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Full text of "Traité élémentaire de conchyliologie : avec les applications de cette science à la géologie"

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TRAITÉ  ÉLÉMENTAIRE 


DE 

CONCHYLIOLOGIE. 


K 

- ''*r  , 


IMPRIMÉ  CHFZ  PAüI.  RENOUARD,  RÜE  GA  R AK<’l  F.RF.  , 


y y ^ y 


TRAITE  ELEMENTAIRE 


DE 


CONCHYLIOLOGIE, 


AVEC 

LES  APPLICA.TIONS  DE  CETTE  SCIENCE 

A LA  GÉOLOGIE, 

FAK  G.-P.  1>ESB[AT£S, 

CHKVAMER  DELA  LÈGION-d’hONNEUR  » MEMBRE  DE  PLUSIEURS  ACAD 
ET  SOCIÉTÉS  SAVANTES. 


TOME  PKEMIEPi. 


'rw 


c. 


PARIS. 

CROCHARD  ET  C'',  LIBRAIRES-ÉDITEURS, 

PLACE  DE  l’ÉCOLE-DE~Mi':dECINF.,  N.  1^. 


1839. 


.TRAITÉ  ÉLÉMENTAIRE 


DE 

CONCHYLIOLOGIE. 

DÉFINITION  DES  MOLLUSQUÉS. 

Animaux  pairs , symétriques , mollasses  sans 
squelette  intérieur  articulé,  sans  cerveau  p - 
ment  dit  et  sans  moelle  épinière.  Système  nerveux. 
Un  anneau  œsophagien  composé  de  plusieurs  gan- 
glions plus  ou  moins  rapprochés,  embrassant  l’œ- 
sophage ou  une  partie  des  viscères.  Respiration 
hranchiale , circulation  simple  et  complète  au 
moyen  d’un  ventricule  et  d’une  oreillette.  Sang 
blanc,  contenu  dans  un  système  artériel  et  dans 
un  système  veineux.  Organes  de  la  digestion  di- 
vers dans  leurs ‘formes,  mais  consistant  toujours 
en  une  bouche,  un  œsophage,  un  ou  plusieurs  es- 
tomacs, un  intestin  plus  ou  moins  long,  terminé 
par  un  anus  diversement  placé.  Ils  sont  accompa- 
gnés de  glandes  salivaires,  dans  la  plupart,  et  d’un 
organe  biliaire  dans  tous.  Génération  dioïque, 
monoïque  ou  hermaphrodite.  Organes  des  sens  en 
général  peu  développés , si  ce  n’est  le  toucher.  La 

r» 


T.  1. 


a DEFINITION  DES  MOLLUSQUES. 

plupart  n’ont  point  d’yeux,  ont  des  plaques  cor- 
nées à la  bouche,  et  aucun  n’a  d’organe  propre  à 
l’audition. 

Corps  quelquefois  nu,  le  plus  souvent  protégé 
par  une  coquille  cornée  ou  calcaire.  Coquille  tan- 
tôt bivalve  et  articulée  en  chai'nière,  tantôt  uni- 
valve  soit  intérieure  soit  externe.  Lorsqu’elle  est 
univalve,  sa  cavité  est  simple  ou  en  partie  occupée 
)ar  des  cloisons  régulières  percées  d’un  siphon. 

A.U  moyen  de  Panalomie  comparée  des  Mollusques , nous  avons 
fait  Y.oir  que  ces  animaux,  constituant  un  grand  type  dans  le  régne 
anim  ’ . devaient  être  divisés  en  deux  grands  embranchemens  : le 
premîter  comprenant  tous  les  Mollusques  acéphalés,  le  second  les 
MoIIusqv  '•  cépbalés.  D’après  l’ordre  méthodique  que  nous  avons 
adc’"'*  ' . jrdre  qui  est  la  conséquence  des  principes  que  nous  avons 
dt  /eloppés  précédemment,  nous  traiterons  d’abord  des  Mollusques 
' 'éphalés. 


MOLLUSQUES. 

MOLLUSQUES  ACÉPHALÉS. 

CARACTERES.  — Auimaux  mous,  inarticulés,  toujours 
fixés  clans  une  coquille  bivalve,  sans  tête  et  sans  yeux, 
ayant  la  bouclie  cachée  , dépourvue  de  parties  dures  et 
pourvues  de  chaque  côte  d’une  paire  de  palpes  lamellaires, 
un  manteau  ample,  enveloppant  tout  le  corps,  formant 
deux  lobes  libres  ou  réunis  postérieurement;  deux  feuillets 
branchiaux  entre  le  corps  et  le  manteau.  Circulation  simple, 
un  ventricule  aortique  et  deux  oreillettes.  Anneau  nerveux 
très  étendu,  embrassant  toute  la  masse  viscérale. 

Coquilles  toujours  bivalves;  les  valves  presque  toujours 
articulées  en  charnière  et  tenues  réunies  par  un  ligament 
élastique. 

OBSERVATIONS.  — Après  avoir  conçu  la  division  des  Mollu.sques 
à'peU“près  de  la  même  manière  que  nous  l’avons  présentée,  La- 
marck,  dans  .ses  derniers  travaux,  revint  à une  autre  opinion  et 
proposa  d’établir,  pour  les  Mollusques  acéphales,  une  classe  dans 
lerègne  animal,  ayant  la  même  valeur  que  celle  des  insectes,  des 
crustacés,  etc.  11  donna  aux  animaux  de  celte  nouvelle  classe  le 
nom  de  Conchifères,  réservant  le  nom  de  Mollusques  pour  ceux 
de  ces  animaux  qui  ont  une  tête  et  qui  sont  pourvus  d’une  co- 
quille univalve.  Nous  avons  développé  les  motifs  qui  ont  déter- 
miné la  plupart  de  zoologistes  etnous-méme  à rejeter  celte  nou- 
velle manière  de  voir  de  Lamarck  et  à adopter  celle  qui  a servi 
de  base  à ses  premières  méthodes. 


1. 


4 


MOIxrSQüES  DYMÎAIRES. 


Ce  que  nous  avons  dit  px'écédemment  sur  l’organisation  des 
Mollusques  acéphalés,  nous  a conduit  à les  diviser  en  trois  ordres 
principaux  : 

jo  Mollusques  dimyaires. 

2°  Mollusques  monomyaires. 

V Mollusques  Bracluopodes. 


MOLLUSQUES  ACÉPHALÉS. 


MOLLUSQUES  DIMYAIRES. 

CARACTÈRES.  — Animal  régulier , symétrique,  ayant  les 
lobes  du  manteau  tantôt  réunis  postérieurement,  tantôt 
désunis  dans  toute  leur  circonférence,  ayant  toujours  deux 
muscles  principaux  adducteurs  des  valves,  Tun  antérieur, 
l’autre  postérieur.  Une  coquille  presque  toujours  libre  et 
régulière , quelquefois  irrégulière  et  fixée.  Un  pied  de 
formes  diverses,  soit  pour  ramper,  soit  pour  filer  un  byssus. 

OE.<iERVATiONS.  — Cette  première  sous-classe,  établie  par  La- 
marck , doit  être  conservée,  et  nous  avons  dit  pourquoi.  Seule- 
ment les  limites  que  le  savant  auteur  des  animaux  sans  vertèbres 
lui  avait  données  n’étaient  pas  exactes,  et  une  nouvelle  étude 
de  cette  partie  principale  des  Mollusques  acéphales  nous  a fait  voir 
de  quelles  familles  et  de  quels  genres  celte  première  sous-classe 
devait  être  composée.  Nous  la  partageons  en  deux  ordres,  d’après 
ce  caractère  important  de  la  réunion  ou  de  la  désunion  des  lobes 
du  manteau  et  chacun  de  ces  ordres  est  lui-mémepartagé  en  deux 
sous-ordres , d’après  ce  caractère  facile  à observer  de  la  régularité 
ou  de  l’irrégularité  de  la  coquille. 

Nous  avons  cherché  autant  qu’il  nous  a été  possible  à former 
des  familles  naturelles  et  le  tableau  de  classification  qui  est  placé 


rH£m£l\£  VA3I1LLE.  — LES  XUBICOLES.  5 

à la  fin  des  considérations  générales  sur  les  Mollusques  indique 
Tordre  que  nous  allons  suivre  dans  Texposition  des  l’aniiiles. 


PREMIÈRE  FAMILLE. 

Les  Tubicolés. 

CARACTÈRES. — Animal  allonge,  clavilbnne,  tronqué  an- 
térieurement, enveloppé  d’un  manteau  épais  dont  les  deux 
lobes  sont  soudés  dans  toute  leur  longueur  et  prolongés 
postérieurement  en  deux  siphons  réunis  eu  une  seule 
masse  charnue,  une  fente  antérieure  dans  la  troncature  du 
manteau;  branchies  étroites,  allongées,  flottantes  dans  lesi- 
phoii  branchial;  un  pied  petit, rudimentaire,  dirigéen  avant. 

Un  tube  calcaire  dans  lequel  est  contenue  une  coquille 
bivalve,  ou  qui  est  insérée  en  tout  ou  en  partie  dans  sou 
épaisseur.  — Coquille  régulière,  bâillante,  à chaimièrc  li- 
néaire simple,  sans  cuilleron  dans  les  crochets. 

GENRES.  — ^érrosoiry  Cla^>agelle'y  Gastvochhae. 

OBSERVATIONS  GÉNÉRALES.  “ La  faïuille  dos  Tubicolés  a clé  créée 
par  Laniarck,  dans  son  dernier  ouvrage.  Trompé  par  la  valeur 
trop  exclusive  qu’il  donnait  à Texistence  d’un  tube  calcaire  indé- 
pendant des  valves,  ou  en  partie  complété  par  elles,  Lamarck  avait 
réuni  dans  Tordresuivant  six  genresdans  cette  faniilledesTubîcolés. 

Arrosoir^  Cla^a^elle^  Flstulane  y Cloisonnai’re  ^ Teredine , Tarct, 

Lamarck  avait  entrevu  depuis  long-temps  les  rapports  de  ces 
divers  genres,  plusieurs  avaient  été  rapprochés  par  lui  dés  1808, 
dans  les  Annales  du  Muséum,  lorsque,  dans  divers  mémoires, 
il  traita  des  coquilles  fossiles  des  environs  de  Paris.  Fondée  sur 
un  caractère  trop  exclusif,  cette  famille  parut  très  naturelle  à 
la  plupart  des  auteurs,  et  elle  fut  adoptée  par  eux,  sans  éprouver 
de  changemens  notables.  Parmi  ces  auteurs  , nous  citerons  M.  de 
Férussac  (^Tableau  Syst»  des  MolL^  et  M.  Laircillo  [Fam.  nal. 


6 


FRIMliRE  FAMILLE. 


du  rêgn*  an,).  Cuvier  n’avait  point  adopté  l’îngénieux  rapproche- 
ment de  Lamarck , des  arrosoirs  et  des  clavagelles,  Latreiile  crut 
bien  faire  d’imiter  en  cela  rauleur  du  Règne  animal,  et  rejeta  les 
arrosoirs  de  la  classe  des  Mollusques  pour  les  placer  dans  les  An- 
nelides  tubicoles,  non  loin  des  Amphitriies;  M.  de  Blainville  sen- 
tit bien  que  l’on  devait  séparer  en  deux  séries,  les  genres  intro- 
duits dans  la  famille  des  Tubicoles.  Mais  n’ayant  pu  sans  doute , 
étudier  leurs  caractères  d’une  manière  complète,  il  laissa  entre 
eux  quelque  confusion.  C’est  ainsi  qu’il  transporta  les  Gastro- 
chênes,  les  Clavagelles  et  les  Arrosoirs  dans  sa  famille  des  Piloridés 
et  les  genres  Teredine  , Taret,  Fistulane  et  Cloisonnaire , avec 
les  Pholades  , dans  la  famille  des  Adesmaccs. 

Dans  la  première  édition  du  Règne  animal,  Cuvier  n’avait  point 
admis  le  rapprochement  des  genres  qui  font  partie  de  la  famille 
des  tubicoles  de  Lamarck.  Quelques-uns  de  ces  genres  sont  intro- 
duits dans  l’ordre  des  Enfermés,  dans  le  voisinage  des  Solens  et 
des  Pholades,  et  les  Arrosoirs,  comme  nous  venons  de  le  dire,  font 
partie  des  Annelides  tubicoles.  Dans  la  seconde  édition  du  même 
ouvrage,  Cuvier  ayant  eu  l’occasion  d’examiner  un  animal  d’Ar- 
rosoir  rapporté  de  la  Mer-Rouge  par  M.  Ruppell,  abandonna  sa 
première  opinion,  rapprocha  les  Arrosoirs  des  Fislulanes  et  des 
Tarets,  sans  adopter  cependant  la  famille  des  Tubicolés. 

Nous  pensons  que  la  réforme  tentée  par  M.  de  Blainville  d’une 
manière  insuffisante  et  incomplète  , doit  être  actuellement  conti- 
nuée et  nous  nous  appuierons,  à cet  égard,  de  plusieurs  consi- 
dérations importantes. 

Les  mollusques  acéphalés  qui  produisent  un  tube  calcaire,  ac- 
cessoii'e  à leurs  valves  et  destiné  h les  protéger  se  présentent  sous 
deux  formes  différentes:  dans  les  uns,  la  coquille,  plus  ou  moins 
bâillante  a les  crochets  prolubérans  ; la  charnière  est  sans  dents 
cardinales,  elle  est  dépourvue  de  ligament,  et  l’on  trouve  con- 
stamment dans  l’intérieur  des  valves  partant  du  sommet,  des  ap- 
pendices osseux,  recourbés,  plus  ou  moins  longs  qui  s’enfoncent 
dans  les  parties  molles  de  l’animal  .Ces  appendices,  intérieurs  com- 
muns à plusieurs  genres,  tiennent  à une  organisation  qui  leur 
est  propre.  Dans  les  autres  tubicolés , ces  appendices  u’existent 
jamais;  les  coquilles  sont  bâillantes,  mais  elles  ont  un  autre  aspect 
et  l’animal  qui  les  habite  a aussi  des  caractères  particuliers.  Le 
tube  calcaire,  servant  d’enveloppe  aux  animaux  des  genres  que 
nous  avons  mentionnés , est  lui-même'  lin  accident  de  peu  d’im- 


LES  TUBIOOL^S* 


7 

portance,  puisqu’il  existe  ou  n’existe  pas  dans  certaines  espèces 
selon  les  circonstances  d’habitation.  Ce  tube  ne  peut  donc  être  pris 
pour  caractère  essentiel  et  prédominant;  aussi,  pour  nous,  les  ca- 
ractères des  animaux,  traduits  par  ceux  do  la  coquille,  sont  beau- 
coup plus  imporlans  et  nous  les  avons  préférés.  Ce  sont  ces  motifs 
qui  nous  ont  fait  réserver  trois  genres  seulement  dans  la  famille 
des  tubicolés  et  d’après  lesquels  nous  avons  rejeté  les  autres  dans 
la  famille  des  Pholadaires  qui  suit  immédiatement. 

Les  genres  qui  appartiennent  à la  famille  des  tubicolés  ont  cer- 
tainement un  gi*and  intérêt  pour  l’élude.  Nous  voyons  en  effet 
le  tube  singulier  des  Arrosoirs  présenter  des  caractères  en  appa- 
rence absolument  étrangers  à ceux  des  autres  acéphalés.  Il  fallait 
toute  la  sagacité  do  Lamarck  pour  mettre  ce  genre  à sa  véritable 
place.  Le  savant  professeur  avait  remarqué,  vers  la  couronne  des 
Arrosoirs,  une  impression  tout-à-fait  semblable  h celle  que  pro- 
duirait une  petite  coquille  bivalve  parfailement  régulière  et  dont 
le  contour  aurait  été  soudé  dans  l’épaisseur  de  la  paroi  commune. 
Dans  les  Clavagelies,  dont  Lamarck  ne  connut  qu’un  petit  nombre 
d’espèces  et  justement  celles  qui,  par  leurs  formes,  s’éloignent  le 
plus  des  Arrosoirs,  il  trouva  une  valve  incrustée  dans  l’épaisseur 
du  tiibe  et  l’autre  libre  dans  la  cavité  intérieure,  articulée  en 
charnière  avec  la  première  et  maintenue  en  place  au  moyen  d’uu 
ligament.  Depuis,  les  rapports  des  deux  genres  ont  été  pleinement 
justifiés  non-seulement  par  la  découverte  d’espèces  vivantes  de  Gla- 
vagelles,  mais  encore  par  laconnaissanced  espècesfossilesproduisant 
de  grands  tuyaux  claviformes  et  couronnés  semblables  à ceux  des 
Arrosoirs.  Ce  qui  caractérise  les  tubes  de  ces  deux  genres,  c’est  qu’ils 
sontcouronnésparunesortedecorolledont  le  bord  aigu  donnenais- 
sance  àun  grand  nombre  de  peliis  tuyaux,  à travers  lesquels  passent 
desappendices  de  la  partieantéi’ieuredumanleau.Dansles  Arrosoirs, 
ces  tubes  sont  simples,  ils  sont  branchus  dans  les  Clavagelies  couron- 
nées; le  troisième  genre  rapporté  à la  famille  des  tubicolés  'a  été 
autrefois  connu  de  Spcngler  et  caractérisé  par  lui , sous  le  nom  de 
Gastrocliène.  Ce  genre  a des  rapports  évidens  avec  les  Clavagelies 
par  certaines  espèces  qui  se  font  un  liibe  libre,  en  massue,  mais 
toujours  dépourvu  des  épines  tubuleuses  propres  aux  deux  pre- 
miers genres  que  nous  avons  cités.  Dans  ce  genre  gaslrocliene  la 
coquille  bivalve  est  complètement  libre,  c’est-à-dire  q.ae  les  deux 
valves  égales  et  très  bâillantes  sont  contenues  dans  la  cavité  inté- 
rieure du  tuyau  et  ne  sont  jamais  soudées  à une  partie  quelcon- 


I^K^MIÈUE  t'AMlLLE. 


que  des  parois.  On  peut  donc  observer  dans  ces  trois  premiers 
genres  celte  série  si  remarquable  de  modifications  des  deux* 
valves  insérées  dans  l’épaisseur  du  tube  des  Arrosoirs,  une  seule 
dans  le  tube  des  Clavagelles  et  enfin  les  deux  valves  libres  dans 
les  Gastrocbènes. 

IN^ous  terminerons  par  une  dernière  observation  qui  n’est  pas 
sans  intérêt,  c’est  que  l’animal  de  l’Arrosoir,  enveloppéd’un  man- 
teau épais,  ouvert  à ses  deux  extrémités,  a en  réalité  par  cette  dis- 
position et  celle  des  organes  intérieurs  , une  certaine  analogie 
avec  les  Sa/pa,  et  dans  l’ordre  méthodique  que  nous  avons  adopté, 
il  doit  commencer  la  grande  série  des  Mollusques  acéphales. 


GENRE  PREMIER. 

ARROSOIR.  Asperyillum-  (Brug-)* 

PI.  I.  fîg.  I,  2.  3. 

CARACTÈRES  GÉNÉiiiQüEs.  — Animal  allongé,  clavîforme, 
subcylindracé  , enveloppé  d’un  manteau  épais  , ayant  les 
deux  lobes  soudés  dans  tout  leur  contour,  terminé  antérieu- 
rement en  un  disque  ayant  au  centre  une  fente  longitudinale 
courte  et  étroite  et  postérieurement  en  deux  siphons  réunis  ; 
palpes  labiales  longues  etétroites-,  branchies  allongées  étroites, 
se  prolongeant  dans  le  siphon  branchial^  un  pied  rudimen- 
taire porté  eu  avant. 

Tube  calcaire  conique,  élargi  antérieurement  en  un  dis- 
que en  forme  de  corolle , percé  de  trous , d’une  fente  cen- 
trale, et  couronné  au  pourtour  de  petits  tubes  allongées  et 
simples.  Coquille  bivalve,  régulière,  équivalve  , subéquila- 
térale , incluse  tout  entière  dans  la  paroi  du  tube. 

SYXONYRIE  GÉNÉRIQUE.  — Phallus  marüius ; Lister,  Rhum- 
pliius. — Tubulus  inarinus;  Gualtieri.  — U Arrosoir^  le  bran- 
don  d'amour  ; D’argenville.  — Serpula  {^Penis')  Linné.  — 
Genre  , hréchîtes  ^ Guettard.  — Genre  arrosoir péni- 

cillus  ; Bruguières , Cuvier.  — Genre  arrosoir  aspergilluni  ; 


Lhb  ïülilCOLÉbi 


9 

Lamarck,  Blaînvllle. — Genre  ar/thene  arythmaa;  Megerle, 
Ocken,  Ruppel.  — Genre  aquaria  ,*  Perry.  — Genre  arrosoir; 
Clepsjrdra , Schumacker. 

OBSERVATIONS.  — Le  genre,  très  curieux,  des  Arrosoirs,  est  au- 
jourd’hui bien  connu  dans  tous  ses  caractères  zoologiques.  Pen- 
dant long-temps  les  tubes  singuliers , avec  lesquels  le  genre  a été 
institué,  furent  seuls  répandus  dans  les  cabinets  des  curieux,  et 
c’est  à M.  Ruppell  que  l’on  doit  la  découverte  récente  de  l’animal 
et  sa  description  anatomique. 

Nous  trouvons  pour  la  première  fois , un  Arrosoir  figuré 
dans  Pouvrage  de  Lister  [Synopsis  Conchylioram^  pl.  548)  sous  le 
nom  de  Phallus  marinas  , dans  le  voisinage  des  dentales  et  des 
Vermets.  A cette  époque  où  l’on  confondait  dans  une  môme  classe 
tous  les  corps  testacés,  ce  rapprochement  de  Lister  n’a  rien  qui 
doive  nous  surprendre.  Plus  tard  , Kumphius,  dans  son  histoire 
d’Amboine , mit  aussi  les  Arrosoirs  avec  les  Serpules  et  lui  con- 
serva le  nom  imposé  par  Lister.  Gualtieri  suivit  l’exemple  de  ses 
devanciers  en  mettant  comme  eux  l’Arrosoir  parmi  les  Serpules 
et  les  Dentales.  C’est  à d’Argenville  et  à Favaniie,  que  l’on  est  re- 
devable du  nom  assez  convenable  d’Arrosoir  imposé  au  -genre  qui 
nous  occupe. 

Dès  la  dixième  édition  du  Systema  naturm^  Linné,  rapporta  le 
Phallus  marinus  de  Lister  à son  genre  Serpula  et  lui  donna  le 
nom  de  Serpula  pcnis^  confondant  sous  celte  dénomination  , les 
espèces  qui  étaient  connues  de  son  temps.  Depuis,  Linné  a con- 
servé les  Arrosoirs  dans  les  rapports  qu’il  leur  avait  d’abord 
assignés  et  les  laissa  dans  la  môme  confusion  synonymiqua.  Nous 
passons  sous  silence  la  citation  de  plusieurs  ouvrages  qui  n’ont  été 
d’aucune  utilité  pour  la  connaissance  plus  exacte  des  Arrosoirs 
et  de  leurs  rapports  naturels  : Bonanni , Klein  , Lesser  et  d’autres 
ont  mentionné  le  genre  Arrosoir  parmi  les  tuyaux  marins,  mais 
n’ont  rien  ajouté  d’important  à son  histoire.  Il  en  est  presque 
de  même  de  Martini,  qub  dans  le  premier  volume  de  son  Cor- 
chylien  cabinet^  mentionna  aussi  le  genre  qui  nous  occupe  sous 
le  nom  de  Tabulas  vcrmicularis  en  le  comprenant , comme  tous 
ses  devanciers,  parmi  les  Serpules  et  les  autres  tuyaux  marins. 

Dans  Je  recueil  des  mémoires  divers  de  Guèllard  publié  en  1774) 
on  en  trouve  un  fort  remarquable  (t.  a.  p.  i8)  sur  les  tuyaux 
marins.  Quoique  sous  cette  dénomination  vague  et  vicieuse  , 


10 


PREMIÈRE  FAMILLE. 


Guettardj  à l’exemple  de  ses  devanciers,  ait  confondu  des  animaux 
fort  différens,  il  racbèie  cependant  ce  défaut  en  établissant  parmi 
eux  des  coupes  génériques  assez  naturelles  au  moyen  desquelles 
il  rectifie  convenablement  le  genre  Serpula  de  Linné.  Il  com- 
mence par  adopter  le  genre  Taret  d’Adanson,  il  distingue  les  Cloi- 
sonnaires,  il  caractérise  le  genre  Arrosoir,  sous  le  nom  de  Bré- 
chile  , Brechiies,  il  sépare  les  Vermets  des  Siliquaircs  et  des  Ser- 
pules  et  il  définit  le  genre  Siliquaire  de  manière  à le  faire  toujours 
reconnaître  facilement;  enfin,  il  propose  sous  le  nom  d’üpérole, 
un  genre  correspondant  assez  exactement  à celui  nommé  plus 
tard  Gaslrochène,  par  Spengler.  Il  est-fâcheux  que  ce  travail  re- 
marquable de  Guettard  soit  tombé  dans  i’oubli,  car  il  contient  des 
observations  qui,  reproduites  plus  lard,  ont  acquis  seulement  alors 
la  valeur  scientifique  qu’elles  ont  conservée. 

Bruguières  fut  le  premier  qui  apporta  quelques  modifications 
aux  opinions  reçues  avant  lui.  Il  fut  aussi  le  premier,  qui  institua 
le  genre  Arrosoir  dans  son  tableau  systématique  qui  est  au  com' 
mencemenl  du  volume  des  vers  de  l’Encyclopédie.  A l’article  Arro- 
soir qu’il  traita  dans  le  môme  ouvrage,  il  fit  sentir  la  nécessité  du 
nouveau  genre  et  en  fit  ressortir  les  caractères  principaux  : Bru- 
guières s'aperçut  bien  qu’il  s'éloignait  des  Serpules;  mais  n’ayant 
aucune  connaissance  de  l’animal , il  laissa  indécise  la  question 
des  rapports. 

Dans  ses  premiers  travaux,  Lamarck  se  laissa  entraîner  a une 
opinion  toiU-à-fait  comparable  à celle  de  Bruguières,  mais  cette 
erreur  ne  fut  pas  chez  lui  de  longue  durée  , car  dès  1807,  il  rec- 
tifia dans  ses  cours  l’opinion  qu’il  avait  eue  d’abord,  et  la  rem- 
plaça par  celle  dans  laquelle  il  a persisté  depuis.  Par  cette  nouvelle 
manière  de  voir,  Lamarck  transportait  le  genre  Arrosoir,  du  voi- 
sinage des  Serpules  et  des  Patelles,  au  commencement  de  la  grande 
série  desMolIusques  aoéphalés,  comprenant  déjà  ses  rapports  avec 
les  Fisiulancs  et  les  Tarets.  Celleopinion  de  Lamarck  ne  fut  alors 
admise  que  par  un  petit  nombre  de  personnes  parmi  lesquelles 
nous  devons  citer  M.  de  Roissy.  Ce  savant  distingué  saisit  avec 
empressement  les  rapprochemens  indiqués  par  Lamarck,  les  adopta 
dans  l’ouvrage  sur  les  Mollusques,  qui  fait  partie  du  Buffon  de 
Sonnini,  et  les  appuya  sur  des  observations  plcinesde  sagacité.  La 
découverte  que  fou  fit , aux  environs  de  Paris,  d’un  genre  inter- 
médiaire entre  les  Arrosoirs  et  les  Fisiulanes,  vint  confirmer  bien- 
tôt après  les  opinions  de  Lamarck  qui  furent  successivement 


LES  TUBiCÛL£S« 


11 


adoptées  par  un  grand  nombr-e  de  Zoologistes.  Cependant  malgré 
les  travaux  que  nous  venons  de  citer,  Pery  en  Angleterre , Mé- 
gerle  en  Allemagne  et  Schumacher  en  Danemark , donnèrent 
des  noms  nouveaux  au  genre  Arrosoir  de  Bruguières.  Le  premier 
proposa  le  nom  d’Aquaria,  le  second  , celui  d’Aritène  et  le  troi- 
sième celui  de  Clepsydra.  Il  est  de  toute  justice  cependant  de  con- 
server au  genre  le  nom  que  lui  a donné  Bruguières.  Nous  avons 
vu  que  Cuvier  s’était  constamment  refusé  à adopter  l’opinion 
de  Lamarck;  il  a fallu  que  M.  Ruppel  , au  retour  de  son  voyage 
dans  la  Mer- Rouge,  fît  voir  à notre  grand  zoologiste,  l’animal  de 
l’Arrosoir  pour  le  ramener  à une  opinion  plus  juste. 

L’animal,  rapporté  par  M,  Ruppel,  est  figuré  dans  l’Atlas  zoo- 
logique de  son  voyage  dans  le  nord  de  l’Afrique  ; cet  animal  est 
représenté  dans  un  étatdecontraction,  mais  on  couçoit  cependant 
les  rapports  qu’il  doit  avoir  avec  le  tube  qu’il  habite.  Il  est  allongé 
claviforme,  subcyündracé.  Le  manteau  donlilest  enveloppé  con- 
stitue une  des  parties  principales.  Il  est  épais  et  semblable  à un 
tuyau  charnu,  terminé  du  côté  antérieur  par  une  troncature  lé- 
gèrement convexe  et  dont  les  bords  sont  aigus  j l’extrémité  posté- 
rieure est  atténuée,  et  l’on  y voit  deux  petites  perforations  qui  ne 
sont  autre  chose  que  les  ouvertures  fortement  contractées  des  si- 
phons postérieurs.  Au  milieu  de  la  troncature  antérieure , on 
aperçoit  une  petite  fente  courte  et  étroite,  longitudinale  qui  cor- 
respond à celle  qui  se  montre  au  centre  du  disque  du  tube.  Ce  qui 
est  fort  remarquable,  c’est  que,  dans  l’état  de  contraction,  on  n’a- 
perçoit aucune  trace  de  tubes  charnus  ou  de  perforations  corres-* 
pondant  à ceux  qui  se  montrent  sur  la  surface  intérieure  de  l’Ar- 
rosoir. Lorsqu’un  lambeau  du  manteau  a été  enlevé , on  trouve 
dans  l’intérieur  un  animal  dont  l’organisation  est  tou t-à-fait  com- 
parable à celle  des  Fislulanes  et  des  Tarets.  On  remarque  d’abord 
à la  partie  antérieure  et  médiane  une  petite  masse  abdominale , à 
la  partie  antérieure  de  laquelle  est  fixé  un  petit  pied  conique,  tout- 
à-fait  réduit  à l’étal  rudimentaire.  Cet  organe  est  placé  en  face  de 
la  fente  du  disque,  et  pour  nous,  celte  fente  représente  celle  un 
peu  plus  grande  que  l’on  observe  dans  les  Myes.  Au-dessous  du 
pied,  en  avant  se  trouve  une  petite  ouverture  buccale  de  cha- 
que côté  de  laquelle  est  une  paire  de  palpes  labiales  allongées , 
étroites  et  lancéolées.  Les  branchies  commencent  de  chaque  côté 
de  la  masse  abdominale,  se  réunissent  au-dessous  d’elle  et  se  pro- 
longent dans  une  très  grande  partie  du  siphon  branchial  à la  pa- 


12 


l*K£mKll£:  FAMILLE. 


roi  duquel,  elles  se  soudent.  Les  branchies,  ainsi  disposées,  laissent 
derrière  elles  un  canal  assez  large  dans  lequel  Tanus  vient  aboutir. 
La  partie  postérieure  de  l’animal  est  divisée  en  deux  siphons, 
mais  réunis  dans  toute  leur  longueur  et  dont  on  aperçoit  la  sépara- 
tion à l’intérieur.  Dans  la  contraction , ces  parties  sont  courtes  et 
épaisses,  mais  lorsque  l’on  sait  avec  quelle  facilité  s’étendent  et 
s’amincissent  les  organes  musculaires  de  la  plupart  des  Mollus- 
ques, on  comprend  comment  le  manteau  des  Arrosoirs  peut  s’é- 
taler sur  les  parois  d’une  tube  calcaire  deux  ou  trois  fois  plus 
long  que  l’animal  contracté.  L’animal  de  l’Arrosoir  est  attaché 
à son  tube  dans  l’endroit  où  la  petite  coquille  dont  nous  parlerons 
est  insérée.  Il  est  fixé  par  des  muscles  qui  sont  une  modification 
des  muscles  adducteurs  des  autres  Mollusques  acéphalés  : on  com- 
prend qu’ils  doivent  avoir  une  forme  et  des  rapports  particuliers 
dans  un  animal  dont  toute  l’organisation  est  assez  singulièrement 
modifiée. 

Le  tuyau  testacé  dans  lequel  habite  l’animal  dont  nous  venons 
de  parler  est  allongé,  cyHndracé,  légèrement  conique,  mince, 
fragile,  tantôt  lisse  et  quelquefois  hérissé  de  grains  de  sable  que 
l’animal  y a agglutinés.  Plusieurs  auteurs  ont  pensé  que  l’extrémité 
rétrécie  de  l’Arrosoir  se  terminait  à la  manière  desSerpules,  et  que 
cette  terminaison  servait  à fixer  TArrosoir  sur  les  corps  solides. 
Favanne  et  depuis  lui  Bruguières,  s’appuyant  sur  l’opinion  de 
M.  Hwass,  ont  assuré  avoir  vu  des  Arrosoirs  fixés  et  formant  des 
groupes  de  plusieurs  individus  (Marvye,  l’Art  de  conserver,  pl. 
I,  f.  i3),  tous  termines  postérieurement  par  une  pointe  contour- 
née irrégulièrement,  à la  manière  des  Serpules.  Nous  n’avons  au- 
cun doute  sur  la  véracité  des  auteurs  qui  disent  avoir  vu  dans  les 
collections  des  Arrosoirs  terminés  comme  nous  venons  de  le  dire, 
mais  nous  avons  la  ferme  conviction  que  leur  bonne  foi  n été  sur- 
prise par  l’adresse  des  marchands  qui  ont  su  ajuster  avec  art  des 
Arrosoirs  sur  l’extrémité  antérieure  de  Serpules  ou  de  Vermets 
adhérons  sur  une  pierre.  Celte  manière  de  voir  ne  pourrait  sup- 
porter un  long  examen,  et  l’on  avait  assez  souvent  l’occasion  de 
voir  bien  conservée  l’extrémité  postérieure  des  Arrosoirs  pour  être 
convaincu  qu’elle  devait  rester  constamment  ouverte,  et  la  décou- 
verte que  fit  Savigny  de  l’Arrosoir  de  la  Mer-Rouge  fit  cesser 
tout  le  doute  qui  pouvait  encore  rester.  Dans  cette  espèce,  en 
effet,  on  voit  par  les  accroissemens  successifs  de  l’animal  des  sortes 
d’entonnoirs  calcaires  invaginés  les  uns  dans  les  autres,  quelquefois 


LÏS  TOBlCOtés. 


i3 

au  nombre  de  sept  ou  huit,  comme  Fa  fait  voir  M.  Ruppel.  Les 
bords  de  ces  entonnoirs  découpés  et  plissés  ressemblent  à des  man- 
chettes, d’où  est  venu  le  nom  que  l’on  donne  habituellement  à 
l’espèce  dont  nous  parions.  L’extrémité  antérieure  du  tube  de 
l’Arrosoir  présente  un  disque  convexe,  dont  la  surface  est  hérissée 
de  petits  tubes  très  courts  que  l’on  voit  pénétrer  à l’intérieur.  An 
centre  du  disque,  on  trouve  une  petite  fente  correspondant  à celle 
que  nous  avons  fait  remarquer  au  manteau  de  l’animal;  au  point 
de  jonction  de  ce  disque  avec  le  reste  du  tube,  s’élève  une  sorte  de 
corolle  formée  par  une  série  circulaire  de  tuyaux  plus  gros  et  plus 
allongés  que  ceux  du  disque.  Ces  tuyaux  sont  simples  dans  la  plu- 
part des  espèces,  quelquefois  ils  sont  bifides.  Au-dessous  de  cette 
corolle  et  sur  la  ligne  médiane  et  dorsale,  on  aperçoit  sur  le  tube, 
et  incrustée  dans  son  épaisseur,  une  petite  coquille  bivalve  régu- 
lière et  symétrique,  dont  les  valves  sont  bâillantes  et  s’étendent 
régulièrement  à droite  et  à gauche  pour  former  une  partie  des  pa- 
rois du  tube.  Si  l’on  casse  le  tube  pour  l’examiner  à l’intérieur,  on 
aperçoit  dans  l’intérieur  des  valves  une  impression  un  peu  en  forme 
de  C,  et  qui  est  celle  du  muscle  qui  attache  l’animal  à son  tube. 

Savigny  avait  observé  , et  M.  Ruppel  a constaté  un  fait  très  sin- 
gulier que  l’on  observe  quelquefois  dans  les  Arrosoirs  et  les  Fistu- 
lanes.  On  voit  dans  l’intérieur  du  tube  de  certains  individus,  une 
cloison  transverse  légèrement  convexe  et  percée  au  centre,  et  il 
semble  que  cette  perforation  est  trop  étroite  pour  donner  un  libre 
passage  au  siphon  de  l’animal.  On  n’a  point  encore  expliqué  Futi- 
lité de  cette  cloison^  et  l’on  n’a  pas  cherché  non  plus  à expliquer 
la  manière  dont  s’accroît  le  tube  de  FAirosoir  et  de  la  plupart  des 
autres  Tubicolés-  En  examinant  avec  attention  des  ^ tubes  d’ Arro- 
soirs, de  Clavagelles  et  de  Fistulanes,  nous  nous  sommes  aperçus 
que  les  stries  d’accroissemens  se  montraient  à la  partie  antérieure 
du  tube  avec  une  forme  particulière  et  se  manifestait  aussi  à la 
partie  postérieure  avec  une  autre  forme  propre,  d’où  nous  avons 
conclu  naturellement  que  si  les  siphons  ajoutaient  à la  longueur 
du  tube,  la  partie  antérieure  de  l’animal  devait  également  l’ac- 
croître considérablement.  Mais  comment  concevoir  cet  accroisse- 
ment dans  un  animal  complètement  enveloppé  d’un  tube  dans  le- 
quel il  n’existc  aucune  solution  de  continuité.  Pour  nous,  nous 
supposons  qu’au  moment  de  FaccroissemenI , l’animal  contracte 
ses  siphons  et  produit  au  point  de  la  contraction  la  cloison  trans- 
verse perforée  dont  nous  avons  pailé.  Il  dissout  ensuite  le  dis- 


FREMIKRE  FAMILLE. 


14 

que  et  la  corolle  qui  couronne  son  tube;  détache  des  parois,  par  le 
même  moyen,  la  coquille  sur  laquelle  il  est  attaché,  et  trouvant 
un  point  d’appui  à son  extrémité  postérieure,  pousse  tout  son 
corps  en  avant  et  toute  sa  partie  antérieure  reste  à nu,  jusqu’à  ce 
qu’une  nouvelle  sécrétion  en  rapport  avec  son  accroissement  l’ait 
mis  à l’abri  du  contact  des  corps  étrangers.  Celte  dissolution  d’une 
partie  du  tube  teslacé  ne  paraîtra  pas  impossible  à celles  des  per- 
sonnes instruites  dans  la  physiologie  des  Mollusques,  et  qui  savent 
que  certains  de  ces  animaux  détruisent  et  absorben  t les  parties  de 
leur  coquille  qui  pourraient  gêner  leur  accroissement , que  d’au- 
tres jouissent  de  la  singulière  propriété  de  dissoudre  les  substances 
calcaires  dans  lesquelles  elles  s’enfoncent  pour  vivre. 

D’après  les  observations  de  Rumpbius  et  particulièrement  celles 
de  Savigny  et  de  M.  Ruppel,  les  Arrosoirs  vivent  sur  les  plages 
sablonneuses,  s’enfonceiit  perpendiculairement  dans  le  sable  à la 
surface  duquel  elles  font  saillir  l’espèce  de  pavillon  qui  termine  le 
tube.  C’est  dans  ce  pavillon  que  l’animal  dilate  largement  l’ouver- 
ture de  ses  siphons  pour  établir,  par  leur  moyen  et  par  les  ouver- 
tures antérieures  du  manteau,  un  courant  d’eau  destiné  à la  respi- 
ration et  à porter  vers  la  bouche  les  particules  alimentaires  dont  il 
se  nourrit. 

Le  nombre  des  espèces  inscrites  dans  le  genre  est  peu  considé- 
rable. Nous  en  connaissons  cinq  espèces , parmi  lesquelles  une  est 
fossile , des  environs  de  Bordeaux. 

M.  Defrance  a cru  pouvoir  rapprocher  au  genre  Aspergiîlum 
un  petit  corps  fossile  des  environs  de  Paris  : ce  corps  a à peine 
une  ligne  de  diamètre,  il  est  formé  d’une  petite  calotte  sur  le  bord 
externe  de  laquelle  s’élève  une  rangée  de  petits  tubes;  la  calotte 
n’est  point  percée  de  trous  et  elle  n’a  pas  la  fente  médiane  des  Ar- 
rosoirs, enfin  cette  calotte  ne  se  prolonge  pas  en  un  bube  propor- 
tionné, pourvu  de  deux  valves  enchâssées,  nous  croyons  que  le 
corps,  dont  il  est  question,  est  l’opercule  ou  la  partie  antérieure 
►d’une  annelide  tubicole. 

Nombre  des  espèces  : 

5 Vivantes, 

1 Fossile  des  environs  de  Bordeaux,  mais  encore  dou- 
teuse.^ 


LIS  TUBlCOLis. 


ESPECES. 


i5 


Arrosoir  de  Java.  Aspergillum  Jaçanuuu  Brug,  planche  i. 
fig.  I.  2.  3. 

A.  'vaginâ  tercti  attennatâ,  lœvîgatâ,  antlcè  clavatâ^  disco  mediocriter  coU’ 
vexo,  fimbrid  latà  circiimdato;  tubulis  apîcc  bîjîdîs  ^ 'vahns  angustis , 
plants  f 'vagînd  continuis  i unibonibus  proeminentibus , 

Liuué.  Sysî.  nal.  edit.deciai,  l.  a,  p.  788. 

Id,  Mus.  Ülric.  t.  a.  p.  702.  n°  434. 

Serpula  pénis,  Lia.  Syl.  aal.  p,  1267, 

Gmél.  p.  3744.  U®  17  Serpula  pénis, 

Schrol.  Einl.  in  Coucli.  t.  2,  p.  554.  no  16. 

Kumph.  Amb.  pl.  41.  f.  7. 

Valealyii,  Amb.  pl.  10.  f.  89. 

Gualt,  Concb,  pl.  10.  f,  M.? 

Mari.  Conch.  i.  pl.  1.  f.  7, 

Penicillus  javanus,  Brug.  Encycl,  mélh.  p.  128.  Syn.  plur.  exc, 

Serpula  aquaria.  Dilwio.  Cat.  l.  2.  p.  io83.  no  35. 

Id.  Brookes.  lalr.  to  tbe  stud.  of  Concb.  pl.  9.  f.  1 3o  ? 

Bowdich.  Eléments  of  Conch.  2®  part,  f,  126,  126  a, 

Blainv.  Malac.  pl.  81.  f.  2. 

Aspergillum  sparsum,  Sow.  GenJ  of  shells.  n»  27;  f.  3-5. 

Desb;  Lamk.  An.  S.  V.  a®  éd.  t.  7.  p.  ao,  n®  i. 

Habite  POcéan  Indien. 

% 

La  plupart  des  auteurs  confondent  plusieurs  espèces  avec  celle- 
ci;  mais  il  est  très  difficile  de  rectifier  convenablement  la  synony- 
mie, parce  que  les  descriptions  sont  incomplètes,  et  les  figures  mé- 
diocres ou  mauvaises  n’indiquent  pas  les  vrais  caractères  spécifi- 
ques. 

L’Arrosoir  de  Java  se  reconnaît  à son  tube  conique  claviforme; 
la  coquille  insérée  est  beaucoup  plus  haute  que  large  ; son  contour 
est  simple , non  saillant  en  dedans  ou  en  dehors  ; les  sommets  rap- 
prochés sont  petits  et  seuls  saillans  ; les  tubes  du  disque  sont  peu 
saillans,  assez  gros  et  peu  nombreux,  ceux  de  la  circonférence 
sont  longs,  très  rapprochés,  souvent  soudés  latéralement;  parve- 
nus à moitié  de  leur  longueur,  ils  se  bifurquent  et  quelquefois  vers 
l’extrémité,  chacune  des  bifurcations  se  divise  encore  en  deux;  la 
rimule  centrale  du  disque  est  étroite,  courte  dans  le  centre, 
ses  bords  s’infléchissent  en  dedans  et  font  saillie  à l’intérieur. 


iG  PREMIÈBE  FAMME. 

Arrosoir  de  Lt^ognan.  Aspergillum  Leognanum*  Hœnîng. 

A,  ^agînâ  subclavatâ^  corpora  aliéna  agglutinante;  disco  tnbulis  frequentibus 
ecliinatOf  etiam  corpora  aliéna  agglutinante , fimbriâ  et  fissura  destituto, 

Hœning.  Lettr.  à ses  correspondants , f.  1.2. 

Desli.  Encycl,  méth.  vers.  t.  2.  p.  74»  n®  3. 

Fossile  aux  environs  de  Bordeaux. 

Quand  même  on  contesterait,  comme  Font  fait  quelques  person- 
nes, l’existence  de  cette  espèce  à l’état  fossile,  on  serait  néanmoins 
obligé  de  reconnaître  en  elle  des  caractères  spécifiques  particuliers 
propres  à la  faire  distinguer  facilement  des  autres  espèces  connues. 
Le  tube  et  la  corolle  sont  agglutinans;  le  disque  est  convexe  et 
hérissé  de  tubes  presque  aussi  longs  que  ceux  de  la  circonférence; 
les  valves  de  la  coquille  sont  sublriangulaires  et  leur  insertion 
forme  une  dépression  notable  dans  le  tube.  La  fente  du  disque  est 
à peine  apparente.  Ce  qui  a particulièrement  excité  le  doute  au 
sujet  de  cette  espèce,  c’est  qu’un  seul  individu  aurait  été,  jusqu’à 
présent,  trouvé  aux  environs  de  Bordeaux,  et  aurait  échappé, 
depuis  plus  de  3o  ans,  aux  recherches  assidues  de  M.  Grateloup,  et 
d’autres  personnes  qui  mettent  un  zèle  bien  louable  à la  recherche 
des  fossiles  des  terrains  tertiaires  de  la  Gironde. 


GENRE  DEUXIÈME. 

CI.AVAGEI.I.1:.  ClavageUa.  (Larak.). 

PI.  r.  fig.  4-  ï4' 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES. — Tubc  calcaire , tantôt  libre, 
tantôt  inclus  dans  les  corps  sous-marins  ; soit  conique  et  ter- 
miné antérieurement  par  un  disque  , présentant  au  centre 
une  rimule,  et  à la  circonférence  une  couronne  de  tubes 
branchus;  soit  claviforme  et  hérissé  en  tout  ou  en  partie  de 
tubes  spiniformes , simples  : ce  tube  présente  une  valve  in- 
sérée dans  sa  paroi,  et  une  autre  libre  dans  rintérieur. 

Animal  allongé  claviforme  , ayant  les  lobes  du  manteau 
réunis , très  épais  , prolongés  postérieurement  en  deux  si- 
phons réunis  dans  toute  leur  longueur  ou  une  seule  masse 
charnue  cylindracée.  Corps  demi  cylindrique  pourvu  de 


I.ES  TUmCOlES. 


*7 

cliaque  côte  d’une  paire  de  branctiies  étroites  dont  l’extrémité 
postérieure  libre  flotte  dans  le  siphon  branchial  5 palpes  la- 
biales longues  et  étroites  5 un  très  petit  pied  rudimentaire 
antérieur  placé  en  face  d'une  très  petite  fente  du  manteau. 

SYKONY3UE  GÉNÉRIQUE.  — Genre  huccodes^  bnccodus  ; G\xq\.~ 
tard.  — Fistulana  pars\  Lamk,  des  anim,  s,  vert*  — Te~ 
red/o;Brocchi.  — Clavagelle  clavagella;  Lamk.  Annales  du 
Muséum*  Desh.  Blainv.  Fer.  So^v.  etc.,  etc. 

Le  genre  Clavagelle  n’est  pas  moins  intéressant  pour  l’étude  des 
Mollusques  acéphales  que  celui  des  Arrosoirs.  Connu  de  La- 
marck,  lorsqu’il  publia  ses  mémoires  sur  les  Coquilles  fossiles  des 
environs  de  Paris , il  le  confondit  d’abord  avec  les  Fistulanes  et  le 
proposa  pour  la  première  fois  dans  l’extrait  du  cours.  Brocchî  en. 
découvrit  quelques  espèces,  mais  il  n’en  reconnut  pas  les  caractèi’es 
et  les  rapporta  aux  Tarts  et  aux  Fistulanes,  Caractérisé  par  La- 
marck  dans  son  dernier  ouvrage , le  genre  Clavagelle  a été  adopté 
depuis  par  tous  les  zoologistes.  Tous  ceux  des  auteurs,  qui  ont  com- 
pris l’ingénieux  rapprochement  de  Lamarck.,  ont  mis  les  Clava- 
gelles  à côté  des  Arrosoirs,  au  commencement  des  Mollusques 
acéphales , tandis  que  d’autres , entraînés  par  l’autorité  de  l’opi- 
nion de  Cuvier,  ont  détruit  les  rapports  naturels  de  ces  deux  gen- 
res, en  plaçant  l’un  dans  le  groupe  des  Annelides  Tubicoles  et 
l’autre  parmi  les  Acéphalés,  Aujourd’hui  le  genre  Arrosoir  étant 
bien  connu,  il  n’est  plus  permis  de  conserver  une  opinion  que  Cu- 
vier lui-méme  a abandonnée  dans  la  seconde  édition  du  Règne 
animal. 

En  parlant  des  Clavagelles,  dans  son  traité  de  Malacologie, 
M.  de  Blainville  a jeté  quelques  doutes'  sur  la  validité  des  carac- 
tères de  ce  genre  ; il  a supposé  suffisamment  constatées  les  obser- 
vations de  Brocchi  ; mais  si  M.  de  Blainville  avait  pris  connais- 
sance de  celles  que  nous  avons  publiées  dans  noire  ouvrage  sur  les 
coquilles  fossiles  des  environs  de  Paris , il  aurait  reconnu  avec 
nous,  la  possibilité  d’appliquer  à toutes  les  espèces  du  genre,  les 
caractères  donnés  par  Lamarck,  et  dès-lors,  il  D’amait  pas  manifesté 
cette  opinion  qu’il  faut  reporter  les  Clavagelles  parmi  les  Vénus 
irrégulières. Voici  en  quoi  consistent  les  observations  de  Brocchi. 
Le  naturaliste  italien  , ayant  brisé  plusieurs  tubes  de  son  Teredo 
echinata  (Clavagella  Brocchii , Lamk. , fut  très  étonné  d’y  trouver 
des  coquilles  de  diverses  sortes,  d’abord  la  valve  libre  de  la  Cia- 


T.  I 


1$ 


PREMliRE  FAMIttE. 


vagelle  et  souvent  deux  valves,  soitd*une  Saxicave,  soitd*une  Pé- 
tricole  ou  d’une  Vénérupe.  Brocchi  supposa  que  le  même  animal 
pouvait  produire  des  coquilles  si  diverses,  et  embarrassé  lui-même 
de  faits  en  apparence  si  contradictoires  avec  les  principes  de  la 
science,  il  les  abandonna  à la  sagacité  des  naturalistes  sans  cher- 
cher à léà  expliquer.  Ainsi  Brocchi  trouvait  dans  ses  Clavagelles, 
tantôt  üfre  seule  val^e,  tantôt  déni  seulen^cnt,  quelquefois  trois. 

Si  fauteur  italien  avait  eu  connaissance  de  Certains  faits  relatifs 
aux  Mollusques  LithophageS)  il  n’aurait  pas  éprouvé  d’embarras 
pour  expliquer  ses  observations  sur  les  Clavagelles.  Voici  les  ob- 
servations d’après  lesquelles  nous  essayons  d’expliquer  l’anomalie 
plus  apparente  que  réelle  >.  signalée  par  Brocchi.  Lorsque  des  ro- 
chers calcaires  sont  envahis  par  un  grand  nombre  de  Mollusques 
perforans  , on  rencontre  assez  souvent  deux  individus  d’une 
môme  espèce,  de  taille  différente , contenus  dans  la  même  loge  ; 
on  observe  aussi  des  espèces  dilTérentes  et  de  genres  différens  ren- 
fermés dans  la  même  cavité  pierreuse.  C’est  ainsi  que  nous  avons 
vu  des  individus  de  Cypricardes  Coralliophages,  renfermés  dans 
des  Modioles  Litliopbagesj  nous  avons  vu  également  des  Véné- 
rupes  dans  des  Saxicaves,  nous  n’avons  pas  pensé  pour  cela  qu’un 
mênïe  animal  a pü  produire  des  coquilles  aussi  différentes;  mais 
nous  avons  supposé  que  tous  ces  animaux  Lithophages,  vivant 
dans  les  mômes  lieux,  les  œuf*  d’une  espèce  avaient  pu  tomber 
dans  la  cavité  d’un  autre  animal  et  lui  avaient  succédé.  C’est  ainsi 
qu’il  a pu  arriver  à des  œufs  de  Clavagelle  de  s’introduire  dans  une 
cavité  pierreuse  occupée  par  une  Vénérupe  ou  une  Saxicave. 
Cette  Clavagelle,  en  se  développant,  a pu  saisir,  dans  l’épaisseur 
de  son  tube  j une  seule  ou  les  deux  valves  de  la  coquille  étrangère, 
et  le  contraire  a pu  également  avoir  lieu,  c’est-à-dire  qu’une  Vé- 
nérupe 3 tombée  dans  la  cavité  d'une  Clavagelle,  y a vécu  et  s’y  est 
développée.  Tant  que  là  Vénérupe  a été  d’un  volume  assez  petit 
pour  n’avoir  pas  besoin  d’augmenter  la  cavité  où  ëlle  était  renfer- 
mée, elle  a vécu  sans  altérer  la  valve  libre  de  la  Clavagelle.  Mais 
aussitôt  qu’elle  s’èst  trouvée  gênée,  le  premier  obstacle  qu’elle  a 
rencontré  a été  la  valve  libre  de  la  Clavagelle , et  elle  en  a peü-à- 
peu  opéré  la  dissolution  au  moyen  de  la  sécrétion , acide  de  son 
raanleau.  C’est  dé  cette  manière  qii’uneVénérupè  ou  une  Coquille 
d’un  tout  autre  genre  dé  Lithophages  a pu  se  Irbùver  datas  le  tube 
d’une  Clavagelle,  et  cette  explication  simple  et  naturelle  rend 
cbtn^te  dé  toutes  lés  singulières  anomalies  signalées  par  Brocchi. 


LES  TVBICOLÉS. 


^9 

Les  premières  observations,  faites  sur  le  genre  Clavagelle,  ofit 
toutes  rapport  à des  coquilles  fossiles  et  particulièrement  à celles 
des  environs  de  Paris.  Les  premières  espèces  signalées  n’avaient 
pas  autant  que  celle  qu’on  connaît  aujourd’hui  des  caractères  pro- 
pres à les  rapprocher  aussi  intimement  des  Arrosoirs.  Le  premier, 
nous  décrivîmes  une  espèce  à tube  allongé  et  couronné  comme 
celui  des  Arrosoirs.  Depuis,  une  espèce  vivante  a été  représentée 
dans  le  Généra  de  M.  Sovverby , et  M.  Rang , dans  son  Manuel  de 
Conchyliologie,  a annoncé  avoir  connaissance  de  deux  autres  es- 
pèces également  vivantes.  Il  serait  actuellement  nécessaire  de  ras- 
sembler ces  diverses  espèces  pour  s’assurer  si  celles  que  l’on  ren- 
contre quelquefois  dans  la  mer  de  la  Sicile  doit  constituer  une  es- 
pèce distincte  des  trois  autres.  Ëniin  tout  récemment  de  nouvelles 
espèces  rapportées  eu  Angleterre  ont  été  décrites  par  M.  Broderip, 
dans  les  Mémoires  de  la  société  zoologique  de  Londres. 

Nous  avions  signalé  l’existence  à Pauliac  de  notre  Clavagelle 
couronnée.  M.  Rang  la  retrouva  dans  cette  localité  et  se  proposa, 
d’après  de  bons  échantillons,  de  donner  une  figure  et  une  descrip- 
tion de  l’espèce;  s’étant  trouvé  empêché , il  confia  ses  maténaux  à 
M.  Des  Moulins,  qui  publia  dans  le  Bulletin  de  la  société  linnéenè 
de  Bordeaux,  une  notice  dans  laquelle  il  essaya  d’expliquer  le 
mode  d’accroissement  de  tube  des  Clavagelles.  D’après  la  supposi- 
tion de  M,  Des  Moulins,  l’animal  jeune  n’aurait  pas  eu  de  tube,  et 
cette  partie  ne  serait  sécrétée  que  quand  l’animal  est  parvenu  à 
tout  son  développement;  mais  dès  que  l’on  trouve  dans  les  mêmes 
lieux  des  individus  de  taille  différente,  on  ne  peut  attribuer 
cette  différence  qu’à  l’age,  et  cela  seul  détruit  la  manière  de  voir 
de  M.  Des:  Moulins.  L’explication  que  nous  avons  présentée  au  sujet 
des  Arrosoirs,  nous  semble  préférable,  puisqu’elle  rend  exacte- 
ment compte  de  tous  les  faits  relatifs  à l’accroissement  de  la  famille 
des  Tubicolés. 

Les  Clavagelles  sont  des  coquilles  marines  très  voisines  des 
Arrosoirs  par  les  caractères.  L’animal  se  garantit  au  moyen  d’un 
tube  plus  ou  moins  allongé,  dans  la  paroi  duquel  il  incruste  l’une 
de  ses  valves;  cette  valve  saisie  dans  la  paroi  paraît  être  constama 
ment  celle  du  côté  gauche  ; la  droite  reste  libre  dans  rinlérieur 
du  tube  et  elle  est  articulée  à la  première  au  moyen  d’une  char- 
nière sans  dents  , mais  pourvue  d’uu  ligament  extérieur,  peu 
épais,  semblable  par  sa  structure  et  sa  position  à celui  des  autres 
coquilles  bivalves.  La  valve  adhérente,  à la  juger  par  son  contour, 


20 


FREMIÉRE  FAMltLE. 


est  plus  petite  que  Tautre.  Ces  valves,  selon  les  espèces,  sont 
plus  ou  moins  allongées  et  plus  ou  moins  bâillantes  lorsqu’elles 
sont  rapprochées  ; ou  leur  trouve  à rinlérieur  deux  petites  impres- 
sions musculaires  arrondies,  placées  comme  dans  les  autres  Mol- 
lusques dimyaires  et  réunies  entre  elles  au  moyen  d’une  impres- 
sion palléale  profondément  sinueuse  du  côté  postérieur.  Cette 
disposition  de  la  coquille  annonce  dans  l’animal  l’existence  de  deux 
Siphons  allongés  et  postérieurs  , semblables  à ceux  de  l’Arrosoir. 

Quoique  depuis  une  dizaine  d’années  on  connût  des  espèces 
vivantes  de  Clavagelles,  on  ne  savait  encore  rien  de  l’animal  de 
ce  genre  aussi  intéressant  que  curieux.  M.  Audouin^  cependant, 
eut  occasion  d’examiner  deux  individus  bien  conservés  dans  la 
liqueur  de  l’espèce  de  la  Méditerranée,  mais  il  ne  publia  pas  les 
résultats  de  ses  recherches  et  se  laissa  devancer  par  M.  Owen, 
auquel  la  science  est  redevable  de  travaux  d’un  grand  intérêt  sur 
divers  genres  de  Mollusques.  Un  amateur  zélé  de  conchyliologie, 
M.  Cuming  , avait  rapporté  un  bel  indivichi  de  Clavageile  avec 
l’animal;  il  le  remit  à M.  Owen,  qui  publia  bientôt  après, dans 
les  Transactions  de  la  société  zoologique  de  Londres,  une  des- 
cription anotomique  complète,  accompagnée  de  bonnes  figures. 
C’est  à l’aide  de  ce  travail  de  M.  Owen  que  nous  pourrons  don- 
ner des  détails  sur  l’animal  des  Clavagelles. 

L’animal  observé  par  M.  Owen  est  celui  du  Clavagella  lata  de 
M.  Broderip.  Cet  animal  est  subclavifbrme,  subquadrangulaire 
lorsqu’il  est  contracté;  son  manteau  se  prolonge  du  côté  postérieur 
en  une  masse  subcylindrique  épaisse,  à l’intérieur  de  laquelle  sont 
percés  les  deux  syphons;  cette  masse  charnue,  constituant  les  si- 
phons-, est  retirée  à l’intérieur  par  un  muscle  à fibres  rayonnantes, 
dont  on  voit  l’impression  médiocrement  sinueuse  sur  l’intérieur 
des  valves.  Ce  muscle  est  le  rétracleur  propre  des  siphons.  Le  côté 
antérieur  du  manteau  est  très  épaissi  et  les  deux  lobes  sont  joints 
dans  toute  leur  étendue,  laissant  seulement  ouverte  une  très  petite 
fenlelongiludinale  correspondant  à celle  du  disque  du  tube  calcaire 
et,  placée  en  face  du  pied  rudimentaire  de  l’animal.  Lorsque  l’on  a 
ouvert  Je  manteau  de  chacpie  côté,  et  renversé  en  dessus  sa  partie 
antérieure , on  aperçoit  une  masse  abdominale  subcylindracée  à la 
partie  moyenne  et  antérieure  de  laquelle  s’élève  un  petit  mame- 
lon. Ce  mamelon  est  le  pied  resté  rudimentaire.  A la  partie  anté- 
rieure de  celle  masse  abdominale,  entre  deux  lèvres  assez  larges,^ 
on  remarque  l’ouverture  de  la  bouche  ; elle  est  accompagnée  de 


LES  TUBICOLES. 


21 


chaque  côté  d^une  paire  de  palpes  labiales,  longues  et  étroites,* 
garnies  à Tintérieur-de  lames  très  fines.  La  masse  abdominale  est 
particulièrement  formée  par  la  masse  du  foie  et  de  Tovaire;  elle 
est  accompagnée  de  chaque  côté  d’une  paire  de  lames  branchiales 
dont  l’extrémité  postérieure,  libre,  vient  flotter  dans  riniérieur 
de  la  cavité  du  siphon  branchial.  L’animal  est  pourvu  de  deux 
muscles  adducteurs  des  valves.  Ces  muscles  sont  d’une  médiocre 
étendue  ; ils  sont  plus  près  du  dos  , et  le  postérieur  est  un  peu  plus 
grand  que  Tantériour.  L’œsophage  est  étroit  et  assez  allongéj  il 
pénètre  dans  un  estomac  subglobuleux,  petit,  lequel  est  enve- 
loppé du  foie  ainsi  qu’une  grande  partie  de  l’intestin. 

D’après  ce  que  nous  venons  d’exposer,  l’analogie  des  Clava- 
gelles  et  des  Arrosoirs  est  lout-à-fait  incontestable,  et  il  suffit, 
pour  s’en  convaincre  bien  mieux  encore , de  rapprocher  les  figures 
de  l’Arrosoir  de  M.  Ruppel  de  celles  de  la  Ctavagelle  de  M,  Owen. 
Cette  ressemblance  serait  jdus  grande  encore  , si  l’on  pouvait 
mettre  en  regard  de  celui  de  l’Arrosoir  l’animal  d’une  Clavagelle 
de  la  section  des  couronnées. 

Il  est  nécessaire,  pour  décrire  convenablement  les  caractères 
des  Clavagelles,  d’établir  parmi  elles  ü'ois  groupes  principaux. 
Dans  le  premier,  nous  plaçons  les  espèces  tronquées  antérieure- 
ment et  couronnées  d’épines.  Ce  sont  les  espèces  les  plus  voisines 
de  l’AiTOsoir.  Dans  le  second  groupe,  nous  comprenons  les  es- 
pèces ayant  un  tube  lagéniforme  pourvu  d’épines  tubuleuses  sur 
les  parois.  Telle  est  le  Clavagella  cristaia  dè  Lamarck.  Dans  le 
troisième  groupe  enfin,  nous  réunissons  les  espèces  perlbranies 
n’ayant  point  de  tube  spiniforme,  tel  que  le  Clamgelia  Melitensis, 

Dans  les  espèces  du  premier  groupe  , le  tube  est  allongé  , coni- 
que, médiocrement  renflé  à son  extrémité  antérieure.  Au-dessus 
de  ce  renflement,  il  est  subitement  rétréci  en  une  sorte  de  col  et 
élargi  ensuite  en  un  disque  dont  le  bord  extérieur  est  couronné 
d’un  assez  grand  nombre  d’épines  tubuleuses  allongées  et  plusieurs 
fois  dicholomes.  Au  centre  du  disque,  on  trouve  une  petite  fente 
longitudinale;  mais  ce  disque  n’est  point  percé,  comme  dans  les 
Arrosoirs,  d’un  grand  nombre  de  petits  trous.  De  l’extrémité  su- 
périeure droite  de  la  fente,  on  voit  partir  une  espèce  de  suture 
qui  vient  descendre  obliquement  pour  gagner  l’exlrémilé  du  cro- 
chet de  la  valve  incluse  dans  l’épaisseur  du  tube.  Dans  le  second 
groupe  des  Clavagelles,  le  tube  est  court,  en  forme  d’ampoule  , 
quelquefois  subcylindracé,  quelquefois  conique.  Ce  tube;  arrondi 


:42  rREJnèRî: 

à son  extrémité  antérieure,  est  terminé  à la  postérieure  par  une 
ouverture  simple  ovalaire,  comprimée  latéralement.  Prescpie  toute 
la  partie  droite  de  la  paroi  de  ce  tube  est  hérissée  d’un  grand 
nombre  de  petits  tubes  spiniformes,  simples,  comparables  à ceux 
des  Arrosoirs  et  des  ClavagelJes  du  premier  groupe,  mais  placés 
d’une  manière  fort  différente.  Dans  le  troisième  groupe  des  Clava- 
gelles,  le  tube,  enfoncé  dans  l’épaisseur  des  corps  sous-marins, 
tapisse  la  cavité  habitée  par  l’animal.  11  est  subitement  dilaté  an- 
térieurement en  une  poche  ovalaire  ou  subquadrangulaire,  com- 
primée latéralement  et  se  terminant  du  côté  postérieur  en  un  tube 
assez  étroit,  allongé,  subcylindracé  et  dont  l’extrémité  libre  est 
évasée  en  entonnoir.  Déjà  Guettard,  dans  son  Mén\oire  sur  les 
Tuyaux  marins,  avait  eu  connaissance  d’un  fragment  de  tube  qu’il 
fit  représenter  ^1.  70,  fig.  1 , dans  le  recueil  de  ses  mémoires  di- 
vers : ce  fragment , provenant  de  la  Méditerranée,  est  garni  de 
trois  manchettes  foliacées,  et  il  appartient  sans  le  moindre  doute 
au  Cla^^agella  Melitensis  de  M.  Broderip.  Guettard  a compris  ce 
fragment  dans  un  genre  auquel  il  donne  le  nom  de  Buccode  , Buc- 
codus.  Il  est  facile  de  concevoir  que  dans  ces  espèces  perforantes, 
les  tubes  spiniformes  ne  peuvent  exister.  Il  est  à présumer  cepen- 
dant, en  se  fondant  sur  une  observation  de  Brocchi , que  si  le 
corps  perforé  pai*  la  Clavagelle  n’est  point  compacte  et  laisse  des 
lacunes,  l’animal,  en  fermant  ces  lacunes  par  son  tube,  produira 
des  épines  tubuleuses. 

Si  l’on  s’eu  tenait  uniquement  aux  caractères  extérieurs  du 
tube  des  Clavagelles , il  serait  possible , à la  rigueur,  d’établir 
un  genre  pour  chacun  des  groupes  ; mais  si  l’on  porte  son  at- 
tention sur  des  caractères  plus  importans  , ceux  tirés  de  la  co- 
quille , on  trouvera  de  tels  rapports  entre  toutes  les  espèces, 
qu’il  deviendra  impossible  de  les  séparer  en  plusieurs  genres. 
Dans  les  espèces  couronnées,  la  valve  libre  est  ovale  oblongue, 
subnacrée  ; rapprochée  de  la  valve  incluse,  le  coté  postérieur  est 
ti’ès  bâillant  J les  impre.ssions  musculaires  sont  petites,  situées  près 
du  bord  postérieur  et  réunies  par  une  impression  palléale  dont  la 
sinuosité  postérieure  est  assez  profonde.  Dans  le  second  groupe, 
la  valve  libre  est  absolument  semblable  pour  les  caractères;  elle  a 
seulement  une  tendance  à s’élargir.  Dans  le  troisième  groupe  en- 
fin, les  valves  sont  beaucoup  plus  bâillantes,  plus  courtes  posté- 
rieurement, et  l’impression  palléale  offre  de  ce  côté  une  sinuosité 
plus  large  mais  beaucoup  moins  profonde.  Quant  à la  charnière  , 


ÎÆS  TUBJ.COLÉS.  33 

^lle  offre  très  peu  de  différence  dans  les  trois  groupes , et  c.es  diffé- 
rences sont  quelquefois  meme  assez  difficiles  à apprécier. 

Le  petit  nombre  de3  espèces  connue^  nous  permet  de  les  distri- 
J^uer  dans  les  trois  gi’oupes  de  la  maniè^'e  suivante  : 


Clavagclla  coronata. 

Desh. 

Clapagella  bacillaris. 

Desh. 

Clavagclla  echinata. 

Lamk. 

Clavagclla  cristata. 

Lamk. 

Clavagclla  Brongniarti. 

? Desh. 

Clavagclla  Broccliii, 

? Desh. 

Clavagclla  tibialis. 

? Lamk. 

Clavagclla  aperta. 

Sow. 

Clavagclla  Melitensis. 

Brod. 

Clavagclla  lata. 

Brod. 

Clavagclla  eîongata. 

Brod. 

3® 


Les  Clavagelles  habitent , les  unes  dans  le  sable  de  la  même  ma- 
nière que  les  Arrosoirs,  les  autres  s’erifoncent  dans  les  masses  ma- 
dréporiques  ou  dans  les  calcaires  tendres.  Celles  que  Ton  connaît 
à l’élât  fossile  sont  propres  aux  terrains  tertiaires.  Parmi  elles, 
nous  citerons  particuliérement  le  Clamgella  coronata  que  l’on  ren- 
cohtre  dans  tout  le  terrain  Parisien. 

Nous  ferons  quelques  remarques  sur  quelques-unes  des  espèces 
mentionnées  par  les  auteurs.  Il  est  à présumer  que  le  Clavagelîa 
cristata  de  Lamarck  est  un  individu  jeune  du  Clavagella  echiriata» 
Nous  supposons  que  le  Teredo  hacUlum  de  Brocchi  a été  établi 
sur  un  individu  décoimonné  de  notre  Clavügelîa  bacillaris. 

Nombre  des  espèces  : 

'4  vivantes,  celles  de  la  3®  section. 

7 fossiles,  provenant  toutes  des  terrains  tertiaires. 

ESPÈCES. 

Clavagelle  çourüunce.  Clamgella  coronata,  Nob.pl.  i.f.  u. 

Ç,  vaginé  ^ubcyliiidricd  y elaugatâ,  clavalà^  dUco  complanato  ^ antice  tevml-» 
natdi  fissura  suhcentrali  angustâ  perfioraidy  iuhuVis  numçrosiSy  ramosîs 
coronatâ  ; vaîvts  ovato^ohlongis , widitlafis.- 
Nob.  Descrip.  du  coq,  foss,  de  Paris,  t,  x.  p.  8.  n®  r,  pl.  3.  f.  9,  10. 
Nob.  Encycl.  méth,  vers,  t.  2,  p.  289, n®  2, 

So.w.  Min.  Conch.  pl.  480.  f.  i,  a,  3, 


niEMlÉKE  FAMlliLB. 


ixU 

Rang,  et  Desm.  Bulï,  de  la  soc.  d’hist.  nat,  de  Bord,  t,  3 , 5®  livr.,  f,  i à 5, 

Nûb.  Lanick.  An.  s.  v. , éd.  » t.  6 , p.  a3  , n“  i. 

Habile Fossile  aux  environs  de  Paris  dans  les  calcaires  de  Lisy  et 

de  Meaux,  dans  les  argiles  de  Londres  à Barton,  et  dans  les  calcaires 
du  Mcdoc , à Pauliac , à Saint-Estefe.,  à Blaye, 

Dans  les  dernières  localités  mentionnées,  cette  espèce  prend  un 
plus  grand  développement  qu’aux  environs  de  Paris.  Son  tube  est 
allongé,  claviforme,  atténué  à son  extrémité  postérieure.  Comme 
jusqu’à  présent  on  ne  connaît  que  le  moule,  on  ne  sait  pas  encore 
si  cette  extrémité  se  termine  par  un  bord  évasé,  comme  dans  cer- 
tains Arrosoirs.  Le  collet  qui  sépare  le  disque  de  la  partie. renllée 
du  tube  est  peu  prononcé.  Au  centre  du  disque,  on  aperçoit  une 
fente  longitudinale  proportionnellement  plus  grande  que  dans  les 
Arrosoirset  la  Clavagelle  bacillaire. Son  extrémité  supérieure  s’étend 
et  se  bifurque,  et  l’une  des  bifurcations  descend  à droite,  l’autre 
est  presque  supérieure  et  dorsale  ; elle  est  beaucoup  plus  étroite 
que  la  première  et  descend  beaucoup  moins  bas.  Les  tubes  spini- 
formes  , dont  le  disque  est  couronné  , sont  nombreux.  On  en 
compte  une  vingtaine  dans  les  plus  grands  individus;  ils  se  bifur- 
quent et  souvent  chacune  des  branches  se  bifurque  à son  tour.  Les 
valves  sont  ovales  oblongues;  celle  qui  est  incluse  est  presque 
aussi  grande  que  l’autre  ; leur  surface  est  lisse  , mais  ondulée 
transversalement  par  des  accroissemens  assez  irréguliers;  la  valve 
libre  est  très  aplatie;  son  crochet  est  à peine  saillant;  il  est  placé 
vers  le  tiers  antérieur  de  la  longueur;  le  bord  cardinal  est  simple 
sans  dent;  les  impressions  musculaires  sont  petites,  l’antérieure 
surtout;  l’impression  palJéale  est  légèrement  creusée  dans  l’inté- 
rieur de  la  coquille  et  elle  présente  postérieurement  une  sinuosité 
profonde  produite  par  le  muscle  rétracteur  des  siphons. 

Les  plus  gi'auds  individus  de  celle  espèce  ont  près  de  i8  centi- 
mètres de  longueur. 

Clavagelle  bacillaire.  Clavagella  bacillaris,  ^oh,  pl.i,  f.Sàio. 

C,  tuho  subredo,  augustOy  posticè  vaginis  foliaceis  sivpe  terminato;  antice 
d'uco  piano,  fissoyspînis  dichotomis  coronato;  ralvâ  Vibevâ  ovato-elongatà, 
tennissîma,  depressd,  margaritaced  y alierd  majore  ; cardine  edentido» 

Nûb.  Encycl.  mcüi.  vers.,  t,  2,  p.  239,  n*»  2. 

Nob.  Lam.  An.  s.  v.,  2®  éd.,  t.  6,  p.aS,  iio  2. 

Teredo  BaciUum  ? Broebi , Coueb.  foss.  pl.  i5,  f.  6. 

Extermîtatc  posticali 'vaglnifera,  hs\}ÇX^\\\\\va  maDiculatuni.  Philip,  enumer. 


LES  a:UBlCOL£S. 


Moll.  Sicîl.  p.  X pl.  I.  iig.  3. 

Clavagelia  bacillaris»  Philip,  loc.  cit.  pl.  x.  f.  z > a.  b. 

Habite Fossile  eo  Sicile. 

Quoique  celte  espèce  ait  beaucoup  d’analogie  avec  la  précé- 
dente, elle  se  distingue  néanmoins  avec  assez  de  facilité.  Son  tube 
est  très  allongé , claviforme  ; son  extrémité  postérieure , légèrement 
comprimée , se  termine  par  un  bord  renversé  en  pavillon  de  trom- 
pette, Dans  plusieurs  individus,  trois  ou  quatre  de  ces  pavillons 
sont  implantés  les  uns  dans  les  autres,  de  la  même  manière  que 
dans  VAspergillum  vaginiferum»  L’extrémité  antérieure  du  tube  , 
légèrement  comprimée,  après  im  étranglement  court  mais  assez 
profond,  se  dilate  en  un  disque  aplati,  au  centre  duquel  se 
montre  une  petite  fente  courte  et  étroite,  longitudinale,  bi- 
furquée  en  j à son  extrémité  supérieure,  La  bifurcation  du  côté 
gauche  est  très  courte  et  n’atteint  pas  le  bord;  celle  de  droite  le 
traverse  en  y creusant  une  sinuosité  profonde,  et  vient  former 
une  espèce  de  suture  bifide  sur  le  côté  droit  du  tube.  Le  bord  du 
disque  s'amincit  et  il  est  couronné  par  douze  ou  quinze  tubes  spi- 
niformes  qui  se  bifurquent  presque  immédiatement , et  chacune 
des  bifui’cations  se  divise  à son  tour  en  deux  branches.  Sur  la  paroi 
de  l’extrémité  du  tube,  et  du  côté  gauche,  ou  aperçoit  la  valve  de 
ce  côté  incrustée  dans  l’épaisseur  de  ce  tube.  Cette  valve  est  pe- 
tite , subtriangulaire  ; la  valve  libre  est  beaucoup  plus  grande , elle 
est  ovale  oblongue,  peu  profonde,  nacrée,  très  bâillante  posté- 
rieurement. Son  cipchet  est  très  petit  et  à peine  saillant;  la  sur- 
face extérieure  est  lisse  ou  striée  par  des  accroissemens  fins  et  mul- 
tipliés. A l’intérieur , celte  valve  est  peu  profonde;  on  aperçoit 
de  ce  côté  deux  impressions  musculaires  fort  petites;  l’impression 
palléale  est  peu  marquée,  mais  on  voit  cependant  une  sinuosité 
postérieure,  peu  profonde,  indiquant  la  position  du  muscle  ré- 
tracteur  du  siphon.  Le  bord  cardinal  est  simple,  linéaire;  on  y 
remarque  une  très  petite  nymphe  pour  l’insertion  du  ligament, 
et  une  légère  dépression  immédiatement  au-dessous  du  crochet. 

Les  plus  grands  individus  ont  34  centimètres  et  demi  de  lon- 
gueur. 

Clavagelle  élargie.  Clamgella  lata,  Pl,  i.f.  12.  i3.  i4* 

C,  camerâ  rotundato-ûvatâ  ; vàlvâ  Uherâ  y latiusculâ , substrigonâ  ^ subcoii^ 
vexa,  externâ  concentriez  rugosd , Intus  nîtenie  • umbone  subrotundato. 


jFAM^LLE, 

Brod.  Trans.  of  zool,  soc.  t.  i,  p.  265.  pl.  ?o.  f.  8.  à lo.  coq.  ii  à i6, 
animal. 

Habite  l’Océan  de  l’Inde  et  les  iners  iju^lrales. 

Celte  espèce  a beaucoup  d’analogie  avec  le  Clamgella  aperta  de 
So^yerby.  Elfe  en  a également  beaucoup  avec  le  Claç'.agella  Meli- 
tensis.  Son  tube  est  court,  subpyrifprme , dilaté  en  poche,  et  l’a- 
nimal preusp  sa  place  dans  l’épaiçseur  des  madrépores.  La  cavité 
qui  contient  les  valves  se  rétrécît  assez  subitement  en  un  tube 
court,  comprimé  latéralement  et  terminé  par  un  bord  fortement 
dilaté  en  entonnoir.  Los  valves  ont  une  forme  singulière;  ej)les 
sont  presque  égalps,  siibtriangulaires, nacrées  intérieurement.  La 
valve  libre  est  chargée  de  stries  irrégulières  d’accroissement;  son 
crochet  est  subterminal  comme  dans  les  huîtres  ; lo  bord  cardinal 
pt  simple  pt  il  porte  ja  trace  d’un  ligament  extérieur  allongé.  Les 
impressions  musculaires  sont  très  rapprochées  du  bord  supérieur^ 
elles  sont  fort  inégales  5 la  postérieure  est  la  plus  grande.  Le  coté 
antérieur  4es  valves  est  très  baillant,  il  Tpst  beaucoup  plus  que  le 
postérieur,  ce  qui  est  Iput-à-fait  le  contraire  dans  les  coquillles 
des  autres  acéphalécs.  Le  manteau  ne  laisse  qu’une  faible  impres- 
sion : on  en  remarque  une  assez  large  dans  la  direction  du  bord 
antérieur;  plie  donne  insertion  à un  muscle  propi’e  .du  manteau. 

Cette  espèpe  paraît  tre^  raire.  Elle  a'70  à 80  millimètj'es  de  lour 
gueur;  |a  valve  libre  est  longue  dp  3o  millimètres  et  large  de  20. 

GENRE  TROISIEME. 

GASTROCHESfE.  Gastrochce^ia,  Spengl. 

Pi.  a.  fig.  i-Ç. 

caractères  génériques, — Animal  cunéiforme,  tronqué  an- 
térieur.enient;  les  lobes  du  jxiârxieiiu  réunis  et  percés  au  pentre 
de  l.a  à'un  très  petit  trou  pour  le  passage  du  pied  ; 

deux  siphons  réunis  fort  allongés,  et  pouvant  rentrer  en  entier 
dans  la  coquille. 

Tube  calcaire  claviforme  , droit  ou  contourné  , libre  ou 
inséré  dans  les  corps  sous-marins , complet  ou  incomplet,  tou- 
jours ouyert  ^ l’extrémité  postérieure  qui  pst  retrççie;  il 
contient  à l’intérieur  une  coquille  bivalve,  équivalve,  cunéi- 


LES  TÜBIÇOLES. 


n 

forme , très  bâillante  , à charnière  simple  et  linéajre , à liga- 
ment extérienr  droit  ; jamais  de  cuillerons  iptepnes  dans  les 
crochets. 

SYNONYMIE  GÉftÉaiQUE  — GexixàPholas  pars  ; Linné,  -r—  Vpé- 
rote^  Vperotus ; Gueltard.  — Gastrochœna;  Spengler, 

— Fistiilane^  fistiilana  ; Bruguières  , Lamarct,  Deshayes.  — 
Fistulana^  gastrochœna  ; Laruarckj  Cuvier. 

OBSERVATioKs. — Cherchant  à appliquer,  autant  qu’il  est  en  pops,  pe 
principe  de  justice  d’adopter  les  genres  utiles  d’après  la  daf-pdeleur 
publication  , nous  devons  l'estituetr  au  célèbre  Spengler  un  genre 
que  la  plu  part  des  auteurs  français, et  nous-même  â uneautre  époque, 
avons  inscrit  dans  la  méthode  sous  le  nom  de  Fistulane,  Ce  genre 
avait  éié  créé,  dès  1783 , sous  le  noqi  de  Gastrochène , dan  leiVorût 
acta  Dantca,  Spengler,  en  le  créant,  lui  avait  donné  des  carac- 
tères très  naturels , et  il  est  fâcheux  que  les  auteurs  qui  en  eurent 
connaissance  ne  l’aient  pas  aussitôt  adopté.  Linné  avait  malheu- 
reusement introduit  la  classe  des  Muliivalves,  dans  laquelle  les 
auteurs  qui  vinrent  après  lui,  et  particulièrement  Gmélin,  entas- 
sèrent en  asstz  grand  nombre,  desanimaux  qui  n’ont  entre  eux  au- 
cuns rapports.  Aussi,  lorsque  Bruguières,  dans  r£/icyc/o7?éc?i'e,  vou- 
lut réformer  ce  chaos , il  fut  obligé  de  créer  plusieurs  genres  parmi 
lesquels  se  trouve  celui  des  Fistulanes.  11  est  à présumer  que 
Bruguières  n’eut  point  connaissance  du  travail  de  Spengler,  car  sa 
justice  l'aurait  porté  à adopter  le  genre  du  savant  danois,  plutôt 
que  d’introduire  un  double  emploi  lâcheux  dans  la  science.  Les 
communications  scientifiques  se  faisaient  alors  avec  lenteur,  et 
nous  ne  sommes  point  surpris  de  l’ignorance  pu  était  Bruguières 
des  travaux  de  Spengler.  Cependant,  Spengler  avait  reproduit 
son  genre  dans  lequel  il  place  quatre  espèces^  dans  le  tome  3 
(1793)  du  Jqurnal  d* Histoire  naturelle  de  Copenhague,  Une  année 
avant  que  Lamarek  publiât  son  premier  essai  de  classification  des 
vers  testacés  , Cuvier  , dans  son  Tableau  élémentaire,  publié 
eu  1798,  se  fondant  sur  des  caractères  zoologiques,  détruisit  la 
classe  des  Muliivalves  de  Linné  et  de  Bruguières,  et  distribua  les 
genres  qui  y étaient  compris  de  manière  à les  meUre  en  rapport 
d’après  leurs  véritables  caractères  zoologiqiies.  Dans  son  premier 
Tableau  méthodique,  Lamarck  entrevit  que  les  Muliivalves  con- 
tenaient trois  sortes  d’animaux  diiférens  ; aussi  il  forma  un  groupe 
pour  chacun  d’eux , et  dans  le  premier  nous  trouvons  les  genres 


28 


rHEMlÈRE  EÀMILLB. 


appartenant  à la  classe  des  bivalves,  et  que,  peu  de  temps  après, 
Lamarck , dans  son  Système  des  animaux  sans  vertèbres,  classa 
entre  les  deux  séries  des  teNtacés  bivalves. 

Le  genre  Fistulane  , introduit  dans  leurs  méthodes  par  Cuvier 
et  Lamarck,  les  autres  auteurs  l’adoptèrent  aussi et  c’est  sous 
l’autorité  de  ces  deux  grands  zoologistes,  qu’au  genre  de  Spengler 
fut  substitué  celui  de  Bruguières.  Dans  le  BufFon  de  Sonnini,M.  de 
Roissy,  en  adoptant  le  genre  Fistulane,  le  rapprocha  des  Saxi- 
caves  d’un  côté  , et  des  Arrosoirs  d’un  autre.  Ces  rapports  sont 
très  naturels,  comme  nous  l’avons  vu,  et  il  est  à peine  nécessaire 
d’y  apporter  quelques  changemens,  quoique  trente  ans  se  soient 
écoulés  depuis  la  publication  de  l’ouvrage  que  nous  venons  de 
mentionner.  Les  rechej'chcs  de  plusieurs  savans , et  notamment  de 
M.  Defrance  aux  environs  de  Paris , avaient  fait  découvrir  le  genre 
curieux  des  Clavagelles.  Lamarck  le  rapporta  d’abord  au  genre 
Fistulane  dont  il  le  sépara  dans  son  cours  de  i8io.  Le  genre  Fis- 
tulane se  trouva  donc  réduit  à un  certain  nombre  de  coquilles  ren- 
fermées dans  un  tube  calcaire,  et  ce  fut  seulement  dans  son  der- 
nier ouvrage  que  Lamarck  indiqua  les  espèces  qui  devaient  faire 
partie  de  son  genre  Fistulane.  Trompé  par  un  caractère  réelle- 
ment peu  important,  Cuvier,  dans  la  première  édition  du  Règne 
animal , adopta  à-la-fois  et  le  ge'nre  Gastrochène  et  le  genre  Fislu- 
lane.  Cuvier  croit  que  dans  les  Gaslrochènes,  il  n’existe  point  de 
tube  pour  contenir  la  coquille;  mais  en  cela  il  se  trompe.  Tous 
les  Gaslrochènes  qui  percent  les  madrépores  pour  s’y  loger,  endui- 
sent leurs  cavités  d’une  couche  calcaire  qui  reste  adhérente  et  ne 
s’aperçoit  pas  toujours  facilement  lorsque  l’on  extrait  la  coquille  de 
la  cavité  qu’elle  habite.  Pour  Cuvier,  les  Gaslrochènes  seraient  des 
Fistulanes  sans  tube  ; pour  nous,  ce  sont  des  Fistulanes  dont  le  tube 
adhérent  avait  échappé  à la  plupart  des  observateurs.  Cuvier  place 
les  Gaslrochènes  entre  les  Pandores  et  les  Byssomies,  non  loin  des 
Solens,  tandis  que  les  Fistulanes  sont  mises  dans  le  voisinage  des 
Tarets.  Dans  ce  genre  Fistulane  , et  d’après  le  caractère  d’un  tube 
fermé  postérieurement,  Cuvier  confond,  avec  une  espèce  de  vraie 
Fistulane , plusieurs  espèces  de  Tarets  dont  il  n’avait  vu  sans  doute 
que  les  tubes  et  non  les  coquilles. 

Dans  son  Tx’aité  des  animaux  sans  vertèbres,  Lamarck  suivit 
l’exemple  de  Cuvier  et  reçut  à-Ia-fois,  dans  sa  méthode,  un  genre 
Fistulane  et  un  genre  Gastrochène.  Préoccupé  de  l’existence  du 
tube  dans  les  Fistulanes,  il  ne  compara  pas  les  coquilles  de  ce 


LHS  TUBICOtis. 


29 

genre  avec  celles  des  Gaslrochènes,  d’où  est  venu  le  double  emploi 
que  nous  avons  signalé  depuis  long-temps.  M.  de  Blainville,  dans 
son  traité  de  Malacologie,  M.  de  Férussac,  dans  ses  Tableaux 
systématiques  des  mollusques  , et  M.  Latreille  dans  ses  Familles 
du  règne  amimal , tombèrent  dans  les  mômes  fautes  que  Lamarck. 
Quoique  nos  observations  sur  les  Fjstulanes  et  les  Gaslrochènes 
fussent  publiées  depuis  assez  long-temps , M.  Rang,  dans  son  Ma- 
nuel de  conchyliologie,  conserva  les  deux  genres  en  les  caractéri- 
sant à la  manière  de  M.  de  Blainvîlle , tout  en  faisant  sentir  ce- 
pendant que  l’un  d’eux  devait  être  supprimé-  M,  de  Blainville  en 
effet,  avait  reporté  aux  Gaslrochènes  quelques-unes  des  Fistu- 
lanes  de  Lamarck,  et  n’avait  réservé  dans  les  Fistulanes  qu’une 
seule  espèce,  Fistulana  gregata,  qui  est  pour  nous  un  véritable 
Taret.  Dans  la  seconde  édition  du  Règne  animal , Cuvier  maintint 
les  deux  genres,  mais  il  reconnut  qu’il  existait  un  tube  dans  les 
Gaslrochènes , et , par  une  conséquence  naturelle , il  aurait  dû 
supprimer  l’un  des  deux  genres. 

Depuis  les  observations  que  nous  avons  faites  en  1824  ) lorsque 
nous  décrivîmes  les  espèces  de  Fistulanes  appartenant  au  bassin  de 
Paris,  nous  fîmes  observer  qu'une  môme  espèce  pouvait  avoir  un 
tube  libre  lorsqu’elle  avait  vécu  dans  le  sable  , et  un  tube  inclus 
lorsqu’elle  avait  vécu  dans  l’épaisseur  des  corps  sous-marins.  Nous 
remarquâmes  aussi  en  cassant  les  madrépores  ou  les  calcaires 
tendres  dans  lesquels  avaient  vécu  les  Fistulanes,  un  tube  très 
mince  servant  de  paroi  à la  cavité  et  qui  restait  adhérent  lorsque 
il  avait  été  cassé  pour  extraire  la  coquille  ; nous  pouvions  donc 
dire  alors  qu'en  suivant  rigoureusement  les  caractères  donnés  aux 
genres  Gastrochène  et  Fistulane , une  môme  espèce  pouvait  être 
comprise  dans  l’un  ou  l’autre,  selon  qu’elle  aura  été  observée  plus 
ou  moins  complètement.  L'inutilité  de  l’un  des  genres  était  dès-lors 
démontrée  , et  toutes  les  observations  que  nous  avons  été  à même 
de  répéter  sur  les  espèces  vivantes  ou  fossiles,  nous  ont  de  plus 
en  plus  confirmé  dans  notre  opinion. 

Les  Gaslrochènes  sont  des  coquilles  marines  dont  les  unes  se 
forment  un  tube  calcaire  claviformé,  libre,  enfoncé  dans  le  sable; 
d’autres  ont  la  propriété  de  perforer  les  madrépores  ou  les  cal- 
caires tendres,  et  de  s’y  loger  à la  manière  des  autres  acéphales 
lilhophages.  Quelques-unes  de  ces  espèces  ont  accidentellement 
un  tube  libre  lorsqu’elles  vivent  dans  les  sables  loin  des  endroits 
contenant  dçs  calcaires  tendres;  dans  les  espèces  litbophages,  la 


3o 


PREMIÈRE  famille. 


cavité  intérieure  est  constamment  revêtue  clW  tube  calcaire-  plus 
ou  moins  épais  , dont  Textrémilé  postérieure  seulement  est  sail- 
lante ali-dehors.  Dans  les  espèces  à tube  libre,  celte  extrémité 
J)oslérieure  du  tube  est  percée  d’une  ouverture  étroite , ovale  ou 
arrondie,  simple.  Dans  les  espèces  incluses,  l’ouverture  du  tube 
est  généralement  plus  étroite,  plus  comprimée  latéralement,  et 
Ton  voit  ordinairement  à l’intérieur  deux  petites  ci*ôtes  opposées 
qui  indiquent  la  séparation  des  deux  siphons  postérieurs  de  l’a- 
nimal. Lorsque  l’on  ouvre  le  tube  libre  de  certaines  Fisiulanes, 
ori  est  surpris  de  trouver  à i’inléi’ieur,  vers  le  milieu  de  la  lon- 
gueur, une  cloison  saillante  percée  dans  le  milieu  d*une  tente 
étroite  : nous  présumons  que  celte  cloison  est  produite  par  i’a- 
ninial  lors  de  son  deimier  accroissement.  Ce  que  nous  avons  dit 
sur  les  Arrosoirs  et  sur  les  Clavagelles  peut  s’appliquer  , à ce  qu’il 
nous  semble  , à racci'oissemeiit  des  FisluIanes  à tube  libre  ; 
quant  à celles  dont  le  tube  est  inclus,  elles  vivent  et  s’accroissent 
à la  manière  des  Saxicaves,  et  l’on  ne  trouve  jamais  dans  leur  in- 
térieur la  sîngulière  cloison  dont  nous  venons  de  parler. 

Toutes  les  coquilles  appartenant  au  genfe  Gaslrochène  se  i*e- 
connaissent  facilement  et  indépendamment  du  tube  qui  les  ren- 
ferme : elles  sont  régulières,  équivâlves  , allongées , étroites,  le 
bord  cardinal  est  droit,  simple,  sabs  dents  et  les  valves  sont 
maintenues  au  moyen  d’un  ligament  extérieur  allongé  et  peu  épais; 
les  crochets  sont  presque  leFniinaux  : la  coquille  est  conséquem- 
ment très  inéqüilatérale.  Lorsque  les  valves  sont  réunies  elles 
offrent  au  côté  antérieur  et  inférieur  un  bâillement  considérable, 
très  élargi  antérieurement,  rétréci  du  côté  postérieur  et  occupant 
les  deux  tiers,  quelquèFois  les  trois  quarts  de  la  longtieur  l'olaTe 
de  la  coquille.  Cotte  côquil  le  est  toujours  mince,  transparente, 
fragile,  et  particulièrement  cellè  qui  habile  dans  un  tube  libi*e. 
Si  l’on  compare  la  grandeur  de  la  coquille  avec  celle  du  tube, 
on  est  obligé  de  croire  que  l’animai  ne  doit  être  recouvert  qu’eh 
petite  partie  par  sa  coquille,  et  cependant  lorsque  l’on  observe 
l’animal , ses  longs  siphons  ainsi  que  les  bords  de  son  manteau  par 
une  contratililé  très  grande,  rentrent  en  entier  dans  l’intérieur  de 
la  coquille. 

L’animal  des  Gastrochènes  est  allongé,  cunéiforme  ; son  coté  an- 
térieur et  inférieur  présente  une  troncature  semblable  à celle  de 
la  coquille.  Les  lobes  du  manteau,  médiocrement  épaissis  sur  les 
bords,  sont  soudés  postérieurement  et  prolongés  de  ce  côté  en 


JÆS  TtTBtCOlis.  3i 

deux  siphon^  presque  égadx  soudés  dans  toute  leur  longueur , 
mais  ayant  sUr  les  côtés  une  dépression  qui  indique  l^endroit  de 
leur  jonctiotJ.  C’est  à celte  dépression  que  correspondent  les 
crêtes  saillantes  dans  l’ouvertui'e  postérieure  du  tube  j les  bords 
du  manteau  suivent  le  contoUr  du  bâillement  de  la  coquille  et  se 
continuant  sur  le  côté  àntérieur  en  une  membrane  assez  épaisse, 
ferrnènt  presque  erilifereraent  lé  côté  antéi'ieur  en  laissant  vers  lé 
centre  dé  la  Iroucaturè  Une  très  petite  düverlure  sphirictéroïde 
pour  le  passage  du  pied.  Ce  pied  ressemble  beaucoup  à celui  des 
Pholades;  il  ést  très  court,  épais,  tronqué  en  un  disque  semblable 
à une  ventouse  ; il  est  à présumer  que  ranimai  s^eii  sert  pour  sd 
fixer  aux  parois  de  la  cavité  qu’il  habité;  là  bouche  est  profondé- 
ment cachée  entre  le  pied  èt  le  muscle  adducteur  antérieur;  elle 
est  petite,  transverse,  garnie  de  lèvres  minces  et  étroites,  pro- 
longées de  chaque  côté  en  une  paire  de  petites  palpes  labiales 
lancéolées,  finement  striées  à leur  surface  interne.  On  trouve 
de  chaque  côté  du  corps,  deux  branchies  très  inégales;  détachées 
à la  base  du  corps  elles  doivent  flollèr  dans  l’intérieur  du  siphon 
branchial.  La  tnâssè  abdominale  est  peu  considérable  et  elle  est 
en  grande  partie  formée  par  le  pied. 

Le  nombre  dés  éspecés  connues  dans  le  gedt’é  Gastrochène  n^est 
point  encore  considérable.  En  examinant  les  espèces  comprises 
dans  les  genres  Fislülâné  ët  Gastrochène  des  auteurs,  genres  que 
nous  réunissons  en  un  seul,  suivant  en  cela  la  juste  opinion  de 
Spengler,  on  i-emarque  plusieurs  doubles  emplois  et  d’autres  er- 
reurs qui,  quoique  signalées  par  nous  dans  d’autres  ouvrages, 
doivent  encore  être  mentionnées  dans  celui-ci  pour  mieux  assurer 
leur  rectification. 

Le  Fùtuianà  ciaçà  de  Lamarck  àVaît  déjà  reçu  de  Spengler  un 
autre  nom  spécifique  qUè  son  antériorité  doit  faire  préférer  ; il 
fâtU  donc  rétablir  cette  espèce  dans  les  catalogues  sous  le  nom  de 
Gastrockœna  mumia.  Nous  ferons  la  môme  observation  pour  le 
Fistulana  lagenula  ; Spengler  lui  avait  dohné  le  nom  de  fistulana 
Cormhium  que  l’on  devra  lüi  restituer. 

La  Fistulane  cunéiforme  et  la  Fistulane  en  paquet,  sont  de  vé- 
ritables Tarets. 

La  Fistulane  poire  Lamk.,  pourrait  bien  être  un  doülilé  emploi 
de  la  Clavagelle  de  Brocchi  ; mais  comme  le  tube  seul  est  connu, 
il  pourrait  se  faire  qu’il  contînt  une  Fistulane.,  et  que  ce  fût  un 
tube  accidentellement  libre  du  Fistulàna  hians  dè  Brocchi. 


32 


PREMIÈRE  FAMILIE. 


Le  nom  de  Fistulana  hians  ayant  été  imposé  à plusieurs  espèces^ 
nous  pensons  que,  pour  éviter  toute  confusion  synonymique,il  se- 
rait utile  de  supprimer  entièrement  ce  nom  de  la  nomenclature 
des  Gastrochènes. 

Les  espèces  fossiles  sont  particulièrement  répandues  dans  les  ter- 
rains tertiaires.  Il  en  existe  aussi  dans  les  terrains  secondaires  et 
nous  en  avons  reconnu  les  traces  jusque  dans  le  Quadersansteîn 
qui  constitue  la  partie  la  plus  inférieure  du  Lias  ; l’on  trouve  aussi 
dans  les  coquilles  épaisses  de  ces  terrains,  des  perforations  qui 
semblent  appartenir  à de  véritables  Gastrocbcnes.  Il  faudrait  ce- 
pendant constater  définitivement  le  fait  par  l’examen  des  coquilles, 
ou  au  moins  de  leur  moule,  et  jusqu’à  pi'ésent,  nous  n’avons  pu 
faire  changer  nos  présomptions  en  certitude. 

Nombre  des  espèces  : 

Il  Vivantes. 

8 Fossiles. 

Parmi  les  espèces , nous  signalerons  les  suivantes  : 

Gastrochœna  modiolina^  Lamk.  Vivant  dans  l’océan  d’Europe. 
Fossile  en  Italie,  en  Sicile. 

Gastrochnœa  giganlea.  Vivant  dans  l’océan  Indien.  Fossile  à 
Bordeaux  et  à Paris. 

Gastrochœna  ampullaria.  Fossile  à Paris , à Londres. 

ESPÈCES, 

Gaslrocbène  momie.  Gastrochœna  mumia.  Spengl.  pl.  2.  f. 

I.  2.  3. 

G,  %'aoinâ  tereti  clavatâ^  recta,  tennissîmâ,  fragîli  ^ testa  'valvîs  elongatîs , 
auticè  contortis,  uncînatis  , regularîter  strîato-p  'Cicatis, 

Upérote  membraneux  droit,  Ouettard,  Mém.  div.  1774»  t«  2,  p.  128. 
no  4.  pl.  71,  fig.  ir. 

Gastrochœna.  , Nov,  act.  dan.  t.  a,  p.  174.  f.  i.  7. 

Gastrochœna  mumia,  Id.  Joiirn.  d’hist.  nat.  Copenh,  t.  3.  pag.  20,  pl.  2. 
f.  I.  I a. 

Fav.  Conclu  pl.  5,  f.  K. 

Eucycl.pl.  167.  f.  17  à 28, 

Chœna  mumla.  Schum.  Essai  classif.  p.  94. 

Fistulana^  Cîava.  Lamk.  An,  s.  v.  t.  5.  p,  435,  n“  i.  ^ 

. Blainv,  Malac.  pl.  Si , f.  3. 


LES  TUBICOLKS. 


33 


FUlidana  dam.  Sow.  Ocn.  of  sliells,  iIq  27,,  f,  i-5. 

hl.  Dcsli.  Encyd.  métli.  vers,  t,  2.  p.  i/|0,  ^ 

Id,  Lamek.  Au.  s.  v,  2®éJ.  l.  6.  p.  3o7  u®  i.’ 

Haliite  l’Océan  de  l’Inde,' 

Le  tube  est  libre  comme  celui  des  Arrosoirs , et  il  est  souvent  re- 
couvert de  {çrainsde  sable  agglutinés  à ses  parois.  îi  est  très  mince , 
d’un  blanc  laiteux,  et  l’on  observe,  dans  presque  tous  les  individus, 
des  rides  transverses,  circulaires,  irrégulières  sur  l’extrémité  an- 
térieure. Ce  tube  est  droit,  claviforme,  quelquefois  un  peu  courbé 
à son  extrémité  postérieure  qui  est  la  plus  étroite.  L’extrémité  an- 
térieure est  terminée  en  calotte  demi  sphérique.  L’ouverture  du 
tube  n’est  point  comprimée,  et  elle  n’est  point  bécarinée  à l’inté- 
rieur comme  dans  la  plupart  des  autres  Gastrochènes.  Dans  son 
Généra  of  shells , M.  Sowerby  a rapporté  une  observation  très  in- 
téressante et  dont  ^ Aspergillum  vaginifernm  avait  déjà  donné  un 
exemple.  Comme  M.  SoTverby,  nous  avons  vu,  dans  le  tube  du 
Gasirochœna  muima,  une  cloison  Iransverse  percée  au  centre 
d’une  fente  ovale,  et  nous  croyons  pouvoir  expliquer  sa  présence 
de  la  môme  manière  que  dans  l’Arrosoir. 

Dans  l’intérieur  du  tube , on  trouve  une  coquille  bivalve  singu- 
lière. Elle  est  étroite,  allongée,  cunéiforme,  très  largement  bâil- 
lante dans  toute  l’étendue  du  bord  inférieur.  Les  valves  sont 
minces,  blanches,  diaphanes.  Leur  extrémité  anlorieui'e  est  al- 
longée et  fortement  recourbée  de  manière  à former  une  sorte  de 
capuchon  au-dessus  du  bâillement  des  valves,  lorsque  celles-ci 
sont  réunies.  A partir  du  crochet,  la  surface  extérieure  des  valves 
est  partagée  en  deux  parties  presque  égales  par  un  sillon  oblique. 
La  partie  supérieure  et  postérieure  est  plus  transparente;  on  y 
voit  des  stries  d’acci’oissement  concentriques,  disposées  comme 
dans  les  Soicns.  Sur  la  partie  antérieure  et  inférieure , les  stries 
sont  transverses  et  les  dernières  bordent  le  bâillement  des  valvej. 
Les  crochets  sont  très  petits,  à peine  saillans,  à peine  dépassés 
par  le  côté  antérieur.  Ce  coté,  lorsque  les  valves  sont  réunies, 
forme  une  surface  presque  plane,  dont  le  milieu  se  relève  en  une 
crête  peu  saillante.  Celle  surface  est  séparée  du  reste,  sur  les  cot^s, 
par  un  angle  obtus.  Cet  angle,  ainsi  que  la  surface  antérieure, 
sont  ornés  de  stries  et  de  fins  sillons  rayonnans.  La  surface  inté- 
rieure est  lisse;  l’impression  musculaire  postérieure  est  allongée; 
l’antérieure  est  petite  et  arrondie,  et  placée  obliquement  sur  la 
partie  courbée  des  valves.  L’impression  palléale  forme  une  sinuo- 

T.  I.  3’ 


rnrMîKivK  FAMUxr. 


34 

site  postérieure  étroite  et  pi'ofonde.  Le  bord  cardinal  est  droit;  il 
est  simple  dans  la  valve  gauche.  On  aperçoit  une  petite  dent  ru- 
dimentaire sous  le  crochet  dans  la  valve  droite.  Dans  l’une  et  l’autre 
valve,  un  petit  sillon  extérieur  sur  le  bord  cardinal,  indique  la 
position  du  ligament. 

Des  valves,  longues  de  3o  millimètres  et  larges  de  6 , sont  con- 
tenues dans  un  tube  long  do  lo  centimètres  et  large  de  lo  milli- 
mètres à la  base. 

Gastrochène  modioline.  Gastwchœna  diihia.  Desli.  pl.  a. 

lîg.  4*  5. 

G,  'oaghiâ  pyrifonni,  contortâ,  crassâ  intus,  ad  aperturam  hlcarinatâ;  testa 
t\  . ovato^ohîongd,  angttstâf  transversîm  striata ^ antice  sînuatâ;  natibus 
promînuUs  latere  antico  hrci>îssîmo,  , 

dubia.  Tenu.  Brit.  zool,  1812.  t.  4,  pl.  47.  f.  19. 

Dacosla.  Condi.  brit.  p.  234.  n®58, 

Mjtiius J 'Encycl.  métli,  pl.  219.  f.  4,  b, pessîma, 

Pholas  hians.  Brocebi.  Conch.  foss.  subap.  p.  592,  pl.  ii,  fig.  T\,a,b» 
Mytilus  amhîguusi  Dilhv,  Cat.  t.  i.  p.  3o4.  n°  9, 

3Iya  dubla»  Donov,  Coucb,  t.  3.  p,  108, 

Dorset.  Cal.  p.  27,  pl.  i,  f.  ir. 

Maton  et  Back.  p,  33  , 

'tVood.  Conch,  p,  102.  pl.  25.  t 2.  3. 

Pholüs  Mans,  Corlesi.  Sag»i.  Geol.  p,  4o.  n'*  4, 

GasirochcBiia  modiolina,  Lamck.  Auim.  s.  vert.  t.  5.  p,  447.  ji*'  3. 

Sow,  Généra  of  shells.  Gasirochœna,  f,  i.  2. 

FîsUdana  hîans,  Besli*  Encycl.  mctli,  vert,  t,  2.  p.  i4i,  n®  3. 
it/j'rt  dnbia  de  Gerville,  Cat.  des  coq.  de  la  Manche,  p.  ii.  n"  i. 
Gastrochœna  modiolina,  Coll,  des  Cherres,  Cat.  des  lest,  du  départ,  du  Fi-- 
nist.  p.  9;  n®. 

Gastrochœna  modiolina,  Boucli,  Chanlcreaux.  Cat,  des  Moll,  du  Boulon, 

p,  8,  n®  4; 

Desh,  Lamk.  Air.  s.  vert. , 2®  edit.  t.  6,  p,  49,  n®  3. 

Habite  dans  l’Océan  européen.  Fossile  en  Italie,  en  Sicile , etc, 

Kous  avions  d’abord  pensé  qu’il  serait  utile  de  conserver  à cette 
espèce  le  nom  de  Gastrockeena  Mans  / mais  nous  étant  aperçu  que 
ce  nom  entraînerait  avec  lui  quelque  confusion  synonjmique,  nous 
avons  préféré  celui  donné  par  Peniiant,  parce  qu’il  est  le  plus  an- 
cien. Nous  ratlâclions  à celte  espèce,  comme  on  peut  le  voir  par 
notre  synonymie , plusieurs  de  celles  des  auteurs.  Si  l’on  s’en  rap- 


LES  TUniCOLES. 


35 


portait  trop  à la  li^nre  tlii  Pholas  hians  tic  Brocchi,  on  pourrait 
ne  pas  admettre  avec  nous  Tidcntità  do  l’espèce  fossile  et  de  la  vi- 
vante 5 mais  dès  que  l’on  est  prévenu  que  la  figure  de  l’auteur  ita- 
lien représente  une  variété  plus  étroite , on  np  peut  plus  avoir  de 
doute  à ce  sujet. 

Le  tuBe  du  Gastrochène  modioliuc  est  allongé,  pyriformej  assez 
épais,  souvent  rugueux  ; le  plus  ortlinairemcnt' il  est  inclus  dans 
répaisseur  des  huîtres  ou  d’autres  coquilles  épaisses.*  Il  s’enfonce 
aussi  dans  les  pierres  calcaires.  L’ouverture  de  ce  tube  est  très  ré- 
trécie, un  peu  comprimée  latéralement,  et  l’on  trouve,  à l’inté- 
rieur , sur  les  parois  les  plus  larges  et  les  plus  rapprochées,  deux 
carènes  opposées,  indiquant  la  séparation  des  siphons. 

La  coquille  est  hianclie,  diaphane,  ovale,  allongée,  très  inéquila- 
térale ; les  valves  rapprochées,  leur  bâillement  occupe  près  des  trois 
quarts  de  la  longueur  totale.  La  surface  extérieure  est  couverte  de 
stries  transverses,  fines,  irrégulières;  la  surface  intérieure  est  lisse, 
et  l’on  aperçoit  deux  impressions  musculaires  inégales.  L’antérieure 
est  fort  petite  et  placée  vers  l’extrémité  antérieure  du  bord  cardi- 
nal ; la  postérieure  est  plus  grande , arrondie  ; elle  est  placée  dans 
l'angle  obtus  que  forme  l’extrémité  postérieure  du  bord  cardinal, 
en  se  joignant  au  bord  postérieur.  L’impression  palléale  présente 
une  sinuosité  postérieure  triangulaii'c  et  peu  profonde.  Les  cro- 
chets sont  médiocrement  sailians,  subcordiformes  , très  rappro- 
chés, et  l’on  remai’que  en  avant  d’eux  un  petit  enfoncement  lunu- 
laire.  Le  bord  cardinal  est  droit,  simple  ; quelquefois  l’impression 
musculaire  antérieure  y produit  une  petite  callosité  , surtout  dans 
les  vieux  individus.  Un  sillon  extérieur,  presque  aussi  long  que 
le  bord,  donne  insertion  à un  ligament  externe,  étroit  et  allongé, 
les  crochets  sont  dépassés  par  un  bord  antérieur  très  court,  for-? 
niant  une  sorte  d’oi'eillette  triangulaire,  qui,  lorsqu’elle  est  jointe 
à celle  de  la  valveopposéo,  forme  le  bord  anterieur  arqué  de  l’ou- 
vertui’e  de  la  coquille. 

Les  valves  ont  20  millimèti’es  de  large  et  9 de  longueur. 

Gastrochène  géant.  Gastrochœna  gigantea,  Desb.  planche  2, 

fig.  6.  7.  8. 

G,  'vaginâclavatà,  închisà,  ad  aperturam  crassâ,  bîcarlnatâ.  Testa  ^ ovatp 
ohlongâj  teniUj  frag'dl,  eleganter  striato^lamellosd,  'valde  hiante;  inarginc 
antico  recto,  umbonibiis  non  tenninaUbus. 

FisUdana  glgantea.  Desh.  Kncyi,  méth.  vers,  l.  2.  p,  142.  n“.  5, 

3^ 


3G 


TREMIKRE  FAMTLT,E. 


Habile  les  mers  de  Pliidc,  la  mer  Rouge,  dans  les  masses  madréporiques. 

Fossile  en  Égyple  (Lefèvre). 

Il  existe  tant  de  ressemblance  entre  cette  espèce  et  la  fossile  des 
environs  de  Paris,  à laquelle  nous  avons  donné  le  nom  de  Fistulana 
'proifignyi^  que  Tou  serait  porté  à les  confondre,  si  Ton  ne  faisait 
une  minutieuse  attention  à tous  leurs  caractères.  Leur  étude,  sur 
un  plus  grand  nombre  d’individus,  nous  porte  actuellement  à les 
séparer.  Ce  Gaslrochène  est  le  plus  grand  du  genre  ; son  tube  est 
toujoui's  inclus  dans  Tépaisseur  des  masses  madréporiques;  il  est 
mince , fortement  attaché  aux  parois  de  la  cavité  dont  il  revêt  les 
parois.  II  s’épaissit  vers  son  extrémité  postérieure,  et  il  se  termine 
par  une  ouverture  ovale  munie  à finlérieur  de  deux  crêtes  laté- 
rales qui  lui  donnent  de  la  ressemblance  avec  la  forme  d’un  buit(8) 
de  chilFre.  Cette  extrémité  du  tube  fait  quelquefois  saillie  en  de- 
hors, La  cavité  est  ovale , oblongue,  pjriforme  ; elle  contient  une 
coquille  bivalve  régulière , subeuoéiforme,  mince,  blanche,  trans- 
parente , très  bâillante  en  avant.  C’est  principalement  lorsque  les 
valves  sont  réunies  qüe  ce  bâillement  paraît  dans  toute  son  éten- 
due. Une  valve,  prise  isolément,  est  subtrapézoïde  , ovalaire, 
ayant  son  extrémité  postérieure  un  peu  en  bec.  Le  bord  cardinal 
est  presque  droit  ; il  est  simple , plus  étroit  sous  le  crochet,  et  un 
peu  onduleux  dans  cet  endroit.  La  surface  extérieure  est  couverte 
de  stries  sublamelleuses  , rapprochées,  assez  régulières,  et  qui  sui- 
vent exactement  les  contours.  Le  crochet  est  court,  peu  saillant, 
et  son  extrémité  vient  s’appuyer  sur  le  bord  cardinal.  Ce  sommet 
est  placé  presque  à Texlrémité  antérieure;  il  est  dépassé  cepen- 
dant par  une  petite  portion  du  côté  antérieur,  comme  dans  les 
Modioles.  Ce  qui  distingue  le  plus  essentiellement  celte  espèce  de 
la  fossile,  c’est  que  le  côté  antérieur  est  presque  deux  fois  plus 
allongé  dans  cette  dernière.  A l’intérieur,  la  coquille  est  d’un  blanc 
luisant , et  il  faut  faire  miroiter  la  lumière  sur  cette  surface  pour 
bien  voir  les  impressions  des  muscles  et  du  manteau.  L’impression 
du  muscle  antérieur  est  étroite  et  s'allonge  presque  parallèlement 
au  box'd  de  la  troncature.  La  postérieure  est  grande,  ovale,  sub- 
trigone , et  l’impi  ession  palléale  offre  une  profonde  sinuosité  dans 
laquelle  est  inséré  le  muscle  rétracteur  des  siphons.  Cette  belle  es- 
pèce a 5o  millimètres  de  long  et  23  de  large.  Nous  avons  vu  des 
individus  plus  grands. 


DEUXIEME  FAMILLE  I — LES  PHOLADAIRES. 


37. 


DEUXIÈME  FAMILLE. 

Les  Pholadaires.  Lamk» 

CAiiACTiiRÊs.  — Animal  claviforme,  ou  vcinniforme;  les 
lobes  du  manteau  re'unis,  si  ce  n’est  antérieurement,  pour 
le  passage  d’un  pied  court  et  tronqué,  prolongés  en  arrière,’ 
en  siphons  toujours  réunis.  Branchies  étroites,  prolongées 
dans  les  siphons,  et  libres  à leur  extrémité. 

Coquille  très  bâillante  de  chaque  côté,  libre  ou  contenue 
dans  un  tube  calcaire;  charnière  sans  ligament,  des  apo^ 
physes  dans  les  crochets. 

GENRES. — CloUonnairCy  Tarât ^ Téi'édme,  Pholade, 

OBSERVATiOîvs. — Tous  les  auteurs  n’ont  pas  également  senti  la  va- 
leur des  caralères  distinctifs  de  la  famille  précédente  et  de  celle-ci. 
Lamarck,  lui-méme , en  les  créant , ne  les  sépara  pas  d’une  manière 
convenable.  En  effet,  danslaPhilosophie  zoologique,  où  Ton  trouve, 
pour  la  première  fois , la  famille  des  Pholadaires,  elle  est  composée 
de  quatre  genres  : Pliolade,  Taret,  Fistulane  et  Arrosoir.  Il  ne  la 
rectifia  pas  dans  l’extrait  du  cours,  mais  y ajouta  un  cinquième 
genre,  celui  des  Clavagelles.  Lamarck,  plus  lai’d,  sentit  bien  quo 
sa  famille  des  Pholadaires  devait  être  rectifiée  ; mais  il  ne  reconnut 
pas  l’ensemble  des  caractères  qui  seuls  peuvent  la  distinguer,  et 
dans  son  dernier  ouvrage,  il  la  réduisit  à deux  genres  seulement  : 
les  Pliolades  et  les  Gaslrochènes.  Nous  avons  vu,  en  traitant  du 
genre  Gaslrociiène , le  double  emploi  fait  par  Lamarck,  et  nous 
avons  donné  la  preuve,  non  - seulement  qu’il  fallait  réunir  ces 
deux  genres  Fistulane  et  Gastrochène , mais  ^encore  les  rapprocher 
des  Clavagelles  plutôt  que  des  Pholades.  Quant  aux  deux  genres 
Taret  et  Térédine , compris , par  Lamarck,  dans  la  famille  des  Tu- 
bicolés,  nous  observerons  bientôt,  dans  leurs  coquilles,  tons  les 
caractères  principaux  do  la  famille  des  Pholadaires. 

Cuvier,  dont  la  classification  est  fondée  d’après  d’autres  vues 
que  celles  de  Lamarck,  a fait , dans  la  première  édition  du  Règne 


38 


DEUXIÈME  FAMILLE. 


animal,  une  grande  famille  des  Enfermées j pour  tous  ceux  des 
Mollusques  dont  les  lobes  du  manteau  sont  réunis  dans  presque 
loulc  leur  étendue.  Les  genres  Phpiade  , Taret  et  Fülulane,  sont 
placés  à la  flu  de  cetfe  famille,  à la  suite  des  Myes  et  des  Solens. 

Dans  l’arrangement  de  la  famille  des  Plioladaires,  M.  de  Férus- 
sac  a été  moins  heureux  que  ses  prédécesseurs^  car,  après  avoir 
adopté  les  deux  genres  Pholadc  et  Gastrochène,  il  y ajoute,  par 
analogie  avec  ce  dernier,  les  genres  Saxicave  et  Hyalclle.  Sans 
doute,  ces  deux  genres  oui  des  points  de  contact  avec  les  Gastro- 
chênes,  mais  ils  doivent  former  un  petit  embranchement  latéral 
destiné  à joindre  le  groupe  des  Tubicolés  à celui  des  Lithophages. 

Dans  ses  familles  naturelles,  Laireille  saisit  un  peu  mieux  les 
caractères  dos  genres  dont  nous  nous  occupons,  mais  les  exagéra, 
selon  nous,  en  réduisant  la  famille  des  Pholadaircs  au  genre  Pho- 
lade  seul,  et  en  comprenant,  d’une  part,  les  Gastrochènes  dans  la 
famille  des  Solénides,  elles  autres,  dans  cèlle  des  Teredinites,  re- 
présentant exactement  celle  des  Tubicolés  de  Lamarck. 

Avant  la  publication  de  l’ouvrage  de  Latreille , nous  avions  déjà 
indiqué,  dans  notre  ouvrage  sur  les  Fossiles  des  environs  de  Paris, 
ainsi  que  dans  le  Dictionnaire  classique  d’histoire  naturelle,  les 
changemens  importans  que  l’on  devait  faire  subir  à ces  deux  fa- 
milles des  Tubicolés  et  des  Pholadaires.  M.,[de  Blainvillo  suivit 
nos  indications  dans  son  Traité  de  Malacologie,  et  néanmoins, 
contrairement  à notre  opinion,  il  laissa  encore  quelques  genres 
dans  des  rapports  peu  naturels.  En  proposant  des  changemens 
aussi  cousidéi'ables  dans  la  famille  des  Pholadaires,  M.  de  Blain- 
ville  trouva  convenable  de  lui  imposer  un  autre  nom,  et  proposa 
celui  d’Adosmacées  qui,  exprimant  le  caractère  principal  do  la 
la  famille  (a^tap-cç  sans  ligament) , aurait  été  préférable  si , par  son 
antériorité,  le  nom  donné  par  Lamarck  ne  devait  être  préféré. 
M.  de  Blainvilie  proposa  de  mettre  cinq  genres  dans  sa  famille  des 
Adesmacées,  Ce  sont  les  suivans  : Pholade,  Teredine,  Taret,  Fis- 
tulane  et  Cloisonnaire.  Le  genre  Fislulane  se  retrouve  ici,  parce 
que  M.  de  Blainvilie  ne  Fa  pas  compris  de  la  même  manière  que 
Lamarck  et  les  autres  auteurs.  Il  lui  a donné  pour  type  le  Fistu- 
lana  gregatay  qui  n’est  point  une  Fislulane  ou  un  Gastrochène, 
mais  un  véritable  Taret.  Aussi , il  suffît  de  supprimer  ce  genre  P^is- 
tulane  de  la  famille  qui  nous  occupe  pour  la  rendre  complète  et 
naturelle. 

Cuvier,  dans  la  dernière  édition  du  Règne  animal,  ne  tira  au- 


LES  FQOL.\DÂIR£S. 


39 

cun  parti  de  ces  indications,  et  se  contenta  d’ajouter  à sa  famille 
des  Enfermées  les  genres  Gastrochène  et  Teredine  dont  il  n’avait 
pas  parlé  précédemment. 

Quant  à M.  Rang,  différant  en  cela  de  ses  pi'édécesseurs , dans 
son  Manuel  de  Conchyliologie,  il  réunit  en  une  seule,  sous  le  nom 
de  Tuhicoîésy  les  deux  familles  dont  nous  venons  de  parler,  et, 
aux  genres  déjà  mentionnés , il  en  ajouta  un  autre  sous  le  nom  de 
Jouannetia  pour  un  petit  démembrement  peu  nécessaire,  selon 
nous,  des  Pholades  subglobuleuses  et  coralliophages.  M.  TiuHon 
avait  aussi  proposé  un  genre  pour  être  ajouté  à la  famille  des  Pho- 
ladaires.  Ce, genre,  décrit  et  figuré  dans  le  Généra  of  shells  de 
M.  Sowerby,  ne  peut  être  accepté,  car  il  présente  tous  les  ca- 
ractères distinctifs  des  Pholades , et  se  joint  à ce  dernier  genre  par 
plusieurs  nuances  insensibles. 

Nous  le  répétons,  la  présence  d’un  tube  n’est  point  le  caractère 
essentiel  pour  les  genres  de  la  famille  dont  nous  nous  occupons, 
cette  partie  accessoire,  existant  ou  non  selon  certaines  circon- 
stances, soit  individuelles,  soit  spécifiques.  Le  caractère  prédomi- 
nant dans  les  Pholadaires,  c’est  l’existence,  dans  tous  les  genres  de 
ce  groupe,  de  cuillerons  implan  tés  dans  l’intérieur  du  crochet;  c’est 
aussi  l’absence  constante  d’un  véritable  ligament  destiné  à tenir  en 
rapport  les  deux  valves  d’une  môme  coquille.  Ces  caractères  sont 
d’accord  avec  Ceux  des  animaux,  et  c’est  de  celte  manière  que 
doivent  être  établis  les  groupes  naturels  dans  une  bonne  méthode. 

Vivant  dans  la  Méditerranée  , le  genre  cloisonnaire  est  ac- 
luellement  mieux  connu.  Le  tube  seul  existe  dans  plusieurs 
collections;  mais,  d’après  la  nature  et  les  caractères  de  celte 
partie,  il  est  certain,  pour  tout  zoologiste  familiarisé  avec  les 
études  do  la  conchyliologie,  que  ce  genre  ne  peut  être  placé 
loin  des  Tarets.  Quant  au  genre  Teredine,  bien  connu  aujour- 
d’hui , depuis  que  nous  en  avons  développé  les  vrais  caractères , 
malgré  sa  singularité,  il  doit  rentrer  dans  la  famille  des  Phola- 
daires, montrant  le  passage  évident  entre  les  Tarets  et  les  Pho- 
lades. 

Les  animaux  de  la  famille  des  Pholadaires  so  reconnaissent  à la 
longueur  do  leurs  siphons  ordinairement  réunis;  à l’étroitesse  do 
leurs  branchies , fiotlantos  à leur  extrémité  postérieure  dans  l’inté- 
rieur du  siphon  branchial.  Le  pied  est  très  court,  tronqué,  et  une 
fente  peu  considérable  du  manteau  lui  donne  passage.  Les  muscles 
adducteurs  des  valves  sont  d’un  médiocre  volume,  et  celui  du  côté 


DKliXlÈME  FAMILLE. 


4o 

antérieur  vient  s’appuyer  sur  les  callosités  cardinales  de  la  co- 
quille. Les  coquilles  sont  quelquefois  libres,  quelquefois  insérées 
à rextrémité  d’un  tube,  ou  retenues  dans  son  intérieur.  Toutes  ont 
le  bord  cardinal  contourné  en  dedans,  et  ce  n’est  que  par  ce  point 
du  bord  que  les  deux  valves  se  touchent.  A riulérieur  des  crochets, 
on  observe  constamment  des  appendices  osseux  courbés,  plus  ou 
moins  élargis , auxquels  on  a improprement  donné  le  nom  de  cuil- 
lerons.  Dans  presque  tous  les  genres,  il  existe  une  ou  plusieurs 
pièces  postérieures , destinées  à cacher  et  à garantir  le  bord  cardi- 
nal et  les  parties  molles  de  l’animal  qui  le  dépassent. 

Les  genres  de  la  famille  des  Pboladaires  sont  tous  marins  et  se 
mettent  à l’abri,  les  nus  en  s’enfonçant  dans  les  argiles,  ou  sous 
les  vases  durcies,  les  autres  dans  la  pierre,  et  quelques-uus  atta- 
quent les  bois  plongés  dans  la  mer  et  les  détruisent  avec  rapidité. 

GENRE  QUATRIÈME.  . 

CXiOlSOM’STAIRE,  Septaria.  (Lamk.}» 

PL  2.  fig.  9,  10. 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES. — Animal  allongé,  cylindracé,  ayant 
les  lobes  du  manteau  réunis,  terminés  postéz'ieurement  en 
siphons  courts,  portant  à la  base  deux  palettes  osseuses  apla- 
ties ; opposées  et  destinées  à fermer  l’extrémité  postérieure  du 
tube , l’extrémité  antérieure  protégée  par  une  coquille  courte, 
aiTOudie  , semblable  à celle  des  Tarets, 

Un  tube  testacé  très  long , conique , ouvert  à sou  extrémité 
antérieure,  terminé  postérieurement  par  deux  trous  sur  les- 
quels sont  fixés  deux  tubes  grêles,  subarticulés. 

SYNONYMIE  GÉNÉRIQUE.  — Sole/i  arenariits ^ Rumpliius. 
Tuhidus  radiciformis  ; Lesscr.  — Tabulas  verniicalaris  ; Sebao 
— Serpida  arenaria;  Linné.  — Genre  Caphe^  Kaphus  ; Guet- 
tard.  Serpula  polyîhalamia;  Linné. — 7eredopaUas;V,yQV,  Hom., 
Dilbvyn.  — Genre  FurceUe^  Fnrcella;  Lamarck.  Syst.  des  a.  s. 
vert.  1801,  p.  io4-  Obs, — Genre  Clolsonnalre ^ Septaria ; La- 
niartkf  Anim.  s.  vert.  1818.  Blainville  , Férussac,  etc»  1 


LES  l’iïOLADAIBES  f 


4i 

OBSERVATIONS. — On  doit  la  connaissance  du  genre  curieux  des  Cloi- 
sonnaires  à Rumphius,  et  cet  auteur  reconnut  à cette  époque  la  res- 
semblance de  la  coquille  qu’il  nomma  Solen  arenarius^d^yGC.  lesTarets. 
La  figure  de  Rumphius  est  assez  complète  pour  faire  connaître  les 
caractères  principaux  de  la  coquille  singulière  et  gigantesque,  pour 
laquelle  Lamarck  a proposé  son  genre  Cloisonnaire.  Dans  son  pe- 
tit traité  desTubes  marins,  Klein  a formé  un  genre  particulier  pour 
la  coquille  de  Rumphius,  à laquelle  il  conserve  du  reste  le  nom 
de  Solen  arenarius,  Ebeinslreit  a également  mentionné  celte  co- 
quille dans  le  muséum  Richterianum.  Lesser,  dans  sa  Testaceothéo- 
logie,  ne  l’a  point  oubliée  et  lui  a donné  le  nom  de  tuhulus  radici-- 
foimisj  geniculatas  ramosus;  mais  ces  auteui's  n’ont  point  compris, 
comme  Pallas,  la  nature  du  genre  qui  nous  occupe.  Pallas , en 
eifet,  à la  page  i4o  àetesMiscellanques  zoologiées,  publiées  en  176G, 
dit  positivement  que  le  Solen  arenariiis  de  Rumphius  ne  diffère 
en  rien  du  Teredo  namlis,  si  ce  n’est  parce  que  son  tube,  au  lieu 
de  s’enfoncer  dans  le  bois , vit  dans  le  sable.  Pallas  ajoute  qu’il 
adopte  l’opinion  judicieuse  de  Rumphius,  auquel  on  doit,  commja^ 
nous  l’avons  vu , le  premier  rapprochement  de  son  Solen  arenarius 
avec  les  Tarets;  mais  Pallas  va  plus  loin,  et  il  est  persuadé  que  le 
Serpula  pénis  de  Linné,  dont  on  a fait  depuis  le  genre  Arrosoir, 
est  très  voisin  des  Tarets , et  particulièrement  de  l’espèce  figurée 
par  Rumphius. 

Dans  la  dixième  édition  du  Systema  naturœ^  ainsi  que  dans  le 
muséum  de  la  princesse  Ulrique,  Linné  avait  confondu,  sous  le 
nom  de  Serpula  arenaria^  des  choses  entièrement  distinctes.  Les 
unes  appartiennent  actuellement  au  genre  des  Vermets,  les  autres 
aux  Serpules,  et  enfin  le  Solen  arenarius  aux  Mollusques.  Depuis, 
Linné  a rectifié  sa  Synonymie  et  a distingué  la  coquille  de  Rum- 
phius sous  le  nom  de  Serpula  polythalamia.  Martini  ne  lui  a pas 
conservé  ce  nom,  lorsqu’il  l’a  mentionnée  dans  son  Conchylien  ca- 
binet; confondant  dans  un  seul  genre  toutes  les  Serpules,  l’Arro- 
soir et  la  coquille  de  Rumphius,  il  lui  donna  le  nom  de  Tuhulus 
vcrmicularisj  et  fit  avec  lui  deux  espèces  : Tune,  pour  l’extrémité 
postérieure  ; l’autre,  pour  un  tronçon  de  l’cxlréniilé  antérieure. 
C’est  à cette  seconde  espèce  que  Martini  rapporte  la  bonne  figure 
donnée  par  Seba,  dans  son  muséum.  Celle  figure  de  Seba,  moins 
complète  que  celle  de  Rumphius,  est  cependant  très  bonne;  elle 
donne  une  idée  exacte  de  la  grandeur  que  peuvent  acquérir  les 
individus  de  cette  coquille.  Outre  les  ouvrages  que  nous  vepons  de 


D£DXiè]|E  vmittt,. 


4a 

citer,  nous  devons  mentionner  encore  les  mémoires  do  Guettard, 
dans  lesquels  ce  savant  naturaliste,  dès  *774?  proposa,  pour  ce 
Solen  arenarhis^  un  genre  particulier  qu’un  nom  fort  peu  scien- 
tifique sans  doute  fit  oublier;  il  proposa  pour  son  genre  le 
nom  de  Cupbe,  Kuphus,  Plus  tard,  en  1801,  dans  son  Système 
des  animaux  sans  vertèbres  , Lamarck,  dans  une  note  à la 
page  io4j  proposa  un  genre  Furcelle,  Furcella,  pour  le  môme 
Solen  arenarius,  dout  lui-mème  fit  dans  son  dernier  ouvrage  le 
genre  Cloisonnaire,  et  le  plaça,  comme  nous  l’avons  vu,  dans  la 
famille  des  Tubicolés.  Depuis  cotte  époque,  il  a été  adopté  par  la 
plupart  des  zoologistes,  et  nous  avons  vu  les  légères  modifications 
qui  ont  été  apportées  récemment  dans  ses  rapports  avec  les  genx'es 
environnans. 

Jusque  dans  cesderniers  temps  l’animal  était  l'esté  inconnu.  Un 
naturaliste  de  Marseille,  M.  Mathéron  en  a découvert  une  espèce 
dans  la  Méditerranée,  et  il  a publié  sur  cet  animal  une  notice  inté- 
ressante dans  les  tomes  i et  11  des  Annales  des  Sciences  et  de 
rindusU'ie  du  midi  de  la  France.  Trouvé  à l’état  fossile  dans  les 
fouilles  que  l’on  fit  pour  établir  le  bassin  de  carénage , le  genre 
Cloisonnaire  a été  observé  depuis  à l’état  vivant,  non  loin  de  Mar- 
seille; l’espèce  recueillie  dans  la  Méditerranée  ii’esl  pas  la  même 
que  celle  de  l’Inde  figurée  par  Rumpbius;  elle  est  plus  petite  , et 
nous  ignorons  si  le  tube  est  pourvu  de  deux  calamules  singu- 
lières , observées  par  llumphius  dans  son  Solen  arenarius. 

D’après  M.  Malhéron,  l’animal  de  la  Cloisonnaire  de  la  Méditer- 
ranée est  loul-à-fait  semblable  à celui  du  Taret.  Pallas,  comme 
nous  l’avons  vu,  a eu  la  même  opinion.  Il  est  allongé,  tubuleux, 
cylindrique;  les  lobes  du  manteau  réunis  forment  un  tuyau  charnu, 
dont  l’extrémité  postérieure  se  prolonge  en  deux  siphons  étroits 
grêles  et  assez  allongés;  l’cxlrémilé  antérieure  ducoi*ps,  la  bouche, 
le  pied,  une  partie  de  la  masse  viscérale  sont  protégés  par  une  co- 
quille très  courte,  subglobuleuso,  baillante  de  chaque  cété,  sem- 
blable, par  ses  caractères  principaux,  à celle  des  Tarels;  les  valves 
sont  appuyées  l’une  contre  l’autre,  mais  non  réunies  par  une 
charnière  articulée  ou  par  un  ligament.  Dans  leur  intérieur  on 
voit  des  cuillerons  allongés , étroits  et  aplatis  comme  dans  les 
Tarels. 

Le  tube  calcaire,  dans  lequel  sont  coalcnns  la  coquille  et  l’animal, 
est  allongé,  subcylinclracé,  d’un  diamètre  moindre  à son  extrémité 
postérieure  qu’à  l’antérieure;  dans  l’espèce  de  l’Inde,  ce  tube,  dout 


LES  PHOLAPAIIVES. 


43 

on  a vu  des  individus  de  près  de  quatre  pieds  de  longueur,  a un 
épaisseur  assez  considérable  pour  lui  assurer  une  grande  solidité  ; il 
est  tantôt  droit,  tantôt  contourné  plus  ou  moins , selon  les  obstacles 
que  l’animal  a rencontrés  pendant  son  développement;  la  surface 
extérieure  est  presque  lisse,  elle  est  marquée  d’accroissemens  trans- 
verses et  quelquefois  de  renflemens  successifs,  compai’ables  à ceux 
d’un  intestin  ; à l’intérieur,  les  accroissemens  sont  indiqués  par  des 
rides  saillantes,  Iransverses,  en  segmens  de  cercle  ; elles  sont  irré- 
gulièrement espacées.  A son  extrémité  postérieure,  le  lest  du  tube 
s’épaissit  beaucoup,  et  la  cavité  simple  se  partage  en  deux  tuyaux 
cylindriques,  dont  l’entrée  intérieure  est  séparée  par  un  éperon 
saillant;  ces  deux  tuyaux,  soutenus  latéralement  par  des  cloisons, 
sont  contenus  dans  l’exirémilé  du  tube,  et  leur  terminaison  exté- 
rieure vient  saillir  au-debors;  ces  tuyaux  donnent  passage  aux 
deux  siphons  de  l’anima’.  Lorsque  la  Cloisonnaire  est  bien  complète, 
les  deux  tuyaux  fe  prolongent  en  deux  calamules  divergentes, 
subarliculées,  longues  de  cinq  à six  pouces;  ces  calamules  revêtent 
les  siphons  charnus  de  l’animal  dans  toute  l’extension  qu’ils  peu- 
vent prendre.  Les  deux  siphons,  très  contractiles,  peuvent  rentrer 
entièrement  dans  l’intérieur  du  tube,  et  lorsqu’ils  sont  ainsi  retirés, 
l’animal  peut  clore  l’ouverture  de  son  tube,  au  moyen  des  deux 
petites  palettes  calcaires  figurées  par  M.Mathéron,  mais  que  Rurn- 
phius  n’a  pas  connues  ; ces  palettes,  semblables  à celles  des  Tarets, 
sont  placées  de  même  dans  l’animal  et  remplissent  les  mômes  fonc- 
tions; nous  en  reparlerons  en  traitant  des  Tarets:  L’extrémité  an- 
térieure du  tube  s’amincit,  et,  jusqu’à  présent,  les  morceaux  répan- 
dus dans  les  collections  ont  celte  extrémité  ouverte  ; Rumphius 
cependant  et,  après  lui,  Martini  ont  fait  figurer  des  individus  chez 
lesquels  cette  partie  est  fermée  par  une  calotte  convexe  en  dehors. 
M.  Malhéron  a vu  aussi  dans  l’espèce  de  la  Méditerranée  des  indi- 
vidus fermés.  Il  est  à présumer  que  le  tube  des  Cloisonnaires, 
comme  celui  des  Tarets,  est  fermé  lorsqu’il  est  parvenu  à tout  son 
développement,  et  qu'il  reste  ouvert  pendant  les  accroissemens  de 
l’animal. 

A mesure  que  l’on  a une  connaissance  plus  exacte  du  genre 
Cloisonnaire,  sa  ressemblance  avec  les  Tarets  devient  de  plus  en 
plus  évidente;  il  n’en  diffère  que  par  deux  caractères  : l’existence 
des  calamules  des  siphons  et  la  manière  de  vivre:  ces  deux  carac- 
tères tiennent  peut-être  à quelques  différences  d’organisation  qu’il 
faudra  chercher  particulièremeat  dan$  l’espèce  des  Indes.  Toutes 


DEUXIEME  FAMILLE . 


44 

les  personnes  qui  vivent  près  de  la  mer,  connaissent  les  ravages  que 
font  les  Tai'ets  dans  les  bois  plongés  dans  la  mer  ; les  Cloisonnaires 
s'enfoncent  dans  le  sable  dans  une  position  perpendiculaire,  l'ex- 
trémité antérieure  du  tube  en  bas , la  postérieure  en  haut , de  ma- 
nière à permettre  la  saillie  des  siphons  ou  des  calamules  au-dessus 
de  la  surface  du  sable. 

On  ne  connaît  encore  que  deux  espèces  de  Cloisonnaires. 
ESPÈCES. 

Cloisonnaire  des  sables.  Septaria  arenaria,  Lamk. 

*5.  'vaginâ  maxïmâf  terete  cyVindraceâ^  alha^  dîversi  modo  contorta,  radïaiim 
crystalllnâ^  ad  cxlremilaiem posticatn  septâ  longîtiidinali  intîis  bîpartUâ^ 
calamuUs  ducibus  siibarticulatîs  terminatd  j intîis  dissîpimentls  hinc  con^ 
vexis  indè  concavis  interruptâ. 

Serpula  arenaria.  Lin.  Sysl.  naU  ed.  lo.  p.  787.’  syn.  plur.  exclus. 

Setpula  arenaria.  Lin,  Mus.  Ülr.  p.  700.  n®,  43a. 

Scrpida  poîytfialamîa^  Lin.  Sysl.  nat.  cd.  12.  p.  1266. 

List,  Synop,  Manlissa  marin,  Conch,  pî,  i.  fîg.  3. 

Solen  arenarius , Kumph.Mus.  amb.  pl.  4i«  f.  P*  H. 

Seba^  Mus.  t.  3,  pl.  94.  {tubi  duo  majores), 

Solcn  arenarius,  Geuus  iT.  Klein,  de  tub.  marin,  p.  3, 

Solen  corallorum  corrugatus,  Klein,  de  lubuli.  p.  5,  pl.  i.  f.  3. 

*y^r/7«/a  Pallas,  Spic,  Zool.  p.  140. 

Martini.  Conch.  1.  I,  p.  4o-  ph  i-f*  6.  p.  46.  pl.  i.  f.  ir. 

Scrpula poljthalamia,  Sclirol,  Einl.  t.  2.  p.  549,  no.  12. 

Serpula,  no,  4,  Schrol.  Einl,  t.  2.  p.  557, 

Eav.  Conch.  pl.  5.  f.  N.  figure  réduite. 

Serptda  poîythaîamia.  Gmel,  p.  3742.  Hq.  1 3. 

Serpula  anguîna.y^r,  B.  p.  3743.  u®.  14. 

Teredo  gtganteus,S\xli\y,  Home.  Xrans.  phil.  1806,  p,  276.  pl,  10  et  n; 

f.  I.  à 7.  . , 

Teredo gigantea,  Dillw,  Cal.  t,  2. p,  1087.  Uq,'  i. 

Septaria  arenaria.  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  43?.  n®.  i. 

Septaria  arenaria,  Blainv.  Malac.  p.  58 1. 

Desli.  Encycl.  mélh.  vers,  l,  2.  p,  247. 

Desh.  Lamk.  An.  s,  v.  2®  édit,  t,  5,  p.  33, 

Habile  l’Océan  de  l'Inde,  dans  le  sable,  cnlre  les  racines  des  Mangliers, 
(Lamarck). 

Nous  avons  vu,  en  traitant  des  généralités  de  ce  genre)  que 


LËS  PROLABATRËS; 


45 

l’espèce  qui  lui  sert  de  type,  connue  depuis  lonfj-tenips,  a été  le 
sujet  de  plus  d’une  errem*  de  la  part  des  auteurs  qui  ont  eu  occa- 
sion de  la  mentionner.  Outre  les  vacillations  de  Linné  et  la  déter- 
mination rigoureuse  et  précise  de  Pcilas,  nous  remarquons  que  la 
plupart  des  naturalistes  ont  fait  deux  espèces  pour  les  deux  mor- 
ceaux de  la  meme  coquille,  représentée  par  Rumphius,  Klein,  le 
premier,  a donné  ce  mauvais  exemple , et  il  a poussé  la  distinction 
jusqu’à  ce  point,  non-seulement  d’établir  deux  espèces,  mais  même 
deux  genres  pour  deux  morceaux  de  coquille,  au  sujet  desquels 
Rumphius  ne  laisse  pas  la  moindre  incertitude.  Martini , Schroter, 
Gmelin  et  d’autres  ont  adopté  cette  en'eur  que  Dillwyn,  le  premier, 
à ce  qu’il  nous  semble , a su  éviter  dans  sa  synonymie.  Gmelin  ne 
s’est  pas  contenté  du  double  emploi  que  nous  venons  de  signaler 
chez  quelques-uns  de  ses  précédesseurs  ; il  a compris  une  partie  de 
la  synonymie  dans  son  SeTpuîa  anguîna  et  en  a fait  la  variété  que 
nous  avons  signalée. 

Plusieurs  zoologistes  ont  pensé  qu’il  était  convenable  de  rendre 
à la  coquille,  qui  nous  occupe,  le  nom  que  Linné  lui-même  lui  a im- 
posé dans  la  douzième  hàiûonàn  Sjstemanatarœ,  Pour  ces  zoologis- 
tes, cette  espèce  devrait  être  décrite  sous  le  nom  de  Septaria  Poly- 
thàlamia;  mais  si,  comme  c’est  une  règle  invariable , nous  prenons 
pour  spécifique  le  nom  le  plus  anciennement  donné,  nous  aurons 
plusieurs  motifs  pour  conserver  à la  Cloisonnaire  le  nom  que  La- 
marck  a préféré  pour  elle,  Rumphius,  antérieur  à Linné,  a désigné 
Je  premier  la  Cloisonnaire  sous  le  nom  de  Solen  arenarius,  et  nous 
puisons,  dans  ceux  des  ouvrages  de  Linné  qui  sont  antérieurs  à la 
douzième  édition,  des  motifs  suflisans  pour  légitimer  cette  nomina- 
tion , puisqu’il  l’avait  adoptée  aussi  bien  dans  la  dixième,  que  dans 
le  musée  de  la  princesse  Ulrique. 

Le  tube  d’une  Cloisonnaire  a souvent  plus  de  trois  pieds  de  lon- 
gueur, et  à la  base  il  a près  de  deux  pouces  de  diamètre.  Ce  tube, 
la  seule  partie  connue  de  cette  espèce  est  blanc,  un  peu  transpa- 
rent , très  épais  et  très  pesant.  Il  est  conique,  cylindrique,  augmen- 
tant de  diamètre  très  insensiblement  ; toute  sa  surface  extérieure  est 
couverte  de  rides  irrégulières , résultant  des  accroissemens.  Dans 
certains  individus,  ce  tube  est  à-peu-près  droit,  dans  d’autres,  il 
est  subitement  coudé  et  irrégulièrement  contourné  à la  manière  des 
Tarets  ; à l’intérieur,  la  cavité  du  tube  est  plus  fisse  , cependant  on 
retrouve  de  ce  côté  des  traces  de  l’irrégularité  des  accroissemens  qui 
se  traduisent  en  grosses  rides  transverses  carénées^,  occupant  ordi- 


mVXlànE  FAMILLE. 


4« 

nairement  la  moili6  ou  les  trois  quarts  de  la  circonférence.  Tous 
les  individus  que  nous  avons  vus  jusqu’à  présent  do  cotte  Cloison- 
naire  avaient  le  tube  aminci  et  ouvert  à l’exlréinilc  antérieure  qui 
est  aussi  lapins  largo  5 l’extrémité  postérieure  pi-ésente,  comme 
dans  la  plupart  des  vieux  Tarets,  une  cloison  longitudinale  qui  par- 
tage en  deux  tubes  presque  égaux , celte  portion  do  la  cavité  in- 
térieure. Ces  deux  tubes,  ainsi  réunis,  occupent  quelquefois  une 
longueur  de  huit  à dix  pouces.  A celte  partie,  ainsi  divisée,  s’a- 
dapteraient, d’api'ès  Rurnpbius , deux  tubes  calcaires  qui  vont  en 
divei’geant,  qui  semblent  subarliculés,  étant  formés  de  pièces  sur- 
ajoutées et  qui  s’abouchent,  en  s’y  sondant,  à l’extrémité  des  tubes 
intérieurs  dont  nous  avons  précédemment  pai'lé.  Si  l’on  casse  un 
tube  de  la  Cloisonnaire  des  sables, la  cassure  n’est  point  esquilleuse 
comme  celle  des  Tarets  ordinaires  et  celle  des  autres  tubes 
testacés;  elle  se  fait  assez  nettement  en  travers,  et  l’on  aperçoit, 
avec  surprise,  que  la  matière  calcaire  est  cristallisée  en  aiguilles 
rayonnantes. 

Cloisonnaire  de  la  Méditerranée.  Septaria  MetUterranea,  Math. 
pL  a.  f.9.  10. 

s,  vaginâ  teretlçyündraceâ  ivregiilarîter  contortâ^  postice  Indiiobus  tubuUs 
termînatâ;  testé  subgiobiilosd , teredinîformi^  utrînque  hiaritej  tenue  et 
arcuatlm  siriatât  întus  ossiculis  cardlnaUbiis  prœdltâ, 

Cloisonnaire  delà  Méditerranée  Malhéron.  Mém,  sur  la  Cloisonnaire,  Ann, 
des  SC.  et  deVindust,  du  midi  de  la  France,  1. 1,  p.  77,  et  t.  a p.  Sia. 
planche  i. 

Habite  la  Mcdîlerrance.  Fossile  dans  les  terrains  récens  des  environs  de 
Marseille, 

Il  est  évident,  d’après  les  observations  de  M.  Mathéron,  que  la 
coquille  qu’il  a décrite  sous  le  nom  de  Cloisonnaire  de  la  Méditerra- 
née^ a tous  les  caractères  des  Tarets.  En  serait-il  exactement  de 
même  pour  l’espèce  précédente?  c’est  une  question  qui  restera  in- 
décise jusqu’au  moment  où  sera  connu  l’animal  du  Septaria  arena- 
ria.  Quant  à celui  de  la  Cloisonnaire  de  la  Méditerranée,  il  ne 
diffère  en  rien  de  celui  des  Tarots,  si  ce  n’est  qu’il  a l’iiabiliule  de 
vivre  enfoncé  dans  le  sable.  Cette  espèce  est  toujours  beaucoup 
plus  petite  que  celle  de  l’Inde;  son  tube  est  allongé,  cylindracé, 
conique,  d’un  blanc  roussâtre,  très  rarement  droit,  presque  tou- 
jours irrégulièrement  contourné  et  boursouflé,  ce  qui  le  fait 


IBS  PHOLADAIRBS. 


47 

rcssembier  au  gros  intestin  des  mammifères.  Son  extrémité 
postérieure  se  divise  en  deux  tubes  étroits , soutenus , dans  l’in- 
térieur du  tube  commun , par  une  série  do  cloisons  résultant 
des  accroisseinens.  Ces  tubes  ne  sc  prolongent  pas  en  dehors  par 
des  tuyaux  subarticulés , comme  dans  l’espèce  précédente.  Dans  ce 
tube,  ordinairement  fermé  à spn  extrémité  antérieure,  on  trouve 
une  coquille  bivalve  très  courte,  assez  mince  et  fragile,  tout-à- 
fait  semblable  à celle  des  Tarets.  Les  deux  valves  s’appliquent  l’une 
contre  l’autre  sans  être  articulées  en  charnière;  elles  sont  très  lar- 
gement bâillantes  des  deux  côtés , et  l’on  trouve  dans  leur  inté- 
rieur, insérés  dans  la  cavité  du  crochet,  des  appendices  recourbés 
en  forme  de  cuilleron.  Entre  cette  coquille,  l’animal  porte,  à son 
extrémité  postérieure , une  paire  de  palettes  triangulaires , apla- 
ties, lout-à-fail  semblables  à celles  du  Teredo  na9alis.  D’après  les 
fragmens  que  nous  possédons  de  celte  espèce,  les  grands  individus 
ont  pu  avoir  jusqu’à  i pied  ou  i5  pouces  de  long,  et  6 à 8 lignes  de 
diamètre  à l’extrémité  antérieure. 


GENRE  CINQUIÈME. 

TARET.  Tcrcùo, 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — ■ Animal  vermiforme  : manteau 
tubuleux , terminé  posterieurement  par  deux  siphons  iné- 
gaux; une  petite  ouverture  antérieure  pour  le  passage  d’rn 
pied  court  et  tronqué;  branchies  en  ruban  dans  presque 
toute  la  longueur  du  manteau;  anus  en  avant  des  branchies; 
un  anneau  musculaire , à la  base  des  siphons , il  fixe  Tani- 
mal  à son  tube  et  donne  insertion  à deux  palettes  latérales. 

Coquille  épaisse , globuleuse  ou  annulaire , équivalve , ré- 
gulière, largement  ouverte  de  chaque  côté,  point  de  char- 
nière , point  de  ligament , un  cuilleron  dans  les  crochets. 
Cette  coquille  est  contenue  dans  un  tube  calcaire  flexueux, 
conique,  toujours  ouvert  postérieurement,  clos  à sa  partie 
antérieure  dans  l’age  adulte  ; ouverture  postérieure  divisée 
en  deux  par  une  cloison  médiane.  Deux  palettes  calcaires 


DF^UXïfeME  famille; 


48 

simples  ou  dentelées  destinées , à fermer  l’ouverture  des  si- 
plions. 

SYKONYMiE  GÉNÉRIQUE.  — Tentliredo  ; Aristote.  — Teredo  ; 
Pline.  — XilophagusiV\\xi^,—  Branca  délia  «rtPe;Vallis- 
nieri.  — Llgniperda  ; Sellius. — Taret^  Teredo  ^ Adanson, 
Linné,  Bruguière  5 Lamarck,  Cuvier , Blainville,  etc.,  etc. 

■ — Le  Taviev  I Guettard.  — Genre  Upérode;  Pars.  Guettard. 
— Fisiulane;  Cuvier,  Blainville. 

OBSERVATIONS.  — Il  est  peu  de  genres  qui  offrent  autant  d’intérêt 
que  celui-  ci,  non-seulement  parce  qu’il  a été  connu  des  anciens  et 
mentionné  par  eux  d’une  manière  non  équivoque,  mais  encore 
parce  que,  envahissant  les  constructions  maritimes,  il  est  devenu 
l’un  des  plus  redoutables  ennemis  des  navigateurs.  La  Hollande 
surtout,  menacée  par  la  rupture  de  ses  digues,  partout  détruites 
par  les  Tarets,  les  redoute  comme  le  plus  dangereux  des  fléaux. 

Les  anciens,  et  Aristote  lui-même,  donnaient  le  nom  de  Ten~ 
thredo  à la  plupart  des  animaux  qui  perforent  le  bois,  ou  qui  se 
creusent  des  galeries  plus  ou  moins  profondes  dans  l’épaisseur  des 
corps  durs,  lis  confondaient  ainsi,  avec  des  animaux  marins  de  plu- 
sieurs classes , plusieurs  espèces  de  larves  d’insectes.  En  parlant 
des  mêmes  animaux,  Pline  conserve  cette  confusion.  Il  est  à pré- 
sumer que  le  mol  Teredo,  appliqué  aujourd’hui  aux  Tarets  pro- 
prement dits,  n’avait  point  autrefois  celte  signification.  Chez  la 
plupart  des  peuples  anciens,  aussi  bien  que  chez  les  Romains,  ou 
avait  la  persuasion  que  les  maladies  des  os,  que  l’on  connaît  au- 
jourd’hui sous  le  nom  de  carie  ^ étaient  occasionées  par  un  ver 
rongeur , et  c’est  à cet  être  imaginaire  que  dans  l’origine  on  appli- 
qua lo  nom  de  Teredo,  Par  extension,  ce  nom  a été  appliqué  à 
plusieurs  animaux , comme  nous  l’avons  vu  tout-à-l’heure  ; mais , 
quand  au  milieu  de  ces  animaux  on  voulait  eu  désigner  un  en 
particulier,  il  recevait  une  épithète  caractéristique,  et  c’est  ainsi 
que  Pline  désigne  le  Tard  proprement  dit,  par  le  nom  de  Tetedo 
xilophaga.  Peut-être  que  si  le  Tavet  n’eÛL  point  été  si  redoutable 
aux  constructions  maritimes,  les  anciens  ne  l’eussent  point  mention- 
né ; car  c’est  toujours  à l’occasion  des  dégâts  qu’il  a causés,  que  l’on 
trouve  aussi  bien  dans  Aristophane  et  dans  Ovide,  que  dans  Pline 
et  Vitruve,  des  preuves  non  équivoques  que  les  anciens  ont  connu 
ce  mollusque  destructeur.  Ce  serait  donc  bien  à tort,  comme  on 


I,KS  rdOTADAlRFS. 


4y 

J’a  proLenJu  vers  le  milieu  du  dernier  siècle , que  l’on  croirait  à 
Tenvahissement  tout  récent  du  Taret  rapporté,  disait-on,  de  rindo 
par  la  navigation  moderne.  Le  Taret  existait  dans  les  mers  d’Eu- 
rope avant  la  navigation  de  Tlnde,  et  on  en  a la  preuve  indépen- 
damment du  témoignage  des  anciens.  On  trouve  le  Tarot  à l’état 
fossile,  dans  les  terrains  tertiaires  de  l’Europe  appartenant  à la 
troisième  période,  et  comme  ces  terrains  ont  été  déposés  avant 
que  l’homme  existât , nous  pouvons  avoir  par  là  la  preuve  la  plus 
irrécusable  que  le  Taret  n’a  point  été  apporté  récemment  dans  nos 
mers. 

Dans  les  ouvrages  des  naturalistes  du  seizième  siècle  et  du  com- 
mencement du  dix-septième,  à peine  si  le  Taret  s’y  trouve  men- 
tionné, Aldrovande,  qui  avait  compilé  avec  tant  de  soin  tout  ce 
que  l’antiquité  nous  a légué  de  ses  écrivains,  ne  pouvait  pas  laisser 
échapper  ce  qui  a rapport  au  Taret;  mais,  trouvant  à ce  sujet 
beaucoup  de  confusion,  et  n’ajant  aucun  guide  certain  pour  la 
dissiper,  il  la  laissa  subsister  tout  entière  dans  son  ouvrage.  En 
1715,  Valisnîeri  publia  son  Recueil  de  diverses  observations  d’his- 
toire naturelle  ; il  y mentionna  le  Taret  ; il  le  nomma  Branca  délia 
nave.  Branca  signifie  la  pierre  du  martyr  , et  l’on  conçoit  facile- 
ment le  sens  que  l’auteur  italien  appliquait  aux  manœuvres  d’un 
animal  qui  attaque  les  vaisseaux  et  les  détruit. 

Déjà,  à plusieurs  reprises,  on  avait  signalé,  comme  capable  de 
détruire  les  bois  plongés  dans  la  mer  , une  Annelide  que  l’on  ren- 
contre quelquefois  dans  les  galeries  qu’elle  s’y  creuse.  Deslandes, 
en  1720,  dans  un  mémoire  publié  dans  rhisloire  de  l’Académie  , 
avança  ce  fait  qui  alors  ne  reçut  point  de  contradiction,  que  le  tuyau 
duTaret  est  formé  parcetteAnnelide,eten  est  constamment  babité. 
Mais  il  ne  fallait  qu’un  bien  petit  nombre  d’observations  pour  dé- 
truire les  assertions  de  Deslandes,  et  bientôt  elles  furent  assez  nom- 
breuses. Roussel,  Massuet  et  l’auteur  du  Muséum  Hoffmannianum, 
Léopold  Frisch,  publièrent,  sui  leTarel,  des  ouvrages  qui,  par 
un  singulier  concours,  parurent  dans  la  meme  année,  en  1723. 
Les  observations  contenues  dans  ces  ouvrages  ont  toutes  un  but 
commun,  celui  de  faire  connaître  le  Taret  dans  ses  diverses  par- 
ties et  sa  manière  de  vivre.  On  concevra  que  ces  ouvrages  du- 
rent élre  bien  accueillis,  puisqu’ils  furent  publiés  dans  le  temps  où 
l’on  venait  de  constater  les  dégâls  des  Tarets  dans  les  pilotis  des 
digues  des  Polders. 

Ces  ouvrages,  que  nous  venons  de  citer,  étaient  incomplets  sous 

T.  I.  A* 


5o 


DEUXIFME  FAMÏLIK. 


le  rapport  scientifique.  Les  personnes  qui  s’étalent  jusqu’alors  oc- 
cupées du  Taret,  lui  avaient  donné  le  nom  de  ver  de  mer,  de 
phaga;  mais  elles  n’avaient  point  reconnu  !a  nature  de  ce  ver 
et  ses  rapports  avec  d’autres  animaux  analogues.  Sellius  fut  le 
premier  qui  donna  un  traité  complet  sur  le  Taret.  Ce  livre,  plein 
d’érudition  , parut  en  1^53  , sous  le  titre  de  Ilisloria  naturalis  Te- 
rcdinis  seu  xilophagi  marîni.  L’auteur  a eu  le  mérite  , avant  Adan- 
son , de  déterminer  rigoureusement  la  nature  du  Taret  et  d’indi- 
quer, avec  justessé,  sa  place  dans  la  classe  des  Mollusques.  Les 
historiens  qui  se  sont  occupés  de  cette  matière,  ont  eu  le  tort  d’at- 
tribuer à Adanson  le  méiile  d’avoir,  le  premier,  déterminé  les 
rapports  des  Tarais.  Mais  le  mémoire  d’Adanson  ne  fut  publié 
qu’en  175g,  dans  les  mémoires  de  l’Académie,  six  ans  après  la 
publication  de  l’ouvrage  de  Selüus.  En  rétablissant  ainsi  les  faits, 
nous  sommes  loin  de  contester  au  travail  d’Adanson  son  importance  ; 
la  question  y est  plus  nettement  posée  et  résolue,  d’après  une  com- 
paraison plus  approfondie  des  divers  animaux.  On  retrouve,  dans 
le  Mémoire  d’Adanson,  la  netteté,  la  précision  qui  caractérisent 
la  plupart  de  ses  travaux.  Ce  mémoire  n’est  pas  le  seul  de  ses  ou- 
vrages où  il  ait  parlé  du  Taret.  Déjà,  en  1757  , dans  son  voyage 
au  Sénégal,  ce  naturaliste  avait  placé  le  Taret  dans  le  voisinage 
des  Pholades. 

En  nous  astreignant  à l’ordre  chronologique  rigoureux,  nous 
aurions  dû  déjà  mentionner  quelques-uns  des  travaux  de  Linné; 
mais  il  nous  a paru  plus  convenable  d’examiner , dans  leur  en- 
semble, les  opinions  du  célèbre  professeur  d'Upsal. 

Ce  n’est  pas  sans  raison  qu’Adanson  reproche  à l’auteur  du  Sys~ 
tema  natarœ^  sa  première  classification  du  Tarot.  On  trouve  en 
' effet,  dans  la  première  édition  du  Fauna  stwcica,  1746,  le  Taret 
compris  dans  le  genre  Dentale,  à titre  d’espèce  de  ce  genre < Ce  rap- 
prochement est  extraordinaire  de  la  part  de  Linné,  qui  connais- 
sait cependant  l’ouvrage  do  Sellius.  Mais  alors , il  ne  faisait  que 
répéter  ce  qu’il  avait  déjà  préparé  deux  années  auparavant,  dans 
la  quatrième  édition  du  Sfstcma  natum,  où  l’on  trouve,  p.  100 , 
parmi  les  Dentales,  le  Taret  et  l’Arrosoir.  Dans  les  éditions  sui- 
vantes, jusqu’à  la  dixième,  Linné  conserva  la  môme  opinion  sur 
les  Tarets.  Mais  alors,  plus  éclairé  par  le  mémoire  d’Adanson,  il 
introduisit  dans  sa  mélliode  un  genre  Taret,  dont  il  fixa  la  place 
à la  fin  des  vers  intesLinaux,  à la  suite  des  Sangsues  et  des  Mixi- 
nes  , avant  le  tort , malgré  les  observations  cl’Adanson  , de  consi- 


I,rs  PHOIADAÎRES. 


dorer  les  valves  comme  des  macJioiros.  Plus  lard,  tians  la  douzième 
édition  àa  Systema  naturcv , il  détacha  le  genre  Tarel  des  vers 
testinaux  et  le  transporta  dans  la  classe  des  Toslacés  sans  spire  ré- 
gulière, à la  suite  des  Patelles,  des  Dentales  et  tles  Serpules. 

A l’exemple  d’Adanson,  Guetlard,  dans  le  tome  3 de  ses  mé- 
moires divers  , a adopté  le  genre  Tarel,  auquel  il  donne  le  nom 
de  Tarier,  Mais,  abusé  sur  la  valeur  des  caractères  do  ce  genre , il 
no  pense  pas  qu’il  doive  se  rapprocher  des  Pholades,  et  le  con- 
serve parmi  les  Serpules  et  autres  tubes  tcstacés,  soit  vivans,  soit 
fossiles. 

Dans  le  tome  2 du  Journal  d’Histoire  naturelle  de  Copenhague, 
(1792),  Spengler  donna  un  mémoire  sur  les  Pholades  et  les  Ta- 
rots; il  adopta  entièrement  l’opinion  d'Adanson,  et  distingua 
parmi  les  Tarels  plusieurs  espèces  que  l’on  confondait  en  une 
seule.  Walch,  dans  Natiuforscher  , avait  fait  connaître  l’espèce 
singulière  à laquelle  Lamarck  donna  le  nom  de  Fistidana  gregala^ 
Spengler,  ne  se  laissant  point  séduire  par  les  apparences  exté- 
rieures, reconnut  le  premier,  dans  celte  espèce,  un  véritable 
Tarel  auquel  il  iirqxisa  le  nom  de  Teredo  nuclvorus.  Depuis  le  tra- 
vail de  Spengler,  tous  les  zoologistes,  à l’exception  des  imitateurs 
de  Linné,  adoptèrent  définitivement  l’opinion  d’Adaiison  ; et 
Bruguière  d’abord  , puis  Cuvier,  Lamarck,  donnèrent  chez  nous 
cet  exemple.  Depuis  cette  époque , le  genre  Tarel  n’a  subi  que  de 
faibles  modifications , soit  dans  sa  composition  , soit  tlans  ses  rap- 
ports.  Bruguière  admettait  encore  la  classe  des  Mullivaives  : les 
Tarets  s’y  trouvent  à côté  des  Pholades,  des  Oscabrions,  etc.  Cu- 
vier, dans  son  Tableau  élémentaire,  eut  le  mérite  de 'faire  dispa- 
raître de  la  méthode  celte  classification  artificielle , et  il  transporta 
les  divers  genres  des  Mullivaives,  là  où  les  appelaient  leurs  rap- 
ports naturels  ; et  c’est  ainsi  que  les  Tarets  et  les  Pholades  se  trou- 
vèrent placés  dans  la  classe  des  Mollusques  acéphalés.  Lamarck, 
qui  d’abord  , dans  son  premier  Essai  des  Mollusques , avait  adopté 
les  mullivaives  de  Bruguière  et  de  Linné,  se  réforma  bientôt 
après,  et  comprit  les  Pholades  et  les  Tarels  dans  ses  Mollusques 
acéphalés  conchyliferes;  mais  alors,  n’appréciant  pas  à leur  juste 
valeur  les  caractères  du  tube  des  Tarels,  et  considérant  ce  lu!)e, 
aussi  bien  que  celui  des  Fistulanes,  comme  une  valve  exagérée 
dans  son  développement,  il  fit  un  petit  groupe  de  ces  deux 
genres  que  nous  venons  de  mentionner.  Il  les  mit  au  commence- 
ment de  la  seconde  grande  division,  comprenant  toutes  les  co- 

4^ 


52 


DEUXIK.ME  FA3Ï1LLE. 


quilles  iuéquivalvos,  tandis  que  les  Pliolades  terminent.  la  pre- 
mière division  J contenant  les  coquilles  cquivalves.  M.  de  Roissy, 
dans  le  Bufion  de  Sonuini,  n’a  point  adopté  entièrement  la  der- 
nière classification  de  Lamarck  ; il  met  en  rapport  les  trois  genres 
Arrosoir,  Fislulane  et  Tarot,  et  les  sépare  des  Pholades  par  un 
petit  groupe  contenant  les  genres  Pelricole  et  Saxicave , dont  La- 
marck a fait  depuis  la  famille  des  Liihophages.  Lorsqu'on  1809 
Lamarck  publia  sa  Philosophie  zoologique,  il  proposa,  pour  la 
première  fois,  le  groupement  des  Mollusques  en  familles  natu- 
relles; et  revenant  à des  idées  qui  se  rapprochent  beaucoup  plus 
de  celles  d’Adanson , il  mit  les  Tarets,  ainsi  que  les  Pholades  , 
dans  sa  famille  des  Pholadaires.  Ces  rapports  restèrent  les  memes 
dans  le  livre  qu’il  donna  en  1811 , sous  le  titre  de  Cours  fait  au 
Muséum.  Celte  opinion,  que  Lamarck  conserva  pendant  long- 
temps, sur  le  rapport  des  Tarets,  fut  encore  modifiée  par  lui, 
lorsqu’il  publia  ses  Animaux  sans  vertèbres  ; il  partagea,  comme 
nous  l’avons  déjà  dit,  celle  famille  en  deux  parties,  dont  la  prin- 
cipale devint  pour  lui  la  famille  des  Tubicolés.  Les  Tarets  se  trou- 
vèrent entraînés  dans  cette  nouvelle  famille,  uniquement  parce 
qu’ils  ont  un  tube;  car,  si  Lamarck  eût  voulu  donner  à la  coquille 
et  à son  animal  , la  valeur  qu’ils  méritent  dans  l’appréciation  des 
rapports,  il  est  certain  qu’il  aurait  conservé  les  Tarets  à coté  des 
Pholades,  comme  nous  proposons  de  le  faire  aujourd’hui.  La- 
treille  a Lien  senti  que  les  Tarets  devaient  être  séparés  de  la  fa- 
mille des  Tubicolés  de  Lamarck  j mais,  au  lieu  de  les  réunir  aux 
Pholades,  comme  cela  paraissait  si  naturel,  il  en  fît  une  fa- 
mille à part,  sous  le  noui  de  Terediniles,  dans  laquelle  il  com- 
prend les  Tarets,  les  Teredines  et  les  Clavagelles.  M.  de  Blainville 
rendit  beaucoup  plus  naturels  les  rapports  des  Tarets , en  les  rap- 
prochant définitivement  des  Pholades,  dans  sa  famille  des  Ades- 
macés.  Nous  ne  ferons,  au  sujet  de  celte  famille  des  Adesmacés  de 
M.  de  Blainville,  que  deux  remarques:  la  première,  c’est  qu’il 
existait  déjà  la  famille  des  Pholades,  dont  Je  nom  eût  été  préfé- 
rable, à cause  de  son  antériorité;  la  seconde,  c’est  que,  sous  le 
nom  de  Fislulane,  M.  de  Blainville  introduit  un  genre  qui  n’est 
autre  chose  qu’un  dédoublement  inutile  du  genre  Taret  lui-mème  ; 
nous  disons  inutile , parce  qa’il  contient  la  Fislulane  en  paquet  de 
Lamarck,  laquelle,  comme  nous  l’avons  vu,  n’est  autre  chose 
qu’un  Taret.  Enfin  , pour  terminer  l’hisloire  de  ce  genre  curieux 
et  important,  nous  dirons  que  Cuvier,  dans  les  deux  dernières 


LKâ  l>H0L4ÜAiR£S.  53 

édiiious  du  Règne  animal , a compris  les  Tarets  dans  sa  famille  des 
Enfermées,  et  les  a rapprochés  des  Pholades. 

Le  Tarel  est  un  animal  allongé  et  vermiforme,  et  Ton  comprend 
que  des  zoologistes,  peu  habitués  à déterminer  les  rapports  d’a- 
près l’ensemble  des  organes,  ont  pu  être  trompés  sur  sa  nature- 
Nous  avons  vu,  en  traitant  l’anaiomie  générale  des  Mollusques, 
que  les  Mollusques  acéphalés  étaient  enveloppés  d’une  peau  for- 
mant deux  lobes,  à laquelle  on  a donné  le  nom  de  manteau. 
Ces  lobes,  souvent  désunis,  sont  quelquefois  réunis  dans  di- 
vers points  de  leur  étendue.  Dans  le  Taret,  ces  lobes  du  manteau 
se  soudent  intimement,  s’allongent  et  constituent  un  véritable 
tuyau  charnu , terminé  antérieurement  par  une  coquille  globu- 
leuse sur  le  bord  de  laquelle  ils  s’attachent , et  postérieurement  eu 
deux  petits  siphons  presque  égaux,  à la  base  desquels  s’insère  de 
chaque  côté,  à droite  et  à gauche,  une  paire  de  palettes  calcaires 
dont  la  forme  et  les  accidens  extérieurs  diffèrent  selon  les  espèces. 
La  coquille  globuleuse  dont  nous  avons  parlé,  est  formée  de  deux 
valves  qui , échancrées  largement  à leur  partie  antérieure,  laissent 
passer , par  cette  ouverture , un  pied  court  et  tronqué,  en  forme  de 
ventouse,  semblable  à celui  des  Pholades  et  des  Gaslrochènes. 
Lorsque  l’on  a détaché  l’animal  de  sa  coquille , lorsqu’on  i’a  sorti 
du  tube  calcaire  dans  lequel  il  est  contenu,  si  on  fend  le  manteau 
dans  toute  sa  longueur,  on  trouve,  pn  allant  d’avant  en  arrière, 
les  parties  suivantes  : Immédiatement  en  avant  du  pied  et  du 

repli  antérieur  du  manteau,  so  trouve  , dans  la  ligne  moyenne  , 
une  petite  fente  Iransverse,  garnie  d’une  lèvre  supérieure  et  d’une 
lèvre  inférieure  : c’est  là  l’ouverture  de  la  bouche.  2°  En  suivant 
les  lèvres  de  la  bouche  , on  les  voit  se  continuer  de  chaque  côté  du 
corps,  s’élargir  et  devenir  de  véritables  palpes  labiales,  adhé- 
rant, dans  presque  toute  leur  longueur  , aux  parties  latérales  du 
corps.  3”  Le  corps  est  très  court  ; il  est  formé  par  la  masse  des  vis- 
cères qui  consistent  en  un  foie,  un  ovaire,  dans  l’épaisseur  des- 
quels 011  trouve  un  estomac  médiocre  et  les  ciicouvoliuions  de 
l’intestin.  4°  ïl®  chaque  côté  de  l’extrémité  postérieure  du  corps, 
commencent  à paraîlie  les  feuillets  branchiaux  qui  forment  deux 
bandes  parallèles  fort  allongées,  que  ion  voit  s’étaler  dans  une 
grande  partie  de  la  longueur  du  tube  charnu  que  forme  le  man -, 
teau.  C’est  au  point  d’insertion  de  ces  branchies  sur  le  corps,  que 
se  trouve,  dans  la  ligue  médiane  et  dorsale,  le  cœur,  composé 
d’un  ventricule  et  de  deux  oreillettes  symétriques.  Le  ventricule 


su 


DEÜXIKMË  FAMILLK. 


est  traversé  par  le  rectum  qui , se  prolongeant  très  haut  devant  les 
branchies,  vient  so  terminer  à leur  extrémité  postérieure  en  une 
petite  ouverture  qui  est  celle  de  l'anus. 

D'après  ce  que  nous  vouons  de  rapporter,  il  est  évident  que  le 
Taret  ne  diffère  des  Pholadcs  que  par  l'allongement  considérable 
du  manteau,  dont  les  lobes  soudés  ont  la  forme  d’un  véritable 
tuyau.  Le  manteau  sécrète,  dans  presque  toutes  les  espèces^  im 
tuyau  calcaire  qui  le  garantit,  et  dans  lequel  l’animal  finit  quel- 
quefois par  se  clore  entièrement  à la  manière  des  Gastrochènes.  Ce 
tuyau  représente,  pour  nous,  les  pièces  dorsales  des  Pholadcs  qui, 
exagérées  et  réunies,  enveloppent  tout  l’animal  et  servent  à le 
protéger, 

La  coquille  des  Tarets  est  fort  singulière.  Elle  est  très  courte, 
très  bâillante  de  chaque  côté,  et  se  réduit  quelquefois  en  un  cercle 
osseux  destiné  à soutenir  les  parois  du  manteau.  Dans  le  plus  grand 
nombre  des  espèces,  les  valves  sont  sublrapézoïdes,  et  elles  res- 
semblent à la  partie  antérieure  d’une  Pbolade  bâillante,  que  l'on 
aurait  séparée  du  reste,  en  coupant  transversalement  la  coquille 
en  deux.  Les  valves  sont  réunies  à la  manière  de  celles  des  Pbo- 
lades;  elles  n'ont  point  de  charnière  articulée  et  point  de  liga- 
ment; mais  on  trouve  en  dedans,  en  partant  de  l’intérieur  des 
crochets,  un  petit  cuilleron  plus  ou  moins  long,  selon  les  es- 
pèces , et  tout-à-fait  semblable  , quant  à la  position  et  aux  usages, 
à celui  des  Pbolades.  Dans  la  plupart  des  espèces  , celle  coquille 
présente  un  sillon  médian  en  forme  de  ceinture,  vers  lequel  abou- 
tissent des  stries  , ordinairement  crépues  , très  fines  et  très  élé- 
gantes. 

L’animal  et  la  coquille,  que  nous  venons  de  décrire,  sont  con- 
tenus dans  un  tube  calcaire,  plus  ou  moins  épais,  qui  revêt  les 
2^arois  des  galeries  que  l’animal  se  creuse  dans  le  bois.  Ce  tube  cal- 
caire n’existe  pas  au  même  degré  d’épaisseur  dans  toutes  les  es- 
pèces, et  il  y en  a môme  quelques-unes  qui  en  sont  dépourvues,  ou 
chez  lesquelles  du  moins  il  est  seulement  membraneux.  Quand , par 
suite  de  la  désagi'égalion  complète  du  bois  dans  lequel  les  Tarets 
ont  vécu , on  parvient  â obtenir  des  tubes  entiers , ils  sont  toujours 
blancs,  épaissis  à l’extrémité  postérieure,  et  beaucoup  plus  minces  à 
l’extrémité  antérieure,  extrémité  occupée  par  la  coquille.  Presque 
toujours , les  tuyaux  des  Tarots  suivent  le  sens  dos  fibres  ligneuses, 
mais  l’animal  se  dévie  avec  la  plus  grande  facilité,  aussitôt  qu’il 
rencontre  un  obstacle,  Lorsque,  dans  leur  marche,  les  Tarets  se 


LES  l’UOLAliAÏREi;. 


00 


rencontrciUj  ils  ne  sc  corrodent  pas  les  uns  les  autres,  ils  se  con- 
tournent, et  quand  il  y en  a un  grand  nombre,  ils  s’enebevôtrent 
dans  plusieurs  sens  et  deviennent  très  iiréguïiers.  Lorsque  lesTa- 
rels  attaquent  des  portions  de  bois  dans  lesquelles  il  existe  des 
noeuds  ou  des  tronçons  de  branches,  ils  se  rencontrent  sous  des 
angles  différens,  et  il  devient  alors  presque  impossible  de  suivre 
leurs  galeries  et  de  reconnaître  la  manière  d*êlre  d’un  seul  indi- 
vidu. L’extrémité  postérieure  du  tube  commence  toujours  à la 
surface  extérieure  du  bois,  et  cette  extrémité,  ordinairement  un 
peu  saillante,  se  reconnaît  aux  deux  trous  dont  elle  est  perforée, 
de  la  même  manière  que  dans  les  Cloisonnaires.  C’est  par  ces  trous 
que  l’animal  fait  saillir  au-dehors  les  siphons  qui  le  terminent 
postérieurement.  Si,  dans  les  vieux  individus  du  Taret,  on  casse 
le  tube  à son  exirémité  postérieure,  ou  voit  que  le  trou  des  si- 
phons, d’abord  simple,  se  bifurque  absolument  de  la  même  ma- 
nière que  dans  les  Cloisonnaires,  et,  par  une  coupe  longitudinale, 
on  voit  que  cette  exirémité,  destinée  aux  siphons,  est  remplie  de 
cloisons  obliques  qui  résultent  de  l’accroissement  intérieur  de  cette 
extrémité  du  tube.  L’extrémité  antérieure  a les  bords  ordinaire- 
ment minces  et  tranebans;  elle  est  ouverte,  et  son  contour  est 
circulaire;  mais  il  arrive  souvent,  sans  que  cela  paraisse  dépendre 
de  l’âge , que  celte  extrémité  est  fermée  en  calotte  hémisphérique, 
ainsi  que  dans  les  Fislulanes,  et  c’est  un  tube  clos  de  cette  manière 
que  Lamarcka  nomme  Fistiilana  corniformis  Azx\s  sa  collection . Nous 
avions  cru  que  le  Taret  ne  se  fermait  que  lorsqu’il  était  parvenu  à 
tout  son  développement;  mais  dos  observations  ultérieures  nous 
ont  démontré  que,  dans  quelques  espèces,  l’animal  encore  jeune 
se  clôt  dans  son  tube.  Il  faut  dès-lors  admettre  aussi  qu’il  jouit  do 
la  propi'iélé  de  dissoudre  la  partie  de  son  tubcj  qui  gênerait  son 
développement. 

En  observant  la  manière  de  vivre  d’un  animal  comme  celui  que 
nous  venons  de  décrire,  on  s’esl  demandé  comment  il  parvenait 
à pénétrer  dans  les  bois  les  plus  durs  ; et  la  première  explication 
qui  s’est  présentée,  a été  de  supposer  que  l’animal  corrodait  le  bois 
avec  ses  valves,  de  la  même  manière  que  le  font  les  insectes  xilo- 
phages  avec  les  ïbrtes  mandibules  dont  ils  sont  armés.  Par  suite 
de  celte  première  comparaison  , on  a prétendu  que  les  Tarels  s’en- 
IbnçaieiU  dans  le  bois  pour  s’eu  nourrir,  llcstc  à savoir  maintenant 
si  ces  opinions  sont  justes  et  doivent  être  acceptées  sans  contrôle. 
Nous  lèrons  observer  d’abord  qite  les  valves  des  Tards,  dans  le 


56 


DEUXIÈME  famille. 


plus  grand  nombre  des  espèces,  sont  très  minces  et  très  fragiles, 
et , d’après  l’essai  que  nous  en  avons  fait , elles  sont  incapables  de 
résister  à i’e/Fort  nécessaire  pour  détacher  les  fibres  d’un  bois  dur 
comme  le  chêne,  par  exemple.  Dans  les  jeunes  comme  dans  les 
vieilles  coquilles  , se  montrent  toujours  bien  conservées  et  sans 
usure , ces  stries  fines  et  délicates  qui  disparaissent  sous  de  très 
faibles  froltemens.  On  a prétendu  que  l’ouverture  antérieure  de 
la  coquille  était  très  favorable  pour  user  le  bois  et  en  emporter  des 
fragmens,  comme  le  ferait  une  tarière  mise  en  mouvement.  Nous 
contestons  que  les  valves  soient  disposées  réellement  comme  on 
le  prétend , nous  croyons  même  que  leur  forme  est  très  défavo- 
rable à l’usage  qu’on  leur  suppose,  quand  on  pense  -surtout  que 
les  accroissemens  de  la  coquille  ont  lieu  continuellement  sur  ses 
bords,  quand  on  réfléchit  que  le  bâillement,  dont  il  est  ques- 
tion , est  constamment  rempli  par  le  pied  de  l’animal.  D’un  autre 
côté,  il  faudrait  que  l’animal  pût  faire  des  mouvemens  rapides 
de  torsion  sur  lui-même  pour  taroder  ; il  faudrait  de  plus  qu’il 
eût  un  point  d’appui  au  moyen  duquel  il  pût  pousser  sa  coquille 
en  avant  avec  une  force  assez  grande  pour  vaincre  l’obstacle 
qu’il  cberclie  constamment  à détruire.  Mais  ces  conditions  né- 
cessaires pour  taroder  n’existent  pas  dans  Je  Taret.  C’est  un  ani- 
mal mou,  dont  le  tuyau  est  diversement  contourné;  il  n’est  at- 
taché à ce  tuyau  que  par  son  extrémité  postérieure,  et  l’on  ne 
trouve , dans  son  manteau , ni  des  muscles,  ni  des  leviers  capables 
de  pousser  la  coquille  en  avant.  Enfid^  les  divers  contournemens 
du  tube  s’opposent  à ce  que  l’animal  puisse  taroder  par  des  mou-  • 
vemens  de  torsion  sur  lui-inôme.  Nous  sommes  donc  parfaitement 
convaincu  que  le  Taret  pénétre  dans  le  bois  par  un  tout  autre 
moyen  que  celui  que  l’on  suppose  et  qui  a servi  jusqu’à  présent  à 
expliquer  sa  manière  de  vivre.  Quels  moyens  un  animal  si  faible 
einploie-t-il  pour  vaincre  des  obstacles  si  puissans?  Nous  l’igno- 
rons .entièrement. 

Ou  a prétendu  aussi  que  le  Taret  rongeait  le  bois  pour  s’en 
nourrir.  Celte  assertion  u’est  pas  plus  soutenable  que  celle  que 
nous  venons  de  combattre.  Il  faut  se  souvenir  que  les  Tarets, 
comme  les  autres  Mollusques  acéphalés,  ont  la  bouche  entièrement 
nue  ; elle  est  constamment  dépourvue  d’une  partie  dure  quel- 
conque, propre  à broyer  une  matière  aussi  dure  que  le  bois, 
quand  même  la  coquille  serait  parvenue  à le  réduire  en  très  pe- 
tits fragmens.  Aussi,  ces  animaux  se  nourrissent-ils  uniquement, 


LES  rüOLADAlRES. 


67 

soit  des  animaux  microscopiques  contenus  dans  l’eau , soit  des  par- 
ticules résultant  de  la  décoiuposilion  des  animaux  et  des  végétaux, 
qui  s’y  trouvent  constamment  suspendues.  Toute  leur  organisa- 
tion est  préparée  pour  ce  genre  de  nourriture,  et  lorsqu’on  ouvre 
leur  estomac,  ce  sont  toujours  ces  détritus  qu’on  y découvre  et  non 
pas  ceux  du  bois  qu’ils  perforent.  D’ailleurs,  les  siphons  qui  ter- 
minent l’extrémité  postérieure  du  manteau,  ont  des  usages  bien  dé- 
terminés chez  les  Mollusques  qui  en  sont  pourvus,  et  leur  présence 
chez  les  Tarets  indique  assez  de  quelle  manière  ils  se  nour- 
rissent. 

Le  genre  Taret  se  rencontre  à l’état  vivant  dans  presque  toutes 
les  mers,  et  tout  nous  porte  à croire  que  ce  sont  des  espèces  diffé- 
rentes qui  habitent  les  diverses  contrées.  Comme  partout  ces  ani- 
maux ont  la  mémo  apparence,  les  naturalistes  voyageurs  ont  cru 
reconnaître  partout  notre  teredo  navalis y et,  trop  si\rs  de  l’avoir 
reconnu  , ils  ont  toujours  négligé  de  rapporter  ceux  qu’ils  ont  ren- 
contrés. Aussi  il  existe,  dans  la  synonymie  de  celte  espèce,  une  con- 
fusion qu’il  sera  difficile  de  faire  disparaître.  Bien  que  l’on  ne  cite 
encore  maintenant  qu’un  petit  nombre  d’espèces  vivantes  du  genre 
Taret,  nous  ne  doutons  pas  que  le  nombre  ne  s’en  augmente  con- 
sidérablement, lorsque  les  observations  seront  dirigées  vers  ce 
genre  intéressant,  II  est  à présumer  que  certaines  espèces  attaquent 
de  préférence  des  bois  d’une  nature  particulière;  il  serait  curieux  du 
moins  de  s’assurer  si  le  Teredo  clava  de  Linné  [Fislulana  gregata^ 
Lamk.)  est  le  seul  qui  chCsisse , pour  s’y  loger , des  fruits  à parois 
épaisses  et  dures  telles  que  les  cocos.  Celte  manière  de  vivre  de 
cette  espèce  a été  également  propre  à quelques  autres  que  l’on 
connaît  à l’état  fossile  seulement  et  que  l’on  rencontre  particulière- 
ment dans  les  terrains  tertiaires  de  la  Belgique. 

Les  Tarets  fossiles  sont  assez  rares.  Ils  so  trouvent  particulière- 
ment dans  les  bois  passés  à l’éiat  de  liguites  ou  qui,  complète- 
ment pourris,  ont  laissé  les  tubes  enchevêtrés  et  formant  des  pa- 
quets. On  trouve  également  des  Tarets  dans  ce  que  l’on  nomme 
vulgairement  du  bois  pétrifié,  c’est-à-dire  devenu  entièrement  si- 
liceux. Ces  bois  siliceux  à Tarets  se  rencontrent  quelquefois  dans 
les  alluvions  de  la  Seine  ; mais  nous  ignorons  absolument  s’ils  pro- 
viennent de  terrains  tertiaires  ou  de  terrains  plus  anciens.  On  a 
cm  pendant  quelque  temps , et  nous  avons  partagé  celte  croyance, 
que  les  Tarets  fossiles  ne  descendaient  pas  au-dessous  du  terrain 
tertiaire;  actuellement  nous  avons  la  preuve  acquise  qu’il  est  des 


58 


DEÜXIÈMÜ  VAMILLE. 


espaces  qui  descendent  dans  les  formations  crétacées,  et  qui  leur 
sont  propres.  Ce  fait  se  reproduit  aussi  bien  eu  Amérique  qu'en 
Europe , et  il  ne  permet  plus  le  moindre  doute.  Dans  ie  plus  grand 
nombre  des  espèces  fossiles , on  ouvre  inutilement  les  tubes  qui  pa- 
raissent les  plus  entiers,  on  n’y  trouve  jamais  la  moindre  trace  de 
la  petite  coquille  bivalve  qui  fait  partie  essentielle  duTaret.  Cette 
absence  de  la  coquille  paraît  si  constante,  que  plusieurs  personnes 
ont  supposé  que  cos  espèces  de  Tarels  étaient  naturellement  dé- 
pourvues d’une  coquille;  mais  il  nous  semble  que  c’est  se  hâter  de 
conclure  en  présence  d’un  trop  petit  nombre  d’observations.  Dans 
ces  Tarets  fossiles,  et  particulièrement  dans  ceux  de  Belgique,  on 
trouve  assez  fréquemment  dans  les  tubes,  les  palettes  calcaires 
attacbées  à l’extrémité  postérieure  de  l’animal  ; et  ces  palettes  ont, 
dans  ces  espèces,  des  caractères  tout  particuliers  : cc  sont  de  petites 
cupules  infondibuliformes,  un  peu  comprimées  latéralement,  ou- 
vertes du  coté  évasé , terminées  au  centre  par  un  pédicule,  et  ces 
petits  entonnoirs  sont  insérés  les  uns  dans  les  autres,  au  nombre  de 
douze  ou  quinze  pour  chaque  palette. 

D’après  ce  que  nous  venons  d’exposer  sur  le  genre  Taret,  il  est 
facile  maintenant  d’apprécier  ses  rapports  naturels,  et  de  le  classer 
d’une  manière  convenable  dans  la  méthode.  Ses  analogies  nom- 
breusesavec  lesPhoIades  sont  déjà  manifestes  ; mais  elles  ressortiront 
bien  plus  encore  lorsque  nous  atn’ons  examiné  les  Teredines  et  les 
coquilles  du  genre  Pholade , qui  ont  aussi  la  propriété  de  perforer 
le  bois.  Parmi  ces  coquilles,  il  en  est  une  qui,  par  sa  forme,  a 
beaucoup  d’analogie  avec  les  Tarets;  et  M.  Soiverby,  dans  son 
Généra  of  sheîlsy  a cru  uécessaii*e  de  faire,  avec  elle,  un  genre 
particulier,  sous  le  nom  de  XHophaga,  Pour  plusieurs  raisons, 
nous  croyons  ce  genre  inutile  : parce  que,  s'il  a la  propriété  de  per- 
cer le  bois  et  d’y  creuser  des  galeries  assez  longues  sans  sécréter  de 
tube , il  y a de  véritables  Tarets  qui  sont  dans  le  même  cas;  si,  au 
contraire,  les  caractères  du  genre  sont  pris  dans  la  forme  particu- 
lière de  la  coquille , nous  trouvons  en  elle  tous  les  caractèi’es  d’une 
véritable  Pholade  à valves  très  courtes,  de  forme  globuleuse,  mais 
ayant  les  crochets  garnisà  l’extérieur  de  deux  pelilespièceseu  forme 
d’écusson  ; aussi,  selon  nous , le  genre  dont  il  est  question  doit-il 
être  placé,  comme  section,  parmi  les  Pbolades  qui  percent  le  bois. 

Nombre  des  espèces  : 

6 vivantes. 
i4  fossiles. 


LKS  rUOLADAIUKS. 


59 

Ces  nombres  d’espèces  sont  loin  d’ètrc  défiaitifs.  Nous  n’avons 
pu  malheureusement  examiner  la  plupart  de  celles  que  nous  comp- 
tons, et  parmi  les  fossiles,  nous  ajoutons  celles  figurées  dans  l’ou- 
vrage de  Burtin. 

Les  Tarets  fossiles  se  rencontrent  particulièrement  dans  les  ter- 
rains tertiaires.  II  y en  a quelques-uns  cependant  dans  les  terrains 
crétacés,  et  nous  n’en  connaissons  aucun  exemple  authentique  dans 
les  terrains  Jurassiques. 

Nous  connaissons  une  espèce  dans  la  craie  inférieure  de  la  Cham- 
pagne (terrain  néocomien). 

Nous  en  connaissons  une  autre  dans  les  terrains  crétacés  supé- 
rieurs de  Maestrich. 

Il  y en  a deux  espèces  dans  les  craies  inférieures  de  TAmérique. 

Nous  eh  connaissons  actuellement  deux  propres  aux  terrains  ter- 
tiaires de  Paris , dont  l’un  , Teredo  Burlini , se  trouve  aussi  dans  les 
terrains  du  même  âge  de  la  Belgique.  Il  y en  a au  moins  cinq  es- 
pèces avec  le  précédent  dans  les  terrains  tertiaires  de  Belgique, 
appartenant  à Pépoque  parisienne. 

Enfin,  nous  pouvons  citer  aussi  une  espèce  qui  est  très  proba- 
blement le  Teredo  namlis^  dans  le  terrain  tertiaire  d’Italie.  Il  en' 
existe  une  qui  est  probablement  la  même  que  la  précédente , dans 
le  crag  d’Angleterre. 

Nous  connaissons  encore  deux  espèces  trouvées  dans  des  bois 
fossiles  recueillis  dans  les  alluvions  de  la  Seine. 

Parmi  ces  espèces,  nous  signalerons  particulièrement  les  deux 
suivantes  : 

Taret  commun.  — Teredo  navalis.  Lin.  Vivant  dans  les  mers 
d'Europe;  et  fossile  en  Italie,  en  Sicile,  en  Morée  et  pro- 
bablement dans  le  crag  d’Angleterre. 

Taret  de  Burtin.  — Teredo  Burtini,  Desh.  Fossile  dans  le  ter- 
rain tertiaire  inférieur  de  la  Belgique , et  aux  environs  de 
Paris. 

ESPÈCES. 

Taret  commun.  Teredo  namlis,  pi.  3.  f.  i à g. 

T*  tubo  ieretîuscuîof  irregularîter  contorto  ^ solldo,  aîbo ; palmulis  sîmplîci^ 
bus,  supernètruncatis.  Tesid  suhgîobtdosâf  hiantissimd , dtnsîssîmè 
nuissîmeque  serrât  O'Strîatd. 

Valisuieri.  Hisl.  nal.  t,  a.  pl.  4. 


6o 


DEUXIÈME  EABIILLE. 


Massuet.  Recherch.  intér.  sur  les  vers  à tuyau,  pl.  i.  f.  r.  2. 

Friscli.  Mus.  Hoffmanniauum.’pl.  i.  pl.  2,  f.  9.  pl.  3,  f.  19.  ao.  pl.  4,  f.  a.  5.  6. 
Sellius.  Hisl.  cat.  Teredînis,  pl.  i,  f.  1.  5.  pl.  2.  f.  i.  2,  3.  5.  6.  Teredo 
navalis, 

Denlalinm,  Liuné.  Fauna  suec,  i®  édit.p,  38o.  n®  1829. 

An  eadem  specics?  Adanson  Descript.  d’une  nouv.  espèce  de  ver  observée  au 
Sénégal.  Mém.  de  l'acad.  1 759.  pl.  9.  f.  1,  7. 

Le  Taret,  Adans.  “Voyage  au  Sénégal,  p,  263.  pl.  19.  f.  i, 

Teredo  navalîs,  Lînu»  Sysl.  nat,  10®  édit.  p.  65i,  u°  2, 

Id,  Syst  nat,  12®  éd.  p.  1167,  n®  807.  * 

Gueltard.  Mém.  divers,  t.  2.  pl.  69.  f.  4.  5. 

TcrdiA?  d’Acosla.  Eril.  Conch.  p.  ar. 

Pholas  teredo,  Mull.  Prodr.  n®  3o34- 

Pholas  teredo.  Fabricius.  Fauna  groenlendica,  p,  427.  n®  426. 

Schrœl,  Einl.  t.  2,  p,  57a, 

Teredo  navaîis,  Kammerer.  CaR.  de  Rudolslat,  p,  6.  pl.  i. 

Teredo  navnlis.Kâvsleo.  Mus.  Leskeanum,  t.  i.  p,  3o8, 

Teredo  batavus,  Spengl.  Mém.  de  la  soc,  d’kist,  nat,  de  Copenh.  p.  io3* 
n®  14.  pl.  2.  f.  7. 

Penu.  Prit,  Zool.  n®  4.  p.  367. 

Teredo  jiavalïs.  Omel.  Syst.  nat.  p.  3747*  n i,  Teredo  utriculus.  Guiel. 
loc.  cit.  n®  2, 

An  eadem  spec.?  Encycl,  mélh.  pl.  167.  f.  r.  2.  Copiée  d'Adanson, 

Teredo  'vulgarh,  Lamk.  Syst.  des  an.  s.  v.  p.  128. 

Teredo  navalis  de  Roissy.  Biiff.  inoll,  t.  6.  p.  459.  pl.  432.  f,  5. 

Mont.  Test,  brit.  p.  527. 

Donov.  t.  5,  pl,  145. 

Dorset.  Catal.  p.  60.  pl.  18,  f.  21. 

Teredo  navalis.  Burow,  p.  166.  pl.  aa,  f,  4, 

Dillvv.  Cal,  l.  2.  p.  10S9,  n°  2. 

Teredo  utriculus,  Ibid,  n®  3. 

Brook.  Intr.  of  Coneb.  p.  143. 

Teredo  navalîs.  Lamk.  au.  s.  v«  t.  5.  p.  44u.  n®  x, 

Blainv.  Malac.  p.  679.  pl,  8x.  f.  6. 

Gervîl.  Cat.  des  coq,  de  la  Manche,  p,  55, 

Pay.  Cat.  des  moll,  de  la  Corse,  p.  26.  n®  3o. 

Schum.  Essai  d’une  classificalion.  p.  94* 

Delle  Cliiaje.  Mém.  sur  les  an.  s.  v.  du  royaume  de  Naples,  t.  4»  P-  32, 
pl.  54.  f.  6.  7.  8. 

Blainv,  Dict.  des  sc.  ual.  t.  Sa.  p,  267, 

. <r' 


LES  PflOI.ADAlRES. 


6l 

Mfiuke.  Syn*  iHÛll».  moll.  p.  12a. 

Desh.  Encycl.  méth.  vers  t.  3.  p,  roo3,  n°  r, 

Pliil.  Eniim.  inoll.  Sic.p.  2,  11°  i. 

Seacchi.  Cal.  Conchyl,  regni  neap.  p.  S . 

Guérin.  Icon.  ilu  régn.  an.  moll.  pl.  33.  f.  2.  Copiée  de  M.  de  Blaiuville. 

Sow.  Généra  of  shells.  Teredo,  f.  7, 

Fossiîis,  Teredo  navalis,  Broccli.  Conch.  foss.  subap.  p.  2oq, 

Sow,  Min,  Conch.  pl.  102.  f.  5.  6.  7.  ? 

Habile  les  mers  d’Europe;  fossile  en  Italie  d’après  Brocchî,  cl  dans  le  crag 
d’Angleterre  d’après  Sowerby. 

Nous  douDons  ici  une  synonymie  très  étendue  du  Teredo  navalis 
de  Linné,  ou  plutôt  nous  restituons  à Selliiis  l’origine  scienlifîque 
du  Taret  commun,  en  rangeant,  sous  celte  dénomination,  tout 
ce  qui,  dans  les  auteurs,  nous  paraît  avoir  quelque  chose  d’ana- 
logue. Linné,  comme  nous  l’avons  vu,  plaça  d’abord  les  Tarels 
parmi  les  Dentales;  plus  tard,  il  adoptai  le  genre;  mais  en  admet- 
tant l’espèce  de  Sellius  dans  sa  nomenclature,  il  la  caractérisa  d’une 
manière  si  vague  et  si  incertaine,  qu’il  ne  serait  pas  étonnant  que 
plusieurs  espèces  fussent  confondues  sous  le  nom  de  Teredo  navalis. 
Nous  pouvons  même  ajouter  que  les  auteurs,  qui  ont  eu  occasion 
de  traiter  du  genre  Taret,  auraient  pu  rapporter  successivement 
toutes  les  espèces  au  Teredo  navalis ^ et,  en  suivant  les  principes 
que  nous  nous  sommes  imposés  pour  la  nomenclature , nous  au- 
rions définitivement  rejeté  l’espèce  linnéenne , si  nous  n’avions  été 
guidé  par  l’ouvrage  de  Sellius,  contemporain  de  ceux  de  Linné. 
En  conséquence  de  ce  que  nous  venons  de  dire,  nous  prendrons , 
pour  type  du  Teredo  navalis^  l’espèce  décrite  par  Sellius.  Nous 
supposons  que  le  Taret  qu’Adanson  a décrit , dans  son  Histoire  na- 
turelle du  Sénégal,  ainsi  que  dans  les  Mémoires  de  l’Académie  des 
sciences,  doit  constituer  une  espèce  différente  de  celle  de  Sellius. 
Cependant,  comme  nous  n’avons  pas  eu  occasion  d’examiner  cette 
espèce  du  Sénégal , nous  suivrons , à cet  égard  , l’opinion  commune 
des  conchyliologisles  qiu  la  rapportent  au  Teredo  navalis.  On 
trouve,  dans  l’ouvrage  de  Kammerer,  la  figure  d’un  groupe  assez 
considérable  de  tubes  de  Tarets;  Gmelin  a cru  devoir  faire  de 
celle  figure  une  espèce  distincte  du  Teredo  navalis.  H lui  a donné 
le  nom  de  Teredo  utriculus.  Spengler,  dont  les  travaux  sur  les  co- 
quilles sont  si  remarquables,  fit  un  travail  sur  les  Tarets,  dans  le- 
quel il  reconnut  distinctement  quatre  espèces,  en  employant,  comme 
caractère  distinctif,  les  palettes  qui  servent  à fermer  l’extrémité 


62  B.ErxrèMr.  famiixf. 

postérieure  du  tube^  mais,  n\'iyant  point  de  fjuide  assuré  pour  re- 
connaître l’espèce  linnéenne,  il  imposa  son  nom  à un  Taret  dont 
les  pièces  operculaires  sont  subarlicidées  ; et  il  a donné  le  nom  de 
Teredo  hatavus , à l’espèce  de  Massuel  et  de  Sellius,  espèce  que 
nous  prenons,  avec  plus  de  raison  que  Spengler,  pour  type  du 
Teredo  navalis.  Nous  n’avons  pu  vérifier  si  les  Tarets  cités  par  di- 
vers auteurs  appartiennent  réellement  à l’espèce  de  Linné  ou  à 
celle  de  Spengler.  II  est  bien  à présumer  qu’en  faisant  les  cata- 
logues des  espèces  de  localités  différentes  , on  aura  inscrit , sous  un 
nom  commun,  des  choses  que  l’oii  distinguerait  si  elles  pouvaient 
être  réunies  et  comparées  soigneusement. 

Le  Teredo  navalis  se  renferme  dans  un  tube  calcaire  assez  mince, 
diversement  contourné , selon  les  accidens  du  bois  qu’il  perfore,  ou 
selon  le  plus  ou  moins  grand  nombre  d’individus  qui  s’accumulent 
dans  un  espace  rétréci.  Le  tube  se  boursoufle  fréquemment,  de- 
vient très  irrégulier,  comme  dans  la  figure  de  Kammerer,  lorsque 
les  Tarets  sont  amoncelés  dans  un  môme  moixieau  de  bois.  En  vieil- 
lissant, l’extrémité  postérieure  du  tube  s’épaissit , et  la  partie  , des- 
tinée à recevoir  les  siphons,  se  divise  en  deux  par  une  cloison  mé- 
diane. Les  palettes  ont  assez  la  forme  de  raquette  ; leur  extrémité 
élargie  est  subquadrangulairc,  tronquée  en  avant,  et  quelquefois 
un  peu  creusée  sur  ce  bord , ce  qui  rend  les  angles  plus  aigus  et. 
plus  saillans.  La  coquille  est  de  laüle  médiocre.  Lorsque  les  valves 
sont  réunies,  elle  est  arrondie  et  à-peu-près  de  la  grosseur  d’un 
pois.  Celle  coquille  offre,  à la  partie  antérieure,  un  très  large 
bâillement,  les  valves  étant  écbancrées  de  ce  côté  très  profondé- 
ment, et  cette  échancrure  formant  un  angle  presque  droit.  La  sur- 
face extérieure  se  distingue  en  deux  parties  : l’une  postérieure, 
très  courte , est  lisse  ; l’autre  est  chargée  de  sli’ies  très  fines,  d’une 
admirable  régularité,  très  finement  crénelées,  et  suivant  exacte- 
ment le  contours  de  l’ouverture.  Le  bord  cardinal  est  comme  rongé, 
aplati,  et  il  est  dépourvu  de  bi  callosité  que  l’on  trouve  sur  les 
Pbolades,  ainsi  que  des  pièces  accessoires  qui  caractérisent  ce  der- 
nier genre.  Dans  l’intérieur  des  valves  s’élève  un  cuilleron  très 
grand,  aplati,  fort  étroit  et  pointu  à son  extrémité  libre.  Ce  cuil- 
leron est  légèrement  contourné  dans  sa  longueur,  et  il  est  plus 
grand  en  proportion  que  celui  des  Pbolades.  Le  tube  de  celte  es- 
pèce a quelquefois  plus  de  deux  décimètres  de  longueur. 


LES  PHOLAOAIRES. 


63 


GENRE  SIXIÈME. 

TXBXBINE.  Têredùia.  (Lanik.) 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES-  — Animal  jnconnu. 

Coquille  globuleuse , équivalve , rc%ulière,  a crochets  sail- 
lans  couverts  par  une  pièce  dorsale  ( écusson  ) , ovalaire , mé- 
diane; point  de  ligament;  des  cuillerons  épais  dans  les  cro- 
chets. Cette  coquille  extérieure  fixée  à l’extrémité  d’un  tube 
conique , ouvert  postérieurement. 

OBSERVATIONS.  — Lauiarck  avait  d’abord  compris  le  genre  qui 
va  nous  occuper  parmi  les  Fistulanes,  lorsqu’en  1806,  il  com- 
mença à publier  ses  mémoires  sur  les  Fossiles  des  environs  de  Pa- 
ris. Ce  ne  fut  qu’en  1818,  dans  le  tome  v de  ses  Animaux  sans 
vertèbres,  qu’il  pensa  à créer,  pour  le  Fistulana  personata,  un 
genre  particulier  auquel  il  donna  le  nom  de  Teredine.  Il  l’intro- 
duisit naturellement  dans  sa  famille  des  Tubicolés,  ou  il  est  dans 
des  rapports  naturels,  entre  les  Cloisonnaircs  et  les  Tarets.  De- 
puis cette  époque,  ce  genre  a été  généralement  adopté,  et  il  a en 
effet  des  caractères  assez  importans  pour  être  conservé  dans  une 
bonne  méthode.  Les  premiers  auteurs  qui  se  sont  occupés  de  ce 
genre,  et  M.  Férussac  d’abord,  l’ont  maintenu  dans  la  famille 
des  Tubicolés;  M.  de  Blainvillo,  dans  son  Traité  de  Malacologie, 
est  le  premier  qui  l’en  ait  tiré  pour  le  joindre  aux  Pholades  et  aux 
Tarets,  dans  sa  famille  des  Adesmacés.  Bientôt  après,  dans  le  Dic- 
tionnaire classique , nous  avons  fait  voir  que  ce  genre  avait  d’a- 
bord plus  de  rapports  avec  les  Tarets  qu’avec  les  Gastrochènes,  et 
dès-lors , nous  l’avons  rangé  dans  la  famille  à laquelle  nous  avons 
conservé  le  nom  de  Pholadaire.  Convaincu  des  rapports  de  cette 
coquille  avec  les  Tarets,  M.  Sowerby , dans  le  Minerai  conchology^ 
proposa  de  réunir  le  Fistuîana  personata  aux  Tarets  proprement 
dits,  et  nous  pensons  que  cet  auteur  a changé  d’opinion , puisque 
nous  trouvons  le  genre  Teredine  dans  le  Généra  oj  skeîîs  qu'il 
publie. 

La  coquille  des  Teredines  est  certainement  une  des  plus  singu- 
lières que  Ton  puisse  imaginer.  Elle  est,  comme  les  Tarets,  formée 
de  deux  parties  ; un  tube  calcaire  à l’extrémité  antérieure  duquel 


DKUXli^ir  F.4;«ÏU:E. 


64 

est  soudée  et  inlimement  unie,  clans  une  position  tout-à-fait  im- 
mobile , une  coquille  bivalve,  régulière  et  symétrique , semblable 
à celle  des  Tarels,  mais  portant  sur  les  crochets  un  écusson  assez 
large,  seinblable  à celui  de  certaines  Pliolades.  Ainsi,  la  Teredine 
offre  cette  combinaison  remarquable  des  caractères  propres  aux 
Tarets  et  aux  Pholades.  Lorsque  Ton  examine  attentivement  une 
Teredine  d’un  certain  volume  , on  est  surpris  do  lui  trouver  une 
épaisseur  aussi  considérable,  et  de  voir  que  la  cavité  que  l’animal 
a dû  habiter  en  dernier  lieu  , était  devenue  très  petite  et  fort  irré- 
gulière. Dans  ces  individus,  nous  avions  remarqué  que  le  tôt  est 
formé  de  couches  concentriques,  k stries  rayonnantes,  comme  si 
elles  eussent  été  le  résultat  d’une  cristallisation.  Ces  observations 
nous  avaient  Fait  poser  la  question  suivante  : les  Teredines  étaient- 
elles,  pendant  la  vie  de  l’animal,  dans  l’état  où  nous  les  voyons, 
et  les  valves  avaient-elles  l’immobilité  qu’elles  ont  actuellement. 
Nous  nous  adi'essions  cette  question , pensant  que  des  infiltrations 
calcaires,  faites  pendant  la  fossilisation,  avaient  pénétré  dans  le 
tube,  sous  forme  de  couches  concentriques,  et  que  c’étaient  ces 
couches  qui  avaient  rendu  la  coquille  immobile  à l’extrémité  du 
tube.  Mais  il  restait  une  explication  fort  embarrassante,  relative- 
ment à la  présence  constante,  dans  tous  les  individus,  de  ces  cou- 
ches d’infiltration;  et  bientôt  nous  eûmes  occasion  de  faire  des  ob- 
servations qui  nous  éclairèrent  entièrement  au  sujet  du  genre  Te- 
redine. Déjà  plusieurs  fois,  on  avait  représenté  des  individus  de 
Teredines,  terminés  postérieurement  par  une  portion  de  tube  d’un 
calcaire  noirâtre  et  subcorné;  nous  pensions  d’abord  que  quelque 
marchand,  industrieux  à se  créer  des  objets  rares  pour  son  com- 
merce, avait  eu  l’art  de  joindre  deux  corps  qui  n’avaient  d’autres 
rapports  que  ceux  que  l’industrie  mettait  momentanément  entre 
eux;  mais,  après  avoir  visité  Courlagnon , et  examiné,  avec  toute 
l’attention  qu’elle  mérite,  l’intéressante  et  précieuse  collection  de 
M.  Arnoud  de  Châlons,  nous  avons  reconnu  que  cette  extrémité 
noirâtre  et  subcornée  était  bien  celle  des  individus  entiers  de  la 
Teredine;  nous  avons  reconnu  aussi,  dans  des  individus  mutilés, 
comment  les  couches  de  la  portion  blanche , de  la  Teredine,  vien- 
nent s’intercaler  entre  celles  de  la  portion  subcornée.  Enfin , après 
l’étude  de  divers  fragmens  du  tube  de  la  Cloisonnaîre  formé  , 
comme  nous  l’avons  dit,  d’un  tôt  à stries  rayonnantes,  très  épais 
et  souvent  très  irrégulier,  nous  avons  été  convaincu  que  le  tube  de 
la  Teredine  n’avait  subi  d’autre  altération  que  celle  résultant  de 


LES  PaOT.AnATEF-S. 


Gfî 

Ja  fossîlisaûon.  A cos  observations,  nous  en  ajouterons  encore  une 
qui  n’est  point  sans  inlérôl  : nous  avons  observé,  dans  la  collection 
de  M.  Arnoud,  une  valve  de  Teredine  très  jeune,  et  cette  valve 
est  libre , isolée  et  sans  aucune  connexion  , avec  un  tube  quelcon- 
que; mais,  ce  qui  nous  a surtout  surpris,  c’crt  que  celle  valve, 
pour  sa  forme  et  ses  caraci(:res,  a la  plus  grande  ressemblance  avec 
celle  du  Xilophaga  dorsalis  de  M.  Sowerbj.  La  coquille  bivalve, 
fixée  à rextrémité  du  tube , a , comme  on  le  voit,  une  certaine  res- 
semblance avec  celles  des-PhoIades  et  des  Tarels.  On  voit,  par  les 
stries  fines  et  subgranuleases  de  la  surface , que , pendant  une  épo- 
que de  la  vie  de  l’aniiual,  celle  coquille  était  très  baillante  anté-- 
rieurement,  mais  que,  plus  tard,  cet  espace  a été  rempli  par  l’a- 
nimal, comme  cela  a lieu  aussi  dans  un  asstz  grand  nombre  de 
Plioîades.  Les  valves  ont  des  crochets  prolubérans,  opposés,  sub- 
cordiformes;  elles  ont  une  petite  duplicaiure  postérieuic  sur  la- 
quelle vient  s’insérer  une  pièce  subquadrangulaire,  plus  ou  moins 
régulière  , et  qui  n’est  autre  chose  que  fécusson  postérieur  des 
Pholades,  La  coquille  était  aussi  très  bâillante  postérieurement, 
mais  tous  les  intervalles  ont  été  remplis,  et  ses  contours  soudés 
sur  l’extrémité  antérieure  du  tube.  Dans  cette  mémo  coquille, 
nous  avons  trouve  un  bord  cardinal  arrondi  et  semblable  à celui 
des  Pholades  ; nous  y avons  également  vu,  partant  de  rintérieur 
du  crochet,  un  petit  ciiilleron  étroit  et  recourbé,  semblable  à ce- 
lui des  Tarels  et  des  Pholades.  Lorsque  l’on  casse  une  Teredine 
vers  la  coquille,  on  voit,  malgré  répaississement  considérable  de 
toutes  Jes  parties,  les  deux  petits  cuillcrons  recourbés  l’un  vers 
l’autre,  mais  souvent  épaissis  et  mamelonnés  par  plusieurs  couches 
calcaires  qui  la  revêtent.  Le  tube  des  Teredines  est  en  proportion 
plus  gros  et  beaucoup  plus  court  que  celui  des  Tarels,  Lorsqu’il 
est  entier,  son  extrémité  postérieure  est  terminée,  comme  nous  le 
disions,  par  une  portion  d’un  brun  corné.  Cette  portion  est  ou- 
verte par  un  trou  arrondi  qui  est  presque  toujours  simple,  mais 
qui,  chez  certains  individus,  offre  une  disposition  toute  particu- 
lière. On  y voit  en  effet  six  crêtes  longitudinales,  saillantes,  très 
aigues,  espacées  avec  une  extrême  régularité,  et  divisant  le  con- 
tour en  six  arceaux  réguliers,  sous-divisés  ensuite  par  une  petite 
crête  médiane  qui  règne  dans  le  fond  de  chacun  d’eux.  Cette  dis- 
position ne  ressemble  en  rien  à ce  qui  est  déjà  connu  des  genres 
des  deux  familles  qui  comprenueut  les  mollusques  Tubicoles. 

Les  Teredines  ne  sont  connues  qu’à  i’élat  fossile.  On  en  a observé 

T.  I.  5* 


66  DErSIKME  FAMUXE. 

une  dans  les  terrains  de  craie  inférieure  de  Saint-Paul-Trois-C bâ- 
teaux J il  y en  a une  autre,  plus  généralement  répandue  dans  ]es 
collections,  qui  est  propre  aux  terrains  tertiaires  do  Paris.  Celte 
dernière  avait  l’habitude  de  s’enfoncer  dans  le  bois  à la  manière 
des  Tarots  : aussi,  c’est  dans  les  terrains  à lignites  des  environs 
d’Epernay  et  de  la  montagne  de  Reims  qu’on  la  rencontre  le 
plus  habituellement.  Nous  avons  eu  dans  les  mains  des  morceaux 
de  bois  fossiles  pétris  de  Teredines  tellement  pressées  les  unes  contre 
les  autres,  qu’il  ne  restait  plus  entre  elles  le  moindre  intervalle  , et 
néanmoins , on  apercevait  sur  elles  des  restes  évidens  de  la  trame 
fibreuse  du  bois  qu’elles  avaient  perforé. 

Nombre  des  espèces  : 

2 fossiles. 

1 de  la  craie  inférieure  de  Saint-Paul-Trois-Cliâteaux,  dé- 
partement de  la  Drôme. 

I du  terrain  tertiaire  de  Paris. 

ESPÈCES. 

Teredine  masquée.  Teredina  personata.  pl.  2.  f.  ii.  12.  i3, 

r.  iestâ  glohosâ  y terccHnem  simulante  ^ posticè  scntatdy  undijvè  clausâ  et 
insertd  in  extremitate  tuhi  teretiuscuU;  tuba  posticè  attenuato  exopevto; 
üperlurâ  tuhi  subcornedy  aliquando  simplicij  aliqumdo  carinis  angustis 
et  acutisy  regularibas  obstructd. 

Fistulana  perso/iata,  Laoik,  Aun.dumus.  t,  7.  p,  429.  n®  4*  et  t.  12^  pl.  43. 
f.  6.  7. 

Teredo  ante  nautœ.  Sow,  Min,  Concli,  pl.  102.  f.  3. 

Besli.  Coq.  foss.  de  Paris,  t.  i.  p.  18.  n®  i.  pl,  i,  f.  23.  26.  28. 

Id,  Eucycl.  méth.  vers.  l.  3.  p.  io3i,  n®  i. 

Lamk.  Ao.  s.  v.  t.  5.  p.  438.  n®  i, 

Blaiiiv.  Malac.  pl.  81.  f.  5. 

Sow.  Gen.  of  sliells.  Teredina,  i,  i à 4* 

Desh.  Lamk.  An  s.  v,  2®  éd.  t.  6.  p.  34.  n*  t. 

Habite...,,  Fossile  dans  les  terrains  tertiaires  de  Paris,  aux  environs  de 
Reims  et  d’Epernay. 

Coquille  fort  singulière  et  qu’il  est  à peine  nécessaire  que  nous 
décrivions , puisque  c’est  elle  qui  nous  a servi  à la  description  du 
genre.  Elle  est  la  seule,  jusqu’à  présent,  que  l’on  cite  avec  certi- 
tude dans  les  lenains  tertiaires;  car,  nous  avons  de  très  fortes  rai- 


LES  FHOLADAIRES. 


67 

sons  de  croire  que  le  Teredina  hacillum  de  Laraarck,  emprunté  à 
Brocchi,  n*est  qu’une  Clavagelle  découronnée  et  dont  les  valves 
sont  restées  engagées  a l’exlrémilé  du  tube.  Nous  avons  mentionné 
ce  fait  très  curieux  d’une  valve  de  cette  Teredine  encore  jeune, 
trouvée  tout-à-fait  isolée  par  M.  Arnoud  qui,  habitant  Châlons  , 
non  loin  de  la  localité  où  les  Teredines  sont  le  plus  abondantes,  a 
recueilli  une  suite  considérable  de  variétés  de  celte  espèce.  Une 
autre  personne  de  Châlons,  M.  Drouay,  connu  déjà  par  un 
grand  nombre  de  communications  géologiques  intéressantes,  a re- 
cueilli la  plus  grande  Teredine  que  nous  ayons  vue;  elle  a 127  mil- 
limètres de  longueur,  c’est-à-dire  4 pouces  8 lignes,  et  27  millimè- 
tres de  diamètre  au  sommet. 


GENRE  SEPTIÈME. 

PHOXiABE.  Pholas  (Linné). 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES.  — Animal  conîque , subcylin- 
dracé  , à corps  épais,  les  lobes  du  manteau  réunis,  si  ce  n’est 
antérieurement,  pour  le  passage  d’un  pied  court,  large  et 
tronqué;  un  petit  lobe  palléal  dorsal  ; les  deux  siphons  réu- 
nis dans  toutê  leur  longueur,  palpes  labiales  allongées,  étroites 
et  pointues  , branchies  très  inégales. 

Coquille  obronde,  ovale  ou  allongée,  mince,  équl valve,  très 
inéquilalérale,  très  bâillante,  des  callosités  sur  les  crochets 
et  couvertes  par  une  ou  plusieurs  pièces  testacées  dorsales.  Un 
cuilleron  dans  les  crochets  , point  de  ligament , remplacé  par 
des  expansions  du  manteau. 

SYNONYMIE  GÉNÉRIQUE. — Pholas?  titkenœus?  Coucha  longa} 
Rondelet.  — Donax  swe  dacty'lus  mas;  Belon.  — Pholas; 
Lister.  — Balanus  et  Üaetylus;  Bonanni.  — Baille;  Réauinur. 
— Pholas;  Linné  et  tous,  les  auteurs  modernes. 

Le  mot  générique  de  Pholade,  appliqué  par  Lister  et  par  Linné 
à un  genre  parli-^-ulier  de  Mollusques  bivalves,  a une  origine  beau- 
coup plus  ancienne.  En  effet,  les  Grecs  avaient  un  adjectif  cooXaç 
qui  signifie  qui  se  cache , qui  habite  dans  les  trous  ou  les  cavernes  , 


G8 


DEIÎXIKME  PAMILLK. 


et  un  substantif, pour  désigner  une  caverne,  un  trou,  un 
antre.  Aussi,  chez  les  anciens,  le  nom  de  9o>.a;  était  appliqué  in- 
distinctement a tous  les  animaux  qui  se  cachent  dans  les  trous  ou 
les  cavci’ues;  mais  aucun  coquillage  u’est  mentionné  particulière- 
ment par  eux  sous  cette  dénomination.  Alhenæus  nous  paraît 
être  le  seul  qui,  en  parlant  d’une  coquille  qui  perce  les  pierres, 
et  d’un  goût  agréable,  l’ait  indiquée  sous  le  nom  de  Pholas  ; mais 
il  est  bien  à croire  que  cette  coquille  d’Alhénée  n’est  aiilre  que  la 
Modioh  Uthopiwgc  des  auteurs  modernes.  Les  premiers  auteurs 
qui  écrivirent  sur  l’histoire  naturelle  au  renouvellement  des  let- 
tres, employèrent  le  mot  Pholas,  mais  ne  furent  pas  toujours  d’ac- 
cord sur  son  application.  C’est  ainsi  que  Rondelet , dans  son  Traité 
des  poissons  , appelle  Pholas  les  Modioles  lilhophages,  et  Coucha 
longa  les  véritables  Pholades.  Aldrovande,  dans  son  Traité  des  ani- 
maux à sang  blanc,  adopte  sans  changement  l’opinion  de  Rondelet, 
tandis  que  Bélon , sans  que  nous  puissions  en  deviner  Je  motif, 
donne  le  nom  de  Pholas  Tiwx  Patelles,  et  préfère  le  mot  de  Donax 
^we  Daclflus  mas  pour  les  Pholades  proprement  dites.  Gesner  re- 
vient à l’opinion  de  Rondelet  qui,  à celte  époque,  paraît  l’empor- 
ter sur  celle  des  autres  naturalistes.  Cette  nomenclature  de  Ronde- 
let et  do  Gesner  subsista  jusqu'au  moment  où  Lister,  par  les  tra- 
vaux considérables  de  conchyliologie  qu’il  publia,  imprima  à cette 
science  une  nouvelle  direction  et  la  rendit  plus  facile  et  plus  ra- 
tionnelle, par  la  manièi'e  dont  il  la  présenta.  Lister  fut  le  premier 
qui  imposa  aux  coquilles  qui  nous  occupent  le  nom  qu’elles  por- 
tent encore  aujourd’hui.  Il  les  distingua  et  en  forma  un  groupe 
très  naturel  dans  l’ouvrage  qu’il  publia  sous  le  titre  de  Synopsis 
conchyllorunij  en  1681.  Peu  de  temps  après  Bonanni,  dans  ses  deux 
ouvrages  sur  la  conchyliologie,  proposa  le  nom  de  Balanus  pour 
les  Pholades,  et  il  croit  que  celui  de  Dactylus  leur  conviendrait 
également.  Bonanni,  qui  aimait  à se  livrer  à l’observation,  avait 
déjà  fait  des  remarques  intéressantes  sur  l’habitude  qu’ont  la  plu- 
part des  Pholades,  de  s’enfoncer , soit  dans  la  pierre,  soit  dans  les 
argiles  durcies,  et  d’y  être  enfermées  sans  en  pouvoir  sortir.  Réau- 
mur,  dont  les  immenses  travaux  l’ont  rendu  l’un  des  meilleurs  ob- 
servateurs des  temps  modernes,  s’appliqua,  pendant  quelque  temps, 
à l’élude  des  mœurs  des  Pholades,  et  publia  en  1712  , sur  ce  sujet 
intéressant,  un  mémoire  que  l’on  trouve  parmi  ceux  de  l’Académie, 
Dans  ce  mémoire,  Réauniur  ne  considère  les  Pholades  que  dans  le 
but  d’expliquer  la  nature  du  mouvement  au  moyen  duquel  elles 


LKS  FHOLADA.IRES. 


69 

pénètrent,  soit  dans  les  couches  d’argile,  soit  dans  celles  de  cal- 
caire. Réaumur  se  figurait  que  les  Pholades,  auxquelles  il  donne 
le  nom  de  Daille,  ne  pouvaient  creuser  les  trous  dans  lesquels  elles  se 
trouvent,  que  pendant  la  mollesse  de  la  matière  qui,  durcie  par 
la  suite,  ne  leur  permettait  plus  de  s’échapper  de  la  prison  qu’elles 
s’étaient  faite.  Il  rapporte  une  expérience  qui  vient  à l’appui  de 
son  opinion.  Ayant  placé  une  Pholade  , extraite  de  son  trou  , sur 
une  boue  argileuse  un  peu  épaisse,  il  la  vit  bientôt  s’enfoncer  et 
disparaître;  mais  il  nous  semble  que  ce  fait  ne  prouve  pas  d’uno 
manière  assez  satisfaisante  que  les  Pholades  ne  peuvent  s’enfoncer 
que  dans  les  matières  molles.  Si  quelques  espèces  cherchent  des 
matières  de  peu  do  consistance  pour  s’y  loger,  il  y en  a d’autres 
qui  criblent  de  leurs  trous  les  calcaires  les  plus  durs. 

Dans  son  voyage  au  Sénégal,  Adanson  consacre  un  genre  Pho- 
lade, et  il  le  place  dans  les  conques  muUivales,  k côté  desTaretsi 
Il  rapporte  deux  espèces  dans  son  genre  pholade  : à une  il  donne  le 
nom  de  Juland,  à l’autre  celui  de  Tiigon.  Cette  dernière  espèce 
n’est  point  une  Pholade;  elle  avoisine  les  Myes,  et  Lamarck  en  a 
fait  une  Analine.  Nous  aurons  occasion  d’en  parler  plus  lard. 

Il  est  à présumer  que  Liuué  comprenait  les  Pholades  dans  sa 
section  des  Concha,  dans  la  première  édition  du  Fauna  sitecica. 
Nous  voyons  en  effet  plus  lard , dans  la  quatrième  édition  du  Sfs- 
tema  natarœ , apparaître  le  genre  Pholas  h côté  dés  Moules  et  des 
Solens,  dans  le  môme  groupe  que  les  Conques.  Ce  qui  a droit  de 
nous  étonner , c’est  que , dans  la  septième  édition  du  Systema 
turœ J Linné  ne  mentionna  plus  le  genre  Pholas;  nous  le  retrou- 
vons dans  la  dixième,  faisant  le  commencement  des  coquilles  bi- 
valves. Ce  genre  resta  dans  les  mêmes  rapports,  dans  le  muséum 
de  la  princesse  Ulricque,  tandis  que,  dans  la  douzième  édition  du 
Systema  naturœ ^ il  fut  compris  dans  la  section  des  Mnltivalves. 
Schrœter,  Gmeiin,  Dill-wyn,  et  beaucoup  d’autres  auteurs,  adop- 
tèrent, comme  nous  l’avons  vu,  cet  arrangement  de  Linné;  et 
c’est  à Cuvier , ainsi  qu’a  Lamarck,  comme  nous  l’avons  déjà  dit 
aussi , que  l’on  est  redevable  de  la  réforme  de  ce  groupe  peu  natu- 
rel des  Mullivalves  de  Linné.  Olivi  lui-même,  qui  eut  occasion  de 
faire  sur  ces  animaux  des  observations  intéressantes,  adopta  pour 
eux  la  classification  de  Linné.  Dans  sa  Zoologie  adriatique,  il  pré- 
tend avoir  vu  des  morceaux  de  lave,  long-temps  plongés  dans  la 
mer,  perforés  par  des  Pholades  et  d’autres  animaux  lilhophages. 
Mais  cette  observation  est  aujourd’hui  contestée,  parce  qu’elle  éta> 


BLÜX1ÈM£  FAMILLE. 


70 

bÜrait  une  exception  unique  à une  règle  jusqu’à  présent  inva- 
riable : c’est  (pic  ïcs  Mollusques  peiroralcurs  ne  pénètrent  jamais 
que  clans  les  substances  calcaires  ou  argilo-calcaires.  On  est  aujour- 
d’hui d’autant  plus  convaincu  de  l’universalité  de  ce  fait,  que  l’on 
sait  que  ce  n’est  pas  par  le  frottement  de  la  coquille  contre  les  pa- 
rois du  trou,  que  ce  trou  s’agrandit,  mais  que  sa  cavité  est  aug- 
mentée au  moyen  d’une  sécrétion  de  l’animal,  sécrétion  pro- 
bablement acide,  mais  dont  la  nature  n’est  pas  parfaitement 
connue. 

Jusqu’au  moment  où  Poli  publia  son  grand  ouvrage  sur  les  Mol- 
lusques des  mers  de  Sicile,  on  ne  connaissait  pas  d’une  manière 
complète  l’organisation  des  Pholades  : leur  coquille  seule  avait  été 
étudiée.  Poli  donna  une  excellente  anatomie  de  l’animal , et  ce 
travail  est  assez  parfait,  puisque,  depuis  lors,  l’observation  n’a 
presque  rien  eu  à y ajouter.  Il  est  bien  à présumer  que  ce  travail 
de  Poli  a été  d’un  grand  secours  à Cuvier,  pour  réformer , 
comme  il  l'a  fait,  la  classe  indigeste  des  Multivalves  et  reporter  les 
pholades  parmi  les  Acéphales  testacés. 

Nous  avons  vu,  en  Iraiiaut  de  la  famille  des  Pholadaires , les 
changemens  peu  nombreux  qu’a  subis  le  genre  Pholade  depuis  la 
publication,  en  1798,  du  Tableau  élémentaire  de  Zoologie,  par 
Cuvier.  Tous  les  auteurs  sont  d’accord  sur  ce  genre,  non-seule- 
ment pour  ce  qu’il  doit  renfermer,  mais  encore  pour  la  place  qu’il 
doit  occuper  dans  la  série. 

Les  Pholades  sont  des  animaux  assez  voisins  des  Tarets  par  leur 
organisation.  Ces  deux  genres  diffèrent  surtout  par  les  proportions 
dans  le  développement  du  manteau.  L’animal  des  Pholades  est  cla- 
viforme,  quelquefois  siibcyliadracé,  et  il  se  termine  postérieure- 
ment en  un  long  tuyau  charnu,  subcylindracé,  dans  lequel  sont 
réunis  les  deux  siphons  sous  une  môme  enveloppe.  Les  lobes  du 
manteau,  minces  et  transparens  dans  une  grande  partie  de  leur 
étendue,  s’épaississent  au  bord  inférieur  et  antérieur,  et  se  sou- 
dent dans  presque  toute  leur  longueur,  ne  laissant  qu’une  petite 
ouverture  ovalaire  à la  partie  antérieure , pour  le  passage  du  pied. 
Ce  manteau  se  continue  postérieurement  pour  former  les  deux  si- 
phons dont  nous  avons  pavié,  et  l’on  remarque,  dans  son  épais- 
seur, deux  muscles  plats  et  en  éventail,  destinés  à retirer  les  si- 
phons vers  l’intérieur  de  la  coquille.  Ces  muscles  s’attachent  sur  la 
surface  interne  de  la  coquille,  et  y laissent  des  impressions  dont 
nous  parlerons  plus  lard.  Si  l’on  vient  à fendre  le  manteau , de 


LES  PaOLADAlRliS. 


71 


manière  à en  détacher  les  lobes  en  coirpant  leur  commissure,  on 
aperçoit  les  parties  suivantes  en  allant  d’avant  en  arrière.  Entre  la 
masse  abdominale  et  l’insertion  de^  lobes  du  manteau,  sous  une 
espece  de  capuchon  formé  par  lui , se  remarque , dans  la  ligne  mé- 
diane, une  ouverture  transverse  ; cest  celle  de  la  bouche.  Elle  est 
pourvue  de  deux  lèvres  minces  qui  se  continuent  à droite  et  à 
gauche  en  une  paire  de  palpes  labiales  allongées , lancéolées  et 
soudées  dans  une  partie  de  leur  longueur  sur  les  parties  latérales 
du  corps.  La  masse  abdominale  est  assez  grosse  j elle  est  surmontée, 
à son  extrémité  antérieure,  d’un  pied  court,  large  et  tronqué, 
ayant  un  peu  la  forme  d’une  ventouse  de  Céphalopode.  De  chaque 
côté  de  la  niasse  abdominale,  se  trouve  une  paire  de  feuillets  bran- 
chiaux. Immédiatement  au-dessous  de  la  masse  abdominale,  les 
branchies  du  coté  droit  se  soudent  a celles  du  côté  gauche,  dans 
une  petite  portion  de  leur  longueur,  se  détachent  ensuite,  pour 
se  continuer  dans  l’intérieur  du  siphon  branchial.  C’est  vers  l’ex- 
trémité postérieure  du  corps  que  Ton  remarque  un  muscle  très 
puissant,  transvei'se,  qui  sert  a rapprocher  les  valves  de  la  co- 
quille. Outre  ce  muscle  postérieur,  il  en  existe  encore  un  autre  à 
la  partie  antérieure  j mais  ses  fibres  ^ très  courtes,  s’insèrent  sur 
quelques  points  du  bord  cardinal  et  y laissent  des  impressions 
qu’on  aperçoit  facilement  dans  quelques  espèces.  Outre  ces  diverses 
parties , il  en  existe  une  autre  toul-à-fait  propre  au  genre  Pho- 
lade,  et  qui  consiste  en  un  appendice  plus  ou  moins  grand  du 
manteau,  qui,  de  l’extrémité  antérieure,  so  réfléchit  sur  le  dos, 
couvre  les  callosités  des  crochets  et  sécrète  une  pièce  postérieure  à 
laquelle  on  est  convenu  de  donner  le  nom  d’écusson.  Si  l’on  veut 
pénétrer  plus  avant  dans  l’organisation  des  Pholades,  on  voit  que 
la  cavité  buccale  aboutît,  par  un  œsophage  gros  et  court,  à un  es- 
tomac en  forme  d’ampoule  entièrement  enveloppé  par  le  foie,  et 
dans  lequel  la  bile  pénètre  par  un  petit  nombre  de  cryptes  bi- 
liaires qui  en  percent  les  parois.  C’est  de  la  paroi  supérieure  de 
l’estomac  , et  au-dessus  de  sa  grande  courbure  , que  l’intestin  prend 
naissance.  Cet  intestin,  cylindrique  et  grêle,  forme  plusieurs 
grandes  circonvolutions  dans  l’épaisseur  du  foie.  Après  ces  circon- 
volutions, l’inlesiin  se  dirige  vers  la  ligne  médiane  et  dorsale;  il 
est  embrassé  par  le  ventricule  qu’il  traverse  , passe  derrière  le 
muscle  adducteur  postérieur,  et  se  termine  presque  immédiate- 
ment en  un  anus  flottant  entre  les  branchies.  Le  foie  est  assez  con- 
sidérable ; il  constitue  à lui  seul  presque  toute  la  masse  abdomi- 


72 


DEUXIEME  K.i?I!LLE. 


«ale;  J’ovaîro  lui  est  accolé,  et  ce  dernier  oi'Qaiie  ne  prend  un 
grand  développement  qu’au  moment  de  ia  ponte. 

Comme  dans  tous  les  mollusques  de  la  mémo  classe,  le  cœur  est 
parfailemeiit  symétrique  ; il  est  placé  sur  le  dos,  dans  la  ligne  mé- 
diane, et  il  est  composé  d’un  ventricule  assez  large  et  de  deux 
oreillettes  aplaties,  triangulaires,  qui  s’ouvrent  dans  les  feuillets 
Lrancinaux  dont  elles  semblent  la  continuation. 

Le  système  nerveux  est  assez  considérable  : un  ganglion  anté- 
rieur est  placé  au-dessus  de  la  bouche,  il  fournit  des  rameaux 
fins  et  nombreux  aux  palpes  labiales  ; il  donne  aussi  des  branches 
viscérales  parmi  lesquelles  une  de  chaque  côté  du  corps  descend 
vers  le  muscle  adducteur  postérieur,  et  vient  coopérer  à la  forma- 
tion du  ganglion  nerveux  postérieur.  Celui-ci  est  beaucoup  plus 
considérable,  il  envoie  des  branches  au  cœur,  aux  branchies,  au 
manteau.  Les  filets  du  manteau  sc  divisent  eux-memes  : les  uns  se 
portent  vers  la  commissure,  les  autres  dans  les  siphons. 

Le  système  musculaire  des  Pholades  peut  être  divisé  en  deux 
parties  bien  distinctes  : les  muscles  adducteurs  des  valves,  les  mus- 
cles propres  du  pied,  et  enfin  deux  muscles  particuliers  pour  le 
mouvement  des  diverses  parties  du  manteau.  Nous  avons  parlé  des 
muscles  adducteurs.  Ceux  du  pied  consistent  en  deux  petits  fais- 
ceaux, dont  une  partie  s’insère  sur  les  ciiillerons,  et  l’autre  dans 
la  profondeur  des  crochets.  De  ce  point  d’insertion  , ces  fibres  mus- 
culaires vont  en  s’épanouissant  sur  la  surface  de  la  masse  abdomi- 
nale , lui  forment  une  enveloppe  solide , entre  les  fibres  de  laquelle 
viennent  s’insérer  celles  du  muscle  propre  du  pied.  Les  fibres  qui 
s’insèrent  sur  les  cuillerons,  traversent  la  masse  abdominale,  et 
contribuent  à consolider  les.  divei's  organes  dont  elle  est  composée. 
Tout  le  boi'd  antérieur  du  manteau,  toute  la  masse  des  siphons, 
sont  formés  de  muscles  à fibres  courtes  , et  qui  servent  à l’allonge- 
ment ou  à la  contraction  de  ces  parties.  Les  siphons  surtout  qui , 
lorsqu’ils  sont  contractés,  sont  courts  et  très  épais,  sont  suscepti- 
bles d’un  allongement  très  considérable  pendant  la  vie  de  l’animal, 
et  c’est  alors  que  les  parois  s’amincissent,  et  que  les  fibres  muscu- 
laires semblent  glisser  les  unes  sur  les  autres,  pour  fournir  à l’al- 
longement considérable  dont  ces  parties  sont  susceptibles.  Dans  la 
plupart  des  espèces,  la  coquille  étant  brûllanle,  diverses  parties  de 
l’animal  restent  à découvert,  mais  elles  sont  revêtues  d’un  épi- 
derme assez  solide^  subcorné,  coriace,  qui  s’insère  sur  la  coquille 
elle-même , et  se  prolonge  sur  toutes  les  parties  dénudées  de  l’ani- 


L£S  rBOLÀDAlUES. 


7^ 

mal*  Il  est  un  certain  nombre  d’espèces  aussi  qui  présentent  un 
autre  phénomène  dont  il  est  nécessaire  de  parler,  parce  qu’on  pour- 
rait commettre  des  erreurs  s’il  n’ciait  pas  suftisarament  connu.  On 
observe,  dans  la  plupart  de  ces  espèces,  une  troncature  antérieure 
à laquelle  correspond  un  bâillement  considérable  de  la  coquille. 
Celte  troncature  et  ce  bâillement  persistent  dans  tous  les  âges; 
mais  il  arrive  dans  d’autres,  qu’après  avoir  été  bâillant  jusqu’à 
un  certain  point  d'accroissement,  l’animal  se  modifie  et  continue 
la  sécrétion  de  sa  coquille  en  faisant  cesser  la  troncature.  Aussi, 
l’on  voit  les  stries  d’accroissement  prendre  une  nouvelle  direction 
et  le  bâillement  de  la  coquille  semble  fermé  par  une  pièce  de 
rapport. 

Presque  toutes  les  Pholades  ont  une  coquille  mince , blanche  et 
diaphane;  presque  toutes  sont  allongées,  ovalaires,  très  bombées 
et  subcylindracées.  Les  valves  d’une  même  coquille  ne  se  louchent 
quelquefois  que  par  un  petit  nombre  de  points  de  leur  circonfé- 
rence, étant  largement  bâillantes  du  côté  antérieur  et  du  côté  pos- 
térieur. Quelques-unes  cependant  sont  parfaitement  closes  à tous 
les  âges,  et  leurs  valves,  plus  rapprochées,  sont  fermées  à la  ma- 
nière de  celles  des  autres  concbifères.  Toutes  les  Pholades  sont 
équivalves , et  presque  toutes  très  inéquilalérales;  elles  sont  pres- 
que toujours  ornées,  à l’extérieur,  de  côtes  rayonnantes,  qui  sont 
plus  particulièrement  placées  sur  la  partie  antérieure,  la  posté- 
rieure restant  constamment  lisse  ou  presque  lisse.  Les  crochets  sont 
très  protubérans;  ils  sont  roulés  vers  l’intérieur  et  saillans  au- 
dessus  de  la  cavité  interne  des  valves.  Ces  crochets  sont  garnis,  à 
Textérieur,  de  singulières  callosités  que  l’on  ne  rencontre  dans  au- 
cun autre  genre.  Ces  callosités  sont  fermées  par  une  lame  cal- 
caire qui  s’étale  en  dehors  et  se  trouve  soutenue  par  des  petites 
voûtes  qui  vont  en  rayonnant  du  sommet  à la  circonférence.  Cette 
lame  et  les  arceaux  qui  la  soutiennent , sont  sécrétés  par  cet  ap- 
pendice supérieur  du  manteau  dont  nous  avons  parlé , et  qui  se 
renverse,  comme  nous  l’avons  dit  aussi,  sur  le  dos  de  la  coquille 
et  couvre  ses  callosités.  Celle  portion  charnue  est  garnie , sur  son 
bord  libre,  de  petits  appendices  quadrangulaires  qui  s’enfoncent, 
en  forme  de  crochets,  dans  l’intérieur  des  arceaux  de  la  callosité. 
C’est  pour  couvrir  celle  portion  du  manteau,  que  se  trouvent  au- 
dessus  d’elle  et  sécrétées  par  sa  surface  supérieure , une  ou  deux 
pièces  symétriques,  calcaires  j quelquefois  subcornées,  auxquelles 
on  est  convenu  de  donner  le  nom  d’écusson.  Lorsque  l’animal  çst 


DlUXlisJE  FAMILLE. 


74 

mort,  cette  pièce  se  détache  facilement  du  reste  de  la  coquille,  et 
l’on  voit  que  sa  surface  interne  est  lisse , tandis  que  sa  surface  ex- 
térieure présente  des  stries  d’accroissement  qui  lui  sont  propres. 
Outre  celte  première  pièce  des  Pholades,  on  en  trouve  une  se- 
conde dans  un  certain  nombre  d’espèces.  Celle-ci  s’étend  sur  le  dos 
de  la  coquille , et  sert  à fermer  l’intervalle  qui  sépare  les  deux 
valves  dans  la  ligne  dorsale  et  médiane.  Ces  pièces  reçoivent  des 
modifications  assez  notables,  suivant  les  espèces  ou  on  les  observe. 
Quelquefois  très  petit,  l’écusson  se  développe  peu-à-peu  et  finit 
par  embrasser,  sous  la  forme  d’une  grande  calotte,  toute  la  partie 
supérieure  et  auléricure  des  valves.  Quelquefois,  il  se  prolonge 
aussi  du  coté  postérieur,  remplace  la  seconde  pièce  postérieure 
dont  nous  avons  parlé,  cl  finit  par  s’emboîter  sur  toute  la  longueur 
du  dos  de  la  coquille.  Dans  ces  espèces  à longs  écussons , et  même 
dans  quelques-unes  dont  l’écusson  est  d’une  médiocre  étendue,  on 
voit  les  callosités  cardinales  se  prolonger  postérieurement  en  pe- 
tits crochets,  lesquels  s’engagent  au-dessous  de  petites  lames  rele- 
vées au  centre  de  l’écusson,  de  sorte  que,  par  ce  mécanisme,  l’é- 
cusson reste  attaché  à la  coquille  , même  après  la  mort  de  l’animal. 
Il  est  d’autres  espèces  chez  lesquelles  l’écusson  a une  forme  très  singu- 
lière. C’est  particulièrement  dans  le  Pholas  orientalis  et  dans  le  PAo- 
îas  clausa  que  l’on  remarque  cette  disposition.  Dans  ces  espèces,  la 
callosité  cardinale  , au  lieu  de  s’étaler  sur  les  crochets  et  de  s’y  at- 
tacher, se  relève  à son  extrémité  postérieure  , et  c’est  à celte  ex- 
trémité que  se  trouvent  deux  pièces  en  petit  capuchon,  et  qui 
semblent  destinées  a accrocher  les  valves  rune  à l’autre.  La  partie 
du  bord  dorsal  , que  l’on  pourrait  nommer  bord  cardinal , ne  res- 
semble pas  à celui  que  l’on  voit  dans  les  autres  Mollusques  con- 
chiféres.  On  n’y  observe  aucune  trace  de  dent  cardinale  j une  sur- 
face inégale  et  calleuse  se  remarque  au  point  de  contact  des  deux 
valves  qui,  comme  il  n’existe  aucune  trace  de  ligament,  ne  sont 
mainloDues  en  contact  qu’au  moyen  des  muscles  de  l’animal,  et 
qui  se  séparent  aussitôt  que  cet  animal  en  a été  retiré.  Si  l’on  exa- 
mine leur  intérieur,  on  les  trouve  lisses,  polies,  et  l’on  voit  à la 
partie  antérieure  des  callosités , quelques  petites  impressions  qui 
sont  celles  du  muscle  adducteur  antérieur.  Une  autre  impression 
beaucoup  plus  grande,  ovale,  arrondie,  se  montre  vers  le  bord 
dorsal , à-peu-près  au  tiers  postérieur  de  la  coquille.  Celle  impres- 
sion est  celle  du  muscle  adducteur  postérieur.  C’est  de  l’extrémité 
inférieure  et  antérieure  de  cette  impression  musculaire  que  l’on 


LES  rHOLADAlRES. 


7^ 

voit  partir  une  ligne  remontant  assez  haut  dans  rintérieur  des 
valves  , se  recourbant  ensuite  pour  se  diriger  en  arrière  et  en  bas. 
Cette  ligne,  à laquelle  on  est  convenu  de  donner  le  nom  de  sinus 
palléal  postérieur,  est  le  résultat  de  l’insertion  du  muscle  rétrac- 
leur  des  siphons. 

L’un  des  caractères  les  plus  particuliers  des  coquilles' de  la  fa- 
mille des  Phoiadaires,  consiste  en  ce  que,  chez  toutes,  on  trouve 
dans  la  cavité  des  crochets  un  appendice  osseux  parlant  du  sommet 
du  crochet  lui-méme,  et  auquel  on  donne  le  nom  de  cuilleron. 
Constant  dans  sa  position , ce  cuilleron  ne  l’est  pas  autant  dans  sa 
forme.  Dans  certaines  espèces , il  est  subcylindracé  et  presque  égal 
en  diamètre  à ses  deux  extrémités.  Dans  d’autres,  l’extrémité  libre 
s'aplatit  et  s’amincit  ; elle  s’élargit  successivement  et  prend  la 
forme  d’un  véritable  cuilleron  , à la  surface  duquel  on  aperçoit  des 
stries  d’accroissement.  Ce  cuilleron  s’enfonçe,  comme  nous  l’avons 
dit,  dans  l’épaisseur  de  la  masse  viscérale  de  l’animal;  il  est  revêtu 
d’une  duplicalure  du  manteau  qui  pénètre  avec  lui , et  nous  avons 
vu  qu’il  sert  à donner  attache  à des  fibres  musculaires  qui  soutien- 
nent les  organes  digestifs  avant  de  se  rendre  au  pied.  Nous  avons 
dit  ailleurs,  en  traitant  de  la  théorie  de  la  charnière,  ce  que  nous 
pensions  de  ces  appendices  des  Pholades , et  comment  nous  pou- 
vions les  rattacher  aux  dents  cardinales  des  coquilles  qui  en  sont 
pourvues , par  une  succession  de  modifications.  Enfin , pour  termi- 
ner ce  qui  a rapport  à la  coquille  des  Pholades,  nous  devons  ajou- 
ter qu’il  existe,  dans  quelques  espèces,  des  pièces  de  rapport  sou- 
dées à l’extrémité  postérieure  des  valves  et  qui  sont  tantôt  ongui- 
formes,  comme  dans  le  Pkolas  clausa,  tantôt  infundibuliformes, 
comme  dans  le  Phoîas papyracea.  En  apercevant  ces  modifications 
si  notables  des  pièces  des  Pholades,  nous  concevons  comment 
toutes,  exagérées,  soudées  çnlre  elles,  elles  ont  enfin  pris  la  forme 
du  tube  du  Taret , et  sont  ainsi , d’accessoires  qu’elles  étaient , de- 
venues la  partie  principale  de  l’enveloppe  générale  de  l’animal. 
Ceci  n’est  point  seulement  une  théorie  destinée  à rendre  compte  de 
la  présence  du  tube  des  Tarets.  On  voit  te  tube  se  former  par  de- 
grés, C'est  ainsi,  par  exemple,  qu’en  prolongeant  les  appendices 
postérieurs  du  Phoîas  papyracea ^ on  a le  tube  des  Teredines,  et 
qu’il  suffit  ensuite  d’ajouter  aux  Teredines  , l’énorme  écusson  de 
quelques  espèces  de  Pholades  pour  avoir  le  tube  complet  desTarets. 

Comme  nous  l’avons  dit,  les  Pholades  sont  perforantes  et  s'éta- 
blissent tantôt  dans  les  argiles  durcies,  tantôt  dans  les  calcaires 


DEUXIÈME  FAMILLE. 


76 

plus  OU  moins  durs.  Quelques  espèces,  comme  certains  Gastro- 
chênes,  se  font,  en  vieillissant,  un  commencement  de  tube  qui 
revêt  la  partie  postérieure  de  la  cavité  qu’elles  habitent.  Lorsque 
nous  traiterons  de  la  famille  des  Lilhophages , nous  examinerons 
d’une  manière  générale,  la  propriété  dont  jouissent  certains  mol- 
lusques de  perforer  les  pierres,  et  nous  verrons  qu’il  n’est  plus  pos- 
sible d’admettre  l’opinion,  jusqu’ici  reçue  parmi  les  zoologistes, 
que  ces  animaux  perforent  les  corps  durs  par  le  frottement  long- 
temps continué  de  leurs  valves.  Lorsque  l’on  recueille  des  Pho- 
lades  pendant  la  nuit , on  les  voit  répandre  une  lumière  phospho- 
rescente assez  intense,  et  si  on  les  mange  dans  l’obscurité , la  bou- 
che paraît  en  feu.  Ces  animaux  ne  sont  pas  les  seuls  mollusques 
qui  jouissent  de  cette  propriété;  nous  la  ferons  remarquer  chez 
d’autres  appartenant  à différentes  familles. 

On  trouve  assez  fréquemment,  dans  les  couches  de  la  terre , des 
traces  évidentes  de  la  présence  des  Pholades  qui  ont  habité  les  an- 
ciennes mers  au  fond  desquelles  ces  couches  ont  été  déposées.  Les 
géologues  ont  attaché  une  assez  grande  importance  à ces  traces  de 
coquilles  perforantes , parce  qu’elles  indiquent  un  séjour  assez  pro- 
longé de  la  mer  dans  les  mêmes  lieux.  Lorsque , à la  fin  de  cet  ou- 
vrage, nous  traiterons  d’une  manière  spéciale  de  l’application  de 
la  conchyliologie  à la  géologie,  nous  tâcherons  d’apprécier  la  va- 
leur de  ces  témoignages,  et  nous  examinerons  aussi  ce  qu’ils  appor- 
tent dans  la  question  des  soulèvemens. 

Nombre  des  espèces  : 

24  vivantes. 
i4  fossiles. 

Jusqu’à  présent , on  n’a  observé  de  véritables  Pholades  que  dans 
les  terrains  tertiaires. 

Parmi  les  espèces,  nous  citerons  particulièrement  celles  qui  ont 
leurs  analogues  vivans  ou  fossiles. 

Phoias  candidat  vivante  dans  les  mers  d’Europe;  fossile  dans  le 
crag  d’Angleterre,  dans  les  faluns  de  la  Touraine  et  dans 
les  terrains  tertiaires  de  la  Suède  et  du  Danemark. 

Phoias  crispata , vivante  dans  l’océan  d’Europe;  fossile  en 
Suède  et  en  Nonvège. 

Phoias  sculata^  fossile  aux  envii’ons  de  Paris,  dans  les  faluns 
de  la  Touraine  , aux  environs  d’Angers  et  aux  environs 
de  Bordeaux. 


DES  FBOLADAIRES. 


77 

Phoîas  candlda  i vivante  dans  les  mers  d’Europe  ; fossile  dans 
les  terrains  tertiaires  récens  de  la  Suède  et  de  la  Norwège- 

Nous  avons  cité  depuis  long-temps  le  Pholas  sculaia^  dans  les 
différentes  localités  qui  sont  ici  mentionnées.  Dans  un  mémoire 
sur  la  géologie  de  la  Touraine,  M.  Dujardin  a décrit,  sous  le  nom 
de  Pholas  dimidiata,  la  coquille  que  je  regarde  comme  une  simple 
variété  plus  grande  de  l’espèce  des  environs  de  Paris,  Un  nouvel 
examen  comparatif  ne  nous  laisse  apercevoir  que  de  si  faibles  dif- 
férences que,  malgré  l’autorité  d’un  savant  dont  nous  aimons  à 
respecter  les  opinions,  nous  persistons  encore  dans  notre  opinion 
d’autrefois.  Nous  n’avons  pas  cru  donner  ici  la  description  et  la 
figure  de  cette  espèce , parce  qu’elle  a été  déjà  fidèlement  représen- 
tée par  nous  dans  notre  ouvrage  sur  les  fossiles  des  environs  de  Pa- 
ris, et  la  variété  de  Touraine , par  M.  Dujardin,  dans  le  mémoire 
précité. 

ESPÈCES. 

Pholade  crépue.  Pholas  crispata^  Linné. 

P,  testa  ovaîi,  hitte  ohtusiore,  hîantissimâ  ; antlcè  crîspato^strîatâ,  postîcè  îœ» 
vigatâf  sulco  îongitudinali  unico,  suèrHediano  cînctâ^  'valvidis  accessoribus 
destUutâ^ 

Liûné,  Mus.  ulric.  t.  i p.  469.  ü®  8. 

Phoîas  crispata.  Lin,  Sysl,  nat,  p,  iiii. 

Soîen  crhpus.  Gmel,  p.  3228. 

List,  Syoop.  Couch.  pl.  436. 

List.  Hist.  anim.  pl,  5,  f.  38  et  append,  pi.  2.  f.  7,' 

Sibalt.  Scotîa  illuslr.  p1«  20.  f,  i,  2.  3. 

Schrot.  Einl,  iu  Conch.  f.  3.  p,  54t,  6, 

Billw.  Gat.  t.  I.  p.  40.  Tl  x i. 

Olasfen.  Isl.  pl.  11.  f.  4,  6, 

Penn.  Zool.  brit.  4.pl,  40,  f.  12. 

Chemn.  Goneb.  8.  pl.  102.  f.  872.  874. 

Dacost,  Brit.  Conch.  pl,  16,  f.  4«  phoîas  hïîrons', 

Gerville,  Cal.  des  coq,  de  la  Manche,  p.  lo.  n®  3. 

Coll,  des  Cher.  Cat.  des  test,  du  Fiuist.  p.  9.  n®  i. 

Bouchard-Chantereaux,  Cat.  dcsmoll.  du  Boulonnais,  p,  7.  n“  3, 

Schum,  Nouy.  sysl.  de  Conch.  p,  96. 

Encycl,  pl.  169.  f.  5.  7.  Copiée  de  Chemnilz. 


78 


DEVXlilME  FAMItLE. 


Desh.  Lamk.  An.  s.  v.  a*  éd,  l.  6.  p,  46.  7. 

Wood.  General,  Conch.  p,  18.  n°  5.  pl.  i5.  f.  3.  4*  *- 
Wood,  Ind.  lest,  p,  9.  Dq  5.  pl.  2,  f.  5. 

Spcngî,  Mém.  de  la  soc.  d’hisl.  nat,  de  Copenh.  t,  a,  p.  96. 

Habile  les  mers  d’Europe,  la  mer  du  nord,  et  se  Irouve  fossile  dans  les  ter- 
rains tertiaires  récens  de  la  Suède  et  du  Danemark* 

Cette  espèce  est  très  remarquable  par  l’énorme  bâillement  de  ses 
valves.  Ces  valves,  en  effet , ne  se  touchent  que  par  deux  points  do 
leur  circonférence,  par  les  crochets  et  par  le  milieu  du  bord  infé- 
rieur. Prise  dans  son  ensemble , celte  coquille  est  subcylindracée  ; 
considérées  séparément,  les  valves  sont  ovales,  oblongues,  subqua- 
drangulaîres , obliquement  tronquées  en  avant;  elles  sont  inéquî- 
latérales,  moins  cependant  que  dans  les  autres  espèces.  Leur  sur- 
face extérieure  est  divisée  en  deux  parties  presque  égales,  par  un 
sillon  assez  large  qui  descend  un  peu  obliquement  du  crochet  et 
aboutit  uu  peu  au-dessous  de  la  partie  moyenne  du  bord  inférieur. 
Ce  sillon  se  répète,  à l’intérieur  des  valves , en  une  côte  peu  sail- 
lante qui  se  termine  sur  le  bord  en  une  espèce  de  bouton  assez 
épais;  c’est  là  le  point  du  bord  inférieur  où  les  valves  se  touchent. 
Tout  le  côté  antérieur  de  la  coquille,  jusque  ùn  peu  au-dessus  du 
sillon  médian , est  occupé  par  des  stries  obliques  et  transverses  qui 
suivent  la  direction  de  la  troncature  antérieure,  et  sur  ces  stries 
lamelleuses  se  relèvent,  à des  distances  égales,  des  dentelures  ai- 
guës qui  semblent  se  succéder  sur  des  lignes  longitudinales  qui 
parlent  en  rayonnant  du  crochet.  Les  bords  de  l’échancrure  anté- 
rieure des  valves  sont  eux-mémes  garnis  d’une  rangée  de  ces  den- 
telures. A l’intérieur,  les  valves  sont  d’un  blanc  opaque  ; elles  sont 
lisses  et  l’on  y remarque,  en  avant  de  la  charnière  et  sur  le  bord , 
les  impressions  musculaires  antérieures,  et  à l’extrémité  supérieure, 
tout  près  du  boi'd  postérieur,  on  voit  l’impression  musculaire  pos- 
térieure qui  est  grande  et  arrondie.  Les  cuillerons  sont  d’un  dia- 
mètre égal  dans  toute  leur  longueur;  ils  sont  aplatis  au-dessus,  et 
se  terminent,  à leur  extrémité  libre,  en  une  petite  dépression 
oblongue,  dépression  qui  est  le  résultat  de  l’insertion  du  muscle 
dont  nous  avons  parlé.  Le  bord  cardinal  est  très  épais  en  devant; 
le  crochet , recourbé  sur  lui-même,  rentre  dans  l’intérieur  des  val- 
ves , et  il  est  garni  au  dehors  d’une  callosité  assez  épaisse  qui  s’ap- 
plique immédiatement  sur  la  surface  , sans  l’intermédiaire  du  tissu 
poreux.  Cette  callosité  est  lisse , elle  est  recouverte  par  le  petit 
lobe  du  manteau  ; mais  celui-ci  est  recouvert  d’un  épiderme  corné, 


LKS  PHOtADAIRES. 


79 

et  il  est  toujours  dépourvu  de  pièces  accessoires  que  Ton  rencontre 
dans  les  autres  espèces. 


Pliolade  scabrelle.  Pholas  candida.  Linné,  pl.  3.  fig.  i3.  i4. 

P,  testa  ohîongâf  anticè  non  rostratâ;  undique  costis  strlîsque  transversis, 
dentîcuîifens  ornaiâ;  vafvuUs  duahus  ; scttio  in  medio  Uneâ  depressâ  hi- 
pariito, 

Pholas  candida.  Lin.  Syst.  nat.  p.  un, 

List,  Syuop.  Conch.  pl,  436.  f.  278.61  435,  f, '»7g, 

List.  Hist.  anim.  pl.  3.f.  Sg. 

Encycl.  pl.  168.  f,  ix, 

Gualt,  Concli.  pl,  io5,  f.  E? 

Pennant,  Zool.  brit,  pl.  Sg.  f,  1 1, 

Chemn.  Concb.  8.  pl.  lor.  f.  861,’ 

Spengl,  Mém.  de  lasc.  d’hist.  nat.  deCopen.p.  90, 

Schrot.  Einl.  in  Concli,  t.  3,  p,  SSg,  n°  4* 

Dillw,  Cat.  t.  I.  p.  36.  Hq  4. 

Wood,  Gener,  Concb.  p.  79.  n°  3,  pl,  14.  f,  3.  4. 

Wood.  Xnd.  test,  p.  8.  n°  3.  pl,  2,  f,  3, 

Desh.  Encycl.  mélh.  vers.  t.  3.  p,  753.  no  2. 

Desb.  Lamk,  An.  s.  v.  2®  éJ,  t,  6.  p.  44»  n®  3. 

Gcrville,  Cal.  des  coq.  du  départ,  de  la  Manche,  p,  10.  n®  2. 

Coll,  des  Cher,  cat.  des  test,  mar.  du  Finisl,  p.  9.  n®  2. 
Bouchard-Chantereau.  Cat.  des  moi),  du  Boulonnais^  p.  7.n®  2. 

Eossile.  P/jo/tw  cylindricus,  Sow»  Min.  Concli.  pl,  198.  f,  i.  2. 

Habite  l’Océan  européen  , et  se  trouve  fossile  dans  les  terrains  tertiaires  de 
la  Suède  et  de  la  Norwège,  ainsi  que  dans  le  crag  d^Angleterre. 

Coquille  ovale,  oblongue,  transverse,  înéquilatérale , obtuse 
antérieurement  et  rétrécie  à Textrémité  postérieure.  Le  côté  anté- 
rieur est  presque  fermé,  le  postérieur  est  largement  bâillant.  Les 
valves  sont  très  convexes,  et  lorsqu’elles  sont  réunies,  la  coquille 
est  subcylindracée.  La  surface  extérieure  est  rugueuse,  âpre  au 
toucher  ; on  j remarque  des  stries  transverses , plus  ou  moins  ré- 
gulières selon  les  individus,  ordinairement  assez  écartées  et  rele- 
vées en  lames  courtes  et  fines.  Ces  lames  deviennent  plus  saillantes 
et  plus  épaisses  sur  l’extrémité  antérieure.  Elles  sont  traversées  par 
des  stries  longitudinales  rayonnantes,  parlant  des  crochets  et  for- 


8o 


DEUXIEME  FAMILÎ.E. 


niant,  avec  les  premières,  iin  réseau  à mailles  quadrangulaires.  Au 
point  d’intersection  de  ces  deux  sortes  de  stries,  il  s’élève  une  pe- 
tite écaille  qui  devient  une  dentelure  plus  proéminente  sur  les 
stries  longitudinales  du  côté  antérieur.  A l’intérieur,  les  valves 
sont  lisses;  le  crochet,  recourbé  en  dedans,  est  revêtu  eu  dehors 
d’une  callosité  peu  épaisse,  immédiatement  appliquée  sur  lui,  mais 
qui  bientôt  se  relève  pour  se  joindre  avec  la  partie  antérieure  du 
bord  cardinal.  Cette  callosité  est  recouverte  par  un  écusson  ovale, 
oblong  qui  semble  formé  de  deux  pièces  soudées  sur  la  ligne  mé- 
diane; car  cette  ligne  médiane  est  sensiblement  déprimée.  De  la 
partie  postérieure  de  la  callosité,  on  voit  sortir  de  l’intérieur  des 
valves,  et  se  diriger  obliquement,  une  sorte  de  pli  calcaire  qui 
vient  faire  saillie  au-dessus  du  bord;  chaque  valve  ayant  la  même 
saillie,  elles  s’appuient  un  peu  l’une  contre  l’autre,  comme  cela  a 
lieu  dans  le  Soleil 'vagina,  par  exemple.  Le  cuilleron  qui  se  trouve 
dans  l’intérieur  des  valves  est  très  grêle  et  très  étroit.  II  est  cylin- 
dracé,  et  présente  , à son  sommet  , une  très  petite  impression. 

L’intérieur  des  valves  est  lisse,  et  c’est  avec  peine  que  l’on  y 
distingue  les  impressions  musculaires.  L’antérieure  est  petite,  et 
s’appuie  sur  l’extrémité  du  boi'd  cardinal  ; la  postérieure  est  ova- 
laire et  très  rapprochée  du  bord  dorsal.  Lorsque  les  valves  sont 
réunies,  on  remarque  entre  elles , du  côté  du  dos , un  grand  espace 
vide  qui,  pendant  la  vie  de  l’animal,  est  rempli  par  une  petite 
pièce  testacée , allongée , étroite , maintenue  en  place  par  les  feuil- 
lets de  l’épiderme.  Celte  espèce,  très  commune,  ne  devient  jamais 
bien  grande;  elle  a 5o  et  55  millimètres  de  large , et  20  millimètres 
de  long. 

Pholade  lîgamentine.  Pholas  ligamentina.  Desh,  pl.  3.  fig. 

II.  12, 

P.  testâ  ovato^hlongâ^  angustâ,  utrînque  hîantissîmâ^  alha^  anticè  truncatà; 
'valvis  tenuïssîmè  irariiversîm  lamellosîs;  lamcllls  undato^crispatîs ; ktw- 
bonibtis  brevibuSf  intus  caîlo  producto  cockUarîformi;  ossîcuUs  internis  bre- 
vissimîs. 

Habite  les  mers  d’Europe, 

Coquille  très  singulière,  et  dont  nous  ne  trouvons  nulle  part  ni 
description  ni  figure.  Par  sa  forme  générale,  elle  se  rapproche  du 
Pholas  crùpata,  mais  plus  encore  du  Pholas  callosa  de  Lamarck.  Elle 
reste  néanmoins  distincte  de  ces  deux  espèces,  et  nous  l’avons  fait 


LES  PnOLADAÏRES. 


8l 


représenter,  parce  qu’elle  offre  un  caractère  remarquable  à la 
charnière  à laquelle  on  trouve  des  caillerons  articulaires  assez 
comparables  a ceux  des  Lulraircs,  par  exemple.  Lorsque  les  deux 
valves  sont  réunies,  elles  ne  se  touchent  que  par  deux  points  de' 
leur  circonférence.  C’est  le  côté  antérieur  qui,  néanmoins,  reste 
le  plus  largement  ouvert.  Les  valves  sont  subtrapt^zoïdales ; on 
voit,  sur  leur  surface  extérieure,  un  très  grand  nombre  de 
fines  lames  très  rapprochées,  comme  pressées  les  unes  contre  les 
antres,  et  qui  sont  finement  festonnées,  avec  tant  de  régularité, 
que  les  angles  des  festons  forment  des  lignes  longitudinales  qui  des- 
cendent des  crochets  vers  les  bords.  Cette  structure  se  continue  sur 
le  milieu  de  la  coquille,  mais  on  voit  les  ondulations  diminuer 
peu-à-peu,  et  les  stries  deviennent  simples  sur  l’extrémité  pos- 
térieure. Les  crochets  sont  peu  saillans;  ils  sont  en  partie  ca- 
chés derrière  une  lame  étroite  qui  ne  les  touche  pas  et  qui  est  pour 
ainsi  dire  un  rudiment  de  la  large  callosité  que  l’on  trouve  dans 
les  autres  espèces.  Le  bord  cardinal  est  large  et  épais.  Nous  avons 
vu,  dans  le  Pholas  candida , une  petite  côte  se  contourner  sur  le 
bord  cardinal , en  sortant  de  la  cavité  du  crochet,  et  venir  se  ter- 
miner en  une  sorte  de  dent  articulaire.  Nous  avons  vu,  dans  le 
Pholas  coslala,  celte  côte  changée  en  un  bourrelet  assez  épais, 
terminée  en  une  surface  arrondie  et  raboteuse,  par  laquelle  les 
valves  s’appuient  Tune  sur  l’autre.  Ici,  ce  bourrelet  a pris  une  exa- 
gération telle  , qu’il  vient  s’étaler  sur  presque  tout  le  bord  cardinal 
et  se  projeter  dans  l’intérieur  des  valves,  sous  forme  de  grands 
cuillerons  horizontaux,  comparables  à ceux  des  Lutraires,  avec 
cette  différence,  cependant,  qu’ils  ne  paraissent  point  encore  con- 
tenir de  ligament.  Au-dessous  de  ces  grands  cuillerons,  et  dans  la 
cavité  du  crochet,  on  trouve  les  appendices  osseux  propres  à toutes 
les  Pholades.  Ils  sont  courts  et  épais , et  paraissent  réduits  a l’état 
rudimentaire.  L’intérieur  des  valves  est  lisse;  l’extrémité  anté- 
rieure se  termine  en  une  sorte  de  bec  , et  c’est  sur  la  portion  du 
bord  cardinal,  appartenant  à ce  bec,  que  l’on  aperçoit  l’impres- 
sion musculaire  antérieure.  L’impression  postérieure  est  arrondie , 
et  placée  très  près  du  bord  dorsal.  Nous  ne  savons  si  celte  espèce 
a des  pièces  accessoires  à la  charnière.  Les  valves  sont  larges  de  26 
millimètres  et  longues  de  i3. 


T.  I. 


82 


DEUXIÈME  FA3IILLE. 


Pholade  grande-taille.  Pholas  costata,  pl»3.  f.  lo. 

Ph,  testa  magnd^  ohîongo-ovatây  costîs  dcntatis  elevatis  undique  striata;  la- 
tere  antlco  rotundo  ; scuto  triangidarly  std^paleUiformi^ 

Phoîùs  costata.  Lin.  Syst.  nat,  lo*  édit.  p.  66g.  n”  ii.  Lin.  Syst,  nat, 

éd.  X2..  p,  iiii, 

Guall.  Concb,  pl.  io5.  f.  9. 

Sclirot.  Einl.  in  Concli,  t.  3.  p.  537.  n°  2 , 

Speng],  Mena,  delà  soc,  tl’hisl.  nat.  de  Copenli.  l.  a.  p.  86. 

Encycl.  pl.  iGg.  f.  i.  2. 

Dillw,  Gat.  t.  I,  p.  3G.  n®  3, 

'VVood,  GCucr.  Conch.  p.  80.  ü°  4.  pl.  i5,  f.  r.a. 

Wood.  Incl.  test,  p.  8.  n°  4*  pl.  2.  f,  4. 

Blainv.  Malac.  pl.  gg.  f,  6. 

Sow.  Gén,  of  shells.  n®  aS.  pl,  i. 

Desh.  Encycl.  mélh.  vei's.  l,  3.  p.  764.  n®  3. 

Desli,'  Lamk,  An. s.  v.  2®  éd.  t.  7.  p.  44,  n°  6, 

Habile  les  mers  d’Amérique, 

Celle-ci  est  la  plus  grande  espèce  connue  dans  le  genre  Pholade. 
Nous  avons  vu  des  individus  d*une  taille  presque  double  de  celui 
que  nous  avons  figuré.  Celte  coquille  est  mince,  blanche  et  très 
bâillante  d?«ns  presque  tous  les  points  de  sa  circonférence  ; les  val- 
ves, en  effet,  ne  se  touchent  que  par  la  charnière  et  une  très  pe- 
tite portion  du  bord  inférieur.  Cette  coquille  est  très  convexe,  cy- 
lindracée,  obtuse  et  arrondie  en  avant,  plus  rétrécie  à son  extré- 
mité postérieure.  Sa  surface  extérieure  est  ornée,  dans  toute  son 
étendue,  de  cotes  longitudinales , rayonnantes,  partant  des  cro- 
chets. Ces  cotes,  en  aboutissant  sur  les  bords  des  valves,  les  ren- 
dent onduleux,  festonnés  à rexlrémité  antérieure,  et  ils  se  répè- 
tent en  creux  dans  l’intérieur  des  valves.  Deux  petites  parties  de  la 
coquille  restent  lisses.  C’est  une  sorte  de  lunule  qui  occupe  rexlré- 
mité supérieure  et  antérieure  et  qui  est  circonscrite  par  la  pre- 
mière côte  de  ce  côté;  la  seconde,  c’est  un  grand  corselet  lancéolé 
limité  par  la  dernière  côte.  Les  côtes  qui  couvrent  la  surface  sont 
élégamment  crénelées  , et  leurs  interstices  sont  occupés  par  des 
stries  transverses  assez  régulières.  Les  six  ou  sept  premières  côtes, 
qui  sont  sur  lo  côté  antérieur , sont  plus  étroites  et  plus  saillantes 
que  les  autres,  et  les  crénelures  que  l’on  y remarque  sont  plus  ai- 
guës, et  ressemblent  assez  à des  écailles.  Les  crochets  sont  très  proé- 
minens,  fortement  recourbés  ; la  callosité  qui  les  rovét  se  relève 


TROisïiîiE  r.niiixE.  — xes  sot^iîArfES.  83 

sans  les  toucher  et  forme  une  lame  épaisse,  à rexlrémité  postérieui’e 
(le  laquelle  se  montre  une  duplicatiire  profonde,  terminée  dcrrièi’e 
le  crochet  en  une  cavité  conique  assez  profonde.  Ces  cavités , ainsi 
que  celle  duplicature,  servent  à recevoir  les  parties  correspon- 
dantes d’une  double  pièce  osseuse,  épaisse  , qui  semble  servir  d’a- 
grafe pour  assurer  la  réunion  solide  des  valves.  Sur  la  callosité 
vient  s’appuyer  un  grand  écusson  triangulaire,  patelliforme , dont 
le  sommet  est  suhcentral.  A l’intérieur,  les  valves  sont  d’un  blanc 
laiteux.  On  remarque,  sur  la  partie  antérieure  la  plus  épaisse  du 
bord  cardinal  , à la  base  des  callosités,  une  impression  ovale  , 
oblongue,  étroite;  c’est  celle  du  muscle  antérieur.  Vers  les  deux 
tiers  postérieurs  de  la  coquille,  et  tout  près  du  bord  dorsal,  se 
trouve  rimprossion  musculaire  poslérlciire.  Elle  est  étroite,  ovale, 
tronquée  antérieurement.  En  exauriuant  la  callosité  cardinale , on 
voit  sortir,  de  i’inléricur  des  crochets  , uu  bourrelet  oblique,  as- 
sez épais,  se  terminant  pai’  une  surface  inégale.  C’est  par  te  point 
seul  que  les  valves  touchent  à la  charnière.  De  l’intérieur  des  cro- 
chets, naissent  deux  grands  cuillerons  qui  s’élargissent  rapide- 
ment. Ces  cuillerons  sont  creusés  en  une  large  gouttière,  et  ter- 
minés postérieurement  par  un  cul-de-sac  en  partie  recouvert  par 
une  sorte  de  cloison. 

Les  grands  individus  ont  65  millimètres  de  long,  et  17  centi- 
mètres de  large. 


TROISIÈME  FAMILLE. 

Les  Solénacées.  Lamk. 

CARACTERES,  — Animal  allongé,  transverse;  les  siphons 
plus  ou  moins  longs,  réunis;  lobes  du  manteau  séparés  an- 
térieurement pour  le  passage  cFun  pictl  cylindroïcle  allongé, 
terminé  par  un  élargissement  ou  une  troncature. 

Coquille  transverse,  épidermée,  bâillante  aux  extrémités. 

Ligament  extérieur  ou  subintéricur , charnière  calleuse, 
ou  pourvue  de  deux  dents  en  crochets. 

GENRES.  — Solemye,  Solen  ^ Soleciuie. 

6^ 


TROISIÈME  FAMILLE. 


S4 

OBSERVATIONS  GENERALES.  — Lamai’ck  Gst  Ic  premier  qui  ait  créé 
cette  famille.  On  la  trouve  pour  la  première  fois  dans  la  philoso- 
phie zoologique  : elle  renferme  les  six  genres  Glyciraère,  Solen , 
Sanguinolaire,  Pélricole , Rupellaire  et  Saxicave.  Ce  groupement 
de  genres  est  certainement  peunaturel  ; Lamarckne  tarda  pas  à s’en 
apercevoir,  et,  dans  l’extrait  du  coursjil  en  détacha  les  trois  derniers 
genres  cités,  pour  en  former  sa  famille  des  Lilhophages  : il  ajouta 
plus  tard  à celle  des  Soicnacées  le  genre  Panopée,  nouvellement 
créé  par  Ménard  de  la  Groje.  Dans  cet  ouvrage  de  Lamarck, 
la  famille  des  Solénacées  est  donc  composée  de  quatre  genres, 
et  quoique,  pour  cette  époque,  elle  dût  paraître  naturelle  aux 
yeux  des  personnes  qui  s’occupaient  uniquement  des  Mollus- 
ques, cependant  elle  ne  fut  pas  adoptée  par  Cuvier  qui,  il  faut 
bien  le  reconnaître  , avait  fondé  ses  classîOcatious  sur  des  prin- 
cipes différens  de  ceux  de  Lamarck.  Cuvier,  généralisant  ce  fait 
commun  à un  gi'and  nombre  de  Mollusques  d’avoir  les  lobes  du 
manteau  réunis,  établit  sur  ce  caractère  une  famille  considérable, 
à laquelle  il  donna  le  nom  de  Mollusques  acéphalés  enfermés.  Ces 
Mollusques,  en  effet,  semblent  enfermés  dans  les  lobes  du  manteau, 
soudés  dans  presque  tous  les  points  de  leur  circonférence.  Mais,  ce 
groupe  considérable  de  Mollusques  petit  être  utilement  divisé 
en  familles,  et  celle  des  Solénacées  reste  nécessaire  en  la  modi- 
fiant. Continuant  toujours  à perfectionner  ses  travaux,  Lamarck  , 
clans  scs  Animaux  sans  vertèbres,  apporta  encore  des  changemens 
dans  sa  famille  des  Solénacées  ; il  en  écarta  les  Sanguinolaires  poul- 
ies porter  dans  le  voisinage  des  Tellines;  et,  dès-Jors,  la  famille 
qui  nous  occupe  se  trouva  réduite  aux  trois  genres  ; Solen,  Pano- 
pée et  Glycimère.  Cet  arrangement  dut  paraître  naturel  tout  le 
temps  que  l’on  ne  connût  pas  les  animaux  des  Glycimères  et  des 
Panopées.  Aujourd’hui  qu’ils  sont  connus,  il  faudra  refaire  la  fa- 
mille des  Solénacées,  et  la  réduire  presque  entièrement  au  genre 
Solen.  Ce  n’est  pointainsi  que  M.  deFérussac  l’a  comprise.  Aux  trois 
gem-es  de  Lamarck,  il  ajoute  les  deux  genres  Pandore  et  Sangui- 
nolaire,  ce  qui  est  loin  de  la  rendre'plus  naturelle.  C'est  à peine 
s’il  est  nécessaire  de  discuter  la  famille  des  Solenides  de  Lalreille. 
Il  y fait  entrer  sept  genres,  parmi  lesquels  nous  remarquons  les 
Hyalelles  et  les  Gaslrochènes,  et  nous  pouvons  ajouter  qu’à  l’épo- 
que où  parut  l’ouvrage  de  Lalreille,  Familles  naturelles  du  règne 
animal,  personne  n’ignorait  les  véritables  rapports  de  ces  genres. 

Pans  son  Traité  de  Malacologie,  M.  de  Blainvüle  a donné  )o 


L£S  SOLKNAGEES. 


85 

nom  de  Pyloridées  à une  famille  qui  représente  presque  complè- 
tement celle  des  Enfermés  do  Cuvier.  Vingt  genres  y sont  l’assem-' 
blés,  et  parmi  eux,  dans  Je  voisinage  des  Mjes,  nous  trouvons  les 
Solens  et  quelques-uns  des  démembremens  de  ce  genre.  Il  est  évi- 
dent que  M.  de  Blainville  a confondu,  dans  ses  Pyloridées,  des 
genres  qui  ont  des  caractères  extérieurs  très  différens,  et  qui  étaient 
assez  connus , pour  qu’il  dût  les  séparer  dans  des  familles  de 
moindre  étendue.  Âinsi,  le  groupe  des  Myes,  par  exemple,  est 
bien  différent  de  celui  des  Solens  , et  celui-ci  diffère  d’une  manière 
notable  du  groupe  des  Saxicaves  , et  surtout  des  Gaslrochènes. 
Depuis  l’ouvrage  de  M.  de  Blainville,  Cuvier,  dans  la  seconde 
édition  du  Règne  animal,  a persisté  dans  la  conservation  de  sa 
famille  des  Enfermés,  et  nous  avons  fait  voir,  en  discutant , dans 
l’Encyclopédie  méthodique,  la  valeur  de  ce  groupe  et  des  genres 
qu’il  renferme,  qu’il  fallait  conserver  la  famille  des  Solénacées, 
mais  non  lou!rà-fait  telle  que  Lamarck  l’avait  instituée.  Aujour- 
d’hui , on*  a de  nouveaux  élémens  pour  discuter , d’une  manière 
plus  approfondie , et  la  famille  et  les  genres  qu’elle  renferme. 

Nous  avions  d’abord  pensé  qu’il  iallaîL  introduire,  dans  la  fa- 
mille des  Solénacées  , les  six  genres  : Glycimère,  Solen , Solemye, 
Panopée,PboladomyeetSolecurte  ; mais  aujourd’hui,  nous  croyons 
nécessaire  de  réduire  le  nombre  de  ces  genres  , et  nous  proposons 
de  conserver  les  trois  genres  Solen , Solemye  et  Solecurte.  Nous  fe- 
rons remarquer  que  dans  les  Glycimèrcs  , les  Panopées  et  pro- 
bablement aussi  les  Pholadomyes,  l’animal  so  rapproche  beaucoup 
de  celui  des  Myes,  non-seulement  par  la  grandeur  des  siphons, 
mais  encore  par  la  petitesse  rudimentaire  du  pied  , pour  lequel  le 
manteau  ne  laisse  qu’une  très  petite  ouverture.  Dans  les  Solens, 
au  contraire,  le  pied  est  grand  et  il  sort  par  une  ouverture  pro- 
portionnée du  manteau , tandis  que  les  siphons  sont  en  proportion 
plus  petits  que  dans  les  Myaires.  Il  est  vrai  que  dans  les  Sole- 
curtes , le  pied  et  les  siphons  ont  des  proportions  bien  différentes 
de  ceux  des  Solens.  Aussi , il  sera  peut-ôlre  nécessaire,  par  la 
suite,  d’établir,  pour  ce  genre  lui  seul,  une  petite  famille  inter- 
médiaire entre  celle  des  Solénacées  et  celle  des  Myaires;  il  faudra 
voir  aussi  si  ce  genre  Solecurte  ne  se  rattache  pas  aux  Solens  par 
quelques  espèces  avec  les  coquilles  desquelles  M.  de  Blainville  a 
fait  son  genre  Solelelline.  Ce  dernier  genre  nous  paraît  plus  voisin 
des  Tellines  proprement  dites , et  des  Psammobies  que  des  Solens  ; 
et,  à considérer  les  rapports  naturels,  ce  genre  doit  venir  se  pla- 


86 


TROISIÈME  FAMILLE. 


cer  comme  un  emljranchoment  laîf^ral  pour  lier  les  Solens  aux 
Tellines,  Il  nous  reste  à parler  du  (lenre  Solernye.  Ce  genre  a aussi 
une  organisalion  propt  e ; car  Icsliranchics  ressemblent  à des  plu- 
mules  étalées  sur  les  parties  latérales  du  corps,  taudis  que  le'  pied 
est  toul-à-fait  comparable  à celui  dès  Solens,  et  les  siphons  sont 
fort  courts.  Quant  à la  coquille,  elle  est  largement  épidermée , ce 
qui  a lieu  aussi  dans  d’autres  genres  avoislnaus;  mais  ce  qui  la 
distingue  le  plus,  o’est  qii’elle  a un  ligament  snbiulérieur , taudis 
qu’il  est  externe  dans  les  aulrês  genres  de  la  ifiéme  famille.  Mais 
nous  avons  vu,  en  parlant  du  ligament  dans  les  généralités,  que  la 
position  de  celte  partie  avait  réellement  peu  d’importance  pour  la 
classification , et  qu’il  ne  fallait  là  considérer  que  comme  carac- 
tère générique. 

Les  Solénacées  ont  une  manière  do  vivre  qui  leur  est  particu- 
lière. Ces  animaux  choisissent  les  plages  sableuses.,  et  ils  y creu- 
sent des  trous  perpendiculaires,  quelquefois  très  profonds,  dans 
lesquels  ils  se  meuvent  avec  une  grande  rapidité,  au  moyen  de 
leurs  pieds.  Ce  pied  a une  disposition  très  appropriée  à ses  inou- 
vemens.  Il  se  termine  par  une  espèce  de  disque  qui,  lors  de  son 
élargissement,  s’appuie  sur  les  parois  du  trou  cylindrique  habité 
par  l’animal,  et  c’est  en  s’appuyant  sur  ce  disque,  et  en  usant  en- 
suite de  la  grande  contractilité  de  son  pied,  que  l’animal  s’élève 
ou  descend  avec  une  extrême  rapidité.  Ces  moeurs  des  Solens  sont 
bien  connues  des  pêcheurs  qui  savent  avec  quelle  rapidité  il  faut 
saisir  l’animal  lorsqu’il  vient  faire  saillir  ses  siphons  à la  surface  du 
sable  ou  il  est  enfoncé. 


GENRE  HUITIÈME. 

SOXiE&lirS.  SoUmya.  (Lanik.) 

PI.  5.  lig.  i5.-i6-i7. 

GXRAGTÊRiiS  GENERIQUES,  — Animal  ovale,  tranverse;  lobes 
du  manteau  réunies  dans  leur  moitié  postérieure  terminés 
par  un  siphon  court  5 pied  prohoscldlforme , tronqué  antc-- 
rieiiremeni  par  iiu  disque  frangé  sur  ses  bords;  une  seule 


LBS  SOlÉNACÉES. 


87 

braiicliie  de  chaque  côté  en  forme  de  plumulc,  dont  les  barbes 
sont  isolées  jusqu’à  la  base;  anus  terminal  flottant  à rcxtré- 
mité  des  branchies. 

Coquille  oblongue , transvei'se,  cquivalve  , inéquilatérale  j 
obtuse  à ses  extrémités,  et  revêtue  d’un  épiderme  épais  qui 
la  déborde  de  tomes  parts  ; charnière  terminale  à l’extrémité 
postérieure  ; crochets  non  saillans  5 ligîiment  extérieur  inséré 
sur  une  nymphe  oblique,  subintérieure,  en  partie  recouverte 
par  le  bord  du  corselet,  et  formant  avec  lui  un  sillon  pro- 
fond 5 l’impression  palléale  large  et  simple. 

OBSERVATIOKS.  — Le  genre  Soleihye  a été  figuré,  pour  la  pre- 
mière fois,  par  Poli,  dans  son  grand  ouvrage  sur  les  Mollusques 
de  la  Sicile.  Il  mentionne  l’espèce  de  la  Méditerranée  sous  le  nom 
de  Tellina  to^ata.  A-peu-près  dans  le  môme  temps,  Bruguière  fai- 
sait représenter  la  môme  coquille , dans  l’Encyclopédie  , parmi  les 
espèces  du  genre  Solen.  En  étudiant  celle  coquille,  Lamaixk  s’a- 
perçut qu’elle  ne  devait  rester  ni  dans  les  Tellines , ni  dans  les  So* 
lens,  et  il  créa  pour  elle  un  genre  auquel  le  nom  de  Solemye  est 
resté.  Ce  genre  parut , pour  la  première  fois,  dans  le  tome  v des 
Animaux  sans  vertèbres,  et,  entraîné  par  la  trop  grande  valeur 
qu’il  attribuait  à la  position  du  ligament , Lamarck  plaça  ce  genre 
dans  la  famille  des  Mactracées , entre  les  Ongulines  et  les  Amphi- 
desmes.  11  est  vrai  que  Lamarck  ne  connut  point  l’animal  de  son 
genre , et  l’on  ne  doit  pas  étro  surpris  que  les  rapports  des  Sole- 
myes  aient  été  mal  appréciés  par  lui  et  quelques-uns  do  scs  succes- 
seurs. Nous  voyons  en  effet  M.  de  Férussac , dans  ses  Tableaux  sys- 
tématiques, transporter  le  genre  qui  nous  occupe  dans  sa  famille 
des  Myaires,  à la  suite  des  Analines,  des  Lutraires  et  des  Myes. 
En  admettant  le  genre  dans  la  famille  des  Mactracées,  Latreille 
sentit  bien  que  ses  rapports  n’élaicnt  point  définitifs,  et  il  fait  en-' 
tendre  qu’il  n’était  point  à sa  place.  Dans  son  Traité  de  Malaco- 
logie, M.  de  Blainville  a judicieusement  rapproché  les  Solemyes 
des  Solens , dans  sa  famille  des  Pyloridées  ; mais  déjà  M.  de  Blain- 
ville avait  pu  s’aider,  dans  sa  nouvelle  classification,  de  la  con- 
naissance de  l’animal  figuré  et  décrit  par  M.  Delle  Cliiaje,  dans 
ses  Mémoires  sur  les  animaux  sans  vertèbres  des  mers  de  Naples  et 
de  Sicile.  Depuis  cette  époque,  on  eut  assez  fréquemment  l’occa- 
sion de  se  procurer  l’animal  de  la  Solemye , que  l’on  rencontre  en 


88 


TROISIÈME  FAMILLE. 


abondance  dans  la  plupart  des  plages  sableuses  de  la  Méditer- 
ranée. C’est  après  avoir  examiné  un  grand  nombre  d’individus  que 
nous  avons  déterminé,  d’une  manière  plus  exacte,  les  rapports  de 
ce  genre.  Depuis  que,  dans  l’Encyclopédie,  nous  avons  décrit 
l’animal,  M.  Philippi  en  a donné  une  fort  bonne  figure  dans  son 
Enumeratio  molluscoriim  Siciliœ,  Mais,  à l’exemple  de  M.  Sovrerby, 
il  a fait  subir  au  nom  générique  un  léger  changement  qui , 
à nos  yeux , a trop  peu  d’importance  pour  valoir  la  peine  d’élre 
discuté. 

L’animal  delà  Solemye.est  ovale,  allongé  et  assez  semblable, 
pour  l’extérieur,  à celui  des  Solens.  Les  deux  lobes  du  manteau 
sont  minces:  ils  tapissent  l’intérieur  de  la  coquille,  viennent  la 
déborder  de  toutes  parts,  tapissent  aussi  la  large  bande  d’épi- 
derme qui  fait  saillie  en  dehoi's  du  têt,  et  se  réunissent  sur  la  li- 
gne médiane  en  laissant  un  écartement  de  près  d’une  ligne  entre 
les  bords  de  l’épiderme.  Les  lobes  du  manteau  sont  réunis  entre 
eux  dans  les  deux  tiers  postérieurs  de  la  longueur  de  l’animal;  mais 
dans  le  tiers  antérieur,  ils  sont  constamment  désunis  et  laissent  une 
large  fente  pour  le  passage  du  pied.  Dans  celle  partie  de  leur  con- 
tour, les  lobes  du  manteau  sont  garnis  de  petites  papilles  courtes 
et  écartées  entre  elles;  le  pied  constitue  la  masse  charnue  princi- 
pale de  l’animal.  Il  est  allongé,  subcylindracé,  et  il  prend  nais- 
sance vers  le  milieu  de  la  longueur  de  l’animal  : il  se  projette  en 
avant.  Lorsqu’il  est  contracté,  il  ne  dépasse  presque  pas  les  bords 
de  la  coquille,  et,  dans  cet  état,  son  extrémité  libre  est  obtuse  et 
semble  formée  de  deux  lèvres  rapprochées.  On  peut  en  effet  écar- 
ter les  deux  parties  dont  le  pied  est  formé,  et  l’on  voit  alors  qu’il 
est  subitement  tronqué  et  terminé  par  une  surface  presque  plane , 
circulaire,  et  dont  le  contour  est  finement  frangé.  Celte  extrémité 
du  pied  se  dilate  en  un  disque  h bords  aigus,  dont  l’animal  se  sert 
d’une  manière  particulière  pour  s’enfoncer  dans  le  sable.  Lorsque 
l’on  a retiré  une  Solemye  du  trou  qu’elle  habitait,  et  qu’on  la  met 
à plat  dans  un  vase  dont  le  fond  est  rempli  de  sable  couvert  d’uiic 
suffisante  quantité  d’eau  do  mer,  on  la  voit  bientôt  étendre  son 
pied  , agiter  vivement  le  sable  pour  le  suspendre  momentanément 
dans  l’eau , et  lorsque  le  pied  est  parvenu  à une  certaine  profon- 
deur, l’animal  le  dilate  en  disque  et  se  lient  immobile.  Pendant 
ce  temps,  le  sable  se  dépose  sur  le  clis(|Uo  lui-méme,  forme  une 
couche  autour  de  lui  et  devient  un  point  d’appui  assez  solide  au 
moyen  duquel  l’animal  sc  redresse  perpendiculairement.  Dans  cette 


LES  SOLÉNACEES. 


89 

position,  il  recommence  la  meme  manœuvre , et,  par  les  conli’ac- 
lions  de  son  pied,  il  parvient  ainsi  à disparaître  dans  le  sable  en 
quelques  minutes. 

Entre  le  pied  cl  le  manteau,  sur  la  ligne  médiane,  on  voit  une 
petite  fente  triangulaire,  transverse:  c’est  celle  de  la  bouche.  Elle 
est  garnie,  en  dessus  et  en  dessous,  de  petites  lèvres  très  minces, 
étroites,  que  l’on  voit  se  diriger  de  chaque  coté  de  la  masse  abdo- 
minale , s’élargir  un  peu , et  se  terminer  en  une  paire  do  palpes  la- 
biales, longues  et  étroites , libres  dans  la  plus  grande  partie  de  leur 
étendue.  La  masse  abdominale  est  courte,  et  se  termine  en  une 
sorte  de  lame  longue  , triangulaire , de  chaque  côté  de  laquelle 
viennent  se  placer  les  branchies.  Celles-ci  la  dépassent  bientôt  et 
viennent  se  prolonger  dans  la  cavité  postérieure  du  manteau  jus- 
qu’àl’origino  du  siphon.  Ces  branchies  ne  sont  pas  comme  cellesdes 
autres  Acéphales  lamellibranches  ; on  ne  peut  les  comparer  exacte- 
ment qu’à  uneplume  dontlesbarbes^eraienl  égales  de  chaque  côté. 
Ces  barbes  sont  librès  et  flottantes  comme  celles  de  la  plume,  et 
elles  s’attachent  aux  vaisseaux  branchiaux  qui  forment  l’axe  de 
chaque  paire  de  branchies.  C’est  vers  l’extrémité  postérieure,,  et 
entre  les  deux  paquets  branchiaux , au-dessus  du  muscle  adduc- 
teur postérieur,  que  l’anus  vient  déboucher.  Le  muscle  adduc- 
teur antérieur  est  aplati,  forme  la  partie  épaissie  du  manteau,  au- 
dessus  de  la  bouche  et  derrière  le  pied,  et  il  s’insère  sur  la  coquille 
dans  le  voisinage  du  bord  dorsal.  Le  muscle  adducteur  postérieur 
est  cjlindracé,  et  il  vient  s’insérer  sur  la  coquille , immédiatement 
derrière  les  ciiillcrons  de  la  charnière.  Par  une  anomalie  des 
plus  singulières,  la  charnière,  dans  les  Solemjes,  au  lieu  d’étre 
située  à l’extrémité  antérieure  de  la  coquille  et  de  correspondre  , 
comme  cela  a lieu  ordinairement,  à la  position  de  la  bouche,  est 
placée  à l’exlrémilé  postérieure , ce  qui  n’avait  pas  été  remarqué 
jusqu’à  présent.  Cette  position  de  la  charnière  se  trouve  tout-à-fait 
inverse  de  celle  des  Solen  vagina,  Sillqua^  etc.,  chez  lesquels  la 
charnière  est  toujours  lerminale  et  antérieure. 

La  coquille  des  Solemyes  est  très  reconnaissable,  non-seule- 
ment par  ses  caractères  extérieurs,  mais  encore  par  ceux  de  sa 
charnière.  Elle  est  ovale,  oblongue,  équivalve  et  inéquilatérale. 
Le  côté  antérieur  est  extrêmement  long,  le  postéi’ieur  est  au  con- 
traire très  court.  Toute  la  coquille  est  mince  et  fragile;  son  tôt, 
blanchâtre  en  dedans  , paraît  ne  contenir  que  peu  de  matière  cal- 
caire. Il  est  revêtu,  à l’extérieur,  d’un  épiderme  épais,  d’un  brun 


90 


TROISIÈME  FAMItLE. 


foncé.  Cet  épiderme  déborde  constamment  la  coquille,  et,  par 
son  étendue,  auf^nienle  au  moins  d’un  tiers  la  cavité  intérieure. 
Les  impressions  musculaires  sont  peu  apparentes  ; on  les  dis- 
tingue cependant  en  faisant  jouer  obliquement  la  lumière  sur 
la  surface  inlerno  des  valves  : l’antérieure  est  allongée,  étroite 
le  long  du  bord  dorsal;  la  postérieure  est  arrondie.  Une  ligne  peu 
profonde  s’étend  d’une  impression  à l’autre  en  suivant  le  contour 
du  bord,  et  celte  ligne  est  produite  par  l’insertion  du  manteau. 
Elle  n’est  point  échaucrée  postérieurement,  et  l’on  conçoit  qu’un 
siphon  aussi  court,  terminant  postérieurement  l’animal,  n’a  pas 
besoin  d’un  muscle  rétracteur  très  étendu  pour  rentrer  dans  la  co- 
quille. La  charnière  présente  des  caractères  plus  particuliers.  Cha- 
que valve  porte , à sou  extrémité  postérieure,  un  ctiilleron  oblique 
redressé,  laissant  entre  lui  et  le  bord,  un  sillon  triangulaire  pro- 
fond, dans  lequel  vient  se  placer  un  ligament  large,  peu  épais,  et 
dont  une  partie  serait  découverte,  si  elle  n’éiait  revêtue  de  l'épi- 
derme qui  s’étend  sur  toute  la  coquille.  On  ne  connaît  encore  que 
trois  espèces  appartenant  à ce  genre.  L’une  est  de  la  Méditerranée, 
l’autre  est  des  mers  méridionales  de  l’Amérique , et  la  troisième 
provient  des  mers  australes. 

ESPÈCES. 

Solcmye  méditerranéenne.  Solemya  ?nediierranea»  Lamk. 
pi.  3.  f.  i5.  i6.  17. 

s.  testa  ovalo-ohlongâ  J iransversd  ^ inequiîateraÜ , iertui , fragilisslmâ  , epi-^ 
dermidc  fusco  iogatà , lincis  pallidiovibns  , longitudinalibus  oniatd  j 
nymphis  Ugamenii  subinteniUy  bvcvîbusy  obliquis. 

Poli.  Test.  Q.p.  43.  et  vol.  i.  tab,  i5.  f.  ao. 

Soleii.  EQC)d,  pl.  225,  f.  4. 

Sow.  Gen,  of  sbells,  7,  f.  2. 

Desb.  Eucycl.  mélh.vers.  l.  3.  p.  957. 

Desb,  Lamk.  An.  s.  v.  2®  éd,  t,  6.  p.  laS.  2. 

Dette  Cliiaje,  Mèm.  divers  sur  les  animaux  invertébrés  des  mers  de  Naples, 
t.  4.  pl.  G2.  f.  10.  II. 

Habile  la  Méditerranée. 

Nous  nous  sommes  servi  de  l’animal  de  cette  espèce  pour  la  des- 
cription du  genre;  nous  n’avons  rien  à ajouter  à son  sujet.  Quand 
on  pourra  lui  comparer  ceux  des  autres  espèces , il  sera  possible 


LtS  SOLANACÉES. 


91 

sans  cloute  cio  généraliser  davantage  les  caractères  que  nous  en  avons 
lires.  Quant  à la  coquille,  elle  se' distingue , par  plusieurs  bons 
caractères,  des  deux  autres  espèces  du  môme  geni’e. 

Elle  est  ovale,  oblonguc,  étroite,  obtuse  aux  deux  extrémités; 
elle  est  très  incquilatérale.  Le  côté  postérieur  est  extrêmement 
court , la  charnière  étant  située  à-peu-près  sur  le  quart  postérieur 
de  la  longueur  totale.  Les  valves  sont  minces,  aplaties  et  très  fra- 
giles. Le  tôt  est  revêtu,  à fextérieur,  d’un  épiderme  épais,  dVm 
brun  marron  foncé,  interrompu  par  de  petites  zones  longitudi- 
nales rayoniianlos  des  crochets  vers  les  bords.  Ces  zones  sont  d’un 
brun  plus  pâle,  et  elles  résultent  d’un  amincissement  assez  notable 
dans  l’épiderme.  Cet  épiderme  déborde  considérablement  les  val- 
ves, et  constitue  au  moins  un  tiers  de  la  capacité  totale  de  la  co- 
cjuille,  lorsque  l’animal  y est  contenu.  Les  crochets  ne  sont  point 
proérainens  ; cependant,  au-dessous  d’eux,  le  diamètre  de  la  co- 
quille commence  à diminuer,  et  bientôt  les  bords  s’arrondissent 
pour  former  rcxirémité  postérieure.  La  surface  intérieure  des 
valves  est  d’un  blanc  brunâtre  terne,  et  l’on  remarque  , à chaque 
extrémité,  vers  le  bord  dorsal,  une  impression  musculaire  arron- 
die; la  postérieure  est  plus  petite  que  l’antérieure.  Une  ligne  ru- 
gueuse, très  voisine  du  bord  inférieur,  en  suit  le  contour,  et  elle 
est  produite  par  l’insertion  du  manteau.  La  charnière  est  singu- 
lière. Si  l’on  en  croyait  Lamarck,  les  deux  valves  seraient  soudées 
entre  elles  en  ce  point  ; mais  il  n’en  est  rien.  Les  valves  se  sépa- 
rent naturellement,  et  sans  aucune  fracture  du  tôt,  lorsque  l’on 
vient  à rompre  le  ligament.  Celui-ci  n’est  pas  non  plus  interne, 
comme  Lamarck  l’avait  supposé;  il  a toute  la  structure  des  liga- 
mens  extérieurs  , comme  ceux  des  Solens , par  exemple;  seulement 
il  est  plus  court  et  en  proportion  plus  épais.  La  nymphe , qui , dans 
les  Solens,  est  portée  à l’extérieur,  est  ici  rentrée  obliquement 
dans  l'intérieur  dej  valves,  et  le  ligament  s’y  insère  de  la  même 
manière  que  dans  les  autres  genres  delà  môme  famille.  11  y a cepen- 
dant celte  légère  différence,  c’est  que  le  rebord  du  corselet  se  relève 
à-peu-près  à la  haïUeiir  du  bord  des  valvesj  et  forme,  avec  la  nym- 
phe, tth  sillon  triangulaire  dans  lequel  le  ligament  est  inséré  et  eu 
partie  caché.  Nous  verrons  par  la  suite  une  disposition  analogue 
dans  un  grand  nombre  de  genres  appartenant  à diverses  familles. 

Les  grands  individus  de  celle  espèce  ont  1 5 millimètres  de  long 
et  5o  de  large. 


92 


TROISIEME  FAMILLE. 


GENRE  NEUVIÈME. 

SOIiEN*.  Solcn  (Linné). 

PL  5.  lig.  8.  PL  6.  fig.  1-9. 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES.  — Animal  li'ès  allongé,  cylln- 
clroïde  , ayant  les  deux  lobes  du  manteau  réunis  dans  toute 
leur  longueur  ou  dans  leur  moitié  postérieure  seulement  et 
terminés  par  deux  siphons  courts  et  réunis  j branchies  égales, 
séparées  à la  basej  anus  flottant;  pied  cylindrique,  terminé 
par  un  empâtement. 

Coquille  très  transverse,  épidermée,  bâillante  aux  extrémi- 
tés; charnière  droite,  linéaire,  tantôt  terminale  ou  sublermi- 
nale,  tantôt  médiane,  présentant  une  ou  deux  dents  fort 
saillantes,  sans  fossettes;  ligament  allongé  extérieur, 

SYNONYMIE  GÉNÉRIQUE.  — 2wXr/v  , Tuyeau,  — Solen^  Onyx  ^ 
Doiiax ; Pline,  Athénée.  — Solen;  Rondelet,  Gesner,  Belon, 
Aldrovande , Lister.  — Solen;  Linné  , Chemitz,  Cuvier,  La- 
marck,  etc.  — Vaginay  Siliqua;  Megerle.  — Solen^  Ensis^ 
Leguminaria^  Cultellus^  Siliquaria;  Schumacker. 

OBSERVATIONS.  — Le  mot  grec  awXrv,  signifie  un  canal,  un  tuyau,  et 
ce  mot  a été  employé  pour  désigner  les  tuyaux  marins  ou  celles  des 
coquilles  bivalves,  dont  les  valves,  creusçes  en  gouttière,  ressem- 
blent à un  véritable  tuyau  lorsqu’elles  sont  réunies.  Les  anciens  ont 
également  employé  les  mots  aulos^  donaxy  onîx  pour  désigner  des 
corpsallongés  et  creux  comme  certains  roseaux,  et  par  extension,  les 
ont  aussi  appliqués  aux  tuyaux  marins  et  aux  coquilles  auxquelles 
Pline  a plus  particulièrement  appliqué  le  nom  de  Solen.  Pline  et 
Athénée  désignent  aussi  ces  coquilles  par  les  noms  de  Dacfylus  ou 
à'Unguis^  parce  qu’elles  ressemblent  par  leur  longueur  et  leur 
forme  aux  doigts  de  la  main  et  des  parties  détachées  par  leur  forme 
et  leur  couleur  ne  manquent  pas  de  ressemblance  avec  les  ongles. 
Il  est  certain  que  les  anciens  connurent  les  coquilles  qui  appar- 
tiennent au  genre  Solen  qui,  par  une  exception  bien  rare,  porte 
encore  aujourd’hui  le  nom  que  nous  a transmis  l’antiquité.  Il  ne 
faut  pas  croire  cependant  que  les  auteurs  de  ranliquilé  ont  dîstin- 


I.ES  SOLANACÉES.  9^ 

gué  nettement  le  genre  qui  nous  occupe  ; ils  confondaient  avec  lui 
tous  les  corps  auxquels  pouvaient  s’appliquer,  avec  plus  ou  moins 
d’exactitude,  le  nom  de  Solcn,  ou  l’un  de  ceux  que  nous  venons  de 
mentionner.  Les  auteurs  qui,  dès  le  milieu  du  seizième  siècle, 
scrutèrent  avec  tant  d’attention  les  ouvrages  des  naturalistes  de 
l’antiquité,  reconnurent  facilement  les  Solens , et  c’est  ainsi  que 
Rondelet  en  distingue  deux  sortes  qu’il  désigne  sous  les  noms  de 
Solen  nias  et  Solen  fœmina;  bientôt  après , il  est  imité  en  cela  par 
Belon  ; Gesncr  suit  leur  exemple,  mais  il  en  ajoute  une  troisième 
espèce  qu’il  observa  dans  les  mers  de  Venise.  Aldrovande  n’ajouta 
à ses  prédécesseurs  qu’une  compilation  plus  étendue  des  anciens, 
et  une  nouvelle  ligure  de  la  nouvelle  espèce  de  Gesner.  Depuis 
celte  époque,  jusqu’en  iG85  que  Lister  publia  son  histoire  des 
Coquilles,  rien  d’important  ne  fut  ajouté  à Thistoire  des  Solens  ; 
mais  Lister,  que  dans  le  cours  de  cet  ouvrage  nous  trouverons 
presque  partout  supérieur  aux  naturalistes  de  son  temps , rassem- 
bla sans  mélange  tous  les  Solens  qu’il  connut,  et  jeta  les  premiers 
fondemens  du  genre  que,  beaucoup  plus  lard,  Linné  créa  dans 
ses  immortels  travaux.  Lister  éloigna  des  Solens,  celle  des  espèces 
ovalaires,  que  la  plupart  des  auteurs  rapportèrent  plus  lard  dans 
ce  genre;  aussi  l’on  peut  dire  que  Lister  en  est  le  vrai  créateur, 
puisqueaujourJ’hui,  après  bien  des  vacillations,  les  concbyliologues 
reviennent  aux  limites  que  ce  naturaliste  a tracées.  L’exemple  de 
Lister  fut  suivi  par  Langius  et  par  Guallieri;  ce  dernier  va  même 
jusqu’à  séparer  celle  des  espèces  dont  M.  de  Blainville  a fait,  il  y a 
quelques  années,  son  genre  Solecurle.  Jusqu’alors  on  connaissait 
fort  peu  l’animal  des  Solens,  et  sa  manière  de  vivre;  notre  célèbre 
Réaumur,  dans  un  mémoire  très  curieux,  imprimé  en  1712,  parmi 
ceux  de  l’Académie  des  sciences,  fit  connaître  les  formes  extérieu- 
res de  l’animal,  et  apprit  par  quelles  manœuvres,  il  sait  creuser 
un  trou  dans  le  sable,  et  s’y  mouvoir  avec  rapidité.  Linné  semble 
avoir  ignoré  ces  observations  de  Réaumur,  et  n’avoir  pas  connu 
les  figures  assez  parfaites  de  l’animal  ; car  dans  les  diverses  édi- 
tions du  Systema  naturœ,  il  caractérise  son  genre  Solen  comme 
tous  ceux  de  la  classe  des  Bivalves  par  ces  deux  mots  Animal  as- 
cidia.  A cet  égard  , on  pourrait  même  blâmer  Linné  qui  n’a  pas  su 
profiter  des  observations  d’Adanson , consignées  dans  ses  Coquilles 
du  Sénégal,  ouvrage  que  Linné  connaissait,  puisqu’il  parut  plu- 
sieurs années  avant  la  publication  de  la  douzième  édition  du  Sys- 
tema  natures*  Adanson  fit  connaître  deux  espèces  du  Sénégal,  l’une 


94  TROISli^.ME  PÀMIELE. 

est  un  véritable  Solen,  l’autre  doit  être  comprise  actuollcmcnt 
dans  le  genre  SolecUrle  de  M.  de  Blainville. 

Si  Linné  est  blâmable  ne  n’avoir  pas  profité  des  observations 
de  Réaunun*  et  d’Adanson,  il  Test  également  ne  n’avoir  pas  res- 
serré-son  genre  Solcn  dans  les  limites  que  lui  avait  données  Lister. 
S’il  avait  suivi  toutes  ces  bonnes  indications,  il  aurait  évité  la  con- 
fusion qui  régne  dans  son  genre.  Au  lieu  de  réformer  avec  sagesse 
les  erreurs  de  Linné,  ses  élèves  et  ses  successeurs  y ont  constam- 
ment ajouté , jusqu’au  moment  ou  Bruguière,  Cuvier  et  Lamarck 
surtout,  portèrent  une  réforme  salutaire  dans  le  genre  oii  Linné 
rassemblait  des  coquilles  de  cinq  ou  six  autres  genres  différons.  Si 
Bruguière  eut  l'avantage  d’ôlre  le  premier  réformateur  du  genre 
Linnéen  , il  fut  aussi  celui  des  naturalistes  qui  comprit  le  moins 
bien  le  rapport  desSolens  avec  les  genres  environnans;  il  le  place 
en  effet  entre  les  Mya  el  les  Pinna,  Il  faut  ajouter  que  Bruguière 
fut  trop  timide  dans  les  changemens  qu’il  fit  au  genre  de  Linné, 
car  sous  le  nom  de  Solens,  on  trouve  dans  les  planches  de  l’encyclo- 
pédie avec  les  vrais  Solens,  les  Sanguinolairos,  les  Psammobies  et 
l’Anatine.  Pour  pouvoir  réformer  d’une  manière  heureuse  le  genre 
Solen  de  Linné,  il  était  nécessaire  de  connaître  Tanalomie  des 
espèces  dont  les  formes  soûl  le  plus  dislincles.  Poli,  dans  son 
grand  et  magnifique  ouvrage  des  Tesiacées  de  deux  siècles,  en 
donnant  des  anatomies  très  bien  faites  des  principales  espèces  de 
Linné,  mit  les  naturalistes  à même  d’améliorer  le  genre;  mais 
malheureusement  ses  travaux  restèrent  long-temps  ignorés  des  na- 
turalistes français  J et  ce  ne  fut  qu’assez  lard  que  Lamarck,  dans 
ses  ouvrages,  mentionna  les  beaux  travaux  du  naluralisie  napoli- 
tain. Cependant,  dès  1799^  dans  les  Mémoires  de  la  société  d’his- 
toire naturelle  de  Paris,  Lamarck  commence  par  séparer  du 
genre  les  Sanguinolaires , et  les  met  entre  les  Myes  et  les  Giyci- 
mères.  Dans  le  même  temps,  Cuvier,  dans  son  Tableau  élémen- 
taire de  l’bistoire  naturelle  des  animaux,  réduisait  aussi  le  genre 
Solen  aux  espèces  ovalaires,  tel  que  le  Solen  sirigilatus , et  aux 
espèces  très  allongées,  telles  que  le  Vagîna.  '^Y.  de  Roissy,  dausJa 
continuation  du  Buffon  de  Sonnini , accepta  sans  changement  les 
réformes  proposées  par  Cuvier  et  par  Lamarck , dans  leurs  pre- 
miers travaux.  Quelques  années  plus  lard,  Lamarck  apporta  quel- 
ques modifications  dans  le  genre  qui  nous  occupe;  il  en  retira  les 
Analines,  qu’il  mit  dans  la  famille  des  Myaires.  Dans  l’extrait  du 
cours,  Lamarck  ne  fit  aucun  changement,  soit  dans  les  rapports, 


LES  SOLIÉNACEES. 


95 

soit  dans  la  constitution  du  genre  Solen.  Cuvier  n’a  pas  agit  de 
môme,  car,  après  avoir  réduit  les  Solens  de  Linné  comme  nous 
Pavons  vu,  il  comprend  co  genre  dans  sa  famille  des  Enfermés, 
et,  à titre  de  sous-genre,  il  y réunit  les  Sanguinoiaires  de  La- 
marck.  Dans  ses  animaux  sans  vertèbres , Lamarck  conserva  le 
genre  Solen  en  tçte  de  sa  famille  des  Solénacces,  et  il  y rassembla 
non-seulement  les  espèces  allongées  et  dont  l’animal  est  pourvu 
de  deux  siphons  courts  réunis , mais  encore  les  espèces  ovalaires 
dont  l’animal  a le  pied  linguifbrme  et  les  siphons  désunis  dans  une 
partie  de  leur  longueur  ; parmi  les  espèces  ovalaires , il  introduisit 
aussi  des  espèces  dont  l’animal  a le  pied  comprimé , les  siphons 
grêles  et  désunis  dans  toute  leur  longueur.  M.  do  Blaiiiville , dans 
son  Traité  de  malacologie,  voulut  réformer  le  genre  Solen  et  le 
réduisit^  en  effet,  aux  proportions  que  Lister  lui  avait  données  ; il 
proposa  deux  genres,  l’un  pour  les  espèces  ovalaires  et  aplaties,  il 
lui  donna  le  nom  de  Solélelline  ; l’autre, pour  les  espèces  plus  cylin- 
driques à pied  linguiforme,  il  lui  imposa  le  nom  de  Solécurte.  De 
ces  deux  genres,  dont  nous  avons  discuté  la  valeur  d’abord  dans 
nos  articles  du  Dictionnaire  classique  d’histoire  naturelle,  et  en- 
suite dans  l’Encyclopédie  méthodique,  un  seul  doit  être  conservé, 
c’est  celui  des  Solecnrtes  ; car,  nous  avons  démontré  que  les  Solé- 
lellines  sont  pour  la  plupart  de  véritables  Psammohies  et  quelques- 
unes  des  Solens  voisins  du  Legumen  : c’est  à dessein  que,  dans  cette 
courte  histoire  du  genre  Solen , nous  avons  négligé  de  citer  plu- 
sieurs ouvrages  dans  lesquels  on  trouve  des  changemens  peu  im- 
portans,  la  plupart  des  auteurs  ayant  adopté  les  idées  de  Lamarck. 
Quelques  auteurs , tels  que  M.  Schumacher,  ont  augmenté  jusqu’à 
l’exagération  le  nombre  des  divisions  génériques  aux  dépens  des 
Solens  de  Lamarck. 

Dans  le  dernier  ouvrage  de  l’auteur  que  nous  venons  de  nom- 
mer, on  trouve , à coté  des  Solens  réduits  au  Solen  vagina,  et  quel- 
ques autres  espèces,  un  genre  Ensis  pour  les  espèces  longues  et 
courbées  à charnière  terminale  ; un  genre  Legumînaria  pour  les 
Solens  à charnière  submédiane  avec  une  cote  intérieure  j un  genre 
Cultellus  pour  les  espèces  larges,  aplaties  et  courbées;  et  enfin  un 
genre  Siliquarm  pour  les  espèces  à charnière  médiane  sans  côte  in- 
térieure, tels  que  le  Solen  Domheyi  de  Lamarck.  M,  Megerle  avant 
Schumacher  avait  aussi  proposé  plusieurs  genres,  entre  autres  un 
genre  Vagina,  un  autre  sous  le  nom  de  Siliqua  et  caractérisés  de 
manière  à ne  renfermer  qu’un  très  petit  nombre  d’espèces.  On  sen- 


TROISIÈME  FAMlttE. 


96 

tira  que  dans  notre  manière  d’envisajjer  les  genres  et  de  les  carac-' 
lériser  zoologiquement,  il  nous  est  impossible  d’accepter  ceux  que 
nous  venons  de  mentionner. 

En  réduisant  le  genre  Solen  dans  des  limites  plus  étroites  que 
Lamarck,  en  le  ramenant  à-peu-près  à celle  de  Lister  et  de  M.  de 
Blainville,  on  trouve  un  ensemble  satisfaisant  dans  les  caractères 
de  ces  animaux,  et  dans  ceux  des  coquilles  ; les  animaux  sont 
allongés,  cylindroïdes,  quelquefois  un  peu  aplatis.  Ils  sont  formés 
comme  les  autres  Conchyfères  , d’une  enveloppe  générale,  le 
manteau,  d’un  corps  ou  masse  viscérale  et  d’un  pied  organe  loco- 
moteur. 

Lorsque  l’on  écarte  les  lobes  du  manteau  d’un  Solen,  et  que 
l’on  incline  en  avant  l’organe  allongé  et  venniforme  qui  est  con- 
tenu dans  la  partie  antérieure  de  sa  cavité,  on  aperçoit,  vers  le 
milieu  de  la  longueur  totale , et  cachée  profondément  à la  base  de 
cet  organe  venniforme,  une  petite  fente  Iransverse,  garnie  en 
dessus  et  en  dessous  d’une  petite  lèvre  membraneuse  j c’est  là  l’ou- 
verture de  la  bouche  : elle  est  parfaitement  symétrique  et  dans  la 
ligne  médiane  de  l’animal;  de  chaque  côté,  les  lèvres  se  conti- 
nuent eu  une  paire  de  palpes  labiales,  longues  et  étroites,  soudées 
entre  elles  à leur  bord  interne  dans  la  moitié  de  leur  longueur,  et 
adhérentes  dans  celte  partie  de  leur  longueur  aux  côtés  de  la 
masse  viscérale  ; ces  palpes  labiales,  de  forme  lancéolée,  ont  leur 
surface  interne  couverte  de  fines  lamelles  membraneuses,  serrées  et 
fort  courtes.  Si  l’ou  pénètre  dans  la  bouche,  on  voit  que  c’est  une 
petite  cavité  qui  conduit  immédiatement,  au  moyen  d’un  œso- 
phage très  court  et  cylindrique,  dans  un  estomac  subglobuleux, 
sc  terminant  insensiblement  en  un  intestin  grêle  qui  fait  d’abord 
deux  courtes  circonvolutions  et  qui  en  forme  ensuite  deux  autres 
beaucoup  plus  grandes  au  moyeu  desquelles  l’intestin  se  porte 
d’abord  d’avant  en  arrière,  puis  dans  un  sens  opposé , pour  se  pla- 
cer dans  la  ligne  dorsale  et  médiane,  et  se  terminer  un  peu  en 
avant  du  siphon  anal  et  en  avant  du  muscle  adducteur  postérieur, 
en  un  anus  flottant  entre  les  feuillets  branchiaux  : un  foie  peu  vo- 
lumineux , distribué  en  petits  lobes  à la  base  du  pied,  et  entre  les 
faisceaux  musculaires  de  cet  organe , enveloppe  une  partie  de  l’es- 
tomac et  de  l’intestin  : les  px'oduits  de  la  sécrétion  de  cette  glande 
sont  portés  dans  l’estomac  au  moyen  de  quelques  cryptes  biliaires 
qui  pénètrent  à travers  les  parois  de  la  cavité  stomacale. 

Les  organes  de  la  circulation  sont,  dans  lesSoIens,  à-peu-près 


LES  80LKNACEES. 


97 

semblables  à ceux  des  autres  genres  do  Conchifères;  ils  consistent 
en  un  ventricule  placé  sur  le  dos  de  Tanimal,  et  embrassant  l’in- 
testin qui  semble  passer  à travers  sa  cavité  : ce  ventricule  donne 
naissance  à une  aorte  qui  distribue  le  fluide  nourricier  dans  toutes 
les  parties  du  corps,  d’oii  il  est  repris  par  un  système  veineux  gé- 
néral, qui  le  ramène  aux  branchies,  dans  lesquelles  il  pénètre 
pour  rentrer  dans  le  ventricule,  au  moyen  de  deux  oreillettes 
triangulaires,  aplaties,  submembraneuses,  parfaitement  sembla- 
bles et  symétriques.  Les  organes  de  la  respiration  consistent  en 
une  paire  de  branchies  allongées  et  étroites,  occupant  la  moitié 
postérieure  de  la  longueur  de  la  cavité  du  manteau.  Les  feuillets 
branchiaux  naissent  entre  les  palpes  labiales  de  chaque  côté  du 
corps.  A leur  origine,  ils  sont  étroits;  ils  s’élargissent  bientôt , et 
leurs  bords  deviennent  parallèles  et  ils  se  terminent  postérieure- 
ment en  une  pointe  courte  qui  aboutit  à l’origine  du  siphon  bran- 
chial. Ces  organes  respiratoires  sont  semblables,  quanta  l’organi- 
sation, à ceux  des  autres  Mollusques  conchifères. 

Les  organes  de  la  génération  ne  diffèrent  en  rien  de  ceux  des 
autres  genres,  et , comme  nous  l’avons  dit  dans  les  généralités  ana- 
tomiques, ils  consistent  en  un  ovaire  compris  dans  la  masse  com- 
mune des  viscères,  et  placé  à côté  du  foie.  Cet  ovaire,  extrême- 
ment développé  dans  le  temps  de  la  ponte,  se  décharge  d’abord 
par  deux  oviductes,  dans  les  mailles  des  branchies,  où  les  œufs 
subissent  une  sorte  d’incubation. 

Les  organes  de  la  locomotion  dans  les  Solens,  comme  dans  la 
plupart  des  Mollusques  conchifères , se  partagent  en  ceux  qui  sont 
propres  à quelques  parties  de  l’animal,  et  en  ceux  au  moyen  des- 
quels l’animal  tout  entier  se  déplace,  L’animal  est  lié  à sa  co- 
quille par  deux  muscles  adducteurs  qui  servent  à fermer  la  coquille 
lorsque  ses  valves  sont  écartées;  de  ces  muscles,  i’un  est  antérieur 
et  l’autre  postérieur;  ils  n’ont  pas  la  forme  qu’on  leur  remarque 
dans  le  plus  grand  nombre  des  autres  Concbyfères;  le  muscle 
antérieur,  placé  à l’extrémité  de  l’animal,  tout  près  du  dos, 
est  allongé,  aplati,  a quelque  ressemblance  avec  un  coin  fort 
allongé,  et  laisse  sur  les  valves  une  impression  située  tout  près 
du  bord  cardinal  et  qui  lui  est  parallèle.  Vu  en  dedans,  ce  muscle 
estèvidemmenl  composé  défibrés  Iransversesetparallèles  entre  elles; 
le  muscle  adducteur  postérieur  est  un  peu  plus  court , plus  ovalaire  ; 
il  s’étend  depuis  l’extrémité  de  la  masse  viscérale  jusqi.e  vers  l’ori- 
gine des  siphons , et  sa  limite  se  reconnaît  facilement,  parce  que 

T.  I,  7^ 


TRorsibii:  rAMiixr. 


d8 

Tanus  vient  cl6boncher  immédiatement  derrière  lui.  Dans  l’épais- 
seur du  manteau,  on  remarque  d’autres  faisceaux  musculaires 
propres  à cet  organe;  l’extrémité  antérieure  et  tout  le  bord  ven- 
tral du  manteau  sont  épaissis,  et  cet  épaississement  est  dii  à 
un  très  grand  nombre  de  petits  muscles  transverses  qui  sont  desti- 
nés à tirer  en  dedans  les  bords  libi’es  de  cet  organe  : ces  muscles 
s’insèrent  en  dedans  de  la  coquille,  sur  une  ligne  particulière  dont 
nous  parlerons  bientôt.  A l’extrémité  postérieure,  le  manteau  est 
plus  épaissi  que  partout  ailleurs  ; cet  épaississement  se  remarque 
particulièrement  dans  une  échancrure  triangulaire,  peu  profonde, 
dans  laquelle  la  peau,  très  mince,  est  remplacée  de  chaque  côté 
par  un  muscle  à fibres  rayonnantes,  destine  à faire  rentrer  à l’in- 
térieur de  la  coquille  les  siphons  qui  terminent  l’extrémité  posté- 
rieure de  l’animal.  Outre  ces  parties  fibreuses,  on  trouve  encore 
dans  les  siphons  un  système  musculaire  particulier , composé  de 
fibres  annulaires  et  longitudinales,  et  qui  servent  au  mouve- 
ment propre  de  ces  parties.  2®  Les  organes  de  la  locomotion  , ser- 
vant à déplacer  tout  l’animal,  consistent  eu  un  pied,  dont  la  forme 
est  un  peu  variable  selon  les  espèces  ; le  plus  souvent  il  est  cylin- 
drique, rarement  aplati;  il  est  gros,  remplit  une  grande  partie 
de  la  cavité  intérieure  du  mabteau,  et  il  est  terminé,  à son  extré- 
mité antérieure,  par  une  sorte  d’empâtement,  dont  l’usage  est  tout- 
à-fait  particulier  au  genre  Solen  et  à quelques  autres  semblables. 
Cet  empâtement  peut  prendre  diverses  dimensions,  suivant  que 
l’animal  veut  creuser  le  sable  ou  monter  et  descendre  dans  le  trou 
cylindrique  qu’il  s'est  creusé.  Dans  sa  masse  principale , cet  organe 
locomoteur  est  composé  d’un  grand  nombre  de  fibres  charnues 
très  solides  et  très  coriaces , qui  se  réunissent  et  s’encUevétrenl 
vers  Textrémilé  libre  du  pied  , tandis  que  vers  la  base,  elles  se  sé- 
pai’ent  en  divers  faisceaux,  soitlongitudinaux,  soit  transverses,  fais- 
ceaux entre  lesquels  une  partie  des  viscères  est  contenue , et  aux- 
quels Poli  a donné  le  nom  de  muscles  funiculaires.  Enfin,  l’eX'* 
trémité  inférieure  se  bifurque  de  chaque  côté  de  la  masse  viscérale, 
et  se  termine  eu  deux  muscles  assez  grêles,  qui  viennent  s’atta- 
cher obliquementà  la  coquille,  au-dessous  du  bord  dorsal,  et  à- 
peu-près  vers  le  tiers  postérieur  de  la  longueur  de  ce  bord,  im- 
médiatement au-dessus  du  muscle  adducteur  postérieur.  Il  est  fa- 
cile de  concevoir  la  fonction  des  divers  muscles  dont  nous  venons 
de  parler;  Les  adducteurs,  comme  nous  l’avons  dit,  sont  destinés  à 
rapprocher  les  valves-,  les  muscles  rayonnés  des  siphons  font  ren 


LES  SOLÉNACÉES» 


99 

(rer  ccs  organes  dans  l’intérieur  de  la  coquille  ; .enfin  , les  muscles 
propres  du  manteau  et  des  siphons  ont  pour  usage  de  faire  sortir 
ou  de  contracter  ces  parties  sur  elles-mêmes. 

Quant  au  pied,  les  muscles  dont  il  est  formé  lui  donnent  divers 
mouvemens.  Cet  organe  peut  s’allonger  et  sortir  de  la  coquille 
dans  une  longueur  égale  presque  à celle  de  la  moitié  de  l’animal. 
Il  se  contracte , et  peut  rentrer  entièrement  dans  l’intérieur  de  la 
coquille.  Son  extrémité  libre  devient  conique  et  tranchante,  d’au- 
tres fois,  elle  prend  une  forme  sphéroïdale,  et  quelquefois  enfin, 
cette  extrémité  ressemble  à un  disque  aplati  et  supporté  par  une 
lige  cylindrique;  nous  verrons  tout-à-l’heure,  en  parlant  des 
moeurs  de  ce  mollusque,  à quel  usage  sont  destinées  ces  diverses 
modifications  du  pied. 

Le  manteau,  comme  nous  avons  déjà  eu  occasion  de  le  dire,' 
détermine  la  forme  générale  de  l’animal.  Dans  les  Solens,  il  se 
présente  sous  la  forme  d’une  gaine  charnue  à parois  minces  dans 
le  milieu,  consolidée  sur  les  bords  libres  par  les  muscles  propres 
du  manteau  dont  nous  avons  déjà  parlé  , et  sc  confondant  vers  le 
dos  de  l’animal , soit  avec  la  masse  viscérale , soit  avec  les  muscles 
dont  il  revêt  les  deux  surfaces.  Tantôt,  selon  les  espèces,  la  cavité 
intérieure  du  manteau  est  en  cylindre  creux , tantôt  elle  est  beau- 
coup plus  aplatie , comme  on  peut  en  juger  d’après  la  forme  exté- 
rieure des  coquilles  : ainsi , cette  cavité  sera  différente  dans  le  *Sb- 
len  vagina^  et  le  Solen  le^umen^  par  exemple.  Dans  les  genres  de 
la  famille  des  Pholadaires  , nous  avons  vu  que  les  lobes  du  man- 
teau sont  réunis  dans  une  grande  partie  de  leur  étendue , quel- 
quefois même  , on  n’aperçoit  jilus  que  quelques  traces  des  ouver- 
tures qui  font  communiquer  la  cavité  palléale  avec  le  milieu  am- 
biant, Dans  plusieurs  espèces  de  Solen , les  deux  lobes  du  manteau 
sont  soudés  par  leurs  bords  libres,  et  ne  laissent  qu’une  ouverture 
antérieure , subcirculaire  , pour  le  passage  du  pied  et  les  ouver- 
tures postérieures  du  siphon.  En  cela , ces  espèces  de  Solen  se 
rapprochent  des  Tarets  et  des  Pbolades  ; mais , dans  d’autres  es- 
pèces exlrémemeuL  voisines,  les  deux  lobes  du  manteau  sont  sépa- 
rés jusque  vers  le  milieu  de  leur  longueur^  et  restent  soudés  par 
toute  Textrémilé  postérieure.  Si  toute  l’organisation  de  ces  deux 
sortes  de  Solen  n’était  absolument  semblable , on  pourrait  cer- 
tainement se  servir  de  ce  caractère  pour  établir  pour  eux  des 
genres  qui  seraient,  aux  yeux  des  anatomistes,  plus  acceptables 
dans  une  méthode  que  la  plupart  do  ceux  qu’on  a essayé  d’y  intro- 

7^ 


400 


TROTSlblK  rAl^IITXK. 


duire  d'après  quelques  caractèi'es  de  coquille.  Dans  presque  toutes 
les  espèces,  les  siphons  postérieurs  sont  réunis  dans  toute  leur  lon- 
j^ueur  ; cependant,  une  dépression  latérale  profonde  indique  qifils 
ne  sont  joints  que  par  une  petite  partie  de  leur  circonférence. 
Dans  d'autres  espèces,  ces  siphons  sont  disjoints  au  sommet,  comme 
dans  le  Solen  ensis  ^ par  exemple,  et  enfin,  ces  siphons  sont  dé- 
sunis dans  presque  toute  leur  lonfîueur,  dans  les  espèces  aplaties 
et  à charnière  submédiane,  comme  dans  le  Sofen  lépxmen,  ÎI  ré- 
sulte de  ce  que  nous  venons  d*exposer  à cet  égard , qu’il  ne  faut 
point  îittacher  trop  de  valeur  à ces  modifications  du  manteau  ; 
qu’il  faut  seulement  s’en  aider  pour  la  distinction  des  espèces  et  des 
genres;  mais,  pour  déterminer  la  limite  de  ceux-ci , il  faut  scruter 
plus  profondément  dans  l’organisation,  et  y chercher  les  vrais  carac- 
tères zoologiques  d’après  lesquels  les  bons  genres  doivent  être  formés. 

Pour  terminer  ce  qui  a rapport  à forganisalion  des  Solens,  il 
nous  reste  à parler  du  système  nerveux  qui,  dans  ce  genre,  pré- 
sente quelques  faits  intéressans.  Poli  est  le  premier  anatomiste  qui 
ait  fait  connaître  le  système  nerveux  d’un  grand  nombre  de  Mol- 
lusques acéphalés  , mais  il  le  décrivit  et  le  figura  comme  un  sys- 
tème de  vaisseaux  lactés,  et  Mangili,  dans  un  petit  opuscule  de- 
venu très  rare,  fut  le  premier  qui,  en  donnant  l’anatomie  d'une 
grande  Mye , attribua  au  système  nerveux  ses  véritables  fonctions 
et  reconnut  rerreur  dans  laquelle  Poli  était  tombé.  Dans  le  genre 
qui  nous  occupe  , le  système  nerveux  est  fort  développé,  il  n’est 
bien  connu  que  dans  le  Solen  vagina;  mais  il  est  à présumer  qu’il 
ne  présente  que  des  variations  peu  importantes  dans  les  autres  es- 
pèces. En  examinant  les  bords  libres  du  manteau  à la  face  interne, 
on  aperçoit,  rampans  sur  la  partie  épaisse  du  bord,  quelques  pe- 
tits filets  qui  se  réunissent  en  un  tronc  transversal , et  bientôt  cette 
branche  principale  vient  aboutir  de  chaque  côté  du  corps  à l’angle 
inférieur  d’un  ganglion  buccal , quadrangulaire;  puis  on  découvre 
immédiatement  au-dessus  de  la  bouche , derrière  les  lèvres  dont 
cette  ouverture  est  garnie  , le  ganglion  d'un  côté,  communiquant 
avec  celui  du  côté  opposé  par  une  branche  transverse  qui  part  de 
l’angle  interne  des  ganglions.  De  l’angle  inférieur  et  interne  de 
ces  mômes  ganglions,  parlent  des  branches  viscérales  qui  se  por- 
tent à la  base  du  pied  , distribuent  des  branches  aux  organes  in- 
terposés entre  les  muscles  funiculaires  et  se  terminent  en  filets  qui 
se  distribuent  dans  l’épaisseur  même  du  pied.  L’angle  inférieur  et 
postérieur  des  ganglions  donne  naissance  à une  grosse  branche 


LES  SOLENACEES. 


loi 

nerveuse  qui  descend  de  chaque  côté  du  corps , se  porte  en  ar- 
rière vers  le  muscle  adducteur  postérieur,  et  vient  se  joindre  à la 
branche  opposée  sur  le  centre  même  de  ce  muscle.  Cette  jonction 
se  fait  au  moyen  de  deux  petits  ganglions  ayant  une  commissure 
transverse,  et  desquels  s’échappent,  en  divergeant,  deux  filets  ner- 
veux assez  considérables,  don  t les  branches  se  distribuent  en  grande 
partie  au  manteau  , et  quelques-unes  aux  siphons,  vers  le  sommet 
desquels  elles  pénètrent.  On  voit,  par  celte  disposition  généi’ale  du 
système  nerveux , qu’il  est  composé  de  deux  masses  gangiionaires 
principales,  formant  un  anneau  complet  qui  embrasse  les  vis^ 
cères  dans  son  contour;  mais  il  est  à remarquer  que,  dans  le  genre 
qui  nous  occupe  et  par  la  disposition  meme  des  organes  principaux 
qui  le  constituent , l’anneau  nerveux  est  moins  étendu  que  dans 
la  plupart  des  autres  genres.  Ici , en  elFet,  l’ouverture  buccale  est 
presque  au  centre  de  l’animal  ; l’anus  vers  le  tiers  postérieur  de  la 
longueur,  et  toute  la  masse  des  viscères  se  trouve  comprise  dans  co 
court  intervalle. 

Les  Solens  ont  généralement  une  coquille  mince  et  fragile.  C’est 
dans  ce  genre  que  l’on  remarque  les  coquilles  les  plus  transverses 
connues;  elles  sont  extrêmement  larges  et  très  courtes.  Le  bord 
inféi'ieur  elle  bord  supérieur  sont  rapprochés  et  parallèles.  Le  bord 
antérieur,  tronqué  dans  un  certain  nombre  d’espèces , est  toujours 
fort  éloigné  du  bord  postérieur.  On  peut  distinguer  ces  coquilles 
en  plusieurs  groupes,  celles  qui  ont  la  charnière  terminale  et 
celles  dont  la  charnière  est  plus  ou  moins  avancée  sur  le  bord  dor- 
sal. On  serait  disposé,  sans  doute,  à établir  deux  genres  pour  ces 
deux  sortes  de  coquilles,  si  l’on  ne  passait  iusensiblemeui  d’une 
forme  à l’autre,  et  si  les  animaux  des  deux  sections  ne  présentaient 
la  plus  grande  analogie.  Ceux  des  Solens  qui  ont  la  charnière  ter- 
minale sont  généralement  cylindracés,  tronqués  en  avant,  arron- 
dis en  arrière,  bâillant  de  chaque  coté , étant  bien  clos  par  le  bord 
dorsal  et  le  bord  inférieur.  Presque  toutes  ces  espèces  sont  droites, 
et  parmi  elles,  il  y en  a quelques-unes  dont  la  charnière  com- 
mence déjà  à descendre  vers  le  tiers  antérieur  du  bord  dorsal 
[Soien  arnbiguus).  Le  Solen  ensis , courbé  dans  sa  longueur,  n’a 
pas  sa  charnière  aussi  terminale  que  le  Solen  vagina;  et  son  côté 
antérieur  n’est  pas  aussi  fortement  tronqué.  Dans  le  Solen  cultet- 
lus  ^ la  coquille  s'aplatit  davantage,  et  la  charnière  est  encore 
moins  terminale  ; enfin  le  Solen  maximus  de  Gmelin , un  peu  plus 
aplati  que  le  précédciil,  a la  charnière  vers  le  tiers  aulérieur  du 


102 


TROISIEME  FAMILLE. 


bord  dorsal 5 et  cette  espèce,  très  intéressante,  devient  ainsi  le 
point  de  jonction  des  Solens  allongés  et  à charnières  terminales , 
avec  ceux  qui  ont  la  charnière  médiane  ou  submédiane  : il  faut 
suivre  cette  liaison  on  étudiant  la  série  suivante  : Soîen  vagina, 
Solen  cnsis , Solen  arnhiguiis , Solen  culleîîus  ^ Solen  pellucidiis  ^ 
Soîen  maximus y ei  enfin  Solen  legumen.  On  admet  encore  dans 
le  genre  Solen,  un  petit  groupe  particulier  de  coquilles  bâil- 
lantes et  aplaties,  toutes  remarquables  par  une  côte  saillante  à 
l’intérieur  et  qui  semble  destinée  à servir  de  point  d’appui  à la 
charnière,  et  à donner  plus  de  solidité  à toute  la  coquille.  Le  5o- 
îen  radialus  appartient  à ce  petit  groupe,  dans  lequel  nous  con- 
naissons actuellement  cinq  espèces.  Peut-être  faudra-t-il  établir 
dans  la  suite  un  genre  particulier  pour  ces  coquilles , si  par  ha- 
sard l’animal,  qui  nous  est  entièrement  inconnu,  vient  à présenter 
quelques  particularités  dans  son  organisation.  Enfin,  il  est  un 
quatrième  groupe  qui  se  lie  plus  intimement  aux  autres  Solens,  que 
celui  dont  nous  venons  de  parler,  et  dont  le  Solen  Domleyanus  de 
Lamarck  et  le  Tagal  d’Adanson  peuvent  donner  de  bons  exemples. 
Ce  groupe,  dont  fait  partie  aussi  le  Solen  coarctalus  de  laMédilerra- 
née,  renferme  déjà  sept  à huit  espèces,  que  l’on  voit  se  lier  d’une 
manière  insensible  au  Solen  Icgiunen,  Si  Atlanson  , comme  on  ne 
peut  guère  en  douter , a représenté  fidèlement  l’animal  du  Tagal , 
ou  est  obligé  de  reconnaître  un  véritable  Solen  dans  cette  es- 
pèce ; car  il  a un  pied  semblable  à celui  du  vagina  , et  son  man- 
teau, comme  dans  cette  dernière  espèce,  se  termine  postérieurement 
eu  deux  courts  siphons  réunis  dans  toute  leur  longueur.  Si  nous 
étudions  la  cbaruièi’e  dans  les  quatre  groupes  dont  nous  venons 
de  parler,  nous  y observerons  les  modifications  suivantes  : dans  le 
Solen  vagina,  la  charnière  est  très  simple;  elle  consiste  en  une 
seule  dent  cardinale  sur  chaque  valve , ayant  la  forme  de  petites 
palettes  ti’ansverses , dont  la  surface  est  lisse  et  parfaitement  plane, 
qui  s’appliquent  l’une  contre  l’autre,  et,  dans  le  mouvement  des  val- 
ves , ont  le  même  jeu  que  le  gond  d’une  porte.  Cette  forme  de 
charnière  , que  Linné  a cru  propre  au  Soîen  vagina,  se  montre 
dans  cinq  ou  six  autres  espèces,  qui  presque  toutes , à cause  de  ce 
caractère  , ont  été  confondues  par  les  auteurs  avec  l’espèce  lin- 
néenne.  Dans  d’autres  espèces,  allongées  cl  cyliudracées,  la  char- 
nière se  compose  de  deux  dents  en  crochets  parallèles  et  très  rap- 
prochées sur  la  valve  gauche  ; une  petite  dent,  fort  mince  élargie 
sur  la  valve  droite,  glisse  entre  les  deux  dents  de  la  valve  opposée. 


LES  SOLEN AGEES. 


io3 

Ces  espèces  offrent  encore,  en  arrière  de  la  charnière,  deux  petits 
prolongeméiis  très  obliques  qui  se  croisent  et  qui  semblent  être  Fo- 
rigined’une  troisième  dent  cardinaleque  Fon  observe  dans  quelques 
espèces  ovalaires.  Le  petit  crochet  latéral  dont  nous  parlons  se 
montre  particulièrement  dans  le  Soîen  legumen,  et  on  en  re- 
trouve une  trace  dans  le  Solen  cosiatus  de  Say.  Dans  le  Solen 
maximm  ^ cette  dent  latérale  postérieure  se  joint  à la  dent  cardi- 
nale, et  forme  avec  elle  un  V largement  ouvert;  on  voit  ainsi 
cette  dent  faire  insensiblement  partie  intégrante  de  la  charnière 
et  devenir  la  seconde  dent  cardinale  qui  se  montre  dans  le  Solen 
Dombeyanus  et  les  autres  espèces  du  même  groupe , sous  la  forme 
de  deux  crochets  peu  courbés  et  peu  divergens. 

Les  impressions  musculaires  que  Fon  remarque  à Finléideur  des 
Soiens  ont  une  forme  qui  coïncide  avec  celle  des  muscles  dont  nous 
avons  parlé  en  décrivant  l’animal;  ces  impressions  sont  rappro- 
chées du  bord  dorsal  ; l’antérieure  est  très  allongée,  fort  étroite,  plus 
large  à son  extrémité  postérieure  qu  à l’antérieure  ; elle  commence 
immédiatement  au-dessous  de  la  charnière,  et  dépasse  un  peu  Fex- 
trémité  postérieure  du  ligament.  L’impression  postérieure  est  ova- 
laire, beaucoup  plus  courte  que  la  première  et  immédiatement 
au-dessus  d’elle.  On  en  trouve  une  plus  petite  sur  laquelle  vient 
s’insérer  le  muscle  rélracteur  du  pied.  L’impression  palléale  suit  la 
direction  des  bords  antérieur  et  inférieur  de  la  coquille  ; celte  im- 
pression est  fort  intérieure;  elle  consiste  en  une  ligne  assez  forte- 
ment imprimée  qui,  à l’extrémité  postérieure  des  valves,  s’infléchit 
en  dedans  peu  profondément , et  forme  un  sinus  triangulaire,  dans 
lequel  s’insère  le  muscle  rélracteur  des  siphons.  Les  impressions 
dont  nous  venons  de  parler  présentent  des  modifications,  lorsque 
Fon  passe  d’un  groupe  vers  un  autre  ; c’est  ainsi  que  l’impression 
musculaire  antérieure  devient  de  plus  eu  plus  large,  à mesure 
qu’on  l’observe  dans  des  coquilles  plus  aplaties  et  plus  élargies. 
L’impression  palléale  elle-même  change  de  forme  dans  cos  espèces, 
et  sa  sinuosité  postérieure  ressemble  plus  à celle  des  Sanguînolaires 
et  des  Psammohies. 

Les  caractères  spécifiques  se  rencontrent  non-seulement  dans 
la  forme  généràle  et  dans  la  disti’ibution  des  couleurs,  mais  en- 
core plus  particulièrement  dans  la  forme  et  les  rapports  des  impres- 
sions musculaires,  et  dans  l’impression  du  manteau.  La  charnière 
peut  aussi  fournir  de  bons  moyens  pour  distinguer  les  espèces, 
mais  comme  les  dents  cardinales  sont  longues  et  fragiles,  il  est  as- 


TKÜlSliiMli  FAMILLL. 


Iü4 

sez  rare , dans  nos  collections , d’avoir  ces  parties  bien  conservées , 
et  de  pouvoir  en  faire  une  minutieuse  comparaison. 

Nos  collections  rassemblent  actuellement  un  assez  grand  nom- 
bre d’espèces  fossiles  appartenant  au  genre  Solen.  Presque  toutes 
se  distribuent  dans  les  terrains  tertiaires,  et  quelques-unes 
d’entre  elles  sont  les  analogues  d’espèces  actuellement  vivantes. 
Nous  rapportons  avec  doute,  au  genre  Solen,  une  coquille  bi- 
valve fort  singulière,  provenant  des  terrains  de  sédiment  infé- 
rieur de  l’Eifel,  et  que  nous  a communiquée  M.  Félix  Dujardin. 
Cette  coquille  a la  forme  d’un  Solen;  cependant,  nous  conser- 
verons du  doute  à son  égard  pour  plusieurs  raisons;  c’est  que  nous 
ne  pouvons  on  étudier  la  charnière,  la  coquille  étant  prise 
dans  une  pâte  calcaire  très  dure,  et  parce  que  nous  ne  pouvons 
non  plus  étudier  ses  impressions  intérieures,  ne  connaissant  jus- 
qu’à présent  qu’un  seul  individu  de  ce  beau  fossile.  Ce  qui  nous 
porte  encore  à douter  de  la  nature  de  l’espèce  dont  il  est  question, 
c’est  que  son  côté  antérieur  n’est  point  aussi  bâillant  que  dans  la 
plupart  des  autres  Solens.  Parmi  les  coquilles  appartenant  aux 
Muschclkaîk , il  y en  a qui  ont  l’apparence  de  Solens  ovalaires, 
assez  rapprochés  du  Solen  coarctalus  pour  la  forme , mais  beau- 
coup plus  aplatis.  Ces  coquilles  étaient  très  minces  , et  d’après  des 
moules  intérieurs  que  nous  avons  vus,  nous  serions  tenté  de 
les  rapporter  au  genre  Solen.  Elles  pourraient  cependant  appar- 
tenir aux  Psammobies.  Jusqu’à  présent,  aucune  espèce  de  véri- 
table Solen  n’a  été  rencontrée,  soit  dans  les  terrains  créiacés,  soit 
dans  le  grand  système  jurassique.  11  y a plusieurs  espèces  que 
nous  devons  signaler  à l’attention  des  géologues. 

Solen  'vagina,  vivante  dans  les  mers  d’Europe;  fossile  en 
Morée,  en  Sicile  et  en  Italie. 

Solen  siliqua,  vivante  dans  les  mers  d’Europe  ; fossile  enNor- 
ivège  et  en  Sicile. 

Solen  ensis,  vivante  dans  les  mers  d’Europe  ; fossile  en  Sicile . 

Solen  coarctatus , vivante  dans  les  mers  d’Europe  ; fossile  aux 
environs  de  Bordeaux , on  Sicile  et  en  Italie. 

Solen  legiunen^  vivante  dans  les  mers  d’Europe;  fossile  en 
Italie. 

Solcîi  Burdigaîcnsis , fossile  aux  environs  de  Bordeaux. 

Nous  mentionnons  celte  espèce,  pour  rectifier  la  détermination 
qu’eu  donne  M.  de  Baslerot , dans  sou  Mémoire  sur  le  bassin  ter- 


LES  SOLÉXACEES. 


io5 


tiaîre  du  sud-ouest  de  la  France;  il  la  confond  avec  le  Solen  va- 
gina,md\%  elle  s’en  distingue  parfaitement  bien  par  la  forme  de 
ses  impressions  musculaires , et  par  la  direction  de  sa  troncature 
antérieure. 

Solcn  vaglnoïdes,  fossile  aux  environs  de  Paris,  à Vallogne  et 
en  Belgique. 

Nous  ajouterons  une  indication  du  nombre  des  espèces  des  véri- 
tables Solens  que  nous  connaissons  dans  les  trois  groupes  des  ter- 
rains tertiaires  ; six  espèces  dans  le  groupe  supérieur  ; trois  dans 
le  groupe  moyen , et  quatre  dans  le  groupe  inférieur. 

ESPÈCES. 

Solen  silique.  Solen  siltqua.  Lin.  pi.  6.  fig.  i.  2.  3. 

s.  testa  elongato-angustâ  cyllndraceà,  epidermide  'vîrescente  îndutâ;  latere 
antico  arcuato , i^tràqtte  cxtremitate  hyante;  cardine  sînlstro  bidentato 
altero  unidentaio,  dente  lateraîi  poireclo. 

Lin.  Syst.  nat,  éd.  10.  p.  67a.  n°  24. 

Lia.  Syst.  nat.  cd,  la.  p.  rn3.  n°  34. 

Lin.  Mus.  Ulric,  p.  473.  u®  i3, 

Belon.  De  aqual.  p.  414. 

Kond.  Hist.  des  pois.  p.  3i. 

Gessner.  De  aquat.  p.  241. 

Aldrov.  De  test.  p.  628  et  52y. 

Lister.  Anim.  angl.  pl,  5.  fig.  87. 

Lister.  Conch.  pl.  4oy.  fig.  ^55. 

Gualti.  lud.  pl.  yS.  fig.  C. 

Fennant.  Brit.  zool.  1812.  t.  4»  pl.  4^.  4> 

D’Acosta.  Brit.  conch.  pl.  17.  fig,  5. 

Knorr.  Vergn.  t.  6.  pl.  7.  fig.  i. 

Born.  Test,  mus,  Cœs.  Vind.  p.  24, 

Chemn.  Conch.  t.  6.  p.  44. 

Schrot.  Einl.  t.  2.  p,  624»  pb  7-  hg.  6. 

Gmcl.  Syst.  nat,  cd.  i3.  p.  3223.  u®  2. 

Olivi.  Zool.  adr.  p.  97.  n®  2. 

Moutagu.  Teslac.  brit.  p.  46, 

Maton  elTackel.  Lin.  Irans,  t.  8,  p.  43. 

Dorset,  Cat.  p.  38,  pl.  2.  fig.  5. 

Speiigler.  Mém,  de  la  soc,  d’hist,  nat,  de  Copenh.  l.  3.  p.  88.  u®  4. 


TROISIÈME  FAMILLE. 


io6 

Wood,  Genei\  Conch.  p,  n8.  u**  i,  pU  2G,fîg,  i,  2, 

Dillw,  Cat,  t.  I.  p.  58.n°4. 

Wood.  Ind,  test.  pl.  3.  fig,  i. 

I£ucycl.  mélh.  pl.  222.  fig.  2. 

Muller,  Zool,  danic*  prodr,  p,  245.  n°  2957. 

Desb.  Eocycl.  méth.  vers,  t.  3.  p.  gSg.  2, 

Lamk.  An.  s.  vert.  2®  éd.  t.  6.  p.  55.  n°  4. 

Fossîlîs,  Testa  majore  crassa.  Des  terrains  tertiaires  de  la  Norwège. 

Grande  espèce  que  l’on  rencontre  en  abondance  dans  presque 
toutes  les  mers  d’Europe.  Elle  se  distingue  facilement  du  Vaginal 
que  l’on  trouve  avec  elle.  Les  lobes  du  manteau  de  l’animal  ne  sont 
réunis  que  dans  la  moitié  postérieure  de  leur  longueur,  tandis  que, 
dans  l’autre  espèce,  ces  lobes  sont  joints  entre  eux  dans  toute  leur 
étendue.  La  coquille  est  allongée,  étroite,  cylindracée,  d’un  beau 
blanc  laiteux  à l’intérieur.  En  dehors,  elle  est  revêtue  d’un  épi- 
derme épais,  d’un  vert  brunâtre  à l’extrémité  antérieure,  plus 
jaune  à l’exlrémité  opposée.  La  surface  est  divisée  en  deux  parties 
distinctes,  sous  forme  de  deux  très  longs  triangles  accolés  dans 
une  ligne  diagonale,  de  manière  à former  un  parallélogramme 
très  allongé.  Les  deux  extrémités  de  la  coquille  sont  bâillantes; 
les  bords  de  l’antérieure  sont  arques  , épaissis  en  dedans  et  faible- 
ment renversés  en  dehors.  Les  bords  de  l’extrémité  postérieure 
restent  minces  et  tranchans  ; le  ligament  est  allongé , étroit  et  for- 
tement fixé  sur  des  nymphes  peu  saillantes  ; sa  longueur  est  à très 
peu  près  le  quart  de  la  largeur  totale  de  2a  coquille;  les  crochets 
sont  sans  saillie;  ils  ne  sont  pas  tout-à-fait  terminaux,  le  bord 
antérieur  les  surmontant  de  quelques  lignes.  La  charnière  dis- 
tingue particulièrement  cette  espèce  du  Vagina.  Sur  la  valve  gau- 
che , il  y a deux  dents  cardinales  fort  saillantes,  en  crochets,  lais- 
sant entre  elles  un  petit  intervalle , dans  lequel  vient  glisser  une 
dent  en  forme  de  palette,  appartenant  à la  valve  droite.  La  char- 
nière porte  encore  une  dent  latérale  postérieure  sur  chaque  valve  ; 
cette  dent  est  placée  au  tiers  de  la  longueur  du  ligament.  Ces 
dents  se  croisent  lorsque  les  valves  sont  rapprochées.  Celte  espèce 
est  voisine  du  Solen  ensis^  mais  elle  n’est  jamais  courbée  dans  sa 
longueur  comme  lui.  Elle  est  droite  et  cylindracée , comme  le  va- 
gina, mais  elle  est  en  proportion  plus  longue  et  en  diffère  par  la 
charnière. 

Le  plus  grand  individu  que  nous  ayons  jamais  vu  de  cette  es- 
pèce , a 19G  millimètx'es  de  large , et  3i  de  long. 


LES  SOléNÀGÉES. 


107 


Solen  gaîue,  Solenvagina,  Lin.  pl,  6.  fig.  4-  5.  6. 

Testa  lïneariy  cyUndracea,  recta,  postice  îalîore,  latert  antîco  hianle,  in* 
iiis  marginato,  cardine  unidentato. 

Lin.  Syst.  Lat.  édil.  10.  p,  672. 

Liu.  Syst.  nai.  cd.  12.  p.  1 1 x3. 

Rondelet.  Hist«  des  pois.  p.  3r, 

GessDcr.  Nomcnc.  aquat.  p.  241. 

Aldroy.  De  teslac. . 529. 
lionan.  Recr.  part.  a.  fig.  57. 

Lister.  Conch.  pl.  4i2.  fig,  i. 

Réaiimur.  Mouv.  prog.  des  coq,  Mém.  de  l’Ac.  1712. p^  i48.pl,  6. 
Rariora.Mus,  Ecsleriaoi.  pl,  22,  Solen  fœmina,  ^ 

Gualt.  Ind.  test.  pl.  95.  fig.  D. 

D’Argen.  Conch,  pl.  27.  fig.  M? 

Flancus.  De  Conch.  min.  notis.  pl.  3.  fig.  6. 

Mai’vye.  Art.  de  conserv,  pl.  2,  fig.  45, 

Lin,  Mus.  Ulric,  p.  472.  la. 

D’Argen.  Zoomorphose.  pl.  6.  fig.  G,  H,  ♦ 

Chemu.  Conch.  t,  6.  p.  36,  vign.  fig.  G.  H,  et  p.  40.  pl.  4,  fig,  27  et  276, 
exch  plui\  s^non, 

Pennant.  Prit,  zool.  1812.  t,  4*  pl*  49*  ûg,  i. 

Boni.  Mus.  cæs.  vind.  p.  24. 

Schrot.  Einl,  t.  a.  p.  623.  exclus, plur,  synon. 

Gmel.  Syst.  nal.  cd.  i3.  p.  SaaS,  n°  i,  exclus,  plur,  synon, 

Roissy.  Buf.  de  Sonnini  Moll,  t,  3,  p.  4i8,  pl.  69.  fig.  3. 

Spengler.  Mém.  de  la  soc.  d’hist.  nat.  deCopen.  l.  9.  p.  82,  n**  i. 

Wood.  Geuer.  Conch.  p.  iig.  11°  3.  pl.  27. fig,  i, 

Monlagu.  Test.  p.  48. 

Maton  et  Racket.  Lin.  ïrans.  t.  8.  p.  42. 

Dorset.  Cal,  p,  28.  pl.  4,  fig,  8. 

Diliw,  Cat,  t.  I,  p.  57,  n°  1, 

Blaiuv.  Malac.  pl.  79.  fig.  2. 

Brookcs,  Introd.  of  Conch.  pl.  2.  fig.  i3. 

Sow.  Généra  ofshells.  Genre  Solen.  fig.  2.’ 

Poli.  Test,  ulriusq.  Sicil.  t.  i.  pl.  10.  fig.  5 à i5.  et  pl.  ii.  fig.  1 à 1 1. 

Desh.  Encl.  méih,  vers,  t.  3.  p.  959,  u®  i. 

Payr.  Cal.  des  An.  et  des  Moll,  de  Corse,  p.  26.  n°  3i, 

Turton.  Test,  hival.  hrit.  p.  79.  pl.  6,  fig.  4, 

Lamck.  Au.  s.  vert,  2®  édit,  t,  6.  p,  53,  u®  i,  Varict,  cxcl. 


io8 


TROISIÈME  FAMILLE. 


FossiUs»  Broccbi,  Conch,  foss.  subap.  t.  2.  p,  496.  n°  t» 

Habite  la  Méditerranée,  TOcéaa  eurcpéeji,  se  trouve  fossile  eu  Italie  et  en 
Sicile. 

On  connaît  actuellement  dans  le  genre  Solen  plusieurs  espèces 
très  voisines  de  celle-ci,  mais  que  l’on  en  distingue  soit  par  la  forme 
générale,  soit  par  la  position  de  la  charnière,  soit  enfin  par  la 
forme  des  impressions  intérieures  des  muscles  et  du  manteau.  Le 
Solen  gaine  est  une  coquille  qui  est  six  fois  plus  large  que  longue; 
elle  est  allongée,  étroite  et  de  forme  cylindracée  lorsque  les 
valves  sont  réunies  : elle  est  un  peu  plus  large  du  côté  postérieur, 
et  un  peu  moins  convexe  de  ce  côté  que  du  côté  antérieur.  Ses 
crochets  sont  complètement  effacés  et  viennent  se  terminer  à J'ex- 
Irémité  antérieure  et  supérieure  du  bord  dorsal.  Le  bord  anté- 
rieur est  coupé  obliquement  et  tombe  sur  le  bord  supérieur  dorsal 
sous  un  angle  de  soixante-dix  degrés.  Ce  bord  est  épaissi  à l’in- 
térieur, et  on  remarque  à l’extérieur  une  gorge  assez  profonde, 
correspondante  à l’épaississement  dont  nous  venons  de  parler.  La 
charnière%est  simple;  elle  porte  une  dent  sur  chaque  valve  , les- 
quelles s’appuient  l’une  sur  l’autre , au  moyen  d’une  surface  plane 
et  horizontale.  Le  ligament  est  allongé,  étroit,  très  solide,  et  son 
étendue  égale  le  quart  de  la  longueur  du  bord  dorsal.  A l’inté- 
rieur, les  valves  sont  d’un  blanc  rosâtre  et  l’impression  musculaire 
antérieure  est  très  étroite  et  placée  parallèlement  au  bord  supé- 
rieur. L’impression  musculaire  postérieure  est  également  près  du 
bord,  mais  elle  est  ovalaire  et  elle  se  confond  avec  l’extrémité  su- 
périeure de  l’impression  palléale.  Cette  impression  se  remarque 
vers  le  milieu  de  la  surface  interne  des  valves;  elle  est  beaucoup 
plus  intérieure  que  dans  la  plupart  des  autres  espèces  ; elle  est  pa- 
rallèle au  bord  inférieur,  et  elle  se  creuse  postérieurement  en  un 
sinus  ayant  un  peu  la  forme  d’un  V.  Lorsque  cette  coquille  est  re- 
vêtue de  sou  épiderme,  elle  est  d'un  brun  verdâtre  ou  grisâtre; 
elle  vient  d’un  blanc  rosé,  lorsqu’elle  en  est  dépouillée.  Les  indi- 
vidus que  l’on  rencontre  le  plus  ordinairement  ont  i4  centimètres 
de  large,  et  21  millimètres  de  longueur. 

Solen  vaginal.  Solen  'vaÿinalis,  Desb.  pl.  (>.  fig.  7. 

Tesid  cîongato  lineari,  cjlindraceâ , subarcuatâ,  ulroqiic  latere  ollusây 
margine  antico  obliquo  coarctato^  intiis  incrassnto ^ cardia  lineari  uni* 
dentato;  impressione  miiscidari  anticây  brevî  ovatd^ 


LES  SOLANACÉES. 


109 

Soïe7i  'oaghia^  Lamk.  Ann.  du  mus.  t.  7.  p,  427.  n°  i,  cl  t.  12,  pl,  43. 
Cg.  3, 

Solm  vagina,  Var.  b.  Lamk,  An.  s.  vert.  t.  5.  p,  45i.  11®  r. 

Solen  vagina.  Desh.  Coq.  foss.  de  env,  de  Paris,  t,  i.  p.  25.  n®  i.  pl.  2, 
fig.  20.  21, 

Solen  altéra,  specîes.  Desh.  dans  Lamk.  Ann.  s.  vert.  2®  éd.  t.  6.  p.  53. 
n®  I. 

Habile.,.  Fossile  aux  environs  de  Paris,  aux  environs  de  Valogne,  dus  les 
argiles  de  Barlon,  en  Angleterre,  et  en  Belgique  dans  les  sables  tertiaires 
de  l’époque  pai'isieniie, 

Lamarck  regai-dait  cette  espèce  comme  l’analogue  fossile  du  So~ 
îen  vagina  de  Linné.  Mais  c’est  une  erreur  de  la  part  de  ce  grand 
zoologiste.  Lorsque,  dans  notre  ouvrage  sur  les  fossiles  des  envi- 
rons de  Paris,  nous  avons  de  nouveau  donné  la  description  de 
celle.coquille,  nous  avons  fait  sentir  qu’elle  devait  changer  de  nom, 
et  conslituei’  une  espèce  tout-à-fait  à part.  En  étudiant  avec  quel- 
que attention  ses  caractères  spécifiques,  on  reconnaît  bientôt 
qu’elle  se  rapproche  plus  du  Solen  amhigaus  que  du  Solen  vagina. 
Elle  est  allongée , cylindracée , et  sa  longueur  égale  cinq  fois  seu- 
lement sa  largeur.  On  voit  par  cela  seul  qu’elle  est  proportionnel- 
lement plus  courte  que  le  Solen  vagina.  Elle  est  sensiblement  ar- 
quée dans  sa  longueur,  ce  qui  la  rapproche,  à certains  égards,  du 
Solen  ensis.  Ses  extrémités  sont  arrondies  et  obtuses;  l’extrémité 
antérieure  n’esi  point  tronquée  de  la  même  manière  que  dans  le 
Solen  vagina/  l’épaississement  intérieur  est  beaucoup  plus  larp-e 
et  la  dépression  extérieure,  qui  correspond  à cet  épaississement, 
est  plus  élargie  et  moins  profonde.  La  charnière  est  simple  et  li- 
néaire ; elle  porte , sur  chaque  valve  , une  seule  dent  cardinale  en 
forme  de  palette.  Le  ligament  était  court,  car  les  nymphes  desti- 
nées à le  porter  ont  à peine  la  sixième  partie  de  la  longueur  du 
bord  dorsal.  Les  impressions  musculaires  sont  bien  dillérentes  de 
celles  du  Solen  vagina.  L’antérieure  est  ovalaire  et  la  postérieure  , 
un  peu  plus  grande,  est  de  la  même  forme  : celte  impression  pos- 
térieure est  placée  un  peu  au-dessous  du  milieu  de  la  longueur 
totale  de  la  coquille.  A l’extérieur,  cette  coquille  est  lisse  dans  la 
moitié  antérieure  de  sa  surface,  et  présente  des  rides  nombreuses 
d’accroissement  dans  l'autre  moilié  de  son  étendue.  Celte  espèce, 
qu’il  est  rare  de  trouver  entière,  a 90  millimètres  de  long  et  18  de 
large. 


110 


TROISIÈME  FAMILLE, 


Solen  gousse.  Solen  legiiïnen.  Lin.  pl,  6.  Cg.  8.  9.  10. 

Testa  eîongatâ lineari,  depressâ , utroque  latere  ohtusâ  længaîà  sithepîder^ 
mlde  /ucescente  alho-roseâ , cardine  centrait,  hîdentato , dente  aîtero 
h'iftdo. 

Lin.  Syst.  nat.  éd.  10.  p,  672.  26. 

Lin.  Syst.  uat.  éd.  12.  p.  1114.  n°36, 

Pennaut,  Brit.  zool,  2®  éd,  t.4.  p,  173.pl,  49.  fig.  3. 

D’ Acosta,  Brit.  conch.  p,  238. 

Lister.  Coucb.  pl.  42,  fig.  264, 

Plancus.  de  Concb,  min.  not.  pl.  3.  fig.  5, 

Gualtieri.  Ind.  pl,  pr.  fig.  A, 

Klein.  Tentam,  ostrac.  pl;  ii,  fig.  66, 

Born.  Mus.  p,  20,  pl.  2.  fig.  i,  2. 

Chemn.  Conch,  t.  6,  p.  49.  pl.  45.  fig.  32.  33.  34, 

Scbrot.  Einl,  t,'2.  p,  627. 

Gmel.  Syst.  nat,  éd.  i3.  p.  8224.  n®  4, 

Donovan,  Brit,  concb.  t.  2.  pl.  53, 

Monlagu.Testac.  brit.  p.  5o. 

Maton  et  Racket.  Trans.  lin.  t,  8.  p,  45. 

Dorset.  Cat.  p.  29,  pl,  4*  Cg.  4. 

Encycl.  pl.  225.  Cg.  3. 

Olivi.  Zool.  adriat,  p.  97.  4, 

Poli.  ïest.Sicil.  pl,  2.  fig.  i5. 

Spenglcr.  Mém,  de  la  soc,  d’iiist.  nat,  de  Gopenb,  t.  3,  p,  gS,  n®  7,' 

Dillw.  Cal.  t,  I.  p.  60.  n®  8. 

Wood,  Ind,  lest,  pl,  3.  fig.  8, 

Solecurtus  Ugumetu  Blainv,  Maîac,  pl.  80.  fig.  i. 

Desb.  Encycl.  mélb.  vers.  t.  3.  p.  gfir,  n®  7. 

Desb.  Expéd,  sc.  de  Morée,  Zool,  p,  85,  n®  7, 

Payr,  Cal;  des  Ann,  et  des  Moll,  de  Corse,  p.  27,  n®  33. 

Fossiîis,  Testa  majore»  Des  terrains  tertiaires  d’Italie. 

Habite  l’Océan  européen,  fossile  en  Italie  dans  les  terrains  subapennins. 

Cliemnilz,  le  premier,  a confondu  cette  espèce  avec  un  autre 
Solen  décrit  par  Adanson , sous  le  nom  de  Molan  j la  plupart  des 
auteurs  ont  copié  ChemnitZj  sans  s’apercevoir  de  l’erreur  dans  la- 
quelle il  était  tombé.  C’est  ainsi  que  Schrœter , Gmelin,  Dillwinet 
d’autres  ont  propagé  une  erreur  qui  peut  être  nuisible,  en  cela  que 
l’on  croirait  habitant  du, Sénégal  cet  animal,  qui,  en  réalité,  ne 
s’y  trouve  jamais.  Poli,  le  premier,  a fait  connaître  les  formes  ex- 


111 


LES  SOL^NACilES. 

téricures  de  Panîmal  du  Soîcn  legumcn,  et  si  M.  de  Blainville,  en 
établissant  son  genre  Solécurte,  s’élait  souvenu  de  Fouvrage  du 
naturaliste  napolitain , il  se  serait  facilement  convaincu  qu’il  existe 
une  très  grande  dilFérence  entre  cette  espece  et  le  Solen  strigÜatus, 
et  cet  examen  lui  aurait  évité  de  dire  que  l’animal  de  sou  genre 
Solécurte  est  inconnuj  puisque  une  description  tros  complète,  une 
représentation  très  exacte,  se  trouvent  dans  Fouvrage  de  Poli. 
Comme  on  pouvait  le  prévoir,  Fanimal  du  Solen  legiimen  dilFèx'e 
très  peu  de  ceux  des  espèces  du  mémo  genre.  Il  a un  pied  cylin- 
dracé , terminé  par  un  disque  dont  Fanimal  se  sert  pour  se  creuser 
un  trou  et  s’y  mouvoir  avec  agilité.  L’extrémité  postérieure  du 
manteau  est  terminée  en  deux  siphons  courts  et  grêles,  séparés 
dans  la  plus  grande  partie  de  leur  étendue.  La  coquille  est  allon- 
gée, étroite,  plus  large  à son  extrémité  postérieure  qu’à  l’anté- 
rieure. Elle  est  ovalaire,  fortement  déprimée  et  bâillante  à ses  ex- 
trémités; sa  charnière  est  submédiane;  les  dents  cardinales  s’ap- 
puient sur  une  côte  intérieure  très  courte  et  peu  saillante;  ses 
dents  ont  une  disposition  très  singulière  ; il  y en  a deux  très  rap- 
prochées sur  la  valve  gauche;  elles  s’avancent  l’une  vers  l’autre, 
comme  si  elles  voulaient  former  un  anneau  ; mais  elles  laissent  en- 
tre elles  une  petite  fente  dans  laquelle  vient  glisser  une  dent 
aplatie  en  forme  de  palette,  qui  appartient  à la  valve  droite. 
Outre  ces  dents,  on  remarque  de  plus,  sur  chaque  valve,  une 
dent  en  forme  de  stylet  très  oblique,  et  dont  l’extrémité  d’un  côté 
se  croise  sur  celle  deFaulre,  lorsque  les  valves  sont  réunies.  Le 
ligament  est  court,  fort  solide,  et  il  occupe  le  milieu  de  la  lon- 
gueur du  bord  dorsal.  Il  s’insère  fortement  sur  une  nymphe 
très  oblique,  détachée  du  bord,  ce  qui  lui  donne  de  la  res- 
semblance avec  celle  des  Solemyes.  Les  impressions  musculaires 
sont  fort  rapprochées,  et  toutes  deux  très  près  du  bord  dorsal. 
L’impression  antérieure  est  ovale,  lancéolée;  elle  s’étend  depuis 
la  côte  cardinale  jusque  vers  le  milieu  du  côté  antérieur.  L’impres- 
sion postérieure  est  en  proportion  plus  petite,  et  on  la  voit  au 
niveau  du  sinus  palléal  postérieur.  Cette  coquille  , mince  et  fra- 
gile, est  d’un  blanc  rosâtre,  sous  un  épiderme  brun  verdâtre.  Les 
grands  individus  ont  22  millimètres  de  longueur,  et  108  millimé- 
trés de  largeur.  Nous  avons  un  individu  fossile  qui  a i3  centimè- 
tres de  large. 


112 


. TROISI^'.ME  rA:\IlLLî:. 


s olen  rtrecl.  Solen  coarctaius,  Gmel.  pl.  5.  fig.  8, 

Testa  alla  clepressây  ovato^oblongd  îrregulanter  transverslm  striata^  în  medîo 
coarctatdy  utrmque  hiante  roiundatà^  cardlne  subcentrali,  bidentatOy  altcro 
unîdentato» 

Chemn.  Gonch.  l,  6.  p.  6a.  pl.  6.  fig.  45, 

Solen  anathins  LinnœU  Schrot.  fluscouch.p.  i85.pl,  9.  fig.  17. 

Sclirot,  Einl,  t.  2.  p.  635.  n®  3, 

Soien  coarctatus,  Gmel.  Syst.  nat,  éd.  i3,  p.3227,  n°  16. 

Monlagu,  ïestac.  bril.  p.  52, 

Sohn  ctdteîîus,  Pennant.  Brit,  zooî,  t.  4*  pl*  4^.  fig,  aS.  2®éd,  18  ta.  t,  4. 
p.  1 74.  pl.  49*  fig*  4»  antiquatus. 

Donovan.  Brit.  sliell,  l.  4*  pl*  ii4. 

Solen  antiquatus.  Mat.  etRack.  Lin.  Trans.  l.  8.p,  46.. 

Chama-Soîeiu  D’Acosta.  Brit.  Concb,  p.  238, 

Solen  emargînatus.  Spengler.  Mém,  de  la  soc.  d’hist,  nat.  de  Copen.  t,  3. 
p,  io5.  n®  21, 

Solen  antiquatus.  Wood.  Gener.  Conch.  p.  laS.  n®  10.  pl.  29,  fig.  3. 

Dillw.  Cat,  t.  I.  p.  64,  n®  18,  Solen  coarctatus.  excl,  syn^ 

Solen  antiqiiatus.  Lamk,  A.  s.  vert,  t.  5.  p,  454,  i5. 

Solen  coarctatus,  Lamk.  A,  s,  vert,  t.  5.  p.  45*4.  n'*  17. 

Id.  Desli.  Encycl,  mèili.  vers.  t.  3.  p.  961.  n®  9. 

Id,  Desli.  dans  Lanik.  A.  s.  vert,  2®  édit,  t,  6.  p.  59,  n®  17. 

Philippi.  Enum.  moll.  Sîcil.  p.  6.n®6. 

Fossilis,  Solen  coarctatus»  Brocchi.  Conch,  foss,  siibap,  t.  2,  p,  497,  n®  5. 

Id.  Phil.  Emim,  moll,  Sicil.  p.  fi,  n*’  5. 

Habile  l’Océan  européen,  fossile  en  Italie,  en  Sicile  et  aux  environs  de 
Bordeaux. 

Quelques  auteurs , corarae  uous  l’avons  vu,  ont  confondu  le 
Molan  d’Adanson  avec  le  Solen  legumen ; quelques  autres,  au  con- 
traire, et  avec  plus  de  raison,  ont  regardé  l’espèce  du  Sénégal 
comme  l’analogue  de  celle-ci.  Nous  pensons  que  l’une  et  l’autre  de 
ces  opinions  doivent  être  rejetées  , parce  que  le  Molan  d’Adanson 
constitue  une  espèce  parfaitement  distincte  de  toutes  les  autres. 
Schrœler,  dans  son  Traité  des  coquilles  d’eau  douce  commet  une 
autre  erreur  que  l’on  a de  la  peine  à concevoir  de  la  pari  d’un  con- 
cliyologue  aussi  habile;  car,  il  figure  et  décrit  le  Solen  coarctatus 
sous  le  nom  de  Solen  anatimis  de  Linné.  Lamarck,  en  établissant 
les  espèces  de  son  genre  Solen  , a laissé  échapper  un  double  emploi 
qu’il  nous  est  facile  de  rectifier  actuellement.  Son  Solen  antiquatus 


I-KS  SOLFNAC^ES. 


ii3 

est  exactement  la  même  espèce  que  !e  Solcn  coarctatns  ^ tous  deux 
inscrits  dans  la  troisième  section  du  genre.  INpus  avions  d’abord 
pensé  que  cette  coquille  devait  entrer  dans  le  genre  Soléourle; 
mais  de  nouveaux  renscignemens , dans  lesquels  nous  pouvons 
avoir  confiance,  nous  font  croire  actuellement  que  cette  coquille 
doit  faire  partie  du  genre  Solcn,  dans  le  voisinage  du  Tagal  d’A- 
danson  et  du  Soîen  domhcyanus  de  Lamarck. 

Le  Soîen  coarctatus  est  une  coquille  ovale,  oblonguo , com- 
primée latéralement,  toute  blanche  en  dedans  et  en  delioi's;  son 
épiderme  est  d’un  brun  grisâtre,  ne  persiste  que  vers  les  bords, 
et  surtout  vers  l’extrémité  postérieure  ; la  charnière  est  subcen- 
irale ; le  ligament  est  court,  peu  épais  et  d’une  médiocre  solidité; 
les  crochets  sont  ü*ès  petits,  à peine  saillans,  et  l’on  remarque 
immédiatement  au-dessous  d’eux,  sur  le  bord  cardinalj  deux  dents 
parallèles,  recourbées  en  crochets  sur  la  valve  droite,  et  une  seule 
dent  plus  mince  sur  la  valve  gauche.  Les  impressions  musculaires 
sontpeu  écartées , la  postérieure  est  la  plus  grande,  toutes  deux  sont 
ovalaires;  le  sinus  postérieur  de  l’impression  palléale  est  large  et 
profond , il  remonte  dans  rintérieur  jusqu’au  niveau  des  dents 
cardinales.  Comme  l’indique  son  nom , cette  coquille  est  comme 
contractée  ou  déprimée  dans  le  milieu  de  ses  valves.  Les  grands 
individus  de  cette  espèce  ont  20  millimètres  de  long  et  5o  de  large. 

GENRE  DIXIÈME. 

SOIiÉCUnXZ:.  SoUcurlns  (BlainvO- 
PL  6,  fig;  11-16, 

cahactères  génériques,  i — Animal  ovalaire,  très  épais; 
trop  grand  pour  sa  coquille;  les  lobes  du  manteau  réunis  dans 
leur  moitié  postérieure,  et  terminés  de  ce  côté  par  deux  si- 
phons très  longs,  inégaux,  réunis  dans  presque  toute  leur 
longueur,  branchies  égales  réunis,  prolongées  dans  toute  la 
longueur  du  siphon;  pied  linguiforme,  très  grand  , ne  pouvant 
rentrer  entièrement  dans  la  coquille. 

Coquille  ovale,  oblongue , équivalve,  équilatérale,  égale- 
ment bâillante  de  chaque  côté  ; les  valves  ne  se  touchant  que 
I.  8* 


TROI.Sli-:ME  FAIMITXE. 


il4 

par  deux  points  de  leurs  bords,  cliarnièi’c  linéaire,  pourvue 
d’une  dent  sur  une  valve,  et  de  deux  sur  l’autre. 

sYXONïJiiE  GÉxÉRiQUE, — Grand.  ^ P».onclelet,  Gessner, 
Aldrovande. — Rondelet,  Gessner,  Aldrovande , Lis- 
ter.— Solen;  Linné,  Schroter,  Cliemnitz  , Gmelin,  Dillwin, 
Wood,  Spengler,  Lamarck. 

OBSERVATIONS.  — Le  genre  Solécurte,  nouvellement  institué  par 
M.  de  Blainville  dans  son  IraiLo  de  Malacologie,  a pour  type  un 
animal  qui  fut  connu  des  ancienssous  le  nom  de  Péloris.Oa  trouve 
chez  les  Grecs  plusieurs  mots  que  l’on  pourrait  rapporter  a l’ani- 
mal qui  nous  occupe.  ITsXcî  veut  dire  noir,  rembrunie;  TrsXwjii;  veut 
dire  grand  , monstrueux  ou  admirable;  enfin  signifie  boue  , 
vase,  argile  à potier.  Parmi  ces  dénominations,  celle  qui  paraît 
le  mieux  convenir  à l’animal  du  genre  Solécurte,  c’est  TreXfûfii;, 
parce  qu’en  effet  l’animal  est  monstrueusement  grand  par  rapport 
à la  coquille  qu’il  habile.  Quelques  commentateurs  supposent 
que  le  nom  de  TreXwst;  a clé  appliqué  à cet  animal)  parce  qu’il  ha- 
bite les  fonds  vaseux  de  la  mer  ; mais  nous  pensons  que  la  première 
étymologie  est  bien  préférable,  à moins  que  l’on  ne  veuille  ad- 
mettre , avec  Rondelet,  que  c’est  le  cap  Pelorura,  on  Sicilej  qui 
a donné  son  nom  à un  animal  qui  habile  son  voisinage.  Quelle  que 
soit  l’origine  du  mol  par  lequel  les  anciens  ont  désigné  le  genre 
qui  nous  occupe,  il  est  pour  nous  hors  de  doute  que  le  Péloris  de 
Rondelet,  de  Gesner  et  d’Aldrovaude  n’est  autre  chose  que  le 
Solécurte  de  M.  de  Blainville.  Plusieurs  zoologistes,  en  examinant 
la  description  et  la  figure  de  Rondelet,  ont  cru  pouvoir  le  rap- 
porter au  genre  Lulraire  de  Lamarck  (^Alactra  luiraria,  Linné), 
mais  nous  sommes  loin  de  partager  celle  opinion.  En  effet,  les 
Lutraires  comme  les  Myes  ont  les  lobes  du  manteau  réunis  dans 
presque  toute  leur  étendue;  elles  ont  une  masse  abdominale  con- 
sidérable et  un  pied  en  général  très  petit.  Les  siphons  sont  réunis 
dans  toute  leur  longueur  et  ne  sont  point  disjoints  à leur  sommet. 
L’animal  représenté  par  Rondelet  a le  manteau  ouvert  dans  une 
grande  partie  de  son  extrémité  antérieure;  par  cette  ouverture 
passe  un  grand  pied  linguiforme  énorme,  et  aucun  autre  Mol- 
lusque n’offre  cet  organe  dans  la  môme  disposition  et  dans  la  même 
propoi’tion.  Un  gros  siplion  de  la  grosseur  du  doigt  termine  l’ani- 
mal du  côté  postérieur , et  ce  siphon  , à son  sommet,  est  partagé 


LES  SOIÆNACEES. 


Il5 

en  deux  tuyaux  inégaux*  qui  tous  deux  sont  repi'ésentés  dans  la 
figure  grossière  donnée  par  Rondelet.  Beion , dans  son  histoire 
dos  poissons n’a' point  appliqué  la  dénomination  de  Péloris  au 
même  animal  que  Rondelet;  il  croit  que  ce  nom  doit  appartenir 
à un  petit  Mollusque  des  côtes  de  la  Manclie,  qui  très  probable- 
ment est  le  Macfra  piperata  de  Linné.  Après  avoir  donné  la  re- 
présentation de  son  Chama pelorisy  Rondelet,  à la  page  suivante, 
représente  la  coquille  isolée  de  la  même  espèce,  il  lui  donne  le 
nom  de  Chaîna  nfgra.  II  est  à présumer  que  la  coquille  repi'é- 
sentée  par  ce  naturaliste  était  devenue  noire,  parce  qu’elle  avait 
long-temps  séjourné  dans  la  vase  après  la  mort  do  l’animal.  Nous 
avons  vu  que  Lister  ii’avait  point  admis  parmi  les  Solen  le  Chama 
pcloris  de  Rondelet , qu’il  comprenait  cette  espèce  dans  une  grande 
section  de  ses  coquilles  bivalves  dans  laquelle  se  trouve  mélangé 
un  grand  nombre  de  genres.  Guakieri  imite  Lister  pour  la  sépa- 
ration des  coquilles  dont  il  est  question,  tandis  que  Linné  les 
rassemble  sous  la  commune  dénomination  de  Solen.  Adanson , si 
judicieux  et  excellent  observateur,  a connu  le  Chama  péloris  de 
Rondelet,  et  ne  Ta  pas  non  plus  distingué  des  autres  espèces  de 
Solen. 

Tous  les  naturalistes  sans  exception , qui  adoptèrent  le  genre 
linnéen,  y ont  admis  les  mêmes  espèces  jusque  dans  ces  derniers 
temps.  M.  de  Blainville,  voulant  réformer  le  genre  Solen  de 
Lamarck  , proposa  à-Ia-fois  un  genre  Solételline  pour  les  es- 
pèces à charnière  médiane  ayant  la  coquille  très  aplatie,  et  un 
genre  Solécurte  pour  les  espèces  dont  la  charnière  est  également 
médiane,  et  dont  la  coquille  est  plus  étroite  et  généralement  plus 
cylindracée.  On  trouve  ce  genre  Solécurte  pour  la  première  fois 
dans  le  Traité  de  malacologie  dont  on  est  redevable  au  savant 
anatomiste  dont  nous  venons  de  parler.  Deux  choses  ont  dû  sur- 
prendre ceux  des  naturalistes  qui  ont  voulu  soumettre  à un  exa- 
men attentif  le  genre  Solécurte  de  M.  de  Blainville  : la  première, 
c’est  que  M.  de  Blainville  dit  que  ranimai  de  ce  genre  est  inconnu. 
L’auteur  cite  trois  espèces  pour  caractériser  trois  sections  dans 
sou  genre;  de  ces  trois  espèces  deux  sont  de  la  Méditerranée,  et 
toutes  deux  ont  parfaitement  bien  été  figurées  par  Poli',  dans  son 
grand  ouvrage  qui  parut  en  1790.  L’une  d’elles,  Solen  stri^ilatusj 
a été  le  sujet  d’une  très  bonne  anatomie  faite  par  le  savant  napo- 
litain; la  seconde  observation,  c’est  que  l’on  trouve  associées, 
dans  le  nouveau  genre  do  M.  de  Blainville,  des  espèces  qui  n’ont 

8^. 


TROTSl^.ME  FAMTtlP. 


il6 

entre  elles  que  des  rapports  fort  eloign^^s".  On  ne  peut  se  faire  une 
bonne  idée  du  genre  Solôcurto,  qu’cn  consultant  farticlc  qui  le 
concerne  dans  le  tome  xnis  du  Dictionnaire  des  sciences  natu- 
relles : les  especes  y sont  distribuées  en  trois  sections.  Dans  la 
première  sont  celles  qui  ont  une  cote  à rintérieiir,  celles-là 
sont  de  véritables  Solens  ; la  seconde  contient,  à côté  du  Solen 
strigilatüs  ^ un  Soîen  alhus  qui  n’est  autre  chose  que  le  Caiididiis 
de  RenieiT;  enfin,  dans  la  troisième  section,  nous  trouvons  les 
espèces  cylindracées  telles  que  le  SoUn  âOmheyi,  le  Caribeus  et 
même  le  d’Adanson.  Il  nous  paraît  certain  que,  si  M.  de 

Blainville  eût  consulté  la  description  et  la  figure  que  donne  Adan- 
son  de  cette  dernière  espèce , il  aurait  reconnu  qu’elle  doit  rester 
parmi  les  Solens,  et  qu’elle  n’a  aucun  des  caractères  des  Solécurles. 
Il  est  impossible,  ou  doit  le  comprendre,  d’introduire  dans  la 
science  un  genre  aussi  défectueux  que  celui  de  M.  de  Blainville; 
aussi  nous  le  réduisons  au  Solen  strigilatus  et  à quelques  autres 
espèces  qui  lui  ressemblent.  Le  genre  ainsi  réformé  a un  ensemble 
de  caractères  d’une  valeur  égale  à ceux  des  Solens  et  des  auires 
genres  que  nous  admettons  dans  la  grande  série  des  Conchyferos  ; 
ce  genre  n'aurait  qu’une  valeur  très  faible,  s’il  restait  tel  que 
M.  de  Blainville  l’a  proposé,  puisqu’il  faudrait  prendre  ses  carac- 
tères dans  des  animaux  et  des  coquilles  très  différens. 

L’animal  des  Solécurtes  est  allongé,  beaucoup  trop  grand  pour 
sa  coquille , dans  laquelle  il  ne  peut  jamais  rentrer  en  entier,  quolfe 
quesoitla  violencede  ses  contractions. Sa partiecentraleestrevélue 
d’un  manteau  dont  les  parois,  très  minces  dans  une  partie  de  leur 
étendue,  deviennent  très  épaisses  et  très  charnues  vers  les  bords. 
Les  bords  de  ce  manteau  sont  désunis  dans  toute  leur  moitié  an- 
térieure; la  partie  ventrale  et  postérieure  est  réunie  par  une  large 
commissure  destinée  à remplir  l’intervalle  que  les  valves  laissent 
entre  elles.  Cette  commissure  est  consolidée  par  deux  muscles 
particuliers  qui,  sous  forme  de  deux  bandelettes,  viennent  se 
croiser  sur  la  partie  médiane  de  la  commissure.  Un  très  grand 
siphon  épais  et  coriace  termine  postérieurement  la  cavité  palléale. 
Ce  siphon  a environ  deux  pouces  de  longueur  et  se  partage  , à 
son  extrémité , en  deux  tuyaux  inégaux  pour  le  diamètre  et  pour 
la  longueur.  Ces  tuyaux  ont  une  structure  bien  différente  de  celle 
du  reste  du  siphon  ; ils  sont  composés  d’un  petit  nombre  d’anneaux 
fibreux,  à fibres  transverses,  et  qui  peuvent  se  détacher  les  uns 
des  autres  avec  facilité,  lorsque  l’animal  est  mort.  Sur  le  bord  ex- 


LES  SOLÉNACÉES. 


117 

terne  des  derniers  anneaux , s’élèvent  des  palpes  tentaculaires  ex- 
Il  éuieiiieiit  sensibles , qui  servent  à avertir  l’animal  du  contact  des 
corps  qui  rapprochent. 

La  bouche  s’observe  dans  le  sillon  profond  qui  existe  entre  lo 
muscle  adducteur  antérieur  et  la  hase  du  pied;  cette  bouche  est 
médiane,  symétrique,  Iransverse  : elle  se  présente  sous  la  forme 
d’une  fente  assez  étroite , garnie  de  chaque  côté  de  deux  petites 
lèvres  membraneuses  que  Ton  voit  se  continuer  en  une  paire  de 
palpes  labiales,  lancéolées  et  fixées  sur  la  partie  latérale  du  corps, 
dans  la  moitié  de  leur  longueur.  Ces  palpes  sont  très  mollasses  j 
elles  sont  lisses  d’un  côté,  ridées  à leur  face  interne;  elles  ne  sont 
pas  lamelleuses  de  ce  côté  comme  dans  la  plupart  des  conchyfères.' 
Au  point  du  corps  où  les  palpes  labiales  se  détachent , commencent 
à se  montrer  de  chaque  côté  uue  paire  de  feuillets  branchiaux  qui,' 
d’abord  séparés , se  réunissent  bientôt  à la  base  du  pied  et  vont  se 
prolonger  jusqu’à  l’extrémité  du  siphon  branchial.  Ces  feuillets 
branchiaux  sont  étroits,  presque  également  larges,  et  ils  présenr 
lent,  dans  leur  disposition,  un  caractère  qu’on  ne  rencontre  guère 
dans  d’autres  genres.  Lorsque  l’on  ouvre  le  siphon  branchial  dans 
toute  sa  longueur  , et  lorsque  l’on  veut  soulever  la  branchie,  on 
la  voit  se  détacher  avec  une  extrême  facilité,  de  telle  sorte  qu’il 
semblerait  qu’elle  est  ajustée  et  seiüement  posée  dans  la  place 
qu’elle  occupe  ; cependant , en  y faisant  plus  attention , on  s’aper- 
çoit ([UC  l’on  ne  peut  détacher  celte  branchie  sans  rompre  une 
membrane  très  mince.  Lorsque  la  branchie  est  détachée , elle  laisse 
ouverte  une  large  fente  qui  fait  communiquer  alors  le  siphon  bran- 
chiai  avec  celui  qui  reçoit  les  déjections  de  l’anus.  Par  ce  procédé , 
on  est  convaincu  que  la  branchie  elle-mémc  sert  de  cloison  entre 
les  deux  siphons  ; ce  qui , nous  le  répétons , ne  se  montre  dans  au- 
cun des  genres  que  nous  connaissons.  Le  pied  est  énorme,  et  il  a 
presque  la  forme  et  la  grandeur  de  la  langue  humaine;  il  est  co- 
riace, d’un  rouge  livide,  et  consolidé  par  des  parois  musculaires 
fort  épaisses  qui  viennent  se  terminer  en  plusieurs  faisceaux  qui 
adhèrent  dans  l’intérieur  de  la  coquille.  C’est  entre  ces  faisceaux 
musculaires  que  sont  compris  les  principaux  organes  intérieurs  de 
ranimai  ; c’est-à-dire  les  organes  de  la  digestion  et  ceux  de  la  gé- 
nération. Un  œsophage  très  court  pénètre  dans  un  estomac  d’un 
médiocre  volume  ; de  la  paroi  postérieure  de  l’estomac,  s’échappe 
une  première  portion  de  l’intestin  , dans  laquelle  se  trouve  con- 
tenu un  stylet  corné , dont  Tusage  est  inçonnu,  G’çst  do  l’extrémité 


ii8 


TROISIÈME  FAMILLE. 


inférieure  de  la  gaine  de  ce  stjlet  que  commence  fintestin  propre- 
ment dit;  intestin  qui  est  très  grêle,  très  long,  formant  un  grand 
nombre  de  circonvolutions  , dont  une  grande  partie  est  enveloppée 
des  lobes  du  foie.  Après  ces  circonvolulions , rinteslin  gagne  la 
ligne  dorsale  et  médiane  do  l’animal , sc  contourne  sur  le  muscle 
adducteur  postéi  ieur,  et  se  termine  derrière  lui  par  un  petit  pa- 
villon flouant , au  centre  duquel  on  remarque  l’anus.  Cet  anus 
débouche  dans  le  siphon  anal  et  non  dans  la  cavité  commune  du 
manteau , comme  cela  a lieu  le  plus  ordinairement.  Le  foie  est  peu 
volumineux,  il  c^l  verdâtre,  il  occupe  toute  la  base  du  pied,  et 
enveloppe  une  partie  des  organes  de  la  digestion.  Au  moyen  de 
deux  ou  trois  grands  cryptes  biliaires,  il  verse  immétlialement 
dans  l’cstoniac  les  produits  de  la  sécrétion.  Les  organes  de  la  cir- 
culation sont  semblables  a ceux  des  autres  concliyfères,  et  ne  mé- 
ritent pas  une  description  particulière.  Les  organes  du  mouve- 
ment consistent  comme  dans  tous  les  autres  conchyfères  dimyaires 
en  deux  muscles  adducteurs  des  valves  et  en  muscles  propres  du 
pied  et  des  siphons.  Ces  parties  ne  présentant  pas  de  grandes  dif- 
férences avec  ceux  que  nous  connaissons  déjà  dans  d’autres  Mol- 
lusques de  la  même  classe,  nous  croyons  utile  de  nous  abstenir  d’en 
faire  ici  une  minutieuse  description. 

Les  coquilles  du  genre  Solécurle  se  distinguent  facilement  des 
Solens  et  de  celles  des  autres  genres  avoisinans;  elles  sont  allongées, 
transverses  ; les  valves  sont  convexes  , et,  lorsqu’elles  sont  rappro- 
chées, la  coquille  eït  cyündracée.  Elle  est  bâillante  à ses  extrémi- 
tés; les  bords  sont  garnis  d’un  épiderme  mince,  mais  large,  des- 
tiné à couvrir  les  parties  nues  du  manteau;  la  charnière  est  mé- 
diane, elle  SG  compose  sur  la  valve  droite  d’une  seule  dent  cardi- 
nale en  crochet,  et  sur  la  valve  gauche  de  deux  dents  également 
en  crochet  entre  lesquelles  s’interpose  la  dent  delà  valve  opposée; 
il  n’existe  aucune  trace  de  fossettes  cardinales.  Les  valves  sont  main- 
tenues en  contact  au  moyen  d’un  ligament  très  puissant  qui  oc- 
cupe la  moitié  postérieure  du  bord  dorsal.  Par  son  extrémité  pos- 
térieure, ce  ligament  se  confond  avec  l’épiderme,  et  il  concourt  à 
fermer  le  largo  bâillement  dorsal  qui  existe  entre  les  valves  lors- 
que CCS  parties  sont  détruites.  Les  impressions  musculaires  sont 
ovalaires,  elles  sont  peu  écnriéps  ; l’impression  paliéalo  est  assez 
près  du  bord  ventral.  Son  sinus  postérieur  est  très  profond,  on  le 
voit  remonter  jusqu’au  niveau  de  la  charnière.  Outre  les  caractères 
dont  noi>s  venons  de  parler,  il  en  est  un  autre  qui  n’est  pas  moins 


LES  SOLES ACÉES. 


119 

important,  car  nous  le  retrouvons  sans  aucune  exception  éur  toutes 
les  espèces,  ce  sont  des  stries  obliques  plus  ou  moins  nombreuses 
qui  descendent  en  ondulant  du  bord  supérieur  des  valves,  vers  les 
bords  antérieurs  et  inférieurs.  Ce  système  de  stries  est  bien  connu 
dans  le  Soîcn  strigiîatus,  et  nous  le  retrouvons  sans  exception  dans 
toutes  les  vèritaldes  espèces  de  Solécurtes. 

D’après  Poli , les  Solécurtes  habitent  les  plages  sablonneuses  à 
une  médiocre  profondeur;  ils  recherchent  les  mers  tranquilles  , et 
il  est  à présumer  qu’il  en  existe  un  bien  plus  grand  nombre  d’es- 
pèces que  celles  qui  sont  actuellement  répandues  dans  les  collec- 
tions. En  réunissant  tout  ce  que  nous  connaissons  sur  ce  genre, 
nous  y comptons  seulement  six  espèces  ou  vivantes  ou  fossiles; 
de  ces  espèces,  cinq  sont  vivantes,  et  parmi  elles,  deux  appar- 
tiennent à la  Méditerranée;  l’une  d’elles,  le  Solecurtus  strigila- 
tus  ^ se  rencontre  aussi  au  Sénégal  ; ces  deux  especes  se  montrent 
fossiles  dans  les  terrains  subapennins  : en  Italie,  en  Sicile  et  en 
Morée;  et  plusieurs  variétés  se  trouvent  dans  le  second  étage  ter- 
tiaire delà  Gii-onde  et  de  la  Touraine.  Les  autres  espèces  vivantes, 
appartiennent  à l’ocpan  de  l’Inde  et  à l’Amérique  méridionale- 
L’espèce  fossile , propre  aux  environs  de  Paris,  a été  confondue 
])ar  Lamarck,  avec  le  Salen  strîgilatus  quoiqu’elle  en  diffère  de 
la  manière  la  plus  notable.  Ce  genre  ne  s’est  encore  jamais  montré 
dans  les  terrains  crétacés  ou  dans  les  couches  qui  leur  sont  infé- 
rieures. 

ESPECES. 

Solccurle  rose.  Solecurtus  strigilatus,  Blainv. 

s,  tesld  ovato  ohlongâ^  convexâ  ^ cylmdraccâ  ^ tUroque  lutcrc  hia/Uo,  rosedî 
albo  biradiato,  oblique  striatdy  strîis  inscidptisy  undidatU;  cardine  hïdtn^ 
talOy  altevo  umdentatOi 

Chaîna pcîoris,  Roüdelcf.  Hist.  des  poiss.  p,  6, 

Chama  nigra,  Roudelet.  Id,  p.  8. 

Id,  Gessncr.  Nomeucl. aqual.  p,  aSo  cl  a3t. 

/J.  Aldrov,  Deteslac,  p.  471  et  475. 

Chama  nigra,  chama  peloris,  Jonston.  De  exuiig.  aquat.  pl.  i4  . 

Ronan.  Test.  part.  2.  fig.  77, 

Lister,  Coiich.  pl.  416, 

Gualli,  lud,  testa,  pl,  yi.  fig.  G. 


120 


TROISIÈME  FAMILLE. 


Le  Golar  Adans.  6énég.  pl,  19. 

Solen  stn^ilaUis.  Lin*Svsl.  nat.  éd.  10.  p.  673, 

/</.  Lin.  luus.UlU'ic.  p.  475. 

jd.lXn.  éd.  12.  p.  iii5. 

Kiior.  Vergn.  t,  6.  pl.  5.  fig.  4. 

Jd,  Murray,  Fuudani.  Tcsl,  aiiuuuil.  Acad.  l.  8.  p.  147.  pl.  3.  fig,  7. 

Id,  Born.  Mus.  p,  26,  27. 

Favauue,  Conch.  pl.  49.  f.  D.  l. 

Chemn.  Concli.  t.  6.  p.  57.  pl.  6.  fig.  41.  42. 

Speugler.  Mém.  delasoc.  d’Uisl.  nal.  de  Copeuh.  l.  3.  p.  i6o.  lü. 

ËQcycl.  métli.  pl.  224.  fij,.  3. 

Schrot.  Eiul.  t.  2,  p.  Û29. 

Gmel.  Sysl,  nat.  éd.  i3,.p.  3225.  n'’  7,  exclus,  varietate. 

Olivi.  Zool.  adriat.p.  97.  u®  5, 

Poli.  Tcslac.  1. 1.  pl.  12.CI  p!,  r3, 

>Yood. Gener. Concli.  p.  127.  11”  12.  pl.  3ü.  fig,  i, 

Dillw.  Cat,  t,  1.  p.  G4.  u"  17. 

Laoïk.  Ann.  s,  vert.  t.  5.  p.  435,  u®  1 S. 

• V f.  Solecuvtus  slrîgilalus»  Blaiuv,  Malac.  p.  668.  p,  79!^  fig.  4. 

Solen  slrîgdatus,  IJesb.  Encycl.  met.  vers,  t,  3,  p.  962.  u®  lo. 

Id,  Payrcaud.  Cat,  des  moll.  de  Corse,  p.  28.  u®  34. 

Solen  stri gilatus,  Pliilippi.  Enum.moll.  Siciliæ,  p.  5. 11°  5.  Exclus,  variel,  p. 

Testa  füssiUs.  Philip,  loc.  cit.  pl.  0,  n®  6, 

Habile  la  MédileiTanée,  les  côtes  d’Afrî(pie^  le  Sénégal.  Fossile  eu  Italie^  eu 
Sicile,  en  Morée,  dans  Télagc  supérieur  des  lerraius  tertiaires. 

Une  variété  sc  rcucoulrc  également  fossile  aux  environs  de  Dax  et  de  Bor- 
deaux, dans  les  falluns  de  la  ïouraiac,  aux  environs  de  Vienne  eu  Au- 
triche, dans  le  second  étage  des  terrains  tertiaires, 

« Cette  coquille  est  allongée,  Iransverse,  ovalaire  ; ses  valves  sont 
Ires  convexes,  ce  qui  donne  à la  coquille  une  forme  subcylindacéc, 
lorsque  les  valves  sont  réunies.  Le  côté  antérieur  et  le  postérieur 
sont  trèsbaillans , et  les  valves  ne  se  touchent  réellement  que  par 
deux  points  opposés  de  leur  contour,  la  charnière,  une  petite  por- 
tion du  bord  inférieur  ou  ventral.  La  coquille  est  subéquilalérale, 
la  charnière  n*est  pas  tout-à-fait  médiane  ; en  divisant  la  longueur 
de  la  coquille  en  cinq  parties,  la  charnière  serait  vers  les  deux 
cinquièmes  antérieurs.  Les  crochets  sont  à peine  proéininens.  Im- 
médiatement au-dessous  dVux,  Ja  charnière  présente  sur  la  valve 
gaucho,  deux  dents  cardiuajes,  aplaties  latéralement,  un  peu 


LES  SOLEWACEKS. 


1^1 


divergentes,  et  recourbées  en  crochet  dans  leur  longueur;  sur  la 
valve  droite,  se  montre  une  seule  dent  aplatie,  qui , dans  le  rap- 
prochement des  valves,  s’interpose  entre  les  dents  cardinales  de  la 
valve  opposée;  le  bord  supérieur  dorsal  est  peu  épais,  la  partie 
la  plus  épaissie  est  occupée  par  une  nymphe  épaisse  et  saillan  te 
sur  laquelle  le  ligament  prend  une  insertion  très  solide.  Les  bords 
sont  simples  et  tranchans  ; dans  les  individus  bien  frais,  ils  sont 
garnis  d’une  zone  assez  large,  d’un  épiderme  mince,  qui  déborde 
beaucoup  la  partie  solide  du  tôt,  et  qui  est  destinée,  comme 
nous  l’avons  vu , à couvrir  une  grande  partie  de  la  surface  nue  du 
manteau.  A l’intérieur,  la  coquille  est  lisse  et  polie,  elle  est  d’un 
beau  rose  tendre,  blanchâtre,  vers  l'intérieur  des  crochets.  L’im- 
pression musculaire  antérieure  est  placée  immédiatement  au- 
dessous  du  bord  supérieur;  elle  est  ovalaire,  sublougitudinale , 
et  elle  se  confond  par  son  extrémité  supérieure  et  postérieure  avec 
une  autre  petite  impression  ovalaire,  produite  par  un  des  petits 
muscles  du  pied.  L’impression  musculaire  postérieure  est  située 
vers  le  tiers  postérieur  de  la  longueur  totale  ; elle  est  ovale , 
semi-lunaire  et  très  rapprochée  du  bord  supérieur.  De  son  angle 
inférieur  et  anterieur  part  une  ligue  qui  remonte  d’abord  paral- 
lèlement au  bord  , et  qui  étant  arrivé  au  niveau  du  bord  supérieur 
de  l’impression  musculaire  antérieure,  sc  recourbe  pour  se  re- 
porter de  nouveau  en  arrière  ; celte  ligne  est  le  résultat  des  mus- 
cles rélracteurs  des  siphons , et  sa  forme  , ses  proportions  doivent 
être  étudiées  avec  attention,  parce  qu’elles  peuvent  être  d’un  grand 
secours  pour  la  distinction  tles  espèces.  Le  Solen  slrigilatus  esta 
l’extérieur  d'une  belle  couleur  rose,  plus  ou  moins  intense,  suivant 
les  individus  ; sur  cotte  couleur,  se  dessinent  deux  rayons  blan- 
châtres, divergens,  qui  partent  du  crochet.  La  surface  extérieure 
présente,  non-seulement  des  stries  d’accroissement , mais  encore 
un  nombre  plus  ou  moins  considérable  de  stries  onduleuses , fines, 
profondément  empreintes,  et  qui  se  dirigent  obliquement  du 
bord  supérieur  des  valves  vers  le  bord  inférieur,  et  quelques-unes 
vers  le  boi*d  antérieur.  Ces  stries  , comme  nous  le  disions,  sont 
variables  pour  le  nombre. Dans  les  individus  de  la  Méditerranée, 
elles  varient  de  dix-huit  à quarante , quelquefois  davantage  ; dans 
les  individus  fossiles  de  Bordeaux  et  de  la  Touraine,  ces  stries  se 
multiplient  quelquefois  singulièrement  sur  l’extrémité  postérieure 
de  la  coquille;  et  si  à ce  caractère  il  s’en  était  joint  quelques  au- 
tres, nous  u’aurioas  pas  hésité  a établir  ^no  espèce  particulière  pour 


122 


TROISIEME  FAMILIR. 


celte  variété.  Les  grands  individus  ont  48  millimètres  de  longueur 
et  82  de  large. 

Solécurte  blanc.  Solecurtus  cajidklus.T^QÛx* 

Testa  ovato^iransvcrsâ^  candîdâ  et  oblique  tenue  striata  ^ in  latere  postico 
striîs  dîvergentîbns,  cardine  dexlo  hidenlato  altero  unidentato^sinu  palld 
profundissîmo  ^ conîco. 

Varletas  Soient  strîgîlatî,  Cbemn,  Conch.  t,  6.  p.  60.  pi,  6.  fig.  43.  Exclus, 
synonym . 

Solcn  strigdatiis.  Var.  Olivi.  Zool.  adrial.p.  97  el  99. 

Soleil  candidus»  Renieri.  Cat.  des  coq.  deTAdriat. 

Soleil  strigüaius.  Var,  p.  Philippi,  Euuin.  moll.  Siciliæ,  p.  5.  u®  3. 

Testa  fossilis»  Solen  candidus»  Brocchî,  Coucli.  foss,  subap.  t.  □,  p.  497,  n**  4t 

Id,  Philippi.  loc.  cil.  p.  7. 

Habite  la  Méditerranée,  se  trouve  fossile  aux  environs  de  Perpignan,  en 
Italie  el  en  Sicile,  dansPetage  supérieur  des  terrains  tertiaires. 

Celte  coquille  est  toujours  d’un  moindre  volume  que  le  Solen 
strigilatusy  et  elle  est  en  proportion  plus  large  et  plus  courte:  elle 
est  ovale,  oblongue,  obtuse,  et  très  bâillante  à ses  extrémités  : le 
bord  inférieur  est  parallèle  au  supérieur  ; ses  boi’ds  sont  simples 
dans  toute  leur  étendue,  et  lorsque  les  valves  sont  réunies,  elles  ne 
se  touchent  que  par  deux  points  opposés  de  leurs  bords,  la  char- 
nière et  le  bord  inférieur  ventral;  la  cliarnière  est  linéaire,  le 
bord  supérieur  est  très  mince;  une  nymphe  courte,  dont  la  lon- 
gueur égale  la  sixième  partie  du  grand  diamètre  de  la  coquille, 
est  le  seul  point  oii  ce  bord  supérieur  soit  plus  épais  ; la  charnière 
consiste  sur  la  valve  droite  en  deux  dents  cardinales,  inégales  et 
recourbées  en  crochet  ; de  ces  deux  dents  l’antérieure  est  épaisse  et 
conique,  la  postérieure  est  comprimée,  plus  oblique,  et  sublamel- 
liforme. Une  seule  dent  aplatie  et  fragile  se  montre  sur  la  valve 
gauche.  A l’intérieur,  les  valves  sont  parfaitement  blanches,  les 
impressions  musculaires  sont  à-peu-près  de  la  même  taille,  elles 
sont  en  proportion  plus  écartées  que  dans  le  Solen  strigUatus.^Wes 
sont  ovales  semi-lunaires^  et  l’antérieure  est  plus  oblique  que  la 
postérieure.  L’impression  palléale  est  encore  plus  profonde  que 
celle  de  l’espèce  précédente,  mais  elle  n’a  pas  toul-à-fait  la  même 
forme;  au  lieu  d’élre  un  segment  d’un  ellipsoïde  très  allongé,  elle 
est  beaucoup  plus  étroite  au  sommet  et  proportionnellement  plus 
large  à la  base,  ce  qui  provient  de  ce  que  la  partie  inférieure  de 
l’impression  est  beaucoup  plus  rapprochée  du  bord;  à l’extérieur. 


LES  SOLÉNACÉES. 


123 


cetle  coquille  est  blaiiclie  comme  en  dedans  : on  remarque  vers  le 
bord  les  restes  d^un  épiderme  mince  et  caduc  d’un  brun  grisâtre} 
les  stries  obliques  sont  très  nombreuses,  elles  deviennent  très  fines 
sur  le  coté  postérieur,  ou  elles  sont  disposées  en  divergeant  comme 
celles  du  Liicina  dwaricafa. 

Nous  avons  quelques  remarques  a faire  sur  la  manière  dont  cette 
espèce  a été  comprise  par  la  plupart  des  auteurs.  Chemnitz  la  donne 
comme  une  variété  du  Solen  strigilatus  y mais  par  une  erreur  peu 
pardonnable  à un  naluralisie  de  ce  mérite,  il  rapporte  dans  la  sy- 
nonymie de  celte  variété  des  espèces  qui  n’ont  avec  elle  aucun 
rapport.  Imitateurs  serviles,  la  plupart  des  conchyliologues  qui  ont 
écrit  depuis  Chomniîz  ont  copié  sa  synonymie  défectueuse.  Shrœ- 
ter,  Gmelin,  Dilhvin  méritent  le  reproche  que  nous  leur  adressons 
d’avoir  négligé  de  vérifier  la  synonymie  de  Chemnitz.  Celte  inté- 
ressante espèce  est  plus  rare  que  le  Sohn  strigiîalus,  les  individus 
que  l’on  rencontre  le  plus  fréquemment  ont  25  millimètres  de  long 
et  55  de  large. 

Solccurte  de  Lamarck,  Solecurtus  Lainarcldi.  Desh. 

Tcstâ  elongato-transversây  angustà,  subeqmlateraHi,  depressâ^  in  medîo  coarc-^ 
tatà^  tenuissime  et  oblique  striatà;  striîs  postice  suhdïvaricaiUy  impressîone 
pallîi  angtisiàf  oblique  ascendente, 

Solen  strlgilatiis.  Lamk.  Ann.  du  mus.  t.  7.  p,  4a8.  4.  et  t.  12.  pl.  43. 

Cg.  5.  a.  î>. 

Id.  Desh.  Coq.  foss.  des  environs  de  Paris.  1. 1.  p.  27. 11°  6.  pl.2.  fig.  22.  23. 

Solen parlsîensls.  Desli.  dans  Lanik.  Ann.  s.  vert.  2®  édit.  p.  63.  n°  4. 

Habile....,  fossile  aux  environs  de  Paris,  et  se  trouve  aussi  à Valognes  et  en 
Belgique,  dans  l’élage  Inférieur  des  terrains  tertiaires. 

Dans  sa  description  des  coquilles  fossiles  des  environs  de  Paris, 
Lamarck  a donné  cette  coquille  comme  une  variété  fossile  du  Solen 
strigilaius ; nous-meme,  conduit  par  son  exemple,  avons  adopté 
d’abord  son  opinion  lorsque  nous  avons  de  nouveau  décrit  celte 
espèce  dans  notre  ouvrage  qui  a pour  objet  l’examen  des  memes 
fossiles  ; depuis,  nous  avons  reconnu  notre  erreur,  et  nous  nous 
empressons  de  la  rectifier  en  consacrant  à cette  espèce  le  nom  du 
célèbre  naturaliste  qui  le  premier  Ta  fait  connaître.  Cette  coquille 
est  toujours  plus  petite  que  les  deux  espèces  qui  précèdent,  elle  est 
ovale,  üblongue,  déprimée  ; sa  forme  générale  et  sa  taille  se  rap- 
prochent beaucoup  des  petits  individus  du  Solen  coarctatus.  Comme 


124  QÜATBlÈ.Mii  FAMILLE. 

celte  dernière  espèce,  celle-ci  est  sensiblement  arcjnée  dans  sa 
longueur  ; elle  est  obtuse  et  très  biiiilanle  à ses  extrémités  j elle  est 
.légèrement  contractée  et  déprimée  dans  son  milieu.  Elle  est  plus 
inéquilatérale  que  le  Solen  candidus,  et  ses  crochets  sont  un  peu  plus 
pointus  et  plus  saillans.  Le  bord  cardinal  est  fort  étroit  ; on  trouve 
deux  dents  comprimées  sur  la  valve  droite  ; une  seule  non  moins 
comprimée  sur  la  gauche  ; les  nymphes  sont  petites,  peu  saillantes  : 
à l’intérieur,  les  valves  présentent  de  petites  impressions  muscu- 
laires à-peu-près  égales,  ovales,  semi-lunaires;  mais  ce  qui  distin- 
gue pai'ticulièremeut  celte  espèce  de  toutes  ses  congénères,  c’est  la 
forme  toute  particulière  de  son  impression  palléale  ; elle  est  petite 
en  proportion  de  la  grandeur  de  la  coquille:  dans  les  autres  espè- 
ces, une  ligne  transverse  qui  partagerait  la  surface  interne  des 
valves  en  deux  parties  égales,  partagerait  aussi  le  sinus  palléal  en 
deux  cotés  symétriques.  Dans  cette  espèce,  au  contraire  , la  ligne 
qui  passerait  par  Taxe  du  sinus  palléal  couperait  très  obliquement 
Taxe  transvorsc,  et  passerait  de  Timpression  musculaire  antérieure 
dans  l’angle  inférieur  et  postérieur  de  la  coquille.  Cette  obliquité 
du  sinus  ii’esL  pas  le  seul  caractère  qu’il  fournisse,  il  est  plus  étroit 
à sou  entrée  que  vers  le  milieu  de  sa  longueur  ; quoiqu’il  s’enfonce 
jusqu’au  niveau  de  la  charnière,  ce  sinus  est  réellement  court, 
parce  que  l’iiuprossioii  qu’il  détermine  s’arrête  loin  de  l’extrémité 
postérieure  do  la  coquille.  Les  stries , dont  celte  coquille  est  cou- 
verte, sont  beaucoup  plus  fines  et  plus  nombreuses  que  dans  les 
autres  espèces;  elles  sont  onduleuses,  très  rapprochées  sur  l’extré- 
mité postérieure,  et  uu  peu  plus  largement  espacées  suivie  milieu 
et  sur  le  coté  anî'’ricur.  Cette  coquille  serait  li  es  commune  si  elle 
était  moins  fragile;  le  plus  grand  individu  que  nous  ayons  vu  a i8 
millimètres  de  longueur  et  44  fie  large. 


QUATRIÈME  EAMILLE. 

Les  Glycimerides.  Dfish. 

GAUACTEHES. — Animal  ovale,  allongé,  régulier,  symétri- 
que, ayant  les  lobes  dti  manteau  réunis  clans  la  plus  grande 
partie  do  leur  éleycluc,  et  prçlongcg  à rcJvtt’éuiilc  posté- 


J.T.9  GLYCtMHRTDES. 


ia5 

rieure  en  deux  siphons  très  allongés,  réunis  sous  une  en- 
veloppe comnume;  masse  abdominale  ovalaire,  tcrmine'e 
par  lin  pied  petit,  et  presque  rudimentaire,  en  face  duquel 
se  trouve  au  manteau  une  fente  étroite. 

Coquille  plus  ou  moins  épaisse,  très  baillante  du  côté 
postérieure,  charnière  simple,  calleuse,  ayant  quelquefois 
sur  chaque  valve  une  dent  en  crochet;  ligament  extérieur 
allongé,  très  épais,  et  inséré  sur  des  nymphes  saillantes  et 
fort  solides. 

GENRES.  — GlfcimerCy  Panopée^  Pholadomye, 

observations  cÉxfRAEES.  — Lcs  trois  genres  que  nous  réunissons 
dans  la  famille  des  Glycimérides  ont  élé  diversement  distribués 
par  les  auteurs  avant  qu’ils  eussent  connaissance  des  animaux  de  la 
plupart  d’entre  eux  ; c’est  ainsi  que  Lamarck  comprenait  dans  sa 
famille  des  Solénacées  les  deux  genres  Panopée  et  Glycimère.  Cu- 
vier les  rassemblait  dans  son  groupe  trop  considérable  des  Enfer- 
més; etM.  deBlainvilie  les  comprenait  dans  sa  famille  trop  étendue 
des  Pyrolidées.  M.  Valenciennes  daus  un  ouvrage  récemment  pu- 
blié sur  les  Panopées  a proposé  de  les  réunir  à la  famille  des  Mjai- 
res.  Sans  doute  que  ces  diverses  opinions  contradictoires  en  appa- 
rence apprécient  cependant  assez  juste  les  rapports  naturels  des 
genres,  dont  il  est  question  ; cependant  il  nous  paraît  plus  conve- 
nable encore  de  proposer  pour  eux  une  petite  famille  à part,  parce 
qu’ils  offrent  plusieurs  caractères  que  ne  présentent  jamais  ni  les 
genres  des  Solénacées,  ni  ceux  des  Myaires;  nous  avons  vu,  en 
effet,  que  dans  la  première  de  ces  familles,  l’animal,  en  proportion 
de  sa  grosseur,  a un  pied  très  grand,  et  les  siphons  généralement 
courts.  Le  genre  Soléciirte,  qui  pourrait  faire  exception  sous  ce 
rapport , conserve  néanmoins  le  caractère  d’un  pied  très  largement 
développé.  Dans  les  Myaires,  l’animal  a bien  do  la  ressemblance 
avec  celui  des  Glycimérides , mais  les  coquilles  présentent,  dans  la 
charnière,  des  difïérencesdont  il  faut  tenir  compte  sans  leur  donner 
néanmoins  plus  de  valeur  qu’elles  ne  méritent.  Dans  la  famiile 
des  Myaires,  nous  ne  mettons  que  des  coquilles  à ligament  inté- 
rieur; et  ici,  nous  comprenons  des  animaux  lies  voisins  des 
Myaires  parleurs  caractères  généraux,  mais  ayant  à leurs  coquilles 
un  ligament  externe. 


4 2G  QtiTRliME  FAMIILE. 

Des  trois  genres  que  nous  réunissons  dans  notre  famille  des  Gly- 
cimérides,  deux  sont  entièrement  connus,  ce  sont  les  Pauopécs  et 
les  Glycimères;  le  troisième,  établi  depuis  peu  d*années  par 
M.  Sowerby,  était  généralement  fort  négligé  : quelques  espèces  , 
fossiles  rassemblés  dans  les  collections,  étaient  réparties  parmi  les 
Lutraires  et  les  Myes , ou  étaient  confondues  avec  les  Cardites  et 
les  Buccards,  et  enfin,  Lamarck  en  avait  rapporté  quelques-unes 
au  genre  Trigonie.  La  découverte  d’une  espèce  vivante  du  genre 
Pholadomye  a fixé  enfin  l’attention  des  conchyliologues  sur  ce 
genre  intéi'essant , et  après  en  avoir  étudié  les  caractères  sur  un 
grand  nombre  d’espèces,  nous  pensons  que  ce  genre  peut  être 
compris  dans  notre  famille  des  Glycimères  ; cependant , comme 
nous  le  verrons  plus  lard,  les  Pholadomyes,  par  le  peu  d’épaisseur 
de  leur  tel,  ont  beaucoup  de  rapport  avec  les  Tiiracies  et  les  Ana- 
tines,  mais  elles  en  diffèrent  essentieliement  par  la  position  du  li- 
gament. Nous  ne  pensons  pas  que  les  rapports  que  nous  donnons 
aujourd’hui  à ce  genre  soient  définitifs,  iis  ne  le  deviendront  qu’au 
moment  où  l’animal  sera  connu. 

Les  animaux  de  la  famille  des  Glycimères  présentent  plusieurs 
caractères  communs:  leur  manteau  est  généralement  épais;  ses 
bords  sont  larges,  fortement  adhérens  à la  coquille  sur  laquelle  ils 
laissent  une  impression  profonde.  Les  siphons,  qui  terminent 
postérieurement  l’animal,  sont  très  allongés  et  fort  épais;  réunis 
sous  une  enveloppe  charnue  commune , ils  peuvent  prendre  un 
allongement  très  considérable,  et  l’animal  vivant  profondément 
enfoncé  dans  lesable,  sans  quitter  les  profondeurs  où  il  se  cache,  se 
sert  de  cette  grande  extensibilité  de  ses  siphons  pour  communi- 
quer avec  le  liquide  ambiant  et  établir  les  couraus  nécessaires  à 
l’entretien  de  ses  fonctions.  Dans  les  Panopées,  ces  siphons  ont  un 
muscle  rélracteur  très  court,  mais  très  épais,  qui  laisse  sur  la  co- 
quille une  impression  plus  ou  moins  sinueuse,  selon  les  espèces: 
ppus  en  connaissops  une  curieuse  sous  ce  rapport,  dans  laquelle 
celle  sinuosité  est  presque  entièrement  effacée.  Dans  les  Glyci- 
mères les  siphons  sont  en  proportion  plus  courts,  mais  ils  sont 
beaucoup  plus  gros.  Au  reste,  cet  animal  n’est  connu  que  dans 
un  état  violent  de  coulraction,  et  il  est  à présumer  que,  pendant 
sa  vie,  ses  diverses  parties  jouissaient  d’une  grande  extensibilité. 
La  grande  épaisseur  des  parois  musculaires  de  ces  siphons  annonce 
que  l’animal  peut  les  allonger  considérablement. 


trs  GIïCüïEniPES. 


127 


GENRE  ONZIÈME. 

OLTCIMÈRE.  Glycîmcris»  (Lamk.) 

PI.  4.fîg.  1-2-3. 

CARACTERES  GÉNÉRIQUES.  — Animal  ovalc , oblong , subcy- 
llndracé,  partout  d’un  noir  très  foncé j lobes  du  manteau  fermés 
dans  presque  toute  leur  circonférence.  Une  petite  ouverture 
antérieure  en  face  de  l’extrémité  de  la  masse  abdominale  ; deux 
siphons  réunis  sous  une  enveloppe  commune,  extrêmement 
épaisse,  et  présentant  deux  petites  ouvertures  à l’extrémité. 
Palpes  labiales  , grandes  et  détachées  dans  presque  toute  leur 
étendue.  Pied  petit , placé  au  sommet  d’une  masse  abdominale 
considérable;  branchies  larges  et  flottantes  dans  la  cavité  du 
siphon  branchial. 

Coquille  ovale , transverse  , très  baillante  de  chaque  côté; 

, charnière  calleuse,  sans  dents, nymphes  très  saillantes  pour  un 
ligament  extérieur  bombé;  épiderme  très  épais  et  débordant. 

STNONYxRiE  GÉNÉRIQUE.  — savcur  clouceâtre*  — 

Mja  siliqua;  Chemnitz.  — Cyrtodaria  ; Daudin. 

OBSERVATIONS.  — Lcs  ancicDS  donnaient  le  nom  de  Glycimères, 
en  grec  ^X'jxup.est^'sç  , aux  substances  qui  ont  un  goût  douceâtre  ou 
fade;  plusieurs  Mollusques  comestibles  furent  indifleremnient  dé- 
signés sous  ce  nom,  et'Pline  l’applique  particulièrement  à quelques 
coquilles  bivalves  que  les  auteurs  du  seizième  siècle  crurent  recon- 
naître, soit  dans  lesMyes,  soit  dans  les  Lulraires.  Rondelet,  et 
après  lui  Gesnor  et  Jonston  pensent  que  le  Ckama  glycimens  de 
Pline  est  une  coquille  vivant  en  abondance  dans  l’Océan  euro- 
péen , et  que  Linné  a rapportée  à son  genre  Mje  , sous  le  nom  de 
Mya  arenaria;k  celte  espèce,  Aldrovandeen  ajoute  deux  autres: 
la  première  est  VAnodonta  cygnœa , la  seconde  est  devenue  le  type 
du  genre  Panopée.  La  nomenclature  linnéenne , ayant  abandonné 


128  OüATRïKHi:  mrln.E. 

le  Chaîna  glycimcns  des  anciens  auteurs  , Lamarck  a repris  ce 
mot , oublié  et  abandonné  pour  rappliquer  à un  genre  que  les 
anciens  ne  connurent  jamais,  et  dont  Linné  lui-même  ne  fait 
pas  mention.  Lamarck  n’a  pas  eu  toujours  la  même  opinion  sur 
son  genre  Glyciniére:  il  rétablit  d’abord  dans  les  mémoires  de 
la  société  d’histoire  naturelle  , en  1799,  pour  le  Mya  glycxmeris 
de  Born  , qui  est  une  véritable  Panopée.  La  mémo  année  , 
Daudin  proposait  sous  le  nom  de  Cyrlodaire,  un  genre  ayant 
pour  type  le  Mya  siliqua  de  Cliemnilz,  mais  Lamarck,  en  pu- 
bliant , en  1801  , son  Système  des  animaux  sans  vertèbres,  trans- 
porta le  nom  Glycimères  du  Mya  glycîmeris  de  Born  , au  Mya  si- 
îiqiia  de  Chemnitz.  Ce  genre  avait  donc  deux  noms,  celui  de 
Daudin  et  celui  de  Lamarck  ; mais  les  travaux  de  ce  dernier  zoo- 
logiste ayant  prévalu,  le  genre  de  Daudin  fut  oublié  , et  celui  de 
Lamarck  adopté.  M.  Roissy  le  mentionne  dans  le  Bufibn  de  Son- 
nini,  et  depuis  il  fut  maintenu  dans  toutes  les  méthodes.  Aucun 
zoologiste  ne  contesta  la  valeur  de  ce  genre,  mais  tous  ne  furent  pas 
d’accord  sur  la  place  qu’il  devaitoccuperclans  la  série.  Dans  la  clas- 
sification des  Mollusques  que  Lamarck  publia  en  1801,  avec  cette 
sagacité  qui  caractérise  ce  grand  naturaliste,  il  mit  les  Glycimères 
entre  les  Solens  et  les  Myos.  Lorsqu’il  créa  des  familles  natu- 
relles, dans  sa  philosophie  zoologique,  il  entraîna  les  Glycimères 
dans  la  famille  des  Solénacées  5 mais  comme  cette  famille  est 
suivie  de  celles  des  Myaires , l’ordre  des  rapports  ne  fut  véritable- 
ment pas  changé.  Cuvier,  dans  sa  classification  du  règne  animal, 
a constamment  maintenu  le  genre  qui  nous  occupe  dans  Ig  voisi- 
nage deMyes.De  tous  les  zoologistes,  celui  qui  a été  Je  plus  incer- 
tain au  sujet  des  Glycimères  est  M.  de  Blainville:  d’abord,  dans 
son  article  Glyciraère  du  Dictionnaire  des  sciences  naturelles,  il 
suppose  que  l’animal  est  voisin  de  celui  des  Solens.  M.  de  Blain- 
yilie  maintient  cette  opinion  clans  son  article  Mollusques  du 
même  ouvrage,  ainsi  que  dans  son  Traité  de  malacologie  j mais  en 
consultant  les  corrections  et  additions  qui  sont  à la  suite  de  cet 
ouvrage,  on  trouve,  à la  page  682,  une  note  par  laquelle  M.  de 
Blainville  change  d’opinion,  et  paraît  entièrement  convaincu  c|ue 
le  genre  Glycimère  doit  être  transporté  dans  sa  famille  des  Sub- 
mylilacées , dans  le  voisinage  des  Bïullettes  et  des  Anodonles.  Pour 
appuyer  cellenouvelle  manière  de  voir,  M.  de  Blainville  prétend  que 
le  bâillement  des  coquilles  n’a  rien  de  commun  avec  celui  que  l’on 
observe  dans  celles  de  sa  famille  des  Pyloridées.  Mais  clans  les  nou- 


LES  rrLYCtMEIVlDES.  1^9 

velles  additions  et  corrections,  M.  de  Blainville  revient  sur  ses 
deux  premières  opinions,  et  en  propose  une  troisième  qui  con- 
siste à rapprocher  les  Glycimères  des  Solèmyes.  Après  ces  contra- 
dictions dans  un  aussi  savant  anatomiste  que  M.  de  Blainville, 
les  conchyliologues  devaient  éprouver  de  Tembarras  pour  placer  le 
genre  Glycimère,  et  il  devenait  nécessaire  d’ajouter  la  connais- 
sance de  l’animal  a celle  de  la  coquille,  pour  déterminer  enfin  les 
rapports  naturels  du  genre.  Pendant  Je  peu  de  temps  queM.  Au- 
douin  a occupé  la  chaire  de  conchyliologie  au  Muséum  d’histoire 
naturelle,  il  trouva  , dans  les  collections,  un  bel  individu  de  la 
Glycimère  avec  son  animal  conservé  dans  la  liqueur  ; il  s’empressa 
de  le  faire  dessiner,  et  il  en  fil  une  anatomie  qu’il  publia,  en  i 829, 
dans  le  vingt-huitième  volume  des  Annales  des  sciences  naturelles. 
Quelques  années  après,  on  sut  que  la  Glycimère  vit  en  abondance 
dans  les  plages  sableuses  du  banc  de  Terre-Neuve  ; etM.  Caillaud 
qui  en  reçut  des  premiers,  eut  roblige'ance  de  nous  communiquer 
cet  animal  intéressant.  Depuis  cette  époque,  les  zoologistes  ont 
pu  établir  convenablement  et  définitivement  les  rapports  des 
Glycimères  avec  les  genres  qui  l’avoisinent.  M.  Audouin  conclut 
que  le  genre  qui  nous  occupe  est  plus  voisin  des  Myes  que  des 
Solens  ; nous  pensons  que  celle  appréciation  confirmative  de  l’opi- 
nion de  Cuvier  est  plus  juste  que  celle  de  Lamarck. 

L’animal  des  est  allongé , cylindracé,  fort  épais  ; ses 

extrémités  sont  obtuses,  et  la  partie  qui  est  recouverte  par  la 
coquille  comprend  à-peu-près  les  deux  tiers  de  sa  surface  totale. 
Les  lobes  du  manteau  sont  épais,  musculeux  sur  les  bords.  Ces 
bords  , en  partie  à découvert  , sont  garantis  par  un  épiderme 
coriace,  plus  épais  que  dans  la  plupart  des  autres  Mollusques  de 
même  taille,  et  se  continuant  avec  celui  de  la  coquille.  En  exami- 
nant le  manteau,  on  trouve,  à son  extiémilé  antérieure,  une  fente 
de  quelques  ligues  d’étendue  dans  laquelle  ranimai  peut  passer 
son  pied.  Lorsque  les  siphons  sont  contractés  , ils  sont  épais  et 
cylindriques,  réunis  en  une  seule  masse  charnue,  très  épaisse,  au 
sommet  de  laquelle  on  trouve  deux  petites  ouvertures  qui  commu- 
niquent avec  la  cavité  intérieure  des  siphons.  Si  l’on  coupe  en 
travers  ces  siphons  , on  voit  qu’ils  sont  inégaux  et  séparés  dans 
toute  leur  longueur  par  une  cloison  longitudinale.  Le  plus  petit, 
qui  est  le  supérieur,  est  destiné  à Tanns  ; l’autre  est  destiné  à rece- 
voir une  partie  des  branchies.  Lorsque,  par  une  section  longitu- 
dinale , on  sépare  les  lobes  du  manteau  , on  trouve  dans  leur 


y 


QUATRIEME  FAMILLE. 


l3o 

cavité  une  masse  abdominale,  oblongue,  assez  épaisse,  à l'extrémité 
antérieure  de  laquelleeal  implanléun  petit  piedconiqueetréduit  à 
Téiat  rudimentaire.  Sur  Ja  ligne  médiane,  entre  le  muscle  adducteur 
antérieur  et  la  niasse  commune  des  viscères , on  trouve  l’ouverture 
de  la  bouche  profondément  cachée  et  garnie  de  très  grandes  lèvi  es 
qui  se  continuent,  de  chaque  côié,  en  une  paire  de  grandes  palpes 
labiales,  triangulaires,  libres  et  très  finement  striées  en  leur  face 
interne.  Cette  bouche  pénètre  dans  l’estomac  au  moyen  d’un  œso- 
phage membraneux  assez  long.  L’estomac,  comme  dans  la  plupart 
des  A-céphalés  , est  une  poche  ovalaire , enveloppée  par  la  masse  du 
foie  et  recevant,  par  deux  cryptes  biliaires  principaux,  les  produits 
de  la  sécrétion  de  celle  glande.  Vers  l’extrémité  postérieure  de 
l’estomac,  s’ouvre  l’ouverture  pylorique  débouchant  dans  un  intestin 
grêle,  contourné  en  un  assez  grand  nombre  de  circonvolutions  très 
petites  et  irrégulières.  C’esl  après s’elre  ainsi  tortillé,  qu’il  se  place 
dans  la  ligne  médiane  et  dorsale  de  l’animal,  et  vient  se  terminer 
en  un  anus  très  court,  à l’origine  du  siphon  anal.  Lorsque  l’animal 
est  contracté,  ses  branchies  sont  assemblées  en  un  paquet  plissé 
comme  un  jabot,  situé  à l’extrémité  postérieure  de  la  masse  viscérale. 
Comme  dans  le  plus  grand  nombre  des  Mollusques  conchiferes, 
il  y a deux  feuillets  branchiaux  de  chaque  côté.  L’extrémité  anté- 
rieure de  ces  feuillets  vient  se  placer  entre  les  palpes  labiales,  tandis 
que  leur  extrémité  postérieure  flotte  librement  dans  la  cavité  du 
siphon  branchial. 

La  coquille  des  Glycimères  est  ovale,  oblongue:  elle  est  assez 
épaisse,  et  les  valves  rapprochées  restent  exlrêmemetil  bâillantes  à 
l’extrémité  postérieure.  Ce  bâillement  n’est  pas  le  résultat  d’une 
troncature  comme  dans  les  Myes  et  les  Panopées;  niais  il  com- 
mence vers  l’extrémité  antérieure  et  va  en  s’augmentant  jusqu’à 
l’extrémité  opposée.  Le  lest  est  épais,  et  il  est  constamment  revêtu 
d’un  épiderme  d’un  brun  noirâtre,  qui,  dans  les  grands  individus, 
déborde  de  près  de  deux  lignes  la  partie  calcaire.  Les  valves  sont 
très  inéquÜatérales,  et , comme  dans  les  Solémyes,  c’est  le  côté 
postérieur  qui  est  le  plus  court.  La  charnière  est  simple:  son  bord 
est  calleux:  elle  se  termine  par  deux  nymphes  très  épaisses,  sur 
lesquelles  s’attache,  avec  solidité,  un  ligament  extérieur,  très 
épais  , convexe  , et  dont  l’extrémité  postérieure  se  continue  avec 
l’épiderme.  A l’intérieur  des  valves , on  trouve  deux  impressions 
musculaires  fort  écartées  , dont  l’antérieure  est  oblongue  et 
triangulaire,  tandis  que  la  postérieure,  placée  louiprès  du  bord,  est 


LES  GLYLIMEAIDES. 


l3l 


ovalaire  et  semble  se  confondre  avec  l’impression  du  muscle  rétrac- 
leur  des  siphons.  Ce  muscle  ne  laisse  sur  la  coquille  qu’une  échan- 
crure Ires  courie,  et  l’on  conçoit  qu’il  pouvait  en  eire  ainsi  chez  un 
animal  dont  les  siphons  sont  beaucoup  Irop  considérables  pour  pou- 
voir entrer  jamais  dans  l’intérieur  des  valves.  L’impression  palléale, 
à la  prendre  depuis  l’impression  musculaire  postérieure,  est  d’abord 
voisine  du  bord  ventral  ; elle  y reste  parallèle  dans  une  partie  de  son 
étendue  ; mais  bientôt  elle  rentre  obliquement  pour  gagner  par  le 
piuscourt chemin  l’extrémité  de  l’impression  musculaire  antérieure. 

Lamarck  a compris,  dans  son  genre  Glycimère,  plusieurs  espèces 
qui  ne  peuvent  y rester  : l’une,  Glycimeris  arctica,  est  une  véri- 
table Panopée;  l’autre,  Glycimeris  margaritacea , est  un  fossile 
de  Grignon , que  nous  avions  pris  d’abord  pour  ïine  valve  libre 
de  Clavagelle;  mais,  après  un  nouvel  examen  de  plusieurs  valves, 
que  nous  avons  fait  avec  M.  Valenciennes,  nous  avons  reconnu 
que  cette  espèce  doit  également  être  rangée  dans  le  genre  Panopée; 
ainsi,  jusqu’à  présent,  il  n’y  a qu’une  seule  espèce  de  Glycimère 
connue,  c’est  la  suivante  : 

ESPÈCE. 

Glycimère  siliqiie.  Glycimeris  siliqua,  Lunik.  pl.  4-  fig.  i.  2.  3. 

Testa  ovato-iransversâ , hiantissimà^  inœquilateraîi  ; latere  postico  breviore  , 
valvulis  epîdermide  nigerrimo  indutis , intiis  disco  calloso  incjassatis . 

Mya  siliqua,  Spengler.  Cat.  rais,  t,  3.  p.  48. 

Id.  Chemn.  Conch,  l.  1 1.  p.  igti.  pl.  198.  f.  1934, 

Favanne.  Conch.  pl.  62.  f.  EE. 

Glycimeris  incrassaia,  Eamk.  Syst.  dosa,  s,  veit.  p.  ia6. 

Cyrtodaria.  Daudin.  Bulletin  des  sc.  nivôse  an  vu.  u®  aa. 

Bosc.  Hist,  nal.  des  coq.  t.  3.  p.  5.  pl.  17.  fig.  i.  a. 

Roissy.  Buf.  de  Sonuini.  t.  6.  p,  428.  pl.  70.  fig.  3. 

Mya  picea,  Wood.  Gener.  (ionch.  p.  96.  pl.  22.  fig.  5. 

Mya  siliqua.  Dillw.  Cal.  t.  r.  p.  49.  D®  21. 

Blainv.  Malac.  pl.  80.  fig.  3. 

Mya  picea,  Wood.  Ind.  lest,  p,  n.  lo.  pl.  2.  fig.  10, 

Glycimeris  siliqua.  Sow,  Gener.  ofshells.  n®  8. 

Laink.  An.  s.  vert,  t,  5,  p.  458. 11**  i. 

Desli.  Encycl.  méth.  vers.  t.  2.p,  17 1. 

Audouin.  Ann.  des  sc.  nat.  t.  a8.  pl.  14.  i5. 

Desl).  dans  Lamk.  An.  s.  vert,  a®  éd.  i.  6,  p.  69.  n*  i. 

Habile  dans  les  parties  sableuses  des  côtes  de  Terre-Neuve. 


9 


QlTATRl^^Mü  FAMILLE. 


î32 

Coquilie  ovale  allongée,  iraiisverse,  très  bâillante  et  très  iné- 
quilalérale.  Sou  côté  postérieur  est  très  court,  les  valves  sont  re- 
vêtues d'une  coucbe  épidermique  fort  épaisse,  lisse  ou  obliquement 
striée,  qui  déborde  quelquefois  de  près  de  deux  lignes  la  partie 
calcaire  du  test;  les  crochets  sont  presque  toujours  décortiqués, 
ce  qui  donne  à celle  coquille  quelque  ressemblance  avec  celles 
des  Muleltes  et  des  Anodonles.  Le  bord  cardinal  est  simple  et 
sans  dents  J il  est  terminé,  à rextréraité  postérieure,,  par  une  très 
grosse  callosité  qui  n’est  autre  chose  que  la  nymphe  devenue  très 
épaisse  et  très  solide  pour  donner  insertion  à un  ligament  très  puis- 
sant; ce  ligament  est  extérieur,  très  bombé;  il  se  continue,  en  arrière 
surtout,  avec  la  partie  de  l’épiderme  qui  recouvre  ranimai  dans  les 
endroits  que  la  coquille  laisse  à nu.  Les  caractères  intérieurs,  dont 
nous  avons  parlé  dans  la  généralité  du  genre,  ayant  éié  empruntés 
a celle  espèce,  nous  pensons  qu’il  est  inutile  de  répéter  ici  ce 
que  nous  avons  dit  précédemment.  Les  grands  individus  ont  85 
millimètres  de  large  et  4®  de  longueur. 


GENRE  DOUZIÈME. 

FAM'O.fiÉE.  Panopœa  (Mén.  de  la  Groje). 

PI.  7.  fig.  1-5. 

GARACTÈKES  généhiquës.  — Animai  ovale,  oblong,  tron- 
qué antérieurement,  prolongé  du  côté  postérieur  en  deux 
longs  siphons,  réunis  sous  une  seule  enveloppe  cylindracée, 
épaisse,  ridée  et  ouverte  à son  extrémité  postérieure  par  deux 
trous  inégaux.  Les  lobes  du  manteau  réunis  dans  toute  leur 
étendue,  si  ce  n’est  dans  la  troncature  antérieure,  où  se 
montre  une  petite  fente  pour  le  passage  du  pied.  Masse  ab- 
dominale considérable  , portant  à l’extrémité  antérieure  un 
pied  petit  et  rudimentaire.  Feuillets  branchiaux  très  inégaux. 
Coquille  ovale,  transverse,  équivalve,  inégalement  bâil- 
lante sur  les  côtés.  Charnière  , ayant  sur  chaque  valve , une 
dent  côuique;  nymphes  épaisses  et  calleuses  pour  un  liga- 


LES  PANOPÉES. 


i33 


ment  extérieur  bombé.  Impression  palléale  écliaucrée  pos- 
térieurement. 

SYNOXYMiB  GÉNÉRIQUE.  — Chatïia  glycimevls;  Aldrovande. 
— Mya  glycimeris;  Born,  Graelin,  Dillw.,  etc.  — Genre 
Glycimeris ^ Lamk.  1799. — Panopœa  Ménard^  Lamk,  Cu- 
vier, etc.,  etc. 

OBSERVATIONS.  — Adrovande  est  le  premier  qui  ait  fait  connaître, 
dans  son  traité  des  Testacés,  un  grand  individu  du  genre  Pano- 
pée , il  lui  donne  le  nom  de  Chama  glycimeris.  Celte  espèce , re- 
produite par  Lister,  a été  comprise  par  cet  auteur  Judicieux  dans 
le  voisinage  des  Solens  et  des  Myes.  Gualtieri  Ta  également  figu- 
rée, et  Born,sans  donner  d'importance  à la  position  du  ligament, 
a placé  cette  grande  coquille  dans  le  genre  Mya  sous  le  nom  de 
Myn  glycîmeris,  Klein  a essayé,  dans  son  Tentamen  astracologicœ , 
d’établir  un  genre  Glycimère,  mais  il  fut  malheureux  dans  cette 
tentative,  car  il  confondit  dans  son  genre  non-seulement  le  Chama 
glycimeris  d’Adrovande,  mais  encore  des  Lutraires  et  desTellines. 
Comme  nous  l’avons  dit  déjà  en  traitant  du  genre  Glycimère, 
Lamarck  proposa  de  nouveau  le  genre  de  Klein  dans  les  Mémoires 
de  la  société  d’Histoire  naturelle,  mais  uniquement  pour  l’espèce 
d’Adrovande,  que  Born  avait  mieux  fait  connaître  par  une  ex- 
cellente figure.  Cette  dénomination  de  Glycimère,  qui  s’appli- 
quait si  convenablement  à la  coquille  d’ Adrovande,  futdélournéo 
et  appliquée  au  genre  Sertodaire  de  Daudin  ; aussi  on  ne  peut 
qu’approuver  M.  Meynard  de  la  Groye  qui,  en  1807,  créa  le 
genre  Panopée,  et  donna  la  figuré  d’une,  espèce  fossile  dans  les 
Annales  du  Muséum.  Quelques  années  plus  tard,  dans  sa  Philo- 
sophie zoologique,  Lamarck  a adopté  le  genre  Panopée  et  l’a 
placé  parmi  ceux  de  sa  famille  des  Solénacées;  depuis  celle  épo- 
que, les  rapports  du  genre  furent  conservés  les  mêmes  par  La 
inarck  dans  ses  différens  travaux.  Cuvier,  n’attachant  que  peu  de 
valeur  à la  position  du  ligament  dans  les  coquilles,  fit  des  Pa- 
nopées  un  sous-genre  des  Myes,  et  le  comprit  dans  sa  famille  des 
Enfermées,  entre  les  Glycimères  et  les  Pandores.  Dans  ses  ta- 
bleaux systématiques,  M.  de  Férussac,  tout  en  admettant  les  So- 
lénacées de  Lamarck,  y a introduit  plusieurs  genres  que  Lamarck 
plaçait  ailleurs,  de  telle  sorte  que  les  Panopées  s’y  trouvent  dans 
les  memes  rapports  indiqués  par  Cuvier,  entre  les  Glycimères  et 


I 34  QUATRIÈME  FAMILLE. 

les  Pandores.  La  famille  des  Solénides  de  Latreiüe  se  rapproche, 
à quelques  égards,  de  celle  de  M.  de  Férussac,  mais  il  y met  de 
plus  les  Hyalelles  dans  le  voisinage  des  Panopécs,  quoique  ces 
Hyatelles  ne  puissent  se  distinguer  des  Saxicaves  et  des  Bissomies. 
M,  de  Blainville  a moins  varié  pour  ce  genre  que  pour  celui  des 
Glycimères;  dans  son  Traité  de  Malacologie,  il  le  comprend  dans 
sa  famille  des  Pylorides,  entre  les  Solémyes  et  les  Glycimères. 
L’animal  des  Panopées  était  resté  inconnu , de  sorte  que  l’on  pou- 
vait encore  conlesler,  à certains  égards,  les  rapports  du  genre. 

II  y a quelques  années,  le  bâtiment  de  l’étal  la  frégate  V Héroïne^ 
commandée  par  M.  le  capitaine  Cécile,  en  croisière  dans  les  mers 
delà  pointe  australe  de  l’Afrique  , fit  une  station  sur  la  côte  Natale, 
à la  baie  des  Tigres,  et  les  oificiers,  en  visitant  cette  baie,  virent 
à !a  surface  du  sable  saillir  les  siphons  d’un  animal  mollusque; 
ils  essayèrent  d’arracher  du  sable  cet  animal,  mais  les  siphons  se 
rompirent,  de  sorte  qu’ils  se  délermincrent  à faire  les  fouilles 
nécessaires  pour  retrouver  l’animal  qui  leur  avait  échappé.  Ils 
virent  que  cet  animal  était  une  grande  et  belle  espèce  de  Panopée 
dont  ils  trouvèrent  plusieurs  individus  qu’ils  curent  soin  de  con- 
server dans  la  liqueur  : Tun  d’eux  fut  acheté  par  Je  Muséum, 
pour  sa  collection  zoologique,  et  M.  Valenciennes  le  fit  repré- 
senter avec  exactitude  et  en  donna  les  caractères  génériques. 
Dans  le  même  temps,  un  individu  de  la  meme  espèce  fui  commu- 
niqué à M.  Qnoy,  qui  en  envoya  le  dessin  à M.  de  Blainville, 
qui  s’empressa  de  le  publier  dans  les  Archives  d’anatomie  et  de 
physiologie.  M.  Valenciennes  ne  se  borna  pas  à faire  connaître 
l’espèce  vivante  rapportée  par  M.  Cécile,  il  joignit  à son  travail 
des  recherches  sur  toutes  les  espèces  connues  dans  le  genre , et  il 
en  fît  une  très  bonne  monographie  qui  vient  à la  suite  de  son  tra- 
vail anatomique.  On  trouve  ce  travail  dans  le  premier  volume 
des  Archives  de  l’histoire  naturelle. 

L’animal  de  la  Panopée  est  ovale  oblong,  il  est  épais,  très 
charnu  ; les  lobes  du  manteau  sont  réunies  dans  toutes  leur  éten- 
due si  ce  n’est  sur  le  côté  supérieur  oii  ils  laissent  ouverte  une 
petite  fente  pour  le  passage  du  pied.  L’extrémité  postérieure  du 
manteau  se  teimine  en  deux  siphons  réunis  en  une  seule  masse 
cylindrique  qui  a au  moins  une  fois  et  demie  la  longueur  de 
la  coquille  : cette  longueur  est  celle  de  l’animal  contracté,  mais 
il  est  à présumer  que  pendant  la  vie,  ces  parties  peuvent  acquérir 
une  bien  plus  grande  longueur.  Lorsque  l’on  divise  les  lobes  du 


LUS  l’ANOPÉES. 


l35 


manteau  par  une  section  longitudinale,  on  trouve  dans  leurs  ca- 
vités une  masse  viscérale  considérable  , surmontée  antérieurement 
d’un  petit  pied  obtus  et  rudimentaire.  A l’extrémité  antérieure 
de  cette  masse  viscérale , derrière  le  muscle  adducteur  anléiieur, 
se  trouve  l’ouverture  de  la  bouche , ovale , transverse  , accompa- 
gnée de  lèvres  minces  et  larges,  qui  se  prolongent  de  chaque 
côté  en  une  paire  de  grandes  palpes  labiales,  dont  la  surface  in- 
terne est  chargée  de  fines  lamelles  membraneuses.  De  chaque  côté 
du  corps , se  montre  une  paire  do  branchies  dont  les  feuillets  sont 
très  inégaux.  Les  feuillets  internes  s’étendent  depuis  l’extrémité 
postérieure  de  l’animal , jusqu’à  la  base  des  palpes  labiales.  Les 
feuillets  externes  commencent  un  peu  au-dessus  de  l’extrémité 
postérieure  de  la  masse  viscérale , et  viennent  se  terminer,  comme 
les  autres,  tout  près  de  l’entrée  du  siphon  branchial.  A.  ces  détails 
que  nous  puisons  dans  la  figure  de  M.  Valenciennes,  nous  ajou- 
terons, d’après  lui,  que  de  chaque  côté  de  la  partie  amincie  et 
postérieure  de  la  masse  abdominale,  à l’endroit  oii  l’intestin  va 
s’engager  dans  le  siphon  , on  voit  les  deux  orifices  des  organes  gé- 
nitaux : un  antérieur,  formant  une  petite  ouverture  ovale  en- 
tourée d’une  papille  saillante,  et  par  derrière,  une  seconde  ou- 
verture plus  grande,  sans  papille  et  sans  bourrelet.  L’œsophage, 
ajoute  M.  Valenciennes,  est  très  court.  Il  se  dilate  en  un  estomac 
assez  large,  plissé  intérieurement  et  comme  divisé  en  plusieurs 
compartimons  par  les  crêtes  formées  par  les  replis  de  la  tunique  in- 
terne. Cet  estomac  occupe  la  partie  supérieure  de  l’abdomen,  et 
l’intestin  se  contourne  une  dizaine  de  fois  sur  lui-méme  avant  de 
se  plonger  dans  le  siphon. 

Les  coquilles  du  genre  Panopée  sont  généralement  grandes  et 
épaisses;  elles  sont  ovalaires,  presque  toujours  tronquées  du  côté 
postérieur;  elles  sont  très  bâillantes,  mais  beaucoup  plus  de  ce  côté 
postérieur  que  de  l’autre.  Dans  toutes  les  espèces  connues  jusqu’à 
présent,  la  charnière  est  très  simple;  elle  consiste  en  une  seule 
dent  cardinale  , conique,  étroite  , courbée  en  crochet , dont  l’ex- 
trémité est  reçue  dans  une  cavité  correspondante.  Une  nymphe 
très  grosse,  calleuse,  donne  insertion  dans  un  sillon  profond  à un 
ligament  extérieur  très  épais,  convexe,  demi  cylindrique.  Pi’es- 
que  toutes  les  espèces  de  Panopéessont  suhéquilatérales;  toutes  sont 
très  convexes,  bombées,  à crochets  proérainens  et  opposés.  A l’ex- 
ception d’une  seule  qui  a quelques  côtes  longitudinales,  toutes 
les  autres  espèces  sont  lisses,  ou  marquées  de  stries  inégales  d’ac- 


i35 


OUATKIKMK  CAMILLE. 

croissement.  Dans  riulérieur  des  valves,  on  trouve  très  écartées 
Tune  de  Taulre  et  placées  aux  extrémités  du  bord  supérieur  deux 
{iraudes  impressions  musculaires  , ovalaires  , et  subtransverses. 
L’impression  palléale  laisse,  dans  l’intérieur  des  valves,  des  traces 
très  profondes , ce  qui  annonce  que  le  manteau  a un  bord  muscu- 
laire fort  épais,  et  qu’il  est  très  adhérent  à la  coquille.  Lorsque 
l’on  a sous  les  yeux  la  plupart  des  espèces  actuellement  connues, 
soit  vivantes  , soit  fossiles,  on  observe  de  très  grandes  différences 
dans  la  sinuosité  postérieure  de  l’impression  du  manteau.  La  forme 
de  celte  impression  peut  donner  de  bons  caractères  pour  distinguer 
les  espèces.  C’est  dans  l’espèce  fossile  des  environs  de  Bordeaux 
que  se  montre  la  sinuosité  la  plus  profonde  dans  l'impression  pal- 
léale  : cette  sinuosité  diminue  dans  l’espèce  des  environs  de  Paris  ; 
elle  est  moindre  encore  dans  celle  d’Amérique,  elle  se  trouve  on 
proportion  plus  courte  dans  l’espèce  de  la  Méditerranée  ; dans  la 
Panopée  arctique , elle  a presque  disparu  , et  enfin  elle  est  réduite 
à une  inflexion  à peine  apparente  , dans  une  espèce  du  terrain 
crétacé  de  la  Touraine,  à laquelle  M.  Dujardin  a donné  le  nom 
du  Panopcca  cretosa. 

D’après  tout  ce  que  nous  venons  de  dire,  il  est  facile  maintenant 
d’estimer  les  caractères  zoologiques  des  Panopées  et  de  déterminer 
rigoureusement  les  rapports  de  ce  genre  avec  ceux  qui  l’avoisinent 
le  plus.llestévideritqu’ilse  rapproche  beaucoup  plus  des  Myes  que 
des  Solens  par  l’animal  surtout;  il  se  rapproche  extrêmement  du 
premier  de  ces  genres;  et,  certainement,  si  l’on  s’attachait  unique- 
ment à établir  le  rapport  des  Mollusques,  sans  tenir  compte  de  la 
coquille,  le  genre  Panopée  devrait  tMitrcr  dans  la  famille  des 
Myaircs.  Mais  la  coquille  étant  une  partie  intégrante  du  Mol- 
lusque dont  il  est  question,  doit  entrer  pour  quelque  chose  dans 
l’eslimatioa  des  caractères  généraux,  et  c’est  pour  cela  que  nous 
comptons  les  Panopées  au  nombre  des  genres  de  notre  famille  des 
Glycimères- 

On  pouvait  déjà  présumer,  d’après  les  caractères  de  la  coquille, 
quelles  sont  les  mœurs  de  l’animal  qui  l’habile  ; on  supposait,  qu’à 
l’exemple  des  Myes  et  des  Solens,  les  Panopées  vivent  profondé- 
ment enfoncées  dans  le  sable  , et  les  observations  du  capitaine  Cé- 
cile et  des  officiers  de  son  bord,  ont  changé  en  une  vérité  désor- 
mais acquise  à la  science  , les  prévisions  des  zoologistes. 

Il  y a quelques  années  qu’on  ne  connaissait  encore  qu’un  petit 
nombre  d’espèces  appartenant  au  genre  Panopée.  Une  seule  vi- 


lï.S  1‘ANOPÉES. 


137 

vante,  de  la  Méditerranée,  se  trouvait  dans  quelques  collections. 
MM.  Quoy  et  Gaimard  en  firent  connaître  une  seconde  des  mers 
australes;  en  passant  dans  ce  genre  le  Mya  nonvegtca  de  Spen- 
gler,  devint  la  troisième  espèce.  M.  Sowerby  en  fit  connaître 
une  quatrième;  c’est  celle  dont  l’animal  a été  récemment  décrit  par 
M.  Valenciennes  : c’est  le  Panopœa  australis.  Enfin , une  cin- 
quièni.e  espèce  a été  rapportée  par  M.  d’Orbigny,  des  côtes  de  Pa- 
tagonie ; elle  a été  nommée  Panopœa  abhreviata , par  M.  Valen- 
ciennes. Â ces  cinq  espèces  vivantes  il  faudrait,  d’après  M.  Valen- 
ciennes, en  ajouter  dix  fossiles  ; ce  qui  porterait  à quinze  le  nombre 
des  espèces.  Ce  n’est  pas  ici  qu’il  convient  de  discuter  la  valeur  de 
chacune  dVIles;  nous  ajouterons  seulement,  que  ce  genre  ne  des- 
cend pas  dans  le  terrain  oolilique,  comme  l’a  cru  M.  Roemer.  Les 
tervains  les  plus  inférieurs  où  il  se  montre  appartiennent  à la  craie 
moyenne;  on  le  rencontre  ensuite  dans  tous  les  terrains  tertiaires. 
Dans  ces  terrains,  les  espèces  y sont  distribuées  avec  régularité  et 
peuvent  servir  à les  caractériser.  Nous  citerons  les  espèces  sui- 
vantes ; 

1°  Panopœa  intermedia.  Desh. 

Cette  espèce , des  argiles  de  Londres , figurée  par  M.  Sowerby  , 
est  la  même  que  nous  avons  découverte  aux  environs  de  Paris,  et 
à laquelle  M.  Valenciennes  a bien  voulu  donner  notre  nom. 

2°  Panopœa  Meynardi,  Desh. 

Nous  avons  décrit  sommairement  cette  espèce  dans  le  Diction- 
naire classique,  tome  xiii,  page  22.  C’est  celle  à laquelle  M.  Va- 
lenciennes a donné  le  nom  de  Panopœa  Basteroti,  Elle  est  fossile 
aux  environs  de  Dax  et  de  Bordeaux , et  ses  fragmens  ont  été  trou- 
vés dans  les  faluns  de  la  Touraine.  Cette  espèce , ainsi  que  celle 
recueillie  par  M.  Dubois  de  Moniperreu,  dans  les  terrains  ter- 
tiaires de  la  Volhynie,  peuvent  caractériser  l’étage  moyen  des  ter* 
rains  tertiaires. 

3®  Panopœa  Aldromndi,  Lamk. 

Habitant  la  Méditerranée,  et , dit-on , les  côtes  d’Espagne.  Cette 
espèce  est  la  plus  anciennement  connue.  Une  de  ses  variétés , un 
peu  plus  petite,  se  trouve  en  abondance  à l’état  fossile  en  Italie  , 
en  Morée  et  dans  les  terrains  récens  de  la  Sicile. 


i83 


QUATKIÈME  FAMILLE. 


ESPÈCES. 

Panopée  d’Aldrovancle.  Panopœa  ÂklromndL  Lamk.  pl.  7. 

fig*  it 

Testa  magna  J crassa^  ovato*  transversa^  subœquilatera  lœvigata^  utrmque  hîante. 
Chama  glYcimeris^  Aldrov,  de  Exang. p.  473.  474* 

Bonan.  Rec.  part.  2.  fig.  5û. 

Lister.  Concb.  pl.  414.  fig.  a58. 

Gualt.Iud,  lest.  pl.  90.  fig.  A. 

Klein,  Tent.  ostrac,  pl.  i,  fig,  72. 

Born.  Mus,  pl.  i.  fig.  8.  Mya  glycimcris, 

Chemn.  Conch,  t.  6.  p.  33.  pl,  3.  fig.  aS. 

Sclu’ot.  Einl.  t.  2.  p.  6tS.  Mya.  u°  ii. 

Mya  glycimerîs,  Gmcl,  p.  3222.  n°  17, 

Donovan.  Brit.  shells.  t.  4.  pl.  142. 

Spengler.  Mém.  de  la  soc,  d’bist.  nat.  de  Copenh.  l.  3.p.  43. 11°  17, 

Wood.  Gener,  Concb.  p.  114. 11041.  pl.  25.  fig.  r. 

Panopœa  Aldromndi,  Ménard.  Aon.  du  mus.  t.  9.  p.  i3i.  no  i. 

Mja  glycimeris,  Dillw,  Cal.  t.  i.  n°  r, 
panopœa  Aldromndi.  Blainv,  Malac.  pl,  80.  fig.  2. 

Desh.  Encyc,  mélh.  vers.  t.  3.  p.  698. 

Lamb.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  457.  n®  i. 

Wood.  Ind.  test.  p.  i3,  n°  4r.  pl.  3.  fig,  41. 

Pbilippî,  Enum,  moll,  Sicil,  p.  7.  pl.  2.  fig.  2, 

Valenciennes,  Archives  du  mus.  t.  r.  p.  33. 

Testa  fossiUs,  Panopœa Faujasî.  Ménard.  Ann.  du  mus.  t.  9,  p.  i3i.n02. 
pl.  12. 

Mya  panopœa.  Broccbî.  Conch.  foss.  subap.  t.  2.  p.  538.  n®  4. 

Panopœa  FrtKyaii.  Vaîenc.  Arcb.du  mus.  t.  i.  p.  i3. 

Habite  la  Méditerranée  et  les  côtes  d’Espagne,  d'après  Lister.  Elle  se  trouve 
fossile  dans  le  Plaisantin,  en  Sicile  et  en  Morée. 

Cette  coquille  est  Tune  des  plus  grandes  bivalves  connues;  elle 
est  ovale,  transverse,  obtuse  à ses  extrémités.  Elle  est  presque  iné- 
quilalérale , et  ses  valves  convexes  ont  des  crochets  saillans  et  op- 
posés. Le  côté  postérieur  est  généralement  un  pou  plus  étroit  que 
ranlérieur,  et  son  bâillement  est  bien  plus  considérable  que  celui 
du  côté  opposé.  Le  bord  cardinal  est  presque  droit;  il  offre,  sur 
chaque  valve,  et  immédiatement  au-dessous  du  crochet,  une  dent 


L£S  FANOPEES. 


i39 

cardinale,  conique,  l'edressée,  un  peu  recourbée  dans  sa  longueur, 
et  légèrement  comprimée  laiéralement.  A côté  de  celte  dent,  se 
trouve  une  fossette  peu  profonde,  dans  laquelle  vient  se  placer  le 
sommet  de  la  dent  opposée,  lorsque  les  valves  sont  réunies.  La 
surface  extérieure  est  lisse  et  marquée  de  sillons  irréguliers  d’ac- 
croisseraens.  A fintérieur,  les  valves  sont  blanches,  quelquefois 
un  peu  rosées  vers  le  centre.  Dans  les  vieux  individus , l’impression 
palléale  est  profondément  empreinte  dans  répaisseur  du  test,  et  le 
bord,  fortement  épaissi  eu  dedans,  ressemble  à un  gros  bourrelet 
un  peu  déprimé.  La  sinuosité  postérieure  de  l’impression  du  man- 
teau est  triangulaire  , obtuse  au  sommet  ; et  si  l’on  fait  passer  une 
ligne  qui  partage  ce  triangle  en  deux  parties  égales,  celte  ligne  di- 
visera la  coquille  transversalement  en  deux  moitiés  presque  égales. 
M.  Valenciennes  a distingué  une  variété  principale,  dont  les 
valves,  plus  larges  et  plus  quadrangulaires,  sont  beaucoup  plus 
înéquilalérales.  Dans  cette  variété,  c'est  le  côté  postérieur  qui  est 
le  plus  court.  Nous  pensons  que  l’on  doit  considérer  comme  autant 
de  variétés  les  individus  fossiles  pour  lesquels  M.  Majnard  de  la 
Groye  a fait  sou  Panopœa  FavjasL  Généralement  plus  petits,  ces 
individus  sont  aussi  plus  minces  que  ceux  que  l’on  a vivans. 
M.  Valenciennes  les  distingue  particulièrement  parce  qu’ils  n’ont 
pas  celte  troncature  oblique  qu’on  remarque  sur  le  côté  antérieur 
des  vieux  individus  vivans.  Mais  si  l’on  étudie  les  stries  d’accrois- 
sement de  ces  vieux  exemplaires  , on  s’aperçoit  [bientôt  que, 
dans  le  jeune  âge,  cette  troncature  n’existe  pas.  Nous  avons  des 
individus  fossiles  de  diverse  taille,  et  parmi  eux,  il  s’en  trouve 
un  qui,  appliqué  sur  un  grand  individu  vivant,  offre,  dans  le 
contour  de  ses  valves,  la  môme  forme  et  les  stries  d’accroissement 
de  ce  grand  individu.  Nous  avons  observé,  parmi  les  fossiles  rap- 
portés de  Ja  Morée  par  M.  Virlet,  un  très  grand  fragment  de  Pa- 
nopée,  qui  annonce  que  la  variété  fossile  acquiert  une  taille  et  une 
épaisseur  aussi  gi’andes  que  dans  la  variété  vivante.  Les  individus 
de  taille  moyenne  ont  i3  centimètres  de  long  et  23  centimètres 
de  large.  Lorsque  les  valves  sont  réunies,  la  coquille  a 90  milli- 
mètres d’épaisseur. 

Panopée  de  Ménard.  Panopœa  Menardi,  Desli,  pl.  7.  lîg.  2.  3. 

Testa  ovato’ohlonga  iransvcvsa^  inœqiiilatera  antice  latiore,  obliqué  suhtrun^ 
cata,  mx  hiautc^  postice  rotundata,  kîantissima^  'valvis  ad  apicem  irregii- 
lariter  pîicatïs  ; sînu  palîii  profundissîmo. 


l4o  (JUATRIÈME  VAMILLK. 

Desh.  Dict.  class.  d’hist,  nat.  t.  i3.  p,  22.  i8a8. 

Panopœa  BasterotL  Valenc;  Arch.  du  mus.  t i,  p,  ai.pl.  6.  fig.  a.  a.  b. 

Habite  fossile  aux  environs  de  Bordeaux  et  dans  les  fatuns  de  la  Touraine» 
Nous  avions  depuis  long-temps  donné  une  description  sommaire 
de  celte  espèce  dans  le  Dictionnaire  classique  d^histoire  naturelle , 
lorsque  M.  Valenciennes  lui  imposa  un  autre  nom  que  nous  ne 
pouvons  accepter,  puisqu’il  en  existe  un  autre  antérieur  de  plus  de 
dix  ans.  Cette  coquille  se  distingue  avec  la  plus  grande  facilité  de 
toutes  les  autres  espèces  du  même  genre  ; elle  est  ovale,  oblongue, 
Iransverse,  inéquilaiérale  ; son  côté  antérieur  est  le  plus  court  : ce 
côté,  dans  les  vieux  individus,  est  plus  large  et  plus  dilaté  que  le 
postérieur.  L’extrémité  postérieure  est  arrondie  ; elle  est  fortement 
bâillante,  tandis  que  sur  le  côté  antérieur,  l’écartement  des  valves 
est  beaucoup  plus  étroit.  Les  crochets  sont  assez  saillans;  ils  sont 
opposés  et  peu  inclinés  en  avant.  Le  bord  cardinal  est  droit;  il 
offre  à chaque  valve  une  petite  dent  cardinale,  étroite  et  compri- 
mée ; la  nymphe  est  grande,  épaisse,  et  en  proportion  plus  allongée 
que  dans  le  Panopœa  Aldromndi;  elle  est  moins  subitement  tron- 
quée à son  extrémité  antérieure.  L’impression  musculaire  anté- 
rieure est  plus  longue  et  plus  étroite  que  la  postérieure;  la  sinuosité 
palléale  est  très  profonde,  car,  si  l’on  fait  tomber  une  ligne  per- 
pendiculaire depuis  le  crochet  jusqu’au  bord  inférieur,  cette  ligne 
rencontre  le  sommet  de  celle  sinuosité;  celle  espèce  reste  toujours 
d’une  taille  beaucoup  plus  petite  que  la  Panopée  d’Aldrovande  et 
sa  variété  fossile.  Son  lest  est  en  proportion  plus  mince  ; aussi,  il  est 
fort  difficile  d’avoir  bien  entière  cette  coquille,  rendue  très  fragile 
par  la  fossilisation.  Le  plus  grand  individu  que  nous  ayons , et  qui 
est  aussi  un  des  plus  grands  connus,  a 60  millimètres  de  long  et 
i3o  millimètres  de  large;  lorsque  les  valves  sont  réunies,  la  co- 
quille a 4s  millimètres  d’épaisseur. 

Panopée  intermédiaire.  Panopœa  iniermedùu  Desh.  pl.  y. 

fig.  4-  5. 

Testa  ovatOy  transversa  angusta , inœquilatera;  utroque  latere  obtnsa^  postice 
hianiissima,  ad  apteem  îrrcguîariter  plicata, 

Corbuîa  dubia.  Desh,  Coq.  foss.  de  Paris,  t,  i,  p.  59,  n”  2 1.  pl.  9,  fig.  i3,  il. 

Mya  intermedia,  Sow.  Min,  Conch,  pl,  4*9.  f»g.  'i* 

Eadem  spccîes?  Mya  plicata,  Sow.  loc.  cit.  fig.  3. 

Eadem  specîes?  Panopœa  Faujasi,  Sow.  Min.  conch.  pl.  60a.  fig.  1.  2. 

Panopœa.  Deshayesii.  Yalenc.  Arch.  du  mus,  t.  i.  p.  20.  pl,  4.  fig- 


LES  GLYCiaiERlDtS.  l4l 

Habile...  fossile  aux  euvirous  de  Paris,  et  se  trouve  aussi  eu  Angleterre,  dans 
les  argiles  de  Loudres. 

Nous  avons  indiqué  autrefois  cette  espèce  d’après  un  seul  frag- 
ment qui,  encroûté  et  privé  de  dents  cardinales,  nous  avait  paru 
appartenir  à cette  section  des  Corbules,  dans  laquelle  la  dent  cardi- 
nale a beaucoup  de  ressemblance  avec  celle  des  Mj'es  ; mais  depuis 
long.-temps  nous  avons  rectifié  l’erreur  que  nous  avons  faite , lors- 
que nous  eûmes  découvert,  dans  la  riche  localité  de  Chaumont, 
un  individu  complet  de  la  même  coquille,  et  qu’à  force  de  soins 
et  de  précautions,  nous  sommes  parvenu  à le  vider  complètement 
du  sable  qui  le  remplissait.  Nous  possédions  cette  belle  espèce  de- 
puis plusieurs  années,  lorsque  M.  Sowerby,  l’ayant  rencontrée 
dans  les  argiles  de  Londres,  en  donna  une  figure,  sous  le  nom  de 
Mya  intennedia.  Plus  lard  , M.  Sowerby  reproduisit  un  individu 
uu  peu  plus  grand  de  la  même  coquille,  et  le  confondit  avec  le 
Panopœa  FaiijasiL  M.  Valenciennes,  dans  sa  monographie  des  Pa- 
nopées,  voulut  bien  donner  notre  nom  à cette  curieuse  espèce  de 
Panopée , et  nous  sommes  très  flatié  de  l’honneur  qu’il  a voulu 
nous  faire;  mais,  uous  étant  imposé  la  règle  rigoureuse  de  con- 
server aux  espèces  le  premier  nom  qui  leur  est  donné,  nous  ren- 
dons à celle-ci  la  dénomination  que,  le  premier,  M.  Sowerby  lui 
imposa. 

La  Panopée  intermédiaire  est  une  coquille  ovale  oblongue;  elle 
est,  en  proportion,  l’espèce  la  plus  étroite;  elle  est  iuéquilalérale, 
et  sou  côté  antérieur  est  toujours  le  plus  court.  Les  crochets  sont 
médiocrement  protubérans;  ils  sont  opposés , et,  immédiatement 
au-dessous  d’eux,  on  trouve,  sur  le  bord  cardinal,  une  dent  très 
comprimée,  et  à côté  une  fossette  plus  éli'oile  et  plus  profonde  que 
dans  les  autres  espèces.  Le  bord  supérieur  est  droit;  la  nymphe 
est  petite , courte , peu  saillaute , ce  qui  prouve  que , dans  cette  es- 
pèce, le  ligament  n’avait  pas  tant  de  solidité  que  dans  les  autres.  L’im- 
pression musculaire'antérieure  est  très  allongée,  comme  celle  des 
Pholadomyes  ; la  postérieure  est  ovale  obroiide.  La  sinuosiTo  pos- 
térieure du  manteau  est  triangulaire  , assez  large,  et  remonte  dans 
l’intérieur  des  valves  jusqu’au  milieu  de  leur  longueur.  Cette  co- 
quillea45 millimètresde  longueur,  90 de  largeur, et  35  d’épaisseur. 


QUATRIEME  FAMILLE. 


ii2 


GENRE  TREIZIÈME. 

PHOIiADOMlTE.  Vholadomya.  (6ow.) 

PI.  4.  fîg.  4 h 10.  PI.  5.  fig.  I à 6. 

CARACTÈRES  GÉTfÉRïQüES.  — Animal  inconnu.  Coquille 
mince,  transverse,  ventrue,  cordiforme,  ëquivalvc,  inéqui- 
latërale,  bâillante  des  deux  côtés  5 côté  antérieur  le  plus  obtus 
et  le  plus  court;  charnière  simple,  linéaire,  sans  dents  5 une 
petite  inflexion  sur  le  bord  cardinal;  deux  petites  nymphes 
donnant  insertion  à un  ligament  extérieur;  impression  palléale 
sinueuse  postérieurement. 

SYNONYMIE  GENERIQUE,  — CoHcha  mgata  ; Moscardo.  — 
Cardites^  Grew. — Conchîtes  ; Langius, — Bajerus, 

Wolfart, — Mjacites^  Donacites;  Schlotheim,  Rrüger. — Phn- 
Jadites;  Kriigcr, — Lutraiia  ^ Mactra  ^ Mya  ^ Cardita^  Phola- 
domya;  Sowerby. — Lamk.  — Amphidesma^ 

Lutrarla^  Pholadomya;  Zieten.  — Lysianassa^  Pholadomya  ; 
Munster,  Goldfuss- — Lyslanassa,  Myopsis  ^ Gresslyn  y Platy- 
mya^  Arcomya;  Agassiz. — Pholadomya;  Sow,,  Nob,,  etc. 

OBSERVATIONS.  - — Le  premier  indice  que  nous  trouvons  du  genre 
Pholadomye,  c’est  dans  un  ouvrage  peu  estimé,  avec  juste  raison  , 
des  naturalistes.  Cet  ouvrage  a pouf  litre  : Museo  Moscardo  ; il  a 
été  publié  à Padoue,  en  i656.  A la  page  i83,  on  trouve,  à côté 
d’un  moule  d’Isocarde,  une  autre  coquil  le  fossile  que  l’auteur  nomme 
Coucha  rugata;  elle  a toute  l’apparence  de  l’une  des  espèces  de  Pho- 
laiÏQmyes  les  plus  répandues  dans  la  partie  supérieure  des  terrains 
jurassiques,  Listei-  et  Grew,  en  Angleterre,  l’un  dans  son  Synopsis 
Conchyliorum , l’autre  dans  le  Muséum  de  la  Société  royale,  ont 
figuré  des  espèces  qui  appartiennent  certainement  à ce  genre;  de- 
puis, il  n’est  guère  d’Orycthographe  qui  n’en  ait  fait  représenter 
quelques  espèces,  sous  le  nom  de  Cardite  ou  de  Musculite,  gé- 
néralement adopté  pour  désigner  la  plupart  des  coquilles  bivalves 
fossiles.  Linnèn’introduisitaucune  de  ces  pétrifications  dans  son  Sys- 
tema  naturœ  ; aussi , on  ne  les  trouve  dans  aucun  auteur  systématique 


LES  GLYGIMERIDES. 


143 

jusqu’au  momenX  où  on  commença  à sentir  l’importance  de  l’étude 
des  fossiles,  et  c’est  à Lamarck  et  à Cuvier  que  l’on  est  redevable 
des  premières  recherches  importantes  et  vraiment  utiles  sur  les 
corps  organisés  fossiles;  mais,  à cette  époque-là  même,  il  était 
presque  impossible  de  caractériser  avec  exactitude  le  genre  qui 
nous  occupe  : aussi,  on  en  trouve  le  petit  nombre  d’espèces  alors 
connues  réparti  dans  dilFérens  genres.  Les  unes  étaient  rapportées 
par  M.  Sowerby  aux  Myes , aux  Mactres,  aux  Lulraires,  aux  Car- 
dites  : en  cela , l’auteur  anglais  suivait  les  indications  de  M.  Bron- 
gniart.  Lamarck  lui-meme,  trompé  par  l’apparence,  rangea  parmi 
les  Trigonies  quelques-unes  des  espèces  du  genre  Pholadomye  ; 
enfin,  par  un  hasard  des  plus  heureux,  on  découvrit  une  espèce 
vivante,  et,  dès-lors,  on  put  caractériser  convenablement  le  genre 
et  y rapporter  par  analogie  les  espèces  fossiles  qui  en  dépendent. 
Cette  coquille  précieuse  et  des  plus  intéressantes  a été  découverte 
à l’île  Torlola  par  M.  Nicholson.  Deux  individus  seulement  sont 
connus  dans  les  collections  , et  il  en  existe  une  valve  dans  celle  du 
Muséum  d'histoire  naturelle  de  Paris.  Cette  espèce  a été  décrite  et 
figurée  pour  la  première  fois  par  M.  Sowerby  dans  son  Généra  of 
shells. 

Depuis  celte  époque,  M.  Agassiz  dans  un  travail  fort  remar- 
quable qu’il  a publié,  en  1842  , sous  le  litre  à'Eludes  critiques  sur 
les  mollusques  fossiles,  a donné  une  monographie  du  genre  Pho- 
ladomye  dans  laquelle  il  a ajouté  deux  espèces  vivantes,  toutes 
deux  de  la  Caspienne,  et  rapportées  toutes  deux  au  type  des 
Cardium  par  M.  Eichwald,  dans  son  Fauna  CaspiO’-Caucasia. 

L’animal  n’est  point  encore  connu.  Toutes  les  coquilles  sont 
très  minces,  et  l’on  peut  juger  de  leur  peu  d’épaisseur  dans  les  es- 
pèces fossiles  elles-mêmes,  car  les  moules  intérieurs  ont  conservé 
avec  une  grantle  netteté  les  côtes  et  les  tubercules,  qui  se  répètent 
toujours  à l’intérieur  des  coquilles  lorsque  leur  test  est  mince.  La 
charnière  est  très  simple  ; elle  est  sans  dents.  On  remarque  seule- 
ment sur  le  bord,  immédiatement  au-dessous  du  crochet,  une  lé- 
gère dépression , oîi  devraient  se  trouver  les  dents  cardinales,  s’il 
en  existait.  Sur  le  côté  postérieur,  se  montre  une  nymphe  pe- 
tite, peu  saillante,  creusée  en-  dehors  et  à la  base  d’un  petit 
sillon  dans  lequel  s’insère  un  ligament  extérieur.  En  examinant 
des  moules  bien  conservés,  ou  mieux  encore  la  coquille  vivante 
elle-même,  on  trouve,  à l’intérieur  des  valves,  deux  impressions 
musculaires  fort  écartées;  l’antérieure  ovalaire  est  quelquefois 


i44  QrATBJÈME  FAMILLE. 

étranglée  dans  le  milieu;  elle  descend, le  long  du  bord  antérieur,  et 
très  près  de  Textrémité  des  valves.  L’impression  musculaire  posté- 
rieure naît  un  peu  au-dessous  du  bord  supérieur,  et  à une  petite 
distance  de  l’extrémité  de  la  coquille  : celte  impression  est  obronde 
ou  ovalaire.  On  ti’ouve  aussi,  dans  l’intérieur  de  ces  coquilles,  une 
impression  palléale  rapprochée  du  bord  inférieur , et  qui  rentre  a 
l’intérieur  sous  forme  d’un  sinus  profond,  lorsqu’elle  est  parvenue 
à l’extrémité  postérieure  de  la  coquille.  Cette  sinuosité  de  l’impres- 
sion palléale  indique,  comme  on  le  sait  déjà  , que  l’animal  est  ter- 
miné postérieurement  par  des  siphons,  et  l’on  peut  présumer,  par 
le  bâillement  considérable  des  valves  du  côté  postérieur,  que  les 
siphons  sont  considérables.  Presque  toutes  les  Pholadonijes  sont 
des  coquilles  ventrues,  cordiformes,  à crochets  proémiiiens,  op- 
posés et  très  rapprochés.  Le  plus  grand  nombre  des  espèces  sont 
très  inéquilalérales,  et  c’est  lé  côté  antérieur  qui  est  toujours  le 
plus  court.  Toutes  les  espèces  sont  plus  ou  moins  bâillantes;  Je 
bâillement  antérieur  est  toujours  plus  petit  que  celui  du  côté  op- 
posé; ces  deux  bâiilemens  ressemblent  assez  à celui  des  Panopées, 
des  Mjes  ou  des  Lulraires.  D’après  ce  que  nous  venons  d’exposer, 
on  peut  déjà  établir  les  rapports  du  genre  d’une  manière  assez  na- 
turelle; il  se  rapproche  évidemment  des  Panopées  par  l’ensemble  de 
ses  caractères;  mais,  par  la  nature  de  son  test  et  sou  peu  d’épaisseur, 
il  a de  l’analogie  avec  les  Pholades,  mais  surtout  avec  les  Anaünes. 

Depuis  quelques  années  que  l’on  s’occupe  avec  tant  d’activité, 
en  Europe,  à étudier  les  fossiles  répandus  dans  les  couches  de  la 
terre,  les  auteurs  ont  ajouté  un  grand  nombre  d’espèces  à celles 
anciennement  connues.  Ce  genre  est  donc  important  pour  les  géo- 
logues, car  il  n’est  presque  point  de  terrain  fossilifère  où  il  ne  soit 
représenté  par  quelques  espèces;  et  la  plupart  d’entre  elles  se  dis- 
tribuent avec  régularité  dans  les  différentes  formations,  et  peuvent 
servir  à les  caractériser.  A force  de  soins,  nous  sommes  parvenu  à 
en  rassembler, plus  de  cent  vingt  espèces,  et  nous  sommes  loin  de 
posséder  toutes  celles  qui  sont  mentionnées  par  les  auteurs.  Nous 
sommes  convaincu  que  des  recherches  plus  étendues  ajouteront 
encore  un  gi’and  nombre  d’espèces  à ce  genre,  et  qu’elles  seront 
doublées,  d’ici  à quelques  années.  Déjà  M.  Agassiz  en  a ajouté 
un  bon  nombre  qui  ne  nous  étaient  point  connues , et  il  a recti- 
fié plusieurs  erreurs  qui  s’élaient  glissées  dans  la  nomenclature. 
M.  Agassiz  compte  ii3  espèces  de  Pholadomyes , et  si  nous  ajou- 
tons celles  qu’il  n’a  pas  mentionnées  dans  sa  monographie,  nous 


LES  GLYCIMEIllDÈSi 


i45 

pouvons  porter  à 172  au  moins  le  nombre  des  espèces  que  nous 
connaissons  actuellemenl;  il  est  vrai  que  dans  ce  nombre  sont 
comprises  des  coquilles  dont  M.  Aqassiz  fait  des  genres  à part  sous 
les  noms  de  Myopsis  et  de  Goniomya  ou  Lysianassa  de  M.  de 
Munster. 

On  a cru  pendant  assez  long-temps  que  les  Pholadomyes  man- 
quaient aux  terrains  tertiaires.  M.  Sowerby  en  a signalé  une  qui 
appartient  aux  argiles  do  Londres.  Cette  même  espece  a été  re- 
trouvée depuis  dans  les  sables  inférieurs  du  bassin  de  Paris,  aux  en- 
virons de  Laon  , et  M.  Agassiz  mentionne  deux  autres  espèces  dans 
les  terrains  tertiaires  supérieurs  de  FAIIemagne. 

Les  terrains  crétacés  supérieurs  ne  contiennent  jusqu’à  pré- 
sent qu’un  petit  nombre  de  Pholadomyes  5 elles  deviennent  plus 
abondantes  dans  les  couches  inférieures  de  ces  terrains,  cou- 
ches désignées  par  les  géologues  sous  le  nom  de  terrains  néoco- 
miens. Elles  se  montrent  en  plus  grande  abondance  dans  la  série 
des  terrains  jurassiques,  etily  a des  espèces  qui  peuvent  carac- 
tériser chacun  des  étages  de  cette  grande  série.  Il  en  existe  encore 
plusieurs  dans  le  terrain  que  les  géologues  allemands  ont  nommé 
Muschelkalk.  Au-dessous  de  cette  formation,  le  genre  Pholado- 
mye  paraissait  manquer;  mais  MM.  de  Verneuil  et  d’Arcbiac> 
dans  leur  excellent  mémoire  sur  les  fossiles  des  dépôts  anciens  des 
bords  du  Rhin,  onldécril  une  coquille  qui  appartient  au  genre  qui 
nous  occupe  ; MM.  Sowerby  et  Goldfussen  ont  égalementmenlionné 
chacun  une  espèce  dans  ces  terrains  ; de  sorte  qu’il  est  bien  con- 
slalé  que  le  genre  Pholadomye  est  du  petit  nombre  de  ceux  qui 
passent  à travers  toutes  les  formations,'  et  vit  encore  aujourd’hui. 

Nous  ne  pouvons,  donner  ici  la  liste  complète  des  espèces  d’un 
genre  aussi  nombreux  que  celui  des  Pholadomyes.  Sans  doute,  il 
eût  été  plus  intéressant  de  les  trouver  distribuées  dans  l’ordre  géo- 
logique; mais  l’étendue  de  cet  ouvrage  ne  nous  permet  pas  une  aussi 
grande  extension.  Aussi,  nous  nous  contenterons  d’indiquer  les 
principales  espèces  caractéristiques  des  terrains,  en  empruntant  à 
l’excellente  monographie  de  M.  Agassiz  plusieurs  renseignemens 
d’un  grand  intérêt.  Nous  n’admellons  pas  toutes  les  opinions  de 
M.  Agassiz,  et  nous  rejetons  plusieurs  des  genres  qu’il  a proposés, 
qui,  selon  nous,  présentent  tous  les  caractères  des  Pholadomyes, 
Il  faut  dire  qu’il  y a peu  de  genres  aussi  difficiles  que  celui-ci  et 
dont  la  synonymie  soit  plus  embrouillée:  plusieurs  espèces,  fondées 
sur  des  individus  mal  conservés,  représentées  par  des  figures  très 

10* 


T.  I. 


i46  quatrième  famille. 

médiocres,  sont  devenues  les  types  sur  lesquels  se  sont  d’abord  ap- 
puyés les  géologues  pour  reconnaître  difFérens  terrains;  et  il  est 
souvent  arrivé  à ces  personnes  peu  habituées  aux  éludes  zoologi- 
ques, de  se  contenter  d’approximations  inexactes  ; c’est  de  cette 
manière  que,  sous  un  môme  nom,  on  trouve  aujourd’hui  plusieurs 
espèces  rassemblées,  et  qu’il  est  très  difficile  de  remonter  à la  source 
de  Terreur  pour  la  réparer.  C’est  ainsi  que  je  remarque  dans  les  au- 
teurs cinq  espèces,  au  moins,  sous  le  nom  de  Fholadomya  murchis^ 
soni  ; sous  le  nom  de  Pholadomya  amhigua,  M.  Soiverby  confond, 
je  le  crois , deux  espèces  j M.  Goldfuss  représente  sous  ce 
nom  deux  espèces  qui  sont  différentes  de  celles  de  Sowerby  ; 
M.  Zieten  donne  encore  un  Amhïgua  qui  est  également  différent 
de  celle  des  deux  auteurs  que  nous  venons  de  mentionner;  enfin, 
M.  Rœmer  représente  un  Amhigua  qui  a beaucoup  de  rapports 
avec  une  de  celles  de  Sowerby,  mais  qui  pourrait  bien  encore  con- 
stituer une.  sixième  espèce.  Ces  deux  exemples  suffisent  pour  donner 
une  idée  de  la  confusion  qui  règne  dans  la  synonymie  des  Phola- 
domyes.  Nous  pourrions  facilement  en  ajouter  beaucoup  d’autres; 
mais  un  le!  travail  neserait  pas  ici  à sa  place:  il  doit  entrer  comme 
élément  d’une  bonne  monographie.  Une  autre  difficulté  se  pré- 
sente : elle  est  inhérente  à la  nature  môme  du  sujet,  puisqu'elle 
résulte  de  la  variabilité  des  espèces  et  des  altérations  qu’elles  ont 
subies  par  le  fait  do  la  fossilisation.  Les  Pholadomyes  sont  des  co- 
quilles très  n\inces  ; on  les  trouve  dans  des  terrains  de  sédiment  qui 
formaient  des  boues  argileuses  ou  calcaires  avant  leur  solidification. 
Pour  peu  que  ces  terrains  aient  subi  des  compressions  où  des  dé- 
rangemena  pendant  que  leurs  couches  étaient  encore  molles,  des 
coquilles  aussi  fragiles  que  les  Pholadomyes  ont  été  comprimées  ou 
étirées  dans  divers  sens,  et  il  est  quelquefois  difficile  de  rencontrer 
quelques  individus  dont  la  forme  naturelle  n’ait  subi  aucune  alté- 
ration. Aussi,  il  pourrait  arriver  qiTune  même  espèce  devînt  l’oc- 
casion de  plusieurs  aux  yeux  d’un  zoologiste,  même  exercé,  dans 
i’impossibiliic  ou  il  serait  de  reconnaître  des  formes  accidentelles 
et  de  les  rapporter  à leur  type  naturel.  Aussi,  pour  entreprendre 
une  bonne  monographie  du  genre  Pholadomye  et  donner  une 
distribution  des  espèces  exempte  d’erreurs  graves,  il  faut  être  en- 
touré de  très  nombreux  matériaux,  et,  malgré  nos  efforts,  nous  ne 
pensons  pas  en  avoir  encore  assez  pour  entreprendre  un  travail 
complet  sur  ce  genre. 

Tous  les  zoologistes  ne  sont  point  d’accord  sur  l’étendue  desca- 


lES  GLTCI31ERIDES. 


147 

ractères  qu’il  convient  de  donner  au  genre  Pholadomyc.  Ceux  que 
nous  avons  exposés  en  (ête  de  cet  article,  et  qui  résultent  pour 
nous  de  l’observation  de  deux  espèces  vivantes  et  des  impressions 
très  nettes  d’un  assez  grand  nombre  d’espèces  fossiles,  permettent 
d’introduire  dans  le  genre  un  assez  grand  nombre  d’espèces  qui  en 
sontrejêtées  parquelques  auteurs.  Il  estcertain  que,  quels  que  soient 
les caractèresextérieursd’une  coquille  bivalve,  toutes  les  fois  qu’elle 
sera  mince,  bâillante,  que  sa  charnière  sera  simple  et  sans  dents, 
que  l’impression  palléale  sera  sinueuse  du  côté  postérieur,  celte  co- 
quille sera  pour  nous  une  Pholadomye.  Si  nous  prenons  actuelle- 
ment le  genre  Lysianassa  deM.  de  Munster,  3Iyopsîs , Platymya,  ' 
ainsi  qu’une  -partie  du  genre  Jrcomya  de  M.  Agassiz,  nous  cher- 
cherons en  vain  les  caractères  qui  les  distinguentdes  Pholadomyes, 
à moins  que  l’on  ne  prenne  ces  caractères  dans  des  accîdens  exté- 
rieurs, qui  pour  nous  n’ont  aucune  valeur.  Nous  remarquons 
d’abord  que  M.  Agassiz  n’admet  dans  le  genre  Pholadomye  que 
celles  des  espèces  qui  ont  des  côtes  longitudinales  ; et  les  difFérens 
genres  de  ce  naturaliste  que  nous  venons  de  mentionner  sont  desti- 
nés à réunir  des  coquilles  qui  ont  tous  les  caractères  des  Pholado- 
myes, mais  qui  n’en  ont  pas  les  côtes  longitudinales.  Il  semblerait, 
d’après  cela,  que  M.  Agassiz  a fondé  des  genres,  non  plus  d’après 
une  appréciation  des  caractères  zoologiques  des  coqtiilles,  mais 
d’après  des  formes  extérieures,  essentiellement  variables  dans  la  plu- 
part des  genres.  Dans  la  nature  actuelle,  où,  nous  cherchons  des 
termes  de  comparaison,  nous  trouvons  des  coquilles  habitées  par 
des  animaux  d’un  même  genre,  ayant  des  caractères  génériques 
semblables,  et  qui  cependant  sont  tantôt  lisses,  tantôt  striées  trans- 
versalement, ou  garnies  de  côtes  longitudinales.  Le  grand  genre 
Cardium^  par  exemple,  nous  présente  tous  ces  accidens  ; il  en  estde 
même  chez  lesLucines,  lcsVeuus,les  Pétoncles, etc., etpersonnen’a 
jamais  songé  à démeinbrerces  genres  uniquement  d’après  le  caractère 
des  côtes  longitudinales  ou  lransverses,ou  le  poli  extérieur  des  co- 
quilles. Ce  que  M,  Agassiz  ne  ferait  certainement  pas  dans  le  genre 
B ucarde, pourquoi  le  fait-il  dans  le  genre  Pholadomye?  Il  nous  sem- 
ble que  la  zoologie  n’esl  une  science  vraiment  philosophique  qu’au- 
lanl  que  ses  diverses  parties  sont  coordonnées  d’après  les  mêmes 
principes,  et  que  la  subordination  des  caractères  des  familles  et  des 
genres  doit  résulter  d’une  règle  invariable  et  inflexible.  Pour  nous, 
nous  ne  voyons  aucune  difficulté  à admettre  dans  le  genre  Phola- 
domye des  espèces  lisses  ou  des  espèces  à côtes,  soit  transverses,  soit 

lO’ 


l48  QUATRIÈME  TAMILLE. 

longiluclinaies;  nous  croyons  môme  que  l’on  doit  y introduire  des 
espèces  aplaties  et  transvei  ses,  aussi  lisses  que  celles  qui  sontcy- 
lindracées  ou  cordiformes;  il  nous  suffit,  en  un  mot,  qu’une  co- 
quille nous  offre  les  caractères  que  nous  avons  assignés  au  genre, 
pour  qu’elle  y trouve  sa  place  : en  agissant  autrement,  nous  croi- 
rions manquer  de  tact  et  à ce  que  l’observation  nous  enseigne.  Dans 
tous  les  grands  genres,  la  nature  est  prodigue  dans  la  variété  des 
formes  et  des  accidens  : que  l’on  considère  les  genres  Lutraire  et 
Mactre  réunis,  les  Lucines,  les  Bucardes,  lesMulettes,  les  Huîtres, 
les  Limes,  les  Peignes,  les  Avicides,  etc.,  et  l’on  verra  avec  quelle 
facilité  la  nature  se  joue,  en  s’appropriant  les  formes  les  plus  di- 
verses sur  des  types  constans  d’organisation.  ÎVous  considérons, 
nous,  le  genre  Pholadomye  comme  l’un  de  ces  grands  types  à mo- 
difications nombreuses  dans  les  formes  extérieures,  mais  à caractè- 
res essentiels  constans.  C’est  ainsi  que  les  espèces  du  genre  Lysia- 
nasse  de  M.  de  Munster  constituent  pour  nous  un  petit  groupe  de 
Pholadomyes  qui,  au  lieu  d’avoir  des  cotes  longitudinales  ou  Irans- 
verses,  les  ont  en  forme  de  chevron  plus  ou  moins  ouvert.  Ce  qui 
nous  détermine  à ranger  ces  coquilles  parmi  les  Pholadomyes,  c’est 
qu’ellesont  la  charnière  simple  et  sans  dents,  comme  les  autres  co- 
quilles du  môme  genre,  et  qu’elles  sont  bâillantes,  exactement 
comme  le  , sont  toutes  les  Pholadomyes.  Nous  cherchons  en  vain 
dans  les  planches  de  M.  Agassiz  quels  doivent  être  les  caractères 
de  son  genre  Myopsis.  Nous  avons  sous  les  yeux  un  assez  grand 
nombre  de  coquilles  de  ce  groupe,  et  nous  trouvons  sur  des  moules 
bien  conservés  l’impression  d’une  charnière  simple  réunissant  les 
valves  bâillantes  d’une  coquille  très  mince  dont  on  aperçoit  diffi- 
cilement les  impressions  musculaires  et  l’impression  palléale,  par- 
ties que  nous  avons  vues  cependant  telles  qu’elles  existent  dans  lo 
genre  Pholadomye.  Nous  avions  d’abord  pensé  que  M,  Agassiz 
avait  établi  son  genre  Arcomye  pour  des  coquilles  singulières  qui 
devaient  avoir  à la  charnière  un  caractère  tout  particulier,  qui  con- 
siste en  une  côte  oblique  appartenant  à la  valve  droite.  Ce  carac- 
tère qui  se  représente  dans  quelques  espèces  du  genre  Jrcomya  se 
montre  aussi  dans  des  coquilles  iloiU  les  formes  sont  très  différentes 
et  avec  lesquelles  M,  Agassiz  a lait  ses  genres  Cero/nya  el  Gresélya» 
Nous  ne  voyons  dans  la  plupart  des  espèces  du  genre  Arcomya 
qu’un  double  emploi  des  Pholadomyes,  car  nous  y retrouvons 
l’impression  d’une  charnière  simple  dans  des  coquilles  bâillantes, 
minces,  inéquiiatérales,  comme  les  autres  Pholadomyes.  Quant  au 


LES  GLYCI?lElUJ)liS. 


i49 

gcni  e Plafymya^  il  paraît  se  distinjjuer  un  peu  mieux  des  Phola- 
domyesj  par  ce  caractère  qui,  pour  nous,  n’a  pas  une  grande  va- 
leur, mais  qui,  à la  rigueur,  peut  être  pris  eu  considération:  il 
consiste  en  une  cote  oblique  intérieure  dans  chaque  valve,  parlant 
de  Jû  charnière  et  allant  mourir  insensiblement  vers  les  im- 
pressions musculaires  postérieures.  Ces  côtes,  que  l’on  retrouve 
dans  plusieurs  genres  à coquilles  très  minces,  et  notamment  dans 
plusieurs  espèces  de  Solens,  pourraient  indiquer  un  genre  particu- 
lier s’il  y avait  à la  charnière  des  traces  évidentes  d’un  caractère 
plus  important  qui  accompagnât  celui-là.  Dans  les  Plalymja  la 
charnière  était  simple  et  sans  dents  comme  dans  les  Pholado- 
myes,  et  ce  motif  nous  paraît  suffisant  pour  joindre  encore  ce 
genre  à tous  ceux  que  nous  avons  mentionnés. 

Nous  donnons  ici  le  nombre  et  la  distribution  des  espèces. 

Trois  espèces  vivantes:  une  des  petites  Antilles  ; deux  de  la  mer 
Caspienne. 

Trois  espèces  tertiaires  : deux  du  terrain  tertiaire  supérieur 
d’Allemagne  ; une  du  terrain  tertiaire  inférieur  du  bassin  de  Paris 
et  de  Londres,  Pholadomya  margaritacea^  Sow. 

Vingt-et-une  espèces  dans  la  craie:  neufdans  la  craie  supérieure 
etglauconieuse  ; six  dans  la  craie  moyenne  ou  grés  vert;  et  six  dans 
le  terrain  néocomien. 

Parmi  ces  espèces,  nous  citerons  les  Pholadomya  u/n^o/za^«,Desh., 
decussata,  Agass.,  qui  sont  propres  à la  craie  supérieure,  les  PAo/a- 
domya  aodulifera^  Munst.,  Æj/nareX*»,  Pusch.,  qui  sont  propres  aux 
grés  verts  de  la  Hongrie,  de  la  Scanie,  de  Quedlinbourg  ; enfin  les 
Pholadomya  langii  et  ncocomensis^  qui  sont  propres  aux  terrains  néo- 
comiens de  la  Suisse  et  de  la  France. 

Quaranle-el-une  espèces  dans  les  terrains  portiandiens  du  Kim- 
meridge-CIay  et  du  Coral-Rag. 

Parmi  ces  espèces,  nous  citerons  : le  Pholadomya  donacina  de 
Votz,  qui  caractérise  le  Porlland,  en  Suisse,  en  Allemagne  et  en 
France;  Vacuticostatay  Sow.,  qui  est  propre  au  Kimmeridge  en 
France,  en  Allemagne,  en  Angleterre  et  en  Suisse. 

Le  Pholadomya  cancellata  se  trouve  à-la-fois  dans  le  Porlland  et 
le  Coral-Rag  supérieur,  en  France,  en  Allemagne  et  en  Suisse  ; en- 
fin le  Pholadomya  ovalist  Sow.,  se  trouve  en  môme  temps  dans  la 
Porlland  et  le  Kimmeridge-Clay,  en  France,  en  Allemagne  et  en 
Angleterre. 

Vingt-huit  espèces  dans  le  terrain  oxfordien. 


j5o  QUATRIEME  FAMItLE. 

Le  Pliolaiomya  œqualisy  Soiv.,  ainsi  que  le  Pholadomya  angus^ 
tata  du  môme  auteur  caractérisent  ce  terrain  en  France,  en  Alle- 
magne et  en  Angleterre. 

Quarante-quatre  espèces  dans  la  grande  colite,  l’oolite  inférieure 
et  Je  lias.  Parmi  ces  espèces  nous  devons  signaler  : 

Le  Pholadomya  producfa,  Sow.,  qui  se  trouve  à-la-fois  dans  la 
grande  colite  et  foolite  inférieure  d^Angleterre  et  de  France. 

Le  Pholadomya  Jîdiculay  que  Ton  rencontre  plus  spécialement 
en  France,  en  Allemagne  et  en  Angleterre,  daasl’oolile  inférieure. 

Le  Pholadomya  semicostata.  Desh.,  que  l’on  rencontre  plus  spé- 
cialement dans  le  lias,  en  France  et  en  Angleten’e. 

Il  y a plusieurs  espèces  qui  passent  dans  les  divers  membres  de 
cette  formation. 

Le  Pholadomyarcticulafay  qui  passe  du  lias  supérieur  dans  l’oo- 
lite  inférieure. 

Et  \e  Pholadomya  fidicuîa,  qui  remonte  de  l’oolite  inférieure  dans 
la  grande  oolilc. 

Dix-neuf  espèces  dans  le  muschelkalk.  Nous  citerons  seu- 
lement : 

Le  Pholadomya  jnusculoides  àe  Schlolheim,que  l’on  trouve  dans 
tous  les  lieux  où  se  montre  cette  formation. 

Trois  espèces  dans  la  formation  paléozoïque  inférieure,  com- 
prenant le  Carbonifère,  leDevonien  et  Je  Silurien  : ces  trois  espèces 
sont  : 

Le  Pholadomya  cuneata,  Sow.,  qui  est  propre  aux  terrains  car- 
bonifère et  silurien  de  l’Angleterre;  et  \e  Pholadomya  mimsferi, 
Verneuil  ; Radiata  Go/<^qui  se  rencontrent  dans  le  terrain  dévo- 
nien de  TEifel, 

En  terminant  ce  qui  a rapport  aux  généralités  du  genre  Phola- 
domye,  nous  devons  ajouter  que  nous  sommes  heureux  de  par- 
tager l’opinion  de  M.  Agassiz  sur  le  soin  et  la  rigoureuse  exactitude 
qu’il  faut  apporter  à la  détermination  des  espèces  fossiles,  surtout 
dans  un  genre  aussi  difficile  que  celui-ci.  De  cette  détermination 
résulte,  en  effet,  comme  conséquence  d’une  haute  importance,  la 
distribution  exacte  et  véritable  des  espèces  dans  les  couches  de  la 
terre.  Revenons  aux  espèces  qui  nous  ont  servi  d’exemple  d'une 
grande  confusion  de  synonymie,  et  que  nous  avons  signalées  pré- 
cédemment. Admettons  pour  un  moment,  sous  les  noms  de  Phola~ 
domya  Murchissoni  oi  ambigua , les  ou  six  espèces  que  l’on  a 
confondues  dans  chacune  d’elles,  ctaussitôt  nous  allons  voir  passer 


LES  GLYCIMEUIDES. 


i5x 


ces  espèces  dans  presque  tous  les  terrains;  ce  seront  autant  d’erreurs 
qui  se  seront  propagées  sous  le  manteau  d'une  zoologie  sans  criti- 
que : Que  l’observation  et  la  critique,  se  prêtant  un  mutuelappui, 
fassent  rentrer  ces  espèces  dans  leurs  véritables  limites,  et  nous 
les  verrons  restreintes  à un  petit  nombre  de  couches  terrestres. 

Voici  une  autre^  observation  qui  nous  est  suggérée  par  les  cou- 
pures artificielles,  selon  nous,  que  M.  Agassiz  a fait  subir  au  grand 
type  des  Pholadomyes.  L’étendue  des  genres  n’est  point  une  chose 
indifférente,  même  au  point  de  vue  de  l’application  de  la  zoologie 
à la  géologie,  et  nous  allons  en  trouver  un  exemple  remarquable 
dans  le  genre  qui  nous  occupe.  Tel  que  l’a  restreint  M.  Agassiz,  le 
genre  Pholadoraye  commence  au  lias, et  remonte  à travers  toutes 
les  formations,  où  il  laisse  des  espèces  en  plus  ou  moins  grand  nom- 
bre, et  se  montre  encore  dans  les  mers  actuelles.  Ajoutez  à ce  genre 
les  espèces  lisses  et  ovalaires  dont  M.  Agassiz  a fait  son  genre  Myop~ 
jij,  et  a l’instant  meme  vous  voyez  le  genre  PboUdomye  pénétrer 
dans  les  couches  qui  sont  sous  le  lias,  et  s’avancer  jusque  dans  le 
terrain  silurien  le  plus  inférieur.  Si , comme  nous  le  croyons  et 
comme  nous  l’avons  déjà  dit,  le  genre  Myopsis  est  artificiel  et  doit 
rentrer  dans  celui  des  Pholadomyes,  il  n’est  point  indifférent, 
comme  on  le  voit,  que  celte  réunion  se  fasse,  puisqu’il  en  résulte 
ce  fait  intéressant  que  le  type  si  remarquable  des  Pholadomyes  est 
du  petit  nombre  de  ceux  qui  ont  assisté  pour  ainsi  dire  aux  pre- 
miers phénomènes  de  la  création  des  êtres,  et  ont  persévéré  à tra- 
vei's  toutes  les  phases  qu’a  éprouvées  notre  globe  terrestre,  et  ont  pu 
s’approprier  aux  conditions  actuelles  d’existence.  Si  l’on  ajoute  en- 
core au  genre  Pholadomye  les  Lysianassa  les  Plaiymia  et  la  plus 
grande  partie  des  Arcomya^  la  distribution  du  genre  éprouvera 
d’autres  changemens  encore  ; il  prendra  plus  d’importance  dans 
des  couches  où  il  paraissait  en  avoir  beaucoup  moins.  La  distribu- 
tion géographique,  elle-méme,  subira  des  modifications  importantes 
selon  que  l’on  aura  accordé  au  genre  plus  ou  moins  d’étendue. 

ESPÈCES. 

Pholadomye  blanche.  Pholadomja  candida,  Sow.  PI.  4*  fig. 

4.  5.  6. 

Testa  ovato^transversâ^  inflatâ^  suhcylindvaceâ  y tenuîyfragilly  hîaîînây  can~ 
àidà^  inœquîlatcraU'j  laterc  antîco  hrevissimo;  '\)ahis  costidis  'variànlibus y 
stries  transçersis  clalhratis;  cardine  angustOj  subinftexOysimpUci » 


i52 


QÜATUlbiE  FAMILLE. 

Sowerhy.  Généra  of  shel(5.  Genre  Pholadomya. 

Beeve.  Concb.  syst.  t.  i.  p.  5o.  pl.  32. 

Desb.  Encycl.  inclh.  vers,  t.  3.  p.  356. 

Agassiz.  Eludes  cril.  sur  les  Moll,  foss,  p.  6a.  n®  i. 

Habile  l’ile  Torlola. 

Espèce  rare  et  curieuse,  la  première  vivante  qui  ait  été  connue  : 
elle  est  ovale,  transverse,  obtuse  à ses  extrémités,  très  convexe, 
et  subcylindracée  dans  le  milieu.  Les  crochets  sont  peu  saillans, 
opposés;  ils  se  touchent,  et  celui  de  la  valve  gauche  est  percé  de 
manière  à recevoir  celui  de  la  valve  droite  qui  peut  ainsi  se  mouvoir 
davantage.  Lorsque  les  valves  sont  rapprochées,  elles  laissent  entre 
elles  un  bâillement  assez  considérable  aux  deux  extrémités  de  la 
coquille.  Celui  du  côté  postérieur  est  plus  considérable  queTanté- 
rieur,  La  coquille  est  très  inéquilatérale,  les  crochets  élani  placés 
vers  le  quart  de  la  longueur  totale;  aussi  le  côté  antérieur  est  très 
court,  et,  vue  de  ce  côté,  la  coquille  est  cordiforme.  La  surface 
extérieure  est  ornée  de  douze  à quinze  côtes  longitudinales  qui 
descendent  en  rayonnant  des  crochets,  et  viennent  aboutir  sur 
toute  la  longueur  du  bord  inférieur.  L*extrémité  antérieure  et  le 
côté  postérieur  restent  lisses.  Des  stries  transverses  d’accroissement 
irrégulières  traversent  les  côtes  longitudinales,  et  les  découpent 
en  grosses  granulations  obtuses  et  subquadrangulaires.  Le  test  est 
tellement  mince  que  ses  accidens  extérieurs  se  reproduisent  assez 
exactement  à Tinlérieur.  Le  bord  cardinal  ou  supérieur  est  linéaire. 
On  remarque,  immédiatement  au-dessous  des  crochets,  une  légère 
inflexion  à la  place  où  seraient  les  dents  cardinales  si  elles  exis- 
taient. En  arrière  du  crochet,  se  relève  une  nymphe  d’une  mé- 
diocre épaisseur,  mais  assez  longue  et  donnant  insertion  à un  li- 
gament externe.  La  surface  intérieure  laisse  voir  deux  impression  s 
musculaires,  dont  l’antérieure,  fort  élrgite,  descend  sur  presque 
toute  la  longueur  du  bord  antérieur  de  la  coquille.  L’impression 
postérieure  est  obronde;  l’impression  palléale  montre  une  large 
sintiositq  postérieure  qui  ne  pénètre  guère  que  jusque  vers  le  tiers 
de  la  longueur  totale.  Cette  coquille  mince,  transparente  comme 
celle  des  Anatines,  a un  reflet  subnacré.  L’individu  figuré  par 
M.  Sewerby  a 4o  millimètres  de  long  et  8o  de  large. 


hhs  GLYCiMüKIDËS. 


l53 


Pholadornye  à côtes  nombreuses.  Pholadomya  multlcostata, 
Agassiz.  PL  4*  fig*  7-  8. 

Testa  ovato-iransversà,  a/iticè  latîore,  InœquUatcraliy  cost'is  angustîsj  inœqiia- 
VihiLSy  radiatîs  ornatà;  latere  antico  hreviorcyobtuso,  postico  acutliuculo; 
umbomùus  approximatUy  magnis, 

Rœraer.  Pelr,  p.  i3i.  n®  14.  pl.  9,  f.  i5.  Ph»  acuticosta, 

Bronn.  Lelh.  Geogn.  pl.  a8,  f.  18. 

Goldf,  Pelr.  (.  2.  p.  271.  pl,  4. 

Agassiz.  Éiuü.  crit.  sur  les  moll,  foss.  p.  S2,  pl.  2.  f.  3.  4.  pl.  3.  f.  10, 
Pb,  muîticostata. 

Habite....  fossile  dans  les  marnes  et  les  argiles  du  Kimmeridge-Clay,  en 
France,  en  Allemagne  et  en  Angleterre. 

Jusqu’à  présent,  cette  espèce  ne  s’est  rencontrée  que  dans  la  for- 
mation kiinméridienne  qui  forme,  comme  savent  les  géologues,  la 
partie  supérieure  des  terrains  jurassiques.  Celte  espèce  peut  servir 
à caractériser  les  couches  dont  il  est  question;  car,  jusqu’à  pré- 
sent, elle  n’en  a pas  dépassé  les  limites. Nous  ne  connaissons  que  le 
moule  intérieur;  mais  nous  savons,  par  l’exemple  de  la  Pholadornye 
vivante , que  ce  moule  reproduit  les  accidens  extérieurs  avec  assez 
de  fidélité.  Cette  coquille  est  ovale,  Iransverse,  très  renflée  dans 
le  milieu  et  du  côté  antérieur,  plus  amincie  et  plus  pointue  du 
côté  antérieur.  Les  crochets  sont  grands  et  saillans;  aussi,  vue  de 
face  du  côté  antérieur,  celle  coquille  est  cordiforme.  De  ces  cro- 
chets partent  en  rayonnant  vingt-quatre  à trente  côtes,  qui  se 
portent,  quelques-unes  sur  le  côté  antérieur,  et  les  autres  viennent 
aboutir  sur  le  Lord  inférieur  des  valves.  Il  n’y  en  a Jamais  sur  le 
côté  postérieur  qui  reste  lisse.  Ces  côtes  sont  inégales  pour  le  vo- 
lume et  pour  leur  écartement.  Les  trois  ou  quatre  plus  grosses  sont 
fort  écartées  , et  occupent  le  ventre  de  la  coquille  ; celles  qui  sont 
sur  le  côté  antérieur  sont  plus  petites  et  plus  rapprochées;  mais, 
depuis  l’extrémité  antérieure  jusqu’à  la  postérieure,  les  côtes  se 
multiplient  rapidement,  mais  elles  s’amoindrissent  à mesure  que 
leur  nombre  s’accroît , et  elles  disparaissent  insensiblement  vers 
l’extrémité  postérieure.  Les  côtes  dont  nous  venons  de  parler  sont 
minces  et  étroites  ; elles  ressemblent  à des  crêtes  tranchantes  posées 
sur  une  surface  lisse.  Quoique  nous  ayons  des  moules  intérieurs  de 
cette  espèce  empreints  dans  une  pâte  très  fine,  nous  ne  trouvons 
sur  eux  aimune  trace  des  caractères  intérieurs  que  peuvent  fournir 


l54  QUATRIÈMK  FAHltLË. 

les  impressions  musculaires  et  celles  du  manteau.  Cette  coquille  a 
6o  millimètres  de  long  et  38  de  large. 

Pholadomye  donaciforme.  Pholadomya  donaciformis.  Desh, 
PI,  4*  fig.  9- 10. 

Testâ  transversdj  ovato^suhtrîgonâ  jinœquiïateraîijventricosâ  y ohîîquè  trun~ 
catâ  , transvevslm  siîlcaiâ. 

An  eadem  specîes?  Amphidesma  donaciforme»  Zieten,  Pétrif,  du  Wurt, 
p.  84.  pl.  63,  f.  a. 

Lutraria  donacina.  Rœmer.  Pétrif.  du  Wurt.  p.  12  t . n.  2.  pl.  9.  f.  14. 

Habile....  fossile  dans  le  lias  supérieur  en  Lorraine,  en*Bourgogne,  en  Al- 
lemagne , en  Angleterre. 


La  6gure  de  M.  Zieten  ne  s’accordant  que  très  imparfaitement 
avec  l’espèce  que  nous  avons  fait  figurer,  nous  no  la  mentionne- 
rons qu’avec  beaucoup  de  doute.  M.  Zieten  renvoie  à une  figure 
de  l’ouvrage  de  M.  Philips  (pl.  12.  f.  5).  La  figure  de  M.  Philips 
a bien  quelques  rapports  aussi  avec  notre  espèce,  mais  elle  s’çn 
distingue  néanmoins  par  de  très  bons  caractères;  et  nous  sommes 
loin  de  partager  l’opinion  des  deux  auteurs  que  nous  venons  de  citer, 
au  sujet  du  genre  dans  lequel  ils  placent  leurs  espèces;  car  il  n’offre 
rien  ni  dans  sa  forme,  ni  dans  ses  auU'cs  caractères,  qui  s’accorde 
avec  ce  qu’on  connaît  du  genre  Ainphidesrae.  La  coquille  à laquelle 
nous  donnons  le  nom  de  Pholadomye  donaciforme  est  transverse, 
ovale,  oblongue,  tronquée  antérieurement  et  extrêmement  iné- 
quilatérale  ; ce  qui  détermine  quelque  ressemblance  en  tre  sa  forme 
et  celle  de  la  plupart  des  Donaces,  Le  côté  antérieur  est  extrêmement 
court;  il  est  aplati  et  il  dépasse  à peine  les  crochets.  Ceux-ci  sont 
grands,  cordiformes,  opposés  et  peu  inclinés  antérieurement.  Le 
côté  postérieur  s’atténue  assez  rapidement:  il  est  cunéiforme,  ar- 
rondi, et,  dans  les  individus  qui  n’ont  point  été  comprimés,  on 
voit  de  ce  côté  un  bâillement  semblable  à celui  des  autres  Phola- 
domyes.  Toute  la  surface  extérieure  est  chargée  de  gros  sillons 
transversGS,  simples,  arrondis.  Dans  la  plupart  des  individus,  les 
sillons  s’amoindrissent  vers  le  corselet  et  vers  la  lunule,  de  sorte 
que  ces  parties  restent  lisses.  Nous  avons  un  individu  qui  vient  des 
lias  supérieurs  des  environs  de  Bourmon  , dans  la  Haute-Marne  ; 
il  a conservé  une  portion  de  son  lest,  et  il  est  plus  mince  qu’une 
feuille  de  papier  très  fin.  Outre  les  sillons  dont  nous  avons  parlé, 
on  trouve  encore,  à la  surface,  quelques  stries  très  lines  d’accrois- 


LES  GLYCIMERIDES. 


l55 


sement  que  Ton  aperçoit  à i’aide  d’un  fort  grossissement.  Cette  es- 
pèce, parfailèment  caractéristique  des  couches  supérieures  du  lias, 
a 25  millimètres  de  long,  et  4^  de  large. 

Pliolaclomye  sémicostulee.  Pholadomya  semicostaia.  Desh. 
PL  5.  fig.  6, 

Testa  oi^ato’transversd y In  mcdlo  turgîdà.postich  'siihnrcuatâ , înœquîlatevaliy 
in  medio  qttadrî  costatâ^  costîs  divaricatîs  ^ nodulosisf  latere  antico  breviy 
ohtuso;  umbonîbus  turgtdîs  ^ decussatis. 

Habile....  fossile  dans  les  lias  de  la  Lorraine. 

Coquille  ovale,  transverse  , ayant  le  bord  supérieur  droit  et  le 
bord  inférieur  régulièrement  arqué  en  demi-cercle , de  sorte  que 
sa  projection  géométrique  ressemblerait  assez  exactement  à un 
demi-cercle.  Cette  coquille  est  très  enflée  dans  le  milieu,  elle  est 
très  inéquilatérale.  Le  côté  antérieur  occupe  à peine  le  tiers  de  la 
longueur  totale;  le  côté  postérieur  s’amincit  assez  l’apidement , et , 
à l’extrémité  de  ce  côté,  les  valves  sont  bâillantes,  les  crochets 
sont  grands  et  cordiformes,  opposés  et  très  rapprochés.  De  leur 
sommet  partent  quatre  côtes  longitudinales,  écartées,  qui  descen- 
dent en  rayonnant  et  aboutissent  au  milieu  du  bord  inférieur , de 
sorte  que  tout  le  côté  antérieur,  et  presque  toute  la  moitié  posté- 
rieure de  la  coquille  restent  lisses.  Sur  les  crochets,  se  montrent 
des  stries  d’accroissement  iransverses;  ces  stries,  en  découpant  les 
côtes,  établissent  un  treillis  assez  gros  et  assez  régulier.  Nous  avons 
fait  représenter  celle  espèce , à cause  de  sa  forme;  car  nous  ne  sa- 
vons jusqu’à  présent  si , par  son  abondance  , elle  peut  concourir  à 
caractériser  la  formation  basique  dans  laquelle  nous  ne  l’avons  vue 
que  rarement  aux  environs  de  Nancy. 

Cette  coquille  est  longue  de  5o  millimètres,  large  de  75  et  épaisse 
de  4o- 

Pholadomye  ombonelle.  Pholadomya  umbonata^  Desh.  PL  5. 

fig.  I. 

Testâ  siihmargarîtaceây  ingond,  transversîm  împîicatd,  costuUs  hngiiudina- 
libus ySiibgranosis  ornatà;  umbonibiis  eîalisj  magnis,  covdatisi  lattre  antico 
brevîssimo , postîco  depresso,  obtuso. 

An  eadem}  Pholadomya  nuda^  Agassiz.  Elucl.  sur  les  molli  foss.  p.  64. 11. 
i3.  pl.  2.,  b.  f,  9.  10.  II. 


i56 


QUATUIÈME  1-AMlLLE. 

An  trigonla  arcuaia"^  Lamk.  Aiiim.  s.  vert.  cdit.  t.  6.  p.  52i.  n.  r6. 
Habite....  fossile  dans  le  sable  vert,  en  I^eleique. 

Nous  devons  la  connaissance  de  celte  espèce  h noire  ami,  M.  Du- 
cliaslel  qui,  comme  on  le  sait  , s’est  livré  pendant  de  longues 
années  à la  recherche  des  fossiles  des  terrains  crayeux  de  la  Belgi- 
que : cette  coquille  a de  l’analogie  avec  le  Pholadomya  margari- 
tacea  qui  est  propre  aux  terrains  tertiaires  inférieurs  ; cependant, 
elle  s’en  distingue  constamment  : elle  est  sublriangulairc,  presque 
aussi  longue  que  large  ; il  y a môme  une  variété  courte,  dont  les 
deux  dimensions  sont  égales;  elle  est  très inéquilatéraie,  tronquée 
du  côté  antérieur  : ce  côté,  aplati  légèrement , se  relève  dans  le 
milieu  où  il  est  comme  pincé.  La  coquille  est  légèrement  aplatie 
de  chaque  côté  ; elle  est  cependant  subcordiforme  et  sa  partie 
la  plus  ventrue  est  du  côté  antérieur;  Je  côté  postérieur  est  dé- 
primé, il  est  arrondi  et  forme  avec  le  côté  inférieur  une  cour- 
bure uniforme  ; le  côté  supérieur  est  occupé  par  un  grand  cor- 
selet lisse,  lancéolé,  dont  la  surface  est  circonscrite  par  uc 
angle  peu  marqué.  Les  crochets  sont  très  grands,  ils  se  relèvent 
considérablement  et  dépassent  de  beaucoup  le  bord  supérieur  des 
valves;  ils  sont  opposés,  pointus  , rapprochés,  cl  a leur  sommet, 
naissent  dix  à douze  côtes  grêles  rapprochées,  granuleuses,  qui  des- 
cendent en  rayonnant  jusque  sur  le  ventre  de  la  coquille , et  dis- 
paraissent insensiblement  sans  atteindre  le  bord  inférieur.  Outre 
ces  côtes,  le  test  présente  encore  des  plis  iransverses,  nombreux  et 
assez  réguliers  entre  lesquels  se  montrent  des  stries  fines  d’accrois- 
sement; ces  plis  et  ces  côtes  disparaissent  presque  complètement 
sur  les  deux  extrémités  de  la  coquille.  Nous  avons  vu  un  individu 
chez  lequel  il  reste  uue  grande  partie  du  test  ; ce  test,  aussi  mince 
qu’un  papier  fin,  est  subnacré  et  brillant.  La  longueur  de  cette 
espèce  est  de  45  millimètres  et  sa  largeur  varie  de  45  à 5o;  son 
épaisseur  est  de  3o  millimètres. 

Pholadomye  rétuse.  Pholadomja  refusa.  Desh.  PI.  5.  fig.  2.  3. 

Testa  ovafo^ohlongd^  inœquilaterali^  anticc  hrevissimà,  obtusàyposticè  dilatatâ^ 
infernè  arcuatd,  ventricosâ  ^ corai  otmiy  transversim  plicatâ  y costis  angus^ 
tlsy  îongitudinalibtis , decussatà, 

Tholadomya  cancellata.  Agassiz.  Etud,  sur  les  Moll.  foss.  p.  128.  70. 

pl,  7,  e.  f,  4-9. 

Habite.. .7  fossile  dans  le  coral-rag  supérieur. 

Cette  espèce  se  rencontre  assez  communément  dans  les  couches 


LFS  GLYCIMERIDES. 


167 

supérieures  du  coral-ragj  elle  est  ovale,  oblongue,  légèrement 
courbée  dans  sa  largeur;  elle  est  extrêmement  inéquilatérale; 
ses  crochets  sont  presque  terminaux  comme  ceux  des  Modioles 
et  à peine  dépassés  par  un  côté  antérieur  fort  court  ; le  côté  posté- 
rieur est  dilaté  dans  les  vieux  individus;  il  s’amincit  assez  rapide- 
ment, et  il  est  toujours  bâillant;  le  bord  supérieur  ou  cardinal 
offre  constamment  un  grand  corselet  lancéolé,  lisse,  qui  s’étend 
depuis  les  crochets,  jusqu’à  l’extrémité  postérieure.  Ce  corselet  est 
nettement  séparé  du  reste  de  la  surface  par  un  angle  assez  aigu. 
Les  crochets  sont  grands,  opposés  et  fort  aigus;  de  leur  sommet 
partent  en  rayonnant  huit  à dix  côtes  longitudinales,  très  étroites, 
qui  ressemblent  plutôt  à des  angles  surbaissés  qu’à  des  côtes;  elles 
sont  traversées  par  des  plis  Iransverses  plus  ou  moins  réguliers  selon 
les  individus , généralement  assez  gros  et  disparaissant  sur  le  côté 
antérieur  ainsi  que  sur  le  postérieur;  ces  plis,  plus  réguliers  sur 
les  crochets,  forment  avec  les  côtes  longitudinales  un  treillissement 
assez  régulier  et  qui  ne  manque  pas  d’élégance.  La  forme  de  celte 
espèce  rend  assez  difficile  la  mesure  de  sa  longueur  si  l’on  fait  tom- 
ber perpendiculairement  une  ligne  des  crochets  au  bord  infé- 
rieur; cette  ligne  est  beaucoup  plus  courte  que  celle  qui  mesure- 
rait le  côté  postérieur;  la  largeur  des  grands  individus  est  de  5o 
millimètres. 

Pholadomye  petite  lyre,  Pholadomya fidicula,  So-w.  PI.  5.  fig.  3 . 

TeHâ  ovalO’^tvansvcrsâ  ^ inœquiîateraU,  anticè  brevlssîmâ,  longitudinalîter 
multicostellald'  coslulh  aliquantîsper  uudulatîs , ohtusis;  îatere postico  ob-^ 
tuso^  hiante, 

Sow.  Min.  Conclu  pi.  aaâ. 

Bronn,  Lelhœa  geogn.  t.  i.  p.  38a.  pl,  ao.  f.  i8. 

Agassiz.  Elud.  ciit.  sur  les  Moll.  foss.  p.  60.  n®  ii.  pl.  3,-  e,  f.  10  à i3. 

Habite..;,  fossile  dans  l’oolite  inférieure,  en  Normandie,  en  Lorraine,  en 
Allemagne  et  en  Angleterre. 

Avant  que  M.  Sowerby  n’eût  établi  son  genre  Pholadomye,  il 
avait  réparti,  comme  nous  l’avons  dit,  différentes  espèces  dans  les 
Cardiles  et  les  Lutraires.  Lorsque  plus  lard  il  rassembla  dans  son 
nouveau  genre  toutes  les  coquilles  qui  pouvaient  y entrer,  il  s’y 
trouva  un  Cardita  lyra  et  un  Lutraria  lyra.  L’une  de  ces  deux  es- 
pèces devait  nécessairement  changer  de  nom,  et  c’est  pour  celle-ci, 
autrefois  Lutraria  lyra  que  M.  Sowerby  a proposé  celui  à^Phola- 


l58  QUATRiiHE  FAMIttE. 

domya  fidlcuîa  cpie  nous  avons  adopté.  Nous  pensons  que  c’est 
cette  espece  que  Lister  a figuré  dans  son  Synopsis  conchyliorum 
(PI,  509,  fig.  63);  sa  coquille  vient  du  Languedoc,  mais  nous 
ignorons  dans  quelle  partie  de  cette  province  française  elle  a été 
recueillie.  Plusieurs  especes  ont  été  confondues  avec  celle-ci  par 
la  plupart  des  auteurs  qui  en  ont  parlé;  c’est  ainsi  que  la  coquille, 
figurée  sous  le  uomàePh.Jidicuîa  par  Rœmer,  constitue  une  espèce 
très  distincte  de  celle  du  naturaliste  anglais  ; il  en  est  de  mémo  de 
celle  de  Goldfuss  qui  diffère  également  de  celle  de  Rœmer  et  de  celle 
de  Sowerby  : enfin  le fidicula  de  M.  de  Ziélen  est  encore  différente 
des  deux  précédentes.  Voilà  donc  quatre  espèces  qui  portent  un 
même  nom,  et  parmi  elles  une  seule,  celle  de  Sowerby,  doit  le 
conserver.  Cette  coquille  est  ovale,  Iransverse,  son  bord  inférieur 
est  arqué  régulièrement,  le  supérieur  l’est  aussi,  mais  à un  bien 
moindre  degré;  elle  est  très  inéquilalérale,  obtuse  aux  extrémités  ; 
le  côté  antérieur  est  très  court,  et  il  est  à peine  du  quart  de  la  lon- 
gueur totale.  Du  sommet  de  ses  crochets  parlent  en  rayonnant  un 
grand  nombre  de  petites  côtes  longitudinales,  obtuses,  quelquefois 
rendues  onduleuses  par  des  accroissemens  Iransverscs,  elles  s’arrê- 
tent brusquement  de  chaque  côté,  de  manière  à laisser  lisse  tout 
le  côté  postérieur  et  une  portion  notable  du  côté  antérieur;  les 
crochets  sont  très  sailians,  cordiformes,  opposés  et  très  rapprochés, 
la  coquille  est  ventrue,  subcylindracéc  dans  le  milieu  et  fort  bâil- 
lante du  côté  postérieur.  Cette  espèce  est  constante  dans  Toolite 
inférieure,  elle  peut  servir  à caractériser  cette  formation;  les 
grands  individus  ont  55  miliimèU'es  de  long  et  90  de  large. 

Pholadomye  treillissée.  Pholadomya  decussata,  Agassiz,  PI.  5. 

fig-  5- 

Testât  ri  oxfndf  veniricosâf  cordiformî^  in(tquîlaieraU,anticctruncatâ,pîanU“ 
latâ^postlcèobtusâ^infernè  arcuatâ;  lateré  antico  bîcatînato ; vahis  Ion-- 
gîtudinaîlter  costatis , transveî'sim  plicîs  obsoletîsy  decussatis. 

Agassiz.  Etudes  crit.  sur  les  Moll.  foss.  pl.  4.  5g.  9. 

Habite...  fossile  dans  la  craie  (grès  verlj  en  France  et  en  Angleterre. 

Cette  coquille  se  rencontre  assez  abondamment  dans  diverses 
localités  du  département  de  la  Sarllie  et  d’Angleterre  dans  Je  sable 
vert;  elle  est  très  enflée;  ses  crochets  sont  grands  et  cordiformes, 
opposés  et  à peine  infléchis  sur  le  côté  antérieur.  La  coquille  est 
extrêmement  inéquilatérale  ; son  coté  antérieur  très  court , est 


tES  GLYCTMERIBES. 


iSg 

tout-à-faitaplali,  et  la  carène  obtuse  qui  le  circonscrit  en  dehors 
est  la  partie  la  plus  épaisse  de  toute  la  coquille;  cette  carène  con- 
tient, en  dedans  de  Tespèce  qu’elle  circonscrit,  un  angle  peu  sail- 
lant, et  limitant  un  espace  lunulaire  très  grand  et  presque  plat; 
le  côté  postérieur  de  la  carène  est  suivi  d*une  faible  dépression 
longitudinale,  et  c’est  après  elle  que  commencent  à se  montrer 
quatre  à six  côtés  longitudinales,  partant  en  rayonnant  des  cro- 
chets et  aboutissant  au  bord  inférieur.  Toute  la  surface  est  découpée 
plus  ou  moins  profondément  par  des  plis  transverses  qui  se 
montrent  particulièrement  sur  les  parties  les  plus  saillantes  du 
test;  Tangle  antérieur,  la  carène  et  les  côtes  sont  divisées  par  ces 
plis  qui  deviennent  obsolètes  dans  les  intervalles;  l’entrecroisement 
des  plis  et  des  côtes  produit  à la  surface  un  Ireillissement  assez  gros- 
sier, qui  a valu  à l’espèce  le  nom  que  lui  a donné  M.  Agassiz. 
Les  individus  de  taille  moyenne  ont  yS  millimètres  de  large,  70  de 
long  et  Go  d’épaisseur. 


GENRE  QUATORZIÈME. 

CEROMTE.  Ceromya,  (Agass.) 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES.—  Animal  incoiinu. 

Coquille  ovale  ou  cordiforme  , très  inéqullatérale , inequi- 
valve;  la  valve  droite  un  peu  plus  grande  que  la  gauche; 
crochets  plus  ou  moins  grands , rapproches,  opposes;  test  très 
mince;  impressions  musculaires  peu  saillantes  : la  postérieure 
arrondie  ; Impression  pallcale  largement  sinueuse  du  côté 
postérieur;  charnière  simple  et  sans  dents;  une  côte  si- 
nueuse , et  remontant  obliquement  de  rhitérieur  sur  le  bord 
cardinal  de  la  valve  droite;  ligament  très  probablement  in- 
térieur. 

SYNONYMIE  GÉNÉRIQUE.  — Isocardia.  Woltz,  Rœmer,  Gold- 
fuss,  etc.  — Ceromya  et  Gresslya,  Agassiz, 

Lorsque  nous  avons  exécuté  les  travaux  préparatoires  pour  cet 


l6o  QUAXRlfeME  FAMILLE. 

ouvrage,  nous  avons  reçu  l’opinion  des  palœontologistes  et  des 
conchyliologLies , et  nous  avons  rangé,  parmi  les  Isocardes,  les 
coquilles  avec  lesquelles  M.  Agassiz  a formé  plus  lard  le  genre 
Céromye  : nous  avons  adopté  ce  genre,  en  y apportant  cependant 
quelques  modifications.  Eclairé  par  les  observations  du  savant  zoo- 
logiste dont  nous  venons  de  parler,  conduit  aussi  par  la  comparai- 
son du  moule  en  plâtre  de  Flsocarde  vivante  avec  les  moules  natu- 
rels du  nouveau  genre  de  M.  Agassiz,  nous  avons  été  bientôt 
convaincu  de  la  validité  de  ses  caractères , et  nous  l’avons  admis 
dans  les  rapports  que  lui  indique  M.  Agassiz,  c’est-à-dire  dans  le 
voisinage  du  genre  Pholadomye.  M.  Agassiz  restreint  son  genre 
Céromye  aux  seules  espèces  très  enflées  et  cordiformes  dont  les 
crochets  sont  généralement  grands  et  opposés,  comme  dans  quel- 
ques-unes des  Pholadomyes  les  plus  épaisses-,  et  il  rejette  dans  un 
autre  genre,  auquel  il  donne  le  nom  de  Gresslya,  des  coquilles  qui 
ne  dificrent  des  premières  que  par  leur  forme  générale,  qui  est  plus 
oblongue  et  moins  cordiforme.  Sans  doute  M.  Agassiz  n’aura  pas 
connu  des  formes  intermédiaires  entre  les  deux  genres  qu’il  a pro- 
posés, et  il  est  probable  que,  s’il  les  avait  eues  sous  les  yeux,  il  au- 
rait supprimé  l’un  de  ces  genres. 

Toutes  les  coquilles  que  nous  réunissons  dans  le  genre  Céromye 
sont  connues  à l’état  fossile  seulement,  et  presque  toutes  appar- 
tiennent à la  grande  série  des  terrains  jurassiques.  Elles  offrent 
même  ce  fait  assez  singulier,  qu’on  ne  connaît  jusqu’à  présent  que 
leur  moule  intérieur,  et  que  c’est  d’après  lui  seul  que  l’on  peut 
caractériser  le  genre;  mais  l’on  peut  juger  d’après  lui,  aussi  bien 
que  d’après  les  empreintes,  que  les  coquilles,  quoique  parvenant 
quelquefois  à de  grandes  tailles,  étaient  formées  cependant  d’un  tôt 
excessivement  mince,  dont  les  valves  i*éünies  par  un  ligament 
peu  puissant,  ont  souvent  été  dérangées,  et  c’est  à la  suite  de  ces 
dérangemens  que  souvent  on  a pu  observer  des  impressions  très 
nettes  de  la  charnière.  Lorsque  les  valves  n’ont  pas  été  dérangées, 
on  s’aperçoit  qu’elles  n’étaient  point  parfaitement  égales,  et  que 
l’une  d’elles,  celle  du  côté  droit,  était  un  peu  plus  grande  que 
l’autre.  Malgré  la  finesse  de  la  pâte  calcaire  qui  le  plus  souvent 
a rempli  ces  coquilles,  on  n’aperçoit  que  très  dilficiiemeut  les  im- 
pressions musculaires  et  l’impression  du  manteau.  Ces  parties  sont 
cependant  indiquées,  faiblement  à la  vérité,  sur  un  grand  individu 
du  Ccrojnya  exçentrica,  et  elles  ont  la  plus  grande  analogie  avec  ce 
qui  se  voit  dans  les  Pholadomyes,  c’est-à-dire,  que  l’impression 


LES  OITCIMEUIDES. 


1 (>1 

musculaire  anlérieurc  osi.  allonf^ée  cl  éiroite,  le  long  du  bord  anlé- 
rieur  de  la  coquille,  tandis  que  la  postérieure,  rapprochée  du  bord 
supérieur,  est  presque  circulaire.  L’impression  palléale  suit  le  bord 
inferieur  des  valves  à une  petite  distance,  et  se  reploie  en  arrière 
pour  former  une  sinuosité  postérieure  fort  large,  arrondie  et  peu 
profonde.  Ce  qui  distingue  particulièrement  le  genre  qui  nous  oc- 
cupe, c’est  la  disposition  de  la  charnière,  dont  on  ne  peut  se  faire, 
du  reste,  une  juste  idée  qu’en  on  prenant  une  empreinte  sur  un 
moule  bien  net  et  bien  conservé.  Sur  le  moule,  on  aperçoit  que 
le  crochet  de  la  valve  droite  a un  sillon  profond  qui  prend  son  ori- 
gine vers  l’impression  musculaire  postérieure,  s’avance  oblique- 
ment, s’approfondit  sous  le  crochet,  et  enfin  se  termine  au-dessous 
de  lui.  Ce  caractère  se  montre  idenliqucment  semblable  dans  les 
coquilles  nommées  Gresslyes  par  M.  Agassiz.  Lorsque,  au  moyen 
de  l’empreinte,  on  a remis  en  saillie  ce  qui  était  en  creux  dans  le 
moule , on  voit  que  celle  valve  droite  était  munie  d’une  côte  obli- 
que, à peine  saillante  à son  origine,  mais  s’épaississant  à mesure 
qu’elle  s’avance  vers  la  charnière,  sur  laquelle  elle  se  place  sous  la 
forme  d’un  S italique  très  allongé,  dont  la  convexité  est  en  dehors. 
Sur  la  valve  gauche , le  bord  cardinal  est  simple,  mais  il  se  relève 
un  peu  vis-à-vis  de  la  cote  de  la  valve  droite,  et  il  nous  paraît 
probable  qu’étant  légèrement  concave,  il  a dû  s’appuyer  en  dedans, 
à la  manière  du  cuilleron  des  Myes,  et  non  contre  l’autre  valve, 
comme  cela  a lieu  dans  les  Pboladomyes.  Dans  tous  les  moules 
que  nous  avons  été  à mémo  d’étudier,  if  nous  a été  impossible  d’a- 
percevoir la  moindre  trace  du  ligament,  de  sorte  que  ce  caractère 
essentiel  du  genre  manque  absolument  ; mais  nous  supposons  qu’il 
a dû  être  placé,  soit  partie  à rinlérieiir  et  à rexlérieur,  comme  dans 
les  Thraciesjsoil  loul-à-faità  rintérieur,  comme  dansions  les  autres 
genres  dont  les  valves  sont  inégales  (Mye,  Corbule,  Pandore, 
Périplôrae,  Anatine,  etc.),  li  suit,  de  ce  qui  précède,  que  nous 
considérons  le  genre  Céroniye  comme  un  type  intermédiaire  entre 
la  famille  des  Glycimérides  et  celle  des  Myaires. 

Les  Céromyes  sont  des  coquilles  bâillantes,  un  peu  moins  ce- 
pendantque  la  plupart  du  Pboladomyes;  il  y en  a même  quelques- 
unes  qui  sont  closes,  presque  aussi  exactement  que  les  Isocardes. 
A les  considérer  dans  l’ensemble  de  leur  forme,  on  voit  les  Céro- 
myes  passer  insensiblement  de  la  forme  comprimée  d’arrièie  en 
avant  des  Héniicardes  jusqu’à  celle  de  coquilles  oblongues  et  Irans- 
verses,  comme  celles  des  Venus,  appartenant  au  sous-  genre  PuUastra 

II* 


I. 


i62  QÜÂTRIÎÎME  FAMILLE. 

de  Sowerby.  A prendre  les  deux  extrémités  de  la  série,  on  pour- 
rait être  disposé,  cooiine  M.  Âgassiz,  à y élabür  deux  genres;  mais 
ii  suÛilde  voir  le  passage  qui  s’établit  par  les  espèces  cordiformes 
s’allongeant  peu-à-peu,  et  arrivant  enfin,  par  une  série  de  modifi- 
cations aux  espèces  les  plus  iransverses,  pour  se  convaincre  que 
toutes  les  parties  de  cet  ensemble  sont  liées  d’uno  manière  intime  ; 
et  quand  môme  on  aurait  des  termes  plus  isolés  de  la  série,  il 
sufliraii  d’y  trouver  des  caractères  zoologiques  de  la  même  valeur 
pour  les  gi'ouper  en  un  seul  genre  naturel. 

D’après  les  observations  de  MM.  Gressly  et  Agassiz,  aussi  bien 
que,  d’après  celles  qui  nous  sont  propres,  les  espèces  du  genre 
Ceromya  vivaient  de  la  même  manière  que  les  Pboladomyes,  c'est- 
à-dire  qu’elles  s’enfoncaient  dans  la  vase  des  rivages  ou  se  dépo- 
saient des  boues  marneuses  ou  ferrugineuses.  La  fragilité  de  leur 
têt  ne  leur  aurait  pas  permis  de  s’établir  sur  des  fonds  marins 
d’une  autre  nature  ; leur  coquille  n’aurait  pu  long-temps  résister 
au  mouvement  des  cailloux  et  des  galets.  En  réunissant , comme 
nous  le  faisons  actuellement,  les  genres  Céromye  et  Gresslyede 
M.  Agassiz,  on  voit  ce  groupe  se  propager  dans  une  assez  grande 
épaisseur  de  sédimens  inférieurs  aux  terrains  tertiaires,  depuis  le 
grès  vert  jusqu’au  lias.  Les  matériaux  authentiques,  que  nous  pos- 
sédons sur  ce  genre,  nous  permettent  d’en  présenter  la  distribution 
suivante  : 

2 espèces  dans  la  craie  : 

Cewmya  crassicornis,  Agass,  Grès  vert  du  Saxonnais  en  'Cha- 
blais  (Savoie). 

Ceromya ptcelonga,  Desb.  Ceromya  neocomensis,  Agass.  Isocardia 
prœlonga.  Desh.  dans  Leymerie,  Mémoire  sur  les  terrains  crétacés 
de  l’Aube;  dans  le  néocomieu  de  la  Suisse  et  de  la  France. 

3 espèces  dans  le  Porlland  et  le  Kimmeridge-Clay  : 

Ceromya  eïegans.  Desh.  Des  environs  d’Alençon. 

Ceromya  injlaia.  Agass.  De  Suisse,  d’Allemagne  et  de  France. 

Ceromya  excenlrica.  Agass.  Très  commune  en  Suisse,  en  Alle- 
magne et  en  France. 

1 espèce  dans  i’Oxford-CIay  ; elle  n’est  point  décrite,  et  elle  ap- 
partient au  genre  Gresslya  de  M,  Agassiz,  Nous  l’avons  recueillie 
au  Vieux-Saint-Remy,  département  des  Ardennes. 

I espèce,  non  décrite  dans  la  grande  oolile,  du  Fresnoy,  près 
Sedan. 

4 espèces  dans  Toolile  inférieure  ; 


LES  r.LYCIMERIDES. 


l63 


Ceromya  plicaia,  Agass.  De  la  Suisse. 

Ceromya  tenera.  A^ass^,{fsocard(a.  Sow.)  D’Angleterre,  de  Suisse 
et  de  France. 

Une  espèce  nouvelle  très  voisine  de  VExcentrica  , el  que  nous 
avons  recueillie  dans  Toolite  ferrugineuse  d’Hayenge. 

Ceromya  Gregarea ?Des\i.(^Gressiya  Gregarea,  Agass.?). Du  môme 
lieu  que  la  précédente. 

3 espèces  dans  le  lias,  dont  deux  non  encore  décrites  du  lias 
moyen  de  la  Lorraine, 

Ceromya  latior?  Desh.  {^Gresslya  latior?  Agass.).  Du  lias  infé- 
rieur de  la  Lorraine. 

En  les  considérant  uniquement  sous  le  point  de  vue  zoologique, 
les  Céromyes  peuvent  se  partager  en  trois  groupes  d'espèces:  les 
Isocar diforme s ayant  les  crochets  divergens  ; 2"  les  Bucardiformes  à 
crochets  opposés;  3”  les  oblongues,  dont  les  crochets  sont  petits, 
la  coquille  allongée,  et  à peine  cordiforme. 

Céromye  élégante.  Cei'omya  elegans,  Nob,  pl,  24*  f.  3.  4*  5. 

C.  testa  cordaidy  depressd^  subcarinatd  ; latere  antico  suhplano , postîcè  i/t 
medio  carînalo;  'valvis  eleganter  striatis;  striis  ohliquis^  in  carinam  laie» 
ralem  conjunctîs;  striis  transversis  decussatis. 

Habile,. , fossile  aux  environs  d’Alençon,  dans  l’oolile  sableuse  supérieure  à 
la  grande  oolile,  d’après  M.  Boblaye. 

Espèce  fort  singulière  qui,  par  sa  forme  générale,  rappelle  beau- 
coup celle  des  Bucardes  de  la  section  des  Hémicardes.  Elle  est 
comprimée  d'arrière  en  avant,  tout-à-fait  cordiforme,  el  la  manière 
dont  ses  crochets  se  contournent  sur  le  côté  antérieur,  nous  avait 
fait  croire  d’abord  qu’elle  devait  se  ranger  dans  le  genre  Isocarde. 
Les  observations  de  M.  Agassiz,  et  la  création  du  genre  Céromye, 
nous  a fait  examiner  de  nouveau  les  caractères  de  toutes  les  es- 
pèces fossiles  rangées  parmi  les  Isocardes,  et  nous  avons  reconnu 
que  celle-ci  devait  en  sortir  pour  entrer  dans  le  genre  où  nous  la 
plaçons  actuellement.  Le  côté  antérieur  est  à peine  convexe;  ce- 
pendant il  se  déprime  un  peu  vers  la  circonférence,  sur  laquelle 
règne  un  angle  obtus  vers  le  bord  inférieur  des  valves,  plus  aigu 
sur  le  crochet.  Le  côté  postérieur  est  proéminent,  surtout  dans  le 
milieu  où  il  est  divisé  , à la  jonction  des  valves  , par  une  careno 
assez  aiguë  qui  descend  depuis  le  bord  cardinal  jusqu’au  bord 
inférieur  des  valves.  Un  angle  à peine  marqué,  sur  le  côté  posté- 


i64  QDATBIKME  FAWILLE. 

ï U ur,  liniile  LUI  rjrancl  cspnce  corcliforme  netlcnunil  circonscrit  par 
une  icgère  dépression  qui  suit  immédiatement  le  côté  extérieur  de 
l’angle.  Les  crochets  sont  grands  et  proéminens  ; ils  sont  un  peu 
clivergens,  comme  dans  les  Isocardes;  ils  ne  sont  pas  parfaitement 
égaux,  celui  du  colé  droit  étant  un  peu  plus  grand  que  l’autre;  ils 
forment  un  peu  plus  d'un  demi-lourde  spire,  et  leur  extrémité  ne 
dépasse  pas  le  plan  du  cdlé  antérieur.  On  voit  à la  base  du  crochet 
delà  valve  droite,  et  du  côté  interne,  un  sillon  étroit  et  assez 
profond,  qui  est,  comme  nous  l’avons  vu,  le  caractère  propre  au 
genre  Céromye.  Outre  les  particularités  distinctives  que  nous  ve- 
nons de  mentionner  dans  cette  espèce,  elle  se  reconnaît  encore  par 
des  stries  très  éléganlespar  leur  régularité;  elles  prennent  naissance, 
en  avant  et  en  arrière,  à une  petite  distance  de  la  circonférence, et 
viennent  se  joindre  obliquement  sur  l’angle  en  formant  une  série 
de  chevrons  emboîtés  les  uns  dans  les  autres,  depuis  le  sommet  jus- 
qu’à la  base.  Par  celle  disposition,  une  partie  des  deux  côtés  de 
la  coquille  reste  lisse,  et  il  arrive  assez  souvent  que  les  stries  d’ac- 
croissement, non  moins  régulières  que  les  stries  divergentei,  dé- 
coupent celles-ci  en  petits  losanges  d’une  non  moins  grande  régU" 
laiilé. 

Les  grands  individus  ont  4o  millimètres  de  bailleur  et  ^7  milli- 
mètres de  large. 

Ccromye  excentrique.  Ceramya  excentrîca.  Agassiz.  pl.  12  bis. 

f.  1.2.  pl.  24.  f.  i4' 

C.  leslâovato-tmvsversâ^  anticc  cordütO’‘'vnitrlcosâ^poUicè  depressây  longi^ 
iudtnaîiter  obsolète  cordafâ;  umhonihus  magnh  , oppositîs;  latere  antico 
îœvîgato. 

Isocardia  excentrica,  yoMi  in  litterîs. 

Id.  Rcp.mer.  Petrif.  p.  106.  i.  pl.  7.  f,  4- 

Id.  Broon.  Letb.  Geogn,  t.  i.  p.  873.  n®  i.pl.  20.  f.  ii. 

Ceromya  exccntrica.  Agassiz.  Etudes  crit.  sur  les  Moll.  foss.  2*livr.  p.  2f? 
a.  11°  I.  pl,  8.  8 b.  S c. 

Habile  fossile  dans  le  calcaire  do  Porllaiid  et  le  Kimmcridge-CIay,  presque 
partout  où  CCS  terrains  se  mollirent  en  Suisse,  eu  Allemagne,  en  Angleterre 
et  en  France. 

M.  Agassiz  a donné  d’excellens  rehseignemens  sur  cette  espèce, 
dans  ses  études  critiques  sur  les  Mollusques  fossiles,  et  nous  ne 


LES  GLYOIMEIUUES. 


l65 


saurions  trop  engager  les  personnes  qui  font  des  études  sérieuses 
sur  les  fossiles  des  terrains  anciens,  à consulter  l’ouvrage  que  nous 
venons  de  citer. 

Cette  espèce  présente  un  très  grand  nombre  de  variétés:  elle  est 
ovalaire,  presque  toujours  tronquée  en  avant,  très  inéquila- 
térale et  à valves  plus  bâillantes  que  dans  la  plupart  des  autres 
espèces.  Le  côté  antérieur  est  très  convexe,  cordiforme  ; le  posté- 
rieur plus  déprimé,  aminci  et  subcunéiforme.  Les  crochets  sont 
grands,  presque  terminaux,  opposés,  rapprochés  et  obliquement 
inclinés  sur  le  côté  antérieur  qui  est  lisse.  Le  crochet  de  la  valve 
droite  est  le  plus  grand,  et  le  sillon  oblique  qui  se  voit  à sa  base  est 
large  et  profond  , surtout  dans  les  grands  individus.  Ce  qui  rend 
cette  espècp  particulièrement  remarquable,  c’est  que,  malgré  le 
peu  d'épaisseur  de  son  têt,  il  se  décompose  en  plusieurs  couches, 
dont  les  stries  ont  des  directions  différentes.  On  conçoit,  d’après 
cela,  comme  le  fait  judicieusement  observer  M.  Agassiz , que  l’on 
pourrait  facilement  s’en  laisser  imposer  par  des  apparences  trom- 
peuses, et  créer  des  espèces  pour  de  simples  modifications  dans  la 
conservation  du  têt  de  celle-ci.  Lorsque  la  coquille  est  bien  con- 
servée, et  M.  Agassiz  en  a fait  représenter  une  dans  un  très  bon 
état,  elle  est  garnie  de  petites  côtes  longitudinales  et  rayonnantes, 
aplaties,  assez  larges,  et  que  l’on  voit  descendre  des  crochets  jus- 
qu’à la  circonférence  des  valves.  Le  côté  antérieur  reste  lisse,  aussi 
bien  quun  espace  lunulaire  assez  grand  qui  occupe  la  partie  supé- 
rieure et  postérieure  de  la  coquille.  C’est  au-dessous  de  ces  côtes, 
et  dans  l’épaisseur  du  lêt , qu’existent  des  stries  obliques  et  diver- 
gentes que  l’on  remarque  sur  la  plupart  des  moules  intérieurs. 
Cette  espèce  devient  très  grande.  Nous  avons  un  individu  qui  a 
12  centimètres  de  large  et  95  millimètres  de  long. 

Céromye  agrégée.  Ceromya  gregaria,  Nob,  pl.  12  bis,  f,  3.  4«  S. 

C,  testa  ovato^oblongd  y in  medio  'vcntricosd^  anlich  posticèque  ohtusd- 
umbonibus  minimU,  approximatis,  in  lunuîam  profundam  incumbtntihus ; 
‘valvh  inœqualibus,  tenuissimis,  lœvigatis, 

Grcsslya  gregaria,  Agass.  Elud.  cril.  sur  les  Moll,  foss,  livr.  pl.  12. 
f.  i3  a.  i5  ? 

Habile  fossile,  irès  coramuuément  répandue  dans  Toolile  inférieure  et  ferru# 
giiieuse  d’Hnyange,  près  Thionville,  des  environs  de  Metz,  et  le  pont 
Saint-Vincent,  Nancy.  Si  celte  espèce  est  identique,  comme  nous  le  sup- 


l66  CINQUIEME  FAMILLE. 

posons,  avec  le  Gnsslya  ^regaria  de  M.  Agassi?,  elle  se  troaveraît  égale- 
ment en  Suisse,  dans  une  position  géologique  semblable. 

Celte  coquille  est  assez  variable  ; elle  est  ovale  oLIongue,  un  peu 
baillante  et  obtuse  à ses  extrémités;  elle  est  très  inéquilalérale , 
subtronquée  en  avant,  et  la  position  de  ses  crochets  varie,  ce  qui 
donne  des  proportions  assez  différentes  aux  diverses  variétés  que 
nous  avons  établies  dans  respèce.  Nous  avons  des  individus  dont 
les  crochets  sont  presque  terminaux,  et  d’autres  où  ils  sont  situés 
vers  le  tiers  antérieur  de  la  coquille.  Nous  avons  sous  les  yeux 
tous  les  degrés  intermédiaires  entre  ces  deux  points  exiiémes.  La 
coquille  est  ventrue  en  avant,  subcordiforme;  son  bord  supé- 
rieur ou  dorsal  est  convexe,  et  non  rentrant  comme  dans  plusieurs 
autres  espèces.  Le  bord  inférieui’  est  lui-méme  convexe,  et  l’extré- 
mité postérieure  est  un  peu  plus  étroite  que  l’antérieure.  Les  cro- 
chets sont  petits,  opposés;  ils  sont  contournés  en  spire  d’un  peu 
plus  d’un  demi-tour;  ils  s’inclinent  obliquement  au-dessus  d’un 
espace  lunulaire  assez  profondément  creusé;  la  valve  droite  est 
toujours  plus  grande  que  la  gauche , présente  aussi  à la  base  le 
sillon  oblique  qui  caractérise  le  genre.  Le  tél  était  très  mince  , et 
nous  n’en  avons  jamais  aperçu  le  moindre  vestige  sur  les  26  ou  3o 
individus  que  nous  avons  été  à même  d’examiner;  il  est  probable 
qu’il  était  lisse,  du  moins  les  moules  n’offrent  aucune  trace  de 
côtes,  soit  longitudinales,  soit  transverses. 

Les  grands  individus  ont  5o  millimètres  de  large  et  37  milli- 
mètres de  longueur. 


CINQUIÈME  FAMILLE. 

Les  Myaires. 

CARACTÈRES.  — Animal  ayant  les  deux  lolies  du  inan- 
leau  presque  entièrement  réunis , ne  laissant  qu’une  petite 
ouverture  pour  un  pied  rudimentaire;  siphons  réunis  dans 
toute  leur  longueur,  pouvant  rentrer  en  tout  ou  en  partie 
dans  la  coquille. 


LES  ItfYAlRES. 


167 

Coquille  équivalve,  bâillante,  quelquefois  close;  ligament 
interne,  fixé  sur  un  cuilleron  perpendiculaire  au  bord  car- 
dinal, ou  sur  une  dent  adnée  qui  le  représente.  Cette  dent 
quelquefois  détachée  dans  Tépaisseur  du  ligaineut. 

GENRES.  — - MySf  Corhule^  Neœi'a, 

OBSERVATIONS  GENERALES.  “ La  famille  des  Myaires  a été  proposée 
pour  la  première  fois  par  Lamarck  dans  sa  Philosophie  zoologique  ; 
il  y réunissait  alors  les  trois  genres  Mye  , Panopée  et  Analine  ; 
plus  lard,  dans  l’extrait  du  cours,  il  réduisit  cette  famille  aux  deux 
genres  Myeet  Anatine,parce  qu’il  fit  passer  je  genre  Panopée  dans 
la  famille  des  Solénacées.  Lamarck  ne  fît  plus  d’autres  changemens 
dans  cette  famille,  et  il  la  maintint  dans  les  mêmes  rapports,  dans 
tous  ses  ouvrages  ; il  la  mit  entre  les  Solénacées  et  les  Mactracées, 
et  c’est  là,  en  effet,  où  elle  doit  se  trouver  d’après  l’eusemble  de  ses 
caractères.  Cuvier,  dans  les  deux  éditions  du  Règne  animal,  réu- 
nit cette  famille  à celle  beaucoup  plus  étendue,  à laquelle  il  donne 
le  nom  d’Enfermés.  M,  de  Férussac  a pensé  qu’il  était  convenable 
d’ajouter  deux  genres  à la  famille  des  Myaires  de  Lamarck, 
mais  il  n’a  pas  été  heureux  dans  le  choix  qu’il  eu  a fait;  il  propose 
d’y  faire  entrer  les  genre  Lulraire  et  Solémye.  Nous  avons  vu  que 
ce  dernier  genre  appartient  à la  famille  des  Solénacées,  et  bientôt 
nous  ferons  voir  que  les  Lutraires  doivent  dépendre  de  la  famille 
des  Mactracées.  M.  Laireille,  dans  ses  Familles  naturelles,  a sup- 
primé le  genre  Solémye  des  Myaires  de  M.  de  Férussac,  et  a eu 
tort,  selon  nous,  d’y  conserver  les  Lutraires.  Lorsque  nous  traite- 
rons de  notre  famille  des  Osléodesmes,  nous  exposerons  d’une  ma- 
nière plus  complète  que  nous-ne  pouvons  le  faire  ici,  les  observa- 
tions qui  nous  ont  conduit  au  démembrement  du  genre  Analine 
de  Lamarck  et  à la  réforme  de  sa  famille  des  Myaires.Trois  genres 
nous  paraissent  avoir  des  caractères  assez  analogues  pour  être  réu- 
nis actuellement  dans  la  famille  des  Myaires;  ce  sont  : les  Myes, 
les  Corbules  et  les  Neœra. 

Les  animaux  des  trois  genres,  que  nous  venons  de  mentionner, 
ont  les  lobes  dû  manteau  réunis  dans  une  grande  partie  de  leur 
étendue.  On  y remarque,  vers  l’extrémité  antérieure,  une  petite 
fente  pour  le  passage  d’un  pied  rudiiiientaire  ; les  deux  siphons 
réunis,  plus  ou  moins  prolongés  terminent  l’aniiiial  du  côté  pos 


i68 


FA3ULLE. 


térieur.  Quoique  souvent  très  allongés  lorsqu’ils  sont  entièrement 
développés,  ces  siphons  sont  très  contractiles  et  Tanimal  peut  les 
rentrer  presque  entièrement  dans  sa  coquille.  Dans  ces  trois  genres, 
la  niasse  abdominale  d*un  volume  relatif  assez  considérable  porte 
à son  extrémité  antérieure  un  pied  très  petit,  réduit  à Tétât  rudi- 
mentaire ; dans  les  Corbules , ce  pied  est  un  peu  plus  grand  et  la 
fente  du  manteau  est  un  peu  plus  étendue.  Si  nous  comparons  ac- 
tuellement les  coquilles,  nous  les  trouvons  plus  ou  moins  bâillan- 
tes, presque  toutes  inéqnivalves,  inéquilatérales  ; la  charnière  les 
caractérise  d’une  manière  toute  particulière.  Dans  les  Myes,  un 
grand  cuilleron  de  la  valve  gauche  tombe  perpendiculairement 
dans  la  cavité  de  la  valve  droite,  dans  laquelle  se  montre  une  ca- 
vité occupant  une  partie  du  crochet,  et  c’est  sur  ce  cuilleron  et 
dans  cette  cavité  que  s’insère  le  ligament.  Aux  dépens  des  Corbu- 
les, M.  Turton  a fait,  il  y a quelques  années,  son  genre 
dont  les  espèces  participent  à-la-fois  des  caractères  desMyes  et  des 
Corbules;  elles  appartiennent  cependant  à ce  dernier  genre.  Les 
Corbules , dont  nous  connaissons  actuellement  cent  vingl-et-une 
espèces,  offrent  un  très  grand  nombre  de  modifications,  parmi  les- 
quelles celles  du  Corbula  complanata  et  quelques  autres  espèces 
analogues,  conduisent  vers  les  Pandores. 

Aux  deux  genres,  Mye  et  Corbule,  nous  en  ajoutons  un  troi- 
sième, créé  depuis  quelques  années  par  M.  Gray,  pour  un  petit 
nombre  d’espèces  confondues  parmi  les  Corbules,  parce  que  le 
caractère  principal  avait  échappé  aux  observateurs.  On  sait  que 
dans  les  Corbules  la  dent  cardinale  de  la  valve  gauche  est  saillante 
sur  le  bord , à la  manière  de  celle  des  Myes  ; cette  dent  est  reçue 
dan  une  cavité  de  l’autre  valve  au  fond  de  laquelle  se  fixe  le  liga- 
ment, Si  on  rompt  par  la  pensée  celte  dent,  et  qu’elle  reste  néan- 
moins en  place  dans  Tépaisseur  du  ligament,  on  aura  le  caractère 
au  moyeu  duquel  M.  Gray  a séparé  des  Corbules  le  genre  Neœra. 
Lorsque  nous  avons  observé,  pour  la  première  fois,  l’osselet  des 
Analines,  desPériplomes  et  de  quelques  autres  genres  voisins,  nous 
les  avons  réunis  dans  une  seule  famille,  parce  qu’en  effet  tous  ces 
genres  offrent  un  ensemble  de  caractères  qui  les  rapprochent; 
mais  depuis  on  a trouvé  un  osselet  mobile  dans  un  genre  qui  ap- 
partient à la  famille  des  Cbamacées.  Un  autre  genre  très  voisin  des 
Pandores  a eu  effet  aussi  ce  caraclùi  e singulier,  de  sorte  que  l’on  ne 
pounait  plus  s’en  servir  aujourd’hui  d’une  manière  aussi  absolue, 
sans  rompre  des  rapports  naturels  fondés  sur  un  ensemble  de  ca- 


LKS  MYAIUES. 


169 

racl ères  plus  iœportans  que  celui  dont  nous  parlons , pris  isolé- 
ment; il  en  est  de  môme  du  genre  Neœra  qui  conserve  trop  le 
faciès  général  des  Corbulespour  en  être  détaché  et  transporté  dans 
la  famille  des  Ostéodesmes. 

Nous  avions  pensé  a une  autre  époque  que  le  genre  Pandore  de- 
vait être  compris  dans  la  famille  des  Mjaires.  Notre  opinion  s’est 
modifiée  depuis  l’étude  que  nous  avons  faite  sur  le  vivant  des 
animaux  de  ce  genre;  nous  avons  trouvé  dans  ce  dernier  des  diffé- 
rences suffisantes  pour  qu’il  devienne  le  type  d’une  petite  famille 
voisine  de  celle-ci. 

Ce  qui  précède  justifie  le  rapprochement  des  trois  genres  que 
nous  rangeons  actuellement  dans  la  amille  des  Myaires;  ils  se 
lient  par  un  ensemble  de  caractères  qui  ne  permettent  pas  de  les 
distribuer  dans  d’autres  groupes. 

Ce  serait  ici  qu’il  conviendrait  de  discuter  la  valeur  des  ca- 
ractères, à l’aide  desquels  quelques  naiuralisiesont  donné  une  très 
grande  étendue  à la  famille  des  Myaires  ; d’après  eux , il  suffit 
qu’un  mollusque  acéphale  ait  les  lobes  du  manteau  réunis  dans  la 
plus'  grande  partie  de  leur  étendue  pour  qu’il  soit  introduit  dans 
la  famille  des  Myaires;  il  en  résulte  que  celte  famille,  sous  un  nom 
emprunté  à Lamarck,  représenterait  en  réalité  un  groupe  auquel 
Cuvier  a donné  le  nom  d’Enfermés.  En  conséquence  du  principe 
posé  , Cuvier  n’excluait  de  ce  groupe  aucun  mollusque  ayant 
les  lobes  de  manteau  réunis,  tandis  que  les  naluralisles,  dont  nous 
parlons,  réservent  quelques  autres  familles  fondées  sur  d’autres 
caractères,  quoique  celui  de  la  clôture  du  manteau  leur  soit 
plus  applicable  qu’à  aucun  autre.  Dans  cette  extension,  de  la  fa- 
mille des  Myaires,  il  a fallu  réduire  à une  moindre  valeur  des 
caractères  qui,  judicieusement  employés  par  Lamarck,  font  con- 
duit à former  de  petites  familles,  il  est  vrai,  mais  qui  du  moins 
ont  l’avantage  d’étre  plus  naturelles.  C’est  ainsi  que  M.  Agassiz  , 
par  exemple,  dans  ses  éludes  critiques,  fait  rentrer  dans  la  fa- 
mille des  Myes  un  grand  nombre  de  genres  dont  les  uns  se  rap- 
prochent des  Panopées,  les  autres  des  Anaiînes,  ce  qui  prouve 
que  ce  naturaliste  ne  tient  aucun  compte  de  la  position  du  liga- 
ment dans  les  genres  qu’il  réunit. 

M.D’Orbigny,  dans  sa  Paléontologie  française,  a suivi  cet  exem- 
ple de  M.  Agassiz,  il  est  même  allé  plus  loin  que  lui,  puisqu’il  ras- 
semble dans  la  famille  des  Myaires  les  sept  genres;  Solen,  Legiimi- 
naria,  Panopœa,  Pholadomya,  Glycimeris,  Mya  et  Lutraria.  Ce 


170  CINQUIÈME  FAMILLE. 

que  nous  avons  dit  du  plus  grand  nombre  de  ces  genres,  dont 
nous  avons  déjà  traité,  doit  suffire  pour  faire  rejeter  de  la  mé- 
thode naturelle  de  grandes  familles  dans  lesquelles  se  trouvent 
évidemment  plusieurs  types  très  distincts;  celui  des  Solens,  par 
exemple,  par  la  forme  du  pied,  Ja  position  submédiane  de  la  bou- 
che, la  longueur  relative  des  siphons,  sera  toujours  nettement 
séparé  de  celui  des  Myes.  En  etfet , dans  ce  dernier  groupe,  la 
masse  abdominale  est  grosse,  le  pied  est  rudimentaire,  placé  au 
sommet,  la  bouche  est  tout-à-fait  antérieure,  les  siphons  sont  plus 
longs,  etc.,  sans  parler  des  différences  que  montre  la  disposition  des 
branchies;  maison  ne  passe  pas  brusquement  d’ungroupeà  faiilre, 
il  se  présente  des  modifications  intermédiaires  se  rattachant,  les 
unes  au  type  des  Solens,  les  autres  à celui  des  Myes;  et  c’est  poui’ 
marquer  cet  état  transitoire  qu’il  est  nécessaire  d’établir  autant  de 
familles  qu’il  y a de  degrés  naturellement  indiqués  par  un  ensem- 
ble de  caractères. 

Nous  avons  déjà  eu  occasion  de  manifester  notre  opinion  à 
l’égard  de  plusieurs  des  genres  nouvellement  proposés  par  M,  Agas- 
siz,  dans  ses  études  critiques  sur  les  Mollusques;  ce  savant  les 
introduit  presque  tous  dans  la  famille  des  Myes.  D’après  noire  opi- 
nion, aucun  de  ces  genres  ne  doit  en  faire  partie,  plusieurs 
doivent  rentrer  dans  le  genre  Pholadomye , comme  nous  l'avons 
vu;  d’autres  devront  se  ranger  dans  la  famille  des  Ostéodesmes,  et 
c’est  alors  seulement  que  nous  les  mentionnerons  pour  en  discuter 
la  valeur. 

Les  Myaires  vivent  de  la  même  manière  que  les  Splénacées  et  les 
Glycimérides  ; les  animaux  de  cette  famille  s’enfoncent  quelquefois 
en  très  grand  nombre  dans  les  sables  des  rivages  et  à une  faible 
profondeur  sous  la  mer.  Chaque  individu  se  creuse  un  trou  dans 
lequel  il  est  placé  perpendiculairement,  de  manière  à ce  que  l’ex- 
trémité des  siphons  vient  affleurer  la  surface  du  sable.  Ces  animaux 
ont  peu  de  mouvement,  et  il  est  à présumer  qu’une  fois  sortis  de  la 
cavité  qu’ils  habitent,  ils  ont  de  la  peine  à y rentrer  n’ayant  qu’un 
organe  faible  et  peu  propre  à creuser  le  sable. 


LBS  MYAIRES. 


171 


GENRE  QUINZIEME. 

MYE.  Mya.  (Linné.) 

PI.  7,  f.  6 à 8.  pl.  8.  f,  I a.  4. 

CARACTÈRES  gènérïques.  — Animal  ovalaire,  plus  ou  moins 
épais  ; les  lobes  du  manteau  ont  les  bords  épais,  réunis,  et  ne  lais- 
sent qu'une  très  petite  ouverture  antérieure,  pour  le  passage  d’un 
pied  rudimentaire  conique;  palpes  labiales  pointues,  étroites  et 
épaisses , deux  ou  trois  feuillets  branchiaux  de  chaque  côté , 
courts,  réunis  à Ifw  base. 

Coquille  subinéquivalve,  ovale,  oblongue,  bâillante,  charnière 
offrant  sur  la  valve  gauche  un  cuilleron  saillant,  horizontal,  et 
sur  la  valve  droite,  une  cavité  également  horizontale,  correspon- 
dante; un  ligament  interne,  fixé  dans  le  cuilleron  et  dans  la  fos- 
sette ; impression  palléale  profondément  échancrée  du  côté  pos- 
térieur. 

SYNONYMIE  GENERKiUE. — Le  Tugon  ; Adanson. — Mya;  Linné, 
Chemnitz,  Schroeter,  Dillwyn.  Chanta  d'Acosta. — Mya[refor- 
matd)s  Spengler,  Bruguière,  Lamarck,  Cuvier,  etc. 

OBSERVATIONS.  — Le  genre  Mye,  tel  que  Linné  Ta  circonscrit , u’a 
pas  été  connu  des  anciens,  quoique  Pline,  au  35‘'chap.  du  livre  9 des 
animaux , dise  que  certaiues  perles  rousses  et  plus  petites  se  trouvent  dans 
des  coquilles  nommées  Mya  et  qui  habitent  dans  la  mer,  surtout  vers  le 
Bosphore  de  Thrace.  Avant  Linné , créateur  du  genre,  Lister,  dans  ses 
animaux  d’Angleterre,  ainsi  que  dans  son  Synopsis  cotichijlioruîn , a fait 
connaître,  non-seulement  une  véritable  Mye,  mais  encore  quelques  autres 
coquilles  que  Linné  rangeait  dans  le  môme  genre.  Une  coquille,  nommée 
Tugon  par  Adanson,  et  qui  fut  decouverte  au  Sénégal  par  ce  célèbre 
naturaliste,  présente  aussi  les.  caractères  de  quelques-unes  des  Myes  de 
Linné;  mais  il  faut  s’empresser  de  le  dire,  le  genre  Mya,  tel  qull  est 
dans  les  10®  et  12®  édit,  du  Syst&ma  naiurœ,  paraît  plutôt  un  Incertœ  sedis 
qu’un  genre  naturel,  puisque,  sur  sept  espèces,  deux  seulement  appartien- 
nent aux  Myes,  telles  qu’elles  sont  actuellement  réduites;  deux  au  genre 


<7^  CINQUIÈMK  FAJliLLE. 

Unio  de  Spengler,  et  des  trois  autres , la  première  est  une  Perne,  la 
seconde  une  Vulselle,  et  la  troisième  une  Saxicave. 

Loin  de  chercher  à réformer  le  genre  de  Linné,  les  auteurs  qui  suivi- 
rent, Schroeter,  Gmelin  , Dillwyn,  etc.,  y jetèrent  une  confusion  dont  la 
science  n’est  point  encore  entièrement  sortie,  en  entassant,  sous  ce  nom 
de  Mye,  un  très  grand  nombre  d’espèces  de  coquilles  bivalves  appartenant 
à des  genres  très  divers.  S’il  était  assez  facile  de  se  rendre  compte  des 
sept  espèces  contenues  dans  le  genre  Mya  de  Linné,  la  tâche  devient  rude 
quand  il  faut  débrouiller  les  nombreuses  espèces  de  Gmelin , dans  les- 
quelles la  synonymie  est  généralement  très  vicieuse.  Il  est  certain  que, 
dans  cet  état  du  genre,  les  zoologistes  devenaient  maîtres  d’appliquer  le 
nom,  tantôt  à un  groupe  d’espèces,  tantôt  à un  autre  : c’est  ainsi  que 
Dacosta,  dans  ses  coquilles  de  la  Grande-Bretagne,  donne  le  nom  do  Mye 
aux  coquilles  que , plus  tard , Spengler  nomma  f/nfo,  tandis  qu’il  nomma 
Chama , un  genre  composé  des  Lutraires  et  de  Myes  proprement  dites. 
Spengler  qui , l’un  des  premiers,  essaya  de  réformer  plusieurs  des  genres 
de  Linné , le  fit  en  observateur  aussi  habile  que  profond,  et  no  laissa , 
parmi  les  Myes,  que  les  coquilles  qui  ont  un  cuilleron,  tantôt  projeté  eu 
avant , tantôt  placé  perpendiculairement  sur  l'une  des  valves;  mais  il  eut 
tort  d’y  comprendre  aussi  quelques  coquilles  à ligament  extérieur,  telles 
que  la  Panopée,  par  exemple.  Spengler  eut  le  mérite  de  séparer  en  genre 
particulier,  sous  le  nom  d’t/>n'o,  les  Mya  pictorum  et  i/ar</an7^/ero,  co- 
quilles d’eau  douce  qui  n’ont  avec  les  Myes  aucun  rapport,  si  ce  n’est 
d’appartenir  comme  elles  à la  classe  dos  bivalves.  Dans  son  travail  sur  le 
genre  Mye,  Spengler  ne  mentionne  pas  les  Mya  perna  et  valsella^  ce  qui 
annonce  qu’il  ne  mettait  pas  ces  espèces  dans  son  genre  réformé. 

En  préparant  les  planches  de  l’Encyclopédie,  Bruguières  poussa  la  re- 
forme du  genre  Mya  beaucoup  plus  loin  que  ne  l’avait  fait  Spengler  ; non- 
seulement  il  adopta  le  genre  Unio,  mais  il  reporta  parmi  les  Mactres  une 
partie  des  coquilles  qui  ont  les  cuillerons  horizontaux  ; il  proposa  un  genre 
Perne  pour  le  Mya  pema,  et  reporta  au  genre  Huître  le  Mya  vulsella, 
parce  que,  dans  cette  coquille,  il  n’y  a qu’une  seule  impression  muscu- 
laire. En  continuant  la  réforme  de  Bruguières  Lamarck  fut  moins  heureux , 
car  il  éloigne  du  genre,  le  Tugon  d’Adanson,  pour  le  mollre  parmi  les 
Anatines,  dont  il  n’a  pas  les  caractères,  et  joint  aux  Myes  deux  coquilles, 
dont  l’une  est  une  Corbule , et  l’autre  une  espèce  du  genre  Lyonsia  de 
M.  Turton.  Aujourd’hui , il  faut  donc  revenir  au  genre  Mya,  te!  que  Bru- 
guières Ta  fait,  pour  avoir  un  groupe  vraiment  naturel.  Réduit  do  cette 
manière , le  genre  qui  nous  occupe  a été  adopté  par  presque  tous  les  cou- 
chyliologues  modernes , et  presque  tous  ont  accepté  les  rapports  que  La- 


Ï.ES  MYAIHKS.  17*i 

marck  lui  a imposés,  soit  qu’ils  aient  admis  les  Myaires,  soit  qu’ils  aient 
préféré  l’arrangement  de  Cuvier,  dans  lequel  le  genre  Mye  devient  une 
véritable  famille.  Pour  le  prouver,  il  nous  suffira  de  dire  que,  dans  ce 
genre  Mye,  Cuvier  range  sept  sous-genres  dans  l’ordre  suivant  : Lutraire, 
Mye,  proprementdito,  Analine,  Solémye,  Glycimère,  Panopée  et  Pandore. 
S'il  est  vrai  qu’entre  les  animaux  de  ces  genres,  il  y ait  quelque  ressem- 
blance, il  existe  aussi  des  différences  assez  considérables  pour  caractériser 
de  très  bons  genres  naturels,  surtout  si  aux  caractères  des  animaux  on 
ajoute  ceux  non  moins  importons  des  coquilles. 

Des  deux  espèces  de  Myos,  abondamment  répandues  dans  les  mers 
d'Europe,  l’une  est  connue  depuis  long-temps  dans  ses  caractères  zoologi- 
ques. Baster  le  premier  dans  le  second  de  ses  Opéra  sahseciva  a donné  une 
figure  et  une  description  satisfaisantes  de  l’animal  du  Mya  arenana/Ia 
description  de  l'autre,  Mya  truncaiaj  faite  par  nous  dans  l’Encyclopédie 
méthodique,  nous  permet  de  compléter  les  caractères  zoologiques  du  genre. 

Les  animaux  dos  Mycs  sont  ovalaires,  transverses,  généralement  com- 
primés de  chaque  côté.  Les  lobes  du  manteau,  épaissis  et  fibreux  sur  les 
bords,  sont  réunis  dans  presque  toute  leur  circonférence.  Vers  l’extrémité 
antérieure,  on  trouve  entre  eux  une  petite  fente  au  moins  aussi  courte  que 
celle  des  Panopées.  L’extrémité  postérieure  du  manteau  se  prolonge  en  un 
long  siphon  cylindrique,  divisé  en  deux  canaux  inégaux  par  une  cloison 
Iransverse  : Lun  de  ces  canaux , le  supérieur,  le  plus  petit , reçoit  l’anus; 
le  second  apporte  l’oau  sur  les  branchies.  Lorsque  l’on  ouvre  le  manteau 
dans  sa  longueur,  on  voit  que  sa  cavité  est  eu  partie  remplie  par  le  corps 
de  l’animal  et  les  organes  do  la  respiration.  Comme  dans  tous  les  autres 
Mollusques  dimyaires,  on  tcouve  la  bouche  profondément  cachée  entre  la 
masse  viscérale  et  le  muscle  adducteur  antérieur.  Cette  bouche  est  trans- 
verse, médiocre  et  garnie  de  lèTOS  assez  larges,  terminées  de  cliaque  côté 
par  une  paire  de  palpes  labiales,  triangulaires , lamclleuses  en  leur  face 
interne  et  détachées  jusqu’à  la  base.  Ces  palpes  labiales  ne  sont  pas  dans 
les  mêmes  proportions  dans  les  deux  espèces  de  Myes  que  nous  avons  pu 
observer.  Dans  le  Mya  inmcataj  elles  sont  telles  que  nous  venons  de  le 
décrire;  dans  le  i/ya  areuana , elles  sont  en  proportion  beaucoup  plus 
grandes  et  plus  épaisses.  La  masse  viscérale  est  assez  considérable;  elle  est 
ovalaire  et  elle  porto,  vers  l’extrémité  antérieure,  un  très  petit  pied  coni- 
que, rudimentaire,  et  qui  semble  avoir  été  ajusté  après  coup  au  sommet 
de  la  masse  abdominale  : les  deux  espèces  de  Myes  que  nous  connaissons 
présentent  encore,  dans  leurs  branchies,  des  différences  assez  notables. 
En  effet,  dans  le  Mya  truncala,  il  y a de  chaque  côté,  trois  feuil- 
lets branchiaux  très  inégaux , réunis  en  dessous  de  la  masse  viscérale,  et 


174  CINQUIÈME  FAMILLE. 

dont  l’extrémité  libre  vient  Üotter  à l'entrée  du  siphon  branchial.  Dans  le 
Mya  armarm^  on  ne  trouve  que  les  deux  feuillets  branchiaux  qui  sont 
propres  à la  plus  grande  partie  des  Conchyfères  lamellibranches.  Les  ani- 
maux desMyes  offrent  une  particularité  que  ne  présentent  pas  au  môme 
degré  la  plupart  des  autres  Mollusques  si[)honifères.  Les  siphons  sont  très 
grands  chez  eux , et  ils  jouissent  d’une  telle  contractilité,  que  l'animal  peut 
les  faire  rentrer  presque  en  entier  dans  sa  coquille,  et  cela  paraîtra  d'au- 
tant plus  singulier  que,  dans  leur  extension  totale , ils  ont  souvent  plus  de 
deux  fois  la  longueur  de  la  coquille. 

Les  coquilles  du  genre  Al  ye  sont  parfailement  caractérisées  et  très  faciles 
à distinguer;  elles  sont  généralement  transverses,  quelquefois  subglobu- 
leusos,  presque  toujours  inéquivalves , subéquilatérales , peu  épaisses  et 
cependant  assez  solides  ; leur  tèt  étant  serré  et  compacte:  elles  sont  bail- 
lantes, les  unes  de  chaque  côté,  les  autres  du  côté  postérieur  seulement. 
Si  on  place  la  coquille  complète  dans  la  position  normale  que  nous  avons 
indiquée,  on  voit  sortir,  du  milieu  du  bord  supérieur  do  la  valve  gauche; 
un  grand  cuilleron  qui  se  porte  horizontalement  dans  la  valve  droite,  où  il 
se  trouve  en  rapport  avec  une  cavité  ayant  à-peu-près  la  même  forme  que 
lui  et  occupant  l’intérieur  du  crochet  do  la  valvo  droite.  Ce  cuilleron  , ainsi 
que  la  cavité  correspondante,  donnent  insertion  à un  ligament  intérieur 
très  puissant  qui  sert  à maintenir  les  valves  on  contact.  Le  reste  du  bord 
supérieur  est  simple,  tranchant,  et  no  présente  aucune  as|)érité  qui  puisse 
concourir  à consolider  la  charnière.  Dans  i&Tugon  d’Adanson,  le  cuilleron 
de  la  valve  gauche,  au  lieu  de  prendre  une  position  horizoïUalo,  s’avance 
obliquement  à la  rencontre  d’un  cuilleron  opposé  qui  est  également  obli- 
que. Alais,  malgré  cette  petite  différence,  nous  ne  voyons  pas  qu’il  soit 
possible  de  séparer  cette  coquille  des  Alyes,  pour  la  transporter  parmi  les 
Anatincs,  comme  Lamarck  l’a  fait.  Les  valves  des  Alyes  ne  sont  point  (mr- 
faitement  égales;  la  valve  droite  a toujours  le  crochet  plus  proéminent 
que  l’autre,  et  presque  toujours  son  bord  inférieur  dépasse  un  peu  celui  de 
la  gauche.  L’impression  musculaire  antérieure  est  étroite,  allongée  et 
courbée  le  long  du  bord  ; la  postérieure  est  obronde  ou  subsemilunaire. 
L’impression  palléale  offre , du  coté  [iostérieur,  uue  sinuosité  large  et  pro- 
fonde, dont  le  sommet  remonte  jusqu’au  niveau  de  la  charnière. 

Les  Aïyes  sont  des  animaux  qui  vivent  de  la  meme  manière  que  les  Pa- 
nopées,  enfoncées  perpendiculairement  dans  le  sable.  Les  trous  qu’elles  se 
creusent  ne  sont  pas  aussi  profonds  que  ceux  des  Solens,  et  elles  occupent 
ordinairement  en  très  grand  nombre  les  plages  peu  profondes,  sableuses 
ou  vaseuses.  Nous  pensons  que  le  nombre  des  espèces  de  ce  genre  est  plus 
considérable  qu’on  ne  le  suppose*  Les  voyageurs,  rencontrant  dans  des 


LES  MYATHES. 


175 

mers  lointaines  des  coquilles  peu  diffi5rentes  des  nôtres,  négligent  de  les 
rapporter;  et  il  esta  présumer  qu’une  comparaison  minutieuse  ferait  dé- 
couvrir des  caractères  propres  à les  distinguer. 

Quoique  l’on  ait  cité  un  assez  grand  nombre  de  Myes  fossiles  appar- 
tenant à divers  terrains,  en  réalité  il  y en  a peu,  parce  que  l’on  a pris 
pour  des  espèces  de  ce  genre  des  Panopées,  des  Pholadomyes  et  d’autres, 
dont  on  jugeait  d’après  les  moules.  Un  examen  plus  attentif,  des  matériaux 
mieux  choisis  et  plus  nombreux , ont  permis  de  faire  une  nouvelle  distribu- 
tion des  Myes  fossiles  , et  il  est  résulté  pour  nous,  de  ces  recherches, 
que  les  véritables  Myes  n’existent  point  dans  les  terrains  secondaires, 
elles  ne  se  montrent  pas  môme  dans  le  bassin  de  Paris;  elles  se  rencontrent 
seulement  dans  les  terrains  tertiaires  réceos  tels  que  le  crag  d’Angle- 
terre, et  ceux  plus  nouveaux  encore  de  laNorw^égc. 

Dans  le  catalogue  des  fossiles  de  l’Angleterre,  par  M.  Morris,  on  compte 
13  espèces  de  Myes,  distribuées  dans  divers  terrains,  mais  en  les  exami- 
nant , avec  une  plus  scrupuleuse  attention  , on  s’aperçoit  bientôt  qu’il  faut 
en  rejeter  le  plus  grand  nombre,  soit  parmi  les  Panopées  et  les  Thracies,  soit 
parmi  les  Pholadomyes;  après  cette  épuration  du  genre,  il  n’y  reste  plus 
que  les  Myes  du  terrain  tertiaire.  Il  en  est  de  même  lorsque  l’on  examine 
les  espèces  du  Minerai  Conchoîogy. 

Sur  les  six  espèces  vivantes  que  nous  connaissons,  nous  en  signalerons 
quatre  à l’attention  des  Géologues. 

r Mya  arenaria,  vivante  dans  l'Océan  d’Europe,  fossile  en  Islande  et 
dans  le  crag  d’Angleterre. 

2°  Mija  tru7ïcata,  vivante  dans  l’Océan  d’Europe,  fossile  en  Islande,  en 
Norvège  et  dans  le  crag, 

3®  Myaovalis,  vivante  dans  les  mers  d’Angleterre,  fossile  dans  le  crag 
{^fyapullus,  Sow.). 

Mya  Tugon^  vivante  au  Sénégal , fossile  en  Morée,  dans  les  terrains 
subaponnins. 

Indépendamment  des  quatre  espèces  précédentes,  qui  sont  à-la-fois  vi- 
vantes et  fossiles,  il  y en  a cinq  autres  fossiles  seulement,  et  qui , comme 
les  premières,  appartiennent  aux  terrains  tertiaires  supérieurs. 

Mye  tronquée.  Mj'a  truncata,  Linné.  PI.  8.  f.  i à 4- 

M.  testa  ovalo^  'vvntvîcosây  postnius  trimcatây  alho^gnseâ  lutesceiite'  s'inu 
paUiilatOy  vix  cxcavato]  dente  caidînaliy  ohH<iuè  pusteriiis  porrecto^ 
rolundalo,  întegerrirno, 

Mya  truncata.  Lin.  Syst.  nat.  la.  éd.  p.  ma.  Gmcl.  3317.  n°  i. 


r.i^nuibiR  rAMitf.F. 


176 

Sthrûel.  ♦ in  Conch.  t.  2.  p.  600. 11°  r. 

Fabr.  Faim.  Groenl.  p.  404.  n®  406. 

Linné.  Fauu.Suec.  a®  éil,  p.  i5i5.n®ai2G. 

Spengîer,  Mem,  de  la  soc.  d'hisl.  nat.  de  Cnpenli.  l,  3,  p,  28  5. 

List.  Concl»,  pl.  4^8.  f.  269. 

List.  Hisl.  anini.  pl,  5.  f.  .36. 

Guall.  Conch.  pl.  91.  f.  D. 

Olaffsen,  Isl,  pl.  ii.  f.  i.  a. 

Chemn,  Conch.  6.  t.  i.  f,  i,  a. 

Olivi,  Adriat,  p.  95.  n°  2. 

Penn.  Brit.  zool.  4.  pl.  41, 

Encycl,  p.  229.  f.  2.  a.  b. 

Dilhv.  CnI.  t.  i.  p.  42,  n®  a. 

Brookes,  Inlr.  of. Conch.  pl.  i f.  10. 

Desh.  Encycl.  met.  vers.  t.  2.  p.  591, 

/</.  Lamk.  an.  s.  v.  2®,  éd,  t.  6.  p.  73.  n®  i. 

Wood.  Geo.  Conch.  p,  90.  n®  i.  pl.  17.  f.  i. 

/i/.  Ind,  tesf,  p.  10.  n®  r,  pl. 

Goiild,  Uep.  inverl.  of  Massachiis.  p.  42. 

Môlier.  Ind,  moll.  Groenl.  p.  ar. 

Hanley.  Discr.  caf.  p.  19. 

(Foss.)  Hiseng.  Lelboca,  siiec.  p,  67, 

Lyell.  On  thc  proofs  of  a graduai  rising  of  the  land.  p.  35,  n®  a. 

S.  Wood.  Cat.  of  sbells  from  the  crag.  Ann.  nat.  hist.  décembre  1840, 

p.  245. 

Habile  les  mers  d’Europe,  tempérées  et  septentrionales...  fossile  dans 
les  terrains  lerliaîres  récens  de  la  Norwége  et  dans  le  crag  d'Angleterre. 

Coquille  ovale  oblongue , incquilatérale,  sensiblement  inéquivalve;  la 
valve  droite  est  la  plus  grande;  siibéquilalérale;  lecdté  antérieur  arrondi, 
le  côté  postérieur  plus  court,  est  tronqué,  et  il  laisse  un  large  bâillement , 
par  lequel  sortent  les  siphons  postérieurs  de  l’animal  ; les  crochets  sont 
assez  proéminens , un  peu  obliques;  les  bords  sont  minces,  simples  et 
tranchans;  sur  la  valve  gauche,  s’avance  horizontalement  un  large  cuille- 
ron  , dont  la  plus  grande  part!,  est  destinée  â donner  insertion  au  ligament 
des  valves;  sur  le  côlé  postérieur  de  cecuilleron,  on  remarque  un  pli 
oblique,  qui  est  probablement  un  reste  des  dents  cardinales,  qui  se  montrent 
sur  la  charnière  des  autres  coquilles  bivalves;  sur  la  valve  opposée,  dans 
l'intérieur  du  crochet , se  trouve  une  autre  cuilieron,  dont  les  bords  sont 
saillans,  et  sur  lequel  s’attache  également  le  ligament  desvalves.  La  coquille 


TT.S  MVAinES.  177 

d’un  blanc  grisâtre  ou  jaunâtre,  sale  en  dedans.  L’impression  muscu- 
laire antérieure  est  allongée,  étroite,  et  occupe  presque  toute  la  longueur  du 
bord  près  duquel  elle  est  située;  l’impression  musculaire  postérieure  est 
petite,  ovale,  obronde,  et  on  la  remarque  à l’angle  postérieur  et  supé- 
rieur des  valves,  tout  près  du  bord  de  la  troncature.  L’impression  palléale 
offre,  du  côté  postérieur,  une  sinuosité  large  et  peu  profonde.  Cette  coquille 
a 60  millim.  de  large  et  35  de  long,  A rextcrieur,  lo  Myatruncata  est  d’un 
blanc  sale,  grisâtre  ou  jaunâtre,  etc.;  l’on  remarque,  à la  surface,  des  stries 
irrégulières  d’accroissement , cachées  vers  lo  bord  inférieur,  sous  un  épi- 
derme d’un  jaune  verdâtre,  mince  et  aiduc  ; du  côté  postérieur,  cet  épi- 
derme, fortement  soulevé  sur  les  bords  de  la  troncature,  devient  plus  épais, 
s’étend  sur  les  siphons,  et  les  revêt  dans  toute  leur  étendue.  La  figure  que 
nous  avons  donnée  do  cette  espèce  représente  cette  disposition  de  l’épi- 
derme. 

Mye  tugon.  Mya  tugon*  Desh. 

jW.  testa  rotundaio^globosâ,  tnœquîhierali^  postlcè  truncatd  hiante,  stri/s 
longitudinaïibus  transversisque  decussatd,  aîbà  fiagili  pellucldd^  ceqtii^ 
valvi. 

Le  Tugon,  Adans.  Voy,  nu  Séiicg.  pl.  19.  f.  2. 

Mya  anatina,  Chemn.  Condi.  t,  C.  pl.  a.  f.  i3  à ifi  . 

Srhrol.  Einl,  t.  2.  p.  6i5,  Mya,  4, 

Mfa  guinensh,  S]ien§ier,  Mém.  de  la  soc.  d’hi.st.  nal.  de  Copenli.  t.  3. 
p.  34.  n®  9. 

Gmel,  p.  3221.  n®  ii. 

Encycl.  mélh.  vers.pl.  229,  f,  3.  a.  b. 

nnatina,Woo{\,  Gen.  Conclu  p.  9 1.  u°  6. 

Id,  Dillw.  Cal,  t.  i,  p.  fi. 

Anatina  ^ohulosa,  Lamk.  An.  s.  vcrl.  I.  5,*p.  '|fiî,  * 

Mya  tugon.  Desh,  Encycl.  mélh.  vers.  I,  2.  p.  59'.*.  3. 

Id,  Deslu  Lamk.  An,  s.  verf,  2®  édit.  t.  6,  p.  79.  n°  5. 

Wood.  Ind.  test,  n*»  6,  pl.  2,  f.  fi. 

Var.  Slrüs  exîUoribus.  Mya  glohosa,  Wood.  Gen.  Conclu  p,  6.^  pl.  21, 
f.  4.5.  6. 

Id,  Dillw,  Cat.  t.  t.  p.  \ II*'  7. 

Jd,  Wood.  Tncl.  lesl.  p,  10.  n®  7.  pl,  2,  f,  7. 

(Foss.)  Myn  ornnta,  V.asi.  foss.  de  Bord.  p.  95.  pl.  4.  f.  22. 

Desh.  Kxpéd.  sc.  de  Morée.  ZooLp.  8S,  n*  ifi. 

Habile  le  Sénégal...  Foss.  aux  environs  de  Bordeaux  , dans  le  2*^  élage  . 
tertiaire,  et , en  Movee,  dans  les  terrains  subapennin.':. 


T.  I, 


CINQUIÈUF.  FAMH.LK. 

Coquille  singulière,  que  l.anuirck  rapportait  à son  genre  Analinc,  mais 
qui , par  ses  cararlèros,  se  rapproelio  beaucoup  plus  des  Myes.  Nous  de- 
vons ajouter  cependant  que  nous  la  maintenons  dans  ce  genre,  temporaire- 
ment, car  il  serait  possible  que  Tanimal  présentât  des  caractères  suffisans 
pour  l’établissemeiU  d’un  genre  particulier- 

Cette  coquille  est  arrondie,  globuleuse,  très  renflée,  équivalvo,  et' très 
inéquilatérale  ; son  côté  postérieur  est  extrépiement  court  ; il  est  subite- 
nieut  rétréci , tronqué  dans  son  milieu,  et  les  valves  offrent  un  bâille- 
ment ovalaire  assez  étendu,  dans  toute  la  longueur  de  la  troncature.  Les 
crochets  sont  assez  grands,  proéminens,  et  ils  semblent  inclinés  du  côté 
postérieur,  à cause  de  leur  obliquité  extrême.  Les  bords  sont  minces  et 
tranchans.  Sur  le  bord  supérieur,  imniédiatoment  au-dessous  du  crochet, 
se  montre  sur  chqquc  valve  un  cuilleron  étroit  et  profond , sur  lequel  s’at- 
tache le  ligament.  Au  lieu  de  s’avancer  horizontalement  dans  rinlérieur 
des  crochets,  comme  dans  le  Mya  irancata,  ces  cuillerons  prennent  une 
position  oblique,  qui  est  réellement  intermédiaire  entre  colle  qu’affeelent 
les  cuillerons  des  Lutraires  et  celui  des  Myes.  La  surface  extérieure  offre 
un  assez  grand  nombre  de  petites  côtes  très  menues,  qui  descendent  obli- 
quement des  crochets  jusque  sur  les 'bords  des  valves.  Ces  côtes  consti- 
tuent un  réseau  irrégulier  par  leur  entrecroisement  avec  des  stries  trans- 
verses d’accroissement. 

Cette  coquille  est  d’un  blanc  laiteux,  et  l’on  remarque  en  dedans  une 
impression  musculaire  antérieure,  longue  et  étroite,  une  impression  mus- 
culaire postérieure,  arrondie,  immédiatement  en  arrière  du  cuilleron,  et 
enfin,  une  impression  palléalo  qui  paraît  simple,  mais  qui,  en  réalité,  est 
faiblement  sinueuse  dans  toute  la  longueur  de  la  troncature  des  valves. 

Cette  coquille , assez  rare,  a 35  millim.  de  largeur,  30  de  longueur  et  26 
d’épaisseur. 


GENRE  SEIZIÈME. 

CORBUI.Z:.  Corbnla,  (Brug.) 

PL  7-  f.  9 a.  1 1.  pl.  8.  f.  D a.  9. 

CAHACTKREs  génériqves.  — Animal  ovale , assez  épais , les 
lobes  du  manteau  réunis  dans  presque  toute  leur  circonfé- 
rence , une  ouverture  antérieure  très  petite , pour  le  passage 


LBS  MTATRKS. 


179 

d’un  pied  rudimentaire  en  mamelon  ; siphons  réunis  ^ com- 
plètement rétractiles;  branchies  courtes,  inégales,  soudées  à 
la  base. 

Coquille  inéquivalve,  inéquilatérale , close  ou  peu  bâillante; 
la  valve  gauche  la  plus  petite , charnière  ayant , sur  chaque  valve, 
une  dent  horizontale,  conique,  et  à côté  une  fossette. 

Ligament  interne  inséré  sur  la  dent  de  la  valve  gauche  et  dans 
la  fossette  de  la  valve  droite. 

. SYNONYMIE  GÉNÉRIQUE.  — Cardium , Walker.  Mya,  Montagu. 
Dilhvyn , de  Gerville.T’eZ/f/za,  Olivi , Brander,  Brocchi.  Erodona , 
Daudin,  de  Roissy.  Jloldis .M.egexAe.  Eivilia.Tnxiow , Thompson. 
Sphœ7iia,TlvLX\or)..  Leiiiidiwn,  Cristofori.  Potamomya  ^ Sowerby , 
Erycina{yxiX^.).  Lamk. 


OBSERVATIONS.  — Avant  que  Bruguières  créât  le  genre  Corbule  dans 
les  planches  de  l'Encyclopédie,  plusieurs  espèces,  appartenant  à ce  genre , 
avaient  été  signalées  par  les  zoologistes.  Chemnitz  en  avait  représenté  une 
sans  savoir  à quel  genre  il  devait  la  rapporter.  Olivi  en  trouva  une  autre 
dans  TAdriatique,  et  il  la  mit  au  nombre  des  Tellines,  cherchant  ainsi 
à se  rapprocher  de  l’opinion  de  Linné,  qui  avait  introduit  la  Pandore  dans 
la  douzième  édition  du  Système  de  la  nature,  sous  le  nom  do  Tellina  ine~ 
quivaîvis.  Montagu , dans  sa  Conchyliologie  britannique , décrivit  l’espèce 
commune  dans  l’Océan  européen,  et  la.  plaça  parmi  lesMyes.  Bruguières  se 
rapprocha  beaucoup  de  l’opinion  do  l’auteur  anglais;  car,  en  créant  le 
genre  Corbule,  il  le  mit  à la  suite  des  Myes.  Malheureusement  cette  opi- 
nion do  Bruguières  fut  entièrement  oubliée , et  les  naturalistes,  après 
avoir  long-temps  tâtonné  pour  trouver  aux,  Corbules  des  rapports  plus  na- 
turels, ont  été  forcés  de  revenir  à l’opinion  de  Bruguières,  en  y apportant 
de  très  légers  changemens.  Nous  allons  indiquer,  do  la  manière  la  plus 
concise  qu’il  nous  sera  possible,  les  changemens  que  le  genre  Corbule  a 
supportés  dans  sa  classification  : Bruguières  n'ayant  rien  écrit  sur  son  genre 
Corbule,  nous  devons  croire  que  ce  savant  naturaliste  aurait' justifié  con- 
venablement les  rapports  qu’il  établit  entre  les  Corbules  et  les  Myes. 
Lorsque  Lamarck,  après  avoir  prison  rang  des  plus  distingués  parmi  les 
botanistes,  se  livra  à letudede  la  zoologie  , et  plus  spécialement  â celle 
des  animaux  sans  vertèbres,  la  science  ne  possédait  qu’un  potit  nombre  de 


12 


t8o  CINQUIEME  FAinUÆ. 

principes,  résultant  du  pou  d’observations  cpi’elle  avait  acquises  par  les 
travaux  des  naturalistes.  Aussi,  Lamarck,  dans  son  premier  essai  de 
classification  , se  contenta  do  partager  les  ^ïollusques  bivalves  en 
deux  classes  principales  : la  première  comprenant  les  coquilles  irrégu- 
lières, et  la  seconde  les  coquilles  régulières.  C’est  à la  fin  de  cette  seconde 
division  que  Ton  trouve  les  Corbules,  parmi  les  coquilles  inéquivalves,  entre 
les  Peignes  et  les  Térébratules.  Comme  on  le  voit,  Lamarck  ne  tenait 
alors  aucun  compte  du  nombre  dosmuscles,  caractère  dont  il  se  servit  par 
la  suite  avec  beaucoup  d’habileté.  Quelques  années  apres,  dans  le  Sys- 
tème des  animaux  sans  vertèbres , le  célèbre  zoologiste  dont  nous  parlons, 
■nlercala  quelques  gmires  entre  les  Pandores  et  les  Corbules,  mais,  au 
fond,  n’apporta  aucun  changement  notable  dans  les  rapports  du  genre 
dont  nous  traçons  rinstoire.  .lusque-là,  Lamarck  avait  eu  soin  d’associer 
les  Pandores  aux  Corbules,  mais  M.  do  Roissy,  qui  probablement  avait  eu 
connaissance  de  l’ouvrage  de  Poli , transporta  les  Pandores  dans  le  voi- 
sinage des  Solens,  et  mit  les  Corbules  entre  les  Cames  et  les  Gryphées. 
Ce  fiitâ-pcii-près  à cette  époque  que  Lamarck  commença  à apprécier  la 
valeur  caractéristique  du  nombre  des  muscles  dans  les  Mollusques  acé- 
phales; et  Ton  voit,  dans  sa  Philosophie  zoologique,  qu’il  utilisa  ce  moyen 
de  classification , car  on  trouve  les  Corbules  dans  la  famille  des  Camacées, 
dans  laquelle  sont  rassemblés  ceux  des  Mollusques  diinyaires  qui  ont  la 
coquille  incquivalve,  régulière  ou  irrégulière.  Lamarck  maintint  la  même 
opinion  dans  l’Extrait  du  cours.  Cuvier  fut  le  premier  qui,  selon  nous,  eut 
le  mérite  de  revenir  à un  arrangement  meilleur,  et  qui  se  rapproche  beau- 
coup plus  do  celui  de  Bruguières  que  de  celui  de  Lamarck. ^En  effet , il 
comprend  le  genre  Corbule  a la  fin  do  sa  famille  des  Cardiacées,  à côté 
des  Mactres,  et  non  loin  des  Myes  qui  commencent  la  famille  suivante.  La- 
marck, dans  son  Histoire  des  animaux  sans  vertèbres,  saisit  avec  empres- 
sement les  indications  de  Cuvier,  et  proposa  enlin  sa  famille  des  Corbu- 
lées,  composée  des  deux  genres  Corbulo  et  Pandore,  et  qu’il  plaça  entre 
les  Maclracées  et  les  Lithopbagcs.  Voulant  concilier  deux  méthodes  dont 
les  principes  fondamentaux  sont  différons,  M.  de  Férussac,  dans  ses  Ta- 
bleaux systématiques  des  Mollusques  , intercala  maladroitement  les  Cor- 
bules parmi  les  Lithophages,  de  sorte  que  ce  genre  se  trouve  plus  éloigné 
de  ses  rapports  naturels  que  dans  les  classifications  précédentes.  Lalreillo 
eut  au  contraire  le  bon  esprit  d’imiter  Lamarck,  lorsqu’il  donna  sa  Classi- 
fication des  Mollusques  dans  ses  familles  naturelles  du  règne  animal.  M.  de 
Blainville  se  rapprocha  beaucoup  plus  do  la  manière  de  voir  de  Cu- 
vier. Dans  le  traité  de  Jlalacoiogie,  le  genre  Corbule  fait  partie  de  la 
grande  famille  des  Concbacées , où  il  est  singulièrement  interposé , ainsi 


LDS  iMYAll^ES. 


itil 

que  les  Clüliios  et  les  Splièiies,  entre  les  ün^ulines  et  les  Vénérupes. 

Nous  avons  vu  , dans  les  généralités  sur  la  famille  des  Myaires , par 
quelles  séries  d’observations  nous  avons  été  conduit  à apporter  des  clmn- 
gemens  notables  dans  les  rapports  du  genre  Corbule.  Lorsque  l’on  a un 
grand  nombre  d’espèces  sous  les  yeux , on  en  trouve  quelques-unes  qui  se 
rapprochent  extrêmement  des  Myes,  et  qui  servent  à lier  les  deux  genres. 
Parmi  ces  espèces,  se  trouvent  celles  avec  lesquelles  M.  Turton  a fait  son 
genre  Sphœnia.  Quelques  autres,  telles,  par  exemple,  que  le  Corbuïa  corn,’- 
2)Ia7îaîa  de  M.  Sowerby,  ont  beaucou[)  d’affînHé  avec  les  Pandores , et 
montrent  les  rapports  qui  existent  entre  ce  genre  cl  les  Corbules.  Enfin , 
comme  dans  plusieurs  autres  familles , il  existe  plusieurs  Corbules  qui 
jouissent  de  la  propriété  de  vivre  dans  les  eaux  douces,  et  ce  sont  ces  es- 
pèces qui , pourM.  Sowerby,  sont  devenues  le  prétexte  de  son  genre  Pu- 
iamomya.  Comme  ou  le  comprend  sans  peine,  nons  réunissons  aux  Cor- 
bules ces  deux  genres  que  nous  venons  de  mentionner. 

Quoique  dans  la  plupart  des  espèces,  la  coquille  des  Corbules  soit 
parfaitemeul  close,  l’animal  a cependant  la  plus  grande  analogie  avec  celui 
des  Myes. 

Nous  avons  eu  occasion  d’observer  deux  espèces  vivantes  de  la  Méditer- 
ranée, le  Corbula  Mcdiltiranea  et  le  Corbula  7incleus  ; la  première  appar- 
tient à la  section  des  Corbules  aplaties,  la  seconde  à colle  des  Corbules 
subglobulcuses.  Ces  mollusques  sont  ovulaires,  assez  épais;  les  lobes  du 
manteau  sont  inégaux  comme  les  valves  do  la  coquille  ellû-mèmc  : 
ces  lobes,  épaissis  sur  le  bord,  font  saillie  en  dehors  de  la  coquille, 
et  cette  partie  saillante  est  niiiico  et  membraneuse.  \ voir  l’animal  à 
Pœil  nu,  il  semble  que  le  bord  du  manteau  soit  simple;  mais,  en  l’exa- 
minant à l’aide  de  la  loupe,  on  voit  que  ce  bord  est  découpé  en  une  frange 
à lobes  festonnés  qui  vont  graduellement  en  diminuant  de  profondeur, 
depuis  le  milieu  jusqu’aux  extrémités.  L’extrémité  postérieure  de  ce  man- 
teau se  prolonge  en  deux  siphons  courts,  gros,  épais,  inégaux,  détaches  au 
sommet  et  soudes  dans  le  reste  de  leur  étendue.  Lorsque  l’animal  les  fait 
sortir,  ils  se  maintiennent  dans  une  position  constante,  l’un  par  rapport  à 
l’autre  ; et  si  l’on  fait  passer  une  ligne  [>ar  leur  axe,  ces  deux  ligues  se  ren- 
contrent à la  base  en  formant  un  angle  droit.  Le  siphon  inférieur,  ou  bran- 
chial, est  très  difierent  de  l'autre;  non-seulement  il  est  plus  gros,  mais 
son  bord  est  découpe  eu  nombreux  tentacules  digilés  qui  se  recourbent  et 
forment  uii  véritalfie  dôme  au-dessus  do  rouvcrtui-e.  Les  digitations  de  ' 
tentacules  sccroiscntsouventet  laisseutenlre  elles  de  très  faibles  espaces 
à travers  lesquels  l’eau,  destinée  û lu  respiration,  est,  t>üur  ainsi  dire,  tami 


102  CINQUIÈME  FAMILLE. 

sée  avant  de  pénétrer  dans  l’intérieur  du  manteau.  Aussi  l’animal,  au 
moyen  des  tentacules  très  sensibles  qui  garnissent  son  siphon,  est  averti  dé 
la  présence  des  moindres  corps  étrangers.  Ces  tentacules  sont  en  nombres 
pairs  et  symétriques  ; les  plus  petits  alternent  avec  les  plus  grands.  Le  si- 
phon anal  est  conique;  son  ouverture  est  rétrécie  et  faiblement  festonnée 
sur  son  bord.  Outre  ces  parties  que  nous  venons  de  mentionner  dans  le 
Corbüla  Mediterranea,  il  y a de  plus,  dans  le  nucléus,  à la  base  des  deux 
siphons,  une  série  de  très  petits  tentacules  cylindriques  qui  se  renversent 
en  dehors,  en  rayonnant. 

Les  lobes  du  manteau  sont  réunis  dans  une  grande  partie  de  leur  éten- 
due; ils  sont  séparés  dans  le  tiers  anlérieur  de  leur  longueur  pour  donner 
passage  à un  pied  petit,  sublinguiforme , ou  lancéolé,  et  dont  ranimai  se 
sert  avec  beaucoup  d’agilité  pour  remuer  le  sable  et  s’y  cnfoticor.  Une  fois 
qu’il  a creusé  son  trou,  il  se  tient  dans  une  position  perpendiculaire,  la 
bouche  en  bas,  et  il  vient  ou^Ti^  ses  siphons  à la  surface  du  sable.  La  niasse 
abdominale  est  assez  grosse,  et  dans  les  Corbnles  subglobulèuses  elle  oc- 
cupe presque  toute  la  cavité  dé  la  coquille.  Si  l’animal  est  contracté,  son 
pied  apparaît  sous  la  forme  d’un  petit  mamelon  inséré  sur  la  partie  anté- 
rieure de  cette  masse  viscérale.  Pour  voir  la  bouche,  il  faut  détacher  l’ani- 
mal de  sa  coquille,  séparer  les  deux  lobes  du  manteau  et  renverser  en 
arrière  le  muscle  abducteur  antérieur  derrière  lequel  se  cache  une  petite 
fente  buccale  transverse,  garnie  d’une  paire  de  petites  lèvres  qui  se  termi- 
nent de  chaque  côté  en  une  paire  de  petites  palpes  labiales  allongées  et 
étroites,  libres  dans  presque  toute  leur  étendue,  et  chargées  de  fines  la  - 
melles à leur  face  interne.  Dé  chaque  côté  du  corps  se  trouve  une  paire 
de  fouillets  branchiaux  ; ces  branchies  sont  inégales,  comme  dans  les  Myés. 
L’antis  est  placé  en  arrière  et  se  débouche,  comme  à l'ordinaire,  dans  le 
siphon  anal. 

Si  nous  examinons  acUielIement  les  coriuiües,  nous  les  trouverons  sans 
exception,  régulières,  transverses,  inéquivalvcs,  ordinairement  closes  et 
rarement  un  peu  bâillantes  à l’extrémité  postérieure.  Presque  toutes  les 
espèces  sont  striées  transversaeraent.  On  n’en  connaît  encore  qu’un  petit 
uombreayant  des  côtes  ou  des  stries  longitudinales.  A prendre  les  Corbules 
les  mieux  caractérisées,  on  trouve  à la  charnière  une  structure  toute  parti- 
culière. Une  grande  dent  pyramidale  assez  souvent  courbée  dans  sa  lon- 
gueur s’élève  perpendiculairement  sur  le  bord  cardinal  de  la  valve  droite. 
Cette  valve  est  toujours  la  plus  petite.  A côté  de  cette  dent  on  trouve  pres- 
que toujours  une  petite  cavité.  Sur  la  valve  gauche,  on  remarque  une 
échancrure  profonde  qui  coupe  carrément  le  bord  cardinal  et  dans  laquelle 
vient  so  placer  la  grande  dent  de  la  valve  opposée.  Sur  le  côté  antérieur 


LES  MYAIKES, 


iS’à 

decette  échancrure  se  relève  une  petite  dent  en  crochet  qui  s’introduit  dans 
une  cavité  correspondante  de  la  valve  droite.  Le  ligament  placé  à Tinté- 
rieur  s’implante  profondément  dans  Téchancrure  de  la  valve  gauche  et  sur 
la  surface  externe  de  la  grande  dent  de  la  valve  droite.  On  doit  s’aperce- 
voir que  ce  que  nous  venons  de  dire  sur  la  disposition  cardinale  dés  Cor- 
bules  pourrait  s’appliquer  presque  sans  changement  au  genre  Mye.  Cette 
charnière  présente  quelques  modifications  qu’il  est  nécessaire  de  connaître 
pour  bien  juger  les  rapports  du  genre  qui  nous  occupe.  La  grande  dent  py- 
ramidale, d’abord  fort  épaisse,  s’amincit  dans  quelques  espèces  dont  le  tèt 
est  lui-méme  peu  épais.  On  la  voit  ensuite  s’élargir,  s’aplatir  de  plus  en 
plus  et  finir  par  présenter  la  forme  d’une  lamelle  triangulaire  reçue  dans 
une  échancrure  peu  profonde  de  la  valve  opposée.  C’est  avec  les  espèces  à 
charnière  ainsi  modifiée  que  M.  Turton  a fait  son  genre  Sphône.  Si  Ton 
suit  cette  modification  dans  d’autres  espèces,  celte  lamelle  devient  plus 
saillante,  plus  large,  et  offre  la  plusgrande  ressemblance  avec  le  cuilleron 
des  Myes.  A mesure  que  la  dent  pyramidale  se  modifie,  la  dent  en  crochet 
de  la  valve  gauche  éprouve  aussi  des  changemens  très  notables.  Elle  s’a- 
moindrit peu-à-peu  et  finit  par  disparaître  dans  celle  des  espèces  qui  se 
rapprochent  le  plus  des  Myes  par  la  forme  do  la  dent  perpendiculaire  de  la 
valve  droite.  Ce  que  nous  venons  d’exposer  se  rencontre  dans  les  espèces 
subglobuleuses  ousubcylindracées.  Si  nous  examinons  les  espèces  aplaties, 
nous  trouverons  des  modifications  qui  les  rapprochent  beaucoup  des  Pan- 
dores : dans  ces  espèces,  en  effet,  la  charnière  a une  tendance  à s’allonger 
vers  l’intérieur  des  valves.  La  dent  perpendiculaire,  amincie,  reste  courte, 
et  à la  base  elle  est  séparée  du  bord  par  une  échancrure  assez  profonde. 
La  valve  opposée  a toujours  une  échancrure  profonde  pour  l’insertion  du 
ligament,  mais  les  côtés  do  cetto  échancrure  se  prolongent  en  divergeant 
dans  l’intérieur  de  la  valve,  et  le  côté  antérieur  se  relève  sous  la  forme 
d’une  très  forte  dent  cardinale,  pour  venir  s’insérer  dans  Téchancrure  de  la 
valve  opposée.  L-es  impressions  tnusculaires  sont  fort  écartées,  elles  sont 
d’une  médiocre  étendue  et  elles  sont  réunies  par  une  impressicm  palléalo 
rarement  échancrée  aü  côté  postérieur,  mais  laissant  un  large  espace  pour 
l’insertion  du  muscle  réiracteur  des  siphons. 

Le  genre  Erodone  de  Daudiu,  adopté  par  deKoissy,  dans  le  BuÜbndeSun- 
nini,  est  un  double  emploi  de  celui  des  Corbules,  et  pour  s’en  convaincre,  il 
suffit  de  lire  avecattenlion  la  description  qu’ën  donne  le  naturaliste  dont  nous 
venons  de  parler,  dans  les  Suite  au  Buffon  (tome  vi,  page  430  des  Mollus- 
ques); peut-être  que  les  deux  esi)èce3  introduites  par  Laudin  dans  son 
genre,  ne  lui  appartiennent  pas  ; mais  le  ^Jya  Erodona  doLamarck  qui  est 
une  des  coquilles  de  Daudiii,  est  une  belle  et  grande  Corbule  assez  voisine 


1Ü4  Cli>yUIÈMt  CAMILLE. 

du  Corbula  yallica,  comme  nous  nous  en  sommes  assuré  aulrelbis  par 
i’exanren  de  l’échantillon  de  la  collection  de  Lamarck. 

Nous  avons  été  en  suspens  sur  la  valeur  du  genre  Ervilia  de  Turton. 
ÛJ.  Recluz  qui  s’occupe  avec  distinction  de  Conchyliologie,  et  qui , depuis 
bien  des  années,  rassemble  les  matériaux  d’une  Conchyliologie  française, 
nous  avait  presque  déterminé  à conserver  ce  genre; néanmoins  en  exami- 
nant toutes  les  espèces  vivantes  et  fossiles  de  Corbulcs,  on  en  trouve  parmi 
CCS  dernières  quelques-unes  qui  rattachent  les  Ervilies  aux  Corbules,  mais 
en  les  laissant  à Textrémilé  du  genre,  vers  les  coquilles  équivalves,  puis- 
que en  effet  les  Ervilies  sont  des  Corbules  sensiblement  équivalves,  ce  sont 
des  espèces  plates  qui  se  rapprochent  du  Curbula  Mediterranea  avec  la- 
quelle M.  Cristofori  a fait  le  genre  inutile  (ju’il  nomme  Lentidium. 

Les  Corbules  sont  des  animaux  littoraux  vivant  dans  le  sable  ou  dans  la 
vase,  à une  faible  profondeur  sous  l’eau.  11  y a des  parages  où  elles  pullulent 
eu  abondance.  Ce  sont  des  coquilles  répandues  dans  presque  toutes  les 
mers,  mais  leurs  espèces  sont  plus  nombreuses  dans  les  climats  chauds  quo 
Mans  ceux  qui  sont  froids  ou  tempérés.  Le  nombre  des  espèces  vivantes 
connues  est  déjà  considérable,  puisqu’il  s’élève  à 52,  d’après  M.  Reeve  et 
le  Catalogue  de  Mlle  Gatlow. 

Parmi  les  espèces  vivantes,  on  en  trouve  quelques-unes  (jui  ont  leurs 
rcprésenlans  répandus  à l’état  fossile  dans  les  terrains  tertiaires;  ce  sont 
les  suivantes. 

Corbula  binghami  {SYÎ\ii'om'à.  rar/un) .Vivante  dans  l'océan  Eu- 
ropéen. 

Fossile  dans  le  crag  d’Angleterre,  mais  avec  quelque  doute,  d'après 
M.S.  Wood. 

2.  Corbula  nucléus , Lamk.  Vivante  dans  l’océan  d’Europe. 

Fossile  en  Italie,  en  Sicile,  en  Morée,  en  France,  dans  les  terrains 

subapeunins,  dans  le  crag  d’Angleterre  et  en  Volhynie. 

3.  Corbula  viedilerraiwa.  Vivante  dans  lu  Méditerranée. 

Fossile  en  Sicile. 

4.  Corbula  nudformis,  Sow.  Vivante  dans  les  mers  de  rAïuérique 
centrale. 

Fossile  aux  environs  de  Guayaquil  (Guming). 

Nous  connaissons  69  espèces  des  terrains  tertiaires. 

29  dans  le  tertiaire  inférieur. 

•/ 

5 de  l’Amérique  septentrionale. 


LES  MYALRLS. 


l85 


1 8 dans  le  tertiaire  moyen. 

M dans  le  tertiaire  supérieur. 

Pour  établir  ces  nombres ^ il  a fallu  examiner  toutes  cos  espèces,  en 
rectifier  la  nomenclature,  et  rétablir  plusieurs  d’entre  elles , considérées  à 
tort  comme  identiques  avec  d'autres  espèces  déjà  connues. 

Nous  signalerons , dans  le  terrain  tertiaire,  plusieurs  espèces  dont  la 
distribution  n’est  pas  sans  intérêt. 

Corbula  compîanata  y Sow.  On  la  trouve  à-la-fois  dans  le  bassin 
de  Paris,  en  Touraine,  aux  environs  de  Bordeaux  et  dans  lecrag  d’An- 
gleterre. 

2"  Corbula  carinata,  Duj.  (Jiugosa  Basl.).  Fossile  en  Toul-aine,  à Bor- 
deaux et  eu  Püdolie. 

3"  Les  espèces  suivantes:  Corbula  rugosa,  Lamk.,  Umboiiataj  Desh., 
Longirostris , Desh.  Sont  fossiles  aux  environs  de  Paris  et  de  Londres,  dans 
le  terrain  tertiaire  inférieur. 

4°  Le  Corbula  gallica,  Lamk.  Se  trouve  dans  le  bassin  de  Paris , eu 
Belgique  et  à Valognes. 

5°  Le  Corbula  striata,  Lamk.  Se  rencontre  dans  les  mêmes  lieux  que  la 
précédeute  et  de  plus  à Angers. 

G*  Le  Cor6u/a  angulaia  est  commun  dans  le  bassin  de  Paris,  et 
M.  Cailliauden  a fait  la  découverte  aux  environs  de  Nantes,  dans  un  ter- 
rain de  l’époque  Parisienne. 

En  passant  des  terrains  tertiaires  dans  les  terrains  secondaires,  le  nom- 
bre des  especes  do  Gorbules  diminue  rapidemen).;  nous  en  comptons  sept 
dans  la  formation  crétacée,  parmi  lesquelles  ou  remaniuo  le  Corbula 
strialula  qui  est  commun  au  Grès  vert  cl  au  Gault  en  Angleterre  et  en 
Allemagne.  Nous  avons  du  en  écarter  le  Cprbula  lanceoîata  de  M.  Geinilz 
etle‘C'or6i//a  caudata  de  Nilson,  parce  que  la  première  est  une  Anatine 
et  la  seconde  une  Neœra. 

Le  Corbula  alata,  Sow.  (dans  Fiton  Chalk.  and  Oxf.  ooL),  est  la  seule 
esi)cce  que  nous  connaissions  dans  le  terrain  Weldicn. 

0 espèces  seulement  sont  mentionnées  dans  toute  la  série  oolitique. 

Le  Corbula  curiansata,  Phil.  York.,  se  trouve  à-la-fois  dans  le  Corul 
rag  et  l’Oxford  inférieur;  les  autres  espèces  Corbula  punctum,  Obscara, 
Depressa,  Involuta,  sont  propres  à l’oolite  inférieure.  Nous  ne  citons  pas 
les  espèces  dcM.  Bœmcr,  elles  nous  paraissent  douteuses. 

Le  Muschelkallc,  d’après  M.  de  Munster,  aurait  une  espèce,  le  Corbula 
dubia. 

Les  terrains  carbonifères  ne  sont  pas  dépourvus  de  ce  genre  ; deux  es- 


l86  CINQUIÈME  FAMILLE. 

pèces  y sont  citées , ce  sont  les  Corbula  similis , Phil.  et  Limosa , Flem. 

Enfin , une  seule  espèce  so  montre  dans  les  couches  plus  anciennes  que 
les  précédentes;  le  Corbula  hennaM,  Sovv.,  a été  découvert  en  Angleterre 
dans  le  terrain  Dévonien. 

Comme  on  le  voit,  -1 6 espèces  seulement  sont  distribuées  dans  toute  la 
série  des  formations  secondaires,  tandis  que  69  espèces  sont  propres  au 
terrains  tertiaires;  si,  à ces  nombres,  on  joint  celui  de  52  espèces  vi- 
vantes, on  aura  un  total  de  137  espèces- dans  un  genre  où  on  iFen  comp- 
tait qu’un  très  petit  nombre,  il  y a quelques  années. 

Il  est  à remarquer  que  le  genre  Corbule  est  du  petit  nombre  de  ceux  qui 
parcourent  toute  la  série  des  terrains  ; les  terrains  siluriens  seuls , les  plus 
anciens  de  tous , n’en  contiennent  pas.  II  est  curieux  de  voir  le  nombre  des 
espèces  s’augmenter  peu-à-peu  à mesure  qu’elles  sont  dans  des  couches 
plus  récentes,  et  enfin  se  multiplier  tout-à-coup  dans  les  terrain  tertiaires. 
Nous  voyons  leur  nombre  s’acci’oître  dans  la  nature  actuelle,  car  il  n’est 
aucune  période  tertiaire  qui , à elle  seule  ^ en  contienne  autant  que  les 
mers  actuelles. 

Corbule  ovulée.  Corbula  omlata,  Sow.Pl.7.  fig.  9. 10.  11. 

6\  testd  elon^to-ovatâ^  andcc  rotimdatà^  posticè  acumînatd,  transvcr- 
sîmlenuàsulcatàf  albdjUmbonîbiisroseo  (inctis, 

Sow.  Proc.  zoül.  soc.  i833.  p.  36. 

Reeve,  Cuuch.  icoh.  pl.  i.  f.  7. 

Habite  Xipîxapi,  Caraccas,  Mazallau,  etc.  Amérique  ceuîrale. 

Nous  avions  pris  cette  espèce  pour  le  Corbula  Brythrodon  de  Lamarck, 
et  c’est  sous  ce  nom  que  nous  l’avons  fait  représenter  ; il  est  actuellement 
facile  de  rectifier  celte  erreur.  La  Corbule  ovulée  est  une  coquille  assez 
grande,  dont  le  tôt  est  épais  et  solide;  elle  est  ovale,  équilatérale,  trans- 
verse, arrondie  du  côté  antérieur,  pointue,  subrostrée  du  côté  postérieur; 
la  surface  extérieure  est  Ornée  de  fins  sillons  peu  appareils;  lu  charnière 
se  compose,  sm'Ia  valve  droite  qui  est  la  plus  grande,  d’une  grosse  dent  en 
pyramide  triangulaire  un  peu  recourbée,  età  côté  une  fosseUe  assez  grande 
triangulaire  dans  laquelle  se  place  la  dent  de  la  valve  gauche.  C'est  danscelte 
fossette  qu’est  inséré  le  ligament;  les  crochets'sont  petits,  peu  proéminens  ; le 
bord  des  valves  est  simple,  quelquefois  très  épais  dans  les  vieux  individus.  La 
plus  grande  partie  de  la  surface  de  cette  coquille  est  blanche,  passant  insen- 
siblement au  rose  rougeâtre  vers  les  crochets;  unèzone  pale  delà  môme  cou 


LES  MY AIRES. 


187 

leur  se  remarque  en  dedans  des  valves,  près  du  bord,  sur  la  charnière. 
Cette  coloration  nous  a trompe  et  nous  a fait  confondre  celte  espèce  avec 
VErythrodon  de  Lamarck.  Cette  coquille  a 46  millimètres  de  long  et  26 
de  large. 

Corbule  noyau.  Corbula  nucléus.  Lamk.  PI.  6.  fig.  7.  8.  9. 

C,  testa,  glvboso^  trîgonâ , albâ,  'vel  roseo  purpured,  'valvd  dexlrd 
transver slrn  striata,  subantîquatà,  sinistrd  lævïgatd , 'vel  îongîtudina- 
litcry  obsolète  costellatd  ; umbonibus  magnîs,  aîtero  gibbosiori, 

G/Vwflw/.  Oper.  post,  l.  n.  p.  3i,pl.  20  f.  i43. 

Tellina  gibba,  Oliv.  Zuol.  adriaU  p.  loi. 

Cardium  striatum.  Walker.  Test  minuta,  rar.  pl.  3.  f, 

Mya  înœquîvaîvis»  Monlagu.  Tcsl,  brit.  p.  38*  sup.  pl.  26.  f.  7. 

Eucycl.  mélb.  pl.  280  f»  4. 

Peauant.  Brit.  zool.  t.  4.  p.  x66. 

Wood.  Üniv.  Conch.  p.  ii3. 

Maton  et  Racket.  Lin.  trans.  t.  8.  p.  40.  pl  i.  f.  6. 

Dillw.  CaI.t.  I,  p.  55, 

Turlon.  Conch,  bril.  p.  3g,  pl.  3.  f.  8 à 10, 

Lamk,  Anim.  s.  vert.  t.  5.  p.  496.  n®  6. 

Gerville.  Cat.  des  Moll,  de  la  Manche,  p.  1 1.  Mya  inœquivalvis. 

Sow.  Généra  of  shells.  f.  i. 

Payr.  Cat,  des  Moll,  de  Corse,  p.  32.  44. 

Wood.  Ind,  lest,  p,  3.  f.  40, 

Desh.  Eucy.  mélh.  t.  2.  p.  S.  n<)  2. 

Desh.  Expéd,  scient,  de  Morée.  Zool.  p,  86,  n°  10. 

Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  2^  cd.  ti  6.  p.  139. 

Philip.  £num.  Moll.  Sicil.  t.  i.  p.  x6.  uo.  i.  et  ).  2.  p.  i« 

Coll,  des  Ch,  Cal.  des  MoU.  du  Finis,  p.  x5.  11°  1. 

Buuch'Chaut.  Cat.  des  Mol . du  Boulouuais.  p.  i5. 

Reeve.  Conch.  syst,  t,  i.  p.  54.  pl.  36.  f.  i. 

Hanley.  Desc.  Cat.  p.  46. 

Corbula  striata,  Thonis.  Rep.  ou  the  faun.  of  Ireland.  p,  263. 

Corhuta  nucléus,  Forbes.  Rep.  ou  œg.  invert,  p,  143, 

Reev,  Conch.  icou.  pl,  2.  f,  10, 

Fossilis,  Corbula  gibba.  Brocchi.  Conch,  subap,  t,  u,  p.  517.  11^.  i5. 
Corbula  rotundata,  Sow.  Min.  Coucb.  pl,  572,  f.  4.  ^ 


l88  CINQUIÈME  FAMILLE. 

Jn  Corhula  volhynîca,  Eichw.  Zool,  spec.  I.  iv,  p.  281.  pl.  5.  f,  5. 

Pusclï,  Pul.  Paleout.  p.  80.  n"  i.  pi.  8.  f.  8.  a.  h, 

Corhula  striata.  S.  AVood.  Cal,  of  sliells  ciag.  Anti.  nat,  Aw,  (décembrü 
1840J,  p.  24C.  11®  X. 

Habile  tout  l’océan  d’Europe,  depuis  les  mers  de  Norwége  jus(jiie  dans  la 
Médilerrance*  Elle  es!’ fossile  eu  Sicile,  dans  le  terrain  snbiipennin  de 
riialie^  de  la  Morée,  de  la  France,  de  l’Algérie;  elle  est  également  dans 
le  crag  d’Angleterre, 


Il  faudra  suivre  l’exemple  de  quelques  naturalistes  et  restituer  à cette 
espèce  le  premier  nom  qu’elle  a re^u.  En  1784,  Walker  publia  ses  recher- 
ches sur  les  petites  coquilles  de  l’Angleterre,  et  il  donna  à celle-ci  le  nom 
de  Caràixm  striaium.  Celle  dénomination  a donc  la  priorité  sur  celle 
d’Olivi  et  de  Montagu,  et  doit  être  préférée.  Cette  petite  coquille  est  facile  à 
distinguer  parmi  ses  congénères;  elle  est  subglobuleuse,  subtriangulaire, 
presque  équilatérale  ; ses  crochets  sont  grands  et  saillans,  opposes,  très 
rapproches  ; celui  de  la  valve  droite  plus  grand  que  l’autre  ; la  surface  ex- 
térieure de  cette  valve  est  régulièrement  striée  transversalement  ; la  valve 
gauche  est  souvent  lisse;  quelquefois  sur  le  milieu  de  sa  surface  s’élèvent 
quelques  petits  plis  longitudinaux,  irréguliers  pour  le  nombre  et  par  leur 
disposition.  Le  côté  antérieur  est  arrondi,  le  postérieur  est  tronqué  îar- 
gemenl.  Les  valves  sont  lisses  en  dedans,  l’impression  musculaire  anlé- 
rieure  est  ovale,  semi-lunaire,  très  rapprochée  du  bord  ; la  postérieure  est 
circulaire.  L’impression  palléale  est  écartée  du  bord,  faiblement  rentrée 
sur  elle-même,  au  moment  où  quittant  le  bord  inférieur,  elle  va  gagner 
l’impression  musculaire  postérieure  ; la  valve  droite  porte  en  avant  du  cro- 
chet une  dent  triangulaire,  pointue,  recourbée  sur  ellc-inômej  en  arrière  de 
laquelle  est  creusée  une  fossette  profonde  où  le  ligament  est  inséré  ; sur  la 
valve  gauche,  on  voit  en  avant  du  crochet  une  cavité  conique  pour  recevoir 
la  dent  do  la  valve  opposée,  et  en  arrière  une  dent  oblique  creusée  en 
cuilleron.  C’est  dans  ce  cuilleron  que  le  ligament  vient  s’implanter. 

Cette  coquille  est  assez  variable  dans  sa  forme  et  dans  ses  couleurs. 
Dans  les  vieux  individus,  la  valve  droite  devient  très  convexe  et  plus  courte 
en  proportion  que  chez  les  jeunes.  Ordinairement  cette  espèce  est  blan- 
châtre, lorsqu’on  la  dépouille  de  son  épiderme.  Il  y a une  variété  rougeâtre 
sur  les  côtes  de  la  Corse;  on  la  rencontre  aussi  dans  les  mers  d’Angleterre. 

Cette  espèce  est  longue  de  1 2 millimètres  et  large  do  1 4. 


LES  MYATRES.  189 

Corbule  aplatie.  Corhida  complanain.  Sow»  PI.  6.  f.  5 à 8. 

C.  testa  ovalo-suhquaâran^ularïy  iransversâ^  mœqiiîlaterd^  (lepressà,  Icevi- 
gatâ;  umbonibus  suhnuUis;  dente  'lahœ  dcxtrœ  ioUdo  conico  ; sînîsfrœ 
depresso  minore» 

Sow.  Min.  Conch.  pl.  362.  f.  7.  8. 

F.rycîna  trigonn,  Lamk.  Ann.  du  Mus.  t.  6,  p.  4i3.  n®  3. 

Desh,  Coq,  foss.  de  Paris,  I.  i.  p.  5o,  n®  4*  pU  7.  f.  8.  9,  i3.  14. 

S.  Wood.Cat.  of  sbells.  crag,  Ann.  nat.  hîs.  1840.  p.  246, 

Dujardif),  Touraine»  p.  256. 

Desli.  dans  Lamk.  An.  s.  vert,  2®  éd,  t,  6.  p;  142, 

Habite fossile  aux  environs  de  Paris,  dans  les  laluos  de  la  Toiiraine| 

aux  environs  de  Bordeaux  et  dans  le  crag  d'Angleterre. 

Coquille  des  plus  singulières  à laquelle  il  faudrait  restituer  son  premier 
nom.  En  effet,  d'après  l’échantillon  de  la  collection  de  M.  Defrance,  La^ 
marck  aurait  connu  une  seule  petite  valve  de  celte  espèce,  et  c/est  elle  qu’il 
a décrite  d’une  manière  trop  concise  sous  le  nom  tïErycina  trigona.  Cette 
espèce  est  très  itiéqnivalve  et  inéquilatérale;  le  côté  antérieur  est  le  plus 
long,  il  est  arrondi  ; le  postérieur  est  anguleux,  il  présente  en  arrière  des 
crochets  un  espace  aplati  assez  comparable  au  corselet  des  Donaces.  Cet 
espace  lancéolé  est  limité  par  un  angle  obtus  qui  descend  obliquement  des 
crochets  et  va  gagner  l’angle  postérieur  des  valves.  Comme  dans  les  autres 
Corbules,  la  valve  droite  est  la  plus  grande,  elle  est  aplatie;  son  crochet 
est  triangulaire,  petit  et  à peine  saillant.  Sa  cavité  n’ost  point  profonde^  et 
c’est  à son  sommet  que  s’appuie  la  base  large  et  épaisse  d’une  grosse  dent 
qui  s’avance  en  dedans,  en  se  détachant  du  bord  cardinal.  En  arrière  do 
cotte  dent,  est  creusée  profondément,  dans  toute  l’épaisseur  du  bord,  une 
cavité  profonde  et  étroite,  destinée  à recevoir  le  ligament  et  la  dent  de  la 
valve  opposée.  Celle-ci,  plus  aplatie  encore  que  l’autre,  présente  à la  char- 
nière une  cavité  peu  profonde,  triangulaire,  pour  recevoir  la  dent  de  la 
valve  opposée,  et  en  arrière  une  dent  très  épaisse,  triangulaire  aussi,  obli- 
que, et  portant  un  sillon  en  guise  de  cuilleron  pour  recevoir  le  ligament. 
Les  impressions  musculaires  sont  assez  grandes,  circulaires;  elles  s'ejoN 
gnent  par  une  impression  palléale  située  loin  des  bords  ctà'peine  infléchie 
au  côté  postérieur  de  la'coquille.  Toute  cette  coquille  est  lisse,  à bords 
simples  et  aussi  parfaitement  close  que  les  autres  Corbules  ; on  pourrait  y 
distinguer  quelques  variétés,  et  entre  autreà  celle  de  Bordeaux  qui  est  plus 


T9^  CINQUIÈME  FAMIUtE. 

étroi^.  Les  plus  grands  individus  que  nous  connaissions  viennent  des  fa- 
luns  de  la  Touraine  ; ils  ont  26  millimètres  de  long  et  40  de  large. 

GENRE  DIX-SEPTIÈME. 

NZŒRA  (Gray). 

PL  12  bis.  Gg.  6 à 12. 

CAEACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  iiiconnu.  Coquille  mince, 
transverse,  inéquivalve,  parfaitement  close,  à crochçts  grands, 
opposés,  presque  égaux;  la  valve  gauche  est  la  plus  grande, 
son  bord  cardinal  est  échancré  au-dessous  du  crochet  et  en  dedans, 
au-dessous  de  Téchancrure,  il  présente  un  petit  cuilleron  profond 
et  oblique,  bord  cardinal  de  la  valve  dx’oite  non  échancré,  un  petit 
cuilleron  spus  le  crochet,  et  en  arrière  une  dent  latérale  très  sail- 
lante et  recourbée;  impression  palléale  médiocrement  échancrée 
en  arrière;  ligament  interne,  fixé  dans  les  cuillerons,  et  contenant 
en  avant  un  petit  osselet  cylindracé. 

SYNONYMIE  GÉNÉRIQUE.  — Teïllna  Oüvi , Covhula  impars.') 

Les  coquillesdu  genre,  dont  nous  allons  nousoccupcr,  étaient  confondues 
avec  les  Corbules.  M.  Gray,  le  premier,  en  reconnut  les  caractères  et  établit 
pour  elles  un  genre  particulier  dans  Fédition  anglaise  du  Règne  animal!  de 
Cuvier,  publié  par  Grifith  ; depuis,  ce  genre  a été  adopté  surtout  par  les 
conchyliologucs  anglais*  la  valeur  et  la  constance  desescaracièrcs  justifient 
son  adoption.  Quoique  très  voisins  des  Corbules,  les  s’en  distinguent 
nettement,  etil  est  è présumer  que  ce  genre  aurait  été  proposé  plustôL  si  Ton 
eut  eu,  dans  les  collections,  des  individus  entiers.  L’animal  est  inconnu,  etil 
est  à croire  qu’il  a de  nombreuses  analogies  avec  celui  des  Corbules.  Quant 
à la  coquille,  elle  est  toujours  plus  mince  que  celle  des  Corbules;  presque 
toutes  les  espèces  sont  très  enflées,  subglobuleuses,  et  terminées  du  côté 
postérieur  en  un  long  bec  ; les  valves  sont  inégales,  mais,  dans  une  moia- 
dre  proportion  que  dans  les  Corbules;  les  crochets  sont  obliques,  ils  sem- 
blent dirigés  en  arrière;  leur  sommet,  cependant,  s’incline  en  avant; 


LES  MYAIUES. 


la  valve  gauche  est  la  plus  grande,  c'est  la  droite  dans  les  Corbules. 

r.a  charnière  consiste,  sur  chaque  valve»  en  un  très  petit  cuilieron  qui 
s’enfonce  obliquement,  de  sorte  que  ces  parties  restent  fort  écartés,  lorsque 
les  valves  sont  réunies.  La  partie  du  bord  cardinal  de  la  valve  gaucho,  qpi  est’ 
au-dessus  du  cuilieron , présente  une  petite  échancrure  triangulaire  ; elle 
n’existe  pas  sur  la  valvç  opposée;  mais  o\\  trouve  sur  elle  une  dent  latérale 
postérieure  assez  forte,  large  à la  base,  recourbée  sur  elle-même;  entre  elle 
et  le  bord  existe  une  dépression,  dans  laquelle  vient  s’engager  le  bord  simple 
de  la  valve  opposée.  Un  ligament  étroit  vient  s’insérer  dans  les  fossettes 
du  cuilieron,  et  dans  son  épaisseur  en  avant,  comme  dans  lesLyonsia,  se 
montre  un  très  petit  osselet  subcylindrique  et  caduc. 

Les  impressions  musculaires  sont  un  peu  différentes  de  celles  des  Cor- 
bules. L’antérieure  est  assez  grande  , superficielle,  subcirculaire  ou  ova- 
laire , faiblement  bilobée  à son  bord  supérieur.  L'impression  musculaire 
poslériôurc  est  petite,  elle  est  tout  près  du  bord,  et  comprend  une  partie 
de  !q  longueur  de  la  dent  latérale.  Cetïe  impression  est  semi-lunaire,  creu- 
sée et  bordée  en  dedans  par  une  côte  oblique  qui,  partant  du  fond  des 
crochets,  vient  s’évanouir  à la  base  du  bec  postérieur  des  valves.  L’impres- 
sion palléale  n'est  pas  éloignée  des  bords  des  valves,  elle  eu  suit  les  con- 
tours; parvenue  à la  base  du  bec,  elle  remonte  en  se  courbant  faiblement 
en  dedans  pour  gagner  l’impression  musculaire  |toslérieure. 

Si  l’on  voulait  attribuer  à la  présence  d’un  osselet  dans  le  ligament  une 
valeur  caractéristique  absolue,  le  genre  Neœra  devrait  passer  dans  la  fa- 
mille des  Osléodesmes;  mais  alors,  il  faudrait  y admettre  aussi  quelques 
autres  genres  qui , évidemment  par  rcnscmble  de  leurs  caractères,  ne 
peuvent  y être  introduits  ; il  faut  donc  subordonner  ce  caractère  à tous 
ceux  que  présente  le  genre,  et  voir  si , indépendamment  do  lui , il  se  rap- 
proche plus  des  Corbules  que  des  genres  do  la  famiHo  des  Ostéodesmes. 
Par  la  forme  générale,  par  la  nature  de  la  coquille  qui  n’est  point  nacrée, 
par  les  impressions  musculaires,  par  l’échancrure  du  bord  cardinal  de  la 
valve  gauche  et  surtout  par  la  forme  et  la  brièveté  de  Péchancrure  posté- 
rieure de  l’impression  palléale,  le  genre  Neœra  appartient  au  type  des 
Corbules,  tandis  qu’il  se  rapproche  des  Périplômes  et  des  Anatincs  uni- 
quement par  les  ciiillerons  du  ligament  et  le  petit  osselet  qu’il  contient.  Il 
est  certain  que  celte  cliarnièrc  différé  d’une  manière  bien  notable  de  celle 
de.s  Corbules.  On  n'y  voit  plus  cette  grande  dent  relevée,  s’enfonçant  dans 
une  échancrure  pour  recevoir  le  ligament;  disparaît  aussi  la  dent  conique 
de  la  valve  droite;  on  peut  donc  considérer  le  genre  Neœra  comme  inter- 
médiaire entre  les  Corbules  et  la  famille  des  Ostéodesmes,  ce  qui  prouve , 
une  fois  de  plus,  que  la  nature  ne  fait  rien  de  brusque,  qu’elle  sait  nuan- 


19*?.  CINQUIÈME  FAMIU-E. 

cer  à l’infini  les  coractèrcs  des  êtres,  et  les  combiner  de  manière  à déjouer 
tous  les  artifices  de  nos  méthodes. 

Parmi  les  espèces  admises  aujourd'hui  dans  les  catalogues,  il  en  est 
quelques-unes,  telles  que  les  Neœra  Lata  et  Iridescens  de  M.  Hinds , qui 
étant  ovales,  transverses,  bâillantes  de  chaque  côté,  ne  peuvent  rester 
dans  le  genre  où  on  les  a placées,  elles  doivent  entrer  de  préférence  dans 
le  genre  Syndosmyc  de  JI.  Recluz;  car  leur  charnière  offre  des  dents  la- 
térales, à la  vérité  peu  apparentes  à cause  de  l’extrôme  ténuité  du  test, 
mais  qui  ressemblent  à celles  du  genre  en  question  ; il  est  un  autre  carac- 
tère qui  rapproche  aussi  CCS  espèces  des  Syndosmyes  ; l’impression  pal- 
léale , au  lieu  d’être  à peine  échîincrée  comme  dans  les  Neœra,  offre  une 
sinuosité  très  profonde  qui  envahit  la  plus  grande  partie  de  la  surface  in- 
terne des  valves. 

On  compte  actuellement  dix-huit  espèces  vivantes  dans  ce  genre  et  sept 
espèces  fossiles  ; ce  sont  des  coquilles  minces,  fragiles,  d’un  petit  volume 
qui , pour  le  plus  grand  nombre,  habitent  les  régions  profondes,  sableuses 
ou  vaseuses  de  la  mer.  D’après  M.  Forbes,  il  y a quatre  espèces  dans  la 
Méditerranée , dont  deux  passent  dans  l’océan  d’Europe,  remontent  jus- 
que dans  les  mers  du  Nord  , et  sont  fossiles  dans  les  terrains  subapennins 
de  la  Sicile  et  de  Tltalie  ; les  autres  espèces  ont  été  recueillies  dans  les 
mers  de  Chine,  aux  Philippines,  â la  Nouvelle-Guinée  et  dans  les  mers 
d’iVmérique;  tout  porte  à croire  que  ce  joli  genre  recévra  encore  de  nom- 
breux accroissomens  lorsque  les  naturalistes  feront  des  recherches  dans 
les  mers  profondes.  Les  deux  espèces  dont  nous  venons  de  parler  sont  le 
Tellina  cuspidaia  d’OIivi  et  notre  Corhula  costellaia  , qui  deviennent  les 
Neœra  cuspidala  et  costellala.  Des  cinq  autres  espèces  fossiles  qui  nous 
sont  connues,  quatre  appartiennent  au  bassin  de  Paris,  la  cinquième 
Neœra  caudatUy  Nob.  Corbula  caudata,  Nilson,  est  de  la  craie  supérieure 
(lu  Nord  ; elle  se  trouve  également  a ï\[acstricht  cl  à Cypli. 

Neœra  cuspidée.  Neœra  ciispidata.  Hinds.  PI.  12.  bis. 

fig.  6.  à 8. 

N.  testa  ovato^ohlongày  aihâ  'X^cî  roseo-tlnctày  memhranaccâ,  fi-agUi  y 
trausvers'im  irreguloviter  strintà  ; lafere  autîco  tumîdof  ohlxisOy  postico 
îonge-rosirato  ■ dente  cocUearlfoemt  îniantOy  obliquoyprofundo. 

Te-Ulna  cu.<pid(i!a.  Olivi.  Zool.  Adrial.  p.  loi.  pl.  4.  f.  3,  (ï7t)^)- 
Mya  rostrota.  SpcngW’r.  Méni.  de  la  Sor.  d’Iii.U.  nat.  de  Coponli.  t,  3, 
p. i6.pl.  2.  f.  t6  ((793). 


LES  MYAIRES.  19^ 

Mya  rostratu  Chem.  Conrb,  I.  ii.  p.  19?»-  'ign.  p.  1S9.  C.  D, 
Copiées  (le  Sjieng'er.  (1790). 

Id,  Wood.  général.  Cottch.  p.  97.  n®  12. 

id.  Dillw.  Cal.  t.  i p.  45.  n®  9. 

Id.  Wood.  Ind.  testac.  pl.  2.  f,  12. 

Anatina  lûngîrostris»  Lamk.  Anim.  s.  verl,  l.  v,  p.  463.  iîo  4* 

Corbula  rostrata.  Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  verl.  2*  édit,  t.  vi,  p.  78. 

4. 

Td.  Hanley.  Descr,  Cat,  p.  46, 

Efycum  cmpidata,  Risso.  Europe  mérid.  t.  iv.  p,  366, 

Corhtda  cui/7fVo/a.Philip.Enuni.  Moll.  Sicil,  1. 1.  p.17,  n**  2.  pl.  i.  f,  19 
et  I,  II.  p.  12.  n°  3. 

Ncœra  cttspîdata,  Hiiids.  proc.  zool.  soc.  iS43.  p.  76, 

id,  Forbrs.  Report  on  lhe  Ægean  invert.  p.  i43.  1843. 

Fossilis,  Telllnacuspidata,  Brocchi,  Conch.  foss.  snbap.,  t.  ii,  p.  5i5,  n°  1 3. 

Habite  la  Méditerranée,  dans  une  zone  qui  s'étend  depuis  12  jusqu’à  t85 
brasses  de  profondeur;  elle  habile  aussi  les  mers  du  nord,  d'où  nous 
l'avons  reçue  de  M.  Keilhan;  elle  e:»l  fossile  en  Sicile. 

Pour  avoir  négligé  les  indications  de  Spengler  et  de  Cheranîtz,  quelques 
naturalistes  ont  divisé.  la  Synonymie  de  cette  espèce  et  en  ont  trans- 
porté la  plus  grande  partie,  au  iVeœra  C/imensîs  de  Gray,  qui  vient 
des  mers  de  la  Chine.  Il  ne  faut  pas  oublier,  en  effet,  que  la  coquille 
de  Spengler  est  de  la  mer  de  Norvège,  de  Bergen  , et  que  Chemnitz 
s’est  contenté  de  copier  les  figures  du  naturaliste  Danois.  La  des- 
cription et  la  figure  de  Spengler  prouvent  que  l’-espèce  peut  acquérir  un 
plus  grand  volume  qu’on  ne  le  croit  ordinairement,  et  nous  sommes  con- 
firmé dans  cette  opinion  par  l’examen  que  nous  avons  fait,  il  y a quel- 
ques années,  d’un  très  grand  individu  de  la  Sicile , presque  aussi  grand 
que  celui  figuré  par  Spengler. 

Cette  coquille  est  ovale,  Iransverse,  enflée  et  arrondie  en  avant,  termi- 
née en  arrière,  par  un  long  bec  cylindracé,  lorsque  les  valves  sont  réunies. 
Les  crochets  sont  grands,  très  obliques,  presque  égaux;  la  surface  exté- 
lérieure  est  finement  striée  en  travers;  les  slries  sont  nombreuses,  rap- 
prochées, obtuses  et  peu  régulières;  au  côté  postérieur  des  crochets  s’élève 
un  angle  obtus,  qui  bientôt  s’élargit  pour  embrasser  toute  la  largeur  du 
bec;  le  test  est  mince  et  fragile,  translucide,  tantôt  d’un  blanc  jaunâtre , 
tantôt  d’un  blanc  rose,  pâle  et  pourpré.  Le  plus  grand  individu  que  nous 
ayons  a 13  millim.  de  long  et  25  de  large;  celui  de  Spengler  a un  volume 
double. 


T.  I. 


SIXIÈME  FAMILLE 


194 

Neœra  costellée.  Neœra  costellata.  (Forbes).  PL  12  bîSj  fig.  9 
à 12. 

iV.  testà  ovalo-^oblongà^  albây  pellucidà,  posticè  longi^rostratâ,  tvuîcèob- 
tusâ^  teuuîy  //ag/A';  costeUis  numeroshyradianübus  inœqualibus  ornatâ, 

Corbula  costellata.  Desh,  Exp,  sc.de  Murée.  Zool.  p.  86.  u®  ii.  pl.  24. 
f.  I,  2.  3. 

Neœra  costellata,  Forbes.  Report  on  OEge.  inv,  1843.  p,  143. 

Hinds.  Proc.  Zool.  soc.  1843.  p.  77. 

Habite  la  Méditerranée  et  FOcéan  d’Europe,  depuis  3o  jusqu’à  i85  bras* 
ses  de  profondeur,  d’après  M • F orbes.  — Fossile  en  Italie,  en  Sicile,  en 
Morée. 

Très  jolie  petite  coquille,  que  le  premier  nous  avons  fait  connaître  à l’é- 
tat fossile.  Depuis,  M.  Forbes,  à la  suite  de  recherches  d’un  grand  intérêt, 
a découvert  le  type  vivant  en  faisant  draguer  à des  profondeurs  aux  ^uelles 
il  est  difficile  d’atteindre,  etquenégligontd’cxplorerleplus  grandnombre  des 
naturalistes  et  des  voyageurs.  Cettecoquille  estd’un  blanc  laiteux  diaphane, 
si  ce  n’est  vers  les  bords  des  valves  où  elle  est  couverte  d’un  épiderme  très 
fin  et  brunâtre.  Ses  valves  sont  très  concaves  et  terminées  postérieme- 
ment  en  un  bec  étroit,  dont  la  longueur  dépasse  un  peu  le  tiers  du  diamètre 
antéro-postérieur.  Sa  surface  extérieure  est  ornée  de  f 2 ou  4 3 côtes  longi- 
tudinales rayonnantes,  qui  vont  graduellement  en  décroissant,  et  en  se 
rapprochant  d’arrière  en  avant;  en  aboutissant  sur  les  bords,  ces  cotes  y 
produisent  des  crénelures  plus  saillantes  sur  la  valve  droite  que  sur  la 
gauche. 

Il  existe  dans  les  sables  inférieurs  du  Soissounais  (Guise  la  Motte),  une 
petite  coquille  un  peu  plus  grande,  qui  a avec  celle-ci  la  plus  grande  ana- 
logie; cependant  on  trouve  à toutes  deux  des  caractères  coustans  qui  les 
distinguent. 

Le  Neœra  costellata  est  une  petite  coquille  qui  a 5 millimètres  de  long 
et  8 de  large. 

SIXIÈME  FAMILLE. 

Les  Pandores. 

CAEACTÈBES.  — Animal  aplati , ayant  le  manteau  ouvert  en 


LES  pandores.  195 

avant,  fermé  dans  le  reste  de  son  étendue  et  terminé  en  arrière 
par  deux  siphons  courts,  réunis  et  plissés;  pied  petit,  comprimé, 
lancéolé  ; palpes  labiales  étroites,  plissées  dans  la  moitié  de  leur 
longueur;  deux  feuillets  branchiaux  en  tout,  un  de  chaque  côté 
du  corps. 

Coquille  très  aplatie  , inéquivalve , la  valve  gauche  la  plus 
grande;  impression  palléale  presque  nulle,  simple,  éloignée  des 
bords.  Charnière  ayant  sur  chaque  valve  une  dent  oblique  pour 
l’insertion  d’un  ligament  intérieur.  Quelquefois  un  osselet  court 
fixé  au  ligament. 

GENRES.  — Pandora,  Myadora. 

OBSERVATIONS  GÉNÉRALES.  A Texemple  de  Lainarck  et  de  tous  les  autres 
zoologistes,  nous  avions,  autrefois,  rapproché  le  genre  Pandore  des  Cor- 
bules,  et  nous  le  comprenions  dans  la  môme  famille.  Nous  avons  vu  com- 
ment les  Gorbules  se  rattachant  à la  famille  des  Myaires  doivent  en  faire 
partie;  les  Pandores  ne  peuvent  en  être  éloignées,  et  aujourd'hui  que 
nous  avons  pu  en  étudier  l'animal,  nous  croyons  nécessaire  de  créer  pour 
ce  genre  et  celui  des  Myadores  une  petite  famille  qui,  par  quelques-uns  de 
ses  caractères,  avoisine  aussi  celle  des  Osléodesmes. 

Les  deux  genres  Pandore  et  Myadore  ont  entre  eux  la  plus  grande  ana- 
logie, et  quoique  l’animal  de  ce  dernier  ne  nous  soit  pas  connu,  nous  avons 
la  conviction  qu’il  diffère  à peine  de  celui  des  Pandores.  Les  coquilles  sont 
très  aplaties,  généralement  minces,  inéquivalves,  la  valve  la  plus  petite 
est  celle  du  côté  droit,  souvent  elle  est  plate,  quelquefois  elle  est  concave, 
jamais  elle  n’est  convexe  ; toutes  deux  sont  nacrées,  et  ce  caractère  ne  se 
montre  pas  dans  les  Gorbules;  les  valves  sont  très  lisses  en  dedans,  et  l’on 
y distingue  à peine  une  impression  palléale;  pour  l’observer,  il  faut  la  cher- 
cher en  dedans,  loin  des  bords,  vers  le  milieu  de  la  surface  interne  ; elle 
est  pou  apparente,  parce  que  les  muscles  du  manteau  sont  en  petit  nom- 
bre, qu’ils  ont  peu  de  points  d’insertion  et  ne  constituent  pas  une  ligne  conti- 
nue, commedansla  plus  grande  partie  des  autres  mollusques.Cette  impres- 
sion reste  simple  du  côté  postérieur;  elle  n’a  pas  même  la  sinuosité  très 
courte  des  Gorbules,  et  cependant  l’animal  se  termine  postérieurement 
en  deux  siphons  courts,  à la  vérité,  mais  qui  peuvent  rentrer  complète- 
ment dans  lu  coquille  lorsque  l’animal  les  contracte.  Néanmoins,  dans 
quelques  Myadores,  on  remarque  une  très  petite  échancrure  à l’impression 
palléale.  Les  impressions  musculaires  sont  petites,  circulaires  et  toutes 


SIXIKHE  FAMitLE 


196 

deux  rapprochées  du  bord  dorsal.  On  conçoit  que  dans  celles  des  espèces 
dont  la  forme  est  triangulaire,  telles  que  certaines  Myadores,  ces  impressions 
deviennent  antérieures  et  postérieures.  Dans  les  deux  genres  que  nous 
réunissons,  la  charnière  est  à-peu-près  la  mèmej  seulement  dans  les  Mya- 
dores, le  ligament  porte  un  osselet  attaché  de  la  môme  manière  que  dans 
les  Neœra  et  les  genres  de  la  famille  des  Ostéodesmes.  En  présence  de 
Tenserablede  caractères  par  lesquels  lesMyadores  se  rapprochent  des  Pan- 
dores, nous  croyons  que  celui  de  l’osselet  cardinal  doit  avoir  une  moindre 
importance  et  ne  pas  empêcher  la  réunion  de  deux  genres  que  joignent 
toutes  les  affinités  naturelles. 

Nous  ne  pouvons  caractériser  cette  famille  que  d’après  l’animal  du  genre 
Pandore. 

Cet  animal  est  très  aplati,  son  manteau  est  mince,  à bords  simples  et 
sans  tentacules  ; il  est  ouvert  en  avant  dans  le  tiers  de  son  étendue;  ses 
deux  lobes  sont  soudés  entre  eux  dans  tout  le  reste  de  leur  contour.  Ce 
manteau  se  termine  en  arrière  en  deux  courts  siphons  réunis,  distincts  au 
sommet.  Les  palpes  labiales  sont  au  nombre  de  quatre  ; elles  sont  lancéo- 
lées, et  leur  surface  interne  est  garnie  de  lamelles  obliques  dans  les  deux 
tiers  de  leur  longueur.  T.a  masse  abdominale  est  petite,  et  elle  porte  en 
avant  un  pied  aplati  ovale-lancéolé.  De  chaque  côté  du  corps,  l’animal 
présente  un  seul  feuillet  branchial,  épais;  parvenu  à la  base  de  l’abdomen, 
celui  d’un  côté  se  réunit  à celui  du  côté  opposé  par  le  bord  dorsal  et 
ils  descendent,  en  diminuant  de  largeur,  jusque  dans  le  siphon  branchial, 
où  ils  se  terminent  en  une  pointe  aiguë. 

Les  animaux  de  celte  famille  vivent  à peu  de  profondeur  sous  les  eaux 
de  la  mer  ; ils  s’enfoncent  dans  le  sable  vaseux  où  ils  se  tiennent  perpen- 
diculairement, la  bouche  en  bas  et  leurs  courts  siphons  vers  la  surface  du 
sable. 

GENRE  DIX-HUITIÈME. 

PANDORE  , ( Ptmdora  Brug.  ). 

IM.  8,  fig.  ro,  II, 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES.  — Animal  ovale,  oblong,  très  aplati, 
les  lobeg  du  manteau  réunis  présentent  en  avant  une  petite  fente 
pour  le  passage  d un  pied  comprimé,  ovale,  lancéolé  ; siphons  réu- 
nis, courts,  le  branchial  plissé,  Fanal  cilié  et  garni  d’une  mem- 


LES  1»Al>DÜKKS. 


ly? 

brane  en  calotte  percée  au  sotnmet;  bouche  i)etite;  palpes  labia- 
les allongées,' non  soudées;  une  brancbie  de  chaque  côté,  se  réu- 
nissant toutes  deux  au-dessous  de  la  masse  abdominale,  et  se 
prolongeant  postérieurement. 

Coquille  très  aplatie,  nacrée,  ovale  ou  subtrigone,  inéquilaté- 
rale, inéquivalve;  la  valve  gauche  la  plus  grande;  charnière  ayant 
une  dent  cardinale,  adnée  sur  la  valve  droite,  et  à côté,  sur  cha« 
que  valve,  une  petite  fossette  pour  l’insertion  d’un  ligament  in- 
terne. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — TeWiiay  Linné,  Gmelin,  Dill- 
wyn,  etc.  — Mya^  Pennant,  Schvveiger.  — Hypogœa^  Poli.  — 
Solen^  Linné,  Wood.  — Anomiay  Gronovius. 

Linné  connut  la  coquille  de  la  Pandore  de  la  Méditerranée,  et  la  rangea 
d’abord  parmi  lesSoIensdans  la  10*  édition  du  Systemaj  puisdans  le  genre 
Telline,  sous  le  nom  de  Tellina  inœquivaîviSy  dans  la  1 2®  édition  du  même 
ouvrage.  A son  exemple,  presque  tous  les  auteurs  qui  vinrent  après  lui  mi- 
rent aussi  celle  espèce  au  nombre  des  Tellines;  mais  Bruguières  en  fit  un 
genre  dans  les  planches  de  VEncyclopédie  méthodique,  et  lui  imposa  le  nom 
de  Pandore.  Dans  ses  premiers  essais  de  classification  des  Coquilles,  pu- 
bliés dans  les  mémoires  de  la  société  d’histoire  naturelle  de  Paris,  Lamarck 
porta  son  attention  sur  des  caractères  négligés  jusqu’alors,  et  ci*ut  bien 
faire  en  rapprochant  les  Pandores  des  Peignes  et  des  Térébratules,  parce 
qu’elles  ont  les  valves  inégales.  Il  est  évident  qu’à  cette  époque,  Lamarck 
n’attachait  aucune  importance  au  nombre  des  muscles  dans  les  Mollusques 
acéphalés,  ce  qui  l’entraîna  à un  arrangement  non  naturel.  Quelques  an- 
nées après,  Lamarck  remonta  un  peu  ces  genres  dans  la  série  et  les  plaça 
entre  les  Houlettes  et  les  Anomies.  Dans  sa  Philosophie  zoologique,  ainsi 
que  dans  l’extrait  du  Cours  (1812),  modifiant  sa  première  opinion,  il  mit  les 
Pandores  dans  la  famille  des  Camacées.  Cependant,  depuis  bien  des  an- 
nées, M.  de  Roissy,  s’appuyant  judicieusement  sur  les  observations  de  Poli, 
a soutenu  que  les  Pandores  doivent  être  rapprochées  des  Solens,  qu’il 
ne  fallait  point  exagérer  la  valeur  du  caractère  de  l’inégalité  des  valves,  et 
rompre,  comme  Lamarck,  les  rapports  naturels  pour  satisfaire  à ce  caractère 
essentiellement  variable  et  artificiel.  Cuvier,  dans  le  Règne  animal,  se 
rangea  à cette  opinion  de  M.  de  Roissy  en  la  modifiant , ce  que  fît  égale- 
ment Lamarck  dans  son  dernier  ouvrage. 


SIXJÈME  FAMILLE 


198 

Déjà  à l’occasion  du  genre  Corbule,  nous  avons  parlé  du  dernier  arran-* 
gemerit  proposé  par  Lamarck,  et  nous  avons  fait  remarquer  qu’il  y a moins 
d’analogie  qu’on  ne  l’aurait  cru,  entre  les  deux  genres  de  la  famille  des 
Corbulées  de  ce  zoologiste.  Cette  opinion  sera  suffisamment  justifiée  par  ce 
que  nous  allons  dire  des  Pandores.  La  cavité  qui  existe  entre  les  valves 
indique  assez  que  l’animal  de  la  Pandore  est  petit  et  très  comprime  latéra- 
lement. Quoique  les  valves  soient  inégales,  cependant  l’animal  est  sensi- 
blement symétrique  ; il  est  ovale,  oblong,  et  conserve  exactement  la  forme 
de  sa  coquille  ; ses  bords  sont  minces  et  Iranclians,  et  le  dorsal  lui-même 
est  plus  mince  que  dans  les  autres  mollusques.  Le  corps  est  enveloppé  dans 
un  manteau  mince,  transparent,  dont  les  lobes  sont  réunis  dans  la  plus 
grande  partie  de  leur  contour;  en  avant,  ils  laissent  entre  eux  une  feiife  du 
tiers  de  la  longueur  totale,  pour  le  passage  d’un  pied  petit  comprimé,  ova- 
laire oif  lancéolé. 

Si  l’on  en  croyait  Poli,  les  siphons  courts  et  réunis  seraient  garnis,  dans 
tout  leur  pourtour,  d’un  rang  de  longs  tentacules  simples  et  filiformes  ; les 
observations  que  nous  avons  faites  sur  la  Pandore  vivante  de  la  Méditer- 
ranée, nous  ont  prouvé  que  Polfavail  commis  une  erreur,  justifiée  d’ailleurs 
par  la  petitesse  des  parties  et  la  difficulté  de  lesbien  observer.  Les  siphons 
sont  en  effet  très  courts  et  peu  apparens  , réunis  à la  base,  détachés  au 
sommet;  leur  masse  est  comprimée  latéralement.  Le  siphon  anal  est  le  plus 
petit,  son  extrémité  est  entourée  d’unbord  festonné  irrégulièrement,  creusé 
dans  l’épaisseur  de  la  partie  charnue  ; au-dessus  règne  un  rang  de  courts 
tentacules  espacés  entre  eux;  ils  ont  à peine  un  quart  de  millimètre  de 
longueur  et  im  peu  moins  de  diamètre  ; ils  sont  implantés  au  point  où  s’in- 
sère une  membrane  mince,  circulaire,  formant  un  court  canal  cylindracé,  à 
bord  simple  et  prolongeante  siphon.  Le  siphon  branchial  offre  une  dispo- 
sition semblable  ; un  feston  irrégulier,  creusé  obliquement  et  formant  un 
plan  assez  large,  sur  lequel  s’élève  un  rang  de  petits  tentacules,  mais  eu 
moindre  nombre  que  sur  l’autre  siphon  ; la  membrane  terminale  est  plus 
épaisse,  plus  ample,  et  elle  est  régulièrement  et  profondément  plissée;  ces 
plis,  par  leur  ampleur,  leur  disposition,  rappellent  ceux  de  la  bourse  d’une 
Quêteuse.  Lorsque  l’animal  les  dilate,  ils  se  renversent  au-dehors  comme 
les  pétales  d’une  fleur;  s’il  les  contracte,  ils  se  croisent  d’une  manière 
tellement  exacte  qu’ils  ne  laissent  aucun  intervalle  entre  eux. 

Lorsqu’on  a fendu  le  manteau  de  manière  à en  renverser  les  lobes  à 
droite  et  à gauche,  on  voit  au' centre  de  l’animal  une  masse  abdominale 
médiocre,  terminée  par  un  pied  coudé  en  avant.  Si  l’on  suit  le  bord  an- 
térieur du  pied  et  de  l’abdomen,  si  l’on  relève  le  muscle  adducteur  anté- 
rieur, on  trouve  entre  ces  deux  parties  une  petite  fente  buccale  transverse, 


LES  VANDORES. 


*99 

dont  les  lèvres  minces  se  continuent  de  chaque  côté  avec  les  palpes  labia- 
les; celles-ci  sont  étroites,  longues,  lancéolées  et  garnies  en  dedans  d'un 
grand  nombre  de  lamelles  très  fines,  obliques,  mais  qui  laissent  nu  le  bord 
inférieur. 

L’appareil  branchial  se  présente  sous  une  forme  spéciale  qui  est  très 
analogue  à ce  qui  existe  dans  les  Lucines  ; en  effet,  on  ne  trouve  de  chaque 
côté  du  corps  qu’un  seul  feuillet  branchial  très  épais,  élégamment  sillonné  ; 
pan  enus  à la  base  de  Tabdomen,  ces  deux  feuillets  se  réunissent  et  se  pro- 
longent, en  passant  devant  Fouverture  interne  du  siphon  anal  qu’elles  fer-' 
menthorméliquemen.  Lorsque  l’on  soulève  l’extrémité  libre  des  branchies, 
et  qu’on  l’examine  en  dessous,  on  y voit  doux  rangées  seulement  de  per- 
forations, ce  qui  prouve  qu’en  effet  une  seule  branchic  existe  de  chaque 
côtéde l’animal.  Cependant  en  dehors  et  à la  base  de  chaque  feuillet  bran- 
chial, on  trouve  un  petit  prolongement  que  l’on  pourrait  considérer  comme 
le  second  feuillet,  mais  avorté  et  considérablement  réduit. 

Le  système  nerveux  est  disposé  de  la  môme  manière  que  dans  les  autres 
mollusques  acéphales  siphonifères.  Un  ganglion  postérieur  placé  à la  face 
interne  du  muscle  adducteur  postérieur  et  donnant  deux  branches  princi- 
pales pour  les  siphons  et  le  manteau,  deux  branches  pour  les  branchies,  et 
enfin  deux  filets  récurrens  qui,  passant  à travers  la  masse  abdominale,  se 
terminent  aux  ganglions  antérieurs  placés  au  dessus  de  la  bouche  et  réu- 
nis par  un  filet  de  commissure.  Des  ganglions  labiaux  parlent  deux  bran- 
ches qui  se  rendent  vers  l’extrémité  du  pied,  pour  se  réunir  en  un  ganglion 
dont  les  filets  s’irradient  dans  toutes  les  parties  de  cet  organe. 

Toutes  les  coquilles  actuellement  connues  dans  le  genre  Pandore,  sont 
petites  ou  d’un  médiocrô  volume,  elles  sont  très  aplaties,  iiléquivalves, 
inéquilatérales;  la  valve  gauche  est  toujours  la  plus  profonde,  la  droite  est 
aplatie,  quelquefois  même  côneaveen  dessus.  Un  pli  assez  semblable  à celui 
des  Tellines  descend  le  long  du  bord  dorsal  et  postérieur  des  valves  ; il  est 
plus  marqué  sur  la  gauche  que  sur  la  dfoite.  Les  crochets  sont  petits,  com- 
primés, non  proéminens,  la  charnière  est  fort  simple  : elle  consiste  sur  la 
valve  gauche,  en  une  entaille  triangulaire  dans  lé  bord  cardinal.  Le  bord 
antérieur  de  celle  entaille  est  coupé  perpendiculairement,  et  il  se  prolonge 
un  peu  en  dedans  par  une  petite  saillie.  Le  bord  opposé  de  l’échancrure  est 
occupé  par  une  cicatricule  allongée,  étroite,  formant  un  ariglô  de  45  degrés 
environ  avec  le  bord  antérieur  ; le  ligament  s’insère  sur  celte  cicatricule. 
La  valve  droite  offre  une  grosse  dent  très  comprimée,  allongée,  èt  à côté 
d’elle,  dans  une  direction  oblique,  une  cicatricule  semblable  à celle  de  l’au- 
tre valve  et  recevant  le  ligament.  Les  impressions  musculaires  sont  petites, 
l’antérieure  subovalaire,  la  postérieure  circulaire,  toutes  deux  très  rappro- 


200 


SIXIÈME  FAMILLE 


chées  du  bord  supérieur.  L’impression  palléaie  est  simple,  et  il  faut  la 
chercher  très  haut  dans  l’intérieur  des  valves;  elle  consiste  en  une  série 
de  petites  impressions  musculaires,  inégales,  distinctes,  rarement  réunies^ 
Toutes  les  espèces  sans  exception  sont  nacrées  en  dedans,  blanches  en  de- 
hors, un  épiderme  brunâtre  très  fin  se  montre  vers  le  bord  des  valves, 
surtout  chez  les  vieux  individus. 

On  ne  compte  qu’un  petit  nombre  d’espèces  vivantes;  treize  seulement 
sont  inscrites  dans  les  catalogues; deux  sont  des  mers  d'Europe:  une  des 
mers  du  Nord,  une  de  l’Amérique  septentrionale;  les  autres  se  distribuent 
dans  les  mers  de  l’Amérique  méridionale  et  dans  l’Océan  indien.  On  ne 
connaît  que  trois  espèces  fossiles  : l’une  est  propre  aux  calcaires  grossiers 
du  bassin  de  Paris  où  elle  est  très  rare  ; l’autre,  non  moins  rare,  appartient, 
aux  terrains  subapennins  ; la  troisième,  enfin,  découverte  dans  le  crag, 
d’Angleterre  par  M.;S.  AVood,  est  l’analogue  incontestable  du  Pandoram- 
irala^  vivante  encore  dans  les  mers  d’Europe. 

Pandore  rostrée.  Pandora  rostrata  (Lamk.  ).  PI.  6,  fig.  10,  11. 

P.  testa  ovatch^hlongâ^  transversd^  iaœquilatecd,  ontirè  obtusà,  posticè  ros^ 
tratâ^  obtussUslmè  bi-anguiatd  ; dente  cardinaii  unico  in  valvâ  dexfrà^ 
parvo,  retmOy  cum  fovecold  adjectà;  in  valvà  sinistré  ^ fosfeolis  duabns, 

Solen  inœquivaîvis.  Lin,  Sysl,  uai,  vd.  lo.  p.  673, 

Tellina  inœqttivalvîs.l}t\,  Syst.nat.  éd.  12.  p.  iri8. 

/d.  Chenm.  Conch.  t.  6.  p.  ii5.  pl.  1 1.  f,  jo6.  a.  b.  c. 

Mya  incequivalvis,  Penuant.  brit.  zool.  t.  K*  p.»  166. 

Gmel.  Syst.  nat,  éd,  i3.  p,  3a33,  exclus,  plur,  syno. 

EiicycL niélb.  pl.  a5o.  Pandora.  {.  t. 

Telliua  {hypogcea)  inœquimlvis.  Pol.  Test, Sicil.  l.  i.  p.  3g.  pl.  i5.  f. 
5.  6.  7.  9. 

Lamk.  Méoi.  de  la  Soc.  d'hist.  nat.  de  Paris,  t.  i.  p.  83. 

Lamk.  Sysl.  des  An.  s.  vert.  p.  i36. 

Roissy.  Bnf.  MoU.  t,  6.  p,  4>9. 

Schum.  Nonv,  syst.p.  114.  pl.4.  f 2.* 

. Doiiov,  Prit,  shells,  t.  a,  pl.  4 f. 

Monlagu.  Tesl.  bril.'p.  75.  n®  iS. 

WooQ.  Gcner.  Con**.b.  p.  201.  pl.  47.  f.  2 .3.  4- 
. Dillw.  Cat.  t I.  p.  8G.n®  3a. 

Lamk.  An.  s.  vert,  t,  5.  p.  498.  1. 

Turlon.  Couch.ins.  brit.  p,  40.  ph  3.  f.  ii  à i4.  Pandora  margaritnera 

Gcrville.  Coq.  de  la  Manche,  p.  17.  n®  16. 


LES  PANDORES. 


201 


Blainv.  Maiac.  p.  563.  pl.  78.  f.  5. 

Pa)'r.  Cat.  des  moll.de  Corse,  p,  33.  11"  46. 

Risso.  Hisi.  liât.  Eur.  mérid.  t,  4.  p.  373. 

Croucb.  Introd.  to  Lamk.  Gouch.  p.  9.  pl.  5.  f.  2. 

Wood.  Ind.  lesl..pl,  5.  f.  97. 

SoW.  Sjiec.  Conch.  Pandora.  f.  7.  8.  9. 

Sow.  Geuera  ofsbells.  f.  1.2.  3. 

Collard  des  Ch  CaC  des  moll,  du  Fînisl.  p.  i5.  n®  r. 

Desh.  Encvl.  liiéUi.  l,  3.p.  697.  u”  r. 

Hauley.  Descr. Cal.  p.  48, 

Forbes.  lleport  on  OEge.  iavert.  i843.  p.  143. 

Desh.  dans  Cuv,  Kègiieau.  tiouv.  éd.  Moll.  pi.  iio.  1.  3. 

Catlow.  Cat.  moll.p.  ii.u°  ii. 

Fossilis,  S.  Wood.  Cal.  of  shells  from  lhe  Crag.  Aaii.nal.  hist.  décembre 
1840.  p, 247, 

Habite  TOcéaa  européen,  la  Méditerranée.  Fossile  dans  le  Crag  d’Angle- 
terre. 

Coquille  commune , fort  connue  de  tous  les  conchyliologues  ; c’est 
d’après  son  animal  que  nous  avons  caractérisé  le  genre.  Elle  est  ovaie- 
oblongue,  transverse,  très  inéquilatérale  ; le  côté  antérieur  est  le  plus 
court,  il  est  obtus  ; le  postérieur  so  termine  en  un  rostre  court , assez  large, 
limité  par  le  bord  dorsal  des  valves  qui  est  concave,  et  par  le  bord  inférieur 
qui  est  courbé  en  sens  inverse.  Un  pli  que  l’on  pourrait  comparer  à celui 
desTellines,  quoique  moins  profond  et  plus  régulier,  est  indiqué  sur  l’une 
et  l’autre  valve  par  deux  petits  angles  très  obtus  qui  descendent  oblique- 
ment des  sommets,  La  charnière  se  compose  d’une  seule  dent  comprimée 
sur  la  valve  droite,  et  sur  la  gauclie,  d’une  fossette  superficielle  ou  plutôt 
d’une  cicatricule  sur  laquelle  s’appuie  la  dent  de  la  valve  opposée.  Sur  l’une 
et  l’autre  valve  se  voit  une  petite  fossette  oblongue,  droite,  dans  laquelle 
s’attache  le  ligament  qui  est  complètement  intérieur.  Les  deux  valves  étant 
réunies,  lorsque  l’on  examine  le  bord  dorsal  postérieur,  on  voit  que  la  valve 
droite  s’infléchit  brusquement  et  tombe  à angle  droit  pour  emboiter  la 
valve  gauche,  à la  manière  du  couvercle  d’une  boîte.  Cette  coquille  est  d’un 
blanc  jaunâtre;  au-dehors,  elle  est  revôtue,  vers  les  bords,  d’un  épiderme 
jaunâtre,  quelquefois  souillé  de  brun  rougeâtre.  Les  grands  individus  ont 
17  millimètres  de  longueur  et  33  de  large. 


102 


SIXIÈME  FAMILLE 


GENRE  DIX-NEUVIÈME. 

MIT AX>ORE  , My adora  (Gray). 

(P!,  12  fig.  i3  à r5). 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  inconnu. 

Coquille  ovale  outrigone,  inéquivalve,  inéquilatérale;  la  valve 
gauche  est  la  plus  grande,  elle  est  concave  ; la  droite  est  aplatie, 
rarement  concave  en  dessus  ; le  côté  antérieur  arrondi,  le  posté- 
rieur un  peu  flexueux,  le  bord  dorsal  postérieur  ayant  une  surface 
plane  et  lancéolée.  Deux  dents  divergentes  sur  la  valvè  droite, 
deux  dents  inégales  sur  la  valve  gauche;  les  dents  postérieures 
donnant  insertion  à un  ligament  interne  dans  l’épaisseur  duquel 
existe  un  petit  osselet  caduc,  oblong  et  aplati.  Impressions 
musculaires  petites  et  circulaires  ; impression  palléale  simple  ou 
faiblement  éohancrée  du  côté  postérieur, 

OBSERVATIONS.  — Le  genre  Myadore  a été  créé  par  M.  Gray  dans  le  Ca- 
talogue synoptique  des  Mollusques  du  Muséum  britannique,  et  reproduit 
dans  la  jKirtie  des  Mollusques  de  l’éditiort  anglaise  dû  Règne  animal  de 
Cuvier,  publié  par  Griffith?.  On  connaissait  imparfaitement  quelques  espè- 
ces de  ce  genre,  et  presque  toutes  étaient  confondues  avec  leé  Pandores. 
Cependant  M.  Stntchbury,  qui  en  découvrit  deux  espèces  dans  les  îles  de  la 
Polynésie,  les  confondit  d’abord  parmi  les  Anatines,  lorsqu’il  les  décrivit 
dans  le  t.  v dir  Zoological  journal.  Depuis,  elles  ont  été  rapportées  à leur 
véritable  genre  par  M.  Reeve,  lorsqu’enlSIi  ce  naturaliste  donna  le  ^enre 
Myadora,  dans  son  Vonchologia  Iconica. 

Les  coquilles  du  genre  Myadore  sont  très  voisines  de  celles  des  Pandorés, 
et  il  ne  faut  pas  s’étonner  si  elles  ont  été  confondues  avec  elles;  plusieurs 
affectent  la  forme  des  Pandores,  qûûiqae  généralement  un  pdu  plus  larges  j 
les  autres  sont  triangulaires,  tontes  ont  les  sommets  petite,  comprimés;  el- 
les sont  en  généra!  plus  équilatérales  que  les  Pandores;  elles  sont  inéqui- 
aWes,  cl  c’est  la  valve  gauche  qai  est  également  la  plus  grande  et  la  plus 
profonde  ; le  côté  antérieur  est  obtus,  le  postérieur  est  flexueux,  quelque- 
fois subrostré  ; la  valve  supérieure  est  plane,  rarement  concave  en  dessus. 
Lorsque  les  valves  sont  jointes,  on  trouve  un  méplat  lancéolé  sur  le  bord 
dorsal  postérieur,  et  ce  méplat  résulte,  comme  dans  les  Pandores,  de  l’in- 


LES  PAKDOIVES. 


2o3 


flexion  subite  et  à angle  droit  du  bord  de  la  valve  droite  qui  vient  emboîter 
le  bord  de  la  valve  gauche.  Dans  la  plupart  des  Myadores,  la  charnière  con- 
siste en  deux  dents  divergentes  qui  partent  du  sommet  et  suivent  la  direc- 
tion des  bords;  sur  la  valve  droite,  la  dentantérieure  est  plus  courte,  plus 
épaisse;  ces  dents  laissent  entre  elles  une  fossette  triangulaire  qui  est 
occupée  par  le  ligament,  au  devant  duquel  et  dans  son  épaisseur,  vient  se 
placer  un  osselet  oblong,  aplati,  qui  se  détache  de  la  charnière,  lorsque  l’on 
ne  prend  aucune  précaution  pour  ouvrir  la  coquille  et  en  séparer  les  val- 
ves. Dans  d'autres  espèces  plus  voisines  des  Pandores,  la  charnière  subit 
une  légère  modification.  En  effet,  la  valve  gauche  présente  une  dent  an- 
térieure, oblique,  très  allongée  ; du  côté  postérieur,  on  trouve  une  très  pe- 
tite dent  obsolète,  peu  apparente  et  plus  courte  que  la  première.  Sur  le  bord 
postérieur,  s’élève  une  cicatricule  oblique  sur  laquelle  le  ligament  s’attache. 
Sur  la  valve  droite,  on  trouve  en  avant  une  dent  courte  assez  épaisse,  un 
peu  dilatée  à son  sommet  comme  celle  des  Pandores,  et  du  côté  postérieur 
une  cicatricule  longue  et  étroite,  semblable  à celle  de  l’autre  valve;  le  li- 
gament, comme  dans  les  Pandores,  se  place  sur  les  cicatricules  et  non  dans 
la  fossette  triangulaire,  mais  de  plus  que  dans  ce  genre,  il  retient  dans 
toute  sa  longueur  une  pièce  calcaire  aplatie,  allongée,  comparable  par  la 
forme  et  la  position  à la  pièce  des  Lyonsia.  Les  impressions  musculaires 
sont  petites,  écartées,  circulaires  ; l’impression  palléale,  dans  le  plus  grand 
nombre  des  espèces,  est  plus  apparente  que  dans  les  Pandores  ; elle  forme 
une  ligne  continue  placée  très  haut  dans  l’intérieur  des  valves,  et  on  lui 
trouve  une  petite  inflexion  postérieure,  ce  qui  annonce  les  muscles  des  si- 
phons plus  grands  et  plus  nettement  détachés  que  ceux  des  Pandores;  mais 
CCS  derniers  caractères  ne  se  montrent  pas  au  même  degré  dans  toutes  les 
espèces,  car  celles  qui  sont  plus  voisines  des  Pandores  par  leur  forme  et 
leur  charnière,  le  sont  aussi  par  l’impression  ])alléa!e  qui  reste  simple  et 
formée  de  points  détachés,  résultant  de  l’insertion  des  muscles. 

Les  Myadores  sont  de  petites  coquilles  naerées  en  dedans,  d’un  blanc 
jaunâtre  en  dehors;  leur  test  est  généralement  plus  épais  et  plus  solide  que 
celui  des  Pandores.  Le  nombre  des  espèces  est  peu  considérable,  M.  Reeve 
en  compte  dix,  nous  en  connaissons  une  onzième  ; toutes  sont  vivantes,  et 
ce  genre  ne  possède  aucune  espèce  fossile.  Ces  petites  coquilles  vivent  à la 
manière  des  Pandores,  enfoncées  dans  le  sable  vaseux,  à une  petite  profon- 
deur sous  l’eau;  le  plus  grand  nombre  des  espèces  connues  ont  été  recueil- 
lies aux  îles  Philippines  par  M.  Cuming  ; lesautres  viennent  des  mers  aus- 
trales. 


SEPTIÈME  FAJIILLE. 


204 

Myadore  rostrale.  My adora rostralis.  Desh.jpl.  Vibis^ fig.l3-i5). 

M,  testâ  ovato-transversâ  t ineequilaterâ^  antîce  obtusà  ^ hiante  posticè 
^ brcvî-rostratà^  alhât  irregularlter  obsolète  transverslm  sidcatâ  ; cardinc 

ossicuio  angftstissimo,  prcedito. 

Habile....? 

Cette  espèce  remarquable  ne  manque  pas  d’analogie  avec  le  M\jadoT(h 
pandorœformis  de  M.  Reeve;  elle  a égalemen|.  de  la  ressemblance  avec  le 
Pandvra  depressa  de  Sowerby,  maiâ  elle  se  distingue  facilement  de  l’une 
et  de  l’autre  espèce.  Sa  forme  est  ovale,  transverse  ; elle  est  obtuse  et  bâil- 
lante du  côté  antérieur.  Ses  crochets  petits  et  comprimés  sont  le  sommet 
d’un  angle  très  ouvert,  formé  par  les  bords  dorsal  antérieur  et  postérieur; 
!e  bord  inférieur  est  régulièrement  courbé  ; le  postérieur,  arrivé  à Tangle 
postérieur  et  supérieur,  se  prolonge  en  un  bec  étroit  et  court  auquel  abou- 
tit une  faible  inflexion  qui,  comme  dans  les  Pandores,  s’étend  du  crochet 
le  long  du  bord  supérieur  et  postérieur.  La  valve  droite  est  plane,  la  gauche 
est  concave,  mais  peu  profonde  ; toutes  deux  sont  blanchâtres,  sillonnées 
transversalement,  mais  les  sillons  sont  larges,  inégaux,  irréguliers.  La 
charnière  est  semblable  à celle  des  Pandores,  seulement  on  trouve  attaché 
à la  face  interne  du  ligament  un  petit  osselet  étroit  et  mince.  Cette  coquille, 
longue  de  16  millim.,  est  large  de  25. 


SEPTIÈME  FAMILLE.- 
Les  Ostéodesmes.  Desh. 

CARACTÈRES.  — Animal  ayant  les  lobes  du  manteau  réunis  dans 
la  plus  grande  partie  de  leur  longueur,  laissant  en  avant  une  petite 
ouverture  pour  le  passage  d un  pied  étroit,  quelquefois  by^ssifère; 
siphons  plus  ou  moins  allongés  et  réunis  en  tout  ou  en  partie. 

Coquille  régulière,  inéquivalve,  plus  ou  moins  bâillante,  mince 
et  subnacrée.  Charnière  ayant  un  cuilleron  sur  chaque  valve,  re- 
cevant un  ligament  interne  sur  lequel  est  fixé  un  osselet  cardinal. 


Its  OSTÉüDESMES. 


ao5 

GENEES.  — - Lyonsie,  Ostéodesme^  Périplome  ^ Anatiney 
Thracie , Myocarne. 

OBSERVATIONS  GÉNÉRALES.  — Dès  1822,  M.  Turton  avait  observé  dans 
une  coquille  des  mers  d’Angleterre, Tin  fait  aussi  nouveau  qu'intéressant; 
il  avait  constaté  dans  le  Mya  Nonvegica,  l'existence  d’un  osselet  entière- 
ment isolé  et  fixé  sur  le  ligament  de  la  charnière  ; en  1825,  nous  faisions 
une  observation  semblable  sur  plusieurs  des  Ânalines  de  Lamarck  et  sur  le 
Mya  soîemyalis  de  cet  auteur,  nous  trouvions  aussi  un  osselet  isolé  à la 
charnière  de  ces  coquilles,  avant  que  le  travail  de  M.  Turton  nous  futconnu. 
D’après  l’ensemble  de  ces  observations,  nous  avons  senti  la  nécessité  d’é- 
tablir une  famille  dans  laquelle  seraient  réunies  toutes  les  coquilles  por- 
tant un  osselet  isolé  à la  charnière,  et  d’établir  dans  cette  famille  autant 
de  genres  que  l’osselet  présenterait  de  modifications,  tant  dans  sa  forme 
que  dans  sa  position.  Nous  avons  été  conduit,  par  là,  à réformer  le  genre 
Anatine  de  Lamarck,  et  à remettre  eu  évidence  le  genre  Thracie  de  Leach, 
jusqu'alors  oublié  dans  les  ouvrages  de  conchyliologie.  Nous  avons  égale- 
ment introduit  le  genre  Périplome  de  M.  Schumacher  dans  notre  nouvelle 
famille,  parce  que  nous  avons  observé  le  premier  l’osselet  triangulaire  qui 
fait  partie  de  la  charnière  ; enfin  ayant  vu  dans  le  Mya  soîemyalis  un  osse- 
let quadrangulaire,  nous  proposâmes  pour  cette  coquille  et  quelques  autres 
du  même  groupe  un  genre  Osiéodesme,  maisM.  Turton,  avant  nous,  dans 
ses  Coquilles  bivalves  de  la  Grande-Bretagne,  avait  établi  un  genre  Lyon- 
sm,  que  nous  avons  substitué  au  nôtre,  à cause  de  son  antériorité.  Il  existe 
un  genre  très  singulier  établi  parM.  Stutchbury,  daus  le  t.  v,  du  Zoological 
journal^  sous  le -nom  de  Myochama.  Nous  ne  le  connaissons  que  d’après 
les  figures  et  les  descriptions  données  par  les  conchyliologues  anglais,  et 
nous  pensons  qu’il  doit  venir  se  ranger  dans  notre  famille  des  Ostéodesmes 
ou  dans  son  voisinage. 

Tous  les  genres  que  nous  venons  de  mentionnei’  ont  un  osselet  à la  char- 
nière. Dans  les  Lyonsies,  cet  osselet  est  une  plaque  sub-quadrangulaire, 
dont  les  deux  bords  les  plus  longs  sont  appuyés  sut*  des  ciiiüerons  obliques 
appliqués  le  long  du  bord  supérieur  et  postérieur  de  la  coquille  ; la  char- 
nière des  Myocames  offre  un  osselet  semblable,  mais  ce  genre  de  mollus- 
ques dimyaires  est  fixé  par  l’une  de  ses  valves,  de  lu  même  manière  que 
les  Cames  ou  les  Huîtres,  et  néanmoins  l’impression  palléale  est  sinueuse 
du  côté  postérieur,  ce  qui  annonce  que  l’animal  est  terminé  par  des  siphons. 
Voilà  donc  une  coquille  adiiérenle,  irrégulière,  qui  contrairement  aux  prin- 
cipes qui  ont  servi  de  base  à la  méthode,  viendrait  s’intercaller  au  milieu 
de  genres  à coquille  libre  et  régulière.  Avant  d’admettre  une  exception 


septième  famillk 

aussi  considérable  que  celle-ci,  il  faudra  revoir  ce  genre  avec  toute  l'at- 
tention qu’il  mérite,  et  attendre  que  son  animal  soit  connu  avant  de  fixer 
définitivement  sa  place  dans  la  série.  Le  genre  Périplome  de  Schumacher 
a les  cuillerons  détachés  du  bord  cardinal,  saillans  dans  les  valves,  et  l’os- 
selet est  enclavé  entre  le  cuilleron  et  le  bord  dorsal*  Cet  osselet  est  trian- 
gulaire, à angles  arrondis,  tandis  que  dans  les  Analines,  l’osselet  est  tri- 
cusp.ide;  deux  branches  s’enfoncent  dans  la  cavité  des  crochets,  la  troisième 
se  place  en  travers  des  cuillerons  et  est  retenue  par  le  ligament.  Dans  les 
Thracies,  l’osselet  est  moins  constant  que  dans  les  autres  genres  ; plusieurs 
espèces  paraissent  en  manquer,  mais  nous  l’avons  trouvé  dans  celle  qui 
habite  les  côtes  de  la  Normandie;  il  est  en  demi-anneau  et  il  embrasse  les 
deux  valves  en  arrière  du  ligament  ; le  ligament  dans  ce  genre,  a déjà  une 
tendance  à sortir  de  la  coquille  ; les  cuillerons  sont  petits,  et  il  y a un  petit 
ligament  extérieur;  ces  différences  ne  sont  pas  les  seules, aussi  il  ne  serait 
pas  impossible  que  plus  tard  les  Thracies  sortissent  de  la  famille  des  Os- 
téodesmes,  d’après  les  caractères  de  Tanimal. 

Nous  ■ connaissons  actuellement  l’animal  de  trois  genres  de  la  famille 
des  Ostéodesmes  : ce  sont  ceux  des  Lyonsies,  des  Anatines  et  des  Thra- 
cies, Ces  animaux  offrent  des  différences  génériques  assez  considérables, 
mais  deux  d’entre  eux,  les  Lyonsies  et  les  Anatines  ont  des  caractères  com- 
muns qui  les  rapprochent  ; le  manteau  est  fermé  dans  presque  toute  sa  cir- 
conférence, une  petite  ouverture  antérieure  et  inférieure  donne  passage 
à un  pied  grêle  et  cylindracé  semblable  à celui  des  Myes. 

A l’extrémité  postérieure,  le  manteau  se  termine  en  deux  siphons  réu- 
nis et  courts  dans  les  Lyonsies,  plus  allongés  dans  les  Anatines,  mais  désu- 
nis dans  toute  leur  longueur  dans  les  Thracies.  Les  palpes  labiales  dans  les 
trois  genres  sont  longues  et  étroites,  et  les  branchies  offrent  un  caractère 
commun  ; elles  sont  situées  le  long  de  l’animal  comme  les  feuillets  d’un  li- 
vre complètement  ouvert  par  le  milieu;  ces  caractères  communs  des  pal- 
pes et  des  branchies  doivent-ils  l’emporter  à l’égard  des  Thracies  sur  ceux 
empruntésaux  siphons,  et  d’après  lesquels  ce  genre  devrait  sortir  de  la  fa- 
mille des  Ostéodesmes?  Dans  notre  opinion,  la  science  ne  possède  pas  en- 
sède  pas  encore  assez  de  matériaux  pour  coordonner  ces  caractères  selon 
leur  importance,  et  fonder  des  groupes  naturels  d’après  leur  emploi  judi- 
cieusement fait. 

Les  coquilles  ont  entre  elles  plus  d'analogie  que  leurs  animaux;  toutes 
sont  minces,  fragiles,  plus  ou  moins  baillantes,  inéquivalves,  et  à l’excep- 
tion des  Thracies,  toutes  sont  nacrées  à intérieur  ; l’épiderme  qui  les  re- 
couvre est  extrêmement  mince  dans  le  plus  grand  nombre,  et  ne  devient 
apparent  que  vers  le  bord  des  valves  ; enfin,  presque  toutes  les  espèces  ont 


207 


LES  OSTÉODpSMES. 

le  dehors  des  valves  garni  de  très  fuies  granulations.  Tous  les  genres  n’ont 
pas  la  même  manière  de  vivre  j les  Anatines  s’enfoncent  dans  le  sable  à peu 
de  profondeur  sous  Teaii;  les  Thracies  habitent  les  lieux  vaseux,  tandis  que 
lesLyonsies  préfèrent  les  endroits  rocailleux,  parce  qu’elles  se  fixent  sous 
les  pierres  au  moyen  de  leur  byssus  ; enfin,  les  Myocames  se  fixent  sur  les 
autres  coquilles,  et  notamment  sur  les  Trigonies,  à la  Nouvelle-Hollande  et 
à la  Nouvelle-Zélande. 

GENRE  VINGTIÈME. 

ZiTOlSrSlEi  Lyonsia  (Turton). 

(Pi.  8,  fig.  12,  i3,  i4)i 

CARACxèRiis  générïqües.  — Animal  ovalaire,  ayant  les  lobes 
du  manteau  réunis  dans  presque  toute  leur  circonférence,  laissant 
en  avant  et  en  dessous  une  petite  fente  pour  le  passage  du  pied  ; 
pied  petit,  cylindracé,  portant  un  byssus  à la  base;  siphons  très 
courts,  réunis,  si  ce  n’est  au  sommet;  impression  palléale  à peine 
sinueuse  postérieurement,  donnant  attache  à un  muscle  rétracteur 
des  siphons  ; ceux-ci  très  courts  et  ciliés  au  sommet. 

Coquille  ovale,  oblongue,  transverse,  inéquivalve,  inéquilaté- 
rale, très  mince,  nacrée;  imcuilleron  étroit  très  oblique,  appliqué 
contre  le  bord  dorsal,  recevant  un  ligament  interne,  large,  sur 
lequel  est  attaché  un  osselet  qùadrangulaire  fort  mince. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Mfa^  Chemnitz , Muller  ,Gme]in, 
Dillwyn,  Wood.  — Amphidesma,  Lamk. — Pandorina  ^ Scac- 
chi,  Philippi.  — OsteodesmUy  Desh.  — Corhula^  Bruguières. 
— Periploma^  Rang. 

OBSERVATIONS.  — Nous  avoRS  proposé  un  genre  sous  le  nom  d’Ostéo- 
desme  à une  époque  où  l’ouvrage  do  M.  Turton  no  nous  était  point  encore 
connu.  Publié  en  1822,  l’ouvrage  du  naturaliste  anglais  contient  le  genre 
Lymsia  qui  correspond  en  partie  au  nôtre,  et  que  ses  caractères  doivent 
faire  accepter  dans  la  méthode.  Néanmoins,  notre  genre  Ostéodesme  ré- 
formé par  la  séparation  des  Lyonsia  que  nous  y confondions,  peut  être  éga- 
lement conservé,  comme  nous  le  verrons  bientôt. 

La  coquille  qui  a servi  de  type  au  genre  de  M,  Turton,  était  connue  de- 


2o8 


SEPTIEME  FAMILLE 


puis  long-temps.  Chemnitz  l’avait  décrite  et  figurée  dans  son  grand  ouvrage 
sous  le  nom  de  Mija  Nonoegica.  Peut-être  Muller  Ta-t  il  connue,  et  il  se- 
rait possible  qu’il  l’eut  inscrite  dans  son  prodrôme  de  la  zoologie  danoise, 
sous  le  nom  de  Mya  niiida.  Gmélin,  Dilwyn,  Wood  ont  suivi  l’exemple  de 
Chemoitz , tandis  que  Bruguières,  dans  V Encyclopédie^  réformant  le  genre 
Mye  et  le  réduisant  à un  petit  nombre  d’espèces,  transporta  celle-ci  dans 
son  genre  Corbule,  quoiqu’elle  n’en  eut  pas  les  caractères.  Lorsque  Lamarck 
publia  ses  ^namaux  sans  vertèbres,  les  zoologistes  durent  être  surpris  de 
rencontrer  le  Mya  Norwegica  dans  le  genre  des  Amphidesmes.  Il  est  vrai, 
comme  nous  le  verrons  plus  tard  , que  ce  genre  paraît  avoir  été  destiné 
par  son  auteur  à recevoir  celles  des  coquilles  bivalves,  qui  ayant  des  carac- 
tères ambigus,  ne  pouvaient  être  admises  dans  des  genres  plus  nettement 
caractérisés.  Quelques  années  plus  tard,  M.  Turton  détacha  des  Myes  le 
genre  qui  nous  occupe,  se  fondant  sur  ce  caractère  singulier  d’un  osselet 
isolé,  attaché  à un  ligament  interne  et  faisant  partie  de  la  charnière;  c-esoat 
des  faits  analogues  que  nous  observâmes  dans  plusieurs  des  espèces  d’Ajia- 
tines  de  Lamarck  qui  nous  déterminèrent  aussi  à créer  la  famille  des  Os- 
léodesmes  et  le  genre  du  même  nom,  en  y rassemblant  un  plus  grand  nom- 
bre d’espèces  que  n’en  connut  le  zoologiste  anglais  ; mais  ces  obsei^^ations- 
commencées  en  1825  sont  postérieures  à celles  de  M.  Turton,  et  nous  euî 
abandonnons  la  priorité  pour  ce  qui  concerne  le  genre  Lyonsia. 

Jusqu’à  présent  l’animal  de  ce  genre  est  resté  presque  entièrement  m- 
connu.  Depuis  peu  de  temps,  nous  avons  pu  cous  procurer  un  individu 
conservé  dans  l’alcool , et  provenant  de  la  Méditerranée.  Cependant 
MM.  Scacchi  et  PhiUppi  l’ont  vu  vivant,  et  le  premier  de  ces  naturalistes^ 
en  a fait  un  dessin  de  grandeur  naturelle;  une  description  très  abrégée  de' 
quelques  parties  extérieures  a été  publiée  par  les  mêmes  auteurs,  dans  les- 
des  sciences  na/ure//es  de  Londres  (janvier  1840).  Le  pied  elles 
siphons  sont  mentionnés,  ce  qui  est  insuffisant,  selon  nous,  pour  détermi- 
ner exactement  la  place  d’un  nouveau  genre  de  mollusques  dans  la  séri& 
méthodique. 

Cet  animal  est  étroit,  ovale,  transverse;  il  est  enveloppé  d’un  manteau 
mince  et  transparent,  dont  les  bords  sont  épaissis  par  une  zône  muscu- 
laire, assez  large  pour  chaque  côté  ; les  bords  en  sont  soudés  dans  presque 
toute  la  circonférence  ; une  petite  fonte  antéro-inférieure  subsiste  pour  le 
passage  d’un  petit  pied  subcylindracé  ouconoïde  un  peu  comprimé  latéra- 
lement. En  arrière,  le  manteau  est  terminé  par  deux  siphons  très  courts 
soudés  à la  base,  détâchés  au  sommet  et  pourvus,  de  chaque  côté,  d’un  mus- 
cle rétracteur  très  court , faisant  à peine  saillie  dans  le  manteau.  Ces  si- 
phons, par  leur  disposition,  ont  beaucoup  d’analogie  avec  ceux  des  Pan- 


LES  ÜSTEÜDESMKS. 


10(9 

dores.  Leur  base,  subitement  plus  épaisse,  est  séparée  du  sommet,  non- 
seulement  par  ce  changement  subit  d’épaisseur,  mais  encore  par  une  ran 
gée  de  tentacules  coniques  placés  au  point  do  jonction  des  deux  parties. 
Lorsque  le'manteau  a été  ouvert,  on  trouve  en  avant  une  masse  abdomi- 
nale peu  considérable,  un  peu  comprimée  latéralement  et  portanten avant 
le  petit  pied  dont  nous  avons  déjà  parlé.  Ce  qui  nous  a paru  extraordi- 
naire dans  le  genre  Lyonsia,  c’est  l’existence  d’un  byssus  assez  considé- 
rable fixé  à la  base  du  pied,  exactement  de  la  môme  manière  que  dans  les 
Byssomyés  de  Cuvier.  Le  pourtour  de  l’ouverture  du  manteau,  par  où 
passe  le  pied^  est  garni  de  courtes  papilles  charnues,  obtuses,  semblables  à 
celles  que  l’on  remarque  dans  la  Solémye. 

La  bouche  est  petite,  transversc,  placée  comme  à l’ordinaire  entre  la  base 
du  pied  et  le  muscle  adducteur  antérieur  ; elle  est  entre  deux  levres  assez 
larges  qui  se  continuent  de  chaque  côté  en  une  paire  de  palpes  très  étroites, 
obliquement  placées  d’avant  en  arrière  et  de  haut  en  bas.  Sur  la  face  in- 
terne de  ces  palpes,  s’élèvent  do  fines  lames  peu  obliques  qui  s’étendent 
d’un  bord  à l’autre.  Ces  organes  ne  sont  point  fixés  par  leur  grand  côté, 
comme  cela  a lieu  chez  beaucoup  d’autres  mollusques,  mais  i»ar  le  côté  le 
plus  étroit. 

Les  Branchies  sont  constituées  par  deux  feuillets  allongés,  étroits,  occu- 
pant de  chaque  côté  toute  la  longueur  de  l’animal,  depuis  les  palpes  jusqu’à 
l’entrée  des  siphons.  Ces  organes  ne  sont  point  relevés  l’un  contre  l’autre 
comme  les  feuillets  d’un  livre  fermé,  mais  ils  sont  largement  étalés,,  exacte- 
ment de  la  mémo  manière  que  les  feuillets  d’un  livre  ouvert.  Cette  dispo- 
sition n’est  pas  propre  seulement  au  genre  qui  nous  occupe,  on  la  retrouve 
chez  plusieurs  autres,  comme  nous  aurons  occasion  de  le  voir  par  la  suite. 
Les  branchies,  dans  les  Lyonsia,  se  distinguent  encore  par  l’épaisseur  et  la 
régularité  des  sillons  transverses  qui  les  couvrent;  en  cela  elles  se  rap- 
prochent de  celles  des  Analines. 

Les  muscles  adducteurs  des  valves  sont  inégaux  ; l’antérieur  est  allongé, 
étroit,  aplati,  ce  qui  le  rapproche  de  celui  des  Solens  et  de  la  Solémye  ; le 
postérieur  qui  est  le  plus  gros  est  subcirculaire,  et  lorsque  l’on  met  rani- 
mai sur  le  ventre,  on  voit  à travers  le  manteau  le  rectum  descendre  le  long 
du  dos  pour  venir  s’appuyer  sur  le  milieu  du  muscle,  en  suivre  le  contour 
et  aboutir  à la  partie  supérieure  du  siphon  anal. 

Les  coquilles  du  genre  Lyon^ia  se  distinguent  facilement  par  l’ensemble 
de  leurs  caractères;  toutes  sont  ovales,  étroites,  transverses,  régulières, 
subéquilalérales,  inéquivalves,  le  test  est  mince,  fragile,  transparent,  na- 
cré, brillant  en  dedans;  en  dehors,  il  est  d’un  blanc  grisâtre  ou  jaunâtre, 
recouvert  d’un  épiderme  qui  paraît  surtout  vers  les  bords  des  valves. 


aïo 


SEPTIÈME  FAMILLE 


Toute  la  surface  est  couverte  de  stries  très  fines  qui  descendent  des  cro- 
chets à la  circonférence  : ces  stries  sont  onduleuses,  faiblement  relevées, 
très  étroites.  Les  valves  sont  inégales  comme  nous  le  disions,  c’est  la  gau- 
che qui  est  la  plus  grande  j les  crochets  sont  médiocres,  rapprochés  ; le  côté 
antérieur  est  arrondi,  le  postérieur  se  prolonge  un  pou  en  un  bec  assez 
large  5 closes  dans  la  plus  grande  partie  de  la  circonférence,  les  valves  sont 
bâillantes  dans  toute  la  largeur  du  bec  : ce  bâillement  ressemble  à celui 
des  Anatines;  elles  les  ont  aussi  en  avant,  mais  plus  faiblement;  il  y a 
même  quelques  espèces  qui  ne  le  sont  pas  de  ce  côté. 

Si  Ton  examine  Tintérieur  des  valves,  on  éprouve  beaucoup  de  peine 
pour  apercevoir  les  impressions  que  l’animal  y a laissées.  Un  individu 
mort  et  terni  en  dedans  est  préférable  à ceux  qui  sont  bien  frais  et  bril- 
lans.  On  trouve  en  avant  et  tout  près  du  bord  supérieur  une  impression 
musculaire  ovale,  allongée,  étroite,  un  peu  courbée  sur  elle-mêmo  et  un 
peu  en  arrière,  une  autre  petite  impression  près  de  la  cavité  des  crochets  ; 
elle  résulte  du  rétracteur  antérieur  du  pied.  L’impression  musculaire  posté- 
rieure est  subcirculaire,  grande,  située  tout  près  du  bord  supérieur;  elle 
s’étend  jusqu’à  la  base  du  bec  de  la  coquille.  Une  impression  palléale  à 
peine  marquée,  commence  à l’extrémité  de  l’impression  musculaire  an- 
térieure, suit  le  bord  des  valves  à une  petite  distance,  et  parvenue  à l’ori- 
gine dû  bec,  s’infléchit  faiblement  en  dedans  pour  recevoir  dans  cette 
échancrure  un  muscle  court  et  large  qui  est  le  rétracteur  des  siphons. 

Le  bord  cardinal  est  extrêmement  mince,  la  portion  de  ce  bord  qui  ap- 
partient au  côté  antérieur  est  un  peu  plus  épaisse,  elle  s’arrondit  en  côto  et 
vient  se  terminer  brusquement  sous  le  crochet.  C’est  à l’extrémité  do  ce 
bord  que  commence  sur  chaque  valve  un  cuilleron  très  aplati,  descendant 
obliquement  le  long  du  bord  supérieur  et  postérieur.  Quand  les  valves  sont 
réunies,  ces  cuillerons,  très  rapprochés  sous  lo  crochet,  s’éloignent  vers 
leur  extrémité  postérieure,  et  leur  écartement  présente  la  forme  d’un  V 
tronqué  au  sommet.  Un  ligament  intérieur  s'attache  sur  ces  cuillerons  , 
s’étend  d’une  valve  à l’autre,  et  il  donne  insertion  à un  petit  osselet  aplati, 
triangulaire  ou  subquadrangulaire,  qui,  par  le  fait,  est  à cheval  sur  la 
charnière,  puisque  chaque  moitié  appartient  à la  valve  qui  lui  correspond. 
Lorsque  l’on  détache  les  valves,  il  arrive  souvent  que  l’osselet  quitte  les 
cuillerons  et  s’échappe,  mais  on  le  trouve  en  place  dans  les  individus  dont 
la  charnière  n’a  point  été  rompue. 

Ce  que  nous  avons  exposé  sur  le  genre  Lyomia^  rend  assez  facile  à dé- 
terminer la  place  qu’il  doit  occuper  dans  la  méthode  générale  ; par  les  si- 
phons de  l’animal,  il  se  rapprochedos  Pandores  ; par  le  manteau  dont  l’ou- 
verture pour  le  pied  est  petite^  il  a de  l’analogie  avec  les  Myes  et  les  Ana- 


LES  OSTÉODRSftlES. 


an 


tines;  enfin,  il  se  rattache  à ce  dernier  genre  par  des  caractères  plus  im- 
portans  tirés  de  la  forme  des  palpes  et  de  la  dispositian  des  branchies.  Si 
nous  nouàcn  rapportons  aux  figures  d’Analine  données  par  M.  Mitre  dans 
le  Magasin  de  zoologie,  les  palpes  et  les  branchies  auraient  dans  les  deux 
genres  la  plus  grande  ressemblance,  et  c’est  celte  ressemblance  qui  doit 
déterminer  le  zoologiste  ù faire  entrer  le  genre- Li/o?iS2a  dans  la  même  fa- 
mille que  les  Anatines. 

Tel  que  nous  le  réduisons  actuellement,  lo  genre  Lyonsia  se  compose 
d’un  petit  nombre  d’espèces  vivantes,,  dont  les  principales  sont  de  la  Médi- 
terranée et  de  rOcéan  européen  j quelques  autres  proviennent  des  mers  de 
l’Amérique  septentrionale.  Nous  n’en  connaissons  aucune  à,  l’état  fossile, 
quoique  récemment  M.  A.  d’Orbigny  ait  cru  devoir  ranger  dans  ce  genre 
des  coquilles  fossiles  des  terrains  ooliüques,  pour  lesquels  M.  Agassiz  avait 
proposé  le  genre  Gresslya,  L’opinion  do  M.  d'Orbigny  paraîtra  sans  doute 
inadmissible  aux  personnes  qui  ayant  des  Lyonsia  vivantes,  auront  re- 
connu la  symétrie  de  leur  charnière , symétrie  qui  n’existe  pas  dans  les 
Gresshja;  car  il  est  évident  que  l’épaisseur  un  peu  plus  grande  des  cuille- 
rons  de  la  valve  droite  dans  les  Lyonsia,  ne  peut  être  considérée  comme 
l’équivalent  de  la  côte  épaisse  qui  exisUtit  dans  le  crochet  de  la  valve,  du 
môme  côté  des  Gresslya*  Au  reste,  nous  avons  vu  en  traitant,  du  genre 
Ceromya  pourquoi  nous  y réunissons  les  Gresslya* 

Lyonsie  corbuloïde.  Lyonsia  Noîwe^ica.  Sow. 

PI.  8.  fig.  12;  13. 14. 

L»  testa  ovato^-angustâ  , oblongâ  ^ transversâ , tenui , pclhicidâ  ^ anticè 
clausây  rotütufatâ,  poslîcè  late  rostraiâ,  hiante;  stnis  vacliantîbus  tenuîs^ 
simîs  imdiilatisornatà, 

Mya  iVonvc^/ca.Chemnilz.Concb.  t.  lo.  p.  34ô,  pl.  ryo.  f.  1667.  i668. 

Gmel.  p.  3228. 

An  Mya  nitida  ? Muller.  Zool.  Dan,  proclr.  p.  245,  n®^963. 

Mya  nitida?  Fabricius.  Mus.  de  la  Soe.  d’iiist,  iial.  de  Copenhague,  t.  4. 
2®  part,  p.  44,  pl.  10.  f.  10, 

Mya  Nonvcgjça,  wood.  Gener.  Cpncli.  p,  98.  pl.  18.  f.  4.  5. 

Mya  nitida.  Wood.  loc.  cil.  p,  io3  ? 

Mya  Korwegica,  Dillwyii.  Cat.  t,  i.  p.  48.  n°  20, 

Mya  striata.  Monlagii.  Lin.  Traus.  t.  ii,  p.  i88,  pl.  i3.  f.  i,  A. 

Id.  Turton.  Conch.  dicl.  p.  io5.  f.  99. 

Mya  Norwegîca,  Turlon*  loc,  cil,  p.  160.  f.  100. 

lyonsia  striata  Turton.  Conch.  brit.p.  35,  n®  i.  pl,  3,  f.  0,  7. 

*4’ 


ai2 


SEPTIÈME  FAMILLE 


Jnatiua  Norwegica.  Sow.  Généra  of  shclls.  f. 

Id.  Reeve,  Conch.  System,  t.  r.  p.  Sa,  pl,  34.  f.  2. 

Amphidesma  corbuloides,  Lamk.  An.  .s.  verf.  !.  5.  p.  49a.  li. 

Osteodesma  corbu/oides»  Desli.  dans  Lamk.  An.  s,  verl.  2®  édit.  t.  5.  p.  85. 

Lyonsia  Nonvegica,  Sow.  Conch.  Man.  f.  4gt.  492. 

Habite  les  mers  d’Europe. 

11  règne  encore  quelques  incertitudes  sur  la  synonymie  de  cette  espèce, 
relativement  surtout  au  Mya^nitida  de  Muller  et  de  Fabricius.  S’il  était 
bien  reconnu  que  Tespèce  désignée  par  ces  auteurs  sous  ce  nom,  est  la 
même  que  le  Mya  Nonveyica  de  Chemnilz,  dès-lors  ce  dernier  nom  de- 
vrait être  changé,  l’autre  ayant  sur  lui  l’avantage  de  la  priorité.  Si  la  figure 
que  donne  Fabricius  du  Mya  7iUida  dans  les  Mémoires  de  la  société  d’his- 
toire naturelle,  était  meilleure,  et  si  surtout  ce  savant  zoologiste  avait  men- 
tionné dans  sa  phrase  caractéristique  l’inégalité  des  valves,  la  forme  et  la 
position  des  cuillerons  de  la  charnière,  le  doute  ne  serait  plus  permis  et 
l’espèce  qui  nous  occupe  devrait  prendre  le  nom  do  Lyonsia  7iitida.  C’est 
donc  à tort,  selon  nous,  que  Wood,  dans  son  General  conckology^  a admis 
à-la-fois  les  Mya  Norwegica  et  nüida.  Quant  au  Mya  siriata  de  Montagu, 
il  est  bien  certain  qu’elle  appartient  à l'espèce  nommée  parChemnitz  ; il  en 
est  de  môme  pour  VA7nphidesma  co7'buloides  de  Lamarck,  dont  nous  avons 
fait  d’abord  notre  Osteodesma  corbuloides. 

Cette  coquille  est  ovale,  oblongue,  transverse,  étroite,  subéquilatérale; 
le  côté  antérieur  est  airondi,  le  postérieur  qui  est  un  peu  plus  long  se  ter- 
mine en  un  bec  large;  ce  bec  offre  une  ouverture  ovalaire  assez  large  pour 
le  passage  des  siphons.  Cette  ouverture  ne  manque  pasd’analogie  avec  celle 
du  Tugon  d’Adansüii  ; elle  est  la  seule  qui  existe  entre  les  valves  ; 
les  crochets  sont  gonflés , arrondis  , mais  peu  protubérans.  En  avant, 
les  valves  sont  égales,  mais  dans  les  deux  tiers  postérieurs  de  la  longueur 
du  bord  inférieur,  la  valve  gauche  devient  plus  large  que  la  droite  et  la  dé- 
borde. Toute  la  surface  extérieure  est  finement  striée  ; les  stries  sont  sail- 
lantes, serrét's,  onduleuses;  elles  semblent  produites  par  un  épiderme 
très  fin  et  plissé. 

Les  grands  individus  de  cette  espèce  ont  20  millimètres  de  long  et  40  do 
large. 

, . GENRE  VINGT-ÜNIÊME. 

oSTEiOBESME.  Osteodesma  (Desli.). 

(Pl.  cj.  fig.  7.  8.). 


LES  OSTÉODESMES. 


2i3 


CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES.  — Animal  inconiiu. 

Coquille  ovale,  oblongue,  transverse,  inéquilatérale,  inéqui- 
valve  et  irrégulière,  subnacrée  en  dedans,  couverte  d’un  épi- 
derme subcorné  en  dehors  et  débordant  les  valves  ; crochets 
protubérans  peu  saillans  sur  le  bord  cardinal.  Impressions  muscu- 
laires inégales  : l’antérieure  ovale  obronde  près  du  bord  infé- 
rieur; la  postérieure  circulaire  près  du  bord  dorsal;  impression 
palléale  large,  ayant  uneinflexion  postérieure  triangulaire,  étroite 
et  oblique.  Charnière  ayant  sur  chaque  valve  un  cuilleron  linéaire, 
subcalleux,  un  peu  saillant,  adhérent  au  bord  postérieur  et  don- 
nant insertion  à un  ligament  intérieur,  sur  lequel  est  implanté  un 
osselet  allongé  et  étroit. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Anatimi^  Lfousia^  Gray*  — MjUy 
Lamk.  — Lyonsia{pars]y^Q\YQxby. 

OBSERVATIONS.  — Depuis  que  nous  avons  été  à même  de  connaître  dans 
tous  ses  détails  le  genre  Lyonsia  de  M.  Turton,  et  qu’à  l’examen  des  co- 
quilles nous  avons  pu  joindre  la  connaissance  exacte  de  l’animal,  il  nous  a 
paru  nécessaire  de  réformer  notre  ancien  genre  Ostéodesme  dans  lequel 
nous  admellions  les  Lyonsia,  et  de  le  réduire  à quelques  espèces  beau- 
coup moins  régulières,  dont  les  coquilles  offrent  des  particularités,  d’après 
lesquelles  nous  pensons  que  l’animal  qui  les  a construites,  a des  caractères 
suffisans  pour  en  constituer  un  bon  genre  ; dès-lors  nous  croyons  devoir 
conserver  à ce  groupe  le  nom  d’Ostéodesme  qui  lui  convient  autant  qu’au 
genre  Lyonsia. 

Nous  avons  dit  en  commençant  que  l’animal  est  inconnu  ; . cependant 
M.  Gray  dans  une  note  critique,  qui  dans  le  n“25  àes  Annales  dliistoire 
naturelle  de  Londres,  suit  la  notice  de  MM.  Scacchi  et  Philippi  sur  le  genre 
Pandorina;  M.  Gray,  disons-nous,  affirme  avoir  donné  la  description  de 
l’animal  du  Lyonsia  cuneata,  qui  pour  nous  est  le  type  de  notre  genre  Os- 
téodesme réformé.  M.  Gray  renvoie  au  premier  numéro  de  son  Spicilegia 
zoologicaoii  nous  trouvons  en  effet  la  description  succincte  de  la  coquille  et 
sa  figure  au  trait,  mais  c’est  en  vain  que  nous  cherchons  la  moindre  indi- 
cation sur  l’animal;  il  esta  présumer  qu’ayant  élédécrit  dans  un  autre  ou- 
ouvrage,  M.  Gray  aura  cité  celui-ci  par  inadvertance. 

Par  l’ensemble  de  ses  caractères,  æ genre  tel  que  nous  le  réduisons  ac- 


StPTÏtfllK  FAMILLE 


2i4 

tuellementse  distingue  avec  facilité  desLyonsia.  Les  coquilles  qu’il  renferme 
sont  loin  d’avoir  la  régularitédes  autres  genres  qui  l'avoisinent;  sous  ce  rap- 
port elles  ressemblent  beaucoup  aux  Saxicaves  les  plus  irréguliers.  Néan- 
moins elles  se  distinguent  nettement  de  ce  dernier  genre,  et  elles  appartien- 
nent à noire  famille  desOstéodesmes;  elles  sont  nacrées  en  dedans;  en  dehors 
elles  sont  revêtues  d’un  épiderme  épais,  subcorné,  qui  dépasse  les  valves,  ce 
qui  ne  les  empêche  pas  de  montrer  des  sillons  inégaux  résultant  d’accrors- 
semens  irréguliers.  Ces  coquilles  sont  transverses,  ovales,  ou  subtrigones 
inéquilatérales;  quelques  espèces  sont  inéquivalves  ; quelques  autres  ont 
les  valves  égales  ; elles  sont  assez  minces,  moins  cependant  que  les Lyon^’a; 
le  côté  antérieur  est  obtus,  quelquefois  tronqué,  ce  qui  rend  la  coquille  très 
inéquilatérale  et  subtriangulaire.  Lorsque  les  valves  sont  inégales,  elles 
ne  le  sont  pas  de  la  même  manière  que  dans  les  lAjonsia  ; l’une  d’elles,  la 
gauche,  est  plus  plate  et  un  peu  débordée  par  la  droite,  dans  tout  son  con- 
tour. L’extrémité  postérieure  se  rétrécit,  s’amincit  en  coin,  mais  n’a  jamais 
le  large  bec  des  Lyoîisia;  à cette  extrémité,  la  coquille  offre  un  petit  bâil- 
lement étroit,  irrégulier,  semblable  à celui  que  l'on  remarque  au  côté  an- 
térieur ; les  crochets  sont  renflés  et  prolubérans.  En  dedans,  les  valves  pré- 
sentent deux  impressions  musculaires  inégales;  l’antérieure  est  la  pins  pe- 
tite ; elle  est  ovale  et  située  tout  près  du  bord  inférieur,  à son  origine  ; elle 
se  trouve  par  conséquent  bien  plus  en  avant  et  en  bas  que  celle  des  Lyon- 
sia;  l’impression  postérieure  est  semilunairc,  placée  très  près  du  bord  su- 
périeur, dans  le  milieu  do  l’espace  qui  sé^îare  la  charnière  de  l’extrémité 
postérieure.  Une  impression  palléale  voisine  du  bord  inférieur  de  la  co- 
quille, parvenue  vers  les  deux  tiers  de  la  longumir  de  ce  bord,  s’infléchit 
sous  la  forme  d’une  petite  sinuosité  triangulaire.  La  partie  de  la  coquille 
comprise  entre  celte  inflexion  et  l’extrémité  postérieure  est  fort  large,  ce 
qui  annonce  qu’ainsi  que  dans  les  Glycimères,  les  muscles  rétracteurs  des 
siphons  se  confondent  avec  un  large  bord  musculaire  du  manteau. 

La  charnière  ressemble  beaucoup  à celle  des  Lyonsia,  et  c’est  d’après 
l’analogie  de  cette  partie  dans  les  deux  genres  que  nous  les  avions  d'abord 
confondus.  La  partie  du  bord  cardinal  située  en  dedans  du  crochet,  offre  sur 
chaque  valve  un  cuilleron  épais  et  oblique,  mais  moins  que  dansées  Lyon- 
sies.  Sur  ce  cuilleron  s’insère  un  ligament  intérieur  assez  large,  à la  sur- 
face duquel  est  fixé  un  osselet  étroit,  allongé,  un  peu  rétréci  à ses  extrémi- 
tés ; il  est  convexe  et  un  peu  courbé  dans  sa  longueur,  il  n’est  point  plat 
êl  triangulaire  comme  dans  le  genre  qui  précède. 

Par  la  comparaison  attentive  des  coquilles  des  genres  Lyonsîa  et  Os~ 
teodesma,  on  doit  reconnaître  avec  nous  qu'elles  se  distinguent  nettement 
dans  lelii^  caractères  les  plus  importons,  leur  manière  de  Ÿivre  confirme 


LES  OSTÈODESNES. 


2x5 


Jeur  séparation  ; en  effet,  nous  avons  vu  que  les  Lyonsia  ont  un  byssus  au 
moyen  duquel  elles  s’attachent  aux  rochers,  sous  les  pierres;  les  Ostéo- 
desmes  n’ont  point  de  bj'ssus,  et  elles  vivent  dans  les  Alcyons  comme  l’a 
observé  M.  Cuming,  pendant  son  voyage  d’exploration  sur  les  côtes  de  l’Amé- 
rique  méridionale. 

Nous  ne  connaissons  encore  qti’un  petit  nombre  d’espèces  d’Ostéodesmes, 
cinq  seulement,  toutes  vivantes  ; la  plupart  des  côtes  du  üloxique  dans  le 
Grand-Océan. 

Ostéodesme  cunéiforme.  Osteodesma  cuneata.  Desh. 

PL  9.  fig.  7.  8. 

O,  testa  oblongây  ciineaidy  inœquîlaterà,  irreguiari^  solidulây  anlicè  su6^ 
iruncatây  rotundatây  poslicè  productd;  vaivis  inceqnaîibus y irregnlariter 
concentrict  rugosis^  eptdvrmide  corueo  înerassatis,  intîis  margarhaccis  ; 
cardine  edentido^  ossiculo  oblongo,  angusio^  convexo prœdito, 

Anatina  cuneata»  Gray.  Spic.  ZooL  n'*  i.  p.  6.  pl.  3.  f.  i4* 

Osteodesma  cuneata,  Hnnley.  Desc.  Cal,  p.  25. 

Callow,  Conch.  Nom.  p.  8.  n®  3, 

Habile  les  côtes  du  Pérou  dans  l’épaisseur  des  Alcyons. 


Cette  coquille  singulière  ainsi  que  le  Mya  solemyalis  de  Lamarck  peut 
servir  de  type  à notre  genre  Ostéodesme  ; elle  est  oblongue,  transverse, 
très  inéquilatérale,  sensiblement  équivalve  ; le  côté  antérieur  court  et  tron- 
qué est  la  partie  la  plus  épaisse  de  la  coquille  ; au  côté  postérieur,  elle 
s’amincit  progressivement  en  coin  ; les  crochets  sont  renflés  et  néanmoins 
peu  proéminens  au-dessus  du  bord  cardinal.  La  partie  antérieure  du  bord 
supérieur  est  assez  épaisse  $ cet  épaississement  s’arrête  brusquement  au- 
dessous  ducrochet,  etc’ est  là  que  commence  dans  chaque  valve  le  cuilleron 
oblique  et  accolé  le  long  du  bord  supérieur  et  postérieur  ; le  bord  interne  de 
ce  cuilleron  est  aigu  et  saillant. Le  reste  delà  circonférence  de  la  coquille  est 
mince  et  tranchant,  et  quand  on  la  voit  du  côté  du  bord  ventral,  on  s’a- 
perçoit qu’elle  a des  irrégularités  comparables  à celles  des  Saxicaves. 
Toute  la  surface  intérieure  est  nacrée  ; la  surface  extérieure  est  revêtue 
d’un  épiderme  d’un  brun  jaunâtre  pâle  qui  s’épaissit  assez  promptement 
vers  les  bords  des  valves  ; cet  épiderme  est  lisse,  subcoriié  ; il  se  fendille 
et  se  détache  des  bords  du  têsl;  il  cache  en  partie  un  petit  nombre  de  rides 
irrégulières,  peu  épaisses  et  transverscs. 

Les  grands  individus  ont  42  millimètres  de  large  et  22  de  long. 


2(6 


SEPTIÈME  FAMILLE. 


GENRE  VINGT-DEUXIÈME. 

^ÉRIPLOME,  Periploma^  ScHUM 
PI.  8,  fig.  i5  à 19. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  incoiinii. 

Coquille  ovalaire inéquivale,  iiiëquilatérale,  subiiacrée,  épaisse; 
le  côté  postérieur  très  court,  un  cuilleron  oblique,  étroit  dans 
chaque  valve,  séparé  du  bord  supérieur  par  un  angle  profond, 
dans  lequel  se  place  un  osselet  tiiangulaire;  ligament  fixédansles 
caillerons  et  sur  l’osselet. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Corbula , Brug, , Mj'a , Dillwyn  ? 
Anatina,  Laink.,  Reeve,  Catlow , Hanley,  Osteodesma  de 
Blainville. 

OBSERVATIONS.  — Lc  gcure  Périplome  a été  proposé  pour  la  première 
fois  en  1817  par  Schumacher  dans  son  essai  d’une  classification  des  co- 
quilles. L’espèce  qui  sert  de  type  au  nouveau  genre  était  connue  de  plu- 
sieurs conchyliologistes.  Bruguières  l’avait  fait  figurer  dans  l’Encyclopédie 
parmi  les  Corbules,  et  Lamarck,  dans  son  dernier  ouvrage,  l'a  comprise 
parmi  ses  Anatines,  en  quoi  il  a été  imité  par  ])lusieiu*s  naturalistes  An- 
glais. Dès  18^8,  dans  un  mémoire  lu  à la  Société  d’histoire  naturelle,  et 
qui  devait  faire  partie  du  sixième  volume  de  son  recueil , nous  avons  été 
le  premier  en  France  à adopter  le  genre  du  naturaliste  danois,  et  nous 
l’avons  fait  avec  d’autant  plus  d’empressement  que , par  de  nouvelles 
observations,  nous  pouvions  y ajouter  des  caractères  importuns  qui  avaient 
échappe  à M.  Schumacher,  et  qui  sont  les  plus  propres  à déterminer  les 
rapports  naturels  du  nouveau  genre.  La  dissolution  de  la  Société  d’histoire 
naturelle  de  Paris  mit  obstacle  à la  publicalion  de  notre  mémoire,  mais 
bientôt  après  nous  trouvâmes  occasion  d’en  répandre  les  matériaux  essen- 
tiels dans  plusieurs  articles  de  l’Encyclopédie,  et  d’indiquer  la  composition 
de  noire  famille  des  Ostéodesmes  dans  les  tableaux  de  classification  qui 
accompagnent  l’article  Mollusques.  A cette  époque,  le  genre  Périplome 
était , pour  nous,  comme  il  l’est  encore  aujourd’hui , voisin  des  Anatines , 
des  Lyonsics  et  des  Ostéodesmes. 

Quoi(]ue  déjà  suffisamment  caractérisé  par  le  naturaliste  danois,  le  genre 


LES  OSTÉODESMCS. 


217 

Périplome  paraît  avoir  été  mal  compris  par  M.  de  Blainville  : on  voit,  en 
effet,  dans  les  dernières  additions  et  Corrections  au  manuel  de  Malacologie, 
ijue  son  savant  auteur  attribue  le  nom  d'Ostéodesmo  au  genre  Périplome, 
ce  dont  on  est  assuré,  puisqu’il  cite  pour  type  du  genre  VAnatina  trapezoi- 
dalis  deLamarckqui  est  aussi  le  type  du  genre  Périplome  de  Schumacher; 
de  plus,  M de  Blainville  emprunte  les  caractères  de  l’animal  de  son  genre 
àVÂnatinamyalis  deLamarckqui  est  une  véritable  Thracio, comme  nous  le 
verrons  bientôt.  Ce  que  nous  venons  de  dire  doit  suflire  pour  faire  com- 
prendre les  rectifications  importantes  que  doit  subir  le  genre  Ostéodesme 
de  M.  de  Blainville;  c’est  pour  n’avoir  pu  les  faire,  ces  rectiQcalions , que 
M.  Scacchi  a été  conduit  à proposer  un  genre  Pandorùia  pour  une  coquille 
qui  appartient  au  genre  Lyonsea  de  Turton,  et  que  nous  comprenions  autre- 
fois darjs  notre  genre  Ostéodesme.  Enfin , nous  le  ferons  remarquer ce 
n’est  pas  sans  raison  que  nous  avons  dit  ne  pas  connaître  l’animal  du 
genre  Périplome,  puisqu’en  effet  c'est  celui  d’une  Thracio  que  M.  de  Blain- 
ville a décrit  sous  le  nom  d’Osléodesme  ou  de  Périplome.  Nous  avons 
vainement  cherché  le  genre  Périplome  dans  la  Conchyliologie  systémati- 
que de  M.  Beeve,  publiée  en  1841 , c’est-à-dire  plus  de  vingt  ans  après  la 
création  du  genre  par  Schumacher,  plus  de  dix  ans  après  son  adoption  par 
noiis , qui , par  la  découverte  de  l’osselet  cardinal , avions  rendu  ce 
genre  indispensable  dans  un  cadre  générique  complet.  11  est  probable  que 
M.  Iteeve  ne  sépare  pas  les  Périplomes  des  Anatines,  si  l'on  en  croit  du 
moins  le  Conchologüt  Nomenclator  de  M*'®  Callow,  fait  sous  les  inspira- 
tions du  naturaliste  dont  nous  venons  de  parler.  Cependant,  dès  1835, 
nous  avions  présenté  les  caractères  complets  du  genre,  dans  la  nouvelle 
édition  des  j4mma«oc  sans  vertèbres  de  Lamarck.  D’autres  zoologistes,  tant 
en  Angleterre  qu’on  Amérique,  ont  adopté  le  genre,  et  M.  Conrad,  entre 
autres,  a ajouté  deux  espèces  a celle  qui  seule  était  connue  dans  quelques 
collections  d'Europe. 

Les  coquilles  du  genre,  dont  nous  nous  occupons,  so  distinguent  nette- 
ment de  celles  des  autres  genres  de  la  même  famille.  Elles  sont  inéqui- 
valves,  inéquiiatérales;  l’inégalité  des  valves  est  plus  considérable  que 
dans  la  plupart  des  autres  genres;  non-seulement  la  valve  droite,  comme 
dans  les  Corbules,  est  plus  profonde  que  l’autre,  mais  encore  elle  la  dé- 
borde dans  presque  toute  sa  circonférence  ; lescrocbeU  sont  petits,  peu 
saillans,  et  viennent  descendre  très  obliquement  vers  l’extrémité  posté- 
rieure, où  ils  surmontent  une  sorte  de  corselet  dans  la  largeur  duquel  les 
bords  sont  flexiKMix  comme  ceux  des  Tellinos;  les  crochets  offrent  de  plus 
ce  caractère  remarquable  d’être  fendus  dans  toute  l’épaisseur  du  test , ca- 
ractère que  nous  retrouverons,  d’une  manière  plus  évidente,  dans  le  genre 


2 1 8 SEPTIÈME  FAMILLE. 

suivant,  celui  des  Analines.Les  bords  des  valves  sont  simples;  à Tintérieur, 
les  valves  sont  subnacrées;  la  charnière  est  fort  singulière,  un  cuilleron 
épais  et  étroit , prend  son  point  d’appui  sur  une  côte  assez  épaisse  que  Ton 
voit  en  dedans  à la  partie  supérieure  du  bord  postérieur;  le  cuilleron  se 
projette  en  dedans,  d’arrière  en  avant,  en  laissant  entre  lui  et  le  bord 
dorsal , une  échancrure  étroite  et  profonde  ; c’est  dans  cette  échancrure 
que  se  place  un  osselet  mobile,  triangulaire,  subéquilatéral,  dont  les 
angles  sont  mousses  et  arrondis  ; les  deux  surfaces  planes  sont  en  contact, 
l’une  avec  le  bord  supérieur  des  cuillerous,  l’autre  avec  le  bord  supérieur 
ou  dorsal  des  valves;  le  contact  de  ses  parties  avec  l’osselet  laisse  sur 
lui  de  petites  empreintes  dont  la  plus  large  résulte  de  l’insertion  d’une 
petite  portion  du  ligament  ; cet  osselet  servant  à-la-fois  à compléter  le 
cuilleron  et  de  dent  cardinale  : le  ligament  est  complètement  intérieur. 

L’impression  musculaire  antérieure  est  longue  et  très  étroite,  elle  occupe 
le  tiers  antérieurdu  bord  supérieur,  elle  se  prolonge  en  arrière  en  une  ligne 
creuse  qui  se  dirige  vers  la  cavité  des  crochets,  mais  s’arrête  avant  d’y 
pénétrer.  L’impression  musculaire  postérieure  est  petite,  elle  est  subcircu- 
laire ou  plutôt  semilunaire  ; on  la  trouve  non  loin  de  la  charnière , près  du 
bord.  L’impression  pallcale  est  très  nettement  marquée,  elle  se  montre 
non  loin  des  bords  des  valves,  dont  elle  suit  exactement  les  contours; 
sur  la  valve  gauche  qui  est  la  plus  petite , cette  impression , ainsi  que  celle 
des  muscles,  est  presque  sur  le  bord  lui-même;  parvenue  à l’extrémité 
postérieure  et  inférieure  des  valves,  cette  impression  s’infléchit  en  de- 
dans et  présente  une  sinuosité  courte  et  triangulaire.  Si  l’on  examine  la 
cavité  des  crochets,  on  y trouve  une  petite  cicatrice  linéaire  correspondante 
à la  fente  apiciale. 

Les  Périplomes  sont  des  coquilles  généralement  plus  épaisses  que  celles 
des  autres  genres  de  la  famille  des  Ostéodesmes;  néanmoins,  ils  ne  peu- 
vent être  éloignés  des  Anatines  avec  lesquelles  ils  ont  les  plus  grands 
rapports  ; cela  ressortira  avec  évidence , si  l’on  compare  les  caractères 
principaux  des  genres  pour  en  montrer  les  ressemblances  et  en  signaler  les 
diflérences.  Dans  les  genres  qui  précèdent  Lyonsie  et  Ostéodesme  , le 
cuilleron  est  appliqué  le  long  dp  bord  postérieur  et  le  ligament  recou- 
vert par  un  osselet  cardinal  plat;  dans  les  Anatines,  le  cuilleron  se  déta- 
che, se  porte  en  avant  et  entraîné  avec  lui  l’osselet  qui  occupe  le  côté 
antérieur  des  caillerons.  Ici,  les  caillerons  se  détachent  aussi,  mais  la 
brièveté  du  côté  postérieur  et  la  manière  dont  il  tombe,  a déterminé  la 
position  spéciale  du  cuilleron  laissant  une  échancrure  entre  lui  et  le  bord 
supérieur,  dans  laquelle  se  loge  comme  un  coin  l’osselet  de  la  charnière.  Les 
Périplomes  n’ont  pas  la  coquille  aussi  bâillante  que  les  Anatines;  les  valves 


LKS  OSTÉODESMES. 


ai9 

sont  moins  écartées  que  celles  des  Lyonsies,  elles  laissent  voir  seulement  un 
faible  écartement  à leur  extrémité  postérieure.  Dans  les  trois  genres  que 
nous  comparons,  le  test  est  nacré,  l’épiderme  très  fin  et  la  surface  souvent 
couverte  de  très  fines  granulations,  tantôt  éparses,  tantôt  en  lignes  longi- 
tudinales ; les  impressions  musculaires  et  du  manteau  ont,  dans  ces  genres, 
la  plus  grande  analogie.  De  toutes  ces  ressemblances,  on  peut  conclure  que 
le  genre  Périplome  est  réellement  voisin  des  Anatines  : il  doit  faire  partie 
de  la  famille  où  nous  le  plaçons. 

Nous  ne  connaissons  aucune  espèce  fossile  que  Ton  puisse  rapporter  aux 
Périplomes,  car  nous  ne  partageons  pas  l’opinion  de  M.  d’Orbigny  qui , 
dans  sa  Paléoniologie  française^  admet,  dans  ce  gènre,  quelques  espèces 
connues  seulement  à l’état  de  moule  et  provenant  du  terrain  crétacé  et  des 
terrains  jurassiques,  parce  qu’elles  n’offrent  pas  les  principaux  caractères 
du  genre  ; on  effet  les  Périplomes  vivans  ont  les  valves  très  inégales  ; dans 
les  espèces  fossiles  en  question,  les  valves  sont  sensiblement  égales,  comme 
dans  les  Anatines;  dans  le  Périplome,  le  côté  postérieur  est  plus  court  que 
dans  les  fossiles.  Par  la  cavité  que  laissent  les  cuillerons , dans  les  moüles 
fossiles,  on  voit  qu’elle  n’a  pas  contenu  d’osselet;  on  ne  trouve  aucune  trace 
de  cette  partie  importante  : il  est  vrai  que  du  côté  postérieur  au-dessous  du 
crocliet  les  moules  fossiles  présentent  deux  impressions  obliques,  symétri- 
ques, qui  résultent  certainement  d’une  côte  oblique  et  postérieure  qui,  dans 
la  coquille  entière,  servait  d’appui  aux  cuillerons;  mais  ce  caractère  nesuffit 
pas  pour  faire  entrer  ces  coquilles  dans  les  Périplomes , car  il  se  retrouve 
identiquement  semblable  dans  le  genre  Cochlodesmade  M.  Couthouy.  C’est 
à ce  genre  que  nous  rapporterions  de  préférence  la  plupart  des  espèces  de 
Périplomes  fossiles  de  M.  d’Orbigny.  Ainsi,  le  genre  Périplome  se  réduit 
en  réalité  à un  petit  nombre  d’espèces  AÛvantes  des  mers  chaudes  de 
l’Amérique. 

Périplome  inéquivalve.  Periploma  inœquimhis.  Sow- 
Pl.  9.  fig.  7.  8. 

P.  tepâ  ovalo-quadratà,  alhây  iransversim  irregnlarlter  striata  * posticè 
anguiatàf  brev'tssimè  subrostratâ^  'valvâ  dextrâ  profimdâ^  majorîy 
sinhtrâ  suhplamdatà  ; umbonîbus  minlmis  inœqualibiis  sithemarginaiis  ; 
dente  cachleari  angusto^  preedito  ossiculo  trigono,  pJanulato, 

Corbula,  Encyci.  pl.  23o.  f.  6 a.  b. 

Anatina  trapezoides.  Lamk.  Anim.  s.  vert.  t.  5.  p.  46.',.  n°  6. 

Periploma  inœquivahis,  Sclitim.  Essai  d'unnouv.  syst,  de  Conch,  p,  ii5. 
pl.  5.  f.  1.  a,  b. 


220 


SEPTIÈME  FAMILLE. 


Osteodesma  trapezoidahs,  de  I5lainv*  Malac,  nouv.  ad,  el  corr,  p.  66o« 
pl.  75.  f.  «. 

Periploma  trnpezoides-  Dcslt.  Ei»py. mélh.  vers.  t.  3.  p.  733. 

/i/.  Desh.  Lnmk.  An.  s.  verl.  2*"  cd.  t,  6,  p.  79  el  8f. 

Periploma  inœquUalvh.  Sow.  Conch.  nian.  f.  72. 

Osteodesma  trapeZOLdes,Cst\\o\\\Ç,Qx\ûi,  nom.  p.  8.  ti"  8. 

Periploma  trapezoides,}\tsïi\ty . Dcsc.  cat,  p,  21. 

Wood.  Ind.  lest,  suppl.  pl.  lu.  f.  3?.. 

Habile  les  mers  du  llrésil. 

Coquille  ovale  subtrapézoïde,  très  inéquilatérale,  le  côté  postérieur  tron- 
qué presque  perpendiculairement,  très  court,  dépassant  à peine  la  sailie 
des  crochets  et  limité  par  un  angle  obtus  plus  apparent  sur  la  valve 
droite.  Les  crochets  sont  petits,  rapprochés,  à peine  saillans,  inégaux,  il 
présentent  une  petite  fente  dont  on  retrouve  la  cicatricule  dans  la  cavité 
des  crochets  ; le  côté  supérieur  est  le  plus  long,  il  est  à peine  courbéj 
l’antérieur  est  obtus  et  arrondi  ; l’inférieur  est  presque  parallèle  au  supé- 
rieur; la  surface  extérieure  des  valves  est  couverte  de  stries  obsolètes  irré- 
gulières, résultant  des  accroissemens  ; à l’aide  de  la  loupe,  on  distingue 
aussi  sur  cette  surface  les  granulations  irrégulièrement  éparses , mais 
nombreuses  et  quelquefois  confluentes.  A l’intérieur,  la  coquille  est  subna- 
crée; le  bord  interne  postérieur,  épaissi  par  une  côte  courte  qui  lui  est  pa- 
rallèle, donne  insertion  à uncuilleron  étroit,  épais,  détaché  du  bord supé- 
rieur par  un  angle  profond  dans  lequel  se  place  Tosselel  cardinal  à la 
manière  d’un  coin.  Cet  osselet  est  triangulaire,  il  complète  le  cuilleron  en 
donnant  insertion  à une  partie  du  ligament,  et  il  sert  en  même  temps  de 
dent  cardinale,  chacune  de  ses  moitiés  appartenant  à chaque  valve,  l’im- 
pression palléale  est  très  rapprochée  des  bords,  surtout  dans  la  valve 
gauche;  elle  offre,  du  côté  postérieur,  une  inflexion  triangulaire  oblique 
et  non  sinueuse,  comme  la  représente  M.  Sowerby  dans  son  Conchoîogical 
Marnai.  Cette  coquille  est  assez  épaisse,  solide,  différente  en  cela  de 
celles  des  genres  avoisinans  : elle  a 23  millim.  de  long  et  28  de  large. 

GENRE  VINGT -TROISIÈME. 

ANATIBIEj',  Anatina^  Lamk. 

Pl.  8.  Og..  20  à 23. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  ovale , transverse,  en ve- 


LE^  Of^tÉODESMES. 


22t 


loppé  cVun  manteau  mince  dont  les  lobes  sont  soudés  dans  toute 
leur  circonférence,  si  ce  n’est  en  avant  et  en  bas,  où  l’on  voit  une 
très  petite  fente  pour  le  passage  d’un  pied  petit  et  conique;  bou- 
che petite,  transverse,  accompagnée  de  chaque  côté  d’une  paire 
de  grandes  palpes  étroites  et  striées  en  dedans;  une  paire  de  grands 
feuillets  branchiaux  de  chaque  côté  du  corps,  ils  sont  presque 
égaux,  se  réunissent  au-dessous  de  l’abdomen  pour  se  prolonger 
dans  le  siphon  branchial;  deux  siphons  assez  allongés,  réunis  et 
soudés  dans  toute  leur  longueur. 

Coquille  transverse,  subéquivalve , bâillante  de  chaque  côté, 
mince,  fragile,  nacrée;  crochets  fendus,  fente  close  par  une  mem- 
brane ; un  cuilleron  perpendiculaire  dans  chaque  valve,  soutenu 
par  une  lame  en  arc-boutant.  Un  osselet  tricuspide,  caduc, 
placé  à la  partié  antérieure  des  cuillerons,  dans  la  plupart  des 
espèces.  Ligament  interne  dans  les  cuillerons  et  sur  l’osselet 
lorsqu’il  existe, 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Megcrlc , Schuina- 
cher. — Solefiy  Linné,  Gmelin,  Chemnitz  et  Bruguières.  — Mya^ 
Spengler.  — Platrmya^  Cercomjay  Agassizl 

En  créant  le  genre  Anatine,  Lamarck  lui  doqna  pour  type  une  coquille 
connue  depuis  long-temps,  et  que  Linué,  dès  la  1 0''  édition  du  Systema  na^ 
turcBy  avait  inscrite  sous  le  nom  de  Solen  Aîiatmim.  Avant  Linné,  llum- 
phiuSjPetiver,  Gualtieri  eu  avaient  publié  des  figures  plus  ou  moins  fidèles, 
mais  ils  la  confondaient  avec  des  coquilles  d'autres  genres,  dans  la  classe 
des  Tcstacés  bivalves.  Gualtieri  cependant  la  comprenait  dans  un  genre 
à part  avec  quelques  Solensâ  charnière,  médiane  sous  le  nom  de  Concha 
soleniformis.  C'est  là  probablement  où  il  faut  diercher  l’origine  de  l’opi- 
nion de  Linné,  qui  mit  la  coquille  qui  nous  occupe  dans  son  genre  Solen; 
cette  classification  conservée  parLinné  dans  tous  ses  ouvrages,  fut  adop- 
tée presque  sans  exception  par  tous  les  conchyliologues.  Spengler  cepen- 
dant, dès  1793,  proposa  une  opinion  meilleure  dans  un  mémoire  qui  fait 
partie  du  3®  volume  de  ceux  de  la  Société  d’histoire  naturelle  de  Copen-. 


1X21 


SEPTIÈME  FAMILLE 

hague.  Cet  éminent  naturaliste  reconnaît  au  Solen  ^na;mws  la  plupart  des 
caractères  des  Myes  et  l’entraîne  dans  ce  genre  ; nous  verrons  bientôt 
combien  était  judicieuse  celte  manière  d’apprécier  les  rapports  de  cette 
espèce.  Néanmoins  personne  ne  se  rangea  à l’opinion  de  Spengler,  Bru- 
guières et  tous  les  conehyiiologues  de  rAUemagne  et  de  l’Angleterre  don- 
nèrent la  préférence  à celle  de  Linné.  Lamarck,  .dans  ses  premiers  essais 
de  classiBcation  des  coquilles,  ne  çonnut  pas  la  valeur  des  caractères  géné- 
riques du  Solen  Anatinus.  Ce  fut  en  1809  seulement,  dans  la  Philosophie 
zoologique-j  qu’il  proposa  le  genre  Anatine  et  l’introduisit  dans  la  famille 
des  Myaires , avec  les  genres  Mye  et  Panopée. 

Lamarck,  comme  Spengler,  fondait  son  opinion  sur  les  rapports  évidens 
qui  existent  entre  les  Analines  et  les  Myes  ; les  autres  zoologistes  se  ran- 
gèrent à l’opinion  de  Lamarck  tout  en  la  modifiant;  car  Cuvier,  tout  en 
agrandissant  le  genre  Mye , tout  eu  réduisant  les  Anatines  en  un  sous- 
genre,  mit  néanmoins  ce  sous-genre  dans  le  voisinage  des  Myes  et  des 
Lutraires,  ce  qui.  fut  ensuite  adopté  par  Férussac,  et  un  peu  plus  tard  par 
M.  de  Blainville. 

Le  genre  de  Lamarck  était  créé  depuis  plusieurs  années  lorsque  M,  Me- 
gerle,  dans  h ^fagasîndeBeTÎinJ  1811,  le  proposa  de  nouveausous  le  nom 
d'Auriscalpiumj  adopté  en  1817  par  M.  Schumacher,  mais  actuellement 
rejeté  de  la  nomenclature,  la  dénomination  de  Lamarck  devant  prévaloir 
par  droit  de  priorité. 

Lorsque  Lamarck  publia  en  1 81 8 le  cinquième  Volume  de  ses  Animaux 
sans  verièbreSj  on  trouva  réunies  dans  le  genre  Anatine  dix  espèces  dont 
les  caractères  s’accordaient  assez  exactement  avec  ceux  du  genre.  Néan- 
moins lorsqu’on  examinant  les  Anatines  de  la  collection  de  Lamarck,  nous 
avons  découvert  cet  osseletsingulier  attaché  auxcuillerons  de  la  charnière, 
nous  cherchâmes  avec  assiduité  à nous  éclairer  sur  la  valeur  de  ce  carac- 
tère, qui  jusqu’alors  avait  échappé  aux  observateurs.  Conduit  par  une 
série  de  faits  nouveaux  et  intéressons,  nous  avons  cru  utile  de  réformer 
le  genre  Anatine  et  de  le  réduire  aux  trois  premières  espèces  de  Lamarck. 
La  quatrième  en  effetqui  nous  parut  être  une  Corbule,  appartient  au  genre 
Neœra  deM.  Gray  ; la  cinquième  est  une  Mye  comme  nous  l’avons  vu  ; la 
sixième  est  le  type  du  genre  Périplome  de  Scliuniachor  ; la  neuvième  ren- 
tre dans  le  genre  Thracie  de  Leach,  et  la  dixième  que  nous  avons  rappor- 
tée aux  Corbules  perforantes,  en  conservant  cependant  quelques  doutes, 
n’ayant  pas  eu  occasion  d’examiner  cette  coquille  avec  tout  le  soin  désira- 
ble ; quant  aux  espèces  sept  et  huit,  nous  ne  les. connaissons  pas  et  nous 
regrettons  de  ne  pas  en  trouver  les  figures  dans  le  bel  et  utile  ouvrage  de 
M.  Delessert. 


LKS  OSTÉODESMES. 


233 


La  réforme  dont  nous  venons  de  parler,  proposée  pour  la  première  fois 
dans  l’Encyclopédie,  reproduite  dans  la  nouvelle  édition  des  Animaux  sans 
vertèbres  de  Lamarck,  a été  accueillie  par  le  plus  grand  nombre  des  con- 
chyliologues  ; cependant  M.  Reeve,  en  Angleterre,  accepte  bien  le  genre 
Thracie  de  Leach,  démembré  des  Anatines  de  Lamarck;  mais  il  laisse 
dans  ce  dernier  groupe  les  Lyonsies  et  les  Périplomes;  nous  persistons 
néanmoins  à réduire  le  genre  Ânatine  comme  nous  venons  de  l’indiquer, 
tout  en  lui  apportant  quelques  modifications  devenues  nécessaires  par 
suite  des  progrès  de  la  science. 

Après  avoir  constaté  l’existence  d’un  osselet  cardinal  dans  ÏÀ7iaUna 
truncaia  de  Lamarck,  nous  avons  cru,  nous  fondant  sur  les  lois  de  l’ana- 
logie, que  cette  pièce  existait  aussi  dans  les  autres  e6i>èee3,  et  que  si  on  ne 
la  rencontrait  pas  dans  les  individus  répandus  dans  les  collections,  cela 
dépendait  de  la  manière  dont  ils  avaient  été  recueillis  et  conservés;  nous 
n’avions  ou  entre  les  mains  VAnatina  truncaia  de  la  collection  de  Lamarck 
que  quelques  instans;  les  valves  étaient  fermées  et  retenues  parun  ligament 
intact,  nous  n’avons  pu,  lors  de  nos  premières  observations,  apprécier  les 
modifications  qui  résultent  pour  les  cuillerons  de  la  présence  de  l’osselet 
cardinal,  mais  lorsque  plus  tard  les  coquilles  du  genre  Anatine  devinrent 
plus  communes  dans  les  collections,  nous  reconnûmes  bientôt  à des  signes 
certains  que  l’osselet  cardinal  ne  devait  pas  exister  dans  quelques  espè- 
ces, nous  nous  aperçûmes  aussi  que  la  fente  des  crochets  n’était  pas  due  à 
la  présence  de  l’osselet,  puisque  celte  fente  se  montre  dans  les  espèces  où 
l’osselet  manque  ; enfin  en  détachant  Fosselet,  nous  avons  vu  que  ses  bran- 
ches ascendantes  venaient  s’appuyer  sur  une  petite  lame  dédoublée  de'  la 
base  des  cuillerons  : il  est  résulté  pour  nous  de  ces  observations  quelques 
modifications  dans  les  caractères  du  genre.  Tels  que  nous  les  donnons  ac- 
tuellement, ces  caractères  peuvent  faire  entrer  dans  le  genre  Anatine,  et 
poury  constituer  un  petit  groupe  assez  distinct,  les  coquilles  pour  lesquelles 
M,  Coulhouy  en  Amérique  a établi  le  genre  Cochlodesma.  L’examen  minu- 
tieux des  caractères  de  ces  coquilles  nous  conduira  à la  conclusion  que  nous 
avons  d’abord  posée. 

Les  Anatines  sont  à-peu-près  équilatérales  ; le  côté  postérieur  un  peu 
plus  courtque  rantérieur;  il  en  est  de  même  dans  les  Cochiodesmes  ; les 
crochets  sont  naturellement  fendus  dans  l’un  et  l’autre  genre;  cette  fente 
apiciale  est  moins  apparente  et  moins  longue  dans  les  Cochiodesmes.  Dans 
ce  dernier  groupe,  les  cuillerons  ne  portent  pas  d’osselet  cardinal  comme 
cela  a lieu  dans  plusieurs  Anatines.  Dans  les  deux  sortes  de  coquilles  que 
nous  examinons, le  cuilleron  estappuyé  sur  une  partie  plus  épaisse dubord 
postérieur;  dans  les  Cochiodesmes,  cet  épaississement  est  plus  considéra- 


SEPTIÈME  famille. 


a 24 

ble  que  dans  les  Anatines  proprement  dites.  On  saitqu’indépendaminent 
de  cet  épaississement  du  bord  qui  donne  attache  au  cuilleron , cette  partie 
est  encore  soutenue  dans  les  Anatines  par  un  are-boulant  mince  et  obli- 
que. Cet  arc-boutant  est  l’un  des  caractères  essentiels  des  Anatines;  il  se 
retrouve  aussi,  mais  modifié  et  amoindri  dans  les  Cochlodesnies;  en  effet, 
en  cherchant  dans  la  cavité  des  crochets,  on  y remarque  une  petite  crête 
saillante  suivant  Tépaississement  du  bord  postérieur  et  venant  aboutinau- 
dessous  du  cuilleron.  Kous  retrouvons  donc  dans  les  Cochlodesmes  tous  les 
caractères  essentiels  des  Anatines;  cependant  quelques  différences  sub- 
sistent entre  les  deux  groupes;  elles  se  montrent  particulièrement  dans 
les  formes  extérieures.  Ainsi  les  Anatines  sont  des  coquilles  bombées,  ven- 
trues, dont  le  test  est  très  mince  ; les  Cochlodesmes  sont  plus  aplaties,  à 
eçoehets  petits,  et  leur  test  nacré  en  dedans  est  plus  épais  proportionnelle- 
ment. Les  Anatines,  pour  le  plus  grand  nombre,  sont  largementbai^Iantes  du 
côté  postérieur;  il  en  est  quelques-unes  cependant,  et  entre  autres  celle 
récemmentjdécritfi  et  figurée  par  JI.  Mitre,  dans  le  Maga:iin  de  zoologie^  qui 
ont  déjà  le  côté  postérieur  plus  fermé  et  moins  baillant,  se  rapprochant 
beaucoup  de  celui  des  Cochlodesmes,  qui  par  suite  de  l’aplatissement  des 
valves,  ifont  plus  de  ce  côté  qu’une  fente  d’une  médiocre  largeur.  A cet 
égard,  ces  coquilles  forment  l’extrémité  d’une  série  d’espèces  commençant 
par  les  plus  ouvertes  et  se  terminant  par  celles  qui  le  sont  le  moins.  Nous 
avons  encore  à comparer  quelques  parties  importantes  dans  ces  coquilles 
pour  pouvoir  porter  un  jugement  définitif  et  complètement  motivé  au  sujet 
de  leur  ressemblance  ; l’impression  musculaire  antérieure  des  Anatines  est 
située  au-dessous  du  bord  dorsal,  à l’extrémité  antérieure  des  valves;  elle 
est  assez  étroite,  courbée  dans  sa  longueur,  et  un  peu  subsemilunaire;  elle 
est  placée  de  môme  dans  les  Cochlodesmes,  mais  elle  est  un  peu  plus  ova- 
laire ; l’impression  musculaire  postérieure  est  arrondie  et  placée  près  du 
bord  supérieur  dans  les  coquilles  de  l’un  et  l’autre  groupe;  enfin  l’impres- 
sion palléale,  dont  la  sinuosité  postérieure  est  large  et  remonte  dans  l’axe 
transversc  de  la  coquille,  jusqu’à  une  ligne  qui  descendrait  perpendiculai- 
rement en  arrière  des  cuillerons,  cette  impression,  disons-nous,  est  sem- 
blable dans  les  deux  sortes  de  coquilles. 

L’examen  scrupuleux  et  approfondi  auquel  nous  nous  sommes  livré, 
démontre  que  la  somme  des  ressemblances  l’emporte  de  beaucoup  sur  celle 
des  différences;  il  faut  même  remarquer  que  les  différences  portent  sur 
ceux  des  caractères  qui  ont  la  moindre  importance,  ceux  empruntés  à la 
forme  extérieure,  à l’épaisseur  du  test,  au  bâillement  postérieur  des  val- 
ves, et  enfin  à la  plus  grande  obliquité  de  la  côte  qui  supporte  le  cuilleron. 
11  nous  semble  que  tout  ce  qui  précède  nous  amène  naturellement  à cette 


LES  OSTÉODESMES.  aaS 

conséquence  que  le  genre  Cochlodesme  doit  rentrer  dans  celui  des  Anatines 
où  il  peut  néanmoins  former  un  petit  groupe  d'espèces. 

Jusqu’ici , ceux  des  naturalistes,  qui  se  sont  occupés  du  genre  Anatine , 
ont  manqué  d’un  élément  important  de  discussion  et  de  comparaison,  la 
connaissance  de  l’animal  de  ce  genre  curieux.  Aujourd’hui  cette  lacune 
est  en  grande  partie  comblée  par  les  observations  d’une  personne  instruite, 
M.  Mitre,  qui  a publié  le  résultat  de  ses  recherches  sur  l’animal  d’une 
Anatine,  dans  le  magasin  de  Zoologie  de  -ISii.  Ce  que  nous  allons  dire 
de  cet  animal  est  emprunté  au  mémoire  de  ce  naturaliste. 

L’animal  de  l’Anatine  est  ovale,  transverse,  épais  ; son  manteau  très 
mince  est  bordé  d’une  zone  musculaire,  étroite  qui,  en  s’attachant  à la  co- 
quille, y laisse  l’impression  linéaire  dont  nous  avons  parlé.  Les  lobes  de  ce 
manteau  sont  soudés  entre  eux  dans  la  presque  totalité  de  leur  circonfé- 
rence ; iis  laissent  en  ayant  et  en  bas  une  très  petite  fente  pour  le  passage 
du  pied.  En  arrière,  cet  organe  se  continue  en  une  masse  cylindracée, 
plus  courte  que  la  coquille  , revêtue  d’un  épiderme  plissé,  brunâtre  et 
creusée  à l’intérieur  de  deux  siphons  réunis  jusqu’au  sommet  et  séparés 
entre  eux,  dans  toute  leur  longueur,  par  une  cloison  membraneuse; 
toute  cette  partie  de  l’animal  est  charnue , musculaire , susceptible  de 
s’allonger  et  de  se  contracter  beaucoup.  Cette  contraction  s’exerce  prin- 
cipalement à l’aide  de  deux  muscles  rétracteurs,  on  fibres  rayonnantes, 
faisant  saillie  dans  les  parois  du  manteau,  et  venant  s’insérer  sur  la 
ligne  sinueuse  que  l’on  voit  sur  l’extrémité  postérieure  de  la  coquille. 
Lorsque  le  manteau  a été  ouvert,  on  voit  la  masse  abdominale  surmon- 
tée en  avant  d’un  petit  pied  conique.  De  chaque  côté  du  corps  sont  deux 
grands  feuillets  branchiaux , que  M.  Mitre  compare  à ceux  des  Myes  et 
desTIiracies;  mais  ces  organes  ne  sont  point  semblables  dans  ces  deux 
genres , et  malheureusement  la  description  et  les  figures  do  M.  Mitre 
ne  peuvent  décider,  auquel  les  Anatines  ressemblent  le  plus  quant  aux 
branchies.  On  concevra,  sans  peine,  l’intérêt  que  peut  avoir  l’éclaircis- 
sement de  l’incertitude,  qui  reste  sur  cette  partie  importante  de  l’animal 
de  TAnatine;  en  effet,  les  feuillets  branchiaux  dans  les  Myes  , les  Lu- 
Iraires,  les  Mactres,  etc.,  sont  relevés  le  long  du  corps,  Vmi  contre  Vautre^ 
exactement  comme  les  feuillets  d'un  livre  fermé,  tandis  que  dans  les 
Thracies,  les  Lyonsies , les  Tellines,  etc.,  les  deux  feuillets  sont  Vun 
à câié  de  Vautre  comme  les  feuillets  d’un  livre  ouvert.  Ces  dispositions, 
si  différentes  des  organes  branchiaux , entraînant  avec  clics  des  modifi- 
cations assez  importantes  dans  d’autres  portions  de  l’organisation  ; il  est 
facile  de  comprendre  l’importance  qu’il  y a à éclairer  cette  difficulté , 
surtout  pour  établir  définitivement  les  rapports  du  genre  qui  nous  occupe. 

i5*. 


T.  I. 


226 


SEPTIÈME  FAMILLE» 


Si  les  branchies  sont  comme  celles  des  Myes,  les  Anatines  doivent , sans 
aucun  doute,  faire  partie  de  la  famille  des  Myaires,  selon  l’opinion  de 
M.  Mitre.  Si , au  contraire,  comme  nous  le  croyons , ces  branchies  sont 
comme  celles  des  Lyonsies  et  des  Thracies,  le  genre  Anatine  devra  rester 
dans  les  rapports  que  nous  lui  assignons  dans  notre  famille  des  Ostéo- 
desmes. 

La  bouche  est  une  petite  fente  transverse,  placée,  comme  à l’ordinaire, 
entre  la  masse  abdominale  et  la  surface  inférieure  du  muscle  adducteur 
antérieur  ; elle  est  munie  de  deux  lèvres  qui  se  continuent  de  chaque  côté 
en  une  paire  de  palpes  labiales,  longues  et  étroites,  finement  plissées  en 
leur  face  interne.  D’après  M.  Mitre,  la  bouche  communicpie  à l’estomac  par 
un  oesophage  court  et  étroit  ; l’estomac  est  en  forme  d’une  poche,  il  donne 
naissance  à un  intestin  grêle  et  cylindrique  qui , sans  faire  de  circonvolu- 
tions dans  l’ovaire  et  le  foie,  se  dirige  immédiatement  vers  le  dos  de  l’ani- 
mal pour  gagner  le  muscle  adducteur  postérieur,  se  contourner  sur  lui  et 
pénétrer  dans  le  siphon  anal . 

Pour  tirer  le  meilleur  parti  des  documens  publiés  par  M.  Mitre,  nous  de- 
vons particulièrement  rechercher  si , en  réalité,  les  branchies  des  Anatines, 
ressemblent  plus  à celles  des  Myes  qu’à  celles  des  Tliracies,  nous  trouvons 
cette  phrase  dans  le  mémoire  de  ce  naturaliste  qui,  habitant  Toulon,  a pu 
voir  des  Thracies  vivantes#  et  qui  probablement  pour  les  Myes , a été 
obligé  de  s’en  référer  aux  descriptions  qui  on  ont  été  publiées  depuis  quel- 
ques années.  « Les  Thracies,  du  reste  dit-il , nous  offrent  absolument  la 
« môme  organisation  de  l’appareil  branchial , comme  nous  avons  -dn 
« maintes  fois  l’occasion  de  le  vérifier  nous  mêmes  sur  l’animal  de  la 
« Thracio  corbuloïde,  » Il  n’est  donc  presque  plus  douteux  que  les  bran- 
chies des  Anatines  sont  l’une  à côté  de  l’autre,  comme  celles  des  Thracies 
et  non  l’une  sur  l’autre  comme  celles  des  Myes,  d’où  nous  concluons  que 
malgré  lu  grande  ressemblance  des  Anatines  et  des  Myes,  ces  deux  genres 
n’appartiennent  pas  à la  même  famille  mais  à deux  familles  voisines,  dont 
les  rapports  ne  s’établissent  pas  seulement  en  ligne  directe,  mais  encore 
par  des  lignes  collatérales  avec  la  famille  des  Pandores  ; ainsi , en  effet, 
par  la  longueur  des  siphons  et  par  leur  réunion;  par  la  jonction  des  lobes  du 
manteau  ; la  petitesse  de  l’ouverture  palléale  ; la  forme  et  la  grosseur  du 
pied,  les  Anatines  se  rapprochent  des  Myes.  Par  tout  ce  qui  tient  au  man- 
teau et  au  pied,  par  la  forme  et  la  position  des  branchies,  les  Anatines  se 
rattachent  aux  Lyonsies  et  aux  Thracies  ; tandis  que  les  Lyonsies,  par  la 
brièveté  des  siphons  et  leur  séparation  au  sommet,  se  mettent  en  rap- 
port avec  les  Pandores  et  les  Myadores,  ce  dernier  genre  se  rattachant 
encore  aux  Ostéodesmes^par  l’osselet  de  la  charnière,  rapport  qui  se 


LES  OSTÉODESMES. 


*ia7 

montre  également  à l’égard  des  Nœara  do  la  famille  des  Myaires. 

M.  Agassiz,  nous  devons  le  rappeler,  a proposé  un  assez  grand  nombre 
de  genres  nouveaux,  pour  des  coquilles  fossiles,  provenant  la  plupart 
des  terrains  jurassiques  et  crétacés,  et  qu’il  veut  introduire  dans  la  famille 
des  Myaires î mais,  comme  nous  l’avons  vu,  plusieurs  d’entre  eux  ont 
besoin  d’être  réformés  et  réunis  ; quelques  autres  appartiennent  sans  le 
moindre  doute  au  genre  Anatine , ce  que  nous  tâcherons  de  prouver  en 
examinant  avec  soin  leurs  caractères.  Et  d’aboixi  que  faut-il  rencontrer 
sur  le  moule  solide  d’une  coquille  fossile  pour  acquérir  la  certitude  que 
l’espèce  appartient  au  genre  Anatine  ? Ce  que  nous  avons  exposé  précé- 
demment, rond  facile  la  réponse  à cette  question.  Il  faut  trouver , sur 
les  moules  dont  il  s’agit,  rempreînte  de  la  côte  postérieure,  servant 
d’arc-boutant  au  cuilleron  ; il  faut  do  plus  aporçevoir  des  traces  de  la 
fente  des  crochets.  Ces  traces  se  manifestent  souvent  par  des  cassures  dans 
la  région  des  crochets  ; mais  il  sulïit  quelquefois  d’une  petite  portion  de 
la  fente  conservée,  pour  la  faire  reconnaître,  II  faut  encore  trouver  sous  les 
crochets  la  cavité  que  les  cuillerons  ont  dû  laisser  dans  le  moule , mais  ce 
caractère,  il  faut  l’avouer,  n’est  pas  toujours  facile  à rencontrer  môme  sur 
les  moules  les  mieux  conservés,  parce  que  souvent  la  matière  des  cuil- 
lerons est  restée  en  place  et  s’ost  durcie,  ou  bien  la  cavité  a été  remplie  do 
la  pâte  calcaire  dans  laquelle  la  coquille  a été  enfoncée.  Indépendamment 
de  ces  trois  caractères  principaux,  il  y en  a quelques  autres  de  moins 
importantes  qui  cependant  ne  doivent  pas  être  négligés.  Les  Anatines  sont 
des  coquilles  bâillantes,  peu  du  côté  antérieur,  beaucoup  plus  du  côté  pos- 
térieur, les  moules  doivent  donc  reproduire  ce  caractère  à moins  que  des 
compressions  exercées  sur  eux,  avant  la  consolidation  des  couches,  les 
aient  plus  au  moins  déformés. 

Avec  ces  élémens  de  comparaisons,  voyons  quelles  sont  les  espèces  de 
M.  Agassiz  qui  devront  rentrer  dans  le  genre  Anatine.  Les  Plaiymya 
rostrata  et  diîatata  sont  pour  nous  des  Anatines,  parce  .que  l’on  y observe 
l’impression  de  la  côte  en  arc-boutant,  et  que  l’on  y trouve  la  trace  de  la  fente 
des  crochets  sur  les  individus  bien  conservés.  Toutes  les  espèces  de  Cer- 
comija  do  M.  Agassiz  doivent,  selon  nous,  entrer  dans  le  genre  Anatine; 
toutes  celles  que  nous  avons  vues  en  bon  état,  offraient  tous  les  caractères 
de  ce  genre,  et,  par  analogie,  nous  pouvons  avoir  la  même  opinion  à 
l’égard  de  celles  que  nous  n’avons  pas  examinées,  ou  dont  la  conserva- 
tion était  imparfaite. 

Nous  ne  partageons  pas  l’opinion  de  M.  d’Orbigny  qui,  dans  sa  Paléon- 
tologié  française  y indique,  comme  devant  appartenir  au  genre  Anatine , 
les  Tellina  dubia  et  corôu/^/ormîs  de  Rœmer , le  Sanguinolâria  lata  de 


SEPTIÈME  FAMILLE. 


aa8 

Goldfuss,  ainsi  que  notre  Phoîadomia  soîenoides.  De  ces  espèces,  les  trois 
premières  sont  pour  nous  des  Thracies,  et  la  quatrième  a en  réalité  la 
forme  générale  des  Analines  ; mais  aucuns  des  individus  que  nous  avons 
eus  sous  les  yeux  n’offraient  la  moindre  trace  des  caractères  essentiels  du 
genre,  et  en  conséquence,  nous  avons  placé  cette  coquille  parmi  les  Phola- 
domyes,  parce  qu*elle  nous  a paru  en  avoir  la  charnière  simple  et  sans 
dents. 

Les  Analines  sont  des  coquilles  marines,  qui  vivent  enfoncées  perpen- 
diculairement dans  le  sable  ou  dans  la  vase  à de  faibles  profondeurs  sous 
Teau;  nous  en  comptons  cinq  espèces  vivantes,  qui  toutes  proviennent  des 
mers  chaudes  de  l'Amérique  et  de  l'Inde.  Les  espèces  fossiles  sont  plus 
nombreuses,  mais  ce  ne  serait  pas  sans  courir  le  danger  de  commettre  des 
erreurs  involontaires,  sil’on  admettait,  sans  contrôle,  toutes  cellesquisont 
inscrites  dans  les  catalogues.  On  applaudira  au  doute  qui  s’élève  dans 
notre  esprit,  lorsque  l’on  se  souviendra  de  la  confusion  qui  naguère  ré- 
gnait parmi  les  espèces  d' Analines  ; la  réforme  que  nous  avons  proposée 
dans  ce  genre,  ignorée  de  quelques  personnes,  auxquelles  on  doit  des  listes 
ou  des  catalogues  de  fossiles,  nous  laissent  dans  la  plus  grande  incertitude 
au  sujet  des  espèces  mentionnées  par  elles. 

M.  Sismonda,  dans  son  Synopsis  methodica  animalium  inveriehratorum 
pedemontii  fossiltujn , indique  deux  espèces  d’Anatines  des  terrains  ter- 
tiaires de  l'Astesan  : Tune  d’elles  est  considérée  comme  l’analogue  de 
l’Anatina  rostrata.  Deux  autres  espèces  tertiaires  sont  mentionnées  par 
M.  S.  W.  Wood  dans  son  catalogue  des  coquilles  fossiles  du  crag  d'Angle- 
terre, mais  les  zoologistes  anglais  conservent  encore  parmi  les  Analines 
des  coquilles  qui  sont  étrangères  à ce  genre,  et  rien  ne  peut  nous  douner 
la  certitude  que  les  deux  espèces  en  question  sont  réellement  des  Analines. 
M.  Philippi  à également  rapporte  deux  espèces  tertiaires  des  terrains  de 
la  Sicile  au  genre  Anatine  ; mais  il  nous  est  assez  facile  pour  celles-ci 
d’avoir  une  opinion,  car  l'auteur  en  donne  une  description  et  une  figure; 
l’une  d'elles,  petite  cl  aplatie,  dont  une  seule  valve  a été  observée  par 
l’auteur,  n’est  point  une  Anatine  et  nous  paraît  d'un  genre  encore  incer- 
tain; l’autre  espèce  est  une  Thracio  dont  le  cuilleron  est  un  peu  plus  dé- 
taché et  plus  saillant  que  dans  les  autres  espèces  du  mèine  genre  j elle 
manque  de  l’arc-boutant  des  cuillerons  et  de  la  fente  des  crochets;  elle 
n’est  donc  pas  une  véritable  Anatine. 

M.  d’Orbigny,  dans  sa  Paléontologie  française^  mentionne  huit  espèces 
(l’Anatines  dans  le  terrain  CTétacé.  L’une  d'elles,  Aîialina  Tîof/ana,  est 
propre  à la  craie  chloritée;  les  sept  autres  se  distribuent  dans  le  terrain 
néocomien  ; mais  il  en  est  une,  Anatîna  Agassizi,  qui  se  rencontre  â la 


LES  OSTEODESMES. 


239 

fois  dans  le  terrain  néocomien  de  la  France  et  de  la  Suisse.  Une  espèce  a 
été  également  mentionnée  par  M.  d’Orbigny  dans  les  terrains  crétacés  do 
l’Amérique  méridionale. 

Si  l’on  admet  avec  nous  huit  espèces  de  Cercomya  jurassiques  de 
M.  Agassiz  dans  le  genre  Anatine , si  l’on  y ajoute  le  Sanguînoloria  un- 
dulata  de  Sowerby,  on  aura  neuf  espèces  dans  cette  série  géologique,  au- 
dessous  do  laquelle  le  genre  est  jusqu’ici  démeuré  inconnu,  M.  Agassiz , 
dans  ses  études  critiques,  distribue  les  neuf  espèces  en  question  de  la 
manière  suivante. 

1.  Anatina  striata  dans  le  Kimmeridge  et  le  Portlandien. 

3.  du  Calcaire  de  Portland. . 

4 . du  Coral  rag. 

2.  de  l’Oxford. 

2.  de  rOolite  inférieure. 

L’une  de  ces  deux  dernières  espèces  est  VAnatina  undulata  [sanguino- 
laria  Sow.)  M.  Agassiz  la  rapporte  à Toolile  inférieure  , tandis  que 
M,  Morris,  dans  son  catalogue  des  fossiles  de  l’Angleterre,  la  range  parmi 
les  espèces  de  l’élage  oxfordien;  ceci  prouverait  peut  être  que  l’espèce 
dont  il  s’agit  sc  trouve  à la  fois  dans  l’un  et  l’autre  terrain. 

Il  résulte  de  cet  invéntaire  des  espèces  vivantes  et  fossiles  du  genre 
Anatine  que  l’on  peut  en  admettre  vingt-trois  ou  vingt-quatre  espèces  dans 
les  catalogues. 

f 

Anatine  subrostrée.  Ânatina  subrosirata  (Lamk.). 

PL  8,  fig.  20  à 23. 

A,  testa  ovato-transversây  turgidulà,  membranacea^  margaritaccâ ^ 

tenuhsimè  et  irregulariter  stiatd  , tenttissimè  granulosà;  umhonlhus 
tumidisy  lœvigatis  j latere  antîco  longiore  y rotundato  y /liante;  poslîco 
Lreviore  rostratOy  rostro  hiante  dilatalo^ 

Roslrum  anatis.  Kumpb.  Mus.  Amb.  pî.  45.  f.  O. 

Peliver  Amb.  pl.  17.  f.  ii. 

Solen  anatinus»  Lin,  Syst.  nat.  ed,  10.  p,  673.  3o. 

Id,  Liii.  Mus.  Ulric.  p,  475.  n®  18,  , 

Id.  Liii.  Sys»,  i»at.  ed.  iq.  p.  iii5,  n®  40. 

Id.  Cbemn,  Conch.  Cab.  t.  6,  p.  6a.  pl.  6.  f.  4^  à 48. 

Jd.  Sebroet.  Einl.  t.  a.  p.  63i, 

Id.  Gmel.  p,  3225,  n®  8. 


SEPTIÈME  FAMILLE 


a3o 

id,  Encycl.  métli,  pl.  228.  f,  3. 

Id,  Wood.  Gener,  Conch.  p»  128.  pl.  3o.  f.  2 à 4. 

Id.  Dillw.  Cat,  t.  I.  p.  65.  n°  20. 

Anatina  subrostrata.  Lamk.  An.  s,  vert.  t.  5.  p.  463.  n°  3. 

Savigny.  Ejtp.  d'Égypte.  Cotf,  pl.  7.  f,  8, 

Solen  anatinus.  Wood.  Tnd,  test,  pl.  3.  f,  r3, 

Anatina  subrostrata,  Hauley.  Desc.  cat.  p,  20. 

Mya  anatina,  Oken.Lerhb.  der  Naturg.  t.  i.  p.  223. 

Desh.  dansLamk.  An.  s.  vert.  2®  édit,  t.  6.  p.  78. 11®  3. 

Callow.  Conch.  nomencl,  p.  8. 

An  eadem?  Anatina  hispîduïa,  Cuv.  Règne  an.  2®  édit.  t.  3.  p.  cSy. 

Mitre.  Magas.  de  Zool.  1844.  pl..io2.  io3. 

Fossîlîs,  Anatina  rostrata  Sismonda^Syn,  mcth.  p.  16? 

Habite  les  mers  de  flnde.  Fossile  dans  les  terrains  tertiaires  de  l’Italie? 

Coquille  ovale-oblongue , transverse,  renflée,  surtout  vers  les  crochets; 
elle  est  inéquilatérale,  et  c’est  le  côté  antérieur  qui  est  le  plus  long;  le 
bord  supérieur  ou  dorsal  est  presque  droit,  l’inférieur  ou  le  ventral  est  à 
peine  convexe , et  il  est  presque  parallèle  au  dorsal.  Ces  deux  bords  sont 
réunis  par  un  bord  antérieur  large,  courbé  en  demi-cercle.  Le  côté  posté- 
rieur se  rétrécit  subitement  en  un  bec  court  et  oblique  dont  l’axe,  dirigé 
de  haut  en  bas  et  d’arrière  en  avant,  viendrait  passer  par  le  milieu  du 
bord  ventral,  et  former  ainsi  un  angle  ouvert  avec  Taxe  longitudinal  de  la 
coquille.  Cette  extrémité  n’est  point  tronquée  mais  arrondie;  elle  est  très 
baillante,  dilatée,  les  bords  se  trouvant  renversés  en  dehors  un  peu  à la 
manière  du  pavillon  d’une  trompette,  caractère  exagéré  dans  plusieurs 
figures , et  notamment  dans  celles  de  Chemnilz  e.l  de  TEncycIopédie.  Le 
côté  antérieur  est  baillant  aussi,  mais  il  ne  l’est  pas  de  la  même  manière 
que  le  postérieur.  Les  valves  sont  séparées  par  une  fente  étroite.  La  sur- 
face extérieure  est  couverte  d’un  très  grand  nombre  de  stries  transverses, 
obsolètes,  irrégulières,  résultant  des  accroissemens  ; de  plus,  si  l'on  exa- 
mine cette  surface  à la  loupe,  on  la  trouve,  en  avant  et  on  arrière,  chargée 
d’un  grand  nombre  de  fines  granulations  quelquefois  déprimées  au  centre  5 
ces  granulations  se  multiplient  sur  le  côté  postérieur,  mois  elles  s’arrêtent 
brusquement  à l’origine  du  bec,  de  sorte  que  cette  partie  demeure  en- 
tièrement lisse.  Le  cuilleron  sc  projette  perpendiculairement  dans  l’inté- 
rieur des  valves,  en  formant  un  angle  droit  avec  le  bord  antéro-supérieur; 
il  est  étroit,  profond  et  soutenu  en  dessous  par  une  lame  en  arc-boutant, 
et  du  côté  postérieur  par  un  épaississement  notable  du  bord  dorsal. 

Nous  avons  admis  avec  quelque  doute,  dans  notre  synonymie,  VÂnaiina 


LES  OSTÉODESMES. 


hispiduîa  de  Cuvier.  Co  n’est  peut-être  qu’une  variété  ayant  le  côté  an- 
térieur plus  étroit,  et  le  bord  ventral  plus  convexe.  C’est  également  avec 
doute  que,  sur  l’indication  do  M.  Sismonda , nous  avons  cité  cette  espèce 
à l’état  fossile  ; il  faudrait  s’assurer  do  l’identité  des  individus  fossiles  avec 
les  vivants  par  un  examen  approfondi  de  tous  les  caractères  spécifiques. 

Cette  coquille  est  longue  de  30  millimètres  et  large  de  55. 

GENRE  VINGT- QUATRIÈME, 

THKACIE , Thracia  (Leach), 

PI.  9.  fig.  I à 6. 

CARACTÈRES  gènÈriques.  — Animal  ovale,  manteau  largement 
bordé,  ayant  les  deux  lobes  réunis,  si  ce  n est  dans  le  tiers  an- 
térieur où  existe  une  ouverture  pour  le  passage  du  pied.  Deux 
siphons  courts , désunis , un  peu  en  massue  ; bouche  ovalaire  ; 
palpes  labiales  étroites , foliacées , désunies , le  long  du  bord 
dorsal  et  lamelleuses  en  leur  surface  interne;  branchies  très 
grandes;  une  paire  ventrale,  tombant  dans  la  cavité  du  manteau, 
une  paire  dorsale  remontant  vers  le  dos.  Pied  petit , comprimé, 
lancéolé. 

Coquille  ovale-oblongue,  transverse,  inéquivalve,  la  valve 
droite  étant  plus  profonde  que  Tautre  ; subéquilatérale,  légèrement 
bâillante  à ses  extrémités;  charnière  ayant  un  cuilleron  saillant 
en  dedans,  oblique,  portant  un  double  liganjent,  Tun  interne, 
puissant;  l’autre  externe , beaucoup  plus  petit.  Dans  la  plupart 
des  espèces , un  osselet  demi-annulaire,  attaché  par  le  ligament 
àT extrémité  antérieure  du  cuilleron.  Impression  musculaire  an- 
térieure, grande,  étroite,  se  continuant  le  long  du  bord;  la  pos- 
térieure subcirculaire , toutes  deux  réunies  par  ime  impression 
palléale,  dont  la  sinuosité  postérieure  est  large  et  peu  profonde. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Chaîna^  Petiver. — Te/Z/wa^Pennant, 
PolijDelle  Chiaje,  Roemer,  Goldfuss.  — Mja^  Donovan,  Mon- 


SEPTIÈI'IE  FAMILLE. 


232 

tagu,  Matton  et  Rackett,  Dorset,  Wood,  Dillwyn,  Turton, 
De  Gerville.  — Rupicola,  Fleurian  de  Bellevue?  — Anatina^ 
Lainarck,  Turton,  Cantraine,  Lyell , Scacchi , Philippi , Thorp. 
— Amphidesma , Lamarck,  Fleming.  — Thracia  ^ Leach, 
Deshayes , De  Blainville , Rang , Sowerby , Forbes  , Catlow , 
Hanley,  Scacchi,  Lovën  , Gould,  Swainson,  Reeve,  etc.  — 
Sanguinolaria^  Goldfuss.  — Corimya  [Pars]  y Agassiz. 

OBSERVATIONS.  — La  Synonymie  générique  qui  précède  prouve  d’une 
manière  incontestable  que  la  plupart  des  conchyliologues  n’ont  pas  reconnu 
les  caractères  du  genre  dont  nous  allons  nous  occuper.  Cependant  les 
coquilles  qui  en  dépendent  étaient  bien  connues,  car  Petiver  en  a déjà 
figuré  une  espèce  dans  son  Gazophyllacimiy  publié  en  1764.  Pennant,  dans 
sa  Zoologie  britannique , signala  une  autre  espèce  appartenant  au  même 
genre,  et  il  la  rapporta  au  genre  Tellina  de  Linné.  En  1791,  Poli  en  dé- 
couvrait une  troisième  espèce  dans  les  mers  de  Naples , et  la  faisait  con- 
naître d’une  manière  suflîsanle  dans  son  grand  ouvrage  sur  les  Testaeês 
des  deux  Siciîes,  Au  commencement  de  ce  siècle,  dix  ans  après  Poli, 
Donovan  publiait  sa  Conchyliologie  britannique , dans  laquelle  plusieurs 
espèces  sont  figurées  et  décrites;  toutes  sont  rangées  dans  le  genre  Mya. 
Cette  manière  de  les  placer  était  certainement  préférable , ces  coquilles 
ayant  en  effet  plus  de  rapports  avec  les  Myes  qu’avec  Tes  Tellines.  Aussi 
l’opinion  de  Donovan  fut  acceptée  de  tous  les  zoologistes  anglais,  et  pour 
s’en  convaincre,  il  suffit  de  consulter  les  ouvrages  des  auteurs  que  nous 
avons  signalés  dans  notre  synonymie  générique.  La  plupart  d'entre  eux 
conservèrent  cette  opinion  jusqu’en  1828 , époque  à laquelle  M.  Wood  la 
reproduisit  encore  dans  son  Index  testaceologicus. 

Lîimarck,  qui  avait  réformé  d’une  manière  beiireuse  le  genre  Mya  de 
Linné , ne  pouvait  y introduire  les  coquilles  dont  nous  nous  occupons.  Son 
genre  Anatine,  créé  pour  des c-oquillcs  nouvelles,  presque  toutes  inéqui- 
valves,  portant  un  ligament  intérieur  sur  des  cuillerons  projetés  horizon- 
talement, a pu  recevoir  les  Thracies  avant  que  les  caractères  eussent  été 
réformés  par  de  nouvelles  observations.  I!  est  certain  cependant  qu’il  ne 
se  rendit  pas  un  compte  bien  fidèle  de  la  valeur  des  caractères  de  son 
genre,  puisqu’après  avoir  compris  une  Thracie  parmi  les  Anatines,  il  en 
range  une  autre  dans  son  genre  très  indigeste  des  Amphidesmes.  L’in- 
fluence de  l’opinion  de  Lamarck  se  fit  bientôt  ressentir.  En  Angleterre, 
d’abord,  nous  voyons  M,  Turton  qui,  peu  de  temps  avant,  mettait  les 
Thracies  parmi  les  Myes  les  admettre  toutes,  sans  exception,  dans  le 


LES  OSTÉODESMES. 


a 33 

genre  Anatine.  Il  aurait  pu  arriver  par  là  une  sorte  de  transformation,  si 
M.  Turton  n’avait  compris  à côté  des  Thracies  deux  espèces  qui  ne  leur 
appartiennent  pas. 

A cette  époque,  le  genre  Thracie  était  inconnu  en  Angleterre,  quoi- 
qu’il eût  été  créé  par  un  zoologiste  anglais.  Leach,  son  auteur,  l’avait 
préparé  pour  un  ouvrage  qu’il  n’a  jamais  publié,  la  mort  l’ayant  sans 
doute  empêché.  Mais  Leach  avait  envoyé  à M.  Brongniart  un  exemplaire 
du  Mya  pubescenSj  étiqueté  de  sa  main  sous  le  nom  de  Thracia  pubescens. 
Lorsqu’on  1824  nous  faisions  des  recherches  sur  les  Anatines  de  Lamarck, 
nous  observâmes  la  coquille  de  Leach,  et  nous  y reconnûmes  les  carac- 
tères d’un  bon  genre  ce  qui  nous  le  Gt  adopter.  Communiqué  à M.  de 
Blainville,  au  moment  où  il  préparait  les  travaux  de  son  Traité  de  Malor- 
cologie,  le  savant  zoologiste  l’adopta  à son  tour  et  le  plaça  entre  les 
Anatines  et  les  Myes,  dans  sa  famille  des  Pylcridées.  Nous  avions  égale- 
ment communiqué  à M.  de  Blainville  les  observations,  à la  suite  desquelles 
nous  avons  cru  nécessaire  de  fonder  la  famille  des  Ostéodesmes , mais 
M.  de  Blainville  se  trompa  lorsque , dans  les  corrections  et  additions, 
publiées  avec  le  dernier  fascicule  de  planches,  il  voulut  rectiGer  les 
caractères  du  genre  Thracie,  et  introduire  dans  sa  méthode  notre  genre 
Ostéodesme.  Nous  ferons  remarquer  d’ahord  que  M.  de  Blainville  avait 
admis  r^nct^î’na  Mijalis^  qui  est  une  véritable  Thracie  , comme  type  des 
Anatines  de  Lamarck.  Dans  les  corrections  et  additions,  il  supprime  cette 
espèce  d’entre  les  Anatines,  et  il  l’indique  comme  le  type  de  notre  genre 
Ostéodesme.  Nous  avions  choisi  à notre  genre  des  types  très  différens  : 
l’un,  le  Mya  solemyalis  de  Lamarck,  l’autre,  \e.Mya  Nonoegica.  Le 
genre  Ostéodesme  de  M.  de  Blainville,  inscrit  dans  les  additions  et  cor- 
rections, est  donc  un  double  emploi  des  Thracies , et  les  caractères  qu’il 
donne  de  cet  animal,  doivent  être  rapportés  à ce  dernier  genre.  Nous 
fîmes  cesser  cette  confusion  par  la  publication  de  divers  articles  dans  le 
Dictionnaire  classique  d’histoire  naturelle  et  dans  l'Encyclopédie  métho- 
dique. Depuis  ce  moment,  le  genre  Thracie,  fondé  sur  des  caractères  très 
précis,  fut  adopté  de  tous  les  conchyliologues,  à l’exception  cependant  d’un 
très  petit  nombre,  qui  continuèrent  à en  confondre  les  espèces  parmi  les 
Anatines.  Jusqu’ici  nous  n’avons  cité  aucun  naturaliste  qui  ait  décrit  ou 
Gguré  ranimai.  M.  de  Blainville,  le  premier,  en  donna  les  caractères  prin- 
cipaux dans  son  Traité  de  Malacologie.  Quelques  années  après,  M.  Kiener, 
dans  son  Species  général  des  coquilles  vivanteSj  publia  la  Bgure  de  l’animal 
de  l’espèce  de  Thracie,  que  l’on  trouve  à Toulon  ; et  à peu  près  à la  même 
époque  M.  Delle  Chiajo  , dans  les  planches  encore  sans  texte,  préparées 
pour  la  suite  de  ses  Mémoires  sur  les  Testacées  des  Mers  de  Naples,  donna 


SEPTIEME  FAMILLE. 


234 

la  figure  d’une  autre  espèce  de  la  Méditerranée,  figure  malheureusement 
très  insuffisante,  puisque  l’animal  n’est  même  pas  sorti  de  sa  coquille. 

Le  genre  Thracie  no  se  trouve  pas  seulement  à l’état  vivant  j on  le 
connaît  également  à l’état  fossile,  dans  les  terrains  tertiaires,  comme  dans 
divers  étages  des  terrains  secondaires.  Ceux  des  Paléontologistes  qui  ont 
eu  occasion  de  rencontrer  des  vestiges  de  ce  genre,  en  ont  confondu  les 
espèces,  tantôt  avec  les  Tellines,  ainsi  que  Pont  fait  MM.  Roemer  etGoId- 
fuss  ; tantôt  avec  les  Sanguinolaires,  comme  on  peut  le  constater  d’après 
les  excellentes  figures  de  l’ouvrage  de  M.  Goldfuss.  Enfin,  U.  Agassiz,  dans 
ses  Etudes  critiques  sur  les  Mollusques  fossiles,  en  a confondu  quelques 
espèces  dans  un  genre  auquel  il  a donné  le  nom  de  Co^imya,  Nous  avons 
sous  les  yeux  quelques-unes  des  espèces  de  M.  Agassiz,  et  nous  y retrou- 
vons les  caractères  des  véritables  Thracies.  Ce  qui  aura  induit  en  erreur 
le  savant  observateur , dont  nous  parlons , c’est  qu’il  aura  comparé  le 
moule  en  plâtre  du  Thracia  corbuloïdes  avec  les  Corimya  qui  ne  sont 
plus  connus  que  par  des  moules  naturels,  et  cette  comparaison  ne  lui  aura 
pas  permis  de  reconnaître  l’identité  des  caractères,  par  une  raison,  que 
lui-même  eut  appréciée  avec  la  plus  grande  facilité,  s’il  avait  eu  à sa  dis- 
position le  moule  de  plusieurs  espèces  de  Thracies.  11  aui-ait  alors  reconnu 
dans  ce  genre  un  phénomène  curieux,  par  lequel  on  voit  le  ligament 
passer  de  l’intérieur  à l’extérieur  par  une  suite  de  modifications  dans  la 
série  des  espèces , et  justement  le  Thracia  corbuloïdes  est  de  toutes  les 
espèces  connues , celle  qui  a les  cuillerons  les  moins  saillans , et  dont  le 
ligament  est  devenu  presque  extérieur , tandis  que  les  moules  de  Corimya 
ont  appartenu  à des  espèces  dont  le  cuilleron  était  beaucoup  plus  saillant, 
comme  dans  le  Thracia  decîivis,  par  exemple.  Àussi  la  comparaison  faite 
entre  les  Corimya  et  l’espèce  de  Thracie  que  nous  venons  de  rappeler,  ne 
laisse  aucun  doute  sur  l’identité  des  caractères  génériques,  ce  qui  nous 
a déterminé  depuis  longtemps  à transporter  parmi  les  Thracies  plusieurs 
des  espèces  de  Corimya  de  M.  Agassiz, 

Les  coquilles  du  genre  Thracie  se  reconnaissent  avec  facilité,  elles  sont 
généralement  oblongues , transverses , obtuses  et  arrondies  du  côté  anté- 
rieur, largement  tronquées  du  côté  postérieur;  elles  sont  presque  équila- 
térales, et  toutes,  sans  exception,  sont  inéquivalves.  Mais  l’inégalité  des 
valves  n’est  pas  la  même  cpie  dans  les  Pandores , car  c’est  la  valve  droite 
qui  est  la  plus  grande,  tandis  que  c’est  la  gauche  dans  les  Pandores, 
comme  nous  l’avons  constaté.  Presque  toutes  les  espèces  sont  bombées, 
les  crochets  sont  protubérans  , opposés , très  rapprochés  ; il  arrive 
même  assez  souvent  que  celui  de  la  valve  droite  est  échancré  pour  rece- 
voir cehii  de  la  valve  gauche.  Le  côté  postérieur  est  circonscrit  par  un 


LES  OSTÉODESMES. 


a35 


angle  obtus,  simulant  le  pli  irrégulier  des  Tellines.  La  surface  extérieure 
est  ordinairement  recouverte  d’un  épiderme  brunâtre,  dans  lequel  est  re- 
tenue une  assez  grande  quantité  de  matière  argileuse,  ce  qui  donne  à la 
plupart  des  espèces  do  ce  genre  une  couleur  d’im  gris  terreux.  Celte  sur- 
face extérieure  n’est  point  lisse,  elle  est  toute  chargée  d’un  nombre  con- 
sidérable de  granulations  que  l’on  peut  comparer  à celles  des  Anatines. 
Elles  sont  cependant  beaucoup  moins  serrées  et  plus  irr^lières.  A l’in- 
térieur, les  valves  no  sont  point  nacrées , elles  sont  d’un  blanc  jaunâtre, 
terne,  et  malgré  leur  peu  d’épaisseur , on  peut , à cause  de  cela,  distin- 
guer plus  facilement  que  dans  les  Anatines,  les  impressions  du  muscle  et 
du  manteau.  Les  bords  sont  simples,  minces  et  tranchans;  les  valves 
réunies,  les  bords  ne  se  joignent  pas  exactement  sur  toute  la  circonférence; 
un  petit  bâillement  se  montre  sur  toute  la  longueur  du  bord  antérieur  ; 
un  autre  existe  dans  la  longueur  du  bord  postérieur , et  il  est  destiné  à 
donner  passage  aux  siphons.  La  charnière  est  très  simple,  elle  consiste,  sur 
chaque  valve,  en  un  cuillcron  très  obtus,  peu  saillant,  qui  s’avance  dans 
l’intérieur  des  valves,  et  reçoit  un  ligament  intérieur.  Ce  cuilleron  se  dé- 
tache plus  ou  moins,  selon  les  espèces;  dans  quelques-unes,  il  prend  à 
peu  près  la  forme  de  celui  des  Anatines , et  dans  d’autres,  il  a disparu 
presque  entièrement , et  il  présente  alors  la  forme  do  nymphes , un  peu 
plus  rentrées , qu’elles  ne  le  sont  habituellement.  Entre  ces  deux  points 
extrêmes  peuvent  se  ranger  toutes  les  modifications,  propres  à les  rattacher 
l'imo  à l’autre,  ce  qui  prouve,  comme  nous  le  disions  d’abord,  que  dans 
ce  genre  très  naturel,  on  voit  le  ligament  passer  de  l’intérieur  à rextérieur 
de  la  charnière.  Dans  la  plupart  des  espèces,  une  côte  peu  épaisse  et  ob- 
tuse, après  avoir  servi  d’appui  au  cuilleron,  vient  s’évanouir  vers  la  limite 
do  l’impression  du  muscle  postérieur  des  valves,  et  nous  retrouvons  ce  ca- 
ractère dans  la  plupart  des  espèces  du  genre  Corimya  de  M.  Agassiz,  Indé- 
pendamment de  ce  ligament  interne,  porté  dans  l’intérieur  des  cuillerons, 
il  y a encore  un  petit  ligament  externe  très  solidement  attaché  au  fond 
d’un  petit  sillon,  limitant  en  dehors  le  cuilleron  interne.  Enfin,  dans  plu- 
sieurs espèces , nous  avons  observé,  attaché  à l’extrémité  antérieure  du 
cuilleron,  au  moyen  d’un  appendice  du  ligament,  un  petit  osselet,  courbé 
en  demi-anneau,  et  cylindrique  dans  sa  coupe  transverse.  Dans  les  espèces 
on  question,  la  présence  de  l’osselet  so  révèle  par  une  petite  impression 
spéciale,  qui  se  montre  dans  l’intérieur  des  valves,  et  qui  commence  au 
point  do  contact  do  l’ossolèt  avec  les  valves  elles-mêmes.  Mais  ce  carac- 
tère, ne  se  présentant  pas  dans  les  grandes  espèces  du  genre,  perd  de  sa 
valeur  ; seulement  il  nous  a guidé  pour  classer  les  Thracies  dans  notre 
famille  des  Ostéodesmes.  Les  impressions  musculaires  sont  différentes 


236 


SEPTIÈME  FAMILLE. 


entre  elles;  l’antérieure  est  allongée,  étroite,  obtuse  à son  extrémité  in-^ 
férieure  ; elle  est  pointue  à l’extrémité  opposée,  elle  se  courbe  le  long  du 
bord  antérieur,  dont  elle  se  rapproche,  et  elle  descend  jusque  vers  îe  point, 
où  le  bord  ventral  se  continue  avec  Tantérieur.  Cette  impression  s’étend 
beaucoup  moins  vers  le  dos  que  dans  la  plupart  des  autres  coquilles,  et 
en  cela,  elle  a de  l’analogie  avec  celles  du  plus  grand  nombre  des  genres 
de  la  même  famille.  L’impression  postérieure  se  trouve  tout  près  du  bord 
supérieur,  vers  Textrémité  postérieure  des  valves.  Elle  est  subcirculaire 
ou  un  peu  semi-lunaire  ; elle  se  prolonge  un  peu  en  un  angle  arrondi  à 
son  extrémité  supérieure,  et  ce  prolongement  est  dû  à l’impression  du 
muscle  rétracteur  postérieur  du  pied.  Le  muscle  rétracteur  antérieur  étant 
très  étroit,  forme  la  pointe  de  l’impression  du  muscle  adducteur  antérieur. 
I^e  manteau  laisse  à l’intérieur  des  valves  une  impression  comparable  à 
celle  des  Myes  ou  des  Corbules  ; elle  commence  à l’extrémité  inférieure  du 
muscle  antérieur , se  place  parallèlement  au  bord  ventral , et  parvenue 
vers  l’angle  postérieur,  elle  s’infléchit  en  dedans  en  une  sinuosité  large 
et  peu  profonde,  et  se  termine  vers  le  milieu  de  l’impression,  musculaire 
postérieure.  L’échancrure  palléale  varie  selon  les  espèces;  à peine  creusée 
dans  le  Thracia  puhescens , elle  est  un  peu  plus  profonde  dans  le  Corbu- 
loïdes;  mais  dans  le  Papyracea  elle  s’enfonce  beaucoup  plus  dans  l’inté- 
rieur des  valves  et  s’avance  jusque  près  de  la  hauteur  de  la  charnière. 

Toutes  les  espèces  de  Thracies  n’ont  pas  les  mêmes  mœurs.  Les  unes 
s’enfoncent  dans  le  sable  ou  la  vase,  les  autres  sont  perforantes,  comme 
le  prouve  la  Tkracie  rupicole,  qui  a servi  de  type  au  genre  Rupicole  de 
M.  Fleuriau  de  BeUevue.  Ace  sujet,  nous  rappellerons  que  tout  récem- 
ment un  conchyliologue  fort  distingué , M.  Recluz , dans  une  note  publiée 
dans  le  Magasin  de  Zoologie,  a revendiqué  en  faveur  de  M.  Fleuriau  de 
Bellevue,  la  priorité  de  la  création  du  genre  dont  nous  nous  occupons. 
Malheureusement  M.  Recluz  a découvert  trop  tard  que  le  genre  Rupicole  do 
M.  Fleuriau  a identiquement  les  mêmes  caractères  que  celui  nommé  Thracie 
plus  tard  par  Leach.  M.  Fleuriau  est  le  premier  qui,  en  4 803,  ait  publié  de 
très  bonnes  observations  sur  les  mollusques  lithophages  des  environs  de 
La  Rochelle.  Dans  ce  mémoire,  l’auteur  propose  plusieurs  genres,  et  un 
entre  autres,  qu’il  nomme  Rupicole,  et  dont  les  caractères,  présentés  mal- 
heureusement d’une  manière  incomplèle,  s’accordent  cependant  avec  ceux 
des  Thracies;  mais  il  faut  savoir  d’avance  qu’il  y a identité  entre  ces 
genres  pour  la  reconnaître,  La  coquille  perforante  de  M.  Fleuriau , très 
rare,  à ce  qu’il  paraît,  a été  connue  de  Lamarck,  qui,  d'abord,  adopta  le 
genre  Rupicole,  mais  sans  le.  caractériser , dans  l’extrait  du  cours.  Plus 
tard,  dans  VHisloire  d^s  Animaux  sans  vertèbres , le  genre  Rupicole  dis- 


LES  OSTÉODESMES. 


287 

parut,  et  la  coquille  de  M.  Fleuriau  fut  mentionnée  parmi  les  Anatines, 
Placée  dans  ce  genre,  avec  une  phrase  caractéristique  très  courte , sans 
synonymie,  sans  figure,  il  était  impossible  de  deviner  qu’elle  dût  appar- 
tenir au  genre  Thracie;  aussi  il  fallut  que  M.  Recluz  eut  occasion  d’exa- 
miner cette  coquille  dans  la  collection  de  Lamarck,  pour  savoir  à quel 
genre  elle  appartient.  Mais,  longtemps  avant  M.  Recluz,  nous  avions  res- 
tauré, pour  ainsi  dire,  le  genre  de  Leach , et  dès  1825,  nous  lui  avions 
acquis  une  véritable  priorité.  En  effet,  avant  nous,  les  Rupicoles  aussi 
bien  que  les  Thracies,  étaient  complètement  ignorées.  On  pouvait  consi- 
dérer ces  genres  comme  n’existant  pas , puisque  ni  Tun  ni  l’autre  n’a- 
vaient été  figurés  et  suffisamment  caractérisés.  Ayant  le  premier  retrouvé 
le  genre  de  Leach,  l’ayant  caractérisé  de  manière  à le  rendre  reconnais- 
sable à tous  les  zoologistes,  c’est  celui-là  qui,  dans  notre  opinion,  doit 
rester  dans  la  nomenclature,  quoique,  par  le  fait,  il  soit  d’une  création 
postérieure  à celui  de  M.  Fleuriau  de  Bellevue. 

L’animal,  dans  son  ensemble,  conserve  tous  les  caractères  importans, 
qui  distinguent  les  autres  genres  de  notre  famille  des  Ostéodesmes, 

Le  manteau,  constitué  comme  dans  tous  les  autres  mollusques  acéphalés 
dimyaires,  a une  cavité  plus  profonde  pour  recevoir,  jusque  dans  la  région 
dorsale,  une  portion  très  importante  de  l’organe  respiratoire. 

Deux  siphons  prolongent  en  arrière  la  partie  postérieure  du  manteau. 
Ces  organes  subclaviformes , fort  inégaux,  sont  disjoints  dans  toute  leur 
longueur.  Le  siphon  anal  seul  a son  ouverture  garnie  d’un  petit  nombre 
de  tentacules.  Une  troisième  ouverture  palléale,  mais  simple  et  sans  saillie, 
existe  au-dessous  des  siphons  et  s’ouvre  dans  la  portion  du  manteau,  cor- 
respondant à l’angle  inférieur  et  postérieur  de  la  coquille.  Cette  ouverture 
nous  apparaît  pour  la  première  fois  chez  les  mollusques  acéphalés , et 
comme  caractère  zoologique,  il  s’ajoute  à tous  ceux  qui  font  reconnaître 
le  genre  Thracie. 

Les  deux  lobes  du  manteau,  soudés  dans  presque  toute  la  circonférénce; 
se  détachent  en  avant  et  laissent  une  petite  fente  pour  le  passage  du  pied. 
On  peut  donc  affirmer  que  dans  le  genre  qui  nous  occupe , le  manteau 
est  percé  de  quatre  ouvertures. 

Les  muscles  adducteurs  des  valves  sont  très  écartés;  l’antérieur  est 
ovale-aplati  ; le  postérieur  est  subcirculaire  et  très,  rapproché  du  bord 
dorsal. 

La  masse  viscérale  est  peu  considérable,  en  proportion  de  la  grandeur 
de  la  cavité  de  la  coquille  ; elle  porte  en  avant  un  organe  locomoteur  d’un 
médiocre  volume,  aplati  latéralement  et  en  forme  do  langue  triangulaire. 

Essentiellement  musculaire,  le  pied  est  creusé,  à sa  base,  d’une  cavité 


238 


SEPTIÈME  FAfilILLE. 


à parois  assez  minces,  musculaires  aussi , dans  laquelle  sont  compris  les 
principaux  viscères.  Le  pied  se  meut  au  moyen  de  muscles  rétracteurs  ; 
un  antérieur  assez  épais;  un  postérieur  beaucoup  plus  mince.  Tous  deux 
se  bifurquent  on  deux  faisceaux  égaux  pour  s’attacher  à la  coquille. 

La  bouche  est  en  fente  transverse , située  entre  la  base  du  pied  et  le 
muscle  antérieur.  Les  lèvres  et  les  palpes  dont  elle  est  garnie,  ressemblent 
beaucoup  à celles  des  Lyonsies  et  des  Anatines.  Les  palpes  sont  étroites , 
lancéolées,  et  libres  dans  presque  tout  leur  contour. 

Un  œsophage  assez  long,  étroit,  commence  à la  bouche  et  sô  termine  à 
un  estomac  sphéroïdal,  divisé  en  plusieurs  poches  par  des  crêtes  saillantes 
à l’intérieur. 

Le  tube  intestinal  est  assez  allongé.  Au  sortir  de  l’estomac , il  se  con- 
tourne en  un  grand  nombre  de  circonvohitions,  au  moyen  desquelles  il  se 
porte  d’arrière  en  avant,  pour  se  recourber  en  sautoir  autour  de  Testomac, 
gagner  la  région  dorsale,  traverser  le  péricarde,  et  enfin  aboutir  dans  le 
siphon  anal,  après  s’être  recourbé  sur  la  surface  supérienre  du  muscle 
adducteur  postérieur  des  valves. 

Le  foie,  d’un  volume  assez  considérable,  enveloppe  l’œsophagG , l’esto- 
mac et  une  portion  notable  de  l’intestin.  Dans  son  organisation  intime, 
il  est  semblable  à celui  des  mollusques,  que  nous  avons  déjà  examinés,  et 
il  verse  le  produit  de  sa  sécrétion  dans  l’estomac , au  moyen  de  deux 
cryptes  biliaires. 

Les  ovaires , peu  considérables  dans  les  individus  que  nous  avons  dis- 
séqués , étaient  complètement  vides,  et  nous  ont  offert  un  exemple  de  la 
structure  fibreuse  de  leur  enveloppe,  Les  ovidactes  viennent  s’ouvrir  à une 
fente  étroite , que  l’on  trouve  au-dessous  de  la  bratichie , de  chaque  côté 
de  la  crête  que  forme  en  arrière  le  muscle  rétracteur  postérieur  du  pied. 

Les  organes  de  la  circulation  ne  diffèrent  en  rien  d’essentiel  de  ceux 
des  genres  du  môme  groupe.  Un  ventricule  aortique,  symétrique,  fusi- 
forme, embrasse  l’intestin  et  reçoit,  de  chaque  côté,  une  petite  oreillette 
triangulaire,  aplatie.  Ces  organes  sont  contenus  dans  un  péricarde  d’une 
médiocre  étendue , formé  d’une  duplicature  du  manteau.  L’aorte  anté- 
rieure entre  dans  la  masse  des  viscères  ; une  aorte  postérieure  est  destinée 
à se  distribuer  aux  parties  postérieures  de  l’animal. 

Les  organes  branchiaux  sont  tout  à fait  semblables  à ceux  dos  Lyonsies 
et  des  Anatines  ; ils  sont  constitués  par  quatre  feuillets  ; deux  descendant 
dans  la  cavité  du  manteau  ; les  deux  autres  remontant  dans  la  région 
dorsale.  Tous  deux  nettement  séparés  au  dehors  par  un  sillon  assez  pro- 
fond, qui  suit  la  ligne  d’adhérence  de  ces  organes. 

Un  organe  dépurateur,-d’un  aspect  semblable  à celui  des  Lyonsies, 


LES  OSTÉODESMES. 


289 

occupe  un  espace  assez  étendu,  circonscrit  par  le  péricarde,  le  muscle 
postérieur  des  valves  et  le  muscle  rétracteur  du  pied  ; à parois  épaisses , 
cet  organe,  creusé  de  deux  cavités,  est  également  divisé  par  un  grand 
nombre  de  canaux  irréguliers , au  moyen  desquels  l’étendue  des  surfaces 
de  sécrétion  est  considérablement  augmentée. 

Le  système  nerveux  est  semblable  à celui  des  Lyonsies  et  de  la  plupart 
des  autres  mollusques  acéphales  dimyaires.  Il  est  composé  de  quatre  gan- 
glions communiquant  les  uns  avec  les  autres,  au  moyen  de  nerfs  récur- 
rens.  Le  ganglion  branchial  ou  postérieur  est  le  plus  fort;  on  le  voit  à la 
surface  du  muscle  adducteur  postérieur  des  valves.  Trois  paires  de  nerfs 
en  partent.  La  première  se  distribue  aux  siphons  et  aux  muscles  posté- 
rieurs du  manteau;  la  seconde  est  branchiale;  la  troisième  traverse  la 
masse  viscérale  pour  se  rendre  aux  ganglious  antérieurs.  Ceux-ci,  petits, 
cachés  sous  la  lèvre  supérieure,  donnent  naissance  û une  paire  de  nerfs 
antérieurs,  destinés  au  muscle  adducteur  antérieur  et  au  manteau.  Quel- 
ques petits  nerfs  prennent  naissance  du  môme  ganglion , et  se  rendent 
aux  lèvres  et  aux  palpes.  Enfin,  deux  nerfs  considérables  rentrent  dans  la 
masse  viscérale  et  se  terminent  à un  ganglion  pédieux  d’un  médiocre 
Volume , de  la  circonférence  duquel  s’échappent , en  divergeant , trois 
paires  de  branches  nerveuses,  qui  so  distribuent  aux  organes  de  la  diges- 
tion, de  la  génération , et  aux  muscles  du  pied. 

Quoique  dans  les  Thracies,  les  siphons  soient  complètement  isolés,  on 
doit  néanmoins  rapprocher  ce  genre  des  Ânatines,  chez  lesquelles  les 
siphons  sont  réunis  dans  toute  leur  longueur.  Le  caractère  emprunté 
à la  jonction  et  à la. disjonction  des  siphons,  ne  doit  pas  avoir  ici  une 
valeur  absolue,  et  faire  rejeter  dans  des  familles  différentes  deux  genres 
dont  les  rapports  mutuels  s’établissent,  d’après  l’ensemble  do  leur  orga- 
nisation. 

En  admettant  la  Rupicole  de  M.  Fleuriau  de  Bellevue  au  nombre  des 
Thracies , ce  genre  renfermerait  dix-neuf  espèces  vivantes , appartenant 
aux  mers  d’Europe  pour  le  plus  grand  nombre.  Quelques-unes  passent  de 
rOcéan  dans  la  Méditerranée. 

Quelques  espèces  des  mers  de  l’Amérique  septentrionale  ont  été  signa- 
lées par  les  naturalistes  de  ce  pays  ; enfin  il  en  est  doux  qui  vivent  dans 
les  mers  tropicales,  Tune  au  Sôtjégal,  l’autre  dans  le  golfe  du  Mexique’. 
Dans  l’état  actuel  de  nos  connaissances  , on  peut  dire  que  les  Thracies 
sont  propres  aux  mers  tempérées  de  l’hémisphère  septentrional. 

Les  espèces  fossiles  du  genre  Thracio  sont  assez  nombreuses , elles  se 
distribuent' dans  les  terrains  tertiaires  ainsi  que  dans  les  terrains  secon- 
daires. Les  renseignemens  que  fournissent,  à leur  égard,  les  traités  de 


SEPTIÈME  FAMILLE 


2/(0 

Paléontologie,  tels  que  ceux  de  M.  Pictet  et  de  M.  Geinitz  sont  très  in- 
complets. M.  Geinitz  confond  quelques  espèces  avec  les  Lyonsies,  et  ne 
mentionne  au  genre  Thracie  qu’une  seule  espèce  vivante,  pour  servir 
d’exemple.  M.  Piclet  cite  dans  la  craie  de  TAIIemagne,  les  deux  espèces 
décrites  par  M.  Rœmer,  et  il  ajoute  quelques  espèces  tertiair  es  des  terrains 
de  la  Sicile  et  de  l’Italie,  ainsi  que  du  Crag  d’Angleterre. 

Dans  sa  Paléontologie  françaisej  M.  d’Orbigny  fait  connaître  une  seule 
espèce  de  Tlu-acie  du  terrain  crétacé.  Mais  ce  naturaliste  nous  semble 
avoir  mal  compris  les  caractères  du  geyre  Periploma  de  Schumacher. 

Nous  avons  dit,  en  traitant  de  ce  genre,  que  nous  rapprocherions  les 
Periplomes  de  M.  d’Orbigny  des  Cochlodesmes  de  M.  Coulhouy.  Nous 
avons  eu  depuis  occasion  d’observer  en  nature  l’une  des  espèces  de 
M.  d’Orbigny,  et  nous  la  rangerions  de  préférence  parmi  les  Thracies;  c’est 
le  Periploma  Robinaldina. 

Les  deux  espèces  figurées  par  M.  F.  A.  Rœmer  {Die  Versieinerungen  des 
Norddeutschen  Kreidegebirges^  2®  liv.),  quoique  d’une  manière  peu  satisfai- 
sante, paraissent  cependant  appartenir  au  genre  Thracie.  Sous  le  nom 
de  Tellina  fncer/a,  le  même  M.  Rœmer,  dans  son  ouvrage  sur  le  Terrain 
oolitique^  a fait  connaître  une  véritable  Thracie,  que  nous  avait  montrée 
autrefois  M.  Vol iz,  qui  l’avait  recueillie  aux  environs  de  Porrentruy.  Une 
autre  espèce  Tellina  corbuloides  ^ provenant  du  Coral-rag,  nous  paraît 
aussi  dépendre  du  genre  Thracie.  Il  pourrait  se  faire  que  le  Tellina  ru- 
gosa  fût  aussi  une  Thracie.  Mais  nous  conservons  des  doutes  à son  égard. 

Presque  toutes  les  espèces  du  genre  Corimya,  de  M.  Agassiz,  sont  de 
véritables  Thracies  ; il  est  fâcheux,  en  vérité,  qu’un  naturaliste,  dont  les 
travaux  inspirent  généralement  une  très  grande  confiance,  commette  des 
erreurs  comme  celle-ci,  produise  un  genre  nouveau,  entièrement  inutile, 
et  jette  ainsi  de  l’incertitude  dans  une  science,  qui  ne  peut  être  utile  à la 
Géologie  que  par  la  détermination  rigoureuse  des  genres  et  des  especes. 

M.  Puschjdans  sa  Paléontologie  polonaise,  donne  le  nom  d' Amphidesma 
securiforme  y à une  coquille  qui  n’est  point  de  ce  genre;  elle  se  range 
aussi  parmi  les  Thracies.  Il  en  est  de  même  pour  deux  espèces  figu- 
rées par  Sowerby , dans  le  Minerai  conchologijj  l’une  sous  le  nom  de 
Lulraria  cariniferay  l’autre  sous  celui  de  Mija  depressa.  M.  Goldfuss,  en 
reproduisant  les  deux  espèces  jurassiques  de  M.  Rœmer,  les  conserve,  à 
son  exemple,  parmi  les  TcUines;  une  troisième  espèce' des  Tellines  de 
Goldfuss  pourrailbicn  aussi  appartenir  aux  Thracies,  c’est  le  Tellina  lata; 
la  forme  générale  est  assez  bien  celle  des  Thracies,  cependant  nous  con- 
servons des  doutes  à son  sujet. 

Quant  aux  espèces  des  terrains  tertiaires,  nous  en  connaissons  dans  les 


LES  05TÉ0DESMES. 


trois  étages;  dans  l'étage  supérieur,  nous  avons  signalé,  en  Moréo,  lo 
Tlmicia  pubescens;  cette  espèce  se  montre  aussi  en  Sicile,  mais  là  elle 
est  accompagnée  de  deux  .autres  espèces  qui  vivent  encore  dans  la 
Méditerranée,  Thracia  convexa  et  papijracea,  M.  Sismonda  cite  deux 
de  ces  espèces  dans  les  terrains  subapennins  du  Piémont,  ce  sont 
les  Thraeîa  pubescens  et  paprjracea.  M.  S.  W.  Wood , dans  son  catalo- 
gue des  coquilles  fossiles  du  crag  d'Angleterre,  inscrit  trois  espèces,  et 
il  constate  que  deux  d’entre  elles  vivent  encore  dans  les  mers  de  l'Eu- 
rope , ce  sont  les  Thracia  pubescens  et  conr^^n , celle  dernière  avec  quel- 
que doute  à cause  de  la  mutilation  des  échantillons.  Nous  connaissons 
une  espèce  dans  les  terrains  moyens  des  environs  de  Bordeaux  ; elle  a 
son  analogue  vivant  au  Sénégal;  elle  a été  décrite  par  nous  sous  le  nom 
de  Thracia  plicata;  enfin,  dans  les  sables  moyens  de  Damerie,  nous 
avons  trouvé  autrefois  une  valve  entière  d’un  Thracia^  qu’un  accident 
a détruite  avant  qu’elle  ne  fût  décrite  et  figurée  ; mais  ce  fait  constate  le 
genre  dans  les  terrains  tertiaires  inférieurs;  il  serait  bien  mieux  établi 
encore  , s’il  est  vrai,  comme  le  croit  M.  Morris  [Cat.  des  foss.  de  la 
Grande-Bretagne),  que  le  Lutraria  oblata  de  Sowerby  (A/m.  conch., 
pl,  534 , f.  3)  est  une  véritable  Thracie,  car  cette  espèce  se  trouve  à la 
fois  dans  le  London  -Clay  et  dans  les  argiles  de  Boom , d’après 
M.  Nyst. 

Nous  comptons  actuellement  vingt-six  espèces  fossiles,  parmi  les- 
quelles nous  en  remarquons  quatre  qui,  dans  les  terrains  tertiaires, 
ont  leurs  analogues  vivants,  et  déplus,  dans  ces  derniers  terrains,  quatre 
espèces  qui  n'ont  plus  de  représentants  dans  la  nature  actuelle.  Sur  ces 
quatre  espèces , deux  sont  propres  au  terrain  tertiaire  supérieur  de  la 
Sicile  ; M.  Philippi  les  a fait  connaître  le  premier  ; la  troisième  a été  fi- 
gurée par  MM.  Sedwich  etMurchisson  dans  leur  beau  mémoire  sur  les 
Alpes  autrichiennes;  ils  lui  ont  donné  le  nom  de  Lutraria  cmvexa. 
Comme  il  existait  déjà  un  Thracia  coiivexa,  nous  proposons  pour  cellç-ci 
le  nom  de  Thracia  i/wrc/u'ssonf, -voulant  attacher  le  nom  du  savant  géo- 
logue à cette  espèce  intéressante.  La  quatrième  enfin  provient  des  ar- 
giles de  Londres , du  terrain  tertiaire  inférieur,  ainsi  que  nous  l’avons 
déjà  dit. 

Sept  espèces  sont  distribuées  dans  le  terrain  crétacé;  sur  ce  nombre, 
‘trois  appartiennent  au  terrain  néocomien. 

Toutes  les  autres  espèces,  au  nombre  de  quinze,  se  répartissent 
d’une  manière  assez  égale  dans  les  divers  étages  de  la  grande  série  des 
terrains  jurassiques. 

Trois  espèces  se  trouvent  dans  le  Portland. 

T.  I.  i6* 


9-4 


SEPTIÈME  FAMILLE. 


Une  dans  le  Kimmeridge. 

Quatre  dans  io  jurassique  moyen. 

Trois  dans  roolile  inférieure. 

Deux  passent  de  l’oolitedans  le  lias  supérieur. 

Deux  enfin  sont  propres  au  lias. 

Si,  à la  suite  de  ce  dénombrement  des  Thracies,  nous  en  faisons  le 
total,- nous  trouverons  quarante-cinq  espèces  dans  un  genre  où  l’on 
on  comptait  à peine  quelques-unes,  il  y a peu  d’années.  Yingt-six  espè- 
ces sont  fossiles. 

Nous  pouvons  signaler  à l’atlenlion  des  géologues  les  espèces  sui- 
vantes : 

^ . Thracia  pubescens.  Vivante  dans  les  mers  de  l’Europe. 

Fossile  dans  les  terrains  tertiaires  supérieurs  du  Piémont , de 
la  Sicile,  de  la  Morée,  dans  le  crag  anglais,  ainsique  dans 
les  terrains  récents  de  la  Norwége,  à üdewalla. 

2.  Thracia  convexa.  Vivante  dans  les  mers  de  l’Europe. 

Fossile  dans  le  crag  d’Angleterre. 

3.  Thracia  papyracea  (Phaseolina).  Vivante  dans  les  mers  de  l’Eu- 
rope. 

Fossile  en  Sicile  et  en  Italie. 

A.  Thracia  plicala.  Vivante  au  Sénégal. 

Fossile  dans  les  terrains  tertiaires  moyens  des  environs  de  Bor- 
deaux. 

6.  Thracia  gibbosa  d’Orb,,  propre  à la  craie  du  midi  de  la  France. 

6.  Thracia  PAtlippt,  Rœmer. 

Thracia  elongata. 

Toutes  deux  découvertes  dan^  la  craie  chloritée  de  l’Allemagne. 

7.  Thracia  Nicoleti. 

Espèce  abondante  dans  le  calcaire  jaune  du  terrain  néocomien, 

8.  Thracia  Tellinoides  ^ Desh. 

C’est  le  Corimya  lala  de  M.  Agassiz.  Nous  avons  été  obligé 
de  changer  le  nom  proposé  par  ce  savant , parce  qu’il  y avait 
déjà  dans  Goldfuss  une  coquille  de  ce  nom  parmi  les  Sangui- 
nolaires;  mais  qui  devant  rentrer  dans  le  genre  Thracie  au- 
quel elle  appartient , entraîne  avec  elle  le  nom  de  Thracia  lata  ; 
le  Thracia  iellinoides  est  particulière  au  terrain  Portlandien. 

9.  Thracia  pinguis  [Corimya  pingnis , Agass.)  est  une  espèce  ca- 
ractéristique de  rOxfordien. 

1 0.  Thracia  frearsiam  d’Orb. 


LES  OSTÉODESMES.  2 43 

Cette  espèce  très  intéressante  a été  décrite  par  M.  d’Orbigny 
dans  le  bel  ouvrage  sur  la  Russie,  qui  fait  tant  d’honneur 
à MM.  Murchisson  et  de  Verneuil  ; elle  paraît  assez  commune 
dans  le  terrain  jurassique  des  environs  de  Moscou. 

1 1 . Thracia  Gresslyi , Desh. 

M.  Agassiz  a donné  le  nom  de  Corimya  elongata  à cette 
espèce  en  1845.  En  l’introduisant  parmi  les  Thracies, 
i!  a fallu  changer  son  nom  puisque  M.  Rœmer,  dès  184'!, 
avait  fait  connaître  une  autre  espèce  sous  la  dénomination  de 
Thracia  elongata.  Ce  Thracia  Gresshji  est  très  caractéristique 
de  roolile  inférieure. 

Thracia  aîta. 

Thracia  glabra, 

Thracia  lata. 

Toutes  trois  offrent  cette  particularité  de  passer  de  Toolite  infé 
rieure  dans  les  couches  supérieures  du  lias. 

1 3.  Thracia  Agassizi^  Desh. 

Celle-ci  est  propre  au  lias.  M.  Agassiz  Ta  fait  connaître  sous  le 
nom  de  Corimya  triincata;  mais  en  passant  dans  le  genre 
Thracie,  elle  a dû  prendre  un  autre  nom,  parce  qu’il  existait 
déjà  deux  autres  espèces  sous  ce  nom  de  Truncata.  En  attri- 
buant à celle-ci  le  nom  du  savant  qui  l’a  fait  connaître  le 
premier,  nous  ne  rendons  qu’un  bien  faible  hommage  à son 
mérite. 

N 

Thracie  corbuloïde.  Thracia  convexa.  Desh. 

PI.  9.  fig.l.  2.  3. 

T.  testa  ovato-transversâ  ^ injlatâ,  griseâf  înaequivalvi  ^ iiiasquîlatera  ^ 
posticè  hîsinuatâ;  umbonibus  magnis , dextro  marginato  ^ •valvulis 
hiantibus  utroque  îatere. 


Mya  deelms.  Donovan.  Brit.  shells.  pi.  82* 

Mya  convéxa,  Wood.  Geo*  cooch.  p.  9a.  a**  3.  pl.  18. 

Mja  deelms.  Var.  Dillw,  Cat.  t,  i p.  43.  a?  4. 

Mya  convexa.TofXoa.  Goneb.  dict.  p.  xoo. 

Anatina  convexa,  Xurt.  Coneb.  bril.  p.  44« 

Thracia  corbuloides.  Desb.  Dicl«  class.  d’hist.  aat.  t.  i6.  Atlas*  6^  livr. 

pl.  14.  f.  4. 

Eadetn,  Blainville.  Malac.  p.  565.  pl.  76.  f.  7. 

16* 


SEPTIEME  FAMILLE. 


2 fri 

j}/)'a  co/ivexa.  Wootl.  Ind,  lest.  p.  lo.  n®  3.  pl.  2.  f,  3., 

Tkracia  corbtiloides,  Dûsh.  Encyc.  mélh.  vers.  t.  3.  p,  loSy.  n°  4. 

Kiener.  Spec.  des  coq.  pl.  2.  f,  r. 

Desli.  dans  Lamk,  An.  s.  vert.  2«  cd.  t.  6,  p.  83.  n°  i. 

Philippi,  Ennm.  Moll.  Sic.  t.  2.  p.  t6- 

Amphidesma  convcxnm,  Fleming,  Brit.  anim.  a*  éd.  p,  43i. 

llanley.  Desc.  cat.  p.  aa. 

Id,  in  Woüd.  Ind,  test,  siippl.  pl.  9.  f.  20, 

Callow.  Conch.  nom.  p,  8. 

Sowerhy,  Conch.  man,  f.  98. 

Thracia  corbtiloides.  Scacclii,  Cat.  conch,  regn.  neap.  p.  6. 

Thracia  coHvexa.  Thomp.  Rep.  on  the  fauna  of  Irel.  p.  263. 

Lovèn.  IiiJ.  moll.  scand.  p.  46.  n®  Sao. 

Possilis,  S,  W.  Wood.  Cat.  foss.  crag.  nat.  hisl.  mag.  (décemb,  1840). 
p.  45.  n®  2. 

Philippi.  Enuin.  moll.  Sic.  t.  2.p.  18,  n*  5. 

Habite  Oran , la  Sicile,  Toulon  , les  mers  d’Angleterre,  Fossile  en  Sicile 
* et  en  Augletcrrc, 

Lorsque  nous  avons  décrit  cette  espèce  sous  le  nom  de  Thracia  corbu- 
Içides , nous  n'avons  pas  reconnu  son  identité  avec  le  Mya  convexa  de 
Wood  , qui  habite  sur  les  côtes  de  l’Angleterre  ; depuis,  nous  avons  pu 
comparer  les  figures  d’individus  provenant  des  deux  mers  et,  en  recon- 
naissant qu’ils  appartiennent  à une  même  espèce,  nous  avons  dû  aban- 
donner notre  nom  spécifique  et  adopter  celui  qui  avait  été  proposé  long- 
temps  avant  nous. 

Il  était  assez  difficile  de  rétablir  une  bonne  synonymie  à cette  espèce, 
non  seulement  parce  qu’elle  est  variable  dans  ses  formes,  mais  encore 
parce  que  les  figures  ne  représentent  pas  ceux  des  caractères  qui  sont 
le  plus  distinctifs  et  qui  sont  à l’intérieur  des  valves.  Mentionnée  et  dé- 
crite un  assez  grand  nombre  de  fois,  cette  coquille  se  distingue  assez 
facilement  de  toutes  ses  congénères.  Elle  est  ovalaire,  presque  équila- 
térale, mais  le  côté  postérieur  est  toujours  plus  allongé  que  l’antérieur, 
les  valves  sont  bombées,  ou,  comme  elles  sont  minces , leur  cavité  in- 
térieure est  profonde;  le  côté  antérieur  est  obtus,  presque  demi-circu- 
laire; le  côté  postérieur , plus  étroit,  est  tronque  perpendiculairement  à 
l’axe  transverse;  lorsque- les  valves  sont  rapprochées,  elles  laissent  en 
avant  un  petit  bâillement  étroit,  niais  en  arrière  , il  existe  sur  toute  la 
hauteur  de  la  troncature.  De  ce  côté  postérieur , on  remarque  une  double 
sinuosité  qui  produit , sur  le  bord  des  valves , une  inflexion  irrégulière, 


LES  OSTEODESMES. 


243 

assez  comparable  à celle  des  Tellines  ; les  crochets  sont  grands  et 
protubérants  ; celui  de  la  valve  gauche  est  entier,  tandis  que  celui  de 
la  valve  droite  est  toujours  échancré  pour  recevoir  la  saillie  du  cro- 
chet du  côté  opposé;  la  surface  intérieure  est  blanche,  brillante;  on 
remarque  ,tout  près  du  bord  antérieur,  une  impression  musculaire  assez 
étroite,  descendant  près  du  bord  ventral.  En  arrière,  tout  près  du 
bord  dorsal  et  non  loin  du  postérieur,  on  trouve  l’impression  musculaire 
postérieure;  elle  est  subcirculaire,  un  peu  prolongée  en  avant,  parce 
qu’elle  se  confond  avec  l’impression  du  muscle  rétracleur  du  pied.  L’im- 
pression palléale  part  de  l’extrémité  du  muscle  antérieur,  se  place  au 
bord  ventral  de  la  coquille , et  parvenue  vers  l'extrémité  postérieure , 
elle  s’infléchit  en  dedans  pour  faire  une  sinuosité  large  et  peu  profonde. 
A l’extérieur,  celte  coquille  est  grisâtre,  et  si  on  l’observe  sous  un  faible 
grossissement,  on  s’aperçoit  qu’elle  est  toute  couverte  de  ponctuations 
très  serrées,  qui  la  rendent  rugueuse  sous  les  doigts.  Nous  avons  con- 
staté depuis  longtemps  que  cette  coquille  a son  analogue  fossile  dans  les 
terrains  récents  de  la  Sicile.  Dans  son  premier  volume  sur  les  Mollusques 
de  la  Sicile , M.  Philippi  avait  d’abord  contesté  ce  fait,  mais  plus  tard  , 
il  en  a reconnu  l’exactitude,  lorsque,  huit  années  après , il  publia  le  se- 
cond volume  de  l’ouvrage  que  nous  citons. 


GENRE  VINGT-CINQUIÈME. 

MTOCAME.  Myochama.  (Stulchbury.) 

Pl.  3 bis,  fig.  12.  x3. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  irrégulier,  ayant  les 
lobes  du  manteau  très  inégaux , soudés  dans  Une  grande  partie 
de  leur  circonférence  et  prolongés  en  arrière  en  deux  siphons 
courts,  égaux,  complètement  séparés  dans  toute  leur  longueur. 
Deux  tentacules  très  courts , opposés  sur  le  bord  du  siphon 
branchial , quatre  tentacules  également  très  courts  sur  le  bord 
du  siphon  anal. 

Coquille  adhérente,  irrégulière,  inéqui valve,  subéquüatérale 


SEPTIEME  FAMILLE. 


246 

la  valve  droite  adhérente  par  toute  sa  surface,  aplatie  ou  con- 
vexe , selon  la  forme  des  corps  sur  lesquels  elle  s* appuie  ; valve 
gauche,  grande,  profonde,  en  forme  de  cabochon;  deux  im- 
pressions musculaires,  écartées;  Tantérieure  plus  grande  ova- 
laire, la  postérieure  circulaire;  impression  palléale  terminée 
postérieurement  eu  une  sinuosité  peu  profonde  et  assez  large. 
Charnière  constituée  sur  la  valve  droite  en  une  fente  profonde, 
triangulaire , contenant  le  ligament , à la  surface  interne  duquel 
est  attaché  un  osselet  trigône  ; sur  la  valve  gauche  un  cuilleron 
triangulaire,  renversé  dans  la  cavité  du  crochet  donnant  inser- 
tion au  ligament. 

OBSERVATIONS.  — G’est  avcc  quelques  doutes  que  nous  introduisons 
ce  genre  singulier  dans  la  famille  des  Ostéodesmes  ; nous  y sommes 
entraîné  par  la  présence  d’un  osselet  cardinal , détaché  dans  le  ligament, 
ainsi  que  par  la  sinuosité  postérieure  du  manteau  et  la  présence  de  deux 
siphons,  séparés  dans  toute  leur  longueur.  Tous  les  autres  caractères 
tendraient  à repousser  ce  genre  de  la  famille  où  nous  le  plaçons  provi- 
soirement. 

Le  genre  Myocame  a été  institué  par  M.  Slutchbury,  dans  le  5*  vo- 
lume du  Zoological  Journal.  Ce  naturaliste  en  expose  brièvement  les 
caractères  et  en  donne  une  Bgure  de  grandeur  naturelle,  qui  laisse  à 
désirer  une  connaissance  plus  exacte  de  la  charnière.  Trois  exemplaires 
seulement  d’une  seule  espèce  de  ce  genre  étaient  connus  dans  les  col- 
lections de  l’Angleterro  et  n'en  sont  point  sortis.  Aussi  la  figure  de 
M.  Slutchbury  a été  successivement  reproduite  par  M.  Sowerby  dans 
son  Gênera  of  shells , par  M.  Reeve  dans  son  Conchologia  iconica^  et 
enfin  par  M.  Sowerby  le  jeune  dans  son  Mamwl  de  Conchyliologie.  Ces 
auteurs  répétèrent  avec  non  moins  de  scrupule  les  caractères  du 
genre,  tels  que  leur  auteur  les  publia  pour  la  première  fois  ; de  sorte  que 
contrairement  a ce  qui  a Hou  le  plus  ordinairement  dans  la  science,  les 
publications  successives  dont  nous  venons  de  parler  n’ont  rien  ajouté 
la  connaissance  du  gonro.  Déjà  nous  nous  proposions  de  nous  servir  de 
ces  matériaux  incomplets,  lorsque  M.  Cuniing  nous  communiqua  un 
exemplaire  très  bien  conservé  du  Myochayna  anomioides.  Les  valves  de 
cet  exemplaire  étaient  maintenues  fermées  par  la  contraction  de  l'animal. 
Voulant  en  étudier  les  caractères  intérieurs , mais  dans  la  crainte  de 
briser  les  moindres  parties,  nous  le  fîmes  macérer  dans  de  l'eau , et 


LES  OSTEODESMES. 


2^7 

nous  eûmes  le  plaisir  de  retrouver  des  parties  assez  considérables  de 
l’animal,  qui,  ramollies,  nous  présentèrent  les  caractères  que  nous 
avons  exposés.  Nous  ne  pûmes  découvrir  aucune  trace  des  branchies,  des 
palpes  labiales  et  même  du  pied  ; mais  les  muscles  adducteurs  étaient 
dans  leur  intégrité,  ainsi  que  les  siphons,  les  muscles fétracteurs  de  ces 
organes  et  une  portion  assez  considérable  du  bord  postérieur  du  man- 
teau. Si  le  pied  eût  été  épais  et  fibreux , ainsi  que  cela  a lieu  dans  les 
Venus,  par  exemple , nous  en  aurions  probablement  trouvé  des  restes  ; 
car  il  est  à remarquer  que  ce  sont  principalement  les  parties  fibreuses 
de  l’animal  qui  ont  été  conservées.  D’ailleurs  les  personnes,  qui  reçoivent 
des  mollusques  desséchés  dans  leurs  coquilles,  savent  très  bien,  que  le 
pied  est  une  des  parties  qui  so  conservent  le  mieux. 

Les  siphons  sont  petits,  complètement  séparés;  ils  sont  d’un  beau 
jaune  orangé,  et  quoique  contractés,  ils  ont  à peu  près  le  quart  du  dia- 
mètre antéro-postérieur  de  la  coquille.  Le  siphon  branchial  est  un  peu 
plus  large  que  l’anal,  mais  il  est  de  la  même  longueur  ; il  reste  du  même 
diamètre  dans  toute  sa  longueur;  son  ouverture  est  large,  simple,  sur- 
montée de  deux  tentacules  très  courts , opposés , à base  large.  Le 
siphon  anal  se  termine  en  un  sommet  obtus,  en  une  sorte  de  calotte, 
percée  au  centre  d’une  petite  ouverture,  sur  la  circonférence  de  laquelle 
s'élèvent  quatre  tentacules  très  petits  et  obtus.  Les  lobes  du  manteau  sont 
circonscrits  par  un  muscle  orbiculaire  extrêmement  mince;  ils  so 
réunissent  et  laissent  en  avant  une  fente  courte  et  étroite  pour  le  passage 
d’un  pied,  probablement  réduit  à l’état  rudimentaire. 

A voir  la  coquille , on  la  prendrait  pour  une  petite  Anomie  à valve 
supérieure  très  convexe  ; mais  lorsqu’on  vient  à étudier  cette  coquille , 
on  s’aperçoit  bien  vite  qu’elle  s'éloigne  très  considérablement  des  Ano- 
mies par  tous  ses  caractères.  Elle  est  très  inéquivalve,  subéquiJatérale  ; 
la  valve  droite  est  aplatie  ou  convexe,  ou  concave,  selon  la  forme  du 
corps  sur  lequel  elle  adhère;  elle  s’attache  plus  particulièrement  et  par 
une  prédilection  singulière  à la  surface  des  Trigonies  ou  des  Pétoncles. 
Par  conséquent,  s’appuyant  sur  une  surface  convexe,  cette  valve  est 
concave  en  dehors  et  convexe  en  dedans.  A l’exception  du  bord  cardinal, 
elle  est  adhérente  par  toute  sa  surface;  elle  prend  l’empreinte  dos 
moindres  accidents  de  la  coquille  à laquelle  elle  adhère,  et  ces  accidents 
se  répètent  fidèlement  sur  la  surface  de  la  valve  gauche.  Ce  phénomène 
se  reproduit  dans  les  huîtres  et  plus  particulièrement  chez  les  Anomies. 
La  valve  gauche  est  très  profonde  et  elle  ressemble  a un  petit  cabochon 
dont  le  sommet  rentrerait  vers  le  bord.  Le  crochet  de  cette  valve  est  grand, 
protubérant,  courbé  sur  lui-même,  et  son  sommet  s’incline  vers  Tinté- 


•^48 


SEPTIEME  FAMILLE. 


rieur  de  la  coquille.  Les  bords  des  deux  valves  sont  minces,  tranchants, 
irréguliers,  de  manière  à s’adapter  au  contour  des  corps  étrangers  sur 
lesquels  vit  l'animal.  L’intérieur  des  valves  est  nacré;  on  y remarque 
deux  petites  impressions  musculaires,  inégales  ; l’antérieure  occupe  pres- 
que toute  la  longueur  du  bord  antérieur  ; elle  est  ovale  , tandis  que  la 
postérieure,  plus  petite,  est  circulaire.  Une  impression  pailéale  fort 
courte  se  détache  de  l’impression  musculaire  antérieure,  s’avance  pa- 
rallèlement au  bord  ventral  et  produit  en  arrière  une  petite  sinuosité 
triangulaire , dont  l’extrémité  supérieure  vient  aboutir  au  muscle 
postérieur. 

La  charnière  est  étroite , le  crochet  de  la  valve  droite  est  fortement 
incliné  en  dessous,  et  le  bord  cardinal  est  fendu  dans  toute  sa  hauteur  à 
peu  près  de  la  même  manière  que  dans  le  genre  Sphœnia  de  Turton  ; 
seulement  cette  échancrure  est  plus  profonde,  et  les  bords  en  sont  plus 
épaissis  et  plus  larges.  Le  ligament  est  contenu  dans  cette  fente  et  il 
porte  sur  sa  face  interne  un  petit  osselet  triangulaire , semblable  à un 
coin , remplissant  la  fente  qu’il  a faite.  La  valve  gauche  présente  au 
dessous  du  crochet  une  impression,  comparable  à celle  de  la  même  valve 
des  Myes,  une  surface  triangulaire,  dont  le  pourtour  est  circonscrit  en 
une  sorte  de  petit  cuilleron  , destiné  à recevoir  le  ligament. 

Par  les  observations  que  nous  venons  de  rapporter,  nous  possédons 
quelques  moyens  de  plus,  pour  juger  le  genre  et  déterminer  ses  rapports. 
Dans  tous  les  animaux  que  nous  connaissons  et  dépendants  de  notre 
famille  de  Mésodesmes  , les  lobes  du  manteau  sont  réunis  dans  presque 
toute  leur  circonférence  ; chez  la  plupart  d’entre  eux , les  siphons  sont 
désunis  et  ordinairement  assez  courts.  Le  seul  genre  Anatine,  d’après 
les  faits  rapportés  par  M.  Mitre , a des  siphons  réunis  de  la  même  ma- 
nière quo  les  Myes  et  les  Lutraires  ; par  conséquent  le  petit  nombre  de 
caractères  connus  de  l’animal  du  genre  Myocame  ne  s’oppose  pas  à son 
introduction  dans  la  famille  des  Osléodesmes  ; mais  il  faut  ajouter,  que 
d’autres  caractères  plus  importants  nous  sont  inconnus,  et  qu'il  se  pour- 
rait faire,  qu’ils  fussent  d’une  telle  valeur,  qu'ils  rendissent  nécessairés 
la  c,réalion  d'une  petite  famille  pour  le  seul  genre  Myocame.  Cette  fa- 
mille se  trouverait  egalement  juslifiée  par  cette  singularité  si  remar- 
quable d’un  mollusque  acéphalé  dimyaire,  adhérent,  irrégulier  et  pourvu 
de  deux  siphons.  Nous  verrons  plus  lard  d’autres  genres  appartenant  à 
la  même  classe;  mais  chez  les  uns  , tels  que  les  Cames,  le  manteau  ne 
fait  plus  saillie  en  dehors  de  la  coquille,  il  est  simplement  perforé.  Dans 
un  autre  genre,  celui  des  Elhéries,  on  trouve  aussi  un  animal  dimyaire 
dans  une  coquille  adhérente  et  irrégulière  ; mais  chez  lui  les  deux  lobes 


LES  OSTÉODESMES.  ^49 

du  manteau  sont  désunis  dans  leur  circonférence,  ce  qui  lui  donne  infi- 
niment de  ressemblance  avec  celui  des  ünio  et  des  Anodontes. 

Si  l’on  voulait  suivre  à la  rigueur  les  principes  de  la  classification  qui 
ont  guidé  Lamarck  et  d’autres  conchyliologistes , on  devrait  faire  du 
genre  Myocame  non  seulement  une  famille,  mais  même  un  ordre,  de  ma- 
nière à rendre  symétriques,  en  quelque  sorte,  les  diverses  parties  de  la 
classification  et  introduire  dans  la  longue  série  des  mollusques  acéphalés, 
ayant  les  lobes  du  manteau  réunis , deux  divisions  principales  ; l’une 
contenant  ceux  h siphon;  l’autre  contenant  ceux  à perforation,  et  dans 
l’un  et  l’autre  de  ces  ordres,  on  établirait  deux  sous-ordres  ; l’un  pour 
les  coquilles  régulières , et  l’autre  pour  les  coquilles  irrégulières.  De 
cette  manière  le  genre  Myocame  serait  aux  mollusques  siphonés  ce  que 
les  Cames  sont  pour  les  mollusques  à manteau  perforé.  Mais  avant  de 
décider  cette  question,  il  est  nécessaire  de  poser  bien  nettement  la  limite 
entre  les  doux  ordres  que  nous  venons  de  désigner,  et  il  est  nécessaire 
également  de  connaître  plus  complètement  l'organisation  de  l’animal  du 
genre  dont  nous  venons  de  nous  occuper. 

Pendant  longtemps  on  ne  connut  qu’un  petit  nombre  d’individus 
d’une  seule  espèce  appartenant  au  genre  Myocame.  Des  recherches  qui 
se  sont  faites  dans  les  mers  australes  y ont  fait  découvrir  deux  autres 
espèces;  c’est  à M.  Cnming  que  nous  devons  la  communication  de  ce 
fait  intéressant.  Jusqu’ici  on  ne  connaît  aucune  trace  de  ce  genre  à l’état 
fossile. 

Myocame  anomioïde.  Myochama  anomioides  ^ Stutchbury. 
PL  8 bis.  fig.  12,  13. 

M.  testa  roscâ^  'vcl  poUide  fiavâ^  tenui  frngili ^ costis  prorninentiùus 
radianùbus  àichotornis  ornatâ^  valvâ  'valdh  convexâ;  um- 

bone  extra  apicem  'valvœ  alterœ  prodiicto^  epidermide  tenuiindntâ. 

Slutchbury.  On  Iüw  ucwgener.  Zool.  jourii.  t.  5.  j».  75,  pl.  suppl.  4^» 
f.  I à 4* 

Sowerby,  Gen.  of  sbells.  n*  3a.  f.  i à 4. 

Id.  Coiich.  man,  p.  196.  f.  7?.  74* 

Reeve,  Coueb.  syst.  t.  i.  p.  57.  pl.  Sy, 

Callow.  Coneb.  nomencLp.  la. 

Tout  ce  que  nous  avons  dit  jusqu’ici  du  genre  est  emprunté  à cette 
seule  espèce  connue.  Nous  n’avons  donc  presque  rien  à ajouter  pour 
qu’elle  soit  caractérisée.  La  valve  gauche  très  concave  est  ornée  de  côtes 


25o 


SEPTIÈME  FAMILLE. 


longitudinales  et  rayonnantes,  qui  se  bifurquent  à une  petite  distance 
du  crochet.  Ces  côtes  peu  régulières  sont  rayonnantes;  comme  la 
coquille  est  fort,  mince,  elles  so  répètent  à l’intérieur  principalement 
vers  le  bord,  et  les  interstices  des  côtes  sont  occupés  par  une  ligne  d*un 
rose  plus  intense.  T a surface  est  revêtue  d'un  épiderme  mince  et  trans- 
parent . probablement  caduc;  dans  les  figures  publiées  nous  n'en  aper- 
cevons aucune  trace.  La  valve  droite  paraît  beaucoup  plus  lisse  que 
la  valve  gauche  ; c’est  à peine  si  l’on  distingue  quelques  traces  des 
côtes  très  prononcées  , qui  sont  sur  la  valvè  gauche.  D’après  la  figure 
de  M.  Stutchbury,  le  plus  grand  individu  de  Myochama  a 20  millimètres 
de  long  et  25  de  large, 

GENRE  VINGT-SIXIÈME. 

CAR1>ILIE.  Cardilia^  (Deshayes.) 

Pl.  8 bis,  fig.  1 6 à ig. 

I 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  inconnu. 

Coquille  ovale  oblongue,  longitudinale,  gonflée,  cordiforme, 
à crochets  saillants , inclinés  obliquement  en  avant.  Charnière 
étroite,  portant  dans  le  milieu  un  cuilleron  profond,  très  saillant, 
dans  lequel  s'attache  un  ligament  intérieur.  Deux  dents  cardi- 
nales saillantes  , courbées , séparées  par  une  fente  profonde  sur 
la  valve  gauche  et  attachées  au  bord  antérieur  du  cuilleron  ; une 
seule  dent  étroite,  courbée , sur  la  valve  droite,  destinée  à se 
placer  dans  la  fente  qui  sépare  les  dents  de  la  valve  opposée. 
Impression  musculaire  antérieure,  ovale , obronde , aplatie,  peu 
apparente;  l’impression  postérieure  sur  une  lame  saillante, 
horizontale,  fixée  sur  la  paroi;  impression  palléale  simple.  Test 
mince , fragile , blanc , sillonné  sur  le  côté  postérieur. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — /socartZm  (semisulcata),  Lamarck. 
— Cardilîa^  Deshayes,  Gray,  G.  B.  Sowerby.  — Hemycy- 
closiera,  Bronn. 


LES  OSTEODESMES. 


35i 

OBSERVATIONS.  — Nous  avoüs  observé  autrefois  ^ dans  la  collection 
de  M.  Michelin,  une  coquille  fossile  des  environs  de  Senlis  ; elle  nous 
offrit  des  caractères  si  particuliers  , que  nous  voulûmes  constituer  pour 
elle  un  genre  distinct,  que  nous  inscrivîmes  , dans  la  collection  de  cet 
amateur  distingué,  sous  le  nom  d' Uemicycîodonta.  Lorsque  nous  eûmes 
connaissance  du  genre  Periplome  de  M.  Schumacher  , nous  pensâmes 
que  la  coquille  fossile  dont  nous  parlons  devait  en  faire  partie  ; mais , à 
la  même  époque,  M.  de  Hann  nous  ayant  communiqué  le  dessin  d’une 
valve  d’une  coquille  vivante,  ayant  tous  les  caractères  de  l’espèce  fossile 
des  environs  de  Paris , nous  reconnûmes  enfin  la  nécessité  do  notre  nou- 
veau genre.  M.  Michelin  se  chargea  de  le  faire  connaître  dans  une  feuille 
détachée,  représentant  quelques  objets précieu.v  de  sa  collection.  Lorsque, 
en  1 835  , nous  fîmes  des  additions  à la  Conchyliologie  de  Lamarck , noos 
retrouvâmes , sous  le  nom  d'isocardia  semisulcata  , la  coquille  dont 
M.  de  Hann  nous  avait  communiqué  une  figure.  Et  c’est  alors  qu’aban- 
donnant notre  premier  nom  générique , nous  proposâmes  celui  de  Car~ 
düia.  II  nous  était  devenu  facile  alors  de  le  caractériser  d’une  manière 
plus  complète  ; etbientôtaprès.grâceauxcommunicationsd’un  voyageur 
fort  instruit , M.  Martin,  à celles  de  M.  Barthélemy  , le  savant  conser- 
vateur du  musée  de  Marseille , et  enfin  à celles  de  M.  Guming,  dont  le 
nom  est  toujours  prononcé  avec  reconnaissance  par  tous  les  amateurs  de 
conchyliologie , nous  avons  eu  dans  les  mains  des  matériau:!  suffisants 
pour  mieux  connaître  encore  le  genre , et  en  confirmer  les  caractères 
en  y ajoutant  plusieurs  espèces  que  nous  avons  décrites  et  figurées  dans 
le  Magasin  de  zoologie, 

M.  Michelotti,  qui  s’est  occupé  avec  un  soin  scrupuleux  de  l’étude 
des  fossiles  du  Piémont,  et  qui  a publié  à leur  sujet  quelques  bons 
travaux,  nous  a communiqué  une  coquille  fossile  de  l’Aslesan  , à la- 
quelle nous  avons  reconnu  tous  les  caractères  de  notre  nouveau  genre. 
Nous  y comptons  actuellement  3 espèces  vivantes  et  2 espèces  fossiles. 

Les  Cardilies  sont  de  petites  coquilles  minces  , blanches,  longitudi- 
nalement oblongues . par  là  elles  avoisinent  quelques  coquilles  de  la 
famille  des  Cardiacés  ; elles  sont  bombées , cordiformes , et , par  cette 
forme  extérieure,  elles  se  rapprochent  soit  des  Bucardes,  soit  des  Iso- 
cardes; cette  forme  seule  justifie  l’opinion  de  Lamarck.  Si  une  espèce 
est  lisse , les  autres  présentent  des  sillons  réguliers  et  élégamment 
crénelés  sur  le  côté  postérieur.  Les  crochets  sont  grands  et  proémi- 
nents ; ils  sont  inclinés  en  avant,  contournés  en  spirale  à la  manière 
de  ceux  des  Isocardes  ; les  bords  sont  simples  dans  l’espèce  lisse  ; ils 
sont  pourvus  de  crénelures  dans  toute  la  partie  de  leur  circonférence  où 


a52 


SEPTIÈME  FAMILLE. 


viennent  se  terminer  les  côtes  rayonnantes  de  l’extérieur.  Jusqu’ici , 
n'ayant  vu  que  des  valves  délacliées  et  jamais  un  seul  individu  entier, 
il  nous  a été  impossible  déjuger,  si  les  valves  sont  égales  comme  dans  les 
Bucardes , ou  si  elles  sont  inégales  ainsi  que  dans  les  Anatines  et  les 
autres  genres  de  la  môme  famille. 

l.a  surface  intérieure  est  lisse  , très  concave;  on  y aperçoit  difficile- 
ment l’impression  musculaire  antérieure , commençant  au  dessous  de  la 
charnière  et  s’allongeant  le  long  du  bord  antérieur.  Cette  impression  est 
ovale,  étroite , plus  large  à son  extrémité  inférieure  qu’à  la  supérieure. 
Une  impression  palléale  , à peine  marqftée  , so  détache  de  l’extrémité 
inférieure  du  muscle , se  place  aune  faible  distance  du  bord , en  suit  la 
circonférence,  et  vient  aboutir  à une  impression  musculaire  postérieure 
dont  la  forme  et  la  disposition  sont  tout  à fait  particulières  au  genre  qui 
nous  occupe.  Nous  verrons  plus  tard , dans  les  Cucullées , l'impression 
musculaire  postérieure  s’appliquant  en  partie  sur  une  lame  saillante  dans 
l’intérieur  des  valves.  Mais,  dans  les  CardiÜes  , cette  impression  est  en 
totalité  sur  une  lame  horizontale  , mince , triangulaire , qui . parlant  du 
sommet  intérieur  des  crochets  , vient  se  terminer  à peu  près  au  tiers 
supérieur  du  bord  postérieur  delà  coquille.  On  remarque  sur  cette  lame 
des  stries  d’accroissement,  semblables  à celles  que  l’on  rencontre  dans 
les  autres  impressions  musculaires.  D’ailleurs,  on  chercherait  vainement 
au  dessus  de  cette  lame  les  traces  de  l’impression  musculaire;  la  ligne 
étroite  de  l’impression  palléale  se  continue  sans  interruption  jusqu’à  la 
lamelle  en  question.  Il  est  donc  certain  que  c’est  sur  elle  que  s’attache 
le  muscle  postérieur.  Par  sa  présence  et  par  sa  position , cette  lame 
donne  à ce  muscle  beaucoup  plus  de  force,  sans  en  augmentër  le  volume  ; 
car  ses  fibres  , plus  courtes , sont  d’une  égale  longueur  ; elles  s’insèrent 
sur  un  plan  perpendiculaire  à leur  direction  , au  lieu  de  le  faire  sur  le 
plan  très  oblique  que  présenterait  sans  cela  la  surface  postérieure  do  la 
coquille,  sur  laquelle  le  muscle  s’attache  ordinairement. 

La  charnière  est  extrêmement  singulière  ; elle  ne  ressemble  en  rien 
à celles  des  autres  genres  connus  ; il  semblerait  que  toutes  les  parties 
d’une  charnière  pliis,étendue  ont  été  concentrées  et  réunies  sur  un  seul 
point  ; car  les  dents  cardinales,  au  lieu  de  sortir  du  bord  cardinal  lui- 
même  , sont  insérées  sur  le  bord  antérieur  du  cuilleron.  Cette  charnière 
se  compose  principalement  d’un  cuilleron  interne,  saillant,  à la  manière 
de  celui  des  Anatines  ou  des  Lutraires.  La  surface  se  divise  en  deux  por- 
tions bien  distinctes,  par  une  petite  crête  oblique,  La  portion  posté- 
rieure reçoit  un  ligament  interne,  tandis  que  l’antérieure  donne  insertion 
à une  ou  deux  dents  cardinales,  saillantes,  courbées  en  crochet,  et  dont 


LES  OSTÉODESMES. 


‘lO'A 

Tuiieest  quelquefois  bifide.  Sur  la  valve  gauche,  les  deux  dents  cardi- 
nales sont  séparées  par  une  fente  étroite  et  profonde,  dans  laquelle  se 
place  une  dent  médiocre  de  la  valve  opposée.  La  structure  insolite  de 
cette  charnière  se  refuse  à une  description  bien  complète  , d’autant  plus 
que  chaque  espèce  offre  quelques  modifications.  Il  est  à présumer  que 
cette  charnière  ne  portait  en  elle  aucune  pièco  accessoire,  comparable  à 
celle  des  Analincs , des  Lyonsies  ou  des  Thracies.  Celte  absence  des 
pièces  détachées  de  la  charnière  devrait  faire  ranger  le  genre  Cardilie 
de  préférence  dans  la  famille  des  Mactracées.  Cependant , par  la  struc- 
ture du  test , par  son  peu  d’épaisseur  , nous  préférons  mettre  les  Car- 
dilies  à côté  des  Anatines , en  avouant  toutefois,  que  ce  genre  n’est  pas 
plus  à sa  place  dans  une  famille  que  dans  l’autre. 

En  effet , si  l'on  examine  les  caractères  que  nous  avons  inscrits  en 
tête  de  la  famille  des  Ostéodesmes , si  l’on  examine  aussi  ceux  de  la  fa- 
mille suivante , des  Mactracées , on  s’apercevra  que  notre  nouveau  genre 
se  soustrait  à l’applicalion  rigoureuse  des  caractères  distinctifs  de  ces 
familles.  Dans  cette  circonstance , il  eût  été  peut-être  préférable  de 
créer  une  famille  à part,  pour  placer  un  genre  si  différent  de  tous  ceux 
que  nous]connaissons  : mais  il  nous  a semblé;  que  les  documents  que  pos- 
sède la  science  ne  sont  pas  encore  assez  complets  pour  permettre  une 
création  de  ce  genre.  Lorsque  l’animal  des  Cardilies  sera  connu  , on 
aura  le  moyen  de  porter  un  jugement  sur  sa  valeur  et  sur  la  place  qu'’il 
doit  occuper  dans  la  série. 

Tous  les  animaux  des  deux  familles  dont  nous  venons  de  parler  sont 
terminés  en  arrière  par  doux  siphons  tantôt  réunis,  tantôt  disjoints  dans 
toute  leur  longueur.  L’existence  de  ces  organes  est  constatée  par  la  pré- 
sence , sur  l'intérieur  de  la  coquille , d’une  inflexion  plus  ou  moins  pro- 
fonde dans  fimpression  du  manteau.  Dans  les  Cardilies,  l’impression 
pal léale  reste  simple;  elle  est  simple  aussi  dans  les  Bucardes,  et  cepen- 
dant , chez  ces  animaux  les  deux  siphons  existent  encore,  mais,  il  faut 
le  dire  , excessivement  raccourcis.  Si , maintenant , nous  portons  notre 
comparaison  sur  les  genres  d’un  autre  groupe,  nous  verrons  que  les  Ery- 
cines , par  exemple  , qui  ont  aussi  l’impression  palléale  simple,  ont  ce- 
pendant le  manteau  perforé , et  ces  perforations  ont  môme  la  propriété 
de  s’allonger  un  peu  au  dehors,  sous  la  forme  de  siphons.  Dans  les  Lu- 
cines , l’impression  palléale  simple  ne  laisse  pas  deviner  l’existence  dans 
l'animal  vivant  d'un  seul  siphon,  prolongeant  l’ouverture  anale  du  man- 
teau. Ainsi , il  se  pourrait  que  notre  genre  Cardilie  , compris  aujour- 
d’hui par  nous  dans  la  famille  des  Ostéodesmes,  en  sortît  plus  lard,  pour 
rentrer  dans  la  famille  des  Erycines,  lorsque  l’animal  sera  connu. 


SEPTIÈME  FAMILLE. 


‘j54 

La  lame  saillante , destinée  à recevoir  le  muscle  postérieur , peut  bien 
servir  de  caractère  générique,  mais  ne  peut  être  d'aucune  utilité  pour 
déterminer  les  rapports  du  genre  Cardilie  avec  ceux  qui  sont  déjà 
connus.  Celte  disposition  de  l’impression  musculaire  peut  se  présenter 
dans  dos  groupes  extrêmement  différents.  Nous  avons  cité  l’exemple 
des  Cucullés  , et  plus  lard  nous  verrons  dans  les  coquilles  tubuleuses 
des  Rudisles,  les  deux  impressions  musculaires , également  proémi- 
nentes sur  la  valve  supérieure.  On  comprend , en  effet , que  ce  moyen 
de  donner  plus  de  force  aux  organes  qui  meuvent  les  valves  d’une  co- 
quille, peut  se  reproduire  dans  des  groupes  fort  différents,  sans  que, 
cependant,  l’organisation  ait  subi  des  changements  importants.  Nous 
pourrions  citer  encore  les  genres  Came  et  Dicérate , chez  lesquels  les 
impressions  musculaires,  et  surtout  la  postérieure,  s’épaississent  à un 
point  considérable  et  tendent  à former  entre  elles  des  plans  parallèles 
dans  des  coquilles  très  concaves. 

Les  Cardilies  sont  des  petites  coquilles  qui,  jusqu'à  présent,  ne  se 
sont  trouvées  que  dans  les  mers  chaudes  de  Sumatra  et  des  Philippines. 
Les  voyageurs,  qui  parcourront  cos  mers,  rendront  un  véritable  service 
à la  science , en  recherchant  l’animal  d'un  genre  aussi  curieux  et  en 
donnant  sur  sa  structure  les  détails  qui  nous  manquent. 

Nous,  connaissons  actuellement  cinq  espèces  de  Cardilies  : trois  vi- 
vantes et  deux  fossiles.  De  ces  dernières,  l’une  appartient  aux  terrains 
tertiaires  supérieurs  de  l'Italie,  l'autre  est  du  bassin  de  Paris.  Toutes 
sont  très  rares. 

Cardilie  demi -sillonnée.  Cardilia  aemisulcata.  Desh. 

PI.  8 bis.  fig.  16  à 19. 

Testa  ovato-oblongâ  , cordiformi  , alhâ  , transUicidâ ; umbonibas 
magnis  cordiformibtis  oppositis  ; latere  antico  hevigato  , postico 
regiilarlter  suîcato;  margirte  posticè  dentato  ; vnlvâ  oblique  striata. 

Isocardia  semisulcata.  Lam.  Anim.  saus  vert.  t.  6.  ,p.  3a.  n”  3. 

Cardilia  semisulcata.  Desh.  dans  Lam.  Anim.  saus  vert,  a*  éd.  t.  6, 
p.  45o. 

Id.  Desbayes.  Magas.  de  zool.  1844.  pl.  99. 

Habite  le  détroit  de  Malacca. 

Cette  petite  espèce  se  distingue  facilement  ; elle  est  ovale-oblongue , 
plus  longue  que  large;  ses  crochets,  grands  et  cordiformes,  sont  tour- 


HUITIÈME  FAMILLE.  — LES  MACTRAGÉES.  a55 

nés  en  spirale,  mais  ils  sont  beaucoup  moins  écartés  que  dans  les  Iso- 
cardes  ; ils  sont  opposés  , très  rapprochés  et  un  peu  inclinés  sur  le  côté 
antérieur.  Tout  le  côté  postérieur  est  occupé  par  des  sillons  longitudinaux, 
peu  profonds,  étroits,  dont  les  trois  premiers  sont  les  plus  profonds  et 
les  plus  larges;  ceux  qui  suivent  vont  graduellement  en  s’amoindrissant. 
Tout  le  côté  antérieur  reste  lisse;  on  y remarque  seulement  de  très 
fines  stries  transverses  d’accroissement.  La  lunule  n’est  point  circon- 
scrite; mais  il  y a un  large  corselet  ovale-lancéolé , limité  par  le  pre- 
mier sillon  postérieur,  et  sur  lequel  on  remarque  des  plis  obliques,  que 
l’on  peut  comparer  à ceux  des  Mactres,  Mactra  stultorim,  par  exemple. 
Le  bord  antérieur  est  mince  et  simple , une  partie  du  bord  inférieur  et 
postérieur  montre  de  petites  dentelures,  qui  diminuent  graduellement  et 
qui  correspondent  aux  sillons  postérieurs. 

Les  grands  individus  de  cette  coquille  ont  20  millimètres  de  longueur, 
1 4 de  largeur  et  1 8 d'épaisseur. 


HUITIÈME  FAMILLE. 

lies  Hact racées.  Lâmarck. 

cARAcriREs. — Animaux  ovalaires  ou  subtrigones,  trans- 
verses, les  lobes  du  manteau  réunis  au  moins  dans  les  deux  tiers 
de  leur  longueur,  et  laissant  en  avant  une  ouverture  médiane 
pour  le  passage  d’un  pied  comprimé  et  triangulaire  5 siphons 
plus  ou  moins  allongés  et  épais , réunis  dans  toute  leur  lon- 
gueur, revêtus  d’une  couche  épidermique,  et  ayant  leur  ou- 
verture terminale  garnie  de  tentacules  tantôt  simples,  tantôt 
branchus.  Palpes  labiales  allongées,  triangulaires. 

Coquilles  ovales,. trans verses  ou  subtrigones,  presque  toutes 
bâillantes  de  chaque  côté.  Charnière  offrant  au  milieu  une  fos- 
sette ou  un  cuilleron  pour  un  ligament  intérieur  ; en  avant  deux 
dents  divergentes , et  une  dent  latérale  en  avant  et  en  arrière. 
Impression  palléale  sinueuse  en  arrière. 


a56 


HUITIÈME  FAMILLE. 


GENRES.  “ Lxtfraire,  Mactre , Gnafhodon^  Aiiaiinelle. 

La  famille  des  Mactracées  a été  instituée  depuis  longtemps  par  La- 
marck  dans  la  classification,  proposée  en  1 809  dans  la  P}ii{o$ophie  zoo- 
logique. Cinq  genres  réunis  dans  celte  famille  semblent  avoir  de  l’ana- 
logie, à ne  considérer  que  les  caractères  des  coquilles;  cependant  un 
examen  plus  approfondi  aurait  pu  faire  découvrir  entre  ces  genres  des 
différences  assez  grandes , pour  les  ranger  dans  d'autres  groupes.  Au- 
jourd’hui les  conchyliologues,  mieux  éclairés  sur  la  valeur  des  caractères 
des  coquilles,  séparent , sans  difficulté,  les  genres  queLamarck  réunis- 
sait, et  il  nous  suffira  de  les  citer  pour  justifier  notre  opinion.  Ces 
genres  sont  disposés  dans  l’ordre  suivant  : Erycine,  Onguline,  Crassa- 
telle,  Lutraire,  Mactre. 

Nous  aurons  bientôt  à décrire  l'animal  du  genre  Erycine,  et  la  moindre 
comparaison  démontrera  de  combien  il  diffère  des  Alactres  et  des  Lu- 
traires.  La  coquille  seule  pouvait  faire  préjuger  cette  différence,  puis- 
qu'elle n’offre  aucune  trace  d’intloxion  à l’impression  palléale,  inflexion 
qui  existe  toujours  dans  les  Lutraires  et  les  Mactres. 

Lamarck  a mal  apprécié  les  caractères  des  Ongulines , dans  toute  la 
série  do  ses  travaux.  II  crut  voir,  à la  charnière  de  cette  coquille,  deux 
ligaments;  mais  il  n’y  en  a qu’un  , et  ce  ligament  ressemble  en  tout  à 
celui  d'un  groupe  assez  considérable  de  Lucines.  En  effet,  les  impres- 
sions des  muscles  et  du  manteau  ne  diffèrent  en  rien  de  celles  des  Lu- 
cines. Ce  qui , depuis  longtemps,  nous  a fait  dire  qu’il  fallait,  non  seu- 
lement retirer  les  Ongulines  de  la  famille  des  Mactracées , mais  même 
supprimer  totalement  le  genre  en  le  réunissant  aux  Lucines. 

Nous  conservons  encore  du  doute  à l’égard  du  genre  Crassatelle.  L’a- 
nimal est  incomplètement  connu , et  la  coquille  offre  des  caractères 
différents  do  ceux  des  deux  genres  précédents  et  de  ceux  qui  suivent. 
Néanmoins  il  faudra  peut-être  l'éloigner  beaucoup  des  Mactres  ou  des 
Mésodesmes. 

Les  deux  derniers  genres  Lutraire  et  Mactre  ont , entre  eux,  les  plus 
grands  rapports.  Ils  doivent  constituer  les  types  généraux  de  la  famille 
des  Mactracées.  Il  faudra  y joindre  cependant  un  genre  propre  à l’Amé- 
rique,  et  que  M.  Gray  a nommé  Gnathodon. 

En  1813,  en  publiant  l'extrait  du  cours,  Lamarck  n'apporta  aucun 
changement  à la  famille  des  Mactracées , mais  il  la  modifia  en  1 81 8 dans 
le  cinquième  volume  de  son  Histoire  des  animaux  sans  vertèbres  ; il 
l’augmenta  des  deux  genres  Solémye  et  Amphidesme , et  distribua  les 


LKS  MACTftACÉES. 


sept  genres  en  deux  groupes  principaux.  Dans  le  premier,  le  ligament 
est  uniquement  intérieur  ; dans  le  second,  le  ligament  est  double.  Le 
premier  groupe  est  lui-méme  sous-divisé,  selon  que  la  coquille  est  bâil- 
lante ou  complètement  fermée.  La  première  section  contient  les  genres 
Lutraire  et  Mactre;  la  seconde,  les  Crassatolles  et  les  Érycines.  Enfin, 
le  second  groupe,  celui  dont  les  coquilles  ont  deux  ligaments,  selon 
l’opinion  de  Lamarck,  réunit  trois  genres:  Onguline,  Solémye,  Amphi- 
desme.  Nous  connaissons  actuellement  les  Solémyes,  qui  doivent  se  rap- 
procher des  Solons;  nous  avons  indiqué  les  rapports  naturels  des 
Ongulines  ; il  nous  reste  à dire  quelques  mots  des  Amphidesmes.  Nous 
devons  prévenir  d’abord  que  ce  genre,  tel  qu’il  est  dans  l'ouvrage  de 
Lamarck  est  des  plus  artificiels.  Nous  y avons  déjà  trouvé  une  Lyonsie, 
des  Thracies,  et  sur  les  1 6 espèces  que  l'on  y compte , il  a fallu  un  cer- 
tain artifice  pour  en  conserver  une  comme  type  du  genre  qui , ainsi  mo- 
diBé,  a conservé  le  nom  d'Amphidesme. 

Lamarck  ayant  fondé  sa  famille  des  Mactracées  sur  les  caractères 
empruntés  aux  coquilles  seules,  on  pouvait , à juste  titre , la  considérer 
comme  à peu  près  artificielle.  Cuvier,  qui  a fondé  la  classification  des 
Mollusques  sur  d’autres  principes,  puisés  do  préférence  dans  les  carac- 
tères des  animaux , suivant  en  cela  l'exemple  de  Poli , Cuvier,  disons- 
nous,  rejeta  les  familles  de  Lamarck  et  construisit  de  grands  groupes, 
principalement  d’après  l’ouverture  du  manteau  et  les  caractères  exté- 
rieurs des  siphons.  11  résulte  de  là  une  distribution  très  différente  des 
genres  dont  nous  venons  de  parler.  Cuvier  ne  les  admit  pas  tous  ; les 
seuls  que  l’on  trouve  dans  la  première  édition  du  Règne  animal , sont 
les  Mactres  et  les  Lutraires,  et  encore  ces  deux  genres,  malgré  leur 
analogie,  appartiennent  à- deux  familles  diiïéreutes.  Les  Mactres  dépen- 
dent de  la  famille  des  Cardia'cées  et  la  terminent  à la  suite  des  Venus 
et  des  Corbules.  Les  Lutraires  sont  considérées  comme  le  premier  sous- 
genre  des  Myes,  et  commencent  la  famille  des  Enfermés.  Les  faits  que 
nous  allons  exposer  démontreront  que  Cuvier,  dans  l’arrangement  des 
deux  genres  qui  nous  occupent,  s'est  laissé  diriger  par  des  caractères 
d’une  faible  valeur.  Plus  tard,  notre  grand  zoologiste  ne  reconnut  pas 
leur  insuffisance,  et  en  1830,  dans  la  deuxième  édition  du  Règne  animal, 
tout  en  adoptant  quelques  uns  des  genres  de  la  famille  des  Mactracées 
de  Lamarck,  conserva  aux  Madrés  et  aux  Lutraires  les  rapports  que 
nous  venons  de  rappeler. 

Dans  l'espoir  do  concilier  les  diverses  méthodes  publiées  jusqu'à  lui, 
Férussac  conserva  les  groupes  de  Cuvier,  il  en  fit  des  ordres,  dans  les- 
quels il  introduisit,  on  les  modifiant , la  plupart  des  familles  de  Lamarck. 


‘)e 


17 


T.  T. 


PARTIE. 


258 


HUITIÈME  FAMILLE. 


La  famille  des  Mactracées  est  la  septième  de  l’ordre  des  Cardiacées; 
elle  contient  cinq  genres  qui,  même  à l’égard  des  caractères  de  coquilles, 
ont  peu  do  rapports  entre  eux.  Ce  sont  les  Érycines,  les  Madrés,  les 
Ligules,  comprenant  une  partie  des  Amphidesmes  de  Lamarck,  les  La- 
vignoDS genre  de  Cuvier  proposé  pour  la  Chama  piperata  des  anciens 
naturalistes  et  Onguline,  mais  avec  doute.  Le  genre  Lutraire  commence 
la  famille  des  Myaires  qui,  elle-mèmo,  est  la  première  de  l'ordre  des 
Enfermés.  Férussac  conserve  les  rapports  généraux  ; il  diffère  de  Cuvier 
par  des  détails  d’une  moindre  importance. 

M.  de  Blainville,  dans  sa  Méthode  pom  la  partie  des  Alollusques  dont 
nous  avons  à nous  occuper,  propose  un  arrangement  peu  différent  de  celui 
de  Cuvier.  Les  "Mactres,  placées  entre  les  Cyprines  et  lesÉrycines,  font 
partie  de  l’immense  famille  des  Conchacés,  tandis  que  les  Lulraires, 
sous  le  nom  de  Lutricoles.  sont  entraînées  loin  de  là  dans  la  famille  des 
Uyloridcs.  Ces  deux  familles,  dans  leur  ensemble,  se  rapprochent 
beaucoup  de  celles  nommées  Cardiacés  et  Enfermés  par  CuVier.  Comme 
on  le  voit,  le  savant  auteur  du  TraHé  de  malacologie  s’est  laissé  guider 
par  des  principes  analogues  à ceux  que  Poli  et  Cuvier  ont  mis  en  pra- 
tique dans  leurs  ouvrages. 

Lorsqii'en  1830,  nous  publiâmes  la  suite  du  Diclionnaire  des  vers  de 
r Encyclopédie  méthodique,  nous  cherebions  à concilier  deux  faits  qui 
semblent  se  repousser,  et  dont  l'un  eût  pu  être  contesté dan$  sa  valeur, 
si  nous  avions  eu  alors,  comme  aujourd'hui,  les  moyens  d’en -vérifier 
roxactitnde.  D'un  côté,  nous  voyions,  delà  manière  la  plus  évidente, 
Velablir  une  transition  insensible  entre  les  Mactres  et  les  Lutraires, 
et  i!  nous  semblait  impossible  de  déterminer  la  limite  nette  et  tranchée 
<los  deux  genres.  D’uii  autre  côté,  nous  plions  obligé  d’admettre,  avec 
Poli.  Cuvier,  de  Blainville.  l’analogie  qui  existe,  plus  en  apparence 
i[u'en  réalité,  entre  les  animaux  des  Mactres  et  celui  du  CytHerea 
rhione.  Nous  apercevions  cette  contradiction  choquante  d’un  animal , 
ayant  des  rapports  avec  un  groupe , tandis  que  sa  coquille  en  a de  non 
moins  certains  avec  un  autre  groupe.  Nous  avons  été  entraîné  par  là 
à considérer  les  .Mactres  comme  un  genre  transitoire  formant  un  em- 
branchement latéral  entre  le  type  des  Venus  et  celui  des  Myes;  et  néan- 
moins, dans  l’ordre  linéaire,  nous  préférions  rapproclier  les  Mactres 
des  Lutraires,  et  comprendre  ces  deux  genres  dans  la  famille  des  Mac- 
tracées, Aujourd'hui  s’effacent  les  difficultés  que  nous  éprouvions  alors. 
Nous  avons  ou  vivants  le.s  animaux  des  Mactres  et  des  Lutraires;  nous 
avons  fait  l’anatomie  des  uns  et  des  autres,  et  nous  avons  reconnu  entre 
eux  beaucoup  plus  d’analogie  qu'on  ne  l’avait  cru  autrefois;  nous  nous 


LKS  MACTRACEES. 


■.i5ç) 

sommes  ainsi  aperçu  que  Poli  et  ceux  des  zoologistes  qui  se  sont  appuyés 
sur  son  opinion,  se  sont  laissé  surprendre  par  des  rapports  plus  appa- 
rents que  réels.  Ainsi  les  Lutraires  et  les  Mactres  constituent , en  réa- 
lité, un  groupe  naturel,  auquel  il  faut  joindre  le  genre  Gnathodon, 
comme  nous  venons  de  le  dire. 

M.  Gray,  dans  un  article  très  court,  mais  qui  témoigne  de  l’attention 
toute  spéciale  que  ce  savant  zoologiste  a mise  à l’examen  des  coquilles 
de  la  famille  des  Mactracées,  a proposé  de  diviser  les  Mactres  en  plu- 
sieurs genres  , et,  ainsi  que  nous,  d'en  rapprocher  les  Lutraires  et  les 
Gnathodons  pour  en  constituer  la  famille  des  Mactracées.  M.  Gray  voit 
comme  nous  une  transition  insensible  entre  les  Mactres  et  les  Lutraires, 
mais  comme  il  ne  se  place  pas  au  même  point  de  vue  que  nous , pour 
déterminer  la  valeur  des  genres,  il  en  propose  plusieurs,  qui  marquent 
les  degrés  qu’il  aperçoit  entre  les  deux  types  principaux.  Pour  nous, 
les  mêmes  faits  nous  conduiraient  plutôt  a" proposer  la  réunion  des  Lu- 
traires et  des  Mactres. 

Nous  n’avons  pas  à nous  occuper  des  travaux  de  ceux  des  naturalistes 
qui  ont  admis , sans  examen  l’opinion  de  Lamarck  ou  celle  de  Cuvier, 
en  y introduisant  des  modifications  quelquefois  prématurées,  en  ce  sens 
qu’ils  ont  rapproché  des  Mactres  des  genres  incomplètement  connus.  (I 
fallait,  én  elfet,  pour  fonder  définitivement  la  famille  des  Mactracées,  que 
l’organisation  des  animaux  des  genres  ce  fût  plus  approfondie,  qui  permet- 
trait de  reconnaître  enfin  les  caractères  communs  qui  les  réunissent. 


GENRE  VINGT -SEPTIÈME. 

ZiVTRAZRX:.  Lutrar'm.  (Lamk.) 

Pl.  9.  fig,  9.  10.  Pl.  10  fig.  7.  S. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  ovale,  oblong,  ayant  les 
lobes  du  manteau  fendus  en  avant  dans  le  tiers  ouïe  quart  de 
leur  longueur  pour  le  passage  d’un  pied  petit,  allongé , triangu- 
laire, très  comprimé.  Deux  siphons  très  gros,  plus  longs  que 
la  coquille , réunis  et  revêtus  d une  enveloppe  épidermique  ; 
lès  ouvertures  de  ces  siphons  un  peu  divergentes  et  garnies  de 


HUITIÈME  FAMILLE. 

tentacules  arborescents.  Palpes  labiales,  longues,  étroites-, 
pointues  et  flottantes.  Branchies  inégales , non  prolongées  dans 
le  siphon. 

Coquille  équivalve,  inoquilatérale,  bâillante  de  chaque  côté  ; 
charnière  ayant  sur  chaque  valve  un  cuilleron  subtrigone , fort 
large,  et  en  avant  une  dent  en  forme  de  V.  Dents  latérales 
nulles  ou  petites  et  rudimentaires.  Ligament  interne  fixé  dans 
les  cuillerons. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Chanta  louga  ^ Chama  glycimeris^ 
Rondelet,  Gesner,  Aldrovande,  Jonston. — Chama,  Da  Costa. 
— Mya  [imrs]^  Linné,  Gronovius,  Chemnitz  , -Schrœter, 
Gmelin , Spengler,  Schweigger. — Macira , Linné  , Cheninitz , 
Schrœter,  Gmelin  , Donovan,  Montagu,  Dilhvyn  , de  Gerville, 
Wood.  — Mmculus,  Pennant.  — Lxitricola^  Blainville. 

OBSERVATIONS.  — Lgs  aiiîmaux  du  genre  Lutraire  sont  répandus  en 
abondance  dans  les  mers  de  l’Europe  et  dans  la  Méditerranée  ; ils  occu- 
pent de  préférence  les  régions  peu  profondes  qui  avoisinent  l’embouchure 
des  eaux  douces.  Aussi  ces  animaux  n’ont  point  échappé  à l’observation 
des  anciens  naturalistes.  Rondelet  mentionne  les  deux  espèces  de  nos 
mers  sous  les  noms  de  Chama  g}\jcimeris  et  de  Chama  lomja.  Les  fi- 
gures qu’il  en  donne,  quoique  grossières,  sont  cependant  reconnais- 
sables ; elles  ont  été  snceessivement  recopiées  par  Gesner,  Aldrovande, 
Jonston , etc.  D’autres  auteurs  ont  aussi  donné  des  figures  de  ces  es- 
pèces, en  les  confondant  avec  des  coquilles  de  genres  très  différents. 
Dans  le  long  espace  de  plus  de  deux  siècles  qui  sépare  Rondelet  de  Linné, 
on  trouve  quelques  rares  tentatives  de  classification  pour  les  coquilles  , 
mais  elles  sont  peu  fécondes  en  résultats.  Lister  est  certainement  l’ob- 
servateur qui  a le  mieux  saisi  les  caractères  d’un  certain  nombre  de  ^ 
genres , et  il  en  est  quelques  uns  qui  n'ont  dû  subir  aucun  changement. 
Pour  les  Lutraires,  Lister  les  laisse  parmi  les  Cames,  genre  indéterminé 
par  sou  étendue  et  la  diversité  des  objets  qu'il  renferme. 

Une  des  coquilles  de  Rondelet  se  reconnaît  facilement  parmi  les  es- 
pèces du  genre  Mya,  dans  la  10*  édition  du  Syüema  nalarœ;  elle  se 
trouve  à la  même  place  dans  la  Fauna  snecioa  et  le  Musexm  Vlricœ.  De 
nouvelles  études  firent  apercevoir  a Linné  des  caractères  qui  le  déter- 


I.KS  MACniACKl-S. 


2G1 

minèrent  à faire  rentrer  dans  les  Mactres  la  coquille  011  question,  et  en 
cela  il  (it  preuve  de  celte  sagacité  qui  est  le  cachot  des  travaux  du  grand 
naturaliste.  Linné  a oublié  la  seconde  espèce  dç  Rondelet,  Chemnitz 
répara  cette  omission.  Mais , ne  reconnaissant  pas  sans  doute  l’identité 
des  caractères  des  deux  coquilles , il  mit  celle  de  Linné  parmi  les 
Mactres,  à l’exemple  du  maître;  l'autre  fut  placée  parmi  les  Myes , 
sous  le  nom  de  Mya  longa.  Presque  tous  les  auteurs  qui  suivirent, 
Schroeter,  Gmelin  et  le  judicieux  Spengler,  tombèrent  dans  la  même 
faute.  Bruguière  n'a  connu  qu’une  seule  espèce,  il  la  rangea  parmi 
les  Mactres,  à l’exemple  do  ses  prédécesseurs. 

En  étudiant  plus  profondément  les  coquilles  qu'on  ne  l’avait  fait  avant 
lui , Lamarck  découvrit  parmi  celles  qui  étaient  le  mieux  connues  , un 
assez  grand  nombre  de  genres  nouveaux,  qu’il  nomma  et  dont  il  exposa 
les  caractères  d'une'manièce  nette  et  précise,  dès  1799,  dans  le  premier 
travail  qu'il  publicV  sur  la  matière.  Parmi  ces  genres,  on  remarque  celui 
des  Lutraires  dont  le  type  est  le  Mactra  liitraria  de  Linné.  Depuis  ce 
moment,  Lamarck  a maintenu  le  genre  Lutraria  dans  tous  ses  travaux 
sur  la  conchyliologie.  Nous  avons  vu  précédemment  comment  il  a conçu 
ses  rapports  avec  les  genres  les  plus  avoisinants.  En  Franco,  le  nouveau 
genre  était  généralement  adopté  ; en  Angleterre,  on  rapprocha  les  deux 
espèces  l’une  de  l’autre,  mais  on  les  conserva  dans  le  genre  Mactre.  Cet 
arrangement  persista  longtemps;  on  le  retrouve  jusqu’en  1828,  dans 
l'Index  testaceologicus  ùoWood.  Ce^cndàïïi  il  est  quelques  exceptions 
qu’il  est  juste  de  signaler.  En  1815  , Brookes,  dans  son  Iniroditclion  à 
l'élude  de  la  conchyliologie , admet  les  Lutraires  parmi  les  genres  dé- 
membrés des  Mactres  de  Linné.  Turton,  en  1 822 , adopta  les  genres  de 
Lamarck , dans  son  histoire  des  Coqiiillea  bivalves  d'Angleterre,  et  il 
rapprocha  les  Lutraires  des  Mactres.  Sowerby,  dans  son  Généra  of 
Shells,  suivit  l’exemple  de  Turton;  mais  ce  naturaliste  , recevant  trop 
légèrement  l'opinion  de  quelques  géologues,  consacra  une  fâcheuse  con- 
fusion qui  régna  longtemps,  en  admettant  dans  son  Minerai  conchology, 
comme.  Lutraires  fossiles,  dos  coquilles  qui  n'ont  aucun  des  caractères  de 
ce  genre. 

A l'exception  du  petit  nombre  d’auteurs  que  nous  venons  de  citer, 
tous  les  conchyliologues  ont  admis  le  genre  Lutraire , et  presque  tous 
ont  compris  que,  dans  la  méthode  nouvelle,  il  devait  prendre  rang  à côté 
des  Mactres,  Cette  opinion,  proposée  par  Lamarck,  a rencontré  quel- 
ques contradicteurs;  Cuvier,  Férussâc  , M.  de  Blainville,  ont  trouvé  aux 
Mactres  plus  de  rapports  avec  les  Venus , et  aux  Lutraires  plus  d’ana- 
logie avec  les  Myes,  ce  qui  les  a conduits  à mettre  ces  deux  genres  dans 


HUITIEME  FAMILLE. 


a (>12 

deux  familles  distinctes.  Aujourd’hui  l'opinion  défendue  par  ces  zoolo- 
gistes est  abandonnée.  Les  conchyliologues  ont  compris  que  les  Mactres 
et  les  Lulraires  ne  doivent  pas  être  séparées,  et  que  l'opinion  de  La- 
inarck  doit  prévaloir  . 

Jusqu’au  moment  où  Lamarck  a publié  le  5®  volume  de  VHistoire  dea 
animaux  sans  vertèbres , on  ignorait  la  composition  exacte  du  genre 
Lutrairo;  on  y trouve  onze  espèces  vivantes  et  une  fossile.  Nous  allons 
rapidement  les  examiner,  pour  nous  assurer  si  toutes  dépendent  en  effet 
du  genre  où  elles  sont  groupées.  Cet  examen  nous  sera  utile  pour  porter 
un  jugement  plus  éclairé  sur  la  manière  dont  les  auteurs  ont  compris 
le  genre  qui  nous  occupe. 

Les  trois  premières  espèces  de  Lamarck  sont  incontestablement  de 
véritables  Lutraires.  Elles  constituent  un  premier  groupe,  caractérisé  par 
la  forme  oblongue  et  transversale  de  la  coquille.  Dans  le  second  groupe, 
réunissant  des  coquilles  orbiculaires  ou  subtrigones , se  rencontrent 
plusieurs  espèces  étrangères  aux  Lulraires.  Ainsi  les  Lutraria  compressa 
et  pîperata  doivent  constituer  un  genre  très  distinct  désigné  par  Cuvier 
sous  le  nom  de  Lavignon,  mais  antérieurement  indiqué  par  Da  Costa 
sons  le  nom  de  Trigonella , que  nous  avons  adopté.  Les  animaux  de  ces 
coquilles  diffèrent  extrêmement  de  celui  des  Lutraires,  comme  nous  le 
verrons  par  la  suite.  La  Lutraire  lelHnoïde  n’est  ni  une  Lutraire  ni  une 
Trigonella,  c’est  une  véritable  Telline  à corselet  enfoncé.  Celte  coquille, 
figurée  dans  le  Recueil  de  M.  Benjamin  Delessert,  ne  peut  plus  être  le 
sujet  du  moindre  doute.  Nous  n'avons  aucun  renseignement  sur  le 
Lutraria  candida;  les  quatre  dernières  espèces  sont  de  véritables  Lu- 
Irairps,  mais  de  celles  qui  sont  minces,  et p-apyracées.  Ce  qui  précède 
prouve  évidemment  que  le  genre  Lutraire  a besoin  d’être  réformé  pour 
devenir  naturel , et  celte  réforme  que  nous  indiquons  pour  l’ouvrage  de 
Lamarck  devra  se  réaliser  aussi  dans  ceux  des  conchyliologues  qui, 
suivant  l’exemple  de  ce  naturaliste,  ont  admis  dans  les  Lulraires  le 
Chamâ  piperata.  A ce  sujet,  nous  pouvons  faire  remarquer  un  fait  cu- 
rieux . Dans  le  catalogue  des  Mollusques  de  la  Corse,  par  M.  Payraudeau, 
plusieurs  Lulraires  sont  inscrites  et  toutes  passent  dans  le  genre 
Trigonella.  Par  là  le  genre  Lutraire  devra  disparaître  de  l'ouvrage  en 
question. 

Nous  verrons  bientôt  que  la  réforme  du  genre  Lutraire  a été  jugée 
nécessaire  depuis  longtemps.  Déjà  en  1817,  Cuvier,  se  fondant  sur  la 
longueur  et  la  disjonction  des  siphons  dans  le  Chaîna  piperata,  avait 
proposé  pour  lui  un  sous-genre  des  Mactres , sous  le  nom  de  Lavignon. 
A la  même  époque,  Schumacher,  dans  son  Essai  d'une  classification  des 


LESM  ACTKACEES. 


a6.‘i 

coquilles , publié  aussi  en  1 81 7,  proposait  pour  la  même  espèce  un  genr® 
Scro&îcu/ana , et  enfin,  en  1822,  M.  Turton,  dans  son  Histoire  des  co- 
quilles bivalves  de  la  Grande-Bretagne ^ instituait  un  genre  Listent  pour 
la  môme  coquille.  Tous  ces  auteurs  avaient  oublié  que  Ha  Costa,  en  1778, 
avait  proposé  un  genre  Trigonella,  dans  lequel  il  rapportait  à la  fois 
quelques  Madrés  et  le  Chama  piperata , que  l’on  peut  ainsi  considérer 
comme  type  du  genre  Trigonelle.  Malgré  les  indications  si  précises  que 
nous  venons  de  rappeler  et  qui  étaient  suflisanles  pour  faire  adopter  ie 
genre  sous  un  des  quatre  noms  qu’il  a reçus,  un  assez  grand  nombre  de 
conchyliologues  conservèrent  le  genre  Lutraire,  tel  que  Lamarck  l'avait 
fait,  poussés,  soit  par  l’habitude , soit  par  le  respect  qu'inspirent  géné- 
ralement les  opinions  d’un  aussi  grand  naturaliste.  Celte  espèce  de 
neutralité  de  la  part  d’un  certain  nombre  de  bons  observateurs  provient 
sans  doutede  l’impossibilité,  où  l’on  se  trouvait,  de  constater  la  dilférenCe 
qui  existe  entre  les  animaux  des  Lutraires  et  des  Lavignons  ou  Trigo- 
nelles.  En  effet,  les  animaux  de  ces  deux  genres,  quoique  très  abondants 
dans  tout  l’Océan  d'Europe  et  la  Méditerranée,  n’ont  jamais  été  décrits 
et  figurés.  M.  Quoy,  le  premier,  en  I 839,  dans  le  Magasin  de  zoologie,  a 
publié  une  description  sommaire  de  l'animal  du  Lavignon  de  Cuvier,  en 
l'accompagnant  de  figures,  au  moyen  desquelles  on  peut  reconnaître  une 
partie  des  caractères  de  ce  genre;  mais,  au  sujet  de  l animal  des  véri- 
tables Lutraires,  nous  ne  trouvons  nulle  part  le  moindre  renseignement , 
car  nous  ne  pouvons  accepter  les  caractères  donnés  par  M.  de  Blainville 
à son  genre  Lulricole  comme  suffisants.  Ces  caractères,  par  leur  étendue, 
pourraient  s’appliquer,  et  ils  s’appliquent  en  effet,  à plusieurs  genres,  ce 
qui  témoigne  de  leur  insuffisance.  Pour  nous,  un  genre  ne  peut  être  bon, 
qu'autant  que  toutes  les  espèces  qu’il  contient  sont  jointes  par  des  carac- 
tères identiques , empruntés  aux  formes  extérieures,  et  il  est  impossible 
qu’un  genre  soit  naturel,  lorsqu’il  rassemble  des  espèces  a siphons  réunis 
et  à siphons  disjoints.  II  peut  arriver,  comme  nous  venons  d’en  avoir  un 
exemple  dans  la  famille  des  Ostéodesmes,  que  des  genres  voisins  diffèrent 
par  la  jonction  ou  la  disjonction  des  siphons  ; mais  il  nous  paraît  certain 
jusqu’ici , que  toutes  les  espèces  d’un  genre  bien  fait  ont  sans  exception 
les  mêmes  caractères  extérieurs. 

En  adoptant  la  réforme  du  genre  Lutraire , telle  que  nous  l’avons 
proposée,  il  n’y  reste  plus  que  des  coquilles  Iransverses,  ovales,  oblon- 
gues,  inéquilatérales,  équivalves,  bâillantes  à leurs  extrémités,  presque 
toujours  lisses,  quelques  unes  présentant  des  stries  ou  des  côtes  trans- 
verses. Si  quelques  espèces  sont  épaisses  et  solides  , il  y en  a d’autres 
qui  sont  minces  et  papyracées.  Dans  le  plus  grand  nombre,  le  côté  an- 


nUiTlEMK  KAMILLK. 


térieur  est  le  plus  court;  il  y en  a quelques  unes  chez  lesquelles  c’est  le 
côté  postérieur.  Ces  diverses  formes,  que  nous  venons  de  mentionner 
rapidement,  se  réunissent  en  un  genre  naturel  au  moyen  des  caractères 
que  présentent  la  charnière  et  les  impressions  intérieures  de  la  coquille. 
Toutes  les  espècesdeLutrairesconnues  jusqu  ici  ont  la  surface  externe 
recouverte  d’un  épiderme  gris-jaunâtre  ou  blanchâtre.  Quelquefois  il  est 
lisse  et  couvre  toute  la  surface;  quelquefois  il  est  rugueux  ou  écailleux. 
Dans  les  espèces  minces  et  blanches  l’épiderme  est  moins  apparent,  il 
perd  sa  couleur  et  une  partie  de  son  épaisseur.  Dans  toutes  les  espèces 
cependant  il  déborde  les  valves,  pour  recouvrir  une  portion  assez  notable 
des  bords  du  manteau.  En  arrière  des  crochets  et  le  long  du  bord  dorsal, 
l’épiderme  passe  d’une  valve  à l’autre  et  cache  le  manteau  qui  sans  cela 
paraîtrait  dans  le  bâillement  naturel  de  la  coquille.  Il  en  est  de  même 
du  côté  antérieur.  Les  crochets  sont  peu  saillants , pointus  et  presque 
opposés  ; ils  sont  peu  inclinés  vers  le  côté  antérieur.  Sur  ce  côté,  ne  se 
dessine  point  de  lunule  entièrement  circonscrite,  ainsi  que  dans  beaucoup 
d’autres  genres.  Du  côté  postérieur,  le  corselet  n’est  pas  non  plus  li- 
mité; ces  parties  se  confondent  avec  le  reste  de  la  surface  par  des 
contours  arrondis.  Cependant,  immédiatement  en  arrière  des  crochets  , 
on  remarque,  le  long  du  bord  et  à l’extérieur,  un  petit  sillon  , séparant 
une  petite  nymphe , sur  laquelle  s’attache  un  ligament  externe  rudi- 
mentaire. 

Dans  les  Lulraires  , les  côtés  antérieurs  et  postérieurs  sont  réguliè- 
rement courbes,  arrondis,  d’une  égale  largeur  dans  le  plus  grand 
nombre  des  espèces  ; quelques  unes  sont  plus  rétrécies  du  côté  posté- 
rieur, quelques  autres  offrent  une  forme  inverse;  mais  ces. exceptions 
sont  au  nombre  de  trois  ou  quatre  seulement.  Le  bord  ventral  est  pres- 
que parallèle  au  bord  dorsal,  et  comme  les  valves  sont  fort  bâillantes  , 
elles  ne  se  touchent  que  par  la  charnière  et  dans  la  longueur  du  bord 
ventral.  I!  y a môme  des  espèces,  Lulraria  ohîonga  {soîenoides  de 
Lamk),  par  exemple,  dont  les  valves  ne  se  touchent  que  par  deux  points 
de  leur  circonférence. 

Au  dessous  des  crochets  , le  bord  cardinal  s’élargit  et  présente  un 
cuilleron  oblique , dirigé  d’avant  en  arrière , quelquefois  transverse,  et 
dans  lequel  vient  se  fixer  solidement  un  puissant  ligament  intérieur. 
Le  bord  interne  de  ce  cuilleron  fait  saillie  dans  rintériour  des  valves  et 
rend  ainsi  très  large  le  milieu  du  bord  cardinal.  En  avant  de  ce  cuille- 
ron, et  au  moment  où  il  prend  naissance,  s’élève  perpendiculairement 
sur  le  bord  une  dent  cardinale  comprimée  et  offrant  la  forme  d’un  V. 
Nous  retrouvons  une  dent  semblable  chez  les  Mactres  ; elle  y est  plus 


LES  MACTUACEES. 


ouverte.  Celte  dent  cardinale  so  remarque  sur  l’une  et  l’autre  valve  ; 
seulement  celle  de  la  valve  droite , dentinéo  à recevoir  celle  de  la  valve 
gauche,  forme  un  angle  plus  ouvert  dans  ses  deux  parties.  Dans  la 
LtUraria  oblonga,  par  exemple,  on  ne  trouve  à la  charnière  aucune  trace 
des  dents  latérales,  tandis  que  dans  l'espèce  suivante,  Lutraria  elUptica, 
on  aperçoit  do  chaque  côté  de  petits  plis  assez  saillants,  qui  sont  les 
premiers  rudiments  dos  dents  latérales  desMactres.  Ces  rudiments  de- 
viennent plus  évidents  dans  \QLtttraria  entîs  de  MM.  Quoy  et  Gaimard  , 
quoique,  pour  l’extérieur,  celte  espèce  paraisse  peu  différente  de  VEltip- 
iica.  Mais  si  nous  passons  au  lAitrarui  riigosa  , nous  voyons  se  déve- 
lopper les  dents  latérales  au  moins  autant  que  dans  certaines  Mactres  ; 
aussi  nous  nous  demandons  pourquoi  cette  coquille  a été  maintenue  dans 
les  Lutraires.  Il  est  à croire  que  les  conchyliologues  se  sont  laissé  guider 
à son  sujet  par  la  forme  extérieure , qui , en  effet , rappelle  celle  des 
autres  Lutraires.  En  étudiant  avec  soin  la  charnière  des  seize  Lutraires 
vivantes  qui  nous  sont  connues , on  retrouve  à presque  tous  les  degrés 
les  dents  latérales.  On  les  voit  pour  ainsi  dire  sortir  du  bord  cardinal , 
s’accroître  insensiblement  et  parvenir  à un  certain  degré  de  développe- 
ment presque  égal  à celui  des  Mactres.  Ce  phénomène  se  confirme  lors- 
qu’on ajoute  les  espèces  fossiles  aux  vivantes,  pour  augmenter  la  série 
des  modifications. 

Les  impressions  musculaires  sont  grandes  mais  écartées.  L’antérieure, 
généralement  ovalaire,  plus  ou  moins  étroite,  selon  les  espèces,  descend 
ordinairement  vers  la  région  ventrale.  Elle  occupe  uno  partie  notable 
de  la  hauteur  du  bord  antérieur.  L’impression  musculaire  postérieure 
est  obronde';  elle  est  située  non  loin  du  bord  supérieur , et  à peu  près 
à égale  distance  entre  la  charnière  et  le  bord  postérieur  ; elle  se  place 
parallèlement  au  bord  ventral,  en  laissant  en(re  elle  et  le  bord  des 
valves  un  espace  fort  large  pour  le  muscle  circulaire  du  manteau.  Par- 
venue vers  l’extrémité  postérieure  des  valves , l’impression  palléalc 
rentre  sur  ello-mCme  et  produit  un  sinus  profond  , qui  s'avance  jusqu’à 
la  hauteur  de  la  charnière  dans  le  plus  grand  nombre  des  espèces.  Par- 
venue au  sommet  de  cette  courbure,  l'impression  palléale  se  recourbe 
en  arrière  et  se  porte  obliquement  vers  l'improssion  musculaire  posté- 
rieure, au  milieu  de  la  circonférence  de  laquelle  elle  aboutit.  L'axe  de  la 
sinuosité  palléale  n’est  point  parallèle  au  grand  axe  de  la  coquille  ; il 
forme  avec  lui  un  angio  aigu,  ce  qui  semble  indiquer  chez  ces  animaux 
une  position  oblique  dans  les  siphons.  Si  ces  organes  suivent  la  direction 
qu’indiquent  leurs  muscles  rétractcurs,  ils  doivent  se  diriger  d’avant  en 
arrière  et  de  bas  çn  haut.  On  observe  , dans  le  voisinage  des  grandes 


HUrntME  FAMILLE. 


impressioQs  muscuiaires  , deux  impressions  beaucoup  plus  petites,  pro- 
duites par  les  muscles  rélracteurs  du  pied  ; la  première  occupe  l’angle 
inlerno  et  supérieur  de  l'impression  du  muscle  antérieur  ; souvent  elle 
se  cache  en  partie  sous  l'extrémité  antérieure  du  bord  cardinal.  La  se- 
conde se  confond  davantage  avec  l'impression  musculaire  postérieure; 
néanmoins  , on  remarque  à celle-ci  un  angle  peu  prononcé  au  point 
de  son  pourtour,  qui  correspond  à l’extrémité  postérieure  du  bord 
cardinal.  Cet  angle  est  occupé  par  le  muscle  rétracteur  postérieur  du 
pied. 

Si  les  caractères  que  nous  venons  d’exposer  avaient  été  suffisamment 
étudiés , on  n’aurait  pas  vu  s'introduire  dans  le  genre  Lutraire  un  assez 
grand  nombre  de  coquilles  fossiles  des  terrains  secondaires  et  qui  n’ont 
pas  môme  la  forme  générale  des  Lulraires  vivantes.  On  a vu  , eu  effet , 
les  paléontologistes  inscrire  dans  le  genre  qui  nous  occupe  un  grand 
nombre  d’espèces,  dont  le  moule  seul  était  connu.  Ces  personnes  ne  se 
rendirent  par  compte  des  caractères  que  toute  Lutraire  doit  empreindre 
sur  son  muscle  intérieur.  C’est  ainsi , par  exemple  , que  les  cuillerons 
épais  et  saillants  laissent  dans  le  moule  une  impression  profonde,  que 
l'on  ne  retrouve  jamais  sur  les  fossiles  des  terrains  secondaires,  dont  nous 
venons  de  parler.  Lorsqu’cnfin  on  s'est  aperçu  que  les  fossiles  dont  il 
s’agit  dépendent  du  genre  Pholadomye,  il  en  est  résulté  ce  fait  qui 
n’est  pas  sans  importance  : c'est  qu’aucune  des  véritables  Lulraires  ne 
dépasse  les  terrains  tertiaires  pour  s’enfoncer  dans  les  secondaires.  Par 
conséquent , il  est  aujourd’hui  certaüi,  que  toutes  les  espèces  iiiscriles 
dans  les  catalogues  de  fossiles , et  désignées  comme  dépendantes  des 
terrains  secondaires  , ne  sont  pas  des  Lulraires  et  doivent  être  distri- 
buées dans  d’autres  genres. 

Le  genre  Lutraire,  tel  que  nous  le  limitons  acluellemeut,  est  beau- 
coup moins  nombreux  en  espèces  vivantes  et  ffissiles  qu’on  ne  le  sup- 
posait d’après  les  catalogues  ou  les  divers  ouvrages  des  paléontologistes. 
Mademoiselle  Catlow  , dansle  Conchologist  twmenclator  , inscrit  dix-huit 
espèces  vivantes  ; mais  ce  nombre  doit  subir  une  diminution  assez  no- 
table, car  nous  y trouvons  des  Lavignons,  une  véritable  Teiline  {Luira- 
rki  lelUnoides  Lamk.)  et  plusieurs  doubles  emplois.  M.  Uanley  compte 
quinze  espèces  seulement  dans  son  Index  iestaceologicus,  et  parmi  elles 
se  rencontrent  des  Lavignons  et  môme  le  genre  Lepton  de  M.  Turton , 
lequel  correspond  au  genre  Erycina  de  Lamarck. 

Après  avoir  examiné  toutes  les  espèces  vivantes  citées  par  les  auteurs, 
après  en  avoir  vérifié  la  nomenclature  , nous  voyons  que  six  espèces 
doivent  être  retranchées  des  ouvrages  de  M.  Hanley  et  de  Mademoiselle 


LES  MAGTRACEES. 


367 

Catlow.  Aux  douze  espèces  qui  restent,  il  faut  en  ajouter  deux,  décrites 
par  M.  Jouas , et  plus  tard  nous  ferons  connaître  quatre  espèces  nou- 
velles de  notre  collection. 

Les  dix-huit  espèces  vivantes  de  Lulraires  se  distribuent  dans  toutes 
les  mers;  il  y en  a trois  dans  les  mers  d’Europe  , quelques  unes  ha- 
bitent les  mers  de  l’Amérique  septentrionale,  nous^cn  avons  une  du 
Brésil , il  y en  a deux  dans  les  mers  australes  , et  nous  en  connaissons 
une  du  Cap  de  Bonne-Espérance. 

Nous  pouvons  afflrmer  que  , de  toutes  les  espèces  citées  sous  le  nom 
de  Liitraire  dans  les  terrains  secondaires,  il  n’y  en  a pas  une  seule  qui 
dépende  de  ce  genre.  Sous  celle  dénomination  générique  , nous  trou- 
vons des  Pholadomyes , quelques  Céromyes , plusieurs  Thracies , etc. 
Les  véritajDles  Lulraires  fossiles  ne  commencent  à se  montrer  que  dans 
le  second  étage  tertiaire  , et  elles  se  continuent  dans  l’étage  tertiaire 
supérieur , dans  lequel  on  peut  citer  quelques  espèces  qui  vivent  encore 
actuellement  dans  les  mers  d'Europe. 

Nous  connaissons  sept  espèces  fossiles,  nombre  dans  lequel  ne  sont 
pas  comprises  les  trois  espèces  des  terrains  subapennins  ; ces  sept  espèces 
appartiennent  exclusivement  au  second  étage  tertiaire  ; quatre  sont  du 
bassin  de  l’Adour  ; les  trois  autres  sont  des  faluns  de  la  Touraine. 

Parmi  ces  espèces  , nous  signalerons  : 

1 . Lutraria  solcnoides  Lamk.,  vivante  dans  les  mers  d'Europe. 

Fossile  en  Sicile. 

2.  Lutraria  rugosa  Lamk. 

Vivante  dans  la  Méditerranée. 

Fossile  dans  les  terrains  subapennins  en  Sicile , en  Italie  , en 
Moréo. 

3.  Lutraria  laiissima  Desh. 

Très  voisine  de  l’espèce  vivante  du  cap  de  Bonne -Espérance  ; 
elle  est  fossile  aux  environs  de  Bordeaux, 

4.  Lutraria  crassidens  Lamk. 

Espèce  fossile  des  faluns  de  la  Touraine;  elle  est  voisine  de  la 
variété  du  Lutraria  solenoides , qui  vit  au  Sénégal. 

Lutraire  solénoïde.  Lutraria  ohlonrja , Turton. 

PI.  9.  fig.  9.  10. 

Ij.  testa  oblon^â  j trnfisversâ.,  squùliJè  aîbâ  ^ epidermide  griseo 'vestita^ 
transversini  ru^osâ  y inœquUatrrd  y utroqne  luterc  hiantCy  postico 
ionf’iote,  supernè  concuvu. 


HUITIÈME  FAMILLE. 

Chaîna  longn,  KonJelel.  Hist.  des  poissons,  p.  i5, 

Id.  Gesner,  Noniencl.  aquat.  p.  23r. 

Concha  longa,  Aldrovandc.  De  teslaceis.  p.  453. 

Jd,  Jonslon.  Hist,  nat.deexang.pl.  4. 

GnnUien,  Ind,  lcst.,pl.  90.  f A.  2. 

Rumphiiis  amb,  pl.  4$.  f.  N.® 

Chama  magna  Da  Costa,  Conch.  Lril.  p.  23o.  pl.  17.  f.  4. 

Mya  ohlonga.  Gmelin.  Syst.  nat.  éd.  t3®.  p.  3a2i.  n*  ro. 

?Iactra  hians,  Donovan.  Erit,  sliells.  t.  4.  pl.  140. 

Id.  AVood.  Cliaru.  des  coq.  Invalv.  Linti.  Trans.  t.  6.  p.  104,  pl,  16. 
f.  5.  6. 

Lutraria  solenoides.  Lam.  Syst.  des  anim.  s.  vert.  p.  120. 

Mactra  hians,  Monlagu.  Testac.  brlt.  p.  loi.  n°  9. 

Id,  Maton  etRaekell.  Linu.  Tians.  t.  8.  p.  74,  n“  12. 

Lutraria  solenoides.  de  Roissy  in  Buffou  de  Sonnini , Moll,  t;  6, 

p.  354. 

MfJctra  hians.  Dillwyn.  Cat.  t.  1.  p,  146.  n*  38. 

Latraria  solenoides,  Lamlv.  An.  s,  vert.  l.  5.  p.  468.  i. 
Mactrahians.  Tnrlon.  Conch.  dict.p,  85.  n®  14.  f.  4r, 

Lutraria  ohlonga,  ïurlou.  Conch.  bril.  p.  64.  no  i.  pl.  5.  f.  6. 
Lntricola  solenoides,  Blainvillc.  Malac.  p.  566.  pl.  77,  f.  3. 

Mactra  hians.  Gervillc.  Cat.  des  coq.  de  la  Manche,  p.  22,  n'^  10. 
Lutraria  solenoides.  Collard  des  Cherres.  Cat,  des  test,  du  Finisl.  p.  i3, 
n'^r. 

Reeve.  Conch.  syst.  pl.  41  f.  i. 

Deshayes.  Encycl.  méth.  vers.  t.  2.  p.  387.  n®  i. 

Menke.  Synop.  moll.  p.  119. 

Boucliard-Chautereaux.  Cat. des  moll,  du  Bout.  p.  1 1.  n’^  10. 

Deshayes  dans  Lam.  Anim.  s.  vert,  a*  éd.  t.  6.  p.  90.  n®  i. 

Lutraria  hians.  Thompson.  Hep.  on  the  fauna  of  Irel.  p.  263, 

Hanley,  Descript.  catal  p.  a6.  iio  i. 

Anton.  Verzeichn.  der  Conch.  p.  3.  n“  87. 

Philippi.  Moll.  Sicil.  t,  q.  p.  7, 

Lutraria  hians,  Fleming,  Bril.  anim.  a®  éd,  p.  4^5. 

Tliorpe.  Brit.  mar.  conch.. p.  44.  n*  i. 

Fossilîs  : Mactra  ohlonga.  Brocchi.  Conch.  foss.  snhap.  t.  2.  p.  536  ? 
Bronn.  liai.  tert.  Gcbirge.  p.  88.^ 

Dujardin.  Mém.  gcolog.  sur  la  Touraine,  p.  4^.  u®  a ? 

Philippi.  Enuin.  moll.  Sicil.  t.  2.  p.  7. 

Sismoiida.  Synops.  mclh  pedcin.  foss.  p.  16. 


LES  MACTRàCÉES. 


aGg 

Ainsi  que  le  témoigne  notre  synonymie  , cette  espèce,  eonnue  des 
anciens  naturalistes , a reçu  plusieurs  noms  spéciûques  , parmi  lesquels 
le  plus  ancien  doit  être  choisi.  Nous  no  parlerons  pas  des  dénominations 
antérieures  à l'immortelle  nomenclature  de  Linné  ; elles  n’ont  aucune 
valeur.  Linné  n’ayant  pas  mentionné  cette  espèce , il  faut  chercher  son 
nom  dans  l’ordre  chronologique  dans  les  ouvrages  de  ses  successeurs. 
Nous  trouvons , pour  la  première  fois  , Tespcce  qui  nous  occui)e  figurée 
et  décrite  en  4782  , dans  le  tome  II  du  grand  ouvrage  de  Chemnitz , 
sous  le  nom  de  Mya  oblonga.  Adopté  par  Gmelin  , ce  nom  ne  fut  point 
admis  par  Donovan.  Lamarck  , embarrassé  sans  doute  en  présence 
d’une  nomenclature  incorrecte  , au  lieu  de  remonter  au  nom  le  plus  an- 
cien , crut  trancher  la  difficulté  en  proposant  un  nom  nouveau , celui  do 
Lutraria  solenoides  ; mais  on  concevra  l’impossibilité  d’admettre  un 
semblable  précédent.  M.  Turlon  fut  le  premier,  dans  son  Histoire  des 
bivalves  de  la  Grande-Bretagne  ^ qui  revint  au  premier  nom  spécifique. 
La  justice  exige  que  ce  nom  soit  actuellement  maintenu  dans  une  bonne 
nomenclature. 

Cette  espèce,  très  commune  dans  tout  l’Océan  d'Europe , se  rencontre 
aussi  dans  les  régions  plus  chaudes  des  îlesduCap-VertetmèmeduSéné- 
gal.  Ellehabite  particulièrement  vers  l’embouchure  des  fleuves  et  des  ri- 
vières. Les  personnes  qui  ignorent  celte  particularité  la  chercheraient 
vainement  ailleurs.  Elle  est  trop  connue  peur  mériter  de  notre  part  une 
description  détaillée  ; il  nous  suffira  de  rappeler  ses  principaux  carac- 
tères. On  la  reconnaît , parmi  ses  congénères  , à sa  forme  générale  , 
courbée  à la  façon  du  Soîen  cuUellus  ; ovale-oblongue  , elle  est  trans- 
verse , inéquilatérale  ; le  côté' postérieur  est  le  plus  long  , et  son  bord 
supérieur  est  concave  ; le  bord  antérieur  est  court , arrondi , moins 
cependant  que  le  postérieur;  le  bord  inférieur  est  régulièrement  arqué 
dans  toute  sa  longueur , et  il  n’est  point  parallèle  au  bord  supérieur. 
Les  valves  , fort  épaisses  et  très  solides , sont  très  bâillantes , car  elles 
ne  se  louchent  que  par  deux  points  de  leur  circonférence  ; elles  sont 
médiocrement  bombées  , et  leur  surface  , d'un  blanc  jaunâtre  ou  gri- 
sâtre, est  recouverte  d'un  épiderme  gris- noirâtre,  écaillé  , peu  épais  , 
qui  presque  toujours  manque  sur  les  crochets.  La  surface  externe  e.'^t 
irrégulièrement  striée  et  rugueuse  par  des  accroissements.  Les  crochets 
sont  peu  protubérants  , pointus  et  opposés  ; ils  s’inclinent  en  avant.  Le 
corselet  est  allongé,  lancéolé,  et  présente  une  surface  presque  plane.  Il 
n'existe  aucune  trace  de  lunule.  L’impression  musculaire  antérieure  est 
semi-lunaire,  la  postérieure  est  sub-circulaire.  A l extrémité  inférieure 
(le  l’impression  antérieure  commence  l'impression  palléale  ; parallèle  au 


•y.ro 


HUITIÈME  FAMILLE. 


bord  ventral . elle  est  remontée  très  haut  vers  l’intérieur  des  valves. 
Parvenue  en  arrière , elle  so  recourbe  pour  se  diriger  en  avant  ; mais 
dans  la  première  partie  de  son  trajet , elle  se  confond  avec  la  ligne  du 
bord  ventral.  Parvenue  à la  hauteur  de  la  charnière , elle  se  recourbe, 
et  se  dirige  obliquement  vers  le  milieu  de  la  circonférence  de  l’impres- 
sion du  muscle  postérieur.  La  dent  en  forme  de  V de  la  valve  gauche 
est  très  comprimée  et  presque  entièrement  remplie  de  matière  calcaire. 
A côté  d’elle  , et  sur  le  bord  du  cuilleron  , s’élève  une  dent  fort  mince 
et  oblique  qu’il  est  rare  de  conserver  entière,  à cause  de  sa  faible  épais- 
seur. La  dent  en  V delà  valve  droite  est  plus  large  et  plus  ouverte  ; elle 
est  accompagnée,  en  avant,  d’une  petite  dent  mince  et  étroite,  relevée  en 
crochet,  qui  est  peut-être  un  rudiment  de  la  dent  latérale  des  Mactres. 
Si  la  Lutraire  oblonguo  se  distingue  facilement  de  ses. congénères  par 
les  caractères  de  sa  coquille,  l’animal  offre  aussi  des  particularités  qui 
ne  permettent  pas  de  la  confondre  avec  aucune  autre.  Ses  palpes , d'un 
blanc  laiteux  , sont  poiiUillées  de  violet;  ses  siphons  , fort  allongés  et 
fort  gros  , sont  rougeâtres  ou  violacés  , et  les  ouvertures  qui  les  ter- 
minent ne  restent  pas  parallèles  , mais  se  placent  sous  un  angle  presque 
droit , l’une  par  rapport  à l’autre.  Les  tentacules  du  siphon  branchial 
sont  courts  et  violacés  ; ils  sont  digités»,  mais  à digitations  courtes, 
pointues.  Enfin  , les  deux  siphons  semblent  conserver  a l’extérieur 
une  communication  directe , au  moyen  d'une  rigole  profondément 
creusée  de  l’un  â l’autre,  dans  la  longueur  de  la  courte  bifurcation  qui 
les  sépare. 

Lutraire  ridée.  Lutraria  rugosa  , Lamarck. 

PL  10.  fig.  7.  8. 

L.  Testa  ovato  transversây  inœquUaterâ^  turgidulâ  ^ albido^  flaves~ 
cente^  utroque  latere  hîante , postico  iongiorCy  cnstulis  longituàina- 
îihus  eîevatisy  radiantibiis,  transversus  minus  eJevatas  decussantibits  ; 
latere  postico  nudoy  cardine  dentihus  lateralibus  ^ brevibiis  instructo, 

Mactra  rugosa.  Spengler.  Soc,  d’hisL  nat.  de  Copeoh.  t.  5.  "i*  part. 

p.  I r 8.  n®  24. 

Id.  f^raelitï  p.  326r.  11"  23. 

Chemnitz,  Conch.  0.  pi  ai.  f a35 
Encvflop.  pl.  aSj.  f.  a.  a.  b. 

Mttura  rugosa.  Dillwyii.  Cal.  l r.  p.  145  n“  34, 
î-aniarck.  Anim.  s.  verl.  t.  5,  p,  3. 


LES  MACTRaCÉES. 


3''  ! 


Rowiîirh.  Klrm.  of  Conoh.  a*  part,  pL  7.  f.  14. 
hutricaln  rngosa.  Rîainville.  Malac.  p. 
yiactrn  rugo^n  Wood.  Iiut.  Ifslap  pî.  t’,  33. 

Lntraria  rugnsn.  De.*>have.s.  Knc.  mélb.  vers.  t.  2.  p.  38;.  n'’  3. 

Menke.  Synop.  inoll.  p.  i rp. 

. Deshayes.  TaW.  compar.  dans  Lyell.  g<‘ol.  I.  .3.  App.  p.  2. 

Id.  daii'5  Lamarck.  Anini.  s,  verl.  t.  p.  91.  n®  3. 

Kanley.  Dcscript,  ratai,  p.  26.  n"  3. 

Fnssllis  Sisinonda.  Syriop.  mrlh,  pedrm  foss.  p.  17- 
Deshavrs.  Exped.  -srient.  de  Moréé.  zool.  p.  S8.  11“  i5. 

Dujardin.  Mrm.  gôM.  snr  la  Toiirainr,  p 45.  n®  i. 

En  inscrivant  celle  espèce  dans  son  Histoire  des  oniyiuiux  sans  ver- 
tèbres , Lamarck  dit  qu'elle  est  commune  clans  l'Océan  d'Europe.  Il 
est  vrai  cependant  que  jusqu'ici  elle  est  restée  rare  dans  les  collec- 
tions, et  elle  n'a  été  mentionnée  dans  aucun  des  catalogues  qui  ont 
pour  objet  de  faire  connaître  les  espèces  de  nos  mers  ; elle  n’est  dans 
aucun  dés  catalogues  d’Angleterre  : la  même  absence  se  remarque  dans 
ceux  de  la  Suède  et  de  la  Norwège.  Les  catalogues  de  France  ne  la 
mentionnent  pas  davantage,  et  jusqu'ici  elle  ne  se  trouve  dans  aucun 
des  nombreux  ouvrages,  publiés  sur  les  productions  de  la  Méditerranée; 
on  pouvait  donc  supposer  d'après  cela  que  Lamarck  avait  commis  une 
erjeur  au  sujet  de  l'habitation  de  l’espèce^  et  la  plupart  des  conchylio- 
logues  la  supposaient  originaire  des  mers  de  l'Inde.  Nous-même  avons 
été  longtemps  dans  cette  croyance.  Cependant  nous  pouvons  l'affirmer, 
actuellement  le  Lutraria  rugosa  habile  la  Méditerranée , sur  les  côtes  de 
l’Algérie,  particulièrement  à Bône,  vers  l’embouchure  do  la  Seybouse. 
Son  analogue  fossile  se  trouve  assez  fréquemment  aux  environs  d'Asti , 
dans  les  sables  jaunes  de  la  formation  tertiaire  subapennirîe. 

Lé  Lutraria  rugosa  est  l’espèce  qui  se  distingue  avec  le  plus  de  fa- 
cilité ; ovale , oblonguc , inéquilatérale , obtuse  et  arrondie  à ses  extré- 
mités, elle  est  moins  bâillante  que  la  précédente  espèce:  elle  est 
])liis  renflée  que  la  plupart  des  Lutraires;  d’un  fauve  grisâtre  en 
dehors  , elle  est  blanche  en  dedans  ; les  crochets  sont  médiocres,  lisses 
îMi  sommet  ; à une  faible  distance  naissent  un  grand  nombre  de  petites 
côtes  longitudinales,  étroites,  peu  écartées  , quelquefois  très  rappro- 
chées, mais  qui,  dans  leur  disposition  générale,  sont  très  variables, 
('es  Cüles  longitudinales  croisent  à angle  droit  des  stries  Irans- 
verses  moins  régulières  et  moins  apparentes.  Le  côté  antérieur  ainsi 
que  le  postérieur  sont  dépourvus  de  côtes  et  de  stries;  ils  sont  lisses. 


HUITIÈME  FAMILLE. 


Le  bord  cardinal  est  épais  ol  solide  , le  cuilleron  est  grand  , profond  , 
sublriangulairc , très  proéminent  à Tintérieur,  la  dent  en  forme  de  Y, 
très  comprimée  et  presque  ontièrement  remplie.  En  avant  s’élève  un 
rudiment  assez  considérable  do  la  dont  latérale  antérieure.  Du  côté 
postérieur  la  dent  latérale  est  beaucoup  plus  grosse , et  ressemble  déjà 
à celle  de  quelques  Mactres.  Les  impressions  musculaires  sont  fort 
grandes  ; l’antérieure  ovale,  semi-lunaire,  descend  dans  toute  la  hauteur 
du  côté  antérieur  ; la  postérieure  est  circulaire  très  rapprochée  du  bord 
dorsal;  l’impression  palléalo  est  plus  rapprochée  du  bord  ventral  de  la 
coquille  que  dans  les  autres  espèces;  elle  s’avance  très  en  arrière, 
et  parvenue  au  niveau  du  bord  postérieur  de  l’impression  musculaire, 
elle  commence  seulement  à s'inüéchir  en  dedans;  elle  remonte  oblique- 
ment et  s'arrête  eh  arrière  de  la  charnière.  Le  test  de  cette  espèce  est 
épais  et  solide.  Les  individus  fossiles  sont  en  général  plus  grands  que 
les  vivants. 


GENRE  VINGT-HUITIÈME. 

MACTKE.  Mactra,  (Lin.) 

PL  lo.  fig.  4.  5,  6,  S, 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES.  — Animal  ovale-trigone , ayant 
les  lobes  du  manteau  garnis  d’une  double  rangée  de  tentacules 
simples  et  coniques.  Les  lobes  réunis  vers  le  tiers  postérieur  de 
leur  longueur  et  terminés  par  deux  siphons  presque  égaux , 
réunis  dans  toute  leur  longueur,  et  revêtus  d’une  couche  épi- 
dermique. Ouverture  des  siphons  garnie  d’une  rangée  de  ten- 
tacules simples;  ceux  du  siphon  branchial  sont  quelquefois 
faiblement  branchus  ; le  siphon  anal  est  terminé  en  une  calotte 
membraneuse,  percée  au  sommet.  Pied  grand,  triangulaire, 
coudé;  bouche  ovale,  très  petite;  palpes  labiales,  grandes, 
triangulaires,  et  dont  la  surface  interne  est  couverte  de  plis 
serrés  et  nombreux.  Quatre  branchies  longues  , étroites,  iné- 
gales , réunies  en  arrière  de  la  masse  abdominale. 

Coquille  ovale  , subtrigone  , un  peu  biullante  de  cliaque  côté; 


lÆS  MACTRACÉEfi  27^ 

charnière  large,  présentant  au-dessous  du  crochet  une  grande 
fossette  triangulaire  pour  un  ligament  interne , et  à côté  une 
dent  en  forme  de  V ; deux  dents  latérales , grandes  et  compri- 
mées, intrantes  et  rapprochées  de  la  charnière;  impression 
palléale  ayant  en  arrière  une  sinuosité  large,  subhorizontale  et 
peu  profonde. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — La  Féifctc/e , Rondelet, — Pecfun- 
culitSj  Lister, — Conclia,  Tellina  [pars] , Gualtieri. — Chaîna , 
Gualtieri,  d’Argenville,  Adanson.  — Isocardia  [pars]^  Klein. 
— Trigonella  [pars)  ^ Da  Costa,  Humphrey.  — Cardhnn  y 
Linné  (syst.  nat.  ed.  10.  Faun,  suec.).—  Callistay  Callisio- 
derma , Poli.  — Linné,  Gmelin,  Bruguière,  Spengler, 

Lamarck,  Cuvier,  Blainville,  Menke,  Latreille,  Deshayes, 
Hanley,  Fleming,  Sowerby,  etc. — Mxdinay  Spisula^  Gray. — 
Schizodesma  ^ Swainson.  — Hemimactray  Swainson. 

oBSEnvATioNs.  — De  tous  les  genres  créés  par  Linné  dans  la  classe 
des  vers  testacés,  celui-ci  est  un  des  plus  naturels,  et  le  seul  peut-être, 
auquel  il  eût  été  bon  de  n’apporter  aucun  changement.  Ce  nom  de 
Mactre , choisi  par  Linné  pour  l’appliquer  à un  genre  bien  déterminé, 
avait  été  diversement  employé  avant  lui  par  quelques  auteurs  de  con- 
chyliologie; celte  dénomination  s’appliquait  indistinctement  à des  co- 
quilles triangulaires,  rappelant  par  leur  forme  générale  celle  d’un  fer 
de  hache  ; il  y eut  même  des  auteurs , tels  que  Klein , par  exemple , qui 
y rapportaient  des  Arches  et  des  Pétoncles.  Il  fallut  donc  qu’en  em- 
pruntant aux  naturalistes  ses  prédécesseurs  une  dénomination  généri- 
que trop  vague  , Linné  la  restreignît , et  c’est  ce  qu’il  fit , comme  nous 
le  verrons  bientôt. 

Quelciues  unes  des  espèces  des  véritables  Mactres  habitent  nos  mers 
d’iùirope  , où  elles  sont  très  abondantes,;  l’une  d’elles  n'a  point  échappé 
à Rondelet , qui  en  a donné  une  figure  assez  reconnaissable , sous  le 
nom  de  Vélade , dans  son  Ui$ioire  des  Poissons.  Cette  figure  reproduite, 
mais  souvent  d’une  manière  imparfaite,  dans  les  ouvrages  de  Gesner, 
d'.Mdrovande,  de  .Tonston,  etc.,  ne  mérîleguère  d’être  citée  dans  une 
synonymie  correcte.  Lister,  dans  son  Traité  des  animaux  d' Angleterre , 
ain.si  quQ  dans  son  grand  ouvrage  de  conchyliologie,  a rendu  une  figure 

iH* 


T.  I.  ‘A*  PARTIE. 


HUlTIÈMIi  FAMILLE. 


274 

plus  exacte  de  la  Vétade  de  Jiondelet  ; il  a ajouté  celle  d’une  espèce 
plus  commune  encore,  connue  sous  le  nom  vulgaire  de  Lisor.  Bonanni , 
dans  deux  de  Ses  ouvrages , Réaumur,  dans  son  mémoire  plein  d’intérét 
sur  la  formation  des  coquilles,  publié  en  1710,  dans  les  Mémoires  de 
l'Académie;  Guallieri , Ginnani,  auxquels  on  peut  joindre  Rumphius  et 
Petiver,  ont  donné  des  renseignements  plus  ou  moins  utiles  sur  les  co- 
quilles du  genre  Mactre  ; ils  en  ont  faitconnaître  des  espèces  par  des  fi- 
gures, dont  la  plupart  se  ressentent  des  imperfections  du  dessin,  tel  qu’il 
s’appliquait  alors  à l’étude  de  l'histoire  naturelle.  Nous  arrivons  enfin  à 
l’ouvrage  d’Âdanson,  publié  en  1757,  c’est-à-dire  à l’époque  où  Linné 
préparait  la  1 0*  édition  du  Sysiema. 

Pour  le  plus  grand  nombre,  les  genres  d’Adanson  sont  fondés  sur 
une  habile  observation  des  caractères  zoologiques  des  mollusques. 
Personne  n’ignore  à quel  haut  degré  Adanson  portait  l’art  de  la  méthode 
et  combien  sous  ce  rapport  ses  ouvrages  sont  supérieurs  à son  siècle. 
Pour  les  coquilles  bivalves,  ce  grand  naturaliste  ne  poussa  pas  les  di- 
visions aussi  loin  qu’il  eût  été  nécessaire  pour  satisfaire  à tous  les 
caractères  des  animaux  de  cette  classe.  Sous  le  nom  de  Chama,  il  con- 
stitua un  genre  très  étendu , dans  lequel  il  rassembla  un  grand  nombre 
de  types  que  M.  de  lilainville  réunit  dans  sa  famille  des  Concbacés. 
C’est  dans  le  genre  Chama  que  se  trouvent  à coté  de  Venus,  de  Cythérées, 
de  Lucines,  etc.,  deux  espèces  de  véritables  Madrés. 

La  1 0'  édition  du  Sijstema  nulurcB  parut  une  année  après  l’ouvrage 
d’Âdanson.  Le  genre  Maclro  ne  s’y  trouve  pas  encore,  et  le  peu  d’es- 
pèces que  Linné  connaissait  est  compris  dans  le  genre  Cardium.  Ce 
genre  Mactre  n’existe  ni  dans  le  Muséum  Utricæ , ni  dans  la  I T édition 
du  Systema , ni  môme  dans  la  2°  édition  du  Fauna  sitecica.  Il  est  inscrit, 
pour  la  première  fois , dans  la  1 2*  édition  du  Systema  naturœ,  publiée 
en  1767. 

Caractérisé  rigoureusement , lo  genre  Mactre  de  Linné  ne  contient 
qu’une  seule  espèce  contestable,  et  encore  avant  de  la  rejeter,  faudrait- 
il  être  convaincu  qu  elle  doit  constituer  un  genre  distinct , ainsi  que  l’a 
proposé  Lamarck.  L’espèce  dont  il  s’agit  [Mactra  hUrorio)  est  devenue 
le  type  du  genre  Lulraire.  Peut-être  serait-il  plus  convenable  de  revenir 
à la  classification  des  espèces,  proposée  par  Spengler.  Ce  judicieux  na- 
turaliste partage  les  Mactres  en  deux  sections  ; la  première,  pour  les 
espèces  oblongues,  contiendrait  les  Lutraires  de  Lamarck  ; la  seconde, 
pour  les  espèces  triangulaires , renfermerait  les  Mactres  du  même 
auteur.  Les  successeurs  de  Linné  s’empressèrent  d’adopter  le  genre 
Mactre;  mais  tous  n'en  ont  pas  respecté  la^siinplicité ; quelques  uns,  et 


LRS  MACTR AGEES. 


particulièrement  Gmelin , dans  la  1 3*  édition  du  Systema , ont  introduit 
dans  le  genre  qui  nous  occupe  des  coquilles  qui  n'en  offrent  pas  les 
caractères.  Cet  exemple  fut  suivi  par  Bruguière  qui , dans  les  planches 
de  l’Encyclopédie,  confond  avec  elles  des  Crassatelles  Mais  bientôt 
toute  confusion  dut  cesser  en  présence  du  beau  travail  de  Poli,  dans 
lequel  il  représenta  l’animal  vivant  de  la  plus  grande  espèce  de  Mactre 
des  mers  de  l’Europe , et  en  donna  une  anatomie  , si  ce  n’est  complète, 
du  moins  suffisante  pour  déterminer  la  place  que  le  genre  doit  occuper 
dans  la  méthode.  Nous  trouvons  dans  l’ouvrage  do  Da  Costa  sur  les 
coquilles  de  la  Grdnde-Bretagne , un  genre  Trigonella  , dans  lequel  à 
quelques  Mactres  est  joint  le  Chama  pîperaia  des  anciens  conchylio- 
logues.  Humphrey,  dans  le  Muséum  Calounianum , a suivi  l’exemple 
de  Da  Costa  et  a préféré  le  nom  générique  de  ce  naturaliste,  pour  un 
genre  semblable  au  sien  , contenant  à la  fois  des  Mactres  et  des  Lavi- 
gnons.  Poli  qui,  pour  l'arrangement  des  Testacés  desDeux-Siciles,  créa 
une  nomenclature  spéciale,  tout  en  conservant  celle  de  Linné,  imposa 
le  nom  de  Callista  aux  mollusques  des  Mactres  et  celui  deCalIistoderme 
aux  coquilles  du  même  genre.  Ces  exceptions  à la  nomenclature  de 
Linné  sont  les  seules  que  nous  ayons  à signaler 

Depuis  la  publication  de  rouvrag^e  de  Poli , Spengler,  en  1 802,  donna 
dans  les  Mémoires  de  la  Société  d' histoire  naturelle  de  Cope7}hagi{e , une 
monographie  très  bien  faite  des  Mactres.  Dans  cet  écrit , le  savant  natu- 
raliste conserve  au  genre  de  Linné  toute  son  étendue  ; seulement,  ainsi 
que  nous  le  disions,  il  partage  les  espèces  en  deux  groupes,  d’après  leurs 
formes.  Malgré  cet  exemple,  presque  tous  les  naturalistes  adoptèrent  le 
changement  proposé  par  Lamarck,  c’est-à-dire  la  séparation  des  Lu- 
traires.  Cependant  celte  réforme  ne  parut  pas  suffisante  à un  zoologiste 
anglais,  à qui  la  science  est  redevable  de  travaux  importants  et  d’un  mé- 
rite incontestable.  M.  Gray,  dans  un  article  très  court,  publié,  en  1837, 
dans  le  Magasin  dliistoire  naturelle,  se  servit  de  quelques  caractères  peu 
importants , selon  nous , empruntés  à la  disposition  du  ligament,  pour 
diviser  les  Mactres  en  plusieurs  genres  que  nous  avons  déjà  eu  occasion 
de  mentionner,  en  traitant  des  Lutraires.  Mais  jusqu’ici , peu  de  zoolo  - 
gistes  onladopté  ces  nouvelles  divisions,  qui  ne  pourraient  avoir  quelque 
valeur,  qu'aulant  qu’elles  s’appuieraient  sur  des  caractères  tirés  des 
animaux;  or,  il  n’est  rien  dans  le  Maclra  Spengleri,  par  exemple,  qui 
fasse  supposer  un  animal  différent  de  celui  du  jl/ac(ro  lactea  ou  d’autres 
espèces  analogues.  Nous  ne  pouvons  donc  admettre,  dans  l’état  actuel 
de  nos  connaissances  , les  nouveaux  genres  proposés  par  M.  Gray. 

Si  tous  les  naturalistes  se  sont  trouvés  d’accord  pour  accepter  le  genre 

i8* 


HriTlÈMK  FAMILLK. 


2;n 

Macire  , ils  n’onl  pas  tous  en  la  même  pensée  pour  en  déterminer  les 
rapports  dans  la  méthode.  Linné  d'abord  en  confondit  les  espèces  parmi 
les  Cardium  et  rapprocha  naturellement  les  Mactres  de  ce  dernier  genre. 
Son  opinion  prévalut  longtemps;  c’est  aux  travaux  de  Poli  que  l’on  doit 
un  changement  notable  dans  l’opinion  des  classificateurs.  Poli  rapproche 
les  Mactres  du  (7y(/ïrrea  chione,  parce  que  l'un  et  l’autre  animal  se 
prolonge  en  arrière  en  deux  siphons  réunis.  Cuvier  et  M.  de  Blainvllle, 
se  fondant  aussi  sur  ce  caractère , ont  entraîné  les  Mactres  dans  le 
voisinage  des  Venus,  quoiqu’elles  eussent  le  ligament  intérieur,  tandis 
que  les  Venus  le  portent  à l’extérieur.  Lamarck  attache  avec  juste  raison 
plus  d’importance  à la  position  du  ligament;  et  comme  il  s’aperçut  des 
rapports  intimes  qui  lient  les  Lutraires  aux  Mactres,  il  ne  voulut  pas 
séparer  ces  deux  genres  et  les  entraîna  tous  deux  assez  loin  des  Venus, 
dans  sa  famille  des  Alactracés.  Depuis  les  travaux  de  Cuvier  et  de  La- 
marck,  les  opinions  se  trouvèrent  partagées  et  il  était  difficile  de  se 
décider  en  faveur  de  l’une  d’elles , parce  que  l’animal  des  Lutraires 
était  complètement  inconnu , et  qu’on  ignorait  par  conséquent  si  les 
rapports  indiqués  par  les  coquilles  se  trouveraient  exacts  à l’égard  des 
animaux.  II  sera  facile  actuellement  aux  zoologistes  de  choisir  entre  les 
deux  opinions  que  nous  venons  de  rapporter  ; ils  trouveront  dans  cet 
ouvrage  les  éléments  d’une  comparaison  assez  complète.  Ils  verront  si, 
comme  l’a  cru  Poli , les  Mactres  sont  plus  voisines  des  Cythérées  que 
les  Lutraires. 

Les  Mactres  sont  des  coquilles  généralement  minces;  elles  acquièrent 
quelquefois  une  taille  assez  considérable;  presque  toutes  sont  lisses;  quel- 
ques unes  offrent  des  côtes  transverses,  que  l’on  voit  se  répéter  exacte- 
ment à l'intérieur  des  valves , par  suite  de  'la  faible  épaisseur  du  lest. 
Aucune  jusqu'ici  n’est  pourvue  de  stries  ou  de  côtes  longitudinales. 
Leur  forme  est  triangulaire  pour  le  plus  grand  nombre;  dans  une  série 
considérable  d’espèces,  on  voit  cette  forme  subir  des  modifications 
insensibles , devenir  plus  oblongue , plus  ovalaire , et  arriver  enfin  à la 
forme  allongée  et  Iransverse  des  Lutraires.  Presque  toutes  les  espèces 
sont  subéquilatéralcs:  la  lunule  et  le  corselet  sont  presque  égaux  et 
presque  toujours  nettement  circonscrits.  La  surface  extérieure  est  re- 
vêtue d’un  épiderme  plus  ou  moins  épais , caduc  sur  les  crochets , mais 
toujours  apparent  sur  le  bord  des  valves,  qu’il  dépasse  d’une  manière 
assez  notable  pour  cacher  la  partie  exserlile  du  manteau.  En  arrière , cet 
épiderme  passe  d’une  valve  à l’autre,  et,  se  prolongeant  en  une  gaine 
digitiforme,  il  revêt  les  siphons  dans  toute  leur  étendue,  comme  dans 
les  Lutraires.  Les  valves,  toujour.^  égales , sont  mieux  fermées'que  dans 


LES  MACn\ALEKS.  277 

la  plupart  des  Lulraircs;  cependant  elles  sont  baillantes  en  avant  et  c-n 
arrière.  Les  bords  sont  toujours  simples,  minces  cl  tranchants:  la  co- 
quille étant  triangulaire,  le  bord  antérieur  descend  obliquement  d'ar- 
rière eu  avant,  et  vient  aboutir  à un  angle,  obtus,  résultant  de  sa  jonction 
avec  le  bord  ventral.  Le  bord  postérieur  suit  une  direction  opposée;  il 
naît  des  crochets  et  descend  obliquement  d'avant  en  arrière,  où  il  se 
termine  aussi  en  un  angle  obtus,  lorsqu'il  se  confond  avec  le  bord  ven- 
tral. Ce  dernier  est  régulièrement  courbé,  à peu  près  comme  le  tran- 
chant d’une  hache,  et  il  est  à présumer  que  c'est  celte  l'orme  générale 
qui  a déterminé  Linné  à préférer  pour  ce  genre  le  nom  de  Macira,  dont 
la  sigtiificalion  est  bien  connue.  Les  crochets  peu  saillants , inclinés  en 
avant , occupent  le  sommet  du  triangle.  Lu  surface  interne  est  généra- 
ment  blanche  et  peu  colorée,  jamais 'nacrée;  on  y observe,  comme 
toujours,  deux  impressions  musculaires  et  unepalléalo.  Les  impressions 
musculaires  sont  assez  grandes , à peu  près  à égale  distance  de  la  char- 
nière ; toutes  deux  sont  comprises  dans  la  région  supérieure  de  la  co- 
quille; elles  sont  presque  égales,  ovalaires  ou  obrondes;  do  Textrémité 
inférieure  de  l'impression  musculaire  antérieure  , il  part  une  impression 
palléale  qui  se  place  parallèlement  au  bord  ventral,  l'accompagne  dans 
les  deux  tiers  de  sa  longueur,  s'infléchit  ènsuite  obliquement,  remonte 
plus  ou  moins  haut  dansrinléricur  des  valves  et  se  recourbe  pour  aboutir 
au  milieu  de  la  circonférence  du  muscle  adducteur  postérieur.  La 
sinuosité  palléale  postérieure  est  étroite  et  dirigée  horizontalement  ou 
obliquement  de  haut  en  bas,  et  d’avant  en  arrière.  Deux  petites  im- 
pressions étroites  viennent  se  confondre  à l’extrémité  supérieure  des 
grandes  impressions  musculaires;  elles  sont  dues  aux  muscles  rétrac- 
leursdupied. 

La  charnière  est  fort  compliquée  dans  les  ^factres  ; elle  est  supportée 
par  un  bord  cardinal  assez  large,  sur  lequel  s’élèvent  des  dents  cardi- 
nales et  des  dents  lalcrales.  Le  milieu  est  creusé  par  une  cavité  trian- 
gulaire un  peu  oblique  et  destinée  à recevoir  un  ligament  intérieur. 
Toutes  ces  parties  que  nous  venons  do  mentionner  sont  variables  à des 
degrés  divers  selon  les  espèces.  Les  dents  cardinales  sont  situées  du 
côté  antérieur,  immédiatement  au-dessous  du  crochet;  elles  affectent 
une  forme  particulière  que  l’on  ne  rencontre  que  dans  ce  genre  et  celui 
des  Lulraircs.  Elles  sont,  en  effet,  en  forme  de  V,  celle  do  la  valve 
gaucho  étant  un  peu  plus  grande  pour  recevoir  la  dent  de  la  valve 
opposée.  Quelquefois  celte  dent  manque  complètement , comme  dans  le 
.1/acrm  gigantea,  par  exemple , et  cette  coquille  reste  parmi  les  Madrés 
parce  que,  à l’exception  de  la  dent  cardinale,  elle  en  conserve  tous  les 


Hl  lTIEMK  FAMÏLLK. 


ajS 

autres  caractères.  Dans  d’autres  .espèces  , telles  que  le  Alactm  strialella 
do  Lamarck , la  dent  cardinale  se  montre  à l’état  rudimentaire  ; il  arrive 
môme  que  l'un  de  ses  côtés  se  confond  avec  les  commencements  de  la 
dent  latérale  aiUéricurc.  Dans  le  Maclra  elongaia  de'MM.  Quoy  et  Gay- 
mard, les  dents  cardinales  ont  subi  une  forte  compression,  ce  qui  les 
fait  ressembler  à celles  deqvielquos  Lutraires.  C’est  principalement  dans 
les  coquilles  dont  le  test  s’apaissit  avec  l’âge,  que  se  montrent  les  mo- 
difications dont  nous  venons  de  parler.  Celles  qui  sont  minces  ont  la 
dent  cardinale  plus  lamelleuse  et  d’une  grosseur  plus  constante.  La 
fossette  du  ligament  peut  être  comparée  à celle  des  Lutraires;  car,  dans 
le  plus  grand  nombre  des-  espèces , le  bord  do  ce  cnilleron  est  saillant 
dans  l'intérieur  des  valves  , ce  qui  donne  au  ligament  une  plus  grande' 
surface  pour  s’attacher.  Dans  quelques  espèces  , telles  que  le  Mactra 
heîvacea,  par  exemple,  le  cuilleron  ne  dépasse  pas  le  bord  cardinal; 
mais  alors  celui-ci  devient  largo  et  très  proéminent  au-dessus  de  la  cavité 
des  crochets.  La  fossette  du  ligament  est  (oujours  triangulaire,  un  peu 
oblique  d’avant  en  arrière.  Le  sommet  s’enfonce  jusque  vers  la  pointe 
des  crochets , et , dans  quelques  espèces , il  est  possible  d’en  suivre  la 
cavité  jusqu'à  son  commencement.  Dans  le  Macira  Spengleri,  le  cuüle- 
ron  , au  lieu  de  s’avancer  horizontalement  sur  le  bord  cardinal  , s’en- 
fonce obliquement  jusqu’au  sommet  des  crochets , et  dans  toute  salon- 
gueur  il  reste  ouvert,  de  manière  à se  montrer  à l’extérieur,  au  moyen 
d’.uuo  fente  également  triangulaire.  Si , par  artifice , on  venait  à rompre 
la  lame  calcaire , peu  épaisse , qui  recouvre  dans  les  autres  Mactres  une 
partie  du  sommet  du  cnilleron  , on  obtiendrait  une  disposition  analogue 
à celle  du  Mactra  Spengleri,  ce  qui  prouve  le  peu  d’utilité  du  genre  que 
M.  Gray  a voulu  établir  pour  cette  espèce.  Le  ligament  implanté  dans 
les  cuillerons  est  épais  , très  solide,  et  il  remplit  exactement  les  cavités 
qui  le  reçoivent.  Les  dents  latérales  sont  constantes  chez  les  Madrés  ; 
seulement  elles  varient  dans  leur  longueur.  Citez  quelques  espèces,  elles 
sont  presque  rudimentaires , et  en  cela  elles  ressemblent  à celles  des 
Lutraires.  Dans  le  plus  grand  nombre  de  ces  coquilles,  les  dents  latérales 
sont  grandes,  aplaties,  lamelliformes,  simples  sur  la  valve  gauche  , 
doubles  sur  la  valve  droite.  Presque- toujours  ces  dents  latérales  sont 
lisses;  chez  quelques  espèces  , toiles  que  le  J/ac/m  soh'rfa,  par  exemple, 
elles  sont  striées  perpendiculairement;  Ces  dents  occupent  une  partie 
notable  des  bords  antérieur  et  postérieur  de  la  coquille. 

Nous  avons  déjà  fait  remarquer  que,  dans  les  Lutraires,  le  ligament 
est  absolument  interne;  il  l’est  également  chez  la  plupart  des  Madrés. 
Il  en  existe  cependant  quelques  unes  où  il  y a dès  rudiments  d’un  liga- 


LES  MACTKACEES. 


’^79 

ment  extérieur.  Dans  celles-là,  Mactra  gigantea  par  exemple^  se 
montre  en  môme  temps  un  petit  bourrelet,  sur  lequel  ce  ligament  s’at- 
tache , et  que  Ton  peut  considérer  comme  une  nymphe  à l'état  rudimen- 
taire. 

Lorsque  nous  traiterons  du  Lavignon , nous  exposerons  nos  obser- 
vations sur  la  nature  du  ligament.  Chez  ceux  des  mollusques  qui  ont  le 
ligament  externe,  cet  organe  est  composé  de  deux  parties  bien  dis- 
tinctes : l’une  extérieure,  très  solide  , convexe,  fibreuse  l'autre  inté- 
rieure , d’une  structure  différente , très  élastique , et  destinée  plus  par- 
ticulièrement à favoriser  le  mouvement  dos  valves  l’une  sur  l'autre. 
Dans  les  Madrés  à deux  ligaments  , les  deux  parties  que  nous  venons 
de.  mentionner  semblent  détachées  l'une  de  l'autre.  La  portion  élastique 
entre  dans  le  cuiUeron  et  en  occupe  toute  la  cavité.  La  portion  fibreuse 
s’arrête  au  dehors  sur  un  rudiment  de  nymphes , ce  qui  démontre  jus- 
qu’à l’évidence  rindépendanco  des  deux  parties  constituantes  du  liga- 
ment extérieur.  Il  y a des  genres,  chez  lesquels  cette  indépendance  se 
manifeste  d’une  manière  non  moins  évidente , celui  des  Amphidesmes 
par  exemple  , chez  lequel  la  portion  élastique  occupe  une  longue  fossette 
décurrente  le  long  du  bord  postérieur  ; tandis  que  la  portion  fibreuse , 
mieux  développée  que  dans  les  Mactres , est  attachée  sur  dos  nymphes 
bien  distinctes.  Nous  avons  donc  raison  en  disant  qùo  l’on  peut  assimiler 
la  cavité  ligamentifère  des  coquilles  à ligament  interne  , à une  portion 
considérable  de  la  nymphe  des  coquilles  à ligament  externe.  Nous  ver- 
rons à ce  sujet  une  modification  intéressante  dans  les  Lucines , genre 
comparable,  sous  ce  rapport , aux  Thracies , puisqu’on  y voit  aussi  le 
ligament  passer  du  dedans  au  dehors  , dans  une  série  peu  nombreuse 
d’espèces. 

L’animal  des  Mactres  a été  depuis  longtemps  décrit  et  figuré  par 
Poli  ; il  a donc  été  facile  , en  se  servant  de  l’ouvrage  du  savant  ana- 
tomiste , de  donner  les  caractères  au  genre.  Cependant,  les  observa- 
tions de  Poli  n'ont  pas  toute  l'exactitude  que  l’on  recherche  aujourd’hui 
dans  de  semblables  travaux  ; et  lorsque  nous  avons  vu  vivants  , pour  la 
première  fois , les  animaux  de  Mactres , nous  avons  été  surpris  que 
quelques  uns  de  leurs  caractères  aient  échappé  au  savant  Napolitain. 

Les  Mactres  sont  des  animaux  dont  la  forme  extérieure  est  conforme 
à celle  de  leur  coquille  ; presque  tous  sont  triangulaires  subcordiformes  ; 
ils  sont  enveloppés  d’un  manteau  mince  , bordé  à la  circonférence  par 
un  muscle  orbicuiaire  assez  large , laissant  sur  la  coquille  une  double 
ligne  d’impression.  Dans  la  région  dorsale  , des  membranes  larges  et 
saillantes  s’interposent  entre  toutes  les  parties  solides  de  la  charnière  ; 


UUrnEME  FAMlLLt. 


U 8 0 

et  en  conservent  tes  formes  ; ces  membranes  sont  destinées  à la  sécrétion 
de  la  charnière.  Une  frange  tentaculaire  s’élève  sur  le  bord  extérieur  de 
chaque  lobe  du  manteau  ; ces  tentacules  se  croisent  au-devant  de  l’ou- 
verture palléale,  destinée  à livrer  passage  au  pied.  En  arrière,  le  man- 
teau 36  prolonge  en  deux  siphons  plus  ou  moins  allongés  , selon  les 
espèces  ; ces  organes  sont  souvent  moins  longs  que  la  coquille,  et  quel- 
quefois ils  dépassent  beaucoup  cette  longueur.  L'entrée  intérieure  du 
siphon  branchial  est  garnie  d’une  valvule  membraneuse  qui  la  couvre 
en  partie  ; il  existe  de  plus  , depuis  rentrée  de  ce  siphon  jusque  vers  le 
milieu  de  la  longueur  du  bord  ventral , une  valvule  palléale  do  chaque 
côté,  consistant  en  un  pli  fort  saillant  qui , en  se  croisant  avec  celui 
du  côté  opposé,  contribue  à clore  l’extrémité  postérieure  de  la  cavité 
palléale. 

Les  siphons,  à peu  près  égaux  en  longueur,  ne  le  sont  pas  tout  à 
fait  dans  leur  diamètre  ; le  siphon  branchial  est  un  peu  plus  large. 
L'ouverture  terminale  de  ces  organes  est  garnie  d'un  grand  nombre  do 
tentacules  allongés,  coniques,  simples  , dans  nos  espèces  de  la  Médi- 
terranée et  de  la  Manche , mais  présentent  des  commencements  do  di- 
visions, au  moins  dans  ceux  du  siphon  branchial,  chez  celles  des  espèces, 
qui  se  rapprochent  le  plus  des  Lutraircs  et  qui  vivent  dans  les  mers 
d’Amérique  ; c’est  ce  que  nous  avons  eu  occasion  d’observer  dans  le 
Maclra  frogilis  (ü/uc.  hrasiliana  Lamk.).  Il  s’ctabliLdonc,  sous  ce  rap- 
port , un  passage  insensible  entre  les  Lutraircs  elles  Mactres.  Le  siphon 
anal  offre  un  caractère,  que  nous  avons  retrouvé  dans  un  assez  grand 
nombre  de  mollusques.  Ce  siphon  se  prolonge  en  une  calotte  membra- 
neuse , percée  d’une  petite  ouverture  circulaire , susceptible  de  con- 
tractions semblables  à celles  d’un  sphincter. 

Le  pied  est  assez  grand  ; il  est  triangulaire  , fort  aplati  de  chaque 
côté , tranchant  sur  ses  bords,  et  courbé  dans  sa  longueur.  Par  sa  base , 
il  se  continue  avec  une  masse  abdominale  peu  épaisse,  subquadrilatèro  , 
et  dont  les  parois  fibreuses  sont  faites  par  le  prolongement  des  muscles 
du  pied.  Deux  muscles  principaux  servent  à retirer  le  pied  en  dedans 
des  valves;  à cause  de  cet  usage,  iis  ont  reçu  le  nom  de  vétmeieurs, 
L’im  est  antérieur,  et  forme  le  bord  antérieur  de  la  masse  abdominale; 
l’autre  est  postérieur  et  oblique  : il  contribue  aussi  à former  le  bord 
postérieur  de  l’abdomen. 

En  avant  et  en  arrière  de  la  masse  abdominale , on  remarque  un  grand 
muscle  transverse  dont  les  fibres  s’attachent  directement  aux  valves. 
Ces  muscles,  destinés  à rapprocher  les  valves  lorsqu’ils  se  contractent, 
sont  nommés  mxtscles  adducteurs  , à cause  de  leur  fonction.  Ces  muscles 


LES  MAC/i'KACEES. 


u8i 

sont  à peu  près  égaux , presque  également  distants  du  centre  de  la 
charnière;  le  muscle  antérieur  est  ovalaire,  le  postérieur  est  subcircu- 
laire. Ils  sont  enveloppés  de  toutes  parts  dans  une  gaine  formée  par  le 
manteau,  et  de  laquelle  on  parvient  à les  dégager,  surtout  chez  les 
animaux  qui  ont  été  conservés  dans  l'alcool. 

La  bouche  est  très  petite  dans  les  Mactres.  Dans  le  Mactra  lisor  , 
par  exemple , elle  admettrait  à peine  la  tête  d'une  épingle.  Elle  est 
percée  entre  la  base-  du  pied  et  l’extrémité  du  muscle  adducteur  anté- 
rieur ; elle  est  protégée  par  une  paire  de  lèvres  membraneuses  assez 
larges  , égales,  transverses,  qui  aboutissent  aux  palpes  labiales  et  s’y 
terminent.  Les  palpes,  dans  les  Mactres,  sont  généralement  très 
grandes  ; elles  sont  triangulaires,  tombantes  de  chaque  côté  du  corps,  et 
situées  un  peu  obliquement  de  haut  en  bas  et  d'avant  en  arrière  ; des 
trois  côtés  du  triangle , le  plus  étroit  est  celui  par  lequel  ces  organes 
s’attachent  au  corps  ; cependaut  ce  côté  est , en  proportion  , plus  large 
que  dans  les  Lutraires  et  dans  beaucoup  d’autres  genres.  Chez  les  Lu- 
traîres , en  effet , les  palpes  labiales  sont  longues  et  étroites  ; chez  la 
plupart  des  Mactres,  elles  sont  non  moins  longues,  mais  plus  larges. 
II  semblerait,  d’après  cela , qu’il  serait  facile  de  distinguer  les  deux 
genres  en  question , en  se  servant  des  caractères  des  palpes  ; mais  on 
serait  dans  l’erreur  : ces  organes  sont  variables  , et  si , dans  un  certain 
nombre  d’espèces  , ils  restent  larges  , dansd’autres  on  les  voit  se  rétrécir 
insensiblement,  et  prendre  graduellement  la  forme  de  celles  des  Lu- 
traires. La  surface  extérieure  des  palpes  est  lisse  ; la  surface  interneest 
couverte  d’un  très  grand  nombre  do  plis  réguliers  , très  fins,  semblables 
à ceux  d’un  éventail  à demi  ouvert. 

Les  organes  de  la  digestion  commencent  par  un  œsophage  mem- 
braneux, aplati  et  peu  allongé  ; ce  canal  aboutit  à un  estomac  subglo- 
buleux,  divisé  à rintérieur  par  des  crêtes  obliques.  A son  entrée  dans 
l’estomac , l’œsophage  est  terminé  par  des  lèvres  découpées  en  pa- 
pilles courtes , comparables  à de  petits  choux-fleurs  ; de  chaque  côté  , 
et  au-dessous  de  celle  ouverture  singulière,  s’ouvre  un  grand  crypte 
biliaire.  L’intestin  se  détache  de  la  paroi  inferieure  de  l’eslomac  ; 
un  duodénum  très  gros,  cylindrique,  descènd  obliquement  vers  l'angle 
postérieur  du  pied  ; parvenu  près  de  la  surface , il  se  change  subi- 
tement en  un  intestin  qui  se  développe  en  nombreuses  circonvolu- 
tions , au  moyen  desquelles  il  remonte  de  bas  en  haut  jusque  vers 
la  région  dorsale.  La  dernière  anse  intestinale , rapprochée  de  la  paroi 
supérieure  de  l’abdomen,  la  perce  vers  le  centre,  et  pénètre  ainsi 
dans  le  péricarde  ; en  traversant  cette  cavité,  il  prèle  appui  au  ventri- 


282 


llUrriEME  FAMILLE. 


cuie  ; il  sort  en  arrière  du  péricarde  , s'attache  à la  surface  dorsale  du 
muscle  adducteur  postérieur  : et  c’est  en  suivant  la  circonférence  de  ce 
muscle,  qu'il  s’introduit  à la  partie  supérieure  de  la  cavité  du  siphon 
anal. 

Un  foie  volumineux  occupe  une  place  considérable  dans  la  région  dor- 
sale et  antérieure  de  la  masse  abdominale  ; il  enveloppe  Toesophage , 
l’estomac  et  une  portion  de  l’intestin  ; sa  couleur  verte  le  rend  facile  à 
reconnaître.  Si  nous  pénétrons  dans  sa  structure , nous  le  verrons  se 
diviser  avec  assez  de  facilité  en  lobes  et  en  lobules , au  centre  desquels 
pénètrent  des  vaisseaux  biliaires;  de  la  réunion  des  vaisseaux  biliaires 
naissent  deux  troncs  principaux  qui  se  dirigent  vers  reslomac  et  s'y 
ouvrent  aux  deux  cryptes  biliaires  dont  nous  avons  parlé. 

L’ovaire  est  non  moins  considérable  que  le  foie  ; il  envahit  toutes  les 
parties  de  la  base  du  pied  et  delà  masse  abdominale  que  n’occupent  pas 
les  viscères  de  la  digestion  ; il  se  répand  en  ramificafions  nombreuses  à 
la  surface  du  foie;  il  gagne  le  dos,  et  finit  quelquefois  par  occuper  toute 
la  région  dorsale.  L’ovaire  pourrait  être  comparé  à une  grappe  de  raisin, 
dont  les  grains  seraient  irréguliers  ; les  embryons  et  les  œufs  se  déve- 
loppent dans  les  grains  , et , parvenus  à leur  maturilé  , ils  descendent 
dans  un  oviducto  branchu,  qui  représente  la  tige  etjes  branches  de  la 
grappe  ; le  tronc  commun  des  oviductes  , après  avoir  parcouru  le  bord 
postérieur  do  l’abdomen,  vient  aboutir  à un  petit  mamelon  fendu,  situé 
au-dessous  de  la  base  du  feuillet  branchial  interne.  Après  avoir  parcouru 
les  oviductes,  les  œufs  parviennent  à l’ouverture  que  nous  venons  d’in- 
diquer ; ils  en  sortent , et  sont  recueillis  entre  les  lamelles  branchiales , 
pour  être  ensuite  rejetés  au  dehors  , lorsqu’ils  sont  parvenus  à un  degré 
convenable  de  maturité. 

Les  feuillets  branchiaux  sont  lisses  ; ils  sont  inégaux,  et  ils  s'étendent 
d'avant  en  arrière  dans  presque  toute  la  longueur  de  la  cavité  palléale. 
Le  feuillet  interne  est  le  plus  allongé  et  le  plus  large  ; il  commence  en 
une  pointe  aiguë,  qui  s'interpose  entre  les  palpes  labiales.  Le  feuillet 
externe  commence  plus  en  arrière  ; il  est  plus  étroit,  mais  son  bord 
externe  se  prolonge  pour  aller  rencontrer  le  manteau  dans  la  région 
dorsale  et  se  souder  à lui.  Celte  soudure  , qui  se  maintient  pondant  la 
vie  de  l'animal , cesse  spontanément  à sa  mort.  Les  quatre  feuillets 
branchiaux  se  prolongent  en  arrière  du  bord  postérieur  de  l’abdomen  , 
SC  réunissent  et  viennent  tomber  en  avant  de  l’ouverture  du  siphon 
anal.  Sur  le  pourtour  de  cette  ouverture  , s’élève  un  pli  du  manteau, 
auquel  s’attache  l’extrémité  postérieure  des  feuillets  branchiaux  réunis. 
Au  moyen  de  cette  soudure , toute  communication  est  interceptée  entre 


LES  MACTHACEES. 


283 


la  cavité  du  manteau  et  celle  du  siphon  anal.  Cette  soudure,  qui  subsiste 
liendaul  la  vie  de  l'animal  , cesse  également  et  spontanément  au  mo- 
ment de  la  mort. 

Si  les  branchies  sont  lisses  dans  le  plus  grand  nombre  des  Mactres  , 
il  y a des  espèces  chez  lesquelles  ces  organes  sont  plissés  en  partie  ou 
en  totalité.  Les  espèces  qui  présentent  ce  dernier  caractère  se  rapprochent 
beaucoup  à cet  égard  des  Lutraires  , chez  lesquelles  les  organes  de  la 
respiration  sont  couverts  de  plis  nombreux  et  réguliers. 

Le  cœur  est  situé  dans  la  région  dorsale  postérieure  de  l’animal  ; il 
est  contenu  dans  un  péricarde  membraneux,  très  mince,  formé  par  le 
manteau  ; il  a une  forme  subquadrangulaire.  Le  cœur  , ainsi  que  dans 
les  autres  mollusques  acéphalés , embrasse  le  rectum  et  l’enveloppe  de 
toute  part.  Cet  organe  est  ovale , oblong,  subfusiforme  ; il  reçoit  de 
chaque  côté  l'insertion  d’une  oreillette  triangulaire,  et  une  ouverture  en 
fente,  garnie  de  doux  valvules  opposées  , sert  de  communication  entre 
l’oreillette  et  le  ventricule.  Ces  parties  de  l'organe  central  de  la  circu- 
lation sont  d’une  parfaite  symétrie.  En  avant , le  cœur  se  prolonge  en 
uneartère  aorte,  qui  pénètre,  dès  sa  naissance,  dans  la  cavité  abdominale  ; 
en  arrière,  il  donne  naissance  à une  aorte  postérieure  qui  se  distribue 
à l’extrémité  postérieure  de  Tanimal. 

Un  organe  dépurateur  assez  considérable  occupe  un  espace  triangu- 
laire , situé  en  arrière  de  l’abdomon , et  du  péricarde  au-dessous  du 
rectum  ; il  s’appuie  sur  le  muscle  rélracteur  postérieur  du  pied  , 
et  l’accompagne  jusqu’au-delà  de  sa  bifurcation.  Cet  organe,  d'une 
extrême  mollesse,  est  d’un  blanc  jaunâtre;  à l’intérieur,  il  est  partagé 
en  deux  cavités  semblables  par  une  cloison  longitudinale  et  médiane. 
Des  piliers  contournés , séparant  des  lacunes  nombreuses  et  irrégu- 
lières , se  montrent  à la  surface  interne  de  l’orgaiie;  d'un  côté  , les 
cavités  de  l’organe  communiquent  avec  l’abdomen  au  moyen  d’un  canal 
membraneux,  qui  accompagne  le  muscle  du  pied;  d'un  autre,  elles 
communiquent  au  dehors  par  une  ouverture , percée  de  chaque  côté 
dans  l’épaisseur  des  parois , et  se  montrant  au-dessous  de  la  branchie 
interne , un  peu  au-dessus  de  l’ouverture  de  Toviducte. 

Le  système  nerveux  , dans  sa  disposition  générale , est  semblable  à 
celui  des  autres  mollusques  acéphalés  dimyaires,  et  ce  que  nous  avons 
dit  dans  notre  introduction,  nous  dispense  de  le  décrire  ici  en  détail. 
Nous  ajouterons  seulement  que  les  . nerfs  postérieurs  des  siphons  ont 
plusieurs  anastomoses  successives  , à chacune  desquelles  se  trouve  un 
très  petit  ganglion  ; nous  ajouterons  aussi  que  le  nerf  cardiaque  naît  du 
ganglion  antérieur  du  côté  gauche,  descend  en  arrière  et  va  se  distri- 


HCIÏIEME  CAMILLE. 


284 

buer  aux  membranes  cardinales  et  au  cœur.  Ce  nerf  paraît  particulier 
aux  Lutraires  et  aux  Mactres. 

Les  Mactres  sont  des  mollusques  qui  vivent  dans  le  sable  ; ils  s’y 
enfoncent  perpendiculairement  et  s’y  creusent  un  trou  au  moyen  de  leur 
pied  ; leurs  siphons  viennent  s’ouvrir  à la  surface  du  sable  ; elles  habi' 
tent  les  rivages  à une  faible  profondeur  sous  l’eau.  Souvent , à la  suite 
des  gros  temps  » les  plages  sont  couvertes  de  leurs  coquilles  que  ra- 
massent volontiers  les  collecteurs  ignorants , d’où  est  venu  le  nom  de 
Mactra  stnllorum  ,•  imposé  par  Linné  a l’espèce  la  plus  commune  de 
l’Océan  d'Europe. 

Nous  comptons  actuellement  près  do  quatre-vingts  espèces  vi- 
vantes de  Mactres;  elles  proviennent  do  toutes  les  mers,  do  toutes  les 
latitudes.  Pour  le  plus  grand  nombre , ces  coquilles  sont  blanches  ou 
ornées  do  couleurs  pèles;  un  petit  nombre  seulement  sont  vivement 
colorées. 

Les  Mactres  fossiles  sont  moins  nombreuses  que  les  vivantes  ; elles 
sont  répandues  dans  tous  les  terrains  tertiaires  connus.  Quelques  unes 
ont  été  mentionnées,  soit  dans  les  terrains  crétacés,  soit  dans  les  terrains 
secondaires  plus  anciens  ; mais  rien  jusqu’ici  n’est  propre  à Justifier  à 
nos  yeux  la  présence  dos  Mactres  dans  des  terrains  plus  anciens  que  les 
tertiaires  ; et  si  quelques  paléontologistes  se  sont  crus  autorises  à les 
mentionner,  cela  provient  do  ce  qu’ils  ont  assimilé  des  moules  de  co- 
quilles triangulaires,  sur  lesquels  on  ne  trouve  aucune  trace  des  carac- 
tères essentiels  des  Mactres.  Dans  la  série  des  moules  factices,  qu’a 
publiée  M.  Agassiz,  on  reconnaît  celui  des  Mactres,  non  seulement  à 
sa  forme  générale,  mais  encore  a l’empreinte  de  la  charnière.  Les  lames 
cardinales,  comme  nous  l’avons  vu,  ont  une  saillie  médiane,  produite 
par  la  proéminence  des  cuillerons;  ces  parties  laissent  dans  le  moule 
une  empreinte  plus  ou  moins  profonde  entre  les  crochets.  La  dent  car- 
dinale se  reconnaît  dans  son  empreinte  par  sa  forme  spéciale.  Enfin, 
les  dents  latérales  laissent  toujours  sur  le  moule  des  traces  de  leur  pré- 
sence, ce  qui  peut  aider  à déterminer  le  genre  d’une  espèce  dont  le 
moule  lui  seul  est  connu.  Il  existe  aussi  des  dents  latérales  dans 
plusieurs  autres  genres,  mais  ce  caractère  seul  aurait  peu  de  valeur.  Il 
faut  donc,  pour  reconnaître  les  Mactres  parmi  les  moules  d’espèces 
fossiles,  que  ces  moules  portent  les  empreintes  des  parties  principales 
de  la  charnière  et  particulièrement  de  la  dent  cardinale. 

On  trouve  dans  les  catalogues  dressés  par  les  paléontologistes  un 
certain  nombre  de  coquilles,  connues  par  leur  moule  seul , et  qui  sont 
attribuées  au  genre  Mactre.  M.  Roemer , dans  son  ouvrage  sur  les  1er- 


LKS  MACTUACKES. 


285 


rains  ooliliques  du  nord  de  l’Allemagne,  mentionne  trois  espèces  qu’il 
rapporte  aux  Mactres,  mais  sur  lesquelles  nous  n’observons  aucun  des 
caractères  du  genre;  il  en  est  de  même  des  espèces  de  Goldfuss  et  de 
Zieten. 

Dans  l’ouvrage  important  publié  par  M.  Fitton  sur  les  terrains  cré- 
tacés du  sud-est  de  l'Angleterre,  ce  savant  géologue  a cité  une  Mactre 
fossile  dans  les  sables  verts,  et  il  en  a donné  une  figure.  Cette  figure  re- 
présente la  coquille  entière,  ayant  ses  valves  rapprochées  et  ne  montrant 
rien  de  sa  charnière.  Si  la  figure  est  fidèle , cette  coquille  serait  inéqui  • 
valve , et  par  conséquent  plus  voisine  des  Corbules  que  des  Mactres. 
L’auteur  avait  lui-même  conservé  do  l’incertitude  au  sujet  de  cette  co- 
quille , et  c’est  avec  doute  qu’il  l’introduit  dans  le  genre , où  il  la 
place. 

Parmi  les  fossiles  rapportés  des  terrains  crétacés  de  l’Inde  par 
M.  Kaye  et  si  bien  décrits  par  M.  Forbes  dans  les  Transactions  de  îa 
Société  géologique  de  Loiiàres  , nous  trouvons , sous  le  nom  de  Maclra 
tripartîta,  une  coquille  qui , par  sa  forme  extérieure , pourrait  bien  être 
une  véritable  Mactre;  mais  la  charnière  reste  inconnue,  ce  qui  laisse 
quelque  doute  sur  la  détermination  du  genre.  Si  celte  coquille  appartient 
réellement  aux  Mactres , elle  nous  offrirait  le  .seul  exemple  authentique 
de  l’existence  de  ce  genre  dans  un  terrain  inférieur  aux  terrains  ter- 
tiaires. 

Deux  espèces  sont  connues  dans  le  bassin  de  Paris.  Lamarck  a cru 
que  l’une  d'elles  [Mactra  semi-sulcata)  avait  son  analogue  vivant  dans 
les  mers  de  la  Nouvelle-Hollande.  Nous  avons  comparé  de  nouveau 
les  coquilles  en  question  , et  nous  avons  reconnu  deux  espèces  toujours 
distinctes.  L’espèce  fossile  apparaît  d'abord  dans  les  sables  marins  in- 
férieurs du  Soissonnais  et  de  la  forêt  de  Compiègne  ; elle  passe  dans 
les  calcaires  grossiers  et  remonte  dans  les  sables  moyens  do  Beau- 
champ  , Valmondois  , etc.  ; elle  offre  quelques  variétés  intéressantes 
dans  ses  divers  gisements.  Les  deux  espèces  de  Paris  se  montrent 
aussi  dans  le  bassin  de  Londres  et  dans  celui  de  la  Belgique;  mais  elles 
ne  remontent  pas  dans  l’étage  moyen  de  Bordeaux  et  de  Dax  , comme 
l’a  cru  M.  Bastérot  et  quelques  autres  personnes  d’après  lui.  Il  résulte 
de  là,  que  l’espèce  nommée  Mactra  deltoïdes^  par  M.  Bastérot,  devra 
recevoir  une  autre  dénomination. 

Les  terrains  tertiaires  moyens  sont  les  plus  riches  en  espèces  de 
Mactres.  M.  Brongniart  en  cite  deux  dans  les  terrains  du  Vicenlin  ; toutes 
deux  sont  douteuses;  la  première,  M.  erebea,  a la  forme  extérieure 
des  coquilles  du  genre;  la  seconde,  M.  cyrena  , dont  la  charnière  est 


' tr 


a86  HUITIÈME  FAMILLE. 

figurée , est  une  véritable  Cyrène  que  Ton  retrouve  également  fossile 
aux  environs  de  Bordeaux  ; c/estlo  Cyrena  Bronyniard  Bast. 

M.  Baslérot,  dans  son  Mémoire  sur  les  terrains  tertiaires  du  sud- 
ouest  de  la  France  , mentionne  trois  espèces  de  Mactrcs  ; il  rapporte 
la  première  au  Maclra  slrialelkt  de  Lamarck , qui  vit  au  Sénégal  et  qui 
offre , en  effet , avec  l’espèce  fossile  une  analogie  incontestable  ; pour  la 
seconde,  M.  Baslérot  l’assimile  à l'espèce  fossile  des  environs  de  Paris, 
et  lui  impose  le  même  nom  ; mais  la  coquille  de  Bordeaux  reste  toujours 
distincte  de  celle  de  Paris;  elle  devra  donc  recevoir  une  autre  dénomi- 
nation. Quant  à la  troisième  Maclra  tna?iguh,  elle  so  montre  en  réalité 
dans  les  étages  moyens  et  supérieurs  des  terrains  tertiaires.  M.  Grate- 
loup , dans  son  Catalogue  zoologîque  du  bassin  de  la  Gironde,  sans  rec- 
tifier l’erreur  de  M.  Baslérot,  ajoute  une  quatrième  espèce  qu’il  identifie 
avec  le  Maclra  deptrssa  des  environs  de  Paris.  La  comparaison  que 
nous  avons  faite  de  ces  deux  espèces,  nous  donne  la  preuve  qu’elles  sont 
constamment  distinctes.  Ainsi,  à l'égard  desMactres,  aucune  de  celles 
de  Paris  ne  remonte  dans  les  étages  moyens  et  supérieurs.  M.  Dubois 
de  Montpéreux  s'est  laissé  entraîner  par  l’exemple  de  ses  prédécesseurs, 
et  il  à imposé  le  nom  de  l'espèce  de  Paris  à une  coquille  qui  en  diffère 
et  qui  se  distingue  aussi  de  celles  de  Bordeaux  et  de  Dax  , de  sorte  que 
sous  ce  nom  dé  Maclra  delloides  trois  espèces  bien  distinctes  sont  con- 
fondues. 

Dans  la  Paléontologie  polonaise,  M.  Pusch  inscrit  parmi  les  Mactres 
des  terrains  tertiaires  de  Pologne  le  Maclra  cu/ienta  de  Sowerby,  espèce 
qui  d’abord  a été  découverte  dans  le  Crag  d’Angleterre , et  que  depuis 
M.  Nysta  retrouvée  dans  celui  de  la  Belgique.  Jusqu’ici  aucune  espèce 
du  Crag  ne  s'élail  remarquée  dans  les  terrains  tertiaires , explorés  par 
M.  Pusch  , mais  on  y trouve  quelquefois  une  petite  variété  du  jMactra 
iriangitla  5 et,  sans  pouvoir  l’affirmer,  nous  'Soupçonnons  que  c'est 
celte  espèce  que  M.  Pusch  aura  rapportée  au  Cuneata  du  Crag. 

A la  suite  d’explorations  aussi  multipliées  qu’attentives , M.  S.  Wood 
a dressé  un  catalogue  très  bien  fait  et  fort  complet  des  fossiles  du  Crag 
d’Angleterre.  Dans  ce  catalogue,  nous  trouvons  six  espèces  de  Mactres, 
parmi  lesquelles  nous  en  remarquons  trois  dont  les  analogues  vivent 
encore  dans  l’Océan  européen  et  même  sur  les  côtes  de  la  Grande-Bre- 
tagne ; ce  sont  les  Maclra  stullorum , solida  et  subtruncata.  A ces 
espèces  du  Crag  d’Angleterre , M.  Nyst  en  a ajouté  deux,  qui  sont 
propres  à celui  des  environs  d'Anvers  ; l’une  d’elles  paraîfdouleuse  à 
M.  Nyst;  elle  pourrait  bien  se  confondre  avec  le  Cuneata  de  Sowerby. 
De  nouvelles  observations  sont  nécessaires  à ce  sujet. 


LES  MACTRACÉES. 


287 

Les  terrains  tertiaires  supérieurs  de  l’Europe  sont  peu  riches  en 
Mactres  fossiles.  Brocchi  en  décrit  trois  espèces,  dont  deux^  les 
Mactra  siuUorum  Qitriaugiiïa  vivent  encore  dans  la  Méditerranée;  mais 
il  paraît  que  Brocchi  avait  commis  la  même  erreur  que  Linné  et  Lamarck 
à l’égard  du  Lisor  d’Adanson  et  du  SluJtorum  ; c’est-à-dire  qu’il  les 
réunissait  sous  un  môme  nom  spécifique.  Nous  avons  fait  voir  que  le 
Lisor,  vivant  au  Sénégal,  offre  des  différences  constantes  avec  le 
Maclra  sluUorum  des  mers  d’Europe,  Depuis,  M.  Sismonda  a reconnu 
que  dans  son  Mactra  siultorum,  Brocchi  avait  aussi  confondu  les  deux 
mêmes  espèces.  Actuellement  distinguées , il  y en  a quatre  dans  le 
terrain  tertiaire  de  l ltalie;  nous  en  avons  ajouté  une  cinquième,  le 
Mactra  coraUina  de  Linné  , provenant  des  terrains  subapennins  de  la 
Morée  ; enfin  M.  Philippi  en  a recueilli , on  Sicile , deux  espèces  de  plus, 
les  Mactra  glauca  et  soîida.  A'oilà  donc  sept  espèces  de  Mactres  bien 
constatées  dans  les  terrains  tertiaires  supérieurs , et  ce  qui  est  fort  re- 
marquable, c’est  qu’il  y on  a six,  qui  sont  encore  actuellement  vivantes 
dans  les  mers  de  l’Europe;  par  un  privilège  assez  singulier,  c’est  encore 
parmi  ces  espèces  que  se  trouvent  celles  qui  passent  dans  d’autres 
terrains.  Ainsi,  par  exemple  : 

Le  Mactra  stultorim  se  trouve  à la  fois  en  Italie  et  dans  le  Crag 
d’Angleterre. 

Le  il/ac(m  solida,  qui  vil  dans  la  Manche,  existe  à l'état  fossile  en 
Sicile  et  dans  le  Crag  en  Angleterre  et  en  Belgique. 

Le  Mactra  iriangnla , vivante  dans  la  Méditerranée  et  les  mers 
d’Europe,  est  connu  à l'état  fossile  en  Italie,  en  Sicile,  en 
Morée,  à Bordeaux  et  à Dax,  dans  les  faluns  de  la  Touraine, 
aux  environs  devienne , et  peut-être  en  Pologne. 

D’autres  espèces  ont  un  moindre  intérêt , et  méritent  cependant  d’être 
signalées. 

Ainsi,  \q  Mactra  glauca  vit  dans  tout  l'Océan  d'Europe,  et  se 
trouve  fossile  dans  le  Crag. 

Le  Maolru  striatella  de  Lamarck  vil  au  Sénégal  , et  une  variété 
un  peu  plus  épaisse  est  fossile  aux  environs  de  Bordeaux. 

Nous  devons  encore  ajouter  le  Maclra  ponderosa  de  M.  Eichwaid  , 
qui  , se  répandant  dan.s  les  terrains  de  la  Russie  et  jusqu'en  Crimée, 
peut  servir  à les  caractériser. 

11  résulte  des  investigations,  auxquelles  nous  venons  de  nous  livrer  , 
que  l’on  peut  admettre  avec  certitude  25  espèces  de  Mactres  fossiles 


HUITIÈME  FAMILLE. 


a 88 

flans  loate  la  série  des  terrains  tertiaires  de  l’Europe.  Les  terrains  ana- 
logues de* l'Amérique  septentrionale  sont  moins  riches,  d'après  les 
catalogues  dressés  par  MM.  Lea,  Conrad  et  quelques  autres  naturalistes. 
Des  terrains  tertiaires  de  l'Amériquo  méridionale  nous  ne  pouvons  citer 
que  les  trois  espèces , mentionnées  par  M.  d’Orbigny  dans  la  Paléonto- 
logie de  son  Voyage  en  Amérique.  Il  reste  bien  constaté  que,  dans  l’état 
actuel  do  la  science , le  nombre  des  espèces  fossiles  reste  inférieur  de 
plus  de  moitié  à celui  des  espèces  vivantes. 

Mactre  triangulaire.  Macira  iriangula.^  Renieri. 

PI.  10.  fig.  4.  5.  6. 

ay.  testa  parvây  trlgonâ^  laUre  utroque  ùhtusissime  carinata  ^ nitidâ  ^ 
lœvi i lactea;  area  lunulâquc  suîcatis,  dentibus  lateraîibus perpen- 
drculariter  striatis, 

Mactra  Jactea.  Poli  Test.  l.  i.  pl.  i8,  f.  i3.  i4* 

Philippi.  Moll.  Sic.  t.  i.  p.  it.  n®  5 et  l.  2.  p.  lo,  n®  5. 

Desliayes.  ExpeJ.  scien.  de  Morée.  Moll.  p.  88.  n®  17. 

Fossiîis^  Brocchi.  Conrli.  foss,  subap.  l.  2.  p.  535.  n°  i.  pl.  i3.  f.  7. 

Philippi,  loc,  cit.  t.  I.  p,  12.  Il®  3, 

Sismouda.  Syn.  metli.  anim.  inverl.  pedem  foss.  p.  17. 

Il  est  bien  évident,  ainsi  que  M.  Philippi  l’a  reconnu,  que  le  Macira 
triangida  de  Renieri  a été  figuré  par  Poli  sous  le  nom  de  Macira  hetea. 
Ce  qui  aura  empéché  les  conchyliologues  de  s'apercevoir  de  l’erreur,  cela 
provient  sans  doute  de  ce  que  Poli  a fait  représenter  l’espèce  sous  un 
grossissement,  qui  la  rapproche  du  volume  habituel  du  Mactra  îaelea  de 
Cliemnilz  et  de  Lamarck.  Cette  confusion,  de  la  part  du  naturaliste 
napolitain,  en  a entraîné  quelques  autres  , par  la  suite , dans  la  syno- 
nymie du  àUaclra  îaetea  , et  il  est  actuellement  facile  de  les  réparer. 
Lg  Mactra  triangida  est  une  coquille,  qui  reste  toujours  d’un  petit 
volume.  Ainsi  que  son  nom  l’indique,  elle  est  triangulaire,  presque 
équilatérale  ; les  crochets  occupent  le  sommet  d’un  triangle  dont  le 
bord  ventral  est  la  base.  Le  bord  antérieur  est  un  peu  plus  court  que  le 
postérieur.  La  coquille  est  médiocrement  bombée , subciméiforme  ; les 
crochets  , lisses  et  peu  saillants , sont  médiocrement  inclinés  du  côté 
antérieur.  La  lunule , ainsi  que  le  corselet,  sont  aplatis,  ovalaires  et 
nellement  circonscrits  par  un  angle  obtus  et  fort  net.  Ces  deux. parties 
importantes  de  la  coquille  sont 'élégamment  striées.  La  surface  exté- 


LES-MACTRACEES. 


rieure  porte  également  des  stries  un  peu  plus  profondes  du  côté  anté- 
rieur que  du  côté  postérieur.  Ces  stries  s’interrompent  de  ce  côté,  qui 
reste  parfaitement  libre.  A.  l’intérieur,  les  valves  sont  lisses  et  polies  ; 
la  charnière  est  supportée  par  une  lame  cardinale,  courte  et  étroite. 
Sur  la  valve  droite  se  trouve  une  grande  dent  en  V,  dont  la  partie  an- 
térieure est  beaucoup  plus  grande  que  Tautre.  En  arrière  de  cette  dent 
existe  la  fossette  du  ligament , étroite  et  assez  profonde , mais  dont  le 
bord  fait  une  légère  saillie  sur  le  milieu  de  la  lame  cardinale.  Sur  la 
valve  gaucho,  la  dentenV  est  unpcu  plus  petite,  et  l’on  voit  son  extrémité 
antérieure  s’abaisser  comme  pour  joindre  l’extrémité  antérieure  de  la 
dent  latérale.  Les  dents  latérales  sont  courtes,  assez  épaisses,  et  striées 
perpendiculairement  de  chaque  côté.  Les  impressions  musculaires  sont 
grandes  en  proportion  de  la  coquille  ; elles  sont  semi-lunaires , fort 
écartées.  L’impression  palléale,  après  avoir  suivi  le  bord  ventral , s’in- 
fléchit en  arrière  et  produit  une  sinuosité  étroite  dont  le  sommet  se 
place  presque  au  niveau  du  cuilleron  de  la  charnière. 

GENRE  VINGT-NEUVIÈME. 

ANATJZUEL1.E.  AnaHneUa.  (Sow.) 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  inconnu. 

Coquille  ovale-transverse , mince , blanche , diaphane , équi- 
valve,  équilatérale 5 subnacrée,  lisse,  gonflée,  à crochets  mé- 
diocres , peu  proéminents  , opposés  et  quelquefois  corrodés  au 
sommet;  charnière  portant  au-dessous  du  crochet  un  grand 
cuilleron  à peine  oblique , étroit,  très  saillant  dans  l’intérieur 
des  valves  ; une  petite  dent  cardinale,  en  avant  du  cuilleron,  sur 
la  valve  droite , deux  plus  petites  sur  la  gauche.  Impressions 
musculaires  superficielles , peu  apparentes , l’antérieure  ova- 
laire, la  postérieure  arrondie;  impression  palléale  simple,  sans 
la  moindre  trace  de  l’inflexion  postérieure. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Mya,  Chcmnitz , Spengler,  Gem- 
lin,  Dihvyn. 

OBSERVATIONS.  Lc  genre  Anatinelle  a été  créé  par  M.  Sowerby,  dans 
la  40'=  livraison  de  son  Généra  of  shells  , publié,  en  1833  ou  183i  , 


T.  \.  2®  PARTIE. 


i) 


HUITIEME  FAMILLE. 


290 

pour  une  coquille  que  ce  naturaliste  a crue  nouvellement  découverte  , 
mais  qui  était  connue  depuis  1782,  époque  à laquelle  Chemnilz  la 
décrivait  et  la  figurait , sous  le  nom  de  ^f\Ja  candida.  dans  le  fi*  volume 
du  CoHchylie7t~Cabmet.  La  coquille  figurée  par  Chemnilz  appar- 
tenait a la  collection  de  Spengler;  extrêmement  rare  à cette  époque 
dans  les  collections,  elle  n’est  pas  devenue  plus  commune  depuis; 
aussi,  un  assez  grand  nombre  d’auteurs  n’ont  pu  la  mentionner  que 
d'après  l’ouvrage  original  de  Chemnitz.  Schroeter  se  contente  de  la 
citer  à la  suite  des  Myes  ; Gmelin  l'inscrivit  dans  la  13®  édition  du 
Si/stema  iiaturœ  , et  au  lieu  d'adopter  le  nom  de  Mya  candida  de 
Chemnitz,  il  proposa  celui  de  Mya  iiicobarica.  C'est  sous  cette  dernière 
dénomination  que  Wood  , en  1814,  la  mentionna  dans  son  Genei'al 
Conchologist.  Dillwyn  la  cite  dans  son  catalogue,  et  M.  Wood  , en 
1 828,  en  donne  une  figure  très  médiocre,  copiée  de  Chemnitz,  dans  son 
Index  teslacæologicus.  Lorsque,  quelques  années  après,  M.  Sowerby 
institua  le  genre  Anatinelle,  il  ne  devait  pas  donner  à l'espèce  un  autre 
nom,  lorsque,  ainsique  nous  venons  de  le  constater,  elle  en  avait 
déjà  reçu  deux. 

Oapuis  que  le  genre  a été  créé , il  a été  généralement  adopté  , et  il 
méritait  de  l'être;  car  il  présente  des  caractères  qui  le  différencient  de 
tous  les  autres  genres  connus.  Nous  l’avons  introduit-  dans  la  famille 
des  Mactracées  , dans  la  nouvelle  édition  des  Animaux  sftns  vertèbres 
do  Lama’rck.  M.  Reeve,  au  contraire,  dans  son  Conchologia  systematicu, 
a placé  lo  genre  Anatinelle  dans  la  famille  des  Myaires,  à la  suite  des 
Corbules  et  des  Pandores  , dans  le  voisinage  du  genre  Myocama. 

Une  seule  espèce  est  connue  dans  le  genre  qui  nous  occupe  : c’est 
une  coquille  ovale-transversc , équivalve,  subéquilatérale,  à , crochets 
petits,  opposés  et  peu  proéminents  au-dessus  du  bord  cardinal.  Les 
bords  de  la  coquille  sont  minces  , tranchants,  simples;  les  valves  se 
joignent  exactement  dans  toute  leur  circonférence,  si  ce  n’est  en 
arrière , où  elles  laissent  entre  elles  un  faible  écartement.  Le  test  de 
cette  coquille  est  mince  et  transparent;  en  cela  elle  se  rapproche  des 
Anaiines  et  des  Thracies  ; le  côté  antérieur  est  arrondi  ; le  côté  posté- 
rieur e.st  circonscrit  par  un  angle  peu  saillant,  mais  bien  marqué,  qui 
de.ssine  un  grand  corselet  très  saillant  dans  le  milieu.  Toute  la  portion 
du  bord  postérieur  , qui  correspond'  à l’angle  dont  nous  venons  de 
parler,  forme  une  troncature  oblique,  courte  , qui  se  dessine  à l'inté- 
rieur par  une  ligne  qui  coïncide  avec  celle  de  l’angle  extérieur.  Les 
impressions  musculaires  sont  petites,  fort  écartées  , à peu  près  égale- 
ment distantes  de  la  charnière  ; l’antérieure  , ovale-oblongue  , vient 


LES  MACTRACÉES. 


291 


s’allonger  le  long  du  bord  antérieur  et  tout  près  de  lui  ; l’impression 
postérieure  est  circulaire  ; elle  est  située  à l’extrémité  postérieure  du 
bord  cardinal . et  comprise  dans  la  largeur  du  plan  que  circonscrit 
l’angle  postérieur  des  valves.  Une  impression  palléale  simple  , rappro- 
chée du  bord  ventral  et  lui  restant  parallèlè , s’étend  d’un  muscle  à 
l’autre,  sans  produire  la  moindre  inflexion. 

La  charnière  est  fort  singulière  ; elle  consiste  en  un  grand  cuilleron 
ovale-oblong  , s’avançant  horizontalement  dans  la  cavité  de  la  coquille , 
de  la  môme  manière  que  celui  des  Lulraires  et  des  Anatines.  Cependant 
il  est  incliné  un  peu  obliquement  en  arrière , et  du  côté  postérieur  il  se 
rattache  au  bord  cardinal  par  une  côte  épaisse,  qui  se  prolonge  ensuite 
dans  toute  la  longueur  du  bord  postérieur  et  supérieur.  Ce  cuilleron  est 
assez  épais  et  profondément  creusé  pour  recevoir  un  ligament  interne, 
proportionné  à la  cavité  où  il  est  reçu.  Le  bord  postérieur  du  cuilleron 
est  simple;  il  s’élargit  en  haut , et , se  renversant  au-dessus  du  cuü- 
leron  , il  change  l’extrémité  supérieure  de  celte  cavité  en  une  gout- 
tière à demi  recouverte.  Sur  le  bord  antérieur , le  cuilleron  porte  deux 
petites  dents  inégales,  divergentes , dont  l’interne  est  la  plus  longua. 
Telles  sont  les  parties  qui  se  remarquent  sur  la  valve  droite  ; sur  la 
valve  gauche . la  charnière  ne  présente  presque  point  de  différence; 
seulement  les  dents  cardinales  sont  très  courtes  ; il  n’existe  aucune 
trace  de  ligament  externe. 

D’après  la  description  que  nous  venons  de  présenter  des  caractères 
du  genre  Anatinelle,  il  devient  évident  que  la  coquille,  qui  lui  sert  de 
type , ne  peut  se  confondre  dans  aucun  autre  genre  connu.  Tel  que  le 
genre  Mye  est  conçu  aujourd’hui , il  ne  peut  recevoir  la  coquille  de 
r Anatinelle;  elle  ne  peut  s’introduire  non  plus  parmi  les  Anatines  , non 
seulement  parce  qu’elle  manque  de  l’osselet  cardinal,  qui  caractérise  ce 
genre , mais  encore  par  l’absence  de  la  sinuosité  paltéale.  Par  la  mémo 
raison , celte  coquille  ne  peut  entrer  ni  dans  les  Liitraires,  ni  dans  les 
Madrés  , et  moins  encore  dans  les  Cumingia , puisqu'elle  manque  dos 
dents  latérales , qui  caractérisent  ce  dernier  genre.  M.  Sowerby  a donc 
bien  fait  de  proposer  un  genre  spécial  pour  le  Mya  nicobarica  ; mais  il 
s’agit  maintenant  de  décider  la  place  que  ce  nouveau  genre  doit  occu[)or 
dans  la  méthode.  Nous  éprouvons,  à son  sujet,  la  môme  incertitude  que 
pour  le  genre  Cardilia.  Aussi  en  l’introduisant  dans  la  famille  des  Mac- 
Iracées,  nous  pensons  que  c’est  une  place  temporaire  et  provisoire  qu'il 
occupe  ; ses  rapports  ne  pourront  être  définitifs;  qu'au  moment  oii 
l’animal  sera  connu. 

Rappelons-nous  les  principes,  à l’aide  desquels  nous  avons  déter- 


*9 


292 


m:iTlÈ:ME  FAMILLE. 


miné  les  rapports  de  quelques  genres  embarrassants.  Tous  les  mollus- 
ques dyuiiaires,  qui  sont  terminés  en  arrière  par  des  siphons,  présentent 
généralement  une  sinuosité  plus  ou  moins  profonde  dans  l’impression 
pallcale.  Ainsi  que  nous  le  savons  , cotte  sinuosité  ost  due  à l’existence 
chez  ces  mollusques  d’un  muscle  propre,  destiné  à contracter  les  siphons 
dans  l'intérieur  de  la  coquille.  Nous  savons  aussi  que  dans  tous  ceux  des 
mollusques  de  la  même  classe,  qui  n'ont  point  de  siphons  en  arrière, 
l’impression  palléale  reste  simple,  et  par  Je  moyen  de  cette  impression, 
on  peut  déjà  classer  un  assez  grand  nombre  de  mollusques  d'après  leurs 
coquilles. 

Mais  il  est  des  'genres  qui  se  soustraient  à cette  règle  générale  et 
chez  lesquels  l’impression  palléale  reste  simple , quoique  le  manteau  se 
prolonge  en  arrière  en  siphons  très  courts  ou  présente  de  simples  per- 
forations, destinées  à remplacer  ces  organes.  Nous  supposons  que  les 
Anatinelles  appartiennent  à celte  série  de  mollusques  dont  le  manteau 
est  simplement  perforé.  S’il  en  est  ainsi,  le  genre,  au  lieu  de  rester 
dans  la  famille  des  Maclracées , devra  faire  partie  de  celle  des  Érycines , 
car  les  animaux  de  ce  genre  ont  aussi  l'impression  palléale  simple , et 
cependant  leur  manteau , perforé  en  arrière  , a ses  lobes  réunis  le  long 
du  bord  ventral  de  la  même  manière  que  dans  les  mollusques  à siphons 
plus  ou  moins  allongés.  Nous  le  répétons , la  place  que  nous  assignons 
au  genre  Analinelle  ne  peut  être  que  temporaire,  mais  pour  décider 
définitivement  des  rapports  du  genre,  il  est  indispensable  de  connaître 
l’animal. 

Nous  ne  connaissons  jusqu’ici  qu'une  seule  espèce  dans  le  genre 
Analinelle,  c’est  la  suivante. 

Anatinelle  blanche.  Anatinella  canclida.  Desh. 

PI.  8 bis.  fig.  4.  5. 


Jn,  testa  ovato-lmnsversâ  subœquîiaterâ  ^ turgidn}a  ^ tenuî ^ fragili  ^ 
canduia^  transhteidâ  ^ transversim  tenuiter  striata,  striis  îangitndi^ 
nalibus  tennissiniis 'inx  perspîcuis  oniald',  îatere  antico  rotundato\ 
postico  oblique  trnncato.,  angnlo  circumseripto. 

Mya  candida,  Chemn.  Comh.  f.  0.  p.  29.  pl.  3.  f.  17.  18. 

Mya,  Schræler.  Eiiil.  I.  2.  p^  616.  u'’  5. 

Mya  uicobarica.  Omel.  Syst.  lul.  cd.  i3.  p.  3221.11”  12, 

Mya  angulata.  Spengîcr,  Méin.  de  la  Soc.  d’hi^l.  nat,  de  Copenh.  t.  3. 

p,  35.  n,‘'  I r . 


LES  MALTUACEES. 


2(j3 

Mya  linguUitii,  DilUv,  Cat.  r.  p.  44.  u*  S. 

Id,  WooJ.  Ccner.  Courli.  p.  97.  n*  1 1, 

Id.  ^V^^od.  Iiid.  Tcsiac.  pl.  2.  1'.  it,  Mala. 

Anatinelta  Sibbaldii,  Sou.  Gênera  of  sliells. 

Ueshayes  dans  Lamk.  An.  s.  verL  a*  éd.  t,  6.  p.  g5. 

Reeve.  Conch.  syst.  t.  i.  p.  56.  pl.  38, 

Id.  Sowerby.  Conch.  Man.  p.  66.  f*  70.  ^ s 

Jd,  lïcrrniansen  Ind.  gener.  Mala.  prim.  l.  i.  p,  48, 

Habite  Cey  lan,  Nicobar,  les  mers  de  l’Inde. 

Les  détails  dans  lesquels  nous  venons  d’entrer,  étant  empruntés  à la 
seule  espèce  connue  , elle  se  trouverait  déjà  suffisamment  caractérisée; 
nous  devons  ajouter  cependant  quelques  particularités  propres  à la  faire 
reconnaître,  dans  le  cas  où  Ton  viendrait  à découvrir  d’autres  espèces 
analogues.  Mais  , avant  tout , nous  devons  constater  l’identité  du  M\ja 
candida  de  Chemnilz  avec  VAnatinella  Sibbaklii  de  Sowerby.  Lorsque 
l’on  vient  à comparer  les  diverses  figures  et  surtout  celle  de  Chemnitz 
et  celle  de  Sowerby,  on  serait  porté  à croire  qu’elles  représentent  deux 
espèces  distinctes.  En  effet , la  coquille  de  Chemnilz  a le  bord  ventral 
moins  arqué , par  conséquent  plus  parallèle  au  bord  dorsal  ; le  côté 
postérieur  paraît  en  proportion  un  peu  plus  allongé;  mais  si  nous  com- 
parons la  coquille  que  nous  possédons  avec  les  figures  en  question , nous 
lui  trouverons  une  forme  intermédiaire.  Mais  ce  qui  est  plus  concluant 
encore,  c’est  l’exactitude  do  la  description  de  Chemnitz,  qui  s’accorde 
parfaitement  avec  les  caractères  de  la  coquille  que  nous  avons  sous  les 
yeux.  Chemnitz  dit  que  le  Mya  nicobarica  présente  à la  surface  exté- 
rieure des  stries  transverses,  très  fines  et  quelquefois  irrégulières  vers 
les  bords  ; ces  stries  se  voient  dans  VAnaiineîla  Sibbaldii  de  Sowerby. 
Chemnilz  ajoute  que  d’autres  stries,  plus  fines  que  les  premières,  descen- 
dent des  crochets , et  ces  stries  sc  trouvent  également  sur  la  coquille  du 
zoologiste  anglais.  On  peut  objecter  que  la  figure  de  Chemnitz  ne  repré- 
sente aucune  trace  des  petites  dents,  qui  s'élèvent  sur  le  côté  antérieur 
du  cuiileron  ; mais  il  faut  se  rappeler,  qu’à  cette  époque  on  n’apportait 
pas  à la  roprésenlalion  des  objets  d’histoire  naturelle  l’exactitude  que 
l’on  exige  aujourd'hui,  et  l’on  conçois  aussi  qu’un  caractère  d’une  faible 
importance  ait  échappé  à un  observateur  aussi  exact  que  Chemnitz. 

Cette  coquille  , rare  et  précieuse,  a 35  millimètres  de  large , 25  de 
longueur  cl  20  d’épaisseur. 


2^4 


HUITIEME  EAMILLt. 


GENRE  TRENTIÈME. 

GK'ATHODOlff.  Gnalhodon.  (Gray.) 

CARACTÈRES  gènériqxtes.  — Animal  ovale-trigone , épais 
d’un  blanc  laiteux  uniforme , revêtu  d’un  manteau  mince , à 
lobes  égaux , réunis  en  arrière  dans  le  tiers  de  leur  longueur, 
ayant  les  boz'ds  simples  et  dépourvus  de  tentacules.  Deux 
siphons  courts,  réunis  dans  toute  leur  longueur,  terminés 
par  une  ouverture  simple  et  sans  tentacules.  Bouche  petite , 
ovale,  entre  deux  lèvres  larges  et  ridées.  Palpes  labiales  gran- 
des, triangulaires,  très  pointues  en  arrière  : l’interne  soudée  au 
corps  dans  la  moitié  de  son  étendue  ; l’externe  attachée  au  man- 
teau. Pied  assez  épais,  triangulaire,  linguiforme,  pointu, 
surmontant  une  masse  abdominale  ovoïde  et  épaisse.  Une  paire 
de  feuillets  branchiaux  lisses,  inégaux,  tombant  de  chaque 
côté  du  corps  dans  la  cavité  palléale  et  se  prolongeant,  après 
s’être  soudés,  en  arrière  de  la  masse  abdominale;  le  feuillet 
externe  le  plus  court  et  le  plus  étroit , prolongé  en  haut  par  un 
bord  membraneux. 

Coquille  ovale-trigone , épaisse,  solide,  ventrue , subcordi- 
forme  en  avant , à crochets  grands  et  écartés  ; toute  la  surface 
externe  revêtue  d’un  épiderme  brun-olivâtre  ; valves  parfaite- 
ment closes,  blanches  en  dedans,  à bords  simples  et  trancliants. 
Charnière  présentant  au-dessous  du  crochet  une  cavité  pro- 
fonde, se  continuant  en  un  canal  fermé  jusqu’au  sommet  des 
valves  et  contenant  un  ligament  interne.  Sur  la  valve  gauche 
une  petite  dent  cardinale,  ployée  en  V,  et  en  avant  une  grosse 
dent  pyramidale,  à laquelle  vient  aboutir  la  dent  latérale  anté- 
rieure. Deux  petites  dents  divergentes  sur  la  valve  droite  et  à 
côté  une  fossette  conique  pour  la  grosse  dent  de  la  valve  oppo- 
sée. Sur  chaque  valve  une  dent  latérale  antérieure  courte , une 
dent  latérale  postérieure  très  allongée , l’une  et  l’autre  striées 
perpendiculairement  ; impressions  musculaires  subcirculaires  ; 


LES  MACTRACEES. 


yy  J 

impression  palléale  très  courte,  remontée  dans  rintérieiir  des 
valves , et  pourvue  d’une  sinuosité  postérieure  courte  et  trian- 
gulaire. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Rauyia , Desmoulins. 

OBSERVATIONS.  — Le  genfc  curieux  dont  nous  allons  nous  occupcv  a 
été  institué  par  M.  Gray.  Signalé  par  ce  savant  à M.  Conrad  , natura- 
liste américain,  il  fut  publié  d'abord  dans  le  journal  de  Silliman.  Peu  de 
temps  après,  M.  Desmoulins  de  Bordeaux  reçut  aussi  cette  coquille 
curieuse , et  proposa  pour  elle  un  genre  sous  le  nom  de  Jiangia , voulant 
consacrer  dans  le  domaine  de  la  science  le  nom  de  M.  Rang,  savant 
marin  français,  qui , par  ses  recherches  et  ses  travaux,  a contribué  à 
Tavancement  de  la  conchyliologie.  Ce  double  emploi  dans  la  dénomi- 
nation du  genre  est  d’autant  plus  pardonnable,  qu’il  était  matériellement 
impossible  à M.  Desmoulins  de  savoir  que  le  genre  venait  d’être  publié 
en  Amérique. 

Lorsque,  en  1837,  M.  Gray  fit  paraître  son  travail  sur  la  famille  des 
Mactracées  dans  le  MagaMn  d'histoire  naturelle,  il  introduisit  son  nouveau 
genre  dans  la  famille  que  nous  venons  de  mentionner.  En  cela,  il  prouva 
qu’il  avait  étudié  avec  un  soin  minutieux  les  caractères  do  son  genre,  et 
qu’il  en  avait  saisi  les  rapports.  Il  était  cependant  difficile  de  se  défendre 
de  certaines  préoccupations , à la  suite  desquelles  quelques  naturalistes 
avaient  la  pensée  que  le  genre  Gnalhodon  devait  constituer  un  type  à part, 
intermédiaire  entre  les  Mactres  et  les  Cyrènes.  M.Gray  fut  guidé  par 
la  connaissance  de  l’animal, ou  du  moins  par  quelques  renseignements, 
obtenus  à son  sujet  ; car  il  est  à croire  que  ce  savant  en  aurait  donné 
une  description  détaillée,  s’il  l’avait  eu  sous  les  yeux.  Nous  reconnaîtrons 
même  quelques  erreurs  dans  le  peu  de  paroles  qu’il  en  a dites.  Depuis 
les  premiers  travaux  que  nous  venons  de  mentionner,  les  conchyliologues 
ont  adopté  le  genre  de  M.  Gray,  et  presque  tous  l’admettent  dans  la 
famille  des  Mactracées. 

Quelques  uns  n’hésilèrent  pas  à l’introduire  dans  la  famille  des  Cycla- 
dées  , correspondant  assez  exactement  à celle  des  Conques  fluviatiles  do 
Lamarck.  C’est  là  l’opinion  de  MM.  Potiez  et  Michaud.  M.  Swainson  n'a- 
dopta pas  l’arrangement  proposé  par  M.  Gray.  Ce  naturaliste,  dans  son 
Traité  de  malacologie,  institua  sous  le  nom  ôeCyclina  une  sous-famille, 
dans  laquelle  les  genres  sont  jetés  au  hasard  ; c’est  ainsi  qu’aux  genres 
Cyclas , Cyrena  et  Galathée  , il  joint  les  Cumingia  , les  Erycines  et  les 
Gnathodons.  Assurément  cet  arrangement  ne  pourrait  prévaloir  quand 


ÜUiriEMK  FAMILLE. 


1296 

mémo  la  coquille  seule  donnerait  les  moyens  de  décider  de  ses  rapports. 
L'opinion  de  M.  Anton , qui  place  le  Gnalhodon  dans  la  famille  des  Gar- 
diacées,  ne  sera  pas  non  plus  acceptée;  rien  no  la  justifie  à nos  yeux. 
Tous  les  genres  de  cette  famille  ont  le  ligament  externe;  elles  ont  des 
dents  latérales,  mais  de  formes  bien  différentes  de  celles  du  Gnathodon. 
Dans  les  Cardiacées,  l’impression  palléale  est  simple  et  non  échancrée, 
comme  dans  les  Gnathodons;  il  n’y  a donc  rien  dans  ce  genre  qui  le 
rapproche  des  Isocardes  et  des  Cardium. 

On  ne  connaît  jusqu’ici  qu’une  seule  espèce  appartenant'  au  genre 
Gnalhodon. Très  commune  dans  les  eaux  saumâtres  du  lac  Pontchartrain, 
non  loin  de  la  Nouvelle-Orléans,  elle  était  connue  des  naturalistes  amé- 
ricains, mais  confondue  par  eux  dans  le  genre  Cyrène  de  Lamarck, 
parce  que , en  effet , elle  a les  caractères  extérieurs  des  coquilles  de  ce 
genre.  Cette  coquille  est  ovale-lrigone  ; elle  est  épaisse,  très  inéquila- 
lérale  et  subcordiforme ; ses  crochets  sont  grands  et  saillants;  ils  se 
contournent  on  avant,  restent  fort  écartés,  laissant  entre  eux  un  es- 
pace profond,  comparable  jusqu’à  un  certain  point  à celui  des  Arches. 
La  surface  extérieure  est  lisse  ou  irrégulièrement  striée  par  des  accrois- 
sements; cette  surface  est  revêtue  d’un  épiderme  brun,  verdâtre  ou 
jaunâtre.  La  présence  de  cet  épiderme,  comparable  à celui  des  coquilles 
d’eau  douce  , Thabilation  delà  coquille  dans  un  lac  d’une  eau  pou  salée, 
étaient  des  circonstances  propres  à favoriser  l’erreur  des  naturalistes 
américains.  Mais  il  suffît  d’ouvrir  la  coquille  et  d'en  voir  la  charnière, 
pour  être  convaincu  qu’elle  ne  peut  se  rapprocher  de  la  famille  des 
Conques  fluviatiles.  A l’intérieur,  cette  coquille  est  blanche;  les  bords 
sont  entiers , tranchants  et  assez  subitement  épaissis.  Les  valves  étant 
rapprochées,  elles  se  ferment  très  exactement  et  elles  ne  laissent  aucun 
bâillement , même  du  côté  postérieur. 

La  charnière  est  de^  plus  singulières;  elle  présente  immédiatement 
au-dessous  des  crochets  et  dans  une  direction  oblique  du  haut  en  bas 
et  d'avant  en  arrière  une  fossette  profonde,  en  cuilleron,  destinée  à con- 
tenir un  ligament  interne;  mais  cette  fossette  est  différente  de  celle 
de  la  plupart  des  Madrés , car  vers  le  bord  dorsal  elle  est  entièrement 
couverte  par  le  bord  cardinal,  de  cette  manière  changée  en  un  vrai 
canal  complet  qui  remonte  jusqu’au  sommet  des  crochets.  Dans  les  indi- 
vidus bien  frais  et  bien  entiers,  particulièrement  dans  ceux  qui  sont 
jeunes,  les  crochets,  conservant  leur  intégrité,  ne  présentent  aucune 
trace  de  la  cavité  du  ligament.  Mais  chez  les  individus  vieux,  altérés 
par  celte  espèce  de  carie,  dont  on  observe  si  fréquemment  les  traces 
sur  les  coquilles  qui  habitent  les  eaux  douces , on  retrouve  très  faci- 


LKS  MACTKACEKS. 


lement  le  canal  du  ligament , dans  lequel  il  est  resté  en  place  , et 
cette  disposition  peut  être  comparée  à ce  qu'on  voit  dans  un  certain 
nombre  de  Spondyles.  11  y a même  des  Mactres , tel  que  le  MactraSpen- 
glerl , par  exemple , qui  offrent  une  disposition  analogue  ; seulement  le 
canal,  destiné  à renfermer  le  ligament,  reste  ouvert  en  gouttière  dans 
toute  sa  longueur  , tandis  que  chez  d’autres  Mactres , ainsi  que  chez  les 
Gnathodon , le  canal  du  ligament  se  ferme  en  partie,  et  il  aboutit  à la 
cavité  en  cuilleron,  qui  forme  la  partie  la  plus  large  du  bord  cardinal.  En 
avant  du  cuilleron  s’élèvent  deux  petites  dents  cardinales,  divergentes  ; 
l’antérieure  s’élève  d’une  base  triangulaire.  Dans  les  jeunes  individus  , 
la  dent  cardinale  postérieure  est  bifurquée  à la  manière  de  la  dent  en  V, 
très  comprimée  de  quelques  Lutraires  et  de  quelques  Mactres.  Sur  la 
valve  gauche  , les  deux  dents  cardinales  se  réunissent  au  sommet,  en 
formant  entre  elles  un  angle  presque  droit,  et  par  là  elles  ressemblent 
bien  plus  encore  à la  dent  en  V des  Mactres  et  des  Lutraires.  Sur  cette 
valve , il  existe  en  avant  une  grosse  dent  conique , sur  laquelle  vient  se 
joindre  le  commencement  d’une  dent  latérale  antérieure.  Sur  la  valve 
droite,  celte  dent  conique  est  reçue  dans  une  fossette  d’une  grandeur 
proportionnée,  En6n  la  charnière  est  complétée  par  des  dents  latérales; 
la  dent  latérale  antérieure  est  courte  , la  postérieure  est,  au  contraire, 
très  allongée  ; toutes  deux  sont  épaisses  et  striées  perpendiculairement  de 
chaque  côté.  L’une  et  raiitrc  de  ces  dents  ont  des  courbures  différentes 
pour  s’adapter  au  contour  des  valves. 

Les  impressions  musculaires  sont  d'une  médiocre  étendue;  elles  oc- 
cupent toutes  deux  la  région  supérieure  de  la  coquille  ; elles  sont  sub- 
circulaires et  l'antérieure  est  un  peu  plus  petite  que  l’autre  ; elle  est 
également  beaucoup  plus  rapprochée  de  la  charnière.  L’impression 
palléale  est  très  courte  ; elle  ne  laisse  pas  sur  la  coquille  cette  double 
ligne  que  l’on  trouve  chez  des  Mactres  ; mais  elle  remonte  très  haut 
dans  l’intérieur,  laissant  entre  elle  et  le  bord  une  large  zone , qui  annonce 
une  largeur  égale  dans  le  muscle  orbiculaire  du  manteau.  Dans  presque 
toutes  les  autres  coquilles,  l’impression  palléale  prend  naissance,  soit 
du  bord  antérieur  du  muscle,  soit  du  milieu  de  son  bord  inférieur  ; mais 
ici  le  muscle  reste  complètement  en  dehors,  et  c'est  de  son  bord  interne 
que  prend  naissance  l’impression  palléale  ; elle  descend  parallèlement 
au  bord  ventral , produit  en  arrière  une  petite  sinuosité  triangulaire,  et 
rejoint  ensuite  l’impression  musculaire  postérieure. 

L’animal  des  Gnathodons  n’a  pas  été  décrit  jusqu’ici.  M,  Gray  se  con- 
tente de  dire,  qu’il  a les  siphons  courts  et  séparés , et  que  les  lobes  de 
son  manteau  sont  réunis  en  arrière.  Mais  ces  renseignements  peu  précis 


HLITlKMt  l AMlLLb. 


298 

sont  tout  à fait  insuflisants,  pour  établir  définitivement  les  rapports  na- 
turels du  genre  qui  nous  occupe.  Un  jeune  voyageur  , plein  de  zèlo  et 
d intelligence,  M.  Salé,  voué  par  goût  à la  recherche  des  objets  d’histoire 
naturelle,  a recueilli  quelques  exemplaires  de  l’animal  du  Gnathodon,  et  il 
a bien  voulu  nous  en  faire  l’abandon  dans  l’intérêt  de  la  science.  Il  nous 
a donc  été  possible  d'en  présenter  les  caractères  d’une  manière  complète 
et  d'offrir  ici  les  observations  que  nous  avons  faites  à son  sujet. 

Cet  animal  a une  forme  semblable  à celle  de  sa  coquille  ; il  est  ovale- 
Irigone  , épais  et  d’unecouleur  uniforme  , d’un  blanc  laiteux,  Il  est  en- 
veloppé d’un  manteau  mince,  transparent,  à la  circonférence  duquel 
existe  un  large  muscle  orbiculaire,  qui  diminue  subitement  de  largeur, 
au  moment  où  il  vient  se  joindre  aux  muscles  adducteurs  des  valves.  Les 
lobes  du  manteau  restent  désunis , depuis  le  muscle  antérieur  jusque 
vers  le  tiers  postérieur  de  leur  longueur.  Là  ils  se  joignent  et  forment 
un  véritable  cul-de-sac,  terminé  en  arrière  par  les  siphons;  on  n'apergoit 
sur  toute  la  circonférence  de  cet  organe  aucune  trace  de  tentacules. 
Les  siphons  sont  courts  et  inégaux  ; loin  d'être  désunis  comme  le  suppose 
M.  Gray,  ils  se  joignent  dans  toute  leur  longueur.  Le  siphon  anal  est  si 
court  qu'il  ressemble  plutôt  à une  perfoiation  du  manteau  qu’à  un  si- 
phon véritable.  Le  siphon  branchial  est  plus  étroit  ei  plus  allongé,  et 
l’un  et  l'autre  sont  terminés  par  une  ouverture  simple , sur  les  bords  de 
laquelle  on  n'aperçoit  aucune  trace  de  tentacules.  L'ouverture  intérieure 
du  siphon  branchial  est  garnie , comme  dans  les  Madrés , d’une  valvule 
membraneuse  , et  comme  dans  les  Madrés  aussi  le  manteau  est  pourvu 
de  deux  longues  valvules,  parallèles  au  bord  et  se  continuant  dans  toute 
la  longueur  de  la  commissure  postérieure. 

Le  pied  est  assez  épais  , linguiforme,  triangulaire  , il  ressemble  tout 
à fait  à celui  des  Madrés;  par  sa  base,  il  se  continue  avec  une  masse 
abdominale  épaisse  et  ovalaire. 

La  bouche  est  petite,  ovalaire,  accompagnée  de  deux  lèvres  assez 
larges , membraneuses , ridées , et  la  lèvre  supérieure  est  creusée  en 
une  cavité  peu  profonde,  destinée  probablement  à contenir  la  matière 
alimentaire  avant  d’être  ingurgitée.  Ces  lèvres  se  continuent  de  chaque 
côté  en  une  paire  de  palpes  labiales , grandes  , triangulaires  , couvertes 
à leur  surface  d’une  multitude  de  lamelles  très  fines  et  très  régulières. 
Ces  palpes  vont  nous  offrir  une  disposition  très  propre  à caractériser  le 
genre.  En  effet  , la  palpe  interne , au  lieu  de  rester  libre,  ainsi  que  dans 
les  Madrés , se  soude  aux  parties  latérales  du  corps  dans  la  moitié 
supérieure  de  sa  surface.  La  palpe  externe , plus  libre  et  plus  détachée, 
est  fixée  par  sa  base  à la  paroi  interne  du  manteau. 


LES  MÀCTKACEEb.  3y9 

Les  branchies  sont  tout  à fait  semblables  à celles  des  MacLres.  Deux 
feuillets  inégaux  descendent  de  chaque  côté  du  corps;  l’interne  est  le  plus 
long  et  le  plus  large  ; son  extrémité  antérieure , terminée  en  pointe , s'a- 
vance vers  la  bouche  entre  les  palpes  labiales.  La  branchie  externe,  plus 
étroite,  commence  plus  en  arrière,  et  son  bord  externe  se  prolonge  vers  le 
dos  en  un  petit  feuillet’membraneux,  destiné  à compléter  le  canal  aquifère 
sous-branchial.  En  arrière  de  la  masse  abdominale , les  feuillets  bran- 
chiaux se  réunissent,  se  prolongent;  leur  surface  inférieure  présente 
une  double  série  d'ouvertures,  circonscrites  par  un  petit  bourrelet,  sur 
lequel  se  soude  un  pourtour  membraneux  du  manteau,  qui  s’élève  autour 
de  l’ouverture  intérieure  du  siphon  anal. 

Ce  que  nous  venons  d'exposer  de  l’animal  du  Gnathodon  donne  la 
preuve  qu'il  se  rapproche  considérablement  de  celui  des  Mactres;  il  lui 
ressemble  par  la  plupart  des  caractères  fondamentaux.  La  bouche,  les 
lèvres,  la  grandeur  des  palpes  labiales,  le  pied , et  surtout  les  bran- 
chies , présentent  des  ressemblances  incontestables.  Mais  les  Gnatho- 
dons  diffèrent  des  Mactres  par  la  brièveté  des  siphons , l’absence  des 
tentacules  à l’ouverture  de  ces  organes,  et  enfin  par  la  réunion  des 
lobes  du  manteau,  qui  s’opère  un  peu  plus  haut  que  dans  les  Mactres. 
En  appréciant  à leur  juste  valeur  les  caractères  de  la  coquille  et  de 
l'animal,  on  peut  conclure,  avec  M.  Gray,  que  le  genre  Gnathodon 
appartient  en  réalité  à la  famille  des  Mactracées , et  que  c’est  là  qu’il 
doit  rester  dans  une  méthode  naturelle. 

Gnathodon  cunéiforme.  Gnathodon  cuneatiis  ^ Gray. 

PI.  10.  %.  9 à 12. 

G,  lesta  ovato-trigonà  ^ cunei/ormi ^ antice  cordiformi ^ Iccvigatâ  epi- 
dennide  Jusco^olivuced  indntà;  uinhonibns  magnis  distantihus. 

Gray  et  Conrad.  Silliman  journal. 

Ratifia  cjrenoides.  Des  Moul,  Act,  de  la  Soc,  linn.  de  Bord.  I.  5.  p.  58, 

pi. .. 

Gnathodon  cnneatus,  Süw,  Généra  of  .vhells,  n®  30. 

Rang,  Nouv.  Ann,  du.  Mus,  d’iiisl,  ual.  I.  3. 

Gray,  Mag.  of  nal.  hisl.  Nouv.  sér,  r.  i.  p,  77.  f,  34, 

Gray.  Arch.  fiir.  Nat.  I.  4,  p,  87, 

Anton.  Verz,  der  Coiich.  p,  lo. 

Swaiiison.  Trea!.  on  Malac.  p.  370. 

Keeve  Couch,  syst,  t.  i,  p.  62,  pl.  43. 

Sow.  Jun,  Coneh.  mau.  p,  i54.  1'.  83. 


3oo 


.NEUVIEME  FAMILLE. 


}laiil(‘y.  DesiT.-cal,  1.  i.  p.  35, 

Polif.z  et  Miel),  Gall,  des  Moll.  t.  2.  p,  194. 

('atlow.  Conch.  oonienc,  p,  i5, 

Wood.  Ind.  Test,  2*  snp.  pl.  10.  f,  22. 

Ainsi  que  nous  le  disions  précédemment,  une  seule  espèce  de  Gna- 
thodon  est  connue;  ce  que  nous  avons  dit  du  genre  se  rapporte  donc  à 
Tespèce  et  peut  servir  à la  faire  reconnaître.  Nous  nous  trouvons  par  là 
dispensés  d'on  reproduire  une  description  détaillée;  nous  ajouterons 
seulement  que  cette  coquille  est  d’un  médiocre  volume,  elle  est  épaisse 
et  solide;  sa  surface  est  lisse,  quelquefois  un  peu  onduleuse  par  des 
dépressions  transverses,  produites  parles  accroissements.  Tous  les  indi- 
vidus adultes  que  nous  avons  observés  sont  corrodés  sur  les  crochets 
de  la  même  manière  que  les  Unio  et  les  Cyrènes.  Ces  érosions , dont  la 
cause  est  inconnue,  altèrent  quelquefois  la  forme  des  crochets,  qui  sont 
plus  courts  et  moins  courbés  qu’ils  no  devraient  l’êlro.  Les  jeunes  indi- 
vidus sont  mieux  conservés,  et  c'est  d'après  eux  que  Ton  peut  bien 
juger  de  la  forme  générale  de  l’espèce. 

Celle  coquille  est  tellement  abondante  dans  le  lac  Pontebanrain  , que 
les  sauvages  en  ont  fait  des  plate-fornies,  pour  dresser  leurs  tentes  et  les 
élever  au-dessus  du  mouvement  des  eaux  du  lac.  On  nous  a assuré  qu’elle 
se  trouve  fossile  dans  les  terrains  récents  do  la  région  méridionale  de 
l’Amérique  septentrionale  ; elle  est  longue  de  5o  millimètres,  haute  do 
48  et  épaisse  de  35. 


NEUVIÈME  FAMILLE. 

fies  IVIcsodesmides.  (Gray.) 

CARACTÈRES.  — Animal  comprimé,  ayant  les  lobes  du  man- 
teau réunis  en  arrière  et  prolongés  de  ce  coté  en  deux  siphons 
courts,  séparés  dans  toute  leur  longueur;  le  siphon  anal  garni 
de  tentacules  simples  , le  siphon  branchial  terminé  par  des  ten- 
tacules branchus  ; pied  allongé , comprimé  ; palpes  labiales , 
courtes,  dont  Tune  est  soudée  au  manteau;  branchies  très 
inégales. 


LES  MESODESMiDES. 


3ol 

Coquille  épaisse,  solide,  parfaitement  close,  équivalve, 
iiiéquilatérale;  impression  palléale  simple  ou  faiblement  si- 
nueuse en  arrière;  charnière  épaisse , portant  un  ligament  in- 
terne, pourvue  de  une  ou  deux  dents  cardinales,  et  quelquefois 
de  dents  latérales. 

Genre  Mésodesme. 

La  famille  des  Mésodesmides  a été  proposée  pour  la  première  fois  par 
Gray,  daus  le  Synopsis  du  Musée  britannique,  publié  en  1840. 
Quelques  années  après,  ce  savant  zoologiste  la  reproduisit  dans  le  Cata- 
logue des  mollusques  et  des  coquilles  de  la  Nouvelle-Zélande.  En  insti- 
tuant cette  famille,  M.  Gray  y introduisit  un  seul  genre,  celui  que  nous 
avons  créé  en  1830,  sous  le  nom  de  Mésodesme.  En  1847,  M.  Gray 
fit  paraître , dans  la  15'  partie  des  Procedings  de  la  Société  zooîogiquc 
de  Londres , un  travail  considérable  sous  le  titre  de  Liste  des  genres  des 
mollusques  vivants,  avec  leur  synonymie  et  l’indication  de  leurs  types. 
Ce  n’est  pas  ici  qu’il  est  convenable  d’examiner  ce  travail  très  utile  et 
do  rechercher  les  principes  de  la  classification  adoptée  par  l’auteur;  il 
nous  suffira  de  dire  que  M.  Gray  n’a  pas  conservé  la  famille  des  Méso- 
desmides ; il  la  remplace  par  celle  des  Papliiadœ , dans  laquelle  il  intro- 
duit les  trois  genres  Paphia,  Anapa^  et  avec  doute  Ervilia.  Nous 
n’adoptons  pas  ce  nouvel  arrangement.  Avant  de  le  rejeter,  recher- 
chons d’abord  ce  que  c’est  que  le  genre  Paphie,  qui  remplace  celui  des 
Mésodesmes , et  qui  devient  ainsi  le  type  de  la  nouvelle  famille. 

Le  genre  Paphia  a été  institué  par  Lamarck,  en  1 801  , dans  le  sys- 
tème des  animaux  sans  vertèbres.  En  même  temps  et  dans  le  même 
ouvrage , ce  naturaliste  proposait  le  genre  CrassateUe , c’est-à-dire  un 
genre  dans  lequel  il  rangeait  des  espèces  à caractères  identiques  avec 
celles  dupremier.  Lamarck  ne  tarda  pas  à s'apercevoir  que  l’un  des  deux 
genres  était  inutile , on  conséquence  il  abandonna  celui  qui  porto  le  nom 
de  Paphia  J et  fit  rentrer  sans  exception  toutes  les  coquilles  qu’il  renfer- 
mait dans  le  genre  conservé..  Ainsi , si  le  genre  Paphie,  dès  son  origine, 
contenait  deux  sortes  de  coquilles,  le  genre  CrassateUe  les  reçut  aussitôt 
que  le  genre  Paphie  fut  rejeté  par  son  auteur.  Des  deux  espèces  que 
Lamarck  indique  comme  type  de  son  genre  Pap/na,  l’une  est  une 
CrassateUe,  M.  Gray,  lui-méme,  le  reconnaît  ; l'autre  appartient  à notre 
genre  Mésodesme  [Paphia  glabrata). 

En  essayant  de  rétablir  le  genre  Paphia  , M.  Gray  s’est  trouvé  dans 
la  nécessité  de  choisir  arbitrairement  entre  les  deux  espèces  pour  en 
faire  le  type  du  genre.  Rien  no  justifie  l’opinion  de  M.  Gray  ; car  nous 


NEdVlÈME  FAMILLE. 


3o*.i 

pouvons  prétendre,  avec  autant  de  raison , que  l'autre  espèce  constitue 
également  le  type  du  même  genre.  On  comprend  les  difficultés  de  tran- 
cher de  pareilles  opinions  , surtout  pour  un  genre  abandonné  par  son 
auteur,  et  que  personne  ne  peut  reprendre  sans  jeter  une  fâcheuse  con- 
fusion dans  la  nomenclature.  Il  faudrait,  d’ailleurs,  contester  à un  natu- 
raliste le  droit  qu’il  a , de  changer  lui-même  les  noms  des  genres  qu’il 
propose,  et  d’améliorer,  par  ce  moyen  , la  nomenclature  qu’il  introduit 
dans  ses  méthodes.  Le  genre  PapMa , abandonné  par  Laraarck , doit  être 
considéré  comme  non  avenu  , comme  une  chose  qui  n’oxisle  plus.  D'ail- 
leurs le  genre  Crassatelle  le  remplace  d’une  manière  si  exacte,  qu’H 
contient,  confondues,  les  espèces  appartenant  aux  deux  types,  que  dans 
l’origine  Lamarck  avait  imposés  a son  genre  Paphia.  Il  résulte  donc  de 
ces  observations  que  le  nom  de  Papliie  ne  peut  être  emploj^  comme 
équivalent , soit  des  Crassalelles,  soit  des  Mésodesmes.  Nous  ne  voulons 
pas  dire  par  là . que  le  nom  de  Phaphiadés,  choisi  par  M.  Gray,  ne 
puisse  rester  à une  famille  de  mollusques  acéphalés.  Mais  comme  ordi- 
nairement le  nom  de  la  famille  est  emprunté  à celui  du  genre  principal 
qu'elle  renferme,  ce  nom  serait  une  espèce  de  non-sens , puisque  lo 
genre  Paphie  ne  peut  pas  exister. 

Au  genre  Paphia  M.  Gray  joint  un  genre  Anapa,  qu’il  crée  pour 
une  espèce  du  genre  Erycine , tel  qu’il  a été  réformé  par  M.  Récluz. 
Nous  verrons  , en  traitant  de  ce  genre  , que  l’espèce  qui  en  est  détachée 
par  M.  Gray  lui  appartient  bien  et  doit  y rester. 

Quant  au  genre  Erviliaj  il  a incontestablement  des  rapports  avec  les 
Mésodesmes  : mais  il  en  a plus  encore  avec  les  Corbules , surtout  avec 
ce  groupe  si  particulier,  caractérisé  par  le  Covhula  nmliterranea.  Ces 
rapports  nous  ont  fait  penser  depuis  longtemps , que  le  genre  Ervilia 
devait  entrer  dans  les  Corbules  ou  se  placer  à leur  suite. 

En  adoptant  le  nom  de  Mésodesmides , proposé  par  M.  Gray,  nous 
restreignons , comme  il  l'a  fait  autrefois,  la  famille  au  seul  genre  Mé- 
sodesme.  Nous  voyons  s’établir  des  rapports  insensibles  d'un  côté  entre 
les  coquilles  des  Mésodesmes  et  des  Mactres,  et  de  l’autre  avec  les 
Crassatelles.  Nous  savons  aujourd'hui  par  M.  d’Orbigny  que  les  Cras- 
satelles  doivent  être  définitivement  retirées  du  voisinage  des  Mactres 
et  transportées  dans  celui  des  Cardites.  D’après  ce  naturaliste,  qui  ca- 
ractérise ranimai  dans  le  3®  volume  de  sa  Paléontologie  française,  ce 
mollusque  aurait  les  lobes  du  manteau  aussi  complètement  désunis 
que  celui  des  Cardites  et  des  ünios.  Nous  devons  regretter,  dans  l'in- 
térêt de  la  science,  de  ne  pas  trouver  dans  l’ouvrage  de  M.  d’Orbigny 
une  description  plus  complète,  plus  détaillée  d’un  animal  recherché 


LES  MESODESMIDES. 


3o3 


depuis  longtemps.  Les  zoologistes  n’onl  pas  toujours  été  d’accord  sur  la 
place  que  ce  genre  doit  occuper  dans  la  méthode,  et  cette  divergence 
dans  leurs  opinions  provient  de  l'absence  de  tout  renseignement 
sujet  de  ranimai. 

Les  coquilles  du  genre  Mésodesme  ont  incontestablement  des  rap- 
ports avec  celles  des  Mactres.  La  charnière  porte  une  cavité  médiane, 
, pour  recevoir  un  ligament  intérieur  ; des  dents  latérales  plus  épaisses 
dans  un  genre  que  dans  l'autre;  une  impression  palléale  médiocrement 
échancrée  en  arrière  ; tels  sont  les  caractères  communs  qui  les 
rapprochent.  Les  Mésodesmes  diffèrent  des  Mactres  par  l’absence  de 
ia  dent  cardinale  en  V ; elles  en  diffèrent  par  la  forme  générale,  par 
leur  épaisseur  et  par  la  petitesse  de  la  sinuosité  postérieure  de  l’impres- 
sion du  manteau.  Ces  différences,  qui  justifient  la  séparation  des  genres, 
seraient  insuffisantes  pour  les  classer  dans  deux  familles  distinctes,  si 
les  animaux  n’avaient  présenté  entre  eux  des  dissemblances  profondes. 
Tl  a donc  fallu  créer  une  famille  particulière  pour  le  seul  genre  Méso- 
desme. M.  Gray,  guidé,  soit  par  les  renseignements  incomplets  de 
M.  d’Orbigny,  soit  par  des  faits  particuliers,  puisés  dans  l’observation  de 
l'animal,  a proposé  une  famille  spéciale  pour  le  genre  Crassatelle , et  il 
la  rapproche  à la  fois  des  Aslartées  et  des  Cardites. 

Si  nous  cherchons  actuellement  les  rapports  généraux  de  la  famille 
des  Mésodesmides , il  sera  facile  de  s’apercevoir  qu'elle  ne  peut  venir  à 
la  suite  de  celle  des  Mactres  , si  ce  n’est  dans  un  arrangement  linéaire. 
Mais  , dans  un  tableau  où  les  genres  peuvent  être  placés  sur  des  lignes 
parallèles,  la  famille  des  Mésodesmides  doit  être  en  avant  des  Alactres , 
et  parallèlement  à celle  des  Donaccs.  L’extrême  ressemblance  qui  existe 
entre  les  animaux  des  Donaces  et  des  Mésodesmes  justifie  noire  opinion  ; 
elle  sera  problablement  adoptée  par  ceux  des  conchyliologues  qui  auront 
étudié,  ainsi  que  nous,  les  animaux  des  genres  dont  il  vient  d’être 
question. 


GENRE  TRENTE  ET  UNIÈME. 

MÉSODESME.  Mesodesma  (Oe-sh.) 

Ll.  10.  f.  i3.  14. 

caractères  génériques.  — Animal  ovalaire  ou  trigune , 
aplati  ; les  lobes  du  manteau  réunis  postérieurement  et  pro- 


NEUVIÈME  FAMILLE. 


:.)04 

longés  en  deux  siphons,  disjoints  dans  toute  leur  longueur  ; 
siphon  anal  bordé  d’une  rangée  de  tentacules  cylindracés , gros 
et  courts,  ce  siphon  se  fermant  par  deux  lèvres  longitudinales  ; 
siphon  branchial , garni  d’une  série  de  tentacules  branches , 
symétriques , inégaux  et  relevés  en  coupole  au-dessus  de  l’ou- 
verture. Pied  comprimé,  triangulaire,  lancéolé;  branchies 
inégales , larges , réunies  postérieurement  ; feuillet  interne  plus 
long , pointu  en  avant  et  interposé  entre  les  palpes  labiales  ; 
l’externe,  tronqué,  de  moitié  plus  petit,  subauriculé  ; palpes 
labiales  fort  petites  , l’externe  entièrement  soudée  au  manteau, 
si  ce  n’est  par  son  bord  supérieur,  qui  se  continue  avec  la  lèvre 
suj)érieure  de  la  bouche  ; cette  lèvre,  reployée  en  avant,  formant 
une  cavité  avec  une  ouverture  propre,  située  au-dessus  de  celle 
de  la  bouche. 

Coquille  ovale  ou  triangulaire,  transverse,  épaisse,  close 
ou  peu  bâillante  postérieurement  ; charnière  ayant  sous  le  cro- 
chet une  fossette  étroite  et  profonde  pour  le  ligament , et  de 
chaque  côté,  une  dent  oblongue  et  simple;  impression  palléale 
offrant  une  très  petite  échancrure  postérieure , quelquefois 
entière. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Mija^  Chcmnitz , Schrœter,  Spen- 
gler,  Wood , Gmelin.  — Macira , Chemnitz , Schrœter,  Poli , 
Bruguière,  Gmelin,  Dilhvyn , Lamarck,  Schweigger,  Turton, 
Audouin,  AVood.  — Tellina^  Gmelin.  — Donax^  Montagu, 
Maton  et  Racket , Pennant,  Dorset,  Dilhvyn,  Turton , Ger- 
ville,  AVood,  Fleming.  — Paphia^  Lamarck,  Roissy,  Gray. 

— Crassaiella^  Lamarck , Dufo  , Delessert,  Scacchi , AVood. 
— Amphidesma^  Lamarck,  Payraudeau,  Collard  des  Cherres, 
i\Iaravigna,  Delessert.  — Erycina^  Sowerby,  Sowerby  junior. 

— Donadlla^  Lamarck  (olim.),  Philippi,  d’Orbigny. — Meso- 
âcsma  ^ Deshayes,  Joannis,  Quoy  etGaimard,  Müller,  An- 
ton , Hanley,  Forbes , Lovon  , Thovpe  , Reeve , Gould  , Gmy, 
Philippi. 


LES  MKSÜDESMIDES. 


OBSERVATIONS.  — Lgs  coquilles'  pour  lesquelles  nous  avons  créé  le 
genre  Mésodesine  ont  été  singulièrement,  ballottées  de  genre  en  genre  par 
les  conchyliologucs  qui  nous  ont  précédé.  Cbemnilz  en  connut  deux  es- 
pèces ; il  comprend  l’uno  dans  le  genre  Alye,  l’autre  parmi  les  Madrés. 
Il  est  imité  par  Schrœter  etGmelin  , ce  qui  n'empôche  pas  ce  dernier 
d'en  introduire  encore  une  espèce  dans  les  Tellines.  Poli  découvrit  dans 
la  Méditerranée  l’espèce  commune  aux  mers  d'Europe,  et  quoiqu’il  en 
connût  ranimai , il  l'introduisit  dans  les  Mactrcs.mais  avec  doute,  car 
il  avait  remarqué  la  différence  qui  existe  entre  ces  animaux  L’ouvrage 
de  Poli , peu  répandu  et  trop  peu  consulté,  ne  servit  pas  à détruire  les 
incertitudes  des  naturalistes  à l’égard  de^  coquilles  qui  nous  occupent. 
Tandis  que  Bruguière  les  maintient  parmi  les  .Madrés,  Spengler  les 
laisse  parmi  les  Myes.  Les  opinions,  comme  on  le  voit,  oscillent  entre 
deux  déterminations.  En  t80d,  Montagu  mentionna  l'espèce  de  la 
Méditerranée  qu'il  retrouva  sur  les  cotes  de  la  Grande-Bretagne.  Il  est 
à présumer  que  cet  auteur,  ordinairement''  exact  et  scrupuleux  , n'aura 
pas  fait  attention  à la  charnière , et , tro])  conliant  dans  les  rapports  que- 
présente  la  forme  extérieure,  il  introduisit  l’espèce  dans  le  genre  des 
Donaces,  (luoiqu'clle  n’en  eût  aucun  des  caractères  fondamentaux. 
Presque  tous  les  auteurs  anglais  conserveront  dans  le  genre  Donaciî 
cette  espèce  qui  ne  lui  appartient  pas,  et,  cordre  leur  habitude,  ils 
abandonnèrent  l'opinion  de  Gmelin  qui , dans  lu  I édition  du  Systciwi 
naUirœ,  l'avait  comprise  au  nombre  des  Tellines.  Au  reste,  à ce  sujet , 
Gmelin  avait  accepté  l'opinion  do  Scliroeler  qui , dans  son  Essai  d'une 
classification  des  coquilles  de  Linné,  se  servant  d’un  figure  assez  exacte 
de  Lister,  l’avait  rangée  au  nombre  des  Tellines.  Tandis  que  quelques 
autours  , 'tels  que  DilKvyn,  Turton  cl  Wooefj  plaçaient  une  espèce  flans 
le  genre  Donace,  ils  en  rangeaient  d’autres  parmi  les  Mactros. 

A l’égard  du  groupe  de  mollusques  qui  nous  occupe,  Lamarck  n‘;i 
pas  moins  laissé  de  confusion  dans  la  méthode  que  ses  devanciers.  Nous 
trouvons-  dans,  le  système  des  animaux  sans  vertèbres  ( 1 80 1 ) un  genre 
Paphic,  pour  lequel  l’auteur  présente  doux  types,  Tun  est  une  Crassa- 
telie,  l’autre  est  un  Mésodesme.  Peu  de  temps  après,  Lamarck  renonça 
à son  genre  Paphie,  et  le  remplaça  par  celui  des  Crassatelles , dans 
lequel  il  confondit  aussi  les  mêmes  coquilles.  Plus  tard  l’espèce  dos 
mers  d'Europe,  rapprochée  de  coquilles  de  divers  genres,  devint 
l’occasion  d’un  genre />on«ci//a , inscrit  dans  les  tableaux  méthodiques, 
publiés  en  1812,  dans  l’Extrait  du  cours.  A cette  époque,  Lamarck 
ne  donna  aucune  déGnition  de  ce  genre  nouveau  ; seulement , on  sut , 
par  tradition,  qu'il  renfermait  le  Doyiax  plebeia,  de  Montagu.  Ce 
T.  î.  'i*  PARTIE. 


9-0 


3o6 


NEUVIÈME  FAMILLE. 


genre  Donacille,  n’ayant  pas  satisfait  Lamarck , il  l’abandonna 
comme  il  avait  fait  des  Paphies , et  le  remplaça  par  un  genre  équivalent, 
pour  lequel  il  proposa  le  nom  d’Amphidesme.  Pour  so  convaincre  que 
le  genre  Ampbidesme  remplace  exactement  celui  précédemment  nommé 
Donacille,  il  sufiitde  rappeler  ce  que  Lamarck  lui-même  dit  à ce  sujet, 
dans  les  observations  relatives  au  genre  Amphidesme  : « Depuis  assez 
» longtemps,  dit  notre  savant  naturaliste , j’avais  établi  ce  genre,  dans 
» mes  cours,  sous  le  nom  de  Donacille  {Extrait  du  cours,  p.  107); 
» parce  que  l’espèce  que  je  connus  d’abord  avait  l’aspect  d’une  Donace.  » 
{Animaux  sans  vertèbres,  t.  V,  p,  390).  Nous  rappelons  les  paroles 
mêmes  de  Lamarck  , pour  que  l’on  sache  bien  que  le  genre  Donacille 
n’avait  plus  aucune  valeur.  Ce  n’était  plus  qu’un  nom,  auquel  il  n’était 
plus  possible  de  rattacher  aucun  genre  quelconque,  abandonné  qu’il 
était  par  son  auteur.  Ce  qui  prouve,  au  reste , que  Lamarck  n’avait  pas 
d’abord  considéré  ce  genre  Donacille  comme  un  type  dans  lequel  le 
Donax  plebeia  aurait  occupé  la  première  place,  c’est  qu’il  range  cette 
espèce  avec  une  autre,  qui  en  est  très  voisine  dans  son  nouveau  genre 
Amphidesme;  de  plus,  il  confond  les  espèces  les  plus  voisines  de 
celles-ci,  soit  parmi  les  Mactres,  soit  parmi  les  Crassalelles.  Cela 
donne  la  preuve  la  plus  évidente,  que  le  genre  Donacille  ne  peut  être 
l’équivalent  de  notre  genre  Mésodesme,  puisque  Lamarck  n’en  a pas 
reconnu  les  caractères  distinctifs,  et  qu'il  distribue  dans  trois  genres 
des  coquilles  que  nous  réunissons  en  un  seul.  Les  naturalistes  contenl- 
porains  de  Lamarck , Dilhvyn  , ïurlon,  Schweigger,  Gerville,  se  con- 
formèrent à l’opinion  de  Montagii  ou  à celle  de  Chemnitz.  A peu  près  à 
la  môme  époque,  M.  Sbwerby,  dans  son  Généra  of  sheîts,  croyant  re- 
trouver dans  le  Donax  plebeia  et  quelques  autres  espèces  voisines  les 
caractères  du  genre  Erycine , de  Lamarck  , il  les  figura  et  les  caracté- 
risa sous  ce  nom  ; mais  cette  erreur  était  facile  à rectifier.  Les  auteurs 
qui  suivirent,  oublièrent  on  abandonnèrent  les  opinions,  antérieures  à 
celles  de  Lamarck;  mais  ils  durent  éprouver  de  l’embarras,  pour  savoir 
lequel  des  trois  genres  ils  préféreraient,  pour  y placer  les  coquilles  qui 
nous  occupent.  Serait-co  des  Mactres,  des  Crassatelles  ou  des  Amphi- 
desmes?  Ce  dernier  genre,  le  plus  mauvais  de  tous,  celui  dans  lequel 
ces  coquilles  étaient  le  plus  hors  de  leurs  rapports,  fut  cependant  pré- 
féré, uniquement  parce  que  Lamarck  y avait  compris  l’espèce  des  rtiers 
d’Europe,  et  que  les  personnes  qui  mentionnèrent  le  genre  s’étaient 
plus  spécialement  occupées  des  Mollusques  de  nos  mers. 

Quand  même  nous  aurions  voulu  conserver  le  nom  de  Donacille  au 
ffenre  que  nous  nous  proposions  d’établir,  nous  ne  l’aurions  pu , sans 


LKS  MESODESMIDES. 


Gütraîner  une  confusion  fâcheuse  dans  la  nomenclature  : puisqu'en 
effet  à ce  nom  do  Oonacille  se  rallnchait , do  l’aveu  do  Lamarck  lui* 
même,  l’idée  d’un  genre  conslilué,  comme  celui  qui  porto  actuellement 
le  nom  d’AmpIiidcsme.  Or,  notre  genre  Mésodesme,  destiné  à réunir  des 
coquilles  distribuées  dans  trois  des  genres  de  Lamarck,  ne  devait  pas 
plus  porter  le  nom  de  Donacille  que  celui  de  Mactre  ou  de  Crassatelle. 
Si , en  réformant  le  genre  indigeste  des  Ampliidesmes  de  Lamarck,  les 
conchyliologues  avaient  consenti  à prendre  pour  type  VAmphidesma 
donacîUa,  il  aurait  fallu  tellement  modifier  le  genre  en  question,  qu  il 
n’aurait  plus  répondu  aux  caractères  essentiels  que  Lamarck  lui  imposa. 
Il  fallait  donc,  de  toute  nécessité,  en  réunissant  en  un  genre  des  co- 
quilles, dont  les  caractères  étaient  méconnus,  lui  donner  un  nom  nou- 
veau , car  il  n’en  existait  aucun  dans  l’ancienne  nomenclature  qui  pût 
lui  être  appliqué  sans  inconvénient.  Au  reste , si  un  nom  approprié  se 
fût  trouvé  dans  les  ouvrages  de  Lamarck,  le  genre  aurait  été  constitué , 
ce  qui  eût  rendu  le  nôtre  parfaitement  inutile. 

A l'exception  de  quelques  uns , tous  les  ouvrages  que  nous  venons 
de  citer  sont  antérieurs  à 1830,  époque  à laquelle  nous  proposâmes  le 
genre  Mésodesme,  danslesecond  volumede  l'Encyclopédie  méthodique. Ce 
genre  a eu  pour  but  de  rassembler  sous  des  caractères  communs  et  par- 
faitement identiques  des  coquilles,  qui  avaient  été  distribuées,  ainsi  que 
nous  venons  de  le  voir.  Elles  avaient  précédemment  appartenu  aux  neuf 
genres  suivants:  Mya  , Mactra  ^ Teilina  ^ Donax,  Paphia^  D&iiaciUa , 
Crassatellaj  Amphidesma , Erycina.  Une  fois  rassemblées  sous  nos 
yeux,  elles  nous  offrirent  des  caractères  d'une  telle  identité,  qu’il  était 
impossible  de  ne  pas  reconnaître  en  elles  un  très  bon  genre,  très  diffé- 
rent de  tous  ceux  dans  lesquels  les  espèces  avaient  été  dispersées. 
Aussi,  à dater  de  celle  époque,  ceux  des  conchyliologues,  qui  eurent 
connaissance  de  notre  genre  Mésodesme , s'empressèrent  de  l’adopter. 
Nous  citerons  particulièrement  MM.  Quoy  et  Gaimard  qui,  au  retour 
de  leur  second  voyage  de  circumnavigation  , nous  communiquèrent  avec 
une  grande  bienveillance  l'animal  de  l’une  des  espèces  qu’ils  avaient 
recueillies  dans  les  mers  australes.  Cette  communication  nous  a permis 
de  confirmer,  pour  les  caractères  de  l’animal,  la  valeur  de  ceux  pré- 
sentés parles  coquilles.  Nous  n’avons  pu  alors  en  donner  une  description 
détaillée,  mais  nous  pûmes  cependant  apercevoir  les  différences  qu’il 
offre  avec  les  animaux  des  genres  déjà  connus. 

M.  Philippi,  dans  le  premier  volume  de  son  Enumeralio  inollusconm 
Sicüiæ,  n’ayant  pas  connaissance  de  notre  travail  sur  le  genre  Méso- 
desme, tenta  de  reconstruire  le  genre  Donacille  de  Lamarck,  lui  don- 


NEUVIÈME  FAMILLE. 


nantpour  type  ï Amphidesma  donacilla  de  ce  naturaliste.  Mais  depuis, 
il  a abandonné  ce  genre  Donacille,  et  il  a adopté  notre  genre  Mésodesme 
dans  le  second  volume  de  l'ouvrage  que  nous  venons  do  citer. 

Par  un  procédé  très  étrange,  M.  d’Orbigny,  dans  le  troisième  volume 
des  termhis  crétacés  dosa  Paléontologie  française^  a l'occasion  du  genre 
Mésodesme , nous  prête  des  opinions  diamétralement  opposées  à celles 
que  nous  professons  depuis  longtemps.  M.  d'Orbigny  pousse  l'assu- 
rance jusqu'à  citer  la  page  de  la  nouvelle  édition  des  Jn/moï/x  sons  ver- 
tèbres de  Lamarck.  dans  laquelle  il  prétend  que  nous  considérons  l'an- 
cien  genre  Donacille  de  Lamarck , comme  équivalent  de  notre  genre 
.Mésodesme,  « On  pourrait  se  demander  alors , dit  M.  d'Orbigny,  pour- 
» quoi  M.  Desliayes  n’a  pas  conservé  le  genre  Donacille , au  lieu  de  lui 
))  donner  un  nom  nouveau.  Suivant  les  lois  d'équité  que  je  me  suis  im- 
» posées,  je  crois  devoir  revenir  au  nom  de  Donacille,  donné  par  La- 
» marck.  » On  voit  par  ce  peu  de  mots  que  l'auteur  a voulu  traiter  d’une 
matière  qui  lui  est  parfaitement  étrangère  ; car,  pour  peu  qu'il  se  fût 
donné  la  peine  de  lire  la  page  de  l’ouvrage,  à laquelle  il  renvoie,  il 
aurait  vu  que,  loin  de  trouver  semblables  le  genre  Donacille  et  nos 
Mésodesmes,  nous  déclarons,  de  la  manière  la  plus  positive,  que  ces 
genres  diiTèrent,  autant  que  les  Mactrcs,  les  Crassatelles,  les  Amphi- 
desines , dans  lesquels  nous  avons  puisé  les  premiers  éléments  de  notre 
genre.  On  voit , au  rosie , à la  manière  dont  iM.  d’Orbigny  a caractérisé 
le  genre  Donacille,  qu’il  en  connaît  fort  peu  l'animal,  quoiqu'il  ait 
cherché  à en  présenter  les  caractères.  On  pourrait  même  supposer  qu'il 
ne  connaît  guère  mieux  les  coquilles , puisqu’il  les  déclare  inéquivalves , 
tandis  qu'en  réalité  il  n’en  est  pas  une  seule  qui  offre  ce  caractère.  Ce 
qui  prouverait  la  justesse  de  notre  assertion , c’est  qu’il  ajoute  que  le 
ligament  est  interne  et  externe,  que  le  ligament  externe  est  court,  puis, 
qu'il  pénèb'e  en  dedans  et  se  loge  dans  un  largo  cuilleron  saillant.  Or, 
dans  tous  les  Mesodesmes , il  n’existe  qu'un  seul  ligament  qui  est  interne, 
et  ce  ligament  est  toujours  logé  dans  un  cuilleron  étroit  et  profond  ; ce 
tlui  est  bien  différent  de  ce  que  M.  d'Orbigny  en  dit.  Il  est  donc  à croire 
que  les  espèces  inscrites  sous  le  nom  de  Donacille , dans  la  Paléonto  - 
logie  française,  n’appartiennent  point  à notre  genre  Mésodesme. 

Il  ne  nous  suffisait  pas  de  créer  un  nouveau  genre,  il  fallait  encore 
rechercher  ses  rapports  les  plus  naturels  dans  la  méthode.  A voir  l’en- 
semble de  ses  caractères , ce  genre  nous  a paru  intermédiaire  entre  les 
Mactres  et  les  Crassatelles,  formant  un  chaînon,  propre  à rattacher 
deux  genres  qui , bien  que  placés  dans  la  môme  famille  par  Lamarck, 
offrent  cependant,  dans  leur  ensemble,  des  différences  considérables. 


LES  MESUDESMIDES. 


?)0<) 

Les  Mactres  et  les  Crassalelles  ont  le  ligament  intérieur.  Voilà  la  raison 
pour  laquelle  Lamarck  les  place  parmi  ses  Mactracées.  Les  Madrés 
sont  généralement  des  coquilles  minces . avec  des  dents  latérales  ; tandis 
que  les  Crassalelles  sont  épaisses  et  toujours  dépourvues  de  dents  laté- 
rales. Les  Mactres  sont  plus  ou  moins  bâillantes;  les  Crassalelles,  au 
contraire , sont  parfaitement  fermées.  Mais  il  y a des  caractères  d’une 
plus  grande  valeur,  qui  semblent  éloigner  les  Crassatellos  de  la  faibille 
des  Mactracées.  Dans  les  Mactres,  en  effet,  l’impression  palléale  est 
toujours  sinueuse  du  côté  postérieur;  elle  est  simple  et  entière  chez  les 
Crassalelles.  Il  est  donc  évident  que  l’animal  des  Mactres  est  prolongé  en 
arrière  par  des  siphons  ; il  paraît  certain , au  contraire  , chez  les  Cras- 
satelles,  que  les  siphons  manquent  ou  qu’ils  sont  très  courts. 

Nous  apercevions  dans  l’ensemble  des  caractères  de  notre  genre 
Mésodesme  des  nuances  insensibles  entre  les  genres  que  nous  venons  de 
comparer,  et  c’était  pour  nous  un  motif  de  l’introduire  entre  eux,  dans 
la  famille  des  Mactracées.  Nous  trouvions,  en  effet,  dans  les  Méso- 
desmes,  des  coquilles  pins  épaisses  que  les  Mactres,  mais  conservant 
une  charnière  analogue  à celle  de  ce  genre.  C’est  ainsi  qu'elles  présen- 
tent un  cuilleron  médian  , des  dents  latérales  mais  sans  aucune  trace 
de  la  dent  cardinale  en  V,  caractéristique  des  Mactres.  Nous  trouvions 
dans  nos  Mésodesmes  des  coquilles  parfaitement  closes  comme  les  Cras- 
satelles;  et  l’impression  palléale  nous  montrait  une  diminution  insen- 
sible et  graduée  de  la  sinuosité  postérieure  qui,  disparaissant  dans  quel- 
ques espèces,  établissait  une  analogie  de  plus  avec  les  Crassatelles.  Tous 
ces  caractères  transitoires,  écrits  si  nettement  sur  les  Mésodesmes,  nous 
offraient  les  moyens  d’une  classification  naturelle.  Mais,  pour  établir 
définitivement  les  rapports  entre  les  genres,  il  faut  observer  les  animaux 
qui,  souvent,  présentant  des  caractères  imprévus,  dérangent  les  rap- 
ports que  l’on  avait  conçus  d’après  les  coquilles  seules;  et  ceci  nous 
est  arrivé  au  sujet  des  Mésodesmes,  lorsque  nous  eûmes  observé  l’animal 
vivant  de  l’espèce  qui  habile  les  mers  d’Europe. 

II  faut  se  le  rappeler,  chez  les  Mactres,  le  manteau  se  prolonge  en 
arrière  en  doux  siphons  réunis  dans  toute  leur  longueur.  Dans  les  Méso- 
desmes , ces  organes  sont  complètement  di.sjoinls,  et  ce  caractère  lui 
seul  suffit  pour  séparer  les  deux  genres , qui  doivent  appartenir  à deux 
familles  différentes.  M Gray  la  bien  senti , quand , en  I 840 , il  a pro- 
posé la  famille  des  Mésodesmides  dans  son  Synopsis  du  Musée  hùtan- 
7nqiie.  Les  observations  que  nous  avons  faites  sur  l'organisation  du  Mé- 
sodesme Donacille,  nous  ont  donné  la  preuve  de  l utilité  de  la  famille, 
proposée  par  M.  Gray,  et  nous  l’adoptons  ici  pour  la  première  fois. 


34  0 NEUVIEME  FAMILLE. 

Dans  l’ordre  naturel , la  famille  des  Mésodesmides  ne  devrait  pas  se 
trouver  à la  suite  de  celle  des  Mactracées  ; on  peut  dire,  pour  la  carac- 
tériser en  quelques  mots,  que  les  mollusques  qu’elle  renferme  sont 
des  Donaces  à ligament  intérieur.  11  faudrait  donc,  pour  bien  com- 
prendre les  rapports  naturels  de  cette  famille,  que  les  genres  fussent 
arrangés  sur  des  embranchements,  marchant  parallèlement  entre  eux , 
de  manière  à pouvoir  placera  la  môme  hauteur,  au  môme  niveau , d’un 
côté  les  Donaces  et  de  l’autre  les  Mésodesmes.  L’arrangement  qu’il  est 
possible  de  réaliser  dans  un  tableau  méthodique  devient  impossible , 
quand  il  faut  exposer  dans  un  ouvrage  une  série  de  familles  et  de 
genres. 

La  forme  dominante  des  coquilles  du  genre  Mésodesme  est  la  trian- 
gulaire ; en  cela , elles  ressemblent  aux  Donaces , à ce  point  que  l’on 
pourrait  confondre  les  deux  genres , si  l’on  s’en  rapportait  uniquement 
à ce  caractère  de  la  forme  extérieure.  Toutes  sont  transverses,  et  si , 
dans  le  plus  grand  nombre , le  côté  postérieur  est  subitement  tronqué , 
il  en  est  quelques  espèces  chez  lesquelles  ce  côté  s’allonge , la  tronca  - 
ture  disparaît  insensiblement,  et  la  coquille  devient  presque  équilaté- 
rale. La  forme  générale,  insensiblement  modifiée , est  devenue  réguliè- 
rement ovalaire,  do  trigone  que  nous  l’avons  vue  d’abord.  Tous  les 
Mésodesmes,  sans  exception , sont  équivalves , inéquilalérales ; le  côté 
postérieur  étant  toujours  plus  court  que  l'antérieur.  La  surface  exté- 
rieure est  généralement  lisse;  elle  est  revêtue  d'un  épiderme  corné, 
luisant , assez  solide  ; il  dépasse  peu  le  bord  des  valves  ; mais  le  long  du 
Ix)rd  dorsal,  en  avant  et  en  arrière  des  crochets,  il  passe  d’une  valve 
à l’autre,  et  contribue  ainsi  à les  clore  de  ce  côté.  L’épiderme,  im- 
planté le  long  du  bord  dorsal , s’épaissit  quelquefois  avec  l’âge,  au  point 
de  simuler  un  ligament  externe  fort  allongé;  mais  il  est  impossible  de 
se  méprendre  sur  la  nature  de  ce  faux  ligament,  puisqu’il  se  montre  in- 
distinctement de  chaque  côté  de  la  charnière.  Dans  les  coquilles,  telles 
que  les  Amphidesmes,  par  exemple,  chez  lesquels  il  existe  en  réalité 
un  double  ligament , le  ligament  externe  est  toujours  situé  du  côté  pos- 
térieur, implanté  sur  des  nymphes  plus  ou  moins  apparentes.  Nous 
trouvons  la  preuve  de  l’absence  du  ligament  extérieur  chez  les  Méso- 
desmes, non  seulement  parce  que  Fépiderme  qui  le  simule  s’étend , 
comme  nous  l’avons  vu,  en  avant  et  en  arrière , mais  encore  par  l'ab- 
sence de  nymphes  ou  de  callosités  propres  à recevoir  un  véritable  liga- 
ment. 

Aucune  espèce  de  Mésodesmes,  actuellement  connues,  ne  nous  a offert 
de  côtes  longitudinales.  Quelques  unes  seulement  ont  des  stries  trans- 


LES  MESODESMIDES. 


3l  I 

verses  ; toutes  les  autres  sont  lisses  ; presque  toutes  les  espèces  connues 
sont  blanchâtres , grisâtres  ou  légèrement  transparentes  comme  de  la 
corne.  Une  seule  espèce,  celle  de  POcéan  d'Europe , est  ornée  de  cou- 
leurs vives  et  variées.  Les  bords  des  valves  sont  simples,  minces  et 
tranchants;  ils  s’épaississent  assez  subitement  vers  l’intérieur;  ils  se 
joignent  exactement  dans  toute  la  circonférence;  ils  ne  présentent 
jamais  ces  fines  dentelures  que  Ton  rencontre  dans  presque  toutes  les 
Donaces.  Les  crochets  sont  généralement  médiocres  et  peu  saillants  ; 
placés  en  arrière,  dans  le  plus  grand  nombre  des  espèces,  ils  sont 
opposés , rapprochés  et  à peine  inclinés  en  avant.  Le  côté  postérieur  est 
toujours  le  plus  court , dans  toutes  les  espèces  sans  exception  ; mais 
dans  celles  qui  ont  une  forme  triangulaire,  ce  côté  se  raccourcit  beau- 
coup , et  dans  Tune  d’elles , il  fait  un  angle  droit  avec  Taxe  transverso 
de  la  coquille.  Les  Mésodesmes  ne  nous  offrent  ni  lunule,  ni  corselet  net- 
tement circonscrits.  La  surface  interne  est  lisse,  blanche , et  l'on  aperçoit 
très  nettement  empreintes  les  impressions  des  muscles  et  du  manteau. 

Les  impressions  musculaires  sont  assez  grandes , presque  égales  ; 
toutes  deux  situées  dans  la  région  dorsale  de  la  coquille , à peu  près  à 
égale  distance  de  la  charnière.  Dans  les  espèces  triangulaires,  la 
postérieure  se  rapproche  davantage  du  point  cardinal , que  dans  les 
espèces  ovales  ou  oblongues.  L’impression  antérieure  est  ovalaire-sub- 
trigone  ; elle  est  située  de  manière  à diviser,  à peu  près  en  deux  par- 
ties égales,  la  longueur  du  bord  dorsal  antérieur.  Très  rapprochée  du 
bord,  son  extrémité  supérieure  se  prolonge  au-dessous  de  lui,  et 
cette  prolongation  est  due  h la  présence,  sur  ce  point,  de  l’împres- 
sion  du  muscle  rétracteur  antérieur  du  pied.  L’impression  postérieure 
est  ovale  ou  subcirculaire;  elle  est  située  au-dessous  et  à l’extrémité  du 
bord  cardinal.  Dans  les  espèces  triangulaires , elle  descend  un  peu  plus 
dans  la  région  ventrale  que  chez  les  espèces  ovalaires.  Ces  impressions 
sont  creusées  profondément  dans  le  lest  ; en  cela , elles  ressemblent  à 
celles  de  la  plupart  des  Crassatelles;  l’impression  paliéale  elle-même, 
habituellement  superficielle,  laisse  une  empreinte  profonde  qui  se  dé- 
coupe nettement  sur  la  surface  interne  des  valves.  Il  est  des  espèces 
chez  lesquelles  on  reconnaît  la  différence  d'organisation  des  deux  parties 
du  manteau.  Tout  ce  qui  est  en  dedans  de  l’impression,  correspondant 
par  conséquent  à la  portion  mince  de  l’organe , est  d’une  couleur  un  peu 
différente  de  celle  des  bords  et  des  impressions  musculaires.  On  retrouve 
donc  ici,  d’une  manière  bien  évidente,  la  preuve  que  le  manteau,  en 
exerçant  les  fonctions  d'organe  sécréteur  de  la  coquille,  les  accomplit 
un  peu  différemment  sur  les  deux  parties  avec  lesquelles  il  est  èn  con 


0 12 


MiUVlEMK  FAMILLE. 


tact.  L’impression  palléale  s’éloigne  du  bord  des  valves  et  se  porto  à 
l’intérieur  ; au  côté  antérieur,  elle  s’inflécliit  en  dedans  et  laisse  une 
partie  du  bord  beaucoup  plus  large  que  dans  le  reste  de  son  étendue; 
elle  descend  obliquement  do  haut  en  bas  et  d'avant  en  arrière,  pour 
gagner  le  bord  ventral , après  avoir  quitté  l'extrémité  inférieure  de 
l’impression  musculaire  antérieure.  Cette  disposition  se  manifeste  parti- 
culièrement dans  les  espèces  les  plus  triangulaires,  comme  le  Meso~ 
dcsma  donacilla.  Dans  les  espèces  ovalaires,,  l impression  reste  plus 
exactement  parallèle  au  bord  ventral;  parvenue  vers  le  niveau  de  l’im- 
pression musculaire  postérieure,  elle  rentre  sur  elle-même  et  forme  une 
sinuosité  postérieure,  variable  selon  les  espèces,  mais  généralement 
petite,  étroite,  assez  souvent  subtriangulaire.  C'est  dans  le  Mesodesma 
donacilla  que  la  sinuosité  palléale  est  plus  grande;  elle  est  presque 
nulle  dans  le  Mésodesnio  trigone,  ainsi  que  dans  le  Chemnitzii  ; mais 
nous  avons  deux  espèces  ovalaires , à test  plus  mince,  et  chez  les- 
quelles la  sinuosité  palléale,  très  étroite,  s’avance  en  suivant  Taxe 
transverse,  jusqu’au  niveau  de  lu  charnière. 

La  charnière , tout  en  conservant  de  l'analogie  avec  celle  dos  AJaclres 
et  des  Crassatelles  , en  ditîère  suffisamment  pour  caractériser  le  genre. 
Elle  SC  compose , immédiatement  au-dessous  du  crochet,  d’un  cuil- 
leron  étroit  et  profond , dont  le  bord  est  plus  ou  moins  saillant  dans 
l’intérieur  des  valves.  Sur  ce  cuilleron  s’implante  un  ligament  in- 
térieur, étroit  et  épais.  En  avant  do  cette  fossette  s'élève,  sur  chaque 
valve,  une  dent  cardinale,  plus  ou  moins  épaisse  selon  les  espèces, 
simplCj  oblique,  quelquefois  légèrement  bifide  à son  extrémité.  II  est 
des  espèces  chez  lesquelles  cette  dent  cardinale  est  réduite  à l'état  rudi- 
menluiro.  Dans  toutes  les  espèces  que  nous  connaissons,  nous  en  re- 
trouvons au  moins  les  traces  ; il  y a même  des  espèces,  chez  lesquelles 
nous  observons  aussi  le  rudiment  d’une  dent  cardinale  postérieure,  s’éle- 
vant le  long  du  bord  postérieur  du  cuilleron.  Outre  les  dents  cardinales, 
s’élève  de  chaque  côté  de  la  charnière  une  dent  latérale,  épaisse  et 
solide,  tantôt  courte  et  simple,  comme  dans  le  Chemnitzii^  tantôt  plus 
allongée  et  finement  striée,  comme  dans  le  Jciwmn  de  M.  Johannis. 
Cette  dernière  espèce  est  l’une  de  celles  qui  se  rapprochent  le  plus  des 
Madrés,  tout  en  conservant  cependant  les  caractères  des  Mésodesmes. 

Les  Mésodesmes  sont  des  coquilles  d’une  médiocre  grandeur;  quel- 
ques unes  pourtant  deviennent  assez  grandes  ; elles  ont  une  épaisseur 
(jui  les  rapproche  des  Crassatelles.  Nous  en  connaissons  acluellemenl 
vingt-trois  espèces,  distribuées  dans  toutes  les  mers,  mais  plus  particu- 
lièrement dans  les  mers  tempérées  des  deux  hémisphères.  Ce  sont  des 


LES  MÉSODESMIDES.  H 1 !> 

coquilles  littorales,  elles  peuplent  en  abondance  les  plages  sableuses  où 
elles  s’enfoncent,  à une  petite  profondeur,  en  se  servant  d’un  très  long 
pied  linguifornie  qui . sortant  par  l’extrémité  antérieure  de  la  coquille , 
creuse  aisément  le  sal)le , au  moyen  d’un  mouvement  vermiculaire  très 
rapide.  Nous  avons  fréquemment  trouvé  l’espèce  de  la  Méditerranée  sur 
une  petite  plage  peu  éloignée  de  la  station  d’Hiver , au-dessous  du  fort’ 
génois  , à quelque  distance  de  Bone  Ce  petit  mollusque  habite  particu- 
lièrement la  région  de  la  plage  battue  par  la  lame,  mais  qui , dans  les 
temps  calmes , est  susceptible  de  rester  à sec  pendant  plusieurs  jours. 
Néanmoins , ce  Mésodesme  ne  change  pas  de  place  ; plongé  dans  un 
sable  humide,  on  peut  marcher,  sans  s’en  douter,  sur  des  milliers  d’in- 
dividus. Au  reste , ce  mollusque  ne  se  creuse  pas  une  demeure  bien  pro- 
fonde. On  lo  trouve  à quelques  centimètres  de  la  surface,  et  en  jetant 
du  sable  sur  un  tamis  ou  un  filet  a fines  mailles,  il  est  possible  de  re- 
cueillir un  grand  nombre  d’individus.  L’animal  ne  se  montre  jamais  à 
l'ardeur  du  soleil  ; mais  si  le  ciel  est  couvert,  on  le  voit  fréquemment 
faire  sortir  leurs  siphons  à travers  lo  sable  et  les  épanouir  à sa  surface. 
Ayant  eu  des  individus  vivants  sous  les  yeux  pendant  plusieurs  jours  . 
nous  avons  pu  nous  assurer,  que  c’est  surtout  pendant  la  nuit,  que  se 
meuvent  le  plus  les  Mésodesmes  de  la  Méditerranée;  ils  changent  sou- 
vent de  place,  et,  pour  cela,  ils  sortent  de  leurs  trous  et  se  laissent 
emporter  par  le  Ilot  qui  les  entraîne  à une  petite  distance;  là,  ils  s’arrê- 
Uml  et  creusent  assez  rapidement  une  nouvelle  demeure,  pour  ne  pou- 
voir plus  être  entraînés  par  le  flor  qui  succède  à celui  qui  les  a mis 
en  mouvement.  Quelquefois,  au  lieu  de  descendre  sur  la  pente  de. la 
plage  , ils  y remontent,  poussés  par  le  flot  qui  s'avance.  La  facilité  qu’ils 
(iiit  de  remuer  le  saWe,  leur  permet  de  se  creuser  des  galeries  obliques  et 
de  reparaître  à la  surface,  assez  loin  du  point  où  ils  s’étaient  enfoncés. 

Jusqu’ici  nous  ne  connaissons  aucune  espèce  de  Mésotlesme  à l’état 
fossile  dans  les  terrains  tertiaires.  M.  d’Orbigny  eu  mentionne  deux  dans 
les  terrains  crétacés  ; mais  nous  avons  bien  des  raisons  de  croire  que  ces 
espèces  n'appartiennent  pas  au  genre  en  question.  D’abord  M.  d’Or- 
bigny en  a jugé  d’après  des  moules,  et  déjà  pour  l’une  des  espèces 
[Mesodesma  compressa),  elle  n’est  certainement  pas  du  genre  dans 
lequel  elle  est  placée;  car,  dans  tous  les  Mésodesmes,  la  charnière  est 
épaisse  et  puissante  ; elle  est  fortement  accusée  sur  le  moule  , comme  on 
peut  le  voir  dans  les  moules  artificiels  de  M.  Agassiz.  Or,  sur  celui 
(iguré  par  M.  d’Orbigny,  le  bord  cardinal  ne  présente  aucune  trace  de 
c-cttc  forte  charnière.  Les  impressions  des  muscles  et  du  manteau,  si 
nettement  imprimées  dans  les  Mésodesmes  vivants,  ainsi  que  dans  le 


NEÜVIKMK  FAMILLE. 


3i4 

moule  artificiel , ne  se  montrent  pas  . dans  l’espèce  de  M.  d’Orbigny. 
Quant  à la  seconde , elle  est  plus  bombée  qu’aucune  de  celles  connues  ; 
ses  croche! s sont  trop  infléchis  pour  laisser  la  place  des  cuillerons;  et 
nous  n’apercevons  , sur  le  côté  antérieur,  aucune  trace  de  la  dent  laté- 
rale; au  reste,  dans  le  genre  qui  nous  occupe,  le  côté  postérieur  est 
toujours  le  plus  court;  c'est  le  contraire  dans  le  Douaci7/a  Couîoni  de 
M.  d’Orbigny  ; nous  sommes  donc  autorisé  à déclarer  que,  dans  notre 
persuasion  , aucune,  espèce  de  Mésodesme  ne  s’est  encore  rencon- 
trée à l’état  fossile.  M.  Dunker,  dans  le  Paleontographica  , qu’il  publie 
avec  M.  Meyer,  décrit  et  figure  une  coquille  du  Lias , sous  le  nom  de 
Mesodesma  Genmri.  Cette  espèce  a une  forme  qui  la  rapproche  du 
Mesodesma  cornea  ; mais  pour  l’admettre  dans  le  genre , il  faudrait  que 
la  charnière  eût  une'  fosselte  médiane  pour  le  ligament  et  des  dents  la- 
térales , et  ces  parties  essentielles  , les  figures  ne  les  montrent  pas. 

1.  Mésodesme  deQuoy,  Mesodesma  Qiioyi.  Desh. 

PL  10.  f.  13,  14. 

M.  testa  ovatu-trigonâ^  Jœvigatâ , paUide  spadiceâ , postlce  oblique 
truncatâ;  latere  antico  longiore^  compressa^  angustiore;  fossulà 
cardinali  profundâ  ^ angustâ. 

Desh.  Eucycl.  melh.  vers,  t,  a.  p.  443.  ii*  3. 

Callow.  Cuncli.  nomeiicl.  p.  i6. 

Habite  la  NouvcUe>Zélaude. 

Coquille  ovale-trigone , transverse , très  inéquilatérale , aplatie , lisse , 
ou  irrégulièrement  striée  par  ses  accroissements.  Son  côté  postérieur, 
qui  est  leplus  court,  est  obliquement  tronqué  comme  dans  les  Donaces; 
un  angle  très  obtus,  qui  s’évanouit  insensiblement  vers  l'angle  posté- 
rieur et  antérieur,  limite  le  côté  postérieur.  Le  côté  antérieur  est  insen- 
siblement atténué;  il  est  allongé,  comprimé  en  coin  et  tranchant.  Une 
lunule  profonde,  étroite,  semblable  à une  fente,  s'étend  depuis  les  cro- 
chets jusque  vers  le  milieu  de  la  longueur  du  bord  antérieur  et  supé- 
rieur. En  dedans , la  coquille  est  d'un  blanc  subcorné;  l’impression 
palléale,  fortement  rentrée  à son  extrémité  antérieure,  forme  de  ce 
côté  une  inflexion  marquée.  Le  cuilleron  de  la  charnière  est  profond, 
étroit  et  saillant  dans  rintérieur  des  valves.  Sur  son  bord  antérieur 
s’élève  une  dent  cardinale  oblique , longue  et  étroite , appartenant  à la 
valve  gauche  seulement.  Sur  la  valve  droite  se  trouve  une  fossette  cor- 
respèndàntè,  et  seulement  un  petit  pli  très  étroit,  qui  rèmplace  la  dent 


LES  MËSODESMIDES. 


3t5 


de  la  valve  opposée.  A l’exlérieur,  cette  coquille  est  d’une  couleur  fauve 
très  pâle , et  cette  couleur  est  interrompue  à des  distances  inégales  par 
des  zones  transverses,  étroites,  d’un  blanc  laiteux  ou  d’un  blanc  grisâtre. 
Cette  coquille  est  longue  de  42  millimètres , haute  de  27  millimètres  , 
épaisse  de  12  millimètres. 

2.  Mésodesme  cornée  , Mesodesma  œmea.  Desh. 


M.  testa  ovatO’tri^onâ,  transversâ,  posteriüs  breviorcy  obtusâ^  lœvigatây 
crassây  albo-fulvo-griseo-'variegatây  subradiatâ,  intus  albâ  Dtl 
griseo^macuîatâ. 

Lister.  Conch.  pl,  SSg.  fig,  aaS. 

Telîina,  Schroeter.  Einl.  t.  3.  p,  la.  n«  35, 

Tellina  'variegata,  var  j3.  Gmeliu.  Syst.  uat.  ed,  i3.  p.  3a37.  45. 

Mactra  cornea,  PoU.  Test,  des  Deux-Sicil.  t.  i.  p.  73.  pl.  19.  f.  8 à ii. 

An  Mya  donacina?  Méin.  de  la  Soc.  d’hist.  nat,  de  Copenii. 

t.  3,  p,  4o* 

Donax  plebeia.  Montagu.  Test,  brit,  p.  107,  pl.  5.  f.  2, 

Id.  Maton  et  Rackett.  Liun.  trans.  t.  8.  p.  76. 

Id.  Pennaut.  Brit,  zool.  a®  éd,  ( iSra).  t.  4.  p.  199.  a"  4. 

Id,  Dorsel.  Catal.  p.  38.  pl.  5.  f,  i3. 

Id^  PuUney  io  Dorset.  Cat.  p.  32. 

Id.  Dillwyn.  Cat.  t.  i.  p,  iSa.  n®  g. 

Amphidesma  donactUa,  Lamarck.  Anim.  s.  vert,  t.  5.  p,  490*  o*  2. 

Id,  Turton.  Couch.  dicl.  p.  42,  a®  4. 

Id,  Turton.  Brit.  Fauna,  p.  i56, 

Id.  Xuilon,  Conch.  ius.  brit.  p.  126.  n° 

Donax  plebeia.  de  Gerville.  Cat.  des  coq,  de  la  Manche,  p.  aS.  n®  4. 

Erycina  plebeia.  Sowerby.  Gen,  of  shells.  a®  10.  f.  3. 

Amphidesma  donacilla.  Payraudeau.  Cat.  des  moll,  de  Corse,  p.  3r. 
a®  42. 

Donax  plebeia.  Wood.  Ind.  testac.  pl.  6.  f.  9. 

Amphidesma  donacilla,  Collard  des  Cherres.  Calai,  des  test,  du  Finist. 
p.  r5. 

Mesodesma  donacilla,  Deshayes.  Hxpéd.  scient,  de  Murée,  zool.  p.  90. 
a®  22. 

Id.  Deshayes.  Eucycl.  mélh.  vers.  t.  2.  p.  444»  t»®  5. 

Id.  Deshayes , dans  Lamarck.  Anim.  s.  vert,  a*  éd.  t.  6.  p.  126.  n®  a. 
p.  r33.  n®  6. 


3i6  NEÜVIBME  FAMILLE. 

Crassatella?  cor//c£r,  Scacchi.  Caf,  conch.  regii.  iieap.  p.  6. 

DonaciUa  Lamarchii.  Phi'ippi,  Knuin.  moll.  Sicil.  t.  i.  p.  87. 

Amphidesma  donaciïla.  Maravigna.  Méin.  p.  servir  à Thist,  jiaL  de  la 
Sicile,  p.  75. 

Erycina  plebein,  Sowerby.  juu.  Concli.  luan.  f.  86, 

lleeve  Courh.  sysl.  t.  i.  p.  65.  pl.  45.  f.  5. 

Mesodesma  donacUla.  Hanley.  Descript.  catal.  p.  89. 

/</,  Forbes,  Report  nn  theOEgean  inverl.  p.  t44. 

Thorpe.  Riit,  mar,  concli.  p,  53, 

Calîow.  L'oiicli.  nomenclat.  p.  16. 

Donax  plebeia.  Fleming.  Rrit.  anim.  2*  cd.  p.  4^4» 

Mf  sodesmn  tlonacilla.  Philippi.  moll.  Sicil.  t.  2.  p.  29. 

Habite  l'Océan  d’Kurope. 

Nous  avons  été  obligé  de  changer  le  uoin,  le  plus  généralement  reçu, 
pour  désigner  celle  espèce;  abondamment  répandue  dans  toutes  les 
mers  de  l’Europe , elle  a été  connue  de  Lister  et  do  la  plupart  des  con- 
chyliologistes,  ainsi  quele  témoigne  la  synonymie  qui  précède.  Schrocler, 
qui  avait  préparé  les  clémenls  d’une  Conchyliologie  plus  complète  que 
celle  de  Linné , avait  puisé  dans  les  ouvrages  de  ses  devanciers  toutes 
les  espèces  non  mentionnées  dans  la  IS*"  édition  du  Syslema  miuræ , et 
les  avait  classées  à la  suite  des  espèces  linnéennes,  en  les  désignant,  non 
par  une  dénomination  spécifique,  mais  par  un  numéro  d’ordre.  .lugeant 
du  Mésodesme  qui  nous  occupe  d’après  la  figure  de  Listeiq  il  l'intro- 
duisit parmi  les  Teiiines.  Gmelin  accepta  celte  opinion;  mais,  au  lieu 
d’en  faire  une  espèce  distincte , il  la  confondit  à titre  de  variété  dans 
une  espèce  de  Telliue  déjà  connue,  llientôt  après,  Poli  décrivit  et  figura 
celte  môme  espèce  dans  sou  grand  ouvrage,  et  lui  imposa  le  nom  de 
Mactra  cornea.  Ce  nom  de  cornea  est  donc  le  plus  ancien  et  par  cela 
seul  il  doit  être  conservé  à l’espèce;  on  doit  donc  rejeter  celte  dénomi- 
nation 6e  plebeia  imposée  en  1803  par  Montagu , c’est-à-dire  dix  ans 
après  la  publication  de  celle  de  Poli.  On  conçoit  dès  lors  que  tous  les 
autres  noms,  proposés  depuis  cette  époque,  doivent  être  définitivement 
rejetés. 

Le  Mesodesma  cornea  est  l’une  des  espèces  que  l’on  distingue  le  plus 
facilement;  car  il  est  le  seul  qui  soit  orné  de  couleurs  variées.  C'est  une 
petite  coquille  donaciformo  , aplatie , lisse , ovale-lransverse  très  inéquj- 
latérale,  ayant  le  côté  postérieur  obliquement  tronqué , et  le  côté  anté- 
rieur plus  allongé , étroit  et  comprimé.  A l’intérieur,  la  coquille  est  très 
lisse,  elle  est  d’un  blanc  corné,  tantôt  jaunâtre,  tantôt  grisâtre.  La 


LÈS  AMPHIDRSMIDES. 


31-^ 

ciiarnière  est  épaisse  et  solide;  les  dents  latérales  sont  grosses  et 
épaisses,  surtout  l’antérieure.  La  fossette  du  ligament  est  étroite,  pro- 
fonde, elle  ne  dépasse  pas  la  largeur  du  bord  cardinal.  U existe  une  dent 
cardinale  sur  chaque  valve  ; elle  est  très  épaisse  sur  la  valve  droite  , 
plus  étroite  sur  la  gauche.  Les  couleurs  de  cette  espèce  sont  extrême- 
ment variables  ; on  trouve  des  individus  d’un  blanc  pur  et  d'autres  d’un 
gris  noirâtre  d'une  égale  intensité.  Entre  ces  deux  extrêmes  se  montre 
une  foule  de  variétés  rayonnées  ou  vergetées , réunissant  quelquefois  ces 
doux  sortes  de  coloration  sur  le  môme  individu , et  commençant  l'une  et 
l’antre  par  des  nuances  très  pâles , pour  finir  par  des  nuances  foncées  , 
en  embrassant  une  foule  d'individus  pour  arriver  du  commencement  à 
la  fin  d’une  môme  série.  Pour  donner  un  exemple  do  cette  extrême  va- 
riabilité, nous  dirons  que,  si  l’on  voulait  les  réunir,  on  en  compterait  au 
moins  une  soixantaine  qu’il  est  possible  do  rattacher  à quatre  ou  cinq 
types  principaux.  Celte  coquille  est  longue  de  20  à 25  millimètres, 
large  de  12  à -15  millimètres  et  épaisse  de  7 à 8 millimètres. 


DIXIÈME  ÏAMHJ;E. 

Latrcili.k. 

CARACTÈRES.  — Animal  aval  , suborbicul aire  ou  transverse  , 
ayant  les  lobes  du  manteau  réunis  en  arrière  et  prolongés  en 
deux  longs  siphons  grêles , inégaux  et  désunis  clans  toute  leur 
longueur.  Palpes  labiales  grandes  et  triangulaires.  Branchies 
petites  ; le  feuillet  interne  tombant  de  chaque  coté  dans  la  ca- 
vité du  manteau,  le  feuillet  externe  relevé  vers  le  clos;  pied 
médiocre,  aplati,  triangulaire. 

Coquilles  peu  épaisses,  obrondes,  ovales  ou  transverses , 
équivalves,  régulières,  ayant  quelquefois  un  pli  irrégulier  sur 
le  côté  postérieur,  un  peu  bâillantes  en  avant  et  en  arrière  ; bords 
minces,  simples  et  tranchants.  Charnière  a3'‘ant  un  cuilleron 
oblique , quelquefois  appuyé  au  bord  dorsal  pour  un  ligament 
interne  ; une  ou  deux  petites  dents  cardinales  ; des  dents  laté- 


DIXIKME  FAMILLE. 


Jl8 

raies  dans  la  plupart.  Impression  palléale  présentant  en  arrière 
une  sinuosité  profonde,  ovale  ou  fortement  dilatée. 

GENRES. — Amphidesina  ^ Cumingia  ^ Trigonella^  Syn^ 
dosmya. 

Nous  réunissons  dans  la  famille  des  Amphidesmides  quatre  genres, 
qui,  avant  nous,  étaient  disséminés  dans  d’autres  groupes  et  se  trou- 
vaient ainsi  hors  de  leurs  rapports  naturels.  Trois  des  genres  étaient 
connus  de  Lamarck;  mais  il  en  confondait  deux  parmi  les  Amphidesmes, 
le  troisième  fait  partie  du  genre  Lutraire;  tous  trois  appartenaient  à la 
famille  des  Maclracées  du  naturaliste  dont  nous  rappelons  les  travaux. 
Cuvier  ne  mentionna  qu’un  seul  des  genres , que  nous  nous  proposons 
d’introduire  dans  la  famille  des  Amphidesmides  ; ce  genre  est  celui  des 
Lavignons.  Cuvier  en  fit  un  sous-genre  des  Mactres  pour  l’éloigner  des 
Lutraires,  entraînées  dans  la  famille  des  Enfermées  à la  suite  des  Myes. 
La  classification  de  Cuvier  ne  gagna  rien  sous  ce  rapport  dans  la  2®  édi- 
tion du  Rè^ne  animal.  M.  de  Blainville , comme  nous  avons  eu  occasion 
de  le  répéter  souvent,  proposa  dans  son  Traité  de  Malacologie  une  clas- 
sification des  Mollusques  acéphalés , qui  se  rapproche  beaucoup  de 
celle  de  Cuvier.  Cependant  en  ce  qui  concerne  les  genres  qui  nous  occu- 
pent, il  eut  des  opinions  à lui  ; c’est  ainsi,  par  exemple,  qu’il  comprend 
les  Amphidesmes  parmi  les  Lucinesà  litre  de  section.  Cette  opinion  de 
M.  de  Blainville  peut  être  justifiée  par  la  composition  même  du  genre 
de  Lamarck.  Ainsi  que  nous  le  verrons  bientôt , parmi  les  seize  espèces 
d’Amphidesmes,  une  seule  doit  être  conservée  dans  le  genre,  toutes  les 
autres  se  rangent  dans  sept  ou  huit  genres  différents,  parmi  lesquels 
les  Lucines  sont  représentées  par  deux  espèces.  M.  de  Blainville  était 
autorisé  à considérer  ces  deux  espèces  de  Lucines  comme  types  des 
Amphidesmes  de  Lamarck,  et  à transporter  le  genre  entier  dans  les 
Lucines.  Un  autre  genre,  celui  des  Lavignons,  M.  de  Blainville  le 
fait  passer  dans  sa  famille  des  Pyloridés,  et,  à l’exemple  de  Lamarck, 
l'a  laissé  comme  section  du  genre  Lutraire,  genre  auquel  M.  de  Blain- 
viile  donne  le  nom  de  Lutrioolle. 

Dans  sa  Paléontologie  fninçal-ie^  M.  d’Orbigny  a établi  une  classifica- 
tion nouvelle  des  Mollusques  acéphalés;  il  propose  d'introduire  la 
plupart  des  genres  qui  nous  occupent  dans  la  famille  des  Tellinides, 
sans  chercher,  au  reste,  à justifier  le  rapprochement  de  genres,  qui 
n’ont  entre  eux  que  des  rapports  fort  éloignés.  Il  compose  cette  famille 
des  genres  DonacUla,  équivalent  pour  M.  d’Orbigny  à notre  genre 


LKS  AMPHIDESMIDES . 819 

Mèsodesme , Laviqnon,  Amphidesma  , At'copagia,  Tellina  ^ Capsa  et 
Donax, 

Nous  avons  vu,  en  traitant  des  Mésodesmes,  que  Tanimal  de  ce 
genre  a des  caractères  qui  le  distinguent  nettement  et  le  séparent  des 
Tellines  et  des  Donaces,  non  seulement  par  les  siphons  et  les  tentacules 
dont  ils  sont  pourvus,  mais  encore  par  les  branchies,  qui  offrent  des 
caractères  d’une  si  grande  valeur  pour  la  classification  de  ces  animaux. 
Le  Lavignon  a aussi  des  caractères  qui  ne  permettent  pas  de  le  rappro- 
cher du  genre  précédent.  La  longueur  des  siphons , la  terminaison  de 
ces  organes,  mais  plus  particulièrement  la  forme  et  la  position  des 
branchies  ; tous  ces  caractères,  en  un  mot , le  repoussent  d'une  famille 
dans  laquelle  se  trouvent  les  Mésodesmes.  Le  gdnre  Arcopagia  de 
Brown  devient  doublement  inutile,  ayant  été  créé  aux  dépens  des  Tel- 
lines pour  celle  des  espèces  qui  sont  ovales  et  obrondes , tel  que  le 
TelUna  Jîemies,  par  e.xemple.  Il  est  à présumer  que  son  auteur  se  serait 
évité  la  formation  de  ce  genre . s’il  avait  eu  sous  les  yeux  l’animal  de  ces 
espèces  ; il  ne  lui  aurait  trouvé  aucune  différence  avec  celui  des  espèces 
allongées  et  transverses.  Bientôt  nous  ferons  voir  les  rapports  qui  exis- 
tent entre  les  coquilles  des  Amphidesmes  et  celles  de  ce  groupe  parti- 
culier des  Tellines.  Ces  rapports,  plus  apparents  que  réels,  n'empê- 
chent pas  les  Amphidesmes  de  faire  partie  d’une  famille  distincte  de 
celle  des  Tellines.  Quant  aux  Capses  et  aux  Donaces , ces  genres 
constituent  un  petit  groupe  aussi  nettement  séparé  que  celui  des  Méso- 
desmes , et  ces  genres  ne  doivent  en  aucun  cas  rester  dans  la  famille 
des  Tellinides  ; car,  ainsi  que  nous  le  verrons  bientôt,  les  Tellines  s’éloi- 
gnent de  ces  genres,  non  seulement  par  la  forme  et  la  grandeur  des 
siphons,  mais  surtout  par  les  caractères  plus  fondamentaux,  empruntés 
aux  organes  delà  respiration, 

La  critique  que  nous  venons  d’adresser  à l’arrangement  de  M.  d’Or- 
bigny  pourrait  s’appliquer  assez  exactement  a l’arrangement  nouvelle- 
ment proposé  par  M.  Gray  dans  la  15®  partie  des  Procès-verhattx  de  la 
Société  zooiogique  de  Londres.  La  famille  des  Tellinides  de  M.Gray  ren- 
ferme onze  genres , parmi  lesquels  se  trouvent , à côté  des  Tellines , les 
quatre  genres  qui  constituent  notre  famille  des  Amphidesmides.  AI.  Gray 
commence  par  rapporter  l uii  des  genres,  celui  nommé  Gummj/fa  par 
Sowerby,  au  genre  Amphidesme,  tel  qu'il  a été  récemment  corrigé. 
Quoiqu’il  y ait  des  rapports  évidents  entre  les  deux  genres  en  question  , 
cependant  ils  conservent  des  caractères  distinctifs  d’une  assez  grande 
valeur  pour  mériter  d’être  conservés.  A ces  quatre  genres,  M.  Gray 
joint  les  Psammobies,  les  Tellines,  les  Donaces,  les  Capses,  et,  ce  qui 


320  DIXIÈME  FAMILLE. 

nous  a paru  plus  étonnanl,  le  genre  Galatée  de  Bruguière  et  de  La- 
raarck. 

M.  Gray  ne  conserve  pas  aux  genres  qui  nous  occupent  les  dénomi- 
nations par  lesquelles  ils  sont  le  plus  généralement  connus.  C’est  ainsi 
qu’il  préfère  au  nom.  d’Amphidesme  de  Lamarck,  celui  de  Semele , 
proposé  au  même  genre  par  Schumacher.  Sans  doute  que  l'ouvrage  de 
Schumacher  est  de  1817,  tandis  que  le  5*  volume  des  Animaux  sans 
vertèbres ÙQ  Lamarck  est  de  1818.  Mais  Lamarck,  qui,  chaque  année, 
professait  et  qui  chaque  année  perfectionnait  ses  méthodes , avait  créé 
le  genre  Aniphidesme  avant  la  publication  du  volume  dont  nous  venons 
de  parler;  d'après  cette  réilexion,  il  ne  faut  pas  s’étonner  si  le  plus 
grand  nombre  des  conchyliologues  se  sont  attachés  à conserver  la 
nomenclature  d’une  méthode  universellement  répandue.  En  cherchant  à 
expliquer  la  préférence  que  l'on  adonnée  jusqu’ici  au  genre  Amphidesme 
de  Lamarck,  nous  ne  voulons  pas^dire  par  là,  qu'il  faut  soustraire  cette 
dénomination  générique  à la  règle  inflexible  de  la  priorité.  11  y a des  tra- 
vaux dont  il  faut  respecter  l’ensemble,  on  l’a  fait  pour  ceux  de  Linné  ; il 
nous  semble  que  ceux  de  Lamarck  doivent  inspirer  un  respect  non 
moins  grand,  et  qu’il  ne  faut  y toucher  qu’avec  une  extrême  réserve. 
Les  créations  d’un  génie  supérieur  ne  sont  pas  choses  si  communes, 
qu’il  soit  permis  d’y  apporter  des  modificalions,  capables  d’en  dénaturer 
l’ensemble  et  l'esprit. 

Pour  le  genre  Lavignon,  .M.  Gray  préfère  la  dénomination  de  Are- 
naria,  proposée  par  M.  Megerleen  I8H  ; il  nous  semble  qu'il  eût  été 
préférable  de  remonter  encore  plus  haut  dans  l’histoire  de  ce  genre,  et 
d'accepter  le  nom  de  Trigonelki  que  lui  a imposé  Da  Costa. 

Un  genre , créé  sous  le  nom  de  Sijndosmye  par  M.  Kéclnz , a été 
assez  généralement  accepté,  parce  qu’en  effet  il  constitue  un  petit 
groupe  fort  naturel.  M.  Gray  adopte  le  genre,  mais  il  refuse  le  nom  , et 
il  préfère  celui  de  Abra,  proposé  par  Leach  en  1817,  dans  un  manu- 
scrit qui  est  resté  jusqu’ici  inédit.  Les  zoologistes  anglaisent  eu  l'in- 
tention, à plusieurs  reprises,  défaire  prévaloir  les  dénominations  de 
leurs  auteurs,  au  moyen  de  leurs  manuscrits.  C’est  ainsi  que  les  noms  de 
Solander  ont  été  préférés  par  les  zoologistes  anglais  à ceux  de  Grneîin 
et  d’autres  naturalistes,  auxquels  il  était  impossible  d’avoir  connaissance 
de  ces  manuscrits.  La  même  prétention  se  manifeste  chez  M.  Gray  en 
faveur  des  manuscrits  de  Leach.  Cependant,  longtemps  égarés,  iis 
n’ont  pu  être  consultés  d’aucun  des  naturalistes  contemporains  ; les 
travaux  de  M.  Gray  lui-même  le  témoignent,  et  vouloir  aujourd'hui 
s’en  servir  pour  établir  une  priorité  en  faveur  d’un  certain  nombre  de 


LES  AMPfllDESMIDËS. 


331 

genres,  c'est  assurément  un  procédé  très  injuste , puisqu’il  tend  à intro- 
duire dans  la  science  une  fâcheuse  rétroactivité.  Mettant  hors  de  ques- 
tion la  sincérité  do  ces  manuscrits , il  suffirait  donc  à un  naturaliste  de 
préparer  un  travail  inédit  pour  venir  troubler  ensuite  la  science  à une 
époque  plus  ou  moins  éloignée.  Cela  no  peut  être  admis  ; car  pour  M.  Gray, 
aussi  bien  que  pour  les  autres  naturalistes , une  observation  quelconque 
ne  devient  authentique  et  ne  prend  date  dans  la  science  qu'au  moment 
de  sa  publication,  encore  faut-il  que  cette  publication 'soit  de  nature  à 
se  répandre  assez  pour  parvenir  à la  connaissance  de  tous  ceux  qu’elle 
intéresse.  Or,  un  manuscrit  n'est  point  une  publication,  à plus  forte  rai- 
son si  ce  manuscrit  reste  inconnu  pendant  près  de  trente  ans  ; ainsi  par 
cette  seule  raison  nous  repoussons  invariablement , de  la  nomenclature 
conchyliologique , tous  ceux  des  genres  de  Leach  dont  l’existence  a été 
révélée,  soit  par  un  nom  sans  signification , soit  par  la  récente  publi- 
cation de  ses  manuscrits. 

Les  quatre  genres  que  nous  réunissons  dans  la  famille  des  Amphi- 
desmides  ont  des  caractères  communs  qui  les  rapprochent.  Ainsi  tous  ont 
une  coquille  régulière  à charnière  dans  laquelle  le  ligament  est  placé  sur 
un  cuilleron  intérieur.  Ce  cuÜleron  est  plus  ou  moins  oblique,  peu  incliné 
dans  le  Cumingia^  il  l’est  un  peu  plus  dans  les  Lavignons,  davantage 
encore  dans  les  Syndosmyes,  ainsi  que  dans  les  Amphidesmes.  En  avant 
de  ce  cuilleron,  la  charnière  porte  une  ou  deux  den's  cardinales,  et  pres- 
que toujours  des  dents  latérales  ; car  le  seul  genre  Lavignon  manque  de 
ces  parties. 

Les  impressions  musculaires  sont  semblables  dans  les  quatre  genres  ; 
nous  retrouvons  aussi  dans  l’impression  palléale  des  ressemblances  con- 
sidérables. Cependant  dans  les  Lavignons  et  dans  les  Syndosmyes, 
cette  impression  est  plus  grande  et  plus  dilatée  dans  le  milieu  que  chez 
les  Amphidesmes  et  les  Cumingies  ; néanmoins  par  leur  forme  elles 
annoncent , dans  les  quatre  genres , des  animaux  terminés  en  arrière 
par  de  longs  siphons  séparés. 

La  forme  générale  des  quatre  genres  est  assez  variable;  les  Syndos- 
myes sont  généralement  transverses,  les  Cumingies  sont  plus  ovales, 
et  par  là  se  rapprochent  des  Ampbidesmies  qui  sont  suborbiculaires. 
Les  Lavignons , au  contraire,  affectent  une  forme  triangulaire.  Dans  les 
quatre  genres,  les  coquilles  sont  légèrement  bâillantes  en  avant  et  en 
arrière;  dans  les  Syndosmyes  elles  Amphidesmes,  il  existe  un  pli 
irrégulier  le  long  du  bord  postérieur,  semblable  à celui  des  Tellines, 
Ces  coquilles  sont  même  quelquefois  un  peu  inéquivalves , ainsi  que 
cela  arrive  dans  un  certain  nombre  d’espèces  do  ce  dernier  genre.  Les 


T.  !.  2»  PARTIE. 


ai 


3^2 


DIXIEME  FAMILLE. 


Lavignons  et  les  Cumingies,  quoique  plus  réguliers,  conservent  ce- 
pendant une  trace  de  ce  pli  postérieur. 

Toutes  les  coquilles  que  nous  rassemblons  dans  la  famille  des  Amphi- 
desmides  sont  minces,  fragiles,  à l’exception  de  quelques  Amphidesmes, 
qui  prennent  un  peu  plus  de  solidité. 

Les  animaux  de  deux  genres  seulement  nous  sont  connus;  ce  sont 
ceux  des  Syndosmyes  et  des  Lavignons , ils  ont  entre  eux  de  tels  rap- 
ports, que  Ton  serait  tenté  de  les  réunir  en  un  seul  genre.  Il  ont  les 
palpes  labiales  fort  grandes , triangulaires  ; les  branchies  sont  petites  ; 
une  seule  paire  de  feuillets , l’interne,  tombe  de  chaque  côté  du  corps 
dans  la  cavité  du  manteau.  Les  feuillets  externes  se  relèvent  vers  la 
région  dorsale;  le  pied  est  médiocre,  comprimé;  les  lobes  du  manteau 
sont  désunis  jusqu'à  l’extrémité  postérieure  de  l’animal , et  ils  se  pro- 
longent en  arrière  en  deux  siphons  inégaux  , dont  l’un , le  branchial , a 
en  longueur  cinq  ou  six  fois  le  diamètre  Lransverse  de  la  coquille. 

Tous  les  mollusques  de  cette  famille  habitent  les  plages  sableuses, 
dans  lesquelles  ils  s’enfoncent  perpendiculairement , de  manière  à faire 
saillir  en  dehors  de  leur  demeure  une  portion  plus  ou  moins  considé- 
rable de  leurs  siphons.  Quoique  nous  ne  connaissions  pas  les  animaux 
des  genres  Ciimîngfïa  qI  Àmphidesma , nous  croyons  fermement  qu’ils 
ont  une  organisation  semblable  à celle  des  deux  autres  genres.  Notre 
croyance  se  fonde  particulièrement  sur  la  forme  des  impressions  muscu- 
laires, et  surtout  sur  celle  de  l'impression  palléale.  Dans  les  Lutraires 
et  dans  les  Myes,  chez  lesquels  les  siphons  sont  grands  et  réunis,  la 
sinuosité  palléale  est  largement  ouverte  en  arrière  ; celte  disposition  se 
retrouve  aussi  chez  les  Mactres.  Chez  tous  les  mollusques  à siphons 
allongés  , grêles  et  désunis,  l'entrée  de  la  sinuosité  du  manteau  est  ré- 
trécie, et  c’est  ce  qui  a lieu  dans  les  deux  genres  dont  nous  parlons.  C’est 
à-  cause  de  ce  caractère  que  nous  les  comprenons  avec  les  deux  autres 
dans  une  même  famille,  et  nous  pensons  que  si  plus  tard  ils  doivent  oc- 
cuper une  autre  place,  faire  partie  d’une  autre  famille , c'est  parce  qu'ils 
auront  offert  des  différences  dans  d'autres  parties  de  leur  organisation. 


LES  AMl’HIDESMIDES. 


GENRE  TRExNTE-DEUXIÈME. 

CUraiSirGli:.  Cumingia. 

PI,  8 bis,  f.  g.  10.  1 1. 

CARACTERES  GENERIQUES.  — Animal  iiiconnu. 

Coquille  ovale-transverse,  subéquilatérale,  équivalve,  apla- 
tie; le  côté  antérieur  plus  allongé,  arrondi,  le  postérieur  sub- 
tronqué , terminé  par  un  angle  peu  saillant  ; crochets  petits,  à 
peine  proéminents.  Charnière  présentant  au  milieu  un  cuilleron 
triangulaire,  perpendiculaire  pour  un  ligament  interne,  et  sur 
son  côté  antérieur  une  seule  petite  dent  cardinale  sur  chaque 
valve;  deux  dents  latérales,  également  distantes  de  la  charnière 
et  sur  la  valve  droite  seulement.  Impression  musculaire  anté- 
rieure ovale-oblongue  ; la  postérieure  plus  grande  et  circulaire; 
sinuosité  de  l’impression  palléale horizontale,  ovale,  oblongue, 
très  profonde. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Mactra , Conrad. 

OBSEnvATioNs.  — Genre  proposé  par  Sowerby  en  h 833  dans  les  Pro- 
ceedings  de  la  Société  zoologique  de  Londres,  et  dédié  à M.  Cuming, 
l'un  des  hommes  auquel  la  Conchyliologie  est  redevable  des  plus  heu- 
reuses découvertes  et  des  plus  abondantes  collections,  qui  aient  été  ras- 
semblées par  un  voyageur,  II  aurait  été  difficile  de  se  faire  une  juste 
idée  du  nouveau  genre  d’après  la  courte  description  de  M.  Sowerby. 
Mais  ce  naturaliste,  dès  l’année  suivante , en  donna  de  bonnes  figures 
dans  le  n”  40  do  son  Généra  of  shells.  Depuis  ce  moment  l’utitilé  du 
genre  Cumingie  ne  pouvait  être  contestée  ; on  reconnaissait  dans  les 
coquilles  qui  y sont  réunies,  des  caractères  particuliers;  le  genre  fut 
donc  généralement  adopté.  Si  les  conchyliologues  ont  été  d’accord  à 
cet  égard,  ils  eurent  des  opinions  diverses  sur  la  place  que  le  genre 
doit  occuper  dans  la  méthode.  L'auteur  du  genre  ne  se  prononce  pas 
sur  les  rapports  à lui  donner,  il  laisse  la  question  indécise.  En  repro- 
duisant le  genre  dans  son  Synopsis  testaceorum  vlventium  M.  Müiler 
l’introduit  dans  la  famille  des  Nymphacées  de  M.  Menke,  à la  suite 
des  Mésodesmes et  des  Amphidesmes.  Nous  ne  savons  trop  si  M.  Menke 


21 


DIXIEME  FAMILLE. 


324 

lui-méme  aurait  adopté  cet  arrangement  de  M.  Muller.  Nous  ne  voyons 
rien  dans  lo  Synopsis  methodicu  .^folhiscoriim  qui  le  justifie.  La  famille 
des  Nympliarces  de  M.  Menke  est  très  étendue,  mais  elle  ne  contient  ni 
le  genre  Ampliidesme , ni  le  genre  Mésodesme  ; elle  est  constituée  k peu 
près  comme  celle  du  mémo  nom  , instituée  par  Lamarck,  ce  qui  nous 
fait  croire  que  M.  Menke  aurait  préféré  un  tout  autre  arrangement,  s'il 
avait  connu  le  genre  dont  nous  nous  occupons. 

Dans  son  Traité  de  Malacologie,  M.  Swainson  agrandit  la  famille  des 
Tellinides  de  Lamarck , et  la  divisa  en  deux  sous -familles  ; la  première 
sous  le  nom  deCyclinœ,  contient  les  six  genres  Cyclas , Cyrena,  Mega- 
desma  [Galatheaf  Lamk.),  Gnathodon,  Cnmingia  Gl  Erycina  (J/cso- 
desma^  Desh.),  c’est-à-dire  des  genres,  qui  sc  repoussent  pour  la 
plupart,  par  les  caractères  les  plus  essentiels.  C'est  ainsi  que  les  Gna- 
thodon SC  rapprochent  des  Mactros;  les  Cumingia,  comme  nous  le 
verrons,  ne  doivent  pas  s’éloigner  des  amphidesraes,  tandis  que  les  Ery- 
cines  de  M.  Swainson , correspondant  à nos  Mésodesmes , doivent  con- 
stituer un  groupe  particulier.  Ainsi , dans  la  méthode  que  nous  exami- 
nons, le  genre  Gumm(/fa  n’est  pas  à sa  place. 

M.  Reevc , dans  sa  Conchyliologie  systématique , a mieux  compris  les 
rapports  du  genre  Cumingia  ; il  l’introduisit  dans  la  famille  des  Mac- 
tracées  à la  suite  des  Amphidesraes.  Cette  famille  des  Mactracées  do 
M.  Reeve  est  plus  étendue  que  celle  de  Lamarck  , mais  elle  est  fondée 
sur  les  mémos  caractères  , et  c'est  dans  celte  famille  , en  effet , que  doit 
• se  trouver  le  genre  Cumingia.  M.  Sowerby  le  jeune , dans  son  Manuel  de 
Conchyliologie,  partage  d’abord  l’opinion  de  M.  Reeve  à l'article  <7u- 
mingia,  mais  en  indiquant  plus  tard  les  genres  qui  doivent  entrer  dans 
la  famille  des  Myaires,  il  y comprend  au.ssi  les  Cumingia.  A laquelle  de 
«es  deux  opinions  M.  Sowerby  s’est-il  fixé?  Il  est  à présumer,  que  c’est 
par  une  eireur  involontaire  que  le  genre  Cumingia  est  dans  la  famille 
des  Myaires,  à la  suite  des  Myochama  et  dos  Cleidothærus , car  il  n’a 
avec  eux  aucune  espece  de  rapports.  M.  Ilanley  a préféré  , avec  juste 
raison,  l’opinion  deM.  Reeve,  et  il  admet  les  Cumingies  dans  la  famille 
des  Mactracées  ; mais  il  com;oit  pour  cos  coquilles  des  rapports  nou- 
veaux, c’est  près  des  Ligules  do  Montagu  que  M.  Hanley  voudrait 
mettre  les  Cumingies.  Il  faut  se  rappeler  que  ce  genre  Ligule  cor- 
respond aux  Syndosmyes  do  M.  Reeve.  Mais  avant  d'admettre  ou  de 
rejeter  l’une  des  opinions  que  nous  venons  de  rapporter,  avant  d'ex- 
poser la  nôtre,  il  est  nécessaire  d’examiner  en  détail  tous  les  caractères 
du  genre  dont  nous  nous  occupons. 

Une  espèce  de  Cumingie,  découverte  aux  États-Unis,  a été  décrite 


LES  AMPHIDESMIDES. 


3-i5 

par  M.  Conrad  , sous  le  nom  de  Mactra  telUnoides  , non  seulement  dans 
le  JouDial  de  f Academie  des  sciences  naturelles  de  l^liiladelpfiie,  mais  en- 
core dans  sa  Conchyliologie  marine  d'Amérique.  Plus  lard,  AI.  Conrad  a 
adopté  le  genre  Citmingia , et  y a placé  l’espèce  dont  nous  venons  do 
parler.  Al.  Gould,  dans  son  excellent  Catalogue  des  invertébrés  de  Mas~ 
sachiissets,  a suivi  l'exemple  de  AI.  Conrad  en  adoptant  le  genre  Cn- 
mîngia,  et  en  l'introduisant  dans  la  famillo  des  Alactracées.  Nous  allons 
voir  pourquoi,  de  toutes  les  classifications  proposées,  nous  préférons  celle 
de  M.  Hanley,  toutefois  après  lui  avoir  fait  subir  des  modifications  dont 
nous  exposerons  bientôt  les  motifs. 

Les  Cumingies  sont  des  coquilles  d'un  médiocre  volume,  qui  ont 
l’habitude  de  vivre  dans  les  fentes  des  rochers , dans  leurs  anfrac- 
tuosités, et  non  plongées  dans  le  sable  ou  dans  la  vase,  ainsi  que  les 
Lutraires.  Ces  coquilles  sont  ovales,  transverses  , subéquilatérales.  Le 
côté  antérieur  est  un  peu  plus  allongé  que  le  postérieur  ; il  est  obtus  . 
arrondi;  le  coté  postérieur  est  obliquement  tronqué,  et  il  se  termine 
par  un  angle  inférieur  et  postérieur  assez  aigu;  les  bords  sont  simples, 
tranchants  et  les  valves  réunies  no  sont  pas  parfaitement  closes  ; elles 
offrent  un  faible  bâillement  en  avant  et  en  arrière  : le  test  est  peu  épais , 
blanc  ou  d’un  blanc  jaunâtre  ; la  surface  externe  est  presque  toujours 
chargée  de  stries  ou  de  lamelles  transverses,  plus  ou  moins  régulières , 
comparables  à celles  du  Tellina  fragiUs  de  Linné.  Les  Cumingies  sont 
des  coquilles  plus  aplaties  que  globuleuses  ; elles  ont  en  arrière  , le  long 
du  bord  postérieur,  une  légère  inflexion,  comparable  a celle  des  Tellines. 
Elles  montrent  souvent  une  irrégularité  qui  annonce  dans  le  développo- 
ment  des  individus  une  gêne  qui  provient,  sans  aucun  doute  , do  leur 
manière  de  vivre. 

Les  impressions  musculaires  peuvent  se  comparer  à celles  des  Syn- 
dosmyes;  l’autérieuro  est  ovale-oblongue , située  très  près  du  bord 
antérieur,  un  peu  arquée  dans  sa  longueur  ; souvent  elle  occupe  la  plus 
grande  partie  de  la  hauteur  du  bord  antérieur.  L’impression  musculaire 
postérieure  estarrondie,  elle  est  proporlionellemenl  plus  grande  que  dans 
les  autres  genres  avoisinants  ; placée  près  do  rextrémilé,  elle  est  plus 
près  du  bord  inférieur  quode  la  charnière;  un  peu  au-dessus  de  chacune 
de  ces  impressions  musculaires,  on  en  remarque  une  très  petite,  qui  est 
due  aux  muscles  rétracleurs  du  pied.  L’impression  palléale  doit  être 
étudiée  avec  soin  dans  ce  genre,  elle  fournit  d'utiles  indications  pour 
déterminer  ses  rapporis.  Cette  impression  part,  comme  à l’ordinaire, 
de  l’extrémité  inférieure  du  muscle  antérieur  ; elle  se  place  à une  petite 
distance  du  bord  et  le  suit  parallèlement,  elle  s’arrête  au  niveau  du  bord 


DIXIÈME  FAMILLE. 


antérieur  de  l’impression  musculaire  postérieure  ; à partir  de  ce  point , 
Timpression  palléale  rentre  sur  elle-même  et  se  dirige  d'arrière  en 
avant;  les  deux  lignes,  d’abord  confondues  jusque  vers  le  milieu  du 
bord  ventral , se  détachent,  et  celle  qui  circonscrit  la  sinuosité  palléale 
se  courbe  en  ovale  à une  petite  distance  du  muscle  antérieur,  et  se 
dirige  de  nouveau  en  arrière,  tantôt  en  s’infléchissant  un  peu  et  en  se 
dilatant  dans  son  trajet,  tantôt  circonscrivant  une  ellipse  allongée  et 
régulière.  Parvenue  dans  le  voisinage  du  muscle,  la  ligne  de  l’impres- 
sion se  courbe  rapidement  et  se  joint , comme  une  tangente , à la  circon- 
férence de  l'impression  musculaire  , do  sorte  que  l’entrée  de  la  sinuosité 
est  rétrécie  par  le  muscle  postérieur. 

La  charnière  offre  des  caractères  bien  distincts  ; le  bord  cardinal  est 
étroit , il  est  divisé  en  deux  parties  presque  égales  par  un  cuilleron  assez 
grand,  triangulaire,  saillant  dans  l'intérieur  des  valves  et  à peine 
incliné  en  arrière.  En  avant  de  ce  cuilleron  s'élève,  sur  chaque 
valve,  une  seule  petite  dent  cardinale,  simple,  étroite,  quelquefois 
obsolète  sur  la  valve  gauche.  En  avant  et  en  arrière  de  cette  charnière  , 
et  à peu  près  à égale  distance , s'élève  une  dent  latérale  grande , 
triangulaire , pointue  au  sommet  et  séparée  du  bord  par  une  gout- 
tière assez  profonde.  Ce  qui  est  fort  remarquable,  c’est  que  ces  dents 
latérales  n’existent  que  sur  une  seule  valve,  la  valve  droite;  la  gauche 
n’en  présente  aucune  trace;  seulement  la  portion  du  bord  correspon- 
dant aux  dents  latérales  est  arrondie  , polie , un  peu  plus  saillante  et 
destinée  à être  reçue  dans  la  gouttière  ménagée  derrière  la  dent.  Les 
dents  latérales  des  Cumingtes  ressemblent  à celles  d’un  grand  nombre 
de  Tellines. 

Maintenant  que  nous  connaissons  exactement  les  caractères  du  genre 
Cumingie , pour  en  apprécier  la  valeur,  il  est  nécessaire  de  les  comparer 
à ceux  des  genres  les  plus  voisins.  Les  Lutraires  ont  un  cuilleron  mé- 
dian, saillant , non  incliné  ; elles  ont  aussi , pour  le  plus  grand  nombre, 
des  dents  latérales.  Elles  ont  aussi  la  sinuosité  palléale  profonde , ova- 
laire et  horizontale;  mais  dans  les  coquilles  dece  genre,  la  dent  cardinale 
est  en  V,  et  elle  ressemble  à celle  des  Mactres  ; les  dents  latérales  exis- 
tent sur  les  deux  valves;  la  sinuosité  palléale  n'est  jamais  rétrécie  à son 
entrée;  ce  caractère  n’est  pas  sans  importance.  Ces  différences  no  sont 
pas  les  seules;  les  Lutraires  sont  grandes,  bâillantes  de  cha((uecôté;  elles 
vivent  enfoncées  dans  le  sable.  Il  n’est  pas  nécessaire  de  comparer  les 
Cumingies  aux  Mactres , les  différences  sont  trop  apparentes,  pour  avoir 
besoin  de  les  rappeler  ; il  n’en  est  pas  de  même  des  Âmphidesmes , près 
desquelles  tous  les  conchyliologues  ont  une  tendance  à ranger  les  Cumin- 


LES  AMPBIDESMIDES. 


32'] 

gies  ; il  existe  cependant  entre  ces  deux  genres  des  différences  assez  nota- 
bles. Ainsi,  dans  les  Âmphidesmes,  le  cuilleron  n’est  pas  saillant  dans 
l’intérieur  des  valves , il  est  couché  le  long  du  bord  postérieur  ; les  dents 
latérales  existent  sur  les  deux  valves.  La  sinuosité  palléate  mérite  une 
attention  particulière.  Dans  les  Amphidesmes,  elle  est  toujours  entièrement 
détachée  du  bord  ventral,  elle  s'élève  obliquement  d’arrière  en  avant  et 
de  bas  en  haut , produisant  ainsi  un  angle  aigu  avec  le  grand  diamètre 
transverse.  Cette  impression , dans  les  Amphidesmes,  est  à peine  ré- 
trécie à son  entrée,  et  elle  ressemble  à une  ellipse  à laquelle  manque  un 
des  petits  côtés.  Les  différences  qui  se  montrent  entre  les  Amphidesmes 
et  les  Cumingies  , ne  sont  donc  pas  moins  grandes  que  celles  qui  exis- 
tent avec  les  Lutraires.  Nous  avons  encore  à examiner  deux  genres , les 
Lavignons  et  les  Syndosmyes.  Les  Lavignons  diffèrent  des  Cumingiës 
par  l'obliquité  du  cuilleron  de  la  charnière,  ainsi  que  par  l’absence  des 
dents  latérales  ; mais  la  sinuosité  du  manteau  , horizontale , dilatée  dans 
le  milieu,  soudée  dans  une  grande  partie  de  sa  longueur  à la  portion 
ventrale,  rétrécie  à son  entrée,  par  l'abaissement  du  muscle  postérieur, 
présente  déjà  beaucoup  d’analogie  avec  celle  des  Cumingies,  qui  reste 
plus  étroite  et  plus  ovalaire.  Quant  aux  Syndosmyes , elles  avoisinent 
bien  plus  les  Cumingies , car  elles  ont  aussi  des  dents  latérales  ; il  est 
vrai  que  le  cuilleron  est  oblique , aussi  pourrait-on  dire  que  les  Cumin- 
gies sont  des  Syndosmyes  à cuilleron  redressé.  Néanmoins  il  y a d'autres 
différences;  le  Cumingies  sont  des  coiÿiilles  plus  épaisses,  plus  grandes, 
et  la  sinuosité  pallôale  est  en  proportion  plus  étroite,  plus  régulièrement 
ovalaire  que  celle  des  Syndosmyes.  De  toutes  les  observations  précédentes 
nous  pouvons  tirer  des  conclusions  pour  déterminer  rigoureusement 
la  place  que  doit  occuper  le  genre  Curaingie  dans  une  méthode  natu- 
relle. Comme  cela  arrive  si  souvent,  ce  genre  a des  rapports  compliqués 
d’un  côté  avec  les  Lutraires  parla  forme  et  la  position  du  cuilleron,  et 
par  rhorizontalité  de  l'impression  palléale;  d’un  autre,  avec  les  Amphi- 
desmes par  l’inflexion  postérieure  des  valves,  mais  il  se  rapproche  da- 
vantage de  Syndosmyes  par  les  dents  latérales,  par  la  sinuosité  palléale 
horizontale  mais  rétrécie  à son  entrée.  Nous  attachons  quelque  impor- 
tance à ce  dernier  caractère,  parce  que  nous  avons  observé  que,  partout 
où  il  existe,  l’animal  a les  siphons  disjoints  dans  toute  leur  longueur.  Les 
Lavignons  , les  Syndosmyes,  les  Tellines  et  les  Diodontes  nous  offrent 
des  exemples  de  cette  corrélation  entre  le  rétrécissement  de  l'entrée  de 
l’inflexion  etl’existence  dedeux  siphons  désunis;  et  cela  se  concevra,  si  l'on 
fait  attention  que  dans  les  mollusques  à siphons  réunis,  comme  les  So- 
lens,  les  Lutraires,  les  Mactres,  les  Myes,  les  muscles  rétracteurs  de  ces 


3a8 


DIXIÈME  FAMILLE. 


organes  se  continuent  pour  ainsi  dire  dans  les  parois  sans  se  condenser 
en  un  tendon,  tandis  que  dans  les  mollusques,  dont  les  siphons  sont 
désunis,  le  muscle  rétracteur,  semblable  à un  éventail,  se  termine  en 
un  tendon  épais,  qui  so  porte  à la  cloison  intérieure  qui  sépare  l’ouver- 
ture des  siphons.  De  cette  disposition  organique  résulte  chez  les  uns, 
la  possibilité  du  rétrécissement  de  l'entrée  du  sinus  postérieur;  chez 
les  autres,  l’impossibilité  de  ce  rétrécissement,  puisque  le  muscle  doit 
embrasser  les  siphons  réunis  dans  toute  la  largeur  de  leur  base. 

C'est  ainsi  que  par  un  examen  approfondi  des  caractères  des  coquilles, 
dans  ieur  relation  avec  l’animal , on  parvient  à déterminer  plus  rigou- 
reusement les  rapports  des  genres  dont  les  animaux  ne  sont  point  con- 
nus. Nous  modifions  en  cela  l’opinion  des  conchyliologues , que  nous  ne 
mettons  pas  les  Cumingies  dans  la  famille  des  Mactracées , mais  dans 
celle  desamphidesmides  avec  les  Lavignons  et  les  Syndosmyes. 

Les  Cumingies  sont  des  coquilles  des  climats  chauds  do  l'Amérique, 
de  l’Australie  et  des  mers  de  l’Inde  ; le  nombre  des  espèces  connues  est 
peu  considérable.  M.  Reeve,  dans  son  Conchologisl  nomenclator,  en  cite 
six  espèces  vivantes.  M.  Soworby  dit  que  ce  genre  n'est  point  connu  à 
l’état  fossile;  nous  avons,  cependant,  fossile  de  l'Amérique  septentrio- 
nale, le  Mactm  lelUnoides , de  Conrad,  qui  est  une  véritable  Curaingie  : 

Six  espèces  vivantes. 

Une  fossile  do  l'Amérique  septentrionale  ; c’est  la  suivante  : 

Cumingie  tellinoïde.  Cumingia  tellinoides.  Conrad. 

PI.  8 his,  fig.  9.  10.  11. 

C,  testa  ovatO’transversâfteqiiilaterâ,  antice  obttisâ  f postice  angulatâ  y 
(enniy/ragiUy  alhây  transversim  striata;  striis  intequalibus ; dentibus 
lateraiibns^  inagnis, 

Mactra  teUinoides.  Conrad.  Journ.  ac.  nat.  sc.  t.  6.  p.  aSS. 

Id,  Conrad.  Amer.  mar.  Conch.  6o.  pl.  14,  f.  a. 

Cumingia  telUnoides,  Conrad.  Journ.  acad.  nat.  sc.  t.  7.  p.  a34. 

Id.  Gould.  luvcrt.  of  Massachussetts,  p.  56.  f.  36. 

• t ’ onch.  noraencl.  p.  18.  u®  5. 

Vivante  dans  les  mers  d’Amérique. 

Fossile  dans  les  terrains  tertiaires  supérieurs  de  l’Amérique  septen- 
trionale. 


LES  AMPHIDESMIDES. 


839 

Petite  coquille  ovale -transverse,  comprimée,  ayant  assez  bien  l’appa- 
rence d’une  petite  Telline,  ainsi  que  sou  nom  l’indique;  elle  est  équila- 
térale, mais  son  côté  antérieur  est  plus  large  que  le  postérieur.  Ce  côté 
antérieur  est  obtus , coupé  en  demi-cercle  ; le  postérieur  se  termine  en 
arrière  par  un  angle  assez  aigu  ; le  bord  dorsal  postérieur  est  droit  et 
descend  obliquement  du  crochet  à l’angle  postérieur;  les  bords  sont 
simples,  minces  et  tranchants,  à peine  bâillants,  en  avant  et  en  ar- 
rière; les  crociiets  sont  petits,  peu  obliques  et  dominent  à peine  une 
petite  lunule  lancéolée,  qui  se  dessine  au-dessous  d’eux  sur  le  côté  an- 
térieur. Le  cuilleron  est  petit,  symétrique,  sans  la  moindre  obliquité; 
les  dents  latérales  sont  grosses  et  saillantes.  La  surface  extérieure  est 
couverte  do  stries  transverses,  nombreuses,  pressées  les  unes  contre  les 
autres,  mais  inégales  et  peu  régulières. Cette  coquille  se  trouve  actuelle- 
ment vivante  dans  les  mers  de  l’Amérique  septentrionale,  et  fossile  dans 
les  terrains  tertiaires  récents  de  la  Virginie. 


GENRE  TRENTE-TROISIÈME. 

JiAViaNON,  Trigonella.  (Da  Costa.) 

PL  10.  flg.  I.  a 3« 

CARACTERES  génériqltes.  — Animal  aplati,  ayant  les  lobes 
du  manteau  disjoints  en  avant  et  dans  toute  la  longueur  du 
bord  ventral;  bords  du  manteau  peu  exsertiles,  garnis  d’une 
rangée  de  papilles  courtes , obtuses  et  écartées  ; la  commissure 
postérieure  consolidée  par  deux  petits  muscles  croisés;  deux 
siphons  inégaux,  séparés  l’un  de  Vautre  dans  toute  leur  longueur, 
grêles,  subcylindracés  ; le  branchial,  le  plus  long,  ayant  cinq  ou 
six  fois  le  grand  diamètre  de  la  coquille , terminé  par  une  ou- 
verture sublobée  ; le  siphon  anal  ayant  deux  fois  à peine  la 
longueur  de  la  coquille , et  son  ouverture  garnie  d’un  rang  de 
cils  très  fins  et  très  nombreux  ; pied  très  aplati,  triangulaire  ; 
palpes  labiales  grandes,  triangulaires , la  paire  interne  soudée 
au  sommet  de. la  branchie;  quatre  feuillets  branchiaux,  deux 
tombant  dans  la  cavifé  du  manteau,  deux  autres,  plus  petits, 


33o 


DIXIÈME  FAMILLE. 


renversés  en  arrière  vers  le  dos;  branchies  lisses,  sans  plis, 
très  finement  striées. 

Coquille  ovale,  subtrigone,  subéquilatérale,  aplatie,  à crochets 
petits,  opposés  ; le  côté  antérieur,  le  plus  court,  arrondi,  le  posté- 
rieur obtus  , un  peu  baillant  ; les  impressions  musculaires  à 
égale  distance  du  sommet,  l'antérieure  ovalaire,  la  postérieure 
arrondie;  l'impression  palléale  formant  en  arrière  un  large  sinus 
subtriangulaire,  très  dilaté  ; charnière  étroite,  offrant  au-dessous 
des  crochets  deux  très  petites  dents  sur  la  valve  droite,  une 
seule  sur  la  gauche,  et  en  arrière  un  cuilleron  oblique,  triangu- 
laire, dans  lequel  s’attache  un  ligament  interne  ; un  petit  liga- 
ment externe,  fixé  sur  des  nymphes  peu  saillantes. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Chama ^ Belon , Gessner,  Aldro- 
vande.  — Coucha  tennis,  Lister.  — Pectuncnhis  laius,  Lister, 
Lavignon^  Réaumur,  Cuvier,  Schweigger,  Férussac. — Chama 
[calcinelle]^  Adanson. — Mactra , Poiret,  Schrœter,  Gmelin  , 
Dorset , Montagu,  Dilhvyn,  Wood,  de  Gerville.  — Tellina^ 
Baster,  Ginanni,  Donovan.  — Mya,  Chemnitz,  Gmelin,  Spen- 
gler.  — Vernis^  Peiinant , Gmelin.  — Trigonella,  Da  Costa, 
Lovèn. — -Soîeu,  Scrohicnlaria , Schumacher,  Philippi. 

— Lniraria , Lamarck,  Croucb,  Payraudeau,  Collard-des- 
Cherres,  Deshayes,  Philippi,  Quoy.  — Listera,  Turton,  Menke. 

— Lutricola^  Blainville.  — Arenaria^  Megerle. 

Le  Lavignon  , habitant  en  grande  abondance  non  seulement  la  Médi- 
terranée, mais  encore  TOcéan  européen  et  l’Océan  atlantique  jusqu’au 
Sénégal , a été  connu  de  nos  anciens  naturalistes;  Belon  est  le  premier 
qui  l’ait  mentionné , en  \ 553  , dans  son  ouvrage  sur  les  Poissons;  il  en 
donne  une  description  assez  détaillée  et  une  figure  médiocre , sous  le 
nom  de  Chama  piperata.  Ce  nom  rappelle  le  goût  poivré  particulier  à 
ce  Mollusque , dont  le  peuple  se  nourrit.  Gessner  et  Aldrovande , dans 
leurs  compilations,  ont  mentionné  le  Chama  piperata  de  Belon,  et 
n’ont  rien  ajouté  aux  renseignements  donnés  par  le  père  des  naturalistes 
français.  Rondelet  cite,  également  ce  Chama  piperata  , du  moins  cela 
nous  paraît  probable,  d’après  quelques  passages  de  son  Histoire  des 


LES  AMPHIDESMIDES. 


33 1 

poissons.  Le  savant  auteur  du  Synopsis  conchylioriim  et  de  plusieurs 
autres  ouvrages,  remarquables  pour  l’époque  où  ils  furent  publiés, 
Lister,  donna  de  bonnes  figures  du  Chama  piperata  de  Belon  , non  seu- 
lement dans  le  Synopsis  que  nous  venons  de  citer,  mais  encore  dans 
son  Traité  des  animaux  de  la  Grande-Bretagne.  Il  semblerait  que , dans 
ces  deux  ouvrages  , il  a considéré  ce  mollusque  comme  appartenant  à 
deux  espèces  ; car,  dans  l'un , il  le  nomme  Concha  tennis , et , dans 
Tautre , Pectunculus  latus.  La  figure  que  publia  Bonanni  est  moins 
reconnaissable  que  celle  de  Lister  ; aussi  l’ouvrage  du  naturaliste  romain 
n’ajoute  rien  à la  connaissance  de  l’espèce.  Nous  pouvons  porter  un 
jugement  semblable  sur  l’ouvrage  de  Petiver,  publié  de  1702  à 1719, 
et  dans  lequel  on  trouve  aussi  une  très  médiocre  figure  du  Chama 
piperata. 

Réaumur  a marqué  son  époque  dans  V Histoire  de  îa  Zoologie , par 
l’art  admirable  avec  lequel  il  savait  observer  les  mœurs  des  animaux. 
Quoique  ses  travaux  sur  les  insectes  soient  les  plus  cités  , nous  n’avons 
oublié , dans  aucune  occasion  , ceux  que  ce  savant  illustre  a publié 
sur  différents  animaux  marins.  On  a de  lurquelques  mémoires  qui  ont 
eu  pour  objet  des  mollusques  ; et  parmi  eux  t nous  trouvons  , dans  le 
Recueil  de  V Académie  des  Scmices,  un  mémoire  très  important  sur  les 
mouvements  progressifs  do  divers  animaux  marins  , ét  notamment  des 
mollusques  acéphalés  ; parmi  eux  , le  Lavignon  occupe  une  place  assez 
considérable , et  dès  1710,  nous  trouvons  sur  cet  animal  de  précieux 
renseignements , non  seulement  sur  sa  manière  de  vivre  , mais  encore 
sur  la  forme  de  ses  parties  externes.  Dans  une  figure,  malheureusement 
peu  correcte,  Réaumur  représente  un  Lavignon,  ayant  les  lobes  du  man- 
teau assez  écartés,  pour  laisser  voir  les  palpes  labiales  , le  pied , les 
branchies  , ainsi  que  les  siphons  grêles  et  très  allongés,  qui  prolongent 
le  manteau  du  côté  postérieur.  A l’aide  de  ce  travail  do  Réaumur,  on 
aurait  pu  reconnaître  les  caractères  génériques  des  Lavignons,  éviter, 
dès  l’origine  de  nos  classifications  modernes,  de  les  confondre,  soit 
avec  les  Madrés , soit  avec  les  Lutraires. 

Longtemps  après  la  publication  du  mémoire  de  Réaumur,  Adanson 
recueillait  au  Sénégal  le  Chama  piperata  do  Belon.  Malheureusement, 
ce  savant  naturaliste,  chez  lequel  était  développé , au  plus  haut  degré , 
le  génie  de  la  classification , n’observa  point  l’animal  et  se  contenta  de 
donner  une  courte  description  de  la  coquille , en  l’inscrivant  sous  le 
nom  de  Calcioelle , dans  son  genre  peu  naturel  de  la  Came.  Dans  une 
courte  addition  qui  termine  son  ouvrage  , Adanson  fait  remarquer  que 
les  Tellines  semblent  se  joindre  aux  autres  Cames , c’est-à-dire  aux 


332 


DIXIÈME  FAMILLE. 


Vénus,  par  l’inlennédiaire  de  la  Calcinclle  ; mais  peut-être  eut-il  modifié 
cette  opinion  , s’il  avait  eu  sous  les  yeux  i’animal  du  Lavignon  , et 
qu’il  l’eiil  comparé  à celui  des  genres  dont  il  parle. 

Poiret , dans  son  voyage  en  Barbarie,  trouva,  comme  nous,  aux 
environs  de  Bono  , le  Ckama  pîpei'ata  , mais  il  ne  dit  rien  de  son  animal 
qu'il  n’eut  point  occasion  d'observer.  A la  môme  époque , Chemnitz 
recevait  la  môme  espèce  des  cotes  d’Espagne,  et  la  figurait  dans  son 
grand  ouvrage,  sous  le  nom  de  Mya  hispanica;  en  la  découvrant  dans 
les  mers  d’Angleterre,  Pennant , en  1777,  inscrivait  le  Chaîna  piperata 
sous  le  nom  do  Kenns  borealis  , dans  son  Histoire  des  animaux  d'Angle- 
terre. Tandis  que  Da  Costa , dans  sa  Conchyliologie  britannique , la 
réunissait  aux  Mactres  des  côtes  d Angleterre , et  proposait  pour  cette 
réunion  un  genre  Trigonelto.  Sans  ce  mélange  , les  auteurs  plus 
modernes  n'auraient  pas  hésité  à réintégrer,  dans  la  science , le 
genre  Trigonelkt  de  Da  Costa , et  ce  n’est  peut-être  pas  un  obstacle, 
pour  qu’il  soit  maintenu  dans  la  méthode.  Bien  des  naturalistes  ont  l’ha- 
bitude de  rejeter  définitivement  les  genres  composés,  comme  celui-ci, 
de  deux  sortes  d’objets  , qui  peuvent  et  doivent  constituer  des  groupes 
différents.  Sur  cinq  espèces  de  Trîgonella^  quatre  sont  des  Mactres  de 
Linné;  la  cinquième  est  le  Chaîna  piperata.  Si  ce  Chama  piperata  eût 
constitué  un  genre,  à l’époque  où  Da  Costa  a écrit,  sans  aucun  doute  le 
genre  Trigonella  devrait  disparaître  complètement;  mais  nous  pensons 
que , en  suivant  l’exemple  des  réformes  introduites  dans  les  genres  de 
Linné,  celui-ci  peut  être  maintenu;  dès  lors  les  noms  qui  ont  été  suc- 
cessivement proposés  pour  lui,  devront  être  relégués  dans  la  synonymie 
générique.  Pour  appuyer  notre  opinion  ù ce  sujet,  il  nous  suffira  d.e 
rapjîeler  ce  qui  s'est  passé  à l’égard  du  genre  Mya  de  Linné , par  exem- 
ple, de  son  genre  Chama  et  môme  de  son  genre  Os/rœa,  et  de  plusieurs 
autres  que  nous  nous  abstiendrons  de  mentionner , parce  qu'ils  sont 
bien  connus  de  zoologistes.  Dans  le  genre  Mya , sur  sept  espèces , les 
deux  premières  seulement  ont  conservé  le  nom  Ünnéen;  dans  le  genre 
Chama,  où  l’on  compte  quatorze  espèces,  aux  quatre  dernières  seule- 
ment a été  réservé  le  nom  générique  de  Came-;  enfin  tous  les  naturalistes 
savent,  que  Linné  comprenait  parmi  les  Huîtres  le  grand  genre  Peigne, 
les  Limes,  les  Marteaux,  les  Pernes,  et  que,  sur  trente  et  une  espèces 
inscrites,  quatre  ou  cinq  sont  de  véritables  Huîtres,  pour  lesquelles  le 
genre  Üstrcea  a été  maintenu.  Ce  que  nous  venons  de  rapporter  n'aurait 
pas  eu  lieu,  si  dans  les  changements  que  l’on  a fait  subir  aux  genres 
linnéens,  on  avait  suivi  la  règle  la  plus  généralement  observée  par  les 
zoologistes  modernes.  Lorsqu’un  genre  a besoin  d’être  divisé,  le  nom 


LES  AMPHIDESMIDES. 


333 


qu'il  a reçu  doit  être  réservé  à celle  des  sections  qui  renferment  le  plus 
d'espèces;  mais,  comme  on  le  conçoit,  cette  règle  doit  souffrir  des  ex- 
ceptions, et  il  paraîtra  naturel  que  le  nom  du  genre  soit  maintenu  pour 
celles  des  espèces,  qui  offrent  le  mieux  les  caractères  génériques  propo- 
sés par  l’auteur.  Bien  que  les  caractères  du  genre  convinssent  aussi 
bien  aux  Mactres,  qu’au  Lavignon,  rien  n’enipôche  cependant  de  pren- 
dre tout  au  moins  ce  nom  pour  l’appliquer  au  Chôma  piperata.  Il  suffit 
pour  cela  de  renvoyer  aux  Madrés  les  coquilles  qui  en  dépendent  et  de 
compléter  les  caractères  qui  distinguent  le  genre  Trigonelkt. 

Schroeter  et  Gmelin  ont  entraîné , parmi  les  Mactres , la  Calcinelle 
d’Adanson;  mais  Gmelin,  après  lui  avoir  donné  deux  noms  dans  le  genre 
Madré,  la  met  aussi  sous  un  troisième  nom  parmi  les  Myes,  et  enfin  la 
reproduit  deux  fois  encore  parmi  les  Vénus;  de  sorte  que  la  seule  es- 
pèce,' connue  à cette  époque,  se  trouve  dans  Gmelin,  sous  cinq  noms  et 
dans  trois  genres. 

Spengler,  auquel  la  science  concbyliologique  est  redevable  d’obser- 
vations judicieuses,  a joint  la  Calcinelle  aux  Myes,  à peu  près  à l'époque 
où  Olivi,  qui  l’observait  dans  l'Adriatique,  croyait  être  le  premier  à 
l’inscrire  dans  les  catalogues.  Olivi  n'appréciant  pas  a leur  juste  valeur 
les  caractères  de  la  coquille  en  question , eut  le  tort  de  la  ranger  au 
nombre  de  Solens  ; mais  il  rachète  cette  erreur  par  des  observations  fort 
utiles  sur  la  manière  de  vivre  de  Tanirral,  observations  qui  s’accordent 
exactement  avec  celles  de  Réaumur,  de  sorte  que,  si  l’on  eût  suffisam- 
ment apprécié  les  observations  d’Olivi  et  de  Réaumur,  on  aurait  eu  le 
moyen  de  caractériser  le  genre  TvigoncUa,  de  le  séparer  des  Lutraires 
et  d'indiquer  ses  rapports  naturels;  mais  ces  travaux  furent  oubliés,  et 
nous  voyons  que  les  auteurs  anglais  firent  passer  le  Chama  piperata  des 
Tellines  dans  les  Myes  ou  dans  le  Mactres,  tandis  qu’en  France,  on 
l’admit,  avec  Lamarck,  parmi  les  Lutraires. 

Nous  voici  parvenu  à l'époque,  où  deux  zoologistes  se  sont  spéciale- 
ment occupés  des  Lavignons.  Les  ouvrages  de  ces  zoologistes  parurent 
en  1817;  l'un  par  Cuvier,  c’est  la  première  édition  du  Règne  animal; 
l’autre  par  Schumacher,  c'est  son  ouvrage  intitulé  : Essai  d'un  nou- 
veau système  des  Vers  testacès.  Soit  que  Cuvier  ait  emprunté  à Réaumur 
ou  à Olivi  leurs  observations,  soit  qu'il  ait  eu  occasion  d’observer  vivant 
l'animal  de  la  Calcinelle,  il  a jugé  do  ses  différences  avec  les  Mactres  et 
les  Lutraires,  et,  en  conséquence,  il  proposa  un  sous-genre  des  Mactres, 
sous  le  nom  de  Lavignon.  Il  caractérise  très  exactement  la  coquille,  et 
il  ajoute  que  les  tubes  de  l'animal  sont  fort  longs  et  séparés  jusqu’à  la 
base  comme  dans  les  Tellines.  L’espèce  type  du  sous-genre  de  Cuvier 


DIXIEME  FAMILLE 


334 

est  le  Cliama  pipanUa  ; mais  dans  les  notes,  Cuvier  a le  tort  de  joindre 
à celle-là  trois  autres  espèces  qui  ne  sont  pas  du  môme  genre,  ce  sont  : 
les  Mactra  papyracea  et  complanata  ^ ainsi  que  le  Mya  nicobarica  de 
Chemnitz.  Les  deux  premières  appartiennent  à ce  groupe  de  Mactres 
qui  font  le  passage  aux  Lutraircs  ; la  troisième  constitue  un  genre  par- 
ticulier, auquel  M.  Sowerby  a donné  le  nom  d'Anatinelle. 

On  pourrait  reprocher  au  genre  Scrobicularia , do  M.  Schumacher,  de 
contenir  à la  fois  deux  coquilles  très  différentes  tl’une , le  TelUna  angu- 
lata , qui , en  réalité , est  une  véritable  Telline;  et  l’autre , le  Chamapi- 
perata.  L’auteur,  il  est  vrai,  expose  les  caractères  génériques  de  la  co- 
quille d’une  manière  plus  nette  que  Cuvier  ; et , si  l'on  avait  à choisir 
entre  deux  noms  qui  ont  paru  à la  même  époque,  il  faudrait  cepen- 
dant préférer  celui  de  Cuvier,  puisque  notre  grand  zoologiste  a ajouté  au 
genre  un  caractère  essentiel  de  l’animal,  ce  que  personne  n’avait  fait 
avant  lui.  L'ouvrage  de  Dillwyn  parut  aussi  en  1817;  mais,  cet  auteur 
ayant  adopté  le  système  linnéen  dans  toute  sa  pureté,  c’est  parmi  les 
Madrés  que  l'on  trouve  le  genre  qui  fait  le  sujet  de  nos  observations. 

En  1818  Lamarck  publiait  le  tome  V de  son  Histoire  naturelle  des 
animaux  sans  vertèbres.  On  trouve  le  genre  Lutraire  divisé  en  deux 
sections  : la  première,  pour  des  coquilles  transversalement  oblongues, 
la  seconde,  pour  des  coquilles  orbiculaires  ou  subtrigones.  C’est  dans 
cette  seconde  section  que  sont  rangées,  sous  deux  noms  spécifiques,  les 
principales  variétés  du  Chaîna  piperata.  Ainsi , quoique  Cuvier  et  Schu- 
macher aient  précédemment  propose  chacun  un  genre  pour  cette  co- 
quille, Lamarck  les  maintient  parmi  les  Lutraires;  mais  il  faut  dire  qu’à 
celle  époque  on  ignorait  complélement  la  forme  et  les  caractères  des 
animaux  des  Lutraires  de  la  première  section  ; et  il  était  permis  de  sup- 
poser que  toutes  les  Lutraires  de  Lamarck,  sans  exception  , avaient  de 
longs  syphons  , séparés  dans  toute  leur  longueur,  et  semblables  à ceux 
des  Tellines.  Cependant  une  étude  approfondie  des  caractères  intérieurs 
des  coquilles  aurait  pu  faire  soupçonner  des  différences  assez  considé- 
rables entre  les  Lavignons  et  les  Lutraires  proprement  dites  ; non  seu- 
lement les  Lavignons  ne  portent  pas  à leur  charnière  la  dent,  en  forme 
de  V,  des  Mactres  et  des  Lutraires,  mais  elles  présentent,  dans  la  forme 
de  l’impression  palléale,  des  différences  assez  considérables.  Dans  les 
Lutraires  proprement  dites,  aussi  bien  que  dans  les  Myes,  la  sinuosité 
postérieure  de  l’impression  palléale  est  transversalement  oblongue;  dans 
les  Lavignons,  au  contraire,  elle  est  dilatée  dans  le  milieu  ; elle  forme 
un  angle,  qui  remonte  sous  les  crochets,  de  la  même  manière  que  dans  la 
plupart  des  Tellines.  De  ces  différences  on  pouvait  conclure  que,  dans 


LES  AMI'UIOESMIDES.  335 

les  vraies  Lulraires,  les  sypbons  sont  réunis  comme  dans  les  Madrés, 
et  que  dans  les  Lavignons  iis  sont  séparés  dans  toute  leur  longueur. 

On  pourrait  croire  que  l'iiistoire  du  genre  doit  se  terminer  ici;  il  semble 
que  les  naturalistes  ont  pu  choisir  entre  les  différents  groupes  qui  ont 
été  successivement  proposés.  La  seule  espèce  jusqu’à  présent  connue 
pouvait  être  également  placée  dans  quatre  genres,  selon  que  Tun' d’eux 
paraissait  préférable  : Trigonella,  Lavignon^  Scrobicularia  et  enfin  Lm- 
iraria;  mais  un  cinquième  genre  parut  encore  nécessaire  à M.  Turton, 
qui  le  proposa,  en  1822,  sous  le  nom  de  Listera,  dans  son  Histoirena- 
turelle  des  coquilles  bivalves  de  l’Angleterre.  Avant  cela,  Schweigger  et 
Férussac  avaient  adopté  le  genre  Lavignon  de  Cuvier,  tandis  que  M.  de 
Blainville  proposait  encore  un  genre  Lutricole  dans  son  Traité  de  ma- 
lacogie.  Ce  genre  Lutricole  est  une  reproduction  assez  exacte  des  Lu- 
traires  de  Lamarck.  11.  de  Blainville  y fait  entrer  à la  fois  le  genre  Li- 
gule de  Leach,  les  Lavignons  de  Cuvier  et  les  Lutraires  proprement 
dites;  par  conséquent,  ce  genre  Lutricole  n’est  point  admissible,  puis- 
qu’il ne  présente  aucune  différence  avec  le  genre  créé  longtemps  avant 
par  Lamarck.  Depuis  cette  époque  les  naturalistes  ont  flotté  entre  le 
genre  Lïsîera,  comme  M.  Menke,  et  le  genre  Scrobicularia,  comme 
M.  Philippi. 

Nous  ne  pouvons  terminer  l’iiistoire  des  Lavignons  sans  mentionner 
une  notice,  très  courte  à la  vérité,  qui  a été  publiée  par  M.  Quoy  dans 
le  Magasin  de  zoologie  de  1839.  M.  Quoy,  dans  cette  notice,  donne  une 
description  succincte  de  l’animal  ; il  l’accompagne  d’une  figure  de  gran- 
deur naturelle;  mais  il  est  évident  que  cet  animal  n’a  pas  été  vu  vivant. 
Il  est  contracté,  ses  siphons  sont  considérablement  rétractés,  et  ils 
n’offrent  pas  la  forme  que  l’animal  leur  donne  pendant  sa  vie.  L’expli- 
cation de  cette  planche  laisse  dans  l’incertitude  beaucoup  de  points  im- 
portants de  la  structure  de  l’animal  ; mais  , si  imparfaite  que  soit  cette 
figure,  elle  peut  encore  servir  de  renseignement;  peut-être  pourrait-on 
dire,  qu'elle  est  moins  exacte  que  colle  de  Réaumur,  et  qu’elle  n'ajoute 
rien  aux  excellentes  observations,  publiées  plus  de  cent  vingt  ans  avant 
celles  de  M.  Quoy. 

Cette  histoire  du  Cfiama  piperata  do  Belon  conduit  à plusieurs  con- 
séquences; elle  démontre  évidemment  que  l’on  a pressenti , depuis  assez 
longtemps,  que  cette  coquille  devait  constituer  un  genre  particulier 
mais  l’animal  n’étant  pas  suffisamment  connu , on  n'a  pu  le  caractériser 
définitivement,  puisque,  à l’exception  do  Réaumur  et  de  Cuvier,  aucun 
des  auteurs  méthodiques  n’a  mentionné  ce  mollusque.  Comme  noua  l'a- 
vons vu,  le  Chama  piperata  a été  rangé  successivement  : 1®  dans  les 


336 


DIXIEME  FAMILLE. 


Cames,  par  Âdanson  , 2°  dans  les  Mactres,  par  Poiret,  Gmelin  etSpen- 
gler  ; 3°  sous  celui  de  TeUina , par  Ginnani , Baster  et  Donovan  ; 4“  sous 
celui  de  Vénus,  par  Pennant  et  Gmelin;  5"  enfin,  Da  Costa  Ta  comprise 
dans  son  genre  THgonetla;  Olivi  parmi  les  Solens;  6*>  Cuvier,  dans  son 
genre  Lavignon;  Schumacher,  dans  son  genre  Scrobicularia  ; 7®  La- 
marck,  dans  son  genre  TAitraire'^  8”  M.  de  Blainville,  dans  un  genre 
LiUricole,  tandis  que  M.  Turton  a proposé,  pour  la  même  espèce,  son 
genre  Lîslo'a.  Il  serait  difficile,  sans  doute,  do  trouver  une  autre  espèce 
de  mollusques  qui  éprouvât  dans  son  histoire  d’aussi  nombreux  change- 
ments que  celle-ci. 

Des  quatre  genres  spécialement  destinés  au  Chaîna  piperata,  un  seul 
doit  prévaloir,  et  celui-là  est  naturellement  désigné  par  la  date  de  l’ou- 
vrage où  il  est  consigne.  Il  est  évident  que  le  genre  Trigonella  de  Da  Costa 
doit  être  préféré , si  l'on  admet  avec  nous  la  possibilité  de  le  réformer  ; 
si  le  nom  de  Da  Costa  eSt  rejeté,  nous  pensons  que  celui  de  Lavignon , 
consacré  déjà  par  les  observations  de  Béaumur  et  par  son  introduction 
dans  la  méthode  par  Cuvier,  devra  prévaloir  sur  le  genre  Scrobicularia 
qui , bien  que  publié  la  même  année,  n’est  point  caractérisé  d’une  ma- 
nière aussi  complète.  Quant  au  genre  Listera,  il  est  hors  de  cause, 
puisque  son  auteur  ne  l’a  produit  que  cinq  ans  après  la  publication  des 
ouvrages  de  Cuvier  et  do  Schumacher. 

Nous  n’avons  plus  qu’un  seul  mot  à ajouter  pour  terminer  l'histoire 
des  Lavignons.  Comme  on  a pu  le  remarquer,  nous  avons  constamment 
parlé  d’une  seule  espèce;  en  eifet,  jusqu’en  1826,  elle  était  la  seule 
connue.  C’est  à cette  époque  que  M.  Payraudeau,  dans  son  Catalogue 
des  Mollusques  de  Corse , ajouta  une  seconde  espèce,  sous  le  nom  de 
Lnlraria  CoUardi.  Depuis  l’intéressante  découverte  de  M.  Payraudeau, 
le  genre  est  resté  compose  des  deux  espèces  que  nous  venons  de  men- 
tionner. 

L’histoire  que  nous  venons  de  tracer  du  genre  Lavignon  nous  ap- 
prend que  quatre  zoologistes  seulement  ont  parlé  de  l’animal  ; ce  sont 
Réaumur,  Baster,  Olivi  et  M.  Quoy;  nous  pourrions  ajouter  Cuvier; 
mais  nous  avons  vu  que  ce  savant,  en  proposant  son  sous-genre  Lavi- 
gnon, en  appuie  l’admission  sur  un  seul  caractère  de  l’animal,  la  lon- 
gueur des  siphons  et  leur  disjonction  totale.  Nous  avons  déjà  dit  que 
ces  divers  travaux  laissaient  presque  tout  à désirer  au  zoologiste  aussi 
bien  qu’à  l’analomisto.  En  effet,  Réaumur,  préoccupé  de  la  manière  de 
se  mouvoir  de  l'animal  qu'il  avait  sous  les  yeux,  s'est  peu  attaché  à 
détailler  ses  caractères  ; il  est  le  premier  qui  ait  parlé  de  l'extrême  lon- 
gueur des  siphons  et  de  la  séparation  de  ces  organes  dans  toute  leur 


LES  AMPHIDESMIDES. 


337 

longueur  ; il  est  également  le  premier  qui  ait  reconnu  leur  usage.  Après 
avoirexaminé  un  grand  nombre  do  JïoIIusqnes,  vivants,  comme  celui-ci, 
dans  le  sable  et  dans  la  vase-,  Réaumur  fut  aussi  le  premier  qui  indiqua 
le  mouvement  du  liquide  ambiant  dans  Tintérieur  de  l’animal,  à l'aide 
des  siphons  qui  le  terminent.  Réaumur  s’attacha  à faire  connaître  le 
pied , et  a décrire  minutieusement  les  manœuvres  à l’aide  desquelles  l'a- 
nimal parvient  à pénétrer  dans  le  sable  ou  dans  la  vase,  en  se  servant 
de  cet  organe.  II  l’enfonce  comme  une  espèce  do  coin  , puis  en  le 
courbant  sur  l’im  des  côtés , il  obtient  un  point  de  résistance  sous  la 
masse  de  sable  qu’il  vient  de  remuer.  Quant  aux  organes  intérieurs, 
Réaumur  n’en  fait  aucune  mention,  si  ce  n’est  des  bords  du  manteau, 
dont  il  a vu  les  cils  courts  et  obtus,  et  les  muscles  adducteurs  qui  ser- 
vent à fixer  l'animal  à sa  coquille. 

Baster  n’a  presque  rien  ajouté  aux  observations  de  Réaumur.  Après 
avoir  parlé  du  pied  et  des  siphons,  et  après  avoir  représenté  ranimai 
vivant,  il  enlève  l’une  des  valves  et  renverse  le  manteau  pour  montrer 
l'intérieur  de  l’animal;  mais  cetto  figure  est  très  défectueuse;  on  y re- 
connaît cependant  le  pied  et  les  siphons  contractés,  et  deux  petites  par- 
ties que  Baster  nomme  appendices,  qui  ne  sont  autre  chose  que  les 
palpes  labiales  contractées  et  roulées  sur  elles-mêmes. 

Comme  ses  prédécesseurs,  Oiivi,  en  observant  l’animal  vivant,  a été 
frappé  de  la  longueur  de  ses  siphons , mais  il  ne  nous  apprend  rien  de  plus 
sur  les  autres  caractères.  Il  n’en  est  pas  de  même  de  M.  Quoy.  Ce 
zoologiste,  connu  par  les  grands  travaux  qu’il  a publiés  sur  les  Mol- 
lusques, dans  la  partie  zoologique  du  voyage  de  l’Astrolabe,  ayant 
déjà  une  longue  habitude  do  l'observation,  no  pouvait  laisser  inaperçus 
les  organes  principaux  d*ua  Mollusque  dont  il  donne  la  figure.  On  doit 
regretter  cependant  que  co  naturaliste  n’ait  point  observe  le  Lavignon 
vivant,  ce  qui  a contribué  à laisser  beaucoup  d’imperfection  dans  sa 
figure  et  une  malheureuse  brièveté  dans  sa  description.  M.  Quoy  constate 
la  longueur  des  siphons,  leur  séparation,  ainsi  que  les  courts  tentacules 
qui  garnissent  les  bords  du  manteau  : il  parle  également  de  la  forme  du 
pied,  et  il  se  trouve  d’accord  avec  Réaumur  et  Oiivi;  il  ajoute  une 
description  très  succincte  de  la  branchie,  dont  les  feuillets  sont  inégaux, 
et,  d'après  lui,  accostés  l'un  à l’autre,  sans  qu’on  puisse  deviner  ce  que 
l’auteur  a voulu  dire  par  là,  puisque,  en  réalité,  les  feuillets  branchiaux 
ont  moins  de  contact  l’un  avec  l’autre  que  dans  la  plupart  des  autres 
genres.  D’après  M.  Quoy,  les  branchies  seraient  plus  petites  que  les 
palpes  labiales,  ce  qui , pour  nous,  n’est  point  parfaitement  exact  ; car 
nous  avons  toujours  trouvé  ces  palpes  en  proportion  plus  petites  dans 


T.  1.  2*  PARTIE. 


32 


DIXIKME  EAMll.LE. 


tous  les  individus  que  nous  avons  observés.  Enfin , M.  Quoy  fait  voir  la 
bouche,  placée  entre  les  quatre  palpes  labiales,  mais  il  ne  dit  rien  de  la 
structure  de  ces  organes  qui  raccompagnent  constamment.  Dans 
l’expUcation  des  figures,  M.  Quoy  indique  la  place  du  cœur,  celle  du 
foie,  celle  du  rectum,  se  contournant  sur  le  milieu  du  muscle  adduc- 
teur postérieur  des  valves.  Les  figures  de  ce  naturaliste,  de  grandeur 
naturelle,  ne  peuvent  suppléer  à la  brièveté  de  son  texte  ; et  nous  le  ré- 
pétons , nous  éprouvons  du  regret  que  M.  Quoy,  qui  s’ est  acquis  des 
droits  à la  reconnaissance  des  amis  de  la  science,  n’ait  pas  poussé  plus 
loin  ses  investigations. 

Les  coquilles  du  genre  Lavignon  sont  de  taille  médiocre,  très  apla- 
ties, minces,  fragiles  ; elles  sont  ovales,  subtrigones,  subéquilatérales , 
très  obtuses  en  avant  et  en  arrière;  les  valves  ne  se  touchent  pas  par 
tous  les  points  de  la  circonférence,  elles  laissent  de  chaque  côté  un  faible 
écartement;  les  bords  sont  simples,  tranchants;  la  surface  extérieure  est 
lisse  ou  striée  vaguement  et  irrégulièrement  par  les  accroissements  ; 
cette  surface  est  revêtue,  vers  les  bords  surtout,  d’un  épiderme  d’un 
brun  grisâtre , caduc,  débordant  le  test  pour  revêtir  une  partie  des  bords 
du  manteau;  les  crochets  sont  petits,  pointus,  opposés,  à peine  obli- 
ques; ils  partagent  le  bord  dorsal  en  deux  parties  presque  égales,  for- 
mant entre  elles  un  angle  très  ouvert.  On  n’aperçoit  aucune  trace  de  lu- 
nule sur  le  côté  antérieur;  du  côté  postérieur,  le  corselet  est  à peine  in- 
diqué par  une  ligne  oblique  qui  rappelle  le  pli  irrégulier  des  Tellines. 
Immédiatement  en  arrière  des  crochets,  commencent  de  pelilest  nym- 
phes courtes  et  peu  saillantes,  sur  lesquelles  se  fixe  un  petit  ligament, 
semblable  à celui  des  Amphidesmes. 

La  charnière  est  très  simple,  elle  consiste  en  un  cuilleron  très  oblique, 
triangulaire,  s’appuyant  le  long  du  bord  postérieur;  il  est  peu  profond, 
à base  oblique , peu  saillant  dans  l’intérieur  de  la  coquille.  En  avant  de 
ce  cuilleron  et  au-dessous  du  crochet,  s’élèvent,  sur  le  bord  cardinal, 
deux  petites  dents  rapprochées,  inégales,  presque  parallèles  sur  la  valve 
droite , une  seule  sur  la  gauche  ; il  n’existe  aucune  trace  de  dents  la- 
térales. 

Les  impressions  musculaires  sont  d’une  médiocre  étendue  ; l'ante- 
rieure est  ovale,  oblongue,  légèrement  courbée  dans  sa  longueur;  son 
extrémité  supérieure  est  plus  étroite;  elle  sê  place  très  près  du  bord 
antérieur  et  l’accompagne  dans  la  plus  grande  partie  de  sa  longueur. 
L’impression  postérieure  est  plus  courte,  plus  relevée  vers  le  bord  dor- 
sal ; elle  est  obronde,  scmi-luuaire  et  très  rapprochée  du  bord  postérieur. 
Ces  deux  impressions  ne  sont  pas  les  seules  que  l’on  remarque  sur  la 


LES  AMPHIDESMIDES. 


339 

coquille  ; au-dessus  de  l'antérieure,  il  en  existe  une  troisième,  petite,  sub- 
circulaire; elle  donne  insertion  au  muscle  rétracteur  antérieur  du  pied. 
Une  autre  impression  oblongue,  se  confondant  en  partie  avec  le  bord 
supérieur  de  la  grande  impression  postérieure,  indique  le  point  où  s’at- 
tache le  muscle  rétracteur  postérieur  du  pied. 

L’impression  palléalo  est  très  propre  à caractériser  les  Lavignons;  elle 
se  détache  de  l’extrémité  inférieure  du  muscle  antérieur;  elle  se  place 
près  du  bord  ventral  de  la  coquille  et  l’accompagne  dans  toute  sa  lon- 
gueur ; parvenue  vers  l’extrémité  postérieure,  elle  s’infléchit  sur  elle- 
même,  rétrograde  le  long  du  bord  venlraljusque  vers  sou  tiers  antérieur, 
reste  confondue  avec  lui  dans  tout  ce  trajet,  s’en  détache  pour  remonter 
obliquement  vers  la  cavité  des  crochets  et  ensuite  pour  redescendre  vers 
le  bord  inférieur  du  muscle  postérieur,  circonscrivant  ainsi  une  large 
sinuosité,  très  dilatée  dans  le  milieu  et  fort  rétrécie  à son  entrée  : telle  est 
la  disposition  que  présente  le  Trigonella  pîpcrala.  Dans  le  Cotardi,  la 
sinuosité  est  plus  profonde,  mais  plus  étroite. 

L’animal  du  Lavignon  a été  pour  nous  le  sujet  de  profondes  recherches 
anatomiques , publiées  dans  l'exploration  scientifique  de  l'Algérie.  Il 
n’entre  pas  dans  le  plan  de  cet  ouvrage  de  reproduire  dans  tous  ses  dé- 
tails le  travail  dont  nous  parlons,  il  nous  suffira  de  donner  succinctement 
la  description  des  parties  extérieures  de  l’animal,  renvoyant  pour  le  reste 
à l’anatomie  comparée  des  Mollusques,  qui  fait  partie  de  l’introduction. 

L’animal  dont  il  est  question  a exactement  la  forme  de  la  coquille  ; 
lorsqu'il  est  détaché,  on  voit  qu’il  est  formé  d’un  manteau,  s’appliquant 
exactement  sur  la  surface  interne  dos  valves  et  d’un  corps  contenu  dans 
la  cavité  du  manteau,  auquel  se  rattachent  divers  organes  extérieurs.  A 
l’exception  d’une  portion  des  organes  de  la  digestion  et  de  la  circula- 
tion, toutes  les  autres  parties  du  Mollusque  sont  parfaitement  symétri- 
ques, et  on  cela  Ü rentre  dans  la  règle  générale  à tous  les  Mollusques  à 
coquille  régulière. 

Les  lobes  du  manteau  sont  égaux,  membraneux  au  centre;  ils  se  ter- 
minent à la  circonférence  par  un  muscle  orbiculaire  étroit,  assez  épais 
qui,  en  s’attachant  à la  coquille,  laisse  une  ligne  d'insertion  qui  est  dé- 
signée sous  le  nom  d’impression  palléale.  Ce  muscle  orbiculaire  est  dé- 
bordé par  un  petit  prolongement  du  manteau,  d’où  s’élève  un  rang  de 
courtes  papilles  coniques,  assez  distantes  les  unes  des  autres.  Ces  pa- 
pilles se  montrent  surtout  dans  la  longueur  du  bord  ventral.  En  arriére, 
vers  l’extrémité  du  bord  ventral , les  deux  lobes  du  manteau  se  réunis- 
sent en  une  commissure,  consolidée  par  deux  petits  muscles  spéciaux  , 
croisés  exactement  comme  un  X.  Depuis  cette  commissure  jusqu’au 


22 


DIXIÈME  FAMILLE. 


340 

muscle  antérieur  des  valves , le  manteau  est  largement  ouvert  pour  le 
passage  du  pied.  Cependant  il  existe  en  arrière,  s’élevant  sur  le  bord 
interne  du  muscle  orbiculaire,  une  large  valvule  palléale  de  chaque  côté 
et  destinée  à diminuer  l’étendue  de  l’ouverture  palléale,  tout  en  laissant 
au  pied  la  liberté  de  ses  mouvements. 

Le  manteau , quoique  très  minee,  est  néanmoins  composé  de  deux 
membranes  adossées,  entre  lesquelles  se  loge,  comme  dans  une  gaîne, 
un  muscle  très  plat,  irradié,  ayant  exactement  le  contour  de  la  sinuosité 
postérieure  de  l’impression  palléale.  En  se  portant  en  arrière,  ce  muscle 
s’épaissit,  se  rétrécit  et  se  change  en  un  tendon  assez  épais,  qui  vient 
aboutir  à l’ouverture  interne  des  siphons,  et  ses  fibres  se  continuent 
avec  colles  qui  constituent  l'enveloppe  externe  de  ces  organes.  Dans  la 
portion  postérieure  du  manteau,  les  deux  membranes  dont  il  est  corn- 
posé  sont  unies  entre  elles  au  moyen  d'un  tissu  cellulaire  très  lâche,  qui 
leur  permet  de  glisser  l’une  sur  l'autre;  aussi  au  moment  ou  l’animal 
contracte  ses  siphons  et  cherche  à les  faire  rentrer  dans  sa  coquille,  la 
membrane  interne  du  manteau  est  entraînée  en  avant , cl  laissant  en 
place  la  membrane  externe,  appliquée  à la  coquille,  produit  à l’extrémité 
de  l’animal  une  cavité  quelquefois  très  profonde,  lorsque  la  contraction 
des  muscles  des  siphons  a été  très  violente.  C’est  à l’aide  de  ces  con- 
tractions que  l’on  aperçoit  la  cloison  charnue , à laquelle  les  siphons 
sont  attachés  et  dans  laquelle  ils  s’ouvrent. 

Les  siphons  des  Lavignons  sont  extrêmement  longs  ; on  no  pourrait 
jamais  s’imaginer  en  les  voyant  contractés  qu’ils  sont  susceptibles  d’un 
allongement  aussi  considérable.  Ces  organes  n’ont  pas  la  môme  lon- 
gueur ; le  siphon  anal  est  le  plus  court , il  acquiert  le  tiers  à peu  près 
du  siphon  branchial;  celui-ci,  dans  son  plus  grand  allongement,  a 
jusqu’à  quatre  ou  cinq  fois  la  longueur  du  diamètre  antéro-postérieur 
de  la  coquille.  De  sorte  que  dans  un  animal  qui  a 45  millimètres 
do  longueur,  le  siphon  branchial  peut  avoir  jusqu’à  25  centimètres, 
Lorsque  les  siphons  sont  dilates  à ce  point,  leurs  parois  sont  minces, 
transparentes,  d'un  jaune  safrané  très  pâle,  leur  diamètre  est  de  5 à 
6 millimètres  à la  base;  ils  diminuent  de  moitié  à leur  sommet.  Le  som- 
met est  percé  d'une  ouverture  circulaire;  celle  du  siphon  anal  est  très 
finement  dentelée,  celle  du  siphon  branchial  est  découpée  en  six  ondula- 
tions peu  profondes. 

L’animal  est  attaché  à sa  coquille  à l'aide  de  deux  muscles  dont  nous 
connaissons  déjà  les  empreintes  ; l’antérieur  est  ovalaire,  le  postérieur 
est  subcylindrique  ; tous  deux  sont  contenus  dans  une  gaine  membra- 
neuse produite  par  le  manteau. 


LES  AMPIHDESMIDES. 


34 1 

Le  pied  est  assez  grand  , linguiforme,  triangulaire  , tranchant  en  son 
bord  inférieur  ; il  surmonte  une  masse  abdominale  peu  épaisse  dont  les 
parois  fibreuses  sont  la  continuation  des  muscles  du  pied. 

En  avant  et  en  haut,  dans  l’angle  profond  qui  résulte  de  la  rencontre 
du  bord  antérieur  de  la  masse  abdominale  avec  l’extrémité  supérieure 
du  muscle  antérieur,  se  montre  une  petite  ouverture  transverse  ; c'est 
celle  de  la  bouche.  Au-dessus  et  au-dessous  de  cette  bouche,  s’élève 
une  lèvre  membraneuse,  assez  large,  transverse  et  qui,  parvenue  de 
chaque  côté  du  corps,  se  dilate  subitement  en  une  paire  de  grandes 
palpes  labiales,  triangulaires,  un  peu  plus  longues  que  larges.  Ces  palpes 
sont  de  la  môme  grandeur;  elles  s'appliquent  Time  sur  l’autre,  et  leurs 
surfaces,  par  lesquelles  elles  sont  en  contact,  sont  chargées  de  fines 
lamelles  obliques , très  régulières  ; la  surface  externe  de  ces  organes 
est  lisse.  La  paire  interne  des  palpes  labiales  se  continue  avec  la  lèvre 
inférieure  ; la  paire  externe  est  la  continuation  de  la  lèvre  supé- 
rieure. 

Les  branchies  ressemblent  à celles  des  Mollusques  do  la  famille  pré- 
cédente; tout  en  conservant  dans  les  Lavignons  des  caractères  qui  leur 
sont  propres  ; elles  sont  d'une  médiocre  grandeur.  Les  deux  feuillets  sont 
inégaux  ; l’interne  est  le  plus  grand  ; il  est  appliqué  sur  les  parties  laté- 
rales du  corps  ; il  est  allongé,  triangulaire,  tronqué  enr  avant,  et  par  sa 
troncature  il  se  soude  au  bord  postérieur  de  la  palpe  labiale  interne.  La 
branchie  externe,  beaucoup  plus  petite,  est  également  triangulaire;  au 
lieu  de  s’appliquer  sur  l’autre  et  de  tomber  avec  elle  dans  la  cavité  du 
manteau , elle  se  relève  vers  le  dos  , et  par  le  fait  elle  est  à côté  de  sa 
congénère  comme  deux  feuillets  d’un  livre  ouvert.  Parvenus  en  arrière 
de  la  masse  abdominale,  les  feuillets  branchiaux  d'un  côté  s’unissent 
à ceux  de  l’autre,  descendent  au-devant  de  l'ouverture  du  siphon  anal , 
y rencontrent  un  pourtour  membraneux,  s’y  attachent  et  servent  ainsi 
de  cloison  pour  intercepter  toute  communication  entre  la  cavité  du  man- 
teau et  celle  du  siphon  anal. 

En  détachant  entièrement  l’animal  de  sa  coquille,  et  en  l’examinant 
dans  la  région  dorsale , on  remarque  au  milieu  de  sa  longueur  une 
cavité,  dans  laquelle  sont  reçusses  cuilleronset  le  ligament  interne  ; au- 
dessous  do  celle  cavité  se  trouve  le  cœur,  contenu  dans  un  péricarde 
membraneux;  de  petits  appendices  du  manteau  s'introduisent  dans 
toutes  les  sinuosités  de  la  charnière  et  en  conservent  la  forme;  l'un 
d’eux,  plus  considérable,  s'avance  d’arrière  en  avant,  s'engage  entre 
les  deux  ligaments,  et  il  est  destiné  à la  sécrétion  de  ces  organes.  Si 
l’on  ouvre  le  siphon  anal  à son  extrémité  supérieure , l'on  découvre 


DIXIÈME  FAMILLE. 


342 

l'anus  sous  la  Forme  d’un  petit  mamelon,  attaché  à la  face  ventrale  du 
muscle  adducteur  postérieur  dés  valves. 

Les  Lavignons  sont  des  Mollusques  littoraux,  qui  se  plaisent  sur  les 
plages  basses  et  vaseuses  qui  avoisinent  l’embouchure  des  rivières.  Pon- 
dant longtemps  une  seule  espèce  fut  connue , elle  est  répandue  dans 
l'océan  d’Europe;  franchissant  le  détroit,  elle  se  répand  dans  toute  la 
Méditerranée , elle  sort  de  celte  mer,  suit  les  côtes  occidentales  de 
l’Afrique,  et  se  propage  jusque  dans  les  mers  du  Sénégal.  Une  seconde 
espèce  a été  découverte  en  Corse  par  M.  Payraudeau  ; peut-être  faudra- 
t-il  joindre  h ces  deux  espèces  ÏAmphidesma  fransuma  de  M.  Say,  qui 
nous  paraît  avoir  tous  les  caractères  des  Lavignons.  On  pourrait  alors 
compter  trois  especes  vivantes  do  ce  genre,  deux  de  l’Europe  et  une 
des  mers  de  l’Amérique  septentrionale. 

Jusqu’ici  nous  n*avons  trouvé  qu’une  espèce  de  LavignOn  à l’état 
fossile  dans  les  terrains  tertiaires , c’est  le  Trigonella  piperata  qui  existe 
dans  un  terrain  récent  des  environs  de  Bono  en  Algérie,  ainsi  que  dans 
le  Crag  d‘Anglelerre.  M.  d’Orbigny  décrit  et  figure  trois  espèces  de 
coquilles  bivalves  sous  le  nom  de  Lavignon  dans  la  Faîéontoîogié  fran~ 
çaise;  malgré  l’attention  que  nous  y avons  apportée , nous  n’avons  rien 
découvert,  qui  nous  donnât  la  preuve  quo  ces  espèces  appartiennent 
réellement  au  genre  dans  lequel  il  les  range.  Les  Lavignons  sont  des 
coquilles  bâillantes,  les  espèces  de  M.  d'Orbigny  sont,  parfaitement 
çloses  ; la  charnière  est  la  partie  essentielle  de  ces  coquilles  pour  en  dé- 
terminer le  genre  , et  nulle  part  M.  d’Orbigny  ne  parle  de  la  charnière 
de  ses  espèces , de  sorte  que  la  formé  extérieure  seule  parait  avoir  décidé 
l’auteur  dans  le  classement  de  ces  fossiles.  Il  y a autant  do  raison  de 
croire  que  ce  ne  sont  pas  des  Lavignons  que  d’affirmer  qu’elles  dépen- 
dent de  ce  genre.  Si  ces  trois  espèces  sont  du  genre  Lavignon , il  y en 
aurait  deux  dans  le  Gault  et  la  troisième  dans  le  terrain  iiéocomien.  Re- 
lativement à cette  dernière  espèce,  M.  d’Orbigny  en  représente  le  moule 
seulement , et  nous  avouons  ne  pas  retrouver  sur  lui  les  caractères  que 
devraient  y laisser  une  coquille  de  Lavignon.  Le  moule  doit  toujours 
présenter  entre  les  crochets , du  Côté  postérieur,  l’empreinte  profonde 
des  caillerons  de  la  charnière  , et  cette  empreinte  n’existe  pas  dans  la 
coquille  de  M.  d’Orbigny.  Aussi  nous  conservons  plus  d’un  doute  à son 
égard. 


LES  AMPHIDESMIDES. 


343 


Lavignon  calcinelle.  Trigonella  piperata.  Desh. 

PL  10.  fig.  1.  2.  3. 

t.  Testa  ovatO’trigonâ,  transversâ^  subœquilaterali^  a\hâ^  compressât 
irregtdariter  transversim  substriatâ;  latere  antico  brevioritrotundato; 
postico  subtruiicatOt  hiante  ; apicibus  minimist  opproximatis, 

Piperata  chaîna.  Belon.  de  aquat.  lib.  II.  p.  4o4« 

^ Concha  tennis.  Lister.  Anim.  angl.  p.  174.  pl.  4.  f.  a3. 

Bonanui.  Recr.  part.  2.  fig.  Sa,  55. 

Pectunculus  latus.  Lister.  Coucb.  pl.  253,  f.  88.- 

Le  Lavignon.  Réaiimur.  Mém.  de  l’Ac.  17  10,  p.  446.  pl.  9.  f.  3,  4»  5, 

La  CcJcinelle.  Adaiison  Seneg.  p.  aSa.  pl.  17.  f.  r8« 

Mactra piperata.  Poiret.  Voy.  en  Barb.  l.  2.  p.  i5. 

Tellina,  Baster.  Opus, snbseciva.  t.  a.  lib.  a.  p.  74.  pl*  6.  f.  5,6,  7, 
Mya  hispaniea.  Ciiemnilz.  Concb.  t.  6.  p,  3i.  pl.  3.  f.  ai. 

Venus  boreaîis.  Pennant.  Bril.  zool.  t.  4.  p.  96. 

Trigonella  plana,  Da  Costa.  Brit.  concb.  p.  aoo.  pl.  i3.  f.  i, 
Hactrapiperata.  Gmelin.  p.  3a6i.  n*  27, 

Mactra  Listeri.  Gmelin,  p.  Safir.  a6. 

Mya  gaditana.  Gmelin.  p,  Saat,  n"  14. 

Vernis  dealbata.  Gmelin.  p.  3295,  n°  144. 

Venus  gibbnla,  Gmelin.  p 3289.  n*  io3. 

Mya  orbictilata.  Spengler.  Soc.  d'iûst.  nal.  de  Copenb.  t.  3,  p.  78, 

n*  i3. 

Solen  callosus.  Olivi,  Adrîat,  p.  98.  pl.  4.  f.  i. 

Tellina  plana.  Donovan.  Brit.  sbells.  t.  a.  pl.  64*  f.  1. 

Mactra  compressa,  Montagii.  Test,  brit,  p.  96.  n®  5. 

Mactra  Listeri.  Pennant.  Brit  zool.  a*  éd.  t.  4.  p.  194.  n®  7. 

Id,  Maton  et  Râckelt.  Lin.  Trans.  l.  8.  p.  71. 

Scrobienlariu  arearia.  Schumacher  Nouv.  syst.  p.  127,  pl.  8.  f,  3. 

Cuvier  Règne  anim.  t.  3.  p.  467. 

Mactra  pipernta.  Dillwyn.  Cat.  t.  i.  p.  14a.  n*  26, 

Lutraria  compressa  et  pipernta,  LaniarcL.  An.  s.  veit.  t.  5.  p.  469. 
n**4et5. 

Mactra  hispaniea.  Sebweigger.  Haudb.  d^r  Nal,  p.  70!. 

Listera  compressa.  Tiirton.  Concb.  ins.  bril.  p.  5i,  pi.  5.  f,  i,  2. 
Lutricola  compressa.  Blainville.  Maine,  p 566.  pl,  77.  f.  2, 

Lutraria  Collard  des  Cberres.  Cat.  des  Moll  du  Finist,  p.  i3, 

U*  3. 


344 


DIXIÈME  FAMILLE. 


Mactra  histeri,  WooJ.  In.l,  leslae.  [»],  0.  f.  23. 

Lutraria  compressa.  Desha)t'S.  Eiicyc.  luclli.  vers.  l.  2.  p.  388.  ij®  4, 

Id.  Büucliard  Chaulereaux.  Cal.  des  Moll,  du  Boul.  p.  1 1. 

Lutraria  piperata,  Philippi.  Emim.  inoll.  Sicil.  t.  i.  p 9.  u®  2. 

Ligiilu  compressa.  Anton.  Vorz.  der  Conch.  p.  3,  n®  89. 

Scrobicalaria  piperata,  Philippi.  Enum.  Moll.  Sicil,  t.  2.  p 8. 

Amphidesma  compressiun.  Fleming.  Bril.  an.  2*  éd.  p,  432, 

Lutraria  compressa.  Jlauley.  Descr.  cat,  p.  27. 

Lutraria  Listeri,  Macgillivray.  Moll.  auim.  ofScoll.  p.  29:. 

Lutraria  compressa,  Thompson.  Rep.  on  the  faun.  of  Irel.  p.  263. 

Listera  compressa.  Thorpe.  Brit.  niar.  conr.li.  p.  45. 

Trigonellu  plana.  Lovèn  Tnd,  moll.  ScanJ.  p.  45.  ♦ 

Fossilis.  Woodward.  Geol,  ofNorf.  ail.  p,  35.  Crag.  p.  43.  pl.  9.  f.  7. 

Lutraria  Listeri.  S.  Wood.  Foss.  shells.  from  lhe  Ciag.  Aun.  Nat.  hist. 
n®  3;.  p.  240. 

Trigoneîla  piperata,  Deshayes,  Explor.  sc.  de  l'Algérie.  Moll.  t.  i. 

p.  Soy.  pl.  44. 

Il  est  intéressant  pour  le  zoologiste  aussi  bien  que  pour  le  géologue, 
de  connaître  exactement  la  distribution  des  espèces  : celle-ci  mérite  à 
cet  égard  de  fixer  notre  attention.  On  la  voit  en  effet  descendre  des  mers 
du  Nord,  en  suivant  le  littoral  océanique  de  l’Europe  et  gagner  le  détroit, 
s’introduire  dans  la  Méditerranée,  s’établir  sur  presque  tous  les  points  de 
celte  mer  en  ressortir  par  la  côte  occidentale  de  l’Afrique,  et  parvenir 
jusqu’au  Sénégal.  Nous  avons  quelques  jalons  à l’aide  desquels  nous 
pouvons  constater  l’existence  de  l’espèce  dans  ses  principales  stations. 
M.  Lovèn  la  mentionne  dans  son  excellent  Catalogue  des  Mollusques  de 
la  Scandinavie;  il  faut  donc  qu’elle  existe  dans  l’océan  du  Nord,  et 
qu'elle  ait  été  recueillie  par  le  savant  observateur  que  nous  venons  de 
citer.  Bastor,  autrefois,  a trouvé  l’espèce  dans  les  mers  de  Hollande, 
et  il  fut  l’un  des  premiers  observateurs  qui  en  ait  fait  connaître  l’animal. 
Réaumur  vit  aussi  notre  espèce  sur  les  côtes  de  France  à La  Rochelle, 
où  elle  est  en  très  grande  abondance.  Chemnitz  reçut  cette  coquille  des 
côtes  de  l’Espagne,  et  ignorant  qu’elle  eût  déjà  reçu  plusieurs  noms, 
il  la  décrivit  sous  le  nom  de  Mya  Impanlca.  Olivi  et  Poirct,  à peu  près 
à la  mémo  époque,  découvrent  le  Lavignon , l'un  dans  l’Adriatique, 
l’autre  sur  les  côtes  de  l’Algérie.  Philippi  la  trouva  en  Sicile  ; Payrau- 
deau  en  Corse.  Enfin , Adanson , dans  son  ouvrage  sur  les  coquilles  du 
Sénégal,  décrit  le  Lavignon  sous  le  nom  de  Calcinelle,  et  en  constate 
l’existence  dans  les  mers  du  Sénégal. 


LES  AMPHIDESMIDES. 


Ainsi  que  loutcs  les  espèces  qui  se  répandent  sur  une  aussi  grande 
surface,  celle-ci  est  variable,  non  dans  scs  couleurs,  puisqu’elle  est 
blanche,  mais  dans  ses  formes,  ce  qui  est  plus  important;  lorsqueTon 
ne  recueille  qu’un  petit  nombre  d’individus,  provenant  do  localités  très 
éloignées , on  est  tenté  de  les  rapporter  à deux  espèces  , et  c’est  ce  qui 
est  arrivé  à Lamarck;  mais  si  on  rassemble  de  nombreux  individus  de 
tous  les  lieux , habités  par  l’espèce , on  voit  alors  toutes  les  variétés  se 
nuancer,  et  de  cette  manière  on  constate  qu'il  n’existe  qu’une  espèce  la 
où  l’on  croyait  en  trouver  deux.  Nous  avons  observé,  vivants,  des  indi- 
vidus de  La  Rochelle  et  de  la  Méditerranée , et  nous  pouvons  certifier, 
de  la  manière  la  plus  positive  , n'avoir  reconnu  aucune  différence  appré- 
ciable entre  ces  animaux.  Les  siphons  ont  la  même  couleur;  ils  ont  la 
même  longueur  ; le  pied  a la  môme  forme  ; tous  les  autres  organes 
extérieurs , palpes , branchies , tentacules  du  manteau , ne  présentent 
aucune  différence  appréciable.  Les  organes  intérieurs  eux- mômes  n’ont 
subi  aucune  modification,  ainsi  que  nous  l’avons  constaté  par  un  très 
grand  nombre  do  dissections. 

Le  Trigonella  piperata  est  connu  à l’état  fossile,  Woodwart  le  cite 
dans  les  couches  d’alluvion  du  Norfolk;  il  le  trouva;aussi  dans  le  Crag , 
ainsique  M.  S.  Wood. -Enfin,  nous  l’avons  rencontré  en  abondance 
dans  un  terrain  récent  des  environs  do  Bone  en  Algérie. 


GENRE  TRENTE-QUATRIÈME. 

STSrDOSMTZ:.  Syndosmya.  (Récluz.) 

PI,  3 bis,  fig.  6.  7,  8. 

CARACTÈRES  gènèriques.  — Animal  ovale-oblong,  comprimé, 
ayant  le  manteau  ouvert  en  avant  et  dans  la  longueur  du  bord 
ventral , terminé  en  arrière  en  deux  siphons  allongés  , grêles , 
inégaux , séparés  dans  toute  leur  longueur  ; siphon  anal  plus 
court , cylindrique  ; siphon  branchial  très  long,  un  peu  com- 
primé; bouche  grande,  ayant  les  appendices  labiaux  très  éten- 
dus, triangulaires,  offrant  une  surface  presque  égale  h celle  des 
branchies;  branchies  inégales,  triangulaires,  réunies  en  arrière 
de  la  masse  abdominale  ; pied  petit,  triangulaire,  très  comprimé. 


DIXIÈME  FAMILLE. 


346 

Coquille  équivalve,  inéquilatérale,  transverse,  ovale,  oblongue 
ou  subtriangulaire  , mince  et  fragile , arrondie  en  avant , an- 
guleuse , flexueuse  en  arrière , inégalement  bâillante , plus  en 
arrière  qu’en  avant  ; le  côté  antérieur  est  le  plus  court  ; crochets 
petits,  opposés  ou  à peine  inclinés;  charnière  présentant  sur  la 
valve  droite  deux  petites  dents  cardinales  peu  épaisses,  presque 
parallèles,  et  sur  la  gauche  une  seule,  reçue  dans  l’intervalle 
des  deux  dents  de  l'autre  valve;  un  cuilleron  ovale  ou  subtri- 
gone,  suivant  le  bordsupérieur,  et  recevant  un  ligament  interne  ; 
deux  dents  latérales  subégales,  l’une  antérieure,  l’autre  posté- 
rieure ; un  ligament  externe , petit , peu  épais  et  fibreux  ; im- 
pressions musculaires  ovales,  oblongues , un  peu  courbées; 
impression  palléale  se  creusant  en  arrière  en  un  sinus  profond, 
transverse,  ovale- triangulaire , à angles  arrondis. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Mactra^  Wood,  Montagu,  Maton 
et  Rackett,  Pulteney,  Gerville,  Turton.  --  Laskey, 

Wood,  Dilhvyn,  Turton,  — Ligula,  Montagu,  Brown,  Forbes, 
Nyst.  — 7’e/Zmct,  Renieri,  Brocchi,  Scacchi.  — Abra,  Leach. 
— Amphülesma^  Lamarck,  Turton,  Risso,  Sowerby,  Collard- 
des-Cherres,  Bouchard-Chantereaux , Scacchi,  JefFreys,  S. 
Wood,  Delessert,  Fleming,  Hanley,  Macgillivray,  Thompson, 
Thorpe.  — Syiidoumya^  Recluz,  Lovèn. 

Nous  avons  fait  remarquer,  dans  plus  d’uno  occasion , combien  était 
défectueux  le  genre  Amphidesme  de  Lamarck.  Déjà  nous  en  avons  retiré 
une  espèce,  V Amphidesma  corbuloides,  pour  la  placer  dans  le  genre  Lyon- 
sia,  de  Turton.  Comme  nous  l’avons  fait  voir  précédemment,  une  seconde 
espèce , V Amphidesma  phnseolina  , dépend  du  genre  Thracie  do  Lerch. 
Il  y a deux  autres  Ampliidesmes  auxquelles  nous  avons  reconnu  tous 
les  caractères  de  notre  genre  Mésodesme  , et  l’une  d’elles  est  le  Meso- 
desma  donacillat  que  nous  venons  de  décrire  dans  l’un  des  genres  précé- 
dents. Mais  ces  quatre  espèces,  appartenant  à trois  genres  bien  distincts, 
ne  sont  pas  les  seules  qui  doivent  sortir  des  Amphidesmes  de  Lamarck  ; 
nous  avons  encore  signalé , dans  ce  genre,  une  Erycine  et  une  Lucine, 
dont  nous  aurons  à nous  occuper  par  la  suite. 


LES  ÂMPHIDESMIDE5. 


34? 

Après  avoir  subi  des  réformes  aussi  considérables , le  genre  Âm- 
phidesme  était  réduit  à un  très  petit  nombre  d'espèces  , parmi  les- 
quelles se  trouvaient  h la  fois  les  Amphfdesmâ  variegala  , prismatica  , 
Boysîi,  etc.  M.  G. -B.  Sowerby,  dans  son  Généra  of  shells  , a proposé 
le  premier,  de  conserver  le  nom  d’Amphidcsme  à ce  petit  groupe , dont 
les  éléments  sont  réunis , en  effet , par  plusieurs  caractères  communs  , 
et  entre  autres  celui  du  double  ligament , qui  a valu  au  genre  le  nom  que 
Lamarck  lui  a imposé.  Tel  que  le  savant  anglais  l’a  considéré,  le  genre 
Ampbidesme  s’est  trouvé  encore  trop  étendu , d’après  les  excellentes 
observations  de  M.  Recluz.  On  voit , en  effet,  parmi  les  espèces  rassem- 
blées par  M.  Sowerby,  deux  sortes  de  coquilles  bien  distinctes;  les 
unes,  telles  que  VAmphîdesma  variegala ^ assez  épaisses,  suborbicu- 
laires  , les  autres  ( ^mp/iidesma , Boysîi  ^ prismatica  ^ etc.),  beaucoup 
plus  petites , très  minces , transparentes  et  subtransverses.  En  exami- 
nant comparativement  ces  deux  groupes  de  coquilles,  M.  Recluz  a 
reconnu  entre  eux  des  caractères  constamment  différents,  d'ou  il  a été 
conduit  à proposer  un  genre  nouveau , sous  le  nom  de  Syndosmye , et  ce 
genre  est  le  sixième,  sorti  desÂmpliidesmes  de  Lamarck. 

Il  résulte  donc,  de  cette  dernière  réforme  de  M.  Recluz,  que  le 
genre  Ampbidesme  doit  avoir  pour  type  la  première  espèce  de  Lamarck , 
VAmphidesma  variegata , tandis  que  les  Syndosmyes  réunissent  les 
Aynphîdesma  Boysn,  prismatica  y etc. 

Avant  M.  Recluz , un  certain  nombre  d’espèces  de  son  nouveau  genre 
étaient  connues  et  citées  dans  les  Catalogues  des  conchyliologistes.  Celle 
qui  a été  mentionnée  la  première  a été  inscrite  par  Müller  dans  son 
Prodrome  de  la  Faune  danoise , sous  la  dénomination  de  Mya  nitida. 
Caractérisée  d'une  manière  très  incomplète , cette  espèce  a été  lé  sujet 
de  plus  d’une  erreur  de  la  part  des  zoologistes  qui , d'après  la  courte 
phrase  de  Müller,  croyaient  avoir  des  raisons  suffisantes  pour  l’en- 
traîner dans  des  genres  différents.  Othon  Fabricius  avait  déjà  produit 
quelques  renseignements  utiles,  mais  encore  insuffisants.  Toute  incer- 
titude à cet  égard  doit  actuellement  cesser,  grâce  à M.  Lovèn,  savant 
danois, , d’un  très  grand  mérite,  qui  a trouvé  le  moyen  d’accumuler 
un  nombre  considérable  d’observations  précieuses  dans  un  opuscule  de 
quelques  pages,  Index  Moîluscorum  Scandinavrœ  habitantium).  Ce  sa- 
vant observateur  rapporte  le  Mya  nüida  de  Müller  au  genre  Syndosmye 
de  M.  Recluz,  en  y ajoutant  une  description  qui  justifie  son  opinion. 
Quant  aux  autres  espèces,  elles  proviennent  toutes  des  mers  d’Europe  ; 
il  faut  donc  les  rechercher  dans  les  ouvrages  de  ceux  des  naturalistes 
qui  se  sont  occupés  dès  productions  de  ces  mers.  Nous  en  trouvons  une, 


DIXIÈME  FAMILLE. 


348 

décrite  pour  la  première  fois  parWood,  parmi  les  Mactres , dans  le 
tome  YI  des  Transactions  de  ta  Société  linnêenne  de  Londres.  En  1800, 
Laskey  et  Montaga  font  connaître  d’autres  espèces  que  le  premier  de 
ces  auteurs  attribue  au  genre  Mye,  et  le  second  au  genre  Madré; 
quelques  années  plus  tard  , Montagu  s’aperçut  que  ces  petites  coquilles 
ne  pouvaient  rester  dans  les  Mactres.  Aussi,  dans  son  Supplément  à 
son  ouvrage  sur  les  l'eslacées  britanniques  , publié  en  1807,  il  établit  un 
genre  Ligule,  dans  lequel  malheureusement  il  rassemble  des  coquilles 
de  genres  fort  différents  , ce  que  M.  Recluz  a démontré  de  la  manière 
la  plus  claire , dans  un  très  bon  mémoire  qu’il  a publié  , en  1843  , dans 
la  Revue  zoologique.  Nous  voyons  , en  eüet , réunis , sous  le  nom  de 
Ligule , des  coquilles  dépendantes  de  cinq  genres , et  parmi  elles  se 
trouvent  les  trois  espèces  que  M.  Recluz  attribue  à son  genre  Syndos- 
mye;  il  était  donc  impossible,  comme  l’auraient  voulu  quelques  zoolo- 
gistes, de  conserver  le  nom  de  Ligule  à l’un  quelconque  des  cinq  genres 
rassemblés  sous  co  nom , à moins  de  vouloir  tomber  dans  une  confusion 
fâcheuse  pour  la  nomenclature.  Le  genre  Ligule  ne  fut  donc  adopté 
que  d’un  petit  nombre  de  personnes , après  lui  avoir  fait  subir  des  ré- 
formes telles,  que  ic  genre  de  ce  nom  coïncide  à peu  près  avec  celui  de 
M.  Recluz. 

Les  petites  coquilles  qui  nous  occupent  ont , à l'extérieur,  la  forme 
et  l’apparence  de  Tellines  ; il  faut  en  étudier,  avec  soin,  la  charnière 
pour  les  distinguer  de  ce  dernier  genre.  M.  Renieri  s’en  laissa  imposer 
par  l’apparence , en  rangeant  au  nombre  des  Tellines  une  espèce  du 
golfe  Adriatique  ; en  cela  il  fut  imité  par  Brocchi , et,  beaucoup  plus 
tard,  par  M.  Scacclii.  Bientôt  les  auteurs  de  catalogues,  ayant  trouvé 
quelques  espèces  scus  le  nom  de  Mya , quelques  autres  sous  le  nom 
de  Mactra , dispersèrent  des  coquilles  très  analogues  dans  les  deux 
genres  que  nous  venons  do  nommer  ; c’est  ce  que  l’on  remarque  dans 
Wood,  dans  Dillwyn,  et  jusqu’en  1819,  dans  \e  Dictionnaire  conchy- 
liologique  de  Turton.  Lamarck,  comme  nous  l’avons  vu  , avait  placé  les 
mômes  espèces  dans  son  genre  Ampbidesme  ; dès  lors  un  grand  nombre  ^ 
de  concliyliologues  suivirent  cet  exemple.  Il  faut  en  excepter  M.  Brown, 
dans  son  Catalogue  des  fossiles  de  riialie , qui  met  l’espèce  de  Brocchi 
et  de  Renieri  parmi  les  Erychies;  ce  que  fait  aussi  M.  Pbilippi  dans  son 
Enumeralio  Molluscorim. 

On  a su  par  Lamarck  que  M.'Leach  avait  eu  l’intentian  d’établir  un 
genre  dans  lequel  il  se  proposait  de  réunir  plusieurs  coquilles 

minces , ayant  un  ligament  interne  ; mais  ce  genre  lui-même  renferme 
des  espèces  de  genres  différents  ; il  était  donc  impossible  de  le  conserver, 


LES  AMPUIDESMIDES. 


Ho 

à moins  que  d’en  changer  la  valeur.  M.  Risso  est  le  seul  naturaliste  qui 
l’ait  adopté  dans  son  Histoire  naturelle  des  productions  de  l'Europe 
mcridionale;  mais  il  est  douteux  qu'il  en  ait  bien  compris  les  carac- 
tères , puisqu’il  en  fait  un  groupe  qui  correspond  au  genre  Lavignon  do 
Cuvier. 

Il  résulte  de  ce  que  nous  venons  d’exposer  que  les  coquilles , dont 
M.  Recluza  fait  son  genre  Syndosmye,  ont  été  successivement  ballot- 
tées dans  les  six  genres  suivants  : Abra,  Leacli;  Mactra,  Wood,  Mon- 
tagu,  Gcrville,  Turlon,  Dillwyn , etc.;  3/ya,  MüIIer,  Wood,  Dill- 
w^n,  Turton  ; Lï</u/a  , Montagu , Brown  , Forbes;  Tellina  , Renieri , 
Brocchi,  Scacchi;  A-mphîdesma^  Lamarck,  Turton,  Risso,  etc. 

Tel  qu'il  a été  constitué,  le  genre  Syndosmye  se  distingue,  avec  assez 
de  facilité,  de  tous  ceux  qui  l'avoisinent.  Ce  sont  de  petites  coquilles 
minces  , blanches , transparentes , ovales , transverses , équivalves , 
presque  toutes  inéquilatérales , ayant  le  côté  postérieur  court  et  pourvu 
d’un  pli  oblique,  comparable  à celui  des  Tellincs,  quoiqu'il  soit  moins 
apparent.  Toutes  ces  coquilles  sont  lisses  , fragiles  et  revêtues  , vers 
les  bords  , d’un  épiderme  d’un  jaune  très  pâle,  qui  déborde  le  pourtour 
des  valves. 

Les  bords  sont  minces  et  tranchants;  l’antérieur  est  toujours  arrondi, 
le  postérieur  l’est  moins  , quelquefois  il  se  termine  en  un  angle  plus  ou 
moins  aigu  ; les  valves  sont  légèrement  bâillantes , en  avant  et  en  arrière. 
Le  bord  ventral  est  régulièrement  arqué;  le  dorsal  est  divisé  en  deux 
portions  inégales  par  la  saillie  des  crochets.  La  portion  antérieure,  qui 
est  ordinairement  la  plus  longue,  s’incline  obliquement  en  avant;  la 
postérieure  s’incüno  davantage,  en  formant,  avec  la  première,  un 
angle  plus  ou  moins  ouvert.  Les  crochets  sont  petits , opposés  , à peine 
inclinés  ; ou  n'aperçoit  aucune  trace  de  lunule  ou  de  corselet. 

La  surface  interne  est  blanche  comme  Texterieure;  quelquefois  elle  a 
des  réÛets  subnacrés , mais  le  test  lui-même  no  contient  point  de  nacre 
proprement  dite , comme  les  Lyonsies  et  quelques  autres  genres.  C’est 
^ par  la  charnière  particulièrement,  que  l’on  distingue  avec  facilité  les  co* 
quilles  du  genre  Syndosmye,  Dans  4)resqu8  toutes  les  espèces,  immé- 
diatement au-dessous  du  crochet  de  la  valve  droite,  s'élèvent  une, 
quelquefois  deux,  petites  dents  cardinales,  parallèles,  appartenant  au  côté 
antérieur.  Sur  la  valve  opposée,  une  seule  petite  dent  cardinale  se  montre; 
elle  est  destinée  à s’interposer  entre  les  dents  do  la  valve  droite.  Un 
cuilleron  commence  au  môme  point  du  bord  cardinal , il  se  dirige  en  ar- 
rière , s’attache  au  bord  supérieur  et  postérieur  et  ne  fait  qu’une  faible 
saillie  dans  l’intérieur  des  valves  ; en  cela , il  diffère  de  celui  des  Ana- 


35ü 


DIXIEMK  FAMILLE. 


tines , des  Lutraires  et  des  Mactres.  Ce  cuilleron  , destiné  à recevoir  un 
ligament  interne , est  plus  ou  moins  étroit , selon  les  espèces.  Son  bord 
supérieur  ou  dorsal  s'épaissit  en  une  nymphe  courte  , derrière  laquelle 
vient  s’attacher  un  ligament  extérieur  très  petit.  11  est  donc  vrai  que  , 
dans  les  Syndosmyes  ainsi  que  dans  les  Amphidesmes  , il  y a réellement 
deux  ligaments,  tandis  que  dans  nos  Mésodesmes  on  n’aperçoit  que 
l’apparence  d’un  ligament  externe , produit  par  l’épaississement  de 
l’épiderme.  Enfin  , on  avant  et  en  arrière  , toutes  les  espèces  de  Syn- 
dosmyes présentent  une  dent  latérale  plus  ou  moins  saillante,  tantôt  sur 
chaque  valve  et  tantôt  sur  une  seule. 

Les  impressions  musculaires  sont  fort  petites , très  écartées  entre 
elles  ; elles  appartiennent  toutes  deux  à la  région  dorsale  de  la  coquille. 
L’antérieure -est  ovale-obrondc , elle  se  prolonge  en  haut  et  en  arrière, 
au  moyen  d'uiie  autre  petite  impression  triangulaire , qui  est  colle  du 
muscle  rétracteur  antérieur  du  pied.  L’impression  postérieure  est 
arrondie,  subcirculaire  ; l’impression  du  muscle  rétracteur  du  pied  s’en 
détache  sous  la  forme  d’un  triangle  aigu,  dont  le  sommet  se  prolonge 
au-dessous  du  bord  cardinal , sous  la  forme  d’une  ligne  étroite. 

L’impression  palléale  va  nous  offrir  un  caractère  générique  précieux, 
surtout  si  nous  la  comparons  à celle  des  Amphidesmes  et  des  Lavi- 
gnons.  Dans  les  Amphidesmes  , l'impression  palléale,  après  être  partie 
du  milieu  du  bord  intérieur  et  inférieur  du  muscle , se  contourne  paral- 
lèlement au  bord  de  la  coquille,  et  parvient  vers  l’extrémité  posté- 
rieure , où  elle  s’arrête  à peu  près  au  niveau  de  l’extrémité  du  cuilleron. 
A ce  point,  elle  s’inQéchit  en  dedans,  en  prenant  une  direction  obli- 
que, de  bas  en  haut  et  d'arrière  en  avant , s'avance  dans  l'intérieur  des 
valves  aune  faible  distance  du  muscle  antérieur,  s'arrondit,  se  re- 
courbe ensuite  en  ellipsoïde  et  vient  aboutir  en  ligne  tangentielle  au 
bord  inférieur  do  Timpression  musculaire  postérieure.  L’inflexion  pal- 
léaie  a donc  une  direction  qui  lui  est  propre  dans  les  Amphidesmes  , et 
une  forme  qu’on  ne  retrouve  plus  exactement  la  même  dans  les  autres 
genres  du  même  groupe.  Le  sinus  postérieur,  d’une  forme  ovalaire  a 
un  axe  qui  fait  un  angle  très  ouvert  avec  l’axe  transverse  do  la  coquille. 

Dans  les  Lavignons,  la  disposition  de  l’impression  palléale  est  fort 
différente:  la  sinuosité  se  dilate  à ce  point  que  son  bord  ventral  vient 
toucher  et  se  confondre  avec  l’impression  parallèle  au  bord  inférieur. 
Ce  caractère  se  montre  aussi  dans  les  Syndosmyes,  mais  la  sinuosité 
est  moins  dilatée  dans  le  milieu  , ce  qui  servirait  à distinguer  les  deux 
genres , à défaut  des  autres  caractères  que  nous  avons  déjà  mentionnés. 
Au  reste,  dans  les  Syndosmyes,  l’impression  palléale  a un  plus  grand 


LES  AMl’HIüESMlÜES. 


35  i 

développement  que  dans  les  Amphidesmes  ; elle  part  de  l'extrémité 
inférieure  de  l’impression  palléale  antérieure  ; elle  se  place  tout  près  du 
bord  ventral  et  l’accompagne,  dans  toute  sa  longueur,  jusqu’au  niveau 
du  bord  interne  du  muscle  postérieur  des  valves.  Là  , elle  se  recourbe 
sur  elle-même  , et  cette  portion  recourbée  s'attache  et  semble  se  con- 
fondre avec  la  moitié  postérieure  de  l’impression , qui  accompagne  le 
bord  ventral.  Parvenue  vers  le  milieu  de  son  trajet,  seulement  alors 
elle  s'en  détache,  en  produisant  un  angle  très  aigu,  et  c’est  ainsi  qu’elle 
s’avance  jusque  dans  le  voisinage  du  muscle  adducteur  antérieur  ; elle 
se  recourbe  , remonte  en  arrière  entre  les  deux  muscles  ; se  dilate  vers 
la  cavité  du  crochet,  et  redescend  ensuite  obliquement,  pour  gagner  le 
bord  antérieur  de  l’impression  musculaire  postérieure.  Dans  les  Amphi- 
desmes , la  sinuosité  palléale  est  en  réalité  ovalaire  ; elle  est  un  peu 
dilatée  dans  le  milieu,  d’où  il  résulte  que  la  largeur  de  l’entrée  de  ce 
sinus  est  peu  différente  de  la  longueur  de  son  diamètre  trans verse. 
Dans  les  Syndosmyes , au  contraire,  le  diamètre  de  la  plus  grande  lar- 
geur du  sinus  palléal  est  au  moins  trois  fois  plus  grand  que  la  largeur 
de  l’entrée  de  ce  sinus. 

Tout  ce  que  nous  venons  d'exposer  des  caractères  des  coquilles  du 
genre  Syndosmye,  prouve,  do  la  manière  la  plus  évidente,  que  ce  genre 
méritait  d’ètro  distingué , et  qu’il  doit  rester  dans  la  méthode.  Il  n’est 
pas  moins  évident  que  ses  rapports  s’établissent  facilement  d’un  côté 
avec  les  Amphidesmes , dont  il  diffère  par  les  impressions  des  muscles 
et  du  manteau  ; et  de  l’autre,  avec  les  Lavignonsou  Trigonelles  , avec 
lesquels  il  a plus  de  ressemblance  que  de  différence.  Ces  rapports, 
aussi  naturels  qu'évidents , nous  font  admettre  dans  la  famille  des  Am- 
phidesmides  do  Latreille,  et  dans  l'ordre  suivant,  les  genres  Amphi- 
desme,  Syndosmye  et  Lavignon.  De  ces  trois  genres,  les  deux  derniers 
seulement  sont  connus  dans  la  Méditerranée , et  malheureusement  nous 
n’avons  pu  découvrir  l’animal  des  Syndosmyes. 

Cependant  nous  ne  devons  pas  oublier  que  M.  Bouchard-Chantereaux, 
dans  son  excellent  Catalogue  des  Mollusques  du  Boulonnais^  a mentionné 
l’animal  d’une  petite  espèce  de  Syndosmye  de  l’Océan,  mais  malheu- 
reusement il  le  décrit  d’une  manière  très  brève.  Cependant  nous  con- 
naissons, par  cet  observateur  consciencieux,  plusieurs  caractères  im- 
portants de  cet  animal  au  moyen  desquels  nous  pouvons  le  rapprocher 
des  Lavignons.  C'est  ainsi,  par  exemple,  que  son  manteau  est  ouvert 
dans  les  sept  huitièmes  de  sa  longueur;  épaissi  sur  ses  bords,  il  est 
garni  de  trois  rangs  de  très  petites  papilles  blanchâtres;  les  siphons 
sont  longs,  séparés  entre  eux  et  diaphanes;  les  feuillets  branchiaux 


DIXIÈME  FAMILLE. 


:.52 

sont  très  inégaux , très  petits  , triangulaires , prenant  naissance  au  tiers 
postérieur  de  la  base  du  pied  ; ils  sont  réunis  postérieurement  avec  ceux 
du  côté  opposé.  Malheureusement  M.  Bouchard -Chantcreaux  laisse 
ignorer  si  ces  feuillets  branchiaux  ont  la  disposition  que  nous  avons 
fait  remarquer  dans  les  Lyonsies  et  les  Thracies,  et  que  nous  retrou- 
verons encore  dans  les  Lavignons.  La  bouche  est  très  grande  et  le  pied 
sécuriforme  est  légèrement  granuleux  à son  extrémité.  Quanta  ce  der- 
nier caractère , nous  no  l’avons  jamais  observé  dans  les  Lavignons , ni 
dans  aucun  autre  mollusque  acéphale.  M.  Bouchard,  qui  a conservé 
dans  l’eau  de  mer  l’animal  vivant  d’une  Syndosmye,  l’a  vu  ramper  sur 
les  parois  d’un  bocal  ; probablement  en  appuyant  le  plat  du  pied 
contre  cotte  paroi , comme  nous  l’avons  vu  faire  aux  Erycines  et  aux 
Poronies.. 

Ce  que  M.  Bouchard-Chantereaux  nous  apprend  de  l’animal  des  Syn- 
dosmyes , nous  confirme  dans  les  observations  au  moyen  desquelles  nous 
pouvons  savoir,  par  l’inspection  des  coquilles , si , dans  certains  genres , 
l’animal  a les  siphons  réunis  ou  disjoints.  Nous  n’attribuons  pas  à ces 
observations  plus  de  valeur  quelles  n’en  méritent;  nous  savons  qu’elles 
souffrent  des  exceptions  assez  nombreuses,  et  cependant,  d’après  Ce 
que  nous  connaissons  des  Tellines  et  des  Lavignons,  nous  aurions  pu 
annoncer  d’avance  que,  chez  les  Syndosrayes,  les  siphons  doivent  être 
inégaux  et  désunis  dans  toute  leur  longueur. 

Jusqu’ici  le  genre  Syndosmye  est  peu  considérable  en  espèces.  Dans 
le  mémoire  que  nous  avons  cité  de  lui , M.  Recluz  en  décrit  huit  de 
vivantes  et  une  neuvième  incertaine , empruntée  à Vlthistralion  conchy- 
liologique  de  M.  Brown;  à ces  huit  espèces,  il  faut  joindre  les  deux 
décrites  par  M.  Lovèn  ; l’une  d’elles  est  le  Mya  nilkîa,  de  Muller, 
comme  nous  l’avons  vu.  Ce  qui  est  remarquable,  c’est  que  toutes  ces 
espèces , sans  exception , sont  propres  aux  mors  de  l’Europe , ce  qui  est 
dû  probablement  à des  recherches  plus  assidues , entreprises  par  les 
naturalistes  qui  habitent  le  vieux  continent. 

M.  Recluz  n’a  connu  qu’une  seule  espèce  qui  eût  son  analogue  fos- 
sile, c’est  celle  qui  habile  les  côtes  de  l'Algérie;  il  existe  cependant 
d’autres  espèces  dont  les  analogues  fossiles  sont  cités.  M,  S.  Wood 
en  mentionne  deux  autres,  les  Syndosmya  alba  et  prismalica  ^ qui, 
vivant  sur  les  côtes  d’Angleterre , sont  fossiles  dans  le  crag  du  même 
pays.  M.  Nyst,  dans  son  excellent  ouvrage  sur  les  Fossiles  tertiaires  de 
la  Belgique,  mentionne  également  deux  espèces  sous  le  nom  de  Ligula; 
elles  senties  mêmes  que  celles  de  M.  XYood,  et  proviennent  d’un  terrain 
des  environs  d’Anvers,  du  même  âge  que  le  crag  d’Angleterre.  La 


LES  AMPIIIDESMIDES. 


liste  des  espèces  fossiles  ne  se  borne  pas  aux  trois  espèces  que  nous  ve- 
nons de  mentionner  ; nous  en  connaissons  sept  autres  , ce  qui  porte  à 
un  nombre  égal  les  espèces  vivantes  et  fossiles  du  genre  Syndosmye. 

Syndosmye  blanche,  Syndosinya  alba,  Récluz. 

PI.  8 bisA.  6.  7.  8. 

s,  testa  ovato-oblongâ  albu^  nitidâ,  soîidiusculâ , transvershn  temiîter 
striata  y stihlcevigatâ  ^ inarginc  supero  ac  postico^convexiuscidâ;  la- 
tere  postico  breviore^  anguîato  ^Jlcxtioso,  extremitate  subrotundato; 
dentibus  cnrdinaîibus  crassiuscidisy  dentibus  îateraîibus  vaîidisyre- 
motiusculis  ceqiddistantibus, 

Mactra  aîba,  Wood.  Lin.  ïrans,  t.  6,  p.  174.  pl,  i8.  f.  9,  12, 

Liguîa  Boj-sii.  Moulagu.  ïeslac.  brit,  p.  98,  pl.  3.  f.  7. 

Mactra  Boysii.  Pullney.  Dorset.  Cat.  p.  33,  pl.  la.  f.  7. 

2d,  Matou,  et  RackeU,  Liii.Traus.  t.  8,  p.  72.  u*  10,  pl.  i.  f.  12. 

Id.  DillwyD.  Cal,  t,  i.p,  i43.u®  28, 

Id,  Turtun.  Coneb.  Bict.  p.  84,  n**  12. 

Id.  Gerville.  Cat.  dcaMoIl,  de  la  Manche,  p.  21.  n®  6. 

Amphidesma  Boysii.  Laniarck.  au.  s.  vert,  t.  5.  p.  491. 

Id,  Sowerby,  Généra  of  sliells, 

Id.  Turlon.  Bril.  biv.  p.  53.  pl.  5.  f.  4.  5, 

Id.  l’oucliard-Chauter,  Cal,  des  Moll,  du  Boul,  p.  i4*  n 17- 
Ligida  Boysii,  Crown.  Coucli.  brit.  andircl.  p.  i.  pl.  i4*  f.  3. 
Amphidesma  album.  Fleming.  Brit.  an.  p.  433.  u®  470 
Id,  Macgillivray.  Moll.  au.  of  Scoll.  p.  292.  n®  i. 

Amphidesma  Boysii.  Hauley.  Descr.  cal.  t.  i.  p.  4^. 

Id.  Tbotnpsou.  Reporl  ou  lhe  faim,  of  Irel.  p.  261. 

Id.  Thorpe.  Bril,  mar.  coueb.  p,  55. 

Ligida  Boysii.  Forbes.  Rep.  on  OEg.  iuvert.  p.  14a. 

Syndosmya  alba.'Bk.tt\\u.  Rev.  zoûl.  1848.  p.  362. 

Id.  Lovèu.  lud.  Moll.  Scand.  p.  44.  u®  3ii. 

Fûssilisy  Amphidesma  album.  S.  AVood.  Cal,  of  shelU  foss.  from  llie 
crag.  Ann.  nat,  hîst.  1840.  u®  37.  p.  246.  u®  i. 

Ligula  alba.  Nyst.  Foss.  de  la  Belgique,  p.  gS.  pl.  3.  f,  14. 

Le  mémoire  do  Wood , dans  lequel  cette  coquille  a été  nommée  pour 
la  première  fois , î*  été  communiqué , en  1 80 1 , a la  Société  linnéenne 
de  Londres  , et  publié , l’année  suivante , dans  le  tome  6 des  Transac- 
tions de  cette  Société.  En  4 803  , Montagu  décrivit  et  figura  de  nouveau 

23* 


T.  \,  2*  PARTIE. 


DIXIÈME  FAMILLE. 


35/, 

la  même  espèce  sous  le  nom  de  Ligula  Boysii;  ce  nom  prévalut  chez  le 
plus  grand  nombre  des  conchyliologues  français  ou  anglais;  cependant 
il  était  juste  d’appliquer  à celte  espèce  la  loi  invariable  delà  priorité  ; 
c’est  ce  que  Ol  d’abord  M.  Fleming , en  l’admettant  parmi  les  Amplii- 
desmes , et  ce  que  ne  manqua  pas  de  faire  aussi  M.  Recluz,  en  l’in- 
troduisant dans  son  genre  Syndosmye. 

Cette  petite  coquille  est  ovale,  oblongue,  transverse,  peu  épaisse; 
elle  est  brillante  et  paraît  lisse  ; cependant,  examinée  sous  un  grossisse- 
ment suffisant,  on  la  trouve  couverte  de  fines  stries  transverses , irré- 
gulières, produites  par  les  accroissements.  Les  crochets  sont  petits, 
opposés  y peu  inclinés , et  le  bord  supérieur,  tant  en  avant  qu’en  arrière  , 
est  convexe.  Le  côté  postérieur  est  plus  court,  obliquement  tronqué, 
infléchi  par  un  pli  semblable  à celui  des  Tellines;  l’angle  inférieur  et 
postérieur  est  arrondi  et  obtus;  le  côté  antérieur  est  arrondi.  Les  fos- 
settes cardinales  sont  obliques  , étroites,  épaisses;  les  dents  latérales 
sont  grandes,  proéminentes,  triangulaires,  épaisses,  écartées  de  la 
charnière  et  également  distantes.  Celte  petite  espèce  vit  dans  tout 
rOcéan  européen  , et  elle  se  trouve  fossile  dans  le  Crag  en  Angleterre 
et  en  Belgique. 


GENRE  TRENTE-CINQUIÈME. 

AMCPHIDESME.  Amphidesma.  (Lamacck.) 

PI.  II.  fig,  10.  II.  la. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Aniiïial  inconnu. 

Coquille  ovale  ou  arrondie , peu  épaisse  , équivalve  ou  sub- 
inéquivalve,  ayant  dans  la  plupart  un  pli  postérieur  irrégulier. 
Charnière  portant  deux  petites  dents  cardinales  sur  chaque 
valve,  deux  dents  latérales  assez  grosses  et  une  fossette  obli- 
que , profonde , allongée , étroite , fixée  le  long  du  bord  dorsal 
postérieur.  Cette  fossette  reçoit  un  ligament  interne  ; une  nym- 
phe petite,  étroite,  donnant  insertion  à un  petit  ligament 
externe.  Impressions  musculaires -grandes , ovales,  obrondes; 
impression  palléale  terminée  en  arrière  en  une  sinuosité  ellip- 
soïde , profonde , obliquement  relevée  vers  le  centre  des  valves . 


LES  AMPHIDESMIDES. 


355 


SYNONYMIE  générique-  — TelHua ^ Linné,  Chemnitz , 
Schrœter,  Gmelin , Bruguière,  Wood,  Dill-wyn.  — Dona- 
cilla  (olim) , Lainarck.  — Semele , Schumacher.  — Amphi- 
desma  [mxic]  ^ Lamarck,  Férussac,  Sowerby,  Say,  Gray, 
Rang , Anton , Reeve,  etc. 

OBSERVATIONS.  — Tel  que  nous  le  réduisons  aujourd’hui,  le  genre  Am- 
phidesme  est  bien  différent  de  ce  que  Lamarck  l’a  constitué.  En  effet , 
de  seize  espèces  que  ce  naturaliste  y avait  introduites , nous  n’en  réser  - 
vons  qu'une  seule,  et  par  là  il  est  facile  de  se  convaincre  que  nous 
avons  rattaché  la  dénomination  générique  à un  groupe  très  différent  de 
celui  qui  se  trouve  dans  {'Histoire  des  animaux  sans  vertèbres.  ' 

L'examen  auquel  nous  nous  sommes  livré , en  traitant  quelques  uns 
des  genres  qui  précèdent,  a fourni  la  preuve  que  dans  le  genre  Amphi- 
desme  de  Lamarck  se  trouvaient  comprises  les  coquilles  de  genres  très 
différents.  C’est  ainsi  que  VAmphidesma  corbuloidcs  a dû  passer  dans  le 
genre  Lyonsia,  car  elle  en  a tous  les  caractères  ; VAmphidesma  phaseo- 
Una  est  une  véritable  Thracie,  à laquelle  nous  avons  rendu  son  nom 
primitif  de  Thracia  papyracea.  Si  Ton  en  croit  la  dénomination  d'Ainphi- 
desma  lactea , la  synonymie  et  môme  la  phrase  caractéristique , cette 
espèce  appartiendrait  au  genre  Lucine  ; mais  d’après  les  recherches  de 
M,  Recluz , dans  la  collection  de  Lamarck , il  aurait  trouvé  sous  ce  nom 
spéciOque  la  Lutraria  Cotardi  de  M.  Payraudeau,  c’est-à-dire  un  véri- 
table Lavignon;  cependant  les  nombreux  changements  matériels  que  l'on 
a fait  successivement  subir  à la  collection  de  Lamarck,  ont  détruit  une 
partie  de  la  confiance,  que  nous  devrions  avoir  dans  l’exactitude  de  la  plu- 
part de  ses  dénominations.  Dans  tous  les  cas  cotte  coquille  doit  toujours 
sortir  du  genre  Ampliidesme,  soit  qu  elle  rentre  parmi  les  Lucines, 
soit  qu  elle  se  range  parmi  les  Lavignons.  Trois  espèces  : Amphidesma 
donacilla^  glabrella,  comea,  appartiennent  à notre  genre  Mésodesme. 
Déjà  nous  avons  vu  les  diverses  espèces  de  ce  genre  mêlées  aux  Mac- 
tres  et  aux  Crassatelles , ce  qui  prouve  invinciblement  que  Lamarck 
n'en  avait  pas  compris  la  valeur.  M.  Recluz,  dans  un  mémoire  publié 
dans  le  Magasin  de  zoologie^  a prouvé,  contrairement  à l'opinion  de 
M.  Sowerby,  qu’il  fallait  distraire  des  Amphidesmes  de  Lamarck 
quatre  espèces  qui  offrent  aussi  des  caractères  particuliers , et  avec  les- 
quelles cet  habile  naturaliste  a fondé  un  très  bon  genre  sous  le  nom  de 
Syndosmye.  Les  espèces  d’ Amphidesmes  dont  il  est  question  senties 
Amphidesma  tenuis  ^ primatica^  Bùysii  ^ et  purpurescens.  Voilà  donc 
23* 


356 


DIXIÈME  FAMILLE. 


déjà  dix  espèces,  qui  se  distribuent  dans  des  genres  que  nous  connais- 
sons; voici  maintenant  la  répartition  des  cinq  dernières  dans  des  genres 
dont  nous  allons  nous  occuper  prochainement.  Les  Amphidesma  physoides 
eialbella  sont  de  véritables  Erycines;  nous  ferons  remarquer,  en  traitant 
de  ce  genre,  cette  erreur  singulière  do  Lamarck , qui , possédant  dans 
sa  collection  de  véritables  Erycines  vivantes , prend  néanmoins  une 
petite  Vénus  pour  type  de  ce  genre.  V Amphidesma  nucleola  dépend  du 
genre  Bornia  de  M.  Philippi.  Enfin  , deux  espèces  , chez  lesquelles  le 
ligament  est  sub-inlérieur,  doivent  rentrer  dans  le  genre  Lucine  où 
déjà  l'une  d’elles  Amphifiesma  lucinalis , se  trouve  sous  le  nom  de  Luema 
lactea. 

Si  nous  reprenions  successivement  les  différentes  espèces  que  nous 
venons  de  passer  en  revue,  il  nous  serait  facile  de  démontrer  que,  pour 
le  plus  grand  nombre , elles  ne  présentent  point  les  caractères  tels  que 
Lamarck  les  a inscrits  en  tête  dé  son  genre.  Ainsi  les  espèces  qui  dé- 
pendent des  ^emes  Lyonsia  , Thracia^  Mesodesma,  Erycinaj  Bornia  et 
Lucina,  n’ont  besoin  d’aucune  discussion  pour  être  éliminées  définitive- 
ment du  genre , puisque  leurs  caractères  ne  s’accordent  point  avec  ceux 
imposés  par  l’auteur  lui-même  à ses  Amphidesmes.  La  discussion  ne 
pourrait  donc  s’établir  qu'au  sujet  des  espèces  avec  lesquelles  M.  Recluz 
a fait  son  genre  Syndosmyc.  A celles-ci  la  phrase  caractéristique  s’ap- 
plique assez  exactement;  par  conséquent,  il  a fallu  agir  arbitrairement 
pour  attribuer  le  nom  plutôt  à un  groupe  qu’à  l'autre.  M.  Sowerby  est 
le  premier  qui  ait  décidé  du  choix , en  proposant  dans  son  Généra  of 
sheîls^  de  réduire  le  genre  Amphidesrae  aux  Amphidesma  mriegala  , 
Boysiif  pnsmaiica,  et  quelques  autres  analogues.  Il  était  naturel  que 
M.  Recluz,  en  découvrant  les  caractères  de  son  genre  Syndosmye,  re- 
tirât ces  espèces  du  genre  Amphidesme  de  M.  So'werby,  et  de  cette 
réforme  nécessaire  il  résulta  que  la  dénomination  générique  resta  à la 
première  espèce  do  Lamarck,  Amphidesma  variegata.  Si  l'on  examine 
les- caractères  de  cette  coquille,  on  voit  qu’ils  s’accordent  exactement 
avec  ceux  du  genre.  Il  est  donc  convenable  de  la  conserver  comme  type 
des  Amphidesmes , et  de  réunir  à elle  toutes  les  espèces  qui  offrent  des 
caractères  analogues.  Déjà  nous  pouvons  lui  associer  l’une  des  Lucines 
de  Lamarck , le  Lticina  relicuîata  , qui  n’est  autre  chose  que  le  Tellina 
reiiculata  de  Linné. 

Il  était  nécessaire  d’indiquer  les  réformes  à opérer  dans  le  genre  Am- 
phidesme avant  d'en  tracer  l’histoire.  Limité,  ainsique  nous  venons  do 
le  dire , ce  groupe  constitue  un  genre  très  naturel , dont  quelques 
espèces  furent  connues  de  Lister,  de  Linné,  de  Chemnitz,  et  rappor- 


LKS  AMPHIDESMIDES.  357 

tées  par  ces  naturalistes  au  genre  des  Tellines.  Schrœter,  Gmelin  , 
Bruguières , Wood  , suivirent  l’exemple  de  leurs  prédécesseurs. 

En  fondant  un  grand  nombre  de  genres,  Lamarck  rencontra  néan- 
moins une  certaine  quantité  de  coquilles,  dont  les  caractères  ne  pou- 
vaient s’y  rapporter  exactement.  Ces  coquilles,  présentant  quelques 
caractères  communs,  celui,  par  exemple,  d'un  ligament  interne, 
accompagné  d’un  ligament  externe , ou  seulement  de  l’apparence  de  ce 
dernier,  Lamarck  les  rassembla  dans  une  sorte  d'mc^rtæ  sedis  , dont  il 
fit  un  genre  auquel  il  donna  d’abord  le  nom  de  Donacille,  dans  l’ex- 
trait du  cours , nom  auquel  il  substitua  celui  d’Amphidesme  dans  le  5* 
vol.  des  Animaux  sans  vertèbres.  Ce  genre  Amphidesme  est  donc  la 
reproduction  du  genre  Donacille  souâ  une  autre  dénomination.  Un  genre, 
aussi  ambigu  que  celui  des  Amphidesmes  , devait  laisser  beaucoup 
d'incertitude  chez  les  naturalistes;  ils  devaient  s’en  faire  des  opinions 
différentes,  selon  les  espèces  que  le  hasard  mettait  sous  leurs  yeux. 
Tandis  que  M.  de  Gerville  entraîne  les  Amphidesma  Boysii  et  prisma* 
«ica,  parmi  les  Mactres  , M.  de  Blainville  considère  les  Amphidesmes 
comme  un  groupedu  genre  Lucine,  et  en  môme  temps  M.  Say  considère 
un  Lavignon  comme  une  véritable  Amphidesme.  De  telles  confusions  ne 
pourront  plus  se  reproduire  dans  l’avenir  ; nettement  défini , débarrassé 
de  tout  ce  qui  lui  est  étranger,  le  genre  Amphidesme  ne  peut  se  con- 
fondre avec  aucun  de  ceux  qui  sont  connus , et  l'examen  des  coquilles 
va  servir  de  preuve  à ce  que  nous  venons  de  dire. 

Les  Amphidesmes  sont  des  coquilles  ovales  et  obrondes,  en  général 
peu  épaisses,  comprimées,  subéquilatérales,  équivaivcs,  quelquefois 
cependant  ayant  une  valve  un  peu  plus  profonde  que  l’autre  ; presque 
toutes  les  espèces  sont  ornées  de  stries  Iransverses,  concentriques  et  de 
stries  longitudinales,  quelquefois  excessivement  fines.  Ces  coquilles 
sont  généralement  blanches,  teintées  do  jaune  ou  de  rougeâtre  à l’inté- 
rieur, quelques  unes  sont  violâtres,  vergetées  de  rouge-brun.  Toutes 
sont  revêtues  d*un  épiderme  ordinairement  gris  ou  brunâtre , mince , 
plus  ou  moius  tenace,  selon  les  espèces;  débordant  le  test  et  destiné  , 
sans  aucun  doute , à recouvrir  les  parties  exsertiles  du  manteau.  Les 
bords  sont  simples  et  tranchants  ; ils  ne  se  joignent  pas  exactement  sur 
toute  la  circonférence  de  la  coquille;  ils  laissent  en  avant  et  en  arrière 
un  petit  bâillement  en  fente  étroite.  Le  côté  antérieur  est  toujours 
arrondi,  il  est  le  plus  court  dans  le  plus  grand  nombre  des  espèces; 
c’est  lecôntraire  dans  un  petit  nombre  d'autres.  Le  côté  postérieur  est 
obtus , et  dans  le  plus  grand  nombre  des  espèces  il  présente  une  inQe.xion 
irrégulière,  tout  à fait  comparable  à celle  des  Tellines.  Le  bord  ventral 


358  DIXIÈME  FAMILLE., 

est  très  convexe,  ce  qui  a lieu  également  pour  le  bord  dorsal  ; seulement 
celui-ci  est  partagé  en  deux  portions  presque  égales  par  la  saillie  des. 
crochets.  Les  crochets  sont  petits,  peu  saillants , légèrement  inclinés  en 
avant;  ils  dominent  une  très  petite  lunule,  courte,  lancéolée,  plus 
ou  moins  profondément  empreinte  selon  les  espèces.  En  arrière  des 
crochets,  on  ne  trouve  aucune  trace  de  corselet  ; mais  immédiatement 
en  arrière  des  crochets  on  remarque  deux  petites  nymphes  courtes  et 
étroites,  sur  lesquelles  s'attache  un  petit  ligament  externe.  Ce  ligament 
n’est  point,  comme  celui  des  Mésodesmes , un  simple  épaississement 
épidermique;  il  est  constitué  de  la  môme  manière  que  tous  les  liga-. 
ments  externes , seulement  il  ne  contient  point  de  matière  cartilagi- 
neuse, il  est  entièrement  constitué  de  la*  matière  Gbreuse.  Dans  ceux  . 
des  Mollusques,  dont  la  coquille  est  pourvue  d’un  seul  ligament  externa, 
ce  ligament  est  composé  de  deux  substances , que  l'on  sépare  avec  faci- , 
lité.  L’une  extérieure , bombée,  composée  d'une  matière  ûbreuse,  solide 
et  tenace  ; l’autre  interne,  jouissant  particulièrement  d’une  grande  élas- 
ticité, ressemble  davantage  à un  cartilage.  Ces  deux  portions  d’un 
même  organe  laissent  entre  elles  un  interstice,  ordinairement  très 
étroit,  dans  lequel  s’enfonce  un  organe  sécréteur,  dépendant  du  man- 
teau. Chez  les  Âmphidesmes,  ces  deux  portions  d’un  môme  organe  sont 
bien  plus  séparées  ; car  l’une  reste  en  dehors,  tandis  que  l’autre  vient 
s'insérer  dans  une  fossette  allongée,  étroite,  profonde  , attachée  le  long 
du  bord  dorsal  postérieur.  Celle  fossette  est  séparée  des  nymphes  par 
un  espace  allongé  , triangulaire . convexe , que  l'on  voit  se  terminer  en 
arrière  par  une  dent  latérale.  Immédiatement  au-dessous  du  crochet, 
les  deux  ligaments  convergents  viennent  se  rencontrer  et  se  confon- 
dent dans  une  petite  portion  de  leur  longueur.  En  avant  de  la  fossette 
du  ligament  interne  s’élève  . sur  le  bord  cardinal , une  petite  dent  sur 
la  valve  droite  et  deux  sur  la  gaucho.  Il  y a dos  espèces  chez  lesquelles 
il  n’existe  qu’une  seule  dent  a chaque  valve  ; mais  il  eu  est  d’autres  , 
où , à côté  de  la  dent  principale  , se  montre  une  seconde  dent  plus  ou 
moins  rudimentaire.  Enûn,  à la  limite  antérieure  de  la  lunule  s’élève 
une  dent  latérale  antérieure , courte  et  conique  ; ainsi  dans  le  genre 
Amphidesme , la  charnière  comporte  une  ou  deux  dents  cardinales  , 
deux  dents  latérales,  une  fossette  oblique  pour  le  ligament  interne  et 
une  très  petite  nymphe  pour  le  ligament  externe. 

Les  impressions  musculaires  sont  grandes  ; si  l’on  partage  la  coquille 
en  deux  moitiés  égales  , les  impressions  musculaires  seront  comprises 
presque  en  entier  dans  la  moitié  supérieure  ou  dorsale.  L’impression 
antérieure  est  ovale-semilunaire;  elle  descend  obliquement  le  long  du 


LES  AJilPHlDESMIDES. 


359 

bord  antérieur  et  elle  se  termine  en  haut  par  une  extrémité  pointue , 
qui  se  continue  jusqu’au-dessous  de  la  dent  latérale  intérieure  par  une 
ligne  étroite,  qui  est  celle  de  l'insertion  du  manteau.  Vers  l'extrémité 
de  cette  ligne,  au-dessous  du  bord  cardinal  et  de  la  dent  latérale  anté- 
rieure , se  trouve  une  petite  impression  irrégulière;  elle  résulte  de 
l’insertion  sur  ce  point  du  muscle  rétracteur  antérieur  du  pied.  L’im- 
pression musculaire  postérieure  est  plus  arrondie  ; elle  se  prolonge  aussi 
dans  une  ligne  de  rinsertion  du  manteau , et  son  angle  supérieur  donne 
attache  au  muscle  rétracleur  postérieur  du  pied.  Une  impression  pal- 
léalo  se  détache  de  l’extrémité  inférieure  du  muscle  antérieur , elle 
accompagne  le  bord  ventral  et  reste  constamment  parallèle  avec  lui 
jusqu’à  l’extrémilé  [lostérieuro  de  la  coquille.  En  s’inÛéchissant  en 
dedans , elle  trace  une  sinuosité  profonde,  ovalaire , dirigée  obliquement 
d’arrière  en  avant  et  de  bas  en  haut.  Les  bords  de  celte  sinuosité  ne 
sont  point  parallèles;  elle  est  plus  large  dans  le  milieu  qu'à  ses  extré- 
mités, et  elle  est  entièrement  détachée  de  la  portion  ventrale,  ce  qui 
la  distingue  éminemment  de  la  sinuosité  des  Lavignons  et  des  Syndos- 
myes.  Dans  d’autres  genres  la  sinuosité  du  manteau  est  également  dé- 
tachée; mais  elle  est  dirigée  horizontalement,  ainsi  que  cela  se  voit 
dans  quelques  Lutraires  , par  exemple.  Nous  verrons  des  Tollines  chez 
lesquelles  la  sinuosité  palléale  devient  très  grande  et  envahit  presque 
toute  la  surface  interne  des  valves.  Chez  ces  espèces  , les  deux 
portions  ventrales  de  l’impression  palléale  se  louchent  dans  la  plus 
grande  partie  de  leur  longueur.  Mais  il  est  d’autres  espèces  de  Tellines, 
chez  lesquelles  la  sinuosité  du  manteau  ressemble  beaucoup  à celle  des 
Amphidesnies  , et  c'est  par  ces  espèces  que  les  deux  genres  que  nous 
comparons  entrent  danslesrapports  les  plus  immédiats.  Il  deviendratrès 
intéressant  de  comparer  les  animaux  de  ce  groupe  de  Tellines  avec  ceux 
des  Amphidesmes,  et  de  s’assurer  par  là  s’ils  .conservent  une  ressem- 
blance , qhe  semble  annoncer  celle  de  leur  coquille. 

Mademoiselle  Catlow  a inscrit  trente-huit  espèces  dans  son  Concholo- 
gical  nomenclator.  De  ces  espèces  , sejit  doivent  être  éliminées  du 
genre , elles  appartiennent  aux  Syndosmyes  et  aux  Erycines  ; il  reste 
donc  trente  et  une  espèces,  dont  quelques  unes  sont  inconnues , car 
elles  sont' empruntées  à un  ouvrage  de  M.  Sowerby,  qui  n'a  jamais  été 
publié. 

Les  Amphidesmes  sont  des  coquilles  de  taille  médiocre;  elles  sont 
essentiellement  marines  ; elles  vivent  à la  manière  des  Tellines  , enfon- 
cées perpendiculairement  dans  le  sable  ou  dans  la  vase  des  rivages. 
Quelques  unes  se  plaisent  dans  les  fentes  des  rochers  j et  par  cette  ma- 


3()0 


DIXIEME  FAMILLE. 


nière  de  vivre,  elles  se  rapprochent  des  Ërycines  et  des  Bornies. 
Presque  toutes  habitent  les  mers  chaudes;  le  plus  grand  nombre  pro- 
vient du  Brésil , du  Pérou , de  la  Colombie , du  grand  Océan  Indien  et 
des  parties  chaudes  des  mers  australes. 

On  a cité  dans  ce  genre  un  assez  grand  nombre  d’espèces  fossiles  ; 
mais  le  genre , après  avoir  subi  les  changements  considérables  que  nous 
avons  mentionnés , nous  pouvons  affirmer  ne  reconnaître  aucune  véri- 
table espèce  d’Araphidesme  à l’état  fossile  parmi  celles  qui  ont  été  dé- 
crites sous  ce  nom.  Il  n’est  pas  à dire  que  le  genre  n’existe  pas  à l'état 
fossile;  nous  avons  la  preuve  de  sa  présence  dans  les  terrains  tertiaires 
de  la  Gironde.  M.  Hébert,  savant  géologue , nous  a communiqué  une 
espèce  très  voisine  d\i  Reticulaln  de  Linné. 

Colles  des  espèces  qui  ont  été  mentionnées  dans  ce  genre  et  qui 
appartiennent  aux  terrains  tertiaires  sont  au  nombre  de  trois  : elles 
doivent  passer  dans  le  genre  Syndosmye;  toutes  les  autres  dépendent 
des  terrains  crétacés  ou  jurassiques,  et  elles  ont  été  introduites  parmi 
les  Amphidesmes  parce  qu’elles  ne  présentaient  aucun  caractère  appré- 
ciable et  propre  à faire  reconnaître  leur  véritable  genre.  Nous  pouvons 
en  dire  autant  des  quatre  espèces  mentionnées  et  figurées  par  M.  Port- 
lock,  dans  son  ouvrage  sur  les  terrains  anciens  des  comtés  de  London- 
derry,  Tyrone  et  de  Fermanagh. 

Il  est  difficile  de  reconnaître  les  Amphidesmes  d’après  le  moule  inté- 
rieur, à moins  que  ce  moule  ne  soit  dans  un  état  de  parfaite  conserva- 
tion. Lorsqu’il  est  bien  net,  on  peut  y distinguer  rinflexion  des  dents 
cardinales,  celles  des  dents  latérales  et  la  cavité  produite  par  la  fossette 
du  ligament.  Mais  dans  des  coquilles  fermées , et  lorsque  leur  moule  ne 
présente  pas  les  impressions  de  la  charnière,  il  est  de  toute  impossi- 
bilité de  reconnaître  en  elle  de  véritables  Amphidesmes.  Les  paléon- 
tologistes qui  ont  donné  co  nom  générique  à des  coquilles,  dont  ils 
n’ont  vu  ni  la  charnière  ni  les  impressions , ont  cherché  à faire  con- 
naître des  formes  , propres  à caractériser  certaines  couches , mais  qui 
indubitablement  appartiennent  à d’autres  genres  , et  par  conséquent  ne 
peuvent  rester  dans  celui  des  Amphidesmes.  Malgré  la  difficulté  du 
sujet,  il  est  des  erreurs  que  les  paléontologistes  devraient  éviter.  En 
voulant  servir  la  science  , ils  la  blessent  dans  ses  intérêts  les  plus  chers  ; 
l’incertitude  qu’ils  y répandent  en  éloigne  les  esprits  sages  qui  savent 
qu’une  science  erronée  ne  donne  que  des  conséquences  erronées  dans 
ses  applications, 


LES  TELLINIDES. 


36i 


Amphidesme  solide.  Amphidesma  solida  , Gray. 

PL  11.  fig.  10.  11.  12. 

A. testa  crassn  solida^  suhorbicuiatd , àlhâ,  eoneentrîce  sulcatâ,  tenuis- 
sime  raàiatim  striata^  posticè  sithnigosâ;  rnargine  eardinali pnrpureo 
îunuJâ  minitnây  îanceolatd,  dentibus  cardinaîibus  parvis, 

^ Gray.  Spîc.  zool,  p.  6.  pl,  6.  f.  6. 

Hanley.  Descr.  caU  t.  i.  p.  43, 

Callow.  Conch.  nomencl.  p.  i8.  a®  34i 
Wood.  Ind.  Testac.  a*  suppL  pl.  la.  f.  Sa. 

Coquille  lenticulaire,  suborbiculaire , presque  équilatérale;  elle  n’est 
pas  parfaitement  équivalve  ; la  valve  droite  est  un  peu  plus  profonde 
.que  la  gauche.  Les  valves  sont  convexes , plus  épaisses  et  plus  solides 
que  dans  la  plupart  des  espèces.  Leur  surface  est  couverte  de  sillons 
concentriques;  ceux  de  la  valve  droite  surtout  sont  remarquables  par 
leurs'petites  ondulations,  qui  les  interrompent  dans  leur  continuité  et  les 
font  se  toucher  les  uns  les  autres  do  manière  à former  des  mailles  irré- 
gulières. Outre  ces  sillons  transverses , la  surface  est  encore  Couverte 
d’un  grand  nombre  de  stries  très  fines , rayonnantes  , qui  descendent 
des  crochets  vers  la  circonférence.  Les  crochets  sont  peu  saillants  , ils 
s’inclinent  obliquement  au-dessus  d’une  lunule  enfoncée,  étroite,  lan- 
céolée, teintée  d'un  rouge  pourpre.  Un  pli  irrégulier,  semblable  à celui 
des  Tellines , limite  le  côté  postérieur,  et  dans  toute  la  longueur  de  ce 
pli , les  sillons  se  changent  en  grosses  rides  dont  la  limite  est  nettement 
arrêtée  sur  la  valve  droite , plus  indécise  sur  la  valve  gauche.  A l’inté- 
rieur, toute  la  coquille  est  d’un  beau  blanc,  si  ce  n’est  le  bord  cardinal 
qui  est  teint  d’un  beau  rouge  pourpre  qui  a surtout  de  l’intensité  sur  les 
dents  latérales;  les  dents  cardinales  sont  très  petites,  les  dents  laté- 
rales, au  contraire,  sont  grosses  et  épaisses. 

Cette  belle  Amphidesme  se  trouve  dans  les  mers  du  Pérou  , où  elle 
n’est  pas  rare.  Elle  a 60  millimètres  de  hauteur,  65  de  longueur  et  27 
d’épaisseur. 


ONZIÈME  FAMILLE. 

lies  Tellinûles.  Desh. 

CARACTÈRES,  — Aniipal  ovale , transverse , peu  épais , ayapt 
lep  Jobes  du  piapteau  réunis  en  arriéré  et  garnis  sur  les  bords 


362 


ONZIEME  FAMILLE. 


d’un  rang  de  tentacules  coniques  ou  tronqués.  Deux  siphons 
longs  et  grêles , désunis  dans  toute  leur  longueur,  pourvus 
d’un  petit  nombre  de  tentacules  simples.  Pied  mince , triangu- 
laire, tranchant;  palpes  labiales  très  grandes  en  triangle  pres- 
que équilatéral.  Branchies  inégales  : la  paire  interne  plus 
grande  tombant  de  chaque  côté  du  corps  , la  paire  externe  re- 
levée vers  le  dos. 

Coquille  obronde,  ovale  ou  transverse,  comprimée  latéra- 
lement, peu  épaisse,  ayant  les  bords  simples  légèrement 
bâillants  en  avant  et  en  arrière,  et  portant  dans  la  plupart  un 
pli  oblique , irrégulier  sur  le  côté  postérieur.  Charnière  étroite , 
munie  de  deux  dents  cardinales  et  souvent  de  deux  dents  laté- 
rales. Ligament  externe  adhérent  à des  nymphes  saillantes. 
Impression  palléale  profondément  sinueuse  du  côté  postérieur; 

GENRES.  — Telîina^  Fragilia. 

Par  la  définition  que  nous  imposons  à la  famille  des  Tellinides , il  est 
facile  de  s'apercevoir  que  nous  la  réduisons  à un  petit  nombre  de 
genres.  Propo.sée,  pour  la  première  fois  par  Latreille,  la  famille  des 
Tellinides  était  très  étendue . car  elle  contenait  à la  fois  deux  familles 
de  Lamarck,  les  Nytnphacées  et  les  Lithopbages.  L'auteur  de  celte 
réunion  aurait  été  très  embarrassé  de  la  justifier.  Sij  en  1 825  , époque 
à laquelle  Latreille  publia  ses  familles  naturelles,  la  science  était  trop 
peu  avancée  pour  limiter  des  familles  réellement  naturelles,  elle  possé^ 
dait  cependant  des'  documents  suffisants  pour  éviter  ta  confusion  que 
nous  signalons.  Nous  pensions  que  le  temps  n’était  plus,  où  les  classi- 
fications SP  présentaient,  en  quelque  sorte,  comme  les  romans  de  la 
science  , où  l’on  jouait  pour  ainsi  dire  avec  les  genres  et  les  familles  , 
essayant  les  associations  les  plus  bizarres,  sans  se  donner  la  peine  de 
les  justifier.  En  parcourant  ces  classifications  si  promptement  élaborées, 
si  facilement  jetées  au  moule , on  se  creuserait  en  vain  l'esprit  pour 
deviner  les  raisons  qui  ont  déterminé  les  auteurs  à constituer  telle  fa- 
mille, à la  séparer  de  telle  autre  ; c’est  le  règne  de  la  fantaisie  et  du 
bon  plaisir,  voilà  ce  que  l'on  en  peut  dire.  Quant  à la  sdience  et  aux 
déductions,  quelquefois  si  difficiles,  qu’elle  exige,  on  s'en  préoccupe 
peu,  pourvu  que  l'on  ait  la  satisfaction  de  dire  : ma  classipcation,  mes 
familles,  mes  genres.  Le  temps  n’est  pas  éloigné , nous  l'espérons  du 


LES  TELLINIDES. 


363 


moins , où  la  science  plus  approfondie  repoussera  tout  ce  qui  ne  pour- 
rait se  justiûer  par  l’observation , nous  verrons  alors  le?  familles  se 
simplifier,  réunir  moins  de  genres,  mais  les  genres  s’agrandir  et 
prendre  les  limites  que  la  nature  elle-même  leur  a imposées.  De  grands 
genres  , de  petites  familles  ; ce  sont  là  les  tendances  auxquelles  con- 
duisent toutes  les  observations.  Ces  réflexions  nous  sont  suggérées  par 
les  transformations  qu’a  subies  la  famille  des  Tellinides , mais  elles 
pourront  trouver  leur  application  à d'autres  parties  de  la  classification 
que  nous  aurons  à examiner  par  la  suite. 

Comme  nous  le  disions  , fondée  par  Latreille , la  famille  des  ïelli- 
nides  contenait  deux  des  familles  de  Lamarck  , les  Nymphacées  et  les 
Lithophages,  c'est-à-dire  treize  genres , dont  .il  serait  impossible  de 
justifier  le  rapprochement.  Déjà  , en  1830  , dans  V Encyclopédis  métho- 
dique , nous  avons  senti  le  besoin  de  détruire  la  faniilledes  Nymphacées  , 
et  de  proposer  une  autre  distribution  des  genres  qu’elle  renferme  , dis- 
tribution plus  en  harmonie  avec  l’étal  de  la  science.  En  conservant  une 
famille  des  Tellinides , nous  l'avons  réduite  à quatre  genres  : Sangui- 
nolaire,  Psammbie,  Telline.  Donace,  nous  fondant  non  seulement 
sur  l’analogie  des  coquilles  , mais  encore  sur  celle  des  animaux , obligé 
de  nous  confier  alors  aux  travaux  de  Poli , auxquels  nous  supposions 
toute  l’exactitude  nécessaire  pour  en  déduire  une  classification  amé- 
liorée. 

D’après  mes  nouvelles  vues , dit  M.  d’Orbigny  dans  sa  Paléontologie 
française  [Tenr.  crét.^t.  Ill,  p.  3-99).  je  réunis  dans  la  famille desTelIinides 
]es  genres  DonaciUa,Lavignon,  4mphidesma  , Arcopugia,  Tellma,  Capsa 
et  Donax.  Ces  nouvelles  vues.  M.  d'Orbigny  les  a acquises  en  se  basant, 
comme  il  le  dit  à la  page  précédente , sur  tes  caractères  propres  aux  ani- 
maux.Ces  mots,  que  nous  soulignons,  vont  nous  donner  la  preuve  que  Tau- 
leur  n’a  guère  connu  les  animaux  qu’il  rassemble  dans  la  familledes  Tel- 
linides. Mais  chaque  phrase  du  court  préambule  de  JL  d'Orbigny  mérite- 
rait un  commentaire,  tant  elle.?  contiennent  d'assertions  curieuses.  Ainsi, 
ce  naturaliste , en  parlant  du  ligament , dk  que  cet  organe  est  un  moyen 
mécanique  et  nullement  un  caractère  sooîogique.  Nous  serions  bien  heu- 
leux  si  M.  d’Orbigny  expliquait  sa  pensée  ; est-ce  qu’il  voudrait  dire 
par  là  (jue  le  ligament  n’esl  point  un  organe  faisant  partie  intégrante 
de  la  coquille  et  sécrété  par  l'animal?  Il  est  très  peu  de  parties  dans 
les  animaux  qui  ne  jouissent  de  fonctions  mécaniques;  les  os  les  car- 
tilages dont  ils  sont  garnis  aux  points  où  ils  se  touchent , les  cartilages 
élasli(iues  placés  entre  les  vertèbres  , etc.,  sont  des  moyens  mécani- 
ques qui  facilitent  les  mouvements.  Est-ce  que  toutes  ces  parties  n’of- 


ONZIEME  FAMILLE, 


364 

frent  pas  des  caractères  zoologiques  ? Est-ce  que  toutes  les  parties  solides 
sécrétées  par  un  animal  en  dedans  ou  en  dehors  de  son  corps  et  rete- 
nues pour  son  usage  pondant  toute  sa  vie  n'offrent  pas  des  caractères 
zoologiques?  Il  serait  aussi  juste  de  dire  que  les  impressions  muscu- 
laires sont  des  moyens  mécaniques,  parce  qu’elles  so  trouvent  sur  un 
test  dont  on  peut  détacher  l'animal.  Mais  achevons  la  phrase  de  M.  d'Or- 
bigny  : aussi  peut-ü  tout  au  plus  servir  pour  les  genres  , mais  non  pour 
les  familles:  C’est  ainsi  que  M.  d’Orbigny  comprend  la  subordination 
des  caractères  ; il  consent  bien  à caractériser  les  genres  avec  des  moyens 
mécaniques  , mais  il  réserve  les  caractères  zoologiques  pour  les  familles. 
A voir  la  composition  do  la  famille  des  Tellinides  de  M.  d'Orbigny.  on 
se  persuaderait  facilement  qu'il  s’osf  mépris,  et  que  ce  sont  les  familles 
qui  sont  caractérisées  par  dos  moyens  mécaniques. 

Nous  avons  déjà  examiné  trois  des  genres  admis  dans  la  famille  des 
Tellinides  par  M.  d’Orbigny,  et  nous  savons  que  les  animaux  des  Méso- 
desmesetdesLavignons  sonUrès  différents  par  lousleurs  caractères  exté- 
rieurs et  anatomiques;  ils  ne  peuvent  donc  entrer  dans  une  même  fa- 
mille, et  siM.  d’Orbigny  les  avait  connus,  comme  il  le  donne  à penser,  il 
n’aurait  pas  commis  la  faute  de  les  réunir  dans  un  même  groupe.  Par 
l’ensemble  de  ses  caractères , le  genre  Amphidesrne,  dont  l’animal  n’est 
point  connu,  doit  appartenir  provisoirement  à la  famille  précédente. 

Le  genre  Arcopagia  ne  peut  être  conservé  . ayant  été  établi  pour  les 
TclPines  obrondos  , ainsi  que  nous  le  verrons  en  traitant  des  Telünes. 
Enfin  , les  genres  Capse  et  Donace  ont  des  animaux  très  différents  de 
ceux  de  tous  les  autres  genres,  et  se  lient  par  quelques  caractères  aux 
Mésodesmes,  tout  en  restant  assez  distincts  pour  constituer  une  autre  fa- 
mille. Ainsi  M.  d'Orbigny,  en  se  basant  sur  les  caractères  des  animaux 
pour  circonscrire  la  famille  des  Tellinides  , confond  cependant  quatre 
sortes  de  Mollusques  appartenant  à autant  de  familles  différentes  ; ce 
qui  a lieu  de  surprendre,  c’est  que  M.  d'Orbigny  caractérise  tous  les 
genres  do  la  famille  d’après  les  animaux.  11  est  vrai  que  cos  caractères, 
écrits  probablement  d’après  de  fugitifs  souvenirs,  sont  aussi  incomplets 
qu’inexacts;  il  y a même  deux  genres,  ^mp/itdesmn  et  Arcopagia,  qui 
sont  caractérisés  au  mo^^en  d'animaux  mutilés  ou  desséchés.  Pour  ceux- 
là  M.  d'Orbigny  a été  forcé  de  recourir  en  partie  aux  caractères  des 
coquilles  pour  les  placer  dans  la  famille  des  Tellinides , et , par  le  fait , 
de  so  mettre  en  contradiction  avec  ce  qu’il  avance. 

Un  zoologiste  connu  par  de  grands  et  d’importants  travaux  sur  pres- 
que toutes  les  classes  des  animaux , M.  Gray  n'a  pas  oublié  les  Mollus- 
ques ; leur  étude  a toujours  eu  pour  Itji  une  prédilection  marquée.  Ce 


LES  TELLIMDES. 


365 


savant  en  a donné  une  preuve  récente  en  publiant  une  classification 
complète  des  Mollusques  dans  la  partie  des  Procès-verbaux  de  la 
Société  zoologique  de  Londres  (1847).  Dans  cette  classification,  dont 
nous  no  pouvons  examiner  ici  l’ensemble  , nous  trouvons  une  famille 
des  Tellinides  ayant  une  étendue,  une  composition  inusitées , et  qui , à 
cause  de  cela,  mérite  toute  notre  attention.  Nous  avouerons  d’abord 
qu’il  nous  est  impossible  d’apercevoir  le  lien  commun  au  moyen  duquel 
les  onze  genres  compris  dans  cette  famille  se  rattachent  les-  uns  aux 
autres.  Nous  y voyons , en  effet , des  genres  à ligament  externe , mêlés 
sans  ordre  avec  des  genres  à ligament  interne  ; nous  y remarquons  un 
genre  d’eau  douce , Galathea  , à la  suite  de  genres  marins  ; ceci  ne  se- 
rait point  un  mal , si  ce  genre  d’eau  douce,  par  son  organisation  , justi- 
fiait la  place  qu’il  occupe.  En  se  bornant  aux  coquilles  > on  reconnaît 
déjà  qu’elles  ne  sont  point  associées  d’après  leurs  rapports  naturels.  ^ 
Examinant  actuellement  ce  groupe , d’après  les  animaux  tels  qu’ils 
étaient  connus  à l’époque  où  M.  Gray  publia  sa  méthode,  nous  recon- 
naîtrons qu'ils  n’ont  qu’un  seul  caractère  commun , que  l’on  retrouve 
encore  dans  d'autres  familles  : tous  sont  termines  en  arrière  par  deux 
siphons  disjoints  dans  toute  leur  longueur  ; mais  un  caractère  d’une 
aussi  grande  étendue  perd  toute  sa  valeur,  surtout  s’il  se  reproduit  dans 
d’autres  groupes.  M.  Gray  aura  cru  sans  doute  que  ce  caractère  n’était 
pas  le  seul , mais  en  cela  il  a commis  une  erreur.  Nous  allons  le  prouver 
par  un  examen  rapide  de  tous  les  genres  agglomérés  dans  la  famille  des 
Tellinides. 

PsAMMOBu.  — Coquille  à ligament  externe.  Animal  à deux  longs 
siphons , presque  égaux  ; feuillets  branchiaux  , inégaux , plissés  trans- 
versalement et  appliqués  l’im  sur  l’autre. 

2*^  Gari.  — Genre  emprunté  à Schumacher,  mais  après  lui  avoir  fait 
subir  une  modification  qui,  le  réduisant  à moitié,  lui  donne  pour  type  un 
groupe  particulier  de  Tellines. 

3°  ÏELLiNÀ.  — Ce  genre  ne  conserve  pas  toute  l’étendue  que  nous  lui 
avons  donnée  depuis  longtemps.  M.  Gray  y admet  comme  nous  les 
Tellinides  de  Lamarck , mais  il  en  fait  s’ortir  les  deux  genres  suivants  : 

4°  Arcopagia,  — Nous  avons  étudié  l’animal  de  l’espèce  qui  sert  de 
type  à ce  genre  (Tellina  crassa)^  et  nous  pouvons  affirmer  qu’il  ne 
diffère  en  quoi  que  ce  soit  des  autres  Tellines. 

5”  Strigilla, — ^M.  Gray  admet  ce  genre  pour  y ranger  le  Tellina 
carnaria  et  quelques  autres  espèces,  uniquement  parce  que  ces  coquilles 
sont  couvertes  de  stries  diagonales.  A part  ce  caractère,  sans  valeur  à 
nos  yeux , ces  espèces  ne  diffèrent  en  rien  des  Tellines , et  doivent  y 


366 


ONZIÈME  FAMILLE. 


rentrer;  si  Ton  admettait  un  pareil  genre , il  faudrait , pour  être  consé- 
riuent,  en  établir  beaucoup  d’autres  non  moins  inutiles,  par  exemple, 
pour  le  Lucina  divaricata^  pour  le  Cytherea  tesUidinalis . pour  le  Car- 
dîum  Æolicim  , etc.,  c’est-à-diro  que  de  pareils  genres  ne  sont  propres 
qu’à  encombrer  la  science  et  à lui  nuire. 

6®  Semble  [Amphuiesma  species  prima  , Lamk.),  — Nous  venons  de 
traiter  de  ce  genre,  il  est  devenu  naturel , grâce  aux  nombreuses  ré- 
formes qu’il  a subies , et  il  est  fâcheux  que  M.  Gray  ait  cru  devoir  y 
joindre  un  genre  bien  distinct  nommé  Cumingia  ps^v  M.  Sovverby. 

7®  Ahenaru.  — Ce  nom  a été  proposé  , en  1811,  par  M.  Megerie  , 
pour  les  coquilles  du  genre  Lavignon  de  Cuvier.  Ce  nom,  adopté  par 
M.  Gray,  doit  disparaître  cependant:  car  il  y a déjà  un  genre  de  ce 
nom  dans  les  ouvrages  de  Linné  pour  des  Annéiides.  Ce  genre  a été 
nommé  Tn'gonella  par  Da  Costa;  ce  dernier  nom  doit  donc  lui  rester. 
Quel  que  soit  le  nom  du  genre,  il  ne  peut  rester  dans  la  famille  des 
Teilinidés;  il  en  est  repoussé,  non  seulement  par  le  ligament  interne 
de  la  coquille , mais  encore  par  la  troncature  de  la  branchie  et  sa  soudure 
à la  palpe  interne. 

8°  Abra.  — Ce  genre  a été  créé , en  1817,  par  Leach , mais  laissé 
dans  ses  manuscrits,  il  n’a  point  été  publié,  si  ce  n’est  par  M.  Gray, 
dans  l’ouvrage  dont  nous  nous  occupons.  Nous  réprouvons  de  la  ma- 
nière la  plus  formelle  cette  tendance  à considérer  des  manuscrits 
ignorés  du  inonde  savant  comme  des  ouvrages  authentiques , eide  vou- 
loir leur  en  donner  l’autorité.  Aussi  nous  rejetons  ce  genre  Abra  de 
Leach,  et  nous  admettons  le  genre  Syndosmye  de  M.  Recluz,  proposé 
pour  les  mômes  coquilles  beaucoup  plus  tard , parce  qu’il  était  impos- 
sible à M.  Recluz  de  connaître  le  contenu  des  manuscrits  de  Leach, 
égarés  pendant  trente  ans.  L’animai  de  ce  genre  a de  grands  rapports 
avec  celui'  du  Lavignon , mais  tous  deux  diffèrent  de  ceux  des  genres 
qui  précèdent  et  qui  suivent.  Il  doit  donc  aussi  sortir  de  la  famille  des 
Telliscides. 

9"  Donax.  — Nous  verrons  bientôt  que  ce  genre,  par  son  animal  et 
sa  coquille,  est  fort  différent  de  tous  les  autres;  les  branchies,  les 
palpes,  les  siphons,  ne  ressemblent  pas  à ces  mêmes  organes  dans  les 
genres  qui  précèdent. 

10®  Iphigexia  [Capsa,  Lamk.).  — Nous  avons  eu  sous  les  yeux  un 
animal  de  ce  genre,  et  nous  ne  lui  avons  trouvé  aucune  différence  avec 
celui  des  Donaces. 

1 1 ® Galathea,  — M.  Raug  a fait  connaître  l’animal  de  ce  genre , et 
nous  sommes  surpris  de  le  rencontrer  içi , car  par  ses  branchies , ses 


LES  TELLÏNIDES.  ^67 

palpes  et  ses  siphons,  il  diffère  des  autres  genres  de  la  famille  des 
■Tellinidcs. 

11  résulte , de  ce  que  nous  venons  d’exposer,  que  M.  Gray  confond 
dans  une  seule  famille  des  genres  qui  doivent  en  constituer  cinq.  La 
première  pour  le  genre  Psammobhi  ; la  seconde  pour  le  genre  Tellina  , 
augmenté  des  Gari,  des  Arcopagia  et  des  St7'igilla  ; la  troisième  pour  les 
Amphidesmes,  les  Cumingies.  les  Lavignons  et  les  Syndosmyes  ; la 
quatrième  pour  les  genres  Donace  et  Capse ; et  la  cinquième,  enfin, 
pour  le  genre  Galaihea. 

De  tous  ces  genres , qui  ne  peuvent  rester  ensemble , nous  n’en  con- 
servons que  deux  dans  la  famille  des  Tellines,  et  tous  deux  se  joignent 
par  un  grand  nombre  de  caractères  communs. 

Lamarck  rapportait  à son  genre  Pétricolele  Tellma  fragilis  de  Linné; 
ayant  étudié  l’animal  de  celte  espèce  pendant  noire  séjour  en  Algérie  , 
nous  avons  reconnu  en  lui  un  genre -très  différent  des  Pétricoles  et 
voisin  des  Tellines.  Ce  genre , auquel  nous  imposons  le  nom  de  Fragilia , 
est  le  seul  qui  se  joigne  aux  Tellines,  pour  entrer  dans  la  famille  dos 
Tellinidcs. 

Ainsi  réduite,  cette  famille  contient  des  coquilles  Iransvcrses , oblon- 
gues  ou  obrondes,  généralement  minces  et  aplaties,  un  peu  bâillantes 
en  avant  et  en  arrière  , à bords  minces  et  tranchants  , ayant  presque 
tontes  un  pli  irrégulier  sur  le  côté  postérieur.  Une  charnière  étroite 
porto  deux  dents  cardinales  petites,  divergentes,  et  très  souvent  des 
dents  latérales.  Un  ligament  externe  s'allonge  sur  le  bord  dorsal;  les 
impressions  musculaires  médjocres  sont  écartées  et  se  rattachent  Tune 
à i’uütro  au  moyen  d’une  impression  palléale,  dont  la  sinuosité  posté- 
rieure est  très  grande,  horizontale , ou  un  peu  obliqua  et  toujours  dilatée 
dans  le  milieu. 

Les  animaux  de  la  famille  des  ïellinides  ont  les  lobes  du  manteau 
désunis  jusque  vers  l’extrémité  postérieure  du  bord  ventral;  les  bords 
de  cet  organe  portent  des  tentacules  courts  et  coniques  ou  plus  allongés 
et  tronqués  au  sommet.  En  arrière,  l’animal  so  prolonge  en  deux  siphons 
inégaux,  grêles,  très  extensibles , terminés  en  une  ouverture  simple  ou 
garnie  do  tentacules  courts , simples  et  coniques;  les  palpes  labiales  sont 
très  grandes,  triangulaires,  àcôtéspresque  égaux  et  présentant  une  surface 
presque  égale  à celle  des  branchies.  Branchies  petites , étroites  , placées 
l’une  à côté  de  l’autre  ; les  feuillets  internes,  plus  grands,  tombant  de 
chaque  côté  du  corps  ; les  externes,  plus  étroits  et  plus  courts , se  rele- 
vant vers  le  dos.  L’animal  so  meut  au  moyen  d’un  pied  comprimé, 
triangulaire,  tranchant,  jouissant  de  mouvements  très  divers,  favorables 


3G8 


ON’ZIÈME  FAMILLE. 


pour  creuser  le  sable  ou  la  vase , et  y préparer  une  demeure  à l’animal. 
Les  animaux  de  la  famille  des  Tellinides  sont  littoraux  ; ils  aiment  les 
plages  vaseuses  ou  sableuses  recouvertes  d’une  faible  épaisseur  d'eau; 
cependant  il  y a quelques  espèces  qui  se  cachent  à de  plus  grandes 
profondeurs. 


GENRE  TRENTE-SIXIÈME. 

FKAGIIiIE.  Fragilia.  (Deshayes.) 

P],  la.  f.  i3.  14.  i5. 

CARACTÈRES  GENERIQUES. — Animal  ovale , subtrigone , trans- 
verse, épais  ; les  lobes  du  manteau  désunis  jusque  près  de  V extré- 
mité postérieure  et  garnis  dans  presque  toute  leur  circonférence 
d’une  rangée  de  tentacules  très  courts , coniques  et  régulière.- 
ment  espacés;  deux  siphons  inégaux  disjoints  dans  toute  leur 
longueur,  l’anal  plus  grêle  et  de  moitié  moins  long  que  le  bran- 
chial , revêtus  à la  base  d’une  couche  d’épiderme  et  terminés 
par  une  ouverture  petite  garnie  de  huit  tentacules  cylindracés , 
gros  et  obtus.  Palpes  labiales  très  grandes,  triangulaires; 
masse  abdominale  épaisse  surmontée  d’un  pied  petit  aplati , 
triangulaire;  branchies  inégales,  la  paire  interne  tombant  de 
chaque  côté  du  corps,  la  paire  externe  redressée  vers  le  dos, 
toutes  deux  se  réunissant  au-dessous  et  en  arrière  du  pied. 

Coquille  ovale,  subtrigone,  transverse,  inéquilatérale,  un 
peu  bâillante  de  chaque  côté  ; obtuse  et  plus  courte  du  côté 
antérieur;  le  côté  postérieur  triangulaire  portant  un  pli  symé- 
trique le  long  du  bord  dorsal.  Charnière  ayant  deux  dents 
courbées  et  divergentes  sur  chaque  valve  ; elles  sont  égales  sur 
la  valve  droite , inégales  sur  la  gauche  ; la  plus  grande  de  cette 
valve  5 bilobée  et  cordifonne  ; ligament  externe  petit , peu  sail- 
lant; impression  palléale  rapprochée  du  bord,  sinueuse  en 
arrière  ; sinuosité  transverse  dilatée  vers  le  milieu. 


LES  TELLINIDES.  36g 

SYNONYMIE  GEpdiRiQrE.  — TelUna , Linné,  Chemnitz, 
Schrœtei’,  Gmelin,  Poli , Wood , Dillwyn , BroMii,  Ttirton  , 
Scacchi,  Fleming,  Philippi,  Ilnniey.  — Pelrlcola.  Lamarck  ^ 
Sowerby,  Payraudeau,  Collard-des-Cberres , Deshayes,  Mi- 
chelotti , Reeve,  Hanley,  Sismonda.  — Venus ^ Fabricius.  — 
Psammoiea,  Lamarck.  — Psammohia  , Ikirton,  Thorpe. 

OBSERVATIONS. — Liniié  a inscrit  dans- sa  édition-  du  S?/siema 
ixalurœ , sous  le  nom  de  Tellina  fragilis , une  coquille  de  la  Méditer- 
ranée et  de  rOcéan  d’Europe,  qui  n’offre  passons  les  caractères  des 
véritables  Tellines;  aussi  le  savant  Olhon  Fabricius,  dans  sa  Faune 
du  Groenland,  publiée  en  1780  , .rangea  l'espece  do  Linné  dans  le  genre 
Venus  ; celte  classification  n'ctait  peut-être  pas  préférable  à la  première  ; 
mais  elle  prouve  au  moins  que  le  naturaliste  qui  la  proposa  avait  aperçu 
dans  la  coquille , dont  il  est  question  , des  caractères  qui  la  distinguent 
des  Tellines.  Cependant  l’opinion  do  Linné  prévalût,  comme  le  témoi- 
gnent les  ouvrages  de  Chemnitz,  de  Scliroetcr,  de  Gmelin  , de  Poli , de 
Wood,  de  Dillwyn,  etc.  Si  Poli  eiU  été  moins  attaché  au  système  de 
Linné,  il  eut  été  en  état,  plus  que  personne,  do  reconnaître  dans  le 
Tellina  fragilis  , des  caractères  distinctifs  ; puisqu'il  en  eut  l’animal  vi- 
vant sons  les  yeux  et  qu71  le  fil  représenter-  assez  exactement  dans  son. 
grand  ouvrage. 

Lamarck  avait  défini  le  genre  TcUine  d'une  manière  plus  rigoureuse 
que  ses  devanciers , et  à cause  de  cela  il  dut  en  rejeter  le  Tellina  fragiUs. 
11  lui  trouva  à peu  près  les  caractères  de  son  genre  Pétricole,  et  dès 
lors  il  l‘y  introduisit,  sans  s’apcrco\’Uirquerunc(îo  ses  variétés  était  déjà 
comprise  par  lui  parmi  les  espèces  du  genre  Psammobie.  Cette  nouvelle 
opinion  de  Lamarck  à son  lourprévalutchezun  certain  nombre  de  natu- 
ralistes, tandis  que  celle  de  Linné  persista  chez  d’autres;  et  si  l'on  comp- 
tait les  auteurs  qui  ont  partagé  l’uno  ou  l'autre  de  ces  opinions  , on 
verrait  qu’ils  sont  en  nombre  à peu  près  égal.  Parmi  le  petit  nombre  de 
concliyliologistes  qui  n’ont  pas  admis  soit  l'opinion  de  Linné,  soit  celle 
de  Lamarck,  nous  devons  citer  Turlon  et  M.  Thorpe,  qui,  dans 
leurs  ouvrages  sur  les  coquilles  marines  de  la  Grande-Bretagne , intro- 
duisirent le  Tellina  'fragilis  dans  le  genre  Psammobie. 

Lorsque  l’on  cherche  les  motifs  qui  ont  guidé  les  naturalistes  dont 
nous  venons  de  parler  ; lorsque  l’on  étudie  avec  soin  les  observations 
consignées  dans  leurs  ouvrages  au  sujet  du  Tellina  fragilis,  on  se  rend 
compte  difficilement  des  opinions  qu’ils  ont  adoptées  ; car  aucune  d'elles 
T.  I.  2“  PARTIE.  24* 


ONZIÈME  FAMILLE. 


370 

ne  peut  se  justifier,  si -ce  n’est  celle  do  Linné , qui  réunit  en  sa  faveur 
le  plus  grand  nombre  de  faits. 

Si  l’on  compare  le  Tellina  frogilis  aux  Venus  , on  verra  d’un  côté  des 
coquilles  dont  le  test  est  solide , dont  les  valves  sont  closes  et  qui  portent 
constamment  trois  dents  à la  charnière;  d’un  autre,  une  coquille, 
ayant  le  lest  mince,  les  valves  baillantes, en  avant  et  en  arrière,  et  la 
charnière  munie  de  deux  dents  seulement.  Les  Pétricoles  présentent 
beaucoup  mieux  des  caractères  analogues  à- ceux  de  la  coquille  que 
nous  examinons;  elles  sont  généralement  milices,  et  leur  charnière  ne 
possède  aussi  que  deux  dents  cardinales , mais  dont  la  forme  est  toujours 
différente  de  celle  du  Tellina  fmgilis.  Quant  aux  Psamraobies,  elles 
sembleraient  avoir  plus  d’analogie,  dans  leurs  caractères^  avec  le  Tel- 
Imafragilis;  cependant  ôn  s’aperçoit,  uu  premier  coup  d’œil,  que  cette 
coquille  ne  peut  entrer  dans  ce  genre  ; car  il  ne  contient  que  des  espèces 
aplaties , oblongues , dont  la  forme  se  rapproche  do  certains  Solecurtes , 
et  si  nous  examinons  la  charnière,  nous  y trouvons  aussi  deux  dents, 
quelquefois  une  seule , mais  dont  la  forme  et  la  disposition  diffèrent 
essentiellement  déco  que  l’on  remarque  dans  le  Tellina  fragilis.  11  nous 
reste  à examiner  maintenant  s'il  existe  des  différences  suffisantes  pour 
séparer  cetlo  espèce  du  genre  ïelüne.  Nous  allons  voir  comment, 
dans  ce  dernier  genre,  la  charnière  se  modifie  en  so  simplifiant; 
comment  les  dents  latérales  disparaissent  insensiblement , et  comment 
enfin  les  dents  cardinales  elles-mêmes  subissent  quelques  changements 
dans  leur  forme;  mais  nous  verrons  aussi  que  les  Tellines  restent  avec 
quelques  caractères  constants,  qui  permettent  de  les  reconnaître  avec 
facilité.  L'un  de  ces  caractères,  le  plus  saillant,  consiste  dans  co  pli 
irrégulier  qui  parcourt  le  coté  postérieur  cl  vient  aboutir  à l'angle  infé- 
rieur et  postérieur  des  valves.  Ce  pli  caractéristique  n 'existe  jamais  dans 
le  Tellina  fragilis  et  quelques  autres  espèces  qui  doivent  entrer  dans  le 
même  groupe.  Si  la  charnière  est  réduite  à deux  dents,  ainsi  que  cela 
a lieu  pour  un  assez  grand  nombre  de  Tellines,  ces  dents  conservent 
néanmoins  une  forme  qui  leur  est  propre  et  qui  ne  se  montre  pas  dans_ 
les  véritables  Tellines  ; cependant  on  ne  peut  disconvenir  que  Linné , 
en  rangeant  le  Tellina  fragilis  parmi  les  autres  Tellines.  a montré  celte 
sagacité  qui  lui  est  habituelle , et  au  moyen  de  laquelle  il  a deviné, 
d’une  manière  surprenante,  des  rapports  que  d'autres  naturalistes  n’au- 
raient pas  entrevus. 

Déjà  la  seule  comparaison  des  coquilles  des  divers  genres , dans  les- 
quels les  conchyliologisles  ont  rangé  le  Tellina  fragilis , prouve  que 
cette  espèce  ne  peut  leur  appartenir;  mais  si  nous  venons  ajouter  dans 


LES  TELLINIDES. 


371 

la  question  des  caractères,  empruntés  à l’animal,  d’après  la  description  et 
les  figures  de  Poli,  il  deviendra  bien  plus  évident  que  le  TelUna  fragilis  ne 
peut  rester  dans  aucun  des  genres,  où  Ton  a essayé  de  le  ranger.  En 
effet,  les  bords  du  manteau,  à peine  exsertiles , sont  garnis  d’une  rangée 
de  papilles  grosses  et  coniques , très  courtes , rapprochées , et  qui  ne 
ressemblent  en  rien  aux  tentacules  cylindriques  et  tronquées  qui  exis- 
tent sur  le  manteau  des  Tellines.  Les  siphons  sont  fort  différents  dans 
les  deux  sortes  de  Mollusques  que  nous  comparons;  nous  les  verrons 
de  deux  sortes  dans  les  Tellines  ; ou  ils  sont  très  grêles  et  presque  égaux, 
et  alors  leur  ouverture  terminale  est  simple,  ou  ils  sont  très  inégaux , 
et  l’un  d'eux  , le  plus  court,  est  terminé  par  quelques  courtes  digita- 
tions. Dans  le  TeUina  fragilis,  les  siphons  sont  plus  inégaux  que  dans 
le  premier  groupe  des  Tellines.  et  beaucoup  moins  que  dans  le  second, 
et  ces  organes,  plus  épais,  plus  charnus , ont  leur  ouverture  garnie  d’un 
petit  nombre  de  tentacules  cylindracées. 

Toutes  les  observations  que  nous  venons  de  rapporter  nous  ont  dé- 
terminé à créer  un  genre  nouveau  pour  le  TeUina  fragilis  de  Linné; 
cette  création  était  une- conséquence  naturelle  dè  l’impossibilité  où  ilous 
nous  trouvions  de  placer  convenablement  un  Mollusque , dont  les  carac- 
tères ne  s’accordent  pas  exactement  avec  ceux  des  autres  genres  connus. 
Ayant  eu  occasion,  pondant  notre  séjour  sur  les  côtes  de  l’Algérie, 
d’observer  vivant  l'animal  du  TeUina  fragilis , nous  le  désignâmes  sous 
le  nom  générique  de  Diodonte,  et  c’est  sous  cette  dénomination  que 
nous  en  fîmes  graver  la  figure.  Nous  avons  dû  plus  lard  en  choisir 
une  autre  ; car  Schumacher,  dans  son  essai  d’une  nouvelle  classifica- 
tion des  Vers  testacés,  avait  proposé  ce  nom  pour  un  genre,  auquel  il 
donne  pour  type  le  SoUn  minutus  de  Linné.  Ce  genre  de  Schumacher 
ne  pouvait  être  accepté , ce  Solen  minutus  appartenant  incontestable- 
ment au  genre  Saxicave  de  Lamarck;  il  devenait  possible  d’emprunter 
son  nom  au  genre  inutile  du  conchyliologue  danois,  pour  l’appliquer 
à un  genre  mieux  défini  ; mais  il  résulterait  de  là  quelque  confusion 
dans  la  nomenclature;  pour  l’éviter,  nous  proposons  à notre  genre  le 
nom  de  Fragilia. 

Les  Fragilies  sont,  des  coquilles  ovales-lransverses , subtrigones, 
renflées,  à crochets  plus  saillants  que  dans  les  Tellines  ; le  côté  an- 
térieur est  le  plus  court , il  est  très  obtus  et  courbé  en  portion  d’ellipse  ; 
le  côté  postérieur  est  triangulaire,  il  se  termine  en  un  angle  obtus, 
auquel  aboutit  une  légère  sinuosité  des  valves,  mais  cette  sinuo- 
sité est  symétrique,  c’est-à-dire  semblable  sur  chacune  d’elles.  Les 
valves  ne  se  joignent  pas  exactement  sur  toute  leur  circonférence;  elles 


372 


ONZIÊMK  FAMll.lJ-:. 

sont  légèrement  baillantes  en  avant  et  en -arriére;  leurs  bords  sont 
minces,  tranchants  et  simples.  La  surface  extérieure  est  revêtue  , prin- 
cipalement vers  les  bords,  d’un  épiderme  mince  et  grisiUro,  qui  dispa- 
raît vers  les  crochets.  Celte  surface  est  ornée  d’un  grand  nombre  de 
fines  lamelles  Iransverses,  plus  ou  moins  régulières , dans  l'inlerAalle 
desquelles  on  aperçoit  des  stries  longitudinales , très  fines  et  plus  ou 
moins  apparentes,  selon  les  individus  ou  suivant  les  espèces. 

La  surface  intérieure  nous  offre  en  avant,  située  le  long  du  bord 
aatérieur,  une  impression  musculaire  d’une  médiocre  étendue  , ovalaire , 
mais  dont  le  bord  interne  est  souvent- sinueux.  L’impression  musculaire 
postérieure  est  en  proportion  plus  grande;  elle  est  obrondo,  subsemilu- 
naire  ; elle  est  située  à une  distance  à peu  près  égale  de  la  charnière  et 
de  l’extrémité  postérieure  des  valves.  L’impression  pailéale  quitte  l’ex- 
trémité inférieure  de  l’impression  musculaire  antérieure,  se  rapproche 
beaucoup  du  bord  libre  des  valves,  l'accompagne  jusqu’auprès  de  l’angle 
postérieur:  puis  cette  impression  rentre  en  elle-même  pour  former 
une  sinuosité  interne,  qui  se  détache  promptement  de  la  portion  ven- 
trale , pour  so  recourber  à la  hauteur  de  la  charnière , se  relève  ensuite 
pour  gagner  l’impression  musculaire  postérieure , après  avoir  produit 
une  double  inilexion. 

La  charnière  conserve  des  caractères  constants  : elle  est  étroite,  elle 
présente  au-dessous  des  crochets  deux  dents  égales  et  divergentes  sur 
la  valve  droite  et  deux  dents  inégales  sur  la  valve  gauche;  la  grande 
dent  de  la  valve  gauche  est  cordiforme  ou  plutôt  büobée.  Dans  l’une  et 
Vautre  valve  les  dents  cardinales  sont  courbées  sur  elles-mêmes  et  sail- 
lantes, un  peu  à la  manière  de  celles  des  Corbiiies.  Un  ligament  externe, 
peu  saillant  et  médiocrement  allongé,  s'attache  à des  nymphes  assez 
grosses,  très  souvent  taillées  en  biseau,  de  manière  à offrir  une  pins 
grande  surface  à l'insertion  de  la  portion  interne  du  ligament,  en  sorte 
que,  dans  quelques  espèces,  ces  nymphes  pourraient  être  comparées  à 
celle  des  Thracies.  ' 

Pendant  notre  séjour  en  .\lgérie  , nous  avons  observé  vivant  l’animal 
de  notre  nouveau  genre,  et  nous  avons  pu  le  comparer  avec  celui  des 
Pétricoles  et  celui  des  Tellines;  nous  Pavons  trouvé  différent,  mais 
beaucoup  plus  du  premier  de  ces  genres  que  du  second;  nous  pouvons 
donc  affirmer  que  le  Telliua  fnt'gilis  de^ Linné,  Petricoîa  oG/u*o/^i/c’a  de 
Lamarck,  n’estpoint  du  tout  une  Pétricole,  et  doit  môme.appartenir  à une 
autre  famille.  H n’oslpas  non  plus  une  Tellino,  mais  il  a de  nombreuses 
analogies  avec  ce  genre  et  constitue  avec  lui  une  famille  naturelle. 

Vdinmal  d\i  Fragilia  fragilis  est  ovale,  trigone,  assez  épais;  son 


LES  TELLINIDES. 


373 

manteau  même  est  peu  transparent,  ses  bords,  épaissis  par  un  muscle 
orbiculaire,  sont  garnis  d’un  seul-  rang  do  tentacules  très  courts-,  coni- 
ques, très  rapprochés,  et  par  conséquent  très  nombreux;  ces  bords 
sont  disjoints  dans  toute  la  longueur  du  bord  ventral  depuis  l’extrémité 
du  muscle  adducteur  antérieur  jusque  vers  l’extrémité  postérieure.  Les 
deux  lobes  se  réunissent  en  une  commissure  consolidée  par  doux  petits 
muscles  croisés  eu  X.  En  dedans,  sur  le  bord,  interne  du  muscle  orbi- 
culaire, s'élève  de  chaque  cote  une  largo  valvule  palléale  qui  vient 
aboutir  à l'entrée  du  siphon  branchial. 

Les  siphons  sonlassez  épaiset  charnus  ; ils  sont  complètement  séparés 
dans  toute  leur  longueur,  ils  sont  inégaux  en  longueur  et  on  diamètre. 
Le  siphon  branchial  est  le  plus  gros  et  le  plus  long  ; une  couche  épider- 
mique ridée  , grisâtre,  le  revêt  à sa  base  ; son  extrémité  libre  est  garnie 
d'une  seule  série  de  six  tentacules  cylindracés  et  obtus.  Le  siphon  anal 
est  de  moitié  plus  court  que  son  congénère';  il  est  d’un  blanc  laiteux , et 
l'on  remarque  six  lignes  d’un  blanc  opaque,  parfaitement  symétriques  et 
régulières  qui , en  aboutissant  sur  le  bord  do  l'ouverture . semblent  se 
prolonger  en  autant  de  tentacules  courts , coniques  et  plus  épais  que 
ceux  du  siphon  branchial. 

La  masse  abdominale  est  très  épaisse  ; elle  est  surmontée  en  avant 
par  un  pied  petit,  comprimé,  linguiforme>  en  proportion  plus  petit  que 
celui  des  Tellines;  par  sa  grandeur  il  se  rapproche  de  celui  des  Pétri- 
coles , mais  il  reste  plus  plat  et  plus  large. 

La  bouche  est  petite , ovale  , étroite , garnie  de  deux  lèvres  courtes , 
(jui  se  changent  de  chaque  côté  en  une  paire  de  très  grandes  palpes 
membraneuses,  coupées  en  triangle,  presque  équilatérales  ; cependant 
elles  sont  un  peu  plus  longues  que  larges,  elles  couvrent  le  pied  et  une 
partie  de  la  masse  abdominale;  en  arrière,  elles  se  prolongent  et  laissent 
glisser  eptre  elles  l'extrémité  antérieure  du  feuillet  branchial  interne. 

Les  branchies  sont  disposées  comme  dans  les  Laviguons,  c’est-à- 
dirc  que  les  deux  feuillets  sont  à côté  l’un  de  raulre.  L’interne  , le 
plus  grand,  s’applique  sur  la  masse  abdominale  et  descend  dans  la 
cavité  du  manteau;  l’externe,  souvent  plissé  dans  sa  longueur,  se  re- 
lève vers  la  région  dorsale.  La  surface  externe  de  ces  organes  est  lisse  ; 
il  faut  les  examiner,  . en  s’aidant  de  la  loupe,  pour  y découvrir  des  stries 
transverses  très  fines,  produites  par  les  vaisseaux  branchiaux.  En  ar- 
rière du  pied , les  brancliies  , d’un  côté , se  joignent  â celles  de  l'autre 
et  s’avancent  au  devant  de  l’ouverture  du  siphon  anal  ; elles  y rencon- 
trent un  pourtour  membraneux,  auquel  elles  se  soudent;  elles  contribuent 
de  cette  manière  à séparer  la  cavité  du  siphon  anal  de  celle  du  manteau. 


ONZIÈME  FAMILLE. 


374 

Le  cœur  est  situé,  comme  à Tordinaire , dans  la  région  de  l’animal  qui 
correspond  à la  charnière  de  la  coquille.  Contenu  dans  un  péricarde  d’une 
médiocre  étendue,  cet  organe  est  fusiforme,  charnu,  soutenu  par  l'intestin 
qu’il  enveloppe,  et  garni  de  chaque  côté  d'une  oreillette  triangulaire, 
à parois  membraneuses,  excessivement  fines. 

Le  nombre  des  espèces  connues  dans  notre  nouveau  genre  est  peu 
considérable  , trois  espèces  vivantes  et  autant  de  fossiles.  Mais,  parmi 
ces  dernières , il  en  est  une  qui  a son  analogue  vivant , de  sorte  que  le 
genre  contient  seulement  cinq  espèces.  Sous  le  nom  de  Petricola  ren- 
ïncosa,  M.  Krauss  , dans  son  ouvrage  sur  les  Mollusques  de  l’Afrique 
australe,  a fait  connaître  une  espèce,  c’est  la  troisième  du  genre,  qui 
a la  plus  grande  analogie  avec  l'une  des  espèces  fossiles  qui  se  trouve 
dans  les  Faluns  de  la  Touraine; 

Les  espèces  fossiles  sont  propres  aux  terrains  tertiaires  ; il  y en  a 
deux  dans  l'étage  moyen , une  seule  dans  l’étage  supérieur  ; mais  cette 
dernière  descend  aussi  dans  l’étage  moyen  et  se  mêle  aux  deux  autres. 

Des  trois  espèces  vivantes,  l'une  est  des  mers  d'Europe  et  de  la 
Méditerranée;  l’autre  est  du  Sénégal,  et  la  troisième  est  du  cap  de 
Bonne-Espérance.  Les  Mollusques  de  ce  genre  vivent  sur  les  plages 
basses  et  vaseuses  ; souvent  elles  se  creusent  des  trous  dans  l'argile, 
d’où  elles  ne  peuvent  jamais  sortir.  Par  celte  manière  de  vivre  s’explique 
la  petitesse  relative  de  l’organe  du  mouvement,  réduit  à beaucoup  moins 
de  mouvements  que  celui  des  Tellines.. 

Fragilie  de  Linné.  Fragilia  fragilis,  Deshayes. 

PI.  12.  f.  13.  14.  16. 

D,  testa  ovato^trîgona  f transversâ  ^ incerjuilaterali,  tnrgidulâ  ^ alhâ  ad 
apicern  intùst/ue Jlavescente  ^ \ramversîm  striato-himeMosâ  ^ longitu^ 
dinnliter  snhstriatây  striis  teuulssimis  ; iatere  ontico  breviore  ^ lotun- 
dato  ^ postico  stihrostrato  ; cnrdine  bideutnto  ^ altero  deuie-  cordijormi 
tnnximo  wstructo,  Dt^ntibus  înteralibus  nntlîs. 

ToUinaJrngilis,  Linné.  Sy.**!.  liât,  ed.  10.  p,  674,  n®  S;. 

Id  1 inné.  Sysf.  nat.  ed.  la,  p.  1x17,  u®  49» 

T'euns  fragdis,  O,  Fabricius.  Faim.  Grocnl,  p.  41^  4i4* 

Tellina  frngUis.  (llienini'z.  Loücli.  Cab.  t,  0.  p,  95.  pi  9.  f.  S4. 

Id.  S('htœit*r.  E.iil.  l.  a.  p.  646.  n®  6. 

Id.,  Gnu'lin.  Syst.  nat.  ed.  i3,  p,  SaSo.  ti*  6. 

/</,  Poli.  Test.  ntr.  Sit  il.  I k p,  43.  pl.  i5.  f.  aa.  a4. 


LES  TELUNIDES. 


375 

Id.  ülisses.  Trav,  of  Nap.  p.  478.  n"  io5, 

Id,  Wôod.  Gener.  Conch.  p.  148.  n®  7.  . 

{à,  Dillwyn,  Cat.  t.  1.  p.  78.  n®  14. 

Petricola  ùchryleucn,  Lamarck.  Anim.  s.  vert.  Û 5.  p.  5o3,  n"  a.  / 
Psammotea  tarentina.  Lamarck.  Anim.  s.  vert.  t.  5.  p,  5i8,  ri®  7. 
TeUina fragiiis.  Tiirlon.  Conch.  Dîct.  p.  166.  n“  i.  f.  18. 

'Tellina  ju^osa.  Rrown.  Wern,  Soc,  I.  a.  p.  5o6.  pl.  L a. 
Psnmmobia  frogilis.  Turlon.  Coneb.  ius.  Brit.  p.  88.  n®  4.  pl.  7.  f. 
1 1.  la,' 

Id.  Sowfirby.  Généra  of  shells.  n*  i5.  f.  4. 

Petricola  ockroleuca,  Fayraudeau.  Cat.  des  Moll,  de  Corse,  p.  34.  n*  5o. 
pl.  X . f.  9.  to. 

Tellina  fragilis.  Wood.  Ind.  test.  pl.  3.  f.  7. 

Id.  Gray  dans  Wood.  Ind.  lest,  suppl.  f.  6. 

Id.  Collard  des  CheiTCs.  Cat.  desTestulu  Kinist.  p.  16.  u®  x. 

Id.  Deshayps.  Eorycl.  méth.  vers.  t.  3.  p.  747.  n®  a. 

Id.  De.shayes.  Expéd.  scient,  de  Morée,  Zool.  p.  90.  n®  a3. 

Id»  Deshayes  dans  Lamk.  Anim.  s.  vert,  a*  éd.  l.  6,  p.  157.  a. 

Id.  Scacchi.  Cat.  conch.  reg.  Neap.  p.  5. 

Id.  Phdippi.  Ennm.  Moll.  Sicil,  I,  i.  p.  ay.  ii*  la. 

Id.  Maravigna.  Méiu.  p.  LHist,  nat.  delà  Sicile,  p.  74*  n®  n. 
Petricola  ochroleticn.  HanJey.  Ind.  testac.  p.  5a. 

Id.  Fleming,  Brii,  anim.  p.  4'34.  d®478. 

Id.  Môlter.  Index  Moll.  Grjeiil.  p.  ao. 

Id.  Reeve.  Conch.  syst.  t.  i.  p.  74,  pl.  5i.  f.  4. 

Id.  Philippi.  Enum.  Moll.  Sicil.  t.  a.  p.  aa.  n®  la. 
PsammobiafragiHi.T\\M'\\t.TtT\X.m^T.  eoiich.  p.  fia. 

Petricola  ochroUucA.  Thompson.  Krp.  on  lhe  faun.  of  Irel.  p.  afia. 

Id  Catlow.  Conch.  nom.  p.  19.  n®  i 3. 

Pi.aminotea  tarentina.  W’ooà.  Ind.  testac.  a®  suppl.pl.  ii  f.  56. 

Tellina  fragili.s.  Hanley.  Tlie.s.  conch.  6*  part.  p.  SiQ,  n®  i9i,pl.56. 

f.  14.  pl.  60.  f.  149. 

Füssids. 

Tellina fragilis,  Pilippi,  Enum.  Moll.  Sicil.  I,  i.  p.  3o,  n®  10  ; t.  a. 
p.  a3.  U®  la. 

Petricola  fragilis.  Micheîotti.  Brevi  ceiini  d’alcuni  brac.  et  aceph.  p.  36. 
Id.  Sismonda.  Synops.  anim.  ped.  foss.  1*  éd.  p.  ao. 

La  synonymie  de  cette  espèce  en  retrace  l’histoire  et  donne  la  preuve 
de  l’incertitude  des  naturalistes  à son  sujet.  Linné,  avec  sa  sagacité 

'ü 


ONZIÈME  FAMILLE. 


37O 

ordinaire , la  range  parmi  les  Tellines , avec  lesquelles  elle  a , en  effet, 
beaucoup  de  rapports.' Lamarck  au  contraire,  mal  inspiré  cette  fois, 
la  réunit  aux  Pélricoles,  se  confiant  trop  exclusivement  aux  caractères 
de  la  charnière.  Par  un  double  emploi  malheureux  , il  la  reproduit  une 
seconde  fois  parmi  les  Psammotées , démembrement  inutile  des  Psam- 
mobies.  Ces  opinions,  accueillies  par  quelques  zoologistes,  les  partagent 
en  trois  catégories;  ceux  qui,  avec  Linné,  reçoivent  l'espèce  dans  le  genre 
Telline;  ceux  qui,  avec  Lamarck,  l’admettent  dans  les  Pétricoies; 
enfin  ceux  en  plus  petit  nombre  qui  la  rangent  parmi  les  Psammobies. 
L’opinion  préférable  est  celle  de  Linné  . et  nous  l’acceptons  en  la  modi- 
fiant, en  créant  pour  l’esiièce  un  nouveau  genre  très  voisin  des  Tellines. 

Le  Fragilia  fragilis  est  une  coquille  ovale  subtrigone,  plus  bombée 
que  la  plupart  des  Tellines , et  n’ayant  jamais  le  pli  irrégulier  qui  les 
caractérise.  Le  côté  antérieur  est  obtus  , le  postérieur  se  termine  en 
un  angle  assez  aigu;  un  faible  bâillement  se  remarque  aux  deux  extré- 
mités de  la  coquille;  les  crochets  sont  petits  , peu  saillants,  à peino 
obliques;  la  surface  externe  est  couvmied'un  grand  nombre  de  lamelles 
courtes  et  fines,  transverses,  plus  ou  moins  serrées,  selon  les  individus. 
Celte  surface  présente  aussi  une  très  grande  quantité  de  fines  strias 
longitudinales  ruyonnantes , plus  apparentes  sur  les  côtés  que  sur  le 
milieu  des  valves.  Celte  coquille  est  blanche,  teintée  do  jaune  orangé, 
très  pâle  à rintérieur  et  sur  les  crochets.  ■ 

Cette  espèce  est  du  petit  nombre  de  celles  qui , vivant  dans  les  mers 
d’Europe,  passent  â l’étal  fossile  des  terrains  tertiaires  supérieurs  dans 
les  moyens. 


GENRE  TRENTE-SEPTIÈME. 

TEIiXINE.  Tellina.  (Lin.) 

Pl.  i3,  üg.  71  ht  j3,  pl.  14.  L I a 8. 

CARACTKRKs  Gi^NihtiQUEs.  — Animal  ovale  ouobrond,  très 
comprimé  ; les  lobes  du  manteau  réunis  à l’extrémité  posté- 
rieure, et  garnis  dans  toute  leur  circonférence  de  nombreux 
tentacules  cylindriques,  tronqués  ou  dilatés  au  sommet.  Deux 
longs  siphons  inégaux,  grêles,  séparés  dans  toute  leur  lon- 
gueur, à ouverture  simple,  ondulée  ou  garnie  d’un  petit  nombre 


LES  TELLINIDES.  877 

de  gros  tentacules  courts.  Pied  allongé,  triangulaire,  com- 
primé ; bouche  très  petite  ; palpes  labiales  très  grandes  et 
membraneuses,  triangulaires.  Branchies  petites,  inégales, 
subtriangulaires,  lisses;  Tune  , l’interne,  tombant  dans  la  ca- 
vité du  manteau;  l’autre,  plus  petite,  se  relevant  vers  le  dos. 

Coquille  ovale,  transverse  ou  obronde-,  mince,  portant  un 
pli  irrégulier  sur  l’extrémitc  postérieure.  Charnière  étroite  ; 
une  ou  deux  dents  cardinales  sur  chaque  valve  , le  plus  sou- 
vent des  dents  latérales;  impression  palléule  très  profondément 
sinueuse  en  arrière. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Co7ic/La  y Lister. — Pectimculus  ^ 
Lister,  Da  Costa.  — Chaîna  y Rumphius,  Gualtieri,  Adansoii. 

— Peroneciy  Peroneoderma , Poli.  — Angulus  y Megerle.  — 
Omala , Phyîloda , Schumacher.  — TellinideSy  Lainarck , Fé- 
russac,  SnAverby,  Crouch,  Broderip,  etc. — Psammohiay  Turton, 
Philippi.  — Hirigillay  Turton.  — Arcopagiay  Leach  , Brown. 
d’Orbigny,  — Marromay  Leach.  — Solecurhts  [spec,],  Gray. 

— 2 e//zna,  Rondelet,  Aldrovande,  Gesner,  Bonanni,  Gualtieri, 
Linné,  Chemnitz,  Da  Costa,  Muller,  Spengler,  Bruguière, 
Lainarck,  Cuvier,  Blainville,  Sowerby,  Wood,  Swainson. 

OBSERVATIONS.  — Lopsque  Linné  proposa  le  genre  Telliiie  dans  les 
premières  éditions  du  Systeina  mtum , il  trouva  chez  les  naturalistes 
ses  devanciers  un  groupe  de  coquilles,  à peu  près  équivalent  et  portant 
le  même  nom.  Si  l’on  remonte,  en  effet,  aux  ouvrages  de  Rondelet,  de 
Gesner,  d’Aldrovande , ou  remarque  quelques  Tellines,  réunies  presque 
sans  confusion.  Cependant,  si  l’on  s’en  rapporte  à la  description  de  la 
première  espèce  de  Rondelet , il  est  à présumer  que  ce  naturaliste  con- 
fondait parmi  les  Tellines  une  véritable  Donace;  car,  d’après  lui,  les 
bords  des  valves  seraient  dentelés  , ce  qui  n’a  jamais  lieu  dans  les  Tel- 
lines. Aux  espèces  de  Rondelet  fidèlement  copiées,  Gesner  en  ajoute 
deux  autres  qui  appartiennent  incontestablement  au  genre.  Dans  sa  sa- 
vante compilation,  Aldrovande  rassembla  les  diverses  espèces  de  Ron- 
delet et  de  Gesner,  et , contrairement  à ses  habitudes  , il  en  ajouta  cinq 
autres  qui  presque  toutes  proviennent  de  la  Méditerranée.  Lorsque, 
trente  ans  plus  tard , Bonanni  publia  son  ouvrage  sous  le  titre  de  Re~ 


378  ONZIÈME  FAMILLE. 

creatio  mentis  et  ocuîi , il  donna  indistinclement  le  nom  de  Telline  à des 
coquilles  qui , pour  la  plupart , doivent  rentrer  dans  le  genre  des  Do- 
naces  de  Linné.  Lisler,  dans  son  grand  ouvrage^  laissa  subsister  une 
plus  grande  confusion  ; car,  indépendamment  des  espèces  qu’il  répand 
dans  son  genre  fort  incorrect  des  Pétoncles , il  ne  distingue  pas  les  autres 
desDonaces,  des  Crassalclles,  des  Mésodesmes , et  môme  d'un  assez 
grand  nombre  de  Venus.  Si  Lister  a eu  le  mérite  incontestable  de  pré- 
céder Linné  dans  la  création  (je  plusieurs  genres  naturels  , il  faut  con- 
venir qu’il  a complètement  échoué  dans  l’arrangement  'du  plus  grand 
nombre  dos  coquilles  bivalves.  Gualtieri  a été  rimitatcur  do  Lister;  il 
laissa  subsister  une  semblable  confusion  parmi  les  mêmes  objets. 

■ Adanson  a été  le  seul  naturaliste  qui  , avant  Linné,  ait^iherché  à limi- 
ter, d’une  manière  rationnelle , un  genre  Telline  en  lui  assignant  ses 
caractères  bien  observés.  Mais  Adanson,  se  laissant  guider  par  l'ouvrage 
de  Bonanni  , imposa  le  nom  de  Telline  a des  coquilles  que  Linné  , plus 
tard  , rangea  parmi  ses  Donaces.  Quant  aux  Tellines  véritables , .4dan- 
son  en  confondit  quelques  unes  dans  son  genre  Chama  avec  des  Cylhérées, 
des  Venus  et  d’autres  coquilles  appartenant  à différents  genres.  Ainsi, 
dans  la  synonymie  générique,  il  faut  se  souvenir  que  le  genre  Telline 
d’ Adanson  ne  représente  pas  celui  de  Linné,  mais  qu’il  est  l’équiva- 
lent de  celui  des  Donaces. 

Jusqu’à  la  dixième  édition  du  Systema  naturœ,  le  genre  Telline  est 
mentionné,  mais  non  pas  défini , dans  les  ouvrages  de  Linné.  Dans 
celte  édition  que  nous  venons  de  citer,  il  est  caractérisé  par  le  pli 
postérieur  des  valves  , par  les  trois  dents  cardinales, de  la  charnière, 
ainsi  que  par  les  dents  latérales.  Sous  cette  diagnose,  Linné  rassemble 
vingt- huit  es|jècos , qui,  pour  la  plupart,  sont  en  effet  de  véritables 
Tellines;  nous  y remarquons  cependant  une  Psammobie,  une  Lucine 
et  une  Gyclade.  Dans  le  Muséum  Uln'cœ,  Linné  rend  le  genre  plus  cor- 
rect; toutes  les  espèces,  moins  une.  lui  doivent  appartenir,  mais  dans  la 
douzième  édition  dü  Systema,  dans  laquelle  le  nombredes  espèces  a été 
augmenté  aux  dépens  de  la  netteté  du  genre,  il  ajoute  une  Tellina 
inœquivalvis  , qui  n’a  aucun  des  caractères  des  autres  Tellines , do  sorte 
qu'au  lieu  de  trois  genres  confondus , il  y en  a quatre  dans  ce  dernier 
ouvrage.  Toutefois,  il  faut  le  reconnaître,  malgré  les  légères  imperfec- 
tions que  l’on  peut  reprocher  au  genre  Unnéen,  les  Tellines,  telles 
qu’elles  sont,  deviennent , dans  les  mains  du  grand  naturaliste  suédois, 
un  genre  beaucoup  plus  naturel  que  précédemment;  aussi  il  a été 
accepté  par  tous  ceux  des  conchyliologues  qui  ont  écrit  depuis  sur 
le  même  sujet . Leur  tâche  devenait  très  facile , puisqu’il  leur  suffisait 


LBS  TEtLIWIDKS.  379 

de  retirer  du  genre  de  Linné  le  petit  nombre  d'espèces  qui  n’en  offrent 
pas  tous  les  caractères. 

Bruguière  fui  le  premier  naturaliste  qui  osa  porter  la  réforme  dans 
le  système  de  Linné  , et  l’on  peut  dire  qu’il  réussit  dans  bien  des  occa- 
sions à améliorer  la  méthode,  en  y ajoutant  dos  genres,  devenus  néces- 
saires ; ils  eurent  cet  avantage  de  rendre  plus  naturels  ceux  de  Linné 
lui-même.  Ceci  s'observe  particulièrement  pour  le  genre  qui  nous  occupe 
en  ce  moment.  En  effet.  Bruguière  proposa  pour  le  Te/lma 
le  genre  Pandore,  rejeta  parmi  les  Lucines  le  TelUna  dwaricdta,  reporta 
parmi  les  Solens  le  Tellhia  Gan,  et  enfin  proposa  le  genre  Cyclade, 
dans  lequel  vint  so  ranger  naturellement  le  Teîlina  comea.  11  résulta  de 
ces  réformes.que  le  genre  Telline , tel  que  Bruguière  le  présenta  dans 
V Encyclopédie  méthodique , avait  acquis  un  tel  degré  d’exactitude , que 
l’on  devait  espérer  pour  lui  dans  l’avenir  une  stabilité  , fondée  sur  la 
juste  appréciation  de  ses  caractères.  C'est,  en  effet,  dans  les  sages  li- 
mites que  lui  avait  imposées  notre  savant  naturaliste  qu'il  fut  accepté 
par  Lamarck  et  par  le  plus  grand  nombre  des  zoologistes  de  ce  siècle. 

Lorsqu’un  genre  ne  contient  qu’un  petit  nombre  d’espèces  et 
qu’elles  en  conservent  les  caractères  précis  , les  zoologistes  n’éprou- 
vent aucun  besoin  de  le  diviser  ; mais  aussitôt  que  par  de  nouvelles 
recherches  un  genre  s’accroît  d’un  nombre  considérable  d’espèces , on 
voit  alors  se  manifester  un  phénomène  qui  se  présente  dans  presque 
tous  les  genres  nombreux.  Quelques  uns  des  caractères  les  moins  im- 
portants se  modifient  par  des  nuances  extrêmement  graduées , et  l’ob- 
servateur, qui  n'a  pas  sous  les  yeux  toutes  ces  modifications,  croit  trouver 
dans  leurs  points  extrêmes  des  caractères  d’une  assez  grande  valeur, 
pour  former  avec  eux  des  genres  particuliers.  Lamarck,  en  proposant 
son  genre  Teilinide,  a prouvé  qu’il  ne  connaissait  pas  un  assez  grand 
nombre  de  Tellines  pour  reconnaître,  au  moyen  d’une  série  d’observa- 
tions suffisantes,  l'inutilité  de  ce  nouveau  genre.  Les  Tellinides  diffè- 
rent des  Tellines  par  l’absence  des  dents  latérales  de  la  charnière.  Pour 
apprécier  la  valeur  de  ce  caractère , il  faut  réunir  le  plus  grand  nombre 
possible  d’espèces,  soit  vivantes , soit  fossiles,  et  alors  on  s’aperçoit  que, 
dans  un  certain  nombre,  les  dents  latérales  sont  constantes  sur  l’une  et 
l'autre  valve  ; mais  dans  d’autres  les  dents  latérales  disparaissent  com- 
plètement, et  d’une  manière  graduée , des  deux  valves  à la  fois  ; il  est 
des  espèces,  chez  lesquelles  la  dent  latérale  antérieure  manque  d’abord, 
tandis  que  la  postérieure  persiste  encore  ; mais  celle  dernière  disparaît  à 
son  tour,  de  sorte  qu’à  la  fin  du  genre  se  groupent  un  certain  nombre 
d’espèces  qui  ont  des  dents  cardinales,  mais  aucune  trace  de  dents  la» 


38o 


ONZIÈME  FAMILLE. 


térales.  Si",  à mesure  que  les  dents  latérales  disparaissent,  il  s’opérait 
dans  les  autres  caractères  des  modifications  de  la  môme  valeur,  les  zoo- 
logistes se  trouveraient  dans  l'obligation  d’indiquer,  par  autant  de  cou- 
pures génériques,  les  principaux  degrés  constatés  dans  la  série  de  ces 
modifications.  Mais  les  choses  ne  se  i)assent  pas  ainsi , tandis  que  les 
caractères  de  la  charnière  éprouvent  les  changements  que  nous  venons 
de  rappeler  ; les  autres , plus  importants , se  conservent  dans  leur4n- 
tégrité,  et  c’est  d’après  eux  que  le  genre  doit  rester  constitué;^  le  pli 
postérieur,  propre  aux  Teltines  à dents  latérales,  Test  également  à celles 
qui  en  sont  dépourvues;  il  en  est  de  même  pour  les  impressions  mus- 
culaires et  celles  du  manteau  ; elles  offrent  exactement  les  mômes  ca- 
ractères dans  toute  la  série  des  espèces,  quelles  que  soient  du  reste 
les  modifications  de  la  charnière. 

Si  M.  Schumacher  avait  fait  la  série  d’observations  dont  nous  venons 
d’exposer  les  principaux  résultats , il  est  à présumer  qu’il  n'aurait  pas 
proposé  le  démembrement  des  Tellinesen  deux  autres  genres,  auxquels 
il  impose  le  nom  de  Omala  et  do  Phylloda  ; car  il  aurait  vu  comme  nous 
que  ces  divisions  réposent  sur  des  caractères  d’une  faible  valeur,  lors- 
qu’on les  compare  aux  caractères  fondamentaux  du  genre.  Quelle  diffé- 
rence générique  y a-t-il,  en  effet,  entre  le  Tellina  planata^  type  du 
genre  Omala  et  le  Tellina  foHacea,  type  du  genre  Phylloda? 

M.  d’Orbigny  dans  sa  Paléo7ilüiogie  française  a conçu  la  famille  de 
Tellinides  autrement  que  les  autres  classificateurs  : nous  venons  de  le 
constater.  11  ne  sera  pas  sans  intérêt  d'examiner  la  manière  dont  ce 
savant  envisage  le  genre  ïelline  lui-même , le  plus  important  de  cette 
famille.  Au  lieu  de  s’appliquer  à simplifier  le  genre,  M.  d'Orbigny  y 
introduit , d’un  côté,  des  coquilles  quq  tous  les  auteurs  en  ont  toujours 
séparé;  tandis  que,  d’un  autre,  il  en  sépare,  sous  le  nom  d’Jrcopagia , 
des  especes  qu’ils  y admetlenl.  Pour  se  faire  une  idée  de  ce  que 
M.  d’Orbigny  renferme  dans  ses  Tellines , il  faut  consulter  la  syno- 
nymie généFique  qu’il  place  a la  tête  du  genre,  et  l’on  verra  qu'il  y admet 
une  partie  des  Snnguitwlaires  de  Lamarck,  toutes  les  Psammobies, 
les  Psammotées  et  les  Tellinides  de  ce  même  auteur  ; il  y introduit 
aussi  les  genres  Psainmocole,  SoleleUinej  Psammobie  ^ Psammotée  et 
Sanguinolai7'e  de  M.  de  Blainville;  enfin,  pour  mieux  compléter  l’en- 
semble de  son  genre , il  y introduit  les  genres  Lobaria,  Gari,  Omala 
et  Phylloda  de  Schumacher  et  dans  le  but  probablement  de  résumer 
les  caractères  zoologiques  du  genre,  U lui  donne  encore  pour  syno- 
iiyme  le  genre  Peronea  de  Poli.  Il  semble  que  la  citation  des  divers 
■genres , si  singulièreatent  amalgamés , serait  une  critique  suffisante  du 


LliS  TlîLLiMüKS. 


38l 


genre  Tellinede  M.  d’Orbigny;  cependant  nous  croyons  nécessaire  de 
passer  rapidement  en  revue  chacun  des  genres  mentionnés,  et  d'exposer 
les  raisons  qui  les  repoussent  pour  la  plupart  des  Telünes  proprement 
dites. 

Depuis  très  longtemps  nous  avons  proposé  la  réforme  des  Sangui- 
nolaires  de  Lamarck;  quelques  espèces,  en  effet,  présentant  les  ca- 
ractères des  Psammobies , ont  dè  rentrer  dans  ce  genre,  et  pour  nous  le 
genre  Sanguiuolaire  doit  avoir  pour  type  le  San(/ump/aria  rugosa  de 
Lamarck  et  quelques  espèces  analogues/  Mais  nous  pouvons  affirmer 
que,  parmi  les  quatre  espèces  inscrites  dans  VJlïstoire  des  unî'maua;  sa7i5 
vertèbres,  il  n’y  en  a pas  une  seule  qui  doive  entrer  dans  le  genre  Telline. 

Nous  avons  été  le  premier  h faire  apprécier  l'inutilité  du  genre 
Psammoïea.Ge'genre  vient  sefondro  insensiblement  dans  les  Psammobies, 
et  une  fois  que  toutes  les  espèces  do  cos  deux  groupes  sont  réunies , on 
reconnaît  chez  elles  tous  les  caractères  d'un  bon.  genre,  et  nous  verrons 
bientôt  que  l'animal  concourt  à faire  d’elles,  non  seulement  le  type 
d'un  bon  genre,  mais  encore  celui  d’une  famille.  Parmi  ses  Psammotées 
et  ses  Psammobies,  Lamarck  avait  égaré  quelques  Tellines;  il  suffit 
donc  de  les  en  retirer,  pour  laisser  au  genre  toute  sa  netteté.  Nous  avons 
vu  le  genre  Tellinide  de  Lamarck,  reposant  sur  l’absence  des  dents 
latérales;  notisqvons  apprécié  la  valeur  de  cette  modification,  etM.d’Or- 
bigny  s’est  mis  d’accord  avec  nous  pour  le  supprimer. 

M.  de  Blainville  a institué  son  genre  Psammocole,  pour  réunir, 
sous  une  même  dénomination  , les  deux  genres  Psammobies  et  Psam- 
motées de  Lamarck.  I!  divise  ensuite  son  genre  en  trois  sections; 
il  désigne  les  deux  dernières  yvar  les  dénominations  génériques  de 
Lamarck.  Il  semblerait,  d'après  rénonciation  de  M.  d'Orbigny,  que 
M.  de  Blainville  admettrait  h la  fois  les  genres  Psammobies  et  Psam- 
motée,  et  de  plus  un  genre  Psammocole,  différent  des  deux  autres.  Ces 
observations  prouvent  qu’il  est  indisi)en3able  de  citer  avec  exactitude 
dans  des  matières  qui  réclament  la  plus  grande  certitude,  sans  quoi  on 
risque  de  tromper  son  lecteur  et  de  l’entraînor  à do  graves  erreurs. 
Tel  que  le  genre  Sanguiuolaire  est  caractérisé  par  M.  de  Blainville , il 
est  évident  qu’il  constitue  un  double  emploi  des  Psammobies;  par  con- 
séquent, au  lieu  d’introduire  ce  genre  parmi  les  Tellines,  il  aurait  fallu 
le  transporter  parmi  les  Psammobies.  Parmi  les  genres  de  M.  de  Elain- 
ville,  M.  d’Orbigny  cite  encore  ceinides  Soletellinos.  Lesconchyliologues 
savent  que  Linné  avait  rapporté  à son  genre  Solen  quelques  coquilles 
telliniformes , dont  le  SoJeu  Diphos  peut  donner  une  idée;  Chemnifz , 
Bruguière,  Lamarck  et  les  naturalistes  enfin  jusqu’à  M.  de  Blainville, 


382 


ONZIÈME  FAMILLE. 


conservèrent- au  genre  Solen  de  Linné  toute  son  étendue.  M.  de  Blain- 
ville  comprit  le  premier  que  ce  genre  devait  être  réformé , et  il  le  fît  en 
proposant  deux  genres,  celui  cTe  Solecurles  et  celui  de  Soleteilines.  Le 
genre  Solecurte  est  aujourd’hui  ad(^lé  de  tout  le  monde  ; il  est  en  effet 
fondé  sur  de  très  beaux  caractères.  11  n’en  est  pas  de  môme  des  Soletel- 
lines , et  nous  avons  prouvé  par  une  discussion  approfondie.,  que  les 
coquilles  de  ce  genre  ont  tous  les  caractères  des  Psammobies.  Dès  lors 
nous  avons  conclu  à la  suppression  du  genre  SoleLelIine  à la  fusion 
de  ses  espèces  parmi  les  Psammobies. 

Parmi  les  genres  de  M.  Schumacher  il  y en  a deux,  Omala  et  Pliyl- 
loda , qui  doivent  rentrer  dan»  le  genre  Telline  ; quant  au  genre  Lobaria, 
il  doit  rentrer  dans  les  Sanguinolaires  de  Lamarck.  Mais  en  comparant 
les  caractères  de  celle  coquille  avec  ceux  des  Psammobies,  nous  ne 
voyons  pas  de  différence  suffisante  pour  les  distinguer,  et  dès  lors  ce 
genre  Loè^n'a  vient  encore  s'ajouter  à la  synonymie  du  genre  Psam- 
mobia. 

Il  en  est  de  même  du  genre  Gari  de  M.  Schumacher  ; ce  genre  cor- 
respond exactement  à celui  des  Psammobies  de  Lamarck  ; par  conséquent 
il  doit  être  supprimé,  mais  non  en  faveur  des  Tellines,  comme  le  croit 
M.  d’Orbigny. 

Le  genre  Peronea  de  Poli  ne  comprend  pas  seulement  les  Tellines 
de  Linné,  il  renferme  aussi  les  Donaces  , et  par  conséquent  la  citation 
non  restreinte,  faite  parM.  d’Orbignÿ,  de  ce  genre  Peronea,  peut  faire 
supposer  qu'il  l’admet  aussi  tout  entier  dans  son  genre  Telline.  Nous 
allons  voir,  par  la  description  abrégée  de  l'animal  dqs  Tellines  et  par 
celle  des  Mollusques  des  Donaces,  que  Poli,  trompé  par  des  études  in- 
complètes , avait  réuni  des  genres  qui  appartiennent  à des  familles  dif- 
férentes. 

Après  avoir  retracé,  le  plus  brièvement  possible , l’histoiro  des  Tel- 
lines et  des  modifications  qu’elles  ont  subies,  il  est  nécessaire  d’examiner 
dans  quels  rapports  ce  genre  a été  maintenu  dans  les  classifications  les 
plus  importantes.  Nous  ne  parlerons  pas  des  classifications  des  natura- 
listes anciens;  elles  nous  présentent  des  imperfections  qui  résultent 
d’un  trop  petit  nombre  de  faits  et  d’observations;  il  fallait  d’ailleurs  un 
puissant  génie  pour  concevoir  l’ordre  et  l’établir  au  milieu  du  chaos  qui 
régnait  alors  dans  les  ouvrages  des  naturalistes.  Linné  fut  le  législateur 
qui,  grâce  aux  idées  les  plus  simples,  enfanta  la  méthode  naturelle  et  la 
fit  prévaloir  dans  toutes  les  parties  des  sciences  naturelles.  C’est 'donc 
dans  ses  travaux  que  nous  devons  rechercher  d’abord  comment  il  a 
compris  les  rapports  du  genre  qui  nous  occupe.  Linné,  avec  cette  ad- 


LES  TE  LL  IN  IDES. 


383 


inirable  sagacité  qui  caractérise  tous  scs  -travaux,  avait  aperçu  les  rap- 
ports qui  lient  les  Tellincsanx  Solens,  surtout  en  admettant,  parmi  ces 
demlers.  quelques  espères  lellinoïdos,  qui  établissent  un  passage  in- 
sensible entre  les  deux  genres.  La  co(]uil]c  des  ïellines  reste  bâillante 
en  avant  et  en  arrière,  comme  celle  des  Solens,. dont  nous  venons  de 
parler;  mais  les  Tellines  ont  un  pli  postérieur  et  de  plus  des  dents  la- 
térales , dont  les  Solens  sont  toujours  dépourvus.  D'autres  genres  ont 
aussi  des  dents  latérales  à la  charnière , et  Linné  les  considère  comme 
transitoires  entre  les  Tellines  cl  les  Venus  : et  c'est  pour  cette  raison 
que  dans  l'ordre  méthodique  on  trouva  les  Douaces,  les  Madrés  et  les 
Cardiunl  à la  suite  des  Tellines.  Cet  ordre,  conservé  par  presque  tous 
les  naturalistes  classificateurs,  est  adopté  par  Bruguière  dans  les  ta- 
bleaux systématiques,  qui  sont  au  commencement  du  I"  volume  de 
{'Histoire  nuliireüo  des  Vers,  &dnsi  V Encyclopédie  méthodique.  Dans  son 
tableau  élémentaire  de  {'Histoire  des  animaux,  publié  en  1798  , Cuvier 
apporta  quelques  modifications  à la  classification  de  Linné  et  de  Bru- 
guière. Les  Tellines  sont  à la  suite  des  ünips  ; elles  sont  suivies  des 
Bucardes,  des  Madrés  et  des  Venus  ; les  Cames  et  les  Arches  s’entre- 
posent encore  entre  les  Tellines  et  les  Solens.  C'est  ainsi  que  se  trouve 
détruit  ce  premier  arrangement  iinnéen,  qui  a paru  satisfaire  les  exi- 
gences (le  la  science.  Mais  Cuvier  modifia  par  la  suite  ses  opinions, 
comme  nous  lo  verrons  lorsque  nous  parlerons  de  la  première  édition 
du  Règne  animal. 

Peu  de  temps  aprèâ  la  publication  du  tableau  élémentaire  de  Cuvier, . 
Lamarck  présentait,  à la  Société  d'hisLoiro  naturelle  de  Paris,  ses  pre- 
mières tentatives  sur  la  classification  des  coquilles.  La  science,  considé- 
rablement enricliiodo  faits  nouveaux,  éprouvait  chaque  jour  davantage 
la  nécessité  de  réformer  les  genres  de  Linné;  il  fallait  en  diminuer  l’é- 
tendue, en  préciser  les  caractères  dislinctifs,  comparer  entre  elles  toutes 
les  espèces  , pour  éliminer  celles  dont  les  caractères  ne  coïncident  pas 
exactement  avec  ceux  du  genre,  et  cependant  dans  ce  travail  long  et 
pénible,  rester  conslamment  pénétré  de  l’esprit  des  méthodes  du  grand 
législateur  d’Upsal.  Bruguière  avait  commencé  et  Lamarck  continua  avec 
toute  la  supériorité  dTm  grand  observateur,  les  réformes  nécessaires  dans 
la  constitution  des  genres  de  la  classe  des  M{)liusques. 

Les  Capses  et  les  Sanguinolaires.  détachés  des  Solens,  vinrent,  ainsi 
que  les  Grlycimères , s’interposer  entre  les  Tellines  et  les  Solens.  Les 
Lucines  et  les  Cyclades,  séparées  des  Venus  et  dos  Tellines,  furent 
considérées  comme  des  genres  intermédiaires  avec  les  Venus,  et  furent 
mises  à la  suite  des  Tellines.  Les  Donacesen  furent,  malheureusement, 


ON/IÈMK  FAMILLli. 


384 

éloignées,  de  sorte  que  dans  la  série  générale,  les  Tcllines  conservèrent 
à peu  près  les  rapports  que  Linné  leur]  avait  imposés.  Nous  trouvons 
le  genre  à la  môme  place,  et  dans  un  ordre  inverse  dans  le  Système  des 
animaux  sans  vertèbres j que  Lamarck  publia  en  1801  ; il  n'cst  donc  pas 
nécessaire,  que  nous  insistions  davantage  sur  la  classification  proposée 
dans  cet  ouvrage;  nous  n’avons  pas  besoin  de  rappeler  non  plus  que, 
jusqu'alors,  aucune  tentative  n’avait  été  faite  pour  grouper  les  genres 
en  familles,  et  que  Lamarck  fut  aussi  le  premier  qui,  Ù-Amssi  Philosophie 
zoologique,  proposa  de  distribuer  le  Règne  animal  en  familles  naturelles. 
Les  Mollusques  eurent  une  classification,  fondée  sur  tous  les  faits  connus 
à leur  égard;  mais  celte  première  tentative,  excellente  pour  l’époque 
où  elle  fut  faite,  en  attirant  rallenüon  de  tous  les  observateurs,  éprouva 
par  la  suite  des  améliorations  considérables.  Nous  trouvons  dans  la 
série  des  familles  des  Mollusques  acéphales,  une  famille  des  Conques 
rassemblant  neuf  genres,  parmi  lesquels  on  remarque  les  Tellines  entre 
les  Donaces  et  les  Lucines,  par  conséquent  dans  des  rapports  beaucoup 
plus  naturels  que  dans  les  méthodes  précédentes  de  Lamarck.  Quelques 
années  après , Lamarck  améliora  sa  classification  dans  un  opuscule 
publié  en  1812,  sous  le  titre  d' Extrait  du  cours  de  zoologie.  La  famille 
des  Conques  est  conservée  ; mais  elle  est  augmentée  de  deux  genres,  et 
les  Tcllines  se  trouvent  séparées  des  Donaces  par  un  de  ces  genres  nou- 
veaux, nommé  Donacille,  auquel,  plus  tard,  le  môme  auteur  substitua  lo 
nom  d’Ampbidesma. 

Nous  savons  déjà  en  quoi  les  méthodes  de  Cuvier  diffèrent  de  celles 
de  Lamarck.  Ces  différences  se  remarquent  à l’occasion  du  genre  qui 
nous  occupe  ; elles  ne  sont  point  considérables  en  apparence,  mais  elles 
le  sont  si  l'on  prend  en  considération  les  principes  qui  ont  dirigé  les 
deux  pins  grands  naturalistes  do  notre  époque.  Dans  la  première  édition 
du  Règne  animal  de  Cuvier,  la  famille  de  Cardiacés  réunit  onze  genres, 
parmi  lesquels  oii  remarque  les  Tellines  entre  les  Corbeilles  et  les  Lo- 
ripèdes , non  loin  des  Cyades  et  des  Donaces  d’un  coté , des  Lucines  et 
des  Venus  de  l’autre.  Cuvier  attachait  très  peu  d’importance  aux  ca- 
ractères empruntés  aux  coquilles.  Lamarck,  au  contraire,  cherchait  à 
donner  h ces  caractères  toute  leur  valeur,  en  faisant  remarquer  leur 
constance  et  leur  analogie.  Cuvier  voulait  fonder  sa  classification  sur 
les  caractères  des  animaux,  h uneépoque  où,  malheureusement,  ceux  de 
tons  les  genres  n'étaient  pas  connus.  II  en  résulta  que  pour  un  assez 
grand  nombre  Cuvier  manqua  de  guide,  et  sa  méthode  s’en  ressentit, 
car  certains  genres  paraissent  y être  jetés  an  hasard  ; c'est  ce  que  l'on 
remarque  pour  les  Tellines,  qui,  sans  contredit,  et  d'après  les  travaux 


LF.S  TELLÎNÎDES.' 


385 


3e  Poli,  sont  ('•Inignées  fies  Lnripiîdps  et  des  Corbeilles.  Los  Corbeilles , 
en  effet  t se  rapprochent  des  Lucines  dont  les  Loripèdes  ne  sont  qu’un 
démembrement  inutile.  Les  Tcllinesse  trouvent  aussi  très  éloignées  des 
Solens  et  des  autres  genres  qui  ont  avec  elles  le  plus  d’analogie  : par 
conséquent,  à l’époque  où  Cuvier  publiait  la  première  édition  du  Rèyvft 
animal,  il  lui  aurait  été  impossible  de  mettre  les  Tellincs  dans  des  rap- 
ports plus  naturels,  en  les  introduisant  dans  un  autre  groupe  plus  rap- 
proché des  Solens. 

Dans  l’intervalle  de  six  années , qui  sépare  l’extrait  du  cours  du 
sixiègie  volume  de  ['Histoire  des  animaux  sans  vertèbres,  Lamarck  mo- 
difia sa  classification  des  Mollusques  acéphalés,  et  la  porta  au  plus  haut 
degré  de  perfection  qu’il  lui  fut  possible , avant  d’atteindre  le  terme 
de  sa  longue  et  glorieuse  carrière.  Notre  célèbre  naturaliste  ne  se 
contenta  pas  de  démembrer  la  famille  des  Conques , il  sentit  que 
plusieurs  des  genres  qu’il  y comprenait  devaient  entrer  dans  de  nou- 
veaux rapports , et  c’est  dans  le  but  de  satisfaire  aux  besoins  de  la 
classification  qu’il  créa  la  fandlle  des  Nymphacées,  dans  laquelle  il 
rangea  dix  genres  , dont  les  uns,  plus  rapprochés  des  Solens,  forment 
un  premier  groupe  sous  le  nom  de  Nymphacées  solenaires,  tandis  que 
les  autres,  sous  le  nom  de  Nymphacées  tellinaires,  se  rapprochent  da- 
vantage du  type  des- Venus  par  les  derniers  genres  qu'il  contient.  Les 
TelUnes,  dans  cet  arrangement  méthodique,  se  trouvent  entre  les  Psam- 
motées,  les  Tellinides  et  les  Corbeilles.  Les  Lucines  et  les  Donaces  font 
partie  du  même  groupe. 

Beaucoup  de  naturalistes  ont  adopté  cet  arrangement  méthodique  do 
Lamarck  ; à le  prendre , au  point  de  vue  de  la  conchyliologie  propre- 
ment dite,  il  est,  en  effet,  plus  satisfaisant  qu’aucun  autre.  Toutes  ces  co- 
quilles se  joignent  par  un  ensemble  de  caractères  communs  qui  paraît 
assez  satisfaisant,  surtout  si  l’observation  est  plus  superficielle  qu’ap- 
profondie. Il  est  certain  que  les  genres  Sanguinolairo , Psammobie, 
Psammotéc,  Tellinc,  Tellinide,  Donax  et  Capse  ont  entre  eux  une 
analogie  incontestable;  mais  il  n’en  est  pas  de  mémo  des  Corbeilles, 
des  Lucines  et  des  Crassines. 

Si,  au  lieu  de  borner  ses  investigatioiis  à la  coquille,  le  zoologiste 
étend  ses  recherches  sur  les  animaux,  il  acquerra  bientôt  la  preuve  que 
l’arrangement  méthodique  de  Lamarck  ne  peut  subsister  dans  une  mé- 
thode naturelle.  Il  suffirait  pour  cela  d(i  inellre  à profit  Ic.s  observations 
consignées  par  Poli  dans  son  grand  ouvrage  sur  les  Mollusques  des 
Deux-Siciles , et,  sans  se  préoccuper  des  opinions  de  l’auteur,  voir  les 
faits  par  eux-mêmes  et  les  estimer  à leur  juste  valeur.  Poli  trouvait 

9.5* 


T.  1.  PAHTIE. 


ONZIÈMK  FAMILLE. 


mi 

entre  les  Tellines  et  les  Données  de  si  grandes  ressemblantes,  qu'il  pro- 
posa do  réunir  ces  deux  genres  en  un  seul,  sous  lo  nom  de  Perronca. 
Mais  Poli  oubliait  les  faits  les  plus  considérables,  (pi'il  avait  iui-mémo 
exposés . et  d'après  lesquels  les  deux  genres  en  question  sont  parPaite- 
meiit  distincts,  autant  par  les  animaux  que  par  leurs  coquilles.  C’est 
ainsi , pour  n’en  donner  qu’un  exemple,  que  dans  les  Tellines  les  bran- 
chies sont  disposées  exactement  comme  dans  les  Lavignons,  tandis  que 
dans  les  Donaces  ces  organes  ont  la  plus  grande  ressemblance  avec  cæux 
des  Mésodesmes.  Poli  fait  voir  combien  la  terminaison  des  siplions  de 
ces  deux'  sortes  de  Mollusques  est  différente,  puisque  dans  les  Tellines 
ils  sont  à peine  ciliés,  tandis  que  dans  les  Donaces  il  sont  garnis  de  ten- 
tacules branchas,  semblables  à ceux  des  Mésodesmes.  Quant  aox  Lu- 
cinos , que  Laniarck  comprend  dans  le  même  groupe  que  les  Toliines , 
Poli  fait  connaître  l'animal  d'une  espèce  de  la  Méditerranée  tous  Io  nom 
de  Loripes.  Cet  animal  est  tellement  différent  de  celui  des  Donaces  et 
des  Tellines,  que  nous  avons  de  la  peine  à concevoir  aujourd'hui  comment 
les  zoologistes,  armés  do  documents  aussi  précis,  ont  pu  hésiter  aussilong- 
lemps  sur  la  classification  des  Mollusques  que  nous  venons  de  mentionner. 
Cuvier,  comme  nous  l'avons  vu,  malgré  ses  connaissances  plus  approfon- 
dies do  Tanalomiede  ces  animaux,  n’a  pas  été  à l’abri  d’erreurs  semblables 
à celles  que  nous  venons  de  signaler  dans  les  ouvrages  de  Lamarck. 

M.  (le  Blainvilie  emprunta  à Poli  beaucoup  de  caractères  génériques, 
mais  il  no  mit  pas  toujours  à ses  emprunts  toute  l’exactitude  que  l'on 
aurait  dû  attendre  d’un  naturaliste  aussi  expérimenté.  Ce  savant  n’amé^ 
liora  en  aucune  façon  la  classification  des  Tell.nes  et  des  genres  envi- 
ronnants ; il  la  laissa  à peu  près  ce  que  Cuvier  I avait  faite.  En  effet , les 
Tellines  sont  à la  suite  des  Bucardes  et  des  Donaces,  et  elles  sont  suivies 
des  Lucines  et  des  Cyclades.  M.  de  EÜainviile  tombe  dans  une  erreur 
qu'il  eût  été  facile  d’éviter;  il  dit  que  l’animal  des  Tellines  est  entière- 
ment semblable  à celui  des  Donaces.  Pour  avoir  la  preuve  du  contraire, 
il  suffit  de  comparer  les  figures  de  Poli,  et  l’on  acquerra  la  conviction 
que  ces  animaux  different  par  les  caractères  importants  que  nous  avons 
mentionnés  tout  à l’heure, 

M.  Rang,  dans  son  Manuel  de  Cotu-hyUohgie,  n’apporta  point  de  chan- 
gements considérables  dans  la  classification  du  genre  qui  nous  occupe; 
nous  pouvons  dire  que  Cuvier  a agi  de  môme,  lorsqu'il  publia,  en  1 830, 
la  dmixièrae  édition  du  Règne  animal.  Dans  cet  ouvrage , raalbeureuse- 
menl  resté  au-dessous  de  la  réputation  de  son  auteur,  les  Tellines  sont 
maintenues  à la  place  qu’elles  occupaient  en  1817,  dans  la  première 
éilition  du  meme  ouvrage. 


LKS  TKf.UNIDES. 


38^ 

. Presquo  ious  les  naluralistos  qui  yiiin'nl  après  Ciiyier  et-  Lamprk. 
traînés  par  l'exemple  de  ces  doux  grands  zoologistes,  n'appoitèrenl  que 
des  changements  peu  considérables  dans  les  rapports  du  genre  Telline 
avec  ceux  qui  l'avoisinent  le  plus.  Presque  toujours,  ce  genre  est  mis 
dan^  le  qoiUMCt  le  plus  immédiat  avec  les  Donaces  d’un  eôté  cl  avec  les 
Lucines  de  raulro.  Nous-méme  avons  élé  .entratnç  à admettre  eet  ar- 
rangement dans  les  divers  ouvrages  do  Conchyliologie  que  nous  avons 
publiés;  maip  aujourd'hui,  en  présence  des  faits  nombreux  que  nous- 
avons  observés  sur  les  animaux  \ivants  dont  il  est  question,  nous  propo- 
serons des  cliangQments  considérables  dans  les  classifications  adoptées. 
La  nécessité  de  cos  changemenU  découlera  natureUement  de  ce  que 
nous  allons  exposer  sur  les  caractères  extérieurs  desTellincs  etsnr  l’orgfi- 
nisalion  intérieure  de  leurs  animaux. 

Les  Teliines  se  distinguent  facilement  de  toutes  les  autres  coquilles 
lévalves  par  l'aplatissement  considérable  de  leurs  yalves  ; elles  se  re- 
connaissent aussi  à un  caractère  propre,  qui  consiste  en  un  pli  irré- 
gulier, quelquefois  très  prqfond  , qui  règne  le  long  du  bord  postérieur. 
La  forme  générale  de  ces  coquilles  est  variable;  pour  le  plus  grand 
nomltre,  elles  ^iont  oblongues , Iransverses , et  elles  passent  insensible- 
ment d'qne  forme  très  étroite  ù une  forme  ovalaire  et  môme  à une  forme 
ül)ro{jd0.  Ces  ditférences  avaient  déterminé  Lamarck  à diviser  le  genre 
m quelrpjGS  groupes,  pour  faciliter  la  distinction  des  nombreuses  espôce-s. 
Püut-étre  produirait-on  des  subdivisions  plus  naturelles,  eu  employant 
d'aulres  caractères  que  pourrait  fournir  la  eharnicre  ainsi  que  l'impres- 
sion pailéalc.  Toutes  les  Teliines  sont  subéquilatérales;  queltpiefois- les 
vulves  sont  inégales,  Titne  d'elles  étant  un  jkîu  plus  profonde  qiu^  l'autre  ; 
le  i^té  anterieur  est  arrondi  ; le  postérieur  est  souvent  prolongé  en  bec, 
et  prasque  toujours  anguleux  , à cause  du  pli  postérieur  . qui  aboutit  à 
l'angle  inférieur  et  postérieur  des  valves.  Les  côtéi?  sont  bûiilaiils,  mais 
ce  biuliement  u'est  pas  semblable  dans  toutes  les  espèces  ; dans  quelques 
unes,  il  est  assez  considérable,  dans  d’autres,  il  est  si  petit  que  les  valves 
semblent  complètement  fermées.  Les  crochets  , dans  les  Teliines,,  sont 
toujours  petits,  peu  saillants,  extrêmement  rapprochés , peu  inclinés 
en  avant;  ils  dominent  à peine  le  bord  intérieur,  sur  lequel  la  lunulo 
est  rarement  circonscrite;  les  bords  sont  toujours  minces,  tranchants, 
simples;  en  cela,  les  Teliines  sont  très  différentes  des  Donaces,  qui  ont 
toujours  les  bords  finement  dentelés.  Le  corselet  est  généralement  limité 
d’une  manière  nette,  au  moyen  d'une  cote  ou  d'un  pli,  ([ui  descend  du 
côté  postérieur  du  crochet  jusqu’à  l'angle  supérieur  et  postérieur  de 
la  coquille.  "Vers  l’extrémité  antérieure  du  corselet  se  montre,  an  deltors, 


388 


ONZIÈME  EAMIfXE.  • 


un  ligament  externe,  allongé,  convexe,  d’un  brun  corne  plus  on  moins 
foncé.  Ce  ligament  est  solidement  implanté  sur  des  nymphes  aplaties  , 
pou  saillantes,  souvent  même  recouvertes  par  un  rebord  proéminent  du 
cx)rselet.  Dans  quelques  espèces , cette  proéminence  du  corselet  s’exa- 
gère à ce  point  cpie  le  ligament,  tout  en  conservant  les  caractères  pro- 
pres à ce  genre,  paraît  cependant  intérieur,  tant  il  est  profondément 
caché.  Lamarck,  trompé  par  la  disposition  que  nous  venons  de  men- 
tionner, avait  transporté  une  véritable  Telline  dans  la  seconde  section 
de  son  genre  Lutraire. 

Actuellement,  si  nous  ouvrons  ces  coquilles  pour  en  examiner  les  ca- 
ractères intérieurs,  nous  y observerons  quelques  modifications  intéres- 
santes qui  prouvent  la  variabilité  de  quelques  uns  de  ceux  qui  otit  une 
moindre  importance. 

La  charnière  est  supportée  . par  un  bord  cardinal  étroit,  un  peu  élargi 
au  centre,  peu  saillant  au-dedans  des  valves;  ainsi,  c'est  à peine  si  au- 
dessous  de  lui  la  cavité  des  crochets  est  creusée.  Les  espèces,  un  peu 
épaisses,  ont  le  bord  cardinal  plus  détaché,  plus  proéminent , sans  que 
pour  cela  il  augmente  de  largeur  ou  d’épaisseur.  La  charnière  se  com- 
pose le  plus  ordinairement  de  deux  dents  cardinales  sur  chaque  valve; 
ces  dents  sont  divergentes,  petites,  rapprochées  et  presque  toujours  bi- 
fides au  sommet;  elles  ne  sont  point  parfaitement  égales  ; la  dent  cardi- 
nale antérieure  est  souvent  la  plus  grosse.  Ces  dents  sont  plus  ou  moins 
saillantes,  selon  les  espèces.  Dans  quelques  unes,  elles  s’agrandissent 
à CO  point  qu'elles  ressemblent  à la  grande  dent  des  Corbules.  Dans  le 
type  des  Tellinos  le  mieux  caractérisé,  des  dents  latérales  s’ajoutent  aux 
dents  cardinales  ; ces  dents  sont  à peu  près  égales,  seulement  l’antérieure 
est  toujours  plus  près  de  la  charnière  que  la  postérieure  ; cette  dernière 
est  située  à l’extrémité  de  la  nymphe , elle  semble  en  être  la  terminaison. 
Los  dents  latérales  sont  plus  apparentes  sur  la  valve  droite  que  sur  la 
gauche.  On  les  voit  diminuer  insensiblement  d’épaisseur,  surtout  dans 
les  espèces  dont  le  test  est  le  plus  mince.  C’est  alors  que  les  dents  la- 
térales disparaissent  complétomcnt  sur  la  valve  gauche;  le  bord  cardinal 
aminci  s’engage  derrière  les  dents  latérales,  et,  par  ce  moyen,  la  char- 
nière conserve  presque  autant  de  solidité.  Bientôt  les  rudiments  des 
dents  latérales  qui  restaient  dans  les  espèces  que  nous  venons  de  men- 
tionner disparaissent  complètement,  et  la  charnière  est  réduite  aux  dents 
cardinales.  Ce  phénomène  de  la  disparition  des  dents  latérales  se  produit 
non  seulement  dans  les  espèces  Iransverses  et  ovalaires,  mais  aussi  dans 
celles  qui  sont  obrondes,  et  dont  le  test  acquiert  une  plus  grande  épais- 
seur, de  sorte  que  si  l’nn  voulait  grouper  les  espèces  d'après  la'présènCe 


LES  TELLlNiDES.  389 

OU  i'absence  dos  dents  latérales , on  pourrait  ençore  subdiviser  chacun 
des  groupes  d’après  la  forme  extérieure. 

Les  impressions  musculaires  sont  d’une  médiocre  étendue  dans  les 
Tellines  ; fort  écartées  l’une  de  l’autre,  elles  occupent  les  extrémités  de  la 
coquille,  en  restant  dans  la  région  dorsale.  L’impression  musculaire  an- 
térieure est  ovale,  oblougue,  légèrement  courbée  dans  sa  longueur;  située 
près  du  bord  antérieur,  elle  l’accompagne  dans  une  partie  considérable 
de  son  étendue;  quelquefois  elle  est  divisée  à son  bord  interne  par  une 
inflexion  plus  ou  moins  profonde,  ce  qui  la  rend  réniforme.  L’impression 
postérieure  est  généralement  plus  grande,  obronde,  quelquefois  subqua- 
drangulaire  ; elle  est  située  à l’extrémité  du  bord  cardinal,  et  elle  s’avance 
assez  bas  dans  la  largeur  de  rextrémité  poslorieuro.  Les  impressions  des 
muscles  rétracteurs  du  pied  se  montrent  comme  à l'ordinaire  dans  le 
voisinage  des  grandes  impressions  dont  nous  venons  de  parler. 

L’impression  du  muscle  rétracteur  antérieur  existe  à l’extrémité  an- 
térieure et  supérieure  do  l'impression  du  muscle  adducteur  antérieur. 

L’impression  du  muscle  rétracteur  postérieur  so  confond  davantage 
avec  celle  du  muscle  adducteur  de  ce  côté.  On  remarque  au  sommet  de 
la  grande  impression,  immédiatement  au-dessous  de  l’extrémité  du  bord 
cardinal,  un  angle  plus  ou  moins  saillant,  qui  résulte  de  la  présence  du 
muscle  postérieur  du  pied. 

L’impression  palléale  présente  des  caractères  assez  variables  dans  le 
genre  Telline;  cependant,  on  peut  dire  qu’elle  offre  aussi  des  caractères 
constants , qui , joints  à tous  ceux  que  nous  avons  déjà  signalés , contri- 
buent à faire  reconnaître  facilement  le  genre.  Dans  toutes  les  espèces  , 
le  sinus  palléal  postérieur  est  toujours  dilaté  dans  rintériour  des  valves. 
Dans  presque  toutes  Iqs  espèces,  il  remonte  d’arrière  en  avant  jusquedans 
le  voisinage  de  Timpression  musculaire  antérieure;  il  reste,  par  rapport 
aux  valves,  dans  une  position  horizontale  ou  à peine  inclinée  sur  l’axe  lon- 
gitudinal. Dans  une  série  d'espèces,  lo  sinus  palléal  diminue  insensible- 
ment de  longueur,  mais  il  dépasse  toujours  la  charnière,  vers  laquelle  il 
remonte  dans  sa  dilatation.  Ce  sinus,  comme  on  le  voit,  a beaucoup  de 
ressemblance  avec  celui  des  Lavignons , ce  qui  provient  sans  aucun 
doute  de  la  longueur  du  muscle  destiné  à faire  rentrer  dans  l’intérieur 
do  la  coquille  des  siphons  très  allongés. 

Nous  devons  insister  plus  particulièrement  sur  la  forme  de  la  sinuosité 
palléale,  parce  que,  ainsi  que  nous  l’avons  dit  précédemment , le  genre 
Arcopagia  a été  séparé  des  Tellines  au  moyen  d’un  caractère  emprunté 
à cette  sinuosité;  il  est  donc  nécessaire  d’en  faire  apprécier  la  valeur, 
afin  de  mettre  à même  les  conchyliologues  de  juger  de  rimportance  de 


Oi^ZlEME  FAMILLE. 


390 

ce  nouveau  genre , et  de  décidet*  s’il  devra  rester  dans  la  méthode. 

Si , dans  le  plus  grand  nombre  des  Teüinos  , le  bord  inférieur  de  la 
sinuosité  palléale  vient  se  joindre  à la  portion  ventrale  de  l’impression 
du  manteau,  il  est  d'autres  espèces  chez  lesquelles  l’extrémité  antérieure 
do  la  sinuosité  se  détache  du  bord  ventral  dans  une  portion  plus  ou 
moins  longue  de  son  trajet.  Cette  disjonction  se  remarque  non  seulement 
dans  les  espèces  très  étroites,  telles  que  le  Tellina  rostratn  de  Linné, 
par  exemple,  mais  aussi  dans  les  espèces  plus  ovalaires.  Mais  on  peut 
dire,  en  général,  qU'ii  mesure  que  la  forme  dcs'TelIincs  s’arrondit, 
Pextrémité  antérieure  de  la  sinuosité  palléale  so  détache  do  plus  en  plus 
du  lîord  ventral,  et  enfin,  après  une  série  non  interrompue  de  ces  n>0- 
dilicalions,  on  arrive  a une  dernière  espèce  de  Tellino,  Tèllina  crassa 
do  Pennant,  dans  laquelle  toute  la  sinuosité  palléale  est  détachée  du 
bord  ventral.  C’est  cette  dernière  espèce  qui  a servi  de  type  au  genre 
Arcopafjia.  Si  ce  caractère  d'une  sinuosité  entièrenmnt  isolée  se  mon- 
trait brusiiuemcnt  dans  un  groupe  de  ïellines  d'une  forme  |)arliculière, 
et  que  l’animal  traduisît  par  quelques  caractères  spéciaux  ceux  de  la 
conuille,  il  est  évident  qu’il  faudrait  adopter  le  genre  ; 11  se 

trouvciait  justifié  aux  yeux  de  tous  les  zoologistes;  Mais  ce  genre  est 
fondé,  comme  on  le  voit,  sur  une  modification  peu  imporlanlé  et  qui 
f(»raie  l’extrémité  d'une  série  générale,  dont  toutes  les  parties  se  tou- 
chent Cl  se  confondent.  Ainsi  , eu  suivant  à la  rigueur  les  caractères 
imposés  au  genre , il  ne  éerait  pas  possible  d’y  introduire,  à côté  du 
Teîlinn  craüsa,  les  TeUina  Hernies,  sulcata.  scobinalai  lingitn  [élis,  espèces 
qui  cependant  constituent  par  leur  forme  un  groupe  particulier,  duquel 
il  est  impossible  de  délachëC  le  Tellina  crassa. 

L'aninml  des  Tellincs  ressemble  beaucoup  à celui  des  Lavignons  et 
des  Syndosmyes il  présente  cependant  des  caractères  propres,  il  est 
important  de  les  faire  connaître  on  abrégé.  Ces  Mollusques  ont  une 
fitrine  (pii  est  indiquée  par  celle  de  leur  coquille , par  conséquent  ils  sont 
presque  tous  allongés,  irausverses,  très  aplatis;  quelqnBfOis  ils  sont 
ovalaires,  et  môme  il  y en  a d’obronds.  Le  manteau  qui  revêt  l’inté- 
rieur des  valves  est  très  mince , et  il  porto  à sa  circonfcrenco  un  muscle 
orbiculairc  assez  large,  peu  é^jais;  ce  muscle,  en  •s^aiiachanl  à la  co- 
{piille,  y produit  l’impression  palléale  dont  nous  avons  parle.  Sur  les 
bords  nxtéiieurs  de  cet  organe  s’élève  une  rangée  de  tentacules  d’une 
forme  particulière  ^ et  qui  ne  s’est  encore  montrée  dans  aucun  des  genres 
précédents.  Eu  effet , cos^  tentacules  sont  cylindriques,  subitement 
tronqués  aù  sommet  et  mômè  quelquefois  dilatés  commo  un  petit  suc;oir 
à leur  extrémité  libre.  Toutes  lès  espèces  de  Teiiines  sané  exception , 


LK5  TKLLIMDKS. 


391 

soit  des  mers  d’Europe,  soit  de  l’océan  Indien,  que  nous  avons  eu 
occasion  d’examiner,  nous  ont  offert  sur  le  manteau  des  tentacules  tels 
que  nous  venons  do  les  décrire.  En  arrière,  le  manteau  se  termine  en 
deux  siphons , dont  les  dimensions  sont  variables  selon  les  espèces  ; 
mais  ces  organes  sont  généralement  très  allongés,  très  grêles,  Ut  le 
siphon  branchial,  qui  est  toujours  le  plus  long,  peut  acquérir  jusqu’à 
deux  fois  ou  deux  fois  et  demie  la  longueur  du  diamètre  transversal  de 
la  coquille  ; io  siphon  anal  est  toujours  un  peu  plus  court;  ces  organes 
se  terminent  par  des  ouvertures  simples  ou  régulièrement  ondulées.  Ce 
que  nous  venons  do  dire  se  rapporte  à un  groupe  de  Tellines  , qui  con- 
tient le  plus  grand  nombre  dos  espèces  ; dans  un  autre  groupe  qui  aurait 
pour  type  le  TelUna  cuntuna , pat  exemple , leS  siphons  sont  très  diffé- 
rents. Le  branchial,  très  allongé,  est  subclaviforme.  il  se  termine  püf  utte 
ouverture  simple;  le  siphon  anal  est  excessivement  court  et  son  ouver- 
ture porte  un  petit  nombre  de- gros  tentacules  courts  et  obtus.  Assuré- 
ment si  l’on  voulait  établir  une  division  dans  le  grand  genre  des  Tellines , 
on  pourrait  se  servir  du  caractère  que  nous  venons  d’indiquer,  qui  cer- 
tainement a plus  de  valeur  que  ceux  dont  on  s’est  servi  en  établissant 
le  genre  Arcopagia.  Un  muscle  rélracleur  ordinairement  très  allongé 
se  glisse  entre  les  deux  parois  minces  du  manteau  et  vient  s’allaGller  à 
l'a  coquille  sur  laquelle  il  trace  la  sinuosité  palléale  postérieure.  Lo  pied , 
dans  les  Tellines,  est  extrêmement  aplati  ; il  est  allongé , triangulaire , 
tranchant  sur  ses  bords  et  susceptible  de  mouvements  divers^  et  surtout 
de  contractions  venniformes  au  moyen  desquelles  l’animal  Creuse  le 
sable  avec  assez  de  rapidité.  Par  sa  base  le  pied  se  continue  et  se  con- 
fond avec  la  masse  abdominale  * qui  elle-même  participe  à l'aplatisae- 
ment  général  de  l’animal. 

La  bouche  est  petite,  transverse,-  garnie  d'une  lèvre  membraneuse 
en  dessus  et  en  dessous;  les  palpes  labiales  sont  très  grandes;  elles 
sont  pour  le  moins  aussi  grandes  que  celles  des  Lavignons;  elles  sont 
triangulaires,  presque  équilatérales  ; cependant  le  côié  postérieur  est 
un  peu  plus  court  que  les  autres.  Les  branebies  ont  une  très  singulière 
disposition  ; elles  sont  Tune  à coté  de  l’autre  comme  dans  les  Lavignons , 
et  non  Tune  sur  l’autre  comme  dans  les  Madrés  et  les  VéUusr  DaiïS  ICs 
Lavignons,  le  feuillet  branchial  interne  a deux  surfaces  égales  ; il  il’eu 
est  pas  de  même  dans  les  Tellines  : les  lamelles  sous-branchiales  s'claf- 
gissent  considérablement  aux  dépens  de  la  surface  interne  de  ce  feuillet 
branchial.  11  en  résulte  que  sa  surface  externe  est  deux  fois  plus  large 
quej^'autro.  Quant  au  feuillet  externe , il  est  plus  petit  ; il  est  renversé 
verÿ  le  dos,  exactement  comme  dans  les  Laviguon»;  çn  arriére  du  pied 


ONZIEME  EAJIILLE. 


392 

les  quatre  feuillets  branchiaux  se  réunissent  et  se  prolongent  au-devant 
de  Touverture  interne  du  siphon  anal,  ün  pli  saillant  et  membraneux  du 
manteau  circonscrit  la  circonférence  de  l’ouverture  interne  du  siphon 
anal  j l'exlrémilé  de  Tappareil  branchial  s’attache  k ce  pli  et  interdit 
toute  communication  entre  la  cavité  du  manteau  et  celle  du  siphon. 

Tout  ce  nous  venons  de  rapporter  des  caractères  extérieurs  de  l’ani- 
mal des  Tellines  peut  s’appliquer  avec  la  plus  grande  exactitude  au 
TüUina  crassa,  type  du  genre  jtrcopa(//a , do  Leach  , et  c’est  ainsi  que 
rinulililé  de  ce  genre  est  démontrée.  Nous  ajouterons  que  cette  Tellrne 
appartient  au  groupe  de  celles  qui  ont  les  siphons  grêles  et  presque  égaux. 

On  compte  aujourd'hui  un  grand  nombre  d’espèces  vivantes  et  fos- 
siles dans  le  genre  Telline.  Dans  sa  Monographio  des  espèces  vivantes., 
fil.  llanley  en  décrit  et  en  figure  207  ; cependant , après  avoir  recueilli 
toutes  celles  qui  sont  mentionnées,  après  en  avoir  drossé  le  catalogue , 
nous  trouvons  près  do  240  espèces  distribuées  dans  toutes  les  mers.  Le 
numbro  des  espèces  diminue  avec  la  température;  très  abondantes  dans 
les  mers  équatoriales  , elles  le  sont  moins  dans  les  régions  tempérées  , 
et  ([uclques  unes  seulement  subsistent  dans  les  mers  froides  des  régions 
polaires  : en  cela  elles  suivent  les  lois  de  la  distribution  générale  des 
filollusqucs. 

Les  espèces  fossiles  sont  moins  nombreuses  que  les  vivantes;  cepen- 
dant nous  en  comptons  plus  de  quatre-vingts  , et  dans  ce  nombre , ne 
sont  pas  comprises  Vingt  espèces  douteuses  inscrites  dans  les  ouvrages 
des  paléontologistes  et  quelques  autres  qui,  placées  k tort  parmi  les 
Tellines,  doivent  se  ranger  dans  d’autres  genres.  Voilà -donc  un  genre 
qui  contenait  k peine  120  espèces,  il  y a une  quinzaine  d’années,  dans 
lequel  on  en  compte  plus  de  320. 

Lu  distribution  des  espèces  fossiles  a beaucoup  d’inléréi  ; mais  si  l’on 
veut  conserver  à cette  partie  de  la  science  conchyliologique  toute  sou 
importance , si  l'on  veut , surtout , qu’elle  soit  utile  k la  géologie  , il  faut 
rejetersoigneusemenl  toutes  les  espècesqui  ne  sont  pas  du  genre;  sans 
cela , on  le  comprendra , ce  serait  une  distribution  mensongère  du  genre 
qui  serait  présentée.  Autant  les  applications  bien  faites  de  la  zoologie 
à la  géologie  sont  utiles  lorsqu’elles  se  fondent  sur  des  faits  înconles- 
tublcs,  autant  elles  deviennent  nuisibles  et  jettent  de  l’incertitude  dans 
les  deux  sciences  si  elles  reposent  sur  des  observations  imparfaites. 

Nous  avons  rapporté  au  genre  'J'hracie  quelques  espèces  de  Tellines 
de  M.  Rœmer,  reproduites  dans  le  môme  genre  par  fil.  Goldfuss.  Les 
autres  espèces  de  RL  llœmer  ne  nous  présentent  pas  les  caractères  des 
Tellines , cl  nous  regietions  que  les  figures  de  son  ouvrage  sur  le  terrain 


LES  TELLliMUES. 


oülitique  ne  puissent  suppléer  à la  brièveté  dos  descriptions.  La  repré- 
sentation de  moules  pierreux , de  grandeur  naturelle , ne  suffit  pas 
toujours  pour  faire  reconnaitro  le  genre  auquel  ils  appartiennent;  les 
Tellines  ont  un  pü  postérieur,  souvent  elles  sont  courbées  en  totalité 
dans  leur  longueur  ; il  faut  donc  que  les  Ogures  reproduisent  ces  carac- 
tères empiriques  à défaut  d’autres»  si  Tauteur  veut  persuader  que  les 
especes  qu’il  nomme  Tellines  sont  réellement  de  ce  genre.  Voilà  donc 
quatre  espèces  mentionnées  dans  le  terrain  oolitique,  dont  l’existence 
dans  le  genre  eût  été  importante  à constater,  mais  qui  nous  échappent 
jusqu’au  moment  où  d’autres  renseignements  seront  acquis  à leur  sujet. 
Il  en  est  de  môme  d’une  autre  espèce , TelUna  inflata , mentionnée  dans 
les  terrains  siluriens  par  M.  Rœmer,  la  description  et  la  figure  laissent 
beaucoup  d'incertitude,  elle  ne  nous  semble  pas  une  Telline. 

Nous  remarquons  parmi  les  Tellines  de  M.  Goldfuss  quelques  espèces 
douteuses:  le  Tellina  subalpma  ^ par.  exemple,  a plutôt  l’apparence 
d’une  Corbeille  ou  d’une  Lucino  que  d’uno  Telline.  Nous  avons  déjà 
parlé  des  Tellina  inversa  et  corbuliformis  qui  sont  des  Thracies.  Quant 
aux  trois  espèces  tertiaires  do  M.  Goldfuss , il  y en  a deux  dont  la  dé- 
termination est  erronée  ; c’est  ainsi  que  sou  Tellina  rostralina  est  très 
distincte  de  celle  du  bassin  de  Paris , elle  ressemble  davantage  à l’es- 
pèce que  M.  Dubois  do  Montpôreux  donne  sous  le  même  nom.  Le 
Tellina  subcarinala  de  Goldfuss  n’est  pas  celle  de  Brocchi , c’est  pins 
probablement  io  Tellina  distorta  de  Poli,  ; niais  nous  pensons  que  les 
deux  espèces  sont  différentes.  On  conçoit  combien  ces  rectifications  sont 
importantes,  car  avant  qu'elles  soient  faites  , on  verrait  se  mélanger 
des  faunes  qui  restent  nettement  séparées  et  s’introduire  des  rapports 
erronés  entre  des  terrains  qui  nient  rien  de  commun. 

MAI.  Koch  et  Dunker,  dans  leur  ouvrage  très  estimable  sur  le  terrain 
ooliliqu&du  nord  de  l'Aliemagne,  ont  aussi  signalé  deux  espèces  fos- 
siles sous  le  nom  do  Telline.  Alais  rien  ne  prouve  que  ces  coquilles 
dépendent  du  genre  : l’une,  Tellina  Œquilatera^  est  une  très  petite  espèce 
ovale,  obronde,  qui  paraît  dénuée  du  pli  postérieur,  rien  chez  elle  n’an- 
nonce une  Telline;  l’autre,  Tellina  Rœmevi^  a plus  la  forme  des  Thracies 
que  des  Tellines,  et  comme  la  charnière  est  inconnue,  nous  laissant 
guider  par  le  port , nous  avons  proféré  ranger  cette  espèce  au  nombre 
des  Thracies. 

M.  Adolphe  Uœiner,  dans  son  ouvrage  sur  la  craie  de  l’Allemagne  , 
a inscrit  dans  le  genre  Telline  plusieurs  espèces  que  nous  rangeons 
parmi  les  douteuses.  Des  descriptions  trop  courtes , dos  dessins  incor^ 
reets  , nous  laissent  inccrlains  sur  les  caractères  génériques.  Dans  les 


ONZIEME  FAMILLE. 


figures  de  M:  Kœmer  nous  n’aperce vons  aucune  trace  du  pli  postérieur 
oaracléristique  des  Tellines;  aussi  nous  n'admettons  qu'une  seule  des 
espèces  de  M.  A.  Rœmer,  le  7'ellina  subdeoussata. 

■ Les  especes  tertiaires,  plus  nombreuses,  mais  plus  faciles  à examiner 
dans  tous  leurs  caractères,  ont  donné  lieu  à des  erreurs  d’une  autre  nà- 
turo  ; ce  n’est  plus  le  genre  qui  est  douteüx , ce  sont  des  espèces  identi- 
fiées, rapprochées,  confondues,  qu'il  faut  reconnaître,  distinguer,  et 
auxquelles  il  est  indispensable  de  restituer  leur  véritable  nom.  C’est  ainsi, 
par  exemple,  que  M.  BasIérot,.dan3  son  ouvrage  sur  le  bassin  tertiaire  du 
sud-ouest  de  la  France  j cite  dans  les  faliins  de  Bordeaux  deux  espèces 
du  bassin  de  Paris,  TeUhta  cleijans  et  bhingiihü'is\  une  comparaison 
plus  approfondie  des  coquilles  des  deux  localités  nous  a prouvé  qu’elles 
constituent  des  espèces  très  distinctes.  M.  Grateloup,  qui  probablement 
n'a  pas  eu  l’occasion  de  répéter  nos  observations  au  sujet  de  ces  espèces , 
les  conserve  parmi  Celles  qui  sont  communes  aux  bassins  do  Paris  et  de 
Bordeaux. 

Nous  ne  poursuivrons  pas  plus  loin  ces  recUfîcations , dont  nous  avons 
Voulu  indiquer  les  principales,  dans  le  but  défaire  comprendre  combien 
il  est  nécessaire  de  contrôler  rigoureusement  tons- les  matériaux  intrO' 
düils  dans  un  genre,  avant  d’en  établir  le  catalogue,  et  surtout  avant 
de  dresser  le  tableau  do  la  dislribulion  de  ses  espèces  dans  les  couches 
de  la  terre.  Il  faut , en  un  mot  , que  la  statistique  d'un  genre  soit  exacte 
pour  inspirer  de  la  confiance  dans  scs  résultats. 

Toutes  les  rectifications  étant  faites , il  nous  reste  86  espèces  fossiles , 
2ï  dans  les  terrains  secondaires,  65  dans  les  terrains  tertiaires. 

L'espèce  la  plus  ancienne  est  le  Tdiîna  oblknm  de  M.  Goldfuss,  elle 
provient  du  terrain  silurien  do  Kimmanau.  On  devra  changer  le  nom 
choisi  par  M.  Goldfuss,  parce  que  longtemps  avant*  de  nom  a été  imposé 
par  Sovve-fby  à une  espèce  du  Crag;  nous  proposons  de  désigner  à 
l’avenir  l'espèce  sous  le  nom  do  Tefiina  Goklfiissi^  Deux  espèces  sont 
citées  dans  lo  calcaire  jurassique  de  la  Bavièro,  et  une  troisième  Tek 
üiHi  iimptinia.,  PhWps  se  trouve  dans  lo  Goral  rng  d’Angleterre. 

En  réunissant  aux  Tellincs  les  Arcopagia,  il  y a dix-sept  espèces 
datis  la  formation  crétacée.  Deux  dans  le  terrain  néocomieh , Tellina 
cûtti'ehlrica  el  Corteroni;  deux  dans  loGauit,  TelHiia  rauHniam  et  Afo- 
reauxii;  dans  le  gris  vert  nous  devons  citer  les  TeUina  RenauxU  et  n«- 
PR  trouvant  à la  fois  à Vaucluse  et  dans  la  Sarthe.  Les  autres 
espèces  se  distribuent  dans  la  craie  moyenne  ; nous  n'en  connaissons  pas 
dans  la  craie  blanche.  M.  d’Orbigny  en  fait  connaître  une  espèce  do  la 
craie  dé  l'Amériquè  méfidiôualô et  aouè  avofis  dû  faire  passer  parmi 


LES  TELLIMDES.  oijS 

les  douteuses  io  Tellina  pondicherimms  de  M;  Forbes,  provenant  des 
terrains  crétacés  de  Fïndo. 

Aux  espèces  tertiaires  du  bassin  do  Paris  que  nous  avons  décrites, 
M.  Sowerby  en  a ajouté  quelques  unes  des  argiles  de  Londres,  et 
M.  Nyst  en  a trouvé  un  petit  nombre  dans  Io  bassin  belge;  mais  do 
tous  les  travaux  le  plus  complot  que  nous  ayons  sur. les  Teilines  du 
terrain  tertiaire  inférieur,  do  l’Angleterre,  a été  publié  par  M.  Edwards 
dans  le  Jotiynul  do  géolo^fie  de  Londres.  Nous  y trouvons  un  grand  noiU'- 
bre  d’espèces  nouvelles  , bien  décrites  et  bien  figurées  , et  nous  acqué- 
rons la  preuve  do  l'existence  simultanée  d’un  certain  nombre  d'espèces 
dans  le  bassin  de  Londres  et  dans  celui  de  Paris.  Cependant  quelques 
Teilines  roslonl  jusqu’ioi  particulières  à chaque  bassin  et  lecariictérisenl. 
Ainsi  les  Tellina  hanloniensis ^ ambhjua , Branderi,  etc.,  sont  {tropres 
aux  argiles  de  Londres;  tandis  que  les  Tellina  rostralie  j rostralma  f 
patellaris,  restent  dans  le  bassin  de  Paris,  et  particulièrement  dans  te 
calcaire  grossier.  Los  Tellina  lunulnta  et  subroiunda  passent  du  calcaire 
supérieur  dans  les  grès  marins  moyens , le  donueialis  remonte  des  grès 
inféricMirs  dans  les  calcaires  grossiers. 

M.  Grateloup  admet  quatorze  espèces  de  Teilines  dans  les  terrains 
tertiaires  moyens  de  Bordcauîc  et  de  Dax.  A ces  espèces , MM.  Dujardin 
et  Dubois  de  Montpéreux  en  ajoutent  quelques  autres  : le  premier,  des 
faluns  do  la  Touraine;  le  second  , de  la  Wolhynie  et  de  la  Podolie* 
Nous  pourrions  encore  parler  de  celles  de  MM.  llisinger  et  Eicliwald. 
MullieureusemeiU  nous  no  possédons  pas  tous  les  matériaux  nécessaires 
pour  contrôler  toutes  les  espèces-  mentionnées;  les  unes  no  nous  sont 
connues  que  par  des  listes  nominales,  les  autres  par  des  descriptions 
incomplètes  sans  figures.  Nous  pôuvons  diro  que  les  terrains  tertiaires 
moyens  sont  ceux  dont  les  fossile»  sont  le  moins  connus  et  réclament  le 
plus  impérieusement  un  ouvrage  spécial.  Il  résulte  cependant  des  ror- 
cherches  que  nous  avons  faites  , que  quatre  espèces  sont  propres  aux 
lerraiuâ  moyens  et  ne  se  trouvent  pas  ailleurs.  L’une  d’elles,  Tellina 
bipartila,  Baslcrol,  est  caractéristique  de  ces  terrains.  Les  autres 
espèces  s.e  partagent  en  deux  c;il0gories  : les  unes  sont  fossiles  seule- 
ment et  remontent  dans  les  terrains  supérieurs  ; les  auti^és  Ont  leurs, 
analogues  dans  la  nature  actuelle.  Parmi  ces  eSpôCeë,  il  y eh  a deux. 
Tellina  slrigosa  et  miegalensh , qui  sont  vivantes  au  Séhégal , et  qui 
sont  spécialement  fossiles  à Bordeahx  pour  le  senègalénsis  cl  h Dax  , en 
Wolhyhie  et  eh  Podolie  poiU’  le  sir/jfosu.  Nous  allons  rotronVeP  les  nu- 
Lres  espèces  parmi  celles  de  la  dernière  période  tertiaire. 

Un  terrain  très  inléressahl  ; lu  Lrag  , renferme  ûü  grand  nombre  de 


UNZIEUlv  FAMILLE. 


J96 

fossiles.  M.  S.  Wood  eu  a fait  une  étude  approfondie  pendant  de  lon- 
gues années  : il  y a trouvé  neuf  espèces  de  Tellines.  Un  terrain  analogue 
et  du  même  âge  existe  aussi  en  Belgique,  et  M.  Nyst  en  a décrit 
les  nombreux  fossiles.  Si  quelques  Tellines  de  ce  terrain  ont  leurs 
représentants  dans  la  nature  actuelle,  il  en  contient  huit  qui  ne  se 
trouvent  pas  ailleurs  ; la  plupart  sont  communes  à la  Belgique  et  à 
l’Angleterre  : tels  sont  les  Tellina  Bcnedeni , liipinoides  ^ ovata  ; c^ite 
dernière , d’après  M.  Philippi , so  trouverait  dans  les  terrains  supérieurs 
de  Palerme;  enfin,  le  TMna  obliqua  de  Sowerby,  dont  le  nom  devra 
être  changé,  car  longtemps  avant  Scwerby,  Lamarck  avait  imposé  ce 
nom  à une  espèce  vivante.  En  conséquence , nous  proposons  pour  le 
Teltina  obliqua  de  Sowerby,  le  nom  dO  Tellina  JVyslii,  Nous  allons 
retrouver  bientôt  lès  espèces  qui  ont  leurs  analogues  vivants;  ces 
espèces  ayant  la  propriété  de  se  rencontrer  aussi  dans  d’autres  ter- 
rains , nous  allons  en  présenter  la  liste. 

Les  terrains  tertiaires  supérieurs  renferment  aussi  un  assez  grand 
nombre  de  Tellines,  nous  en  comptons  dix  fossiles  seulement  : les  unes, 
Tellina  compressa , corbis  , gigantea , slrialella  , telata  , subcarinata  ^ 
sont  propres  aux  terrains  subapenuins;  d'autres  , Tellina  pleurosticla  ^ 
strigilalaj  sont  plus  spécialement  caractéristiques  des  terrains  supé- 
rieurs de  la  Sicile.  Enfin , nous  citerons  le  Tellina  ellipHca  de  Brocchi  , 
qui  existe  en  abondance  en  Italie,  en  Sicile,  en  Morée , en  Algérie,  et 
même  aux  environs  de  Bordeaux.  .■ 

Pour  terminer  les  renseignements  que  nous  nous  proposions  de 
donner  sur  la  distribution  des  Tellines  fossiles,  nous  avons  encore  à 
présenter  la  liste  des  espèces  qui  sont  à la  fois  vivantes  et  fossiles. 
Lorsqu’on  1832,  nous  avons  publié  les  Tableaux  comparatifs  des 
espèces  vivantes  avec  les  fossiles  des  terrains  tertiaires  de  l’Europe , 
nous  avions  reconnu  l’identité  de  onze  espèces;  de  ces  espèces  nous  en 
conservons  dix,  auxquelles  nous  en  ajoutons  sept  autres  acquises  à la 
suite  des  progrès  de  la  science. 

\°  Tellina  balaicstma , Lin.  Vivante  dans  la  Méditerranée. 

^ • * * 

Fossile  en  Sicile  et  en  Italie. 

2°  Tellina  balthica.  Vivante  dans  l’Océan  du  Nord. 

Fossile  à Uddevalla  en  Norwége.. 

3®  Teltina  calcaréa  , Chemn.  Vivante  dans  l’Océan  du  Nord. 
Fossile  à Uddevalla  et  dans  le  crag  d’Angleterre, 

C’est  le  Tellina  ovalis  de  Woodward. 


LES  TELLÎNIDES.  397, 

ToUina  crafim  , Pennant.  Vivante  dans  tout  l Océan  d'Europe , 
la  Méditerranée , jusqu’au  Sénégal. 

Fossile  en  Italie  et  en  Sicile  , dans  le  crag  d’Angleterre  cl  de 
Belgique,  et  en  Touraine  dans  le  second  étage  tertiaire. 
^^Tellina  depreasà,  Gmelin.  Vivante  dans  la  Méditerranée,  dans 
la  Manche. 

Fossile  en  Sicile,  en  Italie.  ‘ 

6°  Telfîm  distorta  , Poli.  Vivante  dans  la  Méditerranée. 

Fossile  en  Allemagne,  d’après  M.  Philippi. 

7“  Tetlina  dmacma , Lin.  Vivante  dans  tout  l'Océan  d’Europe. 
Fossile  en  Sicile,  dans  lé  crag  d’Angleterre  et  dans  les  faluns 
de  la  Touraine. 

8°  Tellina  [ittula  ^ Gmelin.  Vivante  dans  la  Méditerranée  et  dans 
la  Manche. 

Fossile  dans  le  crag  d’x\nglelerre. 

9®  Tellina  lacunom,  Chemnitz.  Vivante  dans  les  mers  de  Guinée.  ■ 
Fossile  en  Italie,  à Bordeaux  et  à Dax,  dans  les  faluns  de  la 
Touraine  et  aux  environs  de  Cassel,  d’après  M.  Philippi. 
C’est  le  TeUmapapyraceadeGinelm,  Tellina  tumidaâe  Brocebi. 
10®  Tellim  Lantivyij  Payraudeau.  Vivante  dans  la  Méditerranée, 
Fossile  en  Sicile. 

Tellina  nitida , Poli.  Très  abondante  dans  la  Méditerranée. 
Fossile  en  Italie  et  en  Sicile. 

M.  Bronn  la  confond  avec  le  Tellina  bipartita  de  Bastérot. 
Tellina  planata , Linné.  Vivante  dans  la  Méditerranée,  aux  îles 
du  cap  Vert. 

Fossile  eîi  Italie  et  en  Sicile.;  une  variété  en  Touraine  et  à 
Bordeaux. 

C’est  le  Tellina  complanata  de  Gmelin. 

13®  Tellina  pulchella  i Lamarck.  Vivante  dans  l’Océan  d’Europe. 
Fossile  en  Sicile  et  en  Italie. 

i 4°  Tellina  senegalensis^  Hanley.  Vivante  au  Sénégal,  dans  les  mers 
de  Guinée. 

Fossile  à Bordeaux. 

Espèce  voisine  du  Te/Zina  curnaWa, 

IS®  Tellina  sei'mta,  Brocchi.  Vivante  dans  la  Méditerranée, 

Fossile  en  Sicile  et  en  Italie. 

1 6“  Tellina  strigosa , Glnelin.  Vivante  au  Sénégal. 

Fossile  à Bordeaux,  en  Podolie  et  en  Wolhynie. 

C’est  le  Tellma  zônaria  de  Lamarck. 


0N7iÊME  rAMlLL?;. 

1 7“  THlma  lenuifi , VivaiHe  daniîî'  loul  i'Océan  d'Europe. 

Fossile  en  Sicile  et  dans  le  cnig  d’Angleterre. 

s ■ > < ' . 

Si , h l'aidG  4es.renseigncments  que  noii^  vonop.s  d’e^sposer,  on  vou- 
ioit  dresser  nn  tableau  de  la  dislribuLion  des  Tellines , on  généraliserait 
facilement  les  faits  qu’il  rassernblerait.  Il  est  remarquable  de  retrouver 
les  espèces  de  la  dernière  période  tertiaire  vivante^  dans  les  mers  les 
plus  proches;  celles  , au  contraire.,  qui  passent  do  cette  formation  dan.s 
celle  qui  la  précède , so  distribuent  sur  un  plus  vaste  espace  ; on  les  voit 
parcourir  du  Nord  au  >ï.idi  tout  je  continent  européen,  et  quelquefois 
gagner  les  côtes  de  l'Afrique  et  parvenir  dons  les  mers  inlertrppicales. 
Mais  le  faille  plus  intéressant,  qui  n’aura  pas  échappé  à la  sagacité  du 
lecleair,  c’est  qu'il  faut  aller  jusque  dans  les  mers  les  plus  chande.s  du 
Sénégal  et  de  la  Guinée  pour  y rencontrer  les  analogues  do?ï  espères  d^ 
Dax , de  Üordeaux  et  des  faluns  de  la  Touraine, 

1.  Telline  zonélle.  TeJlina  siriïjosa.  Gmel.  * ' ' 

PI.  13.  f.  11,  32- 13. 

T.  testa  qi,tettO‘>Qltiongo  y trfina'crsày  StihiCi^utlaU-faii  htliis  f.'vtiisque 
. caviiM , obscure  ^ofwt/i , trausitcrsiffi  sulft(ri/tta;  ç ontiço  ro- 
tnndnto,  postico  ncuminnto  area  ïigameiui  projuud^i  ; cordine.  uni- 
Je/itotûf  altcro  bififototû,  , v 

Le  Fagnh  A.tlans.  Voy.  ou  Sénég.  pi.  17.  f.  19. 

TeUina  sttigosn.  Gwid.  p. 

Sehrol.  Einl.  I,  3.  p.  44  ii"  80.- 
Wood,  Orut  r.  cüiuh.  p,  117.11°  Gr. 

Lamk.  An  s.  y«il.  l,  5.  p,  5a5.  11°  19.  • ’ '*  • 

Dillw.  Cut.  t.  I.  p.  82.  Il**  23. 

"Woo  I,  Iiid.  trsiüc.  pl.  4.  f.  fît,  • . r 

Dcdii.  Eurj'i  mélii.  Mîrs  l.  .3,  p inxu.  11“  lo.. 

Tcliùio  sirigosn  Do.*;!!,  dans  Latuk.  Aii;  s.  vcil.  2*  éJ,  t.  G,  ji.  194.  n®  19. 
ITauU'V.  Dr.siT*  <«1.  p.  63. 

Hanley.  1 hi's.  c«'iuh  p.  275.  pl,  03  f.  2x1. 

Possilis,  Tel/ina  zonarîn,  Laink.  An.  .s,  vert.  t.  4*  p.  ^»35, 

Id.  Basl.  fiiss,  de  Bordeaux,  p.  qS,  11®  i,  pl.  5.  f,.5, 

TeîHna  phftflln.  Dub  Moplp.  Cojich,  fo9«.  Wolliy*  et  Padol  p 5^. 
pl.  5.  f,  i,  2. 

TeUina  strigosa^  Ue4i.  daii«  I.îiJuk.  An.  a*  éd.  6.  p.  91 1,  u®  4- 

Habite  les  mers  du  Séncgal/F^isilftà  Op^tj  i»  B>^drWjM,  et)  Wûlhyiiie  et 
en  Podolie. 


t.KS  TELLINIDES.  ''.99 

Le  TeUiiia  strigosa  ao  reconnaU  avec  faeiüté.  Oblonejae,  iransverse, 
aplatie,  pubéqnilatérale,  son  cuit*  anterieur  nii  pou  jilus  cour!  que  îe 
postérieur  : il  est  ovale,  obtus  ; le  côté  postérieur  est  trianguliürc,  terminé 
en  un  angle  assez  aigu,  auquel  aboutit  le  pli  irrcgulier.  La  surface 
externe  est  brillante,  et  cependant  couverto  de  stries  assez  régulières, 
produites  par  les  accroissements.  L'impression  musculaire  antérieure 
est  ovale,  oblongue  ; son  extrémité  supérieure  se  termine  qn  pointe; 
l’impression  miLSCuIaîre  postérieure  est  grande  et  subquadrangulaire  ; 
l’angle  supérieur  do  çes  deux  impressions  reçoit  les  muscles  rétrac- 
leurs  du  pied.  L’impression  palléalo  est  remarquable  par  son  étendue: 
après  s’être  élargie  au-dessous  de  la  charnière,  elle  s’avance  tout  près 
de  l’exlrémité  inférieure  du  muscle  antérieur.  Le  bord  cardinal  est  assdte 
large , il  porte  une  dent  cardinale  sur  la  valve  gauche , doux  divergentes 
sur  la  valve  droite.  Le  corselet  est  creusé  d'une  fossette  profonde,  dans 
laquelle  est  caché  le  ligament.  Celte  coquille  est  ordinairement  d’un 
blanc  laiteux  pur:  en  dedans  et  en  dehors  , des  zones  trangverses  d’un 
blanc  plus  opaque  se  dessinent  en  nombre  variable.  Nous  ayons  vu  des 
variétés  provenant  des  mers  de  Gainée,  teintées  de  rose  plus  ou  moins 
intense  vers  les  crochets  et  formant  un  passage  avec  le  Tellina  rnadn- 
gdscariensis.  Les  individus  fossiles  sont  extrômemont  abondants  à Bor- 
deaux; on  remarque  parmi  eux  des  variétés  qui  tendent  à rapprocher 
davantage  les  Tellina  strigota  qI  madagascariensis  ; l’une  des  variétés 
intermédiaire , un  peu  plus  large , a été  prise  pour  le  Tellina  phinàta 
par  M.  Dubois  de  Montpéreux. 

2.  Telline  donacée.  Tellina  donacAna.lAwné, 

PI.  14.  f.  1.-2.  3. 

T.  testa  oblon^â^  transi'ersd  ^ soHJtnscnlu,  inœqiiîlnternîi  ^ pmtîcè 
oblique  truncatâ^  nitidâ  y intense  strintn  ^ alhiào  Jlnve.scentc  y rndüs 
rnbro-roseisi  riumeroiisy  interniptis  ornatây  inths  paîlidt  rnbro-jlai’à  ; 
margîne  'ventrali  nibro  punctato  ; latere  àntivo  pratlotigû  , obtuso'y 
cardine  hidentato^  àenUbiis  inccqualibtis  : mnjore  hijido  ; dentibus 
laterahbus  approxhiiatis  ^ ’VuUdis. 

Tellina  donaçlnai  L*n.  Sysl.  nal.  éii,  12.  p.  2118,  ii*  59. 

Id.  Sciiiot.  Eiiil.t,  2.  P U55. 

2d,  Ginu'.  p.  3i34.  2O. 

Id.  Spengl.  Soc.  (l’hist.  naî.  de  CopcuU.  L 3,  2'-'  part.  j».  i X2,  u*  46.  . , 

Jd,  Olivi.  Adiiut.  p.  for. 

Tellina  distnrtaP-  Poli,  'l’csf.  Sieil.  t.  c.  p.  39.  pl.  i5,  f. 


ONZIÈME  FAMILT.E. 


4 00 


Tellina  Poli.  IVsl.  I;  r.  jï.  4*?.  pl*  1*.  lo. 

Teîlina  dunacina,  Moiilagu.  Test.  i)ril.  p.  58,  4, 

Id,  Dorsef,  Cal.  p vpy.  pi.  12.  f.  36, 

Id.  Maton  et  Rack.  Lin.  Iraiis.  t.  8.  p.  5o.  pl,  i.  f.  7. 
fd,  Wood,  Gener.  Conch.  p.  16 1.  pl.  45.  f.  5.  , 

Dilhv.  Cal.  t.  r.  p.  89,  n®  41. 

‘ Lamk.  An.  s.  verl.  t.  5.  p.  527.  n"  27.  • . . ^ 

Tlirtôn, ’Conch.  dre»,  p.  170,0”  10,  * * ' ^ 

Turton,  Conch.  Tns,  hril.  p.  To2.  n”  5:  pl.  8.  f.  4,  ' " ' 

Gérvilte,  Cal.  des  coq.  de  la  Manche,  p.  14.  n*  3.  ' ‘ 

Pilaîotille,  Fau.  fran^.  Moll.  pl.  g.^f.  6.  ' 

Wobd,  înd,  testar.  pl.  4-  f*  3 t.  > 

Payrniid.  Cat«  des  Moll,  de  Corse,  p.  Bg,  n“  34* 

Desh,  F-vp.  SC,  de  Môrée.  Zool.  p.  93.' n**  64. 

Scacehî,  Cat.  conch.  reg.  Neap.  p.  5.  • 

Coll,  des  Cil.  Cat.  des  Test,  du  Finisî.  p.  *9'.  n°  r». 

Ronch.  Chant.  Cat.  des  Moll,  thi  Roui.  p.  j8.  «û  27,*  f ; ^ - 

Marav.Mcm.  pourniist.  nal.  delà  Src.  p.  74.  n“  2^ 

Philip.  Enum.  moll.  Sicil.  l.  r.  p,  24.  u^  2. 

Jeffreys,  List,  of  mar.  Moll,  raalac.  mag,  n®  2.  P..42, 

Hauley.Ond.  (estât,  t.  i.  p.  64. 

». 

Thomp.  Rep.  on  the  Faun.  of  Irel.  p.  26r.  ' ’ r . 

Forbes.  Rep.  on  tlie  OEg.  invert,  p.  143.  ' * ^ 

Thovpe,  Rrit,  mar.  conch.  p.  67.  • ■ • ' *•' 

Varaui,  Cat.  degli  anim.  inv.  p.  i3.  ^ 

Fleming,  Rrit.  anim.  2*  éd.  p.  435. 

Philip.  Emim.  Moll.  Sicil.  t.  2.  p.  21,  n“  2. 

Hanley,  The.s.  Conch.  p.  n*  20.  pl.  50  f.  12.  pl,  GO.  f,  aSp. 
Catlotv,  Conch.  nomme,  p.  22.  n®  35. 

Desliayejs.  Explor.  sc.  de  l’Alger.,  moll.  t.  i.  p.  540.  pl.  O9.  f.  i.  3. 
Possdis,  Philip,  Euuin.  moll.  Sicil.  t.  j.  p.  29.  n®  2.  t.  2.  p,  23. 

S.  Wood,  Cat.  of  sbells  from  the  Crag.  ann.  cat,  hUt.  1S40,  p.  248. 
Morris,  Cat,  ofbril.  foss,  p.  loi. 

Habile  la  Méditerranée,  l’Océan  d'Europe^  fossile  en  Sicile,  dans 
le  Cêag  d^Allgleterre  et  ddüs  les  faUins  de  (a  Touraine. 


Celte  espèce  est  trop  coonue  pour  avoir  besoin  d’être  décrite  de 
nouveau;  par  sa  forme  générale,  eilè  se  rapproche  des  Donaces,  ayant 
comme  elles  le  côté  antérieur  très  long  et '■'le  postérieur  court  et  obli- 
quement tronqué.  La  coloration,  fort  élégante-,  est  variable  ; sur  un  fond 


LKS  TELLIXIDKS: 


40  l 

blanc.jaunâtre  ou  rosâlre;  elle  est  ornée  d'un  grand  nombre  de  rayons 
interrompus,  d’un  beau  rose  pourpré,  qui,  en  aboutissant  sur  lesbords, 
y laissent  autant  de  larges  ponctuations.  L’intérieur  des  valves  est  d’un 
beau  rouge  purpurin.  Les  dents  latérales  sont  grandes,  surtout  sur  la 
valve  droite  ; elles  sont  rapprochées  de  la  charnière. 

Cette  espèce  vit  dans  l’Océan  d’Europe  et  dans  la  Méditerranée;  elle 
est  fossile  en  Sicile,  dans  le  crag  d’Angleterre,  et  se  trouverait  aussi 
dans  les  faluns  de  la  Touraine,  d’après  M.  Dujardin. 

3.  Telline  blanche.  Tellma  candida.  Deshayes, 

PL  14.  f.  6.  7.  8, 

T.  testa  ovaîUobîougâ^  transversât  inœquilaterâ  ^ pellucidâ  y albâ^ 
tenuissimh  transversim  striata;  latere  antico  longiore  obtuso; 
postico  brevissiino  anguîatOyjlexnrâ  xix perspicuu  notato;  Ugamento 
subinfosso't  cnrdine  angusto  ; dentihus  cardinalibus  minimis,  absque 
dentibus  îateraUbtts. 

Psnmmotea  cundida.  Lamk.  Au.  s.  v^*rl.  I,  5.  p.  Si-j.  1.®  6. 

Teîlina  cundida.  Desli.  üaus  l.anik.  Au.  s,  vtrt.  2‘^ud.  t.C.p.  i83.  u®  (5, 

Id.  Hanley.  Descr.  caf.  p.  Go. 

là.  Haiiley.  Thcs.  Couch.  p.  3or.  pl,  Ga,  f igS. 

Habite  la  Nouvelle-Hoüamle  (Laïuk, }. 

Nous  avons  commis  une  erreur  dans  l’explication  des  planches  de  cet 
ouvrage,  en  attribuant  à cette  espèce  le  nom  de  Tdlinides  limoriensifi. 
Nous  devons  donc  lui  restituer  son  nom  spécifique.  Connue  deLamarck, 
cette  coquille  n’a  pas  été  placée  par  lui  dans  son  véritable  genre , au 
lieu  de  la  ranger  parmi  les  Tellinides,  dont  elle  présente  tous  les  carac- 
tères , il  la  classe  au  nombre  des  Psammotées , sous  le  nom  de  Psarn- 
motea  ca/iciida.  Nous  avons  vu  précédemment  pourquoi  le  genre  Tellinide 
doit  disparaître  de  la  méthode  ; fondé  sur  des  caractères  artificiels  * nous 
en  avons  fait  apprécier  la  valeur.  Néanmoins,  pour  faire  bien  connaître 
les  principales  modifications  des  Tellines,  nous  avons  cru  nécessaire 
d’en  figurer  une,  appartenant  aux  Tellinides  de  Lamarck,  c’est-à-dire 
n’ayant  plus  qu’un  vestige  du  pli  postérieur  et  des  rudiments  des  dents 
latérales  de  la  charnière. 

Lq  Tellma  cundida  est  une  coquille  ovale,  transverse,  très  inéquila- 
lérale,  ayant  le  côté  postérieur  subtronqué  et  extrêmement  court.  La 
surface  extérieure  paraît  lisse,  mais  elle  est  très  finiment  striée  en  tra- 
versv  Les  valves  sont  minces , fragiles  , d’un  blanc  pur  en  dedans  et  en 


T.  I.  PARTIE. 


^02 


ON'ZIKME  FAM1M.E. 


clehor.-^.  I/impréssion  musculaire  antérieure  est  ovalaire  , la  postérieure 
est  obronde  et  plus  petite.  L'impression  pallé-alo  se  place  parallèJeinenl 
au  bord  ventral , gagne  l’extrémité  postérieure,  et  se  courbe  en  haut  ; 
elle  s’infléchit  en  dedans,  et  le  bord  inférieur  de  la  sinuosiiése  con- 
fond avec  le  bord  ventral:  pendant  une  portion  de  son  trajet,  il  s'en 
détache',  forme  une  petite  languette  étroite  avant  de  se  dilater  en  re- 
montant vers  la  charnière.  Le  bord  cardinal  est  étroit,  il  porte  une 
dent  sur  la  valve  gauche , deux  divergentes  sur  la  droite. 

4.  Telline  obronde,  Teïlina  suhrotunda,  Deshayes. 

PL  14.  L 4.  5. 

T.  Testa  ovato-snhorbieuJarii profundâ^  crassâ,  suhœqidlaterah ^ trans- 
versim  densissimu , teriui'lamellosâ , InmeiUs  erectis^  tenuibns  ^ bre- 
vibns,  latcre  anitco  obtiiso , postico  breviori  wx  pîicato  ^ cardine 
angttsto^  bideiitatOf  dente  lateraU  antico  majore  aïteroiux  perspicuo, 

Desli.  Coq.  foss.  de  Paris,  t.  i . p.  8 1 . n"  8.  pl.  12.  f.  16,  j 7, 

Id.  F.ncy.  mélh.  vers,  l.  3.  p.  loiS.  11°  37. 

Morris.  Cal.  brit,  fos.s,  p,  102. 

Desh.  dans  Laink.  Au.  s.  vert.  2*  éd.  t.  6.  p.  2x3.  n°  S. 

Habite.  Fossile  aux  enviroui»  de  Paris,  à Acy,  Senlis.  Valmondois.  En 
Aiigleleirc  , à Bracldesham , dans  le  London  clay. 

En  choisissant  cette  espèce  , nous  avons  voulu  donner  à la  fois  un 
exemple  du  genre  Arcopagfia  de  Leach,  et  d’une  espèce  qui,  en  se 
montrant  dans  plusieurs  bassins  du  môme  âge,  peut  concourir  ü les 
caractériser.  Elle  est  ovale,  obronde,  Iransverse,  subéquilatérale ; le 
côté  postérieur  est  plus  court,  et  un  peu  plus  largo  que  l’antérieur  ; 
il  porte  un  pli  oblique , obtus , qui  modifie  peu  la  régularité  de  la 
coquille.  Les  valves  ne  sont  pas  parfaitement  égales  , la  gauche  est  un 
peu  plus  profonde  que  la  droite.  La  surface  externe  est  couverte  d’un 
très  grand  nombre  de  fines  lamelles  concentriques , régulières , re- 
dressées; les  interstices  des  lamelles  sont  lisses.  Le  bord  cardinal  est 
étroit,  peu  épais  ; il  porte  au-dessous  du  crochet  deux  petites  dents 
inégales  sur  la  valve  gauche , également  deux  sur  la  valve  droite,  mais 
égales  et  divergentes.  Des  dents  latérales,  l’antérieure  est  la  plus 
grosse  et  la  plus  rapprochée  de  la  charnière , la  postérieure  est  rudi- 
mentaire et  située  à l’extrémité  do  la  nymphe.  L’impression  musculaire 
antérieure  est  ovale,  un  sillon  la  partage  en  deux  parties  inégales. 
L’impression  postérieure  est  obliquement  orbiculaire  ; l’impression  pal- 


LKS  PSAMMOBÎDES. 


4o?t 

iéale  est.  placée  assez  haut  dans  l’intérieur  des  valves,  elle  est  parallèle 
au  bord  ventral  ; parvenue  à la  limite  du  pli  postérieur,  elle  s’infléchit 
en  dedans  en  formant  une  sinuosité  oblique  de  bas  en  haut  et  d’arrière 
en  avant , un  peu  dilatée  dans  le  milieu.  Les  crochets  sont  petits , peu 
saillants;  ils  s’inclinent  au-dessus  d’une  petite  lunule  lancéolée. 

Cette  espèce,  assez  rare  dans  le  bassin  de  Paris,  se  rencontre  par- 
ticulièrement dans  les  sables  marins  moyens  de  Senlis,  Valmondois,  etc.  ; 
elle  se  retrouve  dans  le  bassin  de  Londres , à Bracklesham. 


DOUZIÈME  FAMILLE. 

hem  PsaiiiiiiobUles.  Desh. 

CARACTÈRES.  — Animal  ovale-oblong , tranverse,  aplati, 
enveloppé  d’un  manteau  membraneux,  garni  à sa  circonférence 
d’un  rang  de  tentacules  simples  et  coniques.  Deux  longs  si- 
phons grêles , presque  égaux  et  séparés  dans  toute  leur  lon- 
^eur,  leur  ouverture  terminale  garniè  de  tentacules  simples  et 
coniques.  Pied  gros  et  épais  palpes  labiales  longues  et  étroites. 
Feuillets  branchiaux  très  inégaux  et  plissés  ; feuillets  internes , 
les  plus  longs,  commençant  en  pointe  entre  les  palpes  labiales, 
les  externes  de  moitié  plus  courts  ; tous  deux  se  prolongeant  en 
arrière  de  la  masse  abdominale  et  se  soudant  solidement  au 
pourtour  de  l’ouverture  du  siphon  anal. 

Coquille  transverse , régulière,  aplatie,  mince,  un  peu  bâil- 
lante en  avant  et  en  arrière,  équivalve,  subéquilatérale.  Char- 
nière étroite , ayant  une  ou  deux  dents  cardinales , sans  dents 
latérales  ; un  ligament  externe  épais  et  saillant  en  dehors  ; 
impressions  musculaires  médiocres , impression  palléale  pro- 
fondément sinueuse  en  arrière. 

GENRES.  — Pèammobia,  Hanguinolaria  , Capsd, 

Tous  les  conchyliologues  ont  eu  jusqu’ici  une  opinion  unanime  au 
sujet  des  genres  que  nous  réunissons  dans  cette  famille  ; à l’exemple 
26* 


DOUZIEME  FAMJM.î:. 


4o4 

de  Lamarck  , ils  les  ont  rangés  à la  suite  des  Tellines  et  dans  la  même 
famille.  Ils  ont  emprunté  cette  opinion  à Poli,  et  elle  semblait  suffi- 
samment justifiée  par  la  description  et  la  figure  que  ce  naturaliste  donna 
d’une  Psammobie  de  la  Méditerranée,  Poli  eut  le  tort  d’en  croire  les 
apparences;  il* vit  dans  la  Psammobie  de  la  Méditerranée  un  animai 
ayant  de  longs  siphons , un  pied  triangulaire  et  comprimé , et  ces 
caractères  superficiels  lui  suffirent  pour  le  juger  du  même  genre  que 
les  Tellines.  Mais  si  Poli  avait  dépouillé  ranimai  de  sa  coquille  , s’il 
avait  ouvert  son  manteau , il  se  serait  aperçu  , avec  la  plus  grande 
facilité  , qu’il  est  en  réalité  extrêmement  différent  de  celui  des  Tel- 
lines. Ën  effet,  les  palpes  labiales  et  les  branchies  surtout  présentent 
de  telles  différences  dans  les  deux  genres , qu’il  n'est  plus  possible 
désormais  de  les  réunir,  non  seulement  dans  le  même  genre , comme 
Pont  voulu  quelques  naturalistes , mais  encore  dans  la  même  famille. 

Aux  Psammobies  nous  réunissons  les  Sanguinolaires  , après  avoir  fait 
subir  à ce  dernier  genre  des  modifications  importantes;  nous  le  rédui- 
sons, en  effet,  mSangumolaria  roseadé  Lamarck,  coquille  bien  con- 
nue sous  le  nom  de  Solen  sanguinolenlus  de  Linné.  Les  autres  espèces 
admises  avec  celles-ci  parmi  los  Sanguinolaires  sont  pour  la  plupart  des 
Psammobies;  l'une  d'elles  dépend  du  genre -Capse. 

Ce  genre  Capse  n’est  point  celui  de  Lamarck,  ce  n’est  pas  non  plus 
tout  à fait  celui  de  Bruguières  , mais  une  partie  seulement.  Bruguières , 
dans  les  planches  de  l’Encyclopédie  , rassemble  sous  le  nom  générique 
de  Capsa  des  coquilles  qui  n’offrent  pas  des  caractères  identiques  ; les 
unes,  en  effet,  sont  de  véritables  Tellines;  peul-ôLi*e  Tune  des  espèces 
appartient-elle  à notre  genre  Fragilia.  Ces  espèces  l'cLirées  des  Capses  , 
il  en  reste  une , c'est  le  Kenus  dellovala  qui  peut  seule  rester  le  type  du 
genre  Capse. 

En  admettant  un  genre  Capse  dans  sa  méthode , Lamarck  aurait  dû 
faire  ce  que  nous  proposons  aujourd’hui , il  aurait  évité  dans  sa  nomen- 
clature ces  vacillations  continuelles  qui  jettent  une  fâcheuse  incertitude 
dans  l’esprit  des  personnes  qui  aiment  la  science- et  veulent  la  cultiver. 
Les  Capses  de  Lamarclt,  ainsi  que  nous  le  verrons  bientôt . doivent 
disparaître  de  la  méthode  pour  rentrer  dans  le  genre  Donax;  par  con- 
séquent il  faut  bien  comprendre  que  sous  un  môme  nom,  des  coquilles 
fort  différentes  ont  été  rangées,  mais  que  ce  nom  devant  subsister, 
il  doit  revenir  au  genre  auquel  il  a été  d’abord  consacré,  et  s’appli- 
quer au  nwins  à l’une  des  espèces  qui  y était  primitivement  contenue. 

Les  coquilles  de  la  famille  des»  Psammobides  sont  oblongues , Irans- 
verses,  équivalves,  et  presque  toutes  subéquilatérales.  Elles  sont géné- 


LbS  I'SAMMOBII>ES. 


/»o5 

râlement  comprimées . aplaties  ; par  leur  forme  générale  elles  ressem- 
blent aux  Tellines , mais  elles  manquent  du  pli  postérieur  qui  caractérise 
ces  dernières  et  leur  charnière  plus  simple  est  toujours  dépourvue  dedents 
latérales.  Les  valves  sont  un  peu  bâillantes  en  avant  et  en  arrière;  elles 
sont  jointes  par  un  ligament  extérieur,  généralement  épais,  bombé  en 
dehors,  allongé  sur  le  bord  dorsal  et  s’appuyant  sur  des  nymphes 
grosses,  quelquefois  saillantes,  circonscrites  par  un  sillon  profond, 
dans  lequel  s’attache  l’enveloppe  fibreuse  du  ligament.  La  charnière 
porte  une  ou  deux  dents , et  ces  dents  sont  modifiées  selon  les  espèces. 

Les  impressions  musculaires  sont  généralement  médiocres;  elles 
occupent  la  région  supérieure  du  test;  l’impression  paliéale  se  rap- 
proche de  celle-  des  Tellines , cependant  la  sinuosité  postérieure  reste 
différente  à quelques  égards.  Ainsi  elle  est  courte  et  ellipsoïde  dans  les 
Sanguinolaires  et  presque  entièrement  détachée  de  la  portion  ventrale  ; 
elle  est  plus  profonde  dans  les  Psammobies,  et  on  voit  son  bord  infé- 
rieur se  confondre  de  plus  en  plus  avec  la  portion  ventrale  jusqu’au 
point  d’y  être  confondue  dans  toute  sa  longueur.  Ces  diverses  modifi  - 
c^ations  pourront  nous  servir  à diviser  le  genre  Psammobie  en  plusieurs 
sections , au  moÿen  desquelles  les  espèces  seront  groupées  d'une  ma- 
nière conforme  à leurs  affinités  naturelles. 

Les  animaux  de  celte  famille  sont  essentiellement  marins;  ils  habi- 
tent les  plages  sableuses  à quelques  brasses  de  profondeur.  Leurs  mœurs 
sont  semblables  à celles  dos  Tellines.  c’est-à-dire  qu'ils  se  creusent , à 
l’aide  de  leur  pied,  un  trou  dans  le  sable  et  s'y  enfoncent  perpendi- 
culairement, la  bouche  en  bas,  de  manière  à laisser  flotter  leurs  siphons 
à la  surfacedu  sol.  Deux  des  genres  contenus  dans  cette  famille,  Psam- 
mobie et  Capse,  sont  connus  à l’état  fossile  ; mais  les  espèces  sont  loin 
d’être  aussi,  nombreuses  que  quelques  paléontologistes  se  le  sont  ima- 
giné. 

GENRE  TRENTE-HUITIÈME. 

PSAMKOBIX:.  psammobia.  (Lamk.) 

Pt.  [3.  flg.  4 à 10. 

CARACTERES  génériqces.  — Animal  ovale ^ transverse,  peu 
épais,  ayant  les  lobes  du  manteau  désunis  dans  toute  la  lon- 
gueur du  bord  ventral.  Bord  libre  du  manteau  large  et  garni 
cl  un  seul  rang  de  tentacules  nombreux  et  coniques;  valvule 


4o6 


D0L1Z1E*ME  FAMILLE. 


palléale,  étroite  en  avant,  plus  large  en  arrière.  Deux  siphoris 
très  allongés , disjoints  dans  toute  leur  longueur,  terminés  par 
une  ouverture  tentuculée  à tentacules  simples.  Pied  robuste , 
long,  triangulaire  ; palpes  labiales  médiocres , triangulaires, 
plus  longues  que  larges , fixées  par  une  base  étroite.  Quatre 
feuillets  branchiaux  tombant  dans  la  cavité  palléale;  la  paire 
interne,  grande,  occupant  toute  la  longueur  du  corps  depuis  les 
palpes  jusqu’au  siphon  anal  ; la  paire  externe,  de  moitié  pliis 
courte  , tronquée  en  avant. 

Coquille  ovale , oblongue , transverse , subéquilatérale , 
aplatie , médiocrement  bâillante  à ses  extrémités  ; crochets 
petits  , peu  saillants,  peu  inclinés.  Charnière  étroite,  pourvue 
d'une  ou  de  deux  dents  sur  chaque  valve  ; ligament  externe 
saillant  le  long  du  bord  postérieur.  Impressions  musculaires 
grandes  , presque  égales  ; impression  palléale , éloignée  du  bord 
des  valves,  présentant  un  sinus  profond,  étroit,  horizontal. 

SYNONYMIE  GÉNÉRIQUE. — Telliiia  ^ Lister,  Linné,  Pennant, 
Boni,  Da  Costa,  Schrœter,  Gmelin,  Poli,  Spengler,Donovan, 
Wood,  Montagu,  Maton  et  Rackett,  Dillwyn,  Turton.  — Tel- 
lina  {pa7's]^  d’Orbigny. — Solen,  Linné,  Schrœter,  Gmelin, 
Bruguière,  Moptagu,  Maton  etRackett,  Wood,  Dillwyn, 
Lamarck,  Turton,  Gerville  —Sanguinolaria^'Roi^^y,  Sowerby. 
— Gari , Schninacher.  — f Psavimobia , Lamarck , Férussac , 
Sowerby , Tuvton  , Crouch  , Collard-des-Cherres , Philips , 
Lesson , Menke , Bronn , Montpéreux , Q,uoy  et  Gaimard , 
Dujardin,  Philippi,  Forbes,  Anton,  Geini^,' S.  Wood. — 
Luiricola^  Blainville.  — Psammocola  , Blainville,  Keferstein, 
Rang , Dufo.  — Psaminotea , Lamarck , Boudich , Sowerby, 
Crouch,  Keferstein,  Cuvier,  Menke.  — SoleieUina^  Blain- 
ville, Grateloup.  — Psammosolen , Bronn.  — Angulus , Me- 
gerle.  — Gatan , Adanson. 

OBSERVATIONS.  — Linné  connut  deux  espèces  appartenant  au  genre 
Psammobie  de  Lamarck:  l’une,  figurée  depuis  longtemps  par  Aldrovande, 


LKS  PSAiMMUBlDKS. 


/jo; 

ost  mentionnée  parmi  les  Tellines  ; la  seconde  , ayant  exactement  les 
mêmes  caractères  que  la  première , a été  rangée  parmi  les  Solens , lors- 
que Linné,  dans  son  Manlissa  pîantarum , donna  un  supplément  aux 
diverses  parties  de  son  Systema  naturœ.  Les  successeurs  de  Linné 
adoptèrent  aveuglément  ses  opinions , partagèrent  aussi  les  mômes 
espèces  entre  les  Tellines  et  les  Solens.  Lorsque  Bruguière,  dans  l’^'n- 
cyclopèdie  méthodique , commen.ça  à réformer  les  genres  de  Linné,  il 
laissa  aux  Solens  une  étendue  trop  considérable,  ce  qui  lui  permit  d’y 
introduire  les  deux  espèces  dont  nous  venons  de  parler. 

Bruguière  aurait  dû  restreindre  l’étendue  du  genre  Solen,  et  créer 
un  genre  nouveau  pour  celles  des  espèces  qui , ainsi  que  celles-ci , n’en 
présentent  pas  tous  les  caractères.  Mais  à cette  époque , les  zoologistes 
étaient  aussi  réservés  sur  ces  sortes  de  créations  ,■  qu'ils  en  sont  devenus 
prodigues  depuis.  Pénétrés  de  l'esprit  de  Linné,  ils  aimaient  à con- 
server aux  coupures  génériques  une  étendue  considérable , ce  qui  leur 
permettait  d'y  introduire,  par  une  sorte  de  tolérance , des  espèces  qui , 
sans  en  avoir  tous  les  caractères,  les  possédaient  en  partie.  Les  coquilles 
qui  nous  occupent  sont  dans  cette  catégorie  ; ayant  des  rapports  avec 
les  Tellines  et  avec  les  Solens , il  no  faut  pas  s’étonner  si  Bruguière  les 
a entraînées  dans  ce  dernier  genre. 

Depuis  Bruguière  jusqu’au  moment  où  Lamarck  publia  le  cinquième 
volume  des  Animaux  sans  vertèbres  ^ les  deux  espèces  de  Linné  et  toutes 
celles  qui  furent  découvertes  depuis,  restèrent  incertaines  entre  les 
Tellines  et  les  Solens;  en  effet,  on  no  trouve  dans  les  précédents  ou- 
vrages de  Lamarck  aucun  genre  qui  pût  recevoir  ces  coquilles.  Cepen- 
dant celte  incertitude  aurait  pu  cesser  beaucoup  plus  tôt  si  les  conchy- 
liologues  n’avaient  pas  oublié  le  grand  ouvrage  de  Poli , ouvrage  dans 
lequel  ils  auraient  puisé  dès  1791  des  renseignements  précis,  qui  les 
auraient  guidés  dansda  classification  des  coquilles  qui  nous  occupent.  Ils 
auraient  appris,  par  les  figures  de  Poli,  que  l'animal  des  Psammobios 
■a  les  caractères  extérieurs  des  Tellines,  et  dès  lors  ils  n'auraient  pas 
Iiésité  à faire  rentrer  dans  ce  genre  toutes  les  espèces  voisines,  du 
Tellina  Gari. 

Lamarck  ne  se  contenta  pas  de  créer  le  genre  Psammobie;  sur  un 
caractère  de  la  plus  faible  valeur,  il  proposa  son  genre  Psammotea.  L’un 
d’eux  était  inutile,  ainsi  que  nous  l’avons  fait  comprendre  depuis  long- 
temps , et  si  nous  avons  conservé  celui  des  Psantmobies , c’est  parce 
qu’il  renferme  le  plus  grand  nombre  d’espèces  et  celles  entre  autres  qui 
furent  connues  de  Linné.  Les  Psammotées  ne  diffèrent  pas  plus  des 
Psammobies  que  les  Tollinides  des  Tellines.  Les  Psammobics  ont  deux 


DUITZIEME  FAMlLLli. 


4o8 

dents  à le  charnière,  les  Psammotées  n’en  ont  qu’une  d’un  côté  et  deux 
de  l’autre , ou  une  seule  de  chaque  côté  : caractère  insignifiant , car  on 
le  voit  s’établir  par  des  degrés  insensibles.  Guidé,  soit  par  l’ouvrage  de 
Poli , soit  par  une  étude  plus  approfondie  des  coquilles  , Lamarck  rejeta 
l’opinion  de  Bruguière,  et  entraîna  ses  nouveaux  genres  dans  le  voisi- 
nage des  Tellioes  et  dans  la  môme  famille  qu’elles. 

M.  de  Blainvillc  ne  voulut  accepter  ni  les  genres  de  Lamarck,  ni.sa 
famille  des  Nymphacées;  il  repoussa  également  son  opinion  sur  la  place 
que  doivent  occuper  les  Psammobies  dans  la  Méthode.  Ce  zoologiste 
créa  un  genre  Psammocole,  qu’il  divisa  en  trois  sections  : les  deux 
dernières  correspondent  aux  genres  Psammobio  et  Psammotée  de  La- 
marck ; la  première  était  inutile,  car  elle  est  faite  avec  une  des  prin- 
cipales espèces  des  Psammobies.  Envisageant  les  coquilles  seules, 
M.  de  BlainvÜle  vit  s’établir  des  relations  entre  les  Solens  et  les  Psam- 
mobics  par  rintermédiaire  des  Solecurtes  et  des  Solelclünos ; mais  si , 
au  lieu  de  créer  ce  dernier  genre,  M.  de  Blainville  l’avait  rapproché  des 
Psammobies , il  aurait  trouvé  entre  eux  assez  d’analogies  pour  les  con- 
fondre , et  alors  il  n’aurait  pas  hésité  à rapprocher  les  Psammobies  des 
Tellines , plutôt  que  de  les  entraîner  dans  le  voisinage  des  Solens.  Nous 
le  répétons,  pour  adopter  une  semblable  opinion,  il  fallait  oublier  l’ou- 
vrage de  Poli. 

Cuvier,  contrairement  à-  son  habitude  d’emprunter  des  documents  à 
l’ouvrage  de  Poli,  ne  l’ayant  pas  consulté  au  sujet  des  Psammobies, 
adopta  l’opinion  de  M.  de  Blainville  dans  la  seconde  édition  du  Règne 
animal  y et  rapprocha  ce  genre,  des  Solens. 

Les  naturalistes  qui , depuis  , eurent  occasion  do  parler  des  Psam- 
mobies , soit  pour  les  introduire  dans  des  systèmes  méthodiques  , soit 
pour  y ajouter  de  nouvelles  espèces , se  partagèrent  entre  les  deux 
opinions  principales  que  nous  venons  d’exposer;  cependant,  en  exami- 
nant tous  leurs  travaux , on  voit  que.  le  plus  grand  nombre  se  range  à 
l’opinion  de  Lamarck,  en  acceptant  le  changement  que  nous  avons  fait- 
subir  au  genre,  en  y ajoutant  les  Psammotées  de  Lamarck  et  les  Soletol- 
linesde  M.  de  Blainville. 

En  traitant  du  genre  Telliiw^  nous  avons  rapporté  l’opinion  de 
M.  d'Orbigny  qui,  par  une  exagération  sans  fondement  de  la  manière 
de  voir  de  Lamarck,  réunit  les  Psammobies  aux  Tellines,  H est  évident 
que  pour  en  venir  à un  arrangement  comme  coIui-Jà,  il  a fallu  oublier 
tout  c-e  qui  a été  écrit  sur  ce  sujet  depuis  17DI  jusqu’eji  4 845;  il  a 
fallu  aussi  examiner  imparfaitement  les  coquilles  elles-mêmes,  car  si 
l'on  trouve  moyen  de  séparer  le  genre  /jrcopt/ym  des  l'eltines,  à plus 


LES  PSÂMMUBIDES. 


409 

forte  raison  peut-on  trouver  celui  de  distinguer  les  Psammobies  d’après 
la  coquille  seule.  Ce  qui  tend  à prouver  riiicertitude.  de  M.  d’Orbigny, 
au  sujet  de  Tenseinble  des  Psanamobies , des  Tellines  et  des  Sanguino- 
laires,  c'est  ^quo,  après  avoir  joint  une  partie  des  Sanguinolaires  aux 
Tellines , il  fait  reparaître  cependant  ce  genre  sous  le  nom  de  Capse  de 
Bruguière,  pour  y ranger  quelques  espèces  de  véritables  Psammobiçs, 
Si  M,  d’Orbigny  voulait  restaurer  le  genre  Capso  de  Bruguière,  ce  qui 
n’est  pas  impossible , il  aurait  fallu  qu'il  s'expliquât  sur  sa  composition , 
attendu  que  dans  ce  genre  se  trouvent  deux  sortes  de  coquilles,  des  Tellines 
et  une  Sanguinolaire  de  Lamarck.  Auxquelles  de  ces  espèces  M.  d’Or- 
bigny veut-il  consacrer  le  nom  de  Capse?  Il  eût  été  nécessaire  que  ce 
naturaliste  le  déclarât,  car,  encore  une  fois,  nous  avons  la  preuve  que 
les  espèces  introduites  dans  son  genre  Capso  sont  de  véritables  Psam- 
mobies. 

L’animal  des  Psammobies  n’était  pas  suffisamment  connu;  la  Ijgure 
de  Poli  nous  apprend  que  le  manteau  est  garni  sur  toute  la  circonférence 
do  tentacules  triangulaires,  qui  imitent  assez  bien  des  dents  de  Scie. 
En  avant,  Tanimal  fait  sortir  un  pied  comprimé,  triangulaire,  compa- 
rable à celui  des  Tellines.  En  arrière,  le  manteau  se  prolonge  en  deux 
siphons  longs  et  grêles,  séparés  dans  toute  leur  longueur  , et  terminés 
l'un  et  l’autre  par  une  ouverture  tentaculée..  Ces  organes  sont  en  pro- 
portion plus  gros  que  ceux  des  Tellines;  mais,  comme  on  le  voit,  rien 
n'indique  dans  ces  caractères  extérieurs,  que  l'animal  des  Psammobies 
diffère  beaucoup  do  celui  des  Tellines.  Il  fallait  donc  étudier  cet  animal 
jusque  dans  ses  caractères  zoologiques,  pour  faire  cesser  toutes  les 
incertitudes,  relatives  à la  place  qu’il  doit  occuper  dans  une  méthode 
naturelle. 

Les  Psammobies  sont  des  coquilles  ovales , Iransverses , à valves 
{>Iates , et  en  cela  se  rapprochant  beaucoup  des  Tellines  ; elles  sont 
subéquiJatérales  , un  peu  bâillantes  en  avant  et  en  arrière  ; toutes  sont 
lisses  et  revêtues,  surtout  sur  les  bords,  d’un  épiderme  généralement 
mince  et  caduc  ^ mais  qui  se  prolonge  en  dehors  au-delà  du  bord  de  la 
coquille  de  manière  à couvrir  et  à protéger  un  large  bord  du  manteau* 
Les  valves-sont  jointes  au  moyen  d’un  grand  ligament  externe,  très 
convexe  et  fort  saillant,  solidement  attaché  sur  desnymphes,  quelque- 
fois saillantes  en  dehors.  La  charnière  est  très  simple  ; sur  un  bord 
cardinal  étroit , s'élèvent  au-dessous  du  crochet  deux  petites  dents 
divergentes  sur  chaque  valve.  Dans  un  certain  nombre  d’espèces  , ces 
dents  sont  égales  et  bifides;  dans  d’autres,  l’une  des  dents  diminue 
graduellement  et  linit  par  disparaître  ; dans  d'autres  enfin , cette  dis- 


DOUZIEME  FAMILLE. 


4lO 

parition  a lieu  également  sur  les  deux  valves;  alors  il  né  reste  qu'une 
seule  dent  à la  charnière,  et  c'est  de  ces  espèces  à la  charnière  simpli- 
fiée que  Lamarck  a formé  son  genre  Psaminotée.  Si  nous  examinons  les 
impressions  musculaires , nous  les  trouvons  peu  éloignées  de  la  char- 
nière et  également  distantes  ; Panlcricure  est  ovale-oblongue , la  posté- 
rieure est  arrondie  ; l’impression  palléale  se  place  très  haut  dans  l’inté- 
rieur de  la  coquille  ; elle  est  parallèle  au  bord  inférieur,  et,  parvenue  au 
bord  postérieur  du  muscle , elle  s’infléchit  et  produit  une  sinuosité 
postérieure  assez  jirofonde  et  horizontale.  Cette  sinuosité  a la  forme  d’un 
ellipsoïde  tronqué  à Tune  deses  extrémités.  Les  Psammobicsn'ont  jamais 
la  lunule  nettement  circonscrite,  et  si  dans  quelques  unes  le  côté 
postérieur  est  limité  par  un  angle  apparent,  cet  angle  est  toujours 
symétrique,  c'est-à-dire  semblable  sur  chaque  valve;  il  n’olfro  jamais 
celte  inflexion  irrégulière  qui  caractérise  les  Tellines. 

Par  l’ensemble  de  ses  caractères , l’animal  des  Psammobtes  est  plus 
voisin  des  Donaces  et  des  A'^enus  que  des  Tellines.  Cependant  il  tient 
aussi  de  ces  derniètes  par  les  longs  siphons  complètement  séparés  qui 
terminent  son  manteau.  Cet  animal  a une  forme  semblable  à celle  de  sa 
coquille;  il  est  aplati,  ovale,  transverse,  et  le  manteau  qui  revêt  l inté- 
rieur'  des  valves  est  mince,  transparent,  épaissi  sur  son  pourtour  par 
un  muscle  orbiculaire , assez  étroit,  présentant  un  double  rebord,  sur 
l’un  desquels  s’élève  une  rangée  dô  fins  tentacules  coniques  rapprochés, 
serrés , et  qui  diflèrenl  constamment  de  ceux  des  Tellines , car  ils  ne 
sont  ni  tronqués,  ni  dilatés  au  somrfiet.  Les  deux  lobes  du  manteau 
laissent  entro  eux  une  graude  ouverture;  qui  s’étend  depuis  l’extrémité 
inférieulre  du  muscle  adducteur  antérieur  des  valves  jusque  près  de 
l’extrémité  postérieure  de  l’animal.  C’est  à ce  point  que  leur  jonction 
s’opère,  au  moyen  d'une  commissure  consolidée  par  deux  petits  muscles. 
Nous  avons  vu  dans  les  Tellines  une  valvule  s'élever  à partir  dé  l’ouver- 
ture intérieure  du  siphon  branchial  et  se  continuer  le  long  du  bord 
interne  du  muscle  orbiculaire.  Cette  valvule  n'existe  pas  dans  les  Psam^ 
niobies. 

Les  siphons  acquièrent  une  très  grande  longueur  ; ils  ont  quelquefois 
deux  ou  trois  fois  celle  de  la  coquille  ; ils  sont  en  proportion  plus  gros  que 
dans  les  Tellines  ; ils  sont  presque  égaux , cependant  le  siphon  anal  est 
toujours  un  peu  plus  court  et  un  peu  plus  grêle  que  son  congénère  Ces 
organes  sont  susceptibles  d’une  contraction  considérable;  cette  con- 
traction s’opère  en  partie  a l’aide  de  deux  muscles  rélracteurs , dont  la 
forme  coïncide  exactement  avec  celle  de  la  sinuosité  palléale  i qui  se 
trouve  à l’intérieur  des  valves.  L’ouverture  du  siphon  anal  est  simple  , 


LES  l'SAMMüHIDES. 


4l  I 

celle  du  siphon  branchial  est  garnie  d’une  série  de  tentacules  allongés , 
simples  et  coniques.  L’ouverture  intérieure  du  siphon  branchial  est 
semblable  à celle  des  Tellines;  elle  n’est  point  couverte  par  une  val- 
vule comme  dans  les  Mactres  et  quelques  autres  genres. 

Le  pied  est  en  proportion  plus  gros  quo  dans  les  Tellines  ; en  cela  il 
se  rapproche  de  celui  des  Solecurtes,  quoiqu’il  reste  d’un  volume  bien 
moins  considérable.  Lorsque  l'animal  le  sort  de  sa  coquille  , il  se  pré-»- 
sente  sous  la  forme  d’une  langue  triangulaire,  pointue,  ayant  le  bord 
supérieur  obtus  et  le  bord  inférieur  tranchant.  Par  sa  base  , il  se  con- 
tinue avec  une  masse  abdominale  comprimée , et  lorsque  l'animal  le 
contracte,  il  est  séparé  de  l'abdomen  par  un  sillon  oblique,  profond , 
qui  s’étend  de  la  bouche  à l'angle  inférieur  et  postérieur  de  la  masse 
abdominale. 

. La  bouche  est  assez  grande , ovale , Iransvcrse  ; elle  est  cachée  par 
deux  lèvres  membraneuses,  larges  et  simples,  qui , en  aboutissant  de 
chaque  coté  du  corps,  se  transforment  en  une  paire  de  palpes  labiales  , 
triangulaires,  mais  longues  et  étroites,  et  très  différentes  par  leur  forme 
et  leur  étendue  de  celles  des  Tellines. 

La  surface  extérieure  de  ces  organes  est  lisse , mais  la  surface  interne 
est  chargée  de  plis  membraneux  d’une  grande  régularité. 

La  palpo  interne  est  attachée  au  corps , tandis  que  l’externe  est  fixée 
sur  les  parois  minces  du  manteau;  de  sorte  qu’en  rejetant  en  dehors  le 
manteau , on  entraîne  la  palpe  externe  et  on  la  détache  de  sa  con- 
génère. 

Les -muscles  adducteurs  des  valves  sont  variables  dans  leur  forme 
selon  les  espèces;  mais,  sans  exception,  ils  sont  situés  dans  la  région 
dorsale  de  l’animal  et  plus  rapprochés  de  la  charnière  que  dans  les 
Tellines.  Le  muscle  antérieur  est  le  plus  souvent  ovalaire  ; alors  il  est 
arqué  dans  sa  longueur  et  accompagne  le  bord  antéro-supérieur.  Dans 
d’autres  espèces , ce  muscle  est  subcirculaire , et , en  cela , il  ressemble 
au  muscle  postérieur,  qui  affecte  celte  forme  et  qui  devient  quelquefois 
semilunaire. 

Les  organes  de  la  respiration  sont  très  différents  deceux  des  Tellines  ; 
ils  ressemblent  beaucoup  plus  à ceux  des  Donaces  et  des  Venus;  doux 
feuillets  sont  de  chaque  côté  du  corps;  ils  sont  inégaux,  les  feuillets 
internes  sont  les  plus  longs;  ils  commencent  en  une  pointe  aiguë,  qui 
s’interpose  entre  les  palpes  labiales  ets’avancejusqueprèsdela  bouche. 
Ce  feuillet , appliqué  le  long  du  corps , s’élargit  rapidement  vers  le  bord 
dorsal  et  descend  obliquement  de  haut  en  bas  et  d'avant  en  arrière. 
Très  larges,  ses  deux  surfaces  sont  couvertes  d'un  grand  nombre  de 


DOUZIEME  FAMILLE. 


4 12 

petites  côtes  régulières , dont  les.  interstices  coïncident  aux  cloisons 
sous-branchiales.  Le  feuillet  externe  no  -se  ren\'erse  pas  vers  le  dos  , 
ainsi  que  cela  a lieu  chez  les  Lavignons  et  chez  les  Tellines.  S’appli- 
quant sur  son  congénère , il  tombe  avec  lui  dans  la  cavité  du  manteau  ; 
il  est  de  moitié  plus  court;  son  bord  antérieur  est  tronqué  , en  suivant 
une  ligne  perpendiculaire,  qui  partirait  do  la  région  cardinale , pour 
aboutir  vers  le  milieu  du  bord  ventral.  Le  bord  inférieur  est  parallèle  à 
celui  du  feuillet  branchial  interne,  et  le  bord  postérieur  s’incline  for- 
tement de  haut  en  bas  et  un  peu  d’avant  en  arrière.  Comme  on  voit,  ce 
feuillet  branchial  est  triangulaire  et  de  moitié  plus  petit  que  le  feuillet 
interne.  Nous  avons  vu  une  disposition  semblable  dans  les  Mésodesmes, 
et  nous  la  retrouverons  bientôt  cliez  les  Donaces  et  dans  d’autres  genres. 

Nous  appelons  spécialement  l’attention  des  zoologistes  sur  ces  diffé- 
rences profondes  qui  se  remarquent  dans  les  organes  dé  la  respiration , 
dans  des  genres  qui  paraissent  tellement  voisins  que  tous  les  classifi- 
cateurs les  ont  compris  dans  la  môme  famille.  Tous  les  zoologistes 
attachent  une  grande  valeur  aux  modifications  d’un  organe  aussi  im- 
portant que  celui  de  la  respiration;  la  classification  do  Cuvier  est  en 
grande  partie  fondée  sur  les  caractères  que  présentent  ces  organes. 
Sans  vouloir  leur  accorder  une  valeur  excessive,  il  faut  cependant  les 
faire  entrer  pour  quelque  chose  dans  la  classification  , quel  que  soit 
d'ailleurs  le  rang  qu’on  leur  accorde  dans  la  subordination  des  carac- 
tères. Si  la  modification  des  organes  branchiaux  était  la  seule  qui  se 
montrât  dans  les  Psammobies,  elle  suffirait,  sans  aucun  doute,  pour 
séparer  ce  genre  des  Tellines  ; mais  celte  modification  en  entraîne 
d’autres,  non  seulement  dans  les  parties  extérieures  do  l’animal,  mais 
encore  dans  son  organisation  profonde.  C’est  ainsi  que  les  tentacules 
du  manteau  , la  grandeur  et  la  forme  des  palpes  labiales  , la  grosseur 
proportionnelle  du  pied  , sont  déjà  des  indices  des  changements  sur- 
venus dans  l’ensemble  de  l’organisfttion.  Les  organes  de  la  digestion 
ont  onx-mômes  subi  des  modifications  qui  les  distinguent  de  ceux  des 
genres  environnants.  Le  système  nerveux  lui-même,  conservant  une 
grande  uniformité , présente  cependant  dans  les  Psammobies  un  gan- 
glion palléal  antérieur  que  l'on  ne  retrouve  dans  aucun  autre  mollusque 
de  la  même  classe.  Nous  avons  donc  eu  raison  do  séparer  la  famille  des 
Psammobides  ; elle  constitue , en  réalité , un  famille  naturelle. 

En  arrière  du  bord  postérieur  du  pied,  les  branchies  de  chaque  côté 
se  réunissent  sur  la  Ligne  médiane.  Elles  s’avancent  sur  la  surface  in- 
terne du  muscle  adducteur  postérieur  des  valves , et  elles  rencontrent  de 
chaque,  côté  un  petit  pli  saillant  du  manteau , qui  se  continue  sur  le  pour- 


LKvS  PSAMMOBIDES. 


tour  de  louverlure  interne  du  siphon  anal.  Labranchie  s’attache  solide- 
ment à ce  pli,  et,  contrairement  à ce  qui  a lieu  dans  la  plupart  des  mollus- 
ques de  la  môme  classe,  cette  soudure  persiste  après  la  mort  de  l'animal , 
de  sorte  que,  dans  ce  genre,  on  acquiert  facilement  la  preuve  que  l'extré- 
mité postérieure  de  labranchie  est  réellement  destinée  à compléter  la 
cavité  du  siphon  anal  et  à la  séparer  de  la  grande  cavité  du  manteau. 

Le  plus  grand  nombre  des  Psammobies  sont  des  mollusques  litto- 
raux ; elles  vivent  comme  les  Tellines , enfoncées  dans  le  sable  des 
rivages  à quelques  brasses^  de  profondeur.  Le  pied  puissant  dont  la 
nature  les  a pourvues  leur  permet  de  déplacer  des  graviers  d’un  plus 
gros  volume,  que  d'autres  mollusques  dont  le  pied  est  plus  grêle  et 
plus  petü. 

Le  nombre  des  espèces  n’est  pas  très  considérable  ; Lamarck  en  a 
inscrit  dix-huit , auxquelles  il  faudrait  joindre  huit  espèces  de  Psam- 
motées , ce  qui  ferait  un  total  de  vingt-six  espèces  j mais  plusieurs 
doivent  être  retranchées;  les  Psammobia  cayaneusis^  lœvigata,  galatea, 
les  Psammotea  pellucida  et  candida , sont  des  Tellines  et  doivent  ren- 
trer dans  ce  genre.  Le  Psamniobia  anranlia  dépend  d’un  genre  curieux , 
auquel  M.  Turton  a donné  le  nom  de  Gateoma.  Le  Psammotea  violacea 
ést  pour  nous  une  Sanguinolaire , et  enfin  le  Psammobiit  tarentina  est 
un  double  emploi  du  Petricola  ockroteuca  de  Lamarck , et  il  doit , par 
conséquent,  rentrer  dans  la  synonymie  du  FragiUa  fragilis  Voilà  donc 
huit  espèces  qu’il  faut  retrancher  des  Psammobies  do  Lamarck;  mais  il 
faut  y ajouter  les  Sdelellines  de  M.  de  Blainville,  trois  des  espèces  de 
Sanguinolaires  de  Lamarck , et  enlin , un  grand  nombre  d’espèces  nou- 
vellement découvertes  et  décrites  par  Sowerby,  llanley,  Cî^iy,  Lesson, 
Quoy  et  Gaimard,  et  quelques  autres  conchylioIogistes.Après  avoir  con- 
trôlé les  espèces  du  genre , après  avoir  réuni  toutes  celles  qui  sont 
connues,  nous  en  comptons  quarante-quatre  de  vivantes,  distribuées 
dans  presque  toutes  les  mers.  L'Océan  d’Europe  en  possède  quelques 
unes  , parmi  lesquelles  nous  en  signalerons  plusieurs  qui  se  répandent 
sur  de  grandes  surfaces.  M.  Cuming  en  a rapporté  quelques  espèces  des 
mers  chaudes  de  l'Inde;  en  en  connaît  d’aatros  provenant  de  la  Nou- 
velle-Hollande et  des  deux  Amériques. 

Nous  partageons  les  espèces  en  plusieurs  sections.  Dans  la  première 
nous  réunissons  des  espèces  allongées,  transverscs,  ayant  des  nymphes 
grosses  et  saillantes  pour  un  ligament  puissant;  la  sinuosité  palléale, 
longue  et  étroite,  s’attache  à la  portion  ventrale  de  l’impression  palléale  ; 
ce  sont  peur  la  plupart  les  Solelellines  de  jM.  de  Blainville,  elles  se 
rapprochent  des  Tellines  par  la  sinuosité  du  manteau. 


nOÜ7.lKME  FAMILLE. 


4»4 

Dans  la  spoonde  section,  nous,  rassemblons  les  espèces  à nymphes 
plus  petites  et.  ayant,  une  sinuosité  palléale  plus  courte  , horizontaie  , 
niais  ovalaire  et  en  partie  détachée  de  la  portion  ventrale  de  l’impression 
du  manteau.  Les  Psammobies  et  les  Psammotées  de  Laniarck  offrent  les 
caractères  que  nous  venons  de  mentionner  et  font  partie  de  notre  se- 
conde  section. 

Enfin,  nous  ajoutons  une  troisième  section  pour  une  espèce  qui, 
ptobahlement , deviendra  le  type  d’un  nouveau  genre;  nous  voulons 
parler  du  Soicn  orbicuîatus  de  Wood  » dont  nous  avons  donné  une  de- 
scription détaillée  dans  le  Magasin  de  zoologie.  Pour  établir  un  genre 
avec  celte  espèce , il  faudrait  en  connaître  i’animal , et  dans  le  cas  où  il 
serait  différent  de  celui  des  Psammobies , on  pourrait  lui  imposer  le 
nom  générique  à-'Orbicularia. 

Les  espèces  fossiles  du  genre  Psammobie  sont  peu  nombreuses  ; elles 
commencent  d’une  manière  certaine  dans  les  terrains  crétacés , et  elles 
se  continuent  dans  toute  la  série  des  terrains  tertiaires.  Les  paléonto- 
logistes ont  cité  plus  d’espèces  que  nous  n’en  admettons,  parce  qu'ils 
ont  compris  dans  le  genre  des  moules  mal  caraclérisos  ou  des  coquilles 
entières  fermées  et  dont  les  vrais  caractères  génériques  sont  absolument 
inconnus.  Si  l'on  s'en  rapportait  aveuglément  aux  renseignements  des 
paléontologistes , les  Psammobies  auraient  paru  dans  les  terrains  les 
plus  anciens.  M.  Sowerby  en  cite  deux  du  terrain  silurien  dans  Pou- 
vrage  do  MAI.  Sedgwich  et  Murchisson  ; mais  la  figure  n’accuse  aucun 
des  caractères  des  Psammobies  , et  cette  espèce  pourrait  aussi  bien  se 
rapporter  aux  Cypricardes.  Nous  admettons  plutôt  parmi  les  Psammobies 
quelques ef^ces  deM.  Philips,  rapportées  par  lui  au  genre  Sanguinolaire. 
A l'égard  des  Sanguinolaires  fossiles,  ils!y  est  introduit  une  si  déplorable 
confusion , que  sur  plus  de  quarante  espèces  que  nous  avons  relevées 
dans  les  ouvrages  des  paléontologistes,  pan  une  seule  n’appartient  en 
réalité  à ce  genre , soit  qu'on  le  restreigne  toi  que  nous  le  faisons 
actuellement , soit  que  l'on  accepte  celui  de  Lamarck,  beaucoup  plus 
étendu.  Après  avoir  exercé  notre  patience  à recueillir  toutes  les  espèces 
fossiles  des  trois  genres  Psammobie , Capse  et  Sanguinolaire,  après  les 
avoir  étudiées,  après  en  avoir  contrôlé  la  synonymie  défectueuse  et  la 
nomenclature , nous  avons  comparé  toutes  les  espèces  et  nous  en  avons 
tenté  une  nouvelle  distribution.  Nous  nous  sommes  assuré  du  genre  de 
toutes  celles  dont  nous  avons  vu  la  charnière  : toutes  les  autres  sont 
douteuses  pour  nous. 

Dans  la  distribution  de  toutes  ces  espèces  si  peu  connues , il  en  est 
quelques  unes  qui  nous  semblent  plus  voisines  des  Psammobies , et 


LES  rSAM^iOBlDES. 


/|  i5 

quo  nous  TÎterons  dans  ce  genre  , en  conservant,  un  doute  motivé  sur 
l’ignorance  où  nous  sommes  des  véritables  caractères  génériques. 
N'ayant  pas  d'autres  moyens  , nous  nous  sommes  laissé  guider  par  les 
caractères  empiriques  de  la  forme  extérieure;  tous  les  observateurs 
savent  combien  on  peut  y être  trompé. 

Nous  aurions  pu  nous  abstenir  do  mentionner  toutes  ces  espèces  qui 
portent  le  doute  avec  olles . mais  nous  avons  dû  considérer  que  ce 
doute  est  relatif  au  genre  et  non  à l'espèce.  Le  genre,  on  le  sait , est 
une  conception  artificielle  , destinée  à rassembler  tous  les  êtres  qui  ont 
de  nombreux  caractères  communs;  l’espèce  est  une  création  de  la  na- 
ture dont  nous  devons  constater  l’existence  : elle  existe  indépendam- 
ment du  genre , et  si  par  ses  caractères  extérieurs  nous  la  reconnaissons 
assez  nettement  pour  la  distinguer  de  toutes  les  autres,  nous  devons 
l’admettre  dans  nos  catalogues , surtout  lorsque , devenue  fossile , elle 
acquiert  un  nouvel  intérêt  par  les  rapports  qu’elle  a avec  les  couches 
de  la  terre  qui  la  recèle.  Néanmoins,  aussi  longtemps  que  le  moindre 
doute  subsiste  au  sujet. d’un  certain  nombre  d'espèces,  nous  devons 
inviter  tous  les  observateurs  à tenter  de  nouveaux  efforts  pour  découvrir 
leurs  caractères  actuellement  inconiiua  ; ils  rendront  par  là  de  nouveaux 
services. à deux  sciences  qui  s’éclairent  mutuellement,  la  zoologie  et  la 
géologie. 

Si  la  connaissance  du  genre  n'est  pas  d’une  nécessité  aussi  absolue 
que  celle  de  l’espèce,  cependant  il  est  d’une  très  grande  utilité  de  recon- 
naître exactement  à quel  genre  appartiennent  les  espèces  fossiles;  c’est 
le  seul  moyen  que  nous  ayons  de  savoir,  par  analogie,  b quelle  époque 
des  périodes  géologiques  ont  commencé  les  divers  types  des  corps  orga- 
nisés, et  il  n'est  pas  indifférent  de  constater,  avec  exactitude,  l'appa- 
rition de  tel  genre  plutôt  que  de  tel  autre , puisque,  les  genres  nous 
désignent  des  degrés  particuliers  d’organisation  ; et  pour  revenir  plus 
particulièrement  aux  genres  qui  nous  occupent  dans  ce  moment , il 
serait  utile  de  savoir  avçc  précision  si  dans  la  nature  ancienne  les  ani  - 
maux  du  type  des  Tellines  vivaient,  comme  aujourd’hui,  associés  à 
ceux  du  type  des  Psammobies  qui , quoique  voisin  en  apparence  , s’en 
éloigne  par  des  caractères  considérables  de  l’organisation.  Le  fait  est 
seulement  probable  dans  l’état  actuel  de  nos  connaissances,  cette  pro- 
babilité peut  fort  bien  ne  pas  se  réaliser. 

Npus  n'avons  pas  à nous  occuper  ici  de  là  discussion  de  toutes  les 
espèces  introduites  dans  les  Sanguinolaires  par  les  paléontologistes  ; 
cette  discussion  trouvera  sa  place  dans  le  genre  Sanguinolaire  lui-même  ; 
nous  nous  contenterons  de  mentionner  celles  de  ces  espèces  que  nous 


4 iC)  DOU/iÈMK  FAMIIXK. 

rapporterions  de  préférelice  aax  Psammobies,  tout  en  conservant  dn 
doute  à leur  sujet. 

Nous  avons  huit  espèces  de  celte  dernière  catégorie , toutes  se  ré- 
partissent dans  les  couchés  moyennes  et  supérieures  des  formations  les 
plus  anciennes,  désignées,  il  y a quelques  années,  par  les  géologues 
sous  le  nom  de  terrain  de  transition. 

Quatre  proviennent  des  couches  dévoniennes  de  rAllémagne  et  de 
TAngleterre  : ce  sont  les  Sanguinolaria  soleniformû  , Goldfuss  ; 
Sanguinolaria  lyrata,  Philips; 

^ Sanguinolaria  Rœmeri,  Verneuil , qui  se  trouve  à la  fois  en  Russie  et 
en  Allemagne.  M.  de  Verneuil  a été  forcé  de  changer  le  nom  d'elliptica 
que  primitivement  M.  Rœmer  avait  imposé  à cette  espèce,  parce  que 
M.  Philips,  dans  ses  Paîœozoic  fossils , plusieurs  années  auparavant, 
avait  employé  cette  dénomination  pour  Pe^èce  suivante,  très  différente 
de  celle-ci  : 

Sanguinolaria  elliptica , Philips. 

Dans  le  terrain  carbonifère  nous  comptons  aussi  quatre  espèces  : 
ce  sont  les  Saiigumo/nna  obovala^  Munster;  angu&talaj  Philips. 
M,  Goldfuss  a donné  le  même  nom  à une  espèce  qui  no  nous  paraît  pas 
identique  à celle  du  paléontologiste  anglais.  I.e  Sanguinolaria  trans- 
versa , Portlock , est  une  belle  espèce  dont  la  forme  rappelle  celle  du 
Psammohia  nallowuysii  du  terrain  tertiaire;  enfin,  le  Sanguinolaria 
attenuata,  Portlock.  Ces  buit  espèces  de  Sangoinolaires  deviendront 
définitivement  des  Psammobies,  ou  seront  rejetées  de  ce  genre.  lorsque 
Poil  aura  découvert  leurs  caractères  génériques.  Il  serait  possible  aussi 
qu’elles  constituassent  un  genre  nouveau  ou  qu'elles  rentrassent  dans  le 
type  des  Cypricardes, 

Voici  encore  deux  espèces  du  Lias  qui  pourraient  appartenir  aux 
Psammobies,  mais  dont  on  ne  connaît  pas  encore  la  charnière  : Sangui- 
nolaria etegans  et  vetnsta  de  Philips , Géologie  du  Yorckshire , tome  I**". 

' Entre  le  Lias  et  les  terrains  crétacés  , le  genre  Psammobie  n’est  point 
interrompu  ; nous  en  avons  plusieurs  espèces  dans  POxford-Clayet  dans 
le  terrain  kimméridien,  mais  ces  espèces  ne  sont  pas  encore  décrites. 

‘ Nous  connaissons  cinq  espèces  dans  la  craie  , en  comprenant  dans 
ce  nombre  les  deux  Capses  de  M.  d’Orbigny,  Gapsa.elegans  et  discre- 
pans,  toutes  deux  des  craies  sableuses  de  la  Touraine.  Le  Psanimobia 
graciîis  de  M.  Fitlon  est  des  sables  verts  d’Angleterre , et  le  Semkos- 
tata  de  M.  Rœmer  est  répandu  dans  le  grès  vert  de  l’Allemagne.  Nous 
avons  une  empVeinte  du  Néocomien  de  Neüchâtel  qui  nous  paraît  de  la 
môme  espèce.  La  cinquième  espèce  est  douteuse,  c’est  le  Psammobia 


I.F.S  PSAMMOBIUES.  417 

hiconapirua  de  M.  Forbes,  trouvée  dans  le  terrain  crétacé  do  Tlndo  par 
M.  Clay. 

Seize  espèces,  en  y comprenant  celles  qui  ont  leurs  analogues  vivants, 
sont  connues  dans  la  série  des  terrains  tertiaires  et  s'y  distribuent  assez 
également;  quatre  espèces  dans  l’étage  inférieur;  deux,  Psaimnohia 
Hallowaysii  et  compressa,  caractérisent  le  bassin  de  Londres;  des  deux 
autres,  le  Psammobia  solenaides  est  propre  aux  calcaires  grossiers  de 
Paris,  la  seconde,  Psammobia  rudis , commence  aux  couches  infé- 
rieures du  calcaire  grossier  et  remonte  jusque  dans  les  sables  marins 
moyens.  Elle  se  retrouve  dans  les  calcaires  grossiers  de  la  Belgique. 

Trois  espèces  dans  l'étage  tertiaire  moyen,  Psammobia  Labordei , 
Basterot,  de  Dax  et  de  Bordeaux  ; \c  Psammobia  pudica,  Brongniart,  du 
Yicentin  , et  lePsawmoèia  affinis,  Dujardin , des  faluns  de  la  Touraine. 
Chaque  espèce  gît  dans  une  localité  particulière.  Il  y en  aurait  une  qua- 
trième si  l'on  admettait  le  Psammobia  rugosior  de  M.  Dubois  de  Mont- 
péreux , mais  cette  espèce  nous  paraît  une  Pétricole. 

Dans  le  crag  d'Angleterre  et  de  la  Belgique , quatre  espèces  propres 
sont  mentionnées  par  M.  S,  Wood  et  par  M.  Nyst.  Le  Psammobia  solida, 
Sowerby,  se  trouve  dans  les  terrains  supérieurs  de  Headen-Hill  et  aux 
environs  d'Anvers;  avec  elle  se  montre,  d’un  côté,  le  Psammobia 
laminàsa  en  Angleterre  et  les  Psammobia  lœvisG[  Dumouli  ^ Nyst,  en 
Belgique. 

L elage  tertiaire  supérieur  ne  contient  que  deux  espèces  particulières , 
le  Psammobia  iiniradiata  et  le  Psammobia  Basteroli  de  Bronn  ; d’autres 
e.spèces  vont  se  retrouver  dans  la  liste  suivante,  contenant  celles  qui 
ont  leurs  analogues  dans  les  mers  actuelles. 

4" /*5ammo6)q  costulala,  Turton. 

Vivante  dans  la  Manche  et  la  Méditerranée. 

Fossile  en  Sicile. 

Psammobia  lellinella , Lamarck. 

Lamarck  a donné  le  nom  de  Psammobia  (lorida  à une  coquille 
qui  n’est  autre  chose  qu’une  variété  du  Psammobia  vespertina. 
M.  Turton  a imposé  ce  môme  nom  à une  espèce  très  différente, 
inscrite  par  Lamarck  sous  le  nom  de  Psammobia  leUinella  ; 
c’est  à cette  dernière  espèce  que  se  rapporte  le  Psammobta 
fîoridaj  fossile  du  crag,  découvert  par  M.  S.  Wood. 

Vivante  dans  l'Océan  d’Europe. 

Fossile  dans  le  crag  d’Angleterre. 

T.  l.  'i®  PAUTIK. 


DOUZIÈME  FAMILLE. 


Psammobhi  vespertma  , Lamarck. 

Vivante  dans  tout  l'Océan  d’Europe  pt  In  Méditerranée. 

Fossile  en  Sicile , en  Italie  cl  dans  le  crag  d’Angleterre. 
Psammobia  incarna  ta  J Desh. 

Tellina  incarnata , Linné  ^ Tellinà  Feroensis,  Ghemnitz.  Vivante 
dans  tout  l’Océan  d’Europe  depuis  les  mers  de  Suède  et  de 
Norwége  jusque  dans  la  Méditerranée. 

Fossile  en  Sicilë,  en  Italie  et  dans  le  crag  d’Angleterre  ei 
d’Anvers. 

1.  Psammobie  boréale.  Psammobïa  incarnata.  Linné. 

PL  P3.  f.  9 10.  ’ 

P»  Testa  ovali-oblongâ  f iransversâ  ^ œqiiUateràf  transversim  tenni- 
stritstâ;  poscicè  ati^uîatâ,  oblique  tmneatâ^  Uneîs  elevatis^  in  latere 
postico  ra^iantibiis;  extus  qîbo.  carneâ  rubro  radiatâ  ^ intiis  carrtea 
violacescente  ; cardine  hidenUito  ^ altero  iinideotato  : denlibus 
bifidis, 

LUier,  Hisi.  an.  a%'l.  app.  pl.  i,  f.  8. 

Lister,  Conch.  pl.  294,  f.  241.  ' 

Petiver.  Gozoph.  p.  ii.  pl.  gL  f.  9. 

Coucha,  Linné.  Fauna  suer.  éd.  i®.  p.  38 r.  n"  1387. 

Tellina  incarnata.  Linné.  Fauua  suecica.  2*  éd.  p,  5 ï 7.  ii®  21 54. 
Pennanl.  Bril.  zool.  p.  177.  pl.  5o.  f.  3.  Mala. 

Tellina  angnlata.'hùTW.  inxxs.  p.  3o.  pl.  2.  f.  5.  ' \ 

Tellina  radiata.  Da  Costa.  Brit.  coiicb.  p.  209.  pl.  14.  L i. 

Tellina  feroensis.  Chemn.  Conch.  I.  6.  pl.  10.  f.  gi. 

Tellina  frari,  Schrœter.  Eiul.  t.  2,  p.  644.  n®  5.  pL,  7^  f.  9.^ 

Tellina  feroensis.  GmeXnu  p.  32^5.  n°  3i. 

Tellina  /iornii»  Ginelin.  p.  323 1,  n®  i5. 

Tellina  trifasciata,  Gmelin.  p.  3223.  n®  24.  çxcl,  Chemn.  .synon. 
Pullney,  in  dors.  Cat.  p.  29.  pl.  6.  f.  i. 

^ Telfina  trifasciata.  Düuuvan  liiil.  shells,  t.  2.  pl.  68. 

V Tellina  feroensis,  Wood.  Lin.  ïraus.  t.  6.  p.  i63.  pl.  i5,  f,  20,  21, 

^ / Id.  Moulagu.  Test  bril  p ,55^  n®  1. 

Id.  Maton  et  Racketl.  Lin.  Traus.  t.  8.  p,  49.  11^  2. 

Id.  Wood.  General  conrhol.  p.  164,  pl.  45,  f.  i, 

Id.  Dillwyii,  Cat.  I.  I.  p.  77.  n®  t3. 

Psammobia feroensis.  Lunik.  An.  s.  vert.  l.  5.  p.  5i2.  n®  2. 

Tellina  feroensis,  Tmlon.  Conch.  dict.  p.  171,  H®  ir. 


LES  PSAMMOBIDES. 


■419 

' Psnmviobin  Jn'ttejixis.  l’ui  toli.  (Ànich.  ins>  bril.  p.-94*  f’J- 
• TelUnnferocnsis,  Wooiî.  in(h'  Tf.sl/pl:  4.  f-  3^*' 

Psnmmobinferoensi$»C4Çi\\.  des (’li. cal.  deî  Test.  duFiiiisl.  p.  18.  n®  t. 

Psammobîd  muricata,  Scacchi.  cat.  Conch.  reg.  Neap;  p.  5. 

/«J/OfOiM.  Sowei  Ijy.  (ioiicli  mnu.  fij;.  ujo. 

Ps-urnmobia feroensis.  For'nes.  Malao.  moiunsi».  p. 

'/</.  Hnnley.  Descr.  rat  p.  5;. 

/d.  Fofhos.  report  on  lhe  OEg.  inv.  p.  143. 

IJ.  Thompson,  rejioil  on  iheFauii.  ofîr.  p.  îi<)3. 

///.  Lovèn.  Tndi  hmll.  s<and.  p.  42.  11*  3<n.  ' . > . 

fd.  rhilippi.  Hiiiim,  inolK  Siril  t.  a.  p 20.  n°  r • 

/J.  Dedi.  dans  T.aink.  An.  s.  \t  rt.  a**  éd.  t.  B.  p.  17'^.  n"  2. 

FossiUs.  . ^ 

TeUinumurUata.  Brorclii.  Conch.  fos.s.  stibap.  f.  2.  p.  5 1 1 . pK  1 2.  f.  .2? 

Psammobîa Jerocnsis.  ï':\\\\,  Enuni.  mull.  Si'Ü  (.  i, aS.  ti®  2.  t.  2. 
p.  2 I . n®  i . . — 

Id.  S.  Wood.  loss.  .'‘Iiclls  fronnlhe  Crag.  Ami.  nal.  hi.sl.  n'’  37.  p,  2.48. 

Id.  SisoKiuda.  Synop..|Wid.  fo-tS,  2®  cdv  p.  ir.  11®  1. 

Psammobia  muricata.  N\sl.-eoq  loss  delà  lîelg.  p.  io5.  0*^62. 

Deux  fois  Linné  a décrit  un  Teliina  inca7'ncLta  dans  ses  ouvrages , la 
première  fois  dans  la  seconde  édition  du  Fatina  suecica  , !a  secondedans 
la  12®  édition  du  Systenia  naturæ  ; mais  lorsque  l’on  vient  à rapprocher 
les  deux  descriptions,  on  reconnaît,  non  sans  surprise,  qu’elles  ne 
s’accordent  point  entre  elles  et  qu’elles  s’appliquent  à deux  espèces  bien 
distinctes.  Cependant  Linné  renvoie  delà  seconde  à la  première,  en 
transportant  la  synonymie  de  celle-ci  à celle-là.  Ainsi  , Linné  décrit 
une  espèce  dans  le  Fawïta  swec/ca  et  y rapporte  une  figure  8 de  l’ap- 
pendieç  de  Lister,  qui  s’accorde  parfaitement  avec  la  de^ription^  Dan.^ 
la  W édition  du  Sÿstema^  som  le  même  nom  de  Teliina  mcarnata  , 
Linné  donne  une  autre  description  qui  s'applique  à une  autre  espèce, 
mais  il  conserve  dans  la  synonymie  cette  même  figure  de  Lister,  qui 
alors  ne  s’accorde  plus  avec  la  nouvelle  description.  Cette  confusion  do 
Linné  a été  imitée  parChemniiz  et  par  Gmelin,  et  par  la  suite  elle  a dû 
occasionner  bien  de  l'embarras  à ceux  des  naturalistes  qui  ont  cherché 
*à  concilier  des  citations  et  des  descriptions  qui  s’appliquent  à des  objets 
différents.  Ceci  explique  comment  il  se  fait  que  Chemnitz,  ayant  sous 
les. yeux  le  Teliina  mcarnata  'du  Fauna  suecica,  a été  entraîné  à lui 
imposer  un  nouveau  nom  Teliina  feroensis , le  prenant  pour  une  espèce 
nouvelle.  Cependant  Born  l'avait  déjà  nommée  avant  lui,  décrite  et 


DOUZIÈME  FAMILLE. 


/l'in 

figurée  sons  le  nom  Hp  TeîUna  angiilatfi.  Quant  à Gmelin , nous  sommes 
liahitués  à lui  voir  rommellre  un  si  grand  nombre  d'erreurs,  que  nous 
ne  devrons  pas  être  surpris  do  trouver  ce  même  Tdlina  ungulata  sous 
trois  noms  différents,  et  uno  quatrième  fois  confondu  avec  lo  Tellina 
incartiula  do  la  4!2®  édition  du  Systema.  Pour  ceux  des  naturalistes  qui 
ont  conservé  au  genre  Telline  toute  son  étendue  , il  était  impossible  de 
remédier  à l’erreur  de  Linné , autrement  qa’en  imposant  un  nom  nou- 
veau à l’un  des  deux  Tellina  incarnataf  et  ce  cliangement  devaits’ap- 
pliquer  à la  plus  récente  des  espèces,  c'esl-à-dirc  à celle  du  Si/siemn. 
Le  contraire  ayant  été  fait  par  Born  . par  Gliemnitz,  et  consacré  par 
tous  les  autres  conchyliologues  , il  nous  semble  possible  de  faire  aujour- 
d’hui ce  qui  était  impraticable  avant  le  démembrement  du  genre  Telline 
de  Linné.  11  sera  facile  de  nous  comprendre.  Le  Tellina  incamata  de 
la  Faune  danoise  est  une  Psammobie  de  Lamarck  ; le  Tellina  mcai-nata 
du  Systema  nalurœ  est  une  véritable  Telline  ; rien  ne  s’oppose  donc  à 
ce  qu’il  y ait  à la  fois  un  Psammobki  incamata  et  un  Tellina  incamata , 
pour  conserver  le  plus  religieusement  possible  la  tradition  de  la  nomen- 
clature linnéenne.  Afin  de  rendre  plus  facile  à accepter  le  changement 
que  nous  proposons  ici , nous  avons  châtié  la  synonymie  de  l'espèce  et 
nous  avons  cherché  à la  compléter  le  plus  possible.  11  serait  désormais 
bien  entendu  qu’au  Psammobîa  mcarnala  se  rattache  uniquement  le 
TetUna  incamata  du  Fauna  succîca. 

Il  n’est  pas  nécessaire  de  décrire  uno  espèce  aussi  connue  que  celle- 
ci  , il  sera  plus  intéressant  de  la  suivre  dans  sa  distribution  à la  surface 
delà  terre.  Elle  existe  dans  les  mers  du  Nord  comme  l'ont  constaté 
Linné  et  M,  Lovèn  ; elle  descend  dans  les  mer.s  tempérées  et  s’introduit 
dans  la  Méditerranée,  où  elle  se  montre  sur  presque  tous  les  points  ; elle 
sort  de  celle  mer  et  se  continue  jusqu’aux  îles  du  cap  Vert,  et  peut-être 
gagne-t-elle  le  Sénégal.  Elle  apparaît  à l’état  fossile  dans  le  crag  d’An- 
gleterre et  de  Belgique  , elle  remonte  dans  les  terrains  siib-apennins  et 
passe  dans  les  couches  plus  récentes  de  la  Sicile. 


LES  rSAMMOBlUES. 


421 

2.  Psannuobie  iriîiculoe.  Psammofjîa  maciilo^a.  Lamk. 

PI.  13.  f.  6.  7.  8. 

P,  Testa  ovato^transversâ  ^ subœquilaterâ  ^ rubellâ , rm^iis  spnc/iceis 
interrupth  maeniis  albis  Danis;  niÿts  trans^rsis  striisquc  ohïrqnis 
deaissaniibus;  latcrc  antico  rotnnclato^  postlco  snbangniato. 

Le  GiUün.  Adaiis.  Seneg.  p 233.  pl.  17.  f.  20. 

Tellina  Gari.  var.  Chemn.  Cnucli,  t.  6.  p.  102.  pl.  10.  f.  p;. 

An  cadem  junior?  Soîen  striatus.  Clienn»,  Coiuli.  1.  (3.  j‘.  7 t.  pl.  7. 
f.  57,  58. 

Encycl.  pJ.  2^8.  f.  2? 

tellina  Gari.  var.  C.  Spengler.  Soc.  d’hisl.  liât,  de  Copeiili,  t.  4 p.  72. 

Solen  striatusy  VYood.  Gciur.  concli.  p.  i34.  11®  22. 

Id.  pilUv.  Cat.  t.  i.  p.  66.  n"  22. 

TcRina  Gari.  var.  Dillw.  Cal.  t.  i.  p.  77.  n"  12. 

Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  5.  11®  5. 

Dcsii.  Ency.  inétli.  vers,  t-  3.  p..852.  n"  3, 

Solen  striatus.  Wooil.  Ind.  (estac.  pl.  3.  f.  24. 

Desli.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  2®  éJ  p.  174,  n®  ,5. 

Hanley.  De.scr.  cal.  p.  57. 

Callaw.  Couch.  nom.  p.  21. 

Wood.  lud.  lest.  2®  suppl.  pl.  ii,  f.  28. 

Par  sa  taille  et  par  sa  forme  générale  cette  espèce  se  rapproche  beau- 
coup du  Psammohia  vesperiina  qui  vit  sur  nos  côtes  et  dans  la  Médi- 
terranée. Elle  est  ovale,  oblongue , transverse , équilatérale,  obtuse  en 
avant , sub-anguieuse  en  arrière , bâillante  do  chaque  côté  ; elle  est 
aplatie  comme  toutes  les  autres  Psammobies.  Le  bord  dorsal  est  paral- 
lèle ou  ventral;  il  est  presque  droit  et  il  est  partagé  eh  deux  moitiés 
égales  par  des  crochets  très  petits , à peine  saillants , opposés  et  très 
rapprochés  lorsque  les  valves  sont  dans  leurs  rapports  naturels.  Un 
angle  très  obtus,  aconipagné  d'un  pli  peu  profond  , irrégulier,  limite  le 
côté  postérieur  en  partant  du  crochet  pour  se  rendre  à Pangle  inférieur 
et  postérieur.  En  arrière  dès  crochets  se  montre  un  ligament  gros,  épais, 
saillant  en  dehors  et  fixé  sur  des  nymphes  allongées  et  épaisses  : ces 
nymphes  sont  d’un  violet  foncé.  Toute  la  surface  est  couverte  de  fines 
stries  obliques  qui , parlant  du  côté  antérieur  et  supérieur,  vont  se  teir 
miner  au  bord  ventral  c»  coupant  les  stries  d'accroissement  sous  un 
angle  très  aigu.  Les  stries  qui  n’atieignent  pas  le  bord  ventral  s’arrè- 


DOUZIEME  FAMILLE. 


.»22 

lent  brusquement  à l'angle  postérieur  des  valves  ; le  coté  postérieur  de 
la  coquille  est  orné  de  stries  transverses,  normales  , et  en  arrière  des 
crochets  de  stries  longitudinales  rayonnantes  qui  s’évanouissent  avant 
d’arriver  au  bord  \ la  charnière  est  étroite,  eJIe  porto  deux  dents  diver- 
gentes., inégales  sur  la  valve  droite  , l’antérieure  étant  la  plus  grande, 
et  une  seule  médiane , simple  et  obtuse  sur  la  valve  gauche.  L’impres- 
sion palléale  est  courte  et  placée  1res  haut  dans  l’intérieur  des  valves  , 
laissant  entre  elle  et  les  bords  une  large  zone.  A tous  ces  caractères 
propres  à faire  reconnaître  cette  espèce , se  joignent  ceux  de  lit  'colora- 
tion. Sur  un  fond  d’uU  rouge  vineiix  très  pâle  se  dessinent  des  rayons 
d’un  brun  ronge,  plus  ou  moins  nombreux  , plus  ou  moins  largos , irré- 
gulièrement interrompus  par  des  taches  blanchâtres  ; quelquefois  c’eSt 
l’inverse  qui  a Heu;  la  coquille  est  d'un  brun  rouge  interrompu  par  des 
rayons  pâles.  Nous  avons  des  individus  qui  portent  les  deiix  variétés  de 
coloration  dont  nous  venons  de  parler.  L'intérieur  des  valves  est  d'une 
belle  nuance  d’un  rouge  vineux  très  pâle,  sur  laquelle  se  détachent  de 
beaux  rayons  d’un  ronge  brun  violacé. 

Cette  coquille  vit  dans  les  mers  du  Sénégal. 

8.  Psammobie  écmWense.  Psainmobia  squamesa.  hsimk. 

PI.  13.  f.  4.  5. 

P,  Testa  ovali-oblongây  transversâ,  angnstâ  ^ subarcuatà  y violacea ^ 
oblique  striata;  striis  posticè  crussioribus , imbrivato  squamosis; 
latere  antico  angustOy  acutiuscnlo^  postico  longiore  y latiore  suban- 
gulütb. 

Lani.  Ai),  s.  l.  5.  p.  5i4  9. 

Desh.  dans  Lamk  Au  s.  vert,  .2*^  cd.  l.  0.  p.  176.  11'’  9.. 

Deles«erl.  Rec.  de  coq.  non.  fig,  pi.  5.  f.  6,  a,  b. 

Callüw.  Coucli.  uo«i.  p.  2 1. 

Hanley.  Descr,  cat,  p.  58.  , 

Wood.  Ind,  Test.  2®  Sup.,  pi.  1 1 , ï.  47. 

Petite  coquille  fort  élégante , autrefois  très  rare  dans  îes  collections  , 
et  qui  offre  des  modifications  que  ne  présente'  aucune  autre  espèce  du 
même  genre.  Oblongue,  ovale,  transverse,  inéquilatérale , aplatie;  ses 
valves  sont  minces  et  fragiles.  Le  bord  dorsal  est  presque  droit , le  bord 
ventral  est  arqué  ; le  côté  antérieur  est  obtus  ; le  postérieur  obliquement 
tronqué  ; tous  deux  sont  bâillants  , mais  siirtont  lo  côté  postérieur  qui 
est  ouvert  à la  manière  du  Cardium  bullatum,  ainsi  que  Lamarck  l’a 
remarqué.  Les  crochets  sont  très  petits  , ne  dépassent  presque  pas  le 


LES  PSAMMOBlüES. 


.I.i3 

bgrd  cardinal  ; au-dessous  des  crocheis,  sur  ce.bord  cardinal  Irès  étroil, 
s’élèvent  deux  petites  dents  divergentes  sur  la  valve  droite,  une  seule 
médiane  sur  la  gauche.  Des  stries  fines,  un  peu  onduleuses,  descen- 
dent obliquement  du  bord  supérieur  et  antérieur  vers  le  bord  ventral  où 
elles  se  terminent.  Celles  qui  avoisinent  le  côté  postérieur  grossissent 
graduellement . et  celles  qui  occupent  ce  côté  se  changent  bientôt  en  do 
véritables  cotes  rayonnantes  au  nombre  de  six  ou  sept et  sur  lesquelles 
se  dressent  de  petites  écailles  obliques  et  sub-imbriquées.  Ces  côtes  sc 
prolongent  en  dentelures  aiguës  qui  découpcnl  le  bord  postérieur  et  ren- 
dent son  bâillement  grimaçant,  comme  dans  le  Cardium  que  nous 
citions  tout  à l’heure.  Les  côtes  postérieures  semblent  partir  du  côté 
postérieur  du  crochet,  mais,  si  à l’aide  d’une  loupe  on  en  cherche 
l’origine,  on  les  voit  prendre  une  direction  horizontale -passant  sur  le 
crochet  et  remonter  jusqu'au  bord  antérieur.  La  coloration  de  cette  jolie 
coquille  est  peu  variable;  presque  tous  les  individus  que  nous  avons 
vus  sont  d’un  violet  foncé , uniforriie  en  dedans  et  au  dehors.  Nous  avons 
vu  des  variétés  plus  pâles , et  nous  en  avons  une  fauve  marbrée  de  fauve 
un  peu  plus  foncé. 

Le  Psammobia  sqwajnosa  vient  de  l’Océan  de  l’Inde;  elle  est  longue 
de  25  à 30  millimètres.  • 


GENRE  TRENTE-NEUVIÈME. 

SASTG'UlSirOXiAIB.E,  Sanguinolana.  (Lamk.) 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  inconnu. 

Coquille  transverse,  subelliptique,  un  peu  bâillante  aux 
extrémités  ; bord  cardinal  étroit',  ayant  deux  dents  cardinales 
inégales  , petites  sur  chaque  valve  ; nymphes  peu  saillantes , 
portant  un  ligament  externe  bombé.  Impression  musculaire 
antérieure  ovale , la  postérieure  circulaire  ; impression  palléale 
allongée  jusqu  a l'extrémité  postérieure  des  valves,  et  produi- 
sant une  sinuosité  postérieure  peu  profonde,  dilatée  et  subtrian  - 
gulaire. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Lobariü , Schumacher.  — Tellina, 
Lister,  Knorr.  — ^olen,  Chemnitz,  Schrœter,  Gmelin,  Bru* 


DOUZIEME  FAMILLE. 


guicres,  Wood,  Dilhvyn. — Sangidnolaria,  Lamarck,  Roissy, 
Brookes,  Sü\yerby,  Reeve,  Hanley,  Cuvier,  Rang.  ~ Psam- 
mobia , Deshayes  [olim] , Desmoulins. 

Jusqu’ici  beaucoup  d’incertitude  a régné  sur  les  genres  (7ap.se  et 
Sa/i{/Mmo(aïre.  Lamarck , le  premier,  a publié  des  opinions  différentes 
au  sujet  do  ces  genres,  et  les  vacilJations  de  ce  naturaliste  ont  entraîné 
celles  de  la  plupart  des  conchyliologues.  Pour  rétablir  exactement  ces 
genres  dans  la  Méthode,  et  pour  éviter  àTavenir  toute  méprise  à leur 
sujet,  il  est  nécessaire  d’en  retracer  Thistoire  avep  quelques  détails  et  de 
rendre  à chacun  d’eux  les  caractères  qui  leur  appartiennent. 

Le  genre  Sanguinolaire  a été  proposé  pour  le  première  fois  par  La* 
marck  en  4 799,  dans  le  premier  volume  des  Mémoires  de  la  Société 
d'histoire  iiaturelle  de  Paris.  Le  Solen  sanguinolentus  de  Gmelin,  co- 
quille connue  de  tous  les  conchyliologues , sert  de  type  à ce  nouveau 
genre,  et  Lamarck  le  maintient  dans  les  ouvrages  qu’il  a successive- 
ment publiés  : Système  des  animaux  sans  vertèbres , Philosophie  zooh- 
gique , Extrait  du  cours.  Ce  genre  fut  accepté  par  Roissy,  Brookes , et 
quelques  autres  autours,  qui  ont  trouvé  dans  la  coquille,  qui  lui  sert 
de  type,  des  caractères  qui  en  justifient  la  nécessité. 

A côté  de  ce  genre  Sanguinolaire . Lamarck  admettait  , dans  les  ou- 
vrages que  nous'  venons  de  citer  de  lui,  un  genre  Capso,  fondé  par 
Bruguières  dans  les  planches  de  V Encyclopédie.  Dans  ce  genre  Capse, 
nous  trouvons  deux  sortes  de  coquilles  : des  Tellines  et  le  Vernis  deflo- 
ra(fi  de  Linné.  Lamarck  adopta  d’abord  comme,  type  du  genre  Capse 
le  Tellina  angulata  de  Linné  ; un  peu  plus  tard  dans  son  Système  des 
animaux  sans  vertèbres , ayant  reconnu  probablement  que  le  Tellina  an- 
gulata est  une  véritable  Telllne,  il  prit  le  TVnii.s  deporata  pour  type 
nouveau  du  genre  Capse. 

M.  de  Roissy,  dans  le  Buffon  de  Sonnini , adoptant  plus  rigoureuse- 
ment le  genre  Capse  de  Bruguières , y introduisit  à la  fois  le  Tellina 
angulata  ci  le  Venus  deporata , coquilles  qui,  assurément,  n’offrent  pas 
les  mômes  caractères  génériques.  Quoique  avant  181 8 le  genre  Sangui- 
nolaire ne  fût  nullement  défini  et  surtout  bien  caractérisé  par  l’espèce  qui 
lui  sert  de  type,  M.  Schumacher,  conservant  des  doutes,  le  reproduisit 
sous  le  nom  de  Lobaria  dans  son  Essai  d'une  classipcation  des  vers 
testacés , et  le  caractérisa  par  la  même  espèce  que  Lamarck.  le  Solen 
sanguinolentus  de  Gmelin.  11  est  évident  par  là  que  le  genre  Lobaria 
est  un  double  emploi  des  Sanguinolaires  , et  qu’il  doit  être  relégué  dans 
la  synonymie  générique.  En  1818,  lorsque  Lamarck  publia  le  S®  vo- 


ÏÆS  l’SAMMOniDlîS. 


hime  des  sans  vertèbres,  on  trouva  clans  !o  genre  Sangiiino- 

lairo  , non  seulement  lo  So/e;t  saîu/uïnofenfns,  mais  encore  le  Kenws 
deflorata , c’est-â-dire  que  sous  cette  dénomination  générique  Lamarclc 
a réuni  ses  deux  anciens  genres  Sanguinolaire  et  Capse.  Nous  n’avons 
pas  à blâmer  celte  opinion  de  notre  grand  naturaliste,  mais  le  tort  qu*  il 
a eu  , après  avoir  supprimé  le  genre  Capso  , c'est  de  reprendre  ce  nom 
pour  l’attribuer  à un  genre  fort  différent,  très  voisin  des  Donaces , et 
qui,  selon  toutes  les  probabilités,  devra  disparaître  de  la  Méthcwic. 
('elle  transposition  des  dénominations  génériques  est  la  chose  la  plus 
fâcheuse  qui  puisse  arriver  pour  la  nomenclature,  et  l’incertitude  qui 
y règne  encore  en  est  le  résultat.  Afin  d'éviter  à l’avenir  toute  confu- 
sion au  sujet  des  genres  qui:  nous  occupent , il  faut  convenir  que  défi- 
nitivement le  genre  Sanguinolaire  aura  pour  type  le  Solen  sangumoïentus 
et  le  genre  Capse  le  Kenus  deflorala.  Ceci  une  fois  reconnu  et  accepté, 
les  deux  genres  en  question  prennent  naturellement  leur  place  dans  le 
voisinage  des  Psammobios , et  doivent  faire  partie  de  la  mémo  famille. 

Les  coquilles  du  genre  Sanguinolairo  sont  en  petit  nombre  ; elles 
sont  ovalaires  et  transverses , plus  élargies  en  avant  qu’en  arrière  ; 
elles  sont  aplaties  et  leur  forme  générale  rappelle  assez  celle  de  certaines 
Tellines;  elles  sont  inéquilatérales,  le  côté  antérieur,  très  obtus,  estiiii 
peu  plus  court  que  le  postérieur.  Le  bord  ventral  est  allongé  ; il  a une 
courbure  comparable  à celle  du  grand  côté  d’une  ellipse.  Des  crochets 
petits,  opposés,  partagent  le  bord  supérieur  en  deux  parties  égales;  l’anté- 
rieur commence  la  courbure  du  côté  antérieur,  la  postérieure  se  projette 
en  ligne  droite*  en  formant  un  angle  extrêmement  ouvert  avec  la  pre- 
mière partie , et  va  joindre  en  arrière  l’extrémité  du  bord  ventral.  Dans 
les  Tellines  et  dans  un  grand  nombre  d’autres  genres  , le  côté  posté- 
rieur présente  deux  angles , l’un  supérieur  ou  dorsal , l'autre  inférieur 
ou  ventral.  Dans  les  Sanguinolaires , l’angle  ventral  n’existe  pas;  le 
bord  inférieur  de  la  coquille  se  continuant  sans  interruption  jusqu’à 
l'angle  dorsal.  La  surface  externe  de  ces  coquilles  est  lisse;  elle  est 
recouverte,  surtout  vers  les  bords,  d’im  épiderme  [leu  épais,  caduc, 
ot  qui , en  débordant  la  portion  solide  du  test , est  destiné  à revêtir  le 
bord  exsertile  dumantfeau  de  l'animal. 

Le  bord  cardinal  est  étroit,  peu  épais;  il  porte  immédiatement  au- 
dessous  du  crochet  deux  petites  dents  cardinales  , divergentes  et  iné- 
gales. La  dent  cardinale  antérieure  de  la  valve  gauche  est  la  plus 
grosse  , la  dent  cardinale  postérieure  de  la  valve  droite  est  également  la 
]»lus  grosse  , de  sorte  qu’à  une  dent  faible  d’une  valve  correspond  une 
dent  forte  de  l'autre  valve.  11  n’existe  aucune  trace  de  dents  latérales  . 


126  DOUZIEME  FAMILLE, 

le  ligament  est  externe;  il  est  allongé  , peu  bombé  eu  dehors . et  il  est 
adhérent  sur  des  nymphes  superficielles , peru  épaisses  et  peu  proémi- 
nentes, Les  impressions  musculaires  appartiennent  à la  région  supé- 
rieure de  la  coquille;  cependant  elles  descendent  plus  bas  que  dans  les 
Psammobies.,  et  la  postérieure  surtout,  complètement  isolée  du  bord 
supérieur,  en  est  plus  écartée  que  dans  d'autres  genres.  L’impression 
musculaire  antérieure  est  ovalaire  , .elle  s'élargit  en  raquette  ; son  extré- 
mité supérieure  est  pointue , et  elle  paraît  se  prolonger  au-dessous  du 
bord  cardinal , parce  qu'elle  se  continue  avec  la  petite  impression  mus- 
culaire du  rétracteur  antérieur  du  pied.  L’impression  musquiaire 
postérieure  est  ovale , subcirculaire  ; entre  elle  et  l’extrémité  du  bord 
Supérieur  se  remarque  une  petite  impression. subquadrauguiaire  pro- 
duite par  le  muscle  rélracteur  postérieur  du  pied.. 

L’impression  palléale  présente  des  caractères  qui  n'existent  pas  dans 
les  Psammobies;  elle  part  du  milieu  du  bord  inférieur  de  l'impression 
musculaire  antérieure  ; elle  se  place  parallèlement  au  bord  ventral  de  la 
coquille,  et  elle  en  suit  régulièrement  la  courbure  jusque  vers  l’exlré- 
milé  postérieure  du  test,  remontant  très  haut,  vers  l’angle  dorsal  et 
dépassant  ainsi  le  bord  postérieur  de  l'impression  musculaire.  De  cette 
disposition  résulte  un, étranglement  considérable  de  l'entrée  de  la  sinuo- 
sité postérieure  du  manteau,  pressée  on  quelque  sorte  par  le  muscle 
postérieur,  situé  beaucoup  plus  bas  que  dans  beaucoup  d'autres  Mol- 
lusques. La  sinuosité  Se  confond  par  son  bord  inférieur  avec  la  portion 
ventrale  ,de  l’impression  palléale.  Parvenue  un  peu  en  avant  de  la 
charnière,  la  sinuosité  se  détache,  en  formant  une  ligne  oblique , qui 
se  dirige  d’avant  eu  arrière  et  de  bas  en  haut.  Cette  ligne  est  sans 
sinuosité;  parvenue  vers,  le  milieu  de  l’espace  circonscrit  par  l'im- 
pression ventrale  et  le  bord  cardinal , elle  forme  u;i  angle  aigu  et  re- 
descend obliquement  du  haut  en  bas  et  d’avant  en  arrière  , .pour  gagner, 
en  décrivant  une  courbure,  le  bord  inférieur  de  l’impression  posté- 
rieure. Trois  lignes  circonscrivent  la  sinuosité  palléale,  et  ces  trois 
lignes  forment  entre  elles  un  triangle,  dont  l’angle  le  plus  allongé  est 
médiocrement  ouvert.  Tout  en  conservant  de  l'analogie  avec  celle  dos 
Tellines , cette  impression  en  ditfère  par  la  large  troncature  de  son 
extrémité  anlérieure;  elle  ressemble  aussi  à celle  des  Lavignpns  , mais 
elle  s'en  distingue  non  seulement  par  une  moindre  étendue,  mais  encore 
par  la  forme  toute  spéciale  que  nous  venons  de  décrire. 

L’animal  du  genre  Sanguinolaire  n'est  malheureusement  point  connu  ; 
cependant  il  habite  en  très  grande  abondance  les  plages  sablonneuses 
de  la  Guadeloupe  et  de  la  Martinique.  Tout  nous  porté  à . croire  que 


LES  PSAMMOBIDËS. 


4 a: 

l’animal  est  pourvu  d’un  pied  robuste,  si  nous  en  jugeons  d’après 
l’étendue  des  impressions  des  muscles  rétracteurs  de  cel  organe.  Le 
rétrécissement  de  l’entrée  du  sinus  palléal,  la  dilatation  de  ce  sinus,  est 
pour  nous  un  indice  certain  que  l’animal  des  Sanguinolaires  se  termine 
en  arrière  par  deux  siphons  complètement -séparés.  Nous  pouvons  même 
assurer  que  chez  l’animal  en  question,  le  manteau  peut  se  creuser 
d'une  cavité  postérieure  destinée  à recevoir  les  siphons  au  moment  de 
leur  contraction,  car  nous  observons  en  avant  du  muscle  postérieur,  et 
sur  la  ligne  supérieure  de  la.sinuosilé  palléale,  l’impression  spéciale 
d’un  petit  musclé  qui  vient  s’irradier  dans  la  portion  du  manteau  dont 
nous  venons  de  parler  ; peut-être  qu'au  moyen  de  l’observation  d’un 
grand  nombre  d'animaux  mollusques  de  k classe  dos  Dymiaires,  on 
parviendra-  à reconnaître  à quelle  hauteur  se  fait  la  commissure  posté- 
rieure du  manteau  , d’après  le  modç  d’union  de  la  sinuosité  palléale  avec 
la  portion  ventrale  de  l'impression  du  manteau.  ' 

Le  genre  Sanguinolaire , étant  circonscrit  comme  nous  venons  de  le 
faire,  se  trouve  réduit  à un  très  petit  nombre  d’espèces.  Nous  en  con- 
naissons seulement  deux  vivantes;  il  faudra  rejeter  aussi  de  ce  genre 
les  nombreuses  espèces  fossiles  qui  y ont  été  successivement  intro- 
duites. Toutes  cos  espèces  auraient  besoin  d’être  revues  avec  le  plus 
grand  soin  ; car,  même  en  conservant  au  genre  Sanguinolaire  toute 
rétcndiic  que  lui  a donnée  Lamarck,  il  n’y  a pas  une  seule  de /ces 
espèces  qui  en  présente  les  caractères;  aussi  Ton  peut  considérer  que 
les  genres  Psammobies,  Sanguinolaires  etCapses,  sont  devenus  pour 
les  paléontologistes  des  véritables  incertœ  sedis  dans  lesquels  ils  ent  dé- 
posé les  especes  fossiles  dont  ils  n'ont  pu  connaître  le  genre  d’une  ma- 
nière authentique.  Se  laissant  guider  par  des  formes  extérieures,  souvent 
trompeuses  , soit  de  moules  imparfaits;  soit  de  coquilles  entières  , mais 
dont  la  charnière  est.  restée  inconnue , ils  ont  fait  de  ces  genres  un  mé- 
lange hétérogène  dont  il  est  bien  difficile  actuellement  de  classer  con- 
venablement les  divers  matériaux.,  Pour  les  distribuer  d’une  manière 
convenable,  il  faudrait  les  réunir  en  môme  temps  sous -les  yeux  , les 
comparer  et  n’admettre  que  celles  des  espèces  qui  offriraient  les  caractères 
de  l’iin  des  genres  ; mais  il  sera  impossible  d’atteindre  le  but  aussi 
longtemps  que  le  zoologiste  n'aura  pour  éclairer  son  opinion  que  des 
figures  incorrectes,  incomplètes  , et  dont  les  défauts  ne  seront  pas  ra- 
chetés par  de  bonnes  de.scriptions. 

' U est  quelquefois  arrivé  aux  paléontologistes  de  distribuer  c.apricieu- 
semeiU  leurs  fossiles  dans  des  genres  dont  ils  ont  connu  les  noms  et  oublié 
les  caractères  distinctifs.  Pourquoi par  exemple,  M.  Philips,  dans  le 


DOU/JKMJi  l'AMlLLli. 


• 1 2 8 

1"  volume-  de  hi  Géologie  du  Yorixshire,  place-l-il  la  coquille  de  la 
pl.  '14,  fig.  \ , dans  le  genre  Sungninolavia  ^ tandis  qu’il  met  dans  les 
Ânxiphidesma  une  autre  coquille  extrêmement  voisine,  représentée  pl.  3, 
lig.  25?  A la  planche  12,  fig.  9,  nous  trouvons  sous  le  nom  de 
Sanguinolaire  une  coquille  qui , génériquement , ne  paraît  point  dissem- 
blable à celles  représentées  pl.  2,  fig.  14,  sous  le  nom  de  LuXniria, 
pi.  9 , fig.  13 , et  pl.  1 1 , fig.  1 5 , sous  le  nom  de  PuUastra.  Nous  ne 
poursuivrons  pas  ici  plus  loin  l’examen  des  espèces  de  M.  Philips,  plus 
tard  nous  aurons  l'occasion  de  le  continuer. 

Nous  avons  déjà  retiré  des  Sanguinolaires  un  bon  nombre  d'espèces 
qui  nous  ont  paru  avoir  les  caractères  des  Psammobies  ; elles  sont  citées 
comme  douteuses  à la  suite  de  ce  genre  ; mais  il  nous  en  reste  beau- 
coup  d'autres  qui  ont  été  figurées  comme  Sanguinolaires  et  placées  dans 
ce  genre , et  nous  nous  trouvons  dans  l'obligation  de  les  soumettre 
actuellement  à un  rapide  examen. 

Les  treize  espèces  suivantes  ont  la  forme  extérieure  desCardites  ou 
des  CypricardeS:;  nous  préférons  les  classer  dans  Tun  de  ces  genres  , 
plutôt  que  de  les  laisser  parmi  les  Sanguinolaires,  dont  elles  n'oflrent 
même  pas  la  forme  générale.  Ce  sont  {Q^Sanguinolariainaxmo.,  oUonga, 
piicala,  de  M.  Portloclc.  Toutes  les  autres  sont  figurées  par  M.  Gold- 
fuss  : Sanguinolaria  gracilis , pusüla , Neptuni,  pygmeea  ^ slndta  ^ de 
Munster;  dorsata,  compresfia  ^ truncata,  lamellosa  et  carinata  ^ de 
Goldfuss.  Nous  retrouverons  plus  tard  ces  cs|)èces  dans  le  genre  Cypri^ 
carde,  et  nous  en  indiquerons  alors  la  distribution  géologique. 

Il  y a trois  espèces  : Sanguinolaria  Ungeri , llœmer  ; Phascolimi  et 
Tellinaria , de  Goldfuss,  qui  ont  la  forme  des  coquilles  du  genre  Put^ 
la^tra;  nous  les  reprendrons  aussi  à la  suite  de  ce  genre. 

Le  Sanguinolana  trigona  de  Münsler  n‘a  pas  la  forme  d’une  Sangui- 
nolaire, mais  plutôt  celle  d’une  Madré;  mais  rien  ne  prouve  qu’il 
dépende  de  ce  dernier  genre. 

Le  .Sattffixï'noiana  undulaia^  de  Sowerby,  est  une  Anatine , ainsi 
que  M.  Morris  lui-même  l’a  reconnu,  et  le  Sanguinolaria  lata,  de 
Münster,  nous  l'avons  reporté  au  genre  Thracio. 

Il  nous  reste  actuellement  neuf  espèces,  véritable  capul  morltium, 
sur  lesquelles  il  nous  est  impossible  de  nous  prononcer  : la  plupart  sont 
de  bonnes  espèces  , mais  les  yeux  de  lynx  nous  manquent  pour  deviner 
le  genre;  ce  sont  les  Sanguinolaria  gibbosa,  Sowerby;  orcuala  et 
iiimida^  Philips,  et  lœvigatUj  Goldfuss.  Sous  le  nom  de  Sanguinolaria 
sulcala  , nous  trouvons  trois  espèces  : une  de  Philips  , une  de  Münster, 
la  troisième  de  Porllock.  Sous  la  dénomination  de  Sanguinolaria  wulata , 


LKA  PSAMMOBIDI-S. 


/129 

SP  rangent  deux  espèces , l’une  de  Porl.lock  , l'autre  de  Miiusler.  Enfin  , 
pour  terminer  cette  revue  des  Sanguinolaires  fossiles , nous  renverrons 
aux  Teliines  de  la  section  des  Tellinides  , notre  Sani/«ûio/aj*ta  Lamarckii 
du  bassin  de  Paris,  qui,  après  notre  nouvel  examen,  n’est  réeUcinciU 
pas  du  genre  tel  qu'il  est  constitué  aujourd'hui. 

Sanguiuolaire  rose.  Sanguinolaria  sangxdnolenia.  l^mn^. 

PI.  lAhisA,  1.  2.  3.  - * 

s.  Testa  transversâ , ihcequîhterali ^ semi^orbîcnlatâ^  utroque  Intere 
hiante  ^ vahis  convexinscuUs ^ aîhîs  ad  apicem  roseo  tinctis  , trans^ 
versim  obsolète  striatis. 

Lister.  CodcIi,  pl.  397.  f,  236, 

Kuorr.  Vergn.  t.  4.  pt.  3,  f.  4. 

Solen.  Cheomitz.  Conch.  t.  6.  p.  72.  pl.  7,  f.  56. 

Sofen.  Srhrijler.  Einl.  t.  2,  p.  636.  n"  5, 

Salen  sangainolentus.  Gmelin.  p.  3227.  n®  iS. 

Solen  fucatus,  Spengler.  Mém.  de  la  Soc.  d’hist.  nat.  de  Copenii.  t.  3. 

p.  I tX.  n®  23.  ^ 

Sùhiï^  Bnig.  Eiicy.  pl.  227.  f.  i. 

Snn^uïnolaria  rosen.  Lamk.  Soc.  d’hist.  nat.  de  Paris,  t.  i.  p.  84. 

Id.  Lamk.  Sysl.  des  An.  s.  vert.  p.  123. 

Jtl,  Uoissy,  Biilf.  Moll.  t.  6.  p.  4*22.  pl,  69.  f.  4. 

Wooil.  General  conch.  p.  ï36.  pl.  33.  f.  4, 

Biuoke.s.  Introd.  p.  54.  pl.  2.  f,  14. 

Solen  sanguinoleritns.  Dilhv.  Cat.  1.  i,  p.  67.  n®  25. 

Z-oW/û  roxtfrt.  Schumacher.  Nouv.  sysl.  p.  122.  pl.6.  f.  t. 
Sanguinolarîa  rosea.  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  5i  i.  11®  2. 

Solen  saiigniHolenlus.  Wood.  Ind,  teslac.  pl.  3.  f.  28. 

Psammobia.  Desh.  Ency.  mélh.  t.  3.  p.  852.  n®  5. 

Cuvier,  Règne  anim.  2*  éd.  t.  3.  p.  i5S. 

Sangulnolaria  rosea,  Sowerhy.  Généra  of  shells.  f,  r. 

Tsammoblà,  Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  2*  éd.  t.  6.  p.  170.  n®  2. 
Sanguinalaria  rosea.  Reeve.  Conch.  svst.  t.  i.  p.  76.  pl.  52.  f.  1 . 
Hanley.  Desc.  cat.  t.  1.  p.  55. 

Catlow.  Concti.  nomencl.  p.  20. 

Xous  restituons  à celte  espèce  son  nom  que  Gmelin , le  premier, 
jui  imposa.  Le  nom  spérifique  est  assez  dissemblable  du  générique  pour 


4^0  DOUZIÈME  FAMILLE» 

pouvoir  être  maintenu  sans  que  la  nomenclature  en  ressente  la  moindre 
confusion. 

Le  Sangtiinolaria  sanguinolenla  est  une  coquille  bien  répandue  dans 
les  collections  ; elle  a l'apparence  d’une  Tellinc  dont  le  pli  postérieur 
aurait  été  effacé  ; ovale  , oblongue , Irahsverse , aplatie  ; elle  est  ioéqui- 
Jatérale  , un  peu  bâillante  en  avant  cl  en  arrière;  les  deux  portions  du 
bord  dorsal  forment  entre  elles  un  angle  très  ouvert,  une  ligne  presque 
droite;  le  côté  antérieur  est  large,  coupé  à peu  près  en  demi-cercle;  le 
côté  inférieur  est  régulièrement  arqué , et  il  ne  se  termine  point  à un 
angle  postérieur  et  inférieur,  comme  dans  un  grand  nombre  de  coquilles, 
il  se  continue  jusqu’à  l’angle  supérieur  et  postérieur;  cet  angle  est 
arrondi.  Toute  la  surface  est  lisse  et  brillante:  les  crochets,  peu  proémi- 
nents , sont  teintés  d’une  belle  couleur  rose  pourprée,  qui  s’étend 
jusque  vers  le  milieu  des  valves  en  diminuant  gradueliemenl'd'intensité; 
le  reste  de  la  surface  est  d'un  blanc  rosé  très  pâle  ; à l’intérieur,  la 
coquille  est  d’un  rose  plus  uniforme  ; les  bords  seuls  sont  blancs.  La 
charnière  est  étroite,  elle  porte  deux  dents  inégales  sur  la  valve  droite, 
l’antérieure  est  la  plus  courte  ; sur  la  valve  gauche  il  existe  une  seule 
dent  médiane  assez  grosse,  et  en  arriéré  le  riidiment  Très  mince  d'une 
seconde  dent  cardinale. 

Cette  espèce  habile  en  abondance  lés  plages  sableuses  des  AhLilievS. 


GENRE  QUARANTIÈME. 

CA'PSX, ^Capsa.  (nrnguières,.) 

Pl.  i3.  fii;.  I.  3.  3. 

CARACTERE^  GENERIQUES,  ^ — Animal  iiiconnu. 

Coquille  ovale , transverse,  équlyalve,  subéquilatérale , un 
peu  bâillante  à ses  extrémités,  convexe,  à crochets  petits, 
peu  obliques.  Charnière  étroite  , portant  deux  dents  inégales 
sur  chaque  valve,  dont  Tune  grosse,  courbée  et  bilobée.  Im- 
pressions musculaires  ovales  ou  subcirculaires;  sinuosité  posté- 
rieure de  l’impression  palléale  courte,  horizontale , large, 
presque  entièrement  . détachée  de  la  portion  ventrale  de  1 im- 


Li;S  PSAMMOUIDKS.  /ïiil 

pression;  ligament  externe,  épais,  attaché  à des  nymphes 
grandes  et  saillantes. 

SYNONYMiK  oénérique.  — Ckama,  Lister.  — Tellina,  RuiVi- 
phius  5 Petîver,  d’Argenville , Gualtieri , Born,  Cheinnitz^ 
Gmelin,  Wood. — Venus,  Linné,  Pennant,  Schrœter,  Gmelin, 
Montagu,  jMaton  et  Rackett , Dilhvyn  , Turton  , Wood. — 
Solen^  DilUvyn.  — Capsula,  Schumacher.  — Capsa,  Bru- 
guières, Lamarck  (olim  ),  Roissy,  Renier,  Brookes,  Férussac, 
Menke.  — Sanguinolarîa  (in  parte),  Lamarck,  Boiidich , 
CrouchjDeshayes,  Desmoulins,  Anton, Dufo. — Psaminocola^ 
Rang.  — Psanimobia  , Sowerbÿ,  Reeve  , Hanley. 

OBSERVATIONS. — Nous  avoiis  retracé  en  abrégé  les  divers  change- 
ments que  le  genre  Capse  a subis  depuis  sa  création.  Adopté  d'abord  par 
Lamarck , de  Roissy  et  plusieurs  autres  couchyliologues , il  fut  sup- 
primé par  Lamarck , confondu  dans  ses  Sanguinolaires.  et  le  nom  géné- 
rique, devenu  sans  emploi,  a été  appliqué  à des  coquilles  voisines  des 
Donaces , et  que  Bruguières  confondait  avec  elles.  Il  n'existe  donc  plus 
la  moindre  analogie  entre  le  genre  Capse,  tel  que  f on  auteur  Lavait  créé, 
et  celui  qui  se  trouve  dans  le  t.  5 de  Vîîistolre  naturelle  des  animaux 
sans  vertèbres.  Si  le  genre  Sanguinolaire  eût  contenu  uniquement  des 
coquilles  renfermées  dans  les  Cap'ses  de  Bruguières,  il  eût  été  facile  de 
rendre  à la  nomenclature  sa  netteté  primitive  ; mais  le  genre  Sangui- 
nolaire de  Lamarck  réunit  aux  anciennes  Capses,  le  Solen  sanguinolàins, 
type  du  genre  Sanguinolaire.  créé  en  4799  par  Lamarck  lui-même. 
Celte  réunion  do  deux  genres  distincts , en  rendant  la  nomenclature 
incertaine,  avait  encore  le  defaut  d'entraîner  les  naturalistes  moins 
expérimentés  à des  erreurs  nombreuses.  Il  était  donc  nécessaire  de 
restituer  à chaque  genre  son  nom , en  leur  assignant  des  caractères  qui 
ne  laissassent  plus  la  moindre  ambiguïté  sur  leur  valeur.  Pour  en  venir  à 
cette  réforme  utile,  il  nous  suffit  de  retourner  en  arrière  dans  l’histoire 
de  la  science  et  de  reprendre  les  genres  Capse  et  Sanguinolaire  à 
peu  près  pour  ce  qu’ils  étaient  à leur  origine.  Car,  ainsi  que  nous 
Lavons  vu,  nous  rendons  au  genre  Sanguinolaire  sôn  type,  le  Solefi 
sanguinolentus , et  nous  reprenons  pour  les  Capses  Lespècé  que  Lamarck 
a désignée  dans  ses  premiers  travaux,  le  Venus  deflorala  de  Linné. 

La  coquille  dont  nous  venons  de  rappeler  le  nom  a été  connue  des 
anciens  conchÿliologues  ; Lister,  Rumphius.  Petiver,  en  donnent  des 


t .T  i DOUZl  RME  F AM  I LLK . 

figures  reconnaissables  Sloaiic  la  nienlionne  flans  son  voyage  à la 
Jamaïque.  D’Argenville,  Gualtïeri , Seba  et  Knorr,  ont  également  figuré 
plusieurs  de  ses  variétés.  Tou^  ces  auteurs,  dont  les  travaux  ont  été 
publiés  avant  ceux  do  Linné , à une  époque  où  la  nomenclature  n’était 
pas  encore  faite,  désignent  cette  coquille  sous  des  noms  divers,  tels 
que  Came  y Tellinc^  Conque,  etc.  Enfin,  Linné  la  mentionna  pour  la 
première  fois  dans  la  \ S*"  édition  du  Sijstema  naiurœ , il  la  plaça  parmi 
les  Venus,  sous  le  nom  de  Venus  delîorata.  Un  grand  nombre  de  natu- 
ralistes, successeurs  do  Linné,  adoptèrent  son  opinion  ; quelques  au- 
-tres , ayant  rencontré  des  variétés  qu'ils  ne  reconnurent  pas  comme 
dépendantes  du  type  spécifique  , les  rangèrent  parmi  les  Tellines,  ainsi 
qu’on  le  voit  dans  les  ouvrages  dé  Born , de  Chemnitz , de  Gmelin  ; mais 
ce  dernier,  admettant  dans  son  catalogue  les  espèces  de  ses  devanciers  , 
sans  les  contrôler,  produit  celle-ci  parmi  les  Tellines  et  parmi  les  Vénus  , 
et  dans  ce  dernier  genre  sous  trois  noms  différents;  de  sorte  que  dans 
cette  dernière  édition  du  i^yslema  natui'œ  , le  l^ciius  deflorata  est  sous 
quatre  noms  difïérents. 

Lorsque  Bruguières  prépara  les  planches  de  l’Enclyclopédic,  obligé 
de  remanier  toute  la  conchyliologie,  et  voulant  imposer  aux  genres  une 
plus  grande  netteté.  U s’aperçut  que  le  l'e/it/s  dejîonUa  no  pouvait 
rester  dans  le  genre  de  Linné,  et  il  reconnut  rimpossibililé  de  ranger 
celte  coquille  dans  aucun  autre  genre  connu.  A celte  époque,  la  char- 
nière seule  des  coquilles  bivalves  déterminait  leurs  rapports  ; ainsi  Bru- 
guières, en  rencontrant  dans  certaines  Tellines  une  eharnière  analogue 
à celle  du  Venus  delîorata  , fut  conduit  à les  y joindre  pour  en  fonder 
son  genre  Capse.  J1  suffisait  de  rendre  aux  Tellines  ces  espèces , dont 
nous  venons  de  parler,  pour  laisser  aux  Capses  toute  la  valeur  d’un  bon 
genre.  Lamarck  l’essaya,  mais  il  est  fâcheux  qu'il  n'ait  pas  persisté 
dans  sa  première  opinion. 

En  étudiant  soigneusement  les  espèces  réunies  dans  les  Sanguinolaires 
de  Lamarck , nous  nous  aperçûmes  que  ce  genre  avait  besoin  d’ôtre 
réformé;  mais  au  lieu  de  revenir  au  premier  nom,  à celui  de  Bruguières, 
nous  conservâmes  le  genre  Sanguinolaire , en  lui  attribuant  pour  type 
le  Venus  deflorata , et  en  rejetant  parmi  les  Psammobies  non  seulement 
les  Sanguinokiria  occidens  et  Uvida,  mais  encore  le  Sanguinolaria 
rosea,  c’est-à-dire  le Solen  sanguinolenlus . A ces  vacillations  déjà  nom- 
breuses, d’autres  naturalistes  ajoutèrent  les  leurs;  c’est  ainsi  que 
j\l.  Rang,  à l'exemple  de  M.  do  Blainvillc,  comprend  les.Sanguino- 
laircs , c'est-à-dire  les  Capses,  dans  uii  genre  Psammocole.  M.  So- 
werby,  ne  trouvant  pas  ^sans  doute  de  caraclères.siiffi.sants  pour  faire  du 


LES  PSAMMOBIDES. 


Venus  (lellomUt  un  gem*e  à part,  il  rapporte  cette  espèce  au  genre 
Psammobie  dans  son  Genmi  of  sheîls  ^ et  cette  opinion  est  admise  par 
MM.  Reeve  , Hanley  et  quelques  autres.  Nous  aurions  dû  parler  aussi 
delà  réforme,  proposée  en  1817,  par  M.  Schumacher,  dans  son  Essai 
d'une  classification  des  coquilles.  Ce  savant  observateur  voulut  appli- 
quer,,en  toute  rigueur,  les  principes  de  Bruguière  et  de  Lamarck,  sur 
la  détermination  des  genres  d’après  le  nombre  de  dents  de  la  charnière. 
Il  fut  entraîné  par  là  à la  création  de  plusieurs  genres  peu  utiles,  mais 
n’ayant  pas  à ce  qu'il  semble,  à sa  disposition,  les  docnments  qui  auraient 
pu  l’éclairer  sur  le  genre  Capse  de  Bruguière  , il  le  proposa  de  nouveau 
sous  le  nom  de  Capsula, 

Quoique  le  Venus  deflorala  soit  une  coquille  des  plus  communes  et 
qu’elle  se  montre  sur  une  très  vaste  étendue , depuis  la  mer  Rouge 
jusqu’aux  mers  de  Chine,  et  depuis  ces  mers  jusqu’à  celles  de  la  Nou- 
velle-Hollande, néanmoins  l’animal  n’est  point  encore  connu,  et  nous 
en  éprouvons  d'autant  plus  de  regret,  qu'il  serait  d’une  grande  utilité 
pour  compléter  les  caractères  d’un  genre,  qui  laisse  quelque  ambiguité 
à cause  des  rapports  nombreux  qu’il  a avec  les  Psammobies.  Un  obser- 
vateur, qui  habita  longtemps  les  Séchelles  ,d  ans  le  but  unique  d’en 
étudier  les  Mollusques , s’‘imagina  probablement  que  l'animal  d’une 
coquille  aussi  commune  devait  être  conna,  et  au  lieu  de  le  décrire,  il 
s’attacha  à un  fait  sans  importance,  qu’il  voulut  constater  sur  un  très 
grand  nombre  d’individus.  M.  Dufo  avait,  remarqué  dans  le  manteau 
une  agglomération  de  sable , dont  les  grains  sont  réunis  par  une  matière 
muqueuse.  II  reconnut  ce  fait  sur  tous  les  individus  qu’il  observa.  Ce 
fait  prouve  seulement  que  l’animal , vivant  au  milieu  du  sable , en  reçoit 
dans  l’intérieur  de  son  manteau,  et  que , ne  s’en  débarrassant  pas  grain 
à grain  , il  en  accumule  une  certaine  quantité,  qu'il  enveloppe  de  mu- 
cosités , et  qu’il  tient  dans  la  partie  supérieure  de  la  cavité  palléale  jus- 
qu’au moment  où  il  le  rejette. 

Les  coquilles  appartenant  au  genre  Capse  sont  ovales , transverses  , 
subéquilatérales,  beaucoup  plus  épaisses  et  beaucoup  plus  bombées  que 
les  Psammobies  et  les  Sanguinolaires  : la  forme  en  est  peu  variable.  Le 
côté  antérieur  est  arrondi , le  postérieur  l’est  aussi  ; cependant  il  est 
obscurément  anguleux.  Le  bord  inférieur  est  presque  droit  ou  médiocre- 
ment bombé  ; le  supérieur  est  partagé  en  deux  portions  inégales  par  hi 
saillie  des  crochets;  ceu-x-ci  sont  peu  proéminents , ils  s’inclinent  sur 
le  côté  antérieur  où  l’on  n’aperçoit  aucune  trace  de  lunule.  Sur  le  côté 
postérieur  se  montre  un  très  gros  ligament , externe  , convexe , très 
allongé,  adhérant  solidement  à des  nymphes  épaisses,  peu  proéminentes 

ab* 


T.  I.  2*  mTlE. 


DOUZIÈME  FAMILLE. 


4:^4 

mais  profondément  séparées  par  un  sillon,  dans  lequel  s'insère  la  tuni- 
que externe  du  ligament.  Les  bords  de  eés  coquilles  sont  simples,  tran- 
chants; lorsque  les  valves  sont  réunies,  elles  présentent  en  avant  et  en 
arrière  un  faible  bâillement.  La  surface  externe  est  tantôt  lisse,  tantôt 
couverte  de  stties  et  de  côtes  longitudinales  et  râyonnantes. 

La  charnière  est  plus  épaisse  que  celle  des  Psammobies  ; néanmoins 
lo  bord  cardinal  reste  étroit,  èt  il  est  peu  saillant  au  dessus  de  la  cavité 
de^  crochets.  On  remarque  . sur  la  valve  droite  deux  dents  inégales; 
l’antérieure  est  petite  et  presque  perpendiculaire  ; la  postérieure  est  très 
grosse,  très  oblique  et  profondément  bifide;  sur  la  valve  gauche  c'est  le 
contraire  qui  a lieu;  la  dent  antérieure  est  grosse,  épaisse,  cordiforine  ; 
lu  postérieure  est  petite  et  très  oblique.  Celte  charnière,  comme  oh  voit, 
ressemble  beaucoup  à colle  des  Psammobies  ; la  différence  consiste  dans 
la  grosseur  relative  des  dents  cardinales,  qui,  dans  les  Capses,  pren- 
nent un  volume  quelles  n’acquièrent  jamais  dans  les  autres  genres  voi- 
sins. La  surface  interne  présente  deux  grandes  impressions  musculaires 
très  écartées , et  occupant,  l’une  et  l’autre,  la  région  supérieure  de  la 
coquille.  L'impression  musculaire  antérieure  est  ovale;  la  postérieure 
est  presque  circulaire  ; l’une  et  l’autre  sont  superficielles.  De  l’extrémité 
inférieure  du  muscle  antérieur,  se  détache  une  impression  palléale,  qui 
se  rend  vers  l'extrémité  postérieure  des  valves,  en  restant  parallèle  au 
'l)ord  inférieur  ventral;  mais  cette  impression  se  porte  très  haut  dans 
l’intérieur  dos  valves,  laissant  entre  elle  elle  bord  une  large  xone,  un 
peu  plus  étroite  en  arrière  qu'en  avant.  Parvenue  au  niveau  du  bord  an- 
térieur de  l'impression  du  muscle  postérieur,  la  portion  ventrale  de 
l’impression  palléale  s’arrête,  s’infléchit  sur  elie-môme  et  alors  com- 
mence une  sinuosité  horizontale,  qui  se  porte  en  avant,  et  atteint  quel- 
quefois la  hauteur  delà  charnière.  Dans  quelques  espèces,  cette  sinuosité 
n'est  pas  entièrement  détachée  de  la  portion  ventrale  de  l’impression 
du  manteau  ; elle  se  confond  avec  elle  dans  le  tiers  ou  la  moitié  de  sa 
longueur  environ.  Dans  les  Psammobies,  la  sinuosité  postérieure  se  con- 
fond avec  l’impression  ventrale  dans  presque  toute  son  étendue,  il  existe 
cependant  quelques  exceptions  par  losquellos  les  deux  genres  se  ratta- 
chent l’un  à l’autre. 

Les  Capses  sont  des  coquilles  qui  n’atteignent  jamais  une  bien  grande 
taille;  elles  vivent  à la  manière  des  Tellines  et  des  Psammobies;  s’en- 
foncent perpendiculairement  dans  le  sable  des  rivages  à une  faible 
profondeur  sous  l’can,  dans  des  limites  que  n’atteignent  jamais  les 
grandes  marées.  Toutes  jusqu’ici  habitent  les  mers  chaudes;  nous  n’en 
connaissons  qu’un  petit  nombre  d’espèces;  deux  vivantes  et  une  fossile. 


Î.ÈS  PSÂ^t^TOÉiDES , 435 

L’espèce  fossile  provient  des  terrains  tertiaires  moyens,  des  environs 
de  Bordeaux;  elle  y est,  à ce  qu’il  paraît,  extrêmement  rare,  car  elle 
n’est  mentionnée  par  aucun  des  naturalistes  qui  se  sont  occupés  des  fos- 
siles de  cette  localité  extrêmement  riche.  Cette  espèce  est  d’autant  plus 
intéressante,  qu’elle  ressemble  beaucoup  au  Tenus  deporaia  , dont  elle 
ne  se  distingue  que  par  un  angle  postérieur  plus  accusé,  et  des  stries 
longitudinales  beaucoup  plus  fines. 

Cwpse  ridée,  Capsa  deJlorata.T>e9ib. 

, PI.  13.  f.  1.  2.  3. 

C,  testa  ovatâ,  ventricosâ  ^ inœquilnteraii^  ntroqne  latere  ohtusd  ^ 
postice  ohtnsissim^  angulatâ,  longitudinaliter  rugosâ^  albâ 'l'ci 
violaceo  rttbroseâ  pictâ  et  radiatâ,  inths  posternu  violaceâ.;  nymphis 
'violaceo  nigris. 

Lister,  Concli.  pl.  424,4^^5.  f.  272,  273. 

Rumphins,  Mus.  amb.  pl.  45.  f.  C.D. 

Petiver,  Mus.  amb.  pl.  17,  f.  9,  i5. 

Sloane,  Voy.  à la  Jamaïque,  t.  2.  9.264.  n*  i.  265;  n*  8 
D’Ariîenville.  Concb.  pl,  25.  f.  À. 

Gualtieri,  Ind.  ïesl.  pl.  86.  f.  R.C. 

Seba,  Xbes.  t.  'à.  pt  86.  f.  17. 

KnoiT,VcrgD.  t.  2.  pl.  20.  f.  5;  l.  4.  pl.  3.  f-  3 ; t.  5.  pl.  9.  f.  3 , 
pl.  II.  f.  2. 

Venus  dejlorata,  Liimé,  Syst.  nat,  éd.  12.  pl.  ii33.  11“  iSa. 

Id.  Peuuaiit,  Zool.  Bril.  t.  4.  p.  96.  pi.  57.  f.  54. 

Born,  Test.  Mus.  Vind.  p.  3i. 

Favanne,  Coucb.  pl.  49.  f.  P. 

Chemu,  Coneh.  l 6.  p.  93.  pl.  9.  L 79  à 81. 

Venus  dejlorata.  Schrœl.  Fini.  t.  3.  p.  i3i  et  p.  iSo  no  Bo 
Id.  Herbst,  Verm.  pl.  40^* 

TèîUna  rosea,Qtm^\.  p.  3238,  h*'  58. 

Venus  dejîorata,  Gmel.  p.  3274.  n*  24. 

Venus  versicolor,  Gmel.  p.  328  t.  n®  65. 

Venus purpuraCa.  Gmel.  p.  3289.  n“  100. 

Capsa.  Brug.  Ëiicycl.  pl.  281.  f.  3.  4. 

Venus  dejlorata.  UUsses.  Trav.  ofNapL  p,  485.  n®  i33. 

Capsa  rugosa.  Lam,  Mérti.  de  la  Soe.  d’hist.  nat.  de  Paris,  t.  t.  p.  84. 
Jd.  Lamk.  Syst.  des  Au.  s.  vert.  p.  125. 

Venus  dejlorata,  Moutagu.  Test,  biit.  p.  i23. 

28* 


4^6 


DOUZIÈME  FAMILLE. 


là.  Maton  et  Eack.  Lin.  Trans.  t.  8.  p.  85.  n*  i5. 

Capsa  ru^osa,  Eoissy,  Buff.  Moll.  t.  6.  p.  355.  pl.  66.  f.  2. 

Teltina  rosea.  Wood.  Gen,  conrh.  p.  175.  n®  58.  ^ 

Capsa  rugosa,  Brookes,  Intr.  of  conch.  p,  66.  pl.  3.  f.  28. 

Venus  dejlorata.  Dillwyn.  Cal.  l.  i.  p.  186.  n*  65, 

Capsula  ru»osa.  Schum.  Nouv.  syst.  p.  i3o.  pl.  9.  f.  i. 

Sangttinolaria  rugosa.  Lam,  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  5i  i.  n®  4« 
y entis  dejlorata.  Turton.  Conch.  dict.  p.  a4o.  n®  19. 

Sanguinoïar'ta  rugosa.  Bond.  £lem.  of  Coiicb.  2*  part.  p.  5.  f.  8. 

Id.  Cfouch.  Intr.  Lamk.  Cooch.  p.  10.  pl.  5.  f.  6.  > 

yenus  dejlorata.  Wood,  Ind.  test.  pl.  8.  f.  64. 

Sanguinolaria  nigosa.  Desh.  Eiicycl.  niélb.  vers,  t-  3.  p.  9a5.  n®  i. 
Psammobia  rugosa.  Sow.  Généra  of  shells.  n®  35.  f.  i,  2. 

Sanguinolaria  rugosa.  Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  . 2*  éd.  t.  6.  p 167 
Dufo,  Ann.  sc.  nat.  2*  sér.  t.  14.  p.  220. 

rn^osa.  Reeve,  Conch.  sysL  t.  i.  p.  76.  pl.  53.  f.  n 2. 
id.  Hanley,  Descr.  cat.  t.  i p.  56. 

Il  y a peu  de  coquilles  plus  communes  que  celle-ci;  elle  est  ré- 
pandue dans  tout  l’océan  de  l’Inde , depuis  la  mer  Rouge  jusqu’aux 
mers  de  la  Chine.  Elle  est  très  intéressante  à cause  du  nombre  considé- 
rable de  ses  variétés,  car  elle  varie  à la  fois  dans  ses  formes,  dans  ses 
accidents  extérieurs  et  dans  ses  couleurs.  Si  l’on  ne  possédait  qu’un 
petit  nombre  d’individus,  il  serait  possible  d’établir  avec  enx  plusieurs 
espèces,  ce  qui  est  arrivé  à Gmelin;  mais  en  réunissant  un  grand  nom- 
bre de  variétés , on  a sous  les  yeux  le  tableau  des  transformations  de 
l’espèce,  et  il  intéresse  le  zoologiste  qui  cherche  à se  rendre  compte  de 
la  valeur  des  caractères  spécifiques  dans  la  classe  des  Mollusques  acé- 
phalés. 

Les  variétés  dans  la  forme  générale  sont  les  moins  nombreuses  ; or- 
dinairement ovale,  transverse  et  inéquilatérale , cette  coquille  devient 
presque  équilatérale;  son  côté  postérieur  se  rétrécit;  le  bord  ventral, 
presque  toujours  droit  ou  peu  convexe , s’arrondit  insensiblement  et  la 
coquille  finit  par  être  proportionnellement  beaucoup  plus  large  que 
d’habitude.  La  surface  externe  est  couverte  de  stries  longitudinales . 
rayonnantes:  elles  commencent  par  être  fines,  régulières,  serrées  les 
unes  près  des  autres;  dans  une  série  d’individus,  ces  stries  grossissent, 
s’écartent  un  peu  et  restent  simples,  mais  bientôt  des  stries  plus  grosses 
sont  entremêlées  de  plus  petites,  et  enfin  on  arrive  à une  dernière  va- 
riété dont  la  surface  est  couverte  de  grosses  côtes  rayonnantes,  régu- 


LES  PSAMMÜBIDES.  437 

lières,  tantôt  striées,  séparées  par  des  interstices  simples,  tantôt  simples 
avec  des  intervalles  striés. 

Quant  aux  couleurs,  elles  sont  très  variables  et  indépendantes  des 
variétés  précédentes.  Il  y a des  individus  blancs,  ayant  une  large  tache 
violette  sur  le  côté  postérieur;  d’autres  qui  sont  jaunâtres  d'abord  sur 
les  crochets,  puis  sur  toutes  l’étendue  des  valves,  cette  nuance  devient 
foncée  dans  une  série  d’individus  et  parvient  au  jaune  orangé.  Les  va- 
riété roses  se  montrent  de  la  même  manière , enûn  les  variétés  violettes 
ne  sont  pas  les  moins  nombreuses.  Les  unes  sont  d’un  violet  pourpré  , 
avec  des  zones  blanches,  transverses;  les  autres  sont  d’un  violet  plus 
foncé,  plus  uniforme,  mais  presque  toujours  interrompu  par  de  beaux 
rayons  blancs  plus  ou  moins  variables;  mais  chez  tous  les  individus  on 
trouve  les  nymphes  et  le  côté  postérieur  teintés  d’un  violet  obscur. 


THEIZIÊME  FAMILLE. 

lloiiaeides.  ÆMonaeMœ,  Fleming. 


CARACTÈRES.  — Animal  transverse  peu  épais,  inéquilatéral  ^ 
trigone , ayant  les  lobes  du  manteau  égaux , disjoints  dans  la 
longueur  du  bord  inférieur  et  bordé  de  tentacules;  siphons 
inégaux  ; le  branchial  le  plus  court  est  garni  de  tentacules  bran- 
chus.  Pied  allongé  très  aplati,  triangulaire,  abords  tranchants; 
palpes  labiales  petites,  étroites,  oblongues,  triangulaires; 
branchies  très  inégales,  l’interne  allongée  depuis  la  bouche 
jusqu’à  la  région  anale;  l’externe,  de  moitié  plus  courte,  et  se 
prolongeant  en  haut  par  un  bord  mince  et  large. 

Coquille  transverse,  trigone,  régulière,  cunéiforme,  à 
volves  égales,  closes,  à bords  simples  ou  dentelés;  ligament 
externe  court.  Charnière  étroite  portant  deux  dents  cardinales 
sur  chaque  valve  et  quelquefois  des  dents  latérales  ; deux  im- 
pressions musculaires,  l’une  ovalaire,  la  postérieure  subcircu^ 


43§  ^WULLE. 

laire,  toutes  cle\ix  danç  ]a  Région  supérieure  de  la  coquille; 
impression  palléale  offrant  en  arrière  une  sinuosité  ovalaire  peu 
profonde,  horizontale. 

— Dojmx, 

L*opjnion  des  çpnchyliologues  a subi  jusqu’ici  un  petit  nombre  de 
variations  au  sujet  du  genre  Donace.  Linné  lé  mettait  en  contact  avec 
les  Mactres  et  les  Bucardes , et  cette  classiûcation  prévalut  jusqu'au 
moment  où  l’ouvrage  de  Poli  eut  une  influence  marqué^  sur  Tesprit  des 
classificateurs.  Lamarck  connut  tard  l’ouvrage  du  zoologiste  napolitain; 
aussi  il  conserva  , dans  ses  premières  méthodes,  un  arrangement  ana- 
logue à celui  de  Linné.  Cependant,  ep  1809,  il  commença  à rapprocher 
les  Donacesdes  Teîlines  dans  sa  famille  des  Conques,  et  quelques  années 
après , il  créa  la  famille  des  Nymphacés,  dans  laquelle  les  Donaces  sont 
définitivement  entraînés  loin  des  Bucardes  et  des  Mactres,  et  placées 
dans  des  rapports  plus  naturels , mais  qui  ne  sont  pas  encore  l’ex- 
pression réelle  des  caractères  que  présentent  ces  animaux.  Poli,  en 
rejetant  la  classification  linnéenne  , trop  confiant  dans  des  observations 
peu  approfondies,  cru^  voir  eptre  les  anijnaux  des  Teîlines.  et  des  Do- 
naces une  ressemblance  si  parfaite  qu’il  proposa  de  les  joindre  en  un 
seul  genre  qu’il  nomma  Peronea.  Sans  contrôler  les  observations  de 
Poli  par  d’autres  faits  mieux  observés , tous  les  naturalistes  conservèrent 
dans  leurs  méthodes  le  genre  Donace:  mais  tous  aussi,  convaincus  de 
son  analogie  avec  les  Telünos,  .le-comprirent  dans  la  même  famille , et 
ç’est  en  cela  que  depuis  plus  de  trente  ans  la  méthode  s’est  trouvée 
invariablement  fixée.  Cependant  des  changements  sont  devenus  néces- 
saires.; ranimai,  des  Donaces  , étudié  avec  plus  de  soin  , nous  a offert 
des  différences  considérables,  non  seulement  avec  celui  des  Teîlines 
mais  aussi  avec  tous  ceux  des  autres  genres  qui  nous  sont  actuellement 
connus.  Dès  lors  nous  avons  senti  la  nécessité  d’établir  pour  ce  genre 
une  famille  distincte,  à laquelle  nous  avons  conservé  le  nom  de  Dona^ 
cideg,  emprunté  k M.  Fleming. 

La  famille  des  Donacides  de  M.  Fleming  n’est  point  semblable  .à  la 
nôtre , elle  correspondrait  plutôt  en  partie  à notre  famille  dés  Telli- 
nides , cér  à côté  des  Donaces  elle  contient  les  genres  Capse  et  Tolline , 
c’est-à-dire  deux  genres,  qui  n'ohl  qu’une  analogie  éloignée  avec  celui 
des  Donaces. 

Ne  conpaissant  qu’un  seul  genre  qui  puisse  entrer  dans  la  famille 
des  Donacides , le?  eewtères  de  famille  ee  trouveni  dw  empruntés 


LES.  DONACIDES, 


4'^9 

à ce  genre  unique,  et  par. là  ils  deviennent  communs  à l'un  e|.à  l’autre 
groupe.  Il  serait  possible  cependant  que  d’autres  genres  vinssent  plus 
tard  se  joindre  à celui  des  Donaeçs,  et  dès  lors,  il  n'est  pas  inutile 
d’insister  sur  les  caractères  généraux  de  la  famille. 

, L^animal  est  transverse,  généralement  fort  aplati;  il  est  attaché  à 
sa  coquille  par  deux  muscles  adducteurs,  d’une  médiocre  grandeur,  et 
situés  l'un  et  l'autre  vers  la  région  dorsale  supérieure.  Un  manteau 
mince  et  transparent  à lobes  égaux,  bordé  d'un  muscle  orbiculaire, 
tombe  de  chaque  côté  du  corps  et  revêt  l’intérieur  de  la  coquille.  Les 
bords  de  ce  manteau  sont  garnis  sur  presque  toute  la  circonférence 
d’une  rangée  de  tentacules,  qui,  dans  le  genre  Donace,  sont  tronqués 
et  dilatés  au  sommet;  mais  d’autres,  Mollusques  pourraient  appar- 
tenir à la  même  famille  sans  être , pour  cela , munis  de  tentacules 
semblables  à ceux  du  genre  que  nous  venons  de  citer.  Les  lobes  du 
manteau  sont  ouverts  depuis  le  bord  inférieur  du  muscle  adducteur 
antérieur  des  valves  jusque  près  de  rextrémi|é  postérieure  du  bord 
ventral.  La  commissure  postérieure  est  consolidée  par  deux  petits  mus- 
cles , croisés  en  X. 

Chez  les  Donaces  , les  siphons  ressemblent  beaucoup  h ceux  des  Mé- 
sodesmes , cependant  avec  quelques  différences  qu’il  est  nécessaire  de 
noter.  Ces  organes  sont  inégaux,  mais  contrairement  à ce  que, nous 
avons  vu  chez  les  autres  Mollusques , c’est  le  siphon  branchial  qui  est  le 
plus  court  et  son  ouverture  est  garnie  de  tentacules  branchus,  sembla- 
bles à ceux  des  Mésodesmes.  Le  siphon  anal  est  complètement  isolé  de 
son  congénère;  il  est  pliis  allongé  et  un  peu  plus  grêle. 

Le  pied  est  allongé,  comprimé,  pointu,  tranchant  sur  ses  bords; 
par  sa  base  , il  se  continue  avec  pne  masse  abdominale  très  aplatie, 
à l’extrémité  antérieure  et  supérieure  de  laquelle  se  trouve  une 
bouche  étroite,  transverse,  accompagnée  de  cliaque  côté  d’une  paire 
de  palpes  labiales  triangulaires,  petites,  étroites,  adhérentes  par  le 
plus  petit  côté  du  triangle  ; mais  , du  reste , libres  et  flottantes  dans  la 
cavité  du  manteau.  Ces  palpes  labiales , comparées  à celles  desTelIines, 
sont  proportionnellement  de  moitié  moins  grandes , et  nous  les  avons 
trouvées  dans  de  semblables  proportions  dans  toutes  les  espèces  de 
Donaces  que  nous  avons  eu  occasion  d’observer.  Mais  le  caractère  le 
plus  important,  celui  sur  lequel  nous  insislprons  davantage,  est  fourni 
par  les  organes  de  la  respiration  ; car,  par  leur  ensemble  , ils  rappel- 
lent ceux  des  Mésodesmes.  et  ils  n’ont  rien  de  ceujc  des  Tellines.  Les 
feuillets  branchiaux  sont  très  inégaux  , ils  ne  sont  j>oint  l'un  à côté  de 
l'autre,  mais  Tun  au-dessus  de  l’autre;  l'extrémité  antérieure  du 


4 4 0 T H E iZ  1 È M E FA  M I IJ  ;Ë . 

feuillet  interne  so  prolonge  entre  les  palpes  labiales,  et  ce  feuillet  se 
[)rolonge  jusqu'au-devant  de  l’ouverture  interne  du  siphon  anal.  Le 
feuillet  externe  est  de  moitié  plus  court;  il  ressemble  à celui  des  Psam- 
mobies;  mais  son  bord  externe  se  prolonge  davantage,  à peu  près 
comme  dans  les  Mésodesmes.  Tels  sont  les  caractères  extérieurs  que 
présente  l’animal  qui  sert  de  type  à la  famille  des  Donacides.  Nous 
verrons,  en  traitant  du  genre,  que  d'autres  caractères  intérieurs  s’ajou- 
tent à ceux  que  nous  venons  d’exposer,  et  confirment  la  séparation  dés 
Donaces  en  une  famille  distincte. 

Les  coquilles  ont  un  caractère  particulier,  elles  sont  beaucoup  mieux 
fermées  que  celles  de  tous  les  genres  qui  précèdent;  par  là  elles  avoi- 
sinent celles  du  type  des  Vénus  ; elles  s’en  rapprochent  également 
par  leur  épaisseur,  par  le  brillant  de  leur  surface  externe,  ainsi  que 
par  l'épiderme  subcorné  qui  s’étend  sur  leur  bord.  Ces  coquilles  ont  le 
(ôté  postérieur  court  et  tronqué;  les  valves  sont  jointes  par  un  ligament 
court,  peu  épais,  et  qui  est  loin  d’offrir  la  solidité  de  celles  des  Psam- 
inobies,  par  exemple,  et  même  des  Tellines.  La  charnière  est  variable; 
le  plus  souvent  elle  est  munie  de  deux  deaU  cardinales  sur  chaque 
valve;  mais  ces  dents  sont  courtes,  ordinairement  simples  et  assez 
épaisses,  La  charnière  porte  aussi,  dans  un  grand  nomLre  d’espèces  , 
des  dents  latérales  ; mais  ces  dents  ne  sont  point  constantes  ; on  lés  voit 
disparaître  insensiblement,  et  Lamarck  avait  prcîposé  d'appliquer  le 
nom  de  Capseà  ces  espèces  de  Donaces,  dépourvues  de  dents  latérales. 
Pour  juger  définitivement  de  la  valeur  de  ce  genre  Capse  de  Lamarck , 
il  faudrait  connaître  l’animal  de  l'espèce  type  ; mais  la  science  ne  pos- 
sède aucun  renseignement  à son  sujet. 

Les  animaux  appartenant  à la  famille  des  Donacides  habitent  les 
rivages  de.  presque  toutes  les  mers  ; ils  vivent  dans  le  sable , s’y  enfon- 
cent perpendiculairement , la  bouche  en  bas,  de  manière  à pouvoir  aspirer 
l’eau  au  moyen  de  leurs  siphons , qui  font  saillie  à la  surface  du  sol 


GENRE  QUARANTE  ET  UNIÈME. 

SOXACE.  Donajc.  bin. 

PI.  14.  f.  9,  à i5;  pl.  i5.  f.  1 à 3. 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES. — Animal  tiigone  , aplati,  trans- 
verse 5 les  lobes  du  manteau  garnis  de  tentacules  tronqués  et 
dilatés  au  sommet,  réunis  à rextrémité  postérieure;  siphons 


LES  DOiNAClDES. 


44^ 

médiocres , grêles  , inégaux , désunis  dans  toute  leur  longueur  ; 
siphon  branchial , plus  gros- et  de  moitié  plus  court  que  Tanal , 
ayant  son  ouverture  garnie  de  tentacules  branchus  et  symétri- 
ques ; siphon  anal  terminé  par  une  ouverture  étroite  surmontée 
d’un  petit  nombre  de  tentacules  simples.  Pied  très  mince  et 
triangulaire;  bouche  petite  ; palpes  labiales  étroites,  triangu- 
laires ; branchies  inégales  ^ larges , l’interne  se  terminant  en 
avant  en  une  pointe  qui  s'interpose  entre  les  palpes  labiales  ; 
l’externe,  étroite  de  moitié  plus  courte,  est  subtransverse. 

Coquille  transverse  >-  trigone  , équivalve , inéquilatérale  , le 
côté  postérieur  court  et  tronque.  Charnière  étroite , ayant  deux 
délits  cardinales  sur  chaque  valve,  soit  sur  une  seule  v une  ou 
deux  dents  latérales,  quelquefois  avortées.  Ligament  extérieur 
court  ; impression  palléale  ayant  une  sinupsitc  postérieure  peu 
profonde,  semi-ovalaire  et  horizontale. 

sa'künymik  générique.  — Tellina,  Aldrovande,  Lister, 
Adanson , Gualtieri , d’Argenville.  — Cuneus^  Da  Costa, 
Humphrey.  — Peronea  {pars).  Poli.  — Laiona  , hecuba,, 
Schumacher.  — Capsa,^  Lamarck,  1818  non  1801  nec , 
Brug.  — Donax , Linné , Bruguière , Lamarck , Cuvier, 
Blaiuville , Defrance , Oken , Reeve , Menke , Swainson , 
Deshayes,  Quoy,  etc. 

Nous  trouvons  le  genre  Donax  inscrit  pour  la  première  fois  dans  la 
1 0*  édition  du  Sijstema  naluræ;  il  est  institué  pour  réunir  des  coquilles 
dispersées  par  les  anciens  naturalistes  Belon,  Rondelet,  Aldrovande, 
et  môme  Lister,  parmi  les  Tellines,  les  Cames,  les  Vénus,  etc.  La 
création  du, genre  par  Linné  date  de  1 758 . mais  cette  fois  il  fut  devancé 
par  un  illustre  savant  français  qui,  dès  l’année  précédente,  avait  jeté 
les  bases  de  la  classiGcation  naturelle  des  animaux  et  des  plantes , et 
qui  a laissé  dans  son  Voyage  au  Sénégal  un  monument  remarquable  de 
son  génie  pour  l'observation  et  surtout  pour  la  classification.  Dans  cet 
ouvrage  célèbre , Adanson  , plus  heureux  que  Linné , non  seulement  le 
devance  dans  la  création  du  genre , mais  encore  le  caractérise  plus 
complètement  d’après  la  coquille  et  d’après  l’animal  dont  il  donne  la 
figure. 


44*  TREIZIÈME  FAMILLE. 

En  ïîarRctérisant  son  nouveau  genre,  Adansonne  crut  pas  nécessaire 
de  lui  imposer  un  nom  nouveau  ; l'étude  attentive,  qu'il  avait  faite  de 
nos  premiers  naturalistes , lui  avait  donné  la  preuve  que  le  plus  grand 
nombre  des  espèces  deDonaces , connues  d'eux,  étaient  comprises  dans 
leurs  Tellines , et  dès  lors  voulant  transmettre  la  tradition  de  ses  pré- 
décesseurs , il  appliqua  le  nom  de  Telline  à un  groupe  d’espèces  dont 
les  caractères  furent  définis  rigoureusement,  et  ces  caractères  coïnci- 
dent comme  nous  venons  de  lé  voir,  avec  ceux  des  Donaces  de  Linné. 

Pour  être  équitables  et  pour  appliquer  rigoureusement  les  lois  de  la 
nomenclature , les  naturalistes  auraient  dû  adopter  l’opinion  d'Adanson , 
et,  malgré  l'autorité  de  Linné,  restituer  aux  Donaces  le  nom  de  Tel- 
lines. Si  ce  changement  ne  s’est  pas  opéré , il  faut  l’attribuer  à ce  respect 
si  naturel , nous  dirons  même  à l’enthousiasme  que  produisirent  les  ou- 
vrages de  Linné  ; on  voulut  conserver  la  méthode  de  ce  grand  homme 
dans  toute  son  intégrité,  et  c’est  ainsique  des  travaux  du  plus  grand 
mérite  furent  longtemps  mis  en  oubli  ou  négligés , et  nous  voyons  Linné 
lui-même  dédaigner  d’y  aller  puiser  les  plus  utiles  renseignements. 
Adanson  a figuré  l’animal  d’une  Donace , on  a pu  croire  que  Linné , au 
moment  de  publier  la  1 0'  édition  du  Systema  naturœ , n'avaît  pas  eu 
connaissance  du  travail  d'Adanson  ; mais  dans  les  ouvrages  qui  suivi- 
rent, tels  que  le  Musœum  Ulrice  et  dans  la  édition  du  Systema 
naturœ , Linné  ne  change  rien  à ce  caractère  banal , qu’il  met  à la  tête 
de  tous  les  genres  des  Mollusques  bivalves , animal  ïhétis.  Assuré- 
ment Linné,  en  répétant  ces  mots, pour  tous  les  genres,  leur  donnait 
non  plus  une  valeur  générique , mais  une  valeur  d’ordre  et  de  famille  , 
et  il  eût  dû  comprendre  que  pour  caractériser  des  genres  d'une  moindre 
étendue , il  aurait  fallu  en  chercher  les  moyens  dans  les  particularités 
des  animaux  en  rapport  avec  les  caractères  de  leur  coquille.  L’on  doit 
être  surpris  que,  trouvant  dans  l’ouvrage  d’Adanson  les  moyens  d’amé- 
liorer l’ensemble  de  sa  méthode , Linné  ne  les  ait  pas  saisis  avec  empres- 
sement ; il  faut  attribuer  à cette  négligence  le  peu  d’importance  que  l’on 
attacha  par  la  suite,  à l’observation  des  animaux  Mollusques. 

Tel  qu’il  est  caractérisé  par  Adanson  et  par  Linné , le  genre  Donace 
est  très  naturel  En  prenant  l’une  après  Tautre  toutes  les  espèces  inscrites 
par  ces  auteurs , on  n’en  trouve  qu’une  seule  ( Donax  irus  ) qui  ne  puisse 
rester  dans  le  genre  Aussi  le  genre  Donace  a été  généralement  adopté 
sans  changement  par  presque  tous  les  conchyHoIogues  ; nous  en  excep- 
terons cependant  Da  Costa.  Ce  naturaliste,  dans  sa  conchyliologie  de  la 
Grande-Bretagne , a rangé  le  petit  nombre  d’espèces  des  mers  d’Europe 
dans  tin  genre  Cumm , dans  hjquel  il  confond  plusieurs  Vénus,  une 


LES  DDNACIDES. 


443 

Vénérupe  avec  les  véritables  Donaces.  Reproduit  plus  tard  par  Hum- 
phrey,  dans  le  Muséum  coîonianum , ce  genre  Cuneus  a été  repris  plus 
récemment  par  M.  Megerle  de  Mühlfeld,  mais  en  y introduisant  d'au- 
tres caractères  . de  manière  à former  sous  ce  nom,  déjà  ancien  et  sans 
valeur,  un  genre  démembre  des  Donaces,  et  dont  nous  aurons  à parler 
plus  tard. 

Poli,  comme  nous  l’avons  vu  , confondait  les  Donaces  avec  les  Tel- 
lines,  et  il  a proposé  pourxes  deux  genres  réunis  le  nom  nouveau  de 
Pero7ïea, 

M.  Schumapher,  en  1 817-,  ayant  voulu  démembrer  le  genre  naturel 
des  Donaces , en  détacha  les  genres  Iphigenia,  Latona  et  Meroê\  Nous 
verrons  bientôt  le  peu  d'utilité  de  ces  démembrements  , lorsque  nous 
étudierons  dans  leur  ensemble  les  caractères  du  genre.  Nous  verrons 
aussi  pourquoi  il  est  nécessaire  de  rqjeler  en  même  temps  les  Capses  dé 
Laniarck , fondées  sur  des  caractères  d'une  très  faible  importance. 
Adanson  , Linné  et  tous  leurs  successeurs , ont  caractérisé  les  Donaces , 
non  seulement  par  la  forme  générale , mais  encore  par  une  charnière 
portant  des  dents  latérales.  Toutes  les  espèces  de  Linné  offrent  ce  ca- 
ractère des  dents  latérales;  mais  ’à  mesure  que  le  nombre  d’espèces 
s’accrut  dans  les  collections , on  s’aperçut  que  les  dents  latérales  étaient 
variables,  à peu  près  comme  dans  les  Tellines,  et  Lamarck , voulaiit 
séparer  toutes  les  espèces  qui  ont  des  denté  latérales  de  celles  qui  n’en 
ont  point , proposa  le  genre  Capse  pour  ces  dernières , se  laissant  guider 
par  des  motifs  semblables  à ceux  qui  lui  avaient  iail  distinguer  les  Telli- 
nides  dès  Tellines.  Comme  nous  le  disions  au  sujet  des  Tellines  , si  les 
dents  latérales  de  la  charnière  disparaissaient  brusquement,  et  si  cette 
disparition  entraînait  en  même  temps  quelques  légères  modîQcations 
dans  les  autres  caractères  génériques , il  faudrait  assurément  conserver 
les  genres  proposés  par  Lamarck;  mais  l’observation  prouve  qu’il  n’en 
est  pas  ainsi.  Dans  les  Donaces , aussi  bien  que  chez  les  Tellines , les 
dents  latérales  disparaissent  insensiblement , et  cependant  tous  les  autres 
caractères  demeurent  invariables  ; il  ne  faut  donc  pas  attribuer  aux  par- 
ties de  la  charnière  , dont  nous  parlons  , plus  de  valeur  qu’elles  ne  mé- 
ritent. C’est  en  appliquant , avec  plus  de  rigueur  encore  les  principes 
de  Lamarck,  que  M.  Schumacher  en  est  venu  à multiplier  les  genres 
bien  au-delà  des  besoins;  et  en  agissant  ainsi , loin  de  porter  la  clarté 
dans  la  méthode,  il  y jette  de  l'incertitude,  par  rimpossiWlité  où  l’on 
est  de  placer  dans  un  de  ses  trois  genres,  les  espèces  à'  caractères 
ambigus  et  qui  servent  de  transition  entre  eux. 

Nous  devons  examiner  maintenant  comment  les  divers  naturalistes 


4 1 4 TREIZIEME  FAMILLE . 

ont  compris  les  rapports  des  Donaces  avec  les  autres  genres  inscrits 
dans  la  méthode.  Linné  n'atlrihuait  pas  une  grande  valeur  à la  position 
du  ligament;  qu’il  fût  , à l’intérieur  ou  à l’extérieur,  cela  ne  Tompêchait 
pas  de  rapprocher  les  coquilles  d’après  d’autres  caractères , tels  que 
ceux  des  dents  latérales,  par  exemple.  C'est  ainsi  qu’à  la  suite  des 
Tellines,  il  range  les  Cardium,  puis  les  Mactrcs,  etenhn  les  Donaces  , 
qui  sont  suivies  des  Vénus.  Cet  arrangement  est  invariablement  adopté 
par  tous  les  élèves  et  tous  les  successeurs  de  Linné , jusqu’au  moment  où 
Lamarck , introduisant  de  nouveaux  éléments  dans  la  classiQcation  des 
coquilles,  proposa  une  méthode  nouvelle  dans  le  premier  volume  des 
Mémoires  de  la  Société  à’ histoire  naturelle  de  Paris.  Dans  cette  première 
ébauche , Lamarck  conserve  les  Donaces  dans  le  voisinage  des  Vénus, 
et  des  Cythérées  ; les  Madrés , les  Lulraires  , lesCrassatelles , viennent 
ensuite.  Dans  une  méthode,  dans  laquelle  les  familles  ne  sont  pas  encore 
créées,  ces  genres  se  suivent  sur  une  seule  ligne;  il  est  impossible 
d’établir  entre  eux  des  rapports  naturels.  Deux  années  plus  tard,  La- 
maick  perfectionna  sa  classification,  il  y ajouta  un  assez  grand  nombre 
do  genres  , et  les  Donaces  sont  séparées  des  Madrés  par  les  Pélricoles. 

Cuvier  avait  d’abord  oublié  le  genre  Donace  dans  son  Tableau  élé- 
mentaire de  l’histoire  naturelle  des  animaux;  il  répara  cette  omission 
dans  le  tableau  de  classification  qui  accompagne  le  premier  volume  de 
l’anatomie  comparée.  Dans  cet  ouvrage,  publié  en  1800,  ce  savant 
zoologiste  jette  le  fondement  d'une  classification  naturelle  , établie , non 
d’après  les  seuls  caractères  de  la  coquille , mais  en  y ajoutant  ceux  des 
animaux,  ce  qu’aucun  zoologiste  n’avait  tenté  jusqu’alors  d*une  manière 
aussi  générale.  Dans  ce  tableau  , des  groupes  très  étendus  sont  tracés  ; 
on  pourrait  les  considérer  comme  des  familles , s’ils  ne  réunissaient  sou- 
vent un  trop  grand  nombre  de  genres  , agglomérés  au  moyen  de  carac- 
tères trop  générau.x.  C’est  ainsi , par  exemple , que  tous  les  Acéphales , 
dont  le  manteau  est  terminé  en  arrière  par  des  siphons,  sont  rassem- 
blés en  un  seul  groupe,  dans  lequel  on  compte  six  genres  seulement, 
soüs-divisés  en  seize  sous-genres.  Le  genre  Donace  est  compris  parmi 
les  six  premiers  ; on  le  trouve  entre  les  Vénus  et  les  Cames , et  dans  la 
série  des  sous-genres  entre  les  Capses  et  les  Cardites.  Comme  nous  le 
verrons , ce  n’est  pas  là  que  le  genre  Donace  devrait  se  trouver  ; il  est 
incontestable  qu’il  ne  peut  s’éloigner  des  Vénus , mais  il  n’est  pas 
moins  incontestable  qu’il  est  très  différent  des  Cardites , puisque  dans 
ce  dernier  genre  les  siphons  manquent  entièrement. 

Dans  plus  d’une  occasion , nous  avons  fait  remarquer  la  sagacité  avec 
laquelle  M.  de  Roissy  a établi  la  classification  des  Mollusques  dans  les 


Ï.ES  DONAClDES.  44^ 

deux  derniers  volumes  de  Thistoire  des  Mollusques , qui  fait  suite  au 
Buflbn  de  Sonnini.  Doué  des  plus  précieuses  qualités  de  l’observateur, 
il  devançait  quelquefois  l'époque  où  il  écrivait  par  la  nouveauté  et  la  jus- 
tesse de  ses  aperçus.  Pour  ce  qui  concerne  le  genre  Donace,  M.  de  Roissy 
fut  moins  heureux  que  dans  d’autres  circonstances.  Se  laissant  entraîner 
par  l’opinion  de  Cuvier,  il  l’éloigna  trop  des  Vénus,  pour  le  rapprocher 
des  Cardites  , des  Madrés  et  des  Tellines. 

Lamarck  fut  plus  habile  dans  la  classiGcatîon  qu’il  proposa  dans  le 
premier  volume  de  la  Philosophie  zoologique.  Les  Mollusques , partagés 
en  familles  peu  étendues  , sont  daiis  des  rapports  beaucoup  plus  naturels 
que  dans  les  élassifîcations  précédentes.  La  famille  des  Conques  est  l’une 
des  plus  considérables  des  Mollusques  acéphales  ; elle  contient  neuf 
genres , parmi  lesquels  se  trouvent  les  Donaces , placés  entre  les  Cy- 
thérées  et  les  Tellines.  Cette  famille  n'est  point  naturellê  ; le  genre 
Vénéricarde  la  commence  ; ce  genre , comme  nous  aurons  occasion  de 
le  prouver  bientôt , ne  se  distinguant  pas  des  Cardites , doit  être  con- 
fondu et  reporté  dans  une  autre  famille , celle  des  Cardites.  Les  Tellines , 
les  Lucines,  appartiennent  aussi  à des  types  très  distincts  , et  quoique 
les  Capses  aient  été  séparées  des  Donaces  sur  des  caractères  insuffi- 
sants, néanmoins  Lamarck  classe  ce  genre  a la  fin  delà  famille,  l’écar- 
tant des  Donaces  par  quatre  genres  très  différents.  Mais  Lamarck  lui- 
même  a senti  rimperfection  de  ce  premier  essai  d’une  classification  par 
famille  , et  si  dans  l’extrait  du  cours  il  l’a  conservé  sans  changements 
considérables,  il  l’a  profondément  modifié  dans  son  dernier  ouvrage, 
V Histoire  des  animaux  sans  vertèbres.  En  effet,  Lamarck  sépare  la 
famille  des  Nympbacées  de  celle  des  Conques  ; tandis  qu'il  réduit  cette 
dernière  à sept  genres,  il  accroît  jusqu’à  dix  le  nombre  de  ceux  des 
Nympbacées.  Il  divise  cette  famille  en  Nymphacées  solenaires  et  en 
Nymphaeées  tellinaires  , et  ces  dernières  sont  partagées  elles-mêmes  en 
deux  groupes,  selon  que  la  charnière  porte  des  dents  latérales  ou  en  man- 
que. Les  Donaces  , ayant  des  dents  latérales , sont  comprises  dans  les 
Nymphacées  tellinaires  du  premier  groupe,  tandis  que  les  Capses  com- 
mencent le  groupe  suivant.  Ainsi,  Lamarck  répare  judicieusement  les 
défauts  de  sa  première  classiQcalion , et  tout  en  conservant  les  Donaces 
dans  le  voisinage  des  Tellines,  il  les  rapprociie  le  plus  qu’il  peut  du 
type  des  Vénus;  en  cela  notre  célèbre  naturaliste  donne  une  preuve  de 
plus  de  sa  profonde  sagacité. 

Plus  attaché  aux  idées  de  Linné,  Cuvier,  dans  la  première  édition  du 
Règne  animal , institue  une  famille  des  Cardiacées , dans  laquelle  il 
rassemble  tous  ceux  des  Mollusques  acéphales  qui  ont  deux  ouvertures 


44(>  TREIZIÈME  FAMILLE. 

postérieures  au  manteau , plus  ou  moins  prolongées  en  arrière  par  des 
siphons  complètement  séparés  l’un  de  l’autre.  Cette  famille  commence 
par  les  Cames,  se  termine  par  les  Mactres,  réunissant  dix  grands 
.genres,  assez  comparables  par  leur  étendue  à ceux  de  Linné.  Les  Do- 
naces  se  trouvent  entre  les  Bucardes  et  les  Cÿclades , trop  éloignées  des 
genres  avec  lesquels  elles  ont  le  plus  d’analogie. 

Lamarck  a conservé  au  genre  Donacé  l’étendue  que  lui  avait  donnée 
Linné  ; nous  pensons  (pie  pour  rendre  le  genre  plus  naturel , il  faut  y 
adjoindre  les  coquilles  avec  lesquelles  le  genre  Capse  à été  constitué. 
Malgré  la  diversité  de  leurs  formes  extérieures  , on  remarque,  dans  cet 
ensemble  d’espèces,  un  certain  nombre  de  caractères  communs  au 
moyen  desquels  elles  constituent  un  genre  véritablement  naturel.  L’un 
des  caractères  extérieurs  prédominants  des  Doriàces  consiste  en  leur 
forme  triangulaire  , ainsi  que  dans  la  brièveté  du  côté  postérieur.  Ce- 
pendant cette  forme  n’est  pas  absolument  constante  : il  y a des  espèces 
subéquilatérales , comprimées , telles  que  le  Do7iax  ^feroëûe  Lamarck  ; 
d’autres  également  subéquilatérales,  sont  plus  bombées  et  se  distin- 
guent par  une  cliarnière  pins  simple , ce  sont  les  Capses.  Kous  exami- 
nerons successivement  les  caractères  de  ces  trois  groupes , nous  les 
comparerons  et  nous  nous  assurerons  par  là  s’ils  appartiennent  à un 
seul  et  mémo  genre. 

Les  espèces  du  premier  groupe  sont  ovales  , transverses , triangu- 
laires, très  inéquilatérales  ; le  côté  postérieur,  qui  est  le  plus  court,  est 
tronqué , souvent  aplati  et  presque  toujours  diversement  orné  selon  les 
espèces.  Dans  le  second  groupe  les  coquilles  sont  plus  ovalaires,  moins 
inéquilatérales  ; l.e  côté  postérieur,,  plus  oblique,  porte  un  corselet  pro- 
fondément creusé;  enfin,  les  coquilles  du  troisième  groupe,  en  conser- 
vant une  forme  triangulaire,  dèviennent  plus  transverses,  plus  équila- 
térales, et  le  çôtè  postérieur  eèt  moins  tronqué  que  dans  les  espèces  des 
deux  groupes  précédents.  Si  l’on  s'arrête  à ces  formes  extérieures,  on 
les  voit  se  nuancer  et  passer  des  unes  aux  autres  par  un  grand  nombre 
d’intermédiaires  ; mais  pour  apercevoir  celte  transition,  il  faut  rassem- 
bler le  plus  grand  nombre  possible  d^espèces  et  c’est  alors  qu’elle  se 
manifeste  le  plus  évidemment.  Nous  devons  ajouter,  néanmoins,  que  le 
groupe  qui  a pour  type  le  Donax  Meroë , s’isole  davantage  des  deux 
autres,  et  il  faut  recourir  a la  charnière  pour  retrouver  en  lui  quelques 
uns  de  ces  caractères  des  Donaces. 

La  plupart  des  espèces  des  Donaces  sont  lisses  à l'extérieur;  un  cer- 
tain nombre  sont  striées  longitudinalement,  et  quelques  unes  seulement 
ont  des  stries  transverses.  Les  couleurs  sont  variables  ; cependant  il  est 


T.KS  DONACIDES. 


à remarquer  que,  dans  rènsemble  du  gehre,  c’est  la  couleur  violette  qui 
domine,  surtout  à l’intérieur  des  valves.  Toutes  les  Donaces  sont  re- 
vêtues d'un  épiderme  plus  ou  moins  épais,  plus  ou  moins  apparent; 
cet  épiderme  est  subcorné,  semblable  à une  couche  de  vernis  assez 
également  répandu  sur  la  surface.  Cet  épiderme  dépasse  à peiné  le  bord 
des  valves. 

Lorsque  les  valves  sont  rapprochées  , elles  sont  exactement  fermées 
sur  toute  la  circonférencé;  Il  existe , cependant , quelques  espèces  chez 
lesquelles  sé  trouve  un  léger  écartement  à l'extrémité  postérieure  delà 
coquille.  Les  Donaces  sont  des  coquilles  dont  le  test  est  assez  épais, 
plus  solide  que  celui  des  Tellines:  elles  sont  aplaties , cunéiformes  , et 
l’on  pourrait  les  partager  en  deux  séries.  Dans  les  unes,  en  effet,  les 
bords  sont  simples  ; dans  les  autres , les  bords  sont  finement  dentelés. 
Le  côté  antérieur  est  variable  dans  sa  forme  ; arrondi  dans  un  certain 
nombre  d’espèces  , il  est  plus  aigu  dans  un  certain  nombre  d’autres  ; il 
est  toujours  plus  obtus  que  le  coté  postérieur.  Le  côté  postérieur  est 
court,  tronqué;  quelquefois  aplati  et  circonscrit,  soit  par  un  angle,  soit 
par  des  stries  ou  d'autres  ornements  qui  lui  sent  propres.  Les  crochets 
sont  généralement  petits,  rapprocliéà,  opposés  ou  à peine  inclinés.  Le 
corselet  est  grand  : dans  les  espèces  tronquées,  il  en  occupe  tout  le  côté 
postérieur;  dans  celles  du  deuxième  groupe,  il  est  profondément  creusé; 
il  est  étroit  èt  semblable  à une  lunule  ; il  est  à peine  indiqué  dans  les 
espèces  du  troisième  groupe.  En  haut  du  corselet , et  immédiatement 
au  dessous  des  crochets,  se  montre  un  ligament  externe  très  court  et 
peu  épais.  Ce  ligament,  peu  puissant,  paraît  disproportionné  à la 
grandeur  des  coquilles  ; mais,  en  compensation  de  sa  petitesse,  il  jouit 
d’une  grande  ténacité  et  de  beaucoup  d'élasticité.  Des  nymphes  assez 
épaisses,  médiocrement  saillantes,  reçoivent  le  ligament  et  lui  fournissent 
une  adhérence  solide.  Chez  les  espèces  du  troisième  groupe,  les  ÇapSes 
de  Lamarck,  le  ligament  est  en  proportion  un  peu  plus  long  et  un  peu 
plus  épais  que  dans  les  Donaces  proprement  dites. 

Lamarck  avait  pris  lé  côté  postérieur  des  Donaces  pour  leur  côté  an- 
térieur; aussi  il  disait  que  dans  ce  genre  le  ligament  est  contenu  dans 
la  lunule';  mais  îl  est  facile  de  rectifier  cette  erreur,  en  considérant  la 
direc-lion  do  la  sinuosité  palléale,  qui  indique  la  position  des  siphons  et 
qui  sert  à distinguer  facilement  le  côté  antérieur  du  postérieur.  Dans  le 
genre  qui  nous  occupe  , il  y a peu  d'espèces  où  l’on  ne  puisse  recon- 
naître facilement  une  véritable  luhule.  La  lunule,  comme  on  le  sait,  est 
située  en  avant  des  crochets;  et  elle  occupe  une  portion  plus  ou  moins 
étendue  du  côté  antérieur.  Lorsqu'elle  existe  dans  les  Donaces,  elle  éSt 


TBEIZIÈME  FaMIU.E. 


Miroite,  lancéolée  et  plus  ou  moins  bien  circonscrite,  selon  les  espèces. 

La  surface  interne  est  toujours  lisse  ; elle  est  ornée  de  couleurs  di- 
verses , mais  le  plus  ordinairement  rougeâtres  ou  violettes.  Sur  cette 
surface  interne  des  valves,  on  trouve  deux  impressions  musculaires 
principales,  qui  se  rattachent  Tune  à Tautre  au  moyen  de  l’impression 
palléale,  creusée  en  arrière,  d'une  sinuosité  peu  profonde. 

Les  impressions  musculaires  sont  d’une  médiocre  étendue  ; elles  sont 
écartées,  très  voisines  du  bord  l’antérieure  est  ovalaire,  située  oblique- 
ment le  long  du  bord  antérieur  et  supérieur;  l'impression  postérieure 
est  subcirculaire;  elle  est  située  entre  la  charnière  et  l’extrémité  du 
bord  postérieur;  elle  semble  quelquefois  se  prolonger  en  un  angle- 
supérieur,  mais  cet  angle  est  produit  par  l’impression  du  muscle  ré- 
tracteur postérieur  du  pied. 

L'impression  palléale  part  de  l'extrémité  inférieure  de  l’impression 
musculaire  antérieure  ; si  l’impression  palléale  se  continuait  à travers 
ce  muscle,  elle  le  partagerait  en  deux  moitiés  égales  dans  sa  plus  grande 
longueur.  L'impression  palléale  descend  le  long  du  bord  ventral , en 
prenant  une  position  oblique,  de  manière  que  l’espace  qu’elle  laisse 
est  plus  large  en  avant  qu'en  arrière,  ainsi  que  cda  a lieu  dans  les  Mé- 
sodesmes,  par  exemple,  et  nous  ferons  remarquer  que  les  caractères  que 
nous  venons  d’indiquer  dans  l'intérieur  des  valves  se  montrent  dans  les 
espèces  des  trois  groupes  et  peuvent, déjà  servir  à les  rattacher  les  uns 
aux  autres.  Parvenue  vers  l'extrémité  postérieure  des  valyes,  l'impres- 
sion palléale  se  rapproche  des  bords  de  la  coquille,  et  elle  vient  se  ter- 
miner en  un  élargissement  peu  étendu , produit  par  l’insertion  des 
petits  muscles  du  manteau  , servant  à consolider  la  commissure  posté- 
rieure et  croisés  en  X.  A partir  de  ce  point,  l’impression  palléale, 
rentrant  sur  elle-même,  circonscrit  une  sinuosité  d’une  médiocre  pro- 
fondeur, qui  ne  dépasse  jamais  une  ligne  perpendiculaire,  qui  tomberait 
delà  charnière  au  milieu  du  bord  ventral.  Cette  sinuosité  mérite  une 
attention  particulière  ; car  elle  est  constante  dans  les  espèces  des  trois 
groupes  principaux.  Au  moment  où  l’impression  se  renverse  en  dedans, 
une  petite  portion  se  confond  avec  la  ligne  ventrale;  après  un  court 
trajet  fait  en  commun,  elle  s’en  détache  en  formant  un  angle  très  aigu  ; 
elle  se  recourbe  dans  le  limbe  des  valves,  se  dirige  de  nouveau  d'avant 
en  arrière , et  vient  aboutir  à l’impression  musculaire  postérieure , 
comme  si  elle  voulait  la  traverser  dans  son  diamètre  antéro-postérieur. 
Nous  avons  vu  dans  d’autres  genres  l'impression  palléale  gagner  la 
circonférence  de  l’impression  musculaire,  comme  la  tangente  d'un 
cercle.  C’est  ce  qui  a lieu  aussi  pour  un  très  petit  nombre  de  Donaces, 


LES  DONàCIDES. 


et  il  est  à remarquer  que  dans  ces  espèces,  la  sinuosité,  au  lieu  d’avoir 
les  bords  parallèles,  comme  dans  les  premières,  est  légèrement  dilatée, 
tout  en  conservant  cependant  la  position  horizontale , particulière  à 
toutes  les  espèces  du  genre.  Les  espèces  du  groupe  ayant  pour  type  lo 
Donax  Méroë  ont  ta  sinuosité  palléale  ditîérente;  elle  se  détache  entiè- 
rement du  bord  ventral  ; elle  est  en  proportion  plus  petite , et  son 
axe  n’est  plus  horizontal  mais  incliné  de  bas  en  haut  et  d’arrière  en 
avant. 

La  charnière  des  Donacesest  variable;  elle  est  généralement  courte, 
supportée  par  un  bord  cardinal  d’une  médiocre  largeur,  bornée  à Pangle 
supérieur  de  la  coquille.  Sur  la  valve  gauche  s’élèvent  deux  dents  car- 
dinales divergentes,  courtes  et  obtuses;  sur  la  valve  droite,  il  y a une 
seule  dent  médiane,  assez  épaisse,  circonscrite  de  chaque  côté  par  une 
fossette,  destinée  à recevoir  les  dents  de  la  valve  opposée  ; de  chaque 
côté  de  celle  charnière  se  montre,  en  avant  et  en  arrière,  une  dent  la- 
térale, ordinairement  étroite  , allongée,  quelquefois  plus  courte' et  plus 
épaisse,  surtout  celle  du  côté  postérieur.  La  charnière  que -nous  venons 
de  décrire  appartient  au  type  des  Donaces,  tel  quo  M.  Schumacher  a 
proposé  de  le  restreindre.  Deux  dents  cardinales  sur  une  valve,  une  sur 
l’autre,  deux  dents  latérales,  tels  seraient,  d'après  cet  auteur,  les  ca- 
ractères du  genre  Donace.  Mais  si  Ton  examine  un  grand  nombre  d’es- 
pèces, on  voit  la  dent  latérale  antérieure  diminuer  peu  à peu  et  ühir  par 
disparaître  complètement , sans  qu'on  puisse  remarquer  la  moindre  al- 
tération dans  les  autres  caractères  génériques.  Le  môme  phénomène  a 
lieu  pour  la  dent  latérale  postérieure,  très  grosse  dans  le  Donax  scoc~ 
tum,  par  exemple;  elle  est  déjà  très  réduite  dans  le  Donax  trxmcuîus^  et 
n’est  plus  que  sous  la  forme  d'un  simple  rudiment  dans  le  Dona.T  rôt- 
gens.  Nous  connaissons  une  série  d’espèces  triangulaires  et  subtronquées 
postérieurement,  chez  lesquelles  les  dents  latérales  n’existent  pas  et 
dont  les  animaux  sont  cependant  tout  à fait  semblables  à ceux  des  autres 
Donaces.  Le  genre  Capse  de  Lamarck  se  rattache  à cette  série  d'espèces, 
et  cependant,  dans  la  plupart  d’entre  elles,  la  valve  droite  présente 
encore  un  rudiment  des  dents  latérales.  Dans  le  Donax  Méroë  et  les 
autres  espèces  voisines , il  y a deux  dents  cardinales  à chaque  valve, 
une  dent  latérale  antérieure,  et  jamais  de  dent  Uitérale  postérieure.  Il 
serait  donc  possible  de  les  détacher  des  Donàces  et  de  conserver  lé  genre 
' Méroë,  proposé  par  Schumacher;  mais  avant  de  radmetlre,  il  faudrait 
en  connaître  les  animaux.  Par  les  impressions  qu’ils  laissent  dans  leurs 
coquilles,  on  pourait  préjuger  qu’ils  sont,  si  ce  n’est  identiques,  du 
moins  voisins  de  ceux  des  autres  Donaces,  et  peut-être  plus  rapprochés 
T.  ! 3*  PARTIE.  29* 


45 O TREUIÈME  FAMILLE. 

des  Cylhérées.  Dans  tous  les  cas , si  le  groupe  des  Capses  doit  reulrer 
dans  les  Donaces,  celui  des  Méroe  devra  en  sortir. 

Sous  le  nom  de  Donax  irregularis^  M.  Basterot  a fait  connaître  une 
coquille  très  singulière,  pour  laquelle  M.  Desmoulins  a proposé  le  genre 
Grateloupia.  Nous  avions  pensé  d’abord  à rapprocher  cette  coquille  des 
Donaces,  mais  un  nouvel  examen  nous  fait  partager  Topinion  de  M.  Gray, 
qui  transporte  les  Graleloupies  dans  le  groupe  des  Cylhérées.  C'est  en, 
traitant  de  la  famille  des  Vénus  que  nous  aurons  a nous  en  occuper. 

Toutes  les  Donaces  sont  des  coquilles  essentiellement  marines,  vivant 
loin  des  eaux  douces,  sur  les  plages  basses  et  sableuses  ; elles  se  propgb 
gent  en  très  grande  abondance.  Vivant  de  la  môme  manière  que  les 
Mésodesmes,  elles  creusent  le  sablo  avec  rapidité  et  s’y  enfoncent  per- 
pendiculairement. Pour  se  mouvoir,  elles  emploient  les  mêmes  mouve- 
ments que  les  autres  Mollusques,  qui,  habitués  à vivre  dans  le  sable, 
s'y  creusent  une  demeure  au  moyen  de  leur  pied.  Ce  sont,  en  général, 
des  coquilles  d'une  taille  médiocre,  dont  la  forme,  aplatie  en  coins,  est 
très  propre  à favoriser  les  mouvements  de  l’animal  dans  les  lieux  qu’il 
habite. 

Le  nombre  des  espèces  fossiles  est  peu  considérable,  car  il  faut  déh-; 
uitivemeut  rejeter  du  genre  toutes  ces  Douacites  dos  paléontologistes; 
elles  se  distribuent  aujourd’hui  dans  des  genres  très  dilVérents  dos  vé- 
ritables Donaces.  Les  unes,  de  Brongniart  et  de  plusieurs'  autres  géo- 
logues, sont  des  Pholadomyes;  les  autres, de  MM.  Schlotheini,  Hermann, 
Zenker,  etc.,  sont  des  Trigonies;  enün,  à l'exception  d'une  seule,  con- 
statée dans  le  Lias  par  MM.  Dunker  et  Meyer,  toutes  les  espèces  men- 
tionnées dans  les  terrains  inférieurs  aux  terrains  tertiaires  doivent  être 
déBnitivement  ri^etées  du  genre  Donax. 

Le  Donax  securiformiSy  de  M.  Dunker,  présente  tous  les  caractères 
d’une  Donace^  il  est  tronqué  postérieurement , son  côté  antérieur  est. 
étroit  et  cunéiforme,  le  ligament  était  petit , .ailaebé  à des  nymphes 
courtes.,  la  charnière  est  celle  des  Donaces  proprement  dites,  car  cll^ 
porte  des  dents  latérales.  Les  impressions  musculaires  sont  celles  des 
Donaces,  mais  malheureusement  les  figures  ne  représentent  pas  i’im- 
pressiou  palléale.  Voilà  donc  une  espèce,  de  Donace  dans  la  formation 
basique,  et  depuis  son  apparition  dans  les  couches  inférieures  du  terrain 
jurassique  le  genre  disparaît  dans  toute  l’énorme  série  des,  terrains  ju-; 
rassiques  et  crétacés,  ,pour  apparaître  de  nouveau  avec  les  terrains, 
tertiaires  inférieurs , se  propager  en  petit  nombre  dans  les  terrains 
moyens  et  supérieurs,  et,  enlin,  prendre  dans  la  nature  actuelle  un  dé-; 
yeloppement  qu'il  n’avait  jamais  eu  auparavant.  Cependant  M.  Kc^emer 


LES  DONACIDES. 


45i 

admet  deux  espèces  dans  la  craie  de  l’Allemagne,  mais  toutes  deux  nous 
paraissent  douteuses,  étpnt  connues  par  un  -moule  mal. caractérisé.  On 
cite  aussi  dans  la  craie  du  nord  un  Donax  arenacea  de  Nilson,  que  fi- 
gure M.  Hisinger  dans  son  Lethœa  suecica  : c’est  aussi  un  moule  trian- 
gulaire ne  montrant  aucune  des  impressions  qui  pourraient.le  caracté- 
riser; il  dépendrait  aussi  bien  du  genre  Maçtre. 

Parmi  les  espèces  admises  dans  les  terrains  tertiaires,  il  y en  a- quel- 
ques unes  qui  doivent  sortir  du  genre  ; le  Domx  obliqua  de  Lamarck, 
ayant  l’impression  du  mapteau  simple,  doit  passer  dans  le  genre  Astarte. 
Le  Donax  tellinella^  du  même  auteur,  après  nouvel  examen,  est  incontes- 
tablement une  Telline.  Elle  prendra  place  dans  ce  genre,  mais  son  nom 
devra  être  changé.  Lg  Donax  irregularis  de  Basterot  devient  le  type 
du  genre  Grateîoupia , que  nous  retrouverons  dans  le  voisinage  des 
Cytliérées  ; le  DonaX  difficilis  du  même. auteur  est  une  Cythérée.  Quant 
au  Donax  sulcala  deBrocchi . c’est  _unq  véritable  pétricole. 

Dans  ses  fossiles  tertiaires  de  la  Belgique,  M.  Nyst  inscrit  quatre  es- 
pèces de  Donaces;  deux  d'entre  elles,  Strialêlla  et  Fj'afjiîis  nous  sem- 
blent plutôt  des  Tellines  que  des  Donaces,  à en  juger  par  les  figures;  la 
Striatelîa  surtout  a l’impréssion  palléale  des  Tellines  ; quant  au  Fra- 
gilisa il  y avait  déjà  une  autre  espèce  nommée  de  la  même  manière  par 
Conrad. 

Après  avoir  subi  les  réformes  que  nous  venons  d’indiquer,  il  reste 
encore  vingt-deox  espèces  fossiles-  de  Donaces , on  renfermant  dans  ce 
nombre  celles  qui  ont  leur  analogue  vivant;  cea  espèces  se  distribuent 
de  la  manière  suivante  : 

Cfnq  dans  le  terrain  tertiaire  de  Paris,  les  unes  passant  des  sables  in- 
férieurs jusque  dans  les  calcaires  grossiers;  les  autres  propres  aux  grès 
moyens;  le  Donax  nîtid<i  existe  à la  fois  dans  le  bassin  de  Paris  et  dans 
eeUti  de  la  Belgique. 

Les  terrains  tertiaires  moyens  comptent  sept  espèces  ; trois  à Bor- 
deaux, une  en  Touraine  et  trois  des  terrains  du  midi  de  la  Russie,  et 
que  nous  empruntons  à M.  Eichwald.  L’une  des  espèces  do  Bordeaux 
était  confondue,  à titrer  de  variété,  avec  le  Donax  analinum  , elle  s’en 
distingue  aussi  bien  que  de  la  Venusla  de  Poli,  avec  laquelle  elle  a égale- 
ment des  rapports.  Dans  nos  tableaux  comparatifs,  qui  font  partie  de  la 
première  édition  de  la  Géologie  de  M.  Lyell,  nous  avons  cité  parmi  les 
espèces  fossiles  de  Bordeaux,  qui  ont  leur  analogue  vivant,  le  Donax 
clongata , qui  vit  au  Sénégal  ; de  nouvelles  recherches  nous  ont  fait 
apercevoir  quelques  légères  différences  entre  les  individus  vivants  et 
fossiles;  fangle  postérieur  est  plus  émoussé  dans  les  fossiles,  mais  le 
29* 


. 


TREl/JEMK  FAMILLE. 


45*2 

caractère  distinctif,  qui  nous  avait  échappé,  consiste  en  une  sinuosité 
paüéale,  plus  détachée  et  plus  oblique  dans  les  fossiles.  11  devient  donc 
nécessaire  d’instituer  l’espèce  fossile  sous  un  nom  particulier,  et  nous 
proïX)sons  celui  de  Dmtax  affinis. 

Quatre  espèces  se  répartissent  dans  le  Crag,  trois  eh  Angleterre,  une 
en  Belgique.  Parmi  ces  espèces  Tune  d’elles  a son  analogue  vivant , 
c'est  le  Donax  tnmcuhis. 

Nous  connaissons  quatre  espèces  en  Italie  et  en  Sicile;  une  seule,  le 
Donax  exilis,  Defr,,  n’a  pas  son  analogue  vivant;  les  trois  autres  sont: 

Donax  variegata^  Desli.  D.  complanata^  de  Montagu.  Vivante 
dans  toutes  les  mers  d’Europe  et  dans  toute  la  Méditerranée. 

Fossile  en  Sicile  et  en  Italie.  > 

Nous  avons  dû  rendre  k cette  espèce  son  premier  nom;  elle  a été 
nommée  TelUna  vcuiegala  parSchrœter  et  parGmelin,  longtemps  avant 
qu’elle  fût  connue  de  Montagu.  En  la  faisant  passer  dans  le  genre  auquel 
elle  appartient,  elle  doit  emporter  avec  elle  le  premier  nom  spécifique 
qu’elle  a reçti . 

Do7iax  seinislriata,  Poli.  Vivante  dans  la  Manche  et  dans  la 
Méditerranée. 

Fossile  en  Sicile.  ^ ‘ 

3"  Donax  venusta^  Poli.  Vivante  dans  la  Méditerranée. 

Fossile  on  Sicile. 

A ces  diverses  espèces  fossiles,  nous  devons  en  ajouter  deux  de 
VAmérique  septentrionale  mentionnées  par  Conrad  et  par  Morton,  mais 
que  nous  ne  connaissons  pas. 

En  réunissant,  comme  nous  l’avons  dit , les  Capses  do  Lamarck  aux 
Donaces,  on  compte  dans  le  genre  plus  de  soixante  espèces  vivantes; 
on  les  trouve  clans  tontes  les  mers  et  à presque  toutes  les  latitudes; 
leur  nombre  est  plus  considérable  dans  les  mers  chaudes.  Nous  n’en 
connaissons  plus  au-delà  du  cercle  polaire  arctique.  En  réunissant  aux 
espèces  vivantes  les  fossiles , on  compte  actuellement  quatre-vingt-cinq 
à quatre-vingt-dix  espèces  dans  le.  genre  ponax, 


LES  DONACIDES. 


453 


1,  Donace  bec-de-flûte.  .çco?Vï/în  , Linné.,  , . 

PI.  ]4.  f.  12.  13.  14.  15. 

/>,  testa  ovato-trxgonu , transvenà , tumidâ  posticè  oblique  truncatâ , 
acutè  angulatâ,  in  medio posticèque  transversim  sulcacâ;  stnis  temii’> 
bas  longitudinalibtis  decussatâ;  latere  antico  ohtuso  lamellis  distan- 
tibus  et  striis  longitudinalibus  clathrato  ; latere  postico  cordiformi , 
piano  'vel  excavato  ^ lœvi^  angiilo  suhmutico 'vel  squamulis  arnato 
circumdato ; lùnulà  magna  ovato-îanceolatâ;  intus  violaceâ  extàs 
albogriseâ;  apicibus  violaceis. 

LÎDné,  SysL  nat.  éd.  10.  p.  6S6.  n"*  io3. 

Linné,  Mus.  TJlric.  p.  493.  n°  .^8. 

Linné,  Syst.  nat.  éd.  12.  p.  ttad. 

Lister,  Concli.  pl.  377.  f.  aao. 

Peliver,  Gazoph.pl.  19.  f.  II. 

D'Argenv.  Concli.  pl.  ai.  f.  L. 

Grouov,  Zoopli.  facc,  3.  p.  3/17.  n°  t i3a, 

Fav,  Concli.  pl.  47.  f,  F.  2,  v 
Bora.  Mus.  pl.  4.  f.  2. 

Chemn.  Couch.  t.  6.  p.  246.  pl.  aS.  f.  242  à 247. 

Encycl.  Vers,  pl,  260,  f.  2. 

Barbnt,  Vermium.  pl.  4.  f.  ir. 

Sclirœt.  FinU  t.  X p.  90. 

Gmelin.  p.  326a.  z. 

De  Roissy,  Buff.  Moll.  t.  6,  p.  36 1.  a, 

Dilw.  Cat.  t.  I.  p.  148,  n"  I.  , 

Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  .546.  n®  i. 

Blainv,  Malac.  pl.  7 1 . f.  1 . 

Sow.  Généra  of  shells.  L i . 

Desh.  Eucy.  niéth.  vert.  t.  2.  p.  95.  n*  i. 

Wood,  Ind.  teslac,  pl.  6.  f.  i. 

Desh.  dans  Lamk.  An., s.  vert,  a*  éd.  t.  6 p.  239.  n»  i. 

Reeve.  Conch.  syst.  1.  i.  pl.  60.  f.  i. 

“ Anton.  Ver/.,  of  Conch.  p.  3,  n®  114. 

Küsler,  Mart.  et  Chemn.  2*  éd.  Donax.  p.  5.rpl.  i.  f.  i,  6. 

Hanley,  Descr.  cat.  p.  79. 

Catlow,  Conch.  nomencl.  p.  28. 

Habite  les  mers  de  Tliide. 

Très  répandue  dans  les  collections , cette  espèce  est  connue  de  tous 
les  conchyliologues  ; elle  est  un  des  meilleurs  exemples  que  l'on  puisse 


TUEÏZIÈME  FAMILLE. 


454 

donner  du  genre  ï>ohace,  à cause  de  la  qharnière  qui  en  offre  tous  les 
caractères  ; elle  est  beaucoup  plus  renflée  que  ses  congénères  ; ovale , 
trigono  j.son  côté  postérieur,  tronqué,  présente  une  surface  lisse , cor- 
diforme , aplàtio,  circonscrite  par  un  angle  aigu,  quelquefois  simple, 
le  plus  souvent  armé  d’écailles  obliques  plus  ou  moins  longues,  selon 
les  individus.  Linné  a fait  une  espèce  distincte  [ Donax  pubescens)  ^ouv 
la  variétéj  à écailles  longqes  ; les  autres  variétés  rentrent  dans  le  Donax 
scorlum;  le  coté  antérieur  est  le  plus  allongé,  il  est  obtus  ; le. postérieur 
so  termine  en  un  angle  inférieur  et  postérieur  aigu , saillant , rétréci 
vers  la  base  par  une  légère  inflexion.  Le  corselet  occupe  toute  la  surface 
plane  du  côté  postérieur  j une  lunule  très  longue  lancéolée,  toute  lisse, 
est  nettement  circonscrite  dans  tonte  . la  longueur  du  bord  dorsal  anté- 
rieur. Les  crochets  sont  grands,  opposés,  à peine  inclinés.  La  surface 
externe  peut  se  diviser  en  deux  régions,  l’une  antérieure  sur  laquelle 
s’élèvent  de  courtes  lamelles  transverses,  écartées,  aiguës  ; après  avoir 
parcouru  le  tiers  de  la  surface  externéj  ces  lamelles  se  changerit  subite- 
ment en  côtes  obtuses , entre  chacunes  desquelles  s’interposent  de  une 
jusqu’à  quatre  côtes  nouvelles,  de  sorte  que  la  seconde  région  qui 
occupe  le  reste  de  la  Surface  jusqu’à  l’angle  'postérieur  est  couverte  de 
petites  côtes  serrées  et  régulières.  Indépendamment  de  ces  côtes  et  de 
ces  lamelles  transverses,  toute  la  surface  montre  des  stries  longitudi- 
nales fines  et  rayonnantes  qui  descendent  des  crochets  vers  les  bords. 
Sur  la  valve  gauche,  la  charnière  présente  deux  dents  courtes  inégales  , 
divergentes , et  deux  grandes  dents  latérales  triangulaires , également 
distantes  ; sur  la  valve  droite , il  ÿ a une  seule  dent  cardinale  simple 
et  deux  fossettes  profondes  pour  recevoir  les  dents  latérales  de  la  valve 
opposée.  A l’intérieur,  celte  coquille  est  d’un  beau  violet , si  ce  n’est 
vers  les  bords  qui  restent  blancs;  à l’extérieur,  elle  est  d’un  gris 
violacé  vers  les  bords;  la  lunule  et  le  corselet  sont  violets  ; les  crochets 
sont  aussi  de  cette  couleur. 

2.  Donace  tronquée.  Donax  irunculus , Linné. 

PL  14.  f.  9.  10.  11. 

D.  Testa  transversim  oblongà^  longiiudinaliter  (Asoletè  striatâ,  nitidâ , 
jlavo-'oiolaced , mel  albo-radiatâ , intiis  'violaced  'vel  albâ  ifiolaceo- 
macuîatâ;  îatere  postico  brevi,  oblique  tnincato  ^ *l(eviy  simpîici ; 
marginibus  dentatis;  dentibus  anticè  hngioribiis;  dente  cardinali 
'vaîvulœ  dextrœ  ^ crasso  y brevi  y bipaitito.  ^ 

Tellina,  Lister,  An.  aügl.  pl.  5.  f.  3 5, 


LÈS  Dt)NÀaO)E8. 


455 


BoHonni^  rocr.  part;'  2.  f.  40. 

LisU»r,  Conch.  pl.  376.  f.  317. 

Cuallicri;  liid.  lest,  pl,  88.  P.  O.  ' ■ ■ 

Ginanni,  Op,  post.  pl.  20.  f;  141. 

Borla'ie,  Cornw.  p.  278.  pl,  aStf,  aS. 

Donax  truncuîus.  Liuué,  Faun.-  siiçê;  a*  éd.  p,  519.  ri®  a<4a. 
T. inné»  Syst.  nal.  éd,  10.  p.  682.  n®  85, 

Linné,  Mus.  ülric.  p.  4941  ri*  5i . 

Linné.  Sysl.  nal.  éd.  12,  p.  1127,  Exd.  plur,  synon. 

Millier,  Zool.  dan.  prodri  p,  246.  n®  2974. 

Cunens  'vittatus,  Dâ  Costa-,  Coneh.  brit.  p.  207.  pl,  14.  f.  3. 
Donax  truncnîus,  Rorn.  MUs.  p«  54.  pl.  4*  f*  3,  4, 

Gronov.  Zooph.  fasc.  3,  p.  267.  Ii35. 

CUemn.  Conch.  t.  6.  p.  359.  pl.  26.  f,  253,  254.  * 

Fav.  Conch.  pl.  49*  f.  E 2. 

Schrot.  £inl,  t.  3.  p.  94.  n°  4. 

Karst.  Mus.  I/esk.  t.  i;  p.  160. 

Olivi  Adriat.  p.  106, 

Pennant,  Brit,  zool.  t.  4.  pi.  198. 

Brug,  Ency.'pl.  262.  f.  i, 

Gmel.  3203.  n"  4. 

Poli,  Test.  Sicii,  t.  2.  p,  75.  pl,  19.  f.  12,  20, 
disses,  Trav.  of  Napl.  p.  483,  n°  128, 

Wood,  Lin.  Trans.  t.  6.  p,  145.  pl.  x6.  f.  ï3,  14.  * 

Donov.  Brit.  schells.  t.  i.  pl.  29.  f.  x.- 
Montagu,  XeSt*  brit.  p.  xo3.n®  z, 

Dillw.  Cat.  t.  X.  p.  x5o.  n°  5. 

Tartori.  CoDch,  die.  p,  4x.  n®  x. 

Laœk.  An.  s.  vert.  t.  5,  p.  S5i.  n®  24. 

Turtori.  Couch.  los.  brit.  p.  12$.  n®  x. 

Blainv.  Malac.  pl.  7t.  f.  2. 

Gerv,  Cat.  des  coq, delà  Manche,  p.  23.  n®  x. 

Sowerby^  Généra  of  shells.  Donax.  f,  3. 

Payraudeau,  Cat.  des  Moll,  de  Corse,  p.  45.  n®  78, 

Kissu,  Hi^t.  uat.  de  lEur.  mériod.  t,  4>  p* 

Crouch,  lil,  intr.  Lamk.  Conch.  p.  ii,  pl.  6.  f.  5. 

Wood,  ind,  Teatac.  pl,  6.  f.  5, 

Desh.  Ency.  méth.  vers.  t.  2.  p.  97.  u®  10. 

Coll,  des  Cb.  Cat.  des  test,  du  Finist.  p.  21.  n®  a. 

Desh.  Exp.  sc.  Je  Morée.  zool.  p.  93..  n®  35. 


436 


THEmElUE  FAMILLE. 


£>on,  anatinum.  Boucb.  Chant.  Cat,  des  Mol).  du  Bou).  p.  19.  n*  3t. 
Exclus,  plui'.  synon. 

Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  2*^  éd.  î.  6.  p.  «48.  n*  a4. 

Philippi,  Ënuin,  Moll.  SicÜ.  t.  x.  p.  36.  n*’  t. 

Scacchi.  Cat.  concb.  reg.  Neap.  p.  7. 

Maravigna,  Mém.  pour  l'iiist.  nat.  de  la  Sicile,  p.  74. 

Forbes,  MaUic,  montnsis,  p.  46. 

Donax  anatinum,  Hanlev»  Descr,  cat.  p.  83. 

Anton,  Verz.  der  Concb.  p,  4.  n*  118. 

Reeve,  Concb.  sysl.  t.  x.  p.  83.  pl.  60.  f.  3. 

Thompson,  Kep.  on  tbe  Fauna  of  Irel.  p.  261^  > 

Forbes,  Rép,  ou  OEga.  invcrt.  p,  t43.  ' 

Donax  anatinum,  Tborpe.  Brit.  mar.  couob.  p.  77, 

Macgillivray,  Moll,  auimi  of  Scot.  p.  a 14  et  275.  ^ 

Fleming.  Brit.  anim,  p.  433.  iio  47a, 

Lovèn.  ind.  Moll.  Scatid.  bab.  p.  42. 

Pbil,  £uum.  Moll.  Sicil.  t.  2.  p,  28.  n®  x. 

Yerani,  Cat.  drgl  aiiiin.  învcrl.  p.  t3. 

Woüd,  Ind.  test,  a'*  «up.  p.  ir.  f.  38. 

Fosstlis.  Scacchi,  Nolizie  iiil.  Concb.  fossil.  di  Gravioa.  p.  17.  n*  32. 

Pbil.  Kmim.  MoU.  Sicil.  t.  x.  p.  3q.  11*  x*;  t.  2.  p.  28.  n*  r. 

S.  Wood,  FufiS.  sbells  IVom  tbe.  Crag  Aim.  iiai.  bist.  u®  87.  p.  248.  n*  t. 

Habile  rOcéaii  d Europe  depuis  les  mers  du  Nord  jusque  dans  la  Médi* 
terranée;  elle  est  fossile  en  Italie , en  Sicile  et  dans  le  Crag  d'Angle» 
terre;  celle  dernière  station  géologique  annonce  le  moment  où  Teapèce 
apparut  pour  la  première  fois  à la  surface  de  la  terre. 

Il  serait  sans  utilité  de  reproduire  ici  la  description  d’une  espèce 
aussi  connue  que  le  Donax  truncnlus;  il  nous  suffira  d’appeler  l’atten- 
tion des  naturalistes  sur  les  nombreuses  variétés  qu’elle  présente  ; il 
faut  les  réunir  en  grand  nombre  pour  voir  comment  elles  se  nuancent  les 
unes  dans  les  autres  , et  forment  un  tout  dont  rien  ne  peut  être  détaché  ; 
quoique  dans  la  Méditerranée  on  trouve  les  variétés  qui  paraissent 
s'isoler  et  prendre  les  caractères  d’espèces.  Nous  devons  à M.  Rous- 
seau, aide-naluraliste  au  Muséum  , la  connaissance  d’un  fait  intéres- 
sant. Ce  naturaliste  a rapporté  de  la  mer  Noire  une  variété  identique  à 
celle  de  nos  côtes  de  la  Manche , et  fort  différente  de  toutes  celles  de  la 
Méditerranée. 

Le  Donax  trunculus  a été  souvent  cité  à l’élat  fossile , mais  à mesure 
que  I on  a pu  étudier  avec  toute  rattention  convenable  les  fossiles  en 
question,  on  a constaté  qu'ils  constituaient  d'autres  espèces. 


LES  DONilCIDES. 


457 


3.  Donace  transverse.  Donax  transversa  , Desh. 

PL  14.  f.  16.  17. 

Z).  Testa  ovato’oblongayanÿustâ^transversây  incequilaterali  y nitidày 
obsolète  longitndinaliter  striata;  lutere  postico  brevioroy  oblique 
truncatOy  mugulo  obtuso  circumseripto , striis  obîiquis . lamellosis 
ornato;  marginibus  tenue  et  projundè  denticulatîs. 

Donax  anatinum,  Yar.  Bast.foss.  de  Bord.  p.  83.  pT.  B.  f,  8. 

An  Donax  Burdigalensis.  Def.  Dict.  sc.  uat.  t.  x3.  p.  4^^^ 

Donax  transversa,  Desb.  Ency«  méth.  vèrs.  t.  3.  p.  xoo.  n*  xg. 

Id.  Desh.  dans  Laœk.  An.  s.  vert,  a*  éd.  t.  6.  p.  a5o.  n*  3i. 

Habite...  Fossile  dans  les'  terrains  tertiaires  moyens  de  Bordeaux  et 
de  Dax. 

M.  Bastérot,  dans  son  Mémoire  sur  les  fossiles  de  Bordeaux,  avait 
rapporté  celte  espèce  au  Donax  anatimm  de  Lamarck.  Elle  en  est  con- 
tamment  distincte  ; nous  ne  savons  si  notre  espèce  est  la  même  que 
le  Burdigalensis  de  M.  Defrance  : la  trop  courte  description  de  ce  natu- 
raliste ne  mentionne  pas  les  caractères  de  notre  coquille , et  notre  doute 
vient  de  ce  que  nous  ne  connaissons  jusqu’ici  qu’une  seule  espèce  de 
Donace  aux  environs  de  Bordeaux,  et  c'est  la  nôtre.  M.  Bronn  considère 
notre  Donax  transversa  comme  l'analogue  fossile  du  Donax  venusia  de 
Poli  y vivante  dans  la  Méditerranée.  Mais  un  examen  minutieux  nous  a 
donné  la  preuve  que  ces  coquilles  ont  des  caractères  spécifiques  qui  les 
distinguent  avec  facilité. 

Le  Donna;  transversa  est  une  petite  coquille  oblongue,  transverse  , 
très  inéquilatérale , dont  la  forme  se  rapproche  de  celle  du  Donax  ana- 
îinum;  ses  valves  , aplaties , sont  luisantes  en  dehors,  on  y remarque 
des  stries  longitudinales,  rayonnantes,  obsolètes  , presque  effacées.  Le 
côté  antérieur  est  très  allongé , il  constitue  les  deux  tiers  de  la  longueur 
totale.  Le  bord  dorsal  antérieur  est  peu  incliné  , on  y trouve  une  longue 
lunule  étroite  lancéolée.  Le  côté  postérieur  est  court,  obliquement 
tronqué;  un  angle  obtus  sépare  un  corselet  qui  occupe  toute  la  hauteur 
du  côté  postérieur;  des  plis  nombreux  obliques,  étroits,  légèrement 
onduleux  , s’élèvent  sur  toute  la  surface  du  corselet , ce  ne  sont  pas  des 
sillons  comme  dans  le  Dunao;  venusia,  et  jamais  ces  plis  ne  dépassent 
l’angle  postérieur  pour  s’étendre  sur  la  surface  de  la  coquille  comme 
cela  arrive  très  souvent  dans  le  Venusia.  Les  bords  sont  crénelés  et  les 
dentelures  sont  plus  serrées,  plus  nombreuses,  plus  profondes,  que 
dans  l’espèce  vivante  ; enfin  , l’impression  palléale  est  très  différente 


TRETiïÈME  FAMlllE. 


458 

dans  les  deux  espèces;  dans  la  nôtre,  elle  laisse  en  avant  un  espace 
très  large , elle  descend  obliquement  et  non  parallèlement  au  bord  ; la 
sinuosité  postérieure  est  large , et  elle  s’avance  jusqu’à  la  moitié  de  la 
surface  interne  des  valves.  Üne^charnière  très  étroite  porte  une  seule 
grosse  dent  simple  et  obtuse  sur  la  valve  droite , deux  petites  et  diver- 
gentes sur  la  gauche  ; la  dent  latérale  postérieure  est  assez  grosse , 
courte  et  très  rapprochée  de  la  charnière;  la  dent  latérale  antérieure  est 
allongée  et  fort  écartée. 

Celte  petite  espèce  est  commune  à Sancats  et  à Léognan  ; elle  a 20 
millimètres  de  longueur  et  9 de  largeur. 

4.  Donace  du  Brésil.  Donax  brasiliensis  ^ Blainv. 

PL  15.  f.  1.  2.  3. 

J D»  Tèstâôvato^obîongâ,  transversal  utriirque  attennntn,  subœ^uUattrâf 

sub  èpidermide  ftisceseente  griseo^nfiolàceâ  , obsoletè  transversim  et 

J.  longitudinaliter  striata , postice  obliqué  truncatâ,  ad  latus  posticum 

\ 

sinuato-depressâ  intùj  albo^violacente, 
l?o>2<ijr.Brüg.  Ency,  pl.  a6r.  f, 

Üoaax  brasHUnsis»  Blainv.  Malac.  p,  549.  pl.  71.  f.  lo. 

Capsa.  Sow.  Généra  ofshells.  L i. 

Capsa  brasihénsis,  Lamk.  An«  s.  vert.  t.  5.  p.  553.  n"  2. 

Crôuch,  lolr.of  lâmk.  CoDch.  p.  XX.  ]^i,  6.  f.  6.  ^ ' 

Désh.  Ehcy.  méth.  vers.  t.  2.  p.  19a.  1. 

Besb.  dans  Lamk.  An.  s.  vert,  a*  éd.  t.  6.  p.  â55.  n'^  a. 

ReéVe,  Concli.  syst  l.  x.  pl.  61,  f.  i. 

Uanley,  Descr.  càt.  t.  x«  p.  36. 

Catlèw,  Conch.  nomencl.  p.  a9. 

Wood,  ind.Testac.  a*  sup.  pl.  i3.  f,  5a. 

Nous  rapportons  aux  Donaces  cette  espèce  qui , pour  Lamarck , était 
le  type  de  son  genre  Capsa , proposé  en  1 84  8.  Elle  offre  tous  les  carac- 
tères des  Donaces  I moins  les  dents  latérales  de  la  charnière;  mais  nous 
savons  déjà  le  peu  d’importance  que  doit  avoir  ce  caractère.  Au  reste  , 
dans  les  quatre  espèces  de  ce  groupe  que  nous  connaissons  , nous  re- 
marquons surtout  sur  la  valve  droite  des  rudiments  des  dents  laté- 
rales. La  Donaeo  du  Brésil  est  une  coquille  ovale,  trigone,  snbéquila- 
térale,  ayant  le  côté  antérieur  un  peu  plus  allongé  que  le  postérieur. 
Le  bord  ventral  et  le  bord  dorsal  antérieur  s’inclinent  Tuii  vers  l’autre 
et  se  fèhcontreht  pour  former  ün  côté  antérieur  étroit  et  obtus,  te  côté 


LES  LITHOPHAGES. 


4^9 

postérieur  est  obliquement  tronqué,  l’angle  qui  le  sépare  est  très  adouci 
comme  dans  lo  Donax  trunculus  ; le  corselet  reste  lisse , il  porte  à son 
sommet  un  ligament  plus  épais  et  un  peu  plus  long  que  dans  les  autres 
espèces  de  Donaces.  La  surface  e;c-térieure  est  lisse  ou  substriée  ; elle 
est, couverte  d’un  épiderme  persistant,  d’un  brun  glauque;  lorsqu’elle 
en  est,  déppuillée,  elle  est  d’un  gris  violâtre  à l’intérieur  ; les  valves  sont 
d un  violet  pâle,  plus  foncé  chez  les  jeunes  individus.  La  charnière 
présente  une  seule  dent  bifide  sur  la  valve  droite  et  deux  inégales  diver- 
gentes sur  la  valve  gauche  ; la  dent  antérieure,  quoique  très  aplatie , 
est  cependant  fendue  au  sommet. 

Cette  coquille,  commune  dans  les  mers  du  Brésil,  a 50  millimètres 
de  longueur  et  34  de  hauteur. 


QUATORZIÈME  FAMILLE. 

lies  liithophaKes.  Lame. 

CARACTÈRES  DE  LA  FAMILLE.  — Animal  ovale , transvme; 
les  lobes  du  manteau  offrant  xme  petite  ouverture  antérieure  et 
inférieure,  pour  le  passage  d’un  pied  très  petit,  quelquefois 
byssifère  ; les  deux  siphons  postérieurs  réunis  dans  une  partie 
de  leur  longueur. 

Coquille  transverse,  inéquilatéralè  , ' souvent  irrégtilièrë , 
bâillante  postérieurement 5 presque  toujours  perforante,,  mais 
sans  tube,  ni  pièces  accessoires  à la  charnière. 

GENRES.  — Saxicœve , Pétricole  ^ Vénérupe, 

La  famille  des  Lithophages  de  Lamarck  a besoin  d’être  réformée. 
Depuis  que  nous  avons  pu  étudier  vivants  les  animaux  des  genres  qui 
la  constituent , nous  y avons  reconnu  deux  types  bien  distincts  : l’uu , 
qui  se  rapproche  des  Gastrochènes , l’nutre , qui  a de  l’analogie  avec  ce 
groupe  des  Vénus  de  Lamarck,  pour  lequel  M.  Sowerby  a établi  le 
genre  Pullastra,  Peut-être  faudra-t-il  rapporter  à un  troisième  groupe 
quelques  espèces  confondues  soit  avec  les  Pétricoles,  soit  avec  les 
Vénérupes. 

Lorsque  nous  avons  commencé  cet  ouvrage,  nous  ne  connaissions 


QUATORZIÈME  FAMILLE. 


ifCu 

les  animaux  d’aucun  des  genres  de  celle  famille.  Millier,  dans  le  Fama 
suecica^  a bien  donné  la  figuré  de  l’animal  de  l’une  des  espèces  de 
Sàxicave  de  Lamarck , sous  le  nom  de  MytUuB  p/m/àdt.s  ( Mxjii  byssifera  , 
Fabricius):  mais  on  pouvait  se  demander  si  cet  animal  doit,  constituer 
un  genre  particulier,  ainsi  que  Cuvier  l’a  proposé  dans  le  Règne  animal, 
ou  si  toutes  les  autres  Saxicaves  qui  lui  ressemblent  sont  habitées  par 
des  animaux  portant  un  byssus  et  offrant  des  caractères  analogues.  On 
ne  pouvait  répondre  à cette  question  qu  après  s'ètro  éclairé  par  l’obser- 
vation des  animaux  d’autres  espèces.  Nous  avons  pu  examiner  vivante 
une  petite  espèce  de  la  Méditerranée , et  tous  ses  caractères  zoologiques 
sont  conformes  à ceux  du  .\fyliîus  photadis  de  Millier.  Toutes  les  espèces 
de  Saxicaves,  dont  les  coquilles  ont  des  caractères  semblables  aux  deux 
que  nous  venons  de  mentionner,  sont  pour  nous  les  véritables  Saxicaves 
de  Lamarck  ou  Byssomies  de  Cuvier. 

Dans  l’ignorance  où  nous  étions  des  véritables  rapports  du  genre 
Saxicave,  nous  l'avons  laissé  dans  la  famille  des  Lithophages,  nOus 
conformant  aussi  à l’opinion  de  Lamarck.  Aujourd’hui  nous  rejetons 
celte  classiûcation . et  nous  croyons  que  le  genre  Saxicave  doit  se  placer 
dans  le  voisinage  des  Gastrochènes  et  devenirle  type  d’une  petite  famille 
particulière.  II  ne  suffit  pas , pour  bien  placer  un  Mollusque  dan.s  une 
classification  naturelle , d’en  voir  la  surface , d’apercevoir  les  caractères 
extérieurs;  il  faut  encore  observer  les  organes  cachés  dans  la  cavité  du 
manteau  : les  branchies,  les  palpes  labiales,  le  pied,  la  masse  abdominale. 
L-observation  de  ces  parties  et  leur  comparaison  avec  celles  des  Clava- 
gelles  et  des  Gastrochènes , nous  font  apercevoir  les  rapports  des  Saxi- 
caves avec  ces  genres.  Dans  la  classification,  linéaire , les  Saxicaves 
devront  prendre  place  à la  suite  des  Gastrochènes,  mais  dans  une  clas- 
sification à éléments  disséminés  ou  à embranchements , telle  que  nous 
la  comprenons,  le  groupe  des  Saxicaves  formera  un  embranchement 
latéral  partant  des  Glavagelles  et  des  Gastrochènes , et  n ayant  plus  que 
des  rapports  très  éloignés  avec  les  Pétricoles  et  les  Vénérupes. 

ün  assez  grand  nombre  de  zoologistes  ont  'partagé  l’opinion  de 
Cuvier,  en  repoussant  de  la  méthode  la  famille  des  Lithophages  de 
Lamarck.  M.  de  Blainville,  dans  son  Traité  de  malacologie , réunit  en 
un  seul  genre  les  Pétricoles  et  les  Vénérupes  ; il  les  place  dans  la  famille 
des  Conchacées , à la  suite  des  Vénus  : les  Saxicaves , les  Byssomies , 
les  Hyatelles  et  les  Rhomboïdes , qui  pourraient  ne  constituer  qu'un 
seul  genre , sont  rangés  entré  les  Glycimères  et  les  Gastrochènes,  dans 
la  famille  des  Pyloridés.  Dans  ses  familles  naturelles , Latreille  a suivi 
à peu  près  l’exemple  de  Cuvier  ; cependant  les  genres  Byssomie  et 


LKS  LITHOPHAGES,  ^6l 

Saxicave  ne  sont  pas  mentionnés,  ils  sont  remplacés  par  le  genre 
Hyatelle  qui  est  leur  équivalent, 

A Tarticle  PuUastra  de  son  Généra  of  shells,  M.  Sowerby  fait  voir  les 
rapports  intimes  qui  lient  certaines  Vénérupes  au  type  des  Vénus. 
S’appuyant  de  ces  observations  très  justes,  mais  non  applicables  à 
toutes  les  espèces  de  Vénérupes,  M.  Sowerby  conclut  à la  suppression 
du  genre  et  à sa  fusion  parmi  les  PuUastra.  M.  Reeve,  admettant  cette 
réforme  sans  autre  examen , conserve  la  famille  des  Lithophages  dans 
sa  Conchyliologie  systématique , réduite  aux  deux  genres  Saxicave  et 
Pélricole;  mais  où  M.  Reeve  place-t-il  le  Fenerupis  Irus , par  exemple, 
et  d’autres  espèces  analogues? 

Si  l’ouvrage  de  M.  d’Orbigny  était  moins  important,  nous  ne  nous 
attacherions  pas , comme  nous  le  faisons , à réfuter  les  opinions  de  son 
auteur  ; mais  destiné  à répandre  à la  fois  le  goût  de  la  paléontologie  et 
celui  des  saines  doctrines  de  la  conchyliologie,  nous  croyons  de  notre 
devoir,  dans  l’intérêt  même  de  la  science  et  de  ceux  qui  la  pratiquent, 
de  rectifier  les  erreurs  que  nous  apercevons  dans  la  classification  adoptée 
dans  la  Paléontologie  française.  Nous  l’avons  déjà  dit  ailleurs,  la  clas- 
sification n’est  pas  la  partie  la  plus  importante  d’un  ouvrage  essen- 
tiellement destiné,  comme  celui  dont  nous  parlons,  à rassembler  un 
nombre  plus  on  moins  considérable  de  descriptions  d'espèces.  Pourvu 
que  les  espèces  soient  dans  les  genres  qu'indiquent  leurs  caractères , il 
importe  peu  que  les  genres  soient  dans  un  ordre  ou  dans  un  autre  ; 
nous  concevrions  que , dans  l’embarras  du  choix  d’une  méthode  , un 
auteur  préférât  Tordre  alphabétique,  car  n’ayant  pas  d’espèces  appar- 
tenant à tous  les  genres  connus,  il  en  résulte  des  lacunes  nombreuses 
qui  rompent  les  rapports  naturels.  Pour  les  Acéphalés,  par  exemple, 
M.  rl'Orbigny  n’a  d'espèces  que  dans  une  soixantaine  de  genres:  la 
métiiode  serait  donc  très  incomplète;  mais  comme  Mt  d’Orbigny  attache 
une  grande  importance  à suivre  un  onlre  méthodique  créé  par  lui,  il  en 
a comblé  les  lacunes  par  la  citation  des  genres  et  des  familles  dans  les- 
quels il  ne  reconnaît  aucune  espèce  fossile  du  terrain  crétacé.  C'est 
pour  cette  raison  que,  dans  la  paléontologie,  les  genres  Saxicave  et 
Pétricûle  sont  mentionnés  , quoique  M.  d’Orbigny  ne  connût  aucune 
espèce  du  terrain  crétaeé  qui  pût  venir  s’y  ranger. 

Nous  venons  d'exposer  TOpinion  de  M.  Reeve  ; celle  do  M.  d’Orbigny 
s'en  rapproche,  mais  elle  en  aggrave  les  défauts.  En  effet,  il  rejette  la 
famille  des  Lithophages,  et  admet  celle  des  Saxicavîdœ  de  Mi  Gray, 
mais  en  lui  imposant  d’autres  caractères , en  y associant  d’autres  genres 
et  en  là  plaçant  dans  d'autres  rapports;  on  peut  dire  que  M.  d’Orbîgny 


QUATORZIEME  FAMILLE. 


462 

a emprunté  le  nom  et  non  la  chose  : cela  seul  est  déjà  suffisant  pour 
jeter  de  la  confusion  dans  la  science.  Cette  famille  des  Saxicaves  de 
M.  d'Orbigny  contient  quatre  genres  : Gaslrochèjpe,  Saxicave,  Pétrîcole 
et  Galeomma.  Nous  allons  voir,  par  l'appréciation  rigoureuse  des  carac- 
tères , dans-  quels  rapports  il  convient  de  naettre  les  Saxicaves.  Us  se 
rapprochent  des  Glavagelles  plus  que  des  Gastrochènes , et  ne  peuvent 
entrer  dans  les  familles  qui  contiennent  ces  genres.  Quant  aux  Pélri- 
coles,  leurs  branchies  courtes  et  leurs  siphons  les  mettent  dans  le  voi- 
sinage immédiat  des  Vénérupes.  Ces  deux  genres  sont  enchaînés  l'un  à 
l’autre  et  inséparables  désormais  ; aussi  ^ si  nous  avions  à choisir,  nous 
donnerions  la  préférence  à l’opinion  de  M.  Gray,  qui  entraîne  les  deux 
genres  Pétricole  et  Vénérupe  dans  la  famille  des  Yénus.  M.  d’Orbigny 
ne  nous  semble  pas  plus  heureux  dans  le  choix  de  la  place  qu'il  assigne 
à la  famille  d&s  Saxicavides  : il  la  range  entre  celle  des  Solécuries  et 
celle  des  Tcllines.  L’auteur  prouve  par  là-  qu'il  n'a  point  connu  les 
animaux  des  genres  dont  il  est  question , et  ce  que  nous  avons  .dit  pré- 
cédemment justifie  notre  assertion.  Nous  ^'examinerons  pas  ici  les 
autres  genres  associés  par  *M.  d’Orbigny  dans  la  famille  des  Saxicaves-. 
Nous  connaissons  déjà  les  Gastrochènes  ; r\Gus  allons  étudier  les  genres 
Saxicave  , Pétricole  et  Vénérupe;  mais  nous  avons  de  la  peine  à com- 
prendre pourquoi  le  genre  Galeomma  se  trouve  dans  la  même  famille; 
il  faut  que  M.  d’Orbigny  ait  oublié  les  renseignements  précieux  publiés 
sur  l'animal  de  ce  genre  par  M.  Mitre  dans  les  Annales  des  sciences 
nfitureiles.  Les  documents  dont  nous  parlons  prouvent  que  le  Galeomma 
appartient  à la  famille  des  Lucines. 

M.  Jouas  a proposé  en  1844  un  genre  nouveau,  qu’il  nomme  Choris- 
todon,  et  qu’il  voudrait  introduire  dans  la  famille  des  Lilbophages. 
Nous  ne  connaissons  pas  ce  genre  en  nature,  mats  d’après  la  description 
et  laûguro  qu'on  donne  M.  Jonas,  nous  pensons  qu’il  doit  rentrer  dans 
les  Pélricoles  deLamarck;  le  seul  caractère  qui  tendrait  à distinguer  le 
nouveau  genre  serait  emprunté  à l’existence  d'un  osselet  caduque  te- 
nant la  place  de  l'une  des  dents  cardinales;  il  faudrait  savoir  si  cet 
osselet  est  constaat  ou  s'il  est  le  résultat  d’une  érosion  maladive  du  liga- 
ment et  do  la  charnière  à la  suite  de  laquelle  une  ou  deux  dents  cardi- 
nales se  détachent  dans  les  individus  qui  en  sont  affectés.  Est-ce  à un 
accident  de  cette  sorte  qu’est  due  la  séparation  de  l une  des  dents  car- 
dinales de  la  coquille  perforante  observée  par  M.  Jonas? 

. M.  Gray  a été  plus  conséquent  aux  principes  posés  par  Cuvier,  lors- 
que, dans  sa  dernière  classification  (Proc.  zool.  soc.,  1847),  il  intro- 
duit à la  fois  dans. la  famille  des  Vénus  les  genres  Véiiérupè  et  Pétricole, 


LES  LITHOPHAGES. 


463 

considérant , non  sans  quelque  raison , cette  propriété  de  perforer, 
comme  d’une  faible  valeur,  comme  un  accident  qui  se  reproduit  dans 
d’autres  familles;  tandis  que  Lamarck,  au  contraire  j attachait. à cette 
faculté  perforatrice  une  grande  importance.  Quant  aux  Saxicaves , 
M.  Gray  en  fait, une  famille  sous  le  nom  de  SavCtçawdœ.  Apparemment 
guidé  par  des  faits  qui  nous  sont  inconnus,  l’auteur  éloigne  les  Saxi- 
caves. des  ^strochènes,  et  les  place  à la  fm  du  second  ordre  des  Ciado- 
podes.,  à la  suite  de  deux  groupes  qui  représenteraient,  assez  bien  les. 
anciennes  Erycines  de  Lamarck,  c’est-à-dire  contenant  le  genre  Pu- 
roiiia,  Kellia , Montacuta,  Lepton , etc.  Assurément,  dans  ce  nouvel 
arrangement  de  M.  Gray,  les  Saxicaves  ne  son,t  pas  à leur  place. 

D’après  ce  que  nous  venons  d’exposer,,  plusieurs  opinions  sont  en 
présence  au  sujet  de  la  famille  des  Lithopliages  de  Lamarck.  Si  quel- 
ques conçhyliologistes  la  conservent  dans  son  entier,  quelques  autres 
l’aaéantiss.ent  complètement;  il. en  est  d’autres,  onûn  , qui  ont  compris 
qu'oUe  devait  être  réformée;  mais  les  uns  ont  voulu  ou  distraire  le 
genre  Saxicave , tandis  que  d’autres  ont  voulu  en  éloigner  les  Vénérupes. 
Entre  toutes  ces  opinions  , quelle  est  celle  que  doit  choisir  le  zoologiste , 
qui  connaît  tous  les  faits  nouveaux , acquis  à la  science  depuis  la  publi- 
cation des  travaux  de  Lamarck,  de  Cuvier  et  des  autres  naturakstes 
que  nous  avons  cités?  Il  est  évident,  comme  nous  l avons  déjà. indiqué 
sommairement  tout  à l’heure,  que  le  genre  Saxicave  est  celui  qui 
s’éloigne  le  plus  des  Pélricolcs  et  des  Vénérupes  ; mais,  une  fois  ce  genre 
écarté  de  la  famille  des  Lithophages,  cette  famille  doit-elle  subsister? 
Telle  est  la  question  que  noua  avons  à examiner. 

Pour  répondre  à la  question  que  nous,  venons  de  poser,  il  faut  donc 
comparer  les  animaux  et  les  coquilles  des  trois  genres.  .Nous  dirons 
d’abord  : les  Pétricoles  et  les  Vénérupes  se  ressemblent  par  les  traits 
principauxde  leurorganisation  ; ainsi  danslesunset  les  autres  le  manteau 
est  médiocrement  ouvert  en  avant  cl  en  bas  pour  le  passage  d’un  pied 
étroit,  allongé.,  très  pointu  au  sommet.  Dans  les  Vénus,  le  manteau  est 
plus  largement  ouvert,  le  pied  est  beaucoup  plus  grand  , plus  aplati  et 
plus  large;  dans  les  Pétricoles,  le  manteau  se  prolonge  en  arrière  en 
deux  siphons  complètement  disjoints  ; dans  les  Vénérupes,  ces  organes 
sont  réunis  dans  une  partie  do  leur  longueur.  Mais  chez  ces  animaux  le 
siphon  branchial  est  garni  sur  son  bord  d’une  rangée  de  tentacules 
branchus,  inégaux  , qui  s’inclinent  au-devant  de  l’ouverture  et  forment 
un  véritable  tamis , à travers  les  mailles  duquel  le  liquide  ambiant  est 
obligé  de  passer  avant  d’entrer  dans.  la. cavité  du  manteau.  Quant  au 
siphon  anal , U est  différent;,  il  est  simplement  Lenlaculé  chez  les  Pétri- 


QUATORZIEME  FAMILLE. 


m 

coies , tandis  que  chez  les  Vénérupes , outre  ces  tentacules  , il  existe  un 
pourtour  membraneux  , en  forme  de  coupole,  percé  d'un  trou  étroit  à 
son  sommet.  Si  nous  pénétrons  dans  l'intérieur  dumanteàu,  nous  trou- 
vons à la  bouche , aux  palpes  et  aux  branchies,  des  ressemblances  très 
considérables,  et  si  nous  comparons  ces  parties  à celles  des  Vénus, 
nous  leur  trouvons  aussi  des  ressemblances  incoQtestables.  Cependant 
chez  les  Vénus , les  branchies  sont  plus  allongées , elles  sc  prolongent 
davantage  en  arrière  de  la  masse  abdominale;  mais  si  nous  examinons 
Touverture  intérieure  des  siphons,  nous  observerons  au  siphon  bran- 
chial des  Pétricoles  une  valvule  circulaire,  membraneuse,  sphinctéroïde^ 
percée  d’ünè  petite  ouverture  centrale;  cette  valvule  n’exisle  pas  chez 
les  Vénus  et  chez  les  Vénérupes.  Si  nous  estimons  actuellement  les 
divers  degrés  de  rapprochement  qui  existent  entre  les  genres  que  nous 
examinons;  nous  verrons  qu’ils  sont  plus  nombreux  entre  les  Pétricoles 
et  les  Vénérupes  qu’avec  les  Vénus,  et  nous  sommes  conduit  par  là 
à conserver  la  famille  des  Lilhophages  et  à la  rapprocher  de  celle  des 
Vénus. 

Les  Coquilles  viennent  confirmer  les  indications  que  nous  fournissent 
les  animaux;  elles  sont  généralement  peu  régulières;  on  voit  qu’elles 
ont  été  gênées  pour  la  plupart  par  les  circonstances  de  leur  habitation. 
Leur  charnière  porte  deux  ou  trois  dents  petites , rapprochées , presque 
parallèles  , quelquefois  divergentes  dans  certains  Vénérupes;  les  impres- 
sions musculaires  sont  grandes,  assez  rapprochées , circulaires  ou  ova- 
laires; les  siphons  étant  très  grands,  en  pro|)ortion  du  volume  de 
l’animal,  ils  sont  munis  de  muscles  rétracteurs  puissants,  larges  et 
épais,  dont  la  base  embrasse  toute  la  largeur  des  deux  siphons.  Ce 
muscle  laisse  sur  la  surface  interne  de  la  coquille  une  large  sinuosité 
très  ouverte  en  arrière  et  qui  ne  se  montre  jamais  sous  celte  forme  dans 
ahcnrie  Vénus.  Chez  les  Vénérupes , cette  impression  palléale  se  rap- 
proche beaucoup  de  celle  dés  Pétricoles , et  c’est  ainsi  que  nous  recon- 
naissons les  rapports  qui  existent  entre  les  deux  genres  que  nous  main- 
tenons dans  la  famille  dès  Lilhophages. 

Jusqu'ici  nous  n’avons  pas  parlé  de  l’un  des  caractères  qui , aux  yeux 
dé  Lamarck,  jouit  d’une  grande  valeur  parmi  ceux  de  sa  famille  des 
Lilhophages.  Tous  ces  animaux  possèdent  les  moyens  de  percer  la 
pierre  et  de  s‘y  préparer  un  abri.  Comme  l’ont  compris  un  assez  grand 
nombre  de  zoologistes , cette  propriété  de  perforer  les  pierres  n’est  pas 
inhérente  aux  seuls  genres  de  cette  famille  ; nous  l’avons  fait  remarquer 
dans  plusieurs  de  celles  qui  précèdent , nous  allons  la  retrouver  bientôt 
dans  celle  des  Cardites , dans  celle  des  Moules , et  même  dans  celle 


LES  L1TH0PH4GES. 


46:") 

des  Lucines,  Il  faut  donc,  pour  en  tenir  compte  ici,  être  guidé  par  d’au- 
tres caractères , et  c’est  justement  ce  qui  a lieu  pour  la  famille  des 
Litliophages, 

Depuis  que  l’on  observe  avec  plus  d’attention  les  mœurs  des  Mollus- 
ques , on  s’est  étonné  de  la  facilité  avec  laquelle  des  eoquilles  minces  et 
fragiles  pénètrent  dans  les  pierres  les  plus  dures.  Quelques  observa- 
teurs ont  prétendu  que  cette  perforation  s’opérait  par  un  moyen  méca- 
nique; les  autres,  au  contraire,  ont  affirmé  que  Tanimal  agissait  au 
moyen  d’une  sécrétion  spéciale;  les  premiers  observateurs  appuyaient 
leur  opinion  sur  un  fait  rapporté  par  Olivi,  d'après  lequel  ces  Mollus- 
ques auraient  pu  s’introduire  dans  des  laves  ou  d’autres  matières  volca- 
niques ; mais  ce  fait  annoncé  n’a  pas  été  confirmé  par  des  observations 
ultérieures  ; il  est  possible  de  trouver  des  coquilles  introduites  dans  les 
porosités  de.  certains  produits  volcaniques  , sans  que  cependant  ces  co- 
quilles yeussent  creusé  leur  place.  Il  existe  certains  petits  Mollusques 
acéphalés  appartenant  aux  genres  Erucîne  ou  Peronia , qui  aiment  à 
s’introduire,  soit  dans  les  fentes  des  rochers,  soit  dans  les  moindres 
vacuoles  qu’elles  rencontrent , et  il  est  bien  certain  que  ces  Mollusques 
ne  jouissent  en  aucune  façon  de  la  propriété  de  creuser  la  pierre.  Des 
jeunes  individus  s'introduisant  dahs  les  cavités  d’une  roche  poreuse , 
s’y  développant  et  n’en.  pouvant  plus  sortir,  ont  probablement  donné 
lieu  à l’observation  d'Olivi. 

11  y a quelques  années , M.  Caillaud  a fait  connaître  un  morceau 
d’une  roche  primitive,  dans  lequel  étaient  creusés  des  trous  analogues  à 
ceux  que  produisent  les  Gastrochènes  et  les  Saxicaves.  Mais  cet  échan- 
tillon, recueilli  assez  loin  de  la  mer,  a pu  être  creusé  par  d'autres  agents  : 
pour  décider  la  question  , il  aurait  fallu  trouver  les  coquilles  en  place. 
Dans  tous  les  cas , comment  comprendre  que  les  coquilles  des  Saxicaves 
et  des  Gastrochènes , qui  ont  si  peu  de  solidité , pourront  agir  efficace- 
ment sur  des  matières  aussi  dures  que  le  quartz  et  le  feldspath?  A l’ex- 
ception de  ces  deux  observations  et  de  quelques  autres , qui  ne  sont  pas 
mieux  constatées  , il  est  reconnu  aujourd’hui  que  tous  les  Mollusques 
perforateurs  s’enfoncent  dans  des  matières  calcaires  plus  ou  moins  dures. 
Quelques  uns  choisissent  des  argiles  ou  des  bois , mais  ces  argiles  con- 
tiennent habituellement  une  certaine  quantité  de  matière  calcaire , et  il 
suffit  de  sa  dissolution  pour  entraîner  la  désagrégation  de  l’argile 
solide,  désagrégation  favorisée  du  reste  par  le  liquide  au  niilieu 
duquel  l’animal  a besoin  d’ôtfe  plongé.  On  a cité  aussi  des  Mollusques 
perforateurs  dans  des  grès  fort  durs , et  qui,  par  leur  dureté  même, 
semblaient  à l’abri  de  l’attaque  de  ces  animaux;  mais  en  examinant 

3o* 


T.  1.  PARTIE. 


466  QÜÀTORZlÈblB  FAMILLE . 

les  roches  dont  il  est  question , on  reconnaît  que  leurs  éléments  sont 
solidement  agrégés  au  moyen  d’une  matière  calcaire  ; ces  grès  font 
effervescence  avec  les  Acides , et  on  comprend  que  le  Mollusque , en 
dissolvant  le  calcaire , désagrégé  les  éléments  de  la  roche  et  parvient 
ainsi  à s’y  creuser  une  demeure. 

Les  Mollusques  perforateurs  se  montrent  partout  dans  des  roches 
calcaires,  et  ce  fait , d'une  grande  importance , tend  déjà  à prouver  que 
ces  animaux  n’agissent  pas  mécaniquement , mais  possèdent  des  agents 
de  dissolulion,  qui,  quoique  non  constatés  par  la  chimie,  ne  peuvent 
être  contestés  par  ceux  des  naturalistes  qui  ont  observé  ces  Mollusques 
pendant  leur  vie.  Une  autre  remarque  générale  doit  être  faite  à ce  sujet. 
Si  les  Mollusques  perforateurs  creusent  les  pierres  à l'aide  d’un  moyen 
mécanique,  la  nature  ne  leur  en  a pas  donné  d'autre  que  leur  coquil  le, 
il  faudrait  donc  que  les  coquilles  de  ces  animaux  fussent  spécialement 
plus  dures,  plus  épaisses,  plus  résistantes  , car  un  corps  destiné  à en 
user  un  autre  doit  être  le  plus  dur;  il  faut  l'acier  pour  limer  le  fer,  il 
faut  un  calcaire  très  dur  pour  en  entamer  un  plus  tendre.  Ëh  bien  , les 
coquilles  perforantes  sont  généralement  minces  et  fragiles  sufQsam- 
ment  protégées  par  les  corps  solides  qu'elles  habitent,  elles  n'ont  pas 
cette  épaisseur,  cette  solidité  nécessaire  à la  déCense  et  à la  conservation 
des  coquilles  libres.  Elles  sont  si  peu  faites  pour  creuser  un  trou  par  le 
frottement,  qu’à  peine  si  elles  pourraient  égratigner,  en  se  brisant,  la  sur- 
face d’un  calcaire  tendre.  A plus  forte  raison  elles  ne  pourraient  atta- 
quer ces  calcaires  durs  et  compactes,  qui,  dans  un  grand  nombre  de 
points  de  la  Méditerranée,  par  exemple,  servent  d'abri  à la  Moule 
lithophage,  aux  Pétricoles  et  aux  Vénérupes.  il  serait  impossible  à 
l’homme,  le  plus  adroit  et  le  plus  exercé , de  creuser  un  trou  dans  un 
calcaire  tendre  à l’aide  des  valves  d’une  coquille  perforante;  il  les  verra 
se  briser  dans  ses  mains , et  dès  |e  premier  contact  se  trouveront  usées 
et  détruites  ces  lines  aspérités , qui  souvent  couvrent  la  surface  de  ces 
coquilles  et  que  l'on  voit  conservées  jusque  dans  les  individus  les  plus 
vieux. 

Le  trou  creusé  par  un  Mollusque , ayant  à peu  près  la  forme  de  la 
coquille  et  présentant  presque  toujours  une  section  iransverse  circu- 
laire, on  s’est  imaginé  que  cet  animai  agrandissait  son  trou  par  un 
frottement  rendu  plus  efficace  au  moyen  d’un  mouvement  rptatoire  pen- 
dant lequel  il  se  pousse  contre  les  q)arois  du  trou  qu’il  veut  agrandir  ; 
mais  on  n’avait  pas  fait  attention  à un  foit  très  important , que  |e  pre- 
mier nous  avons  signalé.  Certaines  Pétricoles  sont  immobiles  dans  four 
trou , ou  ne  peuyenj;  y exercer  que  de  très  faibles  mouvements , car  la 


LES  LITflOPHAGES. 


46*7 

coquille  ovalaire , dans  sa  section  transverse , est  contenue  dans  une 
loge  également  ovalaire  et,  bien  plus,  unç  crête  saillante  s’engage  entre 
les  crochets  de  la  coquille . de  sorte  que  le  trou  creusé  par  le  Mollusque 
semble  l’empreinte  un  peu  élargie  de  sa  coquille , et  celle  crête  engagée 
entre  les  crochets  est  un  obstacle  invincible  pour  des  mouvements  de 
rotation  ou  un  déplacement  quelconque.  Il  est  donc  certain , d’après  les 
faits  que  nous  venons  de  rapporter,  que  les  Mollusques  perforateurs  ne 
peuvent  agir  avec  leurs  coquilles.  Celte  coquille  serait  promptemen  t 
usée  et  détruite,  et  elle  est  d’ailleurs  beaucoup  trop  mince  pour  sup- 
porter un  effort  comparable  à celui  qui  serait  nécessaire  pour  creuser  le 
trou  dans  lequel  elle  est  renfermée.  On  a particulièrement  prétendu  que 
les  Tarets  s'enfoncent  dans  le  jjois  à l’aide  de  leurs  valves  taillées  en 
biseau , et  au  moyen  desquelles  ils  enlèvent  constamment  des  parcelles 
de  la  matière  ligneuse  dont  ils  se  nourrissent.  D’abord , nous  pourrions 
contester  que  les  Tarots  se  nourrissent  de  bois.  11  y a des  Tarets  qui 
vivent  enfoncés  dans  le  sable;  ceux-là  n’ont  donc  pas  besoin  de  la  sub- 
stance ligneuse  que  d’autres  perforent;  mais  il  y a plus,  b Taret,  qui 
a d'abord  vécu  dans  le  bois,  continue  quelquefois  à vivre  dans  le  sable  , 
lorsque  la  matière  ligneuse  qui  l'enveloppe  a été  détruite  par  la  putré- 
faction. Ces  observations  prouvent  invinciblement  que  les  Tarets  peu- 
vent très  bien  vivre  hors  du  bois , et  que  celte  matière  leur  sert  d’abri 
et  non  de  nourriture.  Les  valves  de  ces  animaux  , agissant  sur  une  ma- 
tière beaucoup  plus  tendre  que  la  pierre,  seraient  cependant  des  instru- 
ments très  insuffisants  si  elles  devaient  fonctionner  seules  et  sans  le 
secours  préalable  d’un  ramollissepient  obtenu  par  les  sécrétions  de 
l’animal.  Si  le  Taret  ne  peut  creuser  le  bois  avec  ses  valves  seules,  lui , 
qui  paraît  avoir  pn  instrument  spécialement  disposé  pour  cela,  à plus  forte 
raison  doit-on  penser  que  des  valves  minces , comme  celles  des  Pétri- 
coles , des  Vénérupes  et  des  Gastrochènes , sont  des  moyens  insuffisants 
pour  attaquer  la  pierre.  11  faut  donc  recourir,  pour  rendre  compte  du 
phénomène,  aune  autre  explication,  et  assurément  celle  qui  se  présente 
le  plus  naturellement  à l’esprit  consiste  a croire  que  la  nature  a accordé 
aux  animaux  perforateurs  le  moyen  d’accomplir  leurs  fonctions , et  ce 
moyen  est  incontestablement  une  sécrétion  à l'aide  de  laquelle  ils  dis- 
solvent la  matière  calcaire  dans  laquelle  ils  se  logent.  Nous  en  avons 
la  preuve  par  la  découverte  que  nous  avons  faite,  chez  tous  les  animaux 
perforateurs  dont  nous  avons  fait  jusqu’ici  l'anatomie,  d'un  organe  spé- 
cial de  sécrétion  répandu  dans  le  manteau,  organe  qui  n’existe  pas  chez 
ceux  des  Mollusques  qui  n’ont  pas  la  môme  propriété.  Ce  fait  semble 
trancher  définitivement  la  question , cependant  il  en  est  d’autres  , qui 
3o* 


468  QUATORZIÈME  FAMILLE. 

sont  d’une  grande  valeur  et  ({ne  nous  ne  devons  pas  négliger.  Lorsque 
l’animal  perforateur  vient  de  naître  et  que  sa  coquille  est  à peine  for- 
mée, il  jouit  immédiatement  de  la  propriété  qui  le  distingue,  el'assu- 
rément  sa  coquille  est  de  beaucoup  trop  faible  pour  attaquer  le  corps 
le  moins  dur  ; cette  coquille , en  effet , est  presque  à Tëtat  gélatineux , 
et  cependant  lesGastrocbènes,  au  moment  où  ils  sortent  de  l’œuf,  peu- 
vent déjà  se  creuser  une  galerie  de  plusieurs  millimètres  de  profon- 
deur, comme  Font  constaté  les  précieuses  observations  de  M.  Cailland. 
Ï1  est  hors  de  doute  par  là  que  la  perforation  s’opère  au  moyen  d’une 
dissolution  et  non  par  un  moyen  mécanique. 

Dans  les  Clavagelles,  les  Arrosoirs,  les  Gastrochènes , l’accroisse- 
ment de  l’animal,  de  sa  coquille  et  même  de  son  tube,  ne  peuvent  se  com- 
prendre sans  admettre  la  dissolution  momentanée  d’une  partie  plus  ou 
moins  considérable  de  ce  tube.  Nous  n’avons  peut-être  pas  assez  insisté 
sur  cepoint,  lorsq  ue,  dans  le  commencement  de  cet  ouvrage,  nous  avons 
traité  des  divers  genres  que  nous  venons  de  mentionner.  Nous  nous 
proposions  de  reprendre  d’une  manière  plus  générale  cette  question  si 
intéressante  pour  la  physiologie  des  Mollusques , relative  à la  faculté 
dont  ils  jouissent  de  perforer  les  pierres  et  de  dissoudre  certaines  parties 
testacées  qui  leur  ont  été  utiles  à des  époques  antérieures  de  leur  exis- 
tence. Plus  tard  nous  parlerons  des  Murex , des  Pourpres  et  de  beau- 
coup d’autres  genres  de  Mollusques  céphalés , chez  lesquels  l’animal  a 
la  propriété  dé  faire  disparaître  les  tubercules  et  toutes  les  àutres  parties 
saillantes  qu’il  avait  sécrétés  quelque  temps  auparavant.  Comme  il  s’agit 
ici  de  prouver  que  la  perforation  par  les  Môliusques  acéphalés  a lieu,  non 
par  un  moyen  mécanique,  mais  à l’aide  d’une  sécrétion,  nous  croyons- 
utile  d'insister  sur  l'accroissement  d’un  genre  très  sérieux  , celui  des 
Clavagelles , accroissement  qu’il  serait  impossible^de  comprendre , sans 
admettre  Ja  dissolution  totale  ou  partielle  du  tube  calcaire , qui  enve- 
loppe l’animal  et  l’enferme  aussi  exactement  que  le  trou  pierreux  dans 
lequel  est  logée  une  Pétricole  ou  une  Vénérupe. 

Des  deux  valves  d'une  Clavagelle , l’une , plus  petite  , est  incrustée 
dans  la  paroi  du  tube,  et  on  en  aperçoit  le  contour  très  facilement  sur 

tube  même;  l’autre,  beaucoup  plus  grande,  est  libre  dans  l’inté- 
rieur du  tube , elle  seule  peut  se  mouvoir  vers  sa  congénère  immobile. 
Mais  sut  cette  valve  immobile  on  aperçoit  des  stries  d’accroissement, 
ef  dans  les  vieux  individus  cette  valve  incrustée  peut  avoir  jusqu^à  1 5 
ou  20  millimètres  de  longueur,  et  l’on  comprend  très  bien  que  l'animal 
n'avait  pas  celte  grandeur  en  venant  au  monde.  Cette  valve  a donc  pris 
un  accroissement  régulier  comme  la  valve  libre  ; seulement  cet  accrois- 


LES  LITHOPHAGES.  4^9 

sement  a été  moins  rapide , et  cette  différence  s’explique  en  ce  que 
chez  l’une  raccroissement  n’est  jamais  interrompu,  tandis  que  chez 
l’autre  il  se  fait  périodiquement , pendant  les  instants  où  l'animal, 
se  trouvant  gêné  dans  un  tube  trop  étroit,  dissout  l’extrémité  antérieure 
de  ce  tube,  dégage  ainsi  la  valve  habituellement  incrustée  et  Jui  permet 
de  s’accroître.  Mais  l’accroissement  cesse  aussitôt  que  le  tube  est  recon- 
struit, et  pondant  tout  le  temps  qu’il  existe , l’accroissement  de  celte 
valve  est  suspendu , tandis  que  celui  de  la  valve  libre  se  continue. 
D’après  ces  faits,  il  est  pour  nous  indubitable  que  l'animal  d’une 
Clavagelle  a la  propriété  de  dissoudre  une  partie  plus  ou  moins  consi- 
dérable de  son  tube  et  de  l’approprier  au  nouvel  accroissement  qu’il  a 
pris.  Il  serait  possible  que  le  manteau  de  ces  animaux  jouisse  de  la  pro- 
priété de  former  un  tube,  pour  ainsi  dire  d’une  seule  pièce  et  dans. un 
moment  très  court;  ce  serait  peut-être  le  meilleur  moyen  d’expliquer 
l'agglutination  des  grains  de  sable  ou  d’autres  corps  sur  le  tube  de  cer- 
tains Arrosoirs  et  de  quelques  Clavagelles.  S'il  est  vrai  que  les  Arro- 
soirs, les  Clavagelles  et  les  Gastrochènes  ne  peuvent  s’accroître  sans 
dissoudre  leur  tube , on  est  forcé  d’admettre  chez  ces  animaux  une 
sécrétion  propre  à opérer  la  dissolution  dont  il  s’agit.  Rien  n’empêche 
dès  lors  , par  une  analogie  des  mieux  fondées,  d’admettre  aussi  que  les 
Sax.icaves,  les  Pétricoles  et  les  Vénérupes  perforent  les  pierres  calcaires 
par  les  mêmes  moyens  que  les  autres  genres  dissolvent  leur  tube. 

Une  personne  étrangère  à l’observation  des  animaux  Mollusques  pour- 
rait dire  que  sans  doute  on  peut  admettre  l’action  d’un  acide  plus  ou 
moins  concentré  sur  une  rôche  calcaire , lorsque  l’on  agit  dans  l’air  ; mais 
elle  ne  comprend  guère  comment  peut  s’exercer  l'action  d’un  acide  dans 
l’eau  et  dans  une  quantité  d'eau  aussi  considérable  que  celle  de  la  mer, 
et  qui  est  sans  cesse  renouvelée  dans  les  trous  habités  par  les  Mollus- 
ques lilhophages.  Si  l^acide  sécrété  par  l’animal  est  versé  dans  Teau  qui 
remplit  son  tube,  celte  eau  acidulée  attaquera  les  parois  d'une  manière 
uniforme , mais  elle  attaquera  en  môme  temps  la  coquille , et  comme 
cette  coquille  est  généralement  très  mince  . elle  se  trouverait  détruite 
longtemps  avant  que  l’animal  fût  arrivé  à son  développement;  il  faut 
donc  que  la  liqueur  acide,  sécrétée  soit  mise  on  contact  avec  la  roche 
par  l’organe  môme  qui  la  sécrète , et  que  cet  organe  s’applique  avec 
une  rigoureuse  exactitude  sur  la  surface  qu’il  doit  attaquer.  Car  s’il 
laissait  entre  lui  et  la  pierre  une  couche  d'eau  même  mince l’acide 
délayé  n’aurait  plus  qu’une  très  faible  action  et  pourrait  également 
corroder  la  coquille. 

Les  Mollusques  lilhophages  ne  présentent  que  deux  organes  propres 


47  O QUATORZIÈME  FAMILLE . 

à opérer  la  dissolution  de  la  matière  calcaire;  ce  né  peut  être  que 
le  pied  ou  le  manteau.  Le  pied,  organe  dè  locomotion,  ne  nous  a jamais 
présenté  aucune  trace  d’un  organe  sécréteur  spécial  ; il  est , d’ailleurs , 
excessivement  petit,  et  il  ne  paraît  guère  susceptible  de  s’allonger 
dans  toutes  les  parties  de  la  cavité  habitée  par  l'animal.  II  n’en  est 
pas  de  même  du  manteau;  aussi  chez  les  Clavagelles,  chez  les  Arro- 
soirs, il  prend  un  développement  considérable;  il  est  épais,  fibreux, 
et  chez  les  Gastrochènes  , nous  y avons  découvert  un  organe  spécial , et 
destiné , sans  aucun  doute , à la  sécrétion  de  la  liqueur  acide.  Chez  les 
Saxicaves  et  les  Pétricoles  lé  manteau  contient  aussi  le  même  organe; 
et  lorsque  ranimai  est  vivant,  cette  portion  du  manteau  est  renversée 
en  dehors  de  la  coquille , et  peut  se  mettre  directement  en  contact 
avec  les  parois  de  la  cavité  pierreuse.  Nous  parlerons  dé  cet  organe  en 
traitant  des  divers  genres  de  la  famille  des  Lilhophages. 

Les  animaux  lithophages  ont  un  grand  intérêt  pour  la  géoTogie  ; ils 
laissent  des  traces  indestructibles  de  leur  existence , et  leur  présence 
sur  des  espaces  plus  ou  moins  étendus  annonce  à la  fois  un  rivage 
et  un  temps  d’arrêt  plus  ou  moins  prolongé  dans  la  succession  des 
couches;  souvent  on  ne  peut  constater  les  Mollusques  lithophages 
que  par  les  trous  qu’ils  ont  laissés  dans  les  roches  calcaires.  Si  les  co- 
quilles sont  encore  dans  la  logé  creusée  par  lanimal , elles  sont  enve- 
loppées par  la  matière  pierreuse  durcie , et  souvent  il  est  difficile  de 
reconnaître  h quel  genre  elles  apparliennenl ; mais  pour  le  géologue, 
les  perforations  sont  des  indices  suffisants  pour  le  mettre  sur  la  trace  de 
phénomènes  intéressants.  C’est  ainsi  qu'en  Algérie , les  coteaux , quel- 
quefois assez  élevés  qui  bordent  la  mer,  portent  sur  leurs  flancs  plu  - 
sieurs zones  horizontales,  ou  diversement  inclinées,  de  nombreuses 
perforations  d’animaux  lithophages;  ces  zones, ‘étagées  entre  le  sommet 
des  montagnes  et  leur  pied  plongeant  encore  dans  la  mer,  démontrent 
de  la  manière  la  plus  évidente  que  la  côte  maritime  a été  soulevée  à 
plusieurs  reprises  d’une  manière  assez  brusque  et  en  laissant  un  long 
intervalle  de  repos  entre  chaque  soulèvement.  Pendant  ces  phénomènes 
d’une  excessive  lenteur,  des  terrains  modernes,  quelquefois  d’une 
étendue  assez  considérable , ont  été  émergés , et  le  bas  des  escarpe- 
ments continue  à être  percé  par  les  mômes  Mollusques  perforateurs. 
Cet  exemple , que  nous  venons  de  rapporter,  doit  suffire  pour  donner 
la  mesure  de  l’intérêt  que  le  géofogue  doit  attacher  à Tobservation  des 
vestiges  que  laissent  après  eux  les  Mollusques  lithophages. 


LKS  LiTHOPBAGËS. 


471 


GENRE  QUARANTE-DEUXIÈME. 

, SAXZCAVE.  Saxkava.  (Fleuriau  de  Bellevue.) 

PI.  12.  fig.  la,  4* 

CARACTÈBES  GENERIQUES.  — Animal  allongé,  cylindroïde , 
ou  subrhomboïdal  ; les  lobes  du  manteau  joints  dans  toute  leur 
circonférence,  si  ce  n*est  en  avant  et  en  bas,  où  est  percée  une 
petite  ouverture  pour  le  passage  du  pied  ; deux  siphons  réunis 
dans  presque  toute  la  longueur,  séparés  à leur  sommet,  ayant 
le  bord  de  leur  ouverture  garni  d’une  rangée  de  tentacules 
simples  et  cylindracés.  Pied  très  petit,  allongé,  venniforme, 
fendu  inférieurement  et  souvent  byssifère  ; bouche  grande  ; 
palpes  labiales  petites , non  soudées.  Branchies  étroites , allon- 
gées, se  prolongeant  très  loin  dans  le  siphon  branchial  ; l’ex- 
terne la  plus  large  et  la  plus  étroite. 

Coquille  subrégulière,  quelquefois  inéquivalve,  transverse, 
bâillante , couverte  d’un  épiderme  souvent  écailleux.  Charnière 
linéaire  simple , calleuse  , sans  dents  ou  ayant  une  seule  dent 
rudimentaire  sur  chaque  valve.  Ligament  externe,  allongé, 
épais.  Impression  palléale  sinueuse  postériéusement  ; sinus 
horizontal , étroit  et  profond. 

synonymie  générique.  — Pholds , Lister.  — Mya^  Linné, 
Muller,  Eabricius,  Schrœter.  Gmelin,  Brocchi,  Wood,  Turton. 
— Solen,  Linné,  Pennant,  Cheranitz,  Schrœter,  Gmelin, 
Spengler,  Montagu,  Maton  et  Racket,  Wood,  Dillwyn , 
Lamarck^  Turton.  — Mylilus,  Linné,  Da  Costa,  Schrœter, 
Gmelin,  Müller,  Donovan,  Montagu,  Maton  et  Racket, 
Dillwyn , Turton,  Gerville.  — Cardita,  Bruguière,  — Donax  , 
Poli.  — Hiatellay  Daudin,  Roissy,  Cuvier.  Lamarck, 
Schweigger,  Bowdich,  Férussac,  Turton,  Blainville , Da 
Costa,  Menke,  Rang,  Bouchard  - Chantereaux , Maravigna, 
JefFreys , Fleming , Müller,  Sowerby.  — Irus , Oken.  — Bys^ 


4y'2  QUATORZIEME  FAMILLE. 

somya,  Cuvier,  Bowdich,  Blainville,  Payraudeau,  Grateloup, 
Maravigna,  Lea,  Rang,  Menke.  — Glycrjniens,  Schuma- 
cher.— Didonta,  Schumacher,  — Biapholixis,  Leach,  Ke- 
ferstein.  — Agina,  Turton.  — Rhomboïdes^  Blainville, 
Menke,  Rang,  Scacchi.  — Saxicma^  Fleuriau  de  Bellevue 
(1802),  Roissy,  Lamarck,  Schweigger,  Bowdich,  Férussac, 
Turton,  SoAverby,  Blainville,  Collard-des-Cherres , Raiig, 
Philippi,  Forbes,  Anton,  Gould,  etc. 

OBSERVATIONS.  — Un  coup  d’œil,  jeté  sur  la  synonymie  générique  qui 
précède,  introduira  le  lecteur  à Thistoire  du  genre  dont  nous  allons  nous 
occuper.  Les  erreurs  des  grands  hommes  sont  les  plus  fâcheuses  en  ce 
qu’celles  trouvent  de  nombreux  imitateurs  et  de  non  moins  nombreux  et 
inhabiles  réparateurs.  Linné,  n’ayant  pas  reconnu  l’identité  des  carac- 
tères de  trois  coquilles  appartenant  peut-être  à une  seule  espèce , les 
distribue  dans  Irois  genres  différents  : Mya^  Solen,  Mytihts,  qui  sont 
loin  de  se  ressembler.  Bientôt  le  maître  est  imité  par  ceux  des  natura- 
listes qui  écrivirent  sur  la  Conchylidogie.  Un  sage  et  judicieux  obser- 
vateur, Fabricius,  les  avait  cependant  prévenus  de  l’erreur  de  Linné, 
en  prouvant  que  doux  des  espèces  n’en  constituent  réellement  qu’une 
seule.  Malgré  cet  avertissement  salutaire,  les  auteurs  qui  se  succédè- 
rent conservèrent  et  propagèrent  la  mauvaise  distribution  des  trois 
espèces  de  Linné.  Les  observations  de  Fabricius  ne  furent  cependant 
pas  tout  à fait  inutiles  à quelques  naturalistes  du  dernier  siècle  ; mais  à 
mesure  que  l’on  étudia  davantage  les  coquilles  en  question , on  reconnut 
enfin  qu’elles  ne  pouvaient  rester  dans  aucun  des  trois  genres  de  Linné. 

Bruguière  qui,  dans  les  planches  de  l’Encyclopédie,  créa  un  genre 
Cardite,  pojur  rendre  plus  naturel  celui  des  Cames,  crut  apercevoir  des 
rapports  entre  ces  Cardites  et  les  trois  coquilles  de  Linné , et  en  consé- 
quence il  les  plaça  dans  le  même  genre.  Cette  tentative  imparfaite,  en 
faisant  ressortir  la  justesse  des  observations  de  Fabricius,  avait  aussi 
l’avantage  de  débarrasser  les  genres  de  Linné  d’espèces  parasites. 

Quelques  années  plus  tard , Poli , probablement  embarrassé  comme 
Bruguière  de  placer  convenablement  une  espèce  de  la  Méditerranée  , la 
range,  avec  maladresse,  parmi  les  Donaces.  Nous  disons  avec  mala- 
dresse , parce  que  Poli  figure  et  décrit  l’animal , et  qu’ayant  également 
décrit  et  figuré  celui  des  véritables  Donaces , il  était  plus  que  personne 
en  état  d’éviter  une  telle  confusion , quand  même  les  coquilles  elles-' 
mêmes  n’eussent  pas  suffi. 


LKS  LITHOPHAGES. 


473 

Un  observateur  judiçieux , mais  qui  malheureusement  pour  la  science 
n’a  pas  continué  longtemps  à la  servir,  M.  Flouriau  de  Bellevue , dans 
un  très  bon  travail  sur  lés  animaux  lithophages  des  environs  de  La 
Rochelle,  a proposé,  en  1802,  plusieurs  genres  parmi  lesquels  se 
distingue  celui  des  Saxicaves,  destiné  à rassembler  les  trois  coquilles 
dp  Linné , et  quelques  autres  que  ne  connut  point  Tillustre  auteur  du 
Systema  naturœ. 

Pendant  la  même  année , Bosc  faisait  connaître  un  genre  Hiatelle  de 
Daudin , dans  l’édition  du  Buffon  de  Déterville.  Ce  genre  a été  fondé 
pour  une  petite  coquille  figurée  par  Ghemnitz , et  rapprochée  par  quel- 
ques conchyliologues  des  Cardiles  et  des  Cypricardes  ; mais  examinée 
de  nouveau , elle  se  distinguo  à peine  du  Solen  minutus  de  Linné , et  elle 
rentre  par  conséquent  dans  le  genre  Saxicavo.  Bientôt  après  M . de  Roissy 
adopta  les  deux  genres  nouveaux,  Lamarck  n’en  accepta  d’abord  qu’un 
seul  dans  sa  Philosophie  zoologique;  en  -1 812,  dans  l’extrait  du  cours,  il 
introduisit  le  second  dans  sa  méthode,  les- lliatelles  dans  la  famille  des 
Cardiacées  entre  les  Cardites  et  les  Isocardes  , les  Saxicaves  loin  de  là 
dans  la  famille  des  Lithophages  , instituée  pour  la  première  fois.  La- 
marck n’a  rien  changé  depuis  à l’arrangement  de  ces  genres  lorsqu’il 
publia  son  dernier  ouvrage. 

Cuvier,  n’ayant  pas  reconnu  les  caractères  du  genre  Saxicave  de 
M.  Fleuriau  de  Bellevue , no  le  mentionne  pas  dans  la  première  édition 
du  JRègne  animal , mais  i!  le  remplace  par  un  genre  équivalent  qu’il 
nomme  Byssomya,  Ce  genre , tout  à fait  inutile,  devra  donc  disparaître 
de  la  méthode;  nous  appuierons  cette  opinion  de  toutes  les  observations 
convenables  pour  la  faire  admettre.  Cuvier  accepte  aussi  le  genre 
Hiatelle , mais  au  lieu  de  le  rejeter  loin  de  ses  rapports  naturels , il  le 
met  à côté  des  Byssomyes , et  en  cela  jl  améliore  sa  méthode. 

Au  moment  oü  Cuvier  publiait  la  première  édition  du  Règne  animal , 
les  ouvrages  d’Oken  n’étaient  pas  encore  connus  des  zoologistes  français  , 
sans  cela  ils  auraient  cité  un  genre  ïrus  proposé  par  le  savant  Allemand, 
non  pour  le  Donaæ  irus  de  Linné , comme  le  nom  générique  pourrait  le 
faire  supposer,  mais  pour  le  Mytilus  pholadis  de  Miilier.  Ce  genre , pas 
plus  que  ceux  de  Daudin  et  de  Cuvier,  ne  peut  être  accepté.  Il  faudra 
rejeter  également  les  deux  genres  Glycymeris  et  Didonla , établis  par 
Schumacher  pour  les  mêmes  coquilles  quo  celles  qui  sont  rangées  dans 
les  Saxicaves  et  les  Hiatelles.  Nous  reprocherons  surtout  à Schumacher 
Tusage  du  nom  de  Glycymeris,  déjà  employé  plusieurs  fois  avant  lui 
pour  des  coquilles  très  différentes.  En  suivant  de  tels  exemples,  la 
nomenclature  serait  bientôt  jetée  dans  une  perturbation  profonde  d’où  il 


474  QUATORZIÈME  FAMILLE. 

serait  difficile  de  la  sortir.  Nous  passons  sous  silence  dix  à douze  natu- 
ralistes qui  ont  adopté  un  ou  plusieurs  des  genres  que  nous  venons  de 
citer,  ou  qui , fidèles  à la  méthode  de  Linné , ont  continué  à distribuer 
les  coquilles  qui  nous  occupent  dans  les  Myes,  les  Solens  et  les  Moules. 

II  semble  que  six  genres  pour  un  seul  eii  penheltant  le  choix  aux 
conchÿliologues  , étaient  plus  que  suffisants  ; cependant  M-  de  Blainville, 
croyant  trouver  dans  le  Donax  rhomboidea  de  Poli  un  animal  différent 
des  Saxicaves , des  Byssomyes  et  des  Hiatelles , en  fit  un  genre  sous 
le  nom  de  Rhomboïdes  ^ tout  en  acceptant  dans  son  Traité  de  Malaco- 
logie les  trois  autres  genres  que  noua  venons  do  rappeler.  Il  est  vrai 
que  M.  de  Blainville  range  ces  quatre  genres,  les  uns  à la  suite  des 
autres , dans  la  famille  des  Pyloridés , entre  les  Glycymères  de  Lamarck 
et  les  Gastrochènes. 

M.  Gray  nous  apprend  , qu’en  1819  » dans  son  travail  resté  manu- 
scrit, M.  Leach  institua,  ebus  le  nom  deBiaphoHus,  un  genre  qui 
correspond  exactement  à celui  des  Hiatelles  de  Daudin. 

Dans  celte  histoire  du  genre  Saxicave , le  lecteur  aura  sans  doute 
distingué  deux  phases  bien  distinctes  : pondant  la  première,  sous  l’in- 
spiration de  Linné,  les  naturalistes  cherchent  à conserver  dans  des 
genres  anciens  des  coquilles  qui  ne  leur  appartiennent  pas,  évitant 
avec  une  réserve , dont  il  faut  les  louer,  la  création -de  genres  inutiles 
ou  peu  nécessaires  à leurs  yeux  ; la  seconde  période  commence  par 
rétablissement  d'un  genre  utile,  nécessaire,  celui  des  Saxicaves,  mais 
bientôt  commence  à se  montrer  cet  esprit  novateur  des  naturalistes  de 
ce  siècle  qui  croient  tout  faire  pour  la  science  en  inventant  des  noms 
nouveaux  pour  des  objets  fort  connus  et  déjà  noiûmés  , oubliant,  hélas! 
qu’un  fait  bien  observé , bien  constaté,  est  plus  utile  que  tout  ce  néolo- 
gisme qui  infecte  la  nomenclature  scientifique.  Pour  ne  pas  sortir  de 
notre  sujet , que  gagne  la  science  à ce  qu’un  seul  genre  porte  neuf  noms 
différents?  Elle  y perd  plutôt,  car  elle  repousse  , au  lieu  de  l’allirer, 
l’homme  qui  l’aimerait  si  elle  se  présentait  à lui  grande  et  simple  comme 
devrait  être  toute  science  bien  faite.  Pourquoi  la  science,  au  sortir  des 
mains  de  Linné , a-t-elle  trouvé  tant  d’adeptes  et  tant  d’admirateurs 
enthousiastes?  Parce  qu’elle  était  ce  que  nous  voudrions  qu’elle  fût 
restée  : grande  et  simple.  Assurément  elle  aurait  pu  conserver  le 
cachet  du  génie  de  Linné , tout  en  acceptant  les  nombreu^s  améliora- 
tions que  le  temps  et  l’observation  ont  rendues  nécessaires  ; mais  cette 
progression  lente  et  ascendante  dans  les  connaissances  humaines  ne 
s’opère  pas  sans  oscillations , sans  action  et  réaction  , le  pendule  agité 
ne  reprend  que  lentement  ses  oscillations  nniforines  sOus  là  foroe  tou- 


tes  LlTHOPHAGES. 


475 

jours  égale  qui  le  pousse  ; Thistoire  signale  ces  passagères  perturbations 
qui  finissent  par  s’amoindrir  et  s'eflacer  dans  l’ensemblè  des  progrès 
de  la  science.  Quand  on  aura  bien  ressenti  les  inconvénients  de  l-abùs 
que  nous  déplorons,  il  viendra  on  temps  ofi  l'on  donnera  plus  à Tobser- 
vation  et  moins  aux  néologismes  des  nouvelles  nomenclatures.  Cette 
digression  nous  éloigne  de  notre  sujet , auquel  elle  se  rattache  cepen- 
dant , car  le  genre  qui  nous  occupe  est  un  exemple  de  plus  à ajouter 
à tous  ceux  qui  ont  déjà  passé  sous  nos  yeux,  de  cette  fâcheuse  richesse 
de  la  synonymie  générique. 

Nous  n’avons  presque  nen  à ajouter  pour  terminer  riusloii^e  du  genre 
Saxicave  adopté  depuis  Lamarck,  par  le  plus 'grand  nombre  des  con- 
chyïioIogUes;  d'autres  préférèrent  l’un  ôu  quelques  uns  des  genres  que 
nous  avons  rélégués  dans  la  synonymie  ; il  est  peu  important  de  dire  ici 
que  tel  auteur  a choisi  tel  nom  , plutôt  que  tel  autre , surtout  lorsque  le 
choix  n’est  pas  possible , si  l’on  veut  s’astreindre  à la  loi  équitable  de  la 
priorité.  Pour  ceux-là  même  qui  voudraient  admettre  deux  genres,  il 
faut  opter  pour  les  Saxicaves  et  les  Hiatelles  , puisque  tous  les  autres 
sont  d’une  date  moins  ancienne. 

Nous  Connaissons  l’animal  de  plusieurs  espèces  des  Saxicaves.  Celui 
figuré  par  Poli , et  que  nous  avons  revu  sur  les  côtes  de  l’Algérie  : celui 
de  Müller,  sur  lequel  Fabricius  a donné  de  précieux  renseignements , 
et,  enfin  , celui  de  nos  côtes , observé  par  M.  Fleuriau  de  Bellevue,  et 
qui  9 servi  de  type  au  genre  Saxicave  luî-môme.  Quelques  légères  diffé- 
rences se  manifestent  entre  ces  animaux , mais  nous  verrons  qu’elles 
sont  sans  importance  et  qu’elles  ne  sont  pas  de  valeur  à exiger  la  for- 
mation de  genres  distincts. 

Le  manteau  est  fermé  dans  toute  sa  circonférence , si  ce  n’est  en 
avant  et  en  bas,  où  il  présente  une  ouverture  très  petite,  ovalaire, 
destinée  au  passage  du  pied.  Nous  a^ns  fait  remarquer  dans  les  Gas- 
trochènes  une  large  surface  du  manteau,  occupant  tout  l’espace  qui 
correspond  au  bâillement  de  la  coquille;  un  angle  aigu  circonscrit  cette 
surface.  Il  en  existe  une  à peu  près  semblable  chez  les  Saxicaves , seu- 
lement elle  est  beaucoup  plus  étroite , et  elle  est  bordée  do  chaque  côté 
par  les  bords  saillants  du  manteau  qui  viennent  afflenrer  les  bords  de  la 
coquille  et  se  cacher  sous  le  large  épiderme  qui  la  déborde  de  toutes 
parts.  Cette  commissure  dû  manteau  s’étend  d'avant  en  arrière  dans 
toute  la  longueur  du  bord  ventral.  Dans  ceux  des  Mollusques,  qui  ne 
j ouissent  pas  de  la  propriété  de  creuser  la  pierre , la  partie  mince  du 
manteau  est  transparente , peu  épaisse  , et  ne  contient  entre  ses  deux 
dupiicatures  que  le  système  vasculaire  et  l’organe  sécréteur  de  la  co- 


47^  QUATORZIÈME  FAMILLE. 

quille.  Dans  les  SRxicaves,  cette  portion  du  manteau  est  au  contraire 
épaisse , et  en  cela  elle  ressemble  à ce  que  nous  avons  vu  chez  les  Gas- 
trochènes.  Un  organe  spécial,  grenu ^ envahit  l’intervalle  que  laissent 
les  deux  membranes  du  manteau  et  vient  gagner  la  circonférence  en 
s’interposant  entre  les  faisceaux  fibreux  du  muscle  orbiculaire.  Cet  or- 
gane , creusé  dans  sa  propre  substance  des  canaux  irréguliers  ^ est 
certainement  destiné  à la  sécrétion  d’un  liquide,  propre  à dissoudre 
les  pierres  calcaires.  Ce  liquide,  répandu  par  les  bords  dp  manteau, 
est  mis  en  contact  avec  la  substance  qu’il  doit  altérer,  à l’aide  du  man- 
teau lui-même,  susceptible  d'une  grande  extension. 

Le  manteau  se  prolonge  en  arrière  en  deux  gros  siphons  qui  sont  réunis 
entre  eux  dans  la  plus  grande  partie  de  leur  longueur  ; ainsi  que  dans 
les  Myes  et  les  Lutraires,  ces  organes  sont  protégés  par -un  épiderme 
qui  les  revêt  dans  toute  leur  longueur..  A leur  extrémité  libre,  les 
siphons  se  disjoignent;  mais  cette  disjonction  se  fait  plus  ou  moins  loin 
selon  les  espèces,  et  c’est  là  la  seule  différence  qui  existe  entre  les 
genres  Saxicaves,  Byssomyeset  Rhomboïdes.  A ce  sujet,  nous  devons 
dire  que  M.  de  Blainville  s’en  est  laissé  imposer  par  la  figure  de  Poli. 
Cette  figure,  en  effet,  représente  un  animal  contracté;  la  partie  des 
siphons,  dans  laquelle  ces  organes  sont  unis,  est  rentrée  sous  le  man- 
teau , et  la  figure  ne  montre  plus  que  l'extrémité  bifurquée  des  siphons. 
L’animal  vivant  se  présente  quelquefois  avec  cette  apparence.  Tous  les 
observateurs  savent  combien  les  Mollusques  sont  -timides , lorsqu’on  les  a 
dérangés  de  la  place  qu’ils  ont  choisie  pour  y vivre.  Ils  se  décident  diffi- 
cilement à développer  au  dehors  toutes  leurs  parties , et  l’animal  observé 
par  Poli  est  justement  l’un  de  ceux  que  nous  avons  eu  le  plus  de  peine  à 
voir  dans  son  entier  développement.  Si  l’on  compare  la  figure  que  nous 
en  avons  donnée  dans  V Histoire  des.  MoUusqoes  de  V Algérie  avec  celle  du 
savant  Napolitain , on  aura  de  la  pleine  à se  persuader  qu’elle  représente 
une  même  espèce  ; car  dans  le  nôtre,  les  siphons  réunis  à la  base , sont 
bifurqués  au  sommet  comme  dans  l’espèce  de  Muller,  tandis  que  dans 
celle  de  Poli , deux  siphons  très  courts  , complètement  séparés-,  sem- 
blent terminer  l’animal  en  arrière.  C’est  ainsi  que  se  vérifie  la  similitude 
d'animaux  qui  paraissent  dissemblables  et  que  se  justifie  l’opinion  où 
nous  sommes  que  les  divers  genres  créés  pour  eux  doivent  disparaître 
d’une  méthode  naturelle.  Dans  l’espèce,  obsen'ée  par  M.  Fleuriau  de 
Bellevue,  les  siphons  sont  à peine  divisés  à leur  sommet:  mais  néan- 
moins les  autres  caractères  du  genre  persistent  et  cette  espèce  ne  saurait 
être  séparée  de  ses  congénères.  , 

Les  siphons  ^ont  inégaux  ; le  branchial  est  toujours  le  plus  gros  et  le 


LES  LÏTHOPHAGBS. 


477 

plus  long  ; il  se  termine  par  une  ouverture  circulaire  ; sur  le  bord  de 
laquelle  sont  rangés  un  grand  nombre  de  tentacules  cylindriques  , grêles 
et  obtus.  Le  siphon  anal  a son  ouverture  garnie  d’un  bord  membraneux , 
en  forme  de  calotte,  percée  au  sommet;  un  rang  de  tentacules  s’élève  à 
la  base  de  cette-  calotte  ; ils  sont  plus  courts  et  en  proportion  plus  gros 
que  ceux  du  siphon  branchial. 

La  masse  abdominale  est  grosse  et  épaisse  chez  les  Saxicaves  ; elle 
est  surmontée  en  avant  d’un  pied  allongé , cylindracé , vermiforme , qui, 
dans  sa  plus  grande  longueur,  égale  presque  celle  de  la  coquille.  Le 
bord  inférieur  de  ce  pied  présente  une  fente , semblable  à celle  qui  se 
remarque  chez  les  Moules , et  elle  aboutit  à un  petit  crypte  > dans  lequel 
est  inséré  un  byssus , plus  ou  moins  considérable , selon  l’âge  des  indi- 
vidus, et  surtout  selon  leur  manière  de  vivre.  Fabricius,  en  effet  , fait 
connaître  un  fait  qui  n’est  pas  sans  importance  ; il  a remarqué  que  le 
Mya  lyssifera , que  l’on  trouve  en  grande  abondance  dans  les  mers  du 
Nord , est  pourvu  d'un  byssus  chez  ceux  des  individus  qui  vivent  dans 
les  fentes  des  rochers  ; mais  chez  ceux  qui , rencontrant  des  roches 
calcaires,  les  percent  pour  s’y  abriter , le  byssus,  devenu  inutile,  a 
disparu  complètement.  De  sorte  que  ce  caractère  de  la  présence  oii 
de  l’absence  du  byssus  qui-,  au  premier  abord , paraît  d’une  grande 
importance,  par  le  fait  n’en  a aucune. 

La  bouche,  située  au-dessous  du  muscle  antérieur  des  valves,  est 
fort  grande;  elle  est  garnie  en  dessus  et  en  dessous  d’une  lèvre  mem- 
braneuse , assez  large , que  l’on  voit  se  terminer  bientôt  en  une  paire  de 
palpes  courtes  et  assez  épaisses.  La  surface  interne  de  ces  palpes  est 
couverte,  comme  à l’ordinaire,  de  nombreux  plis  membraneux  très 
saillants. 

Les  branchies  offrent  des  caractères  précieux  dans  le  genre  Saxieave  ; 
elles  sont  composées  d’une  paire  de  feuillets  de  chaque  côté  du  corps  ; 
ces  ot'ganes  sont  étroits , inégaux  dans  leur  largeur,  ainsi  que  dans  leur 
longueur.  La  paire  interne  s’avance  jusqu’au  voisinage  de  la  bouche , 
et  son  extrémité  pointue  s’interpose  entre  les  palpes  labiales.  Le  feuillet 
externe  commence  vers  le  tiers  antérieur  de  la  longueur  totale  de  l’ani- 
mal. Très  étroit  à sa  naissance,  ce  feuillet  s’élargit  sensiblement  à 
mesure  qu’il  arrive  en  arrière.  Parvenus  au  bord  postérieur  de  la  masse 
abdominale , les  feuillets  du  côté  droit  se  réunissent  à ceux  du  côté 
gauche  dans  la  ligne  médiane , et  ils  se  prolongent  ensuite  très  loin 
dans  la  cavité  des  siphons.  Dans  la  plupart  des  Mollusques  à siphons 
les  ouvertures  intérieures  de  ces  organes  sont  à peu  près  sur  le  même 
plan  ; dans  les  Pholades , chez  les  Solecurtes  et  les  Clavagelles,  l’ou- 


478  QUATORZIÈME  FÂMÏULE. 

verture  du  siphon  anal  est  coupée  très  obliquement;  de  sorte  que 
cette  onverture  , en  s’allongeant . permet  aux  branchies  de  descendre 
devant  elle  et  de  prendre  un  développement  beaucoup  plus  considé- 
rable qu'elles  ne  le  pourraient  sans  cette  disposition  particulière.  Les 
branchies  des  Saxicaves ■ sont  disposées  exactement  de  même;  elles 
viennent  se  souder  au  pourtour  d'une  ouverture  très  allongée  et  très 
oblique  , et  cette  soudure  est  solide  et  permanente  même  après  la  mort 
de  l'animal.  Cependant  il  arrive  chez  les  animaux  qui  nous  occupent, 
qu'à  la  mort,  les  branchies  se  disjoignent  dans  la  ligne  médiane,  ou 
du  moins  ces  organes  sont  très  faciles  à séparer  dans  ce  point,  tandis 
que  chez  d’autres  cette  séparation  ne  peut  se  produire  que  par  une  dé- 
chirure irrégulière . 

Les  coquilles  du  genre  Saxicave  sont  allongées , transverses , étroites  , 
très  .inéquilatérales , souvent  irrégulières  et  inéquiv  alves  ; leur  surface 
extérieure  est  revêtue  d'un  épiderme  grossier,  quelquefois  écailleux, 
d’un  brun  verdâtre  ou  jaunâtre,  facile  à détacher,  lorsque  la  coquille  est 
desséchée.  Des  sillons  ou  des  rides  transverses  , résultant  d'accroisse- 
ments irréguliers,  se  montrent  à la  surface  de  cette  coquille.  Â l’inté- 
rieur, elles  sont  blanches  ; on  y remarque  deux  impressions  musculaires 
très  écartées  l'une  de  l'autre  ; l’antérieure  , ovale , obronde  , occupe  la 
hauteur  de  l’extrémité  antérieure  de  la  coquille.  La  postérieure  , circu- 
laire, est  située  près  de  l'extrémité  du  bord  supérieur  et  postérieur. 
L'impression  palléale  se  montre  d'une  manière  très  nette  dans  certaines 
espèces  ; chez  d’autres , elle  consiste  en  une  série  de  petites  impressions 
musculaires  détachées,  comparables,  à celles  des  Pandores . Une  sinuosité 
postérieure  profonde  se  dessine  dans  l’intérieur  des  valves;  tantét d’une 
manière  nette  et  continue.,  tantôt  par  une  série  de  petites  impressions 
détachées  les  udqs  des  autres.  U y a môme  de  vieux  individus  chez 
lesquels  le»  petites  impressions  disparaissent,  et  on  n’en  trouve  plus 
que  deux  grandes  qui  convergent  Tune  vers  l'autre , mais  qui  sont 
complètement  isolées,  Il  semblerait  que  chez  ces  individus  le  mqscle 
rétracteur  deg  siphons  n’est  plue  adhérent  par  touto  sa  circonférence , 
mais  qu’il  est  partagé  en  deux  principaux  faisceaux,  qui  viennent 
s’attacher  sur  la  coquille  aux  deux  points  que  nous  venons  d’indiquer. 

La  charnière  est  extrêmement  simple;  dans  le  plus  grand  nombre  des 
espèces,  elle  consiste  en  un  bourrelet  hsse , terminé  en  avant  par  un 
tubercule  peu  saillant,  et  qui  remplace  les  dents  cardinales.  Cependant 
il  existe  des  espèces  où  l’on  voit  ce  tubercule  se  découper  plus  nette- 
ment en  une  dont  cardinale,  et  alors  cette  dent  est  reçue  dans  une  fos- 
sette de  la  valve  opposée.  Pnfîn , dans  les  espèces  pourvues  de  deux 


LES  LITHOPSÀOES. 


479 

angles  en  arrière , la  dent  cardinale  devient  plus  saillante  encore , et  ce 
sont  ces  espèces  qui  rentrent  dans  le  genre  Hiatelle  de  Daudin.  Le 
Donax  rhombo'idea  de  Poli , avec  lequel  M.  de  Blainville  a fait  son  genre 
Rhomboïde  ^ appartient  à ce  groupe  particulier  des  Saxicave^.  L’examen 
attentif  de  l’animal  nous  a prouvé  qu’il  conserve  tous  les  caractères  des 
autres  Saxicaves.  Toutes  les  coquilles  de  ce  genre  ne  sont  par  parfaite- 
ment closes  ; elles  restent  bâillantes  en  avant  et  en  arrière  ; un  ligament, 
assez  épais , fortement  attaché  sur  les  nymphes  épaisses  et  rugueuses , 
réunit  solidement  les  valves , et,  par  sa  solidité,  supplée  à l'imperfec- 
tion de  la  charnière. 

Les  Saxicaves  sont  des  coquilles  d’un  médiocre  volume  , presque 
toutes  sont  propres  aux  régions  tempérées  et  septentrionales  de  l’hémi- 
sphère nord  de  la  terre.  Cependant  ;\t.  Guming  en  a rapporté  trois 
espèces  de  l’Amérique  méridionale,  auxquelles  M.  d’Orbigny  en  a 
ajouté  une  quatrième.  Au  retour  de  son  second  voyage  de  circumnavi- 
gation, M . Quoy  nous  a communiqué  une  espèce  très  voisine  de  l’Arc  tica, 
provenant  de  la  Nouvelle-Zélande;  il  en  existe  également  une  espèce  à 
Rio-Janeiro.  Nous  en  devons  la  connaissance  à un  navigateur  instruit 
M.  Martin,  auquel  la  science  conchyliologique  est  redevable  d’inté- 
ressantes découvertes.  Il  est  une  espèce,  le  Mya  arcticaÛQ  Fabricius  , 
qui  paraît  commune  aux  mers  septentrionales  de  l’Europe  et  de  l'Amé- 
rique. Le  nombre  des  espèces  connues  est  peu  considérable  ; douze  à 
quatorze  sont  inscrites  dans  les  Catalogues;  mais  il  est  à présumer  que 
ce  nombre  diminuera  lorsqu’on  aura  pu  les  examiner  avec  attention  et 
les  comparer  entre  elles.  II.  faudra  d’abord  en  éloigner  le  Byssomya 
Guerini  de  M.  Payraudeau.  Cette  coquille,  en  effet,  malgré  son  irrégu- 
larité, présent©  tous  les  caractères  des  Gypricardes.  Elle  en  a la  char- 
nière et  l’impression  palléale,  elle  diffère  donc  en  cela  des  Saxicaves. 

Les  Saxicaves  fossiles  ne  sont  guère  plus  nombreuses  que  les  vivantes. 
M.  Deslougcbamps  en  a fait  connaître  dans  les  terrains  oplitiques  du 
Calvados  ; ce  sont  les  premières  qui  paraissent  à la  surface  de  la  terre. 
On  retrouve  ce  genre  dans  les  terrains  crétacés , et  il  remonte  dans  les 
terrains  tertiaires,  se  distribuant  dans  les  trois  étages  principaux  de 
ces  terrains.  Nous  en  connaissons  cinq  espèces  dans  le  bassin  de  Paris  ; 
trois  dans  les  terrains  tertiaires  moyens  et  deux  seulement  dans  les 
terrains  tertiaires  inférieurs.  Ces  doux  dernières  ont  leurs  analogues 
vivants  dans  la  nature  actuelle  ; l’une , le  Sa3>icava  arcUca , qui  vit  dans 
la  Méditerranée  et  qui  est  fossile  en  Italie  et  en  Sicile.  L’autre  est  le 
Saxicava  rugosa , qui  vit  dans  Ips  mers  du  Nord  t qui  se  trouve  à l’état 
fossile  dans  les  terrains  tertiaires  récents  de  la  Suède  et  de  la  Nûrwége. 


48o  QUATORZIÈME  FAMILLE. 

Saxicava  arctica  , Phil.  Vivante  dans  TOcéan  d’Europe  depuis 
la  Norwége  jusque  dans  la  Méditerranée,  et  qui,  d’après 
M,  Krauss , franchissant  l'Océan  Atlantique  dans  toute  la 
longueur  de  l’Afrique , se  trouverait  au  cap  de  Bonne-Espé- 
rance. 

Fossile  dans  le  Grag  de  la  Belgique , en  Italie , dans  les  terrains 
subapenniens,  et  dans  les  terrains  plus  récente  de  la  Nor- 
wége et  de  la  Sicile. 

2°Saxicava  rugosa,  Lâmk.  Vivante  dans  les  mers  du  nord  de 
l'Europe,  au  Groenland,  dans  les  mers  tempérées  de  l’Eu- 
rope , . la  Méditerranée  ? 

Fossile  dans  le  Grag  d’Angleterre  et  dans  les  terrains  récents 
de  la  Norwége , Udvalla  , etc. 

1,  Saxicave  arctique.  >Saa:zcam  Philippi. 

PI.  12.  f.  8.  9. 

S.  testa  ohlongo-transversa  y inœquii>ciîvt , înœquilateraïi  y ci^îiv^xius- 
culây  hiancCy  albo-griseây  irreguîariter  transversim  striata  y latere 
antico  triincato  y brevissimo  y postico  laiiorcy  carinis  duobits  serralo 
dentatis  ad  apicetn  converge ntibus  predito;  cardine  ttnidentato  y 
altero  bidentato^ 

ûrcrncfl.  Linné.  Syst.  nat.  éd.  la*.  p.  tu 3. 

Müller,  Fauna  danica  prodromus.  2963, 

Solen  minntus,  Linné.  Sysl.  nal.  éd.  la».  p.  iii5. 

Mya  arctica.  Fabricius.  Faun.  Groènl.  p.  407,  n°  408. 

Donax  rkomboidéa.  Poli.  Test,  Sicil.  l.  2.  p.  81;  t,  i.  pl.  14.  f. 
pl.  i5.  f,  12.  'i3;.  16. 

Solen  minuttts,  Cheranitz.  Concli,  cab.  t.  6,  p.  67,  pl.  6.  f.  5r,  52. 

Id.  Sclirœter.  Einl.  t.  2 - p.  032. 

2d.  Gmelin.  Syst.  nat.  p.  3226.  n®  ïi. 

Id.  Montagii.  Testac.  brit.  p.  53.  pl.  i,  f.  4.  " 

Cardita  arctica,  Brug.  Ency.  méth.  vers.  t.  i.  p.  44*  n*  1 1 . pl.  234*  f.  4* 
Mytilus prœcisits,  Mootagti.  loc.  cit.  p.  i65.  pl.  4*  f*  2. 

Solen  minutus,  Wood.  Gen.  conch.  p.  i3g.  pl.  34.  f.  5,  6, 

Id,  Dillwyn.  Descr.  cal.  t.  i,  p;  69.  n°  3o. 

Id,  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  453.  n*  lo. 

Mya  arctica,  Turtoiii  Conch.  dict.  p.  ro4.  n®  17. 
lïo/en  minuruf.  Turton.'loc.  cit.  p.  161.  n*  6. 


r.BS  LITHOPHAGES. 


48,1 


Hyntella  arctica,  Lamk,  loc.  cit.  t..6,  p,  3o. 

Hratella  minnea»  Turtou.  Concli.  ins.  bril.  p.  24.  pl,  2,  f.  12. 
Anatina  arctica,  Turton.  loc.  cit.  jv  49.  pl.  4.  f.  7,  8, 
ilytUus /»ra?cw/«.  Gcrville.  Cat.  des  coq,  de  la  Manche,  p;  32.  n®  6. 
Rhomboides  rttgosvs,  Blainville,  Malac.  p,  573.  pl.  80,  f.  C, 

Sofen  minutus»  Wood.  Index,  test.pl.  3.  f.  35, 

Carâita  îithophageila.  Da  Cosla.  Cat.  sysl.  p.  42. 

Hyatella  arctica.  liêsh.,  Ency,  méthJvers.  l.  2.  p.  272.  u°  i. 

Saxicava  arctica,  Philippi.  Enuni.  moll.  Sic.  t.*  i.  p.  20.  pl.  3.  f.  3; 
t.  2.  p.  19.  n®  I. 

Saxicava  rhomboides,  Desli.  dans  Lamk,  An.  s.  vert.  .2®  éd.  t.  6.. 
p.  i53.  ü®  7* 

Rhomboides  rugosiis.  Scacchi.  Cat,  conch.  regn.  Neap.  p.  5, 

Saxicava  arctica.  Forbes.  Rep.  oegcan.  invert.  p,.  i43^ 
arc/ica.  Hauley.  Descr.  cat.  p.  i5o. 

Saxicava  arctica.  Verani,  Cal.  des  invert.  p.  i3, 

Id,  .Forbes.  Malac.  monen.  p.  56.  n»  2. 

Hyatella  arctica,  Fleming.  Brit.  shell.  p.  4.6 n®  674. 

Id,  Jeffreys.  Malac.  and  conch,  niag.  n"  2.  p,  4^.  > 

Krauss,  Sudafrican.  Moll.  p.  2?  • 

Saxicava  arctica,  Mac  Gillivray.  Moll,  aiiim.  of  Scoll.  p.  247  et  2^5. 
//y atelia  arctica.  'ïUorpe,  Brit.  mar.  conch.  p,  59. 

Saxicava  arctica.  Lovèu,  Ind.  Moll.  Scand.  p.  40.. n®  295. 

FossîUs.  Nysl.  foss.  delaBeIg.p.  96.  u®  54.pl.  3.  f.  i5. 

An  Mya  elongata,  Broccbi.  Conch.  foss . subapp.  t.  2.  p.  029*  pl.  1 2 . f.  1 4 . 
Bronn.  Kal.  tert.  Gebil.  p.  91. 

Saxicava  arctica.  Philippi.  Enum.  molI.Sicil.  p.^o.  n®i.  l.  2,  p.  19.  n®i . 

2d.  Sismonda.  Synop.  an. 'pedem.  foss.  p.  20.  n®  1. 

blytihts  carinatus.  Goldfuss.  Petr.  Germ.  t.  2.  p.  179.  pl.  j3i.  f.  14. 

La  synonymie  de  cette  espèce  prouve  combien  naturalistes  ont 
eu  d’incertitude  à son -égard.  Ayant  sous  les  yeux  une  coquille  émi- 
nemment variable^  provenant  de  localités  très  diverses,  ils  ont  cru 
retrouver  en  elle  des  espèces  distinctes  , appartenant  à plusieurs 
genres  différents.  Aujourd’hui , eu  rassemblant  les  documents  qui  la 
concernent,  il  devient  plus  facile  de  rectifierjes  erreurs,  commises 
autrefois  par  les  naturalistes  qui,  en  les  commettant,  ont  transmis 
de  précieux  renseignements.  On  ne  s’attendait  pas  à voir  un  Mollusque 
habiter  depuis  les  régions  polaires  jusque  dans  les  régions  chaudes  de 
l’Europe,  et  subir  des  conditions  d’habitation  que  d’autres  animaux  de 
T,  T.  2«  PARTIE.  3l* 


48?.  QUATORZIÈME  FAMILLE. 

la  môme  classe  ne  peuvent  Bupporter.  Les  exeniples  de  ces  Mollusques  , 
passant  des  régions  froides  aux  régions  chaudes,  s’étant  multipliés  à 
mesure  que  les  observations  sont  devenues  plus  exactes,  il  ne  faut  pas 
s’étonner  de  ce  que  la  Saxicave  arctique  occupe  un  «i  vaste  espace  dans 
les  mers  de  l'Europe. 

Cette  coquille  est  allongée  , étroite,  inéquivalve  et  très  inéquilaté- 
rale, très  souvent  elle  est  devenue  irrégulière  par  la  gêne  qu’elle  a 
éprouvée  dans  les  fentes  des  rochers  qu’elle  habite.  Les  valves  sont  bâil  - 
lantes  en  avant  et  eii  arrière  ; la  droite  est  la  plus  profonde , et  souvent 
vers  Textrémité  antérieure,  elle  présente  une  inllexion  qui  est  due 
à la  présence  du  byssus.  Le  coté  antérieur  est  extrêmement  court , 
tronqué  obliquement,  quelquefois  même  perpendiculairement;  le  côté 
postérieur,  un  peu  plus  large,  est  lui-même  tronqué  obliquement 
à son  extrémité.  Ce  côté  postérieur»  Rplati , porte  deux  angles  peu 
saillants , convergents  vers  le  sommet,  et -sur  lesquels  s’élèvent  de 
•petites  écailles.  Toute  la  sürface  extérieure  est  couverte  d’un  épiderme 
d’un  brun  grisâtre,  qui  déborde  de  beaucoup  la  circonférence  des 
valves  et  sert  à cacher  une' portion  assez  considérable  des  bords  du 
manteau.  A l’extérieur,  (a  coquille  est  d’un  blanc  jaunâtre  ; une  char- 
nière, très  étroite,  porte  ordinairement  .une  seule  dent  sur  chaque 
valve  ; souvent  ces  dents  sont  obsolètes  et  presque  entièrement  effacées. 
C’est  un  individu  dans  eet  état  que  M.  Turton  a placé^dans  le  genre 
.\nalîne , croyant  que  la  petite  cavité  cardinale . située  sous  les  cro- 
chets, était  destinée  à recevoir  un  ligament  interne.  Mais  M.  Turton 
aurait  été  détrompé  s’il  avait  fait  attention  à la  nymphe  épaisse,  desti- 
née à recevoir  un  ligament  externe. 

Depuis  Fabricius,  on  sait  que  cette  coquille  est  fort  abondante  dans  les 
mers  du  Nord  ; elle  est  plus  rare  dans  les  régions-tempérées  des  mers 
de  l'Europe;  elle  paraît  moins  abondante  encore  dans  la  Méditerranée. 
Observée  par  Poli , ce  naturaliste  la  rapporta  au  genre  Donace , tout  en 
faisant  voir  combien  l’animal  est  différent  de  celui,  dés  véritables  Do- 
naces.  Cette  coquille-est  fossile  dans  les  terrains  récents  do  la  Nôrwége 
et  dans  cèux  de  la  Sicile  et  de  ritalie.  M.  N.yst  la  cite  dans  le  Ctag  des 
environs  d’Anvers  ; elle  est  probablement  aussi  dans  c^ui  d’Angleterre. 


LES  LITHOPHAGES. 


48 '5 

2.  Saxicave  gallicane.  Saxîcava  gdlUcana.  Lamk. 

PI.  12.  f.  1.  2.  S.  4. 

♦ « 

s.  testa  ovato-oblohgâ^  üicequilateraUy  anticè  obtusâ,  postieè  truncàtâ  , 
latere  antico  brevi^  valvults  hiantibus  snba^nalibus  posticè  depressis , 
irregtilariter  striata  rugosis  ^ cardine  edenttélo, 

tiamarcky  An.  s.  vert.  t.  5,  p.  Soi.  n*  a, 

^xicave  .striée.  Fleuriâu  de  Bellévue,  Mém.  s.  1.  Mol!,  lith.  Journ.  d e 
physique,  an  A.,  p.  5. 

Hanleÿ.  Descript,  ïal,  p,  5o.  Saxîcava  rngosa,  var. 

Wood,  Ind.  te.stac.  a®  siippl.  pl.  9.  f.  5.  ' 

Avant  d’avoir  vu  l'animal  de  cette  espèce  > nous  avons  eu  quelques 
doutes  sur  sa  valeur,  et  nous  avons  cru  avec  M.  Hanley  qu’elle  devait 
constituer  une  variété  du  Sajrtcaua  rugosa.  Nous  rappellerons  que 
l’animal  du  Swcavcp  rugosa , ûg-uré  par  MüUer  dans.le  Fauua  danica , 
est  terminé  en  arrière  en  un  très  gros  siphon  assez  profondément  bifur- 
qué au  sommet.  Nous  avons  une  figure’  fâile  d'après  l’animal  vivant  du 
Saxicava  gallicana,  et  dans  celte  espèce  les  siphons , moins  allongés  , 
sont  à peine  bifurqués  au  sommet.  Cette  différence  nous  paraît  suffisante 
pour-la  constatation  des  deux  espèces  distinctes , .et  aujourd'hui  cesse 
pour  nous  le  .doute  que  nous  éprouvions  encore  ij  y a quelques  années. 
Au  reste,  en  examinant  un  grand  nombre  d’individus  des  coquilles  de? 
deux  espèces on  reconnaît  entre  elles  des  différences  constantes  , qui , 
quoique  d’une  faible  valeur,  viennent  confirmer  celles  qui  existent  entre 
les  animaux. 

La  Saxkava  galUcttna  est  allongée  , transverso , subéquivalve , très 
inéquilatérale  et  subcylind racée,  à la  manière  desModioles  lithophages. 
Les  valves  sont  bâillantes  en  avant  et.  en  arrière.  Eïlps  sont  épaisses  et 
solides.  Les  crochets,  peu  saillants,  sont  opposés  et  très  rapprochés  ; 
en  arrière , sur  le  bord  dorsal , un  sillon  profond  sépare  une  nymphe 
calleuse épaisse , destinée  à recevoir  un  ligament  externe.  Le  côté 
postérieur  présente  un  méplat  assez  sensible  , limité  par  un  angle  exces"- 
sivement  obtus , qui  s’étend  obliquement  du  crochet  à l'angle  inférieur 
et  postérieur  des  valves.  Ce  méplat  existe  aussi  dans  le  Saxicava  rugosa, 
mais  il  y est  beaucoup  moins  apparent.  L’extrémité  antérieure  des 
valves  est  arrondie , obtuse;  l’extrémité  postérieure  est  tronquée  per-^ 
pêndicuMrement  à l’axe  transVerse  , et  elle  est  aussi  large  que  l’extré- 
mité antérieure.  La  surface  èitérieure  est  irrégulièrement  striée  par  des 
accroissements;  elle  est  revêtue  d*un  épiderme  d’un  brun  grisâtre, 
3i* 


434  QUATORZIÈME  FAMILLE. 

mince  et  caduc.  A l’intérieur,  la  coquille  est  d’un  blanc  jaunâtre;  sa 
charnière  est  sans  dent , et  lorsque  le  bord  cardinal  n’est  point  corrodé 
par  un  empiètement  du  ligament,  il  offre  une  callosité  simple , légère- 
ment infléchie , qui  vient  se  continuer  avec  la  nymphe.  Cette  espèce 
nous  offre  un  exemple  du  rôle  que  doit  jouer. le  byssus  chez  ces  animaux. 
En  effet,  les  individus  qui  se  logent  dans  les  pierres  tendres  des  environs  de 
La  Rochelle,  sont  toujours  dépourvus  du  byssus , tandis  que  ceux  qui 
se  logent  dans  les  fissures  des  rochers  y sont  suspendus  par  un  byssus 
plus  ou  moins  épais  selon  l'âge  des  individus.  Si  de  nouvelles  observa- 
tions venaient  à constater  la  variabilité  dans  la  proportion  des  siphons  , 
il  faudrait  alors  joindre  la  Saxicave  gallicane  à la  Saxicave  fugueuse, 
et  confondre  la  synonymie  des  deux  espèces. 


GENRE  QUARANTE-TROISIÈME 

FETJEUCOIÆ.  Petrîcola,  (Lamk.) 

PL  la.  L 7.  10.  1 1.  12. 

. CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  ovule  , épais  ; les  lobes 
du  manteau,  à bords  simples  réunis,  laissant  entre  eux  en 
avant  et  en  bas,  une  très  petite  fente,  pour  le  passage  d’un 
pied  allongé,  étroit,  pointu;  une  expansion  palléale  assez 
épaisse  se  renversant  sur  les  bords  antérieur  et  inférieur  de  la 
coquille;  les  deux  siphons  postérieurs,  réunis  à la  base,  sé- 
parés au  sommet;  siphon  anal  ayant  son  ouverture  garnie 
d’une  série  de  tentacules  simples  et  cylindracés  ; siphon  bran- 
chial plus  gros  et  plus  long , portant  sur  le  bord  de  son  ouver- 
ture des  tentacules  branchus  inégaux  et  symétriques.  Branchies 
courtes,  sub-quadrangulaires , à peine  réunies  en  arrière  de 
l’abdomen. 

Coquille  subtrigonè  ou  transverse inéquilatérale , arrondie 
antérieurement , atténuée  ou  baillante  du  côté  postérieur.  Char- 
nière ayant  deux  dents  sur  chaque  valve  ou  sur  une  seule. 
Impression  palléale  placée  très  haut  dans  l’intérieur  des  valves 
très  largement  ouverte  du-  côté  postérieur. 


LES  LITHOPHAGES. 


480 

■ SYNONYMIE  tfKNÉHiQXT^.  ™ if 2/z'z7t/..ç , Cheiïinitz  , Schiœter, 
Gmelin,  Dillwyn  , Wood. — Tellina,  Olivi , Poli,^ — Hy- 
pogœa,  Poli.' — Rupellarîa,  Fleuriau  de  Belleviie,  de  Roissy, 
Lamarck  (olim).  — Venv^ , Retzius  , Gmelin,  Brocchi. — 
31ycL,  Montngu. — Petricola , Lamarçk,  Roissy,  Cuvier, 
Rang , Menkn , Sowerby , Philippi , Anton  . Gould , Swainson  , 
Hanley',  etc. 

OBSERVATIONS.  — Le  gGiiro  Pélricole  a été  proposé  par  Lamarck.,  en 
'1802,  dans  \e  Sijsième  des  animanx  sans  vertèbres,  pour  rassembler 
diverses  coquilles  disséminées  par  Schrocter,  Crmelin  et  Chemnitz, 
parmi  les  ÏVuws  et  les^  Mylihts.  Sous  cette  dénomination  générique , 
Lamarck  comprenait  deux  sortes  de  coquilles.  Les  unes  ayant  trois 
dents  à la  charnière,  les  autres  n’en  ayant  jamais  que  deux.  Mais, 
d’après  les  exemples  que  Lamarck  propose,  le  hasard  a voulu  qu’il  citftt 
uniquement  des  espèces  à trois  dents  cardinales.  A peu  près  à la  même 
époque , M.  Fleuriau  de  Belleviie,  dans  son  mémoire  que  nous  avons 
précédemment  cité,  avec  l’éloge  qu'il  mérite,  a proposé  un  genre  Ru- 
pellaire  , coïncidant  en  partie  à celui  des  Pétricoles  de  Lamarck,  mais 
ne  contenant  que  celles  des  espèces  qui  portent  deux  dents  à la  char- 
nière. Ainsi.  M.  de  Roissy  avait  raison  d’adopter  dans  le  Buffon  de 
Sonnini,  les  deux  genres  Pétricole  et  Rupellaire.  Lamarck  lui-même 
les  introduisit  dans  sa  méthode,  publiée  en  '184  2,  dans  l’extrait  du 
cours.  Mais  bientôt  après,  faisant  une  revue  des  divers  genres  admis 
par  lui  dans  sa  famille  des  Lithophages,  il  distribua  les  espèces  entre 
deux  genres  pour. lesquels  il  consacra  définitivement  les  noms  de  Pétri- 
cole et  Vénérupe.  Dès  lors  les  Pétricoles  ne  continrent  plus  que  les 
espèces  à deux  dents  cardinales  sur  chaque  valve  ; par  conséquent  ce 
genre  correspond , avec  la  plus  rigoureuse  exactitude , aux  Rupellaires 
de  M.  Fleuriau  de  Bellevue.  Lamarck  se  serait  montré  plus  équitable, 
si  dans  les  changements  qu'il  a proposés  dans  la  nomenclature,  il  avait 
conservé  le  genre  Rupellaire,  en  consacrant  le  nom  de  Saxicave  au 
genre  que  plus  tard  il  nomma  Vénérupe. 

Dans  le  Règne  animal,  Cuvier  conserva  au  genre  Pétricole  l’étendue 
que  Lamarck  lui  avait  d’abord  imposée.  Entraîné  par  les  rapports  évi- 
dents qui  existent  entre  ce  genre  et  le  type  des  Vénus , Cuvier  le  laissa 
dans  la  môme  famille  , à la  suite  desCapsos.  M.  de  Blainviiio,  dans  son 
Traité  de  malacologie , .n'SippoHa  pas  de  modifications  importantes  à 
l’opinion  de  Cuvier;  il  joignit  les  Pétricoles  aux  Vénérupes,  conserva 


486  QUATORZIÈME  FAMILLE. 

ce  dernier  nom  générique,  et  l’introduisit  dans  la  famille  des  Ghonca- 
cées,  dans  une  section  parliculièrej  comprenant  les  Vénérupes,  les 
Coralliophages , les  Clothos , les  Corbules , les  Sphènes  et  enfin , les 
Ongulines. 

Les  modifications , proposées  par  Lamarck  dans  la  'constitution  de 
son  genre  Pétncole , furent  adoptées  par  le  plus  grand  nombre  des  con- 
chyliologues.  Ils  reconnurent  en  lut  un  genre  plus  net,  mieux  circou' 
scrit , et  prenant  naturellement  sa  place  dans  le  voisinage  de  la  famille 
des  Vénus , se  distinguant  très  nettement  des  Saxicaves , qui  doivent 
redescendre  vers  la  famille  des  Tubicollées. 

Les  rapports  du  genre  qui' nous  occupe  ont  peu  varié  depuis  sa  créa- 
tion. Nous  voyons,  d’un  côté , Lamarck  le  maintenir  dans  le  voisinage 
des  Tellines , et  d’uri  autre  côté,  Cuvier  le  rapprocher  des  Vénus.  L’une 
et  l’autre  opinion  ne  sont  pas  tellement  différentes  qu’elles  ne  puissent 
se  concilier,  au  moyen  d’une  opinion  mitoyenne,  par  laquelle  le  genre 
prendrait  sa  place  dans  la  famille  des  Lilhophages,  que  Ton  mettrait 
en  rapport  plus  immédiat  avec  celle  des  Vénus,  en  l’éloignanl,  par 
conséquent , plus  que  ne  l’a  fait  Lamarck  de  celle  des  Tellines.  En 
effet,  les  animaux  de  ce  genre  offrent  des  caractères  qui  les  rattachent 
au  type  des  Vénus,  ainsi  que  nous  allons  l’exposer  bientôt. 

Dans  un  mémoire,  publié  en  1846,  dans  la  fîavue  zoologique, 
M.  Recluz  s’est  attaché  à retracer  minutieusement  Thistoire  de  la  fa- 
mille des  Lilhophages  de  Latnarck  et  de  tous  les  genres  qui  s’y  ratta- 
chent; soit  qu’ils  y fussent  mentionnés  par  notre  célèbre  naturaliste, 
soit  qu'ils  fussent  mentionnés  par  d’autres  auteurs.  Ce  mémoire  de 
M.  Recluz  est  d’hne  grande  importance  pour  la  connaissance  exacte  des 
genres  dont  il  est  question  , et  surtout  des  modifications  que  lui  ont  fait 
subir  les  divers  c\lassificateurs.  Nous  ne  suivrons  pas  l'auteur  dans  le 
développement  qu’il  croit  nécessaire  à son  sujet  ; nous  ferons  remarquer 
seulement  qu'il  propose  une  classification  qui  se  rapproche  -,  à quelques 
égards,  de  celle  de  Cuvier,  et  plus  particulièrement  de  celle  que  nous 
avons  définitivement  adoptée  et  que  nous  venons  d'exposer  en  traitant  de 
la  famille  des  Lilhophages.  Celle  distribution  des  genres  n’est  pas  celle 
que  nous  avions  préférée  en  1830,  lorsque  nous  avons  publié  notre 
Tabieau  de  classification  dans  l'Encyclopédie  méthodique.  Obligé , à cette 
époque , de  nous  en  rapporter  au  petit  nombre  de  documents  que  possé- 
dait la  science  à l’égard  des  Mollusques  lithophages,  n’ayant  pas  sous 
les  yeux  les  animaux  de  plusieurs  espèces  des  genres  Saxicave,  Pétri- 
cole  et  Vénérupe , forcé  de  nous  arrêter  à des  caractères  extérieurs 
d’une  faible  importance,  il  nous  semblait  v<^  les  trois  genres  so  ratta- 


LES  LITHOPHAGES. 


487 

cher  les  uïis  aux  autres  autant  par  les  caractères  de  leur  coquille  que 
par  ceux  des  animaux.  Nous  apercevions  ce  phénomène  de  Tagrandis- 
sement  successif  de  l'ouverlure  antérieure  du-manteau  depuis  les  Saxi- 
caves  jusqu’aux  VénérupeS.  Nous  apercevions  également  de  l’analogie 
dans  la  forme  et  la  grandeur  du  pied  et  des  siphons  et  de  ces  caractères 
trop  généraux  ; nous  avons  conclu  au  maintien  intégral  de  k famille 
des  Lithôphages.  M.  Recluz , par  une  série  d’observations  aussi  justes 
qu’intéressantes  , conclut,  au  contraire,  à la  séparation  des  Saxicaves 
des  autres  Lithôphages,  et  au  rapprochement  des  Pèlriooles  du  type 
des  Vénus.  En  cela  , M.  Recluz  se  trouve  complètement  d'accord  avec 
nous , depuis  que  nous  nous  sommes  éclairé  par  l’observation  directe 
des  animaux  vivante  des  trois  genres  de  la  famille  des  Lithôphages  de 
Latnarçk. 

Les  coquilles  du  genre  Pétricole  sont  ovales  , transverses inéquila- 
térales , subcunéiformes  , quelquefois  allongées  et  subcylindracées  ; elles 
sont  généralement  peu  épaisses , par  conséquent  fragiles  ; elles  offrent 
souvent  des  irrégularités,  qui  résultent  de  leur  manière  de  vivre,  se 
trouvant  quelquefois  gênées  dans  les  trous  des  pierres  qu’elles  se  creu- 
sent. Les  valves  sont  bâillantes  en  avant  et  en  arrière  ; les  bords  en  Sont 
simples  et  tranchants.  La  surface  externe  tantôt  lisse,  tantôt  striée,  soit 
en  long,  soit  en  travers,  est  presque  toujours  dépourvue  d’épiderme. 
Cependant  il  est  des  espèces  chez  lesquelles  un  épiderme  mince  et  trans- 
parent recouvre  une  partie  plus  ou  moins  considérable  de  la  surface 
extérieure  de  la  coquille.  La  charnière  est  très  simple,  elle  consiste  en 
deux  dents  cardinales  sur  chaque  valve;  ces  dents  sont  presque  égales., 
recourbées  en  crochets,  et  l'imo  d’elles,  l’antérieure  de  la  valvë  gau- 
che , la  postérieure  de  la  valve  droite  , est  bifide  au  sommet. 

Lamarck  a fait  connaître  sous  le  nom  de  Petrioola  p/to/adi/bmîs  une 
coquille  fort  singulière , près  de  laquelle  se  rangent  aujourd’hui  cinq  ou 
six  autres  espèces  très  analogues.  Nous  avions  pensé  d’abord  que  ce 
groupe  devait  constituer  un  genre  particulier,  mais  ayant  pu  comparer 
l’animal  de  celle  espèce  avec  celui  de  nos  Pétricoles  de  la  Méditerranée, 
nous  avons  reconnu  ridentitéde  leur  caractère  générique,  etdèslors  nous 
avons  laissé , à l’exemple  de  Lamarck , iQ  Petncolaphoîadiformis  dans  le 
genre  Pétricole.  La  charnière  de  cette  coquille  nous  offre  des  différences 
assez  considérables  avec  celle  des  autres  espèces  du  même  genre.  Sur 
un  bord  cardinal  très  étroit,  les  deux  dents  cardinales  se  contournent, 
en  partant  sous  la  forme  de  petites  côtes  du  sommet  intérieur  des  cro- 
chets. Si  ces  dents  étaient  plus  détachées  , elles  auraient  la  plus  grande 
analogie  avec  le  cuilleron  intérieur  que  l’on  voit  dans  l’intérieur  des 


QÜATOKZiEME  FAMILLE. 


488 

P holades.  C’est  en  nous  aidant  des  particularités  remarquables  de  cette 
charnière  , que  nous  avons  cherché  à expliquer  le  cuilleron  saillant  des 
Pholades,  en  le  considérant  comme  une  dent  cardinale  entièrement  dé- 
tachée du  bord  dorsal , libre  dans  toute  son  étendue  et  plongée  dans 
l’épaisseur  des  viscères  de  l’animal,  Ici,  plus  rapprochée  du  bord , la 
dent  cardinale  s’y  est  soudée  par  une  de  ses  surfaces , et  elle  est  venue 
présenter  son  extrémité  saillante  au  niveau  du  bord  dorsal , de  manière 
à se  mettre  en  contact  avec  la  dent  semblable  de  la  valve  opposée. 

Un  ligament  extérieur,  peu  épais,  s’allonge  sur  une  partie  du  bord 
dorsal  postérieur,  il  stittache  sur  des  .nymphes  médiocres,  étroites, 
et  séparées  par  un  sillon  profond , dans  lequel  est  reçue  sa  tunique 
fl  hpouse  externe.  Les  impressions  musculaires  sont  médiocres , l'an- 
t érieure  est  ovalaire  ; elle  se  place  obliquement  de  hauten  bas  et  d'avant 
en  arrière  dans  toute  la  hauteur  du  bord  antérieur  de  la  coquille.  L’im- 
pression musculaire  postérieure  est  située  à égale  distance  de  la  char- 
nière et  de  Pexlrémilé  postérieure  de  la  coquille.  Elle  est  circulaire  et  à 
peine  modifiée  par  une  petite  impression  située  vers  son  bord  supérieur, 
et  sur  laquelle  s’attache  le  muscle  retracteur  postérieur  du  pied.  L’im- 
pression pailéale  présente,  dans  les  Pétricoles,  des  caractères  généri- 
que.s  d’iineassez  grande  valeur;  elle  se  détache  de  l’extrémité  inférieure 
du  muscle  antérieur,  et  elle  descend  obliquement  d’avant  en  arrière, 
en  se  rapprochant  insensiblement  du  bord  inférieur  des  valves.  Par- 
venue vers  le  milieu  de  la  longueur  de  ce  bord , elle  s’infléchit  sur  elle- 
même  et  vient  tracer  dans  l’intérieur  des  valves  une  large  sinuosité, 
qui  remmite  jusqu’à  une  ligne  qui  tomberait  perpendiculairement  de  la 
charnière  sur  le  bord  ventral.  L'ouverture  de  cette  sinuosité  est  extrêr- 
mcmenl  large  , et  l’on  reconnaît  qu'elle  doit  recevoir  un  muscle  rétrac- 
teur puissant,  dont  la  base  doit  embrasser  toute  Iji  largeur  des  siphons 
réunis.  Dans  le  Petricola  pholadiformis  et  les  autres  espèces  du  même 
groupe,  l'impression  pailéale  a subi  quelques  modifications  intéressantes  ; 
elle  est  plus  courte,  remonte  moins  haut  dans  l’intérieur  des  valves  et 
son  ouverture  postérieure  est  moins  élargie;  mais  dans  ce  groupe, 
ainsi  que  dans  le  précédent,  persiste  ce  caractère  particulier  au  genre 
d’une  échancrure  p2\Iléale,  courte,  triangulaire,  largement  ouverte  en 
arrière , ayant  son  extrémité  ventrale  moins  avancée  que  celle  qui  aboutit 
à l’impression  musculaire  postérieure. 

L'animal  des  Pétricoles  offre  des  caractères  qui  le  distinguent  bien 
nettement  de  tous  les  autres  genres  connus  et  qui  l’éloignent  à la  fpis 
du  type  des  Tellines , dont  Lamarck  l’avait  rapproché , et  de  celui  des 
Saxicayes  vers  lequel  M.  Reeve  l’avait  entraîné.  La  forme  de  la  coquille 


V 


LES  LiTHÜPHÀüES. 


4^0 

reproduit  exactement  celle  de  l’animal;  il  est  subtrigone  et  cunéiforme 
dans  nos  espèces  des  mers  d’Europe;  il  est  pins  allongé,  subcylia- 
drique  dans  les  espèces  du  second  groupe , qui  proviennent  des  mers  du 
Chili  et  du  Pérou. 

Un  manteau , beaucoup  plus  épais  que  celui  des  Tellines , enveloppe 
l'animal  et  revêt  la  surface  interne  des  valves.  La  circonférence  de  net 
organe,  contient  un  muscle  orbicùlaire,  large,  assez,  épais,  dont  l’in- 
sertion  trace  sur  la  coquille  la  portion  de  l’impression  palléale  qui 
occupe  la  circonférence.  Les  bords  du  manteau  sont  simples,  et  dé- 
pourvus de  tentacules;  cet  organe  se  dédouble  sur  les  bords  comme 
dans  tous  les  autres  Mollusques  acéphalés  ; la  duplicature  interne  reste 
attachée  aux  bords  de  la  coquille  et  en  suit  exactement  le  contour. 
L'autre  bord  qui,  dans  les  Tellines  par  exemple,  est  tentaculifère , 
acquiert  dans  les  Pétricoles  une  étendue  et  une  épaisseur  inusitées  ; 
aussi  il  se  renverse  en  dehors  sur  les  bords  des  valves  elles  revêt  depuis 
la  moitié  du  bord  antérieur  jusque,  vers  l’extrémité. du  bord  postérieur 
ventral.  Cette  portion  exsertile  du  manteau  a une  apparence  particu- 
lière ; elle  est  lisse  , jaunâtre , opaque , et  lorsque  l'on  vient  à en  faire 
la  dissection , on  reconnaît  en  elle  cette  structure  granuleuse  qui  est 
propre  à J,oas  les  organes  sécréteurs  des  Mollusques  acéphalés.  La  sub- 
stance parenchymateuse  de  l’organe  est  creusée  de  canaux  nombreux , 
irréguliers , qui  paraissent  dépourvus  de  parois  propres  et  qui  vont 
constamment  en  grandissant  vers  les  bords  libres.  Il  y a plus;  l’organe 
situé  entre  le?  parois  de  ce  bord  saillant  du  manteau  se  continue  entre 
les  fibres  du  muscle  orbicùlaire  et  vient  s'étendre  entre  les  parois  de  la 
portion  .mince  du  manteau;  de  sorte  que  dans  les  animaux  dont  il  est 
question , cet  organe  spécial  acquiert  un  développement  dont  nous  ne 
trouvons  d’analogie  que  dans  le  manteau  des  G&strochènes  et  des 
Saxicaves. 

Le  long  de  la  ligne  médiane  et  ventrale  j les  deux  lobes  du  manteau 
sont  réunis,  et  par  cette  réunion,  forment  une  zone  assez  large,  en  avant 
de  laquelle  se  montre  une  ouverture  ovalaire,  en  forme  de  boutonnière, 
et  dont  rétendue  est  à peine, d’un  sixième  de  la  longueur  du  bord  infé- 
rieur. Cette  ouverture  est  destinéè  à donner  passage  au  pied.  En  arrière, 
le  manteau  se  prolonge  en  deux  siphons , réunis  à la  base  dans,  une  très 
petite  portion  de  leur  étendue.  Ces  organes  méritent  une  attention  par- 
ticulière, car  ils  concourent  à fournir  au  genre  des  caractères  distinctifs 
d’une  grande  valeur.  Les  siphons  sont  inégaux,  et,  comme  à l'ordinaire, 
c’est  le  siphon  branchial  qui  est  le  plus  gros  et  le  plus,  allongé;  il  .est 
subcylindracé  et  il  se  termine  par  une  ouverture  circulaire,  sur  le  bord 


QUATORZIEME  FAMILLE. 


490 

de  laquelle  s’élèvènt  de  nombreux  tentacules , découpés  en  arbuscules 
et  disposés  ayec  la  plus  grande  symétrie.  Ces  tentacules  ne  sont  pas 
égaux,  un  plus  petit  s’interpose  entre  les  plus  grands,  et  ordinaire- 
ment ranimai  les  incline  au-dessus  de  l’ouverture,  qui  se  trouve  ainsi 
obstruée  par  des  organes  d'une  exquise  sensibilité.  Ces  tentacules  va- 
rient selon  les  espèces,  par  la  forme,  la  grandeur  et  le  nombre.  Le 
siphon  anal  est  conoïde;^  son  ouverture  terminale  est  beaucoup  plus 
étroite  que  sa  base , et  cette  ouverture  est  garnie  d’un  seul  rang  de 
tentacuîes  simples  èt  cylindracés. 

On  muscle  rétracteur,  triangulaire  et  assez  épais  embrasse  la  base 
des  deux;sipTions , sê  glisse  entre  les  deux  membranes  du  manteau,  et 
vient  s*attacher  à l'intérieur  de  la  coquille  où  il  laisse  l’échancrure 
pailéale  dont  nous  avons  parlé. 

La  masse  abdominale  des  Pétricoles  est  courte  et  épaisse  ; ses  parois 
fibreuses,  fort  minces,  se  continuent,  en  avant,  en  un  pied  petit,  à base 
triangulaire  et  aplatie  et  so  prolongeant  en  avant  en  une  pointe  aiguë. 
Entre  le  bord  antérieur  de  l’abdomen-  et  la  face  interne  du  muscle 
adducteur  antérieur  se  trouve  une  petite  bouche  transverse,  garnie 
d’une  paire  de  lèvres  membraneuses  courtes  et  étroites.  Ces  lèvres 
aboutissent  de  chaque  côté  de  l’animal  à une  paire  de  palpes  labiales, 
petites , triangulaires , dont  la  surface  interne  est  couverte  de  très  fines 
lamelles.  Ces  palpes  sont  égales , elles  sont  attachées  par  leur  bord 
supérieur;  la  palpe  externe  se  continue  par  sa  base  "avec  le  manteau. 

Les  organes  branchiaux  sont  très  différents  de  ceux  Ses  Saxicaves, 
et  surtout  de  ceux  des'  Tellines  ; ils  ressemblent  beaucoup  plus  à ceux 
des  Vénus  ; ils  se  composent  de  deux  feuillets  inégaux,  appliqués  l’un 
sur  Tautre , ayant  dans  leur  ensemble  une  forme  ovalaire , ils  descen- 
dent obliquement  de  chaque  côté  de  l’anima!  de  haut  en  bas  et  d’avant 
en  arrière.  La  paire  interne  est  d’environ  un  tiers  plus  large  que  la  paire 
externe;  ces  Organes,  assez  régulièrement  plissés  dans  leur  largeur, 
sont  fort  minces , et  si  on  examine  leur  surface  à un  grossissement 
suffisant,  on  trouve  un  nombre  considérable  de  stries  transverses, 
coupées  en  angles  droits  par  des  stries  longitudinales.  Ces  stries  sont 
produites  par  des  vaisseaux  capillaires  d'uno  extrême  ténuité,  qui 
couvrent  toute  la  surface  de  l’organe,  reçoivent  le  sang  et  le  mettent 
en  contact  avec  le  liquide  ambiant.  Par  leur  base , les  feuillets  bran- 
chiaux sont  attachés  de  chaque  côté  du  corps  et  s’élèvent  jusque  dans 
la  région  du  cœur,  avec  les  oreillettes  duquel  ils  se  mettent  en  conti- 
nuité. La  brièveté  dè  la  masse  abdominale  permet  aux  branchies  de  se 
réunir  sur  la  ligne  médiane  dans  un  très  court  trajet , suffisant  cepen- 


LES  LITHOPHAGES. 


49*i 

dant  pour  se  placer  devant  l'ouverture  du  siphon  anal  et  se  souder  a 
son  pourtour  ; aussi  dans  ce  genre,  comme  dans  tous  ceux  que  nous 
avons  examinés  jusquMcî,  la  cavité  du  siphon  anal,  complétée  par  l’or- 
gane branchial , n’a  aucune  communication  avec  la  grande  cavité  du 
manteau.  * 

L’extrémité  antérieure  du  feuillet  branchial  interne  se  rétrécit  assez 
subitement  en  un  bec  aigu,  que  l’on  voit  se  prolonger  jusque  vers  la 
bouche,  en  se  plaçant  entre  les  palpes  labiales. 

Nous  avons  fait  remarquer  dans  d'autres  genres  la  disposition  parti- 
culière des  valvules  du  manteau  et  de  celles  qui  forment  plus  ou  moins 
complètement  l’ouverture  intérieure  du  siphon  branchial.  Dans  les  Pé- 
Iricoles,  la  valvule' palléale  n’existe  pas,  mais  une  valvule  très  large, 
circulaire  et  percée  vers  le  centre , couvre  l'ouverture  interne  du  siphon 
branchial;  lorsque  l’on  parvient  à examiner,  sur  l’animal  vivant,  les 
mouvements  quelquefois  rapides  de  cette  valvule,  iis  peuvent  se  com- 
parer à ceux  de  la  pupille  de  l'œil  des  animaux  vertébrés. 

Cette  description  abrégée  que  nous  venons  de  présenter  de  l’animai 
des  Pétricoles  s’applique  exactement  à nos  espèces  de  la  Méditerranée 
et  de  l’Océan,  européen.  Nous  avons  retrouvé  de  semblables  caractères 
dans  les  espèces  allongées  et  cylindriques  qui  proviennent  des  mers  de 
l’Amérique  méridionale.  Mais  nos  observations  faites  sur  des  animaux , 
plongés  sans  précaution  dans  une  liqueur  alcoolique,  nous  laissaient  le 
désir  de  voir  des  Bgures  de  ces  animaux  vivants.  Nous  espérions  les 
voir  dans  l’ouvrage  de  M.  d'Orbigny,  Pot/age  dans  V Amérique  méri- 
dionale; mais  noos  avons  été  singulièrement  déçu , en  ne  trouvant  dans 
cet  ouvrage  que  des  figures  d’une  malheureuse  insuffisance.  Il  semble 
que  les  animaux,  observés  par  M.  d’Orbigny,  ont  été  découpés  par  la 
nature  dans  le  métal  le  plus  dur;  il  semble  aussi  qu’on  n'oserait  les 
toucher  sans  être  blessé  par  leurs  contours  tranchants  ou  piquants  ; 
aussi  le  scalpel  de  l’auteur,  arrêté  sans  doute  par  une  résistance  inac- 
coutumée, a à peine  détaché  un  petit  lambeau  du  manteau-,  pour  laisser 
apercevoir  quelques  portions  des  organes  que  cache  celte  enveloppe 
générale.  Il  est  résulté  de  cette  timidité  de  la  dissection,  que  les  figures 
de  M.  d'Orbigny  n'apprennent  rien  de  plus  que  ce  que  l'on  savait  déjà. 

Ce  que  nous  venons  d’exposer  de  l’animal  des  Pétricoles , nous  donne 
la  preuve  que  ce  genre  constitue  en  réalité  un  type  bien  distinct  parmi 
les  Mollusques  de  la  même  clasâe.  Si  le  manteau  est  épais , comme 
dans  les  Saxicaves,  il  déborde  la  coquille,  et  par  là  il  diffère  de  tous 
les  autres  genres  connus.  Son  ouverture  antérieure,  un  peu  plus  grande 
que  dans  le  genre  que  nous  venons  de  citer,  est  beaucoup  plus  petite 


QüATüUZlÈaiE  FAMILLE. 


492 

que  celle  des  Vénèrupes  et  des  Vénus,  et  plus  petite  aussi  que  celle  des 
Tellines  , des  Donaces , dés  Psammobies.  Si , dans  une  classiGcation  on 
voulait  uniquement  s'attacher  à la  progression  qui  so  manifeste  insensi- 
blement dans  l’étendue  de  l'ouverture  palléale , les  Pétricoles  devraient 
descendre  très  en  arrière  des  groupes  précédents,  pour  se  placer  dans 
le  voisinage  des  Solens  et  même  des  Saxicaves.  Maismne  classification 
naturelle  ne  peut  s’établir  d'après  un  caractère  exclusif,  elle  doit  se 
fonder  sur  l’ensemble  de  l’organisation,  et  c’est  alors  que  le  zoologiste 
doit , non  seulement  compter  les  analogies , mais  peser  la  valeur  de 
chacun  dos  caractères , empruntés  à toutes  les  séries  des  organes.  Si  le 
manteau  exclut  les  Pétricoles  de  la  place  où  nous  proposons  de  les 
mettre , les  autres  organes  contre-balancent  ce  caractère  de  peu  de  va- 
leur, et  c’e^t  d’après  eux  que  nous  nous  sommes  déterminé.  En  effet  , 
la  petitesse  de  la  bouche,  la  forme  et  la  grandeur  des  palpes  labiales, 
la  nature  des  branchies,  leur  forme,  leur  position,  leur  étendue , rap- 
prochent les  Pétricoles  des  Vénus , dont  elles  restent  distinctes  par  la 
forme  et  la  grandeur  du  pied  , ainsi  que  par  la  forme  de  la  valvule  du 
siphon  branchial.  Nous  verrons  bientôt , en  traitant  des  Vénérupes , en 
quoi  les  animaux  de  ce  genre  diffèrent  de  celui  des  Pétricoles. 

' Les  Pétricoles  sont  des  coquilles  d’un  taille  médiocre , vivant  dans 
l'intérieur  des  pierres,  presque  toujours  dans  l’obscurité;  elles  sont 
dépourvues  de  toute  coloration  extérieure.  Quelques  espèces , et  parti- 
culièrement celles  de  l'Amérique  méridionale,  sont  teintées  à l’intérieur 
d’un  brun  pourpré  plus  ou  moins  intense;  presque  toutes  ces  coquilles 
deviennent  irrégulières  par  la  ,gêae  qu’elles  éprouvent  dans  les  trous 
quelles  habitent;  presque  toutes  sont  striées  longitudinalement;  quel- 
ques unes  seulement  ont  des  lamelles  transverses. 

Il  esta  présumer  que  le  nombre  des  espèces  s’accroîtra  considérable- 
ment, à mesure  que  l'on  explorera  avec  plus  d’attention  les  roches  cal- 
caires qui  forment  les  rivages  des  divers  continents.  Nous  comptons 
aujourd’hui  trente  et  une  espèces  vivantes  de  Pétricoles,  elles  provien- 
nent dos  mers  qui  ont  été  étudiées  avec  le  plus  de  soin.  11  y en  a sept 
e.spèces  dans  les  mers  tempérées  de  l’Europe.  AI.  Fieuriau  de  Belleviie 
a le  premier  appelé  l'attention  des  naturalistes  sur  plusieurs  espèces  de 
La  Rochelle  ; quelques  unes  passent  do  l’Océan  dans  la  Méditerranée  ; 
il  est  à présumer  que  l’on  en  découvrira  sur  la  cote  occidentale  de 
l’Afrique.  M.  Krauss  en  a trouvé  une  au  cap  de  Bonne-Espérance. 
Quatre  espèces  sont  citées. dans  les  mers  de  T Amérique  septentrionale, 
■et  nous  en  avons  fait  connaître  trois  autres  provenant  des  mers  de  Cali- 
fornie. M.  Sowerby,  dans  les  procès-verbaux  de  la  Société  de  zoologie 


LES  LITHOPHAGES. 


49''> 

de  Londres,  en  a fait  connaître  une  espèce  de  Panama , une  autre  des 
îles  Nicobar  et  une  troisième  des  Gallopagos.  Laniarck  a inscrit,  parmi 
les  espèces  du  genre^  colles  qui  ont  été  rapportéos  de  la  Nouvelle-Hollande 
par  Pérou;  elles  sont  au  nombre  do  trois.  De  toutes  los  régions , la  plus 
riche  en  Pétricolesest  sans  contredit  les  cotes  du  Pérou  et  du  Chili.  Le 
Pérou , visité  par  M.  Curaing , a fourni  neuf  espèces  à cet  habile  obser- 
vateur, ces  mômes  espèces  ont  été  retrouvées  plus  tard  par  M.  d Or- 
bigny  qui,  à son  tour,  a enrichi  nos  catalogues  d'une  espèce  de  la 
Patagonie, 

Les  espèces  fossiles  sont  moins  nombreuses  ; nous  aurons  quelques 
observations  à présenter  sur  plusieurs  d’entre  elles.  II  est  très  douteux 
que  les  deux  espèces  décrites  par  M.  Sowerby,  dans  Touvrage  de 
M.  Fitton , appartiennent  au  genre;  leur  forme  les  éloigne  de  toutes  leurs 
congénères , et  les  caractères  empruntés  à la  charnière  ne  s’accordent 
guère  avec  ceux  des  espèces  vivantes  ; ces  deux  espèces , citées  par  les 
paléontologistes  dans  les  terrains  Crétacés ne  doivent  y être  admises 
qu’avec  une  extrême  réserve. 

Retzius  a fait  connaître  une  espèce  de  la  Méditerranée , sous  le  nom 
de  Venus  lithophagu,.  Poli  a figuré  la  même  espèce  sans  la  décrire,  la 
mentionnant  seulement  dans  Pexplication  des  planches  sous  le  nom  de 
Telline.  Brocchi  a trouvé  cette  même  coquille  à l’état  fossile  dans  les 
terrains  subapennins , il  y ajoute , à titre  de  variété  , une  espèce  très 
distincte  dont  il  donne  une  excellente  figure.  Lamarck  en  a fait  son 
Petricola  chamoides» 

Le  rttpeslris  de  Brocchi  est  une  véritable  Pélricole  ; elle  a 

quelques  ressemblances  avec  le  Venerupisdecmsata  de  Philippi  ; elle  est 
facile  à reconnaître  et  à distinguer.  M.  Sowerby,  dans  son  Généra  of 
shells , figure  sous  le  même  nom  une  espèce  qui  nous  paraît  spécifique- 
ment différente  de  celle  de  Brocchi , l’une  est  couverte  de  stries  treil- 
lissées;  l’autre,  celle  do  Sowerby,  est  lisse.  Nous  proposons  d’imposer 
à cette  dernière  le  nom  du  naturaliste  anglais.  Dans  son  Synopsis-dés 
invertébrés  fossiles  du  Piémont ^ M.  Sismonda  rapporte  au  Petricola 
îamellosa  de  Lamarck , ce  Venus  rupestris  de  Brocchi.  Quand  même 
l’identité  de  ces  espèces  serait  reconnue,  ce  qui  est  contestable,  le 
premier  nom  proposé,  celui  de  Brocchi,  devrait  rester  à l’espèce  par 
droit  de  priorité. 

Le  Tellina  fragilîs  de  Linné  était  rangé  par  Lamarck  parmi  les  Pétri-* 
coles , sous  le  nom  do  Petricola  ochroleuca.  On  trouve  à l’état  fossile 
plusieurs  espèces  très  voisines  de  la  vivante,  et  les  auteurs  qui  les  ont 
mentionnées , ayant  partagé  l’opinion  de  Lamarck,  les  ont  comprises 


49^1  QUATORZIÈME  FAMÏLtE, 

danfî  le  même  genre  ; il  faut  actuellement  les  en  retirer,  ce  qui  diminue 
d’autant  les  Pétricoles.  Do  ce  nombre , sont  le  Petricola  abbreviata , 
Dujardin,  des  faluns  de  la  Touraine,  et  très  probablement  le  Petricola 
peregrina^  de  Bastérot,  des  environs  de  Bordeaux. 

N’ayant  pas  sous  les  yeux  le  Petricola  rupeslris , de  M.  Dubois  de 
Montpéreux , nous  ne  pouvons  constater  son  identité  avec  celle  de 
Brocchi , on  peut  dire  qu’elle  s’en  rapproche  beaucoup  , mais  les  stries 
paraissent  beaucoup  plus  fines  , la  charnière  plus  étroite , l’impression  , 
palléale  plus  courte;  ces  différences,  que  nous  apercevons  d’après  la 
figure,  sont  probablement  suffisantes  pour  séparer  l'espèce  de  Wolhynie 
de  celle  d’Italie , dans  le  cas  où  ces  coquilles  seraient  en  réalité  dis- 
tinctes, nous  proposerions  pour  celle  de  Wolhynie  le  nom  du  natu- 
liste  qui  le  premier  Ta  fait  connaître . 

En  admettant  les  réformes  que  npus  venons  de  proposer,  le  nombre 
des  espèces . fossiles  se  réduirait  à onze,  et  toutes  seraient  propres 
aux  terrains  tertiaires. 

Il  yen  a deux  seulement  dans  le  bassin  de  Paris,  l’une  se  loge  dans 
les  madrépores  qui  sont/dans  les  calcaires  grossiers  , l’autre  s’enfonce 
dans  les  pierres  tendres  ou  les  polypiers  des  grès  marine  de  Valmon- 
dois.  Nous  comptons  quatre  espèces  dans  l’étage  tertiaire  moyen  , une 
aux  environs  de  Bordeaux , la  seconde  en  Touraine , la  troisième  dans 
le  bassin  de  Vienne  et  la  quatrième  en  Wolhynie. 

•Une  seule  espèce , Petricola  laminosa  , Sowerby,  est  cminue  dans  le 
crag,  et  elle  se  trouve  à la  fois  en  Angleterre  et  en  Belgique. 

Quatre  espèces  sont  .actuellement  connues  dans  les  terrains  tertiaires 
supérieurs  de  ITtalie;  l’une  d’elles  , Pëtriçoîa  lühophaga,  très  voisine 
et  peut-être  identique  avec  le  Petricola  striata , est  vivante  dans  la 
Méditerranée. 

Possile  en  Italie  et  en  Sicile. 

Les  terrains  tertiaires  d'Amérique  sont  peu  riches  en  Pétricoles,  une 
seule  est  mentionnée  par  M.  Conrad , c’est  le  Petricola  centenaria. 

1.  Pétricole  rariflamme.  Patricola  rarifiamma.  Desh. 

PI.  12.  f.  10.  11., 12. 

. ^ . r ■ . . ' 

P,  Testa  ovato-trigonâ,  transversâ,  inœqtiilateraU  ^ anticè  breyi,  tur- 

gidâ  y posticè  attemiatd,  alàâ^  sub  epidennide  griseo  postice  Jlammu- 

Its  ri^o^rubris  ornatâ^  îongitudhialiter  striata  ; striis  subdecussatis  , 

posdcalibus  majùrihus^  anticis  evanescentibus. 

Habite  les  côtes  de  Bretagne. 


LES  LITHOPHAGES. 


49^ 

Cette  espèce  est  l’une  des  plus  grandes  des  mers  d’Europe  , sa  forme 
générale  est  assez  semblable  à celle  du  Petrlcoia  striata;  mais  à l’égard 
de  la  forme toutes  les  espèces  européennes  ont  beaucoup  d’analogie. 
Notre  espèce  est  ovale , trigone,  inéquilatérale,  très  renflée  en  avant, 
atténuée  en  arrière.  Le  côté  antérieur  est  court,  arrondi,  obtus;  le 
postérieur,  deux  fois  plus  long , se  rétrécit  et  s’amincit  à la  fois  ; le 
bord  dorsal  postérieur  est  droit,  le  bord  ventral  est  médiocrement 
courbé.  Les  crochets  sont  enflés , proéminents , courbés  en  avant  ; la 
surface  extérieure  est  recouverte  de  stries  longitudinales,  irrégulière- 
ment découpées  par  des  stries  transverses  d’accroissement.  Les  stries 
longitudinales  ne  sont  pas  égales , celles  qui  sont  sur  le  côté  postérieur 
sont  les  plus  grosses;  elles  diminuent  insensiblement  sur  le  milieu  des 
valves  et  s'évanouissent  sur  le  cèté  antérieur.  La  charnière  est  très 
étroite , elle  porte  deux  dents'  inégales  sur  chaque  Valve , la  plus  grosse 
est  bifide  au  sommet.  L’impression  musculaire  antérieure  est  ovalaire  et 
dirigée  très  obliquement  de  haut  en  bas;  l’impression  postérieure  est 
circulaire  au  milieu  de  la  longueur  du  bord  dorsal  postérieur;  l’im- 
pression palléaio  est  très  courte,  elle  descend  d’avant  en  arrière  et  de 
haut  en  bas , comme  si  elle  voulait  gagner  le  milieu  du  bord  inférieur, 
mais,  à une  faible  distance  de  ce  bord,  elle  rentre  sur  elle-même  et 
trace  une  large  sinuosité  triangulaire  largement  ouverte  en  arrière. 

Sous  un  épiderme  grisâtre  et  caduque  , cette  coquille  est  blanche  et 
elle  est  ornée  du  côté  postérieur  de  flammules  longues  et  étroites  d’un 
beau  rouge  brun;  les  vieux  individus  ont  leur  extrémité  postérieure 
teinte  en  dedans  de  brun  violacé. 

2.  Pétricole  roccellaire.  Peiricola  roccellaria.  Larak. 

PI,  12.  f.  7. 

P.  't<!5câ  ovato^trioohâ , trnnsversâ^  inaquilateraU , anticè  hrevi^  fur- 
gidâ^  ohtusâ,  posticè  compressâ  . atteHnatâ,  aibo-sqiialidâ  ; longi^ 
(udînaîiter  sidcatâ^  suîcis  latis  depressis,  antice  minoribus;  iimbo- 
nibus  tumidis  oppositis. 

Lamarck,  An,  s.  vert.  t.  5.  p.  5o4.  n®  7. 

Fayraudeau,  Cat.  des  Moll,  de  Corse,  p.  35.  53., 

Desb.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  2^  éd,  t.  6.  p.  i58.  n®  y. 

Delessert,  Coq.  non  décritts,  pl.  4.  f.  tS.  a.  b, 

Gatlow,  Concb.  nomencl.  p.  19. 

Hauley,  Descr,  cat.  p.  52. 


496  QUATORZIÈME  FAMILLE. 

Woûd,  Ind.  testac.  suppl.  pl.  ii.  ï\  4^.  - 

Requien,  Cal.  des  Moll,  de  Corse,  p.  17.  n° 

Habite  les  roches  calcaires  des  environs  de  La  Roclielle;  elle  se  trouve- 
rait aussi  en  Corse,  d’après  M.  Payi*audeau. 

Si  nous  avons  choisi  cette  espèce  pour  la  faire  figurer  dans  cet  ou- 
vrage , c’est  pour  avoir  occasion  de  mentionner  un  fait  intéressant  qui 
la  concerne.  Nous  avons  reçu  de  La  Rochelle  plusieurs  individus  encore 
en  place  dans  la  pierre  calcaire  qu’ils  avaient  creusée  ; nous  eûmes  ainsi 
occasion  d'observer  les  trous  de  ces  animaux  et  de  nous  assurer  que 
non  seulement  ils  sont  ovalaires  dans  leur  section  Iransversc,  mais 
encore  que  l’animal  laisse  subsister  une  crête  pierreuse  assez  saillante 
correspondant  au  bord  dorsal  de  la  coquille  et  destinée  à s’enfoncer 
entre  les  crochets , de  sorte  que  la  coquille,  étant  presque  aussi  grande 
que  le  trou  qui  la  contient , peut  à peine  se  mouvoir,  et  sa  crête  posté- 
rieure, aussi  bien  que  la  forme  ovalaire  de  la  loge  pierreuse,  s'oppose 
invinciblement  à des  mouvements  de  rotation  qui  seraient  cependant 
nécessaires  pour  expliquer  la  perforation  des  pierres  par  un  moyen  mé- 
canique. L’animal  condamné  à une  immobilité  presque  absolue,  il 
devient  évident  qu’il  ne  peut  agrandir  le  trou  qu’il  habite  que  par  une 
dissolution  lente  et  à l’aide  d’im  agent  chimique. 

Par  sa  forme,  cette  coquille  se  rapproche  de  la  précédente  espèce  ; 
elle  reste  toujours  plus  petite;  ovale  , trigone,  elle  est  très  inéquilaté- 
rale , courte , obtuse  , renflée  en  avant , atténuée  en  arrière , bâillante 
et  contournée  du  côté  postérieur  ; elle  est  plus  régulière  en  avant.  Les 
crochets  sont  renflés,  protubérants,  opposés , à peine  inclinés  en  avant  ; 
il  en  part  en  rayonnant  un  grand  nombre  de  sillons  égaux  sur  toute  la 
partie  postérieure  et  moyenne  des  valves , remplacés  par  des  stries  fines 
sur  le  côté  antérieur.  Les  sillons  sont  assez  larges,  aplatis,  irréguliè- 
rement coupés  par  des  stries  d’accroissement.  La  charnière  est  très 
étroite,  elle  porte  deux  dents  cardinales  inégales  sur  chaque  valve;  elles 
sont  profondément  séparées , et  la  plus  grosse  est  divisée  au  sommet 
par  un  sillon  profond.  L’impression  musculaire  antérieure  est  ovale, 
semilunaire  ; la  postérieure  est  circulaire  ; l’impression  palléale , très 
courte,  s’infléchit  promptement  en  une  sinuosité  large,  profonde, 
demi^elliptique  et  très  largement  ouverte  en  arrière.  Recouverte  de 
son  éDiderme , cette  coquille  est  d’un  gris  foncé  sale  et  terreux  ; elle  est 
blanche  ou  jaunâtre  lorsqu’elle  en  est  dépouillée. 


LES  L1TH0PHA6ES. 


^.97 

GENRE  QUARANTE-QUATRIÈME. 

V^IffÉRUFE.  Venerupis.  (Lamk.) 

Pl.  12,  fig.  l6  à 21. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  ovale  , tr  ans  verse , peu 
épais;  les  lobes  du  manteau  réunis  dans  le  tiers  postérieur  et 
prolongés  en  deux  petits  siphons,  désunis  dans  la  moitié'de  leur 
^ longueur;  siphon  branchial  plus  long  et  plus  gros  que  Tanal, 
garni  à son  ouverture  de  tentacules  branchus , symétriques  et 
inégaux.  Ouverture  du  siphon  anal  rétrécie  par  un  bord  mem- 
braneux dactyliforme,  percée  au  sommet  et  entourée  à la  base 
d*unrang  de  tentacules  simples.  Pied  conique,  petit,  lingui- 
forme  et  bÿssifère  ; branchies  inégales  , subquadrangulaires  , 
réunies  postérieurement , la  branchie  externe  est  la  plus  petite  ; 
bouche  médiocre  ; palpes  labiales  très  petites , triangulaires , 
un  peu  plus  longues  que  larges. 

Coquille  ovale,  transverse,  inéquilatérale  , un  peu  bâillante 
du  côté  postérieur  ; charnière  étroite , présentant  trois  dents 
sur  une  valve  ou  sur  toutes  deux  ; ces  dents  sont  petites,  rap- 
prochées, parallèles,  un  peu  divergentes;  ligament  extérieur. 
Impressions  musculaires  grandes  et  écartées  ; impression  pal- 
léale  parallèle  au  bord  inférieur,  terminée  en  une  sinuosité 
subtrigone  horizontale  et  peu  profonde. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Coucka  tvifidos , Gualtieri.  — 
Donax,  Linné,  Chemnitz,  Gronovius,  Schrœter,  Olivi,  Pen- 
nant , Gmelin , Poli , Dillwyn , Donovan , Montagu , Maton  et 
Racket,  Turton,  Wood.  — Venu$,  Chemnitz,  Schrœter, 
Gmelin,  Cortesi,  Brocchi,  Gerville, Montagu, Turton,  Dillwyn. 
— Cxineus  , Da  Costa,  Humphrey.  — Peiricola  [in  parte) , 
Cuvier,  Lamarck  (o/m),  Turton.  — Rupellaria  [in  parte) , 
Roissy,  Sowerby  jun.  — Venerupis , Lamarck , Férussac , 
Payraudeau,  Rang,  Menke,  Philippi,  Anton,  Swainson, 
Hanley,  Gray,  etc.  — Tellina  ^ Pennant. 

T.  I.  PARTIE. 


32* 


4^3  QUATORZrÈME  FAMILLE. 

OBSERVATIONS.  — En  traitant  du  genre  précédent,  nous  avons  vu 
omment  Lamarck  avait  confondu  dans  un  seul  et  même  groupe  deux 
sortes  de  coquilles  parfaitement  distinctes.  M.  Fieuriau  de  Bellevue , 
dans  son  Mémoire  sur  les  coquilles  lithophages  des  environs  de  La  Ro- 
G/lal/c,  eut  le  mérite  de  distinguer  le  premier  des  Mollusques  confondus 
}iâr  son  savant  c'antemporain.  En  effet , le  genre  qu'il  nomma  Rupellaire 
était  destiné  à réunir  celles  des  Pétricoles  de  Lamarck  qui  ont  deux 
dents  à la  charnière.  Ce  genre  Rupellaire.  adopté  en  1805  , par  M.  de 
Roissy,  dans  la  Conchyliologie  du  Buffon  de  Sonnini,  a été  conservé  par 
Iiarnarck,  non  seulement  dans  la  Philosophie  zàologique^  mais  encore 
dans  VEatlrail  du  cours  publié  en  1812.  Mais  quelques  années  plus 
tard,  Lamarck,  voulant  reviser  et  classer  toutes  les  espèces  contenues 
dans  les  quatre  genres  qu’il  admettait  autrefois,  reconnut  que  trois 
genres  étaient  suffisants  ; il  supprima  les  Rupellaires  et  en  introduisit 
les  espèces  dans  son  genre  Pétricole , qu’il  réduisit  aux  espèces  à deux 
dents  cardinales. 

Depuis  l’institution  du  genre  Vénérupe  dans  VHistoire  des  animaux 
sans  vertèbres  y nous  le  voyons  consacré  dans  presque  toutes  les  mé- 
thodes , soit  qu’on  l’eût  envisagé  comme  suffisamment  caractérisé , soit 
qu'on  l'eût  conservé  à titre  de  sous -genre  ou  de  simplification  des 
Vénus. 

La  plupart  des  conChyliologues  comprennent  aujourd’hui  qu’il  est  peu 
important  qu’un  animal  soit  perforateur  ou  ne  le  soit  pas , cette  pro- 
])riété  n’entraînant  pas  à sa  suite  des  changements  considérables  dans 
l’organisation.  On  remarque,  en  effet,  que  dans  certains  types  de 
Mollusques , il  existe  des  espèces  perforantes  chez  lesquelles  les  carac- 
tères génériques  n’out  subi  aucune  modification  importante.  En  coasé- 
qu'^nce,  avant  d’admettre  un  genre,  d’après  ce  seul  fait  qu’il  est  lilho- 
pli-ïge,  il  faut  constater  encore  chez  lui  des  caractères  particuliers.  La 
plupart  des  conchyliologues  prétendent  aujourd’hui  que  les  Vénérupes 
sont  de  véritables  Vénus  perforantes,  et  que  le  genre  est  par  consé- 
quent inutile.  Ils  ont  tort  et  raison  tout  à la  fois  : raison  , s'ils  prennent 
pour  type  du  genre  le  Venus  liihophaga;  tort,  s'ils  considèrent  le  Donax 
irus  de  Linné  comme  type  de  ce  même  genre.  Car,  en  effet la  première 
coquille  a un  animal  entièrement  semblable  à celui  des  Vénus  dont 
M.  Sowerby  a fait  son  genre  PuUastra  , tandis  que  l’animal  du  Donax 
iras  présente  des  caractères  propres  à en  faire  un  genre  particulier, 
auquel  peut  s’appliquer  le  nom  de  Vénérupe.  II  faut  donc  apporter 
quelques  modifications  à la  constitution  du  genre,  et  y relier  celles  des 
espèces  qui  dépendent  des  PuUastra  de  M.  Sowerby.  Si  les  zoologistes 


LES  LITHOPHAGES. 


499 

ayaient  réformé  le  genre  qui  nous  occupe , comme  nous  le  proposons 
actuellement , il  est  à présumer  qu’ils  auraient  consenti  à le  conserver 
dans  leurs  méthodes  et  à l’associer  aux  Pétricoles  , pour  constituer  avec 
lut  la  famille  des  Lithophages. 

Si  nous  reprenons  l’histoire  du  genre  Vénérupe , nous  verrons  Linné 
en  associer  une  espèce  avec  ses  Donax;  bientôt  après  Ghenmilz  en  fît 
connaître  d’autres  espèces,  mais  il  les  confondit  parmi  les  Vénus.  Da 
Costa , dans  la  CouchyUologie  des  îles  Britanniques , institua  un  genre 
assez  informe  sous  le  nom  de  Cuneus , dans  lequel  il  mélanga  les  Venus 
et  les  Donax  t et  il  entraîna  le  Donax  irus  de  Linné.  Un  assez  grand 
nombre  des  naturalistes  qui  écrivirent  après  ceux  que  nous  venons  de 
citer  distribuèrent  les  espèces  en  partie  dans  les  Donaces  et  en  partie 
dans  les  Vénus.  Quelques  auteurs  seulement  adoptèrent  les  genres  de 
M.  Fleuriau  de  Bellevue  ; plus  tard  presque  tous  les  conchyliologues 
de  ce  siècle , et  Cuvier  lui-même , admirent  le  genre  Vénérupe,  Ce 
genre  resta  dans  les  méthodes  jusqu’au  moment  où  M.  Sower.by,  recon- 
naissant la  plus  grande  ressemblance  entre  le  Venus  litiiophaga  et  ses 
Püllastra , proposa  de  supprimer  les  Vénérupes,  ce  qui  fut  adopté  par 
un  certain  nombre  de  personnes.  Cependant , ainsi  que  nous  le  disions 
tout  à l'heure,  avant  d’accepter  cette  suppression , il  fallait  s’assurer 
si  d’autres  Vénérupes  ne  présenteraient  pas  de  caractères  propres  à les 
faire  maintenir  dans  un  genre  distinct.  Pendant  notre  séjour  dans  l’Al- 
gérie , nous  avons  voulu  comparer  les  animaux  du  Venerupis  irus  avec 
ceux  des  Püllastra , et  nous  avons  observé  quelques  différences  que 
nous  allons  exposer  tout  à l’heure. 

Trois  phases  distinctes  partagent  nettement  l’histoire  du  genre  Véné- 
rupe ; quoiqu’elles  empiètent  les  unes  sur  les  autres , elles  se  recon- 
naissent avec  facilité.  Pendant  la  première,  les  opinions  de  Linné  et  de 
Chemnitz  dominent;  les  Vénérupes  sont  distribuées  entre  les  Donaces  et 
les  Vénus.  Celte  pllase,  très  longue,  se  prolonge  longtemps  après  que 
d'autres  opinions  ont  surgi  ; sa  dernière  manifestation  a lieu  en  1 , 
dans  V Index  testaceologicus  de  Wood,  ouvrage  dans  lequel  la  méthode 
linnéenne  est  suivie  en  toute  rigueur.  La  seconde  phase  commence  avec 
Lamarck,  au  moment  où  il  crée  le  genre  Pétricole,  et  avec  RI.  Fleuriau 
de  Bellevue,  lorsque  ce  savant  observateur  publia  son  mémoire  plein 
d’intérêt  sur  les  Mollusques  perforateurs  ; ainsi  au  commencement  de 
ce  siècle,  les  opinions  précédentes  furent  peu  à peu  abandonnées  et 
remplacées  par  celles  de  Lamarck  surtout,  qui  durent  leurs  perfection- 
nements successifs  à l’excellent  travail  de  M.  Fleuriau  de  Bellevue. 
Enfin,  la  troisième  phase  est  toute  récente  ; elle  est  due  à MM.  Gray 

32* 


5oo  QUATORZIÈME  FAMILLE . 

et  Sowerby,  qui  disloquèrent  la  famille  des  Lithophages  dé  Lamarck  , 
et  introduisirent  les  Vénérupes  dans  la  famille  des  Vénus , et  jusque 
dans  le  genre  Vénus  lui-méme.  On  concevra  facilement  comment  des 
opinions  mixtes  se  sont  formées  aux  dépens  des  trois  principales  que 
noüs  venons  d’exposer;  Il  n’ést  pas  nécessaire  de  les  reproduire  ici , 
puisque  nous  les  avons  mentionnées  en  traçant  T histoire  des  deux  genres 
qui  précèdent.  Nous  avons  préféré  une  de  ces  opinions  mixtes,  parce 
qu’elle  nous  semble  S'accorder  mieux  avec  les  faits  connus  jusqu'ici.  Si 
l’on  a compris  parmi  les  Vénérupes  quelques  véritables  Vénus , il  faut 
les  en  faire  sortir,  et  ne  conserver  dans  le  genre  que  celles  de^  espèces 
qui  se  distinguent  des  Pétricoles  et  des  Vénus. 

Les  Vénérupes  soûl  des  coquilles  qui  vivent  à la  manière  des  Saxi- 
caves  ; les  unes  perforent  les  pierres  * les  autres  se  logent  dans  les  fentes 
des  rochers,  et  se  suspendent  par 'un  byssus;  elles  sont  ovales  ou 
oblongues,  souvent  subglobuleuses;  leur  test  est  plus  épais  et  plus 
solide;  leurs  valves  sont  mieux  formées  que  chez  les  Pétricoles  , pres- 
que toutes  sont  ornées  de  plis  ou  dé  lames  iransverses  et  de  stries  lon- 
gitudinales; leur  épiderme  est  peu  apparent:  en  cela  ces  coquilles  se 
rapprodient  plus  des  Vénus  que  des  Pétricoles.  Les  valves  sont  assez 
régulières,  surtout  dans  les  espèces  perforantes;  celles  qui  vivent  dans 
les  fentes  des  rochers  5e  ressentent  souvent  de  la  gêne  qu’elles  y éprou- 
vent , et  leur  coquille  est  divetsiforme.  Les  bords  des  valves  sont  épais , 
souvent  crénelés.  Les  crochets  sont  plus  ou  moins  saillants  , selon  les 
espèces; ils  s’inclinent  en  avant,  où  l’on  trouve  quelquefois  une  lunule 
nettement  circonscrite. 

La  charnière  se  rapproche  beaucoup  de  celle  des  Pullasira;  elle  con- 
siste en  trois  dents  cardinales,  rapprochées , presque  parallèles,  suppor- 
tées par  une  lame  cardinale  plus  large  et  plus  épaisse  que  dans  les 
Pétricoles  ; dans  quelques  espèces  perforantes , les  dents  cardinales  sont 
plus  divergentes , et  il  arrive  que  la  dent  antérieure  est  séparée  des 
deux  autres  par  une  échancrure  de  la  lame  cardinale.  Le  ligament  est 
externe;  il  est  semblable  à celui  des  Vénus  ; il  s’attache  à des  nymphes 
enfoncées  sous  un  bord  saillant  du  corselet. 

Les  impressions  musculaires  sont  en  proportion  plus  grandes  que 
celles  des  Pétricoles  ; elles  sont  plus  écartées  entre  elles , se  rapprochant 
davantage  des  extrémités  des  valves.  L'impression  antérieure  est  ovale, 
allongée , elle  occupe  la  plus  grande  partie  de  la  hauteur  du  côté  anté- 
rieur. L'impression  postérieure  est  suborbiculaire , elle  partage  le  côté 
postérieur  en  deux  parties  presque  égales.  Quoique  assez  éloignée  du 
bord  , l’in^pression  palléale  lui  reste  parallèle , elle  quitte  l'extrémité  du 


r 


LES  LITHOPHAGES. 


5oi 


muscle  antérieur  et  vient  s’arrêter  non  loin  de  t’extrémité  postérieure  ; 
elle  se  reploie  sur  elle-même  et  dessine  une  sinuosité  horizontale  plus 
ou  moins  profonde,  selon  les  espèces,  et  presque  toujours  triangulaire; 
cette  sinuosité  représente  fidèlement  la  forme  du  muscle  rétracteur  des 
siphons. 

L’animal  des  Vénérupes  a incontestablement  beaucoup  de  ressem- 
blance avec  celui  des  Vénus.  Un  manteau  membraneux , opaque , mais 
moins  épais  que  celui  des  Pétricoles , revêt  l’intérieur  des  valves  ; il  est 
bordé  d’un  muscle  orbiculaire  large  et  épais,  dont  la  circonférence  sô 
termine  en  un  bord  formé  de  quatre  feuillets  membraneux.  L'un  de  ces 
feuillets , le  second , est  plissé  comme  un  jabot  ; il  est  très  extensible  , 
et  c’est  lui  probablement  qui  sécrète  les  lamelles  transverses  de  la  co- 
quille,- telles  qu’elles  existent , par  exemple,  sur  le  Vetierupi^  iras. 
Dans  les  espèces  perforantes,  les  bords  du  manteau  , sans  se  renverser 
sur  la  coquille , sont  plus  proéminents  au  dehors , et  l’on  retrouve  dans 
leurs  tissus  cet  organe  granuleux  que  nous  avons  fait  remarquer  dans 
les  Pétricoles  et  les  Saxieaves.  Les  lobes  du  manteau  se  réunissent  dans 
une  partie  de  la  longueur  du  bord  ventral;  leur  commissure  est  plus 
longue  que  celle  des  Vénus , elle  est  plus  courte  que  celle  des  Pétri- 
coles ; aussi  l'ouverture  destinée  au  passage  du  pied  a plus  d’étendue 
que  dans  ce  dernier  genre.  Les  siphons  sont  en  proportion  plus  grêles 
que  dans  les  Pétricoles  ; pendant  leur  dilatation  ils  acquièrent  la  lon- 
gueur de  la  coquille;  réunis  dans  les  deux  tiers  de  leur  longueur,  ils  se 
séparent,  en  formant  entre  eux  un  angle  d’environ  degrés  ; pendant 
qu’ils  sont  réunis , ils  forment  une  masse  allongée , aplatie,  sur  la  sur- 
face latérale  do  laquelle  on  remarque  utio  légère  dépression  qu’indique  la 
place  de  la  cloison  qui  les  sépare.  Le  siphon  branchial  est  un  peu 
plus  gros  et  un  peu  moins  long  que  l’anal  ; deux  rangs  de  tentacules 
s^élèveht  du  bord  de  l’ouverture  ; dans  l'un  les  tentacules  sont  simples , 
cylindracés , et  ils  se  renversent  en  dehors;  dans  l’autre,  les  lenUcules 
sont  beaucoup  plus  grands , ils  sont  branchus  et  se  renversent  au-dessûs 
de  l’ouverture  sous  forme  d'une  coupole  élégante.  Ces  tentacules  sont 
nombreux,  placés  symétriquement.  Leurs  nombres,  leurs  divisions, 
leurs  couleurs,  sont  autant  d’excellents  caractères  spécifiques. 

La  masse  Abdominale  est  plus  ou  moins  épaisse  selon  les  espèces; 
elle  est  aplatie  dans  celles  qui  sont  comprimées  , plus  arrondie  dans  les 
subglobuleuses  ; elle  porte  en  avant  un  pied  médiocre , aplati , lingui- 
forme , un  peu  plus  grand  que  celui  des  Pétricoles , plus  petit , plus 
étroit  que  celui  des  Vénus.  Si  l’espèce  est  perforante,  le  pied  n’est 
point  fendu  en  son  bord  inférieur,  et  il  est  dépourvu  d’un  byssus;  si 


5o2 


QUATORZIÈME  FAMILLE. 


l’espèce  n’est  point  perforante , son  pied  est  fôndu  le  long  de  son  bord 
postérieur,  et  il  porte  à la  base  un  byssus  composé  d’un  petit  nombre 
de  filaments. 

Une  bouche  étroite  et  petite  s’ouvre  à l’extrémité  antérieure  de  la 
masse  abdominale,  au-dessous  du  muscle  adducteur  antérieur  des 
valves  ; des  lèvres , moins  étroites , couvrent  à peine  l’ouverture  buccale  ; 
elles  gagnent  les  parties  latérales  du  corps  et  se  terminent  de  chaque 
côté  en  une  paire  de  petites  palpes  triangulaires  un  peu  plus  longues 
que  larges,  assez  épaisses*  égales  et  finement  plissées  à leur  surface 
interne. 

Les  branchies  ressemblent  beaucoup  à celles  des  Pétricoles:  elles 
consistent  en  quatre  feuillets  symétriques , deux  grands  appliqués  sur 
les  parties  latérales  du  corps,  deux  externes  d’un  tiers  plus  petits  et 
appliqués  sur  les  .premiers.  La  paire  interne  commence  en  une  pointe 
aiguë;  qui  s’avance  jusqu'au  voisinage  de  la  bouche , s'engageant  un 
peu  entre  les  palpes  labiales.  Ces  organes  descendent  en  arrière  obli- 
quement et  aü  delà  du  bord  postérieur  de  la  masse  abdominale.  Les 
feuillets  externes  sont  plus  étroits  et  plus  courts  en  avant , mais  en 
arrière  ils  égalent  les  feuillets  internes.  Les  organes  dont  nous  par- 
lons ont  leur  surface  régulièrement  plissée;  les  plis  sont  gros  à la 
base,  ils  s’évanouissent  insensiblement  vers  les  bords  libres  des  bran- 
chies. En  arrière  de  la  masse  abdominale,  les  quatre  feuillets  se  réu-- 
nissent  et  s’allongent  assez  pour  se  souder  au  pourtour  membraneux  de 
l’ouverture  interne  du  siphon  anal  et  séparer  la  cavité  de  ce  siphon  de 
celle  du  manteau. 

Toutes  les  espèces  connues  de'  Vénérupes  sont  petites  ou  de  taille 
médiocre  ; leur  nombre  est  peu  considérable , ce  qui  tient  sans  doute  au 
peu  de  recherches  faites  jusqu’ici  de  ces  animaux  qui,  vivant  cachés 
dans  les  fentes  des  rochers  ou  dans  leur  épaisseur,  échappent  facilement 
aux  recherches , souvent  rapides , des  naturalistes  voyageurs.  Aussitôt 
que  des  rivages  calcaires  sont  observés  avec  soin , on  voit  s’accroître 
rapidement  le  nombre  des  Mollusques  lithophages.  Un  exemple  remar- 
quable en  a été  donné  par  M.  Cuming , sur  les  côtes  du  Pérou  et  du 
Chili. 

Quatorze  espèces  vivantes  sont  inscrites  dans  les  catalogues.  Nous 
en  avons  quatre  dans  l’Océan  d’Europe,  trois  sont  dans  la  Méditer- 
ranée, quatre  autres  sont  à la  Nouvelle-Hollande,  à Van-Diemen , à la 
Nouvelle-Zélande.  Nous  en  avons  fait  connaître  deux  de"  la  Californie , 
deux  sont  des  mers  de  l’Inde , les  deux  autres  sont  de  localités  in- 


connues. 


LES  LITHOPHÂGES. 


5o3 


Les  espèces  fossiles  sont  moins  nombreuses , toutes  celles  qui  nous 
sont  connues  proviennent  des  terrains  tertiaires.  Cependant  AI.  de 
Münster,  dans  Goldfuss,  en  a cité  une  dans  les  terrains  de  transition} 
mais  cette  coquille  ne  nous  paraît  pas  du  genre  dans  lequel  l’auteur  l’a 
comprise;  elle  appartient  aux  Cypricardes  où  nous  la  retrouverons 
plus  tard. 

II  y a deux  espèces  dans  le  terrain  tertiaire  inférieur  de  Paris  ; elles 
sont  toutes  deux  des  grès  marins  moyens  d’Àuvers  et  de  Valmandois. 
Elles  sont  logées  dans  les  madrépores  ou  dans  des  galets  calcaiies. 
Indépendamment  du  Venerupis  Faujasi,  cité  aux  environs  de  Bordeaux, 
par  AI.  Bastérot,  le  terrain  tertiaire  moyen  renferme  encore  deux  autres 
espèces  qui  ont  perforé  le  banc  de  calcaire  d’eau  douce. 

AI.  Sismonda  inscrit  quatre  espèces  de  Vénérupes  dans  son.  Synopfii s 
des  invertébrés  fossiles  du  Piémont;  mais  il  compte  parmi  elles  le  Cyprin 
cardia  coralliophaga  de  Lamarck , qui  est  une  Cypricarde  et  non  une 
Vénérupe,  11  y a donc  aussi  trois  espèces  dans  les  terrains  tertiaires 
supérieurs , et  parmi  elles  se  trouve  le  Fenerupis  irus , la  seule  du  genre 
qui  soit  à la  fois  vivante  et  fossile,  et  dont  nous  donnons  plus  bas  la 
description. 

Dans  le  57®  volume  du  Dieiîonnaire  des  sciences  naturelles , AI.  De- 
france  mentionne  six  espèces  fossiles  de  Vénérupes  : trois  étaient  déjà 
connues , les  trois  autres  sont  plutôt  indiquées  que  décrites  ; elles  por  - 
tent des  noms  nouveaux.  Alalheureusement  ces  indications  n'élaut 
accompagnées  ni  d'une  description  , ni  d’une  figure  , il  est  impossible 
de  reconnaître  les  trois  espèces  dont  il  est  question.  Trop  confiant  dans 
une  idenUté  trompeuse  de  noms,  AI.  Defrancea  rapporté  le  Venus  coral-' 
liophaga  de  Brocchi  dans  la  synonymie  du  Venerupis  Faujasi  de 
AI.  Bastérot.  Ces  coquilles  constituent  non  seulement  deux  espèces  bien 
distinctes,  mais  encore  elles  appartiennent  à des  genres  différents;  la 
première  est  une  Cypricarde,  la  seconde  une  véritable  Vénérupe. 

Vénérupe  lamelleuse.  Venerupis  irus.  Lamk. 

PL  12.  f.  16.  17.  18. 

y.  Testa  ovato-transversâ , incequilattrali  atuicè  breviore , angustata , 
posticè  lattere  subangulatâ , albâ^  'velluteolâ  y aiit  rubescente  ; la-- 
mellis  crectis  y transversis  (enuepUcatis  ornatâ , interstitiis  longitudi^ 
naliter  striatis;  striis  tenuibus  ^ depressis;  marginibus  integris , sim~ 
pUcibus  ; n^mpkis  intns  acrQ-.vioîaceis, 

Concka  trijîdos.  Gnalt.  lod.  test.  pl.  95.  fi  A, 

Donax  irus.  Liuoé,  Syst.  nal.  éd.  lo,  p.  683.  û*  90. 


5o4 


QUATORZIÈME  TAMILLE.  ‘ 


Id.  Tîduc,  Syst.  Dat.  éd.  12.  p.  1128.  n®  iii.  > ' 

Cttneitsfoliatns.  Dâ  Costa,  Brit.  conch.  p,  204.  n®  39.  pl.  i5.  f.  6. 
J)onax,  Gronovius,  Zoophyl,  p,  268.  11®  1137. 

Donax  irns,  Chemn.  Cojidi.  Cab.  t.  6,  p.  ^^71.  pl.  26.  f.  268,  270. 
Id,  Schrœter,  Einî,  t.  3.  p.  100.  n®  lo,  ^ 

TelUna  cornubiensis,  Pennant,  Brit.  zool.  t.  4.  p.  89, 

Donax  irns.  Gmelin,  Syst.  nat.  éd.  i3.  p.  3265,  n®  ii. 

'Id,  Poli,  Test.  Sicil.  t.  p.  83.  pl.  10,  f.  i,  pl.  19,  f.  22,  23. 
Donax.  Bruguière.  Eucy,  méth.  pl.  262.  f,  4. 

Donax  irns,  Donovan,  Brit.  shells.  t.  i.  pl.'29.  L 2. 

Id.  Maton  et  Racket.  Lin.  Trans.  t,  8.  p.  77, 

Jd,  Pulteney  in  Hutch.  Dorset.  cat.  p.  32,’  pl.  12.  f.  6. 

Id.  Montagu,  Test.  brit.  p.  108  et  p*  673. 

Id,  Pennant,  Brit.  zool.  2*  éd,  t.  4.  p,  200^  n*  6. 

Pefrico/a.  Brookes,  Intr,  p.  64*  pl-  2.  f,  22, 

Donax  irus,  Dillwyu,  Cat.  l.  i.  p.  t56.  n®  2l.*P/Mr,  syn,  çxcl, 
f^enerupis  irus,  Lamk.  An.  s.  vert,  t,  5.  p.  507.  n®  3. 

Donax  irus,  Turloh,  Conch,  Dict,  p.  43.  n®  7. 

Petricola  irus.  Turtou.  Conchyl.  ins.  brit.  p.  26.  n®  i.  pl,  2,  f.  14, 
Donax  irtni  Gerville,  Cat.  des  coq.  de  la  Manche,  p.  23.  n'*  3. 
Pcnémpîs  irus,  Blainv.  Malac.  p.  559. 

Id,  Payraudeau,  Cat.  des  nloli.  de  Corse,  p.  35.  n®  54.  / 

Id.  Risso.  Hist.  nat.  de  l’Eur,  roérid.  I.  4.  p.  363. 

Donax  irus.  Wood,  Ind.  test,  pl,  6,  f.  21, 

Venerupis  irus.  Collard  des  Ch.  Cat.  des  test,  du  Finistère,  p.  17.  n®  3 
Id.  Deshayes,  Encyc.  méth.  ver»,  t.  3.  p.  1110.  n*  2. 

Id.  Deshayes,  Expéd,  scient,  de  Morée,  Zool.  p,  91.  xs  25. 

Id.  Deshayes  dans  Làmk.  An.  s.  vert.  2®  éd.  t.  6.  p.  x63.  n®  3. 

Id.  Philippi,  Enum.  moll.  Sicil.  t.  i.  p.  2t. 

Scacchi,  Cat.  conch.  reg.  Neap.  p.  7.  '• 

Maravigna.  Mém.  pour  l’Iiist.  nat.  de  la  Sicile,  p.  73. 

Fleming,  Brit.  an.  2®  éd.  p.  45i. 

Hanley,  Dbcr.  cal,  p.  54. 

Philippi,  Enum.  moll.  Sicil.  t.  2.  p.  20. 

Potiez,  Gai.  des  moll.  de  Douai,  p.  240. 

Thompson,  Report  ou  the  Fauna  of  Irel.  p.  262. 

Forbes,  Report  ou  the  OEgean  invert.  p.  143, 

Thorpe,  Brit.  mar.  conch.  p.  60. 

Terani,  Cat.  degli  anim,  invert.  p.  x3. 

PuUastra  irus,  Catlow,  Couch.  nom.  p..4r.  n®  xo. 


5o5 


LES  CONQUES. 

Venerupis  iras.  Desh.  Èxplor.  scient,  de  l’Algérie,  p.  66.  f,  i4,  17. 

Requien^  Cat,  des  moll.  de  Corse,  p.  17,  n®  41. 

Fossilis,  Rliilippi.  Enum.  moll.  Sicil.  t.  1.  p.  ai  ; t.  2.  p.  20. 

S.  Wood)  Cat.  of  shells  l'rom  the  crag.  Ann.  nat.  hisL  1S40.  p.  ado. 

Graieloup,  Cat.  zool.  des  foss.  p.  67.  786, 

Sismonda,  Syn.  ped.  foss.  p.  20. 

Morris,  Cal.  of  Brit.  foss.  p.  104. 

Habile  vivante  fOcéan  d’Europe , la  Mediterranée;  fossile  en  Sicile, 
en  Italie,  dans  le  crag  d’Angleterre,  et  meme  aux  environs  de  Bor- 
deaux , d’apres  M.  Grateloup. 

11,  pe  nous  semble  pas  nécessaire de  décrire  une  fois  de  plus  une 
coquille  aussi  connue  que  celle-ci,  nous  ferons  remarquer  seulement 
qu’elle  est  susceptible  d’un  grand  nombre  de  variations  dans  sa  forme  et 
dans  sa  couleur  ; les  lames  qui  la  recouvrent  sont  plus  ou  moins  sail- 
lantes , selon  quo  l’animal  a été  plus  ou  moins  gêné  dans  ses  accroisse- 
ments. Nous  avons  des  individus  qui , sans  être  roulés  j ont  leurs  lames 
presque  entièrement  effacées  ; d’autres , au  contraire , où  elles  sont  d’une 
grandeur  remarquable  , surtout  sur  le  côté  postérieur.  Presque  tous  les 
individus  sont  blancs  ou  d’un  blanc  jaunâtre  ou  grisâtre  , quelques  uns 
sont  d’un  jaune  fauve,  assez  intense,  quelques  autres  sont  rosés  sur 
les  crochets,  et  d’autres,  enfin,  sont  d’un  rose  pourpré,  quelquefois 
intense. 

Cette  coquille  est  très  commune , surtout  dans  la  Méditerranée. 


QUINZIÈME  FAMILLE, 
lies  Conques.  Nobis. 

CARACTÈRES  DE  LA  FAMILLE.  — Animal  ovale  ou  obrond, 
ayant  les  lobes  du  manteau  réunis  postérieurement,  simples  ou 
frangés  et  prolongés  en  deux  siphons  inégaux,  réunis  à la  base 
ou  dans  toute  leur  longueur.  Ouverture  du  siphon  anal  portant 
des  tentacules  simples  et  cylindracés,  celle  du  siphon  branchial 
les  ayant  tantôt  simples  , tantôt  digités  ou  br^nchus,  ou  n’en 
possédant  aucune  trace.  Pied  triangulaire,  aplati,  tranchant  sur 
ses  bords portant  quelquefois  un  byssus.ià  la  base.  Bouche 


5o6  \^Ul>'2ïÈMk  FAMILLE, 

petite,  ovale,  transverse,  garnie  de  lèvres  courtes  et  étroites 
se  prolongeant  de  chaque  côté  en  une  paire  de  palpes  médio- 
cres, triangulaires,  un  peu  plus  longues  que  larges.  Feuillets 
branchiaux  grands,  aplatis,  subquadrangulaires,  appliqués  Tun 
sur  l’autre  et  se  réunissant  en  arrière  du  pied. 

Coquille  libre,  régulière , close , dents  cardinales  de  deux  à 
quatre,  quelquefois  une  seule  dent  latérale,  ligament  court, 
extérieur.'  Deux  impressions  musculaires  grandes  et  écartées. 
Une  impression  palléale,  parallèle  au  bord  inférieur  et  offrant 
en  arrière  une  sinuosité  médiocre  ovalaire  le  plus'  souvent 
triangulaire  et  oblique. 

GENRES. — Pxdlastra^  Venus,  Gratelowpm.Cyiherea,  Thetis, 
Dosinia,  CyçUna. 

Le  mot  Conque^  que  nous  conservons  pour  l’appliquer  aujourd’hui  à 
une  famille  asspz  réduite  de  Mollusques  acéphales , était  employé  au- 
trefois d’une  manière  beaucoup  plus  générale^  Les  anciens  Conchylio- 
logues  donnaient  le  nom  do  Conque  à toutes  les  coquilles  bivalves 
indistinctement  et  même  à un  certain  nombre  de  coquilles  univalves , 
en  restreignant  l’étendue  de  cette  dénomination  au  moyen  d'épithètes 
particulières.  Dans  ses  divers  essais  de  classification  , Linné  adopta  la 
dénomination  de  Conque , mais  il  l'appliqua  uniquement  aux  coquilles 
bivalves,  auxquelles  il  joignait  les  coquilles  multivalves.  La  science, 
successivement  enrichie  de  nouvelles  découvertes,  ne  pouvait  conserver 
très  longtemps  des  dénominations  aussi  vagues,  et  Lamarck  y substitua 
celle  de  Conchifères  pour  désigner  tous  les  animaux  à coquilles  bivalves, 
et  Cuvier  celle  de  Mollusques  acéphalés , distinguant  ainsi,  par  un  choix 
heureux  du  nom , tous  ceux  des  animaux  qui  n’ont  pas  une  tête  ap- 
parente. 

Lorsque  Lamarck  divisa  les  animaux  en  familles  naturelles , il  pro’ 
posa  dans  la  classe  des  Acéphalés  une  famille  particulière  sous<  le  nom 
de  Conques  ; cette  famille  est  celle  dont  nous  allons  nous  occuper. 
Elle  subit  d'abord  quelques  modifications  dans  les  mains  de  son  auteur, 
et  d’autres  zoologistes,  en  l’adoptant  ensuite,  lui  firent  éprouver  des 
changements  considérables  qu’il  ne  sera  pas  sans  intérêt  de  rapporter 
brièvement. 

Dans  l’origine  ( Philosophie  zooioqiqtie  ),  la  famille  des  Conques  ren- 


LES  CONQUES. 


5o7 

fermait  neuf  genres  dans  i'ordre  suivant  : Venerwardia,  Lucina,  Feniw, 
CyctaSj  Cytheræa,  Galalea,  Donax,  Capsa^  TelUna.  D’après  ce  que 
nous  connaissons  déjà  de  quelques  uns  des  genres  que  nous  venons 
d'énumérer,  il  est  facile  de  s’apercevoir  qu’ils  ne  sont  point  dans  leurs 
rapports  naturels;  aussi  Lamarck  ne  tarda  pas  d’adopter  quelques 
changements  salutaires  dans  la  constitution  de  cette  famille.  En  1812, 
il  la  partagea  en  Conques  fluviatiles  et  en  Conques  marines  : dans  la 
première  section  sont  les  genres  Cyclas  et  Galatea;  dans  la  seconde  se 
trouvent  les  genres  Venericardia^  Lucma,  Vejivs,  Cythereat  Cypn'na, 
Donacilla^  Donaco,  Capsa  et  TeUina.  II  y a ipi  doux  genres  de  plus  , 
Cyprim  et  Donacüta.  Lamarck  ne  resta. pas  satisfait  de  l’arrangement 
de  la  famille  des  Conques , et  il  la  modifia  profondément  dans  son  der- 
nier ouvrage.  Il  y trouva  les  principaux  élémçnts  de  sa  famille  des 
Nympbacées , de  sorte  qu’en  conservant  Iq  môme  nom  et  la  même  di- 
vision en  fluviatiles  et  marines , la  famille  dos  Conques  se  trouve  ré- 
duite-à  sept  genres,  Cyclas,  Cyrena , Galathea  dans  les  fluviatiles, 
Cyprina,  Cylherœa^  Venus,  Vemricardia  dans  les  marines. 

. Tandis  que  Lamarck  faisait  de  louables  efforts  pour  faire  apercevoir 
lys  rapports  naturels  des  genres,  tandis  qu’il  cherchait  à . conserver  à 
ses  genres  .eux-mêmes  une  étendue  qui  leur  assignait  des  caractères 
d’une  valeur  déterminée,  d’autrçs  conchyliologues  entraînés  par  des 
idées  diflérentes  , moins  mûries  aux  rayons  d’une  saine  philosophie, 
cherchaient  à multiplier  les  genres  et  en  déterminaient  les  rapports  non 
d’après  l’ensemble  des  caractères,, mais  d’après  un  seul  emprunté  à la 
charnière.  C'est  ainsi  que  M.  Schumacher,  voulant  réduire  l’étendue  du 
genre  Vénus , consacra  ce  nom  générique  aux  Cythérées  épipeuses  et  à 
celles  des  espèces  pour  lesquelles  Poli  créa  son  genre  Arthemis.  Ce  genre 
ne  répond  ni  .aux  Vénus,  ni  aux  Cythérées  de  Lamarck;  ce  dernier 
conservé  a pour  type  Je  Venus  meretrix  de  Linné , de  sorte  que  déjà  le 
genre  Cythérée  se  trouve  sous  deux  noms  différents.  Il  est  encore  re- 
produit une  troisième  fois  sous  la  dénomination  de  Trigona  et  une 
quatrième  fois  sous  celle  de  Circe.  Quant  aux  véritables  Vénus,  M.  Schu- 
macher les  démembre  aussi  en  plusieurs  genres,  sous  les  noms  de 
Mercenaria , Tapes  et  ÂntigoTia.  On  croirait  que  ces  genres  démembrés 
des  Vénus  de  Linné  sont  rapprochés  dans  l’ordre  méthodique , il  n’en 
est  rien  ; ils  sont  disséminés , séparés  les  uns  des  autres  par  d’autres 
genres  avec  lesquels  ils  ont  fort  peu  d’analogie. 

Dans  le  temps  que  Lamarck  publiait  le  5®  volume  de  ses -4namaïa 
sans  vertèbres,  M,  de . Blainville  proposait,  dans  le  Dictionnaire  des 
sciences  naturelles , une  famille  des  Concliacées  infiniment  plus  étendue 


5io8 


QUINZIÈME  famille. 


que  celle  de  Lamarck,  reufermant  dix-neuf  genres,  divisés  en  deux 
groupes,  non  plus  d’après  l’habitation,  mais  d’après  la  position  du  li- 
gament. Quelques  années  plus  tard-,  M.  de  Blainville,  dans  son  Traité 
de  Malacologie  , conserva  la  même  famille;  mais  il  la  divisa  d’après  ce 
caractère  de  la  présence  ou  de  l’absence  des  dents  latérales  de  la  char- 
nière ; et  comme  ce  caractère  a réellement  peu  de  valeur  pour  indi- 
quer des  rapports  naturels,  U en  résulta  des  rapprochements  très 
inattendus  entre  des  genres  qui  n’ont  entre  eux  qu’une  analogie  très 
éloignée.  Ainsi,  nous  trouvons  les  Mactres  elles  Érycines  à la  suite 
des  Cardium,  des  Lucines,  desCyclades;  les  Crassatelles  et  les  Vénus 
dans  le  même  groupe,  les  Ongulines  à la  suite  des  Corbules,  desVé- 
nérupes  et  des  Coralliophages. 

M.  Rang  chercha  à améliorer  la  classification  de  M.  de  Blainville; 
il  était  difficile  qu’il  le  fît  avec  succès , voulant  ajouter  encore  de  nou- 
veaux genres  à ceux  admis  dans  lé  Traité  de  Malacologie.  Vingt-deux 
genres  se  comptent  dans  la  famille  des  Concbacéës  de  M.  Rang;  il  y 
introduit  le  genre  Iridine,  dont  il  fait  une  section  particulière:  le  reste 
de  la  famille  est  divisé  en  plüsieurs  sections  d’après  la  présence  ou 
l’absence  des  denl-s  latérales , d’après  la  régularité  ou  rirrégularité  de 
la  coquille;  et  sous  ce  nom  de  coquilles  irrégulières,  M.  de  Blainville 
et  M.  Rang  entendent  les  coquilles  lithophages  de  Lamarck.  Nous 
l'avons  dit,  il  est  très  difficile  de  rendre  haturelles  ces  immenses  familles 
contenant  près  de  la  moitié  de  la  classe  des  Acéphalés  ; aussi  elles  ont 
été  abandonnées,  et  il  est  à présumer  que  M.  de  Blainville  lui-même , 
connaissant  les  faits  nouveaux  dont  la  science  s’est  enrichie,  ne  con- 
serverait plus  une  famille  aussi  étendue  que  celle  dont  nous  venons  de 
parler. 

Lamarck  ayant  diminué  l’étendue  de  la  famille  des  Conques , nous 
avons  suivi  l’exemple  de  ce  savant  zoologiste , en  réduisant  encore  la 
même  famille,  lorsque  nous  l’introduistmes  dans  notre  classification  de 
V Encyclopédie  ; en  effet,  nous  en  avons  détaché  les  Conques  fluviatiles 
pour  en  former  une  famille  distincte.  A cette  époque,  les  Conques  étaient 
réduites  pour  nous  aux  trois  genres  Cyprîne , Vénus , Astarte.  Nous 
fondant  sur  cette  observation  que  la  charnière  des  Cythérées  est  modifiée 
insensiblement  pour  prendre  les  caractères  de  celle  des  Vénus , nous 
avions  supprimé  ce  genre  Cythérée , l’admettant  seulement  à titre  de 
section  des  Vénus.  Les  Fullastra,  les  ArthemiSf  nous  présentant  les 
mêmes  transitions  avec  le  grand  type  des  Vénus , nous  ne  les  admet- 
tions plus  comme  genre,  mais,  ainsi  que  les  Cythérées,  à titre  de  sections 
de  Vénus.  Lorsque,  plus  tard,  nous  pûmes  contrôler  les  travaux  dé 


LES  CONQUES. 


5 09 

Poli  par  des  observations  directes,  nos  opinions  furent  successivement 
modifiées,  et  nous  aperçûmes  la  possibilité  de  constituer  quelques  bons 
genres  aux  dépens  des  Vénus.  En  effet,  d’un  côté,  nous  voyons  des 
animaux  ayant  les  siphons  réunis  à la  base,  divisés  au  sommet  dans  le 
tiers  ou  la  moitié  de  leur  longueur,  et  d’un  autre,  des  animaux  ayant 
leurs  siphons  réunis  dans  toute  leur  longueur.  Voilà  donc  deux  groupes 
parfaitemeilt  distincts i dans  l'un  se  rangent  les  Venus  et  les  Pullastra , 
dans  l’autre  les  Cythérées  et  les  Arthémis.  Mais  une  grande  difficulté 
se  présente  au  sujet  des  Cythéréesj  car  quelques  unes,  telles  que  le 
Cytherea  chione , ont  les  siphons  réunis  dans  toute  leur  longueur,  tandis 
que  d’autres,  en  conservant  une  charnière  identiquement  semblable, 
ont  les  siphons  désunis  au  sommet.  Nous  citerons  le  Cytherea  venetiana , 
par  exemple.  Auquel  des  deux  caractères  devra-t-on  donner  la  préfé- 
rence? Si , à l'exemple  de  Lamarck,  on  se  laisse  guider  par  les  carac- 
tères de  la  coquille , il  est  évident  que  Ton  entraînera  parmi  les  Cythé,- 
rées  deux  sortes  d’animaux  qui  se  distinguent  parfaitement.  Si,  an 
contraire,  on  veut  décider  la  séparation  des  espèces  d'après  les  carac^ 
tères  des  siphons,  il  faudra  donc  attendre  que  les  animaux  de  toutes  les 
espèces  soient  connus  avant  de  pouvoir  les  classer,  ce  qui  laissera  de 
l’incertitude  pour  bien  des  années  encore  dans  cette  partie  importante 
de  la  classificalion.  Nous  disons  très  importante , non  à cause  du  nombre 
des  genres,  mais  parce  qu’ils  sont  extrêmement  riches  en  espèces;  que 
ces  espèces  se  distribuent  dans  toutes  les  mers,  et,  à l’état  fossile,  des- 
cendent dans  un  assez  grand  nombre  de  formations.  Sans  perdre  de 
vue  Vd  Paléontologfe  pratique , il  est  indispensable  d'indiquer  d’abord  là 
valeur  des  genres  et  de  les  circonscrire  au  moyen  de  caractères  , qui 
ne  permettent  aucune  ambiguïté.  La  difficulté  que  nous  venons  de  sou- 
lever resterait  insoluble  si  l’on  voulait  persister  d’une  manière  absolue 
dans  Tune  ou  Lautre  opinion.  Dans  l’intérêt  bien  entendu  de  la  science , 
nous  croyons  devoir  admettre  un  genre  Cylhérée,  essentiellement  ca- 
ractérisé par  les  coquilles,  et  néanmoins  solliciter  de  la  part  des  obser- 
vateurs le  plus  grand  nombre  possiblè  de  renseignements  sur  les  ani- 
maux de  toutes  les  espèces  de  ce  genre.  Il  viendra,  sans  doute,  un 
moment  où  pourront  se  concilier  des  caractères  qui  aujourd’hui  sem- 
blent se  contredire. 

M.  d’Orbigny,  à la  famille  de  Conchacées  de  Lamarck,  a substitué 
celle  des  Vénusidées  dont  il  a emprunté  le  nom  à M.  Gray,  se  réservant 
le  droit  bien  naturel  de  l’arranger  suivant  ses  propres  idées  de  classi- 
fication. Nous  trouvons  trois  genres  seulement  dans  cette  famille  de 
M.  d’Orbigny;  les  Pétricoles,  les  Vénus  et  lesThétis.  Nous  avons  dit 


f 


ôio 


QUINZIEME  FAMILLE. 


précédemment  pourquoi  les  Pétricoles  doivent  rester  dans  la  famille  des 
Lithophages  ; quant  au  genre  Vénus , M.  d’Orbigny  lui  rend  à peu  près 
Télendue  que  lui  avait  donnée  Linné,  c’est-à-dire  qu’il  y réunit  leà 
genres  Cytiterea  et  ÂJ'themis.  Par  une  conséquence  naturelle#  M.  d'Or- 
joint  aux  Vénus  tous  les  genres  qui  en  ont  été  démembrés  par 
Schumacher.  Quant  au  genre  Thetis  , nous  en  traiterons  un  peu  plus 
tard;  seulement  il  faut  remarquer  une  sorte  de  contradiction  entre  la 
classification  de  M.  d’Orbigiiy  et  les  faits  dont  il  a donné  connaissance 
dans  son  Histoire  des  Mollusques  de  l’Amérique  méridionale.  En  effet-, 
M.  d’Orbigny  a connu  les  animaux  des  trois  genres  qu’il  rassemble  ; il 
dit  lui-même  que  le$  uns  ont  les  siphons  disjoints,  les  autres  à. demi 
réunis,  et  enfin  d'autres  les  ont  réunis  dans  toute  leur  longueur  t il 
semble  dès  lors  qu’il  était  facile  à M.  d'Orbigny  de  grouper  en  trois 
genres  les  animaux  dont  il  parle  ; mais  comme  les  caractères  dos  siphons 
ne  s’accordent  pas  avec  ceux  des  coquilles,  il  donne  la  préférence  à 
Ces  derniers,  contrairement  aux  principes  qui  l’ont  guidé  dans  d'autres 
parties  de  sa  classification.  ^ 

Il  est  aujourd’hui  hors  de  doute , d’après  les  observations  de  M.  Phi- 
lippi,  auxquelles  nous  pouvons  ajouter  tes  nôtres,  que  le  genre  Astarte 
ne  doit  pas  rester  dans  la  famille  des  Vénus,  ün  manteau  complète- 
ment ouvert,  un  pied  fendu,  l'absence  des  siphons;  tous  ces  caractères 
reportent  ce  genre  dans  la  famille  des  Cardites. 

Pour  terminer  Thisloire  de  la  fandlle  des  Conques.de  Lamarck,  il 
nous  reste  à examiner  la  classification  nouvelle,  proposée  par  M.  Gray, 
dans  la  15®  partie  des  Procès*verbaux  de  la  Société  zoologtgjte  de  Lon~ 
dres.  Et  d’abord  pourquoi  M.  Gray  commence-t-il  la  classe  des  Con- 
chifères  -par  la  famille  des  Vénéridesî  Nous  avouons  ne  pouvoir  le 
deviner.  Jusqu’ici  tous  les  classificateurs , quels  que  soient  les  principes 
de  leurs  méthodes , ont  toujours  été  entraînés  par  la  nature  des  choses 
à placer  la  famille  des  Vénus  vers  le  milieu  de  la  série  des  Mollusques 
acéphalés  dimyaires.  Que  l’oii  prenne  la  méthode  de  Cuvier  ou  celles 
qui  en  découlent,  qu’on  la  compare  à celle  de  Lamarck  et  de  ses  disci- 
ples, et  dans  l’une  et  l’autre  la  famille  des  Vénus  est  vers  le  centre  du 
grand  groupe  des  acéphalés  dimyaires  ; quels  que  soient  les  caractères 
que  l’on  choisisse  pour  fonder  l’ordre  méthodique,  il  en  résulte  toujours 
ce  fait  remarquable,  que  les  Vénus  se  rangent  naturellement  à la  place 
que  presque  tQus  les  naturalistes  leur  assignent.  Ainsi , ni  dans  les 
animaux , ni  dans  leurs  coquilles , nous  n’apercevons  les  raisons  qui  ont 
déterminé  le  savant  anglais  dans  le  choix  de  sa  nouvelle  méthode  ; et  si 
ce  zoologiste  possède  de  nouveaux  éléments  de  classification  fondés  sur 


LKS  CONQUES.  5ii 

des  découvertes  récentes,  nous  le  conjurons,  au  nom  delà  science  et 
de  ses  plus  chers  intérêts , de  les  divulguer  dans  le  plus  brçf  délai. 

M.  jGray  divise  en  deux  sous-familles  cette,  première  famille,  des 
Vénérides.  Sous  le  nom  de  Merëtricina , la  première  sous-famille  cor- 
respondant assez  exactement  au  genre  Cythérée  de  Lamarck,  contient 
huit  genres.  Dan^  la  seconde  sous-famille  Fenusina,  comprenant  à la 
fois  les  genres  Venus,  Venerupis  et  Petricola  de  Lamarck,  M.  Gray  y 
admet  dix  genres.  Sur  les  dix-huit  genres  cçntenus  dans  la  famille  des 
Vénérides , trois  nous  sont  déjà  connus.  Ce  sont  les  Capses,  les  Pétricoles 
et  les  Vénérupesj  nous  n’aurons  donc  pas  à les  examiner  de  nouveau, 
nous  les  mentionnerons  seulement  à la  place  où  ils  sont  dans  la  série 
pour  faire  comprendre  dans  son  ensemble  la  famille  dont  nous  nous 
occupons.  Vpiçi  dans  quel  ordre  sont  disposés  les  genres  de  la  famille 
des  Vénérides. 

Première  sons-famille,.  Meketbicina  : 1°  Dosinia,  Meretrix,  3“  Cu- 
neus,  Grateloupia.,  5°  Trigona.  ù'^  Dione,  7®  Circe,  8®  Venus, 

Deuxième  sous-famille.  Venüsixa  : j)®  Mercetiqria,  \ Anomalocardia, 
'H®  Cyprina,  W'  Chione,  13®  Tapes,  1 4®  iîupe^/ana , 15®  Clementia, 
1G“  Glaucmome , 17®  Capsa,  18®  Petricola, 

Examinons  le  plus  brièvement  possible  chacun  de  ces  genres,  et 
voyons  si  nous  devons  les  admettre  tous  ou  en  rejeter  une  partie. 

1“  Dosinia.  — Dans  un  ouvrage  presque  oublié  et  qui  devrait  être 
plus  souvent  consulté,  un  naturaliste  cminenl,  ScopoLi,  a ajouté  plusieurs 
genres  à ceux  de  Linné,  et  ces  genres,  quoique  brièvement  exposés, 
se  reconnaissent  avec  facilité  parce  qu’ils  sont  fondés  sur  de  bons  ca- 
ractères. M.  Gray  est  le  premier  qui  ait  rappelé  au  souvenir  des  conchy- 
liologups  V ïntrfiduçtmi  à l' Histoire  naturelle  publiée  en  1777  par 
Scopoli.  Notre  auteur,  dès  cette  époque , avait  déjà  reconnu  les  carao- 
lères  des  coquilles  avec  lesquelles  Poli  ht  plus  tard  et  d’une  manière 
plus  complète  son  genre  Arlhemis , genre  que  Lamarck  confondit  avec 
les  Cythérées.  On  reconnaît  chez  Scopoli  un  observateur  exercé  et  plein 
de  sagacité;  il  caractérise  son  genre  par  quatre  dents  à la  charnière, 
dans  les  deux  valves,  et  il  ne  (e  confond , pas  ^avec  les  Cythérées  de 
Lamarck  , qu'il  laisse  dans  les  Vénus.  Nous  devons  donc , à l’exemple 
de  M.  Gray,  restituer  au  genre  sop  premier  nom , et  à ce  nom  dUr- 
themis  substituer  celui  de  Dosinia,  par  respect  pour  la  loi  de  la 
priorité. 

S**  Meretrix.  — Lamarck  avait  d'abord  donné  ce  nom  à un  démenir 
brement  des  Vénus  de  Linné,  auquel  il  substitua  plus  tard  celui  de 
Cytherea.  Le  nom  de  Çytherea  sera  toujours  préféré,  nous  le  croyons , 


5 1 3 QUINZIÈME  FAMILLE . 

f 

parce  que  les  zoologistes  aiment  à respecter  la  liberté  du  savant  qui , 
dans  le  cours  de  ses  travaux , s'applique  à les  améliorer  et  substitue 
une  dénomination  meilleure  à celle  qu’il  regarde  comme  mauvaise. 
M . Gray  ne  se  borne  pas  au  changement  du  nom , il  modifie  le  genre  en 
le  réduisant  aux  seules  espèces  voisines  du  CÿUiérea  meretrix. 

3*"  CnNKüs.  — Ce  genre  Cuneus  n’est- pas  celui  de  Da  Costa.  On  se 
rappellera^  sans  doute,  que  dans  sa  Cmthyliologie  britafiniquej  Da 
Costa  institua  un  genre  Cuneus  pour  y rassembler  des  Donaceset  des 
Vénus.  Rejeté,  ce  genre  tomba  dans  l’oubli.  M.  Megerie,  en  ^811  , 
reprit  ce  nom  depuis  longtemps  abandonné , et  l’appliqua  à un  groupe 
d’espèces  rapportées  aux  Donaces  par  Lamarck  , et  qui  a pour  type  le 
Venus  meroe.  Si , lorsque  f animal  en  sera  connu , le  Donax  meroe  doit 
quitter  le  genre  Donax,  il  est  à présumer  qu’il  rentrera  dans  les  Cylhé- 
rées , car  il  en  présente  la  plupart  des  caractères. 

4“  Gbateloopii.  — Ce  genre  diffère  peu  des  Cythérées , surtout  du 
groupe  des  Corbicules  ; mais  sa  dent  postérieure  divine , et  surtout 
l’impression  paUéale,  noüs  déterminent  à le  conserver; 

5®  Trigona.  — M.  Megerle  est  le  créateur  de  oe  genre;  nous  n’en 
connaissons  pas  l’animal , mais  la  coquille  ne  différant  de  celle  des 
autres  Cythérées  par  aucun  caractère  considérable,  nous  ne  l’admettons 
pas  actuellement,  et  nous  le  faisons  rentrer  dans  le  genre  d’où  il  a été 
extrait. 

6°  Dioxe  , Megerle.  — Ce  genre , s’il  était  admis , aurait  pour  type 
les  Cÿtherea  Qiione  ei  Dîone  de  Lamarck.  En  quoi  ces  espèces  diffèrent- 
elles  des  autres  Cythérées? 

7®’Ciiice,  Schumacher.  — Nous  serions  plus  disposés  à adopter  ce 
genre  ; il  est  destiné  à réunir  toutes  lès  èspèces  de  Cythérées  aplaties , 
dont  le  Cÿtherea  scripta  peut  donnôr  une  idée.  Dans  ces  espèces , 
l’impression  palléaleest  simple,  d'où  l’on  pourrait  conclure  que  l’animal 
est  dépourvu  de  siphons  postérieurs  ; mais  avant  d’adopter  le  genre , il 
faut  se  souvenir  des  Cardium , chez  lesquels  l’impression  paltéale  est 
simple,  quoique  l’animal  soit  pourvu  de  deux  siphons  courts;  il  faut 
aussi  ne  pas  perdre  de  vue  ce  fait  important,  que  dans  les  Cythérées  on 
voit  le  sinus  palléal  s’amoindrir  insensiblement  et  disparaître  enfin 
dans  les  espèces  du  genre  Ciccé  de  M.  Schumacher.  Nous  pensons 
qu'avant  de  l’admettre  on  de  le  rejeter  définitivement , il  faut  attendre 
des  observations  suc  l’animal  et  le  laisser  provisoirement  parmi  les 
Cythérées. 

8®  Venus  , Linné.  — ^ Le  dernier  genre  de  la  sous-famille  est  celui  des 
Vénus.  Ce  genre,  tel  que  M.  Gray  le  comprend,  ne  ressemble  pas  à 


LES  CONQUES. 


celui  de  Lamarck,  et  moins  à celui  de  Linné;  il  est  réduit  aux  espèces 
voisines  des  Kenus  verrucosa  et  puerpera , c’est-à-dire  que  dans  ce 
groupe  M.  Gray  réunit  des  coquilles  à trois  dents  cardinales  divergentes 
et  à peu  près  égales.  Nous  allons  trouver  dans  la  seconde  sous-famille 
les  autres  genres  qui  continuent  les  modifications  proposées  par  M.  Gray 
dans  le  genre  Vénus. 

9"  Mercenaria,  Schumacher.  — Proposé  par  M.  Schumacher,  nous 
comprenons  difficilement  pourquoi  M.  Gray  l'a  adopté;  en  effet,  il  a pour 
type  le  fVnus  mercenaria  , qui  a trois  dents  à la  charnière , et  dont  tous 
les  autres  caractères  s’accordent  avec  ceux  des  Vénus  proprement  dites. 

10“  Anomalocardia,  Schumacher.  — Ce  genre  de  Schumacher  mé- 
riterait plutôt  d’ôlro  conservé  que  le  précédent , si  l’on  voulait  oublier 
toutes  les  modifications  que  présente- la  charnière  dans  le  grand  type 
des  Vénus;  il  est  destiné  aux  espèces  qui  ont  deux  dents  cardinales  et 
une  sinuosité  palléale  très  courte.  Ce  genre  est  pour  nous  inadmissible 
dans  l’état  actuel  de  la  science. 

1 r Cyprixa,  Lamk.  — Tous  les  conchyliologues  admettent  ce  genre, 
et  nous  suivons  leur  exemple  ; mais  doit-il  faire  partie  de  la  famille  des 
Conques?  C’est  la  question  qu’il  conviendra  d'examiner.  On  a une  bonne 
figure  de  l’animal  du  Cyprina  Jslnndica  clans  le  Faitna  suecica  de  MüUer. 
Ce  Mollusque  se  rapproche  beaucoup  do  celui  des  Vénus,  mais  il  en  est 
assez  différent  pour  entrer  dans  une  autre  famille;  ainsi  les  siphons  sont 
ires  courts  et  rapprochés  de  ceux  des  Cardhm.  Le  siphon  anal  a à peine 
le  quart  du  diamètre  du  branchial  ; l’un  et  l’autre  sont  garnis  de  tenta- 
cules simples  ; ils  sont  dépourvus  d’un  muscle  rétracteur.  Si  l'on  vient  à 
comparer  cet  animal  avec  celui  d’une  grande  espèce  de  Cyrène,  telle 
que  le  Zeildnica , par  exemple , on  observe  entre  eux  de  nombreuses 
ressemblances;  aussi  nous  n’hésitons  pas  à comprendre  les  Cyprines 
dans  la  famille  suivante , celle  des  Cyclades, 

12“  Chione,  Megerle.  — Nous  ne  comprenons  pas  plus  l’ulilité  de 
ce  genre  que  celle  des  Mercenaria  et  des  Ânomatocardia.  En  quoi  les 
Keîms  Di/sera,  Gullma,  etc.,  diffèrent-elles  des  autres  Vénus?  Nous 
connaissons  les  animaux  de  ces  espèces , ils  ne  diffèrent  pas  générique- 
ment de  ceux  des  Tenus  verrucosa , puerpera  , été. 

13“  Tapes,  Megerle.  — Ce  genre  correspond  exactement  à celui 
que  plus  tard  M.  Sowerby  a nommé  IhdlaHra.  Quoique  le  nom  de 
Tapes  soit  moins  heureux  que  celui  choisi  par  M.  Sowerby,  il  doit 
cependant  rester  à cause  de  sou  antériorité. 

Nous  passons  sous  silence  le  genre  Rupellaire  ou  Vénérupe , nous 
on  avons  traité  dans  la  famille  précédente. 

T.  l.  -A*  PAHTtF.. 


O O * 


5 1 4 QUINZIÈME  FAMILLE . 

1 4°  Clementia,  Gray.  — La  coquille  qui  sert  de  type  à ce  nouveau 
genre  de  M.  Gray  ne  diffère  en  rien  des  autres  Vénus,  si  ce  n’est 
qu’elle  est  très  mince , blanche  et  papyracée  ; assurément  ces  carac- 
tères sont  insuffisants  pour  la  création  d’un  bon  genre. 

1 5"  Glaocosomie  , Gray.  — Nous  ne  connaissons  pas  encore  l’animal 
de  ce  genre  intéressant , vivant  dans  les  eaux  douces  , ayant  une  char- 
nière à trois  dents  ; il  nous  semble  se  rapprocher  des  Cyrènes  et  des 
Cyclades,  c’est  pour  cela  que  nous  le  rangeons  dans  la  famille  suivante. 

Enfin,  la  famille  des  Veneridœ  se  termine  par  les  deux  genres  Capse 
et  Pétricole  ; ils  nous  sont  connus  et  nous  y renvoyons  le  lecteur. 

Tel  est  l’ensemble  de  celte  grande  famille  de  M,  Gray;  l’examen 
auquel  nous  nous  sommes  livré  nous  démontre  qu'elle  renferme  un 
assez  grand  nombre  de  genres  inutiles  et  quelques  autres  qui  ne  sont 
pas  à leur  place.  C’est  ainsi  que  nous  sommes  conduit  à n'admettre 
que  sept  genres  dans  la  famille  des  Conques  : six  de  ces  genres  sont 
parfaitement  connus;  le  septième  nous  paraît  nécessaire  pour  réunir 
quelques  espèces  voisines  des  Dosinia , mais  qui  n’ont  jamais  que  trois 
dents  à la  charnière  de  chaque  valve. 

Les  animaux  réunis  dans  la  famille  des  Conques  offrent  quelques 
caractères  généraux  à l’aide  desquels  tous  les  genres  se  rattachent  les 
uns  aux  autres , quoique  par  la  diversité  de  plusieurs  autres  caractères 
plus  apparents  que  profonds , ils  semblent  dépendre  de  plusieurs 
groupes  distincts. 

Le  manteau  , dans  tous  les  animaux  de  la  famille  des  Conques,  offre 
les  caractères  que  nous  avons  reconnus  à cet  organe  dans  les  précé- 
dentes familles.  Les  deux  lobes , désunis  dans  presque  toute  la  lon- 
gueur du  bord  ventral , sont  dépourvus  de  tentacules , mars  ces  tenta- 
cules sont  remplacés  par  un  bord  membraneux , plus  ou  moins  profon- 
dément plissé.  Dans  le  Pullastra,  par  exemple,  ce  bord  est  presque 
simple  et  il  tombe  comme  un  voile  au-devant  de  la  grande  ouverture  du 
manteau.  Dans  les  Vénus,  les  Cylhérées,  les  Dosinies.  ce  bord  mem- 
braneux est  profondément  plissé,  et  les  plis  d'un  côté  s’emboîtent 
exactement  dans  ceux  de  l’autre. 

Les  siphons  présentent  des  caractères  très  divers.  Dans  quelques 
Cythérées,  par  exemple , ces  organes  sont  réunis  dans  toute  leur  lon- 
gueur; ils  le  sont  également  dans  les  Artémis;  ils  se  disjoignent  au 
sommet  dans  d’autres  Cylhérées  ; celte  disjonction  devient  plus  pro- 
fonde dans  les  Pullastra,  dans  les  Venus,  et  dans  ce  dernier  genre  il  est 
même  des  espèces  dont  les  siphons  sont  séparés  j usqu’auprès  de  la  base . 
Sous  le  rapport  de  la  jonction  et  de  la  disjonction  des  siphons , on 


LES  CONQUES. 


5i5 


observe  dans  la  famille  des  Conques  presque  tous  les  degrés;  il  ne  faut 
donc  point  attacher  à ce  caractère  plus  d'importance  qu’il  ne  mérite, 
et,  par  conséquent,  on  manquerait  à la  philosophie  de  la  classiOcalîon 
si  l’on  voulait  la  fonder  sur  ce  caractère  unique.  Nous  voyons  aussi  des 
variations  considérables  se  manifester  dans  la  forme  des  tentacules  qui 
terminent  le  bord  libre  des  siphons.  Chez  les  PuUastray  par  exemple, 
le  siphon  branchial  est  pourvu  de  tentacules  digités,  comparables  à 
ceux  des  Donaces,  des  Mésodesmes,  des  Pétricoles  et  dçs  Vénérupes. 
Dans  les  Cylhérées , au  contraire,  ces  tentacules-sont  simples,  cylin- 
dracés;  ils  le  sont  également  dans  les  Vénus,  et  ils  manquent  totale- 
ment chez  les  Artémis,  Le  siphon  anal  offre  des  caractères  plus  con 
stants.  Son  pourtour  se  prolonge  en  une  calotte  membraneuse , percée 
au  sommet , à la  base  de  laquelle  s’élève  un  rang  de  tentacules  simples 
et  cylindracés.  Les  Pullastra,  les  Vénus,  les  Cylhérées,  nous  présen- 
tent cette  disposition , tandis  que  chez  les  Dpsinies  le  siphon  anal 
reste  simple  comme  le  branchial. 

Si  nous  ouvrons  le  manteau,  nous  trouvons  dans  tous  les  animaux 
de  la  famille  des  Conques  une  masse  abdominale  plus  ou  moins  com- 
primée, terminée  en  avant  par  un  pied  triangulaire  à base  large,  ayant 
les  bords  tranchants  et  susceptibles  de  mouvements  très  divers.  Dans  le 
genre  Dosinie,  le  pied  est  un  peu  ditférent  ; il  a quelques  rapports 
avec  celui  des  Pétoncles , étant  taillé  en  forme  de  fer  de  hache;  cepen- 
dant son  extrémité  antérieure  s’étend  sous  la  forme  d’une  petite  langue 
triangulaire,  plus  petite,  mais  semblable  à celle  des  Vénus  et  des  Cy- 
thérées.  La  bouche  est  petite , et  dans  tous  les  genres  dont  les  animaux 
sont  connus  elle  est  accompagnée  de  lèvres  étroiles,  courtes,  terminées 
de  chaque  côté  en  une  paire  de  palpes  labiales  petites , triangulaires , 
un  peu  plus  longues  que  larges. 

Les  organes  branchiaux  sont  semblables  dans  tous  les  genres  connus  : 
ce  sont  deux  grands  feuillets  subquadrangulaires  qui  s’appliquent  sut 
les  parois  de  l'abdomen  ; les  feuillets  internes  sont  un  peu  plus  grands , 
par  leur  extrémité  antérieure  iis  remontent  jusqu’au  voisinage  dé  la 
bouche.  En  arrière  de  la  masse  abdominale,  les  organes  branchiaux  se 
réunissent  et  viennent  se  fixer  au  pourtour  de  l’ouverture  intérieure  du 
siphon  anal. 

En  pénétrant  plus  avant  dans  la  structure  des  animaux  de  la  famille 
des  Conques , nous  leur  retrouvons  à tous  sans  exception  un  caractère 
qui  n’est  pas  sans  importance.  Le  coeur  occupe  la  place  où  il  se  trouve 
dans  les  autres  Mollusques  acéphalés  , il  correspond  à la  charnière  de 
la  coquille  ; il  est  constitué  comme  à l’ordinaire  d’un  ventricule  subglo- 

33* 


QUINZIEME  FAMILLE. 


Tj  i G 

bilieux  et  de  deux  oreillettes.  Mais  en  arrière,  au  moment  où  il  donne 
naissance  à l’aorte  postérieure,  il  se  dilate  en  une  seconde  poche  mus- 
culaire, qui  semble  être  un  second  ventricule  annexé  au  premier.  De 
plus,  un  caractère  commun  à tous  les  animaux  de  la  famille  des  Con- 
ques se  trouve  dans  l’organe  dépuraleur.  Poli  avait  remarqué  dans  le 
Cuüierea  Chionc  un  organe  contenant  de  très  gros  grains  d'une  ma- 
tière solide,  transparente,  jaunâtre , et  il  crut  avoir  découvert , dans 
cet  organe , celui  qui  est  destiné  à sécréter  et  à préparer  la  matière 
calcaire  de  la  coquille.  Mais  l'opinion  de  Poli  est  justement  contredite 
par  un  assez  grand  nombre  d'observateurs,  les  uns  croyant  voir  un  véri- 
table poumon  dans  l’organe  en  question  ; les  autres,  avec  plus  de  rai- 
son , le  comparant  aux  reins  des  animaux  vertébrés , et  le  considérant 
par  conséquent  comme  un  organe  de  dépuration.  L’organe  dépuraleur  se 
présente  sous  dès  aspects  très  divers  dans  toute  la  série  des  Mollusques 
acéphalés:  mais  dans  la  famille  des  Conques  il  a ce  caractère  spécial  de 
contenir  dans  ses  parois  des  granulations  pins  ou  moins  grosses  des 
matières  solides  qu’il  a sécrétées. 

Si  nous  résumons  les  faits  que  nous  venons  d’exposer,  il  est  facile  de 
s’apercevoir  que  tous  les  animaux  que  nous  réunissons  dans  la  famille 
des  Conques  se  rattachent  entre  eux  par  la  similitude  des  organes  les 
plus  importants.  Ainsi , les  bords  du  manteau  , la  bouche  et  les  palpes 
qui  raccompagnent,  les  branchies,  le  cœur,  l’organe  dépuraleur,  ont 
la  plus  grande  ressemblance  ; tandis  que  les  dilférences  so  montrent 
dans  des  organes  d’une  moindre  importance,  tels  que  les  siphons , les 
tentacules , dont  ils  sont  pourvus , ainsi  que  la  forme  générale  du  pied. 
Nous  pouvons  donc  considérer  comme  naturelle  une  famille  dans  laquelle 
sont  rassemblés  des  animaux  chez  lesquels  la  somme  des  ressemblances 
remporte  de  beaucoup  sur  celle  des  différences.  Les  coquilles , dans  la 
famille  que  nous  examinons,  ont,  ainsi  que  les  animaux,  des  caractères 
communs  et  d'autres  caractères  plus  restreints  qui  permettent  de  les 
diviser  en  genres  assez  nettement  circonscrits.  C’est  dans  cette  famille 
que  se  trouvent  réunies  les  coquilles  les  plus  richement  colorées  et  les 
plus  diversement  ornées.  Par  leur  nombre  considérable , elles  devien- 
nent l’ornement  des  collections.  Toutes  ont  un  ligament  externe;  les 
unes  sont  ovales , transverses  ; les  autres  sont  subtrigones , et  elles 
passent  insensiblement  vers  la  forme  orbiculaire  qui  se  maintient  dans 
quelques  genres;  les  unes  sont  fort  aplaties,  chez  le  plus  grand  nombre 
elles  sont  médiocrement  bombées  ; les  crochets  sont  proéminents , in- 
clinés en  avant  au-dessus  d’une  lunule,  ordinairement  superficiels, 
mais  toujours  nettement  circonscrits. 


LES  C0:!sQ[}ï^^. 


J i 7 


Les  bords  des  valves  sont  ordinairement  simples , épaissis , et  lorsque 
les  valves  sont  jointes , il  n’exisle  aucun  entrebûillement , soit  en  avant , 
soit  en  arrière.  Les  Vénus,  couvertes  de  stries  longitudinales,  ont 
quelquefois  les  bords  finement  crénelés  ; il  y a même  un  petit  groupe 
d’espèces , chez  lesquelles  le  bord  dorsal  porte  des  stries  obliques  dans 
le  voisinage  de  la  charnière.  Le  lest,  dans  les  coquilles  de  la  famille  des 
Conques  , est  généralement  épais  et  solide;  une  espèce  de  Vénus,  ayant 
le  test  très  mince , présentant  une  exception  presque  unique  , M.  Gray 
a cru  devoir  en  faire  un  genre  particulier  sous  le  nom  de  Clementia.  La 
surface  interne  n'est  jamais  nacrée  ; le  plus  souvent  elle  est  d’un  blanc 
pur  ; mais  il  est  des  espèces  qui  se  distinguent  par  des  couleurs  bril- 
lantes et  variées , qui  se  montrent  à l’intérieur  de  leurs  valves.  Cette 
coloration  intérieure  se  manifeste  aussi  bien  chez  les  Cythérées  que  chez 
les  Vénus;  elle  se  rencontre  aussi,  mais  plus  rarement,  dans  les 
Dosinies.  Sur  la  surface  interne  se  trouvent  deux  impressions  muscu- 
laires , assez  grandes , situées  l’une  et  l’autre  dans  la  région  dorsale  ou 
supérieure.  Une  impression  palléale  accompagne  le  bord  ventral,  le 
suit  parallèlement  et  se  contourne  en  arrière  en- une  sinuosité  qui  est 
plus  souvent  courte , subtrigone,  quelquefois  ovalaire  et  subhorizontale, 
comme  dans  les  Pullastra,  d’autres  fois  oblique  de  haut  en  bas,  comme  dans 
les  Dosinies  et  les  Cythérées.  Cette  sinuosité  diminue  progressivement 
dans  une  série  d’espèces , et  on  la  voit  disparaître  entièrement  dans  le 
Cytherea  scripta , par  exemple  ; et  c’est  pour  cette  raison  quo  M.  Schu- 
macher a fait  de  cette  espèce  le  type  d’un  genre  Circe , conservé  par 
M.  Gray.  Danslo  groupe  des  Vénus,  un  phénomène  semblable  se  pré- 
sente, et  nous  y avons  attaché  d’autant  moins  d’importance,  qu’ayant 
examiné  les  animaux  de  quelques  espèces  dépourvues  de  sinuosité, 
nous  les  avons  trouvés  en  tout  semblables  à ceux  des  autres  Vénus.  Nous 
admettons  dans  la  famille  des  Conques  le  genre  Thétis  de  Sowerby  ; 
noos  le  considérions  autrefois  comme  un  groupe  particulier  des  Vénus. 
Ce  genre  a été  distingué  par  la  forme  toute  particulière  que  présente 
l’impression  du  manteau.  Cette  impression,  au  lieu  de  suivre  une  ligne 
oblique,  comme  dans  les  Vénus  et  dans  les  Cythérées , remonte  presque 
perpendiculairement  vers  la  région  des  crochets;  elle  est  très  large  à la 
base,  pointue  au  sommet,  et  elle  semble  s'éloigner  de  tout  ce  qui  est 
connu  dans  le  type  des  Vénus.  Cependant  on  admet  dans  le  genre 
Vénus  une  coquille  très  intéressante , nommée  Tenus  incompîa  par 
M.  Philippi,  et  dans  laquelle  la  sinuosité  palléale  présente  la  plus 
grande  analogie  avec  celle  des  Thétis.  C’est  par  ce  fait  que  nous  répon- 
ilons  à la  question  de  M.  d’Orbigny,  qui,  dans  sa  Paléontologie  fraii- 


5i8 


QUINZIEME  FAMILLE. 


çahe , ne  comprend  pas  pourquoi  nous  avions  relégué  le  genre  du 
paléontologiste  anglais  parmi  les  nombreuses  sections  du  grand  type 
des  Vénus.  Nous  ferons  remarquer  aussi  le  caractère  tout  particulier 
que  présente  la  sinuosité  palléale  dans  les  Dosinies  et  dans  le  genre 
C]icHna.  Cette  impression  est  allongée,  étroite,  à sommet  très  aigu,  et 
elle  parcourt  très  obliquement  tout  le  limbe  intérieur  des  valves  Par 
celte  forme,  les  genres  que  nous  venons  de  citer  se  reconnaissent  avec 
facilité  et  se  distinguent  très  nettement  des  Cylhérées  et  des  Vénus. 

Si  nous  examinons  la  charnière  dans  les  coquilles  de  la  famille  des 
Conques , nous  lui  trouvons  des  modifications  â l’aide  desquelles  La- 
marck  a circonscrit  plusieurs  genres,  qui  semblent  devoir  se  maintenir 
dans  la  méthode.  C'est  ainsi . par  exemple,  que  les  Cythérêes  ont  trois 
dents  cardinales  à la  charnière,  et  de  plus  une  dent  antérieure,  située 
dans  la  longueur  de  la  lunule.  Cette  dent  lunulaire  est  susceptible  de 
nombreuses  variations.  Très  apparente  dans  le  plus  grand  nombre  des 
Cythérées,  on  la  voit  diminuer  insensiblement  ^ et  celte  diminution  est 
tellement  graduelle,  qu’il  est  quelques  espèces  incertaines  entre  les 
Cythérées  et  les  Vénus;  ce  qui  nous  avait  fait  pencher  autrefois  vers 
celle  opinion,  que  le  genre  Cythérée  ne  se  distingue  pas  suffisamment 
du  grand  type  des  Vénus  de  Linné.  Dans  les  Vénus  et  les  Pullastra,  la 
charnière  ne  porte  jamais  plus  de  trois  dents.  Dans  les  Pullastra,  les 
dents  sont  presque  parallèles . dans  les  Vénus  elles  sont  divergentes  ; 
mais  ce  caractère  a réellement  bien  peu  d’importance,  et  Ü existe  de 
nombreux  passages  qui  rattachent  ces  deux  genres.  Les  Pullastra  ont  la 
coquille  généralement  plus  mince,  et  ce  caractère  ne  peut  avoir  qu’une 
foible  importance , et  ne  doit  être  employé  qu’avec  une  extrême  réserve. 
Les  trois  dents  des  Vénus  ne  sont  pas  d’une  constance  absolue;  il 
existe  des  espèces  épaisses  et  bombées,  chez  lesquelles  une  des  dents 
a disparu  ; il  n’en  reste  plus  que  deux.  De  ces  espèces  à deux  dents 
M.  Schumacher  a fait  son  genre  .^ïioma/ocardm,  genre  inadmissible  à 
nos  yeux  , car  l’animal  ne  diffère  pas  de  celui  de  Vénus.  Dans  le  genre 
Grateloupia,  la  charnière  a subi  des  modifications  très  intéressantes: 
la  dent  lunulaire  existe  comme  dans  les  Cythérées;  il  y a trois 
dents  cardinales  régulières,  mais  en  arrière  de  la  troisième,  on  en 
trouve  trois  ou  quatre  autres  petites  qui  vont  graduellement  en  dimi- 
nuant. Indépendamment  de  ce  caractère  tout  à fait  spécial,  on  en 
trouve  un  autre,  qui  ajoute  à la  valeur  du  genre.  II  se  remarque  dans 
la  forme  particulière  de  l’impression  palléale;  nous  insisterons  sur  ce 
caractère  en  traitant  du  genre  en  particulier. 

Toutes  les  coquilles  de  la  famille  des  Conques  sont  marines , presque 


LES  CONQUES. 


5i9 

toutes  habitent  les  plages  sableuses , et  ne  s'éloignent  pas  beaucoup 
des  rivages  ; elles  vivent  enfoncées  perpendiculairement  dans  le  sable, 
à la  surface  duquel  elles  viennent  ouvrir  leurs  siphons.  On  les  trouve 
en  grande  abondance  dans  les  régions  équatoriales,  leur  nombre 
diminue  à mesure  que  l’on  s’approche  davantage  des  régWs  polaires. 
On  en  cite  à l’étal  fossile  dans  presque  tous  les  terrains  ; mais  à moins 
d’avoir  des  impressions  bien  nettes  de  charnière , il  est  difficile  de  décider 
si  certaines  espèces,  rapportées  à cette  famille  d’après  la  forme  géné- 
rale, en  dépendent  réellement.  Nous  pouvons  affirmer  que  le  genre 
Dosinia  ne  se  trouve  à l’état  fossile  que  dans  les  terrains  tertiaires. 
Quant  au  genre  Grutetoupia , il  provient  aussi  des  terrains  tertiaires , 
mais  le  type  vivant  de  ce  genre  n’est  pas  encore  connu.  Quant  aux 
Cylhérées,  aux  Vénus  et  aux  Pullastra  , elles  descendent  d'une  manière 
authentique  dans  les  terrains  crétacés  et  jurassiques , et  le  type  des 
Vénus,  lui  seul,  descend  encore  plus  bas.  Au  delà  nous  ne  connaissons 
pas  ce  genre  d’une  manière  bien  certaine. 


GENRE  QUARANTE-CINQUIÈME. 

PÛIiXiASTRE.  Pullastra.  (Sowerby.) 

Pl.  2 1,  f.  7.  8.  II.  12. 

CARACTERES  GENERIQUES. — Animal ovalaire  transverse,  ayant 
les  bords  du  manteau  simples  ; deux  siphons  un  peu  moins 
longs  que  la  coquille,  réunis  dans  le  milieu  ou  les  deux  tiers 
de  leur  longueur  ; siphon  branchial  terininé  par  une  ouverture 
circulaire  sur  le  bord  de  laquelle  s’élèvent  un  grand  nombre  de 
tentacules  rameux,  symétriquement  rangés,  inégaux,  les  plus 
petits  dans  les  interstices  des  plus  grands;  siphon  anal  plus 
étroit  et  un  peu  plus  court,  garni  d’un  rang  de  tentacules  sim- 
ples et  cylindracés;  pied  grand,  aplati,  linguiforme , portant 
un  byssus  à la  base,  dans  la  plujiart  des  espèces;  bouche  pe- 
tite; palpes  labiales  triangulaires  subéquilatérales;  branchies 
larges,  inégales,  subquadrangulaires,  réunies  en  arrière  du  pied. 

Coquille  ovale  transverse , inéquilatérale  , mince , à bords 


020 


QUINZIÈME  FAMILLE. 


simples  parlaitement  clos;  charnière  portant  trois  dents  médio- 
cres, souvent  bifides  ou  canaliculées  au  sommet,  subparallcles 
ou  divergentes.  Deux  impressions  musculaires  ovalaires;  im- 
pression palléale  terminée  en  arrière  par  une  sinuosité  horizon- 
tale ovalaire  et  peu  profonde. 

SYNONYMIE  GÉNÉRIQUE,  — Venus , Linné , Chemnitz  , 
Schrœter,  Gmelin,  Dilhvjn,  Lamarck , etc.  — Twpes^  Me- 
gerle,  Schumacher.  — , Sowerby,  Reeve,  Anton, 
Morris,  etc. 

OBSEnvATiON.s.  — Ofl  doit  à M.  Sowerby  la  création  du  genre  PtiU 
îaslra;  il  l’a  proposé , pour  la  promièro  fois , en  1 827,  dans  son  Généra 
of  shells  et  dans  le  Zoological  journal.  Ce  genre  est  séparé  des  Vénus 
de  Linné  pour  celle  des  espèces  qui  ont  trois  dents  cardinales  rappro- 
chées, presque  parallèles,  dont  le  test  est  mince,  et  dans  l’intérieur 
desquelles  se  remarque  une  impression  palléale,  terminée  en  arrière  par 
une  sinuosité  profonde,  ovalaire  et  subhorizontale.  Fondé  sur  des  ca- 
ractères d’une  faible  importance,  ce  genre  fut  rejeté  par  la  plupart  des 
conchyliologues , et  nous-mÔme,  dans  la  2*  édition  des  Animaux  sans 
vertèbres  de  Lamarck , nous  avons  insisté  sur  le  peu  de  valeur  des 
caractères  empruntés  aux  coquilles  pour  le  repousser  de  la  série  des 
bons  genres , n*ayant  pas  alors  les  moyens  de  nous  assurer  si  les  ani- 
maux offrent  des  différences  avec  ceux  du  grand  type  des  Vénus.  Nous 
faisions  apercevoir  le  peu  de  fixité  des  caractères  signalés  par  M.  So- 
■vverby, . Ainsi  les  dents  cardinales  qui,  dans  le  VeMws  decussaZa,  par 
exemple,  sont  en  effet  petites  et  presque  parallèles,  deviennent  beau- 
coup plus  divergentes  dans  des  espèces  extrêmement  voisines , de  sorte 
que  de  proche  en  proche . on  est  entraîné  à admettre  parmi  les  Pullastra 
une  très  grande  partie  des  Vénus  aplaties  et  transverses  qui  peuplent 
en  grande  abondance  les  rivages  des  mers  chaudes.  Si  Ton  croit  trouver 
dans  l'impression  palléale  plus  de  fixité,  l’observation  vous  désabuse 
bientôt,  et  vous  voyez  cette  impression  s’amoindrir  insensiblement, 
devenir  de  plus  en  plus  triangulaire,  et  finir  enfin  par  ressembler  beau- 
coup à celle  des  Vénus  bombées  et  épaisses.  Dans  l’état  où  se  trouvait 
la  science,  il  était  raisonnable,  nécessaire  même,  de  rejeter  le  genre 
Pulîaslra.  Aujourd’hui  que  nous  possédons  d’autres  documents,  lorsque 
nous  avons  pu  observer  vivants  les  animaux  de  plusieurs  espèces  de 
Pullastra , nous  avons  pu  nous  fixer  sur  la  valeur  de  ce  genre  et 
l'adopter  aujourd’hui  après  l’avoir  rejeté  autrefois. 


L.life  C0^’QÜES. 


J 2 J 


Mademoiselle  Callow,  dans  le  Conclioîogical  nomencitiLor,  'tùnsi  que 
M.  Keeve,  dans  son  ronc/io/ogî'a  îco/ifca,  à l’exemple  do  M.  Sowerby, 
réduit  le  genre  Pullaatra  aux  espèces  perforantes  et  à quelques 
autres  analogues,  telles  que  le  rcjius  decussuia  ; mais  nous  pensons  qu’il 
est  difficile  do  séparer  du  genre  et  de  laisser  parmi  les  Vénus  les  nom- 
breuses espèces  des  mers  de  l’Inde  qui,  à rexccplion  des  dents  cardi- 
nales divergentes,  conservent  les  autres  caractères  des  Pullastra. 

Les  Pullastra  sont  des  coquilles  ovales,  transverses,  quelquefois  un 
peu  subtrigones;  elles  sont  d’une  parfaite  régularité,  et  leurs  valves, 
peu  épaisses,  sont  parfaitement  closes  dans  toute  leur  circonférence. 
Toutes  les  espèces  sont  inéquilatérales;  les  crochets  peu  proéminents 
s’inclinent  obliquement  en  avant  et  viennent  dominer  une  lunule  cir- 
conscrite par  une  strie  peu  profonde.  Cette  lunule  est  variable  dans  sa 
forme;  tantôt  elle  est  étroite  et  lancéolée,  tantôt  elle  est  ovalaire  ou  en 
forme  d’écusson.  La  surface  est  souvent  lisse mais  plus  souvent  encore 
elle  est  striée  transversalement  ; les  bords  sont  simples  et  entiers  ; la 
surface  interne,  ordinairement  blanche , présente  dans  la  région  dorsale 
deux  grandes  impressions  musculaires , dont  l’une , l’antérieure  , est 
ovale , tandis  que  la  postérieure,  un  peu  plus  grande , est  subcirculaire. 
Du  milieu  du  bord  inférieur  de  l'impression  musculaire  antérieure  sc 
détache  une  impression  palléale  qui  se  place  à une  assez  grande  distance 
du  bord  des  valves,  soit  le  bord  ventral  jusque  près  de  Textrémilc 
postérieure,  et  se  recourbant  ensuite  sur  elle-même,  elle  dessine  une 
sinuosité,  ovale,  horizontale,  variable  dans  sa  profondeur  et  dans  sa 
largeur  selon  les  espèces,  et  quelquefois  môme  dans  les  individus  d’une 
même  espèce,  ainsi  que  le  Tenus  decussala  peut  en  donner  la  preuve. 
Cette  sinuosité  diffère  de  celle  des  Psammobies , en  ce  qu’elle  est  entiè- 
rement isolée  de  la  portion  ventrale  de  l’impression  palléale.  Dans  quel- 
ques espèces  des  mers  de  ITnde  la  sinuosité  postérieure  se  rétrécit 
considérablement,  et  elle  commence  à prendre  une  forme  triangulaire 
par  laquelle  elle  se  rapproche  de  celle  des  autres  Vénus.  Nous  ie  répé- 
tons , les  caractères  des  coquilles,  tels  que  nous  venons  de  les  exposer, 
seraient  tout  à fait  insuffisants  pour  déterminer  d’une  manière  certaine 
les  limites  du  genre  Pullastra:  mais  les  animaux  vont  nous  offrir  des 
caractères  beaucoup  plus  constants  à l'aide  desquels  il  devient  possible 
de  limiter  le  genre  d’une  manière  rigoureuse. 

L’animal , dans  le  genre  Pullastra , conserve  la  forme  générale  de  la 
coquille;  il  est  ovale,  transversc,  parfaitement  symétrique,  et.  comme 
à l’ordinaire , enveloppé  dans  un  manteau  membraneux , dont  les  lobes 
sont  ouverts  depuis  !e  bord  inférieur  du  muscle  adducteur  antérieur  des 


522  QUINZIÈME  FAMILLE. 

valves  jusque  près  de  l’origine  des  siphons.  Le  ûianteau  est  très  mince, 
transparent;  il  a quelquefois  l'aspect  laiteux,  et  il  porte  à sa  circonfé- 
rence un  muscle  orbiculaire  assez  large , qui , en  s’ailachant  à la 
coquille , y laisse  l'impression  palléale  que  nous  avons  décrite.  Lorsque 
l’animal  est  vivant  et  qu’il  entre- bâille  ses  valves,  il  ferme'  la  cavité  de 
son  manteau  à l'aide  d'un  bord  membraneux  assez  large,  simple,  dé- 
pourvu de  tentacules  et  à peine  plissé.  Lorsque  l'animal  fait  sortir  son 
pied , il  écarte  ce  bord  qui  alors  s’applique  exactement  sur  les  parties 
latérales  de  l'organe  du  mouvement. 

Le  manteau  se  prolonge  en  arrière  en  deux  siphons  assez  gros,  réunis 
dans  une  partie  de  leur  longueur;  ces  organes  se  présentent  sous 
la  forme  d'une  masse  aplatie,  que  partage  en  deux  portions  inégales 
une  dépression  correspondante  à la  cloison  intérieure,  qui  sépare  leur 
cavité.  La  séparation  de  ces  deux  organes  s’opère  plus  ou  moins  haut, 
selon  les  espèces  : le  plus  ordinairement  elle  a lieu  un  peu  au  delà 
de  la  moitié  Le  siphon  branchial  est  toujours  plus  gros  et  souvent 
plus  allongé  que  l'anal.  II  se  termine  par  une  ouverture  circulaire, 
sur  le  bord  de  laquelle  s'élèvent  de  nombreux  tentacules  arborescents, 
qui  se  recourbent  au-dessus  de  l'ouverture  pour  s’opposer  au  passage 
de  corps  trop  volumineux.  Ces  organes  sont  disposés  avec  beaucoup  de 
symétrie;  il  y en  a de  grands  qui  alternent  avec  de  plus  petits;  sou- 
vent tandis  que  les  grands  se  renversent  au-dessus  de  l’ouverture,  les 
plus  petits  prenant  une  direction  opposée,  forment  une  espèce  de  colle- 
rette autour  de  l'ouverture.  Il  y a même  des  espèces  chez  lesquelles , 
indépendamment  des  tentacules  arborescents,  le  siphon  branchial  est 
pourvu  d’une  rangée  de  petits  tentacules  cyÜndracés,  qui  se  dirigent 
constamment  en  dehors.  Le  siphon  anal  est  fermé  par  une  calotte  mem- 
braneuse , percée  au  centre  ; à la  base  de  cette  calotte , s'élève  un 
rang  de  tentacules  cylindracés , coniques,  plus  ou  moins  nombreux  et 
plus  ou  moins  longs  selon  les  espèces. 

Le  pied  est  allongé,  linguiforme,  triangulaire;  il  est  d’un  blanc 
laiteux,  très  pointu  au  sommet;  son  bord  inférieur  est  fendu,  et  dans 
presque  toutes  les  espèces  que  nous  avons  observées  vivantes  ou  con- 
servées dans  la  liqueur,  nous  avons  trouvé  un  byssus  ; composé  de  fila- 
ments blanchâtres,  mollasses,  comparables  à des  fibres  musculaires, 
qui  auraient  été  détachés  sans  changer  beaucoup  de  nature.  Ce  fait,  nous 
l’avons  observé  dans  le  Pullaslrageographica,  dans  une  espèce  nouvelle 
que  nous  avons  nommée  castrensis,  et  nous  avons  vu  dans  plusieurs 
individus  du  Venus  decussata,  une  fente  au  bord  inférieur  du  pied,  ce 
qui  nous  donne  la  preuve  de  l’existence  d’un  byssus  dans  èette  eèpèce. 


LES  CONQUES. 


520 


La  bouche  est  petite,  ovale,  obrorde,  profordétrent  cachée  au- 
dessous  du  muscle  adducteur  antérieur;  elle  est  garnie  de  deux  petites 
lèvres  étroites  et  courtes.  Ces  organes  se  terminent  de  chaque  côté  en 
deux  palpes  labiales,  triangulaires,  courtes,  un  peu  plus  longues  que 
larges,  et  attachées  à l’anima!  par  leur  bord  le  plus  étroit. 

L’appareil  branchial  consiste  en  deux  feuillets  branchiaux  de  chaque 
côté;  ces  feuillets  sont  subquadrangtilaires ; ils  sont  larges,  régulière- 
ment plissés  , inégaux  ; les  feuillets  externes  étant  un  peu  plus  petits 
que  les  feuillets  internes,  ceux-ci  sè  prolongent  en  avant,  se  termi- 
nent en  une  pointe  aiguë,  qui,  en  s’interposant  entre  les  palpes  la- 
biales, aboutit  jusqu’au  voisinage  de  la  bouche.  Dans  le  Pullastra 
geographica^  par  exemple,  cette  extrémité  de  la  branchie  interné 
s’avance  entre  les  lèvres  jusque  sur  les  bords  de  la  bouche.  En  arrière 
du  bord  postérieurde  la  masse  abdominale,  les  feuillets  branchiaux  d’un 
côté  se  réunissent  à ceux  de  l’autre  ; ils  se  prolongent  un  peu  en  arrière , 
tombent  au-devant  de  l'ouverture  du  siphon  anal,  et  se  soudent  au 
pourtour  de  ce  siphon,  de  manière  à intercepter  toute  communication 
entre  sa  cavité  et  celle  du  manteau. 

Toutes  les  Pullastra  sont  des  coquilles  littorales;  elles  habitent  les 
plages  sableuses,  à une  faible  profondeur  sous  l'eau.  C’est  ainsi  que 
dans  la  Méditerranée,  par  exemple,  toutes  les  espèces  connues  restent 
dans  une  zone  de  dix  à quinze  brasses  de  profondeur.  Nos  observations 
et  celles  de  M.  Forbes  le  constatent  d’une  manière  positive.  Quant  à la 
distribution  géographique  des  Pullastra  , on  peut  dire  qu’il  y en  a par- 
tout, depuis  les  mers  polaires,  où  on  eh  rencontre  quelques  espèces 
seulement,  jusqu'aux  mers  tropicales,  où  elles  deviennent  d’une  grande 
abondance.  Nos  mers  tempérées  et  la  Méditerranée  en  contiennent  cinq 
ou  six  espèces , dont  les  animaux  conservent  les  caractères  constants 
que  nous  avons  exposés  précédemment.  Ces  coquilles  sont  ornées  pour 
la  plupart  de  très  vives  couleurs , extrêmement  variables;  aussi  on  ne 
pourrait  guère  les  employer  à la  détermination  des  espèces , si  ce  n’est 
en  les  considérant  sur  un  très  grand  nombre  d’individus.  Mais  le  moyen 
le  plus  sûr  pour  reconnaître  des  espèces  en  apparence  très  voisines 
consiste  dans  l’observation  des  animaux,  et  particulièrement  de  leurs 
siphons.  Ces  organes,  en  eü'et,  ont  non  seulement  des  couleurs  diffé- 
rentes dans  chaque  espèce,  mais  les  tentacules  dont  ils  sont  pourvus 
présentent  aussi  les  différences  (jui  se  retrouvent  invariablement  dans 
tous  les  individus. 

Dans  l’état  actuel  des  observations  il  est  très  difficile  de  donner  des 
renseignements  bien  précis  sur  la  distribution  des  espèces  fossiles , et 


iJlIiNZlEiMË  FAMILLE. 


02:1 

on  le  concevra  sans  peine,  puisque  pour  la  constatation  irrévocable  du 
genre , il  faut  pouvoir  examiner  non  seulement  la  charnière , mais  encore 
l'impression  palléaie.  Si  cet  examen  est  facile  pour  des  especes  du  ter- 
rain tertiaire,  il  devient,  si  ce  n’est  impossible,  au  moins  très  difficile 
dans  celles  des  terrains  secondaires.  Ainsi , nous  comprenons  pourquoi 
M.  d'Orbigny.  dans  sa  Paléontologie  française , a réuni  en  un  seul  genre 
les  Vénus,  les  Cythérées,  les  Arthémis , parce  qu  on  effet  on  est  obligé 
de  juger  de  cos  genres  par  la  forme  générale,  et  nous. savons,  pour 
l’avoir  prouvé  un  grand  nombre  de  fois , combien  ces  caractères  de  la 
forme  sont  insuffisants.  A défaut  de  la  coquille  mémo,  si  difficile  à 
examiner  dans  les  terrains  secondaires,  l’observateur  doit  recourir  aux 
moules  lorsqu’ils  sont  nets  , et  surtout  lorsqu’ils  offrent  des  traces  de 
la  charnière.  Par  ce  moyen  on  peut  quelquefois  reconnaître  les  carac- 
tères des  coquilles  bivalves  et  décider  si  un  genre  descend  plus  ou 
moins  bas  dans  la  série  des  terrains  secondaires. 

Nous  avons  vainement  tenté  de  rapporter  à leurs  véritables  genres 
la  plupart  des  espèces  fossiles  citées  dans  les  terrains  secondaires  ; une 
confusion  inextricable  s’est  introduite  peu  à peu  ; il  a suffi  aux  paléon- 
tologistes d’un  moule,  d'une  coquille , ayant  une  forme  oblonguo  un 
peu  comprimée  pour  qu’ils  en  fissent  une  Vénus  ou  une  Pullastra.  Dans 
de  semblables  déterminations , ne  s’appuyant  sur  aucune  observation 
certaine  delà  charnière,  de  l'impression  des  muscles  et  du  manteau, 
beaucoup  d’erreurs  ont  été  commises  : il  est  presque  impossible  aujour- 
d'hui de  les  réparer.  Plusieurs  naturalistes  confondant  en  un  seul  tous 
les  genres  de  la  famille  des  Conques  , ont  tenté  de  restaurer  le  genre 
Vénus  tel  que  Linné  l'avait  institué,  lis  ont  réuni  sous  une  dénomina- 
tion un  peu  vague  des  objets  fort  différents  ; il  en  est  résulté  une 
sorte  de  confusion  dans  la  distribution  des  espèces  dans  les  couches  de 
la  terre  : ce  sont  partout  des  Vénus,  là  où  il  pourrait  y avoir  des  Cylhé- 
rées,  des  Dosinies  ou  des  Pullastres.  Au  milieu  do  tant  de  causes 
d’erreur , il  nous  est  bien  difficile  de  compter  les  espèces  de  chaque 
groupe  et  d’en  indiquer  la  distribution;  il  faudrait  réunir  en  une  seule 
collection  les  types  de  toutes  les  espèces  publiées,  les  étudier  avec  un 
nouveau  soin , soumettre  les  douteuses  à de  nouvelles  études  et  admettre  . 
dans  les  listes  de  distribution  les  espèces  incontestables.  Les  ouvrages 
seuls  des  paléontologistes  sont  insuffisants  pour  accomplir  cette  lâche 
difficile  de  remettre  chaque  espèce  à sa  place , car  dans  ce  genre  Vénus , 
ils  ont  confondu  non  seulement  les  divers  genres  de  la  famille  des  Con- 
ques , mais  même  des  genres  qui  lui  sont  étrangers , des  Pkoladomyes , 
des  Carclium  . des  Lucines , etc.  .Continuer  à traiter  la  paléontologie 


I.KS'CO.NQIJKS. 


de  cette  manière , c’est  vouloir  ôter  à cette  science  toute  sa  valeur  et 
justifier  la  critique  des  esprits  sérieux  qui  y rencontrent  tant  d'incer- 
titude. 

Toutes  les  espèces  mentionnées  dans  les  terrains  paléozoïques  sont 
douteuses  pour  nous  ; elles  sont  introduites  dans  le  genre  d’après  la 
forme  générale , la  charnière  et  les  autres  caractères  génériques  ne  soht 
point  connus.  Il  y a un  fait  remarquable  dont  il  faut  tenir  compte  ; c’est 
que  jusqu’ici  toutes  lea  coquilles  bivalves  des  terrains  inférieurs  dont  on 
a pu  examiner  l’intérieur  ont  invariablement  l’impression  palléale  simple 
sans  sinuosité  postérieure;  il  est  donc  à présumer  que  les  espèces  nom- 
mées Pullastra  dépendent  d'antres  genres , et  particulièrement  des 
Cypricardes. 

D'après  M.  Sowerby,  il  existerait  une  espèce,  le  Fmis  lœvis,  dans  lo 
silurien  supérieur  {Ludloiv  roc)  d’Angleterre. 

Trois  autres  Venus,  les  elliptica,  compianata,  lœvis,  à en  croire  le 
même  naturaliste,  dépendent  du  lerèain  dévonien. 

Le  genre  paraît  manquer  dans  toute  la  série  du  trias;  il  se  montre 
de  nouveau  dans  le  lias,  d’après  M.  Strickland.  {Venus  arenicola , 
AVainlode  ClifT  en  Angleterre). 

Trois  espèces  ont  été  signalées  par  M.  Philips  dans  la  série  des  cou- 
ches appartenant  à l’oolithe  inférieure:  ce  senties  Venus  oblüa,  recon- 
dîta  et  peregvina. 

Une  nouvelle  lacune  se  manifeste  dans  l’existence  du  genre  Pullasira, 
pendant  que  se  déposait  la  grande  formation  jurassique.  Il  apparaît  de 
nouveau  avec  la  formation  crétacée.  Les  deux  grandes  lacunes  que  nous 
venons  de  signaler  n’existent  probablement  pas,  elles  résultent  do 
l’imperfection  des  observations  et  de  la  difficulté  de  constater  les  carac- 
tères réels  du  genre. 

Avec  le  terrain  crétacé  inférieur  (néocomien)  se  montrent  six 
espèces  que  l’on  peut  ranger  dans  les  Pullastra;  la  plupart  ont  été  dé- 
crites pour  la  première  fois  par  M.  d’Orbigny  dans  la  Paléontologie 
française.  Ce  naturaliste  repousse  le  genre  Pullastra,  et  toutes  les  espèces 
de  Cy thérées  et  de  Dosinies  deviennent  des  Vénus  pour  lui . Les  Pullastra 
üoryiueliana  , Robinaldina  , Dtipiniana,  Brogniartina , Ricordeana  , se 
rencontrent  dans  tout  le  néocomien  du  centre  de  la  France,  dans  les 
départements  delà  Haute-Marne,  du  Doubs , de  l’Aube , de  TYonne. 
La  sixième  espèce , la  Venus  fabci  de  Sowerby.  se  répand  sur  un  plus 
grand  espace,  car  elle  est  en  Angleterre,  en  Allemagne  et  en  France. 

Nous  n’en  connaissons  jusqu’ici  que  deux  espèces  dans  la  craie  chlo- 
ritée.  L’une  est  des  environs  du  Mans;  on  en  doit  la  découverte  à 


526  QUINZIÈME  FAMILLE . 

M.  Gueranger  : c'esî,  le  Pullastra  fragîlis;  Tautre  est  de  TAlIemagne, 
c’est  le  Pullastra  elliptica  de  Rœmer. 

Dans  la  craie  blanche , nous  trouvons  le  Venus  Royana  de  M.  d’Or- 
bigny,  qui  nous  paraît  un  Pullastra  ; enfin  la  craie  supérieure  de  Scanie 
posséderait  aussi  une  espèce.  Si  le  Venus  exula  de  NÜson  est  un  Pul- 
lastra, ainsi  que  nous  le  supposons,  le  genre  serait  donc  représenté  dans 
toute  la  série  crétacée  et  serait  transmis  aux  terrains  tertiaires  sans 
interruption. 

Les  terrains  tertiaires  sont  peu  riches  en  espèces  du  genre  qui 
nous  occupe;  nous  en  comptons  douze  seulement  distribuées  très 
inégalement  dans  les  trois  étages  de  ces  terrains.  Dans  l’étage  inférieur, 
nous  ne  connaissons  que  deux  espèces,  notre  Venus  tenuis , et  ce  qui  est 
très  remarquable,  le  Venus  decussala,  dont  l’identité  avec  les  individus 
vivants  ne  peut  être  contestée. 

L'étage  tertiaire  moyen  renferme  cinq  espèces  mentionnées  par  les 
naturalistes:  les  Pullastra  triouspis,  Eichwald;  modesta,  Dub.  de 
Monip.  ; Nana,  Sedw.  et  March  , se  rencontrent  dans  les  terrains  ter- 
tiaires de  la  Podolie  et  de  la  .Wolhynie  ; le  Pullastra  vetula  de  Basterot 
se  trouve  à la  fois  à Bordeaux,  à Turin , et  dans  les  faluns  de  la  Tou- 
raine; des  fragments  rapportés  de  Vienne  par  noire  savant  ami  M.  Con- 
stant Prévost  nous  font  penser  qu  elle  existe  aussi  dans  le  bassin 
viennois;  la  cinquième  espèce  est  le  Venus  maura  de  M.  Brougniart  : 
mais  n’ayant  pas  vu  la  charnière  et  ne  pouvant  juger  de  l'espèce  que 
par  sa  forme  générale,  nous  ne  l'introduisons  ici  qu'avec  doute. 

Trois  espèces  sont  mentionnées  dans  le  Crag  : l’une  en  Belgique  , le 
Pullastra  strialella  de  Nyst;  les  deux  autres  en  Angleterre,  ce  sont  les 
Pullastra  perovalis  et  virginea;  cette  dernière  a son  analogue  actuelle- 
ment vivant  dans  les  mers  de  l'Europe,  et  nous  allons  la  retrouver 
parmi  les  espèces  de  l’étage  supérieur. 

Quatre  espèces  sont  mentionnées  dans  l’étage  tertiaire  supérieur  ; ce 
sont  les  suivantes  : 

4°  Pullastra  geographica , Lamk.  Vivante  dans  la  Méditerranée. 

Fossile  en  Italie  et  en  Sicile. 

2“  Pullastra  virginea , Lin.  Vivante  dans  la  Méditerranée  et 
rOcéan  français. 

Fossile  dans  le  Crag  en  Angleterre  et  en  Sicile. 

3°  Pullastra  Genei,  Michelotti. 

Celle-ci  est  particulière  aux  terrains  italiens.  Brocchi  l’avait 
considérée  comme  l'analogue  du  Venits  rotundata  de  Lin. 


LES  CONQUES.  627 

{Venus  papiîionaceay  Lam.);  mais  elle  s’en  distingue  con- 
stamment. 

4“  Pulîastra  decussata  , Lin. 

Espèce  très  commune  dans  tout  l’Océan  d’Europe  ; fossile 
dans  les  sables  supérieurs  du  bassin  de  Paris,  en  Italie, 
en  Sicile  et  dans  les  terrains  quaternaires  d’Angleterre. 

5“  PuUastra  texturata  y Lamk.  Vivante  dans  l’Océan  indien. 
Fossile  des  terrains  tertiaires  de  Java. 

Les  espèces  du  genre  PuUastra  sont  nombreuses;  nous  en  comptons 
plus  de  soixante  répandues  dans  toutes  les  rfiers , mais  plus  abondantes 
dans  les  mers  chaudes  que  dans  les  tempérées  et  les  froides. 

Pullastre  croisée.  PuUastra  decussata  (Vénus)  Lin. 

PL  21.  f.  7.8. 

P.  Testa  ovato-transversâ  y inœquilateraUy  posterîus  subangnîatn  y 
albidày  litturis  maculisve,  aut  radiîs  fuscis  've!  rttfis  picta,  decus- 
satim  striata,  striis  longitudinahbus  erninenlioribus ; intus  albà; 
inargine  cardinali  violaceo  macnlato. 

P'enus  decussata,  Linné,  Sy^t.  uat.  éd.  10.  p.  690.  n»  126. 

Id,  Linné,  Mus.  ülnc.  p.  Ô09.  u®  77. 

Id.  Linné,  Syst.  liât.  éd.  12.  p.  it35.  n**  149.  ..  , 

Bonan,  Récréât,  part.  2.  f.  68. 

Id.  Mus.  Kirch  f.  67. 

Lister,  anim.  Augl.  pl,  4*  f- 
Lister,  Conch.  pl.  428.  f.  271. 

Gualt.  lad.  pl.  85.  f.  L. 

Kegenf  Choix  des  coq.  pl.  4*  4o. 

T’émis  literata.  Pennaiit , Brit,  Züol.  t.  4*  p-  19^).  pl.  67,  f 53.  — 
Venus  decussata,  2*  éd.  p.  210.  pl.  60, 

Vernis  dejlorata.  Boni.  Mus  p.  68.  pl.  5.  f.  2,  3. 

Cimeus  reticulatus,  Ba  Costa,  Brit.  conch.  p.  102.  pl.  14*  L 4- 
disses,  Trav.  of  Nap.  p 486,  a"  140. 

Venus  decussata,  Chemn.  Conch.  t 7.  p.  58.  pi.  48.  f.  4^^*  4^^. 
Schrot,  Eiiii.  t.  3.  p.  i5o.  n**  38. 

Tellina.  Schrot.  Einl.  l.  3.  p.  i4-  a”  45. 

Gmelia,  p.  3294  n®  i35. 

Venus  obscura.  Gmel.  p.  5289.  n°  99. 

Venus  sanguinolenta,  Guiel.  p.  3295.  n®  140. 


5a8  quinzième  famille, 

Teliina  rhomboïdes.  Gmel.  p.  SaSy.  n°  5o.  Var.  excîtis. 

EncycN  pi.  aSS.  f.  4. 

Venus florida.  Poli,  Test.  Sicil.  l.  a,  pl.  21.  f,  16,  17. 

Olivi,  Adriat.  p.  108. 

Venus  decussata.  Donovan,  Brit,  shells.  t.  2.  pl.  67. 

Wood,  Lin.  Trans.  t.  6.  p,  168  pl.  17.  f.  ii,  la. 

Montagn,  Testac.  Brit.  p.  124,  ^ 

Maton  et  Rack.  Iiin.  Tran.s.  t.  8.  p.  88.  pL  2.  f.  6. 

Dillw.  Cat,  t.  r.  p.  aoS.  n”  108. 

Lamk.  An.  s.  vert.  l.  5,  p.  597.  n®  48. 

Turlon,  Concli.  Dicl.  p.  244. 

Gerville,  Cal.  des  Moll,  de  la  Manche,  p.  27.  n”  12. 

Blaînville,  Malac,  pl.  75.  f.  x. 

Tuiion.  Concbyl.  Ins.  Brit.  p.  i5S.  n®  20.  pl.  8.  f.  10. 

Payr.  Cal.  des  Moll,  de  Corse,  p,  5o,  n“  85. 

Wood,  Ind.  testac.  pl.  8.  f.  107. 

Desh.  Ency.  mélh.  vers.  t.  3.  p.  1120.  n®  22. 

Dcsli,  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  2®  éd.  t.  6.  p.  356.  11°  46. 

Desh.  Expéd.  sci.  de  Morce.  Zool,  p.  100.  11°  62. 

PuUastra  decussata.  Autan,  Verz.  p.  8,  285. 

Collard  des  Ch.  Cal.  des  Moll,  du  Finist.  p,  aj.  n®  5. 

Boiich.  Chant.  Cat.  des  Moll,  de  Boni.  p.  21.  11“  3/,. 

Scacchi,  Cat.  Coneh.  reg.  Neap.  p.  7. 

Jeffreys,  List  of  Mar.  Moll,  al  Oban  Conch.  mag.  p.  43. 

Maravig.  Mém.  pour  PHisl.  nat.  delà  Sic.  p.  75. 

Haiiley,  Descr.  cat.  p.  122. 

PuUastra  decussata.  Xhomps.  Rep.  on  the  Fauu.  of  Irel.  p.  262. 
Forhes,  Rep.  011  OEg,  Invert.  p.  i43. 

Verani,  Cat.  degli  an.  iuvert,  p,  i3. 

Thorpe,  Brit.  mar.  Couch.  p.  98. 

Requien,  Cat.  des  Moll,  de  Corse,  p.  25.  u®  107. 

Fossilts,  Desh.  Coq.  fpss.  de  Paris,  l.  i.  p.  142.  p!.  23  f.  8,  9. 
Morris,  Cat.  of  Brit.  l’oss.  p.  loo. 

Habitiî  les  mers  d'Europe,  toute  la  Méditerranée;  fossile  dans  les  sables 
supérieurs  du  bassin  de  Paris,  dans  les  terrains  siibapennins  et  dans 
les  terrains  quaternaires  de  rAuglelerre. 

Espèce  très  commune , habitant  les  plages  sableuses  hlloralos  et  peu 
profondes  dans  la  Méditerranée , plus  profondes  à mesure  que  l’on 
s’avance  davantage  vers  le  nord  ; d’un  goût  agréable  , elle  est  mangée 
par  toutes  les  populations  maritimes;  elle  est  l’occasion  d’un  commerce 


LKS  CONQUES. 


assez  considérable,  car  elle  est  presque  autant  reclierchée  que  les  huîtres 
par  les  habitants  des  bords  de  la  Méditerranée;  quelquefois  elle  est 
exportée , mais  alors  l’animal  est  complètement  enfermé  dans  ses  valves 
au  moyen  d’une  ligature  en  fil  de  fer. 

Parmi  les  variétés  du  Fenus  decussata,  Lamarck  range  une  coquille 
de  la  Nouvelle -Hollande;  un  examen  attentif  nous  a prouvé  que  cette 
variété  constitue  une  espèce  bien  distincte.  D’autres  variétés  ont  été 
citées  dans  les  mers  de  l'Inde  et  dans  celles  de  l'Amérique;  pour  ces 
dernières  nous  ne  les  retrouvons  pas  dans  les  catalogues  des  naturalistes 
des  États-Unis.  Quant  aux  premières  , nous  pouvons  dire  avoir  sous  les 
yeux  une  coquille  des  mers  de  l’Inde  qui  semble  avoir  été  prise  à Mar- 
seille ou  à Toulon;  elle  présente  tous  les  caractères  de  l’espèce  , la 
forme  générale , les  stries  extérieures , la  coloration , la  forme  et  l’étendue 
de  la  lunule , les  impressions  musculaires,  celle  du  manteau,  les  dents 
cardinales  ; en  un  mot , tout  est  conforme  au  type  de  Tespèce , à l’ex- 
ception d’un  seul  caractère:  les  nymphes  ne  sont  pas  violettes  dans  les 
individus  de  l’Inde , elles  le  sont  toujours  dans  ceux  des  mers  d’Europe. 
Maintenant  quelle  est  la  valeur  de  ce  faible  caractère?  Nous  posons  la 
question  en  faisant  observer  que  l'identité  serait  prononcée  si  l’on  com- 
parait la  coquille  de  l’Inde  devenue  fossile  avec  les  individus  vivants  de 
nos  mers. 

La  4 3*  édition  du  Syslema  naiurœesi  très  incorrecte;  nous  avons  eu 
souvent  l’occasion  de  le  démontrer,  nous  en  trouvons  une  nouvelle 
preuve  dans  ce  qui  a rapport  au  Venus  decussata , puisqu’elle  y est  re- 
produite sous  trois  noms  différents , et  une  quatrième  fois  dans  un  autre 
genre,  celui  des  Tellines. 

Il  ne  faut  pas  trop  s’étonner  si  Born  a consacré  à cette  espèce  le  nom 
de  Fenus  deporata;  le  doute  est  d’autant  plus  permis  en  présence  des 
deux  trop  courtes  descriptions  de  Linné,  qu’il  dit  du  defîoratq  qu’elle 
est  dé  rOcéan  européen  , et  du  decussata  quelle  provient  des  mers  de 
rinde.  Poli  publiait  son  grand  ouvrage  à une  époque  oh  la  science  était 
déjà  mieux  fixée  au  sujet  de  l’espèce  qui  nous  occupe,  il  est  surprenant 
qu’il  lui  ait  imposé  un  nom  nouveau , lorsqu'il  pouvait  choisir  entre  plu- 
sieurs autres  déjà  consacrés  avant  lui. 

Lq  Pullastra  decussata  est  une  coquille  ovale,  transverse,  inéquila- 
térale, un  peu  plus  large  en  arrière  qu’en  avant , obtuse  de  ce  côté , 
souvent  sublronquée  du  côté  opposé;  les  valves  sont  assez  bombées,  peu 
épaisses , à bords  simples  et  obtus  ; la  lunule  est  allongée , étroite , 
lancéolée;  elle  est  superficielle,  circonscrite  par  une  strie  profonde;  la 
surface  extérieure  est  couverte  de  stries  longitudinales  et  transverses , 

T.  T.  9*  PARTÏE.  34* 


53o  QUINZIÈME  FAMILLE. 

les  longitudinâlés  sont  les  plus  apparentes  ; les  plus  grosses  occupent  le 
côté  postérieur;  sur  le  milieu  des  valves,  les  stries  sont  plus  fines  et 
moins  apparentes.  A l’inlérietir,  la  coquille  est  blanche,  souvent  nuancée 
de  violet  vers  Textrémité  postérieure;  la  coloration  extérieure  est  extrê- 
mement variable':  on  a des  individus  d’un  blanc  gris  ou  jaunâtre  uni- 
forme, et  l’on  arrive  à des  individus  presque  noirs , par  une  série  consi- 
dérable de  variétés  marbrées , maculées  ou  rayonnées  de  roux  pâle,  de 
fauve,  de  brun,'  passant  peu  à peu  au  brun  noirâtre  très  foncé  et  ré- 
pandu presque  uniformément.  La  forme  générale  varie  dans  des  limites 
assez  larges:  on  remarque  des  individus  plus  étroits,  d’autres  plus 
larges,  subtronqués  du  côté  postérieur,  d’autres  plus  larges  encore  et 
subtrigones.  Malgré  toutes  ceè  modifications , l’espèce  est  toujours  faci- 
lement reconnaissable  au  moyeri  de  la  charnière , des  impressions , des 
muscles  et  du  manteau  , et  enfin  à cette,  tache  violette  qui  s'étend  sur 
^es  nymphes. 

Pullastra  vieille.  PuUasfra  tèiula^  Bast. 

PI.  22.  f.  12. 

P.  Tâstii  ovnto-transversâ  y ina!(jnîlatern  ^ tnrgidnlây  tmnsvcnim  su}- 
catâ;  suivis  depressis  irregnîaribus;  timbonibus  minimis  ; humln'vtx 
perspîcuà;  derïtibus  cardinaUhns  tribus  y di\>aricatis  y conivis,  pro- 
emineutibusypostico  'Valvce  dtxtrœ  hijtdo;  marginibus  integris, 

Bast.,  Foss.  de  Bord,  Mém.  de  la  Soc.  d’hisî.  nat.  t.  a,  p.  89.  n*  5. 
pl.  6.  f.  7. 

Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert,  a*  éd.  t.  6.  p.  879,  n*  i3. 

GoldF.  PetreF  (Verm.  t.  a.  p.  348.  n®  26.  pl.  t5i.  f,  3. 

Sismonda.  Syn.  ped.  foss,  p.  ao. 

An  eadem?  f'^enus  rotnndata.  Dnj.  Foss.  de  Touraine,  p.  a6i.  n*  3, 

Habite...  Fossile  dans  les  terrains  tertiaires  moyens  de  Bordeaux,  delà 
Touraine  et  de  la  Snperga,  près  Turin. 

M.  Dujardin,  dans  son  Mémoire  sur  la  géologie  de  la  Touraine,  a 
mentionné  sous  le  nom  de  Fmws  rotundata,  une  coquille  bivalve  qui 
appartient , en  effet , au  genre  PuUaslra  , mais  qui  nous  paraît  distincte 
aussi  bien  du  rotundata  de  Brocchi  que  du  vehda  de  Baslerot.  Le  ro- 
tuiidala  caractérise  les  couches  du  terrain  subapennin , tandis  que  le 
H^etuîa  ne  s’est  rencontré  jusqu’ici  que  dans  les  terrains  tertiaires 
moyens. 

Le  Pullastra  vetuîa  est  une  coquille  ovale , Iransverse , inéquilatérale , 


LES  CONQUES. 


53  ï 

obtusè  à ses  extrémités  , médiocrement  renflée  ; ses  crochets  sont  petits , 
rapprochés  et  obliquement  inclinés  vers  le  côté  antérieur,  au-dessus 
d'une  lunule  dont  le  contour  est  peu  marqué.  Le  corselet  est  appro- 
fondi; il  se  termine  en  une  longue  nymphe  assez  épaisse  sur  laquelle, 
s’attachait  un  long  ligament  externe.  Trois  dents  cardinales  divergentes 
se  montrent  à la  charnière.  Elles  sont  presque  égales  , elles  sont  com- 
primées et  se  relèvent  graduellement  vers  le  sommet,  ce  qui  leur  donne 
une  forme  conique.  Ces  dents  sont  simples  sur  la  valve  gauche  ; mais  la 
dent  postérieure  de.  la  valve  droite  est  bifide.  L’impression  musculaire 
antérieure  est  semi-lunaire;  la  postérieure  est  plus  grande  et  plus 
arrondie.  Du  milieu  du  bord  interne  de  l'impression  antérieure  se  dé- 
tache l'impression  paléale  qui  descend  parallèlement  au  bord  ventral 
des  valves  jusque  vers  le  tiers  de  leur  longueur.  Alors  elle  se  replie  en 
dedans  et  dessine  une  sinuosité  ovalaire , horizontale , entièrement  dé- 
tachée de  la  portion  ventrale  de  l’impression  palléale.  La  surface  exté- 
rieure est  couverte  de  sillons  iransverses,  inégaux,  peu  réguliers,  tout 
à fait  diflerents  de  ceux  qui  se  trouvent  sur  le  Venus  rotundata  de 
Brocchi.  Ces  sillons  sont  plus  profonds  sur  le  côté  postérieur;  ils  dimi- 
nuent graduellement  de  profondeur  en  s’avançant  sur  le  côté  antérieur. 
Les  bords  sont  assez  épais  et  simples  dans  toute  leur  étendue.  Cette 
coquille  a 64  millimètres  de  long,  et  34  millimètres  de  large. 

Il  existe  aux  environs  de  Bordeaux  une  autre  espèce  de  Pullastra , 
voisine  de  celle-ci , et  plus  rapprochée  du  rotundata  de  Brocchi. 
M.  Dujardin  aura  été  sans  doute  trompé  en  prenant  cette  seconde  espèce 
pour  le  veluta  de  Basterot , et  en  la  rapportant  dans  la  synonymie  du 
rotundata. 


GENRE  QUARANTE-SIXIÈME. 

VÉNUS,  rmus,  Lin. 

PI.  ao.  f.  4.  5.  14  à i8.  PI.  ar.  L i à 6.  9,  10.  i3.  14,  PL  72.  f.  i.  2. 

CARACTÈRES  GÉNÉRIQUES.  — Animal  ovale  ou  arrondi , ayant 
les  lobes  du  manteau  réunis  postérieurement  et  garnis  dans 
toute  leur  circonférence  d’un  bord  membraneux  profondément 
plissé  ; siphons  courts  , inégaux , réunis  à la  base  et  quelquefois 
dans  presque  toute  leur  longueur,  leur  ouverture  garnie  de  ten- 
tacules simples  et  cylindracés.  Pied  mince  et  comprimé,  trian- 

3// 


53a 


OUINZIKME  FAMILLE. 

gui  aire  ; bouche  petite  . ovale,  accompagnée  de  palpes  labiajes 
très  petites,*  quadrangulaires;  branciiies  larges,  courtes  et 
inégales,  réunies  postérieurement,  profondément plissées. 

Coquille  ovale , arrondie  ou  subtrigone , parfaitement  close  , 
épaisse , épiderme  peu  apparent  ; charnière  ayant  trois  dents 
cardinales,  divergentes,  point  de  dents  latérales;  impressions 
musculaires,  grandes,  et  ovalaires  ; impression  palléale  terminée 
du  côté  postérieur  par  une  sinuosité  petite,  triangulaire, 
oblique  de  haut  en  bas  et  d’avant  en  arrière.  ‘ 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — TdUna^  Rondelet,  Lister,  Gual- 
tieri.  — Pechmculus , Lister,  Da  Costa,  Humphrey.  — 
Chxvma^  Gualtieri,  Adanson,  d’Argenville.  — Çuneus^  Da 
Costa.  — CaUisia^  Callisioderma  [in  parie)^  Poli.  — Anoma- 
locardia^  Schumacher . — Dosina^  Gray . — Clausina^  Brown . — ■ 
Chione^  Megerle.  — Oriygia  , Brov/n.  — Timoclea  , Leach, 
Brown.  — Antigone^  Schumacher. — Venus,  Linné,  Chem- 
nitz , Schrocter,  Gmelin,  etc.  [in  pa^'/e], — Genus  entend,, 
Bruguière,  Lamarck,  Roissy,  Cuvier,  Blainville,  Rang, 
Hanlcy,  etc.  j . 

Observations.  — Ainsi  que  nous.venons  de  le  voir,  la  famille  des  Con- 
ques de  Lamarck  a trouvé  tous  ses  genres  dans  le  grand  Vénus  de  Linné  ; 
mais  ces  genres  ne  sont  pas  les  seuls  qui  en  aient  été  séparés.  Bruguière 
en  a extrait  les  Lucines,  les  Galathées  ellesCapses.  Plus  tard,  Lamarck 
les  Pétricoles  et  les  Vénéricardes,  ainsique  les  Cyprines.  Mais  déjà 
avant  Bruguière  et  Lamarck,  Scopoli  avait  proposé  le  genre  Dos mia 
pour  les  espèces  orbiculaires  auxquelles  Poli  attacha  plus  tard  le  nom 
dVlWcfîu'.s*.  Enfin,  Lamarck  fit  un  démembrement  plus  considérable 
encore,  eii  établissant  le  genre  Cylliérée  qu'il  avait  déjà  proposé  une 
première  fois  sous  le  nom  assez  impropre  de  Meretrix.  A la  suite  de  tous 
ces  démembrements  , le  genre  Vénus  de  Linné  se  trouvait  considérable- 
ment réduit.,  et  il  ne  renfermait  plus  que  des  coquilles  bivalves  régu- 
lières portant  trois  dents  cardinales  à la  charnière.  M.  So'sverby  pensa 
que  CO  genre  Vénus  pourrait  être  encore  divisé  en  deux  , et  il  proposa 
sous  le  nom  de  Pulhtstra  un  genre  destiné  à réunir  toutes  les  espèces 
de  Vénus  oblongues,  Iransverses , aplaties  latéralement,  ayant  à la 
charnière  trois  dents  subparaDèles  on  divergentes,  mais  minces  et 


LES  CONQUES. 


533 


étroites.  L’examen  que  nous  venons  de  faire  de  ce  dernier  genre  nous 
a prouvé  qu’il  pouvait  être  avanlageusement  conservé  dans  la  mé- 
thode , puisqu’il  est  caractérisé  à la  fois  par  la  coquille  etpar  l’animal. 
Tout  récemment,  M.  Gray  a proposé  dans  le  genre  Vénus  un  plus 
grand  nombre  de  coupures.  Nous  en  avons  fait  l’examen  dans  les  géné- 
ralités de  la  famille  des  Conques;  nous  pensons  que  la  plupart  de  ces 
genres  ne  sont  pas  dans  leurs  rapports  naturels , et  que  plusieurs  d’entre 
eux  doivent  être  rejetés,  fondés  qu'ils  sont  sur  des  caractères  d’une 
trop  petite  valeur.  Dans  un  groupe  aussi  étendu  que  celui  qui  nous  oc- 
cupe et  dans  lequel  les  caractères  des  coquilles  sont  souvent  vagues 
et.  incertains , il  faut  rechercher  dans  les  animaux  des  moyens  plus  sûrs 
pour  distinguer  de  bons  genres;  et  cette  tentative  n’a  pas  été  faite 
d’une  manière  assez  complète  pour  satisfaire  à tous  les  besoins  de  la 
science.  Aussi  les  opinions  des  concliyliologues,  aujourd'hui  en  pré- 
sence, sont  très  diverses  et  trouvent  toutes  des  moyens  de  se  justifier 
par  les  faits  connus , malheureusement  encore  insuffisants. 

Si  plusieurs  zoologistes  ont  démembré  outre  mesure  les  Vénus,  telles 
que  Lamarck  les  avait  limitées,  d’autres,  au  contraire,  ont  repoussé  pres- 
que tous  les  genres  proposés,  et  en  sont  revenus,  non  pas  à l'ancien 
genre  de  Linné,  mais  à un  genre  qui  a presque  autant  d’étendue. 
L’élude  attentive  et  exclusive  des  coquilles  coudait  presque  inévitable- 
ment à ce  dernier  résultat.  En  effet,  quand  on  rassemble  le  plus  grand 
nombre  possible  d’espèces  vivantes  et  fossiles  appartenant  aux  genres 
inscrits  dans  la  famille  des  Conques,  on  voit  se  produire  un  phéno- 
mène que  nous  avons  déjà  signalé  plusieurs  fois  à l’attention  des  con- 
chyliologues.  Si  l’on  prend  la  forme  générale-,  on  la.  voit  se  modifier 
insensiblement , et  ne  présenter  aucune  constance  dans  chacun  des 
grands  groupes;  par  conséquent , ce  caractère  empirique,  quelquefois 
utile  à l’observateur,  lui  échappe  entièrement.  Si  l’on  prend  les  carac- 
tères de  la  charnière , on  observera  bien , en  effet , des  différences 
entre  les  types  principaux  des  groupes;  mais  à mesure  qu’on  étudie 
un  plus  grand  nonibre  d’espèces,  on  voit  la  dent  dos  Cytbérées,  par 
exemple,  disparaître  insensiblement,  et  il  y a telles  espèces  que  l’on  pour- 
rait aussi  bien  placer  parmi  les  Vénus  que  parmi  lesCylhérées.  Le  carac- 
tère conchyliologique  des  deux  genres  dont  nous  venons  de  parler  se 
trouve  ainsi  d’une  application  difficile,  quelquefois  môme  impossible,  pour 
un  certain  nombre  d’espèces.  Il  en  est  de  même  quand  on  arrive  à la 
limite  des  V^nusel  des  Pullastra.  A mesure  que  la  forme  générale  tend 
à s’allonger,  la  charnière  elle-même  se  modifie,  et  les  dents  épaisses  et 
robustes  des  TViihs  proprement  dites  s'amincissent  peu  à peu,  finit- 


QUINZIEME  EAMILLE. 


534 

sent  par  ressembler  à celles  des  Pullastra , après  avoir  subi  de  nom- 
breuses modifications.  Quant  aux*  Ûo^inia,  elles  se  distinguent  nettement 
par  leur  forme  orbiculaire,  ainsi  que  par  la  disposition  spéciale  de  la 
sinuosité  postérieure  du  manteau.  Cependant  il  y a des  Venus  qui  ont 
une  sinuosité  triangulaire  semblable.  La  charnière  elle-raôme  ressemble 
singulièreinenl  a celle  des  Cytliérées.  Nous  comprenons  comment  il  se 
fait  que  des  naturalistes , entraînés  par  les  observations  que  nous  venons 
de  rappeler,  aient  conclu  à la  réunion  de  tous  ces  genres  en  un  seul , 
auquel  ils  ont  conservé  le  nom  de  Venus.  Mais,  si  ces  naturalistes,  au 
lieu  de  se  guider  uniquement  par  l'étude  des  coquilles  , avaient  cherché 
dans  les  animaux  des  moyens  plus  certains  de  caractériser  les  genres  , 
ils  auraient  déjà  pu  en  limiter  quelques  uns  en  mettant  à profit  les  beaux 
travaux  de  Poli , ainsi  que  d’autres  observations  isolées , actuellement 
acquises  à la  science.  Pour  inspirer  plus  de  confiance , il  manquait  à 
ces  travaux  d’étre  fondés  sur  l'observation  d’un  grand  nombre  d’espèces. 
Poli  s’était  borné  à donner  la  figure  et  la  description  d’une  seule  Pul- 
lastra, d'une  seule  Vénus,  d'une  seule  Cylhérée.  et  d'une  seule  Arthémis. 
On  se  demandait,  non  sans  quelques  raisons,  si  les  animaux  n'offri- 
raient pas  autantde  variations  dans  leurs  caractères  extérieurs  que  leurs 
coquilles  mêmes.  L’observation  seule  pouvait  répondre  à cette  objection, 
et  malheureusement  jusqu’ici  elle  n'a  pu  encore  résoudre  la  difficulté 
d’une  manière  satisfaisante.  Nous  connaissons  les  animaux  de  quelques 
espèces  do  chaque  groupe,  et  quoique  leurs  caractères  soient  constants, 
peut-être  est-oe  conclure  trop  prématurément  que  de  dire  qu’ils  consti- 
tuent des  genres  toujours  distincts  et  désormais  invariables. 

Le  zoologiste  doit  emprunter  aux  formes  extérieures  les  signes  carac- 
téristiques des  bons  genres } Ü est  impossible  que  des  formes  extérieures 
constantes  ne  nous  traduisent  pas  un  caractère  profond  dans  l'organi- 
sation de  l'animal.  Nos  observations  prouvent  que  celte  assertion  est 
vraie  dans  le  petit  nombre  d'espèces  dont  nous  connaissons  les  ani- 
maux, dans  les  Venus  et  les  principaux  genres  qui  en  ont  été  démem- 
brés. Nous  avons  décrit  l'animal  du  PuUastra  ; nous  allons  faire  con-- 
naître  celui  des  Venus  proprement  d'Ues. 

Tel  qu'il  est  limité  aujourd'hui,  le  genre  Vénus  réunit  des  coquilles 
généralement  épaisses,  solides,  plus  ou  moins  bombées,  tantôt  subglo- 
buleuses  et  ovalaires,  tantôt  subtriangulaires  et  plus  aplaties.  Ce  sont 
des  coquilles  qui  sont  toutes  inéquilatérales  ; le  côté  antérieur  est  plus 
court;  quelquefois  il  est  dominé  par  des  crochets  saillauts,  obliques,  et 
inclinés  au-dessus  d une  lunule  plus  ou  moins  profonde,  selon  les  es- 
pèces, mais  se  présentant  nettement  circonscrite  dans  toutes.  Dans  le 


LES  CONQUES. 


535 


plus  grand  nonibredes  espèces,  la  surface  extérieure  est  dépourvue  d’épi- 
dern^o  ; dans  celles  qui  sont  lisses,  si  l 'épiderme  existe,  il  ressemble  à une 
coucho  vernissée,  luisante,  très  tenace,  et  qui  ne  dépasse  jamais  les  bords 
des  valves.  Les  accidents  de  la  surface  externe  sont  nombreux  : tantôt 
les  espèces  sont  ornées  de  lamelles  plus  ou  moins  saillantes,  nombreuses, 
les  intervalles  restent  lisses  j tantôt  ces  lamelles,  plus  serrées,  sont  sé- 
parées par  des  espaces  sur  lesquels  descendent  des  stries  longitudinales 
plus  ou  moins  nombreuses,  plus  ou  moins  régulières.  D’autres  espèces 
ont  seulement  des  stries  longitudinales  ou  des  stries  transverses;  enfin, 
ces  ornements  se  combinent,  diminuent  insensiblement  d’importance, 
finissent  par  disparaître,  et  l'on  a alors  un  groupe  de  Vénus  tout  à fait 
lisses.  Les  bords  de  ces  coquilles  sont  généralement  épais  ; il  y a ce- 
pendant des  espèces  où  ils  restent  minces  et  tranchants.  Dans  les  unes 
ils  sont  simples  : ce  sont  celles  qui  sont  lisses,  ou  qui  ont  des  stries  ou 
des  lamelles  transversales.  Dans  d'autres,  ils  sont  finement  crénelés,  et 
ces  crénelures  ne  se  rencontrent  que  sur  les  espèces  ornées  de  stries 
longitudinales.  Cependant  il  existe  quelques  exceplioas  à cette  règle 
générale:  nous  avons  le  Wrugosay  par  exemple,  dont  les  bords  sont 
crénelés  et  qui  cependant  n'a  point  de  stries  longitudinales.  Le  corselet 
est  assez  nettement  circonscrit  chez  la  plupart  des  espèces.  Il  est  al- 
longé, lancéolé,  il  occupe  une  partie  de  la  longueur  du  côté  postérieur. 
Dans  un  certain  nombre  des  espèces,  tel  que  V.  puerpenty  par  exemple, 
le  bord  du  corselet  de  la  valve  droite  fait  une  saillie  qui  s’avance 
devant  l’extrémité  postérieure  du  ligament.  Le  ligament  est  ordinaire- 
ment épais  et  saillant;  il  occupe  une  grande  partie  de  la  longueur  du 
corselet,  e^il  s’attache  solidement. sur  la  surface  de  nymphes  plus  ou 
moins  épaisses , selon  les  espèces.  Ces  nymphes  sont  circonscrites  en 
dehors  par  un  sillon,  profond , dans  lequel  s’attache  la  tunique  externe 
du  ligament.  Ordinairement  Iq  surface  supérieure  des  nymphes  pré- 
sente un  plan  oblique,  sur  lequel  se  fixe  la  substance  interne  du  liga- 
ment, celle  qui  a l'apparence  d’un  cartilage.  Toutes  les  Vénus  sont  des 
coquilles  parfaitement  closes  ; elles  ne  présentent  aucune  apparence  de 
bâillement,  soit  du  côté  antérieur,  soit  du  coté  postérieur.  La  surface 
interne  est  lisse,  souvent  blanche  ou  diversement  colorée  selon  les  es- 
pèces ; le  rose  et  le  violet  sont  les  couleurs  qui  dominent  au  dedans  de 
ces  coquilles. 

La  charnière  est  supportée  par  une  lame  cardinale  assez  épaisse  et 
solide  : elle  s’avance  plus  ou  moins  dans  l’intérieur  de  la  cavité,  et  laisse 
au-dessous  d’elle  une  cavité  assez  profonde  qui  correspond  à la  proé- 
minence des  crochets.  Cependant  dans  cette  portion  de  la  coquille  le 


536  QUINZIÈME  FAMILLE. 

test  étant  très  épais , il  n’y  a pas  de  coïncidence  exacte  entre  la  forme 
extérieure  et  celle  de  la  cavité  intérieure-des  valves.  La  charnière  est 
composée  de  trois  dents  cardinales,  épaisses,  divergentes,  tantôt  sim- 
ples , tantôt  bifides.  La  forme  de  ces  parties  varie  selon  les  espèces , 
mais  ellé  est  très  fixe  dans  chacune  d’elles,  de  sorte  que  Tétude  atten- 
tive de  la  charnière  contribue  puissamment  à séparer  des  espèces  qui 
semblent  se  confondre  par  leurs  autres  caractères.  Ce  nombre  de  trois 
dents  cardinales  n’est  pas  constant  d'une  manière  absolue.  Tous  les 
conchyliologues  savent  qu’il  y a un  petit  groupe  de  Vénus  chez  les- 
quelles il  n’existe  plus  que  deux  dents  cardinales.  Nous  pouvons  citer 
pour  exemple  le  Venus  fasciata  de  Donavan.  Ces  espèces  pourraient 
former  un  groupe  très  distinct  de  Vénus,  si  elles  ne  s’y  rat- 
tachaient d’une  manière  assez  insensible.  Nous  observons,  en  effet,  en 
réunissant  toutes  les  coquilles  qui  présentent  deux  dents  cardinales, 
qu'il  y en  a quelques  unes  chez  lesquelles  on  remarque , le  long  de  la 
nymphe,  un  rudiment  de  la  dent  postérieure,  et  Ton  peut  suivre  la  dis- 
parition de  celte  dent  postérieure  dans  une  série  assez  considérable  de 
modifications,  El  pour  ne  pas  laisser  de  doutes  sur  la  valeur  de  ce  faible 
caractère,  nous  devons  ajouter  que  l’animal  du  V.  fasciata  et  des 
autres  espèces  à deux  dents  est  tout  à fait  semblablo  à celui  des  autres 
Vénus. 

Les  impressions  musculaires  sont  généralement  assez  grandes  ; elles 
sont  fort  écartées;  elles  se  rapprochent  des  extrémités  de  la  coquille. 
L’impression  musculaire  antérieure  est  ovale  semi-lunaire  ; elle  occupe 
une  grande  partie  du  côté  antérieur  de  la  valve.  L’impression  posté- 
rieure est  plus  circulaire;  elle  se  prolonge  ordinairement  en  haut  à un 
petit  appendice  triangulaire  sur  lequel  vient  s'attacher  le  muscle  ré- 
Iracteur  du  pied.  Au-dessus  de  l’impression  du  muscle  antérieur,  au- 
dessous  de  l’extrémité  antérieure  de  la  lame  cardinale  se  trouve  une 
autre  petite  impression  ovale,  oblique;  elle  donne  insertion  au  tendon 
du  muscle  rétracteur  antérieur  du  pied. 

L’impression  palléale  mérite  un  examen  attentif,  car  il  va  nous 
fournir  une  preuve  des  modifications  nombreuses  que  peut  éprou- 
ver un  caractère  qui  paraît  plus  constant  dans  d’autres  genres.  Cette 
impression  commence  au  milieu  du  bord  inférieur  de  l’impression  mus- 
culaire antérieure;  elle  se  contourne  parallèlement  au  bord  ventral  des 
valves , mais  elle  reste  très  haut  dans  l'intérieur  de  la  coquille,  de  sorte 
qu’entre  elle  et  le  bord  règne  une  large  zone  qui  indique  la  largeur  du 
muscle  orbiculaire  du  manteau.  Parvenue  vers  l’extrémité  postérieure, 
Vrclle  impression  s’infléchit  en  dedans  , et  circonscrit  une  sinuosité  or- 


LES  CONQUES, 


5;>7 

dinairement  courte  et  triangulaire , mais  dont  la  forme  et  les  propor- 
tions varient  dans  un  grand  nombre  d’espèces.  C’est  ainsi  qu’il  y en  a 
un  certain  nombre  chez  lesquelles  la  sinuosité  palléale  présente  la  forme 
d’une  ellipse  coupée  en  deux  dans  son  petit  diamètre.  Mais  ce  qu’il  y a 
do  plus  curieux,  c’est  de  voir  cette  sinuosité  diminuer  très  insensible- 
ment d’une  espèce  à l’autre , se  réduire  à une  inÛexion  très  petite,  et 
disparaître  enfin,  comme  cela  a lieu  particulièrement  chez  un  certain 
nombre  d’espèces  qui  n’ont  que  deux  dents  à la  charnière.  Cependant 
toutes  les  Vénus  à deux  dents  ne  sont  point  dépourvues  de  la  sinuosité 
palléale.  Aussi,  chez  ces  espèces,  les  siphons  existent,  ainsi  que  nous 
nous  en  sommes  assuré  dans  le  V.  fasciata  de  Donovan. 

Ainsi,  à moins  que  de  diviser  les  Vénus  en  un  grand  nombre  d’autres 
genres,  dans  chacun  desquels  se  trouveraient  limitées  les  nuances 
presque  insaisissables  que  nous  venons  d’indiquer,  il  faut  de  toute  né- 
cessité laisser  exister  un  peu  d’incertitude  dans  les  caractères  généri- 
ques pour  ne  pas  les  limiter  d’une  manière  plus  absolue  que  la  nature 
elle-même  no  l’a  voulu.  11  faut  donc  admettre  dans  la  phrase  caracté- 
ristique du  genre  deux  ou  trois  dents  cardinales,  une  inflexion  palléale 
peu  profonde  et  quelquefois  nulle.  Sans  cela  on  risquerait  de  repousser 
du  genre  des  coquilles  qui  lui  appartiennent,  et  il  deviendrait  difficile 
de  juger  de  la  nature  de  certaines  espèces  fossiles  connues  seulement 
par  des  moules  ; car,  sur  les  uns,  on  peut  rencontrer  des  traces  de  deux 
dents  cardinales  et  d’une  petite  inflexion  palléale , et  assurément  le  pa- 
léontologiste ne  placerait  point  ces  moules  parmi  les  Vénus  , s’il  ne  sa- 
vait d’avance  qu’il  existe  des  espèces  vivantes  qui  présentent  ces  carac- 
tères. D’un  autre  côté  , on  pourrait  également  observer  des  moules  de 
coquilles  ayant  l’impression  palléale  simple  , et  offrant  les  vestiges  de 
trois  dents  cardinales.  Pour  celles-là,  le  paléontologiste  se  trouverait 
aussi  dans  le  même  embarras  s’il  ne  connaissait  également  les  espèces 
de  Vénus  qui  présentent  ces  caractères  particuliers.  Ces  observations 
préliminaires  nous  conduisent  à cette  conclusion,  que  pour  bien  étudier 
les  espèces  fossiles , surtout  celles  des  terrains  anciens , il  faut  bien  con- 
naître les  espèces  vivantes  ou  celles  des  terrains  tertiaires. 

On  ne  peut  contester  la  ressemblance  qui  existe  entre  l’animal  des 
Pullastra  et  celui  des  Vénus.  Néanmoins,  ces  mollusques  se  distinguent 
toujours , du  moins  dans  toutes  celles  des  espèces  que  nous  avons  exa- 
minées. 

L'animal  des  Vénus  a une  forme  analogue  à celle  de  sa  coquille  ,.par 
conséquent  il  est  variable  comme  elle  ; mais  ses  caractères  zoologiques 
sont  constants.  Son  manteau  , même  dans  la  plus  grande  partie  de  son 


538 


QUINZIEME  FAMILLE. 


éleadue  , est  limité  sur  ces  bords  par  un  large  muscle  orbiculaîre , dont 
nous  avons  fait  remarquer  l’impression  sur  Tintéricur  des  valves.  Les 
lobes  de  cet  organe,  parfaitement  égaux  et  symétriques  , sont  disjoints 
dans  la  plus  grande  partie  de  leurs  circonférences , depuis  le  bord  infé- 
rieur du  muscle  adducteur  antérieur  jusqu'à  l'origine  des  siphons,  où 
se  produit  une  commissure  solide.  A l'intérieur,  les  lobes  du  manteau 
restent  simples , et  ils  sont  dépourvus  de  cette  longue  valvule  intérieure 
que  nous  avons  fait  remarquer  dans  les  àlactres  et  dans  plusieurs  autres 
genres.  Lo  bord  lui-môme  se  partage  en  deux  parties  bien  distinctes  : 
l’une,  plus  courte,  s’applique  sur  les  bords  des  valves  et  conlieoi  l'or- 
gane sécréteur  du  test  ; l autro,  située  en  dedans  , est  membraneuse, 
saillante;  et  lorsque  l’animal  tient  ses  valves  entre-bâillées,  cos  mem- 
branes se  plissent  profondément  comme  un  jabot , celle  d’un  côté  res- 
tant appliquée  à celle  de  l’autre  ; il  en  résulte  quo  la  cavité  du  manteau 
est  close  de  la  manière  la  plus  parfaite.  Cependant,  lorsque  l'animal 
fait  sortir  son  pied  ou  Iûï*squ  il  a besoin  de  faire  écouler  de  la  cavité  pal- 
iéale  l’eau  qui  y a été  introduite  par  les  siphons i les  deux  lobes  du 
manteau  se  détachent  l'un  do  l’autre , tout  en  conservant  aux  plis  mem- 
braneux qui  les  terminent  tovxtes  leurs  sinuosités  réciproques. 

Les  siphons  sont  généralement  courts , attachés  à l'animal  dans 
presque  toute  la  hauteur  du  (u>té  postérieur  ; ils  ont  une  base  large  de 
haut  en  bas,  mais  comprimée  latéralement.  Ces  organes,  par  la  pe- 
titesse de  leur  volume,  paraissent  disproportionnés  à la  grosseur  de 
ranimai.  C’est  ainsi  que  dans  les  grands  individus  des  Fejiws  verrucosa, 
individus  qui  ont  65  millimètres  de  longueur,  les  siphons  n'ont  pas 
plus  de  1 2 à 4 5 millimètres  d’étendue.  Par  celte  brièveté,  ils  so  dislin  - 
guent  déjà  de  ceux  des  Pullastres  et  des  autres  genres  de  la  famille  des 
Conques.  Les  siphons  sont  inégaux;  ils  sont  réunis  à la  base  et  séparés 
l’un  de  l'autre  au  sommet  dans  une  étendue  plus  ou  moins  considérable. 
Ainsi , dans  le  V.  verrucosa  , ils  sont  séparés  dans  presque  toute  leur 
étendue,  tandis  que  dans  le  V,  gallma  ils  sont , au  contraire,  réunis 
jusque  près  du  sommet.  Dans  le  Venus  /asetaid,  ils  sont  en  quelque 
sorte  intermédiaires,  car  ils  sont  réunis  jusque  vers  le  milieu  de  leur 
longueur.  Ghea d’autres  espèces,  d'autres  nuances  se  montrent.  II  ne 
faut  donc  pas  allaclier  une  plus  grande  importance  qu’il  ne  faut  à ce 
caractère  de  jonction  ou  de  disjonction  des  organes  dont  nous  parlons. 
Le  siphon  anal  est  le  plus  petit , comme  dans  les  autres  mollusques 
acéphalés.ll  se  prolonge  en  un  sphincter  membraneux  en  forme  de  cou- 
pole, percée  au  sommet,  d’une  ouverture  circulaire,  d’un  moindre  diamètre 
que  celui  du  siphon  lui-même.  Au  point  de  jonction  de  ce  bord  mem- 


LES  CONNUES. 


539 

braneux  sur  le  bqrd  du  siphon  s’élève  un  seul  rang  de  tentacules 
simples,  cylindracés  et  obtus  au  sommet.  Ces  tentacules  sont  plus 
ou  moins  nombreux,  selon  les  espèces,  et  leur  longueur  est  elle-même 
variable;  car  ils  sont  plus  courts  dans  le  V‘,  rerrucosa  que  dans  le  V. 
gaUina.  Le  siphon  branchial  est  très  différent  ; son  ouverture  est  sur- 
montée d’un  rang  interne  de  grands  tentacules  simples  et. cylindri- 
ques, et  d’un  rang  extérieur  d’autres  tentacules  plus  courts,  tantôt 
bifurqués,  quelquefois  étoilés , mais  rarement  simples,  comme  le  pre- 
mier. Ces  tentacules  sont  donc  bien  différents  de  ceux  qui  existent  chez 
les  Pullastres . et  cela  seul  suffirait , selon  nous , pour  justifier  ie  genre 
PuUastra  de  M.  Sowerby.  Un  muscle  rétracteur,  petit,  triangulaire, 
peu  épais,  se  confondant  latéralement  avec  le  muscle  orbicuiaire  du 
manteau,  sert  à faire  rentrer  les  siphons  à l’intérieur  des  valves.  Nous 
avons  vu  dans  certaines  espèces  une  impression  palléale  simple;  il  sem- 
blerait , d’après  cela , que  les  lobes  du  manteau  sont  désunis  jusqu'au 
muscle  postérieur,  et  que  les. siphons  manquent;  mais  il  n’en  est  pas 
ainsi,  ces  organes  persistent  et  leur  muscle  rélracleur  se  confond  entiè- 
rement avec  le  muscle  orbicuiaire,  et  n’en  dépasse  pas  la  largeur.  Lors- 
que l’on  ouvre  le  manteau  , et  après  avoir  soulevé  l’extrémité  des  feuil- 
lets branchiaux , on  aperçoit  l’ouverture  intérieure  des  siphons.  Cette 
ouverture,  d une  médiocre  grandeur,  est  dépourvue  de  valvules  propre- 
ment dites;  une  simple  bride  iransverse  membraneuse  est  le  seul  ves- 
tige qui  reste  de  la  large  valvule  qui  existe  chez  d’autres  genres  de  mol- 
lusques. 

La  bouche  est  ovale-lransverse  ; elle  est  petite  relativement  à la  gran- 
deur de  l’animal.  Elle  est  située,  comme  à l’ordinaire,  au  fond  de  l’angle 
produit  par  la  rencontre  du  muscle  adducteur  antérieur  et  de  l'extrémité 
de  la  masse  abdominale.  Deux  lèvres  membraneuses  et  transverses  gar- 
nissent celle  bouche  Ces  lèvres  se  prolongent  de  chaque  côté  en  deux 
palpes  latérales  étroites,  triangulaires  et  peu  allongées.  Â cet  égard, 
les  Vénus  ressemblent  beaucoup  aux  PuUastra,  et  cette  ressemblance , 
dans  des  organes  aussi  constants  que  le  sont  ceux  dont  nous  parlons , a 
été  pour  nous  un  très  bon  moyen  pour  rapprocher  les  divers  genres  de 
la  famille  des  Conques.  La  surface  interne  des  palpes  est  couverte  de 
lamelles  membraneuses,  transverses,  qui  s’arrêtent  brusquement  à 
l’origine  des  lèvres. 

La  masse  abdominale  est  plus  ou  moins  épaisse , selon  les  espèces  j 
elle  est  large  et  mince  dans  les  espèces  aplaties;  elle  est  plus  volumi- 
neuse dans  celles  qui  sont  subglobuleuses.  Cette  masse  abdominale  se 
prolonge  en  avant  en  \\n  pied  large  et  triangulaire , robuste,  et  suscep- 


54o 


QUINZIEME  FAMILLE. 


tible  de  mouvements  très  divers,.  Déjà , dans  la  plupart  des  espèces , le 
pied  montre  un  étranglement  au  moment  où  il  se  réunit  à la  masse  des 
viscères.  Cet  étranglement  est  un  acheminement  vers  la  forme  que  cet 
organe  affecte  dans  les  genres  des  familles  qui  vont  suivre. 

Les  branchies  sont  très  larges  chez  les  Vénus.  Elles  sont  subqua- 
drangulaires:  les  feuillets  externes  sont  un  peu  plus  courts  que  les  in- 
ternes. Dans  le  plus  grand  nombre  des  mollusques,  les  côtes  ou  les  stries 
qui  existent  à la  surface  des  branchies  sont  transverses  ou  à peine  obli- 
ques. Dans  les  Vénus,  au  contraire,  elles  deviennent  de  plus  en  plus 
obliques;  il  y a même  des  espèces  chez  lesquelles  ces  stries  sont  per- 
pendiculaires. se  dirigeant  directement  de  la  bouche  vers  Textrémité 
postérieure.  Les  dimensions  de  ces  organes  sont  presque  égales;  néan- 
moins les  feuillets  internes  se  rétrécissent  brusquement  vers  leur  extré- 
mité antérieure,  se  terminent  en  une  pointe  aiguë  qui  s’avance  vers  la 
bouche  en  se  plaçant  entre  les  palpes.  Les  feuillets  branchiaux  ne  sont 
guère  plus  longs  que  la  masse  abdominale  elle-méme  ; cependant  leur 
extrémité  postérieure  vient  se  prolonger  au-devant  de  l'ouverture  du 
siphon  anal,  et  se  soude  aux  plis  membraneux  qui  entourent  l'ouver- 
ture de  ce  siphon. 

Les  organes  de  la  circulation  sont  situés  dans  la  région  cardinale , 
comme  chez  le  plus  grand  nombre  des  mollusques 'acéphales.  Nous 
n’aurions  pas  à parler  de  ces  organes , si  le  cœur  ne  présentait  un  fait 
particulier  d'organisation  qui  se  montre  pour  la  première  fois  dans  la 
série  des  mollusques  dont  nous  nous  occupons.  Dans  tous  les  animaux 
soumis  jusqu’ici  à notre  examen  , le  ventricule  aortique  est  fusiforme  ; 
il  est  creusé  d’une  seule  cavité  au  centre  de  laquelle  passe  le  tube  intes- 
tinal . Dans  les  Vénus . le  cœur  conserve  celle  forme,  mais  en  se  prolongeant 
en  arrière  le  long  de  l'inleslin  il  parvient  dans  le  voisinage  du  muscle 
postérieur,  et  là  il  se  dilate  de  nouveau  en  un  second  ventricule  plus 
petit  que  le  premier.  Il  serait  curieux  d’observer  comment  s'établit  la 
circulation  dans  un  si  singulier  appareil,  s’il  y a synchronisme  dans 
les  contràcUons  des  deux  ventricules  ou  s’ils  se  contractent  l’un  après 
l’autre. 

Quoique  les  divers  retranchements  opérés  dans  le  genre  Vénus  aient 
réduit  considérablement  le  nombre  des  espèces  , cependant  ce  genre 
en  contient  au  moins  une  centaine  de  vivantes  distribuées  dans  presque 
toutes  les  mers.  Les  Vénus  sont  des  animaux  littoraux.  Ils  aiment  à 
vivre  h peu  de  profondeur  ; ils  choisissent  habituellement  les  plages  basses 
de  sable,  dans  lesquelles  ils  s’enfoncent  perpendiculairement  à Laide 
des  mouvements  vormiformes  de  leur  pied.  Ils  se  creusent  un  trou  peu 


LES  CONQUES- 


5/1 1 

profond  , de  manière  à faire  saillir  leur  siphon  au  niveau  du  sol.  Le 
nombre  des  espèces  va  en  décroissant  des  régions  équatoriales  vers  les 
régions  polaires.  Quelques  unes  s’étendent  sur  une  très  large  surface. 
Nous  avons  quelques  espèces  dans  les  mers  d’Europe  qui  remontent  très 
haut  vers  le  nord  , et  so  retrouvent  sur  la  côte  occidentale  de  l'Afrique, 
après  s’être  propagées  dans  toute  la  Méditerranée.  D’autres  espèces, 
venant  du  nord  de  l’Amérique,  descendent  aussi  vers  les  régions 
équatoriales,  et  nous  n’en  connaissons  aucune  qui  se  soit  établie  sur 
toute  la  longueur  du  littoral  des  deux  Amériques.  S'il  y a un  certain 
nombre  d’espèces  qui  jouissent  de  celte  propriété  de  s’accommoder  à 
des  climats  divers  . il  y en  a beaucoup  d'autres  qui  sont  localisées  , et 
qui  ne  franchissent  pas  de  plus  courtes  limites  : telles  sont  quelques 
unes,  par  exemple,  qui  sont  propres  à la  Méditerranée,  d'autres  au 
Sénégal , d’autres  enfin  aux  îles  de  l'Océanie,  etc.,  etc. 

Près  de  cent  cinquante  espèces  fossiles  sont  citées  dans  les  ouvrages 
des  paléontologistes.  Pour  en  connaître  la  distribution,  il  nous  a fallu 
les  examiner  toutes,  vérifier  l'exactitude  de  leur  synonymie , rejeter 
du  genre  celles  qui  ne  lui  appartiennent  pas,  y introduire  les  espèces 
oubliées,  ou  mal  classées.  De  ce  travail  long  et  fastidieux  , il  en  est  sorti 
quelques  observations  profitables  dont  nous  consignons  ici  les  princi- 
pales , et  il  en  est  résulté  une  réduction  notable  dans  le  nombre  des  es- 
pèces. En  elfet,  nous  les  réduisons  a cent  six , et  parmi  elles , nous  lais- 
sons quelques  espèces  dont  la  charnière  n’est  point  connue.,  et  qui 
offrent  seulement  la  forme  générale  des  Vénus.  H était  bien  difficile  de 
ne  point  les  admettre  dans  le  genre.  Si  elles  sortent  des  Vénus,  ce  sera 
pour  rentrer  dans  les  Cylhérées  ; elles  dépendent  certainement  de  la 
famille  des  Conques. 

Nous  avons  quelques  erreurs  à relever  dans  la  nomenclature  des 
Vénus  inscrites  dans  l’ouvrage  de  Goldfuss. 

Nous  ferons  remarquer  d'abord  que  son  Venus  anguîata  est  une 
coquille  cordiforme  et  suborbiculaire , qui  a bien  plutôt  l'apparence 
d'un  Cardium  que  d’une  Vénus.  L'angle  postérieur  qui  caractérise  l’es- 
pèce se  montre  très  fréquemment  chez  les  Cardium  et  point  chez  les 
Vénus. 

Le  ]''enus  obliqua  du  même  naturaliste  a beaucoup  plus  l’apparence 
d'une  Lucine  que  d’une  Vénus , et  comme  la  charnière  n’est  point 
connue  , il  faut  donc  s’en  rapporter  à la  forme  générale.  Dans  tous  les 
cas , le  nom  devra  être  changé;  car  Lamarck  s’en  était  servi  pour  une 
petite  espèce  du  bassin  de  Paris.  Nous  pourrions  faire  une  observation 
semblable  au  sujet  du  Venus  vndnta  : elle  a tonte  l’apparence  d’une 


542  QUINZIÈME  FAMILLE. 

Lucine.  Si  la  charnière  était  connue  et  qu’elle  fût  celle  d’une  Vénus  , il 
n’y  aurait  aucune  hésitation  ; mais , en  l’absence  de  ce  caractère  impor- 
tant , il  faut  se  laisser  guider  par  la  forme  générale. 

Le  Venus  Srtussttr/  deGoldfuss  nous  paraît  une  espèce  très  incertaine. 
Connue  par  le  moulé  seulement,  cette  espèce  a dû  avoir  un  test  fort 
mince,  sans  cela  les  crochets  ne  pourraient  s’approcher  alitant  qu’ils 
lè  font.  Ce  test  n’a  laissé  sur  le  moule  aucune  trace  des  impression^ 
musculaires  et  du  manteau  ^ et  d’après  les  figures  on  n'aperçoit  aucun 
vestige  de  la  charnière.  A cette  espèce  déjè  si  douteuse  par  elle-niéme, 
Goldfussy  ajoute  d’autres  incertitudes  par  la  synonymie.  Enefl'el,  il  y 
rapporte  le  Domx  Saussun  de  Brongniart , de  Goldfuss  et  de  Roemer  ; 
on  est  porté  à y voir  deux  espèces  , l'une  représentée  par  Roemer  et 
Goldfuss  , l’autre  par  Brohguiart.  Mais  toutes  deux  appartiennent-elles 
au  même  genre  ? 

Le  Venus  sueefea  de  Goldfuss  est  encore  une  espèce  douteuse;  sa 
forme  orbiculaire , ses  crochets  courbés  la  rapprochent  des  Lucines  ou 
des  Dosinics  [Arihemis , Poli). 

Quant  au  Vctiws  caudata,  elle  est  a peu  près  aussi  incertaine  que  le 
Venus  Saussüri:  car  la  charnière  ne  montre  pas  les  inflexions  des  dents 
cardinales;  les  impressions  musculaires  sont  effacées,  et  celles  du  man- 
teau paraissent  encore  moins  ; de  sorte  que  d’après  les  échantillons  que 
nous  avons  examinés,  aussi  bien  que  d’après  les  figures , cette  espèce 
né  peut  rester  parmi  les  Vénus  qu’avec  doute. 

Dans  un  ouvrage  publié  depuis  quelques  années  sur  la  craie  de  la 
Bohême,  M.  Reuss  a mentionné  et  figuré  un  certain  nombre  d’espèces 
qu’il  rapporte  au  genre  Vénus,  et  pour  la  plupart  aux  espèces  déjà 
connues  de  Sowerby  et  de  Goldfuss.  Quelques  années  auparavant, 
M.  Geinitz  avait  déjà  livré  au  monde  savant  un  ouvrage  sur  la  même 
matière , dans  lequel  des  figures,  quelquefois  assez  peu  correctes , don- 
nent une  idée  imparfaite  d'espèces  dont  la  description  est  restée  incom- 
plète. A peu  près  à la  même  époque,  M.  F. -A,  Roemer  publiait  son 
ouvrage  sur  la  craie  du  nord  de  l’Allemagne.  Pour  la  partie  paléonto- 
logique,  cet  ouvrage  peut  à peine  servir  de  document  sommaire,  puis- 
que les  figures  sont  tellement  médiocres,  qu’elles  ne  permettent  pas  de 
reconnaître  les  espèce.s  qui , dans  le  texte , sont  plutôt  indiquées  que 
décrites.  On  devait  espérer,  à l’aide  de  ces  trois  ouvrages , qu'on  recon- 
naîtrait facilement  les  espèces,  retrouvant  dans  Fun  ce  qui  manque  aux 
autres;  malheureusement  bien  des  doutes  subsistent,  et  l’examen  ra- 
pide que  nous  allons  faire  des  espèces  justifiera  notre  manière  de  voir, 

M.  Reuss  nomme  Cytherea  ^longaia  une  coquille  qui  n’a  rien  de 


LES  CONQUES. 


543 


l’aspect  des  autres  espèces  du  même  genre  ; elle  a la  forme  d'un  jeune 
Inocéramus.  La  charnière  n’est  point  figurée,  l'auteur  ne  mentionne 
pas  cette  partie  importante  dans  sa  courte  description  ; de  sorte  que 
rien , à nos  yeux , ne  justifie  l’introduction  de  l'espèce  dans  le  genre 
Cythérée. 

Le  Feaus  parva  de  Sowerby  est  une  petite  coquille  subcirculaire , 
voisine  des  Dosinies  par  sa  forme  générale;  M.  Goldfuss  en  donne  une 
figure  assez  exacte.  M.  Geinitz,  sous  cette  dénomination,  représente 
deux  espèces  très  distinctes  qui,  ni  l’une  ni  l’autre,  ne  sont  le  vrai  Venus 
parva  de  Sowerby.  L'une  d’elles  nous  semble  une  Lucine.  M.  Reuss 
donne  également  deux  figures  pour  la  même  espèce , et  l’une  d'elles  ne 
s’accorde  avec  aucune  de  celles  de  Sowerby,  Goldfuss  et  Geinitz  : elle 
représente  indubitablement  une  Lucine;  quant  à la  seconde,  elle  n’a 
point  de  ressemblance  avec  le  F.  parva  de  Sowerby;  de  sorte  que,  dans 
ces  deux  auteurs  dans  les  ouvrages  desquels  il  y a cinq  figures  du  Ve~ 
nus  parva , cette  espèce  n’y  est  réellement  pas  représentée. 

Venus  inimersa.  En  rapprochant  les  deux  figures  de  cette  espèce  de 
MM.  Geinitz  et  Reuss,  et  celle  de  M.  Sowerby,  on  reconnaît  que  les 
paléontologistes  allemands  se  sont  contentés  d’un  rapprochement  im- 
parfait entre  une  coquille  entière  et  les  moules  qu’ils  avaient  dans  les 
mains;  il  est  même  douteux  que  la  coquille  figurée  par  M.  Geinitz  soit 
de  la  môme  espèce  que  celle  de  M.  Reuss. 

Le  Fenus  plana  de  Sowerby  est  une  véritable  Cythérée  ; les  figures 
de  cet  auteur  le  prouvent  incontestablement.  SI  les  figures  de  ia  même 
coquille  que  l’on  voit  dans  Goldfuss  et  dans  la  paléontologie  française 
sont  exactes,  il  devient  évident  que  M.  Reuss  n’a  point  connu  l’espèce; 
car  il  figure  sous  ce  nom  le  moule  d’une  coquille  très  dififérente  qui  nous 
semble  appartenir  à une  Lucine  et  non  à une  Cythérée. 

Des  observations  semblables  s’appliquent  aux  autres  espèces  inscrites 
dans  les  ouvrages  de  MM.  Geinitz  et  Reuss  : ils  ont  cru  retrouver  dans  la 
craie  de  l’Allemagne  les  espèces  d’Angleterre,  et  en  cela  iis  ont  commis 
des  erreurs  auxquelles  ils  remédieront  en  comparant  en  nature  leurs 
fossiles  à ceux  d’Angleterre. 

M.  Sowerby  a figuré  dans  le  Minerai  Coiichologrj  une  espèce  de  la 
craie  sous  le  nom  de  Venus  ovalis\  elle  est  parfaitement  caractérisée  par 
sa  forme  générale  et  par  les  stries  qui  la  couvrent.  M.  Goldfuss  a assi- 
milé à cette  coquille,  et  en  lui  consacrant  le  même  nom,  une  espèce  très 
distincte  pour  laquelle  nous  proposons  le  nom  de  Fenws  Goldfussiû 

Nous  trouvons  dans  l’ouvrage  de  Goldfuss  une  Venus  parallela  pro- 
venant des  sables  verts  du  terrain  crétacé  de  Bavière;  néanmoins 


OniNZIÈME  FAMILLE. 


.M. -Philips,  dans  le  second  volume  de  son  ouvrage  sur, le  Yorkshire-, 
a imposé  le  même  nom  à une  espèce  du  terrain  carbonifère  et  très  dif- 
férente de  la  première.  Nous  donnons  à l'espèce  d'Angleterre  le  nom 
du  savant  géologue  qui  l’a  fait  connaître  le  premier , kVnus  Philipsii. 

Parmi  les  espèces  du  terrain  crétacé  décrites  et  figurées  par  Goldfuss, 
nous  trouvons  un  ï enns  gibbosa , mais  nous  sommes  obligé  de  changer 
ce  nom;  car  Sowerby,  dans  le  Minerai  Conchology,  l'avait  déjà  appliqué 
à une  espèce  tertiaire  du  crag  d’Angleterre.  En  conséquence,  nous  pro- 
posons de  nommer  Tenus  Sowerbgi  l’espèce  du  terrain  crétacé. 

En  1842,  M.  Matheron  a publié  un  ouvrage  important  pour  l'étude 
des  terrains  de  la  Provence  et  des  fossiles  nombreux  qu'ils  renferment. 
De.s  figures  accompagnent  la  description  des  espèces  nouvelles.  Dbc- 
huit  sont  inscrites  dans  le  genre  Vénus.  Les  unes  proviennent  du 
terrain  crétacé , les  autres  des  terrains  tertiaires  ; mais  toutes  ne 
sont  pas  probablement  des  Vénus,  même  en  acceptant  l’étendue  que 
Tauteur  donne  au  genre;  il  y comprend,  en  effet,  les  Cylhérées  et  les 
Vénus  de  Lamarck. 

Les  Tenus  allaudiensis  et  tnrgidula  deM.  Matheron  sont  des  Aslarte^ 
Le  Venus  galto-provincialis  est  très  probablement  une  Corbeille.  Le  Ve- 
nus Lamarckii  est  une  Lncine.  Les  Tenus  ovum  et  martiniana  sont  des 
Pullastra.  Les  autres  espèces  du  terrain  crétacé  sont  ou  des  Vénus  ou 
des  Cylhérées,  et  il  sera  difficile  de  faire  le  départ  des  espèces  jusqu'au 
moment  où  leurs  charnièrès  seront  connues.  Il  en  est  une  encore  que 
Tauteur  n’a  pas  rapportée  à son  véritable  genre , c’est  son  Venus  semi- 
radiata  qui  est  une  véritable  Telline.  Quant  aux  espèces  tertiaires, 
M.  Matheron  en  cite  quatre  seulement,  et  elles  dépendent  tontes  du 
genre  Cythérée.  Une' fois  les  espèces  étrangères  au  genre  éliminées,  il 
ne  reste  plus  que  sept  Vénus,  parmi  lesquelles  il  y a probablement  en- 
core quelques  Cylhérées. 

Les  espèces  tertiaires,  plus  faciles  à reconnaître  que  leurs  congénères 
des  terrains  plus  anciens,  devraient  offrir  un  moins  grand  nombre  d’er- 
reurs dans  leur  détermination;  il  n’en  est  pas  ainsi:  l’examen  rapide 
auquel  nous  allons  nous  livrer  le  prouvera  surabondamment.  Et  d’abord 
comme  témoignage  de  notre  impartialité  et  de  notre  amour  de  la  vérité, 
nous  reconnaîtrons  les  erreurs  que  nous-môme  avons  commises  au  sujet 
de  quelques  espèces  de  ce  genre. 

Dans  la  deuxième  édition  des  Animaux  sans  vertèbres  de  Lamarck, 
nous  avons  réuni  en  une  seule  espèce,  sous  le  nom  de  Tenus  Brocchiit 
plusieurs  coquilles  distinctes.  M.  Agassiz  les  a reconstituées  dans  un 
moment  où  nous-même,  à l’aide  de  collections  plus  complètes,  nous 


LES  CONQUES. 


o4S 

pouvions  constater  la  valeur  de  caractères  spécifiques  que  nous  avions 
considérés  d’abord  comme  d'une  moindre  importance.  II  n'est  pas  à 
dire  pour  cela  que  nous  admettions  comme  fondées  toutes  les  rectifica- 
tions de  M.  Agassiz.  Si  nous  estimions  moins  le  talent  d’un  aussi  savant 
naturaliste,  si  nous  ne  connaissions  la  juste  autorité  que  l'on  attache  à 
ses  travaux , nous  nous  contenterions  de  quelques  observations  som- 
maires; mais  nous  croyons,  dans  Tintérêt  de  la  science,  devoir  nous 
livrera  une  discussion  approfondie,  et  reprendre  l’une  après  l'autre 
chacune  des  espèces  dont  il  a fait  le  sujet  de  ses  investigations . 

Lamarck,  trompe  par  un  caractère  de  peu  d’importance,  l’érosion  du 
sommet  des  nymphes,  avait  rangé  au  nombre  des  Cyprines  de  grandes 
coquilles  fossiles  d’Italie  et  de  Bordeaux.  En  faisant  une  nouvelle  étude 
de  ces  espèces,  au  nombre  de  quatre,  Cyprina  gigantea,  pedemontnna, 
islandicoides  f uinbonaria  ^ nous  y avons  reconnu  tous  les  caractères 
des  Vénus , et  nous  avons  proposé  de  les  faire  passer  dans  ce  genre,  ce 
qui  a été  adopté  par  tous  les  conchyliologues.  En  même  temps,  après 
avoir  examiné  les  individus  de  la  collection  du  Muséum,  nous  sommes 
entraîné  à les  réunir  en  une  seule  espèce,  parce  qu’en  effet  elles  ont 
entre  elles  les  plus  grands  rapports.  A la  suite  d’un  nouvel  examen,  après 
un  intervalle  de  plus  de  dix  années,  nous  pouvons  affirmer  que  les 
Cyprina  umbonaria  et  gigantea  sont  identiques.  Il  en  est  de  même  des 
Cyprina  pedemonlana  et  is^andicoid^s  ; elles  constituent  une  seconde 
espèce,  à laquelle  l'un  ou  l’autre  nom  pourra  être  appliqué.  M.  Agassiz 
conserve  trois  espèces,  considérant  qu’en  effet,  le  Cyprina  gigantea 
pourrait  bien  être  semblable  à l'um&onan'a;  mais  il  croit  trouver  des 
différences  entre  les  individus  de  Vumbonaria  du  Piémont  et  ceux  de 
Bordeaux,  et  c’est  là  ce  que  nous  contestons.  Si  M.  Agassiz  a comparé 
de  petits  ou  de  jeunes  individus  de  Bordeaux  avec  de  grands  et  de 
vieux  individus  d'Italie,  il  y aura,  en  effet,  trouvé  les  petites  diffé- 
rences qu’il  signale;  mais  en  rapprochant  les  individus  de  même  âge 
et  de  même  taille , on  leur  trouve  l’identité  la  plus  parfaite. 

Le  Cyprina  islandicoides  de  Lamarck , Venus  islandicoîdes  de 
M.  Agassiz,  est  une  espèce  distincte  de  la  première;  c’est  à celle-là  que 
Lamarck  rapportait  l'espèce  de  Bordeaux  dont  nous  parlions  tout  à l’heure. 
II  ajoute  même  dans  la  synonymie  le  œqualis  de  Sowerby,  et  celle- 
là  est  une  véritable  Cyprine. 

Quant  à la  troisième  espèce,  Cyprina  pedemonlana  de  Lamarck , il  y a, 
de  la  part  de  M.  Agassiz , une  singulière  méprise  à son  sujet.  En  effet  , 
il  crpit  trouver  celle  coquille  dans  une  grande  Cylhérée  intermédiaire 
entre  le  Chione  et  l’Erycine.  Que  Lamarck,  qui  n’attachait  pas  une 
T.  1.  a»  partie.  35* 


QUINZIEME  FAMILLE. 


r,46 

grande  importance  à l’impression  du  manteau  , ait  confondu  quelques 
Vénus  avec  des  Cyprines , entraîné  à cela  par  des  rapports  dans  les 
formes  extérieures , on  peut  le  concevoir  ; mais  supposer  que  l'auteur 
lui-même  du  genre  Cythéréo  aurait  confondu  parmi  les  Cyprines  l’une 
des  Cythérées  les  mieux  caractérisées  , et  qui  n’a  rien  des  Cyprines 
dans  le  port,  dans  la  forme  et  les  autres  caractères  , cela,  pour  nous  , 
est  inadmissible  ; d'ailleurs  la  courte  description  de  Lamarck  ne  laisse 
aucun  doute  à cet  égard.  Elle  ne  peut  s'appliquer  en  aucune  façon  à la 
coquille  nommée  Cytherea  pedemonlana  par  M,  Agassiz.  Celle  Cyprim 
pedemontana  que  nous  avons  vue  dans  la  collection  du  Muséum  est  une 
Vénus  semblable  à celle  que  nous  avons  fait  Ggurer  dans  l’ouvrage  de 
Morée  sous  le  nom  de  Venus  Brocchu;  par  conséquent  elle  viendra  se 
ranger  à titre  de  variété  un  peu  oblongue  dans  le  Ke»ws  islandicoides 
de  M.  Agassiz;  encore  faut -il  ajouter  que  dans  celte  variété  il  n’existe 
pas  celte  légère  inflexion  postérieure  qui  caractérise  V islandicoides. 
Par  là,  la  coquille  qui  nous  occupe  est  intermédiaire  entre  les  deux  es- 
pèces, mais  elle  appartient  à la  dernière  par  ses  caractères. 

M.  Agassiz  aurait  dû  penser  qu’une  erreur  de  l'espèce  de  celle  qu’il 
attribue  à Lamarck  n'est  pas  possible , et  que  si  elle  avait  échappé  au 
célèbre  auteur  des  Animaux  sans  vertèbres,  nous  nous  en  serions  aperçu, 
nous  qui  avons  eu  sous  les  yeux  les  coquilles  mêmes  dont  Lamarck 
s’est  servi  pour  les  décrire.  A quoi  servirait  donc  une  longue  expérience 
acquise  par  tant  de  travaux,  si  elle  ne  vous  garantissait  d'erreurs  que 
ne  ferait  pas  l’amateur  le  plus  novice?  M.  Agassiz  nous  semble , dans 
cette  occasion , avoir  jugé  avec  trop  de  précipitation , et  sans  avoir  eu 
en  sa  possession  tous  les  matériaux  nécessaires  ; et  assurément  son 
jugement  aurait  été  très  différent , si , comme  nous , il  avait  vu  les  co- 
quilles de  Lamarck. 

Les  Vénus  dont  nous  venons  de  parler  ne  sont  pas  les  seules  que 
M.  Agassiz  ait  examinées.  Ce  savant  a reconnu , comme  nous , que  plu- 
sieurs espèces  sont  confondues  avec  le  Venus  verrucosa  de  Linné,  et 
cela,  aussi  bien  parmi  les  coquilles  vivantes  que  parmi  les  fossiles.  Entre 
ces  dernières,  M.  Agassiz  signale  comme  espèce  distincte  celle  qui 
est  commune  dans  les  terrains  subapennins.  II  est  vrai  qu'a  prendre 
au  hasard  quelques  individus  de  cette  coquille , ils  présentent  des  diffé- 
rences avec  le  verrucosa  vivant.  Alais  si  l’on  recherche  soigneusement 
les  variétés  ,•  on  voit  les  différences  s'amoindrir  peu  à peu  ; et  en  pré- 
sence de  ces  variétés,  M,  Agassiz  lui-même  serait  sans  doute  fort  em- 
barrassé de  décider  s’ils  sont  les  analogues  du  verrucosa  vivant  ou  s’ils 
dépendent  de  son  Venus  excei\trica.  Dans  tous  les  cas,  et  en  mettant  à 


LHS  CONQUES.  54;' 

l’écart  ces  individus  douteux , il  en  est  d'autres  fossiles  d’Italie  et  de 
Sicile  dont  l'idenlité  n’est  pas  contestable,  tant  elle  est  parfaite. 

Le  Venus  rugùsa  de  Gmelin  a été  cité  plusieurs  fois  à l’état  fossile , 
d’abord  par  Brocchi,  plus  tard  par  MM.  Pusch  , Eichwald,  Morris,  etc. 
M.  Agassiz  s'est  demandé  si  ces  fossiles  sont  en  réalité  les  analogues  de 
l’espèce  vivante,  et  il  a prouvé  que' celle  de  Brocchi  ne  l’était  pas. 
M.  Agassiz  a suivi  une  méthode  qui  nous  paraît  excellente,  car  nous 
la  pratiquons  depuis  bientôt  vingt  ans.  Quand  on  compare  deux  choses, 
il  faut  d’abord  savoir  ce  qu'elles  sont  : aussi  M.  Agassiz  commence  par 
décrire  le  rugosa , et  il  en  donne  une  Ggure  ; mais  il  faut  savoir 
si  cette  coquille  présentée  par  l’auteur  pour  le  rugosa  est,  en  effet,  l'es- 
pèce qui  doit  porter  ce  nom.  M.  Agassiz  dit  l'cuus  rugosa  (Gmelin).  Gmelin 
n’est  pas  le  créateur  de  l’espèce , c’est  Linné  lui-même  dans  le  viantissa  ; 
mais  le  rugosa  de  Linné  est  une  espèce  très  différente  de  celle  de 
Gmelin,  On  sait  combien  ce  dernier  naturaliste  a commis  d’erreurs  du 
même  genre.  Gmelin  , en  effet , à l’espèce  de  Linné  substitue  l’espèce 
que  Chemnitz  figure  sous  le  nom  de  Venus  rugosa  orienialis.  C’est  donc 
Cette  dernière  que  M.  Agassiz  admet  sous  le  nom  de  Fenws  rugosa^  et 
en  cela  il  s'associe  à l’opinion  de  Lamarck. 

En  adoptant  le  rugosa  de  Linné,  Dilhvyn  devait  rejeter  celui  de 
Gmelin  , et  lui  consacrer  un  autre  nom  ; c/est  ce  qu’il  fit  en  imposant 
le  nom  do  Emus  rig/da  an  rugosa  oHenlnlis  de  Chemnitz;  probable- 
ment on  sera  obligé  d’admettre  ce  Changement  dans  la  nomenclature. 
Quoi  qu'il  en  soit,  le  rugosa  de  M.  Agassiz  étant  connu  , il  est  évident 
que  les  espèces  données  comme  analogues  fossiles  par  Brocchi , Pusch, 
Eichwald  , etc.,  sont  très  distinctes  de  l’espèce  vivante.  Lamarck  lui- 
même  l’avait  reconnu  pour  l’espèce  do  Brocchi:  la  comparant  à toutes 
les  espèces  connues,  et  lui  trouvant  des  caractères  distinctifs  constants, 
il  lui  a donné  le  nom  de  Cytherea  muHUamella  dans  son  Histoire  des  ani- 
maux sans  vertèbres  ; par  conséquent  le  nom  de  Venus  cîneta^  proposé 
par  M.  Agassiz  en  1845,  doit  être  rejeté. 

Dans  son  catalogue  des  fossiles  de  lu  Grande-Bretagne , M.  Morris  a 
aussi  inscrit  une  Kenw-s  rugosa.  Elle  n’est  aucune  de  celles  que  nous 
venons  de  mentionner  ; elle  constitue  une  quatrième  espèce  portant  ce 
nom.  Elle  parait  être  l'analogue  fossile  d’une  espèce  encore  vivante  dans 
les  mers  d’Angleterre  , nommée  Venus  rugosa  par  Pennant  et  par 
Fleming;  mais  dans  une  synonymie  défectueuse  Fleming  confond  deux 
espèces  sous  celte  dénomination.  A laquelle  des  deux  se  rapporte  celle 
de  M.  Morris?  L’espèce  de  Pennant  ne  serait  autre  que  le  Venus  lami- 
nosa  deLaskey,  tandis  que  celle  de  Doimvan  serait  différente  encore.  Il 

35* 


548  QUINZIÈME  FAMILLE . 

est  donc  très  probable  que  c’est  à ce  laminosa  que  doit  se  rapporter  le 
rugosa  de  M.  Morris.  Mais  le  laminosa  lui-mômq.  peut-il  être  con- 
servé? Nous  ne  le  pensons  pas  ; nous  croyons,  avec  M.  Macgillivray, 
qu’il  doit  rentrer  à titre  de  variété  dans  la  synonymie  du  Fenus  gallina 
de  Linné.  En  effet,  si  l’on  rassemble  un  grand  nombre  d'individus  des 
deux  espèces , on  les  voit  se  confondre  par  de  nombreuses  variétés , et 
il  est  impossible  d'en  déterminer  la  limite.  Ainsi  l’espèce  fossile  d’An- 
gleterre serait  donc  une  variété  du  Venus  gallina  de  Linné.  On  voit  par 
ce  qui  précède  combien  il  est  nécessaire  d'examiner  soigneusement  les 
espèces  portées  sur  les  catalogues  avant  de  les  admettre  , lorsqu’il  s’agit 
de  constater  des  analogies  importantes,  comme  celle-ci , entre  des  co- 
quilles vivantes  fossiles. 

Une  autre  espèce  a encore  été  désignée  sous  le  nom  de  Venus  rugosa 
par  M.  Pusch  dans  son  travail  sur  les  fossiles  de  la  Pologne.  Elle  est 
distincte  du  véritable  rugosa  ^ et  elle  devra  reprendre  la  dénomina- 
tion de  Veiius  marginalis  que  lui  a donnée  M.  Eichwald.  Ce  marginalis 
n’est  peut-être  lui-même  qu’une  variété  du  muîtilamella  de  Lamarck. 

Si , trompé  par  la  ressemblance  du  nom , on  réunissait  en  une  seule 
toutes  les  espèces  qui  portent  le  nom  de  Venus  7*ugosa , on  tomberait 
dans  de  graves  erreurs  ; on  croirait  qu’une  espèce  vivante  dans  les  mers 
de  rinde  et  du  Brésil  vit  aussi  dans  les  mers  de  l’Europe  septentrio- 
nale, et  a son  analogue  fossile  dans  tous  les  terrains  tertiaires  du  second 
et  du  troisième  étage.  Il  est  donc  indispensable,  nous  le  répétons, 
d’examiner  avec  un  soin  scrupuleux  toutes  ces  espèces  qui  paraissent 
faire  exception  aux  lois  de  la  distribution  des  êtres  à la  surface  de  la 
terre. 

Nous  trouvons  plusieurs  fois  répété  dans  les  catalogues  le  Venus  dysera 
de  Linné,  Dans  une  discussion  approfondie,  publiée  dans  la  2*  édition  des 
Animaux  sans  vertèbres  de  Lamarck  (t.  VI,  p.  376],  nous  avons  démontré 
l’impossibilité  où  serait  un  naturaliste  d’appliquer  ce  nom  d’une  manière 
rationnelle  à une  espèce  quelconque.  En  effet,  sous  le  nom  decù/sera,  Linné 
réunit  quatre  espèces  dans  la  *10'  édition  du  Systema  naturœ.  Dans  le 
Muséum  Uh'îcœ , nous  en  comptons  sept  ou  huit.  La  synonymie  de  la 
12*'  édition  du  Si/s^ma  est  moins  étendue  ; elle  contient  encore  cinq 
' especes.  Cbemnilz  a choisi  arbitrairement  une  de  ces  espèces  pour  lui 
appliquer  le  nom.  Mais  pourquoi  celle-là  à l’exclusion  des  six  ou  sept 
autres?  Gmelin  n’a  point  amélioré  la  synonymie;  il  a même  ajouté  à la 
confusion  qui  existait  déjà  ; aussi  Dillvvyn  a rejeté  toute  celte  syno- 
nymie embrouillée  , et  il  a appliqué  le  nomlinnéen  à deux  espèces  diffé- 
rentes de  toutes  les  autres , et  que  probablement  Linné  ne  connut  pas. 


LES  CÔNyÙES.  549 

Il  est,  comme  on  le  voit,  absolument  impossible  de  dire  à laquelle  de 
toutes  ces  espèces  le  nom  de  dysera  doit  appartenir;  selon  nous,  au- 
cune ne  doit  le  prendre,  car  il  est  à présumer,  par  la  manière  vague 
dont  l'espèce  est  caractérisée  par  Linné,  que  ce  grand  naturaliste  rap- 
portait à un  même  type  des  objets  très  différenls.  Maintenant,  nous  le 
demandons,  est-il  possible  do  dire  ce  que  sont  les  espèces  fossiles  por- 
tées dans  les  catalogues  sous  un  nom  qu’on  ne  peut  appliquer  sans 
erreur? 

Si  l’on  en  croyait  M,  F. -A.  Roimer,  le  genre  Vénus  aurait  commencé 
dans  les  terrains  de  sédiment  les  plus  anciens , car  il  en  cite  une  dans 
les  terrains  dévoniens  du  Hartz.  Mais  l'auteur  a compris  lui -même 
qu'un  moule  sans  autres  caractères  que  la  forme  générale,  qui  ne  s’ac- 
corde guère  avec  celle  des  Vénus,  ne  pouvait  être  placé  dans  un  genre 
avec  certitude  ; aussi  il  l’a  fait  précéder  du  point  de  doute. 

Le  Venus  donacina  de  Schlolheim  nous  paraît  moins  douteuse  que  la 
précédente;  elle  provient  du  trias  de  Golba,  et  elle  accuse  la  présence 
du  genre  d’une  manière  plus  certaine  dans  celte  formation. 

M.  de  Munster,  dans  Goldfuss,  a fait  connaître  six  espèces  dans  le 
lias.  Ce  sont:  les  Venus  basina,  obliqua,  pumila,  anliqua,  caudata  et 
angulala.  Nous  avons  précédemment  critiqué  quelques  unes  de  ces 
espèces. 

L’oolithe  inférieure  contient  aussi  plusieurs  espèces  de  Vénus  ou  des 
coquilles  attribuées  à ce  genre  d’après  leur  forme  extérieure. 

' Nous  citerons  les  Venus  mricosa,  Sow.;  undata,  de  Munster;  tennis, 
Kock  et  Dunker.  De  toutes  les  couches  oolilhiques,  celles  du  coralrag 
sont  les  plus  riches  en  Vénus.  Six  espèces  sont  citées;  quelques  unes 
sont  encore  douteuses  quant  à leur  véritable  genre.  Ce  sont  : les  Venus 
trapeziformis  , Rœtoer;  iennistrîata , jurensis , Munster;  depressa, 
carinata , cardüœformis  de  Rœmer.  Quelques  unes  de  ces  espèces  sont 
probablement  des  Cardium , surtout  celles  qui  sont  carénées  ou  angu- 
leuses du  côté  postérieur. 

Nous  trouvons  dans  Goldfuss  et  dans  Rœmer  cinq  espèces  attribuées 
aux  couches  supérieures  du  Jura,  Kimmeridge  et  Portland.  Ce  qui  est 
remarquable , c’est  que  ces  espèces  sont  propres  jusqu’ici  à l’Alle- 
magne, et  ne  sont  point  connues  en  Angleterre.  Ce  sont,  lesFemis  sue- 
vica  et  gratidis,  Munster;  parvula,  subinflexa,  mtculœformis  de  Rœmer. 

La  formation  crétacée  contient  à elle  seule  plus  d’espèces  que  tous 
les  terrains  de  sédiment  situés  au-dessous  d’elle.  L'augmentation  du 
nombre  des  espèces  de  certains  genres,  à mesure  que  l'on  s’élève  des 
couches  profondes  vers  les  plus  superficielles,  est  un  fait  d’une  grande 


55o 


QUINZIEME  FAMILLE. 


iinportance  qui  ressort  avec  évidence  de  cet  inventaire  que  nous,  faisons 
des  coquilles  fossiles.  Néanmoins  de  nomhreu.ses  exceptions  existent 
dans  ce  développement  des  especes,  puisqu’il  y a dos  genres  qui  s'étei- 
gnent à différentes  époques  géologiques  et  n’existoiU  plus  actuellement. 
Il  n’est  pas  moins  inléreasant  d'éludidr  la  manière  dont  les  genres  se 
sont  manifestés,  et  ont  passé,  des  époques  anciennes  de  notre  globe,  à 
celle  dont  nous  sommes  actuellement  les  témoins. 

Trente-sept  espèces  se  distribuent  dans  les  divers  étages  de  la  craie. 
M.  d'Orbigny  en  a décrit  six,  et  M.  Matheron  une  septième  dans  le  ter- 
rain néocomien,  Elles  se  distribuent  assez  également  dans  les  divers 
lieux  de  la  France  et  de  la  Suisse  où  le  terrain  néocomien  a été  observé 
avec  quelque  soin.  Ce  sont  les  Venus  Matheronensis,  obesn,  Galdrina,  Col- 
taldina^  Icaimensis  Qi  Vendoperata  de  M.  d’Orbigny;  et  (/o/lo-prouin- 
cîalis  de  M.  Matheron.  Il  est  a présumer  que  ces  mêmes  espèces  existent 
aussi  en  Allemagne  et  en  Angleterre,  dans  les  couches  du  môme  terrain. 

Le  gault  et  les  sables  verts  renferment  treize  espèces  en  y joignant 
celle  des  craies  marneuses  grises  de  la  Provence.  Si  plusieurs  espèces 
sont  propres,  les  unes  au  gault,  les  autres  au  grè^  vert,  il  y en  a d’autres 
qui  passent  d’une  couche  à l'autre,  et  quelques  unes  se  répandant  plus 
abondamment,  peuvent  servir  à caractériser  les  couches  dont  nous  par- 
lons. C’est  ainsi  que  le  Venus  Xlhrayana,  par  exemple,  se  trouve  pres- 
que partout  en  France,  en  Angleterre  et  en  Savoie  où  le  gault  existe. 

Dix  espèces  se  distribuent  dans  la  craie  chlorilée.  Parmi  elles,  nous 
citerons  la  T'enns  ^'hoiomagonsis  d’Orb.,  qui  se  trouve  à Rouen  et  à 
üchaux  (Vaucluse);  les  Vmus  mmersii  et  faba  de  Sowerby,  qui  se 
rencontrent  en  Angleterre  à Blackdown,  et  en  France  à Rouen,  à Üchaux 
et  en  Touraine. 

C’est  probablement  à la  craie  chloritée  qu’il  faudra  rapporter  ces 
craies  fossilifères  découvertes  dans  l’Inde,  et  dontM.  Forbes  a décrit 
les  fossiles.  D’après  ce  naturaliste,  trois  espèces  de  Vénus  fossiles  ont 
été  trouvées  dans  les  craies  des  environs  de  Pondichéri.  ünOn  une  seule 
espèce  remonte  jusque  dans  la  craie  blanche  à Uippurites,  c’est  le  Venus 
Archiaciana  deM.  d'Orbiguy.  Nous  ne  connaissons  aucune  espèce  dans 
les  craies  supérieures  de  Maestrichl  et  de  Scanie  ; il  serabJorait  que  le 
genre  s’est  éteint  lentemeul  avant  la  ûn  de  la  période  crétacée,  avant  de 
reparaître  dans  les  terrains  tertiaires. 

Les  terrains  crétacés  de  l’Amérique  contiennent  aussi  plusieurs  es- 
pèces de  Vénus.  Nous  ne  connaissons  pas  celles  de  l’Amérique  septen- 
trionale, mais  M.  d’Orbigny  en  a décrit  deux  des  environs  de  Santa-Fe- 
de-Bogota. 


LKS  CONQUES. 


55  ï 

Il  est  assez  remarquable  de  rencontrer  un  si  petit  nombre  de 
Vénus  dans  le  terrain  tertiaire  inférieur,  si  riche  d’ailleurs  en  es- 
pèces d’autres  genres.  Nous  ne  connaissons  jusqu’ici  que  huit  espèces. 
Quatre,  les  Venus  turgidulaj  puellata,  textuel  scobinellatUj  sont  propres 
au  calcaire  grossier  ; deux  autres , obliqua  et  solida  se  montrent  plus 
particulièrement  dans  les  sables  moyens  de  Beauchamps,  Auvers,  Sen- 
lis,  etc.  La  septième  espèce  n’est  pas  du  bassin  de  Paris,  elle  est  de  la 
Belgique  ; mais  il  reste  des  doutes  à son  sujet.  M.  Nyst,  qui  le  premier 
on  a donné  la  description,  n’en  a pas  vu  la  charnière.  Ce  naturaliste  n’a 
eu  à sa  disposition  qu’un  seul  individu  qu'il  était  impossible  d’ouvrir. 
La  huitième  espèce,  le  Venus  merassata^  Sow.,  est  très  intéressante; 
non  seulement  elle  offre  l'analogie  la  plus  grande  avec  une  espèce  vi- 
vante, Cytfierea  c/trma,  Lamk.,  mais  encore  appartenant  aux  sables 
supérieurs  du  bassin  de  Paris  ; elle  se  montre  dans  un  grand  nombre  de 
lieux  situés  à d’assez  grandes  distances. 

Le  Venus  incrassala  est  l’une  de  ces  espèces  qui , indépendamment 
des  trpis  dents  cardinales,  ont  un  rudiment  de  la  dent  latérale  antérieure 
des  Cythérées.  Elle  est  du  nombre  de  ces  coquilles  ambiguës  que  l’on 
pourrait  aussi  bien  admettre  dans  un  genre  que  dans  l’autre.  Il  en  est 
de  même  à peu  près  du  Cytherea  citrina  de  Lamarck  ; seulement  la  dent 
latérale  est  un  peu  plus  grosse  encore,  ei  c’est  là  la  seule  différence  que 
l'on  aperçoit  entre  l’espèce  vivante  et  la  fossile.  Cela  suffit-il  pour  les 
séparer?  Nous  pensions  que  non  autrefois,  lorsque  nous  n’avions  qu’un 
seul  individu  vivant  à comparer  à quelques  individus  fossiles;  nous 
disons  oui,  aujourd’hui  que  nous  avons  examiné  un  grand  nombre  d’in- 
dividus et  que  nous  leur  avons  observé  constamment  cette  différence. 
Nous  le  répétons  dans  cette  occasion,  l’importance  des  caractères  spé- 
cifiques ne  se  mesure  pas  à leur  grandeur  apparente,  mais  à leur  con- 
stance. 

Cette  espèce  ne  se  rencontre  pas  seulement  en  Angleterre  et  en  France, 
elle  existe  aussi  en  Belgique , à Klein  spauwen  et  dans  quelques  autres 
localités  analogues.  D'une  variété  plus  petite  M.  Nyst  en  a fait  une  es- 
pèce sous  le  nom  de  T chms  iiicrassaloides  ; il  suffira  de  la  joindre  au 
type  de  l’espèce.  Le  Venus  incrassala  a encore  été  trouvée  dans  les 
terrains  tertiaires  de  la  Westphalie,  ainsi  que  dans  ceux  des  environs 
de  Magdebourg.  M.  Goldfuss  ne  la  reconnut  pas  et  la  figura  sous  le  nom 
de  Venus  suborhiculahSy  nom  qui  a été  adopté  par  M . Pbilippi  dans  son 
Catalogue  des  fossiles  de  Magdebourg,  inséré  dans  le  Palœontographîca 
de  M.  Meyer.  M.  Agassiz,  privé  de  matériaux  suffisants , ne  la  re- 
connut pas  non  plus  et  la  décrivit  de  nouveau  sous  le  nom  de  Cytherea 


553 


QUINZIÈME  FAMILLE. 


fîraunii  dans  son  /conogirap/iî^  des  coquilles  tertiaires  réputées  analogues- 
Voilà  donc  une  espèce  qui  se  répand  sur  un  vaste  horizon  géologique,  ce 
qui  lui  donne  un  grand  intérêt. 

Aucune  espèce  dû  terrain  tertiaire  inférieur  ne  remonte  dans  le  ter- 
tiaire moyen.  Ce  terrain  contient,  à notre  connaissance,  dix-huit  espèces 
bien  conslaléeè.  11  y en  a un  plus  grand  nombre  d’inscrites  dans  les 
catalogues;  mais  soit  qu’elles  appartiennent  à d'autres  genres,  soit  que 
leur  espèce  soit  encore  contestable , nous  nous  abstenons  de  les  men- 
tionner. Les  dix-buit  espèces  dont  nous  parlons  se  distribuent  assez 
également  dans  les  divers  bassins  qui  forment  l'étage  tertiaire  moyen. 
M.  Dujardin  en  décrit  quatre  dans  les  falunsdela  Touraine,  mais  nous 
en  connaissons  huit  dont  quelques  unes  se  retrouvent  à Bordeaux , à 
Dax,  à la  Superga  près  de  Turin.  Parmi  elles  il  y en  a qui  gagnent  le 
bassin  devienne  et  se  montrent  encore  en  Wolhynie  et  en  Podolie,  comme 
le  constatent  les  ouvrages  de  M.  Dubois  de  Montpéreux  et  de  M,  An- 
drzejousky.  Il  est  vrai  que  chez  ces  naturalistes  les  espèces  identiques 
ne  portent  pas  le  môme  nom , mais  leurs  figures  sont  assez  bonnes  pour 
faciliter  la  recliOcation  de  la  nomenclature  et  constater  le  fait  que  nous 
avançons.  C’est  ainsi  que  le  Venus  dysera  de  M.  Dubois,  par  exemple, 
n’est  ni  le  dysera  de  Linné,  que  nous  avons  vu  n'ôlre  pas  reconiiais- 
&able;  ni  celui  de  Brocchi , que  nous  reverrons  bientôt  sous  un  autre 
nom.  C’est  une  troisième  espèce  que  l’on  trouve  communément  dans  les 
faluns  de  la  Touraine,  et  à laquelle  M.  Dujardin  a attribué  le  nom  de 
Vetms  casinoides  ; en  avons  fait  le  Venus  liasteroti,  pour  la  distin- 
guer du  IVm/s  casinoides  de  Bordeaux.  Le  Venus  incrassata  de  M.  Du- 
bois n’est  pas  de  la  même  espèce  ni  du  même  genre  que  Pmcrcfssala 
de  Brocchi;  cette  dernière  est  une  véritable  Astarté.  Celle  de  M.  Dubois 
est  une  Vénus  ayant  un  petit  sinus  palléal,  et  elle  est  très  voisine,  si  ce 
n'est  identique  au  Venus  coUmmix^  Duj. , des  faluns  de  la  Touraine. 
Quant  au  Venus  senilis  de  M.  Dubois,  elle  n’est  pas  non  plus  celle  de 
Brocchi,  qui,  ainsique  nous  le  verrons,  est  une  variété  fossile  du  Venus 
tjallina  de  Linné.  L’espèce  de  Wolhynie  nous  paraît  distincte  de  toutes 
les  autres  et  propre  à caractériser  les  terrains  tertiaires  moyens  de  cette 
région  de  l'Europe,  car  c’est  elle  probablement  que  cite  M.  Piisch  dans 
les  terrains  de  la  Pologne. 

Des  dix-huit  espèces  qui  appartiennent  aux  terrains  tertiaires  moyens 
(le  l'Europe,  six  passent  dans  les  terrains  supérieurs,  et  quelques  unes 
se  retrouvent  encore  vivantes  dans  nos  mers.  Mais  avant  d'en  donner  la 
liste , nous  ne  devons  pas  oublier  celles  des  espèces  qui  se  trouvent  à la 
fois  dans  plusieurs  localités  du  terrain  en  question  ; 


LES  CONQUES. 


553 


, .y  -1*  Venus  Basteroti , Desh. 

* Espèce  confondue  avec  le  dysera  et  avec  \e  xasinoides  y mais 
toujours  distincte  par  ses  lames  épaisses  et  comme  écrasées  ; 
elle  est  en  Touraine  et  en  Wolhynie. 

' Venus  rudis  y Bu]. 

^ Espèce  assez  rare  à Bordeaux  et  dans  les  faluns  de  la  Touraine. 

\ 3"  Venus  casinoides  y Lamarck. 

Espèce  très  commune  à Bordeaux,  et  que  l’on  retrouve  à Fréjus 
et  en  Touraine. 

4“  Venus  sulcataria , Nob. 

Nous  ne  connaissons  aucune  bonne  figure  de  cette  espèce  qui 
est  commune  aux  bassins  de  l'Adour  et  de  la  Loire. 
o*"  Venus  circularis  y Desh. 

Celle-ci  se  rencontre  particulièrement  aux  environs  d’Angers. 
Pendant  longtemps  nous  l'avons  crue  propre  à cette  localité, 
nous  la  possédons  actuellement  des  faluns  de  la  Touraine. 

Les  sept  espèces  que  nous  avons  encore  à inscrire  se  partagent  en  deux 
catégories;  dans  la  première  nous  comptons  deux  espèces  seulement  qui 
remontent  dans  les  terrains  immédiatement  supérieurs  et  ne  les  dépassent 
pas.  Les  cinq  espèces  de  la  seconde  série  passent  aussi  dans  les  terrains 
supérieurs,  et  sont  encore  actuellement  vivantes. 

i “ Venus  turgida  , Sow. 

Se  trouve  dans  les  terrains  moyens  de  la  Pologne  et  de  la  Wolhynie, 
et  elle  est  aussi  dans  le  crag  d’AngIelerr,e. 

2®’ Tenus «mèonana,  Agassiz.  ^ 

L’une  des  plus  grandes  espèces  du  genre,  le  Venus  umbonaria  est  à la 
fois  dans  le  terrain  moyen  de  Bordeaux  et  de  Dax  et  dans  lé  terrain  su- 
périeur des  collines  subapennines.  > 

Les  espèces  delà  seconde  série  sont  les  suivantes  rTmus  ovata, 
gradala , plicata y casinUy  fasciata;  nous  les  mentionnons  seulement, 
parce  que  nous  allons  les  retrouver  parmi  celles  des  terrains  tertiaires 
supérieurs. 

Nous  avons  toujours  eu  soin  de  citer  à part  les  espèces  du  cragr  ce 
terrain,  par  le  nombre  des  espèces  analogues  qu’il  contient  étant  inter- 
médiaire entre  le  terrain  moyen  et  le  supérieur,  mérite  celle  distinction 
par  l inlérêt  qu’il  inspire.  Six  espèces  de  Vénus  s'y  rencontrent;  nous 
avons  déjà  mentionné  le  Venus  turgida , nous  y ajoutons  les  Venus  gib- 
bosa  et  mbricata  , toutes  deux  propres  au  crag.  Les  trois  suivantes-'; 


554  QUINZIÉME  FAMILLE. 

casina,  omta^  (asciata,  passent  dans  les  terrains  supérieur^  et  vi- 
vent encore  dans  nos  mers. 

Les  terrains  tertiaires  supérieurs  paraissent  moins  riches  en  espèces 
fossiles.  Ceux  de  l’Europe  en  contiennent  dix,  sur  lesquelles  trois  seule- 
ment n’ont  pas  leur  analogue  vivant;  le  Tenus  umbotmria,  qui  se  trouve 
en  Italie,  à Dax  et  à Bordeaux;  le  Venus scalaris,  Bronn,  qui  est  particu- 
lière aux  terrains  subapennins,  en  Italie,,  en  Sicile,  à Perpignan,  et  enfin 
le  Venus  Dianœ,  Requien,  qui  a été  récemment  découverte  en  Corse 
dans  un  terrain  tertiaire  récent,  par  le  savant  naturaliste  auteur  du 
nom  consacré  à cette  espèce  intéressante.  Toutes  les  autres  espèces 
ont  leur  analogue  vivant,  et  sont  les  suivantes  : 

V Vetms  verintcosa  J Linné. 

Espèce  très  répandue  dans  tout  l’Océan  d’Europe.  Nous  ne  connais- 
sons pas  sa  limite  vers  le  nord , mais  nous  pouvons  croire  qu'elle  n’at- 
teint pas  les  mers  de  Suède  et  de  Norvège,  puisque  M.  Lovèn  ne  la 
mentionne  pas  dans  son  excellent  opuscule.  Vers  le  midi  sa  limite  est 
également  incertaine ^ elle  vit  dans  toute  la  Méditerranée,  et  c’est  elle 
probablement  qu'Adansou  a décrite  et  mal  figurée  sous  le  nom  de 
Clonisse.  Mais  d'après  M.  Krauss  elle  ne  s’arrêterait  pas  au  Sénégal, 
elle  gagnerait  les  mers  du  cap  de  Bonne-Espérance.  Lamarck  prétend 
que  cette  espèce  vit  aussi  à rile-de-France  et  dans  les  mers  australes; 
mais  il  'est  évident  que  Lamarck  a pris  des  espèces  distinctes  pour  de 

V 

simples  variétés. 

Fossile,  le  verrucosa  est  moins  répandue.  Elle  est  dans  les  ter- 
rains tertiaires  supérieurs  de  la  Sicile,  de  Tîle  de  Rhodes,  de  l’Astesan, 
et  c’est  encore  probablement  une  de  ses  variétés  que  M.  Agassiz  a 
nommée  Venus  excetilrica, 

2®  Tenus  casina,  Linné, 

Celle-ci  se  trouve  dans  les  mêm^  mers  que  la  précédente;  seule- 
ment elle  s’étend  pins  au  nord.  M.  Lovèn  la  cite  dans  l’Océan  seandi- 
^nave;  et  s’il  était  vrai,  comme  nous  le  soupçonnons,  que  le  Venus  ro- 
aalina  de  M.  Rang  fût  une  simple  variété,  l'e^èce  vivrait  aussi  dans 
les  mers  du  Sénégal , et  s’étendrait  ainsi  sur  une  ligne  de  près  d’un 
quart  de  la  circonférence  de  la  terre. 

Cette  espèce  se  montre  à l’état  fossile  dans  les  terrains  moyens  de  la 
Podolie,  de  la  Wolhynie,  dans  le  bassin  de  la  Gironde,  dans  celui  de  la 
Loire , en  Touraine  et  en  Anjou  ; elle  se  rencontre  aussi  dans  la  crag 
d’Angleterre  et  delà  Belgique;  enfin  elle  n’est  pas  rare  dans  les  terrains 
tw^Uires  supérieurs  de  la  Sicile. . * 


LES  COJJUUES. 


555 


Nous  appellerons  l'attention  des  naturalistes  sur  ce  fait  : les  indivi- 
dus provenant  de  la  Podolie,  de  la  Touraine  et  de  la  Sicile , ont  les  itn- 
pressions  musculaires  et  la  sinuosité  palléalo  absolument  semblables  à 
celles  des  individus  vivants,  tandis  que  ceux  de  Bordeaux,  d’Angers  et 
du  crag,  soit  d’Angleterre,  soit  de  Belgique,  ont  les  impressions  mus- 
culaires'plus  grandes  et  le  sinus  palléal  plus  étroit. 

3°  Venus  plicalay  G'mel. 

Espèce  fort  belle  vivante,  au  Sénégal  et  dans  l’océan  Indien, 

Fossile  à Salles  dans  le  terrain  moyen  de  Bordeaux , à Vicence , à 
Cassel  et  dans  les  terrains  subapennins.  Nous  ferons  remarquer,  entre  les 
individus  vivants  etfossües,  une  très  légère  différence  dans  la  largeur  du 
sinus  palléal , un  peu  plus  large  dans  les  premiers  que  dans  les  seconds. 

4“  Venus  gradalay  Desh. 

Nous  avons  donné  ce  notn  à une  coquille  confondue,  tantôt  avec  le 
(lysera  de  Linné,  tantôt  avec  le  Venus  fasciata;  elle  se  reconnaît  aux 
six  ou  sept  grosses  côtes  Iransverses,  aplaties,  renversées  en  haut  et 
couvrant  presque  toute  la  surface  extérieure.  Cette  espèce  vit  dans 
presque  toute  la  Méditerranée. 

Elle  est  fossile  dans  le  terrain  moyen  d’Angers  et  dans  le  terrain  su- 
périeur d’Âsti  et  de  la  Sicile. 

5“  Venus  fasciata  J Donovan. 

Espèce  très  répandue  depuis  les  mers  du  Nord  jusque  dans  la  Médi- 
terranée; très  variable  dans  ses  couleurs,  elle  est  plus  constante  dans  sa 
forme  et  tous  ses  autres  caractères.  Gmelin  , Montagu  en  ont  fait 
une  variété  du  Pcmis  Paphia.  M.  Payraudeau  lui  a consacré  le  nom  de 
Vettus  Brongniarli;  mais  il  était  juste  de  revenir  au  premier  nom  donné 
par  Da  Costa , et  c’est  ce  que  fit  Donovan 

Cette  espèce  est  fossile  dans  les  terrains  tertiaires  moyens  et  supé- 
rieurs, dans  le  crag  de  Belgique  et  d’Angleterre,  et  en  Sicile, 

6®  Fenws  galUna,  Linné. 

Cette  espèce  n’est  pas  moins  répandue  que  les  précédentes  ; elle  s’é- 
tend des  mers  du  Nord  à la  Méditerranée.  Vers  le  Nord,  elle  présente 
des  variétés  dont  les  naturalistes  ont  fait  une  espèce  distincte  sous  le 
nom  de  Venus  lamhiosa  ; mais  cette  variété  se  rattache  au  type  de  l’espèce 
par  des  modifications  graduées,  ainsi  que  l’a  fait  remarquer  M.  Macgil- 
livray  dans  son  llisloire  des  mollusques  d’Ecosse. 

A l’état  fossile  elle  n’est  pas  moins  répandue,  mais  elle  reste  dans 
les  terrains  tertiaires  supérieurs  en  Angleterre,  en  Norvège,  en  Sicile, 


556 


QUINZIÉME  FAMILLE. 


en  Morée , en  Italie  ; en  France  ; on  peut  donc  la  considérer  comme  l’une 
des  espèces  qui  caractérisent  le  mieux  les  terrains  supérieurs. 

7®  Fenus  oüa(a,  Pennant. 

Plusieurs  noms  ont  été  successivement  appliqués  a cette  espèce;  un 
seul  doit  lui  rester,  et  c'est  le  plus  ancien,  celui  que  lui  a imposé  Pen^ 
nant  dans  \e  ïiritish  Zooiogy,  publié  en  1777.  Celte  espèce  vit  dans  les 
mêmes  lieux  que  la  précédente  et  l'accompagne  parlotit , mais  il  y en  a 
peu  qui  soient  aussi  répandues  dans  les  terrains  tertiaires  moyens  et  supé- 
rieurs. Ainsi  tous  les  terrains  subapennins  de  l ltalie , de  la  Sicile , de  la 
Morée,  de  l’Algérie,  de  la  France,  de  la  Norvège  et  de  la  Suède,  ren- 
ferment en  abondance  le  Venus  ovata;  les  terrains  moyens  de  Dax , de 
Bordeaux,  de  Vicence,  de  Korod,  dans  le  Siébenburg,  le  crag  d’An- 
gleterre et  de  Belgique  en  recèlent  de  nombreux  individus. 

C’est  à l'âge  des  terrains  subapennins  qu’il  faudra  probablement 
rapporter  ceux  de  l’Amérique  méridionale  que  Al.  d’Orbigny  a fait 
connaître  sous  le  nom  de  terrains  palagoniens , dans  la  paléontologie  de 
son  Voyage  en  Amérique.  Eu  effet,  ce  terrain  contient  un  assez  'grand 
nombre  d'espèces  dont  les  analogues  vivent  dans  les  mers  les  plus 
proches  ; mais  ces  espèces  sont  mélangées  avec  d’autres  qui  paraissent 
éteintes.  Dans  le  genre  Vénus,  M.  d'Orbigny  mentionne  six  espèces  qui 
n’ont  plus  de  représentants  dans  la  nature  actuelle;  une  seule,  le  Venus 
Munsteri,  est  très  rapprochée  du  Venus  (/inliqua  do  Gray. 

Les  dix  espèces  que  nous  venons  de  passer  en  revue  ne  sont  pas  les 
seules  qui  existent  dans  les  terrains  tertiaires  supérieurs.  C’est  ainsi 
que  les.  Venus  deformis^  alveata  et  ï/iercenana  caractérisent  les  terrains 
tertiaires  supérieurs  de  l’Amérique  septentrionale;  d'autres  espèces  les 
accompagnent,  mais  M.  Léa  les  a confondues  avec  les  Astartés. 

M.  Darwin  a découvert,  à Sant-Iago,  un  dépôt  tertiaire  récent  con- 
tenant des  fossiles,  parmi  lesquels  M.  Sowerby  a reconnu  une  Vénus 
très  voisine  du  verrucosa  des  mers  d’Europe,  et  à laquelle  il  a donné  le 
nom  de  Venus  simulans. 

M . Hardies  a rapporté  de  son  voyage  de  Java , provenant  d’un  terrain 
tertiaire  récent,  quelques  exemplaires  fossiles  d’une  Vénus  qui  vit  dans 
tout  l’Archipel  indien,  et  que  M.  Gray  a fait  connaître  sous  le  nom  de 
Venus  papxjracea.  C'est  avec  celte  espèce  que  le  môme  zoologiste  a fait 
un  genre  nouveau  sous  le  nom  de  Clementia, 

Enûn,  nous  avons  sous  les  yeux,  et  provenant  des  terrains  récents  du 
Brésil , plusieurs  exemplaires  du  Venus  flexuosa  qui  vit  encore  dans  les 
'-mers  qui  baignent  ce  pays.  ^ 


LES  CON'OllES.  557 

Il  est  probable  que  les  espèces  mentionnées  par  M.  d’Orbigny  dans 
la-  paléontologie  de  son  Voyage  en  Amérique  proviennent  de.  couches 
non  moins  récentes.  L’auteur  donne  le  nom  de  pampéens  à ces;terrain& 
modernes  qui  constituent  le  sous-spl  des  pampas  de  l'Amérique  méridio- 
nale. Les  trois  espèces  que  M,  d’Orbigny  y a rencontrées  ont  leurs  analo- 
gues vivant  dans  les  mers  les  plus  proches  : ce  sont  les  Tenus  Dombeyi, 
Lamarck,  opaca,  Sow.,  ei  Patagonica , d'Orb. 

Si  nous  comparons  celte  statistique  du  genre  Vénus  à celle  que  dres- 
sait M.  Defrance,  il  y a vingt  ans,  on  sera  étonné  des  progrès  qu'a  faits 
l’histoire  des  fossiles.  Ce  naturaliste  , en  effet,  déclarait  ne  pas  connaître 
de  Vénus  dans  les  terrains  inférieurs  au  bassin  dé  Paris,  et  il  ne  men- 
tionnait qu’une  vingtaine  d'espèces  dans  tous  les  terrains  tertiaires.  Si 
incontestablement  la  paléontologie  a fait  d’immenses  progrès,  surtout 
depuis  dix  à douze  ans,  il  ne  faut  pas  croire  qu’elle  soit  arrivée  à son 
terme.  Celle  science  est  encore  bien  jeune;  les  matériaux  qu’elle  ras- 
semble avec  un  zèle  bien  louable  ont  encore  besoin  de  nombreux  tra- 
vaux pour  être  déblayés  des  erreurs  fâcheuses  qui  les  encombrent,  et 
qui  proviennent,  pour  la  plupart,  de  l’ardeur  et  de  l’empressement  des 
naturalistes  en  faveur  d’une  science  qu'ils  aiment.  > 

1.  Vénus  ridée.  Venus  rugosa^  Gmel. 

PI.  20.  fig.  14.  15.  16. 

y.  Testa  cordatâ  ^ tnmidâ  y soUdây  'ülbO’griseâ,  macttlts  Julvis  angit 
losis  ornatâ;  costnîis  memhranactis  rectis  y transversis  y ad  apicem 
recurvatis ; marginibus  incrassatis , ternie  et emdatis ; humîâ  magna, 
impressâ  latu  cordatà. 

Fenus  var.  Lin.  Sysl.  nat.  éd.  la®.  p.  ii3o,  ci®  1 15, 

Venus  rugosay  Gmel,  p.  3276.  n®  3i. 

Lister,  Conch.  pi,  286.  f.  i23. 

Schrœler,  Einl.  t.  3.  p.  i54.  n®  3. 

Venus  rugosa  orientalisy  Cliem,  CoQch.  6.  p.  SoS.p],  29,  f,  3o3. 

Encycl.  pl.  273.  f.  4.  b. 

Venus  DÜIw.  Cat.  t.  1.  p.  164.  n*  i3. 

Lamarck,  An.  s.  vert.  l.  5.  p.  587.  n®  8. 

Venus  rigidOy  Wood.  Ind.  teslac,  pl.  7.  f.  i3. 

Desh.  Encycl.  méth,  vers.  I.  3.  p.  ui4.  n“  5. 

Desh.  Lamk.  An.  s,  vert,  2®  éd,  t.  6.  p.  SSg,  n®  8. 

Catlow,  Conch.  nom,  p.  35. 


558  QUINZIÈME  FAMILLE . 

Haiilèy,  Desc.  cat,  p.  m. 

Agassiz.  Icou.  des  coq.  tert.  p.  35.  n®  5.  pl.  4.  f.  i à fi. 

Habile  les  mers  de  iTiide  et  da  Brésil. 

Nous  avons  déjà  présenté  quelques  observations  au  sujet  de  cette 
espèce.  Quoique  citée  un  assez  grand  nombre  do  fois  à l'état  fossile , 
les  recherches  de  M.  Agassiz  et  les  nôtres  ont  prouvé  de  la  manière 
la  plus  irrévocable  que  l’espèce  ne  s’est  point  encore  rencontrée  dans 
les  terrains  tertiaires , et  que  c’est  par  suite  d'erreur  qu’elle  y a été 
mentionnée. 

Cette  coquille  est  globuleuse,  très  épaisse,  cordiforme  ; elle  est  un  peu 
plus  large  que  haute  ; elle  est  très  inéquilatérale,  très  oblique;  son  côté 
antérieur,  court,  présente  au-dessous  de  crochets  proéminents  une  grande 
lunule  enfoncée,  cordiforme,  aussi  large  que  haute,  et  couverte  de 
rides.  Toute  la  surface  extérieure  est  couverte  de  lamelles  transverses , 
redressées,  assez  saillantes,  simples  et  légèrement  recourbées  à leur 
sommet.  Les  interstices  de  ces  lames  sont  lisses  ou  montrent  quelques 
stries  légères  d'accroissement.  La  charnière  est  assez  large;  elle  pré- 
sente sur  une  lame  cardinale,  épaisse,  trois  dents  inégales:  une,  posté- 
rieure, très  large  et  creusée  d’un  sillon  au  sommet;  une.  moyenne, 
grosse  , courte , en  pyramide  triangulaire  et  divisée  au  sommet  en  deux 
lobes  très  inégaux  ; enfin  la  dent  antérieure  est  la  plus  petite  ; elle  est 
fort  rapprochée  de  la  moyenne  ; elle  est  un  peu  comprimée  et  fort  aiguë. 
Un  peu  en  avant  de  la  base  de  celle  dent , on  remarque  un  petit  rudi- 
ment analogue  à la  dent  antérieure  des  Cythérées  ; par  conséquent  cette 
espèce  pourrait , à la  rigueur,  faire  partie  de  ce  dernier  genre.  Cepen- 
dant, comme  ce  rudiment  n’est  visible  que  sur  l'une  des  valves , il  est 
à croire  que  l’espèce  qui  nous  occupe  appartient  évidemment  au  genre 
Vénus.  Les  bords  de  la  coquille  sont  épais  , finement  crénelés , et  les 
crénelures  se  continuent  sur  le  bord  de  la  lunule,  La  coloration  de  celte 
espèce  est  peu  variable.  Sur  un  fond  d’un  blanc  grisâtre  ou  fauve  se 
dessinent  de  grandes  taches  d’un  fauve  plus  ou  moins  foncé,  presque 
toujours  terminées  en  fer  de  lance , et  disposées  habituellement  en  trois 
rayons  divergents. 

Les  grands  individus  de  cette  espèce  viennent  des  mers  du  Brésil  ; ils 
ont  85  millim.  de  long  et  75  de  haut. 


LES  CONQUES. 


1^9 

2.  Vénus  à verrues.  Venus  verrucosa,  Lin. 

PI.  21.  f.  1.2. 

F,  Testa  cordaîo-rotundatâ;  convexn^  albidà^  mfo  maculatà;  striis 
îongitudinalibus  obsoletisj  adlatera  divaricatis ; transversis  mtmbra- 
naceis^  antrorsum  imprîmis  verrucosis. 

Feniis  'verrucosa^  Lin.  Syst.  ual.  i i3o.  Gmel.  p.  3269.  n®  ^ 
Schrœter,  Einl,  l.  3.  p.  114.  < 

Olivi,  Adriat.  p.  107.  n®  1. 

dysera^  var.  11.  Lin.  Mus.  Ulri.  p.  498.  37. 

D’Argenv.  Conch.  éd,  i'®.  pl.  24.  f.  9* 

V,  dyserof  var.  Lin.  Syst.  nat.  éd.  12,  p.  II3^>.  ^ 

List.  Concli.  t.  284.  f.  122. 

Peliver,  Gaz.  pi.  98.  f.  117. 

Giialt.  Te.sl.  t.  75.  f.  16, 

15orii.  Mus.  t.  4.  f.  7. 

Chemn.  Conch.  6.  t.  29.  f.  299,  3ou. 

Peunant,  Zool.  brit.  4.  t.  54.  p.  48.  Fenus  erycina. 

Favane,  Conch.  pl.  47.  f.  E.  9. 

Poli,  Test.  Sicil,  l.  2.  p.  90.  pl.  21.  f.  18,  19. 

Donovan,  Brit.  sliells.  t.  2.  pl.  44. 

Dorset,  cat.  p.  34.  pl.  8.  f.  i. 

Maton  et  Racket,  Lin,  Trans.  !.  8.  p.  78, 

Lamarck.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  .586.  n“  7, 

Payr.  Cat.  p.  48.  n®  St- 

Desh.  Encycl.  méth.  vers.  I,  3.  pl.  ii3.  n*  4. 

llesh.  Expéd.sc.  de  Morée.  Zool.  p.  99.  n'*  47, 

Junior^  Fenus  Lemani,  Payr.  Cal.  p.  53.  n*  91.  pl.  i.  f.  29,  3o,  3i. 
Gerviüe,  Cat.  des  Moll,  de  la  Manche,  p.  24.  n*  i. 

Wood,  ïnd.  tc.st,  pl,  7.!.  12. 

Desh.  Laiiik.  An.  s.  vert.  2®  éd.  t.  6.  p.  338.  n®  7, 

Philippt.  Moll.  Sic.  t.  i.  p.  43  ; t.  2,  p.  34. 

Callüw,  Conch.  nom.  p.  36. 

Hanley,  Desc.  cat.  p.  no, 

Turl,  Conch.  Ins.  Brit.  p.  140. 

/d,  Brit.  Fauua.  p,  157.  ’ 

/d.  Conch  Dict.  p.  23t. 

Dillw.  Cat,  t.  I.  p.  i63.  n*  12, 

Pectunculus  strigatns,  Da  Costa,  p,  x85,  pl.  I3«  f,  i. 


QUINZIEME  FAMILLE. 


5()0 

Thorpc,  Bril.  màr.  Coiicii.  p.  85.  . ^ 

Krauss.  sud  AÜfa.  Moll,  p,  lo. 

Sow.  Jun.  Couih.  mao.  f.  X19. 

Collard  des  Ch.  Cat.  des  moll.  du  Finist.  p.  a3.  n*  i. 

Scacchij  Cal.  Couch.  reg.  Neap.  p.  7. 

Marav.,  Méro.  pour  Thist.  nal.  de  la  Sic.  p.  75.  i . 

JelTrcy'!,  Moll.  mar.  ofOban  Conch.  mag,  p.  43. 

Thompson,  Rep.  on  llie  Fauna  of  Xrel,  p.  262. 

Forbes,Rep.  on  OHgc.  Invcrt,  p*  i44» 

Verani,  Cat.  deglî  anim.  inveil.  p.  i3. 

Kequien,  Cat.  des  moll.  de  Corse,  p.  23.  n®  97, 

Agassiz,  Icon.  des  coq.  tcrt.  p.  32.  11°  3.  pl.  5.  f.  i à S. 

' Brocrhi,  Conch.  foss.  stihap.  t.  2.  p.  545.  n®  7. 

Fossilis.  Eadem'var,?  Venus  excentrica^  Âgass.  /oc,  eu.  p.  34,  n*  4. 
pl.  5.  f.  9 J»  II. 

Brown.  liai,  test,  Geb.  p.  99,  n°  564. 

Habite  l’Océan  d’Europe,  la  Méditerranée,  le  Sénégal  (Adanson),  le 
cap  de  Bonne  Espérance  (Kraûs.s).  Fossile,  Italje,  Sicile,  île  de 
Rbode.s , Algérie. 

Nous  n’aurons  pas  à décrire  une  fois  de  plus  une  coquille  aussi  con- 
nue que  celle-ci;  elle  est  l’une  des  premières  qui  s’introduit  dans  le  ca- 
binet de  l’amateur.  A l'état  vivant . elle  présente  quelques  variétés  inté- 
ressantes, tant  sous  le  rapport, de  la  forme,  que  sous  celui  de  la  couleur. 
Nous  avons  vu  des  individus  très  aplatis  et  conslamraenl  blancs  prove- 
nant des  mers  du  Nord;  d’autres  , plus  bombés,  provenant  de  la  Médi- 
terranée ou  de  régions  plus  méridionales  de  la  côte  ouest  de  l'Afrique. 
A l’état  fossile,  les  variétés  ne  sont  guère  moins  nombreuses,  et  ce- 
pendant il  y en  a une  des  plus  constantes  que  M.  Agassiz  a distinguée 
sous  le  nom  de  exceiHrica.  Si  les  caractères  que  M.  Agassiz  donne  à 
celle  espèce  étaient  d’une  constance  absolue  j nous  n’hésiterions  pas  à 
suivre  son  exemple,  et  à admettre  l'espèce  dans  nos  catalogues;  mais 
il  suffit  d’examiner  un  grand  nombre  d’individus  pour  y apercevoir  des 
modifications  insensibles  qui,  d’un  côté,  les  font  passer  au  V.  verrucosa 
proprement  dit , et  de  l'autre  vers  la  Venus  clathrala , qui  se  trouve 
dans  les  faluns  de  la  Touraine.  Cependant  cette  dernière  èspèce  nous 
semble  jusqu'ici  parfaitement  dislinctft. 

Les  grands  individus  du  V.  verrucosa  ont  67  millim.  de  long  et  58  de 
haut.  . • 


LES  CONQUES. 


56l 


3.  Vénus  lévantine.  Venus pUôaia.  Gme!. 

PI.  21.  fig.  13.  14. 

♦ 

Testa  ovato^transversâ  f depressâ  ^ obliqua,  ineequilntera , antxch 
sabcorduta,  albo^rosea'vsl  rtifescente^  posticè  ungulatd ; striis  trans» 
'versis  distantibus  redis  in  anguiis  p'osterioribns  productiorilnts  ; 
lunuiâ  impressâ,  ovatà , rngosâ, 

var  Lin,  Syst.  cat.  la.  p.  ii3o. 

f^enus  pUcata„Gmt\.  p.  3276.  n"  3o. 

Argenv.  Condi.  21,  f.  A*. 

Favan.  pl.  47.  f.  E.  7.  * . 

Born.  lVlus.pl.  <5.  L 9 è specimuie  jîtniore. 

Chemn.'Couch.l.  6,  p.  299.  pl.  aS.  f.  295,  97.  Venus  foUucco  damellosa. 

Valenlyn.  rar,  amb.  pl.  i5.  f.  21. 

Eucycl.  pl,  275,  f,  3 à 6. 

Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  588.  n®  11. 

Wood,  Iiid.  test.  pl.  7.  f.  9. 

Dillw.  Cat.  t.  I,  p.  162.  n®  9. 

Desh.  Encycl.  mélli.  vers,  t,  3.  p.  iii5.  n»  3, 

Dçsh.  Lanik.  Au.  s.  \ert.  2®  éd.  t,  4.  p.  3/*  i.  n*’  1 1 . 

Reeve,  Couch.  Syst.  68.  f.  6. 

Catlow,  Coucli.  nom.  p,  35. 

^ Hanley^  Desc.  cat,  p.  n i . 

Fossilis.  BroccUi,  Concli.  foss.  subap.  t.  2.  p.  542. 

Broun,  liai.  terl.  Geb.  p.  99.  n®  565. 

Philippi,  Tcrliœrvcrsl,  p.  ii.  n®  27, 

Habite  le  Sénégal,  l’océan  ludien  (Lamarck).  Fossilé,en  Italie,  à SalUs, 
près  Bordeaux,  à "Vienne  et  à Cassel  (Philippi), 

Très  belle  espèce  de  Vénus’qui  habite  à la  fois  les  mers  du  Sénégal  et 
celles  de  l’Inde,  comme  le  constate  l’ouvrage  deValeniyn  sur  les  coquilles 
d’Amboine.  Elle  est  ovale,  sub-trigone,  très  inéquilatérale;  son  côté 
antérieur  est  le  plus  court;  il  est  obtus,  et  au-dessous  de  crochets  très 
peu  saillants,,  mais  obliques,  il  présente  une  grande  lunule  déprimée, 
ovale,  sub-cordiforme  et  fmem  en  t striée.  Le  bord  supérieur  ou  le  cor- 
selet est  convexe  et  creusé  médiocrement  dans  sa  longueur.  Le  côté 
postérieur  est  limité  par  un  angle  assez  aigu.  Toute  la  surface  est  cou- 
verte de  grandes  lames  Iransverses,  écartées,  minces,  simples,  légère- 
ment recourbées  sur  le  bord  libre.  Parvenues  à Tangle  postérieur,  elles 
se  prolongent  en  un  angle  saillant  et  ordinairement  creusé  en  gouttière  ; 

T,  I.  a*  PARTIE,  36* 


562  QUINZIÈME  FAMILLE. 

parvenues  à la  limite  du  corselet , ces  lames  sont  armées  d’un  nouveau 
prolongement,  quelquefois  plus  considérable  que  le  premier.  Les  inter- 
stices de  ces  lames  sont  lisses  ; les  bords  de  la  coquille  sont  épais  et 
très  finement  crénelés.  Une  charnière  large  et  épaisse  montre  trois  dents 
cardinales  divergentes  et  inégales.  Les  individus  fossiles  sont  aussi 
grands  que  les  vivants  ; les  lames  dont  ils  sont  couverts  sont  générale- 
ment plus  nombreuses  et  distribuées  un  peu  plus  irrégulièrement.  Mais 
ce  qui  les  distingue  essentiellement , c’est  que  chez  eux  le  sinus  palléal 
reste  plus  étroit.  Il  arrive  chez  cette  espèce  ce  que  nous  avons  remarqué 
dans  le  Venus  verrucosa , c’est-à-dire  que  des  variétés  montrent  que  le 
caractère  que  nous  signalons  n’est  pas  d’une  constance  absolue , et  qu'il 
ne  doit  pas  s’élever  à la  valeur  d’un  caractère  spécifique  suffisant. 

Cette  coquille  a 60  mill.  de  long  et  50  de  hauteur. 

4. ■'Vénus  fasciée.  Venus  fasciata,  Donovan. 

PI.  20,fig.  4,  5. 

V.  Testa  rotundato^trigonâ  y compressa  transversim  costatâ;  costis 
latisy  depressis  y inceqnaîibus ; îunuîâ  ovato-depressâ  y tenuissimè 
striatâ;  marginibits  minutissimè  crenatis;  cardine  tridentatOy  aUero 
hidentato» 

Pectunculus  Da  Costa.  CoDch.  brit.  p.  i88,  pl.  i3.  f.  3. 

Ency.  méth.  pl.  276,  f.  2. 

Penuant,  Brit.  zool..^.  4-  p* 

Venus fasciata,  Donovan,  Brit.  shells.  t.  5.  pl.  170. 

Id.  Maton  et  Kack.  Lin.  Trans,  t.  8,  p,  80. 

Venus  Monlagu,  Test.  brit.  p.  iio. 

Venus  fasciata.  Dütnr.  Cat.  t.  i.  p.  iSp.  n*  3.  ^ 

Jd.  Turton,  Conch.  dict.  p.  234. 

Id,  Turton,  Conch.  brit,  p.  146.  n"  7. 

Wood,  Ind.  test,  pl,  7.  f.  3. 

Gerville,  Cal.  des  Moll,  de  ta  Manche,  p.  24.  n*  3. 

Venus  Brongniarti,  Payr.  Cat,  des  Moll,  de  Corse,  p.  5i. 

Td.  Coll,  des  Ch.  Cat.  des  Moll,  du  Fin.  p,  25.  n°  i3. 

Venus  dysera.  Scacchi  (non  Linné).  Cal.  conch.  reg.  Neap.  p.  7. 

V enus  fasciata.  Forbes,  Malac.  mon.  p.  52.  n®  2. 

Id.  Désb.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  6.  p.  370.  n®  89. 

Venus  Brongniarti»  Marav.  Mem.  pour  Thist.  nat.  de  la  Sicile,  p.  75. 

Venus  fasciata.  Jeffreys,  Mar.  Moll,  al  Oban  malac»  mag.  p.  44. 

îd.  Hanley,  Desc.  cat.  p,  112,  . 


LES  CONQUES. 


563 


Thompson,  Rep,  on  the  Faima  of  Irél.  p.  162. 

Forbes,  Rep.  on  the  OEg,  invert.  p.  144. 

Lovèo,  lod.  Moll,  scand.  p.  39.  n*  287. 

Tborpe,  Brit.  mar.  Concb,  p.  88, 

Macgill.  Moll.  An.  ol’  scotl.  p.  21a.  n®  Set  p.  267. 

Requieu,  Cal.  des  Moll,  de  Corse,  p.  24,  n'’  99. 

Fossilis,  Dosina  fasciata,  Wood,  Cat.  of  foss.  sli.  froin  the  crag  anu. 
nat.  Iiisl.  t.  6.  p.  aSo.  n®  2. 

Bosina  fasciata.  Morris,  Cat.  of  brit,  foss.  p.  87. 

Astartc  antiquata.  \ 

} Woodw.  Geol.  ofNorf.  pl.  2.  f.  i5.  16. 

Astarte  ovahs,  \ 

Habite  l’Océan  d’Europe,  la  Méditerranée.  Fossile,  Sicile;  crag  d’An- 
gleterre et  de  Belgique. 

On  voit  par  la  synonymie  de  cette  espèce  qu’elle  a reçu  plusieurs 
noms.  Parmi  eux , le  plus  ancien  doit  rester,  et  c’est  celui  que  nous 
avons  préféré.  Quelques  zoologistes  ont  pensé  que  cette  espèce  et  quel- 
ques autres  qui  lui  sont  voisines  devaient  constituer  un  genre  à part , et 
ils  lui  ont  donné  le  nom  de  Dosina.  Mais , ayant  eu  occasion  d’observer 
l’animal  de  Tune  de  ces  espèces , nous  avons  reconnu  en  lui  le  véritable 
caractère  des  Vénus , et  nous  en  concluons  tout  naturellement  à la  sup- 
pression d’un  genre  qui  nous  paraît  inutile.  Il  est  vrai  que  ce  petit 
groupe  de  Vénus  avoisine  les  Astarlées  à ce  point,  que  quelques  natura- 
listes , tels  que  M.  Pusch , par  exemple,  ont  cru  pouvoir  les  réunir 
aux  Vénus.  Nous  verrons  bientôt  que  l’animal  des  Astarlées  est  très 
différent  de  celui  des  Vénus  dont  il  est  question. 

Le  Venus  fasciata  est  une  coquille  commune  dans  les  mers  d'Europe, 
et  qui  est  trop  connue  pour  que  nous  en  produisions  ici  une  description 
détaillée.  Elle  est  très  variable  dans  sa  coloration^  et  elle  ne  l’est  guère 
moins  dans  ses  accidents  extérieurs.  Sa  surface,  chargée  de  grosses 
côtes  transverses , aplaties,  larges,  inégales,  présente  quelquefois  des 
côtes  plus  régulières,  plus  minces,  et  qui  se  rapprochent  de  celles  de 
notre  Venus  gradata  , confondue , comme  nous  l’avons  dit  précédem- 
ment, parmi  les  Venus  dxjsera  de  Linné.  La  charnière  se  compose  de 
deux  dents  sur  une  valve  et  de  trois  sur  l’autre  , et  c’est  surtout  ce  ca- 
ractère qui  a déterminé  la  création  de  ce  genre  Dosina. 

Les  grands  individus  ont  30  mill.  de  long  et  26  mill.  de  haut. 


36* 


564 


QUINZIÈME  FAMILLE. 


5.  Vénus  casinQÏde.  Venus  casinozdes.  Bas't, 

PI.  21.  fig.  9..  10. 

y.  Testa  cordaiéiy  obliqua  ^ compressa  ^ posticè  angulàtây  suîcis  trAtss- 
versis  membranaceis  , superne  crebriorlbits , perpendicularittr  sub~ 
plicatis;  lumdâ  ovato^cordata  ^ impressâru^osâ, 

Basterot.  Mém.  de  la  Soc.  d’iiist.  cat.  Paris,  t.  a.  p.  89.  n®  a.  pi.  6.  f,  1 1 . 

Desh.  dans  Lamk.  An,  s.  vert.  2*  éd.  t.  6.  p.  376’  n°  i. 

Matheron,  Cat.  intHli.  p.  i54.  n®  i3o. 

Habite...  Fo«;si!e  aux  environs  de  Bordeaux,  dans  les  faliins  de  la  Tou- 
raine. 

On  trouve  dans  ^les  Animaux  sans  vertèbres  de  Lamarck  un  Venus 
casinoides,  qui,  d'après  ce  savant  naturaliste , so  trouverait  en  même 
temps  fossile  en  Italie  et  aux  environs  de  Bordeaux.  Nous  ne  connais- 
sons aucune  espèce  à laquelle  la  description  puisse  s’appliquer  et  qui 
existe  dans  les  deux  terrains.  M.  Basterot , dans  ses  Becherches  sur  les 
fossiles  de  lioi'deaux , ayant  trouvé  une  espèce  de  Vénus  à laquelle  les 
caractères  donnés  par  Lamarck  s’appliquent  exactement,  lui  a conservé, 
le  nom  spécifique  de  Casinoides , et  depuis  cette  époque , c’est  toujours 
l’espèce  de  Bordeaux  qui  porte  ce  nom.  Nous  présumons  que  Lamarck 
confondait  deux  espèces  sous  une  seule  dénomination;  car  nous  avons 
d’Italie  une  espèce  qui  se  rapproche  de  celle-ci , mais  qui  en  est  con- 
stamment distincte. 

Le  Venus  cashioides  est  une  Vénus  de  taille  médiocre.  Sous  un  vo- 
lume beaucoup  moindre , elle  ressemble  au  V.plicata;  elle  est  cepen- 
dant moins  aplatie,  plus  cordiforme , ovale,  subtrigone;  elle  est  iné- 
quilatérale. Les  crochets , très  obliques , saillants , rapprochés , dominent 
une  grande  lunule  ovale,  cordiforme,  légèrement  déprimée,  et  circons- 
crite par  une  strie  profonde.  La  surface  de  celte  lunule  est  irréguliè- 
rement striée  , le  corselet  est  grand , lancéolé,  creusé  en  une  gouttière 
profonde,  au  fond  de  laquelle  se  voient  les  nymphes  destinées  à recevoir 
le  ligament.  Les  bords  des  valves  sont  épais,  finement  crénelés;  des 
crénelures  beaucoup  plus  fines  se  continuent  dans  la  longueur  de  la 
lunule.  Toute  la  surface  extérieure  est  couverte  d’un  grand  nombre  dé 
lames  minces  , étroites  , peu  distantes  et  irrégulièrement  découpées  sur 
leur  bord.  Ce  bord  reste  mince  et  tranchant;  il  n’est  recourbé  ni  en 
avant  ni  en  arrière.  La  surface  des  lames  présente  de  fines  stries  longi- 
tudinales et  perpendiculaires  ; les  interstices  qui  les  séparent  sont  lisses 
et  très  souvent  inégaux.  Parvenues  vers  le  côté  postérieur,  ces  lames 


LES  CONQUES. 


565 


forment  un  angle  assez  semblable  à celui  du  Kem/s  jiîicala , mais  il  est 
moins  marqué  , même  chez  les  individus  d’une  belle  conservation  : c’est 
à peine  si  l'on  en  découvre  la  trace  par  une  saillie  un  peu  plus  considé- 
rable. La  charnière  est  assez  épaisse  ; elle  consiste,  sur  la  valve  droite, 
en  trois  dents  inégales  et  divergentes.  La  postérieure  est  allongée, 
étroite  et  bifide  au  sommet.  L’antérieure  est  très  petite,  aplatie  et  très 
rapprochée  de  la  moyenne.  Cette  dernière  est  la  plus  grosse;  elle  est 
triangulaire  et  subpyramidale.  Sur  la  valve  gauche , la  dent  moyenne 
reste  la  plus  grosse;  mais  la  dent  postérieure  est  devenue  beaucoup 
plus  étroite  , tandis  que  la  dent  antérieure  a acquis  une  plus  grande 
épaisseur.  En  avant  de  la  charnière  se  montre  un  petit  rudiment  de  la 
dent  latérale  des  Cythérées.  L’impression  musculaire  antérieure  est 
obronde , semilunaire , la  postérieure  est  circulairé.  L’impression  pal- 
iéale  remonte  ^très  haut  dans  l’intérieur  des  valves  ; elle  se  place  paral- 
lèlement au  bord  inférieur,  et  elle  se  termine  en  une  petite  sinuosité 
triangulaire , dont  la  base  est  un  peu  plus  de  la  moitié  de  la  longueur. 
Si  l’on  place  la  coquille  horizontalement,  et  que  Ton  fasse  passer  une 
ligne  par  Taxe  de  la  sinuosité,  on  la  voit  remonter  obliquement  dans  la 
direction' de  l'extrémité  inférieure  de  la  dent  latérale  antérieure.  Par- 
faitement distincte  de  ses  congénères  , cette  coquille  présente  quelques 
Variétés,  l'nno,  dans  laquelle  les  lames  sont  plus  écartées,  et  l’autre 
dans  laquelle  elles  sont  extrêmement  serrées.  C’est  la  dernière  de  ces 
variétés  dont  uous  avons  trouvé  des  individus  parmi  les  fossiles  des 
faluns  de  la  Touraine. 

Les  grands  individus  ont  33  inill,  de  long  sur  26  de  hauteur. 

6.  Vénus  de  Basterot.  Vemts  Basteroii.  Desh. 

PI.  20.  fig.  5.  6, 

y.  Testa  transversâ  ^ ovato^tri^onâ  ^ imetfuilaterà  obliquât  compressa 
posticè  obsolète  anguiatâ  .*  sulcis  transversis  crassis , depretsis,  latis  , 
obiusist  distantlbus,  posticè  tenuioribus^  îamellosis  ; lunulâ  impressâ . 
ovato-lanceolato , 

A'tfw/w  de  Montp.  Pod.  et  Wolh.  p.  6i . pl.  5.  f.  i5,  1 7, 

Venus  casinoides,  Duj.  Foss.  de  Tour.  p.  261.  n”  i. 

Habite...  Fossile  dans  les  fahins  de  la  Touraine,  en  Wolhynie  et  eu 
Podolie. 

On  a confondu,  tantôt  avec  le  V.  dysera  de  Linné,  tantôt  avec  la 
précédente,  une  espèce  qui  nous  paraît  parfaitement  distincte,  et  à la- 
quelle nous  consacrons  le  nom  du  naturaliste  qui , l’un  des  premiers,  a 
appelé  l’attention  sur  les  fossiles  des  environs  de  Bordeaux.  Le  Venm 


566 


QÜINZIEMB  FAJ^lILLE. 


Basteroii  est  une  petite  coquille  très  commune  dans  les  faluns  de  la 
Touraine.  Elle  est  subtransverse  , Irigone,  très  inéquilatérale;  le  côté 
antérieur  est  très  court;  Ü est  dominé  par  la  saillie  de  deux  petits  cro- 
chets qui  viennent  s’incliner  au-dessus  d'une  petite  lunule  étroite , lan- 
c éolée.  Elle  est  circonscrite  par  une  strie  fine  et  peu  profonde.  Cette 
lunule  est  lisse  et  comprise  dans  un  espace  lisse,  qui  occupe  presque 
toute  la  hauteur  du  bord  antérieur.  Le  bord  dorsal  supérieur  n’est  point 
bombé  et  convexe,  comme  dans  l’espèce  précédente,  car  il  se  projette  en 
ligne  droite,  et  il  est  occupé  tout  entier  par  un  corselet  lisse,  creusé 
.en  gouttière,  et  nettement  séparé  du  reste  de  la  surface  par  un  angle 
aigu.  Le  bord  inférieur  est  régulièrement  arqué,  les  valves  sont  très 
déprimées;  lorsqu’elles  sont  rapprochées , la  coquille  ressemble  assez 
à un  fer  de  hache.  Sur  la  surface  de  ces  valves  s’élèvent  six  à neuf  gros 
plis  ou  plutôt  des  lames  épaisses  qui  semblent  écrasées  ; elles  sont  ob- 
tuses, lisses;  les  interstices  qui  les  séparent  sont  également  lisses  , si 
ce  n’est  en  avant,  où  Ton  remarque  des  stries  régulières  qui  disparais- 
sent bientôt  avant  d’atteindre  le  milieu  des  valves.  Parvenues  sur  le 
côté  postérieur,  ces  lames  épaisses  s’amincissent  subitement,  et  ce 
changement  dans  leur  manière  d’être  rappelle  l’angle  postérieur  du 
Tenus  pHcata^  ou  plutôt  du  Caainoides.  La  charnière  est  étroite;  elle 
présente  trois  dents  inégales  sur  la  valve  droite  ; la  dent  moyenne  est  la 
plus  grosse;  elle  est  triangulaire  et  pyramidale  ; la  postérieure  est  large, 
très  étroite;  Tanlérieure  est  lameUçuse , peu  proéminente,  et  presque 
parallèle  au  bord  de  la  lunule.  La  valve 'gauche  ne  présente  plus  que 
deux  dents , la  postérieure  disparaissant , parce  qu’elle  se  confond  avec 
la  nymphe,  mais  Jçs  deux  autres  ont  acquis  ce  que  la  troisième  a perdu. 
Les  impressions  musculaires  sont  semblables  à celles  du  V.  casinoides. 
L’impression  palléale  est  encore  plus  courte;  elle  est  située  très  haut 
dans  l’intérieur  des  valves  ; la  sinuosité  palléale  se  dessine  sous  la  forme 
d’un  triangle  équilatéral  dont  Taxe  se  dirige  obliquement  vers  le  milieu 
de  la  lunule. 

Les  grands  individus  de  cette  espèce  ont  210  mill.  de  long  et  16  de 
hauteur. 

7.  Vénus  poule.  Venus  gallina^ïAw. 

PL  21.  fig.  3.  4. 

V,  Testâ  cordatO’trigoîid  ^ supernè  rotundatâ,  albida^  rufo  radiatâ 
sulcis  transversis , eîevatis  , albo  et  rufo^articulatim  pictis. 

Linn.  Systema  nat.  éd.  la.  p.  ii3o. 

Bona.  Récréât,  part.  a.  f.  45. 


LÈS  CONQUES. 


567 


List.  Coiich.  pl.  a8'i.  f.  lao, 

Schrœler,  Einl.  t.  3.  p.  1 18. 

Born.  Mus.  p.  Vign.  f.  6. 

Chemn.  Conch.  t.  6.  pl.  3o.  f.  3o8,  3io. 

Knorr.  Vergn.  l.  5.  pl.  i4»  f-  2 et  5. 

Klein,  Ostrac.  pl.  lo.  f.  54. 

Venus  rugosa.  Var.  Pennaut.  Brit.  zopl.  l.  4.  pl.  Sq.  f.  a. 

Gmel.  p.  3a70.  u*  9. 

Venus  lusitanica.  Gmel.  p.  SaSi.  11®  58, 

Encycl.  pl.  268,  f.  3 à 6. 

Dorset,  Cat.  p,  35.  pl.  8,  f.  a. 

Maton  et  Rack.  Lin.  Trans.  t.  8.  p.  82  pl.  17.  t.  7,  8. 

Venus  striatuîa.  Mont.  Test.  brit.  p.  ii3. 

Venus  striatuia.  Donov.  Brit,  schells.  l.  2.  pl.  68. 

Pectuncuîus  striatuhis.  Da  Costa,  p.  191.  pl.  12.  f.  2. 

Dillw.  Cat.  ' t.  1.  p.  ï68.  n®  a3. 

Lamk.  An.  s.  vert,  t,  5.  p.  571.  n*  24. 

Payr.  Cat.  p.  49,  n“  83. 

Desb,  Encycl.  méth.  vers.  l.  3.  p,  1117.  n®  14. 

Desh.  Exp.  SC,  de  Moféezool.  p.  100.  n°  5i. 

Desb.  Lamk,  An.  s.  vert.  2*  éd.  L 4.  p.  347.  n®  24* 

Ëichw.  Fauiia  Gaspio-Cauc.  p.  226. 

Philippi,  Moll.  Sic.  l*  1 . p.  41  ; t.  2.  p.  34  . 

Catibw,  Coiich.  nom.  p.  33. 

Hanley,  Desc.  cat.  p.  ii5. 

Turt.  Conch.  Ins,  brit.  p.  149.  pl.  9,  f.  a. 

Id.  Brit.  Fauna.  p.  157. 

Id,  Conch.  Dict.  p.  234. 

Gerville,  Cat.  des  Moll,  delà  Manche,  p.  xS.  a*  4> 

Wood,  Ind.  test.  pl.  7.  f.  23, 

Coll,  des  Ch.  Cat.  des  Moll,  du  Finist.  p,  23.  n”  3. 

Scaccbi,  Cat.  Conch.  reg.  Neap,  p.  7. 

Forbes,  Malac.  mon.  p.  52.  n®  3. 

Maravi,  Mém.  pour  Thist.  nat.  de  la  Sic,  p.  75,  n®  4 
Jeffreys,  Mar.  Moll,  at  Obaii  Conch.  mag.  p.  44. 

Thompson,  Hep.  on  lhe  Fau.  of  Irel.  p.  262. 

Forbes,  Rep.  on  Œg.  luvert.  p.  144, 

Venus  laminosa  et  galUna.  Thorpe,  Brit.  mar.  Conch.  p.  89. 

Venus  gallina  laminosa,  Gallina  striatuia,  Macgillevray,  Moll,  an,  of 
Scoll.  p.  212  et  265. 


568 


QUINZIEME  FAMILLE. 


Kequieu.  Cat.  des  Moll,  de  Corse,  p.  24.  n®  io3, 

Verani,  Cat,  degli  anim.  invert.  p.  i3. 

Fosstiis.  y.  sent/is,  Brocchii.  Concli.  t.  2.  p.  SSq.  ho  2.  pl.  i3.  f.  i3. 
yertus  seniUs.  Bronu.  liai,  terl.  Geb,  p.  160.  n*  567. 

Geinitz,  Gnind.  der  Verst.  l.  2.  p.  418, 

Bronn,  Lelh.  Geogn.  l.  2.  p.  948.  pl.  38.  f.  6. 

Morris,  Cat.  of  brit.  foss.  p.  104,  et  yemis  rugosa. 

Habite  la  mer  du  Nord,  l’Océan  d’Europe , la  Méditerranée. 

Fossile  : Angleterre , Norwége , Sicile , Morée , Italie , France. 

Nous  réunissons  ici  trois  espèces  : le  Venus  laniinosa  de  Laskey, 
nommé  Venus  rugosa  par  Donovan,  quoiqu’il  y eût  déjà  un  Venus  ru- 
gosa de  Linné  et  un  autre  de  Gmelin.  La  troisième  espèce  que  nous 
joignons  à celle-ci  est  le  Venus  senitis  de  Brocchi.  Il  est  Téellement  im- 
possible de  la  séparer  de  son  type  vivant , ,et  nous  sommes  étonné  que 
Brocchi  n’ait  pas  reconnu  l’analogie  que  nous  signalons,  lui  qui  souvent 
a donné  comme  analogues  des  espèces  qui  ne  le  sont  pas. 

Le  Venus  gallina  est  une  espèce  trop  connue  pour  que  nous  croyions 
devoir  en  faire  ici  une  description  détaillée.  Nous  avons  voulu  la  signa  - 
ler à Fattention  des  géologues  , parce  qu’elle  est  une  de  celles  qui  ca- 
ractérisent le  mieux  les  terrains  subapennins,  car  jusqu’ici  nous  ne 
Favons  jamais  rencontrée  dans  aucun  autre  étage  tertiaire , et  si  elle 
y a été  quelquefois  mentionnée,  c’est  par  suite  d’erreur  qu’il  nous  a été 
facile  de  démontrer.  En  arrivant  dans  les  mers  du  nord  de  l’Europe, 
cette  espèce  présente  des  variétés  très  intéressantes.  Déjà  dans  la 
Manche  et  sur  les  côtes  de  l’Irlande,  les  sillons  transverses  qui  garnis- 
sent la  surface  externe  deviennent  plus  nombreux,  plus  étroits , et  ont 
une  tendance  à se  changer  en  lamelles.  Aussi  en  Irlande  et  en  Écosse, 
on  trouve  mélangés  des  individus  qui  ont  des  cotés  obtus,  et  d’autres 
qui  ont  des  lamelles  plus  minces  et  légèrement  recourbées  en  arrière. 
Entre  ces  deux  variétés  la  limite  est  insaisissable  quand  on  a sous  les 
yeux  un  grand  nombre  d’individus.  Aussi  ces  faits  n’ont  pas  échappé  à 
Fobservalion  de  naturalistes  expérimentés,  tels  que  M.  Magglllivray  et 
M.  Lowen.  Dans  le  midi  de  la  Méditerranée  les  individus  que  Fon  y 
rencontre  du  V.  gallina  se  rapprochent  beaucoup  plus  de  ceux  qui  se 
trouvent  dans  les  terrains  subapennins  : ils  sont  plus  arrondis,  et  les 
côtes^  sont  plus  larges  et  plus  épaisses. 

Cette  coquille  a 35  à 40  millim.  de  larg.  sur  25  à 30  de  hauteur. 


LKS  CONQUES. 


569 


8.  Venus  ovale.  Vernis  ovaia.  Pennant. 

F.  Testa  ovato-trigonâ , inœqtdlaUrà , àepressâ , anticè  obttisâ , posticè 
subacuminatâ^  aîho^fuîvn  ^ fusco  maculatà  radiathn  tenue  cestatâ  ^ 
striis  transversis  dectissata  ; intus  roseâ  'vei  violascente  ; marginibus 
crennîatis;  lunulâ  lauceotatâ^  decussatd, 

PectuncuJus.  Lister,  Conch.  pl.  3ii.  f.  147? 

Cardium  striatum,  Walkeer,  Test.  min.  p.  aS.  f.  Sa. 

Venus  ovata,  Peim.  Brit,  zool,  t.  4*  P*  ao6.  pl.  5g.  f.  3. 

Id,  Moniagii,  Tes^t.  brit.  p.  120.  n®  10. 

Matou  et  Racket.  Liu.  Irans.  t.  8.  p.  85.  pl.  2.  f.  4. 

Venus  spadicea.  Reuieri,  Cat. 

Venus  ovata,  Dillw.  Cat.  t,  i.  p.  171,  n*  3o. 

Id.  Turton,  Coiich,  dict,  p.  239. 

Jd.  Id.  Concli.  Ins.  Brit.  p.  i5o,  n°  12.  pl.  9.  1.  3. 

Id.  Lamk.  An:  5.  vert.  t.  5.  p.  607.  n°  87.  ^ 

Venus  pectinuïa.  Lamk.  An.  s,  vert.  t.  5,  p.  5g2.  n®  26. 

Venus  ovataàti  Gerville,  Cat.  des  Moll,  de  la  Manche,  p,  a6.  ii*  g.j 
Jd.  AVood,  Ind.  test,  pl,  7.  f.  3o- 

Id.  Boucli.  Chant,  Cal.  des  Moll.  doBoul,  p.  22.  37,  ^ 

Venus  radiata.  Desh.  Exp.  sc.  de  Morée,  zool.  p.  99  n®  4g. 

* Venus  radiata.  Scacchi,  Cat.  Conch.  reî,^  Neap.  p.  7, 

Id.  Plïilippi,  Enuin,  Moll.  Sicil,  t.  i.  p^  44.  n®  5. 

Id.  Maravigna,  Mém.  pour  Phisl.  nat.  de  la  Sic.  p.  75.  n®  3, 

Venus  ovata.  Forbes,  Malac.  moneiisis.  p.  Si.  n®  5. 

Venus  pectinuïa.  Dclcss.  Recueil  de  coq.  de  Lamark.  pl.  10,  f.  3. 

Id.  Jlanley,  Descr.  cat.  p.  ii5. 

Venus  ovata.  Forbes,  Rep.  on  OEg,  iuv.  p.  144. 

Id.  Thorpc,  Brit.  mar,  Conch.  p.  90.  ' 

Id.  Macgill.  Moll.  An.  of  Scot.  p.  212  et  267. 

Venus  radiata.  Requien,  Cat.  des  Moll,  de  Corse,  p.  25.  n*  104.  ^ 

Cytkerea  ovata,  Thompson,  Rep.  on  tlie  Fauu.  ofirel.  p.  262. 

Venus  radiata,  Phil.  Enum.  moU.  Sicil.  t.  2.  p.  34.  n®  5. 

Fossilis.  V.  radiata.  Brocchi,  Conch.  foss.  subap,  t,  2.  p.  540.  n®  6. 
pl.  14.  f.  3. 

V,  radiata.  Bas!,  Ibss.  de  Bord,  p,  89.  u®  4. 

Id.  Risso.  Eur.  roerid.  t.  4.  p.  36o.  n®  986. 

Id.Dtïr,  Dicl.sc.  nat, t,  57.  p.  291. 

Venus  r/iiZ/dM.  Mar.  de  »Ser,  Geogn,  des  terr.  terl.  p.  i5o.- 
Id.  Bronn.  Ital.  tert.  Geb.  p.  too,  n®  573, 


Sjo 


QÜINZIEMK  FAMILLE. 


Id,  Nyst,  Kecb.  sur  les  coq.  foss.  d’Anvers,  p.  n.  n*  42  pi.  3.  f.  4a. 
. Id,  Philippi,  ËQum.  moll.  Sicil  t.  i.p.  4^1- n®  7. 

V.  ovata,  Hisinger,  Lelh.  suce.  p.  65. 

y,  radiata.  Phil.  Enum.  moll.  Sicil.  t.  2.  p.  36.  n®  6. 

y^  Qvata,  Morris,  Cal.  of  brit.  foss.  p.  104. 

y , spadicea.  Nyst,  coq.  foss.  de  Belg.  p.  i65,  pl.  n.  f.  3, 

y.  radiata,  Sism.  Syn.  ped.  foss.  p.  19. 

Habite  la  mer  du  Nord,  l’Océan  d’Europe,  la  Méditerranée. 

Fossile  : Italie,  Sicile,  Murée,  Algérie,  France,  Norvège,  Suède, 
Dax , Bordeaux  , Vienne , Angleterre  et  Belgique  dans  le  crag. 

Voici  une  espèce  plus  répandue  encore  que  la  précédente.  On  la  voit 
passer  des  mers  du  nord  dans  nos  mers  tempérées,  elle  pénètre  dans  la 
Méditerranée,  et  elle  paraît  se  continuer  fort  loin  sur  la  côte  occidentale 
de  l’Afrique.  A Tétât  fossile,  elle  se  trouve  à la  fois  dans  deux  très  vastes 
dépôts  tertiaires  ; aussi  elle  ne  peut,  en  aucun  cas,  servir  à les  caracté- 
riser Tune  ou  Tautre.  L’identité  des  individus  fossiles  n’est  point  con- 
testable, et  celle  des  individus  fossiles  avec  les  vivants  ne  Test  pas  da- 
vantage , de  sorte  que  Ton  ne  peut  révoquer  en  doute  la  distribution 
de  Tespèce  telle  que  nous  venons  de  la  rapporter. 

Cette  coquille  a reçu  plusieurs  noms , ainsi  que  le  prouve  notre  sy- 
nonymie. Presque  tous  les  auteurs  qui  Tont  citée  à Tétat  fossile  ont 
adopté  le  nom  de  radiata  donné  par  Brocchi , mais  celui  à'ovata 
a incontestablement  la  priorité,  puisqu’il  est  dû  à Pennant,  qui  Ta  pro- 
posé , en  1 777,  dans  sa  Zoologie  britannique.  On  ne  peut  donc  adopter 
Topinion  de  M.  Nyst,  qui,  dans  son  Histoire  des  fossiles  de  la  Belgique^ 
est  revenu  au  nom  de  V.  spadicea , proposé  par  Renieri  dans  son  Ca- 
talogne des  productions  de  V Adriatique.  Mais  ce  Spadtcea  n’est  point  de 
Renieri  il  est  de  Gmelin , et  quand  on  recherche  dans  la  compilation 
de  ce  naturaliste  Tespèce  qui  porte  ce  nom,  on  s'aperçoit  qu'il  a commis 
une  erreur  singulière  en  prenant  pour  une  Vénus  le  Cardium  latum  de 
Lamarck,  ou  une  espèce  qui  en  est  voisine. 

Le  Venus  ovata  est  une  petite  coquille  ovale,  subtrigone,  subéquila- 
térale, pou  épaisse,  à crochets  petits  et  peu  obliques.  Sa  surface  exté- 
rieure est  ornée  d’un  grand  nombre  de  petites  côtes  rayonnantes,  très 
élégamment  crénelées  par  le  passage  d’un  grand  nombre  de  stries 
transverses  et  régulières.  Ces  stries  sont  plus  ou  moins  saillantes  selon 
les  individus.  Les  côtes  elles-mêmes  varient  j car  quelquefois  elles  se 
bifurquent.  La  surface  interne  présente  dans  la  cavité  des  crochets  une 
tache  d’un  rose  violacé,  qui  s’étend  souvent  jusque  vers  le  milieu  des 
valves.  Dans  d’autres  individus , cette  surface  est  d’un  rose  uniforme. 


LES  CONQUES. 


571 

La  charnière  est  étroite;  elle  présente,  sur  la  valve  droite  ,■  trois  dents 
inégales;  la  postérieure  est  la  plus  longue  et  la  plus  grosse,  elle  est 
bifide  au  sommet  ; l’antérieure  est  allongée , presque  parallèle  à la  lu- 
nule, elle  est  très  aplatie;  celle  du  milieu  est  triangulaire,  subpyramw 
dale;  par  sa  longueur  elle  est  intermédiaire  aux  deux  autres.  Sur  la 
valve  gauche,  la  dent  moyenne  devient  plus  épaisse,  et  elle  est  bilobée 
au  sommet , mais  les  lôbes  sont  très  inégaux.  La  dent  aiitérieure  reste^ 
semblable  à celle  de  la  valve  opposée,  tandis  que  la  postérieure  s’amincit 
considérablement  et  se  confond  en  partie  avec  la  nymphe.  L’impression 
musculaire  antérieure  est  ovale  ; la  postérieure  est  obronde.  La  sinuo- 
sité palléale  est  très  courte,  en  triangle  équilatéral. 

Les  plus  grands  individus  de  cette  espèce  ont  1 8 raillim.  de  largeur, 
et  1 5 de  hauteur. 


GENRE  QUARANTE-SÈPTIÈME. 

THÉTIS.  Thetls,  (Sowerhy.) 

PI.  22,  f.  3.  4- 

CARACTERES  GENERIQUES.  — Animal  inconnu. 

Coquille  ovale,  obronde,  subcordiforme,  mince,  parfaite- 
ment close  , à bords  simples  ; crochets  assez  grands  , inclinés 
en  avant  au-dessus  d une  grande  lunule  superficielle  ovalaire. 
Charnière  portant  trois  dents  cardinales  inégales,  la  postérieure, 
la  plus  longue,  lamelliforme  sur  la  valve  droite,  plus  épaisse 
sur  la  gauche  ; impression  musculaire  antérieure  très  petite , 
ovalaire,  marginale,  située  près  du  bord  inférieur;  impression 
musculaire  postérieure  ovale , obronde  ; impression  palléale  très 
courte  en  avant , se  dilatant  en  une  profonde  sinuosité  trian- 
gulaire à base  très  large , très  rétrécie  au  sommet  et  remontant 
perpendiculairement  jusque  dans  la  cavité  des  crochets. 

SYNONYMIE  générique.  ■ — Vmus  ^ Mantcll. 

OBSERVATIONS.  Uu  savaut  géologue,  M.  Mantell,  a fait  connaître  dans 
sa  Géologie  du  comté  de  Sussex , une  coquille  bivalve  singulière , qu’il  a 
inscrite  parmi  les  Vénus.  Quelques  années  plus  tard,  M.  Sowerby, 


QUINZIEME  FAMILLE* 


57 -i 

ayant  fait  des  observations  intéressantes  sur  la  forme  de  l'impression 
palléale  de  celle  coquille , a pensé  qu’il  était  nécessaire  do  créer  pour 
elle  un  genre  particulier, j auquel  il  a consacre  le  nom  de  Thétis. 
M.  Sowerby  laisse  du  doute  sur  plusieurs  parties  essentielles  de  son 
genre  nouveau,  particulièrement  suc  la  charnière;  parce  que,  en 
effet,  les  Thétis,  se  rencontrant  dans  les  couches  inférieures  du  terrain 
crétacé , y ont  laissé  seulement  leur  moule.  Le  test  lui-même  a complè- 
tement disparu.  I!  a donc  fallu  juger  du  genre  ét  de  ses  caractères  prin- 
cipaux d’après  des  échantillons  qui  n'ont  pas  toujours  la  perfection 
désirable. 

Le  genre  Thétis  n’a  pas  été  admis  par  tous  les  naturalistes;  il  a de 
si  nombreux  rapports  avec  le  grand  type  des  Vénus  que  l’on  devait 
craindre  de  l’introduire  inutilement  dans  la  méthode , et  nous-même 
avons  été  du  nombre  de  ceux"'  qui  l’ont  rejeté , ne  voulant  l’adopter 
qu’au  moment  où  tous  les  caractères  en  seraient  parfaitement  con- 
nus. Nous  élionç  guidé  dans  notre  opinion  par  la  connaissance  que 
nous  avons  depuis  "longtemps  d'une  Vénus  de  la  Méditerranée , qui 
offre  des  caractères  tout  à fait  analogues  à ceux  du  genre  Thétis. 
Celte  coquille  a été  décrite  par  M.  Philippi,  dans  le  tome  I de  son 
Enum.  Moll.  Sic.  sous  le  nom  de  Venus  incompta.  Il  est  pour  nous 
indubitable  que  si  l’on  trouvait  consolidé  le  moule  intérieur  de  cette 
Vénus,  on  le  rapporterait  sans  hésiter  au  genre  Thétis  de  Sowerby  ; aussi 
il  est  bien  à désirer  que  les  observateurs  qui  habitent  les  bords  de  la 
Méditerranée  recherchent  l'animal  de  cette  espèce  et  en  comparent 
attentivement  tous  les  caractères  avec  ceux  des  Vénus  proprement  dites 
ou  des  Pullastra.  Il  serait  aussi  curieux  qu'intéressant  de  retrouver 
dans  la  nature  actuelle  le  représentant  d’un  genre  qui  a vécu  en  grande 
abondance  pendant  que  se  déposaient  les  premières  couches  du  terrain 
crétacé , et  dont  on  ne  retrouve  plus  la  moindre  trace , soit  dans  les 
couches  supérieures  de  ce  même  terrain  crétacé,  soit  dans  la  série 
entière  des  terrains  tertiaires. 

Les  Thétis  sont  des  coquilles  subglobuleuses , un  peu  cordiformes  ; 
les  Crochets,  assez  grands  et  saillants,  les  rendent  presque  aussi  longues 
que  larges.  Ces  coquilles  sont  subéquilatérales  ^ obtuses  en  avant  et  en 
arrière  ; le  bord  ventral  est  coupé  en  un  arc  de  cercle,  dont  Taxe  serait 
près  des  crochets  ; le  côté  antérieur  est  le  plus  court,  il  présente  à la 
partie  supérieure  une  lunule  a peine  marquée  par  une  strie  déprimée. 
Le  test  de  ces  coquilles  était  extrêmement  mince , et  par  là  il  ressem- 
blait à celui  du  Venus  incompta  dont  nous  avons  déjà  parlé.  Ces  co- 
quilles sont  lisses  ou  marquées  de  stries  irrégulières  d’accroissement. 


LES  CONQUES, 


5 7^1 

II  èst  très  difficile  de  voirla  charnière  dans  un  jbon  état  de  conservation  ; 
mais  nous  avons  observé  des  empreintes  très  nettes  de  cette  partie 
importante,  et  nous  y avons  reconnu  trois  dents  cardinales  sur  chaque 
valve.  Sur  la  valve  droite.  les  deux  dents  antérieures  sont  les  pjus 
petites;  elles  sont  étroites  et  parallèles;  la  dent  postérieure  s'allonge  , 
en  se  courbant  un  peu  sur  elle-même  et  vient  gagner  l’origine  de  la 
nymphe.  Sur  la  valve  gauche , les  deux  premières  dents  sont  aussi  les 
plus  petites  et  la  postérieure  sublapielleuse  vient  croiser  celle  de  la  valve 
opposée,  à peu  près  comme  dans  les  Isocardes.  On  ne  trouve  aucune  trace 
de  dent  latérale,  soit  antérieure,  soit  postérieure;  par  conséquent, 
ce  genre  s’éloigne  des  Cyprines  et  des  Cythérées;  il  se  rapproche 
davantage  des  Vénus.  Mais  ce  que  l’on  doit  étudier  avec  le  plus  de  soin 
sur  les  moules  des  coquilles  du  genre  Thétis , ce  sont  les  impressions 
musculaires  et  celles  du  manteau.  L’impression  musculaire  antérieure 
divise  le  bord  antérieur  en  deux  moitiés  égales;  elle  est  lellemenl 
rapprochée  des  bords , qu’elle  laisse  à peine  un  petit  intervalle  pour  la 
continuation  des  bords  du  manteau.  Elle  est  ovale  semilunaire  ; son 
extrémité  supérieure  se  prolonge  un  peu  et  ce  prolongement  est  dû  à 
l’imptession  du  muscle  rétracteur  antérieur  du  pied.  L'impression 
musculaire  postérieure-  est  également  très  rapprochée  du  bord  ; elle  est 
subcirculaire , superficielle,  et  il  faut, avoir  des  moules  extrêmement 
nets,  composés  d’une  pète  très  fine,  pour  en  apercevoir  les  contours 
avec  quelque  facilité.  Au-dessus  de  cette  impression  , et  tout  près  du 
bord  dorsal  , se  montre  une  petite  impression  oblongue,  qui  est  celle 
du  muscle  rétracteur  postérieur  du  pied.  Celte  impression  est  située 
plus  haut  et  beaucoup  plus  détachée  que  celle  des  autres  Mollusques 
que  nous  avons  examinés  jusqu’ici.  L’impression  palléale  est  extrême- 
ment singulière  ; elle  est  si  faiblement  marquée  à son  point  de  départ  du 
muscle  antérieur,  que  l’on  a de  la  peine  à la  suivre  dans  son  commen- 
cement. On  ne  l’aperçoit  bien  qu’à  une  petite  distance  du  muscle,  lors- 
qu’elle remonte  perpendiculairement  à peu  près  au  tiers  antérieur  de  la 
cavité  des  valves.  Après  avoir  suivi  cette  direction  jusque  vers  le 
milieu  de  la  cavité  des  valves,  l’impression  s’infléchit  horizontalement , 
puis  remonte  un  peu  obliquement  jusque  vers  le  sommet  des  crochets, 
se  recourbe  en  formant  un  sommet  assez  aigu  et  redescend  oblique- 
ment vers  le  bord  antérieur  du  muscle  postérieur,  à la  circonférence 
duquel  elle  aboutit  comme  une  tangente.  A mesure  que  cette  impression 
palléale  remonte  vers  les  crochets,  elle  se  creuse  davantage,  ce  qui 
prouve  que  le  muscle  rétracteur  des  siphons  trouvait  son  principal  appui 
dans  cette  région  supérieure  et  postérieure  de  la  coquille.  Ce  qui  nous 


5 74  QUINZIÈME  FAMILLE . 

a paru  surprenant  et  ce  que  nous  ne  pourrions  encore  expliquer,  c’est 
qu'il  existe  des  individus  chez  lesquels  une  impression  palléale , indé- 
pendante de  celle  que  nous  venons  de  décrire,  s’étend  directement  et 
parallèlement  au' bord  ventral  de  Tirapression  musculaire  antérieure  à 
la  postérieure,  Nous  devons  ajouter  pour  terminer  ce  qui  a rapport  au 
genre  Thétis , que  les  valves  ont  les  bords  minces  et  entiers , que  ces 
bords  se  joignent  parfaitement  dans  toute  leur  circonférence  , et  enfin 
que  les  valves  sont  maintenues  dans  leurs  rapports  naturels , au  moyen 
d’un  ligament  extérne,  étroit  et  bombé,  fixé  sur  des  nymphes  peu 
proéminentes , étroites  et  séparées  par  un  sillon  peu  profond. 

Presque  toutes  les  personnes  qui  se  sont  occupées  du  genre  Thétis 
ont  eu  à son  sujet  les  mêmes  opinions  ; elles  ont  compris  qu’il  était 
nécessaire  de  rapprocher  ce  genre  des  Vénus  et  des  Cythérées.  Il  faut 
cependant  en  excepter  M.  Gray  qui,  dans  la  classification  du  Musée 
britannique,  introduit  le  genre  dans  la  famille  des  Lucines.  Ces  rapports 
avec  les  Vénus  étaient  pour  nous  d’autant  plus  évidents,  que  nous 
avions  trouvé  dans  une  Vénus  vivante  des  caractères  presque  identiques 
avec  ceux  des  Thétis.  Ce  genre  néanmoins  doit  être  conservé;  la  forme 
de  rimpression  palléale  est  tellement  différente  de  celle  des  autres  Acé- 
phalés  connus , que  cela  seul  suffit  pour  le  faire  admettre  définitivement 
dans  toutes  les  méthodes. 

L’animal  devait  être  très  différent  de  ceux  que  nous  connaissons 
actuellement  : les  siphons , au  lieu  d’être  dirigés  horizontalement  d’avant 
en  arrière,  devaient  tomber  de  haut  en  bas  dans  la  direction  de  leur 
muscle  rétracteur.  Le  manteau  lui-même  a dû  subir  des  modifications 
notables,  puisque  le  muscle  rétracteur  des  siphons  occupait  presque 
toute  la  longueur  du  bord  ventral.  Le  pied,  par  conséquent,  devait 
être  porté  très  en  avant  et  l’espace  nécessaire  pour  son  issue  se  trouve 
extrêmement  réduit  par  l’abaissement  du  muscle  rétracteur  antérieur 
des  valves.  Le  pied  devait  donc  avoir  une  forme  spéciale , et  nous  pré- 
sumons que  cet  organe  était  allongé , cylindroïde  et  comparable  à celui 
des  Lucines;  on  comprend  sans  peine  tout  ce  que  ces  conjectures  lais- 
sent d'incertitude  après  elles.  11  est  curieux  néanmoins  de  pouvoir  recréer 
en  quelque  sorte  un  animal  entièrement  perdu,  en  se  servant  par  induction 
des  renseignements  que  possède  aujourd’hui  Thistoire  des  Mollusques. 

Jusqu’ici  les  véritables  Thétis  sont  au  nombre  de  trois  seule- 
ment: elles  appartiennent,  sans  exception,  aux  couches  inférieures  et 
moyennes  du  terrain  crétacé  connues  sous  le  nom  de  gault , de  grès 
vert  et  de  craie  chloritée.  M.  d’Orbigny  a reconnu  une  troisiènle  espèce 
dans  une  des  corbules  du  Mineraf  ronchologÿt  mais  elle  est  contes- 


LES  CONQUES.  5^5 

table,  car  elle  à la  plus  grande  analogie  avec  le  Thetis  minor';  aussi 
M.  Morris , dans  son  Catalogue  des  fossiles  de  la  Grande-Bretagne , 
réunit-il  les  deux  espèces  que  sépare  M.  d’Orbigny. 

Thétis  petite.  Thetis  minor.  Sow. 

PL  22.  f.  3.  4. 

T.  Testa  siiborbiculari ^ tnrgidâ , subcequüatera^  lœvigatâ  rransversim 
irregtiîariter  striata^  longitudinaliter  punctatâ ; iimbonibus  rninimis, 
vix  obVtquis. 

Venus.  Maotell,  Geol.  of  Sussex.  p.  73.  n®  12. 

Thetis  minor,  Sow.  Miu.  conch.  t.  6.  p.  19,  pl.  5i3.  f.  5,  6. 

Defr,  Dict.  sc.  nat.  t.  54,  p,  274. 

Sow.  Concb.  man.  p.  274. 

Gray,  Syn.  bril.  mus,  p.  91. 

Bronn,  Leth.  geogn.  t.  i.  p.  7o5.  n®  2,  pl.  3o,  f.  22. 

Brown,  Elem.  of  foss.  conch.  p.  112^ 

Fitton,  On  the  strata  belowche  chalk.  p.  i3i.  157,  159.  2o5.  a6S. 

Sowerby  dans  Fitton,  p.  358, 

Morris.  Cat.  of  brit,  foss.  p.  102. 

D’Orbigny,  Paléont.  franc,  ter.  crét.  t.  3.  p.  453.  pj.  387.  f.  4,  5. 

An  'varietas?  Corbula  lœvigata,  Sow.  Min.  conch.  pl.  209.  f.  x,  2. 

Thetis  lœvigata,  D’Orb.  Paléont.  franc,  ter.  crét,  p.  45r.  pl.  387. 
f.  1 à 3. 

Habite...  Fo.ssile  dans  le  Gaullen  France,  en  Angleterre,  en  Allemagne. 

Coquille  dont  on  ne  trouve  habituellement  que  le  moule  intérieur 
formé  d’une  substance  noire  et  dure,  mais  d’une  pâte  ordinairement 
assez  fine  pour  conserver  avec  la  plus  grande  exactitude  les  empreintes 
que  l’animal  a laissées  dans  la  coquille;  c’est  d’après  ces  moules  que 
nous  avons  décrit  les  caractères  du  genre;  quant  à ceux  de  l’espèce 
que  nous  signalons  comme  la  plus  répandue,  ils  sont  faciles  à recon- 
naître. En  effet,  le  Thetis  minor  est  une  coquille  de  taille  médiocré, 
arrondie , globuleuse , renflée,  subcordiforme , lisse  ou  marquée  de  stries 
irrégulières  d’accroissement.  Les  crochets  sont  médiocres , peu  inclinés  ; 
ils  partagent  la  coquille  en  deux  parties  presque  égales.  La  charnière  , 
autant  qu’il  est  permis  d’en  juger  par  son  empreinte,  porte  trois  dents 
inégales,  disposées  à peu  près  comme  celles  desCyprines;  il  n’y  a au- 
cune trace  de  dents  latérales.  L’impression  du  muscle  antérieur  est 
ovale,  oblongue,  située  très  près  du  bord  antérieur  et  non  loin  du 
bord  inférieur. 


^7  fi  QUINZIÈME  FAMILLE . 

Cette  coquille  offre  des  variétés  de  taille,  et  c’est  probablement  Tune 
d’elles  qui,  njal  conservée,  a été  prise  pour  une  Gorbule  par  M.  Sowerby, 
et  distinguée  plus  tard  comme  espèce  par  M.  d’Orbigny;  cette  variété 
se'  trouve  avec  le  type  de  l’espèce , mais  beaucoup  plus  rarement. 


GENRE  quarante-huitième: 

GKAT£IiOUPlE.  G^'alelmqm. 

PI.  i4.  f.  i8.  19.  , f 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  inconnu. 

Coquille  ovale , transverse  , subéquilatérale , parfaite- 
ment close;  crochets  bombés,  peu  proéminents,  inclinés 
au-dessus  d'une  lunule  lancéolée  peu  profonde.  Charnière  por- 
tant trois  dents  cardinales  divergentes  ; une  dent  latérale  an- 
térieure , et  en  arrière  trois  ou  quatre  dents  striées , graduel- 
lement décroissantes  ; ligament  extérieur  étroit,  allongé;  deux 
grandes  impressions  musculaires  écartées,  ovalaires.  Impres- 
sion palléale  occupant  le  bord  ventral  dans  la  moitié  antérieure 
de  sa  longueur,  se  contournant  en  une  sinuosité  large  et  pro- 
fonde ovalaire , dont  l’extrémité  supérieure  gagne  le  muscle 
p'ostérieur,  après  une  inflexion  anguleuse. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Doiiax , Bastérot.  — Graieloupia , 
Desmoulins. 

OBSERVATIONS.  M.  Bastérol  a publié  en  1825  un  mémoire  très  inté- 
ressant sur  la  Géologie  de$  terrains  tertiaires  du  sud-ouest  de  la  France, 
et  il  a décrit  la  plupart  des  fossiles  qui  sont  répandus  quelquefois  en  pro- 
fusion dans  ces  terrains.  Ce  mémoire  fait  partie  du  recueil  publié  par  la 
Société  d’histoire  naturelle  de  Paris.  Parmi  les  fossiles  intéressants 
signalés  à l’attention  des  naturalistes  par  M.  Bastérot,  se  remarque,  sous 
le  nom  de  Donax  irregularîs,  une  coquille  bivalve  qui  a bien  quelques 
uns  des  caractères  des  Don  aces , mais  qui  en  offre  de  tellement  particu- 
liers, que  M.  Desmoulins  a cru  devoir  la  séparer,  en  créer  un  genre 
distinct , auquel  il  a consacré  le  nom  du  savant  distingué  qui , pendant 


/ 


LES  conques. 


^77 

toote  sa  vie,  a recherché  avec  un  soin  minulieiix  les  espèces  fossiles  du 
bassin  de  l’Adour,  et  par  la  a mérité  la  reconnaissance  de  tous  les  amis 
de  la  conchyliologie  et  de  la  paléontologie.  Le  peu  que  nous  venons  de 
dire  rappelle  assez  les  travaux  de  M.  Grateloup,  auxquels  le  genre  de 
M.  Desmoulins  a été  dédié.  Depuis  la  publication  do  M.  Baslérot , un 
autre  observateur,  M.  Lea,  a trouvé  parmi  les  fossiles  de  l’Amérique 
septentrionale  une  coquille  qu’il  rapporte  au  genre  Graleloupia , et  qui 
en  offre  la  plupart  des  caractères  ; malheureusement  il  en  est  quelques 
uns  qui  restent  incertains  parce  que  le  savant  naturaliste  a négligé  de 
les  décrire  et  de  les  faire  représenter. 

Le  genre  Grateîoupia  n’a  pas  été  adopté  par  tous  les  zoologistes:  les 
uns  y ont  vu  un  démembrement  peu  nécessaire  des  Donaces  ; les  autres , 
et  nous  étions  du  nombre , voulaient  le  confondre  dans  le  grand  genre 
Cythérée,  et  le  rapprocher  des  Cyiherca  corbicüla  et  autres  espèces 
analogues  qui  ont  quatre  dents  cardinales  ; mais  la  forme  particulière 
de  la  sinuosité  palléale , ajoutée  aux  autres  caractères  de  ces  coquilles  , 
en  fait  un  genre  nettement  détaché  de  tous  les  autres. 

On  ne  connaît  jusqu’ici  qu’un  très  petit  nombre  d'espèces  dans  le 
genre  Grateîoupia  ; mais  comme  elles  appartiennent  à des  terrains  ter- 
tiaires , dans  lesquels  les  fossiles  sont  d’une  conservation  parfaite,  il  est 
possible  de  retrouver  en  elles  tous  les  caractères  du  genre  aussi  facile- 
ment que  sur  des  espèces  vivantes.  Les  Grateîoupia  connues  sont  des  co- 
quilles ovales,  transverses  ou  subtrigones  subéquilatérales,  ayant  le  côté 
postérieur  un  peu  plus  court  et  subtronqué  obliquement;  le  côté  antérieur 
est  arrondi,  large,  elle  bord  ventral  presque  droit,  présente  une  légère 
inflexion  au  moment  d’arriver  à l’extrémité  postérieure.  M.  Desmou- 
lins, attachant  à ce  faible  caractère  une  trop  grande  importance,  avait 
pensé  que  le  Grateîoupia  doit  faire  partie  de  la  famille  des  Tellines  ; 
nous  verrons  bientôt  d’autres  caractères  d’une  plus  grande  valeur  en- 
traîner le  genre  dans  la  famille  des  Vénus.  Les  bords  sont  simples  et 
entiers , parfaitement  joints  lorsque  la  coquille  est  fermée  ; ils  sont  plus 
épais  et  plus  arrondis  dans  la  longueur  du  bord  antérieur. 

La  charnière  des  Grateîoupia  a de  l'analogie  avec  celle  de  certaines 
Cythérées , telles  que  le  Cytheræa  corbicüla , par  exemple  : ainsi  on  y 
trouve  les  dents  cardinales  des  Cythérées,  c’est-à-dire  trois  dents  car- 
dinales régulières,  une  dent  latérale  antérieure  , occupant  la  longueur 
de  la  lunule  , et  enfin , à la  suite  de  la  troisième  dent  cardinale  , c'est- 
à-dire  de  la  postérieure,  se  trouvent  six  ou  sept  dents  graduellement 
décroissantes,  irrégulièrement  sillonnées.  Ces  dents  s’engagent  l’une 
dans  l’autre , aussi  exactement  que  les  dents  cardinales  elles-mêmes, 
T.  1.  U'  PARTIE.  '^7* 


QUINZIÈME  FAMILLE. 


et  par  leur  moyen  la  charnière  acquiert  un  degré  de  solidité  qui  n‘existe 
pas  au  même  degré  dans  les  genres  avoisinants.  Les  dents  sériales, 
dont  nous  venons  de  parler,  pourraient  se  comparer  à celles  des  Arches. 
Elles  sont  obliques,  rayonnantes,  et  elles  accompagnent  la  nymphe 
dans  une  partie  de  sa  longueur.  Cette  nymphe  est  longue  et  peu  épaisse , 
donnant  insertion  à un  ligament  externe , comparable  à celui  des  Cy- 
thérées.  Cette  charnière,  dont  nous  venons  de  parler,  est  supportée  par 
une  lame  cardinale  d'une  médiocre  épaisseur,  mais  qui  cependant  s’a- 
vance au-dessus  de  la  cavité  des  crochets. 

Les  impressions  musculaires  sont  grandes  et  écartées;  toutes  deux 
sont  comprises  dans  la  région  dorsale  de  la  coquille  et  à peu  près  à égale 
distance  de  la  charnière.  L’antérieure  est  obliquement  semi-lunaire  ; la 
postérieure  est  subquadrangulaire  : c’est  un  carré  dont  les  angles  sont 
obtus.  Au-dessus  de  chacune  de  ces  grandes  impressions,  et  cachées 
au-dessous  du  bord  cardinal,  so  montrent  deux  petites  impressions,  sur 
lesquelles  s’attachaient  les  muscles  rétractours  du  pied.  L'impression 
paliéale  va  nous  présenter  quelques  caractères  remarquables  qui , 
s'ajoutant  à ceux  que  nous  venons  de  signaler,  contribuent  à donner 
plus  de  certitude  au  genre.  Cette  impression  se  détache  de  l’extrémité 
antérieure  et  inférieure  du  muscle  adducteur  antérieur  des  valves  ; de 
cette  manière,  cette  impression  musculaire  est  réellement  en  dedans  de 
l’impression  paliéale.  Celle-ci  descend  obliquement  en  traçant  une  ligne 
courbe,  comme  si  elle  voulait  sortir  de  la  coquille  vers  le  tiers  posté- 
rieur du  bord  ventral;  mais  parvenue  au  voisinage  du  bord  et  très  loin 
encore  do  l’extrémité  postérieure , elle  s’arrête  subitement , se  recourbe 
en  dedans  et  circonscrit  une  sinuosité  ovalaire , dont  Taxe  est  oblique  de 
haut  en  bas  et  d’avant  en  arrière.  La  ligne  supérieure  de  la  sinuosité 
n’aboutit  pas  directement  à l'impression  musculaire  postérieure;  elle 
passe  au-dessous  d’elle,  s’arrête  en  s’élargissant  sous  forme  d’une 
petite  impression  particulière,  et  enfin  remonte  perpendiculairement 
pour  se  confondre  avec  le  bord  postérieur  de  celte  impression.  Il  résulte 
de  celte  disposition  qvie  le  sinus  palléal , au  lieu  d'être  ouvert  en  arriére , 
comme  dans  la  plupart  des  Mollusques  siphonéS  (Mye,  Lutraire, 
Madré,  etc.),  est  ici  ouvert  dans  le  tiers  postérieur  du  bord  ven- 
tral. Uar  conséquent,  le  genre  Grateloupia  se  rapproche  réellement 
de  celui  desThetis,  puisque  les  siphons,  au  lieu  d’être  dirigés  dans 
le  diamètre  anléro  postérieur  do  l'animal,  sont  très  obliques  à ce  dia- 
mètre, mais  ils  le  sont  moins  que  dans  les  Thétis. 

D’après  l’ensemble  des  caraclères  que  nous  venons  d’exposer,  il  est 
évident  que  le  genre  Gnitehupin  doit  être  conservé.  Si  maintenant 


LES  CONQUES. 


'*79 

nous  cherchons  la  place  qu'il  doit  occuper  dans^la  méthode,  nous  lais- 
sant guider  par  l'analogie,  nous  serons  nalurellemenl  conduit  à le 
rapprocher  des  Cythérées.  Quoique  par  sa  forme  générale  la  coquille  so 
rapproche  de  certains  Donaces,  particulièrement  du  Donax  brasiliensis 
[Cnpse  brasiliensis  J Latnk.  ),  néanmoins  la  charnière  emprunte  la  plu- 
part des  caractères  des  Cythérées  ; elle  a une  dent  lunulaire , trois  dents 
cardinales  et  cinq  ou  six  petites  dents  sériales  etintrantes,  qui  remplacent 
la  dent  cardinale  postérieure.  Si  nous  considérons  maintenant  les  im- 
pressions du  manteau  et  des  muscles,  nous  ne  leur  trouverons,  il  est 
vrai,  qu’une  ressemblance  éloignée  soit  avec  celles  des  Donaces  , soit 
avec  celles  dos  Cythérées  ou  des  Vénus.  Et  cependant  ces  caractères , 
en  conGrmant  le  genre , contribuent  â fixer  sa  place  dans  la  famille  des 
Conques. 

Jusqu’ici  nous  ne  connaissons  que  quatre  espèces  du  genre  Orale- 
ioxipia.  Trois  se  trouvent  dans  les  terrains  tertiaires  moyens  des  envi- 
rons de.  Bordeaux  et  de  Dax.  La  quatrième  est  de  l’Amérique  septen- 
trionale; elle  provient  des  terrains  tertiaires  do  l’Alabama,  qui  repré- 
sentent, à ce  qu’il  paraît,  dans  la  série  géologique,  le  second  étage 
tertiaire  des  terrains  de  l’Europe,  Elle  a été  décrite  par  M.  Lea  , sous 
le  nom  de  Graleloupia  Moulinsii.  Les  espèces  de  France  sont  le  Orale- 
loupia  donaciformis , la  plus  répandue  et  la  seule  citée  ; le  Graleloupia 
diflicilis  [Donax  difficilis , Bast.);  la  troisième  ressemble  par  sa  forme 
générale  au  Cijtheræa  polita  de  Lamarck  : nous  proposons  pour  elle  le 
nom  4e  Graleloupia  cuiieata. 

Grateloupie  donaciforme.  Grateloupia  donaciformh^  Desmoul. 
PI.  14.  f.  18.  19. 

Testa  transversâ  ^ ovaco-trigond , stibœquilaterd^  posùcè  obliqué 
truncaldf  nnCicè  latiore  retiiudatu^  lateraliler  compressa  ^ lœvigatd  • 
unibomhus  parvis  oppositis  ; lunulâ  depressa  ^ ovnto-lanceoîatâ. 

Donax  irregidaris.  Bastérol,  foss.  de  Bord.  p.  84.  n”  4,  pl.  4.  f,  19. 

Grateloupia  donaciformis,  Desmoiillns,  Bull,  de  la  Sor.  linn.  d.*  Bord. 

t,  2.  p.  24 î*  f.  1 à *1. 

Broun,  Lleli.  t;fog.  I.  2.  p.  906.  p!.  3;.  f.  19. 

Onili'loiip,  Car.  7.00I.  p.  f>3. 

Sow.  Coii'  li.  niau.  p.  i55.  f.  102. 

Brftwu,  Klom.  of  fos*!.  Corjcli.  p.  108. 

Kang,  Man.  de  Concli.  p.  307. 

Poliez  Mirl».  r»nl.  des  Moll,  de  üonai.  t.  2.  j».  197, 


QUINZIÈME  FAMILLE. 


58o 

Gtinllz,  nrniid.  p,  419,  420. 

lïaLUc...  Foî.sil^’  il  Bordeaux  rt  h Dax. 

Coquille  transverse,  ovale,  snblrigone,  presque  équilatérale , ayant 
le  côté  postérieur  tronqué  à la  manière  du  Donax  brasiliensis , un  peu 
plus  court  que  l’antérieur  ; toute  la  surface  est  lisse,  polie,  brillante, 
marquée  de  stries  irrégulières  d’accroissement;  les  crochets  sont 
petits,  opposés,  rapprochés,  à peine  obliques;  ils  dominent  une  lunule 
peu  étendue,  nettement  circonscrite,  déprimée,  ovale,  lancéolée.  Le 
côté  antérieur  est  large,  comprimé,  arrondi;  le  postérieur  sé  termine 
en  un  angle  obtus.  Les  bords  sont  simples,  peu  épais:  l'inférieur  est 
presque  droit.  La  charnière  porte  trois  dents  principales  sur  la  valve 
gauche  ; elles  sont  étroites  ; l’antérieure  est  parallèle  au  bord  de  la  lunule, 
et  se  place  dans  la  môme  direction  que  la  dent  latérale  ; les  deux  autres 
dents  cardinales  sont  très  rapprochées,  parallèles  et  perpendiculaires. 
La  valve  droite  porte  également  trois  dents  : l'antérieure  est  très  petite  et 
soudée  au  bord  de  la  lunule;  la  dent  moyenne  est  très  grosse,  trian- 
gulaire, subpyramidale;  la  postérieure  est  très  mince  et  lamelliforme. 
En  avant  de  ces  dents  cardinales  se  trouve  une  dent  latérale  antérieure 
comprimée,  conique,  très  pointue  au  sommet  ; en  arrière,  et  continuant 
les  dents  cardinales , se  montre  la  dent  découpée  et  striée  qui  carac- 
térise le  genre.  La  sinuosité  palléale  a une  forme  particulière  dans  eette 
espèce  qui  la  distingue  de  toutes  les  autres;  elle  est  ellipsoïde,  un  peu 
pointue  au  sommet,  moins  large  que  longue  ; une  ligne  qui  passerait  par 
son  axe  aboutirait  d'un  côté  à l'angle  inférieur  et  postérieur  des  valves, 
et  de  l’autre  à l’extrémité  inférieure  du  muscle  adducteur  antérieur. 

Les  grands  individus  de  cette  coquille  ont  57  millimètres  de  long  et 
38  de  hauteur. 


GENRE  QUARANTE-NEUVIÈME. 

CTTHÉRÉE.  Ciffl/eren.  (Lamarck). 
n.  1 8,  f,  1 1 à 1 4,  Pl.  ig,  f.  3 à g.  PI.  20,  f.  i à 3, 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  ovale , tranSverse  ou 
subtrigone , ayant  les  lobes  du  manteau  désunis  dans  toute  la 
longueur  du  bord  inférieur,  terminés  en  avant  et  en  bas  par  un 
bord  profondément  plissé  et  chargés  de  tentacules  le  long  du 


LES  CONOlîES. 


58 1 

bord  postérieur.  Deux  siphons  égaux  en  longueur,  inégaux  en 
diamètre , réunis  jusque  près  de  leur  sommet  ; leur  ouverture 
garnie  de  tentacules  simples  et  cylindratés  ; pied  robuste, 
assez  épais,  triangulaire;  bouche  médiocre,  ovale,  trans- 
verse. Palpes  labiales , triangulaires , petites,  subéquilaté- 
rales ; branchies  larges,  subquadrangulaires,  inégales,  plissées, 
réunies  en  arrière  de  la  masse  abdominale. 

Coquille  ovale , transverse,  subarrondie  ou  trigone,  épaisse, 
solide,  le  plus  ordinairement  lisse,  couverte  d’un  épiderme 
corné  transparent  ; crochets  plus  ou  moins  saillants  et  inclinés 
au-dessus  d'une  lunule  superficielle  dans  le  plus  grand  nom- 
bre. Charnière  portant  trois  dents  cardinales  inégales , diver- 
gentes et  une  dent  latérale  antérieure  dans  la  longueur  de  la 
lunule.  Deux  grandes  impressions  musculaires  ovales-obrondes  ; 
impression  palléale  parallèle  au  bord  ventral , se  terminant 
en  arrière  en  une  sinuosité  peu  profonde  , oblique , triangulaire 
ou  subovalaire,  réduite  quelquefois  à une  simple  inflexion. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Pectuuculus  ^ Listei*.  — Tel- 
lina^  Lister.  — Chama^  Rumphius,  d’Argenville,  Gualtieri , 
Adanson.  — Vernis^  Linné,  Schroeter,  Gmelin,  Chemnitz, 
Born,  Pennant,  Cuvier,  Wood,  etc.  — Mereirix , Lamarck 
(o/m),  Gray,  Schumacher.  — Callüia^  Callistoderma  ^ 
Poli  [pars],  — Trigona^  Megerle  , Schumacher,  Gray.  — - 
Aniigona^  Schumacher.  — Circe  ^ Schumacher,  Sowerby, 
Gray.  — Corbicula  , Benson.  — Dione^  Gray. 

OBSEiïVATiONs.  Dès  SCS  premiers  travaux  sur  la  conchyliologie,  La- 
marck sépara,  sous  le  nom  générique  de  Merelrix , celles  des  Vénus  de 
Linné  qui  portent  à la  charnière  une  dent  latérale  antérieure.  Quel- 
ques années  plus  tard,  notre  célèbre  naturaliste  à uu  nom  peu  conve- 
nable substitua  celui  de  Cythereaj  qui  depuis  a été  universellement 
adopté. 

Inspiré  par  les  travaux  de  Lamarck  et  de  Cuvier,  Koissy  présenta, 
dans  les  Mollusques  du  Butfon  de  Soiinini,  un  arrangement  métho- 
dique dans  lequel  il  sut  tirer  le  meilleur  parti  des  faits  et  des  idées  les 


582 


OÜINZIÈME  FAMILi^E. 

plgs  récemment  introduits  dans  la  science.  11  rejeta  les  sous-genres  de 
Cuvier,  parmi  lesquels  se  trouvait  le  genre  Cythéréô  de  Lamarck  , et  il 
adopta  le  nouveau  genre  en  lui  conservant  ses  rapports  naturels  avec  les 
Vénus.  Quelques  années  plus  tard , Lamarck  créa  la  famille  des  Con- 
ques dans  la  Philosophie  zoologique,  dans  laquelle,  à côté  dès  Vénus  , 
vinrent  se  ranger  les  Cythérées  et  les  autres  genres  que  ndus  avons 
mentionnés  en  retraçant  Thistoire  de  cette  faniille. 

Depuis  sa  création  jusqu'aujourd’hui,  le  genre  Cythérée  a subi  des 
changements  analogues  à ceux  do  la  plupart  des  autres  gepres  de  la 
classe  des  Mollusques.  D’un  côté,  un  certain  nombre  de  zoologistes, 
entraînés  par  Texemple  de  Cuvier,  conservent  le  grand  genre  de  Linné , 
et  se  contentent  de  le  partager  en  sous-genres  qui,  il  faut  l'avouer, 
sont  loin  d’ôtre  égaux  en  importance.  S’appuyant  sur  d’autres  principes, 
les  adeptes  de  l’école  de  Lamarck  , exagérant  les  exemples  du  matlre, 
trahissent  la  malheureuse  propension  de  diviser  sans  cesse  les  genres 
les  plus  naturels  pour  se  créer  le  stérile  mérite  d’encombrer  la  nomen- 
clature d’une  foule  de  genres  inutiles.  Entre  ces  deux  tendances,  égale- 
ment nuisibles  aux  progrès  de  la  science,  il  y a une  juste  mesure,  une 
judicieuse  appréciation  des  faits  qui  ramènent  à cette  philosophie  si 
féconde  par  laquelle  se  sont  laissé  guider  les  grands  zoologistes,  phares 
lumineux  destinés  autant  à attirer  vers  eux  le  navigateur  inexpérimenté 
qu’à  éclairer  le  pilote  plus  habile.  Immobiliser  la  science,  comme  ont 
voulu  le  tenter  l’école  linnéenne  d’Allemagne  et  celle  d’Angleterre  à la 
fin  du  siècle  dernier  et  au  commencement  de  celui-ci,  ce  n'est  pas  en 
fixer  les  principes  ; une  science  qui  sans  cesse  fait  des  progrès  ne  peut 
être  longtemps  réduite  à l’immobilité  sans  en  ressentir  de  graves  dom- 
mages, tandis  qu’elle  profite  toujours  de  la  stabilité  de  ses  principes, 
quel  que  soit  l’esprit  d’innovation  qui  la  domine  passagèrement. 
Au  reste , nous  ressentons  le  contre-coup  de  cette  immobilité  trop  long- 
temps prolongée.  par  un  mouvement  trop  rapide  que  quelques  personnes 
pourraient  prendre  pour  un  progrès,  mais  qui  au  fond  n’est  qu’une 
agitation  à la  surface.  Ou  s'amuse  à créer  des  méthodes,  des  nomen- 
clatures, lorsqu’il  y a tant  de  faits  douteux  à éclairer,  tant  de  faits  nou- 
veaux à découvrir,  lorsque  l'ombre  de  l’ignorance  couvre  encore  de  vastes 
étendues  de  la  science.  Observons , comblons  les  lacunes  qui  existent 
partout,  c’est  le  seul  moyen  d’éviter  les  deux  écueils  sur  lesquels  la 
science  vient  alternativement  échouer,  l’immobilité  et  l'agitation. 

L’examen  que  nous  avons  fait  des  genres  les  plus  considérables  de  la 
famille  des  Conques  abrégera  beaucoup  ce  que  nous  avons  à dire  des 
Cythérées  en  particulier.  Nous  avons  fait  comprendre  le  peu  d’impor- 


LES  CONQUES. 


583 


tance  des  caractères  conchyliologiques  des  Vénus , des  Pullaslra  et  des 
Cythérées,  puisqu’ils  se  fondent  insensiblement  les  uns  dans  les  autres 
au  moyen  d’une  série  de  modifications  et  de  transformations  graduées 
dans  le  plus  grand  nombre  des  caractères.  H est  résulté  pour  nous 
autrefois,  et  pour  plusieurs  autres  conchyliologues,  cette  opinion  que  tous 
ces  genres  artificiels  devaient  rentrer  dans  le  seul  genre  Vénus.  Cette 
opinion  ne  peut  subsister  en  présence  des  faits  nouveaux  dont  l’histoire 
des  Mollusques  s’est  enrichie , et  ces  genres , artificiels  en  apparence  , 
sont  zoologiquement  naturels  : nous  l’avons  démontré  pour  les  Pullaslra 
et  les  Vénus , nous  allons  également  en  donner  la  preuve  pour  les 
Cythérées. 

Les  Cythérées  sont  des  coquilles  do  formes  variables.  La  plupart  sont 
ovales,  transverses,  inéquilatérales;  celte  forme  se  modifie  peu  à peu, 
passe  à la  triangulaire , qui  persiste  particulièrement  dans  un  groupe 
dont  le  Cijtherea  corbicula  peut  donner  une  juste  idée , et  dans  lequel  se 
réunissent  un  assez  grand  nombre  d’espèces.  De  cette  forme  triangu- 
laire on  passe  par  degrés  insensibles  à une  forme  sublenticulaire.  Le 
plus  grand  nombre  des  Cythérées  sont  lisses , polies , brillantes  et  ornées 
de  couleurs  aussi  vives  que  variées.  Leur  surface  extérieure  est  moins 
accidentée  que  celle  des  Vénus  j il  y a cependant  des  espèces , mais  en 
petit  nombre,  qui  sont,  les  unes  striées,  sillonnées  ou  lamelleuses 
transversalement  ; les  autres  ont  des  stries  ou  des  côtes  longitudinales , 
divergentes  et  presque  toujours  bifides  du  côté  postérieur.  Le  poli  bril- 
lant qui  se  remarque  sur  le  plus  grand  nombre  des  espèces  do  Cythé- 
rées est  dû  à l’existence  d’un  épiderme  corné  , transparent,  au-dessous 
duquel  la  coloration  conserve  toute  sa  beauté.  Il  y a des  espèces  chez 
lesquelles  l’épiderme  est  plus  apparent;  il  est  brunâtre,  mais  dans 
aucune  il  ne  déborde  le  test.  On  peut  dire  d’une  manière  générale  que 
dans  les  Cythérées  les  bords  restent  simples  et  sans  crénelures;  car  il 
faut  en  excepter  seulement  le  petit  nombre  de  celles  qui  sont  ornées  de 
stries  ou  de  côtes  longitudinales.  Ce  fait  n'est  pas  sans  intérêt  au  point 
de  vue  de  la  paléontologie;  car  les  crénelures  des  bords  d’une  coquille 
restent  empreintes  sur  son  moule  intérieur  , et  dès  lors  il  y a plus  de 
raisons  à ranger  ces  espèces  fossiles  à bords  crénelés  plutôt  parmi  les 
Vénus  que  parmi  les  Cythérées. 

Quelques  Cythérées  sont  bombées  cl  cordiformcs;  celles-la  ont  les 
crochets  assez  grands.  A mesure  que  les  espèces  s’aplatissent,  les  cro- 
chets diminuent,  se  rapprochent,  s'opposent  fun  à l'autre,  et  dans  les 
espèces  lenticulaires  ils  se  touchent , s’amincissent  et  se  redressent. 
Toutes  les  Cythérées  portent  sur  le  côté  antérieur  une  lunule  plus  ou 


QUINZIEME  FAMILEE. 


o8i 

moins  f;rande,  plus  ou  moins  superficielle  ; sa  forme  varie  avec  celle  de 
la  coquille:  cordiforme  dans  les  espèces  bombées,  elle  est  lancéolée  dans 
les  espèces  aplalies.  La  surface  interne  n’est  jamais  nacrée;  blanche 
dans  le  plus  grand  nombre  des  espèces,  elle  se  nuance  de  violet , de 
pourpre , d’orangé,  de  brun  dans  celles  des  espèces  qui  ont  cette  sur- 
face colorée. 

La  charnière  des  Cythérées  mérite  une  élude  attentive,  car  c’est 
principalement  d’après  celte  partie  que  le  genre  est  caractérisé.  Quoi- 
que cette  charnière  éprouve  quelques  modifications , elle  est  cependant 
constante  dans  le  plus  grand  nombre  des  espèces  : elle  consiste  en  trois 
dents  cardinales,  divergentes,  inégales,  comme  dans  les  Vénus,  et  de 
plus  une  dent  latérale  antérieure  comprise  dans  la  longueur  de  la 
lunule.  Lorsque  le  paléontologiste  n’a  à sa  disposition  que  des  moules 
intérieurs , il  est  de  la  plus  grande  importance  qu’il  recherche  dans  les 
plis  produits  par  l'empreinte  de  la  charnière  les  traces  de  la  dent  laté- 
rale antérieure;  c’est  par  sa  présence  qu’il  peut  décider  du  genre  de 
l'espèce  qu’il  observe.  II  y a d’autres  genres  où  il  existe  aussi  une  dent 
latérale  antérieure , mais  elle  a une  position  et  une  forme  qui  ne  per- 
mettent aucune  erreur.  Déjà,  en  traitant  précédemment  du  genre  Vénus, 
nous  avons  rapporté  ce  fait  intéressant  do  la  disparition  graduée  de  la 
dent  latérale  antérieure.  Dans  une  série  d’espèces  choisies  dans  ce  but^ 
on  voit  la  dent  latérale  diminuer  peu  à peu  et  disparaître  complètement 
après  avoir  laissé  sur  les  dernières  espèces  de  la  série  de  très  faibles 
vestiges  de  son  existence. 

La  dent  latérale  antérieure  des  Cythérées  n’occupe  pas  toute  la  lon- 
gueur de  la  lunule;  elle  est  plus  ou  moins  longue  selon  les  espèces, 
quelquefois  elle  est  comprimée,  assez  souvent  elle  est  en  cône,  pointue 
au  sommet;  tantôt  elle  est  tellement  rapprochée  des  dents  cardinales 
qu’elle  semble  se  confondre  avec  elles,  tantôt  elle  en  est  plus  écartée. 
Les  dents  cardinales  elles-mômes  sont  variables  dans  une  certaine  me- 
sure. Ainsi  il  existe  un  groupe  considérable  d’espèces  vivantes  et  fos- 
siles chez  lesquelles  les  deux  dents  antérieures  de  la  valve  droite  sont 
très  rapprochées  et  presque  parallèles;  la  dent  postérieure  est  alors 
épaisse  et  canaliculée.  Dans  un  autre  groupe  d’espèces  triangulaires , 
les  trois  dents  cardinales  sont  égales  et  divergentes  sur  l’une  et  l’autre 
valve;  dans  quelques  unes  de  ces  espèces  on  voit  apparaître  en  arrière, 
le  long  de  la  nymphe , un  petit  pli  qui  se  transforme  bientôt  en  une 
quatrième  dent  cardinale.  C’est  avec  celte  modification , qui  n'est  pas 
sans  importance,  que  se  présente  la  charnière  du  Cytherea  corbicula  et 
de  plusieurs  autres  espèces  voisines. 


LES  CONQUES. 


585 


Les  impressions  musculaires  sont  généralement  grandes  ; elles  sont 
situées  aux  extrémités  du  bord  cardinal  et  inégalement  distantes  de-  la 
charnière:  l'impression  antérieure  est  ovalaire  ; la  postérieure , plus 
grande , est  subcirculaire.  Dans  les  espèces  aplaties , pour  lesquelles 
Schumacher  a établi  son  genre  Circé , les  impressions  musculaires  sont 
situées  plus  près  de  la  charnière;  elles  sont  plus  oblongues  que  dans 
les  autres  espèces , et  leur  grand  diamètre  est  perpendiculaire  à Taxe 
transverso  de  la  coquille.  Nous  ne  parlerons  pas  des  petites  impressions 
que  laissent  les  muscles  rétracteurs  du  pied  ; elles  sont  semblables  à 
celles  des  Vénus  et  occupent  les  mêmes  places. 

La  sinuosité  de  l'impression  palléalé  est  variable  chez  les  Cythérées 
de  la  même  manière  que  chez  les  Vénus  ; c'est-à-dire  qu’elle  se  pré- 
sente large  et  profonde  dans  certaines  espèces , elle  diminue  peu  à peu 
dans  d’autres,  et  finit  par  disparaître  entièrement  dans  le  groupe  des 
Circés  de  M.  Schumacher.  Il  est  bien  important  de  constater  ce  fait  dans 
l’intérêt  des  paléontologistes  ; car  ils  ont  l’habitude  de  rejeter  des  Vénus 
ou  des  Cythérées  tous  les  moules  qui  présentent  une  impression  pal- 
léale  simple.  11  se  pourrait  cependant  que  quelques  uns  dépendissent 
des  Cythérées  ; mais  pour  s’en  assurer,  il  faudrait  avoir,  en  même  temps 
que  le  moule  intérieur,  des  impressions  bien  nettes  de  la  charnière.  La 
forme  extérieure  de  la  coquille  ne  laisse  pas  toujours  prévoir  l’étendue 
relative  de  la  sinuosité  palléalé.  Les  espèces  ovalaires , par  exemple , 
telles  que  les  Cylkerea  chione , erycina , maculala,  etc.,  sont  celles  qui 
possèdent  la  sinuosité  palléalé  la  plus  grande.  A côté  de  ces  espèces , 
il  semble  que  les  meretrix , petechialis , lusoria , etc.,  ayant  une  forme 
ovale , trigone , intermédiaire  entre  ce  groupe  et  le  suivant , devraient 
avoir  une  sinuosité  moins  profonde;  il  n’en  est  rien  : chez  ces  espèces 
la  sinuosité  a presque  complètement  disparu.  Dans  d’autres  Cythé- 
rées beaucoup  plus  triangulaires,  la  sinuosité  reparaît  avec  diverses 
modifications.  De  sorte  que  si  Ton  rangeait  en  deux  groupes  , abstrac- 
tion faite  de  tous  les  autres  caractères,  toutes  les  espèces  ayant  un 
sinus  palléal  et  toutes  celles  qui  n’en  ont  pas,  les  mêmes  formes  exté- 
rieures S0  retrouveraient  dans  l'une  et  l’autre  série , et  le  fait  deviendrait 
plus  évident  encore,  si  aux  especes  vivantes  on  joignait  les  fossiles. 

Nous  connaissons  les  animaux  de  plusieurs  espèces  de  Cythérées 
ils  se  ressemblent  et  diffèrent  entre  eux  de  la  môme  manière  que  ceux 
des  Vénus,  et  les  différences  se  rencontrent  sur  les  mêmes  organes.  Le 
manteau  est  bordé  à sa  circonférence  d uii  muscle  orbiculaire  fort  large 
et  peu  épais,  qui  s’attache  à la  coquille  sur  la  ligne  de  l'impression 
palléalé.  Ainsi  que  dans  les  Vénus,  le  manteau  déborde  le  muscle  en 


586 


QUINZIEME  FAMILLE. 


SB  partageant  en  deux  bords  distincts  : le  premier,  plus  court,  ne  dépasse 
pas  le  test,  il  s’applique  sur  lui,  le  sécrète  ainsi  que  lepiderme; 
l’autre,  membraneux,  plus  large,  saillant  au  dehors,  est  découpé  en 
larges  lanières  et  contourné  en  plis  profonds.  Cette  disposition  rap- 
pelle tout  à fait  ce  qui  existe  chez  les  Vénus.  Chez  le  Cytherea  cUione , 
en  avant  dans  la  longueur  de  la  lunule , en  arrière  depuis  l'extrémité 
du  ligament  jusqu’à  l’origine  des  siphons,  le  manteau  laisse  échapper 
une  double  série  de  tentacules  cylindracés,  coniques,  qui  s’allongent 
graduellement.  Dans  le  Cytherea  venetiana  , les  tentacules  dont  nous 
parlons  n'existent  pas,  le  bord  membraneux  du  manteau  se  continue 
a leur  place.  Les  lobes  du  manteau  sont  désunis  dans  les  Cylhérées  de 
la  môme  manière  quo  dans  les  Vénus;  ils  laissent  entre  eux  une  large 
ouverture  qui  commence  au  bord  inférieur  du  muscle  antérieur  et  qui 
se  termine  à l’origine  des  siphons. 

Les  siphons  sont  plus  ou  moins  considérables  selon  les  espèces  ; ils 
sont  proportionnés  à la  grandeur  de  leur  muscle  rétracteur  qui  laisse 
sur  la  coquille  la  sinuosité  palléale.  Ainsi  ces  organes , dans  le  Cytherea 
chione  Ql  toutes  les  espèces  du  même  groupe,  sont  grands,  épais,  et 
dans  leur  développement  ils  acquièrent  une  longueur  égale  aux  deux 
tiers  de  celle  de  la  coquille;  ils  diminuent  dans  leurs  dimensions  à 
mesure  que  leur  muscle  rétracteur  s’amoindrit  : cependant  ces  organes 
subsistent  dans  toutes  les  espèces , dans  celles-là  même  qui  n’ont  plus 
de  sinuosité  palléale.  Dans  le  Cytherea  chione,  les  siphons  sont  joints 
dans  toute  leur  longueur,  si  ce  n’est  à l'extrémité,  où  ils  se  désunissent 
dans  un  très  court  espace;  dans  d'autres  espèces , cette  disjonction 
s’étend  davantage;  elle  s’étend  au  quart  de  la  longueur  totale.  Nous  ne 
connaissons  pas  d'espèce  où  celte  disjonction  soit  plus  étendue.  Le 
point  de  la  soudure  des  deux  siphons  se  manifeste  au  dehors  par  une 
dépression  longitudinale , de  telle  sorte  qu’une  section  transverse  repré- 
senterait un  huit  de  chiffre.  Le  siphon  branchial  est  toujours  le  plus 
gros  ; il  est  aussi  un  peu  plus  long  que  l'anal,  même  dans  les  espèces  où 
les  deux  organes  sont  joints  jusque  tout  près  de  l’extrémité  ; les  ouver- 
tures terminales  restent  parallèles  , mais  dans  celles  où  la  disjonction  est 
plus  profonde , les  ouvertures  s'écartent  en  formant  entre  elles  un  angle 
presque  droit.  Quant  aux  tenîacules  qui  garnissent  les  bords  des 
siphons,  ils  sont  simples,  coniques,  et  ils  varient  eu  nombre  et  en 
grandeur,  selon  les  espèces.  Ainsi,  dans  lo  Cytherea  chione,  un  rang  de 
grands  tentacules  naît  du  bord  interne  du  siphon  branchial  ; un  rang  de 
tentacules  plus  courts  et  plus  grêles  s’élève  du  bord  externe  du  même 
siphon,  et  ces  tentacules  sont  espacés  de  manière  que  deux  des  petits 


LES  CONQUES. 


087 

occupent  l'intervalle  qui  sépare  chacun  des  grands.  Dans  le  Cytherea 
venetiana,  la  disposition  est  à peu  près  la  môme;  il  y a cette  différence 
qu'un  seul  petit  tentacule  alterne  avec  les  grands  et  que  tous  partent 
du  môme  bord,  très  mince  dans  celte  espèce.  Le  siphon  anal , chez  le 
Cylherea  chione , ne  diffère  pas  de  son  congénère,  seulement  les  tenta- 
cules sont  plus  petits  sur  une  ouverture  moins  grande,  tandis  que  dans 
ieCyth&'ea  venetiatia  le  siphon  anal  est  tout  à fait  semblable  à celui  des 
Vénus  ; l'ouverture  couronnée  d'un  rang  de  tentacules  est  prolongée  en 
une  calotte  membraneuse  percée  au  sommet. 

Le  pied  est  robuste  chez  les  Cylhérées;  il  est  triangulaire,  lingui- 
forme,  comprimé  de  chaque  côté.  Ses  parois  épaisses  et  musculaires 
embrassent  la  masse  des  viscères  et  la  contiennent  comme  dans  un  sac. 
Des  faisceaux  fibreux  plus  épais,  situés  en  avant  et  en  arrière , donnent 
naissance  à deux  muscles  rélracleurs,  dont  le  tendon  bifurqué  s’attache 
à la  coquille  aux  points  que  nous  avons  déjà  désignés. 

La  bouche  est  petite,  Irausverse , accompagnée.de  deux  lèvres  larges, 
mais  courtes , qui  se  dilatent  do  chaque  côte  en  une  paire  de  palpes 
labiales  triangulaires,  fort  longues,  étroites,  et  présentant  sur  leur 
surface  interne  un  petit  nombre  de  lamelles  peu  saillantes,  très  écartées, 
et  n’occupant  que  les  deux  liprs  de  celte  surface;  l’autre  tiers  formant 
un  bord  interne  entièrement  lisse. 

Les  branchies  sont  semblables  à celles  des  Vénus.  Les  feuillets  externes 
sont  plus  petits  que  les  internes;  ceux-ci  remontent  jusqu’au  bord  an- 
térieur de  la  masse  des  viscères  et  se  terminent  en  avant  en  une  pointe 
courte  et  aiguë  qui  s’avance  jusqu’à  la  bouche,  en  se  glissant  entre  les 
palpes  labiales.  La  surface  des  branchies  est  divisée  régulièrement  par 
un  petit  nombre  de  sillons  obliques,  peu  profonds.  En  arrière  les  bran- 
chies dépassent  un  peu  le  bord  postérieur  de  l'abdomen  ; elles  se  joignent 
entre  elles,  et  elles  viennent  se  souder  au  pourtour  membraneux  de 
l’ouverture  interne  du  siphon  anal. 

Trompé  par  l'apparence,  Poli  avait  cru  devoir  réunir  dans  un  même 
genre  les  Madrés  et  le  Cytherea  chione  ; cette  opinion  , que  l'on  crut 
suffisamment  fondée  sur  dos  faits  bien  observés , trouva  des  approba- 
teurs , et  ce  fut  elle  surtout  qui  contribua  à détruire  chez  certains 
naturalistes  l’importance  des  caractères  empruntés  à la  charnière  et 
à la  position  du  ligament.  Des  observations  plus  complètes  ont  fait 
justice  de  l’erreur  de  Poli:  il  suffit  aujourd'hui  de  comparer  attentive- 
ment les  animaux  des  doux  genres  pour  reconnaître  en  eux  les  carac- 
tères qui  les  éloignent  dans  deux  familles  distinctes  ; il  aurait  même 
suffi  d’apprécier  à leur  juste  valeur  les  différences  que  présentent  les 


j88 


QUINZIÈME  FAMILLE. 


organes  branchiaux  pour  s’apercevoir  que  chez  le  Cytherea  chione  ils 
sont  semblables  à ceux  du  grand  type  des  Vénus,  tandis  que  chez  les 
Madrés  ceâ  organes  se  rapprochent  infiniment  plus  de  ceux  des  Myes 
et  de  tous  les  autres  mollusques  portant  de  longs  siphons. 

Les  caractères  des  Cythérées,  tels  que  nous  venons  de  les  exposer, 
excluent  naturellement  de  ce  genre,  non  seulement  lesDosinies  de  Sco- 
poli  ou  Arthémis  de  Poli,  mais  encore  quelques  autres  coquilles  que 
Lamarck,  à l'exemple  de  Linné,  a conservées  dans  le  genre.  C’est  ainsi, 
par  exemple,  que  le  premier  nous  avons  fait  voir  que  le  Cytherea  tige- 
rina,  Lam.  (Fenus,  Linné),  est  une  véritable  Lucine:  cotte  rectification 
a été  adoptée  depuis  par  tous  les  naturalistes.  Il  en  est  de  môme  du 
Cytherea  leonina  de  M.  Baslérot , voisine  de  la  précédente  ; elle  doit  faire 
partie  du  môme  genre. 

Les  Cythérées  sont  des  mollusques  littoraux  qui  vivent  de  la  même 
manière  que  les  Vénus,  et  qui  se  trouvent  avec  elles  dans  les  mêmes 
parages.  Près  de  deux  cents  espèces  sont  inscrites  dans  les  ouvrages  de 
conchyliologie.  Elles  habitent  particulièrement  les  régions  chaudes  de 
la  terre;  leur  nombre  diminue  rapidement  dans  les  régions  tempérées, 
elles  disparaissent  complètement  dans  les  pays  septentrionaux.  Aussi 
Ton  peut  dire  d’un  terrain  tertiaire  qui  contient  beaucoup  de  Cythérées , 
qu’il  a été  déposé  pendant  une  température  inlertropicalo. 

Quoique  les  paléontologistes  aient  eu  le  genre  Vénus  pour  so  débar- 
rasser do  toutes  les  espèces  vénériformes  qui  les  embarrassaient , ils  ont 
cependant  encore  laissé  un  grand  désordre  parmi  les  Cythérées,  et  pour 
ce  genre  nous  avons  des  nombres  à peu  près  semblables  à ceux  des  Vé- 
nus. Sur  environ  cent  cinquante  espèces  mentionnées , et  que  nous  avons 
examinées,  nous  eu  conservons  quatre-vingt-huit  seulement,  dont 
nous  allons  indiquer  la  distribution , et  sur  quelques  unes  desquelles 
nous  aurons  à faire  quelques  observations,  Mais  avant  d’en  venir  à cette 
énumération,  nous  devons  d'abord  rappeler  celles  des  espèces  qui  pa- 
raissent devoir  être  éliminées  définitivement  du  genre. 

Nous  trouvons,  dans  le  Catalogue  de  Keferstein,  sept  espèces  de  Cy- 
thérées citées  autrefois  par  M.  de  Münster  dans  le  terrain  carbonifère. 
Ces  espèces,  à ce  qu'il  paraît,  ont  été  abandonnées  depuis  par  leur  au- 
teur, car  nous  les  avons  vainement  cherchées  dans  les  ouvrages  paléon- 
tologiquesdu  savant  naturaliste  que  nous  venons  de  citer;  elles  ne  sont 
môme  pas  rapportées  dans  la  synonymie  d’autres  espèces.  M.  do  Müns- 
ter aura  reconnu  plus  lard  leur  genre,  cardans  le  terrain  carbonifère, 
il  n’y  a jusqu’ici  aucune  coquille  que  l’on  puisse  rapporter  avec  certitude 
aux  Cythérées.  Trois  autres  espèces  du  même  auteur  sont  décrites  et 


LES  CONOl^ES. 


OÎJ9 

figurées  dans  l’ouvrage  de  Goldfuss,  sous  les  noms  de  Cytherea  (tp- 
tycfms,  lamellosa,  laîiplexa.  Ces  coquilles  proviennent  du  lias ,,  mais 
elles  ne  dépendent  pas  du  genre  dont  elles  portent  le  nom  ; elles  appar- 
tiennent au  genre  Cardinta,  dans  lequel  nous  les  retrouverons  plus  tard. 

Parmi  les  espèces  du  lias,  on  cite  encore  le  Cytherea  trigonellaris  de 
Voltz  : d’une  forme  triangulaire , celte  coquille  se  rapproche  des  car- 
dinies,  mais  elle  a le  test  plus  mince,  une  lunule  moins  déprimée  et  non 
circonscrite.  Nous  avons  reçu  de  Voltz  lui-même,  sous  le  même  nom,  un 
moule  de  celte  coquille  du  lias  supérieur  de  Gundershoffen  ; nous  y ob- 
servons les  plis  de  trois  dents  cardinales,  la  trace  d'une  petite  dent  laté- 
rale. Un  sinus  palléal  triangulaire  profond  prouve  indubitablement  que  le 
moule  en  question  est  bien  celui  d’uneCylhérée  ; mais  ce  moule  nous  paraît 
provenir  d’une  espèce  distincte  de  celle  Ggurée  par  Goldfuss  sous  la  dé- 
nomination de  Cytherea  trigonellaris.  De  celte  dernière  nous  ne  con- 
naissons ni  la  charnière  ni  l’impression  palléale;  c’est  pour  cette  raison 
que  nous  conservons  du  doute  à son  sujet. 

11  existe  dans  les  marnes  supérieures  du  gypse,  aux  environsde Paris, 
une  couche  peu  épaisse  toute  pétrie  de  coquilles  bivalves  très  minces, 
Iransverses  et  subtrigones.  M.  Brongniart , qui  le  premier  les  a fait  con- 
naître, les  introduit  avec  doute  dans  legenreCythérée,  en  ajoutantqu’ elles 
pourraient  être  aussi  bien  des  ünio,  des  Crassines  ou  des  Cyrènes  ; ceci 
dénote  l’incertitude  du  savant  géologue.  A force  de  soins  et  de  patience 
nous  sommes  parvenu  à dégager  l’impression  bien  conservée  d’une 
charnière  do  ces  coquilles:  elle  porte  trois  dents  petites  et  divergentes^ 
point  de  dents  latérales.  En  comparant  cette  charnière  à celle  des  Glau- 
conomes,  nous  avons  été  entraîné  à rapportera  ce  dernier  genre  les  deux 
Cythérées  des  marnes  supérieures  au  gypse  de  Paris.  Par  conséquent, 
ces  espèces  passant  dans  un  autre  genre , il  deviendra  possible  de  lais- 
ser des  noms  semblables  à de  véritables  Cythérées. 

Ainsi  que  nous  venons  de  le  voir,  le  genre  Cythérée  apparaît  pour  la 
première  fois  avec  certitude  dans  le  lias.  L’espèce  mentionnée  précé- 
demment n’est  pas  la  seule  qui  se  trouve  dans  ce  terrain,  Voltz  en  cite 
deux  autres  à Gundersholfen;  elles  sont  aussi  dans  d'autres  localités  de 
l’Allemagne:  ce  sont  les  Cytherea  lucinia  et  cornea.  M.  de  Münster  en 
ajoute  une  quatrième  sous  le  nom  de  Cytherea  deltoîdea;  mais  ce  nom 
ne  doit  pas  lui  rester,  puisque  Lamarck,  il  y a plus  de  quarante  ans , 
l’avait  consacré  à une  espèce  des  environs  de  Paris.  En  conséquence, 
nous  proposons  le  nom  de  Cytherea  liasina  pour  l’espèce  do  M.  Münster 
décrite  et  figurée  par  Goldfuss. 

Jusqu’ici  le  genre  Cythérée  n’est  représenté  que  par  une  seule  es- 


59»  quinzième  famille. 

pèce  dans  toute  la  formation  de  Toolile  inférieure , et  encore  cette 
espèce  nous  laisse  des  doutes,  car  nous  n‘en  connaissons  pas  !a  char- 
nière: c’est  le  Cytherea  dolabra  de  M.  Philips;  elle  pourrait  être  aussi 
bien  une  Aslarte  qu’une  Cythérée. 

Nous  avons  une  espèce  non  encore  décrite  du  coral  rag  do  Luc  (Cal- 
vados): c'est  une  coquille  lisse  ayant  une  lunule  ovale-lancéolée;  sa 
charnière,  entièrement  dégagée,  porte  trois  dents  cardinales  inégales 
et  une  dent  latérale  antérieure  ; la  forme  générale  de  la  coquille  rappelle 
celle  du  Cijtherea  nUidula  des  environs  de  Paris.  Nous  proposons  pour 
cette  espèce  le  nom  de  Cytherea  velusta. 

Une  seule  espèce  est  mentionnée  dans  les  couches  du  terrain  pori- 
landien  de  l'Angleterre  : c’est  le  Cytherea  rugosa  de  Sowcrby.  Le  nom 
de  cette  espèce  est  mal  choisi,  à cause  de  la  confusion  qui  s’est  établie 
au  sujet  du  Venus  ritgosa  et  de  toûtes  les  autres  espèces  auxquelles  ce 
nom  a été  mal  appliqué.  Quelques-unes  d’entre  elles  ont  été  rapportées 
aux  Cythérées,  et  c’est  de  là  que  pourrait  venir  la  confusion  ; elle  pour  - 
rait  être  évitée  en  substituant  le  nom  de  Cytherea  Fütoni  à celui  de 
rugosa. 

Les  Cythérées  sont  beaucoup  moins  abondantes  dans  la  formation 
crétacée  que  les  Vénus;  il  arrivera  probablement  une  répartition  plus 
égale  lorsque  la  charnière  de  toutes  les  Vénus  sera  mieux  connue  : un 
certain  nombre  passera  probablement  parmi  les  Cythérées.  Dix  espèces 
seulement  sont  connues  dans  la  craie,  sept  sont  propres  à l’Europe; 
aucune  h’est  citée  dans  le  terrain  néocomicn,  presque  toutes  sont  du 
grès  vert  et  de  la  craie  cblorilée.  Le  Cytherea  parva,  Sow.,  passe  du 
gault  d’Angleterre  dans  le  sable  vert  de  l’Allemagne.  Les  Cytherea  plana 
et  suhroîunda  existent  à la  fois  dans  le  grès  vert  d’Angleterre,  de 
France  et  d’Allemagne.  Les  Cytherea  /mco/tï(aet  truncata  ne  paraissent 
pas  sortir  des  sables  verts  d’Angleterre;  elles  ne  sont  pas  mentionnées 
par  les  paléontologistes  du  continent.  Le  Cytherea  caperata  de  Sowerby 
est  Tune  des  espèces  les  plus  citées  et  des  plus  répandues  dans  la  craie 
chloritée  en  Angleterre,  en  Allemagne  et  en  France.  M.  d’Orbigny 
rapporte  h cette  espèce  le  Cytherea  uniformis  de  M.  Dujardin  ; mais  il 
commet  une  erreur,  et  nous  pensons  que  l’une  et  l’autre  espèce  doivent 
être  conservées.  Le  Cytherea  caperata  est  une  coquille  suborbiculaire 
très  voisine  des  Dosinies;  la  surface  est  couverte  de  groé  sillons  obtus 
réguliers.  Le  Cytherea  uniformis  est  subtrigone,  et  ses  sillons  sont 
beaucoup  plus  fins,  plus  serrés,  moins  réguliers.  A ces  espèces  de  l'Eu- 
rope nous  ajouterons  le  Cythei'ea  Herzogii  d’Haussemann,  trouvée  dans 
la  craie  du  cap  de  Bonne-Espérance , accompagnée  du  Cytherea  râpe- 


LES  CONQUES. 


59 1 

rata  d’après  Goldfiiss.  Le  Cytherea  excœvala  de  Morton  est  propre  à la 
craie  de  l’Amériquo  septentrionale.  En6n , le  Cytherea  analoga  de 
Forbes  provient  de  la  craie  de  l'Inde,  et  elle  aurait,  d'après  ce  na- 
turaliste, une  très  grande  ressemblance  avec  le  Cytherea  nitidula  du 
terrain  tertiaire  de  Paris. 

Les  terrains  tertiaires  contiennent  un  grand  nombre  deCytbérées: 
c’est  ainsi  que  nous  en  comptons  quarante  et  une  dans  l’étage  inférieur 
de  ces  terrains;  et  ce  qui  est  très  remarquable,  c'est  qu’il  n’y  en  a au^ 
cune  qui  passe  en  identique  dans  l'étage  moyen , quoique  le  contraire 
ail  été  souvent  annoncé.  Nous-méme  avions  admis  autrefois  une  seule 
exception , nous  avions  cru  retrouver  à Dax  et  à Bordeaux  le  Cytherea 
fîuberycinoides  du  bassin  de  Paris;  nous  avons  reconnu  depuis  des  ca-- 
raclères  constants  qui  séparent  en  deux  espèces  ce  que  nous  avions 
pris  pour  des  variétés  locales  d'un  même  type. 

Lorsque,  en  1830,  nous  avons  publié  nos  tableaux  des  espèces  ana- 
logues vivantes  et  fossiles  des  terrains  tertiaires  de  l’Europe,  nous 
avons  considéré  comme  contemporains  des  couches  inférieures  du  bas- 
sin de  Paris  de  très  vastes  dépôts  nummulitiquos  des  Pyrénées  et  des 
Alpes.  A cette  époque,  le  terrain  nummulilique  en  question  était  classé 
dans  la  craie  par  tous  les  géologues.  Guidé  par  les  faits  que  nous  avait 
révélés  l'étude  des  fossiles  et  de  leur  distribution,  nous  avons  persévéré 
dans  notre  opinion  , certain  que  nous  étions  qu'elle  serait  jusUliée  lors- 
que l’étude  de  ces  terrains  serait  plus  avancée.  Depuis  quelques  années 
la  géologie  a répandu  de  nouvelles  lumières  sur  la  question  , et  à me  - 
sure quePexamen  s'approfondit,  on  reconnaît  l’exactitude  de  notre  opi- 
nion ; les  terrains  crétacés  ont  été  reconnus  et  limités  avec  plus  de  pré- 
cision, et  pourtant  on  les  trouve  nettement  séparés  des  terrains  num- 
mulitiques  qui  les  recouvrent.  Aujourd’hui  les  faunes  des  deux  terrains 
sont  mieux  connues,  et  leur  comparaison  en  démontre  la  profonde  sé- 
paration. Nous  Pavions  annoncé,  au  reste,  en  afûrmant  alors,  comme 
acluellernent  encore , qu'aucune  espèce  crétacée  ne  passe  en  identique 
dans  le  terrain  tertiaire  inférieur.  Les  Cythérées  des  terrains  nummu- 
iitiques  sont  différentes  de  celles  de  la  craie , et  cependant  elles  ne  sont 
pas  semblables  à celles  du  bassin  de  Paris.  Elles  sont  au  nombre  de 
trois:  ce  sont  les  Cytherea  rabica  et  ciistugensis  de  M.  Leymerie,  et  Ver- 
neiiilU  de  M,  d’Ârchiac.  Les  deux  premières  caractérisent  les  terrains 
nummulitiques  des  corbières,  la  troisième  ceux  de  Biaritz. 

En  ajoutant  aux  espèces  que  nous  avons  décrites  celles  qui  ont  été 
découvertes  depuis  la  publication  de  notre  ouvrage  sur  les  fossiles  des 
environs  de  Paris,  le  nombre  des  Cythérées  fossiles  s’élève  actuelle- 


OinXZIEME  FAMILLE. 

ment  à vingt-neuf.  Plusieurs  d’entre  elles  méritent  une  mention  par- 
ticulière. 

I”  CyUwrea  obliqua,  Desh. 

M.  Sturt  a constaté  un  fait  bien  remarquable  pendant  son  voyage  à la 
Nouvelle-Hollande.  Il  a recueilli  des  fossiles  d'un  terrain  tertiaire,  et 
parmi  eux  il  s’en  est  trouvé  plusieurs  identiques  avec  ceux  du  bassin  de 
Paris  , entre  autres  le  Cytherea  obliqua,  qui  se  montre  en  même  temps 
dans  les  sables  inférieurs  du  Soissonnais,  dans  l’argile  de  Londres  et  à 
la  Nouvelle-Hollande. 

2°  Cytherea  pusiîla,  Desh, 

Celte  petite  espèce  ne  se  rencontre  jamais  dans  le  bassin  de  Paris, 
hors  des  couches  des  sables  inférieurs  d’Âbbecourt,  de  Laon  et  du  Sois- 
sonnais; elle  a été  récemment  découverte  dans  les  argiles  de  Barton 
en  Angleterre.  M.  Nyst  la  mentionne  aussi  en  Belgique,  d’après 
M.  Galeolli,  qui  lui-même  no  la  cite  qu’avec  doute. 

3®  Cytherea  elegaiis,  Lamk. 

M.  Pusch  mentionne  celte  espèce  parmi  les  fossiles  de  laPodolie; 
nous  soupçonnons  une  erreur  dans  la  détermination.  Cependant  M.  Gra- 
teloup  la  cite  aussi  dans  le  bassin  de  Bordeaux;  nous  l'avons  vainement 
recherchée  dans  les  collections  les  plus  complètes  : nous  y avons  vu  une 
espèce  voisine , mais  toujours  distincte.  Le  véritable  Gy i/terea  clegfuîis 
commence  avec  le  calcaire  grossier  et  remonte  dans  les  grès  marins 
moyens  ; elle  existe  également  dans  le  bassin  de  Londres. 

4°  Cytherea  semisulcata,  Lamk. 

Celle-ci  se  trouve  à la  fois  dans  le  bassin  de  Paris , dans  celui  de  Va- 
logne,  ainsi  qu’aux  environs  de  Londres.  M.  Pusch  la  trouve  aussi  en 
Podolie,  mais  nous  n’admettons  ce  fait  qu’avec  la  plus  grande  réserve. 

5”  Cytherea  tellinarîa,  Lamk. 

Elle  est  commune  aux  bassins  de  Londres  et  de  Paris.  M.  Nyst  la 
retrouve  avec  doute  en  Belgique  ; enûn  M.  Grateloup  la  mentionne  à 
Saucats,  près  de  Bordeaux.  Nous  ferons  à son  sujet  la  même  observation 
que  pour  l’espèce  précédente;  nous  ne  l’avons  jamais  vue  de  cette 
localité. 

6”  Cytherea  sulcataria,  Desh. 

Il  est  évident  pour  nous  que  deux  espèces  ont  été  confondues  avec  la 
nôtre.  Nous  avons  eu  sous  les  yeux  le  seul  exemplaire  connu  de  l’es- 
pèce belge  décrite  et  figurée  par  M.  Nyst;  elle  est  très  différente  de 
celle  de  Paris,  M.  Hébert , qui  s’occupe  avec  un  soin  louable  des  fos- 
siles des  sables  supérieurs  du  bassin  de  Paris , a reconnu  avec  nous 
les  caractères  distinctifs  des  deux  espèces  , et  a proposé  de  donner  le 


LES  CONOdCS-. 


nom  de  Cytherea  BosquetÀ,  ou  sulcataria  de  Nyst.  Quant  à la  coquille 
figurée  sous  le  même  nom  dans  l’ouvrage  de  Goldfuss . elle  est  tellement 
différente  de  celle  de  Paris,  qu'il  faut  supposer  de  la  part  du  savant 
naturaliste  une  erreur  matérielle  que  nous  ne  pouvons  nous  expliquer. 
A celle  espèce  de  Goldfuss  nous  proposons  d'appliquer  le  nom  de 
Cytherea  sukifeï'a. 

T Cytherea  suberijcinoUks^  Desh. 

Les  observations  que  nous  venons  de  faire  sur  l'espèce  précédente 
pourraient  s’appliquer  à celle-ci  ; car  le  Cytherea  siiherydnoides  de 
M.  Goldfuss  est  une  espèce  différente  de  celle  de  Paris.  Nous  n’avons  pas 
la  même  certitude  à l’égard  de  celle  de  U.  Nyst;  elle  est  au  moins  une 
variété  à sillons  plus  gros.  Le  Cytherea  suberycinoides  se  trouve  en  An- 
gleterre r en  Belgique  et  aux  environs  do  Paris  ; elle  passe  des  calcaires 
grossiers  dans  les  grès  marins  moyens,  où  elle  rencontre  une -espèce 
voisine  que  nous  considérions  autrefois  comme  une  simple  variété.  La 
constance  de  ses  caractères  nous  détermine  à la  séparer  sous  le  nom 
de  Cytherea  Heberti.  L’espèce  de  -Westphalie , figurée  par  Goldfuss , 
devient  pour  nous  le  Cytherea  corriigata. 

8”  Cytherea  poîita  ^ Lamk. 

Espèce  intéressante  qui  se  trouve  dans  les  sables  inférieurs  du  Sols- 
sonnais , passe  dans  le  calcaire  grossier  et  remonte  dans  les  grès  marins 
moyens;  elle  existe  aussi  à Valognes  et  en  Belgique.  MM.  Dubois  de 
Montpéreux  et  Pusch  ont  cru  retrouver  cette  espèce  en  Podolie;  mais 
d'après  la  figure  du  premier  de  ces  naturalistes,  nous  croyons  qu’ils 
ont  pris  pour  elle  de  jeunes  individus  du  Cytherea  affinis. 

9”  Cytherea  nüidula  ^ Lamk. 

Elle  a.  été  l’occasion  d’un  assez  grand  nombre  d’erreurs.  D’abord 
Lamarck,  Defrance,  et  nous-môme  avons  confondu  avec  elle  une 
espèce  du  calcaire  grossier  toujours  plus  mince  et  plus  bombée.  Nous  lui 
qyons  donné  le  nom  de  CythoxHi  parisiensis.  L’espèce  de  Paris  , ainsi 
rectifiée , se  rencontre  depuis  les  sables  inférieurs  jusque  dans  les 
sables  marins  moyens  ; elle  existe  aussi  à Valognes,  en  Belgique  et. en 
Angfeterre,  mais  elle  n’est  pas  aux  environs  de  Bordeaux,  comme  l'ont 
cru  MM.  Bastérot  et  Grateloup  ; ils  ont  pris  pour  elle  de  joimes  individus 
d'une  coquille  à laquelle  M.  Agassiz  a donné  le  nom  de  Cytherea  La- 
marckîi.  Le  Cytherea  nitidula  de  Goldfuss  est  très  différente  de  toutes 
celles  de  Paris  et  de  l’espèce  de  Bordeaux  ; elle  doit  donc  recevoir  un 
autre  nom  , et  nous  proposons  celui  do  Cytherea  decipiena.  Ce  natura- 
liste commet  une  autre  erreur  en  rapportant,  dans  la  synonymie  de  son 
espèce,  le  Cytbei'ea  transreraa  de  Sowerhy,  parfaitement  distincte  par 
T.  l.  ‘1^  PAhTIK.  ^8' 


r>  cj/f  0 U 1 N / 1 È M K F A M I M.  E . 

tous  ses  caractères.  Dan.s  sou  mémoire  sur  les  fossiles  des  environs  de 
Magdebuurg,-  inséré  dans  la  Pakeonlographica  de  Meyer,  M.  Philippi 
cite  aussi  un  Cytiierm  nitidida.  Mais  ost-ce  une  espèce  distincte  de 
louLes  les  autres?  ou  bien  à laquelle  des  nilidula  devra-t-on  la  rap- 
porter? Il  est  à présumer  qu'elle  appartient  à l'espèce  de  Goldfuss. 
Enfin  M.  Pusch  mentionne  aussi  le  nilidula  dans  les  terrains  tertiaires 
de  la  PodoÜe;  mais  celte  citation  n’étant  accompagnée  ni  de  la  descrip- 
tion ni  do  la  figure  de  la  coquille,  nous  ne  pouvons  avoir  d'opinion  à 
son  sujet  ; cependant  nous  devons  observer  que  Jusqu'ici  le  nilidula 
véritable  ne  s'est  pas  rencontré  dans  l'étage  tertiaire  moyen ‘auquel  ap- 
partient le  terrain  tertiaire  de  la  Podolie. 

■10®  Cylherea  lœvigala^  Lamk. 

Celle-ci  réclame  aussi  une  attention  toute  spéciale , car  elle  a été 
mentionnée  dans  deux  terrains  tertiaires,  quoique  par  le  fait  elle  dé- 
pende uniquement  du  plus  ancien  de  tous,  de  celui  de  Paris.  Elle  y est 
répandue  avec  une  extrême  abondance,  depuis  les  sables  inférieurs  jus- 
que dans  les  sables  siiporiours  de  Fontainebleau.  En  passant  des  cou- 
ches inférieures  aux  moyennes  et  aux  supérieures,  elle  a éprouvé  des 
variations  remarquables.  Ainsi,  dans  les  sables  inférieurs  de  Brachcux. 
d’Abbecourt , de  Guise-Ia-Molhe , de  Soissons,  etc.,  elle  est  petite, 
étroite  et  irrégulièrement  sillonnée;  dans  le  calcaire  grossier,  elle  reste 
étroite,  mais  acquiert  un  volume  beaucoup  plus  considérable;  en  pas- 
sant dans  les  grès  marins  moyens , elle  s’épaissit  et  s'élargit  sensible- 
ment,  surtout  du  côté  antérieur;  enfin,  parvenue  dans  les  sables  de 
Fontainebleau,  elle  s’élargit  davantage  encore  et  devient  plus  ovalaire; 
c’est  avec  cette  dernière  variété  que  M.  Mérian  a fait  son  Cylherea 
sptendkla.  Pendant  ces  transformations  la  charnière  reste  constamment 
la  môme;  la  lunule,  lancéolée,  circonscrite  par  une  strie  étroite,  ne  se 
modifie  pas;  les  impressions  musculaires  conservent  leur  forme  et 
leurs  rapports  ; la  sinuosité  palléale,  étroite  et  obtuse  au  sommet,  est 
presque  toujours  obliquement  tronquée  dans  les  individus  des  sables 
supérieurs,  mais  cette  troncature  se  retrouve , quoique  plus  rarement, 
chez  les  individus  des  autres  couches.  La  distribution  géographique' du 
Cylherea  lœvigala  n’est  pas  moins  intéressante.  Elle  Se  trouve  à Valo- 
gnes,  dans  le  bassin  de  Londres,  dans  celui  de  la  Belgique;  elle  se 
rencontre  aussi  en  Westphalie,  à Bunde,  à Alzey  près  de  Mayence; 
enfin,  elle  est  citée  dans  le  sud  de  la  Nouvelle-Hollande  par  M.  Sturt. 
Brocchi  a racnlionrié  respôco  dans  le  terrain  subapennin  ; mais  il  a été 
reconnu  par  nous  et  par  M.  Sismoiula,  que'  l’espèce  du  Plaisantin  est 
très  différente  de  celle  de  Paris  : elle  a reçu  le  nom  de  Cylherea  BonellH. 


LES  CÜN(JÜES. 


595 

1 1'^  Cytherea  citneaUi,  Desh. 

Petite  espèce  qui  caractérise  la  partie  supérieure  du  calcaire  grossier 
au  moment  où  il  commence  à se  môler  aux  premières  couches  des  grès 
moyens.  Goldfuss  la  cite  aux  environs  de  Cassel;  mais,  d’après  la 
figure  môme  de  ce  naturaliste , l'espèce  qu’il  nomme  ainsi  est  diffé- 
rente de  la  nôtre:  nous  proposons  pour  elle  le  nom  de  Cytherea  cunet- 
formis. 

Indépendamment  des  vingt-neuf  espèces  qui  existent  dans  le  bassin 
de  Paris,  il  y en  a encore  dix  autres  qui  appartiennent  à d’autres  bas- 
sins du  même  âge.  Sept  d’entre  elles  ont  été  découvertes  à Bunde,  à 
Cassel,  à Kreusnade,  à AIzey,  à Kleinspauwen  , dans  des  sables  fossili- 
fères qui  paraissent  correspondre  au  grès  de  Fontainebleau  ; quant  aux 
trois  autres,  ce  sont  les  Cyllurea  Solandri,  iransversa  et  lenuislria  de 
Sovverby.  Elles  sont  propres  au  bassin  de  Londres. 

L’étage  tertiaire  moyen  est  de  beaucoup  moins  riche  en  espèces  de 
Cythérées  que  le  précédent  ; nous  en  comptons  douze  seulement,  parmi 
lesquelles  quatre  passent  dans  Fétage  supérieur , et  de  plus  nous  appel- 
lerons l’attention  sur  une  de  ces  espèces  qui,  sans  se  montrer  dans  l’é- 
tage supérieur,  a encore  son  représentant  dans  la  nature  actuelle. 
Nous  aurons  aussi  à présenter  quelques  observations  au  sujet  de  quel- 
ques unes  des  Cythérées  qui  caractérisent  les  couches  dont  il  est 
question. 

I®  Cytherea  Daboisii,  Andrzej. 

M.  Dubois,  dans  son  ouvrage  sur  la  Wolhynie  et  la  Podolie,  avait 
considéré  comme  analogue  au  Cytherea  chione  de  Lamarck  une  espèce 
qui  en  est  effectivement  voisine.  M.  Grateloup,  en  inscrivant  la  même 
espèce  dans  son  Catalogue  zoologique  j l’attribue  aussi  au  Cytherea 
chione.  M.  Pusch  lui  trouve  plus  de  ressemblance  avec  le  Cytherea 
erycinoides.,  et  il  assimile  les  deux  espèces.  Le  fait  est  que  la  coquille 
de  Podolie  et  de  Bordeaux  so  distingue  très  bien  de  toutes  ses  congé- 
nères : c’est  ce  que  M.  Andrzejouski  a bien  compris,  et  il  lui  a donné  le 
nom  de  Cytherea  Duboisii , qui  devra  être  conservé. 

Cytherea  a//ims,  Duj. 

Espèce  très  rapprochée  du  Cytherea  chione,  mais  qui  en  reste  tou- 
jours distincte.  Nous  pensons  que  c’est  elle  qui  a été  découverte  en 
Podolie  par  MM.  Dubois  et  Pusch,  et  qui  en  ont  décrit  les  jeunes  indi- 
vidus sous  le  nom  de  Cytherea  polila.  Si  cette  supposition  n’est  pas 
fondée,  l'espèce  de  Podolie  devra  recevoir  un  nom  nouveau;  car  elle 
n’est  pas  le  poJita  de  Lamarck,  comme  nous  l’avons  déjà  dit. 

38* 


QUINZIÈME  FAMILLE. 


V Cytherea  nitem,  Andrzej. 

Il  est  a regretter  que  les  naturalistes  de-  la  Russie  n'aienl  pas  com- 
plété l'ouvrage  de  M.  Dubois.  Beaucoup  d’espèces  sommairement  dé- 
crites auraient  besoin  d’être  soigneusement  figurées;  ainsi  le  Cytherea 
superha  de  M.  Eichwald,  d’après  la  courte  description  qu’il  en  donne, 
paraît  la  môme  que  le  Cytherea  nilens  d’Andrzejowski.  Mais  comment 
s*assurer  si  ces  espèces  sont  identiques  ou  différentes  en  Tabsence  de 
documents  suffisants? 

4°  Cytherea  undala,  Bast. 

Jusqu’ici  nous  ne  connaissons  cette  espèce  que  dans  le  bassin  de 
Bordeaux.  M.Goldfuss  a cru  la  retrouver  à Bunde,  mais  il  s’est  trompé. 
La  figure  qu’il  donne  de  sa  coquille  le  prouve;  l’impression  palléale  est 
fort  différente.  Celte  widala  de  Goldfuss  devra  donc  recevoir  un  autre 
nom , et  nous  proposons  celui  do  Cytherea  intermedia. 

5®  Cytherea  Lamarch'iij  Agass. 

C’est  cette  espèce  de  Bordeaux  et  de  Dax  que  M.  Bastérota  confondue 
avec  le  nitidula  des  environs  de  Paris,  erreur  que  nous  avons  relevée 
précédemment.  M.  Agassiz  en  commet  uneautre  que  nous  croyons  utile 
de  signaler.  Ce  savant  naturaliste  croit  que  c’est  là  la  coquille  de  Bordeaux 
rapportée  par  Lamarck  au  Cyprina  islandicoides , mais  il  n’on  est  rien. 
La  coquille  de  Bordeaux  citée  par  Lamarck  est  beaucoup  plus  grande, 
et  nous  la  rapportons  au  Venus  umbonaria;  elle  n’est  pas  du  genre  Cy- 
thérée. 

Nous  aurions  encore  à mentionner  deux  espèces  dans  l’étage  tertiaire 
moyen.  L’une  d’elles  a son  analogue  vivant  et  ne  passe  pas  dans  les  ter- 
rains quaternaires  ; c’est  le  Cytherea  erycina\  l’autre  a également  son 
analogue  vivant , mais  elle  remonte  dans  l’étage  tertiaire  supérieur. 
Toutes  deux  seront  citées  un  peu  plus  tard. 

Le  crag  d’Angleterre  et  de  Belgique  renferme  sept  espèces.  Les  Cy~ 
therca  filosa  et  lenticula , S.  Wood,  sont  propres  au  crag  d'Angleterre  ; 
le  Cytherea  chionoideSj  Nyst,  ne  se  trouve  qu’en  Belgique;  deux  autres 
espèces,  sulcala  et  trigona,  sont  communes  aux  deux  pays;  enfin,  les 
deux  autres  espèces,  Cytherea  chione  etrudis,  passent  dans  les  terrains 
supérieurs,  et  ont  leur  analogue  vivant.  Elles  seront  comprises  dans  une 
liste  spéciale. 

Neuf  espèces  seulement  nous  sont  connues  dans  les  terrains  tertiaires 
supérieurs  de  l’Europe.  Quatre  de  ces  espèces  sont  éteintes  et  n’ont 
plus  de  représentants  dans  la  nature  actuelle  : ce  sont , les  Cytherea 
Bunellii^  pedemontanaj  fragilis  et  puello.  Les  trois  premières  sont 


LKS  CONOUKS,  5j)7 

de  rUalie,  les  deux  autres  sont  de  la  Sicile.  Nous  avons  maintenant  à 
examiner  celles  des  espèces  dont  les  analogues  vivants  nous  sont  connus. 

r Cytherea  erijcma,  Lamk'.;  ÎVnws,  Lin. 

Vivante  dans  les  mers  de  l’Inde,  à Java  , à Amboine,  la  Nouvelle- 
Hollande,  etc. 

Fossile  à Bordeaux,  à Dax.  en  Piémont,  à Asti.  M.  Nyst  la  cite  avec 
doute  en  Belgique. 

Dans  les  tableaux-que  nous  ayons  publiés  à la  fin  des  Principes  de 
géologie  de  M.  Lyel!,  réédition,  nous  avons  regardé  comme  parfaite- 
ment analogues  les  Cytherea  erycina  et  cri/cîno/des  de  Lamarck  ; un  nou- 
vel examen  sur  un  plus  grand  nombre  d’individus  vivants  et  fossiles 
nous  confirmé  dans  notre  première  opinion.  Il  semble  que  Lamarck,  en 
imposant  aux  individus  fossiles  un  nom  particulier  [Cytherea  enjcinoides)y 
a voulu  en  faire  une  espèce  à part;  mais  on  serait<ians  l’erreur.  Au 
contraire,  Lamarck  considère  les  fossiles  de  Bordeaux  et  d’Italie  comme 
parfaitement  analogues  à l’espèce  vivante.  M.  Defrance  ne  paraît  pas 
avoir  partagé  la  manière  de  voir  de  Lamarck,  puisqu’il  propose  pour  les 
individus  de  Bordeaux  le  nom  de  Cytherea  burdiyalensis.  M.  Agassiz  a 
étudié  de  nouveau  la  question  dans  son  mémoire  intitulé  : Jcouo(/mp/tîe 
des  coquilles  tertiaires  réputées  identiques  avec  les  espèces  vivantes , etc. 
Nous  regrettons  que  M.  Agassiz  n’ait  point  étendu  ce  travail  utile  et 
consciencieux;  il  estfAcheux  qu’il  Tait  entrepris  loin  d’un  grand  centre 
scientifique,  tel  que  Londres  ou  Paris  : il  aurait  eu  à sa  disposition  des 
matériaux  qui  lui  ont  souvent  manqué  et  par  l’étude  desquels  il  aurait 
modifié  son  jugement.  Pour  nous  borner,  quant  à présent,  à l’exemple  qui 
nous  est  utile,  nous  voyons  M.  Agassiz  conserver  les  deux  espèces  ; 
cependant  il  avoue  qu’elles  ne  diffèrent  en  rien  dans  leurs  caractères  les 
plus  essentiels,  cliarnière,  impression  musculaire,  impression palléale, 
accidents  extérieurs,  lunule,  corselet,  ligament,  sillons,  etc.  Mais, 
ajoute  cet  observateur,  il  y a de  légères  différences  dans  la  forme  géné- 
rale, et  c’est  d’après  cela  sans  doute  que  le  savant  naturaliste  conserve 
les  deux  espèces  : l’une  est  un  peu  plus  ovoïde  que  l’autre,  et  c’est  tout. 
Mais  cela  est-il  suffisant  pour  maintenir  deux  espèces?  Nous  disons  non  ; 
et  notre  négation  repose  sur  des  faits  et  sur  des  analogies.  Si  nous  con- 
sultons l’analogie,  nous  devons  d’abord  poser  cette  question  : Quelle  est 
l’importance  de  la  forme  générale  comme  caractère  spécifique?  Nous 
l’avons  déjà  dit,  et  nous  le  répétons,  ce  caractère  n’a  de  valeur  qu’autant 
qu’on  le  trouverait  invariable,  que  tous  les  individus  d'une  même  espèce 
conserveraient  exactement  la  même  forme.  Celte  fixité  absolue  existe- 
t-elle?  Nullement.  Plus  vous  assemblez  d’individus,  plus  vous  recon- 


ODINZIEME  FAMILLE. 


598 

naissez  de  variations  dans  la  forme  générale.  Cette  variation  ne  dépasse 
pas  certaines  limites,  mais  elle  est  tellement  incontestable  que  nous  ne 
connaissons  pas  dans  le  type  des  Vénus  une  seule  espèce  qqi  soit  sous- 
traite à celte  loi  générale  de  variation,  dans  la  forme.  Or  la  nuance  à 
laquelle  M.  Agassiz  s’arrête  se  trouve  justement  comprise  dans  cette 
limite  <les  variations  spécifiques.  Aussi  pour  nous,  quand  mémo  nous 
n’aurions. sous  les  yeux  que  les  individus  figurés  par  M.  Agassiz , nous 
n’hésiterions  pas  à les  réunir  en  une  seule  espèce.  Dans  une  discussion 
comme  celle-ci,  il  ne  nous  suffisait  pas  do  nous  arrêter  aux  inductions 
par  analogie;  nous  avons  consulté  les  faits,  et  ils  sont  venus  confirmer 
notre  manière  de  voir.  Et,  en  effet,  les  formes  varient  aussi  bien  dans,  les 
coquilles  vivantes  que  dans  les  fossiles,  et  tendent  à se  confondre  par 
une  double  série  de  modifications. 

2°  Cytherea  albina  ? Lamk. 

Vivante  au  Sénégal , fossile  à Bordeaux,  à Dax  et  dans  les  faluns  de 
la  Touraine. 

Nous  avons  du  doute  sur  Tidenlité  de  notre  espèce  avec  celle  nommée 
Cytherea  albina  par  Lamarck.  Celte  dernière  a cependant  été  figurée  par 
M.  Delesserl  dans  son  précieux  recueil  ; mais  dans  la  figure  le  sinus 
palléal  est  simple,  tandis  que  dans  notre  coquille  il  est  étroit  et  profond. 
Nous  ne  trouvons  non  plus  aucune  mention  de  notre  espèce  à l’état 
fossile;  et  comme  elle  est  très  commune  à Saucats,  il  est  à présumer 
qu’elle  est  du  nombre  de  celles  qui  ont  été  confondues  avec  d’autres, 
car  M.  Grateloup  n’aurait  pas  manqué  de  l’inscrire  dans  son  Catalogue 
zoologique.  Quoi  qu’il  en  soit,  le  fait  important  que  nous  voulons  signaler, 
c’est  la  parfaite  identité  qui  se  montre  èntre  l'espèce  vivante  du  Sénégal 
et  les  individus  des  localités  que  nous  avons  citées  précédemment. 

3®  Cytherea  chionc,  Lamk.;  Kenws,  Linné. 

Espèce  commune  dans  l’Océan  européen,  dans  la  Manche,  dans  toute 
la  Méditerranée  et  au  Sénégal. 

Fossile  en  Italie,  en  Sicile,  en  Morée,  en  France,  à Perpignan  et  dans 
le  crag  d’Angleterre. 

Cette  espèce , comme  le  Cytherea  erycina , a été  le  sujet  de  quelques 
erreurs.  Il  est  certain,  par  exemple,  que  l’espèce  de  Wolhynie  à laquelle 
M.  Dubois  donne  ce  nom  méritait  d'être  distinguée,  ainsi  que  Fa  fait 
M.  Andrzejouski.  11  y en  a une  autre  à laquellle  M.  Agassiz  propose 
d’imposer  le  nom  do  Cytherea  lœvis.  C'est  à celle-là  qu’il  rapporte  le  chione 
de  Brocchi,  insinuant  par  là  que  le  véritable  chione  ne  se  trouverait  pas 
dans  le  terrain  subapennin.  Nous  pensons  que  pour  cette  espèce,  ainsi 
que  pour  l’erycma,  M.  Agassiz  n’a  pas  eu  à sa  disposition  des  matériaux 


LES  (;o>;l>les. 


>99 


suffisants;  car  sur  huit  à dix  individus  du  Ctjtfwrca  chione  de  la  Médi- 
terranée, mais  recueillis  dans  des  lieux  différents,  il  y en  aura  au  moins 
un,  quelquefois  plusieurs,  qui  offriront  tous  les  caractères  du  Ctjtherea 
iœvis,  c’est-à-dire  qu’ils  auront  sur  le  côté  antérieur  ou  sur  le  posté- 
rieur des  sillons  distants  plus  ou  moins  saillants.  Quant  aux  autres  ca- 
ractères empruntés  à la  charnière,  aux  impressions  des  muscles  et  du 
manteau,  il  y a une  ressemblance  exacte  entre  tous  les  individus  vi- 
vants, et  si  l'on  compare  entre  eux  un  grand  nombre  d'individus  fossiles, 
on  leur  trouvera  les  mêmes  variétés;  enlin,  la  comparaison  des  deux 
séries  prouvera  qu'elles  appartiennent  à un  seul  type  spécifique,  con- 
servant son  unité  dans  sa  variabilité  assez  restreinte. 

Quelques  naturalistes  ont  cité  le  Cytherea  chione  dans  les  mers  du 
Brésil  et  sur  les  côtes  de  la  Martinique.  Nous  avons  des  individus  de 
ces  localités  : ils  diffèrent  peu  en  apparence  du  chione^  mais  ils  s’en  dis- 
tinguent constamment  par  la  charnière , la  grandeur  et  la  forme  de  la 
sinuosité  palléale.  Ainsi,  le  Ctjtherea  chione  est  une  espèce  européenne  , 
qu'on  la  considère  à l’état  vivant  ou  à Télat  fossile.  Elle  a été  mentionnée 
dans  les  étages  moyen  et  supérieur  du  terrain  tertiaire.  Elle  existe  en 
effet  dans  le  crag , d’après  M.  S.  Wood;  néanmoins  son  abondance 
dans  l’étage  tertiaire  supérieur  la  rend  propre  à le  caractériser.  Il  existe 
dans  les  environs  de  Bordeaux  et  dans  les  faluns  de  la  Touraine  une 
espèce  très  voisine  de  celle-ci.  M.  Dujardin  a reconnu  entre  elles  des 
différences  constantes,  et  il  a désigné  l’espèce  en  question  sous  le  nom 
de  Cytherea  affims.  Si  les  observations  précédentes  sont  fondées,  nous 
ne  devons  pas  accepter  le  Cytherea  chione  tel  que  l’admet  M.  Bronn 
dans  son  Lethea  geognostica;  une  partie  de  la  synonymie  doit  être  re- 
jetée, et  la  distribution  de  l’espèce  subit  par  là  une  modification  impor- 
tante, car  elle  reste  dans  les  terrains  supérieurs,  et  ne  descend  plus 
dans  l’étage  moyen. 

4®  Cytherea  rudis,  Poli  (venetiana  ^ Larak.). 

Vivante  dans  toute  la  Méditerranée. 

Fossile  en  Sicile,  eu  Italie , en  Touraine  et  dans  le  crag  d’Angleterre 
et  de  Belgique. 

Actuellement  confinée  dans  la  Méditerranée,  cette  espèce  occupail 
autrefois  une  bien  plus  vaste  étendue  ; elle  s'avançait  beaucoup  plus  vers 
le  Nord,  puisqu’elle  est  fossile  en  Belgique  et  en  xVngleterrc.  Ce  fait, 
ainsi  que  plusieurs  autres  qui  ressortent  des  renseignements  que  nous 
inscrivons  dans  cet  ouvrage,  prouve  que  la  température  était  plus  élevée 
qu’aujourd'hui  dans  les  lieux  où  sont  actuellement  déposés  les  crags 
d'Angleterre  et  de  Belgique. 


«jüiNziEMK  Famille. 


^)0(> 

Nous  l’estiliiuiiri  à celle  espèce  son  premier  nom,  que  Lamarck  n’au- 
rail  pas  di\cbaugef,  et  nous  ajoutons  à sa  synonymie  le  Gytherea  cycla- 
diformts  do  M.  Nysl:  nous  avons  sous  les  yeux  cette  dernière  espèce,  et 
elle  ne  diffère  en  rien  de  son  type  vivaht. 

0“  Cijlherca  minima,  Montagu.  ‘ 

Vivante  dans  l’Océan  d’Europd,  la  Méditerranée. 

Fossile  en  Sicile,  en  Podolie  et  dans  le  crag  d’Angleterre. 

Sous  le  nom  que  nous  venons  d’inscrire,  Montagu  a décrit  le  premier 
cette  petite  espèce  de  CytEérée.  M.  Scacchi,  en  la  découvrant  dans  le 
golfe  de  Naples  , la  crut  nouvelle , et  lui  imposa  le  nom  de  Cylherea 
Cyrilli,  qui  fut  presque  géncraleiïient  adopté*.  Entin  M.  Andrzejouski, 
Payant  observée  à l’état  fossile  dans  les  sables  de  la  Podolie , crut  voir 
en  elle  une  Aslarté  à laquelle  il  donna  le  nom  d'Astarte  Puschii.  M.  Phi- 
lippi,  dans  le  premier  volume  de  son  E numération molluscorum  Siciliœ, 
la  crut  également  nouvelle,  et  la  nomma  Gytherea  apicalis,  nom  qu’il  a 
abandonne  depuis. 

6“  Cylherea  multilamella,  Lamk. 

Vivante....  dans  la  Méditerranée*? 

Fossile  eu  Sicile,  en  Italie,  à Pile  do  Rhodes,  en  Céphalonie,  dans 
1 étage  tertiaire  supérieur. 

A Vienne,  en  Podolie,  dans  l’étage  tertiaire  moyen. 

Nous  possédons  l’analogue  vivant  du  Cytherea  multHamella  de  La- 
marck; malheureusement  nous  ne  savons  do  quelle  mer  il  provient  ; 
nous  le  soupçonnons  de  la  Méditerranée,  parce  que  l’espèce  se  retrouve 
jusque  dans  les  terrains  les  plus  récents  sortis  de  cette  mer. 

Nous  avons  vu,  dans  notre  examen  du  I Vnus  ruyosa^  la  confusion  qui 
s'est  établie  au  sujet  de  cette  espèce.  Cette  coquille,  portant  à la  char- 
nière une  dent  latérale  antérieure,  doit  venir  se  ranger  parmi  les  Cy- 
thérées,  et  le  premier  nom  qu’elle  a reçu  est  celui  que  lui  a imposé 
Lamarck,  et  qui  devra  lui  rester.  Nous  avons  sous  les  yeux  des  échan- 
tillons de  toutes  les  localités  que  nous  citons , et  nous  avons  par  là  la 
preuve  de  l’apparition  de  l’espèce  dans  Pétage  moyen  des  terrains  ter- 
tiaires, de  son  passage  dans  Pétage  supérieur,  et  de  sa  persistance  dans 
la  nature  actuelle.  Au  reste,  plusieurs  des  espèces  mentionnées  précé- 
demment se  trouvent  dans  de  semblables  conditions, 

7"  Cytherea  gigantea,  Lamk. 

Vivante  dans  le  golfe  du  Mexique. 

Fossile  dans  les  terrains  tertiaires  du  sud  de  l'Amérique  septen- 
trionale. 


LES  CONQUES.  6oi 

Nous'  n'avons  pas  vu  des  individus  fossiles  de  celle  espèce,  nous  la 
rapportons  ici  d’après  les  indications  de  M.  Morton. 

Un  assez  grand  nombre  d’espèces  de  Cÿlhérées  ont  été  signalées  dans 
les  terrains  tertiaires  de  l’Amérique  septentrionale.  Nous  en  relevons 
quatorze  ; il  y en  a probablement  davantage.  Nous  ne  connaissons  pas 
leur  distribution  dans  les  couches  dans  l'ordre  de  leur  superposition. 

1.  Cythérëe  fauve.  Cytherea  chione,  Lamk. 

PL  19.  f.  4.  5. 

C.  Testa  ovato-transversâ^  suheordata^  Icevigatà,  fulvâ  snbradiatâ  ^ 
lul  apicem  maculatâ  ; lunuîâ  ovntO’-lanceolatn  ^ nibro-îividâ;  anticè 
posticève  obsolète  suîcatii;  siriii  pallii  lato,  adjàpicem  coarctato  ^ 
acumiifaco. 

Lister,  Concli.  pl.  abi).  f.  io5? 

Bonan,  Recr.  a*  part.  f.  64,  65. 

Gualt.  Ind.  Test.  pi.  86.  f.  A. 

D’Arg.  Couch,  pl.  a4.  f.  C, 

yetms  chione,  Linné,  Syst.  liai,  éd,  10.  p,  686.  n®  160, 

Id,  Mus.  Ulcic.  p.  5oo.  n”  58, 

Uegenf.  Conch.  pl.  8.  f.  17. 

Linné,  Syst.  nal.  èJ.  la.  p.  n“  laS. 

Xnorr,  Vergn.  t.  6.  pl.  4.  f.  i. 

Ginanui,  Oper.  posl.  l.  a,  pl.  aa.  f.  148. 

Da  Costa,  Brith.  Concli.  p.  184.  pl.  14.  f.  7,  Pectunculus  major, 
y enns  chione,  jBorn,  Test.  Mus.  p.  63. 

Id.  Groiiov.  Zoophyl.  p.  269.  n'^  1145. 

Peniiaut,  Brit.  Zool.  l,.  4.  p.  206.  pl.  54.  f 2. 

Id.  Chemn.  Conch.  t.  6.  p.  345.  pl,  3a.  f.  843. 

Id.  Sclirot.  EiuL  t,  3.  p,  124. 11“  14. 

Id,  Gniel.  p.  3272.11®  16.  yarietatibus  exiliisis. 

Fav.  Conch.  pi.  47.  f- B, 

Poli,  Testac.  Sicil.  t.  2.  pl.  20, 

Encycl.  méth.  pl.  266.  f.  i. 

yenus  chione»  Douovan,  Brit^  shells,  t.  i,  pl.  17. 

Li,  Moiitagu,  Test.  Brit.  p.  ii5. 

Wood,  Liti,  Traiis.  l.  6.  pl.  17.  f.  r,  2. 

Id,  Mat.  et  Rack.  Lin.  Traus.  t.  8.  p.  84. 

Dillw.  Cat.  t.  .1 . p.  178.  n®  45. 

Cytherea  chione,  Lamk.  An,  s.  vert.  t.  5.  p.  566,  u®  22. 


QUINZIÈME  FAMILLE, 


f 'cnusfativi;,  Blainv.  Malac.  pl.  74.  f.  5. 

Risso,  Eurnp.  niérid,  t,  4.  p«  354=  9^5. 

Cytherea  chione,  Turlon,  Conch.  Dicl.  p. 

Jd.  Turtoii,  Coucli.  Brit.  p.  160.  n®  i.  pl.  8.  f.  11. 
frémis  chione,  Gerv.  Cal.  des  Mol!,  d^e  la  Manche,  p,  aS.  n“  C. 
Cytherea  chione,  Payraud.  Cat,  des  Moll,  de  Corse,  p.  47.  n°  77. 
Wood,  Ind.  Test,  pl.  7.  l.,44. 

Coll,  des  Cil,  Cal.  des  Miill.  du  FitiisU  p.  22,  n®  r. 

Oesh.  h!ury.  luélh.  Vers.  t.  2.  p.  5G.  n®  ii. 

Oesh.  Expéd.  sc.  de  Morée.  Zool.  p.  96.  n”  42. 

Michaud,  Cat.  des  coi|.  d’Alger,  p.  44,  n'’  t. 

Desh.  dans  Latnk.  An.  s.  vert.  2«  éd.  t.  6.  p.  3o5.  n®  aa. 

Scacchi,  Cat.  Coiich.  reg.  Neap.  p,  7. 

Marav.  Mém.  pour  Phist.  nat.  de  la  Sicile,  p.  76.  n°  16. 

Philippi,  Emim.  Moll.  Sicil.  t.  i.  p.  40.  n“  i, 

KüsUt  dans  Chemn.  2®  éd.  p.  i3.  n“  7. 

Anton,  Ver/.eichn.  p.  7,  n"  262. 

Hauley,  Descr.  cat.  p.  98. 

Callow,  Conch.  nom.  p.  3;. 

Pot  et  Midi.  Cat.  des  Moll,  de  Douai.  I,  2.  p.  226.  n°  1 1. 

Thorpe,  Bril.  Mar.  conch.  p.  83. 

Phil.  Enum.  Moll.  Sicil.  t.  a.  p.  3t.  n°  i. 

Forhes,  Rep.  ou  OEg*  invert,  p,  144, 

Verani,  Cal.  degli  an.  invert.  p.  i3. 

Requien,  Cal.  des  Moll,  de  Corse,  p.  23.  n®  ga. 

Fossiiis,  Venus  chione.  Brocdii,  Conch,  subap.  t.  a,  p,  .'147.  11°  10. 
Cytherea  itaîica.  Def.  Dict.  sc.  nat.  t.  1 2, 

Bronn,  Ital.  terf,  Geb.  p 98.  n®  555. 

Scacchi,  Notize.  p.  20. 

Bronn,  Lelh,  Geogn.  t.  2.  p.  954.  n”  i.  pl.  38.  f.  3. 

Phil.  Enum.  Moll.  Bicil.  t.  i.  p.  41  ; L P*  32. 

S.  Wood,  Cat.  foss.  shdls  from  the  crag.  Ann,  nat.  hist.  t.  6.  p.  249. 
Morris,  Cat.  of  Brit.  fess.  p.  86. 

Sismonda,  Synop.  Ped.  foss.  p.  19. 

Agassiz,  Coq.  tert.  p.  45.  pl.  to.  f.  10.  i5- 
Broun,  Ind.  Palæoui.  t.  i p.  397.  Excl,  plur.  fyn. 

Habile  les  mers  tempérées  de  rEurope,  Imite  la  Méditerranée.  Fo.^sile 
dans  le  crag  d’Angleterre  et  dansiez  terrains  suhapemiîns  de!  Italie, 
de  la  Morée  et  de  la  France. 


LES  CONQUES. 


6o3 


Nous  avons  déjà  donné  précédemment  des  renseignements  sur  cette 
espèce.  Sa  distribution  dans  les  mers  actuelles  tendrait  à prouver  que 
le  crag  d'Anglèlerre , dans  lequçl  elle  est  citée  à l'état  fossile,  a été 
déposé  à une  époque  où  la  température  aurait  été  au  moins  égale  à 
celle  d’aujourd’hui , puisque  l'espèce  vit  encore  sous  les  mêmes  lati- 
tudes ; elle  ne  remonte  pas  très  loin  vers  le  Nord  ; elle  n’ost  pas  citée 
par  les  naturalistes  de  l’Irlande  et  de  l'Écosse.  M.  Lovèn  ne  la  men- 
tionne pas  non  plus  dans  ses  Mollusques  de  Scandinavie.  Vers  le  Midi 
nous  ignorons  où  elle  s’arrête.  Répandue  dans  toute  la  Méditerranée , 
aussi  bien  sur  la  côte  espagnole  que  sur  celle  de  Barbarie,  elle  doit  se 
continuer  dans  l'Océan,  de  chaque  côté  du  détroit.  Nous  la  voyons 
bien  arriver  dans  nos  mers , mais  nous  ne  savons  si  elle  gagne  les 
parages  plus  chauds  du  tropique.  Celte  espèce  étant  l'une  de  celles  dont 
l’analogie  peut  être  le  moins  contestée,  nous  avons  complété  sa  syno- 
nymie pour  en  faciliter  la  reclicrche  aux  personnes  qui  voudront  con- 
stater par  elles -mêmes  l’identité  des  individus  vivants  et  fossiles. 
L'espèce  est  du  reste  trop  connue;  elle  a été  assez  souvent  décrite  pour 
n’avoir  pas  besoin  de  l’être  une  fois  de  plus. 

2.  Cythérée  cedo-nulli.  Cytherea  erycina,  Lamk. 

PL  19.  f.  3. 

Venus  erycina,  Lluné,  Sysl.  nal.  éd.  lo.  p.  686.  n°  98. 

Lin.  Sysl.  uat.  éd.  la.  p.  i i3i.  n®  laa. 

Lister,  Concli,  pl.  a68,  f.  104. 

Kiiorr,  Vergu.  t.  4.  pl.  3,  f.  5. 

Gronov.  Zoopliyl.  p.  269.  n®  1143. 

Fav,  Coucli.  pl.  46.  f.  F,  a. 

Venus  cedo-nuUi.  Chemu.  Conch,  t.  6.  p.  334.  pl.  da.  f.  337. 

Venus  costata,  Chemn.  Conch.  t.  ii.  p.  226.  pl.  202.  f.  1975. 

Venus  ckinensis.  Chemn.  loc»  cit.  p.  227.  pl.  202.  f.  1976. 

Venus  erycina.  Schroet,  Einl.  t.  3,  p.  120.  u®  ii. 

Gmel.  p.  327 r.  Il®  t3. 

Encycl.  mélh.  pl.  264.  f.  2. 

Venus  erycina^  Venus  costata^  Venus  pacijica,  ÜilUv,  Cal.  t.  r.  p.  175. 

38,  3g,  40. 

Cytherea  erycina.  Lanik.  An.  s.  verl.  l.  5.  p.  564.  n'*  ï4‘ 

Woüd,  lud.  Test.  pl.  7.  f.  38,  39, 

Desh.  Encycl.  mélh.  Vers.  t.  2.  p.  55.  n®  9. 

Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  2*  éd.  t.  6 p.  3ü3.  if  14. 


QUINZIEME  FAMILLE. 


Anton,  Verzeiclj.  n.  7.  ii*’  264. 

Kü-ster  Hans  Clieni».  2^  cd.  p.  12.  pl.  i,  f.  3.  pi.  1.  f. 

Keeve,  Conth.  Syst.  l.  r.  p.  gS.  pl.  71.  f.  ,3. 

Hanley»  Desrr.  cat.  p;  97.  * ‘ 

Pot.  et  Midi.  Cat,  des  Moll,  de  Uouai.  l.  2.  p.  223.  u®  2. 

FosstUs.  Vénus  erycxna»  Rrocchi,  Conch.  foss.  siibap.  t.  2,  p.  548.  ' 

Cytherea  erycinoides.l.dt\s\\.,  Ann.  du  Mus.  t 7.  p.  i 35, 

Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  58i.  n°  t.  2®  éd.  t.  6.  p.  Bag. 

Cytherea  hurdigaUnsis.  Def.  Dict.  sc.  nat.  t.  12.  p.  422. 

Cytherea  erycîttoîdes.  Prong.  Tic,  pL  5.  f.  4. 

Pasl.  Foss.  de  Bord,  p,  8g.  n®  i. 

Grateloup,  Cat.  Zool.  p.  66.  n®  771. 

Broun,  Ital.  lert,  Geb.  p.  98.  n®  56i. 

Malh.  Cat.  mclh.  p.  i54.  n®  i3r. 

Agussiz,  Coq.  tert,  p.  42.  pl.  9.  f.  10  à 12. 

ün  phénomène  assez -remarquable  résulte  de  la  distribution  de  cette 
espèce,  soit  à l’état  fossile,  soit  dans  les  mers  actuelles.  En  effet,  le 
Cytherea  erycrna  se  montre  pour  la  première  fois  dans  l’étage  tertiaire 
moyen,  elle  remonte  dans  l’étage  supérieur;  mais  au  lieu  do  se  conti- 
nuer dans  les  mers  de  l’Europe , elle  en  disparaît  et  se  propage  dans 
les  mers  de  l’Inde;  elle  se  répand  dans  la  grand  Archipel  asiatique, 
et  ses  variétés  gagnent  la  Nouvelle-Hollande.  Elle  disparaît  des  mers 
de  l’Europe  à un  instant  déterminé  des  périodes  géologiques.  Elle  se 
trouve  encore  dans  les  argiles  et  les  sables  jaunes  d*ltalie,  mais  elle 
n’existe  plus  dans  les  terrains  plus  récents  de  la  Sicile;  elle  ne  se 
montre  nulle  part  dans  les  terrains  quaternaires.  Ce  fait  intéressant 
n’est  pas  le  seul  que  nous  aurons  à signaler  ; d’autres  espèces  ont  eu  le 
même  sort  que  celle-ci , et  l’ont  accompagnée  dans  sa  naissance  et  dans 
sa  disparition  des  mers  d'Europe.  Le  Cytherea  eryciiut  est  une  grande 
et  belle  espèce  rochercbée  à cause  de  la  richesse  de  sa  coloration  ; elle 
est  delà  grandeur  du  Cytherea  chione;  elle  a une  forme  semblable, 
mais  elle  est  sillonnée  sur  toute  sa  surface.  U y a des  individus  chez 
lesquels  les  sillons  sont  d’une  parfaite  régularité,  d’autres  où  ils  sont 
plus  ou  moins  larges,  d’autres  enfin  où  ils  ont  une  tendance  à s’effacer. 
Dans  toutes  ces  variétés,  on  retrouve  toujours  avec  constance  les  véri- 
tables caractères  spécifiques  de  la  charnière  et  de  l’impression  du 
manteau. 


LES  CONQUES. 


6o5 


3.  Cythérée  suberycinoïde.  Cyiherea  suherycinoides ^ Desh. 

PI.  19.  f.  6.  7. 

C.  Testa  o\.^ato-transversâ , suhdepressâ , regulariter  stilcoia  ; snîcis^ 
nnmerosis,  rotnndatiSi  profundis  ; lunulâ  mînirnâ,  lœvigatâ;  cardinè 
tridentatOy  dentibiis  divariàatis  ^ postico  h'tfidoy  lateraîi  imnimo. 

Desh.  Coq.  foss.  de  Paris,  t,  i.  p.  lag.  n"  a,  pl.  22.  f.  8,  9. 

Desh.  Encycl.  mélli.  Vers.  t.  2.  p.  60.  n®  27. 

Galeolti,  Geol.  du  Brab.  p.  iSg,  n”  i54. 

Pot.  et  Mich.  Cat,  de  Douai,  t.  a.  p.  229,  n®  27. 

Nyst,  Foss,  de  P»elg.  p.  168.  n“  125.  pl.  ii.f.  4. 

Morris,  Cat.  of  Brit.  }üss.  p.  87. 

Habite Fossile  dans  le  bassin  de  Paris,  à Parues,  à Mouchy,  dans 

calcaire  grossier;  à Talmondois , dans  les  sables  marins  moyens.  Elle 
est  également  en  Belgique  et  en  Angleterre. 

Celte  espèce,  rare  jusqu’ici  dans  le  bassin  de  Paris,  est  l’une  de 
celles  qui  méritent  une  attention  particulière,  parce  qu’elle  caractérise  la 
première  période  tertiaire , se  trouvant  à la  fois  dans  les  trois  princi- 
paux bassins  où  sont  déposés  les  terrains  de  cette  période.  Nous  avions 
d'abord  cru  que  notre  espèce  du  calcaire  grossier  remontait  dans  l’étage 
tertiaire  moyen  de  Bordeaux , de  Dax  , mais  il  n’en  est  rien  ; la  coquille 
de  Bordeaux  est  une  variété  toujmirs  plus  petite  et  à sillons  plus  étroits 
du  Cytherea  erycina.  Dans  le  bassin  de  Paris,  le  Cyiherea  erycinoides 
passe  du  calcaire  grossier  dans  les  sables  marins  moyens;  là  elle  ren- 
contre une  espèce  qui  lui  ressemble , mais  qui  est  toujours  distincte  .par 
sa  taille  plus  petite , la  largeur  de  ses  sillons , leur  aplatissement  et  une 
forme  plus  triangulaire. 

4.  Cythérée  albine,  Cyiherea  albina?  Lamk. 

Pl  20.  f.  1.  2.  3. 

C,  Testa  ovatotrigonn , subcordatâ , transversim  tenue  et  irreguîariter^ 
striata,  inœquUaterâ  ^ aîbâ , 'vel  alternatim  rufo  transversim  laie 
zonatâ;  umbonibus  tumidis;  lunulâ  cordiformi  'vix  perspicuâ, 

Lamark.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  567.  n®  25, 

Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  2*  éd.  t.  6.  p.  307.  n”  25, 

Delessert,  Rec.  de  coq.  de  Lamk.^d.  S.  f,  5? 

Hanley,  Descr.  cat.  p.  99.  ^ 

Callow,  Conch.  nom.  p,  36. 

Habite  vivante  au  Sénégal.  Fossile  à Bordeaux,  à Dax  et  dans  les  falnns 
de  la  Touraine. 


6o(i'  QUINZIÈME  FAMILLE. 

Nous  avons  déjà  parlé  précédemment  de  celle  espèce  intéressante  ; 
elle  est  une  de  celles  qui  indiquent  les  rapports  de  la  faune  de  Tétage 
tertiaire  moyen  avec  celle  qui  vit  encore  au  .Sénégal.  Ce  qui  est  sur- 
tout à constater,  c'est  que  les  individus  vivants  ne  dépassent  pas  la  zone 
équatoriale  ; elle  est  donc  une  de  ces  espèces  qui  accusent  la  tempé- 
rature des  lieux  qu'elles  habitent  : la  retrouver  fossile  à Bordeaux , à 
Dax  et  dans  les  faluns  de  la  Touraine , c’est  justifier  l’opinion  que  nous 
avons  publiée  autrefois,  que  la  température  qui  régnait  au  moment  où 
se  déposaient  les  terrains  du  bassin  de  TAdour  était  dans  ces  lieux 
égale  à celle  du  Sénégal,  et  nous  verrons  d’autres  espèces  s'ajouter  à 
celle-ci  et  corroborer  ainsi  notre  assertion. 

Le  Cythcrea  n/fama est  une  coquille  trigone , suhoordiforme , épaisse, 
inéquilatérale,  d’un  blanc  mat  et  opaque,  interrompu  pardes zones  trans- 
verses tantôt  pâles  et  diaphanes , tantôt  rousses  ou  jaunâtres.  Les  indi- 
vidus fossiles , plongés  dans  l’eau , montrent  des  traces  des  zones  colo- 
rées qui  existent  dans  les  individus  vivants;  toute  la  surface  est  cou- 
verte de  stries  extrêmement  fines,  serrées,  qui  font  refiéler  la  lumière 
d’une  manière  particulière , aussi  bien  sur  les  individus  vivants  que 
sur  les  fossiles.  Les  crochets  sont  grands , protubérants  et  obliquement 
inclinés  au-dessus  d’une  grande  lunule  ovalaire,  nettement  circonscrite 
par  une  strie  ; dans  le  milieu , cette  lunule  est  légèrement  gonflée  à 
l’endroit  qui  correspond  à la  dent  latérale  antérieure.  Le  côté  dorsal  est 
convexe,  il  est  creusé  d’une  rainure  assez  profonde,  dans  laquelle  se 
loge  le  ligament;  la  dent  latérale  antérieure  est  conique,  fort  saillante, 
obtuse  au  sommet  et  comprimée  à la  base;  la  sinuosité  palléaio  a de 
l’analogie  avec  celle  des  Grateloupiaf  en  cela  que  sa  base  est  très 
oblique  , qu’elle  est  étroite,  triangulaire  et  pointue  au  sommet. 

5.  Cythérée  citrine.  Cyiherea  citrina^  Lamk. 

PI.  18.  f.  11,  12.  13. 

C,  Testa  ovato-tri^onâ  ^ cordatâ  , tttinidây  citrinâ^  posticè  /iisco-rufes- 
cente  y transversim  ohsoletè  temiistrîata  ^ umbonihus  obîiqtiis  ^ ap- 
proximatts  ; lunuîâ  magna,  ovatâ,  angitîo  obsoletissimo  circumdatâ  ; 
'vaïmlis  inths  purpureo  rufescentibus, 

Lamk.  Au.  s.  vert.  t.  5,  p.  567.  n°  aS. 

Desh.  Encycl.  mélh.  Vers.  t.  2.  p.  5(1. 

De.sh.  dans  Laïuk.  An.  vert,  t,  6,  p.  3o6.  aS. 

Delessert,  Rec.  de  coq.  de  Lamk.  pl.  S.  f.  8. 

Hanley,  Descr.  cal.  p.  99. 


LES  CONQUES. 


607 


Catlow,  Concb.  nom,  p.  37. 

Wood',  Ind.  Conch.  iip.  Spl,  i3.  f.  a 3. 

Habite  les  mers  de  Nonvellc-IIollande. 

Nous  avons  quelques  variétés  du  Cythcrea  incrassata  des  sables 
supérieurs  de  Paris,  qui  ne  manquent  pas  4’dnalogie  avec  le  Cytherea 
citrina , qui  vil  actuellement  dans  les  mers  de  la  Nouvelle-Hollande. 
Cependant  les  deux  espèces  se  distinguent  nettement  aussi  dans  nos 
tableaux  des  espèces  analogues  des  terrains  tertiaires  ; nous  ne  Pavons 
admis  qu’avec  doute.  Le  Cytherea  cihina  est  une  coquille  subtrigone , 
très  inéquilatérale , oblique,  épaisse',  subcordiforme,  couverte  de  stries 
irrégulières  d'accroissement , obtuse  en  avant , un  peu  angdleuse  en 
arrière,  à bord  dorsal  convexe;  les  crochets  sont  médiocres,  très  rap- 
prochés; ils  dominent  une  grande  lunule  superficielle,  ovale,  limitée 
par  une  strie  è peine  apparente.  La  charnière  est  épaisse;  elle  porte 
trois  dents  à chaque  valve,  et  de  plus  une  dent  latérale  conique  très 
rapprochée  des  dents  cardinales;  la  sinuosité  palléale  est  petite,  un 
peu  plus  longue  que  largo  et  obtuse  au  somment.  Celle  coquille  est 
d’un  jaune  citron  pâle;  des  individus  sont  lavés  de  fauve  en  dedans  ; 
tous  portent  sur  l'extrémité  postérieure,  en  dedans  et  en  dehors,  une 
tache  d’un  brun  rouge  intense. 

6.  Cythérée  vénitienne.  Cy the^'ea  rudis ^ 

PI.  18.  f.  14. 

C.  Testa  nkiif/rtè  ^ cordatâ  , tumidn  . trunst>ershn  detisissimè  striqtâ 

X''  ^ ^ ...  ..  ^ 

TuJo-Jùlva^  albo-radiatâ  ^ 'vel  albà^  rujo  niaculnto-radiafq;  huniîà 
cordatd , wx  distinctâ. 

Cytherea  riulis.  Poli,.Te8lac.  Sicil.  t.  2.  p.  40.  pi.  20.  f.  i5,  16. 

Cythercu  ‘venetiana,  Lam.  An.  s.  veit.  t.  5.  p,  559.  11®  35. 

DcsU.  daiisLaïuk.  An.  s.,  vert.  2*éd.  t.  6.  p.  3io.  n®  35. 

Id.  Dflessert,  Rec.  de  coq.  de  Laipk.  pl.  9.  L 9, 

Id.  Hanley,  Descr.  cat.  p.  100. 

Catlüw,  Conch.  nom.  p.  40. 

Pliil.  Eiinm.  Moll.  Sicil,  1.  1.  p. 

Cytherea  rudis,  Phil,  loc.  cil.  t,  2.  p.  32. 

Fossiîis.  Cytherea  pectuncuhts.  Rrorclii,  Coiicli,  foss.  mbap.  t.  2.  p.  56o, 
pl.  1 3 f.  12. 

Cytherea  'venetiana,  Duj.  foss.  de  Tonraine.  p.  260.  n®  4. 

Id,  Scacchi,  Nolize.  p.  20.  n®  4 a. 

Id.  Sismouda,  Synop.  Ped.foss  p.  20. 


6o8 


QUINZIÈME  FAMILLE. 


Cytherea  ivdis.  Philippi,  Enum.  Moll.  Sicil.  t.  2.  p.  32. 

fU'nus  cycladiformis.  Nyst,  Foss.de  Belg.  p.  171.  n®  129.  pl.  12.  f.  3. 

An  Eadem  ? Venus  rudis.  PIill.  Foss.  de  Magdebourg.  Paléoul.  de  Meyer, 
p.  46.  26. 

Habile  vivante  dans  la  Méditerranée.  Fossile  en  Sicile  et  eu  Italie,  dans 
l’étage  tcj’tiaire  .supérieur;  eu  Touraine,  à Magdebourg?  et  dans  le 
crag  d’Angleterre  et  de  Belgique , dans  l’étage  tertiaire  moyen . 

Nous  restituons  à cette  espèce  le  premier  nom  qu’elle  a reçu  quoi- 
que ce  nom  soit  assez  impropre , puisque  en  réalité  cette  coquille  n’est 
ni  rude  ni  rugueuse,  mais  lisse  et  pourvue  de  stries  ou  de  rides  peu 
apparentes. 

Nous  voyons  surgir  celle  espèce  dans  l'étage  tertiaire  moyen , nous 
la  voyons  remonter  d’uji  degré  dans  le  crag  d’Angleterre  et  de  la  Bel- 
gique ; elle  se  continue  dans  les  terrains  tertiaires  supérieurs  de  l’Italie , 
se  montre  aussi  dans  ceux  plus  récents  de  la  Sicile;  et,  enfin,  nous  la 
retrouvons  dans  la  Méditerranée  : elle  est,  comme  on  le  voit,  moins  ré- 
pandue aujourd’hqi  qu'aulrefois , puisqu’elle  n’habite  plus  l’Océan. 

Ovale,  subtrigone,  cette  coquille  est  inéquilatérale,  assez  épaisse  et 
subcordiforme  ; elle  paraît  lisse , elle  est  brillante  ; vue  à la  loupe , elle 
est  couverte  de  stries  serrées  et  nombreuses  , obtuses  et  comme  écra- 
sées. Elles  n’ont  pas  une  régularité  parfaite  , il  y en  a d’interrompues, 
d’autres  anastomosées;  elles  s’effacent  vers  le  milieu  et  elles  reparais- 
sent , mais  plus  fines , sur  le  côté  postérieur.  En  avant , se  dessine  une 
grande . lunule  ovale , cordiforme , un  peu  déprimée  et  limitée  par  une 
strie  peu  apparenté.  L'impression  palFéale  est  peu  éloignée  du  bord  ; sa 
sinuosité  est  courte,  triangulaire,  un  peu  plus  longue  que  large.  Cette 
coquille  est  agréablement  colorée  de  rayons  et  de  taches  d’un  brun  roux 
sur  un  fond  blanc.  En  comparant  les  individus  fossiles  de  toutes  les 
localités  que  nous  citons,  nous  y avons  reconnu  quelques  variétés  peu 
importantes  parmi  lesquelles  se  range  le  Cxjlherea  cycladiformisûe'SYSl, 
qui  est  un  peu  moins  triangulaire. 

7.  Cythérée  deltoïde.  Cyiherea  deUoidea^  Lamk. 

Pl.  19.  f.  8.  9.  10. 

C,  Testa  ovato-trigond  , subœqtnUuerâ ^ subtilissimè  tiansversim  striatâ; 
lantiiâ  magna;  latere  antico  roUindato;  cardine  bidentato^  ahero 
(ridentato. 

Lamk.  Ann.  du  Mus.  t.  7.  p.  i35.  n®  8. 

Desb.  Coq.  foss.  de  Paris,  t.  i.  p,  i34.  n®  6.  pl.  20.  f.  6,  7.  pl,  22.  f.  12. 

Habite Fo.ssile  à Grignon,  HouJan,  Parne.s,  elr.,  raie,  grossier. 


LKS  CONQUES. 


Gmy 

Celle  espèce  est  Tune  de  celles  qui  caractérisent  le  mieux  le  calcaire 
grossier,  car  .elle  n’en  sort  pas;  nous  avions  cru  autrefois  pouvoir  y 
rapporter  avec  doute  le  Cxjtherea  lineolata  de  Sowerby,  mais  ayant  eu 
sous  les  yeux  cette  espèce  en  nature , nous  lui  avons  reconnu  des  ca- 
ractères spécifiques  qui  ne  permettent  pas  de  la  confondre  avec  celle 
de  Paris. 

Le  Cytherea  deltoidea  est  une  petite  coquille  Irigone,  subéqoilatérale, 
peu  épaisse,  à crochets  petits  et  peu  obliques  ; une  grande  lunule  finement 
striée  occupe  la  plus  grande  partie  du  côté  antérieur;  toute  la  surface 
est  couverte  de  stries  concentriques  fines  et  régulières  qui  s’élèvent  et 
se  rétrécissent  sur  le  côté  postérieur.  Deux  dents  sur  la  valve  gauche , 
trois  dents  petites  et  inégales  sur  la  valve  droite,  une  dent  latérale 
antérieure  petite,  mais  bien  détachée  de  la  charnière,  voilà  en  quoi 
consiste  la  charnière  de  cette  espèce  ; la  sinuosité  palléale  est  petite  , 
en  triangle  équilatéral. 

8.  Cythérée  élégante.  Cytherea  filegans^lLamk. 

PI.  19.  f.  11.  12. 

C.  Testa  ovato-orbictdatâ^  suhtrigonà  ^ depressd  ^ inœquilaterd  ^ trans- 
x'crsun  rcguîarher  snlcntd;  /tiniilu  ovalâ^  minimd, 

Lauik.  Anu.  ilu  Mih.  t,  7.  p.  i34,  n®  7 et  l.  12,  p(.  40.  f.  S, 

Tenus  elegnns.  Sow.  Min.*  fomh.  pi.  4^9..  l'.  3. 

Desli.  Coq.  l'os?,  de  Paris,  t r.  p,  t3a.  11®  H.  pl,  o.O.  f.  8,  9. 

Mürri>‘,  Cal.  of  Prit,  l'uss.  p.  S7.  " 

Espèce  très  commune  dans  le  bassin  de  Paris,  et  qui  paraît  égale- 
ment abondante  dans  celui  de  Londres.  Elle  commence  avec  le  calcaire 
grossier,  et  finit  avec  le  grès  marin  moyen;  elle  ne  parcourt  que  la 
partie  moyenne  de  la  première  époque  tertiaire,  sa  présence  n’étant  point 
constatée  jusqu’ici  dans  les  sables  inférieurs  du  Soissonnais,  ni  dans  les 
sables  supérieurs  de  Fontainebleau.  Par  sa  forme  générale,  elle  ressemble 
à la  précédente , dont  elle  se  distingue  par  des  sillons  transverses  beau- 
coup plus  gros  et  moins  nombreux,  d’une  grande  régularité.  Les  cro- 
chets sont  petits,  peu  obliques;  la  lunule  est  enfoncée,  petite,  ovale; 
la  charnière  porte  trois  dents  cardinales  inégales;  la  dent  latérale  est 
petite,  allongée,  comprimée  et  rapprochée  de  la  charnière;  le  sinus 
palléal  est  grand , profond  et  oblique.  Nous  pourrions  signaler  quel- 
ques variétés,  l’une  à stries  plus  fines,  l’autre  plus  épaisse  et  plus 
triangulaire , une  troisième  plus  aplatie;  mais  on  concevra  sans  peine 
qu’une  espèce  qui  passe  des  terrains  calcaires  dansi  des  sables  quart- 
T.  1.  'i**  PAUTlK.  ;»9* 


QUINZIEME  FAMILLE. 


6 1 0 

zeux  presque  purs  a dû  éprouver  les  efffets  d’un  changement  si  con- 
sidérable dans  les  conditions  de  son  existence,  et  elle  le  témoigne  par 
les  variétés  qu'elle  nous  montre. 


GENRE  CINQUANTIÈME. 

DOSIB7IE,  Dosinia  (Scopoli). 

Pl.  ao,  f,  6 à 1 3. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  subcirculaire , aplati , 
enveloppé  d’un  manteau,  dont  les  lobes  sont  désunis  dans 
toute  la  longueur  du  bord  inférieur  et  terminés  par  des  bords 
membraneux,  larges  et  faiblement  plissés.  Siphons  aussi  longs 
que  la  coquille,  égaux  en  longueur,  soudés  de  la  base  au 
sommet,  légèrement  comprimés  latéralement,  terminés  par 
une  ouverture  simple,  ovalaire.  Pied  grand  . subquadrangu- 
laire,  en  fer  de  hache.  Bouche  petite , ovalaire,  accompagnée 
de  palpes  labiales  longues,  étroites.  Branchies  très  inégales; 
les  feuillets  internes  très  grands,  subquadrangulaires  ; les  ex- 
ternes , de  moitié  plus  petits  , se  réunissant  en  arrière  de  la 
masse  abdominale 

Coquille  orbiculaire,  lenticulaire,  ornée  de  sillons  ou  de  stries 
concentriques.  Crochets  peu  proéminents  , obliquement  inclinés 
au-dessus  d’une  lunule  creusée , cordifonne  ; ligament  extërne 
en  partie  recouvert  par  le' corselet.  Charnière  assez  large, 
pourvue  de  trois  dents  cardinales,  divergentes,  ipégales , et 
une  dent  latérale  antérieure  dans  la  longueur  de  la  lunule  ; 
deux  impressions  musculaires  très  écartées,  l’antérieure  ova- 
laire, la  postérieure  subcirculaire.  Impression  palléale  courte, 
placée  très  haut  dans  l'intérieur  des  valves , et  terminée  en 
arrière  en  une  longue  sinuosité  triangulaire  très  pointue  au 
sommet  et  oblique  de  haut  eu  bas  et  d’avant  en  arrière. 


LES  CONQUES.  Oiï 

SYNONYMIE  générique.  — Pectunculus , Lister. — Coucha 
rotitnda^  Gualticri. — Vertus^  Linné,  Cheninitz , Schroeter, 
Gmelin  , etc.  — Artémis^  Poli,  Oken,  Conrad,  Philippi , 
Agassiz,  Nyst,  Blainville.  — Cyiherea^  Lainarck  , Sowerby, 
Menke,  Philippi,  etc.  — Orbiculus,  Megerle. 

OBSERVATIONS.  Dans  son  voyage  au  Sénégal,  Adanson  décrivit  avec 
soin  deux  coquilles  bivalves  orbiculaires  ; il  les  rangea  dans  un  genre 
assez  indigeste,  auquel  il  donna  le  nom  de  Chame.  sous  la  dénomination 
spécifique  de  Golan  et  de  Dosin.  Ces  deux  espèces  étaient  déjà  connues 
des  ai>ciens  conchyliologues  : on  en  voit  des  figures  dans  les  ouvrages  de 
Lister,  de  Petiver,  Gualtieri,  etc.  ; Linné  les  introduisit  dans  son  grand 
genre  Vénus,  d'où  Lamarcklesa  fait  sortir  pour  les  confondre  avec  ses 
Cythérées.  Une  autre  espèce,  plus  petite  que  les  deux  précédentes, 
vit  assez  abondamment  sous  les  plages  sableuses  de  ta  Méditerranée. 
Poli  eut  l’occasion  d’observer  l'animal , et  lui  ayant  reconnu  des  carac- 
tères propres,  il  fonda  pour  lui  un -genre  distinct,  auquel  il  donna  le 
nom  d'Artémis.  Mais  Poli  n'avait  pas  eu  connaissance  d’un  ouvrage 
publié rdix-sept  ans  avant  le  sien  par  Scopoli,  l’un  des  plus  judicieux 
naturalistes  du  dernier  siècle.  Dans  cet- ouvrage  , malheureusement  trop 
peu  répandu,  Scopoli  commence  déjà  à réformer  les  travaux  de  Linné. 
Dans  la  classe  des  Mollusques,  par  exemple,  il  propose  rétablissement 
d‘un  certain  nombre  de  genres,  parmi  lesquels  se  remarque  celui  qui 
porte  le  nom  de  Dosmï'a.  destiné  à rassembler  toutes  les  coquilles  qui 
ressemblent  au  Dosin  d’Adanson,  et  qui  comprend  par  conséquent 
toutes  celles  que  les  conchyliologues  depuis  Poli  ont  réunies  sous  le  nom 
d’Artémis.  Eu  appliquant  les  règles  imprescriptibles  de  la  priorité,  le 
genre  Dosmia  de  Scopoli  doit  venir  prendre  la  place  de  celui  nommé 
Artémis  par  Poli.  M Gray,  l’un  des  premiers,  a proposé  ce  change- 
ment de  nomenclature  que-  nous  nous  empressons  d’adopter;  car  il  con- 
tribue à rendre  justice  à un  naturaliste  des  plus  éminents  dont  les  sages 
réformes  et  les  excellents  préceptes  ont  précédé  de  quinze  à vingt  ans 
les  travaux  de. nos  grands  naturalistes  français  Bruguière,  Lamarck  et 
Cuvier. 

Un  grand  nombre  d’auteurs  restèrent  longtemps  attachés  aux  opi- 
nions de  Linné , et  pour  eux  les  coquilles  du  genre  DosUiia  restèrent  des 
Vénus.  Quoique  le  genre  de  Poli  fût  fondé  sur  des  observations  pré- 
cieuses de  ranimai,  son  genre  Artémis  fut  longtemps  oublié,  et 
presque  tous  les  conchyliologues  du  commencement  de  ce  siècle  reçu- 


QUINZIÈME  FAMILLE. 


ii  1 *2 

rent  l’opinion  de  Lamarck  : pour  eux  les  coquilles  du  genre  Dosinia 
restèrent  des  Cylhérées.  Probablement  avec  rinlenlion  de  compléter  la 
triade  générique  de  l'une  do  ses  familles*,  Oken,  dans  sou  Livre  de  la 
nature , introduit  le  genre  Artémis  à la  suite  des  Tellines  et  des  Vénus. 
Plus  tard,  Conrad,  dans  les  premières  livraisons  de  ses  Fossiles  de 
l'Amérique  septentrionale,  adopta  également  le  genre  de  Poli,  et  l’un 
des  premiers  en  France  nous  fîmes  sentir  l utilité  du  genre  dans  la 
deuxième  édition  des  Animaitx  sans  vertèbres  de  Lamarck;  et  si  dès  ce 
moment  nous  avions  connu  l'ouvrage  de  Scopoli , nous  aurions  adopté  le 
nom  générique  qui  lui  appartient , en  nous  servant  des  travaux  de  Poli 
pour  démontrer  rutilité  du  genre. 

Un  savant  observateur,  à Topinion  duquel  nous  aimons  à nous  ranger, 
M.  Recluz,  a publié  dans  le  Magasin  de  zoologie,  pour  1847,  des 
observations  intéressantes  sur  le  genre  Artémis  de  Poli , à l’occasion 
d'une  espèce  qu’il  propose  d'introduire  dans  le  genre  en  question.  La 
coquille  dont  M.  Recluz  voulait  faire  une  Artémis  présente  tous  les 
caractères  des  Vénus  : elle  n’est  point  orbiculaire  ; la  charnière  res- 
semble a celle  des  Pullaslra;  elle  est  supportée  par  une  lame  cardinale 
étroite,  et  elle  est  composée  de  trois  dents  cardinales  divergentes  qui 
ne  manquent  pas  d’analogie  avec  celles  de  quelques  unes  des  Vénérupes 
de  Lamarck.  C’est  principalement  la  forme  de  l’impression  palléale  qui 
a décidé  M.  Recluz  à introduire  sa  coquille  dans  le  genre  Artémis. 
Cette  impression  présente  en  arrière  une  sinuosité  oblique,  triangulaire, 
mais  obtuse  au  sommet  ; sinuosité  qui  rappelle  celle  de  quelques  Vénus 
et  qui  se  rapproche  également  de  celle  de  quelques  Pétricoles.  Si  l’on 
admettait,  avec  M.  Recluz,  cette  coquille  parmi  les  Artémis,  à l’in- 
stant même  la  valeur  du  genre  se  trouverait  profondément  modifiée,  et 
il  ne  suffirait  pas,  pour  le  rendre  naturel,  de  le  partager  en  trois  sections, 
comme  le  propose  M.  Recluz.  Au  reste,  le  naturaliste  dont  nous  par- 
lons a lui-même  donné  le  moyen  de  rectifier  son  opinion.  En  effet,  il 
décrit  l'animal  de  son  espèce,  et  cette  description  prouve  qu’il  n’appar- 
tient pas  au  genre  Artémis,  mais  bien  aux  Pétricoles  et  aux  Véné- 
rupes. Ainsi  que  nous  le  verrons  bientôt,  l’animal  des  Artémis  a les 
siphons  réunis  dans  toute  leur  longueur  ; l’ouverture  terminale  de  ces 
organes  est  toujours  simple.  Dans  l’animal  décrit  par  M.  Recluz,  au 
contraire,  les  siphons  sont  séparés  à leur  sommet  et  leur  ouverture  est 
garnie  de  membranes  et  de  tentacules.  Ce  fait  lui  seul,  constaté  par 
M.  Recluz,  décide  de  la  question  de  l’introduction  des  espèces  vénéri- 
formes  parmi  les  Artémis;  elles  doivent  être  définitivement  rejetées  du 

■ i 


genre. 


LES  CüJNQÜES. 


G 1 3 

Tel  que  nous  le  comprenons , le  genre  Üosinie  ne  renferme  que  des 
coquilles  orbiculaires  OL  lentiformes  ; toutes  aussi  sont  chargées  de  stries 
ou  de  sillons  concentriques  réguliers  , ce  qui  leur  imprime  un  caractère 
particulier  au  moyen  duquel  elles  se  groupent  et  - se  reconnaissent  avec 
facilité.  Cette  forme  orbiculaire  varie  très  peu  • si  certaines  espèces  sont 
un  peu  plus  larges  que  longues,  quelques  autres  en  vieillissant  devien- 
nent plus  longues  que  larges.  Les  Dosinies  ne  sont  point  globuleuses  ; 
plus  renflées  vers  le  centre,  elles  s’amincissent  à la  circonférence,  et 
les  crochets  eux-mômes  s’inclinent  et  se  rapprochent  pour  ôbéir  en 
quelque  sorte  a la  forme  lenticulaire,  qui  est  propre  à toutes  les  espèces. 

Presque  toutes  les  espèces  sont  blanches,  quelques  unes  sont  d'un 
brun  fauve  ou  tachées  et  rayonnées  de  cette  couleur;  l’espèce  la  plus 
répandue  dans  nos  mers  est  presque  la  seule  dont  les  variétés  de  colo- 
ration soient  nombreuses.  Ces  coquilles  , ainsi  que  les  Vénus  et  les 
Cythérées,  sont  couvertes  d’un  épiderme  vernissé,  transparent,  qui 
déborde  à peine  le  pourtour  des  valves. 

Le  test  est  assez  épais,  solide;  les  valves  ont  les  bords  simples  cl 
parfaitement  clos  sur  toute  la  circonférence.  Les  crochets  sont  médio- 
cres, peu  saillants;  ils  se  rapprochent  et  s'inclinent  obliquement  au- 
dessus  d’une  lunule  cerdiforme,  plus  ou  moins  grande  selon  les  espèces, 
presque  toujours  profonde , rarement  superfîciellq.  Le  corselet  est  peu 
marqué  ; il  est  creusé  d’une  gouttière  pour  le  ligament , et  celui-ci  est 
en  partie  caché  par  une  lèvre  saillante  appartenant  à chaque  valve. 

Toutes  les  espèces  , à l’exception  de  deux  ou  trois  , sont  blanches  en 
dedans-;  sur  la  surface  intérieure , se  dessinent  deux  grandes  impressions 
musculaires  qui  descendent  perpendiculairement  de  haut  en  bas,  c’est- 
à-dire  de  la  région  dorsale  vers  la  ventrale;  dans  leur  longueur,  ces 
impressions  dépassent  le  diamètre  iransverse  de  la  coquille.  L’impres- 
sion musculaire  antérieure  est  semi-lunaire,  rarement  ovalaire,  plus 
longue  que  large;  son  extrémité  supérieure  se  cache  sous  la  lame  car- 
dinale , et  c’est  au-dessous  de  cette  lame  qu’il  faut  aller  chercher  la 
petite  impression  ovale  et  profonde  du  muscle  rétracleur  antérieur  du 
pied . 

L’impression  musculaire  postérieure  est  ovale,  elle  tend  à s’arrondir 
dans  quelques  espèces  ; soq  extrémité  supérieure  se  détache  en  un  petit 
lobe  oval  ou  arrondi  : c’est  sur  lui  que  s’attache  le  musc  rétracleur 
postérieur  du  pied. 

Du  milieu  de  Texlrémité  inférieure  de  l’impression  musculaire  anté- 
rieure part  une  impression  palléale  très  courte,  située  très  haut  dans 
l’intérieur  des  valves , et  restant  parallèle  au  bord  inférieur  dans  tout 


6i4 


QUINZIÈME  FAMILLE 


son  trajet.  Parvenue  en  arrière , à peu  près  au  niveau  du  muscle  posté- 
rieur, elle  s'infléchit  en  dedans  et  trace  une  profonde  sinuosité  triangu- 
laire, oblique,  presque  toujours  pointue  au  sommet.  Cette  sinuosité 
constitue  l’un  des  caractères  les  plus  constants  du  genres  elle  varie 
selon  ks  espèces,  mais  dans  toutes  sans  exceplioiv  elle  conserve  sa 
forme  caractéristique. 

La  charnière  présente  aussi  des  caractères  constants  dans  le  genre 
qui  nous  occupe , quoiqu'ellô  ait  do  l'analogie  avec  celle  des  Cylhérées. 
Elle  s'en  distingue  au  premier  aspect , car  elle  est  supportée  par  une 
large  lame  cardinale  qui  ne  présente  pas  la  môme  grandeur  proportion- 
nelle dans  les  Cylhérées.  Cette  charnière  se  compose  de  trois  dents 
cardinales  sur  chaque  valve , et  de  plus  d’une  petite  dent  latérale  anté- 
rieure, comprise  dans  la  longueur  de  la  lunule.  Sur  la  valve  gauche  , la 
dent  cardinale  antérieure  est  très  aplatie.  lamelliforme,  en  triangle 
presque  équilatéral , pointue  au  sommet.  La  dent  postérieure  est  lon- 
gue. étroite,  tranchante  et  peu  proéminente;  enfin,-  la  dent  médiane 
est  épaisseet^imple.  Sur  la  valve  droite,  la  dent  antérieure  et  la  moyenne 
sont  très  rapprochées , parallèles,  peu  épaisses  ; elles  laissent  entre  elles 
une  fossette  étroite  et  profonde,- dans  laquiîlle  pénètre  la  dent  anté- 
rieure de  l'autre  valve.  La  dent  postérieure  est  grande , oblique , un  peu 
arquée  et  presque  toujours  bifide  dans  toute  sa  longueur.  La  dent  laté- 
rale est  moins  grande  que  celle  des  Cythérées  , elle  est  souvent  réduite 
à un  rudiment  placé  au-dessous  et  en  avant  de  la  première  dent  cardi- 
nale; elle  existe  sur  la  valve  gauche,  et  l’on  trouvé  !a  fossette  où  elle 
est  reçue  sur  la  valve  droite. 

Les  seuls  caractères  des  coquilles  tels  que  nous  venons  de  les  ex- 
poser justifient  suffisamment  le  genre  Dosinie  ; nous  allons  trouver 
dans  l'animal  d'autres  caractères  plus  importants  qui  le  séparent  nette- 
ment de  tous  ceux  qui  sont  connus. 

L’animal  des  Dosinies  est  orbiculaire  et  lenticulaire  comme  sa  co- 
quille; il  est  d'une  couleur  laiteuse  un  peu  jaunâtre  et  légèrement  dia- 
phane; son  manteau  est  constitué  comme  celui  des  Vénus  et  des 
Cythérées  : il  est  pourvu  à la  circonférence  d’un  bord  exsertilo  membra- 
neux , peu  plissé  et  entièrement  dénué  de  tentacules.  Les  lobes  du 
manteau  sont  disjoints  dans  toute  la  longueur  du  bord  inférieur,  depuis 
rextréraité  du  muscle  adducteur  antérieur  jusqu’à  fa  base  des  siphons. 

Lorsque  l’animal  donne  à ses  siphons  toute  l’extension  dont  ils  sont 
susceptibles,  leur  longueur  égale  ou  dépasse  un  peu  le  diamètre  dè  la 
coquille  ; réunis  dans  toute  leur  longueur,  ces  organes  sont  comprimés 
latéralement , et  le  point  de  leur  réunion  se  trahit  par  une  ligne  dépri- 


LES  CONQUES. 


fi  1 5 

mée  qui  les  parcourt  de  la  base  au  soniinel:  il  résulte  de  ce  mode  de 
jonction  que  leur  coupe  Lransversea  la  forme  d’un  S de  chiffre;  dans 
leur  ensemble,  ils  s’offrent  sous  la  forme  d’un  long  cône  tronqué  au 
sommet.  Ce  sommet  est  occupé  par,  l'ouverlure  terminale  des  siphons. 
Cette  ouverture  est  simple  dans  l'un  et  l’autre  de  ces  organes , elle  ne 
présente  aucune  trace  de  tentacules;  aussi  elle  ne  se  ferme  pas  par  une 
contraction  circulaire  à la  manière  d’un  sphincter,  comme  cela  a lieu 
chez  les  autres  mollusques,  mais  par  le  rapprochement  des  deux  parois 
l'une  vers  l’autre , en  laissant  entre  elles  une  fente  longitudinale.  Aussi 
l’ouverture  des  siphons  n’est  point  circulaire , mais  ovalaire  dans  la 
dilatation  , et  elle  se  ferme  à Taide  de  deux  lèvres  un  peu  arquées,  ün 
muscle  rétracteur  assez  considérable , triangulaire,  embrassa  les  deux 
siphons  à leur  base  : la  for.me  de  ce  muscle  est  exactement  représentée 
par  celle  de  la  sinuosité  palléale. 

Le  pied  est  un  peu  différent  de  celui  des  Vénus  et  des  Cythérées.  Il 
est  plus  dilaté  vers  le  bord  : ce  bord  est  taillé  en  fer  de  hache  ; en  avant  il 
se  prolonge  moins;  à la  base , il  est  séparé  de  la  masse  abdominale  par 
un  étranglement  plus  profond.  Cet  organe  est  très  aplati  de  chaque  côté, 
tranchant  sur  son  bord. 

Une.  bouche  petite,  ovale,  transverse,  pourvue  de  deux  petites 
lèvres  courtes  et  étroites,  s’ouvre  à la  partie  supérieure  et  antérieure 
de  la  masse  abdominale,  au-dessous  du  muscle  adclucteor  antérieur  des 
valves.  Les  lèvres  se  transforment  rapidement  en  deux  paires  de  palpes 
triangulaires,  plus  grandes  en  proportion  que  celles  des  Vénus  et  des 
Cylhérées,  mais  construites  exactement  de  même. 

Tout  en  restant  analogues  à celles  des  Cylhérées,  les  branchies  des 
Dosiniesendiffèrentcependant  d’une  manière  assez  notable  : ellessont  très 
inégales  ; les  feuillets  inlernos  sont  subquadrangulaires , et  leur  étendue 
est  plus  du  double  de  celle  des  feuillets  externes  ; ceux-ci  sont  en  forme 
de  trapèze,  et  ilà  sont  attachés  aux  feuillets  internes,  le  long  d'une 
ligne  qui  diviserait  ce  trapèze  par  son  grand  diamètre.  Il  résulte  de 
celte  connexion  qu’une  moitié  du  feuillet  remonte  librement  dans  la 
région  dorsale  en  forme  d'appendice  branchial.  Les  organes  do  la  respi- 
ration ont  leur  surface  creusée  de  nombreux  sillons  qui  correspondent 
aux  canaux  ménagés  au  liquide  ambiant  dans  l’épaisseur  même  des 
branchies.  En  arrière  de  la  masse  abdominale,  les  feuillets  branchiaux 
se  réunissent , se  prolongent  un  peu,  de  manière  à se  souder  au  pour- 
tour intérieur  de  Touverture  du  siphon  anal. 

n suffira  de  comparer  ce  que  nous  avons  dit  des  animaux  des  Cythé- 
rées  et  des  Vénus,  avec  ce  que  nous  venons  d’exposer  de  ceux  des 


^}\6 


O^NZIEMK  KAMILIJi. 


Üosinies,  pour  reconnaître  les  dilïerences  qui  existent  entre  eux.  Ces 
différences  se  montrent  dans  les  siphons  réunis  dans  toute  leur  lon- 
gueur et  complètement  dénués  de  tentacules  , dans  la  manière  dont  ces 
organes  se  ferment  par  le  rapprochement  de  leurs  parois  ; un  pied  plus 
dilaté,  moins  prolongé  en  avant,  plus  étranglé  à la  base;  des  branchies, 
plus  grandes  et  plus  inégales.  Les  ressemblances  sont  moins  nombreuses 
et  se  décèlent  dans  des  organes  moins  importants  : le  bord  membra- 
neux du  manteau , la  bouche  et  ses  palpes , le  cœur  et  son  renflement 
postérieur.  Ces  ressemblances  sont  cependant  suffisantes  pour  rattacher 
les  Dosinies  à la  famille  des  Conques  , comme  les  différences  suffisent 
aussi  pour  faire  maintenir  définitivement  le  genre  dans  une  méthode 
naturelle  et  le  séparer  pour  toujours  des  Vénus  et  des  Cythérées. 

Les  Dosinies  sont  des  coquilles  littorales  qui  vivent  à de  médiocres 
profondeurs  sur  les  plages  sableuses.  Ces  animaux  s’enfoncent  perpen- 
diculairement dans  le  sable  à Laide  des  manœuvres  de  leur  pied,  ma- 
nœuvres qui  ressemblent  à celles  des  Lavignons;  le  trou  qu’ils  se 
creusent  est  peu  profond.  Le  nombre  des  espèces  vivantes  que  nous 
connaissons  est  de  cinquante  environ.  Elles  proviennent  de  toutes  les 
mers,  mais  particulièrement  des  mers  chaudes  de  Llnde  et  de  LAmé- 
rique.  On  en  connaît  également  dans  le  grand  Océan  austral.  Les  mers 
de  l’Afrique  n’en  sont  point  dépourvues.  M.  Krauss  n’en  cite  point  au 
cap  de  Bonne-Espérance;  mais  Adanson  en  a fait  connaître  deux  du 
Sénégal , et  d’autres  espèces  y ont  été  découvertes  depuis.  Deux  espèces 
se  rencontrent  également  dans  les  mers  d’Europe , et  Lune  d’elles  sera 
signalée  plus  particulièrement  à cause  de  la  vaste  surface  qu*elle  occupe. 

Le  nombre  des  espèces  fossiles  est  beaucoup  moins  considérable  ; 
aucune  espèce  n’existe  d’une  manière  certaine  dans  les  terrains  infé- 
rieurs à la  formation  tertiaire,  et  môme  jusqu’ici  le  genre  ne  s’est 
montré  nulle  part  dans  Léiage  tertiaire  inférieur.  Il  apparaît  pour  la 
première  fois  en  Europe  dans  Létage  tertiaire  moyen , et  deux  espèces 
s’y  présentent  à la  fois;  une  troisième  espècq  surgit  dans  le  crag  d’An- 
gleterre ; une  quatrième , la  plus  grande  de  toutes  les  espèces  fossiles  , 
se  répand  dans  les  terrains  subaponnins  une  cinquième  est  propre  aux 
terrains  plus  récents  de  la  Sicile,  et  la  sixième,  enfin,  caractérise  les 
terrains  tertiaires  supérieurs  de  l’Amérique  septentrionale.  Parmi  ces 
espèces,  il  en  est  quelques  unes  qui  méritent  un  examen  plus  spécial. 

1“  Dosinia  Adansoni  J Philippi. 

M.  Bastérot  le  premier  a rapporté  au  Cytherea  lincta  de  Lamarck 
une  coquille  fossile  de  Bordeaux  qui  a avec  la  vivante  la  plus  grande 
analogie.  Celle  analogie  est  tellement  frappante,  qu’elle  a^  été  admise 


LKS  COXyUKS. 


par  tous  ceux  des  cpnchyliologues  qui  se  sont  occupés  de  la  matière  ; 
iious-même,  entraîné  par  l’opinion  commune,  nous  rangions  sous  le 
nom  de  Cijtherea  lincta , et  à titro  do  variétés,  des  individus  des  mers 
d’Angleterre,  de  la  Méditerranée  et  du  Sénégal , et  comme  nous  trou- 
vions des  variétés  fossiles  correspondantes , nous  leur  appliquions  égale- 
ment le  môme  nom.  Déjà,  en  1835i  nous  avions  conçu  des  doutes 
sur  l’idenlilé  do  plusieurs  de  ces  coquilles,  et  l'étude  que  nous  fîmes 
en  4 840  des  trois  espèces  de  la  Méditerranée  nous  fit  sentir  la  néces- 
sité de  revoir  avec  un  nouveau  soin  les  espèces  fossiles.  11  est  résulté , 
de  cet  examen  , la  disjonction  de  trois  types  vivants , ayant  leurs  repré- 
sentants parmi  les  espèces  fossiles  : D’abord  un  Dosinia  lincta , que 
nous  décrivons  plus  loin;  ensuite  un  Dosinia  lupinus^  nommé  aussi 
Artémis  Philippii  par  M.  Agassiz;  enfin,  un  Dosinia  Adansorii , propre 
au  Sénégal,  et  auquel  nous  rapportons  \q  Cytherea  fossile  à 

Bordeaux.  M.  Agassiz,  en  4 845  , a proposé  le  hom  ù' Artémis  Basle- 
roti,  pour  cette  dernière  espèce  i mais  ce  savant  a été  devancé  par 
M.  Philippi.  On  trouve,  en  effet,  dans  le  Rectieil  d'espèces  noitvelles , à 
la  date  de  4 844,  la  môme  espèce  sous  le  nom  de  Cytherea  Adansoni  : la 
priorité  veut  qu'il  soit  préféré. 

2“  Dosinia  exolela  , Lin. 

Vivante  depuis  le  cap  Nord  jusqu’au  Sénégal,  ainsi  que  dans  toute 
la  Méditerranée. 

Fossile  dans  l’étage  tertiaire  moyen  do  Bordeaux,  en  Touraine,  en 
Allemagne,  probablement  dans  le  crag  d’Angleterre  et  de  Belgique, 
dans  l’étage  tertiaire  supérieur  en  Angleterre  et  en  Sicile. 

3°  Dosinia  orhicnlaris , Agassiz. 

C est  le  Cytherea  concentrica  de  Brocchi.  Comme  cette  coquille  est 
différente  de  l’espèce  vivante  qui  porte  aussi  le  nom  de  concent7'ica, 
M.  Agassiz  s’esl  trouvé  dans  l’obligation  de  changer  son  nom  spéci- 
fique. Cette  espèce  se  rencontre  uniquement  dans  les  terrains  subapen- 
nins , et  elle  est  propre  à les  caractériser. 

4"  Dosinia  acetabulum  , Conrad. 

Celle-ci  avait  été  également  rapportée  au  concentrica,  elle  se  rap- 
proche davantage  du  yigantea  qui  vit  dans  les  mers  delà  Californie; 
elle  est  confinée  dans  l’étage  tertiaire  supérieur  de  l’Amérique  septen- 
trionale, et  peut  contribuer  à les  caractériser, 


QUINZIEME  KAMIULE. 


f>l8 

1.  Dosinie  concentrique.  Dosinia  concentnca^  Boni. 

PI.  20.  f.  6.  7.  8. 

D.  Testa  orùiculari^  depressn , Unu/onni  ^ candidat  nitidâ  ^ ^ptdef 
mide  pnllidè  straminco  vestitâ^  coficeTitncè  et  regulariter  itriuto- 
svlcatâ ; stifcis  depressts^  cenferùs;  lunuln  cordatà,  im pressa,  icevi; 
cardine  Imo  , dente  postico  i>alviilœ  dexlrcc  tw^usto  y ^nfnndè 
Ijifircato, 

Tenus  concentriva.  Boni.  Mus.  p.  71.  pl.  5.  f.  5.  Syn,  exclus, 

.Jn  eadem.  Cliemii.  Conçh.  t.  7.  p.  lo.  pl.  37.  f. 

Scluoet.  Einl.  t.  3.  p.  i35.  n*  3i. 

Gnjel.  p.  32B6.  Il*  82,  Exclus,  phir,  sjnon, 

Dillw.  Cal.  t.  I.  p,  196.  Qo  85.  Exclus,  pïur,  synon. 

Cytherea  concentrica.  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  573.  n*  5o.  Exclus, 
'var.  et  plur,  syn. 

Tenus  concentrica.  Wood,  Ind.  Test.  pl.  8.  f.  84. 

Cyth,  concentcjca.  Desh.  Eocycl.  nictii.  Yers.  t 2.  p.  58.  n®  21. 

Desh.  dans  Lamk.  An.  vert.  2«  éd.  t.  6.  p.  3i6. 11“  5o.  Exel.  pl.  syn. 

Artémis  concentrica.  Philippi,  Ahbild.  Concli.’  Cyth.  p.  5.  ri®  6. 

Habite  le  golfe  du  Mexique. 

Espèce  sur  laquelle  reste  encore  de  rincerLitude , malgré  le  grand 
nombre  des  naturalistes  qui  en  ont  fait  mention.  Malheureusement  la 
description  de  Born , l’auteur  de  l’espèce,  est  trop  courte  et  laisse  dans 
l'oubli  des  caractères  importants  dont  la  connaissance  est  indispensable 
à la  distinction  d’espèces  très  voisines  et  faciles  à confondre.  La  syno- 
nymie s'est  ressentie  de  celte  incertitude  et  do  l' incorrection  des 
figures.  Born,  le  premier,  a donné  l'exemple  de  cette  confusion  en 
rapprochant  des  figures  de  Lister  et  de  Petiver  qui  ne  représentent  pas 
son  espèce.  Ordinairement  plus  exgct,  Ghe.mnitz,  on  reproduisant 
l’espèce , en  augmente  la  synonymie  sans  la  rendre  beaucoup  plus 
correcte;  il  faut  cependant  lui  rendre  cette  justice,  qu’il  en  écarta 
celles  des  figures  trop  différentes  de  celle  de  Born.  Gmelin , Dtllwyn  , 
Lamarck  lui-même  adoptèrent  à peu  près  complètement  la  synonymie 
de  Chemnilz,  et  c’est  de  cette  manière  que  s'est  perpétuée  une  confu- 
sion à la  suite  de  laquelle  quatre  ou  cinq  espèces  sont  réunies  sons 
une  même  dénomination.  Brocebi , entraîné  par  l'exemple  de  ses  devan- 
cierSf  a rapporté  au  Venus  concentrica  une  grande  coquille  fossile  des 
collines  subapennines,  parce  qu'il  a trouvé  citée  dans  tous  les  auteurs 
une  figure  de  Gualtieri  qui  représente  grossièrement  l’espèce  fossile. 


LES  CONFITES. 


619 

D'autres  concliyliologues , plus  récemmen-t  encore,  ont  donné  sous  le 
nom  de  concentrica  d’autres  espèces.  11  ne  faut  pas  s’étonner  d’après 
cela  si  le  Dosûi/a  concentrica  est  cité  de  presque  toutes  les  merS , et 
fossile  en  Amérique  et  en  Italie.  11  faut  revenir  à la  figure  et  à la 
description  de  Born  pour  rétablir  l'espèce  dans  ses  Iimit.es;  et  alors 
rétendue  de  la  synonymie  doit  être  restreinte  à un  petit  nonibre  de 
figures , et  alors  aussi  disparaît  l’analogie  de  l’espèce  vivante  avec  une 
espèce  fossile  quelconque.  L’espèce  ne' vivra  plus  en  même  temps  au 
Sénégal , dans  l’Inde , à la  Noùvelle-Hollaiide  et  en  Amérique  ; elle  sera 
conûnée  dans  une  partie  considérable  du  golfe  du  Mexique,  aux  Antilles, 
et  le  long  de  la  côte  de  l'Amérique' septentrionale , Caroline,  Virginie  , 
Maryland. 

2.  Dosinie  exolète.  Dosiiiia  exoleta^  Lin. 

PI.  20.  f.  9.  10.  1]. 

D.  Testa  orhicuiari^  subœqttilaterti  ^ lentijçnni  ^ albidâ  ^ tnaculis^  lineis 
radtisve  ntjis  aut  roseis  pictq , concentricè  striata;  jtriis  iuœgua- 
Ubns,  snbdetritis  ; Itimdâ  parvây  impressâ,  profundâ  y lamtllnsâ. 

Lisler,  Concli.  pl.  291,  29^.  f.  127,  128. 

Petiver,  Oazoph.  pl.  9!.  f.  i5,  18. 

Giialt.  Indl.  pl.  75.  f.  F. 

Le  Cotan,  Adans.  Voy.  au  Séiipg.  p.  224.  pl.  16.  f,  4. 

Venus  exoleta.  Lia.  Sysl.  liai.  éd.  10.  p.  688.  n®  117. 

Linné,  Mus.  Ulr.  p.  5o6.  11®  70. 

Linné,  Fauna  suecica.  2®éii.  p.  519.  11“  2145. 

Linné,  Syst.  nal.  éd.  t2.  p.  ii34.  u®  142. 

Pectunculus  capiilacens,  Da  Cosla,  Conch.  Briî  p,  187.  pL  f2.  f.  5. 
Müller,  Züül.  Dan.  Prod.  p.  247.  ii**  2978. 

Venus  cxolcta.  Peiinaiit,  Zoo).  Pjiil.  l.  4.  p.  94.  pl.  54.  f.  49. 

Rorn.  Mus.  p.  73.  pl.  5.  f.  9. 

Chemn  Conch.  I.  7.  p.  180,  pl,  38.  f.  404. 

Fav.  Conch.  pl.  48.  f.  F.  i. 

Scliroel.  EinI,  I.  3 p.  142. 

Poli,  Test.  Sicil.  t.  2.  p.  98.  pl.  21.  f.  y,  10,  ri. 
misses,  Trav.  p.  485.  11“  i35. 

Gniel,  p.  3284.  t\^  75.  Exclus,  variet. 

Encycl.  iiiétii.  pl.  279.  L 5. 

Wüod,  Hi tiges  of  Bril.  hiv. slitlis.Liu.  Trarvs.  f.  6.  p.  167 . pl.  17  f.  9,  1 o . 
Donov.  Brit.  shells.  t 2.  pl.  42,  f.  i. 

Montagu,  Test,  Bril.  p.  1 16. 


620 


QUINZIEME  FAMILLE. 


Muluii  et  Kack.  Lin.  Trans,  t,  8.  p.  87.  pl.  3. 1.  i.» 

Dillw.  Cat.  I.  I.  p.  195.  u°  84,  * 

Lamk.  An.  s.  vert.  !.  5,  p.-572.  ii'*  48. 

Turlon,  Coiicli.  Dicl.  p.  a4t.  • 

Turtou,  Cüiich.  Riit.  (i.  itia.  pl,  8.  1‘.  7. 

Vythcrea  sinuata.  Tiuloii,  iüc.  vit.  p.  i63.  [j1.  10.  L xo,  ii.  ExcL  sfn. 
l'tnus  exolcta,  Blaioe,  Malac.  pl.  ^4  L 2. 

1(1.  GerviUe,  Cat.  des  coij.  de. la  Mauche,  p,  26,  ir  8. 

Cytheren  exoleta.  Payr.  Cat.  des  Moll,  de  Corâc.  p.  47.  ir  78. 

Wood,  Ind,  Test,  pl,  8.  f.  83, 

Coll,  des  Ch.  Cal.  des  Moll,  du  Finis.,  p.  22.  i»®  2. 

J^esh.  Encyel.  méth.  Vers.  t.  2.  p.  58.  n"  rp. 

Desh,  K.\p.  sc.  de  Morée.  p.  96.  n“  43. 

Ronch.  Chant.  Cat,  des  Moll,  du  Boul.  p.  21.  ii»  33. 

Desh.  dans  Lamk.  Au.  s.  Vert.  2*  éJ,  t.  6,  p.  3 14.  n"  48. 

Scacchi,  Conch.  regn.  Neap.  p.  7. 

Pliil.  Einini.  Moll.  Sicil.  t,  x.  p.  4r.  n"  4, 

Art'emis  exoJeta,  For  Le?.  Malac.  mon.  p,  5i.  xx®  1. 

Id.  Anton,  Verzeî  der  Concli.  p.  6.  11®  221. 

Marav.  Méra.  pour  l’Hisl.  nat.  de  la  Sic.  p.  76.  n"  X2.  ^ 

Jeffreys,  Cat.  of  Moll,  at  Oban.  Malac.  maij.  p.  43. 

Hanley,  Descr.  cat.  p,  loa. 

Kiisler  dans  Chemn.  2®  éd.  pl.  9.  f.  6. 

Thompson,  Rep.  ou  Fauna  uf  Irel.  p.  262. 

Pot.  et  Mich.  Moll,  de  Douai,  t.  2.  p.  225.  ;i'’  xo. 

Macgill.  Moll.  Aiii.  üI  Scoll,  p.  212.  i.  p.  262.  t ^ 

Thorpe,  Bril.  Mar,  Conch.  p.  84. 

Philippi,  Abbild.  Conch.  Cylh.  p.  5.  n'*  8. 

Phil.  Eiiumj  Moll.  Sicil.  t.  2.  p.  32.  n''4.* 

Cullow,  Conch.  nom.  p.  38.  n"  39. 

Lovèo,  Ind.  Moll.  Scand.  p.  89.  n'*  283. 

Requien,  Cat.  des  Moll,  de  Corse,  p.  23.  11'^  94, 

Agassiz,  Coq.  lert,  p.  20.  u®  3.  pl,  3.  f.  i5  à 17. 

FossiUs,  Dujardin,  Foss.  delà  Tour.  Mém.  de  la  Soc.  degéoi.  I,  2.  p.  260. 
Morris,  Cat.  of  Brit.  foss.  p,  78. 

Philippi,  Enum.  Moll.  Sicil.  l.  i . p.  42.  u°  4 ; t.  2,  p.  33.  n®  4t 
Brunu,  Ind.  Palæouî.  t.  i.  p.  104. 

Goldf.  Petrif.  Gernian.  l,  a.  p,  24iypt.  149.  L 18. 

An  luirietas  ? Arternis  lentijormis.  Woud,  Cal.  foss,  shells  li  om  the 
•7  crag,  Ann.  nat.  hist,  l,  6.  p.  aSo. 


LES  CONQUES. 


621 

Venus  ienfi/ormis,.^i)W,  Min,  Conc\).  pl.  at)3. 

Morrist  Cat.  of  Rrit.,  foss.  p.  78. 

Nyst,  Coq.  foss.  de  Belgique,  p.  184,  pl.  14.  f,  i. 

Habite  viva.nle  dans  les  mers  d’Europe,  la  Méditerranée,  le  Sénégal. 

Fossile  dans  l’étage  tertiaire  moyeu  à Bordeaux  , en  Touraine  , dans  le 
crag  d’Angleterre  et  de  Belgique,  dans  l’étage  tertiaire  supérieur  eu 
Angleterre  et  eu  Sicile. 

Dans  la  nature  actuelle  cette  espèce  occupe  un  espace  très  étendu. 
On  la  trouve  depuis  le  cap  Nord  jusqu’au  Sénégal;  dans  son  trajet,  elle 
entre  dans  la  Méditerranée,  et  s'établit  sur  presque  tous  les  points  de 
son  littoral.  Pour  sa  distribution  géographique , cette  espèce  imite  exac- 
tement le  Venus  ouata,  dont  nous  avons  parlé  précédemment.  En 
admettant  que  le  Venus  lentiformis  est  une  variété  de  Vexoleta , cette 
espèce  se  distribuerait  aussi  dans  les  terrains  tertiaires  de  la  même 
manière  que  la  Vénus  que  nous  venons  de  rappeler.  Elle  se  montre, 
pour  la  première  fois , dans  l’étage  tertiaire  moyen  ; elle  remonte  dans 
le  crag  d’Angleterre  et  d’Anvers , où  elle  subit  une  légère  modiûcalion 
dans  la  forme;  elle  gagne  les  terrains  tertiaires  supérieurs  ; et  , enfin  , 
elle  persiste  dans  nos  mers  où  elle  supporte  des  différences  considéra- 
bles de  température , puisqu'elle  commence  au  cap  Nord  par  72  degrés 
de  latitude  , et  vient  gagner  les  mers  du  Sénégal , vers  le  1 5®  degré , 
occupant  ainsi  une  ligne  presque  égale  au  quart  de  la  circonférence  de 
la  terre.  Dans  ce  long  trajet,  elle  subit  des  modiGcations  intéressantes 
dans  sa  forme,  dans  ses  couleurs.  C’est  à la  suite  de  l’étude  des  va- 
riétés principales  que  nous  rattachons  au  type  spécifique  le  Venus  Imitû 
formis  de  Sowerby.  Nous  retrouvons  à cette  coquille  les  caractères 
principaux  de  Vexoleta  ; la  forme  seule  est  un  peu  différente , elle  tend 
à s’élargir  obliquement,  et  jusqu’ici  nous  n’avons  qu’un  petit  nombre 
d’individus  vivants  dont  la  forme  se  rapproche  de  celle  des  fossiles 
du  crag. 

3.  Dosinie. brillante.  Dosinia  lincia,  Lamk. 

Pl.  20.  f.  12.  13.  - 

D.  Testa  orbicttlari , tumidâ^  i/iœi/nilnrerali , aibidâ,  immacuialâ , 
nitidUf  concentricè  striata;  striis  teniiissimis,  confertis^  regnîaribus  ^ 

. lœvibus  y anticè  posticèque  augustioribus  ^ lameîlœformibiis;  hinulâ 
' impressây  ovato^^acutâ  ^ scutiformi ^ striata  ; sinu  paîlii  angusto, 
apice  acuto  J vix  obliqua^  area  ligamefili  angiislâ , inx  excavata. 

Lister,  Conch.  pl.  290  f.  19.6. 

Venus  sinvatn,  Gmel.  p.  3285.  ti^  7^).  Pro  'vnr. 


622  Ql]lN7fÈMK  FAMILLE. 

yemis  exoUta  Pentianr,  Urit.  Zooî.  t.  4.  }»1.  5g.  f.  r. 

ycnus  Uncta.  Dorset,  Cat.  p.  35.pl.  t,  f.  i3. 

Femts  exoîeta  (-ynr).  Mat.  et  Rack.  Lin.  Trans.  t.  8.  p.  87^  pl.  3.  f.  2. 

i^enus  siniuita.  Tnrloii,  Conch.’  Dict.  p.  a *2. 11°  a4. 

Cytherea  lincta.  Latnk.  Au.  s.  vert,  t 5.  p.  575.  n"  49. 

Cytherea  sinuata  Tiirton  , Coneh.  lirit.  p.  x63,  Excl.Jîgiira  ei  pîeris- 
que  synonymis. 

— • y entts  exohta^  junior(in  parte),  Dillw.  Cal.  I.  t.  p.  r(>R. 

Venus  undata.  VVood,  loü,  Tesl.  pl.  S.  f.  87. 

Cytherea  Vincia.  Desl).  Lamk.  An.  s,  verl.  a*  éJ.  i.  6.  p.  3i5.  n**  49. 

Collard  de-s  Ch.  Cat.  d«s  coq.  du  Finisl.  p.  22.  n®  3. 

Pbiltppi,  Enum.  Moll.  Sic»},  l.  r.  p,  4r.  n“  5 {pro parte). 

Arternis  lincta.  Forbes,  Malac.  monens,  p.  5r,  n®  2. 

Cytherea  undata  Jeffreys,  Mar.  Mofl.  eVOhait.  Malac.  ma",  p.  43. 

,Hauley,  Descr.  cal.  p.  t02, 

Artémis  lincta.  Thompson,  Rep.  00  Fauna  of  Irel.  p.  262.  , 

Pot,  et  MicU.  MqU.  de  Doaai.  l.  2.  p.  aaS.  u®  19  (pro  parte). 

Margill.  MnlI,  an.  ofScotl,  p.  112  et  162, 

Thorpe.  Brit.  mar,  Coneb.  p.  84.  - • > 

. Pbii.  Abbild.  Comh,  Cyth.  p 5.  n®  9. 

Phil.  Eittim.  Moll.  Sicil.  t.  2.  p.  3i.  u®  5. 

Lovèn,  ïud.  Moll.  Scand.  p.  Sg.  11®  284,  ^ ^ 

, . Agassiz,  Mém.  sur  les  coq.  lert.  p.  22,  pl.  3.  f.  Il  à »4- 

F.ossilis.  Pbdippi,  Ëiuini.  Moll.  Sicil.  t.  i.  p.  4^.  n“  5;  l.  a.  p.  33'.  n“5. 

Artetnis  sinuata.  S.  WooJ,  Cal.  .«bclls  foss.  finun  tho  crag.  Ann.  nat. 
bist.  l.  6.  p.  aSo.  n®  a 

Habite  rOcéaji  d’Europe  , la  Méditerranée.  Fossile  en  Sicile. 

Depuis  que  nous  avons  reçu  des  mers  d’Angleterre  des  individus  vi- 
vants de  cette  espèce,  nous  avons  reconnu,  comme  M.  Agassiz,  qu’elle 
doit  être  séparée  de  VArlemîs  lupinus  de  Brocchi  , et  du  CyUterea 
lincta  de  Bastérot,  fossile  des  environs  de  Bordeaux.  Il  est  facile  de 
comprendre  que  l’espèce,  ainsi  restreinte,  n'a  plus  la  distribution  géo- 
graphique et  géologique  qui  lui  était  attribuée.  Néanmoins  elle  est  une  de 
ces  espèces  qui  vivent  depuis  les  mers  du  Nord  jusque  dans  la  Méditer- 
ranée; son  analogue  fossile  se  trouve  uniquenient  en  Sicile.  Parmi  les 
variétés  que  nous  rapportions  autrefois  au  Cytheren  lincta  de  Lamarck, 
il  en  est  une  qui  vit  au  Sénégal  et  qui  est  le  type  vivant  du  lincta  de 
Bordeaux  et  des  faluns  de  la  Touraine.  Quant  à /upmus  de 

Poli,  espèce  que  nous  considérions  aussi  comme  une  variété  du  lincta^ 


LES  CONQUES. 


623 


«lie  paraît  limitée  jusqu’ici  à la  Méditerranée,  et  son  analogue  fossile  se 
trouve  en  Morée,  en  Italie,  en  Sicile,  à Perpignan.  Celte  dernière  espèce, 
connue  déjà  sous  deux  noms,  en  a reçu  un  troisième  de  M.  Agassiz.  Ce 
savant  zoologiste  lui  a donné  le  nom  d'Ariemis  Philîppii,  n’ayant  pas  eu 
sans  doute  les  moyens  de  vérifier  sa  synonymie. 

Le  Dotiina  lincta  est  une  coquille  généralement  plus  petite  que  l’^xo- 
leta^  mais  qui  parfois  atteint  le  même  volume.  Elle  est  circulaire,  iné- 
quilatérale, assez  bombée;  ses  crochets  obliques,  peu  saillants,  dominent 
une  lunule  enfoncée,  ovale,  pointue,  en  forme  d’écusson  nettement  lir 
mitée  par  une  strie  profonde.  Celte  lunule  semble  lisse,  mais  vue  à la 
loupe  elle  présente  des  stries  fines  et  irrégulières.  Le  ligament  est  com- 
pris dans  un  corselet  étroit,  peu  marqué  et  faiblement  creusé  en  gout- 
tière. Toute  la  surface  est  couverte  de  stries  très  fines,  régulières,  lisses, 
aplaties,  très  serrées  et  renversées  de  bas  en  haut,  en  avant  et  en  ar- 
rière. Ces  stries  s'amincissent,  se  redressent,  deviennent  lamelliformes 
en  aboutissant  à la  lunule  et  au  corselpt.  La  lame  cardinale  est  assez 
épaisse;  la  dent  latérale  antérieure  est  grosse  et  obtuse;  la  dent  cardi- 
nale postérieure  est  étroite,  bifide  sur  la  valve  droite,  plus  mince  et 
simple  sur  la  valve  gauche.  La  sinuosi^  palléale  est  étroite  et  profonde: 
sa  direction  est  peu  oblique;  son  bord  supérieur  est  presque  dans  Taxe 
antéro-postérieur  de  la  coquille.  Quoique  le  Dosinia  lincta  soit  en  géné- 
ral d'une  plus  grande  taille  que  le  luphius,  on  a cependant  de  cette 
dernière  des  individus  à peu  près  aussi  grands , mais  ils  sont  moins 
convexes. 

GENRE  CINQUANTE  ET  UNIÈME. 

CircUNE.  Cyelina  (Desli.). 

PI.  r4  f.  20.  21.  22. 

CARACTÈRES  génértqües.  — Animal  inconnu. 

Coquille  orbiculaire  plus  ou  moins  convexe,- peu  épaisse, 
parfaitement  close  . à bords  simples  ou  finement  crénelés. 
Crochets  assez  grands,  obliques,  inclinés  en  avant;  point  de 
lunule.  Bord  cardinal  large , portant  trois  petites  dents  cardi- 
nales étroites,  divergentes,  inégales,  dont  la  postérieure  est 
canaliculée  ; point  de  dents  latérales.  Deux  grandes  impres- 


6'i4  QUINZIÈME  FAMILLE, 

sions  musculaires,  l’antérieure  ovale , la  postérieure- semi- 
lunaire  ; impression  palléale  courte , formant  en  arrière  une 
sinuosité  triangulaire  à sommet  aigu  et  oblique  de  haut  en  bas 
et  d’availt  en  arrière.  Ligamenf étroit,  très  allongé  et  en  partie 
caché  sous  le  bord  du  corselet.  . 

.SYNONYMIE  génériqve.  — Veuus  ^ Chemiiitz , Schroeter, 
Gmelin,  Dilhvjn. — Cyprina  '^  Lainarck. — Chama  [lefélan]^ 
Adanson. 

OBSERVATIONS.  Laniai'ck  rangeait  partni  les  Cyprines  une  coquille  qu’il 
avait  observée  dans  la  collection  de  M.  Dessance,  et  à laquelle  il  a im- 
posé le  nom  de  Cy^rinû  lenuistriaia,  quoiqu’elle  eût  été  figurée  et  dé- 
crite depuis  longtemps  par  Chemnitz  sous  la  dénomination  do  Fenu.s 
chinenm.  Celle  coquille  ne  peut  appartenir  au  genre  Cyprine,  et  il  suf- 
fira de  comparer  les  caractères  des  deux  genres  pour  s’assurer  que  le 
Venus  cliinensis  est  fort  éloigné  des  véritables  Cyprines.  Lorsqu'on 
vient  à rapprocher  celte  coquille  des  Vénus,  on  reconnaît  bientôt  qu'elle 
n‘a  pas  non  plus  tous  les  caractères  de  ce  genre  : une  forme  orbicu- 
laire  ne  so  montre  guère  dans  le*  genre  que  nous  citons;  elle  se  ren- 
contre , au  contraire , dans  un  genre  démembré  des  Cythérées , sous  le 
nôm  d’-4rlcmts,  par  Poli,  mais  antérieurement  sous  celui  de Dosm/a, 
par  Scopoli.  En  effet,  la  comparaison  du  Venus  chinensis  avec  les  v4r- 
temis  amène  à ce  résultat,  que  la  seule  différence  appréciable  de  quel- 
que importance  consiste  dans  l’absence  de  la  dent  latérale  antérieure, 
et  l’on  peut  dire,  en  conséquence,  que  le  Kmus  chinensis  est  par  rapport 
aux  Vénus  ce  que  les  Dosinies  sont  à l’égard  des  Cythérées. 

Ce  sont  ces  considérations  qui  nous  ont  engagé  à former  du  Kem/s 
chinensis  et  de  trois  ou  quatre  autres  espèces  qui  offrent  identiquement 
les  mômes  caractères,  un  genre  particulier,  pour  lequel  nous  proposons 
le  nom  de  Cyclina,  pour  rappeler  que  l'un  des  caractères  les  plus  saillants 
du  nouveau  genre  réside  dans  la  forme  orbiculaire  des  coquilles  qu’il 
renferme.  Notre  nouveau  genre  viendra  peut-être  se  confondre  par  la 
suite  avec  celui  des  Dosinies,  mais  celte  réunion  ne  pourra  s’opérer 
qu’au  moment  où  l’animal  de  l’une  des  espèces  étant  connu,  on  aura  pu 
établir  l’identité  de  ses  caractères  avec  ceux  des  Dosinies  de  tout  autre 
genre. 

Les  coquilles  du  genre  Cyctiha  sont  orbiculaires  , plus  ou  moins 
épaisses,  selon  les  espèces  : en  cela  elles  ressemblent  beaucoup  aux  Ar- 
témis; elles  sont  subéquilatérales,  cependant  le  côté  antérieur  est  un 


LES  CONQUES. 


peu  plus  court.  La  surface  extérieure  est  tantôt  lisse,  tantôt  couverte 
de  stries  concentriques.  Les  bords  sont  quelquefois  simples  et  tran- 
chants, quelquefois  finement  crénelés;  ils  se  joignent  parfaitement  sur 
toute  la  circonférence,  ainsi  que  cela  a lieu  du  reste  dans  toute  la  fa- 
mille des  Conques.  Les  crochets  sont  assez  grands,  obliquement  inclinés 
vers  le  côté  antérieur  et  très  rapprochés  entre  eux.  Des  trois  espèces 
vivantes  que  nous  connaissons,  une  seule  a la  lunule  circonscrite  par 
une  strie  superficielle  ; la  lunule  est  marquée  de  la  mémo  manière  dans  la 
seule  espèce  fossile  qui  nous  soit  connue. 

La  charnière  est  supportée  par  une  lame  cardinale  large  et  peu  épaisse; 
celte  charnière  consiste  en  trois  dents  inégales  sur  chaque  valve:  la 
dent  antérieure  est  presque  rudimentaire,  la  moyenne  est  la  plus  large, 
la  postérieure  est  la  plus  longue,  et  elle  est  faiblement  canaliculée  à son 
sommet.  En  arrière  de  cette  charnière  se  trouve  une  nymphe  fort  large, 
formant  en  dedans  un  plan  faiblement  incliné,  et  sur  lequel  s’attache  la 
partie  cartilagineuse  du  ligament;  un  sillon  étroit,  mais  profond,  donne 
insertion  à la  tunique  externe  ou  fibreuse  du  ligament.  Vers  l'extrémité 
postérieure  de  la  nymphe  et  près  de  la  terminaison  do  la  lame  cardinale 
elle-même,  on  remarque  sur  chaque  valve  une  légère  dépression  sem- 
blable à la  fossette  d une  dent  latérale  qui  aurait  avorté;  mais  cotte  dent 
latérale  n'existe  réellement  pas,  puisque  la  même  dépression  se  montre 
sur  l’une  et  l’autre  valve.  11  arrive  fréquemment,  soit  dans  les  Cyprines, 
soit  dans  les  Vénus  ou  les  Cythérées,  que  l’extrémité  antérieure  de  la 
nymphe  est  corrodée  à l'intérieur,  et  alors,  derrière  la  charnière,  se 
montre  une  cavité  plus  ou  moins  profonde  et  souvent  irrégulière.  La- 
marck  attachait  une  grande  valeur  à l’existence  de  cette  cavité,  car  il  la 
mentionne  parmi  les  caractères  génériques  des  Cyprines,  et  il  est  à pré- 
sumer qu’ayant  observé  une  semblable  érosion  dans  le  F<;nus  chmensis, 
c'est  par  là  qu’il  aura  été  entraîné  à placer  cette  coquille  dans  le  genre 
Cypriue. 

Les  impressions  musculaires  sont  grandes,  elles  s’allongent  assez  bas 
dans  la  région  ventrale  de  la  coquille;  ranlérieure  est  ovale,  étroite;  elle 
descend  perpendiculairement  dans  la  longueur  du  bord  antérieur,  son 
extrémité  inférieure  est  plus  élargie  que  la  supérieure*.  Celle-ci , en 
effet,  se  rétrécit  par  suite  de  sa  contiguïté  avec  une  petite  impression 
étroite  produite  par  le  muscle  rétracteur  antérieur  du  pied;  l’impression 
musculaire  postérieure  est  semi-lunaire. 

L’impression  palléale  est  très  courte,  elle  est  située  très  haut  dans 
l’intérieur  des  valves;  elle  quitte  l'extrémité  inférieure  du  muscle  anté- 
rieur, se  place  parallèlement  au  bord  ventral,  et,  parvenue  en  arrière, 
X.  1.  PARTIE.  40* 


6^6  QUINZIÈME  FAMILLE.  — LES  CONQUES. 

à peu  près  au  niveau  du  bord  interne  du  muscle  postérieur,  elle  s’in- 
fléchit en  dedans  et  décrit  une  sinuosité  triangulaire,  très  pointue  au 
sommet,  semblable  à celle  des  Dosinies,  mais  proportionnellement  plus 
petite. 

Jusqu'ici  noua  ne  connaissons  qu'un  petit  nombre  d’espèces  vi- 
vantes appartenant  au  genre  CycUna.  Elles  proviennent  des  mers  de 
rinde  et  de  la  Chine  ; il  y en  a une  qui  habite  les  côtes  de  la  Sénégam- 
bie.  C’est  elle  que  probablement  Adanson  a décrite  et  figurée  sous  le 
nom  de  Félan.  Aux  trois  espèces  vivantes  que  nous  connaissDns,  nous 
pouvons  en  ajouter  une  quatrième  fossile  qui  provient  des  environs  de 
Bordeaux.  Elle  est  des  plus  intéressantes  ; elle  est  très  aplatie,  ridée  trans- 
versalement, et  couverte  de  stries  divergentes  qui  rappellent  celles  du 
Cytherea  tesludimlis  ; mais  parla  charnière,  les  imjiressions  musculaires 
et  la  sinuosité  palléale,  cette  coquille  dépend  de  notre  genre.  Nous  pro- 
poserions pour  elle  le  nom  de  CycUna  Woodii , pour  rappeler  le  savant 
conchyliologue  qui  a consacré  un  grand  nombre  d’années  à la  recherche  et 
à l’élude  des  fossiles  du  crag  d'Angleterre. 

Cycline  chinoise.  CycUna  chinensis , Desh. 

PI.  14  bis.  f.  20.  21.  22. 

C.  Tcstd  otbiculari ^ subiongitndinali^  crassnftdvuy  intus  albà  e xthsque 
yiolaceo  :^onatâ\  transvenshn  tenuistrintà  y striis  miimfissimis  , ion- 
gitudinallbus  in  tnedio  obsoletis  dccHSsatâ;  apicibusinolactis^  tnmidis; 
marginibus  creniilatis ; dun  pallii  trigono^  obliquoy  ncnto^  sulueyui- 
laterali, 

f'eniis  chinensis.  Chemn.  Concli.  t.  lo.  p.  356.  pi.  17  r,  f.  i663. 

l'entis  sinensis.  Omel.  p.  32^5.  ii'»  91. 

Venus  chinensis.  iJÜhv.  Cat.  I.  i . p.  192.  n®  77. 

Cyprina  lemixsiria.  Lamk.  Au.  s.  vert.  l.  5.  p.  .558.  n®  6. 

Wood,  Ind  Trst.  pi.  S.  f.  76. 

Desh.  dans  Uanik.  An.  s.  vert,  éd.  t.  6.  p 291.  n®  6. 

Venus  sinensis.  Haniey,  Descr.  rat.  p.  lU). 

Habite  les  mers  de  la  Chine. 

Celle  coquille,  rare  autrefois  dans  les  cabinets  de  conchyliologie,  est 
actuellement  répandue  dans  toutes  les  collections;  il  sera  donc  facile 
d’en  étudier  les  caractères  et  d’apprécier  ceux  du  genre  auquel  elle 
peut  servir  de  type.  Cette  coquille  est  circulaire,  et. quelquefois  un  peu 
pItLS  longue  que  large;  elle  est  épaisse  et  bombée:  elle  ressemble  donc 


SEIZIÈME  FAMILLE.  — LES  DUEISSÉNIDES.  627 

à quelques  Dosinies  par  sa  forme  générale;  elle  est  cependant  plus 
bombée  que  les  espèces  de  ce  dernier  genre.  Sa  surface  est  revêtue 
d’un  épiderme  jaunâtre  transparent.  Des  stries  transverses,  fines  et  ré- 
gulières couvrent  la  face  externe;  ces  stries  s'effacent  presque  entière- 
ment vers  le  milieu  des  valves  ; elles  sont  coupées  à angle  droit  par  un 
grand  nombre  de  stries  longitudinales  très  fines,  obsolètes,  plus  appa- 
rentes sur  les  côtés  que  sur  le  milieu;  les  crochets  sont  saillants,  bom- 
bés et  obliquement  inclinés  sur  le  côté  antérieur.  Ce  côté  ne  porte  au- 
cune trace  de  lunule,  et  le  côté  postérieur  n‘a  pas  non  plus  de  corselet 
limité;  un  ligament  externe  peu  épais  est  contenu  dans  une  rainure 
profonde  en  partie  recouverte  par  les,  lèvres  du  corselet.  Les  nymphes 
sont  très  écrasées  et  coupées  en  plan  très  oblique  finement  strié.  La 
charnière  est  supportée  par  une  lame  cardinale  large  et  peu  épaisse 
Cette  lame  porte  trois  dents  cardinales  divergentes  ; l'antérieure  de  la 
valve  droite  est  très  mince:  la  postérieure  est  la  plus  longue,  elle  est 
creusée  en  gouttière  dans  toute  sa  longueur;  la  moyenne  est  comprimée 
et  conique  ; sur  la  valve  gauche,  les  trois  dents  sont  égales.  Les  impres- 
sions musculaires  sont  grandes , ovales  et  descendent  au-dessous  du 
diamètre  antéro-postérieur  de  la  coquille.  L’impression  palléale  est 
courte , la  sinuosité  qui  la  termine  en  arrière  ressemble  à celle  des  Do- 
sinies; elle  est  plus  courte  en  proportion  et  se  dessine  sous  la  forme 
d’un  triangle  subéquilatéral  , dont  l'axe  est  oblique  de  bas  en  haut  et 
d'arrière  en  avant.  Cette  coquille  est  souvent  d’un  fauve  pâle,  ses  cro- 
chets sont  violets  , et  vers  les  bords  elle  est  ornée  de  zones  violettes 
variables  selon  les  individus;  rintérieur'est  blanc,  lavé  de  violet  pâle 
interrompu  par  les  zones  violettes  du  dehors  qui  se  répètent  plus  pâles 
en  dedans. 

Cette  coquille  est  longue  de  45  mill.  et  large  de  47. 


SEIZIÈME  FAMILLE. 

Les  Dveissëniiles.  MBi^eisHewiUte , Gray. 

CARACTÈRES.  — Animal  allongé,  longitudinal,  ayant  les 
lobes  du  manteau  réunis  et  percés  de  trois  ouvertures  ; une 
antérieure  pour  le  passage  d’un  pied  byssifère,  les  deux  autres 
postérieures  , prolongées  en  siphons  courts  et  inégaux.  Bouche 


SEIZIÈME  FAMILLE. 


1)28 

subterminale  antérieure  ; deux  muscles  adducteurs  inégaux,  très 
écartés;  deux  muscles  rétracteurs  du  pied,  deux  paires  de 
branchies  inégales  débordant  en  arrière  la  masse  abdominale^ 

Coquille  allongée , longitudinale , triangulaire  ou  subcordi- 
forme.  Crochets  terminaux,  pointus,  droits  ou  inclinés. Char- 
nière simple;  ligament  externe  allongé,  en  partie  recouvert 
par  les  bords  du  corselet.  Bords  simples  et  tranchants , bâil- 
lants en  avant  et  en  bas  pour  le  passage  du  byssus.  Deux  im- 
pressions musculaires  inégales  ; Tantérieure  petite , sur  une 
cloison  transverse  qui  couvre  la  cavité  du  crochet;  impression 
postérieure  ovale , subcirculaire , presque  marginale  ; impres- 
sion palléale  simple. 

GENRE  Congeria^  Partsch. 

En  admettant  la  famille  des  Dreissénides  de  M.  Gray,  nous  ne  pré- 
tendons pas  y laisser  cinq  genres,  et  surtout  lui  conserver,  dans  l’ordre 
général  de  la  méthode,  la  place  que  lui  accorde  le  savant  zoologiste  an- 
glais. Pour  nous,  la  famille  en  question  ne  contient  qu'un  seul  genre 
fondé  sous  le  nom  de  Conr/er/a,  par  M.  Partsch,  et  proposé  presque  en 
même  temps  sous  celui  de  Dremena,  par  M.  Vanbeneden  ; ce  genre  a 
reçu  plusieurs  autres  noms,  ainsique  nous  allons  le  voir  bientôt. 

Le  genre  Congeria  a été  établi  pour  des  coquilles  fossiles  qui  se  trou- 
vent avec  des  Mélanopsides  et  d’autres  coquilles  d’eau  douce  dans  les 
terrains  tertiaires  de  l’Autriche.  M.  Vanbeneden,  ayant  observé  l’animal 
du  Mytilus  polymorphns  de  Pallas , reconnut  entre  cet  animai  et  celui 
des  Mytilus  de  très  grandes  différences,  et  il  en  fit  le  type  du  genre 
nouveau  qu’il  nomma  Dreissena.  M.  Gray  admet  à la  fois  les  deux  gen- 
res auxquels  il  en  ajoute  trois  autres,  deux  douteux,  Enocephahis  de 
Munster,  et  Myoconcha  de  d’Orbigny,  et  le  troisième  Mytilimiria  de 
Conrad , qui  devra  probablement  rentrer  dans  le  genre  Mylihts  de 
Linné. 

Lorsqu’on  met  en  présence  les  divers  genres  que  nous  venons  de 
citer,  à l’exception  des  deux  derniers,  ils  offrent  des  caractères  identi- 
ques; ils  doivent  en  conséquence  rentrer  les  uns  dans  les  autres.  Dans 
notre  opinion,  un  seul  doit  rester  dans  une  méthode  naturelle. 

D’après  ce  que  nous  a dit  autrefois  M.  Doué  du  genre  Enoccphalus 
de  Munster,  ce  savant  paléontologiste  l’aurait  établi  dans  sa  col- 
lection pour  la  grande  Congérie  cordiforme  de  M.  Partsch  [Congeria 


LES  DREISSEMDES. 


629 

subglobosa);  par  conséquent,  le  genre  n'ayant  jamais  été  publié  par  son 
auteur  de  manière  à le  faire  reconnaître,  il  ne  peut  être  admis.  Le  genre 
Dreissena  ne  diffère  en  rien  des  Congeria  , il  a été  fonde  pour  des  es- 
pèces vivantes  dont  tous  les  caractères  se  retrouvent  dans  les  espèces 
fossiles  qui  constituent  le  genre  Congeria;  il  est  naturel  de  réunir 
des  coquilles  qui  ne  diffèrent  que  par  l'état  où  on  les  trouve.  Quant 
au  genre  Myoconclia  de  Sowerby,  admis  par  M.  d’Orbigny,  nous  ne  le 
comprenons  pas  dans  la  famillo  des  Dressénides:  ce  sont  des  coquilles 
qui  ont  les  plus  grands  rapports  avec  certaines  Cardites,  Cardita  p/tre- 
netica  par  exemple,  et  que  nous  repousserons  également  de  la  famille 
des  Mylilacées.  Ainsi,  des  cinq  genres  introduits  par  M.  Gray  dans  sa 
famille,  il  y en  a trois,  Dreissena  ^ Enocephalus  et  Congeria  qui  n’en 
forment  qu'un  seul,  celui  qui  constitue  à lui  seul  la  famille;  car  des 
deux  autres,  celui  des  jl/f/oco«c/irt  doit  faire  partie  des  Cardites;  le  se- 
cond restera  probablement  dans  la  famille  des  Mytilacées. 

Dans  le  genre  Co7igeria  une  seule  espèce  est  connue  avec  son  animal  : 
c'est  le  Mylilus  polijinorphus  de  Pallas.  Quoique  nous  allions  décrire 
bientôt  cet  animal  avec  détail,  nous  croyons  utile  d'en  retracer  ici  les 
caractères  les  plus  généraux  pour  mettre  le  lecteur  en  état  de  com- 
prendre les  motifs  qui  nous  ont  guidé  dans  l’arrangement  méthodique 
que  nous  proposons  pour  la  famille  des  Dreissénides. 

Quoique  par  leur  forme  générale  l’animal  et  sa  coquille  rappellent  beau- 
coup ceux  des  Mylilus,  cependant  ils  en  diffèrent  par  un  grand  nombre 
de  caractères.  C’est  ainsi,  par  exemple,  que  l’animal  du  Mylilus  poly^ 
inorphus  a le  manteau  presque  entièrement  fermé.  Il  présente  une  petite 
ouverture  antérieure  et  inférieure  pour  le  passage  d’un  pied  byssifère. 
En  arrière,  cet  organe  se  prolonge  en  deux  siphons  très  inégaux  ; le  bran- 
chial, gros  et  dilaté,  garni  de  tentacules  sur  le  bord  et  à l’intérieur, 
semble  continuer  l’axe  longitudinal  de  l'animal.  Le  siphon  anal,  plus 
petit,  plusxourt,  s’élève  d'une  large  base,  et  il  se  dirige  en  dehors  en 
faisant  un  angle  droit  avec  le  premier.  Son  bord  membraneux  reste 
simple,  dépourvu  de  tentacules. 

L’anirpal  est  pourvu  de  deux  muscles  adducteurs  inégaux.  Quoique 
très  réduit,  le  muscle  adducteur  antérieur  est  cependant  plus  gros  que 
celui  des  Mylilus^  et  il  est  placé  d'une  manière  différente,  en  cela  qu'il 
est  sur  une  lame  Iransverse  formant  une  espèce  de  cloison  qui  s'avance 
au-dessus  de  la  cavité  des  crochets.  Le  muscle  adducteur  postérieur 
est  cylindracé,  situé  très  en  arrière,  et  il  n’est  pas  composé  de,  plusieurs 
faisceaux  fibreux , ainsi  que  cela,  a lieu  dans  les  Moules.  Le  muscle 
orbiculaire du  manteau  est  généralement  mince,  étroit,  d’une  largeur 


63o 


SKIZIEME  FAMILLE. 


a peu  près  égale  dans  toute  son  étendue.  Ainsi  que  dans  les  Cyclades, 
les  Cardium  et  d'autres  genres,  les  siphons  n’ont  point  de  muscle  ré- 
tracleur  propre,  faisant  une  saillie  plus  ou  moins  considérable  entre  les 
parois  du  manteau. 

Le  pied  est  allongé  et  vermiforme,  à peu  près  comme  dans  les  Myes, 
les  Saxicaves,  les  Clavagelles,  les  Gastrochènes,  etc.  Les  parois  ne  s’é- 
tendent pas  sur  la  masse  abdominale,  et  les  fibres  musculaires  se  transfor- 
ment immédiatement  en  deux  paires  do  muscles  qui  se  dirigent  eu  avant 
et  en  arrière.  Ainsi,  sous  ce  rapport,  les  animaux  des  DreLssénides  sont 
très  différents  de  ceux  des  Mylilus  et  semblables  à ceux  des  Dimyaires. 
La  masse  abdominale  est  plus  ou  moins  considérable , scion  le  dévelop- 
pement de  certains  organes,  et  surtout  de  ceux  dé  la  génération.  Quand 
ces  organes  sont  tuméfiés  par  leur  développement  naturel,  ils  envahissent 
la  masse  abdominale  dans  toutes  ses  parties,  enveloppent  le  foie,  et  pro- 
duisent en  arrière  du  pied  un  cône  à sommet  obtus  qui  se  prolonge  de 
plus  en  plus  dans  la  cavité  postérieure  du  manteau.  En  avant,  le  pied, 
bridé  par  ses  muscles,  est  enfoncé  au  milieu  de  cette  masse  abdominale, 
et  il  porto  à sa  base  dans  un  crypte  membraneux  un  byssus  à filaments 
fins  et  nombreux,  sécrétés  par  le  pied  de  la  même  manière  que  dans 
tous  les  autres  Mollusques  byssifères. 

La  bouche  est  assez  grande,  presque  terminale  , transversale  , gar- 
nie de  deux  lèvres  membraneuses  et  étroites,  terminées  de  chaque  côté 
en  une  paire  de  petites  palpes  triangulaires,  semblables  par  leur  struc- 
ture à celle  des  Vénus  et  des  Cyclades. 

Les  organes  branchiaux  sont  placés  comme  dans  les  Mollusques 
dimyaires.  Ces  organes  sont  lisses,  parenchymateux;  deux  feuillets 
inégaux  de  chaque  côté  du  corps  les  constituent.  Les  feuillets  internes 
sont  les  plus  grands.  La  pointe  qui  les  termine  antérieurement  vient  se 
placer  entre  les  palpes  labiales.  En  arrière  de  la  masse  abdominale,  les 
quatre  feuillets  branchiaux  se  réunissent  pour  tomber  au-devant  de 
l’ouverture  du  siphon  anal  et  se  souder  avec  le  pourtour  interne  de  cette 
ouverture. 

Si  nous  examinons  les  coquilles  appartenant  à la  fëmille  des  Dreis- 
sénides,  nous  leur  trouvons  plutôt  l'apparence  des  Moules  que  les  carac- 
tères profonds  de  ce  genre.  Ainsi  ces  coquilles  ne  sont  jamais  nacrées. 
Par  leur  texture  elles  se  rapprochent  de  celles  des  Cyclades  et  des 
Cyrènes.  Elles  sont  de  formes  longitudinales,  quelquefois  bombées, 
subcordiformes,  ayant  les  crochets  terminaux  tanlôtdroils,  tantôt  cour- 
bes. La  charnière  reste  simple;  un  ligament  extérieur  est  porté  sur  de 
longues  nymphes,  peu  épaisses,  en  partie  cachées  sous  le  bord  saillant 


LES  miElSSENlDES. 


6:h 

du  corselet.  La  cavité  du  crochet  n’est  point  libre  comme  dans  le  plus 
grand  nombre  des  Moules.  Une  lame  Iransvorse,  horizontale,  plus  ou 
moins  épaisse,  s’avance  au-dessus  de  !a  cavité  des  crochets,  et  reçoit 
l’impression  du  muscle  adducteur  antérieur  des  valves.  L’autre  impres- 
sion musculaire  est  beaucoup  plus  grande;  elle  est  presque  marginale 
et  située  près  de  l’extrémité  postérieure  de  la  coquille.  Une  impression 
palléale,  simple,  très  rapprochée  du  bord,  enferme  en  dedans  de  son 
contour  l’impression  musculaire  postérieuré. 

Si  nous  comparons  les  animaux  des  Dreissénides  à ceux  des  Myti- 
lacées , nous  trouverons  entre  eux  des  différences  aussi  considérables 
que  si  nous  établissions  la  comparaison  entre  des  Buccardes  et  des 
Moules,  par  exemple,  ou  tout  autre  genre  appartenant  à l’ordre  des 
Acéphalés  dimyaires.  Ainsi  le  manteau,  dans  les  deux  groupes,  est  essen- 
tiellement différent.  D’un  côté,  il  est  presque  entièrement  fermé,  de  l’au- 
tre il  est  ouvert  dans  toute  sa  circonférence.  Dans  les  Dreissénides  il 
existe  deux  siphons,  dans  les  MytÜacées  une  seule  bride  postérieure 
constitue  une  ouverture  anale  vers  laquelle  viennent  aboutir  les 
feuillets  branchiaux.  Si  le  pied  a beaucoup  d’analogie  dans  les  deux 
genres,  cependant  il  a une  organisation  différente,  puisque  dans  les 
Moules  il  a plusieurs  paires  de  muscles  qui  n’existent  jamais  dans  les 
COngéries.  Il  est  vrai  que  dans  l’un  et  l'autre  genre  le  pied  porte  un 
byssus,  et  que  par  suite  de  l’existence  de  cet  organe  il  y a une  grande 
ressemblance  dans  les  mœurs  de  ces  animaux  ; mais  il  ne  faut  pas  per- 
dre de  vue  que  le  byssus  a peu  d’importance  comme  caractère  zoologi- 
que, et  qu’il  se  retrouve,  dans  presque  toute  la  série  des  animaux  acé- 
phalés , dans  des  familles  et  dans  des  genres  très  différents.  Nous  en 
trouvons  des  vestiges  dans  les  Gastrochènes.  Il  est  fort  gros  dans  lés 
Lyonsies  ou  dans  les  Saxicaves,  et  nous  en  avons  observe  des  vestiges 
dans  la  plupart  des  PuUasira.  Si  l’on  voulait  maintenant  réunir  leé 
divers  genrôs  dont  nous  venons  de  parler,  par  ce  seul  motif  qu’ils  sont 
bySsifères,  assurément  on  briserait  les  rapports  les  plus  naturels  pour 
constituer  une  famille  avec  des  éléments  hétérogènes.  Il  est  donc  néces- 
saire, pour  bien  placer  le  genre  Congérie  et  la  famille  qui  lo  renferme, 
de  se  prémunir  contre  cette  apparence  de  la  forme  générale  et  de  la 
manière  de  vivre,  par  laquelle  presque  tous  les  zoologistes  s’en  sont 
laissé  imposer,  et  ont  rapproché  des  animaux  qui  n’ont  entre  eux  que 
des  rapports  Irès  éloignés.  Ce  que  nous  venons  de  dire  est  confirmé  par 
deux  choses  très  importantes  dans  l'organisation  des  Mollusques  acé- 
phalés. Dans  les  Moules  les  organes  branchiaux  occupent  toute  la  lon- 
gueur de  l’animal;  ils  sont  attachés  au  manteau  et  composés  de  fila- 


.SEIZIEME  FAMILLE. 


e.î'i 

inents  qui , à la  mort  de  l’animal , se  détachent  avec  la  plus  grande 
facilité,  et  les  organes  branchiaux  peuvent  être  comparés  à un  peigne  à 
dents  très  fines  et  très  rapprochées.  Dans  les  animaux  des  Congéries, 
les  branchies  conservent  la  place,  les  rapports  et  l'organisation  que  ces 
organes  présentent  chez  tous  les  Mollusques  dimyaires,  tels  que  les 
Vénus,  les  Cyclades,  les  PuUastraj  etc. 

Nous  verrons,  en  traitant  de  la  famille  des  My  tilacées,  comment  s’opère 
le  développement  des  organes  de  la  génération.  Chez  eux  la  masse 
abdominale  ne  pouvant  prendre  aucun  développement  dans  la  cavité  du 
manteau,  l’ovaire  se  rejette  en  dehors  entre  les  parois  palléales  elles- 
mêmes  et  les  envahit  dans  toute  leur  étendue  jusqu’à  la  limite  du 
muscle  orbiculaire.  Chez  les  Congéries,  au  contraire,  le  manteau  ne 
contient  jamais  les  ovaires,  qui  restent  renfermés  dans  la  limite  de  la 
masse  abdominale , et  il  leur  arrive,  ainsi  que  chez  les  Gastrochenes,  de 
se  présenter  à découvert  au-dessous  de  parois  très  minces  et  d’envelop- 
per les  muscles  du  pied  au  lieu  d’en  être  recouverts,  ainsi  que  cela  a lieu 
chez  les  Vénus , les  Buccardes,  etc. 

Il  résulte  de  la  comparaison  que  nous  venons  d’établir,  que  si  l'on  fait 
la  somme  des  ressemblances  et  des  différences  entre  les  Dreissénides  et 
les  Mytilacées,  le  nombre  des  différences  l’emportera  de  beaucoup  sur 
celui  des  ressemblances;  c’est  le  contraire  qui  aura  lieu  , si  nous  éta- 
blissons la  môme  comparaison  entre  les  Dreissénides  et  les  Conques. 
Alors  la  somme  des  ressemblances  l’emportera  de  beaucoup  ; et  môme 
si  l’on  voulait  appliquer  à la  rigueur  les  principes  de  la  méthode  natu- 
relle si  sagement  établie  par  les  grands  zoologistes,  il  faudrait  peut- 
être  faire  remonter  la  famille  des  Dreissénidées  plus  haut  dans  la  série 
que  nous  ne  le  faisons  ici.  En  effet,  elle  se  trouve  déjà  éloignée  des 
mollusques  à manteau  presque  complètement  fermé,  tels  que  les  Solons, 
lesMyes,  IesThracies,etc.  Mais  il  faut  se  rappeler  que  la  famille  dont  nous 
nous  occupons  présente  des  caractères  complexes  et  ambigus  , et  que 
dans  une  méthode  par  embranchements,  telle  que  nous  la  concevons, 
cette  famille,  en  partant  de  celle  des  Myaires,  par  exemple,  doit  former 
un  embranchement  latéral , s’élèvant  jusqu’à  la  hauteur  des  Conques 
üuvialiles , et  s'arrêtant  brusquement , tout  en  se  dirigeant  vers  la  famille 
des  Mytilacées.  Si  l’on  ne  s'en  laisse  pas  imposer  par  la  forme  extérieure 
de  la  coquille,  les  caractères  qu’elle  présente  conduiront  au  même  ré- 
sultat. On  y trouve,  en  effet,  deux  impressions  musculaires  inégales 
comme  dans  tous  les  Mollusques  acéphalés  dimyaires,  deux  petites  im- 
pressions pour  les  muscles  rétracteurs  du  pied,  placés  exactement 
comme  dans  les  Mollusques  dimyaires  proprement  dits;  enfin , une  im- 


LES  DKEISSEMDES. 


63;> 

pression  palléale  simple,  s’élargissant  un  peu  en  arrière,  exactement 
comme  dans  les  Cyclades  et  les  Cyrènes  ; et  cependant  dans  tous  ces 
genres,  ainsi  que  dans  celui  des  Cyprines.  l’animal  se  prolonge  en  ar- 
rière en  deux  siphons  inégaux.  Ainsi,  si  l'on  veut  accorder  à chaque 
caractère  zoologique  l'importance  qu'il  mérite , et  que  la  nature  elle- 
même  lui  a accordée,  on  sera  forcé  de  convenir  avec  nous  que  les  Con- 
géries  ne  peuvent  fairepartie  du  groupe  des  Myaircs,  quoique  le  manteau 
soit  simplement  perforé  en  avant,  et  quoique  le  pied  soit  vermiforme: 
d’abord  parce  que  le  manteau  se  termine  par  des  siphons  très  courts 
dépourvus  de  muscles  spéciaux,  et  que  par  suite  de  celte  brièveté  du 
manteau  les  branchies  sont  elles-mêmes  très  courtes , ainsi  que  dans 
les  Cyclades  et  les  Vénus.  Mais  il  est  certain  que  la  jonction  des  lobes 
du  manteau  dans  toute  l'étendue  de  leur  pourtour  indique  des  rap- 
ports évidents  avec  la  famille  des  Myaires  et  celles  qui  Tavoisinent  le 
plus. 

On  ne  peut  non  plus  rapprocher  les  Dreissénides  dos  Mytilacées  ; ces 
familles  se  repoussent  par  tout  ce  qu'il  y a d’essentiel  et  de  profond  dans 
tous  leurs  caractères.  Il  est  évident  cependant  qu’elles  ont  des  rapports 
éloignés  par  la  forme  générale,  et  surtout  par  le  pied  , le  byssus  et  les 
mœurs  que  ces  parties  déterminent  chez  l’animal  : car  le  byssus  est  un 
moyen  de  suspension  au  moyen  duquel  l’animal  s'attache  aux  corps 
environnants , et  il  arrive  que  dans  le  développement  des  individus  ils 
s’attachent  les  uns  aux  autres  et  forment  des  amas  plus  ou  moins 
considérables.  C’est  donc  entre  ces  deux  groupes  et  à une  distance  à peu 
près  égale,  que  la  famille  des  Dreissénides  doit  s'arrêter  dans  la  série 
naturelle  : c’est  pour  cette  raison  que  nous  la  plaçons  à côté  des  Cyclades. 
Nous  avons  préféré  cette  opinion,  d’abord  parce  que  les  Congéries  sont 
des  animaux  fiuviatiles , et  ensuite  parce  qu'ils  présentent  la  plupart  des 
caractères  des  mollusques  contenus  dans  cette  famille  des  Cyclades, 
Ainsi,  trois  ouvertures  au  manteau,  l'absence  de  muscle  spécial  du  si- 
phon, une  bouche  garnie  de  palpes  semblables  à celles  des  Vénus  et  des 
Cyclades  ; enfin,  des  branchies  courtes  et  inégales,  semblables  pour  la 
position  et  la  structure  à celles  de  la  famille  des  Conques  fiuviatiles. 
Nous  pourrions  même  ajouter  que  dans  la  jeunesse  les  Cyclades  et  les 
Congéries  ont  le  "pied  conformé  à peu  près  de  la  même  manière,  et  que 
ces  animaux  s'en  servent  également  pour  ramper  quelquefois  à la  sur- 
face des  corps  solides. 

Si  nous  suivions  l'exemple  de  M.  Gray,  nous  admettrions  quatre  ou 
cinq  genres  dans  la  famille  des  Dreissénides  ; mais  pour  nous  elle  se 
réduit  à un  seul,  celui  nommé  Congeria  par  M.  Partsch.  Ce  que  nous 


SEIZIEME  FAMILLE. 


634 

dVons  dit  précédemment,  et  ce  que  nous  allons  ajouter  en  traitant  du 
genre  en  particulier,  justifiera  notre  opinion. 


GENRE  CINQUANTE -DEUXIÈME. 

COnrG£Rl£.  Congeria^  Parlsch. 

Pl.  37.  f.  9.  rü  n.  1 5i  i6. 

CARACTKREs  GENERIQUES.  — Animal  allongé,  trigone , lon- 
gitudinal , inytiliforme  , ayant  les  lobes  du  manteau  simples  et 
réunis  dans  la  plus  grande  partie  de  la  circonférence.  Une  petite 
ouverture  antérieure  pour  le  passage  ‘du  pied  et  d’un  byssus. 
Deux  siphons  courts  et  inégaux,  le  branchial  large,  dilaté, 
garni  en  dedans  et  sur  son  bord  de  nombreux  tentacules  courts 
et  pointus;  siphon  anal  simple,  quelques  tentacules  dispersés 
sur  le  manteau  entre  les  deux  siphons.  Pied  vermiforme, 
long,  étroit,  cylindracé,  fendu  à son  bord  inférieur,  et  portant 
à sa  base  un  byssus  filamenteux.  Bouche  petite,  subtefmi- 
nale;  palpes  labiales  courtes  et  étroites.  Deux  paires  de  feuil- 
lets branchiaux  assez  épais,  parenchymateux,  lisses,  inégaux, 
la  paire  externe  la  plus  petite.  Deux  muscles  adducteurs  des 
valves  : l'antérieur  petit,  très  courte  situé  sous  les  crochets; 
le  postérieur  beaucoup  plus  grand  et  subcylindrique. 

Coquille  allongée,  longitudinale,  mytiloïde , triangubaire , 
ayant  les  bords  simples  parfaitement  clos , si  ce  n'est  en  avant 
et  en  bas,  oùs’ouvre  une  petite  fente  pour  le  passage  du  byssus. 
Crochets  terminaux  très  pointus,  droits  ou  courbés.  Gharnière 
simple  et  sans  dents  ; ligament  externe  , peu  allongé , saillant. 
Deux  impressions  musculaires  : Tune  pètite , antérieure  , située 
au-dessous  des  crochets , sur  une  lame  transverse  et  triangu- 
laire; l’autre  postérieure  , ovale  ou  circulaire. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — ilytUus , Pallas , Hchroetei’, 
Chemnitz,  Gmeîin , Georgi , de  Baer,  Wood,  Sowerby, 


LES  DRElSSENtDES. 


635 


Pfeiffer,  Kickx,  etc.  — Cangeria,  Partsch,  Bro\V'n5  Kôiiig,  etc. 

— Dreiüsena  , Vanbeneden,  Eichwald,  Bensoii , Sowerby, 
Gray,  Nyst , Picard,  Morris.  — Tichogonia,  Rossmaessler, 
Millier,  Herausgeber.  — Mytüina,  Mytilomia , Cantraine. 

— DytliçLlmia  ^ Jay. 

OBSERVATIONS.  Une  coquille  découverte  par  Pallas  dans  les  eaux  douces 
de  la  Russie  a été  mentionnée  par  le  célèbre  naturaliste  sous  le  nom 
de  Mijtüus  'pohjmorphm.  Confondant  deux  espèces,  l’une  marine  et 
l’autre  d’eau  douce,  le  savant  naturaliste  auquel  la  science  est  redevable 
de  travaux  du  plus  grand  mérite,  a fait  naître  la  croyance  qu’une 
même  espèce  de  mollusques  pouvait  habiter  à la  fois  les  eaux  douces  et 
les  eaux  salées  ; et , si  la  vérité  de  ce  fait  s’était  établie  par  de  nouvelles 
observations  , elle  aurait  été  la  seule  et  la  plus  étonnante  exception  que 
l’on  pût  citer  dans  toute  la  classe  des  Mollusques.  Le  fait  d un  Mytilus 
dans  les  eaux  douces  était  déjà  assez  extraordinaire  par  lui-méme  pour 
attirer  l’attention  des  naturalistes;  et  cependant,  depuis  Pallas  jusqu'à 
nos  jours , l’espèce  retrouvée  dans  d'antres  lieux , en  recevant  divers 
noms,  a toujours  été  admise  sans  difficulté  parmi  les  Moules. 

Personne,  jusqu’en  1835,  n'avait  cherché  à reconnaître  si  l'animal 
est  en  effet  semblable  à celui  des  moules  marines.  Il  était  intéressant 
cependant  do  s’assurer  si  un  genre  aussi  essentiellement  marin  que 
celui  des  Moules  possède  une  es|)èce  dans  les  eaux  douces  ; car  autre 
chose  est  d’admettre  une,  même  espèce  vivante  en  môme  temps  dans  les 
eaux  douces  et  dans  les  eaux  salées,  ou  d’admettre  que  des  espèces  dif- 
férentes d’un  môme  genre  [leuveut  sc  trouver  à la  fois  dans  la  mer  et 
les  eaux  douces  On  connaît  un  assez  grand  nombre  de  genres  qui  ont 
des  espèces  marines  et  d’autres  fluviatiles;  mais  jusqu'ici  on  ne  peut 
citer  aucun  exemple  authentique  d’une  espèce  de  mollusque  vivant  in- 
différemment dans  les  eaux  douces  et  dans  les  eaux  salées.  Les  applica- 
tions multipliées  que  l’on  a faites  depuis  quelques  années  de  la  conchy- 
liologie à la  géologie  rendaient  très  intéressantes  les  recherches  entre- 
prises à ce  sujet;  et  on  le  comprendra  facilement,  car  on  aurait  pu 
rapporter  à des  dépôts  marins  des  couches  formées  dans  les  eaut 
douces,  où  l’on  aurait  pu  croire  à des  méhi-ngos  qui  n’auraient  eu  au- 
cune réalité. 

En  '1835,‘M.  Parlsch  publiait  dans  les  Annales  du  Muséum  de 
Vienne  un  mémoire  sur  des  coquilles  fossiles  trouvées  dans  les  terrains 
tertiaires  des  environs  de  Vienne.  Une  étude  attenlivé  de  ces  coquilles 


6:56 


SKIZIEMfc  FAMILLE. 


fit  reconnaître  à ce  naturaliste  des  caractères  qui  avaient  échappé  à ses 
devanciers;  confondues  parmi  les  Moules,  il  proposa  pour  elles  le  genre 
Co7igcria.  A la  jnômo  époque,  M.  Vanboneden,  après  avoir  étudié  rani- 
mai du  Mytijus  pohjmorphm  de  Pallas,  s’aperçut  qu’il  était  fort  différent 
de  celui  des  moules  marines,  et  il  établit  pour  cette  espèce  un  nouveau 
genre  auquel  il  imposa  le  nom  de  Dreissena.  Bientôt  ce  genre  fut  admis 
par  un  certain  nombre  de  naturalistes;  cependant,  deux  années  plus 
tard,  M.  Rossmaesslcr  n'ayant  pas  eu  connaissance  des  travaux  de 
MM.  Partsch  et  Vanbeneden,  proposait  le  genre  Tichogonia  pour  ce 
môme  Mytilus  polymorpkus  de  Pallas.  Le  genre  Dreissena  avait  sur  ce 
dernier  la  priorité,  et  pour  un  certain  nombre  de  personnes  il  semblait 
que  les  genres  Congeria  et  Dreissena  pouvaient  rester  en  mémo  temps 
dans  ta  méthode.  En  effet,  l'espèce  principale  du  genre  de  M.  Partsch 
se  rapproche  tellement  des  Isocardes  par  sa  forme,  que  Ton  croyait 
trouver  dans  celte  coquille  le  type  d'un  genre  distinct  de  celui  de  Van- 
beneden. Des  études  plus  complètes  sur  des  matériaux  plus  nombreux 
ont  fait  justice  de  cette  opinion  peu  fondée,  et  aujourd’hui  l'identité  des 
caractère.!  génériques  des  Congeria  et  des  Dreissena  est  établie  de  la 
manière  la  plus  irrévocable.  Le  genre  de  M.  Partsch  devra  donc  sub- 
sister, car  on  ne  peut  admettre  la  priorité  du  genre  Enocephalus 
de  Münster.  Quoique  mentionné  par  nous  en  1 833,  ce  genre  est  resté 
manuscrit  dans  la  collection  de  l’auteur,  et  n’a  pas  reçu  une  publication 
suffisante  pour  ôtre  reconnu  par  tous  les  conchyliologues.  Malgré  tous 
ces  noms  précédemment  connus,  M.  Cantraine  en  proposa  encore  un 
autre,  celui  de  .)fylilina,  que  bientôt  après  il  transforma  en  Mytilomyaf 
dans  le  Bulhlin  de  l’Académie  de  Bruxelles  ( 1 847].  La  synonymie  géné- 
rique que  nous  avons  rapportée  en  tête  de  ce  genre  indique  de  quelle 
manière  les  conchyliologues  se  sont  partagés  entre  les  différents  noms 
que  le  genre  Congeria  a successivement  reçus.  Le  plus  grand  nombre 
d’auteurs  ont  conservé  le  nom  de  Dreissena , et  cependant  nous  croyons, 
avoc  M.  Uerrmannsen,  que  le  nom  de  Congeria  doit  être  préféré. 

M.  Gray,  auquel  nous  avons  quelquefois  reproché  de  multiplier  les 
divisions  méthodiques , nous  semble  celte  fois  avoir  raison  de  proposer 
une  famille  spéciale  pour  le  seul  genre  Congeria.  Nous  avons  vu  précé- 
demment par  quels  caractères  cette  famille  se  justifie,  et  ce  que  nous 
allons  ajouter  sur  le  genre  contribuera  à faire  sentir  mieux  encore  la  né- 
cessité de  la  famille. 

Ayant  discuté,  eu  traitant  de  la  famille  des  Congéries,  la  place  qu’elle 
doit  occuper  dans  la  méthode  naturelle , nous  n’avons  plus  à nous  oc- 
cuper içi  de  cette  question,  et  nous  allons  passer  immédiatement  à l’ex- 


LES  DREISSENIDES. 


position  détaillée  des  caractères  de  la  coquille  et  de  l’animal  du  genre 
Congérie. 

Les  coquilles  du  genre  Congeria  se  présentent  sous  des  formes  assez 
diverses  , mais  qui  se  rattachent  toujours  à celles  qui  sont  propres  au 
genre  M^Jtîlus  et  à ses  diverses  modifications.  Les  unes  sont  tout  à fait 
mytiformes , allongées , ayant  les  crochets  pointus , terminaux  et  rap- 
prochés. Dans  quelques  espèces  ces  parties,  plus  courtes,  sont  dépas- 
sées par  un  côté  antérieur  très  court , et  alors  elles  prennent  l’appa- 
rence des  Modioles.  Parmi  les  espèces  a crochets  pointus,  il  en  est  quel-, 
ques  unes  de  fortement  carénées  et  qui  sont  très  bombées  ; elles  ont 
une  tendance  à devenir  subcordiformes.  Vues  du  côté  antérieur,  elles 
ne  manquent  pas  de  quelque  ressemblance  avec  les  Buccardes  de  la  sec- 
tion des  Hémicardes.  Enfin  il  est  d’autres  espèces  chez  lesquelles  l’angle 
antérieur  des  valves  s'arrondit.  Les  crochets  s’inclinent  l’un  vers  l’autre 
en  se  contournant  en  spirale , et  alors  la  coquille  prend  dans  sa  forme 
générale  l’apparence  d’une  Isocarde.  Telles  sont  dans  leur  ensemble 
les  modifications  qu’on  observe  dans  la  forme  extérieure  des  coquilles 
que  nous  réunissons  aujourd’hui  dans  le  genre  Congeria.  Leur  surface 
extérieure  est  lisse,  ou  marquée  de  stries  irrégulières  d’accroissement. 
Dans  les  espèces  vivantes,  un  épiderme  peu  épais,  jaunâtre  ou  brunâtre, 
couvre  toute  la  coquille,  sans  la  déborder.  Cet  épiderme  se  détache  avec 
assez  de  facilité  par  la  macération.  Nous  no  pouvons  parler  de  la  couleur 
que  d’après  les  espèces  vivantes  ; nous  n'en  retrouvons  que  de  faibles 
traces  sur  les  espèces  fossiles  les  mieux  conservées.  Les  espèces  vi- 
vantes sont  des  coquilles  ordinairement  blanches  ou  jaunâtres,  sur 
lesquelles  se  dessinent  de  larges  zones  iransverses  et  irrégulières  plus 
ou  moins  onduleuses,  d’un  beau  brun  noirâtre  foncé.  Les  variations  sont 
nombreuses  ; si  d’un  côté  il  y a des  individus  très  pâles,  d’un  autre  il  y 
eu  a d’extrêmement  bruns,  par  suite  de  l’élargissement  successif  des 
zones  transverses,  qui  finissent  par  se  toucher  et  se  confondre.  Dans  la 
grande  espèce  de  Congérie  de  l’argile  du  bassin  de  Vienne  {Congeria 
subglobosa,  Parstch),  nous  trouvons  dans  les  individus  les  mieux  con- 
servés des  traces  non  équivoques  de  la  coloration  : tout  le  côté  anté- 
rieur était  d’un  brun  pâle,  tandis  que  le  côté  postérieur,  à partir  d’une 
limite  très  nette , est  d’un  brun  foncé  produit  par  un  grand  nombre  de 
fascies  trausverses  et  irrégulières , séparées  par  des  intervalles  plus 
étroits  et  plus  pâles.  Les  bords  dans  ces  coquilles  sont  simples  ; ils  sont 
minces  et  tranchants,  même  dans  les  espèces  les  plus  épaisses  et  dans 
les  individus  les  plus  vieux.  Lorsque  les  valves  sont  rapprochées,  elles 
sont  closes  assez  exactement:  cependant  le  côté  antérieur,  circonscrit 


638 


SEIZIÈME  FAMIELE. 


par  un  angle  plus  ou  moins  aigu,  est  ordinairement  déprimé  vers  le 
centre,  et  celle  dépression  coïncide  à une  fenle  plus  ou  moins  large  que 
laissent  les  valves  pour  le  passage  du  pied  et  du  byssus  : par  là  les 
Congéries  ressemblent  à la  plupart  des  Moules,  qui  ont  aussi  en  avant 
une  ouverture  pour  le  passage  des  mômes  parties,  En  arrière,  la  co- 
quille est  ordinairement  fermée  avec  beaucoup  d'exactitude  ; cependant 
il  existe  une  espèce  dans  les  terrains  tertiaires  de  la  Crimée  ( Mylilus 
apertus)  qui , ainsi  que  son  nom  l’indique  , a un  bâillement  assez  large 
pu  coté  postérieur  pour  le  passage  des  siphons  qui  probablement  était 
plus  considérable  que  ceux  des  espèces  actuellement  vivantes.  Le  côté 
postérieur  présente  vers  le  sommet  une  dépression  peu  profonde,  dans 
laquelle  on  aperçoit  un  ligament  externe  peu  épais,  mais  très  allongé, 
et  contenu  dans  une  rigole  en  partie  recouverte  par  les  bords  légère- 
ment saillants  du  corselet.  Le  bord  cardinal  est  simple  ; il  ne  présente 
aucune  trace  de  charnière  articulée, 

La  surface  intérieure  des  Congeria  n’est  jamais  nacrée , tandis  que 
^ans  les  Moules  les  espèces  sont  revêtues  à l’intérieur  d'une  couche 
nacrée  plus  ou  moins  épaisse.  Quoique  cette  ditférence  dans  la  nature 
intime  du  test  ne  soit  pas  en  apparence  d’une  très  grande  importance, 
cependant  il  faut  en  tenir  compte,  quand  ce  ne  serait  que  comme  carac- 
tère empirique  propre  à rendre  plus  facile  la  distinction  de  deux  genres 
si  voisins.  La  surface  interne  des  Congérie.s,  ordinairement  blanche, 
est  quelquefois  tachée  irrégulièrement  de  gris  ou  de.  brunâtre. 

Nous  devons  maintenant  apporter  une  attention  spéciale  à l'étude  de 
je  surface  interne  de  nos  Congeria.  Lorsqu'on  a l’habitude  de  voir  dans 
les  autres  coquilles  dimyaires  les  impressions  musculaires  imprimées  sur 
la  surface  môme  du  test , on  éprouve  quelque  peine  à reconnaître 
l’impression  musculaire  antérieure  des  Congeria  ^ parce  qu'elle  se  trouve 
sur  un  point  de  la  coquille  où  elle  n’existe  point  ordinairement.  En 
effet  , une  lamé  transverse  se  développe  au-dessus  de  la  cavité  des  cro- 
chets , et  c'est  sur  celte  lame  que  se  trouve  l’impression  musculaire 
dont  nous  parlons.  Il  est  certain  que  celte  impression  est  placée  de  la 
manière  la  moins  favorable  pour  rapprocher  les  valves  lorsque  l’animal 
se  contracte  ; mais,  d’un  autre  côté  , les  lamelles  se  trouvant  très  rap- 
prochées lorsque  les  valves  sont  dans  leur  contact  naturel , il  en  résulte 
que  le  muscle  antérieur  doit  avoir  des  fibres  extrêmement  courtes  , et 
par  conséquent  d'une  action  pins  puissante  que  ne  le  serait  colle  d’un 
muscle  plus  gros , mais  à libres  plus  longues  et  attachées  sur  des  plans 
presque  perpendiculaires.  L’impression  dont  nous  parlons  est  subtrian- 
gulaire : quelquefois  elle  se  creuse  assez  profondément  dans  l’épaisseur 


LES  DHBISSÉNIDES. 


639 

(le  la  lamç  Li-ansverse.  L'impression  musculaire  postérieure  est  tr^H 
éloignée  de  l’antérieure;  elle  est  située  tout  près  du  bord  postérieur,  ce 
qui  la  rend  submarginale.  Celte  impression  est  ovale-obronde  ; elle  egt 
toujours  simple , et,  en  cela , elle  diffère  d’une  manière  reniarquat)le  de 
celle  des  Moules.  Deux  autres  impressions , mais  beaucoup  plus  petites 
t^ue  celles  dont  nous  venons  de  parler,  se  montrent  encore  dans  l’inté- 
rieur des  valves  des  Congéries  ; elles  sont  dues  aux  muscles  rétracteurs 
du  pied.  Le  rétracleur  antérieur  a une  petite  impression  sur  la  partie 
interne  du  bord  cardinal^  à une  faible  distance  du  bord  de  la  lame  trans- 
verse. Cette  impression  ovale-obronde  se  trouve  donc  dans  ses  rapports 
ordinaires  avec  celle  de  l’adducteur  antérieur.  lien  est  de  même  do  celle 
du  rétracteur  postérieur  du  pied  : elle  est  plus  superftcicllo , plus  diffir 
cile  à apercevoir  ; mais,  ainsi  que  dans  les  autres  coquilles  des  Acéphalés 
dimyaires,  elle  forme  une  sorte  de  prolongement  caudiforme  à la  grande 
impression  musculaire  postérieure.  Sj  nous  insistons  sur  la  position  de 
CCS  petites  impressions  musculaires,  c’est  afin  de  bien  faire  comprendre 
que  les  traces  laissées  par  l'animal  sur  sa  coquille  sont  celles  d’un  mol- 
lusque qui  a beaucoup  moins  d’analogie  avec  celui  des  Mouleg  qu’avec 
celui  des  Cyclades  on  celui  des  Buccardes.  L’impression  paliéale  est  sim- 
ple ; elle  est  très  rapprochée  des  bords  de  la  coquille , et  quoique  l’animal 
soit  pourvu  de  siphons  , cette  impression  ne  montre  aucune  inflexion 
postérieure  annonçant  la  présence  de  ces  organes.  Cependant  l’espèce 
fossile  que  nous  citions  tout  à l’heure,  le  Mytilus  rangé  par 

nous  parmi  les  Moules  à une  époque  où  le  genre  Congma  nous  parais- 
sait encore  douteux  ; cette  espèce  , disons -nous , présente  du  côté  pos- 
térieur uneinflexiou  de  l’impression  du  manteau  , largo  et  peu  profonde 
qui  semble  annoncer,  non  pas  l’existence  d'un  muscle  rélracteur  spécial, 
mais  un  élargissement  notable  dans  les  fibres  musculaires  du  manteau. 

En  observant  le  Mytilus  &//ücu/aris  et  quelques  autres  espèces  ana- 
logues,,  leur  trouvant  sous  le  crochet  une  lame  Iransverse  pour  le  mgsçle 
adducteur  antérieur,  nous  avions  pensé  que  les  Congéries  et  ces  espèces 
de  Mytilus  avaient  assez  d’analogie  pour  faire  partie  du  môme  genre,  Et 
comme  nous  n’avions  pas  le  moindre  doute  que  le  M.  biloç\tl({ris  est  une 
véritable  Moule,  nous  en  avions  conclu  l’admission  des  Congéries  à titre 
de  section  des  Moules.  Mais  aujourd’hui  notre  opinion  s’est  modifiée  par 
les  faits  nouveaux  dont  la  science  s’est  enrichie,  et  ce  moyen  de  rap- 
prochement est  en  réalité  insuffisant.  Quelques  zoologistes  avaient  pensé 
que  ranimai  de  ce  Mytilus  bitocularis  ofl’rirait  quelques  caractères  géné- 
riques propres  à séparer  ce  groupe  des  Moules,  et  à l’entraîner  dans  la 
famille  des  Congéries;  mais  l’expérience  a trompé  leur  attente,  et  l'ani- 


SEIZIÈME  FAMILLE. 


(i4() 

mal  de  ces  espèces  à crocliels  cloisonnés  ne  diffère  en  rien  de  celui  des 
autres  Moules  ; par  conséquent  cet  animal  est  extrêmement  différent  de 
celui  des  Congéries  dont  nous  allons  donner  la  description. 

Nous  traitons  ici  d’un  genre  dont  la  place  dans  la  méthode  peut  être 
encore  débattue;  il  nous  a paru  nécessaire  de  présenter  avec  détail  tous 
les  éléments  de  la  discussion , et  c’est  dans  le  but  de  l’éclairer  autant 
que  possible  que  nous  décrirons  avec  soin  l’animal. 

La  forme  générale  de  la  coquille  indique  celle  de  l’animal.  Les  espè- 
ces vivantes  sont  niytiloïdes  : leur  animal  est  donc  allongé,  étroit, 
longitudinal , c’est-à-dire  plus  long  que  large  ; il  se  termine  en  avant 
en  pointe  assez  aigue;  son  côté  antérieur  est  aplati;  il  s’élargit  du  côté 
postérieur.  La  masse  des  viscères  est  enveloppée  d’un  manteau  divisé 
en  deux  lobes  égaux  et  symétriques  correspondant  à chacune  des  valves 
dont  ils  revêtent  la  surface  interne.  Mince  au  centre,  ce  manteau  est 
épaissi  à la  circonférence  par  un  muscle  orbiculaire  étroit,  peu  épais, 
qui  suit  exactement  le  contour  de  la  coquille , et  produit  sur  elle  l’im- 
pression palléale  dont  nous  avons  parlé.  En  arrière , dans  la  hauteur  du 
bord  postérieur,  dans  la  portion  qui  correspond  aux  siphons,  le, muscle 
orbiculaire  est  plus  épais  et  un  peu  plus  large.  Les  lobes  du  manteau 
se  joignent  entre  eux  sur  presque  toute  la  circonférence;  l’ànimal  se 
trouve  ainsi  contenu  dans  un  sac  dont  les  ouvertures  sont  fort  petites. 
La  première  de  ces  ouvertures  se  montre  en  bas  ou  en  avant  ; elle  est 
ovale,  subcirculaire  ,•  et  elle  coïncide  avec  l'ouverture  antérieure  de  la 
coquille.  Ainsi  que  chez  les  autres  mollusques,  elle  est  destinée  à donner 
un  passage  au  pied  et  en  môme  temps  à un  byssus.  En  arrière , le  man- 
teau présente  deux  autres  ouvertures;  elles  s’offrent  sous  la  forme  de 
deux  siphons  courts  et  inégaux.  Mais  avant  de  décrire  ces  organes , 
nous  pouvons  ajouter  que  les  bords  du  manteau  sont  simples  et  dépour- 
vus de  tentacules  dans  toute  la  longueur  du  bord  antérieur.  Ces  bords, 
soudés  entre  eux , sont  susceptibles  de  s’étendre  assez  pour  laisser  aux 
valves  le  moyen  de  s’enlr’ouvrir,  et  permettre  à la  fois  le  passage  du 
pied  et  des  siphons. 

Comme  nous  venons  de  le  dire,  les  siphons  sont  inégaux  et  l'animal 
les  tient,  l’un  par  rapport  à l'autre,  dans  une  direction  constante.  Ainsi, 
tandis  que  le  siphon  branchial  se  projette  dans  le  prolongement  de 
l’axe  longitudinal , le  siphon  anal  fait  avec  lui  un  angle  d’environ  45  de- 
grés. Le  siphon  branchial , dans  la  plus  grande  extension  que  lui  donne 
l'animal , peut  acquérir  près  du  tiers  de  la  longueur  totale.  Etroit  à la 
base,  il  se  dilate  en  pavillon  de  trompette;  on  voit  s’élever  sur  son 
bord  une  série  de  tentacules  plus  ou  moins  serrés,  maisenurts,  coniques, 


LES  1)KKÏSSKN1DE5. 


et  cepondaul  très  grêles.  Ces  tentacules  ne  sont  pas  les  seuls  ; quand  on 
examine  la  surl'ace  interne  du  siphon  , on  la  trouve  hérissée  de  tenta- 
cules plus  allongés,  ordinairement  recourbés  au  sommet  : de  sorte  que 
l’entrée  du  siphon  est  en  réalité  obstruée  par  un  nombre  considérable 
de  tentacules,  mais  dont  la  quantité  est  variable  selon  les  individus.  Chez 
ceux  qui  en  ont  le  moins  , nous  en  comptons  vingt-cinq  ■ chez  ceux  qui 
en  ont  le  pins , il  en  existe  au  moins  le  double.  Nous  avons  établi  cette 
comparaison  entre  des  individus  de  môme  taille  et  qui  nous  ont  paru  du 
même  âge.  Nous  avons  reconnu  chez  les  jeunes  individus  un  nombre 
toujours  moindre  de  tentacules.  Deux  rangées  de  papilles  commencent 
à la  base  du  siphon  branchial , se  continuent  jusqu'au  siphon  anal , et 
viennent  se  joindre  au  point  où  le  manteau  disparaît  en  arrière  dans 
l’intérieur  de  la  coquille.  Le  siphon  anal  est  étroit,  court;  il  aune  large 
base,  et  il  est  semblable  dans  son  profil  à un  cône  déprimé  ayant, le 
sommet  tronqué  près  de  son  extrémité.  Ce  sommet  est  percé  d’une  ouver- 
ture d’un  petit  diamètre  à bords  simples  et  membraneux  sur  lesquels 
on  n’apercoit  aucune  trace  de  tentacules;  mais  l'apimal  a une  manière 
spéciale  de  clore  ce  siphon:  il  ne  le  contracte  pas  comme  un  sphincter, 
mais  il  rapproche  les  deux  parois  et  les  contourne  ensuite  en  forme  d’S 
semblable  à celle  du  caractère  romain. 

Si  nous  détachons  l'animal  de  sa  coquille,  nous  le  trouvons  üé  à son 
test  par  deux  muscles  adducteurs  fort  inégaux  : l'un,  antérieur,  très  petit, 
triangulaire,  fort  aplati,  est  attaché  sur  l'impressiou  que  nous  avons  fait 
remarquer  sur  les  lames  transverses  des  crochets  ; l’autre,  beaucoup  plus 
grand,  estsubcylindriquc  ; il  est  tout  près  de  l’extrémité  postérieure  de 
l'animal  .elle  siphon  anal  vient  s'appuyer  sur  lui , ainsi  que  dans  tous 
les  autres  Mollusques  dimyaires. 

La  masse  viscérale  est  allongée;  elle  est  cependant  plus  ramassée  que 
dans  les  Moules  , car  elle  est  destinée  à réunir  un  plus  grand  nombre 
d'organes  ; elle  produit  une  saillie  assez  notable  dans  l’intérieur  du  man- 
teau; elle  se  prolonge  eu  arrière,  prend  la  forme  d’un  cône  obtus , et 
s'avance  ainsi  jusque  vers  l’eulrée  du  siphon  branchial  lorsqu’elle  est 
dilatée  par  l’accroissement  des  organes  delà  génération. 

A l’extrémité  antérieure  de  cette  masse  abdominale  et  au-dessous  du 
muscle  adducteur  anterieur,  se  trouve  une  ouverture  buccale  lransver.se, 
ovalaire  et  assezgrande.  Deux  lèvres  membraneuses,  transparentes,  gar- 
nissent cette  bouche  en  se  prolongeant  do  chaque  côté  du  corps  en  une 
paire  de  petites  palpes  labiales , plus  longues  que  larges,  triangulaires, 
pointues  et  très  différentes  de  celles  des  Moules,. semblables  au  contraire 
à celles  des  Vénus  et  des  Cyclndes,  Ces  palpes  , parfaitement  égales, 

T.  I.  PAKTIE.  |I* 


SEIZIEMK  FAMILLE. 


64  a 

.soiil  couverlès  (Je  lamelles  Iransverses,  et  elles  sont  fixées  aux  parties 
latérales  du  corps  par  leur  côté  le  plus  court. 

Le  pied  a une  forme  toute  spéciale  dans  le  genre  qui  nous  occupe  ; 
il  ressemble  beaucoup  à celui  des  Aloules,  mais  il  a non  moins  d’analo- 
gie avec  celui  des  Saxicavcs  et  même  des  Gastrochènes.  Au  moment  où 
les  organes  de  la  génération  sont  en  turgescence,  le  pied  semble  partir 
d'un  large  crypte  assez  profond , circonscrit  de  tous  les  côtés  par  le 
gonflement  des  organes  en  question.  Ce  pied  est  vermiforme,  allongé, 
subcylindracé,  et  susceptible  de  mouvements  très  divers;  il  contient, 
comme  celui  des  Moules  et  des  Saxkaves,  un  organe  propre  à la  forma- 
tion du  byssus.  Les  filaments  de  ce  byssus  se  détachent  d’une  fente 
assez  profonde  qui  règne  dans  presque  toute  la  longueur  de  la  face  in- 
férieure du  pied.  A mesure  que  ranimai  vieillit,  il  ajoute  de  nouveaux 
filaments  à ceux  que  contient  déjà  son  byssus,  et  cet  organe  est  im- 
planté à la  base  du  pied  , dans  un  crypte  membraneux  qui  sort  de  la 
partie  fibreuse  de  l’organe  locomoteur.  Lorsque  nous  décrirons  l’animal 
des  Moules,  nous  ferons  connaître  l’appareil  musculaire  assez  compliqué 
qui  sert  au  mouvement  du  pied,  dans  l’épaisseur  duquel  le  byssus  est 
solidement  engagé.  Dans  les  Congeria  une  partie  de  cet  appareil  manque, 
et  les  muscles  propres  du  pied  sont  tout  a fait  semblables,  pour  le  nombre 
et  la  disposition,  à ceux  des  autres  Mollusques  acéphales  dimyaires. Cepen- 
dant nous  devons  l’ajouter,  c’est  avec  les  Gaslrochènes  que  les  Congêries 
ont  le  plus  de  ressemblance  à cet  égard.  A mesure  que  le  pied  se  dé- 
veloppe, ses  parois  deviennent  assez  larges  pour  embrasser  toute  la 
masse  abdominale  comme  dans  un  sac.  Chez  les  Mollusques  à pied  ver- 
miforme, tels  que  les  Clavagelles  et  les  Gastrocliènes , les  parois  ont 
une  si  faible  importance,  qu'elles  ne  peuvent  revêtir  la  masse  abdomi- 
nale, et  alors  les  fibres  se  transforment  en  avant  et  en  arrière  en  une 
paire  de  tendons  grêles  qui  vont  s’attacher  à la  coquille  en  passant  à 
travers  la  masse  des  viscères.  Nous  observons  une  disposition  semblable 
chez  les  Congêries^  les  muscles  rélracteurs  antérieurs  se  détachent  de 
la  base  du  pied  et  remontent  parallèlement  l'un,  à l'autre,  passent  der- 
rières les  lèvres,  et  vont  s’allacher  à la  coquille  un  peu  au-desSous  du 
muscle  adducteur  antérieur.  Les  muscles  rétracteurs  postérieurs  du 
pied  sont  un  peu  plus  épais,  un  peu  plus  divergents;  ils  sont  noyés  dans 
les  organes  de  la  génération,  et  ils  vont  se  terminer  à la  coquille  en  avant 
du  muscle  adducteur  postérieur. 

L.orsque,  par  un  accident  quelconque,  le  byssus  d'une  Congérie  a été 
brisé  , l’animal  rampe  avec  son  pied  sur  les  corps  solides , portant  sa 
coquille  horizontalement,  exactement  comme  le  ferait  un  Mollusque 


I.ES  DREISSÉNIDKS. 


64;^ 

gasléropode.  Nous  avons  observé  ce  mode  de  locomotion  chez  de  vieux 
individus  que  nous  avions  détachés  dans  lo  dessein  d’en  faire  la  dissec- 
tion : mais  ce  mouvement  est  tout  à fait  spontané  chez  les  individus 
jeunes  qui  se  déplacent  pour  choisir  un  lieu  d'iiabitation  , déplacement 
qui  s’opère  chez  eux  lorsqu’ils  ont  déjà  6 à 8 millim.  de  longueur.  Il  est 
intéressant  de  voir  ces  jeunes  animaux  ramper  à la  surface  des  vases 
dans  lesquels  on  les  tient,  parcourir  des  groupes  d’individus  déjà  con- 
solidés, et  choisir  une  anfractuosité  pour  s’y  loger  définitivement  et  com- 
mencer à y filer  leur  byssus.  Ce  mouvement  de  reptation  est  lent.  Il 
nous  a paru  se  produire  à l’aide  du  même  mécanisme  qui  détermine  la 
progression  chez  les  Limaces,  les  Hélices  et  les  autres  Mollusques  mar- 
cheurs. Les  conchyliologues  savent  qu’il  arrive  souvent  aux  Mollusques 
gastéropodes  aquatiques,  et  cela  peut  s’observer  facilement  chez  les 
Lymnées , qu’ils  se  renversent  à la  surface  du  liquide  et  continuent  à 
ramper  sur  cette  surface  avec  autant  de  rapidité  que  s'ils  étaient  ap- 
puyés sur  un  corps  solfde.  Ce  mode  de  locomotion  difficile  à expliquer, 
nous  l’avons  observé  dans  de  jeunes  Congéries  qui  se  sont  suspendues  à la 
surface  dii  liquide,  ayant  leurs  siphons  dilatés  et  la  surface  plane  du  pied 
a la  surface  de  Teau.  Jusqu’ici  c'est  le  seul  exemple  d’une  telle  locomo- 
tion que  nous  connaissons  parmi  les  Mollusques  acéphalés.  Nous  ne  par- 
lerons pas  du  mode  de  formation  du  byssus  : nous  traiterons  de  cet  ap- 
pareil plus  particulièrement  lorsque  nous  en  serons  arrivé  à la  famille 
des  Alytilacées.  Un  travail  très  intéressant  publié  par  M.  Muller,  dans 
les  Archives  de  Viegmann , travail  dont  nous  avions  vérifié  l’exactitude 
avant  de  l’avoir  consulté , nous  fournira  tous  les  renseignements  dont 
nous  aurons  besoin  pour  faire  connaître  en  détail  la  structure  du  byssus 
chez  les  Mollusques  acéphalés. 

De  chaque  côté  du  corps  descend,  dans  la  cavité  du  manteau,  une 
paire  de  feuillets  branchiaux  qui,  chez  ranimai  vivant,  sont  d’un  jaune 
orangé  assez  intense..  Ces  organes  sont  inégaux  ; la  paire  interne  étant 
plus  allongée  ét  plus  large  que  la  paire  externe.  Les  feuillets  internes 
commencent  par  un  pointe  aigue  qui  s’interpose  entre  les  palpes  labiales 
et  s'avance  jubqu’au  voisinage  de  la  bouche.  Ils  s’élargissent  en  des- 
cendant en  arrière,  et,  un  pou  au-dessous  des  palpes,  les  feuillets  externes 
commencent:  plus  bas,  ils  s'attachent  par  la  ba.se  aux  feuillets  internes: 
tous  deux  gagnent  l’extrémité  postérieure  de  la  masse  abdominale;  la 
paire  du  côté  droit  se  soude  alors  avec  celle  du  côte  gauche,  et  après 
celte  réunion  ils  se  continuent  au-devant  du  siphon  anal,  s’attachent  par 
la  Base  à la  portion  du  manteau  qui  recouvre  le  muscle  adducteur  posté- 
rieur, et  iis  interceptent  toute  communication  entre  la  cavité  du  siphon 

4i* 


SEIZIEME  FAMILLE. 


64/4 

anal  et  celle  du  manteau.  La  structure  des  organes  respirateurs  est  tout 
à fait  semblable  à celle  des  Vénus  et  des  autres  genres  que  nous  avons 
examinés  jusqu’ici;  elle  est,  par  conséquent,  différente  de  celle  des 
Moules  : en  effet,  dans  ce  dernier  genre,  non  seulement  les  branchies 
sont  disposées  autrement  sur  les  parties  latérales  du  corps,  mais  elles 
sont  composées  de  filaments  qui  se  disjoignent  avec  la  plus  grande  faci- 
lité, et  chez  lesquels  on  ne  retrouve  plus  la  même  structure  vasculaire  que 
celle  qui  se  montre  dans  les  branchies  du  genre  que  nous  décrivons. 

Les  Congeria  paraissent  être  hermaphrodites;  les  observations  que 
nous  avons  faites  à ce  sujet  ne  nous  paraissent  pas  encore  assez  con- 
cluantes, et  nous  avons  besoin  de  les  répéter  dans  le  moment  oii  ces 
animaux  seront  prêts  à pondre.  Nous  avons  trouvé-  des  individus  chez 
lesquels  l'ovaire  était  blanc  ; chez  ceux-là  nous  avons  observé  un  nom- 
bre considérable  d'œufs  encore  peu  avancés , dans  lesquels  on  distin- 
guait cependant  la  vésicule  dePurkinge,  environnée  d’un  grand  nombre 
de  globules  sublransparents.  Au  milieu  de  la  liqueur  laiteuse  répandue 
par  la  déchirure  de  1 ovaire , nous  avons  remarqué  des  spermatozoïdes 
formés  d'un  corps  ovalaire  très  étroit,  terminé  par  une  queue  filiforme 
excessivement  ténue.  Ces  animalcules  ne  jouissaient  pas  d’un  mouve- 
ment très  considérable  ; quelques  uns  cependant  se  mirent  a nager  en 
oscillant  lorsqu’une  goutte  d'eau  délayait  la  matière  de  l’ovaire.  D’au- 
tres individus  do  Congeria  nous  ont  offert'  un  organe  générateur  d’un 
jaune  orangé  très  intense.  Cet  organe,  sensiblement  granuleux,  ayant 
été  observé  par  lambeaux , nous  a offert  une  masse  énorme  d'animaux 
spermatiques  semblables  à ceux  que  nous  venons  de  décrire  précédem- 
ment , et  qui  vécurent  plusieurs  heures  sur  le  porte-objet  du  microscope, 
nageant  avec  rapidité  et  conservant  le  mouvement  propre  à ce.  genre 
d'animaux.  Lorsque  les  globules  de  l’organe  é.taient  conservés  dans 
leur  entier,  il  se  présentait  sous  l'apparence  de  très  grandes  capsules 
fermées  de  toqtes  parts  et  sur  les  bords  desquelles  se  manifestait  le  mou- 
vement d’organes  vibratiles  excessivement  fins  et  excessivement  multi- 
pliés. En  plaçant  quelques  uns  de  ces  singuliers  organes  sous  le  com- 
presseur et  en  les  faisant  éclater,  il  en  est  sorti  une  immense  quantité 
d’animaux  spermatozoïdes,  ainsi  que  de  nombreux  globules  trauspareiits, 
arrondis  et  de  plusieurs  diamètres.  Il  semblerait  que  les  organes  dont 
nous  ï)arlons  auraient  leurs  parojs  formées  par  le  corps  lui-même  des 
spermatozoïdes,  dont  la  queue,  libre  au  deliors,  se  présenterait  à la  .sur- 
face sous  la  forme  de  cils  vibratiles.  Chez  ces  individus  à organe  de  la 
génération  d’un  jaune  orangé , nous  n'avons  trouvé  aucune  irac-e  d’ovules 
ou  d’œufs. 


i.ES  DUEISSENIDES. 


(>4-5 

Nous  ne  terminerons  pas  ce  qui  a rapport  à l’animal  curieux  des 
Congéries  sans  dire  quelques  mots  du  système  nen^eux.  M.  Vanbe- 
neden,  dans  le  mémoire  que  nous  avons  eité  de  iiii,  s’est  attaché  parti- 
culièrement à la  description  de  ce  système  d'organes;  mais  il  ne  l’a  pas 
fait  connaître  d'une  manière  complète;  il  aurait  semblé  d’après  lui 
qu’il  n’était  point  semblable  à celui  des  autres  Mollusques  acéphales. 
M.  Canlraine , dans  une  note  publiée  dans  le  Bulleiin  de  l’Académie  de 
Bruxelles,  a judicieusement  rectiGé  les  idées  de  M.  Vanbeneden  , et  a 
complété  la  connaissance  du  Système  en  question  en  faisant  connaître 
le  ganglion  pédieux  qui  avait  échappé  aux  investigations  du  professeur 
de  Louvain.  Nous  avons  nous-même  étudié  ce  système  avec  un  soin 
minutieux;  nous  devons  dire  que  par  sa  distribution  il  rentre  dans  Je 
plan  commun  à tous  les  Mollusques  acéphalés'dimyaires.  Si,  dans  un 
certain  nombre  de  ces  Mollusques , il  existe  deux  ganglions  postérieurs 
accolés  par  leur  bord  interne,  il  y eu  a d'autres  chez  lesquels  la  soudure 
des  deux  ganglions  est  tellement  parfaite , que  Ton  n’en  aperçoit  plus 
qu'un  seul  : c’est  ce  qui  a lieu  chez  les  Congéries.  Ainsi,  chez  ces  Mol- 
lusques on  peut  compter  quatre  ganglions  principaux,  comme  dans 
tous  ceux  de  la  même  classe.  La  distribution  des  filets  nerveux  est 
semblable  à ce  que  nous  savons  déjà  des  autres  genres  de  la. plupart 
des  familles  que  nous  avons  parcourues.  ' 

Des  faits  que  nous  venons  de  rapporter,  il  en  ressort  avec  évidence 
que  les  Congéries  ne  peuvent  rester  dans  la  famille  des  Mytilacées.  Le 
manteau  est  fermé  chez  les  Congéries,  il  est  ouvert  chez  les  Moules. 
Dans  le  premier  genre , il  est  pourvu  de  deux  siphons  ; dans  le  deuxième , 
il  n y a plus  aucune  trace  de  ces  organes.  Si  le  pied  et  le  byssus  sont 
semblables,  la  bouche  et  les  palpes  labiales  sont  très  diiférenles.  Mais 
ce  qui  est  bien  plus  essentiel  encore , ce  sont  les  différences  considéra- 
bles qui  se  manifestent  dans  les  organes  si  importants  de  la  respiration. 
Le  système  nerveux  lui-mêrne  présente  des  différences  importantes  : 
par  conséquent,  si  1 on  ne  se  laisse  pas  entraîner  par  la  forme  extérieure 
et  par  la  manière  de  vivre,  on  devra  de  toute  nécessité  éloigner  beau- 
coup des  animaux  que  d’abord  les  zoologistes  ont  rapportés  à un 
même  genre , et  que  plus  tard  ils  ont  laissés,  soit  dans  la  môme  famille , 
soit  dans  des  familles  voisines.  Nous  concluons  de  tout  ce  qui  précède . 
que  le  genre  Congério  doit  remonter  beaucoup  dans  la  série  des  Mol- 
lusques acépbalés,  et  qu’il  doit  trouver  sa  place,  ainsi  que  nous  l’avons 
dit  précédemment,  non  loin  de  la  famille  des  Conques  fluviatiles. 

On  ne  connaît  jusqu  ici  qu’un  petit  nombre  d'espèces  vivantes  appar- 
tenant au  genre  Congério.  Trois  sont  citées,  'et  toutes  trois  sont  propres 


SEIZIEMK  FAMILLE. 


6\6 

aux  eaux  douces.  L'une,  découverte  par  Pallas,  est  actuellement  ré- 
pandue dans  presque  toute  1 Europe.  On  .la  croyait  d'abord  propre  aux 
régions  qu’arrosent  le  Danube  et  ses  divers  affîaents.  Peu  à peu  cette 
même  espèce  a été  découverte  dans  d’autres  régions  , et  notamment 
dans  les  rivières  de  la  Hollande  et  do  la  Belgique.  Plus  tard  elle  ,ge 
retrouva  aussi  dans  les  Docks  de  Londres,  et  enfin  elle  pénétra  récem- 
ment en  France,  particulièrement  dans  les  rivières  qui  ont  des  com- 
munications avec  celles  de  la  Belgique  à l’aide  des  canaux. 

Un  savant  observateur  d'Abbeville,  M.  Bâillon  , à l’obligeance  duquel 
nous  devons  la  communication  dé  Congéries  vivantes , a fait  des  obser- 
vations précieuses  à l’occasion  de  l’apparition  subite  de  la  Congérie 
dans  les  eaux  de  la  Somme  et  de  ses  affluents.  Si  l’on  examine  les  allu- 
vions  anciennes  dans  lesquelles  se  retrouvent  à l’ctat  fossile  la  plupart  des 
Mollusques  actiiollement  vivants  dans  le.  môme  pays  , on  n’y  retrouve 
pas  la  moindre  trace  des  Congéries.  Dans  les  alluvions  plus  récentes  , 
dans  les  tourbières,  dans  les  dépôts  limoneux , produits  récents  des 
cours  d’eau . on  ne  retrouve  non  plus  aucune  trace  des  coquilles  qui 
nous  occupent.  Il  y a sept  ou  huit  ans  les  Congéries  étaient  si  peu  con- 
nues des  naturalistes  qui  habitent  le  département  de  la  Somme,  que 
l’un  d'eux,  voulant  observer  l’animal,  en  sollicita  d’un  correspondant 
belge,  et  en  obtint  quelques  exemplaires  seulement;  mais  depuis  les 
eaux  de  la  Somme  et  de  ses  petits  affluents  sont  infestées  de  Congéries , 
à ce  point  que  l’on  redoute  que  leur  accumulation  ne  devienne  un 
obstacle  à la  circulation  de  Peau.  Voilà  donc  un  Mollusque  qui  a paru 
subitement  dans  un  pays  où  il  n’existait  pas  , et  qui  en  un  petit  nombre 
d'années  Æ’est  multiplié  d’une  manière  extraordinaire.  Plusieurs  obser- 
vateurs ont  annoncé  avoir  vu  dans  les  sables  de  l’Oise  des  coquilles 
de  Congéries;  et  comme,  en  général,  ces  animaux  se  sont  trouvés 
dans  des  rivières  qui  donnent  passage  aux  bateaux  qui  viennent  de  la 
Belgique,  on  a supposé  qu’ils  ont  été  transportés  par  ces  bateaux  et 
répandus  dans  toutes  les  eaux  qu’ils  traversent.  II  y a cependant  une 
observation  sérieuse  à ce  sujet , et  elle  n’avait  pas  échappé  à la  sagacité 
de  M.  Bâillon.  Depuis  très  longtemps , en  effet,  des  communications 
sont  ouvertes  entre  les  eaux  de  la  Somme  et  celles  de  là  Belgique.  Depuis 
plus  de  cinquante  ans  des  bateaux  de  commerce  vont  d’un  pays  dans 
l’autre.  Pourquoi  les  Congéries  n’ont-elles  pas  été  apportées  plus  tôt? 
Quel  que  soit,  au  reste,  le  mode  de  transportation  au  moyen  duquel  ces 
Mollusques  se  sont  successivement  propagés,  il  n’en  reste  pas  moins 
ceci  qui  mérite  l’attention  des  naturalistes  : c’est  que  nous  sommes  té- 
moins du  fait  do  la  dispersion  d’une  espèce , fait  analogue  à ceux  qui  se 


MiS  DRKISSEMÜES. 


sont  passés  à des  époques  plus  anciennes,  que  nous  révèlent  l'étude  de 
la  géologie  et  celle  surtout  des  fossiles  et  de  leur  distribution  dans  les 
couches  de  la  terre.  Il  est  curieux  de  voir  une  espèce  habitant  très 
anciennement  des  régions  où  elle  a laissé  de  nombreux  fossiles,  se 
répandre  de  proche  en  proche  et  s'élever  pour  ainsi  dire  dans  la  chro- 
nologie des  terrains  quelle  est  appelée  à caractériser  à leur  tour.  Fos- 
sile dans  l’étage  tertiaire  supérieur,  le  Contferia  polymorpha  a traversé 
toute  la  période  quaternaire,  et  la  voilà  qui  apparaît  dans  les  dépôts  les 
plus  modernes  de  nos  fleuves,  où  elle  laissera  des  témoignages  des  lon- 
gues périodes  pendant  lesquelles  un  Mollusque  peut  subsister,  inva- 
riable témoin  des  changements  nombreux  qui  se  sont  opérés  autour  de 
lui  sans  que  lui-même  en  ait  ressenti  la  moindre  influence. 

Des  deux  autres  espèces  , l’uno  est  propre  aux  eaux  douces  du  Sé- 
négal , et  l'autre  à celles  de  l'Arhérique  centrale.  Nous  n'admettons  pas 
parmi  les  espèces  du  genre  celle  qu’y  rapporte  M.  Benson , dans  le 
Catalogue  des  coquilles  de  Chusan , dans  le  tome  IX  des  Annales  des 
sciences  'iiaiurelles  de  Londres.  Çe  naturaliste  dit  de  sa  coquille  qu’elle 
est  plissée  en  dehors  et  qu’elle  est  nacrée,  en  dedans,  deux  caractères 
qui  n’appartiennent  pas  aux  véritables  Congéries.  M.  Herausgeber, 
dans  \qs  Archives  de  TFïegfnian  ( 1 838),  a également  proposé  d'intro- 
duire dans  le  genre  toutes  les  Moules  marines  qui  ont  une  cloison  dans 
les  crochets.  Nous  avons  vu  pourquoi  ces  espèces  sont  inadmissibles 
dans  le  genre  Cohgérie. 

Les  espèces  fossiles  sont  beaucoup  plus  nombreuses.  Nous  ^ en 
comptons  douze,  et  dans  ce  nombre  ne  sont  pas  compris  .les  Mijocon- 
ques  que  M.  Gray  rapporte  avec  doute  à la  famille  des  Dreissénides.  Le 
genre  Myoconque  a certainement  beaucoup  d'analogie  avec  les  Congé- 
ries, du  moins  par  la  position  du  muscle  adducteur  antérieur,  situé,  à 
ce  qu’il  paraît . si  ce  n’est  sur  une  lame  Iransverse  dominant  la  cavité 
des  crochets,  du  moins  sur  un  épaississement  tcstacé occupant  la  môme 
place.  Mais  ce  qui  rend  impossible,  quant  à présent,  l’admission  des 
Myoconques  parmi  les.  Congéries , c’est  que  l'impression  du  muscle 
postérieur,  dans  plusieurs  espèces , est  semblable  à celle  des  Moules  ; 
par  conséquent , ces  espèces  figurées  parmi  les  Myoconques  sont  pour 
nous  de  véritables  Moules,  dont  nous  aurons  occasion  de  reparler  dans  la 
suite.  Quant  aux  autres  Myoconques,  elles  sont  pour  nous  de  véritables 
Cardites  , voisines  d’une  espèce  vivante  bien  connue , le  Cardita  nephre- 
tica.  Par  l’exclusion  des  Myoconques , le  genre  Congérie  ne  se  trouve 
pas  dans  les  terrains  secondaires.  Il  commence  dans  les  terrains  ter- 
tiaires de  l’étage  moyen  ; car  nous  n’y  admettons  pas  des  espèces 


SEIZIKME  I-aMILLE. 


0/,8 

nienlioiiuées  par  Al.  Alelleville  dans  les  sables  inférieurs  du  bassin  de 
Paris  : ce  sont  de  véritables  Moules. 

Parmi  les  espèces  fossiles , il  y en  a une  qui  a son  représentant 
actuellement  vivant:  c’est  le  Congeria  polymorpha.  Quelques  personnes 
ont  prétendu  que  le  Congeria  Brardi , avait  aussi  dans  le  DreisserM 
afrimna  de  Vanbeneden  son  représentant  vivant.  Cette  dernière  espèce, 
dont  on  trouve  des  débris  dans  les  terrains  tertiaires  moyens  de  Mayence, 
de  l'Angleterre  et  de  la  Belgique , attesterait  les  changements  considé- 
rables qui  sont  survenus  dans  la  température  de  l'Europe  centrale  , s’il 
est  vrai  que  son  analogue  vivant  a quitté  les  régions  tempérées  de 
l’Europe  pour  trouver  au  Sénégal  une  température  qui  lui  est  néces- 
saire. Mais  l’identité  des  deux  espèces  nous  paraît  encore  contestable , 
malgré  l'opinion  d’un  certain  nombre  de  naturalistes  qui  n'hésitent  pas 
à l’admettre. 

Dans  le  terrain  tertiaire  moyen , nous  connaissons  sept  espèces  qui 
presque  toutes  sont  fossiles  dans  le  bassin  do  Vienne  , ou  dans  d’autres 
parties  de  l’Allemagne,  de  la  Gallicie  ou  de  la  Wolhynie.  Nous  signa- 
lerons particulièrement  les  espèces  suivantes  : 

•1°  Congeria  Basleroti^  confondu  autrefois  avec  le  Mytilus  Brardi. 

Il  se  trouve  à Bordeaux,  à Dax,  en  Touraine,  à Vienne  et  en  Bel- 
gique. 

'2®  Congeria  Brardi. 

Cette  espèce  est  encore  plus  répandue  que  la  précédente;  elle  est 
abondante  en  Allemagne,  aux  environs  de  Mayence,  en  Pologne,  en 
Gallicie  , et  elle  est  également  citée  dans  les  terrains  tertiaires  moyens 
du  Vicentin  et  de  l’Angleterre. 

Les  terrains  tertiaires  supérieurs  ne  contiennent  point  de  Congéries , 
si  ce  n’est  ceux  de  la  Crimée  qui  sont  dans  le  voisinage  de  la  Caspienne , 
et  que  AT.  de  Verneuil  a fait  connaître.  Nous-même  avons  décrit  quatre 
espèces  sous  les  noms  de  Mytilus  inœqutvalvis,  rostriformis , subcari- 
natus  et  apertus , qui  conservent  leurs  noms  spécifiques  en  passant 
dans  le  genre  Congérie  auquel  elles  appartiennent. 

Parmi  les  espèces  vivantes,  une  seule,  celle  qui  peuple  en  abondance 
les  eaux  douces  de  l’Europe  centrale,  le  Congeria  poUjmorpha,  se' trouve 
aussi  fossile  en  Allemagne  dans  les  terrains  quaternaires. 


LES  DRElSSEiSlDES. 


^49 

1.  Congérie  polymorphe.  Congevia  'pohjmorpha,  Pallas. 

PL  37.  f.  9.  10.  II. 

6’’.  Testa  oblongâ  ^ arcuatâ  ^ injlatn  ^ lœvigatà^  dorso  carinata^  intüs 
albidd  ^ eicths  suh  epidermide  flavo  ^ Jasco  transversim  zonatd  ; 
timbonibus  acutts  y terminalibns  ^ inths  septiferis. 

Mytilus  polymorphus.  Scliroel.  Eiill.  t.  3,  p,  47*»  n"  ^7» 

Pallas.  Voy.  «n  Russie,  Appendix.  p.  an. 

Id,  Gmellii,  p.  33(53.  u"  57. 

Mvtiîns  è Jiuvio  Jf  aJga.  CbenHi.  Concli.  (.  1 1 . ().a56.  pl.  aoS.  t.  auaS, 
M.  Hitgenii.  Debaer,  ad  instaur.  Soîein.  adj\  inyt.  nov.desc,  p,  17. 
Kœnigsbfrg,  iSaS. 

47.  Uneotus,  Waardenbiirg,  De  liist.  nat.  Relg.  indigeii.  (pris  pour 
le  Myt,  îineaUis  de  Lamk.). 

iV.  aren,  Kikx,  Dcsc.  d’une  nouvelle  espèce  de  Moule. 

Dreissena  polymorpha.  Vanbeiieden,  Ann.  des  sc.  nat.  avril  i835. 

р.  210.  pl.  8.  f.  I à II. 

Üesb.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  l.  7.  p.  5ü.  n”  38. 

Sowerby,  Généra  of  sheUs.  Mytilns,  f.  4« 

MytUîis  pol^nnorphus.  Hanley.  Desc.  rat.  p.  25o. 

Id.  Reeve,  Conch.  sysl.  t.  i.  p.  140.  pl.  102.  f.  4. 

Dreissena  polymorpha.  Gray  dansTurlon,  2“  éd.  p.  3or  . 

Tickogonia  Rossroass.  leon.  part.  i'®.  p.  ii3.  f.  69. 

Mytilus  polymorphus,  Scbroel.  Fluss.  Concl;.  p.  197.  n"  25. 

Id.  Georgy,  Geog.  des  Russics.  l.  4.  p.  2207. 

/J.  Sow.  Zool.  Jüurn.  I.  1,  p.  084. 

Id.  Wood,  ïud.  Test.  Suppl,  p.  8.  pl.  2.  f.  6. 

Mytilus  polymorphus . Pleiffer,  Sysl.  aiiord.  3*  part.  p.  67. 

Tichogonia  polymorpha.  Millier,  Arch.  de  Wiegm.  t.  4.  p.  i5. 

Id.  Muller,  zur  Anat.  JerTiebog.  Arcb.  de  Weig.  t.  4.  pl.  40. 
i^lytilina  polymorpha.  Caiitraine,  Ann.  sc.  nat.  2®  série,  t.  7.  p.  3ü2. 
Id.  Cantraiue,  Rull.  de  Brux,  t.  4,  p.  106. 

Dreissena  polymorpha.  Picard,  Hist.  des  Moll,  de  la  Somme,  p.  3o8. 
Süwerby,  Conch.  mau.  f.  xSp. 

Dythohnia  Danubii?  iày.  Çat.  p.  3o.  11“  iîSO. 

Tichogonia  Chemnitzii,  Auton,  Verz.  p.  17. 

Id,  Kuster  dans  Cberntiitz,  2*-*  éd.  p.  6.  n^.  i . [d.  r . t‘.  3.  4 . 5. 

Mytilus  polymorphus.  Catlow,  Comb.  nom.  p.  74.  n^'  3y. 

t'ossilis.  Dreissena  polymorpha.  Vtvown  ^ Lelli.  t.  2.  p.  <)25.  {Syn,  pliir. 

с. cclns.). 


(j5o  SEIZIEME  FAMILLE.  — LES  DREISSÉNIDES. 

Mytilus  polymorphns.  Eicluv.  Nal,  hist.  Skizze.  p.  21 1. 

Dreissena polymorpha,  Eichw.  Fanna  Casp.  Cauc.  p.  265. 

Id  Bronii,  inü.  Faléont.  t.  r.  p.  438. 

Id.  Njst,  Fus»,  de*  Bcig.  p.  264  et  268. 

Le  Congeria  polymorpha  est  une  coquille  de  taille  médiocre;  elle  est 
longitudinale;  sa  longueur  est  presque  le  double  de  sa  largeur;  la 
surface  des  valves  est  partagée  en  deux  portions  inégales  par  un  angle 
aigu  qui  prend  naissance  aux  crochets  et  vient  aboutir  au  bord  inférieur. 
Cet  angle  détermine  la  limite  d’un  côté  antérieur  aplati  et  même  con- 
cave. Les  crochets  sont  aigus,  rapprochés,  terminaux,  à peine  inclinés. 
Le  côté  supérieur,  sur  lequel  le  ligament  e.st  attaché,  est  oblique , et 
forme  un  angle  d’environ  45“  avec  Taxe  longitudinal.  L’intérieur  des 
valves  est  blanc , quelquefois  marbré  de  brun  grisâtre.  La  surface 
extérieure,  couverte  d’un  épiderme  mince  et  subécailleux , est  ornée  sur 
un  fond  blanc  de  larges  zones  transversales  d’un  brun  noir,  onduleuses , 
quelquefois  même  anguleuses  et  en  zigzag.  Ces  zones  sont  plus  ou 
moins  nombreuses  selon  les  individus;  il  y en  a chez  lesquels  elles  se 
rapprochent  et  se  confondent  en  une  nuance  uniforme  d’un  brun  marron 
plus  ou  moins  foncé.  Les  grands  individus  de  cette  espèce  ont  36  millim. 
de  long  et  1 7 de  large. 

2.  Congérie  de  Bastérot.  Congeria  Basieroii,  Desh. 

PI.  37.  f.  15.  16. 

C.  Testa  elongato-augustâ  ^ suheompressây  lœvigatâ,  dorso  apieeque 
carinato-  gibbosâ;  umbonibus  acuth  y redis  y termtnnlibus , intùs 
septiferis, 

Mytilus  Brardiy  Var.  Basl.  foss.  de  Bord.  p.  78.  n®  2. 

An  eadem  spec.  M,  Brardi?  Sow.  Min.  ronch.  pl.  532.  1.  2. 

Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  7.  p.  54.  n®  6. 

Mytilus  BasterotL  Duj.  Foss,  de  la  Tour.  p.  59. 

Id.  Graleloup,  Cat.  Zool.  p.  6r.  Un  65t. 

Dreissena  Basleroti.  Bronn,  Leth.  geogn.  l.  2.  p.  924. 

Mytilus  aencirostris,  Ooldf.  Petref.  (Verm.  p.  172.  n®  14.  pl.  129.  f.  ii. 

M.  Brardiy  Zieleti.  Petr.  AViirt.  p.  78.  pl.  59.  f.  i , 

Tichagonia  Brardi.  Pot.  et  Mieh.  Cat,  des  Moll.  t.  2.  p.  i36.  n®  21. 

Dreissena  Basteroti.  Nysl,  foss.  de  Beig.  p.  265.  pl.  20.  f.  7. 

Bronn,  Tnd.  paleont.  t.  i.  p.  438. 

M.  Bastérot  a confondu  cette  espèce  avec  le  Mytilus  Brardi , en  la 
désignant  sous  le  litre  de  variété.  Nous  l'avons  séparée,  et  nous  lui 


DIX-SËPTIÈME  FAMIM.E.  — LES  CYCLAÜES.  65 1 

avons  consacré  le  nom  du  naturaliste  qui  le  premier  l’a  signalée  à 
l’attention  dos  paléontologistes.  Cette  petite  coquille  est  plus  mytili- 
forme  que  la  plupart  des  Congéries.  Elle  est  allongée,  étroite,  presque 
équilatérale,  peu  bombée,  et  l’angle  obtus  qui  divise  la  surface  des 
valves  la  partage  en  deux  parties  presque  égales.  Vers  le  sommet  des 
crochets,  l’angle  dont  nous  parlons  devient  aigu , mais  il  disparaît  rapi- 
dement, il  est  tout  à fait  effacé  vers  l'extrémité  inférieure.  Le  côté 
antérieur  est  aplati  vers  le  haut  do  la  coquille  ; il  est  un  peu  sinueux 
et  irrégulier,  à cause  de  la  fente  que  produit  le  passage  du  byssus.  Le 
coté  postérieur  et  supérieur  est  légèrement  arqué;  il  forme  un  angle  très 
aigu  avec  Taxe  longitudinal.  Les  stries  irrégulières  d’accroissement  cou- 
vrent la  surface  externe',  elles  annoncent  la  présence  d’un  épiderme 
écailleux  lorsque  la  coquille  était  vivante.  A Tintérieur,  les  valves  sont 
lisses.  L’impression  musculaire  postérieure  est  ovale , obronde , et  elle 
se  prolonge  en  avant  et  en  haut  en  une  sorte  d’appendice  ellipsoïde 
produit  par  l’insertion  du  muscle  rétracteur  postérieur  du  pied,  qui  dans 
cette  espèce  devait  être  gros  et  puissant. 

Cette  coquille  est  abondamment  répandue  dans  les  terrains  tertiaires 
du  bassin  de  l’Adour,  bassin  dans  lequel,  d’après  les  précieuses  obser- 
vations de  M.  RauÜn,  s’est  opéré. synchroniquement  le  dépôt  de  couches 
d'eau  douce  et  de  couches  marines  qui  se  sont  irrégulièrement  enche- 
vêtrées. Cette  même  espèce  se  retrouve  également  dans  les  terrains  de 
la  Touraine. 

Les  grands  individus  ont  25  millimètres  de  long  et  t I de  large. 


DlX-SEPTIÉME  FAMILLE. 

Les  Cyclades,  Fér. 

CARACTÈRES.  — Animal  trigone,  ovale  ou  oblong;  les  lobes 
du  manteau  désunis  en  avant  et  en  bas  , terminés  postérieure- 
ment en  deux  siphons  courts,  le  plus  souvent  séparés.  Pied 
mince,  triangulaire.  Branchies  allongées,  presque  égales. 

Coquille  ovale , obronde  ou  subtrigone , régulière , close. 
Charnière  articulée , soit  seulement  par  des  dents  latérales , 
soit  par  des  dents  cardinales,  soit  enfin  par  des  dents  laté* 


6S:>. 


IMX-SKrTlEME  FAMILLE. 


raies  et  cardinales  tout  à la  fois.  Impression  palléale  simple  ou 
sinueuse.  Ligament  extérieur. 

GENRES.  — Gaiatea,  Glauconome , Cxjprina , Cyrena  , 
Cyclas , Pisidiimi. 

Liimurck,  comme  nous  l'avons  vu,  forma 'dans  son  dernier  ouvrage 
une  famille  des  Conques,  qu’il  partagea  en  deux  sections  ; à l’une,  il 
donna  le  nom  do  Conques  marines  ; à la  seconde , celui  de  Conques' 
Iluviatiles.  Presque  tous  les  zoologistes  crurent  nécessaire  de  faire  une 
famille  distincte  de  chacune  des  sous^familles  de  Lamarck.  Férussac, 
le  premier,  proposa  la  famille  des  Cyclades  ; elle  fut  généralement 
adoptée,  en  subissant  quelques  modifications  peu  importantes,  car  tous 
les  naturalistes  y laissèrent  les  trois  genres  Cyclàde,  Cyrène  et  Galatée 
que  Lamarck  avait  introduits  dans  les  Conques  fluviatiles.  Dans  la 
première  édition  du  Règne  animal^  Cuvier  a rangé  le  genre  Cyclade 
dans  la  famille  des  Cardiacés , en  y confondant  les  Cyrènes  et  même  les 
Galatées.  Pour  maintenir  sa  classification  dans  l’esprit  de  celle  du 
grand  zoologiste,  Férussac,  eu  proposant  la  famille  des  Cyclades,  la 
rangea  dans  l'ordre  des  Cardiacés,  substituant  les  mots  d’ordre  cl  de 
famille  à ceux  de  famille  et  de  genres  préférés  par  Cuvier.  Quelques 
années  plus  tard,  Lalreille  introduisit  un  genre  de  plus  dans  la  famille 
des  Cyclades:  c’est  celui  nommé  Cyprine  par  Lamarck.  Cette  innovation 
ne  doit  pas  être  repoussée  ; car,  quoique  le  genre  en  question  vivo  dans 
la  mer,  on  peut  dire  que  , par  sa  coquille  et  par  son  animal,  il  se  rap- 
proche singulièrement  des  Cyrènes,  ainsi  que  nous  le  verrons  bientôt. 
Cependant  ces  nouveaux  rapports  indiqués  par  Latreüle  pour  les 
Cyprines  ne  furent  point  goûtés,  et  MM.  Flemipg,  Menko,  d’Orbigny, 
ne  laissèrent  que  des  genres  lacustres  dans  la  famille  des  Cyclades. 

L’étude  de  l’animal  du  genre  Iridine  iious.ayant  dévoilé  l’existence 
de  siphons  courts  et  gros,  prolongeant  le  manteau  en  arrière,  nous 
crûmes  devoir  retirer  le  genre  de  la  famille  des  Naïades  pour  le  trans- 
porter dans  celle  des  Cyclades.  Nous  attachions  a cette  époque  trop 
d’importance  à ces  organes  dépendants  du  manteau  : si  la  présence 
des  siphons,  chez  les  Iridines,  les  rapprochent  à quelques  égards  de  la 
famille  des  Cyclades , elles  s’en  éloignent  et  se  rattachent  aux  Unio  et 
aux  Anodontes  par  tous  les  autres  points  de  l'organisation;  par  consé- 
quent nous  avons  abandonné  cette  première  opinion  que  nous  nous 
étionsJaitc  de  la  classification  des  Iridines. 

.M.  Gray  a lait  connaître  dans  le  premier  fascicule  du  SpicÜegia  zoolo- 


LES  CYCLADES. 


(iij  J 

^ica,  un  genre  d'eau  douce  très  intéressant  auquel.il  a donné  le  nom 
de  Glauconomu;  il  le  place  dans  la  famille  des  Vénus.  Les  caractères 
empruntés  à la  coquille  prouvent  qu'on  effet  le  genre  nouveau  doit  être- 
maintenu,  et  que  ses  rapports  s’établissent,  si  ce  n’est  directement 
avec  les  Vénus , du  moins  avec  plus  de  certitude  avec  les  Conques 
lluyialiles.  Les  caractères  de  l’animal,  présentés  parM.  Sowerby  dans 
son  Gênera  of  sheîls,  viennent  appuyer  notre  opinion,  et  le  genre 
Glauconorae  peut  aussi  bien  faire  partie  de  la  famille  des  Cyclades  que 
le  genre  Galalée  lui-même. 

Déjà  en  I8H  , Megerle  avait  indiqué  un  petit  genre  inutile,  dé- 
membré des  Cyclades,  sous  le  nom  de  P/sum.  Personne  n’avait  adopté 
ce  genre.  M.  Pfeiffer,  dans  son  ouvrage  sur  les  Mollnsqucs  terreatres  el 
Iluviatiles  de  V Allemagne  ^ ouvrage  rempli  d’excellentes  observations, 
changea  en  Pisidium  le  nom  du  genre,  et  l'appuyant  d’une  figure  de 
l’animal  et  d’une  description , il  fit  voir  la  différence  assez  considérable 
qui  le  sépare  des  Cyclades. 

Si  le  plus  grand  nombre  des  classificateurs  ont  adopté  une  famille 
des  Cyclades , quelques  autres , inspirés  par  la  méthode  do  Cuvier,  ont 
conservé,  à son  exemple,  de  très  grandes  familles,  dans]  lesquelles  il  a 
été  difficile  d’établir  des  rapports  naturels  entre  des  genres  très  diffé- 
rents par  leur  organisation.  Nous  voyons , par  exemple  , dans  le  Traité 
de  malacologie , le  genre  Cyclade  représentant  la  famille  des  Cyclades  de 
Férussac , dans  l’immense  famille  des  Conchacées,  entre  les  Lucinesel 
les  Cyprines , non  loin  des  Tellines  et  des  Mactres.  Rang  modifie  un 
peu  l’arrangement  de  M.  de  Blainville  : il  conserve  les  genres  de  La- 
marck,  les  place  dans  la  famille  des  Conchacées,  et  les  intercale  entre 
les  Erycines  et  les  Crassatelles. 

M.  Anton  eut,  au  sujet  des  Cyclades,  une  opinion  différente  de  tontes 
celles  que  nous  venons  d’exposer,  et  qu’il  serait  assez  difficile  de  justi- 
fier. En  effet,  ce  naturaliste,  après  avoir  réduit  la  famille  aux  trois 
genres  Çyrène.  Cyclade  et  Pisidium  , la  met  loin  des  Conques , lui  fait 
franchir  toute  la  série  des  Cardiacés , desTridancés,  desArcacés,  pour 
venir  la  poser  à côté  de  la  grande  famille  des  Naïades.  L’exemple  de 
M.  Anton  ne  sera  certainement  pas  suivi , l'ordre  naturel  se  trouve  trop 
violemment  brisé;  pour  s’en  convaincre,  il  suffira  de  comparer  ce  que 
nous  allons  exposer  des  genres  de  la  famille  des  Cyclades , et  ce  que 
nous  dirons  plus  lard  de  ceux  de  !a  famille  des  Naïades. 

Nous  ne  pouvons  pas  nous  dispenser,  pour  terminer  l'histoire  abrégée 
de  la  famille  des  Cyclades , d’exposer  le  plus  brièvement  possible  la 
classification  que  vient  de  publier  M.  Gray,  dans  la  l-'î®  partie  des 


DIX-SEFTIEME  FAMILLE. 


654 

Procès-verbaux  de  la  Société  zoologique  de  Londres.  M.  Gray  n'adople 
pour  la  famille  aucune  des  dénominalions  qu'elle  a re(;ucs  avant  lui;  le 
nom  de  Corbiùuladœ^  emprunté  au  genre  Corbicula  de  Megerle,  est 
celui  qu’il  préfère.  Le  savant  zoologiste  rejette  de  la  famille  trois  genres 
que  nous  y admettons , Cyprima  et  Glauconome , qui  font  partie  de  la 
famille  des  Venusinœ , comme  nous  l'avons  dit  précédemment  , et  celui 
des  Galatées  qui  fait  partie  de  la  famille  des  Teilînidœ.  Malgré  ces 
retranchements  considérables,  la  famille  des  Corbiculadœ  contient 
encore  cinq  genres  dans  l ordro  suivant  : 

-l"  Corbicula,  Megerle. 

Genre  sans  valeur,  destiné  à réunir  celles  des  espèces  de  Cyrènes  de 
Lamarck  qui  ont  les  dents  latérales  striées.  Nous  verrons,  en  traitant 
des  Cyrènes,  ce  caractère  disparaître  graduellement,  et  nous  verrons 
aussi  ranimai  des  espèces  qui  le  possèdent  ne  différer  en  quoi  que  ce 
soit  de  celui  des  espèces  à dents  latérales  lisses. 

2“  Cyrena , Lamk. 

M.  Gray  réduit  ce  genre  à celles  des  es()èces  qui  ont  les  dents  laté- 
rales lisses. 

3®  Velorita,  Gray. 

Ce  genre  , institué  par  M.  Gray,  ne  peut  supporter  un  examen  appro- 
fondi; il  a pour  type  une  Cyrène  à charnière  épaisse  et  à dents  lalé- 
raies  courtes. 

4“  Scopoli. 

Compléleraeril  oublié  , le  genre  Sphœrium  de  Scopoli  correspond 
exactement  au  genre-  Cyclas , institué  quelques  années  plus  tard  par 
Bruguière,  dans  les  planches  de  V Encyclopédie  méthodique.  Nous  avouons 
sans  détour  que  nous  ne  pouvons  nous  décider  à substituer  un  nom 
générique  inconnu  jusqu’ici  à celui  de  Bruguière,  adopté  sans  une  seiile 
exception  par  touS’les  zoologistes,  et  consacré  par  près  de  soixante  ans 
d’usage. 

5®  Pisum,  Megerle. 

Le  genre  Pisum  de  Megerle  ne  correspond  pas  au  genre  Pisidîum  de 
M-  Pfeiffer,  comme  semble  le  croire  M.  Gray.  II  fait  un  double  emploi 
du  genre  Cyclado,  tel  qu’il  a été  réformé  par  Lamarck,  puisqu’il  a pour 
type  le  Cyclas  rivicola , espèce  qui  n'appartient  pas  au  genre  Pisidium  : 
c'est  donc  ce  dernier  genre  qui  doit  être  conservé. 

Des  observations  précédentes,  il  résulte  que  le  genre  Cyrène  étant 
reproduit  trois  fois,  la  famille  des  Corbiculadœ  ne  contient  en  réalité 
que  trois  genres  : Cyrène,  Cyclas  et  Pisidium.  Cette  famille  ressemble 
à celle  de  M.  Anton,  mais  elle  nous  paraît  mieux  placée  dans  la  série 


LES  CYCLADES. 


655 


méthodique;  ainsi  conçue,  elle  est  peut-être  plus  naturelle  que  celle 
que  nous  proposons.  Le  genre  Galaléc  mériterait  sans  doute  de  former 
une  famille  distincte,  et  il  en  sera  probablement  de  même  du  Glauco- 
nome,  lorsque  l'animal  sera  plus  complètement  connu.  Quant  au  genre 
Cyprine , nous  lui  trouvons  plus  d’analogie  avec  les  Cyrènes  qu’avec 
tout  autre  genre  de  la  famille  des  Conques  ; aussi  nous  le  maintenons 
dans  la  famille  des  Cyclades, 

Les  animaux  des  six  genres  contenus  dans  la  famille  des  Cyclades 
sont  assez  complètement  connus.  ^Rang  a décrit  celui  de  la  Galatée; 
M . Sowerby  a donné  les  caractères  de  celui  des  Glauconomes  ; Müller, 
dans  le  Fatina  siiecica  , a fait  connaître  le  mollusque  des  Cyprines  ; les 
Cyclas  et  les  Pisidium , vivant  autour  de  nous , nous  en  avons  de 
bonnes  descriptions  de  MM.  Pfeiffer  et  Jeynnens  ; enfin,  nous  possédons 
plusieurs  espèces  de  Cyrènes  , au  moyen  desquelles  nous  décrirons 
l'animal  de  ce  genre.  En  rapprochant  tous  les  documents  dont  nous 
venons  de  citer  les  principales  sources,  voici  quels  seront  les  caractères 
les  plus  saillants  de  la  famille  des  Cyclades. 

F)ans  tous  les  animaux  de  cette  famille,  le  manteau  est  largement 
ouvert  en  avant  et  en  bas,  depuis  l'extrémité  du  muscle  antérieur  jusqu’à 
l’origine  des  siphons.  Les  bords  du  manteau  sont  simples,  soudés  en 
arrière  ; ils  se  prolongent  en  doux  siphons , tantôt  réunis  à la  base  , 
tantôt  dans  toute  leur  longueur,  quelquefois  disjoints  de  la  base  au 
sommet.  Ces  organes  montrent  donc  exactement  la  môme  série  do 
modifications  que  dans  la  famille  des  Conques  marines.  Quoique  tous 
ces  animaux  soient  pourvus  de  siphons  plus  ou  moins  longs , tous  n’ont 
pas  dans  le  manteau  un  muscle  propre  à les  faire  rentrer  dans  la  coquille  ; 
ce  muscle  n'existe  que  dans  le$  deux  genres  Galalée  et  Glauconome. 
Dans  ce  dernier  genre,  il  se  montre  dans  un  état  particulier:  il  est  long 
et  étroit,  et  il  semble  prêt  à disparaître , non  plus  par  son  raccourcis- 
sement, comme  nous  l'avons  fait  remarquer  dans  les  Vénus  et  les  Cythé- 
rées , mais  par  un  rétrécissement  qui  le  réduit  à une  ligne  d’une 
médiocre  largeur. 

l.e  pied  offre  aussi  des  modifications  intéressantes  : tantôt  il  est  large , 
aplati,  triangulaire,  comme  dans  les  Cyclades , les  Cyrènes  , les  Cy- 
princs,  les  Galatées;  tantôt  plus  étroit,  comme  dans  les  Glauconomes; 
quelquefois  plus  étroit  encore  et  subtlagelliforme,  comme  dans  les 
Pisidium. 

Nous  trouverons  plus  de’constance  dans  la  bouche,  les  lèvres  et  les 
palpes  qui  l’accompagnent.  Ces  palpes,  en  proportion  un  peu  plus 
grandes  que  celles  dés  Vénus,  restent  triangulaires,  presque  aussi 


bIX-SEPT[EMR  FAMILLE. 


65f) 

larges  quo  longues.  I..OS  branchies  sont  courtes,  subquadrangulairp.s , 
inégales,  sillonnées,  réunies  en  arrière  du  pied,  cl  assez  prolongées 
pour  se  souder  au  pourtour  membraneux  do  l'ouverture  interne  du 
siphon  anal. 

Si  nous  considérons  actuellement  les  coquilles  réunies  dans  la  famille 
de.s  Cyclades , nous  les  trouverons  également  variées  de  forme , ainsi 
que  nous  l'avons  fait  remarquer  pour  celles  de  la  famille  des  Conques. 
Dans  le  genre  Glauconomo,  elles  sont  transverses  et  étroites , elles  sont 
triangulaires  dans  les  Galatées;  mais  dans  ce  genre  quelques  espèces 
s’allongent  et  se  rapprochent  ainsi  du  genre  précédent  ; elles  deviennent 
ovales , obrondes  dans  les  autres  genres.  Ainsi , dans  ses  transforma- 
tions , la  coquille  présente  les  mômes  modihcations  dans  l'une  et  l'autre 
famille. 

Les  impressions  musculaires  sont  médiocres  , très  écartées , égales 
et  à peu  près  de  même  forme,  ovales  ou  obrondes.  L'impression  palléale, 
simple  dans  les  genres  Cxjclas  , Pisidium  et  Cyrena,  devient  légèrement 
sinueuse  dans  les  Cyprines;  la  sinuosité  s'approfondit  et's'élargit  dans 
les  Galatées  ; elle  s'approfondit  beaucoup  plus  dans  les  Glauconomos , 
mais  alors  elle  se  rétrécit  considérablement  dans  toute  sa  longueur. 

La  charnière  est  variable.  A la  prendre  dans  sa  plus  grande  simpli- 
cité, elle  consiste,  dans  les  Pisidium  et  les  Cyclades,  en  une  ou  deux 
petites  dents  cardinales  rudimentaires  et  en  deux  dents  latérales , l’une 
en  avant,  l’autre  en  arrière.,  Dans  les  Cyrènes,  cette  charnière  se 
développe  ; une  troisième  dent  cardinale  s’ajoute  ; et  les  dents  latérales 
grandissent.  Les  dents  cardinales  des  Cyprines  sont  inégales,  et  des 
latérales  la  postérieure  seule  subsiste  et  s’écarte  de  la  charnière  de 
toute  la  longueur  du  ligament.  Les  Galatées  n’ont  plus  que  deux 
dents  cardinales , à moins  que  l’on  ne  veuille  considérer  comme  laté- 
rales les  dents  divergentes  qui  accompagnent  de  chaque  côté  la  dent, 
centrale;  enfin,  dans  les  Glauconomos , nous  voyons  trois  dents  cardi- 
nales comprimées,  divergentes  et  souvent  bifides. 

Le  ligament  externe,  petit  et  médiocre  dans  les  Cyclades,  les  Pisi- 
dium et  les  Glauconomes , s'agrandit  dans  les  Cyrènes  ; il  est  très 
grand  dans  quelques  unes,  il  n'est  pas  moindre  dans  les  Cyprines;  il 
devient  plus  saillant , plus  bombé  et  plus  court  dans  les  Galatées.  Toutes 
les  coquilles  de  ia  famille  des  Conques  sont  épidermées.  Cet  épiderme, 
souvent  rugueux  , écailleux , est  quelquefois  lissa  dans  les  Cyrènes  ;•  il 
l’est  toujours  dans  les  Cyclades  et  les  Galatées  ; il  déborde  les  valves 
assez  largement  pour  cacher  la  partie  exsertile  des  bords  du  manteau. 

A l’exception  du  seul  genre  Cyprine,  qui  vit  dans  la  mer,  tous  les 


LES  CYCLADES. 


autres  sont  iluviatiles  ; aussi  toutes  ces  coquilles  sont  plus  ou  moins 
corrodées  sur  les  crochets,  de  la  même  manière  que  les  Muletles  et 
toutes  les  autres  coquilles  qui  habitent  les  eaux  douces. 

On  aura  fait  sans  doute  la  remarque  que,  dans  la  famille  des  Cyclades, 
les  caractères  empruntés , soit  aux  animaux , soit  à leur  coquille,  n’ont 
pas  la  constance  de  ceux  que  montrent  les  familles  précédentes.  Natura 
7wn  facit  ^allum , a dit  Linné  ; et  si  cela  est  vrai  d'une  manière  géné- 
raie , cela  ne  l’est  pas  moins  pour. un  grand  nombre  de  cas  particuliers: 
il  est  rare  que  la  fin  d'une  série  de  familles  naturelles  ne  s’annonce  pas  par 
une  espèce  de  perturbation  à la  suite  de  laquelle  une  transition  s’établit 
d’un  groupe  à l'autre.  C’est  ainsi  qu’au  moment  où  nous  allons  voir  les 
siphons  disparaître  complètement , le  manteau  s’ouvrir  dans  toute  sa 
longueur,  la  nature  se  prépare  en  quelque  sorte  longtemps  d’avance  par 
la  disparition  insensible  do  ces  organes.  Voici  une  famille  dont  les  ani- 
maux ont  les  plus  grands  rapports  avec  ceux  des  familles  précédentes. 
Si  dans  les  Vénus  et  les  Cythérées  , il  y a des  espèces  dépourvues  du 
muscle  rétracteur  des  siphons  , ce  sont  des  exceptions  ; ici , au  con- 
traire , ce  sont  des  genres  entiers  chez  lesquels  cet  organe  manque.  Paf 
là  ils  se  rapprochent  de  la  famille  des  Cardiacés , tout  en  conservant 
les  autres  caractères  des  Conques.  Le  pied  lui-même  offre. des  modifi- 
cations qui  tendent  à rapprocher  les  Pisidium , par  exemple , des  Ba- 
cardes.  Dans  le  premier  de  ces  genres , l’organe  locomoteur  n’est  pas 
encore  coudé  , mais  il  est  fort  allongé , et  il  a une  tendance  à se  par- 
tager en  deux  parties.  Ces  préludes  à.des  changements  plus  profonds 
se  continuent  sur  d’autres  organes  dans  les  familles  qui  suivent  celle-ci. 
Après  avoir  envisagé  dans  leur  ensemble  les  phénomènes  dont  nous 
signalons  l’apparition,  on  demeure  convaincu  de  l’impossibilité  de  mettre 
les  familles  et  les  genres  dans  leurs  rapports  naturels  en  se  condamnant 
à suivre  un  ordre  linéaire , et  c’est  ici  qu’il  faut  admirer  lé  génie  de 
Lamarck,  qui  proposa,  avec  tant  de  succès,  une  classification  par 
embranchements.  ^ 

Pour  faire  bien  comprendre  comment  nous  envisageons  les  rapports 
assez  compliqués  que  nous  entrevoyons  entre  les  genres  de  la  famille 
des  Cyclades  et  ceux  des  familles  précédentes  , nous  ferions  partir  une 
ligne  des  Psammobies , remontant  jusqu’aux  Glauconomes , parce  qu’en 
effet,  par  la  charnière  ,■  par  la  forme  générale  des  coquilles , ces  genres 
ne  manquent  pas  de  quelques  ressemblances.  Une  autre  ligne  commen- 
cerait aux  Donaces , et  les  Galatées  descendraient  à sa  rencontre,  parce 
que  l’animal  de  ce  genre  a les  siphons  complètement  désunis , comme 
ceux  des  Donaces.  Le  genre  Pisidium  , compris  dans  une  ligne  ascen- 
T.  I.  a*  PARTIE.  4^* 


658 


DIX-SEPTIÈME  FAMILLE. 


danle,  se  dirigerait  vers  les  Lucines,  parce  que  l’animal  n'a  plus  qu'un 
siphon  exsertile^  que  le  pied  s'allonge,  s'amincit  et  a une  tendance 
à devenir  cylindrique.  Les  genres  Cyprine,  Cyrène,  Cyclade,  formant 
l’axe  de  la  famille,  continueraient  la  tige  centrale  de  la  méthode  ou  le 
tronc  de  l’arbre  en  se  superposant  aux  familles  des  Donacides , des 
Lilhophages  et  des  Conques.  Nous  le  répéterons  dans  l’ordre  linéaire . 
les  rapports  des  genres  ne  peuvent  être  déterminés  d’une  manière 
exacte  ; ils  ressemblent  aux  grains  d’un  chapelet,  tandis  que,  pour  bien 
faire,  ils  devraient  être  disséminés  à des  distances  diverses  autour  d’un 
axe  commun*  comme  un  système  stellaire. 


GENRE  cinquante-troisième. 

GAINATES.  Galatea,  Brug. 

PI.  17.  fig.  II.  12.  i3. 

CARACTERES  GENERIQUES.  — Animal  ovale , trigone,  enve- 
loppé d’un  manteau  à parois  minces  ^ surmonté  le  long  du  dos 
d’une  crete  membraneuse  large  et  plissée,  s’insinuant  dans 
les  anfractuosités  de  la  charnière;  bords  du  manteau  simples 
en  avant,  garnis  d'un  rang  de  grosses  papilles  en  arrière, 
désunis  depuis  l’extrémité  du  muscle  adducteur  anté- 
rieur jusqu’à  la  base  des  siphons..  Une  cloison  longitudinale 
postérieure  donne  insertion  4 deux  siphons  jnesque  égaux , 
désunis  dans  toute  leur  longueur  et  terminés  par  une  ouverture 
portant  des  tentacules  simples  et  inégaux;  ces  organes  sont 
pourvus  d’un  muscle  rétracteur  oval , médiocre,  qui  leur  est 
propre.  Pied  très  grand,  oomprimé,  robuste,  ovalaire. 
Bouche  transverse;  lèvres  étroites,  terminées  en  une  paire  de 
palpes  triangulaires,  très  pointues,  l’externe  - attachée  au 
manteau.  Quatre  feuillets  branchiaux  , les  deux  internes  plus 
allongés , plus  larges  que  les  externes , ceux-ci  se  prolon- 
geant en  un  appendice  dorsal;  les  feuillets  branchiaux  ,se 


LES  CYCLADES.  tJGg 

réunissent  en  arrière  du  pied,  et  s'attachent  au  pourtour  mena- 
braneux  de  l’ouverture  interne  du  siphon  anal. 

Coquille  trigone,  subéquilatérale,  épaisse,'  solide,  lisse, 
parfaitement  close,  couverte  d^un  épiderme  verdâtre  mince  et 
transparent.  Bords  simples  et  tranchants.  Charnière  large  et 
épaisse , portant  sur  la  valve  droite  deux  dents  conniventes  à 
leur  base  et  trois  dents  sur  la  valve  gauche  ; une  dent  médiane , 
pyramidale,  avancée  ; l’antérieure  et  la  postérieure  étroites , 
divergentes.  Impressions  musculaires  petites,  écartées,  ovales 
ou  ôbrondes  ; impression  palléale  terminée  en  arrière  en  une 
sinuosité  ovalaire  peu  oblique,  d’une  médiocre  étendue.  Liga- 
ment externe , court  et  très  saillant , attaché  à.  de  grandes 
nymphes  proéminentes  dans  un  corselet  déprimé. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Peciunculus^  Lister. — Venus, 
Chemnitz,  Born , Gmelin,  Schroeter,  Dillwyn,  Wood.  — 
Donax,  Ferry.  — Tellina  , Dilhvyn.  — Chama  , Favanne. 

— Egeria,  de  Roissy.  — Megadesma , Bowdich  , Swainson. 

— Potamophila , Sowerby,  Sowerby  yxnxoT . — Galateola  , 
Fleming.  — Trigona  [in  parte],  Schumacher.  — Galathea, 
Bruguière,  Lamarck,  Férussac,  Çrouch,  Menke , Blainviile, 
Cuvier,  Rang,  Latreille,  Reeve,  Auton,  etc.  - 

OBSERVATIONS.  La  coqulUe  pour  laquelle  Bruguière  institua  le  genre 
Galalée,  dans  les  planches  de  V Encyclopédie  ^ était  très  rare  autrefois 
dans  les  collections  ; on  en  pouvait  compter  les  individus  : trois  étaient 
cités  dans  les  collections  de  France  et  quatre  ou  .cinq  dans  Iereste.de 
l'Europe.  Lister  avait  donné  autrefois  une  figure  assez  reconnaissable 
de  Tespèce  ; cependant  Etorn , qui  en  eût  aussi  un  exemplaire  de  la 
même  taille^  ne  le  reconnut  pas  dans  la  figure  de  Lister:  il  en  repro- 
duisit une  fort  bonne  figure,  et  le  décrivit  sous  le  nom  de  Venus  para- 
doxa.  Quelques  années  après,  Chemnitz  eut  en  sa  possession  un  petit 
individu  recouvert  de  son  épiderme;  il  ne  reconnut  en  lui  ni  la  coquille 
de  Lister,  ni  le  Venus  paradoxa  de  Boni.  Il  en  fit  aussi  une  Vénus, 
et  lui  imposa  le  nom  de  Venus  reclusa,  annonçant  de  la  manière  la  plus 
positive  qu’elle  habite  la  Guinée.  Voilà  donc  trois  figures  d’une  même 
espèce.  Au  lieu  de  les  réunir,  Schroeter  les  indiqua  dans  son  Supplément 

42* 


DIX-SEPTIÈME  FAMILLE. 


6G(i 

aux  espèces  de  Linné,  comme  trois  espèces  distinctes.  Aussi  Gmelin, 
qui  a copié  servilement  Schroeter,  sans  le  citer,  admet  aussi  les  trois 
especes,  li  nomma 'l^enus  la  coquille  do  Lister;  changeant 

inutilement  le  nom  de  Cheranilz,  il  fait  de  la  coquille  de  ce  savant  con- 
chyliologue  son  Venus  hermaphrodUa.  Enfin,  le  Fc?ius  paradoxa  de 
Born  devient  pour  Gmelin  une  variété'  du  Vcîiïfs  meretrix,  faute  que 
Schroeter  sut  éviter. 

A Tespèce  déjà  connue^  Chomnilz  en  ajouta  une  seconde  dans  le 
tome  XI  et  dernier  de  son  grand  ouvrage;  il  la  décrit  sous  Je  nom  de 
Venus  ægyptiaca.  Mais  comme  par  sa  forme  et  par  sa  couleur,  elle 
diffère  notablement  de  la  première  espèce , personne  ne  songea  à la 
rapporter  à son  véritable  genre,  et  aujourd’hui  même  elle  est  encore 
oubliée. 

Ce  que  nous  venons  d’exposer  prouve  qu'avant  Bruguière  les  co- 
quilles qui  nous  occupent  étaient  invariablement  classées  parmi  les 
Vénus.  Cependant  ces  coquilles  n’ont  pas  les  caractères  des  Vénus,  et 
l’on  doit  applaudir  à la'pensée  de  Bruguière^qui  les  en  détacha  pour  en 
faire  un  genre  distinct. 

Lamarck  eut  le  tort  de  négliger  d’abord  le  genre  de  Bruguière  : il 
l’oublie  dans  ses  premiers  travaux  de  conchyliologie;  il  en  parle  pour 
la  première  fois  dans  le  5®  volume  des  Annales  du  Muséum,  pour  le 
caractériser  et  en  donner  une  meilleure  figure;  il  l’introduit  ensuite 
dans  la  méthode  en  1 809,  lorsqu’il  fonda  les  familles  naturelles  dans  la 
philosophie  zoologique;  il  le  comprend;  comme  nous  l’avons  vu,  dans 
sa  famille  des  Conques , et  c’est  là  qu’il  le  maintient  dans  ses  classifica- 
tions suivantes;  seulement  en  divisant  les  Conques  en  marines  et  en 
fluviatiles  , c’est  dans  ces  dernières  qu'il  entraîne  les  Galatéès. 

Dans  le  6®  \o\umG  des  Mollusques  du  Buffon  de  Sonnini , M.  de 
Roissy  adopta  le  genre  de  Bruguière , mais  il  voulut  en  changer  le  nom , 
alléguant  que  déjà  un  genre  de  Crustacés  avait  été  établi  par  Fabricius 
sous  le  nom  de  Gaiatea;  mais  les  zoblogistes  n’ont  pas  cru  suffisamment 
justifié  le  changement  ^proposé  par  Roissy,  car  ils  ont  consacré  défini- 
tivement au  genre  le  nom  choisi  par  Bruguière  ; et  il  faut  convenir,  con- 
trairement aux  prévisions  de  quelques  personnes,  que  l'adoption  du  nom 
de  Galatéê  pour  un  genre  do  Mollusques  n‘a  déterminé  aucune  cortfusion 
dans  la  nomenclature  scientifique. 

' Presque  tons  les  conchyliologues  adoptèrent  le  genre  Galatée.  Férus- 
sac,  Latreillo,  Mcnke,  Rang,  Reeve,  Llanloy,  Auton , lui  conservèrent 
dans  leurs  classifications  les  rapports  si  naturellement  conçus  par  La- 
marck. Schweigger  et  M.  de  BlainvÜle  voulurent  rapprocher  davantage 


LES  CYCLADES. 


66l 


encore  les  Galalées  des  autres  genres  de  la  famille  des  Conques  .fluvia- 
liles,  ils  conservèrent  le  genre  Cyclado,  et  tous  les  autres,  Cÿrène, 
Galatéc,  etc.,  furent  considérés  comme  des  sous-genres. 

Cuvier  mentionna  pour  la  première  fois  le  genre  Galatée  dans  la 
seconde  édition  du  Règne  animal.  Il  suivit  l'exemple  des  deux  zoolo- 
gistes dont  nous  venons  de  rappeler  les  noms  : il  laissa  les  Cyclades 
dans  la  famille  des  Cardiacés , ainsi  que  dans  la  première  édition  du 
même  ouvrage.,  et  il  le  divisa  en  trois  sous-genres,  Cyrène,  Cyprine 
et  Galatée.  Vient  ensuite  dans  l’ordre- méthodique  le  genre  Corbeille , 
qui  bientôt,  nous  le  constaterons , n’a  pas  le  moindre  rapport  avec  les 
précédents. 

Quoique  les  zoologistes  reconnaissent  au  gendre  Galatée  des  carac- 
tères suffisants  pour  le  faire  admettre,,  cependant  il  lui  manquait  une 
dernière  et  déûnitivo  consécration , celle  qui  résulte  de  la  connaissance 
de  l’animal.  Jusqu’en  '1-S32  , malgré  l’indication  précise  de  Chemnitz, 
presque  tous  les  conchyliologiies  étaient  persuadés  que  la  Galatée  pro- 
venait des  eaux  douces  de  i’Indo  ; on  aurait  donc  vainement  cherché 
l’animal  dans  ce.  pays , puisque  le  genre  ne  s’y  trouve  pas  et  qu’il 
appartient  aux  régions  équatoriales  de  l’Afrique.  C’est  en  voyageant 
dans  ces  parages  qu’un  savant  officier  de  la  marine  française  , trop  tôt 
perdu  pour  la  science  qu’il  affectionnait,  découvrit  des  Galatées  en 
abondance  dans  les  rivières  do  la  Sénégambie,  à une  petite  distance  de 
leur  embouchure:  c’est  ainsi  qu’il  put  en  observer  l’animal  vivant  et  en 
faire  une  anatomie  dont  l’exactitude  est  d'autant  plus  assurée,  que 
c’est  ce  naturaliste  loi-mÔme  qui  en  peignit  les  détails.  Rang  publia 
le  résultat  de  ses  observations  en  4 832  dans  le  tome  25®  des .^nnaZes  des 
sciences  naturelles.  Ce  mémoire,  précieux  pour  la  science,  nous  fournira 
d’excellents  documents  auxquels  -il  nous  sera  permis  d’ajouter  quelques 
détails;  car,  grâce  à l'amitié  qui  nous  liait,  Rang  a laissé  dans  notre 
collection  quelques  individus  bien  conservés  de  l'animal  de  la  Galatée. 

La  connaissance  do  l'animal  du  genre  Galatée  n'a  pas  modifié  d’une 
manière  bien  considérable  les  rapports  du  genre , car  presque  tous  les 
zoologistes  continuent  à le  ranger  dans  le  voisinage  des  Cyrènefe  et 
des  Cyclades.  Rang  lui-même  conclut  de  ses  observations  que  Je 
genre  doit  rester  à côté  des  Cyrènes  et  des  Cyclades  dans  la  famille 
des  Conques  ; il  entrevoit  cependant  des  analogies  avec  les  Donaces  u 
les  tellines  qui , -avant  lyi , n’avaient  point  clé  senties.  Rang  vouîa  i 
satisfaire  â ces  rapports  assez  compliqués,  en  plaçant  le  genre  à la  iih 
de  la  famille,  de  manière  à réloigner  le  plus  possible  des  Cyclades  et  à 
le  rapprocher  des  Tellines  et  des  Vénus. 


662 


DIX-SEPTIÈMK  FAMILLE. 


Dans  sa  dernière  classification,  déjà  citée  dans'l’histoire  des  familles 
et  des  genres  îjui  précèdent , M.  Gray  em'isagé  les  rapports  des  Gata- 
tées  d’une  autre  façon  que  ses  prédécesseurs.  Il  comprend  le  genre 
dans  la  famille  des  Tellinides,  ainsi  que  nous  l’avons  fait  remarquer  en 
traitant  de  cette  famille , à la  suite  des  Donaces  et  des  Iphigenia 
{Capsa,  Lamk. ).  Nous  avons  Jimîté  la  famille  des  TeÜines  à ceux  des 
genres  qui  ont  de  longs  siplions  complètement  séparés , des  palpes 
labiales  très  grandes,  des  branchies  petites,  et  dont  le  feuillet  externe 
renversé  remonte  vers  le  dos  en  montrant  sa  page'  interne.  Ainsi 
définie,  la  famille  des  Tellinides  ne  peut  recê\'oir  ni  les  Donaces,  ni  les 
Capses , et  encore  moins  les  Galatées.  Cela  ressortira  mieux  lorsque 
l’on  aura  comparé  l’animal  du  genre  qui  nous  occupe  à celui  des 
Tellines.  Pour  fticiliter  cette  comparaison , nous  allons  présenter  la 
description  de  ranimai  de  la  Galatée. 

La  forme  de  la  coquille  ne  reproduit  pas  très  exactement  celle  de 
l'animal . parce  que  celte  coquille  est  très  épaisse  dans  la  région 
moyenne  et  supérieure  ; la  cavité  des  crochets  est  loin  de  coïncider  avec 
la  grandeur  extérieure  de  ces  parties  ; il  en  résulte  pour  l'animal  une 
forme  moins  trigone  et  plus  transverse.  Le  manteau  dont  il  est  enve- 
loppé est  conslitûé  exactement  de  la  môme  manière  que  dans  les 
Mollusques  du  môme  ordre  ; la  portion  mince  est  étendue  et  bornée  à la 
circonférence  par  un  muscle  orbiculaire  peu  épais;  au  moment  où  il 
louche  aux  bords  du  test , le  manteau  s’épaissit  sensiblement  et  se 
partage  en  deux  bords  courts;  l un,  externe,  s’applique  sur  le  bord  de  la 
coquille;  Tautre  interne,  plus  exsertile,  reste  simple  et  ne  se  contourne 
pas  cohame  celui  des  Vénus  et  des  Cylhérées.  Simple  en  avant  et  en 
bas  , ce  bord  se  charge  en  arrière  d'un  rang  de  grosses  papilles  courtes. 
Les  lobes  du  manteau  sont  désunis,  ainsi  que  dans  les  Vénus,  depuis 
Fextrémité  du  muscle  adducteur  antérieur  jusqu’à  la  base  des  siphons: 
c’est  dans  ce  trajet  que  les  bords  sont  simples  , c’est  en  arrière  que  se 
montrent  les  papilles  dont  nous  avons  parlé.  - 

Dans  presque  tous  les  genres  chez  lesquels  les  siphons  sont  désunis  , 
tels  que  les  Thracies,  les  Lavignons,  les  Tellines,  etc.,  ces  organes 
sont  comme  implantés  sur  une  cloison  transverse  qui  occupe  l’extrémité 
postérieure  de  l’animal,  et  qui,  soudée  au  manteau,  sert  à clore  en 
arrière  la  cavité  de  cet  organe.  Les  siphons  naissent  de  cette  cloison  ; 
rapprochés  à la  base,  ils  sont  disjoints  dans  toute  leur  longueur.  A parois 
minces,  d’un  faible  diamètre,  ces  organes’,  au  moment  de  leur  exten- 
sion, ont  à peine  la  moitié  de  la  . longueur  de  la  coquille.  Le  siphon 
branchial  est  un  peu  plus  gros  et  un  peu  plus  long  que  l’anal;  la  sur- 


LES  CYCLADES. 


663 


face  eji  est  divisée  symétriquement  par  sixlinéoles  longitudinales,  par- 
tant de  la  base  et  parvenant  au  sommet  ; sur  ces  linéoles  se  dresse  un 
rang  de  courtes  papilles  aplaties , charnues , en  forme  d’écailles  subqua- 
drangulaires.  L’ouverture  du  siphon  est  circulaire  : sur  son  bord  s’élèvent 
six  grands  tentacules  coniques  et  simples  qui  terminent  les  six  linéoles 
écailleuses;  dans  l’intervalle  de  ces  grands  tentacules,  il  en  existe  un 
plus  petit,  de  sorte  que  l’ouverture  du  siphon  branchial  porte  douze  ten- 
tacules. Le  siphon  anal  est  exactement  semblable  ; seulement,  au  lieu  de 
six  linéoles,  il  en  a huit,  et  son  ouverture  est  garnie  de  seize  tenta- 
cules au  lieu  de  douze.  Un  muscle  rétracteur  oval  peu  étendu , flabelii- 
forme , s’attache  à la  cloison  des  siphons , et  sert  à retirer  au  dedans 
de  la  coquille  les  deux  siphons  en  même  temps. 

La  bouche  est  grande*  transverse  et  infundibuliformo ; les  lèvres 
qui  l’accompagnent  sont  largos , mais  courtes  ; elles  se  transforment , 
de  chaque  côté , en  une  paire  de  palpes  labiales  médiocres , triangu- 
laires , très  pointues , plus  longues  que  larges  : les  palpes  externes  sont 
attachées  au  manteau,  les  internes  le  sont  au  corps;  leur  surface 
interne  est  couverte  de  plis  obliques , fins  et  serrés. 

Le  pied  est  très  grand;  il  est  d’un  jaune  orangé  très  pèle;  aplati, 
son  bord  inférieur  est  tranchant,  et  son  extrémité  antérieure,  dilatée, 
subspathuliforme , est  plus  obtuse  que  celle  du  pied  des  Vénus.  En 
arrière,  il  est  très  aminci  et  étranglé  ; dans  le  moment  dé  sa  contraction, 
le  pied  remplit  entièrement  la  cavité  du  manteau. 

Les  organes  de  la  respiration  sont  plus  étroits  que  ceux  des  Vénus  et 
des  autres  genres  de  la  famille  des  Conques;  ils  se  rapprochent  beau- 
coup plus  par  leur  forme  générale  de  ceux  des  Donaces.  II  faut  recon- 
naître que  les  proportions  de  ces  organes  sont  variables  : ils  s’élargis- 
sent dans  les  Mollusques  larges,  ils  s’allongent  et  se  rétrécissent 
dans  ceux  qui  sont  étroits  ; ceci  est  vrai  d’une  manière  générale. 
Cette  règle  souffre  des  exceptions.  Ainsi  dans  les  Mactres,  qui  sont 
larges,  les  branchies  sont  aussi  étroites  que  dans  les  Lutraires,  qni  sont 
rétrécies.  Chez  les  Pullastra,  les  Vénus,  les  Cythérées , les  feuillets 
branchiaux  sont  larges  et  las  feuillets  externes  ne  se  prolongent  pas  ou 
presque  pas  dans  la  région  dorsale;  an  contraire,  dans  les  Dosinies, 
ces  feuillets  semblent  attachés  par  le  milieu.  Dans  les  Galalées,  la 
combinaison  est  encore  différente;  les  branchies  sont  étroites,  inégales, 
et  l'exlerne  est  partagée  en  deux  parties  presque  égales  par  la  ligne 
le  long  de  laquelle  elle  est  attachée  au  corps.  La  surface  externe  des 
organes  branchiaux  est  profondément  plissée  ; les  plis  sont  fins  et  régu- 
liers. Le  feuillet  branchial  interne  a près  du  double  en  largeur  que  son 


ÜIX-SEPTIÈME  t’AMILLE. 


f>b4 

congénère;  iUe  prolonge  en  avant  en  une  pointe  aiguë,  qui  s’interpose 
entre  les  palpes  labiales,  et  se  termine  dans  le  voisinage  de  la  bouche. 
En  arrière  du  pied,  les i)ranchies  se  réunissent  et  se  prolongent  au- 
devant  de  l’ouverture  interne  du  siphon  branchial. 

Les  muscles  adducteurs  des  valves  sont  inégaux  ; ils  sont  petits  en 
proportion  de  la  grandeur  de  l’ammal  et  de  l’épaisseur  de  la  coquille  : 
l’antérieur  est  ovalaire,  le  postérieur  est  plus  cylindrique;  ils  sont 
fort  écartés  et  situés  dans  la  région  supérieure  ou  dorsale  de  l’animal. 

Les  coquilles  du  genre  Galalée  sont  ovales , trigones , subtrans- 
verses, subéquilatérales,  fort  épaisses;  elles  sont  lisses,  ou  médiocre- 
ment rugueuses  par  des  accroissements  irréguliers.  Un  épiderme 
mince  , lisse , d’un  jaune  verdfitre , transparent , revêt  la  surface  exté- 
rieure , si  ce  n’est  sur  les  crochets  qui  sont  souvent  corrodés , comme 
cela  arrive  dans  presque  toutes  les  coquilles  d'eau  douce  ; cet  épiderme 
est  tenace  et  déborde  à peine  le  pourtour  des  valves.  Les  couleurs  sont 
variables  : aujourd’hui  que  l’on  connaît  plusieurs  espèces,  il  y en  a de 
roses , de  violettes , et  la  plus  anciennement  connue  est  d’un  très  beau 
blanc  sous  son  épiderme , et  ornée  de  beaux  rayons  violets , plus  ou 
moins  nombreux. 

Les  bords,  sont  simples , et  quoique  ces  coquilles  soient  très  épaisses , 
ils  restent  minces  et  tranchants  , même  dans  les  grands  et  vieux  indi- 
vidus. Le  bord  cardinal  seul  prend  une  épaisseur  considérable. 

Les  crochets  sont  généralement  grands,  protubérants , ' opposés , 
cordiformes;  ils  sont  à peine  inclinés  en  avant.  Le  côté  inférieur 
n’offre  aucune  trace  de  lunule  : il  est  obtus,  arrondi , et  plus  large  que 
le  postérieur  ; celui-ci  est  plus  anguleux,  quelquefois  même  subrostré; 
le  bord  ventral  est  le  plus  long,  et  il  présente  une  faible  courbure. 
Lorsque  les  valves  sont  rapprochées , la  coquille  est  parfaitement  close, 
comme  dans  les  Cylhéréçs,  les  Vénus  , etc.  La  surface  interne  n’est 
jamais  nacrée; i elle  est  tantôt  blanche,  tantôt  nuancée  de  rose  ou  do 
violet. 

Les  impressions  musculaires  sont  petites  relativement  à la  grandeur 
et  à l’épaisseur  de  l’animal:  elles  sont  écartées  à peu  près  à égale 
distance  de  la  charnière  ; elles  descendent  à la  limite  de  l’axe  antéro- 
postérieur. L’impression  antérieure  est  profondément  imprimée  dans  le 
lest,  elle  est  ovale;  la  postérieure  est  plus  arrondie^  et  ordinairement 
plus  superficielle;  il  y a quelques  espèces  cependant  chez  lesquelles 
elle  est  aussi  profonde  que  l'antérieure. 

Un  peu  en  dedans  du  bord  inférieur  du  muscle  adducteur  antérieur, 
naît  une  impression  palléale  qui  reste  assez  loin  du  bord  ventral,  tout 


LES  CVCLADES. 


665 


en  en  suivant  la  direction  ; parvenue  en  arrière , au  niveau  de  l’im- 
pression musculaire  postérieure,  la  ligne  palléale  s'arrête,  s’infléchit 
sur  elle-même,  et  se  contourne  en  une  sinuosité  presque  horizontale, 
ovale-trigone , peu  profonde  et  en  grande  partie  détachée  do  la  por- 
tion ventrale  de  l’impression  palléale. 

La  charnière  est  large  et  épaisse;  la  cavité  du  crochet  est  tellement 
remplie , que  c’est  à peine  si  la  lame  cardinale  détache  son  bord  infé- 
rieur. Cette  partie  importante  de  la  coquille , quoique  variable  selon  les 
espèces  ou  dans  les  individus  d’une  môme  espèce,  conserve  cependant 
quelques  caractères  constants.  Sur  la  valve  gauche,  le  centre  de  la  char- 
nière est  occupé  par  une  grande  dent  pyramidale  triangulaire  à base  à 
peu  près  équilatérale.  Cette  dent  devient  moins  épaisse  et  finit  quel- 
quefois par  être  réduite  à une  crête  saillante  et  longitudinale.  Do  chaque 
côté  de  cette  dent  s’élève  une  dent  oblique,  plus  ou  moins  épaisse, 
mais  toujours  comprimée.  Sur  la  valve  droite,  le  contre  de  la  charnière 
est  occupé  par  deux  dents  rapprochées  et  confondues  à la  base , sépa- 
rées au  sommet  et  laissant  en  bas  une  cavité  triangulaire  destinée  à 
recevoir  la  dent  pyramidale  de  la  valve  opposée;  ces  dents  sont  profon- 
dément isolées  par  une  cavité  creusée  de  chaque  côté  et  propre  à 
recevoir  les  dents  divergentes  de  la  valve  gauche. 

Une  nymphe,  très  épaisse,  mais  fort  courte,  vient  faire  une  saillie' 
considérable  dans  un  corselet  plus  ou  moins  déprimé  selon  les  espèces  ; 
au  moyen  de  cette  nymphe , le  ligament  devient  horizontal , au  lieu  de 
s’incliner  dans  la  direction  du  bord  dorsal  postérieur.  Le  ligament  est 
bombé  en  demi-cylindre  ; il  est  épais , mais  très  court. 

Après  avoir  étudié  les  caractères  du  genre  Galatée,  il  est  naturel  de 
se  demander  quelle  place  il  doit  occuper  dans  la  série  méthodique.  Si 
nous  considérons  l'animal,  nous  trouverons  en  lui  presque  toute  l’orga- 
nisation des  Mollusques  de  la  famille' des  Conques.  Un  manteau,  large- 
ment ouvert,  à bords  simples;  un  pied  comprimé,  grand  et  robuste; 
une  bouche  transverse;  des  palpes  médiocres,  triangulaires;  des  bran- 
chies inégales.  Tous  ces  organes  sont  semblables  à ceux  qui  existent 
dans  les  Conques  marines;  mais  il  on  est  d’autres  pour  lesquels  les 
Galatées  se  séparent  de  tous  les  genres  environnants  : ce  sont  les  siphons. 
Ils  sont  disjoints , tandis  qu’ils  sont  réunis  plus  ou  moins  dans  tous  les 
autres  genres  de  la  famille  des  Conques  : c’est  par  là  que  les  Galatées 
tiennent  encore  aux  Tellines  et  aux.  Donaces.  Il  est  évident  que  les 
rapports  du  genre  doivent  être  déterminés , non  par  un  seul  caractère , 
mais  par  l’ensemble  de  l’organisation;  et  ce  que  nous  avons  exposé 
assigne  définitivement  la  place  des  Galatées  dans  la  famille  desUycIades, 


666 


DIX-SEPTIÈME  FAMILLE. 


en  les  rapprochant  le  plus  possible  des  Conques  marines.  II  doit  donc 
être  inscrit  le  premier  dans  la  famille  des  Cyclades. 

Les  Galatées  sont,  sans  exception , des  coquilles  d’eau  douce.  Sept 
espèces  sont  actuellement  inscrites  dans  les  catalogues;  toutes  pro- 
viennent des  rivières  de  l’Afrique  interlropicale  ou  centrale.  Il  est  à 
présumer  que  le  nombre  des  espèces  s’augmentera  encore,  à mesure 
que  l’on  explorera  avec  plus  de  soin  un- continent  qui  jusqu'ici  a été  si 
peu  visité  par  les  naturalistes. 

Nous  ne  connaissons  aucune  Galatée  à l'état  fossile. 

La  première  espèce  connue  est  le  Galatea  radiata  de  Lamarck.  La 
seconde  est  le  Galatea  œgypiiuca  (Venus  œgypHaca^  Chemn.).  La  troi- 
sième a été  décrite  sous  lo  nom  de  Galatea  concamerata  par  M.  Du  val , 
dans  le  Magasin  de  zoologie;  les  quatre  autres  ont  été  décrites  dans  le 
Journal  de  malacologie  deM.  Menke:  la  première  par  M.  Dunker,  sous 
le  nom  de  Galatea  bengoensis;  elle  a été  trouvée  par  M.  Tams^  dans 
la  rivière  Bengo,  dans  l’Afrique  occidentale  ; les  trois  autres  sont  décrites 
par  M.  Philippi  sous  les  noms  de  riibicunda  et  tenuicula, 

M.  Philippi  n’cn  connaît  pas  la  patrie;  nous  savons  qu’elles  provien- 
nent de  l’Afrique  interlropicale. 

Galatée  à rayons.  Galatea  radiata , Lamk. 

PI.  17.  f.  11.12.  13. 

G.  Testa  trigona^  suhtransversâ  ^ turnidd,  crassissimâ  ^ lœvigatà.^ 
sub  eperdermide  'viridi  alhâ^  radiis  violaceis  ornatissimà  ; intîis  albd^ 
, aUquando  'violaceo  maculatâ;  cardine  crassissîmo , dentibus  mc- 

diants  majoribus. 

Lister,  Concb.  pl.  i58.  f.  i3. 

Tenus  paradoxa.  Boi‘ii,  Mus.  p.  66.  pl.  4*L  iQ,  i3. 

Venus  rèclusa,  Cbenio.  Concb.  t.  6.  p,  3îi6.  pl.  3ii  f.  327,  SaS,  829. 

Fav.  Cal.  d’un  cab.  p.  3 10.  Il®  i5o6.  pl.  6.  f.  i5o6. 

Fav,  Concb.  pl.  46.  f.  A. 

Schroeler,  Eiul.  t.  3.  p.  160.  Venus:  u®  16.  p.  r3i. 

Venus  subviridis,  Gtncl.  p.  3280.  n®  55. 

Venus  hermnphrodita.  Id  p.  3278.  n®  40. 

-J’enus  meretrix.  Var.  id.  p.  3278.  n®  i5. 

Galathea,  Krug.  Ency.  pl.  25o.  f,  i. 

Galathea  radiata,  Lamk  Ann.  du  Mus.  t.  5.  p.  43o.  pl.  28. 

Egeiin  radiata,  Ruis'^y,  Buf.  Moll,  t.- 6,  p.'327.  pl.  64.  f.  5. 

Fénissac,  Essai  d’uue  niélb  concb.  p.  89. 


LES  CŸCLADES. 


667 


Dontix  'vnriegata.  Perry,  Conch.  pi  5^.  f.  i? 

TeiVina  hermaphrodita.  Dillw.  Cal.  t.  i.  p.  107.  81. 

P'entts  paradoxa.  Dillw.  Cal.  t.  r.  p.  180.  11*^  49- 

Trigona{^ex parte^,  Schumac.  Nouv.  syst.  p.  i53. 

Calathea  radiatm  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  654. 

Potamopkila  Tadiata.Sovi.  Gen.ofsheîh. 

Megadesma  radiata . EUïm,  of  Conch.  a*"  part.  p.  8.  f.  ai. 

Cyclas  radiata.  Schweig.  Haiidb.  der  iiat.  p.  707. 

Galathea  radiaia,  Croiich.  iütrod.  Lanik.  Conch.  p.  la.  pl.  7.  f.  i, 

CycUn  rndiaca,  Blainv.  Malac.  p.  5.^a.  pl.  78.  f.  3. 

Venus  paradoxa.  "VVood,  Ind.  pl.  7.  f.  48. 

Galathea  radiata.  Rang.  Manuel  de  conch,  p.  3i3. 

Desh.  Ency.  métii.  Vers.  l.  a.  p.  264. 

Cuv.  Règn.  anim.  a»  êd.  t.  3.  p.  147. 

Menke,  Syn,  nioU.  p.  iii. 

Rang,  Mém.  sur  Panimal  de  la  Gai.  Aun.  se.  iiat.  i'*  série,  l.  a5. 
p.  i52.  pl.  5.  f.  I,  a,  3. 

GrifGlh.  An.  kîngd,  Moll.  p.  ii3.  pl.  38,  f.  7. 

Desh.  dans  Laujk.  Au.  s,  vert,  a*  éd.  t.  6.  p.  a86. 

Aiilnii,  Verz.  der  Couch.  p.  lo. 

. Megadesma  radiata.Syi^mi,  Malac.  p.  3.70  f.  119, 

. Galathea  radiata.  Reeve,  Conclu  sysl.  t.  i.  p,  88.  pl.  64. 

Potamophila  radiata,  Sow.  Conch.  raan.  p.  236.  f,  ii5. 

Galathea  radiata.  Hanley,  Descr.  cat.  p.  94* 

Pot.  et  Mich.  Cat.  des  Moll  de  Douai,  t.  a.  p.  iqS. 

Catlow,  Conch.  nom.  p.  3i. 

Habile  les  rivières  du  Congo,  à plus  dhnie  lieue  de  leur  embouchure 
dans  la  mer. 

Grande  et  belle  coquille,  au  sujet  de  laquelle  plusieurs  erreurs  ont  été 
commises,  ainsique  le  démontre  notre  synonymie.  Parmi  ces  erreursles 
plus  considérables  sont  celles  de  Gmelin,  de  Schroeter,  de  Dillwyn,  qui 
admettent  deux  et  même  trois  espèces  pour  une.  En  comparant  les  figures 
et  les  descriptions  , en  mettant  ces  documents  on  présence  d’une  série 
d’individus  et  de  variétés  de  l’espèce,  on  reconnaît  bientôt  que  les  trois 
espèces  de  Gmelin  doivent  se  réunir  à un  seul  type  auquel  le  nom  de  Ga/a- 
tea  radiata  doit  rester.  Celte  coquille  acquiert  quelquefois  une- taille  assez 
grande.  Elle  est  triangulaire,  bombée,  épaisse,  pesante,  obtuse  et  arrondie 
en  avant,  sub-anguleuseen  arrière;  sa  surface  est  couverte  d’un  épiderme, 
d’un  vert  plus  ou  moins  foncé  au-dessous  duquel  le  lest  est  d’un  blanc 


668 


ÛIX-SEPÏIÈME  FAMILLE. 


éclatant,  tantôt  pur,  tantôt  orné  d’un  nombre  plus  ou  moins  considé- 
rable de  beaux  rayons  violets,  étroits  et  inégaux.  Cette  belle  coloration 
était  autrefois  mise  en  relief  par  un  beau  poli  artificiel  que  les  amateurs 
ou  les  marchands  faisaient  donner  à celte  coquille.  Les  crochets  sont 
grands , opposés , à peine  obliques  et  cariés  au  sommet.  Le  côté  posté- 
rieur présente  un  corselet  large,  déprimé,  de  l'extrémité  supérieure  du- 
quel s’élèvent  des  nymphes  grandes,  saillantes,  épaisses,  fort  courtes, 
sur  lesquelles  s’attache  un  ligament  très  proéminent.  A l’intérieur,  celte 
coquille  est  d'un  beau  blanc  ; il  est  des  individus  qui  sont  lavés  do  violet, 
mais  celte  variété  ne  se  rencontre  guère  que  parmi  les.jeunes  individus. 

Cette  coquille  a 95  millimètres  de  long  et  77  de  hauteur. 


GENRE  CINQUANTE -QUATRIÈME. 

GIiAUCONOZilE.  Glaicconome, 

Pl.  i4  Bis.  fig.  4.  5.  6. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — ' Animal  ovale,  oblong,  ayant  les 
lobes  du  manteau  réunis , si  ce  h'est  en  avant  et  en  bas , où  ils 
laissent  une  ouverture  linéaire  pour  le  passage  d’un  pied  petit 
et  comprimé  ; en  arrière , le  manteau  se  prolonge  en  deux  longs 
siphons  comprimés  et  épais;  une  dépression  de  chaque  côté 
indique  le  point  de  jonction  des  deux  siphons,  qui  sont  com- 
plètement séparés  versle  sommet.  Masse  abdominale  ohlongue , 
molle  , ventrue , terminée  en  avant  par  un  pied  oblong  et  com- 
primé. Palpes  labiales  triangulaires , larges , allongées , oblon- 
gues,  peu  épaisses.  Branchies  allongées,  oblongues, peu  épaisses, 
réunies  en  arrière  du  corps. 

Coquille  allongée,  transverse,  équivalve,  inéquilatérale, 
mince , plus  ou  moins  bombée , obtuse  en  avant , plus  étroite 
ou  subrostréé'  en  arrière , couverte  d’un  épiderme  verdâtre, 
mince  , débordant  le  pourtour  des  valves.  Bords  minces , sim- 
ples .et  tranchants.  Charnière,  étroite,  formée  de  trois  dents 
cardinales,  petites,  comprimées,  divergentes,  et  dont  les  pos- 


LES  CYCLADES. 


(>69 

térieures  sont  les  plus  allongées  ; la  dent  postérieure  de  la  valve 
gauche  et  la  moyenne  de  la  valve  droite  sont  bifides.  Deux 
impressions  musculaires  petites , fort  écartées  : l’antérieure, 
oblongue,  submargînale  ; la  postérieure,  subcirculaire.  Impres- 
sion palléale  très  rapprochée  du  bord  ventral , se  contournant 
en  arrière  en  une  sinuosité  étroité , profonde , obtuse  au  som- 
met, presque  horizontale  et  à bords  parallèles.  Ligament  long, 
étroit,  peu  épais. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Glauconomya , Bronn , Poliez  et 
Mîchaud. — Solen  [species]^  Linné. 

OBSEnvATioNs.  Si  l’on  en  croit  M.  tlanley,  Linné  aurait  connu  une 
espèce  du  genre  Glauconome,  et  il  l’aurait  rapportée  au  genre  So/èn, 
sous  le  nom  de  Soîen  virens.  En  effet , la  description  de  Linné , quoique 
très  courte,  ne  peut  convenir  qu'à  une  espèce  de  Glauconome.  Le  Solen 
Uï'reïis  vient  de  Java;  il  est  ovale,  oblong-,  les  crochets  sont  gonflés;  la 
coquille  est  blanche  en  dedans,  verdâtre  en  dehors,  très  fragile,  trans- 
parente, ayant  la  forme  de  la  Mye  des  peintres  [Unio  pictorum),  à peine 
fermée  en  avant  et  en  arrière;  deux  dents  cardinales  rapprochées  et  de 
plus  une  callosité  dans  chaque  valve,  simulant  une  dent  obsolète. 
Telle  est  la  courte  description  que  donne  Linné  du  Solen  virens;  elle 
ne  peut  s’appliquer  qu’à  un  Glauconome,  et  M.  Hanley  désigne  même 
une  espèce  à laquelle  il  conserve  le  nom  spécifique  du  célèbre  auteur 
du  Systema  naturœ.  Pour  retrouver  l’espèce  linnéenne,  il  a fallu 
d’abord  signaler  à l’attention  des  conchyliologues  un  type  tout  parti- 
culier de  coquilles  lacustres , et  c’est  ce  que  fit  M.  Gray  en  proposant 
le  genre  Glauconome  en  1 828 , dans  le  premier  fascicule  de  son  Spi~ 
cilegia  zoologica.  Quoique  reproduit  l’année  suivante  dans  le  Zoological 
Joxtrnal , le  nouveau  genre  du  savant  anglais  resta  longtemps  peu 
connu’,  à cause  sans  doute  de  la  rareté  do  la  coquille  qui  lui  a servi 
de  type.  M.  Sowerby  rappela  l’attention  des  conchyliologues  sur  le 
genre  Glauconome  en  1835,  dans  l'une  des  dernières  livraisons  du 
Généra  of  shells.  11  reproduisit  la  figure.de  l’espèce  type,  et  il  ajouta 
aux  caractères  génériques  des  coquilles  ceux  de  l’animal,  qui  jusqu’alors 
était  resté  inconnu.  Nous  avons  emprunté  à M.  Sowerby  sa  courte 
phrase  caractéristique , eh  regrettant  qu’il  n'ait  rien  ajouté  pour  com- 
pléter la  description  d’un  animal  nouveau  et  intéressant  ’ à plus  d’un 
titre.  Depuis  cette  époque,  la  plupart  des  conchyliologues  ont  adopté 


^370  DlX-SEPTlÈME  FAMILEE. 

le  genre,  mais,  tous  ne  lui  ont  pas  accordé  la  même  place  dans  la  mé- 
thode. 

En  créant  le  genre,  M.  Gray  n’hésite  pas  à l’introduire  dans  la  fa- 
mille des  Vénérides,  et  ce  savant  l’y  a maintenu  dans  les  diverses  mé- 
thodes qu’il  a publiées  depuis;  mais  presque  tous  les  autres  zoologistes 
lui  reconnaissent  d’autres  analogies  et  l'entraînent  dans  la  famille  des 
Solénacées.  M.  Sowerby  lui-même,  en  donnant  les  caractères  princi- 
paux de  l’animal , semble  pencher  aussi  pour  cette  opinion,  en  l’attri- 
buant à tort  à M.  Gray,  qui'  ne  l’a  jamais  partagée. 

MM.  Poliez  et  Michaud , dans  l'ouvrage  consciencieux  quHIs  ont  pu- 
blié sous  le  titre  d.e  Catalogue  des  coquilles  de  la  collection  de  la  ville  de 
Douai,  n’ont  pas  admis  l’opinion  de  leurs  devanciers;  avec  une  saga- 
cité dont  il  faut  les  louer,  ils  ont  rapproché  le  genre  des  Cycladés  et 
des  Cyrènes,  et  l’ont  compris  dans  la  môme  famille.  Cet  arrangement, 
conforme  à celui  que  nous-môme  avons  adopté  dans  notre  collection , 
nous  parait  le  plus  propre  à concilier  les  caractères  du  genre  avec  ceux 
qui.  l'avoisinent  le  plus , et  il  a le  mérite  de  se  rapprocher  autant  que 
possible  de  l'opinion  de  M.  Gray.  Mais  avant  de  discuter  la  place  que 
doit  occuper  le  genre  Glauconome  dans  une  méthode  naturelle , il  con- 
vient d’en  exposer  les  caractères  avec  détail. 

La  phrase  caractéristique  de  M.  Sowerby  est  le  seul  document  que  nous 
ayons  sur  l’animal  du  genre  Glauconome.  Ce  mollusque  est  ovale,  oblong, 
transverse;  les  lobes  du  manteau  sont  désunis  en  avant  et  en  bas:  cette 
disposition  du  manteau  est  analogue  à celle  des  Vénus,  des  Cylhérées, 
des  Cycladés , etc.,  et  s’éloigne  considérablement  de  celle  des  Solens  et 
des  autres  genres  des  familles  voisines.  En  effet,  dans  les  Mollusques 
de  la  famille  des  Solénacées,  le  manteau  est  ouvert  en  avant  seulement, 
ce  qui  fait  ressembler  cet  organe  à un  véritable  sac.  En  arrière,  le 
manteau  des  Glauconomes  se  prolonge  en  deux  longs  siphons  réunis 
dans  la  plus  grande  partie  de  leur  longueur;  disjoints  au  sommet,  ils 
sont  comprimés,  et  une  dépression  de  chaque  côté  indique  le  point  de 
leur  réunion.  Si  cette  description  convient  en  partie  aux  Solens,  elle 
s’adapte  bien  mieux  à ce  que  nous  connaissons  des  Vénus,  des  Cythé- 
rées  et  des  Cycladés.  Dans  les  Cylhérées  et  les  Dosinies  , les  siphons 
sont  également  comprimés  et  disjoints  au  sommet;  dans  les  Solens  ils  le 
sont  moins  , et  chez  les  Solécurtes  ils  sont  cylindracés  et  très  gros.  Le 
pied,  dans  les  Glauconomes,  est  petit,  oblong.  et  comprimé:  cette  forme 
de  l’organe  du  mouvement  s'accorde  bien  mieux  avec  colle  de  cette 
partie  chez  les  Vénus  et  les  Cycladés  que  chez  les  Solens  ou  les  autres 
genres  de  la  famille  des  Solénacées.  Nous  voyons  en  effet  dans  les  Solens 


LES  CYCLADES. 


671 

un  pied  très  grand,  cylindrique,  terminé  en  avant  par  un  empâtement 
conique.  Chez  les  Solécurtes,  le  pied  est  énorme,  comprimé  latéralement, 
et  il  embrasse  dans  ses  parois  épaisses  toute  la  masse  des  organes  abdo- 
minaux. Dans  les  Glauconomes  , au  contraire,  la  masse  abdominale  est 
grosse,  ovalaire,  et  elle  n’est  pas  absorbée  pour  ainsi  dire  par  la  base 
du  pied.  Ce  qui  a rapport  aux  palpes  labiales  et  aux  branchies  reste  un 
peu  incertain  pour  nous,  puisque  ces  organes,  quelquefois  variables  d’un 
genre  à l’autre  dans  une  même  famille,  ne  sont  pas  décrits  d’une  ma- 
nière assez  précise.  Les  branchies  sont  longues  et  réunies  en  arrière  du 
pied,  mais  de  combien  se  prolongent-elles  après  leur  jonction?  Chez  les 
Solens,et  surtout  chez  les  Solécurtes,  elles  se  prolongent  beaucoup 
dans  la  longueur  du  siphon  branchial,  mais  dans  les  Vénus  elles  se  pro- 
longent beaucoup  moins.  Ce  caractère  n’est  pas  sans  importance,  si 
l’on  veut  s’en  servir  pour  déterminer  les  rapports  entre  les  animaux  dé 
deux  familles. 

Les  coquilles  du  genre  Glauconome  se  distinguent  avec  facilité  de 
celles  de  tous  les  autres  genres  connus;  ce  serait  avec  les  Psammobies 
que,  par  leur  forme  générale,  elles  auraient  le  plus  de  rapport.  Ce  sont, 
en  effet , des  coquilles  allongées , Iransverses , inéquilatérales , équi- 
valves,  assez  exactement  closes,  très  peu  entre-bâillantes  en  avant  ou  en 
arrière,  et  surtout  de  ce  dernier  colé.  La  surface  extérieure  est  lisse,  striée 
ou  sillonnée  transversalement;  les  sillons  ou  les  stries  sont  générale- 
ment irréguliers,  étant  produits  par  les  accroissements.  Toute  cette  sur- 
face est  revêtue  d'un  épiderme  d’un  vert  plus  ou  moins  foncé,  ordinai- 
rement mince;  il  est  tenace,  et  les  crochets  seuls  sont  décortiqués  et 
cariés  plus  ou  moins  profondément.  Le  côté  antérieur  est  arrondi , 
obtus  ; le  postérieur  s’atténue  insensiblement  ; il  est  subrostré,  quelque- 
fois anguleux;  le  test  est  peu  épais,  les  bords  restent  minces  et  tran- 
chants. Les  crochets  sont  gonllés  et  cependant  peu  proéminents  ; ils 
sont  opposés , à peine  inclinés  en  avant.  Le  bord  dorsal  est  incliné , un 
peu  convexe,  et  si  l’antérieur  ne  présente  aucune  trace  de  lunule, 
celui-ci  n’offre  non  plus  aucun  vestige  de  corselet  circonscrit. 

La  surface  interne  n'est  jamais  nacrée,  elle  est  le  plus  souvent 
blanche  ; quelques  espèces  sont  teintées  de  violet.  Les  impressions  mus- 
culaires sont  médiocres,  fort  écartées,  peu  apparentes  et  superficielles. 
L’antérieure  estovale,  oblongue,  étroite  dans  quelques  espèces,  plus  large 
dans  d’autres;  elle  est  submarginalo  dans  toutes;  elle  se  courbe  le  long 
du  bord  antérieur.  Aq-des.-^us  d'elle  et  presque  au-dessous  de  l’extrémité 
antérieure  delà  lame  cardinale,  on  trouve  une  petite  impression  muscu- 
laire; elle  est  produite  par  lejnuscle  rétracteur  antérieur  du  pied.  L’im- 


DlX-SErT[ÈME  FAMILLE. 


Ü72 

pression,  musculaire  postérieure  est  arrondie,  subcirculaire ; elle  est 
située  près  de  l’extrémité  de. la  coquille  et  non  loin  du  bord  dorsal;  elle 
est  par  conséquent  submarginale  comme  l’autre.  Un  peu  au-dessus 
d'elle  et  parallèlerpent  au  bord , se  détache  une  petite  impression  étroite, 
sur  laquelle  s’attache  le  muscle  rétracteur  postérieur  du  pied.  L'im- 
pression palléale  présente  des  caractères  qui  lui  sont  propres  dans  le 
genre  qui  nous  occupe:  elle  se  détache  du  milieu  de  l’extrémité  infé- 
rieure du  muscle  antérieur,  et  elle  se  range  tout  près  du  bord  ventral; 
elle  le  suit  parallèlement  jjjsqu’au  voisinage  de  l’extrémité  postérieure. 
La  place  occupée  par  celte  impression  dans  l’intérieur  des  valves  annonce 
chez  l’animal  un  muscle  orbiculaire  du  manteau  fort  étroit,  à moins  que 
ce  muscle  ne  dépasse  la  partie  solide  du  test  pour  se  cacher  sous  l’épi- 
derme, comme  cela  a lieu  dans  les  Solémyes  , par  exemple  ; mais  cela 
nous  paraît  peu  probable.  Parvenue,  comme  nous  le  disions,  vers  l'ex- 
trémité postérieure  de  la  coquille , l’impression  s’infléchit  en  dedans  et 
trace  une  sinuosité  longue  et  étroite,  à bords  presque  parallèles.  Cette 
sinuosité  est  réellement  fort  singulière:  il  semble  que  le  muscle  ré- 
tracteur  des  siphons,  tout  en  conservant  une  assez  grande  longueur,  a été 
rogné  de  chaque  côté  et  réduit  à quelques  faisceaux  fibreux  du  centre. 
C’est  sous  celle  forme  que  se  présente  la  sinuosité  palléale,  dans  les 
Glauconome  rugosa,  chinensis,  corrugata,  straminea,  virens  etcerea;elle 
s’élargit  un  peu  dans  Vangulata  et  le^curta-  Celte  sinuosité  est  hori- 
zontale, ou  un  peu  oblique  de  bas  en  haut;  elle  est  entièrement  détachée 
de  l’impression  palléale. 

La  charnière  est  fort  différente  de  celle  de  tous  les  autres  genres 
connus  ; elle  est  variable  dans  la  série  des  espèces,  et  il  n’est  pas  sans 
utilité  d’en  faire  connaître  les  principales  modifications. 

Les  espèces  courtes  portent  trois  petites  dents  cardinales,  diver- 
gentes , sur  un  bord  très  étroit  ; de  ces  dents , l’antérieure  est  simple, 
la  médiane  et  la  postérieure  de  la  valve  droite  sont  bifides,  la  médiane 
de  la  valve  gauche  est  seule  bifurquée,  la  postérieure  étant  trop  mince 
pour  être  divisée.  Dans  les  espèces  dont  nous  parlons  les  dents  s’al- 
longent graduellement  d'avant  en  arrière,  la  postérieure  néanmoins  n’est 
pas  beaucoup  plus  longue  que  les  autres.  La  charnière  change  un  peu 
dans  les  espèces  plus  étroites , les  dents  deviennent  plus  saillantes  ; la 
bifurcation  de  la  dent  moyenne  et  de  la  postérieure  se  creuse  davan- 
tage, de  sorte  que  ces  dents  semblent  formées  de  deux  lames  tranchantes, 
inégales,  obliques  et  réunies  a la  base  ; enfin , dans  les  espèces  les  plus 
étroites,  la  dent  postérieure  s'allonge  beaucoup  plus,  devient  en  même 
teinps  plus  oblique,  et  s’applique  le  long  de  la  nymphe.  A mesure  que 


lÆS  CYQ-.vnKS. 


la  cliarnièro  so  modifie  , comme  nous  venons  do  le  dire , elle  subit  un 
autre  changement;  les  dents,  d’abord  courtes,  se  relèvent  assez  rapide- 
ment et  finissent  par  se  courber  un  peu  en  crochet,  comme  dans  quel- 
ques Solens.  C/est  cette  forme  de  charnière  qui  probablement  a déter- 
miné l’opinion  de  la  plupart  des  conchyliologues  qui  ,<  comme  nous 
l’avons  vu,  ont  rapproché  les  Glauconomes  des  Solens. 

Un  ligament  allongé,  étroit,  peu  proéminent,  réunit  les  valves;  il  est 
attaché  sur  des  nymphes  peu  épaisses,  circonscrites  par  un  sillou  pro- 
fond, dans  lequel  s’attache  la  portion  externe  et  fibreuse  du  ligament. 

Après  avoir  espo'sé  les  caractères  du  genre,  nous  avons  actuellement 
tous  les  éléments  nécessaires  pour  discuter  les  opinions  qui  se  sont  ma- 
nifestées à son  sujet,  et  déterminer  la  place  qu’il  doit  occuper  dans  une, 
méthode  naturelle. 

Nous  avons  déjà  signalé  les  différences  considérables  qui  se  montrent 
entre  les  animaux  des  Glauconomes  et  des  Solens.  De  celte  comparaison 
nous  concluons  naturellement  à l'éloignement  des  deux  genres  en  ques- 
tion. Si  maintenant  nous  continuons  la  comparaison  entre  les  coquilles 
des  mêmes  genres,  nous  leurs  trouverons  dos  différences  considérables: 
d’un  côté,  dans  les  Solénacées,  des  coqqilles  très  brillantes,,  ayant  de 
grandes  impressions  musculaires  et  une  sinuosité  palléale  large  et  pro- 
fonde; d’un  autre,  les  coquillçs  fermées  à muscles  petits  et  à sinuosité 
très  étroite.  La  charnière  sehte  offrirait  de  Tanaiogie  dans  la  saillie  des 
dents  et  leur  disposition  générale,  mais.  un  caractère  d’une  moindre  im- 
portance relative  ne  doit  pas  seul  déterminer  les  rapports  du  genre.  Il 
est  donc  permis  d’affirmer  dans  l'état  actuel  de  nos  connaissances,  que 
les  Glauconomes  sont  fort  éloignés  des  Solénacées  et  ne  peuvent  s’en  rap- 
procher par  aucun  motif  plausible. 

Nous  avons  parlé  d’un  autre  genre  avec  lequel  les  coquilles  des  Glau- 
conomes ont  aussi  une  certaine  analogie.  Les  Psammobies,  en  effet,  ont 
la  coquille  transverse,  et  quelques  espèces  sont  couvertes  d'un  épiderme 
verdâtre  ; mais  dans  les  animaux  de  ce  genre,  les  siphons  sont  grêles  et 
désunis  dans  toute  leur  longueur:  c’est  pour  cela  qu’ils  ont  été  rappro- 
chés des  Tellines.  Quant  aux  coquilles,  elles  diffèrent  par  les  caractères 
essentiels  do  la  charnière,  des  impressions  musculaires  et  de  la  sinuosité 
palléale.  Les  Glauconomes  ne  peuvent  encore  s’arrêter  dans  le  voisinage 
des  Psammobies;  il  faut  donc  les  remonter  davantage,  et  c’est  assuré- 
ment vers  le  groupe  des  Vénus  qu’elles  doivent  s’arrêter;  leur  manière 
de  vivre  dans  les  eaux  douces  les  entraîne  naturellement  dans  la  famille 
des  Cyclades,  et  c’est  là  où  elles  doivent  rester,  à moins  que  l’animal, 
étant  encore  mieux  connu,  ne  devienne  le  type  d’une  famille  distincte  dont 
T.  ï.  9.®  PARTIE,  4^* 


DIX-SEPTIÈME  FAMILLE. 


674 

les  rapports  seront  déterminés  rigoureuseinent  d’après  les  nouveaux 
faits  dont  la  science  se  sera  enrichie. 

Les  Glauconomes  sont  des  coquilles  fluviatiles  d’une  médiocre  taille. 
Toutes,  sans  exception,  habitent  le  continent  asiatique.  Toutes  celles  qui 
sont  connues  ont  été  recueillies  non  loin  de  l’embouchure  des  rivières  et 
des  fleuves  assez  haut,  cependant  pour  ne  ressentir  aucun  effet  du  voi- 
sinage de  la  mer.  Le  nombre  des  espèces  connues  est  peu  considérable. 
M.  Reeve  en  compte  neuf  dans  sa  Monographie  qui  fait  partie  du  grand 
et  important  ouvrage  que  publie  ce  savant  conchyliologue  sous  le  litre 
de  Conchologia  iconica.  Quatre  ou  cinq  espèces  onl  été  découvertes 
aux  Philippines , par  M.  Cuming,  le  célèbre  voyageur  dont  le  nom  s’as- 
socie aux  plus  belles  découvertes  dont  la  science  s' est  enrichie  depuis 
vingt  ans. 

Deux  coquilles  fossiles  citées  et  figurées  par  Cuvier  et  Brongniart,  dans 
le  célèbre  ouvrage  sur  lagéologiedu  bassin  de  Paris,  sô  rencontrent  en 
abondance  dans  les  lits  marneux  qui  recouvrent  le  gypse.  Ces  coquilles 
étaient  minces,  et  elles  n’ont  laissé  que  leurs  empreintes,  sur  lesquelles 
il  est  impossible , malgré  leur  netteté , de  découvrir  les  impressions 
musculaires  et  celle  du  manteau.  Brongniart,  incertain,  rangea  provisoi- 
rement cos  deux  espèces  parmi  les  Gylhérées , tout  en  reconnaissant 
qu’elles  pourraient  aussi  bien  appartenir  à un  autre  genre.  Aussitôt  que 
nous  eûmes  des  coquilles  de  Glauconomes,  frappé  de  leur  analogie  avec 
les  deux  espèces  fossiles  nous  recherchâmes  des  empreintes  de  char- 
nière, et  après  de  minutièut  efforts  , nous  eûmes  la  preuve  que  les  es- 
pèces de  Montmartre  sont  du  genre  qui  vit  aujourd’hui  dans  deS" ré- 
gions très  chaudes  de  la  lérre.  Les  deux  espèces  fossiles  dont  nous 
venons  de  parler  sont  les  seules  qui  nous  soient  connues.  M.  Pusch 
les  menlionne  dans  les  terrains  de  la  Pologne  : mais  l'identité  en  a-l-elle 
été  suffisamment  constatée  ? 

Glauconome  rugueux.  Glauconome  rugosa^  Hanley. 

PI.  14  025.  f.  4.  5.  6. 

G,  Testa  elongatâ  ^ oblongâ^  turgidiila  ^ subcylindraceu  ^ anticè  obiusâ, 
postlcè  attennatd  f obsolète  subungulatâ  ; epidennide  'vîrescente 
longitndlnaliter  et  irregulariter  tenue  plicutdy  riigosa;  impressione 
musculi  antici  circiilari ^ sinu  puUii  itugustissimoy  longo^  obliqua. 

Hanley  dans  Wood,  Ind.  Tcsl.  2*  Snp,  pl.  10.  !'.  24. 

Reeve,  Proc.  zool.  Soc.  1844-  !'•  19* 

Keeve,  Couch.  Icon.  pl.  i.  f.  4*  b. 


LÉS  CYC.LADES.  (>75 

Habite  Its  rivières  qui  se  jetlenl  dans  la  !)aie  de  ManlUe  et  celles  de 
l’ile  Néyros,  Tuue  des  Philippinns. 

Cette  espèce  est  la  plus  grande  du  genre;  -elle  a quelque  ressemblance 
avec  VUniopictorum.  Elle  est  oblongue,  Iransverse,  très  inéquilatérale, 
bombée,  subcylindràcée , obtuse  en  avant,  atténuée  en  arrrière,  mais 
également  arrondie  de  ce  côté  ; les  crochets  sont  proéminents  , toujours 
cariés.  Le  côté  postérieur  ne  présente  que  très  obscurément  un  angle 
décurrent;  cependant  la  place  de  cet  angle  est  indiquée  par  le  change- 
ment dans  la  disposition  de  Tépiderme.  L’épiderme  dans  celle  espèce  est 
d’un  vert  foncé  : sûr  le  milieu  des  valves,  il  présente  une  multitude  de 
fines  rides  longitudinales,  irrégulières,  interrompues,  souvent  anasto- 
mosées en  mailles  allpngéès  ; sur  les  côtés  l’épiderme  est  écailleux;  il  suit 
la  direction  de  stries  assez  grosses  d’accroissement.  Ce  changement 
de  structure  s’opère  subitement  sur  des  lignes  fort  nettes  qui  séparent 
du  milieu  le  côté  antérieur  et  le  postérieur.  La  coquille  est  blanche 
en  dedans  ; les  grands  individus  ont  une  teinte  légèrement  jaunâtre.  Les 
impressions  musculaires  sont  médiocres,  mais  toutes  deux  sont  cir- 
culaires, tandis  que  dans  les  autres  espèces  l’impression  antérieure  est 
ovale  et  souvent  très  étroite;  Timpression  palléale  est  peu  distante  du 
bord  ventral , et  la  sinuosité  qui  la  termine  en  arrière  est  très  étroite  ; 
limitée  d’une  manière  un  peu  vague,  elle  remonte  un  peu  obliquement 
vers  l’impression  musculaire  antérieure.  La  charnière  est  peu  épaisse  ; 
la  dent  antérieure  de  la  valve  droite  est  lamelliforme,  très  saillante,  non 
courbée  ; la  dent  postérieure  de  la  môme  valve  est  grande  et  fort  sail- 
lante; une  fente  profonde  et  étroite  la  divise  en  deux  parties  inégales 
pour  l’épaisseur  et  pour  la  longueur. 

Cette  coquille  a 85  millimètres  de  longueur  et.  37  de  hauteur. 


GENRE  CINQUANTE-CINQUIÈME. 

CirPIUN'£.  Cypiina,  Lamk. 

PI.  i8.  f.  8.  y.  lo.  PI.  19.  r t.  2. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  épais  , ovale ,, ayant  les 
lobes  du  manteau  simples  et  réunis  postérieurement , prolongés 
en  deux  siphons  très  courts,  inégaux,  ciliés  et  peu  comprimés. 

43* 


tÎ7f>  niX-SEPÏIÈME  FAMILLE. 

Pied  aplati , fort  grand , linguiforme  , tranchant  et  dentelé  a 
son  bord  inférieur.  Branchies  grandes,  subquadrangulaires , 
inégales , réunies  postérieurement. 

Coquille  équivtilve,  inéquilatérale,  subcordiforme , épider- 
mée.  Trois  dents  cardinales  sur  chaque  valve , rapprochées  à 
leur  sommet , un  peu  divergentes  ; une  dent  latérale  écartée , 
postérieure,  quelquefois  obsolète.  Nymphes  grandes,  épaisses, 
et  donnant  insertion  à un  ligament  externe  épais  et  bombé. 

Inipressionpalléale  simple.  Impressions  musculaires  grandes, 
subcirculaires,  très  écartées. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — PectuTiculus , Lister.  — Cardia , 
Olafsen.  — Venus,  Linné,  Muller, Fabricius,  Born,  Schroeter, 
Gmelin,  Dillwyn , Wood,  Gerville,  Montagu,  Turton.  — 
Arctica,  Schumacker. — Q/prfwcTjLamarck,  Férussac,  Blain- 
ville,  Rang',  Reeve  , Agassiz,  etc. 

OBSERVATIONS,  ütie  coquUle  figurée  et  décrite  pour  la  première  fois  par 
Lister,  dans  son  Traité  des  animaux  d’A7igl€ter7'e,  a été  présentée  par 
Lamarck  comme  type  à’un  genre  auquel  il  a consacré  le  nom  de  Cijpiina, 
probablement  dans  l'intention  de  faire  remarquer  sa  parenté  avec  les 
Vénus  et  les  Cylhérées.  Linné  connut  aussi  la  coquille  de  Lister,  il  la 
rangea  dans  son  grand  genre  Vénus,  sous  le  nom  de  Tenus  isîandîca; 
bientôt  l’opinion  du  maître  fut  acceptée  par  tous  les  zoologistes  qui  lui 
succédèrent.  Müller  lui-même,  qui  dans  le  Fawia  suecica  décrivit  et 
figura  le  premier  l’animal  de  celte  espèce , ne  la  sépara  pas  des  Vénus. 
Il  est  vrai  qu’à  cette  époque  les  caractères  génériques  des  Mollusques 
n’étaient  pas  appréciés  aussi  rigoureusement  qu’ils  le  furent  depuis. 
Néanmoins  il  esC probable  que  si  Muller  eût  connu  l’animal  des  Vénus, 
un  observateur  de  sa  valeur  aurait  été  frappé  des  différences  de  l'ani- 
mal de  ce  genre  et  de  celui  des  Cyprines,  et  n'aurait  pas  manque  de 
les  signaler.  La  description  de  Muller,-  la  plus  citée  parce  qu’elle  est 
accompagnée  d’une  figure,  ne  doit  pas  cependant  faire  oublier  celle 
plus  complète  d’un  autre  naturaliste,  qui  mérite  à tous  égards  la  grande 
réputation  qui  s’attache  à son  nom,  Othon  Fahrîciits.  On  trouve  en  effet, 
dans  le  Fauna  groenlandica  de  ce.savant  observateur,  une  description 
très  exacte  de  l’animal  du  Venus  islandica.  Lorsque  Poli  eut  fait  con- 
naître, quelques  années  plus  tard,  les  animaux  des  Vénus  de  Linné,  il 


i;es  cvclâdes. 


677 

aurait  été  possible,  par  la  seule  comparaison  des  figures  et  des  descrip- 
tions, d’apprécier  les  différences  qu’ils  offrent  avec  celui  du  Venus  îs- 
landica.  La  conséquence  de  cette  comparaison  aurait  été  l’établissement 
d’un  ^enre  distinct;  mais  aucun  zoologiste  n’y  songea,  et  Lamarck  lui- 
même  sépara  le  genre  Cyprine  d’après  les  coquilles,  et  ne  mentionna  ni 
Fabricius  ni  Muller;  il  ne  parle  pas  de  l’animal,  et  les  auteurs  qui  le 
décrivent  ne  sont  môme  pas  cités  dans  la  synonymie  de  l'espèce  type 
du  genre.  Dans  la  première  édition  du  Règne  animal^  Cuvier  n’oublia 
pas  les  documents  laissés  parMüller  sur  l’animal  du  Venus  hîandica.  Il 
indique  bien  celle  espèce  comme  devant  former  un  groupe  dans  le  grand 
genre  des  Vénus;  mais  le  célèbre  zoologiste  ne  va  pas  plus  loin. 

Dès  la  création  du  genre,  Lamarck  en  avait  indiqué  les  rapports  en 
le  comprenant  dans  la  famille  des  Conques,  dans  les  Conques  marines, 
non  loin  des  Cyclades.  Dans  les  Animaux  sans  vei'têbres^  il  dit  que  ce 
genre  se  rapproche  des  Cyrenes  et  des  Cyclades  par  plusieurs  de  ses 
caractères.  En  admettant  le  genre  dans  sa  trop  vaste  famille  des  Con- 
chacés,  M.  de  Blainville  le  rapproche  des  Cyclades:  mais  nous  nous  de- 
mandons pourquoi  le  savant  auteur  du  Manuel  admet  le  genre  Cyprine, 
tandis  qu’il  rejette  les  Galatées,  par  exemple,  parmi' les  sous-genres 
des  Cyclades.  Assurément  les  Galatées  constituent  un  genre  tout  aussi 
bien  caractérisé  que  lesCyprines.  Le  grand  art  de  la  méthode,  comme 
l’enseigne  M.  do  Blainville  lui-même,  consiste  à mesurer  chaque  degré 
d’après  des  caractères  d’une  égale  valeur,  et,  dans  le  cas  particulier  que 
nous  citons,  ce  sage  précepte  n’a  pas  été  mis  en  pratique.  Latreille  a été 
plus  heureusement  inspiré , en  introduisant  le  genre  Cyprine  dans  la 
famille  des  Cyclades.  Cüvier  adopta  cette  classification  dans  la  seconde 
édition  du  Règne  animal,  et  depuis  cette  époque  deux  opinions,  fort  peu 
différentes  au  fond,  partagèrent  les  Conchyliologues  : les  uns,  et  c’est  le 
plus  grand  nombre,  conservèrent  les  Cyprines  dans  la  famille  des  Con- 
ques marines  ; les  autres,  avec  lesquels  nous  nous  rangeons,  l’admirent 
dans  la  famille  des  Cyclades,  à l’exemple  de  Latreille.  Mais  les  deux  fa- 
milles, dans  toutes  les  méthodes,  ayant  été  con.servées  dans  le  contact 
le  plus  immédiat,  les  différences  d’opinions  que  nous  apercevons  peu- 
vent être  considérées  comme  de  simples  nuances  sans  importance. 

Nous  devons  excepter  M.  d'Orbigny,  car  ce  naturaliste  professé  une 
opinion  très  différente  do  celles  que  nous  venons  d’exposer.  Se  fondant 
sur  une  observation  dont  nous  ne  voulons  pas  contester  actuellement 
l’exactitude,  M.  d’Orbigny  rapproché  les  Cyprines  dos  Cardiles,  et  les 
entraîne  dans  la  même  famille;  bien  loin,  selon  nous,  de  leurs  rapports 
véritables.  Les  observations  de  Poli,  dont  nous  avons  constaté  l’exacli- 


DIX-SEPTIEME  FAMILLE. 


678 

tude,  prouvent  que  les  Cardites  sont  dépourvues  de  siphons,  et  qu  elles 
ont  lo  manteau  ouvert  dans  toute  son  étendue,  exactement  comme  chez 
les  Mulelles.  Il  faut  que  d'autres  zoologistes  aient  trouvé  exacts  les 
faits  exposés  par  Poli  , car  tous  les  classiGcatcurs , sans  exception,  ont 
admis  les  Cardites  dans  l'ordre  des  Mollusques  à manteau  ouvert. 
M.  d’Orbigny  affirme,  aussi  bien  dans  sa  Paléontologie  que  dans  son 
Voyage  en  Amérique,  avoir  trouvé  dans  les  mors  du  Pérou  une  espèce 
de  Cardite  dont  lo  manteau  a les  lobes  réunis  en  arrière  et  prolongé  en 
deux  siphons  très  courts  en  guise  de  perforations  peu  saillantes.  Se 
fondant  sur  ce  fait  unique,  dènt  il.  ne  cherche  pas  à e,stimer  la  valeur, 
M.  d’Orbigny  s’en  sert  immédiatement  pour  modifier  une  classifica- 
tion qui  a reçu  rassentiment  des  meilleurs  zoologistes.  Il  est  évident 
que  si  toutes  les  Cardites  offraient  celte  jonction  des  lobes  du  manteau, 
il  faudrait  en  tenir  compte:  mais  ce  ne  serait  peut-être  pas  une  raison 
suffisante  pour  en  rapprocher  les  Cyprines  ; car  malgré  l'anomalie  dont 
il  est  question,  la  Cardite  de  M.  d'Orbigny  diffère  toujours  des  Cy - 
prines  par  les  branchies,  par  le  pied,  par  les  palpes  labiales , enfin  par 
tous  les  caractères  fondamentaux  à l’aide  desquels  les  familles  se  sépa- 
rent et  les  genres  se  distinguent. 

Quelques  conchyliologûes  admettent  plusieurs  espèces  vivantes  de 
Cyprines.  M.  Turton,  entre  autres,  introduit  dans  le  genre  quatre  pe- 
tites espèces  des  mers  d'Angleterre,  qui  pour  nous  appartiennent  à 
d’autres  genres  ; on  no  peut  donc  conserver  qu’une  seule  espèce  vivante 
dans  le  genre  : c’est  celle  qui  habile  les  mers  du  nord  de  l'Europe  et  de 
l’Amérique,  et  dont  Müller  et  Fabricius  ont  fait  connaître  l'animal. 

Ce  Mollusque  est  ovale-obrond,  assez  épais,  subcordiforme.  Le  man- 
teau qui  l’envelpppo  çst  mince,  à lobe^  égaux  réunis  en  arrière , mais 
séparés  en  avant  et  en  bas,  depuis  rexlrcraité  du  muscle  antérieur  jus- 
qu'à la  base  des  siphons.  Un  large  muscle  orbiculaire  très  plat  s’étend 
à la  circonférence  du  manteau;  son  bord  externe  est  dépassé  par  le 
manteau  lui-mème,  qui  se  termine  par  un  bord  exsertile  d'un  beau  jaune 
orangé.  Simple  dans  presque  toute  son  étendue,  le  bord  du  manteau 
est  pourvu  en  arrjèro  seulement , dans  le  voisinage  des  siphons , d’un 
seul  rang  de  chaque  côté  de  petits  tentacules  cylindracés. 

Les  siphons  sont  très  courts,  par  là  ils  ressemblent  à ceux  des  Car- 
diums;  ils  sont  inégaux  en  longueur  et  en  diamètre,  ils  sont  complète- 
ment dépourvus  d'un  muscle  rétracteur  spécial  ; seulement  dans  l’endroit 
où  ce  muscle  existe  chez  d'autres  Mollusques,  le  muscle  orbiculaire  prend 
un  peu  plus  de  largeur,  ainsi  que  le  prouve  une  légère  inflexion  que 
présente  l'impression  palléale  au  moment  où  elle  touche  le  muscle  ad- 


LES  CYCLADES. 


<3:y 

ducteur  postérieur  des  valves.  Le  siphon  branchial  est  très  large , il  est 
comprimé  latéralement,  et  son  ouverture  est  ovale.  Celte  ouverture  est 
couronnée  d'une  seule  rangée  de  tentacules  cylindracés  pointus  au  som- 
met, égaux,  serrés  et  simples.  Le  siphon  anal  se  réduit  à une  simple 
perforation,  dont  le  grand  diamètre  est  à peine  le  tiers  de  celui  du  si- 
phon  branchial;  l'ouverture  de  ce  siphon  est  peu  saillante,  elle  est  sim- 
ple et  membraneuse  ; au-dessus  d’elle,  et  en  remontant  vers  l’extrémité 
du  ligament,  le  manteau  est  pourvu  de  deux  rangs  de  tentacules  sem- 
blables à ceux  qui  précèdent  le  siphon  branchial. 

La  masse  abdominale  est  grosse  et  épaisse;  elle  se  prolonge  en  avant 
et  en  bas  en  un  pied  comprimé , linguiforme , pointu  à son  extrémité 
antérieure,  ayant  le  bord  inférieur  tranchant  et  dentelé.  Il  serait  falci- 
forme  et  fléchi  comme  un  genou,  d'après  Fabricius  : la  Ggure  de  Millier 
le  représente  tel  que  nous  venons  de  le  décrire.  La  bouche  et  les  palpes 
labiales  ne  sont  pas  mentionnées  par  Millier,  et  sa  figure  ne  représente 
pas  ces  parties.  Fabricius  dit  quelques  mots  des  palpes:  « ad  basin 
pcdis  adhiic  papilla  lacera  conspicitur.  n II  qsl  à regretter  que  dans  sa 
manière  trop  concise  de  décrire,  il  ail  négligé  d'indiquer  la  forme  et 
la  grandeur  relative  des  organes  dont  il  est  question. 

Les  branchies  ressemblent  beaucoup  à celles  des  Vénus  et  des 
Cythérées;  elles  sont  grandes,  inégales,  subquadrangulaires,  d’un  jaune 
blond;  elles  sont  sillonnées  et  finement  striées  obliquement;  elles  se 
réunissent  en  arrière  du  corps,  et  leur  base  perforée  se  montre  à l’ou- 
verture du  siphon  anal. 

Les  muscles  adducteurs  des  valves  sont  fort  gros,  cylindracés,  l’an- 
térieur est  un  peu  semi-lunaire;  ils  sont  très  écartés  et  occupent  les 
extrémités  antérieure  et  postérieure  de  l'animal;  on  peut  les  considé- 
rer comme  submarginaux , car  ils  sont  très  près  des  bords. 

Les  coquilles  du  genre  Cyprine  sont  généralement  grandes,  bombées, 
cordiformes,  inéquilatérales,  obr.ondes  ou  ovalaires;  elles  sont  épaisses, 
solides,  parfaitement  closes;  leur  surface  extérieure  est  lisse,  couverte 
de  stries  Iransverses  d’accroissement  peu  profondes  et  irrégulières; 
elle  est  revêtue  d’un  épiderme  brun  foncé  ou  verdâtre,  épais,  lustré, 
subécailleux,  surtout  du  côté  postérieur.  Cette  surface,  selon  la  juste 
comparaison  de  Müller,  ressemble  à celle  que  couvriraient  de  fins  crins 
serrés  les  uns  contre  les  autres.  Les  bords  sont  toujours  simples,  min- 
ces, tranchants  et  subitement  épaissis  à l’intérieur.  Le  côté  supérieur 
ou  dorsal  est  convexe,  il  est  dominé  par  la  saillie  de  grands  crochets 
rapprochés  obliquement,  inclinés  en  avant;  lecorselet  est  à peine  mar- 
(]ué  dans  la  plupart  des  espèces,  il  en  est  quelques  unes  où  il  est  nette- 


D1X-SE1»TIEME  FAMILLE. 


680 

nient  limité  par  un  angle  aigu.  Le  côte  antérieur  est  coilrt,  arrondi,  ob- 
tus, souvent  creusé  au-dessous  des  crochets  d'un  espace  lunulaire, 
mais  dans  lequel  la  lunule  n’est  point  circonscrite.  Le  côté  postérieur 
est  plus  allongé,  un  peu  moins  obtus  , et  quelquefois  sublronqué  dans 
l’étendue  occupée  par  le  passage  des  siphons. 

La  surface  interne  est  blanche,  d’un  blanc  mat  et  crétacé.  Cette 
surface  est  terne , même  chez  les  jeunes  individus  ; les  impressions 
des  muscles  et  du  manteau  s'y  dessinent  très  nettement,  étant  d’un  blanc 
un  peu  jaunâtre.  Les  impressions  musculaires  sont  très  grandes,  très 
écartées,  étant  Tune  et  l’autre  très  rapprochées  du  bord  : l'antérieure 
surtout  est  marginale,  tant  sa  partie  moyenne  est  rapprochée  du  bord; 
celle  impression  n'est  pas  entièrement  circulaire,  elle  est  plus  longue 
que  large,  son  côté  interne  étant  coupé  en  ligne  presque  droite.  L’impres- 
sion musculaire  postérieure  est  circulaire,  située  tout  à fait  en  arrière; 
elle  est  très  rapprochée  du  bord  postérieur.  Son  extrémité  supérieure 
so  continue  le  long  du  bord  cardinal  en  un  appendice  long  et  étroit  sur 
lequel  s’attache  le  muscle  rétracteur  postérieur  du  pied;  une  impression 
à peu  près  semblable  continue  le  muscle  antérieur;  seulement  elle  est 
plus  large,  elle  est  destinée  à recevoir  le  muscle  rétracteur  antérieur  du 
pied.  L’impression  palléale  quitte  le  muscle  antérieur  du  milieu  de  son 
bord  inférieur,  elle  marche  parallèlement  au  bord  ventral,  et,  parvenue 
vers  l’extrémité  postérieure,  elle  remonte  perpendiculairement  et  gagne 
la  circonférence  de  l'impression  musculaire,  comme  si  elle  devait  la 
traverser  dans  son  diamètre.  Il  résulte  de  celte  disposition  que  l’espace 
laissé  en  arrière , entre  le  bord  des  valves  et  l’impression  palléale,  est 
plus  large  que  celui  qui  e.xiste  dans  toute  la  longueur  du  bord  ventral. 

La  charnière  mérite  une  attention  particulière,  car  c’est  d’après  elle 
que  l’on  peut  rapporter  avec  certitude  les  espèces  fossiles  au  genre.  Il 
existe,  en  effet,  des  Cythérées  et  des  Vénus  dont  la  forme  générale  se 
rapproche  beaucoup  de  celle  des  Cyprines,  et  nous  avons  fait  remar- 
quer dans  ces  genres  la  disparition  graduée  de  la  sinuosité  palléale;  de 
sorte  qu’un  moule  sorti  do  l’une  de  ces  Cythérées  ou  de  ces  Vénus, 
n'ayant  point  conservé  l’empreinte  de  la  charnière , pourrait  être  placé 
parmi  les  Cyprines.  L’inverse  pourrait  donc  aussi  se  présenter  ; l’absence 
de  l’empreinte  de  la  charnière  pourrait  faire  confondre  une  Cyprine 
parmi  les  Vénus  et  les  Cythérées. 

La  charOière  des  Cyprines  est  fort  épaisse  ; elle  est  supportée  par  une 
lame  cardinale,  large,  épaisse,  solide,  dont  la  base  remplit  une  partie 
de  la  cavité  des  crochets;  elle  ne  la  remplit  pas  cependant  d’une  manière 
aussi  complète  que  celle  des  Galatées.  Trois  dents  cardinales  s'élèvent 


LES  CYCLADES. 


68i 


sur  la  valve  gauche  ; elles  sont  inégales:  l’antérieure  e^t  en  pyramide 
triangulaire,  allongée  dans  la  direction  de  la  lunule;  elle  est  irréguliè- 
rement dentelée  ou  sillonnée,  surtout  sur  son  bord  tranchant.  La  dent 
médiane  est  comprimée,  elle  est  oblique  d’avant  en  arrière,  et  elle  est 
séparée  de  l’antérieure  par  une  fossette  d'une  médiocre  largeur.  La 
dent  postérieure  est  encore  moins  épaisse  ; elle  se  rapproche  de  la 
nymphe,  et  elle  descend  obliquement  en  prenant  une  longueur  considé- 
rable; elle  est  séparée  de  la  dent  moyenne  par  une  très  large  fossette 
triangulaire.  La  charnière  de  la  valve  droite  offre  d’abord  en  avant  une 
fossette  triangulaire  propre  à recevoir  la  dent  antérieure.  Cette  fossette 
est  plus  ou  moins  profonde,  selon  les  espèces  ; à côté  d'elle  s'élève  une 
première  dent  oblique,  peu  épaisse,  séparée  de  la  suivante  par  une  fos- 
sette étroite  dans  laquelle  est  reçue  la  seconde  dent  de  la  valve  opposée. 
La  seconde  dent  de  la  valve  droite  est  très  grosse,  très  oblique,  tantôt 
simple,  tantôt  largement  canaliculée dans  toute  sa  longueur;  cette  grosse 
dent  est  séparée  de  la  nymphe  par  une  fossette  étroite  et  profonde  des- 
tinée à la  dent  postérieure  de  la  valve  gauche.  Une  dent  latérale  posté- 
rieure s’élève  sur  la  valve  gauche  en  arrière  du  ligament  et  de  la 
nymphe  qui  le  supporte , elle  est  reçue  dans  une  fossette  correspon- 
dante de  la  valve  droite  ; cette  dent  est  plus  ou  moins  saillante,'  selon 
les  espèces  ; elle  ne  manque  dans  aucune;  il  n’y  a aucune  trace  de  dent 
latérale  antérieure  comparable  à celle  des  Cy rênes.  La  nymphe  est  gé- 
néralement grosse,  épaisse  et  saillante  dans  les  Cyprines  ; elle  sert  de 
point  d’appui  à un  ligament  externe  gros  et  épais,  fort  saillant  au  de- 
hors et  allongé  le  long  du  bord  dorsal. 

Nous  le  disions  tout  à l’heure,  une  seule  espèce  vivante  est  connue 
dans  le  genre  Cyprine  ; cependant  M'  Turton  en  admet  quatre  autres 
dans  son  ouvrage  sur  les  Coquilles  bivalves  de  V Angleterre.  La  première, 
Cyprina  triangularis,  est  une  petite  Cythérée  très  voisine  du  minima^ 
que  nous  avons  mentionnée  dans  le  genre  Cythérée,  et  que  M.  Turton 
range  aussi  parmi  les  Cyprines.  La  seconde,  Cyprina  compressa,  a tous 
les  caractères  des  Astarlés;  elle  ne  porte  que  doux  dents  à la  charnière 
et  elle  n a aucun  vestige  do  dent  latérale  poslérienro.  La  troisième  est 
le  Cyprina  minima,  qui  est  une  véritable  Cythérée,  comme  nous  l’a- 
vons déjà  dit.  Enfin,  la  quatrième,  Cyprina  orbiculala,  est  une  coquille 
orbiculaire,  couverte  d’un  réseau  destries  longitudinales  et  Iransverses; 
elle  appartient  an  genre  Lucine.  Ces  espèces  étant  rejetées  du  genre,  il 
ne  reste  plus  que  le  reniis  islandtca,  seul  type  vivant  du  genre  Cyprine. 
Cette  espèce  est  propre  aux  mers  du  nord  de  l’Europe  et  de  l’Amériquo. 
C.ommune  en  Islande,  où  elle  se  mange,  on  la  Irouve  aussi  en  Suède  et 


682 


D1X>SEPTIEME  FAMrtLE. 


en  Norwége;  elle  descend  jusque  dans  les  mers  d’Angleterre  ; elle,  vit 
dans  les  mers  de  Groenland  , à Terre-Neuve,  et  sur  une  assez  grande 
longueur  des  côtes  de  rAmérique  septentrionale.  Elle  est  fossile  dans 
un  assez  grand  nombre  de  lieux.  Muller  dit  qu’elle  est  fossile  en  Suède; 
on  la  trouve  fréquemment  en  Islande,  dans  des  terrains  volcaniques,  où 
elle  a été  découverte  par  M.  Robert.  M.  S.  Wood  la  cite  parmi  les  fossiles 
du  crag  d’Angleterre,  et  M.  Nyst  dans  ducragdela  Belgique.  Elle  a été 
également  mentionnée  par  M.  Philippi  parmi  les  fossiles  de  la  Sicile. 

Si  l’on  s’en  rapportait  trop  aveuglément  aux  catalogues,  on  pourrait 
croire  qu’il  existe  plus  de  cinquante  espèces  fossiles  de  Cyprines;  mais 
lorsque  l'on  vient  à examiner  chacune  des  espèces,  on  reconnaît  bientôt 
que  plus  de  la  moitié  doivent  disparaître,  soit  qu'elles  rentrent  parmi 
les  Vénus  ou  les  Cythérées,  comme  nous  l’avons  déjà  vu  en  traitant  de 
ces  genres,  soit  qu’elles  fassent  double  emploi  et  se  perdent  dans  la  sy- 
nonymie des  espèces  qu’il  faut  conserver.  A la  suite  d’un  examen  scru- 
puleux, nous  conservons  vingt-deux  espèces  incontestables.  Il  y en  a 
deux  ou  trois  qui  pourraient  bien  dépendre  du  genre,  mais  dont  la  char- 
nièrp  n’est  pas  connue.  Il  faut,  en  conséquence,  les  laisser  jusqu’à  nouvel 
ordre  parmi  les  douteuses. 

Nous  ne  mettons  même  pas  au  nombre  de  ces  dernières  le  Ctjpriua 
vctusta  de  M.  Rœmer.  Dans  ses  fossiles  du  Hartz,  ce  savant  donne  ce 
nom  au  moule  d’une  coquille  ovale,  transverse,  qui,  pour  nous,  est  une 
véritable  Cyprîcardc.  Cette  espèce  est  la  seule  qui  jusqu’ici  ait  été 
mentionnée,  dans  les  terrains  paléozoïques:  en  la  faisant  passer  dans  un 
autre  genre,  le  genre  Cyprine  lui-même  disparaît  de  ces  terrains. 

Nous  avons  recueilli  dans  Toolithe  inférieure  d’Hayange  (Moselle) 
lès  moules  de  deux  coquilles  qui  ont  l'apparence  de  Cyprines  : l’une  a 
la  forme  générale  et  la  grandeur  du  Cyprîiia  islandica;  l’autre,  plus 
globuleuse , se  rapproche  du  Cyprîna  quadrata  de  la  craie , ayant  toute- 
fois les  crochets  moins  saillants.  Avant  de  les  admettre  défmilivemenl 
dans  le  genre , il  faudra  rechercher  la  charnière  que  nous  n’avons  point 
vue.  Deux  espèces  sont  propres  au  terrain  jurassique  moyen  de  la 
Russie  ; elles  ont  été  découvertes  aux  environs  de  Moscou  , et  M.  d Or- 
bigny  les  a fait  connaître  dans  le  bel  et  bon  ouvrage  de  MM.  de  Ver- 
neuil,  Murchison  et  Kaiserling,  sous  les  noms  de  Cyprina  hehner- 
seniona  et  cancriniana. 

De  toutes  les  formations . la  plus  riche  en  Cyprines  est  la  crétacée. 
Nous  y en  comptons  quinze , au  nombre  desquelles  nous  ne  com- 
prenons pas  les  deux  espèces  mentionnées  par  M.  Reuss  dans  son 
ouvrage  sur  la  craie  de  Bohême  : l’une , le  Cyprina  crassitesta^  n’est 


LES  CyrXADES. 


683 


point  figurée,  n'est  point  décrite  d’une  manière  suffisante;  l'autre, 
Cijprina  oblonga  nesi  pas  du  tout  Voblonga  de  M.  d'Orbïgny.  D’abord 
l’espèce  de  M.  Reuss  est-elle  une  Cyprine?  Nous  ne  le  pensons  pas. 
Dans  tous  les  cas , elle  devra  constituer  une  espèce  distincte  de  celle  à 
laquelle  elle  est  rapportée  : elle  est  beaucoup  plus  équilatérale , plus 
aplatio , plus  large  et  plus  tronquée  du  côté  postérieur  ; les  crochets 
sont  beaucoup  moins  saillants,  moins  obliques,  elles  stries  Iransverses 
sont  régulières  et  plus  profondes. 

Une  seule  espèce,  le  Cgprina  rostrata,  se  trouve  dans  le  terrain 
néocomien  en  Angleterre,  en  France  et  en  Suisse.  M.  Leymerie  en 
ajoute  une  seconde , Cyprina  ervyensis , qui , d’après  lui , se  trouverait 
à la  fois  darts  le  grès  yert  et  le  terrain  néocomien.  Mais  M.  d’Orbigny 
ne  l’admet  que  dans  ce  premier  terrain.  Sous  le  nom  de  Cyprfna  ker- 
nensis,  M.  Leymerie  sépare  une  espèce  que  M.  d’Orbigny  rapporte  au 
rostrata , tandis  que  M.  Brotm  le  confond  avec  le  Cyprina  angulata  de 
Sowerby.  N’ayant  pas  cette  espèce  sous  les  yeux , nous  ne  pouvons 
décider  lequel  de  ces  paléontologistes  a raison;  mais  il  nous  semble, 
d’après  la  figure  du  moule,  qu’elle  se  rapproche  davantage  du  rostrata. 
Quatre  espèces  sont  dans  le  gault  : le  regularis  et  Vervtjensis , d’après 
M.  d’Orbigny,  se  trouveraient  à la  fois  dans  l’Aube,  les  Ardennes,  la 
Meuse , dans  la  Drôme  et  en  Savoie. 

Une  espèce,  le  Cyprina  incerta  d’Archiac  , est  propre  au  grès  vert 
de  la  Belgique,  connue  sous  le  nom  de  Tourtia.  Cinq  espèces  se  distri- 
buent dans  la  craie  chloritée;  plusieurs  d’entre  elles  se  montrent  à la 
fois  dans  les  divers  bassins  crétacés , et  celle  nommée  ligeriensis  par 
M.  d’Orbigny,  se  rencontrant  partout , peut  .caractériser  celte  portion 
importante  de  la  formation  crétacée.  Enfin , il  y a une  espèce  dans  la 
craie  blanche  de  Royan , Cyprina  elongata  d'Orbigny,  et  une  dernière 
dans  la  craie  marneuse  do  Quedlinbourg,  nommée  Cyprina  orbicularis 
parM.Rœmer. 

Les  espèces  tertiaires  sont  moins  nombreuses.  Nous  en  avons  déjà 
réformé  plusieurs  que  Lamarck  avait  prises  pour  des  Cyprines,  et  qui 
sont  de  véritables  Vénus  par  tous  leurs  caractères.  A ces  espèces , 
précédemment  signalées  à la  fin  des  Vénus , nous  devons  ajouter  le 
Cyprina  tridacnoides  de  Lamarck,  qui  est  une  grande  Vénus  des  terrains 
tertiaires  de  l’Amérique  septentrionale,  décrite  sous  le  nom  de  Venus 
deformis  par  Say.  Le  Cyprina  islandicoides  de  Lamarck  est  composé  de 
deux  espèces  : une  Vénus , Venus  umbonaria  de  Bordeaux  et  d’Italie , 
une  véritable  Cyprine  qui , pour  nous , est  le  Venus  islandica  : le 
Cyprina  islandicoides  doit  donc  disparaître  complètement. 


DIX-SEPTIEME  FAMILLE. 


684 

L’étage  tertiaire  inférieur  contient  cinq  espèces  : deux  plmiata  et 
Iforn.sn  sont  de  l’argile  de  Londres.  La  troisième  est  des  sables  ma- 
rins les  plus  inférieurs  du  bassin  de  Paris  (Braclieux,  Noailles , 
Abbecourt , etc.):  c'est  le  Cyprina  sculeîlaria,  M.  Nyst  crut  la  re- 
trouver dans  Ie&  sables  de  Kleinspauwen  en  Belgique.  Mais  la  com- 
paraison des  coquilles  des  deux  bassins  nous  a fait  découvrir  en  elles 
des  différences  spécifiques , et  nous  nommons  l’espèce  belge  Ctjprina 
Nystii , voulant  consacrer  à cette  coquille  le  nom  du  naturaliste  qui  le 
premier  Ta  fait  connaître. 

Quoique  le  Cyprina  islandica  soit  assez  variable,  cependant  il  ne  l’est 
pas  aü  point  que  l’on  puisse  y admettre  la  coquille  à laquelle 
M.  Goldfuss  consacre  ce  nom  ; heureusement  que  l’excellente  figure 
publiée  par  ce  naturaliste  permet  de  rectifier  l’erreur  qu’il  a faite  à 
l’instigation  de  M.  Bronn.  La  coquille  décrite  par  Goldfuss  vient  de 
Bunde  et  d'autres  localités  de  Weslphalie,  dont  l’âge  se  rapporte  très 
probablémept  à celui  des  sables  de  Kleinspauwen , et  sont  parallèles 
aux  sables  de  Fontainebleau.  Il  résulte  des  précédentes  observations 
que  cette  soi-disant  islandica  doit  constituer  une  espèce  distincte  à 
laquelle  nous  donnons  le  nom  de  Cyprina  Bronnii^  et  qu’elle  ne  dépend 
pas  de  terrains  tertiaires  supérieurs , comme  l'a  cru  Goldfuss  , mais  de 
la  partie  supérieure  des  terrains  tertiaires’inférieurs. 

Une  seule  espèce  est  particulière  au  crag , elle  est  à la  fois  en  Bel- 
gique et  en  Angleterre  : c’eàt  le  Cyprina  rustica,  Flem.,  Tenus  rnsticaj 
Sowerby,  à laquelle  Goldfuss  a aussi  donné  le  nom  de  Cyprina  Lajon- 
Aaîrit;M.  Nyst  celui  de  Cyprina  iumida , et  presque  en  même  temps 
M.  Vanbeneden  celui  de  Cyprina  Defrancii. 

Enfin,  nous  avons  à mentionner  une  dernière  espèce,  le  Ke/ms  islan- 
dica ^ Lin.  Elle  est  fossile  dans  le  crag  d'Angleterre  et  de  Belgique; 
elle  apparaît  dans  ce  terrain  pour  la  première  fois , et  c’est  son  analogue 
qui  vit  encore  aujourd’hui  et  dont  nous  allons  présenter  la  synonymie. 

Nous  ne  mentionnons  aucune  espèce  dans’  l’étage  tertiaire  supé- 
rieur, Cependant  Brocchi . Lamarck , Defrance  , en  citent  plusieurs  ; 
et  plus  tard,  M.  Bronn  [Italiens  tertiar  Gebilde)  en  a mentionné  jusqu’à 
sept  espèces  dans  les  terrains  subapennins.  Mais  ce  savant  naturaliste 
a reconnu  depuis  que  ces  coquilles  dépendent  du  genre  Vénus  , et  il  les 
y a replacées  dans  son  Index  paîeontologicus. 


LES  CYCLAOES.  ^85 

Cyprine  d’Islande.  Ç'ijprina  islandica . Laink. 

PI.  18.  f.  8.  9.  10. 

C.  Testa  ovato^turgidâ,  cordatà  ^ inœquilaterâ , anticè  rotundatâ  ^ 
posticè  obscure  sabangulatâ , intiis  albo-cretuceà  ^ extàs  epidermide 
fusco  'uirente,  nitido  ^ striato 'vestitd;  cardine  lato  y soHdo;  dente 
anterioTC  pjtramidali , triangulari. 

Lister,  An.  ang.  p.  173.  pl.  4.  f.  22. 

Pectunculus  maximus.  Lister,  Conch.  pl.  272.  f.  108. 

Venus  islandica,  Linné,  Syst.  nat.  éd.  12.  p.  ii3r.  n“  124. 

Olafsen.  Voy.  en  Islande,  l.  i.  p.  37.  n®  98.  pl.  ii,  f.  8. 

Pennant,  Zool,  Brit.  t.  4*  P*  2o5.  pl,  56. 

Pectunculus  major,  Da  Costa,  Coneb.  Brit.  p.  i83.  pl.  14.  f,  3. 

Venus  Bucardium.  Born,  Mus.  p.  63.  pl.  4,  f.  ii. 

Venus  Müll.  Fau.  suec.  Prod.  p.  246.  n®  2977. 

Millier,  Zool.  suecica.  t,  i.  p.  107.  pl.  28, 

Chemu.  Concli.  t.  6.  p.  34o.pl.  32.  f.  34t,  342, 

Fabricius,  Faim.  Groënl.  p.  411.  n®  412.  » 

Schroef.  Einl.  f.  3.p.  123. 

Karslen,  Mua.  Lesk.  t.  i.  p.  i63. 

Gmel.  p.  3271.  n®  i5. 

Donov.  Brit.  Shells,  t.  3.  pl.  77. 

Wood,  Lin.  Trans.  t.  6.  p.  166.. 

Montagu,  Test.  Brist.  t.  i.  p.  1x4. 

Maton  et  Racket,  Lin.  Trans.  t.  8,  p.  83.. 

Dillw.  Cat.  t.  I.  p.  176.  n®42. 

Lamarck,  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  :T56.  n®  2. 

Arctica  'vulgaris,  Sebum.  Nouv,  syst.  p.  ï45.  pl.  i3.  f.  3. 

Turtün,  Conch.  Dict.  p.  238. 

Cyprina  arctica,  Turlon,  Conch.  Brit.  p.  i35.  n°  i. 

Bond.  Ëlepi.  of  Conch.  2®  part.  p.  11.  f.  33. 

Venus  islandica,  Gerv.  Cal,  des  coq.  de  la  Manche,  p.  25. 

Cyprina  islandica.  Blainv.  Malac.  p.  552.  pl,  70  bis.  f.  5. 

Croiich.  III.  Introd.  p.  x3,  pl.  7.  f,  2. 

Flem.  Brit.  An.  p.  443.  n®  5io. 

Venus  islandica.  Wood,  Ind.  pl.  7.  f,  41. 

Ciiv.  Règ.  an.  2®  éd,  t.  3.  p,  147. 

Desh.  Ency.  méth.  "Vers.  t.  2.  p.  46.  n®  1, 

Sowerby,  Généra  of  shells.  Cyprinn.  f.  i.  2.  Cyp,  'vulgaris. 


«86 


DIX“SEPTIÈME  ^'AMILLE. 


Desb.  daus  Lamk.  An.  s.  vert,  éd.  t.  6.  p.  ^90,  n*  2. 

Bouch.  Chant.  Cat.  des  coq.  du  Boul,  p.  20. 

Forbes,  Malac.  Mon.  p.  47, 

Anton,  Verz.  der  Coucb.  p.  10.  * 

Jeff.  Mar.  Moll,  at  Oban.  Conch.  mag.  p.  4.3, 

Gould.  Inv.  of  Massach.  p.  82. 

Reeve,  Conch.  syst.  t.  i.  p.  90.  pl,  65. 

Sow.  Coucb.  Man.  p.  i34.  f.  116. 

Hanley,  Descr.  cal.  p.  g5. 

Kuster,  Cheniii.  2®  éd,  Veu,  p,  5.  pl.  i.  f.  1,2. 

Callow,  Conch.  Nom.  p.  3i.  n“  i. 

Thomps.  Rep.  oflheFauna  oflreland.  p.  261. 

Lovèn,  Ind.  Moll.  Scand.  p.  38.  , 

Màcgill.  Moll,  of  Scotl.  p.  210  et  257. 

Thorpe,  Brit.  Mar.  conch.  p.  81. 

Agassi/., Coq.  tert.  p.  49.  n®  x.  pl.  i3.  f.  6,  7. 

FossHis.  Nyst,  Coq.-  foss.  de  Belg.  p.  147.  n loi.  pl.  9.  f.  i. 
f'ènus  œqualis,  Sow.  Min.  coucb.  pl.  21. 

Cyprina  œqualis,  Phil.  Eiium.  Moll.  SIcil.  t.  r.  p.  89. 

Cyprina  maxima.  Wood,  Cal.  foss.  shells  froin  the  crag.  Ann.  nat. 
bist.  t.  6.  p.  249. 

Cyprina  augulata.  iSyst,  Rech.  sur  les  foss.  d’Aiiv.  p.  9.  n®  84. 

Cyprina  islandicoides,  Nyst,  loc.  cit.  p,  9.  u®  33. 

Cyprina  islandica.  Hisioger,  Lethea  suec.  2®  Sup.  p.  9. 

Id.  Philippi,  Enum.  Mull.  Sicil.  t.  2.  p,  3i. 

Cyprina  'vulgaris.  Mçrris,  Càt.  of  Brit,  foss.  p.  86. 

Cyprina  œqualis.  Agassiz,  Coq.  terl.  p.  52.  n'*  2.  pl.  i3.  f.  5. 

Habite  tout  l’Océau  septentrional  en  Europe  et  eu  Amérique. 

Fossile  en  Norwége,  eu  Suède,  en  Scauie,  en  Sicile,  dans  les  terrains 
tertiaires  supérieurs;  en  Angleterre,  eu  Belgique,  daus  le  crag. 

Nous  ne  pouvons  citer  l’ouvrage  do  M.  Pusch  dans  notre  synonymie , 
parce  que  nous  soupçonnons  que  ce  naturaliste  a eu  sous  les  yeux  une 
Vénus  et  non  une  Cyprine.  Pusch  rapporte , dans  sa  Synonymie,  non 
seulement  le  Fe?ius  islandica  de  Brocchi , et  le  Cyprina  islandicoides  de 
Bastérot , qui  sont  de  véritables  Vénus , mais  encore  le  Cyprina  islan- 
dica de  Lamarck  et  le  Fenu^  œqualis  de  Sowerby  ; ces  citations  ne 
s’accordent  guère  avec  la  figure  de  l’espèce  qui , d’après  la  charnière , 
nous  semble  une  Vénus  voisine  de  Vumbonaria.  Nous  en  pouvons 
juger  avec  d’autant  plus  de  facilité  que  nous  avons  reçu  récemment  de 
Lobersdorf  une  coquille  semblable  à celle  de  M.  Pusch , et  elle  ne  diffère 


LES  CYCLÂDES, 


pas  de  Vumbonaria  de  Bordeaux.  Nous  devons  celle  communication  à 
M.  de  Hauer,  qui  possédé  la  plus  riche  colleclion  des  fossiles  terliaires 
de  l'Autriche  et  de  la  Transylvanie.  Sou^  le  nom  de  Gyprina  œqualis , 
M.  Goldfuss  a décrit  et  figuré  une  coquille  de  la  Westphalie,  qui 
appartient  bien  au  genre,  mais  qui  n’est  pas  de  l'espèce  à laquelle  il  la 
rapporte:  celle  Cyprine  doit  constituer  une  espèce  distincte,  ainsi  que 
nous  l’avons  déjà  dit  précédemment.  M.  Bronn  a commis  de  nombreuses 
erreurs  dans  la  synonymie  qu’il  donna  du  Venus  Brocchii  dans  lè 
Lethea  geognostica,  avec  laquelle  il  confond  le  Gyprina  islandica  et 
d'autres  espèces:  on  conçoit  d’après  cela  comment  il  se  fait  que  pour 
M.  Bronn  l’espèce  se  rencontre  partout,  dans  tous  les  terrains  tertiaires  ; 
mais  depuis  l’auteur  a rectifié  sa  synonymie  dans  son  Index  pahonto- 
logicus. 

Nous  ne  décrirons  pas  de  nouveau  celte  espèce  si  bien  connue , et 
cependant  avec  laquelle  d’autres  ont  été  si  souvent  confondues.  Cette 
confusion  n’était  pas  possible  entre  des  espèces  vivantes , puisqu’il  n’en 
existe  pas  d’autres , mais  elle  s’est  produite  entre  des  coquilles  fossiles 
légèrement  étudiées  dans  leurs  caractères  essentiels.  Nous  avons  tou- 
jours évité  ces  erreurs  , ainsi  que  le  constatent  les  tableaux  que  nous 
avons  publiés  en  1831,  dans  la  première  édition  des  Principes  de  gêologk 
de  M.  Lyell. 

Nous  aurons  quelques  remarques  à ajouter  au  sujet  de  la  distribution 
de  cette  espèce.  Elle  apparaît  pour  la  première  fois  dans  le  crag  d’An- 
gleterre et  de  Belgique;  l’âge  do  ce  terrain,  déterminé  par  les  fossiles 
qu'il  contient,  le  place  entre  les  dépôts  de  l’étage  moyen  et  ceux  de 
l’étage  supérieur.  Dès  cette  époque  l’espèce  était  confinée  dans  les 
régions  boréales  jusqu’au  delà  de  la  limite  de  la  région  tempérée  ; elle 
ne  se  montre  pas  dans  lés  terrains  tertiaires  supérieurs  du  midi  de 
l’Europe.  Quoique  citée  dans  les  terrains  subapennins,  elle  n’y  existe 
pas,  mais  la  continuité  de  son  existence  se  manifeste  par  sa  présence 
dans  les  terrains  terliaires  du  Nord.  En  même  temps  elle  apparaît  dans 
les  terrains  quaternaires  de  la  Sicile;  ce  qui  prouve  que,  entre  son 
origine  et  le  moment  où  elle  se  répand  dans  ce  pays,  les  conditions  de 
son  existence  sont  changées.  Les  continents  se  sont  agrandis , les  mers 
se  sont  approfondies , et  l’espèce,  se  propageant  en  suivant  des  lignes 
d’égale  température,  a gagné  les  grandes  profondeurs  des  mers  du 
midi  de  l’Europe,  et  elle  est  ainsi  parvenue  jusque  dans  la  Méditerranée, 
accompagnée  d’un  assez  grand  nombre  d'espèces.  Cette  population , 
presque  littorale  au  nord  , devient  pélagienne  vers  le  midi , attachée 
qu’elle  est  à celte  loi  de  la  distribution  des  êtres  qui  les  soumet  dans 


G88 


1)  1 X-SK  PT  l K M K F A M ! L I . K . 


fîes  limites  assez  étroites  à riiabitation  de  zones  d'éga^les  températures. 
11  a suffi  que  dans  rémersion  des  terrains  de  la  Sicile  il  y en  eût  de  pris  à de 
grandes  profondeurs  pour  qu’ils  apporjtassenl  à la  surface  celte  Cyprma 
isîandka^  que  l’on  croit  spécia.Ie  aux  mers  du  Nord,  mais  qui  par  le 
fait  peut  se  trouver  partout  où  règne  la  basse  température  qui  lui  est 
nécessaire.  La  constatation  de  l’identité  des  indivîdus  fossiles  déjà 
Sicile,  avec  ceux  qui  vivent  dans  les  mers  du  Nord,  a semblé  à 
M.  Agassiz  un  fait  d’une  importance  propre  à prouver  le  refroidisse- 
ment général  de  l’Europe  pendant  la  période  glaciaire.  Pris  dans  son 
isolement , le  fait  dont  il  est  question  ne  donne  pas  la  prouve  du  phé- 
nomène recherché  par  M.  Agassiz.  La  période  glaciaire,  telle  que  les 
géologues  la  déterminent,. a été  d’une  très  longue  durée  : d’après  eux 
la  température  moyenne  aurait  été  plus  basse  de  quatre  ou  cinq  degrés. 
Un  phénomène  d’une  telle  intensité  a dû  avoir  une  action  profonde 
sur  tous  les  êtres  vivants;  tous  ont  dû  se  déplacer  vers  le  midi  et  laisser 
de  nombreuses  traces  de  leur  migration.  On  n"’en  trouve  aucune 
cependant  ^ et  ce  fait  du  Cyprina  islandka  de  Sicile , cité  avec  tant 
d’empressement  et  d’éclat  par  M.  Agassiz  , n’a  rien  de  plus  extraordi- 
naire qué  beaucoup  d’autres  semblables  et  dus  à la  cause  toute  simple 
que  noua  exposions  tout  à l'heure. 

Cyprliie  scutellaire,  Cyprina  sciiteîlaria  ^ Desh. 

PI.  19,  f.  1.  2, 

C,  Testa  magnâ^  ovatii , cordiformi , subdepressâ^  irregulariter  striatd^ 
posticè  subangidatâ  \ latere  postico  angnlo  obtuso  eircumdaco; 
umhonibus  magnis  ,•  obUqitis  approximatis ; dente  Innari  angùsto , 
prcelongo  apice  irregulariter  crenato^  dente  lateraîi  postico  maxima^ 
in  alierâ  i?alvtdâ  nuUo. 

Cytherea  senteUaria^  Lamk.  Ann.  du  Mus.  t.  7.  p.  i33,  n®  r. 

là.  Defr.  Dict.  sc.  nal.  t.  12.  p.  421. 

Cytherea  scnteiinria,  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5,  p.  58i.  n°  3. 

Cyprma  scutellaria.  Desh.  Dict.  class.  d’hisl.  nat.  t,  5.  p.  282. 

Cyprina  scutellaria.  Desh.  Coq.foss.  de  Paris.  1. 1.  p.  i2  5,  pl.20.  f.  i , 4t 

Desh.  Ency.  inélh.  Vers,  t,  2.  p.  .'j6.  n®  2. 

Desh.  daus  Lamk  An.  ÿ.  vert.  2*  cd.  t.  6.  p.  33o.  n"  3. 

Habite...  Fossile  dans  les  sables  inférieurs  du  bassin  de  Paris,  Bra- 
cheux,  Abbecourl,  Noailles,  près  Beauvais,  elc. 

M.  Nyst  a mentionné  cette  espèce  dans  les  sables  de  Kleinspauwen 
en  Belgique,  mais  elle  n’y  existe  pas  ; ce  savant  naturaliste  ayant  pris 


LES  CYCLADES.  689 

pour  elle  une  espèce  qui  en  est  très  voisine.  Nous  avons  sous  les  yeux 
les  coquilles  des  deux  localités , et  nous  leur  trouvons  des  différences 
constantes.  Le  Cyprina  scutellaria  est  une  assez  grande  coquille  qui 
acquiert  la  taille  et  à peu  près  la  forme  du  Cyprina  islandica;  elle  est 
ovale,  inéquilatérale,  subcordiforme , mais  moins  gonflée,  plus  aplatie 
de  chaque  côté.  Au-dessus  d’un  côté  antérieur,  court  et  obtus , s’incli- 
nent des  crochets  saillants , très  obliques  et  très  rapprochés.  Le  côté 
postérieur  est  subtronqué;  il  est  circonscrit  par  une  cote  très  obtuse, 
accompagnée  d’un  pli  déprimé , peu  profond  ; cette  côte  et  ce  pli  par  - 
tent du  côté  postérieur  des  crochets  et  descendent  obliquement  vers 
l’extrémité  postérieure  de  la  coquille.  La  charnière  est  large  et  épaisse; 
la  lame  cardinale  est  courte  et  sinueuse  dans  le  milieu  ; la  dent  anté- 
rieure est  longue , étroite,  triangulaire,  son  bord  libre  est  irrégulière- 
ment dentelé.  La  dent  médiane  de  la  valve  gauche  est  toujours  bifide; 
les  lobés  résultant  de  la  bifurcation  sont  inégaux,  l’antérieur  est  le 
plus  gros.  Celle  bifurcation  n’existe  pas  dans  l’espèce  de  M.  Nyst.  La 
dent  latérale  postérieure  de  la  valve  droite  est  très  grosse  ; elle  est 
séparée  du  bord  par  une  rigole  étroite  et  profonde  dans  laquelle  est 
reçue  une  portion  correspondante  du  bord  de  l'autre  valve  un  peu  plus 
saillant,  mais  dépourvu  de  dent.  L'impression  palléale  est  simple,  mais 
elle  ne  reste  pas  parfaitement  parallèle  au  bord,  car  le  bord  s’élargit 
en  arrière , ce  qui  n’a  pas  lieu  dans  l’espèce  de  Belgique. 


GENRE  CINQUANTE-SIXIÈME. 

CYRÈNXï.  Cyrena,  Lamk. 

PL  ï 8.  lig.  I à 7. 

Caractî:rE3  GÉNÉRIQUES. — Animal  ovale,  transverse;  les 
lobes  du  manteau  simples  ou  frangés  , réunis  postérieurement  ; 
deux  siphons  courts  et  réunis  à la  base.  Pied  comprimé,  ovale, 
trigone  ; deux  branchies  très  inégales  : la  plus  grande  interne , 
subquadrangulaire , la  plus  petite  subtrigone.  Bouche  trans- 
verse; palpes  labiales  allongées,  ovales,  trigones,  non  soudées. 

Coquille  ovale,  arrondie  ou  subtrigone,  épaisse,  solide, 
épiderinée.  Charnière  ayant  trois  dents  cardinales  sur  chaque 
T.  I.  PARTIE.  4 U 


DIX-SEPTIÈME  FAMILLE. 


690 

valve;  deux  dents  latérales,  tantôt  lisses,  tantôt  striées; 
l’antérieure,  ordinairement  la  plus  épaisse;  la  plus  courte,  est 
la  plus  rapprochée  des  dents  cardinales.  Impressions  muscu- 
laires petites,  arrondies;  impression  palléale  simple. 

SYNONYMIE  généïuque.  — VcHus  ^ Çhemnitz , Schroeter, 
Gmel.,  Faujas,  Dilhv.,  Wood.  — Tellina^  Muller,  Schroeter, 
Gmel.,  Montagu,  Dillw.,  Wood. — Cardium,  Da  Costa, 
Dorset,  Montagu.  — Cyclas ^ Bruguière,  Lamarck,  Bosc, 
Schumacher,  Cuvier,  Blainville.  — Corbicula^  Megerle. — 
Macira^  Brongniart.  — Geloina  , Gray. — Velorita^  Gray. 

OBSERVATIONS.  Lo  güiiro  Cyclado  de  Bruguière,  réunissant  sons  des 
caractères  naturels  des  coquilles  disséminées  parmi  les  Tellines , les 
Vénus  et  môme  les  Cardiums , aurait  pu  être  conservé  dans  son  entier  ; 
mais  Lamarck  crut  nécessaire  de  le  partager,  d'après  dos  caractères  de 
faible  valeur  empruntés  aux  coquilles:  il  en  sépara  les  Cyrènes , et  son 
exemple  fut  généralement  suivi  ; cependant , comme  nous  le  verrons 
bientôt,  il  s'établit  une  transition  insensible  d'un  genre  à l'autre,  de 
telle  sorte  qu'il  devient  parfois  assez  difficile  de  marquer  nettement 
leur  limite. 

Les  Cyrènes  étaient  connues  avant  Bruguière.  Millier,  dans  son 
HhtoivB  des  vers,  en  mentionne  plusieurs  et  les  range,  avec  les 
Cyclades,  dans  le  genre  Tellina.  Muller,  en  cela,  se  conforme  à l’opi- 
nion de  Linné , qui  plaça  dans  ce  genre  Telline  l’espèce  de  Cyclade 
la  plus  répandue  dans  les  eaux  douces  de  l’Europe.  Par  le  fait.  Millier, 
ayant  séparé  les  Tellines  d'eau  douce  des  marines , il  a suffi  à Bru- 
guière de  prendre  ce  genre  si  bien  ébauché  et  do  lui  donner  un  nom 
convenable.  Quelques  années  après  la  publication  de  l'ouvrage  de 
Millier,  Chemnilz  fit  connaître  quelques  espèces  qui  auraient  pu  se 
ranger  dans  les  Tellines  de  cet  auteur  ; mais  leur  trouvant  trop  d'épais- 
seur et  de  solidité , le  savant  conchyliologue  les  mit  au  nombre  des 
Vénus.  Les  naturalistes  qui  succédèrent  à ceux  que  nous  venons 
de  citer  eurent  le  tort  de  suivre  sans  examen  leur  exemple,  conservant 
à quelques  espèces  leur  place  dans  les  Tellines , à quelques  autres  leur 
rang  parmi  les  Vénus. 

Les  Cyclades,  par  leur  charnière,  se  rapprochent  réellement  des 
Bucardes;  il  no  faut  donc  pas  s’étonner  si  Da  Costa,  à une  époque  où 
l’élude  des  coquilles  était  peu  avancée,  confontîit  les  Cyclades  parmi 


LES  CYCLADES. 


G91 

les  Cardiums;  mais  il  est  surprenant  que  celte  opinion  .ait  trouvé  des 
approbateurs  parmi  des  conchyliologues  aussi  instruits  que  Montagu , 
Pulteney,  Racket,  qui  écrivirent  lorsque  la  science  possédait  assez  de 
documents  certains  pour  éviter  une  telle  confusion. 

Lamarck  conserva  d’abord  le  genre  Cyclade  tel  que  Bruguière  l’avait 
conçu;  Megerle , en  1 811  , le  modifia  et  en  fit  sortir  le  genre  Corbicuîa 
pour  celles  des  Cyrènes  qui  ont  les  dents  longues  et  étroites.  A ce 
genre  incomplet  Lamarck  en  substitua  un  autre  , plus  naturel , mieux 
caractérisé,  qu’il  proposa  sous  le  nom  deCyrène  dans  ses.4nîïnawaï  sans 
vertèbres.  Depuis  sa  création , ce  genre  fut  adopté  par  presque  tous  les 
zoologistes.  Nous  devons  cependant  en  excepter  M.  Gray,  qui  en  1 844, 
et  plus  tard  en  1 847 , proposa  de  partager  en  trois  un  genre  aussi 
naturel  que  celui  de  Lamarck.  M,  Gray  admet  d’abord  le  genre  Corbi- 
cuîa  pour  les  espèces  à dents  latérales , longues  et  striées  ; le  genre 
Cijrena  se  trouve  réduit  aux  espèces  à dents  latérales  simples  et  plus 
courtes;  et  enfin  il  détache  un  genre  Velorita  pour  des  espèces  à 
dents  latérales,  courtes,  épaisses  et  rapprochées  de  la  charnière. 
Nous  allons  voir,  par  l’examen  des  coquilles  et  des  animaux,  que  les 
trois  genres  de  M.  Gray  ne  se  justifient  pas  par  des  caractères  do 
quelque  valeur. 

Nous  avons  sous  les  yeux  l’animal  du  Cyrem  zeylanica;  il  a beau- 
coup de  ressemblance  avec  celui  des  Vénus,  mais  il  conserve  des 
caractères  propres  au  genre  auquel  il  appartient.  Il  est  enveloppé  d’un 
large  manteau  membraneux , dont  les  lobes  sont  séparés  dans  la  plus 
grande  partie  de  leur  circonférence  ; leur  séparation  commence  au  bord 
inférieur  du  muscle  adducteur  antérieur  des  valves  et  se  termine  tout 
à fait  en  arrière,  à la  base  des  siphons.  Cet  organe  présente  môme  de 
ce  côté  une  disposition  tout  à fait  semblable  à celle  que  nous  ont  offerte 
les  Galalées , c’est-à-dire  que  les  lobes , au  lieu  de  se  réunir  étroi- 
tement à la  base  des  siphons , débordent  ces  organes  et  leur  ménagent 
une  cavité  particulière  pour  les  loger  au  moment  où  l’animal  les  con- 
tracte. 

La  circonférence  du  manteau  est  épaissie  par  un  muscle  orbiculaire 
assez  large,  qui  lui-même  est  débordé  par  un  large  bord  membra- 
neux, profondément  lobé,  plissé,  en  un  mol  exactement  disposé 
comme  celui  que  nous  avons  décrit  dans  plusieurs  espèces  de  Vénus. 
Ce  bord  se  rétrécit  en  avant  et  en  arrière,  et  en  même  temps  ses  lobes 
s’amoindrissent  ; entre  ce  bord  et  celui  qui  s’applique  sur  le  test , il  en 
existe  un  troisième  assez  épais , mais  court  et  simple. 

Les  siphons  sont  gros  et  courts.  Ils  sont  aplatis  latéralement  et  réunis 

fl  h* 


DIX-SEPTIÈME  FAMILLE. 


dans  presque  toute  leur  longueur  ; une  dépression  latérale  les  parcourt  et 
indique  le  point  de  leur  jonction.  Ces  organes  sont  presque  égaux  ; une 
ouverture  grande  et  ovalaire  les  termine,  et  sur  le  bord  de  cette  ouverture 
s’élève  un  seul  rang  do  petits  tentacules  serrés,  nombreux,  subcylin- 
driques et  toujours  simples.  L’ouverture  intérieure  des  siphons  nous 
présente  une  disposition  remarquable , comparable  à ce  qui  existe  dans 
les  Mactres.  Une  grande  valvule  membraneuse  couvre  l’entrée  du 
siphon  branchial.  Ses  extrémités  antérieures  se  prolongent  en  avant  et 
présentent  la  forme  d’un  V très  ouvert  j au-dessous  de  celte  valvule  on 
en  trouve  une  autre  que  nous  n’avons  jamais  vue  dans  les  autres  genres 
de  Mollusques  que  nous  connaissons.  Elle  ressemble  à une  manchette 
qui  s’élève  du  pourtour  intérieur  du  siphon  et  s'avance  en  avant  à une 
faible  hauteur.  Les  membranes  qui  entourent  l’entrée  du  siphon  anal 
sont  elles-mêmes  très  saillantes  ; elles  forment  une  espèce  d'entonnoir 
qui  s’avance  au-devant  de  l'extrémité  postérieure  des  branchies. 

La  masse  abdominale  est  peu  épaisse  : elle  est  terminée  par  un  large 
pied  subquadrangulaire  continué  en  avant  par  une  pointe  triangulaire 
aplatie  et  linguiforme.  Ce  pied  est  tout  à fait  semblable  à celui  des 
Vénus,  et  il  est  pourvu  en  avant  et  en  arrière  d’un  muscle  rétracteur 
bifurqué  à son  extrémité,  et  qui  s’attache  à la  coquille  de  la  même  ma- 
nière que  chez  les  autres  Mollusques  acéphalés. 

La  bouche  est  grande , subcirculaire  ; elle  est  accompagnée  comme  à 
l’ordinaire  de  deux  paires  de  palpes  labiales,  dont  la  forme  et  la  grandeur 
se  rapprochent  assez  de  celles  des  Mactres.  Ces  organes  sont  portés  beau- 
coup plus  en  avant  que  chez  les  autres  Mollusques.  Il  en  résulte  la  sup- 
pression totale  des  lèvres,  les  palpes  labiales  d’un  côté  se  joignant  par 
leur  base  à celles  de  l’autre  sur  la  ligne  médiane.  Nous  avons  déjà  remar- 
qué d’autres  Mollusques  chez  lesquels  les  lèvres  étaient  très  courtes,  mais 
celui-ci  est  le  seul  où  elles  manquent  complètement.  Les  palpes  labiales, 
chez  les  Cyrènes,  sont  grandes , en  triangle  très  pointu  et  couvertes  en 
leur  surface  interne  d’une  très  grande  quantité  de  fines  lamelles  peu 
saillantes,  mais  très  serrées;  et,  ce  qui  n’est  pas  ordinaire,  ces  lamelles 
»e  continuent  jusqu’au  voisinage  de  la  bouche. 

Les  organes  de  la  respiration  ont  la  plus  grande  analogie  avec  ceux 
des  Vénus.  Ils  sont  composés  de  deux  paires  de  feuillets  branchiaux 
inégaux,  dont  les  internes  sont  les  plus  grands.  L’extrémité  antérieure 
de  ces  feuillets  se  maintient  très  largo  : parvenue  vers  l’origine  des 
palpes  labiales , elle  se  prolonge  en  une  pointe  étroite  qui , pour 
s’avancer  jusque  près  de  la  bouche , s’interpose  entre  les  organes  dont 
nous  parlons.  Les  branchies  se  prolongent  en  arrière  de  la  masse  abdo- 


LES  CYCLADES. 


6g?, 

minale;  elles  so  réunissent  au  moyen  d’un  bord  membraneux  étroit,  et, 
se  soudant  par  leur  face  interne  aux  membranes  du  siphon  anal , elles 
interceptent  toute  communication  entre  la  cavité  de  ce  siphon  et  celle 
du  manteau. 

Les  muscles  adducteurs  des  valves  sont  d’un  médiocre  volume  si  on 
les  compare  à la  grandeur  do  l’animal.  Ces  organes  sont  subcylindri- 
ques , à peu  près  égaux,  et  tout  on  restant  dans  la  région  dorsale , ils 
occupent  à peu  près  les  extrémités  de  l’animal. 

Les  coquilles  du  genre  Cyrène  sont  généralement  grandes  elles  sont 
épaisses,  solides,  suborbiculaires  ou  subtrigones,  presque  équilatérales; 
elles  sont  plus  ou  moins  comprimées  ; quelques  unes  sont  bom- 
bées et  subcordiformes.  Leur  surface  externe,  ordinairement  lisse,  pré- 
sente cependant  des  stries  irrégulières  d’accroissement , et  un  certain 
nombre  d’espèces  sont  ornées  de  sillons  transverses.  Toutes , sans 
exception,  sont  revêtues  d’un  épiderme  tenace,  plus  ou  moins  épais , 
verdâtre,  d’un  brun  plus  ou  moins  foncé.  Les  bords  sont  toujours 
simples,  et  les  valves  étant  rapprochées , la  coquille  est  parfaitement 
close  sur  tout  son  pourtour.  Ses  bords  sont  minces  et  tranchants  ; ils 
s’épaississent  assez  vite  à l’intérieur.  Le  coté  antérieur  est  ordinaire- 
ment le  plus  court;  il  est  obtus  et  arrondi  : il  est  dénué  de  la  lunule  et 
il  est  dominé  par  des  crochets  généralement  peu  saillants  , très  rappro- 
chés , et  presque  toujours  profondément  cariés , ainsi  que  cela  a lieu 
dans  presque  toutes  les  coquilles  qui  habitent  les  eaux  douces.  Le  côté 
postérieur,  un  peu  plus  allongé , est  obscurément  tronqué  à la  manière 
de  celui  des  Cyprines.  Le  côté  dorsal  ou  supérieur  est  presque  toujours 
convexe;  il  porte  à son  extrémité  antérieure  des  nymphes  épaisses , 
solides,  plus  ou  moins  saillantes,  selon  les  espèces,  séparées  par  un 
sillon  profond,  et  destinées  à recevoir  un  ligament  externe  ordinaire- 
ment saillant , convexe  et  allongé  le  long  du  bord  dans  une  étendue 
variable  et  toujours  en  rapport  avec  la  longueur  des  nymphes.  Dans 
les  espèces  triangulaires,  pour  lesquelles  M.  Mégerle  a proposé  le 
genre  Corbicula,  la  nymphe  est  plus  petite  elle  ligament  plus  court; 
mais  si  l’on  adoptait  ce  genre,  dans  toute  la  rigueur  de  ses  caractères  , 
il  faudrait  y ajouter,  comme  nous  le  verrons  , do  très  grandes  espèces 
chez  lesquelles  le  ligament  est  plus  saillant  que  dans  aucune  autre. 

La  surface  interne  n’est  jamais  nacrée;  elle  est  blanche  dans  un 
grand  nombre  d’espèces;  elle  prend  des  teintes  pourprées  ou  violacées 
dans  un  assez  grand  nombre  d'autres;  et  cette  distribution  de  couleurs 
n’afïecle  pas  plus  une  forme  qu'une  autre  : elle  se  montre  indiffécefu- 
ment  chez  les  espèces  orbiculaires  ou  dans  les  triangulaires, 


DIX-SEPTlÊME  FAMILLE. 


694 

La  charnière  présente , comme  dans  tous  les  grands  genres , des 
caractères  constants,  et  cependant  variables  dans  certaines  proportions. 
C'est  ainsi  qu'on  peut  dire,  d’une  manière  à peu  près  absolue,  que 
cette  charnière  est  composée  de  trois  dents  cardinales  et  de  deux  dents 
latérales.  Les  dents  cardinales  sont  divergentes,  généralement  peu 
proéminentes,  presque  toujours  égales;  cependant  dans  un  certain 
nombre  d'espèces , la  dent  cardinale  antérieure  est  plus  courte.  Si 
quelquefois  ces  dents  sont  simples,  il  arrive  souvent  qu’elles  sont  creu- 
sées d’un  sillon  à leur  sommet;  quant  aux  dents  latérales,  elles  sont 
plus  variables  que  les  cardinales , courtes  et  épaisses , comme  dans  le 
Cyrena  zeylmica:  par  exemple,  on  les  voit  s’allonger  successivement, 
do  manière  à occuper  la  plus  grande  partie  do  la  longueur  des  bords 
antérieurs  et  postérieurs , ainsi  qu'on  peut  le  remarquer  déjà  dans  le 
Cyrena  vioiacea;  mais  bientôt  ces  dents  s’allongent  encore  dans  les 
espèces  triangulaires , et  alors'  elles  deviennent  plus  étroites , et  leur 
extrémité  s’avance  jusqu’aux  impressions  musculaires.  Il  y a donc  une 
véritable  progression  dans  l’allongement  des  dents  latérales  , de  telle 
sorte  qu'en  employant  les  caractères  qu’elles  offrent,  il  est  impossible 
de  donner  une  limite  certaine  au  genre  Corbicule.  Dans  la  moitié  à peu 
près  des  espèces,  les  dents  latérales  sont  simples;  chez  les  autres,  ces 
dents  sont  striées  perpendiculairement.  M.  Gray  a attaché  quelque 
valeur  à la  présence  des  stries  sur  les  dents  latérales;  comme  elles 
existent  principalement  chez  les  espèces  triangulaires  qui  ont  les  dents 
très  allongées , il  a cru  trouver  là  un  moyen  de  plus  pour  appuyer  le 
genre  Corbicule.  Mais  si  l’on  étudie  toutes  les  espèces  tant  vivantes  que 
fossiles  du  genre  Cyrèno,  on  en  trouvera  à dents  courtes  qui  sont 
striées,  comme  celles  à dents  longues;  par  conséquent,  ce  caractère 
échappe,  comme  tous  les  autres,  pour  fonder  une  ou  plusieurs  divisions 
dans  le  genre  naturel  des  Cyrènes. 

Dans  ces  derniers  temps , M.  Gray  a proposé , ainsi  que  nous  l’avons 
dit,  un  genre  Velorüa  pour  quelques  espèces  de  Cyrènes,  chez  lesquelles 
les  dents  latérales  sont  courtes,  épaisses,  très  rapprochées  des  dents 
cardinales.  Cette  légère  modification  n’a  point  assez  d’importance  à nos 
yeux  pour  mériter  la  création  d’un  genre;  si  à côté  d’clio  on  en  remar- 
quait d’autres , soit  dans  l’impression  du  manteau , soit  dans  l'empreinte 
des  muscles,  on  pourrait  alors  soupçonner  quelques  différences  assez 
grandes  dans  l'organisation  de  l’animal;  mais  ces  modifications  n’ayant 
pas  lieu,  nous  rejetons  un  genre  qui  no  nous  paraît  pas  suffisamment 
justifié. 

Les  impressions  musculaires  sont  généralement  petites  dans  le  genre 

I 


LES  CYCLADES. 


695 

Cyrène,  ovales  ou  oblongues  ; elles  sont  situées  aux  extrémités  de  la 
coquille,  cl,  quoique  descendant  assez  bas,  elles  appartiennent  cepen- 
dant à la  région  dorsale  de  l’animal.  L’impression  musculaire  antérieure 
est  submarginalo ; elle  so  trouve  très  rapprochée  du  bord;  la  posté- 
rieure en  est  plus  éloignée.  Une  impression  palléalo  parallèla  au  bord 
ventral  s'étend  d’un  muscle  à l’autre;  elle  est  située  plus  ou  moins  haut 
selon  les  espèces;  parvenue  vers  le  côté  postérieur,  elle  s’infléchit 
quelquefois  un  peu  en  dedans,  à la  manière  de  celle  des  Cyprines  : et 
nous  avons  sous  les  yeux  quelques  espèces  dans  lesquelles  il  existe  près 
du  bord  antérieur  de  l’impression  musculaire  une  petite  sinuosité  étroite, 
moins  nettement  arrêtée  que  celle  des  Vénus  et  des  Cylhérées,  qui 
semble  indiquer  l’existence  d’un  petit  muscle  spécial , rétracteur  des 
siphons.  Cette  sinuosité  rappelle  celle  des  Glauconomes,  mais  beaucoup 
plus  courte  et  non  moins  étroite. 

Toutes  les  Cyrènes  sont  des  coquilles  d'eau  douce;  quelques  unes, 
dit-on,  vivent  dans  des  eaux  saumâtres,  mais  ayant  une  très  faible 
salure;  toutes  habitent  les  pays  chauds.  Il  n'en  reste  qu’une  seule  en 
Europe;  elles  ont  disparu  môme  do  celles  de  nos  eaux  thermales  où  se 
sont  conservées  des  Mélanies  et  des  Mélanopsides.  On  n‘cn  trouve  pas 
dans  le  nord  de  l’Afrique  ; il  faut  aller  dans  des  régions  plus  chaudes  , 
en  Égypte,  par  exemple,  et  en  Perso,  en  Sicile,  pour  rencontrer  celles 
qui  s’avancent  le  plus  vers  le  nord.  Mais  elles  deviennent  abondantes 
dans  l’Inde , et  surtout  dans  les  eaux  douces  du  grand  Archipel  indien. 
MM,  Quoy  et  Gaimard  en  ont  rapporté  quelques  unes  de  la  Nouvelle- 
Hollande,  et  depuis  MM.  Lesson  et  Garnol  en  ont  également  rencontré 
dans  la  plupart  dos  îles  do  l'océan  Pacifique  , qu’ils  ont  visitées.  Les 
Cyrènes  sont  beaucoup  plus  localisées  pour  la  plupart  que  les  Mollus- 
ques marins,  et  cette  observation  n’ost  pas  sans  importance,  lorsque 
l’on  veut  se  rendre  compte  de  la  distribution  des  espèces  fossiles  limitées 
quelquefois  sur  do  très  petites  surfaces.  Si  dans  la  nature  actuelle 
quelques  espèces  so  répandent  dans  les  eaux  d'une  mémo  région , il  y 
en  a d’autres  qui  no  franchissent  pas  un  fleuve,  une  rivière,  un  lac;  il 
en  était  do  même  dans  les  temps  anciens , aux  diverses  époques  géolo- 
giques pendant  lesquelles  les  Cyrènes  so  sont  montrées.  Nous  comptons 
actuellement  environ  cinquante  espèces  inscrites  dans  les  ouvrages 
publics;  il  faut  en  retrancher  quelques  unes , qui  ont  été  reproduites 
sous  plusieurs  noms  spécifiques. 

Les  espèces  fossiles  ne  sont  pas  moins  nombreuses.  On  a cru  pen- 
dant longtemps  qu’elles  no  descendaient  pas  au-dessous  des  terrains 
tertiaires  ; mais  celte  opinion  était  pour  nous  tout  à fait  fausse  dès  1 823, 


DIX-SKPTIEME  FAMILLE. 


696 

ayant  reconnu  pour  appartenir  au  geiire  qui  nous  occupe  des  coquilles 
prises  pour  des  Vénus,  et  trouvées  dans  le  weald,  en  Angleterre. 
M.  Rœmer,  dans  son  excellent  ouvrage  sur  le  terrain  oolithique  de 
rAllemagne,  a prouvé  que  les  Cyrènes  se  répandent  en  abondance  dans 
le  terrain  wealdien  de  l'Allemagne;  mais,  plus  récemment  encore, 
MM.  Dunker  et  Meyer,  dans  leur  ouvrage  iniilaXé  Palœonlographica  ^ 
ont  décrit  une  véritable  espèce  de  Cyrène  provenant  des  marnes  du 
lias , et  accompagnée  d’une  Nériline  et  d’autres  coquilles  fluviatiles, 
La  découverte  de  Cyrènes  dans  des  terrains  considérés  par  des  géolo- 
gues comme  exclusivement  marins  est  un  fait  d’une  grande  importance , 
et  qui  prouve  que  dans  les  temps  les  plus  reculés  de  l'histoire  de  notre 
globe  les  eaux  douces  ont  existé,  ont  nourri  des  animaux  de  même 
genre  que  ceux  de  la  nature  actuelle.  Un  phénomène  semblable  à ceux 
qui  se  passent  sous  nos  yeux  a dispersé  dans  la  mer  ces  animaux 
lacustres,  et  leurs  débris  ont  été  môlés  à ceux  des  animaux  marins. 

La  présence  des  Cyrènes  dans  les  terrains  dont  nous  venons  de  parler 
explique  celle  des  autres  coquilles  d’eau  douce , pour  lesquelles  quelques 
paléontologistes  ont  proposé  plusieurs  genres  nouveaux,  dans  la  per- 
suasion que  CCS  coquilles  ont  vécu  dans  la  mer,  quoiqu’elles  eussent 
tous  les  caractères  de  celles  de  nos  eaux  douces.  Nous  reviendrons  plus 
tard  sur  celte  question  intéressante , quand  nous  traiterons  des  genres 
auxquels  nous  faisons  allusion. 

La  présence  des  Cyrènes  fossiles  dans  une  grande  partie  des  terrains 
de  sédiment  de  l’Europe  . la  où  le  genre  n'existe  plus  maintenant,  est 
un  fait  dont  Tapprécialion  ne  doit  pas  être  négligée.  Ici , il  n’y  a point 
de  distinction  à établir  entre  les  espèces  méridionales  et  septentrionales 
d’un  même  genre  pour  saisir  l’analogie  des  espèces  fossiles,  et  en 
déduire  les  changements  dans  les  circonstances  d'habitation;  c’est  le 
genre  tout  entier  qui  se  déplace  : autrefois  européen , il  habitait  des 
régions  qui  aujourd'hui  sont  froides  ou  tempérées.  Mais  à quelle  époque 
ce  déplacement  s’est-il  opéré?  Voilà  ce  que  nous  pourrons  préciser  par 
nos  recherches  sur  la  distribution  des  espèces  dans  les  terrains  ter- 
tiaires. 

Nous  connaissons  80  espèces  fossiles  de  Cyrènes.  M.  Bronn,  dans 
son  Index  palœontologicns , en  mentionne  75;  nous  n'admettons  pas 
toutes  celles  de  ce  savant , et  nous  restituons  le  litre  d’espèces  à plu- 
sieurs de  celles  qu’il  relègue  dans  la  synonymie  ; enfin,  dans  le  chiffre 
que  nous  adoptons , sont  comprises  plusieurs  espèces  de  notre  collection 
non  décrites,  et  qui  méritent  cependant  d’être  mentionnées. 

Ainsi  que  nous  venons  de  le  dire,  M,  Dunker  a fait  connaître  une 


LES  CYCXADES. 


697 

espèce  qui  provient  du  lias  des  environs  de  Halberstadt  (basse  Saxe)  ; 
elle  est  la  première  qui  apparaisse  dans  les  terrains  sédimentaires. 

Nous  devons  à M.  Dujardin  la  connaissance  d’un  autre  fait  analogue 
à celui  que  nous  venons  de  rapporter.  Ce  savant,  connu  par  tant  d'ex- 
cellents travaux  de  zoologie,  en  explorant  les  terrains  coralliens  de  Luc 
(Calvados),  y découvrit  deux  espèces  de  Cyrènes,  et  nous  les  com- 
muniqua. 

Depuis  les  couches  du  coral-rag  jusqu’à  celles  du  weald , que  les 
géologues  regardent  comme  les  plus  inférieures  du  grand  système 
crétacé,  aucune  espèce  ne  se  montre;  mais  par  un  phénomène  très 
extraordinaire,  le  genre  prend  tout  à coup  dans  le  weald  un  développe- 
ment considérable.  Nous  y comptons  quarante  et  une  espèces  qui , presque 
toutes,  ont  été  découvertes  en  Allemagne , et  décrites  par  M.Rœmer, 
par  Goldfuss,  et,  enfin,  par  M.  Duuker,  dans  un  ouvrage  spécialement 
consacré  aux  fossiles  de  la  formation  dont  nous  parlons.  A ces  espèces, 
il  faut  joindre  celles  d’Angleterre , décrites  par  Sowerby,  et  rapportées 
pour  la  plupart  au  genre  Cyclade.  Nous  ne  pouvons  mentionner  toutes 
ces  espèces  auxquelles  cependant  s’attache  un  vif  intérêt;  nous  cite- 
rons seulement  celles  qui  se  retrouvent  en  même  temps  dans  plusieurs 
localités.  Ckjrena  elonrjala,  Rœmer,  nommée  aussi  Cyclas  angulata 
par  Sovverby,  dans  l’ouvrage  de  M.  Fitton:  elle  se  trouve  à la  fois  en 
Angleterre  et  en  Allemagne;  il  en  est  de  mômô  dos  Cyrena  gibbosa, 
major,  media,  Sow.,  qui.,  communément  répandues,  sont  propres  à 
caractériser  le  grand  dépôt  lacustre  placé  aux  limites  des  formations 
jurassiques  et  crétacées.  Une  seule  espèce , le  Cyrena  fossulata,  a été 
mentionnée  par  M.  Cornuel,  dans  les  couches  inférieures  du  système 
crétacé  ; elle  paraît  avoir  échappé  à M.  d’Orbigny. 

Vingt  et  une  espèces  sont  distribuées  dans  l’étage  tertiaire  inférieur; 
elles  commencent  avec  les  ligniles  ou  dans  les  sables  qui  sont  au-des- 
sous. Quelques  unes  sont  d’une  abondance  extrême  ; le  cnneiformis , 
par  exemple , couvre  le  sol  ; le  sable  en  est  pétri  et  des  couches  en  sont 
formées;  elle  est  commune  au  bassin  do  Paris  et  à celui  de  Londres.  Il 
en  est  de  môme  du  Cyrena  telîinella,  Fér.  Une  autre  espèce,  moins 
abondante,  Cyrena  aiitiqua,  Fér.,  accompagne  le  cuneiformis,  mais 
elle  reste  dans  le  bassin  de  Paris  ; dans  celui  de  Londres,  elle  est  rem- 
placée par  une  espèce  nommée  deperdita  par  Sowerby,  mais  qui  est 
très  différente  du  deperdita  de  Lamarck.  àl.  Bronn  la  rapporte  à notre 
Cyrena  Gravesn,  dont  elle  diffère  non  moins  que  de  la  première;  noua 
proposons  pour  elle  le  nom  de  Cyrena  britannica. 

Dans  les  couefes  supérieures  du  calcaire  grossier  se  trouvent  aussi 


DIX-SEPTlÈMlî  l'AMILLE. 


698 

quelques  espèces  de  Cyrènes , le  compressa , le  cÿcladiformis  ; cette 
dernière  a été  récemment  découverte  en  Angleterre  par  M.  Edwards. 
Los  grès  marins  moyens  renferment  quelques  lits  d’eau  douce,  dans 
lesquels  le  Cyrena  deperdita  est  d’une  grande  abondance  ; on  la  retrouve 
partout  dans  ces  sables , mais  elle  reste  dans  les  limites  des  contrées 
qu’ils  recouvrent. 

Les  terrains  lacustres  do  l’Auvergne  contiennent  aussi  des  Cyrènes. 
Cos  terrains,  considérés  par  les  géologues  comme  du  môme  âge  que 
ceux  de  Paris,  ont  des  espèces  différentes,  quoique  M.  Bouillet,  qui  les 
y a découvertes,  les  ait  prises  pour  les  analogues  des  nôtres.  Ce  savant 
cite  les  Cyrena  compressa  et  pisum,  mais  ces  coquilles  conservent  des 
caractères  spéciQques  qui  les  distinguent  suffisamment;  aussi  nous 
avons  nommé  la  première  Cyrena  Bouilleli  et  la  seconde  arncrnensîs. 

Une  espèce,  très  abondante  à Kleinspauwen , en  Belgique  et  dans 
beaucoup  d’autres  localités  du  môme  pays  et  de  l’Allemagne , a été 
retrouvée , il  y a quelques  années , au  centre  du  bassin  de  Paris , par 
M.  d’Archiac  ; elle  est  pétrie  en  abondance  dans  une  couche  mince  aux 
en  virons  de  Pont-Sainte-Maxence,  où  M.  Hébert  l’a  également  retrouvée. 
Nous  voulons  parler  de  notre  Cyrena  semislriata , et  les  sables  dans 
lesquels  elle  se  trouve  sont  supérieurs  au  gypse,  et  parallèles,  par  con- 
séquent, aux  sables  de  Fontainebleau.  Cette  espèce,  dont  les  variétés 
sont  nombreuses , a été  le  sujet  de  plusieurs  erreurs  de  Goldfuss  , judi- 
cieusement relevées  par  M.  Nyst.  L’auteur  des  pétrifications  do  l'Alle- 
magne croit  y voir  les  Cyrena  cnneiformis  et  trigona  des  lignites  de  Paris, 
et  d’une  variété  triangulaire  il  fait  le  Cyrena  œqîialis.  Ces  rectifications 
sont  importantes,  car  on  pourrait  croire  que  des  especes  passent  des 
couches  inférieures  dans  les  supérieures , et  viennent  se  mélanger  k des 
faunes  auxquelles  elles  n’appartiennent  pas  ; ce  sont  ces  erreurs  qui, 
en  répandant  de  l’incertitude  dans  la  science  paléontologiquo,  la  font 
rejeter  des  hommes  auxquels  elle  devrait  être  le  plus  utile. 

L’étage  tertiaire  moyen  ne  contient  plus  que  six  espèces,  parmi 
lesquelles  nous  signalerons  particulièrement  le  Cyrena  Brongniarti, 
Bast.  ; elle  se  rencontre  à Bordeaux  , à Dax  et  dans  le  Vicentin. 
M.  Goldfuss  la  mentionne  aussi  à Bundo  et  à Mayence.  Le  Cyrena  GesUni, 
Desh.,  propre  au  bassin  de  l’Adour,  prend  déjà  la  forme  des  espèces 
vivantes  de  l’Inde,  mais  cette  forme  est  bien  mieux  accusée  dans  les 
deux  espèces  des  lignites  des  bouches  du  Rhône,  que  nous  a fait  con- 
naître M.  Matheron  dans  son  précieux  ouvrage  sur  les  corps  organisés 
fossiles  du  midi  de  la  France.  Une  autre  espèce , prise  pour  une  Vénus 
par  Faujas,  et  que  nous  avons  nommée  Cyrena  Faujasi,  caractérise  les 


LES  CYCLADES. 


<^99 

dépôts  lacustres  des  bords  du  Rhin.  M.  Goldfuss  en  a donné  de  bonnes 
figures,  mais  il  a ou  le  tort  de  lui  imposer  deux  noms,  prenant  une 
do  ses  variétés  pour  une  espèce  distincte,  Cyrma  lævigata  et  polüa. 

Il  ne  reste  plus  qu’une  seule  espèce  dans  iecrag  d’Angleterre;  elle 
a été  nommée  Cyrma  Duchastelli  parM.  Nyst,  et  plus  tard  Irigonuîa, 
par  M.  S.  Wood.  Ce  dernier  nom  ne  pourra  pas  rester  à l'espèce,  si 
l’on  s’attache  aux  lois  équitables  de  la  priorité.  M.  Morris  croit  pouvoir 
rapporter  à cette  espèce  du  crag  celle  qui  est  fossile  en  Sicile , et  que 
M.  Philippi  a nommée  Cyrena  Gemmeîlari;  n’ayant  pas  ces  coquilles 
sous  les  yeux,  nous  ne  pouvons  vérifier  la  justesse  de  l’opinion  du 
savant  anglais  , mais  si  nous  nous  en  rapportons  aux  figures , assuré- 
ment il  faudrait  conserver  les  deux  espèces. 

Enfin , dans  l’étage  tertiaire  supérieur,  nous  ne  connaissons  non  plus 
qu’une  seule  espèce  : elle  est  du  val  d'Arno  supérieur,  où  elle  a été 
découverte  par  notre  savant  ami  M.  Bertrand  Geslin;  par  sa  forme, 
elle  ne  manque  pas  d’analogie  avec  le  Cyrena  antigua  des  environs  de 
Paris. 

Dans  les  terrains  plus  récents  de  la  Sicile,  une  seule  espèce  y est 
également  restée;  et,  enfin,  comme  arrière-garde  de  la  migration  du 
genre  , une  petite  espèce,  fort  rare,  à ce  qu’il  parait,  vit  encore  dans 
quelques  ruisseaux  de  la  Sicile.  Il  ne  faudrait  peut-être  pas  un  événe- 
ment géologique  bien  considérable  pour  faire  disparaître  entièrement  ce 
dernier  et  faible  représentant  d’un  genre  qui , pendant  les  seules  pé- 
riodes tertiaires , a peuplé  l’Europe  de  plus  de  trente  espèces  et  de 
myriades  d’individus. 

La  disparition  du  genre  Cyrène  des  régions  qu’il  a si  abondamment 
peuplées  autrefois  est  un  spectacle  digne  d'intérêt.  La  diminution  pro- 
gressive des  espèces,  le  moindre  nombre  des  individus  de  plus  en  plus 
restreints  dans  l’étendue  de  leur  habitation  . la  diminution  non  moins 
remarquable  dans  la  taille  des  espèces  à mesure  qu’elles  s'éteignent, 
cet  ensemble  do  phénomènes  annonce  clairement  la  cause  principale 
des  changements  que  ces  Mollusques  ont  éprouvés.  Cette  cause  est  cer- 
tainement la  diminution  de  la  température,  et  ce  qui  tend  à le  confirmer, 
c’est  la  dispersion  dos  espèces  vivantes  dans  les  régions  les  plus  chaudes 
do  notre  globe.  Dans  tous  les  temps,  les  Cyrènos  ont  été  constituées  pour 
habiter  les  pays  chauds;  leur  présence  à l’état  fossile  dans  nos  régions 
tempérées  et  septentrionales  suffirait  seule  pour  constater  les  énormes 
changements  qui  sont  survenus  dans  toutes  les  conditions  de  l'existence. 

Pour  terminer  ce  qui  a rapport  à la  distribution  des  Cyrènes,  nous 
devons  ajouter  qu’il  en  existe  aussi  de  fossiles  en  xVmérique.  l’une,  des 


700 


DIX-SEPTIÈME  FAMILLE. 


environs  de  New-York,  a été  nommée  depuis  longtemps  Cyrena  truncata, 
par  Lamarck;  l’aulro,  le  Cyrena  caroîinensis  ^ vit  encore  dans  les  eaux 
douces  de  la  Caroline , ainsi  que  son  nom  l’indique. 

1.  Cyrène  violette.  Cyrena  violacea^  Lamk. 

PI.  18.  f.  1.  2.  3. 

C,  Testa  ovato-ellipticâ , inœqmlaterali , transversim  irreguîariter  suU 
catà , sulcis  distantibus  anticè  profundioribus , inths  violaceâ  vel 
pallide  roseo-purpurascente;  dentibus  lateralibus  incequalxhus^  striatis, 

Cyclas.  Brug.  Encycl,  pl,  3oi.  f.  i.  a, 

Cyrena  violacea,  lamk.  An.  s.  vert.  t.  5,  p.  553.  n*  7. 

Desh.  Ency.  mélh.  Vert.  t.  a,  p.  49.  n®  9. 

Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert,  2*  éd.  t.  6.  p,  273.  n®  7. 

Deless.  Rec.  de  coq.  pl,  7.  f.  5. 

Hanley,  Descr.  cat.  t.  i.  p.  92. 

Anton,  Verz,  der  Conch.  p.  i3.  n®  499. 

Wood,  Ind.  test.  2'  Suppl,  pl.  i3.  f.  i3. 

Habite  la  Nouvelle-Zélande  et  d'autres  îles  de  l'Océanie. 

Grande  et  belle  coquille  que  l’on  distingue  avec  facilité  parmi  ses 
congénères.  Elle  est  ovale,  sublransverse , inéquilatérale,  comprimée; 
le  côté  antérieur,  obtus,  s'incline  obliquement  ; le  postérieur  est  arrondi. 
Les  crochets  sont  assez  grands , proéminents  et  obliquement  inclinés 
vers  le  côté  antérieur.  La  surface  extérieure  est  revêtue  d’un  épiderme 
d'un  brun  verdâtre  foncé , qui  est  ordinairement  carié  sur  les  crochets  : 
celte  surface  montre  des  stries  irrégulières  d’accroissement,  interrom- 
pues en  avant  et  en  arrière  par  de  gros  sillons  transverses  assez  égale- 
ment séparés  et  qui  disparaissent  complètement  sur  le  ventre  de  la 
coquille,  La  charnière  est  large  et  épaisse  ; elle  est  formée  de  trois  dents 
cardinales  divergentes  et  de  deux  dents  latérales  inégales.  Ces  dents 
latérales  sont  peu  saillantes,  striées  perpendiculairement,  mais  d’un 
côté  seulement.  La  dent  latérale  antérieure  est  la  plus  courte.  Si  l’on 
enlève  à cette  coquille  son  épiderme,  on  la  trouve  à l'extérieur  d’une 
belle  couleur  violette  ; cette  couleur  se  répète  en  dedans , surtout  vers 
les  bords.  Chez  certains  individus,  cette  couleur  violette  pâlit  et  se  nuance 
de  tons  pourprés  qui , pâlissant  h leur  tour,  passent  au  rose  tendre. 
Les  grands  individus  ont  jusqu’à  81  imllimètres  de  longueur, 


LES  CYCLADES. 


70 


2.  Cyrène  de  Graves.  Cyrena  Gravesii.  Desh. 

PI.  18.  f.  4. 

C,  Testa  snborbiculari  ^ turgidâ,  subcordatâ^  îœvigatâ;  umbonibus 
magnis^  integris , obîiquis;  cardine  tridentato  ; dente  antîco  'vnîvuïœ 
dextrce  minimo ; dentibus  lateralihus  angustis  ^ elongatisy  cardine 
approximatis  ^ tenue  et  breviter  striait  s» 

Desh.  Desc.  des  coq.  foss.  des  env.de  Paris,  t.  i.  p«  120.  pU  ig.  f.  3,  4. 

Desh.  Ency,  raélb.  Vers,  t,  2.  p.  4!**  4- 

Desh.  dans  Lamk.  An.  s.  vert.  2®  éd.  t.  6,  p.  27S.  n®  18. 

Anton,  Verz.  der  Conch.  p.  i3.  n"  5û4. 

Broun,  Ind.  paléont.  p.  Sgo. 

Habite..,  Fossile  des  sables  inférieurs  du  bassin  de  Paris,  à Retheuil, 
Guise,  etc. 

Celle-ci  est  la  plus  grande  des  espèces  fossiles  du  bassin  de  Paris  : 
on  la  distingue  avec  la  plus  grande  facilité , par  sa  forme  obronde  et 
quelquefois  subquadrangulaire.  Elle  est  très  inéquilatérale  ; son  côté 
antérieur,  court  et  obtus,  est  plus  étroit  que  le  postérieur.  Les  crochets 
sont  grands,  obliques  , proéminents;  la  surface  extérieure  est  lisse  ou 
marquée  d'accroissements  irréguliers.  La  charnière  est  étroite;  elle 
porte  trois  dents  cardinales  inégales  sur  chaque  valve  : la  première  de 
la  valve  droite  est  petite  et  très  courte  ; la  troisième  de  la  valve  gauche 
est  longue , étroite  ; elle  a une  tendance  à se  confondre  avec  la  nymphe. 
Les  dents  latérales  sont  allongées  et  étroites.  L’antérieure  est  très 
rapprochée  de  la  charnière  ; la  postérieure  commence  à l’extrémité  de 
la  nymphe.  Ces  dents  ne  sont  point  striées  dans  toute  leur  hauteur  : les 
stries  sont  fines , très  courtes , et  souvent  sont  réduites  à de  fines  den- 
telures , qui  accompagnent  le  bord  supérieur.  Les  impressions  muscu- 
laires sont  petites,  très  écartées;  l'antérieure  est  ovale,  étroite, 
subsemi-lunaire  ; la  postérieure  est  un  peu  plus  large.  Cette  coquille 
est  extrêmement  commune  dans  les  sables  inférieurs  du  bassin  de 
Paris;  elle  peut  servir  à les  caractériser.  Elle  a 55  millimètres  de 
longueur. 


702 


DIX-SEPTIÈME  FAMILLE. 


3.  Cyrène  antique.  Cyrena  antiqtta^  Fér. 

PL  18.  f.  5.  6.  7. 

C,  Testa  trigonây  cordiformi,  inteqaUaterd  y crassisshnâ^  tnrgîdidây 
lœvigatâ  ; umbonihus  ohHquiSy  magnis;  dentibus  cardinalibus  tribus  ^ 
paraUeîis;  lateraJibas  magnis,  triangnlaribus  ^oblique  et  irreguîariter 
striato-crosis ; nymphis  breyibtis,  latis. 

Fér.  Hisl,  des  Mol.  1er.  el  fluv.  pî.  de  Cyr*  foss.  f.  5, 

Desb.  Coq.  foss,  de  Paris,  t.  i.  p.  119.  5,  pl.  x8.  f,  19,  ai. 

Desh.  Ency.  méth.  Vers,  t,  2,  p,  47.  n®  3. 

Desb.  dansLamk.  Ân.  s.  vert.  2*  éd.  t«  6.  p.  279,  n**  19. 

AntoD,  Verz.  der  Concb.  p.  i3.  n®  495. 

Bronu,  Ind.  paléoot.,  p.  389. 

Habite...  Fossile  des  bgnitcs  du  bassin  de  Paris,  aux  environs  d’Epernay, 
de  Reims  et  de  Soissous. 

Celle  coquille  est  Tune  des  plus  remarquables  que  recèlent  les  ter- 
rains tertiaires  du  bassin  do  Paris  : elle  est  triangulaire  ; par  sa  forme 
et  par  son  épaisseur,  elle  ressemble  plutôt  à une  Vénus  qu’à  une 
coquille  d’eau  douce  ; elle  est  entléo  , cordiforme,  très  inéquilatérale. 
Le  côté  antérieur  est  court,  déprimé  on  avant  par  un  espace  lunulaire 
non  circonscrit  ; le  côté  postérieur  est  occupé  par  un  très  grand  corselet, 
creusé  dans  le  milieu , et  nettement  circonscrit  par  un  angle  obtus.  La 
charnière  est  épaisse  : on  y remarque  trois  dents  cardinales  parallèles 
sur  chaque  valve;  sur  la  valve  droite,  la  dent  antérieure  est  très  mince 
et  un  peu  plus  courte  que  les  autres  ; sur  la  valve  gauebe , c'est  la  dent 
postérieure  qui  est  réduite  en  une  lamelle  très  courte.  Les  dents  latérales 
sont  grosses  et  épaisses  ; elles  sont  inégales  et  très  rapprochées  des 
cardinales.  Vues  de  profil , elles  ressemblent  à de  longues  pyramides 
triangulaires  couchées  sur  l'un  de  leur  grand  côté  ; des  stries  fines  et 
irrégulières  parcourent  obliquement  la  surface  do  ces  dents.  La  dent 
latérale  antérieure  est  la  plus  courte;  la  nymphe  est  courte,  profondé- 
ment cachée  et  séparée  du  bord  par  un  sillon  profond  destiné  à recevoir 
le  tunique  externe  d'un  ligament  qui  devait  être  épais  et  proéminent  au 
dehors.  Les  impressions  musculaires  sont  petites , très  écartées  ; l’an- 
térieure est  semi-lunaire  ; la  postérieure  est  circulaire.  Le  test  de  cette 
coquille  est  épais , solide , ce  qui  la  distingue  facilement  de  toutes  les 
autres  espèces  du  même  genre  Elle  a 33  millimètres  de  long  et  30 
millimètres  de  hauteur. 


LES  CYCLADES.  700 

Cette  coquille  est  plus  rare  dans  le  bassin  de  Paris  que  la  précédente  : 
elle  est  propre  aux  terrains  à lignite,  et  c’est  particulièrement  à Épernay , 
à la  montagne  de  Bernon  , qu’on  la  rencontre  le  plus  abondamment.  Il 
y en  a des  milliers  d’individus  ; des  couches  entières  en  sont  formées , 
mais  il  est  presque  impossible  d'en  obtenir  d’entiers. 


GENRE  CINQUANTE-SEPTIÈME. 

CircZiABE,  Cyclas,  Larak. 

CARACTÈRES  génériqües.  — Animal  ovale,  assez  épais; 
lobas  du  manteau  à bords  simples  réunis  en  arrière,  et  terminés 
postérieurement  par  deux  siphons  courts , joints  à la  base , 
divergents  au  sommet,  dépourvus  de  tentacules.  Bouche  ova- 
laire , petite.  Palpes  labiales  courtes  et  étroites.  Branchies 
assez  larges,  presque  égales,  réunies  postérieurement.  Pied 
mince,  grêle , coudé,  très  allongé’. 

Coquille  ovale , subéquilatérale,  bombée,  à crochets  sail- 
lants. Charnière  étroite,  portant  deux  très  petites  dents  cardi- 
nales sur  chaque  valve,  dont  une  pliée  en  deux,  quelquefois 
une  seule  pliée  ou  lobée  sur  une  valve,  et  deux  sur  l'autre: 
ces  dents  sont  quelquefois  presque  nulles  ; dents  latérales 
allongées,  comprimées,  lamelliformes.  Impression  palléale 
simple.  Ligament  externe  peu  épais’,  situé  sur  le  côté  le  plus 
long  du  bord  dorsal. 

SYNONYMIE  GENERIQUE . — Coucha  ^ Linné,  Faun.  Suec.  — 
Tellina^  Linné,  Miiller,  Schroeter,  Gronovius,  Chemnitz, 
Gmelin,  Karsten,  Poiret,  Alten,  Stourm,  Dilhvyn,  Montagu, 
Maton  et  Racket , Wood , etc.  — Cai'dium  , Poli , Montagu , 
Da  Costa.  — Chama,  Geoffroy,  d’Argenville.  — Mtisculus 
Lister,  Gualtieri. — 'Pectxtncnlmjiuwatilis^  Lister. 
— SphœrÙLm^  Scopoli,  Gray.  — Cornea,  Megerle,  — Pisrim^ 
Megerle.  — Cnrneonjclas , Férussnc. 


niX-SEPTIÈMK  FAMILLE. 


704 

OBSERVATIONS.  Pfcsque  tous  les  naturalistes  attribuent  à Bruguière  la 
création  du  genre  Cyclade  ét  du  nom  qu’il  porte;  cependant  le  savant 
auteur  des  premiers  volumes  de  VerSf  de  VEnajchpédie,  a trouvé  son 
genre  nettement  déterminé  par  Muller,  et  le  nom  qu’il  a choisi  a été  pro- 
posé longtemps  avant  lui  par  Klein  , dans  son  Tentamen  oslracoiogicœ 
pour  une  famille  et  un  genre  de  coquilles  bivalves,  orbiculaîres  qui  corres- 
pondent assez  exactement  au  genre  Lucine  de  Bruguière  et  de  Lamarck. 
Bruguière  eut  raison  d'emprunter  à une  méthode  abandonnée  un  nom  qui 
s’appliquait  parfaitement  à un  genre  que  Müller,  à l’imitation  de  Linné, 
avait  défini  dans  son  Histoire  des  vei's  sous  le  nom  de  Telîina.  En  réalité, 
l’honneur  de  la  création  du  genre  Cyclade  revient  à Bruguière,  parce 
que  l’on  peut  dire  que  si  Müller  lui  a donné  des  limites  naturelles , c'est 
par  la  nature  môme  du  sujet  qu’il  a traité , ayant  exclu  de  son  ouvrage 
toutes  les  espèces  marines  du  genre  Tellina  de  Linné.  Avant  Bruguière, 
tous  les  naturalistes , à l'exception  de  Scopoli , confondaient  les  Cyclades 
parmi  les  Tellines,  et  même  quelques  unes  parmi  les  Cardiums.  En 
restreignant  le  nombre  des  genres , Linné  fut  contraint , presque  malgré 
lui , de  réunir  sous  une  seule  dénomination  générique  des  coquilles  qui 
ont  peu  de  rapports  entre  elles.  Les  successeurs  les  plus  immédiats  du 
grand  législateur  suédois  ne  voulurent  pas  toucher  à ces  genres , et  tous 
sans  exception  rapportèrent  aux  Tellinès  les  petites  coquilles  fluvialiles 
qui  nous  occupent.  Scopoli  seul , digne  par  son  génie  d’être  l’émule  et 
le  successeur  de  Linné,  dans  un  ouvrage  des  pins  remarquables 
publié  en  1777  [Jntroductio  ad  historiamnaturaîem) , osa  améliorer  la 
méthode  linnéenno  par  la  création  d’un  assez  grand  nombre  de  très 
bons  genres  dans  un  temps  où  l’admiration  pour  les  ouvrages  de 
Linné  était  portée  à un  si  haut  degré,  que  l’on  aurait  considéré  comme 
sacrilège  la  main  qui  y aurait  touché.  C’est  peut-être  à ce  sentiment 
exagéré  qu’est  dû  l'oubli  dans  lequel  est  tombé  l'ouvrage  de  Scopoli. 
Ce  naturaliste  définit  très  nettement  le  genre  Cyclade  sous  le  nom  de 
Sphœrîum,  et  lui  donne  pour  type  le  Telîina  cornea  de  Linné , et  proba- 
blement, ajoute-t-il,  plusieurs  autres  espèces  de  coquilles  circulaires. 

Bruguière  ne  se  contenta  pas  d’introduire  dans  son  genre  Cyclade  le 
Tellina  cornea  de  Linné  et  quelques  autres  espèces  analogues  ; il  y 
admet  également  d’autres  coquilles  fluviatiles  des  régions  plus  chaudes 
delà  terre,  et  qui,  pour  être  plus  grandes  et  plus  épaisses,  n’en  con- 
servent pas  moins  la  plupart  des  caractères  des  espèces  plus  petites  et 
plus  minces  qui  habitent  les  eaux  douces  de  nos  régions  tempérées  et 
septentrionales.  Ainsi  que  nous  l’avons  vu , Lamarck , dès  ses  premiers 
travaux , démembra  les  Cyclades  dè  Bruguière , conserva  sous  le  nom  de 


LES  CYCLADES, 


7o5 

Cyclades  les  petites  espèces  seulement  y et  des  grandes  il  en  fit  un 
gènre  Cyrène  caractérisé  principàletrtent  par  une  charnière  plus  forte- 
ment articulée,  et  portant  daiiS  presque  toutes  les. espèces  trois  dents 
cardinales.  Ce  changement , proposé  par  Laniarck,  a été  adopté  par 
presque  tous  les  zoologistes.  Cependant  le  genre  Cycîade,  ainsi  réduit 
et  quoique  très  naturel  en  apparence,  a subi  un  nouveau  dédoublement 
devenu  nécessaire  par  les  observations  dont  il  a été  le  sujet. 

Depuis  un  certain  nombre  d'années,  les  naturalistes  ne  se  contentent 
plus  d’observer  seulement  la  coquille  desMollusques  ; ils  ont  compris  enfin 
que  l’enveloppe  testacée  d’un  animal  ne  suffit  pas  toujours  pour  en  déter- 
miner les  rapports.  M.  Cari  Pfeiffer,  dans  ses  recherches  sur  les  Mol- 
lusques de  l’Allemagne,  fit  connaître  un  failfort  intéressant  qui  jusque- 
là  avait  échappé  à l’attention  des  autres  observateurs.  11  vit  que  dans 
certaines  Cyclades,  l'animal  est  terminé  en  arrière  par  un  siphon  bifur- 
qué , comparable  à celui  des  Vénus  et  même  des  Cardiums  ; tandis  que 
chez  d’autres  espèces  ce  siphon , beaucoup  plus  court , est  toujours 
simple  et  percé  d’une  seule  ouverture.  Se  fondant  sur  ces  différences 
considérables,  M.  Pfeiffer  réduisit  le  genre  Cyclade  aux  espèces  dont 
l’animal  a un  double  siphon , et  proposa  un  genre  Pisidium  pour  toutes 
celles  des  espèces  qui  ont  le  siphon  simple  et  unique.  Bientôt  après,  les 
observations  dè  M.  Pfeiffer  furent  pleinement  confirmées  par  , celles 
d’un  savant  anglais,  M.  Jenyns,  qui  publia  dans  les  Tnmsaclions  de  la 
Société  philosophique  de  Cambridge  une  excellente  monographie  des 
deux  genres , accompagnée  de  très  bonnes  figures  suffisamment  grossies 
de  toutes  les  espèces  de  Pisidium  alors  connues  en  Angleterre.  Ce 
travail  a peut-être  plus  d’utilité  que  celui  de  M.  Pfeiffer,  parce  qu'’il  a 
le  mérite  d’être  accompagné  de  figures  suffisamment  grossies , ce  que 
M.  Pfeiffer  a malheureusement  négligédansle  sien.  Noos  ne  croyons  pas 
utile,  à notre  sujet,  d’insister  davantage  sur  l’histoire  du  genre  Cyclade  ; 
si  nous  voulions  la  compléter  par  de  minutieux  détails , nous  pourrions 
mentionner  cent  cinquante  ouvrages  environ  dans  lesquels  ce  genre  a 
été  mentionné  avec  plus  ou  moins  de  détails  : dans  le  plus  grand  nom- 
bre, on  trouve  la  description  des  espèces;  dans  le^  autres,  principale- 
ment consacrés  à la  classification  des  Mollusques , le  genre  est  cité  dans 
l’ordre  des  rapports  tels  que  les  auteurs  les  ont  conçus.  Ces  derniers 
travaux  pourraient  avoir  un  plus  grand  intérêt;  mais  presque  tous  sont 
d’accord  pour  placer  les  Cyclades  dans  la  méthode',  soit  à la  tjianièrede 
Lamarck , soit  à celle  de  Cuvier  ; et  comme  nous  avons  résumé  les 
opinions  de  ces  ^savants  dans  l’histoire  de  la  famille  des  Cyclades , nous 
y renvoyons  le  lecteur. 

T.  T.  PARTIE. 


DIÏ-SEFTIEME  FAMILLE.  • 


^oG 

L’animal  des  Cyclades  ne  mangue  pas  d’analogie  avec  celui  des 
Vénus  , mais  il  a beaucoup  plus  de  ressemblance  avec  celui  des  Cyrènes. 
Néanmoins,  il  en  diffère  par  quelques  caractères,  et  cela  doit  suffire, 
quant  à présent,  pour  maintenir  le  genre  dans  la  méthode.  La  forme  do 
la  coquille  représente  exactément  celle  de  l'animal  : il  est,  par  consé- 
quent., ovale,  arrondi,  subglobuleux,  un  peu  plus  long. que  large,  Son 
manteau  ressemble  à celui  des  autres  Mollusques  dîmyaires.  Son  bord 
exserlile  est  simple  dans  toute  sa  circonférence  ; en  cola,  il  diffère  de  celui 
des  tyrènes,  sur  lequel  nous  avons  fait  remarquer  des  plis  profonds.  La 
circonférence  du  manteau  est  occupée  par  un  muscle  orbiculairc,  très 
niince  et  fort  étroit.  Eii  arrière,  les  lobes  du  manteau  se  réunissent  en 
une  commissure  simple,  très  voisine  de  l'origine  des  siphons.  Ceux-ci 
sont  fort  petits  ; réunis  à la  base  dans  la  plupart  des  espèces,  ils  se  dis- 
joignent au  sommet,  et  ils  se  mainlienneul  écartés  on  formant  entre  eux 
un  angle  d'environ  45  degrés.  Mais  toutes  les  espèces  n’offrenlp^s  une 
semblable  disposition.  Chez  quelques  unes  les  siphons  sont  séparés  jus- 
que près  de  la  base , èt  l'animal  les  porte  dans  une  position  à peu  près 
parallèle  entre  eux.  Ces  organes  sont  membraneux  , minces,  transpa- 
rents; ils  sont  inégaux  ; le  siphon  branchial  est  un  peu  plus  grand  et 
un  peu  plus  large  que  le  siphon  qnal.  Tous  deux  se  terminent  par  une 
ouverture  circulaire , dont  les  bords,  très  minces , sont  dénués  de  ten- 
tacules.. Les  siphons,  relativement  au  volume  de  l’animal,  sont  do 
la  môme  grandeur  que  ceux  des  Vénus  , et  cependant , chez  les  Vénus , 
.ces  organes  sont  pourvus  d’un  muscle  rétracleur  particulier,  tandis 
que  dans  les  Cyclades  ce  muscle  a complètement  disparu.  Il  faut  môme 
remarquer  que  le  muscle  orbiculaire  du  manteau,  dans  la  portion  cor- 
respondante à l'insertion  des  siphons,  n'est  point  devenu  plus  large  et 
ne  s’est  presque  pas  épaissi. 

Le  pied  est  allongé,  triangulaire  ; il  est  mince  et  aplati  comme  celui 
des  Vénus  ; il  est  tt-ès  extensible , mais  il  ne  l'est  ni  plus  ni  autre- 
ment que  dans  les  Mollusques  marins.  Par  sa  base,  cet  organe  se 
continue  avec  la  masse  abdominale  ; en  avant , il  se  termine  à la  bouche  ; 
en  arrière,  il  est  subtronqué  et  prolongé  en  une  sorte  de  talon.  Lorsque 
l’animal  est  sur  un  fond  vaseux , il  se  sert  de  son  pied  pour  se  creuser 
un  trou  peu  profond  dans  lequel  il  se  cache.  Mais  s'il  est  posé  sur  un 
corps  solide,  il  étend  son  pied  le  plus  qu'il  peut , et  au  moyen  de  la 
mucosité  qu'il  sécrète  il  contracte  avec  les  surfaces  les  plus  lisses  une 
adhérence  suffisante  pour  se  mouvoir  lentement.  Il  parvient  môme  à 
l’aide  de  cette  manœuvre  à monter  le  long  des  parois  perpendicu- 
laires d’un  vase  dans  lequel  il  est  plongé.  Nous  verrons  que  d’aiitr 


LES  CŸCLADES. 


707 

Mollusques  jouissent  do  la  inômé  faculté  et  qu'ils  ont  des  mœurs  en 
relation  avec  ce  moyen  particulier  de  locomotion.  Pour  le  passage  du 
pied  , les  lobes  du  manteau  sont  séparés  entre  eux  depuis  l’extrémité 
inférieure  du  muscle  adducteur  antérieur  des  valves  jusqu'au  voisinage 
de  la  base  des  siphons.  Cette  fente  occupe,  par  conséquent,  toute  la 
longueur  du  bord  inferieur  de  l’animal. 

La  bouche  est  fort  petite;  elle  se  présente  sous  la  forme  d'une  fente 
Iransverse,  située  entre  le  muscle  adducteur  antérieur  et  la  base  du  pied. 
Celte  bouche  est  accompagnée  de  deux  petites  lèvres  étroites , mem- 
braneuses, simples,  très  courtes;  elles  se  changent  de  chaque  côté 
en  une  paire  de  petites  palpes  triangulaires,  à la  surface  interne  des- 
quelles on  trouve  un  petit  nombre  de  lamelles  Irans verses  et  saillantes. 

Les  organes  de  la  respiration  sont  assez  grands.  Ils  consistent , 
comme  chez  les  Cyrènes,  en  deux  feuillets  branchiaux  de  chaque  côté.  Ces 
feuillets  sont  inégaux,  transparents,  minces  dans  l’animal  vivant;  plus 
épais  et  plps  opaques  lorsque  l'animal  a été  conservé  quelque  temps  dans 
l'alcool;  les  feuillets  internes  sont  les  plus  grands;  ils  sont  subqua- 
drangulaires  : le  côté  antérieur  tombe  presque  perpendiculairement , et 
néanmoins  son  extrémité  supérieure  se  prolonge  en  une  pointe  courte  et 
aigue  qui  s'interpose  entre  les  palpes  labiales  ; le  feuillet  externe  com- 
mence un  peu  plus  en  arrière;  il  est  plus  étroit  que  son  congénère  ; la 
forme  on  eslsüblriangulaire.  En  arrière  de  la  masse  abdonüriale  les  bran- 
chies se  réunissent , se  prolongent  un  peu  et  viennent  tomber  au-devant 
de  l’ouverture  interne  du  siphon  anal.  La  surface  extérieure  des  bran- 
chies est  lisse , plane  ou  souleinenl  onduleuse.  Observée  à l’aide  d’un 
grossissement  assez  puissant,  celle  surface  montre  un  très  grand 
nombre  de  stries  très  fines,  régulières  et  parallèles,  produites  par  les 
vaisseaux  branchiaux  dirigés  un  peu  obliquement  de  haut  en  bas  et 
d’avant  en  arrière. 

Ce  que  nous  venons  d’exposer  de  l’animal  des  Cyclades  prouve  incon- 
testablement son  analogie  avec  celui  des  Vénus.  Les  principales  diffé- 
rences que  nous  y apercevons  se  rencontrent  dans  des  organes  de  peu 
d'importance.  Dans  les  A^énus,  les  bords  du  manteau  sont  ornés  de. 
plis  nombreux  et  profonds  ; dans  les  Cyclades , au  contraire , ces  bords 
sont  simples.  Déns  les  deux  genres,  les  siphons  sont  disposés  à peu  près 
de  la  même  manière.  Seulement,  chez  les  Vénus,  ces  organes  portent  des 
tentacules , tandis  que  les  Cyclades  eu  sont  dépourvues.  Pour  tout  le 
reste  de  rorganisalion , la  plus  grande  ressemblance  se  maintient;  par 
conséquent , le  genre  Cyclade  ne  pouvait  être  éloigné  des  Conques  ma- 
rines , et  Lamarck  avait  sainement  jugé  ses  rapports  en  le  rangeant, 

45* 


DIX-SEPTÏÈME  FAMILLE. 


708 

comme  il  Ta  fait , à la  suite  des  Cyrènes  dans  ses  Conques  fluviatiles. 

Les  coquilles  du  genre  Cyclade  sont  fort  peu  différentes  de  celles  des 
Cyrènes.  Elles  sont  ovales , obrondes , transverses , presque  équilaté- 
rales; elles  sont  minces,  fragiles,  bombées,  à crocliets  obtus  et  peu 
proéminents.  La  surface  extérieure  est  lisse  ou  striée  transversalement  ; 
elle  est  toujours  revêtue  d’un  épiderme  mince,  tenace,  d’un  vert  brun 
plus  ou  moins  foncé,  tantôt  tirant  au  jaunâtre,  tantôt  verdâtre,  selon 
l'âge  et  les  espèces.  Cet  épiderme  déborde  à peine  le  contour  testacé  des 
valves.  Les  extrémités  de  la  coquille  sont  obtuses,  arrondies;  le  bord 
inférieur  est  moins  convexe;  le  bord  supérieur  est  presque  droit,  et  il 
est  divisé  en  deux  parties  à peu  près  égales  par  la  proéminence  des 
crochets.  On  n'aperçoit  en  avant  aucune  trace  de  lunule;  en  arrière,  le 
corselet  est  complètement  effacé. 

La  surface  intérieure  des  valves  est  lisse , d’un  blanc  bleuâtre  ou 
jaunâtre , selon  la  couleur  de  la  surface  externe;  cela  est  dû  à la  trans- 
parence du  test,  qui,  contrairement  à ce  qui  existe  dans  les  autres 
coquilles,  n^a  pas  une  couleur  qui  lui  soit  propre.  Sur  un  lest  très 
mince , il  est  très  difficile  do  trouver  les  traces  de  l’animal  ; pour  décou- 
vrir les  impressions  musculaires  et  colles  du  manteau,  il  faut  rechercher 
les  individus  morts  qui  sont  devenus  opaques.  Alors  on  aperçoit  en 
avant,  tout  près  du  bord,  une  petite  Tmpression  musculaire,  et  du  côté 
postérieur,  également  dans  le  voisinage  du  bord,  une  seconde  im- 
pression subcirculaire  et  un  peu  plus  grande.  L’impression  palléale  est 
peu  apparente;  elle  reste  parallèle  au  bord  inférieur  de  la  coquille; 
elle  est  étroite  et  toujours  simple. 

La  charnière  est  assez  variable  dans  les  Cyclades.  Dans  quelques 
espèces , elle  présente  deux  dents  cardinales  sur  une  valve  et  une  seule 
sur  l’autre,  quelquefois  accompagnées  d'un  rudiment  de  la  seconde 
dent.  Dans  d'autres  espèces , une  seule  dent  subsiste  sur  chaque  valve  ; 
mais  alors  l’une  d’elles  est  comme  ployée  en  deux,  et  elle  devient  à 
peu  près  semblable  à la  dent  en  V des  Martres.  Enfin , il  est  des  espèces 
chez  lesquelles  les  dents  cardinales  ont  presque  entièrement  disparu  , 
elles  sont  remplacées  par  de  petits  rudiments  en  forme  de  tubercule. 
De  chaque  côté  des  dents  cardinales  existent  des  dents  latérales  sem- 
blables à celles  des  Cyrènes  : elles  sont  moins  épaisses , et  cela  provient 
certainement  de  la  moindre  épaisseur  du  test  ; car  nous  avons  remarqué, 
dans  des  individus  de  Cyclades  épaissis  par  l'âge , que  les  dents  laté- 
rales y prenaient  tous  les  caractères  de  celles  des  Cyrènes.  La  dent 
latérale  antérieure  est  un  peu  plus  courte  que  la  postérieure.  Le  liga^ 
ment  externe,  peu  proéminent  et  court , sort  à joindre  les  deux  valves 


LES  CYCLADES. 


7oy 

et  à les  maintenir  dans  leurs  rapports  iialorels.  Il  est  en  proportion 
beaucoup  moins  saillant  et  beaucoup  moins  grand  que  celui  des  Cyrènes  ; 
mais  il  ne  faut  pas  attacher  à cette  différence  plus  de  valeur  qu'elle 
n’en  mérite  ; car  nous  avons  vu,  même  dans  les  Cyrènes  et  les  Vénus,  ce 
ligament  varier  d’une  manière  notable  dans  son  développement. 

Après  avoir  retiré  du  genre  les  espèces  qui  dépendent  des  Cyrènes 
et  des  Pisidies , les  Cyclades  conservent  encore  de  nombreuses  espèces. 
Nous  en  comptons  une  trentaine  de  vivantes , distribuées  sur  presque 
tous  les  points  de  la  terre  explorés  par  des  observateurs  attentifs.  Sept 
à huit  espèces  vivent  dans  les  eaux  douces  de  l'Europe,  quelquès  unes 
de  la  Norwége  et  de  la  Suède  jusqu'en  Espagne  et  en  Sicile,  quelques 
autres  sont  plus  conûnées  dans  le  centre  de  l’Europe.  Nous  avons  trouvé 
quelques  petites  espèces  dans  l'Algérie.  M.  Krauss  en  cite  deux  au  cap 
de  Bonne-Espérance  ; les  îles  du  grand  Océan  austral  en  possèdent  quel- 
ques espèces.  Le  pays  qui  en  paraît  le  plus  abondamment  pourvu  est 
l'Amérique  septentrionale:  dix  especes  sont  inscrites  dans  les  catalogues 
des  naturalistes  de  ce  pays;  rArriérique  méridionale  en  compte  un 
moindre  nombre  : cinq  seulement , tant  du  Brésil  que  du  Chili  et  du 
Pérou.  M.  Moller  en  a fait  connaître  une  du  Groenland  , et  M.  Eichwald 
une  autre  de  la  Bussie  méridionale.  11  est  à présumer  que  le  genre  ne 
manque  pas  dans  les  eaux  douces  de  l’Asie  septentrionale  ou  centrale  5 
mais  jusqu’ici  nous  n'en  voyons  aucune  mentionnée  dans  les  catalogues. 

Les  espèces  fossiles  sont  à peu  près  en  môme  nombre  que  les  vivantes; 
mais  avant  de  les  compter,  nous  devons  nous  souvenir  que  pour  un 
certain  nombre  de  naturalistes,  les  Cyrènes  et  les  Cyclades  constituent 
un  seul  genre  sous  ce  dernier  nooi  ; il  faut  donc  rendre  aux  Cyrènes 
celles  des  espèces  qui  sont  encore  égarées  parmi  les  Cyclades.  Ainsi, 
les  Cijclas  orbkularis^  trigonay  majuscuîat  fasdala  et  carinata  de 
Goldfuss  sont  des  Cyrènes.  Il  en  est  de  même  de  presque  toutes  celles 
du  Minerai  conchologtj, 

M.  Dunker,  dans  la  Paléontographie  de  M.  Meyer,  a fait  connaître , 
sous  le  nom  de  Cyclas  rugosa , une  coquille  intéressante  du  lias  de 
Halberstadt.  Nous  connaissons  une  coquille  très  voisine  de  celle-là,  de 
la  grande  oolithe,  mais  nous  la  rapportons  au  genre  Lucine,  parce  qu'elle 
en  présente  les  principaux  caractères  ; il  en  sera  probablement  de  môme 
do  l’espèce  de  M.  Dunker.  Une  serait  cependant  pas  impossible  qu’une 
Cyclade  se  montrât  dans  le  lias , puisque  M.  Dunker  y a trouvé  une 
Cyrène,  ainsi  que  nous  l’avons  fait  remarquer  précédemment. 

Dans  son  ouvrage  sur  les  fossiles  de  la  Wolhynie  et  de  la  Podolie  , 
M.  Dubois,  de  Montpéreux,  décrit  et  figure  deux  coquilles  sous  les 


y 10 


DIX-SEPTIÈWE  FAMILLE. 


noms  de  Clycas  gîobus  et  triangular4s  ; ni  Fune  ni  l’autre  ne  nous  pa- 
raissent dépendre  du  genre  auquel  Fauteur  les  rapporte  : d'après  les 
figures  , elles  auraient  plutôt  les  caractères  des  Lucines , et  comme  nous 
n’avons  pas  ces  coquilles  sous  les  yeux,  dans  le  doute  que  nous  éprou- 
vons à leur  sujet,  nous  nous  abstenons  de  les  inscrire  dans  notre  liste 
des  espèces  fossiles. 

Ces  réformes  étant  faites,  il  reste  encore  trente-cinq  espèces  de 
Cyclades  fossiles,  en  comprenant  parmi  elles  celles  qui  ont  leur  analogue 
vivant  ; ces  espèces  se  distribuent  de  la  manière  suivante  : 

Les  Cyclades  apparaissent  pour  la  première  fois  à la  surface  de^la 
terre  dans  le  terrain  vs^ealdien;  ainsi  que  les  Cyrènes,  elles  y sont 
représentées  par  do  nombreux  individus , tant,  en  Angleterre  qu’en 
Allemagne.  Nous  en  comptons  neuf  espèces,  cinq  en  Angleterre , quatre 
en  Allemagne.  Le  Cijclas  anguîata^  Sowerby,  paraît  commun  au  weald 
des  deux  pays. 

Nous  retrouvons  les  Cyclades  dans  les  terrains  tertiaires  inférieurs 
du  bassin  de  Paris.  M.  de  Boissy,  dans  un  mémoire  très  intéressant 
publié  dans  le  Recueil  des  mémoires  de  la  Société  géologique  de  France , 
fait  connaître  cinq  espèces  dans  le  terrain  lacustre  de  Rilly,  situé  au- 
dessous  de  tous  les  autres  dépôts  qui  se  sont  accumulés  dans  le  bassin 
de  Paris.  A ces  espèces  il  faut  en  ajouter  une  sixième , que  nous  avons 
découverte  dans  les  marnes  blanches  inférieures  du  Mont-Bernon,  près 
Épernay.  M.  Hébert  nous  a communiqué  une  septième  espèce  du  bassin 
do  Paris  ; elle  provient  des  marnes  du  gypse,  où  elle  paraît  fort  rare. 

Dans  les  terrains  à lignite  de  la  Provence  des  environs  d’Aix, 
MM.  Lyell  et  Murchison  ont  signalé,  dès  \ 829,  dans  le  tome  Vil  de  la 
Revue  d’Edimbourg^  quatre  espèces  de  Cyclades.  M.  J.  de  C.  Sowerby, 
qui  a examiné  ces  coquilles,  les  a fait  figurer  et  leur  a imposé  des 
noms  spécifiques.  M.  Matheron,  au  moment  de  la  publication  de 
son  Catalogue  méthodique  dès  fossiles  des  Bouches-du-Rhône  , ne  connais- 
sait pas  sans  doute  le  mémoire  du  savant  anglais,  aussi  il  lui  est  arrivé 
d’imposer  des  noms  nouveaux  à trois  des  espèces  déjà  connues.  M.  Ma- 
theron , dont  les  recherches,  attentives  ont  été  longtemps  continuées , a 
découvert  six  autres  espèces  dans  le  terrain  à lignites,  ce  qui  porte  à 
neuf  le  nombre  des  Cyclades  connues  aujourd’hui  dans  le  terrain  d’eau 
douce  ancien  de  la  Provence* 

Nous  ne  voyons  aucune  espèce  de  Cyclades  mentionnée  dans  le  ter- 
rain tertiaire  moyen  ; il  est  à présumer  que  ce  genre  n’y  manque  pas  ; 
seulement  la  petitesse  des  coquilles  qu’il  renferme  Faura  fait  échapper 
à Fattention  des  observateurs. 


LES  CyCLADES. 


711 

M.  Bronn  cite  une  espèce  dans  les  terrains  tertiaires  supérionrs  de 
l’Italie  [Itaî,  tert,,  Geb,,  p.  96);  il  lui  donne  1q  nom  de  Cyclas  coji~ 
centrica. 

Le  terrain  quaternaire  contient  aussi  des  Cyclades,  mais  ce  sont 
celles  qui  vivent  encore  dans  nos  eaux  douces  ; on  cite  particulièrement 
les  trois  espèces  suivantes  : 

1“  Cycla's  cahjcidata  f Lamk. 

Vivante  dans  presque  toute  l’Europe  depuis  la  Suède  jusqu'en 
Espagne.  Elle  est  fossile  dans  les  alluvions  anciennes  du 
Rhin,  où  elle  a été  citée  par  Voltz. 

2*^  CydasYmcota,  qui  vit  également  dans  toute  l’Europe. 

Elle  est  fossile  avec  la  précédente. 

3°  Cyclas  îacmlris , ' si  commune  partout , a été  retrouvée  fossile 
dans  le  terrain  supérieur  de  Marseille  par  M.  iMatheron. 

Les  Cyclades  n'ont  peut-être  pas  été  assez  recherchées  sur  toute  la 
surface  de  la  terre  pour  généraliser  les  phénomènes  de  leur  dispersion; 
il  est  peu  probable,  en  effet,  que  ce  genre  manque  au  centre  de 
l’Afrique,  tandis  qu’il  existe  à ses  deux  extrémités;  il  est  peu  probable 
aussi  qu’il  ne  vive  pas  à la  Nouvelle-Hollande,  lorsqu’il  habite  Timor  et 
d’autres  îles  du  grand  océan  Pacifique.  Les  Mollusques  qui  nous  occu- 
pent sont-ils  confinés,  comme  on  l’a  cru  longtemps,  dans  les  régions 
froides  et  tempérées  des  deux  hémisplières  ? La  température  des  régions 
équatoriales  serait-elle  trop  élevée  pour  ces  animaux  et  ne  pourraient-ils 
la  supporter?  Les  espèces  découvertes  par  M.  d’Orbigny  dans  l’Amé- 
rique centrale  j>rouvenl  qu'elles  peuvent  vivre  dans  lyic  des  régions  les 
plus  chaudes  de  la  terre;  il  est  donc  h présumer  que  les  Cyclades  peu- 
vent exister  sur  toute  la  surface  du  globe,  tandis  que  les  Cyrènes 
sont  actuellement  restreintes  aux  régions  chaudes.  La  présence  des 
Cyclades  seules  dans  les  terrains  no  peut  fournir  aucune  indication  pré- 
cise sur  la  température  qui  a régné  pondant  leur  dépôt;  il  n’çn  est  pas 
de  mémo  des  Cyrènes,  animaux  des  pays  chauds;  elles  accusent  une 
haute  température  partout  où  elles  se  montrent.  Nous  insistons  sur  ces 
faits,  parce  qu'ils  nous  semblent  d'accord  avec  ce  que  nous  offre  la 
faune  toute  spéciale  du  terrain  wcaldien.  Nous  y observons  à la  fois  un 
grand  nombre  do  Cyrènes  et  quelques  Cyclades;  celle  réunion  des  deux 
genres  n’a  rien  d’insolite  , ainsi  que  le  constatent  les  faits  rapportés 
précédemment. 


712 


DiX-SErTlEME  FAMILLE. 


Cycladc  des  rivi'èrds.  Cyclas  rivicola^  Lamk. 

PL  17.  f.  8.  9.  10. 

C>  Testa  ovato-globosâ,  'ventricosâ,  confertim  striata,  virescente 
fnsea  , umbonibns  obtusis;  antice  lunniâ  sfibimpressâ  ^jlavà» 

Lisler,  Conch.  pl.  iSg.  f.  14. 

LisUr,  Anirn.  angl.  App.  p.  22. 

Cyclas  cornea.  Drap,  Hisl.  des  Moll,  p,  128.  n®  i.  pl.  lo.  f.  i.  2.  3. 
Cardium  cortieum.  Mootagu,  Test.  BriL  p.  86, 

Tellina  rivaîis^  ex  parte,  Scbroeler,  ,Flus.  Couch,  p.  189.  pl.  4,  f.  3, 
Encycl.  pl.  3o2.  f.  5.  <2,  b,  c, 

Tellina  cornea.  var,  B.  Mat.  et  Racket,  Lin.  Trans.  l.  8.  p.  69. 

Cyclas  cornea,  Brard,  Hist..des  coq.  p.  219.  pl.  8,  f.  2,  3. 

Tellina  cornea.  Dillwyn,  Cat.  t.  t.  p.  104.  n®  73,  Sy/i,  plerisque 
exclusis. 

Tellina  cornea,  Wood,  Gener.  couch.  p.  196.  pl,  46.  f.  3. 

/i/,  Turion,  Coneb.  dicl.  p.  180. 

Cyclas  rivicola.  Lamk.  An.  s.  vert,  l.  5.  p,  558. 

là,  G Pfeiffer,  Syst.  anord.  part.  r.  p.  12  r.  n“  2.  pl.  5.  f.  3.  4.  5 

Id.  Turton,  Conebyl.  Brît.  p.  248.  pl.  ir.  f.  i3. 

IJ.  Fleming,  BriL  anim.  p.  452. 

Id.  Desh.  Eucycl.  mélh.  Vers,  L 2.  p.  36.  n®  2 
Brooke?,  Introd.  Lamk.  Couch.  pl.  2.  f.  i5. 

Süwei’by,  Gênera  of  shells.  Cyclas.  î.  i.  2.  3. 

Jenyus,  Tr«Às.  of  the  Cambr.  pbil.  Soc.  t.  6.  2*  part.  p.  294, 

Turton,  Conch.  man.  p.  12.  n®  i.  pl.  1.  f.  1. 

Tellina  cornea.  Wood,  Iiid,  lest.  pl.  5.  f.  90, 

Ktckx,  Synop,  Moll.  Brab.  p.  86.  h®  io6. 

Rceve,  Conch.  syst.  t.  x.  p.  861.  pl.  62.  f.  i.  2.  3. 

Callüw,  Conch.  nom.  p.  3o, 

Haiiley,  Descr.  cal,  t.  i.  p.  89. 

Schollz,  SchlesMoIl,  p.  137. 

Gray  dans  Turlon,  Man.  2®  éd.  p,  279.  pl.  i.  f.  i. 

Sowerby,  Conch.  nian.f.  21  r, 

Fossilis.  Cyclas  rivicold.  Morris,  Cat.  of  Bril.  foss.  p.  85. 

Braun  in  Deiitsrh  Natiirf.  iS',2  p.  144,  i45. 

Broun,  Ind.  pala?o«jL  I.  i.  p.  373. 

Celle-ci  est  la  plus  grande  des  Cyclades  ; elle  est  aussi  celle  qui  se 
rapproche  le  plus  des  Cyrènes.  Elle  est  ovale,  obronde,  subéquilatérale, 


LES  CYGLADES. 


7i3 

obtuse  à ses  extrémités;  le  côté  antérieur  est  un  peu  plus  étroit  que  le 
postérieur  ; la  surface  externe  est  revêtue  d’un  épiderme  d’un  brun 
verdâtre,  jaunâtre,  interrompu  par  un  petit  nombre  de  zones  trans- 
vorses  presque  noires.  Toute  la  surface  est  couverte  de  stries  transverses, 
fines , assez  régulières.  Les  crochets  sont  courts  et  obtus , à peine  s’ils 
font  saillie  en  dehors,  au-dessus  du  bord  cardinal,  La  charnière  est 
mince  et  étroite  ; elle  porte  au  centre  deux  petites  dents  cardinales  sur 
chaque  valve , et  de  chaque  côté  une  dent  latérale  saillante,  triangulaire 
et  fortement  comprimée  de  chaque  côté.  A l’intérieur,  la  coquille  est 
(l'un  blanc  bleuâtre.  Les  impressions  musculaires  sont  petites  ; l’anté- 
rieure est  ovale,  subréniforme ; la  postérieure  est  subtriangulàire , 
mais  les  angles  du  triangle  sont  effacés,  ce  qui  le  rapproche  de  la 
forme  suborbiculaire. 

Cette  coquille  est  très  abondamment  répandue  dans  presque  toutes 
les  rivières  de  l’Europe.  M.  Nilson  la  mentionne  en  Suède,  etM.  Graels 
la  cite  jusqu’au  midi  de  l'Espagne.  Elle  est  fossile  dans  les  terrains 
récents  que  les  géologues  rapportent  â la  période  quaternaire. 

Elle  a 23  à 25  millimètres  de  long  et  1 7 à 1 8 millimètres  de  large. 


GENRE  CINQUANTE-HUITIÈME. 

PISIDIZ:,  Pisidiam,  Pfeiffer. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  ovale  assez  épais,  ayant 
les  lobes  (lu  manteau  peu  saillants  en  dehors,  dépourvus  de 
tentacules  sur  leurs  bords,  réunis  en  arrière  et  terminés  de  ce 
côté  en  un  seul  siphon.  Bouche  petite.  Palpes  labiales  triangu- 
laires, étroites,  un  peu  plus  longues  que  larges.  Branchies 
d’une  médiocre  largeur,  inégales,  soudées  en  arrière  du  pied. 
Pied  petit,  très  extensible,  triangulaire  et  comprimé. 

Coquille  petite,  mince,  fragile,  gonflée,  inéquilatérale,  par- 
faitement close,  à bords  simples  et  tranchants.  Charnière  por- 
tant une  ou  deux  petites  dents  cardinales,  rudimentaires,  quel- 
quefois tuberculiformes  et  presque  effacées,  une  dent  latérale 
lamelliforme  de  chaque  côté.  Impressions  musculaires  petites, 


DIX-SEI‘TIEMK  FAMILLE. 


écartées;  impression  paliéale,  simple.  Ligament  externe  peu 
apparent,  situé  sur  le  côté  le  plus  long  du  bord  dorsal. 

SYNONYMIE  génériql’e.  — La  même  'que  celle  des  Cyclades , 
et  de  plus  : Leach.  — Leach.  — Galileja, 

î)a  Costa. 

OBSERVATIONS.  Si  l'on  en  croyait  trop  exclusivement  M.  Gray,  il 
faudrait  rejeter  le  genre  PîSïdi'ura  de  M.  Pfeiffer^  et  mettre  à sa  place 
celui  nommé  Pisum  par  Mégerle,  et  créé  en  ISt  l par  ce  naturaliste. 
Cetto  substitution  ne  doit  pas  s’opérer,  car  en  examinant  le  type  du 
gonro  pisum  [Ciiclas  rivîcola)^  il  est  facile  de  s’assurer  qu’il  est  un 
Rouble  emploi  des  Cyclades  telles  que  Lamârck  les  a réduites.  Si  Ton 
veut  adopter  le  genre,  il  faut  préférer  celui  de  M.  Pfeiffer,  fondé  sur  de 
bonnes  observations,  et  lui  laisser  le  nom  que  lui  a imposé  le  savant 
pilleur  du  bel  ouvrage  sur  les  Mollusques  de  l’Alieipagne. 

Un  assez  grand  nombre  de  naturalistes  ont  adopté  le  genre  Pisidium 
de  M.  G.  Pfeiffer.  Tous  n’ont  pas  été  parfaitement  d’accord  sur  la  place 
qu’il  doit  occuper  dans  la  méthode.  C’est  ainsi  que  M.  Pfeiffer  propose 
de  l'introduire  dans  la  famille  des  Cardiacées , et  M.  Held  accepte  cette 
opinion.  A rexomple  de  Lamarck , M.  Philippi  le  comprend  dans  la 
famille  des  Conques  fluvialiles,  tandis  que  les  autres  conchyliologuos , 
Nilson,  -Menke,  Kleberg,  Gray  et  Sowerby,  Tinlroduisent  dans  la 
famille  des  Cycladées,  a côté  des  Cyrènes  et  dos  Cyclades.  Nous  préfé- 
rons cette  dernière  opinion  : elle  nous  semble  plus  en  accord  avec  les 
faits  connus  jusqu’ici  à l'égard  du  genre  Pisidium;  il  fallait  que  ce  genre 
fût  bien  voisin  des  Cyclades  pour  avoir  été  constamment  confondu  avec 
elles;  séparé  au  moyen  d’un  caractère  que  présente  l’animal,  il  ne 
pouvait  être  éloigné  des  Cyclades , et  c’est  là  , en  effet , que  le  retien- 
nent tous  ses  caractères , ainsi  que  nous  allons  le  voir  par  l’examen  de 
l’animai  et  de  sa  coquille. 

L’animal  des  Pisidium  est  presque  entièrement  semblable  à celui  des 
Cyclades  ; Je  manteau  est  ouvert  en  avant  et  en  bas  de  la  même  ma- 
nière. Les  commissures  de  cet  organe , son  muscle  orbiculaire,  sont 
exactemenl  comme  dans  les  Cyclades;  nous  trouvons  la  même  ressem- 
blance dans  la  bouche  et  les  palpes  qui  l’accompagnent.  Les  branchies 
elles-mêmes  no  présentent  pas  d’autre  différence  que  celles  qu’on  re- 
marque entre  les  espèces  d’un  même  genre.  Il  n’y  a donc  que  deux 
organes  qui  méritent  d’attirer  notre  attention  , parce  qu’ils  diffèrent  de 
ceux  des  Cyclades.  Nous  avons  vu  que  chez  ces  derniers  animaux , le 


LES  CYCLAOES. 


7i5 

manteau  est  terminé  en  arrière  par  deux  siphons  inégaux,  soudés  entre 
eux  , tantôt  à la,  base  seulement,  tantôt  jusqu’au  voisinage  du  sommet. 
Dans  les  Pisidium,  un  seul  de  ces  organes  subsiste,  c’est  le  siphon 
branchial  ; l’autre  est  remplacé  par  une  simple  perforation.  L’animal  du 
genre  Cyprine  nous  a déjà  offert  une  disposition  semblable;  elle  nous 
paraît  être  un  acheminement  vers  les  familles  des  Lucines  et  des  Cur-^ 
dium  qui  doivent  suivre  celle  des  Cycladées. 

Le  pied  des  Pisidium  est  fort  différent  de  celui  des  Cycladps  ; jl.  se 
rapproche  beaucoup  de  celui  des  Cardium.  En  effet,  par  sa  base,  il 
enveloppe  la  masse  abdominale,  se  ploie  dans  le  milieu  sous  la  forme  d'un 
coude,  et  se  prolonge  on  avant  eu  prenant  une  forme  cylindracée  et 
vermiculaire.  Cet  organe  est  susceptible  d’allongements  considérables  , 
et  lorsqu’il  est  ainsi  prolongé  autant  que  l’animal  le  peut , il  prend  beau- 
coup de  ressemblance  avec  le  pied  funiculaire  des  Lucines.  L’aniipal 
s’en  sert  à peu  près  de  la  même  manière  que  les  Cyclades , soit  pour 
creuser  un  trou  et  s’y  cacher,  soit  pour  opérer  une  sorte  de  reptation 
à la  surface  des  corps  solides. 

La  coquille  du  Pisidium  offre  tous  les  caractères  de  colles  des  Cy- 
clades. Cependant  elle  a cela  de  remarquable,  d’être  beaucoup  plus 
inéquilatérale.  Le  côté  antérieur  est  le  plus  court,  il  est  obtus;  le  posté- 
rieur est  généralement  plus  étroit.  Ces  coquilles  sont  minces , fra- 
giles, Subglobuleuses;  leur  surface  externe  est  revêtue  d'un  épiderme 
d’un  vert  brun  verdâtre  ou  jaunâtre,  plus  ou  moins  foncé,  suivant  les 
espèces.  La  coquille  est  parfaitement  close;  ses  bords  sont  minces  et 
tranchants.  Les  crochets  obtus,  peu  proéminents,  sont  à peine  obli- 
ques. La  lunule  et  le  corselet  no  sont  pas  mieux  indiqués  que  dans  les 
Cyclades.  A l'intérieur,  ces  petites  coquilles  sont  lisses;  elles  sont 
blanchâtres , et  l’on  a de  la  peine  à apercevoir  les  impressions  que 
l'animal  y a laissées.  Pour  étudier  ces  impressions,  il  faut  choisir  des 
individus  morts  dont  la  surface  interne  a été  ternie;  alors  on  s’aperçoit 
que  les  impressions  musculaires  et  du  manteau  ne  diffèrent  en  quoi  que 
ce  soit  de  celles  des  ^Cyclades. 

La  charnière,  qui  ordinairement  traduit  assez  bien  les  modifications 
produites  chez  les  Mollusques  acéphalés,  n’éprouve  aucun  changement, 
et  reste  semblable  à celle  des  Cyclades  ; en  effet , cette  charnière  se 
compose  d’une  ou  de  deux  dents  cardinales,  quelquefois  avortées  ou 
réduites  à l’état  rudimentaire.  Les  dents  latérales  sont  beaucoup  plus 
constantes;  elles  existent  invariablement  dans  toutes  les  espèces,  et 
ceci  est  un  trait  de  ressemblance  de  plus  avec  les  pyçlades.  Pour 
résumer  brièvement  ce  que  nous  venons  d'exposer  au  sujet  des  Pisi- 


7ï6 


DlX-SEPTlEME  FAMILLE. 


dium , nous  pourrons  dire  que  ce  genre  rassemble  des  Cyclades  à 
coquille  inéquilatérale , et  dont  l’animal  n’a  plus  qu’un  seul  siphon. 

Les  Pisidium  sont  de  très  petites  coquilles  qui  habitent  les  eaux 
douces  de  presque  toute  l'Europe.  On  en  trouve  en  Suède,  et  ce  qui 
est  fort  remarquable , ce  sont  les  mêmes  espèces  qui  vivent  dans  les 
ruisseaux  de  l’Espagne  et  do  la  Sicile.  Le  nombre  des  espèces  est  peu 
considérable  : c’est  principalement  en  Allemagne,  en  France  et  en 
Angleterre  que  ce  petit  genre  a été  étudié  ; et  ce  sont  presque  toujours 
les  mêmes  espèces  que  l’on  rencontre  dans  ces  trois  pays.  M.  Jenyns, 
dont  nous  avons  déjà  parlé,  a publié  une  monographie  très  bien  faite 
des  espèces  d'Angleterre’  dans  les  Transactions  de  la  Société  philoso* 
phique  de  Cambridge,  Ce  savant  fait  connaître  six  espèces  ; il  en  donne 
de  très  bonnes  Bgures  avec  les  animaux  : il  est  à désirer  que  son  exemple 
soit  imité.  Dans  la  seconde  édition  du  Manuel  de  Turton,  M.  Gray,  en 
admettant  le  genre , Ta  enrichi  d’une  espèce  que  l’on  croyait  propre  au 
continent. 

On  en  cite  une  douzaine  d’espèces  qui  appartiennent  aux  régions 
tempérées  de  l’Europe  ; il  en  existe  probablement  aussi  dans  les  eaux 
douces  de  l’Amérique.  Mais  jusqu’ici  elles  ont  été  confondues  avec  les 
Cyclades. 

Le  nombre  des  espèces  fossiles  est  peu  considérable.  Dans  son  index 
palœontologicus , M.  Bronn  en  cite  six  : trois  provenant  du  terrain 
wealdien  de  l’Allemagne  ; elles  ont  été  décrites,  pour  la  première  fois, 
par  M.  Duhker,  dans  son  ouvrage  remarquable  intitulé  : Monographie 
du  terrain  wealdien  du  nord  de  V Allemagne,  Les  trois  autres  sont 
mentionnées  dans  les  terrains  tertiaires  récents , et  tous  trois  ont  leurs 
analogues  vivants.  Ce  sont  : 

Pisidium  afTniicum,  de  Jenyns. 

2“  Pisidium  foUinale  [Cyclas  fo7iUnaîîs , Draparnaud). 

3”  Et  enûn  le  Pisidium  henslowianum. 

Ces  trois  espèces , répandues  dans  presque  toutes  les  eaux  douces  de 
l'Europe,  sont  fossiles  dans  les  terrains  récents  de  l’Angleterre  et  de 
l’Allemagne. 

Pisidie  des  rivières.  Pisidium  amnicum^  Jenyns. 

P,  Testa  ovalif  'ventricosâ , obliqua  ^ aliqnando  tri  gond  ^ tenui  ^ frn- 
giltf  cinerascenti-fusedf  anticè  pîaniusculâ^  tenue  striata^  et  pro/un- 
diore  sulcatâ^  intus  ctemlescente  y umbonibns  obtusis, 

Tcllina  amnica.  Millier,  Zool.  Dan.  Prodr  p.  246.  n®  2967. 


LES  CYCLADES. 


1^1 


Tellina  amntca.  Millier.  Hist.  verm.  t.  a,  ao5. 

Jd.  Grael.  p.  3a4a.  n°  78, 

Cycîas  palnstris.  Drap.  Hist.  des  Moll.  p.  i3o.  pl.  10.  f.  6,  7. 

TeUina  amntca.  Mat.  elRactel,  Lin.  Tians.  l.  8.  p.  60. 
lâ,  Pennant,  Brit.  zoo),  t.  4.  p.  i85. 

Id,  Wood,  General  conch.  p.  î53.  pl.  47.  f* 

Id.  Dillw.  Cal.  t.  i.  p.  io5. 

Id.  Turlon,  Conch.  dicl.  p.  168, 

TeUina  rivalis.  Mal.  et  Rack.  Lin.  Trans.  l,  3.  p.  44.^ pk  >3.  f.  37. 

Id.  Donovan,  Brit.  shelU.  t.  3.  pl.  64*  f.  a. 

Cardium  om/i/Vwm.  Montagn,  Test.  Brit.  p,  86, 

Cyclas  amntca.  Turlon,  Conch.  Brit.  p.  aSo.  pl.  ii.  f.  i5, 

Cycîas  obliqua.  Lamk.  An.  s.  verl.  t,  5.  p.  559. 

Id.  Nilson,  Molt.  Scan.  p.  99. 

Pisidinm  obltqtium.  C.  Pfeiffer,  Sysl.  anord.  p,  124.  pl.  5.  f.  19.  20.  1 

Cycîas  amnica.  Fleming.  Brit.  auim.  p.  453. 

Id,  Gray,  Turlon,  Man,  p.  a85.  pl,  i.  f.  5; 

Pisidium  amnictim,  Jenyns,  Trans.  Cambr.  pliil.  Soc.  t.  4*  p Sog. 
pl.  19.  f.  a, 

Catlow,  Conch.  nomencl.  p.  29. 

Hanlcy,  Descr.  cal,  p.  89, 

Picard,  Moll,  delà  Somme,  p.  3^6, 

Merroet,  Moll,  des  Pyrén.  occ.  p,  92, 

Possiîis,  Cyclds  amnica^  Morris,  Cat.  of  Brit.  foss.  p.  85. 

Lyell,  Geol.  proc.  1840,  t.  3.  p.  175, 

Braun,  Deutsrli.  Nalnrf.  1842,  p,  144,  » 

Broun,  Ind.  paîaeont.  t.  2.  p.  982, 

Cette  petite  coquille  a été  signalée  la  première  fois  par^Müller,  sous 
le  nom  de  TeUina  amnica;  confondue  avec  les  Cyclades , elle  a été 
transportée  dans  le  genre  Pisidium  par  M.  Pfeiffer,  et  celte  nouvelle 
classification  a été  confirmée  par  les  observations  de  M.  Jenyns.  Celte 
coquille  eçt  ovale  , obronde,  iuéquilatérale , enflée,  un  peu  subcordi- 
forme  ; le  côté  antérieur  est  court  et  obtus  ; le  postérieur  est  un  peu  plus 
étroit.  Les  crochets  sont  courts,  très  obtus.  La  surface  externe,  cou- 
verte d’un  épiderme  brunâtre , présente  des  zone^  transverses , tantôt 
d’un  brun  cendré  pâle,  tantôt  jaunâtre  et  verdâtre.  Des  stries  fines 
d’accroissement  couvrent  toute  la  surface;  des  sillons  plus  gros  et 
transverses  , assez  réguliers , s’entremêlent  avec  les  striés  et  disparais- 
sent vers  les  bords.  Cette  coquille  , très  mince , est  d’un  blanc  bleuâtre 
à l’intérieur;  sa  charnière  est  en  proportion  plus  épaisse  que  celle  des 


7 1 B DIX-HÜITtÈSiE  FASïiLEE. 

Cyclatles;  elle  porte,  sur  chaque  valve,  deux  petites  dents  cardinales, 
inégales , divergentes  et  réunies  au  sommet  de  l’angle  peu  ouvert 
qu'elles  produisent.  Los  dents  latérales  sont  à peu  près  égales  ; elles 
sont  triangulaires,  très  comprimées , fort  saillantes.  Les  impressions 
musculaires  sont  petites , très  écartées  : l’antérieure  est  ovale-semi- 
lunaire.  Celte  petite  coquille  est  très  abondamment  répandue  dans  les 
eaux  douces  de  TLurope;  elle  habite  aussi  bien  les  régions  froides  du 
nord  que  les  pays  les  plus  chauds  du  midi  de  l’Espagne.  On  la  ren- 
contre à l’état  fossile  avec  le  Cycias  rîvicqla  dans  les  terrains  quater- 
naires. 

Elle  a 8 à 1 0 millimètres  de  longueur. 

DIX-HÜITIÈME  FAMILLE. 

lies  Éryelnides.  Æryciniaœy  Desh. 

CARACTÈRES.  — Animal  ovale  ou  arrondi,  aplati  ou  sub- 
globuleux , revêtu  d'un  manteau  à double,  bord  ; Tex- 
terne  court , tantôt  simple , tantôt  muni  de  tentacules  courts 
et  peu  nombreux  ; l’interne  exertile , percé  de  deux  ou  trois 
ouvertures  destinées  à remplacer  les  siphons  ; Tantérieure  donne 
passage  au  pied.  Pied  grand,  comprimé,  pédicule.  Bouche  pe- 
tite 5 palpes  labiales  courtes  et  étroites.  Branchies  très  inégales,: 
les  internes  très  grandes , subquadrangulaîres  ; les  externes 
très  étroites  obliques,  attachées  par  le  milieu  de  leur  largeur  : 
ces  organes  sont  réunis  en  arrière  du  pied  et  de  la  masse  abdo- 
minale. 

Coquille  Ovale,  aplatie  ou  subglobuleuse,  le  plus  souvent 
minfce  et  fragile  , équivalve , close , à bords  minces  et  sim- 
ples. Charnière  rétrécie  dans  le  milieu , portant  une  fossette 
interne  pour  le  ligament,  et  une  dent  latérale  de  chaque  côté 
plus  ou  moins  apparente,  une  ou  deux  dents  cardinales.  Im- 
pressions musculaires  petites,  peu  apparehtes  ; impression 
palléale  simple. 

GENRES.  — Erycina,  Poronia. 


LES  ÉRYCINIDES. 


7 '9' 

En  créant  le  géhre  Érycine , Lamarck  lo  rapprocha  des  Mactres , et 
lo  comprit  dans  la  famille  des  Maclracés , dans  son  histoire  des  Animaux 
sans  vertèbres.  Quoique  pour  ce  grand  naturaliste,  lo  genre  Érycine 
soit  resté  une  sorte  d'incertœ  sedis  dans  lequel  il  rassemblait  des  co- 
quilles appartenant  à plusieurs  genres,  ces  coquilles  avaient  cependant, 
pour  la  plupart,  quelque  analogie  avec  celles  des  Madrés,  surtout  à 
cause  de  la  nature  et  de  la  position  du  ligament.  L'opinion  de  Lamarck 
peut  donc  se  justifier,  surtout  si  l'on  a égard  à l’état  de  la  science  à 
l'époque  où  écrivait  le  savant  professeur  du  Muséum.  Aujourd'hui  des 
observations  nouvelles  et  multipliées  sont  venues  détruire  l’arrangement 
méthodique  de  Lamarck.  Il  n’est  plus  possible  de  conserver  aux  Érycines 
leurs  rapports  avec  les  Mactres  : nous  verrons  bientôt  en  traitant  spé- 
cialement du  genre,  pourquoi  il  a été  si  difficile  de  les  déterminer  avec 
certitude,  et  comment  s’est  établie,  à l’égard  du  genre,  une  confusion 
presque  inextricable.  Les  conchyliologues  n'ayant  point  de  guide  pour 
appliquer  avec  certitude  les  caractères  donnés  par  Lamarck  aux  Éry- 
cines, il  en  est  résulté  une  double  série  d’erreurs;  D’un  coté,  des  coquilles 
qui  n'appartiennent  pas  au  genre»y  ont  été  introduites;  d’un  autre , un 
assez  grand  nombre  de  genres  ont  été  successivement  proposés  pour  de 
véritables  Érycines.  La  recherche  des  petites  coquilles  voisines  des 
Érycines  a amené  la  découverte  de  quelques  bons  genres  , parmi 
lesquels  .nous  pouvons  rappeler  les  Syndosmyes  de  M,  Kecluz,  genre 
dont  nous  avons  traité  précédemment , ainsi  que  celui  des  Poronies  du 
même  naturaliste.  Ce  dernier  avoisine  beaucoup  les  Éryemes , il  doit 
faire  partie  do  la  même  famille. 

Nous  réduisons  à deux  le  nombre  des  genres  de  notre  famille  des 
Érycinides,  Erycina  et  Poronia,  et  nous  en  empruntons  les  caractères 
non  seulement  aux  coquilles,  mais  surtout  aux  animaux.  Ces  animaux, 
nous  les  avons  observés  souvent  pendant  leur  vie.  Ils  n’ont  point  de  res- 
semblance avec  les  Mactres;  ils  diffèrent  aussi  de  ceux  du  grand  type 
des  Conques  marines  ou  fluvialilos  do  Lamarck,  ils  so  rapprochent  beau- 
coup plus  de  ceux  des  Lucines.  Néanmoins  ils  offrent  des  différences 
assez  considérables  pour  mériter  de  constituer  une  famille  dislincto. 

M.  Gray  a bien  compris  qu’il  fallait  séparer  les  Mactres  des  Érycines, 
et  des  autres  genres  analogues  ; mais  ce  savant  zoologiste  n’ayant  pu 
asseoir  son  opinion  que  sur  les  caractères  des  coquilles,  les  a rapprochés, 
d’un  côté  dos  Saxicaves,  et  d'un  autre  des  Galeomma.  Pour  faire 
bien  comprendre  l’opinion  du  savant  anglais,  nous  devons  ajouter  que 
les  groupes  dont  nous  venons  de  parler  sont  rejetés  à la  fin  de  l'ordro 
des  Cladopodes,  à la  suite  des  Gastrochènes , des  Solens,  des  Nucules , 


720 


DIX-HUITIÈME  FAMILLE. 


des  Myes,  ^es  Analînes  et  des  Corbules.  Nous  ne  pouvons  entrer  ici 
dans  les  détails  nécessaires  à Texamen  critique  de  cet  arrangement 
méthodique  de  M.  Gray;  nous  nous  permettrons  seulement  quelques 
courtes  observations  sur  la  composition  de  la  famille  dans  laquelle  nous 
trouvons  les  éléments  dans  la  nôtre. 

M.  Gray  donne  à. cette  famille  le  nom  de  Lasiadées,  empruntant  cette 
dénomination  au  genre  Lasea  de  Lcach.  M.  Gray  cherche  a attribuer  à 
Leach  l'honneur  de  la  première  création  d’un  grand  nombre  de  genres , 
et  il  voudrait  les  faire  adopter.  Sans  contester  à ce  naturaliste  le  mérite 
d'avoir  établi  le  premier  un  certain  nombre  de  genres , nous  ne  pouvons 
les  admettre,  puisqu’ils  sont  restés  perdus  dans  un  manuscrit  depuis 
1819,  jusqu’au  moment  où,  vers  1840,  M.  Gray  eut  connaissance  du 
manuscrit  en  question , et  en  fit  connaître  le  contenu.  M.  Gray,  il  faut 
lui  rendre  cette  justice,  donne  l’exemple  de  l’abnégation;  les  genres 
qu’il  a proposés  dans  l'ignorance  de  ceux  de  Leach , il  les  sacriGë  et  les 
abandonne  ; mais  cet  éxemple , nous  ne  l’accueillons  pas , nous  con- 
seillons même  aux  naturalistes  de  le  repousser.  Nous  croyons  défendre 
les  vrais  principes  de  la  priorité  en  n’en  accordant  aucune  à des  travaux 
restés  manuscrits  : c’est  un  malheur*sans  doute  que  de  tels  travaux 
n’aient  pas  été  publiés  à leur  époque , nous  le  déplorons  ; mais  il  ne 
faut  pas  réparer  un  mal  par  un  mal  plus  grand.  Ce  serait  jeter  le 
désordre  dans  la  science  par  une  fâcheuse  rétroactivité , si  l’on  voulait 
accorder  à des  manuscrits  oubliés  ou  longtemps  égarés  l’autorité  d’ou- 
vrages publiés.  Chacun  pourrait  ainsi  s’assurer  une  gloire  posthume  et 
faire  rentrer  dans  le  néant  les  conceptions  des  meilleurs  observateurs, 
et  nous  sommes  étonné  que  ces  réflexions  si  justes  ne  soient  pas  venues 
à l’esprit  de  M.  Gray,  et  qu’il  ait  persisté  à conserver  dans  ses  méthodes 
des  genres  qui  auraient  dû  être  relégués  dans  la  synonymie. 

Le  genre  Lasea  est  du  nombre  de  ceux  qui  devront  disparaître;  il 
renferme  de  très  petites  coquilles  pour  lesquelles  M.  Recluz  a établi  son 
genre  Poronia.  A la  suite  de  ce  genre,  M.  Gray  en  admet  cinq  autres 
dans  sa  famille  des  Lasiadées.  Ce  sont  : 

1 ° Kellia , Turton . Ce  genre  ne  ditfère  en  rien  des  véritables  Êry- 
cines  de  Laraarck,  telles  qu’elles  ont  été  réformées  par  M.  Recluz  et 
par  nous-môme. 

2“  Cyamivm,  Philippi.  Ce  genre,  encore  douteux,  nous  paraît 
avoisiner  les  Ervilies , et  par  conséquent  se  rapprocher  du  type  des 
Corbules. 

3®  Montacuta,  On  chercherait  vainement  les  différences  génériques 
qui  séparent  ce  genre  de  M.  Turton  des  Kellia  et  des  Érycines.  Pour 


LES  ÉRYCINIDES. 


721 


nous , qui  avons  sous  les  yeux  les  coquilles  de  ces  trois  groupes , nous 
y reconnaissons  des  caractères  spécifiques-,  mais  non  des  caractères 
propres  à les  séparer  en  genres. 

4°  Il  en  est  de  môme  du  genre  Clmsina  de  M.  Jeffreys  ; aussi  nous 
le  rapportons  dans  la  synonymie  des  Érycines  de  Lamarck. 

5°  Enfin,  M.  Gray  termine  sa  famille  des  Lasiadées  par  le  genre 
Embla  de  M.  Lovèn.  Mais  les  renseignements  que  le  savant  zoologiste 
danois  donne  sur  son  nouveau  genre  sont  suffisants  pour  dérîiontrer 
qu’il  n'a  point  de  rapport  avec  les  Érycines,  et  qu’il  se  rapproche 
davantage  des  Mactres.  En  effet,  dit  M.  Lovèn,  l'animal  est  terminé 
en  arrière  par  deux  siphons  , et  nous  allons  voir  que  ce  qui  caractérise 
la  famille  des  Érycinidcs,  c’est  l’absence  de  ces  organes. 

Les  Mollusques  que  nous  réunissons  dans  la  famille  des  Érycinides 
sont  de  très  petite  taille,  et  par  conséquent  d’une  observation  assez 
difficile  ; ils  sont  ovales , Iransverses  ou  suborbiculaires  ; tantôt  aplatis , 
tantôt  subglobuleux  : le  manteau  dont  ils  sont  revêtus  est  mince  et 
transparent  ; .le  bord  est  dédoublé  profondément;  ,1a  duplicature  la 
plus  courte  conserve  le  contour  exact  de  la  coquille  et  la  déborde  à 
peine;  la  seconde  duplicature  est  susceptible  d’une  extension  plus. con- 
sidérable : elle  forme  un  large  bord  extérieur  qui  augmente, d’autant  la 
cavité  palléale  ; il  arrive  môme  quelquefois  à ce  bord  de  se  prolonger 
sous  la  forme  d’un  grand  capuchon,  au-dessous  duquel  le  pied  peut 
être  caché  en  partie,  ainsi  que  nous  l’avons  reconnu  dans  une  des 
Érycines  de  la  Méditerranée.  Le  manteau  n’est  jamais  prolongé  en 
arrière  par  des  siphons.  Dans  les  Érycines,  une  large  commissure 
sépare  deux  ouvertures  inégales  : l'une,  antérieure  et  inférieure,  très 
grande,  donne  passage  au  pied  ; l’autre,  postérieure,  remplace  les  deux 
siphons.  Dans  le  Poronia  , la  disposition  du  manteau  est  fort  différente; 
car  son  bord  inférieur  présente  trois  ouvertures  inégales  séparées  par 
deux  commissures  : la  première  do  ces  ouvertures  est  antérieure  ; elle 
est  petite,  un  peu  prolongée  en  avant,  elle  est  destinée  à donner  pas- 
sage au  pied  ; la  seconde  est  beaucoup  plus  grande , elle  occupe  une 
partie  du  bord  ventral  de  l’animal  ; elle  nous  paraît  destinée  â rem- 
placer le  siphon  branchial;  la  troisième,  enfin,  est  postérieure  ; elle  est 
en  forme  de  boutonnière,  et  elle  ressemble  à celle  qui  occupe  la  môme 
place  chez  les  Érycines.  Ainsi  la  différence  qui  existe  entre  les  Poronies 
et  les  Érycines  consiste  dans  la  soudure  des  bords  du  manteau  au 
milieu  de  la  grande  ouverture  antérieure  et  inférieure.  Jusqu’ici  aucun 
autre  exemple  ne  peut  être  cité  d’un  Mollusque  acéphalé  ayant  au 
manteau  trois  ouvertures  sessiles  disposées  comme  dans  les  Poronies.  » 
T.  I.  2«  PARTIE.  4b* 


DIX-HÜITIÈME  FAMILLE. 


^22 

Dans  ies  deux  genres  que  nous  rapprochons , la  bouche  est  petite  et 
Irahsverse;  ies  lèvres  en  sont  larges , et  elles  se  terminent  en  une  paire 
de  palpes  labiales  courtes  et  étroites.  Les  branchies  sont  semblables 
dans  les  deux  genres;  les  feuillets  sont  très  inégaux;  les  internes  sont 
très  grands  et  subquadrangulaircs;  ils  s'étendent  dans  presque  toute  la 
cavité  du  manteau.  Les  feuillets  externes  sont  très  étroits,  ils  semblent 
attachés  à l'animal  par  le  milieu  de  leur  surface  interne.  Une  moitié 
tombe  en  avant,  tandis  que  l’autre  remonte  en  arrière  dans  la  région 
dorsale  : ces  organes  se  réunissent  en  arrière  de  la  masse  abdominale, 
et  viennent  so  souder  au  manteau  sur  le  pourtour  de  l’ouverture  posté- 
rieure dont  il  est  percé. 

Les  muscles  adducteurs  des  valves  sont  très  petits  : ils  occupent  les 
extrémités  de  l’animal,  et  ils  se  présentent  sous  la  forme  de  faisceau 
cylindrique  dans  les  Érycincs,  un  peu  plus  ovalaire  dans  les  Poronies. 

Le  pied  a de  l’analogie  avec  celui  des  Cyclades  et  des  Pisidium  : çet 
organe  est  susceptible  d'allongements  considérables;  il  est  aplati  do 
chaque  côté,  tranchant  sur  son  bord  inférieur;  il  se  prolonge  en  avant 
sons  la  forme  d'une  lanière  étroite  dans  les  Érycines;  il  se  termine  en 
arrière  en  un  talon  pointu,  et  il  se  lie  à la  niasse  abdominale  au  moyen 
d’un  pédicule  étroit. 

Les  mœurs  de  ces  animaux  sont  en  rapport  avec  la  forme  du  pied  et 
la  manière  dont  ils  peuvent  s’en  servir.  Chez  presque  tous  les  Mollus- 
ques acéphalésque  nous  connaissons  actuellement,  l'organe  locomoteur 
est  destiné  à creuser  le  sable  ou  la  vase,  et  à préparer  un  trou  dans 
lequel  l’animal  tout  entier  finit  par  s'enfoncer.  Les  petits  Mollusques 
qui  nous  occupent  ont  une  tout  autre  manière  de  vivre.  Us  s’abritent 
Sous  les  pierres,  ou  ils  s’enfoncent  dans  les  fentes  des  rochers, 
dans  lesquelles  ils  remontent  an-dessus  du  niveau  des  marées.  Pour  se- 
mouvoir,  sur  les  corps  solides , ces  animaux  étendent  leur  pied  autant 
qu’ils  le  peuvent,  en  appliquent  le  plat  sur  les  corps  qu'ils  rencontrent, 
et  i’y  attachent  avec  assez  de  solidité  à l'aide  de  la  mucosité  que  sécrète 
un  organe  spécial  situé  à la  base. du  pied.  Une  fois  attaché  par  son 
extrémité , le  pied  se  contracte , et  il  entraîne  avec  lui  l’animal  tout 
entier.  Ce  mouvement,  se  réJ)étaDt  avec  assez  de  rapidité,  permet  à 
ranimai  de  s’avancer  assez  vite  et  de  se  tenir  habituellement , non  pas 
sur  le  sol , mais  sur  la  face  inférieure  des  pierres,  dans  une  position 
semblable  à celle  d’un  insecte  qui  est  attaché  au  plafond  d’un  apparte- 
ment. 

Les  coquilles  se  distinguent  facilement,  non  seulement  par  la  peti- 
tesse de  leur  taille,  mais  aussi  par  la  structure  de  leur  charnière,  qui 


LES  ÈRYCLMDES. 


723 

ne  ressemble  en  rien  à ce  qui  est  connu  dans  les  autres  genres.  Ce  sont 
des  coquilles  généralement  lisses,  minces  et  fragiles;  elles  sont  équî- 
valves  , subéquilatérales  et  parfaitement  closes.  Leur  surface  externe 
est  revêtue  d'un  épiderme  mince  et  transparent  ; les  crochets  sont  petits, 
peu  obliques  et  à peine  saillants  au-dessus  du  bord  cardinal  ; on  n'aper- 
çoit ni  lunule  ni  corselet.  A l'inténeur,  ces  coquilles  sont  lisses;  ce 
n*est  qu'avec  beaucoup  de  peine  que  l'on  parvient  quelquefois  à y 
découvrir  deux  très  petites  impressions  musculaires  et  une  impression 
palléale  simple,  plus  ou  moins  rapprochée  du  bord  inférieur,  selon  les 
èspèces.  Quant  à la  charnière,  elle  présente  quelques  modifications 
intéressantes.  Nous  croyons  utile  de  les  exposer  rapidement. 

Le  caractère  le  plus  apparent  des  coquilles  do  noire  famille  des 
Érycines  consiste  en  une  échancrure  plus  ou  moins  profonde  qui  se 
montre  au  centre  delà  charnière,  là  où  dans  d'autres  genres  celte  partie 
est  la  plus  large  et  la  plus  épaisse.  Celle  échancrure  est  triangulaire; 
elle  est  plus  ou  moins  profonde , selon  les  espèces.  Dans  cellés  qui  sont 
aplaties , par  exemple,  cette  échancrure  est  peu  oblique,  étroite  et  peu 
profonde.  Dans  les  espèces  subglobuleuses,  elle  devient  plus  longue, 
se  creuse  beaucoup  plus,  et  finit  par  se  cacher  presque  entièrement  au- 
dessous  du  bord  postérieur  et  supérieur.  Cette  fossette  reçoit  un  liga- 
ment intérieur  dont  l’étendue  est  toujours  proportionnée  à la  cavité 
dans  laquelle  il  s’attache.  Petite  et  triangulaire  dans  les  espèces  plates  , 
elle  a une  ressemblance  éloignée  avec  celle  des  Grassatelles.  A mesure 
que  les  espèces  s’approfondissent,  le  ligament  dévient  de  plus  en  plus 
oblique;  il  s’allonge  le  long  du  bord  et  prend  de  la  ressemblance  avec 
celui  des  Amphidesmes.  Dans  les  Poronies,  cette  ressemblance  est 
surtout  frappante,  parce  que  la  cavité  du  ligament,  plus  épaisse  , est 
projetée  en  dedans  et  devient  ainsi  plus  apparente.  Indépendamment  du 
ligament  dont  nous  venons  de  parler,  le  bord  cardinal  présente  d’autres 
parties  qui  servent  à Caractériser  la  famille  et  les  genres.  Sur  le  bord 
antérieur  de  l'échancrure  du  ligament  s'élèvent  une,  quelquefois  deux 
dents  cardinales;  très  peu  d'espèces  ont  les  deux  dents,  presque  toutes 
les  autres  n'en  ont  qu’une.  De  plus , la  charnière  porte  deux  dents 
latérales  comprimées  et  intranlés.  Ces  dents  lâtérales  sont  variables, 
particulièrement  dans  le  groupe  d’espèces  pour  lequel  M.  Turton  a pro- 
posé le  genre  Kellia,  En  effet , la  dent  latérale  antérieure  manque  ou  se 
confond,  lorsqu’elle  est  rudimentaire,  avec  la  dent  cardinale  du 
même  côté.  Dans  ce  même  groupe,  la  dent  latérale  postérieure  est 
située  à l’extrémité  du  ligament,  et  elle  est  toujours  très  apparente. 
Dans  les  Poronia , toute  la  charnière  est  plus  robuste,  et  les  dents 

46* 


7^4  DIX-HUITIÈME  FAMILLE. 

latérales  s’allongent  de  chaque  côté  et  l’avancent  au-dessous  des  cro- 
chets. 

A l’aide  des  caractères  que  nous  venons  d'exposer,  empruntés  aux 
animaux  et  à leurs  coquilles,  il  sera  toujours  facile  de  rapporter  à la 
famille  des  Érycinides  ceux  des’Mollusques  acéphalés  qui  en  dépendent. 
Pour  résumer  ces  caractères  , nous  rappellerons  que  ces  animaux  sont 
dépourvus  de  siphons , que  leur  manteau  a deux  ou  trois  ouvertures 
sessiles,  que  le  pied  est  plat,  très  allongé,  et  que  l'animal  rampe  en 
appliquant  le  plat  de  ce  pied  sur  les  corps  solides.  Quant  aux  coquilles, 
elles  so  distinguent  par  leur  peu  d’épaisseur,  par  leur  petitesse,  par  le 
ligament  complètement  intérieur,  sans  aucune  trace  de  ligament  externe; 
par  une  charnière  dans  laquelle  les  dents  latérales  prédominent  et  où 
les  dents  cardinales,  au  nombre  de  deux,  ont  une  tendance  k disparaître, 
et  disparaissent,  en  effet,  dans  un  certain  nombre  d’espèces.  Enfin, 
ces  coquilles  se  distinguent  encore  par  leur  impression  palléale  simple 
et  par  deux  impressions  musculaires  petites  et  très- écartées. 

Connaissant  actuellement  les  caractères  principaux  de  la  famille 
des  Érycinides,  nous  avons  à rechercher  la  place  qu’elle  doit  occuper 
dans  la  série  générale,  fi  est  évident  qu’elle  ne  peut  rester  dans 
le  voisinage  des  Mactres,  comme  l’ont  cru  tous  les  conchyliologueSi 
Il  suffirait,  pour  se  convaincre  de  leur  erreur,  de  comparer  les  ca- 
ractères des  Mactracées  avec  ceux  de  la  famille  qui  nous  occupe. 
On  verrait , d’un  côté , dos  animaux  terminés  en  arrière  par  deux  si- 
phons réunis , ayant  un  pied  robuste , des  palpes  labiales  très  grandes, 
des  branchies  très  longues  et  étroites  ; tandis  que  dans  les  genres 
des  Érycinides  il  y a absence  complète  de  siphons  ; le  pied  est  pé- 
dicule, mince  et  étroit;  les  palpes  labiales  courtes  et  rétrécies;  les 
branchies , très  inégales , occupent  presque  toute  la  cavité  du  man- 
teau. Quant  aux  coquilles,  d'après  lesquelles  Lamarck  avait  opéré  le 
rapprochement  que  nous  critiquons,  elles  n’ont  guère  plus  de  ressem- 
blances que  les  animaux  eux-méraes.  Dans  les  Mactracées  l’existence 
des  siphons  entraîne  la  présence  d’une  échancrure  plus  ou  moins  pro- 
fonde dans  l’impression  du  manteau.  Cette  impression  reslo  toujours 
simple  dans  les  Érycinides , et  cela  s’explique  très  bien  par  l'absence 
des  siphons.  Les  charnières  sont  très  différentes.  Dans  les  Mactracées, 
deux  ligaments,  un  très  gros  à l'intérieur,  l’autre  très  petit  à l’exté- 
rieur. Les  dents  cardinales  sont  constantes,  les  dents  latérales  seules 
varient.  Dans  les  £rycipides,  un  seul  ligament,  toujours  intérieur,  et 
ce  sont  les  dents  cardinales  qui  varient,  tandis  que.  les  latérales  sont 
plus  constantes.  Il  est  donc  prouvé  pour  nous  que  la  famille  des  Éry- 


LES  ÉKYCLMDES. 


cines  est  très  éloignée  de  celle  des  Mactres  ; mais  de  quel  groupe 
de  Mollusques  doit-ëlle  se  rapprocher?  11  est  évident  que  c’est  avec 
celui  des  Lucines  qu’elle  a le  plus  de  rapports.  En  effet,  dans  cette 
dernière  famille  nous  trouvons  aussi  un  manteau  simple , n’ayant  plus 
qu’un  seul  siphon  ; les  palpes  labiales  sont  très  petites,  et  les  branchies 
sont  très  grandes  ; le  pied  des  Lucines  devient  encore  plus  étroit,  car 
souvent  il  est  funiculaire  ; les  branchies  prennent  une  extension  con- 
sidérable, et  quelle  que  soit  la  manière  d’envisager  ces  organes , ils  ont 
de  la  ressemblance  avec  la  branchie  interne  des  Érycines.  Dans  les 
coquilles  , la  ressemblance  n’est  pas  moins  frappante.  En  effet , chez  les 
Lucines,  le  ligament  a une  tendance  à passer  de  l’intérieur  à l’exté- 
rieur de  la  charnière,  èt  l’on  peut  dire  aussi  que  dans  ce  genre  les  dents 
cardinales  sont  plus  variables  que  les  latérales  ; enün,  les  Lucines,  ainsi 
que  les  Érycines , ont  l’impression  du  manteau  toujours  simple.  A la 
suite  de  la  comparaison  des  divers  genres  que  nous  venons  de  men- 
tionner, il  était  naturel  de  modifier  la  classification  et  de  transporter  la 
famille  des  Érycines  loin  des  Mactres  et  des  Tellines  , dans  le  voisinage 
des  Lucines  ; peut-être  même  aurions-nous  dû  la  ranger  à la  suite,  plutôt 
que  delà  mettre  en  avant  ; mais  nous  devons  rappeler  que  lesdeux familles 
que  nous  rapprochons  constituent  un  embranchement  latéral  qui , en 
sortant  du  tronc,  ne  s’oppose  plus  à la  continuité  des  rapports  qui  exis- 
tent entre  la  famille  des  Cyolades  et  celle  des  Gardium.  Nous  étions 
entraînés  à rapprocher  les  Érycinides  des  Cyclades  à cause  de  quelque 
ressemblance  dans  les  animaux  : le  pied,  par  exemple , a de  l'analogie 
dans  les  deux  familles  ; les  palpes  labiales  sont  à peu  près  du  même 
volume  : enfin  , nous  avons  vu  dans  les  Pisidium  les  siphons  disparaître 
presque  complètement,  ce  qui  les  rapproche  à la  fois  des  Lucines  et  des 
Gardium. 

Les  Mollusques  de  la  famille  des  Érycines  sont  marins  ; ils  vivent  sur 
les  rivages,  sous  des  eaux  peu  profondes  ; ils-  habitent  sous  les  pierres , 
dans  les  fentes  des  rochers  : ceux  que  nous  avons  observés  vivants 
ne  se  sont  jamais  enfoncés  dans  le  sable  ou  dans  la  vase.  11  serait  pos- 
sible cependant  que  des  espèces  que  nous  n’avons  point  vivantes  vécus- 
sent à la  manière  des  autres  Mollusques  acéphalés.  Cependant  nous  en 
doutons , et  d’après  ce  seul  fait  qu’ils  sont  dépourvus  de  siphons , organes 
particulièrement  destinés  à s’opposer  à l’introduction  de  corps  étrangers 
dans  la  cavité  du  manteau. 


7^6 


DJX-HÜIXIEME  FAMILLE. 


GENRE  CINQUANTE -NEUVIÈME. 

£&YCX9irx.  Enjcina,  Lamk. 

PL  II.  fîg.  639. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  ovale  ou  arrondi,  ayant 
le  manteau  percé  de  deux  ouvertures  très  inégales,  l’une  an- 
térieure et  inférieure  pour  le  passage  du  pied;  l’autre,  posté- 
rieure, représentant  les  deux  siphons.  Bord  du  inanteau  bilabié, 
la  lèvre  externe  courte,  portant  une  série  de  courts  tentacules 
également  distants  ; la  lèvre  interne  se  prolongeant  en  avant 
ou  en  capuchon  triangulaire  propre  à couvrir  la  base  du  pied. 
Pied  mince,  étroit,  allongé,  tranchant,  soutenu  par  un  pédicule 
étroit.  Bouche  petite,  munie  de  grandes  lèvres  terminées  par 
des  palpes  labiales  courtes  et  étroites.  Branchies  très  inégales, 
les  feuillets  internes  subquadrangulaires  presque  aussi  larges 
que  le  manteau  ; feuillets  externes  étroits  et  obliques. 

Coquille  libre,  ovale,  transverse,  équivalve,  inéquilatérale, 
entièrement  close.  Charnière  présentant  deux  dents  cardinales 
inégales , divergentes , ayant  en  arrière  une  fossette  oblique  ; 
deux  dents  latérales  oblongues,  comprimées , intrantes,  courtes 
sur  chaque  valve.  Ligament  intérieur,  épais,  fixé  dans  les  fos- 
settes. Impression  du  manteau  simple  ; impressions  musculaires 
superficielles  arrondies. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Mya , Moiîtagu , Matou  et 
Racket.  — Kellia,  Turton,  Gray,  Forbes,  Jeffreys,  Gould, 
Margillivray,  Sowerby,  Morris.  — Lesœa,  Leach  [teste  Gray), 
Gray,  Lesæa^  Môller.  — Cyamium,  Philippi,  Gray.  — Mon- 
iacuta^  Turton,  Lovèn,  Gray,  Jeffreys,  Thompson. — Clau- 
sina,  Jeffreys,  Gray.  — PÿZ/wTia , Hinds.  — Chironia, 
Deshayes. 

OBSERVATIONS.  L’étude  que  fit  Lamarck  des  fossiles  du  bassin  de 
Paris,  et  particulièrement  de  la  célèbre  localité  de  Grignon,  lui  fit  décou  - 


LES  ERYClMüKS. 


7-n 

vrirun  certaiu  nombre  de  petites  coquilles  bivalves  dont  les  caractères  ne 
pouvaient  s’accorder  avec  ceux  des  autres  genres  connus.  Avec  ces  co- 
quilles minces  et  fragiles , il  créa  un  genre  Érycine  dont  les  caractères 
furent  publiés,  pour  la  première,  fois  , dans  le  6*  volume  des  Annales  du 
Muséum.  Les  principaux  caractères  assignés  par  Lamarck  a son  nou- 
veau genre  se  remarquent  dans  la  charnière  , composée , d'après  lui , 
d’une  fossette  intérieure  pour,  le  ligament,  placée  entre  deux  dents 
cardinales  divergentes,  accompagnée  de  chaque  côté  d’une  dent  laté- 
rale ordinairement  saillante*  Dans  ce  genre,  Lamarck  réunit  six  es- 
pèces d'abord , auxquelles  plus  tard  il  en  adjoignit  quelques  autres , 
et  entre  autres  une  vivante  de  la  Nouvelle-Hollande. 

Le  nou^yeau  genre  introduit  par  Lamarck  dans  les  classifications 
qu'il  publia  successivement  fut  toujours  maintenu  dans  le  voisinage  des 
Mactres,  le  savant  auteur  conservant  à ce  sujet  les  premières  opinions 
qu’il  avait  publiées.  Malheureusement  les  Dgures  qui  accompagnent  le 
mémoire  de  Lamarck,  dans  Annales  du  Muséum,  ne  sont  pas  suffi- 
samment exactes  pour  faire  comprendre  les  caractères  des  Érycines; 
de  là  résulta  une  confusion  considérable  qui  s’introduisit  peu  à peu 
parmi  les  conchyliologues,  parce  que  chaque  observateur  crut  retrouver 
des  Érycines  dans  toutes  les  petites  coquilles  minces  et  fragiles  à liga- 
ment intérieur,  qu’il  eut  occasion  d’examiner.  11  aurait  fallu,  avant 
toutes  choses , étudier  avec  la  plus  grande  attention  les  types  spéci- 
fiques réunis  par  Lamarck  dans  son  genre  Érycine.  Mais  cet  examen 
avait  ses  difficultés , surtout  pour  les  personnes  étrangères  qui  devaient 
s’en  rapporter  uniquement  aux  caractères  décrits , ainsi  qu^aux  figures. 

Si  l'on  rassemblait  aujourd’hui  toutes  les  coquilles  qui  ont  été  succes- 
sivement décrites  sous  le  nom  d'Érycine,  on  serait  bien  étonné  de  co 
résultat,  qu’à  l’exception  de  deux  ou  trois,  toutes  les  autres  n’appar- 
tiennent point  au  genre.  On  arriverait  à un  résultat  non  moins  inat- 
tendu, si  l'on  rassemblait  les  espèces  do  plusieurs  genres  qu’on  a crus 
nouveaux  : on  y rencontrerait  presque  toutes  les  Érycines  actuel- 
lement connues.  Il  faut  l’avouer,  Lamarck  a été  en  partie  cause  de 
la  confusion  que  nous  venons  de  signaler  brièvement.  En  effet , le  savant 
naturaliste  avait lui-raéme  réuni,  sous  le  nom  d'Érycine,  des  coquilles 
de  divers  genres  que  leur  politesse  avait  soustraites  à une  observation 
plus  complète;  aussi  il  était  loisible,  en  quelque  sorte,  à chaque  natu- 
raliste de  prendre  au  hasard  un  des  types  de  Lamarck  et  de  lui  attribuer 
toute  la  valeur  des  caractères  génériques;  et  nous  allons  bientôt  voir 
que  le  résultat  ne  pouvait  être  autre  que  celui  qui  a été  obtenu  , c’est- 
à-dire  une  confusion  presque  inextricable. 


DIX-UUITIÈME  FAMILLE. 


928 

M.  Recluz  a publié,  dans  la  Revue  zoôlogique\  un  très  bon  travail 
sur  le  genre  Érycine.  Non  content  d’apprécier  avec  une  grande  saga- 
cité tout  ce  qui  a été  publié  sur  ce  genre,  M.  Recluz  a examiné 
dans  la  collection  de  Lamarck,  dans  celle  de  M.  Defrance,  ainsi  que 
dans  la  nôtre , les  espèces  vivantes  et  fossiles  qui  avaient  servi  aux 
descriptions  de  Lamarck  et  aux  nôtres.  De  cet  examen  aussi  radical 
qu'éclairé,  il  résulta  une  réforme  du  genre  Érycine;  elle  était  néces- 
saire, puisque  M.  Recluz  découvrit  dans  ce  genre  des  espèces  appar- 
tenant aux  Vénus  , aux  Lucines,  aux  Tellines,  et  enfin  aux  Astartés. 
Le  type  vivant  du  genre  Érycine  ( Enjclna  cardioides  ) , que  nous  avons 
vu  autrefois  dans  la  collection  du  Muséum^  est  une  véritable  Vénus; 
quoique  étiquetée  de  la  main  de  Lamarck,  nous  pensions  que  sa  pré- 
sence dans  le  genre  Érycine  était  le  résultat  d’une  erreur  matérielle, 
telle  qu'elle  pourrait  avoir  lieu  dans  les  remaniements  successifs  qu’a 
snhis  h collection  du  Muséum.  Mais  cette  même  coquille  se  trouvant  sous 
le  même  nom  dans  la  collection  de  Lamarck^  on  ne  pouvait  se  refuser  à 
l’évidence , et  il  restait  démontré  que  l’erreur  venait  de  Lamarck  lui- 
même.  L’erreur  était  plus  facile  à justifier  à l’égard  dos  espèces  fossiles 
appartenant  à d’autres  genres  ; beaucoup  plus  petites,  elles  ont  des 
caractères  d’une  élude  plus  difficile;  quelquefois  on  no  pouvait  pas 
s’assurer  avec  facilité  si  le  ligament  est  réellement  intérieur.  Néan- 
moins, parmi  ces  coquilles,  quelques  unes  ont  l’impression  palléale 
simple;  quelques  autres  ont  celte  impression  sinueuse  : parmi  ces  der- 
nières , les  unes  sont  de  véritables  Tellines  ; les  autres  sont  très  voisines 
de  VAmphidesina  Bogsü.  Elles  doivent  par  conséquent  rentrer  dans  le 
genre  Syndosmrja , ainsi  que  nous  l’avons  vu  précédemment.  Des  douze 
espèces  inscrites  par  Lamarck  dans  son  Histoire  des  a7iimaux  sans 
vertèbres  f deux  seulement,  d’après  les  observations  de  M.  Recluz, 
peuvent  rester  dans  ce  genre.  A celles-là  seules  s’appliquent  presque 
rigoureusement  les  caractères  imposés  au  genre  par  Lamarck.  Lorsque 
l’on  vient  à leur  comparer  les  espèces  des  genres  Keîlia  et  Montacuta 
de  Turton , celle  du  genre  Cyamium  de  Philippi , Clausina  de  Jeffreys, 
Pithina  de  Hinds , et  Chiroma  de  nous , on  reconnaît  que  toutes  ces 
coquilles  dépendent  d’un  type  unique,  et  que  c’est  à lui  que  le  nom 
d’J^î/ricma  doit  être  conservé. 

Nous  avons  pensé  d'abord  qu’il  faudrait  joindre  à cette  synonymie 
générique  les  genres  Cycladina  de  Cantraines,  ou  Poronia  de  Recluz; 
mais  les  observations  que  nous  avons  faites  sur  les  animaux  de  ce  petit 
groupe  nous  ont  déterminé  à le  conserver,  ainsi  que  nous  l’avons  déjà 
dit,  en  traitant  delà  famille  des  Érycinides.  Nous  ne  pouvons  nous 


LES  ÉRYCINIDES. 


729 

appesantir  à discuter  les  différents  genres  que  nous  venons  de  men- 
tionner : M.  Recluz  Ta  fait  dans  l’excellent  travail  dont  nous  venons  de 
parler,  mais  la  nécessité  de  leur  réunion  deviendra  évidente  par  la 
description  minutieuse  que  nous  allons  donner  des  coquilles  que  nous 
réunissons  dans  le  genre  Érycine.  Cette  description  nous  fournira  d'ail- 
leurs l’occasion  de  faire  remarquer  d’après  quels  caractères  les  genres 
que  nous  rapportons  à notre  synonymie  ont  été  fondés. 

Jusqu’ici  l’animal  des  Érycines  n’a  point  été  décrit,  si  ce  n’est  par 
M.  Recluz,  d’après  quelques  renseignements  qu’il  a bien  voulu  accepter 
de  nous.  Il  était  cependant  bien  nécessaire  que  cet  animal  fût  connu 
pour  pouvoir  déterminer  rigoureusement  la  place  que  le  genre  doit 
occuper  dans  la  méthode.  Nous  ne  reviendrons  pas  sur  ce  que  nous 
avons  dit  à ce  sujet  dans  les  généralités  de  la  famille,  nous  y renvoyons 
le  lecteur. 

L'animal  des  Érycines  est  ovale , transverse , aplati  ou  subglobuleux  : 
il  est  d’un  blanc  pâle  , laiteux  et  demi -transparent.  Ses  muscles  adduc- 
teurs constituent  la  partie  la  plus  opaque  de  son  corps , et  ils  appa- 
raissent sous  forme  de  deux  petites  taches  à travers  la  coquille,  pendant 
la  vie  de  l'animal.  Le  manteau  est  très  mince , transparent;  il  est  plus 
fortement  adhérent  à la  surface  interne  des  valves  que  dans  la  plupart 
des  autres  Mollusques  acéphalés.  11  est  bordé,  à la  circonférence,  par 
un  muscle  orbiculaire,  étroit,  peu  épais,  échancré  en  avant  et  en 
arrière  par  le  passage  des  muscles  adducteurs.  Vers  le  bord,  le  man- 
teau se  dédouble.  L’une  des  duplicatures  suit  le  contour  du  bord  libre 
des  valves,  le  dépasse  â peine  , et  il  donne  naissance  à un  petit  nombre 
de  courts  tentacules  également  distants.  L’autre  duplicalure  est  beau- 
coup plus  extensible.  Elle  prend  naissance  au  côté  interne  de  la  pre- 
mière , et  son  bord  libre  reste  simple  ; mais  ce  qui  la  rend  particu- 
lièrement remarquable,  c’est  qu’elle  s’allonge  en  avant  en  forme  de 
capuchon  terminé  en  pointe,  et  au-dessous  duquel  une  partie  du 
pied  peut  se  cacher.  Nous  ne  connaissons  pas  d'autre  Mollusque  chez 
lequel  le  manteau  présente  une  disposition,  nous  ne  dirons  pas  sem- 
blable , mais  môme  analogue.  Le  bord  antérieur  de  ce  capuchon  n’est 
pas  formé  de  deux  parties  simplement  rapprochées.  Les  lobes  du  man- 
teau sont  soudés , et  cette  soudure  constitue  la  commissure  antérieure 
de  la  grande  ouverture  palléale.  Cette  ouverture  commence  un  peu  au- 
dessous  du  muscle  adducteur  antérieur,  et  elle  se  continue  dans  toute 
la  longueur  du*  bord  ventral  de  l’animal.  Une  autre  soudure  se  fait 
alors  entre  les  lobes  du  manteau,  et  bientôt  elle  est  interrompue  de 
nouveau  par  une  ouverture  postérieure  unique,  destinée  à remplacer 


DlX-HUlTlEiUE  FAMILLE. 


73o 

les  deux  siphons  que  nous  avons  vus  Jusqu’ici  dans  tous  les  Mollusques 
des  familles  précédentes.  Nous  insistons  vivement  sur  ce  fait  d’une 
ouverture  postérieure  unique  destinée  à remplacer  les  siphons , parce 
que,  après  la  Solémye,  le  genre  Érycine  est  le  seul  parmi  les  Dimyaires 
qui  présente  ce  caractère  singulier.  Nous  aurons  bientôt  q en  estimer  la 
valeur. 

Le  pied  est  très  singulier  chez  les  Éryciues.  Les  Mollusques  des 
familles  qui  précèdent , à l’exception  des  Pisidium,  nous  ont  montré 
presque  tous  un  pied  linguiforme,  triangulaire,  tranchant,  plus  ou 
moins  épais  et  subitement  tronqué  en  arriére,  et  à peu  près  dans  la 
forme  du  talon  d'un  pied  humain.  Chez  tous,  cet  organe  locomoteur 
est  fortement  uni  à la  masse  abdominale , puisque  les  parois  de  cette 
niasse  en  sont  formées  : il  en  est  bien  de  môme  chez  les  Érycines  ; mais 
au  lieu  de  s’élargir  progressivement , la  partie  qui  continue  l’abdomen 
se  rétrécit  en  un  pédicule  aplati  auquel  est  attaché  un  pied  très  long, 
comprimé,  vermiforrne,  terminé  en  arrière  par  une  pointe  assez  longue, 
du  tiers  environ  de  la  longueur  totale. 

La  bouche  est  petite,  iransverse-;  elle  est  garnie  de  très  larges 
lèvres  membraneuses  simples  qui  se  prolongent  de  chaque  côté  en  une 
paire  de  palpes  labiales  triangulaires,  courtes  et  étroites.  La  surface 
interne  de  ces  palpes  montre  un  petit  nombre  de  fines  lamelles  obli- 
ques. 

Les  branchies  présentent,  dans  le  genre  qui  nous  occupe , des  carac-  . 
lères  tout  particuliers  : les  feuillets  branchiaux  sont  très  inégaux,  les 
internes  sont  les  plus  grands:  ils  ont  une  étendue  peu  commune,  car 
ils  occupent  presque  toute  la  surface  interne  du  manteau.  Ils  c£schent  la 
masse  abdominale,  et  la  plus  grande  partie  du  pied  lorsqu'il  est  con- 
tracté. Ces  organes  sont  subquadrangulaires  ; on  pourrait  les  comparer 
b,  un  large  scapulaire  jeté  sur  le  dos  de  l’animal,  et  se  terminant  en 
pointe  large  et  obtuse  a son  extrémité  postérieure.  Ces  organes  ne  pa- 
raissent pas  s'interposer  entre  les  palpes  labiales.  Nous  avons  toujours 
vu  ces  palpes  entièrement  dégagées.  Les  feuillets  externes  sont  beau- 
coup plus  étroits;  ils  ont  à peu  près  le  tiers  de  la  largeur  des  feuillets 
internes.  Ils  sont  plus  courts  et  commencent  plus  en  arrière.  Ils  sont 
attachés  par  le  milieu  de  leur  largeur  ; une  moitié  tombe  en  avant  dans 
la  cavité  du  manteau;  l’autre  moitié  remonte  vers  la  région  dorsale. 
Les  feuillets  branchiaux , soudés  entre  eux , en  arrière  de  la  masse  abdo- 
minale , viennent  présenter  leur  surface  interne  à l'entrée  de  l’ouverture 
postérieure  du  manteau.  Ces  organes  sont  très  minces;  ils  sont  très 
finement  striés  en  travers.  Les  stries  sont  produites  par  une  multitude 


LES  ERYCINIDES.  7^1 

de  vaisseaux  branchiaux  que  l’on  ne  peut  bien  apercevoir  qu’à  l’aide  de 
fortes  loupes  ou  de  grossissements  microscopiques. 

A la  base  du  pied  et  dans  la  portion  de  cet  organe  qui  se  lie  à la 
masse  abdominale  , on  remarque  un  organe  particulier,  plus  opaque  que 
le  reste  : il  est  subréniforme.  On  pourrait  le  comparer  au  crypte' qui 
reçoit  le  byssus  dans  les  Mollusques  byssifères.  Mais  chez  tes  Érycines, 
il  n'existe  aucune  trace  de  byssus , et  l'organe  dont  nous  parlons  doit 
avoir  un  autre  usage.  Nous  le  croyons  destiné  à la  sécrétion  des  mu- 
cosités abondantes  dont  l'animal  a besoin  pour  s’attacher  à la  surface 
des  corps  solides  sur  lesquels  il  rampe  avec  assez  de  rapidité. 

Nous  avons  souvent  observé  vivantes  les  petites  espèces  d'Érycines 
dé  la  Méditerranée.  Nous  avions  d’abord  compté  rencontrer  ce  petit 
Mollusque  vivant  dan^  la  vase  ou  dans  le  sable  fin  ; mais,  contrairement 
à notre  attente,  nous  l'avons  toujours  trouvé  sous  les  pierres  des  rivages, 
à une  faible  profondeur  sous  Teau  ; ce  qui  nous  a surpris  le  plus  , c’est 
de  le  trouver,  non  pas  sur  le  sol  abrité  par  la  pierre  , mais  attaché  à 
là  surface  de  la  pierre  exactement  comme  un  insecte  au  plafond  d'un 
appartement.  Mis  dans  des  vases  de  verre  ou  de  porcelaine,  nous  avons 
vil  ces  petits  Mollusques  y ramper  avec  assez  de  rapidité , grimper  le 
long  des  parois  perpendiculaires , et  se  tenir  longtemps  suspendus  par 
l'extrémité  antérieure  du  pied.  Pour  produire  celte  locomotion,  l'animal 
allonge  son  pied  en  lui  imprimant  de  légères  ondulations  , et  en  l’appli- 
quant par  le  côté  plat,  le  plus  exactement  possible,  sur  la  surface  du 
corps  qu’il  rencontre.  Lorsque,  à l’aidede  cette  légère  compression  et  de 
l’abondante  mucosité  qu’il  sécrète , l’animal  s’aperçoit  qu’il  est  suffi- 
samment adhérent,  il  contracte  son  pied  qui , en  se  raccourcissant  con- 
sidérablement, fait  faire  à l’animal  un  pas  dans  là  direction  qu’il  a 
choisie.  Celte  manœuvre . répétée  fréquemment  et  avec  plus  de  rapidité 
qu'on  ne  le  supposerait  d’abord  , permet  à l'animal  de  cheminer  aussi 
rapidement  qu’un  Mollusque  gasléropode.  Pendànt  tout  le  temps  que 
l’animal  manœuvre,  il  fait  sortir  hors  de  sa  coquille  le  grand  capuchon 
qui  couvre  la  base  du  pied  ; mais  jamais  on  n'aperçoit  la  moindre  trace 
de  siphons  ou  d'organes  qni  en  tiennent  lieu , les  bords  de  la  fente 
postérieure  du  manteau  ne  faisant  aucune  saillie  au  dehors  des  valves. 

Les  coquilles  du  genre  Érycine  sont  toutes  d’un  petit  volume.  La 
plus  grande  espèce  qui  nous  soit  connue,  nous  en  avions  fait  le  type 
du  genre  Chironîa  , que  nous  avons  dû  abandonner  depuis  lôs  réformes 
nouvellement  proposées  par  M.  Recluz.  Celle  coquille  présente , en 
effet,  tous  les  caractères  des  Érycines  ; et  il  serait  peut-être  utile  de  la 
prendre  désormais  pour  type  du  genre,'  son  volume  la  rendant  d’iinè 


DiX-HülTlÈME  FAMILLE. 


,32 

observation  plus  facile  : cependant  nous  pensons  devoir  présenter  les 
caractères  du  genre , en  les  empruntant  aux  espèces  de  Lamarck , et  en 
montrant  les  modifications  successives  que  ces  caractères  ont  ressenties 
en  passant  d'une  espèce  à l’autre. 

Les  Érycines  sont  généralement  ovales,  transverses,  aplaties  ou  sub- 
globuleuses. Elles  sont  inéquilatérales  ; presque  toutes  sont  lisses,  très 
minces , transparentes  et  fragiles  : un  épiderme  peu  épais  en  couvre 
la  surface  ; souvent  il  est  caduc.  Les  couleurs  sont  peu  variables  : presque 
toutes  les  Érycines  sont  blanches , quelques  unes  seulement  sont  jau- 
nâtres ou  rougeâtres.  Les  bords  sont  simples,  tranchants,  et  la  coquille 
parfaitement  close  : les  crochets  sont  petits,  peu  saillants,  obliquement 
inclinés  en  avant  ; la  lunule  n’est  jamais  circonscrite  ; le  corselet  est 
arrondi;  il  n’est  point  limité  par  un  angle  ou  par  d’autres  accidents. 
Les  côtés  antérieurs  et  postérieurs  sont  obtus.  La  surface  interne  n’est 
jamais  nacrée;  elle  est  blanche.  On  y aperçoit  très  difficilement  les  im- 
pressions que  l'animal  y a laissées  ; ces  impressions  sont  superficielles  ; 
elles  sont  lisses  et  brillantes,  comme  le  reste  de  la  surface  ; cela  subsiste 
même  dans  les  espèces  fossiles,  et  c’est  une  des  difficultés  que  ren- 
contre l'observateur  pour  apercevoir  nettement  tous  les  caractères  du 
genre.  On  parvient  néanmoins  à trouver  deux  impressions  musculaires 
fort  petites , ovales , obrondes , très  écartées  l’une  de  l’autre , et  situées 
aux  deux  extrémités  de  la  coquille.  Dans  quelques  espèces,  ces  impres- 
sions sont  submarginales  : l’antérieure  est  située -un  peu  au-dessous  du 
bord  cardinal  ; la  postérieure  occupe  une  position  semblable , seulement 
elle  est  un  peu  plus  grande  et  un  peu  plus  rentrée  en  dedans.  Ces  im- 
pressions éprouvent  quelques  modifications  qui  sont  en  relation  avec  la 
forme  extérieure  de  la  coquille.  C’est  ainsi , par  exemple,  que  dans  les 
espèces  appartenant  autrefois  au  genre  Montacuta  de  Turton , la  co- 
quille étant  plus  transverse , l’impression  musculaire  postérieure  est 
devenue  plus  ovalaire  : elle  s’est  allongée  le  long  du  bord , qui  lui- 
même  a pris  plus  de  développement.  Quelques  espèces  âu  genre  Kellia 
ont  l'impression  musculaire  antérieure  un  peu  plus  ovalaire,  sans  qu’il 
soit  possible  d’apercevoir  chez  ces  coquilles  d’autres  différences  avec  les 
Érycines  proprement  dites. 

L’impression  palléale  reste  la  même  dans  toutes  les  espèces  du  genre. 
Elle  est  toujours  simple  ; elle  conserve  un  parallélisme  constant  aveo  le 
bord  inférieur  de  la  coquille;  elle  se  détache  en  avant  du  muscle  adduc- 
teur antérieur,  de  manière  à laisser  ce  muscle  en  dedans , au  lieu  de  le 
diviser  en  deux,  ainsi  que  cela  a lieu  dans  le  plus  grand  nombre  des 
coquilles.  Elle  se  place  dans  le  voisinage  du  bord , et  l’accompagne  plus 


LES  ÉRYCINIDES.  7.33 

OU  moins  haut  jusqu’à  l’extrémité  postérieure , où  elle  se  dirige  vers  le 
muscle  postérieur  comme  pour  le  couper  en  deux. 

Le  bord  cardinal  est  étroit.  Ce  qui  le  rend  remarquable  à la  première 
vue , c’est  le  rétrécissement  qu’il  montre  dans  le  milieu  de  sa  longueur, 
là  où  il  est  justement  le  plus  large  dans  les  autres  genres  de  coquilles. 
En  avant  de  cette  dépression,  s’élèvent  à angle  droit  une  ou  deux  petites 
dents  cardinales  inégales , dont  l’une  , celle  qui  est  à côté  de  la  fossette 
du  ligament , semble  avortée  ; il  y a des  espèces  chez  lesquelles  elle 
n’existe  pas  du  tout.  En  arrière  de  ces  deux  petites  dents , est  creusée 
une  petite  fossette,  soit  oblique,  soit  parallèle  au  bord  supérieur,  et 
dans  laquelle  est  reçu  un  ligament  complètement  interne.  La  fossette 
de  ce  ligament  est  assez  variable  selon  les  espèces  ; quelquefois  elle  est 
subtrigqne  : le  plus  ordinairement  elle  est  étroite,  profondément  en- 
foncée dans  la  cavité  du  crochet  ; ce  qui  a lieu  particulièrement  dans 
les  espèces  subglobuleuses  à valves  profondes.  Dans  les  espèces  com- 
primées, la  fossette,  rencontrant  la  profondeur  do  la  valve,  resté  natu- 
rellement plus  superficielle.  En  avant  et  en  arrière,  cette  charnière  est 
complétée  par  des  dents  latérales  ordinairement  grandes  et  intrantes. 
Cependant  ces  parties  éprouvent  des  modiGcations  qu’il  est  nécessaire 
de  faire  connaître  afin  que  Ton  ne  puisse  se  méprendre  sur  la  valeur 
des  caractères  que  nous  assignons  au  genre.  Dans  un  groupe  d'espèces, 
la  dent  latérale  antérieure  se  rapproche  considérablement  des  dents 
cardinales,  et  quand  celles-ci  sont  presque  avortées,  elle  semble  les 
remplacer;  peu  à peu  celte  dent  s’écarte  davantage,  et  elle  finit  par 
s'isoler  entièrement  des  dents  cardinales.  Quant  à la  dent  postérieure  , 
située  à l'extrémité  du  cuilleron  , elle  est  toujours  plus  isolée  du  reste 
de  la  charnière , quoiqu'il  y ait  des  espèces  chez  lesquelles  les  dents 
latérales  sont  également  écartées.  Mais  il  y a encore  des  nuances  parmi 
ces  espèces  ; car  les  unes , celles  d’une  forme  triangulaire  particulière- 
ment, ont  les  dents  très  rapprochées  l’une  de  l’autre,  tandis  qu’elles  sont 
plus  éloignées  dans  les  espèces  d’une  forme  ovalaire. 

Il  est  évident,  d’après  ce  que  nous  venons  d’exposer,  que  le  genre 
Py(/ima  de  M.  Hinds  doit  rentrer  parmi  les  Érycines.  Ce  genre,  en 
effet,  ne  diffère  de  la  plupart  des  espèces  que  par  le  rapprochement  des 
dents  cardinales  et  des  dents  latérales;  mais  nous  avons  vu  que  ce 
caractère  n’avait  aucune  constance  et  qu’il  perdait  ainsi  sa  valeur 
générique. 

En  voyant  le  nombre  assez  considérable  de  genres  que  nous  réunis- 
sons en  un  seul,  on  pourra  peut-être  nous  objecter  que  nous  rassemblons 
des  objets  qui  diffèrent  notablement  entre  eux.  Nous  répondrons  que 


734  DiX-lILUTIÊME  FAMILLE. 

les  différences  observées  se  montrent,  non  par  degrés  arrêtés,  mais 
dans  une  série  continue  de  modifications  insensibles.  A prendre  les 
espèces  aux  deux  extrémités  du  genre,  on  serait  disposé  à y voir  des 
types  de  genres  différents.  Mais  si  l'on  comble  l’intervalle  par  toutes 
les  espèces  connues,  on  voit  s'établir  une  série  continué  de  modifi- 
cations à l'aide  desquelles  loules  se  rattachent  les  “unes  aux  autres  sans 
qu'il  soit  possible  de  trouver  en  elles  des  caractères  suffisants  pôur  là 
formation  de  plusieurs  genres  ; aussi  il  est  à remarquer  que  la  plupart 
des  genres  que  nous  réunissons  dans  la  synonymie  générique  ont  été 
proposés,  soit  à une  époque  où  le  genre  Érycine  était  mal  connu . soit 
par  des  naturalistes  qui  n'ont  eu  à leur  disposition  qu’un  petit  nombre 
d’espèces. 

Les  Érycines  sont  de  petits  Mollusques  littoraux  qui  vivent  dans 
presque  toutes  les  mers;  on  en  connaît  maintenant  des  deux  Améri- 
ques , du  grand  Océan  austral , mais  le  plus  grand  nombre  provient  des 
mers  d'Europe.  Gomme  ces  coquilles  peuvent  échapper  facilement  par 
leur  petitesse,  il  est  à présumer  que  c'est  de  là  que  provient  la  pau- 
vreté relative  du  genre,  dans  certaines  régions,  et  probablement  aussi 
sa  plus  grande  abondance  dans  les  mers  do  l'Europe  explorées  depuis 
plus  longtemps  et  avec  plus  de  soins  que  loules  les  autres.  Nous  avons 
donné  quelques  détails  sur  les  mœurs  de  ces  animaux,  mais  ces  détails 
s’appliquent  particulièrement  à ceux  de  la  Méditerranée.  Ces  mœurs 
sont-elles  les  mêmes  dans  loules  les  autres  espèces?  C’est  à l’observa- 
tion à répondre  plus  tard  à celte  question. 

Dans  sa  monographie  des  Érycines , M.  Recluz  a décrit  dix-huit 
espèces  vivantes  et  onze  espèces  fossiles  ; depuis  cinq  ans  que  ce  travail 
a été  publié,  nous  comptons  quelques  espèces  de  plus , une  vivante  et 
quatre  fossiles  , décrites  par  M.  Nyst,  dans  ses  Fossiles  de  Belgique; 
de  sorte  que  ce  petit  genre , qui  comprenait  à peine  quelques  espèces  au 
moment  où  il  à été  réformé,  en  possède  aujourd’hui  trente-quatre,  et 
tout  nous  porte  à croire  que  leur  nombre  s'augmentera  rapidement  lorsque 
les  explorateurs  visiteront  avec  soin  les  rivages  et  les  fentes  des  rochers. 

M.  Bronn  admet  vingt-huit  espèces  fossiles  dans  le  genre  Érycine; 
il  en  a donné  le  catalogue  dans  son  Index  ^alœontologkus.  Sur  ce 
nombre,  quatre  seulement  sont  douteuses  pour  lui  ; pour  noûs,  il  y en 
a davantage,  puisque  nous  y retrouvons  des  espèces  que  nous  avons 
exclues,  M.  Recluz  et  nous,  depuis  bientôt  cinq  ans.  On  comprendra, 
au  reste,  qu’il  nous  est  irtipossible  d’admettre  dans  un  genre  qui  a été 
entouré  de  tant  d’incertitudes  des  espèces  dont  nous  n’avons  pas 
reconnu  les  caractères  par  l’étude  des  individus  en  nature. 


LES  ÉRYCINIDES. 


Le  bassin  de  Paris  est,  de  tous  les  terrains  tertiaires,  celui  qui  con- 
tient le  plus  d’Érycines.  Elles  sont  particulièrement  répandues  dans  le 
calcaire  grossier  ; une  seule  passe  dans  les  sables  moyens  marins.  Nous 
en  connaissons  huit  espèces;  aucune  d’elles  ne  remonte  dans  les  étages 
tertiaires  moyen  ou  supérieur. 

D'après  ce  que  nous  en  savons , le  terrain  tertiaire  moyen  ne  con- 
tiendrait que  deux  espèces  d’Érycines,  une  de  Dax  et  de  Saucats, 
mentionnée  par  M.  Graleloup  dans  son  Catalogue  soologique;  la  seconde 
provient  du  bassin  de  Vienne,  et  nous  a été  communiquée  par  M,  J.  de 
Hauer. 

Les  espèces  de  M.  Nyst,  à Texceplion  d’une  seule  douteuse,,  sont 
propres  au  crag  d’Anvers.  Sous  les  noms  génériques  de  Kellia  et  de 
Monlacuta.  M.  .Morris  indique  quatre  espèces  fossiles  du  crag  d’Angle- 
terre. Ont-elles  de  l'analogie  avec  celles  de  Belgique?  11  nous  a été 
impossible  de  le  vérifier. 

Les  terrains  tertiaires  supérieurs  sont  peu  riches  en  Érycines. 
M.  Sismonda,  dans  son  Synopsis ^ en  indique  deux  seulement:  elles 
sont  douteuses  pour  nous.  il.  Philippi  en  cite  trois  en  Sicile;  elles  sont 
comprises  dans  son  genre  Bornia^  qui , ainsi  que  nous  l’avons  vu,  ren- 
ferme trois  Érycines  et  un  Poronia.  Ces  trois  espèces  sont  encore  vivantes 
dans  la  Méditerranée. 

Ce  sont  les  suivantes  : 

Erycina  Geo/froyi , Payraud.  Habite  ia  Corse,  la  Sicile, 
l’Algérie. 

Elle  est  fossile  en  Sicile. 

2“  Erycina  corbuloides , Philippi.  Vivante  dans  l’Adriatique,  en 
Sicile,  en  Corse,  en  Algérie. 

Fossile  en  Sicile. 

3“  Erycina  inflata , Philippi.  Vivante  dans  les  mers  de  Sicile. 

Fossile  à Palerme. 

A ces  trois  espèces,  dont  les  analogues  fossiles  sont  connus,  nous 
pourrions  en  ajouter  une  quatrième,  que  nous  trouvons  citée  par 
M.  S.  Wood,  et  rapportée  plus  tard  par  M.  Morris,  dans  son  Catalogue 
des  fossiles  de  V Angleterre, 

4"  Erycina  suborhicularîs , Recluz,  ‘{^TCeUiti,  Turton).  Vivante 
dans  la  Manche , sur  les  côtes  de  France  et  d’Angleterre. 

Fossile  dans  le  crag  de  Sutton  en  Angleterre. 


Dfx-HUITÏÈME  FAMILLE. 


736 

Érycine  cycladiforme , Erycina  cycladiformis ^ Desh. 
Pl.^ll.Üg.  6.  7.  8.  9: 

Testa  ovatâ^  inccquiîaterâ  ^ teniii , pellucidA,  pallide  corneâ  vel 
stramineây  lœx'igata  subïente  tenuissimè  striata^  laterahcer  compressa^ 
intiis  flavidulâ  ; umbonibus  minimis , obliquis^  approximatis» 

Habite  la  Nouvelle-Zélande. 

Nous  devons  à M.  Quoy  la  connaissance  de  cette  intéressante  espèce  ; 
elle  a quelque  ressemblance  avec  le  Cyclas  calyculataj  pour  !a  forme 
générale  et  la  couleur.  De  forme  ovalaire,  elle  est  obtuse  en  avant  et  en 
arrière  ; comprimée  latéralement,  elle  est  moins  globuleuse  que  la  plu- 
part des  ou  des  ^fontacuta,  et  moins  aplatie  que  les  Erycina 
Geoffroyi  et  autres  espèces  voisines  ; elle  sert  de  liaison  entre  les  deux 
groupes.  Ses  crochets  sont  petits , peu  proéminents , rapprochés  et 
obliques.  La  charnière  est  très  étroite;  la  fossette  du  ligament  est  très 
oblique  et  fort  étroite;  deux  très  petites  dents, antérieures  sur  la  valve 
gauche,  une  seule  sur  la  droite;  la  dent  latérale  postérieure  est  égale- 
ment saillante  dans  les  deux  valves:  elle  est  triangulaire.  Impressions 
musculaires  petites , l’antérieure  surtout  ; cétte  dernière  est  subcircu- 
laire ; la  postérieure  paraît  longue , parce  qu’elle  se  confond  avec  la  fin 
d’une  large  impression  palléale.  Cette  coquille,  mince,  fragile,  trans- 
parente, est  d’un  jaune  pâle,  couleur  de  corne  blonde;  elle  paraît 
lisse , mais  vue  à la  loupe , elle  est  couverte  de  fines  slrieg  d’accroisse- 
ment. 

Cette  petite  coquille  a \ % millimètres  do  long  et  9 de  large. 


GENRE  SOIXANTIÈME. 

I. 

PORONIE.  Po7'onia,  Recluz. 

PI.  i4  bis.  f.  i6  à 19, 

CARACTERES  GENERIQUES.  — Animal  ovale  ou  obrond , sub-* 
globuleux  5 enveloppé  d’un  manteau  à bords  bilabiés  simples  ; 
trois  ouvertures  palléales  inégales  : l’une,  antérieure,  petite,  un 
peu  proboscidiforme,  pour  le  passage  du  pied;  la  seconde,  ven- 


LES  ÉRYC1XIDES. 


traie,  est  la  plus  grande;  la  troisième,  postérieure,  remplace  les 
siphons.  Bouche  petite,  garnie  de-  larges  lèvres,  terminées  de 
chaque  côté  en  une  paire  de  palpes  courtes  et  étroites.  Pied 
comprimé,  tranchant,  triangulaire,  très  long,  subvermiforme  ; 
branchies  très  inégales  ; les  feuillets  internes  très  grands , 
subquadrangulaires  ; les  externes  étroits  et  obliques. 

Coquille  ovale,  subglobuleuse,  inéquilatérale,  transverse, 
régulière,  parfaitement  close.  Crochets  petits  et  obliques;  bord 
cardinal  étroit,  échancré  au  milieu;  en  avant  de  l’échancrure, 
xme  ou  deux  petites  dents  cardinales  sur  chaque  valve;  en  arrière, 
à la  limite  du  ligament , une'  dent  latérale  postérieure  grosse , 
épaisse  et  intrante.  Ligament  interne  inséré  dans  une  fossette 
en  cuilleron,  oblique,  naissant  du  sommet  de  l’échancrure  et  se 
prolongeant  le  long  du  bord  dorsal  supérieur  et  postérieur,  jus- 
qu’à la  dent  latérale.  Deux  impressions  musculaires  petites  , 
presque  égales  et  subcirculaires.  Impression  palléale  simple. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.. — Cardium  ^ Maton  et  Rackett, 
Montagu. — Kellia  [ex  j}CL^'ie]  ^ Turton,  Forbes , Macgille- 
vray,  Gray,  etc.  — Borriia  [spec.] , Philippi. 

Une  petite  coquille  découverte  au  Sénégal  par  Adanson  reçut  du 
savant  naturaliste  le  nom  de  Poron.  Une  description  malheureuse- 
ment trop  concise  ne  permit  pas  d'abord  aux  conchyliologues  de  rap^ 
porter  l’espèce  à son  véritable  genre.  Plus  lard,  Montagu  découvrit  à 
son  tour,  dans  les  mers  britanniques , une  autre  petite  coquille  très 
analogue  à celle  du  Sénégal  ; il  la  plaça  dans  le  genre  Cardhm , quoi- 
qu’elle n’en  présentât  les  caractères.  Le  Cardixun  rxibrxm  du  natu- 
raliste anglais  fut  bientôt  introduit  dans  les  catalogues,  où  il  resta 
jusqu’au  moment  où  M.  Turton,  après  une  nouvelle  étude  dos  coquilles 
bivalves  de  la  Grande-Bretagne , le  retira  d’entre  les  Cardium  et  l'in- 
troduisit dans  un  genre  nouveau  dédié  à Montagu , sous  le  nom  de  Mon- 
tacuta.  Adopté,  par  la  plupart  des  conchyliologues,  ce  genre  fut 
placé  dans  la  méthode  à côté  des  Ixellia  du  même  auteur,  dans  le  voi- 
sinage des  Madrés.  Nous  avons  vu  comment  M.  Recluz  fut  conduit  à 
réformer  les  genres  dont  nous  venons  de  parler,  et  à reporter  dans  les 
Érycines  le  plus  grand  nombre  des  espères  qu’üs  renfermaient.  Mais 
T.  r.  p.xUTiE.  4:* 


DIX-HUITIEME  FAMILLE. 


738 

pour  iM,  Reciuz,  ainsi  que  pour  nous,  les  deux  petites  coquilles  que 
nous  avons  meDtionnées  d'abord  présentant  des  caractères  diiïérents 
de  ceux  des  Érycinés,  il  a paru  nécessaire  à M.  Reciuz  d'établir  pour 
elles  un  genre  nouveau,  auquel  il  a consacré  le  nom  de  Poronia  en 
souvenir  du  Poron  d'Adanson.  Dans  ce  môme  genre  doit  venir  se 
ranger  encore  une  coquille  plus  grosse  que  les  deux  précédentes,  et  que 
Lamarck  confondit  à tort  avec  ses  Amphidesines.  peut-être  faudra-t-il 
y ajouter  une  quatrième  espèce  pour  laquelle  U.  Canlraine  a proposé 
un  genre  Cycladina,  que  nous  rapportons  provisoirenjent  aux  Érycinés 
de  Lamarck. 

H existe  tant  d'analogie  entre  les  Pôronies  et  les  Érycinés  , que  nous 
avoua  doiilé  de  Putililé  du  nouvead  genre  do  M.  Reciuz;  mais  pendaiit 
notre  séjour  en  Algérie,  ayant  eu  l’occasion  d’observer  vivante  une 
petite  espèce  de  la  Méditerranée,  nous  avons  reconnu  dans  ce  petit 
Mollusque  des  caractères  qui  le  distinguent  nettement  des  Érycinés  et 
de  tous  les  autres  genres  connus.  En  effet,  cet  anima!  est  enveloppé 
d'un  manteau  mince  , transparent , dont  les  bords  sont  comme  à l'ordi  - 
naire  épaissis  par  un  petit  muscle  orbiculairc.  Ce  bord  est  divisé  en  trois 
feuillets.:  l'un  , externe,  simple,  suit  le  contour  de  la  coquille;  l'autre, 
moyen,  beaucoup  plus  extensible,,  est  libre  dans  toute  sa  circonfé- 
rence; le  troisième-,  enfin,  ou  l’interne,  se  soude  avec  son  congénère 
en  laissant  trois  ouvertures  inégales.  La  première  de  ces  ouvertures 
est  antérieure;  elle  est  petite,  un  peu  proboscidiforme;  elle  est  destinée 
à donner  passage  au  pied,  et  elle  est  susceptible  de  prendre  toutes  les 
formes  nécessaires  pour  s’adapter  au  mouvement  de  l'organe  locomoteur  ; 
la 'seconde  ouverture  est  ventrale,  elle  occupe  un  peu  moins  de  la  lon- 
gueur du  bord  inférieur  de  l’animal;  la  troisième,  enfin,  est  posté- 
rieure ; elle  a la  forme  d’une  petite  boutonnière,  dont  les  bords  sont 
légèrement  proéminents.  A elle  seule , elle  remplace  les  deux  siphons 
qui  existent  chez  les  Mollusques  des  familles  précédentes. 

Voici  un  Mollusque  qui  offre  le  premier  et  le  seul  exemple  d’un  man- 
teau à trois  ouverture.^  disposées  ainsi  que  nous  venons  de  le  dire.  Si 
l’ouverluro  antérieure  était  joinio  à l’inférieure,  le  manteau  présenterait 
les  caractères  de  celui  des  Érycinés;  mais  celle  jonction  est  constante, 
et  nous  l’avons  constatée  chez  tous  les  individus  de  la  même  espèce.  Ce 
qui  est  intéressant  aussi  dans  la  disposition  du  manteau,  c'est  l’absence 
totale  des  siphons  remplacés  par  urie  ouverture  unique  et  sans  saillie 
à l'extérieur.  Ce^caraclère,  que  nous  retrouvons  dans  les  Érycinés , et 
qui  se  représente  à un  moindre  degré  dans  les  Lucines  , est  celui  qui 
nous  a délérniiné  à la  séparation  définitive  de  la  famille  des  Éryci- 


LES  ÉHyciMUES.  7^9 

nides,  et  qiii  nous  a conduit  à réloignenieiit  do  cette  famille  d.e  ceUe 
des  Mactracées. 

Le  pied  est  mjnce,  plat,  très  allongé;  il  ressemble  à celui  des 
C)''clades,  et  l'animal  s’en  sert  clq  la  môme  manière  que  les  Érycines  : 
il  en  applique  le  plat  sur  les  corps  solides , s’y  attache  à l’aide  d’une- 
abondante  mOcosUé,  et  par  la  contraction  de  cet  organe  ij  se  .dépla^’-e 
assez  rapidement  à la  surface  des  corps  les  plus  lisses. 

La  bouche  fort  petite;  elle  est  accompagnée  de  grandes  lèyres 
saillantes  qui  se  terminent  de  chaque  côté  en  une  paire  de  petites  palpes 
labiales  étroites  et  triangulaires. 

Les  branchies  sont  semblables  à celles  des  Érycines:  el|cs  se  com- 
posent de  deux  feuillets  très  inégjaux  : l’un  interne,  très  grand  et 
subquadrangulaire;  l'autre,  externe,  fort  étroit,  parcourt  le  bord  infé- 
rieur du  feuiliet  branchial  interne.  En  arrière  de  la  masse  abdominale, 
les  branchies  se  réunissent  et  se  prolongent  de  manière  à embrasser  la 
circonférence  de  l’ouverture  pôslerieure  du  manteau.  . 

Les  coquilles  du  genre  Poronie  sont  fort  petites  : elles  sont  sobglo- 
buleuses  ,' ovales , iransverses  , inéquilaiérales,  et  ce  qui  les  distingue 
au  premier  coup  d’œil  des  Érycines,  c’est  que  chez  elles  le  côté  anté- 
rieur est  le  plus  allongé.  La  surface  extérieure  est  lisse  ou  striée  par 
des  accroissements;  elle  est  revêtue  d'un  épiderme  mince,  corné  et 
caduc.  Les  valves  sont  parfailerhent  closes;  les  crochets  sont  pétits.  et 
dirigés  obliquement  vers  le  côté  antérieur;  les  bords  des  valves  sont.' 
minces,  tranchants,  niais  le  test  de  la  coquille  est  plus  épais  et  plus 
solide  que  celui  des  Érycines.  On  n’aperçoit  en  avant  aucune  trace  de 
lunule  : le  corselet  n’est  point  non  plus  séparé.  A rinlérieur,  ces  co- 
quilles sont  d'un  violet  pourpré,  plu§  ou  moins  intense;  elles  no  sont 
point  nacrées;  leur  charnière  a beaucoup  d'analogie  avec  celle  des 
Érycines;  toutefois  elle  se  distingue  par  beaucoup  plus  d’épaisseur. 
Elle  présente  cependant  ce  caractère  remarquable,  d'être  moins  large  au 
centre  qu’à  ses  extrémités;  elle  montre  au  milieu  une  échancrure 
triangulaire  dont  les  côtés’ sont  inégaux.  Sur  le- côté  antérieur  s’élèvent 
deux  petites  dents  cardinales  inégales,  parallèles,  dont  J’interne  est  la 
plus  petite;  elles  nespnt  pas  absolument  semblables  sur  les  deux  valves, 
ce  qui  résulte  de  leur  inégalité  môme.  Le  long  du  bord  postérieur  de 
l'échancrure  se  relève  un  cuillpron  étroit  et  oblique;  il  prend  iiais- 
sanco  au  sommet  piôme  de  la  charnière:  il  s’élargit  progressivement  en 
arrière,  en  descendant  obliquement  dans  l'intérieur  de  lacoquillo;  sur 
ce  cuilleron  s’attache  un  ligament  épais  et  carlilagiqeux  tout  a fait 
interne.  Le'  bord  cardinal  s’élargit  en  arrière,  et  il  porte  à son  ex'lré- 

47* 


74o  mX-HUITIÈME  FAMILLE. 

mité  une  dent  latérale  postérieure  assez  épaisse , triangulaire  et  in- 
trante. 

Les  impressions  musculaires  sont  petites:  elles  occupent  les  extré- 
mités de  la  coquille;  elles  sont  subcirculaires,  superficielles  et  à peu 
près  égales.  L'impression  palléale  est  simple;  elle  se  place  près  du  bord; 
elle  y reste  constamment  parallèle. 

II  est  évident,  d’après  ce  que  nous  venons  d’exposer,  que  les  co- 
quilles des  Poronies  se  distinguent  à peine  de  celles  des  Érycines , et  le 
genre  no  devrait  pas  être  conservé  si  l’animal  n’offrait  des  caractères 
qui  le  distinguent  suffisamment. 

Les  Poronies  sont  de  petites  coquilles  marines  qui  vivent  sur  les 
rivages,  au  niveau  du  mouvement  des  vagues,  remontant  même  quel- 
quefois dans  les  fentes  des  rochers , beaucoup  au-dessus  du  niveau 
habituel  des  eaux.  Le  nombre  des  espèces  connues  est  peu  considé- 
rable. M,  Recluz  en  a cité  trois  dans  sa  monographie;  plusieurs  autres 
peuvent  leur  être  actuellement  ajoutées.  On  les  connaît , non  seulement 
des  mers  de  l’Europe , mais  encore  de  celles  de  l’Amérique  et  du  grand 
océan  Pacifique. 

Nous  citerons  entre  autres  le  Poronia  rubra , Carditm  rubrum , de 
Montagu,  Kellia  rubra,  .deXurton,  qui  vit  en  abondance  dans  les 
mers  d’Europe , et  que  M.  Gould  a retrouvé  siir  les  côtes  du  Massa- 
chussets. 

Aucune  espèce  ne  nous  est  connue  à l’état  fossile , si  ce  n’est  celle 
de  la  Méditerranée  qui  est  mentionnée  par  M.  Philippi , dans  les  ter- 
rains tertiaires  des  environs  de  Païenne. 

Poronie  pourprée.  Poronia  jmfpurascens  ^ Recluz. 

PI.  14  bis.  fig.  16-19. 

P,  Testa  ovato-gîobosâ,  solidâ,  atrO'purpurascentCy  mceqmlaterd,trans-‘ 
veTsim  tenue  striata  ; latere  anlico  îongiore,  angustiore-i^  subacumi* 
nato  ; postico  altiore  obtuso  ^ umbonibus  proemineutibus  obliquis } 
cardine  incrassato  ^ dente  latcraU  postico  maximo., 

Amphidesma  purpurascens.  Latnk.  An.  s.  vert,  t.  5.  p.  493.  n®  14. 

Desh.  dans  Latnk.  An.  s,  Terl.  t.  6,  p.  129.  n®  14. 

Habite  Van-Diemen , la  Nouvelle-Zélande, 

Lamarek  la  croyait  de  nos  côtes  de  la  Manche,  mais  elle  n'y  a jamais 
vécu. 

Petite  coquille  confondue  par  Lamarek  parmi  ses  Amphidesmes, 
mais  qui  nVn  présente  pas  les  caraclère.s.  Elle  ne  porte  qu'un  seul 


i.ES  (iALEÜMMlDES. 


ligament  à la  charnièi-e  , làntlis  que  le  caractère  principal  des  Amphi- 
desmes  est  d'en  avoir  deux;  elle  est  globuleuse,  suborbiculaire,  très 
inéquilatéralc  , mais  , contrairement  à ce  qui  a lieu  dans  les  Éryciuos, 
c’est  le  côté  antérieur  qui  est  le  plus  long.  La  surface  extérieure  est 
irrégulièrement  striée  par  des  accroissements;  vers  les  bords,  elle  est 
couverte  d’un  épiderme  très  mince.  Les  crochets  sont  assez  grands, 
peu  obliques;  on  n’aperçoit  en  avant,  ni  en  arrière,  aucune  trace  de 
lunule  ou  de  corselet;  les  bords  sont  parfaîtemeDt  clos;  ils  sont  simples 
et  tranchants,  mais  ils  s’épaississent  assez  subitement  à l'intérieur.  La 
charnière  est  forte  et  épaisse;  les  dents  cardinales  sont  petites,  et  la 
dent  latérale  postérieure  est  très  grosse.  Celte  coquille  est  d’un  rouge 
pourpré  assez  éclatant  à l'inlérieur;  à Texlérieur,  cette  couleur  est  plus 
foncée,  plus  terne  et  un  peu  rembrunie.  Cette  coquille  est  la  plus  grande 
du  genre  Poroma  ; elle  a 8 à 9 millimètres  de  diamètre  transversal. 


DIX-NEUVIÈME  FAMILLE, 

lies  Galéommides.  Gaieommiaw,  Grat, 

La  famille  des Galéommides  ne  contenant  qu’un  seul  genre,  il  n’est 
pas  nécessaire  d'en  exposer  les  caractères,  puisqu’ils  sont  empruntés  au 
genre  lui-même,  et  leur  sont  identiques.  Nous  n’aurions  même  pas  à 
nous  occuper  de  I histoire  de  la  famille,,  car  elle  se  confond  entièrement 
avec  celle  du  genre.  Toutefois  nous  croyons  utile  do  rappeler  rapide- 
ment les  diverses  opinions  dont  elle  a été  le  sujet  de  la  part  des  natura- 
listes. Proposée  parM.  Gray,  la  famille  des  Galéommides  a été  comprise 
entre  celle  des  Solémyes  et  celle  des  Érycines , non  loin  des  Pandores , 
d’un  côté,  et  des  Saxicaves  de  l’autre.  11  est  évident  que  dans  cet  arran- 
gement, M.  Gray  n’a  pas  tenu  compte  des  principaux  caractères  de  la 
coquille  et  de  l’animal , et  qu’il  a suivi , en  la  modifiant,  l’opinion  de  la 
plupart  de  ses  prédécesseurs,  qui  ont  toujours  considéré  la  coquille  très 
bâillante  des  Galéommes  comme  plus  voisine  du  grand  groupe  des  Myaires 
que  de  toute  autre  famille  des  Mollusques  acéphalés.  Nous-même,  en- 
traîné par  ce  caractère  singulier  de  la  coquille,  nous  l’avons  comparée  à 
celle  des  Glycimères , et,  en  traitant  ce  genre  dans  la  seconde  édition 
des  Animaux  sans  vertèbres  de  Lamarck,  nous  avons  proposé  de  l’intro- 
duire dans  la  famille  des  Glycimérides.  Alors  l’animal  des  Galeomma  ne 


74  DIX-NEUVrEME  FAMILLE. 

îioûs  était  point  connu  ; depuis  nous  l’avons  observé  vivant  sur  îe's  côtes 
de  l’Algérie;  un  naturaliste  de  mérite,  M.  îliitre,  l’a  retrouvé  en  abon- 
dance aux  environs  de  Toulon  , et  il  en  a publié  uile  description  accorn- 
pagtiéo  de  fort  bonnes  figures,  eh  1847,  dans  Je  tome  VI!  des  Annales 
des  sciences  naturelles.  Mais  avant  cela,  M.  Scacchi  l’avait  découvert  dans 
la  fner  de  Naples , et  l'avait  décrit  sous  le  nom  de  PaH/ii.nopea  dans. ses 
Observations  zoologiqucs.  Quelques  années  après.  M.  Philippi  eh  donnait 
une  description  plus  détaillée  dans  les  Archives  de  Wlegman,  1839  , et 
dans  le  môme  temps  M.  Delle  Chiajé  en  publiait  une  figure  très  mé- 
diocre dans  des  planches  sans  texte  qui  doivent  faire  suite  à celles  de 
son  ïfistoîrè  des  animaux  sans  vertèbres  de  Naples;  enfin , pour  men- 
tionner ici  tous  les  travaux  relatifs  à l'animal  du  genre  Galeomma,  nous 
devons  rappeler  qu’en  1833,  MM.  Quoj;  et  Gaimard  publiaient,  dans 
le  Voyage  de  l'Astrolabe , la  déscripllon  et  la  figure  d’une  espèce  de 
Vanikoro,  sous  le  nom  de  Pmmmobia  vitrea.  Les  connaissances  acquises 
sur  le  genre  Galeomma  sont  suffisantes  pour  déterminer  rigoureuse- 
ment la  place  qu’il  doit  occuper  dans  une  méthode  naturelle. 


GENRE  SOIXANTE  ET  UNIÈME. 

GAIiÉOMME.  Galeomma  J Turlon. 

^ ‘ Pl.  II.  fig.  i3  à 17. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  ovale , transvefsè, 
tronqué  dans  toute  la  longueur  de  son  bord  inférieur,  enveloppé 
d'un  manteau  très  large  et  débordant  la  coquille  dans  toute  la 
circonférence.  Trois  ouvertures  palléales  : la  première  très 
grande,  antérieure  et  inférieure;  deux  postérieures,  inégales,  à 
peine  exertiies  , et  remplaçant  les  siphons.  Bouche  petite, 
garnie  de  lèvres  larges  et  membraneuses , Terminées  par  une 
paire  de  palpes  étroites,  oblongùes,  subtrigones.  Branchies 
très  grandes , presque  égales  , soudées  en  arrière  de  la  nmsse 
abdominale  et  prolongées  dans  la  cavité  du  manteau.  Pied 
cylindraeé,  subvermiforme,  fendu  en  sou  bord  inférieur  et 
portant  quelques  fils  de  bÿssUs  dans  un  crypte  situé  à sa  base. 


LES  GALEüMMinES. 


Coquille  ovale  , transverse , équivalve  , subéquilatérale,  lar- 
gement bâillante  dans  toute  la  longuéur  de  son  bord  inférieur. 
Crochets  petits , â peine  saillants.  Charnière  simple , à bord 
calleux,  présentant  au-dessous  des  crochets  une  petite  fossette 
triangulaire  pour  un  ligament  interne.  Deux  impressions  mus- 
culaires petites,  inégales  : Tantérieure  subcircuîaire , la  posté- 
rieure ovalaire;  l’impression  palléale  simple. 

sTOONYMiE  GÉNÉRIQUE . — PsammoMa^  Lamarck  , Quoy  et 
Gaimard.  — Hiatella  , Costa,  Delle  Chiaje.  — Parthenojoe  , 
Scacchi. 

OBSERVATIONS.  Lamarck  a connu  une  des  espèces  du  genre  Galeomrna, 
mais  il  l’a  confondue  parmi  celles  de  son  genre  Psammobie.  M.Turton, 
en  1820,  proposa  le  genre  dans  le  2*  volume  du  Zoi)hgicat  Journal; 
bientôt  après  M . Flemming  f adopta  dans  son  Histoire  des  animaux  de  la 
Grande-Bretagne  , le  renferma  dans  la  famille  des  Myes.  Comme  nous 
le  disions  tout  à l'heure,  noos  avons  proposé  de  rapprocher  ce  genre 
des  Glycimères , supposant  que  le  bâillement  de  la  coquille  était  destiné 
à donner  passage  à de  gros  siphons  réunis. 

Les  observations  zoologiques  de  M.  Scacchi  sont  de  1833;  le  savant 
italien  ne  connaissait  pas  encore,  à ce  qu'il  paraît-,  â celte  époque,  le 
travail  de  Turton.  En  découvrant  le  Galeomma  dans  la  mer  de  Naples  , 
il  crut  avoir  dans  la  main  un  genre  nouveau  ; il  le  décrivit  sous  le  nom 
de  Parlhenope.  Le  savant  observateur  rechercha , d'après  les  caractères 
de  l’animal , la  place  qu’il  d,oil  occuper,  et  il  conclut  à rétablissement 
d’une  famille  nouvelle  intermédiaire  entre  les  Conebifères  , Crassipèdes 
et  Ténuipèdos  de  Lamarck;  elle  se  trouverait,  par  conséquent,  inter- 
calée entre  les  Myaircs  et  les  Mactracées. 

M.  Philippi  observa  également  l'animal  du  Galeomma  dans  la  mer  de 
Naples;  ne  trouvant  pas  qu'il  fût  suffisamment  connu  par  la  courte 
description  de  M.  Scacchi,  il  publia,  à son  sujet,  des  renseignements 
plus  étendus  accompagnés  d’une  bonne  figure  dans  les  Archives  de 
Wiegman.  Ces  documents , très  importants  dans  l’bistoire  du  genre , 
furent, presque  immédiatement  traduits  dans  les  Anmles  des  sciences 
naturelles  de  Londres. 

Lorsqu'on  1835,  à l’occasion  du  Psammobia  auranlia  de  Lamarck  , 
nous  introduisîmes  le  genre  Galeomma  dans  les  additions  à la  seconde 
édition  de  l’ouvrage  du  célèbre  naturaliste,  nous  n’avons  pas  osé  rap  • 


DIX-NEUVIEME  EAMILLE. 


744 

porter  à ce  genre  la  Psammobie  vitrée  de  M.  Qaoy.;  nous  ne  connais- 
sions pas  alors  les  observations  de  M.  Scacchi  : et  quand  nous  les  aurions 
connues  , il  nous  aurait  été  difficile  , en  l'absence  de  figures  , de  les 
rapporter  au  genre  deTurton;  nous  avons  donc  pu  nous  livrer  aux 
conjectures  que  les  caractères  delà  coquille  nous  ont  suggérées,  et  c*est 
ainsi  que  nous  avons  été  conduit  à proposer  le  rapprochement  des 
Galéommes  et  des  Glycimères,  rapprochement  que  n’onl  point  justifié 
les  observalions  subséquentes. 

Sous  le  nom  do  Psammohia  vitrea  , M.  Quoy  a décrit  et  figuré  dans 
\q  Voyage  de  l’Astrolabe,  un  petit  Mollusque  qui,  sans  aucun  doute , 
doit  appartenir  au  genre  Galeomma.  La  description  du  savant  naturaliste 
laisse  quelques  doutes  à ce  sujet,  mais  la  figure  représentant  l’animal 
ne  permet  pas  de  le  placer  ailleurs.  Malheureusement  la  description  et 
la  figure  sont  insuffisantes  sous  plusieurs  rapports,  car  elles  laissent 
ignorer,  d’un  côté,  si  la  coquille  est  ouverte  dans  son  bord  inférieur,  et 
d'un  autre  si  l'animal  a exactement  tous  les  caractères  intérieurs  de 
celui  des  mers  de  l’Europe.  Néanmoins  le  peu  que  M.  Quoy  nous 
a appris  sur  cet  intéressant  animal  était  plus  que  suffisant  pour  le 
faire  sortir  des  Psammobies , et  faire  abandonner  pour  toujours  l'opi- 
nion de  Lamarck. 

M.  Swainson,  dans  son  petit  Traité  de' malacologie , n'adopta  aucune 
des  opinions  publiées  avant  lui;  il  proposa  d’introduire  le  genre  qui 
nous  occupe  dans  la  famille  des  Saxicaves.  Il  existe,  en  effet,  dans  les 
Saxicaves  des  espèces  dont  la  coquille  est  très  bâillante;  mais  ces  co- 
quilles sont  couvertes  d'un  épiderme  épais,  tandis  que  les  Galeomma 
en  sont  à peu  près  dépourvus.  Iæs  Saxicaves  sont  irrégulières  , les 
Galeomma  ont  une  coquille  beaucoup  p!us_  symétrique.  Aussi  M.  Reeve 
préféra  revenir  à l’opinion  de  Lamarck  , et  il  rangea  le  genre  Galéomme 
dans  la  famille  des  Nymphacées.  Cependant  si  l’on  compare  les  carac- 
tères des  coquilles  de  cette  famille  à ceux  du  nouveau  genre , on  y 
remarque  des  différences  très  profondes.  Dans  les  Nymphacées , le 
ligament  est  extérieur;  la  charnière  est  articulée  ; les  impressions 
musculaires  sont  en  proportion  plus  grandes,  et  l’impression  palléale 
offre  toujours  une  profonde  sinuosité  postérieure.  Ainsi  les  caractères 
distinctifs  des  Nymphacées  ne  se  retrouvent  point  du  tout  dans  le 
genre  Galeomma.  M.  Reeve  n’a  donc  pas  lui-même  trouvé  la  place  que 
ce  genre  doit  occuper  dans  l’ordre  naturel. 

Dans  son  Manuel  do  conchyliologie,  M.  Sowerby  le  jeune  eût  encore, 
au  sujet  du  Galeomma , une  opinion  différente  de  celle  que  nous  venons 
de  rapporter  ; il  rapproche  ce  genre  des  Pholades , et  le  comprend  dans 


LES  GÂLEOMMfDES. 


745 

la  famille  des  Pholadaires.  M.  Philippi  n’était  guère  mieux  inspiré , 
lorsque,  dans  le  second  volume  des  Mollusques  de  la  Sicile , il  proposa  de 
rapprocher  les  Galéommes  des  Corbules  , et  de  les  introduire  dans  la 
famille  des  Corbulées.  Enfin,  nous  rappellerons  encore  l’opinion  de 
M.  Gray  qui,  en  établissant  la  famille  des Galéommides , la  met  dans 
l’ordre  général  entre  celle  des  Solémyes  et  celle  des  Érycines.  Nous 
ne  comprenons  pas  facilement  les  motifs  d’après  lesquels  M.  Gray  s’est 
gui^é  dans  cette  nouvelle  classification.  M.  Gray  connaissait  sans  doute, 
non  seulement  le  travail  de  M.  Miltre,  mais  il  ne  pouvait  ignorer  les 
recherches  de  M.  Scacchi  et  celles  de  M.  Philippi;  en  1847,  l’animal 
décrit  et  figuré  par  M.  Quoy  trouvait  alors  sa  place  ; par  conséquent , 
savant  anglais  se  trouvait  en  étal  de  juger  de  la  valeur  des  caractères 
zoologiques  du  genre  et  d'apprécier  ses  rapports  d’après  son  organisa- 
tion. En  présence  des  faits  que  la  science  possède,  nous  ne  pouvons 
nous  expliquer  le  rapprochement  proposé  par  le  savant  anglais  des 
Solémyes  et  des  Galeomma.  Co  dernier  genres  plus  de  rapport  avec 
ceux  de  la  famille  des  Érycines  ; néanmoins  il  s’en  éloigne,  et  il  mérite 
de  former  un  embranchement  particulier  sur  la  lige  principale  de  la 
classification.  Nous  regrettons  sincèrement  qu'un  savant  aussi  éminent 
que  M.  Gray  se  soit  contenté  de  l’exposition  toute  sèche  d’une  mé- 
thode , sans  déduire  les  raisons , probablement  très  judicieuses , à l’aide 
desquelles  il  a formé  son  opinion  au  sujet  d'un  grand  nombre  de  genres 
et  de  familles.  Lorsque  Ton  propose  des  changements  considérables 
dans  une  méthode,  on  court  le  risque  de  n’être  pas  compris,  si  l’on  ne 
prend  pas  le  soin  d’exposer  les  principaux  faits  sur  lesquels  ces  chan- 
gements reposent. 

Nous  rappellerons,  en  passant,  qu’un  savant  italien,  M.  Costa, 
trompé  sur  les  caractères  du  genre  Hyatetle  de  Lamarck,  crut  le  re- 
trouver dans  l’espèce  de  .Galeomma  de  la  Méditerranée.  Ce  naturaliste 
paraît  avoir  ignoré  le  travail  de  M.  Turton  , publié  en  18  25;  car,  s’il 
l’eût  connu  , il  aurait  évité  cette  méprise. 

L’animal  des  Galeomma  est  un  des  plus  singuliers  Mollusques  que 
nous  connaissions  ; il  est  ovale-transverse;  il  est  enveloppé  d’un  très 
grand  manteau , mais  cet  organe  peut  se  diviser  en  plusieurs  portions 
distinctes.  L’une  revêt  l'intérieur  de  la  coquille;  elle  est  d’un  blanc 
subnacré  ; elle  se  termine  sur  le  bord  du  test  par  un  petit  bourrelet  peu 
saillant  garni  d’un  trè.s  grand  nombre  de  fines  papilles  on  plutôt  de 
dentelures  comparables  à celles  qui  terminent  le  bord  de  la  coquille 
elle-même.  L’autre  portion  du  manteau  continue  la  première;  elle  forme 
une  large  zone  plissée,  toujours  saillante  en  dehors  de  la  coquille,  Vers 


DlX-iNKÜVlEME  lAMlLLK. 


le  bord  inférieur  et  interne  de  cette  zone , se  montre  une  série  d’organes 
oculiformes,  que  M.  Mitlre  compare  judicieusement  à ceux  du  nianleau 
des  Peignes.  Enfin,  le  manteau  se  continue  encore  en  une  portion  mem- 
braneuse qui , semblable  à un  voile,  ésl déployée  au-devant  de  l'ouver- 
ture inférieure,  et  sert  à clore  fa  grande  cavité  palléaîo.  Dans  l’espèce 
figurée  par  M.  Quoy,  ces  diverses  parties  du  manteau  no  sont  pas  aussi 
distinctes,  parce  que  toute  la  surface  de  cet  organe  qui  est  en  dehors 
de  la  coquille  est  couverte  d'un  grand  nombre  do  petites  papilles  irré- 
gulièrement disséminées.  Les  deux  lobes  du  manteau  sont  réunis  en 
arrière,  et  ils  sont  percés  de  deux  ouvertures  peu  saillantes',  dont  l’une, 
qui  est  aussi  Pa  plus  grande,  remplace  le  siphon  branchial  ; l’autre,  un  peu 
plus  proéminente , lient  lieu  du  siphon-anal.  Nous  devons  faire  observer 
que  la  commissure  de  la  première  ouverture  n'a  point  de  solidité  : elle 
s'ouvre  spontanément  a la  mort  de  l'animal , et  celte  ouverture  se  con- 
fond alors  avec  celle  qui  donne  passage  au  pied.  Nous  devons  même 
ajouter  que  dans  plusieurs  des  individus  que  nous  avons  observés 
vivants,,  l’ouverture  branchiale  n'existait  pas,  l’animal  la  formant  avec 
son  manteau,  sans  que  les  lobes  en  soient  réunis. 

Le  pied  des  Galéommes  ressemble  beaucoup  à celui  des  Congéries,  et 
surtout  à celui  des  Érycines  : il  est  allongé,  ver’miculaire , subcylin- 
dracé;  sou  bord  inférieur  est  fendu  peu  profondément,  ei  cette 
fente  aboutit  à un  crypte  peu  profond , dans  lequel  s’attache  un  petit 
nombre  de  fils  soyeux  et  très  fins  d’un  byssus  peu  volumineux.  En 
arrière , ce  pied  se  prolonge  quelquefois  en  une  sorte  dé  talon  compa- 
rable à celui  des  Érycines.  L'organe  locomoteur  que  nous  venons  de 
décrire  est  attaché  au  sommet  d'une  masse  abdominale  assez  épaisse  , 
dans  laquelle  l’ovaire  prend  une  place  considérable. 

La  boucheest  petite,  trarisversc  ; elle  est  cachée  par  de  larges  lèvres 
fort  courtes  qui  se  changent  très  vite  en  une  paire  de  palpes  labiales 
inégales,  ovales,  subtrigones. 

Les  branchies  sont  très  grandes;  elles  ont  de  l’analogie  avec  celles 
deè  Gastrocliènes  : elles  sont  coftiposées  de  chaque  côté  de  deux  feuillets 
presque  égaux,  minces,  très  finement  striés.  Les  feuillets  internes  sont 
un  peu  plus  longs  et  un  peu  plus  larges  que  les  externes;  ils  se  rétré- 
cissent subilemenl  en  avant,  et  se  prolongent  en  une  pointe  aiguë  qui 
s’interpose  entre  les  palpes  labiales.  Les  feuillets  externes  naissent  au- 
dessous  des  palpes  labiales,  ils  sont  un  peu  plus  étroits  que  leurs  congé- 
nères. Les  quatre  feuillets  branchiaux  se  réunissent  en  arrière  de  la  masse 
abdominale  et  se  prolongent  dans  la  cavité  palléale  beaucoup  plus  que 
celles  des  Vénus,  des  Lucines  et  des  Érycines.  A celte  extrémité  pos- 


LEb  GALKOMMlüES. 


74/ 


térieure,  ces  organes  restent  plus  larges  qu’à  l’ordinaire,  ce  qui  augmente 
considérablement  la  surface  au  moyen  de  laquelle  ils  agissent  sur  le 
liquide  ambiant. 

Les  muscles  adducteurs  des  valves  sont  d’un  médiocre  volume  ; 

l’antérieur  surtout  est  fort  petit  ; le  postérieur  est  plus  gros  : tous  deux 

sont  cylindracés;  le  postérieur  est  un  peu  plus  aplati , ce  qui  lui  donne 

une  forme  un  peu  plus  ovalaire.  Le  pied  a deux  muscles  qui  lui  sont 

propres:  l'un,  antérieur,  extrêmement  grêle,  produit  en  avant,  au- 

1 

dessous  du  bord  cardinal,  deux  très  petites  impressions.  Le  muscle 
postérieur  est  beaucoup  plus  gros;  il  est  bifurqué  à son  extrémité,  et 
l’on  trouve  en  dessous  du  bord  cardma!  deux  impressions  musculaires 
qu’il  a laissées  sur  le  lest. 

La  coquille  estoblongue,  trans^^erse  ; elle  est  mince  , demi-trans- 
parente et  fragile.  Cette  coquille  est  équivalve  , équilatérale  ; et  ce  qui 
la  rend  !e  plus  remarquable,  c’est  qu’elle  est  ouverte  dans  toute  la 
longueur  de  son  bord  inférieur,  comme  si  elle  avait  été  coupée  artifi- 
ciellement.  Que  l’on  prenne,  en  effet,  une  coquille  close,  du  genre 
Vénus,  par  exemple , et  qu’on  l’use  par  son  bord  inférieur  du  tiers  de 
sa  hauteur  environ  , on  obtiendra  une  ouverture  arlicificielle  comparable 
à celle  des  Galéommes.  La  surface  extérieure  est  dépourvue  d'épiderme, 
si  ce  n'est  le  long  du  bord  dorsal  où  il  passe  d'une  valve  à l'autre, 
simulant  ainsi  un  double  ligament  : les  bords  de  Ta  coquille  sont  clos  en 
avant  et  en  arrière;  ces  bords  sont  minces,  simples,  dans  quelques 
espèces,  très  finement  dentelés  dans  d'autres.  Ce  sont  les  espèces  fine- 
ment striées  à l’extérieur  qui  portent  des  dentelures  sur  les  bords.  La 
surface  interne  est  blanche,  non  nacrée  : elle  présente  deux  impressions 
musculaires  assez  éloignées  des  bords  et  comprises  toutes  deux  dans  la 
région  dorsale.  La  forme  et  la  grandeur  de  ces  impressions  est  en  rap- 
port avec  celle  des  muscles  qui  les  produisent.  Une  impression  palléale, 
peu  apparente;  toujours  simple,  s'étend  d’une  impression  musculaire  à 
l’autre.  La  charnière  est  peu  épaisse,  elle  est  simple;  elle  présente  un 
simple  bourrelet  décurrent  dans  lequel  se  découpent  quelquefois  des  iné- 
galités comparables  à des  dents  cardinales  ; mais  ces  inégalités  ne  sont 
point  articulées  : au-dessous  des  crochets,  est  creusée  une  petite  fossette 
triangulaire,  peu  profonde,  dans  laquelle  s'attache  un  petit  ligament 
interne,  dont  le  bord  supérieur  s aperçoit  au  dehors  entre  les  crochets 
des  valves,  lorsqu'elles  sont  réunies. 

L’animal  des  Gakomma  a une  manière  de  vivre  qui  s’éloigne  de  celle 
de  la  plupart  des  Mollusques  acéphalés.  Les  individus  que  nous  avons 
trouvés  étaient  attachés  aux  liges  des  fucus  marins  auxquels  ils  se  sus- 


74^  DIX-NEUVIÈME  FAMILLE. 

pensent  au  moyen  de  leur  byssus;  mais  ces  animaux,  ainsi  que  ceux 
des  Peignes , peuvent  rompre  spontanément  les  fils  de  leur  byssus , et 
alors  ils  so  mettent  à marcher  à peu  près  de  la  même  manière  que  les 
Gastéropodes.  Lorsqu’ils  marchent , les  valves  de  la  coquille  sont  large- 
ment ouvertes  et  étalées  comme  un  bouclier  sur  le  dos  de  l’animal.  La 
preqiière  zone  du  manteau  est  elle-même  étalée  en  dehors  du  pourtour 
de  la  coquille,  tandis  que  le  voile  palléal  est  reployé  en  dessous  et  ne 
laisse  plus  en  avant  qu’une  ouverture  médiocre  par  laquelle  passe  l'or- 
gane locomoteur.  Cet  organe  se  porte  en  avant  ; il  s'aplatit  en  arrière,  et 
se  change  ainsi  en  une  sorte  de  disque  comparable  à celui  qui  existe 
au-dessous  du  pied  des  Mollusques  gastéropodes.  C'est  à l’aide 
de  cette  disposition  que  le  Galeomma  peut  ramper  avec  facilité  sur  les 
tiges  cylindriques  des  plantes  marines  et  sur  d’autres  corps  solides , 
môme  des  plus  lisses , tels  que  le  verre  et  la  porcelaine.  Lorsque  l’animal 
trouve  dans  sa  marche  un  endroit  favorable  où  il  veut  s’arrêter,  il  s’y 
attache  au  moyen  de  deux  ou  trois  fils  de  byssus;  mais  s’il  veut  se 
déplacer,  il  rompt  avec  la  plus  grande  facilité  les  fils  par  lesquels  il  était 
suspendu.  Par  ses  mœurs,  le  Galeomma  s’éloigne  considérablement  de 
presque  tous  les  Mollusques  des  familles  précédentes.  If  ne  s'enfonce 
point  dans  la  vase  ou  dans  le  sable;  c’est  un  animal  qui  marche  et  se 
déplace  comme  les  Érycines , mais  il  ne  nage  pas  en  voltigeant  comme 
les  Limes  et  les  Peignes  ; il  aime  les  eaux  peu  profondes,  et  il  s’expose 
volontier^ux  rayons  du  soleil.  Ces  animaux  s’épanouissent,  pour  ainsi 
dire,  sur  les  plantes  marines  exposées  à la  plus  vive  lumière.  Il  est  à 
remarquer  que  presque  tous  les  autres  Mollusques  se  cachent  pendant 
le  jour  et  choisissent  le  crépuscule  ou  la  nuit  pour  sortir  de  leur  retraite. 

Un  fait  que  nous  ne  devons  pas  passer  sous  silence  a été  signalé 
par  M.  Mittre.  En  ouvrant  les  ovaires,  ce  naturaliste  les  a trouvés  rem- 
plis d’œufs  très  volumineux,  dans  lesquels  l’embryon  était  déjà  très 
développé,  muni  d’un  rudiment  testacé,  et  par  conséquent  prêt  à éclore. 
Il  est  donc  certain  que  chez  ces  animaux,  les  œufs,  au  sortir  de  la  mère, 
ne  subissent  pas  l'incubation  branchiale,  et  probablement  éclosent  très 
peu  de  temps  après  avoir  été  pondus. 

Nous  venons  d'exposer  les  faits  qui  sont  indispensables  pour  juger  la 
question  relative  à la  classification  définitive  du  genre  Galeomma  dans 
une  méthode  naturelle.  L'animal  constitue  à lui  seul  un  type  particu- 
lier. En  effet,  la  structure  de  son  manteau,  la  forme  de  son  pied,  la 
grandeur  remarquable  des  organes  branchiaux , et  enfin  la  disposition 
des  ouvertures  palléales  ne  se  montrent  dans  aucune  autre  famille  des 
Mollusques  acéphalés.  Le  Galeomma  présente  donc  une  combinaison 


LES  GALÉOMMIDÉS.  749 

spéciale  d’organisalion , et  pour  cela  seul  il  devait  constituer  une  famille 
distincte. 

Maintenant  nous  devons  nous  demander  quelle  place  la  famille  et  le 
genre  doivent  occuper.  L’animal  n’a  point  de  siphons  saillants  réunis  ou 
disjoints;  ce  sont  de  simples  perforations  , encore  Tune  d’elles  paraît 
temporaire  et  formée  à la  volonté  de  l’animal.  Par  conséquent , d'après 
ce  seul  caractère , le  genre  Galeomma  ne  peut  rester  dans  la  famille 
des  Pholadaires,  comme  M.Sowerby  l’a  proposé,  ni  dans  celle  des 
Glycimérides , comme  nous  l’avons  cru  ; pas  davantage  dans  celle  des 
Myes,  comme  M.  Flemming  l’a  proposé.  Il  ne  peut  non  plus  réster  dans 
la  famille  des  Saxicaves,  selon  l'opinion  de  M.  Swainson  ; car,  dans 
toutes  les  familles  que  nous  venons  de  citer,  les  Mollusques  portent  en 
arrière  deux  siphons  plus  ou  moins  gros , toujours  saillants  en  dehors 
de  la  coquille  et  toujours  réunis,  de  la  basé  au  sommet,  en  une  masse 
cylindracée.  Le  genre  Galeomvia  ne  peut  non  plus  rester  dans  la  famille 
des  Corbules,  ainsi  que  le  propose  M.  Philippi,  parce  que  l’animal  de 
ce  genre  est  terminé  en  arrière  par  deux  siphons,  fort  courts  à la 
vérité,  mais  qui,  malgré  leur  brièveté,  conservent  tous  les  caractères 
de  ceux  des  Myes.  Enfin,  pour  terminer  cet  examen  rapide,  le  genre 
Galeomma  doit  être  repoussé  de  la  famille  des  Nyinphacées , contre  le 
sentiment  de  MM.  Reeve  et  Hanley,  parce  que  dans  les  Mollusques  de 
cette  famille  le  manteau  est  terminé  en  arrière  par  deux  très  longs  si- 
phons très  grêles  et  désunis  dans  toute  leur  longueur.  Si  nous  comparons 
actuellement  l'animal  du  Galeomma  à ceux  des  Conques  fluviatiles  de 
Lamarck,  nous  reconnaîtrons  qu’il  s’en  éloigne  par*  les  mômes  raisons 
qu’il  se  détache  de  toutés  les  autres  familles  où  l’on  a essayé  de  le 
placer.  Il  résulte  dô  ce  que  nous  venons  de  dire , qu’aucune  des  opinions 
publiées  jusqu’à  ce  jour,  au  sujet  de  la  classification  du  genre  Galeomma, 
ne  peut  être  acceptée.  11  faut  donc  rechercher  au  genre  des  analogies 
dans  d’autres  familles , et  particulièrement  dans  celles  chez  lesquelles 
les  siphons  ont  une  tendance  à disparaître , comme  dans  la  famille  des 
Érycines  , dans  celle  des  Lucines,  et  môme  dans  celle  des  Cardiacées. 

L’absence  ou  la  brièveté  des  siphons  entraîne  presque  toujours  la 
disparition  du  muscle  spécial  de  ces  organes , et  par  conséquent  aussi 
l’absence  de  la  sinuosité  postérieure  de  l'impression  palléale.  Il  faut 
donc  encore  placer  le  genre  Galeomma  parmi  ceux  des  Mollusques  qui 
offrent  aussi  ces  mômes  dispositions,  c’est  encore  vers  les  familles  des 
Érycines  et  des  Lucines  qu’il  faut  remonter  pour  rencontrer,  sous  ce 
rapport , une  organisation  semblable. 

Si  nous  consiclérôns  maintennnt  l'organe  locomoteur,  nous  n’y  Iroü- 


7^0  DIX-NECVIKME  FAMILLE. 

/ ^ . 

vons  a.ucune  analogie  avec  celui  des  premières  familles  de  la  classe  à 
laquelle  le  genre  appartient  ; c'est  dans  le  genre  Congeria  que  nous 
trouvons  le  premier  exemple  d'un  pied  semblable  4 celui  des  GaleQinma 
et  fonctionnant  à peu  près  de  la  même  manière.  Nous  trouvons  dans  les 
Pisidium  , et  surtout  dans  les  Eryçines,  un  pied  analogue  à celui  des, 
Galéorames.  Enfin,  le  pied  des  Lucines  et  des  Cardium,  mais  des 
Lucinps  surtout,  a une  grande  analogie, avec  celui  du  genre  qiii  nous 
occupe.  Quant  à la  bouche,  elle  offre  tant  de  ressemblance  dans  tous 
les  Mollusques  de  la  classe,  que  nous  devrions  à peine  en  parler.  Cepen- 
dant nous  remarquerons  la  petitesse  relative, des  palpes  labialçs  exacte- 
ment comme  dans  les  Érycines , et  nous  verrons  dans  les  Luciqes  ces 
organes  d,irainuer  encore  d’importance. 

Nous  avons  maintenant  a parler  des  orgapes  branchiaux.  Pour  ceux-ci, 
nous  devons  le  dire,  ils  sont  dans  le  Galeomma  très  différents  de  ce  que 
nous  les  avons  vus  chez  les  Érycines , et  plus  différents  encore  de  ceux 
des  Lucines.  Par  leur  longueur,  ces  organes  se  rapprochent  de  ceux  des 
Myes  ou  des  Lulraires.  Ainsi  voilà  le  seul  caractère  qui  entraînerait  le 
genre  vers  ces  familles;  mais,  selon  nous,  il  est  insuffisant,  puisqu'il 
est  seul  contre  les  autres.  Or,  dans  la  formation  des  familles  naturelles 
et  dans  l'appréciation  de  leurs  rapports,  il  ne  faut  pas  seulement 
compter  les  caractères,  il  faut  aussi  en  peser  la.valeur,  et  pour  ce  qui  a 
rapport  au  Galeomma^  le  nombre  et  l'importance  l'emportent  de  beaucoup 
pour  entraîner  le  genre  et  la  famille  dans  le  voisinage  des  Érycines  et 
des  Lucines,  Si  M.  Mitlre avait  pesé,  ainsi  que  nous  venons  de  le  faire, 
tous  les  caractères  du  genre  qu'il  a étudié  , il  n’aurait  pas  proposé  de  le 
rapprocher  des  Bénitiers , et  de  le  comprendre  dans  la  famille  des  Tri- 
dacnées.  Nous  verrons  bientôt  en  quoi  dilfèreut  très  essonliellement 
les  genres  que  M.  Mittre  propose  de  rapprocher. 

jLes  caractères  de  la  coquille  confirment,  en  partie  du  moins,  les 
rapports  que  l’animal  détermine.  Quoique  très  bâillante,  elle  ne  l'est 
pas  de  la  môme  manière  que  chez  ceux  des  Mollusques  qui  sont  pourvus 
de  gros  siphons.  Le  Gaslrochène  seul  aurait  de  l’analogie  par  le  bâille- 
ment antérieur  et  inférieur  de  ses  valves  ; mais  les  Gastrochènes , les 
P^olades , .les  Glycimènes,  les  Saxicaves,  les  Corbules,  les  Myes,  ont 
le  manteau  fermé  en  avant  et  percé  d'une  très  petite  ouverture  anté- 
rieure pour  le  passage  du  pied,  tandis  que  le  Gu/eomma  a cet  organe 
ouvert  dans  toute  la  longueur  du  bord  inférieur , exactement  comme 
dans  les  Érycines,  les  Lucines,  etc. 

Quant  à la  charnière,  nous  la  voyons  déjà  réduite  à une  grande 
simplicité  chez  les  Érycines.  Nous  lui  verrons  subir  des  lransformations 


IVS  GALDOMMlDgS.  70 1 

bien  plus  considérables  dans  le  seul  genre  Lucine.  Far  conséquent,  la 
simplicité  à laquelle  elle  est  réduite,  la  position  du  ligament,  ne  sont 
pas  des  obstacles  à rapprocher  les  Galéotnmes  des  Érycines  et  des 
Lucines.  Nous  pensons  dotic  avoir  déterminé  d'une  manière  rigou- 
reuse les  rapports  naturels  du  petit  genre  si  intéressant  que  nous 
venons  de  décrire.  I!  est  à présumer  q^ue  ^toutes  les  vacillations  cesse- 
ront à’son  sujet . et  que  les  classificateurs  adopteront  l'opinion  que  nous 
venons  d'appuyer  par  une  discussion  approfondie. 

Les  Galeomma  sont  de  petits  Mollusques  qui  habitent  Içs  côtes  à une 
faible  profondeur  sous  l’eau.  On  les  trouve  tantôt  cachés  sous  les  pierres, 
tantôt  entre  les  racines  des  fucus,  et  lé  plus  souvent  attachés  aux  plantes 
marines  exposées  à la  vive  lumière  du  soleil.  Nous  ne  connaissons  jus- 
(|u’ici  que  trois  espèces  : l'une  de  l'Océan  d'Europe,  et  particulière- 
ment delà  Méditerranée;  l'autre  de  l'tle  de  Franco,  et  la  troisième 
enfin  de  l'IIc  Vanikoro,  où  elle  a été  découverte  par  M.  Quoy.  Aucune 
espèce  fôssllo  n’est  connue,  même  dans  nos  terrains  quaternaires  les  plus 
récents.  Cependant  M.  Philippi,  dans  le  second  volume  des  Mollusques 
lie  la  Sicile , rapproche  des  Galéomma  une  petite  valve  fossile  qu’il  a 
trouvée  dans  les  calcaires  de  Palerme.  Mais  cette  valve,  ne  présentant 
pas  exactement  les-  caractères  du  genre , ne  peut  y rester  que  tempo- 
rairement. 

Gîiléomme  de  Turton.  Galeomma  Turtoni , Sow. 

PL  11.  fig.  13  à 17. 

C,  Testa  nîbâ  ^ ovato^transversa,  longitudinnliter  (enuè  strîùtâ  ; st/Hs 
âichotomiSf  sitbartiatïatis^  striis  Cransversnlihus  tewiissimè  sermlatis  ; 
cardinc  incrassato  ; apicibtis  minimis  nantis;  impressione  paUii 
simplid^  rugosâ, 

Sow.  Zool.  jourrt.  l.  2.  p.  56r.  pl,  i3.  f.  i.- 

Fleming,  Frit,  an,  p.  466»  ^ 

Parthenopea/ormosa,  Sçacch»,  Üsser.  zool,  p,  8 et  p.-  ip. 

Id.  Scacrhi,  Cal,  conrh.  regn.  Neap.  p.  4. 

HyutcUa  striata.  Ddle  Chiaje-,  An.  5.’  vert,  de  la  mer  de  Napl.  pl. 
siippl.  80.  f.  9,  10, 

Galeomma  Ttirtoni  Desb.  dans  Lamk.  An.  s.  vert,  t,  6.  p.  iSo. 

Sow.  Généra  of  shells  Galeomma,  f.  r.  2.  3. 

Philippi,  dans  Wiegm.  Ari  h.  t.  5.  p.  X17. 

IJ.  Ann.  liât,  hisl,  ofLond.  i»®22.  p.  92. 

Jleeve,  Conch,  syst.  t.  r.  p.  78.  p'.  54., f.  i.  2.  3. 


702 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


Sowerby  jeune,  Couch.  man.  p.  i5i,  f.  58, 

Hanley,  Descr.  cat.  t.  i.  p.  59. 

Mittre,  Ann.  Jes  sc.  nat.  1847.  1,  7,  p.  169.  pî,  5.  f,  i,  8. 

Desh.  Explor.  sc.  de  l’Algérie,  pl.  81.  f.  11.  iS.  pl.  8a.  f.  i.  7. 

Habite  l'Océan  d’Europe,  toute  la  Méditerranée. 

Petite  coquille  ovale,  transverse,  subéquilalérale,  à crochets  très 
petits,  opposés;  le  bord  dorsal  et  le  bord  ventral  sont- parallèles  ; les 
extrémités  sont  arrondies  ; le  bord  ventral  est  tronqué.  De  ce  côté,  la 
coquille  est  largement  ouverte;  l’ouverture  est  elliptique,  pointue  à 
ses  extrémités,  et  cette  forme,  comparée  par  M.  Turton  à celle  de 
l'œil  d'une  belette , a valu  au  genre  le  nom  que  cet  auteur  lui  a imposé. 
La  surface  de  'cette  coquille  est  revêtue  d’un  épiderme  très  mince  et 
d’un  blanc  jaunâtre  ; il  passe  d’upe  valve  à l'autre  en  avant  et  en  arrière 
des  crochets,  et  simule  un  double  ligament  qui,  en  réalité,  n'existe 
pas.  Au-dessous  de  cet  épiderme , la  coquille  est  d’un  blanc  laiteux  ; 
elle  est  ornée  d'un  grand  nombre  de  stries  longitudinales,  rendues 
granuleuses  par  le  passage  de  stries  transverses  moins  apparentes.  Les 
Stries.  longitudinales  sont  souvent  divisées , ce  qui  leur  imprime  un 
cachet  particulier.  A l'intérieur,  les  valves  sont  lisses  ; l’impression 
palléale  est  large  et  irrégulièrement  plissée.  La  charnière  est  étroite  ; le 
bord  cardinal  offre  quelques  éminences  irrégulières  ; et  dans  le  milieu 
une  petite  fossette  triangulaire  dans  laquelle  s’attache  un  petit  liga- 
ment intérieur. 

Cette  petite  coquille  a 1 ^ ou  1 4 millimètres  de  diamètre  transverse  ; 
elle  en  a 7 à 8 de  large.  » 


VINGTIÈME  FAMILLE. 

« 

lâC»  liucines»  ÆiUei»teœ,  Desh. 

CARACTÈRES  DE  LA  FAMILLE.  — Animal  ovale  ouobrond,  plus 
ou  moins  épais , ayant  les  lobes  du  manteau  courts  et  désunis 
le  long  du  bord  inférieur,  terminés  en  arrière  soit  par  de  sim- 
ples perforations,  soit  par  un  seul  siphon,  soit  par  deux  siphons 
courts  et  en  partie  conjoints.  Palpes  labiales  petites , q^uelque- 
fûis  rudimentaires.  Pied  allongé.,  étroit,  quelquefois  vernii- 


LES  LUCINES. 


753 

forme  ; une  seule  paire  de  branchies  de  chaque  côté  du  corps, 
grandes,  subquadrangulaires,  épaisses  ; quelqiiefois  deux  bran- 
chies inégales  ; muscles  adducteurs  très  grands,  l'antérieure 
surtout  étroits  et  descendant  jusque  dans  la  région  inférieure. 

Coquille  ovale,  transverse  ou  suborbiculaire , épidermée; 
parfaitement  close,  à bords  simples  ou  crénelés.  Charnière  va- 
riable, ayant  des  dents  cardiçales  et  des  dents  latérales, 
quelquefois  munie  de  dents  cardinales  seulement  et  assez  sou- 
vent elle  est  simple  et  sans  dents;  ligament  extérieur  paraissant 
parfois  intérieur,  étant  recouvert  par  un  rebord  saillant  du 
corselet.  Impressions  musculaires  grandes  et  inégales;  la  pos- 
térieure ovale  ou  obronde , l’antérieure  quelquefois  ovalaire  et 
plus  souvent  allongée,  étroite  et  oblique;  impression  palléale 
simple. 

PREMIÈRE  SECTION.  — Genres  Lucina,  Corhis. 

DEUXIÈME  SECTION.  — Genres  Ünguîina,  Cyrenella, 

La  famille  des  Lucines  a été  fondée  par  nous  dès  1 830  dans  VEncy- 
clopédie  méthodique  ; nous  y rassemblions  alors  les  trois  genres  Corbis, 
Lucina  et  Ungulina,  Ces  genres  étaient  distribués  par  Lamarck  dans  sa 
famille  des  Nymphacées.  M.  de  Blainville,  dans  son  Traité  de  mala- 
cologie, rapportait  ces  trois  genres  à la  première  section  d’une  famille 
beaucoup  trop  étendue,  celle  des  Conchacées.  Il  est  évident  que  dans 
l’une  et  l’autre  méthode,  les  genres  dont  il  s’agit ^e  se  trouvaient  pas  à 
leur  place.  Ce  que  nous  avons  dit  jusqu'ici  prouve  invinciblement  que 
les  Lucines  et  quelques  genres  voisins  constituent  un  groupe  tout  par- 
ticulier dans  la  classe  des  Mollusques  acéphalés  Dimyaires.  L’examen 
seul  des  coquilles,  en  montrant  les  profondes  différences  qui  les  sépa- 
rent des  divers  groupes  qui  précèdent , devaient  sufûre  pour  en  faire  un 
groupe  distinct,  en  attendant  que  la  connaissance  des  animaux  vînt  nous 
apprendre  la  place  définitive  que  la  famille  doit  occuper  dans  la  méthode 
naturelle. 

Depuis  qu’elle  a été  proposée , la  famille  des  Lucines  a subi  quelques 
modifications.. M.  d'Orbigny  changea  son  nom  pour  celui  de  Lucinides, 
T.  I.  a"  PAUTIE. 


VINGTIKME  FAMILLE. 


{■ 

et  il  l'a  réduit  aux  deux  genres  Lucma  et  Corbis.  Quelques  années 
auparavant,  Al.  Anton,  dans  son  lis  fiai  de  classi/icalion  des  coquiiles  , 
avait  proposé  le  nom  de  Lucinacœa;  il  admettait  quatre  genres  au  lieu 
de  trois  , supprimant  les  Ongulines  , et  les  remplaçant  par  les  Amphi- 
desmeset  les  Eryci.nes.  Pour  ce  dernier  genre  , M.  Anton  avait  touché 
juste,  puisqu’en  eCFet,  ainsi  que  nous  venons  de  le  voir,  il  se  rapproche 
considérablement  des  Lucines , mais  il  n’en  est  pas  de  môme  des  Amphi- 
desmes.  Ce  genre , comme  nous  l’avons  vu  précédemment,  se  rapproche 
plutôt  des  Trigonelles  et  des  Tellines.  Dans  son  bel  ouvrage  sur  les 
CoquiUes  tertiaires  de  la  Belgique,  M.  Nysl  a adopté  la  fiimille  des 
Lucines,  à laquelle  il  propose  d’ajouter  les  trois  genres  Axinus,  Diplo- 
donta  et  Hippagits.  Noos  ne  connaissons  ce  dernier  genre  que  par  ce 
qu’en  a dit  M.  Lea  dans  ses  Contributions  pour  la  géologie.  Quant  aux 
deux  autres,  pour  nous  ils  rentrent  dans  les  Lucines,  ils  ne  portent  en 
eux- mêmes  aucun  caractère  assez  considérable  pour  conserver  le  litre 
dé  genre. 

Dans  la  méthode  qu’il  a publiée  dans  le  15*  volume  des  Procès- 
verbaux  de  la  Société  zoologique  de  Londres ^ M.  Gray  a proposé  des 
changements  très  profonds,  aussi  bien  dans  la  constitution  môme  de  la 
famille  , que  dans  ses  rapports  avec  les  familles  avoisinantes.  Le  travail 
de  M.  Gray  est  trop  important  pour  être  négligé,  et  nous  croyons 
éclairer  la  science  en  le  discutant  avec  soin,  à mesure  que  l’occasion 
s'en  présente.  M.  Gray  admet  huit  genres  dans  la  famille  des  Lucinides, 
et  cette  famille  elle-même  est  la  huitième  de  l’ordre  des  Goniopodes  ; 
elle  se  trouve  intercalée  entre  la  famille  des  Glossidées  et  celle  des 
ünionidées.  Pour  so  faire  mieux  l'idée  des  rapports  de  cette  famille  im- 
portante des  Lucines,  nous  devons  ajouter  que,  d’un  côté,  celle  des 
Glossidées  est  précédée  des  Pholadomyes . des  Astartés  et  des  Crassa- 
teliidôes;  et , d’un  autre  côté . la  famille  des  ünionidées  est  suivie  de 
celle  des  Muteladées , des  Mycétopodes,  desTrigonies  et  des  Arches.  A 
considérer  cet  ensemble  de  familles,  on  se  demande  par  quels  liens  elles 
sont  réunies:  les  Glossus  de  Poli  ou  Isocardes  de  Lamarck,  terminés 
en  arrière  par  deux  siphons  courts , ne  paraissent  guère  avoir  de  rap  - 
ports avec  les  Crassatelles  qui , au  dire  de  M.  d'Orbigny,  n'onl  plus  du 
tout  de  siphons,  U en  est  de  même  des  Astartés;  mais  quant  aux  Pho- 
ladomyes, le  large  bâillement  postérieur  de  leurs  valves,  la  large  sinuo- 
sité postérieure  du  manteau  , annonce  chez  ccs  animaux  des  j'iphons  au 
moins  aussi  considérables  que  ceux  des  Lulraires  ou  des  Myes.  Si  chez 
eux  le  pied  est  aplati,  comme  chez  les  Crassatelles  et  les  Astartés , il  a 
cette  même  forme  dans  les  Lulraires,  et  nous  ne  voyons  pas  pour  quel 


LES  LÜCINES. 

motif  ce  genre,  constituant  une  famille  particulière  pour  M.  Gray,  se 
trouve  ainsi  transporté  à côté  des  Cardites  et  des  Aslartés. 

Huit  genres,  disions-nous , sont  réunis  par  M.  Gray  dans  sa  famille 
des  Lucinidées  : le  premier,  est  celui  xJes  Lucines  de  Bruguière,  mais 
beaucoup  plus  restreint  que  l’auteur  du  genre  lüi-même  ne  l’a  voulu  ; le 
second  est  le  genre  Mysiaô&  Leach.  H correspond  au  genre  Diplodontede 
Bronn,  adopté  plus  tard  par  M.  Philippi.  L’animai  de  ce  genre  ne  paraît 
pas  différent  de  celui  des  Lucines.  Quant  à la  coquille , elle  ne  se  dis- 
tingue de  ce  dernier  genre  que  par  l’impression  musculaire  antérieure, 
plus  courte  et  plus  ovalaire,  et  bientôt  nous  aurons  à apprécier  la  valeur 
de  ce  caractère.  Le  troisième  genre  est  celui  que  nous  avons  nommé 
Ctji'enella.  Il  mérite  d’étre  conservé,  et  il  doit  faire  partie  de  la  famille 
des  Lucines.  Le  quatrième  est  le  genre  TIvjasira  de  Leach  ; il  corres- 
pond aux  Cryptodontes  de  Turlon,  Ptychina  de  Philippi  et  ilxinws  de 
Sowerby.  Un  examen  attentif  des  coquilles  rangées  sous  cette  dénomi- 
nation générique,  nous  donnera  bientôt  la  preuve  de  l’inutilité  de  ce 
genre,  qui  devra  rentrer  dans  celui  des  Lucines.  Le  cinquième  genre  a 
été  nommé  Fimbria  par  Megerle  et  Corbis  par  Cuvier.  Ce  dernier  nom 
a généralement  prévalu  ; et  ce  genre , caractérisé  par  l’animal  et  sa  co- 
quille, doit  rester  dans  le  voisinage  des  Lucines.  Le  sixième  genre  delà 
famille  de  Lucinidées  a été  nommé  Loripes  par  Poli.  1!  ne  diffère  en  rien 
de  celui  des  Lucines  : il  en  porte  tous  les  caractères , aussi  bien  dans 
l’animal  que  dans  la  coquille.  II  est  donc  au  nombre  de  ceux  que  Ton 
peut  supprimer  sans  inconvénient.  Le  septième  genre  est  celui  que 
M.  Philippi  a nommé  Scacchia  en  1 844.  II  est  douteux  pour  M.  Gray,  il 
l’est  également  pour  nous  ; car  nous  n'avons  jamais  eu  l’occasion  d’en 
observer  la  coquille,  et  les  caractères  tels  que  les  donne  M.  Philippi, 
nous  paraissent  avoir  besoin  d'une  vérification  attentive.  M.  Gray  em- 
prunte son  huitième  et  dernier  genre  de  la  famille  des  Lucinidées  à 
l’ouvrage  de  Scopoli,  qui  le  proposa  sous  le  nom  de  Cqdakia.  Ce  dernier 
genre  doit  encore  rentrer  dans  celui  des  Lucines,  ainsi  que  nous  l’avons 
proposé  le  premier  dans  l'Encyclopédie  méthodique.  La  coquille  qui  en 
constitue  le  type  était  rapportée  par  Linné  à son  genre  Vénus  et  par 
Lamarck  au  genre  Cythérée , sous  le  nom  de  Cytherea  tigerina.  Nous 
avons  fait  voir  que  dans  cette  coquille  se  retrouvent  tous  les  caractères 
des  Lucines. 

En  résumant  ce  que  nous  venons  de  dire  au  sujet  do  la  famille  des 
Lucinidées  de  M.  Gray,  nous  voyons  que  les  genres  Mysia,  Thyasira , 
Loripes  et  Codakia  , peuvent  être  supprimés  en  rentrant  dans  le  genre 
Lucine.  Le  genre  Scacchia  reste  douteux:  il  est  probablement  voisin 

48* 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


^56 

des  Erycines.  Ces  suppressions  admises,  la  famille  reste  donc/comme  la 
nôtre  composée  des  quatre  genres  Litcina,  CyreneUa^Unguîina  et  Corbis; 
car  le  genre  Onguline  de  Lamarck,  que  nous  avions  fait  rentrer  autrefois 
parmi  les  Lucines,  mérite  d’en  êlre  séparé,  ainsi  que  le  prouvent  les 
curieuses  observations  de  M.  Duvernoy,  et  nous  ne  voyons  pas  pour- 
quoi M.  Gray  l’a  annexé  au  groupe  des  Loripes. 

Les  animaux  des  quatre  genres  que  nous  conservons  dans  la  famille 
des  Lucines  sont  actuellement  connus.  Tous  sont  remarquables  par  un 
manteau  fendu  dans  toute  la  longueur  du  bord  inférieur,  cet  organe  se 
terminant  en  arrière,  tantôt  par  deux  ouvertures  sessiles,  quelquefois 
par  un  seul  siphon  accompagné  d’une  fente,  et,  enfin,  par  deux  siphons 
courts  plus  ou  moins  réunis.  Chez  ces  animaux , le  pied  a une  tendance 
à s’allonger  et  à s’amincir;  il  est  môme  des  espèces  chez  lesquelles  il 
est  devenu  cylindrique  et  a pris  la  forme  d’une  cordelette.  La  bouche 
est  généralement  petite,  accompagnée  de  palpes  labiales  qui  ont  elles - 
mêmes  une  tendance  à diminuer  de  grandeur,  à ce  point  que  dans  cer- 
taines Lucines  elles  sont  réduites  à l’état  rudimentaire.  Les  branchies 
offrent  aussi  des  caractères  communs  d’une  très  grande  importance.  Ces 
organes  apparaissent  sous  la  forme  d’un  seul  feuillet  branchial  de 
chaque  côté  de  l’animal , mais  ce  feuillet  unique  est  gros , épais  , très 
large,  et  l’on  conçoit  que  dans  la  fonction  de  la  respiration  il  puisse 
remplacer  le  double  feuillet  que  possèdent  les  autres  Mollusques.  Nous 
réservons  quelques  détails  à ce  sujet  au  moment  où  nous  parlerons  du 
mémoire  de  M,  Valenciennes.  Dans  les  genres  Cyrénelle  et  Onguliné, 
les  quatre  feuillets  branchiaux  existent  ; aussi  il  sera  nécessaire  de  mo- 
difier les  rapports  que  nous  proposions  autrefois  pour  ces  genres. 

Les  coquilles  ont  des  caractères  extrêmement  divers , quoique  dans 
l’ensemble  elles  conservent  un  cachet  qui  leur  est  propre  : elles  sont 
ovales-lransverses  ou  orbiculaires  ; peur  la  plupart  elles  sont  épaisses , 
solides , subglobulouses  ou  en  forme  de  lentilles  ; leur  surface  est  cou- 
verte d’un  épiderme  plus  ou  moins  apparent.  Quelquefois  cette  substance 
manque  entièrement.  Leur  surface  extérieure  est  couverte  le  plus  sou- 
vent de  stries  concentriques  ou  d’un  réseau  formé  par  l’entrecroisement 
de  stries  ou  de  lamelles  longitudinales  et  transverses  : la  charnière  est 
très  variable  dans  ses  caractères , tantôt  elle  est  articulée  très  forte- 
ment au  moyen  de  dents  cardinales  et  de  dents  latérales,  tantôt  elle 
est  simple  et  sans  dents.  Entre  ces  deux  points  extrêmes  se  trouvent 
toutes  les  modifications  imaginables,  telles  que  des  dents  cardinales 
sans  dents  latérales,  ou  des  dents  latérales  sans  dents  cardinales.  Cette 
disparition  des  parties  de  la  charnière  ne  se  produit  pas  brusquement , 


LES  LUCINES. 


757 

mille  nuances  s’établissent , dans  lesquelles  on  voit  disparaître  insensi- 
blement toutes  les  parties  saillantes  du  bord  cardinal  jusqu’au  moment 
où  il  est  devenu  édenté. 

L’un  des  traits  les  plus  caractéristiques  de  la  famille  des  Lucines 
réside  dans  la  forme  et  dans  l'a  position  des  impressions  musculaires. 
Dans  toutes  ces  coquilles, -en  effet,  ces  impressions  sont  grandes,  tantôt 
ovalaires  et  presque  égales,  comme  dans  les  Corbeilles,  tantôt  plus 
étroites  et  subtriangulaires,  commedans  les  Cyrénelles,  et,  enfin,  pres- 
que toujours  inégales,  comme  dans  les  Lucines.  Dans  ce  dernier  genre, 
l'impression  musculaire  antérieure  mérite  une  attention  spéciale,  parce 
qu’elle  s’allonge  beaucoup  et  vient  descendre  obliquement  en  dedans  de 
l’impression  du  manteau  vers  le  bord  inférieur  des  valves. 

L'impression  palléale  est  toujours  simple , elle  s'étend  d’un  muscle  à 
l’autre  en  suivant  parallèlement  le  bord  inférieur  des  valves.  Cette 
impression  est  ordinairement  superficielle;  cependant  chez  les  vieux 
individus  des  Lucines  et  des  Corbeilles , elle  s'approfondit  d’une  ma- 
nière notable.  Cotte  impression  est  placée  dans  les  autres  genres  de 
manière  à partager  les  impressions  musculaires  en  deux  si  l’on  venait 
à la  prolonger  jusqu’aux  limites  du  bord  cardinal.  Dans  le  groupe  des 
Lucines,  au  contraire,  les  impressions  musculaires  sont  toutes  deux 
situées  en  dedans  de  l’impression  palléale,  d’où  résulte  cette  saillie 
relativement  plus  considérable  qu'elles  font  vers  le  centre  des  valves. 
Dans  presque  tous  les  genres  que  nous  avons  étudiés  jusqu’ici , toute  la 
surface  interne  de  la  coquille  comprise  en  dedans  de  l’impression  du 
manteau  reste  complètement  lisse.  Dans  les  Lucinides,  au  contraire, 
on  remarque  très  souvent  des  accidents  particuliers  qui  consistent  en 
petites  ocelles  ou  en  lignes  en  quelque  sorte  hachées , imprimées  plus 
ou  moins  profondément  dans  l'épaisseur  du  test. 

Dans  l’ensemble  de  notre  classification  des  Mollusques  acéphales , 
nous  nous  sommes  laissé  guider,  non  par  les  modifications  d’un  seul 
organe , mais  par  celles  de  l’organisation  tout  entière.  Néanmoins  nous 
avons  cherché  à placer  les  familles  et  les  genres  dans  l'ordre  qu'exige 
la  diminution  successive  des  siphons  et  l’agrandissement  graduel  de 
l’ouverture  inférieure  du  manteau,  cherchant  ensuite  ù placer  sur 
des  embranchements  latéraux  celles  des  combinaisons  organiques  qui 
monlrentdes  déviations  plus  ou  moins  considérables  dans  le  plan  général 
des  transformations.  On  ne  parviendrait  jamais , en  effet,  à faire  com- 
prendre l’ensemble  des  rapports  si  l’on  empruntait  les  bases  d’une 
classification  è quelques  organes , môme  parmi  les  plus  importants. 
Ainsi , les  organes  branchiaux , par  exemple , aux  yeux  de  certains 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


768 

zoologistes,  devraient  servir  à la  délimitation  des  groupes  les  plus  con- 
sidérables. Eh  bien,  ce  caractère,  qui  paraît  si  constant,  souffre  cepen- 
dant des  exceptions  assez  remarquables;  il  est  impossible  de  s’en  servir 
pour  caractériser  soit  ta  classe , soit  môme  quelques  ordres  en  parti- 
culier. Le  caractère  le  plus  saillant  des  organes  de  la  respiration,  chez 
les  mollusques  acéphalés,  est  d’être  composés  de  quatre  feuillets  parfai- 
tement symétriques,  et  dont  l’organisation  est  à peu  près  la  même  dans 
toutes  les  familles.  Il  existe  cependant  plusieurs  genres  chez  lesquels, 
outre  les  deux  feuillets  principaux,  il  y en  a un  troisième  qui  s’élève 
dans  la  région  dorsale  ; mais  chez  d’autres  Mollusques,  au  lieu  des  deux 
ou  trois  feuillets  de  chaque  côté , il  n'en  reste  plu&  qu’un  seul , tel  que 
chez  les  Solèmyes  et  les  Pandores.  Un  nouvel  exemple  se  représente 
eifcore  dans  le  groupe  des  Lucines , mais  il  n’y  aurait  pas  de  raisons 
suffisantes  de  détacher  les  trois  genres  dont  nous  venons  de  parler 
pour  constituer  avec  eux  un  ordre  ou  un  groupe  d'une  valeur  quel- 
conque. Ces  trois  genres  ayant  leurs  rapports  indiqués,  non  pais  seu- 
lement d'après  les  organes  de  la  respiration , mais  d'après  l’ensemble 
de  leur  organisation. 

Dans  une  notice , sur  l’organisation  des  Lucinès  et  des  Corbeilles , 
présentée  à l'Institut  en  1844,  par  M.  Valenciennes,  ce  naturaliste,  se 
fondant  sur  de  nouvelles  observations,  veut  modifier  la  famille  des 
Lucines,  et  la  réduire  aux  deux  genres  Lucine  et  Corbeille,  parce 
que  les  animaux  de  ces  deux  genres  ne  portent  qu’un  seul  feuillet  bran- 
chial de  chaque  côté  de  la  masse  viscérale.  Par  cette  raison  , M.  Valen- 
ciennes repousse  de  la  famille  le  genre  Onguline  lui-même  , quoique 
depuis  la  discussion  que  nous  avons  soutenue  à son  sujet,  tous  les 
conchyliologues  aient  reconnu  son  extrême  ressemblance  avec  les  Lu- 
cines. II  ne  suffit  pas,  à notre  avis,  de  présenter  des  faits  d’un  certain 
intérêt,  il  faut  encore,  en  les  introduisant  dans  la  science,  les  poser 
avec  soin  pour  en  estimer  la  valeur.  Que  les  Lucines  et  les  Corbeilles 
possèdent  un  seul  feuillet  branchial,  personne  ne  le  conteste-;  mais  il 
faut  voir  si  dans  ce  seul  feuillet  branchial  les  deux  feuillets  branchiaux 
ordinaires  n'y  sont  pas  contenus,  et  c’est,  en  effet,  ce  qui  a lieu.  Les 
feuillets  branchiaux  ordinaires  sont  composés  de  deux  plans  vasculaires 
séparés  par  les  lacunes  branchiales;  ces  plans  se  joignent  par  le  bord 
libre  de  la  branchie,  et  dans  l’ensemble  on  peut  les  comparer  à la  lame 
d’un  couteau  un  peu  épaisse  du  côté  du  dos.  Les  injections  , les  sections 
longitudinales  et  Iransverses,  les  préparations  produites  par  la  macé- 
ration,tous  les  moyens  enfin  employés  par  l'anatomiste  pour  s^éclairer 
sur  la  structure  de  l'organe  branchial , donnent  la  preuve  qu’il  est  corn- 


LES  LUCINES. 


7^9 

posé  ainsi  que  nous  venons  de  le  dire.  Cette  organisation  est  fort  diffé- 
rente dans  les  Lucines.  En  effet,  chaque  feuillet  branchial  très  épais  et 
parenchymateux  en  apparence  doit  cette  épaisseur  insolite  à un  double 
rang  de  vaisseaux  sur  chacune  des  parois.  II  se  trouve  quatre  rangées 
vasculaires  superposées  là  où  il  n’y  en  a que  deux  chez  les  autres  Mol- 
lusques. Aussi  nous  avons  contesté  à M Valenciennes , en  nous  appuyant 
sur  les  faits  que  nous  venons  de  rappeler,  la  valeur  de  cette  apparence  de 
deux  branchies  chez  les  Lucines  et  les  Corbeilles  ; pour  nous,  les  bran- 
chies de  ces  animaux  fonctionnent  au  moyen  de  surfaces  aussi  étendues 
que  si  les  quatre  feuillets  branchiaux  existaient;  en  un  mot,  pour 
résumer  notre  opinion  , nous  disons  que  sous  l’apparence  de  deux  feuil- 
lets branchiaux , les  Lucines  et  les  Corbeilles  en  ont  réellement  quatre 
par  l’organisation;  ces  deux  feuillets  contenant  en  réalité  autant  de 
vaisseaux  branchiaux  que  dans  quatre  branchies  d’une  égale  étendue, 
mais  d’une  moindre  épaisseur. 

Pour  nous,  les  caractères  extérieurs  auxquels  M.  Valenciennes  a 
attribué  une  grande  importance , se  réduisent  à la  proportion  de  carac- 
tères génériques.  Nous  ne  croyons  pas  possible  de  séparer  les  Ongulines, 
et  de  les  transporter,  comme  le  voudrait  M.  Duvernoy,  dans  le  voisi- 
nage des  Moules.  Ce  genre  doit  nécessairement  rester  dans  la  famille 
des  Lucines,  et  il  deviendra  possible  de  la  partager  en  deux  sections  : 
dans  la  première  , se  trouveraient  les  Corbeilles  et  les  Lucines , ani- 
maux à deux  branchies  ; et  dans  la  seconde,  les  Ongulines  et  les  Cyré- 
nelles , animaux  à quatre  branchies. 

Il  est  facile  de  comprendre  actuellement  pourquoi  nous  devons  déta- 
cher les  Lucines  des  Tellines  pour  les  transporter  beaucoup  plus  en 
avant  dans  la  classification  et  les  faire  remonter  jusque  dans  le  voisinage 
de  la  famille  des  Cardiacées.  Lamarck  avait  jugé  de  ces  Mollusques, 
non  d’après  leur  organisation  , mais  d'après  leur  coquille  seule , ce  grand 
zoologiste  ayant  cru  trouver  des  rapports  convenables  entre  ces  genres, 
parce  qu’un  certain  nombre  de  Lucines  ont.  en  arrière,  dans  la  circons- 
cription du  corselet,  l'apparence  d'un  pli  comparable  à celui  des  Tellines  ; 
mais  on  comprend  aujourd'hui  combien  est  faible  ce  moyen  de  rappro- 
chement que  no  justifie , au  reste,  aucun  fait  emprunté  à l’organisation. 


vingtièmü:  famille.  ‘ 


760 

GENRE  SOIXANTE-DEUXIÈME. 

IiUOINE.  Lucina^  Brug.  • 

PI,  14  bis,  f.  7.  8.  g.  pl.  i5,  f.  4.  5, 6.  pl.  i6.  f.  i à r4.  pl.  17,  f.  t à 5, 

CARACTERES  GENERIQUES.  — Animal  ovale  ou  arrondi,  lobes 
du  manteau  minces  et  rcilnis  postérieurement  dans  le  tiers  de  leur 
longueur.  Un  seul  siphon  anal  court,  membraneux,  rétractile. 
Siphon  branchial  sessile  réduit  à une  simple  fente.  Bouche  très 
petite,  ayant,  au  lieu  de  palpes,  quatre  petits  tubercules.  Une 
seule  branchie,  grande,  épaisse,  ovale  de  chaque  coté  du  corps. 
Un  pied  très  long,  cylindracé,  vermiforrne. 

Coquille  suborbiculaire,  inéquilatérale.  Charnière  variable, 
présentant  tantôt  deux  dents  cardinales  et  une  ou  deux  dents 
latérales,  tantôt  des  dents  cardinales  seulement , et  quelquefois 
à bord  cardinal  simple  et  sans  dents.  Deux  impressions  muscu- 
laires séparées,  inégales;  Tantérieure  étroite  et  très  longue. 
Impression  palléale  simple. 

Synonymie  générique.  — Vénus,  Linné,  Chèmnitz,  Gmelin, 
Schrœter,  Born,  Kœmmerer,  Montagu,  Maton  et  Racket, 
Dorset,  Dillwyn , Wood,  Donovan. — Tellina,  Montagu, 
Maton  et  Racket,  Wood,  Linné,  Chèmnitz,  Schrœter,  Gmelin, 
Dillwyn.  — Cytherea  [expai'ie],  Lamarck.  — Strigiïla,  Turton 
[eic parlé).  — Myriea,  Turton,  Sowerby,  Fleming.  — Orfygia, 
Brown.  — Crypiodon,  Turton,  Macgillivray,  Moller.  — Ply- 
china , Philippi.  — Axinus,  Sowerby,  Loven  , Nyst , de  Ko- 
ninck,  King.  — Amphidesma  , Lamarck.  — Loripes , Poli, 
Cuvier,  Blainville,  Rang,  Mcnke,  LatreÜle,  Oken,  Swainson, 
Fleming,  Gray, — Leniillaria  , Schumacher.  —Thiaiyra, 
Leach,  Sowerby.  ^ — Codakia.  Scopoli,  Gray.—  Codok,  Adan- 
son, — Orbicuhis,  Megcrle.  — Aycr/rt,Lca.  — Edmondia, 
de  Koninck,  Morris,  Gcinilz. 


LES  LUCINES. 


761 

OBSERVATIONS.  Pou  de  genres  offrent  autant  d'intérêt  que  celui  des 
Lucines.  Vivant  dans  toutes  les  mers  , il  est  fossile  dans  tous  les  ter- 
rains de  sédiment.  11  so  montre  dans  les  plus  anciennes  couches  dé- 
posées à la  surface  de  la  terre  ; il  est  du  petit  nombre  de  ceux  qui , 
depuis  ces  temps  reculés , n’ont  pas  cessé  d'exister  jusqu’aujourd’hui 
• et  sont  représentés  dans  les  diverses  formations  par  de  nombreuses 
espèces.  Ce  genre  ne  doit  pas  avoir  moins  d'intérêt  aux  yeux  du  zoo- 
logiste ; les  Mollusques  qu'il  renfernie  ont  des  caractères  tellement 
particuliers  que  l’on  peut  les  considérer  comme  un  groupe  à part 
qui  mérite  de  former  un  embranchement  spécial  sur  la  lige  commune 
de  la  classification.  Nous  avons  vu,  en  traitant  de  la  famille  des  Lu- 
cines , comment  il  fallait  envisager  aujourd’hui  les  rapports  du  groupe 
tout  entier,  et  ceux  des  Lucines  en  particulier.  Nous  n’aurons  donc  pas 
à revenir  sur  cette  question , ayant  employé  pour  la  discuter  tous  les 
documents  dont  la  science  s’est  enrichie  relatifs,  non  seulement  aux 
Corbeilles , aux  Ongulines  et  aux  Cyrénelles , mais  encore , et  surtout , 
aux  Lucines. 

Communément  répandues  dans  presque  toutes  les  mers  , un  certain 
nombre  d'espèces  de  Lucines  ont  été  connues  des  anciens  conchylio  - 
logues.  Gesner,  Bonanni,  Lister,  Rumphius,  Guallieri , d’Argenville , 
en  ont  figuré  plusieurs' dans  leurs  ouvrages;  mais  parmi  eux,  c’est 
Lister  qui  en  a fait  connaître  le  plus.  Dans  le  temps  que  Linné , dans 
la  \ 0“  édition  du  Systema  naiurcBj  introduisait  ces  coquilles , les  unes 
dans  son  genre  Telline,  les  autres  parmi  les  Vénus,  un  savant  obser- 
vateur, Âdanson  , en  faisait  connaître  plusieurs  espèces  dans  son  Voyage 
au  Sénégal.  Il  les  place  dans  son  genre  Came,  supposant  quales  ani- 
maux , qu’il  n’a  pas  eu  occasion  d’examiner,  sont  semblables  à cçux  des 
Vénus.  Depuis  Linné,  dont  la  10®  édition  du  Sysima  est  de  lYSS  , 
jusqu’à  Bruguière,  tous  ceux  des  naturalistes  qui  eurent  occasion  de 
parler  dos  Lucines,.  imitèrent  Linné,  et  les  rangèrent  sans  exception 
dans  les  Tellines  et  dans  les  Vénus.  Le.  nombre  de  ces  auteurs  est  con- 
sidérable, et  il  nous  paraît  peu  nécessaire  de  les  mentionner  ; ils  sont 
déjà  connus  par  la  citation  que  nous  en  avons  faite  dans  Thistoire  de 
plusieurs  autres  genres. 

En  préparant  les  planches  de  V Encyclopédie  méthodique  ^ Bruguière, 
le  premier,  institua  le  genre  Lucine.  Nous  insistons  à dire  qu’il  est  le 
premier,  parce  que  plusieurs  auteurs  veulent  faire  remonter  l'origine  du 
genre  , les  uns  à Poli , les  autres  à Scopoli;  mais  nous  pensons  que  celte 
opinion  peut  être  contestée,  surtout  à l'égard  de  Poli.  En  effet,  si  le 
savant  napolitain  a eu  le  mérite  de  faire  connaître  le  premier  un  animal 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


762 

du  genre  Lucine , et  de  lui  imposer  le  nom  de  Loripes,  on  ne  l’a  pas 
vu,  généralisant  les  faits  de  la  science,  rattacher  à son  genre  les  autres 
espèces  qu'il  connut  et  qu‘il  continua  à ranger  parmi  les  Tellines;  par 
conséquent  Poli  a fait  connaître  un  fait  particulier,  mais  on  ne  peut  guère 
le  considérer  comme  le  créateur  du  genre  Lucine,  et  cela  est  si  vrai , 
que  Cuvier  et  un  grand  nombre  d’autres  naturalistes,  ont  adopté  à la  fois  * 
dans  leur  méthode  et  le  Loripes  de  Poli  et  les  Lucines  de  Bruguière. 

Les  observations  qui  précèdent  pourraient  s’appliquer  en  partie  au 
genre  Codakia  de  Scopoli.  Par  la  manière  dont  il  est  èaractérisé  par 
l’auteur,  on  voit  que  ce  naturaliste  éminent  a senti  le  besoin  de  séparer 
des  Vénus  de  Linné , la  Came  Codok  d’Âdanson.  Cette  Came  n'esl  autre 
chose  que  le  Venus  tigerina  de  Linné;  Scopoli  on  indique  les  caractères 
d’une  manière  tellement  brève,  qu’il  est  impossible  d'y  retrouver  ceux 
d’un  genre  suffisamment  bien  observé.  Il  se  borne  à dire,  en  effet: 
a Testa  bhalvis  submnbomila , cardo  valvæ  iinius  trîdentatus^  alterius 
bidentatus.  » Ainsi,  pour  lui,  la  différence  résidait  dans  la  charnière, 
partie  éminemment  variable,  comme  chacun  le  sait,  dans  le  grand 
genre  Vénus,  et  il  néglige  les  véritables  caractères  génériques,  ceux 
que  présentent  les  impressions  des  muscles  et  du  manteau.  Il  résulta 
de  cette  imperfection  que  les  naturalistes , malgré  l'opinion  de  Scopoli , 
continuèrent  à ranger  au  nombre  des  Vénus  , le  Codok  d’Adanson  et  les 
espèces  qui  s’en  rapprochent.  Lamarck,  lui-même,  ne  put  se  soustraire 
à l’opinion  de  Linné,  et  comme  dans  les  coquilles  dont  il  est  question, 
la  charnière  porte  une  dent  latérale  antérieure , Lamarck  les  entraîna 
dans  son  genre  Cythérée,  lorsqu’il  les  détacha  des  Vénus  de  Linné, 
ün  autre  reproche  que  l'on  pourrait  adresser  à Scopoli,  c’est  d’avoir 
adopté  un  nom  barbare  pour  l'introduire  dans  une  méthode  pour  laquelle 
Linné  avait  créé  un  langage  harmonieux  ; mais  ce  motif  ne  serait  pas 
suffisant  pour  rejeter  le'genré  Codakia,  si  ce  genre  avait  été  convena- 
blement généralisé  par  son  auteur.  Nous  pouvons  donc  conclure  que 
Bruguière  est  le  véritable  créateur  du  genre,  quoi  qu’il  l’eût  publié  en 
4 792,  tandis  que  l’ouvrage  de  Scopoli  est  de  1777,  et  celui  de  Poli 
do  1791. 

Dès  ses  premiers  travaux  sur  la  conchyliologie  , Lamarck  s'empressa 
d'adopter  le  genre  Lucine  de  Bruguière;  il  le  rangea  entre  les  Cyclades 
et  les  Tellines,  et  conserva  une  opinion  analogue  dans  tous  scs  autres 
travaux  à mesure  qu'il  les  perfectionna.  Cuvier  oublie  d'abord  le  genre 
dans  son  Tableau  du  règne  anîmat;  il  no  le  mentionne  pas  non  plus 
dans  son  Tableau  de  classification  qui  fait  partie  du  T'’  vol.  des  Leçons 
d'anatomie  comparée;  mais  dans  Ï'A  édition  du  Règne  animal,  il 


LES  LUCINES. 


'}G3 

répare  tardivement  cet  oubli , et  il  comprend  les  Luçines  dans  sa  famille 
des  Cardiacées , à côté  des  Loripèdes  entre  les  Tellmes  et  les  Vénus , se 
rapprochant  par  là,  sous  quelques  rapports,  de  la  manière  de  voir  de 
Lamarck,  et  s’en  éloignant  aussi  en  comprenant  les  Vénus  dans  la  même 
famille. 

Tandis  que  les  deux  grands  zoologistes  français  consacraient  dans 
leurs  travaux  le  genre  établi  par  Bruguière , d’autres  naturalistes , plus 
étroitement  attachés  au  système  de  Linné,  continuaient  à ranger  les 
Lucines,  les  unes  dans  les  Vénus  et  les  autres  dans  les  Tellines.  Cet 
attachement  au  système  do  Linné  se  remarque  particulièrement  parmi 
les  naturalistes  anglais  du  commencement  de  ce  siècle;  il  y en  a même 
quelques  uns  qui  le  conservèrent  jusqu’en  1828. 

Le  genre  Lucine , considéré  dans  son  ensemble , est  des  plus  natu- 
rels; mais  quand  on  vient  à examiner  de  petits  groupes  d’espèces , soit 
vivantes , soit  fossiles , on  a une  tendance  à le  démembrer  en  plusieurs 
genres , et  c'est  à quoi  se  sont  appliqués  un  certain  nombre  de  conchy- 
liolôgues  depuis  la  publication  du  dernier  ouvrage  de  Lamarck.  Indé- 
pendamment du  genre  Loripes  de  Poli , que  plusieurs  ont  voulu  con- 
server, M.  Schumacher  a rétabli  le  genre  de  Scopoli  sous  une  autre 
dénomination;  il  en  fait  son  genre  Lentillaria ; puis,  pour  les  espèces 
qui  ont  trois  dents  à la  charnière,  c’est-à-dire  deux  d'un  côté  et  une 
de  l’autre,  il  en  fait  son  genre  Tridonta,  que  nous  verrons  rentrer  sans 
difficulté  dans  le  grand  type  des  Lucines.  Bientôt  après,  M.  Turton, 
dans  ses  Coquilles  bivalves  de  l' Angleterre,  proposa  de  retirer  des  Lucines 
de  Lamarck,  sous  le  nom  générique  ÔQStrigella,  celles  des  espèces  qui 
sont  ornées  à l’extérieur  de  stries  divergentes.  A l'exemple  de  Lamarck, 
M.  Turton  laissa  subsister  dans  son  genre  une  confusion  que  le  premier 
nous  avons  rectifiée;  en  effet , dans  ïaStrigilla  de  cet  auteur,  de  véri- 
tables Tellines  , Tellina  carnaria,  par  exemple,  sont  confondues  avec 
des  Lucines,  Lwcma  divaricata.  En  même  temps  il  séparait  sous  le 
nom  de  Cryplodon  celles  des  espèces  qui  ont  un  corselet  profondément 
sinueux.  Déjà  ce  genre  avait  été  proposé  sous  le  nom  d’j^jrmtis , par 
Sowerby  dans  son  Minerai  concology.  Nous  ne  parlerons  pas  des  dif- 
férents genres  proposés  par  M.  Lcÿch.  Ceux  des  auteurs  qui  les  con- 
naissent le  mieux  conservent  encore  des  doutes  au  sujet  de  plusieurs 
d’entre  eux.  Ils  ont  été  cités  avec  des  variantes,  soit  par  Lamarck,  qui 
en  a reçu  communication  deLeach  lui-même,  soit  par  M.  Brown.  D'ail- 
leurs ces  genres  ne  peuvent  être  admis  ; fondés  sur  des  caractères  con- 
testables, ils  perdent  beaucoup  de  leur  intérêt  et  ne  méritent  pas  une 
discussion  approfondie.  Nous  rangerons  à peu  près  dans  la  même  caté- 


VINGTIEME  FAMILLE. 


764 

gorie  les  genres  proposés  par  M.  Brown.  Un  autre  genre,  qui  a pour 
type  le  Tellina  rolundata , a été  proposé  par  M.  Bronn,  en  1831,  sous  le 
nom  de  diplodonla  : il  mérite  un  plus  sérieux  examen  parce  qu’il  a été 
admis  par  M,  Philippi  et  par  plusieurs  autres  conchyliologues  de  mé- 
rite; pour  nous,  nous  retrouvons  en  lui  les  principaux  caractères  des 
Lucines.  L’animal  lui-méme , si  nous  en  croyons  quelques  observa- 
teurs , ne  différerait  pas  d’une  manière  notable  de  celui  des  Loripes  : 
ses  caractères  sont  empruntés  à la  coquille,  et  nous  verrons  bientôt 
combien  ils  sont  variables  tout  en  conservant  un  certain  degré  de  fixité, 
la  limite  des  variations  génériques  se  trouvant  resserrée  dans  un  cercle 
assez  étroit.  Nous  avons  déjà  indiqué  le  genre  j^ormus  de  Sowerby; 
M.  Phillippi,  qui  ne  le  connaissait  pas , le  reproduisit  sous  le  nom  de 
Plycliina , dans  ses  Mollusques  de  Sicile  ; mais  un  peu  plus  tard,  il  sup- 
prima ce  nom  et  préféra  celui  plus  ancien  de  Cryptodon,  donné  par 
Turton  ; do  sorte  que  pour  l’auteur  dont  nous  parlons,  les  Lucines  de- 
vraient se  diviser  en  trois  genres,  ce  qui,  pour  nous,  n’est  point  ad- 
missible. 

Dans  ses  Etudes  critiques  sur  les  Mollusques  fossiles  de  la  famille  des 
Myaires , M.  Agassiz  a proposé  un  genre  Mactromya^  dans  lequel  il 
introduit  des  Lucines , dont  il  n’a  pas  reconnu  les  caractères  généri- 
ques. Il  est  vrai  que  le  savant  naturaliste  n’a  jugé  de  ces  espèces 
que  d’après  le  moule  intérieur  seulement,  ce  qui  pouvait  entraîner  de 
l’incertitude  chez  une  personne  qui  n’est  pas  encore  très  habituée  à re- 
connaître la  nature  des  genres  d’après  des  matériaux  quelquefois  in- 
complets. Cependant  les  figures  de  M.  Agassiz  sont  suffisantes  pour 
opérer  la  réforme  que  nous  proposons  dans  sou  genre  Maclromya. 

Dans  sa  dernière  classification  des  Mollusques , M.  Gray  adopte  sans 
difficulté  plusieurs  des  genres  que  nous  venons  de  passer  en  revue;  ces 
genres , nous  les  avons  cités  dans  nos  généralités  sur  la  famille  des 
Lucines,  nous  n’avons  donc  pas  à y revenir  actuellement,  car  nous 
aurons  encore  l'occasion  de  les  mentionner,  lorsque  nous  exposerons  les 
modifications  que  subissent  les  Lucines  et  les  caractères  peu  importants 
d’après  lesquels  ces  genres  ont  été  limités. 

Telle  est  Thistoire  succincte  du  ^rand  genre  Lucine  de  Bruguière  et 
de  Lamarck.  Nous  aurions  pu  lui  donner  une  bien  plus  grande  étendue  , 
si  nous  avions  voulu  mentionner  dans  l'ordre  de  leur  publication  tous 
ceux  des  ouvrages  dans  lesquels  il  est  question  des  Lucines.  Celte  tâche 
ingrate,  en  allongeant  notre  travail , ne  nous  conduirait  pas  à do  meil- 
leurs résultats,  parce  que,  dans  ces  ouvrages,  les  mêmes  opinions  se 
reproduisent  et  se  répètent  : elles  n’ajoutent  donc  rien  à la  science , 


LES  LUCINES. 


765 

souvent  elles  n’ont  même  pas  le  mérite  d’être  préférées  à la  suite  d’un 
contrôle  suffisamment  approfondi.  Aussi  riiisloiro  des  Lucincs  peut-elle 
se  résumer  do  la  même  manière  que  celle  de  plusieurs  autres  genres. 
Ces  coquilles  n’ont  point  été  reconnues  par  Linné;  elles  ne  le  sont  pas 
davantage  par  le  plus  grand  nombre  de  ses  successeurs.  Bruguière  les 
sépare  ; Lamarck  d’abord , Cuvier,  beaucoup  plus  tard , adoptent  cette 
séparation  en  conservant  au  genre  toute  son  étendue  ; mais  bientôt  ces 
grands  philosophes  , qui  ont  aimé  à conserver  à leurs  genres  des  carac- 
tères larges  et  profonds , sont  débordés  par  les  observateurs  minutieux 
qui  cherchent  sans  cesse  à faire  de  nouveaux  genres  aux  dépens  de  ceux 
qui  existent,  et  malheureusement  sans  se  préoccuper  assez  si  ces  nou- 
velles créations  sont  fondées  sur  des  caractères  zoologiques  d’une  assez 
grande  valeur  pour  être  acceptés  dans  une  méthode.  On  comprend  aussi 
qu'il  est  infiniment  plus  facile  de  créer  des  genres  nouveaux  que  d’en- 
treprendre des  études  approfondies  et  de  rassembler  l’immensité  des 
matériaux  nécessaires  pour  arriver  à la  démonstration  de  l'inutilité  de  ces 
mêmes  genres. 

L’animai  des  Lucines  offre  dans  son  organisation  des  particularités 
remarquables , et  comme  le  genre  lui-même  constitue  le  type  principal 
de  la  famille , nous  sommes  obligés  d'entrer  dans  des  détails  plus  appro- 
fondis à son  sujet.  Toutes  les  espèces  vivantes  connues  sont  suborbicu- 
laires,  quelquefois  aplaties  en  forme  de  lentilles,  quelquefois  plus 
globuleuses  et  même  sphérbïdales.  L’animal  conserve  très  approximati- 
vement la  forme  de  sa  coquille;  il  est  enveloppé  d’un  manteau  mince, 
d’un  blanc  laiteux,  et  dont  la  surface  contracte,  avec  celle  delà  coquille, 
une  adhérence  plus  grande  que  dans  la  plupart  des  autres  genres.  Celte 
jonction , plus  intime , provient  particulièrement  de  la  présence  dans  le 
manteau  d’organes  particuliers  ordinairement  subcirculaires,  et  qui 
laissent  leur  impression  sur  le  disque  intérieur  de  la  coquille.  Un  muscle 
orbiculaire,  étroit,  occupe  la  circonférence  du  manteau.  Il  est  d’une 
épaisseur  uniforme , et  son  bord  intérieur  donne  naissance  à une  large 
mémbrane  qui  s'étend  dans  toute  la  partie  postérieure  de  l'animal  et 
sert  de  commissure  au  manteau.  Le  manteau  est  donc  en  réalité  pourvu 
de  deux  bords , l’un  extérieur,  qui  s'applique  sur  le  pourtour  de  la 
coquille  , et  l’autre  intérieur,  plus  ou  moins  exsertile,  selon  la  volonté 
de  l’animal.  En  avant , par  exemple , lorsque  l'animal  est  contracté , le 
bord  membraneux  se  renverse  en  dedans , et  il  forme  de  chaque  côté 
une  poche  incomplète  dans  laquelle  la  branchie  vient  se  placer  naturelle- 
ment. La  commissure  antérieure  du  manteau  se  produit  vers  le  milieu 
de  la  longueur  du  muscle  adducteur  antérieur.  La  commissure  posté- 


VlNCxTIEME  FAMILLE. 


;0r> 

rieure  se  montre  vers  le  milieu  de  la  longueur  du  bord  ventral.  Cette 
commissure  est  très  large,  membraneuse,  et  par  la  hauteur  qu’elle 
acquiert,  elle  réduit  de  beaucoup  l'ouverture  antérieure  du  manteau 
destiné  au  passage  du  pied.  En  arrière,  cette  commissure  est  percée  de 
deux  ouvertures  : la  première,,  destinée  à remplacer  le  siphon  bran- 
chial, est  complètement  sessile,  l’animal  ne  la  fait  jamais  saillir  au 
dehors  ; elle  est  subcirculaire  dans  sa  dilatation , mais  lorsque  les  valves 
sont  rapprochées , elle  prend  la  forme  d’une  petite  boutonnière  ; l'autre 
ouverture  est  séparée  de  la  première  par' un  intervalle  assez  largo,  elle 
est  d'un  diamètre  plus  petit.,  et  elle  se  prolonge  en  dehors  en  un  tube 
membraneux,  mince  et  transparent,  cylindrique,  et  dont  l’ouverture 
terminale  est  simple  et  dénuée  de  tentacules.  Cet  organe  peut  se  con- 
tracter, quoiqu’il  jie  possède  aucun  muscle  rétracleur  comparable  à 
celui  des  Tellines  ou  des  Vénus;  mais  il  se  contracte  de  la  mémo 
manière  que  les  tentacules  des  limaçons,  par  exemple,  qui,  au  moyen 
de  fibres  annulaires  et  longitudinales  comprises  dans  leur  paroi , peu- 
vent faire. rentrer  le  tentacule  sur  lui-même  et  le  mettre  ainsi  à l'abri 
d'un  contact  dangereux.  Ces  Lucines  agissent  do  môme  pour  faire  rentrer 
dans  la  cavité  du  manteau  le  siphon  anal  au  moindre  attouchement. 
Cet  organe  se  contracte  et  rentre  sur  lui-même  exactement  comme  un 
doigt  de-gant  que  l'on  retourne. 

La  masse  abdominale  est  assez  considérable  : elle  est  d’une  forme 
subquadrangulaire , et  c’est  de  son  bord  inférieur  et  postérieur  que  se 
détache  un  pied , le  plus  singulier  qui  existe  dans  toute  la  série  des 
Mollusques  acéphalés  dimyaires.  En  effet,  il  est  complètement  vermi- 
forme , cylindracé,  obtus  au  sommet;  sa  base  forme  une  espèce  do 
talon  comparable  à celui  du  pied  humain.  Cet  organe  est  susceptible  do 
mouvements  très  divers  ; mais  nous  ignorons  comment  l’animal  en  fait 
usage  ; car  les  Lucines  que  nous  avons  vues  vivantes  ne  s’on  sont  jamais 
servies  , quoique  nous  ayons  essayé  de  les  replacer  dans  des  conditions 
favorables  pour  les  observer  vivantes.  Elles  ont  fait  sortir  leur  pied 
de  la  cavité  du  manteau , mais  elles  n’ont  jamais  tenté  de  creuser 
le  sable,  quoiqu’il  soit  possible,  par  exemple,  de  supposer  qu'elles 
peuvent  y réussir  aussi  bien  que  les  Solens.  Cependant  il  faut  dire  que 
la  coquille  de  ces  derniers  a une  forme  qui  favorise  singulièrement 
l'action  du  pied  , tandis  que  chez  les  Lucines , au  contraire  , la  fortne 
orbiculaire  doit  présenter  un  obstacle  assez  considérable  à l’action  d’un 
organe  aussi  grêle.  H faut,  au  reste,  que  cet  organe  ait  une  bien  grande 
souplesse  dans  ses  mouvements,  puisque  nous  avons  trouvé  un  individu 
chez  lequel  le  pied  portait. un  gros  nœud  très  serré  vers  la  base.  Nous 


LES  LUCINES.  ^ 7^7 

en  avons  donné  la  figure  dans  la  partie  conchyliologiqne  de  l’expiora- 
lion  scientifique  de  TAIgérie. 

Les  muscles  adducteurs  des  valves  méritent  une  attention  particu- 
lière , parce  que  leurs  impressions  laissent,  sur  la  coquille  des  caractères 
impérissables  d’une  très  grande  valeur  pour  déterminer  le  genre  auquel 
on  doit  la  rapporter.  Le  muscle  adducteur  antérieur  est  très  allongé  : il 
descend  dans  la  région  ventrale  de  la  coquille  de  manière  à être  com- 
pris dans  l’intérieur  de  l'impression  palléale.  Par  sa  position  et  sa  lon- 
gueur, ce  muscle  forme  en  avant  une  sorte  de  capuchon  au-dessous 
duquel  la  bouche  est  profondément  cachée,  son  bord  inférieur  tombant 
jusque  dans  la  région  ventrale,  il  en  résulte  un  rétrécissement  consi- 
dérable de  l’ouverture  antérieure  du  manteau  ; mais  on  conçoit  que 
pour  donner  passage  à.  un  pied  aussi  grêle  que  celui  que  nous  venons  do 
décrire,  il  ne  faut  pas  une  ouverture  très  étendue.  Le  muscle  adduc- 
teur postérieur  est  oval  ou  subcirculaire;  il  est  situé  tout  près  du  bord 
postérieur  et  au-dessus  du  siphon  anal.  Les  muscles  sont  en  proportion 
plus  grands  que  dans  les  autres  Mollusques , et  ils  offrent  ce  caractère 
remarquable  d'être  compris  dans  l’intérieur  de  l'impression  du  manteau. 

La  bouche  est  très  petite  : elle  est  garnie  de  deux  lèvres  très  étroites  , 
dépourvues  de  palpes  labiales,  et  l’absence  de  ces  organes,  si  constants 
chez  tous  les  Mollusques  acéphalés,,  est  un  caractère  d’une  grande 
valeur  pour  distinguer  les  Lucines  et  en  former  un  groupe  distinct  de 
tous  les  autres. 

Les  organes  de  la  respiration  ont  aussi  une  organisation  toute  parti- 
culière ; un  seul  grand  feuillet  branchial  existe  de  chaque  côté;  ces 
branchies  sont  ovales  - quadrangulaires  ; elles  sont  soudées  à la  masse 
abdominale  en  avant  et  dans  toute  la  longueur  du  bord  dorsal.  En 
arrière,  elles  se  réunissent  et  se  terminent  en  pointe,  dont  l’extrémité 
est  soudée  au  manteau  , dans  la  partie  de  la  commissure  qui  sépare  le 
siphon  branchial  de  l’anal , de  sorte  que  la  grande  cavité  palléale  est 
toujours  séparée  de  la  cavité  du  siphon  anal.  Les  feuillets  branchiaux 
sont  très  épais;  et,  si  l'on  opère  sur  eux  diverses  sections,  on  s’aperçoit 
qu’ils  sont  composés  do  deux  épaisseurs  égales,  renversées  l’une  sur 
l’autre , disposition  que  l’on  pourrait  comparer  à celle  d’une  feuille  de 
papier  pliée  en  deux.  Aussi  en  brisaul  les  lamelles  transverses  qui  ser- 
vent à rattacher  une  paroi  à l'autre,  on  déploie  facilement  cette  double 
branchie  en  une  seule  lame  dont  on  parvient  à effacer  les  plis.  Nous 
avions  donc  raison  de  dire  que  chez  les  Lucines  il  y a réellement  deux 
branchies  sous  l’apparence  d’une  seule.  Cette  manière  d’envisager  ces 
organes  est  confirmée  par  leur  structure  anatomique,  et  ici  nous  arri- 


VINGTIEME  FAMILLE. 


7G8 

vons  à dos  détails  que  ne  comporte  pas  un  traité  élémentaire , par  consé- 
quent noos  renvoyons  le  lecteur  à des  ouvrages  qui  traitent  spécialement 
de  celle  matière. 

Presque  toutes  les  coquilles  du  genre  Lucine  sont  orbiculaires  ; nous 
n'en  connaissons  qu'un  petit  nombre  d'ovales  et  de  subtransverses,  et 
celles-là  se  rapprochent  de  la  Corbeille  par  certains  caractères  de  leur 
charnière.  Si  quelques  unes  sont  très  bombées  et  globuleuses , il  y en  a 
un  plus  grand  nombre  d’aplalies  et  qui  affectent  la  forme  lenticulairev  La 
surface  extérieure  est  couverte  d’um  épiderme  plus  ou  moins  apparent , 
quelquefois  très  pâle  et  transparent , quelquefois  grisâtre  ou  brunâtre , 
et  plus  ou  moins  écailleux.  Sur  le  bord  du  test,  cet  épiderme  le  dépasse 
un  peu  de  manière  à abriter  la  bord  interne  du  manteau.  Les  accidents 
extérieurs  sont  de  diverses  sortes;  un  assez  grand  nombre  d'espèces 
sont  lisses , mais  le  plus  grand  nombre  est  chargé  de  stries  et  de  côtes 
concentriques  qui  affectent  quelquefois  une  grande  régularité  ; enfin  , 
un  petit  groupe  d’espèces  se  distingue  par  une  surface  découpée  par  des 
stries  longitudinales  et  transverses  à peu  près  égales.  Presque  toutes 
les  Lucines  sont  blanches  ou  d'un  blanc  jaunâtre  ; quelques  unes  sont 
rosées  ou  rougeâtres , et , en  général , elles  sont  plus  colorées  à Tintée 
rieur  qu’au  dehors.  Les  teintes  dont  elles  sont  ornées  passent  du 
rose  pourpré  à l’orangé,  au  jaune  fauve  très  pâle.  Les  bords  des  valves 
sont  généralement  simples.  Cependant  il  existe  des' espèces  chez  les- 
quelles on  remarque  de  très  fines  crénelures  au  moyen  desquelles  la 
clôture  des  valves  devient  encore  plus  exacte. 

Les  Lucines  sont  généralement  inéquilatérales , mais  elles  le  sont 
d'une  petite  quantité , par  conséquent,  le  bord  dorsal  est  divisé  en  deux 
parties  presque  égales  par  la  saillie  des  crochets;  ceux-ci  sont  généra- 
lement petits,  déprimés,  rapprochés,  médiocrement  saillants;  ils  s'in- 
clinent obüquemwit  du  côté  antérieur  et  viennent  dominer  une  lunule 
presque  toujours  nettement  circonscrite,  souvent  profonde  et  quelque- 
fois superficiello  et  peu  marquée.  Le  corselet  n’existe  pas  dans  toutes 
les  espèces  : aussi  sous  ce  rapport  les  Lucines  pourraient  facilement  se 
partager  en  deux  groupes.  Lorsque  celte  partie  existe,  elle  est  limitée 
au  dehors  par  une  ligne  déprimée  qui  descend  du  crochet  jusque  vers 
l’extrémité  postérieure  du  bord  inférieur.  Dans  ces  espèces , la 'lunule 
est  presque  aussi  grande  que  le  corselet  d’où  résulte  que  la  surface 
est  divisée  en  trois  parties  inégales:  à la  lunule  appartient  la  plus 
petite  ; la  seconde  est  occupée  par  le  corselet , et  la  troisième  est  ré- 
servée au  centre  des  valves.  LesLuema  columbella  jamaicensîs  peuvent 
donner  un  très  bon  exemple  de  ce  groupe  remarquable  de  Lucines.  Chez 


LES  LUCINES.  769 

les  aiilres,  on  voit  la  lunule  et  le  corselet  s’effacer  insensiblement,  et 
lorsque  la  lunule  subsiste  encore,  le]  corselet  'a  complètement  dis- 
paru. 

La  surface  intérieure  est  moins  lisse  que  dans  la  plupart  des  autres 
genres  : elle  n’est  jamais  nacrée,  et  l'on  y remarque  très  souvent  de 
petites  impressions  arrondies  ou  bien  des  lignes  longitudinales  comme 
bâchées,  plus  ou  moins  profondes.  Ces  lignes  ou  ces  impressions,  comme 
nous  le  disions  tout  à l’heure,  résultent  d’une  structure  particulière  du 
manteau.  Cet  organe  laisse  encore  dans  l'intérieur  des  valves  de  la 
plupart  des  espèces,  une  ligue  oblique  et  déprimée  dont  nous  ne  con- 
naissons pas  l’origine.  Il  faudrait  en  rechercher  la  cause  dans  l’animal 
du  Lucina  tigerina  , par  exemple , chez  lequel  celte  ligne  est  fortement 
imprimée.  On  la  trouve  dans  le  Lucina  jamaicensis  ^ et  nous  l’observons 
dans  un  très  grand  nombre  d'espèces  fossiles. 

La  charnière  est  très  variable  , ainsi  que  nous  l’avons  répété  plusieurs 
fois,  et  en  cela  ce  genre  ressemble  à celur  des  Bucardes  et  à celui  des 
Mulettes.  Ainsi,  on  peut  commencer  la  série  par  des  coquilles  dont  la 
charnière  est  absolument  simple  et  sans  dents.  L’une  d'elles  , à cause 
de  cela,  a été  appelée  Lucina  edentula  par  Lamarck.  Dans  ce  groupe  des 
édentés  se  rangent  des  coquilles  généralement  minces  et  globuleuses; 
cependant  il  est  des  espèces  plus  aplaties  qui  sont  également  dépourvues 
do  dents  cardinales  ou  latérales,  et  qui , par  conséquent,  doivent  faire 
])artie  de  la  même  section.  Tontes  ces  espèces  n'ont  pas  les  mômes 
caractères  extérieurs  , car  les  unes  sont  sans  corselet  et  ont  une  lunule 
très  petite,  tandis  que  les  autres  ont  la  lunule  et  le  corSelet  très  grand. 
Pour  bien  comprendre  les  divisions  du  genre  Lucine , il  ne  faut  pas  se 
contenter  de  l’examen  des  espèces  vivantes,  il  faut  Pétendre  aux  espèces 
fossiles. 

A la  fin  du  genre,  on  pourrait  composer  un  groupe,  dans  lequel  se 
réuniraient  toutes  les  espèces  ayant  à la  fois  des  dents  latérales  et  des 
dents  cardinales.  Nous  trouverions  encore  dans  ce  groupe  des  formes 
extérieures  semblables  à celles  du  premier,  c'est-à-dire  des  coquilles 
globuleuses,  des  coquilles  aplaties  : les  unes  ayant  une  grande  lunule 
et  un  grand  corselet,  les  autres  n’ayant  plus  qu’une  très  petite  lunule. 
Entre  ces  deux  groupes  se  classeraient,  dans  une  série  non  interrompue, 
tous  les  intermédiaires  que  l'on  peflt  imaginer.  C’est  ainsi  que  les  dents 
cardinales  se  montrent  d’abord  à l’état  rudimentaire.  Elles  prennent 
successivement  do  l’accroissement,  il  en  est  de  même  des  dents  laté- 
rales, soit  qu'elles  naissent  simultanément,  soit  que  Tune  d’elles  appa- 
raisse d’abord.  Elles  prennent  leur  accroissement  tantôt  sans  être  accora- 
T.  I.  PAUTIE,  49* 


VINGTIEME  FAMILLE. 


770 

pagnées  de  dents  cardinales,  tantôt  lorsque  la  charnièré  porte  ces  parties 
dans  un  étal  plus  Ou  moins  complet  de  développement.  On  comprend 
dès  lors  de  (combien  de  combinaisons  est  susceptible  la  charnière  des 
Lucines,  puisqu'elle  peut  être  sans  dents,  avoir  des  dents  latérales 
sans  dents  cardinales , une  seule  dent  latérale  sans  autre  dentelure,  une 
dent  cardinale  et  une  dent  latérale  tantôt  antérieure,  tantôt  postérieure; 
enfin , la  charnière  présente  encore  celle  combinaison  des  deux  dents 
cardinales  et  des  deux  dents  latérales. 

Le  ligament  est  toujours  extérieur,  il  s’étend  sur  une  partie  assez 
considérable  du  bord  supérieur  et  postérieur,  et  il  est  presque  tou- 
jours recouvert  par  les  lèvres  saillantes  du  corselet.  Par  ce  fait,  il  est 
pou  apparent  à l'extérieur;  il  arrive  assez  souvent  que  les  nymphes, 
en  s’enfonçant  sous  les  bords  du  corselet,  cachent  tellement  le  ligament 
que  l’on  pourrait  le  croire  intérieur;  mais  aussitôt  que  Ton  en  étudie 
la  structure , on  lui  reconnaît  toutes  les  parties  constituantes  des  liga- 
ments extérieurs.  Trompé  par  cette  apparence,  Lamarck  avait  cru 
trouver  dans  les  Ongulines  un  ligament  interne,  mais  ayant  étudié  de 
nouveau  ce  ligament  sur  des  individus  bien  entiers , nous  Pavons  trouvé 
soutenu  par  des  nymphes  très  aplaties  sur  lesquelles  vient  s’attacher  sa 
tunique  externe  et  fibreuse. 

Il  existe  quelques  espèces  vivantes  dans  lesquelles  le  ligament  pour- 
rait être  considéré  comme  intérieur,  car  il  est  caché  dans  une  rigole 
profonde,  comparable  au  cuilleron  des  Amphidesmes,  mais  située  moins 
en  dedans  de  la  coquille  et  complètement  cachée  par  la  lèvre  saillante 
du  corselet.  Déjà  le  Lucma  lactea  présente  dans  sa  charnière  une  modi- 
fication analogue  à celle-ci,  mais  le  ligament  reste  encore  plus  près  de 
la  surface  que  dans  d'autres  espèces  qui,  comme  le  L.  Crypteîla  d’Orb., 
ont  cette  partie  complètement  intérieure.  Les  espèces  vivantes  dont 
nous  parlons  ont  pour  nous  un  très  grand  intérêt , parce  qu’elles 
conduisent  insensiblement  à un  genre  proposé  par  M.  de  Koninck 
que  nous  voulions  d'abord  conserver.  Ce  savant  observateur,  qui  a déjà 
rendu  de  très  grands  services  à la  science  , et  dont  les  opinions  jouis- 
sent d’une  autorité  que  leur  ont  méritée  ses  travaux  consciencieux,  a 
proposé  le  genre  Edmondia,  pour  des  coquilles  fossiles  qui  sont  le 
dernier  terme  des  Lucines  à ligament  subintérieur.  Dans  les  coquilles 
de  ce  genre,  la  charnière  porte  une  lame  assez  large,  creusée  on  gout- 
tière, sur  laquelle  le  ligament  vient  s'attacher,  en  sc  cachant  derrière  la 
lèvre  très  proéminente  du  corselet.  Aucune  dent  cardinale  ou  latérale 
n’existe  sur  celte  charnière , mais  les  impressions  du  manteau  et  des 
muscles  sont  conformes  à celles  des  véritables  Lucines;  d’où  il  suit  que 


LES  LUCINES.  77 ^ 

ce  genre  Edmondid  doit  venir  encore  se  confondre  dans  le  grand  type 
des  Lucines,  et  son  nom  s’ajouter  h la  synonymie  générique. 

Les  impressions  musculaires  exigent  une  étude  toute  spéciale  dans  le 
genre  des  Lucines;  quoiqu’elles  subissent  aussi  des  modifications  dans 
la  série  des  espèces,  néanmoins  elles  sont  d’un  secours  considérable 
pour  distinguer  le  genre  lorsque  la  charnière  vient  à manquer.  On 
conçoit , d’après  ce  que  nous  avons  dit  des  muscles  eux-mêmes , que 
leur  impression  sur  la  coquille  doit  offrir  des  particularités  que  l’on  ne 
saurait  rencontrer  dans  d’autres  genres  : elles  sont  fort  écartées  et 
occupent  les  extrémités  de  la  coquille.  L’impression  antérieure  est  la 
plus  remarquable  : on  y distingue  facilement  deux  parties,  l'une  supé- 
rieure, très  rapprochée  du  bord , quelquefois  subovalairc  et  occupant  la 
place  de  l'impression  antérieure  des  autres  Mollusques;  l'autre  partie 
consiste  en  une  ligule  assez  étroite  qui  se  détache  de  l’extrémité  infé- 
rieure de  la  première  partie,  pour  s’avancer  obliquement  à l’intérieur 
des  valves,  quelquefois  jusque  vers  le  milieu  du  bord  ventral,  ainsi 
que  le  Lucina  mutabilis  de  Lamarck  en  donne  un  exemple.  Cette  im- 
pression n’eSt  pas  toujours  aussi  allongée , elle  diminue  insensible- 
ment de  longueur  dans  une  série  considérable  d’espèces,  et  déjà  elle  est 
très  réduite  dans  l’une  des  coquilles  confondues  parmi  les  variétés 
du  Lucma  divaricata  de  Lamarck.  A mesure  que  cette  portion  de  l’im- 
pression musculaire  diminue , la  portion  supérieure  devient  de  plus  en 
plus  ovale,  et,  enfin  , il  arrive  un  moment  où  toute  la  portion  inférieure 
a disparu , ainsi  qu’il  arrive  dans  celles  des  espèces  pour  lesquelles 
M.  Bronn  a établi  son  genre  Diplodonte.  Malgré  ce  changement,  on 
reconnaît  à ces  coquilles  les  caractères  des  Lucines , parce  que  l’im- 
pression musculaire  est  toujours  en  dedans  de  l’impression  palléale,  et 
que  son  extrémité  inférieure  s'incline  toujours  vers  le  disque  intérieur 
de  la  coquille.  11  existe  même  des  espèces  de  ce  groupe  chez  lesquelles 
l'impression  musculaire  tout  entière  descend  le  long  de  l’extrémité 
antérieure  et  inférieure  du  bord  ventral.  Entre  cette  position  et  celle  de 
l’impression,  telle  quelle  se  trouve  dans  les  autres  Lucines  , il  existe 
quelques  nuances  intermédiaires  que  l'on  peut  observer  particulièrement 
sur  des  espèces  fossiles,  et  notamment  sur  le  Lucina  unguis  de  Bonelli , 
qui  se  trouveassez  abondamment  dans  les  marnes  argileuses  de  Tortone. 
Entre  l’impression  musculaire  et  celle  du  manteau,  il  reste  ordinaire- 
ment un  intervalle  plus  ou  moins  large  selon  les  espèces.  Cet  intervalle 
diminue  peu  à peu  , et  dans  l’espèce  que  nous  venons  de  citer,  presque 
toute  l’impression  musculaire  est  confondue  avec  celle  du  manteau  ; une 
très  petite  portion  s’en  détache , et  par  cette  disposition  toute  spéciale , 

49* 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


TP 

cette  coquille  r^ittache  aux  Lucines  le  genre  Diplodonte  de  M.  Broun. 
L’impression  musculaire  postérieure  reste  toujours  courte  et  ovalaire , 
située  tout  près  du  bord , elle  se  voit  à l’extrémité  de  la  charnière  et 
dans  celle  des  espèces  dont  le  corselet  est  limité  par  une  inflexion  , elle 
est  toujours  comprise  dans  la  largeur  de  ce  corselet.  Cela  arrive  aussi 
chex  les  especes  dont  le  corselet  est  fortement  sinueux , et  pour  les- 
quelles le  genre  Axinus  a été  créé  par  M.  Sowerby.  Dans  ces  coquilles 
singulières , les  caractères  des  Lucines  persistent , la  charnière  est  sans 
dents , ainsi  que  dans  beaucoup  d’autres  espèces.  L'impression  muscu- 
laire antérieure  est  ovalaire , comme  dans  les  Diplodontes  , et  l’impres- 
sion postérieure  est  petite  et  ovale,  ainsi  que  dans  toutes  les  Lucines. 
Il  n’y  a donc  point  de  raisons  suffisantes  pour  admettre  le  genre  Axinus 
d’après  les  caractères  qui  lui  ont  été  assignés.  Pour  le  détacher  des 
Lucines,  il  faudrait  trouver  dans  l’animal  des  caractères  suffisamment 
distincts  ; mais  jusqu’ici  l’animal  de  ces  espèces  est  resté  inconnu. 

L’impression  palléale  est  toujours  ‘simple  dans  les  Lucines  : elle  est 
parallèle  au  bord  ventral , et  elle  en  est  rapprochée.  On  voit  par  les 
empreintes  musculaires  qu’elle  porte  et  par  sa  largeur  inaccoutumée, 
, que  le  muscle  orbiculaire  du  manteau  s’y  attache  avec  une  grande 
solidité.  Parvenue  à l’extrémité  inférieure  do  l’impression  musculaire 
postérieure,  il  semble  qu'en  se  continuant,  elle  couperait  cette  im- 
pression en  deux  parties  égales.  Comme  il  arrive  souvent  au  paléon- 
tologiste de  n'avoir  à examiner  que  des  moules  intérieurs  de  coquilles 
bivalves,  nous  avons  cru  nécessaire  d’insister  sur  tous  ces  minutieux 
détails,  au  moyen  desquels  il  évitera  de  confondre  les  Lucines  avec  les 
Vénus , des  Cypnnes , des  Aslartes  et  des  coquilles  de  tout  autre  genre. 

Comme  nous  l’avons  annoncé  au  commencement  de  cette  discussion 
des  caractères  des  Lucines,  presque  tout  est  variable  dans  ce  genre; 
cependant  dans  des  limites  assez  étroites  pour  qu’on  le  reconnaisse  par 
un  ou  plusieurs  des  caractères  énoncés  et  que  l’on  no  retrouve  pas  dans 
les  genres  voisins.  C’est  ainsi  que  la  forme  orbiculaire  est  dominante;  la 
charnière  est  variable,  sans  doute,  mais  elle  ne  prend  jamais  le  carac- 
tère de  celle  des  Cyrônes  qui  ont  aussi  des  dents  cardinales  et  des  dents 
latérales.  Dans  le  cas  où,  par  exception  , une  Lucine  aurait  une  char- 
nière de  Cyrèno,  les  impressions  des  muscles  et  du  manteau  la  distin- 
gueraient facilement  de  ce  genre.  Quelques  espèces  ont  une  charnière 
qui  so  rapproche  assez  de  celle  des*.  Cythérées:  cependant,  il  faut  en 
convenir,  cette  charnière  n’a  pas  la  régularité  do  celle  du  genre  en  ({ues- 
tion  ; mais  cette  confusion  ne  saurait  subsister  aussitôt  que  Ton  compare 
les  impressions  musculaires  et  celles  du  manteau  , car  dans  les  Lucines, 


LES  LUCINES. 


77^ 

en  question,  elles  ont  des  caractères  propres  au  genre  et  no  peuvent  se 
confondre  avec  les  Cytliérées.  On  voit  par  là  do  quelle  importance  sont 
les  impressions  musculaires  pour  caractériser  les  Lucines,  et  nous  avons 
vu  que  les  variations  de  ces  parties  sont  réellement  peu  considérables 
relativement  à celles  de  la  charnière,  par  exemple. 

La  limite  des  genres  n'est  point  une  chose  inditTéronte  à quelque  point 
do  vue  que  se  place  le  zoologiste.  S’il  envisage  l’ensemble  philosophique 
delà  classification,  il  doit  faire  en  sorte  que  tous  les  genres  soient  com- 
parables entre  eux  et  qu’ils  soient  fondés  sur'dos  caractères  équivalents. 
Si , d'un  autre  côté  , il  considère  la  zoologie  dans  ses  rapports  avec  la 
géologie,  il  doit  encore  conserver  les  mômes  tendances  et  chercher  à 
maintenir  les  genres  dans  la  limite  que  la  nature  elle-même  leur  a 
imposée.  Il  comprend  combien  il  est  important  qu'un  genre  représente 
fidèlement  un  type  particulier  d’organisation , puisque  c’est  l’existence 
de  ce  type  dans  les  anciens  âges  du  monde  qu'il  s’agit  do  constater. 
Nous  avons  déjà  fait  pressentir  dans  l'histolro  du  genre  Pholadomye , 
tous  les  avantages  qui  résultent  pour  les  sciences  de  la  bonne  conception 
des  genres;  car  selon  qu’ils  seront  plus  ou  moins  étendus,  plus  ou 
moins  découpés,  ils  existeront  ou  n'existeront  pas  dans  certaines  cou- 
ches de  la  terre.  Que  l’on  restreigne,  par  exemple,  Ips  Lucines,  tel 
que  le  voudraient  certains  conchyliologues , à l'instant  môme  vous  allez 
modifier  la  distribution  des  espèces  dans  les  couches  de  la  terre.  Si , au 
contraire  , vous  conservez  au  genre  toute  l’étendue  que  comportent  ses 
caractères , il  devient  alors  facile  de  tracer  fhistoire  de  son  développe- 
ment à travers  les  périodes  successives  de  la  création.  Aussi  nous  ne 
cesserons  de  conjurer  les  sincères  amis  de  la  science  d’éviter  avec  un 
soin  scrupuleux  ces  démembrements  inutiles  des  grands  genres  naturels. 
Le  résultat  le  plus  positif  de  ces  découpures  est  de  jeter  la  confusion 
dans  la  nomenclature,  de  troubler  profondément  l'harmonie  de  la 
science , d’en  écarter  pour  un  temps  plus  ou  moins  long  les  résultats  les 
plus  précieux  ; et , enün  , do  rendre  son  accès  difficile  en  hérissant  la 
nomenclature  d’une  foule  de  noms  qu’il  faudra  ensuite  oublier.  Les 
zoologistes  et  les  paléontologistes  agissent  trop  souvent  dans  l’éloigne- 
ment les  uns  des  autres  ; ils  perdent  de  vue  rintérèt  le  plus  sacré  de  la 
science,  celui  de  son  ensemble  et  de  son  unité  ; ils  oublient  qu’ils  ten- 
dent les  uns  et  les  autres  au  môme  but , et  que  ce  but  ne  pourra  être 
atteint  qu’au  moyen  do  l’adoption  définitive  des  principes  uniformes 
qui  doivent  les  diriger. 

Toutes  les  Lucines  sont  des  coquilles  marines;  elles  habitent  les 
rivages , elles  se  plaisent  sur  les  fonds  sableux  et  légèrement  vaseux. 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


774 

Quelques  unes  i^réfèrenl  les  lieux  tranquilles  et  complètement  vaseux  ; 
elles  se  cachent  alors  sous  les  racines  des  plantes  marines  en  se, creu- 
sant dans  la  vase  un  trou  peu  profond  où  elles  ne  font  d'autres  mouve- 
ments que  de  se  rapprocher  de  la  surface  du  sol  pçur  aspiVer  dans  la 
cavité  du  manteau  l’eau  qui  est  nécessaire  à leur  nnlrilion  et  à leur 
respiration.  On  comprend  que  ces  animaux  , dénués  de  siphons  posté- 
rieurs, ont  besoin  de  vivre  dans  une  eau  tranquille,  car  sans  cela, 
enterrés  sous  le  sable  cl  n’ayant  pas  un  pied  robuste  pour  en  sortir, 
ils- périraient  inévitablement  dans  les  mouvements  si  fréquents  que  le 
sable  éprouve  sur  les  fonds  de  cette  nature. 

Les  Lucines  se  rencontrent  dans  toutes  les  mers;  quelques  unes 
remontent  très  haut  vers  le  nord , mais  les  plus  p;randes  sont  propres 
aux  régions  chaude.s  de  la  terre;  c’est  aussi  dans  ces  mêmes  régions 
que  l’on  trouve  le  plus  grand  nombre  des  espèces , et  l’on  peut  dire 
qu'une  faune  riche  en  Lucines  s'est  produite  dans  une  mer  chaude.  Ceci 
n’est  pas  tout  à fait  sans  imporlanco  pour  l'étude  des  espèces  fossiles, 
puisque  leur  rareté  ou  leur  abondance  permet  à l'observateur  d'estimer 
approximativement  la  température  primitive  des  lieux  où  ces  Lucines 
ont  été  recueillies.  C’est  ainsi , par  exemple,  que  les  Lucines  étant  très 
abondantes  dans  le  bassin  de  Paris,  on  peut  croire  que  ce  bassin  s’est 
comblé  à une  époque  où  la  température  de  la  France  était  au  moins 
égale  à celle  de  l'équateur,  car  dans  aucune  mer  équatoriale  actuelle  ou 
no  trouve  rassemblé  dans  un  espace  aussi  étroit  un  aussi  grand  nombre 
d’espèces  de  Lucines.  Il  en  est  de  même  pour  le  bassin  de  Bordeaux, 
et,  en  général,  pour  le  second  étage  tertiaire.  Il  est  également  très 
riche  en  Lucines , et  ce  fait  se  joignant  au  reste  de  la  faune  accuse  aussi 
pour  cette  période  géologique  une  température  équatoriale.  Beaucoup 
moins  nombreuses  dans  le  troisième  étage  tertiaire , on  s’aperçoit  à 
l’instant  môme  qu’il  s'est  opéré  un  changement  notable  dans  la  tempé- 
rature des  mêmes  lieux , et  cette  conclusion  paraît  d’autant  plus  rigou- 
reuse qu’elle  s'appuie  sur  l'identité  d'un  assez  grand  nombre  d’espèces 
fossiles  avec  celles  qui  vivent  dans  nos  mers. 

Le  nombre  des  espèces  vivantes  de  Lucines  connues  de  Lamarck 
était  peu  considérable,  même  en  y ajoutant  celles  des  espèces  qu’il 
avait  égarées  dans  d’autres  genres,  telles  que  les  Amphidesmes,  les 
Vénus,  les  Cylhérées.  En  1843,  mademoiselle  Catlow  en  comptait 
33  espèces  dans  son  Conchological  iwmenclator.  Aujourd'hui  nous  en 
trouvons  le  double  inscrites  dans  les  divers  ouvrages  de  conchyliologie. 
11  est  vrai  que  pour  nous  le  genre  Lucine  est  plus  étendu  que  pour  la 
plupart  des  autres  naturalistes , puisque  nous  y faisons  rentrer,  ainsi 


LES  LUCINES. 


775 

qu'on  l'a  vu,  plusieurs  autres  genres  qui  en  avaient  été  démembrés.  Ces 
espèces  se  distribuent  dans  toutes  les  mers;  il  en  est  quelques  unes, qui 
occupent  de  grands  espaces,  soit  en  Europe,  soit  en  Amérique;  il  en 
est  d’autres  qui  sont  beaucoup  plus  localisées.  Elles  semblent  davantage 
attachées  à certaines  circonstances ,de  lieux  et  de  localités.  Parmi  toutes 
ces  espèces,  il  en  est  quelques  unes  qui  jouissent  de  la  singulière  pro- 
priété de  se  trouver  presque  partout  dans  la  zone  inlerlropicale.  C'est 
ainsi  que  le  Lucina  tigerina  , par  exemple , habite  à la  fois  le  Sénégal , 
la  mer  Rouge  et  le  canal  de  Mozambique,  tout  le  grand  océan  Indien. 
Il  existe  aussi  dans  le  grand  Archipel  austral , et,  enfin,  se  retrouve 
dans  l’océan  Atlantique,  aux  Antilles,  et  même,  dit-on , sur  le  continent 
américain.  Si  dans  les  âges  futurs  de  la  terre,  de  nouveaux  terrains  sont 
soulevés  sur  divers  points  de  la  surface  de  notre  globe,  leur  contempo- 
ranéité se  trouvera  naturellement  établie  par  la  présence  du  Mollusque 
dont  nous  venons  de  signaler  la  distribution  à l’attention  des  natura- 
listes. 

Les  espèces  fossiles  sont  plus  nombreuses.  Nous  en  comptons  242 
réparties  dans  toutes  les  formations.  Leur  nombre  s’accroît  à mesure 
que  l'on  remonte  des  plus  profondes  aux  plus  superficielles.  Mais  quelle 
que  soit  la  richesse  des  formations  prises  en  particulier,  aucune  ne 
contient  autant  d'espèces  qu’il  y en  a dans  la  nature  actuelle.  Ce  genre , 
témoin  de  tous  les  changements  qui  se  sont  succédé  à la  surface  de  la 
terre,  présente  un  intérêt  particulier,  et  nous  avons  dû  en  rechercher 
avec  soin  toutes  les  espèces  pour  les  constater  d'une  manière  irrévocable 
et  pour  en  établir  la  nomenclature  définitive.  Nous  avons  comparé  les 
descriptions,  et  nous  avons  pu  souvent  les  comparer  aux  espèces  elles- 
mêmes.  De  ce  grand  travail . il  est  résulté  de  nombreuses  rectifica- 
tions dont  nous  présenterons  seulement  les  principales  à mesure  que 
nous  indiquerons  le  nombre  des  espèces  et  leur  distribution  dans  chacune 
des  formations  géologiques.  Mais  avant  d’en  venir  à ces  détails  impor- 
tants, il  nous  semble  utile  de  jeter  un  coup  d’œil  rapide  sur  quelques 
uns  des  ouvrages  dans  lesquels  les  espèces  de  Lucines  fossiles  ont  été 
mentionnées  d’une  manière  toute  spéciale. 

Après  avoir  relevé  un  grand  nombre  d’erreurs  dans  l’ouvrage  de 
Goldfuss,  dans  les  genres  Vénus,  Cythérée,  etc.,  il  nous  est  agréable 
d'en  rencontrer  beaucoup  moins  parmi  les  Lucines.  Nous  ferons  remar- 
quer seulement  que  parmi  les  espèces  inscrites  dans  ce  genre  par  le 
savant  paléontologiste  de  Vienne , il  en  est  une  qui  ne  saurait  y rester  : 
c’est  le  Lucina  lœvis  qui  doit  passer  parmi  les  Cardinia.  Une  autre,  Lucina 
solida,  est  une  véritable  Vénus^  dont  la  charnière  a été  détériorée.  Nous 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


77fi 

aurons  encore  quelques  observations  à faire  au  sujet  des  Luema  divari- 
cMta^  uncinata,  dentala  et  saxorum.  Elles  se  trouveront  mieux  à leur 
place  lorsque  nous  parlerons  de  ces  especes  en  particulier. 

M.  Agassiz  a traité  des  Lucines  particulièrement  dans  son  /co?tOj;ra- 
phio  des  coquilles  terlîan'es , réputées  identiques  avec  des  espèces  vi~ 
vantes;  il  a également  mentionné  plusieurs  espèces  de  ce  genre  parmi 
ses  Mactromya,  dans  un  ouvrage  non  moins  important,  ses  Éludes 
critiques  sur  les  Mollusques.  M.  Agassiz  est  trop  haut  placé  dans  la 
science  pour  laisser  ses  travaux  sans  examen , ses  opinions  sans  critique. 
Il  jouit  d'une  trop  grande  autorité  pour  permettre  à des  erreurs  de 
s'abriter  sous  son  patronage,  pour  s’introduire  dans  le  domaine  de  la 
science.  Elles  deviendraient  d’autantplus  nuisibles  qu’elles  s'appuieraient 
sur  un  plus  grand  nom  pour  se  maintenir  et  persévérer  longtemps. 

Le  premier  des  ouvrages  de  M.  Agassiz , que  nous  venons  de  citer, 
est  rempli  d'excellentes  observations , ainsi  que  nous  l’avons  déjà  dit  en 
diverses  occasions.  Nous  regrettons,  pour  noire  compte,  que  cet  ouvrage 
no  soit  pas  plus  étendu , et  que  son  auteur  n’ait  pas  appliqué  ses  inves- 
tigations à un  nombre  de  genres  beaucoup  plus  considérable.  Néan- 
moins il  a posé  les  vrais  principes  d’après  lesquels  on  doit  procéder  à 
l’examen  minutieux  des  espèces  que  l’on  compare , et  il  a donné  de  bons 
exemples  des  erreurs  qui  surviennent  à la  suite  d’un  examen  moins 
approfondi.  Il  faut  dire  que  la  science  se  perfectionne  chaque  jour.  Il 
faut  dire  que  celte  question  des  analogues , que  nous  avons  rendue  si 
considérable  par  les  nombreuses  applications  que  nous  en  avons  faites , 
était  à peine  aperçue  il  y a un©  trentaine  d’années  par  ceux  des  natu  - 
ralisles  qui  s’occupaient  le  plus  de  l’étude  des  fossiles.  Ils  prenaient 
sans  difficullé  pour  des  analogues  incontestables  des  espèces  dont  les 
différences  s’apprécient  aujourd'hui  avec  la  plus  grande  facilité.  A cette 
époque  on  se  bornait  à l’ensemble  ; aujourd’hui  on  descend  à l’élude  des 
plus  minutieux  caractères.  Le  premier,  nous  avons  donné  ce  cachet  de 
certitude  à l’examen  des  espèces  analogues.  Cependant,  arrivant  dans 
un  temps  où  des^méthodes  moins  rigoureuses  jouissaient  d’un  grand 
crédit,  il  nous  est  quelquefois  arrivé  de  nous  attacher  trop  scrupuleu- 
sement à des  opinions  de  Lamarck,  que  nous  aurions  dû  abandonner. 
C’est  ce  qui  nous  est  arrivé  à l'égard  de  quelques  unes  des  espèces 
examinées  par  M.  Agassiz.  Nous  citerons  particulièrement  le  Lucina 
divaricata  , que  nous  croyions  retrouver  dans  toutes  les  mers  et  fossile 
dans  tous  les  terrains  tertiaires;  mais  déjà  depuis  plusieurs  années  des 
observations  sur  un  plus  grand  nombre  d’individus  de  toutes  les  loca- 
lités avaient  profondément  modifié  notre  opinion. 


LES  LUCINES. 


777 


Rï.  Agassiz,  malgré  lout  son  soin,  n’a  pu  se  soustraire  à quelques 
erreurs  d’un  autre  genre.  C’est  ainsi , par  exemple , qu’il  conteste 
l'analogie-  des  individus  vivants  et  fossiles  du  Lucina  colutnhella;  mais 
heureusement  M.  Agassiz  donne  luL-môme  le  moyen  de  remonter  h la 
source  de  son  erreur  : il  prend  pour  le  Coîumhella  vivant,  uno  coquille 
qui  provient  des  Antilles,  différente  sans  le  moindre  doute  de  l’espèce 
du  Sénégal,  et  de  son  représentant  fossile  dans  le  second  étage  tertiaire 
de  l’Europe.  II  est  à présumer  que  si  M.  Agassiz  avait  eu  sous  les  yeux 
le  Lxicina  columbelta  du  Sénégal,  il  aurait  reconnu  avec  nous  son  iden- 
tité parfaite  avec  l'espèce  fossile , si  communément  répandue  dans  le 
bassin  de  Bordeaux,  dans  les  faluns  de  la  Touraine , etc. 

Dans  ses  études  critiques , M.  Agassiz  a proposé  un  genre  Mactromxja 
sur  des  caractères  qui  ne  sont  pas  semblables  dans  toutes  les  espèces 
qu’il  y a introduites.  Dans  les  unes , en  effet,  nous  voyons  des  impres- 
sions musculaires  médiocres  et  une  impression  palléale  profondément 
sinueuse  en  arrière;  dans  les  autres,  au  contraire,  les  impressions 
musculaires  sont  très  grandes  et  l’impression  palléale  est  toujours 
simple.  Ce  sont  ces  dernières  que  nous  relirons  des  Mactromya  pour  les 
introduire  parmi  les  Lucines , quoiqu’elles  soient  généralement  plus 
ovales  et  plus  transverses  que  ne  le  sont  les  autres  espèces  du  même 
genre.  Par  leur  forme,  elles  sont  intermédiaires  entre  les  Lucines  et 
les  Corbeilles,  mais  elles  appartiennent  plutôt  au  premier  de  ces* genres. 
Nous  avons  été  conduit  au  changement  que  nous  proposons  par  l’étude 
de  charnières  parfaitement  dégagées  et  de  moules  intérieurs  d’une  par- 
faite conservation.  Ces  coquilles,  répandues  dans  les  couches  inférieures 
de  la  grande  formation  jurassique,  commencent  à se  montrer  dans  le  lias 
inférieur  et  quelques  unes  remontent  jusque  dans  les  étages  supérieurs 
connus  sous  le  nom  de  Kimmeridgo-Klay  des  géologues  anglais.  L’une 
de  ces  espèces,  trouvée  dans  le  lias  inférieur  d’Hermanstadt,  a été 
prise  pour  une  Cyclade  par  M.  Dunker. 

Douze  espèces  nous  sont  connues  dans  la  série  paléozoïque  : deux 
descendent  jusque  dans  les  couches  siluriennes,  ce  sont  les  Lucina 
antiquissima  et  Hisingert;  la  première  a été  découverte  en  Esihoniepar 
M.  Eichwald  ; la  seconde  vient  de  Gothland,  où  elle  a été  trouvée  par 
M.  Murchison.  Sept  espèces  se  répandent  dans  le  terrain  dévonien;  il 
serait  possible  que  ce  nombre  se  réduisît  à six,  s’il  était  prouvé  que  le 
Liicina  îineata  deGoIdfuss  n’est  qu’une  variété  de  VAntiqiuila  du  même 
auteur  ; le  plus  grand  nombre  a été  trouvé  dans  l’Eifel  ; le  Diifrcsnoyi , 
Verneuil,  existe  à la  fois  dans  l’Eifel  et  en  Russie;  le  GriffUhi  est 
propre  à la  Russie,  comme  le  Dedivis  do  M.  Rœmer  n’est  encore  cité 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


778 

que  dans  le  Hartz.  Le  terrain  carbonifère  contient  trois  espèces  : l’une 
d’elles,  Lucina  unioniformiSf  est  le  type  du  genre  Edmondia  do  M.  de 
Koninck;  elle  est  à la  fois  en  Angleterre,  en  Belgique  et  dans  l'Oural, 

Le  Muschelkalk  ne  renferme  que  deux  espèces  de  Lucines  ; elles  sont 
très  différentes  de  celles  des  terrains  sous-jacents,  elles  proviennent 
toutes  deux  de  SainL-Cassian  ; l’une  d’elles , le  Duplicata.,  Munster,  est 
remarquable  par  une  lunule  très  grande,  séparée  par  un  sillon  aigu  et 
profond. 

La  longue  série  des  terrains  jurassiques  n'a  jusqu’ici  révélé  l’exis- 
tence que  de_  vingt-quatre  espèces  de  Lucines.  Quatre  sont  dans  le  lias  ; 
celle  qui  apparaît  la  première  est  le  Lucina  liasina,  Mactromya  liasina 
d’Agassiz;  elle  se  montre  dans  le  lias  inférieur  d'Hettange,  près 
Thionvilie , où  elle  est  citée  par  M.  Terquem  ; elle  passe  dans  les  assises 
moyennes  et  supérieures  de  ce  terrain,  et  nous  la  retrouvons  dans  les 
couches  les  plus  inférieures  de  Toolite.  Cette  espèce  a de  l’importance 
parce  qu’elle  existe  à peu  près  partout  où  le  lias  se  rencontre  ; elle  peut 
aider  à le  caractériser.  Il  en  est  de  môme  à peu  près  du  Lucina  œqualis , 
Mactromya  œqUalis , Agassiz:  il  commence  seulement  plus  tard  dans 
la  partie  moyenne  du  lias.  Si  l'on  rapproche  les  figures  que  Zielen  et 
Goldfuss  ont  données  du  Lucina  plana , on  est  surpris  de  leur  trouver 
si  peu  de  ressemblance,  à ce  point  que  l'on  pourrait  croire  qu’elles 
représentent  deux  espèces  très  différentes,  et  cela  est  fâcheux,  car 
l'espèce  de  Goldfuss  est  assez  communément  répandue  dans  le  lias. 
Quant  au  Lucina  elegans  de  MM.  Koch  et  Dunker,  il  devra  changer 
de  nom,  parce  que  depuis  très  longtemps,  1827,  M.  Defrance  avait 
imposé  ce  nom  à une  espèce  du  bassin  de  Paris;  nous  proposons  pour 
celle  du  lias  le  nom  do  Lucina  Dunkeri. 

Le  groupe  oolitique  inférieur  recèle  sept  espèces  seulement,  parmi 
lesquelles  nous  devons  particulièrement  citer  \g  Lucina  cardioides  (Cor- 
bula  cardioides,  Phillips,  Mactromya,  Agassiz).  H est  très  répandu 
en  Allemagne,  en  Suisse,  en  France  et  en  Angleterre;  nous  devons 
citer  encore  le  Lucina  lyrata  ûq  M.  Phillips,  qui  se  rencontre  plus 
spécialement  dans  le  Kelloways-Rock  en  Angleterre , en  Lorraine  et  en 
Allemagne, 

Dans  le  groupe  oolitique  moyen  nous  comptons  dix  espèces,  huit  dans 
les  couches  oxfordiennes,  deux  dans  le  coral-rag:  il  esta  remarquer 
que  presque  toutes  celles  de  l'oxford  proviennent  de  la  Russie,  spécia- 
lement des  environs  de  Moscou.  Il  y en  a une  le  Lucina  phillipsiana  , 
d'Orbigny,  qui  se  montre  en  môme  temps  en  Angleterre  et  en  Russie. 
Celles  du  coral-rag  sont  citées  en  Angleterre  et  en  Allemagne,  le 


LES  LUCINES. 


779 


Lucina  aliéna  de  Bronn  , par. exemple,  Astarte  aliéna  de  Phillips, 
Aslarle  rotuudata  de  Rœmer  et  de  Goldfuss.  Le  Lucmu  obliqua  , qui  est 
dans  le  coral-rag  d’Allemagne  et  de  Frapce , devra  changer  de  nom; 
celui  choisi  par  Goldfuss  ayant  été  appliqué  par  Defrauco  à une  espèce 
de.  Hautevilie.  Nous  djOnnerons  le  nom  de  Lucina  Goldfusi  à l'espèce  du 
savant  paléontologiste  allemand.  Nous  possédons  quatre  autres  espèces 
encore  inédites  de  Lucines  du  coral-rag  : lune  est  de  Luc  (Calvados) , 
nous  Pavons  retrouvée  à Commercy  (Meuse)  ; une  autre  est  la  géante 
du  genre , elle  vient  de  Sampigny  ( Meuse) , elle  est  fort  aplatie,  elle  a 
jusqu’à  4 centimètres  de  long  et  1 0 de  large.  Nous  connaissons  cinq 
espèces  seulement  dans  le  groupe  oolilique  supérieur,-  deux  dans  le 
Kimmeridge  et  trois  dans  le  Portland.  Quelques  unes,  et  le  Portlandica 
entre  autres , se  montrent  en  France  et  en  Angleterre  ; elle  paraît  des- 
cendre dans  le  Kimmeridge- Klay. 

Les  paléontologistes  ont  signalé  jusqu'à  vingt-neuf  espèces  de  Lucines 
dans -la  formation  crétacée,  nous  en  connaissons  cinq  dans  le  terrain 
néocomien,  l'une  d’elles.  Lucina  globiformis , Leymerie.  se  trouve  en 
France  et  en  Angleterre;  s’il  est  vrai , comme  le  croit  M d’Orbigny, 
que  le  Luema  soUdula  de  M.  Forbes  soit  la  môme  que  le  Dtipinkina,  il 
y aurait  alors  une  espèce  de  plus  commune  aux  deux  pays , et  une  espèce 
néocomienne  de  moins.  Dans  le  gault  et  le  sable  vert  supérieur  il  y a 
sept  espèces , parmi  elles  la  Lucmu  sculpta  , Phillips , passe  d’Angle- 
terre en  France:  il  en  est  de  môme  de  POrWeu/aris  de  Sowerby.  Mais 
cette  dernière  devra  changer  de  nom , parce  que  dès  1831,  nous  avions 
imposé  cette  dénomination  à une  espèce  des  terrains  tertiaires  de  l’Italie 
et  de  la  Morée.  Nous  proposons  le  nom  de  Lucina  Sowerbyi,  pour 
l’espèce  crétacée  ; Puue  des  espèces  a été  nommée  Lucmu  globosa  par 
M.  Sowerby.  Si  l'auteur  avait  consulté  les  catalogues , il  y aurait  trouvé 
déjà  deux  espèces  portant  le  môme  nom;  depuis,  d’autres  naturalistes 
Pont  encore  employé.  Cette  dénomination  spécifique  doit  rester  à une 
espèce  vivante  nommée  par  Chemnitz.  En  souvenir  de  ses  beaux  travaux 
sur  la  craie  de  l’Angleterre,  nous  donnons  au  Gïoèosa  de  Sowerby  le 
nom  de  Luema  Fittoni.  La  craie  chlorilée  contient  neuf  espèces  ; elles 
proviennent , pour  le  plus  grand  nombre,  de  Bohême  et  de  AVestphalie 
Les  paléontologistes  allemands  ne  sont  pas  eux-mômes  d’accord  sur 
plusieurs  de  ces  espèces;  à en  croire  MM.  ReusS  et  Bronn  , il  faudrait 
les  réunir  presque  toutes  au  Lentkularis  do  Goldfuss  ; les  unes  ayant  été 
faites  sur  de  jeunes  individus , les  autres  sur  des  individus  dont  la  forme 
a été  modifiée  par  des  compressions  dans  divers  sens  avant  la  solidifi- 
cation définitive  de  la  roche;  c’est  ainsi  que  les  Lucina  lens , Rœmer, 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


780 

Reichîi  et  Circuîaris  de  Geinitz  devraient  passer  dans  la  synonymie  du 
Lentîcularis.  Cette  dernière  par  sa  distribution  aurait  un  intérêt  parli- 
culior,  car  elle  se  trouve  on  Westpbalie,  en  Bohème  et  dans  les  craies 
supérieures  do  Maeslrichl.  Les  autres  espèces  sont  do  France  et  d'An- 
gleterre. Deux  espèces  existent  dans  la  craie  blanche , Tune  en  Cham- 
pagne, Taulre  en  Touraine.  M.  d’Orbigny  les  a fait  connaître  Tune  et 
l'autre.  Trois  autres  espèces  ont  encore  été  signalées  dans  la  craie, 
l'une  en  Amérique,  par  M.  d'Orbigny;  les  deux  autres  dans  la  craie 
do  l'Inde,  dans  les  environs  de  Pondichéry,  parM.  Forbes. 

Les  terrains  tertiaires  renferment  à eux  seuls  beaucoup  plus  d'espèces 
do  Lucines,  que  cette  longue  suite  de  dépôts  sédimentaires  qui  les  ont  pré- 
cédés. Nous  en  avons  décrit  vingt-cinq  espèces  dans  noire  Ouvrage  sur  les 
fossiles  de  Paris,  Nous  en  connaissons  actuellement  le  double  auxquelles 
il  ftuidra  joindre  les  dix-huit  espèces  qui  sont  déjà  connues  on  dehors 
du  bassin  de  Paris  , mais  dans  les  terrains  du  môme  âge.  Aujourd’hui 
la  faune  des  sables  de  Fontainebleau  a été  explorée  plus  complètement 
qu’aulrefois  ; elle  se  distingue  aussi  nettement  de  la  faune  parisienne, 
proprement  dite,  que  de  celles  de  Télage  tertiaire  moyen  entre  lesquelles 
elle  est  placée.  On  doit  à un  savant  et  laborieux  géologue , M.  Hébert , 
des  observations  précieuses  à ce  sujet  : le  premier,  il  a entrevu  l’ana- 
logie de  celle  faune  des  sables  de  Fontainebleau  avec  celle  du  Limbourg, 
et  à Tavenir  nous  mentionnerons  à part  les  espèces  do  cette  faune,  tout 
en  les  conservant  dans  l’étage  tertiaire  inférieur.  Plusieurs  espèces  du 
bassiu  de  Paris  méritent  une  attention  particulièro , soit  à cause  de  leur 
distribution  , soit  à cause  des  rectifications  que  leur  nomenclature  exige. 

V Lucina  angiiîata , Tiesh. 

Axinus  angulalits,  Sow.,  Nyst,  de  Koninclc,  Michelollî,  Broun,  etc., 
Phgchina  bipUcalaj  Philippi. 

Nous  commençons  par  cette  espèce,  l’une  des  plus  intéressantes  du 
genre.  Sa  forme  singulière  l’a  fait  considérer  comme  le  type  d’un  genre 
particulier  auquel  nous  avons  consacré  précédemment  quelques  obser- 
vations. Par  sa  distribution  dans  les  terrains  tertiaires;  cette  coquille 
mérite  une  attention  spéciale,  nous  la  voyons  apparaître,  pour  la  pre- 
mière fois , dans  les  couches  les  plus  basses  de  l’étage  tertiaire  infé- 
rieur. M.  Sowerby  l'avait  signalée  depuis  longtemps  dans  les  argiles 
de  Londres  ; M.  de  Koninck  dans  les  argiles  de  Boom  en  Belgique , du 
mémo  âge  ; plus  récemment  nous  l’avons  découverte  dans  les  sables  de 
Retheuil , et  M.  Hébert  vient  d’en  retrouver  une  variété  plus  gonflée 
dans  les  sables  de  Châlons-sur-VesIes , parallèles  à ceux  de  Bracheux. 
On  no  rencontre  plus  cette  espèce  dans  le  calcaire  grossier,  mais  elle 


LES  LÜCINES. 


78  I 

passe  dans  l’étage  tertiaire  moyen  ; elle  est  spécialement  à la  Superga, , 
près  de  Turin.  Elle  disparaît  encore  une  fois,  elle  n’est  point  citée 
dans  les  argiles  ou  les  sables  subapcnnins  ; puis  elle  se  montre  de 
nouveau  dans  les  sables  supérieurs  de  Palermo;  enfin , elle  vit  encore 
dans  la  Méditerranée.  Voilà  donc  une  espèce  qui  a traversé  toutes  les 
périodes  tertiaires,  sans  éprouver  de  modifications  bien  sensibles,  et  qui 
est  encore  actuellement  vivante;  elle  présente  ce  phénomène  remar- 
quable de  paraître  et  de  disparaître  à trois  reprises  différentes.  Il  est 
à présumer  cependant  que  des  recherches  ultérieures  en  indiqueront 
l’existence  dans  des  couches  intermédiaires  où  elle  n’est  pas  connue 
aujourd’hui. 

2°  Les  quatre  espèces  suivantes  : Lucina  sulcata , squamula , con- 
centrica  , ambiguaj  sont  communes  au  bassin  belge  et  à celui  de  Paris. 
L'une  d’elles,  le  Lucina  squanmlat  a été  citée  par  M.  Grateloup,  dans  le 
bassin  de  Bordeaux;  mais  nous  pensons  que  celle  de  Bordeaux  est 
différente.  M.  Defrance  lui  a donné  le  nom  de  Lucina  lamelîosa. 

3°  Nous  nous  sommes  expliqué  tout  à l’heure  au  sujet  du  Lucina 
dîvaricata.  Cette  espèce  ne  passe  pas  dans  toute  la  série  des  terrains 
tertiaires  ; elle  y est  représentée  par  des  espèces  très  voisines.  Celle  du 
bassin  de  Paris , nommée  Lucina  pulchella , par  M.  Agassiz , se  propage 
dans  toutes  les  couches  marines  de  ce  bassin  , et  elle  joue  le  même  rôle 
dans  les  bassins  de  Londres  et  de  Belgique;  une  autre  espèce  l’accom- 
pagne, c’est  le  Lucina  milis. 

Lucina  saxorum , Lamk. , très  commune  dans  les  calcaires  gros- 
siers , ainsi  que  dans  les  sables  marins  moyens  du  bassin  de  Paris  ; elle 
se  retrouve  aussi  en  Belgique,  et  dans  le  terrain  nummulitique  des 
environs  de  Nice  à la  Pallarea.  Le  Lucina  saxorum  de  Goldfuss  est  une 
espèce  distincte  propre  aux  sables  de  Fontainebleau  et  du  Limbourg  ; 
celle  de  M.  Michelotti  est  différente  des  deux  autres  et  doit  recevoir  un 
nom  nouveau. 

5°  Lucina  mulahiîis , Lamk.  ; elle  a exactement  la  même  distribution 
que  la  précédente.  M.  Grateloup  la  mentionne  aux  environs  de  Bor- 
deaux ; nous  ne  l’y  avons  jamais  vue , quoique  nous  ayons  consulté  les 
collections  les  plus  riches  de  cette  localité. 

6°  Lucina  fortisiana , Def.  ; celle-ci  se  rencontre  a la  fois  à Valo- 
gne,  à Paris  et  dans  les  calcaires  grossiers  de  Blaye. 

7°  Le  Lucina  gîganlea , Desh.,  ne  s’est  pas  trouvé  à Vaîognç  , mais 
il  est  en  Angleterre,  et  comme  la  précédente,  dans  les  calcaires  gros- 
siers'de  la  Gironde. 

8”  Le  Lucina  gibhosuïa  est  encore  plus  répandu  que  les  précé- 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


782 

dentes  ; elle  est  connue  dans  le  bassin  de  Paris,  à Rdnca , h Castel 
Gomberto,  et  dans  le  calcaire  nummulitique  de  la  Pallerea.  Nous  la 
rapprochions  autrefois  d'une  espèce  qui  eh  est  très  voisine,  et  qui  est 
propre  à l’étage  tertiaire  moyen,  M.  Bronn  lui  a donne  le  nom  de 
Luchia  Iransversa. 

Nous  avons  quelques  rectifications  à faire  à l’occasion  de  plusieurs 
autres  espèces  de  l'étage  tertiaire  inférieur.  Le  Lucina  alhella  de 
M.  Nyst,  par  exemple,  n’est  pas  identique  avec  celui  de  Paris. 
M.  Hébert  en  a fait  une  espèce  distincte  sous  le  nom  de  Lucina  Thie- 
rensi.  Goldfuss  a cru  retrouver  le  Lucina  uncinala  des  sables  inférieurs 
de  Paris,  dans  ceux  d’Alzey  et  de  Bunde.  Entraîné  par  l’autorité  de 
Goldfuss,  M.  Nyst  a attribué  le  même  nom  spécifique  h une  coquille  de 
Kleinspauwen  qui  est,  en  etfet,  analogue  à celle  de  Goldfuss;  mais 
toutes  deux  diffèrent  de  celle  de  Paris,  et  devaient  recevoir  un  autre 
nom.  M,  Hébert  a reconnu  l’erreur  commise  par  M.  Nyst,  et  a donné  le 
nom  de  Lucina  lenuistria  à l’espèce  de  Belgique.  Les  sables  deSaucats, 
près  Bordeaux  , recèlent  une  espèce  très  voisine  du  Lucina  rennlata  des 
calcaires  grossiers  de  Paris.  J\l.  Bastérot  d'abord,  et  M.  Grateloup,  plus 
lard  , ont  confondu  les  deux  espèces  ; nous  proposons  pour  celle  de 
Bordeaux  le  nom  de  Lucina  profiinda. 

Nous  devons  encore  mentionner  quelques  espèces  qui  ont  vécu 
plus  spécialement  dans  chacun  des  bassins  tertiaires  inférieurs.  Les 
Lucina  allaviltcnsis  et  obliqua,  Def.,  ne  se  trouvent  qu'aux  environs 
de  Valogne.  Les  Lucina  Volderiana  et  Galcotliana  de  M.  Nyst,  ne  sont 
qu'en  Belgique;  le  Lucina  GoodhalH,  Sowerby,  ne  s’est  jusqu’ici  ren- 
contré que  dans  le  bassin  de  Londres  ; tandis  que  les  Lucina  corbarica 
et  sulcosa  sont  propres  aux  terrains  nummulitiques  des  Pyrénées.  II  est 
facile  de  comprendre  que  toutes  celles  des  espèces  non  mentionnées 
précédemment  sont  particulières  au  bassin  de  Paris , et  lu  caractérisent. 

Les  sables  de  Fontainebleau  et  les  couches  qui  les  représentent  dans 
le  Limbourg  et  sur  les  bords  du  Rhin,  renferment  huit  espèces,  sur 
lesquelles  nous  devons  nous  arrêter  un  moment;  plusieurs  so  trouvent 
en  même  temps  dans  le  bassin  de  Paris  et  dans  d'autres  localités.  Ce 
sont  les  Lucina  squamosa  , Tfiierensi  et  Heberti.  Nous  avons  vu  que  le 
Thierensi  est  ÏAlbcHa  do  M.  Nyst , et  nous  proposons  le  nom  de  Lucina 
Heberti  pour  l’espèce  confondue  avec  le  Saxorum  par  Goldfuss.  Le 
Luciiia  tenaislria  se  trouvé  a AIzey  et  à Klainspauwen.  Le  Parvuîa  de 
Munster  se  montre  dans  les  mêmes  lieux,  et  de  plus  à Cassel,  d’après 
M.  Philippi.  Il  en  est  de  même  du  Slriatula  de  Nyst.  Goldfuss  a assi- 
milé au  Lucina  denlala  , de  Bordeaux , une  petite  espèce  qui  est  abon- 


LES  LÜCINES. 


783 

dante  à Bunde  el  à Cassël  ; cependant  ces  coquilles  offrent  des  caractères 
qui  les  distinguent  constamment;  l’espèce  de  Goldfuss  devra  donc 
recevoir  un  autre  nom , et  nous  lui  imposons  celui  de  Cordiformis , à 
cause  de  La  profondeur  de  ses  valves. 

Quarante-trois  espèces  sont  connues  dans  l’étage  tertiaire  moyen; 
déjà  dans  cet  étage  commencent  à se  montrer  un  assez  grand  nombre  des 
espèces  qui  ont  leurs  représentants  dans  la  nature  actuelle.  Nous  les 
voyons  apparaître  dans  les  divers  bassins  du  môme  âge;  quelques  unes 
échappent  aux  dépôts  plus  récents , quelques  autres  s'y  mêlent  avec  une 
nouvelle  population  ; parmi  les  espèces  perdues , il  y en  a aussi  quelques 
unes  qui  passent  dans  l'étage  tertiaire  supérieur;  le  plus  grand  nombre 
reste  a ttaché  à l’étage  qui  les  a vus  naître  et  qui  les  voit  également  périr. 

II  y a de  ces  espèces  qui  sont  localisées;  nous  en  comptons  six  dans 
les  couches  du  Piéniont»  la  Superga,  Tortone,  etc.  ; parmi  lesquelles 
nous  citerons  le  Luc/na  miocemctt,  ['Unguis^  \eTau)'inia.  Sept  espèces 
sont  propres  au  bassin  de  l’Adour,  el  ne  se  montrent  pas  ailleurs  : ce 
sont  les  Lucina  dentata  , Neglecta,  de  Bastérot,  Trigonella , profunda  ^ 
muUilameîlata , globulosa  et  globularis;  cette  dernière  espèce  devra 
recevoir  un  autre  nom  ; celui-ci  ayant  été  employé  depuis  longtemps  par 
Lamarck , et  attaché  à une  espèce  vivante , nous  proposons  pour  elle  le 
iiohi  du  savant  qui  en  a fait  la  découverte , Lncina  GrateloupL  Deux 
espèces  les  Lucina  exigua  el  nivea,  d'Eichwald , paraissent  ne  pas 
sortir  du  bassin  tertiaire  du  Nord. 

Voici  quatre  espèces  (pii  méritent  une  attention  toute  spéciale,  parce 
que,  sans  quitter  l’étage  moyen  , elles  se  trouvent  dans  plusieurs  loca- 
lités à la  fois. 

1“  Lwcma  îamellosa , Def.,  confondue  par  M.  Grateloup  avec  le 
Sqiiamula  de  Paris  ; se  trouve  en  môme  temps  en  Piémont,  à Dax,  à 
Bordeaux  et  dans  le  bassin  de  Vienne. 

Lucina  Agassisi , Michelotti , s’est  rencontrée  à Turin  , à Dax  et 
à Bordeaux. 

3°  Lucina  Dujardinii , Desh.  Nous  donnons  le  nom  de  ce  savant 
plein  de  mérite  à l'espèce  qu’il  a prise  pour  le  Lucina  lactea;  ces  deux 
espèces  sont  extrêmement  voisines , cependant  la  fossile  a quelques 
caractères  constants  (jui  la  différencient  de  1 espèce  vivante;  elle  se  trouve 
à Turin  et  dans  les  faluns  do  la  Touraine. 

4“  Lucina  scopuloruin  , Brong.  Celle-ci  a un  intérêt  bien  plus  grand 
encore  que  les  précédentes;  car  elle  se  présente  à la  fois  et  en  abon- 
dance dans  tous  les  bassins  de  l’étage  tertiaire  moyen  ; elle  est  du 
Vicentin , de  Bordeaux  et  de  Dax,  des  faluns  de  la  Touraine.  M.  Dubois 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


784 

•(le  Montpëreaux  l’a  décrite  de  Wolhynie,  sous  le  nom  de  Lucma  incras- 
sata;  elle  se  trouve  également  aux  environs  de  Vienne. 

Nous  avons  trois  espèces  qui  ont  pris  naissance  dans  l’étage  moyen  , 
et  qui  remontent  dans  l’étage  supérieur  pour  s*y  éteindre. 

1°  Lucma  leoiiina,  Bastérot;  elle  est  à Bordeaux,  k Vienne  et 
à Asti, 

2°  Lncîna  astensis  qnl J sans  sortir  du  Piémont,  est  dans  les  deux 
étages  tertiaires. 

3”  Lucina  transversa ^ Bronn,  nommée  plus 'lard  Irregularis,  par 
Audrzjousky,  et  confondue  par  M.  Bastérot  avec  le  Gibbosuîa  de  Paris. 
Cette  espèce  est  particulièrement  commune  dans  l’étage  moyen,  mais 
elle  passe  dans  l’étage  supérieur,  d’après  M.  Phiiippi  ; elle  .est  en 
Podolie,  à Bordeaux,  à Turin  et  en  Sicile. 

Des  sept  espèces  encore  vivantes,  qui  commencent  dans  l'étage 
tertiaire  moyen,  il  y on  a deux  qui  ne  se  retrouvent  pas  dans  l'étage 
supérieur,  ce  sont  le  Lucina  ornata,  Agassiz,  el  Columbella , Lamie. 

4®  Le  Lucma  ornata  a été  séparé  du  Divaricala  pour  l’espèce  qui 
est  si  abondante  à Bordeaux,  à Dax  , en  Touraine,  et  dans  les  autres 
bassins  du  môme  âge,  Vienne,  la  Wolhjmie,  etc.  ; il  vit  aujourd'hui  au 
Sénégal;  ce  n’est  pas  celte  espèce  qui  est  en  Sicile  et  en  Italie;  c’est 
le  Bharicala  véritable  qui  se  trouve  dans  ces  lieux. 

2°  Le  Lucma  cohmbellaest  encore  plus  répandue  que  la  précédente; 
elle  est  en  abondance  dans  tous  les  bassins  depuis  la  Wolhynie  et  la 
Podolie  jusqu'à  la  Snperga  près  de  Turin  ; une  variété  peu  importante  a 
été  distinguée  sous  le  nom  de  Lucina  candida,  par  M.  Eichwald.  Cette 
coquille  est  vivante  dans  les  mers  du  Sénégal  où  elle  est  très  abon- 
dante. M.  Phiiippi  en  cite  une  valve  fossile  de  Sicile , dans  un  tuf  basal- 
tique ancien,  mais  est-ce  bien  identiquement  la  même  espèce?  Nous 
faisons  cette  question  parce  que  cette  espèce  se  trouverait  avec  d’autres 
beaucoup  plus  récentes  qui,  pour  la  plupart,  vivent  encore  dans  la 
Méditerranée. 

Les  six  espèces  suivantes  passent  dans  les  terrains  supérieurs  et 
vivent  encore  aujourd'hui. 

3®  Lucma  spmî/cra , Philjppi , Lucina  hyatellokles , Bastérot,  Venus 
spinifera,  Monlagu  , est  une  petite  coquillp  aplatie , ornée  d’un  rang 
d'écaillcs  spiniformes  sur  le  bord  du  cors?!et;  elle  est  fossile  à Bor- 
deaux, à Turin,  et  dans  l’étage  supérieur  en  Sicile,  en  Céphalonie,  etc. 
Elle  est  vivante  dans  l'Océan  d’Europe  ; nous  en  avons  un  individu  de 
la  côte  occidentale  de  l’Afrique. 

4"  Lucina  Inpiims  (^Venus  hipinus,  Brocciii);  elle  est  distribuée  de  la 


LES  LUCliNES.  786 

même  manière  que  la  précédente , mais  de  plus  elle  est  en  Morée  et  à 
Turin  ; elle  vit  dans  TOcéan. d'Europe.  «* 

5“  Lucina  pecten^  Lamk.  Cette  coquille  est  très  abondante  dans  toute 
la  Méditerranée  ; elle  est  fossile  en  Sicile  et  en  Morée.  Nous  la  con- 
naissons également  de  Saint-Avit,  departement  des  Landes,  d’où 
M.  Hébert  Ta  reçue;  elle  est  également  en  Wolhynie;  elle  nous  a été 
communiquée  de  cette  dernière  localité  par  M.  de  Hauer. 

6“  LucÎ7ia  rotundata  , Desh,.,  TeUina  rolwulata  , Mont,,  Diplodonta, 
Philippi,  est  une  coquille  qui  aujourd’hui  vit  uniquement  dans  la  Médi- 
terranée; autrefois  elle  occupait  une  plus  vaste  étendue,  puisqu’elle  se 
retrouve  dans  le  crag  d’Angleterre,  au  dire  de  M.  S.  Wood;  elle  est 
aussi  fossile  en  Sicile  et  en  Morée. 

7°  Lucina  spurîa  j Desh.,  Venus  spuWa,  Gmelin , Lucina  raâula  ^ 
Lamk,,  Venus  circinnata,  Brocchi,  Lucina  anliqüata  ^ Sowerby, 
Lucina  affiiiis , Eichwald  ; c’est  peut-être  la  Venus  borealis  de  Linné, 
mais  nous  n’avons  aucun  moyen  de  nous  en  assurer,  la  description  de 
Linné  étant  insuffisante.  Voilà  une  espèce  qui  a reçu  cinq  noms;  nous 
avons  dû  reprendre  le  plus  ancien,  celui  de  Gmelin.  Vivante  dans  tout 
rOcéan  d’Europe , depuis  les  mers  de  Norwége  jusqu’à  la  Méditerranée; 
elle  est  abondamment  répandue  à l’état  fossile  dans  le  crag  d'Angle- 
terre et  de  Belgique.  M.  de  Hauer  nous  l’a  communiquée  de  Wolhynie, 
où  elle  a été  également  rencontrée  par  M.  Dubois  de  Montpéreux*; 
enflii,  elle  est  dans  les  terrains  supérieurs  en  Italie,  en  Sicile  et  à 
Üddevalla  en  Norwége. 

Nous  avons  déjà  cité  deux  espèces  du  crag;  elles  ne  sont  pas  les 
seules  qui  se  trouvent  dans  ce  terrain , il  y en  a sept  autres , dont  les 
unes  sont  propres  au  crag  d’Angleterre  et  les  autres  à celui  de  Belgique. 
Il  paraîtrait  qu’une  seule,  Luema  aslartea , Nyst,  serait  commune  aux 
deux  pays,  mais  nous  pensons  que  les  rapports  des  espèces  entre  elles 
seront  changés  par  une  étude  ultérieure  que  nous  n’avons  pu  entre- 
prendre, faute  de  matériaux  suffisants. 

En  comprenant  les  cinq  espèces  précédentes  parmi  celles  de  l’étage 
supérieur,  nous  en  comptons  vingt  seulement  ; la  différence  dans  le 
nombre  des  espèces  des  deux  terrains  est  de  plus  de  moitié , et  encore 
pourrait-on  dire  de  près  des  deux  tiers , si  l'on  excluait  les  cinq  espèces 
communes  entre  les  deux  épêques  tertiaires. 

Six  espèces  du  terrain  tertiaire  supérieur  sont  déjà  éteintes  ; parmi 
elles  nous  remarquons  deux  Luema  gîobosa:  l’une  citée  par  M.  Sis- 
monda  dans  son  Stjnopsis , comme  inédite  du  Musée  de  Turin  , où  elle 
a été  nommée  par  Bonelli  ; l’autre  est  le  Globosa  de  Defrance , Venus 
T.  ï.  2®  PARTIE.  5o* 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


786 

gîohosa  de  Brocchi.  Nous  avons  dit  précédemment  à quelle  espèce 
vivante  ce  nom  de  Ghhom  devait  être  appliqué;  les  deux  espèces  fos- 
siles que  nous  venons  de  citer  devront  donc  recevoir  d'autres  noms  : à 
la  première  nous  donnons  celui  de  Litchia  Sismondæ;  a la  seconde 
celui  de  Lucina  Brochii,  Brocchi  a cru  trouver  fossile  en  Italie  l’ana- 
logue d’une  Lucine  des  mers  d’Amérique,  connue  sous  le  nom  de 
Pensylvanica  ; le  rapprochement  des  deux  types  nous  a fait  reconnaître 
les  différences  spécifiques  qui  les  séparent.  En  conséquence  l’espèce 
fossile  a dû  prendre  un  autre  nom , et  noos  lui  avons  imposé  celui  de 
Lucina  orbicularis;  elle  se  trouve  en  Italie  et  en  Morée. 

Des  sept  espèces,  dont  les  analogues  vivent  encore,  trois  se  trou- 
vent dans  la  Méditerranée  , et  sont  fossiles  en  Sicile  : ce  sont  les  Lucina 
fragilis  , digitalis  et  commutata. 

Le  L«cma  îaetea,  vivante  dans  les  mers  d’Europe,  est  aussi  fossile 
en  Sicile , mais  de  plus  à Asti  et  en  Morée. 

Les  Lucina  flexuosa  et  undata , vivantes  dans  l’Océan  d’Europe , sont 
fossiles  dans  les  terrains  supérieurs  de  l’Angleterru. 

Avant  de  franchir  l’océan  Atlantique  pour  examiner  les  Lucines  du 
continent  américain  , nous  nous  arrêterons  en  Égypte  pour  y constater, 
dans  les  terrains  quaternaires,  la  présence  du  Lucina  tigerina,  qui  vit 
dans  la  mer  Bouge  ; nous  nous  arrêterons  aussi  à la  Guadeloupe , où  la 
même  espèce  est  également  fossile  et  vivante  ; mais  elle  n’est  pas  la 
seule,  elle  est  accompagnée  des  Lucina  jamaicensis  et  edentula;  nous 
avons  le  moule  d'une  quatrième  espèce , qui  pourrait  bien  être  celui  du 
Lucina  punclata  , mais  il  est  plus  renflé  que  cette  espèce  ne  Test  habi- 
tuellement. 

Les  terrains  tertiaires  de  l’Amérique  septentrionale  sont  fort  riches 
en  Lucines  fossiles.  M.  Conrad  en  a signalé  récemment  quatre  espèces 
dans  un  terrain  tertiaire  inférieur  très  analogue  à celui  de  Paris , par 
l'ensemble  de  la  faune  ; parmi  ces  espèces,  il  en  est  une,  le  Perîevis,  qui 
a la  plus  grande  ressemblance  avec  le  Retiulala  de  Grignon  ; les  autres 
espèces,  au  nombre  de  quatorze,  se  distribuent  dans  les  terrains  plus 
récents.  Un  naturaliste  américain  d’un  grand  mérite , M.  Lea , en  a 
fait  connaître  six  espèces  (conlnhulfon  on  Geoîogy)^  provenant  d'un 
terrain  tertiaire  moyen  ou  inférieur  de  l’Alabama  ; parmi  elles , celle  que 
l’auteur  nomme  Corniita , a beaucoup  de  rapports  avec  le  Lucina  angu- 
lata  (Aæfutis  angulatiis,  Sow.).  Los  autres  espèces  de  TAmérique  ont 
été  décrites  par  M.  Say  ou  par  M.  Conrad  ; elles  sont  du  Maryland , de 
Claiborne  et  des  bords  du  Mississipi. 

Enfin  , pour  terminer  cette  longue  série  d’espèces,  nous  dirons  que 


LES  LUCINES. 


787 

M.  d’Orbigny  a trouvé  dans  les  terrains  tertiaires  supérieurs  une  espèce 
qui  vit  encore  dans  les  mers  du  Chili , c’e'st  \e  Lxtcîna  fialagonica. 

Nous  n'avons  pu  nous  dispenser  d’entrer  dans  les  longs  détails  qui 
précèdent.;  il  nous  a été  impossible  d’abréger  davantage  ce  qui  con- 
cerne un  genre  aussi  important  qui  celui-ci,  dans  lequel  sont  rassem- 
blées plus  de  trois  cents  espèces.  Près  des  trois  quarts  dè  ces  coquilles 
sont  fossiles  et  réparties  dans  toutes  les  formations.  Nous  avions  aussi 
plus  d’un  double  emploi  à rectifier,  plus  d'une  erreur  à redresser,  pour 
rétablir  d’une  manière  certaine  les  espèces  de  chaque  formation  de 
chaque  térrain.  Nous  ne  suivrons  jamais  le  fâcheux  exemple  de  ces 
naturalistes  qui  semblent  faire  sortir  la  science  toute  faite  de  leur 
conception,  sans  aucune  discussion,  sans  rappeler  aucun  précédent, 
dédaignant , pour  ainsi  dire,  de  s’expliquer  et  d’éclairer  leurs  lecteurs , 
s’imaginant  sans  doute  par  là  persuader  qu’ils  en  sont  les  premiers  in- 
venteurs. 

Lncine  d’Emond.  Lucina  untoniformis , Desh.  , ^ . 

PI.  14  Ô25.  f.  7.  8.  9. 

E,  Testa  ovato^rotunâatâ^  rugis  transvhrsalibus^  tenue  stnatis  obâuctâ; 
hinula  lanccolatà;  umhonibus  maxime  recurvntis, 

K/ï/owr/or/niV.  Phillips,  Geol,  ofYo)k5,  t.a.p.  209.  pL  5.  f.  i3. 

Edmondia  unioniformis\  Koninck,  Descript.  des  auim.  foss.  de  Belg. 
p.  67.  pl.  I.  f.  4. 

Id,  de  Verneuil,  Paléont.  de  Rassie,  p.  Sgo.  n®  i« 

Habile.,.  Fossile  dans  le  terrain  carbonifère  de  Belgique,  de  l’Angle- 
terre et  de  l’Oural. 

• 

Celte  coquille  est  celle  pour  laquelle  M.  de  Koninck  a fondé  son  genre 
Edmondia.  Nous  avons  dit  pourquoi  nous  n'adoptions  point  ce  genre , il 
présente  tous  les  caractères  de  l’un  des  groupes  encore  vivants  du  genre 
Lucina.  Cette  coquille  est  ovale,  orbiculaire,  gonûée,  subcordiforme  ; 
elle  est  inéquilatérale;  sa  surface  extérieure  est  couverte  de  rides  on  de 
sillons  inégaux  produits  par  des  accroissements.  Les  bords  sont  sim- 
ples, et  la  coquille  parfaitement  close.  La  charnière  se  compose  d’une 
lame  assez  large,  un  peu  oblique,  sur  laquelle  s’attachait  un  ligament 
externe  presque  complètement  caché  par  le  bord  saillant  du  corselet. 
Cette  lame  se  continue  en  avant  au  delà  du  crochet , et  M.  de  Koninck 
a cru  voir  dans  cette  particularité  un  caractère  d’une  grande  valeur  de 
son  nouveau  genre  ; mais  si  l’on  vient  à supprimer,  par  la  pensée , les 

5o* 


) 

^88  VINGTIÈME  FAMILLE. 

petites  dents  cardinales  du  Lucina  lactea  j par  exemple,  on  voit  aussi 
la  lame  cardinale  dépasser  le  crochet  et  s’étendre  assez  loin  sur  le  côté 
antérieur.  On  ne  peut  juger  des  impressions  musculaires  et  du  manteau 
que  d’après  des  moules  intérieurs  de  la  coquille.  Les  impressions  mus- 
culaires sont  grandes,  ovalaires,,  presque  égales  et  assez  semblables  à 
celles  des  Diplodontes.  L’impression  palléale  est  simple  et  peu  apparente. 

Cette  coquille  a 22  millimètres  de  diamètre  transverse  et  20  de 
hauteur.  , 

Lucine  changeante.  Lticzna  mutabilisy  Lamk. 

PI.  16.  f.  G. 

X.  Testa  orbicniato-ovaiâ^  obliqua,  oompressâ ; intiis.  valvîs  radiaùin 
striatis ; cardine  edentuîo^ 

Venus  mutahiVis.'LtimV^  Ann.  du  Mus.  vol.  7.  p.ôr.et  t.  9.  pl.  Si.  f.  9. 

Luctnajnutabills,  Lamk.  ans.  vert,  t,  5,  p.  540,  n®4. 

ldi  Defr.  Dict.  sc.  nal.  t.  3 

Desh.  Descr.  des  Coq.  foss.  de  Paris,  t.  i,  p.  92  pl.  T4,  f.  6,  7. 

Id,  Encycl.  mélli.  Vers.  t.  2.  p.  573.  n®  4. 

Sow.  Gener.  of  shells.  n®  27.  f.  5, 

Desli.  Lamk.  Anim.  s.  vert,  2*2  édit.  l.  6.  p.  224,  n®  4* 

De  lïurf,  Orycl.  de  Brux.  pl.  18.  f.  e. 

Galeotti,  Géog.  du  Brab,  Mem.  acad.  Brii.\,  t.  r2.  p,  157.  n** 

Oral.  Cat.  anim.  foss.  de  La  Gironde,  p.  64.  n®  719. 

Eoliez  et  MicliauJ,  Cnl.  Moll,  de  Douai,  t.  2.  p.  199.  ti"  4, 

Nyst,  Defcr.  coq.  foss.  Belg.  p;  120.  n°  78. 

Habile...  Fossile  dans  le  bassin  de  Paris,  dans  celuideValogne,  en  Belgique, 
aux  environs  de  Nice,  à la  Pallarra , dans  le  terrain  nummnlilique. 

Cette  coquille  est  trop  connue  pour  avoir  besoin  d'ôtre  décrite  de 
nouveau.  Nous  ferons  observer  seulement  que  Lamarck  confondait  avec 
elle  une  espèce  qui  en  est  voisine,  d’où  lui  est  venu  probablement  le 
nom  4e  MtUahilis  que  lui  a imposé  le  célèbre  professeur.  Cette  coquille 
n’est  pas  plus  variable  que  les  autres  Lucines  ; il  suffit  de  l’avoir  vue  une 
fois  pour  la  reconnaître  toujours  avec  la  plus  grande  facilité.  Sa  charnière 
est  sans  dents  ; son  impression  musculaire  antérieure  est  excessivement 
longue,  et,  enfin,  la  surface  interne  des  valves  est  profondément  découpée 
par  des  sillons  nombreux  et  rayonnants.  Cette  coquille  acquiert  quelque- 
fois un  volume  assez  considérable. 

Les  grands  individus  ont  0 à îO  centimètres  de  longueur. 


LES  LÜCINES, 


789 


Lucine  dts  rochers.  Lucina  scopulorum^  Brong. 

PI.  16.  f.  7.  8. 

Testa  QrbicuJarl^  îçnticuîarî  ^ dcprcs^â  obliqua  transversim  irregu- 
lariter  striata^  ninbombus  minimis  obliquis;  îunuîâ parva^  ovato^lan^ 
ceolatâ;  cardine  edentulo } impressione  muscuîari  anticâ  angustâj 
subperpendicuîari, 

Brongniart,  Terr,  viceàt.  p.  79. 

Bastérot,  foss,  de  Bord.  p.  87.  11°  8. 

Lttcuia  incrassata.  Dubois  de  Mootp.  Foss,  de  Wolhy«  p.  58.  pl.  6« 
f.  I,  a,  3. 

Dujardin,  Foss.  de  Tour.  p.  aSg,  n®  5. 

Graleloup,  Cal.  zool.  p.  64.  n°  7. 

Habile...  Fossile  dans  le  Yicenlrn,  à Bordeaux,  à Dax,  dans  les  faluns 
de  la  Touraine,  en  Podülie , en  Wolhynie,  aux  environs  de  Vienne. 

Coquille  très  répandue  dans  l'élage  tertiaire  moyen,  elle  est  commune 
dans  toutes  les  localités  où  ce  terrain  existe;  elle  peut  donc  servir  à le 
caractériser,  et  à cause  de  cela,  elle  mérite  d’Ôtro  connue  des  géolo' 
gués.  Elle  est  obrondo , circulaire,  déprimée  et  lenticulaire;  sa  surface 
extérieure  est  couverte  de  stries  peu  régulières  d'accroissement.  Les 
crochets  sont  petits , obliques  ; ils  s’inclinent  au-dessus  d’une  lunule  très 
petite , ovale , lancéolée , et  profondément  creusée.  Au-dessous  de  cetto 
lunule,  quelques  rides  irrégulières  semblent  séparer  une  lunule  plus 
grande.  Le  èorselet  n'est  point  marqué;  les  bords  des  valves  sont  sim- 
ples : le  bord  cardinal  est  étroit , il  ne  porte  aucunes  traces  de  dents , 
soit  cardinales,  soit  latérales.  Une  rainure,  assez  profonde,  détache  la 
nymphe  du  ligament,  et  elle  est  dominée  par  un  bord  fort  saillant  du 
corselet.  L’impression  musculaire  antérieuro  est  étroite  et  peu  allongée  ; 
elle  se  dirige  perpendiculairement  de  l’extrémité  du  bord  cardinal  vers 
le  bord  inférieur.  Ce  caractère  est  l'un  de  ceux  qui  distinguent  le  mieux 
cette  espèce  et  la  fait  reconnaître  parmi  ses  nombreuses  congénères. 

Cette  coquille  a 40  à 45  millimètres  dans  scs  doux  diamètres. 

Lucine  colombelle.  Lucina  columbella^  Lamk. 

PL  15.  f.  4.  5.  6, 

Z.  Testa  aîbà,  suhorblculatâ , convexo^gibbosâ,  transversim  multila- 
ineüata;  lunttlâ  magna  ^ cordatd  y sulco  profundo  separatu:  ano 
magna  y ovafo,  lamelloso;  sulco  distincto^ 

Bastéroi.  de  la  Sôc,  d’hi'l.  tiat.  de  Paris  pi.  5.  f.  ir. 


790 


VINGTIEME  FAMILLE. 


MatheroD,  Gat.  méth.  p.  i45,  n°  102. 

Schmidt,  Petref.  Buch.  p.  i55. 

Smith,  quart.  Jouro.  geol,  soc.  t.  3.  p.  412. 

Philippi,  Moll.  Sicil.  L i,  p.  35. n®  7 ; t.  2.  p.  26.  8. 

Lucina  Basterotî,  Agassiz,  Etud,  crit.  p.  58.  n°  2.  pl.  2.  f.  i à 6,. 
Lucina  vulnerata,  DeFrahce.  Dict.  sc.  nat.  t.  27.  p.  275. 

Liicina  candida.  Agassiz,  Élud.  crit.  p.  Sq.  n®  3.  pl,  2.  f.  7 à i3. 
Lucîna  Sismonda,  Syu.  Ped.  foss.  p.  16. 

Dubois  de  Monip.,  Foss,  de  Wolhy.  p.  57.  no  3.  pl,  6,  f.  8,  1 1 . 
Lucina  candidù.  Eichwald,  Arch.  de  Karst.  t.  2.  p.  i3i. 

Dujardin,  Tour,  p,  258.  ii“  i. 

Desh.  Encycl.  mélh.  Vers,  t,  2,  p.  383, 

Pusch,  Pol.  paléout.  p.  i83. 

^roun,  Lelb.  geogu.  t.  2.  p.  gSg.  pl.  37.  f.  i3, 

Hauer,  Jahrb.  1837,  p.  423,  661, 

Grateloup,  Cat.  zool.  p.  64.  u**  6* 

Geioitz,  Giundriss,  t.  2.  p.  439.  pl.  x8.  f.  9. 

Habite  le  Sénégal.  Fossile  à Bordeaux  , Dax , Turin , faluns  de  la  Tou- 
raine , la  Podolie , la  Wolhynie , les  environs  de  Vienne. 

Cette  coquille,  très  abondante  dans  les  mers  du  Sénégal,  présente 
Tanalogie  la  plus  incontestable  avec  les  individus  que  l’on  trouve  fossiles 
en  grand  nombre  dans  toutes  les  localités  où  se  montre  l’étage  tertiaire 
moyen.  Lorsque  l’on  rassemble  un  grand  nombre  dindividus,  soit 
vivants , soit  fossiles , on  remarque  quelques  variétés  parmi  lesquelles 
on  distingue  celle  pour  laquelle  M.  Eiohwald  a fait  son  Lucina  candida. 
Celte  même  variété  a été  acceptée  comme  espèce  par  M.  Agassiz , ce 
qui  nous  prouve  que  ces  savants  naturalistes  n'avaient  pas  sous  les  yeux 
un  nombre  suffisant  d’individus  provenant  de  localités  diverses.  11  n’est 
pas  nécessaire  que  nous  reproduisions  ici  la  description  d’une  coquille 
aussi  connue  que  le  Lwcina  co/um6ei/a.  Les  individus  jeunes  sont  plus 
aplatis,  les  vieux  sont  presque  sphériques,  La  surface  est  ornée  de 
lames  Iransverses  courtes , régulières , concentriques  plus  ou  moins 
serrées  selon  les  individus , toujours  plus  rapprochées  vers  le  bord  des 
valves  des  vieux  individus.  Cette  coquille  est  remarquable  par  la  gran- 
deur de  sa  lunule  et  de  son  corselet  qui  sont  presque  égaux , et  l’un  et 
l’autre  séparés  par  un  sillon  profond.  Les  bords  des  valves  sont  finement 
dentelés.  La  charnière  porte  deux  petites  dents  cardinales  inégales  et 
deux  grandes  dents  latérales.  La  dent  latérale  antérieure  de  la  valve 


LES  LÜCINES.  791 

droite  est  conique , pointue  et  un  peu  comprimée  à la  base.  Cette  coquille 
est  toute  blanche  en  dedans  ; elle  est  jaunâtre  en  dehors. 

Les  grands  individus  ont  27  millimètres  do  hauteur  et  24  de  largeur. 

Lucine  spinifere.  Luçina  spinifera^  Philippi. 

PL  17.  f.  3.  4.  5. 

Z.  Testa  ovatâ^  transversâ  ^ lenticularî ^ compressiusculâ  , striis  conccn" 
tricis  numerosis  lamelltformibus  ; îunidâ  impressâ  îanceolatâ  ; area 
utrinque  squamis  brevibits  spinosis  cinctâ;  cardine  dentibus  latera^ 
îibns  remotis, 

Thomp,  Fauna  Jreî,  (Invert,),  p,  a6i. 

Venus  spinifera.  Mont.  Testac.  Brit. 

Lucina  hiateîloides.  Ba&t.  foss.  de  Bord,  p.  87,  pl.  5«  f,  i3. 

Uicina  hiateîloides,  Sismonda,  Synop.  Ped.  foss.  p.  17. 

Lucina  spinifera,  Slrickland,  quart.  Jour.  geol.  soc,  t.  3.  p.  iio. 

Lucina  hiateîloides,  Michelotti,  Faune  miocène,  p.  116.  pl.  4.  f.  ii, 

Catlow,  Couch.  nom.  p.  27. 

Hanley,  Desc.  cat.  p.  78. 

Lucina  hiateîloides,  Phil.  Moll.  SicÜ.  t.  i.  p.  32.  11®  2.  p.  34.  n“  3. 

Lucina  spîrifera,  Phil.  Moll.  Sicil.  t.  2.  p.  25.  n'’  3.  p.  26,  n®  3. 

Lucina  hiateîloides,  Gratel.  Cat.  zool.  p.  64.  n®  727, 

Jd.  Dujardin,  foss.  de  la  Tour,  p,  259. 

Habite  les  mers  d^Ëurope,  la  Méditerranée..  Fossile  à Bordeaux,  à 
Turin,  en  Touraine,  dans  l'étage  moyeu;  en  Sicile,  dans  Pile  de 
Céphalonie,  étage  supérieur. 

Petite  coquille  fort  intéressante;  elle  passe  de  la  Méditerranée  dans 
les  profondeurs  de  l’Océan,  et  gagne  aiusi  la  mer  du  Nord.  Elle  est 
ovale , transverse , très  comprimée  ; sa  surface  externe  est  couverte  de 
fines  lames  transverses  assez  régulièrement  espacées , mais  peu  rappro- 
chées vers  les  bords.  Les  crochets  sont  petita,  rapprochés,  comprimés; 
ils  partagent  le  bord  dorsal  en  deux  parties  à peu  près  égales  ; ils  domi- 
nent une  petite  lunule  étroite  et  lancéolée.  Le  corselet  est  lui-même  très 
étroit  et  allongé  sur  son  bord  externe  ; les  lames  s’y  terminent  en  une 
écaille  spiniforme.  Le  bord  cardinal  est  étroit  ; il  présente  deux  petites 
dents  cardinales  et  deux  dents  latérales  petites  et  peu  saillantes.  Les 
impressions  musculaires  sont  médiocres,  l’antérieure  est  bilobée,  à 
peine  prolongée, à son  extrémité  inférieure. 

Les  grands  individus  ont  jusqu’à  1 ë et  1 8 millimètres  transverses. 


VINGTIEME  FAMILLE. 


792 

Lucine  lactée.  Liicina  lactea,  Laink, 
PL  17,  f.  1.  2. 


Jv,  Testa  lentiformiy  gibbâ,  albâ  ^ yellucidà^  transversïm  tenuiter 
striata  ; natibus  tumtdis  uncinatis, 

Tellina  îactea,  Linn,  Syst.  nat.  p.  1119. 

Chemn.  Concli.  t,  6,  p.  i3o.  pl.  i3.  f.  i25, 

Scrot.  EinI,  t.  2.  p.  659.  . 

Gmel.  p.  3240.  U®  69, 

Moulag.  Test.  Brit.  p.  70.  pl.  2.  f.  4. 

Matou  et  RacLut,  Trans.  Ihin.  t.  8.  p.  56» 

Dorset,  Cat.  p,  3o.  pl.  5,  ï.  9. 

Wood,  gener.  Couch.  p.  187.  n®  76. 

Dilhv.  Cat.  l.  r.  p.  99.  n®  62. 

Amphidesina  laccea.  LamU.  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  49 r.  u®  3. 
tuciniL  Iactea,  Id,  An,  s.  vert.  t.  5.  p.  642.  n“  12. 

Id.  Payr,  Cal,  des  Moll,  de  Corse,  p.  4x.  n®  67. 

An  eadcmp  Loripède  lacté.  Blainv.  Malac.  pl.  72.  f.  n. 

Lucina  amphidesmoides.  Desh.  Encycl.  méth.  Vers.  î.  2.  p.  375. 
Lucina  Iactea»  Desli,  Lamk.  An.  s,  vert.  2'  édit.  t.  6.  p.  228.  n°  12, 
Amphidesina  lucinaîis,  Larak,  An.  s.  vert.  t.  5.  p.  491.  n®  6. 

Tellina  îactea,  TuiTou,  Linn.  Syst.  t.  4*  p.  igS. 

IJ^  Id,  Brit.  fauna.  p,  i5i. 

Id.  Id.  Concli.  dict.  p.  176, 

Turlon,  Concli.  insul,  Brit.  p.  112.  pl.  7.  f.  4,  5. 

Wood,  Ind.  test.  pl.  4*  k 76- 
Encycl.  méth.  Vers,  pl,  286.  f,  i, 

Philippi,  Mol!.  Sicil.  t,  i,  p,  33.  34.  n°  ü.  t.  2.  p.  20,  26. 

Callcw,  Concli.  nom.  p.  26. 

Jlanley,  Descr,  cat.  p.  76, 

Krauss,  Sudafr.  Moll.^p.  5, 

Fossilis,  Philippi,  Loc,  cit»  t.  i.  p.  34*  11®  6.  , 

Desh.  Expéd.  sc.  de  Morée.  Moll.  p.  gS.  11®  89. 

Habite  rOcéan  d’Europe,  la  Méditerraucç.  Fossilç  à Asli^  en  Morée, 
en  Sicile. 

La  Lucine  lactée  est  une  coquille  bien  connue , qui  est  devenue 
cependant  le  sujet  de  plusieurs  erreurs.  LamarCk,  par  exemple,  la 
rapporte  en  môme  temps  à deux  genres  différents,  les  Amphidesmes  et 


LKS  LUCINES. 


793 

les  Lucines  ; il  confond  avec  elle  une  espèce  qui  en  est  distincte  , 
quoique  très  voisine  et  provenant  dos  mômes  mers.  Nous  avions  pensé 
autrefois  qu’une  coquille  des  faluns  de  la  Touraine  est  analogue  à 
l’espèce  vivante.  M.  Dujardin  a adopté  celle  opinion,  mais  nous  avons 
reconnu  depuis  que  l’espèce  fossile  a des  caractères  qui  lui  sont  pro- 
pres. Le  Lucina  lactea  est  une  coquille  orbiculaire,  lenticulaire , dont  la 
surface  est  irrégulièrement  striée  par  des  accroissements  ; les  crochets 
sont  petits,  rapprochés,  peu  obliques;  la  lunule  est  à peine  marquée  ; 
elle  est  très  petite  ; les  bords  sont  simples , minces  et  tranchants  ; la 
charnière  est  étroite , elle  porte  au  centre  les  rudiments  d’une  ou  deux 
dents  cardinales  et  des  vestiges  de  dents  latérales.  Un  sillon  profond  est 
creusé  au-dessous  du  bord  du  corselet  pour  recevoir  le  ligament.  L’im- 
pression musculaire  antérieure  est  étroite , elle  est  assez  régulièrement 
courbée  dans  sa  longueur,  et  elle  so  détache  de  l'impression  palléalo  en 
formant  avec  elle  un  angle  très  aigu. 

Cette  coquille  a 23  à 30  millimètres  do  diamètrè, 

JjUcine  obronde.  Lucina  rotundata^  Desh. 

L.  Testa  convexâ^  lamisciila^  margine  subundato  ^ valvis  bidcntatis, 

Teîlina  rotundata.  Mont.  test.  Brit.  p.  71,  pl.  2.  f.  3. 

Id,  Maton  et  nacket,  Linn.  trans.  t.  3.  p.  56. 

id,  Dorset,  Cat.  p,  3o.  pl.  5.  L 8. 

Id,  Wood,  gener,  Conch.  p.  187,  n®  77. 

Id,  Dillw.  Cat,  t.  I.  p.  99.  11°  63. 

Id,  Wood,  Ind.  Test.  pl.  4*  f-  77.  * 

Diplodonta  rotundata,  Philippi,  Moll.  Sîcil.  t.  i,  p,  3i.  p).  4.  f.  7,  et 
t,  2.  p,  24. 

Teîlina  rotundata,  Penu.  Zooî.  Prit.  t.  4.  p.  182. 

Pectuncuîus  tentiis.  List.  Couch.  pl.  294,  f.  i34, 

Tlioms.  Faitna,  Irl.  p.  261. 

Tnrion,  Brit.  Biv.  pl.  7.  f.  3.  p.  114. 

Callow,  Conch,  nom,  p.  27. 

Haniey,  Desc.  cat.  p.  76, 

Turton,  Conch.  dicl.  p.  176. 

Fossîîis,  Morris,  Cat.  of  Brh.  fois.  p.  89. 

Desli.  Expéd.  sc.  de  Morce  Moll,  p,  94.  n®  38. 

S.  Wood,  foss,  crag.  Ann,  nat.  List.  t.  6.  p.  248.  n®  3. 

Habite  rOcéan  d’Europe,  la  Méditerranée.  Fossile  dans  le  ciag  d'An- 
gleterre, eji  Morce  et  en  Sicile. 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


794 

Celle-ci  appartient  au  genre  Diplodonte  de  M.  Philippi;  elle  ne  man- 
que pas  de  ressemblance  avec  le  Lucina  lupmus.  Elle  est  obronde,  assez 
épaisse  ; son  test  est  mince  et  fragile  ; il  est  partout  d'un  blanc  laiteux 
uniforme;  la  surface  extérieure  présente  dos  stries  d’accroissement  peu 
apparentes  et  très  multipliées.  Les  valves  sont  équilatérales;  le  côté 
antérieur  est  étroit  ; le  postérieur  est  beaucoup  plus  large  et  sublronqué  ; 
les  bords  sont  minces  et  tranchants;  le  cardinal  est  très  étroit , il  porte 
au  centre  deux  petites  dents  cardinales  divergentes  surxhaque  valve. 
Les  impressions  musculaires  sont  médiocres , presque  égales , ovalaires 
et  très  écartées;  elles  sont  jointes  par  une  impression  palléale  simple 
très  rapprochée  du  bord  inférieur.  Quoique  cette  coquille  ne  soit  pas 
parfaitement  circulaire,  ses  deux  diamètres  sont  cependant  égaux;  ils 
sont  de  21  millimètres. 

Lucine  tigérine.  Lucina  tigerina^  Desh. 

PI.  16.  fig.  4.  5.' 

L,  Testa  lentiformiy  convexiusculâ  deciissatim  striata , albâ;  intiis 
margine  infero  purpnreo;  ano  trigono  impresso  minimo;  impressione 
mtiscuîari  anticâ , prœlongâ;  impressione  pallii  siniplici, 

List,  Conch.  p.  337.  f»  ^74* 

Bonami,  Becr.  part.  a.  f.  69. 

Kumph.  Mus,  t,  42.  f.  H. 

Guall,  Test.  t.  77.  f.  A. 

D’Argenv.  Conch,  pl.  21.  f.  E. 

Venus  tigerina.  Linu.  Syst.  nat.  p.  ii33;  Gmel.  3283.  n°  69, 

Knorr.  Vergn.  1.  4.  pl.  a.  f.  i.;  et  t.  6.  pi.  37.  f.  2, 

Le  Codock.  Adans-  Sénég.  p.  223.  pl.  16.  f.  3. 

Fav.  Conch.  pl.  47-  L D* 

Venus  tigerina.  Chemn.  Conch.  7.  p,  6,  pl.  37.  f,  Sgo,  Sgi, 

Venus  tigerina,  Schrot,  Eiul.  t.  3.  p.  i36,  n®  25, 

Encycl.  pl.  277.  f.  4» 

Venus  ligerina.  Dillw.  Cat.  t.  i,  p.  igr.  n®  76. 

Cytherea  tigerina,  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5,  p.  574.  no  53, 

Venus,  Blainville,  Malac.  pl.  74»  h 3, 

Lucina  tigerina.  Desh.  Dict.  class.  d’hist.  nat.  t.  9,  p,  528  (1826), 

Id,  Desh.  Encycl.  méth.  Vers.  t.  2.  p.  384.  37. 

Sowerby,  Gener,  of  shelis.  4i 

Lucina  tigerina.  Desh.  dans  l.  6,.  p.  3i8. 

Callow,  Conch.  nom.  p,  27, 


LES  LUCINES. 


795 


Huiiley,  Descr.  cal.  p*  77. 

Krauss,  sud  Afr.  Moll.  p.  5. 

Habite  la  mer  Rouge,  Focéan  Atlantique,  au  Sénégal,  aux  Antilles , 
les  mers  de  Tlnde,  Fossile  en  Égypte,  à la  Guadeloupe. 

Cette  espèce  est  trop  connue  pour  avoir  besoin  d’être  de  nouveau 
décrite.  Elle  est  l’une  de  celles  que  Lamarck  rapportait  à son  genre 
Cythérée.  Le  premier,  en  1 826,  article  Lticine  du  Dictionnaire  classiquey 
nous  l’avons  remise  dans  le  genre  Lucine,  et  la  connaissance'de  l’animal 
est  venue  confirmer  notre  rectification.  Cependant  M.  Valencienne, 
dans  un  mémoire  présenté  à l’Académie  en  1844,  s’attribue  sans  façon 
le  mérite  de  cette  amélioration  que  nous  avons  fait  prévaloir  dans  toutes 
les  occasions.  Nous  avions  pensé  que  cette  espèce  avait  son  analogue 
dans  le  bassin  de  Bordeaux  ; mais  nous  avons  reconnu  depuis , en 
examinant  un  plus  grand  nombre  d’individus  fossiles , que  nous  avions 
commis  une  erreur,  ainsi  que  M.  Agassiz  l’a  reconnu  lut-méme.  L’espèce 
de  Bordeaux  devra  donc  conserver  la  dénomination  spécifique  que 
M.  Bastérot  lui  a donnée.  Le  Lncina  tigerina  n'a  été  trouvé  jusqu’ici  à 
l’état  fossile  que  dans  les  terrains  quaternaires  en  Égypte  et  à la  Gua- 
deloupe. Fossile  ou  vivante,  cette  coquille  est  très  variable;  les  stries 
transverses  et  longitudinales,  qui  en  découpent  la  surface,  sont  plus  ou 
moins  fines,  plus  ou  moins  serrées;  la  coquille,  ordinairement  com- 
primée, prend  quelquefois  une  forme  subglobuleuse  en  vieillissant.  Mais 
ces  variétés  se  rattachent  les  unes  aux  autres  par  une  série  considérable 
de  modifications  qu’il  est  nécessaire  de  rassembler  si  l’on  veut  se  faire 
une  juste  idée  de  la  variabilité  des  espèces  dans  le  genre  Lucine. 

Cette  grande  coquille  a quelquefois  8 à 9 centimètres  de  diamètre. 

Lucine  bord-rose.  Lucina  punciata  , Desh. 

PL  16.  fig.  1.  2.  3. 

X.  Testa  lentiformiy  orhicuîatâ^  convexiusculâ  ^ crassâ,  ponderosâ^ 
longitudinalîter  sulcatâ;  sulcis  planuîatis;  limho  interno  Tosco; 
discoUiteOy  subpunctato  ; irnpressione  musculari  anticày  angustd  ^ 
prœlongày  obliquatâ^ 

Cytkerea  punctata.  Lamk.  An.  s.  vert.  t.  5,  p.  574.  o?  54. 

Tenus  punctata»  Linn.  Syst,  nat.  p,  ii34j  Gmel.  p.  3284,  n®  74. 

Rumph.  Mus.  tab.  43.  f.  D. 

Gault.  Test,  tab.  75.  f,  D.  ^ 

Chemn.  Conch.  t.  7.  p.  i5.  tab.  07.  f.  397,  898. 


79*5 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


Schi'ot.  £inl.  I.  3.  p.  i4o» 

Encycl.  pl.  377.  f.  3. 

Desh,  Encycl.  mélh,  hist.  naî.  des  Vers.  t.  2.  p.  335,  n°  38. 

Lucina  piuictata.  Desh.  Dicl.  class.  d’hist.  nat,  t.  9 p.  528. 

Sow.  Gener.  ofshells,  n®  27.  f.  i, 

Keeve»  Coneb.  syst.  pl.  59.  f.  x. 

Catlow,  Conch.  nom.  p.  27, 

Hanley,  Desc.  cal.  p.  77. 

Habite  l’océan  Indien. 

Le  Lucina  punctata  est  l’espèce  la  plus  voisine  du  Tigerina.  Elle  est 
orbiculaire  , lenticulaire , comprimée  de  chaque  côté , et  cependant  assez 
épaisse.  Elle  est  presque  équilatérale  ; sa  surface  est  couverte  de  larges 
sillons  longitudinaux  et  très  aplatis.  Ils  sont  irrégulièrement  interrompus 
par  des  stries  d’accroissement.  Le  lest  est  épais  et  solide  ; il  est  d’un 
jaune  soufré  en  îedans  et  d’un  rose  pourpré  sur  les  bords.  La  charnière 
est  très  large,  elle  offre  deux  dents  cardinales , inégales  et  une  dent 
latérale  antérieure  grosse  et  épaisse;  la  dent  latérale  postérieure  man- 
que complètement.  Les  nymphes  sont  très  aplatie^.  Elles  sont  séparées 
par  un  sillon  dans  lequel  s'attache  la  tunique  externe  du  ligament , 
tandis  que  sur  leur  surface  interne  vient  se  fixer  la  portion  cartilagi- 
neuse du  même  organe. 

Cette  grande  coquille  a les  mêmes  dimensions  que  la  précédente. 

Lucine  dentée.  Lucina  dentata,  Desh. 

Pl,  16.  fig.  9:  10.  11, 

Z.  Testa  orbiculatù  •lenticnlarî  convexà  tenui^  alba^  pellucidà^  striis 
divaricatis  numerosissirnis  ornata;  urnbonibns  minimîs,  lunulâ  patya 
profundè  excavata;  cardine  angtisto  bidtntato;  dentibus  latcra- 
libus  subnuUis;  inipresstone  mnsctilari  anticu  ati^ustâ  subperpen^ 
dicularif  marginc  postico  dentieuhto^ 

♦ 

TcUhia  dentata.  Wood  gener.  conch.  p.  19^,  n*  88,  pl,  49.  f,  7. 

Id,  Dillw.  cal.  t.  t,  p,  io3.  u®  71. 

/</.  Wood,  ind.  test,  p),  4.  f.  88. 

Id,  Catlüw,  conch,  nom.  p.  26, 

Habite  la  Nouvelle-Zclande. 

Cette  coquille,  confondue  parmi  les  variétés  du  Lucina  th’uar/ca(a, 
se  distingue  non  seulément  de  celle-là , niais  encore  de  toutes  les  autres 


LES  LUCINES. 


197 

du  même  groupe.  Elle  est  orbiculaire,  lenticulaire,  assez  épaisse  ; son 
test  est  mince,  blanc  et  subtransparent.  La  surface  externe  est  cou- 
verte d’un  grand  nombre  de  stries  divergentes  plus  serrées  qu’elles  ne 
le  sont  dans  la  plupart  des  autres  espèces.  Le  sommet  de  l’angle  que 
forment  ces  stries  est  situé  à la  partie  antérieure  de  la  coquille,  vers 
le  tiers  environ  de  son  diamètre  antéro-postérieur.  Les  crochets  sont 
petits,  rapprochés,  à peine  obliques,  lis  divisent  le  bord  cardinal  en 
deux  moitiés  égales;  ils  dominent  une  très  petite  lunule  arrondie  et  très 
profonde.  Le  bord  des  valves  est  crénelé;  la  charnière  est  étroite,  elle 
présente  deux  dents  cardinales . inégales  et  souvent  irrégulières  ; c’est 
à peine  si  l'on  aperçoit  les  vestiges  d'une  dent  latérale  postérieure.  Le 
ligament  est  porté  par  une  nymphe  étroite,  mais  fort  longue,  qui  so 
montre  à l’extérieur  dans  presque  toute  sa  longueur.  L’impression 
musculaire  antérieure  est  étroite , allongée , elle  descend  presque  per- 
pendiculairement vers  le  bord  inferieur,  en  formant  ayec  l’impression 
palléale  un  angle  très  aigu  ; elle  s’arrête  au-dessous  du  milieu  du  dia- 
mètre transverse  de  la  coquille.  L’impression  musculaire  postérieure  est 
ovalaire  et  très  rapproèhée  du  bord. 

Cette  coquille  a 27  millimètres  de  diamètre  transverse  et  2S  de 
hauteur. 


6ENRE  ÔOIXANTE-TROISIÈME. 

CORBE1X.X.E.  Corhis,  Cuv. 

CAîiACTèREs  GÉNÉRIQUES. — Animal  ovale,  gonflé,  enveloppé 
d*un  manteau  ouvert  dans  toute  la  longueur  du  bord  ventral 
et  terminé  en  arrière  par  deux  ouvertures  sessiles.  Pied  mé- 
diocre, (Tomprimé,  très  extensible.  Bouche  petite,  munie  de 
deux  lèvres  étroites  terminées  par  des  rudiments  de  palpes 
labiales.  Une  seule  branchie,  épaisse,  quadrangulaire , subtra- 
pézoïde  dé  chaque  côté  du  corps. 

Coquille  ovale,  transverse équivalve ; crochets  bombés, 
opposés.  Lame  cardinale  épaisse,  offrant  deux  dents  cardi- 
nales épaisses,  inégales  sur  chaque  valve;  deux  dents  laté- 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


79*^*  . 

raies:  Tantérieure  la  plus  grosse  et  la  plus  rapprochée  des 
cardinales.  Ligament  extérieur  enfoncé  sous  les  bords  du  cor- 
selet. Impressions.musculaires  grandes  et  écartées:  l’antérieure 
ovale,  oblongue,  inclinée  en  dedans;  la  postérieure,  plus 
courte,  subcirculaire.  Impression  palléale  simple renfermant 
l’impression  musculaire  antérieure  et  divisant  la  postérieure. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Veuus,  Linné , Chemnitz , 
Schroeter,  Gmelin,  Dillwyn  , Wood. — Lucina^  Bruguière, 
Lamarck , de  Blainville.  — Fimhria , Mégerle.  — Idothea , 
Schumacher. — Corhis^  Cuvier,  Lamarck,  Menke,  Reeve,  etc. 
— Spheera , Sowerby . 

observations'.  Le  genre  Corbeille  a été  institué  par  Cuvier,  dans  la 
première  édition  du  Règne  animal,  pour  ünê  coquille  déjà  connue  des 
conchyliologues.  En  effet,  on  en  trouve  des  figures  reconnaissables 
dans  les  ouvrages  de  Lister,  de  Bonami,  de  Gualtieri  et  d’Argenville. 
Linné  la  mentionna  parmi  les  Vénus,  et  c’est  dans  ce  genre  qu'elle 
resta  dans  les  ouvrages  de  Chemnitz , de  Schroeter,  de  Gmelin , de 
Dillwyn,et  même  dans  ceux  beaucoup  plus  récents  de  Wood.  Entraîné, 
par  l’appréciation  judicieuse  de  ses  caractères , Bruguière,  dans  V Ency- 
clopédie , avait  compris  cette  espèce  dans  son  genre  Lucine  ; Lamarck , 
de  Roissy,  et  plusieurs  autres  naturalistes,  adoptèrent  cet  arrange- 
ment jusqu’au  moment  où  Cuvier  eut  proposé  le  genre  Corbeille,  qui 
fut  généralement  adopté,  quoique  longtemps  avant,  ce  genre  eût  été 
proposé,  dès  sous  le  nom  de  Fimbria,  par  M.  Megerle.  Au 

moment  où  Cuvier  faisait  connaître  son  nouveau  genre , M.  Schumacher 
le  publiait  de  son  côté,  dans  son  Esnai  d’une  nouvelle  classifiGatign  des 
testacés.  Il  proposait  pour  lui  le  nom  d' Idothea,  Ce  nom  n’a  pas  prévalu, 
et  celui  de  Cuvier  est  resté,  malgré  la  priorité  de  celui  de  Mégerle. 

Les  classificateurs  n’ont  pas  été  d’accord  sur  la  place  qu’il  convient 
de  donner  au  genre  Corhis.  Bruguière  en  faisait  une  Lucine , et  if  sem- 
blait naturel  que  le  genre  nouveau  restât  dans  le  voisinage  de  celui  d’où 
il  a été  extrait.  Lamarck  pensa  que  les  Corbeilles  devaient  avoisiner  les 
Tellines , et,  en  conséquence,  elles  vinrent  se  ranger  entre  les  Tellines 
et  les  Lucines.  Cuvier,  au  contraire,  rapproche  le  genre  de  ceux  de  la 
famille  des  Cardiacées , et  il  le  place  entre  les  Cyclades  et  les  Tellines , 
non  loin  des  Donaces  , d’un  côté,  et  des  Loripèdes  , de  l'autre.  Cette 
opinion  fut  partagée  par  tous  ceux  des  naturalistes  qui  adoptèrent  de 


LES  LUCÏNES. 


799 


préférence  la  classification  do  Cuvier:  mais  pour  nous,  qui  n'avons 
jamais  pris  d’opinions  qu’après  avoir  vérifié  les  faits  sur  lesquels 
elles  reposent,  nous  n’avons  admis  ni  celle  do  Cuvier  ni  celle  de  La- 
marck,  et  dès  4 830,  nous  avons  fondé  la  famille  des  Lucines,  dans 
laquelle  nous  avons  placé  les  Corbeilles  à côté  des  Lucines.  En  effet , 
ces  genres  sont  très  voisins  l'un  de  l'autre , à ce  point  que  nous  doutons 
encore  de  Tulilité  de  celui  qui  nous  occupe.  Tant  que  la  coquille  seule  a 
été  connue , on  pouvait  trouver  en  elle  quelques  caractères  propres  ù la 
distinguer  des  Lucines:  mais  depuis  que  l'animal  a été  incomplètement 
décrit  par  M.  Valenciennes , le  peu  qu’il  en  dit , suffît  pour  démontrer 
son  extrême  ressemblance  avec  celui  des  Lucines  ; par  conséquent , nous 
étions  fondé  dans  notre  appréciation  qui , pour  dater  de  vingt  ans,  n'en 
est  pas  moins  juste. 

L’animal  de  la  Corbeille  est  grand  et  épais  ; il  est  ovale , transverse , 
subéquilatéral;  le  manteau  qui  l'enveloppe  est  semblable  à celui  des 
Lucines  ; il  est  ouvert  dans  presque  toute  la  longueur  du  bord  ventral  : 
ces  bords , épaissis  par  un  muscle  orbiculaire,  sont  divisés  en  plusieurs 
feuillets,  dont  l'un,  celui  qui  s’applique  sur  le  test,  doit  être  découpé 
pour  produire  les  lames  frangées  de  la  coquille.  En  arrière , le  manteau 
présente  deux  ouvertures  ; nous  soupçonnons  qu’elles  sont  semblables  à 
celles  des  Lucines,  et  nous  regrettons  que  M.  Valenciennes  ait  laissé  sa 
notice  incomplète  sous  ce  rapport.  Le  pied  des  Corbeilles  n’est  point 
tout  à fait  vermiforme  comme  il  l'est  dans  les  Loripes.  II  est  triangu- 
laire, étroit , un  peu  comprimé  de  chaque  côté;  mais  ce  caractère  ne 
devrait  pas  faire  exclure  les  Corbeilles  des  Lucines,  car  nous  connais- 
sons quelques  espèces  de  ce  dernier  genre  chez  lesquelles  le  pied  est 
exactement  semblable.  Nous  citerons  entre  autres  le  Ludna  pectm  de  la 
Méditerranée.  La  bouche,  dans  les  Corbeilles,  est  semblable  à celle  des 
Lucines;  elle  est  fort  petite , garnie  de  deux  lèvres  fort  étroites . termi- 
nées de  chaque  côté  on  un  très  petit  rudiment  des  palpes  labiales.  Les 
branchies  sont  également  semblables  à celles  des  Lucines  : elles  consis- 
tent en  un  seul  feuillet  de  chaque  côté  du  corps  ; mais  qui  est  très  épais 
et  d’une  structure  semblable  à celle  de  la  branchie  des  Lucines.  De 
tous  les  caractères  connus  de  l'animal , nous  n'en  voyons  aucun  qui 
s’opposerait  à la  réunion  des  Corbeilles  et  des  Lucines. 

11  n’en  est  pas  tout  à fait  de  môme  de  la  coquille  ; elle  diffère  de  celle 
des  Lucines  par  une  forme  plus  transverse  et  des  valves  plus  bombées  ; 
mais  ces  caractères  extérieurs  se  modifient,  et  il  existe  un  passage 
presque  insensible  dans  un  certain  nombre  d’espèces  soit  vivantes , 
soit  fossiles.  C’est  ainsi  que  le  Lucina  liasina  est  une  de  ces  espèces 


8oo 


VINGTIEME  FAMILLE. 


intermédiaires  qui  tiennent  à la  fois  aux  Lucines  et  aux  Corbeilles,  et 
que  l’on  devrait  ranger  dans  ce  dernier  genre , si  leur  surface  était 
ornée  de  lames  transverses.  Il  en  est  de  môme  aussi  d’une  coquille  du 
bassin  de  Paris , que  nous  avons  décrite  autrefois  sous  le  nom  de 
Psammobia  dubia , et  qu'une  appréciation  plus  rigoureuse  de  ses  carac- 
tères fait  rentrer  dans  le  type  des  Lucines;  celte  coquille,  avec  la 
plupart  des  caractères  des  Lucines , a la  forme  Iransverse  des  Cor- 
beilles, sans  être  ornée  des  lames  qui  les  distinguent. 

Les  Corbeilles  sont  des  coquilles  généralement  ovalaires , épaisses, 
bombées,  subcordiformes , subéquilatérales;  leur  surface,  dénuée 
d’épiderme,  est  presque  toujours  couverte  d’un  réseau  formé  de  lames 
Iransverses  plus  ou  moins  minces  et  do  sillons  longitudinaux,  réguliers 
et  rayonnants  ; les  crochets  sont  assez  grands  et  protubérants  ; ils  sont 
peu  obliques  , très  rapprochés , et  ils  dominent  une  lunule  ovale  , lan- 
céolée, assez  profcmdément  creusée.  Le  corselet  est  Jui-méme  dé- 
primé; il  est  allongé,  étroit,  et  il  contient.,  dans  une  partie  de  sa 
longueur,  un  ligament  externe  en  partie  caché  par  un  bord  saillant. 
Les  bords  des  valves  sont  épais , finement  crénolés,  parfaitement  clos , 
lorsque  les  valves  sont  rapprochées.  La  charnière  est  supportée  par  une 
lame  cardinale  large  et  épaisse;  elle  porte,  au  centre,  deux  dents  car- 
dinales inégales  sur  chaque  valve  ; ces  dents  sont  courtes  , larges  et 
épaisses.  Aux  extrémités  de  la  charnière  se  montrent  deux  dents  laté- 
rales; l'antérieure  est  la  plus  proéminente  et  la  plus  rapprochée  des 
dents  cardinales.  Les  impressions  musculaires  sont  grandes , elles  sont 
écartées  et  elles  occupent  les  extrémités  de  la  coquille.  L'antérieure  est 
ovale , elle  s’incline  vers  l’intérieur  des  valves , et  c’est  en  cela  qu’elle 
ressemble  à celle  des  Lucines;  la  postérieure  est  plus  courte  et  plus 
arrondie.  L'impression  palléale  est  large,  assez  profonde;  elle  est 
simple  et  elle  s'étend  d'un  muscle  à l’autre  en  restant  parallèle  au  bord 
inférieur.  L’impression  musculaire  antérieure  est  comprise  tout  entière 
dans  l'intérieur  de  l’impression  palléale,  tandis  que  l’impressioii  posté- 
rieure serait  divisée  en  deux  si  la  ligne  palléale  se  continuait  à tra*- 
vers  elle. 

On  ne  connaît  jusqu’ici  que  deux  espèces  vivantes  de  Corbeilles  : 
l’une  d’elles,  le  Corbis  fimbriata,  habite  le  grand  Océan  de  l’Inde,  et 
80  trouve  aussi  dans  les  îles  de  la  Polynésie  ; l’autre  espèce , que  le 
premier  nous  avons  décrite  sous  le  nom  de  Corbis  elegans , vient  des 
Philippines,  où  elle  a été  retrouvée  par  M.  Cuming. 

Le  nombre  des  espèces  fossiles  est  peu  considérable.  M.  Bronn , dans 
son  Index  paleontohgicüs J en  indique  dix-sept,  parmi  lesquelles  deux 


V 


LES  LÜCINES. 


8oi 


sont  douteuses;  pour  nous  elles  se  réduisent  à quatorze,  quoique  nous 
en  admettions  plusieurs  que  ii’a  pas  connues  l’auteur  de  l’ouvrage  dont 
nous  venons  de  parler. 

On  a cru  longtemps  que  les  Corbeilles  fossiles  ne  descendaient  pas 
au-dessous  des  terrains  tertiaires;  cependant  le  plus  grand  nombre  des 
espèces  aujourd’hui  connues  se  distribuent  dans  la  craie  et  le  terrain 
jurassique.  Si  l’on  en  croit  M.  Phillips,  la  première  apparition  du 
genre  aurait  lieu  dans  le  lias  supérieur;  malheureusement  les  caractères 
de  l'espèce  ne  sont  pas  suffisamment  constatés:  le  Corbis  uniformis  est 
douteux  pour  l’auteur  lui-méme.  Il  faut  remonter  un  peu  plus  haut 
dans  l’oolite  moyenne  (Kelloways-îlock)  pour  rencontrer  avec  certitude 
quatre  espèces  de  Corbeilles. 

Corbis  lœviSf  Sowerby;  elle  traverse  toute  la  série  des  couches  de 
l’oolite  moyenne  ; elle  se  montre  dans  l’oxford-clay,  le  coral-rag  et  le 
calcareous-grit  ou  coralien  supérieur.  Elle  conserve  la  môme  position 
en  France  et  en  Angleterre.  Au  sujet  de  l’espèce  dont  nous  venons  de 
parler,  nous  devons  rectifier  une  erreur  de  M.  Rœracr,  qui , dans  son 
Histoire  des  terrains  oolitiqiics  du  nord  de  l' Allemagne ^ attribue  le  nom 
spécifique  de  Lœvîs  à une  coquille  qui  est  bâillante,  très  inéquilatérale 
et  qui  très  certainement  n’appartient  pas  au  genre  Corbeille. 

2°  Corbis  ovalis,  Phillips;  elle  est  de  Poxfordien  inférieur  ou  kello- 
way-roc  des  Anglais , et  elle  ne  s’est  rencontrée  jusqu’ici  qu’en 
Angleterre;  il  ne  faut  donc  pas  confondre  avec  elle  le  Corbis  ovalis  de 
M.  Buvignier;  cette  dernière  est  du  terrain  oxfordien  des  Ardennes, 
et  nous  proposons  pour  elle  le  nom  de  Corbis  depressa  ; la  quatrième 
espèce  a été  découverte  dans  le  terrain  jurassique  moyen  de  la  Russie,  par 
M.  Kayserling:  elle  est  nommée  Corbis  sublœvîs , par  le  savant  géologue. 

Le  coral-rag  de  la  Meuse  contient  deux  espèces  décrites  par  M.  Bu- 
vignier ; elles  viennent  toutes  deux  des  environs  de  Commercy  et  de 
Saint-Mihiel  : à Tune  d'elles  M.  Buvignier  a donné  lo'nom  d'elegans, 
quoique  celte  dénomination  spécifique  ait  été  attachée  par  nous  depuis 
une  dizaine  d’années  à une  espèce  vivante;  nous  proposons  en  consé- 
quence de  consacrer  à l'espèce  fossile  le  nom  du  savant  géologue  qui  le 
premier  Ta  fait  connaître  ; elle  deviendra  le  Corbis  Buvignieri. 

Quatre  espèces  sont  mentionnées  dans  la  craie  : l'une  d’elles,  le  Corbis 
corrugata^  Forbes , mérite  de  nous  arrêter  un  instant.  En  1822, 
MM.  Mantell  et  Sowerby  Pont  fait  connaître  presque  en  même  temps 
sous  deux  noms  cl  dans  deux  genres  différents  : pour  lo  premier  de  ces 
naturalistes,  c’est  le  Venus  ringmeriensîs , pour  le  second,  c’est  le 
Sphœra  eorrugata;  depuis,  la  môme  espèce  a été  mentionnée  par  nous- 
T.  1.  2®  PARTIE.  T)!* 


802 


VirSGTiEME  FAMILLE. 


même,  d’après  un  moule  imparfait , sous  le  nom  de  Venus  cordiformis, 
]\J.  Matberon  en  a fait  le  Cardium  gallo-provinciale^  et  M.  d’Orbigny  a 
reconnu  que  notre  coquille  et  celle  de  M.  Matberon  sont  de  la  même 
espèce  et  dépendent  du  genre  Corbeille  ; il  l'a  inscrite  dans  sa  Pa/^u(o- 
logie  française  sous  le  nom  de  Corbis  cordiformis.  Plus  récemment  , 
M.  Forbes  , dans  le  premier  volume  du  Journal  Irimespiel  de  la  Société 
géologique  de  Londres,  1845,  a reconnu  l’identité  du  Sphœra  corrugala 
de  Sowerby,  d’un  côté  avec  la  coquille  de  Manlell , et  d’un  autre  avec 
celle  de  M.  d'Orbigny.  Actuellement  il  est  facile  de  compléter  la  syno- 
nymie de  l’espèce,  et  il  devient  nécessaire  de  lui  restituer  son  premier 
nom  spécifique  : on  devra  donc  l'inscrire  désormais  sous  celui  de  Corbis 
corrugata . Forbes.  Celte  espèce  se  trouve  à la  fois  en  France,  en 
Angleterre  et  en  Suisse,  principalement  dans  le  terrain  néocomien  ; elle 
passe  cependant  dans  le  grès  vert. 

Une  seconde  espèce  de  la  craie  mérite  encore  d’être  mentionnée, 
c'est  le  Corbis  rotundata  d'Orbigny.  Elle  se  répand  sur  une  grande 
surface,  et  parait  propre  à la  craie  chloritée  ; elle  est  à la  fois  dans  les 
bassins  du  Nord  et  dans  ceux  du  Midi. 

Les  deux  espèces  du  bassin  de  Paris  sont  les  seules  qui  soient  con- 
nues dans  les  terrains  tertiaires,  et  il  est  bien  remarquable  de  ne  pas 
rencontrer  le  genre  dans  les  étages  tertiaires  moyens  et  supérieur  lors- 
qu’il vil  encore  aujourd'hui.  Comment  n’a-t-il  laissé  aucune  trace  de 
son  existence  pendant  ces  deux  longues  périodes?  11  les  aura  sans  doute 
traversées  , confiné  dans  des  régions  éloignées  des  lieux  où  il  s'est 
montré  d’abord  en  grande  abondance. 

Le  Corbis  peclunculus  est  la  plus  grande  des  espèces  connues;  elle  est 
assez  commune  dans  le  calcaire  grossier  du  bassin  do  Paris  ; elle  existe 
aussi  dans  celui  de  Valogne,  et  M.  Grateloup  la  cite  dans  les  calcaires 
do  Blaye.' 

Le  Corbis  lamellosa , Lamk.,  est  beaucoup  plus  commune  ; elle  com- 
mence avec  les  premiers  dépôts  marias  du  bassin  de  Paris  (sables  de 
Bracheux);  elle  remonte  dans  le  calcaire  grossier  où  ello  est  d’une 
extrême  abondance,  et  elle  passe  dans  les  sables  marins  moyens,  où  elle 
n est  guère  moins  commune;  elle  subit  de  nombreuses  variations  soit 
dans  la  forme  plus  ou  moins  bombée,  soit  dans  le  nombre  des  lamelles 
qui  la  couvrent  ; les  individus  de  Bracheux  ont  les  lames  plus  serrées  ; 
celte  espèce  ne  se  borne  pas  au  bassin  de  Paris , elle  est  aussi  à Valogne, 
en  Belgique,  à Blaye  , à la  Palarea,  près  do  Nice,  dans  le  terrain 
numniuliüquo.  Une  variété  plus  bombée,  très  rapprochée  de  celle  de 
Bracheux , est  assez  commune  à Castel-Gomberto.  Mais  ce  qui  rend 


LES  LUCINES. 


8ü3 


cette  coquille  plus  intéressante  encore,  c'est  qu’elle  se  trouve  aussi, 
d’après  M.  Conrad,  dans  les  terrains  tertiaires  inférieurs  do  l’Amérique 
septentrionale.  -Enfin,  M.  Slurt  l’a  rencontrée  dans -les  terrains  ter- 
tiaires qui  avoisinent  le  port  Jackson  à la  Nouvelle-Hollande.  Si  l’iden- 
tité est  bien  établie,  le  fait  rapporté  par  M.  Sturt  est  aussi  intéressant 
qu’inattendu. 

D’autres  espèces  de  Corbeilles  ont  été  citéesdans  les  terrains  tertiaires. 
M.  Brongniart,  dans  son  Mémoire  sur  le  Vicenlin^  a figuré  sous  le  nom 
de  Corbis  Aglaurœ , une  belle  espèce  de  Vénus  qui  se  rencontre  aussi 
aux  environs  de  Bordeaux.  M.  Bronn  (/(abVns  tertiœr  Gebilde).  a cru 
autrefois  trouver  en  Italie  plusieurs  espèces  de  Corbeilles  , mais  il  a lui- 
même  reconnu  son  erreur.  En  effet,  les  coquilles  qu'il  prenait  pour  des 
Corbeilles  sont  dos  Lucines  ou  des  Tellines  ; à ce  dernier  genre  appar- 
tient aussi  le  Corbis  ventricosa  de  M.  Marcel  de  Serres.  [Geogn.  des  terr. 
tert.,  p,  146,  pl.  6 , fîg.  2 , 3 ). 

Corbeille  élégante.  Corbis  elegans^  Desh. 

Pl.  15.  fig.  7.  8.  9. 

Corb,  Testa  trans^ersâ  , tiunidâ , gibbosâ , lacteâ  aut  rnbellâ  ; 
radiis  loscis  obsoîetis  ab  umbonibiis  nd  mnrginem  divergentibus  ; 
iamelUs  transvcrsis  elevaùs  ^ rernotiiisculis , utrinqiie  serratis ^ antice 
'validioribus ; striis  mtmerosis  radiantibus , intra  lameUas;  margiiie 
subcrassOy  profnnde  crennlato  ; umhonibus  longitudinaîibus ^ minuits  , 
opposite  incurvis;  litnuld  parvâ  ^ subcordatâ, 

Corbis  Sowerbyi.  Keeve,  Proced,  zool.  soc.  1841. 

Id.  Reeve,  Conch.  syst.  pl.  58,  f.  4,  6. 

Cailow,  Conchol.  nom.  p.  26. 

Hauley,  Desc.  cat.  p.  70. 

Desh.  dans  Cuv.  3®  édit.  pl.  102.  f.  i. 

Habile  le.s  Philippines. 

T rès  belle  espèce  que  le  premier  nous  avons  possédée , etque  nous  avons 
fait  connaître  , en  la  figurant  dans  cet  ouvrage.  La  priorité  du  nom  nous 
appartient , sans  cela  nous  aurions  accueilli  avec  empressement  celui 
de  M.  Reeve;  car  il  rappelle  le  nom  d'un  savant  qui  a rendu  d'émi- 
nents services  à la  Conchyliologie.  Celte  Corbeille  est  ovale , transverse, 
subéquilatérale,  très  bombée;  le  côté  antérieur  est  un  peu  plus  long, et 
plus  large  que  le  postérieur.  Les  crochets  sont  saillants,  très  rapprochés, 
peu  obliques;  ils  dominent  une  lunule  d’une  médiocre  étendue,  ovale, 

5i* 


8ü4 


VINGTIEME  FAMILLE. 


lancéolée,  très  nettement  circonscrite , mais  peu  profonde.  La  surface 
extérieure  est  ornée  d’un  grand  nombre  de  lames  transverses,  fines , 
relevées  perpendiculairement,  à bord  simple  dans  le  milieu  des  valves, 
crénelé  en  avant,  festonné  et  tranchant  en  arrière  ; sur  les  crochets  les 
lames  sont  très  serrées,  elles  sont  plus  écartées  vers  les  bords  ; d’un 
côté,  en  dessus,  elles  sont  lisses,  de  l’autre  elles  sont  striées  perpendicu- 
lairement ; les  interstices  sont  couverts  de  stries  longitudinales  rayon- 
nantes qui,  partant  des  sommets,  gagnent  les  bords,  où  elles  se  termi- 
nent par  de  nombreuses  crénclures.  D’un  beau  blanc  laiteux  eu  dedans, 
cette  coquille  a le  bord  supérieur  teint  d’un  rose  tendre  de  la  plus 
agréable  nuance;  elle  est  également  blanchn  en  dehors,  et  de  ce  côté 
elle  est  ornée  de  rayons  interrompus  d’un  beau  rose  tendre  d’une  grande 
fraîcheur.  Cette  coquille,  fort  remarquable  par  la  finesse  de  ses  lames 
et  la  fraîcheur  de  sa  coloration , ne  manque  pas  d’analogie  avec  le 
Corbis  îamellosa  du  bassin  de  Paris  ; elle  est  plus  bombée  et  plus  grande  ; 
nous  avons  vu  un  individu  presque  aussi  grand  que  le  Corbis  pectun- 
culiis. 

Corbeille  pectoncle.  Corbis  peciuncuhis ^ Lamk. 

PL  15.  fig.  10. 

€•  Testa  rotiindatâ^  'ventricosâ  ^ crassâ  ^ canceUatâ,  îameUis  trans- 
versis  crebrîs  ^ ad  îatus  posticiim  piicato^crispis , serratis. 

Desh.  Descr.  des  coq.  foss.  t.  r.  pl,  i3.  f.  3 à 6, 

/</,  Encycl.  méth.  Vers.  t.  2.  p.  6.  n“  2. 

Id,  Lamlv.  Anim.  s.  vert.  2®  édit.  t.  6.  p,  21g.  n®  3. 

Lamk.  Ânim.  s.  vert.  t.  5.  p.  537.  n®  3.  ^ 

Gratel.  Cat.  zool.  p.  65.  n°  i. 

Bronn,  luJ.  Pal.  p,  334. 

Habite...  Fossile  des  environs  de  Paris  et  de  Hauteville , dans  le  Calcaire 

r 

grossier. 

Grande  et  belle  coquille  qui  ne  manque  pas  d'analogie  avec  le  Corbis 
eîegans , actuellement  vivante  dans  les  mers  des  Philippines  ; elle  est 
ovale , oblongue , transverse,  subéquilatérale,  bombée , à lest  très  épais 
et  fort  solide.  Le  côté  antérieur  est  un  peu  plus  long  que  le  postérieur  ; 
il  est  large , régulièrement  arrondi.  La  surface  extérieure  est  couverte 
de  lames  transverses,  courtes,  épaisses,  obtuses  dans  le  milieu  des 
valves,  minces , plus  saillantes  sur  le  côté  postérieur,  très  élégamment 
crénelées  sur  le  côté  antérieur.  Les  interstices  de  ces  lames  montrent 


LE6  LUCINES, 


un  grand  nombre  de  petites  côtes  longitudinales , régulières , rayon- 
nantes qui , en  aboutissant  sur  les  bords  , y produisent  des  dentelures 
régulières:  les  crochets  sont  grands,  peu  obliques,  rapprochés,  opposés; 
ils  dominent  une  lunule  assez  grande,  creusée  et  sublancéolée;  les 
bords  sont  épais,  ils  s’élargissent  avec  l'âge  en  formant  des  plans  in- 
clinés , très  régulièrement  plissés  dans  leur  largeur. 

Les  individus  qui  se  trouvent  à Hauteville  , près  de  Valogne , sont 
un  peu  moins  larges , et  les  lames , qui  les  couvrent,  sont  plus  étroites 
et  plus  serrées.  Nous  avons  vu  autrefois  un  grand  individu  de  la  même 
espèce  recueilli  à Ronca  par  Maraschini , et  qui  offrait  des  côtes  longi- 
tudinales plus  grosses  que  celles  des  individus  de  Paris  et  de  Valogne. 

Les  grands  individus  ont  jusqu’à  10  centimètres  et  demi  de  large  et 
90  millimètres  de  long. 


GENRE  SOIXANTE-QUATRIÈME. 

ONGUlilNE.  Vmjiilina,  Daudin. 

Pl.  i5.  f.  Il  à 14,  I 


CARACTÈRES  GENERIQUES.  — ' Animal  ovale  ou  oblong , ayant 
le  manteau  fermé  en  avant,  ouvert  dans  la  longueur  du  bord 
inférieur  et  percé  en  arrière  de  deux  ouvertures  sessiles.  Pied 
allongé,  cylindrique,  vermiforme,  claviforme  dans  la  con- 
traction. Bouche  petite,  transverse,  garnie  de  deux  petites 
lèvres  terminées  de  chaque  côté  en  une  paire  de  très  petites 
palpes  labiales.  Deux  feuillets  branchiaux  de  chaque  côté  du 
corps,  inégaux,  obliques  , Texterne  le  plus  court  et  le  plus 
étroit. 

Coquille  longitudinale,  oblongue  ou  arrondie,  un  peu  irré- 
gulière, non  baillante;  deux  petites  dents  cardinales,  diver- 
gentes sur  la  valve  droite,  une  seule  bifide  sur  la  gauche;  une 
nymphe  subintérieure  donnant  attache  au  ligament.  Impres- 
sions musculaires  très  grandes , presque  égales  ; impression 
palléale  simple.  » 


8ü6 


VLNGXJÈMl!;  I^VMILLK. 


GYNONYMiK  uÉNÉRiQUH.  — Lovipes  [iu  parle)  ^ Gray. — 
Cloiho  ^ Bastérot,  Broiui  [in  parle). 

OBSERVATIONS.  Une  petite  coquille,  observée  par  Daudin  , dans  la 
Collection  de  Famne  ^ fut  érigée  par  lui  en  un  genre  nouveau  , auquel  il 
donna  le  nom  d’Onguline.  Bosc  fut  le  premier  qui  fît  connaître  ce  nou  - 
veau genre  dans  la  petite  Édition  de  Biiffon  de  Déterville.  II  le  carac- 
térisa très  imparfaitement  ; mais  la  figure  qu’il  en  donne  fut  suffisante 
pour  éveiller  l’attention  des  naturalistes,  et  bientôt  après,  do  Roissy 
d'abord,  et  Lamarck  ensuite,  ont  introduit  ce  genre  dans  leurs  Méthodes 
conchyliologiques.  Roissy,  avec  sa  perspicacité  habituelle,  rapproclie  les 
Ongulines  des  Lucines;  Lamarck,  au  contraire,  croyant  trouver  à la 
charnière  des  Ongulines  un  ligament  intérieur,  entraîne  le  genre  dans 
sa  famille  des  Mactracées,  entre  les  Érycines  et  les  Crassatelles  , loin , 
par  conséquent , des  rapports  naturels  du  genre.  Presque  tous  les  natu- 
ralistes adoptèrent  cette  opinion  de  Lamarck  ; M.  de  Blainville,  dans  le 
Dictionnaire  des  sciences  naturelles,  ainsi  que  dans  son  Traité  de  mala- 
cologie, incertain  sur  la  valeur  du  genre,  ne  le  connaissant  que  d’une 
manière  imparfaite,  le  relègue  à la  fin  de  sa  grande  famille  des 
Concliacécs. 

Dans  son  dernier  ouvrage , Lamarck  modifia  un  peu  sa  première 
opinion.  Il  conserva  les  Ongulines  dans  sa  famille  des  Mactracées;  mais 
il  l’introduisit  dans  un  troisième  groupe  avec  les  genres  Solémye  et 
Amphidesme;  nous  verrons  un  peu  plus  lard  en  quoi  pette  opinion  est 
mal  fondée  et  ne  peut  être  actuellement  maintenue. 

M.  Sowerby,  dans  son  Généra  of  shells,  fut  le  premier  qui  reconnut 
exactement  les  caractères  des  Ongulines  , et  qui  revint  à l’opinion  de 
Roissy,  en  les  rapprochant  des  Lucines.  A la  môme  époque,  et  avant 
de  connaître  le  travail  de  M.  Sowerby,  nous  nous  formions  une  opinion 
semblable  à la  sienne-,  à la  suite  d’un  examen  attentif  de  plusieurs 
individus  de  l’OnguIine,  et  particulièrement  de  ceux  de  la  Collection  du 
Muséum.  Bientôt  après,  M.  Rang  nous  apprit  que  l’Onguline,  dont  la 
localité  avait  été  ignorée  jusqu’alors  , habite  en  abondance  dans  les 
mers  du  Sénégal,  et  que  son  irrégularité  fréquente  provient  de  son 
habitude  .de  creuser  les  pierres  pour  s’y  loger.  Dès  lors,  pour  nous, 
rOnguIine  devint  une  Lucine  perforante. 

Cuvier  qui,  dans  la  première  édition  du  Règne  animal,  ayait  complè- 
tement oublié  le  genre  Onguline , répara  cette  omission  dans  la  seconde 
édition,,  et  il  entraîna  le  genre  à la  suite  des  Lucines  , dans  sa  famille 
des  Cardiacées.  ' 


LES  lAJClNES. 


807 

Jusqu’en  '1842,  époque  à laquelle  M.  Duvernoy  en  donna  ia  des- 
cription. l'animal  du  genre  Onguline  était  resté  complètement  inconnu. 
(]e  savant  anatomiste  publia  un  mémoire  plein  d’intérêt  dans  les  Annales 
des  sciences  naturelles,  dans  lequel  il  dévoile  . de  la  manière  la  plus 
satisfaisante,  l’organisation  de  l'animal  dont  il  est  question.  M.  Düvernoy, 
qui  alors  ne  connaissait  pas  l’organisation  des  Lucines,  eut,  au  sujet 
des  Ongulines,  une  opinion  toute  différente  de  celle  de  ses  prédéces- 
seurs. 11  crut  voir  en  elles  un  type  plus  voisin  des  Mylilacées  que  des 
Lucines  et  des  Mactracées. 

Frappé  de  la  ressemblance  de  l'animal  de  l’Onguline  avec  celle  du 
Loripes  de  Poli,  nous  employâmes  les  nouveaux  documents  publiés  par 
M.  Duvernoy  à combattre  son  opinion  et  appuyer  celle  que  nous  avions 
toujours  défendue.  Bientôt,  après  avoir  fait  connaître  l’organisation  de 
l’animal  et  les  caractères  de  la  coquille , nous  passerons  en  revue  les 
diverses  opinions  que  nous  venons  de  rappeler  dans  leur  ordre  chrono- 
logique. 

L’animal  de  l’Onguline  est  orbiculaire,  aplati,  enveloppé  d’un  man- 
teau mince , et  dont  les  bords  sont  épaissis  comme  à l’ordinaire  par  un 
muscle  orbiculaire  étroit.  Les  lobes  du  manteau  ont  une  commissure 
antérieure  située  on  peu  au-dessus  du  bord  inférieur  du  muscle  anté- 
rieur. Une  autre  commissure  se  produit  en  arrière,  et  entre  elles  se 
trouve  une  grande  ouverture  qui  occupe  tout  le  bord  inférieur  ou  ventral 
de  l’animal.  M.  Duvernoy  dit  qu’à  la  place  des  siphons,  il  existe  une 
seule  ouverture  en  forme  de  boutonnière  et  correspondant  à la  position 
de  l’anus.  Nous  soupçonnons  qu’une  des  ouvertures  palléales  a échappé 
à l’attention  de  M.  Duvernoy,  cardans  les  Lucines  elles-mêmes  , fors- 
qu'elles  sont  contractées , l’une  des  deux  ouvertures  du  manteau  se 
déguise  facilement  entre  les  plis  de  cet  organe  et  peut  échapper  à 
l’attention  du  naturaliste.  11  faut  voir  ces  animaux  vivants  pour  se  con- 
vaincre que  leur  manteau  a deux  ouvertures  postérieures.  Nous  atta- 
chons une  grande  valeur  au  caractère  dont  nous  parlons  , et  nous 
engageons  ceux  des  naturalistes  qui  auront  occasion  de  revoir  l’animal 
des  Ongulines,  de  bien  s’assurer  si,  en  effet,  il  a une  ou  deux  ouver- 
tures postérieures.  D’après  ce  que  nous  avons  vu  dans  les  Érycines  et 
Tes  Poronies , il  faudrait  faire  des  Ongulines  une  petite  famille  particu- 
lière si,  en  effet,  l’animal  n’avait  qu’une  seule  ouverture  à la  partie 
postérieure  du  manteau  ; si , au  contraire,  comme  nous  le  croyons,  les 
deux  ouvertures  subsistent , le  genre  devra  rester  dans  la  famille  des 
Lucines. 

Les  muscles  adducteurs  sont  très  allongés , comme  ceux  des  Lucines  ; 


8o8 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


ils  sont  aplatis  -et  ils  tombent  perpendiculairement  vers  le  bord  anté- 
rieur des  valves.  C*est  au-dessous  du  muscle  adducteur  antérieur,  au 
sommet  de  l’angle  profond  que  forme  ce  muscle  avec  la  masse  abdomi- 
nale que  se  voit  une  petite  fente  transverse  garnie  de  deux  petites 
lèvres;  cette  ouverture  est  celle  de  la  bouche.  Les  lèvres  dont  nous 
parlons  sont  membraneuses,  mais  extrêmement  étroites;  en  cela  elles 
ressemblent  à celles  des  Lucines;  mais  au  lieu  de  se  terminer  par  des 
palpes  rudimentaires  comme  dans  les  Corbeilles,  ces  organes  s’allon- 
gent un  peu  plus,  mais  ne  prennent  point  un  développement  propor- 
tionné à la  grandeur  de  ranimai. 

La  masse  abdominale  est  comprimée,  peu  étendue;  son  extrémité 
inférieure  se  prolonge  en  un  pied  cylindracé,  vermiforme,  tout  à fait 
semblable  à celui  des  Lucines.  Il  prend  la  forme  d’une  petite  massue 
lorsqu’il  est  violemment  contracté  et  rentré  dans  la  cavité  du  manteau. 

Probablement  gôiié  par  l’espace , AI.  Duvernoy  n’a  point  représenté 
les  organes  branchiaux  de  l'Ongulino.  Peut-Ôtre  aurait-il  suffi  de  sou- 
lever un  peu  plus  Tua  des  lobes  du  manteau  pour  montrer  la  forme  et 
la  disposition  de  ces  organes  importants.  Nous  sommes  .donc  obligé  de 
citer  les  paroles  de  M.  Duvernoy  : « Les  deux  lames  branchiales,  dit-il, 
de  chaque  côté  sont*  disposées  obliquement  d’avant  en  arrière  et  de  haut 
en  bas;  l’externe  est  sensiblement  plus  petite  que  l’interne;  elles  n’of- 
rent  d'ailleurs  rien  de  particulier  dans  leur  organisation.  » Telle  est  la 
courte  description  de  AI.  Duvernoy,  à laquelle  nous  ne  pouvons  rien 
ajouter,  n’ayant  jamais  vu  l'animal  de  l’Ongulino,  et  ne  connaissant 
aucun  autre  naturaliste  qui  en  ait  donné  la  description. 

M.  Duvernoy  insista  beaucoup  sur  le  système  nerveux  et  sur  sa 
distribution.  Au  moment  où  cet  habile  anatomiste  a publié  son  mémoire , 
on  ne  connaissait  presque  rien  encore  sur  le  système  nerveux  des  AIol- 
lusques  acéphales,  ou  pour  mieux  dire  ce  que  l'on  en  connaissait  était 
insuffisant  pour  généraliser  son  mode  de  distribution  dans  les  divers 
ordres  de  ces  animaux.  On  en  était  réduit  au  petit  nombre  de  faits 
dévoilés  par  Poli , et  complétés  sur  un  seul  genre  par  AlangiÜ.  Ces 
premiers  documents  avaient  été  plus  récemment  augmentés  par  le  beau 
travail  de  Aï.  Garner,  inséré  dans  le  17“ -volume  des  Transactions  de  la 
Société  limiéenne  de  Londres;  mais  encore  une  fois  ces  matériaux  étaient 
insuffisants  pour  généraliser  d’une  manière  rationnelle  les  faits  relatifs 
au  système  nerveux  des  Mollusques  acépbalés.  Si  AI.  Duvernoy  eût 
connu  le  système  nerveux  des  moules,  il  aurait  compris  sur-le-champ 
qu’il  était  impossible  de  rapprocher  les  Ongulines  des  Alytilacés.  Les 
travaux  anatomiques  que  nôus  avons  publiés  dans  l’Exploration  scien- 


LES  LUCIDES. 


809 

tifique  de  l' Algérie  permettront  enfin  de  faire  des  rapprochements  plus 
heureux  et  do  laisser  les  animaux  dans  leurs  rapports  les  plus  naturels. 

La  coquille  des  Onguünes  est  variable  dans  sa  forme  : cependant  elle 
affecte  le  plus  ordinairement  la  forme  orbiculaire  des  Lucines  : elle 
devient  parfois  longitudinale  à mesure  qu'ello  vieillit  ; car,  eu  suivant  les 
stries  d'accroissement  chez  ces  individus  plus  longs  que  larges,  on  voit 
qu’ils  étaient  orbiculairos  avant  d’avoir  atteints  la  dernière  période  de 
leur  accroissement.  Souvent  les  coquilles  des  Ongulines  sont  irrégu- 
lières , elles  ont  des  espèces  d'impressions  ou  de  cicatrices  qui  se  répè- 
tent d’une  valve  à l’autre , et  qui , vraisemblablement , sont  dues  à la 
gêne  que  l'animal  éprouve  dans  son  accroissement,  parce  qu’il  a l’habi- 
tude de  s’enfoncer  dans  les  pierres  et  de  s’y  creuser  une  demeure  à la 
façon  des  Pétricolcs  et  des  Saxicaves.  La  surface  extérieure  est  couverte 
d’un  épiderme  plus  ou  moins  épais,  suivant Jes  espèces;  cotte  surface 
est  lisse  ou  irrégulièrement  striée  par  les  accroissements.  Ces  coquilles 
sont  subéquildtérales ; les  crochets  sont  petits,  peu  obliques,  presque 
opposés;  on  n’aperçoit  au-dessous  d’eux  aucune  trace  de  lunule  et  en 
arrière  aucun  indice  de  corselet.  Les  bords  sont  simples,  minces  et 
tranchants  ; les  valves  sont  parhutement  closes  lorsqu’elles  sont  rappro- 
chées : elles  sont  lisses  à l’intérieur  ; elles  laissent  apercevoir  deux  im- 
pressions musculaires  écartées,  très  longues , presque  égales,  descen- 
dant très  bas  vers  le  bord  inférieur  et  conservant  une  direction  presque 
perpendiculaire.  Sous  le  rapport  de  la  forme  et  de  la  position,  les  deux 
impressions  musculaires  se  ressemblent  complètement;  En  cela  , elles 
se  rapprochent  davantage  de  celles  des  espèces  pour  lesquelles  M.  Broun 
a établi  le  genre  Diplodonle.  Cependant  elles  sont  un  peu  plus  longues 
que  dans  ce  dernier  genre,  et  toutes  deux  sont  comprises  dans  l’inté- 
rieur de  l'impression  palléale.  Cette  dernière  impression  est  simple , 
parallèle  au  bord  inférieur  et  placée  tout  près  de  lui. 

La  charnière  a des  caractères  qui  la  rapprochent  singulièrement  de 
celle  des  Lucines  : elle  se  compose  de  deux  petites  dents  inégales  sur 
la  valve  droite  et  d’une  seule  sur  la  gauche.  Cependant  on  aperçoit  quel- 
quefois à la  limite  de  la  nymphe  le  rudiment  très  étroit  d’une  seconde 
dent.  Le  ligament  est  la  partie  do  la  .charnière  qui  mérite  le  plus 
notre  attention.  Lamarck  a cru  à l’existence  de  deux  ligaments  : c'est 
pour  cette  raison  qu’il  a conservé  le  genre  dans  la  famille  des  Mac- 
tracées,  et  qu’il  l’a  placé  dans  le  voisinage  des  Amphidesraes.  Pour 
nous,  le  ligament  est  externe,  et  c’est  pour  cela  que  nous  n’avons 
pas  hésité  à mettre  le  genre  dans  la  famille  des  Lucines;  en  admettant 
deux  ligaments,  Lamarck  considérait  comme  destiné  à recevoir  le  liga- 


VINGTIEME  FAMILLE. 


8 10 

ment  intérieur,  un  petit  espace  situé  sur  le  bord  cardinal  en  arrière  de 
la  nymphe;  mais  il  suffira  de  faire  tremper  dans  Teau  un  individu  dont 
le  ligament  n’a  pas  été  rompu  pour  s’apercevoir  que  l'espace  en  ques- 
tion rosie  vide  et  forme  une  petite  cavité  revêtue  de  l’expansion  de  la 
tunique  externe  du  ligament,  ainsi  qu’elle  existe  en  arrière  des  nym- 
phes do  presque  tous  les  Mollusques  acéphales  dimyaires.  Pour  se 
faire  une  meilleure  idée  de  la  disposition  du  ligament  des  Ongulines,  il 
faut  étudier  avec  un  soin  spécial  la  charnière  des  Lucma  punctata  et 
ligerina  : on  y verra  des  nymphes  très  écrasées  formant  des  plans  pres- 
que horizontaux,  sur  lesquels  s'attache  la  portion  cartilagineuse  du 
ligament.  Il  en  est  de  même  chez  les  Ongulines , seulement  cette  nym- 
phe est  beaucoup  plus  petite , plus  courte , et  le  ligament  qu’elle  reçoit 
est  plus  épais.  Cette  nymphe  est  limitée  en  dedans  par  un  rebord  légè- 
rement saillant.  Ensuite,  du  côté  externe,  la  nymphe  est  séparée 
du  test  par  un  sillon,  dans  lequel  s'attache  la  tunique  externe  du 
ligament.  Ce  sillon,  profond  dans  les  Ongulines,  se  continue  en 
arrière  sur  la  lame  cardinale  en  une  surface  lisse,  comme  vernissée, 
et  c’est  celte  surface  que  Lamarck  a prise  pour  celle  d’un  second  liga- 
ment ; mais  elle  n'est  autre  chose  que  la  paroi  do  cotte  cavité  dont  nous 
parlions  tout  à l’heure,  et  que  l’on  remarque  plus  particulièrement 
à l’extrémité  postérieure  du  ligament  des  Cyrènes,  des  Muleltes  et  des 
Ânodontes,  etc.  Ainsi,  le  ligament  des  Ongulines  ne  présente  rien  d’ex- 
ceptionnel dans  sa  structure,  et  rien  chez  lui  ne  s'oppose  au  rappro- 
chement du  genre  avec  les  Lucines;  il  le  confirme  bien  plutôt,  puisqu’il 
a une  extrême  analogie  avec  celui  des  Lucines  les  mieux  caractérisées. 

Nous  venons  d'exposer  les  caractères  de  l’animal  et  de  la  coquille 
du  genre  Onguline.  Ce  que  nous  connaissons  des  Lucines  va  nous  aider 
singulièrement  à déterminer  les  rapports  du  genre.  Par  ses  muscles , 
par  son  pied,  par  son  manteau,  l’animal  dont  il  est  question  res- 
semble parfaitement  à celui  des  Lucines  ; il  en  diffère  par  des  palpes 
labiales  un  peu  plus  allongées  et  des  branchies  dont  les  quatre  feuillets 
sont  détachés  les  uns  des  autres.  Nous  l'avons  vu  : si  les  Lncines  n'ont 
point  de  palpes  labiales.  les  Corbeilles  en  ont  un  rudiment  et  les  Ongu- 
lines les  auraient  un  peu  plus  longues.  Relativement  aux  branchies, 
nous  nous  sommes  expliqué  à leur  sujet,  et  nous  avons  fait  voir  que  si 
deux  do  ces  organes  se  montrent  dans  les  Lucines  et  les  Corbeilles , 
c’est  qu'ils  ont  beaucoup  plus  d'épaisseur  et  qu'ils  renferment  en 
réalité  autant  de  vaisseaux  branchiaux  que  les  quatre  feuillets  des 
autres  Mollusques.  C’est  pour  cette  raison,  comme  nous  le  répétons, 
que  nous  n’avons  pas  hésité  à introduire  dans  une  même  famille 


LES  LÜCINES. 


8n 


des  genres  qui  paraissent  plus  différents  qu’ils  ne  le  sont  en  réalité 
Il  faut  donc  rejeter  l’opinion  de  M.  Duvernoy,  par  laquelle  il  déplace  le 
genre  pour  le  transporter  dans  le  voisinage  des  Moules,  Uion,  en  effet,  ne 
justifie  cette  opinion  ; les  Moules  appartiennent  à un  type  d'organisation 
tout  particulier  dans  lequel  la  bouche , les  branchies  , le  manteau  , les 
ovaires,  le  système  nerveux,  n’ont  presque  aucune  analogie  avec  ces 
mêmes  organes  chex  les  Ongulines.  Nous  n’insisterons  pas  davantage  à 
ce  sujet,  il  suffira  de  comparer  la  description  de  l’animal  de  l’Onguline 
avec  celle  de  celui  des  Moules. 

Les  Ongulines  sont  des  coquilles  d’un  médiocre  volume  ; nous  en 
connaissons  trois  espèces  vivantes  qui  proviennent  des  mers  du  Sénégal , 
et  une  quatrième  fossile  qui  s’est  creusé  des  trous  peu  profonds  dans  les 
calcaires  d’eau  douce  du  bassin  de  la  Gironde.  C’est  cette  espèce  que 
M.  Bastérot  a eu  le  tort  de  rapporter  au  genre  Clotho  de  Faujas.  La 
coquille  pour  laquelle  Faujas  a institué  le  genre  que  nous  venons  de 
cittr  est  très  différente  de  celle  de  M.  Bastérot  : elle  est  très  voisine 
du  Petricoîa  ochroîeuca  de  Lamarck.  avec  lequel  nous  a\^ns  établi 
notre  genre  Fragilia.  L'espèce  de  M.  Bastérot,  au  contraire,  a tous 
les  caractères  des  Ongulines.  et  elle  ressemble  plus  particulièrement 
à une  petite  espèce  perforante  du  Sénégal  qui  n'a  point  encore  reçu 
de  nom.  En  aliribuanl  ainsi  à ces  deux  sortes  de  Clotbo  la  place  géné- 
rique qui  leur  convient,  le  genre  lui-mème  disparaît  et  doit  s’effacer.  En 
même  temps  la  confusion  qui  s'est  depuis  longtemps  établie  entre  les 
deux  espèces  que  nous  venons  de  rappeler  ne  peut  plus  subsister. 
M.  Bronn , dans  son  Index  patæontologicm  ^ en  admettant  le  genre 
Clotho  de  Faujas,  a continué  à confondre , dans  un  même  genre,  deux 
coquilles  que  nous  avions  séparées  depuis  longtemps.  Ainsi  quand  nous 
citons  une  Onguline  fossile  à laquelle  nous  rapportons  le  Clotho,  il  est 
entendu  que  c’est  de  celui  de  M.  Bastérot  seul  qu’il  s’agit,  et  non  de 
celui  de  Faujas. 

Onguline  couleur  de  laque.  U^igulina  l'uhra^  Daudin. 

PI.  15.  fig-  11  à 14. 

U.  Testa  œqmlaU-rà  , rotuncîato-Ienticulari,  aliquatitîspei  subtnmsversâ 
'vcl  oblon;^d  ^fuîvo~fusca^  uitüs  rnbescente , triinsvershn  irregnîatiter 
rugosâ;  mnbonibus  tninimis^  vi.v  obliquis  ^ opposicis. 


Onguline  coiiN'Ur  d«  laque,  Daudin,  Bo.se*.,  BtifL,  de  Déterv  , Moll, 
t.  3,  p.  pL  20.  f.  r,  2. 

De  Roissy,  Ruff.  de  Sonn.  Moll.  t.  6.  p.  374.  pL  66.  f,  4. 


8i2 


YlNGTlKAIli  FAMILLE. 


Oken,  Lehrb,  der  Natnrg.  t.  r.  p.  229, 

UnguUnaoblongaçXtransversa.  Lamk.  An,  s.  vert.  1,5.  p.  487,  u® 

Scliwcigger,  Nalurg.  p.  703. 

Sowerby,  Généra  of  shclls,  Ungultna, 

Blainv.  Dict  sc.  nat.  l,  32.  p.  345. 

Blainv,  Malac,  p.  562.  pl.  73.  f.  G.  Onguline  transverse. 

Cuvier,  Règne  anim.  2*  éJ.  p.  149. 

Meiike,  Syu.  Moll,  2*^  éd.  p.  11  g. 

Crouch.  III.  iiilr.  lo  Lamk.  Coiicli.  p.  8.  pl.  4.  f.  7. 

Rang,  Mau.  des  Moll.  p.  32 r, 

Unguïinu  tninsvcrsa.  Desb.  Encycl.  inélli.  Yers.  t.  3.  p.  G65, 

Desli.  dans  Lamk.  Au.  s.  vert,  2^  éJ,  t,  6.  p.  120. 

Reeve,  Conch.  sysl.  I.  i.  p.  66.  pl.  46. 

Swainsüi),  Malac.  p.  37  i . f.  1 1 7. 

Duveruoy,  Méin.  sur  l’an,  de  TOng.  Ann.  sc.  nat,  2®  sér,  l.  18,  p.  iio. 
pl.  5.  f.  1,  2,  3. 

■» 

Dfth.  Obs,  sur  les  Ong,  Anu.  sc.  nat.  2®  sér.  t.  19.  p.  5. 

Ungtilina  transversa,  Sow.  Jun.  Conch.  Man.  p.  9.85,  f.  88. 

Hanley,  Descr.  cal.  p.  40, 

Poticz  et  Mich.  Gai.  des  Moll,  l,  2.  p.  25ü. 

DesU.  dans  Cuv.  3®  éd.  pl.  104.  f.  3. 

Habite  le  Sénégal. 

Coquille  très  variable  dans  sa  forme.  Tantôt  elle  est  orbiculaire, 
tantôt  sublransverse , et  quelquefois  elle  devient  longitudinale.  Lors- 
qu’elle était  très  rare  dans  les  collections , il  a été  possible  de  constituer 
deux  espèces  avec  ses  deux  principales  variétés,  ainsi  que  l’a  fait 
Lamarck  dans  son  Histoire  des  animaux  sans  vertèbres.  Après  avoir 
examiné  les  individus  de  la  collection  du  Muséum , ceux  do  la  collection 
de  Lamarck,  nous  avons  reconnu  quils  appartiennent  à un  môme  type 
spécifique,  et  nous  les  avons  réunis  sous  une  môme  dénomination. 
Depuis , cette  Onguline  a été  découverte  au  Sénégal  par  M.  Rang.  Elle 
a été  répandue  assez  abondamment  dans  les  collections , et  il  est  devenu 
facile  à tous  les  observateurs  de  constater  qu’en  effet  les  deux  espèces 
de  Lamarck  doivent  se  réunir  en  une  seule. 

Cette  coquille  se  distingue  facilement  parmi  ses  congénères  : elle  est 
peu  bombée;  sa  surface  est  irrégulièrement  ridée  ou  striée  par  des 
accroissements;  elle  est  couverte  d’un  épiderme  tenace  d’un  brun  plus 
ou  moins  foncé.  Ses  crochets  sont  petits,  ils  partagent  le  bord  dorsal  en 
deux  parties  presque  égales;  la  charnière  est  étroite,  et  la  description 


LES  LUCINES. 


8l3 


que  nous  en  avons  faite  précédemment  a été  empruntée  à l’espèce  qui 
nous  occupe.  Les  valves  sont  d’un  rouge  de  laque  à l’intérieur.  En 
dehors,  elles  sont  d’un  brun  rougeâtre  dans  les  individus  les  plus  pâles, 
et  cette  couleur  passe  insensiblement  au  brun  le  plus  foncé.  Les  indi- 
vidus que  l’on  rencontre  le  plus  habituellement  ont  24  millimètres  de 
haut  et  25  millimètres  de  largeur;  ceux  qui  sont  longitudinaux  conser- 
vent la  même  largeur  et  ont  jusqu’à  32  ou  33  millimètres  de  hauteur. 


GENRE  SOIXANTE  - CINQUIÈME. 

CTREUfEliLE.  Cyrenella. 

PI.  i4  his,  lig.  10  à i5. 

CARACTÈRES  GENERIQUES.  — Animal  ovale  OU  obrond , épais , 
convexe,  enveloppé  dun  manteau  à bord  simple,  fendu  dans 
toute  la  longueur  du  bord  ventral , terminé  en  arrière  par  deux 
siphons  courts  , réunis  dans  toute  leur  longueur.  Bouche  petite, 
transverse  , accompagnée  de  quatre  palpes  labiales  médiocres 
et  étroites  ; deux  muscles  adducteurs  presque  égaux , très 
écartés , allongés  et  étroits  ; masse  abdominale  épaisse , ter- 
minée en  son  bord  inférieur. par  un  pied  cylindrique , allongé , 
vermifonne;  quatre  feuillets  branchiaux  très  inégaux,  réunis 
en  arrière  de  la  masse  abdominale  ; ils  sont  allongés  et  étroits  \ 
les  externes  sont  de  beaucoup  plus  petits  que  les  internes. 

Coquille  ovale  ou  obronde,  subglobuleuse,  mince,  lisse, 
couverte  d’un  épiderme  brunâtre  ou  jaunâtre;  subéquilatérale, 
parfaitement  close,,  à bords  minces,  simples  et  tranchants; 
bord  cardinal  étroit,  portant  au-dessous  des  crochets  deux 
petites  dents  obliques  sur  la  valve  droite  et  une  seule  sur  la 
gauche  ; ligament  externe  appuyé  sur  des  nymphes  très  apla- 
ties et  obliques.  Impressions  musculaires  grandes  et  écartées, 
ovalaires;  impression  palléale  simple. 

SYNONYMIE  GENERIQUE.  — Cyreuoicla . Joannis. 


VINGTIEME  FAMILLE. 


8l4 

OBSERVATIONS.  Nous  avions  distingué  la  coquille  type  de  ce  genre 
longtemps  avant  que  M.  Joannis  la  décrivît  dans  le  Magasin  de  zoologie. 
Nous  avons  hésité  à en  parler,  parce  que  nous  n'en  connaissions  point 
l'animal.  M.  Quoy,  qui  l avait  recueilli  au  Sénégal , voulut  bien  nous  en 
communiquer  le  dessin,  et  alors  seulement  nous  exposâmes  les  carac- 
tères du  nouveau  genre  dès  1833  à la  Çociété  philomatique.  Nous  pour- 
rions donc  invoquer  au  besoin  les  procès-verbaux  de  celte  société 
pour  établir  notre  priorité , si  nous  mettions  une  grande  impor- 
tance à attacher  notre  nom  à la  création  d'un  genre.  11  nous  suffit  qu’un 
genre  soit  bon  pour  que  nous  Tacceplions  avec  plaisir,  quel  que  soit 
l’auteur  qui , le  premier,  l'a  introduit  dans  la  science.  Si  nous  préférons 
notre  nom  à celui  de  M.  Joannis,  c’est  parce  qu’il  est  plus  conforme 
aux  règles  établies  par  Linné , ce  sage  législateur  de  la  nomenclature 
ayant  prescrit  de  repousser  impitoyablement  tous  les  noms  terminés 
comme  celui  proposé  par  M.  Joannis.  Ainsi,  quand  même  le  nom  que 
nous  avons  choisi  n aurait  pas  la  priorité , il  faudrait  néanmoins  le  con- 
server, ainsi  que  M.  Hermannsen  en  a donné  l’exemple  dans  son  ou- 
vrage précieux  Index  generum  malacozoorum. 

A la  première  espèce  vivante,  rapportée  du  Sénégal,  les  laborieuses 
recherches  de  M,  Cuming  en  ajoutèrent  trois  autres  découvertes  aux 
Philippines.  Depuis,  nous  reconnûmes  les  caractères  du  nouveau  genre 
dans  une  coquille  fossile  des  environs  de  Paris,  que  nous  avions  rap- 
portée au  genre  Vénus,  sous  le  nom  de  Venus  hicinoïde.TQls  sont  les 
matériaux  que  renferme  actuellement  le  genre  Cyrénelle  à l’aide  des- 
quels nous  allons  en  exposer  les  caractères. 

L’animal  est  orbiculaire  ou  ovalaire  selon  les  espèces  : il  est  épais  ; 
le  manteau  qui  l'enveloppe  est  mince,  transparent,  et  il  est  bordé  à la 
circonférence  par  un  muscle  orbiculaire  étroit  et  peu  épais  ; les  bords 
du  manteau  sont  simples,  ils  sont  séparés  dans  toute  la  longueur  du 
bord  inférieur;  l’ouverture  qu'ils  offrent  est  semblable  à celle  des  Lu- 
cines.  La  commissure  antérieure  se  produisant  beaucoup  plus  bas  que 
dans  les  Vénus,  à cause  de  la  longueur  et  de  la  position  du  muscle 
antérieur.  En  arrière,  la  commissure  a lieu  vers  l'origine  de  deux 
siphons  peu  épais,  assez  allongés  et  réunis  dans  toute  leur  longueur  en 
une  seule  masse  cylindracéo  conique.  Ce  qui  est  remarquable  pour  des 
organes  de  cette  grosseur,  c’est  qu’ils  sont  entièrement  dépourvus  d’un 
muscle  rétracleur  spécial.  L’ouverture  postérieure  des  siphons  est 
simple,  dépourvue  de  franges  ou  de  tentacules  ; ces  siphons  sont  iné- 
gaux en  diamètre,  le  branchial  étant  plus  large  que  son  congénère: 
mais  ils  sont  égaux  en  longueur. 


LES  LÜCINES. 


S 1 6 

Les  muscles  adducteurs  sont  allongés,  aplatis;  ils  occupent  les 
extrémités  de  l’animal,  et  ils  s’attachent  à la  coquille  tout  près  du  bord, 
lis  sont  placés  de  manière  à occuper  presque  toute  la  hauteur  des  bords 
antérieur  et  postérieur. 

Au-dessous  du  muscle  adducteur  antérieur,  vers  son  extrémité  supé- 
rieure , se  trouve  l’ouverture  de  la  bouche  qui , dans  le  genre  Cyrénelle  , 
est  petite  , Iransverse  et  ovalaire;  deux  lèvres  très  courtes  raccompa- 
gnent, et  elles  se  changent  rapidement  de  chaque  côté  en  une  paire  de 
palpes  étroites  et  d’une  médiocre  grandeur.  A cet  égard  , les  Cyrénelles 
se  rapprochent  des  Ongulines. 

La  masse  abdominale  est  grosse  et  épaisse  ; elle  est  ovoïde  et  elle  se 
termine  inférieurement  en  un  pied  cylindrique,  obtus  au  sommet, 
semblable  à celui  des  Lucines  et  des  Ongulines. 

Les  organes  branchiaux  se  rapprochent  aussi  beaucoup  de  ceux  de  ce 
dernier  genre.  Ils  sont  formés  de  deux  feuillets  inégaux  de  chaque  côté 
du  corps  ; les  fauillpls  internes  sont  allongés , étroits , subquadrangu- 
laires;  ils  s’étendent  de  la  région  buccale  à l’ouverture  interne  des 
siphons  : ils  commencent  en  une  pointe  assez  aigue  qui  s’interpose  entre 
les  palpes  labiales.  Les  feuillets  externes  commencent  beaucoup  plus  en 
arrière , vers  le  milieu  do  la  longueur  de  leur  congénère.  Ils  sont  plus 
étroits  et  ils  se  prolongent  en  arrière  jusqu’à  l'ouverture  des  siphons. 
Par  leur  disposition  générale , les  organes  de  la  respiration  ne  manquent 
pas  d’analogie  avec  ceux  des  Vénus , seulement  ils  sont  plus  étroits , co 
qui  les  distingue  aussi  de  ceux  des  Cyrèues. 

Les  coquilles  du  genre  Cyrénelle  sont  orbiculaires  ou  ovalaires  ; elles 
sont  bombées,  lisses,  revêtues  d’un  épiderme,  quelquefois  cariées  vers 
les  crochets.  Ces  coquilles  sont  minces  , fragiles  : elles  sont  équivalves 
et  subéquilatérales;  les  crochets  sont  petits,  peu  saillants,  à peine 
obliques  ; ils  sont  très  rapprochés.  La  lunule  n’est  point  circonscrite. 
Dans  quelques  espèces  le  corselet  est  grand  et  limité  par  un  angle  obtus. 
Les  bords  des  valves  sont  simples  , minces  et  tranchants.  La  charnière 
est  étroite;  elle  montre  sur  la  valve  droite  deux  petites  dents  inégales , 
dont  la  postérieure  est  ordinairement  bifide  au  sommet.  Une  seule  dent 
cardinale  existe  sur  la  valve  gauche,  et  en  arrière,  à la  limite  du  liga- 
ment, on  distingue  le  rudiment  d’une  seconde  dent  cardinale.  On  n’aper- 
çoit sur  ce  bord  aucune  trace  de  dents  latérales. 

La  surface  intérieure  est  blanche,  quelquefois  un  peu  violacée:  elle 
est  lisse , et  l’on  a quelque  peine  à distinguer  les  impressions  que 
l’animal  y a laissées.  Les  impressions  musculaires  sont  ovales  et  étroites; 
l’antérieure  est  fort  longue;  elle  occupe  toute  la  hauteur  du  bord  an- 


8i6 


VINGTIEME  FAMILLE. 


térieur  en  -suivant  la  courbure  de  ce  bord.  L’impression  postérieure 
est  un  peu  plus  large , elle  est  aussi  un  peu  pins  courte  ; elle  est  ovale 
ou  subquadrangulaire  ; Tune  et  l’autre  sont  extrêmement  rapprochées 
des  bords  des  valves.  Une  impression  palléale  simple,  parallèle  au  bord, 
fort  rapprochée  do  lui,  s’étend  d’une  impression  à l’autre.  Le  ligament 
est  externe  : par  sa  structure  il  présente  de  l’analogie  avec  celui  des 
Ongulines  et  de  la  plupart  des  Lucines.  Il  est  supporté  par  une  nymphe 
très  aplatie.  La  tunique  fibreuse  externe  s’enfonce  dans  le  sillon  étroit 
de  la  nymphe,  tandis  que  la  portion  cartilagineuse  du  ligament  se  fixe 
sur  une  surface  en  plan  oblique  qui  s'étend  sur  presque  toute  la  largeur 
du  bord  cardinal.  Nous  devons  ajouter,  relativement  aux  dents  de  la 
charnière  , que  tantôt  elles  se  projettent  obliquement  en  avant , tantôt 
elles  sont  transverses  ou  un  peu  obliques  en  arrière. 

Les  caractères  du  genre  Cyréncilc,  que  nous  venons  d’exposer,  sont 
suffisants  pour  déterminer  la  place  que  ce  genre  doit  occuper  dans  la 
méthode.  M.  Joannis  avait  dit  : les  Cyrénelles  sont  des  Cyrènes  sans 
dents  latérales.  Par  conséquent,  pour  ce  naturaliste,  le  genre  aurait 
dû  faire  partie  de  la  famille  des  Conques  fluviatiles  de  Lamarck. 
M.  Joannis  insistait  en  considérant  comme  de  peu  de  valeur  les 
caractères  de  la  coquille , et  les  croyait  propres  à fonder  un  sous- 
genre  des  Cyrènes  plutôt  qu’un  genre  distinct.  Nous  n’avons , dans 
aucun  temps,  partagé  l'opinion  de  M.  Joannis.  Lorsque  nous  connais- 
sions la  coquille  seule , nous  l’avions  rapprochée  des  Lucines , et  cette 
opinion  s’affermit  dans  notre  esprit  lorsque  nous  eûmes  connaissance  de 
l’animai.  Nous  avons  décrit  celui  des  Cyrènes,  il  est  facile  d’en  com- 
parer les  caractères  avec  ceux  des  Cyrénelles,  et  l'on  s'apercevra 
bientôt  qu’en  effet  les  deux  genres  appartiennent  à deux  types  diffé- 
rents d’organisation.  Tout  nous  porte  à croire  qu'un  peu  plus  tard  , 
lorsque  les  zoologistes  auront  étudié  un  plus  grand  nombre  d’animaux 
de  Lucines,  celui  des  Cyrénelles  s'y  rattachera,  tout  en  constituant  un 
petit  groupe  particulier,  avec  lequel  il  serait  possible  de  faire  une  famille 
à part  qui  serait  caractérisée  par  la  présence  des  siphons  ; on  pourrait 
alors  résumer  les  caractères  de  celte  famille  en  disant  qu’elle  renferme 
des  Lucines  à deux  siphons  réunis.  Nous  insisterons  aussi  sur  la  forme 
spéciale  de  l'organe  locomoteur  : il  n’est  caractérisé  dans  aucun  genre 
de  la  même  manière  que  chez  les  Lucines , et  retrouver  un  organe  sem- 
blable chez  les  Cyrénelles  a été  pour  nous  une  des  raisons  qui  nous  ont 
le  plus  particulièrement  décidé  à introduire  ce  genre  dans  la  famille  des 
Lucines. 

Les  Cyrénelles  sont  des  coquilles  qui  habitent  les  eaux  douces  dans 


LES  LUCINES. 


817 

les  pays  chauds.  On  n’en  connaît  encore  qu’un  très  petit  nombre 
d’espèces  ; une  du  Sénégal , les  trois  autres  des  Philippines.  La  cin- 
quième espèce  est  fossile  dans  le  bassin  de  Paris  où  nous  l’avons  décou- 
verte dans  les  sables  marins  moyens. 

1.  Cyrénelle  de  Dupont.  Cyrenella  Dupontiana  ^ 

PL  14  bis,  fig.  13.  14.  15. 

C.  Testa  orliculari  ^ tttmidu  subœquilatetâ  temd  ^ fragili^  transversim 
irregnlariter  striata , sub  epitiermide  fiisco  albd;  umbonibus  parvis  j 
tumiUis,  oppositis;  intiis  albo  ccerulescente  ; carJine  angusto,  bidcn^ 
tato\  dvntibus  parvis^  dnticè  obUquatis. 

Cyrenoida  Ditpontia  de  Joannis,  Magas.  de  zool.  iS35.  pl.  6^4. 

CyrentUa,  Desh  Alag  de  zool.  iS35.  pl.  70. 

So\?erby,  Conch.  Man.  p.  i35.  f.  xi4. 

Habite  les  eaux  douces  du  Sénégal. 

Coquille  obronde,  inéquilatérale  : elle  est  enflée;  son  test  est  mince 
et  fragile;  ses  crochets,  peu  saillants , sont  rapprochés  au  sommet  et 
peu  inclinés  en  avant,  La  surface  extérieure  est  chargée  de  stries  irré- 
gulières d’accroissement;  elle  est  revêtue  d’un  épiderme  d'un  brun 
foncé  sale , quelquefois  excorié  sur  les  crochets , ainsi  que  cela  arrive 
fréquemment  chez  les  coquilles  qui  habitent  les  eaux  douces.  Sous  cet 
épiderme , la  coquille  est  d’un  blanc  jaunâtre;  à l’intérieur,  elle  est  d’un 
blanc  bleuâtre , et  l’on  remarque  quelquefois  de  ce  côté  des  taches  irré- 
gulières rougeâtres  qui  paraissent  dues  à un  état  maladif  du  manteau. 
Le  bord  cardinal  est  très  étroit;  il  se  rétrécit  surtout  au  centre,  pour 
s’élargir  un  peu  en  avant  : il  porte  deux  dents  cardinales  sur  la  valve 
gauche.  La  postérieure  est  obsolète  et  presque  à l’état  rudimentaire  ; il 
y en  a trois  sur  la  valve  droite  : l’antérieure  est  mince , elle  est  la  plus 
longue  ; la  postérieure  est  étroite  et  très  courte.  Ces  deux  dents  conver- 
gent l’une  vers  l’autre  à leur  sommet  et  forment  un  V très  ouvert  com- 
posé de  deux  branchés  inégales.  C’est  au  milieu  de  ce  V que  s’élève  la 
dent  moyenne  ; elle  est  triangulaire , plus  large  et  plus  épaisse  que  les 
deux  autres.  Ce  qui  rend  cette  charnière  remarquable , c’est  qu’elle  se 
dirige  du  côté  antérieur,  au  lieu  de  se  porter  en  arrière,  ainsi  que  cela  a 
lieu  dans  la  plupart  des  autres  coquilles. 

Les  grands  individus  de  cette  espèce  ont  35  ou  36  millimètres  dans 
leurs  deux  diamètres. 


T.  I.  PAUTIE. 


8i8 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


2.  Cyrénelle  lucinoïde.  Cyrenetta  lucinoides 
PL  14  bis.  fig.  10,  11.  12. 

C,  Testa  turgidulâ  ^ tenui^  orbiculari  ^ incequilaterali  y transversim 
obsolète  striata  sublœvigata  ; umhonibus  minimis y obïiquis  y lunulà 
ovata  ; cardine  angusto , ineequaUter  bidentalo , dente  majore  bifido. 

Venus  lucinoides.  Desh.  Descr.  des  coq.  foss,  de  Paris,  l.  i.  p.  146. 
n®  9.  pl.  a3.  f.  la,  i3.  ■* 

Habite...  Fossile  à Senlis  dans  les  sables  marins  moyens. 

La  Cyrénelle  lucinoïde  est  jusqu’ici  une  des  coquilles  les  plus  rares 
du  bassin  de  Paris.  Nous  ne  connaissons  que  le  seul  individu  de  notre 
collection  ; nous  l’avons  recueilli  aux  environs  de  Senlis , dans  les  grès 
marins  moyens.  Celte  coquille  a beaucoup  d’analogie  avec  une  espèce 
qui  vient  des  Philippines , et  qui  a été  nommée  Cyrenella  Cumingii. 
Néanmoins  les  deux  espèces  restent  parfaitement  distinctes  ; la  nôtre  est 
orbiculaire , inéquilatérale , bombée  ; sa  surface  est  chargée  de  stries 
irrégulières  d’accroissement  : elle  montre  de  plus , vers  le  milieu  des 
valves,  un  peu  en  arrière,  deux  côtes,  très  obsolètes  rapprochées  et  diver-, 
gentes.  Un  angle  très  obtus,  obliquement  dirigé  en  arrière,  circonscrit 
obscurément  un  grand  corselet.  La  lunule  est  ovalaire,  elle  est  circon- 
scrite par  une  ligne  déprimée,  peu  apparente.  Les  crochets  sont  petits, 
opposés,  à peine  inclinés  au-dessus  de  la  lunule  : la  charnière  est 
étroite;  elle  porte  deux  dents  inégales  sur  chaque  valve;  sur  la  valve 
droite , la  dent  antérieure  est  mince  et  dirigée  en  avant  ; la  dent  posté- 
rieure est  beaucoup  plus  épaisse , et  elle  est  profondément  biBde.  Cette 
bifurcation  est  tellement  profonde  que  l’on  pourrait  croire  à l’existence 
de  trois  dents , mais  il  n’en  existe  réellement  que  deux.  Les  dents  de  la 
valve  gauche  sont  plus  grêles  : l'antérieure  est  la  plus  épaisse,  et  elle 
est  biüde;  la  postérieure  est  plus  allongée,  mais  elle  est  plus  mince. 
Les  impressions  musculaires  sont  semblables  à celles  des  autres  Cyré- 
nelles;  toutes  deux  descendent  très  bas , comme  dans  les  Lucines  , et 
sont  comprises  dans  l’intérieur  de  l’impression  palléale. 

Cette  coquille  a 22  millimètres  de  hauteur  et  autant  de  largeur. 


FIN  PD  PREMIER  VOLUME. 


TABLE  DES  MATIERES 


CONTENUES  DANS  LE  PREMIER  VOLUME. 


DÉFINITION  DES  MOLLUSQUES i 

inOlililJSQVES.  — CliASSE  prehiière. 

Mollusques  acéphales 3 

phemiere  sous-cusse. 

Mollusques  dimjraires 4 

PREMIÈRE  FAMILLE. 

Les  Tubicolés 5 

Gehre  premier.  Arrosoir  ^spergillum 8 

■dspergiliitm  Javanum.  » i5 

~ leognanum l6 

Gehre  DEUXIEME.  CUvagelle,  Clavagella . iS 

Clavagêlla  coronata a3 

^ bacillaris a4 

lata 'aS 

Genre  troisième.  Gastrochèue,  Gastrochœna a6 

Gastrochœna  mumia Sa 

— > dubia 34 

— gigantea 35 

DEUXIÈME  FAMILLE. 

Les  Pboladaires. . 37 

Genre  quatrième.  CloisoDuaire , Septaria 40 

SeptiÀria  arenaria 44 

— mediterranea 46 

Genre  cinquième,  x^ret,  7 credo 47 

T*!fodo  navalis 69 

Genre  sixième.  Tércdine,  Teredina 63 

Teredina  personata 66 

Genre  septième.  Pholade,  67 

Pholas  crispata 77 

— candida 79 

— ligamentina 80 

— costata.  . 8 a 

TROISIÈME  FAMILLE. 

Les  Solénacées 83 

Genre  huitième.  Solémye,  Solernya 86 

Solemya  mediterranea 90 


52 


820 


TABLE  DES  MATIÈUES. 


Oenre  neuvième,  Solen,  Sofen 

Soleu  siliquo 

— viÿi/irt 

— . . . 

/eÿumen 

— coarctntus,  . . . 

Genre  dixième.  Soléciiile,  Solcairtus 

SoUcnrtns  strigilaWs 

cnndlduf 

— i.nmarchii.  . , . 

QUATRIÈME  FAMILLE. 

Les  Olyciméiides 

Genre  onzième.  Glycimére,  Gîjcimeris,  . , . 

Giycimeris  siliqua.  . , . , . 
Genre  douzième.  Paaopée,  Panopæa,^  . . . 

Panopæa  Aldrovnndi»  , . , 

— Meîiardi,  . , • . 

— intermedia,  , . , 

Genre  treizième.  Phuladoniye,  Pholadomya, 

Pholndomya  candida , . . 

— muhicostata.  . . 

— donacijormis,  . , 

— semicQstata,  , . . 

• — umbonata. . . • , 

— retiisn 

— fidicuîa 

— decussata 

Genre  quatorukme.  Ccromye,  Ceromya,  . , 

Ceromya  elegans,  . . . 

— excentrica,  . . , 

— %^cgaria 

CINQUIÈME  FAMILLE. 

Les  Myaires 

Genre  quinzième.  Mye,  Mya « . 

Mya  tnincata * 

— tugon, . 

Genre  SEIZIÈME,  Corbiile,  Corbula 

Corbula  wuiata • 

— nucUus 

complanata.  , • , 

Genre  DIX-SEPTIÈME,  Neæra , . 

Ncœra  cuspidata,,  , • , 
cosrellata 

SIXIÈME  FAMILLE. 

Les  Pandores 

Genre  dix-huitième.  Pandore,  Pandora,  . . 

Pandora  rostrata.  . . , 
Genre  dix-neuvième,  Myadore,  Myndora,  . 

Myadora  rostrata.  . . 


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187 

189 

190 
192 
192 


194 

196 

200 

202 

204 


TABLE  DES  MATIEBES. 


821 


SEPTIÈME  FAMILLE. 

Les  O.siroiIc.smi’S 20  + 

Genre  vnütième.  Lvoiisic,  l.ronsir, ao- 

Lj-nnsia  norivcî^icn 211 

Genre  vin(;t  et  unième.  OstôoilfS'nc* , Offt-otlestim aia 

OstfoJesma  cuntata 2i5 

Genre  venot* deuxième.  Prriplome,  Penphma 216 

Peripfu/nn  ittœquivn^v'S 219 

Genre  vingt-troisième.  Anaïiiie,  Anutlnn.  • 220 

Anntlua  suhrostrnta,  . 229 

Genre  vingt-quatrième,  'l’hraiîie , Thr/icia . , aSt 

rhrticia  co/huioides. , . • • , . . 243 

Genre  ungt  cinquième,  Myccliaim; . Myochama 245 

iMyockoma  anomioides»,  , . , . . 249 

Genre  vingt-simème.  CdiJiliiî,  Cordilia . . . a5i 

Cttrdiiln  sfmisidcntn.  2 54 

HUITIÈME  FAMILLE. 

Les  Mactracées 255 

Genre  vingt-septième.  Lutraire,  Lutraria 259 

Lutraria  oblouga 267 

— lugQsa 270 

Genre  vingt-huitième.  Mâche,  Maeva.  272 

'Mnctrn  tnnngula 288 

Genre  vingt-neuvième.  Aiiatinelle,  AnatineUo,  289 

Anatinelîa  candida.  292 

Genre  trentième,  Giialliodoti , Guathodon 294 

Gnathodon  caneattis , 299 

NEUVIÈME  FAMILLE. 


Les  Mésudesmides.  3oo 

Genre  trente  et  unième.  Mésodesme,  ^lesodesma 3o3 

Mfsodesma  Quoyi 3 14 

— cornea 3i5 


OIXIÈME  FAMILLE. 

Les  Âmphidesmides.  317 

Genre  trente-deuxième.  Cumiiigie  , Cumingia SaS 

Cumingia  teUinoides 328 

Genre  trente-troisième.  Lavignon,  TrigoneUa 329 

TrîgoneUa  piperata 343 

Genre  trente-quatrième.  Syndosmve,  Syndosmya,  ....  345 

Syndosmya  ulba.  ' 355 

Genre  trente  cinquième.  Ainphidesine,  Amphidesma. . , . 354 

Amphi'desma  solidfi,  36 1 


8^4  TABLE  DES  MATIÈRES. 

Genre  cinquante-septième.  Gyrîadi»,  Cycîns -o3 

Cyclas  rivicola.  ...  1 ....  . 712 

Genre  c NQUANTE-HUiTiÈME,  Pisidie,  Pisidium 713 

Pisidium  umnicutn 716 

DÎX-HUIIIÈME  FAMILLE. 

Les  Érycinides 718 

Genre  CINQUANTE-NEUVIÈME.  Èvyfi'iiàc , Eryci^a 726 

Erjcina  cycladiformis 736 

Genre  SOIXANTIÈME.  Porooie , Poroma  736 

Poronia  purpurascens,  - 740 


DIX-NEÜVIÈME  FAMILLE. 


Los  Güléommides 741 

Genre  soixante  et  unième,  Galéonune,  Galeomma 742 

Galeomma  Turtoni 751 


VINGTIÈME  FAMILLE. 


Les  Luciues* 752 

Genre  solxante-deuxième.  Liicine,  Lucina 760 

Lucina  iinioniformis,  787 

— mntabiîis 788 

— scopülorum 7^9' 

— columbeUa 789 

— spinifera.  791 

— lactca^ 792 

— rolundaca,  798 

— tif’erwa 794 

— punctata 796 

— dentata 796 

Genre  soixante-troisième.  Corhcille.  (7o/i&is . . . 797 

Corbis  elegans 8o3 

— pectuncuUis 804 

Genre  soixante-quatrième.  Onguline,  UnguUna  8o5 

UnguUna  rubrii Sii 

Genre  soiXANTE-riNQUiÈME.  Cyrêuelli*,  Cyrenelia 81 3 

CyrencUa  Dupontiana 817 

CyrtncUa  htcinoides 818 


FIN  DE  LA  TABLE  DU  PREMIER  VOLUME. 


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