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Full text of "Traité pratique et raisonné de l'emploi des plantes medicinales indigènes"

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PRATIQUE ET RAISONNÉ 


DE L'EMPLOI DES 


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DE L'EMPLOI DES 


PLANTES MÉDICINALES IXDIGÈNES 


LIBRARY 


PAR Bad BAL one vork 


DANY'T A NI A 


Médecin à Boulogne-sur-mer, 


MEMBRE CORRESPONDANT DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE DE MÉDECINE DE MARSEILLE, . 
DE L’ACADÉMIE MÉDICO-CHIRURGICALE DE FERRARE, DE LA SOCIÉTÉ DES 
SCIENCES MÉDICALES ET NATURELLES DE BRUXELLES , DE LA 
SOCIÉTÉ NATIONALE D'AGRICULTURE, D'HISTOIRE NATU- 

RELLE ET DES ARTS UTILES DE LYON, El DE 
PLUSIEURS AUTRES SOCIÉTÉS SAVANTES, 


QUYRAGE COURONNE {MÉDAILLE D'OR) AU CONCOURS. 
OUVERT EN 1847 


PAR LA 
SOCIÉTÉ ROYALE DE MÉDECINE DE MARSEILLE, 
Sur la question suivante : 


« DES RESSOURCES QUE LA FLORE MÉDICALE INDIGÈNE 
PRÉSENTE AUX MÉDECINS DES CAMPAGNES. » 


Auquel l’auteur à ajouté un travail complémentaire considérable et un 
Atlas de plantes lithographiées. 


Trahimur peregrinis et exoticis, domestica: 
vero et indigena despicimus, (Eaglisi.) 


—22900 @D00e— 
BOULOGNE, PARIS, 
CHEZ L'AUTEUR, | CHEZ LABÉ, LIBNAIRE, 
Rue du Pot- d'Étam a Place de l'École de Médecine, n° 4.. 


L850. 


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INTRODUCTION. 


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Après vingt années de pratique à Calais , j'ai dû, pour des 
raisons particulières, me fixer à la campagne, où j'ai exercé la 
médecine depuis 1832 jusqu’en 1846. 


Il m'a suffi de jeter un coup-d'œil sur l'état comparé des 
villes et des campagnes pour me convaincre , au point de vue 
médical , de l'énorme différence qui existe entre les ressources 
des unes et celles des autres. 


Dans les villes , l'étal social forme un corps dont toutes les 
parties distinctes, mais intimement liées, agissent et réagissent 
les unes sur les autres. L'aspect de la misère agglomérée y 
excite la pitié, et sollicite des secours qu'il est presque toujours 
facile de se procurer. Les villes ont des hospices, des bureaux 
de bienfaisance , des caisses de secours mutuels pour les ou- 
vriers, des associations pieuses, des dispensaires, etc. 


Les campagnes sont privées de tous ces avantages et restent 
abandonnées à elles-mêmes, comme si, formant un peuple à 
part, elles n'étaient pas régies par les mêmes lois et ne devaient 
pas prétendre aux mêmes bienfaits, Dans les communes rurales, 
plus qu'ailleurs, s'offre le contraste du bien-être des riches 
et de l'infortune des nombreux habitants qui n’ont d’autres biens 
que l'emploi de leurs forces. Si l’ouvrier des campagnes est 
moins à plaindre que celui des villes tant qu'il se porte bien, 
il est beaucoup plus pauvre, plus écrasé par le malheur quand 
la maladie l’atteint. Le plus souvent, alors, il souffre sans 
secours, lutte péniblement, languit ignoré et meurt silen- 
cieux et résigné dans une chaumière où le froid, l'humi- 
dité, la malpropreté se joignent aux autres causes de des- 
truction. 


Le curé et le médecin assistent presque toujours seuls à ce 
déchirant spectacle de la misère aux prises avec la maladie. 
. Si l'un, représentant la pensée religieuse comme une immor- 
telle espérance entre la terre et le Ciel, est la première provi- 
dence du village, l’autre, prodiguant avec désintéressement les 
. Secours et les consolations de son art, en est assurément la 
seconde. Quand, ne possédant pour eux-mêmes que le strict 
- nécessaire, ils ne peuvent faire, sous le rapport physique, tout 


Le] 


1 où 


le bien que leur suggèrent leurs bonnes intentions, réduits 
alors à solliciter des secours , à associer à leur dévouement 
quelques personnes charitables, ils deviennent, pour ainsi 
dire , les messagers de la bienfaisance , malheureusement trop 
restreinte et toujours insuffisante , des habitants de la com- 
mune, 


Cet état déplorable de nos campagnes, qui réclame toute la 
sollicitude du gouvernement , et auquel on ne remédiera que 
par l'établissement d’un service de santé gratuit, m'a convaincu 
de la nécessité d’y faire de la médecine à bon marché. Jai 
donc renoncé, dans ma pratique rurale, aux médicaments d’un 
prix plus ou moins élevé, et aux préparations pharmaceutiques 
dont le luxe ne peut être payé que par le riche, pour m'occuper 
de l'emploi si simple et si économique des plantes que la nature 
fait naître avec profusion autour de nous. « Sur nos rochers les 
»_ plus stériles, dit M. Munaret, au fond des ombreuses vallées, 
» aux pieds de nos balsamiques sapins, sur les bords du ruis- 
» Seau qui serpente inconnu dans la prairie, comme le long 
» du sentier que je gravissais tous les matins, pour visiter mes 
» malades, partout j'ai pu récolter des espèces préférables, avec 
» leurs sucs et leur naïve fraîcheur, à ces racines équivoques, 
» à ces bois vermoulus que le nouveau-monde échange contre 
» notre or, et souvent contre notre santé... ({) » 


J'ai fait comme le spirituel auteur que je viens de citer, et 
les résultats que j'ai obtenus ont dépassé de beaucoup mes 
espérances. Livré à la pratique rurale après avoir été pendant 
long-temps familiarisé avec la thérapeutique urbaine, j'ai pu 
comparer et juger les deux genres de médication. L'expérience 
m'a démontré plus d'une fois que l’on doit presque toujours 
préférer les plantes indigènes, lorsqu'elles offrent les mêmes 
principes médicamenteux , aux substances exotiques , souvent 
altérées par le voyage ou le séjour dans les magasins , plus 
souvent encore falsifiées par la cupidité (2). 


»_ La frelatation des drogues, dit Gilibert, est la seule science 
«“ dont les marchands se piquent. Les drogues les plus chères 
» sont les plus maltraitées. L'abus est poussé à un tel point 
» que certains articles quadruplent de masse en sortant de 
» Marseille. On vend, par exemple, cent fois plus de quinquina 
» que l'Amérique n’en peut fournir; on vend cinquante fois 


* 


(1) Du médecin des villes et du médecin de campagne, 2e édition, p.259. 


(2) Je ne fais d'exception qu'en faveur du quinquina, qu'il est impos- 
sible, quant à présent, de remplacer dans le traitement des fièvres perni- 
cieuses. 2! 


5 
e 
» plus de manne qu’il n’en arrive à Marseille. Les résines les 
» plus précieuses , les aromates, les bois sont presque tous 
» Contrefaits ; pour y parvenir on ajoute des bois analogues 
» qui prennent un peu d'aromate par le contact, on les peint, 
» on les colore , etc, etc. (1).» 


Non-seulement on falsifie les substances exotiques dans leur 
pays natal, à leur arrivée dans nos ports et chez les droguistes, 
mais encore , quand elles sont d’un prix élevé , chez les phar- 
maciens avides et peu consciencieux. 


Si dans tous les temps on a préféré les objets difficiles à 
obtenir, dans tous les temps aussi il s’est trouvé des hommes 
assez dévoués à leur pays et à l'humanité pour combattre ce 
préjugé. 

Pline se plaignait déjà de ce que, pour une légère excoria- 
tion, on mettait à contribution les rives de la Mer-Rouge, tandis 
que les vrais remèdes se trouvent partout à la portée de la 
classe la plus indigente (2). 


Tabernæmontanus en Allemagne (3), Thomas Bartholin en 
Danemark (4), Beverovicius (Jean de Beverwick) en Hol- 
lande (5), Jean Prévost en Italie (6), Burtin (7) et Wau- 
ters (8) en Belgique ; Campegius (Champier) (9), Antoine 
Constantin (10), Garidel {11}, Coste et Wilmet (12), Bodart 


(4) L’anarchie médic. ou la méd. consid. comme nuisible à la société ; 
Neufchâtel, 1772. y 


(2) Ulceri parvo medicina à mari rubro imputatur, cum remedia vera 
guotidie pauperrimus quisque tenet (Pline, lib. xxiv ). 


(3) Recueil de plantes (en allemand), Francfort, 1588. Cet auteur 
étudiait les vertus des plantes indigènes au lit des malades, et les em- 
ployait de préférence aux exotiques. 


(4) De medicina danor. domestica, etc. Copenhag., 4606. 
(d) Introductio ad medicin. indigen. Leyde, 1644. 


(6) Medicina pauperum, etc. Francfort , 14641 ; Lyon, 1643 ; Paris, 
4654; Pavie, 1660. ibid, 4718. | 


(7) Quels sont les végétaux indig. que l’on pourrait substituer dans 
les Pays-Bas aux vég. exot., relativement aux différents usages de la vie ? 
Bruxelles, 1784, Mémoire couronné en 4783 par l’Acad. des Sc. de 
Bruxeiles. 


(8) Repertor. remedior. indigen., etc. Gandæ, 1810. Couronné en 
4807 par la Société de Méd. de Bordeaux. 


_ (9) Hortus gallieus, etc., cui accedit analogia medicinar. exoticar 
et gallicar. Lyon, 1533, | 


(40) Brief traité «le la pharmacie provençale et familière, Lyon, 4507. 
(41) Hist. des pl, qui naissent aux environs d’Aix, etc. Paris, 4723. 
_{42) Essai botan., chim. et pharm. sur les pl, indig, substituées avec 


. IN 
n 
(1), Loiseleur-Deslongchamps {2) en France, ont prouvé que 
la nature ayant suffisamment pourvu chaque pays des secours 
nécessaires à ceux qui l'habitent, on peut, sans avoir recours 
aux substances exotiques, guérir les malades avec les remèdes 
tirés des plantes indigènes. 


Ceux qui, pour me servir de l'expression pittoresque de M. 
Munaret , sacrifient sur l'autel de l'exotisme leur raison et leur 
pays , objectent que les plantes indigènes ou naturalisées sont 
peu énergiques ou infidèles dans leur action sur nos organes. 


Il suffit, pour réfuter la première objection, de rappeler que 
nous possédons des plantes amères, astringentes, aromatiques, 
purgatives, diurétiques, etc., tout aussi actives que celles que 
nous faisons venir à grands frais des régions lointaines ; que 
nous avons l’aconit, l’arnica, la bryone, la belladone, la chéli- 
doine, le colchique, la coloquinte, la digitale, les ellébores, 
l'élatérion, les euphorbes indigènes, la gratiole, la jusquiame, 
la laitue vireuse, la moutarde, le nerprun, le pavot et l'opium 
indigène, la pulsatille, la scille, le seigle ergoté, la soldanelle, 
le stramonium, le tabac, les varecs et l’iode, la valériane, etc. 


La seconde objection n'est pas mieux fondée. La prétendue 
infidélité thérapeutique de nos plantes provient de causes que 
l'observation la moins attentive peut journellement constater, 
et qu'il est facile de faire disparaître. Indépendamment de la 
diversité des effets produits par les médicaments quelconques, 
suivant l'idiosyncrasie des sujets et les circonstances morbides, 
dont la prévention ne tient aucun compte, nous ferons remar- 
quer, dans nos grandes villes, le défaut de soins et de précau- 
tions relativement au choix de la plante, à sa récolte, à sa 
conservation, à ses diverses préparations, etc. 


Souvent, en effet, les plantes sont récoltées avant leur par- 
fait développement ou lorsqu'elles ont perdu la plus grande 
partie de leurs facultés, par des femmes qui n'ont d'autre 
instruction que la routine. Elles sont livrées à l’herboriste 
tantôt chargées de rosée , tantôt mouillées et rafraichies pour 
les faire paraître plus récentes quand elles n'ont pas été ven- 
dues au marché précédent , et, dans cet êtat , elles s’altèrent 
au lieu de se conserver par la dessiccation. Les malades les 


succès à des végét. exotiques, Nancy, 4776, Paris, 4793, Couronné par 
l'Acad. de Lyon 


(4) Cours de Botan. médic. comparée ; Paris, 4840. 


«2» 4 Rech. et observ. sur l'emploi de plusieurs plantes de France 
ui, dans la pratique de la mél., peuvent remplacer un certain nombre 


de substances exotiques. — 2° Manuel des plantes usuelles indigènes , 
Paris, 4819 ‘ 


V 


emploient d'habitude sans les faire examiner par le médecin, 
lequel peut seul constater leur identité , savoir si elles sont en 
bon état, s'assurer si elles ne sont pas récoltées depuis plusieurs 
années (1), si elles ont été cueillies chacune dans la saison con- 
venable, dans l'exposition, dans le climat et dans le terrain qui 
leur est propre. On cultive souvent dans les jardins les végé- 
taux les plus disparates, pour éviter la peine de les aller cher- 
cher dans les lieux où ils croissent naturellement. Une plante 
aromatique qui aime les montagnes et l'exposition au midi, 
se chargeant des principes au milieu desquels elle vit, devient 
aqueuse, se gonfle et perd les trois quarts de son énergie 


dans un terrain gras, trop humide, privé des rayons vivifiants 
du soleil. 


Les extraits de nos plantes fournis par le commerce, et dont 
les médecins des villes et des hôpitaux se servent, sont-ils 
toujours convenablement préparés et bien conservés ? Non ; et 
j'en apporte pour preuve leur complète inertie dans des cas 
assez nombreux où un suc épaissi préparé sous mes yeux pro- 
duisait constamment l'effet que je désirais obtenir. 


Parmi les causes auxquelles on peut avec raison attribuer 
l'oubli dans lequel sont tombées les plantes qui croïissent sur 
notre continent, il en est une que Je dois particulièrement 
signaler : c'est la négligence que l’on apporte généralement 
dans l'étude de la botanique médicale. Si l’histoire naturelle 
et les diverses méthodes de classification des végétaux sont 
parvenues, par les travaux de nos savants , au plus haut degré 
de perfection , 1l n'en est pas ainsi de la science qui consiste à 
déterminer les propriétés thérapeutiques des plantes qu’il nous 
importe le plus de connaître. « La botanique, dit Fontenelle 
» (éloge de Tournefort), ne serait qu'une simple curiosité, si 
» elle ne se rapportait à la médecine ; et quand on veut qu'elle 
» soit utile, c’est la botanique de son pays qu’il faut étudier»: 
Et cependant, chose à peine croyable, le plus grand nombre 
des médecins ne s'occupent de cette partie essentielle de l'art 
de guérir que d’une manière très-superficielle, ou y sont même 

» d’une ignorance absolue. On devrait exiger, dans les examens, 


: la présentation d’un herbier contenant les plantes usuelles 
- indigènes recueillies dans les herborisations et fait par l'élève 
- lui-même. Chaque plante de cette collection serait accompa- 


:  gnée d’une notice exposant succinctement ses noms, sa classe, 


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(1) La racine d’asaret, par exemple, sera considérée comme le meil- 
leur succédané de l’ipécacuanba par le médecin qui l’emploiera dans 
les six premiers mois de sa récolte, tandis que celui qui la mettra en 


usage après un ou deux ans ne lui trouvera qu'une propriété purgative, 
ou même simplement diurétique. 


1 


VI 


sa description, le lieu où on l’a récoltée, l'époque de sa flo- 
raison et ses vertus. La peine qu'on s’est donnée pour acqué- 
rir une science se grave dans la mémoire, et inspire presque 
toujours le désir de la mettre à profit. 


C'est surtout au médecin de campagne qu'il appartient 
d'employer les plantes indigènes. C’est pour lui une res- 
source dont il peut d'autant plus facilement tirer parti, que 
l'homme des champs lui-même témoigne de la prédilection 
pour les s2mples. Il en est tout autrement dans nos cités, où 
les préjugés de l’opulence, entretenus par l'intérêt du pharma - 
cien, et même par celui du médecin, s’opposeront encore 
long-temps, et peut-être toujours, à l'adoption de la médecine 
économique. « Les hommes qui appartiennent aux premières 
classes de la société, dit Montfalcon, ont sur les propriétés 
des médicaments des préjugés qu’il serait dangereux de heur- 
ter ; ils aiment la multiplicité des remèdes, ils prennent pour 
de grandes vertus la singularité de leurs noms, leur rareté, et 
surtout leur prix élevé. Médecins, n'allez pas leur prescrire ces 
végétaux précieux, mais d’un emploi trop vulgaire, que la 
nature fait croître abondamment dans nos campagnes, réser- 
vez-les pour le peuple. Voulez-vous donner une haute idée 
de votre génie ! N’ordonnez jamais que des remèdes extraor- 
dinaires, ou des substances amenées à grands frais des contrées 
les plus éloignées (1). 

L'ouvrage que je soumets aujourd’hui au jugement du pu- 
blic médical est beaucoup plus volumineux que le mémoire 
qui m'a valu, en 1847, la récompense flatteuse décernée par 
la Société royale de Médecine de Marseille. N'ayant eu con- 
naissance du prix proposé par cette Société : Sur les ressources 
que présente la Flore médicale indigène aux Médecins des 
campagnes, que peu de temps avant la clôture du concours, 
je n'ai pu lui présenter qu'un travail incomplet, L’addition 
d’un grand nombre d'articles, de compléments d'articles, 
d'observations, de notes pathologiques et thérapeutiques, etc., 
en ont fait un traité proportionné à l'importance du sujet (2). 


Cependant, j'ai rapporté sommairement la plupart des faits 
que j'ai recueillis, et souvent même je me suis borné à une 
simple mention, afin de donner à cet ouvrage une concision 
toute pratique et propre à atteindre le plus directement possi- 
ble le but d'utilité que je me suis proposé. 


(4) Dict. des Sc. Méd. du savoir-faire ; t. xxxt, p. 342. 

(2) Les articles qui n'étaient pas dans le mémoire couronné sont indi- 
qués par une note ou par un astérisque, et les compléments d'articles 
par des crochets, Les notes forment aussi un trayail additionnel. | 


VII 


C’est l'expérience seule qui, en médecine, peut confirmer 
ou détruire les opinions de ceux qui nous ont précédés. Aussi, 
ai-je cru nécessaire de répéter des essais déjà tentés sur les 
propriétés de beaucoup de plantes, afin de juger par moi- 
même de la réalité et du degré de leur action sur l’orga- 
pisme (1). Egalement éloigné de la crédulité des anciens, con- 
cernant les vertus de nos végétaux, et du dédain des modernes 
pour tout médicament qui ne vient pas d’un autre hémisphère, 
j'ai cherché sans prévention la vérité : je l’ai quelquefois trou- 
vée dans les pratiques traditionnelles des paysans. Qui ne sait, 
en effet, qu'un grand nombre de moyens préservatifs où cura- 
tifs doivent leur origine à la médecine populaire ? (2), 


En exposant les propriétés de chaque plante, je me suis par- 
ticulièrement attaché à préciser les cas qui en indiquent ou en 
contre-indiquent l'emploi. Il n'est de remèdes que ceux qui 

sont adaptés à la circonstance ; c’est l'opportunité ou l’art de 
saisir l'occasion qui caractérise l'habileté pratique (3). 


J’ai cru devoir exposer en tête de chaque article les divers 
modes d'administration de la plante qui en est le sujet. Quoique 
les préparations pharmaceutiques indiquées soient quelquefois 
très-nombreuses, je dois dire que je n'ai mis en usage dans 
ma pratique rurale que les plus simples et les moins coûteuses. 
J'emploie de préférence l'infusion’ théiforme ou la décoction 
aqueuse, la macération dans le vin, la bière ou le cidre, le 
suc exprimé dépuré ou épaissi par évaporation, la poudre mé- 
lée avec du miel, dans un liquide ou en pilules, quelquefois 
l'extrait aqueux et la teinture alcoolique. « La simplicité des 
» préparations, dit M. Munaret, économise l'argent du malade 
» et le temps du médecin. — Gaubius nous fait un précepte 
» de la première économie ; quant à la seconde, elle est d’au- 
» tant plus appréciable, que toutes nos heures se dépensent en 
» mille petits et imperceptibles détails attachés à la pratique 
» des campagnes. » (4). | 

L'ordre alphabétique, quoique éloignant toute idée de plan 
et de système, m'a paru le plus propre à faciliter les recher- 
ches. La classification thérapeutique placée à la fin aurait 
SR 


(4) Liberam profiteor medicinam, nec ab antiquis sum, nec à novis : 
utrosque ubi veritatem colunt, sequor ; magni facio sæpius repetitam 
-eæperientiam (Klein, interp. clinic. Præfat.) 
; (2) Ne pigeat ex plebeis sciscitari, si quid ad curationem utile Hip. 
in præcep.) 


” 
4 
# 


(3) In morbis curandis magni semper momenti est opportunitas (Fer- 
nel, method. medend. lib, 4.) 


(4) Ouv. cit. p. 238. 


VIII 


donné lieu, si je l'avais employée dans le corps de l'ouvrage, 
à de nombreuses répétitions nécessitées par les diverses pro- 
priétés d’une seule et même plante. 


En me livrant à l'étude des végétaux indigènes considérés 
au point de vue des ressources qu'ils offrent à la médecine 
rurale, je n'avais ni l'intention de publier les résultats que j'ai 
obtenus, ni la prévision d’un concours. Mon seul désir était de 
me rendre utile aux indigents et aux cultivateurs peu aisés du 
canton dans lequel j'exerçais. Je suis déjà payé de mon travail 
par le bien que j'ai pu faire, et par le suffrage de la Société 
savante qui m'a engagé, au nom de l'humanité, à poursuivre 
mes recherches, et à contribuer de tous mes efforts à la propa- 
gation des vérités pratiques dont je me suis fait le défenseur. 
Je serai doublement récompensé si les médecins de campagne, 
auxquels cet ouvrage est principalement destiné, adoptant mes 
vues d'économie, de bienfaisance et de patriotisme, répandent 
l’usage des plantes qui croissent naturellement dans les vil- 
lages qu'ils parcourent. 


TRAITÉ PRATIQUE ET RAINONNÉ 


DE L'EMPLOI DES 


PLANTES MÉDICINALES 


2NDLIGÈNES. 


ABSYNTHE, 


ABSYNTHE COMMUNE, GRANDE ABSYNTHE, ALUINE. 


Absynthium vulgare (T.) 
Artemisia absynthium (L.) 


L’absynthe est une plante vivace qui croit dans presque 
tous les climats, mais qui préfère les pays froids, les ter- 
rains incultes et arides, et que l’on cultive généralement 
dans les jardins. Les feuilles et sommités sont usitées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Eau distillée, 45 à 400 gram., en potion. 

Infusion aqueuse, 40 à 50 gram. par kilog. d’eau. 

Sirop (A d'infusion sur 2 de sucre), de 153 à 400 gram., pour 
édulcorer les potions, etc. 

Teinture (4 sur 8 d'alcool à 210), de 2 à 19 gram., en potion. 

Vin (1 sur 16 de vin), de 30 à 120 gram. 

Huile essentielle, de 4 à 2 gram.., en potion. 

Extrait, de 2 à 4 gram., en pilul. ou délayé dans un véhicule. 

Conserve (4 sur 4 de sucre), de 4 à 140 gram., en pilul., po- 
tion, etc. 4 

Poudre (rarement employée), 4 à 2gram., en bols, pilules, etc. 


A L'EXTÉRIEUR: En décoction, pour fomentations, lotions, etc., 
et en cataplasme, 
Propriétés. 


D'une odeur forte et aromatique , d’une saveur ex- 
_irêmement amère, l’absynthe est tonique, stimulante, an- 
thelmintique, fébrifuge et antiseptique. — On l’emploie 
principalement dans les affections atoniques du canal 
digestif, dans l’aménorrhée , la leucorrhée , la chlorose, 
l’anasarque , les fièvres intermittentes, et surtout comme 
anthelmintique. 


6 


Je n'ai jamais employé, dans ma pratique rurale , que 
l'infusion aqueuse, le vin, la teinture ou l'extrait d’absynthe. 
Je prépare le vin, d’après le conseil de Chaumeton, d'une 
manière à Ja fois simple, prompte et économique : sur 30 
gram. de feuilles et de sommités d’absynthe, je. verse un 
litre de bon vin blanc ; je soumets pendant une nuit ce 
mélange à la chaleur de 30 degrès du thermomètre centi- 
grade ; le lendemain matin je le filtre, et le vin peut de suite 
être employé ou gardé pour l’usage. 

L'absynthe est une des plantes indigènes les plus pré- 
cieuses. Je l'ai souvent employée contre les fièvres inter- 
mittentes de tous les types, lorsque l’état des voies digestives 
m'en permettait l'usage. Elle m’a surtout réussi dans les cas 
de récidive, après un long emploi des préparations de quin- 
quina. Entre autres cas, je citerai celui d’un manouvrier 
âgé de 41 ans, d’un tempérament lymphatique, habitant une 
chaumière basse, non aérée, sur le bord d'une tourbière, et 
qui depuis deux ans était atteint d’une fièvre intermittente 
plusieurs fois suspendue par l'usage du sulfaie de quinine, 
et reparaissant ensuite sous divers types. Je vis ce malade 
en novembre 1832. Atteint alors d’une fièvre quotidienne, il 
était accablé sous le poids de la misère et de la maladie. 
Les accès avaient peu d'intensité ; mais les extrémités infé- 
rieures étaient œdématiées , la face infiltrée et blafarde, la 
rate manifestement engorgée, la débilité très-grande. 

Le vin d'absynthe, à la dose de 60 gram., en augmentant 
graduellement jusqu’à celle de 150 gram. par jour, rétablit 
promptement les forces, augmenta la sécrétion urinaire, 
diminua peu à peu le volume de la rate, fit disparaître 


l'œdématie, intercepta les accès dans l’espace de six à huit: 


jours, et amena un rétablissement complet et non suivi de 
récidive au bout de vingt jours de traitement. 

J'emploie fréquemment le vin d’absynthe comme vermi- 
fuge. Dans ce cas, j'y joins souvent les fleurs de tanaisie. 
Chez les enfants, j'applique l’absynthe en cataplasme sur 
l'abdomen, bouillie dans Île lait avec quelques gousses d'ail. 
Ces moyens me réussissent souvent. : 

J'ai mis en usage avec succès un vin fébrifuge fait avec 
l'absynthe et l'écorce de saule blanc. Il m'a offert dans la 
plupart des cas le même avantage que le vin de quinquina. 
Je l'ai employé avantageusement dans les leucorrhées ato- 
niques et dans la débilité des organes digestifs, dans l’épui- 
sement des forces à la suite de longues maladies fébriles , 
d'hémorrhagies utérines , de suppurations abondantes, etc. 
Dans ces derniers cas, j'en fais prendre une ou deux cuille- 


es 


7 


rées à bouche trois ou quatre fois par jour.Comme fébrifuge,. 


j'en administre 80 à 150 gram. par jour, dans l'intervalle 
des accès. 

Les brasseurs substituent ou joignent l’absynthe au hou- 
blon dans la fabrication de la bière, soit pouren modérer la 
fermentation ou empêcher son acidité, soit par économie, 
lorsque le prix du houblon est trop élevé.La présence d’une 
certaine quantité d’absynthe dans cette boisson la rend plus 
enivrante : c’est un fait que j'ai constaté. Déjà les anciens 
avaient remarqué que l'usage trop fréquent de l’absynthe 
nuit à la tête et aux yeux. Cette opinion existe aussi dans 
nos campagnes , et paraît justifiée par l'observation. L'in- 
destolpe a éprouvé de violents maux de tête et de l’inflam- 
mation aux yeux toutes les fois qu’il a fait usage de l'extrait 
ou de l'essence d’absynthe. J'ai moi-même observé cet effet 
chez un jeune cultivateur d’un tempérament sanguin, et 
qui , atteint d’une irritation gastrique, avait pris du vin 
d’absynthe pendant quinze jours pour se fortifier l'estomac. 
J'ai vu, par la même cause, une femme irritable, atteinte de 
gastralgie et d’affections herpétiques revenant chaque prin- 
temps, éprouver des céphalalgies, des vertiges, avec injec- 
tions des conjonctives. Il est donc de toute évidence que 
l’absynthe est nuisible lorsqu'il existe une grande excita- 
tion nerveuse ou un état phlegmasique. 

A l'extérieur, l’absynihe déterge. les ulcères et limite la 
gangrène. J'ai eu l’occasion de l'employer avec succès dans 
le flegmon diffus gangréneux. Je me sers, dans ce cas, 
d’une forte décoction d’absynthe , à laquelle je fais ajouter 
une certaine quantité de sel commun. Dans les ulcères 
atoniques, scorbutiques ou scrofuleux, de même que dans 
les plaies entretenues par l’abondance de la suppuration, 
j'applique le suc exprimé d’absynthe, étendu plus ou moins 
dans l’eau, et dont j'imbibe les plumaceaux. L'hiver j’em- 
ploie de la même manière l’extrait d’absynthe, que je pré- 
pare moi-même par macération et évaporation. 


L’ABSYNTHE MARINE | Artemisia maritima) est em- 
ployée d’une manière tout-à-fait populaire dans nos cam- 
pagnes, comme anthelmintique. On fait bouillir 4 gram. de 
sommités de cette plante dans 100 gram. d’eau ; on édulcore 


avec suffisante quantité de sucre , et l'on administre cette 


dose à jeun pendant plusieurs jours. L’absynthe marine est 
un excellent tonique excitant. 


8 


ACHE, 
CÉLERI SAUVAGE OU DES MARAIS, PERSIL DES MARAIS. 


Apium palustre et Apium officinarum (T.) 
Apium graveolens (L.) 


L'ache est une plante qui croît partout dans les lieux 
humides, et que l'on cultive dans nos jardins sous le nom 
de céleri. — On emploie les feuilles , les racines et les se- 
mences. 

Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, 50 à 60 gram. par kilog. d'eau. 

Sirop, de 50 à 60 gram., en potion. 

Conserve, de 8 à 15 gram. 

A L'EXTÉRIEUR : [nfusion, de 50 à 100 gram. par kilog. d’eau, 
pour fomentation. 

Feuilles, quantité suffisante, en cataplasme. 


Propriétés. 


Elle est diurétique, résolutive , expectorante. — J'ai vu 
employer avec avantage par quelques cultivateurs atteints 
de catarrhe puimonaire chronique, cu d’asthme humide, 
une décoction d’ache dans du lait sortant du pis de la 
vache, et prise à jeun. Les femmes de la campagne appli- 
quent sur les engorgements laiteux froids des mamelles 
un cataplasme de feuilles d’ache bouillies dans le sain-doux. 
Ce cataplasme a quelquefois dissipé des engorgemients glan- 
duleux, suite de mammite aigüe. — On applique aussi les 
feuilles d’ache, de même que celles de persil , sur les con- 
tusions. La racine d’ache est un diurétique très-usité. 


ACONIT NAPEL, 


Vulg. CAPUCHON, PISTOLETS. 


Aconitum cœruleum seu Napellus (T.} 
Aconitum Napellus (L.) 


Cette plante croît dans toute l’Europe, dans les vallées 
humides de la Suisse, de l'Allemagne, et est cultivée dans 


les jardins, à cause de la beauté de sa fleur. — On emploie 
ses feuilles et ses racines. 


9 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Extrait alcoolique (2 sur 7 d'alcool à 24e), 2 cent. 
à À gram., en potion. 
Extrait aqueux, 5 cent à 4 gram. 20 cent. 
Extrait avec les feuilies vertes, 5 à 20 cent. 
T'einture alcoolique (2 sur 5 d'alcool à 210), 50 cent. à 5 gram. 
Teinture éthérée (1 sur 8 d'éther), 10 cent. à 4 gram. 50 cent. 
Teinture avec feui les fraiches (4 sur 8 d'alcool à 55°}, 25 cent. 
4 gram. 50 cent. 
Teinture avec feuilles sèches (4 sur 4 d'alcool à 24°), 49 cent. 
690 cent. 
Poudre, 2 cent. à 20 cent. 
A L'EXTÉRIEUR : Extrait, de 2 à 4 gram. 
Teinture alcoolique, 1 à 8 gram., en liniment. 
Poudre, 10 cent. à 60 cent. 


S 


©" 


Propriétés, 


L’aconit est un poison violent qui contracte fortement 
la pupille au lieu de la dilater, comme fait la belladone. 
On devrait en défendre la culture dans les jardins. — 
Cette plante énergique, d'une saveur âcre, d’une odeur 
vireuse, est narcotique, antispasmodique, sudorifique , 
diurétique. — On l'emploie dans les rhumatismes chroni- 
ques, la goutte, les névralgies, la syphilis secondaire ou ter- 
tiaire, les affections dartreuses, les hydropisies, les paraly- 
sies, la phthisie, etc. 


Dans l'emploi que j'ai fait des préparations d’aconit, je 
n’ai rien observé qui ne soit déjà connu de tous les prati- 
ciens. Je dois dire néanmoins que c’est surtout contre les 
névralgies que j'en ai retiré de grands avantages, adminis- 
trées tant à l’intérieur qu’appliquées extérieurement sur le 
siége de la douleur. — La plante, appliquée fraîche, m'a 
quelquefois réussi pour apaiser des douleurs que rien ne 
pouvait calmer. Mais continuée, cette application peut rubé- 
fier la peau. Il résulie des essais nombreux faits par M. Fou- 
quier, qu'une augmentation notable dans la sécrétion uri- 


naire est le seul effet constant auquel l'administration de 


l’aconit napel donne lieu : c’est surtout dans les cas d'hy- 
dropisies passives que ce professeur a employé cette plante 
avec le plus de succès. — Il est bien certain que Stœrk a 
beaucoup exagéré les propriétés de l’aconit. 

L’aconit est plus actif dans le midi que dans le nord, et 
perd une grande partie de ses propriétés par la dessiccation. 
(Voy. supplément, p. 597.) 


10 
AGARIC BLANC, 


ACARIC DU MÉLÈZE. 


Agaricus albus. 
Agaricus albus optimus (T.) 
Boletus laricis (L.) 


Ce végéial parasite est assez commun dans la Savoie, dans 
les forêts du Dauphiné et de la Provence. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Poudre, 20 cent. à 60 cent., bols, pilul., comme 
drastique. — Contre les sueurs des phthisiques, à la dose de 5 
cent. à 20 centigrammes. 


Propriétés. 


L’agaric blanc est un purgatif drastique presque en- 
tièrement abandonné de nos jours. Je ne l’ai jamais em- 
ployé, attendu que je n’ai jamais manqué de purgatifs plus 
doux, plus sûrs et surtout plus dangereux. — A petites. 
doses, je l'ai mis en usage avec succès contre les sueurs 
des phthisiques, quand il n’y avait point de diarrhée. 


AIGREMOINE, 
AGRIMOINE, INGREMOINE, EUPATOIRE DES GRECS: 


Agrimonia officinarum (T.) 
Agrimonia eupatoria (L.) 


Cette plante vivace croît dans presque tous les climats, le 
ong des haies, des chemins , dans les bois, les prairies.— 
L’herbe seule est usitée. 

Propriétés. 

L’'aigremoine est un astringent peu énergique. Les cam- 
pagnards l’emploient en décoction avec du miel, pour gar- 
garisme, dans les inflammations légères de la gorge.— Cette 
plante est généralement employée dans le nord de la France, 
par nos paysans, en guise de thé. Son arôme est très-agréa- 
ble, quoique peu prononcé. 


AIL. 
Allium sativum (T.) 
Allium sativum (L.) 
Cette plante exotique est devenue indigène par sa culture 
dans nos jardins.—La bulbe est la seule partie usitée. 


11 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction, 8 à 20 gram. par kilogr. d'eau ou 
de lait. 
Sirop (4 sur 2 d’eau et 2 de sucre), 59 à 60 gram., en potion. 
Suc, 25 cent. à 60 cent., en potion, bols, pilul. 
Oxymel (4 de vinaigre d'ail sur 2 de miel). 50 à 60 gram., en 
potion. 
Vinaigre (4 sur 42 de vinaigre), 3 à 20 gram. dans 50 à 100 
gram. de tisane. 
À L'EXTÉRIEUR : En substance, comme épithème rubéfiant, vési- 
cant.— Le vinaigre pour lotions, fumigations, etc, 


Propriétés. 


L’ail est un excitant énergique, mais d’une action mo- 
mentanée. Il facilite la digestion, augmente l'appétit et 
excile les organes urinaires et pulmonaires. On l'emploie 
dans diverses maladies chroniques sans phlegmasie, dans 
les fièvres intermittentes, les hydropisics, l'asthme humide, 
le catarrhe chronique, les affections scorbutiques, vermi- 
neuses. — À l'extérieur, on l’applique comme rubéfiant 
et vésicant, comme résolutif sur les tumeurs scrofuleuses, 
l’œdème, eic. À Sumatra une feuille stimulante frottée d'ail 
sert de vésicatoire. 

J’ai souvent employé l’aii comme vermicide, expectorant 
et fébrifuge. Je lui ai reconnu une vertu plus particulière- 
ment prononcée sur l'appareil génito-urinaire et sur la peau. 
Il m'a été très-utile comme expectorant. L'emploi de l'ail 
comme vermifuge et comme préservatif du mauvais air 
est tout-à-fait populaire dans nos campagnes. Son odeur 
forte, extrêmement volatile et très-pénétrante, semble justi- 
fier son emploi pendant le règne des épidémies. Je ne pense: 
pas qu'il agisse ici seulement comme tonique. Son arôme, 
imprégnant l'atmosphère et pénétrant dans nos humeurs, 
peut les modifier et s'opposer à l’intoxication qui produit 
les fièvres de mauvais caractère, le typhus et la peste. J'ai 
connu des paysans qui ont pu se préserver des fièvres inter- 
mittentes sévissant dans les marais du Calaisis, qu’ils habi- 
aient, en mangeant de l'ail matin et soir. Il serait à désirer 
que l'on en fit un usage habituel dans les lieux aquatiques. 
La vertu fébrifuge de l’ail,reconnue par Celse,et constatée par 
Bergius et par Boerhaave, ne m'a laissé aucun doute depuis 
que je l’ai moi-même employé dans des cas de fièvres invé- 
térées et accompagnées d’un état cachectique voisin de l’hy- 
dropisie. Comme les célèbres médecins que je viens de citer, 
je fais prendre matin et soir une gousse d’ail que le malade 
mange ; j'augmente jusqu'au nombre de six. Quand la fièvre . 


12 
est passée, je fais diminuer jusqu'au nombre de deux, et le 
malade continue ce nombre pendant plusieurs semaines. 

Le suc d'ail mêlé dans un verre de vin blanc, et pris à 
jeun, m'a réussi pour dissiper en peu de temps l’anasarque 
essentielle, suite de suppression de transpiration ou de fiè- 
vres intermittentes. Sydenham vante les bons effets de l'ail 
dans l’hydropisie. 

J'emploie souvent ce précieux bulbe dans la bronchite 
chronique et apyrétique, dans l'asthme humide, dans les 
affections vermineuses. Dans ces cas je le donne en décoc- 
tion dans le lait. Rosensten cite une femme qui, après avoir 
mangé pendant six mois une gousse d'ail tous les matins, 
rendit enfin un ténia de seize brasses de longueur. 

Je fais un vin d’absynthe et d’ail (15 gram. d’ail et 30 
gram. d’absynthe) , que j'administre par cuillerées plus ou 
moins rapprochées, suivant l'âge et le but que je me pro- 
pose. Ce vin est surtout employé comme anthelmintique et 
fébrifuge. Lind employait l'ail dans le scorbut. 

Desséché au point de perdre plus de la moitié de son 
poids , l'ail ne perd presque rien de sa saveur ni de son 
odeur ; mais cuit dans l’eau ou dans le vinaigre, il perd 
l’une et l’autre, et se réduit en un mucilage très-visqueux, 
qui peut rendre les plus grands services comme émollient, 
et remplacer les gommes arabique et adragant. 


A l'extérieur, l'ail agit comme rubéfant, et excite même 
des phlyctens comme la semence de moutarie. Je l'ai sou- 
vent employé dans mes tournées à la campagne, faute d’au- 
tres substances, pour remplacer la moutarde ou les can- 
tharides. C’est surtout pendant l'hiver que j'employais ce 
moyen. Pendant l'été, des plantes âcres et vésicantes s’of- 
frent en foule pour produire le même effet. 


J'ai fréquemment appliqué à la plante des pieds, contre 
Ja coqueluche , un mélange de parties égales d'axonge, de 
feuilles de jusquiame et d'ail, réduit en pommade. Une 
légère rubéfaction avait lieu, et l'action de la jusquiame se 
faisait remarquer par une diminution marquée dans la fré- 
quence des quintes. Cette diminution n'avait pas lieu aussi 
promptement par le simple mélange de l'ail et de l’axonge 
employé comme révulsif, bien que la rubéfaction füt plus 
fortement produite. 

J'ai vu un garçon de ferme se débarrasser de la gale par 
des frictions pendant huit jours faites avec un mélange de 
suc d'ail et de beurre salé. (Voy. supplément, p. 601). 


13 
ALCHIMILLE, 


PIED-DE-LION, MANTEAU DES DAMES. 


Alchimilla vulgaris (T 
Alchemilla vulgaris (L.) 


Lepied-de-lion est une plante vivace qui croît partout,dans 
les prés, dans les bois, etc.—Toute la plante-est usitée. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. 
d'eau. 
Suc, de 50 à 60 gram., en potion, julep, etc. 


Propriétés. 


Tonique et astringent qu'on a conseillé dans les leu- 
corrhées, les dyssenteries chroniques, les ulcères ato- 
niques. 

J'ai quelquefois employé le pied-de-lion; mais, comme 
son action ne m'a pas paru très-marquée, je l'ai abandonné 


pour recourir aux astringenis indigènes plus énergiques. 


ALKEKENGE, 
COQUERET, COQUERELLE. 


Alkekengi officinarum (T.) 
Physialis alkekengi (L.) 


Cette plante, qui croît spontanément dans les bois taillis, 
dans les lieux ombragés des départements du centre de la 
France, est cultivée dans les jardins pour l'usage médical. 
— On emploie les baies et les feuilles. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion des baies, de 45 à 60 gram. par kilog, 
d’eau. 
Suc récemment exprimé, de 50 à 60 gram., en potion. 


- À L'EXTÉRIEUR : Décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau, 


en fomentalion, lotions, etc. 
Propriétés. 


Acidules, mucilagineuses, rafraîchissantes et diurétiques, 
les baies d’alkekenge ont été vantées dans les maladies des 
voies urinaires, quelques hydropisies, ictères, etc. Les 
feuilles, émollientes et calmantes, ont pu être employées à 
l'extérieur contre l’érysipèle, le phlegmon, etc. 


14 


Les baies d’alkekenge, diurétiques et anodines tout à la 
fois, peuvent déterminer un flux abondant d'urine sans 
trop stimuler les organes, ce qui les rend précieuses dans 
diverses affections graves des reins et de la vessie.—Comme 
Gilibert, j'ai employé les baies d’alkekenge avec succès dans 
Ja gravelle, l’'œdème et les leucophlegmaties qui suivent les 
fièvres intermittentes. Dans l'œdème et l'anasarque qui ac- 
compagnent les maladies organiques du centre circulatoire, 
dans l’hydropéricarde, ces baies m'ont été très-utiles, à 
cause de leur action peu stimulante. Dans ces cas je les fais 
prendre en décoction —Contre l’hydropisie, je fais écraser 
sept ou huit baies dans un verre de vin blanc, que le malade 
prend à jeun, en y joignant l’infusion ou la décoction pour 
boisson.—L’extrait se donne à la dose de 15 grammes, 
dans un véhicule approprié. 

Je ne puis m'empêcher de remarquer, avec Gilibert, que 
les solanées cessent d’être des poisons lorsqu'ils sont aigre- 
lets : l'alkekenge et la tomate en sont la preuve. 


ALLELUIA, 
OXALIDE-OSEILLE, SURELLE, PAIN DE COUCOU. 


Oxis flore aibo (T.) 
Oxalis acetosella (L.) 


Cette plante croît abondamment dans les bois, au pied 
des arbres, à l’ombre.—On emploie toute la plante. 
Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction, une poignée par 500 gram. d'eau ou 
de petit-lait. 
Suc, de 16 à 50 gram. 


Sirop, 50 à 60 gram. dans une potion. 
Conserve d'alleluia, 4 à 4 gram. 


Propriétés. 


L'alleluia est acidule, tempérante, diurétique. — Elle 
convient dans les affections bilieuses, inflammatoires, les 
embarras gastriques. —Elle fournit l’oxalate de potasse (sel 
d’oseille), objet de commerce important pour quelques can- 
tons de l'Allemagne et de la Suisse. | 

Dans tous les cas où les acides sont indiqués, je fais avec 
l'alleluia une limonade des plus agréables, et qui remplace 
celle que l'on compose avec le citron, que l’on n’a pas tou- 
jours sous la main. Cette limonade, si facile à se procurer 


15 


pendant l'é l'été, apaise la soif et l'ardeur fébrile, favorise la 
sécrétion des urines, et lâche quelquefois le ventre. J'ai re- 
marqué qu'elle aide à l’action des purgatifs.—L'hiver je 
_ la remplace en faisant dissoudre 2 à 6 gram. d’oxalate de 
potasse dans 500 gram. d’eau, avec addition d'une suffisante 
quantité de sucre. 

A l'extérieur, elle est maturative comme l’oseille com- 
mune. Je l’ai quelquefois appliquée sur des tumeurs scro- 
fuleuses et des abcès froids, pour les résoudre ou en hâter 
la maturité; mais j'ai, dans ces cas, employé avec plus 
d'avantage la petite oseille sauvage, conseillée par Pinel. 
Elle est plus active et se trouve partout, dans les pâturages 
et le long des haies. 


ALLTAIRE. 


Hesperis allium redolens (T.) 
Erysimum alliara (L) 


L'alliaire, qui croît dans toute la France et se trouve 
principalement le long des haies, a l'odeur et le goût de 
l'ail. La dessiccation affaiblit ce goût et cette odeur, et lui 
Ôte une grande partie de son énergie.—On emploie les 
sommités fleuries et récentes. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusior, de 50 à 60 gram. par Hups: d'eau. 
ide 


Décoction, : idem. 
Suc, de 45 à 50 gram., en potion. 
Propriétés, 


Cette plante est stimulante, incisive, diurétique et anti- 
putride. La dessiccation, ainsi que je viens de le dire, de 
même que la coction, dissipe presque toutes ses propriétés. 
Cependant la décoction d'alliaire, fraîchement cueillie, est 
très-expectorante et agit plus fortement que celle du velar 
(Erysimum officin.) 

J'ai employé peu cette plante intérieurement; mais j'ai 
eu l’occasion de constater {après Simon Pauli et Boerhaave) 
les bons effets de son suc appliqué sur des ulcères sordides 
et gangréneux. Un vaste ulcère de cette nature existait à la 
partie externe de la jambe droite d’un enfant de dix ans, et 
avait l'aspect et la fétidité de la pourriture d'hôpital, par 
suite sans doute de l'habitation inaccoutumée dans un lieu 
bas, humide et non aéré (au village de Verlincthun, situé au 


16 


milieu d'eaux stagnantes). Le suc d'alliaire, appliqué avec 
de la charpie, et continué pendant quinze jours, détergea 
l’ulcère, procura une suppuration louable, et amena une 
cicatrisation favorisée à la fin par l'application du vin 
miellé. La semence est rubéfiante, mais moins active que 
celle de moutarde. 


meme 


ANCOLIE, 


GANT DE NOTRE-DAME. 


Aquilegia sylvestris (T.) 
Aquilegia vulgaris (.) 


L'ancolie croît spontanément dans les bois et le long des 
haies, en France et dans la plupart des autres régions de 
l'Europe. Les racines, les feuilles, les fleurs et les graines 
ont été employées. 

Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Semence en poudre, 2 à 4 grammes. 


Infusion des semences, 4 à 8 gram. par 4/2 kilog. d'eau bouillante. 
Sirop (4 de fleurs sur 2 d'eau et 2 de sucre), 50 à 50 gram., en 
potion. 


Teinture (4 de fleurs sur 50 d'eau d'ancolie et 4 d'acide sulfu- 
rique), de 45 à 50 gram., en potion. | 
Propriétés. 


Toutes les parties de cette plante ont été regardées comme 
apéritives, diurétiques, diaphorétiques, antiscorbutiques. 
—Quelques médecins lui ont reconnu seulement une vertu 


calmante et tempérante.—On a employé les semences pour. 


favoriser l'éruption de la variole, de la rougeole et de la 
scarlatine. Il est certain que les vétérinaires prescrivent la 
racine en poudre, à la dose de 30 gram., pour faciliter la 
sortie du claveau.—Le docteur Eysel prétend qu'elle guérit 
le scorbut, et Tragus que l’ictère ne lui résiste pas. Four- 
croy dit que ses graines, qu’on peut administrer en émul- 
sion, communiquent aux mortiers dans lesquels on les pile 
une odeur forte et tellement tenace, qu'il est presque im- 
possible de la dissiper. Le sirop de fleurs d’ancolie, d'une 
belle couleur bleue, décèle, mieux que celui de violette, les 
acides et les alkalis. 

L'action de l'ancolie est mal connue. Je me propose de la 
soumettre à des expériences, afin de mieux apprécier ses 


effets et de lui assigner la place qu’elle mérite d'occuper 
dans la matière médicale. La 


17 
ANEMONE DES BOIS, (4) 


SYLVIE. 


Ranunculus purpureus, vernus (T.) 
Anemone nemorosa (L.) 


Cette plante est très-commune le long des haies et dans 
les bois, où elle montre sa fleur dans les premiers jours du 
printemps. 

La sylvie fraîche est extrêmement âcre. À l'intérieur, 
même à petite dose, elle produit de grands ravages. On doit 
se borner à l’usage externe de cette plante. {Appliquées à nu 
sur la peau, les feuilles et les racines sont vésicatoires et 
peuvent même produire en très-peu de temps les effets d’un 
cautère. [l est nécessaire de faire connaître aux paysans qui 
conseillent aux fiévreux de s'appliquer sur le poignet cette 
plante pilée, les dangers qui pourraient en résulter. 

Chomel indique la décoction d’anémone des bois comme 
propre à guérir la teigne , employée en lotions. Cette même 
décoction a été mise en usage à l’extérieur contre la gale. 
Les feuilles pilées sont, dit-on, employées avec succès pour 
détruire les cors ; mais, nous le répétons, ces applications 
ne sont pas sans danger : il faut y mettre beaucoup de pré- 
caution. Les parties environnantes doivent être garanties 
par un emplâtre fenêtré qui limite l’action du médicament. 


ANETH, 
FENOUL PUANT, ANETH À ODEUR FORTE. 
Anethum hortense (T.}—Anethum graveolens (L.) 


Ceite plante croît spontanément en Italie, en Espagne et 
dans les départements du midi de la France. On la cultive 
dans nos jardins potagers, où il faut semer la graine aussitôt 
qu'elle est mûre: On emploie l'herbe et la semences 

L’aneth contient de l’huile volatile et répand une odeur 
forte et agréable ; la saveur de la semence est aromatique et 
chaude. | 
A DR : Infusion des semences , 4 à 8 gram. par kilog. 

’eau. | 
 Euu distillée, de 30 à 100 gram., en potion. 


(4) Cet article n'était pas dans le mémoire couronné. 
(2) Même observation, 


18 


Huile essentielle , 25 cent. à 4 gram. , en potion. 
Poudre , 4 à 2 gram. - 
A L'EXTÉRIEUR : Jnfusion , pour fomentations, lotions, cata- 


plasmes , etc. 
Propriétés, 

Cette plante est stimulante ; ses semences sont carmina- 
lives et conviennent dans la débilité gastrique, les coliques 
venteuses , la gastralgie. Elle est recommandée comme celle 
du fenouil, par Dioscoride, pour augmenter Ia sécrétion du 
lait des nourrices. À l'extérieur, les feuilles , les sémences et 
les fleurs sont employées en cataplasmes, en fomentations, 
comme résolutives. On les administre aussi en lavements , 
comme carminatives. 


ANGÉLIQUE, 


ANGÉLIQUE DES JARDINS , RACINE DU SAINT-ESPRIT , 
ANGÉLIQUE OFFICINALE. 


Imperatoria sativa (T.) 
Angelica archangelica (L.) 


Cette plante, d’une odeur forte, aromatique, d’une saveur 
âcre, piquante, un peu amère, croît naturellement dans les 
Alpes, les Pyrénées, en Bohême, en Suisse , en Norwége. 
Culiivée dans les jardins, où elle se sème d’elle-même, on 
la regarde comme indigène en France. Les parties usitées 
sont la racine, les tiges et les semences. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 40 à 30 gram. par kilog. d’eau 

bouillante. 

Eau distillée , de 30 à 100 gram., en potion , julep. 

Teinture (4 de racine sèche sur 6 d'alcool), 2 à 40gr., en potion. 

Vin (2 sur 52 de vin), 50 à 400 gram. * 

Conserve (4 sur 2 de sucre), de 40 à 50 gram. 

Extrait (1 sur 5 d'alcool), de 4 à 4 gram., en bols, pilules. 

Poudre, de 4 à 8 gram., en bols, pilules eu dans un véhicule 
quelconque. 


À L'EXTÉRIEUR : Vinaigre d'angélique , en lotions , fomentations, 
frictions , etc. 
Propriétés. 
L'angélique est tonique , excitante , sudorifique , emmé- 


nagogue. Elle est-très utile dans l’atonie générale, dans celle 
des organes digestifs, les vomissements spasmodiques , 


| 


19 


certaines céphalalgies nerveuses, l’aménorrhée, la chlo- 
rose , les névroses avec débilité, etc. On la donne aussi 
avec avantage comme diapherétique et expectorante dans la 
dernière période des bronchites chroniques, pour tonifier la 
muqueuse pulmonaire. 

Les propriétés de l’angélique, que je metssouvent à profit, 
sont beaucoup plus prononcées dans la racine que dans les 
autres parties @e la plante. Je la substitue, ainsi que le cou- 
seille Hildenbrand, à la serpentaire deVirginie dans les fièvres 
typhoïdes et adynamiques, soit en poudre, soit en infusion, 
ou en teinture alcoolique dans les potions. J'ai constaté, 
comme Chaumeton, les bons effets d’une boisson préparée en 
versant un litre d'eau bouillante sur 30 grammes de racine 
d’angélique coupée en tranches minces, et ajoutant à l’in- 
fusion quatre centilitres d’eau-de-vie, un hectogramme de 
sirop de vinaigre et quelques gouttes d'huile volatile de ci- 
tron. Les malades trouvent délicieuse cette espèce de punch. 

J'ai fait, dans ma pratique à la campagne , un fréquent 
usage de la racine d’angélique , et je puis affirmer qu’elle 
est d’une grande ressource pour remplacer non seulement 
la serpentaire de Virginie, mais aussi la racine de con- 
trayerva et le costus d'Arabie. J’ai employé la semence 
comme stimulante et carminative. J'’associe souvent la 
racine d'angélique aux amers dans la composition des vins 
médicinaux toniques , pour les aromatiser. 


ANIS , (1) 
ANIS VERT, BOUCAGE A FRUITS SUAVES. 


Apium anisum dictum, semine suaveolente (T.) 
Pimpineila anisum (L.) 


Cetté plante, que l'on cultive dans les jardins, croît spon- 
tanément en Egypte, en Turquie, en Sicile, en Italie. Les 
graines , dont on fait exclusivement usage, sont l’objet d’un 


commerce étendu. F 


| Préparations ei doses. 


A L'INTÉRIEUR : De 8 à 50 gram. par kilog. d’eau bouillante. 
Eau distillée , 45 à 100 gram., en potion. 
Teinture (4 sur 4 d'alcool à 52°), 4 à 45 gram.., en potion. 
Sirop (1 d'eau distillée sur 2 de sucre), 50 à 60 gram.., en potion. 
ne ; 1 à 8 gram., mêlés avec du sucre ou délayés dans l’eau 
ou le vin. 


" 


(4).Cet article n’était pas dans le mémoire couronné. 


20 | | 


Propriétés. 


La semence d'anis, d’une saveur sucrée et aromatique, ét 
d’une odeur agréable, est moins chaude que plusieurs autres 
aromates du même genre. Stimulante et carminative, on 
l'emploie vulgairement dans la débilité des voies digestives , 
contre les flatuosités , les tranchées des enfants, la gastral- 
gie, etc., tant à l'intérieur qu’à l'extérieur, en forme de 
cataplasme. Sous cette dernière forme, elle est vantée 
comme résolutive contre les engorgements laiteux et Îles 
ecchymoses. 

Les anciens employaient souvent la semence d’anis pour 
enchaîner la violence de certains médicaments purgatifs. 
Elle était un des aromates avec lesquels Mesué corrigeait 
l'action du momordica elaterium. 1] est à désirer que l’on 
multiplie cette plante dans le midi de la France, où elle 
conserve toute son énergie. 


ARISTOLOCHE CLÉMATITE. (1) 


Aristolochia elematitis recta (T.) 
Aristolochia clematitis (L.) 


Cette espèce d’aristoloche croît spontanément en Italie, 
en Espagne , dans le midi de la France, et même dans les 
environs de Paris ; elle préfère les terrains pierreux, les 
haies et les vignes. La racine seule est employée. 


Préparaiions ei doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction ou infusion des racines, 42 à 45 gram. 
pour un kilog. d'eau. 
Poudre, 4 à8 gram., avec du vin ou du miel , ou en pilul., bols, ete. 
Extrait alcoclique (4 de racine sur 6 d'alcool), 2 à 4 gram., selon 
l’âge et les farces. 
Teinture (4 de racine sur 5 d'alcool), 4 à 2 gram., en potion. 


ÿ Propriétés. 


Douée,comme les aristoloches longues et rondes qui nous 
viennent des pays méridionaux , d’une saveur âcre , amère, 
d’une odeur forte, pénétrante, elle paraît jouir des mêmes 
propriétés que ces dernières , et a, pour nous, le précieux 
avantage d’être indigène. | 

N'ayant sur les effets de cette plante aucune observation 


(4) Cet article n'était pas dans le mémoire couronné. 


®, 
21 


qui me soit propre, je ne puis mieux faire que de citer l’opi- 
nion de Gilibert. Voici comme il s'exprime : 

« Toutes les aristoloches , même notre aristoloche cléma- 
tite, cachent un principe médicamenteux très-pénétrant, 
répendant une odeur forte, d’une saveur vive , amère, aro- 
matique , qui laisse une longue-impression sur la langue. 
L'infusion des racines, édulcorée avec du miel, est un remède 
énergique qui augmente le flux des urines, détermine plus 
abondamment les menstrues. On en donne aussi la poudre 
dans du vin. Ce remède a réussi dans les pàles couleurs , la 
bouflissure , les fièvres intermittentes, l’asthme humide, 
l'anorexie dépendante d’une atonie avec glaires; c’est un 
puissant adjuvant dans la paralysie, la goutte sereine ; appli- 
qué extérieurement, il déterge les ulcères sordides. Toutes 
ces propriétés , ajoute le même auteur, sont constatées par 
des observations spéciales : aussi doit-on être étonné, dit-il, 
qu'une plante aussi énergique soit presque abandonnée. 
Nous nous sommes toujours servi de l’aristoloche clématite, 
d'après notre principe, ajoute-t-il, que l’on doit préférer les 
plantes indigènes lorsqu'elles ep les mêmes principes 
médicamenteux que les exotiques. » 

Alston rapporte qu’en Écosse on emploie l’aristoloche clé- 
matite de préférence aux autres espèces,surtout comme anti- 
goutteuse. Selon Helde, administrée en poudre ou en extrait, 
et principalement en essence simple ou teinture alcoolique, 
elle a prévenu les accès de la goutte ; on lui attribue même 
la faculté de calmer les spasmes que les goutteux éprouvent 
fréquemment dans les jambes avant le paroxysme; mais 
n'est-il pas à craindre que ce prétendu spécifique ne pro- 
duise des rétrocessions funestes , ainsi qu’on l’a observé par 
l'administration de la fameuse poudre de Portland , dont la 
racine d’aristoloche ronde fait la base , et que je l'ai vu moi- 
même par l’usage des préparations de colchique ? 

Toutes les espèces d’aristoloche, et particulièrement 
l'aristoloche clématite , peuvent, à une dose trop forte, 
causer des cçampes d'estomac, de vives douleurs intesti- 
nales, des vomissements, des superpurgations, et même, 
si l'on en croit quelques auteurs, occasionner des pertes et 
des avortements. Ces divers accidents , résultant de l’admi- 
nistration imprudente d’un médicament , loin de démontrer 
le danger de son emploi thérapeutique , prouvent , au con- 
traire, son énergie. D’un autre côté, des médecins dignes 
de foi ont regardé l'aristoloche clématite comme une plante 
faible et douteuse, malgré les éloges que lui ont accordé les 
anciens. Ces diverses opinions Viennent sans doute du lieu. 


: # 
+ 


où a été récoltée la plante, de Ia saison où elle a été re- 
cueillie, et surtout de son degré d'ancienneté. Il ne faut 
point oublier que Gilibert l’a employée dans les environs de 
Lyon , et que la même plante, croissant dans les départe- 
ments du nord de la France . est souvent beaucoup moins 
active. Il suffirait peut-être, dans ces derniers cas , d'aug- 
menter les doses. 


22 


es me + ne 


ARMOISE , 
HERBE DE LA SAINT-JEAN. 


Artemisia vulgaris (T.) 
Artemisia vulgaris (L.) 


On rencontre cetie plante partout. Elle croît dans leslieux 
incultes, le long des chemins, sur le bord des champs, et 
fleurit en France au mois de juillet. On doit la cueillir 
dans les lieux secs, arides , sur les masures : c’est là qu'elle 
jouit de toutes ses propriétés. Elle est moins active dans les 
jardins et dans les terrains gras ou humides. On met en 
usage la racine et les sommités. 


Préparations ei doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 40 à 50 gram. par kilog. d'eau bouil- 

Jante. 

Eau distillée, de 50 à 400 gram., comme véhicule de potion. 

Huile essentielle, de 4 à 2 gram., en potion. 

Sirop simple ou sirop composé, de 50 à 60 gram. , en potion, 
julep, ete, 

Extrait, de 2 à 4 gram., en bois, pilul., potion. 

Poudre , de 2 à 8 gram., en bols, pilul., potion. 

Suc exprimé , 45 à 80 gram. 


A L'EXTÉRIEUR : De 60 à 400 gram. par kilog. d’eau bouillante, 
pour fumigations, lavemenis, etc. 


Propriétés. 


L'armoise est stimulante, tonique , emméngogue , anti- 
spasmodique. On s'en sert généralement, dans les cam- 
pagnes, contre l'aménorrhée. La racine est employée en 
poudre contre l'épilepsie et la chorée. : 

J'ai employé le suc d'armoise avec succès dans l’amé- 
norrhée ; j'en fais prendre 30 à 80 grammes à jeun pendant 
les dix jours qui précèdent le molimen utérin ou l’époque 
habituelle des règles. Lorsque les malades répugnent à 
prendre le suc , je leur fais prendre une forte décoction des 


be 


sommités tiède, le matin,pendant le mème espace de temps. 
Je pourrais citer un grand nombre d'observations qui cons- 
tatent Feffet emménagogue de l’armoise ainsi administrée : 
les limites qui me sont tracées par la nature de mon travail 
ne me permettent le plus souvent qu'une simple mention. 
Lorsqu'il y a chlorose, je joins au suc d’armoise Ja teinture 
de mars tartarisée, et je fais prendre ce mélange dans un 
verre de vin blanc. Ce moyen m'a surtout réussi lorsque la 
chlorose était accompagnée d’un état d'inertie de la matrice. 
Il serait nuisible si cet organe, comme cela se rencontre 
quelquefois, était surexcité. 

[ Le docteur Burmann, de Peine (Hanovre) , administre 
contre les convulsions, pendant la première dentition, deux 
centigrammes etdemi de poudre de racine d'armoise mêlée à 
vingt-cinq centigrammes de sucre pulvérisé Cette dose est 
donnée d'heure en heure; on l’augmente graduellement jus- 
qu’à dix centigrammes. On a employé aussi, en Allemagne, 
la racine d'armoise contre l’épilepsie : on prétend en avoir 
obtenu des avantages réels dans cette maladie. On donne, 
dans ce cas, la racine en poudre à la dose de 4 grammes.] 

Lorsque, par atonie, les lochies languissent, je fais pren- 
dre l'infusion chaude d’armoise, surtout chez les femmes qui 
n’allaitent pas. J'ai remarqué que l'écoulement muqueux 
utérin qui suit l'écoulement sanguin est plus abondant par 
l'effet de l'armoise, et que cette dérivation contribue à la 
diminütion de l’afflux du lait dans les mamelles. Une longue 
pratique comme médecin-accoucheur m'a mis à même de 
vérifier ce fait un grand nombre de fois : il est d’ailleurs ex- 
pliqué par les relations sympathiques qui existent entre 
deux appareils d'organes qui concourent au même but. C'est 
par un effet inverse, et en veriu de ces mêmes relations, que 
les ventouses appliquées aux mamelles'font cesser une hé- 
morrhagie utérine, et que les lochies se suppriment mo- 
mentanément pendant la fièvre de lait, 

[J'ai rappelé une leucorrhée habituelle et dont la suppres- 
sion avait donné lieu à une toux inquiétante, en faisant 
prendre à la malade pendant dix jours 60 grammes de suc 
exprimé d’'armoise. ] | 

À une certaine dose , le suc d’armoise peut provoquer le 
vomissement. J’ai vu produire cet effet à la dose de deux 
onces, chez une femme délicate et nerveuse. Lorsqu'on veut 
le donner comme altérant, il est bon de commencer par une 
moindre dose et de n’augmenter que graduellement. : 


23 


: Li 


2% 
ARNIQUE-ARNICA, ( 


BÉTOINE DES MONTAGNES , TABAC DES VOSGES, 
DORONIQUE D'ALLEMAGNE. 


Doronicum plantaginis folèis alterum (T.) 
Arnica montana (L.) 


Cette plante, qui aime les lieux élevés, froids et ombrag gés, 
croit abondamment sur les montagnes du centre et du midi 
de la France, dans le Lyonnais, sur les Alpes , etc. Les 
racir.es, les feuilles et les fleurs sont usitées. 

Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion et décoction, 8 à 50 gram. par kilog. 
d'eau bouillante. 

Xacine en poudre , 60 cent. à 12 gram, progressivement. en élec= 

tuaire , opiat, bols, etc. 

Fleurs en poudre, 50 cent. à 2 gram. progressivement , en bols, 

pilules , etc. 

Eau distillée , 90 à 100 gram., en potion. 

J'einture alcoolique (1 de racines sur 8 d' alcool), À à 20 gram. , en 

potion. 

Teinture éthérée (A de fleurs sur 4 d'éther }, 1 à 40 gram., en 

potion. 

Extrait aqueux (4 sur 5 d'eau), 59 cent. à 4 gram. , en potion, 

pilules, etc. 

Exirait alcoolique (4 de fleurs sur 8 d'alcool et 4 d'eau), 50 cent. 

à 4 gram., en potion, etc. 


A L'EXTÉRIEUR : Feuilles et fleurs , en cataplasmes. 
En poudre , comme sternutatoire. 
Propriéiés. 


Les racines et les fleurs d'arnica, d'une odeur balsamique, 
d’une saveur âcre, piquante, décèlent leurs vertus stimu- 
lantes, toniques, légèrement émétiques et sternutatoires. 

Les effets primitifs de cette plante ont lieu sur les voies 
digestives, qu’elle irrite plus ou moins; l’action secondaire 
se produit par une excitation sur le cerveau et le système 
nerveux. Les effets de son administration se manifestent 
assez prompitement par des démangeaisons à la peau, des 
nausées , des vomissements , des anxiétés, des étourdisse- 
ments, quelquefois même par des tremblements, des se- 
cousses nerveuses, des spasmes , etc. 

L’arnica a été préconisée contre les fièvres thyphoïdes- 
adynamiques , les catarrhes chroniques , l’asthme humide, 


l'œdématie , certaines paralysies, l’amaurose, la danse de 


Saint-Guy atonique , les rhumatismes chroniques, les chûtes 


(4) Cet article n'était pas dans le mémoire couronné. 


25 


et contusions avec ecchymoses, les fièvres intermittentes,etc. 

On doit considérer l’ arnique, dit Gilibert, comme tonique 
et apéritive, donnée à petite dose, et comme émétique, pur- 
gative, diurétique , sudorifique et emménagogue, donnée à 
plus grande dose. 

Dans les fièvres adinamiques ou putrides, on administre 
l'infusion ou la décoction de fleurs d’arnica édulcorée avec 
un sirop convenable ou avec addition d’un peu de racines 
de réglisse , à la dose d’une tasse , de deux heures en deux 
heures. C’est surtout dans cette forme de fièvre typhoïde ca- 
ractérisée par l’enduit fuligineux de la langue, la prostration 
des forces, le délire obscur , le pouls faible, petit, accéléré, 
que ce médicament convient. Je l'ai vu employer avec suc- 
cès dans les hôpitaux de l’armée , pendant la campagne de 
1809, en Allemagne, contre la fièvre putride qui sévissait 
alors d’une manière générale. Depuis, je l'ai souvent mis 
en usage moi-même dans les mêmes cas, en l’associant le 
plus souvent à la racine de valériane et à celle d’angélique. 
Je fais verser la décoction bouillante de fleurs d’arnica et 
de racine de valériane , faite à vase clos , sur la racine d’an- 
gélique Le malade prend cette tisane à doses modérées , 
mais fréquemment répétées. Administrée de cette manière , 
l'arnica détermine rarement le vomissement et la douleur 
gastrique , et elle n’en est pas moins efficace , quoi qu'en 
disent les médecins qui regardent ces manifestations comme 
favorables à l'excitation générale que l’on veut produire. 
Cette excitation est même plus durable quand elle est obte- 
nue plus graduellement et sans douleur; car il est bien 
évident que la douleur, surtout quand elle a son siége dans 
les organes digestifs , épuise les forces au lieu de les relever. 
Je pense néanmoins que l’arnica réussit moins en infusion 
légère, comme le recommande Stoll, que lorsqu'elle est ad- 
ministrée en décoction rapprochée ; mais c’est toujours pro- 
gressivement et à petites doses fréquemment répétées que 
cette décoction doit être mise en contact avec la muqueuse 
gastrique : il faut toujours en surveiller l'effet. 

L’arnica ne convient pas aux tempéraments nerveux. On 
doit s'abstenir de son emploi dans les fièvres caractérisées 
par l'excitation cérébrale et l’ataxie. 

Dans les fièvres intermittentes , l'arnica diminue seule- 
ment l'intensité des accès et augmente les sueurs ; ce n’est 
point là un effet suffisant pour en recommander l'emploi 
dans le traitement de ces fièvres. Quoique Stoll l’ait décoré 
du nom de quinquina des pauvres, c'est, à mon avis, COMME 
anti-périodique , un pauvre quinquina. 


26 


La propriété très-excitante de larnica a déterminé quel- 
ques praticiens à l’employer contre certaines paralysies. 
Le docteur Rogery cite, dans le Recueil périodique de la So- 
ciété de médecine de Paris, le cas très-remarquable d’une 
jeune femme qui, à la suite d’une fièvre mal jugée, éprouvait 
une sorte d’engourdissement et un état d’impuissance dans 
les membres inférieurs. Ce médecin lui prescerivit la décoc- 
tion des fleurs d’arnica et l'extrait de ces mêmes fleurs, 
qu’on faisait dissoudre dans l’eau de menthe édulcorée avec 
le sucre. Comme il n’avait pas obtenu tout le succès désiré , 
il donna judicieusement les fleurs pulvérisées de cette plante 
dans suflisante quantité de miel, et bientôt la malade éprou- 
va des fourmillements et des douleurs auxquelles succéda 
Ja restitution complète du mouvement et de la sensibilité. 

Comment constater les effets de l'arnique dans les chüûtes, 
les contusions avec ecchymoses, les collections de sang 
caillé ?.. Ne sait-on pas que la nature dissipe souvent les 
suites de ces accidents sans le secours de l’art? Et d’ailleurs, 
dans ces cas, ne vaut-il pas mieux avoir recours à la saignée 
et aux antiphlogistiques qu'à ces prétendus vulnéraires, qui 
n'ont d'action que celle qu'ils exercent sur l'imagination 
des malades ? 

Si Collin, Stoll, Junker, Fohr et autres auteurs ont exagéré 
les propriétés de l’arnica contre les engorgements du foie et 
de la rate, l’apoplexie, l’hémiplégie, l’épilepsie, l'amaurose, 
etc. Vacca-Berlinghiéri a fait connaître des essais négatifs 
qui réduisent ces propriétés à leur juste valeur, et les dépré- 
cient quelquefois même trop, sous l'autorité de faits isolés 
et insuffisants : est modus in rebus. Une jeune dame était 
attaquée d'une maladie convulsive, à laquelle s’était jointe 
une fièvre intermittente très-légère. On proposa les fleurs 
d'arnica; Vacca-Berlinghiéri les accorda; mais elles ne 
procurèrent aucun soulagement ; de plus, elles soulevaient 
l'estomac et causaient des désordres dans les viscères. Il ne 
faut pas plus ajouter foi, selon l'opinion du médecin que je 
viens de citer, à la faculté qu'on attribue à Farnica de 
guérir la goutte-sereine. 

Les feuilles d’arnica, en infusion aqueuse ou vineuse, ont 
les mêmes propriétés médicales que la racine et les fleurs. 
Appliquées en cataplasmes sur les tumeurs douloureuses , 
elles en ont puissamment favorisé la résolution, au rapport 
de Scopoli. Les paysans des Vosges font dessécher les 
feuilles et les fleurs, et s’en servent en guise de tabac. 

On préfère généralement l'arnica recueillie sur les mon- 
tagnes de la Bohême, comme étant plus énergique.  * 


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27 


ARRETE-BSOEUF, 
BOUGRANE, BUGRANE. 
Anonis spinosa (T.)—Onounis spinosa (L ) 


L'arrête-bœuf est une plante vivace qui croît partout en 
France, surtout dans les lieux incultes, les pâturages mé- 
diocres. On emploie la racine en décoction (16 à 60 gram. 
par kilog. d’eau). 

Propriéiés. 

- Les racines sont apéritives, diurétiques. Je les ai souvent 
mises en usage dans les tisanes diurétiques. Elles ne méritent 
pas l'oubli dans lequel elles sont tombées. Les gens de la 
campagne emploient les feuilles et les fleurs d’arrête-bœuf 
en gargarisme, bouillies dans une certaine quantité d’eau, à 
laquelle ils ajoutent du miel et du vinaigre, contre l’angine 
tonsillaire. 


Le 


ARROCHE, 


BONNE-DAME. 
Atriplex alba hortensis (T.)—Atriplex hortensis (L.) 


Cette plante est cultivée dans les jardins, pour l'usage 
culinaire. 


Préparations et doses, 


Eu décoction, de 50 à 60 gram. 
Semences (comme éméto-cathartique), de 2 à 5 gram. 


Propriétés. 


Ses feuilles sont émollientes, rafraîchissantes. On en met 
dans les bouillons de veau et de poulet. J'ai essayé la se- 
mence d’arroche comme éméto- -Cathartique,d’aprèsle rapport 
de quelques campagnards qui en avaient fait usage au début 
des fièvres tierces. Employée à la dose de 2 à 3 gram., légère- 
mentcontuse,et mise pendant une heure dans un verre d’ eau, 
elle a produit trois à cinq vomissements et autant de selles: 
mais dans d’autres cas elle a été moins régulière dans ses 
effets ; elle a produit de l’anxiété, des coliques, sans amener 
d’évacuations suffisantes. Je l'ai abandonnée comme peu 


certaine et ne pouvant remplacer l’ipécacuanha ni le tartre 
stibié. 


98 
ARROCHE FETIDE, ® 


ARROCHE PUANTE, VULVAIRE, ANSÉRINE FÉTIDE , 
HERBE DE BOUC. 


Chenopodium fœtidum (T.) 
Chenopodium vulvaria (L) 


Cette plante est très-commune et se rencontre dans les 
lieux incultes, sur le bord des chemins. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 15 à 50 gram. par kilog. d'eau. 
A L'EXTÉRIEUR : Décadioh de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau, 
pour fomentations, lavements, injections, cataplasmes. 
Propriétes. 


La vulvaire est antispasmodique. Je l'ai employée quel- 
quefois en infusion dans les névroses de l'estomac et des 
intestins. On lui attribue une vertu emménagogue que je 
n'ai pas été à même de constater. Mais je pense qu’elle peut 
être utilement employée dans l'hysiérie. A P extérieur elle est 
légèrement résolutive et détersive. Les paysans s'en servent 
en décoction, pour appliquer sur les ulcères putrides et ver- 


mineux des bêtes à cornes, en y ajoutant un peu d'eau-de- 
vie ou de vinaigre. 


ARTM, 
PIED-DE-VEAU, GOUET, GOUET COMMUN, VIT-DE-PRÊTRE, 
VAQUETTE. 


Arum vulgare (T.)— Arum maculatwm (L.) 


L'arum est une plante très-commune dans les lieux hu- 
mides, le long des haies, sur le bord des chemins, dans les 
bois. On se sert des racines et des feuilles. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Poudre, deÿ à 10 gram ; —Altérant, de 4 à 2 gram. 


A L'EXTÉRIECR : Comme vésicant, écrasé, en application, en cata- 
plasme. 


Propriétés. 


La racine, partie usitée autrefois, est à tort abandonnée 
dans la pratique, où la mode exerce son empire comme sur 


@) Cet article n'était pas dans le mémoire couronné. 


Br 


3 
t 


. 29 


tant d’autres choses. On l'employait dans les pneumonies 
chroniques, dans l'asthme humide, sur la fin de la coque- 
luche, etc. A l'extérieur elle est vésicante. 

L’arum est regardée, par les auteurs qui en ont parlé, 
comme incisive, résolutive, expectorante. Les anciens re- 
commandaient la racine de pied-de-veau dans l’asthme et 
les affections chroniques des organes respiratoires. Gesner 
dit qu'elle a guéri trois hommes et une femme atteints de 
phihisie commençante , et en à soulagé plusieurs autres, en 
leur administrant l'extrait vineux des feuilles et des racines 
de cette plante en parties égales. L’effet de ce remède était de 
produire des évacuations abondantes. Antoine Constantin , 
médecin provençal, employait, à l'imitation de Mesué (liv. IT, 
chap. 24, de med. simp. purg.), la racine d’arum de la ma- 
nière suivante : Racine d’arum maculat., 3 gros. Lavez dans 
du vin, pilez long-temps dans un mortier de marbre, passez 
par un tamis, ajoutez : menthe pulvérisée 3 gros, absynthe 1 
gros 1/2, et un peu de suc de coing ou autre fruit astringent; 
faites un opiat avec q. s. de miel ou de vin cuit. Dose, 3 à 4 
gros, pour atténuer les humeurs et la pituite épaissies dans 
l'organe de la respiration, dans l’estomac, dans la tête et dans 
les articulations. Le même médecin conseille aussi des po- 
tions ou des pilules de poudre d’arum avec le jus d’origan, 
d’absynthe ou de sauge. Cette composition, dit-il, à la dose 
de quatre scrupules, purge efficacemént et sans violence. 

J'ai employé la racine d’arum dans l’asthme humide, la 
cachexie suivie de fièvres intermittentes prolongées, l’hydro- 
pisie, comme purgative et diurétique. Je commençais par la 
dose de deux ou trois grammes en poudre dans de la tisane 
d'orge ; j'étais souvent obligé de diminuer cette dose pour 
l’augmenter graduellement. La racine fraîcheest d’une âcreté 
telle qu’elle produit dans la bouche, lorsqu'on la mâche, une 
saveur brûlante qu'on ne peut dissiper qu'avec de l'huile 
d'olive ou d'amandes douces, ou mieux, avec l’oseille. La 
dessiccation lui ôte en grande partie cette acrimonie ; il 
n'en reste aucune trace si l'on soumet cette racine à la tor- 


_réfaction ou à des ébullitions répétées. On obtient par ces 


procédés une fécule blanche très-nourrissante, et avec la- 


-quelle, suivant Cirillo, on peut faire de fort bon pain. Il y a 


évidemment une grande analogie entre l’arum et le manioc : 


dans l’un comme dans l’autre, la matière nutritive se trouve 
_ mêlée au poison, dont il est facile de la séparer. 


C'est surtout dans les affections chroniques des organes 
respiratoires que l’on à recommandé l'usage de la racine 
d'arum. J'ai fait cesser en dix jours une bronchorrée chez 


30 


un cultivateur qui en était atteint depuis un mois, par suite 
d’une bronchite aigue, en administrant trois fois par jour 
1 gram. de racine de cette plante mêlée en forme d’élec- 
tuaire avec q. s. de miel. Je lai employée aussi avec succès 
chez un enfant de trois ans, atteint d’une coqueluche qui 
menacait de se terminer par une pneumonie chronique. Je 
faisais prendre 30 centig. de cette racine pulvérisée, trois fois 
par jour, et ensuite Cinq fois. Elle produisait quelquefois le 
vomissement,et toujours quelques évacuations alvines. Après 
douze à quinze jours de son usage la guérison était COM- 
plète. Dans d’autres cas je l’ai associée à a poudre de racire 
de belladone. Son effet me paraissait analogue à celui de 
l'ipécacuanha , qu’elle peut, je crois, remplacer comme 
expectorante, ayant la même action sur les muqueuses 
bronchique et gastrique. 


[Je n’emploie que la racine de l’année ; plus ancienne et 
trop desséchée, elle est d’un effet incertain : on ne peut 
apprécier le plus ou le moins de perte de son principe actif 
par la vétusté, 

Voici ce que dit, au rapport de Bulliard (Histoire des 
plantes vénéneuses de la France) au sujet d'une des pro- 
priétés particulières de la racine d’arum. l’auteur d’un Traité 
de médicaments simples : « J'ai éprouvé d'heureux effets de 
l’usage de cette racine dans le traitement des douleurs de 
rhumatismes, surtout quand elles étaient fixes et situées 
profondément. En pareil cas j'ai fait prendre depuis dix 
grains jusqu’à un scrupule de racine fraiche d'arum, deux 
ou trois fois par jour; elle s’avalait en bol ou en émulsion, 
jointe à des substances huileuses et mucilagineuses qui 
empéchaient que son âcreté et son irrilation ne se fissent 
sentir vivement et ne produisissent sur la langue une im- 
pression douloureuse. En général, elle occasionne partout 
le corps une légère agitation avec picotement, et quand le 
malade se tient chaudement au lit, elle cause des sueurs 
abondantes. » ] 


A l'exterieur. Les feuilles fraîches pilées, ou la racine ré- 
cente coupée en tranches minces, appliquées sur la peau, 
y produisent un effet rubéfiant et vésicant. J'ai souvent em- 
ployé ce vésicatoire, parce que je l'ai toujours trouvé sous la 
main pendant la belle saison. Un mélange de feuilles d’arum 
et d’oseille, cuites sous la cendre dans une feuille de chou, 
et incorporées avec du saindoux, m'a souvent servi comme 
maturatif sur les abcès froids, les tumeurs <crofuleuses 
ouvertes mais encore engorgées dans leur voisinage, dans 


91 


tous lés cas, enfin, où il fallait animer des tissus tumé- 
fiés, soit cellulaires, soit glandulaires. 

[L'oseille, mitigeant | action de l’ arum, empêche la vési- 
cation et borne cette action à un effet puissamment résolutif, 
stimulant et détersif. Quand ce mélange est fait avec les 
feuilles fraîches pilées dans un mortier, il est plus actif et 
convient surtout pour dissiper les engorgements glanduleux, 
œdémateux, etc.] 

J'ai détergé promptement des ulcères atoniques, scorbu- 
tiques ou scrofuleux par l application du suc des feuilles et 
de la racine d’arum ; son action est très-énergique et change 
le mode d’irritation ‘des parties affectées. Une suppuration 
Jouable a lieu, et une cicatisation solide s'opère peu à peu. 
On réitère plusieurs fois cette application. 


ASARET, 


ASARINE D'EUROPE, CABARET, OREILLE D'HOMME. 
Asarum (T.)—4sarum europœum (L.) 


Cette plante se rencontre dans les lieux ombragés, et vient 
spontanément dans toute l'Europe. J’en ai cultivé dans 
mon jardin. Les racines et les feuilles sont usitées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Poudre, comme excitant, 5 à 10 cent.; —comme 
vomitif, 50 cent. à 2 gram. 
Feuilles fraîches, de 4 à 12, infusées pendant une nait dans six 
onces d’eau bien pure. 
Extrait aqueux, de 4 gram. à 1 gram. 50 cent. 
Extrait Spiritueux, idem. 


Prupriétés, 


Les racines et les feuilles d’asaret sont excitantes, éméti- 
ques et anthelmintiques. Elles sont aussi sternutatoires. 
On les emploie dans les fièvres intermittentes invétérées, 
les obstructions du bas-ventre , et principalement dans les 
engorgements de la rate et du mésentère, les hydropisies, les 
maladies cutanées, etc. Des auteurs ont avancé que l’éner- 
gie des feuilles est moins puissante que celle des racines. 
Je n’ai pas cette opinion ; les feuilles m'ont paru jouir d’une 
action tout aussi prononcée. 

Le véritable succédanée de l'ipécacuanha est la racine 
d'asaret. Wauters s'exprime ainsi sur cette plante : Prin- 
cipuis suis tenaient cum ipecacuanha coincidere vide- 


32 


tur, licet aliquando venenis adnumeratum fuerit, quum ab 
imprudentibus sine debits cautelis præscribebatur. En effet, 
je pense avec cet auteur que si quelques praticiens ont re- 
jeté l'emploi de l'asaret comme agissant avec violence .et 
n'ayant qu'une action irrégulière et inconstante, c’est parce 
qu'on l’a administré sans précaution ou à des doses trop 
élevées, ou même dans des cas où une irritation préexistante 
en contre-indiquait l'usage. Si une prédilection marquée 
pour les médicaments exotiques n’existait pas chez la plu- 
part des médecins, on tiendrait compte aussi de l’action 
irrégulière de l ipécacuanba , si souvent observée dans la 
pratique. Le plus ou le moins d'effet des médicaments vient 
bien plus de la disposition idiosyncrasique des sujets qui en 
reçoivent de que du médicament lui-même. C’est une 
vérité pratique que l'expérience journalière confirme , et 
qui s'applique à tous les genres de médication. 

L’asarum, dont les anciens faisaient grand Cas, a été né- 
gligé depuis la découverte de l ipécacuanha ; mais les gens 
de la campagne, plus attachés aux traditions populaires | que 
les citadins, ont conservé l’usage de ce remède. Ilsemploient 
l'infusion des feuilles pour provoquer le vomissement et la 
purgation. Je dois dire que je l’ai toujours vu employer 
avec avantage, et qu’il n’a produit, dans certains cas, 
d’autres accidents que ceux que tous les purgauifs excitent 
quand ils sont pris à doses trop élevées ou intempestive- 
ment administrées. Soixante à quatre-vingts centigrammes 
de poudre de racine d’asaret font aussi bien vomir que la 
même dose d’ipécacuanha, et ne fatiguent pas davantage. 
J'ai employé cette poudre à la dose de deux, trois ou quatre 
grains (10, 15 ou 20 centigrammes), comme altérante, dans 
la bronchite chronique, la coqueluche, et surtout dans la 
diarrhée. Elle m'a réussi aussi bien que l’ipécacuanha. Je 
la mêle quelquefois à la belladone pour combattre la coque- 
luche. Long-temps gardée, cette racine n’est plus vomitive ; 
après six mois elle n’est que purgative , après deux ans elle 
ne purge presque plus, même à la dose de { gram. 50 centi- 
grammes. Elle acquiert alors la vertu diurétique, et peut 
être employée comme telle dans les tisanes. Il faut donc 
avoir égard à son plus ou moins de vétusté pour en régler 
les doses. Lorsque les feuilles et les racines de cette plante 
ont été pendant sept à huit mois dans un grenier aéré, on 
peut en toute sûreté les administrer à la dose de 1 à 2 gram. 
Coste en faisait prendre la racine à cette dose dans une 
tasse de bouillon de veau. Nos paysans se contentent de l’in- 
fusion de 6 à 15 feuilles sur des cendres chaudes pendant 


33 


une nuit, dans l’eau bien pure, pour prendre le matin à jeun, 
avec un peu de miel ou de cassonade. 


Les maréchaux, qui dans nos campagnes exercent la mé- 
decine vétérinaire d’une manière toute traditionnelle et rou- 
tinière, regardent le cabaret comme un bon purgatif, propre 
au traitement du farcin et à l'expulsion des vers chez les 
poulains. 


[La meilleure racine d’asaret est celle qu’on récolte dès le 
commencement du printemps ou vers l’automne. Quand 
on la prend dans le commerce, il faut la choisir belle, en- 
tière, bien nourrie, grosse comme une moyenne plume 
d'oie, récemment séchée, grise, d’une odeur agréable et 
pénétrante. ] 


ASPERGE. 


Asparagus sativa officinalis (T .) 
Asparagus officinalis (L.) 


Cette plante, venant spontanément dans les terrains légers 
et sablonneux , est généralement cultivée dans les jardins. 
On utilise les racines et les jeunes pousses. 


Preparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Décaction, de 15 à 60 gram. par kilog d'eau. 
Süop «e pointes d'asperges, de 30 à 400 gram.. seul ou en potion. 
Extrait de pointes, de à à 20 gram. en pilules, potion, tisane. 


Propriétés. 


Les racines et les pousses d’asperge sont diurétiques, 
apéritives et (dit-on) sédatives de la circulation. On uti- 
lise souvent l’asperge dans l’hydropisie, les obstructions 
_ abdominales, l’ictère, les maladies des voies urinaires, 
- lhypertrophie et les palpitations du cœur. 


a Je mets fréquemment en usage la racine d'asperge comme 
_ diurétique; mais je dois dire que le sirop de pointes d’as- 
… perge ne m'a jamais réussi. J'ai essayé une forte infusion 
… de pointes, et je n'ai observé que l'effet diurétique à -un 
moindre degré que dans les racines, et non l’action sédative 
_ récemment préconisée. 


34 
AULNÉE ov AUNÉE, 


ENULA CAMPANA. 


Aster omnium maximus (T.) 
Inula helenium (L.) 


Cette plante vivace croît dans les départements du centre 
de la France, dans les prairies, aux bords des ruisseaux et 
des rivières. On emploie la racine. 


Preparations ei doses. 


À L'INTÉRIEUR : Décoction ou infusion, de 45 à 50 gram. par kil. 
d'eau. 
Sirop, de 30 à 100 gram. en potion. 
Teinture. de 5 à 15 gram. en potion. 
Vin (4 de racine fraicie sur 16 de vin blanc), de 60 à 400 gram. 
Extrait, de 4 à 10 gra. en bol:, pilules. 
Conserve, de 5 à 10 gram. en bols, pilules. 
Poudre , de 2 à 40 gram. en bols, pilules ou en substances dans 
du vin. 
À L'EXTÉRIEUR : Décortion concentrée, pour lotions, fomentations. 
Poudre, 4 à 5 d'axonge, pour onguent, pommade en frictions. 


Proupriétes, 


Cette racine est tonique, excitante, emménagogue. Elle 
est regardée comme utile dans l'atonie des organes digestifs, 
les catarrhes vésicaux et pulmonaires chroniques, la diarrhée 
séreuse, l’'aménorrhée. À l'extérieur on l’emploie dans la 
gale et les dartres. 


L'aunée est une plante indigène très-précieuse et dont je 
fais un grand usage. Je donne la décoction de la racine de 
cette plante dans l’eau contre la débilité générale. Je la fais 
quelquefois infuser dans le vin, ou tout simplement dans la 
bière, lorsque le vin est trop cher pour les pauvres, auxquels 
je l’administre souvent. Dans la chlorose je donne la dé- 
coction de racine d’aunée coupée avec autant d’eau de clous 
rouillés : elle me réussir très-bien dans ce cas. La même 
décoction, à laquelle j'ajoute une once de suc d’oignon pour 
six à huit onces de décoction, avec une suffisante quantité 
de miel, forme une potion expectorante très-efficace dans 
le catarrhe pulmonaire à sa période d’atonie, et dans la 
bronchorrée , qu'elle tarit promptement. J'ai aussi donné en 
pareil cas la poudre de racine d’aunée à la dose de 3 à 6 
panne par jour, soit dans du vin, ou incorporée avec du 
miel. 


39 


M. Delens a lu à la Société de Médecine de Paris une 
notice sur l'efficacité de la racine d’aunée employée contre 
la leucorrhée et contre les maladies scrofuieuses. Entre au- 
tres faits rapportés par ce médecin, je citerai les suivants : 


« Une jeune dame conservait, à la suite d'une blennor- 
rhagie, , une leucorrhée des plus abondantes, accompagnée 
de faiblesse et de langueur d'estomac, et d'un état de ma- 
laise et de débilité générale. On eut vainement recours 
aux médications générales et locales les plus diverses, aux 
émollients, aux astringents, aux stimulants de toutes sortes. 
Le spéculum ayant été appliqué, on reconnut quelques 
traces de la blennorrhagie, accompagnant de légères ulcéra- 
tions du col : quelques cautérisations avec le nitrade acide 
de mercure en amenèrent promptement la guérison, mais 
ne tarirent point le cours de l'écoulement leucorrhéique, 
qu'on voyait sortir en nappe de l’orifice du col utérin. Ce- 
pendant tous les toniques ayant été inutilement employés 
à l’intérieur, M. Delens crut devoir prescrire la racine d’au- 
née pour remédier à la débilité de l'estomac. Une décoc- 
tion de deux gros de cette racine fut donc administrée, et 
l'on fut extrêmement surpris de voir qu'au bout de quelques 
jours l'écoulement leucorrhéïique avait complètement cessé, 
et que, de plus , l’état général de la malade était infiniment 
meilleur. On continua l'usage du médicament, porté à trois 
gros, pendant plusieurs jours, et cetie dame se trouva com- 
plètement guérie. » 


« Une dame d’une faible constitution, et éminemment 
scrofuleuse, fut atteinte de chlorose et guérie par l'emploi 
du fer uni au carbonate de potasse. Peu de temps après, 
il lui survint dans la mâchoire une tumeur qui acquit bien- 
tôt une grosseur considérable. Malgré l'application de deux 
vésicatoires volants sur la tumeur, celle-ci s'accrnt si rani- 
dement qu’on fut persuadé qu'elle allait devenir le siége d’un 
volumineux dépôt. Ce fut alors que M. Delens prescrivit la 
décoction de racine d’aunée, non dans la vue d'obtenir la 
résolution de cette tumeur, mais afin d'agir favorablement 
sur l’état général de la malade, qui était fort débilitée ; mais 
le succès obtenu dépassa toutes les prévisions, puisque la 
tumeur cessa aussitôt de s'accroître. Le lendemain elle était 
diminuée de plus de moitié, et quelques jours après elle 
était entièrement fondue. » 

(Joirnal de Médecine et de Chirurgie pratiques, tom. 7, page 438.) 


Dépuis 1836 que ces faits ont été publiés, j'ai eu souvent 
l'occasion d'employer la racine d’aunée dans Ia leucorrhée, 


36 


et toujours j'en ai retiré de grands avantages. Une jeune 
fille de la campagne, d’un tempérament lymphatique, ayant 
eu des engorgements glanduleux au col dans son enfance, 
était atteinte de fleurs-blanches abondantes depuis près de 
deux ans. Elle était dans un grand état de débilité ; des ti- 
raillements d'estomac, de l’inappétence avaient lieu. Je lui 
fis prendre chaque matin une décoction de racine d'aunée, 
à la dose de 12 grammes, dans # à 5 onces d’eau. Au bout 
de huit jours l'écoulement était diminué de moitié, l'esto- 
mac faisait ses fonctions, et un mois après je revis cette 
malade entièrement rétablie. | 

A l'extérieur. Wolf (De Viribus inulæ helenii in scabie 
persanaudä, epistola, Lipsiæ, 1787) vante l'emploi exté- 
rieur de la racine d’aunée contre la gale. On se sert de l’on- 
guent et de la décoction de la racine de cette plante pour 
lotions et frictions. Je n'ai qu'un seul cas de gale guérie 
par des lotions faites avec une forte décoction de racine 
d’aunée, chez un garçon de dix ans. Ces lotions étaient faites 
tous les soirs pendant un quart d’heure. Au bout de‘huit 
jours la guérison fut obtenue. Cette gale n'existait que de- 
puis un mois environ. 

La pommade d’aunée serait sans doute plus efficace. On 
peut l’employer aussi contre les dartres, et l’appliquer 
comme résulutive sur les engorgements scrofuleux. Cette 
racine, pilée crue, réduite en pâte, m'a mieux réussi dans 
ce dernier Cas, ainsi que dans les ulcères atoniques. 


AUNE ou AULNE, 


Betula alnus (T.)—Alnus glatinosa (L.) 


Cet arbre, commun dans toutes les forêts, surtout dans 
les lieux bas et humides, a une écorce riche en tannin. 


Préparations ei doses. 


Poudre de l'écorce, de 8 à 16 gram. perdant l’apyrexie. 
Décoction, 30 à 60 gram. par kï'og. d'eau. 


Proprietes, 


L'écorce d’aune est astringente, fébrifuge. 

Si nous n'avions pas l’écorce de chêne, celle d’aune serait 
souvent employée comme astringente. 

Je ne dois pas laisser ignorer un fait qui s’est plusieurs 
fois offert à mon obServation. Lorsqu'un cheval est atteint 
d'un écoulement muqueux et purulent sortant abondam- 


| 37 + j 


À ment par les naseaux , on l’attache dans une pâture , de 
| manière à ne lui laisser que l'herbe pour toute nourriture, 
| et pour toute boisson l’eau déposée dans une cuve tenant en 
macération une assez grande quantité d'écorce d’aune. 
Par ce simple traitement, le cheval guérit dans l'espace 
d’un à deux mois. Quelques campagnards m'ont dit avoir 
; guéri la morve par ce moyen ; mais comme ils ont pu con- 
| fondre une affection purement muqueuse avec cette mala- 
- die, Je ne puis rien affirmer à cet égard. Cette médication 
est, sous le rapport de la médecine comparée , de nature à 
fixer l'attention des praticiens. 
à [ Roussille Chamseru a préconisé l'écorce d’aune comme 
un des meilleurs succédanées du quinquina. Je pense qu'on 
pourrait avec avantage’ associer cette écorce, si riche en 
tannin , à la gentiane, à la petite centaurée , à l'absynthe ou 
au chardon étoilé , afin de la rapprocher plus encore , par 
: cette addition , de l'écorce du Pérou. 

J'ai vu employer avec succès, dans les inflammations 
légères de la gorge, le gargarisme de décoction de feuilles 
d’aune miellée. Ce gargarisme convient aussi dans l’angine 
chronique, les engorgements des gencives et les uicérations 
de la muqueuse buccale. ] 


ART TT A 2" 


AURONE , (1) 


AURONE MALE, CITRONELLE DES JARDINS , IVROGNE. 


Abrotanum mas augustifolium majus (T.) 
Artemisia abrotanum (L.) 


Cet arbuste ligneux est cultivé dans nos jardins. 


Préparations ct doses. 
Infusion des feuilles et sommités, 45 à 50 gram. par kilog. d'eau. 


Propriétés. 


Cette plante, d’une odeur forte de citron et de camphre 
en même temps , d’une saveur âcre el amère, est regardée 
comme stimulante emménagogue, sudorifique. Je Fat sou- 
vent employée dans les espèces aromatiques; les semences 
sont employées comme vermifuges dans les campagnes. 
J'ai vu un asthmatique se soulager dans les accès en pre- 


Li 


(4) Cet article n’était pas dans le mémoire couronné. 


L'2 PC 


nant en grande quantité Finfusion chaude de feuilles d'au- 
rone sèches. 

A l'extérieur, la décoction des feuilles et sommités d’au- 
rone dans l’eau , où l’on a fait dissoudre du sel commun, 
s'emploie avec avantage dans la gangrène , les ulcères pu- 
trides et vermineux, et dans l’œdème, 


AVOINE. 


Avena vulgaris (T }—Avena sativa (L.) 


Plante cultivée partout, et qui préfère aux climats chauds 
et secs, ceux dans lesquels une température peu élevée s’ac- 
compagne d’une légère humidité. Semence usitée. 


Propriétés. 


La semence, dépouillée de sa pellicule, forme un gruau 
qui est émolient et nutrilif. Il est très-employé dans les 
maladies de poitrine, les catarrhes, les toux sèches , l’hé- 
mopiysie, les flegmasies du tube digestif. C'est avec le lait 
qu'il forme une nourriture douce, rafraîchissante, ealmante, 
qui convient surtout pour les enfants. Les balles d'avoine 
sont employées à l'extérieur, dans des coussinets, pour les 
appareils de fracture. Je m'en sers pour cet usage et pour 
les oreiilers dans les affections de Ja tête , où les oreillers de 
plumes causent trop de chaleur. Dans ma pratique , j'em- 
ploie généralement la tisane d'avoine telle qu’elle est, dans 
les maladies aiguës, pour boisson ordinaire. Je lui ai quel- 
quefois reconnue une propriété diurétique assez marquée, 
mais irrégulière et inconstante. 

L'eau aigrie sur la farine d'avoine, forme, avec le sucreet 
une petite dose de vin blanc, une limonade antiseptique et 
stimulante dont Pringle à constaté les avantages pour ar- 
rêter les progrès du scorbut. | 

L'avoine noire ou rouge , bouillie dans le lait destiné à 
faire des crêmes, lui communique un arôme analogue à 
celui de la vanille. Les traiteurs de Paris connaissent et em- 
ploient cette innocente falsification. 

A l'extérieur , en cataplasme, la farine d’avoine est émol- 
liente et résolutive. J’emploie quelquefois l'avoine cuite avec 


du vinaigre, appliquée sur les points de côté pleurétiques F 


qu'ils soulagent; mais je leur préfère l'action d’un rubé- 
fiant. 


ee 


39 r1 


[ J'ai employé avec avantage, sur les ulcères putrides , 
un cataplasme composé de farine d'avoine et de levüre 
de bière : l'effet antiseptique de ce cataplasme est très- 
prompt. ] 


BALSAMITE , (1) 


COQ DES JARDINS, BAUME-COQ. 


Tanacetum hortense , foliis et odore menthæ (T.) 
Tanacetum balsamita (L.) 


Cette plante vient spontanément dans plusieurs parties de 
l'Europe, et est cultivée ordinairement dans les jardins. Les 
feuilles , les fleurs et les semences sont usitées. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Infusion aqueuse ou rineuse. 
A L'EXTÉRIEUR : Î fusion , pour fomentation, lotions, etc. 


Proprietés. 


La balsamite est aromatique, excitante, vermifuge. J’em- 
ploie les feuilles de cette plamte dans tous les cas où les 
aromatiques sont indiqués. Les fleurs et la semence peuvent 
être administrées comme vermicides de la même manière 
que celles de tanaisie, avec lesquelles elles ont une grande 
analogie de famille. La poudre des fleurs, à la dose de deux 
grammes , a fait rendre cinq ascarides lombricoïdes , après 
trois jours de son usage, chez un enfant de quatre ans. Ce 
médicament peut remplacer le semen-contrà. 


BARDANE, 


HERBE AUX TEIGNEUX , GLOUTERON , DOGUE. 
Lappa major (T.)—Arctium lappa (L.) 


Cette plante, commune dans presque tous les climats, 
croît le long des chemins, sur les terrains inculies, au voisi- 
nage des masures. On emploie la racine, les feuilles et 
quelquefois la semence. 


2 —_———— + 0 RO 


(4) Éet article n'était pas dans le mémoire courenné, 


” ” 
Prébarations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Racine ou feuilles, 45 à 60 gram. par kilog. d'eaa, 
en décoction ou infusion. 
Sirop (4 de racine fraîche sur 8 d’eau et 8 de sucre), de 30 à 
490 gram.. seul ou en potion 
Teinture (4 de racine sur 5 d'alcoo!), de 1 à 10 gram.. en potion. 
Extra (4 sur 6 d'eau par infusion , décoction ou inspissation da 
suc;, de 4 à 410 gram., en pilules, bols, etc. 
Poudre (rarement), de 4 à 4 gram , en bols, pilules, ou en 
substance dans un véhicule. 
A L'EXTÉRIEUR : Feuilles, q. quelconque, en cataplasme. 
Décoction, pour lavements. 
Suc des feuilles, pour pommade, etc. 


Propriétés, 


La racine de bardane, regardée comme sudorifique, diuré- 
tique et dépurative, a été recommandée dans le rhumatisme, 
Ja goutte, le catarrhe pulmonaire, les dartres squammeuses 
et surfuracées , les affections syphilitiques secondaires et 
tertiaires. Baglivi la recommande dans cette dernière ma- 
Jadie, à cause de sa vertu diaphorétique. Les feuilles ont à 
peu près les mêmes propriétés. 

Henri JIT, roi de France, fut guéri de la syphilis au moyen 
de la bardane ei du séné, par Péna. Samuel Formius ( Obser- 
vat. 41) rapporte ainsi les détails de cette cure : « Henricus 
tertius Gallorum rex lue venereû laborans à medicis ordi- 
nartis curari non poterat. Monitus fuit Penam lune 1em- 
poris Lutetiæ medicinam facientem multos ab hoc morbo 
liberare remedio peculiari quod à quodam Turca dichcerat ; 
äubum vocari jussit : ab eoque curatus est. Remedium tale 
erat : È 

» Radic. bardanæ in toleolis sectæ unc. 8. — Vini ali 
et aquæ fontis lib. 2. — Bulhiant ad mediæ partis consump- 
tionem, addendo sub finem, Senn. mund.unc. lib, 1 1/2 pro 
dispositione ægrotantis : colaturæ caprat manè lib. 1 1/2. Su- 
dores provocando cum silicibus majoribus calidis linters 
obvolutis, quorum unus admoveatur plants pedum, duo 
tibiis, duo cruribus, duo juæta medium parte exteriore, et 
duo juxta humeros, probè tegendo ægrum ; sudores comosi 
excitantur per horam unam cum dimadia et circa vesperam 
alvus solvitur bis aut ter : hoc remedium præmassis univer- 
salibus usurpabatur per spatium quindecim aut vigint 
dierum. Posteà capiebat manè sinqulis diebus decoctum 
bardanæ sine senna et sine ullo regimen per mensem inte- 
grum aut des quadraginta. » 


# * 

| On voit , d'après cette observation, que les sueurs provo- 
quées ont été très-utiles , et qu’elles ont pu , après plusieurs 
traitements mercuriels, amener la guérison de la syphilis 
.dont était atteint Henri IIT Il est à remarquer que ce n’est 
guère que dans ces circonstances que les végétaux dits su- 
dorifiques guérissent la vérole. 

J'ai employé la racine de bardane en décoction dans un 
cas de syphilis tertiaire, chez un militaire libéré du service, 
et chez lequel, après une guérison apparente, il était sur- 
venu des pustules au front (corona veneris) et des douleurs 
noctures au périosie des tibias (periostite) tellement vives 
que ie malade ne pouvait trouver un seul instant de repos 
que vers le matin. Je l'ai traité absolument et de point en 
point comme Péna avait traité Henri IE, ei j'ai obtenu le 
méme résultat. Ce malade , affaibli par deux traitements 
mercuriels subis dans les hôpitaux militaires, était dans les 
conditions les plus favorables pour l'usage des sudorifiques. 
Il a continué pendant cinquante jours la décoction de racine 
de bardane; mais je n'ai eu besoin de provoquer les sueurs 
que pendant quinze jours. Les symptômes avaient prompte- 
ment cédé. Îl y a maintenant près de six ans que la gué- 
rison a eu lieu , et aucune récidive ne s’est manifestée. 

J'ai depuis employé cette plante sans succès dans une cir- 
consiance à peu près semblable; mais la salsepareille elle- 
même, à laquelle on a proposé de substituer la bardane, 
réussit-elle toujours ? [Il est bien certain qu'aujourd'hui 
l'iodure de potassium l'emporte en efficacité sur ces moyens 
pour combattre la syphilis eonstitutionnelle ; mais ce médi- 
cament est d’un prix très-élevé. ] 

J'ai acquis la certitude que la semence de bardane infusée 
dans du vin blanc, à la dose de 4 gram. pour 500 gram. de 
vin, est diurétique Je l'ai donnée avec succès dans un cas 
d'anasarque survenue chez une petite fille de dix ans à la 
suite de la scarlatine. On peut donner cette semence en 
émulsion. 

. À l'extérieur. Les feuilles de bardane appliquées exté- 
rieurement sont résolutives et détergent les ulcères Percy 
employaït le suc des feuilles de cette plante dans les exco- 
riations légères avec inflammation , dans les croûtes de lait 
et la teigne squammeuse; usage ancien sans doute d’où 
vient probablement le nom d'herbe aux teigneux qu'on 
donne vuigairement à cette plante. Il recommandait surtout 
un onguent, espèce de nutrilum qu'il faisait préparer avec 
un demi-verre de sue de feuilles de bardane non clarifié et 
autant d'huile, qu'on triturait et qu’on agitait à froid avec 


PRET SP PT 


ES 42 


plusieurs balles de plomb dans un vase d’étain; il en ré 
tait une pommade verte contenant un peu d'oxide de plomb, 
qui sans doute ajoutait encore aux propriétés du suc de bar- 
dane. La plupart de ces ulcères atoniques variqueux , Si Opi- 
niâtres, aux jambes, guérissent très-facilement en les re- 
couvrant d’un plumaceau trempé dans cet onguent , et par- 
dessus d’une feuille de bardane. I est rare, dit Percy , de les 
voir résister à ce puissant topique : il en ramollit les bords 
calleux , y attire une suppuration de bonne qualité. Enfin, 
cette pommade à été souvent appliquée avec succès sur des 
tumeurs scrofuleuses ouvertes, et même sur des cancers, 
dont elle a ralenti la marche et calmé les douleurs. 

Les cataplasmes de feuilles de bardane soulagent dans 
les gonflements articulaires chroniques, suite de l’arthrite 
aiguë. J'ai vu un engorgement de celte nature au poignet 
se dissiper au moyen de cataplasmes de feuilles de bardane 
bouillies dans l'urine avec une suffisante quantité de son, 
appliqués soir et matin pendant quinze jours , el recouverts 
avec les feuilles fraîches de la même plante. 

Les feuilles vertes de bardane , légèrement froissées et 
appliquées sur les tumeurs blanches , à l'envers, excitent 
une exhalation cutanée qui soulage beaucoup. Pour povo- 
quer la transpiration aux pieds dans les affections catar- 
rhales, j'ai vu des paysans se les envelopper avec de larges 
feuilles de bardane. Cela m'a donné l'idée d’en appliquer 
sur la poitrine et entre les épaules dans les maladies de 
poitrine, ce qui m'a parfaitement réussi. Il est plus facile 
de trouver ce moyen à la campagne que de se procurer un 
emplâtre de poix de Bourgogne. Je dois faire remarquer 
que ces feuiiles, étant glutineuses, adhèrent quelquefois 
fortement à la peau. 

La bardane , comme on le voit , peut rendre quelques ser- 
vices dans la pratique rurale. C’est à tort que Cullen et Des- 


bois , de Rochefort, regardent les propriétés de cette plante 
comme inutiles et fort douteuses. 


BECCABUNG:A , 


VYÉRONIQUE AQUATIQUE , CRESSONNÉE. : 
Veronica aquatica major (T.) 
Veronica beccabunga (L.) 


Cette plante est très-commune sur le bord des ruisseaux 
et des fontaines. Elle a bien moins d'analogie, sous le rap- 


43 + 


port médical, avec les véroniques qu'avec la famille des 
crucifères. On ne se sert que de la plante fraiche. 


Propriétés. 


Cette plante fraîche est excitante et antiscorbutique. 


A l'intérieur. On administre pour l'ordinaire le suc ex- 
primé à la dose de deux à quatre onces { 60 à 120 gram.}), 
soit éeul, soit mêlé à ceux de cresson , de cochléaria , soit 
uni au lait ou au petit-lait. Les autres préparations de bec- 
cabunga sont aujourd'hui abandonnées. 


û 


BELLADOKE, 


BELLE-DAME , MORELLE FURIEUSE. 


Belladona majoribus soiiis et floribus (T.) 
Atropa belladona (L ) 


Cette plante , commune dans les climats chauds et tem- 
pérés, croît sur les montagnes, dans les fossés ombragés, le 
Jong des haies , dans les bois taillis, etc. Elle est cultivée 
dans les jardins. Les racines, les feuilles et les fruits sont 
usités. 

Fréparaiions ei doses. 


A L'INTÉRIEUR [nfusion , de 40 à 60 cent. pour 450 gram. d’eau 

bouil ante, dont on prend par jour 50 à 50 g'am. 

Teintuie de feuilles fraiches (A sur 4 d'alcool à 30°),5 à 50 cent, 
en potion. | 

Teinture de feuilles sèches (4 sur 8 d'alcool à 22°), 10 à 50 cent., 
en potion 

Teinture éthérée (1 de feuilles sèches sur 8 d'éther), 410 à 50 cent., 
en potion. 

Sirop (4 d'extrait sur 50 d'eau et 75 de sucre), 45 à 50 gram., 
en potion. 

Ertrait «queux , de 5 cent. à 4 gram., en potion, pilules , pro- 
gressivement. 

Extrat de uc clarifié, par inspissation, de 5 à 20 cent., en 
potion, pilules , progressivement. 

Extrant de suc non dé, ure , de 5 cent. à 4 gram., progressivement. 

Extrait alcoolique (4 de suc sur 4 d'alcool à 55 , ou 2 de feuiiles 
sèches sur 7 d'alcool à 21°). 4 à 30cent., progressivement. 


Poudre , 5 à 60 cent., progressivement. 


À L'EXTÉRIEUR : Infusion, 4 à 45 gram. par kilog. d'eau, pour 
lotions, fomentaiions, bains, etc. ;—de 50 à 60 cent. par 200 
gram, d’eau , pour lavements. 


ä 4.4 
Extrait, de 5 à 50 gram. ,en lavements ;, —de 4 sur 8 d'axonge, 
en pommade. 
Poudre, en topique, rarement. 
Feuilles sèches, fumées en cigarettes. 


PFroprieies. 


La belladone est un poison narcotico-àcre. 


[ A la dose de 40 cent. à 1 gram., cette plante irrite vive- 
ment l'estomac et tout le tube intestinal, cause des vomisse- 
ments, des déjections fréquentes, le ténesme ; la circulation 
devient irrégulière, l'action des reins et de la peau est aug- 
mentée, el il survient des sueurs ou une diurèse ; le système 
nerveux est atteint; la vue se trouble, des vertiges et des 
éblouissements ont lieu, et le malade éprouve un sentiment 
particulier de gène dans les tempes et les paupières, de la 
pesanteur de tête, de Ja faiblesse musculaire prononcée, de 
Ja somnolence troublée par des allucinations fantastiques, 
enfin tous les symptômes d'une congestion cérébrale Ces ac- 
cidents disparaissent peu à peu après trois ou quatre heures ; 
mais la pupille reste dilatée quelquefois pendant plusieurs 
Jours. Si la dose de la belladone est plus considérable, elle 
cause l'empoisonnement caractérisé par les mêmes symp- 
tômes, mais beaucoup plus intenses. Les médecins de cam- 
pagne qui cultivent la belladone doivent prendre des pré- 
caulions contre les dangers qu'offre cette plante aux enfants, 
qui se laissent séduire par la couleur de ses baies, dont le 
goût n’a rien de désagréable. ] 

A petite dose elle est narcotique, stupéfiante et calmante 
d'une manière toute spéciale. Elle paraît agir principale- 
ment sur le système nerveux, tant ganglionaire que de Ja 
vie animale, en émoussant leur sensibilité. On l'emploie à 
l'intérieur dans les névroses, les névralgies, la coqueluehe, 
Ja toux convulsive , le croup , l'asthme , les cancers, l'ictère 
spasmodique , la dyssenterie avec tenesme, etc. Elle est 
regardée comme un préservatif de la scarlatine. A l'extérieur 
on s'en sert avec avantage comme calmant contre certaines 
inflammations aigues et chroniques de la peau, les tumeurs 
blanches articulaires , le rhumatisme , la sciatique. Unie à 
J'o.guent mercuriel , elle est utile dans l'iritis, la rétinite, 
Ja sclérotite et quelques ophtalmies. 

La belladone est utilisée encore contre les douleurs aigues 
des fissures, les contractions spasmodiques, les irritations 
de l'anus et les hémorroïdes. Elle jouit aussi de la propriété 
de combattre le spasme de divers organes, tels que l'anus, 
l'urêtre, l'utérus, l'anneau inguinal, etc., et de dilater Ja 


45 


pupille. On s'en sert dans ce dernier cas pour rendre plus 
facile l'opération de la cataracte, et pour explorer le cristal- 
lin et ses annexes. 

On emploie la belladone par la méthode endermique 
contre le tic douloureux de la face, la sciatique et les 
névralgies en général. Dans ces cas, et surtout dans les 
affections spasmodiques des organes respiratoires, les feuilles 
de belladone, fumées seules ou mêlées à du tabae, à de la 
sauge , etc., réussissent très-bien. 

J'ai quelquefois employé les feuilles fraîches de belladone 
dans les engorgements des mamelles. ‘Je les mélais avec du 
saindoux ou du beurre frais. C'était une pommade de bel]ja- 
done extamporanée. Elles m'ont servi, ainsi préparées, dans 
tous les £as où la pommade de belladone est indiquée. [Cui- 
tes sous la cendre dans une feuille de chou, et mélées avec 
autant de saindoux, elles sont appliquées en cataplasme sur 
les tumeurs glanduleuses, shirreuses, etc.] 

Je traite toujours la coqueluche avec la poudre de racine 


de belladone, à la dose de 1 à 5 centig., répétée de quatre 


heures en quatre heures, et mêlée avec une certaine quan- 
tité de sucre blanc pulvérisé. Je l’'administre aussitôt que la 
période catarrhale ou inflammatoire est dissipée. J’applique 
en même temps, tous les soirs, à la plante des pieds, le mé- 
lange d'ail, de feuilles de jusquiane et d’axonge. Ce traite- 
ment modère et éloigne promptement les quintes de toux ; 
les symptômes se dissipent ordinairement dans l’espace de 
vingt-cinq à trente-cinq jours. 

Dans tous les cas où la douleur névralgique ou le spasme 
local existent, l'usage de la belladone produit toujours de 
bons effets. J’ai deux fois rendu facile la réduction d’une 
hernie inguinale étranglée par l'application du suc de bella- 
done mêlé avec autant d'eau chaude, ou employé pur en. 
frictions. L’effet est plus prompt qu’en usant de la pommade 
composée avec cette plante. 


[Mne Debette , de Calais, âgée de trente-trois ans, d’une 
grande taille, d'une constitution grêle, d’un tempérament 
nervoso-sanguin, enceinte de cinq mois, fut prise au mois 
d'août 1811 d’un resserrement spasmodique des mâchoires, 
qui, d’abord peu prononcé, augmenta dans l’espace de cinq 
à six jours au point de tenir la bouche constamment fermée. 
Le contact sur les lèvres et les gencives de boissons ayant 
une saveur quelconque, et surtout acide, augmentait le spas- 
me et la constriction jusqu'à faire saigner les gencives. Il y 
avait absence complète de douleur. Une saignée de 7 à 800 


46 


grammes fut pratiquée et n’amena aucun soulagement. Je 
prescrivis des demi-lavements avec l'extrait gommeux d'o- 
pium, un liniment camphré et opiacé, sans obtenir plus de 
succès. La malade était dans le même état depuis six jours, 
quand il me vint à l’idée d'employer des onctions de pom- 
made de belladone sur les mâchoires. Cette pommade, dans 
la proportion de 4 grammes d'extrait sur 30 grammes d’a- 
xonge, était appliquée à la dose de 4 grammes toutes les 
trois heures. Dès le second jour de l'emploi de ce moyen, 
la malade commença à desserrer les dents ; sa bouche s’ou- 
vrit peu à peu, et au bout de six à huit jours la guérison de ce 
trismus était complète. [lest à remarquer que pendant plus 
de*quiuze jours une tension spasmodique était toujours pro- 
voquée par la présence des boissons acides dans la bouche. 

Ne pourrait-on pas obtenir quelque succès dans le tétanos 
en frictionnant la région rachidienne avec la pommadede 
belladone? La vertu anticontractile de cette plante semble 
l’'annoncer. 

Mme Hanson, demeurant à Calais, âgée de 26 ans, d’un 
tempérament lymphatique, me fit appeler le 15 juin 1818. 
Elle était prise d’un violent accès de colique néphrétique. 
J'avais inutilement employé la saignée et le bain de longue 
durée, quand attribuant les symptômes au spasme local, je 
fis frictionner de demi-heure en demi-heure, avec la pom- 
made de belladone (#4 grammes d'extrait pour 30 grammes 
d’axonge) la région correspondante au rein, siége de douleurs 
Jancinantes très-vives. Dès la seconde friction la douleur 
s’apaisa. La malade s’endormit après la troisième friction. 
Le lendemain les douleurs étaient entièrement dissipées, et 
cinq petits calculs avaient été rendus avec quelque difficulté 
pendant leur passage dans l'urètre. Deux de ces calculs 
étaient de la grosseur d'un pois. Je suis convaineu que, 
dans Ja plupart des cas, les douleurs néphrétiques sont dues 
au spasme déterminé, par la présence des calculs dans 
les uretères. 

Mne H**°, de Boulogne, âgée de 44 ans, ayant eu des 
hémorrhoïdes à la suite des couches, était atteinte d’une 
constriction douloureuse du sphincter de l'anus. Une cons- 


 tipation habituelle avait lieu ; les excréments étaient comme 


arrêtés au fondement, et ne pouvaient être expulsés que peu 
à peu, à diverses reprises, et avec douleur et excoriation. Il 
n'y avait pas de fissure. Cet état durait plus ou moins violem- 
ment depuis quinze ans, lorsque je fis pratiquer des onctions 
à l'intérieur du rectum, matin et soir, avec la pommade de 
belladone. Au bout de deux ou trois jours l'effet avantageux 


47 


de ce simple moyen fut très-prononcé. Les selles devinrent 
plus faciles et moins douloureuses ; la constipation fut com- 
battue avec succès par les lavements d’eau froide. Il suffit, 
toutes les fois que la constriction du sphincter donne la 
moindre apparence de retour, d'employer Ja même pom- 
made pour la dissiper aussitôt. 

La pommade de belladone produit le même soulagement 
dans les affections hémorrhoïdales, où elle calme Ja douleur 
et diminue la constipation. 

Je suis parvenu à faire cesser des palpitations de cœur 
très-violentes chez une jeune fille de 18 ans, devenue chloro- 
tique par suite de frayeur, en faisant frictionner deux fois 
par jour la région précordiale avec un liniment composé 
d'un jaune d'œuf, de 2 grammes de suc de belladone et de 
4 grammes de suc de digitale. Ces palpitations étaient pure- 
ment nerveuses. J'ai obtenu un soulagement prompt dans 
les palpitalions et les douleurs causées par l’hypertrophie 
du cœur, en employant le même liniment ou la pommade 
de belladone. TI est à remarquer que dans ces cas l’usage 
interne de la belladone ne produit aucun soulagement. J'ai 
eu deux fois occasion d'employer la pommade de belladone 
dans le cas de régidité spasmodique du col utérin pendant 
l'accouchement. L'effet en a été prompt et satisfaisant. Une 
fois j'ai introduit de cette pommade dans l'utérus pour faire 
cesser le resserrement partiel de cet organe, produisant l’en- 
chatonnement du placenta ; mais je ne puis assurer que la 
dilatation n’eût pas eu lieu sans cela, ainsi qu’on l'observe 
fréquemment quand on attend quelques minutes et que l’on 
sollicite les contractions générales de la matrice par des 
frictions sur l hypogastre. 

M. de B**, de Boulogne, âgé de 66 ans, d’un tempéra- 
ment nerveux, d'une constitution grêle, était atteint d’un 
engorgement chronique de la prostate, avec difficulté 
d’uriner, flux muqueux, et surtout douleurs vives pendant 
l'émission fréquemment répétée des urines. Lorsque je vis 
le malade, au printemps de 1846, ces douleurs existaient 
depuis six mois et avaient résisté à l'application réitérée des 
sangsues, à l'usage journalier des baïns et à un repos absolu 
dans une position horizontale. Je fis pratiquer matin et soir 
des frictions avec la pommade de belladone ( 4 grammes 
d'extrait sur 30 grammes d’axonge), au périnée et le long 
du canal de l’urètre, dans lequel je faisais introduire plu- 
sieurs fois par jour de cette même pommade au moyen 
d’une bougie. Dès le premier jour il y eut soulagement; 
au bout de huit jours les douleurs étaient eomplètement dis- 


45 


eu et l'émission des urines plus rare. Il a suffi d’enduire 
la bougie dont le malade se sert habituellement, pour em- 
pécher le retour des douleurs. L’embonpoint et es forces, 
que la continuité des souffrances avait fait perdre, se réta- 
blirent peu à peu sous l’influence du calme moral, du repos 
et d’une alimentation analeptique. 


(Madame la marquise de B**, de Soissons, âgée de 63) 
ans, d'un tempérament lymphatique, était à Boulogne pour 
prendre les bains de mer dans l'été de 1846, lorsqu’ elle me 
fin appeler. Cette dame, atteinte d’une arthrite chronique, 
élait en même temps en proie, depuis plus de deux ans, à 
des attaques très-fréquentes de strangurie spasmodique 
attribuée , par les médecins qu’elle avait ‘consultés à Paris, à 
l'existence d’une cystalgie essentielle ayant son siége au col 
de la vessie. Une extrême irritabilité du tube intestinal et 
des douleurs arthritiques vagues alternaient avec les accès 
de cystalgie, ou les accompagnaient avec plus ou moins d'in- 
tensité. Les antispasmodiques, les bains généraux et locaux, 
un régime antiphlogistique, avaient été employés en vain. 
Les douleurs vésicales, avec émission goutte à goutte et 
fréquemment répétée des urines , persistaient et épuisaient 
les forces de la malade, lorsque je prescrivis l’introduction 
matin et soir dans le rectum d’un suppositoire de beurre 
de cacao , au centre duquel je faisais mettre 5 centigrammes 
d'extrait de belladone. L’eflet en fut si prononcé dès le pre- 
mier jour, que je fus obligé, à cause de l’action générale de 
ce médicament, d'en réduire la dose à 3 centigrammes. 
Bientôt les douleurs et le spasme diminuèrent graduelle- 
ment; la malade put goûter quelques heures de sommeil 
non interrompu par l’émission des urines. Ce moyen si 
simple, continue depuis un an, avec augmentation très- 
graduelle des doses d'extrait de belladone, a toujours produit 
le même soulagemeni toutes les fois qu’il y a eu Apparence de 
récidive du spasme ou de la douleur (1). 


M. Morand, médecin, et l'un des fondateurs de la colonie) 
agricole de Mettray, combat l'incontinence nocturne d’u- 
rine, chez les enfants, par l'administration de la belladone. 
Sans se montrer toujours infaillible, ce médicament obtient 
entre ses mains des succès fort nombreux: Voici, du reste, 
comment ce praticien l’emploie : «Il fait ordinairement con- 
fectionner des pilules de { centigramme d'extrait de bella- 


(4) Le suppositoire est introduit assez profondément pour rester en 
place et fondre peu à peu, 


‘ 


49 


done ; il en administre d’abord une le matin etune autre le 
soir aux enfants de 4 à 6 ans. Si au bout de huit jours il n’y 
a aucun effet produit, il en donne une troisième à midi, 
au bout de quinze jours une quatrième. Pour les enfants de 
12 à 15 ans, on peut commencer par trois pilules, et aug- 
menter en conséquence. Chez les adultes , on peut aller jus- 
qu’à dix , douze et quinze par jour. 

» Si la vue vient à se troubler , s’il survient quelques 
symptômes toxiques, on suspend, pour reprendre plus 
tard. 

» Deux, trois ou quatre mois de l'usage de la belladone suf- 
fisent ordinairement pour amener la cure radicale de l'in- 
continence d'urine. Toutefois, on comprend qu’une des 
conditions de succès est que cette maladie ne se rattache 
à aucune lésion des organes génilo-urinaires, en un mot, 
qu’elle soit essentielle. Alors la belladone étend ses bienfaits 
jusque sur les vieillards, du moins pendant quelque 
temps. (1) » (Journal de Méd. et de Chirurg. prangq., 
tom. XVI, page 199.) 


Mme F**, de Boulogne, âgée de 43 ans, brune, d’une 
taille moyenne, d’une forte constitution, mariée depuis un 
an, enceinte de trois mois environ, fait un grand effort pour 
pousser une voiture hors de la remise, et éprouve à l’ins- 
tant même une douleur au-dessus de la région inguinale 
gauche. Cette douleur se dissipe presque immédiatement. 
Trois jours après, le 4 décembre 1847, vers six heures du 
matin, des douleurs abdominales se font sentir. Ces dou- 
leurs alternent avec des instants de calme, augmentent gra- 
duellement, et sont accompagnées d’une perte légère. 

Je suis appelé à huit heures du matin. Je trouve la ma- 
lade en proie à des douleurs utérines d’une violence extré- 
me, presque continues, avec pâleur et contraction de la 
face, petitesse et fréquence du pouls, en un mot concentra- 
tion des forces par l'intensité des souffrances. Le col utérin, 
allongé, épais, comme dans l’état normal , n'offre point de 
dilatation ; mais on sent au toucher le produit de la concep- 
tion s'appliquant au-dessus à chaque douleur ; les contrac- 
tions de la matrice sont manifestes. 


a 


&) On a obtenu dans l’incontinence nocturne d'urine des succès cons- 
tatés de l'emploi de l'extrait de noix vomique , dont l’action est opposée 
à celle de la belladone. Ne pourrait-on pas conclure de ces faits que 
l'affection dépend tantôt d'un défaut, tantôt d’une augmentation de sen- 
sibilité du col de la vessie ? 


4 


50 


Je prescris la potion suivante : 


Eau distillée de fleurs de tilleul . . . 123 gram. 
Ptier/sulfarique dt: 400 SENTE 2 gram. 
Laudanum liquide. . ..:..... 1 gram. 
Sirop d’écorce d'orange . . . . . . . 30 gram. 


La malade prend successivement trois cuillerées à bouche 
de cette potion , et ensuite une cuillerée de dix minutes en 
dix minutes. Au bout d’un quart d'heure les douleurs se ra- 
lentissent sans diminuer d'intensité, le pouls se développe 
peu à peu, les traits reprennent leur expression naturelle ; 
bref, la réaction 2 lieu et est complète vers deux heures de 
l'après-midi. Néanmoins les contractions utérines conti- 
nuent, deviennent plus fortes, et sont toujours suivies d’un 
écoulement sanguin peu abondant. L'orifice utérin est un 
peu moins allongé et légèrement entr'ouvert. Une saignée du 
bras de 6 à 700 grammes est pratiquée. Dès ce moment les 
douleurs laissent plus d'intervalle, et la perte diminue peu 
à peu. À sept heures du soir les douleurs ont cessé, et il ne 
reste plus qu'un léger écoulement sanguin. Une transpira- 
tion abondante s'établit et dure toute la nuit. Le 5 au matin, 
le pouls est presque dans son état normal; l'écoulement de 
sang est encore diminué ; la malade a dormi deux heures et 
n’a éprouvé aucune douleur. Je recommande le repos le plus 
absolu. Le 6 au matin, le mieux encore plus prononcé, som- 
meil durant quatre à cinq heures ; le sang ne coule plus 
qu'en très-petite quantité ; la malade a de l'appétit et prend 
deux soupes dans la journée. Mais vers deux heures de l’a- 
près-midi les douleurs reviennent après un lavement pris 
sans mon ordonnance et quelques efforts pour aller à la 
garde-robe. D'abord légères, ces douleurs augmentent et 
sont tellement vives vers sept heures, que la concentration 
de Ja vitalité se manifeste de nouveau par la petitesse du 
pouls, la pâleur de la face, l’agitatiou et l’anxiété portées 
au plus haut degré. Quelques cuillerées de la potion éthé- 
rée produisent, cette fois, un effet beaucoup plus prompt : la 
réaction s’opère en moins d’une demi-heure; mais les 
douleurs persistent, allernent avec des intervalles de calme 
plus prononcés, et sont décidément expultrices; le col 
utérin s’efface, l’orifice se dilate peu à peu, s’amineit et 
présente, à huit heures et demie, une ouverture d’environ 
1 1/2 centimètre, et sur laquelle l’œuf s'applique à chaque 
contraction de l'utérus. | 


Dans cet état de choses, où, regardant comme inévitable 
l'avortement, il ne s’agit plus, suivant tous les accoucheurs, 


oi 


que d'aider la femme à se débarrasser du produit de la con- 
ceplion de la manière la plus facile et la moins dangereuse, 
je saisis néanmoins l’occasion qui se présente d'essayer 
l'application de la pommade de belladone (2 gram. d'extrait 
sur 45 gram. d'axonge), sans espérer pouvoir enrayer un 
travail aussi avancé. J'en introduis environ 3 grammes, 
dont une partie reste dans le vagin et l’autre est employée 
en frictions légères sur le bord de l’orifice de Ia matrice. 
Après dix minutes, les contractions utérines semblent 
moins violentes et moins longues. Je réitère l'emploi de 
la pommade à la même dose et de la même manière. L’effet 
cette fois en est plus appréciable ; une troisième application 
a lieu une demi-heure après, et fait graduellement diminuer 
etenfin cesser complètement les douleurs dans l’espace de 
quarante minutes. L’orifice utérin reste dilaté et plus souple. 
Je laisse la malade vers minuit dans un état de calme par- 
fait, mais fatiguée et disposée à se livrer au sommeil. 

Le lendemain 7, la nuit a été tranquille, quoiqu'il y ait: 
eu peu de sommeil; l'écoulement sanguin est diminué des 
trois quarts et n'excède pas celui des règles. L'appétit est 
bon, le pouls dans son état normal: l'orifice est moins 
dilaté, mais encore souple. 

Les jours suivants le mieux se prononce de plus en plus ; 
l'écoulement sanguin disparaît peu à peu, les mamelles ne 
sont point affaissées, la face reprend son état d’épanouisse- 
ment habituel. Une constipation qui existe depuis dix jours, 
et contre laquelle je n’ai rien employé, de crainte de rappeler 
l'irritation de la matrice, cesse sans inconvénient au moyen 
de 25 grammes d'huile de ricin. Malgré quelques coliques 
pour l'expulsion de matières fécales durcies et volumineuses, 
aucun retour de symptômes pouvant faire craindre de nou- 
veaux accidents n’a lieu, et la malade, après avoir tenu le 
lit pendant quinze jours, se livre avec prudence aux occu- 
pations ordinaires du ménage ; elle se trouve aujourd’hui ; 
8 janvier 1848, tout aussi bien qu'avant l'accident qui a 
amené les symptômes généralement regardés comme pré- 
curseurs d’un avortement inévitable. Le col utérin est re- 
venu à son état naturel. | 

Tous les accoucheurs reconnaîtront facilement les cas où 
la belladone est indiquée, et apprécieront les immenses ser- 
vices qu'elle est appelé à rendre à l'humanité. 

L'action préservative de la belladone contre la scarlatine 
ne fait plus doute. Des faits nombreux l'ont constatée. On 
prépare pour cela une solution de 15 cent. d’extrait dans 30 
gram. d'eau distillée. On en donne: aux enfants d’un an et 


52 


au-dessous , 2 ou à gouttes; aux enfants de deux an$, 3 ou 
4 gouttes; et on augmente suivant l’âge sans dépasser 15 
gouttes. 

Dans une observation communiquée au Journal de Méde- 
cine et de Chirurgie pratiques (1833, art. 674), on trouve 
le fait suivant : 

« M. Carré, chirurgien en chef de l'hôpital militaire de 
Briançon, avait inutilement employé la saignée et les bains 
sans pouvoir réduire une hernie étranglée et volumineuse 
qu’il étaicsur le point d'opérer. Une bougie enduite de pom- 
made de belladone fut introduite dans l’urètre, et à peine 
une demi-heure s'était écoulée que ce chirurgien put opérer 
facilement la réduction. » 

M. B'*, directeur des postes, âgé de 47 ans, d’un tempé- 
rament bilioso-sanguin , d’une forte constitution , était at- 
teint depuis plusieurs mois d’une douleur fixe et continue à 
la région hypogastrique, sans cause connue, et n'apportant 
aucun changement dans les fonctions intestipales ni dans 
celles des organes urinaires. Cette douleur, plus incommode 
que vive, avait résisté à l'usage des bains, à l’application 
des sangsues à l'anus, aux cataplasmes et aux liniments 
opiacés. Je prescrivis un suppositoire de beurre de cacao 
avec 5 centigrammes d'extrait de belladone, à introduire 
matin et soir. Dès le second jour de l'emploi de ce moyen, 
la douleur diminua. J’augmentai la dose d'extrait de bella- 
done graduellement jusqu’à celle de 12 centigrammes. Dès- 
lors la douleur disparut complètement. Depuis deux mois 
que le malade a cessé l'emploi du suppositoire belladoné, 
aucun symptôme de récidive n'a eu lieu. 

« Un homme âgé de 60 ans, d’un tempérament nerveux, 
éprouvait depuis quelques jours des douleurs abdominales 
aigües. Chez lui le pouls était petit, précipité, la face pâle, 
grippée, couverte de sueur froide; narines contractées, res- 
piration anxieuse, ardeur à l'estomac, vomissements, ventre 
rétracté, dur, constipation opiniâtre, extrémités froides ; tout 
annonçait la fin prochaine de ce malheureux. Des moyens 
en apparence très-rationnels , tels que des potions laudani- 
sées , des lavements huileux, des cataplasmes, etc. , avaient 
échoué. M. Groenendaels formula un lavement composé 
avec l’eau chaude, l'huile d'olive et 2 grains d'extrait de 
belladone, dont l’administration dut être répétée de trois 
heures en trois heures. Un peu de délire et quelques phéno- 
mènes cérébraux survenus la nuit suivante firent craindre 
que la dose de l'extrait ne fût trop élevée. En conséquence, 
on recomposa des lavements avec un demi-grain au lieu 


93 


de deux grains ; puis, au lieu de trois lavements, il fut con- 
venu qu’on n’en donnerait que deux, un le matin, l’autre le 
soir. Deux jours après, les douleurs avaient cessé, Ie ventre 
était libre, et bientôt le malade entra en convalescence. 

» Au bout de quatre mois, nouvelle attaque : 15 grains 
d’extrait de belladone injectés en dix fois, dans l’espace de 
trois jours, font disparaître tous les symptômes. Enfin ce 
double succès devait avoir la consécration de la contre- 
épreuve, dans une circonstance malheureusement fatale au 
malade. Quelques jours à peine s'étaient écoulés que le 
pauvre homme mourut à la suite d'une attaque semblable 
aux précédentes, et contre laquelle le médecin appelé 
persista à faire administrer les Jaxatifs, au lieu de lui 
prescrire les calmants. » (Journal de Médec. et de Chirurg. 
pratig., page 197.) 

Tout porte à croire, par analogie , que la belladone peut 
.être employée avec suceès en lavements et en frictions sur 
l'abdomen dans les coliques nerveuses quelconques, le 
volvulus, la colique saturnine, l’invagination intestinale, les 
épreintes et le ténesme qui accompagnent la dyssenterie, 
etc. ; ainsi que je l’ai dit, on peut en espérer d’heureux effets 
dans le tétanos. 

Le docteur Magistel (Gazette Médicale, décembre 1834, 
page 817) préconise l'emploi des fumigations de feuilles de 
belladone dans le traitement de l'asthme. Sur cinq malades 
traités par ce moyen, quatre ont guéri, et le cinquième, 
vieillard âgé de 75 ans, a éprouvé de l'amélioration. 

J'ai apaisé comme par enchantement des migraines très- 
intenses en mettant dans l'oreille du coton imbibé de tein- 
ture de belladone , et en frictionnant à diverses reprises la 
partie douloureuse avec cette même teinture. On peut aussi 
dans ce cas appliquer l'extrait de cette plante. M. Piorri, 
qui attribue la migraine à une névrose de l'iris, fait faire des 
frictions sur les paupières avec l'extrait de belladone mêlé 
avec une suffisante quantité d'eau pour lui donner une con- 
sistance sirupeuse. Je l'ai employé une fois de cette manière 
avec succès. 

D'après les faits que nous venons de rapporter, il sera 
facile au praticien de juger de tous les cas qui réclament 
l'emploi de la belladone. Il est une foule de circonstances 
où ce précieux médicament peut être de la plus grande 
utitité. {Voy. Supplément, page 609.) 


94 


BÊNOITE, 


BENOÎTE GARYOPHYLLÉE, HERBE DE SAINT-BENOÎT. 


Caryophillata vulgaris (T.} 
Geum urbanum (L.) 


On trouve communément la benoîte dans les bois, lelong 
des chemins, dans les lieux ombragés. La racine seule est 
usitée. 

Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. 
d’eau. 

Teinture (4 sur 8 d'alcool), de 15 à 30 gram., en potion. 

Vin (4 sur 12 de vin), de 30 à 60 gram. 

Poudre, 4 à 8 gram., en substance, pilules, etc. 

Extrait, 2 à 4 gram., en pilules ou dans du vin. 


Propriétés. 


La racine de benoîte, astringente, tonique, d’une odeur 
agréable, d’une saveur chaude, aromatique et un peu amère 
et âpre, a été employée contre les diarrhées chroniques , la 
dyssenterie atonique, les métrorrhagies passives, les catar- 
rhes, les leucorrhées et quelques fièvres intermittentes. 

Entre l’enthousiasme de Buchlave, médecin danois ; de 
Weber, de Gilibert, et le dédain de Brandelius et de beau- 
coup d’autres médecins , il n’y avait qu'un parti à prendre, 
celui de l’expérimentation. Je déclare ici avoir employé la 
racine de benoîte comme fébrifuge sans succès ; mais je l'ai 
quelquefois associée à l'écorce de saule, à cause de ses qua- 
lités aromatiques et astringentes. Voici la formule que j'em- 
ploie, d'après Bouillon-Lagrange : 

Racine de benoîte. . . . 
Ecorce de saule blanc. . 
Faites bouillir dans 1 litre 1/2 d’eau réduite à 400 gram. 

Ajoutez : Hydrochlorate d’ammoniaque, de 1 à 2 gram. 

Sirop d’écorces d'orange, 50 gram. 

A donner en deux fois au malade, à une heure de dis- 

tance : ce mélange m'a réussi. 


l 80 grammes. 


BETOINE. 
Betonica purpurea (T.) 
Betonica officinalis (L.) 
On 1rouve cette plante dans les endroits ombragés, les 
tillis, les prairies. Elle est vivace. Les racines, les feuilles 
et les fleurs sont usitées. 


PR 


9 


Préparations et doses. 
A. L'INTÉRIEUR : Infusion, de 5 à 20 gram. par kilog. d'eau. 
Eau distillée, 50 à 100 gram. 
Poudre, 1 à 5 gram. 


A L'EXTÉRIEUR : Comme sternutatoire. 


Propriétés. . 


La bétoine est excitante. La racine, plus particulièrement 
émétique et purgative, est peu employée. Les feuilles et les 
fleurs le sont davantage, comme sternutatoires et.à la ma- 
nière du tabac, dans la céphalalgie, l'hémiplégsie, etc. Je 
n'ai jamais essayé l’emploi de la bétoine à. Fintérieur. 
Elle a, dit-on, été administrée comme fébrifuge dans les 
fièvres intermittentes automnales, à la dose de 3 à 6 gram. 
de feuilles en poudre, dans un jaune d’œuf, quatre heures 
après la fin de l'accès. Cette dose nous paraît propre à pro- 
duire une violente révulsion. 


BETTE,. 


BETTE-RAVES (DEUX ESPÈCES). 


4° Bette ou poirée blanche, joutte.— Beta cycla. 
2° Bette commune. — Bette-rave champêtre. 
Beta vulgaris. 


Ces deux espèce sont cultivées dans les jardins et dans 
les champs. On emploie la racine et les feuilles. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction, de 400 à 200 gram. par kilog. d'eau. 
Suc, 50 à 100 gram. 


A L'EXTÉRIEUR : Décoction, pour lavements, lotions. 
Feuilles, pour pansement des vésicatoires. 


Propriétés. 


Elles sont émollientes, rafraîchissantes, souvent utiles 
dans les affections chroniques de poitrine, les irritations 
gastro - intestinales , les entérites ; plus souvent employées 
comme condiment et pour la fabrication du sucre indigène. 
Les feuilles sont mises en usage dans le pansement des 
yésicatoires. 

On substitue souvent, dans la médecine rurale, le miel ou 
la racine de réglisse au sucre ou au sirop pour édulcorer les. 
préparations pharmaceutiques. 


56 
BISTORTE, 


BISTORTE COMMUNE. 


Bistorta (T.; 
Poligonum bistorta (L.) 


Cette plante est commune dans les pâturages et les prés. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau. 
Macération, de 45 à 50 gr. par kilog. d’eau froide. 
Extrait, de 1 à 4 gram., en potion, bols, pilules. 
Poudre, de 2 à 10 gram., en bols, pilules ou en substance dans 
du vin. 
Suc, de 20 à 50 gram., pur ou mêlé avec du vin. 


Propriétés. 


La racine de bistorte est un puissant astringent ; à petite 
dose elle agit seulement sur l'estomac, tandis qu’en quan- 
tité suffisante elle agit sur tous les appareils organiques. 
Elle réussit contre les flux muqueux, les hémorrhagies pas- 
sives, les écoulements de l’urètre, les leucorrhées, les diar- 
rhées, la dyssenterie, après avoir combattu les symptômes. 
inflammatoires et dans la période d'atonie. 

J’emploie la racine de bistorte avec autant d'avantage que 
celle de ratanhia. Elle à constamment répondu à mon 
attente dans les eas d'hémorrhagies passives. Je l’ai admi- 
nistrée avec beaucoup de succès dans un melæna très-grave, 
chez une fille de 27 ans, déjà affaiblie par une gastro-enté- 
rite chronique. Je la faisais prendre en décoction rappro- 
chée et à petites doses fréquemment répétées. La guérison 
était complète le douzième jour. Unie à l’absynthe et à la 
racine d’aunée en macération dans le vin blanc, elle m'a 
réussi contre les leucorrhées sans irritation. Je fais prendre 
deux à quatre onces de ce vin par jour, 

[Cullen donnait la racine de bistorte en poudre,mêlée avec 
autant de poudre de racine de gentiane, comme fébrifuge, 
à la dose de 4 à 12 grammes par jour. Ce mélange peut 
être fort utile non-seulement dans les fièvres intermittentes, 
mais aussi dans tous les cas où les toniques fixes sont indi- 
qués.] ( 

A l'extérieur , je l'ai essayée en décoction dans un cas de 
fissure à l’anus. Elle a amené une amélioration marquée sans. 
opérer la guérison. L’emploi de la racine de ratanhia dans 
ce cas m'avait conduit à celui de la racine de bistorte. Je ne 
doute pas qu’on ne parvienne à obtenir, par l'usage de cette 


97 


dernière, les mêmes résultats. [La décoction de racine de 
bistorteen gargarisme raffermit les gencives et déterge les 
aphtes.] 


BOUILLON-BLANC, 


MOLÈNE, BONHOMME, HERBE DE SAINT-FIACRE. 


Verbascum mas laitfolium luteum (T.) 
Verbascum thapsus (L.) 


Cette plante croît abondamment en France, dans les en- 
droits pierreux, sur les bords des chemins, dans les dé- 
combres et les ruines. On se sert des feuilles et des fleurs. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : [nfusion, de 40 à 30 gram. par kilog. d'eau. 
Macération, de 8 à 45 gram. par kilog. d’eau froide. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau, 
pour lotions, fomentations. 
Feuilles, quantité suffisante pour cataplasmes. 


Huile ( 4 de fleurs sur 2 d'huile d'olive), q. s. pour lotions, am- 
brocations, frictions. 


Propriétés. 


Les feuilles et les fleurs sont pectorales, adoucissantes, 
antispasmodiques, émollientes. Elles conviennent dans les 
inflammations gastro-intestinales, le catarrhe pulmonaire, 
la toux , le crachement de sang, la phthisie. On a vanté le 
bouillon-blanc contre Ja diarrhée, la dyssenterie, la difi- 
culté d’uriner. En topique les feuilles peuvent être utiles 
dans les douleurs hémorrhoïdales, dans les inflammations 
externes. 


Le bouillon-blanc est un remède tout-à-fait domestique 
et généralement mis en usage, soit intérieurement, soit ex- 
térieurement, par les habitants des campagnes, dans tous les 
eas où les émollients et les adoucissants sont indiqués. Il 
est plus adoucissant que les autres émollients. Je Fai em- 
 ployé avec beaucoup de succès en lavements dans les diar- 
rhées avec coliques et ténesme. Les feuilles bouillies dans du 
lait, et appliquées en cataplasme sur les hémorrhoïdes dou- 
loureuses, apportent du soulagement. J'ai souvent mêlé à 
ce cataplasme autant de feuilles de jusquiame noire. La 
fomentation de bouillon-blanc et de semence de jusquiame 
cuite dans l’eau a guéri une douleur d’hémorrhoïdes insup- 
portable, au rapport de Forestus. Mais dans ces cas la jus- 


58 


quiame l'emporte en efficacité sur le bouillon-blanc, qui 
n'est plus qu’un auxiliaire peu énergique. 

C’est surtout dans les affections du tube intestinal et danS 
celles des voies urinaires, à l’état aigü, que j'administre la 
décoction ou l’infusion des fleurs de bouillon-blanc. Elle 
rend les urines limpides et abondantes. La décoction des 
feuilles en lavements peu volumineux, et fréquemment ré- 
pétés, est employée concurremment. J’use fréquemment 
aussi de la décoction des fleurs dans les affections de poi- 
trine, soit avec le suc de réglisse, soit avec du miel. 


[Il est nécessaire de passer l’infusion de bouillon-blanc 
avant de la prendre; parce qu'il existe sur les fleurs de petits 
poils qui, s’arrêtant à la gorge, pourraient causer de l'irri- 
tation et provoquer la toux. Cette remarque paraîtra minu- 
tieuse à ceux qui, peu familiarisés avec la pratique, ne 
savent pas combien la médecine, riche en principes et en 
aperçus généraux, manque de détails utiles dans l’applica- 
tion.] 


BOURRACHE. 


Borrago floribus cœruleis (T.): 
Borrago officinalis (L.) 


Cette plante annuelle se cultive dans les jardins, où elle- 
se propage avec une extrême facilité. Les feuilles et les: 
fleurs sont usitées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction, 50 à 60 gram. par kilog: 
d'eau. 
Suc exprimé, 50 à 400 gram. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction, 50 à 100 gram, par kilog. d’eau bouil: 
lante, pour fomentations, fumigations, etc. 


Propriétés. 


La bourrache est émolliente, légèrement sudorifique et: 
diurétique, fréquemment employée dans le catarrhe, la 
pneumonie, et dans un grand nombre d'affections inflamma- 
toires et éruptives (rougeole, variole, scarlatine miliaire),. 
les fièvres bilieuses, etc. 

Cette plante est très - souvent employée à la campagne, à 
cause de la facilité que l’on a de se la procurer. La décoction 


ri its 


59 


miellée convient surtout dans les bronchites et les affections 
éruptives aigües. 


BOURGÈNE, 
BOURDAINE, AUNE NOIR, BOURDAINIER. 


Frangula dodonœi seu integrifolia (T.) 
Rhamnus frangula (L.) 


La bourgène vient abondamment dans les taillis, les haies 
et les terrains frais du nord de la France. L’écorce est 
usitée, et on à aussi employé quelquefois les baïes. 


Préparations ef doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction des racines, 50 à 60 gram. 
par kilog. d'eau. 
Sirop (14 sur 2 de sucre), de 50 à 60 gram., en potion. 
En substance, triturée avec un mucilage, 1 à2 gram. 


Propriétés. 


L’écorce moyenne, jaune, inodore, d’une saveur amère, 
sLyptique, nauséabonde, vomitive quand elle est fraîche, 
purgative quand elle est sèche, peut être employée avec 
avantage dans quelques cas, surtout chez les indigents, à 
cause de la facilité que l’on a de se la procurer. 


J’ai donné plusieurs fois l'écorce de bourgène à la dose 
de 2 grammes, triturée longtemps avec le mucilage de gui- 
mauve ou de graine de lin, et réduite en pilules. Elle a 
toujours produit un effet purgatif régulier. Un garçon de 
douze ans a rendu par ce remède, pris à la dose de 1 gram., 
une grande quantité de vers lombrics. Gilibert rapporle qu il 
a vu rendre un ver solitaire par l'action de cetie écorce. 
Roques indique depuis 2 gros jusqu'à demi-once (8 à 16 
gram.) de l'écorce de bourgène sèche et concassée, bouillie 
dans quantité d’eau suffisante pour obtenir 20 onces (620 
gram.) de decoctum édulcoré avec un sirop agréable ; on en 
donne 4 onces (120 gram.), répétées plusieurs fois le jour. 
Je l'ai administrée de cette manière chez un cultivateur 
atteint d'anasarque par suite de fièvres intermittentes né- 
gligées. Elle a produit des évacuations répétées qui ont 
SRRRUE promptement l'infiltration cellulaire. A cause de 

état de débilité du sujet, j'ai discontinué l'usage de ce 
A pour achever la guérison au moyen d’un vin diuré- 


60 


tique amer, que je prépare avec l'absynthe, la cendre de 
genêt et le vin blanc. 


Les baies, que l’on regarde aussi comme purgatives, sans 
doute à cause de leur analogie avec celles du nerprun, n’ont 
point cette propriété. J'en ai vu manger par des enfants, en 
assez grande quantité, sans qu'aucun effet ait été produit. 
Cette remarque avait déjà été faite par quelques auteurs. 


[L’écorce de bourgène bouillie dans: une très-petite quan- 
tité d’eau, ou pilée avec du vinaigre, a été employée exté- 
rieurement avec avantage contre la gale et certaines affec- 
tions dartreuses invétérées.] 


BOURSE-A-PASTEUR, 
BOURSETTE, MOLETTE A BERGER. 


Bursa pastoris (T.) 
Thlaspi bursa pastoris (L.) 


Cette plante est très-commune partout. L’herbe entière 
est usitée. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction, de 30 à 60 gram. par kilog. d’eau. 
Suc exprimé, 50 à 400 grani. 


Propriétés. 


La boursette est astringente et peut être employée dans 
les diarrhées, les dyssenteries, les hémorrhagies passives, 
lorsque l’on ne veut produire qu’une astringence modérée 
et graduée, pour ensuite faire usage d'astringents plus 
actifs. Dioscoride la vante contre l'hémoptysie. 


On trouve dans un journal allemand (Medicimasche 
Zeitung) un article de M. Lange qui prouve que la 
bourse-à-pasteur a rendu d'éminents services dans beau- 
coup de cas de métrorrhagie passive et de menstrua- 
tion surabondante chez des” personnes d'une constitution 
faible et d’un tempérament lymphatique. Voici com- 
ment M. Lange administre ce médicament: on fait 
bouillir une demi-poignée de la plante entière dans trois 
tasses d'eau, jusqu'à réduction d'un tiers. Le malade en 
prend une tasse à la fois. Or, il arrive qu ‘au bout d’une 
heure l’hémorrhagie diminue à ce point qu ‘il devient inutile 
de recourir à une "seconde tasse. S'il s ‘agit d’une menstrua- 


. 
À 
3 
| 
J 
- 


6t 


tion trop abondante, M. Lange parvient souvent à modérer 
l'écoulement sanguin, et même à le prévenir, en adminis- 
trant le médicament dès le début. Il suffit, en général, d’user 
de cette médication à deux ou trois époques menstruelles, 
pour qu'après cela le flux périodique reparaisse dans des 
conditions normales. M. Lange croit d'ailleurs devoir ob- 
server que la bourse-à-pasteur n’a donné lieu à aucun 
accident, et qu’elle s’est montrée utile alors qu’on avait 
employé inutilement les astringents de toute nature. (Jour- 
mal de Médecine et de Chirurgie pratiques , année 1844, 
page 363.) 


—— 


BRIONE où BRYONE, COULEUVRÉE, 
VIGNE BLANCHE, NAVET GALANT, NAVET DU DIABLE. 


Bryonia aspera sive alba (T.) 
Bryonia dioica (L.) 


Cette plante vivace. extrêmement commune dans presque 
tous les climats, croît principalement dans les haies. On 
emploie la racine et quelquefois les jeunes pousses. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Décoction, de 45 à 50 gram. par kilog. d'eau. 
Sirop (5 de suc sur 4 de sucre), de 30 à 50 gram., en potion 
ou seul. | 
Vin (4 de racine fraîche sur 46 de vin blanc), de 50 à 400 gram., 
selon l'effet que l’on veut produire. 
Suc, de 4 à 12 gram., dans un bouillon ou tout autre véhicule, 
souvent dans l’eau miellée. 


Extrait, de 25 à 75 centigrammes. 3 
Poudre, de 50 cent. à 4 gram., en bols, pilules, selon l'effet que 
l'on désire. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction, q. s. pour lotions, fomentations, 
lavements. 


Pulpe et suc, seuls ou avec mie de pain, farine, etc., pour cata- 
plasmes résolutifs, vésicants. 


Propriétés. 


La racine de bryone est incisive, fondante, vomüive, pur- 
gative et diurétique. Administrée récente et à forte dose, 
elle devient un drastique puissant, un irritant énergique. 
Cette racine, quipeut remplacer l’ipécacuanha, le jalap et le 
séné, abeaucoup d’analogie avec celle d’arum. On peut en 


62 


extraire, comme de cette dernière, une fécule fine et blanche, 
susceptible de fournir une substance alimentaire très-utile 
dans les cas de disette. On l’a employée dans les hydro- 
pisies, la dyssenterie, les fièvres muqueuses et vermineuses 
continues ou intermittentes, les affections catarrhales aigües 
ou chroniques , la coqueluche, la pneumonie bilieuse , la 
rougeole, la variole, etc. 

Comme en Allemagne et en Suède, j'ai vu des cultivateurs 
de nos contrées creuser les racines de bryone fraîche pour 
en faire un gobelet qu’ils remplissaient de bière , laquelle, 
dans l’espace d'une nuit, devenait émétique et purgative. 

J'ai souvent employé le vin de bryone préparé avec 50 à 
60 gram. de racine sèche dans un kilog. de vin blanc. Ce 
vin, à la dose d’une once (30 gram.) à deux onces (60 gram.), 
est diurétique et un peu laxatif, etconvient dans l’anasarque. 
J'ai fréquemment mêlé autant de vin de bryone que de vin 
d'absynthe avec avantage dans le même cas, et surtout dans 
les cachexies qui suivent les fièvres intermittentes. Ce mé- 
lange convient aussi contre les affections vermineuses. Le 
vin de bryone, à la dose de 60 à 100 gram., est éméto-cathar- 
tique et même drastique. C'est surtout à cette dose qu’il con- 
vient dans les hydropisies où les diurétiques sont nuls ou 
insuffisants. Le sieur Dubois, couvreur en paille, âgé de 44 
ans, était devenu Jeucophlegmatique à la suite d’une fièvre 
double-tierce négligée pendant l'été de 1846. Je vis ce ma- 
Jade vers le mois de novembre de la même année : ilétait 
enflé de tout le corps ; sa respiration était difficile et sem- 
blait annoncer de l’épanchement séreux, bien que l’anseul- 
tation et la percussion ne l’annonçassent nullement.La gêne 
du mouvementrespiratoireétaitdue à la compression résultant 
de l'infiltration séreuse générale. Je mis le malade à l'usage 
de la digitale à 4’iniérieur. Je fis pratiquer des frictions à la 
partie interne des cuisses et sur l'abdomen avec la teinture 
de digitale et de scille. L’infusion de baies de genièvre fut 
prescrite pour boisson. Ces moyens, continués pendant dix 
jours, n’amenèrent aucun changement. Les urines n'aug- 
mentèrent point en quantité. Je fis prendre l’acétate de po- 
tasse liquide uni à la teinture de digitale et de scille, avec 
tout aussi peu de succès. Un vin préparé avec la cendre de 
genêt à balai (carbonate de potasse) ne produisit pas plus 
d'effet. Je pris alors le parti de mettre en usage un dras- 
tique, et je choisis de préférence la racine de bryone in- 
fusée dans lé vin blanc. Bien que cette racine fût sèche 
avantson infusion , elle n’en produisit pas moins un bon 
effet ; 80 gram. de ce vin provoquèrent trois vomissements 


63 


et quinze selles abondantes ei séreuses. Trois joursaprès, la 
même dose fut répétée et produisit le même effet. Dans l'in- 
tervalle je faisais prendre le même vin, à la dose de 30 gram. 
matin et soir. Üne diurèse des plus abondantes eut lieu. 
Après quinze jours de ce traitement, le malade était com- 
plètement désenflé. Le vin d'absynthe, continué pendant 
quelques jours, compléta le rétablissement. Aucune récidive 
n’eul lieu. 

Je pourrais citer un grand nombre de cas analogues où 
la racine de bryone a été employée avec succès, soit à dose 
diurétique, soit à dose cathartique ou drastique , selon les 
indications. J’administre le suc de racine de bryone à la 
dose de 8 à 12 gram. dans une décoction de racine de gui- 
mauve. | 

Un à deux grammes de racine de cette plante, en poudre 
et délayée dans un verre d’eau, est un vomitif qui convient 
aux constitutions délicates , et que j’ai administré plusieurs 
fois ; mais je lui préfère l’asaret, comme plus fidèle. 

Dans l'asthme humide, dans les affections catarrhales, dans 
la coqueluche, ce médicament m’a paru aussi efficace que le 
kermès pour faciliter l’'expectoration, Dans toutes les affec- 
tions chroniques de la poitrine où les expectorants sont in- 
diqués , je donne la racine de bryone en oximel , à la dose 
d’une ou deux cuillerées, de deux heures en deux heures. 
Je prépare ainsi cet oximel : je prends une once et demie 
de bryone concassée (45 gram.), une livre de miel (1/2 kilog..) 
et une livre et demie de vinaigre (750 gram.); on fait bouillir 
pendant une demi - heure, et on coule. J'administre quel- 
quefois, pour remplir la même indication, et par petites 
demi-cuillerées, un mélange de 4 gram. de bryone et de 
120 gram. de miel. 

La bryone est celui des drastiques qui mérite Ja préfé- 
rence, dit Desbois de Rochefort. Reussner dit avoir guéri 
plusieurs enfants épileptiques en les purgeant avec le suc 
de racine de bryone deux fois par semaine. Ces faits prou- 
vent seulement que dans certains cas les purgatifs convien- 
nent pour combattre l’épilepsie, mais ne démontrent aucune 
propriété spéciale contre cette maladie. Il est à remarquer 
que la bryone est vermifuge , et que l’épilepsie reconnait 
quelquefois pour cause la présence des vers dans les in- 
testins. | s 04 

[Aucun médecin n'a mieux étudié les effets de la racine 
. de bryone que Harmand de Montgarny, médecin de Verdun. 
Les avantages qu'il en a retirés, l'ont porté à lui donner le 
nom d'ipécacuanha,européen. Ce médecin l’a employée avec 


64 


succès dans Ja dyssenterie épidémique (Nouveau Traitemént 
des maladies dyssentériques , à l'usage du peuple indigent, 
1783), dans toutes les maladies que nous avons désignées, 
et surtout dans les affections catarrhales, Ja pneumonie 
bilieuse, la rougeole, la variole, etc. (Ancien Journal de 
Médecine, année 1788, août, page 250.) Dans ces derniers 
exanthèmes, après avoir fait vomir avec la bryone avant 
l'apparition de l'éruption, il faisait donner, jusqu’au moment 
de la desquamation, du lait de vache, que l'on coupait avec 
partie égale d'une déeoction de 2 grammes de bryone dans 
une livre d'eau, édulcorée avec un peu de sucre, et dont 
le malade prenait sept ou huit verres par jour. Cette boisson 
excite une diaphorèse légère et active la sécrétion des urines. 
Je l'ai administrée avec avantage vers la fin de l’arthrite 
aigüe, lorsque les articulations restent engorgées et peu 
douloureuses. J’ai aussi, dans ces derniers cas, employé la 
poudre de racine de bryone à dose altérante, et quelquefois 
j'en fais des pilules avec l'extrait de pavot blanc. Admi- 
nistrée ainsi , elle m’a tenu lieu de poudre de Dover.] 

A l'extérieur, j'ai souvent appliqué la pulpe de racine de 
bryone sur les engorgements glanduleux et dans 1ous les 
cas où de puissants résolutifs sont nécessaires. Ce topique a 
dissipé une hydarthrose chez un jeune homme de 17 ans. 
Je produisais sur Ja partie une rubéfaction qui se dissipait 
assez promptement pour me permettre de réitérer au bout 
de deux jours. A la fin, des phlictains ont eu lieu. La réso- 
lulion s’est opérée en quinze jours. 

Je me suis quelquefois servi de petites tranches semi- 
lunaires de racine de bryone pour appliquer derrière les 
oreilles des enfants, afin de rappeler une exsudation salu- 
taire pendant la dentition. En friction elles rubéfient la peau. 

Ainsi, cette plante, qui croît dans nos champs, peut 
être très-utile dans une foule de cas. Le médecin de cam- 
pagne doit en faire un fréquent usage. Elle peut remplacer 
les autres vomitifs, les purgatifs et diurétiques les plus 
énergiques. Il suffit de la manier avec prudence et d'en 
faire une judicieuse application. 

Pour conserver à la racine de bryone ses propriétés, lui 
enlever son odeur vireuse et la dépouiller de ses principes 
les plus âcres, on la prépare de la manière suivante : on fait 
arracher cette racine en automne , lorsque la tige est sèche 
et la baie bien müre, ou même pendant l'hiver, jusqu'au 
moment où elle jette sa pousse au commencement du prin- 
temps ; on Ja lave, on la coupe en rouelles minces, que l'on 
fait sécher à l'ombre, en les étendant sur des claies d’osier, 


65 


ou mieux, en les suspendant après les avoir enfilées en 
forme: de chapelet, de manière que les rouelles soient un 
peu espacées entre elles.] 


BRUNELLE, 


PETITE CONSOUDE. ; 


Brunella major (T.; 
Bruneila vulgaris (L.) 


Cette plante est très -commune dans les prés. L’herbe 
entière est usitée. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : En décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. d’eau. 
Suc exprimé de ses feuilles, de 60 à 90 gram. 


Propriétés. 


La brunelle, un peu amère, est astringente, détersive. 
On l’employait autrefois dans les hémorrhagies , les diar- 
rhées chroniques, les gargarismes détersifs, etc. 


M. H***, professeur de rhétorique , âgé de 42 ans, était 
atteint depuis plus de quinze ans d’hémorrhoïdes volu- 
mineuses, très-incommodes et souvent très-douloureuses. 
Elles étaient assez rarement fluentes, mais presque toujours 
accompagnées d’une excrétion muqueuse plus ou moins 
abondante. Ayant employé beaucoup de moyens pour ob- 
tenir du soulagement, il lui fut conseillé par un homme de 
la campagne qui s'était trouvé dans le même cas, de man- 
ger en salade, tous les jours, une certaine quantité de 
feuilles de brunelle , assaisonnées, comme pour les autres 
préparations du même genre, de sel, d'huile et de vinaigre. 
M. H**** mangea à ses repas de cette salade au lieu de celle 
de laitue, dont il faisait usage fréquemment. Au bout de cinq 
à six jours de l'emploi de ce remède,il éprouva du soulage- 
gement. Il continua ; après dix à douze jours, le paquet hé- 
morrhoïdal était notablement diminué. Au bout de vingt- 
cinq à trente jours il était presque entièrement affaissé. 
Depuis trois ans M. H*** réitère son traitement chaque 
année, Les deux premières fois qu ‘il mangea de cette 
salade , il éprouva un sentiment pénible de “pesanteur à 

l'épigastre ; il n’en fut ensuite nullement incommodé. Un 
seul fait ne pouvant suffire en médecine pour établir une 
vérité pratique, je me propose d'essayer ce moyen quand 


66 


l'occasion se présentera et que rien ne s’opposera à la cure 
d’une maladie qu'il est souvent dangereux de guérir, mais 
que l’on peut toujours modérer, afin de la rendre suppor- 
table. 


BUGLE, 


Bugula dodonœi (T.) 
Ajuga reptaus (L.) 


Cette plante est très-commune dans les prés et les bois. 
C’est un léger astringent qu’on a dit utile dans les hémor- 
rhagies, les dyssenteries, les crachements de sang, les ulcéra- 
tions de la bouche, etc. Elle agit à peu près comme la 
brunelle, et s’administre de la même manière. 


BUGLOSSE. 


Buglossum augustifolium majus (T.) 
Anchusa officinalis (L.) 


Cette plante, qui a la plus grande analogie avec la bour- 
rache, se trouve dans les lieux incultes. Les feuilles et les 
fleurs sont usitées. Le mode d'administration et les proprié- 
tés sont les mêmes que ceux de la bourrache. 


BUIS. 


Buxus arborescens (T.) 
Buxus sempervirens (L.) 


Spontané sur les collines pierreuses des départements mé- 
ridionaux, en Italie, en Suisse et en Espagne, le buis est 
cultivé dans nos jardins. On utilise le bois, les feuilles et 
les racines. | 

Préparations et doses. 
À L'INTÉRIEUR : Infusion, de 45 à 100 gram. par kilog. d'eau 
bouillante ou de vin (râpure du bois). 

Feuilles en poudre, 4 gram. 

Extrait, (2 d’écorce de racine sur 7 d'alcool à 24°), de 5 à 20 gram. 

Huile, de 20 à 50 cent., en potion. (Blennorrhée.) 


Propriétés. 
Le buis est un excitant sudorifique qu’on a préconisé 


67 


contre la goutte, les affections rhumatismales chroniques, 
les maladies syphilitiques secondaires et tertiaires. Les 
feuilles ont été employées comme purgatives, fébrifuges, etc. 
Amatus Lusitanus (Cur. med. cent. 2, cur. 95) a guéri, au 
moyen de ce médicament, un jeune homme dont les symp- 
tômes vénériens avaient résisté cinq fois aux frictions mer- 
curielles. 

Gilibert, Macquart, Roques, Bodart, Biett, prescrivirent 
Ja râpure du bois ou de la racine de buis, à la dose de 30 à 
60 grammes, bouiliie dans un kilog. d’eau ou infusée dans la 
même quantité de vin, comme pouvant remplacer le 
gayac. | 

Rocques indique particulièrement 306 gram. de racine râ- 
pée, à bouillir dans un kilog. d’eau réduit à moitié, pour trois 
doses qu’on fait prendre dans le jour. C’est ainsi que je l'ai 
employée chez un manouvrier atteint d’arthrite chronique, 
suite d’un rhumatisme aigu articulaire mal soigné. Ce ma- 
lade avait des articulations plus ou moins engorgées et dou- 
loureuses, alternativement l’une ou l’autre, avec plus d’inten- 
sité, depuis près de trois ans. Îlse présenta chez moi au prin- 
temps de 1834; il était âgé de 48 ans, d’un tempérament 
Jymphatico-sanguin, affaibli par le chagrin que lui causait 
son état impotent et la misère qui en était le résultat. Je 
lui procurai quelques secours et le mis de suite à l’usage de 
la décoction que je viens d'indiquer. Elle réussit au-delà de 
mes espérances. Au bout de huit jours, le soulagement 
était marqué, bien que la transpiration ne fût pas sensible- 
ment augmentée. Je conseillai de prendre les trois doses 
à jeun et de rester au lit jusqu’à dix heures du matin. 
L'amélioration se prononça de plus en plus ; l'engorgement 
articulaire se dissipa graduellement, et après deux mois de 
traitement il n’en restait aucune trace. Le malade, complè- 
tement rétabli, put travailler à la moisson pendant tout l’été 
sans éprouver la moindre récidive. Je lui fis porter une che- 
mise de laine sur la peau l'hiver suivant ; car, ainsi que tous 
les praticiens ont été à même de l'observer, aucune maladie 
n’est plus sujette à récidiver que le rhumathisme articulaire 
chronique, lors même. qu’il n’en reste aucune trace appa- 
rente. 

Dans un autre cas analogue à celui que je viens de rap- 
porter, et qui eut lieu chez un individu âgé de 58 ans, habi- 
tant une chaumière humide, je n’ai pu obtenir par le même 
traitement qu'un soulagement momentané. Si ce malade avait 
été placé dans des conditions hygiéniques plus favorables, 
Peut-être eût-il eu le même bonheur. 


68 


Les feuilles de buis ont été proposées comme purgatives, 
à la dose de 4 grammes, en poudre, par Vogel et Puyhn. 
Je n'ai point essayé ce moyen, à cause de la facilité que j'ai 
toujours eu de me procurer des purgatifs indigènes d'un 
effet constaté par l'expérience, et sur lesquels je n'avais à 
observer que leur plus ou moins d'action pour faire un 
choix. L’extrait alcoolique, fait avec les feuilles et la racine 
de buis, est, suivant M. Rattier (Dict. de méd. et de chir. 
prat.), un purgalif énergique. 


BUSSEROLE, 


BOUSSEROLE, RAISIN D OURS, ARBOUSIER. 


Uva ursi (T.,) 
Arbutus uva ursi (L.) 


On rencontre cette plante dans le midi de la France, 
principalement sur les montagnes de la Provence et du 
Dauphiné. (Dans les lieux élevés, ombrageux, stériles.) 
Les feuilles, l'écorce et les baies sont usitées, 


Préparations et doses. 
À L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction, 8 à 45 gram. par kilog. 


. 


d'eau. 


Extrait (4 sur 7 d’eau), 4 à 2 gram., en potion, bols, pilules. 
Poudre, de 4 à 4 gram., en bols, pilules. 


Propriétés. 


La busserole est astringente, excitante, diurétique. Elle 
est employée contre la gravelle, le catarrhe chronique de Ia 
vessie, la blennorrhagie, la leucorrhée, la diarrhée atonique, 
l'albuminurie, l'engorgement de la prostate, etc. 


Je n'ai rien observé de particulier sur les propriétés de 
cette plante. Je l'ai employée, comme tous les praticiens, 
dans les tisanes diurétiques. J'ai eu soin de m’assurer qu'il 
n'existait aucun signe d’inflammation, avant de la mettre 
en usage. Cullen dit qu’elle modère les symptômes de la 
pierre. Kleyskens l'a employée avec succès dans la cystirrhée. 


[« Un journal hollandais rapporte que le docteur Sommers, 
chirurgien à Leyde, a cherché à réhabiliter l'usage de l’uva 
ursi, ou busserole, qui pendant longtemps a été employé 
dans le traitement de diverses affections des voies urinaires. 
Cette plante a été administrée à trois malades, et avec le 


69 


succès le plus complet. L’un d’eux, âgé de 75 ans, affecté 
d’épiplocèle et d'hydropisie scrotale, se trouvait, à la suite 
d'un refroidissement, dans l'impossibilité de rendre ses 
urines ; une saignée du bras fut pratiquée, et M. Sommers 
sonda le malade , mais avec difficulté, la prostate étant très- 
volumineuse. Pendant un mois divers moyens furent em- 
ployés, mais sans succès, lorsqu'on recourut enfin aux 
feuilles de busserole de la manière suivante : 
Pr. feuilles de busserole pulvérisées . . 2 gros. 

Camphre en poudre . . . . . . . . 6 grains. 

SAUCE DANC? 2 net MORE 

» Mêlez et faites douze paquets, à prendre un paquet 
quatre fois dans la journée. 

» Deux jours après, le malade se trouvait déjà notable- 
ment mieux; il urinaït naturellement, et l'engorgement de 
la prostate paraissait sensiblement diminué. Au bout d'une 
quinzaine de l'emploi de la busserole sans camphre, la gué- 
rison était complète. 

» Chez le second malade, également avancé en âge, 
l'uva ursi fut prescrit en infusion, à la dose de 2 gros par 


jour. Deux semaines suflirent pour amener une guérison 
complète. 


» Enfin le troisième malade était un garçon de ferme qui 
avait depuis deux ans une incontinence d'urine. On mélan- 
gea parties égales de poudre de feuilles d’uva ursi et de 
sucre blanc (4% gros de chaque), et l’on divisa en vingt- 
quatre paquets égaux. Le malade devait en prendre un 
toutes les trois heures. 

» Au bout de trois semaines, l’incontinence d'urine avait 
entièrement disparu. (Journal de Médecine et de Chirurgie 
pratiques, tome XVIII, 1847, page 490.) 

Le célèbre Barthez, atteint de la pierre, et ne voulant 
pas se faire opérer, crut pouvoir calmer ses souffrances par 
l'usage de la busserole, à laquelle il attribuait la propriété 
de diminuer sympathiquement l’irritation de la poitrine par 
son action sur la vessie : il croyait ainsi combattre à la fois 
deux affections dont il était atteint ; lorsqu'il se décida à se 
faire opérer , il était trop tard. Sa confiance dans les vertus. 
de l’uva ursi lui à été fatale. 

Suivant MM. Merat et Delens, on donne souvent dans les 
pharmacies, pour des feuilles de busserole, la plante connue 
sous le nom de vaccinium vitis 1dæa, qui ne possède au- 
eune des propriétés de l’uva ursi. Cette substitution frau- 


duleuse peut expliquer la diversité des opinions sur les. 
effets de cette plante.] 


70 


CAILLE-LAIT , 
PETIT MUGUET. 


Deux espèces : 1° Caille-lait jaune.— Gallium verum. 
2 Caille-lait grateron.— Gallium aparine. 


Ces plantes sont très-communes.On se sert des sommi- 
tés fleuries. 
Préparations et doses, 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 4 à 45 gram. par kilog. d'eau. 


Suc exprimé, de 400 à 200 gram. 
Eau distillée, de 50 à 100 gram. 


Propriétés. 


J'ai employé le caille-lait jaune comme antispasmodique, 
légèrement diurétique et astringent. On l’a vanté dans l’é- 
pilepsie et quelques affections épileptiformes. Je l'ai mis 
en usage dans les gastralgies, les affections nerveuses, 
comme auxiliaires de moyens plus énergiques. 


J'ai vu employer la semence de grateron à la dose de 
4 gram. environ, infusée (après l’avoir réduite en poudre} 
dans un verre de vin blanc. pendant la nuit, et avalée le ma- 
in, contre la gravelle. L'effet diurétique de ce mélange est 
assez prononcé. La décoction de la plante, ou son sue, à la 
dose de 60 à 100 gram., produit le même effet. L’uva ursi 
ou l’alkekenge sont bien préférables, à cause de leur énergie 
mieux connue. (Voy. supplément, p. 614.) 


CALAMENT. 


Caiamintha vulgaris (T.) 
Melissa calamintha (L. 


Cette plante se trouve dans les lieux incultes. Les feuilles 
et les fleurs sont usitées. 
Propriétés. 


Le calament est excitant, antispasmodique , carminalif, 
et s'emploie comme la mélisse, la menthe poivrée, etc. 


D 


1t 


CAMOMILLE ROMAINE. 


Chamæmelum nobile:{T.) 
Anthemis nobilis (L.) 


Cette plante, très-commune dans les climats chauds et 
tempérés, croît sur le sol de la France, dans les lieux secs, 
sablonneux, le long des grandes routes, sur les rives de la 
Loire, de l'Indre, du Cher et de la Mayenne. Elle est culti- 
vée en grand. Les fleurs particulièrement usitées. 


Préparations et doses. 
À L'INTÉRIEUR : Décoction ou infusion, à à 45/gram. par kilog, 

d'eau. 

Eau distillée (4 sur 4 d'eau), de 50 à 100 gram., en potion. 

Sirop (4 fraîche sur 2 d'eau et 3 de sucre), de 15 à 60 grammes. 
en potion. 

Teinture (4 sur 8 d'eau-de-vie), de 4 à 10 gram., en potion. 

Extrait (4 sur 9 d’eau), 4 à 4 gram., bols, pilules. 

Extrait alcoolique (4 sur 4 d'alcool à 22), de 4 à 4 gram., en 
bois, pilules. 

Commerce (} sur 5 de sucre), de À à 4 gram. 

Huile essentielle, de 25 à 50 cent., en potion. 

Poudre, de 4 à 5 gram., en substance, en bols, pilules, etc. 


A L'EXTÉRIEUR : Infusion pour lotions, fomentations, cataplasmes, 


lavements. 
Huile essentielle, de 50 à 60 gram., en liniment, pour embre- 
cations. 
Propriétés. 


Les fleurs de camomille romaine sontstimulantes, amères, 
toniques, fébrifuges, anthelmintiques, emménagogues. Elles 
conviennent dans les langueurs d’estomac, le défaut d’appé- 
tit, les digestions difficiles, les coliques venteuses, la dys- 
pepsie, l'hypocondrie, la diarrhée atonique, les fièvres bi- 
lieuses, putrides, muqueuses, cotinues ou intermittentes, 
l'aménorrhée, la chlorose, l’hystérie. A l'extérieur, on ap- 
plique la camomille sur les seins des nouvelles accouchées, 
comme résolutive; sur les ulcères atoniques et sur les par- 
ties gangrénées, comme tonique et antiseptique. 

Il n'est pas inutile de faire connaître que les propriétés de 
Ja camomille romaine varient suivant la forme que l’on donne 
au médicament; ainsi la décoction, l'extrait, Ia conserve, 
la teinture, sont particulièrement toniques ; tandis que l’eau 
distillée, le sirop, l'infusion, sont plutôt excitants et anti- 
spasmodiques. 

Bodart rapporte des observations qui constatent l'effet 
fébrifuge de la camomille noble. « L'espèce d’oubli où cette: 


72 


plante est tombée, dit cet auteur, vient de deux causes : Ia 
première, parce qu’on donne la préférence à la camomille 
romaine à fleur double, cultivée dans les jardins ; la seconde, 
parce qu'on vend souvent pour cette fleur la matricaire à 
fleur double, qui lui ressemble beaucoup. » 


‘ J'ai administré la poudre de fleurs de camomille romaine 
dans trois cas de fièvre intermittente tierce. Elle a réussi 
dans deux cas ; le troisième a cédé promptement à l'emploi de 
l'écorce desauleblanc. Wauters l’a substituée au quinquina. 

Je mets fréquemment en usage l'infusion de camomille 
noble dans le traitement des fièvres muqueuses et adyna- 
miques. Je verse un 1/2 kilog. d’eau bouillante sur 8 à 15 
gram. de fleurs, et j'ajoute quelquefois à cette infusion 30 
à 60 gram. de bon vin blanc ou un peu d’eau-de“vie, d’eau 
de fleurs d'oranger, ou quelques gouttes d'éther, suivant 
l'indication qui se présente. 

A l'extérieur, j’ai employé la décoction concentrée de ca- 
momille avec avantage, comme antiseptique, contre la gan- 
grène. J’y ajoutais presque toujours une certaine quantité 
d’eau-de-vie camphrée. Cette décoction convient dans les 
ulcères atoniques, et comme résolutive dans les inflamma- 
tions avec engorgement œdémateux. 


CAMOMILLE PUANTE, 


MAROUTE, CAMOMILLE FÉTIDE. 


Chamæmelum fœtidum (T.} 
Anihemis cotula (L.) 


Cette plante est très-commune dans les champs incultes. 
Toute la plante est usitée. 


Préparations ef doses. 
A L'INTÉRIEUR: Infusion des fleurs, 5 à 12 gram. par 4/2 kilog. 
d'eau. 
À L'EXTÉRIEUR : En fomentalion (toute la plante), cataplasmes, etc, 


Propriétés, 


La camomille fétide, d’une saveur amère, d’une odeur 
pénétrante, est antispasmodique, carminative, antihysté- 
rique. | 

Cette plante, trop négligée, et que l’on peut se procurer 
si facilement, peut être employée avec avantage dans les 


73 


névroses, et surtout dans l’hystérie, la gastralgie, l’entérat- 
gie. Elle m'a réussi dans les cas où la gastralgie s'acCom- 
pagne de flatuosités, qu’elle dissipe très-promptement. 

[Peyrilhe ordonnait la camomille fétide avec succès, à 
forte dose, contre des fièvres intermittentes rebelles au 
quinquina. On sait que quelquefois ces fièvres sont entre- 
tenues par un état nerveux qui cède à l emploi des sédatifs 
et des antispasmodiques , après avoir résisté aux fébrifuges 
amers et astringents. 

[On peut, pour l'usage intérieur comme pour l'extérieur , 
substituer les fleurs de cette plante à celles de camomille 
romaine. ] 


CAPUCINE (GRanpe), 
CRESSON DU PÉROU, CRESSON D'INDE, CRESSON DU MEXIQUE. 


Cardamindum ampliore folio et majori flore (T.) 
Tropæolum majus (L.) 


Originaire du Mexique et du Pérou, cette plante fait au- 
jourd’hui l'ornement de nos jardins : toutefois elle n’y est 
qu'annuelle, tandis qu'elle est vivace dans son pays natal. 
Les feuilles, les fleurs, les boutons et les fruits tendres, 
sont usités. 

Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Décoction, de 15 à 30 gram. par kilog. d'eau. 
Suc exprimé, de 30 à 60 gram., seul ou mêlé avec le lait, la 
conserve de roses, etc, 
Propriétés. 


Douée d’une saveur âcre, piquante, et d’une faculté sti- 
mulante et tonique, elle offre un antiscorbutique qui n’est 
pas assez employé. On confit au vinaigre les jeunes bou- 
tons et les fruits verts, comme ceux ‘du câprier, qu'ils 
peuvent remplacer. On doit dire cependant que l'action 
médicamenteuse de ce cresson péruvien est très-inférieure 
à celle de nos cressons indigènes comme antiscorbutique. 


On a préconisé le suc de capucine contre la phthisie : 
a On entend ici, à ce que je crois, dit Eumuller, la phthisie 
scorbutique, lorsque l'acide du scorbut corrode le poumon.» 
Je crois plutôt, avec Roques et Biett, que le catarrhe pulmo- 
naire ayant été très- souvent confondu avec la phthisie, on 
doit ajouter peu de foi à ces cures brillantes fastueusement 
prônées par des médecins inhabiles, incapables de saisir 
le vrai caractère d’une maladie. J'ai été à même de vérifier 


74 


la justesse de cette remarque, et d'apprécier en même 
temps les propriétés de la capucine. Marie Rousselle, âgée 
de 30 ans, d’un tempérament lymphatico-sanguin, avait été 
prise, dans les premiers jours du mois d’août, à la suite de 
travaux pénibles, et après avoir bu de l’eau froide étant en 
sueur, d’une bronchite très-intense. Cette affection fut né- 
ligée, devint chronique et prit toutes les apparences d’une 
phihisie pulmonaire au second degré. C’est dans cet état 
que je vis la malade, vers la fin de septembre 1842. Elle 
avait perdu tout son embonpoint, avait des sueurs noctur- 
nes, toussait beaucoup, et expectorait abondamment des 
crachats épais et muqueux, principalement le matin. Avant 
d’avoir pereuté et ausculté la poitrine, je la croyais moi- 
même phthisique. L’exploration la plus attentive ne m'offrit 
que l'existence d’un râle muqueux très-prononcé. Je fus 
rassuré, sans cependant annoncer une guérison à laquelle 
je n'osais croire, malgré les signes favorables fournis 
par l’examen local, tant l'état général état peu satisfaisant. 
Je saisis cette occasion d'essayer l’usage du suc exprimé de 
capucine. J'en fis prendre d’abord une once dans une tasse 
de petit lait. J’augmentai la dose peu à peu, jusqu’à celle 
de 3 onces en deux fois, dans la journée. Dès les premiers 
jours la toux diminua, ainsi que l’expectoration; Îles 
sueurs cessèrent peu à peu, le mouvement fébrile du soir 
disparut, le pouls, habituellement fréquent dans ce genre 
d'affection, reprit son rythme habituel, les forces revinrent 
avec l'appétit et le sommeil, et au bout de 25 à 30 jours 
le rétablissement était assuré. Il fut consolidé par l'usage 
pendant quinze jours d’une décoction de racine d'aunée, 
dont la convalescente prenait trois tasses par jour. 
Je suis convaincu que le suc de cresson de fontaine, 
dont j'ai fait usage dans des cas analogues, eût produit le 
même effet. 


CARDAMINE, 


CRESSON DES PRÉS, CRESSON ÉLÉGANT, CRESSON SAUVAGE , 
PASSERAGE SAUVAGE. 


Nasturtium pratense (T.) 
Cardamine pratensis (L.) 


On trouve cette plante partout, dans les prairies basses et 
humides, dans les marais, le long des fossés. On met en 
usage la plante et les sommités fleuries. 


| 
| 
| 


75 
Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction ou infusion, de 30 à 30 gram. par kilog. 
d'eau. 

Suc exprimé, de 30 à 400 gram., en potion, dans un bouillon,etc. 

Feuilles pulvérisées, de 4 à 4 gram. (d’après Georges Baker, qui 

en préconise l'emploi dans l’hystérie, la chorée, la dysphagie, 

l'asthme, etc. 

Propriétés. 


La cadarmine se rapproche du cresson. Les jeunes feuilles. 
pourraient se manger, comme celles de ce dernier, en salade, 
ou servir à assaisonner les salades d’une saveur plus douce. 
On peut considérer cette plante comme antiscorbutique, t0- 
nique, excitante. Je l'ai vu employer dans l'asthme comme 
expectorante, chez un vieillard. Il en éprouvait beaucoup de 
soulagement en la prenant en décociion aqueuse avec une: 
suffisante quantité de miel. 


CAROTTE. 


Daucus vulgaris (T.} 
Daucus caroita (L.) 


La carotie sauvage se trouve dans les prés, sur le bord 
des champs et des chemins. La culture améliore cette ca- 
rolte sans altérer notablement ses caractères botaniques. 
On emploie la semence et la racine. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR: L'infusion des semences, À à 4 gram. par 4/2 kilog. 
d’eau bouillante. 
Décoction des racines, 50 à 400 gram. par kilog. d’eau. 
Sirop, (1 de suc sur 2 d'eau et 4 de sucre), de 50 à 400 gram. 


A L'EXTÉRIEUR: Pulpe, q.s. en cataplasme. 
Propriétés. 
La semence est carminative, diurétique; la racine est 


émolliente, résolutive, un peu antiseptique à l'extérieur 
dans les ulcères putrides, scorbutiques ou cancéreux. 


La carotte est un anti-ictérique vulgairement employé et 
pourtant bien peu actif. J'ai administré la décoction de 


graine de carotte sauvage comme diurélique; elle a un effet 
assez prononcé, et convient toutes les fois qu’un état inflam- 


maloire n'en contre-indique pas l'usage. Quelques bras- 


76 , 


seurs mettent dans la bière une petite quantité de graine de 
carotte, afin de lui communiquer une saveur piquante et 
une qualité supérieure. 

J'ai souvent appliqué la pulpe de carotte sur les ulcères 
sordides, et surtout sur l’ulcère cancéreux, dont il diminue 
l'odeur putride, tout en le détergeant doucement et sans 


douleur. Je l'ai souvent appliquée en cataplasme sur les 
engorgements des mamelles. 


[J'ai vu employer avec succès, dans l'extinction de voix, 
les toux opiniâtres, la phthisie et l'asthme, le suc de carotte 
ainsi préparé : on fait cuire deux ou trois carottes rouges 
dans l’eau pendant un quart-d’heure. On les râpe ensuite 
entièrement, et l’on tord la pulpe dans un linge. On ajoute, 
par verre de suc extrait, deux verres d’eau pure. Cette dose 
se prend tiède dans la journée,en trois ou six fois.] V. p.615. 


CARVI, © 


CUMIN DES PRÉS. 


Carvi officinarum (T.) 
Carum Carvi (L.) 


Le carvi vient spontanément dans les départements mé- 
ridionaux de la France. Les semences sont usitées. 


Féparaiions et doses, 


Pnfusion, 4 à 8 gram. par kilog. d’eau bouillante. 

Poudre, À à 4 gram.,dans du vin ou en électuaire, bols, pilules, etc. 
Eau distillée, 50 à 400 gram., en potion. 

Teinture (4 sur 42 d'alcool, 2 à 45 gram., en potion. 

Huile essentielle, 40 à 50 cent., en potion. 


Propriétés, 


La semence de carvi, d'une saveur chaude et agréable, 
d’une odeur aromatique analogue à celle du fenouil, est très- 
stimulanie et carminative. On l’emploie avec avantage 
dans la débilité des voies digestives, la cardialgie, les co- 
liques venteuses, lorsque, toutefois, celles-ci proviennent de 
l'atonie; car, lorsqu'elles sont l'effet d'une irritation gas- 
trique ou intestinale, elles ne pourraient qu'ajouter à la 
cause qui les occasionne. L'huile essentielle, mêlée à l'huile 


(4) Cet article n’était pas dans l'ouvrage couronné. 


par 
+ 
d'olive ou d'amandes douces, en ambrocation sur le ventre, 
convient dans les douleurs nerveuses ou venteuses des in- 
testins, surtout chez les enfants. 
La semence de carvi a été proposée par Wauters comme 
propre à remplacer le cumin. 


CASSIS, 


GROSEILLER NOIR. 


| Ribes nigrum (T.) 
. Ribes nigrum (L.) 


Cet arbrisseau est cultivé dans tous les jardins. On utilise 
les fruits et les feuilles. 


Préparations eé doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction des feuilles et sommilés, de 50 à 60 gram. 
par kilog. d'eau. 
Macération, de 50 à 60 gram. par kilog, d’eau froide, avec ad- 
dition d'un peu de vin blanc, de cidre ou d'eau-de-vie. 
Teinture, de 5 à 45 gram., en potion. 


Suc des fruits, de 5 à 15 gram., en potion ou étenda dans l’eau. 
Sirop (4 de suc et de sucre }), en potion, boisson, etc. 


Froprités. 

Les feuilles sont stomachiques et diurétiques. Les fruits 
sont acidules et conviennent dans les angines et dans quel- 
ques diarrhées et dyssenteries chroniques entretenues par la 
flegmasie chronique de la muqueuse intestinale. 


Je prépare avec les feuilles er les sommités fraîches de 
cassis une boisson très - agréable pour les malades, en les 
faisant macérer dans l’eau froide et en ajoutant à cette in- 
fusion une certaine quantité de vin blanc et de sucre. Cette 
boisson convient dans la période des fièvres muqueuses où 
de légers toniques sont indiqués, sans perdre de vue lirri- 
tation encore existante des cryptes muqueux. Je l’emploie 
aussi avec avantage dans les hydropisies accompagnées 
d’une soif intense, qu'elle calme tout en favorisant la sécré- 
tion des urines. J’ai conseillé aux moissonneurs du nord de 
la France, qui trop souvent ne font usage que de l'eau froide 
pendant leurs travaux, de se désaltérer avec l’infusion à 
froid de feuilles de cassis, à laquelle on ajoute quatre cuil- 
lerées d’eau-de -vie par kilogramme de cette infusion. C'est 
de toutes les boissons la plus convenable et la moins dis- 


78 


pendieuse pour se désaliérer pendant les chaleurs de l'été 
et les pénibles travaux de la récolte. 


CATAIRE, 


CHATAIRE ,; HERBE AUX CHATS, 


Cataria major, vulgaris (T.) 
Nepeta cataria (L.) 


On trouve communément cette plante vivace sur le bord 
des chemins et le long des haies. On se sert des sommités 


fleuries. 
Préparations et deses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 20 à 50 gram. par kilog. d’eau. 
A L'EXTÉRIEUR: Infusion vineuse, en fumigations, en fomenta- 
tions, en pédiluves, en demi-bains, en injections, en lave- 


ments. 
Proprietés. 


Les sommités sont toniques, stomachiques, carminatives, 
emménagogues et anti-hystériques. L’odeur aromatique, la 
saveur amère de cette plante, démontrent des verlus que 
quelques observations ont justifiées. Linné en a vanté les 
effets dans la chlorose. 

Nous possédons sans doute dans le même genre beaucoup 
d’autres plantes utiles; mais il importe, ainsi que le fait re- 

marquer Bodart, de connaître toutes celles qui sont congé- 
nères en vertus, parce que, dans certains cas urgents , la 
seule plante consacrée à 1elle ou telle maladie peut ne pas 
se trouver sous la main, et le malade manque de secours ou 
succombe faute d’avoir employé le végétal qui eût pu rem- 
placer le premier. 


CENTAURÉE (Petite), 


CHIRONÉE, CENTAURELLE, GENTIANE CENTAURÉE. 


Centaurium minus (T.) 
Gentiana centaurium (L.) 


La petite centaurée se trouve dans toute la France, dans 
les bois, les prairies. On emploie les sommités. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 40 à 50 gram. par kilog. d'eau. 
Eau distillée (4 sur 3 d'eau), de 30 à 400 gram.., en potion. 


73 


Sirop (A sur 50 d’eau et 60 de sucre), de 50 à 400 gram., en 
potion. 

Suc, de 50 à 60 gram., en potion. 

T'einture, de 5 à 45 gram., en potion. 

Vin, de 100 à 200 grammes, 

Bière, de 400 à 200 grammes. 

Extrait (4 sur 6 d’eau), de 4 à 5gram., en pilules, dans du vin, etc. 

Poudre, de 2 à 40 gram., en électuaire ou dans du vin. 


Propriétés. 


Les sommités fleuries, très-amères, sont toniques, fébri- 
fuges , et conviennent dans la convalescence des fièvres in- 
termittentes, dans la chlorose, dans l’atonie des organes di- 
geslifs, en un mot dans tous les cas où les toniques fixes sont 
indiqués. 

M. Nepple (Arch. gén. de méd., t. 26, p.61) considère, 
d’après l'expérience, la petite centaurée donnée en poudre, 
à des doses au moins égales à celles du quinquina, comme 
le meilleur de tous les fébrifuges après ce dernier. 

J'ai souvent mis en usage la petite centaurée. Elle jouit, 
à un plus faible degré, de toutes les propriétés de la gentiane 
jaune. Roques administrait contre les fièvres intermit- 
tentes une infusion très-rapprochée de cette plante, avec 
partie égale de camomille noble, et addition de 9 à 4 gram. 
d’éther sulfurique, à la dose d’un verre, de quatre en quatre 
heures, dans l’apyrexie. Je donne souvent la bière de pe- 
tite centaurée dans la convalescence des fièvres muqueuses 
eLintermittentes, dans la chlorose et à la suite des hydro- 
pisies, après l'évacuation des sérosités, afin de fortifier tous 
les organes. Je ne crois pas, avec Wedelius, que la petite 
centaurée, appliquée en cataplasme, puisse guérir des ui- 
cères fistuleux rebelles à tous les moyens curatifs ; mais je 
dois dire que j'en ai retiré des avantages appréciables dans 
les ulcères atoniques, scrofuleux et scorbutiques. 


CERFEUIL COMMUN. 


CERFEUIL CULTIVÉ. 


Chœrophyllum sativum (T.) 
Scandix cerefolium (L.) 


Cette plante est cultivée dans nos jardins. L’herbe et les 
semences sont usitées. 


80 


Préparoetions et doses. 
À L'INTÉRIEUR : Infusion, 50 à 60 gram.., par kilog d'eau bouillante 
à vase clos. 
Eau distillée ( 4 sur 5 d'eau), 50 à 60 gram., en potion. 
Suc dépuré, de 50 à 400 gram., seul ou mêlé avec du pelit lait. 
Sirop. de 45 à 60 gram , en potion, ou seul. 
Extrait, de 4 à 45 gram., en bols, pilules, etc. 
A L'EXTÉRIEUR: Décoction, de 30 à 60 gram. par kilog, d'eau, 
pour lotions, fomentations, cataplasmes. 
Feuilles, en quantité suffisante, pour cataplasmes. 


Propriétés, 

Le cerfeuil est un peu diurétique et stimulant ; il convient 
dans l’ictère, l'hépatite chronique, le catarrhe chronique, les 
engorgements laitcux des mamelles. A l'extérieur, il est 
d'un usage vulgaire dans les démangeaisons des parties 
génitales, les hémorrhoïdes, les flegmasies érysipélateuses 
légères, l’ophtalmie, etc. 

M. le docteur Deval à consigné dans les Annales d’'ocu- 
listique le résultat d’expérimentations nombreuses faites 
avec le cerfeuil sur des malades affectés d’ophtalmie. fl 
cite surtout le cas d’une jeune fille de 10 ans portant une 
ophtalmie intense de l'œil droit, avec sécrétion muqueuse, 
phlyciènes garnissant le cercle scléro-kératique, photopho- 
bie et larmoiement. Les évacuations sanguines n'avaient 
procuré qu’un soulagement momentané. Il avait conseillé 
un traitement énergique, de nouvelles évacuations san- 
guines : rien ne fut exécuté. « Or, voici ce qui était arrivé : 
les avis d’une commère, chose si fréquente dans la pra- 
tique, l'avaient emporté sur ceux de l'homme de l’art. De- 
puis la veille, trois heures de l'après-midi, jusqu’à six heures 
du lendemain matin, des cataplasmes de cerfeuil avaient 
été constamment maintenus sur les paupières de l’œil phlo- 
gosé, l'herbe cuite pendant dix minutes ou un quart d'heure 
étant placée à nu sur ces parties ; de plus, depuis le matin 
jusqu’à trois heures du soir l’organe avait été soumis à de 
nombreuses lotions avec une décoction concentrée de cer- 
feuil. Ce traitement si simple, continué pendant quelque 
temps, avait suffi pour produire une cure vraiment surpre- 
nante par sa rapidité.» (Journal de Médec. et de Chir. 
pratiq,, tome XVI, page 151.) 

« Depuis cette époque, plus de soixante malades furent 


. soumis à l'usage du même agent, et toujours avec le même 
succès.» (Ibid.) 


Ces résultats avaient déjà été obtenus en 1762 par De- 


81 


mours, et plus récemment "par M. Chabrely, de Bordeaux. 
Moi-même j’employais ce topique depuis plus de vingt ans, 
d’après l'usage tout populaire qu'en faisaient nos paysans 
depuis un temps immémorial. Il m’a presque toujours 
réussi. | , 

J'ai souvent employé le cerfeuil en cataplasme sur les 
mamelles engorgées, même lorsque la peau était phlogosée. 
La décoction est très-efficace dans l’érysipèle. 


Le CERFEUIL MUSQUÉ (cerfeuil d'Espagne, odorant, anisé), 
chœrophyllum odoratum, est légèrement aromatique, anti- 
spasmodique. J’ai vu des athmatiques se soulager en fumant 
les feuilles sèches de ce cerfeuil. 


CERISIER. 


Cerasus vulgaris seu domestica (T..) 
Prunus cerasus (L.) 


Les parties mises en usage sont l'écorce, les pédoncules, 
la semence et les fruits. 


Préparations et doses, 
A L'INTÉRIEUR: Décoction de l'écorce, de 30 à 60 gram. par 
kilog. d'eau. 
Ecorce en poudre, de 2 à 40 gram. 
Eau distilèe de cerise noire, de 50 à 100 gram. 
Pédoncules, 39 gram. par kilog. d'eau, en décoction. 


Propriétés. 


L’écorce et les pédoncules sont astringents et légèrement 
fébrifuges. Les fruits sont rafraichissants, tempérants, diu- 
rétiques. On les recommande dans les irritations gastro- 
intestinales. 


[ La gomme de cerisier peut dans beaucoup de cas rem- 
placer la gomme arabique. On ne peut cependant admettre 
avec Bodart et Gilibert leur identité parfaite. La gomme 
arabique est plus sèche, plus transparente, et se fond plus 
facilement dans l’eau sans en troubler la limpidité. ] 


J'ai vu employer très-fréquemment les pédoncules ou 
queues de cerises par les campagnards, comme diurétiques, 
dans l’hydropisie et la gravelle. J’ai été à même de cons- 
tater celte propriété. Souvent d'autres diurétiques avaient été 
employés sans succès lorsque cette décoction opérait promp- 


6 


82 


‘tement et abondamment la sécrétion urinaire. Quand on 
conserve ces pédoncules pour l'hiver, on a soin, avant de les 
faire bouillir, de les faire macérer douze heures dans l’eau 
froide, afin de les ramollir. FI serait bon même de 18 con- 
tondre un peu. 

Je n’ai jamais employé l'écorce de cerisier comme fébri- 
fuge, parce que je la regarde comme presque nulle. 


[ Sous l’Empire on mêélait souvent, pour le service des hô- 
pitaux de l’armée, l'écorce de cerisier à celle de quinquina, 
dont le prix était alors très-élevé. On trompait à la fois la 
religion du médecin et l’on se jouait de la vie des braves, 
pour étancher la soif de l'or. Cette fraude était d'autant 
plus facile que, de toutes les écorces , celle de cerisier se 
rapproche le plus, par ses caractères extérieurs, de l'écorce 
péruvienne. ] 

L'eau de cerise noire est sédative. Elle était très-employée 
dan le siècle dernier, comme base des potions calmantes 
et antispasmodiques. 


[ De toutes les variétés du cerisier, les griottes sont les 
plus salubres et les plus agréables. On en exprime le suc, 
qu’on délaie dans l’eau, à laquelle on ajoute un peu de 
sucre, pour donner en boisson dans les fièvres inflamma- 
wires et bilieuses , dans les phlegmasies gastro-intestinales 
chroniques, l’ictère, la néphrite chronique. Fernel cite plu- 
sieurs exemples de mélancoliques guéris par Ja décoction 
de cerises desséchées, et Vanswieten rapporte que des ma- 
niaques ont été rendus à la raison après avoir mangé des 
quantités considérables de ce fruit. On sait que ces affec- 
tions sont souvent produites ou entretenues sympathique- 
ment par des lésions abdominales et un état de constipation 
que la propriété laxative et rafraîchissante des fruits rouges 
peut dissiper. ] 


CHANVRE. (1) 


Cannabis sativa (T.) 
Cannabis sativa (L.) 


Bien que le chanvre soit originaire des Indes orientales, 
il croit spontanément sur les bords de la Newa , du Borys- 
thène et du Wolga. On le cultive dans nos champs pour 
l'emploi industriel de la partie textile de sa tige, el pour sa 


(A) Cet article n'élait pas dans le mémoire présenté au concours, 


83 


graine, connue sous le nom de chenevis. Les feuilles et les 
semences sont usilées en médecine. 


£ Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion aqueuse des feuilles, 30 à 60 gram. par 
kilog. d’eau. 
Infusion des semences, 50 à 60 gram. par kilog. d'eau. 
Emulsion, 8 à 16 gram. pour 450 gram.. d’eau. 


A L'EXTÉRIEUR : Feuilles fraîches, en cataplasme. 


Proprietés. 

Tout le monde connaît l'odeur vireuse qui s’exhale du 
chanvre. On sait aussi que ceux qui dorment près du champ 
où il se trouve en pleine vigueur éprouvent er s’éveillant des 
vertiges , des éblouissements, une sorte d'iyresse. Cet effet 
ne se produit pas aussi facilement dans le nord que dans le 
midi. Cependant on m'a dit l'avoir observé dans le Calatsis, 
chez un enfant de neuf ans qui s'était endormi en plein 
midi près d’une chenevière exposée aux rayons ardents du 
soleil. L’eau dans laquelle on rouit le chanvre exhale des 
miasmes qui occasionnent des maladies graves ; elle con- 
tracte un degré de putréfaction tel que les poissons soumis 
à son action délétère languissent et meurent. Cependant la 
toux, l’hémoptysie, l’asthme , la phthisie, qui attaquent les 
individus qui battent et cardent le chanvre, sont plutôt pro- 
duits par la poussière qui pénètre avec l'air dans les bron- 
ches que par les exhalaisons qui se dégagent de cette plante. 
Ce qui vient à l’appui de cette opinion, c'est que les cardeurs 
de lin, respirant aussi un air chargé d'une poussière fine 
et ténue, sont sujets aux mêmes maladies. 

Gilibert a étudié sur lui-même l’action des feuilles de 
chanvre. Îl en fit infuser une once dans une demi-livre 
d'eau. Cette infusion , d’une odeur et d'un goût nauséeux , 
souleva l'estomac, produisit la céphalaigie, augmenta le 
cours des urines et détermina une sueur fétide. Le même 
praticien a vu réussir cette boisson dans le rhumatisme 
chronique et les dartres ; il dit aussi que les feuilles fraîches 
appliquées en cataplasme raniment les tumeurs froides, et 
les disposent à Ia résolution. 

Le chenevis, écrasé et infusé dans de l’eau bouillante. 
fournit une émulsion adoucissante que Tode et Swediaur ont 
employée avec avantage dans la gonorrhée accompagnée 
d'une vive irritation inflammatoire. Elle est aussi très-utile, 
suivant Murray, dans la blennorrhagie arthritique, et, sui- 
vant d’autres auteurs, dans l'ictère spasmodique. Je l'ai emn- 


84 


ployée avec succès dans la période d'irritation du catarrhe 
vésical, et dans un cas de rétention d'urine acsidentelle et 
occasionnée par l’abus des spiritueux. Je pense que cette 
émulsion peu être aussi administrée avec avantage dans les 
phlegmasies gastro-intestinales ei bronchiques. Il paraît que 
la semence de chanvre participe jusqu'à un certain point 
des propriétés narcotiques des feuilles de cette plante. 

Ne pourrait-on pas, en médecine, substituer l'huile qu'on 
en tire à celle d'amandes douces ? 

Le chenevis, pour être de bonne qualité, doit être gros, 
lisse, noirätre et pesant. 

Tout porte à croire, malgré l'opinion du botaniste La- 
marck, que le cannabis indica avec lequel les Orientaux 
préparent le haschish des Ismaëéliens , le bangue des Us- 
becks, le maslac des Turcs, compositions exhilarantes, 
enivrantes et aphrodisiaques , n’est autre chose que le can- 
nabis sativa rendu plus énergique par l'influence du climat. 
Cette plante, comme tant d’autres, diminue d'activité à 
mesure qu'on avance dans le nord, et, si l'on en croit 
Bergius, les chanvres de la Suède sont tout-à-fait dépour- 
vus de la propriétés enivrante, quoique provenant de la 
même semence que ceux du midi. 


» 


CHARDON BÉNIT, 


CENTAURÉE SUDODIFIQUE. 


Carduus benedictus (T.) 
j Centaurea benedicta (L.) 


Cette plante, spontanée dans le midi de la France, se 
culiive dans les jardins. On emploie les feuilies et les fleurs, 


quelquefois les semences. 


Préparations et doses. 
À L'INTÉRIEUR: Infusion ou décoclion, 45 à 60 gram. par kilog. 

d'eau. 

Suc exprimé, 50 à 1400 gram. 

Infusion vineuse, 30 à 50 gram. par kilog. de vin (55 à 460 gram.) 

Eau distillée, 60 à 420 gram., en potion. 

Feinture, 2 à 5 gram., en potion. 

Semence en émulsion, 2 à 4 gram. 

Extrait, 2 à 4 gram., en pilules, bols, ou délayé dans da vin, de 
la bière, etc. | 

Propriétés. 


Le chardon bénit, doué d’une amertume très-prononcée , 


85 


est tonique, fébrifuge léger, sudorifique, diurétique ; à forte 
dose , il est émétique. Il est employé dans les fièvres inter- 
mittentes , les fièvres éruptives avec atonie, etc. 


J'ai vérifié le fait rapporté par quelques auteurs, savoir : 
que l'urine est rendue fétide par l’usage de la décoction de 
chardon bénit. L’eau distillée de cette plante servait autre- 
fois de base aux potions excitantes et sudorifiques. Elle est 
à tort abandonnée de nos jours. 


[ Lewis , Linné et Gilibert ont constaté les bons effets du 
chardon bénit dans la débilité d'estomac, l’anorexie et la 
dyspepsie atoniques, les fièvres intermittentes, l’ictère. 
Dans cette dernière maladie, il faut s'assurer de l'état du 
foie et des conduits biliaires, car il est bien évident que 
lorsque la jaunisse dépend d’un état phlegmasique ou d'un 
spasme du canal cholédoque, l'action du chardon bénit, 
comme celle de tous les toniques , ne peut que nuire : les 
antiphlogistiques, les calmants et les diurétiques délayants 
sont alors plus rationnellement indiqués. ] 


La décoction des feuilles de cette plante est détersive et 
peut être employée sur les ulcères atoniques ; mais nous 
possédons des moyens plus énergiques pour satisfaire à 
celte indication. au 


CHARDON ROLLAND, 


CHARDON A CENT TÈTES, PANICAULT COMMUN. 
Eryugium vulgare campestre (T). 
Eryugium campesire (L.) 
Cette plante est commune dans les lieux incultes. On 
emploie Ja racine et la semence. 
Féparations et doses, 
Décoction, 50 à 60 gram. par kilog. d'eau. 
Propriétés. 


La racine de chardon rolland est diurétique. On l’emploi 
dans l’hydropisie, l’ictère, la gravelle, etc. 


86 


CHARDON ÉTOILÉ ov CHAUSSE-TRAPE, 


CALCITRAPE. 


Carduus slellatus seu calcitrapa (T.} 
Centaurea calcitrapa (L.) 


Cette plante croît dans toute la France, sur le bord des 
chemins, autour des villes ei des villages. Toute la plante 
est usitée. 

Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction, 45 à 60 gram. par kilog. d’eau. 

Suc des feuilles, de 120 à 160 gram., comme fébrifuge. 

Feuilles en poudre, de 4 à 4 gram., dans du vin, eu en électuaire. 

Extrait, de 45 à 60 gram. 

Semence, 4 gram., macérée dans du vin blanc, comme puissant 

diurétique. 

Vin, 30 à 60 gram. pour 4 kilog. (de 60 à 400 gram.) 


Propriétés. 


Cette plante, d’une saveur très-amère, est tonique, fébri- 
fuge. La racine et les semences passent pour apérilives, 
diurétiques , etc. 

Tournefort, Linné, Gilibert, Chrétien ( Bull. de Pharm., 
1809), Valentin (nouv. Journ. de Méd., 1819), ont 
reconnu des propriétés diurétiques et fébrifuges dans la 
racine, les feuilles, les fleurs et les graines de Ja chausse- 
trape. 

Je regarde le chardon étoilé comme un de nos meilleurs 
amers indigènes. J'ai employé trois fois son suc dans des 
fièvres intermittentes tierces. J’ai réussi deux fois. 

J'ai quelquefois associé cette plante, en décoetion, à 
l'écorce de saule et à l'absynthe, dans les cas de fièvres 
automnales cachectiques. Dans tous les cas où les toniques 
fixes sont indiqués, le chardon étoilé peut être avantageu- 
sement employé et remplacer les amers exotiques. Je l'ai 
substitué au quassia amara. Il m'a réussi complètement 
dans la leucorrhée atonique, soit en décoction, soit infusé 
dans le vin blanc, avec addition d’un peu de racine d'an- 
gélique. 

La semence de calcitrape est certainement très-diurétique. 
Je l'ai fait prendre en proudre, avec du vin blanc, dans des 
cas d'hydropisie, où elle a produit une abondante sécrétion 
urinaire. La racine ne m'a pas paru avoir une action diuré- 
tique aussi prononcée. 


$ 87 


CHARDON A CARDER, 


CHARDON A FOULON. 


Carduus fullonus (T.) 
Dipsacus fullonum (L.) 


Ceite plante est très-commune dans les lieux incultes, les 
paturages. 


Propriétés. 


On rencontre dans la partie supérieure du chardon à 
foulon un ver qui, écrasé sur les dents, peut, par son 
application, ou même par le contact des doigts avec lesquels 
on l’a broyé, produire un calme instantané , une cessation 
immédiate de la douleur odontaigique. J'ai plusieurs fois 
employé ce singulier moyen avec succès, La douleur revient 
au bout de dix, quinze ou vingt minutes ; mais une nouvelle 
application produit le même soulagement. Je l'ai réitérée 
jusqu’à cinq fois successives sur la même dent, et toujours 
j'ai obtenu le même résultat. J’engage les savants à faire 
des recherches sur les causes de cet effet vraiment extraor- 
dinaire. La coccinelle à sept points noirs a, dit-on, la 
même faculté, mais beaucoup moins marquée et plus 
inconstante. 

Les paysans se servent de l’eau qui séjourne dans les 
feuilles du chardon à foulon comme antiophtalmique. J’en 
ai vu de bons effets dans les ophtalmies très-légères. 


CHÊNE, 


Quercus latifotia robur (T.) 
Quercus robur (L.) 


Le chêne se trouve dans toutes les forêts de l'Europe. 
L’écorce , les fruits et les feuilles sont usités, 


Préparations ef doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décuction, de 40 à 50 gram. par kilog. d’eau. 
Glands torréfiès.en infusion, de 30 à 40 gram. par kilog. d'eau, 
et même à plus forte dose. 
Poudre de l'écorce, de 2 à 4 gram., en électuaire ou dans du vin. 
Cupule du gland, en poudre, 2 à 4 gram., dans du vin ou en élec- 
tuaire, bols, pilules, etc. 


A V'EXTÉRIEUR: Décoction, q. s. pour lotions, fomentitions, in- 
Jecuons, etc. 


88 


Poudre de l’écérce, q.s. pour saupoudrer les ulcères, suppositoi- 
res, Cataplasmes. 


Propriétés, 

L'écorce de chêne est astringente, fébrifuge , styptique. 
On la prescrit rarement à l'intérieur, bien qu’elle ait été 
conseillée dans les métrorrhagies atoniques, les fleurs 
blanches sans irritation, la fin des blennorrhagies, les 
hémorragies passives, l’incontinence d'urine, les fièvres 
intermittentes, les diarrhées, les dyssenteries chroniques, etc. 


Cet astringent indigène peut remplacer tous les astrin- 
gents exotiques. J'ai employé la poudre d’écorce de chêne 
mêlée avec du miel, à la dose de 2 à 4 grammes, contre des 
hémorragies utérines qui n'avaient cédé à aucun autre 
moyen. Le gland torréfié ne m’a pas moins réussi en pareil 
cas (1). Je pourrais rapporter en détail vingt observations 
qui prouvent l'efficacité de l’un ou de l’autre de ces moyens 
contre la ménorrhagie atonique, le mélœna, i’hémopty- 
sie, etc. 


J'ai, à l'exemple de Scopoli , employé le calice ou cupule 
du gland pulvérisé, à la dose de 4 grammes dans un verre 
de vin rouge, répétée toutes les trois heures, dans un cas 
d'hémorragie utérine continuant à la suite d’un avorte- 
ment, chez une jeune femme d’une faible constitution et 
ayant habituellement une menstruation abondante. Dès le 
premier jour, l'hémorragie diminua de moitié, et dans 
l'espace de trois jours elle avait entièrement cessé. Il n’est 
pas inutile de dire que cette femme avait fait usage sans 
succès d’une décoction de racine de grande consoude et de 
ratanhia, prescrite par un médecin de la ville voisine du 
village qu’elle habite. 

[ Alibert employait avec succès l'écorce de chêne dans les 
leucorrhées continuelles entretenues par une faiblesse géné- 
rale et un relächement de la muqueuse vaginale. Dans ce 
dernier cas on injecte [a partie souffrante avec la décoction 
de cette écorce, en même temps qu’on en fait prendre à 
l'intérieur la poudre ou l’infusion vineuse. Cullen, Wauters 
et Schwilgué ont dissipé des fièvres intermittentes par l’ad- 
ministration de ces dernières préparations. Dans ces cas, 


(4) D'après les recherches de Davy, la torréfaction est très-propre à 
développer le princine tannin, puisque les glands qu’on a fait cuire dans 
un four chauffé à 880 de Réaumur en ont donné une quantité considé- 
rable, tandis qu'ils n’en fournissent point dans l'état naturel. (Philoso. 
Transact., 4803.) 


89 


je crois qu'il est avantageux de l’associer, comme pour l'em- 
ploi de l'écorce d’aune et de la racine de bistorte, à une cer- 
taine quantité de racine de gentiane , de sommités de petite 
centaurée, d’absynthe ou de feuilles de calcitrape. Ce mé- 
lange m'a quelquefois réussi dans les fièvres intermittentes 
anciennes, et contre lesquelles on avait à diverses reprises 
fait usage des préparations de quinquina. ] 

Les habitants de la campagne usent contre les vers d’une 
décoction de quatre grammes environ de {an dans une tasse 
d'eau réduite à moitié, et qu'ils font prendre aux enfants le 
malin. J'en ai vu de si bons résultats que je l’ai employée 
dans ma pratique. Je l’administre de la même manière dans 
les cas d'affection vermineuse sans complication, et dans 
les fièvres mucoso-vermineuses. 


Un cultivateur ügé de 53 ans m'a dit s'être débarrassé de 
fissures à l'anus, qui le faisaient beaucoup souffrir, par le 
moyens d’injections et de lotions faites avec la décocton rap- 
prochée de feuilles de chène dans l’eau où l’on avait fait 
éteindre à diverses reprises du fer rougi au feu. Je pense 
que l'écorce de chêne aurait dans cette maladie le même 
avantage que la racine de ratanhià, que quelques praticiens 
ont employée avec succès. 

A l'extérieur, l'écorce de chêne peut remplacer le quin- 
quina. J'en ai vu de très-bons effets dans les hôpitaux mili- 
taires, du temps de l’Empire, lorsque le quinquina était d’un 
prix tellement élevé qu'il était impossible d’en étendre l’u- 
sage au service chirurgical. Ce succédané rendait de grands 
services comme antiseptique et astringent dans la gangrène, 
la pourriture d'hôpital, les ulcères de mauvais caractère, 
les engorgements scorbutiques des extrémités inférieures, 
etc. On l’employait en décoction simple ou animée avec. 
q. S. d'eau-de-vie camphrée, ou mêlée avec autant d’eau de 
chaux , et en poudre seule ou mêlée avec le sel ammoniac, 
le sel commun , la poudre de charbon, le camphre, etc. 


[ J’ai vu employer avec avantage, sur les hernies com- 
mençantes , l'hydrocèle et la chûte du rectum chez les en- 
fants, le tan seul ou mêlé avec une suffisante quantité de lie 
de vin. Les feuilles de chêne infusées dans du vin rouge, 
avec addition d’un peu de miel, forment un gargarisme dont 
j'ai reconnu l'efficacité dans le relâchement des gencives, 
l’angine commençante ou chronique, la stomacace, etc.] 

(Voy. supplément, p. 615.) 


90 


CHÈVRE-FEUILLE, 
CHÈVRE-FEUILLE DES BOIS. 


Caprifolium (T. 
Leonicera periclynum (L.) 


Cette plante se trouve dans les haies et dans les bois. Les 
tiges , les feuilles et les fleurs sont usitées. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion des fleurs et décoction des feuilles, 4 à 15 
gram,. par kilog. d’eau. 
Propriétés. 

Le chèvre-feuille est très-peu employé, bien qu’il ait été 
regardé comme astringent , tonique léger et diurétique. 

Je mets en usage l'infusion des fleurs de chèvre-feuille 
comme antispasmodique. Je pense que l'eau distillée de 
ces fleurs pourrait remplacer l’eau de fleurs d'oranger, 


CHICORÉE SAUVAGE. 


Cichorium sylvestre intybus (T.) 
Cichorium intybus (L.) 


Plante très-commune et très-connue dans toute la France. 
Les parties usitées sont la racine et les feuilles. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction, de 50 à 60 gram. de racine, ou 6 à 42 
gram. de feuilles par kilog. 

Suc épuré, de 60 à 420 gram , pur ou mêlé dans du petit lait. 

Sirop, de 30 à 400 gram. 

Extrait, de 4 à 10 gram., en pilules, bois, etc. 

Propriétés. 

La racine et les feuilles de chicorée sont amères, toni- 
ques, fébrifuges, très-fréquemment employées dans l’atonie 
des premières voies, l'ictère, les engorgements viscéraux, 
quelques maladies de la peau, les fièvres intermittentes, 
vermineuses, vers la fin des fièvres muqueuses, etc. 

La racine torréfiée constitue le café indigène. 

L'usage longtemps continué de la racine de chicorée tor- 
réfiée donne quelquefois une couleur jaune-paille à la peau. 
J'ai toujours vu disparaître peu à peu cette coloration en 
faisant cesser la cause qui l’avait produite. 


Le 


En 
+ 


3 91 


CHIENDENT. 


Graman offlcinarum (T.)} 
Triticum repens (L.) 


Les rhizomes (improprement racines), sont usitées comme 
émollientes, diurétiques, et très-employées dans les maladies 
aigües, surtout dans les flegmasies des voies urinaires, en 
décoction ; en extrait, comme pectoral. 

Il est nécessaire de contondre le chiendent avant de le 
faire bouillir. 


CHOU VERT, CHOU ROUGE. 


Brassica (T.) 
Brassica oleracea veridis, rubra (L..) 


Le chou est antiscorbutique, pectoral, légèrement exci- 
tant. Le chou rouge surtout est souvent employé comme 
béchique. | 

J’emploie avec avantage le bouillon de mou de veau et de 
chou rouge dans les affections catarrhales bronchiques et 
dans la phthisie pulmonaire. 

[On prépare aussi une gelée avec 10 grammes de chou 
rouge cuit dans quantité suffisante d’eau. On passe et l’on y 
fait fondre 2 grammes d’ichtyocolle; on passe de nouveau, 
et on ajoute sur le feu 25 grammes de sucre; on clarifie 
avec deux blancs d'œuf, et on fait évaporer. Cette gelée 
s'emploie dans le rhume, la bronchite aiguë ou chronique, 
la phthisie.] 

Appliquées chaudes sur la poitrine, les feuilles de chou 
ont quelquefois diminué ou fait disparaître des points de 
côté. Leur application sur les plaies des vésicatoires excite 
une exhalation séreuse abondante ; sur la tête, elles rappel- 
lent la croûte laiteuse ; sur les douleurs arthritiques et 
rhumatismales, elles soulagent beancoup. M. Récamier 
superpose trois à six de ces feuilles faufilées ensemble, lé- 
gèrement chauffées et flétries, et les applique à nu sur la 
partie endolorie, où il les maintient avec un mouchoir. 

[Chelius (Traité de Chir., trad. par M. Pigné) conseille 
contre la croûte laiteuse Ia décoction de 16 grammes de chou 
vert dans du lait, que l’on administre matin et soir, ou une 
once de cette plante, desséchée et réduite en poudre, que 
l'on donne chaque jour dans du lait ou dans de la bouillie.] 


92 
CIGUE (cran), 


Cicuta major (T.) 
Conium maculatum (L.) - 


Cette plante, d'une odeur vireuse, se rencontre dans les 
lieux frais, dans les terrains gras, autour des villages, dans 
le milieu et le nord dela France. L’herbe est usitée. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : [nfusion, de 10 à 20 gram. par kilog. d'eau. 
Suc dépuré, de 50 cent. à 2 gram., en potion. 
Teinture avec feuilles fraiches (5 sur 2 d'alcool à 21°), de 20 à 
60 cent.,en potion. 
Teinture avec feuilles sèches (1 sur 4 d'alcool à 24°), de 50 cent. 
à 4 gram. 58 cent., en potion. 

Feüilure éthérée, de 25 cent. à 4 gram. 50 cent., en potion. 

Extrait aqueux ou alcoolique, de 5 cent. à 2 gram. et plus, pro- 

gressivement. 

Poudre, de 10 cent. à 4 gram., progressivement, en potion, 

pilules, etc. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau, 
pour lotions, fomentations, etc. 

Huile (4 fraiche sur 2 d'huile d'olive ou de jusquiame) , de 10 à 

80 gram., pour ambrocation. 

Feuille: contuses, de 40 à 15 gram. par kilog. de cataplasme 

émollient, ou appliquées seules. 

Onguent (4 partie de suc sur 4 d'axonge), frictions, onctions, em- 

plâtre, etc. 
Propriétés. 

La grande ciguë est un poison narcotico-âcre. Elle agit 
particulièrement sur le système nerveux et la moëlle épi- 
nière, et enflamme l'estomac. Elle est d'autant plus éner- 
gique que la plante a été récoltée dans un pays plus chaud. 
L'’empoisonnement par cette plante produit une vive exal- 
tation nerveuse avec délire, ou une sorte d'ivresse avec 
abattement, insensibilité, tremblement général, suivant le 
tempérament et les dispositions particulières du sujet. D’a- 
près les expériences de M. Orfila, le conium maculatum n'a 
produit la mort que dans un petit nombre de cas. Il n'en 
faut pas moins l’administrer avec prudence et à doses 
graduées. 

A petite dose, cette plante est un sédatif puissant. On l’a 
conseillée dans les affections nerveuses, l’épilepsie, les toux 
rebelles, les vomissements spasmodiques, le satyriasis, la 
fureur utérine, les névralgies, les spasmes, les douleurs du 
cancer, etc. Son action sur le système lymphatique la rend 


93 


utile dans les engorgements des mamelles, de lPutérus, de 
l'estomac, du foie, des testicules ; dans les affections scro- 
fuleuses et tuberculeuses, dans la syphilis constitutionnelle 
el qui a résisté au mercure; dans les abcès chroniques, les 
ulcères de mauvaise nature, etc. On l’emploie à l'extérieur 
comme calmant et résolutif. 

La ciguë a été administrée avec des succès différents, 
selon le pays où elle avait été récoltée , la manière dortelle 
avait été préparée et les circonstances dans lesquelles on 
l'avait donnée. Après avoir exagéré ses vertus, on les a 
peut-être trop dépréciées : en thérapeutique, nous nous te- 
nons rarement dans les limites d’une rigoureuse observation. 
des faits. L'enthousiasme, la crédulité ou le scepticisme 


s'opposent trop souvent, même chez les plus illustres méde- 


cins, à la juste appréciation de l'effet des médicaments. 


J’emploie rarement l'extrait de ciguë, parce que je suis 
convaincu qu’il est mal préparé et presque toujours brûlé, 
ce qui lui ôte toutes ses propriétés. Je préfère la poudre des 
feuilles, que je mêle avec un extrait approprié. Ce que je 
puis dire sur les propriétés de la ciguë est connu. On en 
retire de grands avantages contre les névralgies. Pour ce 
qui est de ses vertus curatives, vantées par Stœrk contre les 
aflections cancéreuses, les praticiens qui ne se laissent gui- 
der que par l'observation savent à quoi s’en tenir. 


[Cependant je dois dire que les bains de ciguë ont été 
employés avec succès par Hoffmann dans le cancer des 
mamelles, et par Hufeland dans le cancer utérin et dans les 
scrofules, Ce dernier rapporte une observation recueillie par 
le docteur Günther, de Cologne, qui constate les bons effets 
de ces bains dans les affections cancéreuses de la matrice. 
Ils étaient préparés avec dix poignées de ciguë fraîche et 
quantité suffisante d'eau pour un bain entier. Le malade y 
restait une demi-heure chaque j jour. Les douleurs cessèrent 
presque entièrement et l'écoulement fétide diminua beau- 
coup dans l’espace de vingt jours. «Je ne puis assez recom- 
mander, dit Hufeland à celte occasion, les bains de ciguë 
dans les affections cancéreuses ; je les emploie depuis trente 
ans, et je les ai déjà conseillés dans un traité sur les scro- 
fules. Si je ne guéris pas toujours les malades attaqués de 
tubercules cancéreux, je réussis cependant à en arrêter les 
progrès et à prolonger ainsi la vie des malades.» (Journ. de 
Meédec. pratiq., de Hufeland, 1832.)] 

M. Baudelocque emploie à l'hospice l'extrait de ciguë 
contre les scrofules chez les enfants. Il commence par la 


9% 


dose de 40 centigrammes, et augmente peu à peu jusqu'à 
4 grammes et plus, sans danger. Lorsqu'il survient quel- 
ques vertiges ou des éblouissements , on suspend , et on 
purge les malades. Au bout de quinze jours on en recom- 
mence l'usage à la dose de 50 centigrammes à 1 gramme, 
suivant la quantité que l'on donnait au moment de la cessa- 
tion. (Journ. de Méd. et de Char. prat., 1529.) 


J'ai donné la poudre de feuilles de ciguë dans la coque- 
luche, à la dose d’un demi-grain à un grain (2à 5 centigr.), 
trois ou quatre fois par jour. J'angmente ou je diminue cette 
dose selon l’âge des enfants. Elle m'a réussi quelquefois ; 
mais je lui préfère la poudre de racine de belladone, dont 
l'effet m'a paru plus constant et plus spécial. 

Dans les névralgies, j'ai administré tantôt la poudre, tan- 
iôt le suc de ciguë. Je commençais l'usage du suc à la dose 
de 10 à 15 gouttes, et j'augmentais graduellement jusqu'à 
celle de 40 et même 50 gouttes. J'en ai retiré des avantages 
réels et appréciables dans ce genre d'affection. 

A l'extérieur, j'ai fréquemment employé la ciguë fraîche 
en cataplasme, sur les engorgements des mamelles, sur les 
tumeurs scrofuleuses, l’'engorgement chronique des testi- 
cules, etc. L’emplâtre de ciguë appliquée sur les parois de 
la poitrine soulage les phthisiques. 

[Pilée et mêlée avèc autant de pulpe de carotte, elle m'a 
été utile sur le cancer ulcéré des mamelles. Je mêle quel- 
quefois à ce topique une certaine quantité de charbon en 
poudre.] 

[Hallé employait la ciguë à l'extérieur contre les engorge- 
ments squireux du sein, de la manière suivante: «Je faisais 
faire, dit-il, un cataplasme de farine degraine de lin, souvent 
mêlé de pulpe de carotte, et alors humecté avec le suc même 
exprimé des carottes. Le cataplasme était cuit et bien chaud. 
J'y faisais mêler un peu de saindoux (demi-once sur un ca- 
taplasme fait pour recouvrir le sein), dans l'intention de 
rendre le cataplasme onciueux et de l'empêcher de se re- 
froidir trop promptement, de se sécher et d'adhérer à la peau 
de manière à s’en détacher difficilement. Au moment de l’ap- 
plication, je faisais couvrir le cataplasme d’une demi-once à 
une once de poudre de ciguë, que l’on mélait avec la surface 
du cataplasme qui devait être en contact avee la peau. On te- 
nait ce cataplasme appliqué pendant six heures le jour ; on le 
renouvelait. Je le faisais aussi appliquer le soir, pour rester 
en place toute la nuit. Bien souvent je me suis contenté du 
cataplasme de farine de graine de lin seule, toujours mêlée 


95 


avec le saindoux, mais couvert de la poudre de ciguë, » { Bi- 
bhothèque de Thérapeutique, par A.-L.-J. Bayle, D. M., 
tom. 3.] 

On doit faire dessécher les feuilles de ciguë à l’étuve et à 
l'abri du contact de la lumière, parce qu'en perdant leur cou- 
leur verte, elles perdent aussi une partie de leurs propriétés. 

(Voy. supplément, p. 617.) 


CITROUILLE, 


COURGE, PASTÈQUE. 


Cucurbita major rotonda (L } 
Cucurbitac itrullus (T.) 


Les semences de citrouille sont rafraîchissantes et tempé- 
rantes. Elles conviennent dans les phlegmasies aiguës, la 
cystite, la néphrite, la blennorrhagie , l'hépatite, les fièvres 
bilieuses, etc. On les donne en décoction {30 à 60 gram. par 
kilog. d’eau), ou en émulsion. 

[M. Brunet communiqua en 1845 à la Société de Méde- 
cine de Bordeaux deux observations sur l'efficacité de la pâte 
de semence de courge contre le ténia. Soixante-douze pilules 
d'extrait de fougère mâle avaient provoqué chez un marin 
l'expulsion de quelques fragments de ver solitaire. M. Bru- 
net fit prendre un purgatif sans succès. Il fit alors admi- 
nistrer 45 grammes de semence de courge pilée avec autant 
de sucre. Après diverses doses de cette pâte, le malade ren- 
dit un ténia complet. Un second malade porteur du même 
parasite prit le même remède et obtint un résultat sem- 
blable. M. Sarraméa présenta peu de temps après à la même 
Société deux ténias rendus par des jeunes gens après l’ad- 
ministration de la pâte de graine de citrouille. L’un des deux 
malades a rendu le ver après la troisième dose; chez l'autre 
il a été expulsé après la première dose.] 

Le parenchyme et le tissu extérieur de la courge, appli- 
qués, après avoir été pilés, sur les inflammations superti- 
cielles, sur les brülures du premier degré, les inffammations 
traumatiques et les ophtalmies , procurent un soulagement 
instantané. J'ai eu fréquemment recours à ce moyen tout 
populaire, et toujours j'ai eu à me louer de ses bons effets. 
On renouvelle fréquemment cette application, que l'on 
fait toujours à froid. 


56 
CLÉMATITE DES HAIES, 


IERBE AUX GUEUX, VIGNE BLANCHE, VIORNE, 
CRANQUILLIER. 


Clematis sylvestris latifolia (T.) 
Clematis vitalba (L.) 


Cette plante croît dans toutes les haies de la France, de 
J Europe. On emploie l'herbe et les fleurs. 


Fréparations @eé doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 5 à 12 gram. par 500 gram. d'eau 
bouillante, comme diaphorétiques, à prendre en plusieurs fois. 

Extrail aicoolique (4 d'alcool sur 4 d'herbe et8d'eau),5 à 20 cent. 

Poudre, de 5 à 45 cent., en potion, comme purgatif. 

A L'EXTÉRIEUR : Feuilles pilées, q.s., comme vésicatoire. 
Fropriétés. 

L'herbe et les fleurs de clématite sont àâcres, irritantes, 
rubéfiantes, vésicantes. On a préconisé cette plante comme 
diaphorétique , diurétique et purgatif drastique dans les 
maladies vénériennes secondaires et tertiaires, l'hydropisie, 
les scrofules. Son administration demande beaucoup de 
prudence. On doit commencer par des doses très-légères, et 
observer soigneusement son action sur le tube digestif. 

Il est à regretter que les médecins aient laissé tomber 
dans l'oubli une plante aussi énergique, et qui, bien étudiée 
dans ses effets, peut être d’un grand secours à la thérapeu- 
tique. 

Je n'ai jamais fait l'essai de la clématite à l’intérieur. Je 
me promets, à l'occasion, de l’employer comme drastique 
et comme diaphorétique. Je l’ai mise en usage à l’exté- 
rieur pour produire la vésication; elle a un effet très-prompt 
et dont on pent tirer un grand parti à la campagne. 

J'ai employé avec avantage la décoction des feuilles de 
clématite comme détersive dans les ulcères sordides , ato- 
niques et scrofuleux ; elle déterge puissamment et prompie- 
ment. Après son action la cicatrisation s'opère avec plus de 
rapidité. 

Les paysans se guérissent quelquefois de la gale par des 
frictions avee de l'huile dans laquelle cette plante a été 
broyée et macérée. Ces frictions peuvent exciter vivement la 
peau, l’enflammer, et donner lieu même à un mouvement 
fébrile plus ou moins vif. Les propriétés de la clématite dimi- 
nuent beaucoup par la dessiccation et par l’ébullition. 

{ Voy. supplément, p. 623.) 


97 
COCHLEARIA , 


HERBE AUX CUILLERS. 


Cochlearia folio subrotundo (T..) 
Cochlearia officinalis (L.) 


Ceite plante, croissant spontanément sur les Pyrénées, 
dans les contrées maritimes du nord de l’Europe , est culti- 
vée dans les jardins. On emploie l'herbe et la graine. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion , de 20 à 50 gram. par kilog. d’eau, de 
lait , de petit lait, de bouillon , de bière ou de vin. 
Suc exprimé , de 50 à 200 gram. , en polion , dans la journée. 
Teinture (1 de suc sur 1 d’aicool à 56°), de 2 à 45 gram. , en 
potion. 
Sirop (4 de suc sur 2 de sucre), de 20 à 60 gram., en potion. 
Extrait, 2 à 5 gram. , en potion. 
Conserve (4 sur 1 de sucre), de 2 à 5 gram, , en potion. 
Eau distillée , 
À L'EXTÉRIEUR: Infusion, q.s., en lotions, fomentations , injec- 
tions, etc. 


Teinture , 2 à 45 gram., en gargarisme, étendu dans le vin blan: 
ou dans l’eau, 


Eau distillée , en gargarisme pour guérir les ulcères scorbutiques 
des gencives. 


Propriétés. 


Le cochlearia, d’une saveur chaude, irritante et désa- 
gréable, est excitant, antiscorbutique, diurétique. Onle 
donne contre le scorbut, l'œdème du poumon, la toux avec 
expectoration, l'asthme, le catharre chronique, la cachexie, 
la leucorrhée , la paralysie, l’hydropisie, les scrofules, les 
engorgements atoniques des viscères et certaines maladies 
cutanées chroniques. 

[Cette plante à été recommandée dans les maladies cal- 
culeuses par Desbois de Rochefort, dans les fièvres quartes 
par Stalh, dans le rhumatisme chronique vague par Syden- 
ham. Mais il faut se garder de l’employer, quand il y a irri- 
tation inflammatoire, dans les affections hémorrhoïdales, 
l'hémopiysie , les toux sèches et spasmodiques, les palpita- 
tions, les congestions sanguines au cerveau, la céphalalgie. 
Lorsqu'on est forcé d’en faire usage dans ces circonstances, 
il faut préparer le malade par l’usage des antiphlogistiques 
et mitiger l'action de la plante par l'addition des mucilagi- 
neux. Dans ces cas j'administre le mélange de suc de co- 


gi 


98 


chlearia et de Jaitou de bouillon de veau ; souvent aussi il 
est utile de Jui associer des acides végétaux, comme le suc 
d'oseille, d’alleluia, d’épine-vinette , le cidre, ete. 

Je considère les feuilles et les semences de cochlearia 
comme antiscorbutiques par excellence. Le mélange à par- 
ties égales de suc de cochlearia, de trèfle d'eau et de cres- 
son, est précieux dans les affections scorbutiques arrivées 
même au plus haut degré, et caractérisées par l'ahération du 
sans, des hémorragies, des ecchymoses, un état d'infiltra- 
tion cachectique , etc. 

Je citerai le fait suivant comme assez remarquable : Un 
garçon boucher en service chez le sieur Lafranchise, de 
Calais, se fractura la jambe droite en tombant de cheval. 
La fracture fut réduite et maintenue par les moyens ordi- 
naires. Ce blessé était âgé de 25 ans, d'un tempérament 
lymphatique, et se nourrissait principalement de viandes. 
Au bout de quarante jours je voulus m'assurer de la conso- 
lidation du eal; mais, à mon grand étonnement, les deux 
fragments du tibia étaient tout aussi mobiles que le jour 
même de la chüûüte. Dès lors je soupçonnai l'existence d’une 
diathèse scorbutique. J’examinai les gencives, que je trou- 
vai engorgées et saignantes. Cependant aucun autre symp- 
tôme n'existait, excepté une sorte de bouffissure de la face 
difficile à désigner, et qui s'observe souvent dans les 
affections de ce genre. 

Je mis de suite le malade à l'usage du mélange dont je 
viens de parler. Le suc exprimé des trois plantes fut pris 
chaque jour à la dose de 90 grammes d'abord, et ensuite 
de 120, 150 et 200 grammes. J'interdis l'usage de la viande 
et je donnai pour toute nourriture les pommes de terre, 
les légumes, et pour boisson la décoction de houblon coupée 
avec le vin de Bordeaux. 

Après quarante jours de ce traitement, la consolidation, 
résultat de la guérison de l'affection scorbutique générale, 
était parfaite et la santé tout-à-fait en bon état. 

On doit faire remarquer que la dessiccation et l’ébullition 
enlèvent les propriétés du cochlearia comme de la plupart 
des végétaux antiscorbutiques Cette plante forme la base 
du sirop antiscorbutique , fréquemment employé dans les 
maladies du système lymphatique chez les enfants. 

Le cochlearia, par son action diurétique, m'a réussi 
dans quelques anasarques causées par la durée des fièvres 
intermittentes. 

À l'extérieur, le cochlearia est légèrement rubéfiant, dé- 


99 


tersif. J'ai appliqué avec succès le suc de cette plante 
sur les ulcères scorbutiques et atoniques. Etendu dans 
l’eau , il convient en gargarisme pour déterger et raffermir 
les gencives scorbutiques. L'hiver je lui substitue Ja tein- 
ture alcoolique de la même plante, étendue dans suffisante 
quantité d’eau. On fait mâcher les feuilles de cochlearia 
comme celles de cresson, pour raffermir les gencives molles, 
livides, boursouflées ou scorbutiques. 

On compose un esprit ardent, dit de cochlearia, qui est 
le produit de la distillation des feuilles de cetie plante 
avec la racine de raifort sauvage sur l'alcool, ei que l'on 
donne à la dose de dix à douze gouttes dans des tisanes. 
en polions antiscorbutiques ou pour gargarisme. 


COGNASSIER ou COIGNASSIER. 


Cydonia vulgaris (T.) 
Pyrus cydonia (L.). 


Cet arbre est cultivé dans toute la France. Ses fruits et 
ses graines sont estimés. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Coings, suc étendu dans s.q. d'eau pour boisson, 

Sirop, de 50 à 100 gram., en potion ou pur. 

Rob et gelée (6 sur 10 d'eau et 4 de sucre), de 109 à 200 gram. 

Sirop composé, aromaltise, de 50 à 400 gram. 

Semences, en décoction, de 40 à 50 gram. par kilog. d’eau. 

Mucilage, étendu dans s. q. d’eau. 

À L’EXTÉRIEUR : Pulpe décoclée, q. s. pour cataplasme, 
Semence décoctée, q.s. pour lotions, fomentations, injections, etc. 
Propriétés. 

Les coings sont astringents et conviennent dans les diar- 
rhées et les dysenteries chroniques, l’hémoptysie, la métror- 
rhagie, les flux hémorrhoïdaux, la leucorrhée atonique, Ja 
faiblesse des organes digestifs, etc. 

Les semences sont émollientes et adoucissantes ; elles sont 
prescrites dans les gerçures du sein et des lèvres, la brülure, 
les ophtalmies aiguës, etc. Elles conviennent en décoction 
dans les irritations des voies digestives et urinaires, dans la 
bronchite, la diarrhée, etc. 

Le mucilage de semences de coings peut très-bien rem- 
placer la gomme arabique; il possède toutes les qualités de 
cette substanee. On s’en sert en pharmacie pour favoriser 


100 


la solution et l'incorporation des substances résineuses et 
gommo-résineuses avec différents médicaments. 


Dans le traitement des hémoptysies sans molimen vers 
l'organe malade, ainsi que dans celui des diarrhées chro- 
niques et atoniques, j'ai souvent prescrit la décoction de 
coings coupés par morceaux, et mêlée à égale quantité de 
décoction de semences de la même plante. Ce mélange, à 
la fois mucilagineux el astringent, produit un très-bon effet. 


[Chez les enfants atteints de diarrhées abondantes et qui 
les jettent promptiement dans une extrême débilité, j'emploie 
avec succès, par petites cuillerées fréquemment répétées, une 
mixture composée de sirop de coing 30 grammes, d'infu- 
sion concentrée de sauge 60 grammes. Je fais quelquefois 
appliquer en même temps sur le bas-ventre des fomenta- 
tions tièdes de décoction vineuse de coings préalablement 
coupés par tranches. Cesmoyens sont d’ autant plus efficaces, 
qu'il existe moins d'irritation intestinale , ainsi que je l'ai 
observé dans une diarrhée qui a régné épidémiquement chez 
les enfants au-dessous de l’âge de deux ans pendant l'été de 
1846, et qui, par le prompt épuisement qu'elle cansait, sem- 
blait présenter quelque analogie avec le choléra.] 


Le vin de coing obtenu par la macération dans le vin de 
ce fruit divisé par tranches, convient dans la faiblesse géné- 
rale, dans les convalescences et chez les vieillards ; mais il 
a l'inconvénient de produire la constipation. Ce vin est 
employé à l'extérieur dans le relâchement du vagin, les 
chütes de la matrice, le boursouflement des gencives, etc. 


[J'ai vu employer avec succès, contre la chûte du rectum, 
un cataplasme de pulpe de coing.] 


: 


COLOQUINTE, 


CONCOMBRE COLOQUINTE. 


Colorynthis fructu rotondo majore (T.) 
Cucumis colocynthis (L.) 


Cette plante, originaire de la Syrie, d'Alep, des îles de 
T'Archipel, est naturalisée et cultivée en F rance. Ses fruits 
sont usités. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR: Infusion ou décoction, de 4 à 3 gram. pour 
1 kilog. d'eau (rarement employée à cause de son amertume.) 


._« > état ts 


101 


La pulpe bien pulvérisée, de 20 à 60 cent., seule ou associée à la 

gomme adragante. : 

Leinture (4 sur 12 d'alcool), de 20 cent. à 4 gram., progressive- 

ment, dans un véhicule approprié. 

Vin (vin sucré) (4 sur 6 de vin blanc), de 15 à 60 gram. 

Extrait aqueux (4 de chair sur 7 d'eau froide), La 5 à 40 cent., 

Extrait alcoolique (2 sur 3 d'al. et 9 d'eau froide), j en bols;fpilules. 
À L'EXTÉRIEUR : Pulpe, appliquée sur l'ombilic, comme purgative 

et vermifuge. 

Propriétés. 

La coloquinte, d’une saveur très-amère, est un purgatif 
drastique, hydrogougue, emménagogue et vermifuge. On 
J'a vanté dans les hydropisies passives , les affections sopo- 
reuses, certaines maladies de la peau , la manie, l'épilep- 
sie, la colique saturine, la goutte, l'arthrite chronique, 
la sciatique, les engorgementsatoniques des viscères, les dou- 
leurs mercurielles, les congestions cérébrales, et comme ver- 
mifuge assez énergique pour tuer le ténia. 

Ce purgatif drastique agit avec la même énergie que la 
gomme-gulte. À grande dose, il est toxique; il produit 
des évacuations sanglantes très-douloureuses, l'érosion et 
l’ulcération des intestins. J'ai vu des militaires atteints d’en- 
térite pour avoir pris intérieurement de fortes doses de 
coloquinte, dans l'intention de supprimer promptement la 
chaude-pisse. Elle agit plus spécialement sur le rectum. 

Je l'ai administré dans le cas d'hémiplégie appoplec- 
lique , en lavement à la dose de 4 à 8 grammes décoctés, 
toutefois après une déplétion sanguine suffisante. 

Les anciens ont regardé avec raison la coloquinte comme 
un purgatif violentet dangereux. Les Anglais font un usage 
fréquent de l'extrait de cette plante, mêlé à d’autres ingré- 
dients, est surtout au calomel, dansles maladies chroniques 
du foie. 

Mais de toutes les maladies dans lesquelles on en a fait 
usage, la syphilis constitutionnelle, s’il faut en croire Schræ- 
der, serait celle où la coloquinte aurait eu le plus de succès. 

J'applique souvent sur l'abdomen des enfants, comme 
rermifuge, un mélange d'extrait de coloquinte, { gramme; 
d'aloës pulvérisé, 2 grammes, et de suc d’absynthe, quan- 
tité suffisante. Je place ce mélange au centre d’un emplâtre 
agolutinatif, afin de le maintenir assez long-temps en place 
pour lui faire produire l'effet désiré. Ce topique fait souvent 
rendre les lombrics qui existent dans les intestins chez les 
enfants auxquels il est difficile d’administrer les vermicides 
à l'intérieur. En pareil cas, j'ai aussi employé la coloquinte 
par la méthode endermique. 


102 


J'ai quelquefois appliqué sur le nombril, pour produire 
Je même effet, la pulpe de coloquinte mélée avec le fiel 
de bœuf. 

[Le docteur Chrestien de Montpellier (de la Methode Ia- 
traleptique, Paris 1841), a employé avec succès la coloquinte 
en frictions sur l'abdomen ou à l’intérieur des cuisses, dans 
les affections mentales. Ce médecin rapporte huitobservations 
de manie guéries par l'usage de ces frictions, pratiquées soit 
avec la teinture (60 à 100 gouttes), soitavec la poudre de co- 
Joquinte (1 à 2 grammes), mêlées à l’axonge. L'action du 
médicament se manifestait tantôt par des évacuations al- 
vines, tantôt par l'augmentation de la sécrétion des urines.] 

[La coloquinte doit ses propriétés à un principe très-actif 
que Vauquelin en a séparé sous le nom de colocynthine, 
substance résinoïde d'une amertume extrême, el si éner- 
gique qu’elle peut, à la dose de 5 à 10 centigrammes, rem- 
placer l’huile de croton tiglium. La coloquinte entre dans 
une foule de médicaments composés dont les formules ne se 
trouvent plus que dans les anciennes pharmacopées telles 
que celles de Lemery, de Charas, de Beaumé et autres.] 

(Voy. p. 624). 


CONCOMBRE SAUVAGE, 


ÉLATERIUM , ÆELATÉRION , MOMORDIQUE PIQUANTE , GICLET, 
CONCOMBRE D'ANE. 


Eucumis sylvestris (T.) 
Momcordica elat erium (L.) 


Cette plante vient spontanément en Italie, dans le midi de 
la France. Sa racine et ses fruits sont usités en médecine. 


Préparations €é doses. 

A L'INTÉRIEUR. Fécule, de 50 cent. à À gram., en pilules. 
Extrait (élatérion), de 3 à 20 cent., en pilules. 

A L'EXTÉRIEUR : Miel, de 5 à 40 gram., dans un lavement. 


Propri&iés. 
Le concombre sauvage est un purgatif drastique que l’on 
a vanté dans les hydropisies passives, les engorgements ato- 
niques , les affections cutanées chroniques, la leucorrhée , 
l'aménorrhée, les affections comateuses, eic. 


[Les anciens faisaient un grand usage del'élatérium, etlui 
attribuaient les vertus les plus merveilleuses. Je crois inu- 


1 


TO I SI CE 


103 


tile de rapporter ici tont ce qu'ont dit Théophaste et Dios- 
coride sur les différentes manières de préparer ce médica- 
ment. Quoique très-intéressants, ces détails historiques 
n'ajouteraient rien à ce que l'expérience nous à appris sur 
ses propriétés réelles. 

L'élatérion , préparé suivant le Codex Medicamentarius, 
est un des plus violents purgatifs. Lister à observé que les 
malades qui en font usage ont le pouls plus fort et ressentent 
un mouvement extraordinaire à l'extrémité des doigts. 
Sydenham , Bontius, Heurnius, le recom mandent comme 
très-efficace pour évacuer les sérosités par les selles dans les 
hydropisies. Les dangers de l'administration de l’élatérium 
n'existent pas plus dans cette substance que dans la scamo- 
née, la gormme-gulte, l'huile de croton tiglium. Ses eflets 
sont subordonnés aux précautions ou à l'incurie qui pré- 
sident à son emploi. On a tort de négliger ce médicament. 
Je l'ai employé à la dose de 15 centigrammes , mêlé à un 
peu de poudre de semence d’anis et à l'extrait de genièvre, 
dans un cas d’anasarque exempt de toute irritation viscérale, 
et je m'en suis bien trouvé. 

L'élatérium fait partie de l’électuaire panchimagogue de 
Crollius et des onguents d’agrippa et d'arthanita, composi- 
tions tombées en désuétude et qu'on ne trouve plus que 
dans les anciens ouvrages de pharmacie. 


CONSQUDE (Grande), 


OREILLE D'ANE. 


. Consolida major (T.) 
Symphilum majus sive officinalis (L.} 


Cette plante, très-commune, se trouve dans les prés, 
sur le bord des ruisseaux. Sa racine est usitée. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction, de 15 à 50 gram. par kilog. d’eau. 
Sirop (4 sur 6 d'eau et 32 de sucre), de 50 à 100 gram., en 
potion ou mêlé aux tisanes. 


Cette acine est mucilagineuse, adoucissante, émolliente, 
béchique et un peu astringente. On l’emploie dans l'hémop- 


104 


tysie, l’hématurie , la métrorrhagie , la diarrhée, la dyssen- 
terie , elc. 

Je fais un très-grand usage de la racine de grande con- 
soude dans ces diverses maladies. Cette plante étant très- 
commune , est à la portée des pauvres. 

[La décoction, qui est la forme la plus usitée pour l'emploi 
de cette plante, ne doit pas être faite dans des vases de fer, 
à cause de l’action de l'acide gallique sur ce métal.] 

La grande consoude est loin de justifier la haute opinion 
qu'en avaient conçue les anciens dans le traitement des 
plaies, des hernies, des fractures, des luxations, de la scia- 
tique, des douleurs de goutte. Il suffit du plus simple examen 
pour faire justice de ces erreurs de la crédulité.] 

J'ai été témoin des bons effets de la racine de grande 
consoude contre les gerçures du sein chez les nourrices. 
On creuse cette racine fraîche en lui donnant la forme d’un 
dé à coudre , et l’on introduit le mamelon dans la cavité, de 
manière que la paroi intérieure s'applique sur le mal. Ce 
moyen aussi simple qu’ingénieux, et que beaucoup de 
femmes mettent en pratique dans nos villages , vaut mieux 
que toutes les compositions pharmaceutiques proposées 
pour remédier aux gerçures du mamelon. Il calme la douleur 
et procure une prompte cicatrisation. 


COQUELICOT. 


Papaver erraticum (T.) 
Papaver rheas (L.) 


Le coquelicot croit sponianément, et se trouve surtout 
dans les champs de blé. Les fleurs sont usitées. 


A L'INTÉRIEUR : En infusion , 5 à 4 pincées par kilog. d'eau. 
Teinture , 1 à 2 gram., en potion. 
Extrait des capsules , 40 à 40 centigrammes. 

Eau distillée , 30 à 100 gram., en potion. 
Sirop, 10 à 30 grammes. fé 
Suc , 20 cent. à 5 gram. 


Calmant , légèrement narcotique et sudorifique, le coque- 
licot convient dans le catarrhe pulmonaire, les fièvres érup- 
tives, les tranchées des enfants, la coqueluche. 

Chez les malades qui ne supportent point les effets de 


105 


l'opium sans éprouver des accidents graves, j'emploie le 
coquelicot avec avantage. Il produit alors le même effet que 
l’opium, eu égard à l’extrême susceptibilité des organes et à 
une sorte didiosynerasie qui ne permet pas l'administration 
de ce dernier médicament, même à la dose la plus 
légère. Il convient aussi aux enfants pour la même 
raison. 

[Fouquet en administrait le suc à la dose de 20 centi- 
grammes à 1 gramme, dans la coqueluche et les maladies 
convulsives. Baglivi associait l'infusion des fleurs à celle 
des semences de lin dans la pleurésie. On a prétendu, 
d’après l'analyse chimique, que le coquelicotne contient pas 
de narcotine et qu’il n’a aucune propriété médicale. 
Je répondrai à cette assertion par un fait irrécusable : un 
de mes enfants âgé de 3 ans, atteint de coqueluche , ayant 
pris le soir 146 grammes de sirop de coquelicot, eut pen- 
dant toute la nuit des hallucinations continuelles. La même 
dose, répétée quatre jours après, produisit le même effet.] 

(Voy. p. 624). 


CORIANDRE. 


Coriandrum majus (T.) 
Coriandrum sativum (L.) 


La coriandre croît spontanément en Italie et en Espagne, 
eLest cultivée dans nos jardins.—Les semences sont usitées. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, 40 à 50 gram. par kilog. d'eau. 
Eau distillée (4 sur 4 d'alcool), 50 à 100 gram., en potion. 
Poudre, 1 à 4 gram., en pilules, bols, électuaire, ou dans du 
vin. 
Teinture (1 sur 8 d'eau-de-vie), 2 à 4 gram., en potion. 
Huile essentielle, 50 cent. à 4 gram., en potion. 


Les semences de coriandre, d’une saveur forte et piquan- 
te, sont stimulantes, carminatives ; on les emploie dans les 
affections atoniques des voies digestives, et elles sont surtout 
propres à dissiper le gaz qui s’y accumule. Cependant elles 
ne conviennent, ainsi que les semences d’anis, de carvi, etc., 
que lorsque le développement de ce gaz tient à des causes 


106 


débilitantes. Ajoutées aux potions purgatives, elles neutra- 
lisent jusqu'à un certain point l'odeur du séné, et empêchent 
même, suivant la remarque de Cullen, cette dernière sub- 
stance d’occasionner des coliques. On a vanté les semences 
de coriandre à haute dose contre les fièvres quartes rebelles : 
je n'ai aucun fait à citer en faveur de leur propriété fébri- 
fuge. Jtard s'en servait en injection dans les névroses 
acoustiques. 

La plante verte paraît avoir une propriété narcotique qui 
n'existe point dans la plante sèche. Lorsqu'elle est fraiche, 
elle exhale une odeur vireuse qui n’est pas exempte de dan- 
ger. Gilibert dit avoir éprouvé des cardialgies, des maux de 
tète, des nausées, en respirant l'odeur de cette plante ras- 
semblée en grande quantité. Cette odeur, qui se rapproche 
de celle de la punaise, se dissipe par la dessication, et se 
transforme en un parfum aromatique. 

C’est avec raison que Cartheuser, Wauters et Bodart ont 
proposé de substituer la coriandre, que nous cultivons très- 
facilement, au cumin qui nous vient de l'étranger. 


CORONILLE, 


SÉNÉ PBATARD, FAUX SÉNÉ. 


Coronilla cesalpini (T.) 
Coronillu emerus (L.) 
Cette plante croît spontanément dans les climats tem- 
pérés de l'Europe, dans les haies et les lieux ombragés. 
Les gens de la campagne se purgent avec les folioles de 


Ja coronille. Je puis assurer qu'elles font autant d'effet 
que le séné, en augmentant la dose d’un tiers environ. 


— 


CRESSON DE FONTAINE , 


CRESSON D'EAU. 


Sisymbrium palustre repens (T.) 
Sisymbrium nasturtium (L.) 


Cette plante, dont les feuilles sont usitées, se trouve dans 
les eaux courantes des petits ruisseaux. 


Préparations et doses; 


A L'INTÉRIEUR : Iufusion ou décoction à vase elos, de 30 à 60 ve 
par kilog, d'eau. 


107 


Suc exprimé de l'herbe fraîche, de 60 à 120 gram. 
rop (4 de suc sur 2 de sucre ), de 30 à 199 gram., en potion 
ou pur, 
Huile essentielle, Ge 25 cent, à 4 gram., en potion {rarement 
employée ). . 
En salade, en quantité quelconque.—On mäâche les feuilles pour 
raffermir les gencives , déterger les ulcères scorbatiques de la 
bouche. 


Propriétés. 


Le cresson d’eau est stimulant, antiscorbutique ; diuré- 
tique, expectorant et diaphorétique. [1 augmente les forces 
digestives et convient dans la débilité de l'estomac , le scor- 
but, les cachexies, les engorgements de la rate par suite de 
fièvres intermittentes, l’anarsaque, les scrofules, la phthisie, 
l’empième, les calculs. Son action est analogue à celle du 
cochlearia , du raifort et des autres plantes antiscorbutiques. 

Le cresson est d’un usage tout-à-fait populaire ; on le 
mange en salade et le paysan le prend avec son pain. 
Toutefois, cette plante ne peut être utile que lorsque les 
malades qui en font usage sont exempts de fièvre , d’inflam- 
mation, d'irritation locale quelconque ou d'irritabilité ner- 
veuse. J’ai employé le cresson dans une foule de cas de 
maladies chroniques. Je ne parlerai point du scorbut, 
contre lequel on l’administre sous toutes les formes. J'en ai 
retiré de grands avantages dans les catarrhes pulmonaires 
chez les sujets lympatiques et qui expectoraient abon- 
damment. Dans ces cas, je donne le suc à la dose de 120 
grammes , mêlé avec autant de lait. 

Un jeune homme de 23 ans, fils d'un cultivateur du vil- 
lage de Crémarest, était alteint de toux avec sueurs noc- 
turnes, amaigrissement, grande débilité, inappétence, etc.; 
il était regardé généralement comme poitrinaire depuis trois 
mois environ. Sa maladie datai du mois de février 183%, et 
nous étions en juin de la même année. Lorsque je levis, 
ses traits étaient altérés, sa débilité prononcée au point qu'il 
ne pouvait plus sortir ; sa toux était fréquente, surtout pen- 
dant la nuit, et il expectorait abondamment des crachats 
mucoso-purulents; mais il avait peu de fièvre. Il rapportait 
un état de gêne parfois très-pénible à la région sternale, 
sans signe de vive irritation. L'exploration de la poitrine 
me fit concevoir l'espérance de guérir ce malade: les 
poumons me paraissaient sains. Je le mis à l'usage du suc 
exprimé de cresson mêlé avec autant de lait chaud. Dès 
les premiers jours de l'emploi de ce moyen, l'amélioration 
fut sensible ; la toux et l’expectoration diminuèrent, l'appétit 


108 


revint, les sueurs nocturnes cessèrent; les forces se ré- 
tablirent si promptement qu’au bout de quarante à cinquante 
jours de traitement le malade fut complètement guéri. 

Je pense que les prétendues cures de phthisie pulmonaire 
par l'emploi du cresson et des autres anti-scorbutiques, 
souvent donnés sous forme de sirop dans la pratique ur- 
baine, ne se rapportent qu’à des affections catarrbales bron- 
chiques. Il était souvent difficile de distinguer ces deux 
maladies avant la découverte de l’auscultalion médiate. 

A l'extérieur, j'ai employé le cresson comme résolutif et 
détersif, en cataplasme ou tout simplement pilé. Il convient 
sur les ulcères scorbutiques, scrofuleux, sordides, etc. 
J'ai vu des paysans débarrasser leurs enfants de la teigne 
en leur faisant manger du cresson et en appliquant sur la 
tête cette herbe pilée avec du saindoux, pendant quinze à 
vingt jours. Après la guérison apparente , on fait continuer 
l'usage intérieur du cresson aussi long-temps que la saison 
le permet. On conçoit toute l’action de cette plante sur les 
systèmes lymphatique et dermoïde. Selon Tournefort, son 


suc, injecté souvent dans les narines, aurait guéri des 


polypes muqueux. 

Le suc de cresson est la meilleure préparation à employer. 
La conserve et l'extrait aqueux qu’on en préparait ‘autrefois 
ne méritent aucune confiance. La décoction, même à vase 
clos, est peu énergique. La dessiccation dissipe le principe 
actif de cette plante.— On a récemment découvert la présence 
de l'iode dans le cresson. 


CYCLAMEN , 
CYCLAME, CYCLAMINE D'EUROPE, PAIN DE POURCEAU. 


Cyclamen europeum (L.) 


Les Arabes donnent à cette plante le nom d’arthanita. 
Elle se trouve dans les lieux ombragés, les haies, les fossés 
et les bois frais du midi de l'Europe. La racine est usitée. 


La racine fraîche, en décoction, 4 à 412 gram. dans un 4/2 kilog. 
d'eau. 
En poudre, de 50 cent. à 4 gram., selon son degré de dessiccation. 


La racine fraîche , inodore , d'une saveur âcre, brülante 
et amère, est purgative, résolutive et vermifuge. Le principe 


; 


109 


âcre se volatilise en partie par la dessiccation. Cette racine, 
gardée un an dans un lieu sec, et pulvérisée, à la dose de 
30 à 60 centigrammes, triturée avec de la gomme, purge 
très-bien et sans tranchées. « C’est, dit Gilibert, un de ces 
médicaments précieux que la pratique des médecins ano- 
dins a chassés des boutiques, qui offre cependant de grandes 
ressources dans les maladies chroniques. » 

Elle est la base de l’onguent d’arthanita que l’on appli- 
quait autrefois sur le bas ventre des enfants comme purga- 
tive et vermifuge. 

Je regrette que l’on ait abandonné l'usage de l’onguent 
d'hartanita. Je l'ai employé en frictions sur l'abdomen des 
enfants, comme purgatif et vermifuge : il m'a presque tou- 
jours réussi. Quaat à l'emploi intérieur de la racine de cy- 
clame, je ne puis fournir aucune observation concluante. 
Ses effets plus ou moins prononcés, selon le degré de dessic 
cation, m'ont éloigné de tout essai. Il faut, en thérapeutique, 
une action sur laquelle on puisse compter. 

A l'extérieur celte racine est résolutive. 

On assure que récoltée en automne, la racine de cyclamen 
est plus active que dans les autres saisons. 


mt 


CYNOGLOSSE , 


LANGUE DE CHIEN. 


Cynoglossum vulgare (T.) 
Cynoglossum officinale (L.) 


La cynoglosse croît presque partout, dans les lieux in- 
cultes el pierreux. Les racines et les feuilles ont été em- 
ployées. 


Il règne beaucoup de vague sur les propriétés de la cy- 
noglosse, que les uns considèrent comme narcotique, tandis 
que les autres la regardent seulement comme adoucissante 
et mucilagineuse. Cette plante est réellement délétère ; mais 
celte qualité s’affaiblit et disparaît même par la dessiccation. 
Dans ce dernier état, j'en ai employé les racines et les 
feuilles comme béchiques et adoucissantes, à la dose de 30 
à 60 grammes pour un kilog. d’eau, dans les affections ca- 
tharrhales, les diarrhées avec tranchées, les toux sèches ou 
nerveuses. 


110 


Les feuilles et les racines fraîches de cynoglosse, en cata- 
plasme ou en décoction rapprochée, sont très-utiles appli- 
quées sur les brûlures, les inflammations superficielles et 
les érysipèles. Elles calment la douleur. Les cultivateurs 
en font très-fréquemment usage dans la médecine vétéri- 
naire, en fomentation sur les engorgements inflammatoires 
et dans l’ophtalmie aiguë. 


Les pilules de cynoglosse, si usitées en médecine, mé- 
ritent-elles le nom qu'elles portent? C’est évidemment à 
lJ'opium el aux semences de jusquiame, qui entrent dans 
leur composition, que l’on doit attribuer la propriété nar- 
cotique dont celles jouissent. 


DENTELAIRE, 
DENTAIRE , HERBE AUX CANCERS. 


Pinmbago quorumdam (T..) 
Plumbago europea (L.) 


La dentelaire, ainsi nommée à cause de la prepriéte que 
les anciens lui supposaient d’apaiser les douleurs des dents, 
ne croît en France que dans les départements méridionaux. 
La racine est usitée. 


L 


La racine de cette plante est d’une saveur âcre et brülante. 
Bien que Widelius, cité par Peyrithe, ait considéré la plum- 
bago comme émétho-cathartique et antidyssentérique, et 
qu'il lait même décoré du nom d’ipecacuanha nostras, je 
n'ai jamais tenté de l'administrer à l’intérieur. L'appli- 
cation à l'extérieur exige même beaucoup de précautions. 
Cette racine caustique a été long-temps employée en Pro- 
vence pour la guérison de Ja teige et de la gale; mais 
Garidel a vu résulter de graves accidents de ce traitement 
empirique, et Sauvages parle d’une jeune fille qui fut en 
quelque sorte écorchée vive pour en avoir fait usage. 
Cependant Sumeire l'a proposée en 1779 contre la gale, 
mais en lui faisant préalablement subir une préparation 
ayant pour effet d'en diminuer l’extrême âcreté. Cette pré- 
paration consiste à triturer dans un mortier de marbre deux 
ou trois poignées de racine de cette plante, sur lesquelles 
on verse un demi kilogramme d'huile bouillante. Après 
avoir broyé le tout pendant quelques minutes, passé à tra- 


ec 7 


111 


vers un linge et exprimé fortement le résidu , on place une 
partie de ce résidu dans un nouet de linge fin que l’on 
trempe ensuite dans l'huile tiède, pour en faire des onc- 
tions sur la peau. Trois ou quatre de ces onctions suffisent 
en général pour la guérison de la gale simple. Les bons 
effets de ce traitement ont été constatés dans le temps par 
une commission de Ja Société royale de Médecine de Paris. 


[Mais on doit distingeur Ja gale du prurigo, avec lequel on 
Ja confond souvent ; car si on pratiquait des frictions avec la 
préparation dont nous venons de parler sur le prurigo for- 
micans, celte éruption, au lieu de guérir, en deviendrait 
plus rebeile.] (1) 

Presque toutes les parties de la dentelaire peuvent être 
employées à l'extérieur comme vésicatoires : l'effet en est 
prompt. On s’en sert avantageusement dans les ulcères ato- 
niques, pour réprimer les chairs fougueuses et activer le 
travail de la cicatrisation dans les plaies anciennes, pâles 
el blafardes. Elle perd une partie de son âcreté par la 
dessiccation. 


DIGITALE POURPRÉE, 


GANT DE NOTRE-DAME. 


Digitalis purpurea (T.) 
Digitalis purpurea (1...) 


La digitale se trouve dans les bois des environs de Paris, 
et surtout dans la Normandie et la Bretagne, le long des 
routes, dans les terrains sablonneux et élevés. On la cultive 
dans les jardins, où elle se sème d'elle-même. Les feuilles 
et les fleurs sont usitées. | 


(1) La gale consiste dans de petites vésicules occupant les interstices 
des doigts, les aisselles, la partie interne des cuisses, et contenant une 
matière séreuse qui, de transparente qu’elle est d’abord, devient jau- 
nâtre, épaisse, concrèle, Le prurigo se développe le plus souvent dans le 
sens de l'extention des membres, et les papules qui le constituent, déchi- 
rées par les ongles, se couvrent ordinairement de petites croûtes noires de 
sang desséché.. Mais ce qui distingue surtout le prurigo de la gale, c’est 
que dans cette dernière les malades éprouvent du soulagement en se 
grattant, tandis que dans le prurigo, la démangeaison n’en devient que 
plus vive. L'absence de l’acarus scabiei dans le prurigo établit encore une 
différence entre ces deux dermatoses. 


112 
Préparations ef does. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion des feuilles (comme diurétique), 4 à 4 
gram. par kilog. d'ean bouillante. 

Infusion des feuilles (comme contro-stimulant), 4 à 42 gram. par 
kilog. d'eau. 

Suc exprimé (comme diurétique et sédatif), 2 à 8 gram. 

Sirop d'infusion (4 de feuilles sur 46 d'eau et autant de sucre), 
45 à 100 gram., comme diurétique. 

Sirop de sue (2 de teinture de suc sur 7 d’eau et 15 de sucre), 

- 45 à 400 gram. 

Poudre (comme diurétique), à à 60 centigram., progressivement. 

Poudre (comme contro-stimulant) , 50 centigr. à 4 gram., pro- 
gressivement. 

Extrait alcoolique (4 sur 8 d'alcool à 24° ), 2 à 50 centigram., en 
pilules, polion, etc. 

Extrait aqueux [operé par évaporation avec le suc) , 2 à 50 cen- 
tigram., en pilules; etc, 

Suc épaissi, 2 à 50 centigrammes. 

Teinture alcoolique (4 de feuilles sur 4 d'alcool), 10 centigram. à 
4 gram. comme diurétique , et de 4 à 2 gram. et plus comme 
contro-stimulant. 

Teinture éthérée, comme la teinture alcoolique. 


A L'EXTÉRIEUR : Poudre, en frictions (macérée dans la salive ou 
dans l’eau), où par la méthode endermique. 
Teinture , 2 à 45 gram.., en frictions. 
Feuilles en décoclion , cataplasme, fomentations , pommade, etc. 


Propriétés. 


La digitale, d’une saveur d’abord nauséeuse , puis très- 
amère, détermine l’excrélion d’une assez grande quantité 
de salive, un léger sentiment d'âcreté dans le gosier, un 
faible soulèvement de cœur et de la sécheresse dans la 
bouche. Cette plante exerce une action stimulante sur les 
organes digestifs, sur le système nerveux, sur divers or- 
ganes sécréteurs, et même, quoique d’une manière instan- 
tanée, sur le système sanguin. Ses effets sur l'organisme 
sont, comme pour toutes les substances toxiques, subor- 
donnés aux doses auxquelles on l’administre. À hautedose, 
elle irrite fortement la muqueuse gastro-intestinale, stupéfie 
le système nerveux, cause des nausées , des vomissements, 
des cardialgies, des vertiges, des syncopes, du délire, des 
hallucinations, un coma profond et la mort. À dose mo- 
dérée, elle stimule l'estomac, augmente d’abord l'action du 
cœur, et devient secondairement contro-stimulante. À 
petite dose, elle augmente la sécrétion urinaire et active les 
fonctionsdu système absorbant. Presque toujours elle dimi- 


sh d'atluléeté d'ail" trs. CR ct RÉ ES 


113 


nue la fréquence du pouls : cette diminution peut être d’un 
tiers ou même de moitié. On l’a vue quelquefois, chez cer- 
tains sujets, exciter la salivation et même la sueur. 

[L'effet sédatif de la digitale sur la circulation est d'autant 
plus facilement obtenu que l'estomac, qui en reçoit l'action 
primitive, est moins irrité. Broussais a le premier remarqué 
que lorsque l'irritation gastrique est prononcée, la sédation 
n'est point opérée, ce qui peut jusqu "à un certain point ex- 
pliquer la diversité des opinions émises sur les effets de 
cette plante. Cependant lorsqu'il n'existe pas d'irritation 
gastrique antérieure eL qu’on n'élève pas les doses de Ja 
digitale au-delà de 15 à 30 centigrammes par jour, lex- 
citation que cette plante détermine momentanément et à 
diverses reprises dans les premières voies ne l'empêche 
pas de produire le ralentissement du pouls. 

Si après avoir obtenu ce ralentissement, on continue 
d’administrer la digitale à la même dose, le pouls revient à 
son rythme habituel. Il est donc nécessaire d'en suspendre 
de temps en temps l'usage, et de recommencer par des 
doses légères qu'on augmente progressivement. ] 

J'ai rencontré des sujets chez lesquels je n'ai jamais pu 
produire la sédation par la digitale administrée sous toutes 
les formes et avec touies Les précautions possibles. J'ai 
quelquefois même constaté une accélération soutenue du 
pouls par son usage, sans qu’il se manifestât la moindre 
irritation d'estomac, Ces cas exceptionnels se rencontrent 
très-rarement ; mais, quoiqu'il soit plus facile de les ob- 
server que de les expliquer, il n'est pas inutile d'en faire 
mention. 

[J'ai vu la digitale en poudre, donnée à la dose de 25 cen- 
tigrammes en trois prises dans la journée à une jeune 
femme atteinte de palpitations par suite de chagrins 
domestiques, causer des vertiges, des étourdissements, 
suivis de vomissements, d’anxiété précordiale , et d’un ra- 
lentissement si prononcé dans la circulation , que le pouls 
ne donnait plus que trente-quatre pulsations par minute. 
Ces accidents se dissipèrent peu à peu , et je pus de nouveau 
et sans inconvénient employer le médicament en tein- 
ture, à la dose de trois gouttes, et en augmentant progressi- 
vement jusqu’à celle de quinze gouttes par jour. La sédation 
s’est manifestée par la cessation graduelle des palpitations. 

Ce qui arrive presque toujours. comme nous l'avons dit 
plus haut, par l’action de la digitale prise à une certaine 
dose, c'est une excitation du cœur et des vaisseaux san- 
guins, à laquelle succède bientôt un ralentissement, un 

8 


11% 


effet sédatif qui ne saurait être contesté. Ces changements 
physiologiques sont d'autant plus prononcés que la dose de 
la plante a été plus élevée et que l’on a persisté dans son 
usage. Saunders, dont les expériences sont connues, à vu la 
fièvre inflammatoire être le résultat immédiat de cette per- 
sistance. Un fait à peu près semblable s’est offert à mon 
observation chez un jeune homme de 15 ans, atteint de 
palpitations telles qu'on en observe à l’âge de puberté, et 
qui ne reconnaissent le plus souvent d'autre cause que le 
développement naturel, le surcroît d'activité des organes 
contenus dans la poitrine. Il a suffi de six doses de 5 centi- 
grammes chacune, prises dans l'espace de quarante-huit 
heures, pour donner licu à une fièvre violente, qu’une 
saignée de 400 grammes et l'usage des boissons émulsives 
el mucilagineuses ont promptement dissipée. Un ralentis- 
sement marqué dans la circulation a succédé immédiate- 
ment à l'excitation fébrile : de 105 pulsations le pouls était 
tombé à 65. L'état des voies digestives me le permettant , 
j'ai pu entretenir ce ralentissement en donnant au malade 
l'extrait aqueux de digitale à la dose légère de 2 centi- 
grammes, trois fois par jour, et progressivement à celle. de 
10 centigrammes, que je n’ai point dépassée. Le malade, 
dont l'affection morale était grande, par la crainte d'un 
anévrisme , était guéri le irentième jour. 

J'ai cru devoir dans ce cas suspendre l'administration de 
la digitale quelques jours après l'émission sanguine, afin de 
m'assurer de la réalité de son action sédative ; dès le troi- 
sième jour de cette suspension, le pouls était revenu à 80 
pulsations : la reprise du médicament l’a ramené de nouveau 
à une variation de 60 à 65 battements. 

On peut induire des faits que nous venons de citer: 1° que 
dans l'administration des médicaments énergiques en géné- 
ral et de la digitale en particulier , il est important de varier 
les doses et de ne commencer que par les plus légères ; 
90 qu'ilest quelques fois utile de substituer une préparation 
à une autre ; 3° que l’on obtient le ralentissement du pouls 
sans excitation primitive appréciable, en commençant l’u- 
sage de la digitale par des doses très-légères qu'on n'aug- 
mentie que peu à peu, 

L’infusion de la poudre de digitale pendant une heure , 
dans s. q. d’eau, à la dose de 50 centigrammes à { gramme, 
m'a semblé la préparation la plus active; mais elle est plus 
difficilement supportée par l'estomac que la poudre, la 
teinture et l'extrait aqueux préparé par évaporation avec 
le suc. Quelquefois, après avoir donné inutilement la 


115 


teinture , j'ai obtenu de prompts effeis de la poudre chez le 
même malade et tout-à-fait dans les mêmes circonstances. 

J'ai reconnu que la poudre de digitale, en substance ou 
en infusion, et l'extrait aqueux préparé avec le suc exprimé, 
avaient un effet plus certain et plus constant que toutes les 
autres préparations. J'emploie le suc exprimé de digitale 
dans les palpitations, les dyspnées, etc. Je commence par 
la dose de 1 à 2 grammes, et j'augmente graduellement jus- 
qu’à celle de trois cuillerées à café, mêlées avec une sufñi- 
sante quantité d’eau miellée ou sucrée.] 

L'influence si marquée de la digitale sur la circulation 
a dû la faire employer dans les maladies du cœur, où elle 
a eu des avantages réels dans les palpitations anévrisma- 
tiques, dans certaines hémorrhagies actives, telles que 
l'hémoptysie, la métrorrhagie par afflux utérin, lépi- 
taxis, etc. La teinture alcoolique de cette plante, à la dose 
de 1 à 2 grammes, avec 4 grammes de nitrate de potasse 
dans 220 grammes d'eau distillée de laitue, donnée par 
cuillerées d'heure en heure, m'a parfaitement réussi dans 
plusieurs cas d’hémoptysie grave, principalement caracté- 
risés par le molimen hémorrhagique très-prononcé et par 
la fréquence du pouls. J'ai pu ainsi m'abstenir de saignées 
répétées et conserver les forces dans des circonstances où 
une disposition phthisique rendait redoutables les émissions 
sanguines trop abondantes. 

L'emploi de la digitale, indiqué quand il y a hypertrophie, 
contractions énergiques des ventricules avec ou sans dilata- 
tion, est évidemment nuisible dans la dilatation des cavités 
du cœur avec amincissement des parois, débilité générale, 
teinte violacée de la face, etc. 

Dans les palpitations résultant d’une surexcitation primi- 
tive du système nerveux, l'effet sédatif de la digitale est bien 
moins marqué et même souvent nul: c’est directement sur 
la cause première qu'il faut agir, et non sur le cœur, qui 
n’est que sympathiquemernt atteint ou seulement sous l’in- 
fluence d'une concentration essentiellement vitale. 

[Considérant l’eflet sédatif de la digitale, on a été conduit 
à l'employer dans les inflammaiions. Beddoes, qui a exagéré 
les propriétés de cette plante, a cru néanmoins devoir signa- 
ler les dangers auxquels expose l'abus qu’on peut en faire, 

«Si quelqu'un était assez fou, dit-il, pour négliger la res- 
source presque certaine qu'offre la lancette dans la pleurésie, 
en faveur de la vertu sédative de la digitale, ilaugmenterait la 
maladie s’il se bornait à des doses modérées. Si, voulant asso- 
cier divers agents thérapeutiques, il faisait en même temps 


116 


des saignées copieuses, sa pratique ne serait pas rationnelle, 
le bien-être produit par la phlébotomie pouvant masquer les 
mauvais effets causés par le remède. » 

Cependant nous ne devons pas laisser ignorer que Tom- 
massini employa la digitale dans un cas de pleurésie où les 
saignées lui avaient paru inutiles, et que Mac-Léan cite un 
cas à peu près semblable. Cette plante m'a réussi dans les 
épanchements pleurétiques, où elle agissait plutôt comme 
diurétique que comme sédative ; mais ayant toujours appli- 
qué en même temps un vésicatoire sur le côté malade, je ne 
puis faire la part du médicament dans les résultats heu- 
reux que j'ai obtenus. 

La digitale a été placée par les médecins italiens au 
nombre des remèdes contro-stimulants. Rasori l'a employée 
dans la pneumonie, et J. Frank l’a proposée en décoction, 
unie au nitrate de potasse (1 à 2 gram. de feuilles de digi- 
tale dans 650 gram. d'eau réduite à 500 gram., avec addition 
de 4 gram. de nitrate de potasse et 30 gram. de sirop sim- 
ple). Mais comme on a dans le tartre stibié un moyen beau- 
coup plus certain, la digitale, dont les avantages dans ce cas 
sont loin d'être démontrés, a été avee raison abandonnée. 

Comme diurétique, la digitale estun des meilleurs moyens 
curaiifs dans les hydropisies essentielles. Dans l’hydrothorax 
dépendant d’une lésion organique du centre circulatoire , 
elle produit un soulagement tel, en dissipant l’infiltration et 
les collections séreuses, que des malades ont pu prolonger 
leur existence pendant plusieurs années et rester quelque- 
fois long-temps sans récidive. Ici l’hydropisie n'est que l’ef- 
fet d’une autre maladie; mais cet effet devient lui-même 
une cause qui tue le malade avant que la lésion essentielle 
soit arrivée à sa dernière période. Dans ce dernier cas, la 
digitale agit à la fois comme sédative et comme diurétique 
contre les palpitations et contre l'hydropisie. Comme diu- 
rétique elle est si énergique qu'après quatre ou cinq jours 
de son usage, les hydropiques rendent quelquefois six litres 
d'urine en vingt-quatre heures, quoique dans le même 
temps ils n'aient pris qu'un litre de boisson. Cette diurèse 
ne commence en général que trois à cinq jours après l'em- 
ploi de la digitale, et elle est annoncée par la limpidité des 
urines, lorsque celles-ci étaient auparavant troubles et sé- 
dimenteuses. Quand ce changement à lieu, lors même que 
Ja secrétion urinaire n’est pas augmentée, je puis pronosti- 
quer avec certitude le succès désiré : c’est un fait de séméio- 
tique que j'ai constamment observé. Lorsqu'au bout de 
huit jours de l’usage de la digitale l'effet diurétique ne s’est 


117 


point manifesté, il est inutile d’én continuer l’administra- 
tion. Il faut recourir à d’autres moyens ou l’employer à 
l'extérieur, ce qui réussit quelquefois. 

Je pense avec le Dr Vassal (Dissertation sur les effets de la 
digitale pourprée dans les hydropisies), que la digitale est 
sans effets dans les hydropisies enkistées et dans celles du 
cerveau et du rachis. Je crois mème qu'elle réussit bien ra- 
rement dans l'ascite, à moins que cetie dernière maladie ne 
soit essentielle et passive (1). 

J'ai rencontré en 1840 un cas de cette espèce, survenu 
à la suite de la scarlatine, chez un garçon de douze ans, 
ayant le sang appauvri par la misère, et qui fut guéri d'un 
épanchement séreux abdominal par l'usage de la poudre 
de digitale à l’intérieur et des frictions avec la teinture de 
la même plante sur le bas-ventre, 

Je pourrais produire un grand nombre d'observations en 
faveur de l'emploi de la digitale dans les hydropisies ; mais 
eiles ont tant d'analogie avec celles qu'on trouve dans les 
auteurs (2), qu’elles ne pourraient être qu’une répétition de 
faits connus de tous les praticiens, et sur lesquels il ne 
reste aucun doute.] 

Je me contenterai de rapporter ici un cas d'albuminurie 
aiguë bien caractérisée ({ maladie de Brigh : hydropisie 
dépendante d'une affection des reins), et dans lequel Ia 
teinture de digitale a été employée avec succès. Mre de 
Lamarlière, âgée de 35 ans, d’un tempéramment Ilympathico- 
sanguin, enceinte de cinq mois environ, et n'ayant jamais 
eu d’enfant, était dans un état alarmant lorsque je fus 
appelé, bien qu’elle ne fût malade que depuis une dizaine 
de jours. Elle avait de fréquents vomissements, le pouls 
était dur, vite et plein, et la difficulté de respirer telle- 
ment grande, qu’elle était obligée de se tenir sur son séant. 
Une douleur sourde, plus prononcée à gauche, existait à la 
région lombaire ; les extrémités inférieures étaient œdéma- 


(1) Dans ces hydropisies les absorbants et les exhalants sont inactifs 
ou agissent avec beaueoup moins d'énergie. Je sais qu'on a nié l’exis- 
tence de cette cause dans les hydropisies, comme on a repoussé dans la 
doctrine physiologique la possibilité des hémorragies passives ; comme si 
dans l’inertie de l'utérus, par exemple, où ies orifices vasculaires laissent 
échapper le sang, on n'avait pas une preuve irrécusable de l'existence de 
ces hémorragies, El bien! l’épanchiement séreux dont je parle est-il autre 
chose qu’une hémorragie blanche passive ? 

(2) Ces auteurs sont principalemeut Bipauct-pe-ViLers ( Essai sur les 
propriétés médic. de la digitale, 2e édit., 4812); Vassa (Dissert. inaug. 
sur les effets de la digitale dans les hydropisies, 1809) ; Coure (de t’Hy- 
aropisie de poitriue et des palpitations de cœur, 2e édit., 1822). 


i18 


tiées, volumineuses, tendues, crypsipélateuses vers la partie 
inférieure, où se trouvaient d'anciens ulcères variqueux et 
un engorgement cellulaire habituel. Les urines étaient san- 
guinolentes. 

La région du cœur m'offrit à l'exploration des battements 
précipités, profonds, sourds, de la matité à la base dans 
une étendue assez considérable, et telle que je pus consta- 
ter l'existence d’un épanchement péricardique. Ce fut le 
17 mai 1845 que je vis la malade pour la première fois. Je 
pratiquai immédiatement une saignée du bras de 500 gram. 
Je constatai dès le lendemain. d’abord par l'acide nitrique, 
ensuite par l’action de la chaleur, d’après les procédés indi- 
qués par M. Rayer, la présence d’une grande quantité d’al- 
bumine dans l'urine. Le sang tiré la veille était très-couen- 
neux et avec retrait considérable du caillot. Le soulagement 
étant peu sensible, je pratiquai une seconde saignée le 21, 
de 600 grammes environ, eLje prescrivis la teinture de digi- 

tale à la dose de dix gouttes dans un peu d’eau sucrée, 
quatre fois dans les vingt-quatre heures, en augmentant 
d'une goutte chaque fois tous les jours. Le soulagement ne 
se fit pas attendre : après deux jours de l'usage de ce médi- 
cament, la dyspnée diminua considérablement; bientôt les 
urines, qui étaient beaucoup moins abondantes, augmen- 
térent, le pouls fut moins fréquent, l’œdématie des cuisses 
moins considérable. 

Mais vers le 27 (dix jours après ma première visite) il y 
eut recrudescence des symptômes; le pouls reprit de la du- 
reté et de la fréquence, l'oppression revint, la douleur rénale 
augmenta, et une plus grande quantité d’albumine se fit re- 
marquer dans l'urine, qui reprit aussi plus de coloration et 
devint noirâtre au bout de quelques minutes de repos. Une 
troisième saignée de 500 grammes environ fut pratiquée. On 
continua l’usage de la teinture de digitale à l’intérieur, tou- 
jours à doses graduellement augmentées, et l'on fit des fric- 
tions à Ja partie interne des cuisses avec cette même tein- 
ture, à Ja dose de f2grammes pour chaque friction, que l'on 
pratiquait matin et soir. Dès lors le mieux fut progressif et 
très-sensible; dans les huit jours qui suivirent, la respira- 
tion devint beaucoup plus facile, les urines furent de nou- 
veau plus abondantes, à peine sanguinolentes, mais toujours 
plus ou moins albumineuses. Les battements du cœur plus 
rapprochés de la paroi thoracique, et la matité précordiale 
tout-à-fait dissipée, me rassurèrent. Cependant, malgré l’a- 
mélioration des sy mptômes principaux, les jambes et a par- 
tie inférieure des cuisses restaient œdématiées, les urines 


[19 


contenaient toujours plus ou moins de flocons albumineux ; 
enfin Ja cure n’était pas complète et je craignais de nou- 
veaux accidents, lorsque le 22 juin (33 jours après ma pre- 
mière visite, 43e jour de la maladie), la malade ressentit 
vers minuit les douleurs de l’enfantement. À cinq heures du 
matin, le 23, elle accoucha d’un garçon mort depuis quel- 
que temps, en état de macération putride, et au terme de six 
mois environ. Dès ce moment, et sans médication aucune, 
l'œdème et tous les autres symptômes se dissipèrent avec 
une promptitude telle, que dix jours après il ne restait au- 
cune {race de la maladie. Les suites de couches furent na- 
turelles, les forces se rétablirent peu à peu , et la malade 
se livra bientôt à ses occupations ordinaires. 

Cette dame est de nouveau enceinte. Elle a été saignée au 
cinquième mois de sa grossesse : elle est maintenant arrivée 
au neuvième mois sans le moindre indice de reproduction 
de symptômes pouvant faire craindre le retour de la néphrite 
albumineuse (1). 

[Considérée sous le rapport de son action sur le système 
absorbant et dans l’ensemble de ses propriétés, la digitale 
a été préconisée dans la phthisie, les scrofules, l'asthme, les 
toux spasmodiques , les dyspnées, quelques névroses, et 
même contre l’épilepsie. 

Withering, Darwin, Broc, Fowler, Kinglake, Bedlers, 
Drake, Mossmann, Ferriar, Beddoes, Magennis, etc , citent 
de nombreuses cures de phthisie opérées à l'aide de la digi- 
tale. Drake prétend avoir guéri radicalement des phthisies 
confirmées avec expectoration purulente, et Beddoes s'écrie 
avec enthousiasme que la digitale est le spécifique de la 
phthisie comme le quinquina est celui des fièvres intermit- 
tentes et le mercure celui de la syphilis. Magennis dit avoir 
guéri tous les malades au premier degré, et 25 sur 48 au troi- 
sième (Journ. de Méd.ct de chirurg.prat.tome VI, page 149). 
Malheureusement, depuis quele diagnostic de Ja phthisie est 
devenu plus-certain au moyen de l’ansculiation médiate, 
l'expérience n’a eu pour résultat que ia presque certitude 
que les auteurs que nous venons de citer ont cru traiter la 
phthisie quand ils n'avaient affaire qu’à des catharres pul- 
monaires chroniques. J’emploie la teinture de digitale avec 
succès dans ces derniers cas, surtout quand ii existe, 
ainsi que ce!a a souvent lieu, une accélération marquée 
dans la cireulation. Je m'en suis bien trouvé aussi comme 
AA PT LOU 2 PE IE TE à APESS LAURE BA CE MF RMUEOS CALME RER PETER 


(4) Mme de Lamarlière est aceouchée à Ja fin de juillet 4847, d'un en 
fant três-bien portant, et jouit elle même d’une bonne santé. 


120 


moyen de ralentir autant que possible la marche rapide de 
certaines phthisies et de procurer au malade quelque soula- 
gement À l'exemple du docteur Mayer, j’administre 10, 15 
et 20 gouttes dans un demi-verre d’eau sucrée, d’un mélange 
de parties égales de teinture de digitale et d’eau distillée de 
laurier-cerise. Quelquefois je donne la teinture de digitale 
seule, et j'en élève graduellement la dose, que je n'ai ce- 
pendant jamais portée au-delà de 100 gouttes par jour. 

L'efficacité de la digitale dans les affections scrofuleuses 
jaisse encore bien des doutes. C'est à Van-Helmont qu'on 
doit les premiers renseignements sur sen emploi dans ces 
affections. Ce médecin conseille de faire prendre intérieu- 
rement la racine de cette plante, et de l'appliquer à l'exté- 
rieur, unie sous forme d’emplâtre, à la gomme-résine am- 
moniaque et au Bdellium. Hulse prétend que la digitale, 
utile dans les scrofules humides ou suppurantes, ne con- 
vient point aux sèches. Meyer, Hufeland et Mossmann af- 
firment, au contraire, qu’elle est dans ces dernières d’unc 
grande efficacité. Haller rapporte des ebservations de scro- 
fules dans lesquelles la digitale a été employée avec succès; 
parmi ces observations, nous avons remarqué les deux sui- 
vantes: on administra pendant plusieurs mois une décoction 
de feuilles de digitale à un homme scrofuleux par une cause 
hériditaire ; les symptômes s’améliorèrent et disparurent 
presque entièrement. Un homme était atteint d’un ulcère 
à la cuisse droite, qui avait fait de grands ravages ; on 
ne croyait pouvoir en arrêter les progrès que par l’amputa- 
tion. On lui fitprendre une petite cuillerée de suc de digitale 
dans une demi-bouteille de bière chaude, pendant quatorze 
jours. On appliquait en même temps des cataplasmes de 
feuilles de digitale sur les ulcères, qui changèrent de nature 
et s'antmerent ; l’état du malade s’améliora, et après quel- 
ques mois Ja guérison fut complète. | 

Le medecin allemand Merz rapporte, dans son opuscule 
(De Diguali purp. ejusque usu in scrofulis medico, dissert. 
naug. en, 1799), trois observations qui sont loin d'être 
conciuantes: Île premier malade n’a pas guéri, malgré l'em- 
ploi de Ia digitale, de la ciguë, du quinquina, des antimo- 
nieux: et chez les autres, les caractères de laffection 
scrofuleuse ne me paraissent pas bien établis, ma’gré les 
efforts de l'auteur. Pour mon compte, j'ai employé plusieurs 
fois la digitale, soit en poudre, soit en teinture, dansles affec- 
tions scrofuleuses, sans en retirer des avantages appréciables 
et qu'on puisseattribuer à l'effet du médicament. C’est ainsi, 
par exemple, que, donnée pendant près de trois mois à une 


121 


jeune fille atteinte d'engorgements Iymphatiques ulcérés, Ia 
digitale aurait pu être considérée comme ayant amené une no- 
table amélioration, si le changement d'air et les efforts salu- 
taires de la nature à l'âge de puber té, n'étaient venus reven- 
diquer leur puissante influence. Dans le cas dont il s'agit, on 
a cessé l'usage de la digitale, et Ja guérison s’est opérée spon- 
tanément. Il estplus difficile qu'on ne le pense communément 
de savoir jusqu'à quel point, dans certaines maladies et au 
milieu de circonstances concomitantes, les médicaments 
contribuent à la guérison. 

Lorsque dans a chlorose il existe de violentes palpita- 
tions , je joins avec avantage la digitale aux préparations 
ferrugineuses qui forment le traitement principal. 

Withering, Parkinson, Kinglake, ont conseillé la digitale 
dans l'épilepsie. M. Patrice Sharkey, (the Lancet, 1831) em- 
ploie contre cette maladie la digitale à dose pertubatrice ; 
il unit au polypode de chêne ; mais cette addition ne paraît 
pas y être d’une nécessité absolue ; car, suivant l'auteur, le 
traitement a souvent réussi sans le secours de cette subs- 
tance. Voici la formule de M. Sharkey : feuilles de digitale 
récentes, trois onces et demie ; broyez-les dans un mortier 
en consistance de pulpe, et ajoutez-y ensuite une livre de 
forte bière; faites infuser pendant sept heures, coulez et 
exprimez. La malade prend quatre onces de ceute infusion 
avec dix grains de poudre de feuilles ou de racine de polypode 
de chêne. Peu de temps après, il éprouve des vomissements 
nombreux et violents qui durent quelquefois plusieurs 
jours ; le pouls se ralentit, devient irrégulier, intermittent , 
la faiblesse est extrême, et des crampes, que l'on regarde 
comme de bon augure, surviennent dans les membres. La 
force revient, le pouls se relève, Îa réaction a lieu, les 
accès épileptiques sont d’abord moins nombreux et finissent 
par ne plus reparaître. 

M. Sharkey commence, avant d'administrer la potion, 
par s'assurer qu’il n'existe aucune affection des viscères : 
« Dans plusieurs Cas, dit-il, j'ai trouvé F épilepsie liée à une 
maladie du foie, el j ’ajouterai que cette liaison est beaucoup 
plus fréquente qu'on ne le pense généralement.» S'il recon- 
naît quelque maladie de cet organe ou du cerveau, des pou- 
mons, de l'estomac, etc., il la traite par les moyens conve- 
nables. Quand il ÿ a manie ou quelque affection cérébro- 
spinale, il n’administre j jamais le remède anti-épileptique. 
Ce traitement préparatoire guérit quelquefois l'épilepsie ; 
mais s’il est insuffisant, on emploie la digitale, dont les 
effets curatifs ont lieu sans qu'on ait besoin de l’adminis- 


122 


tirer une seconde fois. Quels que soient l’âge, le tempéram- 

ment, la constitution du sujet, la dose est toujours la même. 

« Les sujets les plus délicats, dit M. Sharkey, supportent ce 
médicament au moins aussi bien que les plus robustes. 

—J ai observé, ajoute l’auteur, que lorsqu'il survient des 

crampes dans les quarante-huit premières heures, la gué- 

rison a généralement lieu, quoiqu'elle puisse être obtenue 

sans que ces symptômes se manifestent. S'ils étaient portés 

au point de causer quelque inquiétude, on pourrait les mo- 

dérer en donnant au malade une pinte de bouillon de pou- 

let ou quelque stimulant, sinon il vaut mieux les laisser sui- 

vre leur cours. Dans aucun cas il n’est arrivé d'accident, et 

je conçois les craintes qu’inspirait aux anciens l’administra- 

tion de la digitale. Donnée à petites doses, comme äls le 

pratiquaient, et à des intervalles assez éloignés pour lui 

donner le temps d’être absorbée, elle devait exercer une ac- 

tion délétère. Aussi n’ai-je jamais changé les doses, quelque 

füt l’âge du malade, de peur qu’une moindre quantité ne 
devint vénéreuse.» 

Le nombre des épileptiques que M. Sharkey a guéri est 
considérable. Toutefois il avoue des insuccès, et dans un 
cas où il s'agissait d'une demoiselle de seize ans, il conçut 
des craintes sur l’effer du médicament : «Je fus très-alarmé: 
sur son compte, dit-il, car l'heure qui suivitladministration 
de la potion se passa sans vomissements, ce qui est exlraor- 
dinaire. La prostration était excessive, le pouls très-irrégu- 
lier, intermittent, à peine sensible, à quarante-quatre, etc. 
Mais heureusement le vomissement survint, et elle ne cessa 
de vomir pendant trois jours. » 

Parmi les observations que rapporte M. Sharkey, il en est 
une surtout qui nous semble de nature à Ja recommander. 
« Le cas suivant, dit l’auteur, est celui d’un homme qui était 
épileptique depuis vingt ans. Il était robuste, d’un tempé- 
ramment sanguin, d'une bonne santé en général , quoique 
habituellement constipé. Il avait été traité par plnsieurs 
médecins distingués, et déclaré incurable Entre autres re- 
mèdes, il avait pris une grande quantité de nitrate d'argent 
qui avait donné à sa peau une couleur horrible, sans soula- 
ger son mal. Pour abréger, je me contenterai de dire que je: 
lui fis subir un traitement préparatoire pendant deux ou 
trois mois, sans amender les accès. Je lui fis prendre ja 
digitale et les feuilles de polypode en poudre. La prostra- 
tion et la faiblesse du pouls devinrent effrayantes. [Il y a dix 
ans qu'il est guéri, etil n'a pas eu le moindre accès depuis. 
Six après je guéris son frère , et cette guérison a été tout. 


123 


aussi complète.» Cette observation est remarquable à cause 
de l'ancienneté de la maladie, parce que cette dernière était 
probalement héréditaire, puisque son frère en était atteint, 
et parce qu’enfin il n’y eut aucune récidive dans les dix ans 
qui suivirent l’époque de la guérison. 

La méthode suivie par M. Sharkey mérite toute l'attention 
des praticiens. Si elle présente des dangers qui réclament 
tous les soins du médecin, il a pour compensation l'es- 
pérance de pouvoir triompher d’une maladie contre laquelle 
les moyens ordinaires échouent presque toujours. 

Lorsque l'irritation de l'estomac s'oppose à l'usage inté- 
rieur de la digitale, on emploie cette plante à l'extérieur, en 
fomentations, en cataplasme, en frictions avec la teinture ou 
la poudre, et par la méthode endermique ; quelquefois on l'ad- 
ministre simultanément à l’intérieur et à l'extérieur, surtout 
dans les hydropisies, afin d'obtenir à la fois des effets plus 
prompts et pluscertains.Bréra employaitla poudre de digitale 
à la dose de 60 centigrammes à 1 gramme, macérée pendant 
douze heures dans 1 à 2 gros de salive. On se sert générale- 
ment de la teinture alcoolique en frictions sur l'abdomen ou 
à la partie interne des cuisses. J'ai employé avec succès le 
suc délayé dans l’eau ou l'infusion chaude de digitale sur 
l'abdomen dans les hydropisies. Dans deux cas d’anasarque 
j'ai observé un effet très-prompt d’un demi-bain dans lequel 
j'avais fait ajouter une décoction de 60 grammes de cette 
plante dans un litre d'eau. Ce demi-bain, répété chaque 
jour , à fait désenfler les malades en moins de quinze jours. 

J'ai aussi employé la digitale en injection dans le rectum 
chez les malades atteints d'irritation gastrique ou de vomis- 
sements : l'absorption est plus prompte par celte voie que 
par la peau. Je préfère ce moyen à la méthode endermique, 
qui nécessite l'application répétée et plus ou moins doulou- 
reuse d'un vésicatoire. L'introduction de ce médicament 
dans le gros intestin n’exige pas moins de précaution que 
son administration par la bouche. J'ai plus d’une fois ob- 
servé, dans le cours de ma pratique, que les substances 
énergiques données en lavement avaient un effet aussi pro- 
noncé et quelquefois même plus prononcé que par leur in- 
gestion dans l'estomac. L'emploi de ces substances doit faire 

exception à la règle générale établie dans tous les livres de 

thérapeutique, et qui consiste à doubler ou tripler les doses 
qu'on injecte dans le rectum. L'expérience m'a dicté à cet 
égard des précautions dont je ne m’écarte jamais. 

Le docteur Rademacher, de Berlin, emploie la digitale à 
l'extérieur dans les cas de croup où il est impossible de faire 


19% 


avaler quelque médicament que ce soit aux petits malades. 
Ce médecin met en usage une pommade composée de 8 
grammes d'extrair de digitale et de 30 grammes de cérat ; 
il fait recouvrir toute la partie correspondant à la trachée- 
artère, depuis los hyoïde jusqu’à la partie supérieure du 
Slernum , avec des compresses largement enduites de cette 
pommade : il faitrénérer ces applications très-souvent dans 
les vingt-quatre heures. Sous l’influence de ce moyen, les 
accès de suffocation diminuent promptement d'intensité et 
de fréquence; la fièvre baisse en même proportion, et dans 
l'espace de trois jours le rétablissement est obtenu. (Aberlle 
Médicale, tome 2, page 193.) IL est à croire que le doc- 
teur Rademacher n'a pu obtenir un résul{at aussi heureux : 
que dans le cas de pseudo-croup. Dans le vrai croup bien 
caractérisé, nous ne conseillerons pas de s’en tenir à un 
moyen que nous ne pouvons regarder que comme auxi- 
liaire. 

Pour les maladies externes, on se sert de feuilles de digi- 
tale réduites en pulpe, comme maturatif, détersif et résolu- 
if. On les fait aussi macérer dans du miel ou dans une dé- 
coction de sauge. On en prépare un onguent avec l'axonge, 
qu'on applique sur les engorgements Iymphatiques et scro- 
fuleux, les tumeurs blanches, les engorgements glanduleux 
des mamel'es. Je me suis servi avec avantage du suc de 
digitale mélé à l’onguent digestif simple pour déterger les 
ulcères scrofuleux recouverts d’une couche blafarde ; mais 
il faut surveiller les effets de son absorption, et en cesser 
l'usage dès que la surface de la plaie est rouge et offre des 
bourgeons charnus. | 

La digitale est plus ou moins énergique, suivant la saison 
où elle a été récoliée et son plus ou moins de vétusté. Toutes 
les propriétés de Ja plante paraissent s’être concentrées dans 
les feuilles. On doit choisir celles qui ont reçu l'influence 
du soleil, et les cueillir lorsque les fleurs commencent à se 
montrer. Leur dessiccation doit être opérée avec beaucoup 
de soin et à l’étuve. Les feuilles vertes ont moins d’effica- 
cité que les feuilles sèches ; mais celles-ci perdent en vieil- 
lissant une grande partie de leurs vertus : on donnera donc 
Ja préférence à celles de l'année.] 


DIGITALINE. 


[La digitaline est le principe actif de la digitale, et a été 
administrée dans les mêmes cas que cette dernière. Nous 


125 


rapporterons sur cette substance, encore peu connue, ce 
qu’en ont dit MM. Homolle, docteur en médecine, et Que- 
venue, pharmacien de l’hôpital de la Charité. La digitaline 
qu’ils ont extraite se présente sous la forme d'une poudre 
blanche inodore, d’une saveur très-amère, se faisant surtout 
sentir à l’arrière-bouche, et pouvant provoquer de violents 
éternuemen s lorsqa’elle est disséminée en particules très- 
tenues dans l'air. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR: Granules (4 gram. de digitaline sur 50 gram. de 
sucre), 4 à 6 dans les vingt-quatre heures. 

Sirop (50 cent. de digitaline sur 1500 gram., de s'rop de sucre), 
de 60 à 90 gram. par jour. 

Potion (digitaline, 3 milligr.; eau distillée de laitue, 400 gram ; 
sirop de fleurs d'oranger, 25 gram.), à prendre par cuillerées 
dans les vingt-quatre heures.pur ou dans une boissonappropriée. 

A L'EXTÉRIEUR : Pommade (digitaline dissoute dans quelques goui- 
tes d'alcool à 22°, 5 centigr.; axonge basalmique, 140 gram. 
Propriétés. 

L'administration de ce médicament demande une grande 
circonscription: # milligrammes de digitaline représentent 
40 centigrammes de poudre de digitale préparée avec soin 
et prise en nature. Ce principe actif offre donc à la théra- 
peutique une énergie centuple de celle de la préparation de 
la digitale la plus active et la plus constante dans ses effets. 

Les granules, d’une solubilité complète et d’une inaltéra- 
bilité parfaite, n’exigeant d’autre précaution que celle d’en 
compter le nombre, doivent être préférées. Afin de n’être 
pas obligé de peser une si petite quantité, ce qui est souvent 
difficile, on peut, pour la potion, préparer à l'avance une 
solution de digitaline dans l'alcool à 50 degrés centigrades, 
dans la proportion de 2 milligrammes par gramme. 

Ecoutons M. Homolle sur l'emploi de la digitaline : «Si 
l’on cherche à pénétrer le mode d'action de cet agent médi- 
camenteux, si l’on étudie les affections dans lesquelles il a 
été employé avec succès, on reconnaît qu’il agit comme alté- 
rant, c’est-à-dire comme modificateur puissant des fonctions 
de la vie organique, doué d'une action spécifique sur l'organe 
central de la circulation. À ce titre, combien d'indications 
n'est-il pas appelé à remplir ? C’est à bien préciser ces indi- 
dations que doit tendre le médecin jaloux d'augmenter les 
ressources de la thérapeutique; c'est le travail qui nous oc- 
cupe. 

» Nous sera-t-il permis, après avoir répondu aux objections 
élevées contre l’emploi du principe actif de la digitale pour- 


126 : 


prée, de dire en quelques mots les avantages qu'il présente 
sur celui des préparations pharmaceutiques de Ja plante? 

» Il n'est pas de praticien qui n’ait eu à déplorer l'infidélité 
de ces dernières. La plante elle-même varie d'énergie selon 
son âge, le terrain où elle a poussé, le plus ou moins de 
sécheresse de la saison pendant laquelle on l’a récoltée, le 
soin mis à la dessiccation et le temps depuis lequel elle est 
conservée. 

» La poudre peut être ancienne ou récente, plus ou moins 
chargée de parties ligneuses , altérée par l'influence de la 
lumière ou de l'humidité. 

» L'infusion, la teinture et lextrait de digitale varieront 
nécessairement en vertu des qualités de Ja plante, et,de plus, 
en raison des inconvénients attachés à ces divers modes de 
préparations , inconvénients trop connus pour que nous 
croyions devoir insister. 

» Avec le-principe actif, et en adoptant nos formules, le 
médicament est toujours identique etn’expose à aucun mé- 
compte; on observe des effets certains en rapport avec les 
doses employées; ladministration n'excite pas la moindre 
répugnance, et le dosage est toujours facile. 

» Quant à l'impossibilité d'employer la digitaline par Ja 
méthode endermique { impossibilité que nous avons le pre- 
mier dénoncée), il faudrait renoncer au plus grand nombre 
des agents thérapeutiques, si elle devait constituer un arrêt 
de proscription. N'oublions pas d’ailleurs qu'elle n'implique 
nullement la nécessité de rejeter l'usage des frictions avec la 
solution alcoolique de ce principe actif ou la pommade pro- 
venant de son incorporation dans l’axonge.» (L’Abeille meé- 
dicale, tom. 2, page 181.) 

D'après ces considérations, la digitaline jouirait de tous 
les avantages de la digitale, sans avoir les inconvénients 
attachés aux autres préparations de cette plante , et con- 
viendrait dans tous les cas où ces mêmes préparations sont 
indiquées. ] 


DOMPTE-VENIN, 


ASCLÉPIADE BLANCHE. 


Ascleplias aico flore (T.) 
Asclepias vincetoxicum (L.). 


Cette plante est très-commune dans toute l'Europe ; on la 
rencontre dans les bois, les terrains incultes, sur lescôteaux 
secs et pierreux. La racine et les feuilles sont usitées. 


127 


Féparations et doses, 


À L'INTÉRIEUR : Décoction, 15 à 59 gram. par kiloz. d'eau. 
Poudre, 2 à 4 gram., en bols, pilules, électuaire, ou dans du vin. 
Extrait (4 sur 6 d'eau), 4 à 4 gram., en potion, bols, dans le 

miel, etc. 
Teinture (4 sur 5 d'alcool), 2 à 6 gram.., en potion. 


À L'EXTÉRIEUR : Feuilles, en cataplasme. 
Propriétés. 


Les effets de cette plante sur nos organes varient suivant 
les doses auxquelles on Fadministre. À grande dose elle est 
vomilive et purgative. À petite dose elle agit principalement 
sur les voies urinaires et sur le système cutané. On l'a con- 
seillée dans les affections scrofuleuses, darireuses et syphili- 
tiques ; dans l'hydropisie, les engorgements hépatiques , l'Ic- 
ière, etc. Ses feuilles sont employées par les paysans comme 
résolutives dans les engorgements lymphatiques et glandu- 
leux, les abcès froids, etc. 

Coste et Wilmet { Mat. méd. indigène) rapportent que les 
habitants du pays de Liége prennent communément, à titre 
de vomilif doux, 30 à 40 grains (1 gram. 50 cent. à 2 gram.) 
de feuilles d’asclépiade blanche infusées dans un verre d’eau. 
Aussi les auteurs que nous venons de citer conseillent-ils 
de substituer cette plante à l’ipécacuanha. Wauters indique 

aussi comme succédanée de ce dernier la racine de vénce- 
toxicum. 


« Quelques auteurs, dit Gilibert, condamnent l'usage de 
celte racine. Cependant la décoction, que nous avons souvent 
ordonnée à haute dose, n'a jamais causé le moindre aceci- 
dent: nous l'avons trouvée utile dans les dartres, les ana- 
sarques, les écrouelles, la chlorose et la suppression des 
règles; clle augmente sensiblement le cours des urines ; 
extérieurement elle déterge les ulcères et arrête les progrès 
du vice scrofuleux. » 


J'ai employé deux fois la racine de dompte- venin 
comme vomitive; elle m’a paru produire un effet ana- 
logue à celui de l’ipécacuanha. Cependant je lui préfère, 
comme succédanée de ce dernier , la racine d’asaret, dont 
l'action est à la fois plus active et plus constante. A petite 
dose, en décoction, la racine d’asclépiade m’a été utile par 
son action à la fois diurétique et diaphorétique, dans trois 
cas d’anasarque survenus à la suite de la scarlatine. 


128 


Après avoir accordé à l’asclépiade des vertus imaginaires, 
on l’a à tort condamnée à l'oubli. Comme sudofirique, elle 
pourrait être substituée à la salsepareille dans les affections 
syphilitiques secondaires et tertiaires. Cette plante mérite 
d'être réhabilitée dans l'opinion des praticiens. 


DORADILLE, 


CÉTÉRACH , CÉTÉRAC, VRAIE SCOLOPENDRE, HERBE DORÉE, 
DORADE. 


Asplenium sive ceteraeh.{(T.) 
Ceterach officinarum., (L.) 


Cette plante est très-commune, el se trouve sur les 
rochers et à l'ombre. L’herbe est usitée. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, 40 à 50 gram. par kilog d'eau. 
Sirop, 50 à C0 gram. 


Fropriétés. 


La doradille est diurétique et astringente. On l'emploie 
dans le catarrhe de la vessie, la néphrite, la gravelle et la 
plupart des maladies des voies urinaires où un état flegma- 
sique trop intense n’en contre-indique pas l'usage. On l'a 
aussi conseillée dans les engorgements des viscères abdo- 
miInaux. 

J'ai été à même de constater l’action assez fortement 
diurétique de la doradille dans deux cas de gravelle non ac- 
compagnée d’une trop grande irritation des voies urinaires. 
On ne doit pas négliger cette plante; elle peut être fort 
utile dans la pratique rurale. 


[La décoction de cétérac dans l'eau de forgeron (où l'on 
éteint le fer) est un remède populaire contre les engorge- 
ments de la rate et l'œdème qui suivent ou accompagnent 
des fièvres intermittentes.] 


129 


DOUCE-AMÈRE, 


MORELLE GRIMPANTE, VIGNE VIERGE, VIGNE DE JUDÉE, 
LOQUE (1). 


 Solanum scandens (T.) 
Solanum dulcamara (L.) 


Cette plante se trouve dans toute la France, dans les fos- 
sés humides, dans les haies, sur le bord des ruisseaux. Les 
sommités et les jeunes rameaux sont usités. Les feuilles 
sont employées à l'extérieur. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction et infusion des rameaux, 8 à 50 gram. 

par kilog. d'eau. 

Suc erprimé des feuilles, 20 à 60 gram. (presque abandonné), 

Poudre , 2 à 8 gram. (assez rarement employée). 

Sirop( 2 sur 44 d’eau et 8 de sirop de sucre), 50 à 400 gram , et 
plus, en potion. 

Extrait par infusion , 50 cent. à 40 gram. et plus, progressive- 
ment. 


Propriétés. 


La douce amère est stimulante, sudorifique, dépurative , 
légèrement narcotique. On la conseille dans les affections 
rhumatismales et vénériennes , les dartres, la gale, les 
ulcères de mauvais caractère, les engorgements des viscères 
abdominaux, les scrofules, les inflammations latentes du 
poumon, la phthisie, la goutte, les affections catarrhales 
chroniques, l'ictère, l'asthme, les convulsions, la coque- 
luche, etc. | 

[Les effets primitifs de la douce-amère se font remarquer 
sur le tube digestif; mais cette plante a une action secon- 
daire sur divers systèmes et notamment sur le cerveau et le 
système nerveux. Cetie action varie beaucoup selon les 
dispositions individuelles et l’état des organes ; elle se porte 
plus ou moins sur la peau, les reins, l’encéphale, etc. Mais 
l'irritation révulsive qu’elle détermine sur le tube digestifest 
la chose la plus importante à observer par rapport aux 
effets secondaires qui en résultent, et qui lui sont en grande 
partie subordonnée. 

Donnée à grande dose, cette plante produit des nausées, 


(1) Cet article, peu étendu dans le mémoire couronné, a été considéra- 
blement augmenté. 


9 


130 


des vomissements , de l'anxiété, des picotements dans di- 
verses parties du corps, quelquefois un prurit des organes 
génitaux , des évacuations alvines, une abondante sécrétion 
d'urine, des sueurs, des crampes, de légers mouvements 
convulsifs dans les paupières, les lèvres etles mains, de 
l'agitation, de la pesanteur de tête, de l'insomnie, des ver- 
tiges, des étourdissements , en un mot, la série des symptÔ- 
mes qui annoncent évidemment un principe vénéneux tel 
que celui qu’on rencontre dans d'autres plantes du même 
genre, mais moins actif que dans la beiladone et autres 
solanées. Chez certains individus ce principe ne produit 
même aucun effet. Guersent rapporte avoir pris jusqu'à 15 
grammes d’exirait de douce-amère sans en avoir éprouvé 
la moindre influence. 

Floyer (pharmacol., page 86), dit que trente des fruits de 
douce-amère ont fait périr un chien dans l’espace de trois 
heures: mais M. Dunal {histoire médicale des solanées), a 
fait avaler à des cabiais et à des chiens de moyenne taille, 
de trente à cent cinquante de ces fruits sans qu’il soil arrivé 
le moindre accident à ces animaux. D'après ces dernières 
expériences , ilest reconnu aujourd'hui que les baies de 
douce-amère n’ont aucune action vénéneuse sur les ani- 
maux, et que la mort du chien dont parle Floyer doit être 
attribuée à une cause accidentelle n'ayant eu d'autre rela- 
tion, avec l’ingestion de ces baies , que la coïncidence de 
deux faits distincts. 

Les feuilles de douce-amère n’ont pas plus d'action que 
les fruits ; les tiges sèches de cette plante sont les seules 
parties qui jouissent d’une énergie généralement reconnue. 

Iin'estrien de plus vague, de plus contradictoire que 
tout ce que les auteurs rapportent sur les propriétés médi- 
cinales de la douce-amère. On a fait un grand usage ou 
plutôt un grand abus de cette plante, et cependant rien de 
positif, dans la plupart des faits recueillis, n’est venu éclai- 
rer le praticien. Boerhaave et Faller en ont conseillé l’em- 
ploi dans tes pleurésies et les pneumonies ; Werlhoff et 


Sagar ont vanté son efficacité contre la phthisie pulmoraire ; 


Linné assure l'avoir donnée avec avantage à l'hôpital de 
Stockolm contre le scorbut. Tragus (Lebouc) l'a adminis- 
trée dans les engorgements glanduleux et viscéraux, et 
surtout dans l’ictère. Dehaen l’a mise en usage contre les 
convulsions et diverses affections spasmodiques. Sauvages 
lui attribue la guérison d’une syphilis constitutionnelle. 
Razoux a préconisé ses vertus contre l’hydropisie, la caco- 
chymie, les scrofules. Guersent l'a trouvé utile dans cer- 


131 


tains catarrhes avec atonie et sans fièvre , et dans plusieurs 
cas de blennorrhagie et de leucorrhée. Quelques auteurs 
l'ont regardée comme anthelmintique. Carrère à observé 
des rhumalismes aigus guéris par la douce-amère, ou plu- 
tôt par les saignées, “les bains, les délayants, qu'il employait 
en même temps comme auxiliaires, en ne voyant jamais 
que les vertus de Ja plante en faveur de laquelle il était 
prévenu. On peut croire néanmoins que cette plante, en 
augmentant l’action de la peau, a pu contribuer à la gué- 
rison , bien que Culien, qui en a fait usage dans ces mala- 
dies, avoue que si elle a paru quelquefois y être avanta- 
geuse , le plus souvent elle n'y à produit aucun effet. 
. Îlen a été de la douce-amère comme de beaucoup d’au- 
tres médicaments. On a trop vanté ses vertus; les plus 
belles espérances ayant été déçues , on lui a refusé trop 
légèrement la place qu’elle doit occuper dans ia matière 
médicale. Les observations de Razoux, de Bertrand de la 
Grésie et de plusieurs autres médecins , ne laissent aucun 
doute sur l'efficacité de cette plante contre Îles dartres ; et 
si Desbois de Rochefort et Alibert n’en ont obtenu que des 
succès médiocres, il faut, suivant la remarque de Guersent, 
en attribuer la cause à ce qu'ils ne Font pas employée à 
dose assez forte. L'usage que j'en à ai fait dans les affections 
cutanées chroniques vient à l'appui de cette dernière opi- 
nion. J'ai vu chez un marin de Calais , âgé de quarante-un 
ans, d’un tempérament lymphatique, une darire eczéma- 
teuse occupant les deux tiers de Ia jambe droite, avec 
exsudation séro-purulente , et qui avait résisté pendant un 
an à divers traitements , guérir dans l’espace de deux mois 
par l’usage interne d'une forte décoction de rameaux de 
douce-amère. Les premières doses (12 grammes, en aug- 
mantant tous les jours d’un gramme jusqu’à 60 grammes 
par jour ), ont produit des maux de tête, des vertiges et des 
étourdissements. J'ai persisté ; et ces symptômes ont dis- 
paru pour faire place à une excitation de la peau , à des 
sueurs pendant Ja nuit et quelquefois à des évacuations 
alvines. Le succès obtenu dans ce cas m'a paru d'autant 
plus remarquable , que l’on n’a pu l’artribuer à aucun autre 
médicament; ear le plus souvent ja douce-amère étant 
administrée en même temps que d’autres substances , on ne 
peut en distinguer les effeis. 

Je dois dire, cependant, que Wauters (repertor. remed. 
indigen. | cie plusieurs observations rapportées par Althof 
_et qui prouvent aussi incontestablement que cette plante , 
donnée à grande dose et sans autre médicament, à guéri 


132 


des affections herpétiques graves, des leucorrhées âcres, 
des ulcères invétérés, etc. Wauters l’a vanté contre l’hy- 
dropisie. 

M. Fages { Recueil periodiq. de la Soc. de méd. de Paris, 
tom. VI, pag. 162), à employé avec succès la douce-amère 
associée à une certaine quantité de tartre stibié dans le 
traitement des dartres. Ce médecin faisait prendre , dès le 
principe, 50 centigrammes d'extrait de douce-amère avec 
2 centigrammes et “demi de tartre stibié, et il augmentait 
progr essivement la dose de l’une et de l’autre substance, de 
manière que, dans un cas, il a ordonné l'extrait jusqu'à 
la dose de 32 gros (120 grammes), et le tartre stibié à celle 
de 32 grains {1 gram. 60 cent.) par jour , en divisant cette 
quantité en deux prises, l'une pour le matin , et l'autre 
pour le soir. D'un côté le tartre stibié avait perdu une 
grande partie de son action émélique par son union avec 
la douce-amère , de l’autre il était toléré par la graduation 
des doses, et le médicament opérait le plus souvent par une 
augmentation des sécrétions, et surtout par des sueurs qui 
laissaient quelquefois le malade dans une sorte d’abattement. 

Les observations rapportées par l’auteur semblent ne 
devoir laisser aucun doute sur l'efficacité de ce mélange, 
qu’on pourrait, je crois, administrer aussi avec avantage 
dans le rhumatisme articulaire chronique et même dans 
l'arthrite aiguë, après l'emploi, dans ce dernier cas, des émis- 
sions sanguines dont l'effet antiphlogistique place l'orga- 
nisme dans les conditions favorables à la révulsion. 

On trouve dans le journal d'Hufeland quatre observations 
recueillies à l'Institut polyclynique de Berlin, sur l'emploi 
de l'extrait de douce-amère contre la coqueluche ; mais, 
comme dans le traitement mis en usage cet extrait est joint 
à des préparations antimoniales , il est difficile d'apprécier 
l'action de chaque substance. Ces observations n’en sont 
pas moins intéressantes sous le rapport pratique. 

Swediaur recommande l'usage de la douce-amère dans 
ies affections syphilitiques de la peau. Murray et Carrère 
disent l'avoir employée avec succès dans les douleurs 
ostéocopes et dans la leucorrhée regardée comme suite 
ou comme cause de dartre à la vulve. Cependant, on ne doit 
compter sur ses bons effets que dans les affections syphili- 
tiques qui ont résisté au traitement mercuriel. Je l'ai 
administrée avec succès, jointe à la racine de bardane et à 
celle de mezereum , dans un cas de syphilide squammeuse 
survenue trois mois après un traitement mercuriel incom- 
plet et mal dirigé. Le malade, âgé de vingt-quatre ans, et 


133 


qui n’avait eu, pour affection primitive, qu’un chancre resté 
un peu induré après la cicatrisation , avait aux bras, au 
front et au cuir chevelu des plaques rouges, pustuleuses et 
squammeuses. Dans les premiers jours du traitement l'érup- 
tion augmenta ; mais, au bout de trois semaines environ, 
les squammes se détachèrent , la rougeur disparut peu à 
peu, les pustules se cicatrisèreut etfla guérison fut complète 
au cinquantième jour. Quoique Fon ne puisse faire ici la 
part de la douce-amère dans le résultar obtenu , je n'ai pas 
cru devoir passer sous silence un fait qui m’a paru présenter 
quelque intérêt sous le rapport de la possibilité de trouver 
dans nos plantes indigènes les moyens de remplacer la 
salsepareille. 

J'ai employé pendant près de troisimois laÿdécoction et 
l’extrait de douce-amère à doses progressivement augmen- 
tées jusqu’à celle de 45 grammes par jour , chez trois sCro- 
fuleux ayant des engorgements glanduleux ulcérés au cou, 
et je n’en ai observé aucun avantage. Il me paraît démontré 
que les effets qu’on attribue à cette plante, dans le traite- 
ment des scrofules, sont dus aux substances énergiques 
auxquelles on l’associe presque toujours. ] 

Donnée en -décoction dans le lait contre les bronchites 
chroniques , la douce-amère m'a réussi dans certains Cas, 
et a été sans effet appréciable’ dans d’autres’cas {de même 
espèce. J'ai remarqué qu’en général elle réussissait mieux 
dans les toux sèches et nerveuses que dans celles qui étaient 
accompagnées d'expectoration. | 

On a recommandé les} bains de fdécoction de tiges de 
douce-amère dans les affections herpétiques et dans les der- 
matoses syphilitiques. On employait autrefois les feuilles de 
cette plante en topique sur les engorgements des mamelles, 
sur les hémorroïdes douloureuses, les squirres et les cancers 
ulcérés, sur les contusions, les entorses, les échymoses, etc. 
La confiance qu'on leur accordait venait sans doute de 
l'analogie de la douce-amère avec les autres solanées. 
Aujourd’hui on regarde les feuilles de cette plante comme 
simplement émollientes. !Cependant je les ai quelquefois 
appliquées , avec celles de morelle, en cataplasme sur les 
engorgements du tissus cellulaire ou glanduleux des seins 
chez les nourrices. 

[ Les médecins ont beaucoup varié sur le mode d'adminis- 
tration de la douce-amère. Tragus faisait bouillir une livre 
(500 gram.) de tiges de cette plante dans deux livres 
( 4 kilog.) de vin blanc, et prescrivait deux verres par jour 
de cette décoction au malade. Razoux, craignant l'action. 


134 


vénéneuse de cette plante, ne dépassait pas la dose de 
4 grammes dans une pinte d’eau réduite à moitié. Carrère 
en donnait 8 grammes en décoction , en augmentant cette 
dose d'autant tous jes six jours. Quarin la porta à 60 gram. 
Crichton en conseillait 30 grammes par jour en trois fois, 
dans 45 grammes d’eau réduits à 30 grammes, et Gardner 
(London, Medical Repertory , 1830) , en prescrit jusqu’à 
90 grammes qu'il fait prendre aussi en trois fois chaque 
jour. Quoique ia douce-amère ne puisse occasionner aucun 
accident dangereux , il est bon cependant d'en commencer 
l'usage par ia dose de 4 à 8 grammes , et d'augmenterpro - 
gressivement jusqu’à 56 grammes et plus, s'il ne survient 
aucun symptôme qui obiige d'agir avec plus de ménage- 
ment. On prépare la décoction de cette plante en faisant 
d’abord infuser les iises coupées par morceaux pendant 
plusieurs heures dans de l’eau bouillante. On fait ensuite 
réduire le liquide par l’ébullition , d’un tiers environ. Le 
malade doit prendre au moins un demi-kiiogramme de cette 
décoction par jour, seule ou mêlée avec du lait. L’infusion 
aqueuse est rarement employée. 

Les tiges de douce-amère doivent être mises en usage 
dans l’année, être remplies de moëile et recueillies au prin- 
temps ou vers la fin de l’automne. On les coupe par mor- 
ceaux longs de deux à cinq centimètres , que l’on fend sui- 
vant jeur jongueur pour les faire sécher ensuite avec soin. 
On doit préférer la douce-amère récoltée dans le midi , ou 
dans les endroits secs et élevés, à celle que l’on cultive 
dans les jardins comme objet d'agrément, ou qui vient dans 
les lieux bas et humides. ] 


[ La SoLanINE , découverte par Desfosses , est le principe 
immédiat alcaloïde de ia douce-amère , de la morelle et des 
baies de pommes de terre. Elle se présente sous forme de 
poudre blanche ou de cristaux réunis en étoiles, d’une 
saveur légèrement amère et nauséeuse. De tous les sels de 
solanine , l’acétate est le seul dont on ait essayé l'action 
sur l’homme. Comme l’opium , la solanine peut produire le 
vomissement et le sommeil ; mais ses propriétés vomilives 
paraissent plus développées que celles de l’opium , tandis 
que ses propriétés narcotiques le sont beaucoup moins 
(Magendie , Desfosses). Ce principe actif diffère des autres 
ajkalis des solanées, puisqu'il ne dilate pas la pupille, et 
qu'à dose toxique il paralyse les extrémités inférieures. Ses 
propriétés thérapeutiques sont encore peu connues : on 


‘ 135 


devrait en étudier l’action dans le cas où les extraits de 
douce-amère et de morelle sont indiqués, mais à doses très- 
minimes, comme de 6 à 12 milligrammes, en pilules. 


ÉCLAIRE, 


GRANDE ÉCLAIRE, CHÉLIDOINE, FELOUGUE. 


Chelidonium majus vulgare (T.) 
Chelidoïium majus (L.) 


Cette plante croît dans toute Ia France et se trouve dans: 
les masures, dans les lieux frais et ombragés, le long des 
haies, etc. La racine, l'herbe et les fleurs sont usités. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR: Racine en décoction, de 10 à 45 gram. par kilog. 

d'eau, à prendre par tasses dans les vingt-quatre heures. 

Suc erprimé, de 1 à 4 gram. dans de l’eau sucrée, en émulsion, 
potion, etc. 

Extrait (1 sur 40 d'eau), de 25 cent. à 10 gram. progressivement 
ou suivant l'effet que l’on veut produire. 

Vin (15 à 50 gram. de racine pour 4 kilog. de vin), 30 à 90 gram. 
chaque matin. 


À L'EXTÉRIEUR: Suc de la plante fraiche, quantité suffisante, seul 
ou étendu dans l’eau, pour topique rubéfiant ou stimulant de 
la peau, pommade avec l’axonge et le suc ou l’extrait ; décoc- 
tion pour lotions, injections , etc. 


Fropriétés. 


Toute la plante contient un principe àcre, volatil. Des: 
inéisions faites à la tige découle un suc jaune, amer, caus- 
tique, d’une odeur forte et nauséabonde, d'une saveur 
âcre, tenace, très-amère. Purgative, excitante et diuréti- 
que, la chélidoine peut être utiie dans les engorgements 
abdominaux, l’hydropisie, l’ictère, les affections scrofu- 
leuses , syphilitiques et dartreuses, la goutte, le calcul, etc. 
Les feuilles fraîches de cette plante sont rubéfiantes et vési- 
canies ; son suc âcre et caustique a été utile en lotions sur 
les ulcères atoniques, scrofuleux, les dartres, les excrois- 
sances, les verrues, les cors, etc. 

La chélidoine, qui croît partout et que les anciens avaient 
parfaitement appréciée, ne mérite pas l'oubli auquel elle a 
été condamnée par les médecins modernes. Son énergie est 


136 ‘ 


très-grande et ses effets plus ou moins prononcés suivant Ja 
dose à laquelle on l’administre et ses divers modes de pré- 
paration. Une cuillerée de suc de chélidoine, dit Bodard, 
purge et fait vomir. Il m'a suffi de cette dose mêlée avec 
autant d’eau sucrée pour obtenir un effet éméto-cathartique 
violent chez une jeune fille atteinte d'une fièvre quarte, avec 
gonflement de la rate et état cachectique très-prononcé. La 
pertubation causée par l’action de ce médicament amena 
une grande amélioration dans l’état de cette jeune fille. Elle 
n'éprouva plus que de faibles accès qui, plus tard, cédèrent 
tout-à-fait à l'usage d’une forte décoction de trèfle d’eau et 
d’écorce de saule blanc. 

Je crois, avec les anciens, que les propriétés de la grande- 
éclaire sont plus énergiques dans la racine. Galien et Dios- 
coride administraient cette racine en infusion dans du vin 
blanc, pour la guérison de l’ictère. Forestus la faisait bouillir 
dans la bière. Je l'ai employée de l’une et de l’autre manière, 
selon les circonstances et la position de fortune des malades, 
dans l’hydropisie et dans les embarras atoniques des viscères, 
qu'il est plus facile d'apprécier chez le malade que d'expli- 
quer, et que l’on rencontre fréquemment chez les pauvres 
exposés à l’action du froid humide et soumis à toutes les 
autres causes de destruction qui les entourent. 

Lange (médecine domestique de Brunswick) emploie de 
préférence l'extrait de chélidoine préparé avec du vin à 
un feu doux, et l’ordonne à la dose de 1 gram. 20 centig. à 
4 gram. 50 centig. dissous dans de l'eau distillée , que l'on 
fait prendre au malade chaque jour pendant plusieurs se- 
maines, pour combattre l’ictère , les fièvres intermittentes 
et les obstructions lentes des viscères abdominaux. J'ai vu 
employer avec succès contre la gravelle et l’hydropisie, par 
le conseil d’un guérisseur de campagne , la racine de chéli- 
doine infusée dans le vin blanc (30 à 60 gram. de racine 
pour { kilog. de vin) ; ce vin était pris à la dose de 30 à 90 
gram. chaque matin, et agissait à-la-fois comme diurétique 
et comme laxatif. 

[Gilibert assure avoir guéri des ictères chroniques et des 
empâtements de la rate par l’usage de la décoction de 
chélidoine. Wagner et Linnée l'ont employée avec succès 
dans les fièvres intermittentes. M. Récamier regarde aussi 
cette plante comme ayant sur les engorgements indolents 
de la rate une action particulière.] 

J'ai adopté dans l'administration de la chélidoine la mé- 
thode indiquée par le professeur Wendt: j'exprime, en été, 
le suc de toute la plante, et le mêle à une égale quantité de 


a" 137 


miel. La dose de ce mélange, qui d’abord est de 8 gram., 
est graduellement portée à 16 gram. délayés dans une à 
deux cuillerées d’eau. Au printemps ei en automne, je n’em- 
ploie que le suc de la racine, et, en hiver, je donne l'ex- 
trait de la plante tout eutière, dont je forme des pilules de 
10 centigrammes ; je commence par en donner deux ; puis 
j'arrive progressivement à dix, et je continue cette dose 
jusqu'à la guérison. Administrée de cette manière, la chéli- 
doine est un médicament d'autant plus utile qu’on le trouve 
toujours sous la main. Je l'ai employée avec succès chez un 
garçon de ferme, enfant de l'hospice, âgé de dix-sept ans, 
d'un tempéramment éminemment lymphatique, et atteint 
d’une dartre squammeuse-humide occupant les aines et la 
partie interne et supérieure des cuisses. Ceute affection da- 
tait d’un an environ. Je commençai le traitement au mois de 
juin 1833, en donnant d'abord 6 gram. de sue d’éclaire mêlé 
avec autant de miel, et j'augmentai graduellement et de 
manière qu'au quinzième jour de traitement le malade en 
prenait 12 grammes : à cette époque l'amélioration était 
sensible. Je fis alors pratiquer des onctions avec une pom- 
made composée de suc de la même plante bouillie dans du 

saindouX ]} jusqu FA consomption de ce suc, d'après le conseil 
d'un curé qui avait employé cette pommade dans des cas 
semblables. Au bout d’un mois de ce traitement, aussi sim- 
ple que peu coûteux, la dartre était entièrement guérie. Ce 
jeune homme, que j'ai revu depuis, jouit d’une très-bonne 
santé. | 

[ La chélidoine est un purgatif prompt et certain que le 
médecin de campagne peut employer dans presque tous les 
cas où ce genre de médication est indiqué, et surtout dans les 
‘ maladies chroniques.Cette propriété est due à la présence de 
Ja gomme-gutte. Moins active que cette dernière, la chéli- 
doine en a tous les avantages sans en avoir les inconvé- 
nients. Ce purgatif indigène est le plus efficace; de tous ceux 
que l'on a proposés comme succédanés des évacuants exo- 
tiques. S'il nous venait de l'Amérique ou des Indes, on le 
trouverait dans toutes les pharmacies, et tous les médecins 
le prescriraient. Quand donc finira cette exoticomanie qui 
rend la médecine inaccessible au pauvre, et la France tribu- 
taire de l'étranger pour des ressources qu ‘elle possède et 
dont elle pourrait user à si bon marché ? 

Le suc ou l'extrait de grande- éclaire, mélé avec le jaune 
d'œuf, le mucilage de semence de coing, de racine de gui- 
mauve ou de graine de Jin, dans suffisante quantité d’eau 
sucrée, forme la base d’une potion purgative, légèrement 


2 


138 * 


Jaxative ou altérante, suivant la dose à laquelle on l’admi- 
nistre. J’ai quelquefois employé avec succès comme vermi- 


fuge l'extrait de chélidoine en pilules avec le calomel.L'usage 


de ces pilules, continué longtemps, m’a réussi dans quel- 
ques affections scrofuleuses et dartreuses présumées d'ori- 
gine syphilitique par hérédité, dans les engorgements 
chroniques du foie et de la rate, et dans les constipations 
opiniâtres dues à l'inertie desinstestins.L’effetlaxatif produit 
par la chélidoine permer d'administrer le protochlorure de 
mercure à petites doses, sans craindre son action sur la 
bouche On sait qu'une petite quantité de calomel répétée et 
qui séjourne dans les premières voies, où elle est absorbée, 
cause plus facilement la salivation qu'une dose plus forte de 
celte substance déterminant des contractions intestinales et 
la purgation. 

La chélidoine doit être maniée avec prudence. Comme 
toutes les plantes énergiques, elle peut, à trop forte dose, 
occasionner des accidents et même la mort, en déterminant 
une vive inflammation des organes digestifs, el secondaire- 
ment une irritation du système nerveux. M. Orfila pense 
que celte plante agit spécialement sur les poumons. ] 


Les anciens préparaient dans un vase de cuivre un collyre: 


composé de suc de chélidoine et de miel. Je ne dirai pas, 
avec certains enthousiastes, que l’on a prévenu la cataracte 
et guéri des amauroses par l'usage interne et externe de cette 
plante; mais je puis affirmer que nos paysans ont souvent 
guéri des ophtalmies chroniques qui avaient résisté à toutes 
les ressources de l’oculistique, par la décection de ses feuil- 
les employée comme collyre. Ce moyen est tout-à-fait popu- 
laire et a aû être connu de temps immémorial,ainsi que l'an- 
nonce le nom de grande-éclaire, fondé sans doute sur une 
propriété constatée par l'expérience. J'ai moi-mêmeemployé 
avec succès le suc des feuilles de chélidoine, étendu dans 
plus ou moins d'eau fraîche, en collyre pour les ulcères des 


paupières, les palpébrites muqueuses ou glanduleuses, les 


ophtalmies chroniques, les taies de la cornée et les restes 
du ptérigion. L'emploi de ce collyre réclame de la circons- 
pection : le suc pur de cette plante, en contact avec la con- 
jonctive, peut déterminer une vive irritation et même une 
inflammation grave de l'organe de la vue. Je pense néan- 
moins que le suc des feuilles de chélidoine, plus ou moins 
étendu dans l'eau et même pur, conviendrait, instillé entre 
les paupières, dans l'ophtalmie purulente des nouveaux- 
nés ; c'est un moyen à essayer. 

J'ai employé la racine fraîche de grande-éclaire sur les 


139 


tumeurs scrofuleuses ulcérées ; elles ont eu un effet mar- 
qué et à-peu-près semblable à celui que produit Ia racine 
d’arum employée de la même manière. Le suc des feuilles 
et des racines de celte piante, pur ou mêlé avec plus ou 
moins d’eau, selon qu’on veut lui donner plus ou moins 
d'activité, appliqué avec de la charpie sur les ulcères sor- 
dides, scorbutiques, atoniques, les modifie avantageuse- 
ment, les déterge er les met dans des conditions qui 
en favorisent la cicatrisation. J'ai eu plusieurs fois l'occa- 
sion de constater les bons effets de ces applications.Les in- 
jections de ce suc dans les ulcères sinueux pourraient, en 
déterminant une irritation phlegmasique de leurs parois, en 
produire l’adhérence, si j'en juge par l'essai que j'en ai fait 
dans un cas de décoïlement survenu à la suite d’un abcès 
ouvert spontanément à l’aisselle,entretenant une suppuration 
assez abondante depuis trois mois, et que j'ai guéri par ce 
moyen. Je laissais séjourner le suc injecté jusqu'à produc- 
tion de la chaleur et de ja douleur, ce qui avait lieu au bout 
de deux à trois minutes. J’exerçais ensuite une compres- 
sion graduée. 

[ J’ai vu mettre en usage avec succès, pour provoquer 
l'écoulement des règles, un pédiluve préparé avec une 
grande quantité de chélidoine fraîche en décoction dans une 
suffisante quantité d’eau. Ce pédiiuve gonfle promptement 
les veines des extrémités inférieures et leur donne l'appa- 
rence d’une dilatation variqueuse. On pourrait l'employer 
dans tous les cas où les bains de pieds irritants sont indi- 
qués. 

On applique le suc de grande-éclaire pour détruire les 
verrues et les cors; mais son action, trop faible pour cela, 
est assez forte pour enflammer les parties voisines et aug- 
menter le mal au lieu de le détruire. 

La chélidoine qui a été récoltée dans un terrain sec ou 
sur de vieux murs esi beaucoup plus active que celle qui a 
crû dans des lieux humides et ombragés. La dessiccation lui 
fait perdre une partie de son âcrelé, tandis qu’elle augmente 
au contraire son ameriume. Sa racine, blanche intérieure- 
ment et d’un brun rougeûtre à l’extérieur, devient presque 
noire quand elle est sèche.] 


140 


ÉGLANTIER, 


ROSIER SAUVAGE. 


Rosa sylvestris (T.) 
Rosa canina (L.) 


L'églantier se trouve partout dans les haies. On utilise 
ses fleurs et ses fruits. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Décoction des fruits concassés , 50 à 60 gram. par 


kilogramme d'eau. 
Conserve de cynorrhodon (fruit), 30 à 69 grammes, seule ou dans 


du vin. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction des fruits ou des fleurs , en collyre. 


Propriétés. 


Les fruits de l'églantier sont astringents. Les fruits, 
connus sous le nom de gralte-cu, à cause du prurit 
que les poils qu’ils renferment causent à la peau, ser- 
vent à la confection connue sous le nom de conserve 
de cynorrhodon, qu'on emploie dans la diarrhée, l’ato- 
nie des voies digestives, etc. J'ai quelquefois mis en usage 
la décoction des fruits concassés du rosier sauvage (après 
en avoir enlevé les poils), avec une suffisante quantité de 
sucre, dans les diarrhées des enfants. Cette préparation, 
d'un goût agréable, tient lieu de sirop de coing là où il 
n’est pas toujours possible de se procurer ce dernier. La 
décoction des fleurs est employée en collyre dans les ophtal- 
mies et les palpébrites légères. 

CII naît sur le fruit, là tige, la feuille et son pétiole, par 
la piqûre d’un insecte parasite (cinips rosæ), une excrois- 
sance spongieuse connue dans les anciennes pharmacopées 
sous le nom de bédéquar, er à laquelle on attribuait, entre 
autres propriétés, celle de dissiper les goîtres. L'expérience 
a depuis long-temps fait justice de la prétendue efficacité de 
cette productien tout-à-fait inerte.] 

J'ai employé comme vermicide mécanique à l’intérieur les 
poils contenus dans le fruit de l’églantier. (Voy. Rosier 
de chien, p. 476.) 


141 


ELLÉBORE NOIR, 
ROSE DE NOEL, HERBE DE FEU. 


Helleborus niger flore roseo (T.) 
Helleborus niger {L.) 


Cette plante vivace croît dans les montagnes d’Italie, de 
la Suisse et dans le midi de la France, les Pyrénées, etc. On 
la cultive partout ailleurs, dans les jardins, pour la beauté 
de ses fleurs hiémales. On se sert de sa racine et rarement 
de ses feuilles. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction des racines, de 2 à 8 gram. 
par kilog. d’eau. 
Puudre (de la racine), 40 centig. à À gram. en électuaire, dans 
l’eau ou Île vin, etc. 
Vin (préparé avec la racine), de 20 à 60 gram. 
Teinture (1 sur 4 d'alcool à 220), de 50 centig. à 4 gram. pro- 
gressivement, en polion. 
Extrait (par infusion ou décoction de la racine,i sur 6 d’eau), 
de 10 à 80 ceniig. en pilule, etc. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction pour lotions. Pommade (4 à 8 gram. 
de poudre de racine pour 30 gram.d’'axonge), en frictions. 


Propriétés. 


- L’ellébore noir, dont la racine est plus ou moins âcre et 

détermine sur la langue un sentiment de stupeur, est un 
purgatif drastique qui peut produire l’empoisonnement si on 
le donne à trop forte dose, et que l’on doit administrer avec 
beaucoup de prudence. A l’état frais, sa racine, appliquée 
sur une plaie saignante pendant quelques instants, déter- 
mine le vomissement; aucune des subsiances vénéneuses 
employées jusqu’à ce jour ne produit aussi promptement 
cet effet, au rapport de M. Orfila. Administrée à forte dose, 
cette plante peut causer une superpurgation, des vomisse- 
ments opiniâtres, l’inflammation du tube digestif, des selles 
sanguinolentes, un froid excessif et la mort. 

A petite dose, les anciens comme les modernes ont em- 
ployé l’ellébore noir dans les affections mentales non fébri- 
les,dans les fièvres intermittentes,les affections vermineuses, 
la paralysie, l’hypocondrie, l'apoplexie, la léthargie, l'épi- 
lepsie, les céphalalgies nerveuses, l'hydropisie, le rhuma- 
tisme, la goutte, la chorée; dans les maladies chroniques 


142 


de la peau, telles que la lèpre , l'éléphantiasis , les dartres ; 
Ja suppression des règles ou des hémorroïdes par suite 
d’atonie générale , etc. 

[ A très-petite dose et comme altérant, l’ellébore noir. 
paraît exercer une action spéciale sur le système nerveux. 
On l'associe souvent, en cette qualité, à l'extrait de valériane 
et à la jusquiame dans les névralgies ; mais cette action 
n'est pas démontrée d'une manière certaine et paraît plutôt 
le résultat d’une révulsion faible, mais continue, sur les in- 
testins au profit du cerveau. Si, donné à plus haute dose, 
et produisant par conséquent une stimulation plus grande 
sur l'appareil digestif, Pellébore donne lieu à des symptômes 
nerveux secondaires , il a cela de commun avec tous les 
excitants. Pourquoi chercher , dans un principe occulte et 
spécial , des effets physiologiques que le raisonnement et 
l'observation expliquent et constatent suffisamment ! 

Les anciens faisaient grand cas de la racine d’ellébore 
contre la folie. Les historiens et les poëtes ont célébré de 
tous temps les cures merveilleuses opérées par l’elleborisme 
dans l'île d’Antycire. On pense que ia plante dont se ser- 
vaient les anciens était l’helleborus orientahs, dont les 
propriétés peuvent être très-différentes de celles de notre 
ellébore noir Quoiqu'il en soit, l’action perturbatrice de 
ce dernier peut être efficace dans certains cas d’aliénation 
accompagnés d'une sortie d'inertie, de torpeur du canal 
digestif, el d'un élat du cerveau et du système nerveux indi- 
quant Ja nécessité d’une ferte révulsion. 

La puissante dérivation que produit l’ellébore noir sur 
les organes digestifs l’a fait employer avec succès dans les 
hydropisies passives, lorsque, toutefois, il y avait absence de 
phlegmasie péritonéale où de lésions organiques avec irri- 
tation. Freind et Brunner, d'après Avicenne, l'ont employé 
dans cette indication. Brunner faisait infuser une once 
(32 grammes) de racine fraîche de cette plante dans quatre 
livres (2 kilogram.) de vin généreux, avec une poignée d’ab- 
synthe ; il en faisait prendre un verre le matin à jeun. 

Tous les médecins savent que l’ellébore noir fait la base 
des pilules toniques et antihydropiques de Bacher, lesquels 
sont composées de 30 grammes d'ellébore noir , de pareille 
quantité d'extrait de myrrhe à l'eau et de 12 grammes de 
poudre de chardon bénit, dont on fait des pilules de 2 cen- 
tigrammes et demi. J'ai employé ces pilules avec avantage 
dans quelques cas d’anasarque où il n'existait aucune irri- 
tation inflammatoire des organes digestifs, et lorsque la 
maladie avait un caractère passif bien évident. 


143 


[ Hildanus s’est guéri lui-même, avec la racine d’ellébore 
noir, d'une fièvre quarte, et a obtenu le même succès sur 
d'autres malades. Ïl est quelquefois utile de rompre, par 
une violente perturbation, l'habitude morbide qui entretient 
les fièvres intermittentes anciennes. Au reste, dans ces cas, 
tout autre drastique produit le même effet, ainsi que je l'ai 
observé à l'occasion de l'emploi de la chélidoine chez une 
jeune fille atteinte depuis long-temps d’une fièvre quarte. 
(Voy. Eclaire, page 135.) 

Les anciens employaient fréquemment l’ellébore dans les 
maladies cutanées chroniques. Arété et Celse, Halles et 
Hildanus, la recommandent dans la lèpre, l'éléphantiasis, 
les affections herpétiques et psoriques.] 

J'ai fait prendre plusieurs fois, avec un succès remar- 
quable, la mixture de Rosenstein dans les affections vermi- 
neuses. Cette mixture se compose de 1 gram. 20 centig. 
d'extrait d'ellébore noir, de 50 centig. de sulfate de fer, de 
32 gram. d'eau de ckaréon bénit et de 32 gram. de sirop de 
violette où de miel. La dose de ce mélange est d’une cuille- 
rée à bouche, le matin à jeun, pour les enfants : on aug- 
mente où l'on diminue cette dose, suivant l'âge et les cir- 
constances. Baglivi donnait la décoction des feuilles d’ellé- 
bore comme vermifuge. 

[II faut bien se garder d'employer l’ellébore noir comme 
vomitif ou purgatif chez les sujeis sanguins ou trop irritables. 
Oa ne le donnera aux enfants, aux vieillards el aux femmes 
délicates qu'avec la plus grande circonspecion. On s’en 
abstiendra toujours lorsqu'il existera une irritation inflam- 
maloire ou nerveuse des organes digestifs. En imitant Ia 
prudence des anciens dans la manière de l'administrer, il 
pourra remplacer beaucoup de purgatifs exotiques. Comme 
altérant (diurétique, excitant, emménagogue, eic.), on ne 
doit pas dépasser la dose de 35 à 40 centigrammes: comme 
purgahf, on ne doit pas aller au-delà de 1 gramme 50 cen- 
tigrammes de poudre, ct de 4 gramme d'extrait, prépara- 
tions le plus ordinairement employées. 

À l'extérieur, on emploie la pommade d'ellébore avec 
succès dans les darires invétérées. La plante, appliquée 
fraiche sur la peau, y produit un effet vésicant. On l'a signa- 
lée comme un sternutatoire violent; mais cette propriété est 
plus prononcée dans les varaires, connus aussi sous le nom 
d ellébores. 

Dans le commerce, l’ellébore noir est souvent mélé avec 

lusieurs autres racines qui lui sont ainsi substituées à 
Éiéout du médecin qui le prescrit. On y trouve celles de 


14% 


helleborus fœtidus, de l'helleborus viridis, de l'adoms 
vernalis de l’aconilum napellus, etc. Cette falsification, 
ou plutôt cette négligence, est sans doute la cause princi- 
pale de la diversité des opinions sur les effets de l’ellébore 
noir et sur les doses auxquelles il convient de l’adminis- 
trer. La racine de ce dernier est d’un brun noirâtre à 
l'extérieur et blanche ou grisätre en dedans. Elle se com- 
pose de tronçons de la longueur et de la grosseur du petit 
doigt, irréguliers, couverts de radicules, ei parsemés d’an- 
neaux Circulaires. On voit sous son écorce un cercle de 
points blancs indiquant la naissance des radicules. 

Les effets plus ou moins prononcés de cette racine dépen- 
dent de son degré de fraîcheur et de siccité. Si l'on veut 
compter sur son efficacité il faut l’employer à l’état frais 
pour ses diverses préparations, et, dans tous les cas, ne 
jamais attendre que la vétusté l’ait privée de ses principes 
les plus actifs.] 


ELLÉBORE BLANC, 


VARAIRE, VÉRATRE, VÉRATRE BLANC. 


Veratrum flore Subviridi (T.) 
Veratrum album (L.) 


Cette plante vivace croît en Suisse, en Italie et dans le 
midi de la France. Les racines et les feuilles sont employées, 
mais celles-ci rarement. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Racine en poudre, 20 à 50 cent. 
Racine en décoction, 60 cent à 1 gram. irès-progressivement. 
A L'EXTÉRIEUR: Décoction, 10 à 42 gram. par kilog. d’eau, pour 
lotions antipsoriques, elc. 
Vinaigre (4 sur 100 de vinaigre) pour lotions anti-herpétiques. 
Pommade (1 sur 4 d'axonge) pour onctions anti-psoriques. 


Propriétés. 


La racine d’ellébore blanc, d’une saveur d'abord dou- 
ceâtre, puis âcre, amère et corrosive, est un purgatif violent. 
[A forte dose elle cause des vomissements, une faiblesse 
extrême du pouls, des convulsions, la perte de la voix, une 
sueur froide, le hocquet, en un mot, des symptômes ana- 
logues à ceux de l’empoisonnement par }'ellébore noir, mais 


145 


plus intenses. Réduite en poudre, elle est très-fortement 
sternultatoire. 

Les évacuations abondantes que la racine de cet ellébore 
produit,ont quelquefois favorisé la guérison de Phydropisie:; 
mais, ainsi que l’observe le judicieux Murray, la violence 
de son action à donné la mort à plusieurs hydropiques. 
Comme j'ai toujours pu remplir les mêmes indications avec 
d’autres plantes sans exposer les malades à de tels dangers, 
je me suis abstenu de l'usage de lellébore blanc à l'inté- 
rieur.] | 

Cependant Gesner, qui à essayé les propriétés de cette 
plante sur lui-même, a trouvé le moyen d’enchaîner cette 
substance trop énergique, et de guérir par son usage des 
obstructions abdominales. Voici comme il procédait : Racine 
sèche et pulvérisée d'ellébore blanc, 8 grammes; faites 
digérer pendant un mois dans 170 grammes de vin spiri- 
tueux, que l’on administre à la dose de { gram. 25 centig., 
non dans l'intention de purger, mais de résoudre les embar- 
ras des viscères. Gilibert indique ce remède comme un des 
meilleurs fondants. Sous cette forme, on la employé dans 
les dartres, la teigne, la lèpre et l’éléphantiasis. 

[La racine d’ellébore blanc a été mise en usage à l’exté- 
rieur contre certaines maladies chroniques de la peau. 
Swediaur employait dans le prurigo et le porrigo favosa, la 
lotion suivante : Racine d’ellébore blanc, 135 grammes ; eau 
bouillante, 1 kilog.; passez après refroidissement,et ajoutez 
à la solution 135 grammes de teinture d’ellébore blanc. Biet 
s’est servi dans le traitement de la gale, chez les personnes 
qui redoutaient les préparations sulfureuses, d’une pommade 
composée de 4 grammes de poudre de racine d’ellébore 
blanc, de 32 grammes d'axonge et deux gouites d'essence de 
bergamotie, pour deux frictions, matin et soir. Quarante 
malades ont été guéris en treize jours (durée moyenne) sans 
accidents. 

Plistonicus faisait des suppositoires avec l’ellébore blanc, 
et excitait ainsi le vomissement. Dioclès en faisait des pes-. 
saires pour introduire dans le vagin, et produire le 
même effet. Dans les affections goutteuses des extrémités, les 
médecins de l'antiquité arrosaient les pieds avec l’ellébore 
en décoction dans l’eau de mer; ces lotions produisaient 
des vomissements qui diminuaient les douleurs des articu- 
lations.] 


10. 


146 


ELLÉBORE FÉTIDE. 


PIED DE GRIFFON. 


Helleborus niger fœtidus (T.} 
Helleborus fœtidus (L.) 


Cette plante croît spontanément en Suisse, en Allemagne, 
dans presque toute la France, sur les lisières des bois, dans 
les lieux stériles, ombragés et pierreux, La racine et les 
feuilles sont employées. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Décoction des feuilles fraîches, 2 à 4 grammes 
pour 180 gram. d'eau. 
Suc, mêlé au miel ou au suc, 4 à 4 grammes. 
Poudre, 10 à 80 centigrammes, progressivement. 


Propriétés. 


Cet ellébore, d’une odeur fétide, d’une saveur âcre et 
amère, si on l’emploie sans précaution, est aussi vénéneux 
que les deux espèces dont je viens de parler. Il peut être 
très-utile comme purgatif et vermifuge quand il est manié 
avec prudence. À l'exemple des anciens, qui excellaient 
dans l’art de diminuer l’action trop véhémente des substan- 
ces les plus délétères, on peut faire macérer modérément ses 
feuilles dans le vinaigre, ou les humecter simplement avec 
cette liqueur, en exprimer ensuite le suc pour en faire un 
sirop avec le sucre ou le miel. Ainsi préparé, l’ellébore fétide 
ne cause ni nausées ni vomissement. On en administre une 
moyenne cuillerée le soir, et une ou deux le matin pendant 
deux ou trois jours de suite,pour un enfant de cinq à six ans. 
On augmente ou l'on diminue la dose selon l'âge et l’état 
du malade. Comme cette dose produit rarement des selles, 
on peut prendre ensuite un léger purgatif. J'ai employé la 
poudre des feuilles de cet ellébore à la dose de 50 à 80 cen- 
tigram. dans quantité suffisante d’eau miellée, pour expulser 
les vers instestinaux. Ordinairement celte dose, proportion- 
née à l’âge des enfants, et que l’on répète tous les deux ou 
trois jours, purge suffisamment tout en agissant très-effica- 
cement comme vermicide. Donnée en plus grande quantité, 
cette plante devient éméto-cathartique. 

[Bisser (Essai sur la constitut. méd. de l'Angleterre) dit 
que c’est un remède qui ne lui a jamais manqué à titre de 
vermifuge; mais, ainsi que le fait remarquer Pinel (Ency- 


147 


clop. method.), à cause des qualités très-âcres de cette 
plante, il faut commencer par de très-pelites doses pour 
éviter l'effet irritant qu'elle peut produire sur des individus 
délicats et sensibles. 

« Si, dans les maladies vermineuses des enfants, dit 
Bulliard, on leur fait prendre tous les matins à jeun un 
bol composé avec les jeunes feuilles de cette plante pilée et 
unie avec un peu de miel, et saupoudrée de sucre, cela tue 
les vers ; mais il faut observer les effets de ce médicament : 
commencez par purger doucement; donnez un très-petit bol 
le lendemain de la médecine ; augmentez-en peu à peu le 
diamètre, et faites boire souvent à cet enfant beaucoup de 
limonade cuite ou du sirop de vinaigre.» (Hast. des plantes 
véneneuses de la France, p.273.)] 

La racine de pied de griffon est employée par les vétéri- 
naires comme purgatif et pour en former des sétons ; elle 
entretient une irritation et une suppuration continues. 


ÉPINE-VINETTE, 


BERBÉRIS, VINETIER. 


Berberis dumetorurm (T.) 
Berberis vulgaris (L.) 


Cet arbuste, remarquable par la faculté contractile de ses 
étamines ({), croît partout, le long des bois, dans les haies, 
au voisinage des fermes. L’écorce, les feuilles et les fruits 
sont usités. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction de l'écorce intérieure de la tige ou de la 
racine, 4 grammes pour 500 grammes d’eau. 
Suc des fruits, 30 à 60 grammes par kilog.d’eau pour boisson. 
Sirop (2 de suc des fruits sur 5 de sucre) 30 à 150 grammes en 
potion, et pour édulcorer les boissons. 
Rob, gelée, conserve, etc., de 50 à 60 grammes. 


Propriétés, 


Toutes les parties de l’épine-vinette sont utiles. La seconde 
écorce de la tige, où mieux de la racine, est amère et légè- 


(1) Les fleurs de berbéris présentent un phénomène curieux : les éta- 
mines sont douées d’une irritsbilité telle, qu’au plus léger attouchement 
elles se contractent et se portent aussitôt vers le pistil,où elles demeurent 
fixées pendant un certain temps comme pour le garantir de toute atteinte 
extérieure. 


148 


rement purgative. Gilibert la regarde comme un bon fondarit 
indiqué dans les embarras du foie et de la rate. Je l’ai mise 
en usage avec succès dans les hydropisies. Je me sers de la 
formule suivante : Seconde écorce de berbéris 4 grammes, 
eau froide trois verres ; faites cuire jusqu’à ce que l'eau soit 
bouillante, retirez alors de dessus le feu ; ajoutez du sucre 
et laissez refroidir l’infusion ; pour une dose à prendre en 
trois fois chaque jour le matin. Quelques praticiens ont 
recommandé la même écorce macérée dans du vin blanc, 
contre l’icière, sans préciser l'indication de son emploi, 
comme si la coloration symptomatique dela peau, qui caracté- 
rise cette maladie,tenait toujours à une seule et même cause. 
La décoction des feuilles de berbéris, avec addition d’un 

peu de miel,a été employée dans le scorbut et dans quelques 
espèces de dyssenteries. 

Les fruits de cet arbrisseau ont la saveur et les avantages 
réunis de la groseille et du limon. On en prépare un rob, un 
sirop et une gelée. On confit, pour l'usage de la table, des 
grappes d’épine-vinette dans le sucre. Les baies fermentées 
avec de l’eau miellée fournissent un hydromel aigrelet fort 
agréable. On emploie avec avantage la limonade faite avec 
le suc de ces baies dans l’angine, les fièvres inflammatoires, 
bilieuses et typhoïdes. Cette limonade, comme celle d’a!le- 
luia, est à la fois simple, agréable et économique; elle est 
supérieure à celle que l’on prépare avec le citron. Les fruits 
d'épine-vinette, séchés pour l'hiver, conservent leurs qua- 
lités. Il serait à désirer que lon cultivât cette plante par- 
tout où elle n’est pas assez abondante ; elle n'est sans doute 
si négligée que parce que le groseiller, plus productif, 
donne des produits analogues. 


EUPATOIRE, 


EUPATOIRE D'AVICENNE, EUPATOIRE DES ARABES, 
HERBE DE SAINTE CUNÉGONDE,. 
Eupatorium cannabinum (T.) 
Eupatorium cannabinum (L.) 
Cette plante se trouve partout, sur les bords des eaux 
stagnantes, dans les prés humides, les marais. Ses feuilles 
et ses racines sont usitées. 
Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction des feuilles, de 30 à 60 gram. 
par kilog. d'eau. 


149 


Décoction des racines dans l'eau, ou infusion dans le viu ou dans 
la biére, de 30 à 60 gram. par ki! og. d'eau. 
Suc des feuilles, de 30 à 120 grammes. 


A L'EXTÉRIEUR : Feuilles, en caiaplasme, décoction, pour fomen- 
tations, lotions, etc. 


Propriétés. 


Toutes les parties de cette plante ont une saveur amère, 
aromatique et piquante. Elle est purgative, apéritive, stimu- 
lante, tonique. On l'a employée dans les hydropisies, les 

catarrhes chroniques, la chlorose, le scorbut, l’ictère, les 

engorgements du foîe et de la rate, les affections cutanées 
chroniques, J'aménorrhée, etc., et à l'extérieur comme ré- 
solutif, détersif, tonique, etc. 

Les auteurs sont loin d’être d'accord sur les propriétés de 
l'eupatoire d’avicenne. La vertu purgative de la racine, 
constatée par les uns, a été révoquée en doute par les autres. 
Mais, ainsi que Guersent l’a judicieusement remarqué, cela 
tient probablement à ce que la racine a été, dans les diverses 
expériences, récoltée à des époques différentes. On sait, en 
etfet, qu'après la maturité des semences, les racines des 
plantes les plus actives sont dénuées d'une grande partie de 
leurs propriétés. [l paraît démontré aujourd'hui, par les 
essais de Gesner, confirmés par ceux de Boudet et de Cham- 
bon de Montaux (Bulletin de pharm., tom. 1° ef 3), et ma 
propre expérience vient à l'appui de cette opinion, fondée 
sur des faits, que la racine de cette plante, récoltée en saison 
convenable, est purgative, et que les feuilles agissent à la 
manière des toniques amers. J'ai vu des paysans employer 
les racines et les feuilles d’eupatoire infusées ensemble dans 
la bière, afin de produire à la fois un effet purgatif, toni- 
que et surtout vermifuge. fnfusées de Ia même manière dans 
le vin blanc, elles peuvent être utiles dans lPhydropisie, 
l'œdème, les engorgements viscéraux succédant aux fièvres 
intermittentes, les cachexies, etc.; mais rien n’est venu jus- 
tifier les merveilleuses propriétés attribuées à l'eupatoire par 
un grand nombre d'auteurs. Ses propriétés résolulives sont 
tout aussi douteuses. J'ai essayé l'application de ses feuilles 
en cataplasme sans en relirer aucun avantage appréciable. 
La racine pilée à été un peu plus active, sans cependant 
produire un effet qui puisse la faire e adopter de préférence à 
tant d’autres agents de même nature, et que l’on à abandon- 
née depuis loug-temps. Ce qu'on dit du suc de cette plante, 
associé au vinaigre et au-sel commun, pour le traitement 
de la gale, paraît plus conforme à l'observation journalière, 


150 


lorsqu'on réfléchit que les lotions faites avec la décoction 
de presque toutes les plantes âcres ou aromatiques suffisent 
souvent pour guérir cette affection. 

[L’eupatoire ayant une action analogue à celle de la rhu- 
barbe, comme à la fois purgative et tonique, me paraît pou- 
voir être substituée souvent à cette dernière dans la pratique 
rurale.] 


EUPHORBE CYPARISSE, 


PETITE ÉSULE, EUPHORBE À FEUIRLES DE CYPRÈS, 
RHUBARBE DES PAYSANS. 


Euphorbia cyparissias (T.) 
Euphorbia cyparissias (L.) 


Cette plante croît partout, sur les lisières des chemins et 
des bois, dans les lieux incultes. Ses feuilles ressemblent 
si bien à la linaire qu’on ne les distingue que par le lait 
dont l'ésule est remplie etque la linaire n’a point, ce qui a 
donné lieu à ce vers : 

Esula lacteseit, sine lacte linaria crescit. 


[ Ainsi que d’autres espèces de la même famille, la petite 
ésule a des propriétés analogues à celles de l’euphorbe- 
épurge. Sa racine, avalée, même en très-pelite quantité, 
excile de violents vomissements et purge abondamment. 
C’est à sa vertu drastique qu'elle doit le nom vulgaire de 
rhubarbe des paysans. Cette plante est plus active encore 
que l’épurge; elle enflamme, corrode et ulcère la membrane 
muqueuse du tube digestif. Toutefois,son âcreté peut être cor- 
rigée soit en la faisant macérer pendant vingt-quatre heures 
dans le vinaigre, dans le suc d'oseille ou toute autre liqueur 
acide, soit en la faisant dessécher selon le procédé de Coste, 
indiqué pour l’épurge. Dans cet état, on peut l’administrer 
comme drastique en substance à la dose de 50 centigram. 
à 1 gramme. Géoffroiy l'employait même à la dose de 1 gram. 
25 centigram. à 4 grammes. On en a quelquefois donné les 
feuilles en décoction dans le lait ou dans l’eau de racine de 
guimauve à la dose de 8 grammes. Les fruits de cette plante, 
au nombre de dix à douze, purgent violemment les sujets 
les plus robustes. C’est avec la poudre des feuilles de petite 
ésule que l’on préparait le fameux purgatif appelé poly- 
_chreste, tout-à-fait oublié aujourd’hui comme tant d'autres 
compositions de la polypharmacie des anciens. Haller a vu 
une ophtalmie suivie de cécité résulter de l'application du 


151 


suc de petite ésule à la face externe des paupières. Vicaf 
fait mention d'un homme qui eut le visage écorché pour 
s'être frotté avec le suc de cet euphorbe, et Lamotte parle 
d'un clysière préparé avec cette herbe, qu'on avait prise en 
place de mercuriale, et dont l'effet fut mortel.] 

Les campagnards font disparaître les verrues avec lesuc de 
toutes les tithymales, et surtoutavec celui de l'espèce appelée 
réveille-matin,qui estheaucoup plus commune que les autres; 
mais il faut, avant d'appliquer ce suc, enlever légèrement 
la superficie de l’excroissance avec un instrument tranchant. 


L'EUPHORBE RÉVEILLE-MATIN (euphorbia helioscopia), qui 
croît dans tous les terrains cultivés et principalement dans 
les jardins, était considéré par les anciens comme la moins 
active de ses congénères. Ils attribuaient, en outre, plus ou 
moins d'activité à chacune des parties de cette plante: le lait 
était la substance la plus violente ; la graine l'était moins, 
les feuilles moins encore que les graines, et les racines 
moins actives que les feuilles. Hippocrate et Dioscoride 
incorporaient le lait de réveille-matin avec la pulpe de figue 
sèche, et l'y laissaient séjourner plus ou moins long-temps 
avant d’en faire usage. La graine, récoltée en automne, séchée 
et pulvérisée, était mêlée avec du miel, ou bien, selon Pline, 
avec le raisiné ou le vin cuit, à la dose de 20 grains ({ gram.) 

_Actuarius faisait torréfier les feuilles de réveille-matin dans 
un vase de terre neuf; après les avoir pulvérisées, il en mé- 
lait 4 grammes avec de la farine d'orge, dans une tisane 
mucilagineuse, dans du miel, dans la pulpe de raisin, dans. 
du raisiné, dans l'eau simple ou dans un bouillon de poulet. 
On l’employait aussi dans le vin blane, le suc d'absynthe, 
de mélisse. etc., ou en pilules. Constantin, dans son brief 
Traité de la Pharmacie provençale et familière, recommande 
les graines pulvérisées, ou la racine en poudre, avec la pulpe 
de prunes aigres ou douces, avec celle de raisins secs ou 
de figues, en forme de lénitif. 

On faisait encore macérer pendant quelque temps les. 
feuilles, l'écorce ou la semence de réveille-matin, à la dose 
de 8 à 12 grammes dans une décoction de bourrache, de 
bulglosse, de chicorée, de mélisse, de pourpier, d'alkekenge, 
d’oseille, d'hypociste, de raisins secs, de pruneanx et de 
grande consoude. Après avoir passé cette Lisane on la don- 
nait au malade à dose plus ou moins forte, selon les cas. 
On administrait anssi en électuaire les feuilles macérées de 
la plante, après les avoir fait sécher et pulvériser; l'effet en 
était alors mitigé. 

D'après le degré d'énergie des diverses parties de Ia 


. 

152 , 
plante, le suclaiteux corrigé était donné à Ja dose de 1 gram. 
à 2 grammes; les semences à 1 gramme, les feuilles à # 
gramme 25 centigranmes, et les racines à 1 gramme 50 
centigrammes. 

D'autres espèces de tithymales, telles que l'euphorbe des 
vignes {euphorbia pepulus) l'euphorbe des marais ou grande 
ésule (euphorbia palustris), Veuphorbe nummulaire ou petit 
tithymale (ewphorbia chameæcice), peuvent être employés 
comme ceux dont nous venons de parler, et être substitués 
à l’euphorbe officinale ou des anciens, et à la gomme-gutte, 
à la scamonée. Tous les tithymales bien vérifiés, dit Gilibert, 
offrent divers degrés d’activité; manié par des praticiens 
sagement hardis, ils peuvent produire des effets très-heu- 
reux. Cependant on les néglige, quoiqu’une foule d'obser- 
vations anciennes parlent en leur faveur ; et, par une éton- 
nante contradiction, les médecins ordonnent chaque jour, 
dans les maladies atoniques, des drogues étrangères qui ne 
sont que des sucs résineux plus àcres dans leurs plantes 
vivaces que celui de nos tithymales. 

J'ajouterai à ces considérations thérapeutiques, que les 
drastiques sont supportés plus facilement dans le nord que 
dans le midi, dans les campagnes que dans les villes, dans 
les lieux bas et aquatiques que sur les montagnes. De là les 
opinions contradictoires des praticiens sur l’action plus ou, 
moins véhémentes de nos euphorbes et des autres drastiques 
indigènes. J'ai été plus d'une fois à même d'observer que 
tel médicament de ce genre, administré sans inconvénient 
aux paysans, occasionnait chez les citadins, où le système 
nerveux est habituellement surexcité, des superpurgations 
eu des accidents sympathiques très- graves. L'action des 
médicaments énergiques est donc subordonnée à l'état du 
système nerveux.] 


EUPHORBE-ÉPURGE, 


ÉPURGE, CATAPUCE, EUPHORBE LATHYRIENNE. 


Tithymalus latifolius, cataputia dictus (L°+} 
Euphorbia lathyris (L.) 


Cette plante, une des plus belles espèces d’euphorbe parmi 
celles de l'Europe, se trouve sur les lisières des grandes 
routes, dans les terrains sablonneux el boisés, et est plus 
abondante dans les parties tempérées de la France que dans 
les départements du nord, Je la cultive dans mon jardin, où 


LD 


153 
elle se sème d’elle-même. Onutilise les semences, les feuilles 
et les racines. 
Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Semences, 6 à 42 entières comme cathartique, 
éméto-cathartique où drastique. 
Huile des semences, 20 centigrammes à 1 gramme en pilules, 
potion, émultion. 
A L'EXTÉRIEUR ; Huile en friclions, de 4 à 2 grammes. 
Fropriétés. 

L'épurge est un purgatif drastique des plus violents. La 
semence de cette plante n’en est pas moins d’un emploi tout- 
à-fait vulgaire dans nos campagnes. On en avale six à 
douze graines pour produire un effet purgaif suffisant. On 
prend aussi quelquefois quatre ou cinq de ses feuilles 
broyées avec du miel. Les paysans qui se purgent avec les 
semences les mâchent bien avant de les avaler quand ils 
désirent produire un grand effet ; ils les concassent légère- 
ment lorsqu ils ne veulent qu’un effet modéré. Pour moi, je 
les emploie en émulsion avec le jaune d'œuf et une suffi- 
sante quantité d'eau. Cependant, chez les sujets robustes et 
surtout dans les hydropisies non accompagnées d’irritation 
gastro-intestinale ou d'inflammation, je les administre en 
substance. Ces semences peuvent remplacer avantageuse- 
ment l'huile de croton tiglium; elles sont d’une action moins 
violente et tout aussi certaine. 

[ L'huile qu’on en retire est, au rapport de Cario Calde- 
rini, qui le premier l’a obtenue, un purgatif très-doux. A la 
dose de trois gouttes chez les enfants, et de six à huit gouttes 
pour les adultes, elle produit des évacuations alvines sans 
coliques, sans ténesme. Ce n'est que lorsqu'elle est rance 
qu'elle cause des coliques. Avec le temps, et surtout par 
l'influence d’une température chaude, elle se trouble et ran- 
cit ; alors sa saveur, de douce qu'’eile était, devient piquante. 
Dans l'usage que j'en ai fait, je l’ai vue produire assez sou- 
vent des contractions de l'estomac, et absolument le même 
effet, sur les intestins, que l'huile de croton tiglium. Louis 
Frank pense que l'huile d’épurge pourrait être employée 
contre le ténia, l’ascite, l’hystéralgie, etc. M. Martin 
Solon l’x administrée avec succès à la dose de 1 gramme 25 
centigrammes jusqu'à 4 et 6 grammes dans plusieurs cas 
d’aibuminurie chronique (Bulletin de thérapeut., tom. vin). 
Mais, ainsi que le fait judicieusement remarquer M. Valleix 
(Guide du méd. praticien, tom. vn), dans d'autres cas aussi, 
en continuant trop longtemps son administration, on a pro- 


154 


duit une irritation assez vive de la muqueuse intestinale, 
qui à paru hâter la mort. Lorsque dans cette maladie il y à 
opportunité pour l'emploi des purgatifs, je donne la préfé- 
rence à la racine de bryone, à l'écorce intérieure de sureau, 
à la gratiole, au nerprun, ‘ele. , qui remplissent la même 
indication avec moins de violence. 

Dans les cas où il n'existe pas trop d’irritation intestinale, 
j'ai pu remplacer l'huile de ricin par un mélange d'huile 
d'olive ou d’œillette et d'huile d’épurge (6 à 12 centig. pour 
30 grammes d’huile.] 

J'ai produit la rubéfaction et une éruption à Ja peau,com- 
me avec l'huile d’épurge, dans les affections bronchiques, 
dans la sciatique, etc., en employant l’huile d'olive ou d'œil- 
lette dans laquelle j'avais fait macérer les semences concas- 
sées d'épurge. Cette huile m'a été d'un grand secours dans 
les épidémies de coqueluche, concurremment avec l’usage 
intérieur de la belladone. L'irritation qu’elle produit en 
friction sur la poitrine est moins douloureuse que celle qu'on 
provoque par la pommade stibiée, et l'action en est plus. 
facilement graduée. Les feuilles fraîches d’épurge et de 
quelques autres espèces d’euphorbe, avec lesquelles on fric- 
tionne la peau, produisent aussi la rubéfaction; mais je leur 
préfère les frictions huileuses préparées avec la semence 
comme je l'ai indiqué plus haut. Le prix élevé des huiles de 
croton et d’épurge n’en permet pas l’usage à l’extérieur 
dans la médecine des pauvres. 

L’épurge ne doit être employée à l’intérieur qu'avec une 
extrême prudence; dans les mains du vulgaire elle peut 
devenir un poison violent. J'ai vu déterminer une diarrhée 
rebelle chez un cultivateur qui avait pris quinze semences 
de cette plante dans un jaune d'œuf. Ce ne fut qu'après un 
long usage des mucilagineux et des opiacés que je parvins. 
à le guérir. Au reste, dans les circonstances où l'énergie de 
l’'épurge est indiquée, le médecin n’a d’autres précautions à 
prendre que celles que réclame l'emploi de la scamonée, de 
la scille, de la gomme-gutte, etc. 

[Bulliard conseille d’administrer l'épurge de la manière 
suivante : « Vous faites infuser 8 grammes des feuilles, des 
tiges ou des fruits de tithymale encore vert, dans une livre 
d’eau tiède, dans laquelle on délaie une cuillerée de miel, et 
l'on prend de cette eau de la même manière que l’eau émé- 
tisée, c'est-à-dire, que l’on en prend d’abord deux cuillerées, 
une heure après deux autres cuillerées, et de demi-heure en 
demi-heure une nouvelle cuillerée, jusqu'à ce que ce remède: 
produise l'effet qu’on en attend : il faut, à chaque fois que: 


155 


l’on prend de cette eau, avaler un petit bouillon gras (Hisé, 
des plantes vénén., pag. 256.) 

On peut modérer l'énergie de l’épurge par la dessiccation 
prolongée ou par une légère torréfaction. Séchée à l'air libre 
pendant dix mois et mêlée avec du sucre, les feuilles, la ra- 
cine et l'écorce des tithymales, agissent, suivant Coste, sans 
inconvénient comme purgalif et même comme émétique à 
la dose d'un gramme : huit paysans robustes, atteints de 
fièvre tierce, à qui on a administré ce remède, en ont fourni 
la preuve. ] 


EUPHRAISE, 


EUPHRAISE OFFICINALE. 


Euphrasia officinarum (T.) 
Euphrasia officinalis (L.) 


Je ne parle de cette plante que parce qu'un grand nombre 
d'auteurs lui ont attribué les propriétés les plus merveil- 
leuses. Il faut la crédulité de Mathiole pour croire que l’eu- 
phraise guérit la cataracte, l’épiphora, l'obscurité de la vue, 
la cécité et presque toutes les maladies de l’appareil oculaire. 
Des hommes célèbres, tels que Fabrice de Hilden, Lanzoni, 
Camérarius, Hoffmann, Rai, Jean Frank, se sont laissés en- 
traîner par le préjugé en faveur d'une plante, très-jolie du 
reste, mais sans vertus. Quand de grands noms accréditent 
. l'erreur, elle marche, traverse les siècles et vient s’asseoir 
gravement à côté de la science. Croira-t-on qu'il est encore 
des praticiens instruits qui prescrivent comme un précieux 
anti-ophtalmique l’eau distillée d’euphraise? 

Quel est donc l’origine de la réputation de l’euphraise ? 
La voici : La tache jaune qu’on observe sur ses fleurs est 
remarquable ; on lui a trouvé la forme d’un œil, dit Chau- 
melon, et, à une époque où l’absurde système des signatures 
était en vigueur, on en a conclu que l’euphraise devait être 
un remède infaillible contre les maladies des yeux. 


FENOUIL, 


ANETH OU ANIS DOUX. 
Fœniculum duice (T..) 
Anethum fæniculum (L.) 
Le fenouil croît en France, en ltalie, etc., dans les terrains 
pierreux, les décombres ; on le cultive dans les jardins. Les 
racines, l'herbe et les semences sont usitées. | 


156 


Fréparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Semences en pou?re, 2 à 4 grammes. 

Décoction des racines, de 30 à 60 gram. par kilog.d'ean. 

Infusion aqueuse des semences, de 45 à 66gram.par kilog.d’eau. 

Eau distillée (4 de fenouil sur 4 d'eau), de 50 à 100 gram.comme 

véhicule en potion, coilyre, etc. 

Vin (50 à 60 gram. de semences pour 1 kilogram. de vin), de 30 

à 420 grammes. 

Teinture (4 sur 8 d'alcoo! à 21°), de 50 centigram. à 2 gram,, 

en potion. 

Huile essentielle, de 50 à 50 centig., en potion. 

A L'EXTÉRIEUR : Huile essentielle et teinture, en frictions. 

Poudre, quantité suffisante en topique, en pommade avec 

l'axonge, elc. 

Feuilles et summilés, en cataplasme, fomentations, etc. 

Propriétés. 

Le fenouil, d'une saveur aromatique, âcre et pénétrante, 
est excitant. On peut, à ce titre, l'employer dans toutes les 
affections qui réclament l'action des toniques diffusibles. 
Hippocrate, et après lui Dioscoride, l’ont recommandé pour 
activer la sécrétion du lait. Bodard a vérifié cette propriété : 
« Nous pourrions, dit cet auteur, citer plusieurs exemples 
de mères qui, manquant de lait, étaient sur le point d'aban- 

donner leur enfant à un lait étranger, et chez lesquelles nous 
avons rétabli la sécrétion de ce fluide précieux, au moyen 
d’une infusion théiforme de semences de fenouil, édulcérée 


avec un peu de racine de réglisse verte. (Cours de Botamiqg. 


médic. comparée.) » J'ai employé plusieurs fois le même 
moyen avec succès chez les femmes atteintes d'agalactie par 
suite de dyspepsie produite par l'atonie de l'estomac ou la 
gastralgie. Lorsqu'il existe une irritation phlegmasique de 
l'estomac, accompagnant ou causant la suppression du Jait, 
l'usage du fenouil ne peut que nuire. Attribuer à cette plante 
des vertus carminalives comme à l'anis, au carvi, à la co- 
riandre. etc., et Ja dire stomachique, diurétique, emména- 
gogue, antispasmodique et même fébrifuge, c'est exprimer 
tout simplement une action excitante sur l’économie en 
général, et, selon les dispositions individuelles, sur tel ou 
tel organe en particulier. 

La racine de fenouil est mise au nombre des racines apé- 
rilives ; les feuilles et les sommités sont appliquées en cata- 
plasme sur les engorgements des mamelles. Cette plante, 
comme toutes celles du même genre, est beaucoup plus 
aromatique dans le midi que dans les départements du centre 
et du nord de la France. La semence de fenouil doit être 
nouvelle, nette, bien nourrie, et d'un goût agréable. 


157 


. FENU-GREC, * 


TRIGONELLE FENU-CREC, SÉNÉGRÉE. 


Fœnum græcum sativum (T.) 
Trigonella fœnum græcum (L.) 


. Le fenu-grec, très-commun dans l’ancienne Grèce et en 
Egypte, où on le cultive, se rencontre dans plusieurs des 
départements méridionaux de la France, dans les champs et 
sur les bords des chemins. On cultive cetie plante comme 
fourrage dans quelques parties du Languedoc et du Dau- 
phiné. Les semences sont usitées. 


Propriéiés. 


La grande quantité de mucilage que contiennent les 
graines de fenu-grec les rendent adoucissantes, émollientes, 
lubrifiantes ; 30 grammes de ces semences donnent, par 
l'ébullition, la consistance mucilagineuse à 500 gram. d’eau, 
qu'on peut employer avec avantage à l’intérieur et en lave- 
ment, pour appaiser l'irritation de l'appareil digestif dans 
les diarrhées, la dyssenterie, l'empoisonnement produit par 
les substances corrosives, le gastro-entérite chronique, etc. 
Mais c'est surtout à l'extérieur qu’on emploie les semences 
de fenu-grec, en décoction dans l’ophtalmie, les aphtes, les 
gerçures des lèvres et du mamelon. En catapiasme, la graine 
de fenu-grec convient pour calmer la douleur et favoriser 
la résolution dans le phlegmon et autres inflammations 
externes. Îl faut choisir cette graine récente, grosse, de cou- 
leur jaune ; la vétusté la rend obscure ou brune. 


— 


FÈVE DES MARAIS. 


Faba major, sive flore candido \T.) 
Faba vulgaris (L.) 


Cette plante est cultivée pour son fourrage et pour sa 
graine. 


Propriétés. 


Les fleurs de cette plante sont légèrement aromatiques et 
antispasmodiques. Les semences sont adoucissantes, réso- 
lutives et astringentes. J'ai vu des diarrhées chroniques 


158 


traitées inutilement par les moyensles plus rationnels, céder 
à l'usage exclusif d'une bouillie faite avec la farine de fêve. 
C’est surtout dans le cas où la maladie est entretenue par 
une vive irritation de la muqueuse intestinale coïncidant 
avec un état de débilité, que cette bouillie me réussit. 
L'infusion de la cendre des tiges et des gousses de fêve dans 
le vin blanc (60 à 90 grammes de cendre pour 1 kilog. de vin) 
est employée vulgairement dans nos campagnes comme diu- 
rétique, dans la gravelle, l'hydropisie et les engorgements 
viscéraux sans inflammation. La dose de ce vin est de 60 à 
100 grammes chaque jour. On fait, avec la farine de fêve, 
des cataplasmes légèrement résolutifs. 


FIGUIER, * 


Ficus communis (T.) 
Ficus carica (L.) 


Tout le monde connaît le figuier: Ses fruits sont usités : 
comme aliment et comme médicament. Nous ne devons le 
considérer que sous ce dernier rapport. 


Fropriétés. 


Les figues sont émoilientes, adoucissantes, relâchantes. 
La décoction de figues dans l’eau convient dans les maladies 
inflammatoires, la pneumonie,la pleurésie, le catarrhe bron- 
chique, la cystite, la néphrite, la variole, la rougeole, la 
scarlatine, etc. Bouillies dans le lait, on les emploie en gar- 
garisme lorsqu'il y à tension, douleur, gonflement dans 
l'engine, la gingivite et la stomatite. On les applique en 
cataplasme sur les tumeurs inflammatoires. Je me sers sou- 
vent de figues grasses pour excipient d’une certaine quantité 
de semence de moutarde pulvérisée, comme résolutif, rubé- 
fiant, en cataplasme. J'emploie de la même manière d'au- 
tres substances énergiques pour en adoucir plus ou moins 
l’effet, selon l'indication que j'ai à remplir. 

Les anciens employaient le suc âcre et laiteux du figuier, 
à l'extérieur, dans le traitement de la lèpre et autres mala- 
dies cutanées chroniques. On en frotte les verrues et les 
cors pour les faire disparaître peu à peu. 


FILIPENDULE. * 


Filipendula vulgaris (T .) 
Spiræa filipendula (L.) 
La filipendule est très-commune en France. Sa racine 
est usitée. 
Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Décoction des racines, de 30 à 60 gram. par kilog. 
d’eau. 


Propriétés. 


Cette plante est douée d'une certaine astringence. Les 
racines, cueillies à la fin de l'automne, exhalent une odeur 
analogue à celle des fleurs d'oranger. Rapées fraîches, elles 
communiquent à l’eau une couleur rosée, et déposent une 
fécule amylacée dont Bergius a obtenu une colle excellente. 
Ces racines ont fourni dans les temps de disette une res- 
source alimentaire. Gilibert en a retiré une farine de bonne 
qualité, après les avoir fait cuire el pulvériser. Les méde- 
cins savent aujourd'hui à quoi s’en tenir sur les vertus diu- 
rétiques et lithontriptiques qu’on leur attribuait autrefois. 
Leur astringence légère les fait encore employer dans les 
diarrhées et la dyssenterié, après la période d'irritation, et 
avant d’en venir à des astringents plus énergiques. 


FOUGÈRE MALE. 


Filix non ramosa, dentata (T.) 
Polypodium filix mas (L.) 


L'espèce dont il est ici question, placée d’abord parmi les 
polypodes, appartenant aujourd’hui aux aspidium, se ren- 
contre partout dans les lieux incultes et dans les bois. On 
emploie la souche, ou stipe, improprement nommée racine. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Décoction, de 45 à 60 gram. par kilog. d'eau. 
Poudre, de 4 à 15 gram. en substance, pilules, électuaire, etc. 
Eau distillée, de 50 à 400 gram. en potion. 

Exirait alcoolique, de 4 à 2 gram. en pilules. 
Extrait résineux, de 50 cenL. à 2 gram. en pilules. 
Huile éthérée, de 2 à 10 gram. en potion. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction en lavement, de 45 à 60 par kilog d’eau. 


160 


Propriétés. 


La racine de fougère mâle, d’une saveur d’abord stypti- 
que, ensuite douceâtre, un peu aromatique, visqueuse et lé- 
gèrement amère, est généralement regardée comme anthel- 
mintique. On l'administre contre les ascarides lombricoïdes, 
les tricocéphales, et même contre le ténia. On a aussi pré- 
conisé cette racine comme adoucissante, tonique, et légère- 
ment astringente ; elle a été employée contre la goutte, le 
rachitisme, le scorbut, les embarras viscéraux. On a été 
jusqu'à lui attribuer la propriété d'activer la sécrétion du lait, 
de rappeler l'écoulement des règles, et de provoquer même 
l'expulsion du fœtus. 

Pour déterminer avec précision les véritables propriétés 
d’un médicament, il faut l’administrer isolément. Ce n’est 
pas ce que l'on a fait pour la fougère. Le remède de Mre 
Nouffer, qui a mis cette plante en vogue, se compose de 12 
grammes de poudre de racine de fougère, par-dessus les- 
quels on fait avaler au malade un mélange de calomel (690 
centigrammes}), de scamonée { 60 à 75 centigrammes }, de 
gomme-gutte (25 à 40 centigrammes). Bourdier donnait la 
fougère conjointement avec les doses assez fortes d'éther. 
Mathieu, pharmacien de Berlin, l’associait au fer et à la 
limaille d’étain. Comment distinguer, dans ces divers traite- 
menis, ce qui appartient à la fougère et ce qui est l'effet 
des autres médicaments vermifuges et purgatifs? ais 

La fougère mâle, en décoction ou en poudre, ne m'a réussi 
que d'une manière peu fidèle. Chez certains enfants, elle a 
réellement agi comme anthelmintique, tandis que, chez 
d’autres, elle n’a point eu cet effet, bien que la présence des 
vers ait été prouvée par l'expulsion de ces derniers après l'ad- 
ministration de vermicides plus énergiques. Ces faits 
portent à croire, avec Guersent, que la fougère n’a pas d'au- 
tre action que celle des astringents et des toniques ordinaires. 

[II paraît démontré, néanmoins, que l'huile grasse, aro- 
matique et un peu empyreumatique, obtenue par le pharma- 
cien Peschier, et à laquelle on a donné le nom d’oléo-résine, 
a été employée avec le plus grand succès contre le ténia. 
La dose de l'oléo-résine de fougère est de 30 à 36 gouttes 
dans de l'huile de ricin, à prendre en deux fois, l’une le ma- 
tin et l’autre le soir. On peut aussi la donner en pilules, 
une goutte pour chaque, ou dans un électuaire approprié, 
dans un sirop, une émulsion. Ainsi administré, ce nrédica- 
ment ne cause aucune douleur intestinale. Deux heures 
après la seconde dose on fait prendre deux onces d’huile de 
ricin pour provoquer la sortie du ver. Il est rare, dit-on, 


161 


qu'on soit obligé de revenir à une seconde dose de ce médi- 
cament. 

Le docteur Albert, professeur à l’université de Bonn, 
emploie avec succès, depuis vingt ans, l'extrait éthéré de 
fougère mâle à la dose de 15 décigrammes répétée au bout 
de trois heures ; après cette seconde dose il fait avaler au 
malade 39 grammes d'huile de ricin. Une ou deux heures 
sont à peine écoulées depuis l’ingestion de cette huile, que 
le ver est ordinairement rendu au milieu de matières mu- 
queuses abondantes.] 

Les feuilles de fougère servent, dans nos campagnes, à 
composer la couche des enfants. Les coussins et les matelas 
qu'on en fait sont beaucoup plus sains que ceux qui sont 
faits avec la plume. On les recommande surtout aux scro- 
fuleux et aux rachitiques. 

[La racine de fougère mâle perd en vieillissant une grande 
partie de ses propriétés. Il faut la prendre fraîche pour en 
extraire les parties actives ; sèche, elle est bien moins sûre 
dans ses effets, et vieille, elle est presque nulle. Elle doit 
être récoltée avec soin, plutôt dans l'été que dans les autres 
saisons, parce qu'à celle époque elle est dans toute sa 
vigueur, ce que l'on reconnaît à sa cassure verte. L'’oubli de 
ces conditions a peut-être été la cause de la diversité des 
opinions émises sur les propriétés de cette plante. 


La FoucÈère FEMELLE (Fix ramosa major (T.), Pteris 
aquilinina (L.), qui n’est pas du même genre que la précé- 
aente et appartient aux p{eris, a joui de la même réputation 
contre le ténia. Malgré les assertions de Halier, d’Alston 
et d’Andry, qui ont élevé sa vertu anthelmintique au-dessus 
de celle de fa fougère mâle, les effets réels de cette racine 
sont encore à constater. Il est probable que, faiblement 
astringente et tonique, elle n’a dû la faveur qu'on lui a 
accordée comme vermifuge et purgative, qu’aux substances 
drastiques ou résineuses qui lui ont toujours été associées.] 


| FRAISIER. 
| Fragaria vulgaris (T.) 
. Fragaria vesca (L.) 


Tout le monde connaît celte plante et surtout les fruits 


agréables qu’elle fournit. Ses racines, ses feuilles et ses fruité 
sont usilés. 


11 


il 


162 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction des racines ou des feuilles, de 30 à 60 
gram. par kilog. d'eau. 
Suc des fruits, quantité suffisante étendue dans l'eau pour boisson. 
Sirop, en potion, et pour édulcorer les boissons. 


Propriétés. 


La racine et les feuilles de fraisier sont diurétiques et un 
peu astringentes. Eiles sont fréquemment employées dans 
les affections des voies urinaires, dans quelques hémorrha- 
gies passives, surtout dans l'hématurie lorsque l'irritation 
est calmée, dans la période d’atonie dés diarrhées, etc. La 
décoction de racine de fraisier donne aux urines une teinte 
rosée. | 

[On trouve dans un recueil scientifique d'Amérique, le 
Southern medical and surgical Journal, l'exposé de diverses 
expériences tentées par le docteur Blackburn avec les feuilles 
du fraisier sauvage dans la dyssenterie. Ce médecin a fait 
usage des feuilles de fraisier sous toutes les formes, dans le 
traïñtement de cette maladie; mais voici la formule à laquelle 
il s'est arrêté, comme étant la meilleure : Pr. feuilles vertes, 
373 grammes ; bonne eau-de-vie 1 litre 15 centilitres; faites 
bonillir jusqu'à ce que le liquide soit réduit à 55 centilitres. 
Filirez. On administre cette boisson par cuillerées à bouche 
toutes les trois heures jusqu’à ce que les symptômes alar- 
mants aient disparu. M. Blackburn cite plusieurs observa- 
tions, desquelles il résulte que dans des cas de dyssenterie 
où les moyens ordinaires avaient échoué, il a suffi de dix 
cuillerées de la décoction de feuilles de fraisier pour pro- 
duire une amélioration qui, bientôt, a fait place à une gué- 
rison complète. » 

« Nous ajouterons à ce qui précède, une observation en- 
core plus récente que celles de M. Blackburn, et qui ne 
prouve pas moins en faveur du remède préconisé par ce 
praticien : c’est la relation sommaire d'un fait recueilli par 
M. Malgaigne , et consigné dans la Revue médico-chirur- 
gicale de Paris. « Le 11 janvier 1848. dit le rédacteur en 
chef de ce journal, est entré à l'hôpital Saint-Louis un 
militaire réformé, âgé de vingt-cinq ans. Ce jeune homme 
avait la diarrhée depuis plusieurs mois. Il était dans un état 
anémique très-prononcé ; la peau était décolorée ; il y avait 
jusqu’à douze selles dans les vingt-quatre heures, accom- 
pagnées de coliques ayant leur siége du côté de la fosse 
iliaque gauche et vers l’'ombilic, mais sans tenesme ni cha- 
leur à l'anus. Les selles étaient abondantes, liquides, jaunes, 


163 - 


mélées de mucus non sanguinolent. Pas de douleur à la 
pression ; pas de nausées ; pas de vomissements; pas de 
fièvre. 

« M. Malgaigne prescrit : gomme sucrée, 2 pots; ipéca, 
1 gramme en trois paquets. Le 13, le malade a vomi ; il n’y 
a eu que six selles dans les vingt-quatre heures. Prescrip- 
tion : ipéca 0,50 centigrammes. Le 14, pas de vomissements; 
encore six selles dansles vingt-quatre heures. M. Maigaigne 
se résout à essayer les feuilles de fraisier. Il preserit, en 
conséquence,la décoction suivante : feuilles fraîches de frai- 
sier, ad libilum ; eau-de-vie, trois fois leur poids. Faites 
bouillir jusqu’à réduction à moitié. Trois cuillerées par jour. 

« Le 15, il n'y a eu que trois selles moins liquides avec 
moins de coliques. L’appétit est augmenté (méme potion, 
deux portions). Le 16, une seule selle, rendue même avec 
quelques efforts et sans coliques (même prescription, trois 
portions). Le 17, ni selles, ni coliques, l'appétit va croissant 
(on cesse la potion, quatre portions). Le 21, pas de selles 
depuis le 17 ; le malade reprend progressivement ses forces 
et sort de l'hôpital le 24, treize jours après son entrée. (1) 
(Journal de méd. et de chair. prat., tom. x1x, art. 3585.) 1 » 

Les fraises sont rafraichissantes et tempérantes. Elles 
conviennent aux tempéraments bilieux et sanguins. J'ai vu 
une gastro-entérite chronique survenue à la suite de l'abus 
des spiritueux, chez un cultivateur âgé de trente-quatre ans, 
d'une constitution sèche, d'un tempérament nerveux, se 
dissiper entièrement par l'usage des fraises mangées en 
grande quantité et presque comme seul aliment pendant un 
mois. Cette cure eut lieu en 1826. Depuis cette époque, au- 
cun symptôme de gastrite n’a reparu. On sait que Linné 
parvint à se garantir des attaques douloureuses de la goutte 
par ce moyen, et que plusieurs.goutteux ou calculeux en ont 
fait avec succès leur principälé nourriture. Le journal de 
chimie médicale (année 1840} rapporte que M. Sauquet, 
pharmacien à Sigeau, a adressé, à la Société des sciences 
physiques, une observation relative à un de ses amis qui 


(4) Ces faits sont à ajouter à tons ceux que nous possédons, et qui 
militent en faveur de l’usage des plantes indigènes. Que les médecins haut 
placés et doués de l'esprit d'observation, acceptent les richesses que notre 
flore leur offre si libéralement, qu’ils commencent l'œuvre de la réforme 
thérapeutique, et bientôt tous les praticiens, entrainés par l’exemple, se 
convaincront de la possibilité de mettre les ressources de la médecine à la 
portée de la classe ouvrière, et d’affranchir en même temps la France des 
millions qu'elle paie à l'étranger pour des drogues dont elle peut fasile- 
ment se passer. | 


16% 


s'était délivré de la goutte en mangeant annuellement, soir 
et matin, des fraises. On a aussi conseillé l’usage de ce fruit 
contre la jaunisse, les obstructions, la phthisie, la bronchite 
avec toux sèche et chaleur des voies aériennes. 

[ Van Swieten rapporte que des maniaques, ayant mangé 
jusqu’à vingt livres de fraises par jour, pendant plusieurs 
semaines, ont été complètement rendus à la raison. Gilibert 
et Hoffman citent des guérisons de phthisie qui n'étaient 
sans doute que des catarrhes pulmonaires, d'inflammations 
chroniques de la poitrine, accompagnées, comme cela a sou- 
vent lieu, de fiévre lente et de marasme. Gesner rapporte que 
le suc exprimé des fraises, macéré dans l’esprit de vin. admi- 
nistré à la dose d’une cuillerée à bouche chaque matin, a 
puissamment soulagé des personnes atteintes de la pierre. 
Boerhaave dit que la propriété diurétique réside plus parti- 
culièrement dans les graines; il les prescrit infuseées dans da 
vin blanc. M. Juste Liébig, chimiste distingué de Giessen, 
a prouvé par l'analyse que, pendant l'usage des fraises, l’urine 
cessait de contenir cet excès d’acide urique qu'elle présente 
quelquefois chez les individus sujets ou prédisposés à la 
néphrite calculeuse. Ce fait confirme les observations des 
auteurs que nous venons de citer. ] 

Les fraises déterminent, chez certaines personnes, une 
éruption, une sorte de roséole occupant une étendue plus ou 
moins grande et surtout marquée au cou et à la face. J'ai 
observé ce fait “sur moi-même jusqu'à l’âge de trente ans 
environ. J'ai pu ensuite m'habituer peu à peu à l'usage de 
ce fruit sans en être incommodé. 


FRAXINELLE," 


DICTÂME BLANC. 


KE Fraxinella (T.) 
Dictamus ulbus (L.) 


La fraxinelle est une belle plante vivace qui croît spon- 
tanément sur les collines pierreuses et dans les bois élevés 
de la France, de la Suisse, de l'Italie, d'Allemagne, etc. 
La racine seule esi usitée. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 43 à 50 gram. par kilog. d'eau, de 
bierre ou de vin. 
Poudre, de 4 à 40 gram. en bo!s, pilules, ou dans du vin. 
Teinture (4 deracines fraiches sur 8 d'alcool), de 4 à 2gr.en potion. 


.… 


163 


Propriétés. 


La racine de fraxinelle, d’une odeur forte à l’état frais, 
d’une saveur aromatique et amère, est tonique et stimulante. 
Gesner et Stark l’onttrop vantée comme fébrifuge, anthel- 
mintique, emménagogue, etc. En réduisant ses vertus à ce 
qu'elles ont de réel, elle peut encore être un précieux sti- 
mulant diffusible, convenable dans les affections atoniques 
en général, et en particulier dans le scorbut, les scrofules, 
les cachexies, etc. 

La racine de diciame, en matière médicale, est celle de 
fraxinelle, tandis que Les feuilles de dictame désignent les 
feuilles du dictame de Crète. La partie ligneuse de Ia ra- 
cine du dictame blanc est inerte : on la sépare de l’écorce, 
qu'on livre au commerce, en morceaux de la longueur d'un 
pouce, de couleur blanchâtre, roulés sur eux-mêmes comme 
la canelle. 


FRÊNE COMMUN. 


Fraxiuus excelsior (T.) 
Fraxinus excelsior (L.) 


Cet arbre croît dans toutel Europe. On emploie son écorce, 
ses feuilles er ses fruits. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction de l'écorce ou des semeness, de 50 à 60 
grammes par kilog. d'eau. 
Infusion ou déroction des feuilles, de 8 à 42 grammes pour 250 
grammes d'eau. 
Poudre de l'écorce, de 40 à 30 gram.en électuaire ou dans du vin. 
Semences ex poudre, de 40 à 50 gram.en électuaire ou dans le vin. 


Propriéiés. 

Bocrhaave a dit de l'écorce de frêne, comparée à celle du 
quinquina : S2 duplo majori copia sumatur, tunc eundem 
effectum præstat ac Cortex peruvianus. Helwig appelle cette 
écorce le quinquina d'Europe. Bergius, Coste et Wilmet la 
recommandent comme fébrifuge. Je l'ai employée en cette 
qualité dans six cas de fièvres intermittentes tierces ou 
doubles-tierces. J’en faisais prendre la décoction à la dose 
de 30 grammes dans 500 grammes d’eau. J'ai réussi à in- 
tercepter les accès chez trois malades; mais chez l’un d'eux 
l'effet a été douteux, attendu qu'avant l'administration du 
médicament la maladie avait déjà diminué d'intensité. 
L'écorce de saule blanc m'ayant donné des résultats beau- 


166 


coup plus avantageux, j'ai cessé d'employer celle de frêne 
contre les fièvres intermittentes. 

[ J'ai vu un paysan, âgé de cinquante ans, se guérir très- 
promptement d’une leucophlegmatie par l'usage d'une tisane 
faite avec l'écorce de racine de frêne, à la dose, chaque jour, 
de deux onces environ pour un litre d’eau. L’'alkali tiré des 
cendres de l'écorce de frêne, est, selon Gilibert, un puissant 
diurétique.] 

Petetin, médeein de Lyon, a employé les feuilles de frêne 
contre les scrofules. Gilibert dit aussi avoir guéri plusieurs 
affections scrofnleuses commençantes, et arrêté les pro- 
grès de cette maladie chez d’autres sujets, au moyen des 
bains faits avec les feuilles de frêne, et par l’usage de ces 
mêmes feuilles à l’intérieur. On sait que tous les amers 
conviennent dans ces affections, sans pour cela posséder une 
propriété qui leur soit spécialement applicable. 

Tablet assure que les feuilles de frêne, prises à la même 
dose et de la même manière que le séné, purgent tout aussi 
bien et sans coliques. Bodart dit que dans les essais qu'il en 
a faits à Pise, en Toscane, ces feuiiles, administrées à double 
dose du séné, ont consiamment procuré des purgations effi- 
caces, sans coliques et sans aucun inconvénient.Il neles a pas 
essayées en France. Quant à moi, j'ai administré plusieurs 
fois ces mêmes feuilles à double et triple dose du séné, afin 
de constater leur vertu purgative, et je n’ai obienu que des 
résultats irréguliers et incertains. Cette différence dans les 
effets peut s'expliquer par celle des climats : mes essais ayant 
eu lieu dans le nord, ne peuvent infirmer les résultats obte- 
nus par Bodart sous l'influence vivifiante du ciel de l'Italie. 

J'ai administré Ja semence de frêne en poudre dans des 
cas de cachexie, d'engorgements hépatiques et spléniques 
chez des sujets Iymphatiques et exempts d’irritation ou de 
phiegmasie des voies digestives. J’en ai obtenu des avan- 
tages appréciables ; mais d’autres plantes amères auraient, 
sans doute, produit le même effet. Cependant, le frêne étant 
très-commun, doit être préféré pour les malades indigents. 


FROMENT, * 
BLÉ. 
Triticum hybernum (T .) 
Triticum sativum (L.) 


Parmi les graminées le froment tient le premier rang 
comme servant à la nourriture de l’homme. La farine qui 


167 


provient de sa graine contient, sous un volume donné, une- 
plus grande quantité de parties nutritives. On en fait le pain 
qui sert comme aliment journalier, et dont on ne se dégoüte 
point tant qu'on est en santé. On regarde même, comme 
l'annonce d'une prochaine convalescence, le désir qu’a un 
malade de manger du pain. 

Vers la fin des maladies aiguës, chez les convalescents et 
dans les phlegmasies chroniques des voies digestives, dans 
tous les cas enfin où une alimentation est nécessaire, malgré 
l'irritation qui semble l’interdire, on fait usage d’une crême 
de pain ainsi composée : Faites bouillir pendant une heure 
125 grammes du meilleur pain dans un kilogramme d’eau ; 
après avoir-bien brisé et passé ce mélange, remettez-le au 
feu pour le faire cuire jusqu’à consistance d’une crême 
légère; ajoutez-y 30 grammes de sucre et 10 grammes d'eau 
de fleur d'oranger. 

La décoction de pain (eau panée ) est adoucissante, ra- 
fraîchissante; elle convient dans les maladies aiguës. La mie 
de pain entre dans la décoction blanche de Sydenham. On 
corrige la crudité de l’eau en y mettant tremper une croûte 
de pain rôtie deux heures avant de la boire. J'ai vu maintes 
fois, à la campagne, des malades atteints de fièvre typhoïde, 
n'avoir d'autre ressource que cette boisson, refuser toute 
autre médication, et guérir Lout aussi bien et peut-être plus 
facilement qu'avec le concours des nombreux moyens em- 
ployés contre cette maladie, et tour-à-tour vantés ou dépré- 
ciés suivant la prédominance de telle ou telle doctrine. 

La mie de pain sert à lier les pilules, à étendre des sub- 
stances actives; on la donne quelquefois seule en pilules qui 
passent pour contenir des médicaments auxquels on feint 
d'attribuer de grandes vertus. Corvisart, qui, certes, n’était 
pas charlatan, donna à l’impératrice Joséphine des pilules 
de mica panis aurata, qui la guérirent d'une maladie qu’elle 
n'avait que dans son imagination. C’est une petite fraude 
que le médecin peut se permettre en vue des bons effets 
qu'il en attend. En pareil cas, ou lorsque la maladie est 
incurable, une ordonnance console le malade, inspire la 
confiance,et cachel’impuissance de l’art.Quel prix,d'ailleurs, 
attacher à une visite dont tout le résultat est de ne rien faire ? 

On compose descataplasmesémollients avec la mie de pain: 
mêlée à l’eau, au lait ou à la décoction de semences de lin. 
Le levain ou pâte fermentée sert à former un vésicatoire 
étant étendu sur du linge et saupoudré de cantharides. Ce 
même levain, cuit avec une suffisante quantité de vieille 
bierre, peut être employé en cataplasme comme maturatif. 


163 


Un campagnard m'a dit s'être guéri d’un rhumatisme: 
articulaire chronique, en s'étendant à nu sur une couche de 
pâte amincie au moyen d’un rouleau et saupoudrée de farine, 
et se faisant recouvrir avec pareille couche de la même pâte 
jusqu'au cou, de manière à en être complètement enveloppé. 
Îl restait chaque jour pendant deux ou trois heures dans 
cette singulière enveloppe, laquelle provoquait une abon- 
dante transpiration, qu'excitait encore Fingestion de quel- 
ques tasses d’infusion chaude de fleurs de sureau. 

M. le docteur Faverot à récemment publié, dans la Revue 
médico-chirurgicale de Paris, plusieurs observations sur les 
avantages de la farine de froment dans le traitement des 
érysipèles. Ce moyen, pour n'être pas nouveau, n’en est pas 
moins bon : les habitants de la campagne l'ont employé 
de Lemps immémorial. Théodore Zwinger en parle ainsi, 
d’après Schroeder : Trihica farina siccea cum fructu erysr- 
pelati adspergutur. (Compend. medicinæ univers. Basileæ, 
1724, page k82). Culien l'a indiqué, et Pinel (nosograph. 
philosoph.., tom.au, p. 78), ne recommande que ce lopique 
pulvérulent pour calmer l'infiammation érysipélateuse. Je le 
mets moi-même en pratique depuis plus de trente ans, sur- 
tout quand Ja phlegmasie a son siége à la face, en raison de 
la difficulté de recouvrir cette partie de compresses imbibées 
d'infusion de fleurs de sureau, cemme on le fait habituelle- 
ment sur les membres. La farine diminue constamment et 
promptement Pinflammation, et par suite la réaction fébrile 
qui en est la conséquence ; mais le plus souvent la maladie, 
bien que moins intense, n'en parcourt pas moins ses 
périodes. Considéré comme local, l'hérysipèle simple guérit 
de lui-même ; ce qui est dù à Ja nalure est souvent attribué 
aux moyens successivement préconisés par les médecins qui 
se sont OCCUPÉS s du traitement externe de cette maladie. 

La farine, ajoutée aux bains généraux, convient dans les 
affections cutanées ch me accompagnées d'irritation. 
Afin d'administrer avec plus de facilité une poudre active, 
on peut la diviser avec de la farine. 

Le Sox en décoction (une poignée pour un kilog. d’eau) est 
adoucissant, émollient, rafraîchissant. On l’emploie souvent 
dans les catarrhes aigus, les irritations gastro-intestinales, 
en boisson, en Javements, en fomentations et en bains. 
Chauffé à sec et appliqué en sachet, le son convient dans les 
douleurs rhumatismales, la pleurodynie, les coliques ner- 
veuses, les douleurs gastralgiques, les engorgements arti- 
culaires chroniques, l'asphyxie par submersion, etc., ces. 
sachets doivent être fréquemment renouvelés, afin d'entre- 


169 


tenir le degré de chaleur propre à atteindre le but qu’on se 
propose. Les cataplasmes de son et de décoction de graine 
de lin ou de plantes émollientes, sont les plus légers et les 
plus économiques. 

L’Ammon est une fécule amylacée qu’on retire plus parti- 
culièrement du froment. Cette substance est adoucissante, 
émolliente, nourrissante,; elle convient dans les inflamma- 
tions intestinales, Ia diarrhée avec irritation, la dyssenterie, 
etc. On la donne en décoction {de 8 à 15 gram. par kilog. 
d’eau), en lavement {de à 15 gram. par 800 gram. d'eau ); 
en cataplasme, et pour solidifier les bandages à fraetüre. 
Beaucoup de médeeins se contentent, quand ils prescrivent 
des lavemenis amylacés, de mettre la poudre d'amidon dans 
Peau; il est nécessaire, pour l'effet adoucissant qu'en se pro- 
pose d'obtenir, de la faire un peu décocter, afin de lui 
donner la consistance d'une bouillie légère. 

La DExTRiNE. L'eau chaude convertit lamidon en une 
espèce de gelée que l’on nomme empois. Cet empois, traité 
par l'orge germé, se fluidifie et forme un principe soluble 
connu sous le nom de dextrine. Ce principe sert à la prépa- 
ration des appareils employés pour le maintien des frag- 
ments dans le traitement des fractures. Seatin, inventeur du 
bandage amidomé, lui préfère l'empois simplement fait 
avec l’amidon. Je n'ai jamais employé que ce dernier. 

L'IODURE D’AMIDON est un composé d’iode, d’amidon et 
d'alcool. Il a les mêmes propriétés que l'iode et est particu- 
lièrement employé contre les effections scrofuleuses. On 
J’'administre ordinairement à la dose de 6 à 18 grammes en 
boisson, potion, etc. 

Le GLUTEN, composé de gélatine et d'afbumine végétale, 
est extrait des céréales et plus particulièrement du froment. 
Cette substance est analeptique et adoueissante. On la con- 
seille dans la débilité d'estomac, dans la convalescence des 
maladies graves, lorsque Fon ne peut ingérer aueun autre 
aliment. Taddéi l'a proposé pour combattre l'empoisonne- 
ment par le sublimé corrosif; on l’administre en décoction 
à la dose de 30 à 60 grammes par kilogramme d'eau. 


FUMETERRE, 
FIEL DE TERRE. 
Fumaria officinarum (T.) 
Fumaric officinalis (L.) 
Cette plante croît dans toute l’Europe, et se rencontre 


dans les terres cultivées et principalement dans les jardins. 
L'herbe est usitée. 


170 


Préparations €t doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction et infusion, de 50 à 60 grammes par 
kilogramme d’eau. 
Suc exprimé, de 50 à 100 grammes. 
Sirop (parties égales de suc et de sucre), de 50 à 400 grammes. 
Extrait, de 2 à 19 gram. en bols, pilules, julep, potion, etc. 
Conserve, de 5 à 15 grammes. 


A L'EXTÉRIEUR : Décoction pour fomentation. — Suc délayé dans 
l'eau, herbe en cataplasme. 


Propriétés. 


La fumeterre, d'une saveur amère qui augmente par la 
dessiccation, est tonique, fondante, dépurative, vermifuge. 
On l'emploi dans la débilité des voies digestives, l’ictère, les 
engorgements des viscères abdominaux ; dans les affections 
cutanées, scorbutiques et scrofuleuses ; dans les dartres, 
l'éléphantiasis, etc. 

[ Les médecins de l'antiquité faisaient un grand usage de 
Ja fumeterre contre les diverses maladies que nous venons 
d'énumérer. Les modernes l’ont aussi employée avec succès. 
Gilibert regarde cctie plante comme un bon antiscorbutique, 
et Hoffmann lui attribue de grands succès contre les affec- 
tions lentes des viscères, l'hypocondrie et les scrofules. 
C'est principalement contre les affections cutanées chroni- 
ques qu’elle a montré une efficacité incontestable. Leiden- 
frost, Thomson, Bodart, rangent la fumeterre parmi les 
meilleurs moyens curatifs de la lèpre en général, ét parti- 
culièrement du radesyge, que le docteur Demangeon appelle 
éléphantiasis du nord. Le médecin suédois Strandberg a 
constaté ses propriélés antidartreuses. Je joindrai à ces té- 
moignages celui de Pinel, dont la réserve thérapeutique est 
connue. « Je pourrais citer, dit ce médecin, une observation 
faite avec soin sur la guérison d’une dartre invétérée qui se 
manifestait au bras. La malade eut la constance de faire 
usage, pendant près de six mois, de la fumeterre infusée 
dans du lait, en même temps qu’elle pratiquait des lotions 
sur la partie avec la même infusion. Après cette époque, il 
n’a resté aucune trace de maladie. (Encyclop. méthod.) 7 » 

Je fais un usage fréquent de la fumeterre dans les tisanes 
dépuratives. L'été, J’emploie de préférence le sue de cette 
plante ; comme elle est beaucoup plus commune que le trèfle 
d'eau, je Ja substitue souvent à ce dernier dans les sucs 
antiscorbutiques. Les enfants atteints de croûtes de lait, 
de débilité des voies digestives et d’affections vermineuses, 
se trouvent très-bien de l'usage du sirop de fumeterre, qu'on 


171 


administre seul ou mêlé à la décoction de pensée sauvage. 

[{ Suivant la plupart des auteurs, plusieurs autres espèces 
de fumeterre, telles que les fumaria media, spicata, 
capreolata, etc., jouissent des mêmes propriétés que la 
fumeterre officinale, et elles peuvent remplacer celle-ci. 
M. A. Steinheil (archiv. de botanig., 1833, t. 1, p. 420), 
a remarqué que dans les fumaria capreolata et media, la 
saveur, au lieu d’être franchement amère, comme dans la 
fumeterre officinale, était excessivement âcre et brülante. 
Cette différence de saveur avait porté M. Steinheil à croire 
qu’il pouvait en exister une dans les propriétés médicinales 
de ces plantes ; il attribua dès lors l'effet purgatif qui à 
quelquefois lieu par l'administration de la fumeterre, à la 
substitution du fumaria media et du fumaria capreolata 
au fumaria officinahis dans la préparation du suc. J'ai em- 
ployé séparément, ei à plusieurs reprises, ces trois espèces 
de fameterre , et j'ai pu me convaincre qu'en effet l’exci- 
{alion intestinale et la purgation se manisfestaient toujours 
d’une manière plus ou moins prononcée après l'ingestion du 
suc des deux premières espèces, tandis que celui de fume- 
terre officinale, donné à la même dose, ne produisait rien 
de semblable. Il est donc prudent de n’employer que la 
fumeterre officinale , dont le degré d'énergie et les proprié- 
tés sont bien connus. ] 


FUSAIN, * 
BONNET DE PRÈTRE, BOIS À LARDOIRE. 


Evonymus vulgaris granis rubentibus (T.} 
Evonymus europœus (L.) 


Le fusain est très-commun, et se rencontre surtout dans 
les haies. Les feuilles, les jeunes tiges, les capsules et les 
fruits peuvent être employés. 


Propriétés. ’ 


Ilexisie dans l'écorce, les feuilles et les fruits du fusain, 
un principe âcre, éméto-cathartique et drastique. Si les 
médecins ont différé d'opinion sur les effets de cette plante, 
c’est parce que son énergie est plus on moins prononcée 
suivant la saison où elle est recueillie. Au printemps, il n’en 
faut qu'une petite dose pour provoquer le vomissement , 
tandis que dans d’autres saisons elle est moins active ; les 


172 


jeunes pousses surtout sont drastiques à un tel degré qu’om 
ne les emploie presque jamais à l'intérieur: elles sont mor- 
telles pour les moutons, les chèvres et mêmes les vaches, 
quand elles produisent une vive irritation sans évaeuations, 
ou qu’elles superpurgent jusqu'à déterminer une violente 
inflammation du tube digestif. 

Les fruits, en quelque temps qu’on les emploie, sont 
fortement émétiques et purgatifs au nombre de trois ou 
quatre. J'ai vu des paysans robustes les prendre à cette dose 
sans inconvénient, en buvant abondamment du bouillon de 
veau, de la tisane de mauve ou de graine de lin. Martin, 
ancien chirurgien-major de l'hôpital de Dunkerque, m'a dit 
avoir vu, en 1808, un cuitivateur des environs de Bergues, 
âgé de 35 ans, se débarrasser du ténia après avoir inutile- 
ment mis en usage tous les moyens jusqu'alors connus, en 
prenant pendant six jours une graine de fusain dans trois 
onces d'huile d'œillette {pavot ), et en se purgeant le sep- 
tième jour avec cinq semences de la même plante, lesquelles 
firent rendre la dernière partie de cet entozoaire après dix 
selles accompagnées de violentes coliques, de vomissements 
ei d'une syncope. Ce traitement n’a été suivi d'aucun acei- 
dent ; l'usage du lait a suffi pour rétablir complètement le 
malade dans l'espace de quelques jours. 

La décoction aqueuse de jeunes tiges et de feuilles de 
fusain, est un détersif très énergique dans les ulcères invé- 
térés , sordides , atoniques, œdémateux , scorbutiques ou 
ganoréneux. Une partie de celte décoction et deux parties 
de décoction de feuilles de noyer, mélées et employées en 
lotion et en application, au moyen de la charpie, sur un 
ulcère scrofuleux, blafard et engorgé, situé au-dessous de 
l'angle de la mâchoire inférieure, l’a avantageusement mo- 
difié en quelques jours. | 

La décoction des fruits et des capsules de fusain {15 à 30 
grammes par kilog. d’eau }, à laquelle on ajoute un peu de 
vinaigre, est d’un usage populaire contre la gale. Les vété- 
rinaires emploient la décoctuion des feuilles, de l'écorce, des 
capsules et des graines dans le vinaigre, en lavage contre Ia 
gale des chevaux et celle des chiens et autres ,animaux 
domestiques. On en fait aussi une pommade (8 grammes de 
poudre sur 30 grammes d’axonge). Répandue sur la tête, 
comme celle de | staphisaigre, Ja poudre de semence de fusain 
fait mourir les poux. 


175 


GARANCE, * 


GARENCE. 


Rubia tinetorum sativa (T.) 
Rubia tinctorum (L.) 


Cette plante, que l’on cultive pour la teinture, est sponta- 
née dans la Zélande, aux environs de Montpellier et de 
Lyon, en Suisse, etc. Sa racine est usitée. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction de 15 à 30 gram. par kilog. d'eau. 
Poudre, de 4 à 4 gram. en pilules, électuaire, etc. 
Extrait a'coolique, de 4 à 2 gram. en pilules, ou dans un véhicule 
approprié. 
Propriétés, 


La racine de garanee, qui semble n’annoncer qu’une pro- 
priété légèrement tonique et astringente, a été conseillée 
dans l’ictère, les toux anciennes, les affections Iymphati- 
ques, le rachitis, etc. Les anciens l'ont recommandée con- 
tre les rétentions d'urine, la dyssenterie, la sciatique, les 
fleurs blanches, les cachexies. « Quelques observations in- 
contestables , dit Gilibert, prouvent l'utilité de la racine de 
garance dans le rachitis; on en a même prescrit la décoc- 
tion avec avantage contre la toux chronique, la jaunisse, la 
chlorose, des dartres. » Des praticiens l'ont: recommandée 
dans le vomissement chronique, l'ischurie, les calculs de Ja 
vessie, l’hypocondrie, lhystérie, la sciatique. On l’a aussi 
considérée comme emménagogue. Boerhaave faisait appli- 
quer sur la peau des linges teints avec la garance pour sou- 
lager les goutteux!.. Cette macédoine de propriétés 
ne suffit-elle pas pour faire naître l'incrédulité et 
justifier l'oubli dans lequel Ia garance est tombée? La 
coloration des os en rouge, chez les animaux qui se nourris- 
sent de cette plante, est le seul elfes bien constaté qui résulte 
de son action. Ceute singulière propriété conduisit Bergius, 
Bochmer er Duhamel aux expériences qui facilitèrent les 
progrès de l’ostéogénie. 


GAROU, 


( Les plus usitées : TROIS ESPÈCES. ) 


4°, GAROU SaixT-Bots.—Thymelœæa foliis lini (T }—Daphne gni- 
dium (L.) croît dans les départements méridionaux. 


174 


2, LAURÉOLE, LAURÉOLE MALE,—Thymelea lauri folio deciduo 
seu laureola mas (T.)—Daphne laureola (L) se trouve dans 
les lieux ombragés du milieu et du midi de la France, et dans 
toute l'Europe méridionale. - 

5°. MézerÉON, Bois-GENTIL, LAURÉOLE FEMELLE, —1Thymelæu 
lauri folio deciduo sive laureola fæmina (T.),—Daphne mese- 
reum (L.)-—-vient naturellement sur les Alpes, les Apennins, 
les Pyrénées, dans le midi de la France, et est cultivé dans les 
jardins pour la beauté de ses fleurs. 

Les écorces et les fruits des trois espèces sont usités. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décociion du mesereum, de 4 à 8 gram. par kilog. 
d'eau. 
Poudre de mesereum, de 5 à 50 centig. en pilules, bols, élec- 
tuaire, etc. 
A L'EXTÉRIEUR : Extrait alcoolique de l’une des deux espèces pour 
taffetas et papier vésicants. 
Huile vésicante (4 d'écorce pilée sur 2 d'hnile). 
Pommade (4 de poudre sur 44 d'axonge), comme épispastique. 
Ecorce en morceaux, pour vésicatoires, cautères, etc. 


Propriétés. 


[ Les feuilles dans l’état frais, les écorces et les semences 
de ces plantes, soit fraîches, soit sèches, font éprouver, 
quand on les mâche un certain temps, une sensation âcre et 
brülante qui s'étend jusqu'au gosier et qui ne se dissipe que 
lentement. Comme poison, elles déterminent une vive in- 
flammation de l’estomac et des intestins, et une irritation 
sympathique du système nerveux. Linné rapporte qu'une 
demoiselle, atteinte d'une fièvre intermittente, mourut. 
hémoptoïque après avoir pris douze baies de mesereum ou 
bois-gentil. Vicat cite un cas où le garou a occasionné une 
diarrhée mortelle. | 

Ce sont des médicaments dangereux quand ils ne sont 
pas maniés avec la plus grande circonspection. Comme sti- 
mulantes et diaphorétiques, on a employé ces plantes à l'in- 
térieur dans les maladies du système osseux, les douleurs 
ostéocopes, les exostoses, les scrofules, les affections dar- 
treuses, la syphilis secondaire ou tertiaire, le rhumatisme 
chronique, etc. 

Gilibert conseille la pulpe des baies de mesereum un peu 
torréfiée, unie avec la gomme en pilules de cinq centigram- 
mes, comme un des meilleurs fondants et comme le vrai 
spécifique contre les dartres rebelles. J’ai employé deux 
fois cette médication avec un succès complet contre des dar- 
tres qui avaient résisté à divers traitements. Russel, Home, 


175 


Swediaur, Wright recommandent, dans les affections syphi- 
litiques constitutionnelles, l'usage de l'écorce de mesereum 
comme un remède précieux. On la donne ainsi préparée : 
écorce "Pécente de racine de mesereum, 4 grammes, eau de 
fontaine, 7 kilogrammes et demi. Faites bouillir jusqu'à ré- 
duction d’un tiers ; ajoutez : racine de réglisse 30 grammes, 
décantez et gardez pour l'usage, à la dose de 250 grammes 
répétée quatre fois par jour. J'ai plusieurs fois, dans le cours 
de ma pratique, employé ce remède dans Ia syphilis secon- 
daire ou tertiaire. Je n'ai pu constater son efficacité que 
dans un seul cas, où il existait un ulcère serpigineux à la 
joue et une tumeur gommeuse au bras, à la suite de di- 
verses infections vénériennes et de plusieurs traitements 
mercuriels. Le malade fut complètement guéri au bout de 
cinquante jours de traitement, Dans deux autres cas, des 
douleurs ostéocopes m'ayant obligé à donner concurremment 
les préparations d'opium, le succès obtenu a pu être égale- 
ment attribué à ce dernier médicament, qui, comme on sait, 
suflit quelquefois seul, dans certaines circonstances, pour 
guérir la syphilis invétérée. Hufeland cite un malade qui 
avait une exosiose du crâne, avec de violentes douleurs à 
l'intérieur de cette cavité, qui, dès le sixième jour de l’usa- 
ge du garou, éprouva du soulagement, et fut guéri au bout 
d'un mois. (Journal d'Hufeland, 1808.) 

Le mesereum, macéré pendant vingt-quatre heures , à 
une dose plus ou moins grande, selon les cas, dans un mu- 
cilage, dans le petit lait ou dans le lait, devenait, dans les 
mains des anciens, et surtout des médecins du seizième siè- 
cle, un purgatif sûr ou un fondant efficace et exempt de 
danger. 

Constantin, qui s’attachait particulièrement à tirer parti 
des végétaux indigènes, employait le topique suivant sur le 
ventre des hydropiques pour produire un effet purgatif : 
feuilles de daphné, 20 grammes. Faites tremper dans deux 
kilogrammes et demi d'eau pendant vingt-quatre heures ; 
faites bouillir jusqu’à réduction de moitié. Passez, ajoutez 
250 grammes d'huile d'amandes douces ; faites bouillir en- 
core jusqu à ce que l'eau soit toute consommée. Ce moyen 
iatraleptique mérite une attention toute particulière. Je 
m'empresserai de l'essayer à la première occasion. 

L'écorce des garous, macérée pendant quelques heures 
dans du vinaigre et appliquée sur la peau, agit comme ru- 
béfiant et vésicant. C’est un épispastique habituellement 
employé et qui supplée à l’action des cantharides sans 
avoir l'inconvénient de porter sur la vessie, mais qui a 


176 


celui d'occasionner souvent une démangeaison insupportas 
ble, une éruption boutonneuse et de l'inflammation autour 
de la partie sur laquelle il est appliqué. La pommade de 
garou, que l’on mitige à volonté, sert à entretenir les vési- 
catoires. 


GENÉT A BALAI. 


Cytiso-genista vulgaris scoparia (T.) 
Genistu scoparia (L.) 


Cette plante est très-commune et se trouve principale- 
ment dans les bois. On emploie l'herbe entière, les fleurs, 
les graines et les écorces. 

Préparations @eé doses, 
A L'INTÉRIEUR : Décoction concentrée de l'herbe ou des fleurs, de 
30 à 60 gramm. par kilog. d'eau, 

Suc exprimé des branches tendres, 15 à 50 gram. seul ou mêlé 
au miel comme purgatif. 

Senence en poudre, @e 2 à 4 gram. infusée pendant une nuit dans 
un verre de vin blanc comme éméto-cathartique, purgatif ou 
diurétique, suivant la dose administrée. 

Conserve des fleurs, de 45 à 30 gram. comme éméto-cathartique 
ou purgatif. 

Vin diurélique (50 à 45 gram. de cendre de genêt, infusée à 
froid, par kilog. de vin blanc ou de bon cidre), —de 60 à 90 
grain. deux Où trois fois par Jour. 

Sirop des fleurs, de 50 à 60 gram. 

À L'EXTÉRISUR : Lessive des cendres, décoction, en catapiasmes, etc. 


Propriétés. 

Le genêt est purgatifet diurétique. La fleur est plus pur- 
gative que la semence. L'une et l'autre sont employées vul- 
gairement dans l'hydropisie. Les paysans prennent le suc 
exprimé des branches tendres, qui agit souvent comme 
éméto-cathartique. Le vin préparé avec la cendre de genêt 
est un excellent diurétique que j'emploie fréquemment dans 
l'anasarque. Ce remède agit sûrement et promptement. Il 
débarrassa le maréchal de Saxe d'une hydropisie contre la- 
quelle on avait inutilement mis en usage les ordonnances 
des plus célèbres médecins de l’armée et de la Faculté de 
Paris. 

[La lessive de cendre de genêt(30 à 45 grammes par ki- 
logramme d'eau) se prend par verrées dans l'hydropisie, la 
gravelle sans irritation phlegmasique des reins, l’albuminu- 


177 


rie chronique, les engorgements viscéraux, suite de fièvres 

-intermittentes, dans tous les cas, en un mot, où ie bi-carbo- 
nate de potasse est indiqué. On lit, dans les mémoires de 
l’Académie des sciences de Stockolm,qu'en 1759, l’armée sué- 
doise, ayant beaucoup souffert d’une épidémie catarrhale 
qui se terminait par l’anasarque, dut sa guérison à une bois- 
son lixivielle des cendres de genêt, donnée à la dose d’une 
pinie par jour. 

À défaut de carbonate de potasse {de 8 à 15 grammes pour 
un kilogramme d'eau}, Levret se servait, contre les engor- 
gements lymphatiques et laiteux des mamelles, de la lessive 
de cendres de genêt ou de sarment, qu’il considérait comme 
un des plus puissants résolutifs : il faisait entretenir sur le 
sein malade, après quelques douches, une compresse sufi- 
samment imbibée de cette liqueur chaude, et recouverte 
d'un taffetas ciré. (Levret, Ari des accouchements, page 184, 
3me édition). J'ai employé ce moyen avec succès, non-seu- 
lement dans les engorgements des mamelles, mais aussi 
contre l'hydarthrose, l’œdème, les engorgements scrofuleux, 
les tumeurs blanches , en un mot, dans ious les cas où les 
fomentations, les douches et les bains alkalins conviennent. 

L'infusion et le sirop de fleurs de genêt, à dose altéranie 
ou légèrement laxative , ont été conseillés dans le rhumautis- 
me chronique, la goutte , l’œdème, les maladies du foie et 
les engorgements mésentériques. Administré ainsi, le genêt 
active les sécrétions; il augmente à la fois les urines et les 
selles. 

Les branches tendres, les fleurs, les gousses et les fruits 
du genêt à balai sont résoluifs et peuvent être appliqués en 
décoction ou en cataplasme sur les tumeurs scrofuleuses , les 
abcès froids, l'œdème, etc.] 


GENËT D'EsPaGnE. Sparlium junceum.—Genista juncea. 


[ Cette espèce, dont les fieurs sont si odorantes et que l’on 
cultive dans les jardins, possède les mêmes qualités que le 
genêt à balai, mais à un plus haut degré. L’infusion de 2 
gros (8 grammes) de fleurs de cet arbrisseau, purge ; on en 
fait un fréquent usage à la campagne. Leur saveur est su- 
crée, peu désagréable, recherchée des abeilles, Des enfants, 
trompés par celte saveur, en mêlent une assez grande quan- 
tité dans une omeletie, el la mangent. Quelques heures 
après, ils éprouvent des nausées, des vomissements, de la 
faiblesse , de l'anxiété, avec mal de tête; un d'eux en est 
purgé. L’eau chaude donnée abondamment, puis l’oxycrat, 
les guérissent. (Gazette de santé, n° 38 ; 1776.) 

12 


178 


GENËT DES TEINTURIERS, GÉNISTROLE. Genista tinctoria. 


Cette espèce de genêt, que l’on trouve dans les lieux ari- 
des, les pâturages des montagnes, etc., a les mêmes proprié- 
és que les précédentes; mais on lui a attribué, de plus, 
dans quelques provinces russes , celle d'empêcher le déve- 
loppement dela rage. Le docteur Marochetti a lu un mé- 
moire à ce sujet à la Société médico-physique de Moscou, le 
4 octobre 1820. On administre pendant six semaines une 
forie décoction de cette plante, associée au rhus coriaria; 
on en lave aussi les plaies ; on s’en sert en gargarisme, etc. 
Mais il faut, en même temps, examiner le dessous de la lan- 
gue, où, dit-on, il se développe du troisième au neuvième 
jour après Ia morsure, des pustuies que l’on doit cautériser 
dans les vingt-quatre heures. Le docteur Salvatori attribue 
tout l’effet obtenu à cette dernière opération. La cautérisa- 
tion des pustules sublinguales suffit, suivant lui, pour pré- 
server de la rage, et l’on doit se borner, après lavoir prati- 
quée, à des lotions d’eau salée sur les parties cautérisées. En 
attendant que l'expérience ait prononcé sur la valeur de ces 
moyens, on fera bien de ne compter que sur l'emploi de la 
cautérisation prompte de la plaie, comme pouvant seule pré- 
server de l'infection rabieïque. 

Il y a soixante ans que le gouvernement fit publier, com- 
me un spécifique contre l’hydropisie, un remède qui n’était 
autre chose que les semences de genêt des teinturiers rédui- 
tes en poudre. On la donnait tous les deux jours à la dose 
d’un gros (4 grammes) dans six onces de vin blanc, avez 
l'attention d'en adoucir l'effet par deux onces d'huile 
d'olive, prises une heure après la poudre. Ce remède, deve- 
nu tout-à-fait populaire, et que j'ai vu réussir quand beau- 
coup d’autres avaient échoué, doit prendre place parmi les 
moyens thérapeutiques que le médecin de campagne se pro- 
cure le plus facilement. 


GENÉVRIER, 
GENIÈVRE. 


Juniperus vulgaris (T. 
Juniperus communis (L.) 


Le genévrier croît dans presque toute la France, et se 
trouve dans les bois, les terrains incultes, sur les montagnes. 
On utilise son bois, ses sommités et ses baies. 


179 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion des baies concassées ou des sommités (à 
vase clos), de 45 à 50 gramm. par kilog. d’eau ou de vin blanc. 

Décoction du bois en copeaux, 30 à 60 gram. par kilog. 

Eau distillée (X sur 4 d'eau), de 59 à 125 gram., et pour mas- 
quer l'odeur et la saveur désagréables de diverses préparations 
purgatives. 

Teinture (1 sur 2 d'alcool à 53°), de 2 à 8 gram. en potion ou mé- 
langée à la tisane, à du vin, etc. 

Extrait (par infusion 4 sur 4 d’eau), de 4 à 8 gram. en pilules ou 
en solution dans un liquide approprié ou seul. 

Huile essentielle (\ sur 8 d'eau), de 19 à 45 centig. en potion, en 
oleo-saccharum, pilules, etc. 

Poudre, de 2 à 8 gram. en bols, pilules, ou dans un liquide 
approprié. 

Alcoolat, à la même dose et de la même manière que la teinture. 

A L'EXTÉRIEUR : Infusion des baies, décoction des sommités, en lo- 
tions, fomnentations. bains. 

Teinture, en frictions. Poudre ou baies entières sur des charbons 
ardents, dans une bassinoire, pour famigations. Poudre, en 
bains. Baies contuses, en cataplasmes. 


Propriétés. 


Les sommités et les baies du genévrier, d’une odeur forte, 
aromatique, d'une saveur résineuse, sont stimulantes, toni- 
ques, diurétiques, diaphorétiques, stomachiques. On les em- 
ploie dans les affections catarrhales pulmonaires et vésicales 
chroniques, la phthisie, la leucorrhée, la blennorrhée, la né- 
phrite calculeuse , la chlorose , l’aménorrhée par débilité, 
l'hydropisie, l’asthme humide, la bronchorrée, le scorbut, les 
engorgements des viscères abdominaux, les cachexies, les 
affections cutanées chroniques,rhumatismales. A l'extérieur, 
le genévrier est tonique, excitant, détersif, résolutif. 

[Les praticiens de tous les temps ont employé avec succès 
le genévrier dans les diverses maladies que nous venons d'é- 
numérer. On peut lire à ce sujet Van Swieten, Hoffmann, 
Vogel, Rosenstein, Meckel, Schmidt, Hecker, Lange et De- 
mangeon. Ce dernier à fait insérer dans le journal de méde- 
cine (1806) deux observations remarquables constatant l’ac- 
tion particulière des baies de cet arbuste sur l’appareil uri- 
naire : {° Le fils d’un vigneron, âgé de 18 mois, jette des 
cris perçants au moment d’uriner; il porte souvent la main 
vers l'organe urinaire. Les urines coulent tantôt par jet, tan- 
tôt goutte à goutte. Demangeon se détermine à essayer un 
diurétique qui lui a souvent réussi dans les hydropisies peu 
anciennes. Il dit à. la mère de faire bouillir dans deux pin- 
tes d’eau une cuillerée d'orge mondé, et d'ajouter ensuite 


180 


une poignée de baies de genièvre bien noires, bien müûres, et 
aussi fraîchement cueillies que possible. On donne cette dé- 
coction froide ou tiède pour tout breuvage, avec un peu de 
miel ou de sucre. Au bout de deux jours, l'enfant urine sans 
pleurer. On trouve dans ses langes plusieurs petits calculs ; 
l'un d’eux était de la grosseur d'une lentille. 2° Un enfant 
d'Epinal, âgé de trois ans, éprouvait les même symptômes 
que le précédent ; Demangeon conseille Ia même boisson, en 
recommandant bien de ne pas faire bouillir les baïes de ge- 
nièvre, et de les avoir aussi fraîchement cueillies que possi- 
ble. Au boui de trois jours de l'usage de cette boisson, on 
s'aperçut d’une pierre engagée dans la fosse naviculaire, 
dont l’auteur fit l'extraction en pressant doucement la par- 
tie postérieure du canal. Cette pierre, de la grosseur d'un 
haricot moyen, hérissée de plusieurs aspérités, pesait envi- 
ron trois grains. L'enfant n'a pas eu de récidive {1).] 

Le genévrier doit être placé au premier rang dans le cata- 
logue des substances indigènes. Son bois est diurétique et 
sudorifique. Je l’ai employé en décoction dans des cas de 
rhumatisme chronique chez des malades affaiblis par de lon- 
gues souffrances. Je faisais en même temps pratiquer des 
frictions sur les parties malades avec une flanelle imprégnée 
de la vapeur aromatique de baies et de sommités de ce pré- 
cieux végétal. Ces fumigations m'ont été aussi d’un grand 
secours dans l’anasarque qui survient à la suite de la fièvre 
scarlatine, pour rétablir les fonctions de la peau. Dans ce 
dernier cas, je les fais pratiquer au moyen d’une bassinoire 
dans le lit des malades. J'ai toujours eu à me louer de l’em- 
ploi de ces moyens. On fait quelquefois brûler les branches 
et les feuilles du genévrier pour désinfecter l'air. Il est re- 
connu aujourd'hui que ce moyen, ainsi que tous ceux du 
même genre, au lieu d'atteindre le but qu'on se propose, ne 
fait que masquer les mauvaises odeurs, et ajoute à l'air des 
corps étrangers qui en altèrent la pureté. 


Gÿ En employant préalablement ou simullanément l’infusion de baies 
de genévrier et les frictions de pommade de belladene, dont l'effet est de 
dissiper le spasme et la douleur, on pourrait favoriser l’expulsion des cal- 
culs, dans les cas où ces symptômes, au lieu de diminuer, augmenteraient 
par l'usage des diurétiques. (Voyez Belladone, page 43.) On sait que les 
baies de genévrier excitent à tel point les organes sécréteurs de l’urine, 
que celle-ci devient quelquefois sainguinolente quand on les administre à 
trop grande dose, qu'on en fait usage trop long-temps, ou chez des sujets 
trop irritables. 11 «st donc rationnel, dans les affections calculeuses, de 
s'assurer du tempérament du malade, et surtout de l’état des voies uri- 
maires, avant de prescrire ce médicament, 


181 


Le bois de genévrier est le meilleur succédané du gayac ; 
aussi a-1-il été préconisé contre la maladie vénérienne par 
quelques auteurs. Je regrette de n’avoir aucun fait à citer en 
faveur de cette assertion, que je crois cependant très-fondée. 

[Dans les pays bas et humides, l’usage de l’infusion des 
baies de genévrier dans l’eau, la bière ou l’eau-de-vie (ra- 
tafña), relève les forces, favorise les sécrétions, et peut pré- 
server des fièvres muqueuses et intermittentes qui sévissent 
annuellement sous l'influence paludéenne. Dans le nord, on 
distille beaucoup de grains, et l’eau-de-vie qu'on en relire a 
toujours un goût de feu, un goût âcre, empyreumalique; 
pour remédier à cet inconvénient, et lui communiquer d'au- 
tres qualités, on a coutume de mêler des baies de genévrier 
à la liqueur qu’on veut distiller; l’eau-de-vie en prend Île 
goût et porte le nom de genièvre. Les paysans emploient les 
baies de genévrier telles qu’elles sont : ils en avalent quinze 
à vingt pour favoriser la digestion et exciter la sécrétion de 
l'urine. Les Suédois préparent avec ces baies une espèce de 
bière qu'ils louent comme anti-scorbutique. Helvétius con- 
seillait une boisson composée de six boisseaux, mesure de 
Paris (7 décal. 1/2), de graines de genièvre concassées et de 
quatre poignées d’absinthe bien épluchée, jetés dans un ton- 
neau plein d’eau pour laisser infuser dans un lieu frais ou 
dans une cave pendant un mois. Cette boisson est salutaire et 
durable, si on a soin, chaque fois, de remettre autant d'eau 
qu’on a tiré de liqueur pour l’usage journalier. 

C’est surtout dans les affections catarrhales anciennes et 
les écoulements chroniques muqueux, que j'ai été à même de 
constater les bons effets des sommités et des baies de gené- 
vrier. J'ai vu des leucorrhées anciennes avec délibité des 
voies digestives, traitées inutilement par divers moyens, cé- 
der à l’usage d’une forte infusion aqueuse ou vineuse de 
baies de cet arbuste, dont les propriétés me semblent, au 
reste, tout-à-fait semblables à celles de la térébenthine et 
des autres substances résineuses. J'associe souvent, à ce 
médicament, la racine d’aunée et celle d’angélique. Dans les 
hydropisies, les engorgements viscéraux et les cachexies qui 
suivent ou accompagnent les fièvres intermittentes, je l'em- 
ploie seul ou mêlé avec la gentiane, la bryone, l’absinthe, 
la petite centaurée, l’eupatoire d’avicenne, le calcitrape ou 
la digitale, selon les indications et l’état du malade.] 

Les cendres du genévrier, en infusion dans le vin blanc, 
sont très-diurétiques. J'ai vu des cas de leucophlegmatie, 
qui avaient résisté aux moyens ordinaires, céder à l’effet de 
ce vin. Jele prépare en faisant infuser à froid 150 gramme 


182 


de ces cendres dans un kilogramme de bon vin blanc de 
Bordeaux ou du Rhin, ou tout simplement dans le cidre de 
bonne qualité. Le malade en prend 60 à 100 grammes deux 
ou trois fois par jour, jusqu'à ce qu'il soit complètement 
désenflé. Je dois faire observer que cette dose, très-bien 
supportée par des campagnards robustes et peu irritables, 
serait trop forte pour des sujets faibles, nerveux, ou atteints 
d'irrilation gastrique ou intestinale. 

La décoction de genévrier est employée à l'extérieur com- 
me résolutive, détersive, tonique, dans le traitement des 
engorgements froids, œdémateux, les ulcères atoniques et 
scorbutiques. On emploie aussi les baies de genévrier con- 
cassées en cataplasme. J'ai vu des paysans appliquer sur la 
iête des enfants atteints de teigne, des baies de genièvre ré- 
centés pilées et mêlées avec du saindoux. J'ai observé de 
bons effets de ce topique. 

Les fruits du genévrier restent verts pendant deux ans; ce 
n'est qu’à la troisième année qu’ils mürissent et deviennent 
d'un brun noirâtre. C’est à cause de la lenteur de leur mà- 
turité qu’on voit constamment sur les genévriers des fruits 
verts et des mürs. La récolte de ces fruits se fait dans les 
mois d'octobre et de novembre; on les sèche facilement en 
les étendant clair semés dans un grenier, et les remuant 
souvent. On doit choisir les graines de genièvre grosses, 
bien nourries, noires, luisantes, pesantes, d’un goût sucré et 
un peu âcre. Elles doivent être aussi récentes que possible, 
parce qu’il est prouvé qu'avec le temps elles perdent leur 
arôme et leurs vertus. 


Aurze pe Cane, ou huile pyrogénée de genévrier oxicèdre 
(juriperus oæicedrus), qui croît dans le midi dela France. 
Cette huile, produit de la distillation des grosses branches 
et des racines des vieux genévriers de l'espèce que nous ve- 
nons de désigner, que l’on coupe par morceaux de 20 à 30 
centimètres de long pour les soumettre à l’action du feu dans 
une vieille marmite percée sur un des côtés et couverte d’une 
pierre plate qu’on late avec de FPargile; cette huile, dis-je, 
qui coule par l'ouverture Jaissée au vase distillatoire, est 
un liquide brunâtre, inflammable, d’une odeur forte, rési- 
neuse, analogue à celle du goudron, d’une saveur âcre et 
caustique. 

M. le docteur Serre d'Alais a publié dans le Bulletin de 
thérapeutique (1816), un mémoire sur les bons effets de l'huile 
de cade, déjà employée depuis long-temps dans la médecine 
populaire. Nous allons extraire de ce mémoire ce qu'il con- 
tient de plus intéressant sous le rapport pratique. 


185 


Appliquée sur la peau saine, l’huile de cade ne provoque 
ni douleur ni démangeaison. Sur les muqueuses non en- 
flammées, l’irritation est très-peu prononcée; sur la peau 
et les muqueuses enflammées, son application est quelque- 
fois accompagnée d’une cuisson légère et de courte durée ; 
sur les parties ulcérées, cette cuisson est un peu plus forte, 
mais elle ne dure pas davantage : environ un quart où une 
demi minute. Elle ne détermine pas de réaction pathogéni- 
que sensible chez les enfants atteints d'affection vermineuse, 
auxquels on la donne à l'intérieur. 

Les premiers essais de M. Serre ont porté sur la gale, et il 
a si constamment réussi qu'il n’emploie plus d'autre moyen 
dans le traitement de cette affection. Trois ou quatre 
frictions suffiseni le plus ordinairement pour faire disparaître 
Ja gale lorsqu'elle est récente. Lorsque cette maladie est in- 
vétérée et qu'il s’y joint un élat eczémateux avec suintement, 
M. Serre réussit encore à la guérir par l'huile de cade, quand 
tous les traitements ont échoué. IT cite à ce sujet le fait sui- 
vant : M. H..., âgé de soixante ans, était tourmenté depuis 
plus de six mois d’une gale qui avait résisté à tous les 
moyens. Îl présentait en outre un écoulement eczématique 
des plus abondants aux deux jambes et au dos. La quantité 
de linge sali était énorme. Les antiphlogistiques, les bains 
émollients, les cataplasmes, les dépuratifs, les bains sulfu- 
reux, avaient été sans nul effet contre ce prodigieux écoule- 
ment. M. Serre appliqua, avec les barbes d'une plume, une 
couche d'huile de cade pure sur toutes les parties malades. 
La cuisson qui s'ensuivit fut courte et fort supportable. Dès 
Ja seconde application, il y avait déjà une modification avan- 
tageuse. Le cinquième jour, le suintement était réduit des 
quatre cinquièmes; la guérison fut complète le vingtième 
jour. Ainsi quatre ou cinq jours d’onctions faites sur les 
parties malades, et souvent seulement sur les bras et les 
jambes, ont sufli pour amener la guérison. M. Serre a eu 
aussi à trailer un homme qui portait à la main une dartre 
lichénoïde que les remèdes les plus actifs n'avaient pu dé- 
truire, quoique employés avec persévérance pendant plus 
d’une année : il a été guéri en six semaines par les seules 
onctions d'huile de cade. Ce médecin est convaincu de la 
réussite de ce traitement contre toute maladie dartreuse, 
quelle que soit sa forme. Dans les cas où l'on a fait précéder 
un traitement interne et rationnel sans succès, il ne reste 
plus, pour obtenir la guérison, que la peine de faire des 
onctions tous les deux jours sur les parties malades. 

M. Serre signale, comme particularité remarquable, la for- 


18% 


mation d'une pellicule analogue à l’épiderme par l’action de 
l'huile de cade. Cette pellicule se forme, du quatrième au 
cinquième jour, sur les parties eczémateuses ointes d'huile ; 
elle est lisse et presque transparente. Du cinquième au 
sixième jour, celte pellicule se casse, et tombe du neuvième 
au dixième jour, laissant voir la surface malade guérie ou 
en voie rapide de guérison. 

C’est surtout contre l’ophtalmie scrofuleuse que M. Serre 
a obtenu de bons effets de l'huile de cade. Chez les adultes, 
il applique cette huile pure sur la paupière inférieure tous 
les deux jours. Chez les enfants, il n’a jamais eu besoin de 
porter le remède sur l'œil ou sur les paupières pour guérir 
les ophtalmies les plus opiniâtres ; de simples onctions sur 
le front, les tempes, les pommettes, et extérieurement sur 
les paupières, ont le plus souvent suffi pour amener la gué- 
rison. Dans quelques cas, les résultats ont été activés par 
l'introduction d’une goutie d'huile de cade dans chaque 
narine. 

Si la guérison, ou une amélioration tellement notable 
qu’on puisse l'espérer prochaine, n’est pas obtenue au bout 
du cinquième ou sixième jour, on ne doit plus, selon M. 
Serre, compter sur l'huile de cade, soit qu'on ait affaire à 
une affection eczémateuse, soit qu'il s'agisse d'une ophtal- 
mie. Dans ce cas, M. Serre a recours aux bains de sublimé. 
Il atteste que dans ces ophtalmies anciennes qui ont résisté 
aux traitements les mieux entendus, lorsqu'il a échoué en- 
core avec l’huile de cade, il à toujours réussi avec le bain de 
sublimé ; et lorsqu'il a eu recours, d’abord sans succès, au 
bain de sublimé avant les orctions d'huile de cade, il a tou- 
jours triomphé en employant celle-ci : « Les bains de subli- 
mé sont préparés, pour les adultes,avec 4 grammes de deuto- 
chlorure de mercure, et 2 grammes pour les enfants, pour 
Feau nécessaire à un bain. Les malades doivent y séjour- 
ner deux heures, et se laver continuellement la figure avec 
l’eau du bain. Cinq ou six bains, un par jour, suffisent pour 
la guérison. » | 

Dans le Languedoc, les commères donnent l'huile de cade 
contre les affections vermineuses. La dose varie depuis vingt 
gouttes dans l’eau sucrée, jusqu’à une cuillerée à café, selon 
l’âge de l'enfant. M. Serre n’a jamais mis en usage cette 
huile comme anthelmintique, mais il pense qu’elle a dû être 
aussi utile pour remplir cette indication que la décoction de 
suie employée de temps immémorial par les gens du peuple. 
Ce sont encore les bonnes femmes qui appliquent l'huile de 
cade à l’odontalgie, M. Serre dit avoir vu souvent des dou- 


RES 


leurs de dents intolérables calmées par l'introduction d’une 
goutte de cette huile dans le trou de Ja dent cariée. 


GENTIANE, 


GRANDE GENTIANE. 


Gentiana major lutea (T.) 
Gentiana lutea (L.) 


Cette belle plante, que Haller à célébrée, et qui doit son 
nom à Gentius, roi d'Illyrie, lequel, d’après Dioscoride, 
l'employa le premier, croît dans les départements du milieu 
er du midi de la France, aux environs de Lyon, dans les 
Alpes, l'Auvergne, les Pyrénées, la Suisse, les Cévennes, 
etc. On emploie sa racine. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Macératiox et décoction, de 10 à 20 grammes par 

kilog. d’eau. 

Sirop (1 sur 40 d'eau et 40 de sucre), de 50 à 100 grammes en 
potion. 

Extrait (par infusion 1 sur 8 d’eau), de 5 à 10 grammesen pilules, 
potions, boïs. 

Poudre, de 50 centig. à À gramme, comme tonique, et de 10 
à 20 grammes comme fébrifuge. | 

Vin (1 sur 146 de vin), de 50 à 100 grammes. 

Teinture, de 2 à 8 grammes en potion ou dans du vin. 


Propriétés, 

La racine de gentiane est amère, tonique, fébrifuge, anti- 
septique, vermifuge. On l’administre dans les dyspepsies, 
les flatuosités, les diarrhées et tous les écoulements entrete- 
nus par la débilité de l'appareil digestif; dans les scrofules, 
le rachitis, l’ictère avec absence d irritation des voies biliai- 
res, le scorbut, la chlorose, certaines hydropisies atoniques 
sans inflammation viscérale, l’œdème qui suit ou accompa- 
gne les maladies chroniques, les fièvres intermittentes, etc. 

J'associe quelquefois la gentiane à l'écorce de saule dans 
certaines fièvres intermitientes; mais comme celte plante ne 
croît pas dans nos contrées, je la remplace par d’autres amers 
et surtout par la petite centaurée. 

[La vertu fébrifuge de la racine de gentiane était connue 
des anciens. Matihiole en vante l’infusion contre les fièvres 
tierces et quartes. C'était, avant la découverte du quinqui- 
na, le remède le plus usité contre les fièvres intermitientes. 
On l’associe quelquefois à l'écorce du Pérou quand ces fiè- 


136 


vres sontrebelles, avec engorgement de la rate, état cachec- 
tique; plus amère qu’astringente, elle modifie avantageu- 
sement, dans ces cas, l'action du quinquina. Boerhaave dit 
que Ja décoction de cette racine convient dans toutes les fiè- 
vres intermittentes. En Pologne, on administre, avant l'in- 
vasion de l'accès, quatre grammes de racine de gentiane en 
poudre dans du vin. Vicat assure que ce remède réussit dès 
la première prise, et que, bien que l'emploi de ce fébrifuge 
n’aitété précédé d'aucun médicament préparatoire, la mala- 
die n’a jamais eu de mauvaises suites. Willis, Eller, Alibert 
l’ont vanté. Le docteur Julia de Fontenelle, étant médecin 
en chef de l'hôpital de convalescence italien de l’armée de 
Catalogne, lorsque le quinquina était à un prix exorbitant, 
traita tous les fiévreux, avec beaucoup de succès, par la ra- 
cine de gentiane en poudre. [l adressa à ce sujet un mémoire 
à la Société royale de Médecine de Marseille, qui, recon- 
naissant déjà les avantages de l'emploi des plantes indigè- 
nes, lui décerna une médaille d'encouragement. 

D'un autre côté, MM. Trousseau et Pidoux se prononcent 
ainsi sur la gentiane : « Quant à ses propriétés fébrifuges, 
elles sontnulles très-certainement, quoi qu’en aient pu dire 
les nombreux auteurs qui ont expérimenté sur des fièvres 
intermittentes vernales, où sur des fièvres rémitientes qui 
ordinairement cèdent sans le secours de la médecine (Traité 
de thérap. et de mat. méd., {. x, 2° parte, p.252). » Je re 
partage pas l'opinion de ces auteurs. Îl est vrai que la gen- 
tiane ne jouit pas, comme le quinquina, d’une propriété 
anti-périodique spéciale ; mais son action, comme celle de 
tous les toniques amers, n’en est pas moins efficace dans 
certains cas de fièvres intermittentes prolongées : c'est un 
fébrifuge relatif, et qui trouve son application comme l'ab- 
sinthe (Voy. ABSINTHE). 

La racine de gentiane, mêlée avec celle de bistorte, avec 
l'écorce de chêne ou celle d’aune, à parties égales, soit en 
décoction, soit en poudre, agit plus efficacement comme 
fébrifuge que lorsqu'on l’administre seule : c’est une remar- 
que faite par Cullen, et que j'ai été à même de vérifier. 
Prise à trop haute dose, la gentiane produit du malaise, un 
sentiment de pesanteur à l'épigastre et même le vomisse- 
ment. Il est donc de toute évidence qu’elle ne convient point 
dans les fièvres qui oni le plus léger caractère inflammatoire 
ou qui sontaccompagnées d’une irritation gastrique plus ou 
moins vive. Il est nécessaire, dans les longues maladies, 
d'en suspendre l'usage de temps en temps; car, par une 
influence que Cullen attribue à un principe vireux existant 


187 


dans tous les amers, son emploi, long-temps continué, finit 
par produire une gastrite chronique qui détruit la faculté 
digestive, et exige un traitement antiphlogistique. 

La racine de gentiane sert en chirurgie, comme l'éponge 
préparée, pour agrandir les orifices fistuleux et dilater cer- 
taines ouvertures, particulièrement le canal de l’urêtre des 
femmes affectées de la pierre. On l’applique aussi, en poudre 
ou en décoction, sur les plaies gangréneuses, atoniques, 
scorbutiques, etc.; on en fait même des pois à cautère, qu'on 
emploie de préférence quand il s’agit de rendre au fonticule 
l'étendue que le temps lui a fait perdre. 

La racine de gentiane doit être peu ancienne, de moyenne 
grosseur, Spongieuse, jaune en dedans, très-amère, n'ayant 
pas beaucoup de petites racines. On doit rejeter comme 
mauvaises les racines qui sont ridées, cariées, noirâtres, et 
moisies à l’intérieur. 


GENTIANIN. 


Le gentianin, principe actif de la gentiane, est une sub- 
sance jauue, inodore, très-amère, cristallisant en aigrettes. 


Fréparations et doses, 
A L'INTÉRIEUR (pur) : 40 à 20 centiz. en pilules, dans un liquide 
approprié. 
Teinture (4 sur 460 d'alcoo! à 240), de 2 à 8 gram. en potion. 


Sirop (4 sur 500 de sirop de sucre) de 30 à 60 grammes, seul 
ou en polion. 


Propriéiés. 
Le gentianin convient dans les mêmes cas que la gentiane. 
J'ai souvent administré, dans ma pratique urbaine, le sirop 
de gentianin contrel’helmintiase chez les enfants, el comme 


tonique chez les sujets lymphatiques, pour combattre la 
tendance scrofuleuse. 


GERANION, * 
BEC DE GRUE, HERBE A ROBERT, GÉRAINE ROBERTIN. 


Geranium robertianum primum (T.) 
Gercnium robertianum (L) 


Cette plante, très-commune, se rencontre sur les vieux 
murs,le long des haies, aux lieux sombres.L’herbe est usitéee 


188 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction, de 15 à 45 grammes par 
kilogramme d'eau. 
Suc, 50 à 100 grammes. | 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction, quantité suffisante pour lotions, fo- 
mentation, gargarisme ; plante verte pilée, appliquée froide ou 
bouillie, pour cataplasmes. 


Propriétés. 

L’heibe à Robert, d’une odeur désagréable, comparée à 
celle de l’urine des personnes qui ont mangé des asperges, 
d’une saveur un peu amère et légèrement austère, est un 
peu astringente. Je ne dirai pas, avec Hildanus, que ceue 
. plante guérit le cancer, et, avec d’autres auteurs, qu'elle 
dissout le sang coagulé dans le corps, arrête toutes les hé- 
morrhagies, guérit la phihisie scrofuleuse, etc.; de telles 
assertions remontent aux temps où la crédulité attribuait aux 
plantes les plus inertes les propriétés les plus merveilleuses. 
Mais faut-il, parce que l'expérience n’a pas justifié les éloges 
prodigués au bec de grue, l’exclure de la matière médicale 
indigène ? Je l’ai vu employer avec avantage, en décoction 
concentrée, dans l'hématurie des bestiaux. J'ai pu constater 
aussi un effet diurétique non irritant de son suc étendu dans 
l'eau ou le petit lait, dans deux cas de néphrite calculeuse 
chronique. Je l'ai mis en usage en gargarisme dans les. 
engorgements des amygdales et vers la fin des angines ; elle 
a produit de bons effets en fomentation dans les inflamma- 
tions superficielles de la peau, el en cataplasme comme le 
cerfeuil dans l’ophtalmie et les engorgements laiteux des. 
mamelles. 


GERMANDRÉE, 
PETIT CHÉNE. 


Chamædrys major repens (T.) 
Teucrium chamaædrys (L.) 


La germandrée vient spontanément dans toute la France, 
dans les bois et sur les collines arides. On emploie les som- 
mités fleuries. 

Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 50 à 60 gram. par kilog. d’eau. 

Poudre, de 2 à 40 grammes en bols, pilules, ou dans un liquide 

approprié. 

Eau distillée, de 50 à 100 grammes, en potions. 

Extrait, de 4 à 8 gram. en bols, pilules, ou dans du vin. 


189 


Propriétés. 


‘On a beaucoup trop exalté les vertus de cette plante. C’est 
un tonique amer qui n’a rien de plus spécial que beaucoup 
d’autres amers indigènes que l'on administre dans tous les 
cas où une légère médication tonique est'indiquée. 

[Les qualités physiques de la germandrée, dit Chaume- 
ton, ne me semblent point assez prononcées pour justifier la 
grande renommée dont cette plante a joui depuis les temps 
les plus reculés jusqu’à nos jours. Pline, qui ne s'appuie 
souvent que sur des récits incertains, la dit irès-efficace 
contre la toux invétérée, les affections pituiteuses de l’esto- 
mac, les douleurs de côté, l'hydropisie commençante, etc. 
Suivant Prosper Alpin (de Med. egypt., lib. iv), les Egyptiens 
l’opposent avec confiance aux fièvres intermittentes, contre 
lesquelles Matthiole, Boerhaave, Rivière, proclament aussi 
ses bons effets. Les médecins de Gènes, d’après Vésale, firent 
prendre au goutteux Charles-Quint, durant soixante jours, 
une décoction vineuse de germandrée, sans obtenir la gué- 
rison que ces médecins lui avaient promise. Solenander et 
Sennert ont également vanté cette plante contre la goutte. 

«On a trop exalté, sans doute, son utilité dans lesaffections 
arthritiques, dit Bodart; mais on ne peut refuser à la ger- 
mandrée beaucoup d'efficacité comme tonique amer dans 
les maladies goutieuses qui reconnaissent pour principe une 
débilité sensible dans les fonctions digestives. (Botanig.méd. 
compar.) » Je répondrai à cette assertion que nous possé- 
dons une foule de plantes amères beaucoup plus énergiques, 
tant pour remplir cette indication que pour combattre les 
fièvres intermittentes, les affections catarrhales, la débilité 
des voies digestives, etc. En réduisant, toutefois, les pro- 
priétés de la germandrée à leur juste valeur, elles trouvent 
leur application dans les circonsiances qui n’admettent 
que l'usage gradué des toniques. C’est ainsi que j'emploie 
avec avantage l'infusion de cette plante après la période 
-d’irritation des fièvres muqueuses, lorsque l’état de l'estomac 
et des instesiins ne permet pas encore l'administration de 
toniques plus énergiques, bien que ceux-ci soient indiqués 
par la débilité générale du malade : ce sont des nuances 
thérapeutiques que l'observation apprécie et que lexpé- 
rience confirme.] 

On emploie aussi, comme jouissant à peu près des mêmes 
propriétés que la germandrée, l'ivette lteucrium chamæpi- 
ts (L.) ou chamæbpitis, et l’ivette musquée ({eucrumiva (L.] 


190 


GERMANDRÉE AQUATIQUE, 


TEUCRIUM AQUATIQUE, SCORDIUM, GERMANDRÉE D'EAU, 
CHAMARAS. 


Chamædrys (T.) 
Teucrium scordium (L.) 


Cette plante, beaucoup plus énergique que la précédente, 
croît dans les terrains humides et marécageux du midi de 
la France. On emploie ses sommités. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau. 
Suc exprimé et elarifié, de 45 à 60 grammes. 
Extrait, de 3 à 40 grammes, en pilules où dans du vin. 
A L'EXTÉRIEUR : En décoction ou infusion aqueuse ou vineuse, 
en cataplasmes, etc. 


Propriéiés. 

Le scordium, exhalant une odeur d'ail en le froissant 
entre les mains, est un tonique amer et stimulant employé 
dans les fièvres muqueuses avec prostration des forces, dans 
la paralysie, la chlorose, l’anasarque, les affections vermi- 
neuses, les cachexies, les catarrhes chroniques, etc. 

[Cette plante, presque entièrement oubliée dans la méde- 
cine moderne, et que des propriélés non équivoques recom- 
mandent, était employée dès le temps d'Hippocrate. Parmi 
les modernes, Rondelet, Pélissier, Gilibert, Pont préconisée 
contre les maladies qui tiennent à un état de débilité bien 
caractérisé. Selon Newmann et Cartheuser, l'extrait spiri- 
tueux de scordium est plus amer et plus énergique que 
l'extrait aqueux.] | 

A l'extérieur, la germandrée aquatique est utile dans les 
ulcères de mauvais caractère, dans la gangrène, employée 
en infusion ou en décoction, avec le vin ou le vinaigre et un 
peu d'alcool camphré ou d'acide hydrochlorique, ou tout 
simplement avec une suffisante quantité de sel commun. On 
l'applique aussi en poudre sur les ulcères sordides, qu'elle 
déterge. 

Cette plante entre dans le diascordium et dans d’autres 
compositions officinales. (Voy. Scordium, p. 511.) 


291 


GERMANDRÉE MARITIME, ‘ 
GERMANDRÉE COTONNEUSE, HEBBE AUX CHATS. 


Chamædrys maritima (T.) 
Teucrium marum (L.) 


Ce sous-abrisseau croît sur les bords de la Méditerranée, 
aux îles d’Hyères, dans les lieux stériles et rocailleux, et 
est cultivé dans les jardins. Les feuilles sont employées. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 8 à 30 gram. par kilog. d'eau. 
Poudre, de 2 à 5 gram., en électuaire, pilules, ou dans du vin. 
Extrait, de 4 à 2 gram., en pilules ou dans du vin, 


Fropriétés, 


La germandrée maritime, d’une odeur pénétrante, cam- 
phrée, sternutatoire, d'une saveur chaude, amère et âcre, est 
tonique et excitante. Elle exerce sur le système nerveux une 
action qui la rend efficace dans toutes les maladies qui ont 
pour caractère essentiel un état de débilité, d'atouie.Elle con- 
vient conséquemment dans la paralysie, la chlorose, l'hydro- 
thorax, l'asthme humide, le catarrhe pulmonaire chronique, 
le scorbut, l’aménorrhée par atonie, l'hypocondrie, etc. 
Wedelius donne à cette plante la qualification depolychreste; 
Cartheuser et Liunée, la rangeant parmi les plus précieux 
médicaments, en proclament les nombreuses et éminentes 
vertus. 

Bodart, dont les recherches thérapeutiques ont toujours 
eu pour but de détruire le préjugé qui nous fait préférer les 
plantes exotiques aux plantes indigènes ayant les mêmes 
propriétés, parle ainsi des vertus de cette plante : « Elle 
mérite le premier rang parmi les cordiaux. Son parfum 
suave et doux la rend supportable à presque toutes les cons- 
titutions; on peut donc la considérer comme un médicament 
nervin, diaphorétique, diurétique, emménagogue, selon les 
organes atteints plus particulièrement de la faiblesse à la- 
quelle il remédie. Succédané du camphre, dont il recèle une 
grande quantité, il s'oppose à la putridité, augmente la sé- 
crétion de la bile, favorise les fonctions digestives, ranime 
l'appéut, et remédie à la lenteur du système circulatoire. » 
(Bot. méd. comp., tom. 3, p. 150.) 

On a droit d’êire surpris, dit Chaumeton, qu’une plante 


192 


aussi active ne soit pas plus fréquemment employée, tandis 
que les tablettes des pharmacies sont surchargées et les or- 
donnances des médecins souillées d'une foule de drogues 
inertes. » (Dict. des Scienc. méd., t. 18, p. 225.) 

On a attribué au marum la propriété de guérir les polypes 
du nez et de s'opposer à leur reproduction. En 1822, Hufe- 
land a annoncé cette propriété dans son journal. M. Mayr 
d’Arbon (London med. and phys.journ., Janv. 1834) a pré- 
conisé l’ Miel éé de cette plante, prise par le nez comme le 

tabac, contre un polype de cette partie ; il en fit faire usage 
après son extraction ; il ne repullula point, et l'odorat, qui 
était perdu, revint. Le docteur 1 May er cite aussi un cas de 
ouérison de polype nasal par le même moyen. (Nouv. bibl. 
méd., L. 11, pag. 430. | Il est probable que ces polypes étaient 
muqueux. La propriété d’ empêcher la reproduction de celte 
maladie doit surtout fixer l'attention des praticiens. 

Les chats aiment le marum autant que la cataire. Ils se 
roulent sur lui, le lèchent, le mordent avec délices, le bai- 
gnent de leur urine et même quelquelois de leur sperme. 
Geoffroy conseille, si on veut en la cultivant la conserver 
intacte, de la renfermer dans des cages de fer. 


GLAYEUL PUANT, 


IRIS GIGOT, SPATULE, IRIS FÉTIDE. 
Iris fætidissima (L.) 


Cette plante croit dans les lieux humides, près des ruis- 


seaux, dans les vignes. On employait autrefois sa racine et 
sa semence. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Semence où rucine en décoction, de 45 à 50 gram. 
par kilog. d'eau. 


Racine sèche pulvérisée, 4 à 8 gram. pour un kilog. de vin blanc 
(altérant). 


Suc, de 2 à 42 gram., comme altérant et comme purgatif. 
Propriétés. 


La racine de glayeul fétide, d'une saveur âcre et nauséa- 
bonde, est stimulante et purgative, ainsi que ses semences. 
On les a conseillées dans les scrofules, la cachexie, l’hydro- 
pisie. Quoique l'administration de cette plante fraîche ne 
soit pas sans danger, j'ai vu des paysans prendre le suc de 


193 


sa racine contre l'hydropisie, qu'elle à souvent réussi à dis- 
siper. Je ne l’ai jamais employé. 

[Laracine sèche perd une grande partie de ses proprié- 
tés ; on peut alors la donner comme diurétique, emména- 
gogue, fondante, etc.] 


GLOBULAIRE, 
GLOBULAIRE TURBITH. 


Giobuiaria fruticosa (T 
Globularia alypuim (L.) 


Ce sous-abrisseau croît dans les départements méridio- 
naux de la France, en Espagne, en Italie. Ses feuilles seu- 
lement sont employées. 


Préparations et doses, 
A L'INTÉRIEUR : Décoction des feuilles sèches, de 412 à 50 gram. 
pour 406 gramm. d'eau. 
Extiait, de 2 gram. 50 cent à 5 grammes. 


Propriétés. 


La globulaire turbith, d'une saveur très-amère, est un pur- 
gatif qui opèredoucement, sans produire ni irritation,ni nau- 
sée, ni malaise. Il peut avantageusement remplacer le séné à 
dose double de ce dernier. En comparant les effets deces deux 
plantes, Loiseleur - Deslonchamps (Biblicth. méd., t. 48), 
observaieur judicieux auquel on doit de précieuses recher- 
ches sur la thérapeutique végétale indigène, a constaté que 
tous les avantages étaient en faveur de la globulaire ; que 
la décoction de cette dernière était exempte de la saveur 
désagréable du sené, et que les évacuations qu'elle produi- 
sait étaient plus égales. Elle est en même temps tonique. 

D’après le docteur Ramel, qui à puissamment contribué, 
après Clusius et Garidel, à dissiper les préventions que l’on 
avait contre cette plante (1), la globulaire serait en outre 


(A) Les propriétés de la globulaire turbith étaient inconnues aux an- 
ciens. Le nom d'Herbe terrible, Herba terribilis, Frutex terribilis, que 
lui doune J. Bauhin, et qu’elle porta iong-lemps aux environs de Mont- 
pellier, atteste qu'on la regardait comme un purgatif violent. Cette er- 
reur vient, ainsi que l’a démontré M, Mérat (Dict. des Sciences méd., 
t. xvut cé suiv.—Journal de Méd., t. 62, p. 374), à ce qu'on à confondu 
cette globulaire avec l’alypum de Dioscoride, qui est, en effet, un dras- 
tique dangereux. | | 

13 


19% 


hydragogue et fébrifuge. On ne peut attribuer son action 
contre les flèvres intermittentes qu ‘à son principe amer, 
et son utilité dans les hydropisies qu’à ses effets purgatifs. 

Quand on administre la globulaire en décoction, qui est 
la forme la plus usuelle, il faut que l’ébullition soit conti- 
nuée environ dix minutes, afin que l'eau puisse s'emparer 
de toutes les parties actives de la plante. 


GLOBULAIRE VULGAIRE, MARGUERITE BLEUE, (Globularia 
vulgaris). Les feuilles de cette espèce, qui croît dans les 
pâturages secs des départements du centre et même du nord 
de Ja France, peut très-bien remplacer la globulaire turbith, 
en augmentant la dose d'un tiers. Elle m'a constamment 
réussi. 


GRATIOLE, 


HERBE A PAUVRE HOMME, GRACE DE DIEU. 
Digitalis minima, gratiola dicta (T..) 
Gratiola officinalis (L.) 


La gratiole se trouve partout dans les lieux humides, aux 
bords des ruisseaux, sur les chaussées des étangs et des mou- 
lins. L’herbe et la racine sont usitées. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Décoction ou infusion, de 4 à 412 gram. pour 120 

grammes d'eau ou de vin. 

Poudre, de 50 cent. à 2 gram. en pilules, potion, etc. 

Extrail (1 fraiche sur 1 d'ean par décoction), de 40 cent.à 1 gram. 

Vin M sur 50 de vin), de 50 à 100 gram.) 

Teinture (4 sèche sur 8 d'eau-de- ie) , de 50 cent. à 2 gram,, 
seule en potion. 

Propriétés. 


À trop grande dose, la gratiole, d’une saveur amère et 
nauséabonde, est un irritant qui produit l'empoisonnement 
à la manière des drastiques. À dose modérée, c’est un éméto- 
cathartique énergique trop négligé de nos jours. Il a été 
utile contre certaines hydropisies non accompagnées de 
phlegmasie, dans l'hypocondrie, la manie, le rhumatisme 
chronique, la goutte, quelques affections vermineuses, contre 
le ténia, etc. A faible dose et fractionnée , la gratiole peut 
être employée comme altérante dans plusieurs maladies 
chroniques de la peau. 

[ « Sept fois, disent Coste et Wilmet (Essais de mat. méd. 
indig., tom. 11, p. 101), nous nous en sommes servi pour 


_ cintre ut 


195 


purger des œdématiques, et l'effet hydragogue s’en est suivi 
sans irritation et sans fatigue. Nous avons administré cette 
infusion aqueuse à 12 personnes (4 à 12 gram. de feuilles 
pour un verre d'eau), de différents âges, sexes, constitu- 
tions, attaquées de saburre pituiteuse, de fièvre erratique, 
d'hydropisie et de vers. Nous nous sommes bien trouvés de 
l'addition d’un gramme jusqu’à quatre de racine de la même 
plante, dans cette infusion, pour les hydropiques. Mais nous 
nous sommes abstenus de prescrire cette racine en poudre, 
à raison de l'état d’anxiété et de malaise qu’elle communique 
aux malades, par de fausses envies de vomir. » 

J'ai administré plusieurs fois la poudre de gratiole com- 
me vomilive, à la même dose que celle d’ipécacuanha : ses 
effets ne sont pas constants ; car elle purge quelquefois 
énergiquement sans faire vomir. Wauters à fait Ia même 
remarque et en parle ainsi : Pessimum sane, si remedium 
aliquod adhibentes, ignoramus an emeticam an diasticam, 
an nimiam an nullam vim sit exerturum. (Repertor. reme- 
dior. indigen., p. 56). Comme émétique, l’asaret est bien 
préférable à la gratiole, dont l'administration, d’ailleurs, 
n'est pas sans danger dans le cas d'irritation gastro-intes- 
tinale, de diarrhée ou de dyssenterie, malgré l'opinion de 
Boulduc (Hem. de l’Acad. des Sciences, 1707, p. 188), qui 
considère la gratiole comme aussi efficace que lipécacuanha 
au commencement de cette dernière maladie. Il n’y a au- 
cune parité entre l’ipécacuanha, qui agit principalement sur 
l'estomac comme vomitif, et la gratiole dont l'effet, comme 
purgatif violent, se produit sur tout le tube digestif. 

Comme purgatif , la gratiole est le meilleur succédané du 
jalap et du séné. J'ai souvent remplacé ce dernier par les 
feuilles de gratiole à la dose de 8 grammes infusées dans 120 
grammes d’eau, avec addition de 30 grammes de sirop de 
nerprun. J'ai employé aussi, d’après Bergius, dans les fiè- 
vres intermittentes automnales avec cachexie, le mélange de 
50 centigrammes de gratiole en poudre avec 25 centigram- 
mes de gentiane. Après quelques jours de l'usage de se mé- 
lange, je faisais prendre l'écorce de saule unie à l’absynthe 
er à la racine d’angélique dans le vin blanc ou dans la bière. 
J’ai pesque toujours réussi à me rendre maître de la fièvre 
par ces moyens simples, et à obtenir ainsi, par nos végétaux 
indigènes, des résultats aussi satisfaisants qu'avec les subs- 
tances exotiques d’un prix élevé. 

J'ai donné avec succès, dans quelques hydropisies exemp- 
tes de flegmasie et accompagnées de flaccidité, d’atonie géné- 
rale,soit l’infusion aqueuse, soit l’infusion vineuse de feuilles 


196 


et de racine de gratiole, à la dose de 50 à 100 grammes, selon 
l'âge, le tempérament et les forces. Elle m’a paru agir avee 
certitude et sans inconvénient quand la prudence a présidé 
à son usage. Il fauL toujours commencer par une dose mo- 
dérée, afin de juger du degré de susceptibilité des organes 
digestifs. À la campagne, où l’on faitun fréquent usage de 
cette plante pour se purger, elle agit doucement chez les 
uns, et cause chez les autres des superpugations, à cause 
du défaut de prudence et de discernement dans son adminis- 
ration J'ai vu,dans deux cas d'hydrothorax avec tuberculisa- 
tion, la gratiole produire une diarrhée opiniâtre er hâter la 
mort. On doit toujours, quand cette complication existe, 
s'abstenir de l'usage des purgatifs. 

Peyrilhe, qui donne à la gratiole la qualification d'héroï- 
que, conseille de l’'employer avec du petit lait, alin d'empé- 
cher les nausées et les vomissements. Boulduc prescrit l'in- 
fusion des feuilles dans du lait, dont on donne un verre par 
jour dans l’ascite, ou contre les vers. Je l'ai administrée 
aussi dans du laït, comme purgalive et vermifuge, avec 
succès. 

C'est, comme tous les purgatifs, à titre de dérivatif et non 
en raison de propriétés spéciales, que la gratiole a été utile 
dans les affections cérébrales non fébriles, telles que l’apo- 
plexie, la manie, et contre la goutte, le rhumatisme chroni- 
que, les écoulements blennorrhagiques et leucorrhéïques, 
l'orchite, etc. On l’a vantée dans le Delvwrium tremens 
(journ. d'Hefeland—1830). 

À petite dose et comme altérante,la gratiole a été utile dans 
les engorgements froids des viscères, la cachexie, les mala- 
dies chroniques de la peau, la syphilis, ete. Dans ces cas, 
c'est surtout son extrait qu’on emploie : on le fait prendre à la 
dose de 10 centigrammes, matin et soir d’abord, en augmen- 
tant ensuite peu à peu la quantité, jusqu'à ce qu’il survienne 
des évacuaiions. Cet extrait, associé à une poudre aroma- 
tique et mis en pilules, est, de tous es modes d’administra- 
ion de la gratiole, celui qui mérite la préférence Adminis- 
tré ainsi ou avec des feuilles de rhue ou de la semence de ta- 
naisie, il m'a complètement réussi comme anthelmintique. 

[La gratiole, donnée en lavement, a une action spéciale 
sur les organes de la génération. Employée de cette manière 
chez les femmes, elle a quelquefois donné lieu à une sorte 
de nymphomauie. M. Bouvier à rapporté dans le journal 
général de médecine (vol. 5%) quatre observations qui cons- 
tatent cette action singulière. Le praticien devra donc en 
tenir note pour les cas où il jugerait nécessaire l'injection de 
gratiole dans le rectum. 


197 


Stoll, et après lui Swediaur, employaient la formule sui- 
vaute contre les dartres ec la syphilis invétérée : Rob de su- 
reau, 90 grammes; extrait de gratiole, 12 grammes; subli- 
mé corrosif, 45 centigrammes, pour un électuaire dont la dose 
est de 4 grammes tous les matins. 

Il est impossible d'admettre, en présence du sublimé cor - 
rosif, que la gratiole puisse avoir une part active à la guéri- 
son. On peut en dire autant de la guérison de la gale, obte- 
nue, suivant le docteur Delavigne (dissertatio de gratiolà of- 
ficinali ejusque usw in morbis cutaneis ; 1n 4°., Erlangæ, 
1799), par l'usage interne de Ia décoction de gratiole, joint à 
des onctions d'onguent citrin dans le premier cas, et, dans 
le second, à des lotions de sublimé dissous dans l'eau. 

On a vanté les applications extérieures de la gratiole con- 
tre la goutte et le rhumatisme chronique. On conçoit faciie- 
ment que Matthiole et Césalpin aient pu croire que les feuil- 
les de cette plante guérissaient promptement les plaies sur 
lesquelles on les applique ; mais n'est-on pas surpris de voir 
Murray adopter , avec les progrès de la chirurgie , une sem- 
blable opinion ? 

La gratiole, moins amère qüand elle est desséchée, ne 
perd cependant que peu ou point de ses verius.] 


GRENADIER , * 
BALAUSTIER. 


Punica sylvestris, sativa (T.) 
Punica granatüum (L) 


Le grenadier , originaire des contrées de l'Afrique que 
baigne la Méditerranée, croît en Espagne, en Italie, et dans 
le midi de la France. On emploie les fleurs (balaustes), les 
fruits (grenades), la racine et l'écorce {malicorium). 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR: Infusion ou décoction des fleurs, àe 45 à 30 gram. 

par kiog d'eau. 

Décoction de l'écorce du fruit, de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau. 

Décoction de l'écorce de la racine fraîche, 60 gram, pour 700 gram. 
d'eau que l'on fait réduire à 500 gram. et que l'on donne en 
trois fois contre le ténia. 

Extraii alcoolique de la racine, de 415 à 20 gram, comme astrin- 
gent, vermifuge. 

Poudre de la racine, de 5 à 45 gram. en pilules, bols, ou dans du 
vin, comme estringent,. 

Poudre de malicorium, de 5 à 12 gram. en substance ou en bol, etc. 


198 


Sirop de grenade, (8 de suc sur 15 de sucre), de 50 à 60 gram. en 
boisson, 


Suc de grenade, étendu dans l'eau et édulcoré. 
Sirop de malicorium, de 50 à 60 gram. en potion. 
Semence en poudre, de 4 à 8 gram. dans du vin, comme astrin- 
gent. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction des écorces ou des fleurs (30 à 90 gram. 


par kilog. d'eau), pour fomentations, lotions, lavements astrin- 
gents, ele. 


Propriétés. 


Les fleurs ou balaustes et l'écorce du fruit du grenadier 
ou malicorium {cuir de pomme), sont toniques et astrin- 
gentes. On les emploie, à l'intérieur, dans la diarrhée et la 
dyssenterie quand la période d’irritation est dissipée , dans 
les hémorrhagies passives, les écoulements muqueux avec 
atonie, et, à l'extérieur, en gargarisme dans-le gonflement 
atonique des amygdales, le relâchement de la luette et des 
gencives, en lotion et en injection contre le relâchement de 
la muqueuse du vagin, la chûte du rectum, l'œdème des ex- 
trémités, les engorgements articulaires suite d’entorse où 
de luxation, etc. On fait ordinairement usage des fleurs à 
l'intérieur, et de l'écorce des fruits à l'extérieur. Les graines 
renfermées dans les grenades, d'une saveur aigrelette, sont 
aussi astringentes, mais à un degré beaucoup plus faible; 
elles ont été néanmoins prescrites en poudre dans les fleurs 
blanches, et, à l'extérieur, contre les ulcères atoniques. Le 
suc de grenade est raffraîchissant et diurétique. Etendu dans 
l’eau, il fournit, comme nos fruits rouges, une boisson aci- 
dule d'un goût agréable , et qui convient dans les maladies 
inflammatoires, bilieuses et putrides, les affections des voies 
urinaires, elc. 

Piine l'Ancien dit qu’une grenade, pilée et bouillie dans 
trois hémines de vin réduites à une, expulse le ténia, (Hist. 
mundi, hb. xvni, c. 6). La grenade entière, enfermée dans 
un pot de terre neuf bien couvert et lutté d'argile, mise 
au four et desséchée au point de pouvoir facilement la ré- 
duire en poudre, et administrée à la dose de 2 à 4 grammes 
avec du vin rouge, était un remède populaire vanté contre 
Ja dyssenterie chronique, les pertes utérines, les fleurs blan- 
ches et les fièvres intermittentes. L’écorce du fruit du gre- 
nadier est regardée par les médecins persans et thibétains, : 
comme succédané du quinquina et employée contre les 
fièvresi ntermittentes. (Bibliot. britan., Sept. 1811.) 

La propriété vermifuge de écorce de racine de grenadier, 
que l’on n’a mise à profit que depuis une trentaine d'années, 


199 


était connue des anciens. Caton le Censeur Îa conseille con- 
ire les vers , et Dioscoride recommande la décoction de ra- 
cine de grenadier prise en breuvage pour tuer les vers lar- 
ges et les chasser du corps. Dans l'Inde, ce ténifuge était 
employé de temps immémorial. Laissant de côté, comme 
inutiles dans un travail exclusivement consacré à la théra- 
peutique , les autres détails historiques concernant ce pré- 
cieux remède, nous nous contenterons de dire que le mé- 
moire du docteur Gomès, publié en 1822, et traduit par M. 
Mérat (Journ.compl., t. xv1, p. 24), a le plus contribué à en 
répandre l'usage en France. 

Ce qui frappe le praticien dans l'emploi de l'écorce de ra- 
cine de grenadier comme ténifuge, c’est le défaut de propor- 
tion entre son action immédiate sur le tube digestif et le ré- 
sultat qu’on en obtienr. Introduite à dose légère dans l’esto- 
mac, elle ne produit aucun effet sensible; en quantité plus 
forte, elle occasionne un peu de chaleur et rarement de la 
douleur dans la région épigastrique ; quelquefois, cependant, 
des nausées et même le vomissement ont lieu. Comme pur- 
gative, l'écorce de grenadier à une vertu peu active : elle ne 
provoque, administrée à haute dose, qu'un bien petit nom- 
bre de selles. On sait d'ailleurs que les purgauifs, même les 
plus énergiques, n’ont pas, par cette seule propriété, l'effet 
vermifuge. L'amertume de cette racine n’est pas assez pro- 
noncée pour que l'on puisse lui attribuer sa vertu anthelmin- 
tique ; tout-à-fait dépourvue d'arôme , sa décoction a seule- 
ment quelque chose de nauséabond. 

On a quelquefois observé, après l'administration de ce mé- 
dicament, des vertiges, des étourdissements, une sorte d’i- 
vresse, parfois des syncopes, de légers mouvements convul- 
sifs; mais ces accidents sont fugaces ei ne laissent aucune 
trace après leur manifestation. 

Il paraît donc certain, en raisonnant par voie d'exclusion, 
que l'écorce de racine de grenadier agit d'une manière spé- 
ciale et par intoxication sur le ver, que l’on trouve toujours 
mort, peloionné sur lui-même, et noué fortement à plusieurs 
endroits de sa longueur. Les remarques faites par Ex plupart 
des auteurs qui ontétudié les effets de cette substance vien- 
nent à l'appui de cette opinion. Breton (London médico- 
surgical transact., t. xx, p. 361), ayant jeté des ténias vi- 

vants dans une décoction d’écorce de racine de grenadier, 
les a vus se contracter aussitôt avec vivacité et mourir au 
bout de quelques minutes, tandis que ceux qui ont été plon- 
gés dans l’eau simple ont vécu plusieurs heures après leur 
expulsion. Le docteur Gomès s'est aussi assuré que des por- 


200 


tions de ténia vivant, jetées dans Ja décoctien d'écorce de ra- 
cine de grenadier, deviennent raides, contractéès, et y péris- 
sent presque aussitôt, tandis que dans les autres anthelmin- 
tiques , même dans l'essence de térébentine, elles se meu- 
vent avec plus ou moins de vivacité. 

Le mode d'administration de l'écorce fraîche de racine 

de grenadier est très-simple. On fait bouillir 45 à 60 grammes 
de cette écorce dans 4 kilogramme d’eau, et réduire à trois 
verres que l’on fait prendre en trois fois le matin à jeun. Le 
ver est ordinairement rendu peu de temps après le second 
ou le troisième verre. 
#* » Une pratique de vingt-quatre ans a prouvé à M. Mérat 
que l'écorce de racine de grenadier ne manque jamais son 
effet dans le cas deténia; du moins, il déclare n’avoir ja- 
mais observé d'exemple contraire. Mais le succès est lié à 
l'observation indispensable de certaines conditions, et ces 
conditions sont Îles suivantes : 

1° N’administrer lemédicament que le jour même ou le 
lendemain du jour où des anneaux de ténia auront été 
rendus. 

2° Faire prendre en trois fois, à une demi-heure de dis- 
tance les unes des autres , le produit de la décoction de 60 
grammes d’'écorce de racine fraîche de grenadier cultivé, 
dans 750 grammes d'eau réduite à 500 grammes par l'ébul- 
lition. 

Pour assurer la bonne réussite de la médication, M. Mérat 
est dans l'habitude de faire acheter un grenadier vivant, de 
buit à dix ans au moins {plus jeune il ne pourrait fournir 
la quantité d’écorce de racine suffisante), et d’en faire sépa- 
rer l'écorce chez le malade même, le jour, ou, au plus tard, 
le lendemain du jour où des anneaux de ténia ont été expul- 
sés ; il le fait ensuite employer comme il a été dit plus haut. 

» Suivant M. Mérat, les insuccès que l’on a reprochés à ce 
mode de traitement sont dus uniquement à ce qu’il n’a pas 
été feit convenablement, et ils doivent toujours être consi- 


dérés comme résultant soit de la faute du médecin, soit de 


celle du malade. Aïnsi, tantôt on a employé l'écorce sèche 
(qui pourtant réussit encore dans le plus grand nombre des 
cas), souvent altérée et mêlée à d’autres écorces ; tantôton à 
fractionné la dose du médicament, et on lui a associé des 
purgalifs, ou on en a administré auparavant; tantôt, enfin, 
les malades n’ont rendu des portions de ver que depuis un 
certain temps, etc.»(Abeille méd., t. u, p. 275, année 1845.) 

M. Bourgeoise (Bibhot. med., {. vi, p. 307) fait prendre 
la veille du jour où il doit administrer l'écorce de racine de 


* 


201 


grenadier, le matin ou le soir, 45 à 60 grammes d'huile de 
ricin, dans la vue de nettoyer le tube digestif, de débarrasser 
le ténia des matières fécales qui l'entourent, et de le mettre 
à nu le plus possible. Il ne croit pas ce purgatif indispen- 
sable, mais il lui paraît augmenter les chances de succès. 
Le docteur Gomès donne le conseil, lorsqu’après l'adminis- 
tration du ténifugeune portion du ver reste pendant à l'anus, 
de faire prendre le jalap, l'huile de ricin, etc., pour en fa- 
ciliter la sortie. 

Chez les sujets faibles, nerveux et surtout chez les en- 
fants, on ne doit administrer l'écorce de racine de grenadier 
qu'à doses fractionnées. On peut dans ces cas, faire prendre 
pendant huit à quinze jours, tantôt par l'estomac, et tantôten 
lavements, une décoction de # grammes de cette écorce. Ce- 
pendant ces demi-moyens sont loin d'amener un résultat 
aussi satisfaisant que le mode ordinaire d'administration, et 
qui consiste dans-&äe dose assez forte du médicament pour 
tuer le ver. | 

L'administration de l'écorce de la racine de grenadier 
sous forme de poudre, conseillée par Breton, qui la faisait 
prendre à la dose de 60 centigrammes toutes les demi-heures 
pendant trois heures de suite, est moins certaine dans 
ses effets que la décoction. L’extrait alcoolique proposé par 
le docteur Deslandes {archiv. gen. de méd., 2° serie, L.1, p. 
120), comme possédant une efficacité ténifuge plus pronon- 
cée que celle de l'écorce elle-même, est plus facile à admi- 
nistrer, répugne moins aux malades, et mérite d'être adopté, 
non-seulement comme propre à agir spécialement contre le 
ténia,mais aussi contre les autres espèces de vers intestinaux. 

Je n’eus qu’une seule fois occasion d'employer l'écorce 
de racine de grenadier contre le ténia. Ce fut en 1828, chez 
M. Seaton, officier anglais en résidence à Calais. Ce ma- 
lade, âgé de quarante-six ans, d’un tempéramment Iymphati- 
co-nerveux, d'une taille élevée, d’une constitution grêle, 
avait été atteint, à l'âge de vingt-neuf ans, d'une fièvre 1y- 
phoïde. La production de son ténia datait, disait-il, de la 
convalescence longue et pénible de cette dernière maladie. 
Un sentiment d'engourdissement ou de fourmillement pres- 
que continuel au-dessous de l’ombilic, des mouvements on- 
dulatoires, des élancements douloureux et instantanés dans 
les intestins, un appétit irrégulier et parfois vorace, de temps 
en temps une diarrhée muqueuse avec expulsion spontanée 
de morceaux de ténia; des spasmes vers l’épigastre avec 
efforts de vomissements, irritations nerveuses sympathiques 
et exaltation intellectuelle, auxquels succédait toujours 


202 


un état d’abattement et de somnolence : tels étaient les symp- 
tômes que présentait M. Seaton lorsqu'il vint me consulter. 
Il avait mis en usage, pendant plusieurs: années et à di- 
verses reprises, la fougère, la gomme-gutte, l'huile de théré- 
bentine, l'étain, l'huile de ricin et divers autres anthel- 
mintiques, sans autre effet que l'expulsion de portions plus 
ou moins longues du vers qui le tourmentait. 

Je ne pus me procurer une quantité suffisante d’écorce de 
racine de grenadier qu’au bout de trois semaines. Je lui en ad- 
ministrai 60 grammes en décoction dans un litre d’eau réduit 
à trois verres. Le malade, préparé par la diète et quelques la- 
vements, prit le premier verre à six heures du matin et le 
vomit dix minutns après. A six heures et demie, le second 
verre fut avalé et conservé, ainsi que le troisième, qui fut 
administré à sept heures et demie. Déjà des coliques s'étaient 
fait sentir, et bientôt deux selles eurent lieu sans qu'aucun 
symptôme nerveux se füt manifesté. Vers midi, le malade 
éprouvant des tranchées et des épreintes suivies seulement 
d'expulsion de mucosités, je me décidai à lui faire prendre, 
en lavement, une décoction de 20 grammes d'écorce de 
racine de grenadier dans 809 grammes d’eau réduits par 
l'éballition à 500 grammes environ. Un quart d'heure après 
cette injection, une garde-robe amena le ver tout entier. 
Il était assez épais, opaque, roulé en peloton, de la longueur 
de quatre mètres environ, et de l'espèce non armée. J’ai 
pu, à l’aide d'une forte loupe, distinguer les papilles laté- 
rales, et, entre elles, Ia protubérance indiquant le suçoir 
central de l'animal. 

Ce fait, que j'ai cru devoir rapporter, vient se joindre au 
grand nombre de ceux qui sont consignés dans les journaux 
de médecine, et qui prouvent incontestablement que l’écorce 
de racine de grenadier est, de tous les anthelmintiques indi- 
gènes connus, celui qui jouit au plus haut degré de la fa- 
culté de tuer le ténia {1}. C'est le succédanée du cousso. 

Dans le commerce de la droguerie on remplace quelque- 
fois la racine de grenadier par celle de buis ou d’épine- 
vinette. L'amertume de ces deux dernières racines suffit 
pour déceler la fraude. L'écorce de racine de grenadier 
indigène ou cultivé est tout aussi bonne que celle de gre- 
nadier sauvage; elle est plus efficace fraîche que sèche, 
bien que celle-ci réussisse dans la plupart des cas, lorsqu'on 
a eu la précaution de la faire macérer pendant vingt-quatre 
heures dans l’eau qui doit servir à l'ébullition. 


(4) Voyez Archiv. génér. de méd., t. vr, p.293.—t. vas, p. 453, 603.— 
x1V, p. 285, 374, G03.—xv, p. 4124.—xvi, p. 298.—xvrt, p. 430.—xvur, 
p. 483.— Journal gén. de méd., t. xxvir, 2e série, p. 329, etc. 


203 


GROSEILLER ROUGE. 


Grossularia hortensis (T 
_Ribes rubrum (L.) 


Cet arbrisseau, très-commun, est cultivé dans les jardins 
pour l'usage alimentaire de ses fruits. 


Préparations €ét doses. 
A L'INTÉRIEUR : Suc (A sur 3 ou 4 d’eau avec du sucre } pour 
boisson. 
Sirop (8 de suc sur 15 de sucre), en potions, limonade, etc. 
Gelée (parties égales de suc et de sucre). 


A L'EXTÉRIEUR : Gelée, en topique sur la brûlure ; suc étendu dans 
l'eau en gargarisme. 


Propriétés. 


Comme aliment et mangé en grappes, les groseilles rouges 
ou blanches sont très-salutaires dans les phlegmasies gastro- 
intestinales chroniques, les embarras des viscères désignés 
sous le nom d’obstructions, le scorbut, les affections cuta- 
nées rebelles. Ces fruits conviennent surtout aux jeunes 
gens, aux tempéraments sanguins et bilieux, dans les pays 
chauds et secs; chez les personnes faibles et délicates, 
elles troublent les digestions quand elles sont ingérées en 
trop grande quantité. La gelée, le sucre et l'acide que 
renferment les groscilles, les rendent nutritives. rafrai- 
chissantes el diurétiques. Leur suc, pris en limonade, est 
très-propre à appaiser Ja soif, er convient dans les fièvres 
inflammatoires, bileuses, putrides ; dans la gastrite, l'enté- 
rite, l’angine, la rougeole, Îla scarlatine, les phlegmasies 
des voies-urinaires, le scorbut aigu, le purpura hémorrha- 
grea, etc. 

Dans quelques contrées du nord, on fait sécher les gro- 
seilles rouges ou blanches sur des feuilles de papier, dans 
un four faiblement chauffé ou dans celui d'une cuisinière 
dont la grande chaleur a disparu. On les conserve dans des 
boites de bois ou de fer blanc, et l’on en use comme du thé, 
en en faisant infuser une pincée dans une suffisante quantité 
d’eau. Cette boisson, très-agréable au goût, est sudorifique, 
diurétique, et convient dans tous les cas où les groseilles 
fraiches sont employées. 

La gelée de groseille, appliquée immédiatement après une 
brûlure du premier ou du second degré, appaise la douleur, 
prévient l'inflammation ei le développement des phlyctènes. 


204 


* 

GUL. 

VERQUET. 
Viscum baccis albis (F.) 
Viscum album (L.) 

Cette plante parasite et toujours verte, pour laquelle les 
anciens Gaulois avaient un respect superstitieux, croîtsur le 
tronc et les branches du pommier, du chêne, de l’orme, du 
ülleul, du saule et de tous les arbres qui ne contiennent 
pas un suc laiteux ou caustique. Les tiges sont usitées. 


Préparaiions ef doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau. 
Poudre, de 2 à 42 gram. en bols, pilules, ou dans un liquide, 
dons les vingt quatre heures. 
Exliait aqueux ou vineux, de 4 à 8 gram. en pilules, potions, etc. 
A L'EXTÉRIEUR : en Cataplasmes. 
Propriétés. 


Les tiges de gui, inodores , d’une saveur visqueuse el un 
peu austère à l'état frais, d’une odeur désagréable et d’un 
goût amer et un peu âcre quand elles sont sèches, ont été 
vaniées commeantispasmodiques dans l’épilepsie et presque 
toutes les maladies convulsives. Pline, Matthiole, Paracelse 
ont préconisé son efficacité contre l’épilepsie. Dalechamp, 
Boyle, Koelderer, Colbatch, Cartheuser, Van Swieten, assu- 
rent en avoir oblenu de grands avantages contre cette redou- 
table maladie. Dehaen place le gui sur la même ligne que la 
valériane, et Boerhaave dit que le gui lui a souvent réussi 
dans la mobilité des nerfs et dans les convulsions. Colbatch, 
outre les succès qu'il en a obtenu dans l'épilepsie, prétend 
l'avoir employé avec avantage contre la chorée. Koelderer 
dit s’en être bien trouvé dans l'asthme convulsif et dans un 
cas de hocquet ; Bradley en loue les bons effets dans la para- 
lysie, l’hystérie et autres affections nerveuses. D’autres au- 
teurs ont vanié les propriétés du gui contre Ïa diarrhée et la 
dyssenterie, les pertes utérines, les écoulements hémorrhoï- 
daux, la goutte, la coqueluche, les toux rebelles, nerveu- 
ses, etc. 

D'un autre côté, Tissot, Cullen, Desbois de Rochefort, 
Peyrilhe, disent n’avoir point obtenu de résultats avania- 
geux de l'emploi de cette plante. Ces faits contradictoires, 
rapportés par des auteurs ‘également recommandables, sont 
une preuve de plus des difficultés de l'observation et de 
l'incertitude de l'expérience en thérapeutique. Toutefois, 
hâtons-nous de le dire, ces difficultés el cette incertitude 


205 


naissent bien plulôt des préoccupations de l'esprit que de la 
nature des choses soumises à nos investigations. Si l'on a 
trop légèrement adopté les assertions des uns, peut-être le 
scepticisme des autres, qui a fait tomber cette plante dans 
l'oubli, n’est-il pas mieux fondé. Souvent les premiers ont 
attribué au gui des résultats obtenus par des vomitifs et des 
purgatifs préalablement ou en même temps administrés, 
lesquels suffisent quelquefois seuls pour guérir certaines 
épilepsies. Les seconds, déçus dans leurs espérances, ont 
refusé à ce médicament des propriétés qu'un examen 
attentif et des expérimentations cliniques bien faites eussent 
réduites à:ce qu’elles ont de réel. 

Le gui exerce une action excitante sur le tube digestif, et 
provoque même quelquefois des éyacuations alvines. La 
manière dont on lJ’administre ‘doit influer, suivant la 
remarque judicieuse de Guersent (Dict. des Scienc. méd., 
4. XIx), sur ses effets immédiats. Tous les principes actifs de 
la plante résident, dit cet auteur, dans l'écorce. Il faut, sui- 
vant Colbatch, cueillir le gui entier à la fin de l'automne, 
le faire sécher avec soin, le pulvériser et le renfermer dans 
un vase de verre hermétiquement fermé et déposé dans un 
lieu sec. Cette poudre est légèrement amère, nauséeuse et 
astringente ; eile produit, à la dose de 8 grammes par jour, 
des effets un peu toniques et excitants, et provoque souvent 
quelques selles. La décoction et l'extrait alcoolique de gui 
ne paraissent pas être aussi laxatifs que la poudre, et 
jouissent de propriétés toniques moins prononcées. On croit 
généralement que les baies sont laxatives ; cependant j'en ai 
avalé quinze sans éprouver le moindre effet. A l’occasion, 
je soumettrai cette plante à de nouveaux essais. 

A l'extérieur, on a employé les cataplasmes faits avec le 
gui ou ses semences pour calmer les douleurs de la goutte 
et comme résolutifs sur certaines tumeurs, l'œdème, etc. 

Les expériences de Cartheuser et de Colbatch ont prouvé 
que le gui de chêne, qui était celui que les druides choisis- 
saient, ne jouit pas de proptiétés plus remarquables que les 
autres ; l'arbre sur lequel il prend naissance n'apporte au- 
cune différence dans sa composition chimique. 


GUIMAUVE, 
Althea officinalis (T.) 
Althea officinalis (L.) 
Cette plante croît dans les lieux frais et humides de l’Ita- 
lie, de la France et de la Hollande ; on la cultive dans les 
jardins. Les racines, l'herbe et les fleurs sont employées. 


206 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Infusion et décoction des racines, des feuilles ou 
des fleurs, de 8 à 39 gram. par kilog. d'eau. 
Sirop (3 de racine sur 16 d’eau et 42 de sucre), de 30 à 400 gr. 
en polions. 
Poudre (de 6 à 45 gram },en bols, pilu'es, pâte. 
A L'EXTÉPIEUR : Décoction des feuilles ou des racines, pour baïns 
locaux, fomentations, lotions, lavements, gargarismes. 


Propriétés. 


La guimauve, très-riche en mucilage, est émolliente et 
adoucissante. On l'emploie journellement à l'intérieur et à 
l'extérieur dans le traitement de toutes les phlegmasies 
aiguës, telles que la toux, les catharres, l’angine, la gas- 
trite, les hémorrhagies actives, la péritonite, les empoi- 
sonnements produits par des substances âcres et corrosives, 
dans les irritations dues à la présence des corps étrangers, 
etc. J'ai remplacé, depuis long-temps, tousles mucilagineux 
exotiques par la racine de guimauve ou par la graine de lin, 
que l’on peut se procurer partout et à peu de frais. Je les 
préfère à la gomme arabique : elles sont plus adoucissantes 
et n’ont pas, comme cette dernière, l'inconvénient de causer 
Ja constipation. La mauve et la passe-rose ou rose trémière, 
peuvent être employées comme la guimauve et &ans les 
mêmes Cas. , 

[L’infusion de racine de guimauve, préparée en jetant de 
l'eau bouillante sur Ja racine lavée, et dont on a ôté la 
pellicule afin de n’avoir pas un produit trop épais, est em- 
ployée à l’intérieur ; elle doit être prise à une douce tempé- 
rature (20 à 30 degrés cent.) ; trop froide ou trop chaude, 
elle deviendrait excitante. La décoction, épaisse, trouble, 
n’est ordinairement employée qu’à l’extérieur en fomenta- 
tions, lotions, bains, lavements, et pour délayer la mie de 
pain, le son ou Ja farine de graine de lin dansla préparation 
des cataplasmes ; on use de la décoction des feuilles de la 
même manière. Vaidy rapporte qu'il a vu souvent, lorsqu'on 
appliquait la décoction de ces feuilles sur des phlegmons, 
la partie se couvrir d’une multitude de petits boutons qui 
finissaient par suppurer, ce qui n’arrivait pas lorsqu'on 
employait une autre décoction émolliente, par exemple, 
comme celle de graine de lin (Dact. des Scienc. méd., t. xix, 
p. 515). C’est un fait que j'ai pu constater, et qui à lieu aussi 
quand on se sert de l'infusion de fleurs fraîches de sureau. 

Afin de favoriser la dentition, on donne à mâcher aux 


207 


enfants une racine de guimauve séchée. Ce moyen convient 
mieux que les corps durs que l’on à coutume d'employer 
en pareil cas. On s’en sert aussi en chirurgie, comme de celle 
de gentiane, pour dilater les conduits fistuleux après l'avoir 
taillée en petits cylindres, qui, introduits dans les sinus, se 
gonflent et agissent ainsi à la manière de l'éponge préparée, 
mais avec moins d'efficacité que cette dernière. 

On trouve la racine de guimauve, dans le commerce, avec 
ou sans épiderme ; cette dernière est très-blanche lorsqu'elle 
est bien préparée, et porte le nom de guimauve ratissée. A 
cause de son mucilage, cette racine est long-temps à sécher ; 
les herboristes de Narbonne hâtent cette dessiccation en la 
passant au four ; quand elle subit une chaleur trop intense, 
elle roussit. D’après M. Adam, de Metz (Journ. de pharm., 
déc. 1835), on tirerait de Nimes, pour vendre dans le com- 
merce, sous le nom de racine de guimauve, celle de l'alcée 
(malva alcea L). ] 


HÉPATIQUE DES FONTAINES, * 


Lichen petreus latrifolius, sive hepatica fontana (T.) 
Marchantia polymorpha (L.) 


Cette plante croît sur les bords des fontaines et des puits ; 
elle s'attache aussi aux arbres et aux rochers, et forme 
comme une espèce d’écaille. Toute la plante est employée. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoclion, de 30 à 60 grammes par kilog. d'eau. 
A L'EXTÉRIEUR ; Toule la plante, en cataplasme. 


Propriétés. 


L’hépatique des fontaines était regardée par les anciens 
comme propre à combattre les maladies du foie; de là le nom 
qu’elle porie. Quoique rarement employée, on la regarde 
encore aujourd'hui comme diurétique, dépurative et déter- 


sive. Lieutaud dit que son usage ne paraît pas sans succès 


dans les embarras du foie et des autres viscères, et même 
dans la phthisie, Ce médecin la conseille aussi comme dé- 
purative dans les maladies chroniques de la peau. 

« M. Short, médecin de l’infirmerie royale d'Edim- 
bourg, assure avoir employé avec beaucoup de succès l’hé- 
pathique à l’extérieur pour faire couler les urines, etamener 
par là la guérison de différentes espèces d'hydropisies. Ce 


208 


diurétique ne lui a pas toujours réussi; mais jamais il n’a 
déterminé d'accidents fàcheux. Voici la manière dont il 
l'emploie : Il fait bouillir pendant douze heures deux poi- 
gnées de feuilles d’hépatique dans Fleau; il les broie 
ensuite à l’aide d’un pilon, y joint une quantité égale de 
farine de graine de lin, et en forme un cataplasme qu’il étend 
sur le ventre des malades. Ce cataplasme est renouvelé deux 
fois par jour; il produit une abondante transpiration , et 
augmente considérabiement la sécrétion des urines. Si, au 
bout de quelques jours, on n'en obtient pas d'effet, il est 
inutile d'en continuer l’usage plus long-temps. Les obser- 
vations que cite M. Short sont extrêmement remarquables. 
Le 20 septembre il appliqua un cataplasme semblable sur le 
ventre d’une femme hydropique. Dès la nuit même la sécré- 
tion des urines fut considérablement augmentée ; elle rendait 
chaque jour environ dix livres d'urine, et à la fin du mois 
de cécembre il n’y avait plus de traces d’hydropisie. Dans 
les autres chservations citées par M. Short, l'hépatique eut. 
un succès à peu près semblable. Le seul inconvénient qui 
résulte de l'application de ces cataplasmes est de jeter les 
malades dans une grande faiblesse, qui force de temps à 
autre à en suspendre l’emploi. Pendant tout le temps de la 
cure, ce médecin ne donne aucun médicament à l'intérieur ; 
il se borne à soutenir les forces avec des bouillons de bœuf 
et de poulet {Journ. de méd. et de chir. prat., &. 1v, p. 103).» 

J'ai employé, dans deux cas d’anasarque, les cataplasmes 
d'hépatique. Dans le premier cas, il n’a produit aucun efiet 
sensible ; dans le second, la sécrétion urinaire a été consi- 
dérablement augmentée ; mais cel effer ne s’est soutenu que 
pendant cinq à six jours. J'ai alors essayé l'usage interne 
de cette plante; j'en ai fait broyer et finfuser 60 gram. daus 
1 kilog. de vin blanc. Cent grammes de ce vin, administrés 
deux fois ‘par jour, produisirent un effet diurétique pro- 
noncé; au bout de quinze jours l’infiltration séreuse du tissu 
cellulaire était entièrement dissipée. Cette infiltration était 
survenue,chez ur manouvrier âgé de 50 ans, à la suite d’une 
fièvre quarte contre laquelle il n'avait employé, à*diverses 
reprises, qu’une forte décoction de café avec addition de suc 
de citron et d'eau-de-vie. Je ferai observer, à celte occasion, 
que lorsqu'on supprime les accès des fièvres intermittentes 
automnales, sans , au préalable, avoir ramené les organes 
digestifs à un état favorable, les embarras viscéraux et sur- 
tout l’engorgement de la rate, l'œdème et l'hydropisie sont 
fréquemment la conséquence de cette pratique irrationnelle. 


209 


J'ai vu l’engorgement splénique, que je considère comme effet 
et non comme cause, subsister long-temps après Ja cessation 
des accès de fièvre. 

L'hépatique des fontaines peut être récoltée dans toutes 
les saisons, mais préférablement dans l été, la plante étant 
alors mieux nourrie. Après en avoir séparé les feuilles 
mortes, on la fait sécher à l’étuve ou au soleil, et on Ia con- 
serve dans un lieu sec, à l'abri du contact de l'air. 

Le docteur Levrai-Perrotton a employé avec succès la 
décoction concentrée du marchantia dans des cas de gravelle 
qui avaient résisté à divers traitements. « Le premier malade, 
à peine âgé de douze ans, souffrait depuis deux ans. Le 
marchantia fut conseillé en désespoir de cause; le malade en 
but un litre et demi par jour. Cette simple médication, suivie 
pendant quelque temps, réussit parfaitement, et aujourd'hui 
M. N.... qui est âgé de vingt-huit ans environ, n’a plus de- 
puis lors ressenti de douleurs néphrétiques ni rendu de 
graviers. 

Le second malade, âgé de quarante ans, était depuis Jong- 
temps atteint d’une dysurie presque continuelle, parfois 
accompagnée de douleurs atroces et qui ne se calmaient que 
lorsque les urines avaient amené quelques petits graviers. 
Après avoir prescr it (out ce que conseillent les livres, el sans 
le moindre succès, M. Perrotton en vint au marchantia 
conica; le malade en but deux litres dans les vingt-quatre 
heures. Sous l'influence de cette seule médication, les urines 
devinrent abondantes, sédimenteuses et soulageantes. Au 
bout de quelques jours, les douleurs avaient cessé. Dans 
les trois années suivantes, elles sont parfois revenues, 
quoique très-rares, et la décoction de marchantia les a 
promplement dissipées. Elles n’ont pas reparu depuis un an. 

Le troisième malade, âgé de quarante-six ans, a été sujet 
à des douleurs a arthritiques, auxquelles ont ensuite succédé 
des douleurs néphrétiques avec issue de graviers. Rien ne le 
soulageait. La décoction de marchantia a produit rapide- 
ment de si heureux effets, que par précaution le malade en 
a continué l’usage pendant deux mois. Six mois après, il 
n’y avait eu aucun retour des douleurs. 

Le quatrième malade, âgé de soixante ans environ, ren- 
dait depuis plusieurs années de petits graviers en urinant, 
et éprouvait une dysurie habituelle. Il était obligé de fuir la 
société, tant son mal était incessant. Au bout “de trois ou 
quatre jours de l'emploi de la décoction de marchantia, la 
dysurie avait cessé. Mais son pharmacien, ayant épuisé sa 
provision de marchantia, ce traitement fut forcément aban- 

14 


210 


donné, et tous les symplômes reparurent avec Ja même 
intensité que par le passé. Quelques jours après le malade 
put reprendre Ja bienfaisante décoction, qui répondit à som 
attente. Comme l’auteur rédigeait cet article au moment 
même où il traitait le malade, il ne peut donner l’observa- 
tion comme complète ; mais on peut espérer que la guérison 
aura lieu comme dans les trois précédentes. 

Le marchantia rampe dans les lieux humides, sur de vieux 
murs placés aux bords des ruisseaux, ou sur des roches 
calcaires infiltrées d’eau. Il doit nécessairement contenir cer- 
tains sels, de ceux peut-être qui ont une action dissolvante 
sur les calculs urinaires. Il a des propriétés diurétiques 
comme le nitre, la digitale. la scille et la pariétaire; car il 
augmente les urines. Mais il doit avoir aussi quelques prin- 
cipes différents des autres diurétiques, puisque ces derniers 
sont souvent impuissants dans des cas où il réussit. 

Depuis long-temps M. Ie docteur Gensoul, collègue de l'au- 
teur, emploie le marchantia comme diurétique ; il n’a qu’à 
s'en louer. Cette plante a été connue des anciens. Pollini dit 
d’elle : « Apud medicos olim 1n usw erat (marchantia) on 
morbis hepatis et vesicæ. » Les dictionnaires de médecine 
modernes l'ont oubliée. (Voire même la Pharmacopée uni- 
verselle, de Jourdan). 

Le marchantia employé par M. Levrat-Perrotton est le 
conica ; le marchantia polymorpha, ayant les mêmes habi- 
iudes, a les mêmes propriélés médicales. (L'Abeille médi- 
cale, année 184%, p. 35.) 


HÈTRE ,* 


FAU. 
Fagus (T.) 
Fagus sylvatica (L.) 

Le hêtre, connu de tout le monde, est un des plus beaux 
arbres de nos forêts ; il se plaît particulièrement sur les 
côteaux et au pied des montagnes. L'écorce et les fruits 
(faînes) sont usités. # 

Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Déroction de l'écorce , de 50 à 80 grammes pour 
un kilogramme d'eau. 
Jinile de faînes, employée comme celle d'olive, d'æillette, etc. 


Propriétés. 
L'écorce de hêtre, d'une saveur austère, est astringente ; 


211 


elle a été placée parmi les fébrifuges indigènes. Le docteur 
Fuhrmann. de Schoenfeld, dit l'avoir employé ée en celle qua- 
lité avec succès. « L’écorce, destinée à l'emploi médical, 
doit être récoltée sur des individus d’un ou deux ans au 
plus. On la donne sous forme de décoction, que l'on pré- 
pare avec 30 grammes {une once) d'écorce fraîche, ou 15 
gram. (4 gros) d'écorce sèche, pour 180 gram. (six onces) 
d'eau commune, que l'on fait réduire des deux tiers par 
l’éballition. Le décoctum, passé avec soin et édulcoré à vo- 
lonté, est administré tiède, en une seule prise, une heure 
avant l'invasion présumée de l'accès. Quelques observa- 
tions, recueillies par l’auteur, confirment l'efficacité de ce 
remède, et M. Fuhrmann ajoute qu'il considère cette écorce 
comme étant douée d’une propriété anti-pyrétique aussi 
prononcée que l’est celle du quinquina : il la regarde comme 
méritant la préférence sur ce dernier agent, en raison de la 
modicité de son prix. Du reste, dans l’emploi de ce nou- 
veau fébrifuge, les indications et les contre-indications sont 
les mêmes que pour l’écorce du Pérou HS dr des Comm., 
méd., prat. et de pharmacol., mar, 1842). » 

Desbois de Rochefort dit que l'écorce de hêtre, outre sa 
qualité astringente, recèle des propriétés apéritives et pur- 
galives ; donnée à haute dose, elle peut même, suivant cet 
auteur, provoquer le vomissement. À cause de cette diver- 
sité d'action on pourrait l’employer avec avantage dans des 
circonstances où d’autresfébrifuges seraient restés inefficaces. 
L'expérience prouve journellement que tel médicament de 
ce genre {sans en excepter le quinquina) est infructueuse- 
ment employé quand tel autre, en apparence moins éner- 
gique, répond complètement à l’attente du médecin.L’ecvrce 
de hêtre peut donc trouver sa place. La matière médicale 
n’est jamais trop riche pour lepraticien qui, sachant y puiser 
avec discernement, en fait une judicieuse application. 

Les fruits ou faînes offrent, après l'enlèvement de leur épi- 
derme, un parenchyme blanc, consistant, d'une saveur douce 
et analogue à celle des noisettes. Ils fournissent de l'huile 
jouissant de toutes les qualités des huiles grasses, et pou- 
vent être employée aux mêmes usages économiques et mé- 
dicinaux. Cettehuile, qui ne se coagule point par le froid, 
est un peu moins agréable ou goût que l'huile d'olives; mais 
elle a l'avantage, au lieu de rancir comme celte dernière, 
de s'améliorer avec le temps. 

Les faînes, mangées en trop grande quantité, causent 
l'ivresse. Le principe qui produit cet effet, que j'ai été à 
même d'observer plusieurs fois, est pen connu. 


212 


HIÈBLE, 


SUREAU HIÈBLE, PETIT SUREAU. n 


Sambucus humilior frutescens (T.} 
Sambucus ebulus (L.) 


Cette plante croît dans les champs et sur le bord des che- 
mins, dans toute la France. Les feuilles, les fruits, les graï- 
nes, et surtout l'écorce intérieure de la racine, sont usités. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Jnfusion vineuse ou décootion aqueuse de la racine 

ou de l'écorce, (412 à 50 gram. par kilog.), 30 à 400 gram. 

Sue exprimé des racines, de 6 à 42 grammes, et plus, selon l'effet 
qu’on veut produire. 

Rob préparé avec les baies, de 15 à 60 grammes. 

Semences contuses, de 4 à 12 grammes, en infusion dans du vin 
blanc où dans un autre véhicule, ou en électuaire. 

Infusion des fleurs dans l'eau, de 4 à 8 gram. par kilog. d’eau. 


À L'EXTÉRIEUR : Fleurs et feuilles, en décoction, cataplasme, etc. 
Propriétés. 


L'’hièble, exhalant une odeur vireuse analogue à celle du 
sureau, mais plus forte, dont les feuilles ont une saveur 
amère, très-nauséeuse et teignant la salive en rouge, est un 
purgatif drastique. Cette plante est en outre diurétique, 
sudorifique. On en obtieni d'heureux résultats dans la leu- 
cophlegmatie, et, en général, dans les hydropisies passives. 
La racine, l'écorce et la semence, sont plus particulière- 
ment employées comme purgatives ; les fleurs, comme celles 
de sureau, sont anodines et diaphorétiques à petites doses; 
les feuilles jouissent à peu près des mêmes propriétés que 
l'écorce; mais on les emploie le plus souvent à l'extérieur en 
forme de cataplasme contre les engorgements articulaires, 
lymphatiques, glanduleux, œdémateux. 

La plupart des auteurs ont avancé que dans l’hièble chaque 
partie de la plante jouit de vertus différentes. C'est 1à une de 
ces erreurs, comme tant d’autres, que lobservation et l’ex- 
périence détruisent chaque jour. Chaque partie de la plante 
a une activité plus ou moins grande selon que les principes 
qu’elle contient sont plus ou moins rapprochés , mais toutes 
exercent sur l'organisme des effets analogues, et qui se 
réduisent à une excitation plus ou moins remarquable, se 
manifestant, dans l'appareil digestif par le vomissement et 
la purgation, sur les voies urinaires, par la sécrétion 


ci de deb di mil 


213 


augmentée de l'urine, sur le système exhalant par l’aug- 
mentation de Ja transpiration. Les faits viennent à l'appui 
de cette opinion : les fleurs, en infusion dans l’eau, sont 
béchiques, diaphorétiques, expectorantes, et le suc de ces 
mêmes fleurs, à la dose de 4 à 8 grammes, offre un purgatif 
analogue aux follicules de séné par son action sur le tube 
intestinai. Le rob de baies d'hièble, étendu dans une grande 
quantité d’eau chaude, produit l'effet diaphorétique, tandis 
que, administré d’une manière plus concentrée, il agit sur 
les intestins et provoque Ja purgation. 

L’hièble est une de ces plantes dont on n'a pas assez 
étudié l’action au lit des malades. Chaque auteur a répété ce 
que ses prédécesseurs avaient eux-mêmes copié. Cependant 
cette plante mérite tonte Fattention des praticiens, et peut; 
ainsi que le sureau, avec lequel elle a Ia plus grande ana- 
logie, être d’une grande utilité dans la médecine rurale. 
J'emploie fréqueniment les fleurs en infusion théiforme, 
avec du miel, dans le catarrhe pulmonaire ; elles sont légè- 
rement stupéfantes, excitent la transpiration et l'expectora- 
tion d’une manière secondaire, c’est-à-dire, après avoir agi 
sur le système nerveux comme sédatives. 

Les semences et l'écorce intérieure agissent avec d'autant 
plus d'efficacité comme purgatives, qu'elles sont plus ré- 
centes. C’est dans l'écorce (surtout celle de la racine) que 
cette propriété est le plus énergique, bien que la racine ait 
été spécialement vantée comme hydragogue. Les feuilles 
jouissent à peu près des mêmes vertus que les autres parties 
de la plante; mais, comme nous l'avons dit plus haut, on 
les a particulièrement recommandées comme résolutives, 
sous forme de cataplasme, sur les contusions, les entorses et 
les engorgements lymphatiques et œdémateux. Cuites dans 
du vin, suivant Vermale {(observat. et recherch. de Chirurgq., 
pag. 81), elles dissipent les tumeurs des articulations pro- 
venantes de contusion, surtout si l’on y joint un bandage 
compressif. Dans ce cas, le bandage n'a-t-il pas, ainsi que 
Vaidy le fait observer {dict. des Scvenc.méd.), autant de part 
à la guérison que le remède ? 

J'ai plusieurs fois employé la racine et l'écorce d'hièble 
infusées dans le vin blanc à des doses plus ou moins élevées, 
selon l'effet que je désirais produire. J'ai eu à me louer de 
leur usage dans l’anasarque. Ce purgatif ne laisse pas 
à sa suite ce sentiment de chaleur et d'érosion que l'on 
observe souvent après l'administration de la plupart des dras- 
tiques résineux. La semence, pilée et mêlée avec du miel, 
m'a fourni un éleetuaire dont l'emploi m'a réussi à la dose 


214 


de 4 grammes prise en deux fois, à une heure de distance, 
le matin à jeun. Donnée en une seule fois, cette dose pro- 
voque quelquefois le vomissement. 

Chesneau (observat. médical., pag. 227) recommande 
l'emploi, dans les hydropisies, d’une huile mucilagineuse 
fournie par la semence d’hièble bouillie dans l’eau. La dose 
de cette huile, que je n'ai jamais administrée, est de 15 
grammes. Haller en a constaté l'effet énergique. 

Le rob d’hièble est une préparation infidèle; il perd la 
propriété purgalive par la vétusté. Quand Haller fui refusait 
celle propriété que Scopoli lui attribuaïit, on peut croire que 
tous les deux avaient raison. 

Les feuilles d’hièble et celles d’absynthe, cuites ensemble 
et appliquées sur le bas-ventre d’un enfant de dix-sept mois, 
ont procuré quatre évacuations alvines abondantes, avec 
expulsion de six lombries vivants. J'ai employé la semence 
verte d’hièble, pilée et mêlée de la même manière, avec de 
l'absynthe et un peu d’ail, chez un petit garçon de l'âge de 
deux ans. Ce topique a déterminé trois selles copieuses et 
la sortie de trois ascarides Jlombricoïdes, et d’une grande 
quantité d’ascarides vermiculaires. 

Je crois inutile de donner ici la longue énumération des 
maladies contre lesquelles on a recommandé l'hièble et ses 
diverses préparations. Les effets physiologiques de cette 
plante vraiment utile, étant bien connus, il est facile, sans 
lui assigner une action imaginaire et spécialement adaptée 
à tel ou tel cas, d'apprécier les circonstances où elle convient. 
Signaler l'hydropisie, les dartres, l’épilepsie, le rhumatisme, 
l’arthrite chronique, les obstructions des viscères et beau- 
coup d’autres maladies dissemblables, comme pouvant être 
traitées avec succès par l’hièble, c'est dire d’une manière 
moins simple qu’on doit l’employer, avec les modifications 
convenables, dans toutes les affections qui réclament l’ad- 
ministration des purgatifs drastiques, des diurétiques ou 
des diaphorétiques. 


HOUBLON. 


Lupulus (L.) 
Humulus lupulus (T.) 


Cette plante croît spontanément dans toute l'Europe, et 
se trouve ordinairement dans les haies ; on la cultive pour 
la préparation de la bière. Ses fruits, ses sommités et ses 
racines sont usités. | 


215 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction ou infusion , de 15 à 60 grammes par 

kilogramme d’eau. 

Extrait par infusion (4 sur 4 d'eau) , 4 à 4 gram. en bols, pilules 
ou dans du vin. 

Extrait aqueux des racines (4 sur 4 d’eau), 75 cent. à 5 gram. 
en pilules, etc. 

Suc, de 10 à 50 grammes. 

Teinture alcoolique, de 4 à 6 gram. en potion, comme tonique et 
narcotique. 

Poudre (assez rarement emp'oyée), de 4 à 2 gram. en pilules ou 
dans le vin. 


A L’EXTÉRIEUR : Extrait, À sur 5 d’axonge, pour onguent. 
Propriétés. 


Cette plante, d’une odeur forte, d’une saveur amère, est 
tonique, un peu narcotique, diurétique et diaphorétique. 
On l’emploie dans les affections scrofuleuses, le rachi- 
tisme, le carreau, les écoulements muqueux atoniques, 
J'atonie des voies digestives, les affections vermineuses, les 
hydropisies passives, les eachexies, le scorbut, et quelques 
maladies de la peau. 

Le houblon est souvent employé dans les campagnes. C’est 
un excellenttonique-fébrifuge contres les fièvres automnales. 
Je l’administre en infusion ou en décoction dans l'eau, à 
laquelle je mêle quelquefois une certaine quantité de vin. 
J’emploie ordinairement les cônes ou fruits. Les lavements 
de décoction de cônes de houblon sont vermifuges. C’est 
presque toujours sous celle forme que je l’administre aux 
enfants, surtout lorsqu'il existe des ascarides vermiculaires. 

Les affections lymphatiques et scrofuleuses, le dépéris- 
sement el la détérioration constitutionnelle résultant de l’état 
de pauvreté de la plupart des manouvriers de la campagne, 
réclament l'emploi fréquent des amers et surtout du houblon 
(cônes), que tout le monde connaît et prend sans répu- 
gnance. 

[Dans plusieurs pays du nord on emploie l'extrait aqueux 
de houblon en place d’opium. Cet extrait, de même que la 
teinture alcoolique, est narcotique à la dose de 1 gramme. 
(De Roches, dissert. inaugural. de humulo lupulo ; Edim- 
burg, 1803). 

Dans le nord de l’Europe on fait cuire les jeunes pousses 
de houblon, qu’on mange comme celles d’asperge,auxquelles 
on donne même la préférence comme ayant plus de saveur 
que ces dernières. Ces jeunes pousses, légèrement laxatives: 


216 


2 


et apérilives , sont ütiles dans les embarras des viscères 
abdominaux, la cachexie, etc. 

Les propriétés diurétiques et diaphorétiques attribuées au 
houblon ne peuvent dépendre que de sa vertu tonique, et 
sont par conséquent relatives à l’état d’atonie des reins ou 
de la peau. D'après les observations de Graunt, au rapport 
de Rai, il y aurait beaucoup moins de calculeux en Angle- 
terre depuis que le houblon est universellement employé à 
Ja fabrication de la bière. Toutefois, cet effet prouve d'autant 
moins une propriété spéciale contre la formation de la pierre, 
et confirme d'autant plus notre asserlion, que très-souvent, 
dans les brasseries, la fraude substitue au houblon les feuilles 
de buis, le trèfle d’eau, l'absynthe, la petite centaurée, une 
petile quantité de quassia amarra, etc. 

Suivant Coste et Willemet {essais de mat. méd. 2ndigq.} la 
racine de houblon peut être substituée à la salsepareille 
comme ayant toutes les vertus de cette dernière. En signalant 
cette substitution dans le commerce, où Ja cupidité les avait 
devancés dans l’art de remplacer les substances exotiques, 
ces auteurs s'expriment ainsi :« Depuis environ douze ans, 
un herboriste très-entendu, associé à une femme également 
intelligente en cette partie, débitaient et vendaient dans 
notre dépariement une racine longue, rampante, revêtue 
d'une écorce noirâtre, brune ou rougeâtre, blanche en 
dedans, se fendant facilement, dont la grosseur excède quel- 
quefois la plume d'oie Ja plus forte, d’un goût ligneux et 
légèrement douceâtre.lls en faisaient de petits fagots à l’imi- 
tation de la salsepareïlle des droguistes, et la commercçaient 
pour cette racine médicale, avec laquelle la leur avait beau- 
coup de ressemblance. » Ayant reconnu, après bien des 
recherches, que cette racine n’était autre que celle de hou- 
.blon, Coste et Willemet l’'employèrent dans tous les cas de 
dartre, de gale opiniâtre, et autres maladies cutanées. Ils 
assurent qu'il n’est aucun des effets qu’on attribue et qu’ou 
reconnait à la salsepareille, que celle-là n’ait opérés sous les 
yeux des médecins qui les ont prescrites, et que l'identité des 
succès n’a jamais engagé à se douter de cette substitution. 

Les feuilles et les sommités de houblon, appliquées sous 
forme de cataplasmes, ont été vantées comme résolutives 
dans les engorgements œdémateux, les tumeurs froides, et 
pour appaiser les douleurs arthritiques. Simon Pauli rap- 
porte que, de son temps, on employait beaucoup le houblon 
à l'extérieur, après lavoir fait bouillir dans la bière, et qu’on 
l’appliquait en fomentations pour appaiser les douleurs cau- 
sées par les accès de goutte, les luxations et les contusionr 


217 


Swediaur faisait usage de l’onguent de houblon pour calmer 
les douleurs du cancer. M. Barbier n’en a point obtenu 
cel effet. 


LUPULINE.—LuruLn. 


La lupuline ou lupulin est le principe actif du houblon 
découvert par M. Yves, et que la plupart des auteurs regar- 
dent comme le produit d'une sécrétion végétale. On l'obtient 
en effeuillant, et en agitant sur un tamis très-fin, les cônes 
femelles du houblon récoltés depuis une année. On en sépare 
la poudre ainsi obtenue, et par des lavages et des décanta- 
tions alternatives, on retire le sable qui s’y trouve mêlé; on 
décante ensuite cette poudre et on la renferme dans des 
flacons bien bouchés, où elle se conserve pendant plusieurs 
années. Des cônes de houblon bien conservés fournissent à 
peu près un dixième de lupulin. 


Préparations eé doses, 


A L'INTÉRIEUR : Poudre de lupulin, de 50 cent. à 4 gramme par 
fractions dans les vingt-quatre heures, en pilules ou dans un 
liquide. 

Teinture (4 sur 2 d'alcool), 50 cent. à 2 gram. en potion. 
Sirop (4 de teinture sur 7 de sirop simple), de 15 à 50 grammes 
en potion. 


A L'EXTÉRIEUR: Pommade (4 sur 5 d'axonge), comme calmant. 
Teinture, en frictions, à la dose de 2 à 5 grammes. 


Froprieiés, 

Le lupulin passe pour être à la fois aromatique, tonique 
et narcolique, propriétés dont, suivant Yves, aucun autre 
médicament n'offre l’heureux concours. Son action narco- 
tique a paru à cet auteur d'autant plus précieuse qu’elle 
n’est accompagnée ni de constipation , ni d’affaiblissement 
du ton de l’estomac, comme celle de l’opium. A petite dose, 
le lupulin diminue la fréquence du pouls ; à plus forte dose, 
à 1 gram. ou { gram. 50 centig., par exemple, il détermine 
des nausées, de la céphalalgie, des étourdissements, l’en- 
gourdissement des membres. Au reste, ce principe actif du 
houblon convient dans tous les cas où ce dernier est indiqué. 
M. Barbier l’a trouvé efficace dans les fièvres intermittentes. 

La pommade de lupuline, préférable à celle de houblon, 
est employée comme calmante sur les ulcères cancéreux, les 
hémorrhoïdes douloureuses, etc. 


[A 


218 


HOUX. 


lex aculeata Eaccifera (T.) 
lex aquifolium (L.) 


Le houx s'offre à nos yeux partout, dans les bois, dans les 
haies, etc. Les feuilles, les racines et les fruits sont usités. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Décoction des feuilles fraîches ou sèches, de 30 
à 60 grammes par kilog. d’eau. 
Vin (! de feuilles sur 24 de vin blanc), de 100 à 200 grammes. 
Poudre , de 4 à 12 grammes dans l’eau ou dans le vin blanc. 
Extrait, de 2 à 4 grammes. 
st 40 à 42 comme purgatives, en macération pendant douze 
ieures. 


A L'EXTÉRIEUR: Feuilles pilées-en cataplasmes, décoction en lave- 
ment. 


Propriétés. 


Le houx est tonique et diurétique ; on l'a proposé comme 
fébrifuge. Les baies sont âcres, vomitives et purgatives. J'a 
employé inutilement les feuilles de houes, comme fébrifuges, 
dans quelques fièvres intermiltentes. Je suis donc porté à 
croire que c’est à tort que quelques praticiens les ont crues 
propres à être substituées au quinquina. 

[ M. Chomel (Acad. de méd., séance du 19 janv. 1830), 
qui a employé la poudre des feuilles de houx à l hôpital de 
la Charité, n’en a obtenu aucun résultat favorable. Cepen- 
dant d’autres thérapeutistes ont eu à se louer de son usage. 
Durande, médecin de Dijon, a rapporté plusieurs cas de 
guérison par leur emploi quand les fièvres avaient résisté au 
quinquina. Le docteur Rousseau, dans un écrit publié en 
1831, sur ce fébrifuge indigène, et qui contient un assez 
grand nombre d’ observations, a confirmé cette opinion. Cet 
auteur rapporte non - seulement ses propres observations, 
mais aussi celles de Reil, des docteurs Constantin, de Roche- 
fort, Raynaud, de Toulon : Delormel , de Paris, elc., etc. 
M. Magendie, chargé par l’Institut de vérifier les faits avan- 
cés par M. E. Rousseau, a expérimenté sur treize femmes 
atteintes de fièvres intermittentes de types divers, et avec 
toutes les précautions propres à s'assurer de l'effet exclusif 
du médicament. Il leur a donné des feuilles de houx à Ja 
dose de 4,8 etmême 15 grammes par jour, soit en décoction 
dans l’eau, soit en macération dans le vin. Toutes ces femmes. 
ont été guéries. En général, les accès n’ont pas cessé brus- 


219 


guement, comme il arrive par l'emploi des préparations de 
quinquina ; ils se sont toujours plus ou moins prolongés ; 
cependant, dans aucun cas, la fièvre n’a résisté , et a été, 
au contraire, guérie après vingt jours de séjour à l'hôpital. 

Les observations que nous venons de citer en faveur des 
feuilles de houx employées comme fébrifuges, ayant été 
recueillies par des hommes dignes de foi, sont de nature à 
appeler l'attention des médecins dont les efforts tendent à 
simplifier les moyens thérapeutiques et à les mettre à la 
portée du pauvre. Je me propose d’essayer de nouveau ce 
fébrifuge indigène sur un plus grana nombre de fiévreux, et 
d’en observer soigneusement les effets. Les fébrifuges ne 
sauraient être trop nombreux; car tel d’entre eux qui échoue 
dans une circonstance, réussira dans une autre où divers 
moyens auront été employés inutilement. 

On administre les feuilles de houx, dans les fièvres inter- 
mittentes, 1° en décoction, à la dose de 15 grammes dans 210 
à 300 grammes d’eau, réduite à moitié, passée et adminis- 
trée en une seule fois, deux heures avant l'accès, pendant 
huit, quinze jours et même plus, lors même que la fièvre a 
cédé aux premières doses; 2° en substance, à la dose de 4 
à 12 grammes, macérée à froid dans du vin blanc, donnée 
deux ou trois heures avant l'accès, et répétée quatre, cinq, 
six fois et plus, suivant les cas. En extrait, pris en nature 
ou sous forme pilulaire, dont on peut porter la dose à six 
grammes lorsque la fièvre persiste. En lavements, à la dose 
de 15 grammes de feuilles fraîches ou sèches de houx dans 
une quantité d’eau nécessaire. Suivantle docteur Constantin, 
à qui ce mode d'administration est dû, ces lavements ont 
l’avantage de procurer des gardes-robes assez abondantes, 
sans troubles ni coliques. 

Werlhooff, Reil et M. E. Rousseau, ont, en outre, employé 
avec succès les feuilles de houx dans les affections rhuma- 
tismales et goutteuses. Dodonée qui, comme tous les humo- 
ristes de son temps, attribuait à chaque purgatif une action 
spéciale, regardait les baies de houx comme propres à éva- 
cuer les matiéres pituiteuses. Ces baies, que j'ai employées 
deux fois, ont un effet analogue à celles de nerprum, et 
peuvent être employées dans les cas où ces dernières sont 
indiquées ; cependant je les crois un peu plus âcres. 

La glu, substance pariiculière qu’on retire de la seconde 
écorce du houx pour différents usages domestiques, a été 
recommandée dans plusieurs ouvrages de matière médicale 
comme émolliente, maturative, résolutive.] 

On considère, dans nos campagnes, les feuilles de houx 


220 


pilées et appliquées fraîches, comme un puissant résolutif 
dans les tumeurs blanches, les engorgements scrofuleux, 
l’œdème, etc. Je n'ai pas eu l’occasion de constater cette 
propriété. 

[L’Icraxe est le principe immédiat, la matière active et 
fébrifuge du houx. Elle se prescrit sous forme pilulaire à la 
dose de 30, 60 centigrammes, { gram. et même 2 grammes. 

Perir Houx, Houx FreLox, Fracon-Housson, myrthe 
sauvage des anciens (ruscus aculeatus). Le petit houx, sous- 
arbrisseau qui n’est pas de la même famille que le houx 
(asparaginées), croît dans presque toute la France; on le 
trouve surtout dans les départements dn centre, sur la lisière 
des bois montueux et couverts, dans les haies ; onemploie 
sa racine. Elle est au nombre de celles dites apéritives 
mineures, et entre dans le sirop des cing racines. Sa pro- 
priété diurétique est généralement reconnue. On l’emploie 
en décoction dans les hydropisies, la gravelle, les engorge- 
ments viscéraux atoniques, l’ictère, etc. Les baies, dont la 
saveur est douceâtre , jouissent, dit-on, des mêmes proprié- 
tés, bien qu'elles ne soient pas usitées. Les jeunes pousses, 
qu'on mange quelquefois comme celles d’asperge, sont aussi 
diurétiques. En Corse, on torrélie les graines de petit houx 
pour remplacer le café, et on les considère comme se rap- 
prochant beaucoup de ce dernier.] 


HYSSOPE, 


OU HYSOPE. 
Hyssopus officinarum (T.) 
Hyssopus officinalis (L.) 
Cette plante croît spontanément en Allemagne , en Italie, 


sur les côteaux de nos départements du midi ; on la cultive 
dans les jardins. Les sommités et l’herbe sont usitées. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Infusion à vase clos, de 8 à 45 gram. par kil. d'eau. 
Eau distiliée (4 sur 4 d’eau), de 50 à 100 gram. en potion. 
Sirop (4 sur 40 d’eau et 46 de sucre), de 50 à 60 gr. en potion. 


A L'EXTÉRIEUR : Décoction, cataplasmes. etc. 
Fropriéiés. 


L'hyssope est culivée dans tous les jardins de nos fermes. 
L'odeur forte, pénétrante et aromatique de cette plante, son 
goût amer et camphré, annoncent son énergie. Son usage, 


221 


comme expectorant dans l'asthme humide des vieillards, est 
populaire dans nos campagnes. On la prend en infusion avec 
du miel; elle est employée dans toutes les affections bron- 
chiques et pulmonaires, lorsque trop d'irritation n’en contre- 
indique pas l'usage. Pour en modérer l’activité, on lui associe 
souvent les mucilagineux , telles que Ics fleurs de mauve, 
de guimauve, de bouillon blanc, etc. 

[Comme possédant toutes les propriétés inhérentes aux 
plantes aromatiques etbalsamiques, l’hyssope peut être utile 
dans tous les cas où il s’agit d’exciter les fonctions de Ja vie. 
On l’a donnée avec succès dans la débilité des voies diges- 
tives, les coliques venteuses, l’inappétence par atonie, la 
gastralgie, l’aménorrhée asthénique, la chlorose, les rhuma- 
tismes d’ancienne date, les exanthêmes aigus chez les sujets 
faibles, certaines affections calculeuses avec inertie des reins. 
C'est ainsi que cette plante a pu être considérée par les au- 
teurs comme stomachique, diurétique, sudorifique, etc., 
selon les dispositions des sujets etles circonstances morbides 
qui en favorisent l'action locale. C'est aussi à ses propriétés 
excilantes qu'il faut attribuer l'effet anthelmintique rapporté 
par Roseinsiein, dans un cas où son usage détermina l’ex- 
pulsion d'un grand nombre d’ascarides lombricoïdes ; il agit 
ici tout-à-fait comme les sommités de romarin et d'auronne, 
qu'on emploie aussi comme vermifuges dans nos campagnes. 

A l'extérieur, l'hyssope est tonique et résolutive. On fait 
résoudre promptement les échymoses des paupières et de 
l'œil, par l'application d’un sachet d'hyssope pilée et bouillie 
dans l’eau ; on fomente avec l’eau sur le sachet appliqué. 
J'ai vu employer ce moyen avec succès. Il est évident que ce 
résolutif peut convenir dans les contusions des autres parties 
du corps. Son analogie avec le camphre explique ses effets. 

Je me sers quelquefois de l’hyssope pour aromatiser mes 
formules indigènes. C’est un tonique diffusible que je joins 
aux amers dans la débilité d'estomac, dans les fleurs blan- 
ches, les affections vermineuses, etc. 


1°: 


Taxus (T ) 
Taxus baccaia (L.) 


Cet arbre, à feuilles persistantes, croît spontanément sur 
les montagnes de l'Italie, de la Suisse et des départements 
du midi dela France. On le cultive partout dans les jardins. 


72 


Propriétés. 


Galien, Pline, Dioscoride, Matthiole, regardent Vif 
comme ayant des qualités délétères. Jean Bauhin affirme 
que des animaux ont péri après avoir mangé des feuilles dif. 
On a été jusqu’à dire que l'ombre de cet arbre pouvait don- 
ner la mort. Rai assure que les jardiniers employés à tondre 
un if très-touffu du jardin de Pise, ne purent rester plus 
d'une demi-heure à faire ce travail sans être atteints de 
violentes douleurs de tête. Bulliard, au contraire, s’est tenu 
long-temps, et dans les grandes chaleurs, dans des lieux 
plantés d’ifs nouvellement taillés, sans avoir éprouvé la 
moindre incommodité. Gérard, botaniste anglais, dit aussi 
s'être souvent endormi à l'ombre de l'if sans ressentir de 
mal de tête ni aucune autre incommodité, et en avoir mangé 
plusieurs fois les fruits sans qu’il en fut résulté le moindre 
dérangement dans ses fonctions ordinaires. D'un autre côté, 
une jeune fille de vingt-six ans, au rapport de Harmand de 
Montgarny, s'étant endormie un soir sous un if, y passa 
toute la nuit; le lendemain, à son réveil, son corps était 
couvert d’une éruption miliaire très-abondante, et pendant 
les deux jours qui suivirent, elle demeura dans une sorte 
d'ivresse. Suivant l’auteur que nous venonsde citer (observat. 
sur l'if, journ. de méd., 1790, vol. 81, p. TT et swiv.), l'ex- 
trait ou la poudre de l'écorce ou des feuilles, à forte dose, 
produit des nausées quelquefois suivies de vomissements ; 
une diarrhée ordinairement copieuse, accompagnée de 
tenesme ; des vertiges momentanés, un assoupissement de 
quelques heures ; la difficulté d’uriner , une salive épaisse, 
salée et quelquefois âcre ; des sueurs gluantes, fétides, avec 
une vive démangeaison à la peau; un engourdissement avec 
une sorte d'immobilité dans les extrémités. 

Tout ce qui a été dit de l’if tend à faire croire que cet 
arbre doit être mis au rang des poisons. Îl est certain, toute- 
fois, que dans nos contrées les fruits sont dépourvus des 
qualités délétères contenues dans les feuilles et les rameaux. 
Ils causent tout au plus une légère diarrhée lorsqu'on en 
mange avec excès. Percy (Preuves ultérieures de l'innocwité 
des buies d'if, etc., journal de méd., année 1790, vol. 
83, pag. 226 et suiv.), qui en a étudié les effets, les a 
reconnus adoucissants, béchiques, laxatifs, et en faisait pré- 
parer un sirop et une gelée qu'il donnait par cuillerées dans 
les toux chroniques, la coqueluche, la gravelle , le catarrhe 
de vessie, elc. 1 

Trois malades de périneumonies catarrhales , et toussant 


| 


223 


encore avec effort, reçurent beaucoup de soulagement de 
l'usage du sirop donné le soir en se couchant. Une femme 
hydropique , ayant une toux sèche que rien n'avait pu cal- 
mer,n'’en fut presque pas tourmentée tant qu’elle put prendre 
du sirop de eupule d'if, et elle futen même temps délivrée de 
coliques aiguës que lui avaient laissées les purgatifs hydra- 
gogues dont elle avait fait un long usage. Une autre femme, 
souffrant beaucoup de tranchées au dixième jour de ses cou- 
ches, but du sirop et fut guérie. Une troisième, tourmentée 
de douleurs hémorrhoïdales, et habituellement constipée, 
recouvrait la liberté du ventre chaque fois qu’en se mettant 
au lit elle avalait une cuillerée de gelée pure. Un officier, sujet 
à la gravelle, et souffrant beaucoup, rendit copieusement des 
urines glaireuses, et fut promptement rétabli après avoir pris 
trois ou quatre onces de sirop. Enfin, deux particuliers, 
affectés de catarrhes à la vessie, dès les premiers verres de 


gelée fondue dans de l’eau tiède, urinèrenr avec plus de 


facilité et se crurent quittes de leur maladie après avoir con- 
1inué cette boisson pendant une quinzaine. 


IMPÉRATOIRE. 


Imperaloria alpina maxima (T.) 
imperatoria ostrutrium ([L..) 


Cette plante croît dans les pâturages des montagnes, aux 
lieux ombragés, dans toute la France. On emploie ses racines. 
Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Dnfusion, de 45 à 50 gram. par kilog. d'eau. 
Poudre, de 1 à 5 gram. en bols, pilules électuaires, ‘potion. 
Eau distillée, de 30 à 100 grammes en potion, 


A L'EXTÉRIEUR: En cataplasmes, en poudre, en pommade avec 
l'axonge. 


Propriétés. 


L'impératoire , exhalant dans l’état frais une odeur forte- 
ment aromatique, d'une saveur âcre, amère, désagréable, 


“est un tonique excitant employé dans l’inappétence, les fla- 


tuosités, les coliques venteuses causées par la débilité des 
voies digestives ; dans les fleurs blanches, les embarras ato- 
niques des viscères, l'asthme humide, la néphrite calculeuse 
sans irrilation, ec. Baglivi l’'employait dans les fièvres 
putrides. 

[ Lange attribue à l impératoire la même efficacité qu’au 
quinquina dans le traitement des fièvres intermittentes , et 


224 


particulièrement dans celui des fièvres quartes. Forestus dit 
que, machée , elle a fait cesser l’hystérie ; Cullen la vante 
comme un masticatoire très-utile dans l’odontalgie et dans 
les fluxions dentaires. En poudre, elle a été administrée avec 
succès par Decker, contre la paralysie de la langue.] 

Si l'impératoire n’est pas d'un usage plus fréquent, cela 
tient moins à son défaut de propriétés qu’au grand nombre 
de plantes analogues que nous possédons. Cette racine 
n’agit, comme tous les toniques excitanis, qu'en augmentant 
l'action des organes ; ses propriétés, comme celles de toutes 
les plantes du même genre, ne sont que relatives à l’état de 
relâchement et d'atonie dans lequel on suppose ces derniers. 
Il faut reléguer au rang des fables tout ce qu’on a débité sur 
les propriétés alexipharmaques et alexiières de cette plante, 
et sur sa vertu contre les venins. 


IRIS DES JARDINS, 


IRIS FLAMBE, IRIS OU FLAMBE GERMANIQUE ; 
LIRGUO, IRIS NOSTRAS. 


Iris vulgaris germanica, sive sylvestris (T.) 
Iris germanica (L.) 


Cette belle espèce d'iris vient spontanément sur les vieux 
murs, les toits de chaume, etc., et est cultivée dans nos jar- 
dins pour ses fleurs. On emploie la racine, regardée par 
M. Guibourt comme une tige souterraine. 


Préparations ef doses. 


A L'INTÉRIEUR : Suüc frais, de 45 à 60 grammes. 
Vin, 120 gram. de racines pour un demi kilog. de vin, en macé- 
ration pendant vingt-quatre heures. 
Poudre, de 4 à 2 gram. en pilules électuaires, etc. 
A L'EXTÉRIEUR : En poudre, comme sternutatoire, dentifrice, sialo- 
gogue, aromatique. 


Propriétés. 


L'iris germanique, à l’état frais, d’une odeur désagréable 
qui se change, par la dessiccation, en une odeur de violette, 
d'une saveur âcre, amère, nauséeuse, est purgatif, expecto- 
rant, excitant, anthelmintique, diurétique; on l’a conseillé 
dans l’hydropisie, l'asthme humide, le catarrhe humide, etc. 

[ Les observations de Rivière, de Ruffus et de Werlhoff 
attestent que le suc de la racine d'iris rostras a été employé 


225 


avec succès dans l’ascite, l'anasarque et autres hydropisies, 
soit primitives ou essentielles, qu'elle peut alors guérir , soit 
sympathiques ou liées à des lésions organiques, où il n’ap- 
porte qu'un soulagement résultant de l'évacuation des séro- 
silés. Ses succès, dans ces cas, tiennent évidemment à son 
action purgative. Montet (Hist.de l’Académ. des scienc.,1772, 
p.1 et 657), et Wauters (Repert. remedior. indigenor. exo- 
hors in medicinà substituendor. Gandæ, 1810, p.71 et 72), 
ont proposé de substituer la racine d’iris germanique à celle 
d'iris de Florence, qu’elle à plus d’une fois remplacée frau- 
duleusement dans le commerce : « Florentina nullà præro- 
galhivä gaudet præ nostrate, queæ illius varietas est, sive ad 
medicandum sive ad odorandum adhibeatur.…..decem ultimis 
anms quibus ruri medicinam feci semper indigenam hanc 
plantam æquali successu ac antea exoticam præscripsi. » 
(Wauters, loc. cit.) 

A dose altérante , la racine d'iris germanique en poudre 
a été administrée avec avantage dans l’asthme humide, dans 
le premier degré de la phthisie, la coqueluche, et en général 
dans tous les cas où l'ipécacuanha, donné à petites doses, 
est indiqué.] 

J’ai administré deux fois le suc frais de la racine d'iris 
germanique dans l’hydropisie, comme drastique. Les vives 
douleurs intestinales qu’elle a produites à la dose de 40 gr., 
accompagnées de vomissements et de selles abondantes, me 
l'ont fait, sinon abandonner, du moins réserver pour les 
tempéraments lymphatiques difficiles à émouvoir {1}. Nous 
possédons assez de purgatifs indigènes sans recourir à ceux 
dont les effets sont ou incertains où dangereux. L’iris agit 
d'une manière tellement directe sur la muqueuse gastro- 
intestinale, qu'elle y détermine un sentiment de chaleur 
âcre et brülante qui persiste encore long-temps après la ces- 
sation des contractions de la membrane musculaire du tube 
digestif. Toutefois, dans l’un des deux cas où je l'ai mis en 
usage, cet effet a été bien moins prononcé, parce que j'ai eu Ja 
précaution d'étendre 40 grammes de suc dans 150 grammes 
d'infusion de guimauve. De nouveaux essais me mettront 
peut-être à même d'apprécier plus sûrement les avantages 
et les inconvénients de ce purgatif drastique. | 

La racine d'iris germanique perd une grande partie de son 
aclivilé par la dessiccation. On peut alors la réduire en pou- 
dre et s'en servir pour remplacer celle d’iris de Florence dans 


(4) Ilest à remarquer que Wauters, qui a eu à se louer de l'emploi de 
cette racine , exercait à la campagne chez des flamands robustes et d'une 
sensibilité obtuse. 


15 


226 


les préparations où l'odeur trop forte de celle-ci répugne. 

[On doit récolter la racine d’iris pendant l'été, en enlever 
l’épiderme avec un couteau, et la faire sécher promptement 
et complètement en l’exposant à l’ardeur du soleil, à l’action 
du vent, et, à défaut de ces moyens, à la chaleur du four. 
Avec ces précautions on l'obtient blanche et non moisie. 

IRIS DES MARAIS, GLAYEUL DES MARAIS, IRIS JAUNE.— 
(Iris palustris lutea (T.) —Iris pseudo-acorus (L.) — Cette 
espèce d'iris croît dans les lieux aquatiques, sur le bord des 
étangs, où ses fleurs jaunes le font aisément distinguer. On 
emploie sa racine. On l’administre de la même manière et 
aux mêmes doses que l'iris germanique.L’odeur marécageuse 
qu’elle exhale dans l’état frais, se dissipe par la dessiceation; 
elle est alors inodore, un peu âcre, eL exerce sur nos organes 
une action tonique et une légère astriction. Lorsqu'elle est ré- 
cente, son action purgative est peut-être plus prononcée en- 
core que celle de l'iris germanique. Aussi Ramsay, Plater et 
d’autres auteurs l’ont-ils employée contre l’anasarque etlas- 
cite. Etmuller l'a mise en usage comme vermifuge,et Blair, au 
rapport de Murray, attribuait au suc qu'elle fournit de bons 
effets contre les scrofules. Cette racine, à la fois tonique, 
astringente et purgative, selon la dose à laquelle on ladmi- 
nistre et l’état des organes soumis à son action, peut, en 
effet, être utile dans les diverses maladies que nous venons 
de citer ; mais peut-on admettre son efficacité (quand elle 
est sèche) dans la diarrhée et la dyssenterie,contre lesquelles 
on l’a préconisée, sans préciser les circonstances où elle 
convient et celles où elle pourrait être nuisible? Si son usage 
est contre-indiqué dans l'état aigü de ses affections, il ne 
l'est peut-être pas moins parfois dans l’état chronique. Dans 
ce dernier cas, en effet, il est plus diflicile de juger de 
l'opportunité d’une médication astringente que ne le pensent 
ces praticiens routiniers qui, prenant leur aveugle empi- 
risme pour de l'expérience, trouvent toajours avec facilité, 
dans la matière médicale, un remède contre chaque maladie, 
et dans chaque remède un spécifique. 

Le suc de la racine d’iris jaune, introduit dans les nari- 
nes, irrite vivement la membrane pituitaire, produit de l’ar- 
deur dans les fosses nasales, le pharynx, et détermine un 
écoulement abondant de mucosités par le nez. Amstrong 
dit que cet effet a dissipé des céphalalgies opiniâtres et des 
odontalgies qui avaient résisté à tous les autres moyens. 
J'en ai retiré de grands avantages dans un cas d'amaurose 
commençante, chez un sujet d’une constitution délicate et 
d’un tempérament nerveux : c’est un moyen à employer en 


227 


pareil cas, mais après s'être assuré qu’il n’existe poinc de 
congestion sanguine au cerveau, et lorsque les moyens gé- 
néraux indiqués ont été mis en usage. Vicat dit que ce suc 
est si actif que, si on l’applique sur une dent malade, il 
en détruit sur-le-champ la sensibilité. 

La racine d’iris des marais sèche est acerbe, astringente. 
Sa décoctiion, mêlée avec des préparations de fer, sert aux 
montagnards de l’Ecosse pour faire de l'encre. Un anglais 
(William Skrimskire) a présenté les graines de cette plante 
comme pouvant remplacer le café. Ces graines acquièrent, 
par la torréfaction, un parfum qui a plus d’analogie avec ce 
dernier que toutes les graines qu'on a jusqu’à présent tenté 
de lui substituer. (Voyez dans les Annales de chimie, vol. 
LXXVIN, p. 95, l'examen de la graine d'iris comparée au 
café, par Bouillon-Lagrange.) 

L'Iris rÉrIDE est aussi employé en médecine (Voyez 
Glayeul puant, p. 192.) 4 


JOUBARBE,, 
GRANDE JOUBARBE, JOUBARBE DES TOITS, JOMBARDE. 


Sedum mujus (T.) 
Sempervivum teciorum (L.] 


La joubarbe croît spontanément partout, et se rencontre 
sur les toits de chaume, les ruines. La plante entière est 
usitée. 

Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR: Suc, de 40 à 60 grammes. 
Sirop (4 de suc sur 2 de sucre) de 50 à 60 gr. en potion. 


A L'EXTÉRIEUR : Sue, Cataplasmes, etc. 
Propriétés. 

La joubarbe, offrant au goût un sentiment de fraîcheur et 
d’astriction, est réfrigérante, astringente, antispasmodique, 
détersive. On employait autrefois le suc de cette plante con- 
tre les fièvres inflammatoires, bilieuses et intermittentes, la 
dyssenterie, les maladies convulsives, la chorée, l’épilepsie, 
etc. C’est un remède vulgaire dans les brûlures, les inflam- 
mations superficielles, les plaies gangréneuses, les ulcères 
sordides, les cors, etc. | 
. J'ai vu employer le suc de joubarbe étendu dans une suf- 
fisante quantité d'eau, en gargarisme, avec du miel, dans 
l'angine tousillaire. Il m'a paru produire un très-bon effet 


228 


dans cette affection où, comme on sait, les astringents réus- 
sissent beaucoup mieux que les émollients, Ce même suc, 

- seul ou battu avec de l'huile d’olive ou de noix, appliqué 
sur les brûlures du premier et du deuxième degré, appaise 
les douleurs et prévient les phlyctènes; mais il faut en 
renouveler souvent l'application. Je l’ai vu produire aussi de 
bons effets dans les inflammations traumatiques, les hémor- 
rhoïdes douloureuses, etc., comme réfrigérant. En cette der- 
nière qualité j'ai souvent appliqué la jourbarbe pilée sur le 
front pour calmer la céphalalgie fébrile ; elle m'a presque 
constamment réussi dans ce cas; mais , comme pour les 
brülures,, je faisais fréquemment renouveler ce topique, 
que tous les paysans connaissent et emploient journelle- 
ment. Ils tiennent aussi du suc de joubarbe dans la bouche 
pour s'opposer à la sécheresse de la langue dans les fièvres 
bilieuses, inflammatoires ou typhoïdes. Je l'ai vue, dans ces 
circonstances, soulager beaucoup, de même que dans les 
aphtes (en se gargarisant avec un mélange de suc, d’eau et 
de miel). Je fais usage dans le muguet du collutoire sui- 
vant : Suc de joubarbe et miel, de chaque 60 grammes ; 
alun, 4 gram. 20 cent. On en fait l'application plusieurs 
fois par jour avec un plumaceau. 

[J'ai vu plusieurs fois des hémorrhagies nasales cesser à 
l'instant même par l'effet d’un cataplasme de feuilles de 
jourbarbe pilées avec du vinaigre et appliquées à froid sur le 
scrotum. 

« Le docteur Reïichel, de Naïla (Bavière), annonce que le 
suc fraîchement exprimé de la grande joubarbe (semper- 
vivum tectorum L.) est un narcotiqne spécifique contre 
les affections spasmodiques de l'utérus, qui ne reconnais- 

sent pas pour point de départ une anomalie dans la plasti- 
cité de cet organe. 

Ses propriétés, calmantes et rafraîchissantes à la fois, le 
distinguent de la valériane, du castoreum, et d’autres médi- 
caments utérins qui ne produisent la sédation des spasmes que 
par l’activité qu'ils impriment au système nerveux en raison 
de la grande proportion d'huile volatile dontils sont chargés : 
ces derniers agents thérapeutiques accélèrent donc en même 
temps l’action vasculaire ; et par conséquent ne peuvent être 
supportés lorsqu'il existe un orgasme dans la partie qui est 
le siége des spasmes, ou encore lorsque l'élément vasculaire 
prédomine l'élément nerveux. Dans ces cas, le suc de la 
grande joubarbe fournit, au contraire, des résultats excel- 
lents. Ainsi donc, ce suc est spécialement indiqué dans les 
cas où les malades accusent des douleurs fixes et pulsatives 


229 


dans la région hypogastrique, une pesanteur dans le bassin ; 
lorsqu'il existe une augmentation de température, une cir- 
culation plus rapide, et, en général, des symptômes de plé- 
thore abdominale. On le donnera avec avantage dans la 
dysménorrhée et l'aménorrhée. On donne ce suc, fraîche- 
ment exprimé, à la dose d’une demi-cuillerée à café, trois 
ou quatre fois par jour. On l'administre dans un peu d’ eau 
sucrée. 

Comme il est très-facilement altérable, et comme, dans 
le cas d’orgasme vasculaire , il n’est pas possible de l’as- 
socier à des liquides alcooliques , il est indispensable de ne 
le préparer qu'en petite quantité, afin de pouvoir le renou- 
veler plus souvent. 

Si les spasmes utérins portent plutôt sur la sensibilité que 
sur la circulation ; si les extrémités sont froides, l'urine 
pâle, etc., on associe ce suc à partie égale d’alcoolé de valé- 
riane, et à moilié seulement d'alcoolé de castoréum : on 
donne vingt gouttes de ce mélange sur du sucre trois ou 
quatre fois par jour. On peut prescrire en même temps pour 
üsane une infusion de quelques feuilles de la plante fraiche 
unies à des plantes aromatiques, par exemple, à la mé- 
lisse, etc. 

Ce suc est recommandé aussi contre la cophose qui à pour 
cause l’endurcissement du cérumen ou une exsudation in- 
flammatoire, que la maladie soit ou non accompagnée d'un 
écoulement de mauvaise odeur. Dans les cas de ce genre, 
on instille plusieurs fois par jour quelques gouttes du suc 
dans les oreilles, et on les y maintient avec un petit bour- 
donnet de coton ouaté. 

Nous terminerons en disant que les feuilles de grande 
joubarbe sont encore employées avec succès contre les COrs 
aux pieds. Pour cela on dépouille ces feuilles de leur cuti- 
cule, puis on les applique sur les points malades ; elles dis- 
sipent les douleurs et cautérisent peu à peu les parties en- 
durcies. » (Abeille médicale, tom. nue p. 317, année 1846.) ] 


JOUBARBE (1 (PETITE) , 


VERMICULAIRE, ORPIN BRULANT, POIVRE DES MURAILLES, 
ILLECEBRA, PAIN D'OISEAU. 
Sedum parvum, flore luteo (T.) 
Sedum acre (L.) 

Cette plante, qui n'appartient pas au même genre que la 
précédente, croît partout sur les vieilles murailles et dans 
se lieux pierreux et sablonneux. Toute la plante est em- 
ployée. 


230 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Décoction, dans l’eau ou la bière. 

Suc dépuré, de 4 à 45 gram. et même 50 gram., selon l'effet qu'on 

veut produire. 

Poudre, äe 25 centigr. à 4 gram. dans un véhicule approprié. 

A L'EXTÉRIEUR: Suc pur ou délayé; décoction dans la bière ou 
dans l'eau, pour lotions, fomentations, en cataplasmes, après 
l'avoir pilé. 

Propriétés. 

La vermiculaire, d’une saveur piquante et brûlante à l’état 
frais, est un éméto-cathartique violent, et que l’on ne doit 
administrer qu'avec une extrême prudence (1. Son action 
secondaire ou consécutive sur différents appareils orga- 
niques lui ont fait donner les titres de diurétique, apéritive, 
fébrifuge, fondante, etc., el, comme beaucoup d'autres 
plantes actives, elle a été employée dans le traitement de 
plusieurs maladies, et particulièrement contre l’hydropisie, 
le scorbut, les scrofules, les fièvres intermittentes, l’épilep- 
sie, la chorée, etc. 

[Eutmuller et Below, médecins suédois, administraient 
cette plante intérieurement contre le scorbut. Below la don- 
nait dans le lait ou dans la bière, et l’employait aussi au 
pansement des ulcères scorbutiques. Pour l’usage interne, 
il faisait bouillir à vase clos huit poignées de vermiculaire 
dans huit livres de vieille bière, jusqu'à réduction de la 
moitié, el en faisait boire chaque jour, ou de deux jours 
l’un, trois ou quatre onces (90 à 120 gram.) le matin à jeun. 
Les malades qui vomissaient les premiers jours étaient plus 
tôt guéris. Chez ceux dont les gencives étaient gâtées et dont 
les dents vacillaient, il ordonnait un gargarisme composé de 
cette décoction, à laquelle il ajoutait un peu d'alun et de 
miel rosat. Lange (Médec. domest.), dans les mêmes indica- 
tions, mitigeait cette plante, en Ja faisant bouillir dans du 
lait de chèvre. Cet auteur rapporte que les gens du peuple 
de Brunswick, pour se guérir des fièvres intermittentes, se 
font vomir en avalant une demi-cuillerée de suc exprimé de 
cette joubarbe mêlé avec du vin. Ce remède produit ce que 
produirait tout autre vomitif. 

A la dose de #4 à 8 gram.; le suc de sedum acre excite 
seulement quelques nausées, et agit comme diurétique effi- 
cace. Donné sous cette forme comme altérant, Gilibert le 


(4) M. Orfila a constaté, par ses espériences, qu’à la dose de 435 
grammes , le suc de cette plante devient un vérstable poison pour les 
chiens. 11 à trouvé la membrane muqueuse d’une couleur rouge de feu 
dans la moitié qui avoisine le pylore ; le canal intestinal parat sain. 


231 


recommande comme un excellent remède dans les empâte- 
ments des viscères abdominaux, dans l’ictère et dans la 
chlorose. N'oublions pas, toutefois, que l'emploi de ce mé- 
dicament, dans ces cas, doit être subordonné à l’état des 
organes malades, et qu’il serait dangereux quand il y a 
irritation ou phlegmasie chronique des voies digestives.] 
Piusieurs faits publiés en Allemagne et en France, sem- 
blent annoncer que cette plante a été administrée avec succès 
dans quelques cas d’épilepsie ; mais, ainsi que tous les pra- 
ticiens l’ont remarqué, cela n’a pu arriver que lorsque les 
purgalifs et les vomitifs quelconques auraient pu amener le 
même résultat, en produisant les mêmes effets révulsifs (1). 
Ne peut-on pas en dire autant de son administration avant 
l'accès des fièvres intermittentes ? 
Malgré les assertions de Marquer, de Nancy, (Observat. 
sur la quérison de plusieurs maladies notables, Paris 1750), 
je n’ai trouvé dans la vermiculaire, appliquée sur les ul- 
cères cancéreux ou autres, qu’une propriété fortement déter- 
sive, mais rien de spécial contre ces affections. Je dois dire 
néanmoins que la décoction de cette plante ou son suc, se- 
lon l'effet plus ou moins actif que je désirais produire, m'a 
été très-utile dans tous les cas j'ai eu en vue de diminuer 
la fétidité de l’ichor cancéreux, de combattre la gangrène, 
de dégorger les surfaces fongueuses. J'ai employé fréquem- 
ment la petite joubarbe en déeoction avec du miel, comme 


(4) Quoique les bons effets de ce remède dans l’épilepsie ne pussent 
être attribués, ainsi que nous venons de le dire, qu’à son action sur le 
tube digestif comme éméto-cathartique, ils n’en meritent pas moins d’être 
pris en considération par les praticiens. Le docteur Laubender, eité dans 
le journal de médecine et mentionné par Boiart , l'a employé avec succès 
dans le traitement de cette maladie, mélé avec du sucre, donné matin et 
soir, d'abord à la dose de 50 centigrammes successivement portée jusqu’à 
4 gram. 25 eentigr. ou À gram. 50 centigr. en poudre, Les premiéres 
doses déterminent des vomissements, des selles et un état de malaise qui 
fatiguent les malades. Dans l’un des deux cas que l’auteur a observés, les 
accès, qui avaient lieu plusieurs fois par semaine, ont é.é un an à 
reparaître. Dans le second cas, les accès revenaient régulièrement tous 
les quinze jours depuis deux ans. On donna le médicament à la dose de 
75 centigr.; cinq jours après on le donna à celle de À gramme. La malade 
en continua l'usage pendant trois mois ; on lui fit prendre ensuite le vin 
de quinquina ; les accès furent un mois sans reparaître, et depuis ce temps 
elle a continué à se bien porter. L’on doit à M. Peters (Flore médicale) 
cinq observations d’épilepsie et de chorée, dans lesquelles le sedum acre, 
administré en poudre à la dose de 40 à 50 centigr, par jour, pendant un 
certain temps, a guéri un malade, et retardé ou affaibli les accès chez les 
autres. Le Journal des progrès (année 1829) cite un cas d’épilepsie où 
l'emploi du sedum acre a produit une grande amélioration ; après l’usage 
de ce remède, le malade n’avait plus que trois accès par an au lieu de 
douze, et ils étaient beaucoup plus faibles. 


232 


gargarisme dans les ulcérations cancéreuses ou scorbutiques 
de la bouche. Je mêle avec avantage à ce gargarisme, com- 
me antiscorbutique, une certaine quantité de suc d'oseille. 

{ Aliberc (nouvo. Elém. de thérapeut.. t. 11, p. 259, 2e édit.) 
a eu occasion d'essayer les cffets de cette plante sur un 
cancer ulcéré du sein et sur un ulcère cancéreux du nez. 
L'application en fut supportée difficilement durant les pre- 
miers jours; mais on s’y habitua peu à peu ; dans le premier 
cas la suppuration devint moins fétide, les hémorrhagies 
qui avaient lieu fréquemment cessèrent, et la plaie prit un 
bon aspect. Ce mieux se continua à peu près un mois ; mais 
Ja malade, épuisée par les souffrances, succomba bientôt. 
Dans le second cas on avait employé vainement les caus- 
tiques et autres remèdes. Les cataplasmes de sedum acre 
détergèrent assez promptement l'ulcère ; les bords, qui 
étaient gonflés, se dégorgèrent, et les chairs devinrent ver- 
meilles. Ces cataplasmes furent continués un mois et demi ; 
mais le malade s’en dégoûta et ne voulut plus en permettre 
l'application. «Le résultat que nous avons obtenu, dit 
Alibert, semble prouver qu'elle (la petite joubarbe) est 
douée de vertus détersives très-énergiques. » 

La vermiculaire, pilée et réduite en pulpe, appliquée sur 
les tumeurs blanches indolentes, l’hydarthrose, les engor- 
gements lymphatiques et glanduleux, a souvent produit de 
bons effeis. Dans ces cas, je la mêle avec plus ou moins de 
feuilles d’oseille comme pour les feuilles d’arum, dont l'effet 
résolutif est à peu près le même. 

Marquet a employé la vermiculaire avec succès contre la 
teigne. «Dans les différentes expériences que j'ai faites, 
dit-il, pendant près de quarante ans de pratique, j'ai décou- 
vert une plante qui guérit certainement la teigne en l’appli- 
quant sur la partie malade, après l'avoir pilée. C’est un doux 
caustique qui enlève et fait tomber toutes les croûtes, sans 
causer aucune douleur. Cette plante s'appelle {{lecebra ou 
sedum minus acre, et en français pain d'oiseau. J'en ai fait 
l'expérience sur quantité de sujets. Elle a toujours bien 
réussi. » (Ouvrage. cité, pages 270 et 271.)] 

Le suc et la pulpe de vermiculaire jouissent de beaucoup 
de vogue dans le peuple pour le traitement des cors et des 
durillons. Lorsque son application cause une trop vive 
irriation, on se sert alternativement de June et de l’autre 
joubarbe. Dans ce cas on applique la feuille de la grande 
joubarbe entière, et après lui avoir enlevé la pellicule qui 
Ja recouvre. 


233 


JULIENNE .‘ 
GIROFLÉE MUSQUÉE, ARAGONE. 


Esperis hortensis, flore purpureo vel albo (T..) 
Esperis matronulis (L.) 


Cette plante est cultivée dans les jardins à cause de l'odeur 
agréable et de la beauté de ses fleurs. 


Préparations et doses. 
Les mêmes que celles du cresson, du raifort, etc. 


Propriétés, 


La julienne, de la famille des crucifères, etque l’on n'em- 
ploie pas en médecine, bien qu’elle soil très-active, peut être 
mise en usage dans tous les cas où le cresson, le cochléaria, 
le raifort, la capucine, la cardamine, etc., sont indiqués. 
Je l'ai employée avec succès dans les affections scorbuti- 
ques, dans les catarrhes pulmonaires chroniques, l'asthme 
humide. les affections scrofuleuses, l’anasarque et Îles 
cachexies qui suivent ou accompagnent les fièvres inter- 
mittentes, Je fais prendre son suc pur ou mêlé avec le Jait 
ou le petit lait. L’infusion ou la décoction des feuilles frai- 
ches, à vase clos, est aussi employée, de même que le vin 
dans lequel on a fait macérer ces mêmes feuilles Ces pré- 
parations activent les fonctions de la peau et celles des reins. 
A ce titre, elles conviennent dans la gravelle sans irritation, 
l’albuminurie chronique, les hydropisies, ete. 

Les feuilles fraîches de julienne, broyées et appliquées 
en cataplasme , sont résolutives et détersives. J'ai employé 
ce topique avec avantage sur les tumeurs scrofuleuses, les 
engorgements lymphatiques, œdémateux, les ulcères scor- 
butiques, atoniques , fongueux, sordides ou gangréneux. 


Cette plante mérite de prendre rang dans la matière médi- 
cale indigène. 


JUSQUIAME , 
HANNEBANE. 
Hyosciamus vulgaris, vel niger (T.) 
Hyosciamus niger (L.) 


Cette plante croît dans toute la France, autour des vil- 
lages, des hameaux, des fermes. On emploie les feuilles, les 
racines et les semences. 


234 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusiox, de 2 à 5 gram. pour 200 gram. d'eau. 

Sue, 4 à 4 gram. en potion (progressivement). 

Extrait par le suc épaissi, 5 cent. à À gramme. 

Extrait aqueux, 5 cent. à 4 gram. en potion, pilules, etc. 

Extrait alcoulique et extrait de semences, 2 à 40 centigram. en 
potion, pilules, etc. 

Ternture avec les feuilles fraîches ou les semences. (4 sur 42 
d'alcool), 50 cent. à 4 grammes. ; 

Teinture avec les feuilles sèches (4 sur 4 d'alcool à 22), 1 à 4 
gram. en potion. 

Teinture éthérée (4 de feuilles sèches sur 6 d’éther sulfurique}, 
ù cent. à { gram. en potion. 

Sirop de suc (2 de teinture de feuilles fraîches sur 15 de sucre 
et 7 d'eau), de 5 à 50 gram. en potion, 

Sirop d'extrait (4 d'extrait sur 425 d'eau et 250 de sirop de 
sucre bouillant}, de 5 à 50 gram. en potion. 

Poudre, 5 à 20 cenlig. en pilules ou dans un liquide. 

A L’EXTÉRIEUR : Décoction ( de 20 à 50 gram. par kilog. d'eau), en 

fomentations , lotions , famigations, et feuilles en cataplasmes. 

Extrait, de 50 centig à 2 gram. par la méthode endémique. 

En pommade (1 sur 2 d'axonge }, pour onction. 

Buile (L de jusquiame fraiche sur 2 d'huile d'olives), en liniment, 
embrocations. 

Propriétés. 


La jusquiame, d’une odeur vireuse, repoussante , d’une 
saveur fade et nauséabonde, est un poison narcotico-âcre 
dont l’action se porte particulièrement sur le système ner- 
veux. Son effet toxique est bien moins puissant que celui de 
la belladone, mais analogue. 

[ A haute dose, cette plante cause de l’ardeur à la bouche 
et au pharynx, des douleurs abdominales , des vomisse- 
ments, la rougeur de la face, la fixité du regard, la vue 
double, la dilatation des pupilles, le trismus, l'aphonie, la 
distorsion spasmodique de la bouche, la gêne, l'accélération 
de la respiration, le vertige, l’assoupissement, la somno- 
lence, la perte du sentiment, le délire gai ou sérieux, le 
tremblement, la paralysie d’un seul ou des deux côtés, l’agi- 
tation convulsive des bras, la petitesse et l’intermittence du 
pouls, la carphologie, le refroidissement des extrémités, et la 
mort. D’après ces symptômes, il est difficile d'admettre, avec 
M. Orfila, que la jusquiame ne détermine point l’inflamma- 
tion de l'estomac, tout en exerçant sur le système nerveux 
cette violente excitation qui cause l’aliénation mentale et 
consécutivement la stupeur. Suivant M. Flourens, cette - 
plante produit, comme l’opium, une effusion sanguine dans 
les lobes célébraux. 


235 


Quoi qu'il en soit, la jusquiame, administrée à dose 
thérapeutique, est généralement regardée comme narcolique, 
antispasmodique, calmante. On l’emploie dans les névral- 
gies, l'épilepsie, la toux nerveuse, l'asthme, la coqueluche, 
les maladies convulsives, les tremblements musculaires, la 
manie, elc. 

Elle est employée à l’extérieur dans les mêmes cas : en 
bains, lotions, fumigations, fomentations, et pour calmer les 
douleurs goutteuses, rhumatismales , cancéreuses. Les feuil- 
les, roulées et fumées à la manière des cigarres, sont utiles 
contre l'asthme, les palpitations nerveuses, la phthisie, etc. 

Ïl n’est pas un médecin qui n'ait été à même d'apprécier 
l'utile emploi de la jusquiame dans tous les cas dont nous 
venons de donner l’énumération (1). Il serait donc fastidieux 
de répéter ce que tous les auteurs ont dit et répété mille fois 
sur les diverses applications thérapeutiques de cette plante. 
Je dirai seulement qu'elle offre une ressource d'autant plus 
précieuse dans la pratique médicale des campagnes, qu'elle 
est très-commune et qu’on Ja trouve toujours sous la main 
pour l'usage qu’on en fait si fréquemment à l'extérieur dans 
les entorses , dans les douleurs rhumatismales et goutteuses, 
lesengorgements douloureux des mamelles, les engelures,les 
hémorrhoïdes, le panaris, etc. (2) J’ai déjà fait mention d'une 


————————————————————————…————.——————"————————————————ç“——…—————…——……—…———…—…—…———————…——————————…_—__————.—…— 


@) Les anciens connaissaient la jusquiame; mais ils n'employaient que 
l'huile retirée de ses semences. Ce ne fut qu’en 4762, par suite des travaux 
de Siœrk sur les plantes vénéneuses, qne l'on commenca à lemployer 
à l’intérieur. Ce dernier la donnait contre les névroses, les convulsions, 
l’épilepsie, les palpitations du cœur, la cépbalalzie invétérée, la manie,etc. 
Il en portait progressivement la dose à 75 centig. dans les 24 heures. 
Collin et Guding, qui en ont fait usage dans les mêmes maladies, ont été 
jusqu’à 4 gram. 20 centig. par jour. Stoll, Chailli, Burdin, Méglin, ont 
emp'oyé la jusquiame à l’intérieur contre les névralgies (tous les prati- 
ciens connaissent les pilules anti-néyralgiques de Méglin , composées 
d'extrait de cette plante, de celui de valériane et d’oxide de zinc ). 
Gilibert la recommande contre la paralysie, les engorgements lympha- 
tiques, le squirre. Stoll, Vaidi et Smidt, au début des imflammations pour 
les faire avorter. Hartz ( Biblioth. germaniq., tom. vi, p. 240 ), d'après 
Forestus et Stærk, l’a prescrite dans les bémorrhagies, et surtout dans 
celles qui ont pour cause un état plus ou moins spasmodique ou un excès 
d’irritabilité, comme dans certaines hémoptysies. Ce médecin donne, dans 
ces cas, une infusion de feuilles fraîches de jusquiame , dans quatre fois 
ieur poids d'huile d'olives, dont il administre une cuillerée à café, mêlée 
avec deux d'huile d'amandes douces.L'hémopt ysie cesse après les premières 
doses, bien que les malades éprouvent parfois de légers vertiges. Stoll a 
employé cette plante avec succès dans la colique saturnine, et Frank dans 
l’hypocondrie. D’autres auteurs lui ont décerné le titre d’antimaniaque. 


(2) J'ai cru nécessaire de donner à cet article une plus grande étendue. 


236 


pommade composée de jusquiame, d'ail et de saindoux, que 
j applique à la plante des pieds et dont je retire de bons 
effets dans le traitement de la coqueluche. 


[ La jusquiame peut être substituée à l’opium dans beau- 
coup de cas où celui-ci ne peut être administré sans incon- 
vénient. J'en ai eu récemment un exemple chez un malade 
âgé de quarante-huit ans, d’un tempéramment lymphatico- 
sanguin, d'une forte constitution et atteint, par suite de 
l'abus des spiritueux, du delirium tremens, avec hallucina- 
tions et parfois délire furieux. L'’extrait gommeux d’opium, 
que j'emploie toujours avec succès en pareil cas, déterminait 
le vomissement et un état prononcé d’anxiété et d’exas- 
pération. L'extrait aqueux de jusquiamenoire,donné d’abord 
à la dose de huit centigrammes de trois heures en trois 
heures, et ensuite de deux heures en deux heures, fut bien 
supporté par l'estomac et produisit un calme suivi bientôt 
d'un effet sédatif qui amena je sommeil, une diaphorèse 
générale, la disparition du tremblement des membres et du 
délire, en un mot, le rétablissement complet dans l'espace 
de trois jours. J'ai pu, sur ce malade, porter la dose d’extrait 
de jusquiame à 1 gramme 20 centigr. dans les vingt-quatre 
heures : l'abus des liqueurs alcooliques explique cette 1olé- 
rance. Wauters cite un cas d’insomnie, par cause morale, 
où l’opium ayant été sans effet ; l'extrait de jusquiame, pré- 
paré par épaisissement du suc au moyen de la chaleur 
solaire, fut aussi employé à grande dose avec un succès 
remarquable : « Domino Velghe fere octogenario robustis- 
simo, perfecta laboranti agrypnia ex affectione mentis tristi 
oriunda, et jam ultra mensem omnibus remediis etiam opir 
dosibus sat magnis resistente, prœscripsimus D' Verwer 
egoque Extracti hyoscyami gr. vin, ut indè binæ pilulæ 
formarentur. Sumpsit eas æger,unam 107 alteram 1174 ves- 
pertina, in lecto decumbens : nullus indè somnus, nec etiam 
nulla affecho molesta. Postridie sumpsit eodem modo 
gr. Xi, Cum aliquali effectu. Terha vespera Grana xvr 
sumpsit, et ia somno placidissimo quinque minimum horas 
indulsit. Verum ille suceessus non perpetuus ; nam obser- 
vabamus alterna nocte pilularum effectum minus completum 
esse. Dedimus itaque corticem peruvianum et ægrotus ilhco 
convaluit integre. » (Repertcor. remedior. indigen. exoticis 
in medicin. subshituendor.—Gandæ 1810, p. 243.) 


Certe observation confirme l'opinion émise par divers au- 
teurs, relativement à la nécessité, quand on veut provoquer 
le sommeil, de donner la jusquiame à la dose double et 


237 


même triple de celle de l’opium. Pour une appréciation 
exacte et comparative, Wauters aurait dû indiquer la dose 
à laquelle il avait porté l'administration de ce dernier mé- 
dicament avant d'employer la jusquiame. S'il y a une grande 
analogie d'action entre la jusquiame et l'opium il y a aussi 
dans leurs effets des différences remarquables : la jusquiame 
n’a pas, comme ce dernier, l'inconvénient de suspendre les 
évacuations, ce qui la fait préférer lorsque la constipation 
est à redouter, comme dans l'hypocondrie, l'entérite chro: 
nique, etc. Les personnes qui ne peuvent prendre sans 
accidents graves la plus légère dose d’opium, supportent 
ordinairement très-bien la jusquiame. 

Le docteur Breiting, médecin à Augsbourg, a publié 
(Journal d'Hufeland, 1807) l'histoire d’un tic douloureux 
de la face, qui, pendant cinq mois, avair résisté à tous les 
moyens possibles, et qui fut guéri par l’usage de l'extrait de 
jusquiame noire, préparé avec le suc de la plante. On faisait 
dissoudre 4 grammes de cel extrait dans une once d'eau de 
fleurs de camomille ; la dose était de dix gouttes par heure, 
en augmentant de quatre gouttes chaque fois. Par la suite, 
le docteur Breiting fit prendre à sa malade des pilules dans 
lesquelles il entrait 20 centigr. d'extrait de jusquiame, et 
elle prenait jusqu'à six de ces pilules par jour. Enfin, pen- 
dant deux traitements qui durèrent en tout huit mois, la 
malade prit la quantité énorme de 140 grammes d'extrait de 
jusquiame noire, el cet extrait était très-énergique, ainsi que 
le docteur Breiting s’en assura en l'employant chez d’autres 

malades. Les Joses des médicaments stupéfiants, pour en 
obtenir l'effet qu'on en attend, doivent être d'autant plus 
élevées que la douleur est plus vive, que le spasme est plus 
prononcé ou que le système nerveux est plus exalté. Cette 
vérité physiologico-pathologique est confirmée par l’obser- 
vaiion journalière des faits, parmi lesquels nous citerons, 
comme le plus saillant, le peu d’effet de l’opium donné à 
très-grande dose dans le tétanos. 

A l'extérieur, la jusquiame exerce, comme sédative, des 
effets évidents sur le système nerveux. Ses feuilles fraîches, 
appliquées sur la tête, soulagent les douleurs névralgiques 
de cette partie. Cuites dans du lait et appliquées à l'épigas- 
tre, elles ont calmé instantanément une violente douleur 
gastralgique qui durait depuis six heures, et contre laquelle 
J'avais employé inutilement le laudanum à l’intérieur. J'ai 
eu aussi à me louer de ce topique sur l’hypogasire dans un 
cas de strangurie goutteuse, où l'application des sangsues 
au périné, les onctions opiacées, les bains tièdes généraux 


238 


n'avaient produit qu’un soulagement momentané. On dit 
avoir calmé des douleurs odontalgiques et fait cesser de 
longues insomnies, en faisant, avec l'huile qu'on retire des 
semences de la jusquiame, des frictions sur les tempes. 

L’extrait aqueux de jusquiame m'a réussi à l’intérieur, et 
à l’extérieur délayé en consistance sirupeuse, en friction 
autour des yeux, dans un cas d'iritis très-intense dont M. 
de Sept-Fontaines, de Calais, physicien distingué, membre 
correspondant de l’Académie des Sciences, fut pris en 1818 
après la disparition presque subite d'un accès de goutte, 
maladie dont il était atteint depuis long-temps, et qui se 
portait fréquemment et alternativement aux deux pieds. Dès 
le premier jour de l'emploi de la jusquiame, les douleurs se 
calmèrent; les pédiluves sinapisés, en rappelant l'affection 
arthritique, achevèrent la guérison, qui eut lieu au bout de 
huit jours de traitement. Je me suis bien trouvé aussi des 
applications chaudes de décoction de feuilles de cette plante, 
comme moyen accessoire, dans l’ophtalmie scrofuleuse- 
photophobique , surtout quand il y avait occlusion spasmo- 
dique des paupières. 

On cite quelques bons effets de l'emploi de la jusquiame 
dans la cataracte commençantie, et dans le cas d’iritis sur- 
venue à la suite de son opération. La jusquiame, dilatant la 
pupille comme la belladone, on s’est servi de son extrait 
comme de celui de cette dernière plante pour rendre plus 
facile l'opération de la cataracte. 

Les feuilles de jusquiame, pilées et appliquées tièdes sur 
une orchite blennorrhagique très-aiguëê, calmèrent instanta- 
nément la douleur et firent avorter linflammation chez un 
jeune homme de vingt-deux ans pour lequel je fus appelé au 
mois d'août 1847. 

Tournefort conseille, contre les engelures, l'exposition 
des parties affectées à la fumée produite par les semences de 
jusquiame , lorsqu'on les projette sur des charbons ardents. 
On recommande, contre les douleurs de dents, de retenir 
dans la bouche cette même fumée ou celle de la plante 
sèche ; mais ce moyen, devenu populaire, peut être suivi 
d'accidents : on l’a vu causer le délire et tous les symptômes 
de l’intoxication. L'usage de la jusquiame à l'extérieur est 
loin d’être toujours innocent. On a vu des symptômes d’em- 
poisonnement résulter de l'application des feuilles fraîches 
de jusquiame sur une brûlure. On cie aussi plusieurs 
exemples d'accidents graves causés par la décoction de jus- 
quiame noire donnée en lavement. Les émanations même de 
ceute plante ne sont pas sans danger. Des hommes qui dor- 


239 


maient dans un grenier où l’on avait semé çà et là des racines 
de cette plante pour en écarter les rats, se réveillèrent atteints 
de stupeur et de céphalalgie; l'un d’eux éprouva des vomisse- 
ments et une hémorrhagie nasale abondante (Gazette de santé, 
1773 et 1774). Boerhaave, en préparant un emplâtre dans 
lequel entrait l'huile des semences de la jusquiame, se sentit 
agité d’une sorte d'ivresse. La domestique du curé d’un 
village du Calaisis, âgée de quarante-cinq ans, d’un tempé- 
rament sanguin, pour laquelle je fus appelé au mois d’août 
1826, et que l’on croyait atteinte d’une fièvre maligne, avait 
Ja face rouge, des mouvements convulsifs partiels, la parole 
brève, un délire gai, avec propos et gestes obcènes, vertiges, 
en un mot, tous les effeis d’une sorte d’ivresse avec conges- 
tion au cerveau et exaltation nerveuse. Ces symplômes 
étaient occasionnés par la présence, dans le rectum, d’un 
suppositoire de feuilles de jusquiame broyées avec du miel, 
que le maître de la malade avait conseillé comme moyen 
innocent et très-efficace de calmer des douleurs d’hémor- 
rhoïdes dont elle souffraitdepuis plusieursjours. Une saignée 
du bras et des boissons acidulées avec le vinaigre, produi- 
sirent un calme suivi d’un sommeil profond et d'une abon- 
dante transpiration. Il ne restait au réveil qu’un état d’abat- 
tement avec dilatation des pupilles. Ce fait me rappelle celui 
d’un berger, que le célèbre Gassendi, au rapport de Garidel, 
rencontra un jour et qui lui dit qu'à l’aide d’un onguent il 
pouvait, quand il le désirait, assister au sabat des sorciers, où 
il voyait, disait-il, des choses merveilleuses. Après avoir fait 
épier cet homme, Gassendi s’assura que son onguent était 
composé de jusquiame noire, de graisse et d'huile, et qu’a- 
près s’en être introduit dans le fondementune certsine quan- 
tité, il s’assoupissait et tombait dans une rêverie pro- 
fonde. | 
Le suc et le decoctum de racine de jusquiame noire en 
pleine végétation, jouissent de propriétés très-énergiques ; 
mais leurs effets sont moindres si on les emploie au com- 
mencement du printemps. Le suc des feuilles est moins 
actif ; l'extrait aqueux, préparé en faisant évaporer au bain- 
marie le suc de la plante fraîche en pleine végétation, jouit 
à peu près des mêmes propriétés vénéneuses que le suc, 
tandis qu'il est beaucoup moins actif lorsqu'il a été obtenu 
par décoction de la plante peu développée ou trop dessé- 
chée : ce qui explique pourquoi certains extraits de jusquia- 
me, chez les pharmaciens , ne possèdent aucune vertu (1). 


(1) Quand M. Fouquier ( Archiv. génér. de méd,, mars 1823), dans ses 


240 


L'extrait le mieux préparé ne doit pas être employé lors- 
qu'il a plus d’un an. 

La jusquiame noire doit être récoltée en juillet et dessé- 
chée à l’étuve avec toutes les précautious indiquées pour les 
plantes grasses et succulentes. Le docteur Foy (Bulletin 
thérapeutig. Juin 1838) prépare, avec les feuilles fraîches 
de celte jusquiame et du sucre, une conserve sèche ou pul- 
vérulente préférable aux autres préparations de cette plante. 


LA JusqurauE BLANCHE (Hyoscriamus albus), LA JusqurAmE 
DORÉE (Hyoscramus aureus) et LA JUSQUIAME DE SCOPOLI, 
jouissent à peu près des mêmes propriétés que la jusquiame 
noire. Les anciens regardaient la jusquiame blanche comme 
moins irritante que la noire, et la prescrivaient, de préférence 
à celle-ci, contre la goutte, les douleurs en général, les toux, 
les hémorrhagies, etc. On lit dans le Formulaire des méde- 
cins praticiens, 3° édition, que les feuilles de jusquiame 
blanche ont été employées avec succès dans la réduction des 
hernies et du paraphymosis. 


La Hyoscraume est le principe actif de la jusquiame 
noire découvert par Brande. Son action sur l’économie est 
peu connue. 


LAITUE CULTIVÉE. 


Lactuca sativa (T.) 
Lactuca sativa (L.) 


Cette plante, créée, pour ainsi dire , par l’industrie hu- 
maine, et dont on ne connaît pas bien l’origine sauvage, est 
cultivée dans tous les jardins. On emploie les feuilles, la 
tige er la semence. On se sert indifféremment de la laitue 
romaine ou de la laitue pommée. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction des feuilles, de 50 à 60 grammes par 
kilog. d'eau. 

Eau distillée (4 sur 2 d’eau}, de 60 à 100 gram. en potion. 

Suc, de 45 à 60 grammes dans un liquide approprié, comme le 

petit lait. 

Extrait, de 2 à 8 grammes, et plus. 

Thriduce, de 50 centig. à 2 gram.et plus, en bols, pilules, potion. 
ee mm reste ete AIS 
expériences sur les effets de la jusquiame, a pu donner des doses énormes 
d'extrait de cette plante (42 gram. en vingt quatre heures) sans qu'on ait 
pu ebserver aucune action spéciale ct curative, ne se servait-il pas d’une 
préparation inerte, ne recélant aucune des propriétés du suc épaissi et 
non altéré par la vétusté ? 


241 


Sirop de thridace (7 sur 60 d’eau et 500 de sirop de sucre bouil- 
lant), de 45 à 30 gram. en potion. 

Teinture de thridace, de 50 cent. à 3 gram. en potion. 

Lactucarium, de 10 cent. à 4 gram.et plus en potion, pilules, etc. 

Sirop de lactucarium, de 45 à 60 gram. en potion. 

Teinture de lactucarium (4 sur iù d'eau-de-vie ), de 90 centigr. 
à 2 gram. en potion. 

A L'EXTÉRIEUR : Décortion de quantité suffisante pour collyre, 
topique sédatif, cataplasmes. 
Thridace et lactucarium, de 50 cent à 2 gram. en collyre,lavement. 
Teinture de lactucarium ou de thridace, en frictions. 


Propriétés. 

La laitue est émolliente, calmante et légèrement narco- 
tique, Elle est fréquemment employée dans les phlegmasies 
aiguës, les névroses, etc. On administre la décoction, l’eau 
distillée, le suc récent, le suc concret, le lactucarium. 
L'usage de ce dernier est généralement répandu, bien qu’il 
soit loin de posséder des vertus aussi prononcées qu'on l’a 
d'abord cru. J'ai pu, en effet, en administrer à grandes 
‘doses sans produire une sédation marquée, excepté, toute- 
fois, chez les sujets qui, ne pouvant supporter sans incon- 
vénient les moindres doses d’opium , sont très-accessibles 
à l'effet des calmants les moins actifs. L’eau distillée de 
laitue est très- fréquemment employée comme légèrement 
hypnotique; elle est souvent l’excipient des potions calmantes. 

Ïl faut distinguer le lactucarium, suc laiteux tiré par in- 
cision de la thridace faite avec le suc exprimé et épaissi du 
tronçon de la laitue. Ce dernier n’a pas autant d'efficacité. 

A l'extérieur, j'emploie la laitue cuite en cataplasme dans 
l’ophtalmie aiguë, dans les inflammations superficielles, 
l'érysipèle, etc. ? Je la donne aussi très- -fréquemment en lave- 
ment dans les irritations intestinales. 

La semence de laitue jouit des mêmes propriétés cal- 
mantes que Ja plante. 


LAITUE VIREUSE, 


LAITUE MÉCONIDE. 
Laciuca virosa (T.) 
Lactura virosa (L.) 


Cette plante croît dans les lieux incultes , les décombres 
et sur le bord des champs. L’herbe est employée. 


Préparations et doses. 
À L'INTÉRIEUR : $uc, de 20 centigr. à 60 gram. progressivement, 
16 


242 


Teinture (4 de feuilles fraiches ou de suc sur 2 d'alcool à 36° } 
de 50 cent, à 5 grammes en potion. 
Extrait aqueux,de10 cent.à 5 gram.et plusen pilules,potion,etc. 
À L'EXTÉRIEUR : Décoction, en fomentations, feuilles en cataplasmes. 
Teinture, en frictions, elc. 


Propriétés. 


Le suc lactescent de cette espèce, dont l’odeur est désa- 
gréable et vireuse, est d’une nature assez analogue à celui 
du pavot. Aussi, la laitue vireuse a-t-elle toujours été regar- 
dée comme beaucoup plus narcotique que celle que l’on 
cultive; les feuilles fraîches ne le sont cependant qu'à un 
degré assez faible ; le suc et surtout l'extrait qu'on en prépare 
sont plus actifs. Huit grammes de cet extrait ont toujours 
fait mourir, en plus ou moins de temps, les chiens auxquels 
M. Orfila les fit prendre. Appliqué sur le tissu cellulaire mis 
à nu, il produit des effets plus marqués que lorsqu'il est 
introduit dans l'estomac. 

Employée à dose thérapeutique, la laitue vireuse a été 
regardée comme très-calmante, diurétique, diaphorétique 
et légèrement laxative. Collin assure s'être toujours servi de 
l'extrait de cette plante avee avantage dans l’hydropisie. Je 
l'ai employé plusieurs fois dans cette maladie sans succès. 
Il est vrai que je ne l'ai point associé à d'autres médicaments 
diurétiques auxquels on doit, le plus souvent, attribuer les 
résultats heureux qu’on a pu obtenir. Il n’en est pas de même 
de l'effet de la laitue vireuse dans les maladies nerveuses, 
contre lesquelles elle peut être employée avec succès. Si elie 
est loin d’avoir l'activité de l’opium, elle n’en à pas non plus 
les inconvénients, et doit Jui être préférée dans certains cas 
et chez certaines personnes. On peut ladministrer à une 
dose beaucoup plus élevée qu'on ne croit généralement. 
Je commence par celle de 20 centigrammes, et j'arrive 
promptement à 60 centigrammes. Je suis parvenu à 
en faie prendre 8 grammes par jour à une femme atteinte 
de douleurs gastralgiques, et chez laquelle la plus légère 
dose d’opium provoquait le vomissement (1). 

La laitue vireuse n'a pas, comme l’opium, l'inconvénient 


a) M. Fouquier cest arrivé graduellement à administrer 10 grammes 
d'extrait de laitue vircuse sans observer d'autre résultat qu'une augmen- 
tation considérable de la sécrétion urinaire. Les effets constants que j'ai 
obtenus de l'usage de cette plante, m'autorisent à crone que M. ! ouquier | 
s’est servi d'un extrait mal préparé, ainsi que cela arrive souvent dans la 

ratique urbaine, où qu'il a employé l'extrait d'une autre espèce de laitue. 
suc exprimé des feuilles et des tiges, épaissi par une évaporation mé: 


243 


de produire la constipation. Le suc épaissi de cette plante 
m'a paru plus actif que l'extrait, qui souvent est mal préparé. 


[ Je me suis toujours très-bien trouvé de l'extrait de laitue 
vireuse, préparé avec le suc épaissi, dans tous les cas où 
l’opium est indiqué, mais non supporté par les malades. Ce 
médicament convient aussi beaucoup mieux que l’opium 
dans les inflammations chroniques douloureuses, telles que 
celles du foie, des intestins et surtout du péritoine ; il agit 
à la fois comme calmant et comme légèrement laxatif, deux 
qualités que l’on rencontre bien rarement dans la même 
substance. J’associe avec avantage l'extrait de laitue vireuse 
à la digitale dans les cas d’ascite causée par la phlegmasie 
chronique du péritoine, dans l'épanchement pleurétique, 
et toutes les fois que dans les hydropisies il y a engorgement 
douloureux d’un ou de plusieurs viscères, lésion des reins 
ou néphrite albumineuse, irritation gastro-intestinale, etc.] 


Dans les affections cancéreuses, surtout celles de l'utérus, 
j'ai adopté l'usage de l'extrait ou plutôt du suc épaissi de 
laitue vireuse, de préférence aux extraits de ciguë, de jus- 
quiame, d’aconit, de stramoine. L'usage prolongé de ces 
dernières plantes nuit presque toujours au lieu d’apporter 
le soulagement que leur réputation semble promettre. Ils 
anéantissent les fonctions de l'estomac, qu'ils irritent et en- 
flamment à la longue ; les doses élevées auxquelles on est 
obligé de porter progressivement ces poiscns, produisent 
une véritable intoxication lente manifestée par des dou- 
leurs dans le tube digestif, des vomissements, des trem- 
blements, des vertiges , des hallucinations , des révasseries, 
la stupeur, la congestion cérébrale, etc. 

Pourquoi,d'aillenrs,tourmenter &es malades incurables par 
une médication réellement morbifique, quand l’usage prudent 
et alternatif de préparations de pavot indigène, de laitue vi- 
reuse et parfois d’opium, suffit pour calmer leurs douieurs? Ne 
sait-on pas aujourd'hui à quoi s’en tenir sur les guérisons 
de squirres et de cancers rapportées par Stork, et dont on 
peut dire avec raison ce que Sydenham, je crois, disait à 
propos des déceptions de la théorie en médecine pratique : 
Ægri curantur 1n bris, et moriuntur in lectis. 


nagée, est la seule opération sur laquelle on puisse compter. Pour que 
cette préparation ait toute son énergie, il faut rejeter le centre de la tige 
comme tout-à-fait inerte et ne pouvant qu'ajouter zu volume, et faire 
croire ainsi à une grande dose de médicament, quand, en réalité, le prin- 
cipe actif n’y est qu'en petite quantité, 


24% 


LAURIER .” 


LAURIER D'APOLLON, LAURIER FRANC, LAURIER-SAUCÉ. 


Laurus vulgaris (T.} 
Laurus nobitis (L.) 


Le laurier , originaire d'Afrique, de la Grèce, etc., na- 
turalisé en Espagne, en Italie, et même dans les départe- 
ments du midi de la France, est cultivé dans les jardins. 
Cet arbre, consacré chez les Grecs au dieu de Ia poésie et 
des arts, était aussi destiné, comme il l’est de nos jours, à 
ceindre le front des vainqueurs, Les feuilles et les fruits 
sont usilés. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion des feuilles, 10 à 20 gram. par kilog. 
d'eau. 
Infusion des baies concussées, 4 à 18 gram. par kilog d'eau. 
Poudre des feuilles (rarement), de 2 à 4 gram. en pilules ou 
délayée dans un liquide. 
Huile essentielle de feuilles, de 4 à 42 gouttes, en potion, pilules, 
oléo-saccharum. 
Poudre des baies, 23 eentig. à { gram. en pilules, potion, élec- 
tuaire, etc. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction des feuilles pour bains, fomentations, 
fumigations. 
Décoction vineuse, pour fomentations. 
Huile exprimée de baies, quantité suffisante pour frictions. 
Ounguent (4 partie de feuilles récentes contuses et de baies sèches 
sur 2 parties d'axouge), en frictions , embrocations. 


Propriétés. 


Les feuilles de laurier, d’une odeur balsamique, d'une 
saveur chaude, aromatique et un peu amère el àcre, pro- 
voquant, par la mastication, une abondaute sécrétion de 
salive, sont aromatiques, très-excilantes, toniques, elc. 
Les propriétés stomachiques, carminatives, expeclorantes, 
diurétiques, sudorifiques, antispasmodiques, emménagogues 
de ces feuilles, ne peuvent se réaliser que dans les cas où les 
organes qui en reçoivent l’action sont dans un état d’atonie, 
de relâchement plus ou moins prononcé. C’est ainsi qu’elles 
conviennent dans l’inappétence, les flatuosités et la difficulté 
des digestions, par débilité de l’estomae ; dans le catarrhe 
pulmonaire chronique, dans l'asthme humide, la bronchor- 
rée, la chlorose, l'aménorrhée avec atonie , la paralysie, 
l'hystérie, l’hypocondrie, sous l'influence des mêmes con- 


LA 


245 


ditions. Elles sont donc manifestement contre-indiquées 
toutes les fois qu’il y a angioténie, orgasme ou inflammation. 

Les fruits, qu’on emploie toujours à l’état sec, jouissent 
des mêmes propriétés que les feuilles, mais à un degré plus 
marqué. Leur ingestion à une certaine dose peut, à cause 
de la vive excitation qu’elle détermine sur l’estomac, provo- 
quer le vomissement, ce qui leur a fait accorder le titre de 
vomilif par les anciens. 

L'huile essentielle de laurier, très-àcre, se donne comme 
carminative et stimulante ; mais on ne s'en sert guère qu’à 
l'extérieur, en liniment, comme calmante, tonique el réso- 
lutive, dans le rhumatisme chronique, la paralysie , les en- 
sorgements indolents des articulations, les infiltrations, etc. 
L'huile exprimée des baies est employée à l'extérieur dans 
les mêmes cas {1}. Dans les pharmacies on lui substitue 
souvent l’onguent de laurier {produit de Ja macération des 
baies et des feuilles écrasées dans le sain-doux) qui n’est pas 
aussi efficace, et qu’on emploie dans les mêmes circon- 
stances. C’est ce dernier onguent dont on fait un si grand 
usage dans la médecine vétérinaire. La décoction des baies 
et des feuilles de laurier est tonique, détersive , résolutive. 
La poudre des feuilles, saupoudrée sur les ulcères atoniques 
et sordides, les déterge en peu de temps. 

Bodart a proposé de substituer le laurier à la cannelle 
(laurus cinnamomum) ,et au laurier cassie ou cassie ligneuse, 
cannelle du Malabar (laurus cassia—cassia aromatica— 
cassia Syrinx—xylocassia—cassia lignea). Pourquoi faut-il, 
dit Gilibert, que les praticiens négligent un arbre qu'ils ont 
sous la main, pour employer avec mystère les congénères 
des Indes! Cet auteur présume que ce qui à faït négiiger 
le laurier, c’est que quelques anciens pharmacologistes ont 
avancé que ses baies faisaient avorter. On faisait boire l’in- 
fusion vineuse de cinq à six baies de laurier à une femme, 
pour savoir si elle était enceinte. Si elle vomissait, on pro- 
nonçait affirmativement ; on déclarait le contraire quand le 


(1) Pour obtenir l'huile de ces baies, on les choisit y arfaitement müres, 
on les pile dans un mortier de marbre, et on les fait bouillir avec de 
l’eau dans un vase cios pendant environ une demi heure ; on passe avec 
expression la liqueur bouillante à travers un linge, et apres le refroi- 
dissement on ramasse , à la surface de cette liqueur , une huile verte, 
odorante, de consistance butireuse. En pilant le marc et en le faisant 
bouillir une seeonde fois dans l'eau, on obtient une autre portion d'huile 

ue l’on réunit à la premiére. Ce produit se compose de deux huïtes, 
l'une fluide, odorante et volatile, qu’on sépare par la distillation ; l'autre 
fixe , concrète et qui ne doit son odeur faible de laurier qu’a la petite 
quantité d'huile de laurier qu’elle retient. 


246 


vomissement n'avait pas lieu. On sait aujourd’hui à quoi 

s’en tenir sur cette épreuve, et l’on est bien convaincu aussi 
que jamais les baies de laurier , même à haute dose, n’ont 
produit l'avortement. 


LAURIER CERISE, * 


LAURIER AMANDIER , LAURIER DE TRÉBISONDE , LAURIER TARTE, 
LAURIER AU LAIT. 


Laurus cerasus (T.) 
Prunus lauro cerasus (L.) 


Cet arbre, originaire des bords de la Mer Noire, est cultivé 
dans les jardins. °Les feuilles fraîches sont employées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Eau distillée limpide (4 sur 4 d'eau) de 45 à 100 
et beaucoup plus. 


Huile essentielle, 5 à 40 cent. en plusieurs fois, oléosacharum , 
potion. 


Conserve, de 4 à 30 gram. en plusieurs fois. 

A L'EXTÉRIEUR : Huile essentielle , 50 cent. à 4 gram. mêlée à 415 
gram. d'huile d'olives, d'amandes äouces ou d’æillette, pour 
frictions. 

Infusion des feuilles récentes, à vase clos, 125 gram. par kilog. 
d'eau, avec addition de 425 gram. de miel, en lotions. 


Propriétés. 


Les feuilles de ce laurier sont très-amères et légèrement 
SLY ptiques. Les noyaux de son fruit, d'une amertume ana- 
Jogue à celle des feuilles, sont de la nature de celle des 
amandes amères. Toutes les propriétés toxiques et médi- 

cales de cette plante paraissent dues, en grande partie du 
moins, à la présence de l acide hydrocyanique qu'elles con- 
tiennent. L’empoisonnement par les différents produits de 
cet arbre se manifeste par une action prompte et énergique 
sur les divers centres nerveux. Quand la mort n’a pas lieu 
immédiatement après l’ingestion du poison, on observe, en 
général, des douleurs à F épigasire el à la partie antérieure 
de la tête, des envies de vomir, des coliques, des engour- 
dissements , des picotements et des fourmillements ‘dans 
toutes les parties du corps, une sorte d'ivresse, des étourdis- 
sements, de l’accablement, de la difficulté de respirer, 
l'abolition partielle des mouvements musculaire ou des con- 


247 


vulsions également partielles, le resserrement tétanique des 
mâchoires, la fixité des yeux, etc. On ne trouve à l'ouverture 
du corps aucune altération organique ; on observeseulement, 
comme après l'empoisonnemeni par les narcotiques, les vais- 
seaux du cerveau injectés par un sang liquide. Cependant 
Fodéré trouva l'estomac légèrement enflammé chez un hom- 
me et une femme que l’eau distillée de laurier cerise avait fait 
périr dans les convulsions. L’acide hydrocyanique-anhydre, 
le plus actif des poisons eonnus, cause si promptement la 
mort, que Lout secours est ordinairement inutile : la mort 
arrive en une ou deux minutes et Comme par asphyxie. 
Il en est de même de l’acide hydrocyanique de Schèele, à 
une dose plus forte ; l’eau distiilée et l'huile de laurier cerise: 
agissent aussi comme ces derniers. 

Si lon en croit quelques praticiens, l’eau distillée de 
Jaurier cerise est toxique au point de donner la mort à un 
animal de forte taille, à la dose de 4 à 8 ou 15 grammes. 
« Néanmoins, dit M. Richard, d’autres faits, el en assez 
grand nombre, paraîtraient prouver son peu d'action et en 
quelque sorte son innoeuité. Ainsi, M. Robert, pharmacien 
de Rouen, a fait sur l’eau distillée de laurier cerise des 
expériences nombreuses dont il a consigné les résultats dans 
le Recueil de l'Académie de Rouen et dans les Annales de 
cliniques d'octobre 181%. M. Robert dit avoir pris deux cuil- 
lerées d’eau disullée de laurier cerise très-odorante sans en 
avoir éprouvé aucun effet. Il a fait prendre à un chien et à 
des couleuvres une dose très-forte d'huile volatile de la même 
plante, sans que ees animaux aient paru en souffrir en 
aucune manière. Le professeur Fouquier, dans sa clinique 
à l'hôpital de la Charité, a essayée l’eau distillée de laurier 
cerise dans les différents cas où son usage avait élé recom- 
mandé. L’ayant d'abord donnée à la dose de quelques gros 
étendue dans 4 à 6 onces de véhicule, il n’en a retiré aucun 
effet. Il l’a alors administrée pure à la dose de deint once, 
puis de 1 once, de 2 onces. et ainsi en augmentant rapide- 
ment. J'ai vu ce praticien donner ce médicament à la dose 
de 12 ec même de 16 onces dans les vingt-quaire heures, 
sans que les malades en éprouvassent d’autres accidenis que 
quelques vomissements, où parfois un léger embarras gas- 
trique. Un résultat aussi contraire à celui obtenu par le plus 
grand nombre des autres praticiens a dû éveiller l'attention 
de M. Fouquier. Il a d’abord pensé que le médicament dont 
il s'était servi pouvait avoir été mal préparé ou avoir perdu 
son activité. I a donc prié M. Henri, chef de la pharmacie 
centrale des hospices civils de Paris, de lui préparer une eau 


248 


de laurier cerise double, c'est-à-dire, en employant une 
quantité double de feuilles pour une même dose de liquide. 
Ayant fait usage de cette nouvelle préparation, M. Fouquier 
a obtenu de semblables résultats. » (Dichon. de Méd., 2° édht., 
XVII, D. 597.) 

L'action plus ou moins énergique de l’eau distillée de 
laurier cerise peut tenir à sa composition, qui varie suivant 
la nature des feuilles employées et le genre de préparation, 
à son ancienneté et à son mode de conservation. Il convient 
d'employer les feuilles récentes, récoltées en juin. Au prin- 
temps, elles n’ont pas encore acquis leur force ; en automne 
elles l'ont perdue. On doit se servir d’un filtre mouillé, afin 
de séparer complètement l'huile essentielle qui pourrait 
rester en suspension. Cette eau sera renouvelée chaque 
année et conservée dans un flacon recouvert de papier bleu 
à l'abri du contact de l'air et de la lumière (1). 

Il est de la plus haute importance de faire connaître que 
le calomel, mis en rapport avec l’eau distillée de laurier 
cerise, produit un poison insoluble, même à petite dose. 

L'huile essentielle de laurier cerise, douée d'une exces- 
sive âcreté, détermine promptement la mort, même à faible 
dose. Cependant on l’emploie comme médicament dans les 
cas où l'eau distillée de la même plante est indiquée. On la 
donne à Ja dose d’une gouite, divisée et suspendue dans une 
potion appropriée, que l’on fait prendre par cuillerées dans 
les vingt-quatre heures : on augmerte graduellement la dose 
suivant les effets obtenus, mais toujours avec circonspection 
et à mesure que l’on s'aperçoit que son action diminue par 
l'habitude. 

L’utilité du laurier cerise, dans certaines maladies, ne 
fait point doute. C’est particulièrement dans les affections 


(A) Cette eau a d'autant plus de force qu'elle est plus récente, plus 
trouble, ce qui est causé par l'huile essentielle qu'elle tient en suspen- 
sion. Si on la filtre, comme le recommande avec raison le codex, l'huile 
s'en trouve séparée, et il ne reste plus qu'un liquide transparent, 
beaucoup plus doux que celui qui ne contient que peu ou point d'huile 
essentielle, et qi peut sans inconvénient être prescrit par onces. Si, au 
contraire, on la laisse trouble, elle devient vénéneuse à la dose de 4 à 2 
gros (4 à esse on ne peut la donner à plus de 20 à 30 gouttes, en 
prenant la précaution de remuer le mélange pour qu'il ne reste point 
d’huile essentielis en suspension ; d’où il résulte que ce médicament est 
inégal dans son action, variable suivant les pharmacies où on le prépare. 
Il vaudrait mieux, ainsi que le conseillent MM. Mérat ct Delens (Dict. 
univers, de Therapeut.) préparer extemporanément l'eau de laurier cerise 
en versant une goutte d'huile essentielle par once d'une eau distilléc 
quelconque ,que l'on prendrait en quatre doses à deux heures de distance 


249 


où l’irritabilité est accrue et où l'indication patente est de 
diminuer cette irritabilité et d’enrayer conséquemment l’ac- 
tion des organes, qu’on l’a employé avec succès. Il semble 
diminuer la trop grande irritabilité du cœur et favoriser, au 
contraire, l’action des vaisseaux absorbants. Les médecins 
italiens le considèrent comme un excellent contro-stimulant, 
et l’emploient dans tous les cas où il s’agit de combattre 
l'hypersthénie (les phlegmasies les plus aiguës , telles que 
Ja pheumonie, la pleurésie, l’angine, etc.) Les médecins 
français sont loin de partager cette opinion, que l'expé- 
rience, du reste, n’a pas justifiée. 

On a recommandé l'usage de FPinfusion des feuilles de 
laurier cerise dans la phthisie pulmonaire (Linné, Bayllies); 
la mélancolie, l'asthme, le rhumatisme , la fièvre hectique 
(Baylles); les engorgements du foie et des autres viscères 
de l'abdomen { Cameron, Ducellier, Thomacen) ; l'hystérie, 
l'hypocondrie {Thilenius). L'eau distillée des feuilles de 
cetie plante a été employée dans la syphilis et la gonorrhée 
(Mayer); dans les palpitations du cœur , la pneumonie, l’an- 
gine, l’entérite, etc. (Cévasco); on à injecté cette eau dans 
les veines contre Ja rage, mais sans succès { Dupuytren ). 
On en a constaté l'efficacité en vapeur inspirée dans les 
affections spasmodiques des poumons et des muscles de la 
poitrine à la dose de 4 à 15 gram., versée sur un vase chaud 
de manière à s'évaporer en dix ou douze minutes (Krimer). 

L’infusion des feuilles ou l'eau distillée de laurier cerise 
est utile dans les inflammations superficielles ou trauma- 
tiques de la peau, les brûlures, les contusions douloureuses, 
les cancères ulcérés, les affections cutanées chroniques avec 
prurit et douleur, les engorgements laiteux des mamelles. 
M. Caron-Duvillard (Bulletin thérapeut., année 1834) a em- 
ployé l’eau distillée de laurier cerise avec succès dans ce 
dernier cas chez une dame qui, ayant été obligée desuspendre 
subitement l'allaitement, fut prise de sympiômes inflamma- 
loires aux seins. Ce médecin fit faire, sur les parties malades, 
des embrocations avec cette eau battue avec partie égale 
d'huile d'amandes amères. Il fit prendre de temps en temps 
à Ja malade quelques cuillerées à café d'eau distillée de 
laurier cerise. Le soulagement fut prompt. On peut se bor- 
ner, dans ce cas, à l'emploi extérieur de ce médicament. 
M. Caron-Duvillard a employé avec succès le même moyen 
contre le prurit des parties génitales et de l'anus, les vio- 
lentes démangeaisons qui accompagnent la dessiccation des 
boutons de la variole. Dans ce dernier cas, il faisait prendre 
des bains composés de décoction de pieds de veau coupée avec 

t 


250 


F'eau distillée de laurier cerise. Je pense que la simple décoc- 
tion de pieds de veau er de feuilles de laurier cerise suffirait. 

Les feuilles du laurier cerise pulvérisées peuvent se don- 
ner comme un puissant sternutatoire à la dose de 20 à 40 
centigrammes. Mêlées avec de la farine de graine de lin, ces 
mêmes feuilles peuvent être employées en cataplasmes sur 
les cancers, les ulcères douloureux, ete M. Janin, dans les 
mêmes cas, se sert d’une pommade faite avec l'huile essen- 
tielle dans l’axonge {% gram. pour 60 gram. d'axonge.) 


ACIDE HYDROCYANIQUE MÉDICINAL, Ou acide hydrocyanique 
étendue de six fois son volume d'eau distillée, ou mieux d’al- 
cool, comme s'évaporant moins promptement (Magendhe.) 

L'inconstance des effets de Feau de laurier cerise et les 
inconvénients attachés à sa préparation, ont engagé la plu- 
part des médecins à employer de préférence l'acide hydro- 
cyanique étendu d'eau dans les proportions convenables, et 
connu sous le nom d’acide hydrocyanique médicinal. On 
l'emploie dans les maladies sthéniques, la pneumonie et Ja 
pleurésie chroniques, l’inflammation des bronches, le 
catarrhe pulmonaire chronique, l'hémoptysie, les spasmes. 
hémorrhoïdaux, la phthisie tuberculeuse (Manzom); les ma- 
ladies du cœur et surtout les affections spasmodiques de cet 
organe, comme sédatif de la circulation (Brera); les toux 
purement nerveuses, chroniques, pour modérer lexpecto- 
ration et favoriser le sommeil (Magendie) ; les dyspnées, læ 
coqueluche (Coulon, Grandville, Hcinken); les affections 
vermineuses, le rhumatisme (Bréra). 

M. Magendie administre ordinairement l'acide hydrocya- 
nique ainsi qu'il suit : {° acide prussique-médicinal 4 gram., 
eau distillée 500 gram., sucre pur 45 gram.—dose : une 
cuillerée à bouche le matin et une le soir en se couchant ; on 
peut élever la dose de ce mélange jusqu'à six el même huit 
cuillerées ex vingt-quatre heures. 2 Infusion de lierre ter- 
restre 60 gram., acide hydrocyanique médical #5 gouttes, 
sirop de guimauve 30 gram., pour une potion à prendre par 
cuillerée à bouche de trois heures en trois heures. Chaque 
fois qu'on fait usage de ces mélanges, il faut remuer la bou- 
teille, sinon l'acide, s’accumulant à la surface, peut être 
pris en trop grande quantité et causer des accidents plus 
ou moins graves. 

J'ai été plusieurs fois à même de constater Ja propriété 
sédative de l'acide hydrocyanique dans les palpitations soit 
nerveuses, soit symptomatiques des lésions organiques. J'ai 
employé ce médicament avec avantage dans les cas de 


251 


pléthore pulmonaire accompagnant les premiers degrés de 
la phthisie. On l’a beaucoup trop vanté contre cette maladie, 
où il ne convient que comme palliatif. Je m'en suis bien 
trouvé dans tous les cas de palpitations et de dyspnées 
soit essentielles ou nerveuses, soit symptomatiques de lésions 
organiques. Seulement, dans ces derniers cas, la maladie 
étant incurable, il ne pouvait procurer qu'un soulagement 
momentané. Je l'ai vu réussir quand la digitale avait échoué : 
M. Laïné, directeur des messageries à Calais, âgé de trente- 
huit ans, d'un tempérament sanguin , d’une haute taille et 
d’une forte constitution , ayant eu de légères attaques de 
goutte aux gros orteils depuis deux à trois ans, livré à un 
genre de vie exciiant, fut pris, vers huit heures du malin, 
après un sommeil fort agité et une violente palpitation, d'une 
grande difficulté de respirer,avec un sentiment d’anxiété et de 
constriction précordiale inexprimable, yeux étincelants, face 
animée, pouls accéléré, plein. Le malade, se refusant obsti- 
nément à une saignée du bras, malgré mes instances, je lui 
prescrivis une potion composée d’eau distillée de laitue 
125 gram., teinture de digitale { gram. 50 cenligr., nitrate 
de potasse 2 gram., sirop de thridace 30 gram. Cette potion, 
prise par cuillerée à bouche de demi-heure en demi-heure 
dans l’espace de deux à trois heures, n'apporla aucun sou- 
lagement. J'administrai alors l'acide hydrocyanique médi- 
cinal à la dose de 12 gouttes dans quatre onces d'eau de 
laitue. Les deux premières cuillerées, données à dix minutes 
d'intervalle diminuèrent la fréquence du pouls; une troisième 
cuillerée,administrée presque immédiatement,amena un sou- 
lagement marqué. Le mieux se prononçant de plus en plus, 
j'éloignai les doses du médicament. L'application répétée de 
sangsues à l'anus, et despédiluves sinapisés qui provoquèrent 
l'apparition de la goutte, prévinrent le retour de nouveaux 
accès de dyspnée. 

J'ai toujours observé que l'acide hydrocyanique était 
nuisible dans les phlegmasies aiguës, dans les irritations 
vasculaires gastro-intestinales, el dans les cas où il fallait 
l'employer long-temps et en augmenter progressivement les 
doses. Dans ces dernières circonstances, j'ai pu bien rare- 
ment en continuer l'usage, à cause des accidents qu’il déter- 
minait. On doit tout au moins, quand on le croit indiqué, 
en suspendre de temps en temps l'administration, afin de 
pouvoir le reprendre à doses plus légères ; enfin, c'est un de 
ces médicaments qu'il ne faut employer qu'avec une extrême 
prudence. 

On se sert, à l'extérieur, de l'acide hydrocyanique dans 


252 


les névralgies faciales, et pour calmer les douleurs et retarder 
la funeste terminaison du cancer des mamelles, des testi- 
cules, de l’utérus, etc., où il agit à la fois comme calmant 
et comme antiseptique. Il convient aussi dans les dartres, 
le prurit de la vulve, la couperose, etc. On emploie dans ces 
cas, pour lotions et pour injections , d’après la formule de 
M. Magendie, un mélange de #4 à 8 grammes d'acide hydro- 
cyanique médicinal, et de 2 kilog. d’eau de laitue. On peut 
augmenter la dose de l'acide de 8 à 16 grammes. 


LAURIER ROSE. * 


Nerium floribus rubescentibus (T.) 
Nerium oleander (L.) 


Le laurier rose, qui appartient à la famille des apocynées, 
croît spontanément dans la partie méridionale de l’Europe, en 
Barbarie et dans l'Orient. On le trouve dans le midi de la 
France, aux environs d'Hyères, près de Toulon. On le cul- 
tive partout ailleurs en caisse dans les jardins, pour la forme 
élégante de ses fleurs. Les feuilles sont usitées. 


Propriétés. 

Cet arbrisseau, dont l'écorce et les feuilles ont une odeur 
désagréable, une saveur âcre et amère, est extrêmement 
délétère. Son principe vénéneux, qui existe dans toute Ja 
plante, est tellement subtil que ses émanations seules ont 
sufli pour déterminer des accidents graves et même la mort; 
mais ce principe s’affaiblit par la culture. Cependant M.Orfila 
a prouvé que celte plante, cultivée à Paris , était un poison 
extrêmement violent et dont l'acuüon, analogue à celle des 
stupéfiants, se portait sur le système nerveux et spécialement 
sur le cerveau. Libautius rapporte qu’un individu mourut 
pour avoir laissé la nuit, dans sa chambre à coucher, des 
leurs de laurier rose, et qu'une autre personne périt égale- 
ment après avoir mangé d’un rôti pour lequel on s'était 
servi d’une broche faite avec le bois de cet arbuste. Malgré 
les propriétés dangereuses du laurier rose, les gens du peuple 
du midi de la France l'ont employé contre les maladies de 
la peau. Des praticiens même l'ont administré à l'intérieur 
dans ces mêmes maladies et dans la syphilis ; mais comme 
il a été reconnu aussi inutile que dangereux par Loise- 
leur-Deslonchamps et Marquis (Dct. des scienc. méd. } 
et que presque tous les praticiens partagent celte opinion, 
on fera bien de ne l'employer qu'à l'extérieur , où il s’est 


253 


montré efficace contre la gale, la teigne , certaines dartres. 
Pour cela, on se sert de la décoction de ses feuilles dans 
l'huile, ou d'une pommade composée de ces mêmes feuilles 
en poudre et de graisse. On emploie l’une et l'autre en 
frictions. On peut aussi mettre en usage la solution de l’ex- 
trait des feuilles dans l’eau, avec laquelle on lave les pustules 
psoriques. Les proportions de ce mélange sont de 4 gram. 
et plus pour 125 gram. d’eau, pour trois ou quatre jours de 
traitement. Ce traitement, employé en 1811 et 1812 dans 
une salle de galeux, a eu des succès marqués. Le docteur 
Gray a prescrit aussi avec un égal avantage, contre la gale, 
la digestion des feuilles de laurier rose dans l'huile. 

Les feuilles pulvérisées de cette plante sont sternutatoires : 
l’action en est d’abord peu prononcée sur la pituitaire, mais 
ensuite elle fait éternuer violemment. En raison des dangers 
de son emploi, on devra même s’en abstenir de cette manière. 


LAVANDE, 


LAVANDE OFFICINALE. 


Lavandula angustifolia (T.) 
Lavandula spica (L.) 


Cette plante croît spontanément dans les départements du 
midi de la France, et est cultivée dans nos jardins. Les som- 
mités fleuries sont usitées. 


Préparations et doses, 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, 6 à 42 gram. par kilog.d’ean. 
Eau distitlée (1 sur 4 d'eau), 30 à 400 gram. en potion. 
Huile essentielle, 40 à 20 centig. en potion, pilules, etc. 
T'einture, 2 à 4 gram. en potion, etc. 
Poudre, À à 4 gram. en pilules, potion, etc. 
A L'EXTÉRIEUR : Infusion, en lotions, fomentations, famigations. 
Teinture ou alcoolat, quantité suffisante en frictions, et pour la 
toilette. 
Vinaigre (4 sur 12 de vinaigre), idem. 


Propriétés. 


Cette plante, d’une odeur très-agréable, est aromatique, 
stimulante et tonique. Ses sommités fournissent plus d'huile 
essentielle que ses feuilles. Cette huile contient beaucoup de 
camphre. | Ç 

[Comme toutes les plantes du même genre, la lavande 
convient dans les affections nerveuses atoniques, la débilité 
des organes digestifs, les catarrhes chroniques avec expec- 
toration el sans chaleur fébrile ; dans l’asthme humide, les 


204 


rhumatismes anciens, etc.; mais on doit s’en abstenir dans 
tous les cas où il y a chaleur, sécheresse, fièvre, réaction 
vitale, irritabilité vive, congestion vers la tête, etc. 

On attribue à la lavande la propriété de provoquer les 
règles ; mais il est évident qu’elle ne peut avoir cette pro- 
priété que lorsqu'un état de débilité en indique l'usage ; 
elle ne saurait avoir pour cela une vertu plus spéciale que 
toutes les autres plantes aromatiques ou stimulantes. 

A l'extérieur, la lavande est employée en infusion aqueuse 
ou vineuse comme stimulante, tonique et résolutive. On 
fait, avec la plante sèche, des sachets qu'on applique sur les 
contusions et sur les engorgements atoniques. La teinture 
alcoolique est employée en gargarisme dans la paralysie de 
Ja langue. La teinture et l'huile volatile sont en usage dans 
les liniments excitants. 


La GRANDE LAVANDE, qui n’est qu’une variété de la lavande 
officinale, croissant dans les lieux secs et pierreux de la 
Provence et du Languedoc, fournit une huile volatile connue 
dans le commerce sous le nom d'huile d'aspic ou de spi. 
Cette huile est particulièrement employée dans l’art vétéri- 
naire. 


La Lavanne srÉcras, lavande dentelée Per. Steæ- 
chas, L.), qui nous venait autrefois de l'Arabie, que nous 
lirons maintenant de Ja Provence, est d'une odeur forte et 
térébenthinée, d'une saveur chaude, âcre et amère ; elle est 
très-riche en huile volatile et fait la base du sirop de stéchas 
composé. Elle offre, dit Bodart, un aromate dont nous avons 
souvent éprouvé l'efficacité dans les embarras de l'organe de 
Ja respiration et dans l’oppression. On confond souvent cette 
plane, chez les herboristes, avec le gnaphalium stæchas, qui 

n'a avec elle aucun rapport. 


LIERRE, 


LIERRE GRIMPANT , LIERRE DES POËTES. 
Hedera arborea (T.) 
Hedera heïix (L.) 
Cette plante, connue de tout le monde, se trouve partout 


autour des arbres, sur les murs, etc. On emploie ses feuilles, 
ses baies, et la gomme qui découle de son tronc. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction des feuilles, 2 à G gram. pour 
4/2 kilog. d'eau. 


255 


änfusion ou décoction des baies concassées, 2 à 4 gram. pour 4/2 

kilog. d’eau. 

Poudre des feuilles, 4 à 2 grammes en pilules ou dans un liquide 

approprié, 

Poudre des baies, 50 centig. à 4 gram. 50 cent. dans un liquide 

approprié, électuaire, bols, pilules, etc. 
À L'EXTÉRIEUR : Décoction, pour fomentations, lotions, cata- 
plasmes , ec. 
Propriétés. 

Les feuilles de lierre sont amères, austères, nauséeuses, 
et ont quelquefois été employées comme excilanies, emmé- 
nagogues, détersives. La décoction vineuse de ses feuilles 
est regardée comme ayant de l'efficacité contre les ulcères 
atoniques, fongueux, sanieux, la teigne, la gale, etc. Je l'ai 
essayée contre “celte dernière affection sans succès. J'ai vu 
employer avec avantage, sur les brûlures du premier et du 
second degré, les feuilles de lierre bouillies dans l’eau, 
appliquées sur la partie malade et recouvertes de compresses 
trempées dans la décoction tiède et souvent renouvelées. 
Ces mêmes feuilles , réduites en cataplasmes , sont résolu- 
tives eu peuvent être employées contre les engorgements 
froids. Avec le bois mou et spongieux du lierre je fais faire 
de petites boules ou pois qui servent à entretenir l'ouver- 
ture des cautères, comme ses feuilles à les tenir frais. 

Les fruits ou baies de lierre, d’une saveur acidule qui 
devient amère et âcre après la dessiccalion, passent pour un 
éméto-cathartique assez violent. 

[ Ces baies, que les paysans emploient contre les fièvres 
intermiltentes, doivent être administrées avec prudence. 
Hoffmann et Simon Pauli les regardaient comme dange- 
reuses. Boile les donnait à haute dose comme sudorifiques. 
On les a employées comme telles dans la peste de Londres : 
on les donnait en poudre et délayées dans le vinaigre. Spigel 
les a administrées comme fébrifuges. Je les ai employées 
comme telles en 1847, d’abord à dose éméto-cathartique et 
ensuite à dose nauséeuse et altérante ; elles ont réussi dans 
deux cas de fièvre tierce vernale, et dans un cas de fièvre 
quotidienne automnale qui durait depuis six semaines, et 
contre laquelle le malade n'avait employé aucun traitement. 
Les accès disparurent après les trois premières doses chez 
les deux premiers malades. La fièvre quotidienne céda peu 
à peu et ne fut entièrement dtssipée qu'après la cinquième 
dose (2 gram. en poudre dans du vin). Dans deux cas de 
fièvre quarte, je n’ai obtenu qu'une diminution dans l'inten- 
sité et dans la durée des paroxismes. Ce médicament cause 


256 


des nausées, un état de malaise suivi d’une excitation ma- 
nifeste et quelquefois d'un peu de transpiration favorisée 
par Ja chaleur du lit. La décoction vineuse des feuilles pro- 
duit le même effet L'action énergique de cette plante sur 
nos organes mérite l'attention des médecins praticiens ; des 
observations cliniques bien faites, et déterminant avec pré- 
cision ses propriétés, lui assigneraient indubitablement une 
place distinguée dans la matière médicale indigène. Je me 
propose de la soumettre à de nouveaux essais, tant pour en 
étudier les effets immédiats et secondaires sur l'organisme, 
que pour en apprécier l'application thérapeutique. 

LA Résine, ou Gomme de lierre, Gomme hedérée, d’une 
odeur résineuse agréable lorsqu'on la brûle , paraît être la 
partie la plus active de cette plante. Stahl employait cette 
substance comme excitante, emménagogue et fondante. Ne 
pourrait-on pas, d’après ces propriétés, la substituer à la 
myrrhe ? On l'a employée comme topique dans le traitement 
de la teigne, et on lui attribue aussi la propriété de tuer les 
poux et de faire tomber les cheveux. On dit, enfin, qu'in- 
troduite dans les cavités des dents cariées, elle calme la dou- 
leur et combat la carie. 


LIERRE TERRESTRE, 


HERBE DE LA SAINT-JEAN, RONDOTTE, DRIENNE. 


Calamintha humilior, folio rotundiore (T.) 
Glechoma hederacea (L.) 


Cette plante, très-commune dans toute la France, se 
trouve dans les fossés humides, le long des haies, dans les 
lieux frais et ombragés. L’herbe entière est usitée. 


Préparations et doses. 

A L'INTÉRIEUR : Infusion, 10 à 25 gram.par kilog. d'eau bouillante. 
Suc, 50 à 80 grammes. 
Sirop (4 de suc sur 4 de sirop simple), 25 à 60 gram, en potion. 
Eau distillée, 50 à 100 gram. en potion. 
Exirait (4 sur 6 d'eau), 4 à 4 gram. en pilules, électuaire, etc. 
Conserve (4 sur 2 de sucre), 4 à 4 gram en pilules, bols, etc. 
Feuilles en poudre, 2 à 4 gram. dans un liquide approprié, en 

électuaire, etc. 
A L'EXTÉRIEUR : Infusion, en lotions, fomentations, cataplasmes,etc, 
Propriétés. 


Cette plante, d'une odeur aromatique, d’une saveur bal- 
samique, amère et un peu âcre, connue dans nos campagnes 


257 


sous le nom de drienne, est vulgairement employée dans un 
grand nombre de cas. Je l’'administre toujours avec confiance 
dans la période d’atonie des brochites, dans la bronchorrhée, 
et en général dans toutes les affections de poitrine où une 
expecloration muqueuse ou purulente se manifeste avec une 
certaine abondance. J'ai guéri, par le seul usage d’une forte 
infusion de lierre terrestre , des catarrhes pulmonaires chro- 
niques qui, Sans l'exploration des organes respiratoires , 
auraient été considérés comme des phihisies bien caractéri- 
sées. Les nombreux exemples de guérison de phthisies attri- 
bués à l'usage de cette plante et annoncés par Willis, Morton, 
Rivière , Sauvages , et plusieurs autres médecins recom- 
mandables, se rapportaient, sans doute, à des catarrhes 
pulmonaires chroniques. 

[ Cullen , quoique privé des ressources exploratrices que 
nous possédons , a plus sainement apprécié les propriétés 
du lierre terrestre. « Ce que les auteurs de matière médi- 
cale disent de cette plante , » écrit ce judicieux médecin, 
« ne me paraît pas mieux fondé que les opinions vulgaires. 
Il me semble absolument dénué de probabilité qu’elle ait la 
vertu de guérir les ulcères des poumons et différentes espè- 
ces de phthisie. L'autorité de Simon Pauli ou d'autres auteurs 
n’aaucune valeur à mes veux, vu la nature deces maladies et la 
difficulté de les guérir en général. Son usage contre les cal- 
culs de la vessie n’est pas appuyé de meilleures autorités ni 
plus probable, et je ne craindrais pas de commettre d'excès 
en l’employant à grande dose.» ] 

Ne peut-on pas en dire autant de l'efficacité de cette la- 
biée, suivant Lautt, contre les fièvres intermittentes, ‘de la 
guérison d’une céphalalgie invétérée et autres effets mer- 
veilleux observés par Raï, et que la saine raison réprouve ; 
contre les maladies mentales comme un sédatif direct de 
l’'encéphale , au rapport du docteur Sultiffe, qui en a fait 
usage pendant vingt-trois ans avec succès, en y joignant 
toutefois la saignée , sans se douter de la puissance de ce 
dernier moyen, qu'il regardait probablement comme un 
faible auxiliaire. Sunt qui oculos habent et non vident. 

Le lierre terrestre est employé à l'extérieur en décoction, 
en cataplasme ou en poudre comme aromatique, tonique, 
résolutif et détersif. On l'employait autrefois et on l'em- 
ploie encore dans nos campagnes , ainsi que beaucoup d’au- 
tres plantes, pour déterger les ulcères. 

Cette plante doit être récoltée à la fin de juin ou au com- 
mencement de juillet, mondée de ses tiges et de ses pétio- 
les, séchée à l’étuve ou au soleil et conservée dans un lieu 

17 


258 


see et à l'abri du contact de l'air, sinon æile perd son arô- 
me, attire l'humidité et noircit. 


LILAS, 


LILAC. 


\  Syringa cœrulea sive alba (T.) 
Syringa vulgaris (L.) 


Cette plante, que l’on ‘cultive dans les jardins pour la 
beauté de ses fleurs, est connue de tout le monde. Les cap- 
sules sont employées. 


Fréparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction , 25 à 60 gram. par kilog. d'eau. 
Poudre , À à 4 gram. en électuaire ou dans du vin. 
Vin (45 à 50 gra!n. pour 4 kilog. de vin rouge ou blanc), 60 à 100. 
Extrait mou, 4 à 8 gram.en pilules, bols, ou dans du vin. 


Propriétés. 


Les capsules vertes du lilas, dont la saveur est amère, 
ont été proposées comme succédanées du quinquina. J'ai 
administré ce fébrifuge dans quatre cas de fièvres intermit- 
tentes tierces. Trois fois il a manqué son effet. Le seul cas 
où j'ai pu lui attribuer la cessation des accès est d'autant 
plus douteux que le malade avait déjà éprouvé une diminu - 
tion notable dans l'intensité du dernier paroxisme. 

Les capsules vertes du lilas, qu'il est si facile de se pro- 
curer, peuvent néanmoins être employées comme toniques 
et astringentes. 

[ M. Cruveilhier à le premier attiré l'attention des prati- 
ciens sur le lilas. Il a fait préparer, avec les capsules encore 
vertes de cette plante, un extrait mou qu’il regarde comme 
ionique et fébrifuge. Il a administré cet extrait, à la dose 
de 4 grammes , pendant deux ou trois jours , à six malades 
atteints de fièvres intermittentes plus ou moins invétérées, 
et qui ont tous été guéris. ] 

De tels résultats sont de nature à appeler l'attention des 
médecins sur ce fébrifuge indigène. Je me propose de l'em- 
ployer de nouveau et d’en étudier avec soin les effets. 


259 


LIN, 


LIN. CULTIVÉ: 


Linum sativum (T.) 
Linum usitatissimum (L.) 


Cette plame, originaire d'Égypte et d'Italie, est cultivée 
partout comme plante textile et pour l'huile que fournit sa 
graine. 


Préparailions et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion des semences , 6 à 48 gram par kilogram. 
d'eau , pendant quelques minutes seulement, afin qu’elle ne soit 
pas trop épaisse. | 

Tuile (par expression à froid) par cuillerées, plus ou moins, selon 
l'effet qu'on désire. 


A L’EXTÉRIEUR : Décoclion des graines , de 45 à 30 gram. par kilog. 
d'eau pour inj-etions, lotions, fomentations , lavements. 
Farine en cataplasmes. — Huile en frictions, embrocatiens, etc. 


Fropriétés. 


Les semences de lin sont mucilagineuses, émollientes, 
adoucissantes. Elles sont employées, tant à l’imérieur qu’à 
l'extérieur, dans presque toutes les maladies inflammatoires 
telles que la gastrite, l'entérite, la dysenterie, la péritonite, 
les hémorrhagies actives , la cystite, lischurie , Ja strangu- 
rie, la blennorrhagie, Ia pneumonie, la pleurésie, etc. Dans 
toutes les inflammations externes, les ulcères irrités, les 
plaies douloureuses, etc., ses semences forment la base des 
cataplasmes émollients. 

J'ai remplacé depuis long-temps la gomme arabique et 
tous les mucilages coûteux par celui de graine de lin. Il n’a 
pas, comme celui de gomme, l'inconvénient dé produire la 
constipation , et est bien plus antiphlogistique. Afin de ne 
pas employer le pain dans les cataplasmes, je les compose 
avec la décoction de graine de lin et une suflisante quantité 
de son. Ainsi préparés, ils sont plus économiques et plus 
légers que ceux que l'on fait avec la farine de lin. 

[ L'huile de lin, que Gesner et Wauiers substituaient à 
l'huile d'amandes douces, est très-relàchante. Prise par 
cuillerées à bouche , à peu de distance les unes des autres, 
“elle agit comme laxative. A des distances assez éloignées, 
et mêlée avec un sirop, elle est seulement adoucissante. Ce 
dernier mode d'administration convient dans les cas de 


260 


phlegmasie et particulièrement dans celles des organes de la 
respiration. Baglivi, Sydenham, Gesner, vantent son effica- 
cité dans la pleurésie. D’autres auteurs la recommandent 
dans l’hémoptysie; elle convient surtout dans cette dernière 
maladie lorsqu'il y a une vive irritation des bronches. En 
pareil cas , je l’ai employée une fois avec un succès marqué. 
Dehaen et Van Swieten la préconisent, prise à grande dose, 
contre l’ileus et la colique métallique. Ruland a guéri un 
paysan dont le ventre était devenu dur comme une pierre par 
l'engouement stercoral, en lui administrant un lavement de 
5onces (150 grammes) d'huile de lin. Michel (Journ. de 
Méd., t. xvur, p. 41 et suiv.) l’a donnée aussi avec succès 
dans les constipations opiniâtres. 

Wauters, praticien trop peu connu, l’a mise en usage avec 
succès dans un cas remarquable d’empoisonnement par la 
coloquinte chez un riche paysan qui, par avarice, avait de- 
mandé une médecine à un maréchal-ferrant. L'auteur, joi- 
gnant avec esprit le plaisant au sérieux, rapporte ainsi ce 
fait à-la-fois anecdotique et médical : Rusticus dives et ava- 
rus, in pago nobis vicino habitans, a fabro ferrario 
remedium purgans exposcebat : hic autem dat ev par- 
œum fructum colocynthidos, commendans ut 1llum minu- 
im concideret, èn spirit. Vini infunderet. etc. Rusticus 
mandata exequitur, sed fructum ta prœparatum unica 
vice devorat. Brevi terribilia tormina et dein dejectiones 
cum tenesmis violentissimis sequebantur. Aliquatenus ta- 
men pacabatur et tormina sat patienter mitio ferebat cresus 
noster, applaudens summæ excrementorum abundantiæ. 
Ast aliquot post horis, sub intolerabilibus intestinorum (or- 
minibus, vix "rw sed copiosissimus cruor alvo reddebatur 
et œger vix sellam perforatam deserere quiebat, quin pomum 
diaboli fut cum solenander loquar) produceret une sauce 
de diable in rustici braccas. Res seria evadht : continuis 
mere cruentis secessibus doloribusque ineffabihbus vires 
vitales ferme extinguuntur, ac tandem R. Dominus Pastor 
et ego accersebamur. Faciem inveniebam Hippocraticam, 
pulsum vacillantem fere extinctum, etc. Mox porrigo lar- 
gam copiam olei hi recents ore et ano ingerendam. Sic 
homo duplici titulo sordidus, brevi solamen et intra duos 
tresve dies integram valetudinem nanciscebatur. (Op. cit.) 

Murray a fait expulser, par l’usage de cette huile, une 
grande quantité de vers du canal intestinal, et Heberden la 
préférait à toute autre huile pour chasser les oscarides vermi- 
culaires qui s'accumulent parfois dans le rectum des enfants. 
Dans ce dernier cas, je l'ai administrée avec avantage à la fois 


: 


261 


par la bouche et en lavement. Le mélange d’une cuillerée 
d'huile de lin et de pareille quantité de suc de citron ou de 
vinaigre sucré, m'a souvent réussi comme vermifuge chez 
les enfants. L'huile de lin ne doit être employée que récem- 
ment exprimée et douce. On peut lui faire perdre sa rancidité 
en l’agitant fortement et à diverses reprises avec de l’eau 
tiède. Le marc ou {ourteau, dont on a extrait l'huile, peut 
être employé dans les cataplasmes émollients. M. Derheims, 
pharmacien à St.-Omer, conseille même de n’employer en 
cataplasme que la semence privée d'huile , afin d'éviter l’é- 
bullition ou l’érysipèle léger par l'application sur la peau de 
la graine de lin rance. 

L'huile de lin, battue avec partie égale d’eau de chaux, 
forme un liniment employé avec succès contre la brûlure. 
C'est un moyen populaire qui, comme tant d’autres, a été 
adopté par la science. 

Bouillie avec de la litharge et épaissie par l’ébuilition 
prolongée, l'huile de lin sert à la fabrication des sondes, 
des bougies, des pessaires et autres instruments de chirurgie 
dits en gomme élastique. 

Je me sers souvent à la campagne de la filasse ou de l’é- 
toupe pour recevoir les cataplasmes ou autres topiques tels 
que les sinapismes, le blanc d'œuf battu avec l’eau-de-vie 
camphrée, et l’alun, après les luxations, etc. La filasse s’a- 
dapte et enveloppe mieux que le linge qui, d'ailleurs, est 
rare chez les pauvres. L’étoupe m'a été plus d’une fois utile 
comme remplissage dans les fractures pour le premier appa- 
reil, quand rien autre chose ne se présentait sous la main. 

[' eau dans laquelle on a fait rouir le lin acquiert une qua- 
lité vénéneuse pour l’homme et pour les animaux. La pous- 
sière qui s'échappe de la filasse, quand on la travaille dans 
les filatures, attaque les voies respiratoires et produit l’'émop- 
tysie, l’asthme, etc. 

La filasse, mise au fond d’un entonnoir, sert de filtre aux 
liqueurs qu'on y verse. Ce filtre est à-la-fois commode et 
laisse passer promptement le liquide. On connaît l’usage de 
la toile et de la charpie en chirurgie. 

L'on sait aussi que le papier, qui reçoit la pensée et 
transmet à la postérité, par la merveilleuse invention de 
l'imprimerie, les productions de l'esprit humain, n’est que 
du vieux linge converti en pâte et convenablement préparé. 
On a aussi employé le papier en médecine. On l’a recom- 
mandé en décoction dans la diarrhée et Fa dysenterie. J'ai 
vu des personnes atteintes de diarrhées chroniques prendre 
avec avantage, chaque jour, une sorte de soupe faite avec du 


papier blanc bouilli dans le lait. Mâché et appliqué sur le 
lieu d’une hémorrbhagie, le papier peut, à l’aide de la com- 
pression , arrêter cette dernière. Appelé pour un cas d’hé- 
morrhagie survenu à Ja suite de l'extraction d'une dent mro- 
laire, et qui duraït depuis quinze heures, malgré les moyens 
employés par le chirurgien qui avait fait l'opération, je pus 
faire cesser cet accident à l'instant même. en tamponnant 
Falvéole avec du papier mâché et en maintenant les mâchoï- 
res rapprochées pendant une heure, de manière à exercer 
sur ce papier une compression suffisante. 

Le carton sert à faire des attelles dans les cas de fractures 
des membres chez les enfants et même chez les adultes, en 
lemployant convenablement (1). 

On connaît, sous le nom de PyroTHONIDE, une liqueur 
empyreumatique où huile pyrogénée résultant de la combus- 
tion du linge de lin ou de chanvre. Ce liquide noirâtre, très- 
âcre , proposé comme agent thérapeutique par M. Ranque, 
est, selon cet auteur, un astringent efficace dans les hémor- 
ragies utérines , la leucorrhée , la blennorrhée, ete. Dans 
ces cas, on l’emploie dans ia proportion de 30 à 50 grammes 
par 120 grammes d’eau en injection dans le vagin , sept à 
huit fois par jour, ou en compresses imbibées entre le pré - 
puce et le gland. On l’emploie aussi contre les engelures, 
en fomentation , et dans Fophiaimie chronique, en en ins- 
üllant quelques gouttes pures entre les paupières, plusieurs 


(1) M. Sommé, chirurgien en chef de l'hôpital civil d'Anvers, emploie 
le carton pour maintenir les fractures des membres, dans tous les cas. 
Pour la jambe , par exemple , on taille , sur une feuille de earton brat du 
no 9 à 11, deux attelles ou valves ayant Ja forme des parties latérales 
de la jambe et du pied. Ces attelles serout assez larges pour entourer la 
moitié de la jambe et du pied sans cependant se toucher par leurs bords. 
La partie inférieure de ces valves à la forme et la direction du pied. Ces 
cartons sont légèrement trempés dans Fean chaude, afin de les ramollir 
sans les déformer ou les déchirer. On les applique depuis l'extrémité in- 
férieure de la cuisse jusqu’à la plante des preds ; sur des compresses sim - 
ples entourant préalablement le menibre. Une bande de forte toile , large 
de trois travers de doigt , roulée avec force sur les cartons «lépuis le pied 
jusqu'au dessus du genou, fait prendre aux cartens la forme exacte des 
parties. Jusqu'à ce que le carton soit sec, on remet la serviette et les at- 
telles de bois maintenues par des rubans ou une bande. La dessiccation 
s’opère en un ou deux jours ; on retire alors les attelles , le mémbre est 
libre , le malade peut se retourner, se promener avec des béquilles , en- 
treprendre un voyage. Le carton desséché est aussi dur que du bois, et, 
comme il a pris la forme du membre, on n’éprouve aucune com pression 
douloureuse. On ne change de bandes que deux ou trois fois dans le cours 
du traitement, sans ri n déranger à l'appareil. ( Voyez , pour de plus 
grands détails , les ‘nnales de la Société u Médecine d’ Anvers, 1847, ou 
l’Abeille médicale , t.1v.) 


263 


fois dans les vingt-quatre heures, et en bassinant ces mé- 
mes paupières avec le liquide étendu d’eau. M. Ranque, 
plein de confiance dans la pyrothonide , croit qu'en en tou- 
chant la vessie, au moyen d’une sonde qui en serait induite, 
on pourrait guérir le catarrhe de cet organe,et, qu'introduite 
dans l'estomac et dans les intestins , elle dissiperait certai- 
nes phlegmasies chroniques du tube digestif, qui résistent 
aux moyens antiphlogistiques ordinaires. Il n’est pas inutile 
de faire remarquer que ce médecin recommande en même 
temps les boissons adoucissantes et un régime sévère. 

La pyrothonide évaporée convenablement donne un ex- 
trait qui se conserve très-bien, et qu'on peut employer 
en dissolution dans une suffisante quantité d'eau. 


LIN CATHARTIQUE ,‘ 
LIN PURGATIF. 


Linum pratense flosculis exiguis (T.) 
Linum catharticum (L.) 


Cette plante , assez commune en France, se trouve dans 
les prés , les bois, les lieux humides , le long des chemins, 
et fleurit pendant une grande partie de l'été. L’herbe est 
usitée. 


Préparations ei doses. 


4 


A L'INTÉRIEUR : Infusion dans le petit lait ou dans l'eau, 8 à 15 
gram. par kilog. 
Poudre , À à 4 gram. en électuaire, pilules, où dans &u vin. 


Propriétés. 


D'une saveur très-amère et nauséeuse, le lin cathartique 
a été recommandé comme purgatif par divers auteurs et sur- 
tout par Linné. En Irlande et dans quelques provinces de 
l'Angleterre , le peuple emploie cette plante , bouillie dans le 
vin ou la bière, à la dose d’une poignée. James lui reproche 
l'inconvénient de produire le gonflement flatueux du bas- 
ventre; mais il est facile de prévenir cet effet au moyen 
d'une semence carminative telle que la semence d’anis , de 
coriandre , etc. Vogel assure qu'à la dose de 4 grammes, en 
poudre, ou une poignée infusée dans Feau ou dans le petit 
lait, cette placte purge doucement et suffisamment. Geoûroy 
dit que les feuilles récentes, contuses et réduites en bol , à 
la dose de % à 8 grammes,ou la poudre de ces mêmes feuil- 
les, à la dose de 4 grammes, mêlée avec un peu de crême 


26# 


de tartre et de semence d'anis, offrent un purgatif très-doux 
ei très-utile contre les fièvres intermittentes et l'hydropisie. 
Coste et Wilmet ont substitué le lin cathartique au séné, en 
l'empioyant à la dose de 8 grammes, en infusion dans 120 
grammes d’eau bouillante. Wauters l’a aussi considéré 
comme le meilleur succédanée de cetie plante. « Le grand 
nombre de purgatifs que,nous offre la matière médicale, di- 
sent Loiseleur-Deslonchamps et Marquis, l'habitude de se 
servir, de préférence, des médicaments exotiques, ont fait 
entièrement négliger cette plante, qui paraît cependant d’un 
usage commode et sans inconvénient, eL qui se {rouve par- 
tout. Elle est du nombre de celles sur lesquelles il ne pour- 
rait être qu'utile de faire de nouveaux essais. » (Duct. des 
Scienc. Méd., t. XV, p. 275.) 

Je viens joindre le témoignage des faits à tout ce que les 
auteurs recommandables que je viens de citer ont avancé en 
faveur du lin cathartique. J'ai employé tantôt les feuilles ré- 
centes et en bol, tantôt l'infusion de ces mêmes feuilles (8 
gram. dans 120 gram. d’eau), avec addition d’un peu de se- 
mence d’anis, et je puis affirmer que ce purgatif a constam- 
ment produit le même effet que le séné. Comment se fait-il 
donc qu'avec la globulaire dans certaines contrées, le lin ca- 
thartique, le liseron, le nerprun et la gratiole partout, on 
aille encore chercher une plante dans le Levant pour se 
purger en France ? 


LINAIRE , ” 


LIN SAUVAGE , MUFLIER LINAIRE. 
Linaria lutea vulgaris (T.) 
Anthirrinum linaria (L.) 


Cette plante est très-connue en France et dans toute l’Eu- 
rope ; On la trouve sur le bord des chemins et des champs , 
où ses fleurs , grandes et jaunes , se font remarquer en été. 
Les feuilles et les fleurs sont employées. 


Propriciés, 


La linaire passe pour émolliente , adoucissante et un peu 
narcotique. On la regardait jadis comme diurétique, et à 
ce titre on la prescrivait dans l'hydropisie , dans la jaunisse. 
On a vanté l'infusion des fleurs de linaire mélées à celles de 
bouillon blanc contre les maladies chroniques de la peau, 
bien que l'expérience n'ait pu lui attribuer d'autre effet que 
celui qu’on éprouve par l’action des délayants, des tisanes 


265 


adoucissantes quelconques. Haller regarde cette plante, et 
toutes celles qui appartiennent à la même famille, comme 
suspectes. 

A l'intérieur, Horstius, Simon Pauli, Chesneau, ont pré- 
conisé la linaire contre les Lémorroïdes douloureuses , soit 
en cataplasme, soit en fomentation, bouillie dans le lait. Je 
l'ai employée dans ce cas avec avantage ; mais Je lui pré- 
fère la jusquiame , dont l'effet est bien plus marqué. Jean 
Wolf, au rapport de Horst (Obser. et épist. lb. 1v observ. 
50), faisait un secret de l’onguent de linaire préparé avec 
cette plante bouillie dans l’axonge. Le landgrave de Hesse, 
qui en avait éprouvé de bons effets contre les hémorrhoïdes 
dont il était tourmenté , lui acheta ce secret moyennant la 
rente viagère d’un bœuf gras par an. Le docteur, en fai- 
sant connaître sa formule, afin que l’on ne confondit point 
la linaire avec l’ésule , à laquelle elle ressemble avant la 
floraison , composa ce vers : 


Esula lactesit , sine lacte linaria crescit. 
Un plaisant de la cour du Landgrave ajouta le suivant : 
Esula nil ncbis, sed dat linaria taurum. 


Ni la grosse rémunération du prince Hessois, ni les vers 
dignes d’un tel sujet, n’ont pu sauver la linaire de l'oubli 


dans lequel elle est tombée sous le rapport de son emploi 
médical. 


LIS , * 


Lilium. album (T.) 
Lilium candidum (L.) 


Le lis, tenant par sa beauté la première place dans Ia fa- 
mille à laquelle il a donné son nom, et que nous cultivons 


dans nos jardins, nous vint de l'Orient. Ses bulbes et ses 
fleurs sont usitées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Eau distillée (4 sur 4 d'eau) 50 à 400 gram. en 
potion. 


A L'EXTÉRIEUR : Bulbe en cataplasme ; — pélales en cataplasmes , 
en décoction pour lotion, fomentation ; —huile (4 de fleurs sur 
2 d'huile d'olive) pour frictions , onctivns, etc. 
Propriétés. 


L'oignon de lis est mucilagineux , émollient, maturatif. 
Cuit dans l’eau ou dans le lait, on en forme des cataplas- 


266 


mes vulgairement employés sur les tumeurs inflammatoi- 
res pour diminuer la tension et la douleur ou hâter Ia ma- 
turation. C'est ainsi qu'il est utile dans le phlegmon, le 
furoncle, l’anthrax, le panaris, les plaies enflammées , 
les engelures, etc. L'huile de lis a été employée en lini- 
ment sur les brülures , les gerçures du mamelon ; on l'a 
fait entrer dans les cataplasmes , dans les lavements adou- 
cissants. L'huile seule produirait, sans doute, le même 
effet. 

L'eau distillée de lis, regardée comme calmante, était 
employée autrefois contre la toux , les affections nerveuses, 
les irritations gastriques , etc. Elle est aujourd’hui presque 
abandonnée comme inerte. 

Les pétales de cette plante peuvent être employés comme 
les bulbes, en cataplasme, en lavement ; on les a aussi em- 
ployés en collyre dans l'ophtalmie. Les anthères qui pa- 
raissent être le siége de l’arôme du lis ont été regardées 
comme anodines , antispasmodiques et emménagogues. La 
simple émanation des fleurs du lis peut, en viciant l’air d’un 
appartement, causer des accidents nerveux, des synco- 
pes et même la mort, ainsi que Murray et plusieurs au- 
tres auteurs en rapportent des exemples. 


LISERON, 


GRAND LISERON, LISERON DES HAIES, LISET, LISETTE. 


Convolvulus major albus (T.) 
Conroloulus sepium (L.) 


Cette plante existe dans toute la France , dans les haies 
autour desquelles ellé grimpe et s'attache par ses vrilles. La 
racine et les feuilles sont usitées. 


Fréparations ef doses. 
A L'INTÉRIEUR : Sue épaissi en consistance d'extrait, 1 à 2 gram. 


Infusion des feuilles contuses: 6 à 12 gram. dans 14350 gram. 
d'eau bouillante. 
Froprieies. . 
Le grand liseron , injustement abandonné , est peut-être 
préférable à la scamonée d'Orient, à laquelle Haller a le 
premier proposé de la substituer (1). Coste et Wilmet ont 


4) Burtin à produit , sur le liseron des haies, un mémoire intéres- 
saut qui à été couronné en 1783 par l'Académie des Sciences et Belles- 
Lettres de Bruxelles. 


267 


employé le suc laiteux épaissi de celte plante avec un succès 
marqué , à la dose de 1 gramme 20 centigram. sur quatre 
hydropiques et sur deux femmes âgées et cachectiques. J'ai 
moi-même employé ce purgatif, et les effets que j'en ai 
obtenu m'ont donné la certitude qu'il est plus doux que la 
scamonée sans être moins certain. Donné à la dose de 1 gram. 
25 centigram., à un culivateur âgé de vingt-trois ans atteint 
de fièvre intermittente quotidienne depuis un mois, et ayant 
les pieds œdématiés , la face pâle et injectée , les fonctions 
languissantes , elle à donné lieu à huit selles copieuses et 
sans grandes douleurs intestinales. L'accès, qui devait re- 
venir le soir même du jour où le purgatif fut pris, n’a pas 
reparu. Je n’en tirerai pas ia conséquence que le suc épaissi 
de liseron est fébrifuge, ainsi qu’on l’a fait pour maintes 
plantes qui ont usurpé cetie réputation par la révulsion 
qu'elles provoquent et qui intervertit le mouvement pério- 
dique de la fièvre. | 

Les feuilles contuses du grand liseron, infusées à la dose 
de 6 à {2 grammes dans une suffisante quantité d’eau, for- 
ment une potion purgative commode que j'ai vu employer 
par les guérisseurs de nos villages et que j'ai ensuite em- 
ployée moi-même avec confiance. J'ajoute à l'infusion une 
certaine quantité de miel, et chez les sujets irritables, 
un peu de mucilage de racine de guimauve ou de graine 
de lin. Je laisse les fleurs infuser avec les feuilles. Les 
racines , que je n'ai jamais employées, jouissent , dit-on, des 
mêmes vertus. 

Les enfants prennent sans répugnance l’émulsion édulco- 
rée du suc épaissi de liseron. Je l'administre souvent après 
l'usage, pendant quelques jours, d’un vermifuge approprié à 
l'indication , et je réussis ordinairement à procurer l'expul- 
sion des vers qui se trouvent dans les intestins. 

Les feuilles de cette plante, séchées à Fombre, pulvéri- 
sées et mêlées avec le miel ou le vin cuit, conservent long- 
temps leurs facultés purgatives, ou du moins une grande 
parties de ses facultés. | 

Les commères prétendent que pour faire percer un clou 
en vingt-quatre heures, il n'y a qu’à broyer entre les doigts 
quelques feuilles de grand liseron et de les appliquer dessus. 

[ Le Perrr Luseron , ou liseron des champs ({convolvulus 
arvensis L.), paraît doué des mêmes vertus que le grand 
liseron. M. Chevalier, qui a publié un travail intéressant 
sur cette plante dans le Journal de Pharmacie (juillet et 
août 1823), a retiré de sa racine une résine qui jouit des 
mêmes propriétés que celle du jalap. ] 


268 


* LiSERON À FEUILLES DE GUIMAUVE (convolvulus althœoï- 
des, L.)—Cette espèce , qui croît dans les contrées méri- 
dionales de l'Europe , et que l’on rencontre dans le Langue- 
doc et la Provence, n’était point employée en médecine 
lorsque Loiseleur-Deslongchamps, pensant qu'elle devait 
participer aux propriétés purgatives de la plupart de ses 
congénères, l'essaya comme succédanée du jalap. L’expé- 
rience justifia cette opinion. « Les parties de la plante que 
nous avons mises en usage , disaient cet auteur et son Ccolla- 
borateur Marquis, ont été les racines, et nous les avons 
employées en en préparant une teinture alcoolique par l'in- 
fusion de deux onces de ces racines dans seize onces d’es- 
prit de vin. Nous avons donné de cette teinture ainsi 
préparée , depuis quatre jusqu’à six gros , dans une tasse 
d’eau sucrée , à six malades différents, qui étaient des en- 
fants de huit à onze ans; et, sur six fois que nous l'avons 
ainsi employée, elle a agi cinq fois comme doux purgatif , 
procurant des évacuations faciles, exemptes de coliques, 
une fois au nombre de deux seulement, deux fois au 
nombre de six, et les autres à la quantité de sept et de 
huit ; une seule fois notre teinture n’a point agi comme pur- 
gative : c'était chez un jeune garçon de onze ans , auquel 
nous en avions donné dix gros, la plus haute dose. que nous 
ayons administrée; le même enfant, cependant , avait eu 
deux évacuations, une première fois qu'il n'en avait pris 
que six gros.—Nous pensons que ce petit nombre d’obser- 
vaiions , faites sur les racines du liseron à feuilles de gui- 
mauve , prouve assez que nous possédons dans cette plante 
indigène un bon purgaiif, qui, par sa manière d'agir, 
nous paraît devoir être assimilé au jalap. » (Dict. des Scenc. 
méd., tom. xvux, p. 329.) 


LS - 
LIVECHE, 
LIVÈCHE , ANGÉLIQUE A FEUILLES D'ACHE ,; SÉSÉLI OÙ ACHE 
DE MONTAGNE. 


Ligusticum , seseli officinarum (T..) 
Ligusticum levisticum (L }) 


La livèche croît sur les montagnes du midi de la France 
le plus ordinairement. Elle est cultivée dans les jardins. On 
à mis en usage ses racines el ses semences. 


269 
Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction des racines , 15 à 20 gra, 
par kilog. d'eau. 
Infusion des semences , 8 à 15 gram. par kilog. d'eau. 
Extrait, 2 à 4 gram. en pilules , potion, etc. 


Teinture , 2 à 4 gram. en potion. 

Poudre des graines , 4 à 2 gram. 

” Propriétés, 

Les racines de livèche, âcres et aromatiques , sont diu- 
rétiques. Je n'ai jamais employé cette plante et ne puis rien 
en dire. Tant d’autres végétaux indigènes possèdent des 
vertus analogues , que je n’ai pas cru jusqu’à présent devoir 
m'en occuper. 

[ « La livèche , dit Loiseleur-Deslongchamps , passe pour 
carminative, stomachique et emménagogue. On la recom- 
mandait autrefois dans les cas de digestions difficiles , lors- 
que l’estomac avait besoin d'être fortifié. On l’a cru pen- 
dant longtemps un remède spécifique contre la jaunisse. On 
a vanté l'usage de ses feuilles, prises intérieurement , 
comme un excellent moyen de rétablir les évacuations 
mentruelles supprimées. Mais aujourd'hui, sous aucun 
rapport , on ne fait plus usage de la livèche..…. On assure 
que ses feuilles, mêlées avec le fourrage, guérissent la toux 
des bestiaux.» (Dict. des Scienc. méd., tom. xvir, p. 489.) 
On vend dans les pharmacies la racine de livèche sous le 
nom de racine d'âche.] | 


MARRONNIER D'INDE. 


Hippocastanum vulgare (T ) 
OŒsculus hippocastanum (L.) 


Cet arbre, généralement connu, orne nos campagnes. Son 
écorce et son fruit sont usités. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction , 30 à 60 grammes et plus (écorce) par 


kilogramme d'eau. ae 
Poudre, 1 à 4 gram.comme tonique , 45 à 50 gr. comme fébrifuge. 


Extrait aqueux, 75 cent. à 5 gram. en pilules, potion, etc 
Extrait alcoolique , 50 centigram. à 4 gram. et plus, en pilules, 


potion , etc. 
Vin, (50 à 60 gram. d'écorce par kilog. de vin blanc, en macéra- 


tion) 60 à 100 grammes. 
A L'EXTÉRIEUR : En décortion, plus ou moins concentrée pour 
lotions, fomentations, injections , etc. 


Fropriéiés. 


L'’écorce de marronnier d'Inde est tonique et astringente : 
elle a été conseillée comme fébrifuge. On a aussi proposé 
les marrons d'Inde comme propres à guérir les fièvres in- 
termittentes. 

L'expérience n'a pas justifié les éloges prodigués à l'écorce 
du marronnier par quelques auteurs guidés plutôt par l’ana- 
logie que par l'observation. Tous les médecins savent au- 
jourd’hui que, si ce médicament à paru réussir dans les 
fièvres printannières , on a bien pu lui attribuer ce que la 
nature opère tous les jours dans ces fièvres, que nous voyons 
se dissiper d’elles-mêmes après quelques accès. Comme 
astringente , l’écorce de cet arbre peut être utilement em- 
ployée contre les hémorrhagies passives. 

[ A l'extérieur, l'écorce de marronnier d'Inde peut être 
employée comme tonique, détersive et antiseptique. Coste et 
Wilmet l'ont substituée au quinquina dans une menaee de 
gangrène au bas de la jambe d’un hydropique ; et la décoc- 
tion, qui en a été faite dans le vin, n’a pas été suivie de moins 
de succès qu'aurait été celle d’écorce du Pérou. Les marrons 
d'Inde, réduits en poudre, ont été employés comme sternu- 
tiatoires. On en fait des pois à cautères qui peuvent rempla- 
cer ceux d'iris dans les cas où la légère irritation que pro- 
duisent ces derniers n’est pas nécessaire. 

. L’écorce de marronnier d'Inde doit être récoltée au prin- 
temps sur les jeunes branches, et dépouillée de son épi- 
derme extérieur. ] 3 PA Éth 


MARRUBE BLANC, 


MARRUBE COMMUN. 


Marrubium album vulgare (T.) 
Marrubium vulgare (L.) 


Cette plante croît spontanément sur le bord des chemins. 
dans toute l’Europe. L’herbe est employée. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, Ge 45 à 50 gram. par kilog. d'eau, 

Suc exprimé, 50 à 60 et même 100 gram. avec du miel et pareille 
quantité de lait. 

Eau distillée 4 sur 4 d'eau), 50 à 400 gram. en potion. 

Sirop (4 sur 52 d’eau de marrube et 64 de sucre), 45 à 100gram. 
en potion. 

Extrait aqueux , À à 4 gram. en pilules, potion, eic. 


271 


Ext ail alcoolique, 4 à 5 gram. en pilules, potion, etc. ( plus 

amer et plus actif que l'extrait aqueux } 

Poudre , À à 8 grammes. 

Conserve , 50 à 60 grammes. 

Vin {50 gram. pour 1 kilog de vin bianc), 50 à 406 grammes. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction, 50 à 60 gram. par kilog. d'eau pour 

lotions , fomentations , etc. | 
Propriétés. 

Le marrube est tonique , stimulant, expectorant , emmé- 
nagogue. Il est administré contre le catarrhe chronique, 
l'asthme humide, la bronchorrhée , la pneumonie et la pleu- 
résie chroniques ; la toux rebelle , suite de la rougeole ou de 
la coqueluche , et chez les personnes débilitées par l’âge ou 
cacochymes. On l’emploie aussi quelquefois pour rétablir les 
forces digestives affaiblies ou perverties, contre les dysen- 
teries chroniques, quelques fièvres intermittentes, les fièvres 
muqueuses ou vermineuses, l'hystérie avec atonie , lictère, 
le scorbut, les scrofules, la chlorose, la leucorrhée atonique, 
certains cas d'aménorrhée, l’anasarque, l’infiltration séreuse 
du poumon , elc. 

Cette plante, dont l'odeur aromatique et la saveur âcreet 
amère annoncent l'énergie, est une production indigène à la 
fois abondante et précieuse. Si Cullen a contesté les vertus 
du marrube, Dehaen les a confirmées par sa propre expé- 
rience. Gilibert dit avec raison que le marrube est une des 
meilleures plantes de l'Europe. « C’est, dit-il, une de ces 
plantes fameuses que nous avons souvent conseillées. On ne 
peut douter de son énergie dans les empâtements des vicères 
du bas-ventre, dans l'asthme pituiteux, dans la suppression 
des règles avec atonie. Il abrège beaucoup les rhumes dans 
les caiarrhes habituels ; il facilite lexpectoration. Quelques 
phthisiques en sont évidemment soulagés : son suc a quel- 
quefois guéri seul des ictères. » 

Celse prescrivait le suc exprimé de cette plante, édulcoré 
avec du miel, dans les catarrhes chroniques , l'asthme, 
l’ictère, etc. Forestus , qui en a éprouvé les bons effets dans 
un ictère chronique et dans plusieurs maladies analogues 
qui tendaient à l'hydropisie, l’administrait en décoction, ou 
bien en donnait le suc exprimé mêlé avec du vin, du sucre 
ou du miel. Alexandre de Tralles, l’un des médecins qui ont 
le plus vanté cette plante , en administrait la poudre mêlée 
dans du miel, à la dose de 4 à 8 grammes. 

[ Linné assure avoir fait cesser, par l'infusion de marrube, 
un ptyalisme mercuriel qui durait depuis plus d’un an. 
Wauters à employé le marrube blanc comme succédanée du 


272 


quinquina, dans les fièvres intermittentes. Il en donnait la 
décoction concentrée le matin à jeun {une poignée dans 
750 grammes d'eau réduite à moitié par l’ébullition). Dans 
quatre cas de fièvres tierces et un cas de fièvre quotidienne, 
l'auteur à réussi ; mais il a employé inutilement cette plante 
contre une fièvre quotidienne qui a cédé à l'administration 
du quinquina. Dans de nombreux cas ultérieurement obser- 
vés, Wauters ayant eu à se louer de l’usage du marrube 
comme fébrifuge, s'exprime ainsi dans une note addition- 
nelle : Ex temipore quo hæc scripsi, aliæ observationes non 
paucæ marubui laudem æquum ostenderunt (Repert. remed. 
indigen., p.212 et 213). Le marrube blanc agit ici à peu près 
comme J’absynthe, et paraît plus particulièrement indiqué 
dans les cas de fièvres intermittentes anciennes avec engor- 
sement des viscères , état cachectique, etc., ou après un 
long usage des préparations de quinquina, lorsque toutefois 
l'état des voies digestives permet l'usage de cette plante 
éminemment amère et aromatique. Il est bien évident qu’elle 
serait nuisible s’il y avait irritation ou inflammation. Je ferai 
la même remarque pour les engorgements du foie et l’ictère, 
dans lesquels Zacutus Lusitanus, Forestus, Chomel et autres, 
n’ont pu employer le marrube avec succès que parce que 
ces maladies étaient exemptes de douleur, de pléthore et de 
phlegmasie. C’est bien moins une maladie, désignée dans un 
cadre nosologique , que l’état du malade que l’on doit voir : 
le diagnostic individuel et différentiel d’une affection, peut 
seul diriger le praticien dans l'application de ses moyens 
thérapeutiques.—Borelli attribue de très-bons effets au mar- 
rube dans la chlorose et l'aménorrhée, quand celle-ci, sans 
doute, est atonique. Freind (Emmenalogia, Londini 1717, 
p.160) assure que le sang, auquel on mêle l'infusion de cette 
plante, devient plus vermeil et plus fluide. Enfin, le mar- 
rube, trop négligé de nos jours, ainsi que le remarque judi- 
cieusement Alibert, peut être administré dans toutes les 
circonstances où Ja médication tonique est nécessaire, avec 
plus d'avantages que beaucoup d’autres végétaux bien moïns 
énergiques quoique plus vantés. ] 

Mon expérience m'a confirmé dans l’opinion avantageuse 
que j'avais conçue des effets du marrube, sur la foi des 
auteurs qui en ont parlé. Comme le lierre terrestre, le pou- 
liot, l’hyssope, il paraît agir plus particulièrement sur le 
système pulmonaire. Bien qu'il puisse être administré dans 
presque toutes les maladies atoniques, il convientprinei- 
palement dans les catarrhes pulmonaires passés de l’état 
aigu à l’état chronique, dans l'asthme humide, dans la 


273 


phthisie même, comme un des meilleurs expectorants. J'ai 
fréquemment employé le marrube en infusion aqueuse, avec 
du miel, dans ces diverses affections, et j'en ai toujours 
éprouvé de bons effets. Cette piante, infusée dans le vin ou 
dans la bière, m'a été très-utile dans la gastralgie et dans les 
leucorrhées atoniques. Je joints souvent à cette infusion les 
sommités d'absvnihe, la racine d'aunée ei celle d'angélique. 
J'ai cependant mis en usage, dans plusieurs cas, le vin de 
marrube seul, afin d'en anprécier isolément les effets. 

[ Cette plante est employée à l'extérieur comme tonique, 
détersive et antiseptique, dans les engorgements œdéma- 
teux , les ulcères sordides. la gangrène, etc. 7 

Le MareuBe Noir (Marruhéum fœtidum nigrum— Ballota 
migra), vulgairement BazLote, dont les propriétés toniques 
sont évidentes, n’est employé qu'à l'extérieur, à cause de 
son odeur désagréable. Le suc des feuilles de cette plante, 
appliqué sur les ulcères sordides et atoniques, les déterge 
et en favorise la cicatrisation. Je l'ai appliqué broyée sur un 
ulcère scrophuleux qu'elle a amélioré en peu de jours. 


—————— 


MATRICAIRE, 
ESPARGOUTTE. 


Matricaria vulgaris seu sutiva (T.) 
Matriearia parthenium (L.) 


Cette plante, connue de tout le monde, se rencontre prin- 
cipalement dans les jardins. On emploie l'herbe entière et 
les sommités fleuries. 


Preparations ei dos?s. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, 4 à 12 gram. par kilog d'eau. 
Suc erprime. 45 à 60 granime; 
Pouiire, 4 à 4 gram en potion, pilules, ou dans un liquide. 
Huile volatile, 20 à 50 veut. en pilule, potion, sacchatoe. 
Eau di tiliée (4 de feuilles fraiches sur 4 d'eau; , 30 à 400 gram. 
en potion. 
A L'EXTÉRIEUR : Déroction ou änfusion, 45 à 30 gram. par kilog. 
d'eau pour lavements ; 50 à 60 gram pour lotions, foiseuta- 
tions , injections, etc.; feuilles en caraplasmes, 


Froprietes, 


Cette plante, d’une odeur forte et pénétrante, d’une saveur 
chaude et un peu âcre, est légèrement tonique, stimulante, 
emménagogue et antispasmodique. Elle est utile dans l'amé- 

18 


27% 


norrhée, la leucorrhée, l’hystérie, chez les femmes caco- 
chymes et languissantes, lorsqu'il n'existe ni pléthore locale 
trop prononcée, ni irritation phlegmasique. On l'emploi en 
lavements contre les coliques nerveuses, le météorisme, chez 
les femmes vaporeuses. L'eau distillée de cette plante sert 
de base, comme celle d'armoise, aux potions anti-hysté- 
riques , elc. 

Mademoiselle Dubois, fermière, âgée de vingt-un ans, 
d’un tempérament lymphatico-nerveux, d’une constitution 
délicate, était atteinte d’une dysménorrhée qui la faisait 
beaucoup souffrir. Souvent même elle éprouvait une hysté- 
ralgie bien caractérisée. Les antispasmodiques, tels que 
l’éther, l’assa-fœtida, le laudanum, et en dernier lieu l’acé- 
tate d'ammoniaque, avaient apporté peu de soulagement. 
Une vieille femme lui conseilla de prendre, de demi-heure 
en demi-heure, un verre de décoction tiède de matricaire 
(une poignée de cette plante pour 1 kilogram. et demi d’eau 
réduite aux deux tiers à vase clos) trois ou quatre matins de 
suite vers l’époque des règles. Ce moyen réussit. Les souf- 
frances diminuèrent considérablement dès la première fois. 
Le second mois elles furent très-supportables, et, le troiï- 
sième, un état de malaise les remplaça. La malade fit usage 
de la matricaire à chaque retour des règles pendant quatre 
mois, après lesquels elle fut complètement guérie. 

[ La mauricaire, ainsi que beaucoup d'autres plantes qui, 
depuis long-temps, ne paraissent plus dans les prescriptions 
médicales, ne mérite pas l'oubli auquel l'ont condamnée la 
mode et le luxe pharmaceutique de nos jours. Le fait que je 
viens de rapporter, quoique isolé, porte à croire que cette 
plante a une action marquée sur l'utérus, en faisant cesser 
l'état spasmodique de cet organe. On sent bien que si elle 
peut être utile dans les affections utérines purement ner- 
veuses ou atoniques , elle serait nuisible dans la dysménor- 
rhée, l’'aménorrhée, etc., qui seraient le résultat d'un excès 
d'action vasculaire, d’un état pléthorique, soit général, 
soit local. 

On a employé la matricaire dans plusieurs autres mala- 
dies. On l’a conseillée comme anthelmintique ; Ray et Lange 
l'ont administrée avec succès contre le ténia ; Miller en don- 
nait le suc avec avantage, à la dose de deux onces, deux 
heures avant l'accès, comme fébrifuge. C'est sans doute sa 
propriété contre les fièvres intermittentes qui lui a valu le 
nom anglais de feverfew. Cette propriété peut trouver son 
application dans certains cas de fièvres d'accès simples, ou 
contre lesquelles le quinquina à êté, à diverses reprises, 


275 


employé avec un succès mamentané et suivi de récidives, ou 
bien encore dans ceux qui, exempts d’irritation locale, peu- 
vent être considérés comme dépendant plus particulièrement 
d’un état nerveux qui subsiste, par une sorte d’habitude 
morbide, après la disparition de la cause primitive de la 
maladie. Elle paraît agir à peu près comme la camomille 
fétide ou marouie, que Preyrilh dit avoir employé aussi avec 
succès comme fébrifuge. 

Si l’on en croit Chomel, qui pro@igue souvent aux plantes 
des épithètes médicales sans en préciser l'application pra- 
tique {1}, la matricaire, en cataplasme, a appaisé et fait 
disparaître des céphalgies, la migraine, voire même les dou- 
leurs de la goutte, dont la cessation subite d’ailleurs n’est 
pas sans danger. Suivant Simon Pauli, il suffit de se munir 
d’un bouquet de matricaire pour se préserver de la piqûre 
des abeilles, que l’odeur de cette plante fait fuir. ] 


La MATRICAIRE CAMOMILLE O4 CAMOMILLE COMMUNE (Cha- 
mœæmrlum vulqare— Matricaria chamomilla) a les mêmes 
propriétés que la matricaire. Dioscorides, Zacutus Lusita- 
nus, Rivière, Morton, Hoffmann, Vogel, Pitcairn, Heberden, 
Cullen et surtout Wauters ont employé avec succès la camo- 
mille (le plus souvent les fleurs en poudre dans le vin, à Ia 
dose de # à 8 grammes), contre les fièvres intermittentes. 
On doit rapporter à celte plante tout ce qu’on trouve dans 
les anciens sur la camomille, On Ja substitue souvent, dans 
les officines, à Ta camomille romaine, et on [a remptace 
elle-même par la camomille des champs {Anthemis arvensis). 
La camomilie romaine (Anthemis nobils ), qui possède à un 
plus haut degré les mêmes propriétés, est généralement 
préférée. 

La MATRICAIRE ODORANTE ( Matricaria suaveoleñs), dont 
les fleurs, quand on les froïsse, exhalent une odeur plus 
forte, peut remplacer dans tous les cas, suivant Loiseleur- 
Deslonchamps, les diverses espèces de camomilles. 


OOo —_—_—_— 


(1) Ce reproche peut s'adresser à la plupart des auteurs de botanique 
médicale, qui, dans de gros volumes, nous apprennent que la rose est 
astringente, le nerprun purgatif, le pissenlit apéritif, l’absyuthe fébrifuge, 
l'angélique stimulante, etc. . et attribuent, sans distinction de cas et de cir- 
constances, aux plantes qu'ils préconi:ent, des vertus merveilleuses contre 
telle ou telle maladie. Les ressources surabondent pour remplir des indi- 
eatiôns qui, en réalité, nous manquent oa sont difficilement déterminées 
au lit du malade : agendi gnaroraram remedii penuriam ( Sxvvxmau). 


L 


276 
MAUVE. »r6keyrrre 


Malïa vulgaris ; flore majore (T.) 
Malva sylvestris (L.) 


Cette plante utile est répandue partout dans nos campa- 


gnes , et tout le monde la connaît et s’en sert. On: emploie 


ses feuilles , sés fleurs et ses racines. 


Fréparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Infusion ou décoction. légèré des fleurs, 10 à 43 


gram. par kilog d'eau. 
Infusion, ou d'coction légère des feuilles ou des racines , 15 à 50 
gram. par kilog. d'eau. 
À L'ÉXTÉRIEUR : Déroction, plus ou moins forte, pour bains, lotions, 


lavements, fomentations, injections, gargarismes, Collyres, etc. 
Pulge:, en cataplasme. " 
Propriétés, 

La mauve est émolliente, adoucissante, pectorale. Elle est 
d’un usage ordinaire, tant à l’intérieur qu’à l'extérieur, dans 
le traitement de toutes les phlegmasies aigues , Surtout dans 
celles de la poitrine, des voies gastriques “et urinaires, de Ja 
peau, des yeux , etc. 

Lorsque j'arrive chez un malade atteint d'une inflamma- 
tion, je trouve de suite, dans la mauve qui croît autour de la 
ferme, de quoi lui faire de la tisane. À l’intérieur, je préfère 
la racine en décoction ayec un peu de miel. Cette plante, à 
peine employée dans les grandes cités, rend de grands ser- 
vices à la campagne. J’ai vu manger les feuilles de mauve 
préparées comme les épinards. Sous cette forme elle convient 
dans les phlegmasies chroniques du tube digestif, dans la 
constipation , les toux sèches, etc. 

[ On emploie indifféremment la grande mauve ou mauve 
sauvage (Malva sylvestris.), et la petite mauve ou mauve à 
feuilles rondes (Malva Sears à 


C1 


 MÉLIT. OT, 


TRÊFLE DE CHEVAL. 


Melilotus officinarum germaniæ (T Dir 
Trifolium mililotus officinalis (L. ) 


. Cette plante, que l’on rencontre dans les prés et le long 
des chemins et des haies, est très-commune dans toute l’Eu- 
rope. On emploie l'herbe fleurie, 


277 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, 15 à 30 gram. par kilog. d’eau. 
A L'EXTÉRIEUR : Infusion, de 25 à 50 gram. par kilog. d'eau , pour 
fomentations, lotions, infusions, collyre. 
Eau distillée, pour collyre. 


Propriétés. 


Le mélilot est d’une odeur aromatique beaucoup plus forte 
après la dessiccation qu'à l’état frais, d’une saveur d’abord 
mucilagineuse , et ensuite un peu amère, passe pour émol- 
liente, béchique , résolutive, anodine, carminative. Haller 
regardait cette plante comme étant de nature suspecte, et 
Bulliard dit qu'en séchant elle prend de l’âcreté. Le principe 
aromatique qu'elle contient a quelque ressemblance à la 
coumarine, principe auquel la fêve tonka doit son arôme. 
Cependant aucun fait bien observé n'a justifié-les craintes 
que sa prétendue propriété vénéneuse avait fait concevoir. 
Ses propriétés médicales ne sont pas mieux constatées. On 
l'a vantée contre la colique, les vents, le rhumatisme, la 
dysenterie, la dysurie , la néphrite. De graves auteurs ont 
vanté les effets de son infusion aqueuse contre les douleurs 
utérines qui précèdent et suivent l'accouchement, contre 
l'inflammation des viscères abdominaux. Michaelis, dans ses 
notes sur Schroeder, recommande l'emploi du mélilot dans 
la leucorrhée « La tisane faite avec ses sommités et celles 
de camomille, dit Tournefort, est excellente dans les inflam- 
mations du bas-ventre, dans la colique, la rétention d'urine, 
dans les rhumatismes, et généralement dans toutes les occa- 
sions où il faut faciliter le cours des humeurs en tempérant. » 
Haller à constaté les effets irritants des semences de cette 
plante dans un cas d’angine, où leur décoction avait été mal 
à propos associée à celle des semences de lin. | 

Cette foule de vertus contradictoires, dont on a décoré le 
mélilot, prouvent seulement que des médecins crédules ou 
peu attentifs lui ont attribué gratuitement des succès düsau 
efforts salutaires de cette bonne -et puissante nature qui, 
dans beaucoup de cas, guérit sans et même: malgré les 
secours de l’art. 

Aujourd’hui, on ne se sert plus de cette plante qu’à l’ex- 
térieur.Ettmuiler et Simon Pauli la recommandent en fomen- 
tations sur le ventre, et en lavement contre les douleurs et 
l'inflammation de l'utérus et des viscères de l'abdomen. 
Chomel dit que ces fomentations lui ont scuveñt réussi dans 
la colique venteuse, dans la tympanite et dâns là tension 
douloureuse du bas-ventre. Les lavements ‘d'infusion de 


* 


278 


mélilot passent pour émollients, anodins, carminatifs. Les 
campagnards font, pour ces lavements, une décoction des 
sommités de cette plante dans du bouillon de tripes ; ils les 
rendent ainsi beaucoup plus émollients. Comme légèrement 
résolutive on emploie la décoction du mélilot sur les tumeurs 
inflammatoires, et son eau distillée en collyre seule ou asso- 
ciée à d’autres ingrédients. Mais, à l'exemple du judicieux 
Murray, nous conclurons de tout ce que l’on a dit des vertus 
du mélilot, que des expériences chimiques bien faites sont 
nécessaires pour constater les véritables propriétés médicales 


de cette plante, dont l’action, du reste, paraît assez peu 
marquée. 


MELISSE ,* 
CITRONELLE , CITRONADE , HERBE DE CITRON. 


Melissa hortensis (T'.) 
Melissa officinalis (L.) 


Cette plante eroît spontanément en Italie, sur les Alpes et 
dans quelques parties des Pyrénées ; on la cultive dans nos 
jardins. On emploie ses feuilles et ses sommités. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion à vase elosides sommités fleurces, 4 à 10 
gram. par 500"gram. d’eau. 

Eau distiliée (4 sur 4 d'eau), 30 à 400 gram.en potion, comme 

excipient. 

Poudre (rarement), 4 à 8 gram. en pilules, électuaire on dans un 

liquide approprié. 

Alcoolat de mélisse composé (ou des carmes ), 4 à 8 gram. dans 

une potion. 

Teinture (4isur S5d'eau-de-vie), 2 à 46 gram. en potion. 

Extrait (A sur 5 d'eau), 2 à 6 gram. en potion, pilules (rarement). 
A L’EXTÉRIEUR : Teinture et alcoolat de métisse composé . à dose 

indéterminée, en frictions, ou avec d'autres préparations ayant 
des proprietés analogues. 
FPropriciés. 

La mélisse, d’une odeur suave et analogue à celle du ci- 
tron, est stimulante et antispasmodique. L'excitation qu’elle 
exerce sur le système nerveux et sur différents appareils de 
la vie organique, lui à valu les qualifications surannées de 
céphaliques , .cordiales, stomachiques, carminatives , etc., 
selon les dispositions atoniques, générales ou locales, des 
sujets qui en reçoivent l'influence et les doses auxquelles on 
administre. On l'emploie généralement dans les affections 


CE » 


279 


nerveuses , telles que l’hystérie , les palpitations, les cardial- 
gies, les spasmes, l’hypocondrie, la paralysie, les vertiges , 
la mélancolie, la migraine , etc. Hoffmann l’administrait en 
poudre dans l’hypocondrie, et Rivière en infusion vineuse 
dans la manie. On la conseille aussi dans l’asthme humide, 
le catharrhe chronique chez les vieillards lymphatiques, 
dans la goutte vague , le rhumatisme ancien, etc. Son infu- 
sion théïiforme est d’un usage très-utile contre l’inappétence, 
les indigestions et les flatuosités, surtout dans le nord. 
Comme toutes les plantes excitantes, la mélisse est nuisible 
quand il y a chaleur, douleur, soif, en un mot, irrilation. 
Afin que les feuilles conservent leur odeur et leur couleur, 
il faut les cueillir un peu avant la floraison , et en détacher 
les tiges et les pétioles ; les faire sécher ensuite au’soleil", 
ou mieux à l’étuve, et les placer dans un lieu sec. L’humidité 
les rend molles et noirâtres. 


MENTHE, 


BAUME. 


4° Menthe sauvage (menthastre, mentha sylvestris L) 
2 Menthe aquatique (mentha aquatica L.) 
5° Menthe pouliot (mentha pulegium L.) 


Ces trois espèces de menthe croissent partout en France 
spontanément. La menthe aquatique, que l’on trouve dans 
les terrains marécageux et humides, est la plus commune. 


Fréparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Ænfusion, 8 à 45 gram. par kilog. d’eau. 

Eau distillée, 50 à 400 gram, en potion. 

Sirop (4 de feuilles sèches sur 16 d’eau bouillante et 32 de sucre), 
45 à 60 grammes. 

Suc mêlé avec autant de sirop simple, 15 à 30 grammes. 

Teinture (4 sur 8 d’alcoo! à 20°), 45 à 50 gram. en potion. 

Esprit ou alcoolat (4 sur 4 d'alcool à 20°). 4 à 5 gram. dans une 
potion. 

Huile essentielle, 40 à 40 centig. sur du sucre ou en potion. 


À L'EXTÉRIEUR : Infusion, de 15 à 30 gram. par kilog. d'eau ou de 
vin pour lotions, fomentations, injections, etc. 
Propriétés. 


Les feuilles et les fleurs de ces plantes sont toniques, 
excitantes , stomachiques , antispasmodiques. Les menthes 
portent surtout leur effet sur le système nerveux ; en réveil- 


260 


lant puissamment l’action des tissus. Elles conviennent dans 
les affections atoniques de l’estomac, les flatuosités, les 
cardialgies, dans l'hystérie, l’hypocondrie, certaines amé- 
norrhées, flux chroniques, vomissements spasmodiques, ete. 

[ La menthe pouliot active l’exhalation bronchique et 
favorise | expectoration. A ce titre on l’emploie vulgairement 
dans l'asthme, dans l'engouement muqueux des voies 
aériennes chez les vieillards, où je l'ai vu agir comme le 
serpolet, la sauge , l’hysope, etc. Sauvages a recommandé 
l'infusion aqueuse de cette espèce de menthe dans la coque- 
luche , et Cullen dit qu’elle lui a paru nuisible dans cette 
maladie , ainsi que tous les échauffants. Cette différence dans 
les résultats tient, sans doute, aux circonstances diverses 
dans lesquelles se trouvaient les malades, soit sous le rap- 
port des périodes de la maladie, soit sous celui des symp- 
tômes concomitants ou des complications. Il est, en effet, 
de la dernière évidence que, s’il y avait dans les cas obser- 
vés par le premier, atonie, absence d’irritation et de phlo- 
gose pulmonaire, l'usage de la menthe à pu être avanta- 
geux , tandis que si, dans ceux où Cullen administra cette 
plante , il y avait pléthore, orgasme des voies respiratoires , 
vive sensibilité de ces voies , elle ne pouvait qu'augmenter ces 
symptômes et produire même des accidents plus où moins 
graves. Les mêmes remarques peuvent s'appliquer à ce 
qu'ont dit les anciens de la vertu emménagogue du pouliot, 
vertu qui ne peut être que relative à l’état d'asthénie, au 
défaut d’'excitation, soit générale, soit locale. La menthe 
crispée est aussi tellement emménagogue que, selon Bodart 
(Bot. méd. compar.), son huile essentielle a souvent causé 
des hémorragies utérines. 

Suivant Campegius, le suc-de menthe {dont il n’indique 
pas l'espèce], mêlé avec du vinaigre ou du suc de grenade, 
arrête le hocquet, le vomissement, l’hémorragie, le choléra- 
morbus, et tue les lombrics. 

A l'extérieur, les menthes conviennent dans les engorge- 
ments cellulaires non inflammatoires, l'œdème, et dans tous 
les cas où les aromatiques sont indiqués. On en fait un grand 
usage dans nos campagnes. On compose avec ces plantes 
un vin aromatique pour l'usage extérieur, comme résolutif. 

On emploie, comme ayantles mêmes propriétés, la menthe 
verte romaine où à épis (mentha viridis (L.) ; la menthe 
crépue ou frisée (mentha crispa (L.); la meuthe ridée, 
menthe à feuilles rondes, de cimetière (mentha rotondi- 
foha (L.) 

On doit cueillir les feuilles de menthe un peu avant la 


281 


floraison, et, afin qu’elles conservent une partie de leur 
couleur et de leur odeur, on les fait sécher rapidement à 


l'étuve. Ainsi préparées, elles donnent un meilleur produit 
à la distillation. 


MENTHE POIVREÉE 
MENTHE POIVRÉE. 


Mentha Sapore favido piperis (T.) 
Mentha piserita (L.) 


Cette espèce, originaire d'Angleterre et que l’on rencontre 
dans quelques parties des Pyrénées, est cultivée dans nos 
jardins, où elle se propage abondamment. Les feuilles sont 
employées. 


Fréparations ei doses. 


A L'INTÉRIEUR : Pnfusion des fouilles séch-s à vase clos ,4 à S gram. 
d'eau chaude et sucrée à prendre par petites tasses de temps 
en termps. 

Eau distillée , 50 à 125 g'am. en potion. 

Sirop, 50 à 60 gram et plus, pur, par petites cuillerées ou étendu 
dans une potion ou une tisane. 

Alcootat, 4 à 4 gram dans un véhicule aporoprié. 

Huile volatile, 45 à 60 centig en potion ; oleo-saccharum. 


Pastilles, qrantité indetériinée, 
Poudre, 60 centig. à { gram. 20 centig toutes les deux heures, 
délayée dans un liquide approprié , ou en électuaire, pilules, e:c. 
A L'EXTÉRIEUR : Infusion, plus ou moins chargée ; — pulpe, prépa- 
rée avec les feuilles fraiches en rataplasme; — «alcoolat, en 
frictions ; — huile essentielle, associée à l'asonepour pom- 
made ; — youdre, en saclet, etc. 


Proprié(cés. 


La menthe poivrée, d’une odeur forte et aromatique, 
d'une saveur chaude, piquante, déterminant une sensation 
brûlante sur la langue , immédiatement suivie d'un senti- 
ment de froid très-agréable, est, de toutes les plantes du 
même genre, celle qui recèle le plus d'huile volatile et con- 
tient le plus de camphre. Aussi, ses propriétés médicales 
sont-elles plus puissantes que dans les autres espèces de 
menthe. A la vive excitation qu'elle produit sur l'appareil 
digestif, succède sympathiquement celle de tous les organes. 
Son action énergique sur le système nerveux J'a mise au 
rang des plus puissants antispasmodiques. Sous ce rapport 
on à eu à se louer de son usage dans certaines fièvres pé- 


282 


riodiques avec symptômes nerveux, l’asphyxie, l'asthme 
humide, la paralysie, l'hystérie, les tremblements et les 
vomissements nerveux, l'hypocondrie, les coliques utérines, 
Ja dysménorrhée, certaines névroses abdominales , les cé- 
phalgies nerveuses, etc. Comme stimulante , la menthe 
poivrée convient aussi dans l’atonie des voies digestives , les 
tlatuosités, les hoquets, la tympanite nerveuse, qui se ma- 
nifestent souvent chez les gastralgiques, les chlorotiques, 
les hystériques, les hypocondriaques. Elle est utile toutes les 
fois qu’il s’agit de fortifier les organes, de ranimer les fonc- 
tions dans la débilité générale ou locale, et, par conséquent, 
de rappeler l'écoulement menstruel quand il y à inertie de 
l'utérus, de faciliter l’expectoration, de ramener la transpi- 
ration cutanée chez les sujets ;ymphatiques, les vieillards 
cacochymes. 

Lorsqu'on veut obtenir de grands effets de cette plante, 
dit Alibert, on la donne en poudre à la dose de 60 centig. 
à { gram. 60 centig. toutes les deux ou trois heures, dans 
une petite quantité d’eau ou dans tout autre liquide appro- 
prié. Cette manière de l’administrer convient surtout dans le 
traitement des fièvres nerveuses. { Élém. de thérapeut. et de 
mat. médic.) Bergius, Cullen et autres médecins distingués, 
faisaient grand cas de la menthe poivrée. Knigge ( De menth. 
peperitid. comment. botan. Elong. 1788) la recommande 
comme un excellent tonique doué d’une force diffusible 
susceptible de récréer promptement tout le système des 
solides. 

Entre tous les moyens propres à tirer les malades d’un 
état de syncope, il en est un peu connu, dit le docteur Duval, 
et dont j'ai plusieurs fois éprouvé l'efficacité : c’est l'essence 
de menthe en frictions sur les gencives.» (Bullet. de l'Acad. 
nation. de médecine, €. xnx, p. 1160.) 

L'infusion théiforme de menthe poivrée est la préparation 
que | ‘emploie le plus ordinairement. Je la donne chaude et 
sucrée par petites tasses assez fréquemment répétées. Je l'ai 
employée ainsi avec avantage non-seulement dans tous les 
cas énumérés plus haut, mais encore dans les fièvres essen- 
tiellement nerveuses, les fièvres ataxiques, typhoïdes; dans 
celles reconnues adynamiques, ou par débilité directe ou 
réelle, chez des sujets détériorés par une mauvaise nourri- 
ture, habitant dans des lieux humides, soumis, en un mot, 
à l’action de toutes ces causes dépressives, physiques et 
morales qui constituent la misère et dégradent l’homme. 
Dans ces cas je fais prendre habituellement, à ces malheu- 
reux , la menthe poivrée en place de thé ; et, à cet effet, je 


283 


la cultive dans mon jardin, où elle se propage en abondance. 
J'ai vu cet usage produire l'expulsion des vers et ranimer les 
forces chez des enfants faibles et languissants. A l'extérieur, 
on applique la pulpe préparée avec les feuilles fraîches de 
menthe poivrée comme résolutive sur les engorgements 
laiteux des mamelles. L'infusion aqueuse ou vineuse de cette 
plante, en lotions, fomentations, etc., est tonique. résolu- 
tive, et convient dans les engorgements froids, les contu- 
sions, les échymoses, les ulcères atoniques, etc. M. Astier, 
pharmacien militaire ( Bullet. de pharm., t. vr, p.350), s’est 
servi avec succès, contre la gale, d’une infusion très-chargée 
de menthe poivrée en lotions (1). L’alcoolat s'emploie en 
frictions contre les douleurs rhumatismales chroniques, le 
relächement musculaire, soit seul, soit associé à des topiques 
analogues. L'huile essentielle est mise en usage à la dose de 
quelques gouttes dans des gargarismes contre le gonflement 
indolent des gencives, dans des liniments résolutifs et stimu- 
lants ; appliquée sur les dents cariées, elle calme la douleur. 
M. Boullay a proposé de l’associer à l’axonge pour en former 
une pommade propre à remplacer les lotions employées par 
M. Astier dans le traitement de la gale. 

Cette plante, récoltée pendant les mois d’août et de sep- 
tembre, séchée avec soin et placée dans un lieu sec, ne perd 
aucune de ses propriétés. Dans cet état, l’eau distillée qu’elle 
fournit laisse voir au bout d'un an des cristaux blancs, 
diaphanes, luisants, ayant la saveur, l'odeur, la volatilité 
et la fragilité du camphre. Aussi, Bodart (Cours de Botaniq. 
compar., t.11, p.193) a-t-il proposé la menthe poivrée comme 
un des meilleurs succédanées de ce dernier. 


(1) Voici le procédé de M. Astier : on prend une quantité suffisante 
de menthe po vrée , qu’on incise, qu’on met dans un tonneau ; ensuite 
on verse dessus de l’eau chaude, et on laisse infuser ie tont pendant plu- 
sieurs jours , en agitant de temps en temps le tonneau fermé. Plus l’infu- 
sion sera chargée, plus elle aura d'effet. Quatre onces (420 gram.) de 
cette infusion s emploient journellement pour lotions sur les articulations 
et tous les endroits où l'éruption de la gale se multiplie. Cetie lotion, 
qu'on peut renouveler deux fois par jour, d ssipe ordinairement la ma- 
ladie en quinze jours au plus, et suns inconvénient, J'ai obtenu le même 
succès dans deux cas de gale récente, en employant de la même manière 
la menthe aquatique. On aurait très-probablement le même résultat avec 
h plupart des plantes de la même famille , surtout celles qui sont trés- 
aromatiques, telles que la sauge , le romarin , le thim , la lavande, etc. 


ARR 7 PER PRE 


+ = 


284 


MENIANTHE, 


MENIANTHE TRIFOLIÉE, TRÈFLE D'EAU. 


Menyanthes palustre (T.) 
Menyanthes trifoliata (L, 


Cette plante, dont la fleur est si jolie, croît dans les marais 
en France, dans les étangs et les lieux marécageux de toute 
l'Europe. L’herbe entière est usitée. 


Propriétés et doses. 


A L'INTÉRIEUR: Dérociion ou infusion , A5 à 50 gram. par kilogr. 

d'eau, par petites tasses. 

Sue exprimé, 30 à 400 grammes. 

Vin (50 gram, pour 4 kilog. de vin ou de bière), 50 à 1400 gram, 

Sirop (4 de suc sur 5 de sirop), 30 à 100 grammes. 

Teinture (4 sur 6 d'alcool, 2 à 4 gram en potion. 

Ertrait alroolique (A sur 4 d'alcool et 8 d'eau), 4 à 4 gram.en 
pilules, bols, ete. 

Extriit aqueu: par infuso-decoctum (1 sur 8 d’eau), 4 à 4 gram. 
en pilules, bols, etc. 

Poudre (rarement emp'oyée) ,1 à 4 gram.en bo!s, pilules ou dans 
un liquide. 


A L'EXTÉRIEUR : Décortion , pour lotions, fomentations, feuilles en 
cataplasines ; suc en topique. 


Propriétés. 


Le trèfle d’eau est amer, tonique, fébrifuge , antiscorbu- 
tique. À haute dose, il est vomitif et purgatif. On l'emploie 
dans les affections atoniques du tube digestif, les scrofules, 
le scorbut, la goutte, le rhumatisme chronique, les maladies 
cutanées anciennes, les fièvres intermittentes, l’aménor- 
rhée par atonie, etc. all à 

Faut-il admettre l'efficacité qu’on a si libéralement accor- 
dée au trèfle d’eau contre une foule d’affections diverses, 
quand lanalogie et l'expérience nous démontrent qu’à 
l'exemple des gentianées et de beaucoup d’autres plantes 
amères, son aciion tonique sur nos organes est la seule 
admissible ?.... Cette plante peut contenir des principes qui 
mod fient cette action ; mais il y'a loin de ces modifications 
aux effets qu’on lui suppose et aux éloges qui l'ont fait 
regarder comme une sorte de panacée. Si Boerhaave en a 
éprouvé d'heureux effets sur lui-même contre la goutte, et 
si Bergius en a constaté de plus en plus l'utilité dans ce 


289 


genre de maladie, cela prouve seulement que l'état d’atonie 
dans lequel se trouvaient ces malades rendait nécessaire 
l'emploi d'une médication qui put augmenter l'énergie vitale 
et rendre les sécrétions plus actives. Quel médecin oserait 
affirmer que la gentiane , le chardon étoilé, l’absynthe, la 
centaurée n’eussent pas produit le même effet 4 

Quelle confiance accorder à toutce que dit Villins {Actes de 
la Société de Copenhague, année 1774) quand, pour preuve, 
ce praticien rapporte avoir guéri dans quinze jours une 
hydropisie ascite très-considérable, en prescrivant trois 
verres par jour de cinq pots de petit lait, dans lesquels on 
avait fait infuser trois poignées de trèfle d eau, une poignée 
de racine d’aunée, de raifort sauvage, de feuilles d’ asclépias 
et de fleurs de buglose ?. …… Tout le monde sait qu’on peut 
faire une excellente soupe avec des cailloux, pourvu qu’on 
y ajoute de la viande et des légumes. 

Au total, le ménianthe est un tonique puissant dont je fais 
très-fréquemment usage. C’est principalement dans le scor- 
but, seul ou associé aux plantes antiscorbutiques et surtout 
au cresson et au cochléaria, que je l'emploie. J'ai souvent 
administré cette plante, dans les lieux où elle était à proxi- 
mité de mes malades, contre les fièvres intermitientes , les 
cachexies, les scrofules, l’hydropisie, la chlorose, l’état 
d’atonie résultant de la misère. J'en ai toujours retiré de 
très-bons effets ; mais je dois dire que, comme fébrifuge, 
elle n'a pas offert plus de certitude que la gentiane, le char- 
don étoilé, l’absynthe et la petite centaurée. 

[Willis administrait aux enfants vermineux 60 centig. 
à { gram. 60 centig. de trèfle d’eau en poudre le matin à 
jeun | pendant douze où quinze jours de suite ; et au bout de 
ce temps il a vu survenir une adondante évacuation de vers 
intestinaux. ] 

A l’extérieur, j’ai employé le trèfle d’eau en décoction sur 
les ulcères atoniques , scorbutiques et scrophuleux. Je n’ai 
pas remarqué d'effet qui lui fut exclusif. Il agissait comme 
toutes les subtances de même nature. J’ai connu un culti- 
vateur asthmatique qui se soulageait en fumant des feuilles 
de trèfle d'eau séchées. 

C L'extrait de cette plante ne contenant pas de tannin : 
peut être associé sans inconvénient aux sels de fer { Soubei- 
ran ; (nouv. Traité de Pharm.) )1 2 fe b2T 


286 


MERCURIALE ANNUELLE, 


FOIROTTE , FOIROLLE , CAGARELLE , RIMBERGE , AVANCE. 


Mercurialis testiculata (T.) 
Mercurialis annua (L.) 


On rencontre cette plante partout en Europe, dans les 
jardins, les lieux cultivés, parmi les décombres , dans les 
terrains pierreux. 


Fréparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décortion, 20 à 50 gram. pour demi-kilog. d’eau. 
Suc exprimé. 50 à 100 grauimes. 
Miel de mercurinule simple ,50 à 60 gram.{rarement par la bouche.) 
Miel de mercuriale com;0$é (sirop de longue vie}, 50 à 60 grain. 
A L'EXTÉRIEUR : Miel de mercuriale en lavement , 60 à 420 gram. 
Suc, 50 à 60 gramnies, en lavement 


Déroction , en fomentations, lotions, lavements; feuilles en cata- 
plasime. 


Propriéiés. 


La mercuriale offre une odeur fétide et une saveur amère, 
salée, fort désagréable. Elle est considérée comme Jaxative ; 
mais on ne lui trouve qu'une action inconstante (1). Cepen- 
dant on l’emploie en lavement, en décoction ou sous forme 
de mellite. Tous les médecins connaissent l’usage du miel 
de wiercuriale. Ce miel est resté dans nos pharmacies mo- 
dernes, malgré le système d’exclusion adopté contre la plu- 
part de nos plantes indigènes. Les feuilles de mercuriale, 
en décoction , sont employées comme émollientes et jointes 
le plus souvent à celles de mauve, de bouillon blanc, etc. 

« Ds du Bosch in Watervlet, venerahilis senex , 83'um 
agens ætatis suæ annum, debilis conshtutioms , jam usque 
ab annis multis, propter famailiarem ipsi conshipathionem et 
colicos inde nascentes dolores, decoctum mercurialis, opti- 
mo successu assumere suevit. » ( Wauters, repertor. remed. 
indig., p. 293.) | 


a) Cette prétendue inconstance des effets de la mercuriale vient de la 
manière de l’employer, Il faut l'administrer fraichement cueillie ; car la 
dessiccation lui enlève presque toute son activité. La coction diminue aussi 
cette activité, et de purgative que cette plante était, elle devient par cette 
préparation simplement laxative. Ces faits , que j'ai été à même de consta- 
ter, expliquent suflisamment les préventions des praticiens modernes 
contre une plante que les anciens employaient généralement , et qui, 
presque abandonnée de nos jours , offre pourtant de grandes ressources 
à la campagne, où elle abonde de tous côtés. | 


+4 


287 


J'ai vu des constipations opiniâtres céder à un moyen tout 
populaire, et qui consiste à introduire dans l'anus des feuilles 
et sommités de mercuriale broyées avec un peu de miel ou 
d’huile d'olive, de la grosseur d'une noix et même davantage, 
suivant le cas. Les nourrices font quelquefois un supposi- 
toire avec un morceau de tige de chou qu’elles taillent de 
manière à lui donner la forme et le volume converables . et 
qu'elles enduisent de suc de mercuriale. Ce suppositoire est 
très-efficace. Îl ne faut pas oublier , dans tout ceci , que la 
mercuriale est de la famille des euphorbes, et que son usage 
chez les enfants doit inspirer une juste méfiance. A cette 
occasion , je crois devoir recommander de ne pas prendre 
la mercuriale vivace (mercuriahis perennis L.) qui est plus 
suspecte , pour la mercuriale annuelle (1). 

[ Les qualités purgatives de Ja mercuriale étaient déjà 
connues du temps d'Hippocrate. On l'employait particuliè- 
rement dans l'hydropisie. Dioscoride, Galien, Oribase, Paul 
d'Egine la prescrivaient comme purgative dans les fièvres 
continues et intermittentes , pour purger les femmes en- 
ceintes et délicates, et les vieillards atteints de constipation. 
Brassavole rapporte que de son temps (153%) les habitants 
de Ferrare mangeaient de cette plante dans le potage ou sous 
forme de bouillie, pour se purger. Gouan { Hort. monsp., 
p. 371) faisah manger aux enfa ts qui avaient des vers une 
soupe préparée avec cette plante. 

« Nous recognoissons , dit Constantin , en la mercuriale 
une puissance laxative très-fidelle , de la phlegme , de l’hu- 
meur séreux et la bile et sans aucune perturbation ; telle- 
ment qu'elle est très-utile pour purger aux fièvres continues 
et ardantes, et aussi à celles qu'assaillent le malade par 
intervalle, que nous appelons intermittentes. 

« U'icelle se peuvent aussi purger, sans aucun regret tous 
ceux qui doyvent avoir en tout temps le ventre lasche et 
libre : elle est convenable aux femmes enceintes et à toutes 
vieilles gens, qui coustumièrement ont le ventre chiche et 
constipé ; les enfans encore et les plus tendrelets en peuvent 


(1) La mercuriale vivace ou des montagnes, rangée par M. Orfila par- 
mi les poisons narcotico-âcres, croît dans les lieux ombragés et différe de 
la mercuriale annuelle par sa tige toujours sample, ses feuilles un peu 
rudes et son odeur désagréable. Sloane (Transact phil, vol. xvir, p.875) 
cite un fait qui prouve son action vénéneuse : une famille ayant mangé 
de cette plante frite dans du lard, le père, la mère et trois enfants éprou- 
vèrent des vomissements, une diarrhée violente, de la somnolence et d’au- 
‘tres symptômes graves. Un des enfants mourut. Vicat cite aussi un cas 
d'empoisonnement suivi de mort, par l'ingestion de cette plante. 


2838 


recevoir à l'intention susdite*...… Son jus est très-utile à 
recevoir les poudres des médicaments dédiez pour Îles pi- 
lules: ses feuilles pilées et meslées avec le miel ou le vin 
cuil, pourront estre réservées en forme d'opiat, iaquelle 
conviendra non seulement à lascher le ventre, mais aussi 
pour déliureret ouurir les obstructions des parties internes ; 
el principalement pour prouoquer les menstrues aux fem- 
mes, pour lequel faict aussi, elle peut estre très-utilement 
supposée en forme de pessaire ; et pour autant qu'elle 
ofiense quelque peu lestomach, celuy-là corrigera et aug- 
mentera sa puissance purgative qui la meslera avec: l’ab- 
synthe. » (Pharm. provencal., bv.2, chap:8 , p. 120.) 

J'ai vu plusieurs fois employer par des commères , et j'ai 
moi-même employé avec succès la mercuriale cuite sous la 
cendre et appliquée chaude sur la tête, pour rappeler les 
croûtes de lait, dont la rétrocession donnait lieu à divers 
accidents. Entre autres cas, je cerai celui d’une petite fille 
âgée de vingt mois, très-Iymphatique, ayant habituellement 
le räle muqueux qu'on observe chez quelques enfants, et qui 
nécessilent souvent l'emploide l’ipécacuanha comme vomitif. 
Ce râle, produit de l'augmentation de la sécrétion muqueuse, 
était considérablement augmenté, accompagné d’une grande 
difficulté de respirer et faisait craindre un catarrhe suffo- 
cant. Après trois vomissements provoqués par l'administra- 
tion de trois centig. de tartre stibié mêlés à trois onces d’eau 
distillée, prises par cuillerées, la mercuriale fut appliquée 
sur toute l'étendue du cuir chevelu. Dès cette première 
application l'exsudation séro - purulente reparut, et les 
symptômes bronchiques s’appaisèrent notablement. Une 
seconde application de mercuriale rendit à l'affection cutanée 
toute son activité , et fit disparaître complètement Ja maladie 
produite ou du moins considérablement augmentée par une 
rétrocession qui, considérée comme cause ou comme effet, 
détermine souvent les accidents les plus graves. 

Les feuilles de mercuriale pilées et appliquées tièdes sont 
plus actives que ces mêmes feuilles cuites sous la cendre. 

Le miel de mercuriale est fréquemment employé dans les 
lavements comme laxatif. Les pharmaciens, en le préparant, 
y ajoutent souvent, au rapport de MM. Mérat et Delens, les 
grabeaux de séné pour en rendre l'effet plus marqué. Je 
doute que cette addition ait lieu. 

Swinger a inventé un sirop de mercuriale composé qui a 
joui d'une grande vogue sous le nom de sirop de longue vie 
ou de Calabre. Ce sirop, tombé dans l'oubli pour avoir-été 


trop vanté, a pour base le suc de mercuriale, la racine d'iris 


289 


germanique et celle de gentiane infusées dans le vin blane. 
Comme à la fois laxatif et tonique, il convient dans tous les 
cas où se présente la double indication de fortifier les or- 
ganes et, en même temps, de lâcher le ventre. 

J'ai connu un goutteux qui ne se soulageait que par l'usage 
de ce sirop: il en augmentait ou il en diminuait la dose sui- 
vant l'effet tonique ou laxatif qu'il voulait produire. Les 


vieillards constipés , cacochymes et asthmatiques s'en trou- 
vent bien. 


En 


MILLE - FEUILLE, 


HERBE AUX CHARPENTIERS, HERBE AUX VOITURIERS, 
HERBE MILITAIRE, HERBE A COUPURES, 
HERBE ENDOVOIRE (1). 


Millefolium vulgare album (T.) 
Achillea millefolium (L.) 


Cette plante abonde dans les champs, aux lieux incultes, 


sur les bords des chemins. On emploie l'herbe et les som- 
mités fleuries. 


Préparations et doses, 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, 10 à 20 gram. par 500 gram, d'eau 
bouillante. 
Suc exprimé, 50 à 400 gram. en potion. 
Eau distillée (4 sur 12 d’eau), 50 à 400 gram. en potion. 
Iluile essentielle, 59 cent. à { gram. en potion. 
Extrait, 4 à 40 gram. en potion. 
Sirop 1 fraiche sur 6 d’eau bouillante et 12 de sucre), 50 à 60 
gram. | 
A L'EXTÉRIEUR ; Décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau, pour 
lotions, fomentations, bains, lavements. 


Propriétés. 
La mille-feuille, dont les feuilles offrent une saveur as- 
tringente et amère, est tonique. Sous ce rapport, elle peut 


(4) Endover signifie, en patois boulonnais, endormur, (du celtique dov, 
endormir); endovoire, quiendort. Ce nom lui vient sans doute de ses pro- 
priétés calmantes et antispasmodiques, et de l'usage qu'on en à fait depuis 
un temps immémorial dans les affections nerveuses. Nos paysans croient 
qu'il suffit d'introduire de cette herbe dans les narines ou dans les oreil- 
les pour produire le calme, le sommeil, et même une sorte d'ivresse. L’ex- 
périente ne les a pas détrompés. Le vrai n'a point de charmes pour 
l’ignorance ; elle aime mieux croire aveuglément le merveilleux qu’on 


lui a mille fois raconté, el qu'elle écoute toujours avec plaisir, que de 
chercher à le vérifier. 


19 


290 


être utile dans le traitement de certaines affections nerveu- 
ses accompagnées d'inertie des organes, et chez les sujets 
lymphatiques. Mais je dois avouer que je ne lui ai reconnu 
aucune des propriétés spéciales annoncées par Stahl, Hoff- 
mann et Gruner contre la leucorrhée, les affections calcu- 
leuses, nerveuses, rhumatismales ; l’hypocondrie, lhystérie, 
l'épilepsie, les hémorrhagies passives, etc., etc. Le nom 
qu'elle porte vulgairement (herbe aux charpentiers) Jui 
vient de sa vertu supposée vulneraire. Les paysans retar- 
dent la guérison de leurs coupures mal réunies en y appli- 
quant cette herbe; mais comme ils guérissent par les efforts 
de la nature, malgré cette application, ils lui attribuent le 
merveilleux travail de la cicatrisation. 

[L’infusion de mille-feuille noircissant et perdant promp- 
tement son arôme, on ne doit préparer que la quantité que 
l'on peut prendre en une ou deux fois. ] 


MILLE-PERTUIS, 


HERBE DE SAINT-JEAN, TRISCALAN PERFORÉ, 
HERBE À MILLE-PERTUIS. 


Iypericum vulgare (T.) 
Hypericum perforatum (L.) 


Cette plante est très-commune aux lieux incultes, dans 
les bois, dans les haies. On emploie ses sommités fleuries. 
Préparations et doses. 

A L'INTÉRIEUR : Infusion théiforme. 45 à 50 gram. par kilog. d’eau. 
Suc erprimé, 15 à 50 gram. et plus. 
Extrait résineux, 4 à 8 gram. 
Teinture alcoolique, À à 2 gram. en potion. Ô 
Huile volatile, 50 à 50 cent. dans un véhicule approprié. 
Poudre, 4 à 8 gram. (rarement). 
Vin, (50 gram. par kilog.de vin blanc en macération),50 à 100 gram. 
À L'EXTÉRIEUR : [ufusion ou décoction pour lotions, vapeur, fomen- 
tations, injections, etc.—Huile (infusion des fleurs dans l'huile 
d'olive en frictions, et pour composer l’onguent digestif simple). 


Propriétés. 


Le mille-pertuis, d’une odeur résineuse quand on le froisse 
entre les doigts, d’une saveur amère, astringente, un peu 
salée, ayant joui d’une réputation immense dans l’antiquité 
comme vulnerare, est un stimulant balsamique que l'on a, 
à tort, abandonné. Il peut être utile dans les catarrhes chro- 


291 


niques, certaines phthisies, quelques cas de leucorrhée et 
d'aménorrhée; etc. On conserve encore dans nos pharmacies 
urbaines l'huile d'hypericum pour la confection de l'onguent 
digestif, où elle se trouve étouffée sous la puissance résineuse 
de là térébenthine. | 

J'ai employé avec avantage l’infusion théiforme de sommi- 
tés de mille-pertuis dans les affections catarrhales pulmo- 
naires chroniques, dans certaines leucorrhées sans irritation 
utérine trop prononcée ; dans l’asthme, dans le catarrhe vé- 
sical chronique et même dans la phthisie avec expectoration 
purulente : je me suis toujours très-bien trouvé de son usage. 
Son action est due bien évidemment à un principe amer 
gammo-résineux dont la présence se révèle au goût. Cette 
infusion m'a surtout été utile dans les cas de catarrhe vési- 
cal où un état d'irritation subsistait encore avec une sécré- 
tion muqueuse plus ou moins abondante. Lorsque l’eau de 
goudron , la térébenthine, avaient l'inconvénient de causer 
un surcroît d'irritation , l'infusion‘de mille-pertuis plus ou 
moins rapprochée, était supportée facilement et amenait, 
en peu de jours, une amélioration remarquable. 

J'ai souvent mêlé le mille-pertuis à la racine d'aunée et au 
lierre terrestre dans les affections chroniques de la poitrine. 
Je l’ai aussi administré avec le lichen pulmonaire ou le li- 
chen d'Islande. Les cas où ces combinaisons sont indiquées 
ne peuvent s'apprécier qu'au lit des malades. Les principes 
généraux s’établissent, en thérapeutique, dans.les livres ; 
l'application de ces principes subit les modifications suggé- 
rées par l’état particulier du sujet, et c’est ce qui constitue 
la pratique. 

[L'analogie qui existe entre l'huile de térébenthine et 
l'huile volatile de mille-pertuis explique les avantages qu’on 
dit avoir obtenus de l'administration de cette plante comime 
vermicide. Il faut reléguer au rang des fables tout ce qu'ont 
rapporté Théophraste, Matthiole, Paracelse, Fallope, Scopoli, 
Camérarius, Locher, Geoffroy, sur les vertus prétendues vul- 
néraires et cicatrisantes de l’hypericum. On doit aussi ré- 
duire à leur juste valeur les assertions d’Ettmuller sur les 
propriétés diurétiques de cette plante, dont, selon lui, la dé- 
coction ou l'extrait sufliraient, administrés à l’intérieur, 
pour guérir radicalement ou pour prévenir l’ischurie, l'hé- 
maturie, la néphrite calculeuse, etc. Il en est de même de 
sa précieuse faculté de dissoudre le sang épanché et caillé 
dans l’intérieur des organes, de guérir l’hémoptysie et la 
phthisie. Le célèbre Baglivi lui-même à cru qu’elle pouvait 
guérir la pleurésie chronique. L'amélioration qu’elle precure 


292 


réellement dans les maladies de poitrine, ainsi que j'ai 
pu en juger par ma propre expérience, ont pu porter cet au- 
teur à lui accorder une propriété qu’elle partage, au reste, 
avec toutes les substances résineuses. On s’en est servi avec 
avantage, dit-on, dans les cas d'inertie de l'utérus, pour 
ramener l'écoulement des règles, et même pour favoriser 
l'accouchement , ce qui mérite confirmation. Enfin, loué ou- 
tre mesure par les anciens et abandonné sans restriction par 
les modernes, le mille-pertuis ne mérite ni les pompeux élo- 
ges des uns ni l'inconcevable indifférence des autres. Entre 
ces extrêmes , l'observateur impartial lui assigne la place 
qu'il doit occuper dans la matière médicale indigène. 

On peut employer les semences et les feuilles comme les 
sommités de la plante. La récolte doit en être faite à l’époque 
de la floraison : séchées à l’étuve et bien préparées, les di- 
verses parties du mille-pertuis conservent leur belle cou- 
leur. ] 


MORELLE, 
MORETTE, MOURELLE, CRÈVE-CHIEN. 


Solanum officinarum (T). 
Solanum nigrum (L.) 


L'espèce de morelle dont il est ici question est la plus 
commune : on la trouve partout, dans les champs, les lieux 
incultes, sur le bord des chemins, dans les jardins, etc. 
L’herbe entière est usitée. 


Préparations eé doses. 


A L'INTÉRIEUR : (N'a presque jamais été employée.) Poudre ou ex- 
trait, 5 à 20 cent. 
A L'EXTÉRIEUR : Décoction, 30 à 60 gram. par kilog d'eau, pour 
lotions, injections, bains. —Pulpe des feuilles, en cataplasme. 
Extrait, 4 à 8 grammes par 30 grammes d'axonge, en pommade. 
Huile (4 de feuilles sur 2 d'huile d'olive), 50 à 60 gram. pour 
liniment. 
Propriétés. 


La morelle, d’une odeur légèrement fétide et d’une saveur 
fade , est émolliente lorsqu'elle est jeune et pendant la flo- 
raison , narcotique lors de la maturité des baies. La plante 
avec ses baies est utile, à l'extérieur, comme sédative dans 
les névralgies, le cancer, certaines leucorrhées, la métrite 
chronique, quelques inflammations et éruptions cutanées 
douloureuses. 


293 


Je n’ai jamais administré la morelle à l'intérieur. Les au- 
teurs sont si peu d'accord sur les qualités délétères de cette 
plante, que de nouveaux essais pourraient seuls éclairer le 
praticien. Un état de stupeur, le coma, et une violente dou- 
leur épigastrique avec fièvre ont été observés par Alibert 
chez un enfant de huit ans qui avait avalé des fruits de mo- 
relle. Wepfer parle de trois enfants chez qui les fruits de 
cette solanée ont occasionné le délire, la cardialgie et Ia dis- 
torsion des membres. 

[ Dans les expériences faites par M. Orfila, on voit plu- 
sieurs chiens périr au bout d'environ quarante-huit heures 
après avoir pris 24 à 28 grammes d'extrait aqueux de mo- 
relle ; 8 grammes du même extrait, dissous dans 6 grammes 
d'eau et appliqués sur le tissu cellulaire de la cuisse d’un 
chien, le firent mourir à peu près dans le même espace de 
temps. ] 

On oppose à ces faits des observations et des expériences 
qui tendent à représenter la morelle comme dépouillée de 
toute espèce de qualités narcotiques et délétères. Ainsi 
Spielmann a avalé en infusion #5 centigrammes de ceite 
plante sèche sans en éprouver aucun effet : il a vu donner : 
un épileptique jusqu’à 8 grammes de son extrait sans qu'il 
en fût résulté le moindre danger. 

[ L’infusion de cette plante, bue par Guérin {De Veget. 
venenat. Alsatiæ, p. 66), ne produisit aucun effet remar- 
quable. Le suc de l'herbe, donné à la dose de 12 grammes 
à des malades, ne parut pas en produire davantage ; 8 
grammes de suc des baies, administrés à trois convalescents, 
ne firent qu'augmenter les urines. M. Dunal, qui a fait 
prendre à différents animaux jusqu'à cent baies de morelle 
noire. et qui, lui-même, en a pris un nombre assez considé- 
rable sans en éprouver le moindre inconvénient, pense que 
dans la plupart des empoisonnements attribués aux baies de 
cette plante, les accidents ont été produits par les fruits de 
la belladone, qu'on désigne aussi quelquefois sous le nom 
de morelle.] 

Cette diflérence dans les effets de la morelle sug l’écono- 
mie vient, sans doute, de ce que les expérimentateurs ont 
employé la poudre ou l'extrait préparés avec la plante en- 
core jeune, en fleur, ou avec des fruits non mûrs. On sait 
aujourd'hui qu’elle contient un principe actif (solaline) 
après sa complète fructification, en assez grande quantité 
pour causer les accidents les plus graves, étant administrée 
à l'intérieur à dose toxique. 

[Quoiqu'il en soit, la morelle, autrefois employée à l'in- 


29% 


terieur contre la cardialgie, les tranchées et diverses affec- 
tions nerveuses, l'ischurie, la strangurie , les douleurs 
néphrétiques, etc., n’est plus mise en usage qu’à l'extérieur. 
On applique les feuilles récentes pilées sur les ulcères dou- 
loureux, le cancer, les fissures du mamelon, les hémorrhoï- 
des, etc. On s’en sert aussi en décoction ou en cataplasme 
sur les furoncles, le panaris, le phlegmon, le chancere véné- 
rien, les brûlures, les contusions, la strangurie, et, suivant 
Alibert, sur les dartres vives et rongeantes. 

M. Dunal a remarqué que le suc de la morelle noire, ap- 
pliqué sur les yeux, occasionnait une légère dilatation de la 
pupille, etrendaïit, pendant plusieurs heures, l'œil insensible 
à l'impression d’une vive lumière. Quoique cet effet soit 
moins prononcé que celui qui est produit par la belladone , 
on peut, à défaut de cette dernière, se servir de la morelle 
pour préparer l'organe à l’opération de la cataracte. ] 

Les anciens employaient à l'extérieur, dans les cancers, 
une pommade faite avec le suc de morelle et l'axonge battus 
et méêlés dans un mortier de plomb. Percy a renouvelé cette 
méthode pour les feuilles de bardane. Je pense que cette 
trilturation végéto-minérale peut être avantageuse. J'ai quel- 
quefois mêlé le suc de morelle avec le jaune d'œuf comme 
topique anodin. J’ai aussi employé, faute d’autres moyens, 
la décoction et quelquefois le suc tiède de morelle sur les 
hémorrhoïdes douloureuses. Ce calmant, qu'il est toujours 
si facile de se procurer lorsque la plante est en pleine vi- 
gueur, m'a réussi. Le médecin est heureux de trouver, dans 
l'isolement des hameaux, les plantes que la Providence lui 


offre si généreusement pour soulager le pauvre qui réclame 
ses Secours. | 


MOSCATELLINE, 
MOSCATELLE, 
MOSCATELLINE A FEUILLES DE FUMETERRE BULBEUSE, 
L HERBE MUSQUÉE. 


Moschatellina foliis fumariæ tulbosæ (T}). 
Adoxa moschatellina (L.) 


La moscatelline se trouve partout en France, dans les 
prairies fraîches, dans les haies ombragées, au bord des 
ruisseaux, dans les terrains légers, sablonneux. On peut 
utiliser toute la plante. 


295 


Propriétès. 


Les feuilles et les fleurs de cette plante ont une odeur de 
musc très-agréable, surtout le matin et dans les terrains hu- 
mides. Je l'ai mise en usage , comme antispasmodique, dans 
les affections nerveuses, la gastralgie, les flatuosités. Elle 
m'a paru produire du soulagement et agir un peu comme 
diaphorétique. Je l’administre en infusion théiforme. Je la 
joins quelquefois aux fleurs de tilleul et aux sommités de 
caille-lait jaune. 


MOURON ROUGE 


MOURON MALE, MOURON DES CHAMPS. 


Auagallis phœnicco (T.) 
Anagallis arvensis (L.) 


Cette plante abonde dans les champs et les jardins. On a 
employé toute la plante. 


Propriétés, 


Le mouron rouge, d'abord d’une saveur douce, laisse en- 
‘suite dans la bouche un sentiment d’amertune et d’àcreté. 
Beaucoup d’auteurs, d'après Pline et Dioscoride , ont décoré 
cette plante de vertus plus ou moins merveilleuses. Non- 
seulement on l'a administrée comme fondante et apéritive 
dans les obstructions des viscères et dans l'hydropisie, mais 
aussi comme un remède infaillible contre le cancer des 
mamelles, et même contre la rage, soit, dans ce dernier 
cas, comme préservatif, soit comme curatif. Cette dernière 
opinion vient sans doute de la propriété que lui accordait 
Dioscoride contre le venin de la vipère. C'est aussi sur le 
témoignage de ce dernier qu'on a vanté le suc de mouron 
mêlé avec du miel, pour guérir les ulcères de la cornée et la 
faiblesse de la vue, et que l'on a employé cette plante dans 
l’épilepsie, l'odontalgie, la goutte , la peste, la phthisie, les 
hémorrhagies, etc. Les uns ont recommandé le suc de la 
plante fraîche ou l'extrait; les autres, la poudre ou la décoc- 
tion dans le vin. On a mêlé aussi son suc avec autant de lait. 

Le soulagement que l'application du mouron sur un can- 
cer au sein produisit, au rapport de Murray, ne fut pas de 
longue durée, et le mal ayant fait de nouveaux progrès, 
conduisit bientôt la malade au tombeau. Je dois dire, toute- 
fois, que j'ai vu des campagnaxds employer avec quelque 


296 


apparence de succès la décoction ou le suc de cette plante 
pour calmer les douleurs des plaies et des ulcères, et pour 
déterger et fondre des engorgements scrofuleux ulcérés. 

Hartmann, pour guérir la manie, commençait par un 
vomitif antimonial, et donnait ensuite à son malade la décoc- 
tion de mouron rouge durant plusieurs jours, ce qui lui 
réussissait, grâce au vomilif, que l’on aurait pu tout aussi 
bien faire suivre de l’usage de l’eau distillée simple ou de 
quelques pilules de mie de pain. Parmi les auteurs qui ont 
préconisé le mouron rouge contre la morsure du chien en- 
ragé et de la vipère, quelques-uns ont employé en même 
temps l’alkali volatil, d’autres des préparations mercurielles. 
On peut, avec juste raison, attribuer à ces derniers médica- 
ments, et surtout à l’ammoniaque, pour ce qui concerne le 
venin de la vipère , le succès qu'on a pu obtenir, et non à 
une plante qui, pour n'être pas dépourvue de propriétés, est 
loin de posséder celles que les anciens et les modernes lui 
ont si gratuitement accordées. 

On ne se sert plus du mouron rouge à l'intérieur ; mais, 
dans le cas où l’on voudrait le soumettre à de neuvelles 
expériences thérapeutiques , il est important que l’on sache 
qu'il ne doit être administré qu'avec circonspection. Donné 
à une certaine dose, l’action qu'il exerce sur Féconomie 
animale peut donner la mort, à la manière des poisons nar- 
cotico-âcre. [I résulte des expériences de M. Orfila, que 12 
gram. d'extrait de mouron préparé par évaporation du suc, 
dans 45 gram. d’eau donnés à un chien, l'ont fait périr en 
vingt-quatre heures, et que 8 gram. du même extrait, mêlés 
à une égale quantité d’eau et appliqués à huit heures du 
matin sur le tissu cellulaire de la partie interne de la cuisse 
d’un petit chien robuste, ont produit la mort au bout de 
onze heures. 

En présence de tels résultats, on a lieu de s'étonner que 
les anciens n'aient pas reconnu les propriétés délétères du 
mouron rouge, et que Lieutaud { Précis de Mat. médhcal., 
1.1, p.579), ait prescrit sa décoction dans la proportion 
d’une poignée par livre d’eau, et son suc exprimé à la dose 
de deux à trois onces. Des herboristes igorants ont quelque- 
fois substitué au mouron rouge le mouron des oiseaux ou 
morgeline , plante inerte , et dont l'administration à l’inté- 
rieur à pu faire croire à l'innocuité du mouron rouge. 


297 


MOUSSE, 


MOUSSE COMMUNE. 


La mousse {muscus vulgarissinmus) comprend plusieurs 
espèces, telles que les hypnum, le sphagnum palustre, 
arboreum , etc. 

L’odeur et la saveur de quelques mousses portent à croire 
qu’elles sont légèrement astringentes. On prétend que la 
poudre de mousse est hémostatique, ce que l’on a, dit-on, 
appris des ours, qui, étant blessés, arrêtent le sang avec 
cette plante. Ce qui est mieux constaté, c’est que l'ours a 
appris aux Lappons à enlever avec adresse les larges plaques 
du polytricum commune pour s'en faire un lit et se préser- 
ver ainsi du froid pendant la nuit. Les pauvres , dans quel- 
ques contrées de la France, font des sommiers de mousse 
qui ont plusieurs avantages sur les paillasses. Les souris, 
les puces et les punaises n’y séjournent pas comme dans la 
paille. On choisit la mousse la plus douce, la plus longue , 
aux mois d'août et de septembre ; on la fait sécher à l'ombre ; 
on la bat sur des claies pour en détacher toute la terre. Ces 
couchettes rustiques qui tiennent lieu de matelas aux gens 
de la campagne, et qu'on bat de temps en temps pour leur 
rendre leur première épaisseur, peuvent durer au moins 
vingt ans. Le sommeil, qui fuit si souvent les lits de plume 
et de duvet préparés par le luxe et la mollesse, s’abat avec 
délices sur la mousse, qu'il arrose du suc le plus pur d 
ses pavots. 

Non-seulement j'ai fait faire des coussins de mousse pour 
placer sous des membres blessés, mais j'ai encore employé 
cette substance, à défaut d'autre, pour servir de remplissage 
dans le traitement des fractures. Quand on ne peut trouver 
ce que l'on désire, il faut savoir se servir de ce que l’on 
trouve. Je fus appelé dans le cours de mes visites à la cam- 
pagne, chez un indigent habitant une chaumière isolée et 
dont le fils âgé de douze ans venait de tomber du haut d’un 
arbre et de se fracturer complètement la jambe droite à sa 
partie moyenne. Je n'avais à ma disposition ni linge ni 
attelles. Après la réduction de Ia fracture , des morceaux de 
bois de la grosseur du petit doigt, rangés à côté les uns des 
autres, fixés à leurs extrémités au moyen d'une ficelle, garnis 
ensuite de mousse au-dedans, appliqués autour du membre 
et maintenus par deux jarretières de laine, composèrent 
tout l’appareil. Je n’en employai pas d’autre pendant les 


298 


trente jours que dura le traitement, et le malade guérit tout 
aussi bien et sans autant de gêne qu'avec le bandage clas- 
sique (1). 

Lorsque, dans certains cas, le poids des cataplasmes in- 
commode le malade, comme, par exemple, dans les inflam- 
mations des viscères abdominaux , je remplace ces derniers 
avec la mousse , que j'imbibe de décoction émolliente et que 
je fais arroser de temps en temps. 

J'ai vu, chez un campagnard âgé de cinquante ans envi- 
ron , un ulcère très-douloureux, calleux, enflammé , occu- 
pant, à la partie interne et moyenne de la jambe gauche, une 
étendue d'environ cinq centimètres, et contre lequel on avait 
inutilement employé divers moyens pendant plusieurs an- 
nées , guérir dans l’espace d’un été en lui faisant recevoir 
l'eau tombant d’une fontaine , et en le recouvrant de mousse 
continuellement humectée de cette même eau. La douche 
était de la durée de deux heures chaque jour, 


MOUTARDE NOIRE. 


Sinapis rapi folio (T.)—Sirapis nigra {L.) 


La mouiarde est une plante connue depuis long-temps, 
qu'on rencontre partout dans les terrains arides et pierreux 
du nord de la France, et que l’on cultive pour l'usage culi- 
naire. On emploie la semence. 


a — 


(4) On met généralement trop d'art dans le traitement des fractures. 
Les tourments de la compression le gonflement, la gangrène, le sphacèle, 
ou, tout au moins, l'atrophie du membre, sont les tristes résultats d'un 
bandage trop bien appliqué, trop serré. L'expérience m'a démontré que, 
dans la plupart des cas,.le repos, la simple contention des parties , les 
pansements rares, l'absence de toute violence exercée sur les muscles, 
sont des conditions beaucoup plus favorables à la guérison des fractures 
que celles qu’on obtient par des bandages compliqués ou par des machines 
qui excitent l’action musculaire, déterminent des tiraillements , blessent 
les parties molles, causent souverft des douleurs insupportables , et de- 
viennent dans certains cas de véritables instruments de torture. Le ban- 
dage amidonué même , dont les avantages sont généralement reconnus , ne 
doit, à mon avis, être employé qu'au bout d'une à deux semaines , lors- 
que les premiers accidents sont dissipés, que le membre est dans un état 
de relâchement dû au repos, ct que les fragments commencent à éprouver 
les changements organiques producteurs du cal. Bien que Mayor et d'au- 
tres praticiens habiles aient ingénieusement simplifié le traitement des 
fractures des extrémités, il reste encore beaucoup à faire pour le perfce- 
tionnement «le cette partie essentielle de la chirurgie, Fr 


299 


Préparations cet doses. 


À L'INTÉRIEUR : $emence concassée ou en poudre, 8 à 15 grammes 
en potion, ou dans 500 gram. de lait. 
Graines entières, un peu ramollies dans l'eau , 15 à 20 grammes. 
Vin ou biére (15 à 50 gram.pour 1 kilog. de vin), 50 à 100 gram. 
suivant l'effet qu'on veut produire. 
Huile fixe douce, 50 à 60 grammes. 
Huile volatile, 3 à 20 cent. en potion. 


A L'EXTÉRIEUR : Poudre, soit seule, soit mêlte à la farine de graine 
| de lin. avec suffisante quantité ‘d'eau ou de vinaigre ; 50 à 200 
gram. pour pédiluve, manuluve, lavements, etc. 
Pommade (poudre avec axonge , huile, etc.), en frictions topique. 
Huile fixe, en liniment. — PE distillée , en frictions, — Huile 
volatile, dans l'alcosl comme rubéfiant 


Propriétés. 


La semence de moutarde noire, d’une saveur amère, 
chaude, d'une âcreté fugace, est excitante, antiscorbutique. 
A petite dose, elle relève le ton et l’action des viscères, et 
convient contre l'anorexie par atonie, l’hypocondrie, la 
chlorose , la cachexie ; à dose plus élevée, elle excite tous les 
organes, l'estomac, le poumon, les reins , et peut être utile 
dans les engorgements atoniques, les hydropisies, certains 
catarrhes chroniques, la paralysie et surtout les affections 
scorbutiques. À haute dose, elle est vomitive. En graine, 
prise entière, elle a été vantée dans quelques affections 
dyspepsiques avec constipation, les fièvres intermittentes, 
etc. Pulvérisée et appliquée sur la peau, elle produit la rubé- 
faction et la vésication ; on l'emploie ainsi journellement 
comme un puissant révulsif. 

La thérapeutique rurale trouve dans la moutarde un de 
ses médicaments les plus actifs. La graine de cette plante 
peut remplacer tous les autres antiscorbutiques. Je l'ai em- 
ployée seule, dans un cas de scorbut très-grave, chez un 
enfant de quatorze ans que M. de Bavre, maire du village de 
Parenty, me présenta au printemps de 1842. Cet enfant, 
appartenant à une famille indigente, avait des hémorrhagies 
nasales continuelles et très-abondantes , les gencives engor- 
gées et saignantes , le corps couvert de taches , d’échymoses, 
la face jaune ei bouffie, le pouls faible et les pieds œdéma- 
tiés. Désirant satisfaire à l'indication la plus pressante, celle 
de modérer les hémorrhagies, je fis administrer à ce malade 
une forte décoction d’écorce de chène par demi-tasses 
fréquemment répétées. L’écoulement du sang diminua de 
moitié environ dans l’espace de cinq jours; mais il fallait 


300 


auaquer le scorbut. Je préparai, à cet effet, la bière sinapi- 
sée {32 grammes de semence de moutarde concassée dans 
4 kilogram. de bière ) que je fis prendre à la dose de quatre 
à cinq onces par jour. L'amélioration se manifesta dès les 
premiers jours. Les taches scorbutiques s’effacèrent gra- 
duellement, les hémorrhagies s’éloignèrent et cessèrent 
enfin, et, au bout de quarante à cinquante jours de l'usage 
du médicament, l'enfant fut complétement rétabli. 

[Ray (Hist. plant., p.803) rapporte que, pendant le siége 
de la Rochelle, la moutarde pulvérisée et mêlée dans dû 
vin blanc, sauva la vie à un grand nombre de malheureux 
atteints de scorbut. Cet auteur dit avoir vu des uleères imfects 
de la bouche et autres symptômes de cette affection, dispa- 
raître par ce seul moyen employé tant à l'intérieur qu'en 
gargarisme. Callisen a traité la fièvre putride avec un succès 
aussi prompt qu'inespéré au moyen de la moutarde en poudre 
administrée d'heure en heure à la dose d’un gros {4 gram.) 
Ainsi, la gastro-entérite de Broussais , traitée en France par 
les sangsues et les antiphlogistiques avec plus au moins 
d'avantages, guérissait au Danemark par l'usage de la mou- 
tarde , à grande dose ff). 

Le docteur Savy, de Lodève (Annales clinig. de Montpel- 
lier, mai 1816, {. xL }, employa la moutarde avec succès dans 
une épidémie de fièvre putride maligne qui avait beaucoup 
de rapport avec celle dans laquelle le médecin danois en 
avait retiré un effet avantageux. C'était après les vomitifs, 
lorsque l’adynamie, s’alliant avec l'ataxie, menaçait les jours 
du malade, que le docteur Savy la mettait en usage. La dose 
ordinaire était une demi-once {15 grammes) pulvérisée en 
décoction sur une pinte et demie d’eau (759 grammes). Les 
malades en prenaient une demi-tasse à café de demi-heure 
en demi-heure. Les observations suivantes constatent les 
bons effets de ce médicament. «La fille Biscarlet des Pascals, 


@) Si vous le pouvez, ami lecteur, expliquez ces résultats obtenus par 
des moyens opposés. Pour moi,Je me contenterai de dire que les effets dle la 
moutarde dans la fiévre typhoïde ne m'élonnent pas plus que ceux de la 
valériane , de la serpentaire de Virginie, de l’arnica, du camphre, du 
quinquina , de l’acéiate d’ammoniaque que j'ai vu employer en pareilles 
circonstances chez des milliers de malades dans les hôpitaux de la grande 
armée , alors que le brownisme , nosographié par Pinel, régnait encore 
dans nos écoles et dirigeait toute la pratique médicale. Sous l'influence de 
cette médication tonique et antiseptique, la langue, de sèche et noire 
qu'elle était, s’humectait , la soif cessait , la fuliginosité des dents dispa- 
raissait, le pouls se développait et se fortifiait, la peau devenait souple 
et-halilueuse, tous les symptômes, en un mot, diminuant d'intensité , 
annoncaient, dans la plupart des cas,une heureuse solution de Ja maladie. 


301 


agée de seize ans, était à la seconde périodé de la maladie 
lorsqu'on réclama nos secours. Le flux diarrhoïque, les 
pétéchies et la prostration extrême des forces nous inspirait 
d'autant plus de craintes qu’elle ne voulait prendre aucun 
remède; je la mis à l'usage de la moutarde le 29 août 1813. 
Le surlendemain, l'ayant visitée, on me dit qu’elle avait pris 
depuis mon départ six pintes de tisane ; le pouls était élevé; 
tout le corps était couvert de pétéchies, les forces en meil- 
leur état, la diarrhée moindre , la langue sèche et noire. Le 
4 septembre, il n’y avait plus de diarrhée, la soif était moins 
considérable, ainsi que les pétéchies ; la malade se trouvait 
beaucoup mieux ; elle avait pris deux pintes de tisane. Le 7. 
je la trouvai levée : tous les symptômes alarmants avaient 
disparu , la tisane d'orge remplaça la décoction de moutarde. 
Le 8, elle servait sa mère qui était attaquée de la même 
maladie ; elle fut traitée comme sa fille et offrit les mêmes 
résultats. — La fille d’Affre, de Gours, âgée de onze ans, 
était au huitième jour de la maladie ; elle prit 15 grains 
d'ipécacuanha , qui furent réitérés le surlendemain. Le 7 
septembre, et 12° de la maladie, ayant trouvé la prostration 
des forces , les soubresauts, etc., nous ordonnâmes la décoc- 
tion de moutarde. Le lendemain le mieux-être était sensible, 
la langue était moins sèche. Le 4 il y eut une exacerbation 
très-orageuse ; la malade, trompant ses gardes, s'était levée 
et avait été boire à la cruche. Le 15, au matin, il y avait 
délire, pétéchies, soubresauts, pouls concentré, langue sèche 
et tremblante ; même tisane de moutarde ; la soif était si 
forte , qu'elle but dans la journée quatre pintes de tisane ; le 
soir le pouls était toujours faible, accompagné de délire , 
nous fimes appliquer les vésicatoires aux jambes. Le lende- 
main mieux-être, même tisane; le soir, elle raisonnait 
mieux, les soubresauts n’existaient plus , et la convalescence 
ne tarda pas à arriver. » 

Deux autres observations sont rapportées par l’auteur. Sur 
le grand nombre de malades chez lesquels il a employé ce 
traitement, quatre fois seulement il a trompé son attente ; 
encore,chez l’un de ces malades, qui mourut le dix-huitième 
jour, une phthisie parvenue à son second degré paraît-elle 
avoir eu beaucoup de part à cette terminaison. 

Dans une épidémie de fièvre mucoso-putride-vermineuse 
qui régna chez les habitants des marais de Coulogne près de 
Calais durant l’automne de 1822, j'ai employé avec le plus 
grand succès la décoction de moutarde faite à vase clos. 
À l’aide de cette médication, des vers lombricoïdes nombreux 
étajent expulsés, la langue, couverte d’un enduit muqueux 


302 


et noirâtre se nettoyait, le pouls se développait, la diarrhée 
diminuait peu à peu et les forces se rétablissaient prompte- 
ment. J'ai pu, par ce moyen aussi économique que simple, 
traiter les indigents atteints de l'épidémie. 

L'usage de la moutarde contre les fièvres intermittentes 
était connu des anciens , ainsi qu'on peut le voir dans Dios- 
coride (Mat. méd., l.11, cap.18%); Bergius (Mat. méd. p.581) 
administrait la graine entière de cette plante à la dose de 
quatre à cinq cuillerées par jour pendant l'apyrexie. Cullen 
la prescrivait aussi de cette manière dans les mêmes fièvres, 
les angines graves, le rhumatisme chronique. Boerhaave 
(Hist. plant., p. 428) donnait aussi la semence entière de 
moutarde dans les fièvres quartes et quotidiennes autom- 
nales , et administrait aussi l'huile douce de cette semence 
à la dose de 2 onces (64 grammes) comme purgative. 
M. Julia-Fontenelle (Journ. de Chimie méd., t.1, p.130) a 
administré cette huile comme anthelmintique, et elle lui a 
paru remplacer très-bien l'huile de ricin à la même dose 
que cette dernière. Je l’ai employée avec le même avantage : 
c’est une bonne acquisition pour la médecine des pauvres. ] 

J'ai eu l’occasion d'employer la semence de moutarde en- 
tière dans deux cas de fièvres automnales intermittentes 
chez des sujets lymphatiques et exempts d’irritation gastro- 
intestinale. L'un avait une fièvre quarte, et l'autre une fièvre 
double-tierce. Tous les deux avaient eu la fièvre tierce le 
printemps précédent. Je leur fis prendre , dans l'apyrexie, 
une cuillerée à café de semence de moutarde entière d’heure 
en heure, ainsi que l'indique Gilibert. Les accès allèrent en 
diminuant chez celui qui était atteint de fièvre double-tierce 
et cessèrent complètement le cinquième jour. Celui qui avait 
la fièvre quarte éprouva une diminution notable dans l'in- 
tensité des paroxysmes; mais, malgré la continuation de 
l'usage de la moutarde, il ne put guérir. J’eus recours alors 
au vin concentré d’absynthe et d'écorce de saule, avec addi- 
tion de 18 grammes de cendre de genêt par litre de bon vin 
blanc. Après huit jours de l'emploi de ce vin, que le malade 
prenait à la dose de 120 grammes chaque jour, dans l'apy- 
rexie, la fièvre disparut, l'appétit et les forces se rétablirent. 
Je fis continuer pendant quinze jours le vin de saule et d’ab- 
synthe sans y joindre la cendre de genêt. 

Une cuillerée à bouche de graine de moutarde entière agit 
comme laxatif. Elle convient, ainsi administrée, dans les 
constipations dépendantes de l'inertie des intestins, chez les 
hypocondriaques , les paralytiques , les vieillards, toutes les 
fois que rien n’en contre-indique l’usage. En poudre , à la 


303 


dose d’une cuillerée à bouche dans un verre d’eau, elle est 
vomilive et agit avec promptitude, ce qui peut la rendre fort 
utile à la campagne, où, dans un cas pressant, le malade 
peut succomber en attendant l'émétique ou l'ipécacuanha 
de la ville voisine. 

Mais si la moutarde peut être utile chez les personnes 
Jymphatiques, décolorées, affaiblies par la misère ou de lon- 
gues maladies, on se gardera bien de l'administrer aux sujets 
secs , nerveux, irritables , disposés aux congestions san- 
guines , à une irritation locale ou générale. 

La farine de moutarde peut être employée en gargarisme 
dans l'angine œdémateuse. J'en ai retiré de grands avan- 
tages dans les angines tonsillaires manifestées plutôt par le 
gonflement que par la douleur et l’inflammation. Je la fais 
délayer dans l'eau et le miel, et je donne à ce gargarisme 
un degré de force porportionné à l'état local. Macartan 
(Journ. gén. de Méd., décemb. 1812, p. 338), qui a le pre- 
mier indiqué ce moyen (1), employait la moutarde blanche. 
Parmi les cas nombreux d’angine tonsillaire où j'ai employé 
la moutarde, le suivant m'a paru devoir être rapporté : 
« Fabre, forgeron à Calais, âgé de vingt-trois ans, consti- 
tution délicate, corps frêle, teint pâle, atteint d’angine depuis 
trois jours, était dans l’état suivant lorsque, le 17 janvier 
1813, il me fit appeler ; impossibilité presque absolue de la 
déglutition, gonflement très-considérable des amygdales, 
luette tuméfée et très-alongée , sans grande douleur ni rou- 
seur des parties malades ; respiration gênée par le volume 
de ces parties et les mucosités très-épaisses qui remplissent 
l’arrière-bouche , et que le malade ne pouvait expulser ; 
voix étouffée et ne pouvant articuler qu'avec beaucoup de 
peine quelques mots ; face décolorée ei par instant bleuâtre ; 
douleurs compressives aux tempes ; léger gonflement sous 
le menton. Peu d’instants après mon arrivée, difficulté plus 
grande de respirer, impossibilité de parler et d’avaler, agita- 
tion extrême, pouls petit, intermittent et vite, menace de 
suffocation. ({ Pédiluve très -chaud ; ventouses sèches entre 
les épaules et sous les clavicules). Comme il y à dans la 
maison de la moutarde délayée, j'en imbibe une petite 


(1) Je me trompe , cette priorité appartient à Rivière, ainsi que le con- 
state l'observation suivante , remarquable par la prompte efficacité de la 
_moutarde : Mulier quædam afflicta est tonsillarum inflammatione gravissi- 
ma, quum brevi secuta est exulcerationum dolore intenso : celebrata venæ 
sectione, et gargarismis ex oæicrato per biduum frustra usurpatis, sequenti 
curata est intrâ unum diem : semen. sinapi, dragm,. À. acct. rosac. et 
sacchar:alb. an une. LIT, f. gargarissima.(Lazar, River, observ. 76,cent.4, 


304 


bande de linge roulée et fixée à l'extrémité d’un petit mor- 
ceau de bois, que j'introduis à diverses reprises et avec peine 
dans l'arrière-bouche , en ayant soin d'appliquer particuliè- 
rement ce collutoire sur la luette qui est considérablement 
tuméfiée, pâle, œdémateuse, et produit la sensation d’un corps 
étranger. Après la troisième introduction de la moutarde , 
la salivation et l'expulsion de mucosités épaisses se mani- 
festent , la luette se contracte un peu et diminue de volume. 
Je continue le même moyen pendant une demi-heure; la 
sécrétion muqueuse etla salivation augmentent ; le dégorge- 
ment est tel que la respiration devient en très-peu de temps 
beaucoup moins gênée, l'agitation moins grande, le pouls 
plus développé et plus régulier. Je fais préparer un garga- 
risme composé d’une once de semence de moutarde noire, 
de huit onces (250 gram.) d’eau et de suffisante quantité de 
miel. Le malade se gargarise très-fréquemment , et éprouve 
chaque fois, par la sécrétion de mucosités abondantes , un 
soulagement marqué. { Lavement purgatif avec sulfate de 
soude et le miel de mercuriale ; pédiluve sinapisé ; laine au- 
tour du cou.) 

Le lendemain (quatrième jour de la maladie) la luette est 
diminuée de moitié ; la respiration est beaucoup plus facile. 
Les amygdales, beaucoup moins volumineuses , sont plus 
rouges el “plus douloureuses. Le gonflement extérieur est à 
peine sensible. Le pouls est fébrile. (Continuation des mêmes 
moyens.) 

Le cinquième jour, la douleur des amygdales est augmen- 
tée par le contact de la moutarde, l’excrétion muqueuse est 
nulle. Le gargarisme sinapisé est remplacé par celui de 
décoction de racine de guimauve miellé, 4 onces (125 gram.); 
nitrate de potasse, 1 gros (4 gram.) ; sinapisme au cou. 

Les sixième et septième jours, diminution graduelle des 
symptômes, résolution évidente de l’engorgement uvulaire 
ettonsillaire, déglutition beaucoup plus facile. Le neuvième 
jour, le malade entre en convalescence. » 

Les sinapismes, ou cataplasmes de farine de moutarde 
délayée dans l’eau ou le vinaigre, s'appliquent sur différentes 
parties du corps pour produire la rubéfaction ou la vésica- 
tion selon la durée de leur application. Ce n’est qu'au bout 
d’un ou deux jours que la peau se colore, et, plus tard en- 
core, que l'épiderme se détache par écailles. Les phénomènes 
produits par l'application sur la peau de la farine de mou- 
tarde ont quelque chose de particulier. A la fréquence du 
pouls , à la production d'une sorte de fièvre instantanée, 
résultat ordinaire de toute irritation externe intense, se joint 


305 


un trouble nerveux et une agitation tellement marquée, que 
certains sujets très-irritables ne peuvent endurer cette ap- 
plication que pendant quelques minutes. Les malades ne 
peuvent guère supporter plus de trois-quarts d'heure un 
sinapisme préparé avec la semence récente de moutarde et 
l'eau, à moins que la sensibilité ne soit diminuée par la 
nature de la maladie. 

D’après des expériences de MM. les docteurs Trousseau 
et Blanc (Archives général. de Med., septemb. 1830), etce que 
j'ai moi-même constaté, 1° l'action de la moutarde nouvelle 
et récemment pulvérisée est plus prompte que celle de 
l’ancienne ; mais au bout de quelques minutes elle est Ja 
même, et les deux parties, sur lesquelles on l’a appliquée 
simultanément, sont également rubéfiées. 2° Les sinapismes 
préparés à l’eau chaude paraissent d’abord agir avec plus de 
violence ; mais au bout de dix minutes la douleur est égale- 
ment cuisante avec l'eau froide, et les résultats sont les 
mêmes. 3° Le vinaigre affaiblit tellement l’action de la mou- 
tarde, que le sinapisme préparé à l’eau simple détermine au 
bout de six minutes une cuisson aussi violente que celui 
qui est préparé avec le vinaigre au bout de cinquante mi- 
nutes. Le vinaigre chaud n’a pas plus d'action , ainsi que 
l'acide acétique concentré étendu d’une pareille quantité 
d’eau, et même l'acide acétique concentré pur, dont l'effet 
est plus lent qu'avec la moutarde mêlée à l’eau simple. 
Cependant, l'acide acétique appliqué avec de la sciure de 
bois produit un effet presque instantané et qui diffère de 
celui qui résulte des cataplasmes de moutarde, ce qui prouve 
que celle-ci détruit l'action de cet acide. 4° Lorsqu'on lève 
le sinapisme, l'impression de l'air fait cesser la douleur ; 
mais une cuisson douloureuse se fait bientôt sentir, dure 
plusieurs heures et quelquefois des jours entiers. Quand 
l'application a été prolongée, elle détermine des ampoules 
qui se forment lentement et les unes après les autres. Le 
sinapisme bien préparé ne doit pas rester plus de quarante 
à cinquante minutes : il y a de graves inconvénients à le 
maintenir pendant une heure ou plus, comme on le conseille 
généralement. MM. Trousseau et Blanc (loc. cit.) citent 
lexemple d’une jeune dame qui, à la suite de convulsions, 
eut les pieds et les mains couverts de sinapismes que l’on 
maintint en place pendant trois heures, et dont l'action, 
quoique peu douloureuse d’abord, fut si vive, qu’au bout 
de quelque temps il se détacha plusieurs escarres (1). Il est. 


(1) Pour remédier aux accidents déterminés par l’application prolongée 
des sinapismes, MM. Trousseau et Blanc conseillent le liniment suivant : 


20 


306 


donc prudent de ne jamais laisser les sinapismes appliqués 
plus d’une heure, quand ils sont préparés à l’eau avec la 
farine de moutarde sans mélange et récemment broyée. 

Les sinapismes s’emploient tantôt pour produire une 
excitation générale, comme dans l'apoplexie, Ia paralysie, 
les affections comateuses , les fièvres typhoïdes, etc., tantôt 
pour opérer une dérivation ou pour rappeler à l'extérieur 
une affection aigue ou chronique, tels que la gouue, le 
rhumatisme , les dartres, l’érysipèle, les exanthèmes, une 
inflammation ou une irritation quelconque portée sur un 
organe intérieur (1). On s’en sert aussi pour enlever une 
douleur circonserite, comme dans la pleurodynie, la pleu- 
résie (après avoir employé, dans ce dernier cas surtout, 
les moyens antiphlogistiques indiqués), dans quelques 
névralgies chroniques, la sciatique, le rhumatisme chro- 
nique, etc. 

On peut faire des demi-sinapismes en saupoudrant les 
cataplasmes de farine de graine de lin avec celle de semence 
de moutarde. J’emploie avec avantage une pâte composée 
de moutarde noire ou blanche et de figues grasses pilées 
ensemble dans un mortier. Cette pâte est rubéfiante et réso- 
lutive : elle convient, étendue sur de la filasse, contre la 
sciatique, la pleurodynie et les points de côté, loco dolenn ; 
le catarrhe pulmonaire chronique , la coqueluche, l'angine , 
appliquée sur la poitrine , entre les épaules ou au cou; les 
tumeurs scrofuleuses, les abcès froids, etc. Cette pâte, que 


qe 


Onguent populeum 15 grammes, extraits de betladone , de stramonium 
et de jusquiame , de chaque 30 centigrammes. On enduit un linge d'une 
couche légère de cette pommade et on l’applique sur ia partie malade. 
Ils ont aussi employé avec avantage des cataplasmes composés de feuilles 
de belladone , de jusquiame et de stramonium , de chaque 8 grammes, 
bouillies dans un kilosramme d’eau jusqu’à réduction de 500 grammes, 
On mêle cette décoction avec suflisante quantité de mie de pain ou de 
farine de graine de lin. Lorsque de larges surfaces sont excoriées , il faut 
diminuer les doses, de crainte de produire des symptômes d'empoisonne- 
ment par l'absorption du principe narcotico-âcre de ces plantes. 

{1 Dans les maladies inflammatoires el dans les fièvres , il faut bien 
se garder d'employer les sinapismes ou les pédiluves sinapisés lorsqu'il 
existe une réaction fébrile , une sorte d'angioténie générale, de pléthore, 
d'orgasme ou d'éréthisme ; 1ls augmenteraient ces symptômes, produt- 
raient de l’agitation , du délire , et autres accidents. On abuse communé- 
ment de ce puissant moyen, soit comme stimulant général, soit comme 
révulsif. Dans le premier cas, le malade doit se trouver dans cet état de 
relâchement , de langueur detoutes les fonctions qui caractérise l’atonie , 
l'adynamie ; dans le second , pour opérer une sorte de métastase, diminuer 
ou faire cesser une concentration morbide, une irritation ou une phlegma- 
sie , il faut que tout le reste de l'organisme ne participe en rien de l'irri- 
tation , qu'il soit , au contraire , dans des conditions tout-à-fait opposées ; 


307 


l’on peut rendre plus ou moins active en augmentant ou en 
diminuant la quantité de moutarde , convient encore pour: 
opérer une révulsion modérée, et s'opposer, en l’appliquant 
à la plante des pieds, surtout chez les enfants, aux conges- 
tions vers la tête ou la poitrine. J’ai guéri ainsi, chez une 
dame de quarante ans , un corysa chronique qui pendant six 
mois avait résisté aux moyens ordinaires. Je faisais enve- 
lopper les pieds alternativement chaque soir pendant un 
mois , avec la pâte sinapisée et un chausson de flanelle 
recouvert de taffetas gommé. 

On peut rendre l'emplâtre de poix de Bourgogne plus ou 
moins rubéfiant, en y incorporant une plus ou moins grande 
quantité de poudre de semence de moutarde. 

‘Les pédiluves et les manuluves sinapisés, qu'on prépare en 
délayant 200 à 500 grammes de farine de moutarde récente 
dans l'eau bien chaude, agissent, comme révulsifs, de la 
même manière, et sont employés dans les mêmes circon- 
stances que les sinapismes. 

J'ai employé avec succèsle bain général sinapisé{1 à 2 kilo- 
gram. de poudre de moutardre pour un bain, suivant l’inter- 
sité des symptômes ) dans le choléra asiatique. Dans un cas 
observé à Calais en 1832, chez une femme de trente-cinq ans 
et où l’algidité et l’anéantissement de la circulation à Ia 
périphérie étaient extrêmes , la réaction fut si forte que je 
dus immédiatement pratiquer au bras une saignée copieuse. 
Une abondante transpiration favorisée par la vapeur de l’al- 


sinon , l’action stimulante s’exerçant au profit de l’organe malade, tous 
les symptômes s'exaspérent au lieu de céder. Un exemple rendra cette 
vérité pratique plus patente : Le petit garcon de madame Cornille , de 
Boulogne, âgé de six ans, d'une constitution frêle, d’un naturel irascible, 
ayant été atteint plusieurs fois de bronchites assez intenses , est pris le 
3 avril 4847 de toux violene et presque conlinuelle avec fièvre, 
sentinent de strangulation , oppression ; ees symptômes augmentent vers 
le soir, au point de faire craindre un catarrhe suffocant. La rougeole 
régnant généralement , on considère ces symptômes comme précur- 
seurs de cette maladie et comme pouvant aussi, par leur intensité, 
s'opposer à l’éruption. Dans l'intention de favoriser cette dernière , des 
bains de jambes sinapisés sont employés à diverses reprises dans la nuit, 
et chaque fois les symptômes s’exaspèrent et présentent enfin un danger 
imminent. Je suis appelé le 4 au matin ; je fais appliquer six sangsues 
à l’angle formé par les articulations sterno claviculaires. Le sang coule 
abondamment pendant deux beures ; la toux diminue et se dissipe ensuite 
presqu'entièrement , ainsi que l'oppression ; l’éruption paraît spontané- 
ment, et la rougeole suit sans complication sa marche ordivaire. Une 
irritation phlegmasique intense appelait à elle le mouvement inflamma- 
toire qui devait se porter à la périphérie du corps ; il à sufh de la 
combattre pour rendre à ce mouvement sa tendance normale , sans le 
secours des révulsifs. 


308 


cool reçue au moyen d’une lampe placée dans une baignoire 
couverte, acheva de dissiper les symptômes cholériques. 
Le rétablissement fut prompt. 

On peut se servir à l'extérieur, dans'les ças où l'on ne 
peut se procurer. un sinapisme convenablement préparé, de 
la moutarde que l’on trouve chez les épiciers et que Fon a 
presque toujours chez soi pour l'usage de la table. 

Frank recommande une composition composée de farine 
de moutarde, d'huile d'amandes douces et de sue de citron, 
pour faire disparaître promptement les échymoses: On peut 
l’employer aussi contre les engelures. On en frictionne légè- 
rement la partie malade une ou deux fois par jour. On a 
employé le vin de moutarde en collutoire dans les paralysies 
de Ja langue, dans l’engorgement chronique des amygdales 
ou des glandes salivaires. 

M. Faure (Journ. de pharm., t. xvn1,:p. 643) a proposé, 
pour lotion irritante ou comme rubéfiant agissant à l'instant 
même, la solution de l'huile essentielle de moutarde dans 
l'alcool (1 partie sur 10 d’alcool). On a aussi conseillé cette 
huile par gouttes dans des potions excitantes. On emploie 
avec succès contre la gale une pâte faite avee 30 gram. de 
moutarde en poudre, et suffisante quantité d'huile d'olive; on 
se frictionne une fois, rarement deux, le corps et les extré- 
mités avec cette préparation. Ce moyen m'a réussi plusieurs 
fois; il occasionne d’abord une rubéfaction à la peau, mais 
qui ne tarde pas à se dissiper. L'eau distillée de moutarde, 
proposée par M. Julia-Fontenelle, convient mieux pour 
lotions antipsoriques. 

Le suc des feuilles fraîches de moutarde, seul ou étendu 
dans l’eau mieliée, convient en gargarisme dans les affec- 
tions scorbutiques des gencives, Ia stomacace, l’engorge- 
ment chronique des amygdales, ete. 

M. Mahier, pharmacien à Château-Gonthier, a reconnu à 
la farine de moutarde délayée dans une petite quantité d’eau 
froide ou tiède, la propriété d'enlever l'odeur aux vases ayant 
contenu des huiles essentielles ou des teintures odorantes. 
« Des bouteilles qui avaient servi à l’essence de, térében- 
thine, de menthe, de thym, de lavande , de girofle, à la 
créosote, à l’eau-de-vie camphrée, à la teinture d’assa-fétida, 
ont été rendues propres et sans odeur en y introduisant de 
la farine de moutarde sur laquelle on versait une petite 
quantité d’eau froide ou tiède, en agitant fortement la bou- 
teille pendant quelques instants et en lavant à grande eau ; 
si l'odeur ne disparaissait pas complètement par un premier 
lavage, on recommencerait une seconde fois. Des essais 


309 : 


comparatifs portent M. Mahier à accorder à la farine de 
moutarde une action presque égale, pour cet usage, à la 
pâte d'amandes amères, qui atteint parfaitement le but » 
(L’Abeille méd., 1847, p.56.) 


MOUTARDE RLANCHE. 


Sinapis api folio (T.) 
Stuapis alba (L.) 


Tout ce que nous venons de dire sur la moutarde noire 
peut se rapporter à la moutarde blanche. Seulement, celle-ci 
a été particulièrement vantée contre les maladies atoniques 
de l’estomac. Elle jouit d’une réputation populaire qui en a 
fait répandre, je ne dirai pas l'usage, mais l'abus. Adminis- 
trée sans discernement, elle a donné lieu à des accidents 
graves, surtout lorsque, prenant une gasirite pour une débi- 
lité d'estomac, on a, malgré ses mauvais effets, persité à la 
mettre en contact avec une membrane irritée ou phlogosée. 
Employée à propos, elle peut, comme la moutarde noire, 
rendre de grands services à la thérapeutique. 

[ Vers le milieu du siècle dernier on avait, dit Cullen, 
(Mat. méd., t. 11, p.180), introduit à Edimbourg l'usage 
de cette semence, prise entière à la dose d’une cuillerée à 
bouche. Ceute substance, dit-il, stimule le canal intestinal 
et agit ordinairement à la manière des Jaxatifs, ou tout au 
moins entretient la régularité des évacuations alvines, et 
augmente parfois le cours des urines. « Îl est évident, disent 
MM. Trousseau et Pidoux (Traité de thérapeut. et de mat. 
méd., t.1, p.689), que cette graine purge à la dose de 15 à 
30 grammes. On la donne non concassée, à jeun ou le soir, 
au moment où les malades se mettent au lit. On peut encore, 
sans inconvénient, l’administrer au commencement du 
repas. La dose, qui varie d’ailleurs suivant chaque individu, 
doit toujours être telle qu’elle sollicite une ou deux évacua- 
tions faciles dans la journée. Cette espèce de purgation, qui 
ne cause aucune colique, est surtout utile à ceux qui sont 
habituellement constipés et dont les digestions sont en même 
temps laborieuses. C’est au médecin qu'il appartient de 
juger si cette paresse des fonctions digestives ne tient pas à 
une phlegmasie, auquel cas l'usage de Ta graine de moutarde 
blanche ne serait pas indiqué. » 

J'ai employé avec succès la moutarde blanche ainsi admi- 
nistrée, contre la constipation qui accompagne la chlorose. 


310 


C'est le moyen qui m'a le mieux réussi dans ce cas : il com- 
bat en même temps la débilité des voies digestives et les 
flatuosités qui fatiguent les chlorotiques. Le vin ou la bière 
de moutarde blanche m'a réussi dans l’anarsaque et l'œdème 
exempts d'irritation phlegmasique des voies digestives. Je 
m'en suis bien trouvé aussi dans les cachexies qui suivent 
les fièvres intermittentes automnales et dans les catarrhes 
chroniques, surtout dans celui de la vessie, quand ilya 
engouement de matières muqueuses s'opposant mécanique- 
ment à l'émission des urines; sans irritation active. 

Macartan se servait, ainsi que nous J'avons dit plus haut, 
de Ja farine de moutarde blanche en gargarisme contre les 
angines tonsillaires. On l'emploie de la manière suivante : 
farine de moutarde blanche et gomme arabique. de chaque 
2 grammes (1) ; infusion de fleurs de sureau, 280 grammes ; 
mêlez, pour gargarisme. Par ce moyen, d’abondantes mu- 
cosités et des portions membraniformes se détachent, le 
dégorgement et Ja résolution s’opèrent. L'expérience a dé- 
montré que les gargarismes alkalins ou astringents sont 
préférables aux émollients et aux mucilagineux , que la mé- 
decine expectante se contente d'employer en pareil cas. On 
sait combien l'application du caustique même à eu de succès 
dans les angines. C’est un point de pratique sur lequel il ne 
reste plus aucun doute. ] 


MUGUET DES BOIS. 


LYS DES VALLÉES, MUGUET DE MAI. 


Lilium convallium album (T.) 
Convallaria majalis (L.) 


Cette plante vient spontanément dans les bois, dans les 
lieux ombragés ; elle fleurit au printemps. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Infusion des fleurs, de 8 à 20 gram. par kilog.d'eau. 
Eau distillée (4 sur 4 d'eau), de 45 à 50 gram. en potion. 

. Sirop (4 sur 2 d'eau et 4 de sucre), de 50 à 60 gram en potion. 
Extrait alcoolique des fleurs , 2 gram. en pilules. 


1) On peut augmenter la dosc de la moutarde suivant l'état des par. 
ties malades , ct remplacer la gomme arabique par lc inucilage de racines 
de guimauve , de semences de lin ou de coing. 


311 


Fropriéiés, 


L'odeur des fleurs de muguet a quelque rapport avec celle 
de Ja fleur d'oranger. On les regarde, de même, comme anti- 
spasmodiques. On les a employées dans la migraine, les 
convulsions, l’épilepsie ; mais leur efficacité dans ces diverses 
affections n’a pas été constatée. Les facultés sternutatoires 
de ces fleurs pulvérisées sont mieux connues. Cette poudre, 
prise comme du tabac, a réellement calmé des douleurs de 
tête invétérées en faisant rendre beaucoup de sérosités par 
les narines. 

On à attribué à cette plante une vertu éméto-cathartique. 
C'est surtout la racine que l’on désigne comme possédant la 
faculté de faire vomir ou de purger, selon la dose à laquelle 
on l’administre. Mossdorf dit qu'un demi-gros (2 grammes) 
de ses fleurs suffit pour purger fortement. Jé n’ai aucun 
essai à citer à ce sujet. Je me promets de constater cette 
propriété dans le courant de l'année prochaine, et de pou- 
voir ainsi juger du degré de confiance qu’elle mérite. 

[ Suivant J.-F. Schulze , qui l’a essayé sur lui-même et sur 
d'autres, l'extrait spiritueux des fleurs est amer et purgatif 
(Dist. de hhio convalho, Halæ 1742) à la dose d’un demi- 
gros (2 grammes). Wauters à proposé cet extrait comme 
. sSuccédanée de la scamorée | 0p. et. 72 282). Peyrilhe l'avait 
indiqué comme pouvant être substitué à l’aloës. 

Cette plante est difficile à préparer ; il faut séparer les 
pétales et les sécher à l’étuve. 


Le pETiT Mucurr, aspérule, hépatique étoilée ou des 
bois (asperula odorata L.), que l'on trouve dans toutes les 
forêts et qui fleurit en mai, est d’une odeur fort agréable, 
surtout quand elle est sèche. Elle passe pour diurétique. On 
lui a donné le nom d’hépatique à cause de l'usage qu’on en 
a fait dans la jaunisse et les engorgements du foie. ] 


MURIER.. * 


L 


3 Morus fructu nigro (T.) 
Morus nigra (L.) 


Cet arbre, originaire de la Perse, et, selon quelques au- 
teurs , primitivement apporté de la Chine, est naturalisé dans 
les provinces méridionales de l'Europe et cultivé en France. 
Il produit ses fruits en septembre. 


312 


Fréparations et doses, 
A L'INTÉRIEUR : Suc des fruits ou sirop, comme celui de groseille 
rouge , d'épine vinette , etc. 
Racine en infusion ou décoction , 4 à 42 gram. pour 300 gr.d’eau. 
Racine en poudre, 2 à 4 gram. dans un liquide ou en électuaire. 


Propriétés. 


. Les müres ou fruits du mürier sont rafraîchissantes , aci- 
dulées et très-agréables.On en prépare des boissons qui con- 
viennent dans les fièvres inflammatoires, les inflammations 
internes, etc. Le sirop de müres est vulgairement employé 
dans les inflammations de la gorge et de la bouche, en gar- 
garisme. 

L’écorce de la racine de mürier, d’une saveur amère ‘et 
âcre, a été préconisée comme anthelmintique et purgative 
dès le temps de Dioscoride. On l’a même employée contre‘le 
ver solitaire. Sennert, Mercurialis, Andry (Geneér. des vers, 
page 172), et d’autres auteurs l'ont recommandée contre les 
lombrics et le ténia. Lieutaud { Mat.méd.) dit que cette der- 
nière vertu n’est pas bien constatée. Cependant un médecin 
de campagne instruit et habile praticien, feu Dufour, de 
Bourthes, m'a dit avoir fait rendre, en 1802, un ténia long 
de douze à quinze mètres chez une femme de quarante-cinq 
ans, au moyen d'une demi-onee {15 grammes) de racine de 
müûrier bouillie pendant une demi-heure dans huit onces 
d’eau. La malade prenait cette décoction chaque matin en 
deux fois, à une demi-heure d'intervalle. Le quatrième jour, 
elle rendit le ver, après avoir eu trois évacuations précédées 
de coliques. Comme il n’est pas aussi facile de se procurer 
la racine de grenadier {à laquelle on substitue frauduleuse- 
ment d’autres racines ) que celle de mürier, il serait utile de 
vérifier, par de nouveaux essais, la propriété ténifuge de 
cette dernière. 


On doit récolter l'écorce de la racine de müûrier avant Ia 
maturité des müres. 


MYRTE COMMUN.* 


Myrtus latifolia romana (T.) 
Myrtus communis (L.) 


Le myrte, non moins célèbre que le laurier chez les an- 
ciens, servait à couronner les amants heureux. Originaire 
d Afrique, il croît en Espagne , dans le midi de la France, et 
est cullivé comme arbrisseau d'agrément. Les feuilles et es 
fruits ont été usités. 


313 


Toutes les parties de cette plante sont astringentes et 
aromatiques. Vanté outre mesure par les anciens et presque 
entièrement oublié comme plante médicinale par les mo- 
dernes, cet arbrisseau ne mérite ni les éloges prodigués par 
les premiers, ni le dédain des derniers. « L'huile volatile 
aromatique que fournissent toutes ses parties, le principe 
astringent que décèle le mélange du sulfate de fer avec son 
infusion , qu'il noircit, annoncent des propriétés excitantes 
et astringentes dont on pourrait tirer parti, si tant d’autres 
moyens ne s’offraient pour remplir les mêmes indications. » 
{ Loiseleur Deslongchamps, Dict. des seienc. med.) — Dios - 
coride et Pline le recommandaient contre la débilité des voies 
digestives, la diarrhée, les fleurs blanches, les hémorrha- 
gies , etc., on en préparait un vin appelé myrtedanum. 

Garidel {Hist. des Plantes de la Provence, 1723) donne la 
composition d’une liqueur huileuse dont il exagère la vertu : 
Prenez , baies de myrte bien müres, un peu desséchées sur 
l’arbuste , une ou deux poignées ; pilez-les dans un mortier, 
mettez-les dans un pot de terre neuf avec un peu d’eau-de- 
vie. Au bout de sept à huit jours, passez avec expression, 
vous aurez un suc huileux propre à raffermir certains organes 
relàchés. Le myrte, consacré à Vénus, n'offre, quoiqu’en 
dise Garidel , qu’une ressource bien illusoire pour effacer 
les traces ineffaçables du culte de cette déesse. 


MYRTE BATARD ou DE BRABANT ,* 
MYRTE DES PAYS FROIDS, PIMENT AQUATIQUE, PIMENT ROYAL. 
Myrtus brabantica (T.) — Myrica gale (L.) 


Le myrte bâtard croît dans les lieux marécageux et in- 
cultes de l'Europe septentrionale. On le trouve dans les 
marais des planets à St-Léger, aux environs de Versailles, 
dans les marais du Cériseit, de Montfort, etc., et dans beau- 
coup d'autres parties de la France. 


Propriétés. 


Cette plante, d’une odeur forte, aromatique, d'une saveur 
amère , passe pour tonique, excitante, vermifuge et anti- 
psorique. Elle paraît contenir beaucoup de camphre ; ses 
feuilles et ses jeunes pousses sont parsemées de petits points 
qui, selon Peyrilhe, ont beaucoup d’analogie avec la cire. 
On prétend que ses fruits fournissent , par la décoction dans 


314 


l'eau , une huile concrète semblable à la cire qu’on obtient de 
l'arbre à cire (myrica cerifera L.) Gilibert la recommande 
aux praticiens. Son odeur forte, dit-il, a autant d'énergie 
que plusieurs autres plantes tant recommandées. Peyrilhe 
lui supposait aussi de grandes vertus. Cette plante, dit 
Bodart, est du nombre de celles qui pourraient être multi- 


pliées, en s appliquant à la propager dans es sites où nous 
la trouvons spontanée. 


NARCISSE DES PRES, 


NARCISSE SAUVAGE , AÏAUT , AILLAUD ; FAUX NARCISSE , 
PORILLON ; FLEUR DE COUCOU. 


Narcissus sylvaticus (T.) 
Narcissus pseudo-narcissus (L.) 


On trouve le narcisse sauvage partout, dans les bois, les 
prés, où il montre de bonne heure ses jolies fleurs. Les 
feuilles, les fleurs et les racines sont employées. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : Infusion des fleurs sèches (1 à 2 gram. pour 123 
gram. d'eau), par cuillerées dans la COUCREES 
Poudre des feuilles et des fleurs, de 4 à 2 grammes. 
Racine en poudre, de 2 à 8 gram., comme purgative et vomitive. 
Sirop (4 de fleurs fraiches sur 2 d'eau et 4 de sucre), de 5 à 50 
grammes. 


Extrait (4 de fleurs sir 4 d'eau), de 5 centigram. à un gram. en 
pilules, potions , etc. 


Orimel, une cuillerée à café trois ou quatre fois par jour, comme 
expectorant, sédatif. 


Fropriéies. 


La bulbe, les feuilles et les fleurs de narcisse des prés, 
d'une saveur amère, àcre , ont été regardées comme vomi- 
tives et antispasmodiques. On les a proposées contre Ia 
coqueluche, l'asthme, les fièvres intermittentes, la toux 
convulsive, diverses affections nerveuses, elc., soit à dose 
altérante ou nauséabonde, soit à dose vomitive. 

Loiseleur-Deslongchamps a provoqué d'abondants vomis- 
sements avec la bulbe de cette plante réduite en poudre et 
administrée à la dose de 2% à 48 grains (1 gram. 20 cent. 
à 2 gram. 40 cent.). Les fleurs ont produit le même effet, 
mais à dose un peu plus élevée ; il a fallu en faire avaler 


319 


2 à 4 gram.en suspension dans un véhicule édulcoré (1). 
Le même médecin a encore reconnu à cette plante une pro- 
priété narcotique et antispasmodique, et l'a donnée avec 
succès dans la coqueluche, la dysenterie, ete. 

[ Les docteurs Armet et Waltecamps, de Valenciennes 
{ Bull. de pharm., vol. nr, p.198 et 398), regardent les fleurs 
pulvérisées de narcisse sauvage comme un bon émétique à 
la dose de 1 gram. à 1 gram. 50 centig. Le docteur Lejeune, 
de Verviers ( Diction. des Scienc. méd., t. xxxv, p.188), dit 
avoir vu presque constamment { gramme de cette poudre 
délayée dans 300 grammes d’eau avec 30 grammes de sirop 
d’écorce d'orange donné par cuillerées d'heure en heure, 
produire le vomissement. D'un autre côté, les docteurs 
Loiseleur-Deslongchamps et Marquis, ont donné, dans l’es- 
pace de six à huit heures, depuis 2 gram. 50 centig. jusqu'à 
8 et même 12 grammes de fleurs de narcisse pulvérisées à 
trente-un malades, et sept seulement ont eu un, deux ou 
tout au plus trois vomissements ; les autres n’ont rien éprouvé 
de semblable. Cette différence dans les résultats paraît pro- 
venir, suivant les deux auteurs que nous venons de citer, de 
la manière dont la dessiccation des fleurs est faite. Ainsi, 
lorsque cette dessiccation a lieu rapidement, les fleurs restent 
d'un beau jaune, et elles ne sont alors que très-rarement 
émétiques. Lorsqu’elles ont été récoltées par un temps de 
pluie, ou que l’atmosphère, constamment humide pendant 
quelques jours, n'a pas permis de les dessécher prompte- 
ment, ou enfin, lorsqu'on y a mis peu de soins, elles passent 
alors facilement au jaune verdâtre, et, dans ce cas, elles 
agissent beaucoup plus souvent comme émétiques. « Nous 
avons encore cra remarquer, disent les mêmes auteurs, que 
l’eau bouillante développait beaucoup leur propriété émé- 
tique, et que, toutes choses égales d’ailleurs, la décoction 
de vingt ou trente fleurs de narcisse, prise même refroidie, 
provoquait plus fréquemment le vomissement qu’une quan- 
tité pareille de fleurs prises réduites en poudre. La décoction 
dans l’eau nous a paru tellement développer la propriété 
émétique des fleurs de narcisse des prés, que celles-ci four- 
nissent à peu près le quart de leur poids d'extrait, trois à 


(4) Employé avec prudence , le narcisse des prés est un médicament 
utile ; mais, à haute dose, il est un poison irritant. L’exirait de cette 
plante , qui est la préparation la plus active , peut, suivant M. Orfila, 
occasionner Ja mort dans l'espace de quelques heures lorsqu'il est donné 
à la dose de 8 à 42 grammes. 11 agit spécialement sur le système nerveux 
et sur Ja membrane muqueuse de l'es'omec, dont il détermine l'inflamma- 
tion, lors même qu'il a été appliqué sur une plaie ou sur le tissu cellu'aire, 


316 


quatre grains de ce dernier ont fréquemment excité des 
vomissements chez plusieurs malades , et ces trois à quatre 
grains ne correspondaient cependant qu'à douze et seize 
grains de fleurs en nature, quantité avec laquelle nous 
n'avons jamais vu vomir un seul malade. » M. Loiseleur- 
Deslongchamps (0p. cit.) a employé les fleurs de narcisse 
des prés pulvérisées comme fébrifuges sur dix-huit malades 
atteints de fièvres intermittentes diverses, et comme anti- 
dysentériques sur treize malades. Dans le premier cas, treize 
malades ont été guéris radicalement ; dans le second , neuf 
ont vu Jeur maladie se dissiper promptement. Ces fleurs 
pulvérisées étaient administrées à la dose de 4 à 8 grammes 
délayées avec suffisante quantité d’eau sucrée et aromatisée. 
Dans les cas de fièvre, cette dose a été donnée en quatre fois, 
de deux heures en deux heures , avant le paroxysme. Elle a 
été prise par fractions, en vingt-quatre heures , dans les cas 
de diarrhée et de dysenterie. C’est à la vertu narcotique du 
narcisse , connue des anciens , mais oubliée, que paraissent 
dûs les bons effets qu'on en a obtenus dans les fièvres et les 
dysenteries, où l'opium , comme on le sait, réussit souvent. 
Cependant on peut admettre, à l'égard de la dysenterie et 
des catarrhes , une action spéciale de cette plante analogue 
à celle de l’ipécacuanha sur les membranes muqueuses. ] 

Dans une thèse soutenue à la Faculté de médecine de Paris, 
M. Passaquay a annoncé avoir employé avec beaucoup de 
succès le narcisse des prés contre plusieurs épidémies de 
dysenteries qui se manifestèrent à différentes époques dans 
le département du Jura. Ce médicament était, dès le début, 
employé à peu près dans tous les cas, sauf ceux où les symp- 
tômes inflammatoires trop prononcés forçaient de débuter 
par l'emploi des émissions sanguines. 

Le docteur Dufresnoy, de Valenciennes (des Caract. du 
traitem. et de la cure des dartres, des convulsions, etc., Paris, 
an vu }, a rapporté diverses observations constatant les bons 
effets de l’infusion ou de l'extrait des fleurs de narcisse des 
prés dans les maladies convulsives. Il en a retiré de grands 
avantages dans l’épilepsie, le tétanos , la coqueluche. Dans 
cette dernière maladie le même médecin employait de pré- 
férence le sirop des fleurs de narcisse sauvage. Ce sirop fait 
vomir les malades sans les fatiguer, et calme les quintes de 
toux. Le docteur Veillechèze { Journ. de méd. chirurg. et 
pharm., déc. 1808), a confirmé par de nouvelles observations 
l'efficacité de l'extrait des fleurs de narcisse contre la coque- 
luche ; mais il n’a obtenu, dans divers cas d’épilepsie, qu'une 
amélioration passagère. Laennee est parvenu avec cet extrait 


317 


seul , à la dose de 2 à 5 centig. donnés à deux, quatre ou six 
heures d'intervalle, à guérir plusieurs fois la coqueluche 
dans l’espace de quelques jours. 

Frappé des avantages et de l’innocuité de cette plante 
(à dose thérapeutique), je l'ai adoptée dans ma pratique 
comme vomitif doux etexpectorant analogue à l’ipécacuanha. 
Je m'en suis très-bien trouvé dans les affections catarrhales 
pulmonaires, dans l'asthme et dans quelques diarrhées chro- 
niques. Je n’ai pas eu l’occasion de l’employer dans la dysen- 
terie. Ce fut surtout dans une épidémie de coqueluche qui 
régna dans nos villages en 1840. que j'en retirai de grands 
avantages. Je l’administrais d’abord à dose vomitive, et 
lorsque le début, presque toujours inflammatoire, était 
dissipé pour faire place à cette abondante sécrétion mu- 
queuse et à ces quinies spasmodiques qui caractérisent cette 
maladie , je fractionnais les doses, comme on le fait avec 
l’ipécacuanha. Je l’associais souvent à la poudre de racine de 
belladone , et, lorsqu'il y avait indication, je revenais de 
temps en temps à la dose vomitive. 

J'employais l'infusion, le sirop ou l'extrait des fleurs. Je 
faisais dissoudre ce dernier dans une potion appropriée à la 
dose de 5 à 30 centigrammes et plus , suivant l’âge du ma- 
lade, l'intensité des symptômes et les effets produits. 

La certitude des bons effets du narcisse des prés est une 
précieuse acquisition pour la médecine rurale. On devrait 
adopter cette plante partout dans la pharmacopée des pau- 
vres , et la placer dans les officines à côté de la racine d’asa- 
rum, dont elle diffère par une action plus douce et qui permet 
de l'administrer aux enfants les plus délicats et aux femmés 
les plus irritables. 

[ La propriété émétique existe dans la bulbe de la plupart 
des narcisses. Pline, Dioscoride et Galien attribuaient cette 
propriété à celui du nareisse poétique. Ils en faisaient man- 
ger l'oignon cuit ou en faisaient boire la décoction pour 
provoquer le vomissement (Dioscor., lib. 1v, c. 155). Des 
observations relatives au narcisse odorant, à la jonquille, 
au pancratium marilimum, au perce-neige, ont attesté dans 
ces plantes la même propriété émétique à divers degrés. Le 
narcisse odorant (narcissus odorus L.) est celui qui, comme 
émétique, a donné les, résultats les plus, satisfaisants ; 
viennent ensuite les narcisses tazette et sauvage (narcissus 
tazetta L.—narcissus pseudo-narcissus). Le principe ex- 
tractif gommo-résineux, âcre et stimulant qu’ils contiennent 
ne perd point de son énergie par la dessiccation de la plante. 


318 


NAVET. 
Napus sativa (T.)— Brassica napus (L.) 


Le navet, qui appartient au même genre que le chou, et 
qui est si généralement cultivé, croît aujourd’hui sans cul- 
ture dans les champs , les moissons, où il s’est naturalisé 
par la dissémination des graines. On emploie la racine et la 
semence. 

Froprietes. 

Le navet est plutôt cultivé comme aliment que comme 
médicament. On lui a cependant reconnu une propriété 
émolliente et pectorale. On l’emploie vulgairement dans les 
toux, la coqueluche, l'asthme, etc. 

Les paysans font un usage fréquent, dans les affections 
de poitrine , d’une forte décoction de racine de navet, prise 
chaude avec du miel. Les mères préparent, pour leurs en- 
fants atteints de rhume ou de coqueluche, un sirop de navet 
en creusant en forme de tasse une racine de cette plante et 
mettant dans la cavité du sucre candi en poudre. Le sirop 
qui passe à travers le parenchyme du navet est donné par 
cuillerées fréquemment répétées. Ce sirop est fort bon et 
calme la toux en facilitant l’expectoration. On emploie aussi 
vulgairement le navet cuit et réduit en pulpe sur les enge- 
lures : il modère les démangeaisons et l’inflammation. 

[ Le navet convient comme aliment dans les affections 
scorbutiques ; mais comme il est flatulent, il est bon de 
l’'assaisonner avec des aromates. La semence de navet, en 
infusion ou en décoction à la dose de 4 à 8 grammes, est 
diurétique et un peu diaphorétique. ] 


NAVETTE ,‘ 


COLZA , COLSA. 


Brassica oleracea arvensis (T.) 
Brassica campestris (L.) 


La navette ou colza, que l’on cultive surtout dans le nord 
de la France comme plante oléagineuse, semble être une des 
espèces primitives peu altérées du genre brassica. 


Propriciées. >» 


L'huile de navette, d’une couleur jaune, très-visqueuse, 
ayant une odeur analogue à celle des plantes crucifères, est 


319 


douce et d’une odeur agréable quand elle est bien dépurée. 
Cette huile, qui sert à l'éclairage et à la fabrication des 
savons , peut, comme l'huile douce de moutarde, être em- 
ployée en médecine : elle est laxative et vermifuge. Prise à 
la dose de 60 à 100 grammes, par cuillerées, elle a fait 
cesser des constipations opiniâtres. Dans ces eas, et dans 
les affections vermineuses, je l'ai fait aussi administrer en 
lavements. On peut s’en servir à l'extérieur, pour remplacer 
les huiles d'amandes douces et d'olives dans la composition 
des liniments. 


NENUPHAR, 


LYS D'ÉTANG. 


Nymphæa alba major (T.}—Nymphæa alba (L.) 


Le nénuphar brille à la surface des étangs comme le Iys 
dans nos parterres. Ses racines et ses fleurs sont usitées. 


Préparations ei doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion , de 460 à 560 gram. (racine) par kil. d'eau. 
au distillée, en potion. 


Sirop (1 sur 2 2 d’eaa bouillante et de sucre), 50 à 400 gr.en potion. 
A L’EXTÉRIEUR : en Calaplasmes. 


Propriétés. 


Les anciens ne balancent pas à reconnaître dans les se- 
mences et la racine de nénuphar, la vertu d’éteindre les 
désirs vénériens, et même d’abolir la faculté génératrice. 
Personne n’ignore la confiante et aveugle crédulité avec 
laquelle les religieuses de nos couvents faisaient usage de 
celle plante pour réprimer des désirs que l’on ne parvient à 
éteindre que par l'absence de toute excitation, soit morale, 
soit physique. 

Regardée par les uns comme émolliente et rafraïchissante, 
et par les autres comme excitante à la manière des toniques 
et des amers, nous restons dans le doute sur les véritables 
propriétés de la racine de nénuphar. Ce dont j'ai pu me 
convaincre, c'est qu’à l’état frais elle rougit et enflamme la 
peau sur laquelle on l’applique. Cet effet explique le succès 
(tout révulsif) que Detharding a obtenu contre la fièvre 
intermittente, en appliquant cefte racine, >, coupée en long, 
sur la plante. des pieds. 

[ Bien que les fleurs de nénuphar aient été regardées par 


320 


Alibert comme légèrement narcotiques, elles ne sont en 
réalité, malgré leur odeur un peu nauséabonde, que muci- 
lagineuses , ‘émollientes el adoucissantes. ] | 


NERPRUN, 


NOIRPRUN, BOURG - ÉPINE. 


Rhammes catharticus (T.) 
Rhammes catharticus (L.) 


Le nerprun est un arbrisseau très-commun dans les taillis, 
dans les haies, dans les forêts de la France et de l'Europe 
septentrionale, où on peut le multiplier à volonté. Les baies 
seules sont employées. = 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction , 20 à 50 baies par kilag. d'eau. 
Suc crprimé des baies, de 8 à 30 gram. en potion. 
Extrait des Faies ou ob, de 4 à 8 gram.en potion. 
Sirop (4 de suc des baies sur À de sucre), de 50 à 409 gr. en potion. 


A L'EXTÉRIEUR : Suc,en lavement, de 50 à 100 gr. délayé dans l’eau. 
Proprietés. 


Les baies de nerprun sont un purgatif drastrique éner- 
gique, commode et sûr. On l’a surtout recommandé dans les 
hy dropisies, et, comme puissant révulsif, pour déplacer cer- 
ines affections éloignées (apoplexie, congestions célébrales, 
paralysies). On l’a aussi vanté comme vermifuge. Il produit 
une vive irritation de la muqueuse gastro-intestinale, et agit 
souvent comme éméto-cathartique. 

Les habitants de la campagne font un usage fréquent des 
baies de nerprun pour se purger. Ils en avalent de dix à 
vingt , fraîches ou sèches , et mangent immédiatement après 
de la bouillie pour émousser l’action irritante de ces pilules 
toutes préparées par la nature. Ils les emploient aussi en 
décoction au nombre de 40 à 60 pour 390 GPAHRES d’eau, 
en y ajoutant un peu de miel. 

J'ai souvent administré les baies de nerprun en substance, 
en faisant avaler par dessus un verre de décoction de racine 
de mauve ou de guimauve miellée. J'ai aussi donné la 
décoction et le suc mêlés avec le mucilage étendu dont je 
viens de parler, ou avec le bouillon de veau. Ce purgatif 
est très-approprié au tempérament des habitants de la cam- 
pagne qui, pour l'ordinaire, est peu irritable. Le sirop de 


321 


nerprun à conservé sa place dans nos pharmacies ; il entre 
dans les potions purgatives. Je l'administre souvent seul 
dans un peu de décoction mucilagineuse. 

Linné prescrivait un gros (4 gram.) de graine de nerprun 
iorréfiée et pulvérisée, ou deux gros (8 gram.) en décoction. 
Tournefort en adininistrait depuis 4 gram. iusqu'à 6, sèches 
et pulvérisées dans un peu de conserve d'orange, ou bien 15 
à 20 baies bouiilies pendant une demi-heure dans un bouil- 
lon avec un demi-gros (2 gram.) de crême de tartre. Cette 
purgation est douce et ne cause aucune tranchée. On doit 
choisir, surtout pour être conservés, les grains gros, bien 
nourris, noirs, luisants, glutineux et succulents. 

L'écorce moyenne de nerprun est éméto-cathartique ; mais 
on n’en fait point usage, sans doute à cause de la facilité 
que l’on à de se procurer les baies de cet arbrisseau. 


NIELLE ," 


NIELLE DES JARDINS , NIELLE DE CRÈTE , NIELLE DE L’ARCHIPEL, 
NIELLE ROMAINE, NIELLE DOMESTIQUE , MILLE-ÉPICES, 
TOUTE ÉPICE, CUMIN NOIR, FAUX CUMIN, 

NIGELLE CULTIVÉE. 


Nigella, flore simplici minore candido (T..) 
Mig-lla satira (L.) 


Cette plante, qui vient spontanément en Égypte, dans l’île 
de Crète, en Espagne, est cultivée dans nos jardins. C’est le 
melanthion des anciens. La semence est usitée, 


Proprietés. 


La nielle cultivée est d’une odeur aromatique et d’une 
saveur âcre et piquante. L'arôme existe dans l'écorce de la 
semence. L'alcool s empare de la saveur ei de l’odeur de 
cette semence. L’extrait alcoolique est amer et un peu astrin- 
gent. Carthenser dit que l'extrait aqueux est insipide. 

Les semences de Nigelle cultivées sont en usage comme 

-assaisonnement dans l'Orient et ailleurs depuis un temps 
immémorial. Les anciens les considéraient comme inci- 
sives , apérilives , diurétiques, atiénuantes. On les regarde 
comme avant fait pariie de la matière médicale d'Hippro- 
crate (Steril., 675). On les employait surtout dans les affec- 
tions catarrhales pulmonaires et pour provoquer les règles. 

Arnaud de Villeneuve, qui, malgré ses erreurs théoriques 

21 


322 


et le farrago de sa polypharmacie galénique, s’est montré 
dans la pratique judicieux observateur et a recueilli un 
grand nombre de faits intéressants, employait la formule 
suivante comme un puissant emménagogue : « Succi mer- 
curial., mell. despumati an.unc.{ farinæ nigellæ unc. 1.1/2 
vel q.s. ut possint confier pilulæ. Da mulieri 2 vel 3 singu- 
lis noctibus, quando menstrua debent venire, et tunc mens- 
tua venient copiosè. Non solum provocant hæc pilule 
menstrua, sed etiam præparant ad conceplum et matricem 
mandificant (De Stérihit., cap. 8). » Varandal ( Varendæus) 
au rapport de J. Dolæus (Encyclop. med. de chlorosi, hb.5, 
p.700, Amstelod. 1688), employait cetie formule avec un 
succès constant ; il en divisait un gros en six pilules, et en 
faisait prendre deux chaque soir pendant trois jours. 
D'après ces témoignages , la semence de nielle aurait sur 
l'utérus une action spéciale qui mérite toute l'attention des 
thérapeutistes, et que je me propose de vérifier. « Notre 
propre expérience, dit Bodart (ouv. cité), nous a prouvé 
qu’elle est susceptible de provoquer et d’augmenter la sécré- 
tion du lait.» Le docteur Pevyrilhe lui accorde la faculté 
anthelmintiqué. La tonicité dont elle est pourvue, en aug- 
mentiant la force péristallique du tube intestinal, peut être 
favorable à l'expulsion des vers; mais nous ignorons sur 
quel fondement ce savant praticien la considère comme 
utile dans l’hydrophobie. Wauters a proposé de substituer 
la semence de nielle cultivée aux aromates exotiques et sur- 
tout à la noix muscade, au macis, aux clous de girofle. 


La Nrezze pes Cuamps (nigella arvensis), qu’on ne doit 
pas confondre avec l’agrostema githago (L.) que l’on nomme 
aussi vulgairement nielle, participe aux qualités de la nielle 
cultivée. Ses semences sont àcres et brûlantes. Prises à l’in- 
térieur à forte dose , elles peuvent, suivant Dioscoride, don- 
ner la mort. Tragus et Hoffman les regardent aussi comme 
suspectes. J'ai vu, dit Builiard (owv. cit.), un homme sujet 
aux maux de dents employer avec succès la graine de nielle 
pour se procurer du soulagement ; presque toutes ses dents 
étaient gâûtées, et, dès qu’il ressentait des douleurs, il faisait 
entrer dans la cavité de la dent qui lui faisait mal une ou 
deux graines de cette plante; ce qui causait un petit ulcère et 
détruisait la sensibilité. Ces semences, réduites en poudre, 
sont un sternutatoire violent. Les caractères botaniques de 
toutes les nigelles doivent les faire considérer comme plus 
ou moins suspectes et nécessitent de la prudence dans leur 
emploi à l'intérieur. | Fr: 


NOYER. 


Nux juglans , sive regia vulgaris (T.) 
2 Juglans regia (L). 


Le noyer, originaire de la Perse, est naturalisé en France, 
quoiqu'il n’y soit point acclimaté au point de pouvoir résis- 
ter au froid des hivers rigoureux. On emploie les feuilles, 
le brou, les écorces et les fleurs. 


Préparations @ef doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion des feuilles fraîches ou sèches, 45 à 20 

gram par kilog. d'eau ; 2 à 5 tasses par jour. 

Décoction de feuilles fraîches, de 15 à 50 gram. par kil. d'eau ; 
2 à 5 tasses par jour. 

Décoction de brou sec, de 50 à 60 gram. par kilog. d’eau. 

Teinture de brou (4 sur 6 d'eau-de-vie} , de 20 à 50 grammes. 

Extrait de brou. de 2 à 8 grammes. 

Extrait de feuilles fraîches (par la méthode de déplacement), 


48 à 96 cent. en pilules avec suffisante quantité de poudre de 
feuilles de noyer. 


Extrait de feuilles sèches (se conserve plus long-temps), idem. 

Sirop (40 cent. d'extrait pour 52 gram. de sirop simple), 2 à 4 
cuillerées à café aux enfants dans les vingt-quatre heures ; 
50 à 45 gram. pour les adultes. 


Sirop avec les feuilles vertes (plus aromatique, mais moins facile 
à doser ) idem. 
A L'EXTÉRIEUR : Huile, de 20 à 50 gr. en lavements, frictions, etc. 
Feuilles sèches ou fraîches, en decoction pour bains, lotions, 
injections , fumigations, cataplasmes, pansements, etc. 


Propriétés. 


Les différentes parties du noyer sont astringentes, toni- 
ques , sudorifiques, détersives. On les utilise contre les scro- 
fules , les affections herpétiques et vénériennes, l’ictère , les 
ulcères atoniques, scorbutiques, scrofuleux, les aphtes. 
L’extrait de brou de noix est purgatif et anthelmintique, 
avantageux contre les lombrics. L'huile est calmante, adou- 
cissante, tant qu'elle est récente. L’écorce intérieure de la 
racine est vésicante. 

Dans un mémoire de M. le docteur. Baudelocque inséré 
dans la Revue médicale {année 1833), on trouve une obser- 
vation fort intéressante sur l'emploi des feuilles vertes du 
noyer et des noix tendres contre les affections scrofuleuses. 
Voici cette observation : M. Psorson médecin à Chambéry, 
rapporte qu'une fille , âgée d'environ vingt ans, se présenta 


324 


“hez lui dans l'état le plus pitoyable. Outre plusieurs autres 
symptômes de scrofules, son cou était tellement sillonné 
par de larges ulcères, allant de la mâchoire aux clavicules, 
et même jusque sur la poitrine , que presque tout le muscle 
peaucier semblait mis à nu. En plusieurs endroits#la peau 
avait évidemment été détruite par le mal, et une abondante 
suppuration découlait de ces vastes ulcères. 

Cette malheureuse offrait un aspect si repoussant, que sa 
famille l'avait chassée, et qu’elle ne trouvait à servir nulle 
part. M. Psorson se rappela que le professeur Jurine , de 
Genève , avait souvent retiré de bons effets de la tisane de 
feuilles de noyer et des noix tendres non écalées dans le 
traitement des engorgements lymphatiques Il conseilla donc 
à sa malade d'en prendre au moins une verrée le matin à 
jeun, le midi et le soir, de laver en outre ses ulcères avec 
de l'eau salée, et de les couvrir dans l'intervalle avec des 
cataplasmes des mêmes feuilles de noyer cuites. Ce médecin 
l’engagea en même temps, comme on élait au milieu de 
l'été, à faire sa provision de noix tendres, coupées par quar- 
tiers et séchées, pour faire sa tisane dans la saison morte, 
pendant laquelle les cataplasmes de feuilles d'oseille pour- 
raient remplacer ceux de feuilles de noyer. Quant au régime, 
il est évident que chez une mendiante on ne pouvait rien 
prescrire à cet égard. | 

À la fin de l'automne suivant, cette jeune fille revint telle- 
ment rétablie, qu’il était difficile de la reconnaître ; on ne 
voyait plus sur le cou que des cicatrices blanches et régu- 
lières, indiquant à peine le mal qui existait cinq mois 
auparavant. 

M. Psorson fait préparer, avec l’écale verte de la noix, un 
sirop et une conserve qui réussissent très-bien à ranimer les 
forces digestives chez certains estomacs trop irritables pour 
|: admettre des toniques trop excilants. 

M. le docteur Négrier, d'Angers, a publié deux mémoires 
intéressants sur l'objet qui nous occupe. Dans le premier 
(1841), ce praticien annonçait que depuis plusieurs années 
il employait les feuilles de noyer dans le traitement des 
scrofules, et qu'il avait obtenu par ce moyen de nombreuses 
guérisons. 

Pour bien constater les effets de ce médicament, M. Ne- 
grier avait partagé ses malades en diverses séries ; les uns 
étaient atteints d'engorgements scrofuleux non ulcérés, les 
autres d'ophtalmies scrofuleuses, une 3° série offrait des 
engorgements strumeux abcédés ; enfin, les maladies des 
os étaient réservées pour une 4° catégorie. Il résulte de.ses 


325 


recherches que les malades de la 1'° série ( engorgements 
strumeux non ulcérés), qui étaient au nombre de dix, sont 
guéris complètement. Les malades atteints d'ophtalmie 
étaient au nombre de quatre ; l’un d'eux est mort après la 
guérison de son ophtalmie, les trois autres sont guéris. Il y 
avait vingt cas d'engorgements strumeux ulcérés ; sur ce 
nombre six malades ont succombé, dont auatre à la phihisie 
pulmonaire ; les deux autres n’ont point été examinés, mais 
il est probable qu’ils ont péri de la même manière. Les qua- 
torze autres sujets ont vu leur guérison se consolider. Enfin, 
les malades de la 4° série étaient atteints de gonflements et 
carie scrofuleux des os et des articulations ; ils étaient au 
nombre de dix-neuf, la plupart très-gravement affectés. Au 
mois d'avril 1841, huit étaient guéris et tous les autres avaient 
éprouvé de l'æinélioration. Depuis cette époque, deux ont 
succombé à la phthisie tuberculeuse, deux autres ont guéri. 
L'un d'eux offrait une carie de la colonne vertébrale avec 
abeès par congestion. Les autres sont dans un état plus 
satisfaisant et n'ont pu être retrouvés. 

L'auteur, dans le second mémoire (1844), a cru pouvoir 
déduire les conclusions suivantes des diverses expériences 
auxquelles il s’est livré pendant plusieurs années : 

1° Les affections scrofuleuses sont, en général,radicalement 
guéries par l'usage des préparations de feuilles de noyer ; 

20 L'action de cet agent thérapeutique est assez constante 
pour qu’on puisse compter sur la guérison des trois-quarts 
des sujets traités par ce moyen ; 

8° L'action de ce traitement est généralement lente ; il 
faut äe vingt à cinquante jours, selon Ia nature des symp- 
tômes et la constitution des sujets, pour que les effets en 
soient sensibles ; 

4° Les sujets guéris par les préparations de feuilles de 
noyer conservent presque tous la santé qu'ils ont obtenue 
sous l'influence du traitement : on voit peu de rechutes. 
après ce traitement : 

5° Les effets produits par l'usage intérieur de l'extrait des. 
feuilles de noyer sont d'abord généraux ; l'influence de cette 
médieation ne se manifeste que plus tard sur les symptômes 
lacaux ; 

6° Dans certaines formes de l'affection scrofuleuse, on 
n'observe qu’à la longue une action efficace de ce traïtesnent. 
Cette remarque est applicable surtout aux glandions stru- 
meux non ulcérés ; 

7° Les préparations de feuilles de noyer exercent , au con- 
traire, une action assez prompte sur les ulcères, les plaies: 


326 


fistuleuses, entretenues ou non par la carie des os, sauf 
chez les sujets d’un tempérament sec et nerveux ; 

8° Jusqu'à ce jour, les ophtalmies scrofuleuses que j'ai 
observées ont été sûrement et plus rapidement guéries par 
ce traitement que par toute autre médication. 

M. Négrier donne les feuilles en infusion édulcorée ; il en 
forme aussi un extrait et un sirop. Il se sert de la décoction 
des feuilles en lotions et en injections, et enfin, il prescrit 
ordinairement, dans les ophtalmies scrofuleuses, un collyre 
composé de 192 grammes de décoction de feuilles de noyer, 
d'un gramme de belladone et d’un gramme de laudanum 
de Rousseau. 

J'ai donné mes soins, en 1837, à une petite fille âgée de 
dix ans, atteinte d’un ulcère avec engorgement glandulaire 
au côté gauche du cou ; cet ulcère, de la grandeur de cinq 
cent. environ, était sinueux, avec décollement de la peau, 
chairs blâfardes, suppuration modérée. Le tempérament 
lymphatique et l'aspect général de cette malade achevaient 
de caractériser son état évidemment scrofuleux. Je la mis à 
l'usage de la décoction de feuilles fraîches de noyer le 2 
juin ; elle prit deux verres par jour de cette décoction pen- 
dant tout l'été. Je faisais appliquer sur l’ulcère les feuilles 
bouillies et broyées, après avoir réprimé les chairs avec la 
poudre d’alun calciné. Un bout d’un mois l’état général de 
la malade était très-amélioré; elle se sentait, disait-elle, 
beaucoup plus forte et mangeait beaucoup plus ; l’ulcère 
commença à se cicatriser au bout de deux mois, quoiqu'il 
eût pris plus tôt un meilleur aspect; bref, au mois de 
novembre il était cicatrisé et l’engorgement était presque 
entièrement dissipé. Le reste de cet engorgement à persisté 
pendant l'hiver, malgré l’usage continu de la décoetion de 
feuilles sèches de noyer. Le printemps suivant la malade 
reprit la décoction des mêmes feuilles fraîches pendant trois 
mois. Je la revis à la fin de l'été de 1838 : elle était complè- 
tement guérie. 

J’ai en ce moment plusieurs scrofuleux en traitement par 
les feuilles de noyer. L'un d’eux porte un vaste ulcère à la 
partie antérieure de la jambe gauche depuis l'âge de deux 
ans, avec nécrose d’une portion considérable” du tibia. 


J'observerai, avec autant d'attention que d'intérêt, les effets 
de ce traitement (1). 


(4) Ce malade , jeune garcon âgé de douze ans, grâce au lraitement par 
. feuilles de noyer ct le brou de noix long-temps continué, est dans 

‘état le plus satisfaisant. 11 y a eu élimination d'un séquestre de la lon- 
pe de 5 centimètres. La plaie s'est cicatrisce. 


327 


Damy, de Boulogne-sur-mer, âgé de neuf ans, éminem- 
ment lymphatique , ayant la lèvre supérieure épaisse , la 
face pâle, plombée, les chairs flasques , émaciées , affaibli 
au point de ne pouvoir faire quelques pas sans fatigue, me 
fut présenté par sa mère, indigente, le 10 mai 1847. Il était 
atteint d’un engorgement glandulo-cellulaire considérable, 
occupant presque toute la partie latérale gauche du cou et la 
joue du même côté, offrant à son centre , vers l'angle, le 
long et au-dessous de la mâchoire, un ulcère fongueux, 
sordide , de l'étendue transversale de 5 cent. sur 2 cent. de 
largeur, avec suppuration fétide, abondante, et aboutissant 
à une portion nécrosée de la face externe du maxillaire 
inférieur. 

Je mis aussitôt ce malade à l'usage de la décoction de 
feuilles fraîches de noyer, à la dose de trois verres par jour; 
je fis pratiquer des injections, des lotions, et appliquer des 
cataplasmes de ces mêmes feuilles broyées sur l’ulcère et 
sur toute l'étendue de l’engorgement. Les chairs fongueuses 
furent réprimées de temps en temps au moyen de Falun 
calciné en poudre. 

Au bout d’un mois de ce traitement, l’état général du petit 
malade était amélioré , ses forces étaient augmentées, son 
appétit plus prononcé ; mais aucun changement notable ne 
s'était opéré du côté de l'affection locale, ce qui, d’ailleurs, 
s’expliquait par la coexistence de la nécrose. 

Après trois mois de traitement les forces étaient presque 
complètement rétablies, la coloration de la face beaucoup 
meilleure, l’appétit et les digestions dans leur état naturel, 
lexercice plus facile et mieux supporté, la tristesse et 
l'abattement dissipés. L'engorgement était diminué au cou ; 
la suppuration moins abondante, les chairs un peu meil- 
leures. 

Vers les premiers jours d'octobre une portion d'os nécro- 
sée se présenta dans la bouche, devint de plus en plus sail- 
Jante, et, enfin, à peine adhérente au commencement de 
décembre, fut extraite avec facilié. Elle avait un centimètre 
et demi de longueur sur un demi centimètre de largeur à son 
centre, lisse d’un côté, rugueuse de l'autre. 

Dès lors , l'ulcère prit un aspect favorable, la suppuration 
diminua et fut de meilleure nature, l'engorgement se dissipa 
peu à peu. Le traitement, secondé par un régime fortifiant, 
fut continué pendant l'hiver avec la décoction de feuilles 
sèches de noyer. Au printemps de 1848, le malade était dans 
l'état le plus satisfaisant : la plaie, devenue superficielle, de 
Ja grandeur d'un centime environ et ne fournissant que peu 


328 


de suppuration, marchait rapidement vers la cicatrisation, 
que quelques cautérisations avec le nitrate d'argent fondu 
favorisèrent. L'usage interne des feuilles fraîches de noyer 
fut repris et continué durant toute la saison. Vers la fin de 
l'année, la cicatrice, qui depuis deux mois s'était complète- 
ment fermée, s’est rouverte pour donner issue à une par- 
celle d'os. Il reste seulement une petite plaie qui continue 
de suppurer un peu sans s’agrandir el sans engorgement. 
Le malade, du reste, a continué de se bien porter. 

Si je me suis étendu sur les propriétés anti-scrofuleuses 
des feuilles de noyer et du brou de noix, c'est parce que ce 
médicament est à la portée de tout le monde et infiniment 
préférable, pour la campagne, aux préparations diode dont 
le prix est si élevé, et qui, d'ailleurs, sont loin de mériter 
les éloges qu’on leur a prodigués : ils déterminent souvent 
des accidents graves, et causent l'émaciation. 

On m'a rapporté que le docteur Souberbielle employait 
contre l'ictère 2 à 4 gram. de feuilles de noyer séchées au 
four, pulvérisées et infusées du soir au matin dans {50 gram. 
de vin blanc. Il donnait cette dose à jeun. Douze à seize 
doses, suivant ce praticien, ont toujours suffi pour la gué- 
rison de l’ictère simple, et le soulagement de l'ictère par 
cause organique. Que -penser d’une pareille assertion quand 
on sait que Ja couleur jaunen’est que le symptôme commun 
d'affections dissemblables du foie ou de ses annexes? Le 
médecin doit rechercher, autant que possible , la nature et 
le siége de la lésion dont un symptôme peut n'être que l'ex- 
pression vague ou incertain (1). 

R. Solenander (Censil. 8, sect. 4) assure avoir constam- 
ment réussi à arrêter les hémorrhagies utérines en admi- 
nisirant le matin à jeun, pendant plusieurs jours, un gros 
{4 gram.) de fieurs de noix bien mûres en poudre mêlé avec 
une suffisante quantité de vin chaud. Ces mêmes fleurs 
peuvent remplacer la racine de ratanhia et tous les astrin- 


(1) Il n'est pent être pas de maladie contre laquelle on ait proposé un 
aussi grand nombre de remèdes qu: contre la jaunisse.Ces non Dreusus n.é- 
dic:Bons prouveit bien moins les ressources de l'art que son mutilité ou 
son inpuisssnce. La jaunisse guérit presque to: jours sans aucun remède 
du 45e au 30: jour, lorsqu'elle n est point entretenue par mn vice orga- 
nique. J ai vo souvent des persounes attentes de cette maladie, conserver 
iouie- leurs forces, manger avec plaisir, digérer, vaquer a leurs uflanes, 
n'éprouver, en un mot, aucun dérangement dans leurs fonctions. 
L'exp'oruion du foie eu du ducdenum ne révélait ni pot «louloureux 
di inflemmation ; il n'y avait aucun signe de souffrance. Les 1etêres ont élé 
abandonnés à cux mêmes, et quand parfois j'ai prescrit quelques formules 
insignifiantes , ce n’était que pan satisfaire aux désirs de personnes qui , 
jugeant du degré de gravité de leur maladie par la couleur de Icur peau, 


sents exotiques. L’épiderme mince qui recouvre la sub- 
stance de la noix, quoique moins astingente que les fleurs 
et le brou, jouit de propriétés analogues. 

Le docteur J.-S. Frank regarde comme sudorifique l'écorce 
du fruit du noyer ; il prescrit trois gros {12 gram.) de cette 
substance en décoction dans 500 gram. aromatisés avec un 
peu d'eau de fenouil. Sous cette forme , ce médicament égale 
et surpasse même, dit cet auteur, l'efficacité du sassafras, 
surtout quand on administre l'extrait aqueux de ses fruits 
non mûrs, avec le double d’eau de canelle, à la manière de 
Fischer. Ce dernier, après avoir fait dissoudre 8 grammes 
d'extrait de noix verte dans 16 grammes d'eau distillée de 
canelle, donnait aux enfants, comme vermifuge, 20 à 50 
gouttes de ce mélange, suivant leur âge. Ce brou, associé 
au miel, formait une préparation connue autrefois sous 
le nom de rob nucum, et qui jouissait d'une grande ré- 
putation. ] 

J'ai administré avec avantage, comme vermifuge, le vin 
de brou de noix et d’ail. Ce vin, pris à une certaine dose, 
est à la fois vermicide et laxatif. 

Pevrilhe regarde le brou de noix comme vermifuge, anti- 
syphilitique et anti-gangréneux. Le châton de noyer en 
fleurs , selon BϾcler, est un puissant auxiliaire dans les 
maladies vénériennes. Swediaur à reconnu dans l'écorce de 
noix une vertu antisyphilitique ; mais comme il l'emploie 
avec la salsepareille, la squine et le sulfure d'antimoine, 
peut-on raisonnablement attribuer à cette écorce un effet 
dû sans doute aux substances plus énergiques auxquelles 
elle est jointe ? | 

Schrœæder considère comme émétique la seconde écorce 
des jeunes branches enlevée au printemps pendant que la 
sève est en activité. I la prescrit à la dose d’un demi-gros 
à 1 gros (2 à 4 grammes). Ray et Buechner lui ont aussi 
reconnu cette propriété. 

[ Les noix coufites avant leur maturité offrent un aliment 
agréable et tonique. Le ratafiat de brou de noïx a les mêmes 


n'auraient pu croire à leur guérison si je les avais négiigés , si je ne les 
avais pas méd'camentés. . 

La profusion des remédes proposés contre l'ictére dépendant d'une 
lésion organique da foie, prouve, non la puissance de l'art , mais la 
gravité de Ja maladie. On multiplie les moyens contre les inaux qu'on 
ne guérit que diflicilement ou qu'on ne guérit pas. Que devient , en effet, 
aux yeux du praticien non routinier, un remède contre la jaunisse qui 
dépend , soit de l'irritation, de linflammation ou de l'engorgement 
atonique secondaire du foie, soit de concrétions de bile, de calculs , 
d'obstacles mécaniques quelconques dans les conduits biliaires ? 


390 


qualités. Hippocrate avait observé que les noix mangées em 
grande quantité expulsaient les vers plats. On obtient l'eau 
dite de trois-noix , employée comme stomachique, à la dose 
de 50 à 100 grammes, par la distillation répétée des fleurs 
et des fruits dans des états différents. 

Il coule, par des incisions faites au noyer, une sève mu- 
cilagineuse et sucrée. Baron a retiré, d’un quintal de ce 
liquide, plus d’un kilogramme de sucre cristallisé. 

J'ai souvent fait, avec les noix récentes , des émulsions 
comme avec les amandes douces. J'ai prescrit l'huile de noix 
par expression, comme laxative et vermifuge. On l'emploie 
surtout en lavement dans la colique des peintres. Elle peut 
remplacer, pour l'usage médical, les autres huiles ; mais elle 
doit être employée récente, car elle devient facilement 
rance et àcre. 

J. Bauhin indique l’eau distillée des feuilles de cet arbre 
comme un déteisif et un cicatrisant efficace, appliquée sur 
les ulcères, en y maintenant des compresses constamment 
humectées de cette eau. La simple décoction de feuilles de 
noyer est tout aussi efficace. ] 

Hoffmann indique la seconde écorce des racines du noyer 
trempée pendant une heure dans du vinaigre, comme un 
rubéfiant prompt, susceptible d'agir comme vésicatoire dans 
des cas urgents. Wauters s'exprime ainsi à ce sujet : « Mohul 
efficacius cortice interno radicis juglandis recents, vel cum 
aceto, contuso : hunc sœæpiùs succedentem vidr, dûm cantha- 
rides nullas producebant vesicas. Ingens aliquando. mia 
præstitit obsequium ubi procul à pharmacopærs , apud rus- 
ticos, promptissimè vesicato opus erat (op. cit., p. 29.) » 

J'ai été à même de constater cet effet vésicant : 1l-est sûr 
et prompt. 

L'écorce du noyer blanc ou cendré (juglans cinerea), 
proposée par Macartan {Journal de médecine, sept. 1809), 
séchée et mise en poudre , paraît aussi efficace que les can- 
tharides , et n’en a pas les inconvénients. Cette écorce , ainsi 
que celle du tronc, est, dit-on , purgalive. 

J’emploie avec succès, dès le début de l'angine tonsillaire, 
la décoction de feuilles de noyer ou de brou de noix en 
gargarisme. Je parviens souvent ainsi à arrêter l'inflamma- 
tion, Ce gargarisme convient aussi vers la fin de l’'amygdalite 
aigue et dans les angines chroniques. 

[ Le docteur Becker, chez un jeune garçon affecté de 
congestion ancienne des tonsilles, a employé la préparation 
suivante, appliquée à l'aide d’un pinceau : Extrait de brou 
de noix, # grammes ; eau distillée, 60 grammes : faites dis- 


331 


soudre. Ce lopique fut si eflicace , que l'engorgement des 
amygdales était disparu avant qu'on eût employé la totalité 
de la solution (Abeille médic., 1845, p. 196.) 

« Si le noyer, dit avec raison Bodart ne se cultivait que 
dans le Nouveau-Monde, nous nous empresserions de le 
ranger sur la ligne des végétaux les plus utiles en médecine ; 
mais il croît abondamment autour de nous, er nous négli- 
gerions encore d'étudier les propriétés de ses différentes 
parties , si d'illustres praticiens ne tentaient de ramener l’at- 
tention sur ce végétal précieux et injustement abandonnné. »] 


NUMMULAIRE, * 


HERBE AUX ÉCUS , MONNAYAIRE , HERBE AUX CENT YEUX. 


Lysimachia humi-fusa, folio rotundiore , flore luteo (T. 
Lysimachia mumanularia (L.) 


Cette plante est très-commune dans les bois, les prés, sur 
le bord des ruisseaux, qu’elle émaille de ses fleurs jaunes, 
en juin et juillet. On emploie l'herbe entière. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : [nfusion ou décoction, 50 à 60 gram. par kil. d'eau. 
Suc erprimé , 50 à 400 grammes. 
Feuilles en poudre , ? à 4 grammes, et plus. 
Vin (50 à 60 gram. pour 1 kilog. de vin}, 60 à 120 Se mr 


Propriétés, 


La nummulaire, d’une saveur âcre, austère et un peu 
acide, a disparu de la matière médicale moderne et est pres- 
que ignorée des praticiens. Cependant, suivant Lieutaud, 
elle n’est pas le moins efficace des remèdes astringents. Elle 
a été regardée comme très-utile dans l'hémoptysie, l’hé- 
maturie, les pertes utérines, l'écoulement immodéré des 
hémorroïdes, les hémorrhagies scorbutiques, la diarrhée, la 
dysenterie , la leucorrhée , etc. Boerhaave faisait grand cas 
de cette plante. J’en ai fait prendre le suc exprimé à la dose 
de 80 grammes chaque matin dans un cas de ménorrhagie 
lente passive, qui existait depuis trois mois et avait consi- 
dérablement affaibli la malade. Cette malade, âgée de vingt- 
huit ans, était lymphatique, d'une constitution délicate, 
avait eu. deux enfants et trois avortements, à la suite des- 
quels il lui restait toujours un “écoulement sanguin peu. 


332 


abondant , mais continuel. Ce flux a cessé après la quatrième 
dose de suc de nummulaire, dont la malade à néanmoins 
continué l'usage pendant dix jours. Cette plante peut prendre 
rang, comme astringente, à côté de la centinode et de la 
bourse à pasteur, dont on à récemment reconnu l'efficacité. 


OIGNON, 


OIGNON BLANC, COMMUN. 
Cepa vulgaris (T.)-— Allium cepa (L.) 


Cette plante est du même genre que l'ail et se cultive dans 
les jardins potagers. Les bulbes sont usitées. 


Fréparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoctio» miellée, pour boisson. * 
Sirop (4 sur 5 d'eau et 6 de sucre}, de 50 à 109 grammes. 
Sue erprimé, de 50 à 100 grammes dans l'eau miellée où dans 
du vin blanc. 


A L'EXTÉRIEUR : Pulpe d'oignon cuit ou bulbe pilée, en cataplasme. 
Proprietés. 


L'oignon cru est excitant, diurétique , souvent utile dans 
les affections scorbutiques, scrofuleuses et atoniques. Appli- 
qué sur la peau , il y produit une légère excitation. 

L'oignon cuit est émollient, adoucissant, peetoral. On 
emploie dans les catarrhes bronchiques, vésicaux, aigus ou 
chroniques, lorsque trop d’irritation n'en contre-indique 
pas l'usage. A l'extérieur, l'oignon cuit est un bon matu- 
ratif dont on se sert contre les bubons, phlegmons, clous, 
panaris, etc. On met l'oignon dans les bouillons pectoraux. 

L'oignon cru ne convient pas, comme aliment, aux tem- 
péraments sanguins ou bilieux. aux sujets très-irritables , 
aux personnes sujettes aux hémorrhagies, aux affections 
dartreuses , etc. 

L'oignon cru possède réellement une propriété diurétique 
assez prononcée. Son suc à été utile dans certains cas de 
rétention d'urine et dans les hydropisies. Pilé et appliqué 
sur Phypogastre, il agit de même comme excitant sur les 
voies urinaires. Murray cite Ja guérison d’une anasarque 
due à la simple application de sa pulpe crue, soit à l’hypo- 
gastre, soit à la plante des pieds. J'ai vu lanasarque sur- 
venue à Ja suite de la scarlatine chez plusieurs enfants, 
disparaître en peu de temps par l'administration de 30 à 60 


333 


gram. de sue d’oignon mêlé avec autant de vin blane sucré. 
Lauzoni rapporte que des sujets ont été guéris de l'hydro- 
pisie ascite par l'usage abondant de l'oignon pendant plu- 
sieurs mois, soit en boisson, soit comme aliment. Il est bien 
évident que ce bulbe serait nuisible dans l’ascite produite 
par une phlegmasie péritonéale plus ou moins douloureuse. 
On oublie trop que l'hydropisie est le plus souvent une 
mañadie secondaire, subordonnée à une affection primitive 
qui deit avant tout attirer l'attention du médecin. 

[ J'ai vu des paysans se guérir promptement du rhume au 
moyen d'un oignon cuit sous la cendre après l'avoir enve- 
loppé dans -une feuille de choux, pilé, écrasé, réduit en 
pulpe, er mêlé dans uae tasse de décoction chaude d'extrait 
de réglisse. Cette potion, prise matin et soir, calme la toux 
et facilite l’expectoration. 

Le vin rouge, dans lequel on a fait macérer un oignon 
coupé par morceaux, et qu'on a exposé à l'air pendant deux 
jours, pris le matin à jeun , est un vermifuge que j'ai sou- 
vent vu employer avec succès. 

Le cœur d’un oignon, en suppositoire, est un moyen 
populaire mis en usage pour rappeler les hémorrhoïdes sup- 
primées. Quand on veut en modérer l’action , on l’enduit de 
saindoux, d'huile de lin, d'œiilette ou d'olive. 

Le suc de cette bulbe, introduit dans l'oreille à la dose 
de quelques gouttes, a été vanté contre la surdité et le 
cophosis ; mais les lésions de l'ouie sont si variées, et la 
pathogénie en est si obscure, qu'un semblable remède n’a 
pu avoir qu’un succès relatif et dû au hasard. 

L'oignon, doux et sucré dans le midi, où il convient mieux 
comme aliment, est âcre et plus actif comme médicament 
dans le nord. 

La pulpe d'oignon cru, appliquée à la plante des pieds, 
agit comme un doux révulsif qu'on a toujours sous la main 
et que le médecin de campagne peutemployer avec avantage 
dans les affections où ce genre de médication est indiqué. 
J'ai vu des commères appliquer cette pulpe ou tout simple- 
ment des oignons grossièrement écrasés, sur des brûlures, 
et empêcher ainsi la production des phlictènes. Cette appli- 
cation cause d’abord une douleur assez vive qui s’appaise 
peu à peu et cesse ensuite entièrement : similes similibus 
curantur. C'est faire de l'homæopathie sans s’en douter. 


334 


OLIVIER. 
Oliva sativa (T.)— Olea europea (L.) 


L'olivier, dont l’origine se perd dans la plus haute anti- 
quité, croit aujourd’hui spontanément dans les montagnes 
de l'Atlas, et est cultivé en Italie, en Espagne, en Langue- 
doc , en Provence. On se sert de ses feuilles, de ses écorces 
et de ses fruits ou olives. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction de feuilles, ècorces, olives vertes , 15 à 60 
. grammes par kilog. d'eau. 
Écorce ou feuilles pulvérisées, de 4 à 24 gram. dans un véhicule 
approprié. 
Teinture alcoolique d'écorces (4 sur 8 d'alcool à 52°), de 2 à 4 gram. 
en potion. 


Extrait d'écorres (1 sur 5 d'alcool à 52°), 2 à 4 gram. en pilules 
ou dans un liquide. 


Sirop d'écorces À sur 46 d'eau et 12 de sucre), de 50 à 60 gram. 
seul ou en potion. 


Huile d'olives, de 46 à 60 grammes et plus, pure ou mêlée à l’eau 
par un mucilage. 
A L'EXTÉRIEUR : 59 à 120 grammes en lavement, frictions, lini- 
ment , etc. ; le maic en topique. 


Propriétés, 


L'écorce et les feuilles d’olivier sont amères, toniques, 
astringentes et fébrifuges. On les a considérées comme 
propres à remplacer le quinquina, non-seulement dans les 
fièvres intermittentes, mais aussi dans les fièvres typhoïdes 
et dans les maladies atoniques où l'usage de l'écorce du 
Pérou est indiqué. 

M. le docteur Bonnet, ex-président de la Société royale 
de médecine de Bordeaux , a publié sur les fièvres intermit- 
tentes un ouvrage (1835) dont le Journal de médecine et de 
chirurgie pratiques à extrait les passages suivants concer- 
nant l'emploi, comme fébrifuge, des feuilles et de l'écorce 
d'olivier : « Les officiers de santé français, pendant les 
« guerres d’Espagne, n'ayant pas une quantité suffisante de 
« quinquina, employèrent avec le plus grand succès les 
« feuilles et l'écorce d'olivier, qui paraît être un des meil- 
« leurs succédanées du quinquina. On donne la poudre à la 
« dose de 1, 2, 3, # et 6 gros. L’infusion se prépare de la 
« manière suivante : Poudre de feuilles ou d’écorce d'’oli- 


339 


« vier, 4 once; eau ou bon vin vieux, 2 livres. Laissez 
« infuser pendant deux fois vingt-quatre heures. 

« L’extrait amer de l'écorce se donne à la dose de 12 à 

« 36 grains. Le sirop de la même substance, préparé de la 

« manière suivante , est beaucoup vanté par M. Pallas , sur- 
_« tout contre les fièvres intermittentes qui se développent 
« chez les enfants : Prenez une livre d'écorce sèche d'oli- 
« vier, concassez et faites bouillir dans huit pintes d’eau de 
« fontaine ; passez au travers d’un blanchet, et ensuite faites 
« évaporer pour réduire à moitié. La liqueur étant refroidie, 
« on la décante pour en séparer la matière résineuse qui se 
« précipite par le refroidissement. On ajoute à cette décoc- 
« tion douze livres de sucre terré. puis on clarifie avec des 
« blancs d'œufs, et l’on fait cuire jusqu’à consistance de 
« sirop. On conserve pour l’usage dans des bouteilles exac- 
« tement fermées. La dose est d’une once, fractionnée en 
« trois ou quatre prises données pendant l'apyrexie. 

« La teinture d’olivier a été également recommandée par 
« M. Pallas : Prenez écorce d'olivier, 200 grammes ; eau-de- 
« vie ordinaire, 1 litre. Laissez digérer pendant cinq jours, 
« et filtrez. La dose est d’une demi-once, qu'on étend dans 
« deux onces d'eau, et qu'on donne en deux fois. » 

Plus tard, M. Pailas eut occasion d'administrer l’écorce 
d’olivier aux soldats de l'expédition de Morée. Vingt malades 
atteints de fièvres tierces et quotidiennes guérirent tous. Ce 
médecin administrait trois ou quatre fois la teinture en po- 
tion, comme on vient de l'indiquer, ou bien, l'extrait amer 
à la dose de 6 à 18 décigrammes. M. Giardoron, médecin à 
Sebenico, a préconisé les feuilles en décoction et en poudre 
à la dose d’une once et demie {poids d'Autriche) en six 

parties. Ce fébrifuge indigène, qui était connu de quelques 
_ médecins espagnols, et dont M Bidot, en France, a le pre- 
mier fait mention, paraît le plus digne de suppléer au quin- 
quina dans les départements du midi, où l’on peut se le 
procurer facilement. 

L'huile d'olive est adoucissante, émolliente, laxative, 
anthelmintique. On l'emploie cependant rarement pure à 
l'intérieur dans les maladies inflammatoires, parce que, 
séjournant dans les voies digestives, elle peut y acquérir des 
qualités irritantes en s'y rancissant. On l'emploie plus par- 
ticulièrement dans les empoisonnements par les substances 
âcres et corrosives, pour en diminuer l’activité et calmer en 
même temps l’irritation qu’elles ont produites. On peut 
l'employer en émulsion comme l’huile d'amandes douces, 
dans les toux sèches avec irritation, dans la strangurie et 


336 


les douleurs néphrétiques. Elle paraît, prise pure, comme 
la plupart des huiles fixes, exercer une action délétère sur 
les vers intestinaux, dont elle provoque souvent l'expulsion. 
Pour prévenir le vomissement, qu'elle occasionne quelque- 
fois lorsqu'elle est prise à haute dose, on lui associe une 
certaine quantité d'un acide végétal comme le suc de citron, 
qui, lui-même, est vermicide, ou autant de vin. Les lave- 
ments d'huile d'olives conviennent dans les coliques qui 
suivent les accouchements laborieux, dans celles qui accom- 
pagnent les hernies, ou qui sont produites par la rétention 
des matières stercorales durcies. Dans un cas de cette der- 
nière espèce, chez un vieillard habituellement constipé, je 
ne suis parvenu à calmer les douleurs et à provoquer l'ex- 
pulsion des fèces accumulées dans le gros intestin, qu'en 
injectant au-dessus, au moyen d’une longue canule de gomme 
élastique , {20 grammes d'huile d'olive d'heure en heure. 
L'expulsion des matières s’est opérée après la quatrième 
injection. J'ai pu prévenir de nouveaux accidents par l'usage, 
trois fois par semaine, de la décoction miellée de mercuriale 
annuelle à la dose d'une tasse. 

Les anciens faisaient un grand usage des onctions d'huile 
d'olives ; ils s’en frottaient le corps en sortant du bain pour 
assouplir les muscles et les articulations, et rendre la peau 
moins sensible à l'impression subite d’un air frais. C'est en 
se frottant tout le corps d'huile que les athlètes se prépa- 
raient à la lutte. L'empereur Auguste demandait au cente- 
naire Romulus Pollion comment il avait fait pour conserver 
jusque dans un âge avancé la vigueur de corps et d'esprit 
qu'il montrait : « C’est, dit le vieillard, en usant habituelle- 
ment de vin miellé à l'intérieur et d'huile à l'extérieur : 
intus mulso, fores oleo. » 

Les onctions d'huile étaient aussi fréquemment employées 
dans le iraitement de plusieurs maladies. Dioscoride et Celse 
parlent de leur usage contre l’hydropisie. Forestus, Olivier, 
Storck, Gardane , parmi les modernes, rapportent avoir vu 
plusieurs fois l’ascite et l'anasarque se dissiper par ces onc- 
tions répétées plusieurs fois par jour. Bien qu’elles n'aient 
pas eu le même succès entre les mains de Tissot et de plu- 
sieurs autres praticiens, au nombre desquels je puis me 
compter, on ne doit pas y renoncer avant de les avoir de 
nouveau essayées. 

La réputation dont l'huile d'olive a joui, appliquée à 
l'extérieur comme antidote, est plus douteuse. De ce que 
les accidents produits par la morsure de la vipère se sont 
dissipées après l'usage des onctions d'huile, peut-on rai- 


337 


sonnablement attribuer à ces onctions celte heureuse selu- 
tion quand on la voii fréquemment s’opérer par les seuls 
efforts de cette-nature ? 

Les onctions de cetie huile, proposées par Delpech contre 
la gale, n’ont pas non plus les bons effets qu'on leur avait 
attribués. Je les ai employées deux fois sans succès. 

Le marc ou magma, résidu des olives exprimées, paraît 
agir sur la peau comme irritant. On l'a recommandé contre 
le rhumatisme chronique, la goutte, lafparalysie.Son applica- 
tion sur tout le corps à la fois n’est pas, dit-on, sans danger. 


ORGE 
ORGE COMMUN, ORGE MONDÉ , ORCE PEPLÉ. 


Ordeum polystichum , vernum, hybernum (T.) 
Ordeum vulgare (L.) 


L'orge, qu’on croit originaire de la Russie, et dont on 
distingue plusieurs variétés, est cultivé depuis la plus haute 
antiquité pour l'usage alimentaire et médical. Dépouillées 
de leur enveloppe, ses semences portent le nom d'orge 
monde. Lorsqu'en les privant de leur écorce on leur donne 
la forme sphérique, elles portent le nom d'orge perlé. 
Réduites en farine grossière et séchées au four, elles con- 
stituent l'orge grue, griot ou gruau. La décoction de ces 
semences, réduite à la consistance de gelée, forme la créême 
d'orge. Enfin, l'orge germé, dont on a arrêté la germination 
par une forte chaleur et dont on à détaché les germes, con- 
stitue le malt; celui-ci, moulu et portant le nom de drèche, 
contenant plus de sucre, d’amidon et de gomme, fait la base 

de la bière. 
_ Suivant Pline, l'orge à été un des premiers aliments de 
l'homme civilisé. La farine d'orge, cuite dans l'eau ou le 
lait, forme une bouillie très-nutritive. On en fait du pain 
dans certaines parties de la France ; maïs, le défaut de gluten 
et de liant rend ce pain friable et prompt à se dessécher. 

Sous ces différentes formes l'orge est nourrissant, émol- 
lient, adoucissant, rafraîchissant. On l’emploie en décoction 
dans la plupart des maladies aig'es et inflammatoires, el 
comme analeptique dans les maladies chroniques, fébriles 
ou avec irritation, telles que la fièvre hectique , la phthisie 
pulmonaire et les cousomptions, l’héinoptysie, la néphrite, 
la cystite, etc. | 

22 


338 


Afin que la matière amylacée de l'orge puisse se dissoudre 
entièrement dans l’eau et donner à la décoction divers degrés 
de consistance , suivant les différents états de la maladie, il 
faut prolonger l'ébullition à un feu doux pendant sept à huit 
heures. Sans cetle précaution , cette boisson est dénuée de 
vertu, ou bien elle est même un peu excitante, à cause de la 
matière extractive qu’elle a enlevée à l'enveloppe de la 
semence. C’est ainsi que les anciens préparaient l'eau d’orge 
qui, alors, fournissait dans les maladies aigues une boisson 
mucilagineuse et nourrissante, que nous avons à Lort rem- 
placée par les bouillons de viande. 

Il résulte des expériences de Magbride , de Lind et autres 
médecins, que le malt et Ja décoction qu'on en pré- 
pare, sont éminemment antiscorbutiques , et ont été comme 
tels employés avec succès dans les voyages de long cours, 
tant comme préservatifs que comme curatifs. Rush ditavoir 
vu différents sy mptômes, reliquats de la syphilis, céder à 
l'usage du malt, après avoir résisié à tous les remèdes. 
Percival lui attribue de l'efficacité contre les scrofules. Mais 
Ja bière qui est composée avec le malt et le houblon est bien 
plus utile contre ceite dernière maladie. Amère, nourris- 
sante et tonique, la bière appaise la soif sans débiliter, 
augmente l'action de l'estomac et excite les sécrétions. 

Dans le nord, où le vin est d'un prix trop élevé pour le 
pauvre, on emploie souvent la bière pour faire macérer 
les plantes qu'on veut administrer sous celte forme. 

J'ai vu employer à à la campagne, comme anthelmintique 
et purgatif, à Ja dose d’un à trois verres, la bière qu’on avait 
laissé éventer pendant trois ou quatre jours. Ce moyen pro- 
voque souvent l’expulsion des lombrics dès le premier jour 
de son usage. 

La levure de bière a été considérée comme antiseptique 
et administrée dans les fièvres putrides. J’en ai remarqué de 
bons effets dans un cas de fièvre muqveuse vermineuse chez 
une petite fille de dix ans, qui, pendant le cours de cette 
maladie, n’a fait usage d'aucun autre moyen, à l'exception 
de l’ ipécacuanha qu ‘elle avait pris au début comme vomitif. 
La levure de bière était prise par petites cuillerées fréquem- 
ment répétées. On l'a aussi employée à l'extérieur comme 
antiseptique. 

La farine d'orge peut être employée en cataplasme comme 
émolliente. Le ‘docteur Willams applique sur les plaies de 
mauvais caractère (pourriture d'hôpital, plaies gangréneuses, 
sordides, etc.) un cataplasme fait avec l'orge fermenté et la 
bière bouillante. Ce cataplasme, qui a paru supérieur à tous 


339 


les moyens de même nature, doit être changé deux ou trois 
fois en vingt-quatre heures. 

Les bains de drèche chaudssont employés avec avantage 
dans le rhumatisme et les engorgements articulaires chro- 
niques , la paralysie, les névralgies , les rétractions muscu- 
laires , l'œdème, l'anasarque, etc. C’est un moyen populaire 
et qui n'est pas à dédaigner. 


ORIGAN, 


ORIGAN COMMUN, GRAND ORIGAN, MARJOLAINE PBATARDE, 
MARJOLAINE SAUVAGE, MARJOLAINE D ANGLETERRE. 


Origanum sylvestre (T.) 
Origanum vulgare (E.] 


Cette plante, très-commune aux lieux montagneux, dans 
les bois et le long des haies, a beaucoup de rapport avec la 
marjolaine. On emploie les sommités fleuries. 


Propriétés. 


L'origan est stimulant, stomachique, expectorant. Il 
convient dans la débilité d'estomac, dans les catarrhes 
chroniques et l'asthme humide. On l’administre en infusion 
théïiforme (de 5 à 30 gram. par kilog. d’eau). A l'extérieur, 
on en fait des épithèmes, des cataplasmes, des fomenta- 
Lions, eic. 

L'origan, comme le serpolet, l'hyssope, etc., est fréquem- 
ment employé dans nos campagnes contre l’asthme humide et 
vers la fin des catarrhes aigus ou dans les catarrhes chroni- 
ques, surtout chez les vieillards, lorsque les voies aériennes 
affaiblies ont besoin de stimulants pour être débarrassées des 
mucosités qui engorgent les bronches et leurs ramifications. 

A l'extérieur, on empioie l'origan dans tous les cas où 
les aromatiques sont indiqués. Les guérisseurs hachent de 
l’origan nouvellement cueilli, léchauffent en le remuant à 
sec dans une poêle de fer sur le feu, et l’appliquent chan- 
dement sur la partie atteinte de rhumatisme chronique, et 
sur le cou dans le torticolis. Ce moyen réussit souvent. Une 
plante aromatique quelconque produirait probablement le 
même effet; mais l’origan étant très-commun, on s’en sert 
de préférence. | 


me rs 
: 


340 


ORME PYRAMIDAL 
ORMEAU, ORME COMMUN OU CHAMPÈÊTRE. 
Ulmus campestris (T.) — Ulmus campestris (L.} 


Cet arbre croît dans toute l'Europe, et est généralement 
connu. On emploie l'écorce intérieure des rameaux. 


Fréparations et doses, 


À L'INTÉRIEUR : Décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. d'eau. 
Estrait, de 5 à 15 gram. en pilules. | 
Sirop (dont la formule est i:diquée plus bas),30 à 400 grammes 


proprietés. 


L'écorce intérieure de l'orme pyramidal est diaphoré- 
tique. On l’a vantée dans l'ascite, les dartres, l'ichthyose, 
la lèpre . l'éléphantiasis et autres maladies de la peau ; dans 
les scrofules , le scrobut, les douleurs rhumatismales , les 
fièvres intermittentes, les uicères cancéreux. 

J'ai employé l'écorce intérieure de l’orme en décoction 
dans les affections dartreuses ; je ne puis rien dire de l'effet 
dépuratif de cette écorce, parce que des médicaments plus 
énergiques étaient administrés en même temps. 

M. Devergie, médecin de l'hôpital Saint-Louis, emploie 
dans le traitement de l’eczéma chronique , comme un excel- 
lent modificateur de la constitution , le sirop d’écorce d'orme 
pyramidal , surtout chez les jeunes personnes d’un tempé- 
rament lymphatique. Voici la formule qu'il en donne : on 
fait choix de l'écorce du commerce, qui est en filaments, 
est non de celle qui s’y trouve en morceaux. On en fait 
macérer 500 gram. dans un litre d'alcool, après l'avoir très- 
divisée. On laisse pendant quarante-huit heures en contact. 
On décante l'alcool et on le remplace par 125 gram. d’eau 
que l'on met de nouveau en contact pendant quarante-huit 
heures avec l'écorce, afin de l’épuiser. On distille l'alcool 
de manière à obtenir un résidu de eonsistance sirupeuse ; 
on y ajoute le liquide provenant de la macération par l'eau, 
puis une quantité d’eau et de sucre convenable pour faire 
un sirop, que l'on donne pur, en commençant par deux 
cuillerées, une le matin et l’autre le soir, et augmentant 
tous les deux ou trois jours d’une cuillerée de manière à 
arriver à six cuillerées par jour. 


341 


ORTIE. 


4° GRANDE ORTIE, wrlica urens marima (T.): Urtica dioïca{L}) 
2° ORTIE BRULANTE, urtica urens minor (T.); Uitica urens (L.) 


L'ortie, que tout le monde connaît, croît partout, parmi 
les décombres, aux lieux incultes et abandonnés. La plante 
entière est usitée. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Suc exprimé, de 60 à 100 grammes. 
Tnfusion ou décoction, de 30 à 60 gram. par kilog. d'eau. 
Semences et fleurs en poudre , 4 4 à 8 gram. dans un véhicule appro- 
prié, en électuaire, etc. 


A L'EXTÉRIEUR : en Calapiasmes, fomentations, etc. 
Propriétés, 


La grande ortie et l'ortie grièche ou petite ortie sont 
astringentes. On les a recommandées dans l'hémoptysie, 
l'hématémèse, la métrorrhagie, etc, 

[ Zacutus Luzutanus, qui se distingua par son habileté 
pratique , s'exprime ainsi sur la vertu de l’ortie contre l’ hé- 
mopiysie : « Qui sanguinem ex pectore rejectarunt, et à 
medicis tamquam deplorati sunt habiti, solo urticæ succo 
convaluerunt. Post multa autem machinata remedia, nullum 
üa contulit ut sanquis cohiberetur, ac urticæ succus, quem 
ad quinque vel sex dies ebiberunt : singulis scilicet diebus 
unc IV Jejuno stomacho : imù el ipsam urticam incoctam 
Jure pull aut vervecis sæpè comedebant. » (Oper.omn.1694). 

Lazerne, Scopoli, Geoffroy, ont aussi vanté cette plante 
contre l’hémoptysie ; Peyroux et Lange contre la ménorrha- 
gie : « C’est, dit Chomel, le remède le plus certain contre 
l'hémoptysie et toutes les hémorrhagies ; je l'ai prescrit, 
contre la première maladie , à plusieurs personnes, et tou- 
jours avec succès.» Succus intermè sumptus egreqium stip- 
hcum est, dit Wauters (op. cit.) en proposant ceite plante 
comme succédanée du cachou. Cocchius { Vindiciæ cort. 
 peruv. luyd. Balav., 1750) va jusqu’à la regarder comme 
propre à dissiper efficacement les tubercules des ponmons 
« Vim agnis adstrictoriam et vere balsamicam imatatur in 
sepulta intra pectus tuberculorum diæresi…. » 

Le suc des orties, dit Lieutaud (mat. méd., t. 1, p. 294), 
introduit dans le nez, arrête les hémorrhagies ; Ia racine à 
le mênie effet. 


342 


Le docteur Attitio Menicucci { de Rome) rapporte qu'il a 
fait usage de cette plante (wrtica urens) dès les premières 
années de sa pratique, comme d'un moyen hémostatique 
dont il a retiré les résultats les plus satisfaisants. fl l’a em- 
pioyée en outre avec succès pour les relâchements de FPuté- 
rus, en introduisant dans le vagin une éponge imprégnée 
du suc de cette plante mêlé à de l’eau tiède. { L'Abeulle méd., 
1. 3°, 1826, p. 129.) 

Le suc d’ortie a été proposé pour combattre le diabètes. 
D'après les observations du docteur Friard ( Formul. ecclec- 
tique, par d'Etilly, 1839), la décoction d’ortie amenant la 
suppression des urines, on peut l’employer avec succès dans 
cette maladie (ce qui mérite confirmation). Ce médecin fait 
prendre par cuillerées, d'heure en heure, un mélange de 120 
gram. de suc d’ortic et d’une once de sirop de karabé. On 
conçoit que le sirop de karabé peut être remplacé par le 
sirop de pavot et un aromate indigène quelconque. ] 

C'est à tort que l'on a banni l'ortie de la matière médicale 
moderne. J'ai employé le suc d’ortie avec un/succès presque 
constant comme hémostatique dans l'hémoptysie et surtout 
dans les pertes utérines. Entre autres cas, je citerai le sui- 
vant : « La femme Sueur, âgée de trente-cing ans, d’un 
tempérament lymphatique, fui atteinte,au mois de juin 1843, 
d'une hémorrhagie utérine contre laquelle on avait depuis 
quinze jours employé inutilement divers moyens. La malade 
était dans l'épuisement ; le pouls était faible, la face déco- 
lorée, le moindre exercice impossible. Je lui fis prendre un 
verre (109 gram. environ) de suc d’ortie matin et soir. Dès 
le second jour, l'écoulement sanguin diminua de. moitié ; 
Je quairième jour, la perte était entièrement arrêtée. Cette 
malade prit chaçue matin pendant quinze jours, pour réta- 
blir ses forces , 4 onces (120 grammes) de bière de petite 
centaurée et de racine de tormentille. 

[On trouve dans les anciennes matières médicales que l'in- 
fusion et le suc d’ertie brülante, ont été conseillés contre 
les rhumatismes , la goutte, la gravelle, Ja petite vérole, la 
rougeole , les catarrhes chroniques , l'asthme humide, Ja 
pieurésie , etc. Gesner préconisait la racine d’ortie contre 
l'ictère, sans indiquer les variétés de cette maladie où elle 
convient : il faisait pilier une livre de racine et un scrupule 
de safran avec une suffisante quantité de vin blanc, de ma- 
nière à en extraire le suc qu'il administrait à Ja dose de 
4 onces le matin, pendant quatre ou cinq jours : il faisait 
ensuite couvrir Je malade pour provoquer la sueur. Le 

Parmi les modernes , Ia graine d’ortie brûlante, suspectée 


343 


par les uns d'être vénéneuse, est regardée par Îes autres 
comme emménagogue , purgative, diurétique, vermifuge et 
même fébrifuge. « Ses semences, ainsi que celles de l'urtica 
dioïca, exigent, dit Bulliard (owv. cit., p.377), des précau- 
tions dans l'emploi. » 

J'ai vu employer et réussir quelquefois, contre l'inconti- 
nence nocturne d'urine , chez les enfants, un remède popu- 
Jaire ainsi composé : Semence d'ortie pilée, 46 grammes ; 
farine de seigle , 60 grammes ; mêlez, et faites , avec un peu 
d’eau chaude ou froide et du miel, une pâte dont vous for- 
merez six petits gâteaux que vous ferez cuire au four ou au 
foyer, sur une pierre plate. On fait manger un de ces gâteaux 
tous les soirs pendant huit, quinze ou vingt jours (4). 

Zanetti, médecin à l’armée d'Italie { Extrait d’une lettre 
insérce dans l’Ami des Arts, 17 Nov. 1796). assure avoir 
employé les fleurs de la grande et de la petite ortie en sub- 
siance, infusées dans le vin, contre les fièvres intermittentes 
tierces, double-tierces , quartes , et même contre la fièvre 
pernicieuse. Le succès , dit ce médecin, était souvent plus 
prompt qu'avec l'écorce du Pérou.On ne doit jamais dépasser 
la dose de 4 grammes répétée deux ou trois fois par jour. Ce 
remède, suivant ce même médecin, est très-propre à relever 
les forces dans l'épuisement qui caractérise la fièvre perni- 
cieuse. Il exige les mêmes précautions dans son administra- 
tration que le quinquina , et ne doit être donné ni dans la 
diathèse inflammatoire, ni dans les obstructions opiniâtres ; 
enfin, d'après des expériences réitérées de Zaneiti, il l'em- 
porte sur l'écorce du Pérou, soit comme tonique, soit comme 
fébrifuge. Il est à désirer que de nouveaux essais viennent 
justifier de tels éloges. 

Le suc et ia décoction d’ortie ont été employés en garga- 
risme ou en collutoire dans l'angine, la sitomacace, l'engor- 
gement des gencives , etc. On fait, avec les feuilles de cette 
plante , cuites et réduites en bouillie, des cataplasmes réso- 
lutifs et détersifs pour appliquer sur les tumeurs Iympha- 
tiques et les ulcères de mauvais caractère. Les mêmes. 


(1) M. le docteur Morand a trouvé dans la belladoneun moyen beau- 
coup plus certain que tous ceux que l’on a proposé jusqu'à ce jour contre 
l'incontinence nocturne d'urine (voyez p.48). Employée depuis par plu- 
sieurs médecins et notamment par M. Bretonneau, la belladone a presque 
toujours réussi. Je l'ai moi-même mise en u:age l'année dernière chez 
deux petites filles qui étaient atteintes de cette affection et qui en ont été 
débarrassées , l’une au bout de quinze à vingt jours, l'autre après Le 
vingt-cinquièmé jour de traitement. | 


344 


feuilles , pilées avec un peu de sel, sont efficaces contre Ia 
gangrène et les ulcères putrides ou sordides. ] 

Je ne l'ai jamais mise en usage dans ces affections ; mais 
je l'ai vu employer avec avantage dans la chirurgie vétéri- 
naire pour satisfaire à ces diverses indications , et surtout 
comme résolutive et détersive, en cataplasme. 

Tout le monde sait qu'on se sert de l'ortie pour produire 
sur la peau l’urtication dans quelques maladies ( apoplexie, 
léthargie, répercussions exanthémateuses,rhumatismes chro- 
niques, paralysie, anaphrodysie , choléra asiatique, etc. (1). 

J'ai vu des payans arrêter l'hémorrhagie nazale en intro- 
duisant dans les narines le suc d’ortie au moyen de coton 
imbibé de ce suc. Peut-être le tamponnement était-il ici le 
véritable hémostatique (2). 

D'après tout ce que nous venons de rapporter sur l’ortie, 
n'a-t-on pas lieu de s'étonner que Cullen , Peyrilhe, Alibert 
et plusieurs autres médecins aient exclu cette plante de la 
liste des médicaments ?.. Quand, parfois, la science, outre- 
passant le doute philosophique, tombe dans le scepticisme, 
elle a ses préjugés comme l'ignorance et la crédulité. Îl ne 
faut ni admettre, ni rejeter les choses qu'après les avoir 
examinés attentivement et sans prévention. On se laisse 
trop souvent influencer par l'autorité d'un grand nom. 
L'observation et l'expérience, n’ayant que la raison pour 
guide et la vérité pour but, doivent faire également justice 
de l'erreur, de quelque part qu’elle vienne. 


— ——— — 


ORTIE BLANCHE. 


Lamium vulgare aibum (T.) 
Lamium a!bum (L.) 


L'ortie blanche , qui n’est pas de la famille des orties , est 
très-commune, et se trouve principalement le long des haies. 
Les fleurs et les feuilles sont usitées. 


(1) Le prurit, la cuisson et la douleur qu'on ésrouve en touchant des 
orties, ou en frappant une partie avec cette plante verte { urtication }, est 
causé par un suc àâcre, irritant et caustique contenu dans une petite vési- 
cule située et adhérente à la base de poils raides , minces et aigus, dont 
les feuilles sont hérissées sur toutes leurs faces. Lorsque la pointe de ces 
aiguitlons pénètre dans la peau , la vésicule qui lui sert de base est com- 
primée , le fluide qu'elle contient traverse ces aiguillons , qui l'insiuuent 
ainsi dans [a peau. 


(2) Pepuis, j'ai vu ee suc arrêter seul l'hémerrkagie. 


349 


Propriéies. 


Cette plante est tonique et astringente. On l'a employée 
contre les diarrhées, les hémorrhagies passives, et surtout 
contre la leucorrhée atonique. Elle est, dans cette dernière 
maladie, d’un usage vulgaire. 

Le docteur Consbruch assure {Journ. d'Hufeland, t. 27, 
1818) n'avoir rien trouvé de plus utile dans les fieurs blan- 
ches que les fleurs sèches d’ortie morte ou ortie blanche, 
dont il fait prendre une infusion saturée (8 ou 16 grammes 
pour 750 gram. d’eau bouillante) trois fois par jour, à ia 
dose de deux tasses chaque fois, en continuant trois ou 
quatre semaines. Il assure que cette plante, oubliée des mé- 
decins et bannie des pharmacies, lui a réussi dans des cas 
où il avait employé inutilement des médicaments en appa- 
rerce très-énergiques. On préfère les coroiles mondées de 
leur calice aux parties herbacées. 

L'ORTtE JAUNE, espèce de labiée (galeopsis galeodolon L.), 
paraît, par ses rapports naturels, avoir les mêmes propriétés 
que l’ortie blanche. 

L'OrTIE PUANTE, labiée qui appartient au séachis (L.), 
passait autrefois pour vulnéraire. Les campagnards, dans 
quelques cantons, se servent de ses feuilles macérées dans 
l'huile, en topique sur les brûlures. 


CSEILLE COMMUNE. 
SURELLE, VINETTE. 


Acetosa rotundifo'ia, hortensis (T.) 
Rumezx acetosa (L) 


Tout le monde connait l’oseille cultivée dans les jardins 
poitagers , ainsi que Ja petite oseille sauvage ou surelle. On 
. emploie les racines, les feuilles et les semences. 


Éropriciés, 


L'oseille est acidule, tempérante, diurétique et anti- 
scorbutiqu *. Elle est fréquemment employée dans les affec- 
tions bilieuses, inflammatoires, les embarras gastriques, et 
pour faciliter l’action des purgatifs. On la donne en décoc- 
Uon, ou on Ja met dans le bouillon de veau ou de pouiet, etc. 

Les racines d’oseille entrent dans les tisanes rafraîchis- 
sanies et diurétiques. | | 


J'ai vu au village de Vieille-Église, où les fièvres inter- 


3460 


mittenies sont endémiques, des cultivateurs traiter ces fièvres 
en prenant, au moment de l'accès, un grand verre (150 à 
200 gram.) de suc d’oseille. L'accès manque souvent après 
Ja première prise de ce remède. C'est surtout dans les fièvres 
tierces printannières, qui guériscent souvent d'elles-mêmes, 
que l’on emploie le suc d’oseiile. L’oscille sauvage est pré- 
férée lorsqu'on peut se la procurer. 

[M. Urban, médecin à Iles-sur-Suippe (Marne), administre 
le jus d'oseilledepuis plus de quarante ans contre les fièvres 
intermittentes, à la dose de trois verres, pendant l'apprexie. 
Quelquefois il en donne un autre verre une heure avant 
accès ; maïs il commence par préparer ses malades à f’ac- 
tion du remède par l'administration d’un vomitif et d'un 
purgatif, ainsi que par l'usage de: fumetcrre et de pissenlit 
(Journal de méd. ct de chirurg. prat., (.8, 1837, p. 278). 
J'emploie quelquefois, comme anthelmintique, le suc d'o- 
seille à défaut de citron ; je le mêle avec autant d'huile de 
lin, d'œillette, de noix ou d’elive, et j'y ajoute un peu de 
sucre. Les enfants prennent facilement ceiic mixture. 

Le sue d’oseille a été employé avantageusement dans le 
scorbut aigu et dans le purpura hemorrhagica, qui a avec 
cette dernière maladie là plus grande analogie. ] 

À l'extérieur, loseille est un maturatif vulgairement 
connu, et l'application de l'oseille sauvage sur les tumeurs 
scrofuleuses ulcérées produit un effet stimulant très-ayan- 
‘tageux. Ce moyen est recommandé par Pinel. 


PAQUERETTE, 
PETITE MARGUERITE. 
Beliis minor (T.)—Bellis perennis (L } 


La petite marguerite, qu'on trouve en fieur pendant toute 
la belle saison, est très-commune dans les prés, sur les 
pelouses, eic. 


Propriéies. 


Cette plante, dont la saveur n’est que légèrement amère, 
et qui cependant a joui autrefois d’une grande réputation, 
est aujourd'hui rayée de la matière médicale. Les anciens 
thérapeutistes l'ont vantée contre les affeciions strumeuses, 
la phthisie pulmonaire. les douleurs goutteuses et rhumatis- 
males, les obstructions des viscères du bas-ventre et l'hydro- 
pisie. Mais c’eit surtout comme un des meilleurs vulnéraires 
qu’on l'a préconisée, et que Cornuti {Canadens. plantar. 


347 


hist. 1635 ) la considérait, sous ce rapport, comme une des 
plantes les plus précieuses. Le vin blanc dans lequel on a 
fait macérer la plante fraîche (2 poignées par litre) dont on 
prend un verre chaque matin, est encore vulgairement em- 
ployé pour dissiper les douleurs de tête suite de chutes, de 
coups, de commotions du cerveau, etc. On met aussi ce vin 
en üsage dans les douleurs rhumatismales, l'hydropisie, la 
gravelle, les engorgements viscéraux , etc. 

J'ai vu des paysants employer la décoction chaude de cetie 
plante fraîche pour faire avorter la pleurésie. Comme alors on 
secouvre beaucoup, afin äe provoquerlasueur, peut-être l’eau 
chaude prise abondamment produirait-elle ie même effet. 

Schroeder et Garidel s'accordent à dire que le suc de 
paquerette , à la dose de # onces, che le ventre. D’autres 
auteurs assurent que la décoction des fleurs ou des feuilles 
et des racines est discussive , apéritive, diurétique et sudo- 
rifique. Murray ne croit pas à cette plante des propriétés 
bien actives. Pour moi, tout en lui refusant l'énergie qu’on 
lui a supposée, et que l’on peut, dans Ia plupart des ças, 
attribuer aux seuls efforts de la nature, j'attendrai que 
l'expérience ait prononcé définitivement avant de la rejeter 
comme entièrement dépourvue de propriétés. 

LA GRANDE MARGUERITE, FLEUR DE Saint-Jean ( Chry- 
santhemum leucanthemum L.), plante commune dans les 
prés, et que tout le monde connaît. D'une saveur un peu âcre 
et amère, elle était regardée comme apérilive, diurétique et 
dépurative ; mais comme beaucoup de plantes possèdent les 
mêmes propriétés à un plus haut degré, elle est tombée dans 
l'oubli. | 


| PARIÉTAIRE. 
HERBE DE KNOTRE - DAME , HERBE DE SAINTE - ANNE. 


Parietaria offcinarum (T.) 
Parietaria officinalis (L.) 


La pariétaire se trouve dans toute l’Europe, sur les ma- 
sures et sur les murailles humides. 


Préparaiions ei doses, 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 45 à 50 gram. par kilagram. d'eau” 
Eau distitlée (4 sur 2 d'eau ), de 59 à 4090 gram.conime véhicule 
de potion, ele. 
Sirop (4 sur 2 de sucre), de 59 à 109 gram. en potion. 
Sue exprimé, de 50 à 4060 grammes. 
A L’EXTÉRIEUR : en Cataplasmes, fomentations, etc, 


348 


Propricies. 

Elle passe pou émolliente, diurétique. On la met en usage 
dans les maladies des voies urinaires avec irritation : la né- 
phrite, la strangurie, la dysurie, la cystite, l'hydropisie, ete. 

A l'extérieur, on l'emploie en décoction et en cataplasme 
comme émolliente. 

Je n'ai fait mention de cette plante que parce qu'elle 
occupe une place usurpée dans la pharmacie moderne ; pour 
moi, je crois à sa complète inertie. La propriété émolliente 
même, qu’on lui suppose, est illusoire : Sr quid emollhiendo 
præstat, id justius aqueæ calidæ vehiculo tribues, dit judi- 
cieusement Murray. 


PARISETTE, 
HERBE A PARIS, RAISIN DE RENARD, ÉTRANGLE-LOUP. 


Herba paris (T.) 
Paris quadrifolia (L.) 


La pariseite vient spontanément dans toutes les forêts de 
l'Europe. On emploie les racines , l'herbe et les fruits. 


Proprieiése 


La parisetie est émétique, purgative, narcotique. On l’a 
conseillée dans Ia manie, les spasmes, la coqueluche, Fépi- 
lepsie. Les fruits de cette plante peuvent produire l'empoi- 
sonnement. 

La parisette a une codeur vircuse, narcotique. Tout 
annonce dans cette plante un médicament énergique et que 
les observateurs ne devraient pas laisser dans Foubli. L'ac- 
tion de ses fruits ét de ses feuilles sur l'organisme paraît * 
assez analogue à celle des narcotiques. Gilibert a éprouvé 
des anxiétés après avoir avalé deux baies mûres de parisette. 
J'ai répété cette expérience d’abord avec deux baies, ensuite 
avec trois. La première dose nr'a produit un léger sentiment 
de constriction à l'épigastre suivi de pesanteur de tête et de 
propension au sommeil; cet effet n’a duré qu'une demi- 
heure. La seconde dose, prise deux jours après. m'a fait 
éprouver les mêmes symptômes, mais plus prononcés et avec 
nausées , inquiétudes vagues , rougeur à la face, besoin de 
repos, et enfin effort de vomissement sans effet. Cel état n'a 
cessé complètement qu'au bout de deux heures, et n'a eu 
aucune autre suite qu'une irritation gastrique légère qui à 
duré deux jours. Je n'ai pas poussé plus loin ces essais. 


949 


Comment concilier ce que Vicat à observé avec ce que 
Gilibert et moi avons éprouvé par l'ingestion des baies de 
parisette ? Cet auteur parle de deux fous qui, dans l’espace 
de vingt jours, furent guéris par l'usage d'un gros (4 gram.) 
de graines de cette plante par jour (1). 

Il paraît que les feuilles sont moins dangercuses ; çar 
Bergius a donné un scrupule {4 gramme 20 centig.) de ces 
feuilles sèches, chaque soir, à un enfant de dix à douze ans 
atteint de toux convuisive, qui n'eut que quelques évacua- 
tions alvines suivies d'un sommeil paisible. 

Linné, et, après lui, Coste et Willemet, indiquent ja 
racine de parisette comme vomitif à double dose de l'ipé- 
cacuanha, c'est-à-dire de 2 gram. à 2 gram. 59 centigram. 
Gilibert l'indique à la dose de 24 à 30 grains (1 gramme 20 
cent. à 1 gram. 50 centig.) Le docteur Waïlkiers donna la 
racine de cette plante à la dose d'un gros {4 gram.), 1° à une 
fille de trente-cinq ans atteinte de fièvre intermittente quo- 
tidienne , laquelle vomit quatre fois ei fut débarrassée de la 
fièvre ; 2° à un homme de quarante-cinq ans, atteint de 
fièvre tierce au dixième jour de la maladie, qui eut trois 
vomissements abondants et qui fut également guéri de la 
fièvre; 3° à une jeune fille de dix-neuf ans atteinte de 
fièvre quotidienne, qui ne vomit point, mais qui eut cinq 
selles (Dessert. de Emet., Lovanii, 1781.). 

Vogel (Mat. med., p. 3) assure que la racine de parisette, 
à double dose, équivaut à l'ipécacuanba. 

On doit conclure de tous ces faits, que la parisette produit 
sur nos organes des effets divers selon la partie de la plante 
qu’on emploie, et surtout, selon les doses auxquelles elle est 
administrée. Narcotique et antispasmodique à dose altérante, 
elle devient vomitive et purgative à dose plus élevée. Dans 
le premier cas, elle reste en contact avec les organes diges- 
tifs, et transmet au système nerveux, par absorption ou au- 
trement , son action délétère ; dans le second, elle concentre 
toute cette action sur l’estomac et les intestins, en y déter- 
minant des contractions musculaires. 

Je me propose de me livrer à des essais thérapeutiques, 
afin de déterminer d’une manière précise les cas où la pari- 
selte peut être employée avec succès à dose altérante. La pro- 
priété présumée de cette plante contre l'empoisonnement 
par la noix vomique a besoin aussi d’être constatée par de 
nouvelles expériences. 


& @G) Ne peut-on pas attribuer, comme pour lop'um , l’innocuité d’une 
aose aussi élevée à l'exaltation du système nerveux de ces deux imaniaques ? 


300 


PASSERAGE, 


GRANDE PASSERAGE, PASSERAGE A LARGES FEUILLES. 


Lepidium latifolium (T.) 
Lepidium latifoïium (L.) 


La passerage croît aux lieux ombragés et humides. Toute 
la plante est usitée. 


Preparations ei doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion des feuilles, de 50 à 60 gram. par kilog. 
d'eau ou de vin, en 3 ou 4 prises. 
Sur, 60 à 120 grammes 
Décoction des racines , de 16 à 52 gram. par kiïlog. d'eau. 
Eau distillée (4 sur 1 d'eau), de 50 à 400 gram. en potion. 


A LEXTÉRIEUR : fomentatious , lotions , cataplasmes. 
Proprietles, 


Cette plante, d'une saveur âcre, pénétrante, poivrée, est 
stimulante, tonique, antiscorbutique, résolutive, rubéfante. 
On l'emploie à l’imérieur contre le scorbut comme le eres- 
son , le cochléaria , Le raïifort. On l’a mise aussi en usage dans 
lhy pocondrie , l hy stérie , l'hydropisie, les serofules, etc. 


[ La passerage , quoique rarement employée, est d’une 
grande énergie. C’est un de nos antiscorbutiques les plus 
puissanis. On pourrait avec avantage la joindre au cresson 
de fontaine ou à la cardamine, soit pour être mangée en 
salade, soit pour servir à la préparation des sucs d’herbe. 

On reconnaissait autrefois à cette plante des propriétés 
diurétiques très-énergiques. Ses feuilles, réduises en poudre, 
étaient données avec succès dans l’hydrotherux et l'anasar- 
que , à la dose de 45 grammes chaque matin. 


A l'extérieur, la grande passerage est résolutive, détersive 
et excitante. On a employé le suc ou la décoction de cette 
plante dans la gale, les dartres et quelques autres maladies 
cutanées. Je lai vu employer dans les névralgies et les rhu- 
matismes comme rubéfiante. 

Les anciens appliquaient contre la sciatique Ja racine de 
passerage fraîchement récoltée et pilée avec du beurre. Ce 
mélange restait sur tout le membre et particulièrement sur la 
cuisse pendant quatre heures. On mettait ensuite l'extrémité 
malade dans le baïn ; on la frictionnait avec du vin, on l’es- 
suyait et on l enveloppait de flanelle. La rubéfaction de la 
peau était le résultat de cette application. 


39! 


La PETITE PASSEPRAGE, PASSERAGE IBÉRIDE, CHASSERACGE, 
NaAsiTORT SAUVAGE | Lepidium iberis L.), et la Passerace Des 
DÉCOMBRES, CRESSON DES RUINES | Lepidium ruderale, LE.) 
jouissent des mêmes propriétés que là grande passerage. En 
Espagne, suivant Peyrilhe , on joint souvent l'infusion de la 
passerage ibéride au quinquina, et 1 on donne l'un et l'autre 
avant l’accès dans les fièvres intermittentes. 

Le bas peuple, en Russie, au rapport du docteur Rubi}, 
médecin de l’empereur, se sert de l’infusion théïforme de Ia 
passerage des décombres , appelée di koy kress, qu'on admi- 
nistre pendant le froid des fièvres intermittentes. 

En 1812, il régna beaucoup de fièvres intermittentes, et la 
cherté du quinquina fit employer cette plante. Les docteurs 
Ruth, Ritisneisier, Trinius et Blum s’en servirent. L’herbe 
entière avait été recueillie au mois de juin et de juillet de 
l’année précédente, et l’on en faisait bouillir une demi-once 
dans une livre d’eau que l'on réduisait à huit onces. Les 
malades attaqués de la fièvre tierce ou quotidienne en pre- 
paient , pendant l'intermission , deux cuillerées à bouche de 
deux keures en deux heures. De quarante qui prirent ce 
médicament , il n’y en eut que deux qui ne furent pas guéris, 
quoiqu’on eût employé ce remède sans la moindre prépara- 
tion. Son usage, pendant une seule intermission, sufisait 
déjà pour empêcher les accès. Hahnemann croit que cette 
plante est l’iberis des anciens, qui en connaissaient déjà 
l'utilité ({ Extrait du Bulletin de la Société med. d'éemulat., 
mnt le Journ. de Méd., oct. 1815, vol. 84, p. 289.) 

« Le professeur Williams, medecin à lhôpital Saint- 
Te a constaté les bons effets de cette plante (lepidium 
iberis ou iberis amara) contre l'asthme, la bronchite, ’hy- 
dropisie, et surtout l'hypertrophie du cœur. Elle ne diminue 
pas le nombre des pulsations comme la digitale; mais elle 
modère leur violence, ce qui la rend très-recommandable 
dans l’hypertrophie avec hydropisie. Un autre médecin 
anglais, le docteur Sylvestre, lui attribue des propriétés spé- 
cifiques analogues à celle de la digitale et de Ia betladone ; 
il la considère également comme un des moyens les plus 
propres à régulariser les battements du cœur. Ces deux 
, praticiens prescrivent l'ibéris amara en poudre , associée à 
la crême de tartre, dans le but de dissimuler son goût nau- 
séeux, et en même temps de faciliter sa trituration. Elle 
détermine quelquefois des nausées, des étourdissements et 
de la diarrhée ; mais on fait rapidement cesser ces accidents 
en suspendant son emploi pour quelques jours... Il yaurait 
donc utilité à se livrer à de nouveaux essais sur les propriétés 


392 
de la passerage, qui à été rayée, on ne sait trop pourquoi, 
de la liste des médicaments, après y avoir figuré avec hon- 
neur pendant vingt siècles. » (Journ. des conn. méd. chi- 
rurg., mars 1849, p. 114% ct 115.) 


La PASSERAGE CRESSON ALÉNOIS, CRESSON DES JARDINS, 
Nasirorr {Lepidium sativum L.), qui croît naturellement 
dans les lieux stériles, et que l’on cultive dans les jardins 
potagers , est d'une saveur chaude, un peu âcre, piquante et 
très-agréable. On la mêle, comme l’estragon et la capucine, 
à la salade de laïtue pour en relever le goût. Elle est anti- 
scorbutique comme le cresson de fontaine, et peut, comme 
ce dernier, être mangée crue ou administrée en décoction 
où mieux sous forme de suc ou en infusion vineuse. Cette 
plante a été employée avec avantage dans certaines affec- 
tions atoniqhes, telles que l'hydropisie , la dyscrasie qui suit 
Jes fièvres intermittentes , l'engorgement chronique des vis- 
cères abdominaux quand un état phlegmasique douloureux 
ne s’y joint pas. J’ai fait disparaître en peu de jours une 
anasarquecausée par une suppression de transpiration, sur- 
venue chez un ouvrier de cinquante ans après un sommeil 
de deux heures sur Fherbe humide , en lui faisant prendre 
le suc de cresson alénois dans le vin blanc, à la dose de 100 
grammes matin el soir. 

Le docteur Roques rapporte que, sous forme de salade, 
les feuilles de cette plante, avec le cresson de fontaine et la 
chicorée sauvage, ont dissipé une affection scorbutique 
rebelle jusqu'alors à des moyens plus compliqués. Le malade 
éprouvait des douleurs musculaires qui simulaient le rhu- 
matisme ; tâches d'un rouge livide sur la poitrine et aux 
extrémités supérieures, gencives molles et saignantes , fai- 
blesse générale, sentiment profond de tristesse. 

Ce malade prenait trois fois par jour une forte dose de 
cresson alénois , de cresson de fontaine et de chicorée sau- 
vage , Simplement assaisonnée avec quelques grains de sel 
eL un peu de vinaigre ; son principal repas consistait en quel- 
ques viandes rôties, en salade antiscorbutique et deux verres 
de vin de Bordeaux. Au bout de deux mois, ce régime fut 
suivi d'une guérison complète. 

Ambroise Paré { Petag., p.678 ) prescrit cette plante pilée 
ou frite dans l’axonge de porc sur la croûte laiteuse des en- 
fants. Il est prudent d'employer préalablement, dans ce cas, 
un traitement dépuratif convenable. La suppression subite 
de cette gourme peut amener des dangers , surtout lorsqu'il 
existe sur un organe principal comme le cerveau ou le 
poumon, une irritation prédisposante cLatiractive. 


« 


393 


Bodart (ouv.eit.) a proposé de substituerle cresson alénois 
à l'écorce de Winter, reconnue tonique et antiscorbutique. 
« Nous pouvons , dit ce médecin , très-bien nous dispenser 
de faire venir des îles du détroit de Magellan l'écorce de 
Winter, que les étrangers nous vendent à ja frontièré douze 
francs la livre. L’importation de cette drogue, en 1806, a été 
de 1652 kilog. Nous eussions donc évité, relativement à ce 
seul médicament, l’émission de plus de 39,646 liv. argent 
de France si nous nous fussions contentés de nos antiscor- 
butiques indigènes. » 

Les passerages, comme toutes les plantes du même genre, 
n'ont une grande énergie qu'à l’état frais. La germination 
du nasitort est si prompte que l’on peut se procurer cette 
plante fraîche en tout temps et en tout lieu. Semée sur du 
coton ou de la laine imbibée d’eau, elle pousse comme en 
pleine terre, dans un appartement, même en hiver. J'en ai 
fait germer et croître au mois de janvier sur une planche re- 
couverte d'une couche légère de mousse entretenue humide. 


1: PATIENCE SAUVAGE, 


PARELLE , PATIENCE FRISÉE. 


Lapathum folio acuto erispo (T.) 
Rumex patientia crispus (L.) 


2 PATIENCE AQUATIQUE, 


PATIENCE D'EAU, PARELLE DES MARAIS, HERBE BRITANNIQUE, 
OSEILLE AQUATIQUE. 


Lapathum aquaticum , folio cubitali (T.) 
numezx aquatlicus (L.) 


Ces plantes, très-communes, se trouvent dans les prairies, 
les lieux aquatiques. La racine et les feuilles sonr employées. 
Préparations et doses. 

A L'INTÉRIEUR : Décoction, de 50 à 60 gram. par kilog. d’eau. 
Suc exprimé des feuilles, de 59 à 100 gram. 
Extrait, de 4 à 4 grammes. 
A L'EXTÉRIEUR : Pulpe des racines, en cataplasmes, décoctions, 
lotions, etc. | 
Propriétés. 
_ La racine de patience est tonique , diaphorétique, dépu- 
ralive et même purgative à haute dose. On l’emploie dans les 
23 


le 1:65 MES 


394 


maladies de Ex peau, l'ictère, les obstructions des viseères 
abdominaux , le rhumatisme, la syphilis et les affections 
atoniques du canal digestif. | 

La patience sauvage est plus active que la patience aqua- 
lique; en décoction très-rapprochée | 60 grammes pour 
1/2 kilog. d'eau), édulcorée avec un peu de miel, elle est 
laxative. Les gens de la campagne font un remède universel 
de la patience, qu’ils emploient,comme on dit vulgairement, 
à toutes sauces ; ils ne font point de tisanes sans y faire 
entrer la racine de cette plante, qu’ils considèrent comme 
propres à purifier le sang. 

La pulpe de racine de patience s'applique utilement sur 
les ulcères de mauvais caractère. Une forte décoction de 
cette racine sert en lotions pour le même usage, et, en outre, 
pour effacer les pustules, les lentilles, les furfuraces de la 
peau. Les paysans composent un Onguent pour Ja gale ainsi 
qu'il suit : Racines de patience bouillies dans du vinaigre 
jusqu’à ce qu’elles soient molles ; écrasez-les et passez par 
un tamis pour en avoir 16 grammes de pulpe ; mêlez dans 
un mortier avec graisse de porc 16 grammes, soufre pulvé- 
risé 16 grammes. 

[ La patience sauvage a été employée avec quelque avan- 
tage dans l’atonie des voies digestives et dans les engorge- 
ments froids des viscères abdominaux. Dès la plus haute 
anquité on l’a mise en usage contre les maladies de Ja peau ; 
Arétée la recommande contre l’éléphantiasis. Les modernes 
l'ont aussi vantée contre les darires, la teigne, la lèpre, la 
gale, etc. Cullen lui refuse toute espèce de vertu contre ces 
affections ; Alibert dit que, bien qu’elle ne suffise pas pour 
opérer le traitement de la gale, elle est néanmoins très-utile 
pour déterminer l’éruption à la peau : c’est lui reconnaitre 
une action sur le système dermoïde. 

Bodari et Wauters ont proposé de substituer la racine de 
patience aquatique à la salsepareille. L’intention de ces 
médecins est louable sans doute, mais leur opinion, à cet 
égard , ne saurait être admise. La racine de patience a ses 
principes constituants et des propriétés qui n'offrent, avec 
ceux de la salsepareille, qu’une faible analogie. «Les ulcères 
aux jambes, le scorbut, les éruptions cutanées et les fièvres 
intermittentes sont, dit Wauters, quatre maladies auxquelles 
les habitants peu aisés des pays marécageux sont sujets ; ils 
trouvent sous la main un remède très-approprié à ces maux 
dans la patience sauvage qu’on trouve en abondance dans 
les fossés, Le long des ruisseaux et dans les eaux stagnantes. » 

Munting , professeur à Groningue, dans une production 


399 


indigeste (de verd antiquorum herbä Britannica et ejusden 
efficacri contrà stomachacen, ete. Dissert. historico-méd., 
Amstel. 1681) considère, dans son enthousiasme, l'herbe 
britannique, seule ou associée aux autres antiscorbutiques, 
comme plus précieuse que l'or. Il assure avoir guéri, avec la 
décoction concentrée de cette plante le scorbut et les mala- 
dies qui en dépendent; la paralysie, l’hydropisie commen- 
çante, l'esquinancie, la pleurésie, la dysenterie, la diarrhée, 
les hémorroïdes, etc. Cette décoction doit être faite, en été, 
avec une poignée de feuilles et 4 onces de racines ; en hiver 
avec 6 onces de racines, 2 gros de réglisse, 1 gros de gin- 
gembre, 4 onces de sucre et 4 livres de bon vin : coupez et 
pilez grossièrement le tout ; faites tremper pendant une nuit 
dans le vin à vase clos ; faites bouillir au bain-marie, à petit 
feu , jusqu'à la consomption du tiers du vin ou pendant une 
heure et demie ; passez ensuite par un linge et conservez la 
colature dans une bouteille bien bouchée. La dose est de 3 
onces le matin à jeun, durant quinze jours. Munting faisait 
appliquer sur les ulcères, une fois chaque jour, les feuilles 
vertes pilées, ou bien le suc exprimé de toute la plante, 
épaissi à petit feu, en consistance de miel. 

Wauters (op. cil., p.65), ayant souvent prescrit la racine 
de patience comme dépurative, le hasard lui fit découvrir 
qu'elle était vomitive à la dose de 4 gram. en poudre. Afin de 
rendre son effet plus certain, il faisait prendre par-dessus et 
peu à peu une décoction d’une poignée de feuilles de vince- 
loxicum ou dompte-venin. Plus tard, Wauters vit dans un 
manuscrit laissé par le docteur Michaux, professeur de 
botanique à Louvain, que ce dernier avait depuis longtemps 
découvert et constaté par de nombreux faits la propriété 
vomilive de la racine de patience pulvérisée. | 

La patience sauvage et la patience aquatique ne sont pas 
dépourvues de propriétés ; mais elles sont loin de posséder 
celles qu'on s’est plu à leur accorder. Leur usage m’a paru 
utile dans la cachexie et les engorgements viscéraux qui 
suivent les fièvres intermittentes. Je les ai aussi employées 
avec avantage seules ou associées à la racine de bardane , à la 
faumeterre ou à la sapenaire , dans les affections dartreuses, 
surtout chez les individus lymphatiques. 


LA PATIENCE CULTIVÉE (Rumex patientia L.) jouit des 
mêmes propriétés que les deux espèces dont nous venons de 
parler. La décoction de ses racines, qui est rouge, se com - 
munique aux excréments si l’on en croit Lamarck, et simule 
parfois le flux de sang ; il est bon que le praticien soit averti 
de cette particularité. ] 


Q 


396 


PAVOT , * 


PAVOT DES JARDINS, PAVOT BLANC, PAVOT SOMNIFÈRE. 


Papaver hoïtense semine albo (T.) 
Papaver somniferum (L) 


Le pavot blanc, généralement connu, originaire de l’Asie, 
croît spontanément dans l’Europe méridionale, et est cultivé 
dans nos jardins pour l'usage pharmaceutique. On le cultive 
en grand dans les champs en Allemagne, en Flandre, dans 
les départements du Nord et du Pas-de-Calais,en Alsace, etc., 
pour extraire des semences une huile connue dans le com- 
merce sous le nom d'huile d’œillet ou d’œillette. 

Dans nos départements méridionaux on cultive dans la 
campagne le pavot blanc à grosse tête oblongue pour l’usage 
médical. Les capsules, recueillies un peu avant la maturité, 
séchées à l'ombre et mises en caisse, se vendent comme 
têtes de pavot blanc du Levant. 

Les fleurs, les capsules ou têtes, et les graines de pavot, 
sont usitées. 


Fréparations et doses. 


À L'ISTÉRIRUR : Décoction ou infusion des capsules, de 2 à 50 gram. 
pour 500 grammes d'eau. 

Extrait alcoolique (1 de capsule sur 4 d'alcool à 22°) de 45 à 20 
centigram. (équivalant à celle de 25 milligram. à 5 centigram. 
d'extrait aqgueux d'opium.) | 

Sirop (sirop diacoûe — 14 d'extrait sur 8 d'eau et 100 de sirop 
bouillant } , de 45 à 60 grammes.) 

Huile des Graines (huile d'æilleite ), de 30 à 100 gram., comme 
adoucissante et laxative. 

A L'EXTÉRIEUR : Décoction, pour lavements, lotions, fomentations, 
cataplasmes, etc. | 

Buile d'œillette, de 60 à 100 gram.pour lavements, liniments, etc. 


Propriétes. 


La capsule du pavot, contenant en moindre quantité les 
mêmes principes que l’opium, jouit à un plus faible degré 
des mêmes propriétés, et est employée dans les mêmes cas 
que ce dernier. Mais son action est plus incertaine que celle 
del’opium,etilestdifficile d'établir avec certitude des rapports 
de thérapeutique entre eux. à cause des variations qui seren- 
contrent dans Ja composition des têtes de pavot suivant le 
climat où la plante est venue [les pavots du Midi contenant 


LI 


| 337 
plus de principes actifs que ceux du Nord), l'époque de leur 
récolte, la température plus ou moins élevée qui à régné, 
les soins apportés à leur dessiccation, etc. 

Je donne à l’intérieur l’infusion de têtes de pavot sèches 
à la dose de 2 à 6 gram. pour 500 gram. d'eau. J'augmente 
cette dose selon les effets produits. Cette infusion miellée 
ou sucrée est calmante, et convient, prise par demi-tasses, 
dans les affections catarrhales , les toux nerveuses, les irri- 
tations intestinales , les diarrhées, la dysenterie, les vomis- 
sements spasmodiques, les fièvres intermittentes et érup- 
tives , les douleurs du cancer, la blennorrhagie, le catarrhe 
utérin , etc. 

Il est prudent de n’administrer d'abord les préparations 
de têtes de pavot à l’intérieur qu'à petites doses, que l'on 
augmente graduellement. Alors elles provoquent le sommeil, 
causent des rêvasseries, de la pesanteur de tête. A dose plus 
élevée , elles déterminent de l’assoupissement, des halluci- 
nations, de l’engorgement au cerveau. Il n’est pas rare de 
voir des accidents se développer, des symptômes de narco- 
tisme survenir à la suite de l’ingestion du sirop de pavot 
blanc ou de l'administration d’un lavement fait avec une 
seule capsule de cette plante. M. Petit a vu une sorte d’em- 
poisonnement par des têtes de pavot vertes, administrées de 
cette manière (Journ. de Chim.méd., t.1, p.4). Louvyer- 
Villermay a signalé plusieurs cas semblables à l'Académie 
de médecine. M. Rouxel, médecin à Boulogne-sur-mer, m'a 
cité un cas de narcotisme suivi de mort chez une dame, par 
l'effet d'un lavement préparé avec une seule tête de pavot 
blanc. J'ai vu un enfant de deux ans, jouissant de la meil- 
leure santé, succomber au narcotisme avec conges‘ion 
considérable au cerveau, à la suite de l'administration de 
12 à 15 grammes de sirop de pavot blanc, que la veuve 
d'un pharmacien avait donné au lieu de sirop de coquelicot, 
pour calmer une toux causée par la dentition. Les nourrices 
emploient quelquefois la décoction de tête de pavot dans le 
lait ou dans la bouillie des enfants pour les endormir. Wendt 
(Bullet. des Scienc. méd. de Ferussac, 182%, p. 148 et 231) 
a cité des exemples d'enfants empoisonnés par cette cou- 
pable manœuvre. J'en ai observé un cas à Saint-Pierre-lès- 
Calais, en 1818, chez un enfant de cinq mois, auquel on 
avait donné le soir de la décoction de tête de pavot dans le 


lait, et qui est mort dans la nuit même. J'ai vu des enfants | 


qui, ne pouvant plus dormir sans l’emploi journalier et pro- 
_gressivement augmenté de la décoction ou du sirop de pavot, 
étaient tombés, par l'altération des fonctions assimilatrices 


- 


et par une sorte d'intoxication lente, dans lamaigrissemenit 
et le marasme. 

Les inflammations internes, les fièvres continues, les ac- 
cidents de Ja dentition, contre-indiquent presque toujours 
l'usage du pavot. Quand on le donne dans ces cas, pour mo- 
dérer Ja douleur où calmer des Symptômes nerveux, il faut 
préalablement employer les émissions sanguines. De même 
que l’opium , il est nuisible dans les coliques ct les affections 

gastro-intestinales résultant d'une indigestion ou de laccu- 
mulation de matières saburrales dans l'estomac ou dans les 
intestins. On peut établir, comme règle générale, que le 
pavol ei ses pr éparations sont conire- indiqués chez les sujets 
disposés aux congestions célébrales, ou d’un tempérament 
sanguin, dans Îles réactions fébriles très-intenses, la cons- 
tipation, les sueurs excessives, et pendant qu'une évacua- 
tion critique s'opère. 

A l'extérieur, on emploie la décoction de tête de pavot en 
lavement dans les infiammations abdominales, les coliques 
nerveuses, pour calmer les douleurs ; en fomentation , en 
bain, en gargarisme, en cataplasme avec Ja farine de graine 
de Jin ou ja racine de guimauve, contre les inflammations 
externes. Le suc des feuilles de pavot, appliqué sur la piqüre 
des guêpes et des abeilles, fait cesser la douleur instanta- 
nement. 


Œuire D'ŒILLETTE. La semence de pavot n’est point nar- 
cotique : l'huile qu’on en tire peut remplacer l'huile d'olive. 
Dans Ie commerce du Nord, elle est souvent mélée en plus 
ou moins grande quantité à cette dernière. D'une belle cou- 
leur blonde et d’une saveur agréable, l'huile de pavot est, 
après l’huile d'olive fine, celle que l’on doit préférer pour 
l'usage alimentaire. Elle reste liquide à 10° et même 
à 45° au-dessous de zéro. 

Wauiers, dans une dissertation, en langue flamande, sur 
les huiles indigènes (Pruæelles, 1788 , p. 6), rapporte avoir 
prescrit plusieurs fois à une femme de la campagne, atteinte 
de constipation , 4 onces d'huile de semences de pavot faite 
par expression à froid, et avoir obtenu chaque fois deux 
ou (rois selles. Le ricin, que l’on cultive maintenant, en 
France, nous fournit une huile efficace, tant comme Jaxative 
que comme vérmifuge ; mais, à défaut de celle-ci, Phuile 
douce de moutarde, ‘celles d'æiilette’, defnavette ou°de in ; 
peuvent être employées. 

M. le docteur Dubois, de Tournay, a substitué l'huile 
d’œillette, dont la saveur est douce et qu'on trouve partout 


259 


à bon marché, à l'huile de foie de morue, dont le goût est 
désagréable et le prix très-élevé dans certaines localités. Ce 
médecin pense que la plupart des huiles, soit animales, soit 
végétales, jouissent des propriétés plus ou moins analogues 
à celle de foie de morue. Il ne croit pas que c’est à l’iode, 
que cette dernière contient, que l’on doit attribuer les pro- 
priétés dont elle jouit. « Autant vaudrait dire, s’écrie-1-il, 
qu'avec deux ou trois grains d'iode {l'huile de foie de morue 
en contient autant par litre) administrés en cinq ou six 
mois, on peut guérir les affections les plus rebelles, telles 
que le rachitisme ei les scrofules ! Si c’est à l'iode qu’on deit 
attribuer les propriétés médicales de l'huilede morue, alors 
à quoi bon recourir à une substance dégoütante, trois fois 
plus détestable à prendre, quand il s’agit d’administrer tout 
simplement une dose infiniment petite d’un médicament qui 
ne répugne à personne ? » {Annal. de la Société de med, de 
Gand, 1841.) 

L'auteur rapporte vingt-quatre observations détaillées 
dans lesquelles l'huile de pavot, donnée à la dose d'une à 
deux cuillerées à café matin et soir, et portée graduellement 
jusqu’à deux onces par jour, a été suivie d'heureux résultats. 
Les malades appartenaient tous à la classe indigente ; ïls 
habitaient des réduits obscurs, peu aérés, et se nourrissaient 
de mauvais aliments, circonstances qui prouvent plus claire- 
ment l'efficacité de l'huile d’œillette, et tendent à faire voir 
que c’est exclusivement à son usage qu’on doit attribuer les 
succès obtenus. 


OPrum INDIGÈNE. « Nous sommes persuadé, dit Bodart 
({ouv. cité), qu'il est possible d'extraire de l’opium des têtes 
de pavot cultivé en France, et surtout dans nos départements 
du Midi... La Calabre, certaines parties de Ftalie, la Tos- 
cane, où nous avons vu des champs entiers de pavots portant 
des têtes extrêmement grosses ; l'Espagne, le Portugal, les 
départements du Midi, et surtout celui de Vaucluse, de la 
Drôme, des Bouches-du-Rhône, sont les lieux où il convien- 
drait de renouveler les essais avec la précision convenable... 
Les expériences de Falk, à Stockholm ; d’Alston, à Edim- 
bourg, qui, dans l'espace d'une heure, recueillit un gros 
d'opium ; de Charas, de Dillen , de Haller, à Gottingue, de 
Tralies, en Silésie , doivent encourager à tenter de nouveaux 
essais pour obtenir un véritable opium indigène, soit par le 
choix du terrain ou du climat, soit par la manière de le pré- 

_parer et de ladministrer. » 
Le docteur Loiseleur - Deslonchamps a econelu d'expé- 


260 


riences nombreuses, faites avec autant de soin que d’exacti- 
tude, 1° que l’opium indigène retiré du suc qui s'écoule des 
têtes de pavot égalait en vertu l'opium gommeux et pouvait 
être donné aux mêmes doses ; 2° que l'extrait retiré du suc 
provenant de la contusion et de l’expression des têtes de 
pavot vertes et des pédoncules, doit être employé à double 
dose de l'opium gommeux ; 3° que l'extrait obtenu du suc 
vert des tiges et des feuilles du même pavot doit être employé 
à dose quadruple de l’extrait gommeux du commerce ; #° que 
l'extrait des têtes de pavot, obtenu par décoction, n’a pas 
plus de vertu que le précédent et exige une dépense double 
pour la manipulation ; 5° que l'extrait retiré par la décoction 
des têtes sèches offre le même inconvénient et est encore 
plus faible ; il en faut huit grains pour équivaloir à un grain 
d'extrait gommeux ; cependant on peut en préparer pour 
utiliser les têtes de pavot, qu’on jette après en avoir retiré la 
graine pour fabriquer l'huile d'œillet. 

« [1 paraît, d’après d'assez nombreuses expériences , que 
l’opium peut-être recueilli non-seulement en Algérie, mais 
encore en France. Que dans ce dernier pays il offre toutes 
les qualités de l’opium qui nous vient de l'Orient, et que 
même on trouve à l'analyse une plus grande quantité de 
morphine,ce qui tient sans doute à la falsification que l’opium 
exotique, comme tant d’autres substances subit avant d’être 
livré au commerce {1). 

« Nous avons vu, par une communication faite à l’Acadé- 
nie des Sciences , que M. Aubergier, qui habite l'Auvergne, 
cultive en grand le pavot et qu’il en retire une notable quan- 
tité d’opium. Pour diminuer les frais de main-d'œuvre, il a 
imaginé un instrument contenant quatre lames de canif qui 
font saillie d’un à deux millimètres au plus. C’est avec cet 
instrument qu'on pratique des incisions à la capsule, sans 
craindre de pénétrer dans son intérieur et de nuire ainsi au 
développement de la graine. Cette incision faite, au lieu de 
laisser le suc se concréter sur la capsule, M. Aubergier le 
récolte aussitôt, et le fait sécher à part. De cette manière, la 
main-d'œuvre est économisée des deux tiers, et le rende- 
ment est assez considérable. L’opium obtenu par M. Auber- 
gier est de bonne qualité, et l’indemnisera probablement des 
déboursés nécessités par ses expériences. » (Journ. de méd. 
et de chir. pratig., 1846 , p.376.) 

« La commission désignée par l'Académie avait désiré 


(1) M. Petit, pharmacien à Corbeil , a obtenu aussi de l’opium indigène 
du pavot d'Orient ( paparer orientale L.) cultivé en France. 


361 


que M. Aubergier fit constater les résultats obtenus à l'aide 
de ses procédés dans une journée de travail, par MM. les 
présidents et secrétaires de l’Académie de Clermont et des 
Sociétés d'agriculture et d’horiiculture de l'Auvergne. Ces 
. résultats sont consignés dans un procès-verbal, d’où il résulte 
que deux ouvrières recueillent, en moyenne, 910 gram. de 
suc laiteux , se réduisant à 30 p. °/, par la dessiccation ; le 
produit de la récolte serait de 273 gram. d’opium de bonne 
consistance par chaque couple d’ouvrières. 

« Le prix de la main-d'œuvre étant de 60 c. par chaque 
ouvrière, les frais de récolte de l'opium obtenu dans une 
journée s’élèveraient, par kilogramme, à 4 f. 38 c. L'une des 
ouvrières pratiquait les incisions, et l'autre enlevait le suc, 
qui s’écoulait quelques minutes après , au lieu de le laisser 
dessécher dans la capsule même, comme le pratiquent les 
orientaux. Cette expérience authentique ne laissera aucun 
doute sur la réalité des avantages que présente cette manière 
d'opérer. Elle a été faite sur des pavois provenant de semis 
d'automne. Nous avons applaudi et nous applaudissons 
encore à la noble persévérance de M. Aubergier. C’est ua 
bonheur pour nous que de pouvoir annoncer à la France 
qu’elle ne sera plus tributaire des nations étrangères, qu'elle 
récoltera sur son propre sol, ou sur le sol de son Algérie, un 
produit important , et que ce produit, de qualité meilleure, 
coûtera moins que lorsqu'il était importé. » (Revue scien- 


\ 


hfique.— Extrait par l'Abeille méd., 1846, p. 297.) 


OPIUM. 


L'opium , suc épaissi du papaver somniferum, doit être 
choisi sec, luisant, d’une couleur brune foncée, d'une odeur 
forte et vireuse, exempte d’'empyreume, d’une saveur amère 
et nauséabonde. 

Cette production est souvent falsifiée ; on la ramollit à 
une douce chaleur et on y ajoute des gommes-résines et des 
extraits de plantes inodores ; d’autres y mêlent de la terre, 
des débris végétaux, de la bouze de vache. Dans le premier 
cas , l’'opium est beaucoup plus noir; dans le second, la 
fraude se reconnaît par le plus simple examen: 

L’extrait du glaucium ou pavot cornu est quelquefois 
vendu pour l’opium {Voyez Pavot cornu, art. suivant.) 

On peut réduire les matériaux immédiats de l'opium à 
quatre substances, la morphine, la meconine, la narcotine: 


362 


et Fertracthif. Les opinions sont encore partagées sur les 
effets de chacune de ces substances : l’action de l’opium tient 
à leur réunion et à leur mode particulier de combinaison. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Poudre, de À à 45 centig. en pilules ou dans un 

liquide (rarement.) 

Ertrail théaique (opium gommeux }, de { à 40 cent. ( mieux en 
pilules qu'en solution.) 

Ertrait «lcoolique , comme l'extrait d'opium gommeux. 

Extrait Tineur, idem. 

Ertrait ac/tique |extr. d'opium de Lalouette, à peine usité), idem. 

Feinture alcolique d'opium brut, de 6 à 15 gouttes en potion. 

Peinture aqueuse d'extrait d'opium, idem. 

Elirir parégorique (teinture ammoniacale d'opium) , 50 centigr. 
à À gramme en potion. 

Fin d'oyium simple, de 6 à 24 gouttes en potion. 

Fin d'opium composé (laudanum liq. de Syÿdemham), de 42 à 50 
gouttes en potion. 

Fin d'opium par fermentation (laudanum, ou opium de Rousseau), 
49 à 45 centig. en potion. 

Sirop (5 centigr. d'extrait pour 50 gram.), de 45 à 50 gram. seul 
au en potion. 

Finaigre d'opium , de 5 à 45 gouttes en potion. 


A L'EXTÉRIEUR : Poudre, à la surface des cataplasmes, 

Solution aqueuse, pour lotionner les uleères et les chancres dou- 
loureux , etc. 

Solution d'extrait (#0 à GO centigram. par 50 gram. d'eau), pour 
fomentations. injections, collyre , ete. 

Feiature alccoläque : teinture d'extrait ; laudanum liquide de 
Sydenham.— En frictions, gargarismes, liniment ; en topique 
à la surface des cataplasmes. — Le laudanum liquide est appli- 
qué avec la barbe d'une plume sur la surface oculaire eontre 
les tâches de la cornée, les exaltations de sensibilité de l'œil, etc. 

Pommade (4 d'extrait sur 59 d'axonge), pour pansement des 
plaies , les excoriations ; en friction dans les névralgies , sur 
l'abdemen dans les affections spasmodiques et nerveuses des 
organes digestifs. : 

Suppositoire (comme pouvant remplacer les lavements calmants). 


Fropriéteés. 


L'opium est un narcotique violent. À grande dose, 1} pro- 
duit , peu après son ingestion, des nausées et quelquefois 
des vomissements , un état d'affaissement et de somnolence, 
et même le coma le plus profond , l'insensibilité à toute 
espèce de stimulation La face est pâle, la physionomie 
‘alme , les pupilles plus souvent contractées que dilatées, 
presque insensibles à la lumière ; la peau a sa chaleur natu- 


363 


relle et est même quelquefois froide ; le pouls est développé, 
plein, large, fort ou petit, serré et très-accéléré. Des mou- 
vements convulsifs ontiieu dans quelques parties du corps, 
ainsi que quelques tremblements passagers. Dans certains 
cas, et surtout chez les jeunes enfants , on observe des con- 
vulsions générales, des symptômes de congestion au cerveau 
manifestés par le gonfiement de la face et du cou, les yeux 
proéminents, fixes, immobiles, ecchymosés. La teinte 
bleuâtre de la peau , la tension et la dureté de l'abdomen. le 
relâchement des muscles du tronc et des membres , l'affai- 
blissement du pouls, la respiration interceptée, pénible, 
suspirieuse , stertoreuse ; l'expulsion de matières visqueuses 
par la bouche ei le nez, enfin le refroidissement , la pàleur, 
la mort, tels sont les symptômes qui complètent le tableau 
de l’empoisonnement par l’opium. 

Il s'écoule ordinairement de sept à douze heures entre le 
moment où le poison a été pris et celui où la mort a lieu. 
Un grand nombre de ceux qui survivent après douze heures 
se rétablissent, bien que l'on cite plusieurs cas fdevenus 
funestes après un temps plus long. Quelquefois aussi la mort 
arrive bien plus tôt, par exemple, en six, en'quaire et même 
en trois heures.—Parmi ces symptômes, les uns sontplus 
prononcés que les autres suivantles dispositions individuelles. 

Lorsque cet empoisonnement n’est pas suivi de mort, les 
symptômes diminuent graduellement après douze, vingt- 
quatre ou quarante-huir heures, et se terminent par une 
sueur générale et le rétablissement des excrétions suppri- 
mées. Le malade sort comme d'un rêve, et croit quelquefois 
que son sommeil n’a été que de courte durée. 

Après la mort, le corps se putréfie promptement ; il y a 
engorgement des vaisseaux cérébraux , les poumons sont 
rouges ou violacés , plus denses, plus serrés, plus gorgés de 
sang ; le cœur et les gros vaisseaux veineux sont pleins d'un 
sang noir. La membrane muqueuse de l’estomac et de l’in- 
iestin est quelquefois enffammée ; mais cette phlegmasie a 
pu être produite, du moins en partie, par quelques-uns des 
moyens employés pour combattre les symptômes de l’em- 
poisonnement, ou même n'avoir jamais existé qu’en appa- 
rence, l'injection passive survenue après Ia mort pouvant Ja 
simuler. Quelquefois on ne trouve aucune lésion sensible 
après Ja mort. à ta 

La quantité d’opium nécessaire pour faire naître l'appareil 
des symptômes de Jl'empoisonnement, est relative à l’âge, 
_àu tempérament, à l'idiosyncrasie du sujet, au genre de 
maladie dont il peut être affecté et à diverses autres cir- 


36% 


constances. Une très-pelile quantité de cette substance peut 
produire le narcotisme chez certains sujets, tandis que chez 
d’autres 25 centig. el plus, ne déterminent aucun symptôme 
grave. Ce que nous avons dit à cet égard du pavot indigène 
peut, à plus forte raison, s'appliquer à l'opium. Zacutus 
Luzitanus rapporte qu’un individu tourmenté d’une douleur 
d'oreille qui l’'empêchait de se livrer au sommeil, se mit, par 
le conseil d’un charlatan, un morceau d’opium dans l'oreille. 
Le malade dormit; mais il eut à son réveil quelques mou- 
vements convulsifs, devint fou, stupide, imbécile, et mourut 
bientôt après. Gaubius dit qu'un malade fut endormi et 
mourut pour avoir pris un lavement dans lequel on avait fait 
entrer 4 grains d’opium. Quarin a vu un seul grain d'opium 
ou 20 gouttes de laudanum liquide de Sydenham, donné 
dans un lavement, produire un malaise remarquable et un 
commencement de paralysie des extrémités inférieures. 
Monro cite un cas où un emplâtre opiacé, appliqué aux 
tempes, a rendu furieux et déterminé des spasmes dans la 
bouche. J'ai été témoin d’un état de somnolence qui a duré 
vingt-quatre heures, chez une dame qui s'était introduit dans 
une dent cariéeun peu de coton imbibé de laudanum liquide. 
Des accidents graves et même la mort ont souvent lieu chez 
les enfants et surtout chez les nouveaux-nés par la dose la 
plus légère d’opium ; il produit chez eux l’assoupissement, 
J'insensibilité et les convulsions. Chez les vieillards, l’opium, 
même en très-pelite quantité, favorise les congestions céré- 
brales ou anéantit promptement le principe vital déjà très- 
affaibli. J'ai vu le sirop diacode, donné le soir à la dose de 
30 grammes à un vieillard de soixante-dix-neuf ans, pour 
calmer la toux, causer promptement le narcatisme ei la mort. 

De hautes doses d'opium peuvent être supportées quand 
on y est arrivé par degrés et que l'habitude a produit l'émous- 
sement (1), ou lorsqu'un état morbide particulier l'exige. 
Dans ce dernier cas, les narcotiques sont d'autant plus faci- 
lement supportés et produisent d'autant moins d'effet que la 
douleur est plus vive, que le spasme est plus prononcé, que 
le système nerveux est plus exalté. L'administration de 


(1) On peut arriver progressivement à prendre des quantités considé- 
rables d'opium sans produire d'effets bien marqués. Garcias ( Hist. des 
drogues et épiceries, liv. I) cite le fait d’un individu qui en prenait tous les 
jours 40 gram. sans en être incommodé. On rapporte que certains malades 
ont pris plus de 40 kilog. d’opium dans le cours de leur maladie. Zeviani 
(in memoriæ di matematica e fisica di verona, t. FT) cite nn sujet qui en 
prit 400 kilog. dens l'espace de plus'eurs années, après être arrivé à en 
user 250 gram. par jour. 


369 


l’opium à grande dose dans le tétanos en est une preuve. Ou 
a donné dans celte affection jusqu'à 30 grammes, et même 
beaucoup plus, de laudanum liquide de Sydenham dans les 
vingt-quatre heures, sans produire H sédation du système 
nerveux. | | 

Un spasme local , avec éréthisme général, exaltation de 
la sensibilité, tension du système nerveux , peut diminuer 
considérablement l'effet de l’opium. Je citerai, à ce sujet, le 
fait suivant comme très-curieux sous le double rapport de 
l'effet relatif des narcotiques et du résultat thérapeutique qui 
en fut la conséquence : M. Moleux, propriétaire à Wierre- 
aux-Bois . âgé de cinquante-cinq ans, d’un tempérament 
sanguin, d'une forte constitution, livré au repos depuis quel- 
ques années, ayant eu, depuis vingt ans, deux attaques de 
goutte aux pieds, est pris le 10 décembre 1839, vers le soir, 
d’une strangurie qui dans la nuit même devient une réten- 
tion complète d'urine. 

Appelé le 11 au matin, je pratique une saignée de 700 gr.; 
je fais appliquer vingt-cinq sangsues au périnée et je prescris 
un bain tiède prolongé. Ces moyens n'amènent aucun chan- 
gement. Une seconde saignée, aussi copieuse que la pre- 
mière , pratiquée à onze heures du soir, calme l'agitation et 
l'anxiété, mais ne fait point cesser l’ischurie. L'introduction 
dela pommade de belladone dans le rectum , réitérée pen- 
dant la nuit, procure l'émission répétée de quelques gouttes 
d'urine et un peu de soulagement dû, sans doute, autant à 
l'espoir d’une amélioration prochaine , qu’à l’action du mé- 
dicament. | 

Le 12 au matin , les symptômes ont repris toute leur in- 
tensité, et le malade, pourtant, ne consent pas à l'opération 
du cathétérisme , à laquelle, d’ailleurs , je répugne toujours 
moi-même en pareil cas, en raison des difficultés qui tien- 
nent à la nature de l'affection et des accidents qui peuvent 
en résulter. Plusieurs lavements émollients n’ayant provoqué 
qu'une selle peu abondante, et l’état habituel de constipation 
me faisant soupçonner l'accumulation de matières fécales 
dans les intestins, je prescriwis 45 grammes d'huile de ricin 
méêlés avec 30 gram. de sirop de limon. En même temps 
j'ordonne, pour employer en frictions sur l’hypogastre et le 
périnée, un liniment composé de six grammes de laudanum 
liquide de Sydenham , de 2 gram. de teinture de belladone 
et de 40 gram. d'huile d'amandes douces. Obligé de m'ab- 
senter vers dix heures du matin pour un accouchement que 
la sage-femme qui me fait appeler considère comme dange- 
reux, je désigne soigneusement à la garde la mixture que 


366 


le malade doit avaler. et le liniment qui est destiné à l’usage 
externe. Je promets à M. Moleux, que je laisse à regret dans 
un état extrême d’agitation de corps et d'esprit, de revenir 
le plus tôt possible. 

Une heure environ après mon départ, on vient m’annoncer 
que le malade urine abondamment, qu’il est calme et par- 
faitement bien. Je ne le vois qu’à cinq heures et demie du 
soir. Je le trouve au lit, immobile et dans un état de som- 
nolence dont il ne sort un instant que pour répondre avec 
justesse aux questions que je lui adresse ; la respiration est 
facile ; le pouls, à 78 pulsations, est large, développé, mou ; 
la face est colorée, les conjonctives un peu injectées , les 
pupilles dilatées, la peau chaude et moite. IL y a eu écoule- 
ment abondant d'urine ; l’hypogastre est légèrement doulou- 
reux au toucher, mais souple , peu tuméfié. 

Les symptômes d’un narcotisme modéré, et qui n’a pas 
été plus prononcé, sont évidents. On s'aperçoit seulement 
alors, d'après mes questions, et je m'assure moi-même, que 
M. Moleux a avalé le liniment au lieu de la mixture laxative ! 
Mais comme, à mon grand étonnement, il n’en est résulté, 
pendant près de sept heures, que les suites que je viens de 
rapporter et que je regarde comme heureuses, eu égard à la 
cessation instantanée du spasme vésical, je m’abstiens de 
toute médication. Une abondante transpiration, qui dure 
toute la nuit, dissipe l’assoupissement. À mon arrivée, le 
lendemain 13 au matin, je trouve M. Moleux ayant seule- 
ment les pupilles dilatées , la vue un peu trouble, de la pro- 
pension au sommeil, mais, du reste, enchanté d’une cure 
aussi prompte qu’inespérée. 

Cette dose toxique de laudanum et de belladone, qui a 
guéri à l'instant même M. Moleux, l'aurait infailliblement 
empoisonné s’il avait été dans son état normal (r). La dépres- 
sion des forces circulatoires et de la vie organique par les 
émissions sanguines, d’une part, et la persistance du 
spasme local porté à un haut degré, avec exaltation de la 
vie nerveuse, d'autre part, ont fait d’un poison un remède 
énergique et prompt. 

L'action simultanée de l’opium et de la belladone, dont 
les effets sur l'organisme ne sont point identiques, n’a-t-elle 
pas pu aussi apporter quelque modification dans le résultat 
de leur ingestion ?.... Quoi qu'il en soit , il ressort du fait 


_— 


Cr) Depuis lors , M. Moleux ayant été atteint d’une bronchite , n'a eu 
besoin que de 24 gra. de sirop diacode, pris le soir, pour calmer la toux 
et provoquer le sommeil . 


307 


que je viens de rapporter cet enseignement : que dans beau- 
coup d’affections spasmodiques et de surexcilations ner- 
veuses , auxquelles on n’oppose, le plus souvent, qu'une 
médication timide, on retirerait de grands avantages de 
l’opium administré à doses rapprochées et progressivement 
augmentées. Dans ces cas, le médecin prudent ne confondra 
pas la hardiesse avec. la témérité ; semblable à un habile 
général, il saura attaquer avec vigueur et s’arrêler à propos. 

Comment agit l’opium ? Considéré comme agent thérapeu- 
tique, est-il exclusivement sédalif, narcotique, tonique ou 
excitant? L'opinion que l’opium agit uniquement en pro- 
duisant l’expansion du sang, a régné longtemps, et a été 
presque entièrement adoptée par Frédéric Hoffmann. Cullen 
rapportait tous les effets de ce médicament au système ner- 
veux. Brown le regardait comme le plus puissant stimulant 
de tout l’organisme : Opium, me herclè non sedat! s'écriaitil. 
Suivant cet auteur, la vive réaction qu'il provoque amène 
l'épuisement des forces, la /ablesse indirecte. Ainsi que 
Brown, l’école italienne considère l’opium comme hypers- 
thénisant, et l’asthénie apparente qu’il finit par produire 
comme résultant de l'oppression des forces. Suivant Wirten- 
sohn et M. Barbier, d'Amiens, ce médicament affaiblit la 
sensibilité, diminue la vitalité des organes, et s’il y a acti- 
vité de la circulation, fréquence et développement du pouls, 
congestion sanguine au cerveau, etc.,c'est parce que le sang, 
ne pouvant plus franchir les capillaires débilités, frappés de 
stupeur, reflue dans les vaisseaux, fait réagir le cœur 
qui, par des efforts redoublés, mais inutiles, le repousse 
vers ces mêmes capillaires, où il devient de plus en plus 
stagnant. Brachet, comme Cullen, attribue les effets de 
l’opium à la sédation exclusive du système nerveux. D'après 
Stahl et Bosquillon, cette substance est à la fois stimulante 
et sédative. Hufeland adopte et développe cette opinion ; il 
distingue dans l’opium l'effet sédauif et l'effet excitant, et la 
seule explication satisfaisante qu’on puisse donner, suivant 
lui , de sa manière d’agir, consiste à dire qu'il est une com- 
binaison particulière et intime d’un principe narcotique et 
d’un principe excitant , d’une substance qui agit d’une ma- 
nière spéciale sur le système nerveux, et d'une autre dont 
l'action porte particulièrement sur le système sanguin. 
« L'opium, dit ce célèbre médecin , appartient à Ia cathé- 
_gorie des médicaments dont le mode d'action ne peut point 
s'expliquer, comme celui des autres, par les idées reçues de 
stimulus , d'irritation, d’excitement ; semblable aux agents 
supérieurs de la nature , à la chaleur, à la lumière, à l’élec- 


368 Li 


tricité , il agit immédiatement sur la vitalité elle-même, et, 
sur tous les points , détermine des modifications et des ma- 
nifestations de cette vitalité, la pénètre et la remplit, avec 
cela de particulier qu’il exalte la sphère organico-végétative 
de la vie, le travail fondamental de la vie plastique, tandis 
qu’au contraire il déprime la sphère de la sensibilité. » 
(Man. de méd. pratiq., 2 édit., 1848, p. 610.) 

En effet, tout porte à croire que lopium, regardé à tort par 
Ja plupart des médecins comme irritant primitivement lesys - 
tème entier, et produisant les effets narcotiques comme 
conséquence de la surexcitation, est simultanément et puis- 
samment sédatif du système nerveux et excitant du 
système sanguin (1). 


À dose thérapeutique, les effets de l’opium sur l’économie 
sont les suivants : 


1° Sur le cerveau et le système nerveux, il émousse la 
sensibité, provoque le sommeil, calme la douleur et produit 
quelquefois des rêvasseries, des songes agréables ; appliqué 
localement il engourdit la partie, la rend insensible, fait 
cesser la douleur ou le spasme dont elle est atteinte. 

2e Sur le système circulatoire, il élève le pouls, qui de- 
vient plus plein, plus fort, avec légère accélération dans 
l’état de santé ; mais avec ralentissement et régularité S'il 
était accéléré auparavant par la débilité. La turgescence 
vitale, manifestée par l'expansion , la raréfaction du sang, 
est considérée par Hufeland comme un effet spécial de 
l'opium , et qui se fait remarquer même dans les cas de 
débilité extrême , d’anémie. Cet état constitue une pléthore 
artificielle qui produit, comme conséquence nécessaire , 
l'accroissement de la chaleur vitale. | 

3° Sur les surfaces exhalantes du tube digestif et des votes 
aériennes, il diminue la sécrétion de ces surfaces, en en- 
gourdissant les vaisseaux excréteurs, et donne ainsi lieu à 
la perversion des digestions, à la sécheresse de la gorge, 
à la soif, à la suspension ou à la suppression de l'expecto- 
ration, à la constipation. | 


(x) Cette opinion, fondée sur l'observation, n’est pas nouvelle. La pro- 
priété à la fois sédative et excitante de l'opiam, n’a pu échapper à l’admi- 
rable sagacité de Sydenham : Rudis enim sit oportet et parüm compertam 
habent hujus medicamenti vim, qui idem sopori conciliando, demulcendis 
doloribus , et diarrhææ sistendæ applicare tantüm novit, cm ad alia plu- 
rima, gladii instar Velphici, accommodari possit, et præstantissimum sit 
remedium, cardiacum unicum pené dixerim, quod in rerum naturà hactenus 
est repertum (Sydenh. opera univers, edit. tertia, Lond, MDCCF. p. 148 ) 


309 


4° Sur le systéme cutané et les vaisseaux capillaires, 4 
produit, d’une part, en raison de l'activité artérielle, lac- 
croissement du mouvement vers la périphérie, et, de l'autre, 
par l'effet sédatif, la cessation du spasme de la peau, le 
relächement des orifices vasculaires ; de là, l'augmentation 
de la perspiration, la diaphorèse , l’éruption miliaire , les 
aphies. em 

5° Sur l'appareil génito-urinaire, il stimule l'action des 
organes qui Composent cet appareil, produit des rêves vo- 
luptueux, des érections, des éjaculations. Favorise-t-il la 
sécrétion urinaire ou ne fait-il qu’exciter Ja vessie, qui se 
débarrasse alors de l'urine qu'elle contient ? 

Tels sont les effets de la médication opiacée ; ils sont tels, 
que l’un est inséparable de l’autre, et que le médecin ne 
saurait les obtenir isolément. Toutefois, ils n’ont pas une 
égale constance. La propriété narcotique, qui est la plus 
remarquable , ne se manifeste pas toujours ; certains sujets, 
au lieu d'éprouver un effet sédatif, sont surexcilés par 
l'opium , tandis que chez d’autres, ainsi que nous l'avons 
déjà fait remarquer , il détermine , à très-petites doces, un 
narcotisme profond. Il produit parfois des vomissements 
violents, sans autre effet, ou un délire qui peut aller jusqu'à 
la fureur. J'ai rencontré des femmes chez lesquelles il fai- 
sait naître des symptômes d’hystérie. Ces effets exception- 
nels, qui attestent, tantôt une réaction vive et anomale, 
tantôt un systême nerveux très-facile à déprimer, sont tout- 
à-fait idiosyncrasiques , et n'infirment en rien ce que nous 
avons dit de l’action ordinaire de l’'opium. 

De cette action bien appréciée découlent les indications 
et les contre-indications de l'emploi thérapeutique de ce mé- 
dicament. Exposons à ce sujet quelques préceptes généraux. 


L'opium est indiqué : 


4° Dans l’état morbide dit nerveux ou spasmodique,pourvu 
qu'avec l'exaltation de la sensibilité il y ait en même temps 
diminution de l'énergie du systême sanguin. Plus ce dés- 
accord est prononcé, plus l’opium convient. 

En conséquence , il est toujours donné avec succès dans 
les cas qui en réclament l'emploi, lorsque des pertes abon- 
dantes d’humeurs ou des émissions sanguines ont préala- 
blement amené l’affaiblissement de la vie organique. 

% Dans les douleurs, dont ilestle spécifique, surtout 

quand elles sont essentiellement nerveuses, comme dans Îles 

névralgies, la gastralgie, la colique, etc. La douleur qui tient 

à toute autre irritation ou à l’inflammation , En sûre- 
24 


370 


ment dissipée par ce médicament, à moins qu'elle ne persiste 
après un traitement antiphlogistique. 

3° Dans l’insomnie , dont il est le remède spécial, quand 
elle est exclusivement nerveuse ; il serait nuisible dans 
l'insomnie causée par une irritation inflammatoire : il pro- 
duirait alors des troubles, de l'anxiété, de la stase ou des 
congestions sanguines: 

L'opium est contre-indiqué : 

4° Dans la pléthore et l’état inflammatoire ou les inflam- 
mations , surtout quand les émissions sanguines n’ont pas 
äé préalablement et suffisamment employées. Il augmente 
l'irritation phlegmasiques et porte le sang à la tête. Ainsi, le 
début des fièvres étant toujours un mouvement de réaction 
inflammatoire, on devra, dans ce cas, s’en abstenir, de 
même que dans le cours de toute maladie fébrile où l'angio- 
iénie domine. 

90 Lorsqu'il y a des aliments dans l'estomac ou accumu- 
lation de matières muqueuses , bilieuses , ou des vers dans 
le tube digestif. Dans ces cas, l'opium produit les accidents 
de l’indigestion, ou retient les matières saburrales et ver- 
mineuses, dont l'évacuation est de toute nécessité. 

8° Dans la tendance du sang à la dissolution et à la pu- 
trescence , comme dans la fièvre essentiellement putride, le 
purpura hémorrhagica, le scorbut, etc. 

4° Chez les nouveaux-nés et chez les enfants en général (1), 
surtout pendant la dentition, à cause du peu d'énergie du 
principe vital chez les premiers, et de la tendance aux 
congestions cérébrales chez les seconds. 

5° Chez les vieillards, en raison du décroissement de la 
puissance nerveuse, de la sensibilité, de la vie, et, par 
conséquent, de la tendance à la stase du sang, aux con- 
gestions vers le centre circulatoire et le cerveau. Lors- 
que dans la vieillesse l'emploi de l’opium est impérieu- 
sement commandé, on ne doit l’administrer qu'avec une 
grande circonspection et d'abord à dose très-minime. 
TE ee rs ecrreee Svrsther IE ES 


«1» Cette contre-indication ne saurait être absolue. Seulement, il faut 
autant que possible , chez les enfants, s'abstenir de l'usage des opiacés , 
ou ne les administrer qu'avec beaucoup de prudence. Je mai pu , dans 

uelques cas , faire cesser des diarrhées qui avaient amenéun épuisement 
effrayant chez des enfants dans les premiers mois de la vie (ce qui arrive 
surtout chez ceux qui sont artificiellement allaités ), qu’en leur adminis- 
trant, à des intervalles plus ou moins rapprochés , une goutte de lauda- 
num dans un lavement mucilagineux. Lorsque je suis forcé d’administrer 
l’opium pendant la dentilion , je fais presque toujours appliquer préala- 
blement les sangsucs derrière les orcilles et donner quelques bains tièdes. 


s. à." RS 


371 


Retracer les éloges et rappeler l'espèce de culte dont 
l’opium a été l’objet, exposer les théories qui l'ont fait 
considérer tantôt comme une panacée universelle, tantôt 
comme un médicament dangereux , signaler les cas nom- 
breux dans lesquels il a été employé avec succès, et ceux 
où il s’est montré nuisible, serait faire à Ia fois l'histoire de 
la médecine et passer en revue toute la pathologie. Un tel 
travail dépasserait de beaucoup le bul tout pratique que je 
me suis proposé, et serait d'ailleurs au-dessus de mes forces. 
Je me contenterai donc de jeter un coup d'œil rapide sur 
les principales circonstances dans lesquelles l’opium est mis 
en usage avec succès , et celles où il est inutile ou nuisible. 

Affections nerveuses, spasmodiques. Ici l’action de 
l’opium est d'autant plus efficace qu'elle est directement 
portée sur le systême qui est le siége de Ia maladie. Ce mé- 
dicament est d’une grande utilité dans l’insomnie nerveuse, 
les névralgies, les vomissements et les toux spasmodiques, 
en un mot, dans la plupart des névroses. Cependant, cer- 
taines affections nerveuses résistent à l’effet de l’opium , ou 
même empirent sous son influence, telles sont l'hystérie, la 
chorée, l’épilepsie et autres affections convulsives. C’est que, 
dans la plupart de ces cas, la maladie est subordonnée à une 
lésion locale d’où partent les irradiations ou les sympathies 
que l'on regarde à tort comme idiopathiques. L’irritation 
phlegmasique ou la lésion organique d’un point de la ma- 
trice produisant tous les symptômes de l’hystérie, en fournit 
un exemple qui se présente fréquemment à l'observation. 

C’est donc contre l'affection locale, cause efficiente des 
symptômes nerveux, qu'il faut diriger la médication. Mal- 
heureusement, il est souvent difficile de découvrir le siége 
et la nature de cette affection, et plus difficile encore de a 
détruire, surtout si déjà elle est passée à l’état de lésion 
organique. 

L’opium ne peut, comme on voit, produire d’heureux 
effets dans les affections nerveuses qu'autant qu’elles sont 
essentielles, et que l’on à préalablement combattu les contre- 
indications qui s'opposent à son emploi. 

Le rétanos, affection nerveuse par excellence, réclame , 
ainsi que nous l'avons dit plus haut, l'emploi de l'opium à 
dose élevée et proportionnée à l'intensité de la maladie. Dans 
les spasmes violents du bas-ventre surtout , et dans ceux 


qui se rattachent principalement à la moëlle épinière et au 


nerf intercostal, l'opium, suivant la remarque d'Hufeland, a 
infiniment plus d’eflicacité lorsqu'on l'administre sous forme 
de lavement, que quand on le fait prendre par la bouche. 


372 


Affections nerveuses traumaliques. « Lorsqu'après avüir 
reçu une blessure grave ou perdu beaucoup de sang , dit 
Haufeland , le malade est étendu sur son lit en proie à des 
spasmes, raide et à demi-mort, ou lorsque , dans de sem- 
blables circonstances,les douleurs deviennent excessivement 
violentes au second ou au troisième jour ; le pouls et tout 
l'extérieur annoncent un état nerveux, l’inflammaution n’a 
point une couleur vive, et Ja suppuration est plus icho- 
reuse que purulente ; il n’y a que l'opium qui puisse changer 
la scène avec rapidité, parce que, d’un même coup,il appaise 
la douleur , fait cesser le spasme, relève la force vitale, et 
corrige le travail de inflammation et de Ja suppuration par 
son action toute spéciale sur le système sanguin et la plas - 
ticité du sang, » ( Ouv. ct.) 

M. Malgaione fait un fréquent usage de l'opium à l'hôpital 
Saint-Louis, et, quelles que élevées que soient les doses aux- 
quelles il le donne, il ne produit jamais le moindre accident. 

«a Chez les opérés, comme chez les blessés, pour calmer 
la douleur et provoquer le sommeil dans le cas de diarrhées, 
et en général dans toutes les circonstances où elles sont 
indiquées, M. Malgaigne administreles préparations d'opium 
de la manière suivante : 

« Il prescrit une pilule d’exirait gommeux d’opium de 
cinq centig. de trois heures en trois heures, et plus ordinai- 
rement de quaire heures en quatre heures, jusqu'à produc- 
tion d'effet; ou bien, une potion de ceni vingt grammes 
contenant de trente à soixante gouttes de laudanum de 
Sydenham, à prendre par cuillerées à bouche dans les vingt- 
quatre heures. 

« Parmi les cas particuliers dans lesquels nous avons vu 
donner ainsi l'opium , il en est quelques-uns qui méritent 
d’être cités. 

« Nous nous rappelons, entre autres, celui d’un homme 
qui entra dans le service pour une fracture des deux os de 
la jambe, fracture simple, mais la plus grave peut-être qu'on 
ait jamais rencontré. Douze heures après l'accident , le pied” 
et la jambe étaient gonflés, tendus, violacés, froids comme 
de la glace ; l’épiderme était soulevé et la gangrène semblait 
imminente ; cependant on ne désespéra pas de la conserva- 
tion du membre. M. Malgaigne se contenta de placer deux 
atteiles sur les côtés de Ja jambe , et prescrivit l'opium à 
haute dose. Le malade en prit dix pilules de cinq eentigr. 
le premier jour, et neuf le lendemain , dix-neufgrains, plus 
d'un gramme en deux jours. Le troisième jour cet homme 
allait bien ; l’opium avait calmé Ja douleur eu provoqué une 


‘ 


373 


moiteur salutaire ; la jambe et le pied avaient repris une 
température convenable ; il avait eu un peu de sommeil ,. 
et, l'appétit renaissant, on donna une portion d'aliments 
solides au malade. L’opium fut continué encore pendant 
quelques jours, puis suspendu : la consolidation s'effectua 
ensuite régulièrement. 

« Une chose singulière, c'est que J'opium à cette dose fait 
peu dormir ; il produit plutôt un sentiment de bien-être qui 
se réfléchit sur la figure des malades ; il éveille aussi l'ap- 
pétit et semble être, comme dit M. Malgaigne , un excel- 
lent digestif. Nous avons eu une preuve de tout cela chez 
un blessé de juin, atteint dans les parties molles par un 
biscaïen. Cet homme prit huit grains d’opium par jour pen- 
dant six jours, sans fermer l’œil, mais aussi sans souffrir. 
Le septième jour, il dormit, et son sommeil fut calme, pres- 
que normal. L’appétit revint, le malade mangea , digéra 
bien tout en prenant son opium, et il alla à la garde-robe 
sans être obligé de recourir aux Javements. 

«a M. Malgaigne prescrit aussi, avons-nous dit, le lau-: 
danum à haute dose. Il le préfère dans les cas de dévoic- 
ment ou diarrhée. Le laudanum renferme , outre l’opium, 
une petite proportion de safran , qui, toute minime qu'elle 
soit, pourrait néanmoins expliquer la différence des résul- 
tats qu’on obtient avec l'extrait d'opium et le laudanum 
administrés séparément. Le fait est que nous avons vu un 
homme dont le dévoiement avait résisté à quatre décigram. 
d'extrait sommeux d’opium, donné par pilules de cinq cen- 
tigram. toutes les troïs heures, et qui fut supprimé complè- 
ment au moyen d’une potion contenant quarante goulies 
de laudanum de Sydenham. Au reste, dans les diarrhées 
rebelles, M. Malgaigne associe les deux préparations, mais 
alors le laudanum est donné en lavement. Ainsi, chez un 
blessé, dont on voulait à tout prix arrêter le dévoiement, 
nous avons entendu prescrire pour la journée et la nuit sui- 
vante, jusqu'à effet : six quarts de lavement avec six gouttes 
de laudanum chaque , et huit pilules d'extrait gommeux 
d'opium de cinq centigrammes. Le malade prit tout, et les 
selles furent supprimées. » (Zourn. de méd. et de chair. prat., 
l. xx, p. 21 ef 29: ) 

C’est surtout dans le tétanos traumatique que l’effet nar- 
cotique elanti-spasmodique de l’opium ne peut se manifester 
qu'autant qu'on l’administre à des doses énormes. Le lau- 
danum, donné dans ce cas en lavement, de 15 à 30 grammes. 
produit ordinairement plus d'effet que de toute autre ma- 
nière. Le trismus, d’ailleurs, empêche souvent de l’admi- 
nistrer par la bouche. 


… 


374 


Dysenterie, diarrhée, choléra. 11 ne faut donner l'o- 
pium dans la dysenterie que lorsqu'il y a absence d’inflam- 
mation ou d’étatbilieux, saburral. Dans la première période, 
la dysenterie se manifeste souvent par des symptômes in- 
flammatoires ou bilieux qu’il faut d'abord combattre dans 
le premier cas par les antiphlogistiques, tels que la saignée, 
les sangsues sur le bas-ventre ou à l'anus, et dans le second 
par l'ipécacuanha. Ce dernier peut être remplacé par la 
racine de brione, la narcisse des prés, l’asaret ou la racine 
de violette. Je fais toujours précéder de l'un de ces vomitifs 
l'administration de l’opium. Celui-ci ramène ensuite le 
calme en faisant cesser l’irritation intestinale qui provoque 
les évacuations ; mais cet effet ne doit avoir lieu que graduel- 
lement et au moyen de petites doses souvent répétées. Une 
suppression trop brusque de la sécrétion du mucus et du 
sang peul avoir des inconvénients. C’est surtout dans les 
dysenteries épidémiques que l’opium triomphe. On le donne 
alors par la bouche ou en lavement , associé aux mulcilagi- 
neux. « L’effroyable dysenterie rhumatismale, causée par 
l'humidité et le froid, qui fit tant de ravages dans l’armée 
prussienne en 1792, tant qu’on la combatlit, comme c'était 
alors l'usage, par la rhubarbe en poudre, ne redevint 
curable et ne cessa que quand on lui opposa généralemene 
lopium ( Hufeland, op. cit., p. 622). » En Algérie, nos 
soldats atteints de dysenterie sont traités, après avoir com- 
battu l'inflammation, par l’ipécacuanha et l’opium : ce der- 
nier médicament est le plus souvent administré en lavement. 

Dans les diarrhées, l'opium agit comme dans la dysente- 
rie, et exige dans son emploi les mêmes précautions. Il serait 
nuisible dans la diarrhée critique, qui soulage toujours le 
malade et souvent le guérit, On peut en dire autant de toute 
autre supersécrétion qui aurait le même caractère. 

Dans le choléra, l’opium doit être administré dès le début 
et à haute dose, parce que, dans cette affection , le trouble 
nerveux prédomine. Dans un cas de choléra avec convulsions 
horribles, vomissement affreux , sueur froide, pouls à peine 
sensible, Sydenham donna d’abord 25 gouttes de son lau- 
danum dans une cuillerée d’eau de canelle spiritueuse ; il se 
int ensuite l'espace d’une demi-heure auprès du malade, et 
voyant que celte première dose ne suflisait pas pour arrêter 
le vomissement et appaiser les convulsions, il fut obligé de 
réitérer plusieurs fois le remède et d'en augmenter toujours 
la dose, ayant soin de laisser assez d'intervalle entre chaque 
prise , pour voir ce qu'il pouvait espérer de la précédente 
avant que d’en donner une nouvelle. Par ce moyen, les 


379 


symptômes se calmèrent. Cependant , afin de prévenir Ia 
rechute, Sydenham fit encore prendre de temps en temps du 
Jlaudanum, à doses décroissantes, et recommanda le repos 
le plus absolu durant quelques jours (op. cit., p. 216.) 

En employant ainsi l’opium, j'ai réussi, dans le choléra 
épidémique de 1832 , à arrêter là marche si rapide de cette 
affection chez quelques malades. Comme Sydenham , je 
l’administrais toujours avec une très-petite quantité de véhi- 
cule. Dans le choléra algide, j'employais de préférence la 
teinture ammoniacale d’opium {élixir parégorique du codex), 
afin, tout en calmant les symptômes nerveux, d’exciter plus 
promptement le systême circulatoire et de provoquer ainsi 
une réaction plus prompte (1). Je tenais en même temps le 
ventre libre au moyen de lavements composés de miel de 
mercuriale et de sel de Glauber, parce que j'avais remarqué 
que la suppression subite des selles augmentait l'intensité 
de Ia maladie. 

M. Bataille a communiqué à Ia Sociéié médico-pratique 
de Paris, l'observation suivante : « Un maitre maçon, après 
une contrarié violente, fut pris tout-à-coup des symptômes 
du choléra asiatique : diarrhée séreuse et blanche, vomisse- 
ments, teinte cyanosée, absence complète d'urine. La mort 
semblait imminente, lorsque M. Bataille adminisira l'opium 
à la dose d’un quart de grain de demi-heure en demi-heure. 
A la onzième prise, la sueur et les urines se rétablirent, et 
tous les accidents se dissipèrent ; le malade marcha promp- 
tement vers la guérison. C’est le second exemple de gué- 
rison semblable que M. Bataille a obtenu par le même 
moyen. » (Journ. de médecine ct de chirurgie prat., t. xix, 
p. 370.—1848 ). 

Colique métallique, colique de plomb. L'opium calme 
toujours les symptômes nerveux de cette affection, et peut 
souvent la guérir. Tronchin la traitait par lopium unt au 
camphre. Stoll employait une mixture composée de 50 cen- 
tigram. d'opium, de 180 gram. de fleurs de camomille, de 
6 gram. d'extrait de fleurs de camomille, et de 45 gram. de- 
sirop de la même fleur. Dehaen donnait 5 centigr. d'opium 
toutes les trois heures. Brachet de Lyon (de l'emplor de 
l'opium dans les phlegmasies , etc., p.187) , approuve cette 


() Je viens d’obtenir, pour provoquer cette réaction et Ja maintenir, 
les plus heureux effets du perchlorure d’or et de sodium en frictions 
dans la bouche, à la dose de 4 cent. de quart-d'heure en quart-d'heure, 
jusqu’à effet manifeste sur le système sanguin, dont l’anéantissement est 
si prononcé dans le choléra épidémique. 


316 


méthode et cite des faits à l'appui. Le docteur Bricheteaa 
emploie depuis près de vingt ans l’opium à dose progressive, 
en commençant par dix centigram. à prendre à deux heures 
d'intervalle, avec lavements laudanisés, emplâtres opiacés 
sur le ventre , sans jamais avoir recours aux éméto-cathar- 
tiques (Archives générales de médecine , €. xxx4£, p. 332). 
MM. Bouvier et Martin Solon (Thèses de Paris, n° 132) 
emploient le chlorydrate de morphine à dose progressive en 
commençant par 1 centigram. jusqu'à 35 centigram. dans 
les vingt-quatre heures. M. Tanquerel {Traité des maladies 
de plomb, 1.1, pag. 374 et suivantes) a vu donner l'opium 
er le chlorydrate de morphine seuls dans quatre- vingt-quatre 
cas. Dans les cas les moins intenses , la guérison a eu lieu 
dans l’espace de cinq à six jours; ceux d'intensité moyenne 
ont résisté de six à septjours ; les graves n’ont cédé, terme 
moyen, qu'au bout de huit à dix jours. Sur ces quatre-vingt- 
quatre cas il a eu occasion d'observer cinq rechutes, quatre 
paralysies, trois encéphalopathies. Dans vingt-cinq cas 
d'intensité variable Ia maladie a résisté à celte médication ; 
mais dans huit cas de colique violente, et deux d'intensité 
moyenne, les opiacés ont fait cesser en quelques jours la 
colique après l'emploi infructueux des vomi-purgatifs. Enfin, 
M. Tanquerel regarde le traitement de la colique saturnine 
par les opiacés comme étant supérieur à tous ceux qui ont 
été employés jusqu’à ce jour. 

Delirium tremens. L'opium à petites doses fréquemment 
répétées, et porté même progressivement à une dose élevée , 
est d’une efficacité reconnue dans cette affection , que l'on 
considère aujourd'hui comme essentiellement nerveuse , et 
contre laquelle on emploie bien rarement la saignée qui, le 
plus souvent, s'est montrée nuisible. 

inflammations internes. L'opium , en principe général, 
est nuisible dans les inflammations. Cependant, ainsi que le 
fait judicieusement remarquer Hufeland {op. cit.) , quand, 
après avoir convenablement insisté sur les émissions san- 
guines générales et locales, on voit les symptômes de l'in- 
flammation persister, comme cela arrive quelquefois dans la 
pleurésie à l'égard du point de côté, de Ja toux et de la 
difficulté de respirer, avec pouls fébrile, petit et ne permet- 
tant plus la saignée , lopium est l'unique remède ; il éteint 
l'excès de sensibilité, le spasme, et rend en même temps aux 
vaisseaux le degré d'énergie nécessaire à la résorpiion du 
sang stagnant dans la partie affectée. Quatre saignées , au 
rapport d'Efuxam, n'avaient pas guéri complètement une 
fièvre avec violente douleur de côté, Le laudanum et le sirop 


317 

diacode, à dose élevée, calmèrent Ia douleur d'abord, et 
ensuite les autres symptômes. « J'ai éprouvé dans une muf- 
titude de cas, ajoute le même auteur, que cette méthode est 
très-efficace et très-salutaire. » Quand, après les émissions 
sanguines suffisantes, la douleur conservait son intensité, 
Sarcone donnait de l’opium toutes les trois heures jusqu’à 
ce que le calme fut revenu. Mais il ne faut pas perdre de vue 
que les opiacés ne conviennent que lorsque l’état purement 
inflammatoire primitif est presque entièrement dissipé, et 
qu'il a fait place à la débilité générale, avec persistance 
d’un état nerveux ou spasmodique. Toutefois, ne laissons 
pas ignorer qu'il y a des pleurésies dans lesquelles l’inflam- 
mation est subordonnée, dès le principe, à la douleur, à 
l’élément essentiellement nerveux, et qui sont efficacement 
combattues par l'opium quand les saignées générales et 
locales ont été tout-à-fait infructueuses. 

Le praticien ne confondra point l'oppression des forces 
que l'on observe quelquefois dans l’infflamraation portée à 
un haut degré, comme dans quelques cas de pneumonie et 
de pleuropneumonie, avec la débilité réelle : cette apparence 
de faiblesse est combattue rationnellement par la saignée , 
tandis que l’opium ne fait que l’aggraver en procurant un 
calme trompeur {r) : la douleur cesse, mais l'inflammation , 
au lieu de se terminer par résolution, passe à la gangrène, 
à l'engorgement chronique, où à la suppuration. 


(1) Je n'ai jamais rencontré l'indication de l’opium dans la pneumonie 
franche, où il pourrait, d'ailleurs, avoir le fächeux inconvénient de sup- 
primer l'expectoration: mais je l’ai souvent associé au lartre stibié ou au 
kermeés, employés, soit à vetites dses pour calmer la toux et favoriser en 
même temps l'expectera:tion dans Ja période de résolutions soit pour éta- 
blir plus facilement la tolérance dans l'administration à dose contro-stimu- 
Jante de ces préparations antimoniales. 

L'état de débilité et de spasme douloureux qui en réclamerait l'usage ex- 
clusif, ne pourrait être que le résultat d'un traitement purement antiplogis- 
tique et surtout de l'emploi des saignées coup sur coup, méthode quine m'a 
pas réussi chez les paysans, et que je n’emploie ni à la campagne nt à la 
ville depuis que l’expérience m'a démontré l'excellence de la doctrine de 
Rasori contre la pneumonie. La prompte résolution opérée par léméti- 
que à dose contro-stimulante , après toutefois avoir pratiqué, dans la 
plupart des cas , une ou deux saignées, suivant l’âge, le tempérament 
du malade ou l'intensité de la maladie, m'a presque toujours dispensé 
de lemploi de tout autre moyen, Je puis assurer , comme M. Munaret 
(du méd. des villes et du méd. de campagne, 2° édit. p. 189), avoir obtenu 
par cette méthode onze guérisons complètes sur douze malades, malgré 
les complications ou les circonstances les plus défavorables. Chez les sujels 
débiles et les vieillards je n''abstiens même des émissions sanguines, je 
m'en tiens à | émétique à haute dose, et je réussis dans ces fluxions de 
poitrine qui autrefois étaient mortelles par défaut de réaction, par en 
souement des organes respiratoires. ; 


378 


Le praticien prendra pour guide , dans les cas de phleg- 
masie qui semblent indiquer l'emploi de l'opium , l’état du 
pouls. I faut qu'il soit mou et faible ; si, sous l'influence du 
médicament , il redevient dur et fréquent, c'est qu'il reste 
encore un état inflammatoire qui en interdit l'usage. 


Hémorrhagies. Ce que nous avons dit des inflammations 
par rapport à l'usage de l'opium, peut s'appliquer aux 
hémorrhagies actives. Il est nuisible dans tous les cas où ül 
y à état phlegmasique ou pléthorique, soit général, soit 
local. Mais, lorsque cet état a été combattu par les saignées, 
et que des sympiômes nerveux ou spasmodiques avec débi- 
lité existent, l'opium peut être utilement employé. Il est 
même des hémorrhagies primitivement et exclusivement 
causées par le spasme ou l'irration nerveuse , et qui cèdent 
à l’opium. Certaines ménorrhagies sont dans ce cas : Ubi 
spasmorum ct dolorum ferocia, quod subride in puerperio, 
em post abortum , atque in hypoconchriaca et hysterica 
passione affectis evenit, sanguimis profluvium ciet, confu- 
giendum utlique ad ea, quæ blanda et anodyna vi dolores et 
motus cffrenos solidorum placant atque sedant (F. Hoff- 
manni, med.ralion, syst., t.1v, p.112, halæmagdeb.,1136). 
Voyez, plus bas, l'emploi de l'opium dans l'avortement. 


Dans l'hémoptysie , lorsque la pléthore et le molimen 
hémorrhagique ont été suffisamment combatius, lopium 
peut , en diminuant lirritation des bronehes et la toux, 
empêcher l’afflux du sang et l'hémorrhagie qui en est la 
conséquence. 

Affections catarrhales pulmonaires, toux, coqueluche, ete. 
Comme dans les autres phlegmasies , l'opium est nuisible 
dans la période inflammatoire du eatarrhe pulmonaire aigu ; 
mais il peut être très-utile associé aux expectorants, tels 
que l’ipécacuanba , le narcisse des prés, la bryone, larum, 
le kermès , le tartre stibié , dans la période d’atonie et dans 
la bronchite chronique. J'ai vu des bronchites chroniques 
graves, qu’on aurait pu prendre avant l'emploi de l’auseul- 
tation et de Ia percussion pour des phthisies confirmées , 
céder à l'usage de l’opium associé au tartre stibié et admi- 
nistré à petites doses fréquemment répétées. L’opium peut 
être aussi de quelque utilité dans la période nerveuse de la 
coqueluche ; mais comme cette maladie sévit particulière- 
ment chez les enfants, et qu’elle détermine par les efforts de 
Ja toux l'afflux du sang au cerveau, il ne faut l'employer 
qu'avec beaucoup de circonspection.Dans certaines phthisies 
sèches et nerveuses,où il s’agit de diminuer le spasme local 


319 


et l’exaltation générale de la sensibilité, l'opium procure un 
grand soulagement, et peut même, dans la première période, 
enrayer la marche de l'affection, surtout quand il est secondé 
par un régime adoucissant et analeptique. 

Phlegmasies cutanées. « Lorsque, dans une petite vérole 
maligne, nerveuse, la suppuration ne fait point de progrès, 
vers le cinquième ou sixième jour après l'éruption , qu'elle 
dégénère en une sécrélion séreuse, ichoreuse, que les bou- 
tons ne se remplissent point, qu'ils prennent un aspect 
livide, et semblent sur le point de tomber en gangrène, avec 
prostation extrême des forces, et violente fièvre typheuse, je 
ne connais pas de moyen qui soit plus apte que lopium à 
rétablir la suppuration, à compléter la crise, et par consé- 
quent à sauver la vie du malade. » (Hufeland, op. cüt., 
p. 626).—Sydenham recommandait l'emploi de l’opium dans 
les varioles confluentes accompagnées d'ataxie. Il donnait 
414 gouttes de laudanum liquide, ou une once de sirop dia- 
code dans l’eau de fleurs de primevère ou autres, tous les 
soirs, depuis le sixième jour jusqu’à la fin de la maladie. 
Quand il y aen même temps de la diarrhée, il vaut mieux 
le donner en lavement. J'ai vu plusieurs fois le délire le plus 
violent, les symptômes ataxiques les plus graves accompa- 
gnant la variole confluente, céder comme par enchantement 
à l'administration par la bouche ou en lavement peu volu- 
mineux, de 8, 15 ou 20 gouttes de laudanum chaque jour. 

La toux qui accompagne ordinairement la rougeole et qui 
est quelquefois d’une fréquence qui fatigue beaucoup le 
malade, est constamment calmée et eesse même par l'emploi 
de l’opium. Dans ce cas je donne, à l'exemple de Sydenham, 
le sirop diacode, surtout pendant la nuit. 

Fièvres intermittentes. Depuis Sydenham, on a employé 
l’'opium à doses plus ou moins élevées pour combattre les 
fièvres intermittentes qui, à cause d’un état nerveux plus 
prononcé, cèdent souvent à ce médicament après avoir 
résisté au quinquina. Il ne faut alors donner l'opium que 
deux ou trois heures avant le moment où le frisson doit 
arriver, afin d'agir sur l’éréthisme nerveux. Il serait très- 
nuisible, à grande dose, s’il agissait long-temps avant 
l'apparition de la fièvre, lorsque le sujet est dans son état 

normal. « J'ai vu une femme, dit Mérat (Duct. des Serences 
méd., t. xxxvn1, p. 486 et 487), à la clinique interne de la 
faculté, à qui j'avais prescrit quatre-vingts gouttes de lau- 
danum pourcombattreune fièvre intermittente grave ; malgré 
ma recommandation, on les lui fit prendre aussitôt la dis- 
tribution des médicaments, tandis que son accès ne devait 


380 


veuir que le soir ; etelle périt de narcotisme.» Fallope ayant 
obtenu, pour ses dissections, le corps d’un homme qu’on 
devait supplicier et qui avait une fièvre intermittente quarte, 
voulait le faire mourir avec de l’opium ; deux gros (8 gram.) 
que le condamné prenait vers l'accès, ne produisaient aucun 
effet ; la même dose, prise après le paroxisme, le fit succom- 
ber (Houllier, de morbis intern.. hb. 1.) Ces faits s’expli- 
quent par le degré d’éréthisme du systême nerveux, et 
rentrent dans ceux dont nous avons déjà parlé. 

L’opium peut être très-utile contre les symptômes nerveux 
d’une fièvre intermittente pernicieuse , tels que ceux, par 
exemple, qui simulent lapoplexie et qui sont loin de céder 
à Ja saignée. Hufeland, enadministrant pendant l’apyrexie 
30 gram. de quinquina comme antipériodique, ajoutait tou- 
jours 5 centigram. d’opium. 

Je pourrais rapporter ici de nombreux cas de fièvres per- 
nicieuses cardialgiques ou cholériques, observés dans les 
marais du Calaisis, et dans lesquels lopium a pu seul, en 
dissipant les symptômes effrayants de l'accès, me mettre à 
même d’en prévenir le retour au moyendu quinquina donné 
à grande dose pendant l'apyrexie. Combien de fois n'ai-je 
pas vu, dans ces cas, un vomissement Ccortinuel, avec dou- 
leur aigüe ou déchirante de l'estomac (morsus ventriculr ), 
altération des traits, petitesse du pouls, sueur glutineuse, 
anxiété extrême, épuisement des forces, céder à l'emploi 
simultané des révulsifs à l'extérieur, tels que sinapismes, 
vésicatoires, frictions avec lPalcool camphré et lammo- 
niaque, etc., et de lopium gommeux adminstré à doses 
croissantes et fréquemment répétées. 

Le docteur Peysson a préconisé, contre les fièvres inter- 
miltentes ordinaires, l'opium mêlé au tartre stibié, de chaque 
5 centigram. dans une potion mucilagineuse de 200 gram. , 
à prendre par cuillerées de deux heures en deux heures. 

Fièvre nerveuse, fièvre typhoïide, typhus. L’opium est 
constamment nuisible dans ces fièvres, lorsqu'il existe à la 
fois congestion sanguine et phlegmasie cérébrale. Il y a 
quatre cas, suivant Hufeland, dans lesquels l'opium est 
salutaire, même indispensable, chez les malades atteints de 
fièvres nerveuses ou typhoïdes : 1° quand la maladie est 
purement nerveuse par causes dibilitantes, où survenue 
chez un sujet déjà nerveux, et qui n'offre simultanément 
aucun signe d'inflammation. 2° Lorsqu'après avoir suffisam- 
ment employé les émissions sanguines, le froid et les éva- 
cuants, les signes de la congestion disparaissant, le délire 
persiste ou même dégénère en fureur ; dans ce cas, Hlufe- 


381 


land conseille d'associer l'opium au calomélas. 3° Lorsque 
dès le principe il y a diarrhée, dysenterie ou choléra, afin 
de calmer l'irritation du tube digestif et d'arrêter des évacua- 
tions qui épuisent les forces. « Lui seul, dit Fufeland, a été 
efficace dans le typhus qui ravagea la Prusse en 1806 et 1807, 
et dont la diarrhée était la compagne essentielle (op. cut., 
p. 647). » 4° Lorsque les forces sont au plus bas, et que les 
excitants les plus énergiques ne peuvent relever le pouls. 
« Je ne connais pas, dit l'auteur, que nous venons de citer, 
de meilleur moyen que d'ajouter du laudanum aux autres 
stimulants, par petites doses fréquemment répétées. Pour 
apprécier cet estimable don du ciel, il faut l'avoir vu, en une 
seule nuit, rendre calme, plein et fort le pouls qui était petit 
el fréquent, faire cesser le délire, rendre la connaissance au 
malade, arrêter les évacuations épuisantes, en un mot, pro- 
duire une métamorphose véritablement miraculeuse. » 

Ahénations mentales. L’opium n'est utile dans les vésa- 
nies que lorsqu'elles sont purement survenuses , accompa- 
gnées de débilité ou reconnaissant cette dernière pour cause 
par suite de l'abus des spiritueux, des plaisirs de l'amour, 
etc. Quand il y à excitation vasculaire du cerveau ou des 
engorgements abdominaux, ainsi qu’on en observe quelque- 
fois dans la mélancolie, l’opium ne peut que nuire. 

Rhumatisme articulaire aigu. Après la saignée répétée, 
er lorsque la diathèse inflammatoire est considérablement 
diminuée, j'emploie toujours avec succès l’opium dans le 
rhumatisme aigu. Je donne 5 centigram. d'extrait aqueux 
de cette substance toutes les deux heures ; il ne provoque 
pas le sommeil, mais il calme la douleur et produit une 
transpiration continuelle qui donne quelquefois lieu à une 
éruption cutanée ordinairement de forme miliaire. Lorsque 
j'ai trop à craindre l’action stüimulante de l’opium sur le 
système sanguin, je joints à l'usage de ce médicament celui 
du tartre stibié à dose contro-stimulante. Je donne alterna- 
tivement 5 centigrammes de ce dernier, et autant d'extrait 
gommeux d’opium, toutes les trois heures d’abord, ensuite 
toutes les deux heures, et même toutes les heures. Lorsque 
le tartre stibié ne provoque pas d'évacuations alvines, je fais 
administrer l'huile de ricin tous les deux jours. "Ce traite- 
ment, en diminuant à la fois l’activité du système sanguin 
el l'éréthisme nerveux , tandis qu’il stimule au contraire le 
systême cutané, dont il favorise les fonctions sécrétoires, 
prévient la rétrocession de l'affection sur le péricarde, mo- 
dère les symtômes et abrège considérablement la durée de 
la maladie. 


382 


Avortement, accouchement, état puerpéral. L’opium est 
un remède précieux pour prévenir l’avortement. [I fait cesser 
les contractions prématurées de l'utérus. J'ai eu à me louer 
de son emploi dans un grand nombre de cas où l'avortement 
semblait imminent. Je donne le laudanum liquide dans une 
potion ou dans un tiers de lavement émollient, après, toule- 
fois, avoir vidé les gros intestins au moyen de lavements 
simples et entiers. Cette dernière précaution est d'autant 
plus nécessaire que souvent la constipation suffi seule pour 
produire l’avortement (1). 

M. le professeur Dubois ei le docteur Guillemot ont em- 
ployé le laudanum avec un succès remarquable pour enrayer 
les contractions utérines et prévenir l'avortement. Ce moyen, 
précédé de la saignée quand il y a pléthore locale ou géné- 
rale, convient dans les cas où les symptômes d’avortement 
sont déterminés par des excitants extérieurs, l'irritation d’un 
organe voisin de la matrice, un coup, une chüûte, une com- 
motion, une impression morale profonde et subite. L’opium 
convient encore, aidé du repos et de la position horizontale, 
pour prévenir les fausses-couches qui se succèdent, par une 
sorte d'habitude, presqu'aux mêmes termes de la grossesse. 


a) Une accumulation considérable de matières fécales peut se former 
dans le dernier intestin , provoquer un travail semblable à celui de l’en- 
fantement et produire même un accouchement prématuré. Je rapporterai 
à cette occasion, comme très-remarquable, le fait suivant : Madme Mi- 
gnien , de Saint-Pierre-lès-Calais, âgée de quarante ans , d’un tempéra- 
ment lymphatico sanguin, d’une forte constitution , enceinte, pour la 
première fois, desix mois et demi environ, éprouvait, disait-on, les dou- 
leurs de l’enfantement depuis la veille au soir, lorsque, le vingt-six dé- 
cembre 4818, à sept heures du matin, je fus appelé pour lui donner mes 
soins, L'augmentation considérable des douleurs expultrices, une grande 
agitation , un pouls actéléré , des vomissements violents et répétés, sem- 
blaient, en effet , annoncer un accouchement prochain. Voulant, par le 
toucher, m’assurer de l'état des choses, je rencontrai un obstacle insur- 
montable à l'introduction du doigt; une tumeur très-volumineuse, formée 
par une grande quantité de matières fécales durcies et agglomérées dans 
le rectum, qu’elles avaient énormément dilaté et porté en Baat-et en 
bas, effaçait presque complètement le vagin. J'avais commencé à vider ce 
sac stercoral au moyen d’une petite cuillère en fer enduite de graisse et 
introduite dans l’anus, lorsque, par de fortes contractions et pendant des 
efforts de vomissements, presque toute la masse fut violemment expul- 
sée. Le calme, avec affissement, succéda comme après l'accouchement le 
plus laborieux ; le col utérin, effacé, attestait un commencement de tra- 
vail mécaniquement provoqué ; mais une saignée, indiquée par le déve- 
loppement et la dureté du pouls, un lavement émollient qui entraîna le 
reste de l'accumulation fécale , et, enfin, un quart de lavement avec 45 
gouttes de laudanum liquide, firent rentrer tout dans l’ordre. On prévint 


ultérieurement la constipation , la grossesse marcha sans trouble, et l’ac- 


couchement eut lieu au terme naturel. 


ATVAN 


389 : 


M. Guillemot rapporte {Archives générales de Méd., 1836) 
l'observation d’une dame qui déjà était accouchée cinq fois 
prématurément sans avoir jamais pu dépasser l’époque de 
cinq mois de grossesse, et à laquelle des lavements simples, 
auxquels on ajoutait quelquefois le laudanum , furent pres- 
crils ; mais, comme ce dernier médicament augmentait la 
constipation , on en fit des frictions à la partie interne des 
cuisses. La grossesse marcha sans accidents, et l'accouche- 
ment eut lieu à terme. Il est évident que l’avortement qui 
reconnaît pour cause la mort du fœtus, des lésions graves de 
ses annexes, des alitérations pathologiques de l'utérus, etc., 
est inévitable et même nécessaire. Mais alors, direz-vous, 
comment distinguer ces cas de ceux dont nous venons de 
parler et contre lesquels l’opium agit efficacement ? Le doute 
ici ne doit point arrêter le praticien; si l’opium suspend un 
travail nécessaire , la nature, plus puissante que la médi- 
cation, reproduit ses efforts conservateurs et met fin, en 
expulsant les produits de la conception , à une grossesse 
devenue impossible. Le laudanum administré en lavement 
agit plus efficacement, suivant M. le professeur Dubois, pour 
prévenir l’avortement, que lorsqu'il est donné par la bouche. 

Après la saignée, Deventer donnait souvent l’opium pen- 
dant les douleurs de l'accouchement, soit pour calmer l’irri- 
lation, soit pour mürir le travail. Ce moyen peut être utile 
lorsqu'il y a rigidité spasmodique du col de la matrice. Une 
femme qui était en travail depuis quarante-huit heures, fut 
mise, par le conseil du professeur Alphonse Leroy, dans le 
bain après avoir été saignée deux fois ; il lui fit prendre de 
l'alkali volaiil avec du laudanum ; la femme s’endormit, et 
la matrice reprenant de l'énergie, l’accouchement fut heu- 
reux. J’ai employé avec avantage, dans les cas où la débilité 
générale de la femme rendait le travail long et très-pénible, 
la teinture ammoniacale d'opium. Sous l'influence de ce 
médicament, le pouls se relevait, le courage renaissait, les 
contractions utérines se reproduisaient plus fortes, et l’ac- 
couchement s’opérait. Ce stimulant ne produit pas le même 
effet que le seigle ergoté. Ce dernier a une action prompte, 
fugace et spéciale sur l'utérus tombé dans l'inertie ; tandis 
que l’opium, uni à l’ammoniaque, a des effets plus durables 
et est plus particulièrement indiqué dans la débilité réelle 
et générale. Lorsque les tranchées qui suivent l’accouche- 
mentsont trop violentes , l’opium seul peut les calmer ; on 
donne alors le sirop diacode ou le laudanum liquide en 
potion à prendre par cuillerées de temps en temps. 

Il n’est pas d’accoucheurs qui n’ait été à même de recon- 


384 


naître le bienfait de l'opium administré après un accouche- 
ment très-douloureux et qui à jeté le trouble dans toutes les 
fonctions ; il rend le calme au systême nerveux et rétablit 
en même temps le rhythme naturel de la circulation et 
l'harmonie organique. 

Diabète {Polyurie ou diabète insipide — Glucosurie ou 
diabète sucré). Ætius, Willis, Waren, Rollo, Hufeland, 
Moncy et d’autres auteurs, ont vanté les bons effets de 
J'opium dans cette maladie. Moncy (med. chirurg. trans. 
of Lond., 181%), veut qu'on élève progressivement la dose 
de l’opium jusqu'à en prescrire 1 gram. 20 centigr. par jour. 
Tommasini à été jusqu’à 3 grammes dans les vingt-quatre 
heures. Suivant la plupart des médecins qui ont employé 
l'opium dans le diabète, on doit donner des doses considé- 
rables de ce médicament, et aller jusqu’à produire le narco- 
tisme. Toutefois, on ne doit arriver à de telles quantités que 
graduellement et avec beaucoup de prudence. 

« Ce remède, dit M. Valleix (Guide du Méd. prat., t. vu, 
p. 396; Paris, 1846), n’est pas sans utilité; mais si l'on 
examine attentivement les cas de guérison rapportés par les 
auteurs, on voit qu'il s’agit d’une simple polyurie, ou qu'il 
n’y a eu qu'amélioration passagère, et l'efficacité de l’opium 
devient très-contestable sous ce rapport (1. » 

Syplhilis. L'opium n’est pas, comme quelques auteurs l’ont 
cru, un remède spécifique contre la syphilis. Son efficacité 
dans cette maladie n’est que relative. Il s'est montré très- 
ulile, 1° contre les symptômes douloureux de cette affection ; 
20 quand le mercure ne produit plus d'effes contre des 
symptômes dont la persistance peut être attribuée à une 
irrilation sourde, ou à l’éréthisme du système nerveux ; 
3° en l'associant au mercure pour rendre les effets de ce 
dernier plus rapides, plus énergiques, prévenir en même 


x) D'après la théorie de M. Mialhe (comptes rendus de l’Académie des 
Sciences, 4844 et 1845, ) appuyée sur des expériences concluantes, le dia- 
bête sucré est causé par une altération des fonctions assimilatrices qui 
empêche la transformation du sucre (provenant de la matière féculante) 
par un sang alkalin el tel qu'il est dans l’état normal. Le sang des dia- 
béliques étant neutre ou acide , la transformation de la glucose en ma- 
tière de soxigénante ne peut s'opérer ; le sucre devient un corps étranger 
dans lPéconomie, ct, comme tel, est rejeté par les reins. C'est au défaut 
d'alcalinité du sang qu'il faut remédier. Le bi-carbonate de soude, l'eau 
de Vichy, la magnésie, l'eau de chaux, en faisant parvenir une quantité 
suffisante d’alcali dans le sang, remplissent cette indication. Un fait très: 
intéressant, recueilli par MM. Mialhe et Contour, et communiqué Île 9 
juillet 4844 à l’Académie de Médecine, vient confirmer cette théorie. 


389 


temps l’irritation gastro-intestinale et la salivation ; 4° pour 
favoriser l'impulsion vers la périphérie et provoquer ainsi 
des sueurs qui éliminent à la fois le principe morbifique 
et l'agent métallique hétérogène, dont le séjour trop long- 
temps prolongé dans l'économie peut occasionner des acci- 
denis plus ou moins graves ; 5° quand ces derniers accidents 
existent, qu’il y a reliquats vénériens, vérole dégénérée et 
en même temps maladie mercurielle,dyscrasie toute spéciale 
avec anémie , atonie des organes. J'ai vu maintes fois l'opium 
produire, en pareil cas, des effets merveilleux et que favo- 
risaient dans quelques circonstances les préparations de 
salsepareille et, comme succédanées de cette dernière, les 
décoctions concentrées de racines de bardane , de tiges de 
douce-amère , de brou de noix, d'écorce de mézéreon , etc. 

Gangrène externe, L'opium convient dans la gangrène qui 
dépend essentiellement d’un défaut de vitalité, telle que ceile 
qu’on observe chez les vieillards ( gangrène sénile), quand, 
toutefois, la tendance à la congestion cérébrale, si fréquente 
à cet âge, n’en contre-indique pas l'emploi. Mais c’est sur- 
tout contre la gangrène de Pott, ordinairement caractérisée 
par des douleurs tellement vives, qu’on peut la considérer 
comme liée à une affection essentiellement névralgique, que 

l’opium s’est montré presque toujours efficace (1). 

L'action simultanée de ce précieux médicament sur le 
systême nerveux comme sédatif et sur le systême sanguin 
comme excitant, est ici de la dernière évidence, puisque, 
en effet, peu de temps après son administration les douleurs 
cessent en même temps que le pouls se relève et que la 
réaction organique arrête la gangrène. Entre plusieurs 
exemples que je pourrais citer à cette occasion, Je rappor- 
terai le suivant : « Le sieur Fourcroy, mégissier à Samer, 
d'un tempérament lymphatico-sanguin, ayant toujours joui 
d'une bonne santé, avait été atteint, à cinquante ans, de 
congélation au gros orteil du pied gauche, lequel était resté, 
depuis lors, dans un état d'engourdissement, de fourmille- 
ment douloureux qui augnentait par la fatigue, les varia- 
tions atmosphériques et surtout par l'impression du froid. 
A l’âge de soixante-dix ans { vingt ans après) les douleurs 
de l'orteil deviennent continuelles , le sommeil et l'appétit 


(1) On pourrait, ce me semble, afin d'en désigner le caractère spécial, 
douner à ceite affection le nom de gangrène névralgique. Elle est, en 
effet , accompagnée de douleurs nerveuses plus ou moins vives , et s’'ar- 


rête, le plus souvent, aussitôt que ers douleurs sant appaisées par l'effet 
de lopium. | 


25 


386 


se perdent, les forces diminuent ; un point brun-noirâtre, 
de la grandeur d’une lentille, se montre à l'extrémité, 
s'étend et annonce bientôt une véritable gangrêne qui, 
en peu de jours , envahit la moitié de l’orteil. L'emploi du 
quinquina à l’intérieur et à l'extérieur n’a produit aucun 
effet. À mon arrivée (10 juin 1837) je trouve le malade dans 
l'état suivant : l’orteil est sphacélé, sec, et la gangrène gagne 
la partie supérieure du pied ; les parties environnantes sont 
tuméfiées et d’un rouge bleuâtre vers le point affecté. Des 
douleurs déchirantes et évidemment nerveuses partent de ce 
point et s’irradient sur toute létendue du pied ; le pouls 
est petit er fréquent (86 pulsations) ; le malade qui, depuis 
quinze jours, n’a pu goûter un seul instant de repos, est 
découragé et invoque la mort comme terme de ses horribles 
souffrances. 

Me rappelant les succès obtenus par Pott en pareil cas , 
je fais aussitôt remplacer les applications toniques par des 
émollients, et je prescris Fextrait gommeux d’opium à la 
dose de 5 centigram. de trois heures en trois heures. Dès la 
nuit suivante, et après l'administration de 25 centig. de ce 
médicament, la douleur se calme, le pouls est moins fré- 
quent (80 pulsations) et se développe. Le lendemain , la 
même dose d’opium est donnée de deux heures en deux 
heures. Après quarante-huit heures les douleurs cessent 
presqu’entièrement, et le malade, tranquille, joyeux même, 
n’a eu cependant que deux heures de sommeil. Le pouls est 
relevé et a son rythme presque normal {75 pulsat.) ; la cha- 
leur de la peau est halitueuse, une inflammation franche se 
manifeste autour de la partie malade et borne la gangrène. 
Au bout de quelques jours le sommeil revient, une suppu- 
ration de bonne nature s'établit, les forces se réparent ; 
les doses d’opium sont graduellement éloignées, de manière 
qu'après le huitième jour le malade n’en prend plus qu'une 
matin et soir. La séparation spontanée de l'orteil s'opère 
peu à peu, et, après la chute totale &e ce dernier, il reste 
inférieurement un lambeau qui, ramené et maintenu sur la 
surface articulaire du premier os métartalien, au moyen 
de bandelcttes agglutinatives, diminue considérablement 
l'étendue de la plaie et en facilite ainsi la cicatrisation. 

Plaies et ulcères. « L’opium , dit Hufeland , possède une 
aptitude spéciale à favoriser la suppuration et à faire naître 
un pus de bonne qualité. On peut tirer un parti avantageux 
de cette propriété dans une foule de circonstances (op. cit., 
p. 627 y». Il convient, par conséquent, dans les ulcères sor- 
dides , ichoreux , putrides, gangréneux, dans la pourriture 


387 


d'hôpital, etc. J'ai employé avec succès l'opium à l’intérieur 
et à l’extérieur contre les ulcères rouges, extrêmement sen- 
sibles, d’un caractère éréthique. 

Emploi de l’opium comme palliatif. Lorsque les maux 
sont incurables, l’opium nous reste comme une dernière 
ressource pour Calmer la douleur, consoler le malade, 
relever son courage, et le conduire, bercé par l'espérance, 
jusqu'aux dernières limites de la vie. « Je rappellerai seu- 
lement, dit Hufeland (op. cit., pag. 628 et 629), la triste 
position du phthisique incurable, qui s'avance peu à peu 
vers la tombe, au milieu des plus cruels étouffements ; les 
affreuses douleurs qui tourmentent jour et nuit l’infortuné 
atteint d’un cancer, à l’activité dévorante duquel rien ne 
peut le soustraire ; la longue agonie de l'homme frappé d'une 
hydropisie de poitrine. En pareil cas, qui voudrait être 
médecin sans opium ? Combien de malades ce médicament 
n’a-t-il point arrachés au désespoir !... Non-seulement 
l'opium enlève les douleurs de la mort, mais il inspire le 
courage de mourir ; il contribue même physiquement à faire 
naître la disposition morale qui rend l'esprit apte à s'élever 
dans les régions célestes. 

« Un fait tout récent, pris parmi {ant d’autres que je 
pourrais citer, suffira pour exemple. Un homme, tourmenté 
depuis longtemps par des douleurs de poitrine et des vomi- 
ques , fut enfin aux portes de la mort ; une effroyable agonie, 
accompagnée d’étouffements continuels, s'empara de lui et 
le plongea dans un véritable désespoir ; c'était un spectacle 
horrible à voir, et qui frappait de terreur les assistants 
eux-mêmes. Vers midi cet homme prit, toutes les heures, 
2 centig. d'opium ; au bout de trois heures, il était devenu 
calme ; après en avoir avalé 20 centigr., il céda au sommeil 
et dormit plusieurs heures ; il se réveilla tout dispos, sans 
douleur ni anxiété , et si calme, si fortifié au moral, qu’il 
prit congé des siens avec courage, même avec une sorte de 
gaîté, leur donna sa bénédiction, et se rendormit tranquille- 
ment pour ne plus se réveiller ici-bas. » 

Emploi de l'opium à l'extérieur. Nous avons indiqué les 
divers modes d'emploi de lopium à l'extérieur. Le plus 
ordinairement, dans ce cas, on a pour but unique de calmer 
la douleur locale, bien que par cette voie l’on puisse obtenir 
des effets semblables à ceux que produit l’ingestion de 
l'opium dans les voies digestives. Cependant, sous ce der- 
nier point de vue, l’opium, employé par la méthode intra- 
leptique, a des effets plus ou moins incertains, car on ne 
peut jamais s'assurer de la quantité exacte du médicament 


388 


:#bsorbé, les conditions d'absorption de la peau variant sans 
cesse dans les diverses circonstances de santé où de mala- 
dies. Il résulte de cette variation, que des applications de 
préparations opiacées sur la peau, ont souvent donné lieu 
à des empoisonnements mortels, surtout chez les enfants. 
J'ai vu l'application sur l'abdomen, d'une compresse imbi- 
bée d’eau tiède avec addition de 15 gouttes de laudanum 
liquide, chez un enfant de dix-huit mois atteint de coliques, 
produire un assoupissement inquiétant, et qui, heureuse- 
ment, s’est dissipé après l'application de deux sangsues 
derrière chaque oreille. Le pansement des brûlures avec le 
cérat laudanisé peutaussi produire le narcotisme. Le Journal 
de Chimie (1836) rapporte un cas de narcotisme très-grave 
survenu chez un enfant âgé de deux mois et quelques jours, 
par l'application pendant vingt-quatre heures d'un mélange 
de cérat et de 15 gouttes de laudanum liquide sur une 
excoriation très-douloureuse située à la naissance du cou. 
Le visage était coloré, les pupilles dilatées et presque insen- 
sibles à la lumière, la respiration lente, le pouls obscur ; 
la déglutition ne s'opérait presque plus, et l'enfant ne pous- 
sait quelques cris que lorsqu'on pinçait assez fortement la 
peau. Quelques mouvements convulsifs el un rire sardo- 
nique le tiraient de temps en temps de son immobilité. 
M. G. Pelletan , appelé pour lai donner des soins, fit aussi- 
tôt enlever le cérat laudanisé, et prescrivit quatre sangsues 
au bas-ventre. Bientôt la vie parut se ranimer , et l'enfant 
put avaler quelques petites cuillerées d’eau de groseilles ,que 
l'on répéta tous les quarts-d’'heure. Les symptômes de nar- 
cotisme ne disparurent complètement que le troisième jour. 

L'emploi de lopium à l'extérieur, par la méthode ender- 
mique, est beaucoup plus sûre que par la méthode intra- 
leptique. On met surtout cetie méthode en usage dans les 
cas où il est nécessaire d'enlever promptement une douleur 
vive, ou lorsque l’estomac ne peut supporier aucune prépa- 
ration opiacée. On se sert aujourd’hui de préférence, 
pour cela, des sels de morphine, dont l'absorption est 
prompte et l’effe instantané {Voyez plus bas morphine). 

Les bains opiacés ont été employés dans le tétanos.On fait 
dissoudre plusieurs onces d'opium dans l’eau du bain, et 
on y tient le malade pendant une ou deux heures, suivant 
l'effet observé. 

Si l'opium, administré en lavement, à paru produire 
moins d'effet que par la bouche, c’est parce que l’injection 
étant ordinairement rendue de suite, l'absorption n’a pas le 
temps de s’opérer. Quand elle est retenue, l'effet du narco- 


339 


tique est très-prononcé ; à dose élevée il peut, par cette voie, 
comme par la bouche, causer l’empoisonnement. 

On se sert de l'opium à l’extérieur en lotions, fomenta- 
tions, injections, liniments, pommade, teinture, ou en 
topique étendu sur la toile, à la surface d'un cataplasme,etc., 
dans les affections rhumatismales et névralgiques, la pleu- 
rodynie, l’odontalgie, l’oiite, les hémorroïdes douloureuses, 
le panaris à son début, les affections cancéreuses, les 
pustules muqueuses syphilitiques, les chancres doulou- 
reux, etc. Il faut que l'application de ce médicament se 
borne à la place occupée par la douleur, et qu’on la cesse 
aussitôt qu’elle est calmée, afin de prévenir une absorption 
qui pourrail devenir dangereuse, surtout chez les femmes et 
les enfants. 

L'opium est fréquemment employé dans les collyres contre 
lophtalmie { surtout lorsqu'elle est très-douloureuse ou 
photophobique }, la rétinite, Péritite. Le laudanum est d'une 
efficacité reconnue contre les taies de la cornée. On l'emploie 
aussi dans les gargarismes contre la stomatite mercurielle. 
On sait combien sont atroces les douleurs qui accempagnent 
la période aigüe de l'orchite et de l’épididymite blennor- 
rhagique. M. Voillemier { Gazette des Hôpitaux, 1848), les 
dissipe en quelques heures en enveloppant le testicule d'une 
compresse imbibée de laudanum pur, et recouverte d'un 
morceau de taffetas gomiñé. L’organe est comme stupéfié, 
et le travail inflammatoire enrayé par ce topique. J'ai obtenu 
le même effet, en pareil cas, des cataplasmes de feuiiles de 
jusquiame. 

L'effet prolongé de lopium à lextérieur sur certaines 
excroissances, telles que les polypes du nez, du conduit 
auditif, du vagin, etc., a pour résultat la flétrissure,et enfin 
la guérison de ces productions morbides. C’est un moyen 
trop négligé et que l’on devrait toujours employer avant de se 
décider à pratiquer une opération plus ou moins douloureuse: 
Quæ medicamenta non sanant, ea ferrum sanat (Hipp.) 

L'application topique d'une solution aqueuse d'extrait 
d'opium sur les plaies récentes faites par lacération , contu- 
sion où érosion, avant que la période inflammatoire ait 
commencé à se manifester, a eu, dans les mains de M. Bégin, 
le succès le plus heureux (Avplicat. de la Docetr. phystol. 
à la Chirurg. Paris, 1823). Cette solution calme immé- 
diatement la douleur, diminue considérablement l'inffan- 
mation suppurative et la tuméfaction environnante , EL St Or: 
ne lève l'appareil que très-tard , on a lieu d’être étonné des 
progrès rapides déjà faits vers la guérison. Ne pourrait-on 


390 


pas employer avec avantage ce topique après une opération 
chirurgicale, pour prévenir la douleur , la violence de Fin- 
flammation et la réaction fébrile qui en est la conséquence ? 

Morphine. Alcaloïde incolore, inodore, d'une saveur 
amère, découvert par M. Sartuerner. Ce principe, le plus 
actif de l’opium, exerce sur l’économie une grande action 
narcotique, et convient dans tous les cas où l'opium Jui- 
même est indiqué, surtout contre les affections névralgiques. 
Les sels, l'acetate, le sulfate, V'hydrochlorate, erc., sont 
plus fréquemment employés , à cause de leur plus grande 
solubilité, qui permet tous les modes possibles d'adminis- 
tration, tandis que la morphine, étant insoluble, ne peut-être 
introduite par la méthode endermique : on ne peut guère 
la prescrire qu’en pilules ou en poudre, associée à une 
substance appropriée. ! 

La dose de la morphine ou de ses sels, ne doit être, au 
début, que de 1 ou 2 centigrammes, que l’on peut répéter 
une ou plusieurs fois dans les vingt-quatre heures, mais 
qu’il ne faut qu'augmenter qu'à quelques jours d'intervalle, 
l'habitude n’en émoussant que peu l’action. En général, on 
ne dépasse pas 5 ou 10 centig. par jour. J'ai pu néanmoins, 
dans un cas de cancer utérim, arriver progressivement et 
sans inconvénient à la dose de 30 centigr. d’acérate de mor- 
phine dans les vingt-quatre heures. Néanmoins, lorsqu'un 
sel de morphine cesse de produire l'effet ordinaire , il vaut 
mieux avoir recours à une autre espèce de sel de la même 
base, qui agit alors sans qu’il soit nécessaire d'élever la 
dose, que d'augmenter beaucoup la quantité de celui qu'on 
a primitivement employé. 

L'acétate, le sulfate et le chlorhydrate de morphine s'em- 
ploient en pilules, en potion, en sirop contenant 12 milli- 
gram. par chaque 30 grammes. Le sulfate et le chlorydrate 
méritent la préférence sur l'acétate. On emploie à l'extérieur 
une pommade d’acétate de morphine (30 cent. sur 8 gram. 
d'axonge) en frictions contre les douleurs, les névralgies, 
la sciatique, le lombago, la goutte, le rhumatisme, les 
douleurs qui succèdent au zona, le tenesme, etc. 

Le chlorhydrate double de morphine et de codeïne \ sel 
de Gregory), plus en usage en Angleterre qu’en France, et 
qu'on administre comme les précédents, jouit, dit-on, de 
propriétés plus sédatives que les sels de morphine simples. 

Emploi des sels de morphine par la méthode endermique. 
Cette méthode consiste à appliquer le sel de morphine sur 
le derme dénudé au moyen d’un vésicatoire, de la pommade 
de Gondret ou d'un vésicant quelconque. Le contact du sel 


391 


cause d'abord sur la partie dénudée une douleur assez vive ; 
mais après cette première impression l'absorption s'opère 
de suite, et l'effet narcotique a lieu immédiatement. Cet effet 
s’affaiblit à mesure que l’on répète les applications sur la 
même partie, à cause des modifications vitales apportées 
par l’inflammation et la suppuration qui s’établissent à la 
surface du derme. Quand on n’a besoin que d'un effet lent 
et modéré , on peut continuer longtemps l'application des 
sels de morphine sur Ja surface bien nettoyée et vive d’un 
vésicatoire ; mais lorsque l'intensité de la douleur réclame 
une action énergique du médicament, on est obligé de 
soulever chaque fois l'épiderme au moyen d’un vésicatoire 
nouveau ou de la pommade ammoniacale. Il faut, du reste, 
placer le vésicatoire le plus près possible du siége de Ia 
douleur ou d’un centre organique, puis répandre directe- 
ment et sans mélange le sel pulvérisé sur la plaie ; car si on 
le mêle à un corps gras ou qu’on en saupoudre un emplâtre 
ou un cataplasme, l'effet devient incertain. 

La morphine, vu son insolubilité, ne peut être convena- 
blement employée par la méthode endermique. 

Emploi de la morphine par l'inoculation. Le dr Lafargue, 
de Saint-Emilion, expérimente, depuis plus de dix ans, une 
nouvelle méthode d'introduction des médicaments dans 
l’économie, celle qui consiste à les insinuer dans l'épaisseur 
de la peau à l’aide d’une lancette. Ses recherches ont tour- 
à-tour porté sur nos agents les plus actifs. « Si, après avoir 
délayé un peu de morphine avec de l’eau pour en faire une 
pâte, on charge de ce mélange l'extrémité d’une lancette à 
vacciner et qu'on l'introduise presque horizontalement sous 
l’épiderme, à trois millimètres de profondeur, on observe 
aussitôt un peu de gonflement et une teinte rosée autour de 
la piqûre. Un léger prurit et de la chaleur se développent 
en même temps. Si on pratique plusieurs piqüres, à peu de 
distance les unes des autres, la peau rougit partout et Ja 
chaleur est plus vive. L’absoption de la morphine s'annonce 
bientôt par de la céphalgie, des bâillements, de la sécheresse 
de la bouche. 

« Cette nouvelle méthode remplace avec avantage celle des 
frictions, si souvent inefficaces , et surtout celle des vésica- 
toires volants à l’aide desquels on favorise l'absorption 
cutanée, mais au risque de produire des ulcérations et des 
cicatrices. Cette, dernière considération est très-importante 
pour les névralgies de la face, particulièrement chez les 
femmes. Avec l'inoculation , pas de cicatrice, pas de dou- 
leur, BRRARÈUE d' application sur tous les points de léco- 
nomie. 


392 


« Afin de rendre l'absorption de ja morphine plus con- 
plète, M. Lafargue humecte à plusieurs reprises les surfaces 
inoculées avec une solution narcotique. 

« Dans le traitement de la sciatique aigue, M. Lafargue 
combine très-heureusement l’action des ventouses scorifiées 
et celle des narcotiques. Dès qu'il ne sort plus de sang par 
les incisions, on introduit au fond des plaies de la pâte de 
morphine. La guérison s'obtient ainsi avec une promptitude 
remarquable. 

« L'inoculation procure un soulagement immédiat dans 
les cas de démangeaisons rebelles des parties génitales, de 
douleurs vives succédant au zona. Pratiquée sur les gencives 
ou sur les joues, pour conjurer l’odontalgie, elle calme 
comme par enchantement les douleurs les plus aiguës. De 
nombreuses piqûres pratiquées sur une surface cutanée 
endolorie, qu'on va couvrir d’un cataplasme laudanisé, 
favorisent singulièrement l’action de la liqueur narcotique. 

« Ilest des personnes, enfin, qui ne peuvent supporter 
les préparations d'opium introduites sous l’épiderme ou 
déposées dans l'estomac. On pourra essayer chez elles 
l'inoculation de la morphine à dose infiniment petite d’abord. 
M. Lafargue est parvenu, par ce moyen, à obtenir la tolé- 
rance (Journ. des Conn. med. chir., 1. xxxr, 1848, p. 30 
et 31. } » 

Codeine. Substance alcaloïde , dont la découxverte.est due 
à Robiquei, et qui ne diffère de la morphine que par une 
proportion d'oxigène en moins. Suivant M. Barbier et d’au- 
tres thérapeutistes , ce principe actif de l’opium agit princi- 
palement sur les nerfs gangléonnaires , et ceux surtout de la 
région épigastrique. M. Magendie n'admet pas eette action 
spéciale : il dit qu ‘elle est seulement moins active que la 
morphine et qu'on lemploie à dose double dans les mêmes 
cas (2 à 10 ou 15 centig. en poudre ou en pilules). On en 
prépare un sirop qui contient par chaque 30 gram. 10 cen- 
tigram. de codéine, et que l’on donne à la dose de 8 à 30 
et même 45 grammes, par petites cuillerées, étendu 
dans une potion ou une boisson appropriée. 

Le chlorhydrate et l'axotate de codeïne, sont plus actifs 
que la codéine. M. Magendie en a obtenu de bons effets, 
surtout du chlorhydrate, dans certains cas de névralgies 
faciales et sciatiques qui avaient résisté à tous les autres 
moyens. On les administre à la dose de 1 à 5 centig., pro- 
gressivement, en pilules ou en potion. 

La Narcoline est peu usitée en médecine. 


393 


Ici se termine tout ce que nous avions à dire sur l’opium. 
Nous avons donné à cet article une étendue proportionnée 
à l'importance du sujet. Il n’en est point, en effet, qui ait 
autant appelé et mérité l'attention des praticiens. Ce remède, 
dit Sydenham, est si nécessaire à la médecine, qu'elle ne 
saurait absolument s’en passer : Quinimô 1{à necessarium 
est in hominis periti manu organum , jam laudatum medi- 
camentum, ul sine illo manea sit ac claudicet medicina ; 
qui vero eodeminstructos fuerit,muora præstabit quaim quis 
ab uno remedio facil speraverit (Sydenk , op. cit., p.148). 
Tour à tour vanté avec exagération et blämé sans réserve, 
suivant son application judicieuse ou irréfléchie , son emploi 
mesuré ou abusif, l’opium est, pour me servir de l'expression 
d'Hufeland, une épée à deux tranchants, un don divin dans 
la main du maître, un poison redoutable dans celle de 
l’homme sans expérience. 


PAVOT CORNU 
GLAUCIER JAUNE. 


Glaucium flore luteo (T.)— Chilidonium qlaucium (EL ) 


Le pavot cornu ou glaucier jaune croit dans diverses par- 
ties de la France, dans les plaines sablonneuses, près de la 
mer ; je l'ai trouvé en abondance dans la plaine des Pierrettes, 
à Saint-Pierre-lès-Calais. 

Propriétés. 


Le pavot cornu est un poison narcotique. On rapporte, 
dans les Transactions philosophiques, que Charles Worth, 
prenant cette plante pour du chou marin, en fit faire un 

&té qu'il n’eùt pas plustôt mangé que ses domestiques et 
lui en furent tous plus ou moins incommodés et atteints de 
délire; ils eurent tous une altération de l’organe de la vue 
qui leur faisait prendre pour de l'or tout ce qu'ils tou- 
chaient (r). 

« Le glaucium luteum, ainsi que le glaucium rubrum, 
plantes annuelles qui appartiennent à la famille des papa- 
véracées, sont très-communes dans les environs d'Athènes. 


—— 


. (1 Le Semeu contra, pris à forte dose. fait voir aussi les objrts colo- 
riés en jatne ou eu jaune verdätre, ce qui paraît du, suivant M. Ginco- 
mini (trad. de la pharmacol. p. 489,, à ce que la partie co'orante de la 
substance se porte ca et la sur les exosmoses séreuses ct conséquemment 
dans l'humeur aqueuse de l'œil. 


394 


Un herboriste de cette ville, ayant pris ces plantes pour des 
pavots, en fit un extrait, en partie par des incisions prati- 
quées sur les tiges et en partie par la décoction de la plante 
non séchée, et l’offrit en vente à plusieurs pharmaciens pour 
de l'opium. Cet extrait du glaucium exhalait une odeur 
narcotique et présentait un goût amer semblable à celui de 
l'opium, de manière qu'il ressemblait beaucoup à de l'opium 
de Smyrne de mauvaise qualité. » 

M. Landerer croit pouvoir attacher assez d'importance 
à cette notice, puisqu'il a appris de personnes très-dignes 
de foi, etentre autres d'un pharmacien très-accrédité de 
Smyrne, que les fabricants d'opium de cette ville emploient 
dans la confection de ce narcotique les deux espèces de glau- 
cium et surtout le rouge /glaucium rubrum phœniceum), qui 
ressemble beaucoup, par sa forme extérieure, au papaver 
rheas, et que presque tout l'opium qui se vend dans les ba- 
zars de Smyrne n'est qu’un extrait de ces plantes. De même 
toute la thériaque, que l’on peut également se procurer dans 
les bazars pour quelques paras, se prépare au moyen de ce 
prétendu opium (Buchner’s Repertorium f. d. pharm. — 
Répert. de pharm. nov. 1848, p. 145). 

On peut donc, d'après cette substitution opérée dans le 
commerce, considérer le pavot cornu comme un succédané 
de l’opium, et se livrer à des essais comparatifs concernant 
son usage à l’intérieur. 

Garidel (op. cit.) rapporte qu’en Provence les paysans se ser- 
vent des feuilles de glaucier pilées pour déterger les ulcères 
qui succèdent aux contusions et aux écorchures des bêtes de 
charge, notamment les enflures et engorgements dans les 
jambes des chevaux qui proviennent de foulures. « Quelque 
grosses et dures qu’elles soient, dit-il, ie suc de cette plante 
les guérit infailliblement, pourvu que le mal ne soil pas 
Lrop invétéré. » 

Les feuilles de pavot cornu, pilées avec quelques gouttes 
d'huile d'olive, etappl'quées sur la partie malade, sont tout 
aussi efficaces que l’opium contre les contusions, les plaies 
avec déchirures, le panaris commençant, les piqüres de 
sangsues enflammées, l’irritation phlegmasique des vésica- 
toires, etc. Comme dans les campagnes une solution d'o- 
pium n’est pas à la portée de tout le monde, on peut se 
servir avantageusement et gratuitement de cette plante. 
M. le docteur Girard, de Lyon, a rapporié (Journ. génér. de 
Med. t. 25, 2% série, p. 354) plusicurs observations qui 
constatent les bons effets de certe plante dans les cas qne 
nous venons de citer, et je l’ai employée moi-même avec 


395 


succès sur des plaies coutuses avec déchirement, e& suriont 
dans un cas de douleurs hémorhroïdales atroces et contre 
lesquelles on avait inutilement mis en usage les bains, les 
sangsues, les émollients. J'ai fait cesser dans l’espace de 
quinze jours une constriction spasmodique de l'anus, sans 
fissures, qui datait de douze ans, chez une femme de Saint- 
Pierre-lès-Calais, au moyen d’onctions faites, deux fois par 
jour, avec un mélange de 16 grammes de suc de glaueier 
jaune, de 12 grammes de suc de jasquiana et d’un jaune 
d'œuf. 


PECHER .* 
Malus persica (T.) — Amygdalus persica (L.) 


Le pêcher, originaire de la Perse, cultivé partout à cause 
de son excellent fruit qui fait les délices de nos tables, four- : 
nit des ressources à la médecine dans ses fleurs, ses feuilles 
et ses semences (amandes). 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : feuilles en infusion, 55 ou 45 gram. pour 1/2 litre 
d'eau ou de lait. 

Infusion des fleurs sèches, 45 à 50 gram. pour 1/2 litre d'eau ou 
de lait. 

Sirop (8 de fleurs sur 12 d'eau bouillante et 8 de sucre), 30 gram. 
et plus pour les adultes, —de 4 à 13 gram. pour les enfants, soit 
pur, soit étendu dans une potion. 

Poudre des fleurs (rarement), de 2 à 4 gram. dans un véhicule 
approprié. 

Extrait aqueux des bourgeons, de 4 à 2 gram. 50 cent. 

A L'EXTÉRIEUR : feuilles, fleurs et amandes en cataplasme sur l'ab- 
domen comme vermifuge; sur les inflammations et les douleurs 
internes comme calmant. 


Propriétés. 


Les feuilles, les fleurs et l’amande du pêcher ont une sa- 
veur amère analogue à celle des feuilles de laurier-cerise, et 
qu'elies doivent à la présence de l'acide prussique. A grande 
dose elles peuvent, comme ce dernier, produire l'empoison- 
nement en détruisant l'irritabilité des organes. Bertrand a 
vu mourir un enfant de dix-huit mois, au milieu de convul- 
sions et de vomissements, pour avoir pris une forte décoc- 
tion de ces fleurs, que sa mère lui avait donné comme ver- 
mifuge: Roques (Phytog. méd., t. 11, p. 250), qui a voulu 
les essayer sur lui-même, en a pris 30 grammes ; à huit 


396 


heures gu soir, il se mit au lit; à minuit, il fut réveillé par 
des douleurs de ventre, et par des éructations et des vents 
continuels. Bientôt après, il fut saisi d’une forte diarrhée 
et d'une sueur froide générale : quelques tasses de thé léger 
ne lui procurèrent qu’un soulagement passager. Gel état per- 
‘sista jusqu'à trois heures après minuit; alors il se sentiL dé- 
faillir. Une potion éthérée, avec addition de 24 gouttes de 
laudanum liquide de Sydenhawm, ayant été prise en deux fois, 
dissipa peu à peu ces accidents. 

On trouve dans le Journal de la section de Medecine de 
Nantes (1836), le fait suivant : 

«Un homme de 30 ans, atteint d’une fièvre intermittente, 
pril une poignée de feuilles de pêcher en décoction dans une 
bouteille d'eau réduite en un tiers. Bientôt il se manifesta 
des accidents; les yeux étaient injectés, la face rouge et ani- 
mée, la respiration extrêmement gênée, le pouls dur et petit, 
l'épigastre douloureux, le ventre contracté, avec coliques et 
envies de vomir. M. le docteur Loret fit administrer de suite 
une infusion de tilleul et de fleurs d'oranger, avec quelques 
gouttes de laudanum, et prescrivit plusieurs lavements avec 
une forte décoction de têtes de pavots et de graines de lin. 
Des fomentations huileuses et émollientes furent pratiquées 
pendant toute la nuit, et le malade but plusieurs pintes de 
lait. Les douleurs se calmèrent peu à peu et tout rentra dans 
l’ordre.» 

Les fleurs et les feuilles de pêcher sont purgatives, an- 
thelmintiques et diurétiques. Le calice est la partie des fleurs 
du pêcher dans laquelle paraît résider plus particulièrement 
leur principe actif. Coste et Wilmet employaient les bour- 
geons et les jeunes feuilles de cet arbre,récoltés au printemps, 
infusés pendant la nuit et ensuite décoctés, à la dose de 
15 à 45 gramnies dans 360 grammes d'eau, avec addition 
de 30 grammes de sirop de fleurs de pêcher, ou d’une petite 
quantité de miel; ils donpaient la veille, selon la force du 
sujet, 12 à 24 décigrammes d'extrait aqueux de bourgeons, 
saturé de Ja poudre des fleurs de pêcher desséchées. Coste et 
Wiimet ont vu rendre plus de soixante vers à un jeune 
homme d’une quinzaine d'années, peu d'heures après le 
premier bol de cet extrait. Dans l’espace de douze jours, cet 
enfant prit 30 grammes d'extrait en 24% doses, el trois po= 
ions dans lesquelles les feuilles de pêcher étaient entrées 
jusqu’à 30 grammes. Il était d’un tempérament assez robuste, 
difficile à évacuer. Il eùt quatre à cinq selles chaque fois, et 
ordinairement quatre ou cinq vers dans les premières; ila 
été parfaitement guéri sans autre secours. 


397 


Bodart employait les feuilles fraiches de pêcher comme 
succédanées du séné, à la dose de 30 grammes pour deux 
verres de decoctum, à vase fermé ; les fleurs à la dose de 15 
grammes. Îl donnait, aux femmes délicates et aux enfants, 
le sirop des fleurs à la dose d’une cuillerée à bouche, toutes 
les demi-heures, jusqu'à ce que le remède commençât à 
agir. ; 

L'infusion et la décoction des feuilles de pêcher ont été 
vantées dans ja néphrite et plusieurs autres affections des 
voies urinaires. Dower, au rapport de Vogel, les regardait 
comme un spécifique contre les calculs urinaires. Ettmuller 
accorde aussi cette vertu à l'infasion des amandes contenues 
dans le noyau de la pêche. Les Anglais joignent l’eau dis- 
tillée d'amandes amères à l'infusion des feuilles de pêcher, 
et emploient ce mélange pour faciliter la sécrétion et l’exé- 
crétion des urines, appaiser les douleurs néphrétiques et vé- 
sicales. Ce moyen, que j'ai mis en usage plusieurs fois, calme 
promptement les souffrances des malades atteints de spasme 
ou d’irrilation à la vessie, favorise l'émission des urines dans 
Je catarrhe vésical chronique et soulage les calculeux. 

Comme les amandes amères, les amandes de pêches peu- 
vent être employées pour les émulsions en les associant en 
petite quantité aux autres semences émulsives. Seules, et à 
une certaine dose, il est à présumer qu’elles auraient une 
action analogue à celle des feuilles, comme purgatives et 
anthelmintiques. 

Burtin (Mém. couronné en 1783 par l'Acad. de Bruxelles, 
p. 30 ef suiv.) prescrivit à un pauvre, atteint de fièvre in- 
termittente, deux poignées de feuilles de pêcher izfusées 
dans deux kilogranimes de bière brune bouillante, à prendre 
dans l’espace de 2% heures dans l’apyrexie. La fièvre dispa- 
rut après la seconde dose. Encouragé par ce succès, il em- 
ploya le même moyen chez plus de vingt malades atteints de 
fièvres intermittentes de divers Lypes, et tous furent entiè- 
rement guéris. Î employait avec le même avantage dans Fa- 
pyrexie, la poudre des feuilles, à la dose de 30 grammes 
divisée en plusieurs prises ; l'écorce est aussi fébrifuge. 

Les feuilles de pêcher perdent de leur vertu par la des- 
siccation ; cependant, les feuilles à peine développées, ré- 
coltées au printemps, séchées avec soïn et enfermées ensuite 
dans des boîtes, ainsi que le pratiquaient Coste et Wilmet, 
ont conservé une énergie constatée par leur effet purgatif 
et vermifuge. 

J'ai employé les feuilles de pêcher pilées en cataplasme 
sur l'abdomen, chez des enfants d’un à deux ans, et j'ai ob- 


398 


tenu un effet anthelmintique qui, dans quelques cas, ne 
m'a laissé aucun doute. Ce topique m'a paru aussi calmer 
les coliques. On applique avec avantage ces mêmes feuilles 
sur les inflammations externes, les dartres enflammées et 
douloureuses, les uleères cancéreux, les douleurs locales, etc. 

La pêche est, quoiqu’en disent Galien et l'Ecole de Sa- 
Jerne, un fruit très-agréable, nourrissant, rafraîchissant et 
adoucissant; elle convient parfaitement aux tempéraments 
sanguins et bileux, soit dans l'état de santé, soit dans les 
maladies accompagnées de chaleur ei d’irritation, Toutefois, 
les personnes faibles on sédentaires peuvent, par l'usage 
trop abondant ou trop longtemps prolongé des pêches, éprou- 
ver de la débilité d'estomac, des flatuosités et même la diar- 
rhée. On évite ces inconvénients en leur associant du sucre 
ou du vin généreux. 


PENSÉE SAUVAGE, 


VIOLETTE OU PENSÉE TRICOLORE. 


Viola tricolor arvensis (T.) — Viola tricolor (L.) 


Cette plante est très-commune dans les champs et croît 
dans toute la France. On emploie la tige et les feuilles. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : infusion ou décortion dela plante fraîche ou sèche, 
de 50 à 60 gram. par kilog. d’eau. 
Sirop (3 gram. sur 50 d'eau et 50 de sucre), de 15 à 60 gram. 
en potion. 
Extrait, de 5 à 15 grammes. 
Poudre, 2 à 3 grammes dans du lait. 


Propriétés: 


Légèrement diurétique et diaphorétique, elle est regardée 
comme dépurative. On s’en sert contre les dartres, les croùtes 
Jaiteuses, la teigne, les scrofules. 

[Jean-Philippe Boecler, de Strasbourg, et Strack, de 
Mayence, préconisèrent les premiers l'usage de la pensée 
sauvage et conslatèrent, par des expériences, ses effets avan- 
tageux dans les maladies cutanées. Strack la donnait en 
poudre, à la dose de 2 grammes dans du lait, ou en décoc- 
tion matin et soir, ou bien dans la soupe au lait, qui n’en 
prend aucun mauvais goût. Au bout de quatre jours , le 
visage se couvre de croûtes épaisses, ce qui n'empêche pas 
de continuer cette boisson , même après leur chute, qui à 


399 


lieu ordinairement après la seconde ou la troisième semaine, 
ainsi qu'une expérience de trente ans l'a prouvé à l'auteur 
que nous venons de citer. Cet auteur a remarqué, ainsi que 
je l’ai moi-même observé plusieurs fois, que les urines 
prennent, pendant l'usage de cette plante, une odeur fétide, 

analogue à celle de l'urine de chat. 

Depuis, Haase, Metzer, Plouquet, et presque tous les au- 
teurs qui se sont occupés des dermatoses, se sont servi de 
la pensée sauvage dans les dartres, la teigne, la gale, plusieurs 
maladies lymphatiques, le rhumatisme chronique, la blen- 
norrhagie, etc. En 1813, le docteur Fauverge la donna à 
une jeune fille, sujette à des accès nerveux qui étaient re- 
gardés comme produits par la suppression de croûtes lai- 
teuses, et la guérison fut obtenue : eum curaturum quem 
prima origo causæ non fefellerit. (Cels.) 

Pariset, avec son atticisme exquis, tourne en ridicule, dans 
une de ses lettres écrites d'Orient, les médecins de Paris qui 
ordonnent gravement à leurs malades la viola tricolor ; mais 
on sait que “la raillerie tient bien plus de la pénétration de 
l'esprit que de la sévérité du jugement. 

Schlegel porta la confiance dans la pensée sauvage jusqu’à 
la croire utile dans les affections syphilitiques, surtout con- 
tre les ulcères vénériens. 

On oppose à l'opinion des auteurs qui ont vanté cette 
plante, celle de plusieurs praticiens qui prétendent n’en 
avoir retiré que de faibles avantages, ou qui la considèrent 
même comme dépourvue de toute propriété. ] 

Je fais usage journellement de la pensée sauvage dans les 
croûtes de lait; j'ai cru remarquer une grande amélioration 
dans cette Malais lorsque les enfants en ont usé pendant 
quinze à vingt jours. Je la fais macérer à la dose de 4 à 8 
grammes dans 250 grammes d’eau chaude pendant la nuit; 
je fais bouillir ensuite et j’administre cette dose à jeun, 
coupée avec un quart de lait et édulcorée. De cette manière 
les enfants la prennent sans répugnance. Je mets souvent la 
pensée sauvage dans les tisanes dépuratives. 


PERCE - NEIGE.” 


Nivalis triforum minus (T.) 
— Galanthus nivalis (L.) 


La perce-neige se trouve dans les bois, les prairies et les 
jardins ; sa fleur paraît au milieu des frimats et nous annonce 
la première le retour du printemps. Ses bulbes et ses fleurs 
peuvent être utilisées. 


400 


Propriétés. 


Les bulbes de la perce-neige partagent la propriété émé- 
tique du narcisse des prés. « Une femme de la campagne, 
dit Loiselier-Deslonchamps (Daict. des Science. méd.,t. 40, 
p. 210), étant venue vendre au marché, dans une ville d'AI- 
lemagne, des oignons de perce-neige pour ceux de cibou- 
lette, toutes les personnes qui en mangèrent furent prises 
de vomissements qui, d’ailleurs, se calmèrent facilement et 
ne furent suivis d'aucun accident.» On pourrait donc utiliser 
cette plante, qu’il est si facile de se procurer, comme le 
narcisse des prés qui, du reste, est lui-même très-commun. 

Appliqué en cataplasme, le bulbe de perce-neige est ré- 
solutif et maturalif. 


PERSICAIRE BRULAN'TE, 
POIVRE D'EAU, CURAGE. 


Persicaria urens seu hydropiper (T . 
Polygonum hydropiper (L.) 


Cette plante, ainsi nommée à cause de la ressemblance 
de ses feuilles avec celles de pêcher, est une des plus com- 
munes. On la rencontre dans les lieux humides, les fossés, 
les marais, les terrains tourbcux, etc. L’herbe entière est 
employée. 

| Préparations et doses, 
À L'INTÉRIEUR : En infusion, de 5 à 15 grammes par kilog. d'eau. 

Poudre, de { à 4 gram. en bols, pilules, etc. 

Extrait, de 60 centig.à 2 gram. Gans un véhicule approprié. 


Propriétés. 


La persicaire est excitante et diurétique. On l'a conseil- 
lée dans les hydropisies, dans les engorgements viscéraux. 
Appliquée fraiche sur la peau, elle est, dit-on, rubéfiante et 
vésicatoire. On l'emploie à l'extérieur conime détersive. 

[La persicaire exerce sur l’économie une action stimulante 
manifeste. Le sulfate de fer y décèle un principe astringent. 
Son effet diurétique, tant vanté jadis,en l’administrant étendu 
dans une grande quantité d'eau , ne peut avoir lieu qu'au- 
tant que les reins sont dans un état d’atonie ; la surexcitation 
de ces organes, non-seulement s'opposerait à cet effet, mais 
encore rendrait très-nuisible l'action de cette plante. La 
vertu lithontriptique qu'on lui à attribuée est illusoire. Elle 


401 


a été toutefois utile comme diurétique dans la gravelle et le 
catarrhe vésical exempts d'irritaton ou d’inflammation, 
dans l’anasarque asthénique et l’œdême sans lésion du centre 
circulatoire niirritation des voies digestives, dans les en- 
gorgements non inflammatoires du foie et de la rate. Ettmul- 
ler Ja regarde comme vermifuge, et, d’après Peyrilhe, donnée 
en poudre aux moutons, à la dose d’un gros dans du miel, 
elle détruit une espèce de ver auquel ces animaux sont ex- 
posés. 

Suivant Lieutaud, elle est utile dans le traitement de Ia 
cachexie, de la jaunisse et de l'hydropisie, administrée en 
infusion aqueuse. 

La confiance des jeunes filles atteintes de chlorose ou 
d'aménorrhée a été quelquefois, suivant Tournefort, jusqu'à 
croire qu’il suffisait de porter cette plante dans leurs chaus- 
sures pour guérir. 

L'usage interne de la persicaire, entièrement oubliée de 
nos jours, mérite l'attention des thérapeutistes. Des faits soi- 
gneusement abservés mettraient à même d'apprécier les 
avantages que son énergie indique, et lui rendrait le rang 
qu’elle paraît avoir occupé dans la matière médicale indigène, 
à une époque où la science n'était pas assez avancée pour 
préciser lescirconstances pathologiques qui en réclament 
l’application. 

A l'extérieur, on pent, suivant Boerhaave, employer la 
persicaire comme rubéfiante , à l’état frais , lorsqu'on man- 
que de moutarde. 

Comme elle irrite les tissus dénudés, elle convient comme 
détersive sur les ulcères atoniques et screphuleux. Je l'ai 
employée avec avantage, en pareil cas, en l’associant en dé- 
coction aqueuse ou vineuse aux feuilles de noyer. Elle con- 
vient, en décoction concentrée, pour favoriser la séparation 
des cscarres dans la gangrène. Sa décoction aqueuse ou vi- 
neuse a été, suivant Murray, employée en gargarisme contre 
lodontalgie, les aphtes, l'angine, les ulcérations du pharynx 
et des fosses nasales. On a vanté aussi l'application de ses 
feuilles cuites dans l'eau sur les engorgements œdémateux 
et séreux, pour en favoriser la résolution. ] 

Buchwald {spec. med.) recommande cette plante contre 
la gale. Linné dit qu'on emploie, en Norwège, ses feuilles 
cuites dans l’eau et appliquées à l'extérieur contre l’odon- 
talgie. Bulliard rapporte que dans les campagnes on se sert 
de ses graines en guise de poivre. 

J'ai souvent mis en usage la persicaire à l'extérieur,com- 
me résolutive et détersive, dans les engorgements glanduleux 

26 


402 


eriymphatiques. Je l'ai appliqué avec succès sur un ulcère 
sordide, à bords durs et calleux . situé à la partie inférieure 
de la jambe droite, chez un vieillard de soixante-neuf ans. 
Je couvrais cet ulcère avec les feuilles cuites dans l'eau. 
L'action en fut prompte et très-satisfaisante ; au bout de 
huit jours la détersion était complète. Dans un cas d’ulcère 
serophuleux dont la surface était recouverte d’une couche 
membraniforme épaisse , fétide, situé à la partie inférieure 
et interne de la cuisse, chez une jeune fille de quatorze ans, 
j'ai employéavec succès,pour la détersion de cetulcère,parties 
égales de feuilles de noyer et de persicaire. Un cultivateur du 
village de Doudeauville avait toute l'extrémité supérieure 
gauche gonflée, indolente et tendue, sans inflammation , à 
la suite d’un érysipèle dont elle avait été le siége deux mois 
auparavant. Le volume de cette extrémité, surtout à l'avant- 
bras, était doublé. Je fis appliquer sur toute l'étendue du 
membre une décoction concentrée de feuilles fraîches de 
persicaire. L'effet de cette application réussit merveilleuse- 
ment ; dès le lendemain la résolution commençait à s’opé- 
rer, et au bout de huit à dix jours elle était complète. 

La persicaire, je le répète, n’est point à négliger. Les vé- 
térinaires de campagne en font un grand usage à l'extérieur 
pour déterger les ulcères qui surviennent à la couronne du 
sabot, et dans les gonflements lymphatiques des articula- 
tions, après l'application du feu. 

[ La persicaire âcre que l’on doit récolter au mois de juil- 
let, époque de sa floraison, perd, par la dessiccation, une 
grande partie de l’âcreté et de la saveur brûlante qu'elle a 
dans l’état frais. Son infusion et sa décoction n’ont pas non 
plus l’âcreté de la plante verte, 

Le suc de ceue plante pur, ou plus ou moins étendu dans 
l’eau ou la décoction de feuilles de noyer, convient mieux, 
à l'extérieur, lorsqu'il s’agit de combattre la gangrène et 
de stimuler avec énergie des ulcères sordides, des chairs 
blafardes et fongueuses. 

La PersicaiRe pouce (Polygonum Persicaria L.) est, 
dit-on, astringente et a été employée autrefois dans les hé- 
morrhagies passives, les diarrhées chroniques, etc. On l'a 
considérée comme détersive et anti-septique. Ravelet (Thèses 
de Strasbourg, 1806) rapporte huit observations de gan- 
grène traitée avec succès au moyen de la persicaire douce. 

La persicaire tachée, variété de la persicaire douce, jouit 
des mêmes propriétés. 


403 


PERSICAIRE AMPHIBIE,* 


PERSICAIRE ACIDE. 


Potamogeton salicis folio (Bauh.) 
Poligonum amphibium (L.) 


Cette plante vivace croît abondamment dans les marais et 
les lieux couverts d'eau. Lorsque les chaleurs de l'été dessè- 
chent les étangs, les ruisseaux, etc., et que cette plante est 
exposée à l'air après avoir flotté dans l’eau, elle subit des 
changements physiques qui la rendent méconnaissable, et 
lui ont fait donner, dans ce nouvel état, le non de Persicaire 
amphibie terrestre. La racine est employée. 


Propriétés. 


La persicaire amphibie a été l’objet d'une dissertation par- 
ticulière de Jean-Henri Schulze (de persicarid acidd, Hal. 
1735). Burtin (mém. couron. cité) dit que la racine de cette 
plante est le meilleur succédané de la salsepareille. Coste 
et Wilmet (op. cit.) l’ont aussi substituée à cette dernière 
comme celle de houblon; ils en ont préparé un extrait 
aqueux, un extrait résineux, et un extrait gommo résineux. 
La persicaire amphibie, comme plus mucilagineuse. que le 
houblon, à fourni un huitième de plus d’extrait gommeux 
ou aqueux, un sixième de moins d’extrait résineux, et l’autre 
à proportion. Ces extraits, suivant les auteurs que nous 
venons de citer, ont eu un succès étonnant contre les écou- 
lements gonorrhoïques, à la dose de 78 centigrammes matin 
et soir, avalant pardessus une tasse de forte décoction des 
mêmes racines, édulcorée avec un peu de sucre, Il faut con- 
tinuer ce remède de la sorte pendant quelque temps, suivant 
les circonstances, le tempérament du malade et l'intensité 
de la maladie. On administre ces extraits en pilules de la 
manière suivante : extrait aqueux ou gommo-résineux de 
persicaire amphibie, 16 grammes ; parties égales de poudre 
de racine de persicaire et de gomme de gayac, quantité suf- 
fisante; divisez en pilules de 25 à 30 centigrammes. 

J’ai employé la racine de persicaire amphibie, en décoction 
concentrée, contre une large dartre syphilitique située à la par- 
tie supérieure interne des cuisses, chez un ouvrier âgé de 30 
ans qui, un an auparavant, avait subi un traitement mercuriel 
mal dirigé. Cette dartre était survenue trois mois après la 
guérison d’un chancre au prépuce que l’on avait touché fré- 


404 


quemment avec le nitrate d'argent fondu. La décoction de 
racine de persicaire amphibie (100 gram. pour 1,500 gram. 
d'eau réduits à { kilog.), prise à la dose de 4 verres, d'heure 
en heure chaque malin, et continuée pendant un mois, a 
suffi pour faire disparaître peu à peu cette dermatose évi- 
demment vénérienne. Depuis dix ans que le malade est 
guéri, il n’y a eu aucune apparence de récidive. 

Ce seul fait ne suffit pas pour constater les propriétés de 
laracine de persicaire amphibie; mais ilest de nature à enga- 
ger les praticiens à essayer l'emploi de cette racine dans Tes 
cas où la salsepareille est indiquée. Cette dernière est trop 
cher pour la médecine des pauvres. 

La racine de persicaire amphibie, qu’on récolte à la fin de 
l'été ou au commencement de l'automne, doit être préparée 
comme celle de salsepareille, à laquelle elle ressemble à 
tel point que, suivant Coste et Wilmet, elle a été vendue 
pour cette dernière. 


a —— 


PERSIL. 


Apium hortense, seu petroselinum (T.) 
Apium petroselinum (L.) 


.. 


Le persil, cultivé dans tous les jardins potagers, connu 
depuis très-longtemps, se rencontre en Provence dans son 
état sauvage. Les racines, l'herbe et les graines sont usitées. 

Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoct. des racines, de 45 à 60 gram, par kil. d’eau. 


Eau distillée, de 60 à 400 gram. et plus,s seule ou comme véhicule, 
Suc exprimé ‘des feuilles, “de 400 à 123 gram, par Jour. 


A L'EXTÉRIEUR : feuilles fr aiches, contuses, pour cataplasmes. 
Propriétés, 


C'est un diurétique que l’on emploie dans les engorge- 
ments des viscères abdominaux, l’hydropisie, l'ictère, la 
leucorrhée, certaines aménorrhées atoniques, quelques 
exanthèmes fébriles avec défaut d'action vitale, ete. On a 
aussi employé le persil depuis quelque temps comme fébri- 
fuge. La semence de persil est considérée comme carmina- 
tive el préconisée contre les maux d'estomac avec flatuosités, 
quand il n'existe pas de gastrite chronique. Les feuilles, à 
l'extérieur, sont résolutives , employées contre les engorge- 
ments des mamelles, appliquées fraîches et contuses sur 
ces organes, quand, toutefois, ces engorgements ne sont pas 


405 


inflammatoires où phlegmoneux. La racine de persil est 
diurétique lorsque, toutefois, l’atonie des voies urinaires en 
favorise l’action. 

M. le docteur Péraire a publié, dans let Bulletin medical 
de Bordeaux, plusieurs mémoires sur le waitement des 
affections périodiques par les préparations de persil. Ce 
médecin a fait un très-fréquent usage de cette plante dans 
les fièvres intermittentes , et les succès qu'il en a obtenus 
méritent de fixer toute l'attention des praticiens. Les faits 
que M. Péraire rapporte ne laisseraient aucun doute sur la 
vertu fébrifuge de cette plante, si lon ne savait que dans 
tous les temps on à tour-à-tour préconisé et abandonné une 
foule de substances contre les fièvres intermittentes;c'est que 
souvent ces fièvres guérissent spontanément où sont suspen- 
dues par la plus légère révulsion. Bien que dans mes mains le 
suc de persil, que j'ai administré à six malades (dont trois 
ont été guéris après la 2°, 3° ou 4° dose, un n'a éprouvé aucun 
soulagement, et deux une diminution notable dans les accès), 
n'ait pas aussi bien réussi, il n’en est pas moins vrai que c’est 
un remède qu’il ne faut pas regarder comme inefficace, et que 
de nouvelles observations mettront peut-être au rang des 
fébrifuges indigènes à l'usage des pauvres de Ia campagne. 

Voiciles diverses préparations dont M. Peyraire fait usage: 
Poudre de persil, 2 gram. par jour. — Teinture { suc récent 
250 gram., alcool à 33° 125 gram.) 4 gram. par jour —Sirop, 
3 ou 4 cuillerées à café par jour pour les enfants, # cuille- 
rées à bouche pour les adultes, ou incorporées dans une 
potion. — Fin (teinture de persil 60 gram., vin blanc de 
Grave 330 gram.) par petites verrées trois fois par jour.— 
Extrait, de 60 centigram. à { gram. par jour, associé à la 
poudre de persil. 

Il emploie aussi les formules suivantes : Pilules fébrifuges 

de persil : extrait de persil, 1 gram. 3 décigram.; thridace, 
6 décigram.; poudre, q.s. pour 12 pilules.—Potions fébri- 
fuges : eau distillée de persil, 100 gram.; extrait de persil, 
6 décigram.; sirop d’absynthe, 30 gram. à prendre en trois 
fois.— Autre potion : eau de mélisse, 60 grammes ; eau de 
menthe, 30 gram.; extrait de persil, { gram.; sirop de persil, 
20 grammes.— Même mode d'administration. 
_ [J'ai employé avec succès le suc de persil dans le vin 
blanc contre les engorgements des viscères abdominaux, 
l’'œdème et l'anasarque qui suivent ou accompagnent les 
fièvres intermittentes automnales, dans la leucorrhée et la 
blennorrhée, l'albuminurie chronique. 

J.-F. Herrenshwand { NMédecine domest., Berne 1795.— 


406 


Ordonn. pour l'Apothacaire, n° 214) regarde la racine de 
persil comme pouvant être substituée àfcelle de pareira 
brava. ] 

On a vanté contre la syphile l'extrait de persil donné en 
pilules à la dose de 4 grammes le matin et de 2 grammes Je 
soir, ou en sirop à la dose de 45 grammes matin et soir. Chez 
plusieurs malades, d'après les essais de Cullerier (Dict. des 
Scienc. méd.), le mal a disparu, chez d’autres il a résisté, 
chez la plupart les symptômes sont revenus, ou bien la 
maladie à reparu sous une nouvelle forme. Le professeur 
Lallemand (Journ. de Chim. méd., t. 4, p. 30) a employé 
avec succès l'huile essentielle de persil, à la dose de deux 
ou trois gouttes par jour dans un verre d’eau, contre des 
blennorrhagies qui avaient résisté au copahu et à la térében- 
tine. Un médecin homæopathe m'a dit avoir souvent guéri 
l'urethrite, aigue ou chronique, au moyen d’un mélange à 
parties égales de suc dépuré de persil et d'alcool à 40°. Le 
malade en met deux ou trois gouttes sur la langue, le matin 
à jeun, et reste ensuite deux minutes sans ouvrir la bouche, 
et quelques instants sans boire. Crede...…. 

Les gens de la campagne appliquent les feuilles de persil 
froissées sur les contusions et sur les coupures. Dans le 
premier cas, elles peuvent être utiles comme résolutives ; 
mais, dans le second, elles sont évidemment nuisibles par 
l'irritation qu'elles causent aux bords non réunis de la 
plaie, qu’il suffit dans tous les cas de rapprocher et de main- 
tenir en contact, sans autre traitement. Il est difficile de 
faire croire aux paysans que la nature guérit les plaies. 

J'ai vu employer, d'après le conseil d’un vieux curé, dans 
les engorgements scrofuleux, l’hydarthrose, les glandes 
engorgées des mamelles, etc., du persil pilé dans un mortier 
avec des limaçons à coquille, jusqu'en consistance d’on- 
guent, qu’on applique sur la partieemalade, étendu sur de 
la filasse et qu'on renouvelle tous les jours. Ce topique est 
un résolutif mitigé. Je l'ai appliqué avec avantage sur les 
abcès froids, pour y déterminer la maturation (r). 


{s) Les persennes qui ne connaissent pas bien les plantes prennent que!- 
quefois la petite cigue, qui cst un poison violent (æthusa cynapium), pour 
le persil, qui lui ressemble beaucoup , et parmi lequel elle se trouve 
souvent dans les jardins. Bulliard rapporte plusieurs accidents fâcheux 
causés par cette erreur ; il cite, entre autres, l'exemple d'un jeune gar- 
con qui avait cru manger du persil; tout son corps s'enfla et se couvrit 
de tâches livides; sa respiration devint embarrassée, et, bientôt après, 
il expira. ? 

Le fait suivant, communiqué à Virey, prouve que la petite cigue, em- 


PERVENCHE, 


VIOLETTE DES SORCIERS. 


Pervinca vulgaris angustifotia (T) 
Vinca minor (L.) 


Cette jolie plante se trouve partout à la campagne, et nous 
montre sa fleur, d'un bleu pur et céleste, dans les beaux 
jours du mois de mai. 


£ 


Propriétés. 


C'est un faible astringent que l’on a administré contre 
des hémorrhagies qui ont pu s'arrêter d’elles-mêmes , ce qui 
arrive souvent par le repos et un régime convenable. 
Combien de fois la réputation d’un médicament s’est établie 


ployée à l'extérieur, peut donner lieu à des accidents analogues à ceux 
que produit son ingestion. 

« Mme P. B., quelques jours après son accouchement, et ne nourris- 
sant pas son enfant, voulut faire passer son lait et diminuer l’extrême 
gonflement du sein. La sage-femme, ayant conseillé d'appliquer un épi- 
thème de persil sauvage, fricassé ou cuit, on s'adressa a l'un de ces pré- 
tendus botanistes, qui donna, por ignorance, de la petite cigue des jar- 
dins (æthusa eynapium L), qui ressemble au persil. Bientôt Mme B. 
ressentit une douleur vive ct poignante, avec chaleur, rougeur, anxiétés 
précordiales. Le lendemain, une multitude de phlictaines ou vésicules, 
rs Re de lymphe, s'élevérent sur les mamelles et rendirent beauceup 
de liquide séreux à la levée du topique. La malade était extrêmement 
oppressée, ne respirait qu'avec grande peine, éprouvait de violentes pal- 
pitations de cœur, des agitations et des angoisses très pénibles. Le ventre 
serré et tendu, une soif ardente qni ne pouvait être étanchée, parce que 
des aphes, des pustules enflammaient la gorge, rendaient l’état de la 
malade presque désespéré, et ces symptômes persistérent pendant plu- 
sieurs jours. 

« Cependant, au moyen des remèdes calmants et adoucissants, le mal 
se dissipa peu à piu, mais assez singulièrement, car Ja malade fat saisie 
d'un flux de salive aussi abondant que si elle eût été traitée par le mer- 
cure, ct cette salivation dura près de 44 jours ; les aphes, les palpitations 
disparurent en même temps, et Mme P. B.. après avoir couru le risque 
de la vie, se rétablit lentement. 11 lui resta longtemps une plus grande 
sensibilité nerveuse qu'auparavant et qui n’a cédé qu'à l'usage prolongé 
des bains (Bull, de pharm. et des Scienc. access., 6e ann. p. 340). » 

La petite cigue diffère du persil en ce qu’elle n’est point odorante 
comme ce dernier, que sa racine est plus petite, que ses feuilles sont d'un 
vert jaunâtre à leur face supéricure, que ses fleurs sont blanches et qu’elle 
est munie d’un involucre partiel. 

Une autre ombellifére demi-aquatique, le faux persil des jardins 
(ænanthe crocata L), et qui est très-vénéneuse, peut être aussi confondue 
avec le persil, auquel elle ressemble beaucoup. On la reconnait à ses 
feuilles, qui sont plus glauques que celles du persil, 


408 


sur les résultats heureux des efforts de la nature ! Quoi qu'it 
en soit, nous devons dire que le vulgaire emploie la décoc- 
tion de pervenche contre la leucorrhée, les hémorrhagies, 
et en gargarisme dans les maux de gorge. Quant à nous, 
nous nous Contenterons d'admirer celte jolie fleur, qui rap- 
pelait à J.-J. Rousseau les douces émotions de sa jeunesse. 


PEUPLIER, 


1° Peurzrer Baumier. (Populus balsamafera L.) Le peu- 
plier baumier, originaire de l'Amérique septentrionale, est 
cultivé dans le jardin potager de chaque métairie des dé- 
partements du Nord. 


Préporations et doses, 
A L'INTÉRIEUR : Infusion, décoction, macération, de 43 à 50 gram. 
par kilog, d'eau ou de vin. 
A L’'EXTÉRIEUR : Pommade (4 sur 4 d'axonge) pour pansements. 


Propriétés. 


Les bourgeons de ce peuplier sont balsamiques, toniques 
et excitants. [ls ont été conseillés comme sudorifiques dans 
la goutte, le rhumatisme chronique, les diarrhées et dysen- 
teries anciennes. On les a aussi administrés, comme diuré- 
tiques et emménagogues , dans la néphrite et l’aménorrhée. 
Pour l’usage externe, on les emploie comme maturatifs, 
comme détersifs, dans les ulcères atoniques, les brülures, 
les gerçures, etc. 

Le peuplier baumier est regardé par les campagnards 
comme le vulnéraire par excellence. On applique ses feuilles 
entières ou froissées sur les coupures, les plaies avec perte 
de substance et les ulcères, sans trop distinguer les cas où 
il peut nuire de ceux où il est réellement utile. Le malade 
guérit plus ou moins promptement à la faveur du baumier, 
ou malgré son application, et l'admiration qu’il inspire, 
passe de père en fils dans les familles. 

Le peuplier baumier a , sur les membranes muqueuses, 
l’action de toutes les substances résineuses, mais à un 
moindre degré. Le nom de copahu que lui ont donné les 
paysans semble en indiquer les propriétés. La décoction des 
bourgeons de cet arbre m'a été très-utile dans les affections 
catarrhales pulmonaires chroniques, vers la fin du catarrhe 
de Ja vessie et dans la leucorrhée. J'ai guéri de cette der- 


409 


nière maladie une jeune fille qui en était atteinte depuis 
deux mois, à la suite d’une transition subite du chaud au 
froid. Il y avait bien évidemment çatarrhe utéro-vaginal, 
avec écoulement muqueux abondant. Trois verres par jour 
de décoction de bourgeons pendant quinze jours suflirent 
pour târir tout-à-fait l'écoulement. Il n’y eut aucune réci- 
dive. - 


90 PEUPLIER BLANC DE HOLLANDE, BLANC Bois. (Populus 
alba L). MM. Cottereau et Verdé de Lisle ont annoncé à la 
Société de Médecine pratique, en 1833, qu'ils avaient em- 
ployé avec succès les feuilles de peuplier blanc dans les fie- 
vres intermittentes. Ces médecins en font bouillir une poi- 
gnée dans un verre d'eau, et administrent la décoction 
deux heures avant l'accès. M. Gallot, docteur en médecine 
à Provins, avait déjà employé un grand nombre de fois 
l'écorce du peuplier blanc, et la regardait comme la subs- 
tance qui se rapprochait le plus du quinquina par ses pro- 
priétés fébrifuges. L'écorce de Ja racine est plus active. 

J'ai employé les feuilles de ce peuplier et celies du peu- 
plier tremble qui sont plus amères et contiennent de la 
salicine. Je n’ai que trois cas de fièvre tierce à citer où cet 
amer à réussi ; mais je ne puis savoir jusqu'à quel point 
il a pu contribuer à la guérison, qui n'a point été instan- 
tanée. 

Les semences du peuplier blanc et celles du peuplier du 
Canada (vulgairement peuplier carré), sont entourés d'une 
sorte de coton qui peut remplacer le coton écru dans le trai- 
tement de la brûlure ou comme hémostatique. 


3° Peupzier Noir. (Populus migra L.) On emploie ses 
bourgeons récents. [ls ont été donnés tantôt comme sudori- 
fiques dans les maladies de la peau et les rhumatismes, 
tantôt comme diurétiques dans certaines affections des reins 
et de la vessie. La dose est de 8 à 15 grammes en infusion 
dans un demi-litre d’eau bouillante, ou en macération dans 
une égale quantité de vin généreux. On en prépare aussi 
une teinture alcoolique qui s’administre à la dose de 2 à 4 
gram. et plus, en potion ou dans une tisane appropriée. À 
l’extérieur, on emploie les bourgeons de peuplier noir, en 
les faisant macérer dans des corps gras oualcooliques pour 
en extraire les principes. On en frictionne les parties affec- 
tées de névralgies, de rhumatisme ou de certaines éruptions 
cutanées. Ces mêmes bourgeons entrent dans l’onguent po- 
puleum. 


310 


PHELLANDRIE, 


PHÉLLANDRE AQUATIQUE, MILLE-FEUILLE AQUATIQUE , 
FENOUIL D'EAU, CIGUE AQUATIQUE, 
OENANTHE PHELLANDRIE (1). 


Phellandrium dodonæi (T) 
Phellandrium aquaticum (L.) 


Le phellandre ou phellandrie est commun dans les lieux 
humides, les étangs, les marais, les fossés. La racine, 
l'herbe et les graines sont usitées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 20 à 60 gr. par kil. d'eau bouillante. 
Teinture (4 sur 6 d'alcool à 25° }, de 2 à 4 gram. en potion. 
Poudre des graines, de 4 à 8 gram. en pilules ou en électuaire. 
Sirep, 100 gram.pour 300 gram. d'eau bouillante ; — après refroi- 

dissement et filtration, mêlez à sirop de sucre ,—1,000 gram. 
réduit par évaporation à 700 gram. contient 2 gram. de partie 
aciive par 46 grammes.) 


Propriétés. 


Le phellandre est regardé comme narcotique, excitant, 
diurétique. On l’a conseillé dans les scrophules, le scorbut, 
les catarrhes chroniques, l’hydropisie, l'asthme, quelques 
maladies nerveuses,mais surtont dans la phthisie et la fièvre 
intermittente. 

Cette plante avait été employée par les vétérinaires contre 
la toux des chevaux, avant qu'on en eût fait les premiers 
essais dans la médecine humaine. Cependant on pense géné- 
ralement que lorsqu'elle se trouve par hazard mêlée dans Île 
foin , elle leur cause une paraplégie extrêmement dange- 
reuse. Ce fait semble annoncer une action délétère très- 
énergique sur le systême nerveux, et, sans doute, plus 
particulièrement sur la moëlle épinière (2). 


G) Les noms de ciguë d’eau, ciguë aquatique, donnés mal à propos au 
phellandre , pourraient faire confondre cette plante avec la ciguë vireuse 
(cicuta virosa), que l’on trouve aussi désignée dans la Flore francaise de 
Lamark sous le nom de cicuta aquatica, et qui est un poison très violent. 


(2) Le bétail ne touche point à cette plante tant qu'elle est verte. 
Sèche, Linnée dit qu'elle ne lui est pas nuisible. Bulliara cite le fait de 
deux jeunes chevaux qui s'étaient échappés dans la prairie, et qui, ayant 
ane de cette plante par inexpérience, sont morts empoisonnés le jour 
même. 


411 


Le phellandre est une plante suspecte, quoiqu'elle soit 
loin d’être aussi dangereuse que la grande ciguë , dont elle se 
rapproche beaucoup. On à employé la racine, les feuilles et 
surtout les semences de cette plante. Ces dernières, comme 
dans d’autres ombellifères analogues , étant plus ou moins 
aromatiques el ne participant point du principe vireux qui 
rend souvent les autres parties dangereuses, peuvent être 
administrées avec plus de confiance. Des essais sur les 
feuilles ou les racines ne devraient être tentés qu'avec réserve 
et en commençant par de faibles doses. 

Le fenouil d'eau a joui, au commencement de ce siècle, 
d'unegrande réputation commeanti-phthisique. Voici la for- 
mule que Hers employait: semences de phellandre,25 gram.; 
sucre de lait, 50 gram.; nitrate de potasse, 30 gram.; gomme 
arabique, 40 gramm. — Mêlez, pulvérisez, divisez en douze 
paquets. En prendre trois par jour. On peut porter graduel- 
lement la dose du fenouil d'eau à 75 grammes (r). 

[Le médecin hollandais Thuessing a regardé les semences 
de phellandre comme jouissant d’une action tonique spé- 
ciale sur le poumon, et pouvant être très-utile dans les af- 
fections catarrhales chroniques et la coqueluche. Thomson, 
médecin danois, dit qu'elles agissent sur les poumons comme 
calmantes etexpectorantes; il a même reconnu dans les cra- 
chats, chez ceux qui en font usage, l'odeur qu'elles y lais- 
sent. Elles ne guérissent pas, dit-il, la phthisie bien confir- 
mée, maisil est certain qu’elles en arrêtent les progrès, di- 
minuentles symptômes, tels que la toux et l’expectoration,etc. 

« Les moyens les plus importants, dit Hufeland en parlant 
de la phthisie pulmonaire puralente, ceux dont l'expérience 
a constaté l'efficacité dans certains cas, sont les semences 
de phellandrium aquaticum dont j'ai moi-même reconnu les 
vertus spéciales, mais en les administrant à hautes doses, 
depuis 1 gramme et demi jusqu'à 8 grammes par jour, en 
poudre, ou 14 grammes en décoction. (Man. de Méd. prat.}» 

Lange dit avoir observé que le phellandre fait cesser l’hé- 
moptisie,qu'il arrête le développement des tubercules pulmo- 
naires, qu’il s'oppose à Icur ramollissement et contribue 
enfin à la cicatrisation des cavernes. Bertini rapporte le cas 
d’une consomption pulmonaire parvenue au dernier degré, 
et guérie par l'emploi de ces semences; la diarrhée et les cra- 


(1) Cette dose pol énorme, L'abus de ces semences peut causer, dit-on, 
des vertiges, de l'anxiété, des spasmes, l'hémoptysie. Toutefois, ces acci- 
dents sont tellement rares , qu'on peut les considérer, quand ils survien- 
nent, comme dépendant d'une disposition particulière aux malades , ou 
produits par une cause étrangère à Paction du médicament, 


412 


chats diminuèrent sensiblement au bout de cinq jours de 
leur usage, l’état général s’améliora. Portée graduellement 
depuis 1 ou 2 décigrammes jusqu'à 6 grammes dans les 
vingt-quatre heures, la fièvre se dissipa ainsi que la toux, 
l'expectoration et la diarrhée; les fonctions se rétablirent, 
et, en deux mois et demi, le malade sortit de l’hôpital en 
parfaite santé. 

M. Michea (Bullet. de therapeut. 1848) rapporte trois 
faits remarquables à l'appui de l'efficacité des semences de 
cette plance dans les affections de poitrine; 1° un jeune 
homme de 25 ans, né d’une mère phthisique, phthisique 
lui-même, au moins au premier degré, amaigri, crachant le 
sang, etc., prend les semences du phellandre aquatique du- 
rant l'espace de six semaines. Les symptômes les plus graves 
disparaissent peu à peu; la matité du son et l'obscurité du 
bruit respiratoire sous la clavicule droite ont rétrogradé ; le 
malade reprend chaque jour de l'embonpoint. 2° Cas de 
catharre pulmonaire chronique opiniètre, que rien n'a mo- 
difié, et que cependant le phellandre aquatique a enlevé en 
deux mois. 3° Malade affecté d'asthme, dont les accidents, 
dissipés par l'emploi de la semence de cette plante, ne sont 
pas revenus depuis plusieurs mois. M. Michea fait prendre 
la poudre de semence de phellandre à Ia dose de 5 déci- 
grammes, mêlée avec du sucre; mais la forme sirupeuse lui 
a paru agir avec plus de promptitude. Îl faut, suivant ce 
médecin, donner de deux à quatre cuillerées à bouche de 
SF0p par jour, et en continuer l'usage sans interruption pen- 
dant l'intervalle de six semaines à deux mois. Cern’estguère 
qu'au bout de ce temps que les effets de cette médiation se 
manifestent. 

M. Sandras, médecin de l hôpital Beaujon ( Revue 
pharmac. 1849), a récemment employé avec succès le phel- 
landre dans les affections pulmonaires tuberculeuses et les 
catarrhes bronchiques chroniques. Ce médecin se sert de Ia 
semence encore entourée de son enveloppe et pilée, puis in- 
corporée dans du miel ou du sirop de miel, à la dose de 1 
gramme tousles soirs, ou soir et matin, suivant le cas; il n’a 
pas été au-delà de 2 grammes. Quand elle est prise une 
heure avant le repas, ou deux heures après, elle ne trouble 
ni les digestions ni aucune autre fonction, et peut être sup- 
portée sans fatigue pendant des mois entiers. 

« On ne peut, dit M. Sandras, à cause de l'obscurité des 
signes réels de la phthisie commençante, être sûr que c'est 
bien cette maladie que l'on à enrayée. Comme médecin, j'ai, 
grace au phellandre, éprouvé quelquefois une vive satisfac- 


413 


tion en voyant revenir à la vie commune des malades qui 
réunissaient à mes yeux toutes les probabilités d’une phthi- 
sie commençante; mais, Comme homme de science, je me 
garderais bien de soutenir que mon diagnostic probable ait 
été posé sur une tuberculisation réelle dans les cas où le 
phellandre, employé au début, m'a réussi. Malgré les doutes 
que la guérison m'a laissés sur la nature du mal, ces faits 
sont assez importants pour que j'en tienne grand compte, 
eL pour que je conseille vivement l'emploi du phellandrium 
aquaticum, au risque de ne pas compléter l'observation, 
comme disent les anatonio-pathologistes. » 

Dans un état avancé de la maladie, le phellandre est, 
suivant M. Sandras, un palliatif précieux. Les phthisiques 
affectés de fontes tuberculeuses incontestables et de tous les 
dépérissements qui s'ensuivent, n’ont pas plustôt usé pen- 
dant une huitaine de jours de la phellandrie qu'ils se sentent 
mieux : ils ont cessé de souffrir. L'expectoration est devenue 
à Ja fois moins abondante et plus facile ; la fièvre à diminué 
ou disparu ; la diarrhée s’est amendée ; l’appétit est revenu, 
et en même temps le sommeil répare mieux les forces. 
« Depuis que je sounrets mes malades à ce traitement, 
ajoute M. Sandras, je les vois presque tous endurer la 
phthisie, et dans l'immense majorité des cas, ils se conservent 
merveilleusement sous tous les rapports pendant des mois 
qui,sans ce traitement,seraient dévolus à la consomption. » 
M. Sandras a vu à l'Hôtel-Dieu annexe, un jeune romain 
reprendre toutes ses fonctions assez bien pour pouvoir 
retourner dans son pays, malgré l'existence d’une caverne 
qu'il portait au haut de chaque poumon. A côté de lui était 
un jeune enfant scrofuleux et tuberculeux qui a guéri d’une 
caverne tuberculeuse qu'il portait au sommet d'un des 
poumons. 

Dans les catarrhes pulmonaires chroniques la phellan- 
drie produit, en général, ses bons effets au bout de peu de 
jours. Elle convient surtout dans les bronchites des vieil- 
lards qui viennent avec les froids humides et ne disparais- 
scut ordinairement que par les temps doux; elle met fin, 
chez les jeunes sujets lymphatiques, et sans réaction, à ces 
quintes de rhumes qui les tourmentent si longtemps. 

Le phellandrium à paru à M. Sandras n’être d'aucune uti- 
lité contre l'emphysème pulmonaire et l'asthme, hormis les 
cas où ces affections se compliquent de bronchite chronique. 

En présence de tels résultats, la phellandrie doit être tirée 
de Foubli. La plupart des médecins français la regardaient 
comme tombée en désuétude, après avoir été autrefois pré- 


414 


conisée; formule banale adoptée par les auteurs de matière 
médicale qui se sont successivement copiés, et qui rejettent 
ainsi des remèdes indigènes qu’ils n'ont jamais essayés. 

L'emploi des semences de phellandrie n'empêche pas 
l'usage des autres moyens appropriés aux indications qui 
peuvent se présenter. Il convient souvent de lui associer les 
balsamiques , le lichen d'Islande, les fleurs d’arnica, les 
feuilles d’hyssope ou de marrube blanc, les racines de poly- 
gala, le quinquina, etc.] 

« M. le docteur Rothe, de Guhran, après une longue expé- 
rience du phellandre aquatique, affirme que c'est un moyen 
très-précieux dans les cas de toux chronique due à une aug- 
mentation de l’irritabilité de la membrane muqueuse des 
voies aériennes, compliquées d’une sécrétion de mucus plus 
ou moins abondante. Ce médecin a retiré des avantages 
remarquables de l'emploi du même moyen, dans beaucoup 
de cas de toux catarrhale entretenue par une prédisposition 
à la dégénérescence tuberculeuse. « Il faut reconnaître, 
dit-il, que ce médicament contient des principes narcotiques 
doux, qui calment comme l’opiam, sans donner lieu aux 
effets consécutifs désagréables qui accompagnent l’adminis- 
tration de ce dernier.» M. Rothe poseen principeque la phel- 
landrie est particulièrement indiquée chez les sujets débiles 
et à système nerveux très-irritable. Plusieurs fois il l'a 
prescrit avec le plus grand succès chez des femmes hysté- 
riques , pour arrêter rapidement une toux d'irritation très- 
fauigante et véritablement inquiétante, qui avait duré des 
mois entiers en résistant opiniâtrément à tous les autres 
moyens employés. Toutefois, lorsqu'il existe des lésions 
org ganiques des poumons, des ulcères, on ne peut en attendre 
qu'un secours palliatif, comme de Lous les autres agents 
thérapeutiques qui ont été conseillés jusqu'ici. On doit 
observer, d’ailleurs, que, si ce médicament est des plus 
convenables pour la pratique des pauvres, en raison de Ja 
modicité de son prix, il a un inconvénient reel, celui de 
déplaire au plus grand nombre des malades par son odeur 
désagréable. M. Rothe le prescrit aux indigents sous forme 
pulvérulente, à la dose de 50 à 75 centigram., trois fois par 
jour, seul ou associé à 25 ou 50 centigram. de chlorydrate 
d'ammoniaque, ou encore à parties égales de poudre de 
réglisse composée (Pharmacop.de Prusse). Aux gens riches, 
il administre ordinairement sous forme pilulaire, de la 
manière suivante : Poudre de semences de phellandre, 
12 gram.; extrait de chardon bénit, 8 gram.; chlorydrate 
d'ammoniaque purifié, 4 grammes. M. et F.S. À. une masse 


415 ; 


parfaitement homogène, divisée en pilules du poids de 
10 centigram. roulées dans la poudre de lycopode, et qui 
doivent être renfermées dans un flacon. On fait prendre 
6 à 8 de ces pilules quatre fois par jour { L’Abeille medic., 
1.2, p. 253 et 254—1845.) 

S'il fallait croire tout ce qu’on a écrit sur le phellandre, il 
serait un fébrifuge supérieur au quinquina même : il offri- 
rait des secours efficaces contre les cancers, les ulcères, la 
gangrène, les hydropisies , le scorbut, l’asthme, la coque- 
luche, l’hypocondrie, et une foule d’autres maux qui n’ont 
entire eux que peu ou point d'analogie. Je ne nie point les 
qualités actives de cette plante ; mais je ne puis m'empêcher 
de trouver exagérés de pareils éloges. 

C'est surtout Ernsting (Phellandriolog. physico-medic., 
Brunsw., 1739), qui, dans un traité spécial, a signalé le 
phellandre comme un fébrifuge infiniment au-dessus du 
quinquina. Il l’administrait dans toutes les fièvres d'accès, 
à la dose de #4, de 8 et même de 12 grammes un peu avant 
l'accès , les jours de fièvre. Ii est à remarquer que les accès 
ne cessaient que graduellement , puisque ce médecin parle 
des doses qu'il administrait, en outre, les jours d’apyrexie. 
Qui nous dit alors que la disparition de la fièvre, après 
l'emploi plus ou moins prolongé de cette plante, est plutôt 
due à son influence qu'aux efforts de la nature et à la marche 
spontanée de la maladie ?—Pour reconnaître dans une sub- 
stance la vertu fébrifuge , il faut bien se rendre compte de 
son effet immédiat sur l'accès fébrile. Cet accès doit dispa- 
raître ou être considérablement affaibli après l’administra- 
tion de la première dose du médicament pendant l’apyrexie. 
Ce résultat, obtenu un grand nombre de fois, devient une 
vérité pratique incontestable. 

[ Quelques auteurs ont recommandé Fusage des feuilles 
de phellandrie aquatique à l'extérieur en décoction et en 
cataplasme dans le traitement des vieux ulcères, contre les 
tumeurs scrofuleuses et le cancer. ] 


PIED D'ALOUETTE DES CHAMPS ,* 


DAUPHINELLE DES BLÉS, CONSOUDE. 


Delphinium consolida { E..) 
Delphinium arvensis (T.) 


Cette plante, de la famille des renonculacées, est com- 
mune dans les moissons, pendant les mois de juin et de 
juillet. On a employé la plante et les semences. 


416 


Préparations ef &oscs. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction , de 5 à 45 gram. par kilog. d'eau, 
Teinture (4 de semence sur 8 d'alcool), de 50 cent. à 5 grammes 
en potion. l ARE. 
À L'EXTÉRIEUR . Infusion, pour lotions, injections , collyre. 
Propriétés, 


Cette plante, par son analogie avec les aconits, réclame 
de la circonspection dans son emploi à l'intérieur. On l’a 
regardée comme diurétique, et conseillée dans les obstruc- 
tions des viscères abdominaux et les affections chroniques 
des voies urinaires. Elle a été aussi employée comme anthel- 
mintique. La teinture alcoolique a été employée dans la 
dyspnée nerveuse et l’asthme. Ces diverses propriétés, mal 
déterminées, ont besoin d’être constatées par une rigoureuse 
observation. A l'extérieur, on l’a vantée contre l’ophtalmie. 
Les semences pulvérisées détruisent la vermine de la tête 
comme celles de la staphisaigre. La décoction de ces 
semences, en lotion, a été quelquefois employée par des 
paysans contre la gale et la maladie pédiculaire. 


PIED DE CHAT ," 


GNAPJIALIE. 


Guaphalium dioïcum (L.) 
Elychrisum montanum (B). 


Cette plante petite et cotonneuse, dont les fleurs repré- 
sentent, quand elles sont bien épanouies, le dessous du pied 
d'un chat, croît dans les lieux sees et Sur les collines. Les 
capitules de pied-de-chat sont regardées comme béchiques 
et administrées en infusion théïforme (15 à 30 gram. par 
kilogram. d’eau } ou en sirop dans les affections catarrhales 
bronchiques. 


PIGAMON ,* 


FAUSSE RHUBARBE, RHUBARBE DES PAUYRES, RUE DES PRÉS. 


Thalictrum flavum (L. 
Thalictrum magnum (Dod) 


Cette plante croit dans les prés humides el marécageux , 
où elle fleurit en juillet et août. Sa racine, d’une saveur dou- 
ceûtre et un peu amère, donnée en décoction (30 à 60 gram. 
pour 1 kilog. d’eau ), est purgative. Murray dit qu'à triple 
dose de celle de rhubarbe, elle produit le même effet que 
cetie dernière. Dodoens regardait ses feuilles mêlées aux 


417 


herbes potagères comme laxatives, et la décoction des ra- 
cines comme possédant la même propriété à un plus haut 
degré. On a encore regardé cette plante comme diurétique, 
apéritive, et on l’a prescrite dans l'ictère, les embarras 
chroniques des viscères abdominaux. Lesson, pharmacien 
à Rochefort ({ Mérat et Delens, ouv. cit.), a retiré de la racine 
de pigamon un principe auquel il a donné le nom de thalic- 
trine, et qu'il a employé avec succès dans les fièvres inter- 
mittentes à la dose de 75 centig. à 1 gramme. Tournefort dit 
que de son temps on faisait usage de la racine de pigamon 
dans Îa diarrhée. Boërhaave indique sa racine comme pur- 
gative à la dose de 30 à 60 grammes. 

J'ai employé la décoction des racines à Ja dose de 23 
gram. dans 500 gram. d’eau, en décoction ; elle a provoqué 
de trois à cinq selles, sans coliques. Ce purgatif doux peut 
trouver son application dans la médecine rurale. 


PILOSELLE , * 


ÉPERVIÈRE PILOSELLE , OREILLE DE SOURIS OU DE RAT. 


Dens leonis qui pilosella officinarum (T). 
Hieracium pilosella (L.)— 


La piloselle est une petite plante très-commune au bord 
des chemins et dans les lieux incultes, où elle montre ses 
fleurs jaunes pendant tout l’été. Cette plante, un peu amère 
et astringente, était jadis employée contre les hémorrhagies 
passives, les diarrhées chroniques, les ulcérations internes, 
la phthisie, et comme fébrifuge. Elle est tombée aujourd’hui 
dans l'oubli le plus profond. Mais les campagnards , qui 
n’abandonnent pas aussi facilement que les hommes de 
science les traditions populaires, la mettent encore en 
usage. J'ai vu plusieurs fois une forte décoction aqueuse de 
cette plante agir assez puissamment sur les reins pour faire 
rendre des graviers. On la récolte pendant le mois de juin, 


avant la floraison. 


PIMENT DES JARDINS, * 


PIMENT ANNUEL , POIVRE D'INDE ; CORAIL DES JARDINS, 
POIVRE DE GUINÉE , POIVRE D'ESPAGNE. 
Capsicum siliquis longis propeudentibus (T). 
Capsicum annuum (I..) 


Le fruit de cette solanée, d’une belle couleur rouge, d’une 


saveur âcre et brûlante, et que nous récolions aujourd’hui 
27 


dans nos jardins, est usité comme condiment culinaire et 
comme médicament. 
Préparations çé doses. 
A L'INTÉRIEUR : En poudre, de 5 à 10 décigrammes en électuaire, 
pilules, etc. 
Teinture alcoolique (4 sur 6 d'alcool à 53°), de 4 à 4 grammes 
en potion. / 
Pinaigre (4 sur 6 de vinaigre et 6 d'eau-de-vie}, de 2 à 4 gram. 
dans une décoction appropriée. 
Huile essentielle, de 45 & 95 cent. sur du sucre ou dans un véhi- 
cule approprié. 
Sirop (4 sur 2 de sucré), de 40 à 15 grammes en potion. 
A L'INTÉRIEUR : Teinture ,de 45 à 20 gram, par 20 grammes d'eau 
pour gargarisme. 
Poudre, de 43 à 20 gram. pour cataplasme rubéfiant, gargarisme. 
Propriétés, 


Le piment est un des excitants les plus énergiques. Frais 
et réduit en pâte, il rubéfie la peau comme la moutarde. 
A petites doses et associé aux amers , on la donne dans la 
dyspepsie, dans l’hydropisie, la paralysie, la goutte” Les 
Anglais l'adiministrent dans certains cas de variole, de rou- 
geole et de scarlatine quand l'éruption Jlanguit par défaut 
d'action vitale, et dans la fièvre jaune. Chapmann l'a prescrit 
en décoction dans l'angine tonsillaire et l'angine maligne, 
réuni au quinquina (Bullet. des Scienc. med. de Férussac, 
txt, p.302). On a aussi appliqué en collyre, dans certaines 
ophtalmies par relâchement des tissus de l'œil, son suc 
exprimé étendu d’eau (Coxe, amer. disp., p.158). Wright 
Va employé dans les hydropisies passives, où les ferrugineux 
sont nécessaires. On emploie dans ce cas, de préférence, 
le vinaigre ou le sirop de piment plus ou moins étendu dans 
un véhicule approprié. 


PIN ET SAPIN. 


Les pins et les sapins fournissent à Ja médecine de grandes 
ressources. On emploie le pin à pignon ou cultivé { Pinus 
pinea L.), le pin sauvage (Pinus sylvestris L.), le pin 
mugho, torchepin, pin du Briançonnais (Pinus muyo L.), 
Je pin maritime (Pinus mariima L.), le pin de Venise, 
mélèze (Pinus larix L.), le sapin pesse, epicea ou faux 
sapin { Abies excelsa L.), le sapin commun ou sapin argenté, 
sapin vrai (Abies pectinalu}), erc. à 

Les parties usitées de ces arbres sont dans le pin à pignon, 
Ja semence (pignons doux); dans tous les autres, les jeunes 


nn. "7 


419 


pousses {bourgeons ), le bois, un suc résineux {térébeu- 
thine}), etc. 
> Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Pignons, de 20 à 69 grammes en émulsion pour 
500 grammes d'eau. 
Infusion de bourgeons, de 20 à 50 gram par kilog. d’eau. 
Sirop de bourgeons (4 sur 4 de sucre et 2 d’eau), de 50 à 429 
grammes en potion. 
Extrait alcootique de bourgeons (4 sur 6 d’alcoo! à 220 ), de 50 
centig. à 2 grammes. 


Extrait aqueux ((4 sur 6 d'eau), idem. 
A L'EXTÉRIEUR : snfusion de bourgeons , pour fomentations, lotions, 
injections. 
Propriétés. 


Les pignons doux ou fruits du pin pinier, que I on mange 
en Jtalie et en Provence, sont d'une saveur agréable. Ils 
contiennent beaucoup de fécule etune huile douce qui rancit 
facilement. Ils sont émulsifs et peuvent remplacer les 
amandes douces. Les amandes du pin cembro sont égale- 
ment bonnes à manger. 

Le bois et les bourgeons ou turions, soit de pin, soit de 
sapin, sont excitan(s, antiscorbutiques, diurétiques, dia- 
phorétiques. Je les ai souvent employé en décoction ou en 
infusion dans l’eau, la bière, le vin, le cidre, le lait ou le 
petit-lait contre le scorbut, les rhumatismes chroniques, les 
affections catarrhales bronchiques et vésicales, la gonorrhée, 
la leucorrhée , les scrofules, la phthisie, les hydropisies, 
l'abuminurie chronique, la goutte vague, les affections 
cuianées chroniques, les syphilides, etc. 


TÉRÉBENTHINE. 


La térébenthine est le suc résineux qui découle des pins 
et des sapins que nous venons de mentionner. On emploie 
surtout celle des sapins et du mélèze. On en retire aussi du 
pistacia terebinthus (L.) On distingue les térébenthines de 
Chio, du Canada, de Venise, de Strasbourg, de Bordeaux. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Térébenthine de Venise, 50 centig. à 25 grammes 
progressivement, en bols, pilules, enémulsion, avecla magnésie. 
Térébenthine cuite (privee d'huile essentielle), de 2 à 42 gram. 
en pilules. ; 
Sirop (4 sur 8 de sirop simple), de 45 à 50 grammes en potion. 
Teinture (4 sur 4 d'alcool à 35"), de 4 à 4 gram.en potion, pilules. 
A L'EXTÉRIEUR : de 5 à 50 gram. en lavement , en liniment, on- 
guent , emplâtre, etc. 


420 


Froprléiés, 


Les diverses espèces de térébenthine ont, à peu près, les 
mêmes propriétés. C'est loujours une action stimulante 
qu'elles exercent sur nos organes , €l plus spécialement sur 
les membranes muqueuses génito-urinaires et sur le sys- 
tême nerveux. Suivant l’état des divers appareils, elle porte 
son activité sur la sécrétion urinaire, sur l'exhalation cuta- 
née, sur la sécrétion bronchique. À haute dose, elle provoque 
le vomissement et la purgation. La térébenthine est employée 
avec avantage dans les catarrhes chroniques pulmonaires et 
vésicaux, la phthisie, la biennorrhée , la leucorrhée ato- 
nique, la diarrhée muqueuse entretenue par le relächement 
de ja muqueuse intestinale, par une sorte d'altération des 
fonctions sécrétoires de cette membrane ou par son ulcéra- 
tion superficielle ; dans le rhumatisme chronique, la goutte 
atonique, certaines névralgies, etc. C'est principalement 
dans la cystite chronique que la térébenthine triomphe ; 
elle Ja guérit dans la moitié des cas, et améliore presque 
constamment l’état du malade dans les catarrhes vesicaux 
dus à la gravelle, aux affections de la prostate, à la paraly- 
sie de la vessie, etc. 

À l'extérieur, la térébenthine entre dans les onguents 
irritants et détersifs qu’on emploie au pansement des plaies 
et des ulcères. Appliquée sur la peau , elle la rubéfie et agit 
alors comme dérivatif, et peut être utile dans le rhumatisme, 
Ja bronchite, la coqueluche, la pleurésie, la pneumonie, la 
péritonite, et pour rappeler des exanthèmes chroniques 
partiels. Elle a été employée aussi en vapeur dans le rectum 
contre le ténesme qui accompagne la dysenterie. 


HUILE ou ESSENCE DE TÉRÉBENTHINE. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Comme stimulante, de 59 centig. à À gramme en 
émulsion ou en électuaire.— Comme antinévralgique, de 2 à 40 
grammes en plusieurs doses , en émulsion ou avec du miel. — 
Comme purgative et vermifuge, de 10 à 60 gram. dans du lait 
sucré où en émulsion. 

A L'EXTÉRIEUR : en lavement, de 15 à 50 gram. pour 250 gram. 
d'eau; liniment, frictions , lotion; ; en topique sur un cata- 
plasmes , etc. 


Propriétés. 
A petite dose, l’action de l’huile essentielle de térében- 


thine se porte particulièrement sur le système nerveux, ce 
qui fait qu'on l'emploie avec avantage dans les névralgies , 


e 


421 


et surtout dans la sciatique. On la conseille aussi dans le 
lombago , le tic douloureux, le tétanos et même l'épilepsie. 
Elle est mise en usage comme stimulante dans l'atonie des 
organes génito-urinaires , la cystite chronique, le catarrhe 
vésical, la gonorrhée, la blennorrhée et la leucorrhée. 

Depuis que M. Récamier a employé, il y a près de trente 
ans, l'essence de térébenthine dans la névralgie sciatique, 
les praticiens l'ont généralement adoptée comme le moyen 
le plus efficace contre cette affection. L'administration de 
celie substance, outre les phénomènes ordinaires pro- 
duits par son ingestion, cause une chaleur accompagnée 
de sueur dans les membres abdominaux, particulièrement 
dans celui qui est le siége de la névralgie, et plus encore le 
long du trajet du nerf malade. Cette action topique avait déjà 
été observée par Cullen et Home. Plus les caractères névral- 
giques essentiels sont bien dessinés, plus les douleurs sont 
vives, plus les chances sont favorables. Les malades guéris- 
sent promptement lors même que l'essence de térébenthine 
n’agit, ni comme purgative, ni comme sudorifique, ni comme 
diurétique. Toutefois si, au bout de huit ou dix jours d’u- 
sage, cette médication n’a pas réussi, il ne faut plus rien en 
attendre. 

L'essence de térébenthine a été employée dans le tétanos. 
W.Tomes a rapporté un cas où, après avoir provoqué des 
vomissements, elle fit cesser promptement des contractions 
musculaires. Le trismus reparut quatre fois, et chaque fois 
le même moyen le fit disparaître. Le docteur Phillips ( Med. 
ehirurg. trans., t. vx, p.65) a vu, par l'administration de ce 
médicament, des convulsions violentes se dissiper très- 
promptement. MM. Weaver, E. Percival et D. Lithgow ont 
réussi, le premier dans un cas de catalepsie vermineuse, les 
deux autres dans des circonstances qui étaient étrangères à 
la présence des vers dans les voies digestives. M. le docteur 
Morand dit avoir employé avec succès l’essence de thérében- 
thine dans l’apoplexie, la paralysie, l'asthme, etc. 

A haute dose, ce médicament est anthelmintique. C'est 
surtout contre le ténia qu'il a été prescrit avec succès. Les 
docteurs Cross, Kennedy, Ozanam, Gomez, Knox, Melo, etc., 
l'ont préconisé contre cet entozoaire. I n'est pas moins utile 
contre les lombries , les ascarides et autres vers intestinaux. 
Je l'ai souvent employé en lavement contre les ascarides. 
Le traitement contre ie ténia en exige de fortes doses, tant 
par la bouche qu’en lavement. 

L'huile essentielle de térébenthine est employée depuis 
longtemps contre la fièvre puerpérale par le docteur Kinneir 
d'Edimbeurg Il la donne jusqu'à ce que les symptômes de 


422 


la maladie soient appaisés. Suivant ce médecin, il est rare 
qu'on seit obligé d'en prendre plus de trois ou quatre fois 
pour obtenir ce résultat. Rarement l'essence est vomie. On 
la fait précéder de la saignée et de la purgation par le calo- 
mel ; elle favorise l'effet de ce dernier. Le docteur Douglas 
regarde cetie essence comme le remède le plus certain de 
la péritonite, même dans les cas les plus graves. 

D'un autre côté, MM. Trousseau et Pidoux nient formel- 
lement cette efficacité. Ils regardent les cas où son adminis- 
tration a été suivie de succès comme accidentels et dus à des 
constipations , à des engouements stercoraux du cœcum ou 
de la potion sigmoïde du colon, lesquels causent de vives 
douleurs, du gonflement abdominal, de la rénitence dans 
une des régions inguinales, et qui peuvent, si on n'en 
débarrasse promptement les nouvelles accouchées, amener 
des entérites phlegmoneuses, des abcès dans le tissu cellu- 
aire qui unit aux deux fosses iliaques les deux portions 
d’intestin indiquées ci-dessus , et même causer des périlo- 
nites partielles, rarement générales. Les faits qui se sont 
offerts à mon observation viennent à l'appui de cette opinion, 
que je partage en tous points. Durande a employé l'essence 
de térébenthine mélée à partie égale d’éther sulfurique dans 
les coliques hépatiques dues à la présence de concrétions 
biliaires. Plusieurs médecins anglais ont vanté cette huile 
essentielle contre les iritis et les choroïdites chroniques. 

Enfin, l'essence de térébenthine a été prescrite dans la 
goutte, le rhumatisme , les fièvres intermittentes , les em- 
poisonnements par l'acide hydrocyanique et l'opium, la 
salivation mercurielle , le diabète, l'anasarque, la néphrite 
albumineuse chronique. 

À l'extérieur, l'huile essentielle de térébenthine est d'une 
grande utilité comme révulsive. Elle cause, en frictions sur 
la peau, une rougeur érythémateuse passagère. Je la préfère 
à la pommade stibiée et à l’huile de croton, pour rubéfer 
la face antérieure de la poitrine dans la coqueluche ; elle est 
plus supportable que la première, et beaucoup moins chère 
que Ja seconde, sans être moins efficace. J'en ai retiré de 
grands avantages dans la bronchite chronique, la phthisie, 
la péritonite chronique, etc. Quand on veut produire un 
cffet prompt et énergique on met de l’essence de térében- 
thine sur un cataplasme. Ce dernier est à peine appliqué 
depuis quelques secondes qu'il cause des picotements, un 
sentiment de chaleur difficilement supportés au bout de 
quatre à six minutes ; il semble au malade que la partie est 
couverte d’eau bouillante. IT en résulie une vive rubéfaction 
de Ia peau, qui subsiste encore quelque temps.Ce cataplasme 


423 


bien chaud, arrosé comine nous venons de l'indiquer avec 
l'essence de térébenthine , à laquelle on peut encore joindre 
à partics égales une teinture aromatique, de l'alcool &e 
mélisse, du baume de Fioraventii, etc., appliqué autour da 
pied et même de la jambe, produit une révulsion énergique 
et prompte dans les cas de rétrocessions goutteuses, rhuma- 
tismales ou exanthématiques, dans les palpitations de cœur, 
dans les névralgies qui occupent les parties supérieures, 
et dans toutes les circonstances où il s’agit de ranimer le 
principe vital, de produire une réaction à la fois vive et 
prompie. J’ai employé ce moyen avec succès, comme puis- 
sant auxiliaire, dans le traitement du choléra asiatique 
de 1832. 

Kentish, Coxe, Goodail, Horlacher, ont recommandé 
l'essence de térébenthine dans la brûlure ; quel qu'en soit 
le degré, disent ces médecins, elle calme la douleur et éteint 
promptement la phlogose. Les plaies stationnaires et indo- 
lentes , les ulcères atoniques ou sordides, la gangrène, la 
pourriture d'hôpital, etc., trouvent dans ce médicament un 
puissant stimulant, un détersif, un antiseptique énergique. 


GOUDRON. 


Le goudron est une poix liquide, un produit résineux 
impur que l'on retire du bois de divers arbres conifères, 
principalement des pins, après qu'on les à épuisés par des 
incisions. 

Préparations et doscs. 3 
A L'INTÉRIEUR : En substanre, de 2 à % gram. en piluies ou dans 
au lait, de la bière, ete. 

Déccction ou infusion, de 45 à 59 gram. par kilogramme d’eau à 

prendre à jeun par tasses 

Süuop , de 60 à 160 gram. par cuillerées. 

A L'EXTÉRIEUR: Pommade , À de goudron sur 3 où 4 d'axonge, 
ou huile essentielle, 4 sur 6 d'axonge. 

Décoction, de 20 à 60 gram. par kilog. d'eau, pour injection, 

lotions ; famigations, bains. 


Propriétés. 


Le goudron est tonique et stimulant, à doses modérées . 
il excite les organes digestifs et cireulaioires ; il augmente 
les sécrétions et surtout celles des urines, et à une action 
notable sur les fonctions de la peau. On Fadminisitre dans 
les catarrhes vésicaux et pulmonaires chroniques, dans la 
pnthisie, l'asthme, le scorbut, et surtout dans certaines 
affections cutanées, telles que les dartres rebelles, le pso- 
riasis , 1a lèpre vulgaire , Ie prurigo , ete. 


424 


Le goudron en vapeur a été préconisé contre la phthisie 
pulmonaire par Christison et Wall. On a obtenu par ce 
moyen , à l'hôpital de Berlin, les résultats suivants : « Sur 
cinquante-quatre phthisiques distribués en quatre salles, 
dans lesquelles on évaporait quatre fois par jour une mar- 
mite de goudron, de manière à les remplir de vapeurs 
épaisses, quatre furent guéris, six éprouvèrent une amélio- 
ration sensible, seize ne ressentirent aucun changement, 
douze devinrent plus malades, et seize moururent {Dict.de 
Méd., 2° édit., t. x1v, p.192.) — (x). 

« Pourles maladies chroniques de la peau, dit M. A. Caze- 
rave (Duct. de Méd., 2° édit.), l'emploi du goudron, mis 
assez souvent en usage, à été suivi, sinon de succès mer- 
veilleux , au moins le plus ordinairement de bons résultats. 
Willan et Bateman l'ont recommandé contre l’ichiyose. Je 
J'ai vu, dans un assez grand nombre de cas, à l’hôpüital 
Saint-Louis, employé par M. Biet dans le traitement des 
affections squammeuses, et aussi dans celui du prurigo. J’ai 
vu rarement obtenir, avec ce moyen seul, des guérisons 
complètes, mais souvent des améliorations premptes et 
positives. Enfin, les expériences de E. Acharius , à lhôpital 
de Stockholm, conduiraient à faire accorder au goudron une 
efficacité réelle contre la syphilis. » 

L’eau de goudron, que l’on prend à la dose de 500 gram., 
par verrées le matin à jeun, seule ou avec du sucre, du lait, 
du vin, de la bière, etc., excite l'appétit, accélère la diges- 
tion, augmente le cours des urines et l'exahalation cutanée. 
On l’emploie dans la dyspepsie, le scorbut, l'asthme, la 
cachexie, le rhumatisme chronique, la phthisie pulmonaire, 
les affections catarrhales chroniques des voies respiratoires 
et urinaires. On l'a aussi employée en injection. 

.. Comme MM. Trousseau et Pidoux (owe. cite, t.I, p.46), 

j'ai employé avec un succès remarquable les injections d’eau 
de goudron dans la vessie affeciée de catarrhe chronique, 
dans les conduits fistuleux qui donnent passage à une sup- 
puration abondante et fétide, et sont entretenus par des 
caries et des névroses ; dans les clapiers purulents résultant 
d’abcès profonds qui ont consumé le tissu cellulaire inters- 
titiel des muscles ; entre la peau décollée et les tissus sous - 
jacents dans certains ulcères scrophuleux ; dans le conduit 


çr) Les fumigations que l’on emploie dans les cas de catarrhe pulmo- 
naire et de phthisie, se préparent en faisant chauffer la quantité que l’on 
désire de goudron, avec suffisante quantité d’eau , qu'on entretient à la 
chaleur de lébullition. IL faut éviter avec soin que l'eau ne se vaporise 
entièrement , afin qu'il n’y ait point production du grande abondance 
de vapeurs empyreumatiques, qui seraient nuisibles au malade. 


425 


auditif externe, siége de ces otorrhées interminables, que 
laissent après elles, chez les enfamis surtout, les fièvres 
éruptives, et principalement Ja scarlatine. 

La pommade de goudron, à laquelle on joint quelquefois 
une petite proportion de laudanum de Sydenham ou de 
Rousseau, est employée en frictions contre la gale, Ja teigne 
granulée , l’eczéma, l’herpès, le psoriasis. 


RÉSINE, POIX DE BOURGOGNE, POIX NOIRE, 


COLOPHANE. 


La RÉSsINE ou Porx-RÉsine, est une sorte de térébenthine 
solide qui coule des pins et ne diffère que par une moindre 
proportion d'huile essentielle. On ne s'en sert en médecine 
que pour préparer divers onguents et empiâtres qu'edle rend 
stimulants , résolutifs et surtout agglutinatifs. 


La Porx pe BourGocnE ow Porx RLANCuE, GaLtPoT, Poix 
JAUNE, Poix Grasse, est de la térébenthine solidifiée par 
l'évaporation d’une partie de son essence. On ne l'emploie 
qu'à l'extérieur, étendue sur de la peau, et on l'applique 
loco dolenti dans les affections rhumatismales chroniques, 
la pleurodynie, la sciatique ; comme dérivative, dans les 
catarrhes bronchiques, les toux chroniques, la phihisie 
pulmonaire, appliquée entre des épaules ou à la partie anté- 
rieure de la poitrine. Elle adhère fortement pendant une ou 
plusieurs semaines , et l’on est souvent cbligé, pour F'ôter, 
d'employer l'huile tiède. Chez certains sujets elle rubéfie la 
peau ou provoque une éruption papuleuse incommode, mais 
qui augmente son effet révulsif. Comme ce topique est ordi- 
nairement très-large et qu'il gêne les mouvements, je lui 
substitue souvent le papier agglutinatif. 


LA Porx Noire est un produit résineux de la combustion 
du pin. On l’emploie comme maturatif à l'extérieur. Son 
action est analogue à celle du goudron. Les paysans font 
mourrir les vers des poulains en leur faisant avaler des bou- 
lettes de poix noire. 


La CocopnanE où Brar sec, Porx sècus, est le produit 
fixe de la distillation de Ia térébenthine. Eïle entre dans Ia 
composition de plusieurs emplâtres. Réduite en poudre, on 
s'en sert comme hémostatique dans les hémorrhagies capil- 
laires. 


426 


PISSENLIT. 


Den: leonis latiore folio (T.) 
Leontodon taraxacum (L). 


Cette plante se rencontre partout dans les prairies. La 
racine et l'herbe sont usitées. 


- Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction et infusion, de 43 à 60 grammes par 
kilogramme d'eau. 
Suc exprimé des feuilles, de 50 à 1530 grammes. 
Extrait par decoction (4 sur 10 d'eau), de 4 gram. à 40 gram. 


Propriétés. 


Le pissenlit est diurétique , diaphorétique , tonique. Il est 
fréquemment employé dans les affections chroniques des 
viscères {ictère, hépatite chronique, ete.) , l’hydropisie , les 
maladies de la peau, les affections scorbutiques, etc. 

Ii en est du pissenlit comme de la patience chez nos cam- 
pagnards ; ils mettent cette plante dans toutes les tisanes, 
et l’emploient dans toutes les maladies. 

[ Je le donne souvent en décoction dans les vices de sécré- 
tion de la bile ; dans l'ictère essentiel ou symptomatique, et 
surtout dans les engorgements hépatiques ou spléniques qui 
suivent les fièvres intermittentes. Je le donne aussi dans la 
convalescence des fièvres muqueuses et adynamiques, pour 
relever les forces digestives et rétablir les sécrétions. 
Zimmermann, appelé auprès du Grand-Frédéric, atteint 
d'une hydropisie de poitrine, prescrivit l’usage du sue de 
pissenlif, qui le soulagea beaucoup en excitant la sécrétion 
urinaire. [tard { Doct. des Scienc. méd., t. 22, p. 404), a vu 
une anarsaque assez considérable se dissiper au bout de trois 
semaines par l'usage de ce suc. Hanin {Cours de Mat. méd., 
4.2, p.127) à eu aussi de fréquentes occasions d'observer 
les bons effets du pissenlit dans les hypropisies. On récolte 
les feuilles du pissenlit avant la floraison. ] | 


PIVOINE, * 


HERBE CHASTE, ROSE SAINTE, 


Peonix folio nigricante splendida quæ mas (T.) 
Peonia officinalis (L.) 


Cetie plante croit spontanément dans les prairies et les 
bois moniueux des contrées méridionales et même des 


427 


départements du centre de la France. On la cultive dans les 
jardins ; on a employé la racine, l'herbe, les fleurs et les 
graines. 


Préparations cé doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction et infusion , de 50 à 69 grammes par 

kilogramme d'eau. 

Sirop des fleurs (4 sur 2 d'eau et 5 de sucre), de 59 à 69 gram. 
en potione 

Teinture (4 sar 4 d'alcool), À à 4 gram. en potion. 

Extrait (1 sur 6 d'eau), 4 à 4 gram. en bols, pilules. 

Poudre des racines , de 2 à 4 gram. en bols, pilules, ou dans un 
liquide approprié. 

Poudre des semences, de 50 cent. à À gram. 50 centigrammes. 


Propriétés, 


La racine de pivoine fraiche a une odeur forte et vireuse, 
une saveur amère, acerbe , âcre. Desséchée, elle perd son 
odeur, mais elle coriserve son amertume. L’extrait aqueux 
est douceûtre , presque insipide et inodore ; l'extrait alcoc- 
lique s'empare de l’odeur et de la saveur de la plante. 

Les tubercules de la racine de cette plante contiennent 
beaucoup de fécule et fournissent un amidon blanc, gélati- 
neux, gluant, analogue à celui de la pomme de terre. 

La pivoine , considérée comme antispasmodique el un peu 
narcolique, a été préconisée contre l'épilepsie, les convul- 
sions, les toux nerveuses, la coqueluche , etc. "Elle est une 
des plantes dont la médecine a le plus anciennement fait 
usage. Galien lui prodigue les plus grands éloges et lui 
suppose même la propriété de guérir l’ épilepsie par la seule 
suspension au cou du malade. “Parmi les modernes, Fernel 
et Willis n’ont pas craint de confirmer par leur Ain 
celui de Galien sur les effets de cette plante par le simple 
contact. 

Théophraste exigeait, pour condition, que la plante eût 
été cueillie la nuit. Les astrologues en faisaient un usage 
absurde. On l’a crue propre aux maladies de l'esprit comme 
à celles du corps : Unus error ex aliero, ut articuli in 
tœnna , pullulat (Murr, app. med.) 

Toutefois, à travers ces contes merveilleux et ridicules, 
qui ont fait rejeter la pivoine comme inerte, la vérité se fait 
jour et montre dans ceite plante des vertus réelles. « [l est 
sûr , dit Gilibert , que quelques épileptiques ont été guéris 
après avoir pris la racine de pivoine ; et si sur d’autres 
sujets elle a été inutile, c’est que l’ouverture des cadavres 
prouve que la plupart des épilepsies reconnaissent pour 
cause des vices dans le cerveau absolument insurmontables. 


€ 


428 


L'infusion des fleurs et la racine en poudre ontété efficaces, 
continue le même auteur, dans quelques éclampsies des 
enfants, dans la danse de Saint-Gui et dans la coqueluche. » 

Peyrilhe dit que cette plante est vraiment héroïque et 
qu'on ne l’emploie pas aussi souvent qu'on le devrait. 
Brendel et Tissot ont parlé de ses succès dans l’épilepsie et 
les maladies convulsives. Hume assure lui devoir la guérison 
de deux épileptiques. Hippocrate (morb. mul.) lui reconnaît 
une action spéciaie sur l’utérus, sans doute, par suite de 
celle qu’elle exerce comme antispasmodique sur le systême 
nerveux, avec lequel l'appareil utérim est si intimement lié. 

« Les anciens, dit Gilibert, ont conseillé la racine dans 
les empâtements des viscères. L'analogie des principes mé- 
dicamenteux de ‘la pivoine avec ceux des autres plantes, 
bien vérifiée, est favorable à cette assertion. C’est encore ici 
le cas, ajoute-t-il, d'inviter les praticiens à étendre l'usage 
de cette plante à toutes les maladies causées par une Iymphe 
épaissie ou par les engorgements chroniques des viscères. 
Les expériences nombreuses que nous avons faites, nous 
font regarder la racine de pivoine comme très-efficace dans 
plusieurs maladies chroniques. » 

« On devrait, disent MM. Merat et Delens, empioyer tou- 
jours la racine en décoction à l’état frais, car on peut s’en 
procurer toute l'année. Peut-être alors retrouverions-nous 
dans la pivoine ces vertus si pronées contre l'épilepsie, et 
Paction sédative sur le système nerveux qu'on lui a accordée, 
ainsi que ses propriétés contre les engorgements des vis- 
cères, comme emménagogues, etc. Nous consetilerons 
volontiers, avec Murray, le suc de la racine fraiche, qui est 
Jaiteux , d’une odeur pénétrante, à la dose de 30 grammes 
(1 once) quoiqu'il soit fort désagréable à prendre, mais parce 
qu'il est doué de toute l’activité de la plante. Ce sue et Ia 
décoction de racine fraîche, dont la dose est de 8 à 30 
grammes dans un litre d’eau réduit à moitié, sont bien pré- 
férables, non-seulement à la poudre, mais encore à l'extrait, 
à l’eau distillée, au sirop , etc., qu'on préparait avec la pi- 
voine. » (Dact. de Mat. méd., t. v, p.161.) 

Il résulte de tout ce que nous venons de rapporter sur Ja 
pivoine, que cette plante à une action principale sur le sys- 
tême nerveux : mais que certe action, ainsi que celle qu'elle 
peut exercer sur divers appareils organiques, a besoin d’être 
constatée par des observations cliniques dépouillées de 
toute idée préconçue et ayant pour caractère exclusif la pré- 
cision et la vérité mises en rapport avec l’état actuel de la 
science. 

On a attribué aux fleurs et aux semences les mêmes pro- 


429 


priétés qu’à la racine. On arrache ceiie dernière en automne, 
et si l'on veut la conserver, il faut la faire sécher au soleil 
ou à l’étuve. 


— 


PLANTAIN. 


Plantago latifolia (T.) 
Plantago major (L } 


Il faut avoir une foi robuste pour croire aux propriétés 
médicales du plantain , rapportées par Dioscoride, Galien , 
Boyle, Borelli et tant d’autres enthousiastes de merveilles 
opérées sans doute par l’eau dans laquelle avait bouilli le 
plantain, ou avec laquelle on l'avait distillé ; car l’eau simple 
a des qualités incontestables, et c’est bien certainement à ces 
qualités que l’eau distillée de plantain, employée dans les 
collyres, doit l'avantage de figurer encore dans nos officines 
à côté de l’eau distillée d’euphraise. 

[ Toutefois nous dirons, pour satisfaire à l'érudition, que 
Galien, dont personne, si ce n'est Matthiole, n’a surpassé la 
crédulité sur la puissance des drogues, attribuaït au plantain 
Ja vertu de dégorger les viscères, de dissiper les fluxions, 
d'arrêter les hémorragies, les diarrhées et les dyssenteries ; 
que Celse et Pline l'avaient recommandé contre la phthisie, 
ainsi que Schulz, qui en faisait prendre le suc avec du miel; 
que des auteurs plus modernes et non moins crédules , l’ont 
préconisé contre les fièvres intermittentes printannières qui 
guérissent sans fébrifuges, contre les fièvres nerveuses et 
de mauvais caractère, que j'ai vu également se dissiper, 
dans nos chaumières, sous la puissante influence de l'eau 
panée. Nous dirons encore, qu’à l’extérieur la décoction de 
piantain a été vantée contre les ulcères, les fistules et le 
cancer, suivant Borelli : que sa racine a été regardée comme 
infaillible pour calmer les douleurs de dents ; que les bonnes 
femmes de nos campagnes appliquent ses feuilles sur les 
plaies récentes, qu’elles préservent ainsi du contact de l’air; 
mais qu'elles irritent parfois, et à la réunion desquelles elles 
s'opposent longtemps avant de permettre une guérison qu’on 
leur attribue avec d'autant plus de reconnaissance qu’elle 
a été obtenue gratuitement. ] 


330 


PLANTAIN D’EAU,"* 


PLANTAIN AQUATIQUE, FLUTEAU PLANTAGINÉ, 
PAIN DE CRAPAUD 


Plantago aquatica (T).— Alisma plantago (L.) 


Le plantain d'eau, qui appartient au genre Flüteau (alis- 
macées), croît en abondance dans les lieux aquatiques. Cette 
plante était sans usage en médecive, lorsqu'en 1817 une 
notice du savant Lewshin, annonça qu'un ancien soldat 
aurait non-seulement préservé de la rage des hommes et des 
animaux qui avaient été mordus par des chiens enragés, 
inais encore aurait guéri, au moyen de cette plante, l’hydro- 
phobie déclarée. On fait manger au malade une tranche de 
pain couverte de beurre et saupoudrée avec la racine de 
plantain d’eau réduite en poudre. Il faut recueillir cette 
racine pendant l'été, la faire sécher à ombre, et la pulvé- 
riser. Deux ou trois doses suffisent pour guérir l’hydropho- 
bie déjà déclarée. Depuis cinquante ans que l'on fait usage 
de ce remède dans le gouvernement de Tula, son efficacité 
ne s’est jamais démentie , au rapport de M. Lewshin, qui 
assure avoir été lui-même témoin d’une guérison chez un 
sujet auquel on n’administra que deux doses du médica- 
ment, et qui vécut dix-huit ans encore sans jamais éprouver. 
de rechute. 

Depuis lors, le docteur Burdach a publié des observations 
de guérison ; mais des praticiens français dignes de foi ont 
affirmé n'avoir obtenu aucun résultat positif de l'emploi du 
plantain d'eau comme antihydrophobique. 

Les feuilles de cette plante, appliquées sur la peau, la 
rubéfient légèrement. Cependant les Kalmouks en mangent 
les tubercules, et Fée (Hist. natur. pharm., +. 1,p.311)ena 
ingéré une assez grande quantité sans en éprouver le moin- 
dre accident. 

Dehaen parle du plantain d'eau comme d'un diurétique 
propre à remplacer Fuva ursi, soit en décoction à la dose 
d'une poignée, soit en poudre (les feuilles) à la dose de 
4 grammes. Wauters (Dissert. botanico-méd., p.791 dit aussi 
avoir employé le plantain d'eau en poudre avec suecès dans 
un cas de douleurs néphrétiques avec hématurie, émission 
difficile des urines, etc., er chez un tailleur atteint de fré- 
quentes rétentions d'urine avec douleur, rétraction du tes- 
ticule, érection involontaire et sentiment de constriction au 
penis. Wauters prescrivit à ce dernier infusion aqueuse 
de plantain d'eau, et obtint dans l’espace de huit jours une 
grande amélioration. 


431 


POLIGALA VULGAIRE, 


LAITIER , HERBE AU LAIT, POLYGALON. 
Poiygala vulgaris (T.)— Polygala amara (L) 


Cette jolie plante croit presque dans toute la France, dans 
les prairies sèches, le long des lisières des bois, sur les 
pelouses des coilines. On emploie les racines. 


Préparations et doses. 
A L'INTRIEUR : Comme {onique, infusiox, macéraiion, Ge 8 à 45 

grammes par kilogramme d'eau. 

L'infusion ou la macération, comme purgatif, de 43 à 50 gram. 
par kilogremme d’eau. 

Sirop (4 sur 25 d’eau bouillante et 25 de sucre}, de 45 à 59 gram. 
en potion. 

Teinture (1 sur 6 d'eau-de-vie), de 40 à 44 gram.en potion. 

Vin, de 45 à 50 grammes. 

Extrait aqueux , de 1 à 2 grammes. 

Extrait alcoolique, de 50 cent. à 4 gramme, pilules. 

Poudre, 50 cent. à 2 gram.comme purgatif, de 4 à 4 gram. en bols. 


Propriétés. 


Le poligala vulgaire est tonique et diurétique à petite 
dose, purgatif et émétique à haute dose. Son action stimu- 
lante sur les organes secrétoires rend le poliga utile dans les 
affections rhumatismales , la dernière période des catarrhes 
pulmonaires, les bronchites chroniques , l'hydrothorax, le 
croup , etc. 

Stoll et Collin ont retiré le plus grand avantage dans les 
affections pulmonaires où il y a atonie et congestion de 
mucosités, de l’emploi du poligala amer (1). Ils le don- 
naient ainsi préparé : Racine de poligala, 50 gram.; faites 
bouillir dans un litre et demi d’eau réduit à moitié ; ajoutez, 
après avoir passé, 30 grammes de sirop d’hyssope et autant 
de sirop de pavot blanc. On donne cette préparation à Ia 
dose de 120 gram., que l'on renouvelle trois fois par jour. 

Coste cite, avec toute la candeur qui le caractérise, 
douze poitrinaines de 25 à 30 ans, du nombre desquels 
étaient quatre jeunes filles, qui ont fait usage du poligala 
vülgaire ; l’auteur croit devoir lui attribuer le salut de dix 


(1) Le poligala amer est une variété du poligala vulgaire; ïl est 
plus petit, ses tiges sont plus étalées , ses feuilles radicales sont arron- 
des , celles de la tige sont linéaires ; ilest plus rare que le poligala 


vulgaire. C’est surtout dans l'écorce de sa racine que paraît résider son 
principe actif. 


432 


d'entre eux. L'autopsie démontra l'incurabilité antérieure 
de plusieurs mois à l'usage de ce remède, chez ceux qui 
succombèrent. C'est-à-dire que, pour tout médecin obser- 
valeur, les dix malades guéris seraient probablement 
aujourd'hui, grâce aux moyens explorateurs que nous 
possédons, tout simplement considérés comme atteints de 
catarrhes pulmonaires chroniques. 

[ Burtin (mém. cité) a employé le poligala vulgaire et le 
poligala amer avec autant de succès que Coste et Wilmet 
contre les affections chroniques des voies respiratoires. ] 

Les médecins de Vienne administrent le poligala de la 
manière suivante : Poligala pulvérisé et sucre royal, de 
chaque { gram. 20 centigram. Après cette dose, qu'on admi- 
nistre tous les matins, on donne une tasse de la décoction 
suivante : Faites bouillir, dans une livre et demie d'eau, 
8 gram. de racine de poligala amer, coupée menu; après 
avoir passé, ajoutez partie égale de lait récent. On prend 
plusieurs tasses de ce mélange dans le courant de la journée. 

Gessner a reconnu au poligala amer, qu'il appelle 
amarella, une propriété purgative ; l’infusion d'une poignée 
de ses parties herbacées, faite pendant une nuit dans un 
verre de vin, le purgea, dit-il, sans aucune espèce d'accident. 

Je considère la racine de poligala comme un tonique fort 
utile et dont l’action se porte principalement sur les organes 
respiratoires. Je l’ai fréquemment employée dans les catar- 
rhes chroniques accompagnés d'expectoration plus ou moins 
abondante, dans l'asthme humide, dans l'hydrothorax ; mais 
je dois avouer qu'elle n'a jamais produit un bon effet quand 
la toux était sèche et que l’irritation fébrile existait. C'est 
presque toujours coupée avec le lait que je donne la décoc- 
tion de poligala. J’ai guéri, par le seul usage de ce mélange, 
un jeune homme du village de Carly, qui, arrivé à une 
extrême maigreur, éprouvait une toux avec expectoralion 
abondante d'apparence mucoso-purulente. jaunâtre, épaisse. 
Le rétablissement de ce malade était complet après six 
semaines de l’emploi journalier de la décoction de poligala. 

J'ai souvent associé au poligala, selon l’état des malades, 
le lichen pulmonaire ou d'Islande, les sommités d'hyssope, 
de lierre terrestre ou d’hypéricum, et plus souvent encore, 
pour en modérer l’activité, la racine de guimaure, les fleurs 
de bouillon blanc ou celles de tassilage. 

Le poligala vulgaire, quoiqu'un peu moins actif que le 
poligala de Virginie, peut remplacer ce dernier dans la 
pharmacie du médecin de campagne. « Pourquoi, dit Bodart, 
aller chercher le poligala en Virgirie, tandis que la nature a 
placé son congénèreauprès de nous dans le poligala vulgaris? 


433 


POLYPODE, 


POLYPODE PE CHÊNE. 


Polypodium vulgare (X.) 
Polypodium vulgare (T). 


Cette plante se rencontre partout, principalement sur le 
pied des vieux chênes. Sa souche est usitée. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction, de 60 à 400 gram. par kilog. d'eau. 
Poudre , de 2 à 4 gram.. en potion. 


Propriétés. 


La souche de polypode est expectorante, faiblement 
astringente, ou léger purgatif selon la dose à laquelle on 
l’'administre. 

Le polypode , après avoir joui d’une grande réputation, 
est tombé dans l'oubli. Il n’a pas plus mérité les éloges qu’en 
lui a prodigués que le dédain dont il est aujourd’hui l’objet 
en matière médicale. J'ai reconnu que cette racine ne lâche 
le ventre que fort doucement, même étant administrée à 
grande dose; mais comme elle est d’une saveur sucrée, je 
l'ai donnée aux enfants. Ils la prennent avec plaisir; et à 
une dose élevée, en décocticn, soit seule, soit mêlée avec un 
peu de lait , elle les purge suffisamment. La thérapeutique 
des enfants est très-diflicile ; il faut autant que possible, 
pour eux, user du précepte d'Horace : Utile dulci. 

La décoction de racines { ou plutôt de souches) de poly- 
pode m’a paru n'être pas inutile dans les affections catar- 
rhales pulmonaires. Les paysans lui reconnaissent cette 
propriété par tradition, et l'emploient avec succès pour se 
débarrasser des toux chroniques, des vieux rhumes. 


POLYTRIC 
PERCE - MOUSSE. 


Polytricum officinarum (T. 
Polytricum commune (L.) 


Cette mousse croît près des fontaines, aux bords des ruis- 
seaux, contre les vieilles murailles, à l'ombre, sur les 
rochers, dans les puits. 

Préparations ct doses. 
A L'INTÉRIEUR : Décoction , Ge 40 à 45 grammes par kilog. d’eau. 
28 


43% 


Propriétés. 


Le poiytric est inodore et n'offre qu’une saveur très-légè- 
rement astringente. Les anciens lui accordaient néanmoïns 
de grandes propriétés ; ils la considéraient comme pectorale, 
astringente, incisive, apéritive, hépatique, splénique, et 
surtout emménagogue. C’est en cette dernière qualité que 
M. Bonnafoux , médecin à Confolens, l’a tirée de l'oubli 
dans lequel il était tombé depuis longtemps. Ce médecin a 
publié dans la Revue médicale (juin 1836) le résultat de ses 
recherches sur les effets du polytric ou perce-mousse em- 
ployé dans le but de rétablir le cours des règles. Le hasard 
ayant porté M. Bonnafoux à s'assurer par une expérience si 
les vertus emménagogues attribuées à cette plante par les 
anciens étaient aussi nulles qu’on le prétend aujourd’hui, 
en a obtenu des résultats si heureux, qu'il engage les prati- 
ciens à l’employer. 

Ce médecin donnait des soins à une demoiselle âgée de 
seize ans , chez laquelle les règles, s'étant montrées une 
seule fois, ne paraissaient plus depuis huit mois: Il em- 
ploya vainement les emménagogues connus sans parvenir à 
rappeler les forces et le ton des tissus. L'état languissant de 
ia malade empirait chaque jour, une mort prochaïne sem- 
biait inévitable. Une décoction de 4 grammes de perce- 
mousse dans 500 grammes d’eau , jusqu'à réduction d'un 
tiers , donnée avec une égale quantité de lait chaque 
jour, partie le matin à jeun, deux heures avant le repas, 
et partie au moment du coucher, pendant un mois et demi, 
a suffi pour rétablir le cours des règles et rendre à cette 
demoiselle une santé parfaite. 

Une demoiselle de vingt-cinq ans, d’une forte constitu- 
tion, se trouvant en sueur à l’époque de l'écoulement des 
règles, but un verre d’eau froide, et aussitôt le sang cessa 
de couler. Trois mois s'étant passés sans que ses règles 
eussent reparu , son embonpoint diminuant chaque jour et 
sa santé se détériorant , elle consulta M. Bonnafoux. Celui- 
ci proposa la saignée et les sangsues , que la malade refusa. 
Elle consentit seulement à prendre le polytric : un mois 

suffit pour rétablir les menstrues. 

Une demoiselle de vingt-deux ans, dont les règles étaient 
supprimées depuis une année , était arrivée à un état chlo- 
rotique d'autant plus alarmant que le poumon droit était le 
siège d’une affection fort grave. Elle prit pendant deux mois 
ja décoction de perce-mousse , et bientôt ses règles repa- 
rurent. L'état du poumon s'était en même temps fort amé- 
lioré. 


M. Bonnafoux a constaté, par un grand nombre d autres 


435 


faits, l'action bienfaisante du polytric dans l’'aménorrhée. 
Toutefois , je ne puis m'empêcher de faire remarquer que 
lorsque le défaut de menstruation reconnait pour cause ef- 
ficiente une affection chlorotique essentielle, la première 
indication à remplir n’est pas de chercher à produire un 
écoulement sanguin qui, s'il avait lieu, ne ferait qu'aggra- 
ver la maladie ; mais de rendre préalablement à l’organisme 
les forces qui lui manquent, et au sang les principes qu’il 
a perdus. Cette double indication ne peut être remplie que 
par l'emploi des ferrugieux et des soins hygiéniques propres 
à en favoriser l'effet. La cause de la suppression dispa- 
raissant, les règles se rétablissent ordinairement sans qu’il 
soit nécessaire de recourir aux emménagogues. 


POMME DE TERRE. 


PARMENTIÈRE. 


Solanum tuberosur. 
Solanum tuberosum esculantum (B.) 


La pomme de terre, qui signale à notre reconnaissance 
les noms de Walter Raleigh et celui de Parmentier, le pre- 
mier comme auteur de la découverte, le second comme 
propagateur de sa culture, est maintenant la ressource ali- 
mentaire de tous les peuples. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : décoction de tiges et de feuilles, de 30 à 400 gram. 
par kilog. d’eau. 

A L'EXTÉRIEUR : tubercule cru, rapé ou cuit, ou farine, fécule en 
cataplasme. 
Feuilles en décoction, pour fomentation, etc, 


Propriétés, 


[ Nous ne parlerons pas des ressources de la pomme de 
terre ni des divers produits qu'on en obtient comme subs- 
tance alimentaire. Tout le monde sait que ce tubercule est 
un aliment abondant et salubre qui peut, dans les temps 
de disette, remplacer le blé, qu'il fournit de la fécule, de 


l'alcool, etc. (1). Nous nous occuperons seulement de son 
emploi thérapeutique.] 

(4) La pomme de terre a été atteinte , depuis quelques années , d’une 
maladie dont les progrès ont alarmé Ics populations et sollicité l’atten- 
tion et les recherches des agronomes. Cette maladie , espèce de gangrène 
tantôt humide , tantôt s’che, suivant les modifications apportées par 
les circonstances atmosphériques , a été attribuée par les uns à des in- 
sectes ou à des cryptogames qui, comme on sait, s'emparent tou- 
jours des végétaux qui languissent ; par les autres, exclusivement à 
l'humidité insolite de l’année 1845, époque de son invasion, ou encore, 


456 


La pomme de {erre est anti-scorbutique. Son usage, dans 
les voyages de long-cours, préserve du scorbut et le combat 
quand il existe.Il est à remarquer que cette affection est de- 
venue beaucoup plus rare depuis l'emploi général de ce 
précieux tubercule comme aliment. 

Le tubercule de la pomme de terre est émollient et ana- 
leptique ; rapé, on en fait des cataplasmes utiles contre les 
brûlures ; c'est un remède populaire et qui convient dans 
les cas les plus simples. Le suce exprimé de ce tubercule, 
appliqué très-fréquemment avec une plume sur du papier 
brouillard recouvrant la brûlure, convient beaucoup mieux; 
je l'ai vu produire de bons effets. Chaque application appaise 
Ja douleur. Avec sa fécule sèche on saupoudre les excoria- 
tions, les phlogoses de Ja peau chez les enfants, l'intertrigo, 
l’érysipèle; on en fait des cataplasmes. — La tige, les feuilles, 
les fleurs et les baies, sont sédatives et narcotiques, utiles 
dans les névralgies, les rhumatismes, les catarrhes pulmo- 
naires chroniques. — J'ai fréquemment prescrit la décoction 
des tiges et feuilles de pomme de terre dans les toux sèches, 
la coqueluche, Ja diarrhée avec irritation. J'ajoute à cette 
décoction un peu de miel, de sucre ou d’extrait de réglisse ; 
ellé calme la toux et facilite l’expectoration. Dans certains 
cas, qu’il est facile d'apprécier, j'ai coupé cette décoction 
avec celle de lierre terrestre, de marrube blanc, de bour- 
geons de peuplier baumier, etc. 

D'après le docteur Nauche, des catarrhes pulmonaires, 
intestinaux, urétraux et surtout utérins, qui duraient depuis 
plusieurs années, ont cédé à de légères décoctions depommes 
de terre rouges et de réglisse. Des injections avec le même 
Hiquide ont eu le même succès contre les fleurs blanches. 
Des scorbuts, des douleurs d'estomac, ont été avantageuse- 


suivant quelques-uns, à un principe occulte, répanda dans l’air ctexer- 
cant sur cette plante une action pestilentielle analogue à celle du cho- 
léra sur les hommes. 

Dans un travail appuyé d'observations soigneusement recueillies pen- 
dant quatre années (2) , et qui a obtenu la grande médaille d'argent au 
concours ouvert en 1848 à la Société Nationale et Centrale d'Agriculture 
de Paris, nous avons démontré que la maladie de la pomme de terre, 
dont les progrès furent accidentellement favorisés par l'humidité de 
4545 , provenait de l'épuisement graduel , de la dégénérescence de la 
plante par une série continuelle de mauvais traitements, et que pour 
ja guérir il suflisait de revenir aux Jois de la nature. 


(2) 4. Dela maladie de la pomme de terre et des moyens de la guérir, Bonlogne- 
sur-mer ,; 1847 ;—2. Sur les moyens de guérir la pomme de terre par la plantation 
d'automne , et d'en obtenir des récoltes plus abondantes et plus hâtives ; lettres adressées 
à la Société Nationale et Centrale d'Ag.iculture de Paris, par MM. Le Roy-Mabille, 
Cazin et Brunet-Sire, membres résidants de la Société d'Agriculture , des sciences et des 
arts de Loulogne sur mer;—Paris; chez Muwe veuve Bouchard-"uzard , 1848. 


À 37 $ 
nent traitées par l’usage de cette décoction. C'est suriout 
contre la gravelle que l’action de la pomme de terre en in- 
fusion a étéefficace. Ce médicament a rendu les urines 
limpides, et a procuré un soulagement plus durable que les 
autres diurétiques. 

Un médecin allemand (annales de la Socicté de Médecine 
d'Anvers, 1845) a vanté les feuilles et tiges de la pomme de 
terre, sous forme de cataplasme, de fomentations et de la- 
vements dans les cas de phlegmasie avec douleur vive, d’hé- 
morroïdes très-douloureuses, de spasmes de la vessie, etc. 
Pour faire ces cataplasmes, il suffit de réduire en pulpe les 
parties indiquées de la plante. 

Les cataplasmes faits avec la pulpe de pomme de terre et 
la décoction de graine de lin, de feuilles de mauve, etc., peu- 
vent remplir la même indication que ceux de mie de pain, 
de farine de froment, eic. | 

En résumé, les tiges et les feuilles de pomme de terre 
jouissent, quoi qu’à un faible degré, des propriétés de la 
morelle noire, de la jusquiame et de la belladone. 


POMMIER. 


Malus flore pleno (T.) 
Pyrus malus (L.) 


Le pommier est un arbre indigène, enlevé depuis long- 
temps à nos forêts et livré à la culture pour ses fruits ou 


pommes, que l’on mange crucs ou cuites, et avec lesquelles 
on fait le cidre. 


Propriétés, 


La pomme est acidule, rafraîchissante, tempérante, fré- 
quemment mise en usage dans les inflammations gastriques 
et pulmonaires, en décoelion. On forme avec la pulpe cuite 
des cataplasmes employés contre certaines ophtalmics ai- 
guës. On fait souvent usage d’une sorte de limonade avec 
la reinette blanche, contre la toux, l’enrouement, les maux 
de gorge, les phlegmasies pulmonaires, vésicales, rénales, 
les fièvres bilieuses et putrides, etc. On fait aussi un sirop, 
une gelée et un sucre de pomme. 

Dans les villages du Nord, où l’on n'a pour boisson orüi- 
naire que le cidre, cette boisson est regardée comme preser- 
vatf de la pierre. Il est à remarquer, en effet, qu'il y a 
moins de calculeux en Normandie et en Picardie que dans 
les autres parties de la France, où l’on use du vin ou de la 
bière. Le suc récent de pomme et le cidre sont utiles dans 
le scorbut. A défaut de vin on peut se servir du cidre de 


438 


première qualité pour composer les vins médicinaux. À Ia 
campagne il faut, autant que possible, faire de la médecine 
à bon marché ; on ne pense pas au village, comme à la ville, 
qu'un médicament est d'autant plus efficace qu'il vient de 
plus loin ou qu'il coûte plus cher. 

Une personne digne de foi m'a assuré avoir vu une dame 
âgée de quarante-huit ans , atteinte d’une ascite contre la- 
quelle on avait vainement employé tous les moyens connus, 
guérir dans l’espace de quinze jours par l'usage abondant 
du cidre doux. La malade en prenait deux à trois litres 
chaque jour. Ce moyen produisit d’abord des selles abon- 
dantes, et, ensuite, une augmentation considérable de Ia 
sécrétion urinaire. [1 n'y eut point de rechute. Le cidre 
doux agit ici probablement comme la cassonnade prise à 
grande dose, et que l'on à vu réussir dans les engorgements 
abdominaux , les phlegmasies chroniques des intestins et 
du péritoine , l’ascite, etc, 

L’écorce du pommier est tonique et astringente. J'ai 
employé, en 1847, la décoction de l’écorce de racine frai- 
che de cet arbre (60 gram. pour 500 gram d’eau) dans 
quatre cas de fièvres intermittentes, dont deux ayant le 
type tierce et deux le type quotidien. Les deux premiers 
cas om cédé au troisième jour de l'emploi de ce moyen. 
Dans les deux autres, les accès ne se sont dissipés que gra- 
duellement dans l’espace de huit jours, de sorte que l'action 
du médicament est restée problématique en présence de la 
possibilité d'une guérison qui a souvent lieu spontanément. 


PHLORIDZINE. 


La phloridzine est une substance amère retirée de l'écorce 
fraiche du tronc et surtout de celle des racines du pommier, 
du poirier, du cerisier et du prunier. Ce principe immédiat 
a été découvert par M. de Konnink. C’est une matière cris- 
talline neutre, d’un blanc mât, à peine soluble dans l’eau 
froide et soluble en toute proportion dans l’eau bouillante , 
plus soluble dans l'alcool que dans l'eau à température 
égale, fort soluble dans l'éther. Les acides favorisent 
sa dissolution dans l’eau ; elle colore en brun le sulfate de 
de fer ; la colle animale est sans action sur elle. 

Pour l’extraire, on met les écorces des racines fraîches: 
en digestion à plusieurs reprises , pendant sept à huit heu- 
res , avec de l'alcool faible , à une tempéfature de 50 à 60 
degrés. Les liqueurs réunies concentrées dans un appareil 
distillatoire , la laissent déposer en cristaux grenus , qu'on 
purifie à l’aide du charbon animal et par plusieurs cristalli- 
sations {Thénard, Traité de chimie, sixième édition.) 


439 


M. de Konnink a employé Ia phloridzine avec succès 
comme succédanée du sulfate de quinine, à la dose de 50 
à 75 centigrammes. Le docteur Hanegraeff, d'Anvers, a 
publié vingt-trois observations de fièvres intermittentes de 
divers Lypes, qui ont été recueillies par lui-même, et six 
par son confrère le docteur Lutens, dans chacune desquelles 
la phloridzine a été employée sans autre médicament. Ce 
médecin a conclu de ces faits : 1° que la phloridzine jouit 
de propriétés fébrifuges incontestables dans les fièvres 
quotidiennes et les fièvres tierces ; 2° que ce médicament 
est moins efficace contre les fièvres quaries; 3° qu'il ne 
produit aucune irritation sensible sur les voies digestives ; 
4° enfin , qu’il n’occasionne ni vertiges, ni surdité, ni tin- 
tement d'oreilles, symptômes qui apparaisseent si souvent 
après l'administration du sulfate de quinine, et que les 
malades supportent avec tant d'impatience. (Bullet. de ta 
Soc. de Médec. de Gand, 1837.) On administre la phlo- 
ridzine en poudre, en pilules ou dans une potion, du si- 
rop , à l’aide d'un intermède approprié. 


POMME ÉPINEUSE. 


STRAMOINE, HERBE AUX SORCIERS, HERBE DES MAGICIENS, 
ENDORMIE. 


Stramonium fructu spinoso, rotunco, 
flore albo, simplici (T). 
Datura sitramonium (L.) 


Cette plante, cultivée d’abord dans les jardins de l'Europe. 
et que l'on croit originaire de l'Amérique, s’est semée d’elle- 
même, naturalisée et propagée partout ; on la trouve sur les 
bords des chemins, près des habitations, dans les champs, 


les lieux sablonneux, eic. On empioie ses feuilles, ses fleurs 
el ses semences. 


Préparations et Soses. 


A L'INTÉRIEUR : énfusion, 5 à 20 cent, par 420 gram. d'eau. 

Sirop (1 de teinture sur 20 de sirop de sucre), de 40 à 20 gram. 
en potion. 

Suc erprimé, de 50 cent. à 4 gram. en potion. 

Feiiture (2 d'herbe pilée sur 4 d'alcooi, ou 4 de feuilles sèches 
sur 8 d’aleool à 24°, ou 4 de suc filtré sur 4 d'alcool! à 554), de 
40 cent. à 1 gram. en potion. 

Teinture éthérée (4 de semences sur 4 d'éther sulfurique), de 40 
cent. à 4 gram. 


Vin de semences (2 sur 8 de viu de Malaga et 4 d'alcool! à 350}, 
de 25 cent. à 4 gram. 


440 


Extrait alcoulique (4 de sucre sur 4 d’aicool à 55e), de 2 à 60 
cent. progressivement. 

Poudre, de 5 cent. à 4 gram. progressivement, en bols, pilules.etc. 

A L’EXTÉRIEUR : extrait et poudre, fréquemment employés par la 

méthode endermique, de 20 cent. à 4 gram. 

Pommade (1 sur 4 d'axonge), feuilles enfumées, en cigares. 

Poudre (2 gram. par 500 gram. d'infusion aromatique) pour fric- 
tions, fumigations, injections, etc. 

Teinture éthérée et huile, en frictions. 

Suc, quelques gouttes dans les collyres calmants. 


Emplätre (9 parties d'extrait alcoolique, une partie de résine-élemi 
et une partie de cire blanche.) 


Décoction, en lotions, fomentations, bains, cataplasmes. 
Propriétés, 


D'une odeur vireuse, d'une saveur âcre et amère, la pomme 
épineuse est un poison narcotico-âcre, très-énergique. À 
petite dose, elle est narcotique et anti-spasmodique. Son 
action est analogue à celle de la belladone. Elle est employée 
contre l’épilepsie, les névralgies, les convulsions, le rhu- 
matisme, la coqueluche, l'asthme spasmodique, l'hystérie, 
les hallucinations, la chorée, la manie, etc. 

Sous le rapport thérapeutique, le datura stramonium n’est 
pas aussi constant dans ses effets que la belladone ; il ré- 
clame dans son emploi la plus grande circonspection. On 
ne doit commencer à l’'administer qu'à une dose très-mi- 
nime et n'’augmenter que graduellement. Il ne faut jamais 
perdre de vue l'effet relatif des plantes narcotiques. Chez 
certains individus, la dose la plus faible peut causer les ac- 
cidents les plus graves, tandis que chez d’autres cette même 
dose suffit à peine pour produire une légère somnolence. 
1). Les enfants et les vieillards, ainsi que nous l'avons dit 
en parlant de l’opium, supportent moins facilement ce genre 
de médication. 

Je fus appelé, au mois de mai 1839, pour voir une petite 
fille, atteinte de la coqueluche, à laquelle un jeune médecin 
avait fait prendre un sirop contenant de l'extrait de stra- :- 
monium. Cette enfant, âgée de 20 mois, avait les yeux 
immobiles et la tête agitée d’un mouvement latéral vif et 
continuel; le pouls était petit et concentré, les membres 
tremblants. Je lui fis prendre assez difficilement de l’eau 
tiède sucrée et émétise (5 cent.) en assez grande quantité 


(1) Chaque narcotique a une action modificative qui lui est propre : 
j'ai vu des femmes d’un tempérament éminemment nerveux ne pouvoir 
pas supporter deux gouttes de laudanum sans éprouver tous les symp- 


tômes du narcotisme, se trouver très-bien de l'usage de la jusquiame à 
dose ordinaire. 


A4! 


pour produire le vomissement, Quelques lavements acidulés 
avec le vinaigre, le sirop de limon, le suc de citron étendu 
dans l'eau, pour boisson, complétèrent le traitement. Les 
principaux accidents se dissipèrent dans la journée ; ; Mais 
le mouvement Jatéral de la tête, qui cependant avait dimi- 
nué, persista encore pendant près de deux mois. Ce petit 
malade n avait pris, au rapport du médecin traitant, que 
trois Ou quatre centigrammes d’extrait de stramonium dans 
les vingt-quatre heures. C'était trop pour un début. 

L'usage longtemps continué du stramonium occasionne 
quelquefois des douleurs dans les membres, du prurit à la 
peau, le hoquet, la somnolence ou un sommeil très-agité; il 
rend parfois les malades comme stupides et produit plusieurs 
anomalies de la vue. 

[Sorck est le premier qui, en 1763, employa à l’inté- 
rieur la stramoine pour combattre l' épilepsie et les convul- 
sions. Ses essais furent répétés peu de temps après sur 
quatorze malades par le docteur Odhelins, de Stockholm, 
et ensuite par Bergius, Greding, Durande, Wedinberg , 
Maret, etc. Depuis lors, on a employé ce remède contre Ja 
chorée, la mélancolie, la manie, les hallucinations , et au- 
tres névroses ; les névralgies, le rhumatisme , l'asthme S 
ele: "ele: 

À dose toxique modérée , la stramoine manifeste ses ef- 
fets par la sécheresse à la gorge, l'irrégularlté du pouls, 
des sueurs abondantes ou un flux d'urine, la congestion au 
cerveau , la rougeur de la face, Ia dilatation des pupilles, 
la perversion des organes des sens, des aberrations dans la 
faculté perceptive, des vertiges, un engourdissement des 
muscles soumis à la volonté , de l'agitation pendant le som- 
meil, des idées fantastiques, etc. ; à dose plus élevée, elle 
cause une soif ardente , un sentiment de strangulation , des 
douleurs cardialgiques, la tuméfaction de l’abdomen , une 
sorte d'ivresse, un délire quelquefois furieux, des convul- 
sions ou le coma, la paralysie, la perte de la voix, la peti- 
tesse et la vitesse du pouls , des sueurs froides et la mort. 
Cette dernière a lieu ordinairement au bout de dix à quinze 
heures. On trouve l'estomac enflammé , le cerveau injecté et 
contenant des grumeaux de sang. Quand le malade a pu 
résister à l’action du poison » il reste souvent frappé, pen- 
dant des mois ou des années, d’une perte absolue de la 
mémoire, d’aliénation mentale, de tremblement dans les 
membres ou d'une grande débilité. ] 

On à souvent combattu les aliénations mentales par le 
dutara stramonium. Sur 85 cas rapportés par Stærck, 
Schmalz, Ifagstroem , Reef, Meyer, Odhelins, Durande, 


442 


Maret, Bergius, Greding, Schneider, Bernard et Ame- 
lung , 21 ont été terminés par la guérison ; 2% ont résisté. 

Dans les Etats de l'Union, on traite la manie sans fièvre 
par le suc de datura , à la dose de 20 à 30 gouttes par jour. 
(De Candolle , Essar sur les propr. med. des plantes, p.226.) 

Le docteur Amelung aflirme que , dans les vésanies pé- 
riodiques on parvient, par l’usage prolongé de la teinture 
de datura stramonium, à rendre les accès moins violents 
et les intervalles de plus longue durée. Il reconnaît à ce 
moyen une action plus spéciale qu’à tous ceux que l’on a 
vantés jusqu'à ce jour. Je dois dire, dans l'intérêt de Ia 
vérité, que dans trois cas de manie aiguë sans apparence 
de congestion cérébrale, et dans lesquels j'avais d'ailleurs 
combattu par les antiphlogistique sles symptômes inflamma- 
toires ou la pléthore, j'ai obtenu du soulagement, une sorte 
de rémission par l'effet du stramonium chez le premier 
malade ; mais point de guérison. La guérison a pu être at- 
tribuée à l'effet du médicament dans le second cas, en rai- 
son de l’amélioration graduellement obtenue par son admi- 
nistration ; chez le troisième malade le rétablissement eut 
lieu spontanément longtemps après la cessation de tout 
traitement. 

Greding n’a réussi que dans un seul cas d’épilepsie trai- 
tée avec le stramonium. Sur 14 épileptiques traités par 
Cdhelins avec l'extrait de cette plante , 8 ont été guéris , 5 
soulagés (1). Les malades éprouvaient, pendant le traite- 
ment, une céphalalgie légère, des étourdissements, l’ob- 
scurcissement de la vue, elc.; mais ces"accidents se dissi- 
paient peu à peu. | 

Il résulte des diverses observations rapportées par les au- 
teurs que, dans un certain nombre de cas d’épilepsie où 
il n'y à pas eu guérison, la maladie a été avantageusement 
modifiée : les accès étaient remplacés par une espèce de 
syncope légère et périodique , ou par un sentiment de for- 
mication incommode et revenant aussi périodiquement. 

MM. Trousseau et Pidoux ont employé le datura avec un 
succès très-remarquable dans deux cas d’asthmeessentielle- 
ment nerveux, intermittent et d’une extrême intensité. L'un 
des malades depuis sept mois, l’autre depuis quatre, 
n'avaient pu se coucher. Nous leur fimes fumer du datura 
stramonium , et, à la lettre, disent ces.auteurs, la maladie 
fut guérie à l'instant même, au point que, dès la première 


(4) Greding fait observer ’mém. de l’ Acad. de Stockholm) que les ma- 
Jades d'Odelins étant trop promptement sortis de l'hôpital , il était im- 
possible de rien aflirmer sur la guérison d’une maladie dont les accès 
laissaient quelquefois entre eux un grand intervalle. 


445 


nuit, ils purent se coucher et dormir sans oppression. De- 
puis plus de quatre ans ils ont éprouvé de temps en temps 
des retours de leur asthme; mais ils fument dès qu'ils en 
éprouvent les premières atteintes , et peu de minutes sufi- 
sent pour les calmer. C’est donc dans cette forme particu- 
lière de l'asthme que le datura réussit le mieux; mais il 
s’en faut qu'il guérisse toujours, même dans ce cas ; nous 
avons souvent réussi, mais aussi nous avons souvent 
échoué, et quelquefois aussi, dans l'asthme spasmodique 
non intermittent qui cède en général moins bien au da- 
Lura , nous avons vu ce médicament calmer les accidents 
avec autant de rapidité que dans l'asthme nocturne. Ce 
moyen est encore employé avec avantage pour calmer la 
toux et la dypsie des phthisiques, des malades atteints de 
catarrhe et de maladie de cœur, lorsqu'ils éprouvent de 
temps en temps de l'oppression, que l’on doit rapporter à 
une modification nerveuse plutôt qu'aux lésions organi- 
ques graves que l’on a pu constater chez eux. . . . . Les 
inspirations de vapeur d’eau chaude chargée de datura stra- 
monium conviennent aussi, mais sont loin d’être aussi ac- 
tives ; elles ne peuvent d'ailleurs être employées quand la 
suffocation est extrême , car elles augmentent momentané- 
ment les accidents dyspnéiques . . . . Quant à l'adminis- 
tration interne de ce médicament , dans le cas de dyspnée, 
nous n’ayons jamais eu à nous en louer. » (Traité de 
therap., t. 1, p. 256.) 

Les bons effets du datura stramonium dans l’asthme ne 
font plus doute. M. English rapporte (Edimb. med. and 
surg. jour. t. vir, 1811 ), que, sujet à des accès d'asthme 
extrêmement violents que rien ne soulageait, il fut guéri 
immédiatement en fumant du datura stramonium. Krimer 
(Journ. compl. du dict. des scienc. médic. t. x. p. 375) cite 
cinq cas d'asthme guéris en fumant de la stramoine. Meyer, 
(Journ. d'Hufeland, avril 1827) l'a employée avec le 
même succès. Christie, Reid, Kipton, ont également pu- 
blié des faits favorables à l'emploi de ce médicament. Laë- 
nec en faisait usage dans les dyspnées. MM. Martin-Solon, 
Andral, Cruveilher , se louent aussi des bons effets qu'ils 
en ont obtenu en s’en servant de la même manière. 

M. T., dit le docteur Lefebvre, (de l'asthme; mém. 
couronné par la Soc. royale de Méd. de Toulouse, Paris 
1847 , p. 108 ef 180) qui a expérimenté celte plante sur 
lui-même , ne saurait lui donner trop d’éloges ; il fume les 
feuilles de stramonium sous forme de cigarettes , et il dit 
que c’est au moment où on éprouve une sorte de vertige 
que le soulagement commence à se manifester ; l'influence 


144 


de cet agent se borne à modifier l'accès contre Icquel on 
l'emploie, il n'a aucune action sur Île paroxisme suivant, 
qui, dit-il , N ‘en arrive pas moins avec toute son intensité. 
Le temps n'a fait que confirmer à mon confrère M. T. les 
avantages qu'il Jui avait reconnus pour arrêter instantané- 
ment le développement des accès d'asthme, seulement il 
l'emploie pur et sans mélange avec le tabac.—Un autre 
médecin de mes amis, qui est asthmatique depuis plus de 
quarante ans, ne s'est décidé à y recourir que dans ces 
dernières années, et ille vante avec enthousiasme. . .. 
La meilleure manière de l’administrer consiste à hacher les 
feuilles comme on fait du tabac, à en charger des pipes 
ordinaires , ou mieux encore à en faire des cigarettes en 
papier , à la manière espagnole. On doit se borner d’abord 
à une ou deux pipes ou cigarettes, pour augmenter plus 
ou moins vite, suivant le résultat. Il est rare que le sou- 
legement ne se manifeste pas très-promptement. Quelques 
asthmatiques se bornent à fumer le stramonium lorsqu'ils 
ressentent les avant-coureurs d’un accès, qu'ils parviennent 
ainsi à enrayer. . . . Plusieurs médecins conseillent de ne 
prescrire ce médicament qu'après s'être assuré qu'il n'existe 
aucune phlogose pulmonaire. » 

Le docteur Meyer recommande de commencer par une 
demi-pipe , surtout pour les personnes non habituées à la 
fumée de tabac, les femmes surtout, et de cesser au bout 
de quinze jours si ce moyen ne soulage pas. On peut aug- 
menter graduellement jusqu’à deux pipes par jour, jusqu’à 
produire le vertige. Le docteur Krimer n'en préconise 
l'emploi que dans l'asthme purement essentiel, et pense 
que l’on pourrait s’en servir avec avantage dans la période 
non inflammatoire des coqueluches. Le docteur Ducros 
jeune, de Marseille, l'a employée avec succès dans un cas 
d'angine de poitrine. (Lancet., 10 janv. 1837.) 

Les névralgies ont été efficacement combattues par Île 
stramonium. Vaidy (Journ. compl. des scienc: méd., {. vur, 
p. 18 et t. x1 p. 176) à rapporté deux cas de névralgie fa- 
ciale où il l'a employé avec succès. Dans le premier, il 
donna 2 centigrammes et demi d'extrait de semences par 
jour , et quatre prises suffirent pour assurer Ja guérison du 
malade ; dans le second , il prescrivit 5 centigrammes d'ex- 
trait des capsules , et, après en avoir pris 40 centigram. , 
le malade fut tellemeut soulagé qu'il ne jugea pas à propos 
de continuer , cette dernière (c'était une femme), pendant 
qu'elle usait de ce remède, était étourdie, éprouvait des 
vertiges, de la sécheresse au gosier, accidents qui cessè- 
rent en discontinuant l'emploi du médicament. Kirckhoff 


445 


(Bull. des scienc.méd.,Férussac, t. xt, p.197) rapporte qua- 
tre cas de névralgies qui avaient leur siège dans différentes 
régions, et dont il obtint la guérison au moyen de frictions 
faites sur le trajet douloureuxavec la teinture de feuilles de 
stramonium. Amelung à constaté l'efficacité de l'usage in- 
terne el externe de celte teinture contre les crampes aux 
mollets, qui, quelquefois, affectent si douloureusement 
les femmes enceintes. M. Marcet (Journ. univ. des scienc. 
méd., t. XVI, p. 107) a donné avec un succès complet 1 
centigramme et demi à 2 centigrammes et demi par jour 
d'extrait de semences de cette plante, dans les douleurs 
nerveuses qui avaient résisté aux autres remèdes. M. Or- 
fila (Nouv. jour. de méd., décembre 1819) a vu une cépha- 
lée se dissiper par l'emploi de 10 centigrammes d'extrait de 
stramonium , qui causa d’abord un narcotisme effrayant. 

L'on a retiré de grands avantages du stramonium , soit à 
l'intérieur soit à l'extérieur, contre le rhumatisme chro- 
notique. Le docteur Zollickoffer (Revue méd. , t, x1,p. 469) 
l’a mis en usage de l'une et de l’autre manière dans cette 
affection. Il se sert, 1° d'une teinture composée de 30 
grammes de semences sur 250 grammes d'alcool , dont la 
dose est de 8 à 12 gouttes par jour, en augmentant pro- 
gressivement jusqu'à ce quil survienne du malaise et des 
étourdissements ; 2° d’une pommade composée de deux 
parties d'axonge sur une de feuilles de stramonium, 
qu’on fait cuire à un feu modéré. Lorsque la tête se prend 
par l'effet de la teinture , on cesse l’usage de cette dernière 
pour se borner à des frictions sur la partie douloureuse 
avec cette pommade. L’auteur rapporte un grand nombre 
de cas de guérison par ce double moyen. Le docteur Van 
Nuffel (Nouv. bibl. méd., t. 11, p. 451) guérit un manou- 
vrier atteint depuis longtemps de douleurs intolérables à 
l'épaule droite en lui administrant par cuillerées, d’heure 
en heure, le mélange de 10 centigrammes d'extrait de 
stramonium dans 250 grammes d’eau distillée; on fric- 
tionna en même temps la partie douloureuse avec un lini- 
ment composé de 2 gram. du même extrait et de 125 
grammes d'huile d'olive : en moins de huit jours la dou- 
leur avait disparu. Il priten tout 14 décigrammes d'extrait 
à l’intérieur et 12 grammes en frictions. 

De tous les remèdes que j'ai employés pour combattre 
celte maladie (rhumatisme chronique), je n’en ai point 
de plus efficace, dit le docteur Kirckhoff (Journ. compl. 
des scienc. méd., t. xxvir, p.191) , que la pomme épineuse, 
vont je ne cesse, depuis nombre d'années, d'obtenir les 
meilleurs effets. Je l’administre à l’intérieur, sous forme 


4246 


d'extrait préparé avec les feuilles, en commençant par un 
grain pour vingt-quatre heures, dose que j'augmente jour- 
nellement, et par gradation, jusqu'à ce qu'il se manifeste 
de la sécheresse à la gorge , des vertiges et la dilatation de 
la pupille. J'emploie également à l'extérieur, sur les par- 
ties douloureuses, de légères frictions avec de la teinture de 
stramoine, ou bien les feuilles de cette plante en cataplasme 
et dans les bains chauds. 

Nous dirons encore, pour ce qui concerne l'emploi à l’in- 
térieur du stramonium, qu'Odhelins l'a recommandé dans 
les convulsions hystériques et dans la ehorée, que Begbie 
l'a employé dans le tétanos , et Marcet dans l’ascite et le 
cancer. 

‘ La stramoine est employée le plus ordinairement en ex- 
trait ou en teinture. La préparation de l'extrait exige beau- 
coup de soin pour conserver le principe actif de la plante ; 
l'extrait des semences est plus énergique que celui des 
feuilles. Il peut encore varier suivant le climat ou certaines 
causes inexplicables, et qu’il faut se contenter d'admettre 
comme démontrées par l'expérience. Ainsi Greding rap- 
porte que l'extrait de Vienne, que lui avait envoyé Stoerk, 
exigeait une dose trois fois plus forte que celui de Leipsick 
pour produire le même effet. 

Stoerck administrait 2 centigrammes et demi d'extrait en 
pilules , matin et soir, et allait jusqu’à 15 centigrammes. 
Odhelins, Wedenberg commençaient par la même dose 
que ce dernieret montaient jusqu’à 35 ou 40 centig. par 
jour. Greding donnait 10 centig. de l'extrait de Vienne et 
augmentait graduellement jusqu’à 1 gram.et même 1 gram. 
20 centig. par jour. Il donnait, en £ommençant , 2 à 5 cen- 
tigrammes de l'extrait de Leipsick et s'élevait à 20 centig. 
sans jamais dépasser celle de 30 centig. Marcet commen- 
çait par 7 à 8 centig. en trois fois, et Begbie par 1 à 2 
centig. et demi toutes les trois ou quatre heures. ] 

A l'extérieur , on se sert de la stramoine en décoction, 
fomentation, bains , etc., ou en cataplasme sur les ulcères 
cancéreux, les chancres , les hémorroïdes douloureuses, 
sur certaines tumeurs inflammatoires très-douloureuses , 
sur les mamelles engorgées pour suspendre la sécrétion lai- 
teuse , sur les brülures, etc. (1) Le suc entre à la dose de 
quelques gouttes dans les collyres ; il n’est pas moins efli- 


C1) L'observation suivante prouve tout le danger de l'application du 
stramonium sur la peau mise à nu : « Un paysan tomba dans une chau- 
dière d’eau bouillante , et en fut retiré ayant les deux jambes brülées 
jusqu'aux genoux. Un médecin applique sur les parties qui avaient été 
brüûlées des feuilles de datura stramonium , ce qui produisit un très-bon 


447 


cace que la belladone pour faire cesser la contraciion de 
la pupille, pour calmer l’excessive sensibilité et les dou- 
leurs de l’œil, pour combattre l’'ophtalmie. 


—— 


POTENTILLE ARGENTINE ,* 


POTENTILLE ANSÉRINE, ARGENTINE, BEC D'OIE. 


Pentaphilloïdes argenteum, alatuim; seu votentilla (T.) 
Potentilla enserina (L ) 


Ceite plante vivace, très-commune, croît partout sur les 
terrains humides, au bord des chemins et des ruisseaux. 
On emploie l'herbe. 

L'argentine, d’une cdeur nulle, d’une odeur légèrement 
styptique, noircit la solution de sulfate de fer, et son suc 
rougit le papier bleu. Elie a joui longtemps d'une grande 
réputation comme astringente contre les hémorrhagies , la 
dysenterie, la diarrhée, les fleurs blanches. Dioscoride 
et Dodacns la recommandent dans ces maladies. Degner 
(Hist. méd. de Dysent., p.146) dit que dans une dysenterie 
qui régna en 1736, on employa avec succès la décoction 
d’argentine dans du lait. Ce remède est vulgairement em- 
ployé dans nos campagnes, et réussit souvent contre les 
diarrées. Les propriétés fébrifuges, antiphthisiques, diuré- 
tiques, lithontriptiques, attribuées à cette plante par Wither- 
ing , Rosen et Bergius sont tout-à-fait illusoires ; elle n'a 
point justifié le titre de potentille (de potentia, puissance, 
vertu, efficacité), bien que l'illustre Boerhaave l'ait consi- 
déréc comme l’égale du quinquina dans le traitement des 
fièvres intermittentes. 


Quandoque bonus dormitat Homerus (HOR.) 


effet. Le docteur Borzencof , l'ayant trouvé parfaitement calme et très- 
bien portant, ordonna de percer les ampoules qui s'étaicnt formées afin 
d'évacuer la sérosité, d'enlever l'épiderme , et de panser avec le cérat 
de saturne ; mais le premier médecin qui lui avait donné des soins, 
après avoir arraché l’épiderme , recouvrit de nouveau les p'aies du da- 
tura stramonium , et bientôt le malalle éprouva les plus graves accidents. 
La bouche devint sèche , les yeux étaient fixes et éteints, les sens ex- 
trêémement émoussés , le pouls intermittent et presque insensible, M. 
Borzencof étant arrivé, enleva avec soin les feuilles qui recouvraient 
les plaies , lava les parties brûlées et les recouvrit avec du cérat de sa- 
ture. Bientôt les symplômes de l'empoisonnement disparurent ; il ne 
resta qu'une faiblesse extrême ct des étourdissements semblables à ceux 
d’un homme qui revient d'un état profond d'ivresse. » (Journ. de méd. 
et de chir. pra ., t, 11, p. 63.) 


448 


PRÊLE, 


QUEUE DE CHEVAL, QUEUE DE RENARD. 


Equisetum arvense (T.) 
Equisetum arvense (L.) 


Cette plante est très-commune dans les lieux humides, 
les fossés, le long des haies. La tige et les feuilles sont 
employées. 

Propriétés, 


On a vanté la prêle comme astringente et diurétique. On 
l'a prescrite dans l’hydropisie , la gravelle, la dysenterie, la 
diarrhée, l’hémoptysie, l’hématurie et autres hémorrhagies. 
Le professeur Lenhossek , de Vienne (Journ. de chinue, 
pharm. et toxicol., 1827), recommande les diverses espèces 
de prêle , et particulièrement l’egwsetum hiemale et l'equr- 
setum limosum, comme des diurétiques puissants. Ces 
plantes n’ont, suivant cet auteur, aucune influence funeste 
sur les organes digestifs, circulatoires et nerveux. Il vaut 
mieux les employer sèches. La poudre et la décoction réus- 
sissent également bien (8 à 15 gram. par litre); une à deux 
cuillerées de cette décoction aux enfants, 100 à 200 gram. 
aux adultes toutes les deux heures. 

J'ai vu employer la décoction de prêle avec succès dans” 
l’hématurie des bestiaux , après avoir toutefois , dans la plu- 
part des cas, pratiqué une large saignée. C'est un remède 
populaire à la campagne. 

Cette plante a été considérée comme emménagogue : 
Schulze accuse les prêles de causer l'avortement des vaches 
et des brebis, quand elles se trouvent mêlées en trop grande 
quantité dans leur fourrage.Cependant les Irlandais donnent 
indifféremment toutes les espèces à manger à leurs bestiaux 
sans qu’il en résulte aucun accident. 

J'ai reconnu à la prêle une action assez prononcée sur les 
organes urinaires. Elle m’a paru utile dans la népbrite ca]- 
culeuse avec absence de douleur vive, et dans l'état cach 
tique et œdémateux qui suit ou accompagne les fièvres 
intermittentes. J'ai donné avec avantage, dans ces derniers 
cas, la décoction de parties égales de cette plante et de 
feuilles de pissenlit. J'ai aussi employé le suc de prêle à la 

* dose de 30 à 100 grammes dans un kilog. de petit lait. 


449 
PRIMEVÈRE, 


OREILLE D'OURS, COUCOU, HERBE DE LA PARALYSIE. 


Primula veris odorata flore luteo simplici (T. 
Primula officinalis (L.) 


Cette plante, très-répandue dans les prairies et le long 
des haies, montre ses fleurs dès les premiers jours du prin- 
temps. L’odeur qu’elles exhalent annonce leur action sur 
les systême nerveux comme calmante et anti-spasmodique. 
On l’a vantée contre les affections hystériques , les vertiges, 
les maux de tête nerveux, la gastralgie , etc. Elle peut être 
rangée sur la même ligne que la moscatelline , les fleurs de 
tilleul , celles de caille-lait jaune. Les feuilles ont été quel- 
quefois employées avec les fleurs. La plante entière a été 
appliquée sur les articulations affectées de la goutte, ce qui 
l'a fait appeler aréthritica par Gesner. En Suède on prépare, 
par la fermentation, une boisson agréable avec ses fleurs, le 
citron et le sucre ou le miel. La racine a une odeur analogue 
à celle de l’anis, et une saveur astringente. Les gens de la 
campagne l’emploienten décoction contre la gravelle. On la 
donne aussi vulgairement , comme vermifuge, en infusion 
dans le vin ou la bière. On dit avoir guéri des maux de dents 
en faisant aspirer par le nez du vinaigre dans lequel cette 
racine avait infusé. 

Cette plante n’est pas tout à fait inerte; mais elle est du 
nombre de celles dont on peut se passer sans inconvénient, 
malgré les éloges qui lui ont été prodigués. 


PRUNELLIER. 


ÉPINE NOIRE, FOURDINIER. 
Prunus sylvestris (T.)—Prunus spinosa (L.) 


Le prunellier est tellement commun qu’on en fait des 
haies. L’écorce, les fruits, les fleurs, sont usités. 
Prépsorations et doses, 
A L'INTÉRIEUR : Décoction de l'écorce, 42à 30 gram. dans 172 kilog. 
d'eau. 
Poudre de l'écorce, 6 à 42 gram., pillules. 


Fleurs en infusion, une poignée pour 150 à 200 gram. d'eau 
bouillante. 


Propriétés. 
L'écorce de prunellier est astringente, fébrifuge; les 
fleurs sont laxatives ; les fruits sont astringents et servent à 
préparer l'acacia germanica. 


29 


450 


L'écorce de prunellier est astringente et a été proposée 
comme febrifuge. 

Cette écorce à pu, au rapport de Coste et Wilmet, 
réussir dans quelques fièvres tierces, mais je dois avouer 
qu’elle ne m'a pas offert Ile même avantage. Sur six cas de 
fièvres, dont cinq à type tierce ctun à type quotidien, un 
seul a pu être considéré comme ayant cédé à l’adminis- 
tration de la décoction concentrée, prise dans l’apyrexie. 
La fièvre quotidienne a résisté. Les quatre autres cas ont 
donné une solution d'autant plus douteuse que les accès 
se sont graduellement dissipés , ainsi que cela arrive dans 
les fièvres printanières, par les seuls efforts de la nature. 

Les fleurs de prunelliers sont réellement laxatives. Je les 
ai fréquemment employées comme telles, fraîchement cueil- 
lies et infusées dans une suffisante quantité d’eau, à la dose 
d’une poignée. Ce laxatif convient aux enfants. En sirop, ces 
fleurs perdent, au bout d'un certain temps, leur vertu pur- 
gative. Le suc exprimé des prunelles, cuit et épaissi jusqu’à 
consistance d'extrait solide, se nomme acacia d'Allemagne 
ou acacia nostras, et peut être substitué à l'acacia d'Egypte. 
Je l’ai employé comme astringent avec autant de succès. 

J'emploie quelquefois la décoction de prunelles dans les 
diarrhées atoniques: l'effet est prompt. J'ai fait un vin as- 
tringent avec des prunelles séchées au four et infusées dans 
le vin rouge. Ces mêmes prunelles cuites, infusées dans 
l’eau-de-vie, donnent une teinture qui, avec addition de 
sucre et de canelle, ou de macis, forme une excellente li- 
queur de table. 


PTARMIQUE, 


HERBE À ÉTERNUER. 


Ptarmica vulgaris (T.) 
Achillæa ptarmica (L) 


Cette plante se rencontre partout dans les prés humides. 
La saveur de ses feuilles, à peine aromatique et un peu 
âcre, ressemble un peu à eelle de l’estragon. Sa racine et ses 
feuilles, séchées et réduites en poudre, sont sternutatoires. 
La racine , lorsqu'on la mâche, excite vivement l’action des 
glandes salivaires Elle convient, ainsi employée, comme 
celle de pyrêthre, qui est plus rare et à laquelle on peut la 
substituer dans l’engorgement des glandes salivaires, l’a- 
mygdalite chronique, les engorgements atoniques de la 
bouche, l’odontalgie rhumatismale, la paralysie de la lan- 
gue, ele: 


451 


PULMONAIRE. 


HERBE DE COŒUR, HERBE AU LAIT DE NOTRE-DAME, 
HERBE AUX POUMONS. 


Pulmonaria vulgaris latifolia (T..} 
Pulmonaria officinalis (L.) 


La pulmonaire, que l'on cultive dans les jardins, croît 
naturellement dans les bois, aux lieux ombragés. — Ses 
feuilles et ses fleurs sont usitées. 


Propriétés. 


Cette plante est adoucissante, pectorale; on la donne en 
décoction dans le catarrhe pulmonaire, la phthisie etc., (50 
à 100 gram. par kilog. d'eau.) | 

Les habitants de la campagne croient fermement que le 
Créateur a indiqué l'usage de cette plante par les taches 
qu'on remarque sur ses feuilles et qui, disent-ils, sont tout- 
à-fait semblables à celles qui existent dans le poumon 
malade. Ils composent avec la pulmonaire, le choux rouge, 
quelques oignons blancs, du mou de veau et une suffisante 
quantité de sucre candi, un bouillon que j'ai moi-même 
- employé avec beaucoup de succès dans les affections de poi- 
trine, surtout quand elles sont accompagnées d’un état fé- 
brile, de difficulté d’expectorer, d'irritation bronchique, de : 
douleurs, etc. 


PULMONAIRE DE CHÉNE. 


MOUSSE PULMONAIRE, LICHEN D'ARBRE, PULMONAIRE 
D’ARBRE, LICHEN PULMONAIRE. 


Lichen arboreus sive pulmonaria arborea (T..) 
Lichen pulmonaria (L.) 


Cette plante vient sur les troncs des vieux chênes, des 
hêtres, des sapins et d’auires arbres sauvages. On recueille 
ordinairement celle qui se trouve sur les chênes. 


Propriétés. 


Tonique et mucilagineux, le lichen pulmonaire est em- 
ployé depuis longtemps dans les affections de poitrine, 
l'asthme, les diarrhées chroniques, etc. Cramer, d’après sa 
propre expérience, a proposé, dans une dissertatien publiée 
en 1780, de substituer ce lichen à celui d'Islande. Willemet 
l'a employé en poudre, à la dose d'un gros (4 gram.) délayé 


% 


452 
dans une forte décoction de Ia même plante, édulcorée avec 
le sucre candi, à prendre matin et soir, contre les toux in- 
vétérées. Scopoli,au rapport d'Foffmann,a guéri des hémop- 
tysies avec toux au moyen de lapoudre de lichen pulmonaire, 
à la dose de quatre gram., quatre fois par jour ; mais il avait 
soin auparavant de combattre l'état inflammatoire et la ple- 
thore par les antiphlogistiques. Pour moi, je retire du lichen 
pulmonaire le même avantage que de celui d'Islande; il 
m'est d’une grande ressource pour mes pauvres. Je le fais 
prenäre en décoction avec du miel dans les. catarrhes pul- 
monaires chroniques et dans la phthisie; je l'emplote dans 
tous les cas où l’on use habituellement, et d’une manière si 
générale, du lichen d'Islande. Selon les circonstances, je 
joins à la décoction de pulmonaire de chêne, les fleurs de 
tussilage, de mauve, le mucilage de graine de lin, les bour- 
geons de peuplier baumier, de sapin, etc. 


PULSATILLE COMMUNE .* 


ANÉMONE PULSATILLE, COQUELOURDE, FLEUR DE VENF, 
HERBE AU VENT, FLEUR DE PAQUES, PASSE-FLEUR, TEIGNE-OEUF. 


Pulsatilla folio crassiore et majore flore (T.) 
Anémone puleatilla (L.)' 


La coquelourde se trouve dans les terrains secs et mon- 
tagneux de la France. Elle se rapproche beaucoup de l'ané- 
mone des prés (pulsatilla nigricans L.) par ses caractères 
botaniques comme par ses propriétés ; elle semble même ne 
s'en distinguer que par la plus grande élévation de sa tige 
et la rectitude de ses pétales. On emploie toute la plante. 


Propriétés, 


La pulsatille commune, presque inodore, est âcre et vési- 
cante. Cette âcreté est plus prononcée dans les feuilles que 
dans les racines. 

Storck (de usu pulsatilla nigricant. medie., Vindebon, 
1771) a mis en vogue la pulsatille des prés, espèce très- 
voisine , ainsi que nous venons de le faire remarquer, de 
noire pulsatille commune. Ces deux plantes, données à l'in- 
térieur à haute dose, enflamment l'estomac et frappent de 
stupeur le système nerveux. Elles sont rangées parmi les 
poisons àcres. 

A dose thérapeutique, la pulsatille a été vantée par Storck 
et d’autres auteurs, comme propre à combattre efficacement 


455 


Famaurose, la paralysie, la syphilis consécutive, la cataracie, 
les taies de la cornée, les ulcères opiniâtres, les dartres. 
C'est surtout dans le traitement de ces dernières que le cé- 
lèbre médecin de Vienne dit avoir obtenu les résultats les 
plus avantageux de cette plante. FH employait ordinairement 
Fextrait, en commençant par une petite dose, qu'il augmen- 
tait graduellement. 

D'un autre côté, Smucker, Richter et Bergius, dont le 
témoignage est également irrécusabie, ont répété sans suc- 
cès les expériences de Storck. Entre ces résultats contradic- 
toires, l'observateur, en se livrant à de nouvelles études sur 
cette plante, doit se placer de manière à voir sans prévention 
jusqu'à quel point l'exagération est chez les uns et le scep- 
ticisme chez les autres. 

Bonnel de la Brageresse {ancien journal de méd., 1.58, 
p.476) regardait l'extrait de pulsatiile comme le remède le 
plus efficace contre le vice darireux. II ladministrait à la 
dose de 8 centigram. deux fois par jour, et faisait en même 
temps lotionner les parties affectées avecla décoction de 
jusquiame et de cigüe. 

Le docteur Deramm (Bibl. med. nat. et étrang.,t. 4. p.521) 
a obtenu des résultats avantageux de l'extrait de pulsatille 
dans la coqueluche. Il prétend.avoir employé ce remède 
pendant dix ans chez un grand nombre de malades, et ne 
J'avoir vu échouer qu’une seule fois. Il donnait l’extrait à la 
dose d'un quart de grain à un grain et demi, suivant l'âge, 
quatre fois par jour. Il le prescrivait aussi aux adultes 
atteints de toux sèches et spasmodiques, à la dose de 2 ou 
3 grains répétée trois fois dans la journée. 

Quelques médecins ont employé, dit-on, avec avantage 
l'infusion des feuilles de pulsatille commune dans les engor- 
gements des viscères abdominaux et dans l'hydropisie. On 
ne doit pas dépasser, dans cette infusion, la dose de 2 gram. 
chaque fois. Sous quelque forme qu'on administre Ja pulsa - 
tille il ne faut commencer que par de petites doses, en 
augmentant progressivement el avec Cireonspeclion. 

La coquelourde ne se rencontre que rarement dans le pays 
que j'habite ; je ne l'ai jamais employée. Les vétérinaires 
appliquent les feuilles de coquelourde sur les vieux ulcères 
des chevaux pour les déterger. Les paysans entourent le 
poignet de ces mêmes feuilles pilées pour se guérir de la 
fièvre intermittente. Bulliard {ouv. cit., p. 178) signale le 
danger de cette application trop longtemps prolongée,et rap- 
porte le fait d’un vieillard chez lequel cette plante, laissée 
pendant douze heures sur le mol'et dans l'intention de gué- 
Fir un rhumatisme très-douloureux , produisit la gargrèae 


45% 


d'une grande partie du membre. Le mal céda aux scarifica- 
tions et aux fomentations d’eau-de-vie camphrée. Cet homme 
fut en même temps complètement débarrassé de son rhuma- 
tisme. 

On peut néanmoins , en agissant avec prudence , mettre à 
profit la propriété rubéfiante et vésicante de la coquelourde 
quand, dans un Cas pressant , on est privé de sinapismes 
et de vésicatoires. 

L'anémone pulsatille perd presque toute son âcreté par la 
dessiccation ; sèche , les bestiaux la mangent sans danger ; 
mais verte ils n’y touchent pas, à moins qu’ils n'aient rien 
autre chose , et alors il est rare qu'ils n’en meurent pas. 

On emploie les fleurs de cette plante cuites dans l’eau 
pour teindre les œufs ; de là le nom de teigne-œuf qu'elle 
porte dans quelques contrées. 


PUTIET,, 


CERISIER SAUVAGE. 


Cerasus racemosus, sylvestris (T.} 
Prunus Padus (L.) 


Le putiet croît naturellement en Lorraine, sur les mon- 
tagnes des Vosges, et se cultive aisément dans les jardins. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Décoction de l'écorce, de 46 à 60 gram. par kil. d'eau. 
Poudre: 4 à 6 gram., dans du vin ou en électuaire, etc. 


Propriétés. 


L'écorce de cerisier sauvage est tonique, stomachique, 
fébrifuge. 

L’écorce du putiet était connue depuis longtemps en Lor- 
raine comme propre à remplacer le quinquina dans les fièvres 
intermittentes; Coste et Willemet ont reconnu cette propriété. 
Trois fièvres tierces, une fièvre quarte, une quotidienne et 
une double tierce ont été guéries, sans récidives. 

De tels succès n'ont engagé a essayer cette écorce. Je l'ai 
administrée en poudre en 1819, pendant le règne d’une épi- 
démie de fièvres intermittentes sévissant à Frethun. Huit 
malades en ont fait usage à la dose en poudre de #, 8 ou 
12 grammes dans l'apyrexie. Six étaient atteints de fièvre 
tierce, deux de fièvre quotidienne. Chez trois malades ayant 
le type tierce, qui ont pris la poudre de cette écorce à la 
dose de huit grammes en deux fois, dans l'apyrexie, l'accès 
a disparu dès le lendemain ; chez trois autres malades, dont : 


455 


un était atteint de fièvre quotidienne et deux de fièvre tierce; 
la maladie a diminuégraduellementpendantl'usage, à la même 
dose, de la poudre de putiet; ils n’ontété guéris qu’au bout de 
8à 12 jours ; les deux derniers atteints, l'un d'une fièvre 
tierce, l’autre d’une fièvre quotidienne, n'ont pu guérir, bien 
que la dose du médicament ait été porlée à 12 grammes, 
prise en trois fois dans l’apyrexie. L'occasion était favorable 
pour l'essai comparatif de l'écorce de saule blanc. Cette 
dernière fut administrée aux deux malades, à la dose de 6 
grammes dans l’apyrexie ; dès le lendemain, celui qui avait 
la fièvre tierce en fut délivré. L'autre éprouva uneamélioration 
notable ; il continua de prendre le médicament et fut débar- 
rassé graduellement dans l’espace de cinq jours. 

Ces faits ne me laissèrent aucun doute sur la supériorité 
de l’écorce de saule blanc, que je préfère à tous les autres 
fébrifuges indigènes et que j'administre avec succès aux in- 
digents et aux ouvriers. Le sulfate de quinine est d’un prix 
trop élevé pour la plupart des habitants de la campagne. 
J'en ai vu beaucoup qui, après avoir pris du sulfate de qui- 
nine pour couper la fièvre, ont eu des récidives, parce qu'ils 
n’ont pu continuer assez longtemps l’usage de ce remède; en 
définitive, ils ne se guérissaient qu’en prenant abondamment 
et pendant quelque temps l’écorce de saule en décoction. 


PYRQOLE,. 
YVERDURE D'HIVER. 


Pyrola rotundifolia major (T.) 
Pyrola rotundifolia (L.) 

Cette plante croît dans les lieux ombragés des bois; elle 
fleurit en mai et juin. Les anciens auteurs la préconisent 
comme vulnéraire et astringente. Elle a une saveur amère 
et acerbe. On l'a employée contre la ménorrhagie passive, 
la leucorrhée chronique, la diarrhée, etc. Elle entre dans le 
mélange connu sous le nom de vulnéraire suisse. On peut 
la donner en décoction (30 à 60 gram. par kilog. d’eau), 
en poudre (2 à 4 gram.), en extrait aqueux ou alcoolique 
(de 1 à 3 grammes). 


La PYROLE EN OMBRELLE ( Pyrola ombellata L.), quoique 
peu connue,ne paraît pas dépourvue de propriétés. On lui a 
reconnu une vertu diurétique qui l’a rendue utile dans les 
hydropisies. L’infusion de cette plante {medical Repository, 
New-York,avril 1818) a été employée avec succès dans deux 
cas de cancer à la face. D’après le journal que nous venens. 


456 


de citer, les deux malades ont été guéris après avoir fait 
usage du pyrola umbellata, Vun pendant un mois, et 
l’autre pendant trois semaines seulement. Il est à craindre 
qu'il n'en soit de cette plante comme de tant d’autres remè- 
des proposés contre le cancer, et qui ont toujours échoué en 
présence de l'observation rigoureuse des faits. 


QUINTE - FEUILLE, * 


POTENTILLE RAMPANTE , PIPEAU. 


Quinquefolium majus repens (T.} 
Potentilla reptans (1...) 


La quinte-feuille, plante vivace, croît partout et est 
connue de tout le monde. La racine et les feuilles sont usitées. 


Propriétés. 


La racine de quinte-feuille est astringente. Elle teint en 
noir la solutiou de sulfate de zinc. Hippocrate ( de morb., 
hb.1n) indique la potentille rampante comme propre à gué- 
rir la fièvre intermittente. Senac (de recond. febr.interm. 
nalurâ , Amsterd. 1759) lui a reconnu cette propriété et l’a 
employée avec succès dans des cas opiniâtres. Les campa- 
gnards l’emploient par tradition pour couper la fièvre ; ils 
réussissent souvent quand ils la prennent en décoction très- 
concentrée. | 

Elle convient comme astringente dans les diarrhées et les 
dyssenteries lorsqu'il y a absence d'irritation ou d’inflamma- 
tion. Chomel assure qu'elle lui a réussi dans ces dernières 
maladies quand l’ipécacuanha avait échoué. On l’emploie 
aussi contre la leucorrhée par atonie, les pertes séminales, 
les hémorrhagies passives, etc. « Cette plante, dit Bodart, 
trop négligée de nos jours parce qu'elle n’a pas le mérite 
d'être étrangère , peut rendre les plus grands services dans 
les hémorragies passives avec relâchement ; mais, comme 
les autres astringents, elle est nuisible dans les flux eriti- 
ques dépendants de l'énergie du principe vital. » (Ou. cot., 
1.1, p.284.) 

J'ai souvent employé, dans ma pratique rurale, une forte 
décoction de parties égales de racine de quinte-feuille, de 
tormentille er de bistorte. Cette décoction me réussit tout 
aussi bien que celle de ratanbia contre les hémorrhagies 
passives, et a, sur cette dernière, l'avantage de ne coûter 
que la peine de récolter les racines indigènes qui la com- 
posent. 


457 


On récolte la racine de quinte-feuille en tout temps ; après 
l'avoir mondée de ses filaments, on l’incise longitudinale- 
ment et on la fait sécher au soleil. 


RAIFORT, 


GRAND RAIFORT SAUVAGE, MOUTARDE DES CAPUCINS; 
DES ALLEMANDS. 


Raphanus rusticanus (T.) 
Cochlearia armoracia (L.) 


Le grand raifort sauvage vient spontanément dans les fos- 
sés, sur les bords des ruisseaux, dans presque Lo les dé- 
partements de la France; on le cultive dans les jardins. Sa 
racine est usitée. 


PFréparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR ; infusion, de 15 à 30 gram. par kil. d'eau. 
Suc exprimé, de 15 à 50 gram. 
Euu distillée, de 45 à 50 gram. dans une potion. 
Sirop (1 de suc sur 2 de sucre), de 15 à 60 gram.en potion. 
Vin ou bière (par macération à vase clos de la racine fraiche, 8 à 
45 gram. sur 4/2 litre), de 50 à 100 gram. 
Teinture, de 8 à 15 gram. en potion. 
A L'EXTÉRIEUR: teinture en frictions. — Pilé, en pédiluves, sina- 
pismes, etc. 


Propriétés. 


La racine de raifortest très-stimulante et anti-scorbutique” 
Son action, puissamment tonique et excitante, due à l'huile 
volatile âcre et caustique qu’elle contient, l'a fait conseiller 
dans les scrofules, les catarrhes chroniques, lœdème des 
poumons, les rhumatismes chroniques, certaines hydropisies 
passives, quelques maladies cutanées, etc. A l'extérieur, elle 
agit comme rubéfiante et peut, comme telle, remplacer la 
moutarde. 

Le raifort sauvage est une plante précieuse ; elleest,comme 
le cochléaria,au premier rang des plantes anti-scorbutiques, 
et convient dans tous les cas où les toniques stimulants sont 
indiqués. Le suc de raifort est vomitif à Ja dose de 30 à 80 
centigr. Suivant Rivière , la semence de cette plante, à Ia 
dose de 15 à 24 gram. en décoction, est aussi émétique et 
purgative. Ettmuler dit avoir guéri une femme hydropique, 
ascitique et scorbutique, avec toux, difficulté de respirer,au 
moyen de la racine de raifort sauvage infusée dans du vin 
blanc, avec du cresson d’eau haché et pilé dans un mortier. 


458 


La malade buvait ce mélange , qui purgeait par haut et par 
bas. Gilibert considère le suc de la racine de cette plante 
comme un des plus forts diurétiques indigènes. Bartholin 
fait infuser la racine de raïfort dans la bière, comme anti- 
scorbutique et diurétique. Bergius faisait avaler, contre la 
goutte et le rhumatisme chronique, une cuillerée de rapure 
de cette racine chaque matin à jeun, et par dessus une tasse 
de décoction de sommités de genévrier. Linné faisait grand 
cas du sirop préparé à froid avec le raifort dans l'asthme 
scorbutique. Sydendam recommandait la racine de cette 
plante dans les hydropisies qui sont la suite des fièvres 
intermittentes. Cullen la croit utile dans le rhumatisme. 
Raygerus (Eph.nat. cur.) rapporte qu’une dame, affectée 
depuis plusieurs années d’un rhumatisme qui avait résisté 
à tous les moyens connus, en fut débarrassée par l’usage de 
Ja décoction de cette racine dans du lait. Lanzoni (Eph.mat. 
cur.) a guéri un bourgeois de Ferrare attaqué d’un enroue- 
ment chronique considérable au moyen du sirop de raifort. 

Les Suédois préparent un petit lait médicamenteux, en 
jetant du lait bouilli sur la rapure de raifort , humecté avec 
du vinaigre ; ensuite ils séparent le fromage du petit lait. Ce 
petit lait, que j'ai fréquemment employé dans ma pratique 
comme diurétique, est une excellente préparation. Je l'or- 
donne principalement dans lanasarque, le scorbut, la 
gravelle sans trop d’irritation , et dans certains catarrhes 
chroniques. Je me trouve très-bien dans la leucophlegmasie, 
lescachexies, la chlorose, etc., de F'usage du vin de racine 
de raifort et de baies de genièvre concassées , de chaque 30 
gram. pour un litre de bon vin blanc. Je fais prendre ce vin 
par plusieurs cuillerées par jour, ou à la dose de 60 gram. 
matin et soir. 

[ Hufeland faisait digérer pendant vingt-quatre heures 
30 gram. de racine fraîche de raifort dans 1 kil. de bière, 
avec addition de 30 gram. de sirop simple, et administrait 

cette boisson par tasses toutes les trois heures dans l’hydro- 
pisie. Brennecke ( Rinnas, Repert., 1833) prétend que cette 
même infusion est très-eflicace dans l’aménorrhée et la 
leucorrhée. 

M. Rayer a employé avec avantage la racine du raifort 
dans l'hydropisie résultant de la néphrite albumineuse chro- 
nique : « J'ai vu, dit cet auteur, l’hydropisie diminuer ou 
même quelquefois disparaître complètement par l'action 
diurétique de la tisane de raifort sauvage. Plusieurs malades 
ont refusé de continuer cette boisson , parce qu'ils la trou- 
vaient désagréable et qu'elle leur fatiguait l'estomac. J'en 
ai vu d’autres qui, malgré la persévérance avec laquelle ils 


459 


en ont fait usage, n’en ont retiré aucun soulagement. 
Cependant, de tous les diurétiques, c’est encore celui dont 
l'usage m'a paru offrir généralement le plus de chances de 
succès.» (Traité des malad. des reins ; Paris, 1839 , p. 40 
et 41.) 

M. Martin-Solon vante aussi ce puissant diurétique contre 
l'albuminairie : « Nous pensons, dit ce médecin, que le 
raifort sauvage convient surtout dans les cas d’hydropisies 
accompagnées d'urine albumineuse, lorsque l’on peut attri- 
buer l'affection à un état blafard et atonique des reins, avec 
tendance au ramollissement.» (Dict. de méd. et de chr. prat. 
1. XIV, p. 127.) 

Comme rubéfiant et vésicatoire, je me sers de la racine ou 
des feuilles de raifort, à défaut de moutarde. Elles agissent 
très-promptement , et j'ai toujours eu à me louer de leur 
effet. Nous avons, à la campagne, une foule de plantes dont 
les propriétés analogues nous offrent des ressources variées 
pour salisfaireà une seule et même indication. 

[ Les propriétés du raifort disparaissent par la dessicca- 
tion. On doit donc employer la racine à l’état frais. L'eau, 
la bière, le vin, le lait, l'alcool dissolvent ses principes 
actifs.On la fait macérer , coupée par petits morceaux, en 
vase clos dans l’une ou dans l’autre de ces liquides, pendant 
vingt-quatre heures. 

La racine de raifort entre dans la bière, le vin et le sirop 
antiscorbutique du Codex ; elle est la base de la teinture de 
raifort composé. 


RÉGLISSE. 


Glycyrrhizsa siliquosa vel germanica (T.) 
Glycyrrhiza glabra (L.; 


La réglisse croît spontanément en Bourgogne et dans les 


départements méridionaux de la France. La racine est em- 
ployée. 
Propriétés, 


La racine de réglisse, en infusion ou en décoction {8 à 
30 gram. par kil. d’ eau est adoucissante et mucilagineuse. 
On l’emploie vulgairement dans les rhumes , les maladies 
inflammatoires , surtout dans celles des voies aériennes et 
urinaires. C'est une boisson populaire en usage pendant les 
chaleurs de l'été. L'infusion est préférable à °la décoction, 
parce que l'eau bouillante en extrait un principe oléo- rési- 
neux âcre et amer. Il vaut même mieux la traiter par l’eau 
froide ou tiède. On ne doit donc l'ajouter aux tisanes qu'on 


460 à 


veut édulcorer, et dans lesquelles elle remplacé le miek 
et le sucre, que lorsque Ja décoction est presqueentièrement 
refroidie ou froide. 
L'extrais de réglisse, suc ou jus de réglisse, jus noir, 

s'emploie journelle ment dans les affections catarrhales ; il 

calme la toux et facilite l’expectoration. La pâte de réglisse, 
faite avec l’infusion de cette plante, la gomme arabique et le 
sucre, est employée dans les mêmes cas. À la campagne, on 
fait un loock domestique avec l’infusion de semence de lin, 
15 gram. environ d'extrait de réglisse et une cuillerée de 
miel ; on y ajoute quelquefois la pulpe d’un oignon cuit sous 
Ja cendre, et trituré dans le mélange. La racine de réglisse, 
tenue dans la bouche, appaise la soif ; on l’emploie comme 
masticatoire chez les hydropiques que la soif tourmente. 


RENONCULE. 


1° RENONCULE ACRE. — Renoncule des prés, grenouillette, 
bouton d’or, patte de loup, jauneau , herbe à la tâche. 
(Ranunculus pratensis erectus acris T.— Ranunculus 
acris L.) « 

2° RENONCULE BULBEUSE —Rave de Saint-Antoine, pied-de- 
coq, pied-de-poule, pied-de-corbin, clair-bassin, bassinet, 
{Ranunculus tuberosus major Harm.—Ranurculus bul- 
bosus L.) 

3° RENONCULE sCcÉLÉRATE. — Herbe sardonique, herbe de 
feu, mort aux vaches, herbe scélérate. { Ranunculus 
palustris api fohio T.— Ranunculus sceleratus L.) 


Toutes les renoncules croissent en France, dans les prai- 
ries, les lieux humides, surtout dans les départements du 
Nord. La racine, les feuilles et les fleurs sont usités. 


Fropriéiés. 


Les renoncules doivent être rangées dans la classe des 
poisons âcres : leur ingestion peut causer la mort. On les a 
employées à l'extérieur contre la teigne , les ulcères atoni- 
ques et scrophuleux ; mais le plus ordinairement on ne s'en 
serl que comme rubéfiantes et vésicantes. Elles peuvent 
remplacer Îles cantharides lorsque l'on craint l'action de 
celles-ci sur la vessie, ou que certains cas d'urgence se pré-. 
sentent où l'on est forcé de se servir du moyen qui se trouve. 
sous la main. 

[ L'action rubéfiante et vésicante des renoncules a lieu 
assez promptement : quelques minutes suffisent quelquefois 
pour produire une inflammation suivie de vésicules conte- 


|] 


A6I 


nant une sérosité âcre. Les plaies qui en résultent guéris - 
sent assez promptement par l'application des feuilles broyées 
de cynoglosse ou de bouillon-blanc. Les mendiants qui, au 
rapport de Linnée et de Gaspard Hoffmann, se faisaient 
venir des ulcères par l'application de la renoncule scélérate 
afin d’exciter la commisération , se servaient de feuilles de 
bouillon-blanc pour les guérir. La renoncule âcre a été 
employée comme vésicatoire dans la goutte et les maux de 
tête, par Chesneau. Il à guéri un prêtre retenu au Hit depuis 
trois mois par la goutte, en appliquant sur la partieaffeetée des 
feuilles de cette renoncule écrasée ( Observ. medicinal. hbri 
quinque , 1672). Baglivi appliquait cette plante sur le siége 
des douleurs externes : Doloribus externarum partium, si 
alia non proficiant, ad causticum devenias : ipse uti soleo 
folus ranunculi.….. (Opera omn. Antwerp., 1715, p. 113). 
Stock employait ce topique dans le rhumatisme articutaire 
chronique. Sennert (De febr. bb. 4) dit qu'un individu, 
affecté de fièvre quarte, avec douleurs vlolentes à l'épaule 
gauche, fut guéri par l'application, au poignet, de la renon- 
cule pilée. R 

La renoncule âcre, que nos paysans nomment herbe à la 
tâche, est vulgairement employée en épicarpe contre les 
taies des yeux ; on entoure de cette herbe écrasée le poignet 
du côté opposé à celui de l'œil atteint de tâches ; après la 
vésication résultant de ce topique, er à l’aide de quelques 
oraisons ou d'une neuvaine, on attend patiemment Ia gué- 
rison (1). 

La renoncule bulbeuse est si active que sa pulpe pilée 
et appliquée sur la peau y produit des phlictaines dans 
l'espace d’une demi-heure. Cette promptitude d'action peut 
être très-utile dans certains cas : mais, comme la renoncule 
àcre, la renoncule scélérale, elle peut causer du gonflement, 
des douleurs vives, des ulcérations rebelles, la gangrêne, 
etc. Pour prévenir ces inconvénients , on ne doit en appli- 
quer qu'une petite quantité à la fois, sur une petite étendue, 
et l'enlever au bout de quelques heures. Avec ces précau- 
tions, on peut se servir des renoncules comme de puissants 
révulsifs dans tous les cas qui exigent une action prompte 
et efficace. 

“« Le docteur Polli vante l'efficacité de la renoncule bul- 
beuse contre la sciatique ; il pile le bulbe et l’applique autour 


{) On a écrit de gros volumes sur les prejugés populaires relatifs à 
la médecine. Une page de l’almanach de Mathieu Lensberg , consacrée 
chaque année à leur destruction , ferait beaucoup plus de bien que l'ou- 
vrage de Richerand sur cette matière. 


462 


du talon ; de cette application résulte une vésication qui ne 
tarde pas à devenir insupportable ; alors on donne issue à la 
sérosité accumulée sous F épiderme soulevé. M. Nardo fait 
l'éloge de cette méthode, et M. Freschi assure qu’elle est 
suivie depuis plusieurs années avec succès dans l’hôpital de 
Crémone (Journ.des Conn.médico-chir., 8° année, 2csemest., 
pag. 257). Virey (Traité de Pharin., t.1, p.73) a retiré une 
fécule douce et nutritive de la racine de renoncule bulbeuse. 

La renoncule scélérate est très-active. Orfila a fait périr 
des animaux en introduisant de l'extrait de cette renoncule 
dans leurs plaies. Cependant Krapf affirme que la décoction 
des renoncules peut être ingérée sans inconvénient. L’ébul- 
lition , en effet ; enlève une grande partie de leur principe ; 
leur suc s’affaiblit aussi beaucoup à l'évaporation. 

Appliquée aux poignets, la renoncule scélérate peut pro- 
duire, comme les renoncules âcre et bulbeuse , une révul- 
sion salutaire dans les fièvres intermittentes. Elle est vulgai- 
rement employée pour cela. Gilibert a proposé de délayer le 
suc de renoncule scélérate dans une grande quantité d’eau 
(2 gram. de suc sur 1 kil. d’eau), pour l’administrer comme 
apéritif, désobstruant et tonique énergique. Il dit que ce 
dilutum a été usité dans l'asthme, les gonorrhées et les 
ulcères de la vessie. Grapf ( Experim. de nonnul. ranuncul. 
venen. qualit. horumque extern. et intern. usu.venn. 1766) 
le recommande dans les mêmes cas et dans la phthisie, les 
scrofules, l’ictère, etc. On manque de données positives sur 
la nature des effets consécutifs de cette plante dans ces divers 
cas, et si son àäcreté surpasse celle des autres renoncules, 
avec quelles précautions et quelle prudence ne doit-on pas 
l'employer. 

Il résulte de tout ce que nous venons de dire,que les effets 
des renoncules âcre, bulbeuse et scélérate, employées à 
l'extérieur, se réduisent à la rubéfaction et à Ja vésication à 
un degré plus ou moins prononcé. J'ai employé trois fois 
ce vésicatoire végétal. Il est douloureux quand l'application 
en est trop prolongée. On doit s’en abstenir chez les femmes 
et les enfants qui ont la peau délicate. J'ai toujours présent 
à la mémoire le fait rapporté par Murray, d'un enfant de 
huit ans qui, ayant été délivré d’une fièvre intermittente par 
l'application en épicarpe de la renoncule âcre , fut immé- 
diatement atteint, outre l’hydropisie ascite et l'hydrocèle 
qui survinrent bientôt , d'un profond ulcère au poignet qui 
altéra les tendons des muscles fléchisseurs et le ligament 
annulaire des doigts , au point de gêner considérablement, 
par l’adhérence de la cicatrice, les mouvements de ces 
organes. 


463 


Suivant le docteur Polli (Annal univers. di Med.) la re- 
noncule scélérate est la plus active ; viennent ensuite les 
renoncules âcre et bulbeuse. Dans les renoncules âcre et 
scélérate la tige et les feuilles sont les parties les plus éner- 
giques ; dans la renoncule bulbeuse, c’est la tige et la bulbe. 
Dans toutes, la fleur est la partie la plus âcre. La teinture 
alcoolique préparée à froïd est très-active ; elle produit sur 
la peau , après dix à douze heures d'application, de la cha- 
leur, de la rougeur, avec tuméfaction ec prurit. Ces effets ne 
disparaissent qu’au bout de cinq à six jours. L'huile prépa- 
rée par la macération de la plante pendant six jours dans 
l'huile d'olive, et chauffée ensuite jusqu’à 60 degrés , pro- 
duit, douze, vingt-quatre ou quarante-huit heurcs après son 
application sur la peau, une rubéfaction accompagnée d’une 
démangeaison très-vive qui dure trois à quatre jours. 
L'alcool distillé au bain-marie, sur la renoncule pilée, cause 
après six à huit heures d'application, une chaleur intense, 
avec gonflement et formation d'une vésicule. L’eau distillée 
de renoncule fraîche est, de toutes les préparations, la plus 
active. Elle peut donner lieu à une gangrène superficielle 
après avoir produit des phlyctaines. Le docteur Jiovani 
Polli conseille ces diverses préparations dans la sciatique 
chronique, la gastralgie, la dyspepsie, les affections chro- 
niques du larynx et de la trachée-artère, l’aphonie, les toux. 
Ce médecin affirme que dans trente cas de sciatiques chro- 
niques, il n’en a pas vu un seul qui ait résisté à l'application 
sur le talon de la teinture ou de l'eau distillée de renoncule. 

L'activité des renoncules diffère selon la nature du sol, 
l'exposition, la saison, etc.; elles perdent leur âcreté par la 
dessiccation et peuvent alors être mangées sans danger par 
les bestiaux. 

La renoncule flammule ou flammette, petite flamme, 
petite douve {Ranunculus flammula L.)—La renoncule des 
champs (Ranunculus arvensis L.)—La renoncule graminée 
(Ranunculus gramineus).—La renoncule rampante (Ranun- 
culus repens L.)—La renoncule aquatique (Ranunculus 
aquaths L.), etc., jouissent des mêmes propriétés que celles 
dont nous venons de parler. | 


46% 


RENQUEE, 


RENOUÉE DES OISEAUX, AVICULAIRE, CENTINODE, TRAÎNASSE , 
HERBE DES SAINTS INNOCENTS, HERBE A CENT NOEUDS, 
LANGUE DE PASSEREAU, FAUSSE SENILE, 
SANGUINAIRE, TRAME. 


Polyqonum latifolium (T.) 
Polygonum aviculare (L.) 


Cette plante est très-commune ; on la trouve partout, dans 
les champs, sur le bord des chemins, dans les lieux incultes 
et même dans les places peu fréquentées des villes, où elle 
pousse entre les pavés. 

Propriétés, 

La renouée est sans odeur et d'une saveur légèrement 
astringente. Elle était tombée dans l’oubli comme tant d’au- 
tres plantes utiles dont on avait exagéré les propriétés, lors- 
que des praticiens l'ayant de nouveau soumise à l’expéri- 
mentation, l’ont trouvée digne de figurer avec avantage dans 
Ja matière médicale indigène. Les anciens employaient la 
centinode dans le crachement de sang, les flux de ventre, 
le vomissement , etc. Camérarius la recommande contre 
l'hématenièse ; Scopoli et Chomel assurent l’avoir employée 
avec succès dans les diarrhées et les dyssenteries chroniques. 
Wilmet (Flore écom.) dit que les vétérinaires font un secret 
de l'emploi de cette plante contre l'hématurie des vaches. 
Je l'ai vu mettre en usage avec succès dans ce dernier cas 
par les habitants de la campagne. Poiret (Hist. des plantes 
de l'Europe) dit que la renouée traînasse , quoique dédai- 
gnée, foulée aux pieds, assez souvent couverte de poussière 
et de boue , n’en est pas moins une plante des plus intéres- 
santes, et qui mérite, par ses grands services, une place 
honorable parmi les végétaux utiles. 

Dans une note lue à la Société de médecine de Lyon, et 
consignée dans le journal de cette Société (1843), M. Levrat- 
Perroton cite trois cas de diarrhée qui, après avoir résisté 
à l'eau de riz, aux fécules et au laudanum, cédèrent à une 
forte décoction de renouée sucrée. Le même succès a été 
obtenu par ce médecin dans beaucoup de flux diarrhéiques 
qui se sont présentés à son observation pendant les chaleurs 
de l'été de 1842. - 

J'ai employé ce remède, en 1846, chez une femme qui, 
atteinte de diarrhée depuis près de deux mois, avait inutile- 


465 


ment employé les opiacés, la rhubarbe, le cachou, le dias- 
cordium, l'extrait de ratanhia; une forte décoction de cen- 
tinode, prise pendant huit à dix jours, arrêta graduellement 
ce flux. Je ferai remarquer, à cette occasion, que les astrin- 
gents les plus énergiques, en supprimant trop promptement 
la supersécrétion de la muqueuse intestinale, n’ont qu'un 
effet momentané et ne sont pas toujours employés sans in- 
convénients, tandis que des astringents plus doux, mais 
dont l’action est continuée, soutenue pendant huit à quinze 
jours, ramenant peu à peu à leur état normal les fonctions 
sécrétoires altérées, ont un résultat plus certain et peuvent 
toujours être administrés sans danger. 

Les semences de la renouée, réduites en poudre, ont une 
odeur nauséeuse et sont, dit-on, fortement émétiques et pur- 
gatives; mais on manque, dit Loiseleur-Deslongchamps, 
d'observations positives pour apprécier cette propriété à sa 
juste valeur. 


RHAPONTIC, 


RHUBARBE DES MOINES, RHUBARBE A MAQUEREAUX, RHUPARBE 
A POUDINGS, RHUBARBE A TARTES,. 


Rhaponticum, folio lapathi majoris glabro (Bauh 
Rheum rhaponticum (L). 


Le rhapontic, que quelques auteurs soupçonnent être le 
rheum des anciens, croit spontanément sur les bords du 
Volga et dans plusieurs parties de la Scythie, le long du 
Bosphore, et sur le mont Rhodope ; on l’a, dit-on, trouvé en 
France dans les montagnes d'Auvergne, au Mont-d’Or. 
Cette plante est d’ailleurs si communément eultivée dans 
nos jardins pour l'usage culinaire, que nous la considérons 
comme indigène. La racine et les tiges sont usitées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : infusion ou décoction de la racine, de 15 à 50 
cram. par kil. d'eau. 
Poudre de la racine, de 4 à 145 gram. en électuaire, ou dans un 
véhicule approprié. 
Extrait de la racine, de 2à 8 gram. 


A L'EXTÉRIEUR : décoction de; tiges, cataplasmes, etc. 


Propriétés. 
La racine de rhapontic est d'une saveur plus astringente 


qu'amère. Quand on la mâche, elle laisse dans la bouche 
une viscosité douce et gluante qui sufMirait seule pour la dis- 


30 


466 


ünuguer de la rhubarbe proprement dite. Elle présente à peu. 
près la même composition chimiqueeta les mêmes propriétés 
médicales, mais à un plus faible degré. Comme tonique et 
astringente, elle a été préconisée dans l’atonie des premières 
voies, dans la diarrhée et la dysenterie, dans les flux mu- 
queux, tels que Ja blennorrhée, la leucorrhée ; elle facilite 
la digestion et convient dans la gastralgie, l’hypochondrie, 
lachlorose ; elle remédie surtout à l'état de torpeur qui, 
dans ces affections, se traduit par la constipation. On la 
mâche souvent comme Speo: 

À haute dose, la racine de rhapontic détermine la purga- 
tion ; torréfiée, elle devient plus astringente. J'ai employé 
cette racine avec autant d'avantages que celle de rhubarbe, 
seulement la dose doit en être plus élevée ; son effet, comme 
astringent, est beaucoup plus constant que comme purgatif. 

Dans plusieurs contrées, cette plante est employée dans 
les cuisines comme la chicorée, les épinards, etc. En Angle- 
terre, on sesert de ses tiges, coupées par morceaux et cuites, 
pour remplacer les groseilles : à maquereaux ; elles sont d’une 
acidité agréable ; on en fait aussi des poudings. 

Ces mêmes tiges, cuites et réduites en pulpe, sont résolu- 
tives et maturatives. Je les ai employées en cataplasme sur 
les engorgements lymphatiques et les abcès froids, pour en 
activer Ja résolution ou en hâter la terminaison par suppu- 
ration. 


RICIN, * 


PALME DE CHRISTI, PALMA-CHRISTI, KIKI. 


Ricinus vulgaris (C. Bauh). 
Ricinus communis (L). 


Le ricin, originaire de l'Inde et de l'Afrique, où il s'élève 
à la hauteur de vingt à quarante pieds, est cultivé en France 
dans les jardins; mais ce n'est plus qu’une plante annuelle 
qui, vers la fin de juillet, a atteint la hauteur de quatre à 
cinq pieds et est couverte de fleurs auxquelles succèdent des 
fruits dont on tire une huile très-usitée en médecine. 


Propriétés. 


Les fruits du ricin sont d’une saveur oléagineuse, dou- 
ceûtre, nauséeuse, âcre et brûlante. Cinq ou six de ces 
fruits suffisent pour produire des vomissements et quelques 
selles. On les à recommandés comme drastiques dans la 
goutte, la sciatique, l'hydropisie. On a prétendu aussi que, 
pris pendant dix à douze jours, à la dose d’un ou deux, ils 


467 


guérissent la gonorrhée; mais leur usage exige une grande 
circonspection, et l'on doit même, suivant l’aveu de Rolfinck, 
s'en abstenir. Ce n’est que vers 1767 que l'on songea à en 
extraire l'huile, employée d’abord en Angleterre sous le 
nom vulgaire d'huile de castor ; mais elle ne fut bien con- 
nue et son usage ne fut bien répandu en France que par 
les ouvrages d’Odier de Genève, en 1778. 

Nous avons aujourd’hui deux espèces d'huiles de ricin ; 
l’une, colorée, légèrement rougeûtre, d’une saveur très-âcre, 
venant d'Amérique, est très-active, mais elle a l'inconvé- 
nient de causer souvent de violentes coliques (1) ; l’autre, 
indigène, qui est celle de nos pharmacies, est douce et moins 
énergique. 

On la prescrit dans tous les cas où les laxatifs sont indi- 
qués. C'est un purgatif doux qui convient surtout lorsqu'il 
existe une irritation des voies digestives, comme dans les 
cas de colique, de péritonite, de dysenterie, de hernie étran- 
glée, d'engouement stercoral, d’inflammation sourde, obs- 
cure des intestins, de rétention de calculs dans les canaux 
biliaires, etc. Elle fait cesser la constipation beaucoup mieux 
que les purgatifs les plus énergiques. Dans l'Inde, on Ia 
donne avant l'accouchement. Le docteur Gariner (Bull. des 
Scienc. med. de Ferussac, t. 29, p. 247) la conseille dans la 
fièvre puerperale et la supppression des lochies, par cuille- 
rées avec le calomel, « On s’en sertavec avantage,dit M. Mar- 
tin-Sclon, à la suite des couches, dans quelques cas de 
péritonite, où l'on reconnaît l'indication d’évacuer le canal 
intestinal. Corvissart l'unissait au sirop de nerprun, et pres- 
crivait ce mélange, un peu épais, à la fin des péripneumo- 
nies ; il obtenait de cette médication de grands avantages 
que nous avons souvent observés dans le service de M. Hus- 
son, et que, depuis, nous avons nous-mêmes fréquemment 
constatés.» On l’emploie avec succès comme anthelmintique, 
contre les lombrics. MM. Dunant et Odier prétendent qu'on 
peut également s'en servir pour l'expulsion du tœnia. 
M. Mérat n’est pas de cel avis; il est certain que les faits 
n’ont que rarement répondu d'une manière affirmative à 
cette assertion. Cependant, employée conjointement avec la 
décoction de fougère mâle et l’éther, elle a quelquefois réussi 
au professeur Bourdier dans le traitement de ce parasite 
dangereux. 

« Pison rapporte qu’au Brésil on applique de l'huile de 
ricin sur le nombril des enfants, pour leur faire rendre des 


(1) On peut, en chauffant cette huile, lui enlever une grande partie 
de son äcreté et en obtenir ainsi l’huile douce de ricin. 


4GS 


vers. Nous avons essayé de frictionner ainsi le ventre avec 
de l'huile de ricin, soit comme laxalif, soit comme anthel- 
mintique; nous avons rarement obtenu le premier, jamais 
le second de ces effets. On a vanté aussi l’usage de cette 
huile, en lavement où en potion, contre la colique saturnine. 
Il s’en faut, d’après nos essais du moins, que ce médicament 
procure de fréquentes et durables guérisons dans certe affec- 
tion ;: son action paraît le plus souvent insuffisante. Toute- 
fois, on peut la prescrire avec avantage lorsque la maladie à 
peu d'intensité» (Dict. de méd.et de char. pra... 14, p.388). 

J'ai souvent employé avec avantage, dans les fièyres 
mucoso-vermineuses, surtout chez les enfants, l'huile de 
ricin mêlé avec le suc d’oseille, l'infusion de menthe et du 
sucre, unis au moyen d’un peu de jaune d'œuf. On donne 
cette huile, à la dose de 15 à 60 et même 100 grammes, 
seule, avec de l’eau sucrée, du bouillon gras, du lait chaud, 
etc., mélanges qu'il ne faut opérer qu'au moment de l’in- 
gérer, car ils s'épaississent bientôt et forment une sorte de 
selée désagréable à prendre La même coagulation a lieu 
avec les sirops de fleurs de pêcher, de chicorée, de limon, 
de pommes, etc. On la donne aussi sous forme d’émulsion ; 
dans ce cas, le jaune d’œuf est préférable à la gomme, qui 
augmente la consistance de là potion. Sous cette forme, 
l'huile de ricin semble perdre un peu de sa propriété pur- 
gative et se rapproche des médicaments simplement émol- 
lients ; aussi convient-elle alors particulièrement dans les 
bronchites aigues, sur la fin des pneumonies, eic., surtout 
lorsqu'il existe en même temps une tendance à la constipa- 
tion. 

Les semences de ricinrancissenten vieillissant et prennent 
alors un goût de chenevis L’huile elle-même devient, avec 
le temps, rance, irritante et drastique. Je lui ai souvent 
substitué, dans ma pratique rurale, le mélange extemporané 
d'huile d'œilleue et d'huile de croton (une goutte par once), 
ou de celle d'épurge / quatre gouttes). 

Les feuilles du ricin, que certains auteurs ont à tort re-. 
gardées comme âcres elvénéneuses, ne sont qu'émollientes ; 
appliquées fraîches ou légèrement fanées, elles calment, 
dit-on, les douleurs de l’arthritis ; pilées et réduites en ea- 
taplasmes, on les applique sur les yeux, dans l’ophtalmie 
et sur les inflammations locales des autres parties du corps ; 
macérées dans le vinaigre, on leur a attribué, contre la gale, 
la teigne, les dartres, etc., une efficacité que l'expérience n’a 
pas confirmée. | à 


469 


ROMARIN, 


ENCENSIER. * 


Rosmarinus hortensis augustiore folio (T.}. 
Rosmarinus officinalis (L.) 


Le romarin croîten abondance sur les rochers et les plages 
maritimes des contrées méridionales de l’Europe; il croît 
également dans nos départements maritimes du Midi; il est 
cultivé dans nos jardins. Les feuilles et les sommités sont 
usitées. 

Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : énfusion théiforme, de 5 à 15 et même 69 gram. 
par kil. d'eau. | 

Eau distillée (1 sur 4 d'eau), de 39 à 400 gram. en potion. 

.Alcoolat, (4 frais sur 5 d'alcool à 310 et 4 d’eau de romarin) ; 4 à 

45 gram. en potion. 
Huile essentielle (1 sur 5 d'huile d'olive), de 5 à 35 cent. en po- 
tion. 
A L'EXTÉRIEUR: énfusion, de 15 à 60 gram. par kil. d'eau en la- 
tions, fomentation, gargarisme, bains, fumigations. 


Propriétés, 


Le romarin, d’une odeur forte, ‘d'une saveur amère, est 
aromatique et stimulant; sa diffusibilité agit sur tout le sys- 
1ème nerveux d’une manière énergique. On l’a vanté contre 
la paralysie, la dyspepsie, l'asthme, les catarrhes chroniques, 
les vomissements spasmodiques, les affections hystériques, 
l'aménorrhée, la leucorrrhée, les engorgements des viscères 
abdominaux, les scrophules, etc. 

A l'extérieur, on l'emploi en gargarisme contre l'angine 
chronique, et en baïns contre le rhumatisme chronique, les 
scrofules, la chlorose. 

Le romarin sauvage convient plus spécialement comme 
léger. narcotique dans quelques maladies convulsives et 
spasmodiques (asthme, coqueluche.) 

[ Campegius (Champier) pensait que le romarin pouvait 
très bien remplacer la canelle. Voici ce qu'il écrivait à ce 
sujet en 1533 : 

« ILabent indi suum cinnamomum, habent et Gall suum 
rosmarinum. Valet cinnamomum contra debilitatemstomacht 
etnovas fissuras labiorum, contra corruptionem gingiva- 
rum, contra syncopem ac'cardiacum passionem ; superflui- 
tatem oculorum siccat, obstructiones aperit.—Valet et Ros- 
marinus Galliens contra syncopem ac cardiacam passionem 
cum vino potus, Contra frigiditatem ac delibitatem cerebri 
ejus cummero decoctio, Contra stomachi delibitatem valet, 


470 
ac digestionem com/fortat el procurat. Matricem mundifical, 
et ad concipiendum muliérem prœparat.» (Hortus gallic.) ] 

J'emploie le romarin pour aromatiser les vins médicinaux 
toniques. L’infusion de sommités fleuries de cette plante 
m'a été fort utile dans divers cas de fièvres mucoso-adyna- 
miques, que l’on désigne aujourd’hui parle nom assez vague 
de fièvre typhoïde, appliqué sans distinction à des va- 
riétés que l’on est ensuite obligé de distinguer par le mot 
forme. Selon que les symptômes muqueux, bilieux, adyna- 
miques ou ataxiques prédominent, on dit fièvre typhoïde 
forme muqueuse, bilieuse, etc., ce qui charge la nomenela- 
ture sans rien ajouter à la science (1). 

L'usage du romarin dans les fièvres adynamiques et ataxi- 
ques m'a été suggéré par une circonstance qui se rencontre 
souvent à la campagne, savoir, la pénurie des moyens ordi- 
nairement employés. J'étais au village de Verlincthun, on 
me prie de visiter un malheureux qui, me dit-on, est sur 
le point de mourir. Je trouve dans une chaumière, située sur 
le bord d’un marais, un homme de quarante ans environ, 
malade depuis huit heures,couché sur une paillasse,occupant 
une place éclairée par un carreau fixé à demeure, où l'air 
n’est jamais renouvelé, et dans laquelle deux personnes ne 
peuvent se mouvoir sans se coudoyer. Un état complet d’im- 
mobilité, la face décolorée, les yeux à demi-ouverts, un 


a) Nous avons eu successivement, pour désigner une seule et même 
maladie, les dénominations de fièvre‘ putride, fièvre putride maligne, 
fièvre adynamique, fièvre ataxico adynamique, fièvre entéro-mésenté- 
rique, gastro-entérite, dothinéntérite, dothinentéritie, iléo-dieliodite, etc. 
C'est surtout relativement à la médecine qu'on peut dire que l’histoire 
d’une science est tout entière dans l’histoire de sa langue. Chaque déno- 
mination , en cilet, est le résumé d’une théorie qui a pour conséquence 
les indications curatives et les déterminations therapeutiques. On à traité 
la fièvre putride par les purgatifs, les acides, les antiseptiques; la fièvre 
adynamique par les boissons vineuses , le vin pur, les toniques , les sti- 
mulants. Quand la doctrine de l’irritation rermplaça les fièvres essen - 
tielles par la gastro-entérite, les sangsues furent appliquées en abon- 
dance snr toutes les régions de l'abdomen, ct les antiphlogistiques si 
rigoureusement recommandés qu'on alla même jusqu’à ne prescrire la 
gomme qu'après l'avoir privée de ce qu'elle pouvait contenir de trop 
ivritant !...... Broussais ct ses sectateurs enthousiastes ne voyaient dans 
lasthénice pathologique qu’un symptôme de l'irritation locale , qu’une 
concentration des forces. Pour cux , l’asthénie réelle, essentielle. ne se 
rencontiait pas trois fois sur cent , tandis que les Browniens abusaïent 
des stimulants dans la persuasion que sur cent maladies quatre-vingt-dix- 
sept étaient asthéniques. Toujours on a invoqué l'observation et l’expé- 
rience , et les succés sont venus cn foule justifier les systêmes les plus 
opposés : «Hine concludo naturam esse optimam morborum medicatricem, 
cum énvilis quæ à medico objiciciuntur  impedimentis , ægrum tamen à 
morbo liberat,» (Sauvages, Nosol. meth.) 


” 471 
délire taciturne, un pouls faible, petit,concentré, mais peu 
fréquent, la langue dans son état naturel, la respiration 
courte, mais sans gêne, sont autant de symptômes qui me 
- font croire, chez ce malheureux, à l’existence d’un accès de 
fièvreintermittente pernicieuse. Demander de l'ail pour appli- 
quer, non à laplante des pieds qui est dure et calleuse, mais 
sur les genoux, aller dans le 7ardinet à la recherche de quel- 
que plante excitante, cueillir des sommités de romarin, en 
préparer une infusion concentrée,en administrer immédiate- 
ment au malade, tout cela ne fut que l'affaire d'un instant: xe- 
cessitas medicinam invenit, experientia perfecit (Baglivi.) 

J'avais annoncé que si l’on parvenait par ces moyens à se 
rendre maître de l'accès, le malade serait beaucoup mieux ; 
mais qu'un second accès,beaucoup plus dangereux,aurait lieu 
si on ne se hâtait de le prévenir par le moyen du sulfate de 
quinine, que je promis de remettre à la personne qui devait 
venir, le lendemain de bonne heure, me donner connais- 
sance de l’état du malade. N'ayant vu personne, je le crus 
mort. Cependant, quatre jours après on vint me dire qu'il 
allait beaucoup mieux ; mais que l'intervalle que j'avais 
annoncé n’ayant pas eu lieu, on s'était contenté de conti- 
nuer l'usage de l’infusion de romarin. Je me transportai de 
suite près de ce malade, que je trouvai dans un état satis- 
faisant. Il avait recouvré son intelligence, le pouls était mou, 
développé ; une chaleur halitueuse de la peau, quelques ins- 
tants de sommeil, une soif modérée, le jeu naturel et activé 
de toutes les sécrétions, annonçaient le résultat d’une réac- 
tion salutaire et le rétablissement prochain de la santé. 

L’ail avait produit une rubéfaction vive et quelques phlic- 
taines. Cette révulsion avait ouvert la marche vers l’amélio- 
ration, l'infusion stimulante l’a continuée. On n’est pasétonné 
de cet effet quand on réfléchit que le romarin contient un 
principe gommo-résineux, une huile volatile limpide très- 
odorante, et du camphre en plus grande quantité que la 
plupart des autres labiées. | 

Je regarde donc le romarin comme un des meilleurs sti- 
mulants anti-spasmodiques que l'on puisse employer dans 
les fièvres typhoïdes. Je l'ai adopté définitivement dans le 
traitement de ces fièvres, surtout lorsque les symptômes 
ataxiques dominent. Je le joinis-quelquefois à Ja racine d’an- 
gélique et à l’écoree de saule dans jes cas où l’adynamie, 
Ja putridité, caractérisent la maladie. 

Le romarin sauvage contient plus de principes actifs que 
celui que l’on cultive. Les feuilles de romarin, cuites dans 
du vin, conviennent comme résolutives dans les engorge- 
ments pâteux et indolents. Je les ai employées ainsi sur les 


#72 


gonfiements articulaires, à Ja suite des entorses. Heister 
a surtout obtenu de bons effets de l'application des feuilles 
de cette plante en iopique sur des tumeurs scrofuleuses du 
cou. D’autres les ont employées en sachets contre l'œdême. 


RONCE, 


RONCE DES HAIES, MURIER DES HAIËS, RONCE FRUTESCENTE. 


Rubus vulgaris (T). 
Rubus fruticosus (L.) 


Cet arbrisseau, très-commun dans les haies, est connu 
de tout le monde ; ses feuilles et ses fruits sont usités. 


Propriétés, 


Les feuilles de ronce ont une saveur astringente; on se 
sert vulgairement de leur décoction en gargarisme dans les 
maux de gorge, dans l’engorgement des gencives, la stoma- 
tte, etc. On l’emploie aussi dans la diarrhée, la dysenterie, 
l’hématurie, etc. 

Les fruits (müres sauvages, catins-murons) sont rafraîi- 
chissants et peuvent remplacer les mûres. Onen fait un 
sirop etune gelée ; écrasés et mis en fermentation, ils four- 
nissent, par l'addition d’une certaine quantité d'eau-de-vie, 
une boisson qui ressemble beaucoup au vin de qualité infé- 
rieure et dont on pourrait faire usage dans les campagnes des 
départements du Nord, où les ouvriers n’ont le plus souvent, 
pendant les chaleurs de l'été, que l'eau pure pour boisson. 


ROQUETTE SAUVAGE, 
FAUSSE ROQUETTE, ROQUETTR DE MURAILLE. 


Eruca tenuifolia perrennis (T}. 
Sisymbrium tenuifolium (L.) 


La roquette sauvage se trouve partout dans les lieux sa- 
blonneux et incultes. On emploie toute la plante. 


Propriétés. 


La roquette, d'une odeur forte, d’une saveur piquante, 
àcre, est anti- -Scorbutique comme le cresson, le cochlearia, 
Ho raifort, etc., ets ‘emploie dans les mêmes cas et de la 
même manière que ces plantes; elle était-célèbre, chez les 
anciens,comme aphrodisiaque, Sa semence se rapproche, par 


473 


son âcreté, de celle de la moutarde,et peut servir au besoin, 
étant pulvérisée, pour rubéfier Ja peau. Wauters (op. cut. 
p. 65) dit que cette semence, en infusion à la dose de 15 
. gram, pour un kil. d’eau, procure assez ordinairement le 
vomissement. 

La roquette est une plante énergique ; elle ne mérite pas 
l'oubli dans lequel elle est tombée. 


ROSEAU. * 


1° Roseau À Bazar. (Arundo fragmutes L.) Ce roseau croit 
dans les rivières er les étangs; sa racine est considérée 
comme sudorifique et diurétique ; elle a été vantée contre 
les affections rhumatismales, la goutte, la syphilis. On a 
prétendu qu’elle faisait la base du fameux Rob de Boiveau- 
Laffecteur. On la donne en décoction (30 à 60 gram. par 
500 gram. d’eau), en sirop, teinture, etc. 

20 ROSEAU A QUENOUILLES, CANNE DE PROVENCE. (Arundo 
donax L). Cette espèce croît abondamment dans le Midi 
de la France. La racine, seule partie usitée en médecine, 
est inodore, d’une saveur douce, sucrée et légèrement 
aromatique. Sa décoction est légèrement diurétique et 
diaphorétique ; elle jouit dans le peuple d'une grande 
répulation comme anti-laiteuse. On l'administre comme 
le roseau à balai. 


ROSEAU AROMATIQUE, * 


ROSEAU ODORANT, ACORE VRAI, ACORUS AROMATIQUE, 
CALAMUS AROMATIQUE. 


Acorus verus sive caiamus aromalicus (T.) 
Acorus calamus (L.) 


Cette plante est d’un autre genre que les précédentes ; 
elle appartient aux aroïdées. On la trouve dans les fossés 
marécageux de l'Alsace, de la Bretagne, de la Normandie, 
etc. On emploi la racine. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : décoction ou infusion, de 8 à 45 gram. et au-delà, 

par kilog. d’eau ou de vin. 

Poudre, de 4 à 4 gram. dans un véhicule approprié, ou en élec- 
tuaire, bols, etc. 

Teinture, de 2 à 6 gram. en potion. 

Extrait, de 4 à 4 gram. 

Vin (5 sur 50 de vin), de 50 à 400 gram, 

Eau distillée, de 530 à 60 gram. 


474 


Propriétés. 


La racine du roseau odorant exhale une odeur agréable ; 
sa saveur est amère, àcre et aromatique. Son action excitante 
l'a fait considérer comme stomachique, diaphorétique, diu- 
rétique, emménagogue, expectorante, etc., suivant l'état 
d'atonie de tel ou tel organe. C’est ainsi qu’elle est utile 
dans les affections exanthématiques lorsqu'il y a défaut 
d'action de la peau, comme on l'observe chez les sujets 
faibles ; dans l’aménorrhée, chez les femmes lymphatiques 
et prédisposées à la chlorose, dans la période d’atonie des af- 
fections catarrhales, dans les fièvres intermittentes exemptes 
d'irritation viscérale et accompagnées de débilité, d’œdème, 
de cachexie ; contre les affections vermineuses, etc. Chomel 
(hist des pl.) en a éprouvé les bons effets dans F'atonie de 
l'estomac, la dyspepsie et le vomissement. Lebeau, médecin 
au Pont-de-Bonvoisin, a préconisé .ce médicament dans 
l'épistaxis eLtdans les hémorrhagies qui suivent l'avortement; 
il dit que son père l'a souvent employé avec succès dans 
différentes espèces d'hémorrhagies lance. journ. de! méd., t. 
10, p. 373); mais il est évident qu’elle ne peut convenir que 
lorsque ces hémorrhagies sont passives : les excitants ne 
peuvent, dans les hémorrhagies actives ou avec pléthore- 
locale, qu'augmenter l'afflux qui les produit. 

Loiseleur-Deslongchamps administrait chaque jour 50 à 
60 centigrammes de racine d’acore en poudre dans les cas 
où il était nécessaire de rétablir les fonctions faibles et lan- 
guissantes des organes digestifs: Mapp (hist. plant. alsatic. 
1742) attribue à l’acore vrai la faculté de provoquer le vo- 
missement, donné à Ja dose de 4 gram. en poudre; il a été 
rarement employé dans le but de produire cet effet, 

Le calamus aromatique indigène peut wès-bien remplacer 
celui qui nous est apporté des Indes. 


ROSIER. * 


1° Rose pr Provins, Rose ROUGE, Rosier pe FRANCE. (Rosa 
rubra multiplex (T).—Rosa gallica (L.) Cet arbrisseau, 
cultivé dans les jardins, croît naturellement dans les mon- 
tagnes de l'Orléanais, de la Touraine, de l'Auvergne. Les 
pétales sont usitéés. | : 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : infusion, de 8 à 15 gram. par kil. d'eau. 
Poudre, de 2 à 8 grammes dans un véhicule approprié. 


4715 
Conserve, de 60 à 120 gram. 
Sirop, de 50 à 60 gram. 
Miel rosat, de 50 à 100 gram. 
- A L'EXTÉRIEUR: infusion, de 45 à 60 gram. par kil. d'eau, en lo. 
tion, collyre, etc. | 
Vin (1 sur 46 de vin rouge), en injection, lotions, etc. 


Miel rosat, en gargarisme, collutoire, etc. 
V'inaigre rosat. 


Propriétés. 


La rose rouge est astringente, amère, ionique; elle con- 
vient dans les écoulements muqueux chroniques, les ca- 
tarrhes, les diarrhées chroniques, les leucorrhées , les 
hémorrhagies passives, etc. Beaucoup d'auteurs ont attribué 
à la conserve de rose une grande efficacité contre la phthisie 
pulmonaire. S'il faut en croire Avicenne, Valériola, Forestus, 
Rivière, Murray, Buchan, on serait parvenu, au moyen de 
son usage longtemps continué, à suspendre Ia marche de 
cette maladie et même à la guérir. Ces auteurs adminis- 
traient ce médicament en grande quantité; ils citent des 
malades qui en avaient pris jusqu’à vingt et trente livres 
dans le cours de leur traitement. 

Cette conserve m'a été utile dans les sueurs et les diarrhées 
des phthisiques. 

L'infusion et le vin de roses rouges, le miel et le vinaigre 
rosats s'emploient en lotions, injections, gargarismes, col- 
lyres, comme astringents, toniques, résolutifs. On met fré- 
quemment en usage, contre les ulcères atoniques, blafards, 
les roses infusées pendant une demi-heure dans du vin 
rouge bouillant {{ partie sur 16 de vin). On applique des 
fomentations, des cataplasmes et des sachets de roses sur 
les tumeurs froides et indolentes, sur les engorgements 
aloniques, œdémateux. 

Les pétales de roses doivent être récoltées avant leur épa- 
nouissement; el'es perdent de leurs qualités en se développant; 
leur astringence est beaucoup plus développée lorsque leur 
dessiccation a été opérée rapidement, à l’étuve,que lorsqu'elles 
sont desséchées lentement. On doit les conserver à l’abri du 
contact de l'air, dans un lieu sec. 


20 Rosrer musquÉ, ROSE MUSQUÉE OÙ DE pamas, Rose 
MUSCATE OU MUSCADE. { Rosu moschata (L.) — Rosa 
 damascena.) 


Ce rosier, originaire de l'Orient, est naturalisé en France. 
La plupart des auteurs de matière médicale regardent 
plusieurs espèces de roses, et surtout la rose musquée, 
comme purgatives. Les Allemands se purgent avec la seule 


476 


infusion des pétales de cette rose dans du petit lait, Veneï 
dit avoir purgé une femme avec quinze pétales de rose mus- 
quée en infusion, et que quaire fois ce purgatif lui a réussi. 
Amatus Lusitanus regarde cette rose comme un purgatif 
violent. Dans le Languedoc et la Provence, les pétales de 
trois ou quatre roses musquées suffisent, suivant Lémery, 
pour purger. Ce purgatifest en effet plus actif dans les pays 
chauds que dans le Nord. 

L'eau distillée de rosé musquée est également purgative à 
la dose de 500 grammes. Loiseleur-Deslonchamps (man. des 
pl. us. ind. p. 204) s'étonne qu’un médicament aussi agréable 
soit tombé dans l'oubli, tandis que tous les jours les médecins 
prescrivent, pour purger, des préparations dégoûtantes 
par leur couleur, leur odeur et leur saveur. 

Le rosier à fleurs blanches (Rosa alba L.), et le rosier à 
fleurs pâles (Rosa pallida L.), jouissent des mêmes pro- 
priétés. 


3° ROSIER DE CHIEN (1), ROSIER SAUVAGE, : CYNORRHODON 
(voyez Eglantier). Loiselier-Destonchamps à obtenu plu- 
sieurs évacuations alvines au moyen des pétales de cette 
rose pulvérisées et données à la dose de 1 à 2 grammes 
50 centigrammes. — J'ai administré cette poudre à la 
dose de quatre grammes; elle a provoqué cinq selles, 
précédées de légères coliques. 


Le duvet qui entoure les semences du cynorrhodon, ap- 
pliqué sur la peau, y cause une démangeaison insupportable 
suivie de douleur, d’un léger gonflementet de points rouges 
qui se dissipent spontanément dans l’espace d’une heure. 
Ce duvet peut être employé à l’intérieur comme vermifuge ; 
il agit immédiatement et mécaniquement sur les vers, en 
les piquant à Ja manière du pois à gratter (Dolichos pru- 
riens L.) que Chamberleyne (a practical treatise on the efji- 
cacy of shlozobium or cowlage, etc. Lond. 1784) a vanté 
comme anthelmintique. J'ai plusieurs fois employé/les 
poils de l’églantier, à la dose de 15 à 30 centigrammes, fnêlés 
dans du miel. Ce vermifuge, que les enfants prénnent avec 
facilité, tue les vers lombrics, et n’a aucun inconvénient. Ni 
les poils du dolichos, ni ceux de l’églantier, ne produisent 
sur Ja muqueuse des voics digestives l'irritation qu'ils déter- 
minent à la peau; ils agissent exclusivement sur les vers. 


G) Ce nom vient de ce que les anciens supposaient à Ja racine de cet 
arbrisseau Ja propricté de guérir la rage. Les dieux même, suivant Pline 
{vin. 44), avaient révélé en songe cette merveilleuse propriété àtune mère 
dont le Gls avait élé mordu par un chien atteint de cette terrible maladie. 


a 68 


* 
PES 


477 


RUE, 


RUE DES JARDINS, RUE OFFICINALE, HERBE DE GRACE. 


Ruta hortensis latifolia (T). 
Ruta graveolens !{L). 


La rue croit spontanément dans les départements du Midi 
et se trouve dans presque tous les jardins. On emploie les 
feuilles et la semence. 

Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : infusion, de 2 à 10 gram. par kil 
par tasses avec un sirop approprié. 

Sirop (2 de teinture sur 7 d'eau distillée de rue et 15 de sucre) 

de 15 à 59 gram. 

Extrait alcoolique (2 sur 7 d'alcool à 22°), de 50 cent. à 2 gram. 

Extrait aqueux, par infusion (4 de feuilles sèches sur 4 d’eau 

chaude), de 50 cent à 2 gram. 
id. par décoction (1 sur 8 d'eau), même dose. 

Conserve (1 de rue fraîche sur 5 de sucre), de 4 à 5 gram. 

Huile essentielle, de 10 à 50 cent. 

Poudre, de 50 cent. à 5 gram. en bols, pillules, etc. 

À L'EXTÉRIEUR : infusion, de 410 à 30 gram. par kil. d'eau, pour 
lotions, fomentations, fumigalions, injections, etc. 

Poudre. pour saupoudrer les ulcères. 


Propriétés, 


La rue, d’une odeur fétide et pénétrante, d’une saveur 
amère et àcre, est tellement stimulante, qu’étant appliquée 
sur la peau elle y détermine la rubéfaction ; introduite dans 
le canal digestif, elle y exerce une vive excitation qui se 
transmet bientôt à tous les organes et donne lieu à divers 
phénomènes consécutifs dont la thérapeutique a su tirer 
partie. Elle a toujours été considérée, en outre, comme agis- 
sant puissamment sur le système nerveux en général et sur 
l'utérus en particulier, ce qui l'a fait employer contre l’épi- 
lepsie, la chorée l’hystérie, et comme emménagogue dans 
l’'amiénorrhée et les désordres de la menstruation. Dans ces 
derniers cas, il est bien essentiel d'apprécier l’état de la 
malade avant de lui administrer un tel médicament. Si 
l’aménorrhée, par exemple, était dû à un excès de sensibilité 
de l'utérus, à un état de pléthore, soit locale, soit générale, 
il est bien certain que l'usage de la rue ne pourrait être que 
très-dangereux. J'ai vu une métrorrhagie active, avec dou- 
leurs violentes à l’utérus causées par l'emploi imprudent 
de cette plante, chez une jeune femme d’un tempéramment 
sanguin avec prédominance utérine. Une forte saignée du 


. d’eau, à prendre 


478 


bras, des bains tièdes, des boissons nitreuses er émulsives, 
des lavements de décoction de mauve et de laitue, suffirent 
pour dissiper ces accidents. Je suis convaincu que si l’hé- 
morrhagie n'avait pas eu lieu, l’inflammation de l'utérus eut 
été la funeste conséquence de l’ingestion de Ia rue. 

[L'influence que cette plante exerce sur la matrice se ma- 
nifeste évidemment par une congeslion sanguine et une 
stimulation des fibres musculaires de cet organe. Les ob- 
servations recueillies par le docteur Hélie (Bull. de thérap., 
tu. 12, p. 77), etles faits assez nombreux qui se sont présen- 
tés à ma pratique, ne me laissent aucun doute sur la pro- 
priété abortive qui lui a été attribuée. Les anciens connais- 
saient cette propriété ; Pline (Hust. nat. lib. 20) en défend 
l'emploi aux femmes enceintes. Les modernes la préconisent 
comme emménagogue ; Desbois de Rochefort employait 
comme un des meilleurs médicaments de ce genre, Flhuile 
essentielle de rue à la dose de 12, 15 et 20 gouttes. 

Comme anti-spasmodique, la rue a été recommandée contre 
l'hystérie et l'épilepsie par Alexandre de Tralles, Valeriola, 
Boerhaave, Cullen, etc. Haller la comparaît à l’assa-fetida 
et l'administrait en lavement dans l’hystérie. Bodart l'a 
proposée comme succédanée de cettè dernière substance. 

Elle est utile dans l'hypocondrie résultant de l’atonie des 
viscères, et surtout de la faiblesse du canal alimentaire, dans 
les coliques avec flatulence, lorsque, toutefois, elles ne sont 
pas dues à un état d'irritation de l'intestin, comme cela a 
lieu le plus souvent. 

La rue est un anthelmintique trop négligé. Wauters pro- 
pose, d'après Cartheuser, de substituer sa semence au semen- 
contra. Je l'ai employée avec succès dans trois cas d'affection 
vermineuse. Je suis parvenu, au moyen de lavements de dé- 
coction de feuilles fraîches de rue, à détruire de nombreux 
ascarides vermiculaires qui causaient depuis dix ans un 
prurit anal insupportable. L'huile d'olive, de noix ou d’œil- 
lette, dans laquelle on à fait infuser les feuilles de rue, peut 
servir en embrocations sur le bas-ventre, Comme vermifuge 
chez les enfants. 

Les propriétés anti-syphilitiques attribuées à la rue n’ont 
pas été confirmées par l'expérience. Ses vertus anti-véné- 
neuses doivent être reléguées au rang des fables, ainsi que 
tout ce qu’on à avancé sur son efficacité contre la peste, Le 
fameux antidote de Mithridate, dont Pompée trouva la for- 
mule dans la cassette de ce prince, était composée.dit-on, de 
vingt feuilles de rue contuses, de deux noix sèches, de deux 
figues et d'un peu désel. Quand on se représente,dit Chaume- 
ton (for. med.),le roi de Pont avalant chaque matin un sem- 


479 


blable mélange,avec ja ferme conviction d'être à l'abri de tont 
empoisonnement pendant le jour, pourrait-on s’empêche de 
rire, si l’on ne réfléchissait que l'ignorance etla crédulité fi- 
gurent honorablement parmi les nobles qualités des héros? 

J'ai vu un curé de campagne employer le topique suivant 
contre la phthisie et fe catarrhe pulmonaire chronique: prenez 
deux poignées de rue fraîchement cucillie, vers la fin de mai; 
faites-les bouillir dans deux kilogrammes d’eau jusqu’à ré- 
duction à moitié; exprimez la rue et retirez-la; mettez 
15 grammes d’aloës dans la décoction,et faites-y tremper une 
serviette de coton demi usée pendant vingt-quatre heures, 
puis faites-la sécher à l’ombre dans un appartement. Cette 
serviette, plié en huit, doit être appliquée sur la poitrine et 
portée jusqu'à ce qu’elle tombe en lambeaux. On m'a assuré 
qu'une seule serviette avait souvent suffi pour opérer Ja 
guérison. On doit avoir deux serviettes ainsi préparées, afin 
que l’on puisse se servir de l’une pendant qu’on fait sécher 
l’autre à l'ombre. Ce moyen populaire, qu'il est bon d’es- 
sayer, à pu procurer quelque soulagement dans là phthisie 
pulmonaire: et guérir des catarrhes chroniques que l’on aura 
pris pour celte dernière maladie. 

On a conseillé la rue dans une multitude d’autres maladies. 
Suivant Martius, on la regarde en Russie comme un excel- 
lent remède contre la rage, et on l'emploie aussi, à ce titre, 
en Autriche, en Westphalie et même en Angleterre. L’expé- 
rience a fait justice de cette prétendue propriété. ] 

A l'extérieur, la rue pilée peut être employée comme ru- 
béfiante. On a conseillé de l'appliquer en épicarpe contre 
les fièvres intermitientes. Les lavements de rue peuvent être 
utiles comme stimulants, dans beaucoup de cas, tels que 
l'inertie des intestins, la timpanite, [a flatulence, l’aménor- 
rhée, etc. On en a fait usage pour déterger les ulcères ato- 
niques et sordides, pour guérir l’ozène, en injectant sa 
décoction dans les narines; contre la gale, la teigne, pour 
tuer les poux (1), pour fortifier la vue, en recevant la vapeur 
sur les yeux. Garidel traitait les taies de la cornée par la 
vapeur de la décoction de ruc dirigée sur l’œil au moyen 
d'un entonoir renversé. Le nsuc de cette plante, plus ou 
moins étendu dans l’eau et introduit dans le conduit auditif, 
a été mis aussi en usage, avec quelque apparence de succès, 
dans la surdité causée par la diminution ou l’aberration de 
la sensibilité acoustique. La décoction vineuse de rue, en 


(1) J'ai vu une femme de soixante-cinq ans se débarrasser du phthi- 
riasis ou maladie pédiculaire, en portant une chemise qu'on avait fait 
bouillir dans une décoction aqueuse de ruc. 


480 : 


gargarisme,a été employée avec avantage dans l’engorgement 
et les ulcères scorbutiques des gencives. 


*RUE DE MURAILLE, SAUVE-VIE. Asplenium ruta muraria L. 
Plante de la famille des fougères,qui croît sur les murailles, 
entre les pierrés, dans les lieux ombrageux.Rangée au nom- 
bre des capillaires, elle est comme ces derniers employée 
comme adoucissante, béchique, légèrement aromatique dans 
les affections légères de la poitrine ou de la gorge. Le cré- 
dule Chomel considère la rue de muraille, d’après son ex- 
périence, comme un remède précieux pour les phthisiques : 
experientia fallax. Cet auteur assure, en outre, avoir fait 
vider une vomique à une femme mal guérie d’une pleurésie, 
en lui faisant user pour boisson ordinaire d’une décoction 
édulcorée de cette plante! J'ai vu plus d’un Chomel attribuer 
à un remède insignifiant des guérisons dues aux efforts sa- 
lutaires de Ia nature. 


SABINE, 


SAYINIER , GENÉVRIER SABINE. 


Sabina folio cupressi (T.) 
Juniperus sabina (L.) 


La sabine croît naturellement sur les montagnes de nos 
départements méridionaux, dans les Alpes; on la cultive 
dans les jardins. Les feuilles de cet arbrisseau sont usitées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion, de 4 à 8 gram. par kilog. d'eau bouil- 

lante, à prendre par petite quatité à la fois. 

Poudre, de 25 cent. à 4 gram. 50 centig. en bols, pilules ou dans 
un véhicule mucilagineux. 

Teinture (A sur 4 d'alcool à 32°), de 1 à 4 gram. en potion. 

Extrait alcoolique (2 de sabine sèche sur 7 d'alcool à 21°), de 50 
cent. à { gramme. 

Extrait aqueux (4 sur 6 d'eau), de 50 cent. à 4 gramme. 

Huile volatile, de 4 à 10 gouttes, en potion, pilules, oléo-sacchar 

Huile par infusion (6 de sabine sur 50 d’huile d'olive), de 10 
à 50 centigrammes. 


A L’EXTÉRIEUR : Pommade (2 parties de poudre sur à d'axonge ou 
de cérat}, pour cataplasme rubéfiant ou vésicant. 

Poudre, comme cathérétique pour détruire les excroissances 
vénériennes, sur les ulcères de mauvaise nature, sur les fon- 
wosités, les os cariés, les dents gâtées, pour calmer la douleur 
odontalgique , etc. | 

Teinture , en frictions. — Décoction, en lotions antipsoriques. 


481 


Propriétés: 


[{ Les feuilles de sabine exhalent une odeur très-forte, 
très-pénétrante , à la fois aromatique et fétide ; leur saveur 
-est chaude, âcre, résineuse et amère. En contact prolongé 
. avec la peau, elles l’irritent, l’'enflamment ; appliquées sur 
une surface saignante ou ulcérée, la poudre de ces feuilles 
produit une impression irrilante et presque caustique. 
M. Orfila { Trait des pois., 3° edht., t. 1, p.724) ayant sau- 
poudré avec 8 gram. de cette poudre une plaie faite à la 
partie interne de la cuisse d'un chien, y a vu survenir une 
inflammation violente, et l'animal est mort au bout de vingt- 
quatre heures. Des traces d'inflammation et des tâches 
livides se remarquaient sur quelques parties du tube intes- 
tinal , le duodénum et le rectum en particulier. Cet organe, 
de même que l’estomac, était sensiblement phlogosé dans 
d'autres chiens, morts douze ou seize heures après avoir 
avalé, l’un 15 gram. et l'autre 24 gram. de sabine en poudre. 

La sabine, à dose élevée, cause un sentiment de chaleur 
à l’épigasire, le hoquet, des vomissements, des coliques, 
des déjections sanguinolentes. Bientôt cette irritation se 
transmet avec plus ou moins d'énergie au systême circula- 
toire, aux poumons, à l'utérus, etc., et produit l'hémoptysie, 
des hémorrhagies utérines, des congestions sanguines sur 
divers points du corps. À dose modérée, c'est un excitant 
énergique ayant une action spéciale sur l'utérus, et dont 
l'emploi doit être dirigé avec beaucoup de circonspection. ] 

Ce que j'ai dit de la rue s'applique avec plus de raison 
encore à la sabine. Cette plante, administrée à l’intérieur, 
peut déterminer l’inflammation où des hémorrhagies redou- 
tables de la matrice, provoquer l'expulsion du fœtus, et 
donner lieu à des accidents qui mettent la vie de la mère en 
danger (1). Il est donc bien essentiel, comme pour l'usage 
de la rue, de s’assurer de l’état de l'utérus, avant d’admi- 
nistrer la sabine comme emménagogue. On sait combien 
les causes de l’aménorrhée sont variées. Celle qui est carac- 
térisée par l’atonie générale peut seule en indiquer l'emploi. 

Bulliard conseille, contre la suppression des règles , la 
simple infusion des feuilles de sabine dans le vin : « On 
prendra, dit cet auteur, une bonne pincée de ces feuilles ; 


@G) Murray rapporte qu’une femme de trente ans, dans l'espoir de 
sauver sa réputation , prit une infusion de cette plante , qui causa des 
vomissements affreux et continnels, suivis, au bout de quelques jours, 
de douleurs violentes et d’avorlement avec hémorrhagie utérine mortelle. 
A l'ouverture du corps, on trouva la vésicule du fiel rompue, une effu- 
sion de bile dans l’abdomen et l’inflammation des intestestins. 


-31 


482 


on les fera infuser dans deux verres de vin rouge ou blanc, 
dont on avalera un verre avec du sucre en se couchant, pen- 
dant deux jours de suite, et l’on se tiendra chaudement au 
lit. Si la malade est d’une complexion faible, un demi-verre 
suffira. » (Hist. des plant. vénen.) 

Les femmes de la campagne pensent qu'il suffit d'intro- 
duire quelques feuilles de sabine dans la chaussure des 
jeunes filles pour provoquer chez elles la menstruation. Il 
serait à désirer que l’on se bornât à une pratique aussi 
innocente. Malheureusement il n'en est pas ainsi. Nous 
avons vu administrer cette plante, par des sages-femmes 
ignorantes et cupides, dans l'intention coupable de rappeler 
les règles lorsque leur suppression était plus que suspecte. 

Cependant, on a prescrit la sabine contre la métrorrhagie, 
Widekind (Hufeland journ., 1810) et Gunter ont préconisé 
cette médication dans des cas où l’hémorragie était due à 
l’atonie de l'utérus. Le dernier prescrit la poudre de cette 
plante à la dose de 1 gram. 25 centigram. quatre fois par 
jour. Sauter (Mélang. de chir. étrang., t.1, p. 281) a arrêté 
et prévenu l'avortement en donnant 7 à 10 décigrammes de 
cetie poudre trois fois par jour. Aran (Gazette medic., 1844) 
l'a aussi employée avec succès dans les mêmes cas. Un anti- 
métrorrhagique pris dans un aussi puissant emménagogue 
me paraît une chose assez contradicioire pour ne pas 
l'adopter sans qu’une rigoureuse observation en ait constaté 
les effets, ou tout au moins sans s'être assuré préalablement 
de l’état réellement atonique de l'utérus. On peut admettre 
que dans les cas d’hémorrhagie par inertie de cet organe, la 
sabine , comme stimulant spécifique, agit à la manière du 
seigle ergoté. À ce titre on pourrait, je crois, l'employer 
avec avantage dans certains engorgements lymphatiques de 
l'utérus. 

[ La sabine a été employée contre les affections vermi- 
neuses et surtout contre le ténia. Elle a plutôt réussi contre 
les ascarides lombricoïdes que contre le ver solitaire. Ray 
donnait commie anthelmintique le suc des feuilles, mêlé 
avec du lait et un peu de sucre. Bulliard prescrit les feuilles 
cuites dans du lait. Un cataplasme de son et de décoction 
de sabine appliqué sur l'abdomen, m'a suffi, chez un enfant 
de trois ans, pour obtenir l'expulsion de treize lombrics 
dans l’espace de trois jours. 

Bréra a donné avec succès l'extrait de sabine dans le 
rhumatisme chronique , et Hufeland (7ourn. 1818) prétend 
avoir guéri, au moyen de la poudre de cette plante à la dose 
de 60 cent. à 1 gram. 93 cent., ou de l'huile essentielle à la 
dose d’une goutte, des gouttes chroniques qui avaient résisté 


483 


aux remèdes les plus énergiques. M. Ratier { Dict. de Med. 
et de Chir. prat., t. xv1) fait judicieusement remarquer que, 
dans ces cas, la guérison a pu être le résultat de la purgation 
. qui ne manque pas d'avoir lieu quand ce médicament est 
employé à dose suffisante. Sauvan (Bull. de la Soc. roy. de 
Médec., 1838) a préconisé la décoction de sabine dans la 
période atonique de la blennorrhagie. Je l’ai employée deux 
fois en pareil cas sans résultat appréciable. Gilibert dit avoir 
guéri , au moyen de cette plante, des fièvres intermittentes 
qui avaient résisté à beaucoup d’autres remèdes. ] 

La poudre de sabine, ainsi que nous l'avons dit plus haut, 
est employée à l'extérieur comme cathérétique. La décoction 
a été employée en lotions contre la gale et comme stimu- 
lante et détersive contre les ulcères putrides, blafards, 
 gangréneux. Boerhaave recommande comme très-efficace, 
contre la teigne et l'ankylose, un cataplasme composé de 
feuilles de sabine pilées, d'huile et de sel. On a quelquefois 
prescrit l'huile volatile de cette plante , amenée à l’état de 
liniment, dans les cas de douleurs névralgiques rhumatis- 
males , arthritiques, etc. La teinture est employée en fric- 
tions dans les mêmes cas. On applique la pommade pour 
produire la rubéfaction ou la vésication. 


SAFRAN, * 


SAFRAN CULTIVÉ , INDIGÈNE , SAFRAN OFFICINAL. 


® Crocus sativus (T.) 
Crocus sativus (L.) 


Le safran, originaire de l'Asie, est cultivé en France ; 
celui qui provient du Gatinois est préféré. Son introduction 
date du 14° siècle. Les tygmates, seule partie usitée, sont 
désignées dans les pharmacies sous le nom de safran. 


Prép2rations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Infusion { comme stomachique), 50 cent. à À gram. 

par kil. d'eau, (comme emménagogue) de 4 à 2 gram. 

Poudre (comme emméuagogue), 59 cent. à 2 grammes; (comme 
stomachique), de 20 à 50 cent. 

Teinture (4 sur 4 d’alcooi à 52°), de 4 à 8 gram. en potion. 

Extrait alcoolique {4 sur 4 d'alcool à 22°), de 50 à 60 cent. en 
pilules. L 

Extrait aqueux (4 sur 46 d'eau), de 30 à 60 cent. en pilules. 

Sirop (par infusion, 5 sur 60 d'eau bouillante et 400 de sucre, 
ou 4 sur 5 de vin blanc et 40 de sucre), de 15 à 50 grammes 
en potion. | 


484 


A L'EXTÉRIEUR : en infusion pour lotions, fomentation, éollyre, etc. 
Teinture , en frictions , fomentat'ons. 
Poudre, en cataplasme , pommade, fumigations , etc. 


Propriétés. 


La safran est d’une saveur chaude, amère, aromatique , 
d’une odeur pénétrante, d’abord agréable, bientôt après 
fatigante. C’est à l'huile volatile qu’il contient qu'on rapporte 
ses propriétés. 

Les émanations de cette substance agissent si énergique- 
ment sur le système nerveux, qu'elles occasionnent des 
céphalalgies , des vertiges, des tremblements, de l’accable- 
ment, et une sorte d'ivresse à ceux qui la récoltent. Borelli 
{observat., cent. xx, p.303) et d’autres observateurs rappor- 
tent des cas où elles ont occasionné le coma et même la 
mort, à des individus qui s'étaient livrés au sommeil dans 
des chambres où il y avait beaucoup de safran , ou sur des 
sacs qui en étaient remplis. Amatus Lusitanus et Kœnig ont 
vu ces émanations causer des ris immodérés et sardoniques. 
Aussi quelques médecins ont-ils rangé le safran parmi les 
poisons narcotiques. Les expériences de M. Orfila, consta- 
tant qu'il n’est point délétère pour les chiens , ou du moins 
qu'il ne l’est qu'à un degré très-faible, ne prouvent rien 
quant à ses effets sur l'homme. 

A petite dose, il excite l'estomac, augmente l'appétit et 
favorise la digestion. À la dose de 12 décig. et plus, il rend 
le pouls plus fréquent, la transpiration cutanée, la sécrétion 
urinaire et d'autres sécrétions plus abondantes ; on éprouve 
du malaise, de la chaleur à l’épigastre, des nausées , des 
coliques. Quelquefois il survient des hémorrhagies , les 
règles paraissent , et une métrorrhagie peut avoir lieu. 

À haute dose, le safran porte à la tête et produit la gaîté, 
le développement des forces , des facultés morales, un som- 
meil inquiet, une sorte d'ivresse ; il peut causer du délire, 
des vertiges , la pesanteur de tête, la faiblesse musculaire, 
la somnolence , à pâleur de la face, le ralentissement du 
pouls,et même la mort. Ces derniers résultats, toutefois, ne 
s'accordent niavec l'expérience d'Alexander (Experimental 
Essays, elc.) qui dit en avoir avalé 4 scrupules sans en 
éprouver le plus léger effet, ni avec les essais de Cullen, 
dont le scepticisme refuse même à cette substance les pro- 
priétés qu’on lui attribue : « Je l'ai donné à grandes doses, 
dit cet auteur, sans en éprouver d'effets sensibles ; à peine 
augmente-t-il la fréquence du pouls ; et je ne me suis guère 
aperçu qu'il agisse comme anodin ou anti-spasmodique. J'ai 
eu , dans un cas ou deux, quelques raisons de croire qu'il 


485 


jouissait d'une puissance emménagogue ; mais, dans beau- 
coup d’autres, il a absolument trompé mes espérances, 
quoique réitéré à fortes doses. » 

Si des résultats aussi contradictoires portent à croire que 
l'on a beaucoup exagéré les vertus du safran, on peut aussi 
admettre qu’ils peuvent tenir au pays où cette plante a été 
cultivée, à l'époque de sa récolte, aux procédés employés 
pour la cueillir et la dessécher, et surtout à sa falsification 
par les étamines de carthame, les pétales de soucis des 
champs, etc. 

Quoi qu’il en soit, le safran passe avec raison pour sti- 
mulant, anti-spasmodique et surtout emménagogue. Cette 
dernière propriété est la plus puissante. Son usage, pour 
rappeler les règles, est tout-à-fait populaire ; les femmes y 
ont recours sans consulter le médecin, bien que cette 
coutume puisse donner lieu à des inconvénients lorsque 
l'aménorrhée est due a l’irritation , à la phlegmasie ou à Ja 
pléthore, soit générale, soit locale. Quand l'absence des 
menstrues tient à l’atonie, l'usage du safran les fait sou- 
vent reparaître. Je l’ai employé avec succès dans ce cas. 
On s’en est servi aussi pour faire couler les lochies ;- mais, 
comme le plus souvent la suppression de ce flux est due à 
l'inflammation de l'utérus où à un point inflammatoire 
quelconque; son usage, dans ce cas, dévra être subordonné 
à l'examen sévère des causes efficientes de la maladie. 
Comme anti-spasmodique sédatif, le safran a été recom- 
mandé dans l'hypocondrie, la mélancolie, l'hystérie, les 
spasmes , l’asthme , la coqueluche, les névroses viscérales , 
les coliques nerveuses , l'ictère provenant de spasme, etc. 
Mais il n’est rationnellement indiqué qu’autant qu'il n'existe 
aucun caractère phlegmasique,et que ces diverses affections 
sont purement spasmodiques ou nerveuses. 

L'infusion aqueuse est le mode d'administration le plus 
fréquemment employé ; c’est celui par lequel on obtient 
avec le plus de facilité les principes de cette substance. On 
l'emploie quelquefois en extrait ou en teinture, soit seul, 
soit associé à d’autres substances. Il entre dansune foule de 
médicaments officinaux. 

A l'extérieur , il est employé comme résolutif et anodin ; 
on en met sur les cataplasmes pour dissiper les engorge- 
ments froids , les phlegmons , et pour-hâter la disparition 
des ecchymoses. On le fait entrer dans les collyres calmants 
et résolutifs. Larrey faisait usage pour le pansement des 
brülures du cérat safrané (2 à 4 gram. par 32 gram. de 
cérat); j'ai employé aussi cet onguent contre les gerçures 
du sein, les excoriations , les vésicatoires ulcérés, l’inter- 


486 


trigo et les exsudations eczémateuses des enfants ; il calme 
la douleur, dissipe l’inflammation, modère la suppuration 
et amène une prompte cicatrisation. 

Le safran de bonne qualité est en longs filaments, d’une 
belle couleur rouge-orangé, sans aucun mélange d'étamines 
(lesquelles sont jaunes) ; il doit avoir beaucoup d'odeur, 
bien colorer la salive, et n'être enfin ni trop humide ni trop 
sec. Il perd beaucoup de son activité par la dessiccation. 


SAFRAN BATARD, * 


SAFRAN D'ALLEMAGNE, SAFRANUM. 


Carthamus officinarum (T } 
Carthamus tinctorius (L.) 


Cette plante annuelle est cultivée en Espagne, en Alle- 
magne, en France, etc. La semence est usitée ; elle est 
vulgairement connue sous le nom de graine de perroquet. 


PFropriétés. 


La semence de carthame est purgative. Hippocrate Ja cite 
comme douée de la propriété de lâcher le ventre. Gallien et 
Dioscoride sont du même avis. Schroeder la regarde comme 
émétique; Mesué la conseille contre la pituite, l’anasarque, 
les maladies du poumon, etc. Quoique la semence de carthame 
d'Europe, dit Camerarius, soit moins purgative que celle du 
carthame d'Alexandrie, elle purge suffisamment donnée en 
émulsion à la dose de deux gros, ce que Burtin à aussi 
constaté , ainsi que Wauters, qui propose de la substituer 
au séné. Sennert la donnait en décoction à la dose de 12 à 
2% gram. Ettmuller ajoutait à cette décoction de la semence 
de fenouil ou d’anis. Heurnius la corrigeait avec le galanga, 
que la racine d’angélique peut très-bien remplacer. 

L’extrait alcoolique de semence de carthame purge assez 
fortement à la dose de 2 à 4 grammes. 


SALEP FRANÇAIS ,* 


ORCHIS, TESTICULE DE CAIEN, SATIRION, PATTE DE LOUP. 


Orchis morio mas, foliis maculatis (T.) 
Orchis mascula (L.) 


Les orchis, dont nos prés, nos collines et nos bois sont 
couverts, peuvent très-bien remplacer le salep qui nous 


487 


vient de Perse. Tous les orchis ont une racine qu'il est 
impossible de ne pas reconnaïtre pour peu qu'on en ait vu : 
elle est tuberculeuse, ovoïde, quelquefois palmée , offrant 
une légère odeur de bouc. Les fleurs, éperonnées et en épi, 
sont d’un aspect agréable. 

Geoffroy (Mém. de l’Acad. des Sciences, 1740) obtint de 
nos orehis un salep tout-à-fait semblable à celui de Perse. 
Depuis, Coste et Wilmet, Bodart, Wauters, Burtin, Desbois, 
ont obtenu les mèmes résultats. « Le commerce, dit Fée 
(Cours d’hist. nat. pharm., t. 1, p.366), tirait autrefois le 
salep de la Perse, et même encore aujourd'hui, que la 
France nous le fournit, on ne manque guère de lui donner 
la Perse pour patrie. Il serait bien temps de revenir à des 
idées plus saines, et de se persuader que nos productions 
indigènes valent, dans le plus grand nombre de cas, les 
productions exotiques. » Les tubercules charnus de l'orchas 
mascula , et de toutes les espèces qui en offrent .de très- 
développés (orchis militaris, orchis bifoha, orchis luti- 
folia , ec.) peuvent servir à la fabrication du salep. « J'en 
ai vu faire à Édimbourg, dit Cullen (Traité de Mat.med.,t.1) 
en parlant de la farine de salep, qui était aussi pure et aussi 
parfaite que celle qui vient de Turquie. » 

Le salep,suivant les recherches de Berzélius et de Lindley, 
est une véritable gomme et non de la fécule. Cette substance 
est restaurante, adoucissante, et convient dans les conva- 
lescences, dans les irritations et les phlegmasies chroniques 
de la poitrine et du tube digestif, les catarrhes, la phthisie 
et la plupart des maladies de longue durée. Sa décoction est 
utile dans la diarrhée, la dyssenterie, l'extrême suscepti- 
bilité de l'estomac et des intestins, par suite des affections 
aigues de ces organes , elc. 

Le salep s’emploie comme aliment en gelées, soit avec le 
bouillon , soit avec l'eau ou le lait aromatisé. Les orchis à 
racine tuberculeuse étant extrêmement communes , pour- 
raient, dans les temps de disette, servir à la nourriture des 
pauvres. 

Pour convertir en salep les bulbes des orchis , il faut les 
récolter en été un peu avant la floraison, les plonger dans 
l’eau bouillante pour en séparer plus facilement l’épiderme, 
les faire ensuite sécher au four, au degré de chaleur néces- 
saire pour faire cuire le pain. On les y laisse six, huit ou 
dix minutes ; elles y perdent leur blancheur, et acquièrent 
une transparence égale à celle de la corne. Lorsqu'on veut 
en faire usage, il suffit d'en mettre en poudre la quantité 
que l'on désire. Cette opération est difficile , à cause de la 
dureté et de la consistance acquise par la dessiccation. 


488 


SALICAIRE , 


LYSIMACHIE ROUGE , SALICAIRE A ÉPIS. 


Salicaria vulgaris purpurea (T.} 
Lythrum salicaria (L. 


Cette plante est très-commuue le long des ruisseaux, au - 
bord des étangs. 

Propriétés. 

La salicaire est légèrement astringente. On la conseille 
contre la diarrhée atonique, la dyssenterie chronique, la leu- 
corrhée, l’'hématurie passive, etc. On la donne en décoction 
(30 à 60 gram. par kil. d’eau), ou en poudre (4 à 8 gram. 
et plus.) 

Nous possédons trop d'astringents indigènes énergiques 
pour avoir recours à la salicaire, dont je ne fais mention 
que parce qu'on l'a signalée comme pouvant être utile. 

[ Toutefois, nous devons dire que Dehaen (Rat. med.) 
administrait cette plante en poudre à la dose de 4 grammes 
deux fois par jour dans la diarrhée et la dyssenterie , que 
Vicat affirme avoir employé son infusion théïforme dans un 
cas de dyssenterie qui avait résisté à une foule de moyens ; 
que Gardanne (Gaz. de santé, 1773) l'employa avec succès 
dans une épidémie de dyssenterie qui régna à Lyon ; que 
Murray l'a vanté dans le flux lientérique ; que Sagar (Dissert. 
de salicariä) Va employée dans la leucorrhée et le crache- 
ment de sang, etc. Les avantages qu’on prétend avoir obte- 
nus de la salicaire paraissent plutôt dus au mucilage qu'au 
principe astringent, dont la présence se révèle à peine dans 
cette plante. ] 


SALSEPAREILLE D'ALLEMAGNE," 


LAICHE DES SABLES, CAREX DES SABLES, SALSEPAREILLE 
DES PAUVRES ,; GLAYEUL DES SABLES. 


Sarsaparilla germanica (Pharm.) 
Carex arenaria (L.) 


.” 


Cette plante est très-commune dans les dunes de Ia Picar- 
die, du Languedoc, etc. Elle est abondante dans les dunes 
des environs de Boulogne-sur-mer ; elle fixe les sables. Les 
racines, ou plutôt les rhizomes, sont employées. Elles sont 
d’une odeur et d’une saveur légèrement aromatiques. 


489 


D'après Murray, Reuss et Gloditch , la laiche des sables 
serait supérieure à la salsepareille, à laquelle Merz, qui lui 
donne de grands éloges, propose de la substituer. Suivant 
Sainte-Marie , les propriétés de cette plante seraient abso- 
lument les mêmes que celles de la salsepareille de Portugal. 
On l’administre à la même dose et de la même manière. 


SANICLE ," 


SANICLE D'EUROPE, SANICLE COMMUNE. 


Sanicula officinarum (T). 
Sanicula europea (L.) 


La sanicle est commune dans les bois , à l'ombre, dans 
les lieux humides. Les feuilles sont usitées. 


Propriétés, 


La sanicle a un goût amer, austère, laissant dans l’arrière- 
bouche un sentiment d’âcreté. Cette saveur est moins forte 
dans la plante fraîche que lorsqu'elle est sèche. On regar- 
dait autrefois cette plante comme une panacée univrselle {r). 
Elle est surtout employée comme vulnéraire, et, à ce titre, 
elle est restée comme une des principales espèces dans les 
vulneraires suisses ou faltranck, sorte de farrago dont 
l'infusion est d’un usage vulgaire dans les chutes et dans 
beaucoup de maladies aussi différentes par leur nature que 
les plantes qui composent ce mélange le sont par leurs pro- 
priétés. La confiance populaire dans les vulnéraires a pour 
effet, comme tous les remèdes innocents, d'empêcher de 
recourir à des moyens rationnellement indiqués et plus 
efficaces. 

Quoiqu'il en soit, la sanicle, à cause de sa légère astrin- 
gence , a été employée dans les hémorrhagies passives, la 
leucorrhée, la diarrhée, la dyssenterie, l'hématurie, etc. On 
en donne le suc (50 à 100 gram., ou l’infusion (30 à 60 gram. 
par kil.). Les gens de la campagne broient une poignée de 
sanicle , la font infuser à froid pendant une nuit dans un 
verre de vin blanc, passent le tout par un linge, avec forte 
expression , et font avaler ce remède à jeun contre les hémor- 
rhagies et surtout contre le crachement de sang, les diar- 
rhées et dyssenteries chroniques. On donne aussi, dans 
quelques cantons, sous le nom d’herbe de Deffaut, la sanicle 


(2) Sanieula dérive du verbe saxara guérir. 


490 


aux vaches qui viennent de vèler, afin de favoriser l’expul- 
sion de l’arrière-faix. 

La sanicle a été employée à l'extérieur comme tonique et 
détersive. 


SANTOLINE ,* 


SANTOLINE BLANCHE, AURONNE FEMELLE, PETITE CITRONELLE, 
SANTOLINE FAUX CYPRÈS ,. GARDEROBE. 


Santolina foliis teretibus (T'.) 
Santolina chamæcyparissus (L.) 


Cette plante croît spontanément dans les lieux secs et 
pierreux des départements méridionaux de la France. On 
la cultive dans les jardins. Les feuilles et les fleurs sont 
usitées. 

Propriétés. 

La saveur amère et aromatique de la santoline, son odeur 
vive et pénétrante, décèlent une propriété excitante qui a 
été rarement mise à profit par les praticiens ; et qui , pour- 
tant, est irès-énergique. 

Cette plante est anti-spasmodique, emménagogue et ver- 
mifuge. Bagard, au rapport de Coste et Wilmet, préférait 
la semence de santoline au semen-contrà. Il Ia donnait à la 
même dose. Wauters propose de la substituerà ce dernier, 
et la regarde comme tout aussi efficace. Loiseleur-Deslong- 
champs dit qu’elle a été employée avec avantage dans les 
affections hystériques et contre les vers. D’après Mérat, 
l'huile essentielle de santoline aurait été employée par les 
anciens contre le ténia. Deux faits rapportés dans une notice 
des travaux de la Société de Médecine de Bordeaux ( 1827 
et 1828) constatent les heureux effets de cette huile essen- 
tielle contre le ver solitaire, donnée à la dose de 10 à 15 
gouttes. Le docteur Pétrequin (Journ. des Progrès des Scienc. 
méd., t. 15) regarde ce remède comme un vermifuge im- 
manquable employé à la dose de 2 à # grammes. J'ai moi- 
même fréquemment employé la semence de santoline en 
poudre à la dose de { à 2 gram. comme anthelmintique ; 
elle ma paru tout aussi efficace que la semence de tanaisie 
comme succédané du semen-contrà. J'ai vu une petite fille 
de huit ans rendre vingt-cinq vers lombrics et un grand 
nombre d’ascarides vermiculaires , après avoir pris pendant 
trois jours, chaque matin, 1 gram. 50 cent. de semence de 
santoline en poudre mêlée avec du miel. 


491 


SANTOLINE DES JARDINS 


CYPRÈS DES JARDINS, BARBOTINE, ARMOISE SANTONIQUE. 


Absynthium santonicum gallicum (T.) 
Arihemisia santonica (L.) 


_ L’armoise santonique est originaire de Ia Tartarie et de 
la Perse. On la cultive dans les jardins. Les semences sont 
usitées. 

Propriétés. 


La semence de santoline des jardins est d’une odeur ana- 
logue à celle de la camomille, et d’une saveur aromatique, 
amère et un peu âcre. Elle contient un principe amer et une 
matière résineuse , ce qui fait que l'extrait qu ‘elle fournit, 
au moyen del alcool, est plus âcre que celui qu’on en obtient 
par l’eau. Cette semence est tonique, stimulante, anthelmin- 
tique , anti-spasmodique. On l’a conseillée dans les engor- 
gements froids et indolents des viscères abdominaux, 
dans l’hystérie avec atonie des organes digestifs, etc. On la 
rencontre quelquefois dans le semen-contrà, qu'elle peut 
remplacer comme vermifuge. On l’administre en poudre 
(de 1 à 4 gram.) en bols , pilules , électuaire, etc., ou en 
infusion {de 2 à 8 gram.) dans l’eau , le lait, le vin, la bière 
ou le cidre. 


SAPONAIRE , 


SAVONNIÈRE, HERBE À FOULON, SAVONAIRE. 


Lychnis sylvestris quæ saponaria vulgà (T.) 
Saponaria officinalis (L.) 


La saponaire croît dans presque toute la France. sur le 
bord des rivières et des ruisseaux, dans les bois, les champs, 
les buissons, les haies, etc. Les racines et les sommités 
fleuries sont employées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Décoction, de 45 à 60 grain. par kilog. d'eau. 
Suc erprimé, de 50 à 120 grammes. 
Sirop, de 50 à 400 grammes. 
Extrait par infusion (4 sur 8 d’eau bouillante}, de 2 à 8 gram. 
en pilu:es, etc. 


Extrait par décoction (1 sur 6 d’eau), de2 à 8 gr.en pilules, etc. 


492 


Propriétés. 


Cette plante est tonique, apéritive, légèrement diaphoré- 
tique. On l’emploie dans les affections cutanées, rhumatis- 
males, goutteuses, syphilitiques ; dans l’ictère, asthme, la 
leucorrhée , la blennorrhée, les engorgements des viscères 
abdominaux, etc. 

[ Bergius et Peyrilhe vantent la saponaire dans le traite- 
ment de la goutte, du rhumatisme , des affections véné- 
riennes. Roques l’a employée avec succès dans les obstruc- 
tions viscérales, suites de fièvres intermittentes rebelles. 
Sennert, Bartholin, Colle, Wedelius, Zapata, etc., ont pré- 
conisé cette plante comme un remède anti-syphilitique très- 
efficace. Jurine (Journ. de Médec. chir. pharm., mars 1786) 
a fait connaître deux cas de syphilis secondaire qui , après 
avoir résisté au mercure et à la salsepareille, furent guéris 
par la décoction et l'extrait de saponaire. « Plusieurs au- 
teurs, dit Alibert {nouv. élém. de Thérap. et de Mat. méd., 
1.2, p.332), donnent de grands éloges à la saponaire, et je 
pense qu'elle en est digne. Il arrive souvent que les maladies 
vénériennes résistent à l'administration du mercure , les 
symptômes, loin de diminuer , semblent acquérir une nou- 
velleintensité. La saponaire, donnée dans ces circonstances, 
produit d'excellents effets. J'ai souvent occasion de l’admi- 
nisirer dans le traitement des dartres furfuracées et squam- 
meuses, et j'aieu lieu de me convaincre, par un grand 
nombre d'observations, que cette plante précieuse n'était 
pas assez employée par les praticiens. » ] 

Je ne crois d'efficacité à la saponaire comme anti-syphi- 
litique, que lorsque son administration a été précédée de 
celle des préparations mereurielles. Quand je vois la liste 
des maladies dans lesquelles on a prescrit cette plante, je 
me demande si les auteurs ont eu soin d'apprécier l'état 
pathologique réel d'un viscère engorgé , obstrué ; car il est 
bien évident que, s’il existe, avec l’engorgement du foie, 
une phlegmasie de cet organe, la saponaire sera contre- 
indiquée ; il en sera de même si l’ictère n’est qu’un effet qui 
dépend de causes diverses, contre lesquelles , par consé- 
quent, un seul et même moyen ne peut être rationnellement . 
employé. 

Je me bornerai à considérer la saponaire, d'après les 
effets que j'en ai observés, comme une plante excitante, toni- 
que, dont l’action est propre à provoquer les sécrétions, à en 
augmenter l’activité, en stimulant nos organes. Sa propriété 
savonneuse l’a mise en réputation comme fondante et apéri- 
tive. Je l'ai employée avec succès dans les engorgements 


493 


lymphatiques, les cachexies consécutives de fièvres inter- 
mittentes rebelles, les affections catarrhales chroniques, les 
maladies cutanées anciennes , et surtout dans les dartres 
squammeuses. Pour en éprouver de bons effets, il faut la 
donner à grande dose. La décoction concentrée de ses 
racines (60 à 100 gram. pour { kilog. d’eau) et le suc des 
feuilles (150 à 200 gram. le matin à jeun) sont les deux 
préparations qui m ont le mieux réussi. A l’extérieur, j'ai 
employé la saponaire comme résolutive, en cataplasme et en 
fomentation , sur les engorgements lymphatiques, œdéma- 
teux, avec quelque succès ; mais je pense que l’eau de savon, 
la solution de savon dans le lait, produisent le même effet. 


SARRIETTE, * 


SARRIETYE COMMUNE, SARRIETTE DES JARDINS, SERVIETTE, 
SAURIETTE , SAVOURÉE , SADRÉE,. 


Satureia Sativa (T.) 
Satureia hortensis (L,) 


Cette plante croît spontanément sur les colines sèches des 
départements méridionaux de la France. On la cultive dans 
les jardins pour l'usage culinaire. Les feuilles et les sommi- 
tés sont employées. 


Propriétés, 


L'odeur aromatique très-forte qu’exhale la sarriette, sa 
saveur amère et chaude, annoncent des propriétés analogues 
à celles du thym, du serpolet, du romarin, etc. Cette plante, 
tout-à-fait tombée en désuétude sous le rapport de son usage 
médical, a des propriétés dont on peut tirer parti. On Ta 
considérait autrefois comme stomachique, carminative, 
anti- spasmodique , aphrodisiaque. vermifuge. C'est au 
camphre qu’elle contient et que l'on observe quelquefois, 
suivant Ferrein, en corpuscules sur ses feuilles, qu’elle 
doit sa propriété vulgairement connue de tuer les vers et de 
guérir la gale. J'ai vu des femmes de 1? campagne donner 
avec succès à leurs enfants, comme anthelmintique, l’infu- 
sion de sarriette (4 à 8 gram. pour 250 gram. d’eau }). Cette 
même infusion très concentrée a réussi , Comme celle de 
menthe et de la plupart des plantes aromatiques et âcres, 
contre la gale. J’ai vu, chez une jeune fille de dix-sept ans, 
celte dermatose guérir dans l’espace de huit jours, au moyen 
de lotions faites matin et soir avecune forte infusion de sar- 
riette. 


49% 


SAUGE, 


10 SAUGE COMMUNE, Cullivée, franche, officinale, grande 
sauge, petite sauge. Salvia officinalis (L.) 

20 Sauce normA. Salvia horminum (L.) 

30 SAUGE SGLARÉE, ORVALE. Salvia sclarea (L.) 

4° SAUGE DES BOIS, Sauge sauvage, germandrée des bois, 
faux scordium. Salvia sylvestris. 

59 SAUGE DES PRÉS. Salvia pratensis. 


La sauge officinale croît naturellement dans les provinces 
méridionales de la France; on la cultive dans les jardins. 
Les autres espèces se rencontrent dans les bois, le long des 
chemins, dans les prés, etc. Les feuilles et les fieurs de ces 
diverses espèces sont employées. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : énfusion théiforme, de 45 à 50 gram. par kil. d'eau. 
Eau drstillée, de 39 à 100 gram. en potion. 
Vin, de 69 à 100 gram. 
Huile essentielle, 10 à 60 centigr. en potion. 
Extrait (4 sur 16 de vin rouge), de 1 à 5 gram. en bols, pillules,etc. 
Conserve, de 4 à 5 gram. en pilules, bols, etc. 
Poudre, de 4 à 4 gram. 
Suc, de 4 à 16 gram. 
A L'EXTÉRIEUR : de 45 à 60 gram. par kil.d’eau, pour lotions, fo- 
mentations, etc. 
Feuilles sèches, fumées dans une pipe ou en cigarettes. 
Vin et infusion vineuse, pour lotions, etc. 


Propriétés. 


Ces plantes sont aromatiques, excitantes, détersives, réso- 
lutives ; on les emploie contre la paralysie, les vertiges, les 
tremblements des membres, la goutte atonique, le rhuma- 
tisme chronique, les fièvres ataxique et typhoïdes, les ca- 
tarrhes ataniques, la toux avec expectoration, lhydropisie, 
les cachexies, les engorgements froids des viscères abdomi- 
naux, eLC. 

Les sauges agiss@nt toutes, plus ou moins, comme les 
plantes aromatiques du même genre. Elles sont stimulantes 
et ont un effet secondaire sur Île système nerveux. Si, au 
lieu de romarin, j'avais trouvé de la sauge dans le jardin 
du malade doni j'ai rapporté l'histoire {page 470), je l'aurais 


probablement employée avec autant de succès; en pareille 


circonstance, je n'hésiterais pas à le faire. | 
Trousseau et Pidoux (ouv. cif.|) regardent la sauge offi- 
cinale comme un médicament utile dans les fièvres mu- 


495 


queuses et adynamiques. Roques a éprouvé, dans quelques 
fièvres intermittentes, d’heureux effets de l’infusion de ses 
feuilles, à la dose de deux ou trois verres, une heure ou deux 
avant l'accès. Je n'ai pas remarqué, en pareil cas, un effet 
qui ait pu me faire considérer cette plante comme fébrifuge. 
Cependant, elle pourrait agir comme telle dans les cas ou 
un état spasmodique entretient la fièvre et résiste aux pré- 
parations de quinquina. Il est reconnu que cette plante a 
une action marquée sur le système nerveux, ce qui a donné 
lieu à cet adage de l'Ecole de Salerme : 
« Salvia confortat nervos manuum que tremorem tollit.» 

[L’infusion de sauge, dit M. Deslandes (Dict. de méd. et 
de chir. prat.), provoque de la chaleur dans l'estomac, faci- 
lite la digestion, excite notablement la sécrétion urinaire, 
modifie le système nerveux, etc. 

Van Swieten employait le vin de sauge, à la dose de cinq 
à six cuillerées, pour arrêter les sueurs nocturnes et débili- 
tantes qui surviennent après la convalescence des fièvres de 
longue durée. Quand le vin était insuffisant, il avait recours 
à la teinture, à la dose de deux cuillerées, répétée deux fois 
par jour. L'infusion de sauge, administrée à froid, m’a réussi 
pour diminuer les sueurs nocturnes et les diarrhées colliqua- 
tives des phthisiques. 

Alibert employait avec avantage le vin de sauge dans le 
scorbut et l'hydropisie, dans l'état de langueur qui accom- 
pagne fréquemment la convalescence des fièvres muqueuses, 
adynamiques etataxiques. 

On a employé la sauge avec succès dans Ja diarrhée ; Sal- 
via sicca est: alvum sishit, dit Hippocrate. Les succès que 
jai obtenu de l'infusion de sauge édulcorée avec le sirop de 
coing, dans les diarrhées abondantes et épuisantes des en- 
fants à la mamelle, confirment pleinement cette propriété. 

Dans les contrées froides et humides de nos départements 
du Nord, les habitants de la campagne font usage de la sauge 
en guise de thé; ils prétendent, avec raison, que cette bois- 
son les préserve des fièvres. Les Grecs modernes s’en servent 
habituellement de cette manière, ce qui l'a faitappeler, dans 
l'Orient, le thé des Grecs. « Un verre de son infusion, dit 
M. Barbier (ouv. cit.) en parlant de la sauge, pris avant ou 
après le repas, donne toujours plus d'activité aux forces di- 
gestives. Ce remède sera favorable quand l'estomac et les 
intestins ont éprouvé une altération matérielle, un ramollis- 
sement ou une oligotrophie de leurs tissus qui nuit à l’exer- 
cice de leurs fonctions, ou quand une diminution de 
l'influence des nerfs sur l'appareil digestif met ce dernier dans 
un état d'inertie.» 


496 


M. Giacomini regrette que la sauge officinale ne soit pas 
aussi sonvent employée qu'elle pourrait l’être, et c’est surtout 
dans le traitement des fièvres rhumatiques, des affections 
éruptives aigues, des bronchites aigues et choniques, qu’elle 
lui parait offrir des avantages réels si on l'administre à 
haute dose. Ce médecin porte la dose de cette plante jusqu’à 
40 grammes en infusion dans un demi litre d’eau. 

Quelques auteurs ont regardé la sauge comme emména- 
gogue. Elle peut avoir cette "action sur l'utérus, comme tous 
les excitants, lorsqu'un état d'inertie de cette organe s’op- 
pose à l'écoulement des règles. Je l’ai employée avec avan- 
tage dans la gastralgie et les affections nerveuses des chlo- 
rotiques. Deker (Praz. med.) la jpréconisait dans la 
cardialgie. 

Aëtius a conseillé l’emploi de la sauge pour combattre 
l'hémopthysie; mais on conçoit que l’administration de cette 
plante doit être subordonnée à la nature de la maladie, à 
l'état du malade et à celui des organes affectés. Une plé- 
thore générale ou locale, un état flegmasique aigu accom- 
pagnant l’'hémorrhagie, contre-indiqueraient évidemment 
l'usage des excilants. ] 

ri sauge officinale est, de toutes ses congénères, celle 
qui à le plus d'énergie. La sauge orvale ou sclarée pourrait 
cependant, à quelques égards, la remplacer; elle a une 
odeur très-pénétrante ; infusée dans le vin, elle lui commu- 
nique une saveur analogue à celle du vin musceat, et le rend 
très-enivrant. C’est un moyen de fraude employé par les 
marchands... | 

La sauge des bois ou sauvage est mise en usage dans nos 
campagnes contre l’anasarque; on la fait infuser dans le 
vin blanc, et l’on donne un verre de ce vin trois ou quatre 
fois par jour. Ce remède convient, en effet, dans les ca- 
chexies, l'œdème et l'anasarque, qui suivent ou accompa- 
gnent les fièvres intermittentes, le scorbut et autres affec- 
tions qu'une atonie manifeste caractérise. 

A l'extérieur, j'emploie quelquefois l'infusion vineuse de 
sauge officinale dans les engorgements articulaires, suites 
d'entorses, dans l’œdème ; en gargarisme avec le cochléaria 
et une certaine quantité de miel, dans les engorgements ul- 
céreux et scorbutiques. II suffit, disent MM. Trousseau et 
Pidoux (ouv. cit.), de toucher les aphthes des enfants et des 
femmes grosses avec un pinceau trempé dans une décoction 
vineuse de sauge pour les voir disparaître. J’emploie souvent, 
en pareil cas, une forte infusion de sauge en collutoire. Le 
thé de sauge, avec un peu de vinaigre, est; suivant Mac- 
bride (inst. meth. à la prat. t. 2, p. 198), un gargarisme 


497 


efficace contre l’angine tonsillaire. M. Giacomini recom- 
mande l’infusion ou le suc de sauge en lotion dans les con- 
tusions, les blessures, les ulcères. MM. Trousseau et Pidoux 
ont vu plusieurs fois les ulcères atoniques des jambes se 
fermer, se couvrir d'un tissu cutané nouveau par l'application 
de compresses imbibées de vin cuit avec la sauge et le miel, 
et même d’une simple décoction de sauge. M. Jobert, de 
Lamballe, emploie avec succès, dans le traitement des ul- 
cères atoniques et scrophuleux, une pommade préparée avec 
la sauge et le lierre terrestre (sauge et lierre terrestre, de 
chaque, 30 gram., axonge, 250 gram., cire blanche, 45 
gram.) Les vulnéraires et les cicatrisants, depuis longtemps 
tombés dans le domaine de la médecine populaire, reprennent 
donc dans la matière médicale leur antique renommée. 

[ « Des baïns préparés avec la sauge ont contribué, dit 
Loiseleur-Deslonchamps (Dict. des Scienc. med. t. L., p. 
62), à rendre le mouvement à des membres paralysés et à 
faire cesser l'endurcissement du tissu cellulaire des enfants. 
Elle agt même assez fortement de celle manière pour qu'on 
ait vu un état fébrile résulter d’un pareil bain. Appliquée 
même seulement en sachets, la sauge ne parait pas avoir été 
tout-à-fait inutile pour dissiper des engorgements œdéma- 
teux et autres tumeurs atoniques. » 

La sauge des pays méridionaux, et celle qui a crü dans 
les lieux secs et élevés, est plus énergique que celle que l'on 
a cueillie dans les lieux humides ou que l’on a cultivée dans 
nos jardins. Il est bon de laver avec soin les feuilles de cette 
plante avant d'en faire usage, la poussière et d’autres impu- 
retés se fixant facilement entre les papilles qui en rendent 
la surface comme chagrinée. 


SAULE BLANC, 


SAUX BLANC, OSIER BLANC. 


Salix vulgaris (L.) 
Salix alla (T.) 


Le saule blanc est un arbre très-commun le long des 
routes, près des villages, au bord des ruisseaux, des rivières, 
dans les terrains humides. Son écorce est usitée. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR: décortion, de 30 à 60 gram. par kil. d'eau. 
Poudre, de 8 à 50 gram. en pilules, électuaires on dans du vin, 
de la bière, etc. 
Teinture (4 sur 4 d'alcool), de 40 à 50 gram. en polion. 
32 


498 


Extrait par infusion (4 sur 40 d'eau), 
— par décoction (1 sur 8 d’eau), 
—  Alcoolique, (4 sur 5 d'alcool), 


À L'EXTÉRIEUR : décoction, pour lotions, fomentations, injections, 
gargarisme, Cataplasme, etc. 


de } à 2gram. en pilules, 
bols,ou dans du vin,etc. 


Propriétés. 


L'écorce de cet arbre est un tonique énergique et un peu 
astringent, proposé comme un bon succédané du quinquina; 
on l’emploie contre les fièvres intermittentes avec succès. 
Comme tonique, elle est très-utile dans l’atonie du tube 
digestif, les névroses, les hémorrhagies passives, les flux 
muqueux aitoniques et surtout la leucorrhée; on la donne 
aussi comme vermifuge. On en fait des bains toniques con- 
tre la faiblesse des enfants, etc. 

L'écorce de saule blanc doit être considérée comme l'un 
des toniques indigènes les plus énergiques. Un grand nom- 
bre d'expériences ne permettent plus de douter de sa vertu 
fébrifuge ; à cet égard, elle est, de toutes les écorces des 
arbres d'Europe, celle qui se rapproche le plus du quinquina. 

Longtemps avant que les médecins eussent fait mention de 
l'écorce de saule comme fébrifuge, nos paysans l'employaient 
en décoction aqueuse ou vineuse. Elle est, dans quelques 
villages de ma circonscription pratique, d’un usage popu- 
laire et traditionnel. On la prend, en forte décoction, en 
infusion dans le vin, dans la bière ou dans le cidre, suivant 
les ressources locales ou individuelles. 

Tous les médecins savent que Stone, Gunz, Gerhard, 
Mayer, Harthmann, Gilibert, Wilkinson, Coste et Wilmet, 
ont combattu avec succès des fièvres intermittentes de tous 
les types avec l'écorce du saule blanc et de quelques autres 
espèces du même genre. Koning, (de cort. salicis alb.) rap- 
porte beaucoup de faits en faveur de l'efficacité de cette 
écorce employée comme fébrifuge. Burtin (Mémotre cou- 
ron. par l’Acad. des Scienc. de Bruxelles), qui en a obtenu 
aussi beaucoup de succès, affirme qu'il l’a vu quelquefois 
réussir dans des cas où le quinquina avait échoué. Wauters 
{répert. cit.) a administré l’écorce de saule à quarante-neuf 
malades atteints de fièvres intermittentes de divers types ; 
sur ce nombre, trente-deux guérirent parfaitement, onze 
furent soulagés, les six autres n’en éprouvèrent aucun effet. 
Clossicus a retiré les mêmes avantages de cette écorce, non- 
seulement dans les fièvres intermittentes, mais encore dans 
d'autres maladies périodiques. IL arrêta un vomissement 
pituiteux périodique, en administrant cette substance, fine- 
ment pulvérisée, à la dose de 24 gram, dans l’intermission. 


499 


M. Barbier, d'Amiens (ouv. cit.), dit que de nombreuses 
observations justifient les éloges qu'on accorde à l'écorce de 
saule dans le traitement des affections périodiques. Planche 
(Bullet. de Pharm., t. 1), assure que , n’ayant pu faire dis- 
paraître une fièvre tierce au moyen du quinquina , il eut le 
plaisir de la voir céder à 60 gram. d'écorce de saule. Pour 
éviter une rechute, une égale quantité fut administrée en 
quatre jours. Depuis plus de vingt ans que j’emploie cette 
écorce, il m'arrive rarement d’avoir recours au quinquina. 
Cependant, j'avouerai que , malgré l'observation rapportée 
par Monier, médecin à Apt, constatant la guérison , par ce 
moyen, d'une fièvre intermittente pernicieuse cholérique, 
je n'ai pu encore me décider à m'en tenir à l'emploi de 
l'écorce de saule dans les fièvres pernicieuses. Le dan- 
ger imminent que présentent ces fièvres commande au 
praticien consciencieux de ne substituer au quinquina 
aucun autre médicament, quelque vanté qu’il ait été. Il ne 
pourrait être autorisé à une telle substitution qu'autant que 
l'écorce du Pérou lui manquerait ; celle de saule serait 
alors le seul succédané qu'il put choisir. Il faut, contre 
une fièvre pernicieuse, une action prompte et sûre , telle 
que celle du sulfate de quinine. Si, dans une fièvre intermit- 
tente ordinaire , l'accès ne disparaît pas après l'adminisira- 
tion des premières doses d’écorce de saule , ce qui arrive 
souvent, on peut, sans danger, attendre un résultat favorable 
de la continuation de l'emploi de cette écorce. Il n'en est 
pas de même de la fièvre intermittente ou rémittente ataxi- 
que, qui, abandonnée à elle-même ou mollement combattue, 
peut emporter le malade au deuxième ou au troisième accès. 

Je ne rapporterai point les cas nombreux de guérison de 
fièvres intermittentes que j'ai été à même de constater ; ce 
serait grossir inutilement le répertoire de tous ceux que les 
auteurs citent et que les praticiens connaissent. Je dirai 
seulement que de tous les faits que j'ai observés j'ai pu 
conclure que l'écorce de saule, administrée à grande dose 
{double ou 1riple de celle de l'écorce du Pérou), compte 
autant de succès que le quinquina dans les fièvres intermit- 
tentes ordinaires ; que, néanmoins, le type tierce cède plus 
facilement que le type quotidien et quarte, par la raison que 
les fièvres printannières guérissent plus tôt que les fièvres 
automnales. Dans les premières, il me suffit souvent de 
donner 8 gram. de poudre d’écorce de saule dans chaque 
intermission pour obtenir Ja guérison au bout de trois ou 
quatre Jours, avec la précaution, comme pour l'emploi du 
quinquina, d'en continuer Jusage pendant hüit à quinze 
jours, afin d'empêcher la récidive. Dans les quotidiennes et 


500 


quartes automnales, je porte la dose à 30, 60 et même 80 
gram. , divisés en quatre, cinq ou six prises pour chaque 
intervalle d'accès. C’est à l'élévation des doses, selon les 
cas, que je dois les succès constants que j'obtiens. La 
décoction et le vin que je fais préparer sont toujours très- 
concentrés. Ainsi que le pratiquait Sydenham pour l'admi- 
nistration du quinquina, je fais reprendre l’usage de l'écorce 
de saute le huitième jour depuis la dernière dose, et je 
reviens jusqu’à trois ou quatre fois à cet usage, en laissant 
toujours huit à quinze jours d'intervalle ; quelquefois je 
donne alors le fébrifuge pendant trois ou quatre jours. 

Dans les fièvres. automnales rebeiles, avec bouffissure, 
engorgement splénique, je me suis bien trouvé de l'addition 
de sel commun à l’écoree de saule, dans la proportion de 
1 gram. pour 5 ou 6 gram. de poudre de eette écoree. Je 
mêle ce sel au vin de saule dans les mêmes proportions pour 
chaque dose de vin, au moment de son administration. 
J'emploie aussi, dans ces cas, le vin concentré de saule et 
d'absynthe , avec addition de cendre de genêt ou de gené- 
vrier. La teinture d’écorce de saule, celle d'absynthe et de 
semences d'anpélique me servent, mêlées , à composer un 
vin fébrifuge extemporané. 

Dans les cas d’hydropisie accompagnant les fièvres inter- 
mittentes , j'ai associé avec avantage à l'écorce de saule la 
racine de raifort sauvage ou de celle de Bryone à dose diuré- 
tique et légèrement laxative, les baies de genièvre concas- 
sées et la semence de moutarde blanche,infusées dans le vin 
blanc , la bière ou le bon cidre. 

[ J'ai employé l'écorce de saule avec un succès incontes- 
table, comme moyen de préserver des fièvres intermittentes 
les habitants qui, constamment soumis aux influences 
marécageuses, en étaient atteints chaque année. Je ponrrais 
citer vingt familles indigentes qui, par l'usage habituel, au 
printemps et en automne, de la décoction ou de la simple 
infusion à froid d'écorce fraîche de saule, se sont délivrés 
de ce fléau périodique et de la misère qui en était la consé- 
quence. Je eiterai, comme le plus remarquable, le fait sui- 
vant : La famille Pinchedé, composée du père, de la mère, 
et de huit enfants, habitant la vallée humide de la Liane, 
(où les fièvres intermittentes sont devenues endémiques 
depuis l'établissement de fossés qui longent le chemin de 
fer), et soumise, en outre, aux effets débilitants d'une posi- 
tion voisine de l'indigence, était atteinte chaque année, 
depuis cinq ans, de fièvres intermittentes de divers types. 
Cette famille était littéralement ruinée par l'emploi réitéré 
du sulfate de quinine. Il m'a suffi, durant le printemps de 


50! 


4847,de la mettre à l'usage d’une forte décoction de saule, et 
de revenir dans le cours de l'été, pendant deux ou trois jours, 
à cet usage, pour les préserver ds l'intoxication paludéenne. 
Le même moyen, réitéré en 1848,les a également préservés. 
De tels résultats, qu'il est d'autant plus facile d'obtenir que 
le saule croît en abondance dans les lieux où sévissent 
généralement les fièvres intermittentes, sont de nature à 
fixer l'attention des philanthropes. 

L'écorce de saule peut être administrée comme tonique 
dans tous les cas où l'emploi du quinquina est indiqué. J'ai 
fait cesser des diarrhées chroniques, des hémorrhagies pas- 
sives , des leucorrhées, des gastralgies par le seul usage de 
la décoction aqueuse, du vin, de la teinture ou de la poudre 
d’écorce de cet arbre. Lorsque, dans ies diarrhées chroni- 
ques, il existe une grande susceptibilité des voies digestives 
jointe à la débilité, i ‘associe l'écorce de saule, en décoction 
ou en teinture , au sirop diacode administré à petites doses 
souvent répétées. 

« L’infusion de l’écorce de cet arbre a guéri, dans six 
semaines, deux ulcères internes, dont l'un à la poitrine, et 
l'autre au rein gauche, suite d'abcès qui avaient été ouverts 
et qui avaient déjà jeté le malade dans une fièvre lente et 
dans le marasme. » (Robert, nouv. Élém. de Méd. pratiq., 
2e partie, p.842.— Paris, 1805). 

Harthman et Luders ont préconisé l'écorce de saule 
comme un anthelmintique puissant. Ils en ont surtout em- 
ployé la décoction en lasement contre les ascarides vermi- 
culaires. Je l'ai aussi administrée avec succès comme ver- 
mifuge ; mais on retire de bien plus grands avantages, sous 
ce rapport, de l'écorce de saule à feuilles de laurier, vantée 
par Em. Harthman ) Déssert. de virtut. salicis folio laureæ 
anthelmint., Francf. 1781), oubliée de nos jours et que j'ai 
employée comme anthelmintique avec beaucoup de succès 
depuis plus de vingt ans. On pourrait aussi l'employer com- 
me fébrifuge. 

A l'extérieur , l'écorce de saule blanc est employée soit 
en décoction, soit en poudre contre les ulcères atoniques ou 
fongueux, contre la gangrène et la pourriture d'hôpital, 
A cet égard encore, elie se rapproche du quinquina et agit 
de Ia même manière. J'ai fréquemment mis en usage ceite 
écorce en décoction comme antiseptique ; j'ai pu arrêter 
promptement la gangrène dans un cas d’érysipèle phlegmo- 
neux occupant toute la jambe gauche chez un vieillard caco- 
chyme , âgé de soixante-neuf ans, cultivateur au village de 
Besinghen, par cette seule décoction très-concentrée, em- 
ployée en fomentation sur toute l'étendue du membre, et en 


502 


injection dans les sinuosités causées par la fonte suppura- 
toire du tissu cellulaire et le décollement de Ia peau, qui ont 
toujours lieu dans cette affection. Je me suis trouvé très- 
bien de cette même décoction pour baigner les enfants scro- 
phuleux ou ceux qui sont atteints de débilité des extrémités 
inférieures. Après chaque bain, je fais pratiquer des fric- 
tions sur le rachis avec la teinture d’écorce de saule et de 
sommités de romarin ou de sauge. Je crois que ces bains 
peuvent sufiire chez les enfants pour guérir les fièvres inter- 
mittentes, quand l'état du tube digestif ou la répugnance du 
malade ne permet pas l'administration de l'écorce de saule 
à l'intérieur. 

Les chatons de saule en fleurs exhalent une odeur agréa- 
ble ; suivant Gunz, ils sont calmants et hypnotiques et l'on 
peut en préparer une eau distillée assez analogue à celle des 
fleurs de tilleul. 

Dioscoride dit que l'usage habituel des feuilles de saule 
en décoction suffit pour rendre les femmes stériles. C’est 
sans doute d'après cette assertion que Ettmuller et autres 
conseillent le suc de ces feuilles aux femmes trop ardentes 
ou atteintes de nymphomanie : Commendantur contra libi- 
dinem imprimis muliebrem arcendam, ad quam decoctum 
horum cum vino egreqiè valet. Imo, ut Ettmuller dicit, per 
salicem non solum appetitus muliercularum minuitur, sed 
se possunt 1lla reddere omninà steriles, jejuno ventriculo 
aliquoties si adhibentur : sic contra furorem uterinum, 
ulem contra nimiam salacitatem mulierum prodest, si primo 
vere ex salicis surculis tenellis sauciatis aqua seu succus 
colligatur et deindè cum pane in placentulas formentur ac 
mulbieribus propinentur, sic meliùs coercetur libido ut nun- 
quam amplis æstiment res venereas et steriles reddantur 
(Boecler. Cynosur. mat. med., t.3, p.589.) 

Bien que la vertu anti-aphrodisiaque des feuilles de saule 
s'accorde peu avec les propriétés toniques bien reconnues 
de cet arbre, on n'en doit pas moins les soumettre à l’expé- 
rience. Les caractères physiques ne sont pas toujours en rap - 
port avec les propriétés thérapeutiques des substances, et la 
chimie même est souvent impuissante pour, en aécouvrir le 
principe actif et spécial. J'offrirai pour exemple le seigle 
ergolé, qui est loin de laisser soupconner, par ses propriétés 
physiques et chimiques, l'énergie de son action spéciale sur 
l'utérus. Si l'on ne doit pas accueillir avec crédulité tout 
ce que les anciens nous ont dit sur les propriétés des plan- 
tes, il ne faut pas non plus toujours rejeter sans examen ce 
que l'apparence ne justifie pas, ou même ce qui nous paraît 
absurde. 


203 


Plusieurs autres espèces { salix fragilis, salix triandra, 
salix vitellina, salix purpurea, salhix caprea, etc.) ont été 
essayées et ont donné des résultats à peu près semblables. 
C'est le saule marceau (salix caprea) que Wilkinson a pré- 
conisé. Comme fébrifuge, je n'ai jamais employé que le 
saule blanc, qui, dit-on, contient plus de salicine que les 
autres espèces. 

Il faut que l'écorce de saule soit prise sur des branches 
de deux, trois ou quatre ans, récoltées avant la floraison, 
desséchées promptement à l’étuve et conservées à l'abri du 
contact de l'air et de l'humidité. 


SALICINE.* 


La salicine, principe immédiat retiré de l'écorce de plu- 
sieurs espèces de saules et de peupliers, est d’un aspect 
nacré , d’une saveur très-amère , un peu soluble dans l’eau 
froide, très-soluble dans l’eau chaude, insoluble dans l’éther 
et dans les huiles volatiles , soluble dans les acides sans se 
combiner avec eux. Son action sur nos organes l'a fait 
considérer comme un tonique puissant. Proposée comme 
succédané du sulfate de quinine, la salicine a été employée 
avec succès dans les fièvres intermittentes et dans toutes 
les affections qui ont une marche périodique ; mais comme 
elle doit être administrée à plus forte dose, le prix en 
devient presque aussi élevé en pharmacie que celui de ce 
dernier. On a administré la salicine à la dose de dix, quinze 
et jusqu’à 100 décigram. dans de nombreux cas de fièvres 
intermittentes , et les succès ont été nombreux, quoi qu'en 
dise le professeur Trousseau. Si ce médecin révoque en doute 
la propriété fébrifuge de la salicine, M. Magendie Ia consi- 
dère comme jouissant d'autant d'efficacité que la quinine 
et la cinchonine. M. Andral a administré la salicine à douze 
fiévreux : chez six malades l'accès a manqué après la 
première dose du médicament ; chez deux, il n’est re- 
venu qu'une seule fois; il a échoué chez les quatre autre. 
« Cette substance , dit M. Barbier {owv. cit.), s'est montrée 
un remède plein d'efficacité dans le traitement des fièvres. 
quotidiennes, tierces, doubles-tierces et quartes. Je l'ai mise 
assez souvent en usage pour avoir reconnu que la salicine 
est une découverte précieuse pour la médecine.» Une foule 
d’autres médecins, tels que Miquel (Gaz. med. de Paris, 
Janvier 1830), Noble, médecin à Versailles, Lefebvre , etc., 
ont obtenu de la salicine, administrée comme fébrifuge, 
les résultats les plus avantageux. 

Serre a employé avec succès la salicine dans un cas de 


504 


névralgie faciale intermittente. Lenz {Journ. de Hufeland, 
août 1833) s'en est bien trouvé dans la toux chronique qui 
persiste à Ja suite des affections aigües de la poitrine et sur- 
tout dans celle qui résulte de la grippe. La salicine a encore 
été utile dans les maladies chroniques avec paroxismes 
fébriles périodiques, les flux muqueux atoniques , les diar- 
rhées colliquatives ; en un mot, dans tous les cas où Ia qui- 
nine est indiquée. 


SAXIFRAGE. 


1° SAXIFRAGE BLANCHE OU GRANULÉE, SANICLE DE Mon- 
TAGNE (Saxifraga granulata L.) Cette plante croît sur les 
bords des bois et dans les pâturages secs. Les petits tuber- 
cules qui composent sa racine ont une saveur un peu 
amère. Bergius a remarqué que leur décoction aqueuse 
noircissait lorsqu'on y versait du sulfate de fer, ce qui décèle 
un principe astringent. On leur a gratuitement attribué la 
propriété de dissoudre les caleuls urinaires et d'en favoriser 
l'expulsion. Comme beaucoup d'autres plantes légèrement 
amères et astringentes, la saxifrage peut exciter l’action des 
reins et provoquer, lorsqu'il y a absence d'irrilation, Ja 
sécrétion de l'urine ; mais elle est, sous ce rapport, au-des- 
sous de beaucoup d'autres végétaux qui possèdent la même 
propriété. 

20 SAXIFRAGE DE SIBÉRIE (Saxifraga grassifoha L.) 
Les feuilles de lierre qui servent ordinairement pour le pan- 
sement des cautères entretiennent une odeur extrêmement 
désagréable ; celles de poirée ou beite ont l’inconvénient de 
se dessécher promptement, de devenir friables, et d’adhérer 
ainsi aux bords de la plaie. M. Rousseau. (Journ. de méd. 
et de chir. prat., t. 1°, p. 189) a conseillé de remplacer ces 
plantes par les feuilles de la saxifrage de Sibérie, que l'on 
cultive dans nos jardins, où elle montre de bonne heure ses 
jolies fleurs d'un rouge foncé. Cette plante n'étant pas 
détruite par la gelée peut servir pendant toute l’année. Je 
l'ai employée avec avantage pour le pansement des vésica- 
toires. 


SCABIEUSE. 


Scabiosa pratensis hirsuta (T.) 
Scabiosa arvensis (L.) 


La scabieuse de; champs est très-commune. On la ren- 
contre partout , le long des chemins, dans les prés, etc. On 
emploie la racine, l’herbe et les fleurs. 


905 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : décoction ou infusion ,de 30 à 60 gr. par kil.d'eau. 
Eau distillée (1 sur 2 d'eau}, de 50 à 109 gram. eu potion. 
Extrait , de 4 à 4 gram. et plus, en potions, pilules, etc. 


Propriétés. 


La scabieuse était autrefois regardée comme sudorifique , 
dépurative, etc , et employée dans les affections cutanées fr), 
la phthisie pulmonaire, la fin des pleurésies et des pneu- 
monies, l’empyrème, les catarrhes chroniques. 

Malgré l'autorité de Boerhaave , qui accordait beaucoup 
d'avantages à la décoction miellée de scabieuse dans le trai- 
tement des pleurésies et des pneumonies parvenues à leur 
dernière période, je ne puis distinguer cette plante d'une 
multitude d’autres de la même nature, et dont l’action est 
si faible, les effets si peu appréciables, qu’on peut les em- 
ployer dans les maladies du caractère le plus opposé, avec 
la même apparence de succès. 

Des bains préparés avec la scabieuse n’ont pas été plus 
utiles que son usage à l’intérieur. Les paysans en font des 
gargarismes contre les maux de gorge. Cette plante, d'une 
saveur un peu amère et astringente , que l'on peut regarder 
comme un faible tonique, est encore prescrite par quelques 
médecins ; mais c’est plutôt par habitude que par persua- 
sion. C’est principalement contre les maladies chroniques 
de la peau, tels que les dartres, la teigne, la lèpre, etc., 
qu'on la met encore en usage. 


SCEAU DE SALOMON, 
GRENOUILLET, MUGUET ANGULEUX. 


Sigillum Salomonis sive polygonatum (T.) 
Convallavia polyganatum (L.) 


Cette plante, très-commune, croît dans les bois et dans 
les lieux ombragés. | 

La racine de sceau de Salomon , d’une saveur douceñtre, 
visqueuse , un peu âcre et amère, est un astrigent léger, 
agissant à peu près comme la grande consoude. On en 
conseillait autrefois l'usage dans la goutte, la gravelle, Ia 
leucorrhée, les hémorrhagies, etc. On l'appliquait sur les 


Gr) Le nom de scabiosa rappelle la propriété anlipsorique attribuée 
_ Jonglemps à celte plante : — « Urbanus per se nescit prelium seabiosæ, » 
dit l’école de Salerme. 


906 


contusions, les ecchymoses. Elle est aujourd’hui presque 
inusitée. Les bonnes femmes pilent cette racine avec autant 
de celle de grande consoude, pour appliquer sur les contu- 
sions, et pour guérir les hernies, qu'un bandage vient 
ensuite consolider. Les cultivateurs donnent quelquefois la 
racine de grenouillet hachée dans l’avoine des chevaux qui 
ont le farcin. 

[ « Quelques auteurs, dit Loiseleur-Deslongchamps, rap- 
portent que 4 grammes de racine de cette plante, ou dix à 
quinze de ses fruits, provoquent le vomissement, ce qui ne 
s'accorde nullement avec ce que disent Linné et Bergius. 
Selon ces auteurs, des paysans suédois, dans un temps de 
disetie, ont mêlé de ces racines avec de la farine de froment, 
et ils en ont fait une sorte de pain d’une couleur brunâtre 
et d'une consistance visqueuse ; mais il n’est pas question 
que ce pain ait fait vomir.» (Dict. des Scienc. meéd., t. 50, 
p.134.) 


SCEAU DE NOTRE-DAME, 


TAME COMMUN, TAMISIER, RACINE VIERGE, VIGNE SAUYAGE, 
VIGNE NOIRE, HERBE AUX FEMMES BATTUES. 


Tamnus sive Sigillum bealæ marie officinarum (T.) 
Tamnus communis (L.) 


Cette plante vient spontanément dans les bois et dans les 
haies du milieu et du midi de la France. La racine est usitée. 


Fropriétés. 


Le tame est une plante purgative tout-à-fait oubliée et qui 
cependant mérite une place dans l’officine du médecin de 
campagne. À petite dose, elle est apéritive et diurétique. Sa 
racine sèche, en poudre, purge à ia dose de 2 à 4 grammes. 

L'odeur et la saveur de cette plante semblent annoncer 
des propriétés énergiques. Sa racine, remplie d’un suc 
visqueux, d’une saveur âcre, d’une odeur nauséabonde, 
a été considérée depuis longtemps comme cathartique (1), 
hydragogue, apéritive. Lobel la regarde comme exerçant 
une action spéciale sur l'appareil urinaire et utérin ; elle peut 
augmenter la sécrétion des urines graveleuses et glaireuses, 


x1) D'après J.Raïi, Martin Lester , médecin anglais, a donné souvent 
la racine de tamisier , en substance ou en extrait à grande dose, sans 
jamais observer qu’elle purgeût, fit vomir ou parût agir d'aucune ma- 
nière scnsible, (Loiselcur-Deslongehamps, Diet.des Se, méd, t, xxt, p.41.) 


907 


et favoriser les règles. Celse en conseille l'usage pour dé- 
truire la vermine de la tête. 

Les guérisseurs de campagne font manger les premières 
pousses tendres de cette plante, comme les asperges, pour 
diminuer la rate pendant ou après les fièvres intermittentes. 
Ils l’appliquent sur les contusions etles ecchymoses après 
l'avoir pilée ou ratissée ; elle est résolutive comme celle de 
Bryone. 

Je n'ai aucun fait à citer en faveur de cette plante, que je 
me propose d'essayer. Elle se rencontre rarement dans nos 

contrées. 


SCILLE, * 


SCILLE MARITIME, SCILLE OFFICINALE, GRANDE SCILLE, 
SQUILLE ROUGE, OIGNON MARIN, ORNITHOGALE 
MARINE, CHARPENTAIRE. 


Cette plante croît sur les plages sablonneuses de la Médi- 
terrannée et de l'Océan; on la trouve abondamment en 
Bretagne et en Normandie. On emploie sa bulbe ou oi- 
gnon. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : poudre, de 5 à 50 cent. en pilu'es, dan: un véhi- 

cule liquide, etc. 

Teinture (4 sur 4 d'alcool à 22°), de 4 à 8 gram. en potion. 

Vin (4 sur 16 de vin), de 15 à 60 gram. 

Vinaigre (1 sur 42 de vinaigre fort), de 5 à 10 gram. en potion. 

Orimel (1 de vinaigre scillitique sur 2 de miel), de 45 à 50 gram. 
en potion. : 1 

Extrait alcoolique (4 de scille sèche sur 5 d'alcool à 22°), 5 à 20 
cent. pilules. 

Extrait aqueux, par infusion (14 fraîche sur 4 d'eau), rarement 
employé, à à 20 cent. pilules. 


A L'EXTÉRIEUR : de 40 à GQ cent. en friction ou par la méthode 

endermique. | 

Décoction, de 8 à 15 gram. en lavement de 550 gram. d’eau. 

Teinture,de 40 à 45 gram. en frictions à l'hypogastre,à l’intérieur 
aes cuisses, etc. 

Vin, de 30 à 60 gram. en lotions, 

Vinaigre, de 10 à 50 gram. en lotions. 

Pulpe, en cataplasme comme rubéfiant, maturatif. 

Pommade (4 de poudre sur 2 d’axonge), de 4 à 15 gram. en 
frictions. | 

Oximel, de 50 à 60 gram. en gargarisme. 


208 


Propriétés, 


La scille, à l'état frais, a une odeur vive et pénétrante, 
une saveur âcre el très-amère; les émanations qui s'en échap- 
pent irritent les yeux et Ja muqueuse nasale. Appliquée sur 
la peau, elle produit la rubéfaction; à l'état sec,elle est ino- 
dore, a moins d'âcreté, mais elle conserve Loute son amertume. 

À haute dose, la scille agit à la manière des poisons 
nai Cotico-âcres ; elle produit des nausées, des vomissements, 
de la cardialgie, des coliques, l’hématurie, la strangurie, la 
Superpurgation, l’inflammation et la gangrène de l'estomac . 
et des intestins, des mouvements convulsifs et la mort. C’est 
un médicament qu'il faut employer avec prudence. Lange 
(Rem. domest, p. 176) dit qu'une femme d'Helmstad, 
attaquée de timpanite, à laquelle un charlatan en fit prendre 
une trop grande dose, en mourut; on lui trouva l'estomac 
enflammé. M. Orfila a constaté ces dangereux effets de la 
scille sur des chiens, même appliquée à l'extérieur dans 
l'épaisseur des chairs, 

À petite dose fréquemment répétée, cette racine excite 
principalement les reins et augmente la sécrétion urinaire. 
Elle a été considérée à juste titre par les anciens et les mo- 
dernes, comme le plus puissant des diurétiques. Sous ce 
rapport, on l’a employée avec beaucoup de succès dans l’a- 
nasarque, l’hydrothorax, les infiltrations séreuses en gé- 
néral. Cependant elle ne produit aucun effet dans l’hy- 
dropisie enkystée des ovaires, et réussit rarement dans 
l'ascite. «Que peut cette plante, dit Alibert, contre les 
squirrosités, les tubercules, les kystes, les concrétions ou 
autres altérations des organes, qui produisent les épanche- 
ments hydropiques ?» Je réponds à cela que lorsque l'hydro- 
pisie n'est pas le résultat d'une lésion organique incurable, 
la guérison peut avoir lieu après l'écoulement des eaux, et 
que, dans le cas contraire, on obtient toujours du soulage- 
ment, une guérison apparente qui fait gagner du temps et 
consolele malade en le livrant aux douces illusions de l'es- 
pérance. 

La scille exerce aussi une action très-marquée sur la mu- 
queuse pulmonaire, et provoque l’expectoration dans les 
affections de poitrine où des mucosités tenaces engouent les 
ramifications bronchiques ; elle convient, à ce titre, à la fin 
des pneumonies, dans certains catarrhes chroniques, dans 
l'asthme humide, l'infiltration pulmonaire, etc., lorsque, 
toutefois, il ÿa absence d’irritation et de fièvre. On en a 
aussi recommandé l'usage dans certaines maladies des 
voies urinaires exemptes de douleur et d’inflammation, 


809 


telles que la népbrite calculeuse, l’albuminurie, Ie catarrhe 
chronique de la vessie. 

M. Giacomini (Trad. de la Pharmacologie, p. 182) re- 
garde la scille comme douée d'une vertu hyposthénisante 
cardio-vasculaire, et, selon lui, les propriétés diurétiques et 
expeclorantes, elc., ne sont que des effets secondaires et 
subordonnés à son action primitive. 

Si la scille convient chez les sujets lymphatiques, d’une 
sensibilité obtuse, et lorsqu'il n'y à plus de chaleur, d'irri- 
tation ni de fièvre, elle est évidemment contre-indiquée 
chez les sujets irritables et très-nerveux, ou qui ont une 
disposition imminente aux phlegmasies, aux hémorrhagies, 
à la phthisie sèche ou nerveuse, dans les cas de fièvre, d’in- 
flammation, d’excitation des voies digestives, de douleurs 
vives, etc. Ce n'est pas seulement par une trop forte dose 
que ce médicament peut être nuisible. Il peut encore deve- 
nir funeste, même à petite dose, soit par une disposition 
idiosyncratique des organes qui en reçoivent l'action, soit 
à l'occasion de l'état d'irritation morbide-latente de ces 
mêmes organes. Quarin rapporte un cas où douze grains de 
scille suffirent pour causer la mort. Il est donc prudent de 
ne commencer que par des doses légères, qu’on augmente 
graduellement ; quand des nausées se manifestent, on doit 
les diminuer. 

L'on doit, de temps en temps, suspendre l'usage de la 
scille, car longtemps continué, même en très-petite quantité, 
cet usage trouble les digestions et produit une sorte de gas- 
trile, ce qui arrive également par l’action prolongée des 
amers sur Ja muqueuse gastro-intestinale. 

Associée à la digitale, la scille est employée dans les 
maladies de cœur, l'hydro-péricarde, les palpitations, pour 
ralentir le pouls et produire en même temps une diurèse 
abondante. Ce mélange convient surtout s’il y a dyspnée, 
étouffement, etc., symptômes souvent dûs à l'infiltration du 
tissu pulmonaire. Unie au calomel, cette racine devient plus 
diurétique et agit plus efficacement sur les absorbants. 
M. Bertrand la mêle à l’oxide noir de fer pour combattre 
les hydropisies atoniques. Dans la vue de diminuer son ac- 
tion trop irritante, ou de modifier ses propriétés suivant 
l'indication, on l’unit encore à Fopium, à l’ipécacuanha, à 
la gomme ammoniaque,à la scammonée, au vin d'Espagne,au 
Savon, aux aromates, aux antispasmodiques, aux mucilagi- 
neux, etc. 

Employée en frictions, la scille agit également comme 
diurétique. La teinture est ordinairement préférée pour ce 
mode d'administration. On en use depuis quatre grammes 


10 


jusqu'à huit chaque fois. Une plus grande quantité pourrait 
causer des accidents analogues à ceux que produit le mé- 
dicament pris à l'intérieur. On se sert souvent pour ces fric- 
tions de parties égales de teinture de scille et de celle de 
digitale, auxquelles on ajoute quelquefois autant d'huile es- 
sentielle de térébenthine. Je me suis très-bien trouvé de ce 
dernier mélange en frictions sur Ja région lombaire, sur 
l'hypogastre et à l'intérieur des cuisses, dans l’albuminu- 
rie chronique, la leucophlegmatie, l’hydrothorax, etc., sur- 
tout lorsque l'état des voies digestives s’opposait à l'usage 
intérieur de la scille et des autres diurétiques irritants. Les 
iavements de décoction de scille peuvent agir efficacement 
comme révulsifs. Schmveker {Dissert. de Scillä) les a con- 
seiliés dans les commotions cérébrales et dans les blessures 
graves de la tête. Larrey (Hém. de Char. mulit.) appliquait 
des cataplasmes de bulbes de scille, cuits sous la cendre, 
sur les bubons pestilentiels pour en hâter la suppuration. 

La poudre de scille n’est pas facile à préparer. Les squam- 
mes de cet oignon détachées, doivent être préliminaire- 
ment desséchées au soleil en été, à l’étuve en hiver. Quand 
elles ne sont pas très-sèches, elles moisissent dans les bo- 
caux et ne se pulvérisent pas. La poudre devient aussi hu- 
mide et s’altère si elle n’est pas conservée dans un lieu sec. 

La scullitine, découverte par Vogel, est le principe immé- 
diat auquel, d’après ce chimiste, la scille doit sa propriété 
active ; elle est inusitée. 


SCILLE PENCHÉE, 


JACINTHE DES BOIS, POTELET. 


Hyacinthus pratensis (Lam .) 
Hyacinihus non scriptus (L ) 


Cette plante, qui fleurit en avril et mai, se trouve en abon- 
dance dans nos bois. M 

Suivant M. Leroux, pharmacien à Versailles (Poiret. 
Hist. phil. des plant. d'Europe, t. 3, p. 299), les bulbes de 
jacinthe des bois contiennent en abondance une substance 
gommeuse ayant les propriétés physiques et chimiques de la 
gomme arabique, et pouvant servir aux mêmes usages. 
Cette plante, étant partout très-abondante, la gomme qu'on 
en pourraitextraire serait d’un prix très-peu élevé,et, partant, 
de nature à fixer l'attention des économistes. En attendant, 


off 


. le médecin de campagne peut tirer parti de ce nouveau mu- 
cilage en l’obtenant par la solution aqueuse de la pulpe et 
l'évaporation jusqu'à consistance convenable. 


SCOLOPENDRE, 


DORADILLE SCOLOPENDRE, LANGUE DE CERF, LANGUE 
DE BOEUF. 


Lingua cervina officinarum sens colopendrium (T.) 
Asplenium scolopendrium (L.) 


Cetie plante se trouve partout, dans les fentes des rochers, 
les puits, elc. 
Propriéiés. 


La scolopendre est un astringent léger, jadis employé dans 
un grand nombre de maladies de poitrine, des voies uri- 
naires, elc., et presque inusitée de nos jours. On la donne 
en décoction (30 à 60 gram. par kil. d’eau.) 

Les qualités physiques de la scolopendre consistent dans 
une faible stypticité et dans un léger arôme. C’est une de 
ces plantes qui, malgré les éloges pompeux dont elles ont 
été l’objet, ont plus d'effet sur la transpiration, la sécrétion 
de l'urine, etc., par l’action de la chaleur et de l’eau qui leur 

_servent d’excipient, que par leurs propriétés. 

[Nous devons dire, néanmoins, qu’on employait autrefois 
cetie plante comme apéritive, béchique, splénique, hépa- 
tique, dans les obstructions des viscères abdominaux, prin- 
cipalement dans celles de la rate, dans le crachement de 
sang, les diarrhées atoniques, les affections catarrhales, la 
gravelle, etc.] 


SCORDIUM (1). : 


Chamædrys palustris, canescens (T.) 
Tancrium chamædrys. 


Propriéiés. 


Galien rapporte qu’à la suite d’une bataille, les morts, qui 
étaient gisants sur des plants de scordium, furent longtemps 
exempts de putréfaction, et qu'ainsi fut découverte la pro- 


(x) Voyez Germandrée aquatique, p. 490. 


012 


priété antiseptique de cette plante. Sans attacher à cette 
fable plus d'importance qu'elle n'en mérite, on peut em- 
ployer le scordium comme topique stimulant, soit en cata- 
plasme, soit en poudre, contre les ulcères sordides, atoniques, 
la gangrène, la pourriture d'hôpital, etc. Je l'ai appliqué sur 
un ulcère qu’il a parfaitement détergé. Comme toutes les 
plantes toniques et excitantes, le scordium augmente le ton 
de l'estomac et des intestins, et l'action de la plupart de nos 
organes sécréteurs. Sa propriété anthelmintique est plus 
faible qu'on ne le croit géuéralement, et celle qu'on lui a 
attribuée comme fébrifuge est plus que douteuse. Elle ne 
m'a pas réussi dans trois cas de fièvres intermittentes où je 
J'ai employée: et comme vermifuge je l'ai mise en usage 
sans en éprouver un succès bien constaté. Entre autres faits, 
je citerai celui d’un enfant de quatre ans qui, après en avoir 
pris en infusion concentrée pendant cinq jours, ne put être 
débarrassé de plusieurs ascarides lombricoïdes que par l'em- 
ploi de l'ail bouilli dans le lait. 


SCROPHULAIRE AQUATIQUE, 


HERRE DU SIÉGE, BÉTOINE D EAU. 


Scrophularia aquatica major (T.) 
Scrophularia aquatica (L ) 


La scrophulaire se trouve partout dans les lieux humides, 
les fossés remplis d’eau, les bois, etc. On emploie toute la 
plante. 

Propriétés. 


Les différentes parties de la scrophulaire ont une saveur 
amère el une odeur fétide. 

Si les succès qu’on attribue à la scrophulaire, et qui sem- 
blent lui avoir fait imposer le nom qu’elle porte, sont réels, 
c’est évidemment à l'excitation qu’elle exerce sur les organes 
qu’ils sont dus. On a observé, en effet, qu'à haute dose cette 
plante provoque la purgation et même le vomissement : c’est 
une propritété que j'ai constatée. Je ne conseillerai pas, 
cependant, de l'employer comme vomitif ou comme pur- 
gatif, à cause de l’inconstance et de l’irrégularité de ses 
effets sur la contractibilité du tube digestif. 

La décoction de racine de scrophulaire, à la dose de 30 
gram. dans 300 gram. d’eau, aromatisée avec un peu de 
semence d'angélique et administrée à un enfant de dix ans, 


513 


-rès-sujetaux affections vermineuses, a provoqué deux vomis- 
sements et déterminé quatre selles abondantes avec expul- 
sion de quatre ascarides lombricoïdes. Comme je n'ai que 
ce seul fait à citer sur les propriétés purgatives et anthel- 
mintiques de la scrophulaire, Je me propose de me livrer à 
de nouveaux essais sur l'emploi de cetie plante, et je le 
ferai avec d'autant plus d'intérét que peu de médecins s’en 
SONT OCCUPÉS, et qu “elle est tombée dans une sorte d’oubli que 
je ne crois pas mérité. 

Tragus recommande la graine de cette plante contre les 
vers, à la dose de quatre grammes. 

On faisait usage autrefois de la racine de scrophulaire 
en décoction, ou en poudre à la dose de deux à quatre gram., 
contre les scrophules, les hémorroïdes, la gâle, les dartres 
et autres maladies de la peau. Divers auteurs ont employé 
la décoction de scrophulaire en cataplasme, en fomentation, 
dans les mêmes affections et sur les ulcères altoniques ou 
gangréneux ; On a même prétendu qu'elle était extrêmement 
utile pour favoriser la cicatrisation des plaies. On raconte, 
en effet, que les chirurgiens, pendant le long siége de La 
Rochelle, sous Louis XII, en faisaient un grand usage pour 
guérir toutes sortes de: blessures, ce qui lui fit alors “donner 
le nom d'herbe du siège. Mais si l’on réfléchit un instant 
que les plaies guérissent parfaitement et beaucoup plus 
promptement par l’usage de l’ean simple que par tout autre 
moyen, on réduira à sa juste valeur Ja décoction de racine 
de scrophulaire considérée comme vulnéraire. Disons, ce- 
pendant, que l’action stimulante de cette plante a pu mo- 
difier des plaies de mauvais caractère, tonifier les chairs, 
prévenir où combaitre la tendance à la pourriture d’ hôpital. 

D'après Boulduc et le botaniste Marchand, j'ai employé 
les feuilles de scrophulaire pour corriger la saveur désa- 
gréable du séné, en faisant infuser parties égales des deux 
plantes. Le mauvais goût de ce dernier a été, en effet, en 
grande partie enlevé sans en altérer en rien la vertu purgative. 
Ce fait est d'autant plus difficile à expliquer quela scrophu- 
laire a elle-même une odeur fétide et nauséabonde qui se 
irouve considérablement diminuée par cette association. 


es mr te 


SEIGLE, 


Secale hybernum vel majus (T.) 
Secale cereale (L.) 


Le seigle est Adi et légèrement laxatif. Il est 
plus usité comme aliment que comme médicament. Sa fa- 
33 


514 


rine peut être employée aux mêmes usages que celle du 
froment. Appliquée en cataplasme, elle est émolliente et 
résolutive, mais elle s'aigrit trop tôt et devient irritante. 
J'ai employé avec avantage le seigle légèrement concassé en 
décoction (30 à 60 gram. et plus par Kil. d’ eau), contre la 
RL paGON, quand” tous les moyens ordinairement mis en 
usage contre cette affection avaient été inutilement admi- 
nistrés. Cadet de Vaux prétend que ceux qui se nourrissent 
de pain de seigle sont rarement atteints d'apoplexie : on 
sait vulgairement que la liberté du ventre dégage la tête,et di- 
minue par conséquent la tendance aux congestions cérébrales. 

Wauters (Répert. remed.1ndig., p. 173) rapporte plusieurs 
observations sur l'efficacité du pain de seigle fortement tor- 
refié, contreles fièvres intermittentes. La plus remarquable 
est celle d’une fièvre quarte qui durait depuis plus de deux 
ans, et avait constamment résisté au quinquina. Il adminis- 
trait ce remèdeen décoction à la dose de 60 gram., 750 
gram. d’eau, en deux fois, dans l’apyrexie, à la manière du 
café. Il le donnait quelquefois en poudre (15 8 gram. en trois 
doses dans l’apyrexie), avec la carcarille (2 à 4 gram.) et le 
sel de tartre (2 gram.) 


SEIGLE ERGOTÉ, 


ERGOT DU SEIGLE, SEIGLE CORNU, SEIGLE NOIR, CLOU 
DE SEIGLE, SEIGLE A ÉPERON. 


Secale cornutum (T). 
Sclerotium clavus (L..) 


Le seigle ergoté, on plutôt l’ergot du seigle, est une ex- 
croissance longiforme qui se développe sur l'ovaire du 
seigle, à la place de la graine de cette plante. Il est d’un 
noir violacé à l'extérieur , d'un blanc violet à l’intérieur, 
allongé, recourbé, d'une saveur amère, un peu âcre, d'une 
odeur légèrement vireuse. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : poudre récente, de 50 cent. à 8 gram. en suspen- 
sion dans de l’eau sucrée, du vin blanc, une potion, etc. 
Infusion de poudre, de 2 à 8 gram. dans 150 à 500 gram. d'eau. 
© Vin (4 sur 40 de vin), de40 à 100 gram. (plas rarement vomi. ) 

Teinture (5 sur 8), de 40 à 45 gram. en potion. 
Sirop (4 sur 5 de sirop), de 45 à 60 gram. en potion. 
Conserve pulvérulente, de 2 à 42 gran, en potion. 
Huile, 20 à 50 gouttes dans un véhicule chaud, (Dr. Wright. ] 

A L'EXTÉRIEUR : poudre, de 8 à 45 gram, en lavement, injection. 
Iluile, en frictions, ambrocation, etc, 


515 


Fropriétés. 


À haute dose, le seigle ergoté est un irritant très-actif, 
suivi d'accidents graves quand on l’adminisitre à l'intérieur 
ou que l’on en prend accidentellement; il produit des convul- 
sions, le tétanos, la gangrène des membres et la mort. Ces 
effets sont connus sous le nom d’ergotisme. 

À doses moyennes et longtemps continuées, l’ergot de 
seigle produit une sorte de narcotisme; à petite dose, sa 
propriété spéciale, et la plus remarquable, est de solliciter 
des contractions utérines dans les cas d'inertie de Ja ma- 
trice. On l’administre lorsque le travail de l’enfanitement 
languit, quand les douleurs ont cessé ou sont trop faibles. 
Il convertit les douleurs lombaires en douleurs expultrices ; 
mais il faut, dans tous les cas, que le col utérin soit suffi- 
samment dilaié, que l'enfant ne soit pas d’un volume dis- 
proportionné avec les dimensions du bassin, qu’il se pré- 
sente dans une position ne faisant pas obstacle à son 
expulsion, qu'il ait franchi le détroit supérieur, en un mot, 
qu'ilne manque pour son expulsion que des contractions 
utérines suffisantes. | 

L'action du seigle ergoté commence ordinairement au 
bout de 10 à 15 minutes ; la durée de cette action varie 
d’une demi-heure à une heure et demie; elle s’affaiblir au 
bout d'une demi-heure, mais elle reprend son intensité si 
on administre une nouvelle dose. Les douleurs, au lieu 
d’être courtes et intermiltentes comme les douleurs natu- 
relles, sont vives, longues et plus ou moins permanentes. 
L'abdomen est plus dur et plns tendu que dans les contrac- 
tions ordinaires de la matrice. 

On emploie le seigle ergoté pour déterminer la sortie du 
placenta et des caïllots sanguins retenus dans la matrice, 
ainsi que celle des corps étrangers développés dans sa eavité, 
tels que les polypes, les môles, les hydatides, etc. Il con- 
vient aussi pour faire cesser la métrorrhagie causée par 
l'inertie de l’utérus. Il ne survient presque jamais d’hémor- 
rhagie utérine après les accouchements provoqués par ce 
médicament. 

Les convulsions qui accompagnent le travail de l’enfante- 
ment ne sont pas une contre-indication à l’ergot de seigle, 
lorsque l'état de l’utérus est d’ailleurs favorable à son admi- 
nistration. Cette pratique n’est pas généralement adoptée. 
MM. Mérat et Delens, entr’autres, disent formellement qu'on 
ne doit point prescrire l’ergot dans ces cas. Cette opinion 
est trop exclusive. J'ai vu, chez une jeune anglaise de vingt 
ans , des convulsions persistant après la saignée et le bain 


516 


tiède, céder immédiatement après l’enfantement accéléré au 
moyen de l'administration du seigle ergoté, qui, du reste, était 
indiqué par la lenteur du travail et la dilatation du col utérin. 
Dans les cas de pléthore générale on fera précéder son usage 
d'une saignée plus ou moins copieuse selon l’état de la ma- 
Jade et les circonstances que Faccoucheur peut seul appré- 
cier. Ce médicament, précieux entre les mains d’un accou- 
cheur habile, devient dangereux et peut même être mortel 
par une administration intempestive ou contre-indiquée. 

La connaissance des vertus obstétricales de l’ergot date de 
longtemps. Ce ne fut pas sans étonnement que j’appris qu’il 
était en usage depuis plus de soixante ans dans nos campa- 
gnes comme moyen de provoquer l'accouchement. Dans 
certaines contrées de l'Allemagne, au rapport de J.-R. Came- 
rarius (1688), les matrones l'employaient pour hâter l’accou- 
chement (Act. nat. cur. cent. 6).: On dit, dans l’Albert 
moderne, recueil imprimé en 1782, p. 1, Art. accouchement 
laborieux , comme recette populaire , que, pour faire accou- 
cher incontinent, il faut prendre plein un dé à coudre de 
l'ergot qui se trouve sur les épis du seigle. La science s'’em- 
para de cette découverte , la discuta, en fit une judicieuse 
applieation , et l'adopta. 

[ Le docteur Stearns, dans une lettre adressée au docteur 
Akerley et insérée dans le Magasin de médecine de New- 
York, éveilla un des premiers l'attention des médecins sur 
ik emploi de l’ergot de seigle pour déterminer des contractions 
utérines et accélérer l'accouchement. Peu après, Olivier 
Prescot (medical and phys. Journal, t. xxxur, p. 90) publia 
un mémoire intéressant sur l'emploi de cette substance dans 
l'inertie de la matrice, la leucorrhée, les pertes utérines. 
A la même époque, et même auparavant, Desgranges, de 
Lyon (nouv. Journal de médec., t. 1, p.54), instruit par 
des matrones, en conslatait, par de nombreuses expériences, 
les vertus obstétricales. Les docteurs Goupil (Journal des 
progrès, t. 1, p.150), et Villeneuve (Mém. sur l'emploi du 
seigle ergoté) publièrent un mémoire où il résulte de l’ana- 
lyse des travaux de leurs prédécesseurs et de l'exposition 
de leurs propres expériences, la preuve irréfragable de ce 
qui avail été dit jusqu'alors en faveur de ces mêmes vertus. 

D’après tous les faits publiés jusqu'en 1835, suivant le 
docteur Bayle {Bbl. de thérap., t. 1x, p. 534%), sur 1176 cas 
d'accouchements ralentis ou empêchés par l'inertie de Ja 
matrice , 1051 ont été plus ou moins promptement terminés 
par l emploi du médicament ; dans 111 cas l’ergot a échoué, 
dans 14 le succès a été modéré. ï 

Les propriétés obstétricales du seigle ergoté ne peuvent 


017 


donc plus être révoquées en doute. Vingt années de pratique 
comme médecin-accoucheur dans une ville populeuse, m'oné 
mis à même d'apprécier les services que ce précieux médi- 
cament rend à l’humanité. Combien de femmes qui, sans 
son administration, n’eussent pu accoucher que par l'appli- 
cation du forceps ! Je pourrais citer cent cas où ce médica- 
ment à été pour moi d’une utilité incontestable ; mais ces 
documents n’ajouteraient rien à ce qui est aujourd’hui 
généralement connu. Je me contenterai de raconter un fait 
récent et remarquable sur les effets que j'ai obtenu de l’ergot 
de seigle comme moyen de provoquer les douleurs expul- 
trices ‘et de prévenir l'hémorrhagie utérine consécutive. 
Je fus appelé le 25 mars 1845 chez "M. Trollé, propriétaire 
cultivateur à Widhen, à l'effet de porter secours à sa femme 
qui, depuis quatre jours , était en travail d’enfantement, et 
auprès de laquelle se trouvaient MM. C. D... et D.. 
médecins à Samer. A mon arrivée, je trouvai madame 
Trollé, âgée de trente deux ans et primipare, dans un grand 
état d'épuisement, n'ayant plus que de faibles douleurs et 

complètement découragée. L'enfant présentait la tête en 
première position, d'après ce que me dirent MM. C. 1N...... 
et D..…, car, dans l’état de tuméfaction où elle était, il me 
fut impossible de reconnaître cette position. On avait tenté 
plusieurs fois d'appliquer le forceps. Ces essais infructueux 
avaient produit une désolation telle que l’on s'attendait à la 
mort prochaine de la mère et de l'enfant. J’annonçai que ce 
dernier n'était plus vivant, et je donnai la certitude que 
l'accouchement serait promptement terminé ; mais je décla- 
rai,en même temps, que je ne pouvais répondre des accidents 
consécutifs, qu’une perte considérable pouvait avoir lieu, et 
que l' inflammation de l'utérus était souvent la conséquence 
d'un pareil état. J'appliquai, non sans difficulté, les bran- 
ches du forceps, à cause de l'extrême tuméfaction de la 
vulve, et je parvins, après quinze à vingt minutes, à termi- 
ner l'accouchement. 

Ce que j'avais prédit arriva ; une perte effrayante eut licu 
immédiatement. J’allai chercher le placenta ; l'hémorrhagie 
diminua un peu, mais bientôt elle revint tellement abon- 
dante, que les affusions froides étant insuffisantes; je ne pus 
m'en rendre maître qu’en injectant en abondance dans lu 
cavité de la matrice un mélange de vinaigre et d’eau-de-vie. 
Le bas-ventre étant très-doulonreux , je n'aurais employé Ia 
compression de l'aorte descendante qu'après avoir inulile- 
ment mis en usage les autres moyens. Les frictions sur lhy- 
pogastre, l'introduction dela main dans l'utérus, et tous les. 
moyens propres à rappeler la contractilité de cet organe 


518 


furent employés et prévinrent une nouvelle perte. L'abdo- 
men se boursoufla, une escarre gangréneuse se forma aux 
grandes lèvres et au périnée : mais les Javements, les appli- 
cations émollientes sur le bas-ventre et une diète sévère, 
suffirent pour prévenir l’inflammation de l'utérus ou du 
péritoire. La malade, ne recouvrant que lentement ses forces, 
ne fut complètement rétablie qu’au bout de quarante jours. 

En 1846, le 26 avril, on m'appela de nouveau pour accou- 
cher madame Trollé. Le travail avait commencé la veille à 
onze heures du soir ; il était six heures du matin. Je trouvai 
la iête de l'enfant en première position dans l’excavation du 
bassin , mais n’avançant plus, quoique les douleurs fussent 
snffisamment expultrices. L’arcade du pubis, se dirigeant 
en arrière, diminuait les dimensions du détroit inférieur. 
Je crus devoir appliquer le forceps au moyen duquel je ter- 
minai l'accouchement en quelques minutes. L'enfant, du 
sexe masculin, était vivant et très-volumineux ; une perte 
Survint comme après le premier accouchement, continua 
aussi après l'expulsion du placenta, et ne cessa qu'après l'in- 
jection dans l'utérus de parties égales de vinaigre et d'eau- 
de-vie. 

Le 15 juin 1847, madame Trollé m’appela pour son troi- 
sième accouchement. J'arrivai près d’elle à neuf heures du 
matin. Le travail avait licu depuis minuit ; les douleurs 
étaient suffisantes et de bonne nature ; le col utérin était 
souple, mince, dilatable et déjà dilaté de la grandeur d’une 
pièce de cinq francs ; la tête en première position , encore 
au détroit supérieur. Les douleurs avgmentèrent, le col se 
dilata de plus en plus, les membranes se rompirent vers 
onze heures du matin, el une grande quantité d’eau s’é- 
coula. Dès ce moment les douleurs se ralentirent et cessè- 
rent enfin presqu'entièrement : la malade se découragea. 
Je lui fis administrer, à une heure après midi, quatre er- 
gots de seigle { je n'avais pu m'en procurer davantage ) 
récoltés en 1846, concassés et bouillis dans 80 à 100 gram. 
d'eau. Trois minutes après, Ia malade fut comme réveillée 
en sursaut par une forte contraction utérine; les douleurs 
vinrent COUp.sur Coup et continuèrent avec la même violence; 
mais la tête rencontrant l'obstacle au détroit inférieur, fut 
amenée par le forceps à trois heures et demie. L'enfant, 
serré au COu par un tour de cordon ombilical, étant dans un 
état apoplectique, fut rappelé à la vie par la saignée qui 
résulta de la section prompte de ce cordan. : 

Deux choses sont à remarquer dans cette observation : 
{4° l'action prompte, très-énergique , et persistant pendant 
trois heures et demie, d’une dose très-légère de seigle ergoté, 


219 


contre une inertie utérine portée au plus haut degré ; 
20 l'absence de l'hémorrhagie qui avait suivi immédiate- 
ment les deux accouchements précédents. Ce dernier 
résuliat était pour moi tellement certain, que je l'avais 
annoncé à l'avance. 

J'ai remarqué, dans le plus grand nombre des cas qui se 
sont offerts à mon observation, que les effets du seigle 
ergoté étaient d'autant plus prononcés que l’ineriie utérine 
était plus grande. Ceci paraît paradoxal, ou tout au moins 
inexplicable ; mais c’est un fait, et, en médecine comme 
dans toutes les sciences d’observation, un fait répété repousse 
brutalement toute théorie qui tendrait à l'anéantir. 

Lorsque le seigle ergoté est imprudemment administré 
dans les cas de rigidité du col utérin, de pléthore locale 
s'opposant par une sorte de torpeur aux contractions uté- 
rines , ces contractions ne se développent qne peu ou point 
par l’action de ce médicament ; mais il en résulte une 
excitation vasculaire pouvant donner lieu à une métrite 
aigue. 

J'ai observé un fait de cette nature chez la femme d’un 
épicier, âgée de trente-six ans, d’un tempéramment sanguin, 
d’une constitution forte et active. Cette femme, accouchant 
pour la quatrième fois, prit, par le conseil d’une sage-femme, 
une dose de seigle ergoté que je ne puis préciser, mais qui 
n’excédait pas 2 grammes. Le pouls s’accéléra, la face devint 
vuliueuse, un état d'anxiété inexprimable eut lieu, et cepen- 
dant les contractions utérines n’augmentèrent pas. L’orifice 
utérin avait quatre centimètres environ de dilatation ; mais 
il était épais et engorgé, sans trop de résistance. Je pratiquai 
une saignée du bras de 500 grammes, et prescrivis un bain 
tiède. Au bout de deux heures seulement les contractions 
utérines revinrent graduellement ; mais l'abdomen était 
tellement sensible que la couverture même ne pouvait être 
supportée. L'accouchement eut lieu naturellement au bout 
de huit heures ; mais le bas-ventre resta sensible au toucher, 
le pouls plein, dur ei fréquent. Une nouvelle saignée du 
bras fut prntiquée, des lavements émollients , des fomenta- 
tions avec la décoction de graine de lin et de tête de pavot 
furent prescrits.” Ce ne fut qu'après une troisième saignée, 
pratiquée dans les premières vingt-quatre heures qui sui- 
virent l'accouchement,que les symptômes s’appaisèrent, que 
les lochies parurent et que je pus espérer de sauver celte 
femme. Les suites de couches furent naturelles, et le réla- 
blissement complet au bout de huit à dix jours. 

Lorsqu'il existe de fortes contractions utérines sans pro- 
grès du travail, et qu'il y a en même temps pléthore , pouls 


520 


plein et dur, turgescence de la face, pesanteur de tête, on 
ne doit pointadministrer l’ergot, mais pratiquer une saignée 
copieuse. 

[ Ilest des médecins qui ne regardent pas la dilatation 
préalable du col utérin comme une condition indispensable 
pour lemploi du seigle ergoté. M. Desgranges rapporte 
l'exemple d’une femme qui prit ce médicament avant le 
commencement du travail, et qui accoucha une demi-heure 
après. Hastam obtint le même résultat dans un cas où 
l'orifice était très-peu ouvert. Mais on sait que quelquefois 
le col utérin est souple, très-dilatable et cède facilement aux 
premières contractions de la matrice, ce qui explique la 
promputude avec laquelle s’opèrent quelques accouchements 
naturels, et, par conséquent, l'effet immédiat du seigle ergoté 
dans ces circonstances. James Prowe, il est vrai, cite un 
autre fait où Le col, qui était raïde et peu dilaté, se ramollit 
et s'ouvrit après l’ingestion de 4 gram. d’ergot , et M. Che- 
vreuil rapporte seize observations où 24 à 30 grains de cette 
substance déterminèrent la dilatation du col utérin et le 
travail de l’enfantement. Michel cite aussi seize cas de non- 
dilatation de l'orifice du col, dans lesquels ce dernier, par 
l'effet du seigle ergoté, s'ouvrit en quelques minutes plus 
qu'il n'aurait fait en quelques heures sans l'emploi de ce 
médicament. Ces faits prouvent seulement, à mon avis, que 
la non-dilatation du col utérin n'empêche pas l’action 
obstétricale du seigle ergoté ; mais cette action, quand le tra- 
vail est si peu avancé et doit nécessairement se faire long- 
temps attendre, est intempestive et peut devenir dangereuse 
pour [a mère par la nécessité de réitérer les doses du médi- 
cament, et pour l'enfant, par la compression plus longue 
que l'utérus, contracté sans relâche, Jui fait subir. 

Lorsque l’expulsion du placenta se fait trop attendre , ou 
que sa présence détermine des hémorrhagies, qu'il y a iner- 
tie de l'utérus manifestée par le défaut de contraction et 
l'absence du globe rassurant se présentant à l'hypogastre, 
l'ergot est indiqué. Aux observations dues a MM. Balardini, 
Davies, Duchâteau et Morgan, et qui ne laissent à ce snjet 
aucun doute, j'ajouterai comme assez remarquable le fait 
suivant : Madame Filiette, marchande de volaille à Samer, 
âgée de trente-sept ans, d’une constitution grêle et faible, 
d'un tempérament nerveux, était accouchée de son septième 
enfant depuis quarante-huit heures , lorsque , dans les pre- 
miers jours de janvier 1835, on m'appela en consultation. 
L'arrière-faix n'était point expulsé, et le cordon ombilical 
avait été rompu par les tentatives d'extraction ; aucune perte 
n'avait eu lieu, et cependant l'utérus paraissait être dans 


921 


une complète inertie. Un état comateux existait depuis qua- 
rante heures environ ; le pouls était normal, mais faible ; 
des mouvements convulsifs avaient lieu de temps en temps 
aux paupières et aux lèvres ; la face était pâle, la peau 
fraîche , la respiration parfois suspirieuse. L’immobilité et 
l'assoupissement, que je considérais comme purement 
hystériques , alarmaient la famille et même mon confrère 
M. Grignon. Cedernier,néanmoins, abandonnait la délivrance 
à la nature plutôt que de recourir à l'emploi du seigle 
ergoté, auquel il n’avait aucune confiance, et dont les vertus, 
d'ailleurs, étaient encore contestées par Dupuytren, et aussi 
par madame Lachapelle, qui, en raison de ses nombreux 
moyens d'expérimentation, devait faire autorité. Toutefois, 
je proposai d’administrer à la malade une potion composée 
de 4 gram. de seigle ergoté en poudre, de 30 gram. d'eau 
distillée de menthe poivrée, de 89 gram. d'eau distillée de 
fleurs de tilleul, et de 30 gram. de sirop d’écorce d'orange, à 
prendre en trois fois, de quart-d'heure en quart-d’heure. 
Huit minutes après la première prise, un état d’agitation se 
manifesta, le pouls devint plus fréquent et plus développé, 
la matrice se contracta, et, au bout d’un quart-d'heure, 
l’arrière-faix descendit dans le vagin, et fut immédiatement 
expulsé. Madame Filiette ouvrit les yeux, revint aussitôt à 
elle-même, et put nous adresser quelques paroles. Les lochies 
furent peu abondantes, et les suites de couches se passèrent 
comme d'habitude. Ainsi, l’action du seigle ergoté, dans 
cette circonstance , a fail immédiatement cesser des symp- 
tômes nerveux insolites, difficiles à expliquer, et coïncidant 
avec la rétention du placenta,en même temps qu’elle a porté la 
conviction dans l'esprit d’un confrère dont l’'incrédulité ne 
voulaï] céder qu’à l'autorité irrésistible des faits. « L’expé- 
rience , dit Montaigne , est proprement sur son fumier au 
sujet de la médecine, où la raison luy quitte toute la place. » 

Le seigle ergoté a été employé avec succès dans les hé- 
morrhagies utérines autres que celles qui sont occasionnées 
par l'accouchement; mais dans ces cas son effet est plus 
lent; la guérison n’a lieu ordinairement que dans l’espace 
de plusieurs heures et même de plusieurs jours. L’ergot 
s’est également montré efficace dans les hémorrhagies ayant 
leur siége dans d'autres parties du corps. Spajrani, Pignacca 
et Cabini rapportent quatre observations d’épistaxis, huit 
d'hémoptysie, deux d’hématurie et une d’hematimèse arré- 
tées après l'emploi de ce médicament. Le docteur Ross 
the Lancet, vol. 2, p. 127—1845) a rapporté un cas de 
purpura hemorrhagica très-grave, où le seigle ergoté, 
administré de quatre heures en quatre heures, à la dose de 


922 


25 centigrammes dans une once d’infusion de roses com- 
posée, eût un succès aussi prompt qu’inespéré. 

Le docteur Macgill a observé le fait suivant sur les bons 
effets de l’ergot dans les cas de môle hydatique : Une femme 
de quarante ans avait une affection utérine annoncée par 
des hémorrhagies qui se renouvelaient tous les soirs depuis 
trois mois; à cette époque, le toucher fit reconnaître un 
corps saillant à l’orifice utérin. L’ergot de seigle fut pres- 
crit, et, quelques minutes après son administration, un pa- 
quet d'hydatides, du volume de la tête d’un enfant, fut 
expulsé. Dès-lors, l’hémorrhagie cessa pour ne plus repa- 
raître, et la malade recouvra promptement toutes ses forces 
et sa santé. 

Bazzoni (Annali univ. di medicina, omodei) a publié des 
observations sur l'utilité de l’ergot de seigle contre la leu- 
corrhée. Sur huit malades auxquelles il Pa administré, sept 
furent guéries en très-peu de temps. La plupart de ces leu- 
corrhées étaient abondantes et existaient depuis plusieurs 
mois ; l’une d'elle durait depuis plusieurs années. Celle où 
l'on n’obtint que du soulagement était due à une lésion or- 
ganique de l'utérus. 

Le docteur Spajrani {Annuli univers. omoder, Marzo, 
1830) à tenté de combattre les congestions utérines qui sont 
souvent le début des phlegmasies chroniques de la matrice, 
en prescrivant l’ergot. Sur quatre femmes, trois furent gué- 
ries, une n’éprouva aucun soulagement. Depuis, plusieurs 
praticiens, et notamment Lisfranc (malad. de l'utérus, 1836), 
ont employé ce médicament avec succès dans le traitement 
des engorgements utérins. [f fait cesser, ou tout au moins 
diminuer graduellement les tiraillements de reins, presque 
constants dans ces affections. Le praticien que nous ve- 
nons de citer rapporte un cas de grossesse avec douleurs 
névralgiques, prise pour une affection grave du col de la 
matrice, suivie de guérison et d’un accouchement heureux, 
après l'emploi du seigle ergoté à la dose de 15 cent. unis à 
un centigramme d'extrait d’opium pour chaque soir. (owv. 
cil., p. 122.) ? 

Le seigle ergoté a été recommandé dans l’aménorrhée 
par Biegelon, Thacher, Beckmann, Béclard, Giacomini, 
etc; mais Prescot croit que ce médicament est contre-in- 
diqué dans ce genre de maladie. L’aménorrhée et la leu- 
corrhée, comme beaucoup d’autres affections, tiennent à des 
causes si diverses. que l'on peut admettre que le seigle er- 
goté à pu réussir dans certains cas et être nuisibles dans 
d’autres cas en apparence identiques. C’est à la recherche 
des causes efficientes, du siége et de la nature des maladies, 


923 


que le praticien doit s'attacher s'il veut distinguer le symp- 
tôme de l'affection essentielle et arriver à des inductions 
thérapeutiques vraiment rationnelles: «ad primam mali 
causam, ad causæ occasionem et primordia deveniendum 
(Hipp.) » | 

« Dans deux cas de paralysie, M. Barbier, d'Amiens, a 
observé, après l’ingestion de 36 grains, des secousses 
dans les jambes et les cuisses, et une émission d’urine par 
jet involontaire, d’où il a conclu que le seigle ergoté ag:t 
aussi sur le renflement lombaire de la moëlle épinière 
dans les cas d'affection de cet organe.» (Bibl. de thér., 
t. IT, p. 530.) De deux paraplégiques, auxquels M. Barbier 
le fit prendre, il y en eut un de guéri, l’autre resta dans le 
même état: tous les deux éprouvèrent des secousses dans 
les jambes et les cuisses. Ducros (Lancet, août 1835), de 
Marseille, rapporte plusieurs cas de guérison de paralysie 
des membres inférieurs par l'emploi de l’ergot pris en guise 
de café, à la dose 75 cent. à { gram. 50 cent par jour. Nous 
citerons le suivant comme très-remarquable : Un matelot 
fit une chute du haut d’un mât sur le tillac d'un vaisseau ; 
il devint impotent et cul-de-jatte. Pendant quelques temps 
il fut infructueusement traité par Delpech à l'aide des 
moxas et des moyens ordinaires ; l'ergot, entre les mains 
du docteur Ducros aîné, de Marseille, en obtint la guérison. 
M. Payan (Bullet. de thérap. 1841) a également rapporté 
quatre cas de paraplégie traités avec succès par le même 
moyen. M. Boudin (Bouchardat, annal. de thérap., 18#3,) 
a vu l’ergot réussir dans un cas d'abaissement et de para- 
lysie du rectum compliquant une paraplégie, et dans un cas 
d'abaissement et de chute de Ia matrice. M. Ulo a raconté 
à la Société nationale de Médecine de Marseille .(procès- 
verb. de la séance publ. du 3 décemb. 1848 et compte- 
rendu des travaux de cette société pendant l'année méd. 
1847-1848, p. 32), l'histoire d'une demoiselle de quarante- 
sept ans, forte, à tempéramment sanguin très-dévelopé, 
qui, à la suite d’une forte attaque d’apoplexie, fut atteinte 
d’une paralysie complète des membres inférieurs. Le ving- 
tième jour de la maladie, la paralysie persistant, M. Ulo donna 
l'ergot de seigle en pilales, à la dose de 20 centigrammes. 
Après douze jours de traitement, il survint une légère amé- 
lioration ; ce médicament fut porté à 30 cent., et, au bout 
de deux mois et demi, la maladie fut tout-à-fait guérie. 
M. Ulo cite encore l'observation d’une femme qui, depuis 
deux mois, était hémiplégique, et chez laquelle l’ergot de 
seigle, administré de le même manière, produisit, après 
soixante jours de traitement, les résultats les plus favo- 
rables. 


52. 


L’ergot de seigle a la propriété d'augmenter la contrac- 
tilité de la vessie. M. Allier (Jouwrn. des conn. méd. 1838), 
l'a employé avec succès dans des cas où la vessie avait 
perdu sa contractilité, par suite de sa distension exces- 
sive produite par l'accumulation de l'urine. M. Guersant 
fils (Journ. de chim. méd., juin 1839) a signalé aux prati- 
ciens l'application qu'il a faite de ce médicament pour dé- 
terminer l'expulsion des fragments de calculs résultant du 
broiement. C’est surtout chez les vieillards, dont la vessie a 
si peu d'action, que l’ergot est employé avec avantage. 

Festler, Backer, Dalton, ont employé l’ergot dans les 
fièvres intermittentes. Sachero l’a préconisé contre les pertes 
seminales, et Clutterburck contre le rhumatisme. D’autres 
médecins l’ont recommandé dans l'hystérie, les névralgies 
internes, la chlorose, la gonorrhée, la diarrhée, etc. 

Les opinions des médecins sur la propriété abortive du 
seigle ergoté sont contradictoires et laissent penser que les 
cas d’avortement causés par cette substance sont très-rares. 
Plusieurs femmes m'ont avoué en avoir fait usage sans ré- 
sultat. Toutefois, comme une prédisposition particulière de 
l'utérus pourrait en favoriser l'action ,on doit être très-prudent 
dans son emploi lorsqu'on soupçonne un état de grossesse. 

Le mode d'administration de ce médicament varie suivant 
les cas. Dans l’inertie de l’utérus, survenant pendant le 
travail de l’enfantement, on emploie ordinairement la poudre 
à la dose de 1 gram. répétée à des intervalles d’une demi- 
heure; et suspendue dans un peu d’eau sucrée ou rougie, 
d'infusion de menthe, de tilleul, ou mieux dans du vin. 
Je Ia donne à la dose de 4 gram. dans une potion composée 
d'eau distillée de fleurs de tilleul, de menthe poivrée et de 
sirop d’écorce d'orange. Je fais prendre le tiers de cette 
potion ; si, après une demi-heure, l'effet ne se manifeste 
pas, je réitère la même dose, et ainsi de suite pour le reste. 
On peut aussi donner cette potion par cuillerée toutes les 
dix minutes jusqu’à effet prononcé. Prescot donnait l'ergot 
en décoction {2 gram. par 100 gram, d’eau, divisés en trois 
doses , à prendre de vingt minutes en vingt minutes ). Dans 
un cas, ce médecin en prescrivit # gram. en lavement. Je 
l'ai administré sous cette forme dans les cas où le vomisse- 
ment s'opposait à son ingestion par la bouche. 

Lorsque l’ergot est indiqué contre un éiat morbide et 
qu'il doit être continué pendant quelque temps, on doit 
l'administrer à doses fractionnées et rapprochées : on com- 
mence à la dose de 1 gram. 20 cent. divisée en six prises, 
pour arriver ensuite à 2 gram., et revenir graduellement 
a { gram. 20 cent., et diminuer successivement pendant 


925 


huit à dix jours après la guérison, afin de prévenir les 
récidives. On est quelquefois obligé de suspendre momen- 
tanément l’usage de ce médicament , à cause de son action 
stupéfiante, ce qui, néanmoins, arrivé rarement, celte action 
étant ordinairement très-modérée ou presque nulle. 

Le docleur Wright (Journ. de pharm., 1. 27, p.430) a 
employé l'huile d'ergot avec le plus grand succès dans les 
cas où l’on administre le seigle ergoté en poudre ou en 
infusion. La dose est de 20 à 50 gouttes dans un véhicule 
chaud, telle qu’une infusion de thé, ou dans une potion légè- 
rement spiritueuse. « L'effet de cette huile, dit cet auteur, 
est plus rapide et son ingestion moins désagréable que celle 
de l’infusion ou de la substance elle-même. » 

L’ergot, bien que renfermé dans des flacons parfaitement 
bouchés, s’alière, est ronge par des mites et de grosses lar- 
ves, et devient inerte après un an. L'emploi de celui que 
le temps a détérioré est probablement la cause qui à fait 
regarder ce médieament comme inefficace. La poudre ne 
doit être préparée qu’au moment de l’administrer, car elle 
perd promptement ses vertus. M. Debourge, de Rollot 
{Journ. de med. et de chirurg. prat., 1.2, p.271), membre 
de la Société médicale d'Amiens, a proposé de le conserver 
par la méthode d’Appert. Il s’est assuré qu'après deux années 
de conservation par ce moyen, le seigle ergoté possédait 
encore toute sa vertu obstétricale. Mais il est plus sûr 
de le récolter chaque année et de ne le pulvériser qu’au 
moment de s’en servir. ] 

L'ERGOTINE a été employée avec succès à l’intérieur (25 à 
50 cent.), eu à l'extérieur contre les hémorrbagies trauma- 
tiques, par M. Bonjean (Journ. de med. et de chir. prat., 
t. 21, p. 5.) 


SÉNÉ BATARD, * 


BAGUENAUDIER, BAGUENAUDIER ARBORESCENT, SÉNÉ D "EUROPE, 
FAUX SÉNÉ, ARBRE A VESSIE, CULOTIER. 


Colutea arborescens (L) 
Colutea vesicaria (T.) 


Cet arbrisseau croît naturellement dans quelques localités 
des départements méridionaux de la France. On le cultive 
dans les jardins paysagers; les feuilles et les semences sont 
usitées. 

Propriétés. 


Les feuilles de baguenaudier ont une saveur âcre, nau- 


926 


séeuse. Boerhaave, Gesner, Garidel, Tablet, regardent ces 
feuilles comme pouvant remplacer le séné. Coste.et Wilmet 
ont administré ce purgatif, à la dose de 30 à 100 grammes 
en infusion dans un kil. d’eau, à des pauvres de la cam- 
pagne, dont plusieure étaient atteints de fièvres intermit- 
tentes. Ces malades ont eu constamment sept à huit selles 
abondantes, sans aucune fatigue. Bodart dit avoir toujours 
employé avec succès la formule suivante : feuilles de Bague- 
naudier, 30 à 100 gram., racine verte de réglisse effilée, 30 
gram., semence de fenouil sucré d'Italie, deux pincées ; 
faites infuser sur les cendres chaudes pendant une nuit, 
dans 1 kil. d'eau; faites bouillir légèrement le lendemain 
et passez, pour prendre le matin, à la dose de trois verres, 
à deux ou trois heures d'intervalle, pendant deux jours de 
suite. On falsifie, dit-on, le séné d'Alexandrie avec les feuilles 
de Bauguenaudier. Ces feuilles fumées font couler une 


grande quantité de sérosités nasales. Les semences sont 
aussi purgalives. 


SÉNECON, * 


Senecio vulgaris (L.) 
Senecio minor vulgaris (T..) 


Cette plante, que l’on trouve en fleur pendant toute la 
belle saison, croû abondamment dans les jardins et les lieux 
cultivés. Toute la plante est usitée. 


Propriétés. 


Le seneçon, prlvé d’odeur et d’une saveur fade et herba- 
cée, est émollient ; On le considérait autrefois comme apé- 
ritif, et on en conseillait ia décoction dans la jaunisse et 
les maladies du foie. En Angleterre, au rapport de Ray, on 
donnait le suc de séneçon aux chevaux qui étaient tourmen- 
tés par des vers. C’est peut-être d'après cela, dit Loiseleur- 
Desionchamps. que quelques médecins ont recommandé ce 
suc à la dose de deux onces contre les vers intestinaux de 
l'homme. Le docteur Finazzi (formul. ecclect. de Détilly, 
1849, p. 99) prétend que le suc de séneçon récent, à la dose 
d’une cuillerée à bouche, deux ou trois fois par jour, fait 
cesser avec la rapidité de l'éclair, les convulsions les plus 
violentes, surtout celles dont la cause est inconnue! et cela 
sans tenir compte de la diversité de l'affection et par con- 
soquent do celle des indications curatives. C’est de l'empi- 
risme tout pur. Boerhaave employait le mélange d'oxicratet 
de suc de séneçon en gargarisme dans les maux de gorge 


927 


inflammatoires. On a conseillé cette plante cuite dans l’eau 
et converti en cataplasme contre l'engorgement laiteux des 
mamelles et les hémorrhoïdes douloureuses, les phlegmons, 
etc. Enfin, Ja décoction de séneçon peut, comme émolliente, 
être employée en lavement. 


SERPOLET, 


THYM SAUVAGE. 


Serpillum vulgare (T..) 
Thymus serpillum (L.) 


Le serpolet, parmi les plantes aromatiques, est une des 
plus communes ; il croît partout, sur les pelouses sèches, les 
collines, le long des chemins, dans les terrains arides, etc. 
L'herbe fleurie est usitée. 


Propriétés. 


Cette plante, d’une saveur amère et d’une odeur agréable, 
est aromatique, excitante, tonique, carminative, eic. On 
l'emploie dans la dyspepsie, les flatuosités, l’aménorrhée 
par atonie. Je l'ai vu employer avec avantage en infusion 
aqueuse miellée dans l’asthme humide, les catarrhes chro- 
niques, la coqueluche, comme l’hyssope, le lierre terrestre 
etautres plantes du même genre. Capuron (Man. des Dames 
de Charité, p. 39) conseille cette infusion contre la coque- 
luche. 

J'ai souvent mis en usage le serpolet comme plante aro- 
matique, qu'il est facile de se procurer. J'ai vu des gastral- 
gies se dissiper par la seule infusion de cette plante prise 
en guise de thé. Elle convient dans tous les cas où il y a 
relachement, débilité, nécessité de solliciter l’action de la 
peau, d'augmenter les sécrétions ; c’est un remède popu- 
laire contre les fleurs blanches. On donne le serpolet en in- 
fusion (12 à 15 gram. par kil. d’eau), eten poudre (2 à 4 
gram.), suspendue dans du vin ou mêlé au miel. 

[Linné attribue au serpolet donné en infusion la propriété 
de dissiper l'ivresse et la céphalalgie qu’elle cause. Campe- 
gius compare cette plante au muse et recommande son suc 
contre l’hémoptysie, et sa décoction pour tuer les vers et 
exciter les règles. Son huile essentielle est excitante, anti- 
spasmodique, emménagogue (6 à 10 gouttes). Les bains pré- 
parés avec cette plante, comme avec toutes les plantes aro- 
matiques, sont utiles dans la faiblesse générale, les rhuma- 
tismes chroniques, les scrophules, le rachitis, la paraly- 


928 


sie, etc. Sa décoction est employée en lotion contre la gale, 
et réussit comme celle de menthe, de sariette, et en fomen- 
{ation sur l’œdême, les infiltrations séreuses, les ecchy- 
moses. 

Le docweur Martineng, de la Seyne, vit, étant médecin à 
l'armée d'Italie, en 1795, l’aumônier d’un hôpital arrêter une 
hémorrhagie nasale qui avait résisté aux moyens ordinaires 
chez une jeune malade de quinze ans, en introduisant dans 
le nez la poudre de serpolet. Ce remède, secret de famalle, 
disait le bon ecclésiastique qui n’en faisait pas un mystère, 
s'était montré tout aussi efficace, pris à l'intérieur, contre 
les hémorrhagies utérines. (Gazet. de santé, 1° déc. 1808). 


SOLDANELLE, 


CHOU MARIN, LISERON SOLDANELLE. 


Convolvulus soldanella (L) 
Convolvulus maritimus nostras rotan difolius (T.) 


Cette plante croît sur les bords de la mer, dans les sa- 
bles. On emploie les feuilles, les racines et la résine qu’on 
enrelire. 

Préparations et doses. 


LE 


A L'INTÉRIEUR : décoction des feuilles sèches, de 10 à 45 gram. par 
500 gram. d'eau. : 
Feuilles en poudre, de 4 à 4 gram. en bols, pilules, etc. 
Racine en poudre, de 2 à 4 gram. en bols, pilules, suspension 
liquide, etc. 
Résine, de 4 à 2 gram., dissoute dans l'alcool. 


| Propriétés, 


La soldanelle était employée autrefois comme purgatif 
drastique contre les hydropisies passives, les engorgements 
atoniques des viscères abdominaux, la constipation par 
inertie des intestins, etc. 

[Mathiole employait la décoction de cette plante avec la 
rhubarbe, comme un remède excellent contre lhydropisie. 
Forestus (observ. mèd., p. 162) et Gabriel Fallope la consi- 
déraient aussi comme un bon hydragogue.] 

Les feuilles en décoction ont un effet infidèle. On doit 
employer la poudre des feuilles où des racines, ou mieux, 
la résine, qui est un purgatif insipide et qui, dans tous les 
cas, peut remplacer le jalap, la scamonée. Les habitants des 
bords de la mer se purgent avec le suc de cette plante, qu’ils 
prennentà Ja dose d’une cuillerée à café à une cuillerée à 


529 


bouche, suivant l’âge, dans un bouillon ou dans une iasse 
d’eau miellée. Buchoz (Dict. univ. des plant., t. 3, p. 301) 
dit qu’en Provence on se purgeavec un bouillon fait avec 
un collet de mouton et une poignée et demie de feuilles de 
soldanelle. | 

Cette plante ne mérite pas l’oubli dans lequel elle est 
tombée. Loiseleur-Deslonchamps a mis hors de doute sa 
propriété purgative. Sur quatre malades auxquels il donna 
les feuilles sèches en décoction , deux ont êté très-bien pur- 
gés ;. les deux autres n’ont épouvé aucun effet. La racine en 
poudre (50 à 60 cent.) ayant été ensuite administrée par le 
même praticien à vingt-quatre malades , ils eurent depuis 
une jusqu'à douze évacuations alvines. Treize malades ont 
pris la teinture (2% à 30 gram.) et dix la résine de solda- 
nelle (75 cent. à 4 gram. 20 cent.) ; tous ont éprouvé des 
effets semblables à ceux des meilleurs purgatifs. (Manuel 
des plantes indig., 2° part., p.39.) 


SOUCI, 


SOUCI OFFICINAL, SOUCI DES JARDINS. 


Caltha vulgaris (T.) 
Calendula officinalis (L.) 


Le souci commun croît spontanément dans nos départe- 
ments méridionaux; on le cultive dans les jardins. On 
emploie toute la plante. 


Préparations et doses, 


A L'INTÉRIEUR : décoction ou infusion, de 30 à 60 gram. par kil. 
d'eau. 
Suc exprimé, de 400 à 260 gram. 
Extrait (par infusion 4 sur 4 d'eau), de 4 à 5 gram., en potion, 
pilules, etc. | 
A L'EXTÉRIEUR: en décoction pour fomentations , lotions, injec- 
tions, feuilles en cataplasme. 


Propriétés. 


Le souci est stimulant, antispasmodique, résolutif, etc. ; 
on l’a employé dans l’aménorrhée athénique, lhystérie, 
l’ictère, etc. Les gens de la campagne accordent à celte 
plante mille propriétés plus merveilleuses les unes que les 
autres. Ils lemploient principalement dans la chlorose, la 
jaunisse et les scrophules. J'ai vu mettre en Hd contre 


530 


les affections scrofuleuses, la décoction de houblon et de 
feuilles fraîches de souci. On joignait à cette décoction le 
suc de souci mêlé avec autant de vin blanc ; le malade pre- 
nait de ce mélange chaque matin, à la dose de 120 à 180 
grammes, deux heures avant le déjeûner. 

On emploie vulgairement la décoction concentrée d'ar- 
moise et de souci en fumigation dans le vagin, pour rappeler 
les règles. | 

Murhsbeck {[Bribl. méed., t. 28, p. 233) a rapporté deux 
cas de vomissements chroniques traités avec succès par 
l'extrait de souci administré à la dose de 20 centigrammes 
cinq fois par jour. Le docteur Carter (Gaz. méd., janv. 1831) 
a également réussi à arrêter par le même moyen des vomis- 
sements opiniâtres. | 

J'ai employé avec avantage le souci pilé sur les tumeurs 
scrofuleuses ulcérées ; il m'a été utile sur des ulcères sor- 
dides et calleux ; les callosités sont manifestement ramollies 
par son action, Je l’ai aussi mis en usage, d’après une pra- 
tique populaire, dans les ophtalmies chroniques; il y pro- 
duit un bon effet quand il n’est pas contre-indiqué par une 
irritation trop vive de la conjonctive; il m'a surtout réussi 
dans les cas de palpébrite chronique et d’ulcération scro- 
fuleuse des paupières. 

[Suivant Hecquet, les feuilles fraîches de cette plante, 
écrasées sur les verrues, font disparaître ces excroissances, 
Ses fleurs, macérées dans le vinaigre, ont pour cela une ac- 
tion plus energique. 

La dessiccation, faisant perdre toutes les vertus du souci, 
on ne doit l’employer qu’à l’état frais.] 


STAPHISAIGRE, * 


DAUPHINELLE STAPHIS4IGRE, HERBE AUX POUX, MORT 
AUX POUX. 


Delphinium platanifotio staphysagria dictum (T.) 
Delphinium staphysagria (L.) 


Cette plante croit naturellement dans les lieux sablonneux 
et maritimes du midi de la France. On la trouve dans les 
environs de Montpellier. La semence est usitée. 


Propriétés. 
La semence de staphisaigre, d’une saveur amère, âcre et 


531 


brülante, produit un sentiment de cuisson dans la bouche 
suivi d’une abondante sécrétion de salive. Elle a été con- 
seillée, à l’intérieur, comme vomi-purgatif et anthelmin- 
tique à la dose de 60 cent. à 1 gram. 20 cent.; à plus forte 
dose, elle peut produire une inflammation assez violente 
pour occasionner la mort. On ne doit l’employer qu'avec une 
extrême circonspection. Son usage le plus ordinaire est 
à l'extérieur contre la maladie pédiculaire, la gale, et pour 
composer quelques emplâtres vésicatoires. Pour détruire 
les poux de la tête, on saupoudre celte dernière avec la 
poudre, ou bien on se sert en onction d’une pommade com- 
posée de 8 gram. de poudre de staphisaigre et de 24 gram. 
de cérat. Ranque (Journ. de Corvisart, t. 20, p. 503) dit 
avoir employé avec le plus grand succès, sur six cents ga- 
leux, des lotions pratiquées avec la décoction de 32 gram. 
de poudre de staphisaigre dans un litre et demi d’eau, à la- 
quelle on ajoute un gramme 20 cent. d'opium. J’ai em- 
ployé cette même décoction avec avantage dans le phthiriasis 
ou maladie pédiculaire. 

La 1einture de staphisaigre a été prescrite en frictions 
sur le front dans quelques cas d’amaurose et d’iritis, à la 
dose de 4 à 6 gram. 


DELPHINE. 


La DELpniNE, principe actif des sémences de la staphi- 
saigre, substance alcaline blanche, inodore , d’une saveur 
d’abord amère, puis âcre, est un poison violent ; pris à la 
dose de 60 cent., il détermine les mêmes symptômes et les 
mêmes altérations de tissus que ceux qui sont produits par 
les graines de staphisaigre. Cependant on l’a administrée à la 
dose de 2 mill. à 7 cent. en pilules, el, en teinture, à celle 
de 50 cent. à un gramme 50 cent. dans une potion, dans 
certaines névroses, dans les névralgies, la paralysie, le rhu- 
matisme, la goutte, les tumeurs glandulaires, l’anasarque, 
et principalement contre l’amaurose récente, l'iritis, l’epacité 
de la cornée, la cataracte capsulaire, l’otite, l’otorrhée, la 
paracousic, la surdité, l’otalgie, l’odontalgie. A l’extérieur, 
on emploie la teinture et l'huile de delphine en frictions ; 
on en fait aussi une pommade (20 cent. par 30 gram. 
d’axonge) qu’on emploie en onction (1). 


(1) La delphine, découverte en 1819 par MM. Lassaigne ct Feneulle 
s'obtient en faisant bouillir la décoction des semences de staphisaigre 
avec la magnésie, filtrant, lavant le résidu ct le faisant bouillir dans l’al- 
cool bouillant, filtrant et faisant évaporer. 


932 


SUMAC, 


SUMAC DES CORROYEURS, ROUX OU ROURE DES CORROYEURS, 
VINAIGRIER. 


Rhus folio ulmi (T.) 
Rhus coriara (L.) 


Cet arbrisseau croit aux lieux secs et pierreux et sur les 
collines du midi de la France; on la cultive dans les jardins 
paysagers. 

Propriétés. 

Le sumac est un tonique astringent. La décoction de ses 
feuilles ou de ses fruits estemployée dans les diarrhées chro- 
niques, les hémorrhagies passives, le scorbut. L’extrait 
aqueux des fruits, à la dose de 8 à 15 gram., est plus actif. 

A l'extérieur, la décoction des feuilles ou des fruits est 
employée en gargarisme dans l’angine tonsillaire, le gonfle- 
ment et l’ulcération scorbutiques des gencives, la vacillation 
des dents, la stomatite, etc. Cette plante est moins en usage 
dans le Nord que dans le Midi de la France où elle croît na- 
turellement. 


SUMAC VÉNÉNEUX ,° 


RHUS TOXICODENDRON. 


Toxicodendron iriphillon (T.) 
Rhus toxicodendron (L.) 


Cet arbrisseau de l'Amérique du Nord est cultivé en 
France dans les jardins, où il se multiplie avec la plus 


grande facilité. 
Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : infusion, À à 2 gram. par 150 d'eau bouillante. 

Extrait, de 50 cent. à À gram., 5 ou à fois par jour, et progres- 
sivement à 4 et 8 gram. chaque fois. 

Sirop (2 de teinture sur 7 d'eau et 25 de sucre), de 45 à 50 gram. 
en potion. 

Teinture, 4 à 10 gouttes dans 60 gram. d'eau distillée, à prendre 
par cuillerées à thé plusieurs “ois par jour, progressivement 
jusqu’à 50 gouttes. 

Poudre, 6 décigram. par jour en plusieurs prises rende 


Propriétés, 
Il existe autour de cette plante une atmosphère for- 


533 


mée par les effluves qui s’en dégagent; elle s'étend dans un 
rayon de cinq à six mètres et est très-malfaisante : elle 
produit, sans contact de l’arbre, du purit, des éruptions à la 
peau, els. | 

Les observations de Fontana, Gouan, Amoureux, Van- 
Mous, et les expériences de M. Orfila, tendent à prouver : 
1° que la partie la plus active du rhus toxicodendron est celle 
qui se dégage à l’état de gaz lorsqu'il ne reçoit pas les 
rayons directs du soleil ; 2° qu’elle agit comme les poisons 
âcres ; 3° que l’extrait aqueux de cette plante, administré 
a l'intérieur ou appliqué sur le tissu cellulaire, détermine 
une irritation locale suivie d’une inflammation plus ou 
moins intense, et qu’il exerce une action stupéfiante sur le 
système nerveux après avoir été absorbé ; 4° qu’il paraît agir 
de la même manière quand il a été injecté dans la veine ju- 
gulaire. 

Dufresnoy, professeur de botanique à Valenciennes, pu- 
blia en 1788 des guérisons de dartres rebelles et de paraly- 
sies, soit récentes soit anciennes, par l'usage de cette plante. 
Depuis cette époque, Van Baerlen, Rumpel, à Bruxelles; 
Pontingon et Gouan, à Montpellier; Alderson, Kellie et 
Duncan, en Angleterre, ont employé ce végétal avec sucès, 
surtout dans le traitement de la paralysie des membres infé- 
rieurs. Il est à remarquer que c’est particulièrement dans 
les cas où cette maladie est due à la débilité générale, au 
rhumatisme ou à la goutte, et non lorsqu'elle est le résultat 
d’une lésion cérébrale apoplectique. Horsfield la donné 
contre le tabès, l'hypocondrie, et Gibson dit en avoir retiré 
de très-bons effets dans la phthisie pulmonaire. On assure 
aussi avoir quelquefois guéri l’ambliopie et l’'amaurose par 
l'usage de cette plante. Lichtenfels dit avoir combattu, avec 
le suc de sumac vénéneux,des ophtalmies herpétiques et scro- 
phuleuses qui avaient resisté à une foule d’autres remèdes. 
Ammon et Grunner prescrivent , dans les mêmes affec- 
tions, la teinture à la dose de dix gouttes dans 60 grammes 
d’eau distillée, à prendre par cuillerées à thé, plusieurs fois 
dans la journée. M. Elsholz (Encyclographie des Scienc. 
med.) a employé, chez un enfant âgé de quatre ans, atteint 
d'une ophtalmie scrophuleuse rebelle, la teinture de rhus 
toxicodendron, qu'il fit prendre à la dose de quatre gouttes 
dans deux onces d’eau (une cuillerée à dessert trois fois par 
jour.) Il augmenta insensiblement la dose jusqu’à 8. 16 et 
32 gouttes sur la même quantité d’eau. Le succès fut sur- 
prenant. Duer a préconisé cette teinture contre le diabète 
et l’incontinance d'urine. L’extrait est la forme la plus or- 
dinairement usitée. Des médecins le croient vénéneux, tan- 


534 


dis que d'autres lui refusent toutes propriétés, ce qui tient 
sans doute au mode de préparation. Souvent la manière de 
confectionner les extraits leur fait perdre leurs qualités, sur- 
tout si elles résident dans un principe volatil. M. Baude- 
locques (Journ. de méd. et de chir. prat., t. 8, p. 28) a 
employé sans succès, contre l’ophtalmie scrophuleuse, la 
teinture de sumac vénéneux, d’après l'indication de la 
pharmacopée de Saxe (suc récemment exprimé et alcool, 
parties égales, filtrés. après plusieurs jours  d’infusion.) 
« Peut-être, dit avec raison le rédacteur du journal que nous 
venons de citer, ne faudrait-il pas se hâter de conclure de 
ces expériences que la teinture de sumac vénéneux est sans 
action dans l’ophtalmie scrophuleuse. On s'était servi en 
effet, pour la préparation de cette teinture, de feuilles de 
sumac recueillies en automne. Il est probable que le suc 
qu’elles contenaient à cette époque jouissait d'une vertu 
beaucoup moins grande qu’au printemps, où les plantes 
poussent avec vigueur. Si quelques-uns de nos lecteurs vou- 
laient répéter ces expériences, nous croyons qu'ils auraient 
quelque chance de succès en recueillant les feuilles au com- 
mencement de l'été. » 

M. Fouquier (Bullet. dela Faculté, t. 5, p. 439), qui a 
administré d'énormes doses de cet extrait, dit ne lui avoir 
jamais vu produire aucun résultat en bien ni en mal, et qu’il 
n’a pas agi d’une manière appréciable sur l’estomac. Selon 
MM. Trousseau et Pidoux (Trait. de thérap. et de mat. méd. 
t. 1, p. 526), il ne résulte de son administralion aucun in- 
convénient ; les fontions digestives ne sont pas troublées, 
et elles acquièrent au contraire plus d’activité. Ils ajoutent 
qu’il ne se manifeste aucun phénomène nerveux, si ce n’est 
quelquefois un spasme de la vessie, en vertu duquel les ma- 
Jades éprouvent un besoin fréquent d’uriner, une sorte de 
tenesme vésical ; mais cet inconvénient cède promptement à 
l'emploi de quelques lavements émollients et de quelques 
bains généraux. Toutefois, il ne faut jamais, sans précau- 
tion, ainsi que le fait judicieusement remarquer M. Gia- 
comini (ouv. cit.), se permettre de prescrire une forte dose 
d'extrait tiré d’une plante vénéneuse, malgré l'ineficacité. 
des doses ordinaires indiquées dans les bons traités. de 
thérapeutique. On donne d’abord l'extrait de rhus 1oxi- 
eodendron à la dose de 50 cent. à { gramme trois à quatre 
fois par jour; on augmente progressivement et de manière 
à arriver, en six semaines ou deux mois, à 4 ou 8 grammes 
chaque fois. Les malades prennent alors 12 à 30 grammes 
d'extrait en vingt-quatre heures. | | 


__— 


539 


SUREAU. 
SUREAU NOIR, SÉU. 


Sambucus fructu in umbella nigro (T.} 
Sambucus nigra (L.) 


Le sureau croît partout, dans les haies, les terrains gras 
et frais, etc. L’écorce intérieure, le liber de la racine, les 
feuilles et les fleurs sont usitées. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : Comme purgalif , décoct. de 20 à 50 gramm. de 
liber , de baies ou de feuilles, par 500 gram. d’eau. 
Suc de la racine, de 50 à 100 gram. 
Infusion théiforme des fleurs sèches, comme sudorifique, de 2 à 
40 gram. par kil. d’eau. 
Eau distillée des fleurs, de 50 à 400 gram. en potion. 
Extrait ou rob, de 10 à 60 gram. 
Vin (100 gram. d’écorce intérieure pour 4 kilog. de vin blanc), 
60 à 100 gram. et plus. 
A L'EXTÉRIEUR: Fleurs en infusion pour fomentations, lotions, etc., 
ou en sachets; décoction de l'écorce ou des feuilles comme ré- 
solutive. 


Propriétés. 


Toutes les parties du sureau exhalent une odeur forte. 
Celle des feuilles, lorsqu'on les froisse, est très-désagréable. 
Les émanations de cet arbre, lorsqu'il est en fleur, suffisent 
quelquefois pour incommoder ceux qui y restent longtemps 
exposés. : 

Tout ce que nous avons dit sur l’hièble peut s'appliquer 
au sureau. 

La seconde écorce de sureau, dont la saveur est douceâtre- 
amère, âcre et nauséeuse , est la partie de toute la plante 
qui à le plus d'énergie, à l'état frais. Son aetion sur les 
voies digestives se manifeste quelquefois par des vomisse- 
ments, ordinairement par des selles abondantes. On a vu 
la violence de cette action, après l’ingestion d’une forte dose, 
produire des accidents, et surtout un état de débilité et de 
somnolence qu’on à attribué à la vertu prétendue narcotique 
de cette plante, et qui n’est sans doute que l'effet secondaire 
de la concentration de la vitalité sur le tube gastro-intes- 
tinal. 

La vertu purgative de cette écorce est vulgairement con- 
nue depuis longtemps. Tragus l’'employait en décoction dans 
le vin; Dodoens et Petrus Forestus parlent des propriétés 


536 


hydragogues de son suc; Boërhaave l'administrait à la dose 
de #4 à 15 grammes dans les hydropisies , et Gaubius le pré- 
conise contre ces maladies. Sydenham, qui faisait beaucoup 
de cas de ce purgatif, prescrivait la décoction suivante dans 
les hydropisies : écorce intérieure de sureau, trois poignées ; 
faites-les bouillir dans un litre d’eau commune et autant de 
lait, que vous réduirez à une livre ; coulez ensuite la liqueur, 
dont le malade prendra la moitié le matin et l’autre le soir, 
etil continuera ainsi tousles jours jusqu’à sa guérison. Syden- 
ham avertit que ceremède ne guérit l’hydropisie qu’en pur- 
geant par haut et par bas,et non pointparune vertuspécifique. 

M. Martin-Solon (Bullet. de thérap.) donne le sucexpri- 
mé de l’écorce de la racine à la dose de 15 à 60 grammes 
chaque jour jusqu’à l’évacuation entière des eaux de l’ab- 
domen. Ce médicament procure des selles liquides, faciles, 
et dont l'effet est terminé, dit-il, au bout de huit à dix heu- 
res sans vomissement ni fatigue. Il a vu des cas non-équi- 
voques d’ascite guéris par ce moyen, quil préfère aux 
autres hydragogues. Toutefois, il ne peut convenir que 
lorsqu'il n’existe aucune irritation phlegmasique des viscè- 
res abdominaux. 

Les donneurs de recettes dans nos villages conseillent, 
contre l'hydropisie, 1 à 3 onces (30 à 90 gram.) de suc de 
l'écorce imérieure du sureau sur lequel ils font traire une 
pareille quantité de lait de vache, en approchant l’animal 
le plus près possible du lit du malade, afin qu'il puisse ava- 
ler ce mélange immédiatement et encore chaud. On met 
deux jours d'intervalle entre chaque dose, qui, en effet, me 
paraît assez élevée pour exiger ce ménagement. J'adminis- 
tre ordinairement 32 grammes d’écorce fraîche de sureau 
en décoction dans un demi-litre d’eau à laquelle j'ajoute 
autant de lait; le malade prend cette dose le matin en trois 
ou quatre fois. Je prépare aussi un vin de sureau, en faisant 
infuser pendant vingt-quatre heures 120 grammes de son 
écorce intérieure dans 1 kilogramme de vin blanc. La dose 
est de 60 grammes le premier jour ; on augmente graduel- 
lement jusqu’à un demi-litre, en consultant toutefois l'état 
de l'estomac. J'ai vu employer aussi avec avantage le suc 
de cette écorce mêlé avec le vin blanc. 

L'écorce intérieure du sureau perd la plus grande partie 
de ses propriétés par la dessiccation. 

Les feuilles et les fleurs de sureau sont laxatives, purgati- 
ves et diurétiques quand elles sont fraîches, diaphorétiques : 
quand elles sont sèches. Les baies sont réellement purga- 
tives ; Hippocrate les employait, comme drastiques, dans 
l'hydropisie. Les campagnards les prennent en teinture dans 


231 


du genièvre (60 à 100 gram. fraîches par litre), à la dose de 45 
à 30 gram., trois fois par jour, comme diurétiques et purga- 
tives,contre la même maladie. Les médecins emploient le rob 
qu’on en prépare comme sudorifique,dansle rhumatisme,dans 
les rétrocessions exanthémateuses, la syphilis constitution- 
nelle. Les semences sont regardées comme laxatives. Elles 
fournissent une huile,qui, suivant Ettmuller, est un éméto-ca- 
thartique excellent, à la dose de quelques gouttes à un gros. 

Hippocrate faisait usage des feuilles de sureau fraîches 
dans l’hydropisie. Wauters (Repert. remed. 1ndiq. p. 294) 
dit que les paysans flamands emploient souvent, pour se 
purger, une décoction préparée avec le lait de beurre et les 
feuilles tendres de sureau. Selon Burtin {mem. cour., p. 
167), on les mange en salade dans les campagnes des en- 
virons de Bruxelles, pour obtenir le même effet. Radeliff, 
au rapport de Haller, se servait souvent de la décoction des. 
jeunes tiges de sureau, pour combautre l’hydropisie (32 gram. 
par kilog. d’eau,avec addition d’un peu de semencede carotte.) 

Les feuilles fraîches et les jeunes pousses de sureau, 
frites dans du beurre frais ou broyées avec du miel, sont 
vulgairement employées comme laxatives dans la constipa- 
tion ; c'est un excellent moyen, il m’a réussi chez les vieil- 
lards atteints de constipation par inertie des intestins. Ces. 
mêmes sommités de sureau, infusées dans du petit-lait bouil- 
lant, agissent comme diurétiques, et conviennent dans les hy- 
dropisies,certains ictères,les engorgements atoniques des vis- 
cères abdominaux , la néphrite chronique, la gravelle, etc. 

J'ai vu employer avec succès, contre les diarrhées et les 
dyssenteries chroniques, les feuilles de sureau récoltées au 
commencement de la floraison , séchées à l'ombre, pulvéri- 
sées, et infusées à la dose de 1 à 2 grammes, pendant 12 
à 15 heures dans 120 grammes de vin blanc, que l’on ad- 
ministrait chaque matin jusqu'à guérison. Ce remède , que 
je tiens d’une dame charitable, m'a réussi dans trois cas 
de diarrhée chronique, dont l’un durait depuis six mois et 
avait résisté à l'emploi de tous Iles moyens rationnellement 
indiqués. La poudre de feuilles de sureau donnée à petite 
dose auraiït-elle sur la muqueuse gastro-intestinale une ac- 
tion analogue à celle de l’ipécacuanha ? 

Les feuilles fraîches passent pour avoir la propriété de 
calmer les douleurs des hémorrhoïdes sur lesquelles on les 
applique. J'ai vu des paysans les employer en suppositoire 
broyées avec l'huile d'olive ou d’œillette, et en éprouver du 
soulagement. Rudolphi cite un exemple de leur succès dans 
un cas semblable. Je les ai employées une fois en pareil cas, 
sans en retirer un avantage appréciable : la décoction de 


938 


jusquiame dans le lait m'a mieux réussi. M. le docteur Val- 
lez a publié, dans le Journal de medecine de Bruxelles, une 
note sur la composition d'un onguent destiné à arrêter le 
flux de sang trop abondant fourni par les veines hémorrhoï- 
dales. Ayant eu plusieurs fois, dit-il, occasion de mettre en 
usage l’onguent résultant de la combinaison ci-dessous dé- 
crite, chez des personnes atteintes d‘hémorrhoïdes fluentes, 
nous avons toujours observé que son application avait les 
résultats les plus heureux. Voici la formule : Extrait de 
feuilles de sureau , 4 grammes, alun calciné, 2 grammes; 
onguent populeum, 16 grammes ; mêlez. On doit en oindre 
l'anus quatre fois par jour, à trois heures d’intervalle, avec 
gros comme une noisette chaque fois. S'il y a de la consti- 
pation, il est prudent d'ordonner un léger purgatif préala- 
blement. Par ce moyen, la spongiosité du tissu muqueux, 
le grand nombre de vaisseaux sanquins qui sillonnent en 
tous sens la face interne du rectum, se densifient, se res- 
serrent, et les ouvertures qui livraient passage à la perte de 
sang se cicatrisent si immédiatement qu’elles résistent dans 
la suite aux efforts de la défécation. 

« L’extrait de feuilles de sureau et l’alun, dit M. Vallez, 
ne sont pas des moyens nouveaux dans le cas dont il s’agit, 
car ils ont été indiqués il y a plus de deux siècles, mais ils 
n’ont été employés que séparément et sous forme de lave- 
ment ; c'est ce qui nous a engagé à les combiner pour les 
utiliser à l'extérieur ; malheureusement aujourd’hui, dans 
la pratique, ces remèdes ont été complètement oubliés. » 

Lorsqu'il est question de tumeurs hémorrhoïdales , c’est- 
à-dire d’hémorrhoïdes sèches, on se trouve très-bien, sui- 
vant M. Vallez, d’un topique composé de feuilles de sureau 
et de persil à demi cuit en application immédiate : et lors- 
que ces tumeurs passeront à l'état d’hémorrhoïdes fluentes, 
on aura recours au moyen précité. 

Le praticien prudent appréciera les cas où l’on peut, 
sans danger, employer les moyens proposés par M. Vallez ; 
il n’oubliera pas que les hémorroïdes sont au nombre des 
maladies qu'il est souvent dangereux de guérir. 

Ainsi que nous l'avons dit plus haut, les fleurs fraîches 
de sureau ont, jusqu’à un certain point, la vertu purgative 
et émétique de l'écorce et des feuilles. Sèches, elles sont 
diaphorétiques, et leur action sur les exhalants cutanés est 
indépendante de la température de l’eau qui leur sert de 
véhicule, bien que prise chaude elle en favorise l’effet. 
J'en fais un grand usage dans le rhumatisme, les affections 
catarrhales, et lorsque, dans la variole et la rougeole, l’é- 
ruption languit par atonie, ainsi que dans les cas de rétro- 


539 


cession subite de ces exanthèmes. Une forte infusion de 
sureau et un pédiluve chaud, ont rappelé, chez un enfant 
de dix ans, l’éruption d’une rougeole dont la rétrocession, 
causée par l’eau froide en boisson, avait donné lieu à une 
oppression alarmante. J’ai vu des campagnards faire avorter 
la bronchite, l'angine, la pleurésie et même Ja pneumonie, 
par une transpiration provoquée au moyen d’une forte in- 
fusion de fleurs de sureau prise abondamment. Lorsque, 
dans la dernière période des phlegmasies muqueuses, le 
pouls devient mou, la peau souple, la diaphorèse, favorisée 
par l’infusion de fleurs de sureau, est très-avantageuse. 

Lorsque j'étais attaché, en 1806, comme chirurgien 
sous-aide à l'hôpital militaire n° 3 de Boulogne, je suivais 
le service des fiévreux, partagé entre les docteurs Liénard et 
Demont. Le premier, médecin de l’ancienne faculté, traitait 
les fièvres qu’il qualifiait de putrides, de putrides-malignes 
et ataxiques, par quelques laxatifs au début, et l’infusion de 
fleurs de sureau nitrée et acidulée prise en abondance pen- 
dant tout le cours de la maladie. Le second, médecin de 
l'école de Pinel, donnait, dans la première période de ces fiè- 
vres, qu'il désignait sous les dénominations d’adynamiques, 
d'ataxo-adynamiques, le vomitif et les laxatifs acidulés et 
stibiés ; dans la période caractérisant l'adynamie et Fataxie, 
l’eau vineuse, la décoction de quinquina, la potion antisep- 
tique de la pharmacopée des hôpitaux (décoction de quin- 
quina, 128 grammes ; teinture alcoolique de canelle, 8 gram- 
mes ; acétate d’'ammoniaque, 8 grammes ; sirop d’œillet, 32 
grammes), et les vésicatoires successivement appliqués et 
entretenus à la nuque, aux jambes et aux cuisses. La mor- 
talité n’était pas plus grande d’un côté que de l’autre, et les. 
deux médecins attribuaient leurs succès à la médication, sans. 
se douter le moins du monde des efforts de cette bonne na- 
ture, qui guérit souvent quand même... 

Je fais un fréquent emploi de l’infusion de fleurs de su- 
reau sèches dans l’érysipèle, que je couvre de compresses 
imbibées de cette infusion tiède. Quoi qu'en disent les par- 
tisants des onctions d’onguent mercuriel, de saindoux, des 
vésicatoires, etc, je me trouve fort bien de ces fomentations ; 
en calmant les douleurs et l'ardeur qui caractérisent cette 
affection, elles en favorisent graduellement la résolution. 
On sait, d’ailleurs, que l'érysipèle est presque toujours sous: 
Ja dépendance d’un état inflammatoire ou bilieux qu’il faut 
avant tout combattre par les antiphlogistiques ou les éva- 
cuations. Je dois faire remarquer que l’infusion de fleurs: 
de sureau fraîches est trop active appliquée sur l’érysipèle ; 
elle peut augmenter l'inflammation au lieu de la diminuer ; 


540 


mais elle convient beaucoup mieux contre les engorgements 
œdémateux, les tumeurs froides, ete. En y ajoutant un peu 
d'acétate de plomb liquide, on en fait un excellent résolutif. 
J'emploie alors indifféremment les feuilles ou les tleurs ré- 
cemment cueillies. 

Les auteurs sont peu d'accord sur les doses auxquelles les 
différentes parties du sureau doivent être administrées à 
l'intérieur. Cette divergence vient de l’activité plus ou moins 
marquée de ce végétal, suivant l'époque de l’année où on l’a 
récolté, sa préparation avec plus ou moins d’eau ou de quel- 
que autre liquide, son emploi à l’état de dessiccation ou frai- 
chement recueilli. Les fleurs doivent être récoltées vers la 
fin de juin, lorsqu'elles sont bien épanouies ; il faut les sé- 
cher promptement et à l'abri de l'humidité,afin qu’elles soient 
d'un beau blanc avec une légère teinte jaune. Elles contrac- 
tent une couleur brune qui en diminue la qualité quand elles 
sont exposées à l'humidité ou séchées trop lentement. 


TABAC,* 


NICOTIANE, PETUN, JUSQUIAME DU PÉROU, HERBE DE LA REINE, 
HERBE DE L'AMBASSADEUR, HERBE SAINTE, HERBE DU 
GRAND-PRIEUR, HERBE SACRÉE, HERBE DB SAINTE 
CROIX, PANACÉE ANTARCTIQUE, TARNABONNE. 


Nicotiana major latifolia (T .) 
Nicotiana tabaeum (L.) 


Cette plante, originaire de l'Amérique méridionale, est 
abondamment cultivée dans toute l'Europe. Jean Nicot, 
ambassadeur de François Il, en Portugal, envoya, dit-on, 
les premières graines de tabac à Catherine de Médicis, en 
1560, et lui en fit connaître les propriétés (1). Les feuilles 
sont usitées. | 

Préporations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : infusion, 75 cent. à 2 gram. par 300 gram. d'eau 
bouillante, comme éméto-cathariique (rarement employé.) 

Vin (4 de feuilles sur 42 de vis), de 25 cent. à 2 gram. 

Sirop (8 de sucre sur 6 d’hydromel, 4 d'oxymel et 12 de sucre, 

ou 4 de tabac sur 12 d'eau ; 2 de réglissse, 24 d’eau et 16 de 
miel), de 40 à 30 gram., comme purgatif et vermifuge. 


) Grâce à un usage devenu un plaisir d'habitude, un besoin factice, 
et aux gouvernements, toujours habiles à profiter de ce qui peut aug- 
menter leurs ressources, nous sommes volontairement tributaires d'une 
herbe âcre, puante et sale, r 


941 


Extrait, de 5 à 20 cent., comme altérant, de 40 à 50 cent.comme 
émétique. 

Teinture de Fowler (52 gram. de feuilles pour 500 gram. d'eau 
en macération au bain-marie ; à 420 gram. de cette infusion, 
ajoutez 60 gram. d’alcool),de 40 à 200 gouttes progressivement. 

A L'EXTÉRIEUR: décoction, de 40 à 50 gram. par kil, d’eau, pour 
lotions, fomentations, etc., feuilles en cataplasme. 

Sue (4 sur 5 d’axonge), pour pommades, etc. 


Propriétés. 


Le tabac exhale une odeur forte, piquante, vireuse ; sa 
saveur est àcre, amère, nauséeuse. frritant et narcotique, il 
agit sur l’économie comme: les autres solanées vireuses, et 
peut occasionner l’'empoisonnement. Appliqué sur une mem- 
brane muqueuse extérieure, telle que celle du nez, de la 
bouche ou de l'œil, le tabac y fait naître un sentiment de 
titillation et de picotement suivi d'une sécrétion plus abon- 
dante , non-seulement des follicules muqueux, mais aussi 
des glandes voisinés, à moins que les parties ne soient accou- 
tumées à son action par un long usage. La vapeur qui s’en 
élève quand on le brûle suffit pour produire ces effets. 
Appliqué sur la peau, même non dénudée, il l’irrite et l’en- 
flamme. Introduit dans l'estomac, son effet primitif ou direct 
est de déterminer l'irritation, des nausées , des vomisse- 
ments, des coliques violentes, des déjections alvines abon- 
dantes, l’inflammation du tube digestif. Lorsqu'il est absorbé, 
il produit la sédation du systême nerveux et donne lieu à 
tous les phénomènes du narcotisme, tels que vertiges, trou- 
ble de la vue, céphalalgie violente, défaillances, convulsions, 
état comateux, apoplexie. Quelquefois aussi il augmente 
l'action des reins ou celle de la peau et provoque une diu- 
rèse douloureuse ou des sueurs abondantes. S'il à été pris 
en assez grande quantité, la mort s'ensuit, et l’on trouve à 
l’autophe des traces d'inflammation ou d’ulcération sur les 
parties avec lesquelles le tabac a été mis en contact. Ces effets 
sont également produits par le tabac en substance, par sa 
décoction, par son extrail aqueux et par sa fumée ; ils ont 
également lieu , soit qu’il soit introduit dans l’estomac ou 
dans le rectum , appliqué sur des surfaces dénudées, inséré 
dans le tissu cellulaire, ou injecté dans les veines, soit qu'il 
ait été simplement appliqué sur la peau excoriée. La fermen- 
tation et les préparations que le commerce fait subir à cette 
plante, ajoutent encore à ses propriétés narcotico-âcres et 
vénéneuses. 

Le poète Santeuil mourut après avoir éprouvé de violents 
vomissements et des douleurs atroces, pour avoir pris du via 


542 


dans lequel on avait mis à son insçu du tabac d'Espagne. 
Murray rapporte l’histoire de trois enfants qui furent pris 
de vomissements, de vertiges, de sueurs abondantes, etc., 
et qui moururent en vingt-quatre heures au milieu des 
convulsions , pour avoir eu la tête frictionnée avec un lini- 
ment composé de tabac, dans l'intention de les guérir de la 
teigne. Ramazzini à vu une jeune fille avoir de violentes 
envies d’uriner, aller fréquemment à la selle et rendre beau- 
coup de sang par les vaisseaux hémorrhoïdaux, pour s’être 
reposée sur des paquets de tabac en corde. Fourcroy a observé 
de graves accidents causés par l’emploi de la décoction de ta- 
bac en lotions dans le traitement de la gale. Le même auteur 
(trad. de l'ouv. de Ramazzini) cite aussi le cas de la petite 
fille d'un marchand de tabac qui mourut dans des convul- 
sions affreuses pour avoir couché dans un endroit où l’on 
en avait rapé une grande quantité, et celui d’un enfant qui, 
ayant avalé de celte plante par mégarde, échappa à ces 
premiers effets, mais qui mourut quelque temps après de 
polypes qu’on ne put attribuer qu’à cette méprise. « Un 
homme âgé de cinquante-six ans était porteur d’une hernie 
étranglée ; après des efforts infructueux de réduction, on 
administra un lavement de 15 grammes de tabac. Un quart- 
d'heure après, les symptômes d’un narcotisme le plus intense 
survinrent , et le malade mourut vingt-cinq minutes après 
l'administration du lavement.» (L’Abeille meéd., £. 1, p. 24.) 

L'usage habituel de priser, par l'irritation répétée qu’il 
cause sur la membrane olfactive, affaiblit l'odorat, dérange 
Ja mémoire, et produit à la longue des vertiges, des maux 
de tête, des tremblements et même l'apoplexie. J. Lanzoni 
(journ. d'Allemagne, année 1730, p. 179) rapporte l’his- 
toire d’un soldat qui avait contracté une telle habitude de 
prendre du tabac, qu'il en consommait jusqu’à trois onces 
par jour ; à l’âge de trente-deux ans, il commença à être 
atteint de vertiges qui furent bientôt suivis d’une apo- 
plexie violente qui l’'emporta. Le même auteur cite encore 
le cas d’une personne que l'usage immodéré du tabac d’Es- 
pagne rendit aveugle et ensuite paralytique. Les grands 
priseurs tombent quelquefois dans une espèce d’imbécillité. 
« J'ai connu, dit M. Mérat (Dict. des scienc. méd., t. 54), 
de ces priseurs intrépides qui étaient dans une sorte d'a- 
battement continuel, qui, la bouche béante et les narines 
étoupées d’une croûte noire de cette poudre, ne savaient 
que fouiller sans cesse dans leur tabatière, et conservaient 
tout juste assez d'instinct pour celte action machinale. » 
L'abus du tabac en prise peut produire des polypes; Four- 
croy cite même un cas de cancer du nez attribué à cette 


043 


cause. Cependant on le prescrit quelquefois comme sternu- 
tatoire, soit pour produire une secousse, soil pour aug- 
menter la sécrétion muqueuse nasale dans les céphalalgies, 
l’odontalsie, l’otalgie, l’enchifrement, les fluxions, certaines 
névralgies de l'une des régions de la tête, etc; mais l’ha- 
bitude que l'on en contracte, lors même qu’on parvient à 
dissiper les maux qui en avaient indiqué l’usage, fait que le 
remède est prs que le mal. Il vaut mieux, quand on le croit 
nécessaire, employer tout autre sternulatoire que le tabac, 
et en cesser l’usage lorsqu'on en a obtenu l'effet désiré. 

L'usage du tabac est tellement répandu dans nos campa- 
gnes et parmi la classe indigente des villes, que le malheu- 
reux supporte plutôt la privation du pain que celle de cette 
plante narcotique, qu'il mâche, fume et prise. L'ouvrier 
prend sur son salaire de quoi satisfaire une habitude qui lui 
fait perdre beaucoup de temps et le rend lourd, moins apte 
à se livrer au travail. L'usage trop fréquent de la pipe occa- 
sionne de grandes pertes de salive et rend la digestion 
pénible et imparfaite, ce qui produit, chez les personnes 
d'une constitution sèche et nerveuse, des affections chro- 
niques de l'estomac, et souvent le squirre, l'ulcère et le 
cancer de cet organe. Le cancer des lèvres est aussi très- 
souvent causé par l'usage d’une pipe à tuyau court et 
échauffé. J'en ai opéré un grand nombre qui n'avaient pas 
d'autre cause. « Le brule-gutule, dit Percy (Dact. des Scienc. 
med, 1. 52, p. 465), est pour le vieux fumeur ce que l’eau- 
de-vie est pour l’ivrogne incorrigible ; ils sont blasés l’un et 
l’autre , et tous deux périssent à peu près de même ; ils se 
nourrissent mal ; aucun aliment n'est assez assaisonné pour 
leur palais et leur bouche brülés ; ils ont toujours soif ; ils 
vieillissent de bonne heure, et une cachexie incurable les 
fait périr avant le temps. » 

Toutefois, les dangers de l’abus du tabac sont moindres 
chez les sujets lymphatiques, ayant de l'embonpoint, livrés 
au repos , que chez les gens nerveux, bilieux, délicats, d’une 
constitution sèche; chez les personnes qui habitent les 
pays bas, humides, froids, marécageux, que chez celles qui 
reçoivent l’action vivifiante des régions sèches, élevées ou 
chaudes. 

Ce poison dangereux, manié par une main habile, devient 
pourtant un médicament héroïque. C’est un stimulant éner- 
gique eten même temps un vomipurgatif qu'on emploie 
avec succès contre les cas de grande diminution ou d'aboli- 
tion passagère de la sensibilité, dans la paralysie, la léthar- 
gie et même l'apoplexie : mais il ne faut pas perdre de vue, 
lorsqu'il y a congestion cérébrale, que l’action stimulante 


æ 


44 


locale et puissamment dérivative , est Ja seule qui soit uule: 
car l'action narcotique ne ferait qu'augmenter le danger. Il 
est bon que l’on sache que cette dernière action est plus 
facilement produite par le tabac en vapeur, que par la décoc- 
tion étendue, l'extrait, etc. 

L'introduction de la fumée de tabac a été recommandée 
depuis longtemps dans l'asphyxie, et surtout dans celle qui 
est produite par la submersion. Pia, pharmacien philan- 
thrope , a mis ces fumigations en vogue, et Cullen, Stoll, 
Tissot, Desgranges, Louis, etc., en ont constaté les bons 
effets. « Plusieurs centaines de faits, dit Fodéré (Dict. des 
Sciences méd., 1.36, p. 43%), en justifient l'emploi, et elles 
n'ont contre elles que des présomptions théoriques et le 
raisonnement.» Marc { Mém. sur les secours, etc.) les re- 
garde comme un des meilleurs auxiliaires pour rappeler les 
asphyxiés à la vie. Vigné (Traité de la mort appar., p.15) 
a rapporté le fait de la mort apparente de vingi marins, après 
quinze à vingt minutes de submersion, et qui furent rappelés 
à la vie au moyen de la fumée de tabac introduite dans le 
rectum par le tuyau d'une pipe. 

Sydenham et Mertens conseillent la fumée de tabac dans 
l'ileus ; on l’a aussi recommandée dans la hernie étranglée 
(Schæffer, Dehaen , etc.), la constipation opiniâtre , les vers 
intestinaux, etc. Introduite en petite quantité à la fois dans 
le rectum, elle m’a réussi chez un cultivateur âgé de irente- 
cinq ans qui n’avait pu, par aucun autre moyen , se débar- 
rasser de nombreux ascarides vermiculaires dont il était 
atteint depuis plus de cinq ans. Ce n’est guère que dans les 
constipations par paralysie que le tabac a pu être employé 
avec avantage. « J'ai connu,dit M. Mérat (Doct. des Sc, méd., 
1.54, p.201), un médecin de la Faculté de Paris, paralytique 
dans les sept ou huit dernières années de sa vie, qui, tous les 
dix ou douze jours , n’allait à la garde-robe qu’au moyen 
d’un lavement de décoction de tabac ; tout autre moyen était 
insuffisant pour le faire évacuer. » 

Le tabac a été employé comme diurétique. Fowler (Med. 
reports on the eff. of tabacco, etc. Lond. 1783) en a préco- 
nisé l'usage dans l’hydropisie. Il employait surtout la tein- 
ture (voyez préparations et doses ) à la dose, deux fois par : 
jour, de 40 à 80 gouttes, augmentant de 5 à 10 gouttes à la 
fois jusqu’à 200 gouttes, sans jamais aller au-delà. Sur 
trente-un malades, dix-huit furent guéris et dix furent sou- 
lagés ; trois seulement n’en éprouvèrent aucun effet. Fowler 
éloignait ou diminuait les doses aussitôt qu’il observait des 
nausées, des vertiges ou du trouble dans les idées. Les ré- 
sultats obienus par ce médecin pourraient être considérés 


D 49 


comme très-heureux si l’on ne savait que l'hydropisie , étant 
la plupart du temps produite par une lésion organique plus 
ou moins grave, les prétendues guérisons obtenues par 
l'évacuation de la sérosité ne sont le plus souvent qu’appa- 
rentes : la source subsistant, l’eau revient. 

Gesner, Hufeland, Stoll ont employé le tabac avec succès 
contre la coqueluche. Pitshaft ( Journal de Hufeland, 1832) 
en faisait prendre l'infusion { { grom. 20 cent. pour 180 gr. 
d’eau bouillante) à la dose d’une cuillerée à café aux enfants 
d’un à deux ans, toutes les heures ; il en donnaït une cuil- 
lerée à bouche aux enfants plus âgés. Hanin (Cours de mat. 
méd.) dit avoir vu employer fréquemment contre l’asthme, 
par un médecin de sa connaissance, quatre à cinq cuillerées 
par jour d’une infusion vineuse préparée avec 32 gram. de 
tabac pour un kilogram. de vin. On s’est servi aussi de ceite 
plante dans les catarrhes chroniques , dans certaines affec- 
tions asthéniques des poumons, contre les fièvres intermit- 
tentes. 

On l’a aussi recommandé à l'intérieur dans l’épilepsie, 
l'hystérie, la manie, etc. Zacutus Luzitanus, Rivière, Han- 
nemer, disent l'avoir employé avec succès dans l’épilepsie. 
On doit s'assurer par de nouvelles expériences si, en effet, 
cette plante, par son action à la fois perturbatrice et stupé- 
fiante, peut s’opposer à la concentration nerveuse, subite, 
convulsive qui caractérise les accès de cette terrible maladie. 
Les résultats obtenus de l'usage de la belladone et du stra- 
monium portent à croire, par analogie, à l'efficacité du tabac. 

Aux Antilles, on administre des bains d’infusion de tabac 
contre le tétanos. Thomas et Anderson {Journ. d’'Edimb., 
4. 7, p. 198) employaient cette plante avec succès dans cette 
maladie. Le premier faisait administrer des lavements de 
fumée de tabac ; le second appliquait cette plante fraîche 
aux parties antérieures et latérales du cou, et en même temps 
en décoction ou en cataplasme sur la plaie, dans le tétanos 
traumatique. Obierne , de Dublin, dit avoir obtenu de bons 
effets de l’infusion de tabac appliquée à l'extérieur dans la 
dyssenterie. On l’a mis en usage en cataplasme (30 gram.) 
sur l'épigastre pour provoquer le vomissement, ou en fric- 
tions (pommade) sur l'abdomen pour procurer des évacua- 
tions alvines. Il vaut mieux, pour produire ce dernier effet, 
employer, comme exempt des inconvénients du principe 
narcotique du tabac, la pommade ou la teinture de colo- 
quinie en frictions, ou plutôt , la poudre de cetie dernière 
plante par la méthode endermique. 

On à encore conseillé le tabac à l'extérieur dans l’ischu- 
rie, la rétention d'urine, le resserrement de l’urêtre, la 

35 


246 


colique métallique. Gravel (Journ.deChim.meéd.., t:4, p.140) 
s’en est servi en topique dans cette dernière maladie. Mais 
c'est surtout contre les maladies externes que le tabac a été 
employé. Les fumigations de cette plante ont été prescrites 
dans quelques maladies de Ja peau, dans le rhumatisme, 
Ja goutte, les douleurs anciennes , en en préservant la face 
et les voies aériennes. Pour calmer les douleurs de la goutte, 
on expose, deux ou trois fois chaque jour, la partie malade 
à la vapeur du tabac jeté sur des charbons ardents. 

Le tabac, employé à l'extérieur, a eu le plus grand succès 
dans le traitement de la gale. Boerhaave, Dodoens, Lémery 
ont vanité les vertus antipsoriques du tabac. Coste, médecin 
des armées, employait, il y a plus de soixante-dix ans, l'in- 
fusion vineuse de cette plante pour guérir les galeux confiés 
à ses soins à l'hôpital militaire de Calais. Bécu avait recours 
à l'hôpital militaire de Lille, en 1786, à la décoction aqueuse, 
bien plus économique et tout aussi efficace. Voici le pro- 
cédé qui fut adopté alors pour les hôpitaux militaires, et 
que j'ai encore vu mettre en usage au Camp de Boulogne : 
on prend 1 kilog. du meilleur tabac haché, on le fait infu- 
ser dans 8 kilog. d’eau bouillante, ou bien on le fait bouillir 
légèrement dans 9 kilog. qu’on réduit à 16. On fait dissou- 
dre dans l’eau, avant d’y avoir mis le tabac, 30 gram. de sel 
ammoniac ou 60 gram. de sel marin ; 150 ou 160 gram. de 
celte infusion, employée chaude en deux où trois lotions, 
suffisent pour un jour. Ces lotions doivent durer huit à dix 
minutes, et n'être pratiquées qu'après la digestion, de crainte 
de natisées et de vomissements. Par ce moyen la guérison 
a souvent lieu au bout de huit jours en été; mais, l’hiver, 
elle se fait souvent attendre quinze jours. Les sujets irrita- 
bles éprouvent des lassitudes dans les membres, des coli- 
ques, des vertiges, des vomissements qui forcent de sus- 
pendre le traitement. [1 faut donc être très-circonspect 
dans l'administration de ce remède et ne pas l’employer 
indistinctement chez lous les sujets. | 
3. Le prurigo, la teigne, les dartres, le phthyriasis, les poux 


de la tête et du pubis, sont aussi avantageusement combatius 


par le même traitement. J'ai vu, en 1847, une femme de 
soixante-dix ans se débarrasser d’une maladie pédiculaire 
contre laquelle elle avait inutilementemployé plusieurs remè- 
des, en employant pendant huit jours des lotions de tabac et 
de sel marin (15 gram. pour { kilog. d’eau); ces lotions pro- 
voquèrent quelques selles âvec coliques et dé légers vertiges. 

On s’est bien trouvé de Finfusion de tabac dans l'ophtal- 
mie purulente. On prépare à cet effet un collyre avec 2 gram. 
de tabac pour 500 gram. d'eau. 


547 


Le docteur J. Graham (Journ. analyt., mars 1828) à guéri 
en peu de jours , au moyen de l'onguent de tabac, des bu- 
. bons qui avaient résisté à une foule de remèdes. On lit dans 
le journal de Leroux {£. 25, p.286) que l'on est parvenu à 
dissiper une tumeur abdominale très-considérable par lap- 
plication des feuilles fraîches de tabac trempées dans le 
vinaigre. J'ai employé ce topique avec succès sur des engor- 
gements lymphatiques, comme résolutif. 

On a encore recommandé le tabac comme excitant pour 
déterger d2s ulcères atoniques , sanieux, putrides , cancé- 
reux ; maisil ne faut pas perdre de vue que, dans ces cas, 
il peut être facilement absorbé et donner lieu à des accidents 
gravés et même à l’empoisonnement. | 

Terminons cet article en disant avec M. Londe {Dict. de 
méd. et de chirurg. prat., t. 15, p. 24%), qu'après avoir 
observé l’anéaniissement, la subite et profonde prostration 
qui suivent l'emploi du tabac fumé ou chiqué chez un indi- 
vidu qui n'en à point l'habitude, il y a lieu d'être surpris 
qu’on n’ait jamais pensé à employer l’une ou l’autre de ces 
pratiques, préférablement à la saignée, dans les cas où il 
s’agit de paralyser sur-le-champ les forces musculaires d’un 
sujet, dans la réduction de certaines luxations, par exemple. 
Ce moyen, dans ce cas, atteindrait mieux et plus rapidement 
que tout autre le but qu’on se propose. 


TANAISIE. 


HERBE SAINT-MARC, HERBE AUX VERS. 


Fanacetum vulgare luteum (T.) 
Tanacetum vuigare (L.) 


Cette plante vient spontanément en France dans les prai-, 
ries, le long des chemins. On la cultive dans les jardins. On 
utilise les feuilles, les fleurs et les graines. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : infusion, de 45 à 50 gram. par kil. d’eau bouillante. 
Eau distillée 4 sur 4 d’eau), de 30 à 400 gram. en potion. 
Pin (4 sur 16 de vin blanc), 60 à 400 gram. 
Sirop, de 15 à 60 gram. en potion. | 
Poudre, de 2 à 8 gram., en bols, pilules, ou en suspension dans 
un liquide. 
Extrait aqueux (1-sur 6 d'eau), de 50 cent. à 4 gram. en bols, 
pilules, etc. das | 
Extrait alcoolique (4 sur 4 d’alcool et t d'eau), de 50 cent. à 4 
gram, ,en bols, pilules, etc. | 
Iuile essentielle, de 20 à 50 cent. en potion, alco-saccharum.etc, 


548 


A L'EXTÉRIEUR: décoction en lavement (59 à { gram. par kil. d'eau), 
fomentations, lotions, etc., infusée dans l'huile, en liniment, 
ambrocation, etc. 

Teinture, en frictions. 


Propriétés, 


La tanaisie, d'une odeur forte et pénétrante, d’une saveur 
amère et àcre, Cst tonique, excilante, anthelmintique, em- 
ménagogue. Elle convient dans l’atonie des voies digestives, 
les fièvres intermittentes, la chlorose, l’aménorrhée avec 
asthénie , la leucorrhée, l’hystérie , les affections vermi- 
neuses. | 

Congénère en vertus à l'absynthe, la tanaisie peut être 
employée dans tous les cas où cette dernière est indiquée. 
Elle convient, par conséquent, dans toutes les maladies 
caractérisées par l'atonie des organes ; mais c'est surtout 
comme vermifuge que la tanaisie à été plus particulièrement 
signalée et répandue traditionnellement dans la médecine 
populaire. Je l'ai souvent employée en lavement contre les 
ascarides vermiculaires. Les semences sont pour moi aussi 
précieuses que le semen-contrà ; elles produisent tout autant 
d'effet que ce dernier, soit en décoction, soit en poudre, 
mélée avec le sirop simple, avec du miel ou délayée dans 
un peu de vin. 

. [ Coste et Wilmet affirment que la semence de tanaisie, 
dont ils vantent les propriétés anthelmintiques , se vend, 
dans les pharmacies de la Lorraine , pour le semen-contrà. 
Wauiters la préfère à ce dernier qui, le plus souvent, contient 
diverses substances avec lesquelles on la falsifie (71). 

Dans les campagnes, on emploie fréquemment la tanaisie 
infusée dans le vin, la bière ou le cidre, dans les fièvres 
intermiltentes, contre lesquelles elle a la même efficacité 
que l’absynthe , la camomille, la petite centaurée, etc. 
Césalpin préconise le vin de tanaisie comme fébrifuge et 
surtout comme emménagogue. 

L'odeur repoussante de cette plante l'a fait employer dans 
les affections nerveuses, l’hystérie , les vertiges , la gastro- 
dynie, les coliques spasmodiques, l’épilepsie, la chorée, etc. 
Suivant Simon-Pauli , les fleurs sont très-utiles dans l'hys- 
térie. Clerk et Bradley ont attribué à là taraisie une vertu 
anti-goulteuse qu’on ne peut rationnellement rapporter qu’à 
ses propriétés toniques, lorsque ces affections sont accompa- 
gnées de débilité. On en a fait aussi usage dans l'hydropisie. 


Q) La semence du tanacetum balsamita L., grand baume ou baume-coq 
des jardins, est aussi vermifuge. (Voyez Balsamite ) 


249 


Payer ( Ephem. d’Allem., déc. 2, an. 2) rapporte qu’un sol- 
dat atteint de cette maladie, ayant pris de la décoction de 
tanaisie au lieu de celle d’absynthe, rendit une si grande 
quantité d'urine que son enflure se dissipa promptément. 

A l'extérieur, la tanaisie est employée en cataplasme sur 
le bas-ventre comme vermifuge. Geoffroy, médecin de 
l'Hôtel-Dieu ( Mérat et Delens, ouv. cit.\, rapporte qu'ayant 
fait appliquer de la tanaisie sur le ventre d’un sujet affecté 
de maladie grave, il évacua trente-deux vers lombrics. Ce 
cataplasme m'a souvent réussi chez les enfants ; j'y ajoute 
de l'ail, des feuilles de pêcher, d’absynthe, d’hièeble, de 
gratiole , etc. 

En fomentation ou en cataplasmes préparés avec l'eau ou 
le vin, la tanaisie est résolutive, détersive et antiseptique. 
Elle s’est montrée utile dans les enterses, les contusions, le 
rhumatisme chronique, les engorgements lymphatiques, les 
ulcères atoniques, sordides,vermineux ou gangréneux. Elle 
a, comme antiseptique ; la même énergie que l'absynthe. 
Tournefort dit qu'on emploie en lotions, contre le rhuma- 
tisme, un esprit préparé avec la tanaisie et l'alcool. 


THÉ DU MEXIQUE ,‘ 


AMBROISIE, ANSÉRIFE AMBROISIE, BOTRYS DU MEXIQUE, PAROTE. 


Botrys Mexicana officinarum ( Murs.) 
Chenopodium umbrosioïles (L.) 


Cette plante, cultivée dans les jardins, s’est répandue 
spontanément, Surtout dans quelques contrées du midi de 
la France. On la trouve le long de la Garonne, dans les 
prairies, dans les environs de Toulouse et de Perpignan. 
On emploie les feuilles, les sommités et les semences. 


Propriétés. 


L'ambroisie a une odeur très-agréable et une saveur aro- 
matique. Elle est considérée comme excitante, antispasmo- 
dique, emménagogue, etc. J. Franck (Prax. med.,t.2, p.201) 
l'a fréquemment employée davs les affections nerveuses et 
surtout dans la chorée. Plenck (de merd. infant) la regarde 
comme le plus efficace de tous les remèdes proposés contre Ia 
chorée. Il rapporte particulièrement cinq cas où la maladie 
après avoir résisté aux moyens ordinaires , céda à l'usage 
journalier de l'infusion aqueuse de cette plante (8 grammes 
pour 300 gram. d’eau, à prendre par tasses soir et matin ). 


590 


Il l’associe à la menthe poivrée. M. Mick, de Vienne, l'a 
également administrée avec succès dans la même maladie ; 
il la mêle au quinquina. Suivant ces praticiens , on obtient 
ordinairement la guérison dans l’espace de trois semaines 
à un mois. Rilliet et Barthez | Bouchardat, Annales de the- 
rap., 1844) en ont fait usage dans les mêmes circonstances 
à la dose de 4 gram. de semences en infusion dans 500 gram. 
d'eau. On attribue aussi à ses semences une vertu vermi- 
fuge.Cetie plante doit être préservée avec soin de l'humidité, 
qui lui fait perdre toutes ses qualités. | | 

Le Borrys (chenopode botrys, ansérine botrys, herbe 
de Printemps, chenopodium botrys L.), que l’on cultive dans 
les jardins et qui s’est très-bien acclimaté dans diverses 
parties de la France, surtout dans les lieux sablonneux des 
départements méridionaux, possède les mêmes vertus que 
l'ambroisie et peut lui être substituée. Un suc balsamique 
très-abondant s'échappe par les pores de ses feuilles et les 
rend très-aromatiques. Exrimiæ fragrantiæ granà etiam dus 
expetita fuisse dicitur hæc planta (Boecl.) 

Cette plante, à laquelle un charlatan appelé Printemps a 
donné son nom (Herbe à Printemps); que Mathiole et 
Geoffroy ont vanté outre mesure, est excilante, antispasmo- 
dique, expectorante. On l’a recommandée dans le catarrhe 
pulmonaire chronique, l'asthme humide, la dyspepsie, la 
dysménorrhée, etc. Wauters { Dissert. botanico-méd., p.9) 
assure avoir guéri des phtphisies confirmées par l'usage du 
botrys, qu'il propose comme succédané du baume de 
copahu, du polygala de Virginie et de la térébenthine. Le 
praticien de Wetteren n’a eu probablement dans ces préten- 
dus cas de guérison de phthisie, que des catarrhes pulmo- 
naires chroniques à traiter. L’infusion théïiforme de cette 
plante est la préparation la plus simple et celle qu’on préfère. 
On administre quelquefois son infusion vineuse. Geoffroy 
(mat. med.) donne la formule d’un sirop qui pourrait être 
fort utile. 


TUVYM, 


THYM COMMUN. 


Thymus supinus caudicans odoratus (T.) 
Thynus vulgaris (L.) 


Le thym croît spontinément dans les départements mé- 
ridionaux, aux environs de Narbonne et de Montpellier. 
On le cultive dans les jardins: ses sammités fleuries sont 
employées. : | 


oo! 
Préparations et doses, 


À L'INTÉRIEUR : infusion, de 19 à 45 gram. par kil. d'eau bouillante. 
Eau distillée, de 50 à 400 gram. en potion. 
Huile essentielle, de 140 à 29 cent. 
Poudre, 4 à 8 gram. en ARE ou dans un véhicule liquide, 
A L'EXTÉRIEUR: infusion Ou décoction, 30 à 100 gram. par kil. 
d’eau ou de vin, pour lotions,fomentations, bains, injections,etc. 


Propriétés. 


Cette plante, d'une odeur aromatique, d’une saveur amère 
et un peu àâcre, est un stimulant ayant des propriétés ana- 
logues à celles du serpolet ou thym sauvage; on le conseille 
dans l’atonie dés voies digestives, les flatuosités, l'aménor- 
rhée asthénique, lés'catarrhes chroniques, etc. 

[Van Swieten employait la vapeur de l'infusion de thym 
contre le lumbago; il!dirigeait cette vapeur sur la partie 
douloureuse, pendant une demi-heure, au moyen d’un tube, 
et frictionnait ensuite fortement avec des linges chauds 
pendant un quart-d’heure. M. Casenave (Bullet. de thérap., 
1. 20, p. 112) a employé avecavantage, contre la gale, les lo- 
tions composées d’infusion de thym (60 gram. pour 1 kil. 
d’eau bouillante) et de vinaigre (280 gram ), trois lotions 
par jour ; durée moyenne du traitement, douze jours. On 
sait que la sarriète, la menthe et d’autres plantes aromatiques 
sont aussi antipsoriques. 

L'infusion aqueuse ou vineuse de thym a été employée 
sur les ulcères atoniques; les sommités de cette plante sont 
appliquées sur les engorgements pâteux et indolents. ] 


TILLEUL, 
TILLEUL D'EUROPE, TILLAU, TILLET, TILLIER, TIL. 


Tiia fœmina (T.) 
Tilia europæa (L..) 


Cet arbre croit spontanément dans les forêts et est cultivé 
dans les parcs, les jardins, dont il fait l’'ornement. On uti- 
lise les fleurs, l'écorce, les jeunes feuilles, les bourgeons. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : infusion des fleurs, de 5 à 10 gram. par kil. d'eau 
bouillante. 
Eau d'istillée, de 50 à 400 gram. 
Sirop, de 50 à 100 gram.en potion, 
Couserve (4 sur 5 de sucre), de 40 à 50 gram. 
A L'EXTÉRIEUR : infusion et décoctiondes flenrs, de l'écorce, ou des 
feuilles en bain, fomentations, etc. 


292 


Propriétés. 


Les fleurs de tilleul sont antispasmodiques, légèrement 
diaphorétiques ; on les administre souvent dans les affec- 
tions nerveuses, l’hystérie, l’hypocondrie, la migraine, les 
indigestions. Dans ce dernier cas, elles n'irritent pas comme 
le thé. L'eau distillée de fleurs de tilleul est souvent em- 
ployée en potion comme excipient. M. Brossat, pharmacien 
à Bourgoin (Journ. de pharm., t. 4, p. 396), a obtenu, de 
la distillation de plus de 50 kilog. de fileursde tilleul à peine 
développées, 40 kilog. d'une eau chargée d’un principe bal- 
samique analogue à celui des bourgeons de peuplier ; cette 
eau, recohobée sur une même quantité de fleurs encore 
moins développées, donna 20 kilog. d’un liquide chargé d'un 
arôme très-pénétrant et très-suave, comme le baume du 
Pérou noir; il sürnageait des globules d'huile volatile d’un 
jaune doré. Celte eau, placée à Ia cave, était, au mois de 
janvier suivant, transformée en une liqueur épaisse, aro- 
matique. M. Brossat éprouva, après en avoir bn, une sorte 
d'ivresse joviale mêlée d’'accablement, de sommeil, et une 
excitation toute particulière. Un hydrolat de tilleul, ainsi 
préparé, offre un médicament énergique à essayer comme 
antispasmodique dans les affections nerveuses. Les bour- 
geons des feuilles à peine développés, et les feuilles nais- 
santes, jouissent des mêmes propriétés que les fleurs, mais 
ces dernières ne doivent pas être confondues avec les brac- 
tées. Les fleurs et l'écorce, soumises à Ja macération aqueuse, 
fournissent un mucilage épais que F. Hoffmann a préconisé 
contre la brûlure et les douleurs de la goutte. J'ai employé 
ce mucilage avec succès dans la diarrhée et les gastro-enté- 
iites chroniques. Les paysans le mettent souvent en usage 
contre les inflammations externes, les plaies enflammées et 
douloureuses, le tenesme, les brûlures, ils font une décoction 
d’écorce de tilleul, et s’en servent, dans ces différents cas, 
en fomentations, en lotions, injections, etc. J'ai vu cesser 
une diarrhée chronique qui avait résisté aux moyens ra- 
tionnellement indiqués, par le seul usage de la tisane muei- 
Jagineuse d'écorce et de fleurs de tilleul, et de Ja même dé- 
coction plus concentrée en demi-lavements répétés chaque 
jour. À cette occasion, je ne puis m'empêcher de faire re- 
marquer que beaucoup de diarrhées chroniques, contre les- 
quelles on emploie inutilement les astringents, cèdent à 
l'usage des mucilagineux continué avec persévérance : c’est 
que très-souvent ces affections sont dues à une irritation de 
la muqueuse contre laquelle les astringents ne réusissent 
pas toujours, bien qu'ils aient une action manifeste contre 
certaines phlegmasies chroniques. 


293 


La semence de tilleul, et même les feuilles, peuvent être 
employées comme l'écorce. 

[M. Rostan (Journ. de med. et de chir. prat., t. 16, p. 299) 
a mis en usage les bains d’infusion de fleurs de tiileul pro- 
longés pendant plusieurs heures (d’abord deux, puis trois, 
quatre heures et même plus), contre les névroses et parti- 
culièrement l’hystérie caractérisée par un spasme généi a, 
un sentiment de strangulation, etc. Ce moyen agit d'autant 
mieux que le bain est Supporté pendant un Lemps plus long. 

Les pharmaciens et les herboristes vendent souvent les 
fleurs de tilleul avec leurs bractées : on doit les en séparer. 
Pour les conserver belles et odorantes, il faut les faire sécher: 
à l’étuve ou au soleil. 


TORMENTILLE, 
TORMENTILLE DROITE, TORMENTILLE TUBÉREUSE. 


Tormentille sylvestris (T.) 
Tormenti:la erecta (L.) 


La tormentille se rencontre partout, dans les bois, les 
lieux frais, le long des haies : on emploie la racine. 


Préparalions et ACSrs. 


A L'INTÉRIEUR : décoction, de 15 à 50 gram. par kil. d'eau. 
Feinture. A sur 8 d'alcool), de 5 à 10 gram. en potion. 
Poudre, de 2 à 12 grain. en bols, pilules ou dans du vin généreux. 
Extrait (1 sur 8 d'eau), de 4 à 4 gram. et plus, dans du vin, en 
pilules, bols, etc. 
Vin (4 sur 16 de vin), 69 à 100 gram. 
A L'EXTÉRIEUR : déroction (36 à 60 gram. par kil. d'eau), pour lo- 
tions, fomentalions, etc. 
Poudre, quantité suffisante pour cataplasme. 
Pommade (1 de poudre sur à à 10 d'axonge. 


Proprielés. 


La racine de tormentille, d'une saveur styptique et un 
peu aromatique, est énergiquement astringente ; comme la 
bistorte, elle est employée dans les flux et “écoulements mu- 
queux atoniques, les hémorrhagies passives, les fièvres in- 
iermiltentes, etc. Haller la préférait à toutes les autres 
plantes astringentes. « La tormentille, disent MM. Mérat et 
Delens (Dict. de mat. méd.), est un des meilleurs astringents 
indigènes connus ; c’est une plante trop négligée, et sa ra- 


35 # 


cine, sous le seul rapport économique, devrait être recueillie 
avec soin et employée plus qu'on ne fait. » 

La tormentille et la bistorte peuvent remplacer, dans la 
médecine rurale, le ratanhia. Je leur ai constamment trouvé 
la même efficacité. Comme tous les autres astringents, la 
racine de tormentille ne doit être employée dans la dyssen- 
terie, la diarrhée, etc., que lorsque la période d'irritasion 
est passée. Loiseleur-Deslonchamps et Marquis (Dict. des 
Scienc. med., t. 44, p. 383) disent que c'est uniquement à 
son emploi intempestif qu'il faut attribuer la diminution de 
sa réputation dans les dyssenteries et les fièvres intermit- 
tentes, et non à son défaut d'énergie ; el ils ajoutent que si 
quelquefois elle a été nuisible, il est probable que ce n'a été 
qu'entre des mains inexpérimentées. 

Cullen a éprouvé de bons effets de la racine de cette plante 
dans certaines fièvres intermittentes, en l’unissant à la gen- 
tiane ; ce mélange m'a réussi dans la leucorrhée atonique. 
Gilibert dit avoir vu un phthisique guérir -par le seul usage 
d'un gros (4 gram.) de tormentille en poudre, administrée 
tous les matins, pendant un mois, par le conseil d'un paysan. 
Cette phthisie était consécutive de fréquents crachements de 
sang avec langueur d'estomac. Il est probable qu'il n'existait 
chez ce malade qu'une grande débilité causée par de fré- 
quents crachements de sang, et que les poumons n’eussent 
offert, à l'exploration, aucune lésion semblable à celles que 
l'on trouve chez les phihisiques. 

[A la campagne, on emploie la décoction de racine de 
tormentille contre l'hématurie des bestiaux. | 

A l'extérieur, on emploie cette plante en décoction aqueuse 
ou vineuse dans les cas de ramollissement des gencives, 
pour résoudre les contusions, les ecchymoses, pour exciter 
les ulcères atoniques, blafards, etc. Le docteur Morin, de 
Rouen (Bullet. de therap., nov. 1839) a recommandé le 
remède suivant contre le panaris : on fait sécher au four la 
racine de tormentille, on la pulvérise, et, au moyen d'un 
jaune d’œuf, on lui donne une consistance pâteuse ; on étend 
sur un linge une ou deux lignes d'épaisseur de cette pâte, 
et on enveloppe la partie malade ; on doit de plus avoir la 
précaution de recouvrir le tout d un cataplasme ordinaire, 
afin de retarder la dessiccation de la pâte par la chaleur de 
la partie malade ; ce remède réussit aussi contre le furoncle. 
Quel est, dans ces cas, sa manière d'agir ?] 


299 


TUE-CHIEN, d 


COLCHIQUE D' AUTOMNE, “SAFRAN DES PRÈS, VEILLEUSE, VEILLOTE, 
MORT-AUX- CHIENS, SAFRAN D'AUTOMNE ; SAFRAN SAU- 
VAGE, SAFRAN BATARD, NARCISSE D' AUTOMNE, 

FLAMME NUE, CHENARDE, LIS VERT. 


Cette plante croît dans les prairies, où elle montre ses 
fleurs vers la fin de l'été. On la trouve dans presque toutes 
les parties méridionales de la France, en Normandie; je 
l’ai rencontrée dans les prés humides des environs d’'Ab- 
beville. 


Préparations et doses. 


À L'INTÉRIEUR : Buibe, Poudre, de 5 à 40 cent. {sédatif), de 40 à 50 

cent. (purgatif). 

Vin (4 sur 46 de vin et un d’alcoo! à 52e), de 50 cent. à 4 gram. 
(sédatif}, et de 4 à 2 gram. (purgatif). 

Vinaigre, ne sert guère qu’à préparer l'oximel (1 sur 12 de vi- 
naigre.) 

Oximel (4 de vinaigre sur 2 de miel), de 8 à 30 gram. (sédatif}, 
progressivement. 

Miel (4 de colchique sur 24 d'eau et 12 de miei), de 15 à 50 
gram. (sédatif}, 

Teinture alcoolique (4 sur 4 d'alcoo! à 240), de 50 cent. à 4 gram. 
(sédatif), de 1 à 2 gram. (purgatif) 

Extrait alcoolique (peu usité), de 4 à 10 cent. en pilules ou en 
solution dans un liquide. 

Extrait acétique (1 de colchique sur un d'acide acétique), de À 
à 5 cent. (sédatif), de 5 à 40 cent. (purgatif). 

Semences .— Vin (53 sur 12 de vin et 2 d'alcool), de 4 à 2 gram. 
(sédatif), de 4 à 5 gram. (pargatif. 

Vinaigre (4 de graine sur 4 de vinaigre blanc), de 2 à 4 gram. 
(sédatif), de 2àa15 gram. (purgatif). | 

Feinture, mêmes doses que celles du vin. 

Poudre, mêmes doses que celles du bulbe, mais d'une action plus 
certaine. 


A L'EXTÉRIEUR : Teinture, en frictions. 
Bulbe, en cataplasme. 


Propriétés. 


A haute dose, le colchique d'automne est irritant de la 
membrane muqueuse du tube digestif ; il détermine des dou- 
leurs aigues à l'estomac, des nausées, des vomissements, des 
déjections alvines, une soif ardente, le tremblement des 
membres, le délire, la diminution et }’ insensibilité du pouls, 
la mort. Brandes, Willis et Carminaui, après avoir signalé 
l'action irritante locale, disent qu’ une fois absorbé il exerce 


290 

une acüon affaiblissante sur le pouvoir nerveux, et consécu- 
tivement il affaiblit aussi les mouvements du cœur et des ar- 
tères. Locher-Balber (Revue méd. 1825), Richter ({us/uhrc. 
arzn, tn, p.425), Schwartz {Pharm. tab. p. 420), no- 
tent, outre les symptômes indiqués, la salivation , une sorte 
de choléra, des sueurs froides aux extrémités, l'évanouisse- 
ment. 

A doses modérées , le colchique produit de légers vertiges, 
des nausées, une diminution du pouls , l'augmentation de la 
sécrétion urinaire [lest employé aussi comme diurétique et 
purgatif. A petites doses il est, par absorption , plus sédatif 
qu'irritant. 

Stoerck fixa l'attention des praticiens en 1763 sur les bons 
effets du colchique dans les hydropisies. Collin, Plenk, Qua- 
rin, Zacht, Cullen, Heurman, Carminati, etc., répétèrent 
avec plus ou moins de succès les expériences de Stoerck. Les 
médecins français ont trop négligé cette plante, dont l’effi- 
cacité est, comme hydragogue , plus énergique que celle de 
la scille, à laquelle Wauters a proposé de la substituer: Scil- 
la invenitur quidem in littore maris in Normandia, sed par- 
cius…. Et si experimenta et auctoritates pensitentur, facilè 
cum schinzio (in præœmio ad wi Stoerk hbell. translat. 
prœferremus oximel colchicum scillitico, etenim vllud sæpè 
juvasse reperiemus ubi scilla iners manserat (Wauters, Re- 
pert. remed. p. 284). J'ai connu un médecin de campagne 
qui employait le colchique avec succès dans toutes les hydro- 
pisies ; je l’ai moi-même mis en usage avec avantage dans 
des cas où les autres remèdes avaient échoué. 

C'était à peu près aux hydropisies que se bornait l'emploi 
du colchique, lorsqu'en 181% des médecins anglais le pré- 
conisèrent contre le rhumatisme et la gouue. J. Watt { Med. 
and phys. journ., t. xx, 1815). Evrard Home l’employa 
sur lui-même pendant dix-huit mois. On rapporte (Lond, 
medic. journ., €. xx, 1821) le cas d’un médecin qui fut 
guéri de la goutte qui le retenait dans son lit depuis un mois, 
en prenant une cuilierée et demie à café de vin de colchique 
dans de l’eau de menthe : au bout de deux heures, le paro- 
xisme était si bien passé qu'il put monter à cheval. Williams 
(Pract. observ on the colch. autum. Lond. 1820) substitua 
les grains au bulbe. L'effet fut prompt chez trente-cinq su- 
jets affectés de rhumatismes aigus ou chroniques. Le doc- 
teur Twedie (The London med. and phys.journ., t. 67, p. 
172), qui a aussi constaté les bons effets du colchique dans 
ces affections, affirme que les insuccès tiennent à la mauvaise 
manière de l’administrer. Il donne les semences en poudre, 
à Ja dose de 9 grammes en plusieurs fois daus les vingt-qua- 


997 


tre heures. Suivant le docteur Leach (Lond. med. gaz.), ce 
médicament est surtout indiqué contre le rhumatisme lors- 
que la constitution est forte et vigoureuse, la peau chaude 
et sèche, le pouls fort et plein, les intestins resserrés et les 
autres fonctions en partie suspendues. 

Le docteur Wigan dit que pendant trente ans il à employé 
avec le plus grand succès le colchique dans le traitement du 
rhumatisme articulaire. Il l’administre en poudre à la dose 
de 40 cent. par heure, dans de l'eau sucrée. IT réitère cette 
dose jusqu'à ce qu'elle ait produit un vomissement actif, 
une copieuse purgation ou une transpiration abondante, ou 
au moins jusqu'à ce que l'estomac n’en puisse plus supporter. 
S'il y à des nausées après trois ou quatre doses, on laisse 
entre elles un quart-d'heure d'intervalle de plus. Il faut 
alors donner au malade un morceau de sucre imbibé d'eau- 
de-vie ou d’eau de Cologne , ou garder dans la bouche une 
tranche de citron , afin de dissiper les nausées et de permet- 
tre ainsi l'administration de quelques doses de plus. Après 
la sixième ou la septième dose, il y a nausées. Si l'atten- 
tion du malade est détournée, ou qu’il excite le palais par 
une tranche de citron, un clou de girofle, etc., il peut en 
prendre trois ou quatre doses de plus, lors même que le dé- 
goût serait devenu intolérable. Il survient ordinairement un 
profond sommeil suivi de nausées. La douleur cesse, mais 
les effets les plus actifs du colchique n’ont lieu que quelques 
heures après la prise de la dernière dose. L’inflammation 
articulaire se calme et le gonflement se dissipe rapidement. 
Du moment que le malade peut boire une tasse de thé, il 
tombe bientôt dans un profond sommeil, auquel succède un 
bien-être parfait. - 

MA. Chailly (Rev. med., t. 1, p. 2, 1836) et A. Boyer, 
(Gaz. méd. de Paris, 1835, p. 359) ont aussi obtenu des ré- 
sultats heureux de l'emploi du colchique dans le traitement 
du rhumatisme aigu et chronique, et dans la goutte; mais 
le docteur Fiévée est un des médecins qui, en France, ont 
employé le colchique avec le plus de succès, et qui en ont 
le mieux étudié les effets dans ces affections. « Depuis vingt- 
quatre ans, dit-il, que nous formulons le colchique, des mil- 
liers de faits, soigneusement étudiés, sont venus, à nos yeux, 
constater l’efficacité de ce remède et nous rendre son action 
aussi sûre, et peut-être plus encore que celle du sulfate de 
quinine dans les fièvres intermittentes. (De la goutte et de 
son trait. Spécif. par les prép. de colchique, 1845). » Ce mé- 
decin regarde la teinture de bulbes séchées comme la pré- 
paralion la plus sûre dans ses effets ; il l’a donne à la dose 
de 3 à 4 gram., de trois heures en trois heures, dans une 


298 


infusion aromatique (tilleul, mélisse, menthe, etc.) édulcorée 
avec le sirop d’orange ou de limon. Lorsque l'estomac ne 
peut supporter cette préparation, il l'administre dans un 
quart de lavement. Beaucoup d'autres médecins, tels que 
Bauley,Consbruck, Armstrong, Bang, Locher-Balber, Kunh, 
Chelius, Cloquet, Mojon, etc., ont obtenu les mêmes résul- 
tats. Après des témoignages aussi irrécusables, je me crois 
dispensé de rapporter les faits qui me sont particuliers, et 
qui m'ont pleinement convaincu de l'efficacité du colchique 
contre les aflections goulieuses et rhumatismales, lorsque, 
toute fois, l'état du malade ou des complications n’en contre- 
indiquent pas l'usage. 

Le professeur Chelius (4rchiv. géner. de méd. 1828) s’est 
assuré que l’urine de ceux qui prennent du vin de semences 
de colchique contient plus d’acide urique qu’elle n'en ren- 
fermait avant l'emploi de ce médicament. Ainsi, chez un 
goutlteux auquel il administrait ce vin, l'urine, avant qu'il 
en fitusage, contenait 0,069 d'acide urique libre ou com- 
‘biné avec l’'ammoniaque ; quatre jours après, la proportion 
était de 0,076 ; le huitième jour, de 0,091, et le douzième, 
de 0,0102. Ce résultat expliquele soulagement qu'en éprou- 
vent les goutteux. 

On a encore employé le colchique dans d'autres maladies. 
Haden, Willams, Wallis, Hasting, Abercrombie, Armstrong, 
Robert Lewins, l'ont employé dans les maladies inflamma- 
toires les plus aigues, et quelques-uns d’entre eux pensent 
qu'ilpeut avec avantage remplacer la saignée, même dans 
Ja pneumonie et les phlegmasies cérébrales. Caron Du Vil- 
lards (Guide prat. pour l'étude et le trait. des malad. des 
yeux, €. 2,p. 574) a mis en usage avec succès la teinture des 
semences, à haute dose, dans l’'inflammation de la scléro- 
tique, ainsi que dans les affections de l'œil compliquées de. 
rhumatisme et de gontte. Locher-Balber (Rev. med., 1825, 
t. 3) a guéri deux ophtalmies par ce remède. Bullock (Journ. 
des conn. méd., 1835) a traité avec succès cinq érysipèles 
au moyen de la poudre de colchique. Elliotson (Arch. génér. 
dé med., 1.16, p. 290) à guéri un prurigo chez un homme 
de soixante -dix ans, en trois semaines, en lui donnant 2 
gram. de vin de colchique trois fois par jour. 

Le docteur Ritton (Gaz. eclettica di Verona, 1835) emploie 
avec succès la poudre de colchique dans la leucorrhée. Il 
commence par {5 cent. en pilules avec du savon, trois fois 
par jour, et il élève cette dose jusqu'à 25 cent. Pendant que 
la malade suit ce traitement, elle doit s'abstenir de liqueurs 
alcooliques ; 25 cent. de colchique, pris trois fois par jour, 
suffisent ordinairement pour guérir la leuchorrhée en dix 


299 


jours. Quelques cas exigent trois semaines el même un mois 
de traitement, 

Le colchique s’est aussi montré efficace dans les affections 
nerveuses. Goss, de Dowlich {Gaz.méd. de Paris, 1833), 
a guéri trois névralgies rebelles au moyen du vin de semen- 
ces de colchique, à a dose de 30 gouutes trois fois par jour. 
Raven (the London med. and philos. Journal) emploie le 
vin ou la teinture de colchique dans la chorée, les crampes, 
l'hystérie, etc. Une jeune fille { Zrbl. med., t. 60, p.124), 
atteinte d'accès hystériques, fut guérie par l'administration 
de 30 gouttes de teinture de colchique toutes les huit heures. 
Trois enfants (2614., t.58, p.292) furent délivrés de la cho- 
rée, en trois où quatre jours, par 16.à 20 gouttes de teinture 
de colchique. 

Le docteur Ciutterburck (the London méd. Gaz., 1838 ) 

a administré le colchique avec succès dans l'inertie de luté- 
rus, tenant à une vive irritation de son parenchyme et de 
ses ligaments. Il a vu la bulbe en poudre produire, chez 
quatre femmes en couche, les mêmes effets que le seigle 
ergoté. . M. Meta {4l filiatre Sebezio, 1813) à employé le 
même moyen pour favoriser l'expulsion du placenta chez 
une femme qui, dans le cours d’une fièvre bilieuse, avait été 
atteinte d’avortement. 

Le docteur Chrishelm (Gersonund julius Magazin,B d. 7, 
p. 370) dit avoir combattu le ténia par le vin de colchique, 
à la dose d'une cuillerée à café deux ou trois fois par jour. 
On rapporte (Rust. Magaz. Band. 21, H. 2, p. 270) qu'un 
ver solitaire a été expulsé par l'usage du vin de colchique 
continué pendant cinq jours. 

Les fleurs de colchique possèdent les Eure propriétés 

que les bulbes. Garidel rapporte qu'une demoiselle suc- 
 comba pour avoir mangé trois ou quatre fleurs de colchique 
dans l'espoir de se débarrasser d’une fièvre intermittente. 
Le docteur Copland, (Kühn, Dissert. sur les colchicacees), 
Frost, Buschell, etc., les administrèrent sous forme de 
vinaigre, de teinture, contre la gouite, le rhumatisme aigu, 
le rhumatisme chronique ; ils ont observé qu elles ralentis- 
saient la cireulation. 

Il n'est pas indifférent d’ employer une préparation ou 
une autre. L'oximel convient mieux dans les cas d’hydropi- 
sie et comme expectorant , parce que le vinaigre adoucit la 
trop grande violence du colchique. Les préparations de 
semences sont, suivant le docteur Williams, plus douces et 
plus sûres que celles de bulbes. Le vin de colchique fait 
cesser promptement les accès de goutte ; il provoque des 
nausées ; mais c'est le seul inconvénient qui résulte de son 


260 


usage , quand il est prudemment administré. On peut le 
donner à haute dose en procédant graduellement el com- 
mençant par 60 à 70 gouttes, pourvu qu'on ait eu soin de le 
priver, par la filtration , d'un sédiment ou dépôt sans doute 
formé par la vératrine, au bout de quelque temps de sa pré- 
paration, et qui est si actif qu'une petite quantité enflamme 
et ulcère la membrane muqueuse de l'estomac. 

Le colchique à été employé à l'extérieur. Le docteur 
Gumpert ( Revue méd., 1.1, p.140) affirme que la teinture 
des semences a eu beaucoup de succès en frictions dans la 
goutte et le rhumatisme, surtout chez un ecclésiastique de 
cinquante ans, qui gardait le lit depuis un mois ou Six 
semaines, et qui fut guéri le cinquième jour après en avoir 
commencé l'usage. Ces frictions peuvent être employées 
comme celles que l'on pratique avec la teinture de scille, 
dans les hydropisies, el pour exciter l’action des reins dans 
l’albuminurie. 

Après la floraison , les propriétés du colchique diminuent. 
Il faut donc le cueillir avant cette époque, et, afin qu'il ne 
moisisse point, le faire bien sécher au soleil, ou mieux à 
l’étuve, et le placer dans un lieu sec. M. Wigan pense que 
le meilleur moyen de prévenir la déperdition de ses proprié- 
tés est de le réduire, lors de sa récolte, en poudre trës-fine 
avec deux ou trois fois autant de sucre : de cette manière, Il 
offre toujours le même degré d'activité dans son application 
thérapeutique. 


COLCHICINE. 


La colchicine, principe actif de la semence de colchique, 
d'une saveur âcre et amère, est très-vénéneuse. À dose to- 
xique , elle cause une inflammation violente de l'estomac et 
des intestins. Ces propriétés sont analogues à celles de la 
vératrine : mais elle est moins âcre et moins active que cette 
dernière. On l’a employée, à petite dose, comme purgatif 
drastique dans quelques affections nerveuses, rhumatisma- 
les et goutieuses, mais principalement dans les névroses 
des organes de la vision et de l'audition. 


TUSSILAGE. 


PAS-D'ANE, PAS-DE-CHEVAL, HERBE DE SAINT-QUIRIN, 
TACONNET , PROCHETON.. 
T'ussilago vulgaris .(T.) 
Tussilago farfara (L.) 
Cette plante se trouve aux bords des ruisseaux, des fon- 


56! 


taines, dans les terrains argileux du centre et du nord de 
la France. Ses feuilles et ses fleurs sont usitees. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : Infusion théiforme des fleurs, de 20 à 50 gram. p. 


kil. d'eau bouillante. 


Sirop des fleurs (4 sur 2 d'eau bouillante et 5 de sucre) de 30 à 
400 gram. 


Suc des feuilles ou des fleurs, de 50 à 60 gram. 

Extrait des feuilles ou des fleurs, de 5 à 40 gram. et plus. 

À L'EXTÉRIEUR : Décoction, de 50 à 400 kil. d'eau pour fomenta- 
tions, lotions , injectiens, fumigations, etc. Feuilles pilées en 
cataplasme, 

Propriétés, 

Le tussilage est presque inodore, et sa saveur est désa- 
gréable, amère et un peu styptique. Les fleurs sont légère- 
ment excitantes , béchiques. On les emploie dans le catarrhe 
pulmonaire, la pneumonie chronique, la phthisie scrofu- 
leuse. Les feuilles ont été employées contre les scrofules. 
Hippocrate faisait usage de la racine dans les affections de 
poitrine. Pline, Dioscoride, Galien, parlent de la fumée 
des feuilles contre la toux et l'asthme. 

Si les qualités physiques et chimiques expliquent jusqu'à 
un certain point les diverses propriétés des plantes, com- 
ment concilier les vertus toniques, fondantes, sudorifiques 
du tussilage, avec les propriétés émollientes , relâchantes , 
antiphlogistiques qui lui sont tout aussi libéralement accor- 
dées?.. L'action tonique de cette plante est trop faible pour 
qu'on puisse y avoir recours avec succès dans les maladies 
qui réclament une médication de cette nature, et elle ne 
peut convenir, à cause de son amertume, dans les cas où 
les antiphlogistiques sont indiqués. 

Fuller, Meger, Peyrilhe, Cullen ont vanté le suc des 
feuilles fraîches de tussilage ou leur décoction concentrée 
dans la phthisie scrofuleuse et les scrofules. Bodart rapporte 
des observations (Ouv. cit., p. 128) recueillies à l'hôpital 
de Sainte-Claire de Pise, en Toscane, qui prouvent, dit-il, 
l'efficacité de cette plante dans l’atonie du système capillaire 
sanguin et lymphatique, qui constitue essentiellement la 
diathèse dite scrofuleuse. Alibert. sous les yeux duquel cette 
plante a été administrée dans diverses affections scrofuleu- 
ses, ren a obtenu aucun résultat. Je n'ai pas été plus heu- 
reux dans deux cas où j'ai désiré me convaincre conscien- 
cieusement de son inefficacité dans ces affections. 

[Si Tourtelle ( A. Lorentz, Dissert. sur les mal. scropful., 
p. 20) a eu à se louer de l’usage de cette plante dans les af- 

36 


262 


fections scrofuleuses , ne peut-on pas l'attribuer à la potasse 
et à la soude avec lesquelles il en aiguisait la décoetion ? 
Baumes néanmoins (Du vice scrofuleux) dit que le tussi- 
lage est un très-bon remède contre les obstructions des glan- 
des, les éruptions cutanées, et surtout contre la toux scro- 
fuleuse et les affections des poumons. Il réussit très-bien, 
suivant lui, chez les enfants qui ont les poumons faibles, 
même lorsque la fièvre a commencé à s'établir. Il prescrit 
le suc frais des feuilles à la dose de 30 à 120 gram. dans la 
journée, ou la décoction des feuilles sèches lorsqu'on ne 
peut se procurer la plante fraîche. Peut-être le tussilage est- 
il plus actif dans le midi que dans les régions froides du nord. 

A l'extérieur, on s’est servi des feuilles de tussilage pilées, 
en cataplasme, pour adoucir et dissiper les inflammations. 
Que penser des vertus de la décoction des fleurs de cette 
plante dans le vin, à laquelle on ajoute un peu de myrrhe, 
de mastic et de litharge, et qui est excellente, disent Simon 
Pauli et Sennert, contre les ulcères gangréneux qui viennent 
aux jambes des hydropiques ? 


THYPHA, 


MASSETTE D'EAU, CHANDELLE D'EAU, ROSEAU DES ÉTANGS, 
ROSEAU DE LA PASSION. - 


Thypha palustris major (L.) 
Thypha latifolia (T.) 


Cette plante vivace est très-commune dans les lieux aqua- 

tiques. | 
Propriétés. 

On peut employer les aigrettes de Ja massette d'eau au lieu 
de coton, dans le pansement des brûlures. On trouve.diffi- 
cilement le coton cardé sous le toit du pauvre. Le docteur 
Vignal {Essai sur les brûlures, thèse, 1833} a publié quel- 
ques observations qui prouvent les bons effets du pansement 
des brûlures suppurarnites avec les aigrettes du typha à larges 
feuilles. 

[ Le docteur Durant (Ann. de la Soc. des Sc. nat de Bru- 
ges, 1840) a employé ce duvet avec avantage contre les en- 
gelures ulcérées ; il hâte la cicatrisation el procure une 
guérison solide. On peut employer de la même manière et 
dans les mêmes cas, l'espèce de coton qui tombe en abon- 
dance du peuplier du, Canada à l'époque de la floraison 
(voyez Peuplier.) De Candolle (Essai sur les prop. des plant., 


563 


p. 306) dit que le pollen du typha remplace dans quelques 
pharmacies la poudre de lycopode, à cause de la facilité d'en 
recueillir une grande quantité à la fois lorsqu'il est en fleur. 

La racine de cette plante, qui est grosse el noueuse , con- 
tient, d’après Raspail (Nouv. syst. de chim. organ.) et 
Lecoq (Journ. de chim. méd. t. 4, 1.177), une fécule abon- 
dante qui, au contact de l’air, prend une teinte rougeûtre, 
et forme , avec l’eau bouillante , une gelée semblable à celle 
du salep. Ceite racine sert de nourriture aux Kalmoucks. 
Elle peut fournir une ressource alimentaire aux indigenis 
dans les temps de disette. ] 


VALERIANE, 
VALÉRIANE SAUVAGE, HERBE AU CHAT. 


Valeriana sylvestris major {T .} 
Valeriana officinalis (L.) 


Cette plante se trouve sur le bord des rivières, aux lieux 
un peu humides, dans les bois. La racine est usitée. 


Préparations et doses, 
A L'INTÉRIEUR : Décoction ou infusion à vase clos, de 15 à 60 gram. 
par kil. d’eau. 


Poudre, de 2 à 50 gram. et plus,len bols, pilules ou dans du vin. 
T'einture (4 sur 4 d'alcool à 24° ou d’éther), de 2 à 50 graw. en 
potion. 


Extrait alcoolique (2 sur 7 d'alcool à 214 } de 4 à 40 gram.. en bols, 
pilules, etc. 


Extrait aqueux (par décoct. 1 sur 8 d'eau) idem. 

Sirop (4 sur 8 de sirop}, de 50 à 60 gram. en potion. 

Huile essentielle, de 20 à 50 centigram. en potion. 

Eau distillée (rarement employée), de 60 à 100 gram. en potion. 

‘ A L'EXTÉRIEUR : Décoction de 30 à 100 gram. par kil. d’eau, pour 
bains, lavements, fomentations. 

Huile et teinture, en frictions. 

Poudre, en introduction dans le nez, comme errhin. 


Propriétés. 


La racine de valériane sauvage est d’une odeur forte, 
nauséeuse, désagréable, et d’une saveur âcre et amère. A 
haute dose, cette racine est un excitant énergique dont l’ac- 
tion se porte sur le système nerveux et plus particulièrement 

sur le cerveau: elle accélèrele pouls, cause de l'agitation, des 
éblouissements, des congestions vers la tête, des mouve- 
ments convulsifs, des douleurs vagues , un sentiment de 
constriction vers la poitrine ; elle provoque la sueur, les 


064 


zrines, les règles; mais elle ne produit presque jamais ni 
yomissement ni purgalion, quoique son amertume et son 
odeur désagréable lui aient fait attribuer ces effets. 

À petite dose, la valériane augmente l’action des organes 
digestifs, sans en troubler les fonctions, même à dose as- 
sez élevée, ainsi que l'ont constaté Tissot, Bergius, Vaidy, 
et récemment MM. Trousseau et Pidoux (ouv. cut., t. 1), 
qui en ont pris eux-mêmes de hautes doses, tant en infu- 
sion qu'en substance, sans éprouver le moindre dérange- 
ment dans les fonctions de la vie organique. Elle leur a cau- 
sé seulement un peu de céphalalgie, de l'incertitude et de la 
susceptibilité dans l'ouie, la vue et la myotilité. C’est donc 
uniquement , disent-ils, sur le système cérébro-spinal qu’'a- 
git cette substance, qu’ils rangent parmi les anti-spasmodi- 
ques purs. M. Giacomini { Trad. de la pharmacol. p. 579) 
prétend que la valériane produit un état d’hyposthénie et 
non d’excitation. Tissot avait déjà fait remarquer, en effet, 
qu'à haute dose elle produisait un malaise général, de la 
faiblesse dans les membres, phénomènes qu’on pouvait pré- 
venir en y associant du macis, qui est une substance hypers- 
théniqme. / 27 €2. 

La valériane est antispasmodique , vermifuge , fébrifuge. 
On l’administre avec avantage dans les névroses en général, 
dans l’hystérie , la chorée , l’hypocondrie, l'hémicranie, la 
catalepsie, l’asthme convulsif, le tremblement des membres, 
le hoquet opiniâtre, le vomissement nerveux, la gastralgie, 
l'hémiplégie et les paralysies circonscrites liées à des né- 
vroses , les palpitations nerveuses, les flatuosités, l'aphonie 
nerveuse, les convulsions des enfants et surtout l’épilepsie, 
contre laquelle elle a été regardée comme spécifique. On l'a 
aussi préconisée contre les fièvres ataxiques et adynamiques, 
le typhus. 

L'action de la valériane sur le cerveau et le système ner- 
veux est constatée par l'observation ; aussi a-t-elle été de 
tous temps administrée dans les maladies nerveuses. Depuis 
l’heureux emploi que Fabius Columna en a fait sur lui-même 
contre l’épilepsie, un grand nombre d’observateurs , parmi 
lesquels je citerai Scopoli, Rivière, Tissot, Haller, Gilibert, 
Sauvages, Macartan, Marchant, Bouteille, etc., ont constaté 
son efficacité dans cette fâcheuse névrose, soit chez Îles 
enfants, soit chez les adultes, surtout quand Paffection était 
purement nerveuse et produite par Ja peur, la colère, l’ona- 
nisme, etc. Citons les faits : 

Scopoli {Flor. Carniol., 1760) a guéri un individu affecté 
«d’épilepsie depuis trois années , par l'usage de la valériane. 
Tissot (Traite de l'épilepsie, 1770) donne à la valériane la 


065. 


première place dans le catalogue des anti-épileptiques ; iF 
rapporte douze cas de guérison obtenus par ce médicament, 
et assure qu'il a soulagé tous les malades qui en ont fait: 
usage. Chomel (plant.usuel.) atteste avoir guéri par le- 
même moyen plusieurs épileptiques , et notamment un gar- 
çon de douze ans, qui était atteint depuis trois ou quatre 
ans. Gilibert a guéri trois sujets atteints de la même mala- 
die, en donnant cette racine en poudre à haute dose et en 
infusion vineuse. Marchant |{ Hist. de l’Acad. des Sc., 1766) 
soulagea presque tous les épileptiques auxquels il fit pren- 
dre la valériane , et en guérit parfaitement quelques-uns. 
Sauvages (nosol.) cite le fait d'un individu qui depuis douze 
ans éprouvait un accès d’épilepsie toutes les fois qu’il rem- 
plissait les devoirs conjugaux , et qui fut guéri par l'usage 
de la valériane en poudre et en infusion continué pendant 
trois mois. Bouteille ( anc. Journ. de Méd., t.48) a rapporté 
cinq observations en faveur de cette plante contre l’épilep- 
sie. Macartan (Journ. géner. de méd., t.25, p. 26) a guéri, 
par ce remède , une demoiselle âgée de dix-neuf ans qui 
était épileptique depuis dix ans. Le docteur Chauffard (même 
Journ., juin 1823) a rapporté trois observations de guérison 
de cette maladie au moyen de la valériane administrée à 
grandes doses. Il n’y avait point eu de récidive dix ans après 
{même Journ., mars 1828, p. 299). M. Gibert (Revue med., 
1835) a employé avec succès, dans les mêmes cas, l'extrait 
de cette racine à haute dose. Gairdner (the Edinb. med. and 
surg. Journ., 1828) a aussi préconisé cecile plante comme 
anti-épileptique. J. Franck dit qu’elle occupe comme telle 
la première place. M. Dhuc à présenté en 1838, à l’Académie 
de médecine de Paris , un mémoire où sont consignées sept 
observations d’épilepsie, dont six militent en faveur de la 
valériane. 

Ainsi que nous l'avons dit plus haut, on a souvent vu 
réussir la valériane dans l’épilepsie essentiellement ner- 
veuse. Je l’ai employée avec succès dans deux cas où la 
maladie pouvait être attribuée à une cause efficiente de cette 

nature ; ces deux observations méritent d’être connues. 
Première observation. Le sieur Boucher, voiturier à 
Saint-Pierre-lès-Calais, âgé de vingt ans, d’un tempérament 
sanguin, d’une forte constitution, fut pris, pour la première- 
fois, et sans cause connue, d'un accès d’épilepsie dans le: 
courant du mois de juin 1829. Vingt-einq jours après un: 
second accès eut lieu. Un troisième survint , et ils se succé- 
dèrent à des intervalles plus ou moins rapprochées, et avee 
tous les caractères de cette névrose portée à un haut degré 
d'intensité. La mitladie existait depuis six mois lorsque je 


566 


fus appelé. Je pratiquai une ample saignée du bras (800:gr.) 
et je mis le malade au régime végétal. Les accès se ralen- 
tirent et devinrent moins violents. Des sangsues, sa 0 
à l'anus , saignèrent abondamment. 

Malgré ce traitement et le régime continué pendant deux 
à trois mois, les accès d'épilepsie persistaient d’une manière 
variable , soi sous le rapport de l'intervalle qu'ils laissaient 
entre ceux, soit sous celui de leur durée et de leur violence. 
Je me décidai à administrer la valériane en poudre, d’abord 
à la dose de 2 grammes, en augmentant tous les trois jours 
de 1 gramme. J'arrivai ainsi à Ta dose de 12 grammes , que 
je faisais prendre en trois fois dans la journée. Après quinze 
jours de ce traitement, un accès eut lieu ; mais il fut moins 
violent et était revenu après un intervalle plus grand. Huit 
jours après, le malade ne fut que légèrement atteint et ne 
perdit pas connaissance. La dose de la valériane était alors 
portée à 25 grammes ehaque jour, administrés en cinq fois. 
Depuis ce dernier et léger accès, aucun sy mptôme de af- 
fection ne reparut. J'ai revu Boucher dix ans après sa gué- 
rison , il n'avait éprouvé aucune récidive ; mais comme il 
était très-sanguin , il se faisait fréquemment saigner. J'ai 
appris qu il était mort en 1846 d'une apoplexie foudroyante. 

Deuvième observation. Le nommé Fourrier, menuisier à 
Hubersent , âgc de trente ans, d’un tempérament Iymphati- 
que (cheveux blonds, teint pâle, taille moyenne, constitu- 
tion grêle), célibataire, adonné à la mastupration depuis 
J'âge de puberté, fut pris, pour la première fois, d’un accès 
d'épilepsie dans le courant du mois d'août 1836, sans cause 
déterminante. Cet accès , dans lequel le malade perdit com- 
plètement connaissance, fut suivi d’un autre plus violent 
huit jours après. Ils se rapprochèrent ensuite au point qu’il 
n'y avait plus entre eux qu’un intervalle d’un, de deux ou 
{rois jours. Quand je fus consulté, la maladie datait de huit 
mois. Je prescrivis une application de sangsues à l'anus 
RTS dérivative, des pédiluves sinapisés, de légers laxa- 
üfs, l’abstinence de Ja mastupration , et une alimentation 
ordinaire. Aprè ès huit jours de } emploi de ces moyens pré- 
paratoires , j'administrai la racine de valériane en poudre à 
la dose de quatre grammes chaque matin. Cette dose fut 
prise pendant dix jours, sans changement appréciable dans 
J'état du malade. Je portai de suite Ta dose à 8 gram. Après 
dix jours, il y eut diminution dans la violence des accès. On 
donna 10 grammes de la même poudre et l’on augmenta 
d'un gramme tous jes cinq jours. J'arrivai ainsi à 20 
grammes, que le malade avalait en quatre prises dans les 
vingt-quatre heures. Dès -lors, non-seulement les accèsfu- 


267 


rent moins violents, mais il y ent aussi entre eux de plus 
grands intervalles. Le malade n ’éprouvait plus d'attaque que: 
tous les quinze à vingt jours. Je continuai l'usage du médi- 
cament à la dose de 20 grammes pendant près de deux mois. 

Au printemps de 1837, les accès ne revenaient plus qu' à 
des intervalles d’un à deux mois; mais leur intensité ne 
diminuait pas dans la même proportion. Cependant, le ma- 
lade, vivement impressionné par la crainte de l’incurabilité 
de son mal, ne se livrait plus à la mastupration. Afin de 
soustraire J’ action de la valériane à l'empire de l'habitude, 
je crus devoir en suspendre l'usage. Le malade fut près d'un 
mois sans en prendre. Pendant cet intervalle je lui fis admi- 
nistrer, à deux reprises, le sirop de nerprun, qui provoqua 
chaque fois un vomissement et six à huit évacuations al- 
vines. 

. Les accès ne furent ni plus violents ni plus fréquents. Je 
repris l'usage de la valériane en poudre, en commençant de 
suite à Ja dose de 10 gram. en deux fois, le matin à jeun, 
et augmentant de { gram. de huit jours en huit jours. Vers 
la fin de année, le malade en prenait 32 gram. chaque 
jour. Les accès étaient devenus Eeaucoup plus rares el 
ne duraient que quelques secondes, sans perte totale de 
connaissance. Je fis continuer l'emploi du médicament, bien 
que le malade éprouvàt quelque peu de pesanteur de tête 
et d’éblouissement, effets bien connus de la valériane admi- 
nistrée à haute dose. 

Après dix-huit mois de ce traitement, le malade était com- 
plètement guéri. Il a toujours joui depuis de la meilleure 
santé. 

Trois choses sont à remarquer dans cette observation : 
4° la cause de Ja malaäïe, que l’on peut attribuer à la funeste 
habitude de l’onanisme; 2° les doses élevées auxquelles 
la valériane à été administrée et qui ont produit des étour- 
dissements et une pesanteur de tête, dont l'effet a peut-être: 
contribué révulsivement, ou comme modificateur de la sen- 
sibilité cérébrale, à amener la guérison ; 3° la longue durée 
du traitement et la persévérance dans l’emploi varié du 
même moyen curalif. 

Je dois avouer que, dans d’autres cas d’épilepsie , et ils 
sont au nombre de huït, je n’ai obtenu, dans les uns aucun 
effet, dans les autres seulement une amélioration plus ou 
moins prononcée, malgré l'usage continué pendant long- 
temps de la racine de valériane. 

J'ai souvent employé la valériane dans la chorée ; elle en 
a presque toujours calmé les symptômes après l'usage des 
moyens généraux antiphlogistiques , les bains, etc. Mais, 


068 


dans des essais comparatifs que j'ai faits, j'ai été convainc 
que, quelque soit le traitement, sans traitement même, celte 
névrose à toujours à peu près la même durée et se dissipe 
souvent d'elle-même, surtout lorsqu'elle à lieu, ainsi que 
cela arrive ordinairement, à Pâge de puberté. Je n’ai pas eu 
souvent l’occasion d'employer la valériane contre d’autres 
névroses dans ma pratique rurale : grâce à une civilisation 
arriérée , ces affections sont rares à la campagne. Mais je 
l'ai mise en usage avec succès dans ma pratique urbaine 
contre une foule d’affections nerveuses indéterminées et qui 
se rapportent plus ou moins à l’hystérie ou à l’hypocondrie. 

[ La vertu vermifuge de cette plante ne fait plus de doute. 
Marchant (loc. cit.) l'a surtout employée avee succès. Je 
Fadministre de préférence dans les cas d’affections ner- 
veuses sympathiques produites par la présence des vers 
intestinaux. Elle satisfait ainsi à deux indications à la fois. 
Il m'est souvent arrivé de l’administrer dans la seule inten— 
tion de traiter une névrose que je croyais idiopathique, et de 
découvrir, par l'expulsion de plusieurs vers lombricoïdes 
qui mettaient un terme à la maladie, la véritable cause de 
cette dernière. Ces résultats inattendus m'ont engagé dans. 
des circonstances embarrassantes, et après avoir inutile- 
ment employé une médication rationnellement indiquée, à 
avoir recours aux anthelmintiques pour m’assurer, au point 
de vue de l’étiologie , de l'existence ou de Ja non -existence 
de vers intestinaux. C’est une pierre de touche qui m’a 
révélé , comme cause unique, l'irritation sympathique pro- 
voquée par ces derniers dans trois cas de chorée et dans 
deux cas d’épilepsie : À juvantibus et lædentibus indicatio. 
L’incertitude de nos connaissancees et la faiblesse de mes 
lumières m'ont plus d'une fois obligé, dans le cours d’une 
Jongue pratique, d'appliquer avec prudence ce principe 
regardé comme une source d'indications, et dont lesanciens. 
faisaient grand usage.] 

J'emploie fréquemment la valériane dans les fièvres ady- 
namiques ou putrides, dans les fièvres ataxiques et vermi- 
neuses : c’est ma serpentaire de Virginie. 

On doit à Vaidy (Journ. de méd. de Cornsart, t. 18, p: 
385), médecin militaire dont j'ai été à même d’appréeier le 
mérite, seize observations sur l'emploi de la valériane à 
forte dose contre les fièvres intermittentes de tous les types. 
Il résulte de ces observations que des sujets affaiblis, çca- 
chectiques et même infiltrés, ont été guéris à la fois de Ja 
fiévre et de ces complications. Ces faits et beaucoup d’au- 
tres ne laissent aucun doute sur la possibilité, dans certains. 
cas, de substituer la valériane au quinquina. 


569 


On peut l'associer avec avantage, comme fébrifuge, à fx 
gentiane ou à l'écorce de saule. 

On à préconisé la poudre de valériane, prise comme du 
tabac, contre l’affaiblissement amaurotique de la vue. Je 
J'ai employée avec avantage dans ce cas : elle agit comme 
sternutatoire. Les feuilles de valériane sont détersives. Do- 
doens {Stirp. hist., p. 350) en employait la décoction en 
gargarisme dans les ulcérations enflammrées de la bouche. 

La valériane qui croît sur les montagnes est plus énergi- 
que que celle qu’on récoite dans les lieux bas et humides, 
L'infusion ne suffit pas pour dépouiller les racines de cette 
plante de tous ses principes. On doitsla faire bouillir dans 
un vase bien clos, afin d'empêcher l’évaporation de ces mé- 
mes principes. 


VAREC VESICULEUX, * 
FUCUS VÉSICULEUX, CHÊNE MARIN, BRAC. 


Fucus marinus (Bauh.) 
Fucus vésiculosus (L.) 


Cette plante se trouve sur les bords de là mer, où elle 
exhale une odeur très-désagréable; c’est le plus commun et 
le plus volumineux de tous les fucus de notre continent. 
Pline en parle sous le nom de quercus marina ( Lib. 12, 
c. 25), et lui attribue une propriété anti-goutteuse et aussi 
celle de calmer les douleurs inflammatoires. Ganbius, Bas- 
ter, etc., le recommandent comme fondant dans les scro- 
fules, le squirre, les engorgements glanduleux, etc. Stel- 
ler indique sa décoction comme pouvant combattre la 
diarrhée. Russel se servait de sa décocetion pour frictionner 
les tumeurs scrofuleuses. J'ai moi-même employé avec 
succès cette décoction en fomentation et en cataplasme, avec 
une suffisante quantité de farine de fève, sur les engorge- 
ments lymphatiques, glandulaires et œdémateux, chez des 
individus qui habitaient les bords de la mer. Réduiten char- 
bon (œthiops végétal), il a été employé avec succès dans 
le traitement du goître et les affections scrofuleuses. 

L'10nE, que Courtois a découvert dans ce fucus, en 1812, 
et qu’on en a extrait si abondamment depuis, est d’une 
efficacité reconnue dans ces maladies. C’est une substance 
énergique qui, à haute dose, peut causer l'empoisonnement ; 
à petite dose, il stimule spécialement le système glandulaire 
et lymphatique, et produit quelquefois, comme fondant, 


570 


l'atrophie des glandes mammaires et du corps thyroïde. On 
l’'emploie non-seulement contre le goître et les scrofules, 
mais encore contre les engorgements lymphatiques quel- 
conques, les indurations, les squirres, les adénites, la blen- 
norrhée, la leucorrhée; l’aménorrhée, la chlorose, la phthi- 
sie pulmonaire, la syphilis constitutionnelle, etc. 

Les préparations de l’iode jouissent des mêmes propriétés 
et ont les mêmes inconvénients que l’iode. Cependant on re- 
garde comme moins nuisible et plus efficace l’iodure de potas- 
sium, dont l'emploi a été reconnu si utile dans les affec- 
tions scrofuleuses et les symptômes tertiaires de la syphilis. 
Dans ce dernier cas, M. Ricord obtient de grandsavantages 
de la préparation suiVante : décoction de houblon ou de sa- 
ponnaire, { kil., iodure de potassium, 1 gram., on porte la 
dose d'iodure potassique graduellement à 4 et jusqu’à 8 gram. 
par jour, et plus. 

Nous ne nous occuperons pas des diverses combinai- 
sons de l’iode avec le fer, le mercure, le plomb, etc., qui 
forment des iodures dont l'emploi est connu de tous les mé- 
decins; nous passerons sous silence aussi les considérations 
thérapeutiques qui se rattachent à l'usage de cette substance 
et que l'on trouve dans tous les traités de matière médicale. 
Je dirai, néanmoins, que l’on doit en suspendre l'usage dès 
qu'il produit l’amaigrissement ou qu’il irrite trop les voies 
digestives. 


VAREC IFELMINTHOCORTON,' 


MOUSSE DE MER, MOUSSE DE CORSE. 


Ce fucus croît sur les côtes de l'ile de Corse, sur 
celles de Sardaigne et de la Méditerrannée. La substance 
que l'on trouve chez les pharmaciens, sous le nom de mousse 
de Corse, ne contient, tout au plus, qu'un tiers de fucus 
helminthocorton ; le resté se compose, suivant Decanddolle, 
d'environ vingt-cinq espèces d'algues. Ce mélange, qu'il ne 
faut pas confondre avec la coraline blanche (coralina offici- 
nals), dont les propriétés sont presque nulles, a une odeur 
saumâtre et désagréable. 


Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : décoction, de 6 à 15 gram. pour 459 à 200 gram. 
d'eau bouillante ou de lait. 
Gelée (64 de décoction concentrée sur 46 de sucre, 46 de vin et 
4 de colle), de 40 à 400 gram. 


971 


Sirop (4 sur 2 d'eau tiède et G de sucre), de 30 à 100 gram. en 
potion. 


Poudre, de 4 à 8 gram. en électuaire ou dans du lait, du vin, etc. 

A L'EXTÉRIEUR : décoction dans l’eau ou le lait, en lavement, de 
50 à 60 gram. 
Propriétés. 

La mousse de mer, dont l'emploi comme vermifuge est 
très-ancien, futsurtout préconisé en 1775 par Dimo Stephano 
. Poli (Pi oyage en Grèce) ; elleest maintenant connue de toutes 
les mères comme le moyen le plus doux et le plus appro- 
prié aux organes digestifs des enfants, pour tuer les vers 
lombrics. On peul en faire usage dans les fièvres vermi- 
neuses, lors même qu’il y à irritation de l'estomac ou des 
intestins. 

Napoléon, lors de son exil à Sainte-Hélène, fit connaître 
à ses médecins l’usage tout-à-fait populaire, en Corse, de 
Ja mousse de mer contre les squirres et le cancer non ulcéré. 
Le docteur Faarr dit en avoir obtenu des résultats satisfai- 
sants dans les dégénérescences squirreuses des glandes; 
il l’administre en décoction (32 gram. pour un kil. d’eau), 
à la dose de trois ou quatre verres par jour. L’effet favorable 
du médicament est indiqué par la coloration en vert des 
excréments, qui sont accompagnés d'une quantité notable 
de Ilymphe coagulable. Malgré le peu de confiance qu'inspi- 
rent de telles assertions, il serait bon de répéter ces essais. 
Entre le sceptique et désolant anatomo-pathologiste, qui 
abandonne ses malades, et le thérapeutiste qui les console et 
tâche de les guérir, lors même qu'ils sont regardés comme 
incurables, il n’y a point à balancer pour le choix. Le pre- 
mier voit toujours dans le malade des lésions organiques 
telles que le cadavre les lui a montrées, sans songer que 
ces résultats des progrès du mal n'ont pas toujours existé, 
et qu’il eùt peut-être été possible de les prévenir; le second 
ne se fait pas illusion sur la nature de la maladie, mais il 
remplit avec prudence les indications qui se présentent, agit 
toujours, tente tous les moyens possibles, et réussit quelque- 
fois: In desperatis satius est anceps remedium, quâm nullum 
(Cels). 

M. Gaultier de Claubry (Ann. chim. t. 93, p. 73) a cons- 
taté, dans la mousse de Corse, l'existence de l'iode. Il est 
à croire que c’est à cette substance qu'elle doit la propriété 
fondante dont nous venons de parler. 


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972 


VARIOLAIRE AMÉÈRE. * 


Variolaria amara (Achard). 
Lichen fagineus (Neck.) 


Ce lichen se trouve assez abondamment sur le charme, le 
hêtre, le châtaignier. 

Cette plante, d’une saveur amère analogue à celle du quin- 
quina, à été employée comme fébrifuge. Le docteur Dacier 
(Journal de méd. et de chir. de Toulouse) en a obtenu des 
résultats avantageux, administrée à la dose de 50 cent. à 
1 gram. pour les adultes, et à celle de 20 à 40 cent. pour 
les enfants au-dessous de dix ans. «Plus d’une fois, dit ce 
médecin, j'ai pu constater ses heureux effets dans toutes 
les saisons, sur des malades de iout àge, de tout sexe, et de 
tout rang ; il m'a paru un remède sûr contre la fièvre quo- 
tidienne, avantageux dans la fièvre tierce, fort incertain 
contre la fièvre quarte. » Le docteur Casseber, en Allemagne, 
et de Barreau, en France, avaient déjà constaté la propriété 
fébrifuge de la variolaire. 

Cette plante, suivant Alms (4rch. de botan., t. 2, p. 380), 
contient un principe cristallisable auquel il donne le nom de 
picrolichénine. Les expériences de MM. Filhol et Bou- 
chardat font présumer que le principe amer contenu dans 
cette plante, est de la cétrarine. 


VELAR, 


ERYSIME OFFICINAL, SISYMBRE OFFICINAL, HERBE AU 
CHANTRE, TORTELLE, MOUTARDE DES HAIES. 


Erysimum vulqare (T) 
Erysimum officinale (L.) 


Cette plante se rencontre partout sous nos pas, dans 
les chemins, le long des haies, des murs, ete. On emploie 
l'herbe, les graines, la plante fraîche. 


Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : infusion, de 50 à 60 gram. par kil. &'eau bouillante. 
Suc, de 45 à 50 gram. 
Sirop (4 sur 42 d'eau bouillante et 24 de sucre), de 50 à 100 gram. 
en potion. 
Conserve (4 sur 2 de sucre), de 45 à 50 gram. 
Poudre, de 2 à 4 gram , enélectuaire, bols, etc. 
A L'EXTÉRIEUR : décoction, sue, poudre, etc. 


913 


Propriétés. 


L’érysimum est inodore; les feuilles, et surtout les se- 
mences, ont une saveur àcre et piquante. Cette plante agit 
sur nos organes à peu près Comme l'alliaire, sa congénère. 
Le sirop d'érysimum était très-employé dans le siècle 
dernier ; on l’a abandonné dans la médecine urbaine comme 
tant d’autres préparations d’une utilité incontestable, pour 
le remplacer par d’autres moins efficaces et d’un prix plus 
élevé. Ne vaudrait-il pas mieux lui rendre sa place dans nos 
officines que d'y perpétuer les dépôts coûteux des sirops de 
Lamouroux, de nafé d'Arabie, etc., que le charlatanisme 
accrédite, et que l’on emploie autant par habitude que par 
conviction ? 

J'emploie souvent l’infusion miellée de velar dans les af- 
fections catarrhales pulmonaires chroniques,etje m'en trouve 
très-bien. 

[Lobel (Sérp. advers. nov. p. 69), vante beaucoup le si- 
rop d'érysimum contre l'enrouement. Vicat préconise aussi 
le sirop simple de cette plante; il dit avoir guéri par son 
usage un enrouement qui était survenu chez un prédicateur, 
et contre lequel on avait inutilement employé une foule de 
remèdes. Le nom d’herbe-au-chantre vient, dit-on, d’un 
passage d'une lettre de madame de Sévigné, où cette femme 
célèbre dit qu’un chantre de Notre-Dame fut guéri, par son 
usage, d’un enrouement cousidérable dont il était affecté 
depuis plusieurs mois.] 

Les semences d’érysimum sont'antiscorbutiques comme 
celles de moutarde et de roquette, mais elles ont moins d'’é- 
nergie. Les feuilles sont aussi antiscorbutiques ; décoctées 
dans l’eau ou le vin, elles peuvent être employées en garga- 
rismes dans les stomacaces, l’'amygdalite chronique, etc. 

Les anciens employaient un onguent d’érysimum contre 
les cancers et les tumeurs squirreuses; ils pilaient la plante 
dans un mortier de plomb avec du miel, en consistance de 
pommade. Un peu d’oxide de plomb, se mêlant à l’on- 
guent, lui donnait une couleur grise. Ce remède, que je n’ai 
jamais employé, peut être très-utile contre certains ulcères 
sordides, et, comme résolutif, dans les engorgements lym- 
phatiques et scrofuleux. Pour l'usage externe, je préfère 
à cette plante l’alliaire, dont j'ai retiré de grands avan- 
tages. (Voir ALLIAIRE, p. 15.) 


974 


VERGE D'OR. 


Virga aurea vulgaris latifolia (T.} 
Solidago virga au*ea (L.) 


La verge d’or est très-commune partout, dans les bois, 
les prairies, les lieux incultes, etc. On emploie l'herbe et 
les sommités fleuries. 

Cette plante est astringente, diurétique. Conseillée jadis 
dans les hémorrhagies utérines, la dyssenterie, la néphrite 
calculeuse chronique, la gravelle, le catarrhe vésical, etc., 
elle est presque inusitée aujourd’hui, bien qu’elle ne soit pas 
tout-à-fait dépourvue de propriétés On la donneen infusion 
théiforme (15 à 100 gram. par kil. d'eau) ou en poudre (5 à 
10 gram.) dans du vin blanc ou en électuaire, pilules, etc. 

Arnauld-de-Villeneuve dit avoir vu de vieux ulcères des 
jambes guérir en neuf jours par l'application des feuilles 
fraiches de verge d’or, renouvelées matin et soir; mais ce 
même auteur, recommandab'e d'ailleurs sous plusieurs rap- 
ports, dit aussi qu’un gros de poudre de cette plante, infusé 
du soir au matin dans un petit verre de vin blanc, et conti- 
nué douze ou quinze jours, brise la pierre dans la vessie! 

…. Risum lenealis amici. 


VÉRONIQUE, 


VÉRONIQUE OFFICINALE, VÉRONIQUE MALE, 


Veronica mus supina et vulgatissima (T } 
Veronica officinalis (L ) 


La véronique se trouve dans toute la France; elle croît 
dans les bois et sur les côteaux arides. 


Préparations et doses. | 
A L'INTÉRIEUR : infusion, de 45 à 50 gram. par kil, d'eau bouillante. 
Eau distillée (4 sur 3 d'eau), de 50 à 100 gram. 
Sue exprimé, de 30 à 60 gram, 
Extrait par décoction (4 sur 6 d'eau), de 4 à 4 gram. 


Extrait alcoolique, do. 
A L’EXTÉRIEUR : décoction pour lotions, fomentations , sue, etc. 
Propriétés. 


La véronique, d’une odeur nulle, d’une saveur un peu 


919 


amère, est légèrement excitante; elle a été employée dans 
les catarrhes pulmonaires chroniques, la dispepsie, les fla- 
tuosités, etc. En infusion théïforme, elle provoque, dit-on, 
la sécrétion de l'urine et facilite l’expectoraticn. 

La véronique doit être mise au nombre de ces plantes 
auxquelles on à attribué une foule de vertus contradictoires, 
et recommandées contre des maladies qui demandent des 
toniques et dans celles qui ne réclament que des antiphlo- 
gistiques. Nos paysans emploient les feuilles de véronique 
mâle séchées, en guise de thé; ils préfèrent cependant, pour 
cel usage, les sommités et les feuilles d’aigremoine. Le seul 
avantage qu'ils en retirent, c’est de leur épargner l'achat du 
thé; car c’est bien plutôt à l’eau et à la chaleur qu'il faut 
attribuer l'effet sudorifique et diurétique de la véronique, 
qu'aux vertus de cette plante. 

[Si l’on en croit Johan Franke, auteur aussi prodigieux 
d’érudition que dépourvu de goût et de jugement (Poly- 
chresta herba veronica, Ulmæ 169%), la véronique peut suf- 
fire seule à toutes les indications, et guérir toutes les 
maladies. Le célèbre Hoffmann lui-même ne tarit point sur 
l'éloge de certe plante (Dissert. de infus. veronicæ, etc., 
Halæ 169%). Il ne faut pas moins se défier des panégyristes 
des médicaments que de ceux des héros, dit le judicieux 
Hailer. Les éloges pompeux prodigués à des plantes inertes, 
ou dont on a exagéré les vertus, n’ont pas peu contribué à 
discréditer la thérapeutique végétale indigène. Si on se fut 
renfermé dans les limites d'un raisonnement fondé sur la 
rigoureuse observation des faits, la pénurie où nous croyons 
être à cetégard, et qui nous porte à payer chèrement les 
secours de l’étranger, n'eûi jamais existé que pour un pelit 
nombre de substances. ] 


VERVEINE, 
HERBE SACRÉE. 


Verbena communis flore cœruleo (T.) 
Verbena officinalis (L.) 


La verveine est très-commune dans les champs, le long 
des chemins, des haies, etc. 

L'étymologie du mot verveine,composé du mot latin herba 
veneris, rappelle les propriétés que les anciens attribuaient 
à cette plante; ils la croyaient propre à rallumer un amour 
près de s’éteindre. C'était avec certe plante que les prêtres 


5716 


nettoyaient les autels pour les sacrifices, d’où vient le nem 
d'herbe sacrée {herba sacra). Les druides la faisaient entrer 
dans l’eau lustrale, et s’en servaient pour prédire l'avenir. 

On a vanté la verveine comme antispasmodique et diapho- 
rétique; on l’employait aussi comme résolutive, dans la 
pleurodynie, les contusions, les douleurs rhumatismales, etc. 

Autrefois la verveine guérissait les fièvres intermittentes, 
l'hydropisie, l'ictère, la chlorose, les coliques, les maux de 
gorge quelconques, les vapeurs, les ulcères, l’ophtalmie, la 
pleurésie, la céphalalgie, et augmentait le lait des nourrices. 
Encore aujourd'hui, dans nos villages, on l’applique en ca- 
taplasme avec du vinaigre sur les points pleurétiques. Son 
suc rougeâtre, qui teint le linge, est pris pour du sang attiré 
par la force du médicament, auquel on ne manque jamais 
d'attribuer le succès, quoique l'effet, si effet il y a, ne puisse 
être dû qu’au vinaigre. 

Les médecins reconnaissent généralement que les vertus 
médicinales de la verveine ne reposent que sur des faits 
douteux, de fausses observations ou des préjugés. Si cette 
plante à quelque propriété tonique et astringente, c'est à 
un degré si faible, qu'elle ne mérite aucunement de conser- 
ver une place dans la matière médicale. 


VESSE-LOUP GÉANTE, 


LICOPERDON VESSE-DE-LOUP, LYCOPERDON GIGANTESQUE, 
YESSE-LOUP DES BOUVIERS, BOVISTA. 


Lycoperdon vulgare (T.) 
Lycoperdon bovista (L). 


Ce champignon globuleux , blanchâtre, jaune quand il 
est sec, de volume varié, mais souvent de la grosseur de la 
tête d’un homme, quelquefois ayant, au rapport de Bulliard, 
dix-huit, vingt et même vingt-trois pouces de diamètre, croît 
aux lieux sablonneux et humides, sur la lisière des bois, 
principalement après les pluies ; il est rare dans nos dépar- 
tements du Nord, mais on y rencontre plus fréquemment la 
vesse-loup verruqueuse ou commune, qui a les mêmes pro- 
priétés (lycoperdon verrucosum). 

La vesse-de-loup était très employée autrefois contre les 
hémorrhagies externes. Félix Plater arrêtait le flux hémor- 
rhoïdal excessif en introduisant la poudre de vesse-de-loup 
dans le reetum. Dans quelques contrées de l'Allemagne 


577 


les chirurgiens-barbiers s’en servaient pour arrêter les hé- 
morrhagies traumatiques les plus graves. On la préparait en 
l’arrosant en été pendant quinze jours avec de l'eau dans la- 
quelle on avait fait dissoudre du sulfate de zine, et, chaque 
fois, on la faisait sécher au soleil ; on la mettait ensuite en 
poudre et on la conservait dans un lieu sec. 

Boerhaave regardait ce champignon comme un excellent 
hémostatique. Tulpius dit qu’une dame qui perdait beaucoup 
de sang par une dent molaire fut guérie au moyen de l'ap- 
plication d’un morceau de vesse-de-loup. Helvétius, dans 
une lettre adressée à Regis, assure que cette espèce de cham- 
pignon « arrête le sang d’une manière surprenante et ne fait 
» nulle douleur ni escarre comme les vitriols.» (Portal, Hist. 
de l'anatomne, art. Helvétius.) 

Lecat employaïit le lycoperdon pour arrêter les hémorrha- 
gies dans les opérations chirurgicales. Ravius, au rapport 
de Haller, faisait usage de ce remède contre les hémorrha- 
gies traumatiques ; il recommandait de le laisser sur la 
plaie jusqu’à sa chute spontanée, parce qu'il nuisait quand 
on l’arrachait. 

Paul Hermann (Cynosura mater. med., Strasbourg, 1710) 
dit que la poudre de vesse-de-loup épaissit, absorbe l’humi- 
dité. Il vante, contre les hémorrhagies, les excoriations, 
les pustules, etc., un mélange de parties égales de terre 
douce de vitriol (colcothar lavé, péroxide de fer rouge pro- 
duit par la décomposition du proto-sulfate de fer par le feu), 
de flegme de vitriol {acide sulfurique extrait par la distilla- 
tion du sulfate de fer), et de bovista, dont on fait une masse. 
Ce mélange, appliqué sur les veines ouvertes, arrête immé- 
diatement l'hémorrhagie. 

Frappé de l'accord d’un grand nombre d'auteurs sur la 
vertu hémostaiique du lycoperdon, je l'ai mis depuis long- 
temps en usage. J'ai plusieurs fois arrêté l'hémorrhagie pro- 
duite par les piqüres de sangsues au moyen d’une couche 
épaisse de vesse-de-loup commune ou véruqueuse, compri- 
mée pendant quelques minutes par une petite pelote de 
linge. Introduite dans les narines, cette poudre m'a réussi 
dans deux cas d’hémorrhagie nasale abondante après avoir 
inutilement employé l’eau de rabel, l’eau alumineuse, les ap- 
plications réfrigérantes, etc. 

Le fait suivant atteste la propriété du lycoperdon contre 
l’hémorrhagie traumatique : M. Duhauton, de St.-Pierre-lès- 
Calais, ancien militaire, âgé de quatre-vingts ans, d’une 
bonne constitution, avait depuis plusieurs années une tu- 
meur spongieuse, hématode, à la région temporale gauche. 
Cette tumeur, du volume d’un œuf de poule, molle, indo- 


518 


jente, rouge-bleuâtre, moins étendue à sa base, avait été &, 
piquée à diverses reprises avec une épingle , et comprimée 
€haque jour pour en faire sortir le sang. Ces piqûres devin- 
rent-des plaies qui se convertirent , dans l'espace de deux à 
trois mois, en un ulcère fongueux, grisâtre, ichoreux, à 
bords renversés, rouges, ayani la forme d’un chou-fleur, et 
donnant issue à chaque pansement à trois ou quatre onces 
de sang. Les hémorrhagies affaiblissaient chaque jour le ma- 
Hde, et l’ulcère faisait de rapides progrès, lorsque je propo- 
sai l’ablation comme le seul moyen à employer. Cette opé- 
ration fut pratiquée le 28 juillet 1813. La tumeur, mobile 
à sa base, où un tissu cellulaire lâche semblait la séparer 
des parties sous-jacentes , fut facilement enlevée par deux 
incisions semi-elleptiques faites dans la partie saine, et une 
dissection de haut en bas , qui acheva de l’isoler. La plaie, 
d’une assez grande étendue, laissait échapper de tous ses 
points, et surtout de ses bords, une grande quantité de sang 
coulant en nappe sans présenter aucun vaisseau dont on put 
faire la ligature. J’appliquai de l’agaric de chène, une com- 
presse un peu épaisse et un bandage serré, espérant que Ia 
compression suffirait pour arrêter l'hémorrhagie. Il n’en fut 
pas ainsi: un moment après l'appareil était entièrement 
imbibé. J'attendis près d’une demi-heure , comptant sur la 
formation d’un caillot plastique. Mon espoir fut trompé. 
J'eus recours alors à la vesse-de-loup commune, que j'avais 
placée depuis peu dans ma collection d'objets d'histoire 
naturelle médicale. J’appliquai sur la plaie, préalablement 
abstergée, une couche épaisse de poudre de ce lycoperdon , 
maintenue par une compresse et un bandage médiocrement 
serré. L’hémorrhagie, à mon grand étonnement, s'arrêta à 
l'instant même. Elle reparut encore , quoique moins abon- 
dante , à chaque pansement, pendant trois ou quatre jours ; 
mais elle fut toujours combattue efficacement par le même 
moyen. Le travail de la suppuration s'établit, quelques 
légères cautérisations avec le nitrate d'argent fondu répri- 
mèrent les chairs fongueuses et favorisèrent Ja cicatrisation, 
qui fut parfaite un mois après l'opération. M. Duhauton 
reprit sa santé habituelle, et ne mourut qu’à l’âge de 94 ans. 
Jusqu'au moment où j'essayai l'application du lycoperdon, 
j'avoue que le discrédit dans lequel il était tombé, comme 
hémostatique, m'inspirait peu de confiance. L'opinion erro- 
née, que la poussière de vesse-de-loup est âcre, irritante et 
même toxique, a été probablement la cause de ce discrédit. 
Linné dit que les Finlandais font prendre la poudre de 

-vesse-de-loup,mêlée avec du lait,aux veaux qui ontla diarrhée. 
Ne pourrait-on pas en essayer l'emploi chez l'homme dans 


219 


# la même affection, et surtout dans les hémorrhagies gas- 
triques et intestinales passives, l’hématemèse, le meléna, 
etc.? Durande (Flore de Bourgogne, t. 2) et d’auires auteurs, 
disent que la poussière de vesse-de-loup dessèche les ul- 
cères, et en favorise ainsi la cicatrisation. 


VIGNE. * 


Viiis vinifera (T}. 
Vitis vinifera (L). 


La vigne cultivée, originaire de l'Asie et acclimatée depuis 
plus de vingt siècles dans nos contrées, est connue de tout 
le monde. On emploie les feuilles, le bois ( sarmenis), les 
fruits ou raisins. Ces derniers produisent le verjus, le mou, 
le vin, l'alcool, le vinaigre, etc. 

Les feuilles de vigne sont astringentes. On les a employées 
dans la dyssenterie, la diarrhée chronique, les hémorrha- 
gies passives. Flamant {le véritable Médecin, Paris 1649, 
p. 245), médecin peu connu, recommande contre les pertes 
utérines la feuille de vigne blanche séchée à l'ombre, pul- 
vérisée et administrée à la dose de 2 à 4 grammes dans un 
demi-verre de vin rouge. Le docteur G. C. Fenuglio, de Turin 
(Journ. univers. des Sc. méd., 1.28, octobre 1822) rapporte 
trois cas de ménorrhagie dans lesquels l'usage des feuilles 
de vigne de raisin muscat noir, séchées à l’ombre et pulvé- 
risées , à la dose de 4 grammes, a été couronné de succès : 
1re observation. Une blanchisseuse, d’un tempérament peu 
robuste , affectée depuis près de neuf mois d’une ménorrhagie 
qui revenait fréquemment; abattement complet, grande 
débilité. Après avoir inutilement employé divers moyens, 
la malade prend 4 gram. de poudre de feuilles de vigne de 
raisin muscat ; l’hémorrhagie s'arrête dans l’espace de dix 
heures et ne reparaît plus ; les forces se réparent et le réta- 
blissement est complet. — 2° Observation. Jeune femme de 
chambre atteinte depuis deux mois d’une très-forte hémor- 
rhagie utérine pour laquelle un médecin lui avait administré 
inutilement divers astringents. Pouls fébrile, dur, plein ; 
deux saignées apportent un prompt, mais {rop Court soula- 
gement : l'hémorriagie reparaît au bout de quelques jours 
comme auparavant. La poudre de feuilles de vigne est prise 
à la dose de % gram. chaque fois ; au bout de quelques jours, 
l'hémorrhagie cesse et ne reparaît plus ; la malade reprend 
ses forces et ses occupations, devient enceinte et jouit d’une 
santé parfaite. — 3° Observation. Femme d’une très-forte 
complexion, d'un tempérament bilieux, prise, après une 


580 


chute, d'une ménorrhagie qui dure depuis un an, et qui, 
après avoir paru céder aux remèdes accoutumés, devint plus 
que jamais inquiétante. Toux, oppression qui nécessite une 
forte sxignée qui amène du soulagement, mais qui ne dimi- 
nue ni la toux, ni l’hémorrhagie. On donne la poudre de 
feuilles de vigne à la dose de 8 gram , et en moins de deux 
heures l’hémorrhagie cesse et la malade ne tarde pas à 
recouvrer la santé. 

Le même médecin cite aussi un cas d'hémorrhagie nasale 
chez un jeune homme d’une constitution très-robuste, dont 
la vie était en danger après avoir perdu une grande quantité 
de sang, et qui fut instantanément débarrassé de cet écoule- 
mént au moyen de la poudre de feuilles de vigne prise en 
guise de tabac. 

Le docteur Fenuglio dit qu’il a vu réussir ce remède dans 
les cas d’excitation comme dans ceux d'atonie ; il doit en 
être ainsi, dit-il, puisque le tannin exerce son action sur les 
tissus surexcilés, comme sur ceux qui sont atteints de 
faiblesse. [Il ne laisse, suivant lui, aucun trouble dans les 
parties sur lesquelles il agit; il les plonge, au contraire, 
dans un calme que les malades n’eussent jamais espéré. On 
l'administre dans du bouillon, dans du vin ou dans de l’eau. 

J'ai employé deux fois la poudre de feuilles de vigne 
contre l'hémorrhagie utérine, avec débilité et anémie ; elle 
m'a complètement réussi , bien qu’elle n’eut point agi avec 
la promptitude signalée par le docteur Feniglio, qui l’a em- 
ployée dans un climat où toutes les plantes sont beaucoup 
plus énergiques que dans le nord. Disons, toutefois, qu’il 
en est de ce moyen comme de tous les astringents, qu'on 
ne doit employer que lorsqu'il n’existe ni pléthore ni état in- 
flammatoire. Tous les praticiens savent qu'il est des hémor- 
rhagies nécessaires, et que l'on se garde bien d'arrêter avant 
qu'elles aient amené le soulagement et l'atonie des organes. 

On doit récolter les feuilles de vigne dans le courant du 
mois d'août, les faire sécher à l'ombre, et se servir de celles 
qui ont le mieux conservé la couleur verte. 

M. Bredel , médecin à Bléré, départt d’Indre-et-Loire, 
(Journ. de méd. et de chirur. prat., {.7, p. 353), indique les 
feuilles de vigne comme pouvant servir à faire des moxas 
tout aussi efficaces que ceux que l’on obtient avec le duvet 
préparé de l’artemisia chinensis. On les prépare de cette 
manière : « À la fin de l'automne, lorsque déjà les gelées 
ont provoqué la chute des feuilles des tiges sarmenteuses, et 
qu’elles sont passablement dépouillées de l'humidité qu'elles 
pouvaient encore contenir, on les prend et on les jette à - 
plusieurs reprises dans un four modérément chauffé. Lors- 


581 


qu'elles sont bien desséchées , ôn les pile dans un mortier 
en fonte, jusqu’à ce qu’elles forment une masse mollette et 
bien cotonneuse. Pour conserver le duvet qui résulte de cette 
simple opération, on les renferme dans des boîtes de carton 
ou de bois, exposées dans un lieu sec et chaud. On se sert de 
ce duvet pour faire le moxa , comme du duvet de l’armoise, 
et les effets que l'on obtient avec ce moxa-vigne sont abso- 
lument les mêmes que ceux procurés par les autres moxas. » 

Les vrilles de la vigne sont acidules et un peu astrin- 
gentes. 

La sève limpide qui découle au printemps des incisions 
faites aux rameaux de la vigne, quoique vantée par les com- 
mères comme propre à guérir les ophtalmies, les dartres, 
en l'employant en loiion, et comme diurétique administrée 
à l'intérieur, paraît tout-à-fait inerte. 

La cendre de sarments est diurétique, et peut être em- 
ployée comme celles de genêt, d’écorce de fèves, etc. A l’ex- 
térieur elle est utile, en lessive, dans tous les cas où les bains 
alcalins sont indiqués. 

Les raisins frais et mürs ont une saveur délicieuse et sont 
nourrissants, rafraichissants , légèrement laxatifs ; ils con- 
viennent aux personnes d’une constitution sèche et irritable, 
aux tempéraments sanguins ou bilieux, dans les maladies 
inflammatoires, les fièvres bilieuses, les exanthèmes, les 
phlegmasies chroniques des viscères, la phihisie, etc. 
Mangés abondamment, les raisins ont guéri des engorge- 
ments des viscères abdominaux, des hydropisies, des | mala- 
dies cutanées chroniques, le scorbut. On en à vu d'heureux 
effets dans 1 “hypochondrie, l'hystérie, les affections des voies 
urinaires avec irrilation, la diarrhée, la dyssenterie, les 
hémorrhagies, etc. Pris avec excès ils peuvent produire des 
coliques , la diarrhée, la dyssenterie, etc. 

Le suc de raisin encore vert {verjus) est fortement acide 
et astringent. On en prépare une boisson tempérante (100 
à 200 gram. par kil. d’eau) qui convient dans les maladies 
inflammatoires , les fièvres bilieuses, les irritations gastro- 
intestinales , les diarrhées légères, etc. On l'emploie aussi 
dans les gargarismes contre le ramollissement des gencives, 
le relâchement de la luette , et au début ou à la fin des 
angines. 

Dans les cantons où croit la vigne sauvage, les pauvres. 
font avec ses raisins fermentés dans l'eau, une boisson aci- 
dule agréable. « C’est, dit le docteur Thore (Flore des 
Landes), notre tisane populaire dans les fièvres ardentes 
et autres qui exige l'emploi des acides. » 

Le suc exprimé des raisins mûrs où moût contient beau- 


982 


coup de sucre ; il est nourrissant. C'est un laxatif agréable, 
mais il dérange souvent les fonctions digestives, et ne con- 
vient pas aux personnes sujettes aux flatuosités. Soumis à 
l'ébullition , ce vin doux prend Ja dénomination générique 
de vin cuit , et présente des différences suivant le degré de 
coction qu'il a subi. Il est nutritif, pectoral , adoucissant, 
mais peu facile à digérer. Réduit à la consistance de sirop, 
de rob, de gelée, le moût peut, dans beaucoup de cas, rem- 
placer le sucre, et servir à édulcorer les préparations phar- 
maceutiques. Proust a extrait de la cassonade du moût de 
raisin, mais ce sucre est peu cristallisable et peu soluble. 

Le marc (ou rdpe passée) qui reste après l'expression des 
raisins , et qui acquiert souvent une température de 30° ou 
plus , est stimulant, aromatique. On l'emploie en bains, 
en y plongeant la partie malade pendant une heure ou deux, 
contre les douleurs rhumatismales, les engorgements arthri- 
tiques , l'ankylose, les rétractions musculaires, la sciatique, 
la paralysie, la faiblesse des membres. Ces bains agissent 
non-seulement par l'humidité et la chaleur, mais aussi par 
les vapeurs alcooliques et carboniques qui s’en dégagent, 
et produisent une excitation à laquelle on peut prineipale- 
ment attribuer les avantages obtenus par ce moyen. 

Les raisins secs, plus sucrés que les raisins frais, sont 
béchiques, émollients, relâchants. On les prescrit en décoc- 
tion dans les affections catarrhales et les phlegmasies des 
organes de la respiration ; ils entrent, ainsi que les figues, 
dans la plupart des tisanes et des boissons que l'on emploie 
dans ces cas (30 à 60 gram. par kil. d’eau ). Par leur fermen- 
tation dans l’eau on obtient un vin léger et agréable. 


VIN. 


Le vin, produit de la fermentation alcoolique des prin- 
cipes du moût, est une liqueur plus ou moins excitante, 
tonique, astringente et nourrissante, selon qu’elle contient 
plus ou moins d’alcool , de tannin ou de matière sucrée. 

Les vins rouges foncés sont astringents el ont une action 
plus durable que les vins blancs, qui excitent plus particu- 
lièrement les reins et sont employés comme diurétiques. 
Les vins doux sont très-nourrissants. Les vins spiritueux 
agissent plus particulièrement sur le système nerveux, et 
enivrent plus facilement. Ceux qui sont acidules , chargés 
d'acide carbonique , mousseux, produisent un effet fugace, 
une ivresse passagère. p 

À dose modérée, le vin augmente l’action de tous les 


d83 


organes ; il excite surtout la circulation et les fonctions 
cérébrales, produit la gaîté, éclaircit les idées , dispose à à la 
confiance, à l'expansion, donne de la valeur et de Ja jactance, 
exalte, en un mot, toutes les facultés. 

Fœcundi calices quem non fecere disertum ? ( Hor.) 

Pris en grande quantité, suriout quand on n'en a pas l’ha- 
bitude, il produit une forte excitation , une joie turbulente 
et déraisonnable, l’affaiblissement des seus, des vertiges, la 
vacillation, la perte de l'équilibre, la suspension de la diges- 
tion, des vomissements , la somnolence, l'ivresse enfin, qui 
peut amener le délire furieux, le sommeil profond ou coma, 
et même l’apoplexie et la mort. 

Quand l'ivresse se renouvelle fréquemment et devient 
habituelle, l'estomac perd sa sensibilité, l'appétit se détruit, 
l'intelligence s’engourdit, les affections du cœur s’éteignent, 
l’action musculaire s’affaiblit. Quelquefois surviennent la 
fièvre, des douleurs intestinales, une vive irritation du cer- 
veau , la chaleur de la peau, une sueur fétide, le delirèum 
tremens. Dans cet état, le sang est noir, extrêmement pois- 
seux,et moins'propre à la circulation. Enfin, l’abus continuel 
du vin peut produire la goutte, l'apoplexie, des inflam- 
mations et des engorgements chroniques des viscères abdo- 
minaux, des hydropisies incurables, 

Chez les femmes, cet abus est encore plus dangereux que 
chez les hommes. Ii rend la peau rude, bourgeonnée, cou- 
perosée, dérange la menstruation et produit la stérilité; ik 
abrutit, fait oublier la modestie et la pudeur, détruit Ja sen- 
sibilité et jusqu'aux liens du sang et de la nature. Il altère 
Je lait des nourrices, et en fait une sorte de poison pour 
l'enfant. 

L'usage du vin est en général nuisible aux enfants. fl les 
dispose aux affections cérébrales, aux phlegmasies gastro- 
intestinales, à la phthisie pulmonaire, à l'hémoptysie, au 
croup, etc. Pris modérément, il convient aux vieillards, aux 
mélancoliques , aux tempéraments lymphatiques , aux per- 
sonnes qui se nourrissent d'aliments grossiers et peu nutri- 
_tifs, accablées sous le poids des chagrins, des soucis, de la 
misère , habitant des lieux insalubres et humides , surtout 
dans les saisons pluvieuses et brumeuses ; à ceux qui fré- 
quentent les hôpitaux et les prisons , ou qui sont exposés à 
l'action du principe contagieux ou épidémique de certaines 
maladies, telles que le typhus, les fièvres typhoïdes, le chor 
léra asiatique , etc. 

Le vin ne convient pas aux sujets maigres et irritables , 
aux tempéraments sanguins el bilicux , > aux personnes. 
sujettes aux cengestions sanguines du cerveau, des poumons 


84 


ou du cœur; à ceux qui sont disposés aux affections de la 
peau , à la phthisie pulmonaire , à l hémoptysie , aux irrita- 
tions phlegmasiques de Festomac et des inteslins, aux 
rétentions d'urine, etc. 

Le vin est un médicament précieux contre une foule de 
maladies, surtout pour les personnes qui n’en usent pas 
habituellement. J'ai vu guérir, dans nos campagnes du Nord, 
des fièvres intermittentes rebelles, la chlorose, le scorbut, 
les scrofuies, par le seul usage inaccoutumé du vin vieux de 
Bordeaux. 11 convient dans toutes Jes maladies où la fai- 
blesse est évidente et essentielle, indépendante de tout point 
central d'irritation, C'est ainsi qn'on l’emploie avec avantage 
après de grandes évaeuations, un allaitement trop prolongé, 
des pertes séminales trop fréquentes, une longue salivation, 

ne abstinence prolongée, une leucorrhée ou blennorrhée 
abondante. Dans ces cas on la donne souvent avee le bouil- 
Jon, ou mêlé avec le jaune d'œuf. Les convalescences récla- 
ment aussi l'usage du vin. 

Dans la période adynamique des fièvres typhoïdes, dans 
les fièvres mucoso-vermineuses et putrides, le vin produit 
de bons effets. Il s'oppose à cet affaissement, à cette pros- 
tration des forces qui caractérisent ces maladies, et qu'on 
ne peut attribuer, quoi qu'en disent les partisans de la doc- 
trine dite physiologique, à l'existence d’une gastro-entérite 
spéciale et sourde, dont le développement est aujourd’hui 
considéré, avec plus de raison, comme coïncidence ou comme 
effet de l'altération primitive du sang. J'ai vu, pendant plu- 
sieurs années, administrer avec avantage l'eau vineuse ou 
le vin de Bordeaux pur, suivant la dépression plus ou meims 
grande des forces, dans toutes les fièvres adynamiques et 
adynamico-ataxiques qui régnaient dans les hôpitaux mili- 
taires du camp de Bonlogne. Ma conviction à cet égard n’a 
point été ébranlée : j'ai continué le même traitement dans 
ma pratique civile et je m'en suis toujours bien trouvé. Lors- 
que la prostration augmente, je fais même prendre Je vin 
de Malaga, d’Alicant ou de Madère pur, par cuillerées sou- 
vent répétées, et je parviens ainsi à maintenir les forces, à 
activer les sécrétions, à provoquer par des erises favora- 
bles l'élimination du principe morbifique. J'ai observé des 
eas où le sujet n'aurait pu supporter en santé le tiers de la 
quantité de vin que je lui faisais prendre, sans obtenir d'autre 
résultat qu'un peu d'élévation dans le pouls, la distribution 
plus égale d'un reste de forces, une tendance à la solution 
heureuse que je tâchais d'obtenir et que souvent la persévé- 
rance réalisait. 

Le docteur Petit administrait aussi le vin avec succès dans 


85 


la fièvre typhoïde, quand cette affection s’accompagnait d’un 
état de faiblesse très-prononcé et de coma. Pinel employait, 
dans ce cas , le vin de Malaga par cuillerées fréquemment 
répétées. 

L'usage du vin de Bordeaux, généreux etpur, est quel- 
quefois nécessaire dès le début de certaines fièvres, parce 
que les signes d’adynamie, d'ataxie, de décomposition sont 
si rapides et si évidents, que la seule indication est de re- 
lever le système nerveux, de ranimer le mouvement artériel. 
De pareils cas se sont présentés dans ma pratique rurale, 
chez des sujets soumis à l'influence destructive d’une saison 
froide-humide, d’une habitation malsaine, de miasmes dé- 
létères, d’une mauvaise nourriture, du chagrin, dela misère, 
etc. Nous avons vu, dans ces malheureuses circonstances, 
des médecins, séduits par une doctrine aussi facile en théo- 
rie que simple dans l'application, poursuivre comme cause 
efficiente une irritation chimérique, perdre rapidement leurs 
malades, et regretter de n'avoir pas appliqué un plus grand 
nombre de sangsues ! 
= Toutefois, hâtons-nous de le dire, le médecin qui, dans 
certains cas appréciés par l’homme de l'art exempt de toute 
prévention, ne traite que les symptômes typhoïdes, sans ja- 
mais prendre en considération l’altération organique interne, 
lors même qu’elle est portée au plus haut degré d'intensité, 
nous paraît aussi aveugle que celui qui s'attache exclusive- 
ment à combattre par les antiphlogistiques la phlegmasie in- 
testinale, dont les caractères non identiques diffèrent ici es- 
sentiellement de l'inflammation franche. Nous avouerons 
ème qu'il n’est pas toujours facile de concilier des indica- 
tions contradictoires, ni de déterminer alors quel est le genre 
de traitement qui convient le mieux. Placé entre une sus- 
ceptibilité viscérale irritative ou inflammatoire, et Ja di- 
minution ou l'absence de réaction générale avec désordre 
du système nerveux, on est parfois très-embarrassé. Dans 
ces circonstances délicates et équivoques, le praticien exer- 
cé, semblable à un habile général sur un terrain ennemi, 
_ avance avec circonspection, s'arrête à propos, et n'attaque 
vigoureusement qu'après s'être assuré de sa position et de ses 
avantages. | 

Tissot, Borsieri, Neumann et beaucoup d’autres auteurs 
considèrent le bon vin, pris à fortes doses, comme le meil- 
leur remède contre les fièvres intermittentes rebelles au 
quinquina. J’en ai observé les bons effets en pareils cas ; 
mais, lorsqu'il y avait cachexie, engorgement splénique ou 
hépatique, œdème, je donnais de préférence le vin blanc. 

Le vin de champagne mousseux, que j'ai employé sou- 


586 


vent, comme Ja potion de Rivière, contre les vomissements 
par irritation nerveuse, surtout chez les femmes enceintes, 
s'est montré utile dans l'épidémie de fièvre jaune de 1819, 
à la Nouvelle-Orléans (Rapp. fait au nom de la Soc. méd. 
de cette ville, p. 11. Nouv.-Orl. 1820). 

Arétée conseillait le vin, à doses faibles mais répétées, dans 
la pneumonie des vieillards. Moscati, Laënnec et le profes- 
seur Chomel disent en avoir obtenu de bons effets dans la 
même maladie. Suivant Pinel et Franck, certaines pneumo- 
nies épidémiques ou adynamiques, où les saignées sont 
meurtrières, se modifient avantageusement par l'emploi des 
toniques el en particulier par celui du vin généreux. «Je 
traitai il y a quinze ans, dit Fodéré, un homme riche qui 
habitait les bords d’un marais, et qu'autrefois j'avais guéri 
d’une péripneumonie exquisite. Je le trouvai cette, fois 
croyant avoir la même maladie parce qu'il crachaït beau- 
coup de sang, qu'il avait une douleur à la poitrine et une 
grande difficulté de respirer ; mais ce sang était noir, il y 
avait quelques taches sur la peau, un pouls faible, flasque, 
irrégulier , et une faiblesse générale que je jugeai scorbuti- 
que. Loin d'employer la saignée, je mis en usage le régime 
tonique, le vin de quinquina et les antiscorbutiques, et mon 
malade guéritencore. Cet homme est mort depuis mon dé- 
part, de la même maladie, que son médecin ne connut pas.» 
(Dict. des Sc. méd., t. 58, p. 100.) 

Le vin chaud est souvent employé à la campagne pour 
provoquer la sueur et faire aÿorter une fluxion de poitrine. 
Ce remède a quelquefois réussi ; mais le plus souvent c'est 
jouer à quitte ou double que de l'employer, surtout chez.les 
sujets vigoureux et sanguins. Le même moyen a souvent 
rappelé immédiatemert les règles supprimées par l'immer- 
sion des mains dans l’eau froide, par la suppression de la 
transpiration, etc., surtout chez les femmes d’une constitu- 
tion délicate et d’un tempérament lymphatique. Il a quelque- 
fois été utile dans les exanthèmes aigus (rougeole, scarlati- 
ne, variole), où l’éruption languit par le défaut d'énergie du 
sujet, et quand il y a dyspnée avec pouls pelit, concentré, pà- 
leur, etc., ce qui se rencontre assez fréquemment chez les 
enfants unémiques des pauvres qui habitent des lieux bas, 
marécageux, peu aérés. 

J'ai vu le choléra asiatique céder, à son début, à l’abon- 
dante transpiration provoquéeau moyen d'unebouteille de vin 
chaud prise par tasses fréquemment répétées. Ce même vin, 
pris chaque soir et provoquant de la sueur pendant la nuit, a 
guéri des diarrhées chroniques qui avaient résisié aux re- 
mèdes ordinairement employés. Tous les praticiens savent 


987 


combien il est difficile de combattre avantageusement les 
diarrhées chroniques. Souvent les astringents sont nuisibles 
ou n’ont qu'un effet momentané, et les mucilagineux sont 
impuissants, surtout quand le malade, conservant l'appétit, 
surcharge l’estomac et fatigue les organes digestifs par le 
travail pénible et irritant de la digestion. Dans ces cas, le 
traitement qui m'a le mieux réussi consiste à administrer 
chaque matin un tiers de lavement de vin rouge, d'abord 
tiède et ensuite froid , dans lequel Je fais délayer un ou deux 
jaunes d'œuf, er à mettre le malade à l’usage des œufs, ava- 
lés crus et entiers, pour toute nourriture, au nombre de deux 
le premier jour, trois le second , ainsi de suite en augmen- 
tant graduellement, selon l'effet obtenu. J'arrive ainsi quel- 
quefois à faire prendre dix à douze œufs dans les vingt- 
quatre heures. Le malade s’abstient de toute boisson. Ce 
traitement, à-la-fois alimentaire et médicamenteux, pro- 
duit un effet prompt et durable ; mais ordinairement, dans 
les diarrhées anciennes, je le fais continuer pendant vingt, 
trente, et même quarante jours. Je ne reviens que peu à peu 
aux aliments ordinaires, en commençant par les plus faciles 
à digérer. 

Dehaen, Welse, Strambio ont trouvé le vin très-efficace, 
même à forte dose, pour calmer et guérir les accidents dont 
l'ensemble constitue la colique saturnine. On l’a même don- 
né en lavement dans cette affection. Guersant l’a vanté con- 
tre l’incontinence d'urine chez les enfants. Il cest aussi très- 
utile dans les affections gangréneuses, les hémorrhagies pas- 
sives, le purpura hemorrhagica , dans la dysménorrhée qui 
dépend de l’atonie, de l’inertie de l'utérus, etc. 

Le vin a aussi été regardé comme anthelmintique. On a 
remarqué que les enfants auxquels on en faisait prendre 
avaient plus rarement des vers intestinaux que ceux qui 
n’en faisaient point usage. Pris à jeun, il m’a réussi chez les 
habitants des marais, ne vivant que-de légumes et de laïtage, 

_pour prévenir le retour des affections vermineuses, en com- 
battant la débilité des voies digestives qui les produi- 
sait. On m'a rapporté que, dans une fièvre vermineuse épi- 
démique qui enlevait la plupart des malades, aucun prêtre 
n'avait été atteint de la maladie. On attribua cette heureuse 
exempiion au vin pur pris à jeun en disant la messe, sans 
tenir compile de celui qui était administré plus largement 
au presbytère, et qui , joint à de bons aliments , devait être 
un prophylactique bien plus puissant. 

Le vin est contre-indiqué dans les irritations, les inflam- 
mations, les ulcérations; dans les maladies fébriles avec 
symptômes angioténiques ou pluralité de lésions, les hyper- 


288 


trophies , les indurations des tissus organiques, dans tous 
les cas où il y a hypersthénie. 

Le gros vin rouge, en injection dans l’urêtre, suspend Ia 
gonorrhée dès son début, et la fait avorter sans inconvénient 
si l'on en continue l'usage deux ou trois fois par jour. Les 
injections vineuses conviennent aussi dans les plaies sinueu- 
ses, dans les conduits relâchés, dans le vagin contre la leu- 
corrhée, dans la tunique vaginale pour la cure radicale de 
l'hydrocèle. Le vin chaud, pur ou miellé, appliqué sur les 
plaies, leur donne du ton, les avive, les déterge et hâte la 
cicatrisation. Le vin est encore employé comme résolutif 
sur les contusions, les infiltrations cellulaires, les engorge- 
ments articulaires suites d’'entorses, etc. On l’a aussi em- 
ployé en lotion et même en bain comme fortifiant chez les 
enfants faibles, scrofuleux ou rachitiques. 

On a conseillé l'ivresse pour réduire les luxations qui of- 
frent trop de résistance musculaire. J'ai vu Percy employer 
ce moyen avec succès dans les Jluxations de l'humérus, chez 
des militaires fortement constitués et offrant une grande ré- 
sistance aux moyens ordinaires de réduction. 

VINS MÉDICINAUX. — Préparations dont le vin est l’exci- 
pient. Les vins médicinaux sont faits tantôt avec les vins 
rouges, tantôt avec les blancs, suivant la nature des prin- 
cipes à extraire et celle des indications à remplir. Ces vins 
doivent être de première qualité, sans être trop vieux, 

car ils tendraient à la décomposition. Les vins alcooliques, 
comme ceux de Madère, de Malaga, etc., fournissent des 
produits de plus longue durée que ceux de France. On 
ajoute de l'alcool à ces derniers lorsqu'on ne peut pas se 
procurer les premiers. 

Un vin médicinal, tel bien préparé qu’il soit, tend tou- 
jours à se décomposer ; il ne se conserve pas plus d'un an, 
même dans des vases bien clos et dans une cave bien fraî- 
che ; ilg se décompose d'autant plus facilement qu'ils-somt «e- 
plus composés. Toute bouteille entamée se corromptavec une 
promptitude extrême, ce qui oblige à le mettre dans des 
vases graduellement plus petits, chose d’une difficile et mi- 
nutieuse exécution. Je me contente, lorsque le vin mé- 
dicinal est fait, de le partager en deux demi-litres et de l’em- 
ployer le plus tôt possible. 

Le procédé de Parmentier, qui consiste à mettre dans le 
vin la teinture alcoolique des substances, donne un produit 
moins susceptible de s’altérer, mais il ne contient pas les 
mêmes principes que celui qui est préparé par le vin, puis- 
qu'il est privé de ceux que l’eau de celui-ci peut retirer. 

Dans nos dépariements du Nord, où le vin est cher, nous 


\ 


289 


nous servons souvent de fort cidre auquel nous ajoutons une 
certaine quantité d’eau-de-vie. La bière et l'hydromel vineux 
peuvent servir aussi aux mêmes usages. 


VINAIGRE. 


Le vinaigre, ou acide acétique impur, pris à jeun dans 
l’état de santé pendant un certain temps, occasionne des 
crampes d'estomac, l’anorixie, et fait maigrir au point de 
produire à la longue le marasme et la mort. 

Etendu dans l’eau (6 sur 50 d’eau), il forme l’oxicrat, qui 
est tempérant, diurétique, antiseptique. Hippocrate en fai- 
sait un grand usage corñme remède antiphlogistique contre 
les fièvres, pour éteindre la soif et appaiser les inflamma- 
tions. Son action est affaiblissante, analogue à celle dela 
saignée. Van Swiéten le regardait avec raison comme un 
excellent sudorifique et diurétique. Il convient dans les 
fièvres bilieuses et putrides, les fièvres typhoïdes, l’ictère, 
le scorbut, etc. 

Il est à remarquer que le vinaigre, quoique tiré du vin, 
a une action dynamique opposée à celle du vin et de l'alcool. 
Il est en effet reconnu comme un des meilleurs remèdes 
contre l'ivresse, qu'il dissipe promptement. S'il faut en 
croire Giacomini, le vinaigre, donné à très-forte dose 
(demi kil. dans l'eau en vingt-quatre heures), a guéri plu- 
sieurs cas d'hydrophobie canine bien déclarée. Mais d'au- 
tres praticiens l'ont inutilement employé dans cette fu- 
neste maladie, contre laquelle tant d'autres moyens proposés 
comme efficaces ont échoué. 

En Allemagne, le vinaigre a été donné avec avantage, à la 
dose de 92 grammes plusieurs fois par jour, contre la folie 
aigüe. Fodéré (Dict. des Scienc. méd., t. 58, p. 135) dit 
lavoir essayé plusieurs fois dans cette maladie sans aucun 
avantage. 

Le vinaigre est astringent ; on a pu arrêter l’épistaxis en 
appliquant des linges twrempés dans le vinaigre sur les tempes 
eu sur le front, et en introduisant dans les narines un bour-- 
donnet de charpie imbibé de cet acide. On ya recours aussi 
dans les pertes qui accompagnent l'avortement, en tampon- 
nant les parties avec de l'étoupe trempée dans l’oxicrat, et 
dans celles qui suivent l'accouchement, en appliquant des 
compresses imbibées de ce liquide et en en injectant dans 
la matrice. Un mélange de vinaigre et d’eau-de-vie, injecté 
dans l'utérus, m’a souvent réussi, après l’accouchement, 
pour faire cesser l'inertie utérine et la métrorrhagie qui en 


V4 Las 


990 


était la conséquence. Les injections d’eau vinaigrée froide, 
dans le cordon ombilical, ont été conseillées par M. Mojou, 
et depuis par plusieurs accoucheurs soit pour hâter le dé- 
collement du placenta, soit pour faire cesser des pertes uté- 
rines. 

Le vinaigre n’est pas moins utile, tant à l'extérieur qu’à 
l'intérieur, dans les hémorrhagies passives des scorbutiques, 
dans le purpura hemorrhagica, dans les stomacaces, le re- 
lichement de la luette, les fongosités des gencives, etc. Fo- 
déré (Loc. cit.} dit avoir employé avec succès des demi lave- 
ments de vinaigre dans des fleurs blanches très-abondantes, 
qui épuisaient les malades, dont la cause était due au relà- 
chement, et contre lesquelles on avait inutilement employé 
les autres moyens. Les lavements d’eau vinaigrée (30, 60, 
92 gram., suivant les médicalions, sur 484 gram. d’eau) ont 
été conseillés dans l’iléus, la constipation rebelle et l’apo- 
plexie. Tabès, chirurgien à Toulouse (Journ. gen. de med., 
{. 304), a retiré de grands avantages dans les cas de pollu- 
tions nocturnes et d’écoulemens involontaires de semence, 
suite de la masturbation, de l'application au périnée d’une 
éponge trempée dans-du vinaigre. 

M. Barber (The Lancet, et Gaz. med. 1849) emploie avec 
avantage le vinaigre pour le pansement des ulcères. Il suf- 
fit de baigner chaque matin le membre où siége l’ulcère dans 
de l’eau chaude ou froide ; on le lave ensuite avec du vi- 
naigre commun, et enfin l’on y applique un morceau de 
linge imbibé de ce liquide; le tout est maintenu par un 
bandage roulé. Sous l'influence de ce pansement régulière- 
ment continué, on voit la suppuration diminuer peu à peu 
et les bourgeons charnus prendre un bon aspect. 

Le mélange, à parties égales, de vinaigre et d'eau-de-vie, 
que l’on peut toujours se procurer instantanément, m’acons- 
tamment réussi, en lotions continuelles, dans les brûlures. 
En enlevant le calorique, il calme promptement la douleur 
et prévient l’inflammation et la vésication. J'ai vu, maintes 
fois, des enfants atteints de larges brülures, s'endormir sous 
l'influence bienfaisante de ces lotions. On applique sur la 
partie des compresses imbibées du même mélange et tenues 
constamment humides. Quand l'épiderme s'enlève ou que 
les essarres se détachent, je panse avec le cérat safrané 
(voyez Safran). J'emploie comme résolutif, dans les con- 
tusions, etc , le mélange d'eau-de-vie, de vinaigre et de sel 
commun. Cette fomentation économique, et que l'on peut 
toujours facilement et promptement se procurer, remplace 
toutes celles que fournit la pharmacie et dont l'usage, conti- 
nué plus ou moinslong-temps, devient très-dispendieux. 


091 


Le vinaigre, réduit à l’état de vapeur, est résolutif. Cette 
vapeur, dirigée sur des tumeurs lymphatiques, des engor- 
gements œdémateux, etc., au moyen d'un appareil conve- 
nable, les a très-souvent dissipés. J'ai vu un engorgement 
du testicule, suite d'orchite, céder à l’action de la vapeur du 
vinaigre versé sur des cailloux chauffés au rouge. 

VINAIGRES MÉDICINAUX. Les vinaigres médicinaux se pré- 
parent par macération. On choisit un vinaigre fort, très- 
odorant et le plus déflegmé possible. Les substances médi- 
camenteuses y ajoutent des parties aqueuses qui tendent à 
laffaiblir ; mais l’ébullition, qu’on peut employer ici, et qui 
est contraire dans la préparation des vins, dépouille les vi- 
naigres de leur humidité. C’est une précaution qu'il faut 
avoir de temps en temps. Les vinaigres médicinaux sont 
simples ou composés. Les premiersne se font qu'avec une 
seule substance, comme le vinaigre framboisé, le’ vinaigre 
scillitique, le vinaigre colchique, etc., lesquels servent à 
composer le sirop de vinaigre framboisé, l'oximel scillitique, 
l’oximel colchique. Les vinaigres composés, sont ceux dans 
lesquels entrent plusieurs substances, tel que celui des quatre 
voleurs 

ACIDE ACÉTIQUE CONCENTRÉ O% VINAIGRE RADICAL. Il se 
rencontre tout formé dans le règne organique, surtout dans 
un grand nombre de fruits, dans la sève, etc., dont on 
peut l'obtenir par la distillation. On le tire ordinairement 
du vinaigre et de l'acétate de cuivre ; iln’est point employé 
intérieurement à l'état de concentration, son action étant 
caustique. Aussi Ie délaie-t-on dans beaucoup d’eau ou de 
tisane ({ gram. pour { kil. de véhicule). Il est alors un 
puissant antiphlogistique ; il appaise la fièvre, favorise la 
transpiration et la sécrétion urinaire, abaisse la vitalité. A 
l'état de pureté, l'acide acétique est un poison dont le mode 
d'action paraît être asthénique comme celui des autres acides. 

A l'extérieur, l'acide acétique concentré est rubéfant et 
vésicant. On peut s’en servir quand on craint l’action des 
cantharides sur la vessie. Pour cela, on coupe un morceau 
de taffetas d'Angleterre, on humecte sa surface gommée avec 
cet acide, et on applique sur la peau. Dans le cas de syn- 
cope et d'asphyxie, on stimule la membrane pituitaire au 
moyen du vinaigre radical mis sous le nez. 

Acide pyro- ligneur, acide pyro-acétique, vinaigre de bois 
impur. D'une odeur et d'une saveur acides, rendues très- 
désagréables par celles SAN ce liquide tient en 
dissolution de l'huile pyrogénée (goudron), et cetie huile 
contient beaucoup d'autres corps qui ont reçu les noms 
d'eupione, de créosote, de picamare, etc. 


292 


Les docteurs Pittchafft, Teussel, de Leipzig, l'ont em- 
ployé avec succès à l'intérieur contre la gastro-malacie ou 
ramollissement gélatiniforme de la membrane muqueuse des 
voies digestives. Ils le conseillent, à la dose de 4 gram. as- 
socié à 60 gram. d'eau de fleurs d'oranger et 30 gram. de 
sirop d'orgeat, pour une mixture à prendre par petites cuil- 
lerées de temps en temps. M. Berres, de Lemberg, le pré- 
sente de plus comme avantageux contre le ténia, les affec- 
tions scorbutiques, etc.; et, à l’extérieur,dans les ulcérations 
carcinomateuses et la gangrène. M. Klantsch, de Berlin, l’a 
aussi indiqué, il ya peu d'années, comme anti-septique, 
contre le cancer aquatique ou roma. M. Schulze, de Karan, 
l'a souvenit employé en topique contre les ulcères phagédé- 
niques des pieds, dont il détruit, dit-il, la mauvaise odeur, 
amollit les callosités, améliore la suppuration, et amène 
promptement Ja cicatrisation. | 


, ALCOOËL. 


L'alcool est un liquide blanc obtenu par la fermentation 
de tout végétal sucré, ou par la distillation des vins, où il se 
trouve tout formé. À l’état de pureté on l'appelle esprit de 
vin rectifié. L'alcool du commerce estordinairement impur; 
il est mêlé à des proportions variables d’eau et d’autres subs- 
tances, et reçoit des noms différents, tels qu’esprit de vin, 
eau-de-vie, rhum, tafa, etc. 

L'alcool estun stimulant diffusible dont l’action porte sur 
le cerveau et surtout sur la moelle épinière. Concentré, c’est 
un poison violent ; à forte dose, il produit l'ivresse: à 
l'excitation générale, à la gaieté, succèdent la faiblesse, 
l'abattement, l'hébétude, quelquefois même des convulsions, 
le délire, l’assoupissement, l’immobilité, un état apoplec- 
tique qui se dissipe quelquefois au bout de quelques heures, 
mais qui aussi devient souvent mortel. 

L'usage habituel de l'eau-de-vie produit l'inflammation 
chronique de l'appareil digestif, l'induration squirreuse du 
foie, des ulcérations et des callosités dansles intestins, l'hy- 
dropisie, des calculs rénaux avec dysurie, ischurie et autres 
symptômes plus ou moins graves; la perte de la mémoire, 
la stupidité, des vertiges, des tremblements dans les mem- 
bres, le delirium tremens, en un mot, tous les symplômes 
que nous avons signalés en parlant de l'abus du vin, sont 
les suites funeste de l’abus de l’eau-de-vie et de toutes les 
liqueurs alcooliques. | 

Etendu dans l'eau, l'alcool est tonique, stimulant, et peut 


293 


être utile dans le typhus, l'adynamie, les convalescencesdes 
maladies graves, le tremblement alcoolique. J'ai vu beaucoup 
d’ivrognes dont les mains tremblaient chaque matin jusqu’à ce 
qu’une certaine quantité d’eau-de-vie fût ingérée dans l’esto- 
mac, et qui ensuite avaient la main ferme. Les campagnards 
emploient contre le chaud et le froid, c'est-à-dire les suppres- 
sions de transpiration, ce qu'ils appellent le gloria, mélange 
d'eau-de-vie et d'eau chaude, de thé ou de café. Ils réussis- 
sent quelquefois ainsi, par une abondante transpiration, à 
faire avorter un catarrhe pulmonaire , une pleurésie ou une 
pneumonie ; mais, combien de fois n’a-t-on pas, par celte 
conduite, rendu très-graves et même mortelles des maladies 
légères dans le principe ? Les bronchites chroniques, avec 
expectoralion abondante, cèdent souvent à l’eau-de-vie 
brülée, au mélange d’eau chaude et d’eau-de-vie. On se 
trouve bien dans l'asthme humide de l'usage d’une petite 
quantité de genièvre. 

L'alcool en lotion convient au début des brülures et des 
entorses , dans les contusions, les ecchymoses, etc. El est 
stimulant, irritant, réfrigérant ou rubéfiant, suivant ses 
degrés de concentration ou la sensibilité plus ou moins 
grande des tissus avec lesquels on le met en contact. 


TEINTURE MÉDICINALE. Liqueur préparée avec de l'alcool 
dans lequel on fait dissoudre diverses substances en les y 
laissant digérer pendant un certain temps à une douce cha- 
leur. Ces substances doivent être sèches, pulvérisées ou 
concassées, et en quantité suffisante pour saturer autant que 
possible l'alcool. Les teintures sont simples ou composées, 
suivant qu’elles contiennent un ou plusieurs médicaments. 
Dans ce dernier cas, on doit mettre en contact avec l'alcool, 
d'abord les substances les plus dures, ensuite celles qui se 
dissolvent facilement. 


La force de l'alcool varie selon la nature des substances à 
dissoudre. On doit se procurer l’alcoo! le plus pur possible, . 
et le ramener ensuite, par l'addition de l’eau distillée simple, 
au degré le plus convenable pour chaque teinture. 


On emploie, en médecine, un grand nombre de teintures. 
Cependant elles ne contiennent pas tous les principes du 
médicament qui a servi à leur préparation. Souvent même 
les substances employées ont des propriétés opposées à celles 
de l'alcool. La digitale est sédative, par exemple, et l'alcool 
est stimulant ; il paraît donc contradictoire d’allier ces deux 
médicaments qui se neutralisent l’un l’autre jusqu’à un 
certain point. Le degré de cette neutralisation n’étant pas 

38 


594 


appréciable , il en résulte des mécomptes fâcheux dans Ia 
pratique. 

On ne devrait donc admettre , pour ces préparations , que 
des médicaments dont le mode d action est analogue à celui 
de l'alcool, tels que l'opium, les substances aromatiques j 
lammoniaque, elc. Ces remarques peuvent s ‘appliquer aux 
alcoolats, esprits, eaux spiritueuses, baumes, essences, etc. 

Les teintures se conservent dans des vases bien bouchés. 


VIOLETTE ODORANTE, 


Viola odorata (E.) 
Viola martia purpurea, flore simpüici odoro (T..) 


La violette, aimable avant-courrière du printemps, croît 
dans les bois, le long des haies et dans les lieux un peu cou- 
verts. On emploie sa racine, ses feuilles, ses fleurs et ses 
fruits. 

Préparations et doses. 
A L'INTÉRIEUR : décoction de la racine comme émétique, 12 gram. 
pour 200 gr am. d'eau réduits à 420 gram. 

Poudre, de Và 4 4 gram., comme émélique. 

Enfusion théiforme des fleurs, de 2 à 10 us 

par kil. d'eau. 

Eau distillée, _de 69 à 409 gram. en potion. 

Sirop (4 sur 5 d’eau, 5 de sucre), de 45 à 60 / comme béchique. 

gram, 

Conserve (4 sur 5 de sucre), de 45 à 50 gram. 

Miel violat (4 sur 2 de miel), de 15 à 66 gram.‘ 

À L'EXTÉRIEUR : décoction des feuilles enlavement, fomentations, 
cataplasme, etc. 


Propriétés, 


La racine de violette, à haute dose, est vomitive. Les fleurs 
sont émollientes, pectorales, légèrement diaphorétiques ; on 
les prescrit contre les bronchites aiguës, les catarrhes chro- 
niques, les angines , les affections exanthémateuses, etc. 
La semence est émétique , purgative , diurétique. 

Coste et Wilmet ont administré la racine de violette odo- 
rante séchée, alcoolisée et pulvérisée comme vomitive. Mélée 
à la dose de 2 gram. dans une tasse de décoction légère de 
feuilles de Ia même plante, édulcorée avec une cuillerée de 
sirop violat, elle a provoqué un vomissement et trois pelites 
selles. À la dose de 2 gram. 50 cent. à 4 gram., cette racine 
a produit trois ou quatre vomissements et cinq selles co- 
pieuses. Quand on répugne à une aussi grande dose on 


595 


administre ainsi : Racine sèche de violette, 8 à 12 gram., 
coupée menue, cuite légèrement et long-temps dans 300 
gram. d'eau, réduits à 400 grammes et édulcorés comme ci- 
dessus, ou tout simplement avec du sucre blanc. C’est ainsi 
que je l’ai donnée dans trois cas où elle a produit quatre à 
six vomissements et autant de selles. 

La racine sèche et alcoolisée peut être portée jusqu’à la 
dose de 5 gram., et en décoction jusqu'à celle de 12 gram. 
Sous cette forme, elle offre un purgatif doux. 

[ La semence de violette est peu usitée. Linné la considé- 
rait comme émétique. Elle offre, en émulsion (12 à 15 gram. 
pour 150 gram. d'eau édulcorée), un purgatif doux, facile à 

prendre, ei convenable surtout pour les enfants. ] 

= Coste et Wilmet ont obtenu les mêmes effets vomitifs et 
purgatifs de la racine de violette de chien |violata canina ). 
Niemeyer {Dissert. de violæ caninæ in mediciné usu , 1785) 
dit qu’elle agit plutôt comme purgatif que comme émétique. 
Hanin (Cours de mat. med., 1.2, p.78) a observé que la 
poudre de celte raciue provoquait le vomissement à la dose 
de 1 gramme, et même à celle de 50 cent. quand elle était 
très-fine et récemment préparée. Suivant cet auteur la pou- 
dre de violette est plus vomitive que purgative, l’infusion et 
la décoction plus purgatives qu'émétiques. 

Dans la plupart des maladies qui réclament l'emploi des 
vomitifs, je mets en usage le tartrate de potasse antimonié 
(émétique), que l’on manie avec précision et dont le prix est 
tellement bas qu'il n’y aurait aucun avantage à lui substituer 
d’autres substances moins certaines, d'ailleurs, dans leurs 
effets. Cependant, il est des cas où l’ipécacuanha est spécia- 
lement employé, et dans lesquels la racine de violette peut 
être administrée avec avantage comme succédané de la 
racine exotique. C’est surtout dans la dyssenterie qu’elle 
trouverait sa place pour cette substitution, en cas d’épidémie 
sévissant sur la classe indigente de nos campagnes. On pour- 
rait aussi l'employer à dose nauséabonde comme l’arum, 
l'asarum et la bryone, dans la coqueluche, l'asthme humide, 
le catarrhe pulmonaire chronique. Lorsqu'un long emploi 
de l'ipécacuanha est nécessaire, il devient trop coûteux pour 
Ja thérapeutique du pauvre. Si la pratique urbaine donne au 
médecin la facilité de puiser à l’aide des bureaux de bien- 
faisance, dans l'officine du pharmacien, il n’en est pas ainsi 
de la pratique rurale ; ici le praticien emploie, le plus 
souvent, ce que la nature lui offre avec cette générosité et 
cette profusion émanée d’une bonté providentielle qui a 


voulu mettre à Ja portée de tout le monde ce qui est vrai- 
ment et généralement utile. 


596 


[LA VIOLINE Où EMÉTINE INDIGÈNE , alcaloïde retiré de la 
violette et de la pensée sauvage , est blanche, d’une saveur 
âcre et nauséeuse, à peine soluble dans l’eau, soluble dans 
l'alcool , insoluble dans l'éther ; elle est éméto-cathartique. 
Chomel a constaté qu'à la dose de 30 à 60 centig. elle pro- 
voque, dans la plupart des cas, le vomissement et quelque- 
fois des évacuations alvines.] 


SUPPLÉMENT 


ACONIT {Ce complement devait étre place à l'arncle: 
AconiT, ?. 8.) Il est reconnu aujourd'hui que l’action de 
J'aconit est essentiellement asthénique et produit le même 
résultat que les hémorrhagies abondantes. C’est donc à tort 
qu’on a regardé cette plante comme analogue à l'opium. 
L'action de ces deux substances est si différente que l’une 
peut être détruite par l'autre. La première, en effet, est anti- 
phlogistique, tandis que l’autre est évidemment stimulante 
du système sanguin. 

Les symptômes propres à l’empoisonnement par l’aconit 
sont les suivants : pâleur, sueurs générales, dysphagie, 
céphalalgie compressive, vertiges , absence de la mémoire, 
froid le long de la moëlle épinière, obcurcissement de ia 
vue, salivation, urines abondantes, nausées, vomituritions, 
vomissements bilieux, diarrhée involontaire, ecchymoses 
par tout le corps, resserrement aux hypocondres, fixité des 
yeux, évanouissements, débilité, pouls filiforme, vacillation 
des genoux, convulsions, paralysie aux bras, somnolence, 
sueurs froides au front, yeux vitrés, intelligence et parole 
libres, quelquefois délire, lèvres violacées, enfin mort par 
asphixie. {Stoerk, Hahneman, Albano, Giacomini, etc.) 

Les mêmes accidents surviennent lorsqu'on met le suc 
où l'extrait de la plante en contact soit avec la membrane 
interne du rectum, soit avec le tissu cellulaire, ou quand 
on en injecte le suc dans les veines. 

Le traitement antiphlogistique est ici essentiellement nui- 
sible et précipite les malades au tombeau. « Le véritable 
antidote de l’aconit a été, dit Giacomini, indiqué par Lémé- 
ry. Ce grand observateur avait remarqué que l'aconit tue 
en produisant des phénomènes analogues à ceux de la vi- 
père. Il a, en conséquence, proposé les remèdes opiacés et 
ammoniacaux, tels que la thériaque et le sel volatil de corne 
de cerf. Les anciens préconisaient le vin pour corriger les 
effets de J'aconit, ainsi que cela nous est laissé écrit par Ma- 


598 


crobe, par Pline et par Celse. Les italiens ne se sont pas 
éloignés de ces préceptes en prescrivant les éthers, l'alcool 
et l’opium, d’après la connaissance de la vertu contro-sti- 
mulante de Faconit. » 

D'après les faits observés, l’aconit est un remède anti- 
phlogistique puissant, et réussit dans les maladies à carac- 
1ère hypersthénique, Fleming (Bouchardat, 1847), à ob- 
tenu les résultats les plus satisfaisants de l'emploi de cette 
plante dans le rhumatisme aigu ; sur vingt-deux cas traités 
par ce médicament, tous ont guéri dans un intervalle moyen 
de cinq à six jours. Lombard, de Genève (Gaz. méd. de 
Paris, août 1834) regarde l’aconit comme une sorte de spé- 
cifique contre le rhumatisme articulaire aigu. Il donne l'ex- 
trait alcoolique à la dose de 1 cent. à 2 cent. et demi toutes 
les deux heures ; il le porte progressivement à 30 ‘et même 
à 45 cent. par jour. «Dans les rhumatismes bénins apyré- 
tiques ou accompagnés seulement d'une fièvre légère, dit le 
docteur Tessier (Bull. de therap.), V'alcoolature d’aconit, 
administré dès le début, peut supprimer complètement les 
douleurs en trois ou quatre jours, et abréger par conséquent 
la durée de la maladie. L'observation nous a appris, au con- 
traire, que dans les rhumatismes intenses , accompagnés 
d'un mouvement fébrile très-prononcé, la même substance 
pouvait bien modérer les accidents, mais qu’il n’était pas 
susceptible d'arrêter brusquement la maladie dans sa mar- 
che. » 

L'aconit agit moins efficacement dans le rhumatisme 
chronique. Cependant Barthez le considère comme un anti- 
goutteux des plus puissants ; il a guéri, au moyen de son 
extrait, des affections goutteuses associées à la syphilis. 
Murray dit que l’aconit long-temps continué peut résoudre 
les tophus arthritiques. Colin, Rosen, Odhelius, Ludwig , 
Ribes, Andrew, Nysten en font également l'éloge dans le 
traitement de cesaffections. Bergius, Vogel, Wildberg, 
Hufeland, Prus, etc., ont employé avec succès l’aconit 
dans différentes espèces de névralgies, et notamment dans 
les névralgies faciales. Burger (Bouchardat, ann. 1842) 
en à éprouvé de bons effets dans la céphalalgie ner- 
veuse. Il prescrivait des pilules d'extrait frais, à la dose 
de 2 centigrammes toutes les deux heures. Fleming ( Bou- 
chardat, ann. 1847) a traité quarante-quatre névralgies par 
la teinture d’aconit ; dix-sept ont guéri radicalement, treize 
n'ont obtenu qu'un soulagement momentané. Sur quarante- 
deux cas de douleurs dentaires traitées par le même médi- 
cament, soit en frictions sur les gencives, soit en l’introdui- 
sant dans Ia cavité de la dent malade, il y a eu vingt-sept 


599 


guérisons immédiates, sept soulagements, el sept résultats 
nuls. Dans la migraine, ce remède lui a procuré dix cas de 
guérison sur quinze. D’après Tessier (Bouchardat, 1848), 
c'est suriout dans les névralgies récentes que l'aconit se 
montre efficace ; dans les névralgies invétérées , il calme 
seulement la douleur. Eades (L’Abeille méd., Oct. 1845) a 
guéri plusieurs névralgies en appliquant sur la partie malade 
des linges imbibés d’un liquide préparé avec 16 gram. de 
teinture d’aconit, et de 120 gram. d'eau de rose. 

« L’aconit a été, dit M. Richard (Dict. en 21 vol., t. 1, 
p. 321), mis en usage pour guérir l’épilepsie, les convul- 
sions et la paralysie, surtout celle qui est la suite des at- 
taques d’apoplexie. M. le docteur Kappeler, médecin de 
l'hôpital Saint-Antoine de Paris, l’a employé fréquemment 
dans celte dernière circonstance, et en a obienu des succès 
souvent répélés. » 

Suivant le docteur Tessier, l’alcoolature d’aconit serait un 
remède avantageux dans l’érysipèle de la face, l'angine, la 
bronchite et la coqueluche. 

Busch regarde l'extrait d’aconit comme un moyen indiqué 
dans le spasme des vaisseaux exhalants et absorbants des 
voies aériennes. Il dit qu’on peut arrêter la phthisie pulmo- 
naire en combattant cet état nerveux au début de la maladie. 
Le docteur Harel du Tancrel a publié une série d’observa- 
tions tendant à prouver l'utilité de l’aconit associé à de fai- 
bles doses de sulfure de chaux, dans la phthisie pulmonaire ; 
mais Portal n’en a obienu dans cette maladie que des résul- 
tais peu satisfaisants, et des essais tentés par MM. Trous- 
seau et Pidoux, dans des phthisies dont les signes n'étaient 
point équivoques, ont convaincu ces praticiens de l’inuti- 
lité de ce moyen. 

Brera, Biett, Trousseau et Pidoux, Double et d’autres 
médecins ont associé l’aconit au mercure et surtout au proto- 
iodure de mercure dans le traitement des ulcérations véné- 
riennes de la peau. Mais, ainsi que le font remarquer MM. 
Trousseau et Pidoux, il est difficile de décider si l’améliora- 
tion rapide que l'on à obtenue ne doit pas être exclusive- 
ment attribuée au mercure. 

Enfin Bergius, Baldinger et Reinld ont guéri des fièvres 
intermittentes rebelles par l’aconit. Fouquet lemployait 
avec succès dans les obstructions des viscères abdominaux, 
les ulcères et les affections scrofuleuses. Greding l’a trouvé 
efficace dans les gonflements glandulaires. Fritze l'a re- 
commandé contre la syphilis constitutionnelle , et Bodart 1& 
considère comme un excellent succédané du gayac. 

Il est important, dans l'emploi de l’aconit comme dans 


600 


celui des médicaments actifs en général, de saisir le degré 
de tolérance de l'organisme, et de ne cesser le remède qu'a- 
près avoir observé des signes de saturation, comme des nau- 
sées, des vomissements, des vertiges, elc. 

Il est toujours prudent de ne commencer l'usage de cette 
plante que par des quantités très- faibles , surtout si on ne 
connaît pas le degré d’activité de la préparation. On peut 
arriver, pour l'extrait, à la dose de 4 gram. par jour et mé- 
me davantage. M. Quadri en a donné jusqu’à 15 gram. et 
Borda jusqu'à 30 gram. en vingt-quatre heures dans les ma- 
ladies inflammatoires. La poudre de la racine se donne à la 
même dose que l’extrait. La teinture demande plus de cir- 
conspection , Car elle est d’une plus grande énergie. On 
peut aussi, à l'exemple de Stoerk, donner l'extrait en poudre 
en le triturant avec une grande quantité de sucre. L’extrait 
préparé à grand feu est souvent carboné, noir et peu actif, 
ou même inerte. Préparé au baïn de sable ou à la vapeur, il 
est moins noir et conserve une partie de son principe actif. 
Stoerck se servait de l'extrait préparé avec le suc récent de 
la plante fraîche évaporé au soleil : cette préparation doit 
être préférée. Comme le principe actif de l'aconit se dissout 
dans l'alcool, la teinture est la préparation la plus énergi- 
que. La partie la plus active de cette plante réside dans la 
racine. Ainsi la diversité des opinions sur les effets de l’a- 
conit napel vient sans doute de la préparation qu’on a mis 
en usage. Elle peut tenir aussi aux conditions variables de 
la plante selon la nature du terrain où elle a été cuhivée, le 
temps de sa conservalion , etc. 


L'ACONITINE, alcaloïde de l’aconit, jouit des mêmes pro- 
priétés et s'emploie dans les mêmes cas. On l’a mise en usa- 
ge avec succès dans l’amaurose récente, l'iritis, l'otite , l'o- 
torrhie, l’otalgie, la paracousie et la surdité. La dose est de 
2 à 5 cent. divisés en 12 à 16 pilules. On dépasse rarement 
7 cent. par jour. La teinture d’aconitine (aconitine 5 cent. 
alcool 8 gram.) se donne à la dose de 20 cent. à 1 gram. 50 
cent. en potion. À l'extérieur , on emploie l’aconitine à la 
dose de 20 à 40 cent. en embrocation et de 20 cent. à 1 gram. 
en liniment, pommade, elc. 


601 


AGARIC DE CHÊNE. 


AGARIC AMADOUVIER, AGARIC DES CHIRURGIENS, BOLET 
AMADOUVIER, POLYPORE AMADOUVIER. 


Agaricus pedis equini facie (T.) 
Boletus igniarius (L.) 


Ce champignon croît sur les troncs des vieux chênes, des 
pommiers et d’autres arbres. 

C’est ce bolet, dépouillé de son écorce et des autres parties 
dures, et ensuite battu jusqu’à ce qu’il devienne spongieux, 
flexible, doux au toucher et facile à déchirer, qui forme 
l'amadoux employé pour arrêter les légères hémorrhagies 
dans les coupures, les piqüres de sangsues. C’est par la com- 
pression et en s’adaptant à la surface de la plaie, en bouchant 
les pelits vaisseaux, qu’il agit. Aussi un bandage compressif 
est-il nécessaire pour en favoriser l’action. 

On a proposé cet amadou contre le rhumatisme chro- 
nique et la goutte. Appliqué sur la partie malade et recou- 
vert d’une flanelle, il excite une douce transpiration qui 
calme la douleur. 


AIL (voyez l'art. Ai, p. 10). Dans une lettre adressée 
par M. Michel, médecin à Avignon, au Bulletin de théra- 
peutique, et reproduite dans l’Aberlle medicale (année 1849, 
p. 147) nous trouvons les passages suivants relatifs à l’em- 
ploi de l'ail dans le choléra épidémique. «Assurément ce 
n’est point par amour d'innovation que nous exhumons de 
l'oubli un médicament aussi prosaïque que l'ail, mais parce 
que, en vérité, nous lui avons reconnu des propriétés que 
nul remède ne possède à un plus haut degré que lui. C’est 
ainsi que dans plusieurs affections adynamiques, léthargi- 
ques, dans [a paralysie, l'atrophie des membres, divers cas 
cacochymiques et comateux, il relève les forces contractiles, 
met en jeu la circulation, et excite cette fièvre salutaire, qui 
est souvent le sûr garant et le triomphe de la nature dans 
les crises qui vont s'effectuer. 

Dans la période algide du choléra, alors que tout l’orga- 
nisme est stupéfé, et que la vie anéantie va s’éteindre, main- 
tes fois, à notre grand étonnement, nous avons vu la réac- 
tion s’opérer, et le malade marcher sans entrave vers la 
guérison. Malgré la figure décomposée etlivide, le pouls 
insensible, les ongles violets, les extrémités froides, le ho- 
quet , les crampes, le vomissement, les déjections alvines , 
là prostration , la stupeur et l’asphyxie cholérique, présages 


602 


d'une mort certaine, nous avons vu, sous l'influence de 
l'ail, les ressorts de la vie se remettre en mouvement sur 
des cholériques pour ainsi dire agonisants. 

Pour produire cet heureux phénomène, il ne faut que pi- 
ler quelques bulbes d'ail dans un mortier, avec addition de 
50 à 75 cent. d'encens, qui se réduisent facilement en pom- 
made, et l’employer en frictions et en cataplasmes sur plu- 
sieurs parties du corps, prineipalement sur la région thora- 
cique et abdominale, pendant que d’un autre côté on admi- 
nistre quelques tasses d’une infusion chaude préparée avec 
quelques gouttes de cet asphodèle. Bientôt un sentiment de 
chaleur suivie de sueur se déclare avec une forte odeur al- 
liacée. C’est le prélude de la réaction qui doit sauver le 
malade. 

Quelquefois nous avons administré la poudre de Dower 
avec une infusion de coquelicot et de bourrache, quand FPail 
n'a pu être supporté à l'intérieur à cause de son goût el de 
son odeur désagréables, mais, dans ces circonstances, il 
faut insister jusqu’au bien-être sur l'usage extérieur. 

Certainement nous ne voulons point signaler l'allium sa- 
livum comme un spécifique contre le choléra ; mais, à l’aide 
de cet agent, nous avons obtenu, nous le répétons, de si 
beaux résultats, que nous croyons utile de l'indiquer à nos 
confrères , faute jusqu'ici de médicaments plus énergiques 
contre la maladie régnante. » 


AIRELLE. 


MYRTILLE, RAISIN DES BOIS, GUEULE DE LION NOIR, 
MORET, BRINBALLIER, ARUDECH, COUSINIER. 


Vaccinium myrtillus (L.) 
Vitis idæa (T.) 


Ce petit arbuste croît dans les bois, sur les montagnes ; 
ses fruits (blueis, cousines, morettes, etc.) sont usités. 

Les fruits de l’airellè sont acides, légèrement siyptiques, 
tempérants, astringents ; ils conviennent dans les inflamma- 
tions, les fièvres inflammatoires et bilieuses, Ja diarrhée, Ja 
dyssenterie, les affections scorbutiques, etc. 

Le docteur Reiss (Journ. de méd., avril 1843), considère 
les fruits de l’airelle comme une ressource d’autant plus pré- 
cieuse dans la diarrhée chronique, que les autres moyens 
restent souvent sans effet, tandis que celui-ci procure au 
moins une amélioration momentanée dans les plus graves 
circonstances, et que, sans jamais être nuisible, il suffit 


603 


quelquefois pour amener une guérison inespérée. Il admi- 
nistre l'extrait seul, sous forme de pilules de 20 cent., que 
l’on prend de quatre à six fois par jour. 
M. Bergasse (Bouchardat, ann. de thérap. ann. 1844, 
p. 80) rapporte l'observation d’une diarrhée chronique ex- 
trêmement grave, guérie par l'administration intérieure de 
30 gram. de baies d'airelle. | 
On donne ces fruits en décoction (30 à 60 gram. par kil. 
d'eau), le suc et le sirop sont employés en potion ou étendus 
dans les tisannes. La poudre est administrée à la dose de 4 
gram.,toutes les deux ou trois heures, et l'extrait à cellede 1 
à 2 gram. par jour, en pilules ou délayé dans l’eau oule vin, 


AMANDIER COMMUN. 


Amygdalus communis (L.) 
Amygdalus sativa, fruetu majore (T.) - 


Cet arbre, qui vient spontanément dans la Mauritanie, 
est naturalisé en Europe. On emploie les fruits que l’on 
distingue, d’après leur saveur, en amandes douces et en 
amandes amères. 

1° AMANDES DOUCES.—On emploie l’eau, l'huile et le sirop 
d'amandes douces. 

L'eau d'amandes douces était préparée autrefois en far- 
cissant d'amandes entières non écorcées le ventre d’un pou- 
let, et en le faisant bouillir. On obtenait ainsi une boisson 
mucilagineuse et légèrement nourrissante. Je prescris sou- 
vent l’eau de veau et d'amandes douces coupées par mor- 
ceaux, comme adoucissant et rafraîchissant. On préparait 
aussi, par la distillation des amandes non écorcées, une eau 
également mucilagineuse et ayant l’odeur de la fleur d’acacia. 
De nos jours on emploie le plus souvent l’émulsion d’a- 
mandes douces ou lait d'amandes. On la prépare en pilant, 
dans un mortier de marbre, les amandes privées de leur 
épiderme, et en délayant le tout avec une certaine quantité 
d’eau, qu'on fait passer ensuite à travers un filtre. On y. 
ajoute quelquefois un certain nombre d'amandes amères et 
on édulcore à volonté. Cette émulsion doit être plus ou 
moins chargée suivant l'état des voies digestives ; ordinai- 
rement, elle est dans les proportions de 30 grammes d'a- 
mandes dépouillées d’épiderme et deux livres d’eau de 
fontaine. 

Dillen propose une boisson analogue au café, en faisant 
rôtir des amandes douces avec du seigle. Les amandes torré- 
fiées sont prescriles aussi aux convalescents, soit entières, 


604 


mangées avec du pain, soit en potages, après avoir été pul- 
vérisées et mêlées avec de l'orge. On prépare encore une 
sorte de potage aux amandes. 

L'huile d'amandes douces est fréquemment employée en 
médecine ; elle dissout le camphre et d’autres substances, 
elle peut s'unir à l’eau au moyen d’un jaune d'œuf. Admi- 
nistrée à l’intérieur (8 à 60 gram.), elle est lubréfiante et 
légèrement laxative ; on la donne aux enfants atteints de 
coliques, de vers intestinaux, de volvulus, ou même de con- 
vulsions. Elle est utile contre les toux sèches et nerveuses, 
la strangurie, les douleurs néphrétiques, les calculs rénaux, 
les douleurs qui suivent l’accouchement. 

À l'extérieur, on prescrit l'huile d'amandes douces comme 
émolliente dans les inflammations externes et sur certaines 
tumeurs ; elle est utile en ambrocation, dans quelques né- 
vralgies ; elle ramollit, adoucit les tissus. 

Les parfumeurs vendent, sous le nom de pâte d'amandes, 
le résidu des amandes qui ont déjà servi à l'expression de 
l'huile et qui est desséché et réduit en farine. En y ajoutant 
une certaine proportion d'amandes amères, cetue farine est 
beaucoup plus détersive et pourrait servir comme médica- 
ment exlerne, sous forme de cataplasme, contre certaines 
phlogoses cutanées et certaines taches du visage. 

LE Sirop D'AMANDES DOUCES {sirop d° orgeat) se prépare à 
l’aide de l’émulsion et de la décoction d'orge. 

2° AMANDES AMÈRES. — Ces amandes contiennent une huile 
volatile vénéneuse et une certaine proportion d'acide hydro- 
cyanique qu'on retire principalement de leur épiderme. La 
quantité de l'huile essentielle qu'on pe en retirer est, d’a- 
près Feruger de Rostock, de 4 gros par 2 kilogrammes d’a- 
mandes, et la proportion de l'acide hydrocyanique dans 
l'huile est variable de 8 à 14 pour 180, suivant Christison 
(on Poisons, p. 718). D’après ce dernier, l'huile essentielle 
cesse d'être un poison si on Ja dépouille de son acide hydro- 
cyanique (ouv. cit., p. 719). Le principe vénéneux de “cette 
huile est donc l'acide hydrocyanique. 

Prises en petite quantité, les amandes amères sont toni- 
ques, tandis qu’à haute dose, elles peuvent empoisonner. 
Une femme sujette à des palpitations de cœur, fit, par le 
conseil d’une commère, usage des amandes amères ; elle 
commença à en manger une par jour et en augmenta en- 
suite le nombre par degrés. Arrivée au n°7 par jour, elle 
éprouva des faiblesses générales, des évanouissements et une 
anxiété extrême (Ann. clin. de Montp., t. 1, p. 297). Une 
femme a donné à son enfant, âgé de quatre ans, le suc d’une 
poignée d'amandes amères pour le guérir des vers. A l’ins- 


605 


tant coliques, gonflement du ventre, vertiges, serrement de 
mâchoires, écume à la bouche, convulsions, mort dans l’es- 
pace de deux heures {Coullon). Un droguiste, éprouvant 
une vive attaque de douleurs néphrétiques, boit d’un seul 
trait, au lieu d'esprit de nitre dulcifié, quinze grammes 
d'huile essentielle d'amandes amères. Tous les symptômes 
de l’empoisonnement sont portés au plus haut degré: Syn- 
copes, anxiété, faiblesse générale, pâleur mortelle, abaisse- 
ment extrême du pouls et du rhythme de toutes les fonctions, 
refroidissement général. | 

M. Chavasse est appelé, fait vomir le malade à l’aide du 
sulfate de zinc qu'il donne jusqu’à la dose de 12 gram. 
et de l'eau chaude. Il réchauffe le corps à l’aide de bouteilles 
d’eau chaude, de sachets et de linges chauds ; il fait prendre 
un mélange d’eau-de-vie et d’ammoniaque étendus dans de 
l'eau. L'amélioration est instantanée et le malade passe de 
la mort à la vie. On fait continuer la potion suivante : ammo- 
niaque, # gram.; teinture de cardamome, 30 gram.; mix- 
ture de camphre, 210 gram. Le malade guérit (Gazette. des 
Hôpit., 2 nov. 1839.) 

Il est évident que, dans ce genre d’empoisonnement, la 
mort arrive par excès d’asthénie si l’on n’administre pas de 
suite de fortes doses de stimulants diffusibles, tels que l’al- 
cool et l’ammoniaque. 

Les anciens considéraient les amandes amères comme un 
excellent moyen de prévenir et de dissiper l'ivresse (Dios- 
coride). Plutarque raconte que le médecin du fils de Néron 
se préservait de l'ivresse, et surpassait les buveurs les plus 
intrépides de son temps, en mangeant cinq ou six amandes 

_amères. 

Comme l'acide hydrocyanique et l’eau cohobée de laurier 
cerise, les amandes amères conviennent, d’après les expé- 
riences de Borda, dans toutes les maladies dont le fond est 
d’excitation. Les anciens les prescrivaient contre les tran- 
chées utérines, les fleurs blanches, la pneumonie, la pleu- 
résie, etc, Boerhaave les recommande dans toutes les affec- 
tions phlogistiques indistinctement ; P. Franck contre les 
affections éruptives de la peau; Bateman dans les affections 
cutanées douloureuses ; Thébesius (Act. nouv. des Cur. de 
la nature) comme préservatif de l’hydrophobie (en faisant 
toutefois appliquer des ventouses scarifiées sur la morsure); 
Hufeland, pour combattre les fièvres intermittentes. Bergius 
conseille une ou deux livres d’émulsion d'amandes amères 
les jours apyrétiques des fièvres intermittentes, avec addition 
de miel et de crême de tarire. 

On emploie les amandes amères contre les maladies ver- 


606 


mineuses, les toux nerveuses, la coqueluche, les accès 
d'asthme, et à l'extérieur, sur les ulcères douloureux, le 
cancer, elc. 

On donne les amandes amères entières, au nombre d'une 
à six parjour ; on en diminue le nombre ou on les suspend 
tout-à-fait quand il survient des vertiges ou des vomissements. 
Ainsi administrées, elles m'ont souvent réussi dans les fleurs 
blanches accompagnées d’un état d'irritabilité de lestomac 
qui interdisait l’usage des amers et des ferrugineux L'émul- 
sion est la meilleure préparation. On peut la composer de Ja 
manière suivante: amandes amères entières et non dépouil- 
lées de leur épiderme, 30 gram.; amandes douces dépouil- 
lées de leur épiderme, 45 gram.; eau de fontaine, 750 gram.; 
faites une émulsion, ajoutez sirop de fleur d’oranger, 30 
gram., à prendre par cuillerées à soupe toutes les heures. 

L'eau distillée se prend à la dose de 4 à 8 gram. par jour 
dans une potion édulcorée. L'huile essentielle, non purifiée, 
est à peine employée en thérapeutique; on peut s’en servir 
avec précaution et à la dose de 1 à 5 centigram. Cette huile 
peut être utile, à l'extérieur, dans les inflammations graves 
de l'oreille, dans le traitement de certaines dartres, en lo- 
tions, liniment, ambrocations, etc. Le tourteau d'amandes 
amères, que les parfumeurs obtiennent par expression pour 
faire de la pâte d'amandes, contenant de l'huile essentielle, 
est vénéneux. « Ila été employé avec un avantage très-mar- 
qué sous forme de cataplasme, chez une jeune personne 
prédisposée à la phthisie et dont la peau de la pointe et de 
la base du nez était habituellement rouge, boursouflée et cou- 
verte de boutons.» (Dict. des drct. de médecine.) 


L’'AMYGDALINE, principe des amandes amères, peut servir 
à remplacer les eaux distillées de laurier-cerise.et d'amandes 
amères dont les effets sont incerlains. 85 Centigram. d’a- 
mygdaline, dissous dans 30 gram. d'émulsion faite avec 
8 gram. d’émulsion d'amandes douces, donnent 30 gram. 
d’un produit représentant 30 gram. d’eau distillée d'amandes 
amères saturée, qui contiennent 5 centigram. d'acide cyan- 
hydrique anhydre. 


ANAGYRE FÉTIDE. 
BOIS PUANT. 
Anagyris f œtida (L.) 


Cet arbrisseau se trouve dans les lieux arides, pierreux 
el montagneux des départements méridionaux de la France. 


607 


Toutes les parties de cette plante exhalent une odeur fé- 
tide quand on les froisse entre les doigts ; les feuilles ont une 
saveur amère. Pline et Dioscoride regardaient ses semences 
comme vomitives; Peyrilhe leur attribue la même propriété, 

‘ainsi qu'aux feuilles qu’il considère aussi comme purgatives. 
Loiseleur-Deslonchamps (owv. cuf., p.57) a constaté les pro- 
priétés purgatives de ces dernières ; elles purgent doucement 
à la dose de 8 à 16 grammes. Elles peuvent, suivant Wau- 
ters (Repert. reméd. indig., p. 293), comme celles de glo- 
bulaire turbith, être substituées au séné. «L’anagyris, dit 
Biett (Duci. des Scienc. médic., t. 2, p. 14), est un purgatif 
dont on pourrait se servir .avec le plus d'avantage pour fa 
classe indigente ou dans les hôpitaux. » 


ARNICA (p.2%). L'’arnica a été employée avec succès, 
à l'extérieur, par le docteur Nagel, dans l’hydrocéphale aigüe. 
Après avoir fait raser la tête, il fait pratiquer de demi-heure 
en demi-heure des fomentations avec une infusion froide 
de 60 gram. d’arnica pour 1 kil. d’eau bouillante. M. Nagel 
rapporte l'observation d’un garçon âgé de neuf ans qui. après 
deux heures de l'emploi de ce moyen, commença à respirer 
profondément et ouvrit les yeux comme au sortir d’un som- 
meil normal ; la dilatation des pupilles diminua peu à peu ; 
la connaissance revint et le pouls se releva. Plus tard, il se 
manifesta plusieurs phénomènes critiqnes : des sueurs d’a- 
bord , puis des selles copieuses, puis enfin une diurèse 
abondante, de sorte que la disparition des symptômes céré- 
braux fut heureusement suivie de celle de l’anasarque (Journ. 
des Conn. médico-chir., août 1849). 

Le docteur Worms (même journ., août 1849) a employé 
avec succès, contre ce qu il appelle la période comateuse du 
choléra, des lotions composées d’infusion d’arnica 100 gram., 
alcool camphré, 150 gram., ammonïiaque 15 à 20 gram., 
hydrochlorate d’ammoniaque, 45 gram. Reste à savoir la 
part que prend ici l’arnica. 

Kluyskens (Mai. méd. prat., t. 1, p.104) a employé l’ar- 
nica avec succès dans la rétention d'urine par atonie. Ce 
remède lui à réussi dans trois cas d'inertie de la vessie qui 
duraient depuis quatre-vingts à cent jours. 


ARTICHAUT. 


Cynara hortensis aculeata (T.} 
Cynara scolymus (L.) 


L'artichaut, cultivé dans nos jardins, est originaire du 
midi de l'Europe. 


608 


Les racines et les feuilles d’artichaut sontamères, toniques, 
diurétiques. Le docteur Montain (Acad. de Méd. 1838) a em- 
ployé l'extrait d'artichaut avec succès comme vermifuge. 
MM. Trousseau et Pidoux (owv. cit.) ont vu employer la 
poudre des feuilles contre les fièvres intermittentes, mais 
ils n’en ont pas constaté eux-mêmes les propriétés. Fournier 
et Vaidy (Duct. des Scienc. med., t. XV, p. 324) ont obtenu 
des succès assez constants de la décoction de queue d’arti- 
chaud dans les fièvres quotidiennes et tierces, particulière- 
ment dans une épidémie de fièvre tierce qui régna à Valen- 
çay et dans les campagnes environnantes. Cependant, M. 
Bailly a fait un rapport peu favorable à l’Académie de Méde- 
cine sur l'extrait d’artichaut que M. Montain avait présenté 
sous le nom d’extrait cynarique, comme amer et fébrifuge. 
La commission ne lui a pas reconnu les vertus fébrifuges 
qu’on lui avait attribuées ; ce n’est qu’à la dose de plusieurs 
onces qu’il est parvenu à supprimer les accès de fièvre ; mais 
son amertume est tellement insupportable, qu'à cette dose 
les malades ne peuvent se décider à le prendre. Cependant 
la commission a pensé que si l’on ne peut l’employer comme 
fébrifuge, il pouvait être utile comme amer. (Jourw. de med. 
et de char. prat., t. 9, p. 237.) 

Le docteur Copeman (Th& London. Med. Gaz. 1833) dit 
avoir employé avec succès l’artichaut contre le rhumatisme 
aigu et chronique. Îl a employé la teinture et l'extrait des 
feuilles ; la première était obtenu en faisant macérer pendant 
quatorze jours deux livres de ces feuilles dans deux pintes 
d'alcool ; la dose était de 2 gros, trois fois par jour, portée 
ensuite à une once. L’extrait, préparé avec le suc évaporé 
des tiges et des feuilles, était administré à Ja dose de 3 grains 
quatre fois par jour. 

M. Levrat-Perrotton (Rev. méd., nov. 1845) a publié quel- 
ques faits qui constatent l'efficacité du suc de cette plante 
dans le traitement de l’ictère chronique. Le docteur Wilson 
(Conspect. des pharm. de Dublin, etc., p. 45) affirme avoir 
obtenu de bons effets du suc épaissi d’artichaut dans les hy- 
dropisies provenant d'une affection hépatique, et qui avaient 
résisté à beaucoup d’autres remèdes. J’ai vu des paysans 
employer avec succès, comme recette de famille, la décoction 
de racine d’artichaut dans le vin blanc contre l’hydropisie, 
la jaunisse et les engorgements abdominaux qui accompa- 
gnent ou suivent les fièvres intermittentes. Le suc des 
feuilles, à la dose de 30 gram. dans un verre de vin blanc, 
esL aussi mis en usage dans les mêmes cas 


609 


AUNE (p.36). Murray (Apparat. med., 1. 1, p.121) a 
proposé les feuilles d’aune, appliquées sur le sein, comme 
un moyen efficace pour arrêter l’écoulement du lait chez les 
nourrices. Buckner (Jour. de Chim. méd., janv. 1843) à 
employé ces feuilles avec succès, en pareil cas, et pour ré- 
soudre les engorgements laiteux des mamelles. On les hâche, 
on les fait sécher dans une assiette jusqu’à exsudation d’un 
liquide, et on les applique sur le sein plusieurs fois par jour. 
Ce moyen m'a réussi l’année dernière dans un cas de galac- 
tirrhée, ou écoulement spontané de lait, qui durait depuis 
un mois. 


AUNÉE DYSSENTÉRIQUE, 


INULE DYSSENTÉRIQUE, INULE CONYSIÈRE , ENULE TONIQUE, 
CONYSE DES PRÉS, HERBE DE SAINT-ROCH. 


Aster autumnalis pratensis, conysæ folio (T.) 
Inula dyssenterica (L..) 


Cette plante, qui fileurit en juillet et août, se trouve abon- 
damment dans les prés humides , au bord des fossés et des 
rivières. 

L'aunée dyssentérique, d’une saveur âcre et un peu aro- 
malique, a été vantée contre la diarrhée et la dyssenterie. 
Les Russes, au rapport de Linnée {Linn. flor. suec. p. 294), 
l'ont empioyée avec succès dans une dyssenterie épidémique 
dont leur armée fut atteinte pendant leur expédition contre 
la Turquie. J'ai administré l’année dernière l’inule dyssen- 
térique en décoction (30 gram. pour 1 kil. d'eau), par tasses 
dans la journée, dans un cas de diarrhée qui durait depuis 
un mois. Dès le second jour il y avait une amélioration sen- 
sible, etle cinquième jour le malade était guéri. Je me pro- 
pose de soumettre cette plante à de nouveaux essais. 


BELLADONE p.43). M. Debreyne (Journ. des conn. 
meédico-chir., déc. 1849, p. 231), qui regarde cette solanée 
comme la plus précieuse de toutes les plantes indigènes de 
France, a rapporté un grand nombre d'observations consta- 
tant son efficacité dans l'épilepsie. Ce praticien donne ordi- 
nairement l'extrait de belladone à la dose de 20 à 30 cent. 
par jour, et lorsque la maladie est dissipée, il diminue gra- 
duellement la dose. Quand la guérison ne peut être obtenue, 
presque toujours les accès s’éloignent et diminuent d’inten- 
sité. Les effets de ce médicament sont surtout marqués chez 
les épileptiques dont les accès sont très-fréquents et même 

39 


610 


journaliers. Îl faut en continuer longtemps l'administration. 
Un épileptique, âgé de quarante-huit ans, a pris pendant 
vingt mois vingt centigrammes d'extrait de belladone par 
jour sans que les accès fussent suspendus, mais ils étaient 
moins longs; on continua le traitement, et à la fin ces accès 
s'éloignèrent et disparurent complètement. Une petite fille 
âgée de huit ans, dont les accès s’éloignèrent dès le quatriè- 
me jour, fut guérie au bout d'un mois ; elle prit néanmoins 
encore pendant deux mois cinq centigram. d'extrait de bella- 
done chaque jour. 

M. Debreyne a employé avec succès la belladone dans Ia 
chorée, l’hystérie, l'asthme, les névralgies, la nyctalopie, les 
toux nerveuses, la photophobie, les taies ou cataractes cen- 
trales, l'incontinence d'urine nocturne, la constriction spas- 
modique de divers orifices, le paraphymosis, etc. Dans des 
cas de panaris très- graves, il a jugulé le mal en un ou deux 
jours à l’aide d'une pommade faite avec deux parties d’on- 
suent mercuriel et une partie d’opium et d'extrait de bella- 
done. Contre les constrictions spasmodiques des orifices (de 
la gorge, dularynx, du col de la vessie, du col utérin, de 
l'anus), la hernie et le paraphymosis, il a recours à l'extrait 
de belladone à la dose de # à 15 gram. pour 15 gram. de 
cérat de Galien. Il emploie souvent, contre les névralgies, 
la pommade suivante : extrait de belladone 12 gram., axonge 
12 gram., opium 2 gram. Mêlez exactement er aromatisez 
avec quelques gouttes d'huile de thym ; en frictions sur le 
siége du mal, au moment des exacerbations, ou trois fois par 
jour. Chaque friction comprenant le volume d’une noisette 
de eette pommade, se fait pendant cinq ou six minutes ou 
jusqu’à parfaite absorption. On y ajoute de temps en temps 
un peu de salive pour mieux faire pénétrer le médicament 
dans la peau. Dans la nyctalopie et dans toutes les affections 
oculaires qui nécessitent l'emploi de la belladone, M. De- 
breyne conseille l'extrait de cette plante en collyre (2 gram. 
d'extrait sur 125 gram. d'eau de rose). 

Pour l'usage interne, ce médecin emploie les pilules sui- 
vantes : extrait de belladone 8 gram., poudre de gomme ara- 
bique 2 gram., poudre inerte quantité suffisante pour 120 
pilules. Doses : une pilule le premier jour, deux le second 
ettroisle troisième, matin, midi et soir, et une heure ou deux 
avant le repas. On continue ainsi si l’on n'éprouve point un 
trouble notable dans la vue. Si ce trouble se manifeste, on 
diminue la dose, ou on cesse tout-à-fait pendant quelques 
jours. Si l’on n'observe aucune altération dans lavue, ni 
autres effets fâcheux, on pourra porter la dose à quatre où 
cinq pilules, ce qui fera environ 30 centig. d'extrait par jour. 


Gif 


M. Debreyne fait ainsi préparer l'extrait de belladone : on 
coupe toute la plante, feuiiles et tiges, vers la fin du mois 
de juin, lorsqu'elle est en pleine floraison ; on la fait forie- 
ment et longtemps bouillir jusqu’à cuisson parfaite des tiges. 
On met en presse, on décante et on fait bouillir vivement 
d’abord pour diminuer promptement le volume du liquide, 
puis on termine l'opération lentement, suivant le procédé 
ordinaire des extraits aqueux. Cet extrait est uni et homo- 
gène et peut se conserver plusieurs années sans moisir, ou 
du moins il ne moisit que fort peu. L’extrait fait avec la 
coupe d'automne est moins bon; il est plus granuleux, 
moins liant, et moisit davantage. 

L’ATROPINE, principe extrait de la racine, des tiges et des 
feuilles de la belladone, jouit des propriétés de cette plante, 
mais à un bien plus haut degré. On l'emploie à ja dose de 3 
millig. à 1 cent. progressivement, avec du sucre, de la gom- 
me, en pilules, sirop, etc. 


BERCE, 
FAUSSE BRANC-URSINE, BRANC-URSINE DES ALLEMANDS. 


Sphondillum vulgare hirsutum (T.) 
Heracleum sphondillum (L.) 


Cette plante, qui aime les pays froids, croît en abondance 
dans nosprés, où elle s'élève à hauteur d'homme. 

L'’écorce et la racine de berce sont si âcres, qu’elles enflam- 
ment, ulcèrent même la peau sur laquelle on les applique ; 
elles pourraient être employées avec prudence comme rubé_ 
fiantes. L'intérieur de la tige, au contraire, offre une saveur 
douce et procure un aliment très-recherché des habitants du 
Kamschatka. Ces peuples mangent la berce récente écorcée; 
laquelle fournit en outre, par la dessiccation, une farine su- 
crée. Les Russes retirent de cette farine une eau - de - vie 
qu’ils préfèrent à celle de grain. 

Les tiges et les pétioles ‘des feuilles concassées et aban- 
données quelques j jours sur des claies, fournissent un suc 
mucilagineux sucré. Accumulez ces tiges et ces pétioles dans 
un lonneau ; versez-y une quantité d’eau suffisante pour re- 
couvrir le tout; après un mois vous retirerez une masse 
d'une saveur acidule agréable, Si vous soumettez ce marc à 
la distillation au moment de la fermentation vineuse, il vous 
donnera un esprit ardent plus actif que celui de grain (Gili- 
bert, Dem. élém. de bot., 1. 2, p. 437). 

La berce esi regardée, dans quelques parties de la Suède, 


612 


comme un remède familier contre la dyssenterie. On a em- 
ployé sa décoction en bains, en lavements, que l’on regarde 
comme carminatifs , apéritifs, antispasmodiques, etc. On 
applique les feuilles et la racine pilées sur les callosités : 
elles sont résolutives et peuvent convenir, en cataplasme, sur 
les abcès froids, les engorgements lymphatiques, l’œdème, 
etc. On dit que le suc détruit la vermine, et que la décoction 
des racines et des semences a été employée avec succès en 
lotion contre la gale. 

La berce n’est point une plante inerte. Elle mérite d’être 
étudiée dans ses effets thérapeutiques. Ses semences ont une 
saveur àcre et aromatique qui décèle une vertu stimulante 
dont on peut faire une utile application. 


BOLET ODORANT, 


POLYPORE ODORANT. 
Boletus suaveolens (L.) 


Ce champignon croît sur les vieux troncs du saule, et 
particulièrement sur le saule blanc et le saule cassant. II a 
une odeur agréable, analogue à celle de l'iris de Florence, 
et une saveur un peu amère el légèrement acide. 

Le bolet odorant est balsamique et un peu excitant. Sar- 
torius et Bœcler , au rapport de Murray, le préconisent 
contre la phthisie pulmonaire. Le docteur Enslin (Dissert. 
de boleto suaveolente), dit qu’il a été employé avec succès, 
contre la phthisie , par les professeurs Schmidel et Wendt, 
et aussi par lui-même. Il prescrit ce médicament en poudre 
à la dose de 1 gram. 20 cent. à # gram. Plusieurs médecins 
allemands citent des cas de guérison où l’on avait employé 
ce médicament à la dose de 8 gram. matin et soir. Nous ne 
devons pas laisser ignorer, toutefois, que l’on avait recours 
en même temps à d’autres médicaments et au lait dechèvre, 
ce qui laisse des doutes sur les effets du bolet odorant. 

Ce champignon a été conseillé également contre cer- 
taines affections nerveuses. Schmidel et Pfeiffer l’ont em- 
ployé avec avantage dans la dyspnée, l’hypocondrie avec 
spasmes abdominaux. 

Le Bozer où CHamPiGNON pu sAULE (Boletus salicinus), 
qui croît sur les saules, possède, dit-on, les mêmes pro- 
priétés. 

Pour pulvériser facilement ces champignons, il faut les 
couvrir de mucilage de gomme arabique et les faire sécher 
‘ensuite. | 


—— 


613 


BOULEAU, 
BOULEAU BLANC, BOUILLARD. 


Betula (T.) 
Betula alba (L.) 


Cet arbre, très-commun dans nos bois, est généralement 
connu. 

Sans croire aux merveilleuses vertus que les peuples du 
Nord ont accordées à Ja sève du bouleau, on ne peut non 
plus les révoquer tout-à-fait en doute. Cette sève, qui est 
très- abondante, a été vantée comme dépurative contre les. 
éruptions cutanées, dartreuses et psoriques par Salzmann, 
Riedlin, Werg, Pauli ; comme diurétique et lithontriptique 
par Matthioli, Charleton, Bartholin, Davel; comme vermi- 
fuge par Rosen et Bergius. On en fait prendre 100 gram. 
par jour aux enfants, et 180 à 250 gram. aux adultes. 

Percy (Opusc. de méd. et de chir., p. 3) parle de l’eau de 
bouleau en ces termes : « Les maladies de la peau, les bou- 
tons, les dartres, couperoses, etc., lui résistent rarement. 
C’est un remède précieux dans les affections rhumatismales, 
dans les reliquats de goutte, dans les embarras de la vessie, 
et dans une foule de maux chroniques contre lesquels la 
science médicale est si sujette à échouer, etc.» Voici, sui- 
vant cet auteur, la manière de se procurer cette eau : « Dès 
les premiers jours de mars, on va dans la forêt voisine choi- 
sir un bouleau de moyenne taille, on y fait, avec une vrille 
grosse comme une plume à écrire, un trou horizontal à Ia 
hauteur de trois ou quatre pieds du sol; dans ce trou, un peu 
profond, on place un tuyau de paille qui sort de trois ou 
quatre travers de doigt, pour servir de conducteur à l'eau 
qui va s’écouler au-dessous et à terre; on dispose un réci- 
cipient quelconque que l’on couvre d’un linge clair et pro- 
pre, afin d'arrêter les petits insectes ou les ordures qui pour- 
raient y tomber. Ce récipient se remplit bientôt ; on ne fait 
cette perforation qu'une ou deux fois sur le même arbre, et, 
au bout de peu de jours, on passe à un autre, afin de ne pas 
trop le fatiguer. On a soin, quand on fait ce changement, de 
boucher le trou avec un fosset, sans quoi le bouleau, conti- 
nuant à donner plus ou moins d’eau, souffrirait, sans toute- 
fois en périr, tant cet arbre est dur et vivace. » 

« L’écorce de bouleau, dit Biett (Dict. des Scienc. méd., 
1. 5, p. 278), a quelquefois été administrée dans les fièvres 
intermittentes accompagnées d’une disposition scorbutique ; 
on loue les effets de la décoction de cette écorce employée 


614 


en lotions dans les vieux ulcères. » Bergius assure que l'é- 
piderme du bouleau, porté dans les souliers, détermine une 
sueur des pieds qui peut devenir salutaire dans plusieurs 
maladies chroniques. Les paysans suédois et moscovites 
couvrent de feuilles de bouleau leurs membres affectés de 
douleurs rhumatismales, arthritiques, ou gonflés par des 
engorgements séreux, œdémateux, afin de provoquer la 
sueur. 


ee — — 


BYSSUS DES CAVES. 


Byssus cryptarum (Lam). 


Ce champignon se trouve dans les caves, sur les vieux 
bois, sur les tonneaux ou le long des murs. Composé de fi- 
laments entrecroisés les uns dans les autres , il forme une 
espèce de feutre mou, doux au toucher comme de l’amadou, 
jaunâtre, puis noir ou d’un brun verdâtre, et qui acquiert 
quelquefois une grande dimension. 

Lepelletier, pharmacien de l'hôpital de la marine de KRo- 
chefort, a, le premier, tiré parti de cette production pour Ja 
fabrication des moxas. Après l'avoir lavé et réduit en 
pâte, il en forma des trochisques et des cônes qui, bien sé- 
chés, furent livrés au service de l'hôpital. II affirme que de- 
puis plusieurs années que l’on se sert de ces moxas, on 
n'a eu qu'à s’en louer. Suivant le docteur Lefebvre (Journ. 
de Méd. prat., 1847), ils brûlent sans qu'on ait besoin 
d'entretenir la combustion par l'insufflation, ce qui leur 
donne un avantage sur ceux de charpie ou de coton, et, à 
volume égal, l’escarre qu'ils produisent parait avoir plus 
de consistance et plus d'épaisseur que celle qui résulte de 
l’action des moxas d'armoise ; ils brülent avec la même len- 
teur que ces derniers. 


CAILLE-LAIT JAUNE (p. 70). Le docteur Ferramosa 
a récemment vanté le eaille-lait jaune dans le traitement des 
scrofules dégagées de toutes complications. Il le préfère à 
l'iode et à tous les antiscrofuleux employés jusqu'à ce jour. 
On donne son suc à l’intérieur à une dose aussi élevée que 
le malade peut la supporter. On applique la plante pilée 
sur les engorgements et les ulcères scrofuleux. L'analyse 
chimique, en montrant dans cette plante de l'acétate de po- 
tasse, de l'acide gallique et du tannin, explique théorique- 
ment, suivant M. Ferramosa, les résultats pratiques qu'on 
en a obtenus, (Bouchardat, Ann. de thérap., 1843.) 


615 


CAROTTE {(p. 75). Rosen, Van Denbosch, Bremser, 
considèrent la carotte crue comme vermifuge. Le peuple 
en fait manger aux enfants vermineux; ce moyen réus- 
sit contre les lombrics. Un médecin de campagne m'a 
dit tout récemment qu'il faisait toujours manger des ca- 
rottes crues, pendant trois ou quatre jours, aux enfants 
ayant des vers intestinaux, avant de leur administrer d’au- 
tres vermifuges plus énergiques : l’effet de ceux-ci est alors 
plus certain et plus complet. 

Le docteur Larroque dit avoir obtenu Ja résolution de 
tumeurs cancéreuses, en y appliquant, tous les deux ou trois- 
jours, {rors ou quatre sangsues, et, deux ou trois fois dans- 
la journée, des cataplasmes de carotte crue. Bouvart, Des- 
bois de Rochefort et Bridault (Traité sur la carotte), se sont 
bien trouvés de l'application de la pulpe de carotte sur les: 
cancers ulcérés, notamment sur celui du sein ; mais il ré- 
sulie des observations de Bayle et de Cayol (Dact.des Scienc. 
med, t. 3, p.638) que ce remède est sans efficacité contre: 
les affections cancéreuses, mais qu’il peut améliorer et même: 
guérir plusieurs affections dartreuses,. scrofuleuses où au- 
tres qui ont parfois toutes les apparences du cancer. M. Ri- 
cord affirme (Trait. prat. des malad:. vénér.) que dans 
des cas rebelles de chancre phagédénique les cataplasmes: 
de pulpe de carotte ont quelquefois réussi. 


CHENE (p. 87). Le café de glands de chêne: s’est mon- 
tré efficace sur la fin de la coqueluche, quand il y a débilité, 
et contre les engorgements et indurations de Fabdomen. 
Hufeland (Man. de med. prat.), Baumes (Dw vice seroful., 
p. 356) ont vu les atrophies scrofuleuses les plus menaçantes 
disparaître après un long usage du même remède. Barras 
(des gastralg., p. 265) a guéri des douleurs d’estomac et 
des dyspepsies par l’usage de l'infusion sucrée de glands 
torréfiés. Prise après le repas, cette infusion lui a souvent 
réussi dans l’atonie des- organes digestifs. Trousseau et Pi- 
doux (ouv. cit.) regardent l’infusion caféïiforme de glands 
eomme fort utile aux enfants après le sévrage, aux personnes 
dont les digestions sont laborieuses et qui éprouvent du 
dévoiement, aux malades irritables dont les fonctions diges- 
tives sont entravées par une phlegmasie chronique. 

Les tubercules qui se forment sur les feuilles de chêne 
ont la plus grande analogie avec la noix de galle et peuvent 
être employés comme ces dernières. L’encre qu'on en pré-- 
pare ne le cède point à l’encre ordinaire. 


Tannis. Le tannin, ou acide tannique, est un produit vé— 


616 


gélal qui existe dans tous les végétaux astringents et qu'ont 
retire ordinairement de la noix des galle, de l'écorce de chêne, 
etc. C’est l’astringent le plus énergique, le plus puissant que 
possède la matière médicale; il est, en masse, résinoïde, de 
couleur verdâtre ; H se dissout dans l’eau en quantité consi- 
dérable. 

Employé pur ou à l’état de dissolution concentrée, le 
tannin peut causer des accidents, mais, convenablement ad- 
ministré, il est très-utile dans les hémorrhagies passives, 
les diarrhées chroniques, le catarrhe pulmonaire, les écou- 
lements muqueux atoniques (blennorrhée, leucorrhée, etc.), 
les fièvres intermittentes, la chlorose, la dyspepsie, quelques 
gastralgies, les affections asthéniques en général. 

Le docteur Pezzoni, de Constantinople (Dact. des Scienc. 
méd., t. 54, p. 341), le considère comme l’égal du meilleur 
quinquina dans les consomptions, le marasme, la chlorose, 
les fièvres d'accès, etc. G. Ricci (Esculapio, 1# cahier, p. 6) 
l'a employé, dissous dans l’alcool, contre les hémorrhagies, 
et, en solution, dans l’eau distillée delaurier-cerise, comme 
contre-stimulant. M. HER de Draguignan (Mémor. des 
hôpit. du Midi, t. 1, p. 50), a rapporté “deux observations 
de métrorrhagies rebelles et menaçantes, arrêtées par l’em- 
ploi du tannin pur; il l’a donné par doses de 10 centigr. 
toutes les deux heures jusqu’à concurrence de 4 gram. sans 
causer d'irritation gastrique. J’emploie depuis long-temps ce 
médicament, et presque toujours avec succès dans les hé- 
morrhagies chroniques ; il réussit surtout dans Ies ménor- 
rhagies, qu’il guérit quand elles sont essentielles, purement 
asthéniques, et qu'il calme souvent lorsqu'elles dépendent 
d'une affection organique de l'utérus. On peut même l'oppo- 
ser à des métrorrhagies actives, pourvu que la saignée en 
précède l'usage. 

Onr administre dans les diarrhées chroniques, à la dose 
de 5 à 20 centigr. chez les enfants, et de 50 centigr. chez 
les adultes ; dans les blennorrhagies chroniques, le catarrhe 
pulmonaire, la leucorrhée, etc., ‘à la dose de 1 gram. et 
même plus, par jour pendant un ou deux mois. 

Le tannin est un excellent contre-poison de la morphine, 
des autres alcaloïdes végétaux et de leurs sels. 

Introduite dans le nez, le tannin a réussi dans l’épistaxis 
rebelle et le coryza chronique ; en gargarisme (#% gram. pour 
250 gram. d’eau), dans les inflammations chroniques de Ja 
muqueuse de la bouche et de la gorge; en injection (5 à 50 
cent. par 30 gram. de véhicule), dans les blennorrhagies 
vaginales et urètrales, le catarrhe utérin; en lavement (1 
gram. à { gram. 50 centigr. pour 500 gram. d'eau), dans la 


L 


617 


diarrhée et la dyssenterie chroniques, les écoulements hé- 
morrhoïdaux ; en collyre (10 à 20 cent. par 30 gram. de 
véhicule), dans l’ophtalmie catarrhale ; en topique, sur les 
tissus relâchés, les escarres gangréneuses, le coccyx, pro- 
venant de la compression, les nœvi materni, les cancers en- 
céphaloïdes, etc. M. Michaelsen (Journ. des conn. médi- 
co-chir., mars 1850), ayant à arrêter une hémorrhagie 
abondante survenue dans le cours des progrès d’un cancer 
au sein, employa la solution de tannin (4 gram. pour 30 
gram. d’eau), au moyen de couches de ouate trempées dans 
cette solution, appliquées sur la surface ulcérée et fréquem- 
ment renouvelées. M. Michaelsen fut étonné le lendemain 
des changements qui s'étaient opérés: l’ulcère paraissait 
rétréci ; ses bords étaient moins douloureux et moins livides. 
Les applications de tannin furent continuées, et bientôt le 
sein ulcéré offrit un aspect de plus en plus rassurant. Au 
bout de dix semaines, la guérison pouvait être considérée 
comme certaine. Il est à regretter, dit avec raison le rédac- 
teur du journal que nous venons de citer, que cette obser- 
vation ne soit pas entourée de détails qui permettent de la 
considérer comme un fait de guérison de cancer. 


ee 


CIGUE (p. 92). Cette plante a été recommandée dans 
quelques névroses et même dans l'épilepsie. Kluyskens 
(mat. méd., t. 1 p. 68) en a employé l'extrait avec succès 
contre les convulsions et les spasmes habituels, non-seule- 
ment de la face, mais de plusieurs parties du corps simulta- 
nément affectées. Il regarde ce moyen comme une sorte 
de spécifique dans toutes les affections musculaires pure- 
ment spasmodiques,à moins qu’une périodicité régulière n’at- 
teste la présence d’une fièvre latente, qui ne demande que 
du quinquina pour se guérir. 

La ciguë administrée à haute dose a été regardée comme 
un anti- “outteux très-efficace. On a calmé et même dissipé 
les douleurs de la goutte par des bains locaux ou entiers 
préparés avec la décoction de ciguë. Plusieurs auteurs pré- 
tendent avoir employé cette plante avec succès, non-seule- 
meut dans les scrofules, les engorgements lymphatiques 
et glandulaires, mais encore dans la phthisie pulmonaire. 
Alibert conseille l'inspiration des vapeurs de ciguë dans 
cette dernière maladie, et vante cette plante administrée à 
l’intérieur dans la phthisie scrofuleuse et nerveuse. 

La ciguë a été employée avec avantage dans les affections 
cutanées. Murray, Quarin, Hufiland l'ont vantée contre Ia 
teigne. Alibert à essayé des cataplasmes de ciguë sur huit 


618 


sujets affectés de teigne, dont quatre étaient atteints de 
teigne faveuse, et quatre de teigne granulée. Trois de ces 
derniers ont été parfaitement guéris, les autres ont eu des 
récidives. Fantanetii (Gaz. Méd. p. 426. 1837) a constaté 
les bons effets des bains de ciguë dans les dermites aiguës 
et chroniques. Il a guéri, par ce moyen, des impitigo, des 
lichens, érysipèles, etc. 

La ciguë a été recommandée dans la syphilis. Zeller la 
considère comme un excellent topique contre les ulcères 
syphilitiques. Casenave s'est bien trouvé de ce médicament 
associé au mercure , et Kluyskens pense qu'il favorise l'effet 
de ce dernier dans le traitement des ulcères vénériens , et 
qu'il est très-utile dans les ulcères mercuriels. Hanin (Hat. 
meéd., t. 2,p. 651), cite le cas d'un montagnard suisse qui 
était couvert d’ulcères vénériens, et que l’usage extérieur de 
la ciguë a guéri complètement. « La cigué, dit Samuel Coo- 
per , peut être regardée comme un remède excellent dans 
les cas d’ulcères scrofuleux avec irritation et douleurs ; 
elle pourra même-compléter la guérison de beaucoup d’ul- 
cères, dans lesquels, après que l’on est parvenu à détruire 
l’action syphilitique à l’aide du mercure, la plaie ne mar- 
che pas d’une manière favorable vers la cicatrisation. Cette 
plante est également utile pour combattre plusieurs ul- 
cères invétérés de mauvais caractère, particulièrement quel- 
ques-uns de ceux que l'on rencontre de temps en temps sur 
Ja langue. C’est un altérant utile dans les cas de noli metan- 
ger, de porrigo, et dans diverses affections herpétiques. J'ai 
vu plusieurs gonflements de la mamelle, chez les femmes, 
disparaître par l'emploi de la ciguë unie au calomel. Quel- 
ques engorgements des testicules ont également cédé au 
même moyen... M. Pearson fait observer, relativement à la 
ciguë, que l'on en peut réellement prescrire avec un évident 
succès la poudre et l'extrait dans les cas d'ulcères irritables. 
et rongeants, soit qu'ils tiennent à l'action présente du virus 
vénérien, soit qu’ils subsistent encore après l'emploi d'un 
traitement mercuriel régulier... M. Pearson établit en. 
principe que la ciguë est presque un spécifique dans les ul- 
cères syphilitiques qui attaquent les orteils dans leur point 
de jonction avec le pied, lesquels se gangrènent quelque- 
fois... Le mode le plus ordinaire d’administrer la ciguë est 
sous forme de pilules du poids de cinq grains que l’on fait 
avec son extrait. J'ai toujours pensé, néanmoins, que des 
pilules de trois grains étaient suffisantes pour commencer, 
augmentant ensuite graduellement la dose. La quantité que. 
l'on peut prendre sous cette forme est étonnante. M. Wilson 
rapporte, dans sa Pharmacop. chirurgical., un cas remar- 

/ 


619 


quable d’ulcère cancéreux pour lequel le malade prit 124 
pilules de 5 grains de ciguë chaque, dans l’espace de vingt- 
quatre heures, sans qu’il éprouvât aucun soulagement ni 
inconvénient. On reconnaît que la dose de ce médicament 
est assez forte quand l’estomac éprouve un peu de malaise 
et qu’il se manifeste en quelque sorte des vertiges (Duct. de 
chir., t. 1, p. 342. Paris.) 

Un malade, traité avec succès par M. Valentin pour un 
catarrhe invétéré de la vessie, prit jusqu’à 4 livres d'extrait 
de ciguë ; il avait commencé par 6 grains et avait élé jusqu à 
3 gros par jour (Ann. de méd. prat. de Montp., p. 1808.) 

Plusieurs accoucheurs ont employé avec avantage la ciguë 
jointe à la valériane au commencement de la fièvre puerpé- 
rale ; M. Antenrieth l’a prescrite en injection dans l'utérus 
contre cette maladie. Georges Hoffner avait recours à la ci- 
guë dans les hydropisies des articulations. 

La ConicinE où Coin, principe actif de Ia ciguë, est 
tellement énergique que 8 gouttes peuvent faire périr un 
chien. M. Baudeloque (Bouchardat, Ann. de theérap., 1844) 
a employé avec succès ce principe dans l'affection scrofu- 
leuse. 


CITRONNIER. 


Citreum vulgare (T.) 
Citrus medica (L.) 


Cet arbre, qui paraît être originaire de la Médie et de 
l'Assyrie, est cultivé partout en Europe. On utilise ses 
fruits (citrons), ses grains, les écorces ou zestes de citron. 


Fréparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR. Suc, de 30 à 69 grammes comme vermifuge (mêlé 
à l'huile de ricin ou à l'huile douce de moutarde), de 50 à 160 
gram. par kil. d'eau (limonade). 

Infusion ou décoction du fruit (limonade), dans l'eau. 

Huile volatile, de 10 à 25 cent. en potion ou sous forme d'oleo- 
saccharum. 

Teinture alcoolique de l'écorce du fruit, 4 à 4 gram. dans un li- 
quide approprié. 

Sirop de suc (4 de suc sur 2 de sucre), de 50 à 1400 gram. en 
potion. 

Sirop d'écorce aqueux {4 de zeste sur 5 d'eau et 10 de sucre), de 
50 à 100 gram.. en potion. 

Sirop vineux (1 de zeste sur 8 de vin blanc et 5 de sucre), de 50 
à 400 gram. en potion. 

Sirop alcoolique {4 d'esprit de citron, 2 de sirop de sucre), de 50 
à 400 gram. en potion. 


620 


Alcoolat d’écorce de citron, 2 à 8 gram. en potion ou dans une 
tisane appropriée. 
Semence, de 10 à 15 en émulsion. 
A L'EXTÉRIEUR. Suc , 50 à 60 gram. par kil, d'eau ou de vin, 
en gargarisme, Collutoire, etc. 
Suc pur, sur les plaies gangréneuses, la pourriture d'hôpital, etc. 


Propriétés. 


On emploie le citron entier pour la préparation de la 
limonade commune. Quand on enlève l'écorce, quand on 
coupe sa partie succulente et qu'on la laisse en contact avec 
l’eau froide ou chaude, on obtient une simple dissolution 
dans l’eau. La manière la plus simple de faire cette boisson 
consiste à exprimer dans l’eau, jusqu’à acidité convenable, 
un citron coupé par le milieu. On y ajoute une suffisante 
quantité de sucre. Si l’on soumet à l’ébullition les tranches 
de citron, on obtient une limonade cuite qui est moins acide 
et d’une consistance plus mucilagineuse. En laissant tremper 
dans l’eau le citron coupé et muni de son écorce, on fait une 
limonade tonique par le principe amer, et excitante par 
l'huile volatile qu’elle contient. Ainsi préparée, elle con- 
vient mieux chez les personnes qui ont l'estomac faible, 
qui digèrent mal, ainsi que dans les fièvres muqueuses, pu- 
trides ou typhoïdes, etc. 

La limonade est rafraichissante, délayante, diurétique. 
Elle convient dans les embarras gastriques de caractère bi- 
lieux, les nausées, les dégoüts, les vomissements, l'ictère, 
les calculs biliaires , les irritations hépatiques, les inflam- 
mations des organes de la tête et de l'abdomen, les fièvres 
inflammatoires , bilieuses, putrides, la fièvre jaune , le ty- 
phus , la peste du Levant. Mais comme les acides excitent 
ordinairement la toux, on doit s’en abstenir dans les inflam- 
mations des organes respiratoires. 

Le suc de citron est vermifuge, antiseptique, rafraîchis- 
sant, diurétique, astringent, etc. On le prescrit contre le 
vomissement, Ja putridité, le scorbut, etc. Mêlé avec la solu- 
tion aqueuse de bicarbonate de potasse, il forme la potion 
anti-émétique de Rivière. Whytt /Flor. med.) a vu des pal- 
pitations nerveuses, rebelles à tous les autres moyens, cé- 
der comme’par enchantement à quelques cuillerées de suc 
de citron , ce qui suppose une action hyposthénisante. Mêlé 
au muriate de soude (sel commun), Wright (Coxe, americ. 
dispensat., p. 200) le vante comme un moyen très-efficace 
dans la dyssenterie, les fièvres rémittentes, les angines gan- 
gréneuses, et presque comme un spécifique dans le diabétès | 
et la lientérie. Le suc de citron, administré à la dose de 60 
à 100 gram. dans l'intervalle apyretique, a quelquefois guéri 


621 


des fièvres intermittentes rebelles. J'ai vu plusieurs fois em- 
ployer avec succès contre ces fièvres le suc d’un citron mélé 
avec une tasse de café très-chaud. Ce moyen populaire, ad- : 
ministré avant de se mettre au lit, provoque une abondante 
transpiration. 

Le suc de citron à la dose de 15 à 60 gram., mêlé avec 
autant d'huile de ricin, d'huile douce de moutarde, ou de 
celle de noix, d'olives, de lin ou d’œillette, avec addition 
d'un peu d'eau-de-vie, forme une mixture vermifuge effi- 
cace. On regarde aussi comme un vermifuge puissant l’é- 
mulsion faite avec dix à douze pepins de citron et quelques 
cuillerées d’eau aromaisée avec l’eau de fleur d'oranger ou de 
menthe. Cette émulsion convient, en outre,dans tous les cas où 
les toniques amers et excilants sont indiqués; je l’ai employée 
avec avantage dans la leucorrhée atonique, dans l’anorexie 
par débilité gastrique, dans les fièvres intermittentes, et 

‘vers la fin des fièvres muqueuses. 

On se sert du suc de citron pour obtenir le sirop de li- 
mons. Etendu d’eau, ce sirop donne une limonade ex- 
temporanée. Ajouté en quantité suffisante à l’eau saturée 
d’acide carbonique, il forme la monade gazeuse. 

A l'extérieur, le suc de citron convient sur les ulcères sa- 
nieux, putrides, gangréneux, vermineux, dans la pourriture 
d'hôpital, etc. 

On a aussi employé avec avantage le suc de citron en fric- 
tion sur les dartres furfuracées. «Un enfant de douze ans, 
aux cheveux blonds, au teint pâle, était atteint depuis quel- 
que temps d’un exanthême qui avait envahi la presque tota- 
lité du corps, et offrait des plaques irrégulièrement circu- 
laires, s'élevant par petites écailles semblables au son de 
froment, plus rapprochées et plus nombreuses sur le pour- 
tour du tronc et sur la plus grande partie des muscles abdo- 
minaux. Ces disques n’offraient aucune sécrétion, mais cau- 
saient une démangeaison continuelle et insupportable. Le 
front, les oreilles ei le cuir chevelu étaient couverts d’une 
éruption de nature différente, qui laissait suinter une séro- 
sité un peu épaisse et de couleur blanc-sale. M. Ardusset 
père, appelé pour donner des soins à cet enfant, prescrivit 
une saignée du bras, des bains tièdes avec addition de son 
de froment ou de feuilles de mauve, une tisane amère et des 
onctions avec le cérat soufré sur les parties dartreuses. L’en- 
fant se refusa à prendre la tisane, et son éruption resta ab- 
solument la même. Les lotions de suie et la litharge incor- 
porée dans l'huile d’olive n’eurent pas de meilleurs résultats. : 
Ce fut alors que M. Ardusset prescrivit deux frictions par 
jour avec le jus de citron sur toute la surface des téguments 


622 


atteints par l’exanthême. Quatre citrons furent employés 
dans l'intervalle de dix jours, et l'effet en fut si prompt, qu’à 
cette époque l’éruption avait entièrement disparu. L'enfant 
reprit sa gaîté, son appétit, et ce fut par précaution seule- 
ment qu'on le purgea de temps en temps avec le calomel, et 
qu'on continua quelques jours encore l'emploi des bains 
tièdes émollients. » (Journ. de méd. et de chir. prat., t. 8, 
p. 462, d'après le Journ. de méd. prat. de Bordeaux.) 

Le docteur Evrat à proposé de répandre le suc d’un ei- 
tron dans l'intérieur de Ja matrice chez les nouvelles aceou- 
chées atteintes d’hémorrhagie utérine, ce qui stimule cet or- 
gane, augmente ses contractions, fait revenir ce viscère sur 
lui-même et cesser l'écoulement sanguin { MM. Mérat et 
Dolens, ouv. cit., {. 2, p. 307). 

L'acide citrique, d’une saveur excessivement aigre, est 
employé aux mêmes usages que le suc de citron ; mais son 
acidité est moins agréable et sujette à pincer l'estomac. On 
l’associe au sucre. Suivant Hallé (Cours d'hygiène, manusc. 
1801), il tend à diminuer la sueur fébrile , tandis que l’aci- 
de acétique l’augmente. Broussais a remarqué (Phlegm. 
chron., t. 3, p. 254) que cet acide était celui que l'estomac 
supportait le mieux dans la gastrite. Quelque concentré qu'il 
soit, même à l’état solide, il ne paraît pas susceptible de pro- 
duire l’inflammation. Les pastilles connues sous le nom de 
pastilles de citron, qui conviennent pour calmer Ja soif dans 
les grandes chaleurs, se font ordinairement avec Facide tar- 
tarique. L’acide citrique s'administre à l'état liquide en en 
faisant fondre 1 gram. 20 centig. dans 500 gram. d’eau qu’on 
édulcore avec 30 gram. de sucre On administre aussi cet 
acide sous forme de sirop. | 

L'écorce de citron, dépouillée de la partie blanche qui se 
trouve au-dessous, est chargée de glandes remplies d'huile 
volatile. À l’état frais, il suffit de presser cette écorce entre 
les doigts pour en faire jaillir ce liquide inflammable. Cette 
écorce a une saveur chaude et piquante. Appliquée sur la 
peau par sa partie extérieure, elle y produit la rubéfaction. 
Elle est tonique, excitante, et un peu diaphorétique. On ia 
prescrit en poudre lorsqu'elle est desséchée, et en infusion 
théiforme lorsqu'elle est fraîche. On en prépare unsirop, 
une teinture et un alcoolat. 

L'huile essentielle de citron, que lon compose avec les 
zestes, se donne à l'intérieur comme stimulente dans une 
potion ou sous forme d'oleo-saccharum. Cette essence a en- 
core été prescrite contre le ténia, à la dose de # à 8 gram. 

Werlitz a proposé (observ. de olei citri rec. exp. usu in 
quibusdam acut. morb.) Yapplication de l'huile essentielle 


623 


de citron dans différentes affections des yeux. D'après ls 
expériences de ce médecin, elle peut spécialement être em- 
ployée avec avantage dans les ophtalmies qui tendent à pas- 
ser à l’état chronique et qui ont leur siége dans les mem- 
branes extérieures de l'œil, surtout dans les cas où les 
petits vaisseaux présentent des dilatations variqueuses, dans 
les ophtaimies rhumatismales, blennorrhoïques et serofu- 
leuses, dans le pannus et le piérygion, dans plusieurs cas 
de taies de la cornée transparente, enfin lorsque le tissu de 
cette membrane estramolli et prend un aspect spongieux. 

On applique cette essence de la manière suivante: on 
coupe une tranche d'écorce de citron d'environ 3 centimè- 
tres (4 pouce) de long sur 12 millimètres (6 lignes) de large, 
et, par une légère pression, on fait jaillir dans l'œil affecté 
les petites gouttelettés d'huile volatile qui remplissent les 
glandules dont est parsemée cette écorce; ces goutteleites 
s’en échappent sous forme d’un petit nuage, et l’impression 
qu'elles produisent dans l'œil est quelquefois très-vive. 
Dans le cas où la douleur produite serait trop forte, on pour- 
rait recourir à des fomentations froides pour la calmer. Cette 
instillation d'essence peut être réïtérée de cinq à dix fois 
dans les vingt-quatre heures. 

L’eécorce de racine de citronnier n’est pas usitée en Eu- 
rope ; mais, à la Guadeloupe, d'après M. Lherminier (Journ. 
de pharm., 1. 3, p. 465), on l'emploie sous forme de poudre 
ou sous celle d'extrait pour combattre les fièvres qui sont si 
communes dans cette île. 


< 


CLÉMATITE DES HAIES (p. 96). La vertu antipsorique 
de la clématite était connue des anciens ; Pline, Dioscoride 
et Galien en ont parlé. Vicari, médecin d’ Avignon (Mem. 
de la Soc. Royale de méd., t. 3, p. 186), guérissait promp- 
tement la gale au moyen de frictions faites avec la clématite 
pilée, mêlée à un peu d'huile d'olive. Schwilgué (Trait. de 
mat. méd., t. 2, p. 149), dit que dans les environs d’Avi- 
gnon on emploie, contre la gale, une huile dans laquelle 
on a fait infuser des feuilles de clématite fraîche. Curtel 
(Wauters, Trait. du choix des exutoires, t. 1, p. 186) em- 
ployait l'huile dans laquelle on avait fait bouillir un nouet 
d’écorce intérieure de cette plante ; il faisait frictionner tout 
le corps avec le nouet près d’un feu clair ; après la deuxième, 
troisième ou quatrième friction, une éruption générale assez 
pénible était produite, mais en huit ou dix jours on était 
débarrassé de la sale, même la plus invétérée. 


624 


COLOQUINTE (p. 100). Fabre (Trait. des maladies sé- 
nér., t.2,p 368) préconisait particulièrement dans la gonor- 
rhée une teinture ainsi préparée: poudre grossière de co- 
loquinte, 45 gram., clous de girofle n° 6, anis étoilé (ou anis 
indigène), 4 gram., safran, 60 cent., terre foliée de tartre, 
30 gram ; faites digérer pendant un mois dans 600 gram. 
d'alcool. Le malade, pendant trois jours de suite, prend à 
jeun, S gram. de cette teinture dans 60 ou 90 gram. de vin 
d'Espagne ; il se repose le quatrième jour, recommence 
pendant trois jours encore, pour resler tranquille encore un 
jour, et ainsi de suite, jusqu'à vingt ou vingt-cinq doses. 
On boit, une heure après l'administration du médicament, 
deux ou irois verres de tisane d'orge ou de chiendent; s’il 
survient des coliques, on donne des lavements émollients. 
Cette médication, très-efficace dans les blennorrhagies un 
peu anciennes, mérite d’être ürée de l'oubli dans lequel elle 
est tombée. 


COQUELICOT ({p. 105). D’après Boulduc (Hist. de l'A- 
cad. des scienc., ann. 1712, p. 66), l'extrait des capsules 
de coquelicot aurait les avantages de l'opium sans en avoir 
les inconvénients. Quatre onces de ces capsules vertes lui 
ont donné 5 gros d'extrait, qu'il prescrivait à la dose de 2 à 
4 grains. Chomel (pl. us.) employait, comme très-utile dans 
les affections de poitrine, une décoction faite avec douze 
têtes de coquelicot, une poignée d'orge et 2 onces de réglisse 
pour 3 pintes d'eau. L'extrait qu'on en prépare, dit eet au- 
teur, donné à la dose d'un demi-gros à un gros, est anodin 
et procure un sommeil assez doux. Loiseleur-Deslonchamps- 
a préparé, par contusion et expression de toute la plante, un 
extrait qui lui a paru agir à peu près comme celui préparé 
par la décoction des têtes et aux mêmes doses. 

Samuel Crumpe a extrait du coquelicot un opium sem- 
blable à celui d'Egypte. Gatereau (Descript. des plant. qui 
croiss. aux environs de Montauban) le préfère à lopium 
exotique. | 


MARONNIER D'INDE |». 269) M. Jobert se sert, à l'hô- 
pital Saint-Louis, d’une teinture d’écorce de cet arbre pré- 
parée de la manière suivante : écorce de marronnier d'Inde, 
125 gram., alcool à 21°, 500 gram.; concassez l'écorce, 
meltez-la en contact avec le véhicule, agitez de temps en 
temps, et, après quinze jours de macération, filtrez. Dose : 
une cuillerée à bouche à jeun ou avant le principal repas, 
le plus ordinairement dans une tasse de tisane amère. M. Jo- 


625 


bert obtient tous les jours les meilleurs résultats de l'usage 
de cette teinture chez les femmes affectées de gastralgies 
atoniques. Ce médicament paraît agir sur le système nerveux 
en vertu d’une huile volatile associée au principeamer Journ. 
de méd. et de chir. prat., janv. 1849.) 


MENYANTHE, TRÈFLE D'EAU (p. 284. Cullen a constaté 
les bonseffets de cette plante dans quelques affections her- 
pétiques, ou même d'un aspect cancéreux. Roques (ou. cit. 
1. 2, p. 244) l'a employé avec le plus grand succès dans plu- 
sieurs affecuions darireuses qui avaient résisté aux prépara- 
tions antimoniales, au souffre et à la douce-amère. Double 
en a obtenu de bons résultats à la fin des rhumatismes ai- 
gus, pour combattre la disposilion des malades aux réci- 
dives. 


MILLE-FEUILLE (p. 289). M. Zanon (Annal. univ. di 
medicina), chimiste italien, a analysé cette plante et y a 
trouvé un principe nouveau qu'il nomme achilléine. M. Puppi 
a fait sur lui-même, et sur quelques malades, des expériences 
qui prouveraient que l’achilléine, à la dose de 50 centig. à 
1 gram. par jour, en solution dans l'eau, serait un fébrifuge 
efficace. Les paysans emploient dans certaines contrées , 
pour combattre les fièvres intermittentes, une forte décoc- 
tion de mille-feuille. 

Boerhaave, Rivière, et beaucoup d'autres auteurs, ont pré- 
conisé cette plante contre les hémorrhagies; elle s’est sur- 
tout montrée eficace, dit-on. contre les hémorrhagies du 
rectum. Trnka (Hist. hœmorrh. omnis œvi obserr., v. 2, 
p- 3) en a recueilli un grand nombre d'observations rappor- 
tées par différents auteurs. 


MOUSSE COMMUNE ({p. 297). M. Dominé /l 4beille 
méd., fév. 1850, p. 52) a constaté que rien n’est plus propre 
que la mousse pour conserver les sangsues ; elle les débar- 
rasse de la matière glutineuse qu'elles secrètent abondam- 
ment, et qui, s’attachant à leurs corps, les presse assez for- 
tement pour les diviser en segments (sangsues nouées), les 
rendre impropres à la succion ei les faire périr. On choisit 
la mousse la plus verte qu'il soit possible de trouver, on la 
monde et on la lave parfaitement; puis on remplit de cette 
mousse un verre de capacité variable {d’un litre de conte- 
nance pour 100 sangsues), et on le recouvre d'une toile. La 

40 


626 


mousse bien éparpillée, et les sangsues bien lavées, intro- 
duites alternativement, doivent remplir complètement le vase. 
En hiver, on peut se contenter d'introduire la mousse et les 
sangsues mouillées ; mais, dès que les chaleurs arrivent, on 
met au fond du vase une petite quantité d'eau. 

Il n’est pas nécessaire de changer souvent les sangsues en 
hiver; en été il faut, au contraire, les renouveler à peu près 
tous les deux jours, et les conserver à la cave. Pendant toute 
la saison, où la température intérieure de l'officine ne s'é- 
lève pas au-dessus de 12 à 15°, M. Dominé conserve les 
sangsues à la pharmacie. 


ORANGER. 


Aurantium dulci medullé vulgare (T.) 
Citrus aurantium (L.) 


Cet arbre, originaire de la Chine ou des îles de Ia Sonde, 
est naturalisé en Espagne, en Portugal, en Italie et dans le 
midi de la France. On emploie les feuilles, les fleurs, les 


/ 


fruits (oranges), l'écorce des fruits. 
Préparations et doses. 


A L'INTÉRIEUR : infusion de fleurs, de feuilles, d’écorce, de 4 à 8 

gram. par demi kilog. d'eau. 

Décoction de feuilles, 120 feuilies pour 600 gram. d'eau, avec un 
peu de vin et de sucre {(Welse.) 

Poudre de feuilles ou d'écorces, de 4 à 8 gran. 

Eau distillée de fleurs (4 sur 5 d’eau),de 59 à 209 gram.. en potion. 

Sirop de fleurs ou d'écorces d'oranges (1 sur 2 de sucre), de 50 à 
60 gram. en potion. 

Alcoolat ou teinture de fleurs, de feuilles ou d'écorce (4 sur 4 
d'alcool à 24:), de 2 à 46 gram. en potion. 

Huile essentielle d'écorces, de fleurs (néroli), de 40 à 50 cent. en 
potion ou sur du sucre. 

Infusion de l'orange (orangeade), une où deux oranges coupées 
par tranches par kil. d’eau. 


Propriétés, 


Les feuilles d'oranger ont une odeur aromatique et une 
saveur amère ; elles sont antispasmodiques, stomachiques, 
toniques, fébrifuges, vermifuges, sudoriques. On les emploie 
avec avantage dans la débilité des organes digestifs marquée 
par l’inappétence, les flatuosités, la lenteur des digestions; 
elles sont utiles aussi dans les maladies nerveuses et convul- 
sives, l’hystérie, l'hypocondrie, les toux spasmodiques, les 
palpitations, la cardialgie, les céphalalgies nerveuses, 


627 


Pépilepsie, les accidents ataxiques des fièvres typhoïdes. 

Locher les trouva très-avantageuses dans l’épilepsie, et 
parvint, par leur usage, à rendre les accès de cette affection 
plus rares et moins violents. Ce médecin purgeait ou faisait 
tirer préalablement un peu de sang, selon les circonstances ; 
il donnait ensuite depuis 2 gram. jusqu'à # gram. de ces 
feuilles en poudre, une, deux, et jusqu'à quatre fois par jour, 
ou bien le decoctum d'une poignée de feuilles bouillies dans 
une livre d’eau réduite à moitié, en une fois le matin à jeun. 
Welse a aussi employé les feuilles d'oranger avec avantage 
dans l’épilepsie. Je m’en suis très-bien trouvé dans l’hystérie 
accompagnée de douleurs vagues et de spasme dans Pestomac, 
ainsi que dans toutes les névroses par débilité. Elles parais- 
sent, dans ioutes ces affections, porter sur l'organisme en 
général, et sur le cerveau et les nerfs en particulier, une in- 
fluence à la fois calmante et tonique. 

Les fleurs d’orangers exalent une odeur suave et ont une 
saveur amère ; elles doivent leurs qualités à une huile essen- 
tielle qui, par la distillation, passe entièrement dans l’eau, à 
laquelle elle donne toutes les propriétés des fleurs elles- 
mêmes {eau de fleurs d'oranger). Cette eau exerce son action 
sur le système nerveux comme antispasmodique et sédative ; 
on en fait un fréquent usage dans les spasmes, les convul- 
sions, les palpitations nerveuses, les anxiétés précordiales, 
l’hystérie, les coliques nerveuses, et dans ceite longue série 
de maux de nerfs qui, dans nos grandes cités, abreuvent 
d’amertume la femme incomprise accablée sous le poids du 
bonheur et de l'ennui, et dont la vie se consume soit à la lec- 
ture des romans du jour, qui exaltent l’imagination, ou à des 
broderies qui n’exercent que les doigts, soit à recevoir, mol- 
lement étendue sur un divan, des visites que l’oisiveté pro- 
cure trop souvent sous le voile de l'intérêt qu’inspire l'état de 
souffrance d'un corps frêle et délicat tenant sous sa dépen- 
dance une âme sensible et destinée à faire les délices de la 
société. 

L’écorce d'orange et les jeunes oranges sont toniques, ex- 
citantes, stomachiques, carminatives ; elles conviennent dans 
toutes les maladies que caractérise ou accompagne la débi- 
lité des organes digestifs. On les a employées comme fébri- 
fuges dans les cas où des symptômes graves ne forcent pas 
d’avoir recours de suite au quinquina. J’ai quelquefois as- 
socié avec avantage l’écorce d'orange à l'écorce de saule contre 
des fièvres intermittentes ordinaires. 

Cette écorce, er ses diverses préparations, sont encore 
employées avec avantage dans la chlorose, l'hystérie, l’hypo- 
condrie, et comme vermifuge. 


628 


Les jeunes oranges fort petites servent quelquefois à rem- 
placer les pois à cautère, pour augmenter la suppuration. 

Le suc d'orange, délayé dans l’eau (orangeade) esttempé- 
rant ; ilest journellement employé dans les fièvres inflamma- 
toires, bileuses, typhoïdes; dans les flegmasies, la dyssenterie, 
la péritonite, la néphrite, la blennorrhagie, les irritations 
gastriques et genito-urinaires, les dispositions scorbutiques, 
en un mot, dans toutes les affections aiguës ou chroniques 
dans lesquelles convient la limonade faite avec le suc de ci- 
tron, mais étant plus doux et plus délayant que ce dernier. 
Le sirop de suc d'orange se donne dans les mêmes cas que 
l'orangeade. 


FI. 


RÉCOLTE , 


DESSICATION 


GONSERVATION DES PLANTES. 


Les plantes qui doivent être employées fraîches. seront: 
récoltées par un temps serein plutôt que nébuleux où: 
pluvieux. 


Les racines se récoltent au printemps et en automne. 
Nous préférons en général l'automne pour les racines 
annuelles et bisannuelles, et le printemps pour celles qui 
durent plus de deux années. Il est des racines qui, essen- 
tiellement ligneuses, peuvent être récoltées en tout temps. 
Il en est qu'il ne faut arracher de terre que lorsque la partie 
ligneuse et solide est déjà formée ; telles sont celles dont 
on n’emploie que l'écorce, comme les racines de cynoglosse, 
de bardane, de quinte-feuille, etc. I1 faut, en effet, que cette 
écorce soit devenue assez épaisse pour qu'on puisse la déta- 
cher facilement du corps ligneux. 

Pour conserver les racines on ne doit pas les laver; l’eau 
en retarde et en rend la dessiccation plus difficile, surtout 
pour celles qui sont mucilagineuses. Il vaut mieux les éten- 
dre à l’air pendant un jour ou deux, et les ratisser ensuite 
légèrement, les brosser, ou les agiter fortement dans un sac: 
de grosse toile pour en séparer la terre et toutes les parties. 


630 


étrangères, les filaments, etc. On les coupe ensuite en tran 

ches d'autant plus minces qu’elles sont plus charnues et plus 
difficiles à sécher. Les racines chargées de mucilage, comme 
celles de guimauve, d'aunée, de grande gentiane, de bar- 
dane, de grande consoude, etc., se dessèchent difficilement 
et se moisissent. Leur dessiccation doit être opérée à l’étu- 
ve, ou mieux au four, après qu’on en a retiré le pain ; mais 
alors il faut les surveiller, parce qu’elles peuvent se griller, 
si l’on dépasse le point nécessaire. Les racines fibreuses et 
jigneuses se dessèchent facilement. Il suffit souvent de les 
placer sur des claies ou de les enfiler dans une corde et de 
les exposer à un courant d'air dans un grenier. 

Les racines se conservent en raison directe de leur état 
de siccité. Il en est cependant, comme celles de bardane, 
qui sont dès la seconde année attaquées par les vers, et d au- 
tres qui se conservent en bon état au-delà de cinq ans. Il est 
à remarquer que la racine d’angélique que l’on récolte au 
printemps est bientôt attaquée par les vers, tandis que celle 
qui est arrachée en automne se conserve plusieurs années ; 
ce qui indique qu’en général, ainsi que nous l'avons dit plus 
haut, on doit récolter de préférence les racines en automne. 

On doit placer les racines dans des boîtes bien fermées ou 
dans un local bien sec, les visiter souvent, et si les vers les at- 
taquent, qu'elles se ramollissent ou moisissent, les nettoyer, 
les passer à l’étuve ou dans un four modérément chauffé. 

Il est des racines que l’on veut conserver pleines de leurs 
sucs le plus long-temps possible, parce que leur énergie di- 
minue beaucoup par la dessiccation : telles sont celles du 
raifort, du pied-de-veau, de l'iris, de la bryone, eic., que 
l'on conserve en les couvrant de sable sec. 


Les bulbes, les oignons, comme ceux de scille, par exem- 
ple, doivent être séchés et conservés de la manière suivante : 
Après avoir enlevé les tuniques et la tige centrale, on déta- 
che toutes les autres squammes, à l'exception des plus voi- 
sines du centre,on les déchire longitudinalement en plusieurs 


63! 


pièces, et, après les avoir enfilées dans une ficelle, on les 
suspend dans une étuve dont la température est très-élevée 
jusqu’à ce qu’elles soient bien sèches. 


Les fewilles er les tiges herbacées doivent être choisies. 
sur des végétaux sains et exposés autant que possible au mi- 
di, cueillies à l’époque de la floraison de la plante, par un 
temps sec, après le lever du soleil et lorsque la rosée est dis- 
sipée. On ne doit pas les laisser en tas ni les presser les. 
unes contre les autres parce qu’elles s’échauffent bientôt et 
se détériorent. On les étend sur des draps de toile, sur des. 
claies recouvertes d’un tissu à larges mailles, exposés aux. 
rayons du soleil, ou dans une étuve dont la chaleur, de vingt-- 
cinq degrés d’abord, est graduellement élevée jusqu'à trente 
trente-six et même plus. Un grenier exposé au midi et sufñi- 
samment chauffé par le soleil peut remplacer l’étuve. On les. 
remue de temps er temps afin que la dessiccation s’opère 
d’une manière égale, et on les retire lorsqu'elles se brisent 
entre les doigts. On les laisse alors au contact de l'air pen- 
dant quelques heures ; et dès qu'elles ont repris un peu de. 
souplesse, on les enferme dans des boîtes que l’on place 
dans un lieu sec. Les feuilles ainsi préparées conservent 
leur couleur et une partie de leur arôme. Les feuilles sé- 
chées lentement et à l’ombre perdent quelquefois leur odeur 
et contractent une couleur fauve ou noire : dans cet état 
elles sont dépourvues de propriétés. 


Les bourgeons doivent se récolter au moment où le mou- 
vement d'ascension de la sève commence, un peu avant leur 
épanouissement. 


Les fleurs se cueillent, pour Ia plupart, avant leur en- 
tier épanouissement. Il en est même plusieurs qu'on ré- 
colte quand le calice ne fait à peine que s’entr’ouvrir. La 
rose de Provins est dans ce cas. Il en est cependant quel- 
ques-unes, comme les violettes, les pensées, etc., qu’on ne 


632 


doit cueillir qu'après leur‘entier épanouissement, maïs il 
faut que cet épanouissement se soit opéré depuis peu. Les 
fleurs des labiées, telles que celles de romarin, de lavande, 
de sauge, de thym, doivent étre cueillies et séchées avec leur 
calice, parce que c'est là que réside principalement leur 
odeur. Celles dont l'odeur réside spécialement dans les pé- 
tales sont ordinairement séparées du calice pour la dessicca- 
tion ; cependant Beaumé a observé qu'on les conservait bien 
mieux lorsqu'on les faisait sécher avec leur calice. 

IT y a des fleurs qui, étant trop petites pour être conser- 
vées séparément, doivent être cueillies avec les sommités de 
la plante : telles sont celles de l’absynihe , de la petite cen- 
taurée, de l'hyssope, de la fumeterre, du eaille-lait, ete. 
Après les avoir fait sécher en petites bottes, on les SE 
dans des sacs de papier. : 

Pour conserver le plus posssible la couleur et l’odeur des 
fleurs, on doit les faire sécher promptement au soleil, à une 
étuve, ou, comme pour les feuilles, dans un grenier dont le 
toit est suffisamment chauffé par la chaleur atmosphérique, 
en les plaçant sur des papiers soigneusement rangés eux- 
mêmes sur des claies. On les remue de temps en temps, et 
lorsqu'elles sont sèches au point d’être réduites en poudre, 
on les retire pour les placer dans des boîtes ou des bocaux à 
l'abri de l'humidité. Il est essentiel que la partie épaisse des 
fleurs soit également sèche, sinon elles se décolorent et se 
détériorent promptement. 

I! est des fleurs, surtout celles qui sont bleues, qui per- 
dent bientôt leur couleur. Cependant celles de mauve restent 
colorées jusqu’à trois années. La lumière solaire contribuant 
à leur décoloration, nous conseillons de les sécher à l’étuve 
ou dans un grenier, et de les conserver dans des boîtes gar- 
nies de papier, bien fermées et placées dans un lieu sec. 
Les violettes exigent des soins particuliers : après avoir en- 
levé les calices et les étamines, on fait sécher les corolles 
entre deux papiers, dans une étuve chauffée à 30 degrés R., 


FE 


633 


et on les conserve ensuite à l'abri du contact de l'air, de la 
lumière et de l'humidité. Il ne faut pas mettre trop d'im- 
portance à la conservation de la couleur des fleurs mé- 
dicinales : ce n’est point Îà que résident leurs propriétés. 


Les fruits qu’on veut employer frais doivent être choisis 
bien mûrs et pleins de sucs ; mais si l'on se propose de les 
faire sécher, il faut les cueillir un peu avant leur maturité 
parfaite, et par un temps sec. En général, pour la dessicca- 
tion des fruits on doit suivre la même marche que pour les 
feuilles, les fleurs, les racines, etc. Les fruits pulpeux, tels 
que la figue, la prune et le fruit du rosier sauvage ne doivent 
jamais être séchés au point de devenir tout-à-fait durs ; il 
suffit d’en faire évaporer l’excès d'humidité, ce qu'on obtient 
en les exposant à une chaleur d’abord très-douce, qu'on 
élève ensuite peu à peu, jusqu’à ce qu'ils soient arrivés an 
degré de mollesse convenable. Les semences émulsives, les 
farineuses et toutes les autres, récoltées parfaitement mûres, 
se placent sur des toiles de chanvre dans des greniers, à un 
libre courant d’air, ou dans une étuve médiocrement échauf- 
fée. On à soin de les remuer souvent, pour renouveler les 
surfaces en contact avec l'air. 


Les écorces résineuses doivent être récoltées au printemps, 
quand les arbres commencent à être en sève ; les non-rési- 
neuses, ordinairement en automne. Il faut choisir les écor- 
ces produises par des arbres vigoureux, sains, dans la force 
de l’âge, sur des branches de deux ou trois ans. Après les 
avoir séparées de l’aubier qui pourrait y adhérer, ainsi que 
des mousses qui couvrent l’épiderme, on les coupe en mor- 
ceaux d'autant plus petits qu’ils contiennent plus d’eau de 
végétation ; on les fait sécher au soleil ou dans une étuve, 
et on les conserve à l'abri de l'air, de l'humidité et de la 
poussière. Bien préparées, les écorces se conservent en bon 
état pendant plusieurs années. 


Les bois indigènes usités en médecine, tels que ceux de 


634 


genevrier, de buis, de gui de chêne, doivent être récoltés 
avant le développement des bourgeons ou après la chute des 
feuilles. On doit choisir les grosses branches, et, à l'excep- 
tion de celui de génevrier, on laisse l'écorce et l'aubier. IL 
suffit, pour la dessication, de les exposer au soleil ou à l'air, 
à l'abri de la pluie et de l'humidité. 


— Nous ne terminerons pas sans dire qu'il faut, autant que 
possible, renouveler les plantes chaque année, et apporter à 
leur récolte tous les soins que nous venons de recommander. 
La négligence à cet égard, en diminuant ou anéantissant 
le principe médicamenteux des plantes indigènes, a puis- 
samment contribué à les faire tomber dans le discrédit. 


PLANTES INDIGÈNES 


CLASSÉES 


D'APRÈS LEURS PROPRIÉTÉS THÉRAPEUTIQUES. 


ÉMOLLIENTS ET ADOUCISSANTS. 


Arroche ou bonne-dame,— avoine, semence, gruau.— 
Betterave, — bouillon blanc, — bourrache, — buglose. —Ca- 
rotte, racine,— chanvre, semence, — citrouille, — chiendent,— 
coignassier, semence, —cynoglosse.— Douce - amère, feuilles. 
—Fenu-grec, semence, —figuier, fruit, —froment, farine , son, 
amidon , pain.— Grande consoude , — guimauve. — Iacynthe 
des bois, gomme. -— Laïitue cultivée , — lin cultivé, semence, 
huile,—lnaire.—lis. — Mauve, — mercuriale annuelle.— Na- 
vette, huile,— noyer , huile. — Olivier, huile, — orchis, salep 
français, — orge, semence.—Pariétaire, — pavot blanc, hurle 
—pied de chat ou gnaphalie,—pomme deterre, feuilles, tuber- 
cule, fécule, —pulmonaire.—Réglisse.—Seigle,semence, farine, 
— séneçon.—Tussilage, fleurs.— Vigne, raisins secs, — vio- 
lier, feuilles, fleurs. 


TEMPÉRANTS, 


Aiïrelle, fruits, —alleluia.— Cerisier , fruits, —citron, suc du 
fruit. — Epine vinette , fruit. — Fraisier, fruit. — Grenadier, 
suc du fruit, —groseiller , fruit.—Mûrier, jrurt —Oranger, suc 
du fruit, — oseille. — Pommier, fruit. — Ronce , fruit. — 
Vigne, raisin, verjus, vinaigre. 


636 


TONIQUES ASTRINGENTS, 


Aigremoine,—airelle, fruits, —alchimille pied-de-lion,—ar- 
gentine, — aune, écorce, feuilles, — Benoite, — bistorte, — 
bourse à pasteur, —brunelle, —bugle.—Chêne, écorce, feuilles, 
glands.— Coïignassier, fruit.— Filipendule,— frêne, écorce.— 
Grenadier , écorce du fruit. — Hêtre , écorce. — Joubarbe,— 
Marronnier d'Inde, écorce, — millefeuille,— myrte. — Noyer, 
feuilles, brou de noix,— nummulaire.—Orme, écorce, —Ortie, 
—ortie blanche.—Paquerette ou petite marguerite,— patience 
aquatique, —pervenche,—peuplier blanc, écorce et feuilles, — 
peuplier tremble, écorce et feuilles, — peuplier noir, écorce, — 
piloselle,—plantain,— pommier, écorce, —prêle, — prunellier, 
écorce , suc épaissi des fruils. — putiet ou cerisier sauvage, 
écorce, —pyrole.—Quinte-feuille.—Renouée,— rhapontic, ra- 
cine, liges,—ronce, feuilles et sommilés,— rosier, roses rou- 
ges ou de Provins, —rosier sauvage, fruit.—Salicaire, —sceau 
de Salomon, racine, —sanicle, —saule, écorce, —sumac des cor- 
royeurs. — Tormentille. — Verge d'or, — vigne, feuilles, 
raisin | VErJUS, VIN rouge, vinaigre. 


TONIQUES AMERS. 


Artichaut,— aunée, —aunée dyssentérique,—Chardon étoilé 
ou chausse-trappe, feuilles et fleurs, — chicorée.— Epine wvi- 
nette, écorce de la racine et de la lige, —eupatoire, feuilles. — 
Fumeterre.— Gentiane.—Houblon, —houx, feuilles.— Lichen 
pulmonaire, —ilas, capsules.—Noyer, feuilles, brou.—Olivier, 


écorce el feuilles, — oranger, écorce du fruit. — Patience sau- 

vage,—petite centaurée.— Marrube.—Polyzala amer, —Scro- 
y ’ 

fulaire aquatique. — Trèfle d'eau ou menianthe. — tussilage, 


feuilles.—:Variolaire amère. 


EXCITANTS GÉNÉRAUX. 


Absynthe,— âche,— acore vrai, —ail, —alliaire, — aneth,— 
angélique, — anis, —armoise, —arrica, — aristeloche cléma- 
tite, — aurone, — Balsamite ou baume-coq, — beccabunga,— 
berce, semence, — betoine,—botrys.—Calament, — camomille 
fétide ou maroute,— camomille romaine, —capucine,—carda- 
mine,—carvi,—cataire,— citron, écorce ou zeste du fruit, —co- 
chlearia,—coriandre,— cresson de fontaine, — cresson alénois. 


637 


Dictame de Crête ou fraxinelle.— Fenouil. —Genèvrier, —ger- 
mandrée aquatique ou scordium , — germandrée maritime , — 
germandrée officinale ou chamædrys petit chêne. —Hyssope.— 
Impératoire. — Julienne.— Lavande , — laurier d'Apollon,— 
lierre terrestre, — livèche. — Marjolaine, — marrube blanc, — 
marrube noir ou ballote,— matricaire,— camomille, — matri- 
caire offiemale,— mélisse,— mélilot, — menthe aquatique, — 
menthe crispée,— menthe poivrée,— menthe pouliot, etc. — 
millefeuille, — millepertuis, — moutarde. — Nielle cultivée, — 
nielle des champs.—Oignon,—oranger, écorce du fruit, —ori- 
gan,— ortie blanche. —Passerage, —persil, —persicaire âcre, — 
piment des jardins, — peuplier baumier, bourgeons, — peu- 
plier noir, bourgeons.—pins et sapins, bourgeons, térébenthine, 
etc.,— polygala vulgaire.—Raifort,— romarin.—Santoline, — 
sarriette,—sauge officinale, —sauge des bois, —sauge sclarée, 
—sauge des prés, — scrophulaire aquatique, —serpolet, —souci 
officinal,—stæchas.—Tanaisie, —thé du Mexique ou Ambroi- 
sie, — thym,— Vélar ou sisymbre officinal, — Véronique offi- 
cinale. 
ANTISPASMODIQUES. 


Ambroisie ou thé du Mexique, —armoise,— arroche fétide 
ou vulgaire.—Bolet odorant, — Botrys.—Caille-lait jaune, — 
chèvre-feuille, fleurs. —Gui.— Matricaire, —mélisse, —mille- 
feuille , fleurs, —moscatelline.— muguet (petit) ou aspérale, — 
Oranger , feuilles et fleurs.— Pivoine,— primevère, fleurs. — 
Saule, fleurs, —souci des jardins,—sthæhas.—Tilleul , f/eurs. 
—Valériane , racine. 

NARCOTIQUES ET SÉDATIFS. 


Aconit.—Belladone.—Cerise noire, — ciguë (grande).—ciguë 
(petite), — coquelicot. — Digitale, — douce - amère, tiges. — 
Jusquiame.— Laitue cultivée ,— laitue vireuse,— laurier ce- 
rise.—Morelle,—mouron rouge.—Pavot blanc ou somnifère , 
opium indigène, —pavot cornu ou glaucier,— pêcher, feuilles 
et amandes du fruit ,— phellandre aquatique, — pomme épi- 
neuse ou stramoine.—Tabac. 


EMMÉNAGOGUES. 


Armoise.—Matricaire officinale. — Nielle cultivée, — nielle 
des champs. — Perce-mousse. — Rue. — Sabine, — safran, — 
seigle ergoté. 


638 


SUDORIFIQUES. 
(Eswcitants de la peau, dépuratifs. ) 


Aconit.—Bardane,—buis, bois.—Chélidoine (dose altérante), 
— Douce-amère. — Fumeterre. —Genévrier , bois, — gratiole 
{dose altérante).—Hièble, f/eurs, —houblon. —Laiche des sables 
ou salsepareille d’Allemagne.—Mézéréon.—Patience sauvage, 
— patience aquatique, —persicaire amphibie,—pensée sauvage, 
—Orme pyramidal.—Roseau à balai.— Saponaire,—scabieuse, 
sapins et pins, bourgeons, goudron, etc.—sureau.—Trêfle 
d'eau.—Vincetoxicum ou dompte-venin {dose altérante.) 


EXCITANTS SPÉCIAUX DU SYSTÈME ABSORBANT 
ET DE CERTAINES GLANDES. 


Aconit. — Ciguë. — Varec, fucus helminthocorton, ou 
mousse de Corse, — varec ou fucus vésiculeux, réduit en 
charbon ou aethiops végétal, —iode et ses préparations. 


DIURÉTIQUES. 


( Stimulants des reins. ) 


Ache,—ail, —alliaire, — alkékenge , baies, —arrête-bœuf, — 
artichaut,—asperge,—avoine , semence. — Bardane , semence, 
—bouleau, sève, — busserole ou raisin d’ours,;—bryone.— 
Carotte, semence.—chardon étoilé ou chausse-trappe , racine 
et semence, —chardon rolland,—cerisier , pédicules ou queues 
de cerise, —chélidoine, — colchique.—Digitale.— Epine vinette, 
racine.—Fenouil, racine, —fève, cendre des tiges et des gous- 
ses,—frêne , écorce de la racine,—fraisier, racine.—Genet, 
semence, cendre, —genévrier, baies, —géranion bec de grue, — 
grateron, semence.—Hépatique des fontaines,—hièble, baies, 
racine, —houx (petit) ou fragon.—Millepertuis, —moutarde.— 
Oignon.—Pariétaire ,— persil ,—pissenlit,—prêle.—Raifort.— 
roquette sauvage. — Sapin et pin, bourgeons , goudron , téré- 
benthine , etc. ,—saponaire , — saxifrage ,—scille ,—sureau, 


écorce intérieure , baies, feuilles.—VNerge d’or ,— vigne, vèn 
blanc. | 


EXPECTORANTS. 
(€ Stimulants des organes respiratoires. ) 
Aïl, —arum ou pied-de-veau , racine , — aunée. — Bolet 
odorant,—Capucine,— chou rouge, — colchique.— Genévrier, 


639 


tiges , feuilles el baies. — Hyssope. — Iris nostras. — Lierre 
terrestre.—Marrube—-millepertuis.—Navet.—Oignon.—Phel- 
landre aquatique, —polygala vulgaire, —pouliot, —pulmonaire, 
pulmonaire de chêne ou lichen pulmonaire. — Sapin et 
pin, térébenthine, goudron, bourgeons, etc.,—serpolet, — 
scille.— Velar ou erysimum. 


VOMITIFS OÙ ÉMÉTIQUES. 


Arroche ou bonne dame, semence, —asaret ou cabaret. — 
Colchique.—Dompte-venin ou vincetoxicum, fusain, fruit.— 
Genêt à balai, —genêt d'Espagne, —genêt des teinturiers.— 
Joubarbe (petite) ou vermiculaire brûlante.—Lierre grimpant, 
baies.—Moutarde, semence en poudre, —muguet, [leurs.—Nar- 
cisse des poètes, — narcisse des prés. — Parisette ou herbe à 
Pâris,—patience sauvage , racine en poudre.—Raïfort ,— ro- 
quette, semence. — Scille.— Violette odorante,— violette de 
chien. 

PURCATIFS. 
(Laxalifs, cathartiques ; drastiques. ) 

Agaric blanc, — anagyre. — Baguenaudier ou faux séné, — 
bourgène, écorce intérieure, — bryone. — Carthame, ffeur, 
—concombre sauvage ou élatérion , — coloquinte , — coro- 
nille ou séné bâtard. — Eupatoire d’avicenne, racine , — 
euphorbe cyparisse , — euphrobe réveille - matin, — eu- 
phorbe des marais, — euphorbe des vignes, —euphorbe num- 
mulaire, — euphorbe épurge.-- Frêne commun, feuilles, — 
fusain, baies.—Genêt à balai, des teinturiers et d'Espagne, 

fleurs et fruits ,—globulaire turbith,—globulaire vulgaire, — 

gratiole. —Hellebore noir, —khellebore blanc ou vérâtre, —. 
hellebore vert —hellebore fétide,—houx, baies.—-Iris des 

marais,—iris fétide,—iris germanique.—Lierre grimpant, baies. 
—lin purgatif,—liseron des champs,—liseron des haies. — 

Mercuriale annuelle, —moutarde blanche, semence,—moutarde 

noire, huile douce de la semence. — Neprun, baies, — noyer 

cendré , écorce.—Pêcher, fleurs, —pigamon jaunâtre,— poly- 

pode.—Rhapontic , racine, —ricin , huile, — rosier de chien, 

fleurs,—rosier musqué, fleurs.—Soldanelle,—sureau, écorce 
et feuilles.—Tam ou sceau de Notre-Dame. 


VERMIFUGES O4 ANTHELMINTIQUES. 


Absynthe,—absynthe marine, —ail, —ambroisie,—amandes 


LEA 


640 


amères,—artichaut —aurone.—Balsamite ou baume-coq, fleurs 
et semences, — bourgène, écorce, — bryone. — Carotte, racine 
crue, — chélidoine, > colchique, — coloquinte, —coriandre.— 
Eupatoire d'avicenne.—Fougère mâle, —fusain, frutts.—Ge- 
nevrier, huile de cade,—gratiole,—grenadier, écorce de la ra- 
cine.—Hellebore noir, — hellebore fétide ou pied de griffon. 
—Lin cultivé, hule_—lin purgatif,—liseron.—Mille-pertuis, 
semence , flcurs , huile essentielle, —mousse de Corse ou fucus 
helminthocorton,—moutarde, huile douce, —mâûrier , écorce de 
læ racine.—Nielle,—noyer, brou de noix, huile.—Oignon, — 
olivier, huile d'olive.—Pêcher, feuilles. — persicaire brûlante, 
—pied d’alouette.—Ricin, huile, —rosier sauvage, duvet inté- 
rieur du fruil.—rue, semence. — Sabine, —santoline blan- 
che, fleurs el semences, —santoline des jardins , /eurs et 
semences,—sapins et pins, térébenthine, huile essentielle de 
térébenthine, —sarriette, —saule à feuilles de laurier, écorce, — 
scordium, — serpolet, — staphisaigre , semence. — Tabac, — 
tanaisie.—Valériane.— Toutes les plantes amères. 


RUBÉFIANTS ET VÉSICANTS. 


Ail,—alliaire,—arum ou pied-de-veau,—anémone des bois. 
—Bryone.— Chélidoine ou grande éclaire, — clématite des 
haies.— Dentelaire.—Euphorbe épurge,—euphorbe cyparisse, 
—euphorbe réveil-matin, etc.— Garou, écorce.— Hellebores.— 
Moutarde noire, moutarde blanche.—Nenuphar, racine frai- 
che,—noyer, écorce de la racine.—Ortie brûlante, —ortie dioï- 
que. — Piment, —plantin aquatique, — pulsatille commune.— 
Raïfort sauvage, —renoncules, — roquette sauvage, —rue.— 
Sabine.— Velar ou sisymbre officinal, —vermiculaire brûlante 
ou petite joubarbe. 

Pour moxas : Byssus des caves.— Vigne , feuilles. 


TABLE 


DES 


Matières Vathologiques et Chérapeutiques. 


A. 


ABAISSEMENT de la matrice. 52% 


ABCÈSs froids, 50, 477, 506, 424, 
466, 612. 

ACCOUCHEMENT (avec inertie 
utérine }, 582, 218, 925. 

ADÉNITE, 970, vVOy. engorge- 
ments glandulaires. 

ADOUCISSANTS , 635. 

AFFECTIONS asthéniques , voy. 
atonie des voies digestives, 
atonie et débilité générale. 


— cancéreuses, VOy. Cancer, 
squirre. 
— catarrhales pulmonaires, 


499, 450. 479, 181,291, 521, 
557, 518, 408, 416, 419, 455, 
451, 460, 474, 495, 511, 558, 
575, 582, voy. Catharre pul- 
monaire. 

— cutanées chroniques, 102, 
141, 468, 170, 179, 194, 196, 
205, 207, 215, 249, 284, 299, 
350, 554, 419, 425, 492, 495, 
305, 589, 605, 617. 

— dartreuses, 127, 155, 540, 
355, 615,625, voy. affections 
cutanées chroniques, affec- 
tions herpétiques, dartres. 

— de poitrine, voy. affections 
catarrkales, pulmonaires, asth- 
me, Catharre pulmonaire, 
phthisie. 


AFFECTIONS goutteuses, voy 
arthrite, goutte. 

— herpétiques, 152, 153, 525, 
625, voy. affections cutanées 
chroniques, affections dar- 
treuses, dartres. 

— Hystériques, 449, 469, 490 
voy. hystérie. 

— mentales, 402,141, 44, voy. 
aliénalions mentales, folie, 
manie. 

— nervenses, 70, 92, 204, 242 
295, 266, 279, 290, 295, 514, 
571, 496, 549, 552, 559. 612, 
voy. affections spasmouiques, 
hystérie, névroses, spasmes. 

— rhumatismales, 129, 479. 
219, 451, 475, 492, 645, voy. 
rhumatisme. 

— Scorbutiques, 470, 255, 299, 
510, 552, 426, 552, voy. 
scorbut. 

— scrofuleuses, 92, 95, 120 
197, 455,170, 245, 255, 546. 
961,562, 569, 615, 619, voy. 
scrofules. 

— Soporeuses, 104, 102, 306, 
voy. appoplexie, léthargie. 

— Spasmodiques, 450, G17 : 
de l'utérus, 228; des pon- 
mons, 249; du cœur, 250: 
chronique du larynx et de Ja 
trachée artère, 465, voy. 
convulsions, spasmes, : 


41 


642 


AFFECTIONS strumeuses, voy. 
affect. scrofuleuses, scrofules. 

— Syphilitiques, 127, 128, 129, 
135, 175, 525, 529, 599, 492, 
voy. syphilis. 

— vermineuses, 48%, 390, 194, 
245, 250, 519, 474, 482, 605, 
VOY « ascarides lombricoï ‘des, 
ascaridesvermiculaires, ténia, 
vers, ver solitaire. 

AGALAXIE, 156. 

ALBUMINURIE, 68, 447, observa- 


tion; 153,176, 419, 459, 509, 
510, voy. néphrite albumi- 
neuse, 


ALIÉNATION mentale, 442, 384, 
441, voy. affections mentales, 
folie, manie. 

AMAUROSE, 24, 226, 455, 551, 
5955, 609. 

AMBLIOPIE , 239. 

AMÉNORRHÉE, 5, 22, 54, 71, 
402, 442, 179, 194, 221, 244, 
271, 272, 274, 280, 284, 292, 
404, 408, 454, 435, 469, 474, 
477, 478, 479, 484, 485, 922, 
327, 548, 091, 070. 

AÂMERS, 654. 

AMYGDALITE, 350, 450, 575, 
voy. angine, engorgement 
des amygdales. 

ANAPHRODISIE, 94%. 

ANASARQUE, à. 12, 14, 41, 59, 
62, observation ; 407, 127, 
476, 477, 199, 208, 213 255, 
971. 532, 356, 339, 550, 592, 
301, 42 2. 458, 486, 496, 508, 
551, voy. by dropisies, leuco- 
phlezmatie. 


ANGINE, 188, 206, 227, 249. 
305, observalion ; 510, 550, 
543, 401, 418, 469, 497, 532, 
581, 599, 620. 

ANGINE de poitrine, 444. 

ANKYLOSE, 485, 582. 

ANOREXIE, 21, 841, 299. 509, 


621, voy. inappétence. 
ANTHRAX, 266. 
ANTISPASMODIQUES, 655. 
APHONIE, 465, 564. 

APHTES, 228,525, 401, 496. 
APOPLEXIE, 141,496, 306, 520, 
344, 421, 543, 590. 


| ARTHRITE, 67, 94, 


4101, 214: 
voy. engorgement articulaire, 
goutte, rhumatisme articu- 
faire. 

ASCARIDES fombricétdes, 260, 
voy. affect .vermineuses, vers. 

— vermiculaires, 344, voy. vers. 

ASCITE, 193, 196, 243, 340, 540, 
458, voy. hydropisie. 

ASPHYXIE, 282; par submersion, 
468, 544. 

ASTHME, 8, 11. 12, 21, 24, 29, 
56, 44, 45, 55, 75, 76,449, 
429, 179, 194. 204, 224, 255, 
241, 249, 255, 271, 279, 279, 
280, 282, 285, 291, 514, S17, 
518, 539, 591, 710, 447, 415. 
416, 421, 425, 424, 440, 412, 
443, 344, 451, 458, 462, 469, 
485, 292, 508: 597, 545, 350, 
564, 595, 395, 606, 610. 

ASTRINGENTS, 654. 

ATONIE de l'estomac , des voies 
digestives, 148, 21, 54, 71, 76. 
90, 105, 107, 140, 203, 291; 
380, 282, 554, 466, 474. 295. 
548. 551 , 615, vOy. débilité 
des or ganes digestifs. 

— générale, 18, "34, voy, débili- 
té générale. 

— des organes génito-urinai- 
res, 421. 

ATROPHIE scrofuleuse, 615, 
voy. affections scrofuleuses, 
scrofules. 

AVORTEMENT, 49, observation ; 
582, 4178, 482, 521. 


B. 


BLENNORRHAGIE, 64 ,85,88, 
95,151, 196, 259, 557, 599, 
406, 616, 628, voy. gonor- 
rhée. 

BLENNORRHÉE, 479, 262, 420, 
421, 456, 466, 492, 570, 584, 
GK6. 

BLESSURES graves de la tête.510. 

BRONGIITE 42, 59. 84,91, 
155, 154,458, 164, 221, "250, 
257, 352, 551 578, 425, 431. 
454, 467, 496, 539, 595 , 
594,599. voy. catarrhe pulmo- 
naire. 


643 


BRONCHORRUÉE , 29, 54, 179, 
257, 244. 

BRULURE, 95, 410, 205, 227, 
228, 249, 255, 261, 266, 294, 
535, 343, 408, 409, 425, 446, 
485, 552. 562, 590, 593. 

Bugox, 532, 547. 

— pestilentiel, 510. 


€. 


CACHEXIE , 29 , 97, 407 , 449, 
465, 166, 179, 190,496, 215, 
253, 272, 285, 299, 510, 559, 
401, 424, 458, 474, 492, 494, 
496. 

CALCULS urinaires, 
165, 179, observation; 
504 , 524, 604. 

— Dbiliaires, 620. 

CANCER, 44, 92, 453, 217, 2514, 
232, 2435, 249, 250, 252, 292, 
294%, 295, 557, 389, 415, 446, 
455, 571, 575, 604, 606, 615, 
617. 

CARDIALGIE. 76, 279, 280, 496, 


107, 155, 
597, 


627, voy. gastralgie. 
CanneaAu, 215; voy.af'ections 


scrofuleuses,  engorgements 
glanduleux, scrofules. 

CATALEPSIE, 421, 564. 

CATARACTE, 45, 258, 453, 551, 
610. 

CATARRHE pulmonaire, 8,41, 
24, 34, 58, 40, 57, 58, 64, 74, 
observation, 91,97, 104,107 ; 
observation ; UE 168 , 491, 
906, 215, 224 . 253, 244, 250, 
9253, 257, 271, "272, a7à, 299; 
510, 516, 57, 518, 352, 539, 
409, 410, 445, 414, 420, 425, 
424, 425, 451, 432, 455, 456, 
445,451, 452, 457, 458, 460, 
475, 487, 595, 494, 496, 505, 
508, 11, 527, 38, 545, 50, 
551,515, 594, 595, G16; voy. 
affections catarrhales pulmo- 
naires, bronchite. 

— dela vessie, 34, 68, 84, 198, 
479, 222, 225, 291, 532, 401, 
408. 420, 4, 295, 424, 509, 
550,574, 619, 


CATARRHE ulérin, 557 456,646; 
voy- lencorrhée. 

CAUTÈRES (pansements des) 487, 

255, 270, 504, 628. 

CÉPHALALGIE , 35 A ER, 226 

| 228, 255, 282, 445, 545, 627, 

CHANCRE douloureux, 589. 446, 
voy. ulcères douloureux. 

— phagédénique. 645. 

CHAUDE-PISSE, 404, voy. blen- 
norrhagie, gonorrhée. 

CHLOROSE , à, 21, 25, 54, 74, 
479, 185,190, 491, 221, 244, 
271, 285, 299, 509, 458, 466, 
469, 524, 529, 548, 570, 584, 
816, 627. 

CHoLÉRA, 280, 507, observation ; 
544,574, 519, observation ; 
425, 585, 586. 

CHORÉE ou danse de Saint-Gui, 
24, 144,204, 250, 428, 441, 
446, 471, 549, 559, 564, 567, 
610. 

CHOROÏDITE Chronique, 422. 

CHUTES, 24, 26. 

CHGUTE de la matrice, 100, 525. 

— du rectum, 89, 400. 

CLous, 267, 552, voy. furoncle. 

Coccix (Escarregangréneuse au) 
617. 

COLIQUE hépatique, 422. 

-— métallique . 260 , 375, 467, 
346, voy. colique saturnine. 
— néphrétique. 6, observation. 
— nerveuse, 224 52 TA SET 

998, 485, 948. 

— saturnine, 105, 255, 587, 
604, voy. colique métallique. 
—— stercorale , 356, VOy. Consti- 

tipation. 

— utérine, 282. 

— venteuse , 18, 20, 71, 76, 
voy. flatuosités. 

CouMoriox cérébrale, 510. 

ConGEsriox cérébrale, 464,320. 

— utérines, 522. 

CONSERVATION des plantes,629.. 

CoONSTIPATION, 286, 302, 509, 
518, 558, 466, 467, 514, 537, 
544, 590. \ 

CONSTRICTION spasmodique de 
l'anneau inguinal, 44, 


6% 


ConsrrieTION de l'anus, 44, 46, 
observation. 

— (le la gorge, 610. 

— de l'urètre, 44, 47, observa- 
tion. 

— du col de la vessie, 610, 

— du cal äe l'utérus, #4, 
610. 

— du larynx, 610, 

ConTusIONS, 8, 25, 135, 221, 
249, 254, 283; 294, 594, 406, 
497, 506, 507, 549, 576, 588, 
390, 595. 


47, 


CONVALESCENCE , 469, 487, 
584. 
Convuzsioxs, 25, 429, 450, 


204, 255, 421, 427, 440, 526, 
564, 599, 604. GI7, 626, 627, 
COPHOSE, 229, 399. 
COQUELUCHE, 42, 30, 4%, 45, 
62, 65, 94, 104, 7129, ’4 34,222, 
256, 250, 280, 506, 514, 516, 
317, 318, 548, 518, 415, 427, 
428. 450, 440. 444, 465, 489, 
27, 043, 995, 099, G66, 
615. 
CoryzA, 507, 616.1 
Cons, 150, 227, 229, 252. 
COUPEROSE, 252, 615. 
CRACHEMENT de sang, 464, 
489, 541, 
tysie. 
CRAMPES, 445, 539. 
CRoUP, 44, 123. 


488, 
9504, VOy. hémop- 


CROUTE de lait, 41, 91, 470, 
288, 2, 598, 599. 
CYSTITE, 95, 158, 206, 259, 


557, 548, 421, voy. catarrhe 
de la vessie. 


D. 


DANsE de Saini-Gui, 24, 408, 
voy. chorée 

DARTRE, 9, 40, 1429, 431, 152, 
455, 157, observation ; 442, 
145, 145, 170, 474, 185, 282’ 
255, 294, 540, 350, 554, 598, 
425, 455, 495, 505. 545, 535, 
615, 621, observation ; Voy. 
affections dartreuses, affections 
herpétiques. 


24 


DARTRE syplilitique, 405, obser- 
valion. 

DéBILITÉ des organes digestifs, 
48,85,105,107,469, 170,185, 
490, 225, 244, 255, 269, 274, 
284, 299, 509; 515, 354, 469, 
495, 626, 627 ; voy. atonie de 
l'estomac et des voies diges- 
tives. 

— générale, 1490, 191, 271,282, 
285, 527, 616, voy. atonie 
générale. 

DÉGÉNÉRESCENCESquirreuse des 
glandes, 571 ; voy. squirre. 

DELIRIUM TREMENS, 256, obser- 
vation ; 576, 584, 292. 

DENTITION, 206. 

DERMATOSES, affections cuta- 
nées chroniques etherpétiques, 
dartres, etc. 

— syphilitiques, 435 ; voy. dar- 
tres syphilitiques. 

DERMITES, 618; voy. affections 
cutanées chroniques. affections 
dertreuses et herpéliques, dar- 
tres. 

DÉVOIEMENT, VOy. diarrhée. 

DIABÈTE, 541. 584, 422, GX. 

DIARRHÉE, 34, 54, 56, 57, 60, 
65, 68, 71, 88, 99, 400, 404, 
109, 440, 1457, 459, 162, 169, 
185, 198, 204, 206, 271, 226, 
264,277, 313, 316, 331, 345, 
355, 357, 374, 402, 408, AT, 
420, 329, 436, 447, 448, 450, 
451 455, 456, 464, 366, 472 
373, A8T, 188. 489, 495, 501, 
504, 514, 524, 532, 557, 002, 
554, 569, 578, 581, 586, 587, 
602, 603, 609, 615, 616. 

DIURÉTIQUES, 656. 

DOULEURS abdominales, 52, 0b- 
servation ; (après l’ accouche- 
ment }, 604. 

— arthritiques, 216, 468, 483, 
DD2. 

— de dents, 87, 552, 598, à 
odontalgie. 

— de l'œil, 447. 

—d' estomac, 486;voy.gastralgie. 

— detête ( suite de chute}, 5347, 
voy. céphalalgie. 


645 


DouLEurs du cancer, 357 ; voy. 
chancre dou'oureux. 

— gastralgiques, 168, 237, voy. 
gastralgie. 

— hémotrhoïdales, 395, voy. 
hémorrhoïdes douloureuses. 
— hypogastriques, 62, observa- 

tion. 

— mercurielles, 104 

— néphrétiques, 336, 430, 604, 
voy. colique néphrétique. 

— nerveuses, 443, voy. dou- 
leurs névralgiques, névralgie. 

— rhumatismales, 283, 546, 
483, 576, 582; voy. rhuma- 
tisme. 

DYSSENTERIE, 44, 54, 56, 57, 60, 
C2, 64, 66, 88, 99, 404, 157, 
459, 169, 198, 204, 206, 226, 
297,259, 261, 271, 277, 316, 
331, 339, 9917, 314, 408, 4929, 
447, 448, 456, 464, 466, 467, 
472, 487, 488, 489, 537, 354, 
374, 581, 595, 602, 603, 609, 
612, 616. 

DYSMÉNORRHÉE, 274, observa- 
lion ; 282, 550, 587. 

DYsPEPSIE, 71, 85, 185, 299, 
340, 18, 424, 469, 474, 527, 
550, 575, 615, 616 ; voy. ato- 
nie de l'estomac, des voies di- 
gestives. 

DYsPNÉE, 419, 250, 251, obser- 
vation ; 446, 445, 612. 


E. 


Eccuyose, 25, 1433. 221, 283, 
308, 485, 500, 507, 528, 593. 

EcLAMPsIE des enfants, 428 ; 
voy. convulsions. 

ECOULEMENTS atoniques, 555, 
616. 

— blennorrhagiques, 196 voy. 
blennorrhagie, gonorrhée. 

— chroniques muqueux, 481, 
198, 215, 280, 475, 504, 553, 
616; voy. écoulements atoni- 
ques. 

— gonorrhéiques, 463: voy. 
blennorrhagie, gonorrhée, 

— hémorrhoïdaux, 647. 


ECOULEMENTS leucorrhéïiques , 
496 ; 10. leucorrhée. 

ECZÉMA, 131, observation, 340, 
425. 

ELÉPHANTIASIS, 142, 145, 470, 
340, 354. 

EmBarRas gastrique, 545, 622. 

— des viscères abdominaux, 
voy. engorgement des vis- 
cères abdominaux. 

EMMÉNAGOGUES, 655. 

EMOLLIENTS, 655. 

EMPATEMENT des viscères abdo- 
minaux , Vuy. engorgement 
des viscères abdominaux. 

EMPIÈME, 107. 

EMPOISONNEMENT {Pathologi:}, 
par l’aconit, 9, 598; l'ané- 
mone des bois, 47; la bella- 
done, 44; la cigüe, 92 ; cigüe 
(petite), 406 ; la chélidoine ou 
éclaire, 438; la digitale, 442; 
l'ellébore noir, 441 ; l'ellébore 
blanc, 144 ; l’ellébore fetide, 
146 ; les euphorbes, 150, 155, 
454; les diverses espèces de 
garou, 474 ; la gratiole, 194 ; 
la parisette, 548 ; la petite 
joubarbe où vermiculaire, 
950 ; la jusquiame, 254, 259, 
observation ; la laitue virense, 
242 ; le laurier cerise, 246; 
le laurier rose ; la mercu- 
riale vivace, 287 ; le mézé- 
réon, 174; la morelle, 295 ; 
le mouron rouge, 296 ; le pa- 
vot,557 ; le pavot cornu, 595 ; 
l'opium, 562, 365, observ.; le 
pêcher, 595, 596; la pomme 
épineuse ou stramonium,440, 
441 ; la pulsatille, 452; les re- 
noncules, 460, 461,462; la sa- 
bine, 481 ; la scille, &08; la 
staphisaigre, 551; le sumac 
vénéneux, 553; le tabac, 
541 ; le tue-chien ou colchi- 
que, 559. | 

— (Thérapeutique), par des 
substances âcres et corrosives, 
157, 469, 206 ; par le sublimé 
corrosif, 469 ; par la colo- 
quinte, 269, observation ; par 


646 


la noix vomique, 549 ; par 


l'acide hydrocyanique , 422 : 
par l’opium, 422. 
ENCHIFRÈNEMENT, 945 ; YOY. 


coryza. 

ENGELURES, 258, 262, 508, 518, 
562. 

ENXGORGEMENTS articulaires, 42, 
165.198, 212, 255, 496, 582, 
588. 

— atoniques, 254. 

— de la prastate, 68, 420. 

— de la rate, 26, 51, 107, 138, 
156, 148, 166, 401, 426, 507, 
511 

— de l'utérus, 95, 482, 522 

— des amygdales, 198, 598. 

— des glandes salivaires, 308, 
454. 

— des mameiles, 45, 76. 155, 
80. 81,95, 93, 224, 156, 188, 
249,283, 406, 446, 527. 

— des testicules, 95, 94, 594. 

— chroniques des viscères, 97, 
401, 102, 429, 455, 149, 170, 
477, 179, 496, 205, 207, 220, 
295, 251, 249, 547, 552, 554, 
595, 400, 404, 405, 426, 428, 
455, 469, 491, 492, 494, 5li, 
557, 381, 599, 608, 615. 

— da foie. 26, 95, 127, 148, 
1656, 477, 207, 949, 401, 426 

— du tissu celiulaire, 402, ob- 
servation; 289. 

— glanduieux,lymphatiques, 8, 
51, 64, 424, 430, 212, 252, 
255, 255, 255, 280, 285, 401, 
466, 475, 492, 495, 551, 547, 
549, 551, 569, 570, 575, 599, 
612, G17. 

— laiteux, 8, 80, 81 
406. 

— Mmésentériques, 54, 477. 

— œdémateux, 72 182 498,212, 
216, 255, 301, 475, 195, 497, 
540, 569 591, 514; voy. æœdè- 
me. 

— «corbutiquesdes gencives,98, 
508, 545, 472, 479, 496, 532, 
554. 

— scorbutiques des extrémités 
inférieures, 89. 


, 188, 285, 


ENGORGEMENTS scrofuleux, 30, 
124, 296. 406, 573, 614, 

EMÉTIQUES, 637. 

ENGOUEMENT muqueux des voies 
aëriennes, 280 

— stercoral des intestins, 467. 

ENROUEMENT, 457, 458, 5173. 

ENTÉRALGIE, 73. 

ENTÉRITE, 203, 249, 259. 

ENTORSE, 135, 198, 593. 

EPANCHEMENT pleurétique, 415, 
242. 

— séreux abdominal, 417. 

EÉPipyYbyMITE blennorrhagique, 
309: voy. orchite. 

EPILEPSIE, 70, 92,101,149,424, 
441, 204, 250, 231, 235, 346, 
348, 421, 427, 428, 440, 444, 
442,447, ATS, 545, 627. 

EpisTaxis, 115, 474, 521, 528, 
589, 616; voy. fiémorrhagie 
nasa!e. 

ERYsIPÈLE, 80, 409, 416,241, 
039, 998, 299. 

— phlegmoneux, 561, observa- 
tion. 

ESCARRE gangréneuse, GIT, voy. 
gangrène, 

Erar puerpéral, 382. 

EXANTHÈMES, 581 ‘pour les rap- 
peler), 306 : voy. rougeole, 
scarlatine, variole, etc. 

EXCITANTS généraux, 634. 

— spéciaux ‘da système absor- 
bant et de certaines glandes, 
636. 

EXPECTORANTS, 636. 

EXSUDATION eczémateuse des 
enfants, 486. 


F, 


FÉBRIFUGES, voyez fièvres inter- 
mittentes. 

Fièvres adynamiques, 282, 426, 
470, 585; voy.lièvres putri- 
des, fièvres typhoïdes. 

— ataxiques , 282, 470 (inter- 
mittentes ou rémittentes) 380, 
499. 

— bilieuses, 148, 498, 203, 227, 
137, 620, 628. 


647 


Frèvres éruptives,104,357,380, 
586; voy. exanthèmes aigus, 
rougeole, scarlatine, variole. 

— inflammatoires, 148, 205, 
297, 312, 620, 628. 

— intermittentes, 5,6, observ.; 
44, 21, 25, 31, 37, 54, 55, 
56, 71, 72, 13, 19, 85, 86, 
88, 89, 90, 97, 106, 136, 141, 
143, 465, 181, 185, 186, 489, 
194, 195, 198, 2414, 215, 217, 
218, 225, 227, 230, 235, 256, 
258, 264, 267, observaiion, 
270, 271, 274, 275, 284, 285, 
299, 303, 310, 314, 316, 319, 


334, 340, 343, 346, 349, 351, : 


594, 357, 319, 397, 404, 405, 
409, 415, 417, 422, 458, 439, 
450, 453, 454, 456. 461, 462, 
479, 483, 495, 498, 499, 500, 
502, 503, 514. 534, 545. 548, 
393, 994, 568, 569, 572, 584, 
285, 599, 605, 608, 613, 616, 
621, 625, 627. 

— jaune, 418. 

— muqueuses, 71, 72, 90, 181, 
189, 190, 271, 299, 426, 554, 
621. 623, 

— nerveuses, 282; voy. fièvres 
ataxiques. 

— périodiques avec symptômes 
nerveux, 282, 

— pernicieuses, 580, 499 ; voy. 
fièvres ataxiques intermit- 
tentes ou rémittentes. 

— puerpérale, 6419. 

— putrides, 714, 72, 198, 203, 
299, 300, observation ; 338, 
437, 585, 620; voy. fièvres 
adynamiques. 

— typhoïides, 19. 24, 448, 282, 
300, 306, 334, 380, 469, 494, 
585. 627. 628. 

— vermineuses, 274, 301, 584, 
587; voy.affections vermineu- 
ses, vers. 

FissurEs à l’anus, 44, 56, 89. 

FISTULES, 424; voy. ulcères 
fistuleux . 

FLATUOSITÉS, 73, 105, 485, 223, 
244, 279, 280, 282, 295, 310, 
D27, 001, 044, 575, 626. 


FLeurs blanches, 88, 198, 313, 
345, 436, 527, 590, 605, 606 ; 

_ voy. leucorrhée. 

FLux de ventre, 644; voy. diar- 
rhée. 

— hémorrhoïdaux, 576, 617. 

Foie, 142; voy. aliénation 
mentale, manie. 

FRACTURE, 169, 261, 262, 297, 
observation. 

FurFuRACEs de la peau, 354; 
voy. dartres. 

FURONCLE, 266, 194, 554 ; voy. 
clous. 


G. 


GANGRÈNE, 7, 72, 89, 251, 270, 
585, observation; 401, 402. 
423,501, 512, 592, G17 ; voy, 
ulcères gangréneux. 

GALACTIRRHÉE, 609. 

GALE, 36, 59, 96, 110, 429, 150, 
172, 185, 252, 255. 285, 350, 
554, 495, 479, 483, 495, 545, 
528, 531, 546, 551, 612, 623. 

GASTRALGIE, 20, 70, 73, 156, 
168, 221, 273, 295, 449, 463, 
466, 469, 501, 527, 364, 625. 

GaAsTRiTE chronique, 203, 206, 
259. 

GASTRO - ENTÉRITE chronique, 
163, observation, 203, 552, 
voy. gartrite chronique. 

GASTRODYNIE, 48, voy. gastral- 
gie. 

GASTRO - MALACIE (|ramollisse- 
ment de la membrane mu- 
queuse des voies digestiv.),592. 

GERÇGURES du sein, 104, 266, 
403, 485. 

GINGIvVITE, 458, voy. stomatile. 

GoiTre, 569, 570. 

GONFLEMENT indolent des gen- 
cives, 283 voy. engrgement 
scorbulique des gencives. 

GONORRHÉE, 83, 249, 419, 424, 
467, 524, 588, 624; voy. blen- 
norrhagie. 

GouTre, 9, 21, 40,67, 104, 430, 
435, 141, 145, 160, 163, 477, 
4189, 194, 205, 246, 240. 284, 


648 


289, 306, 408, 418, 419, 420, 
392, 458, 464, 473, 492 494, 
031, 533, 846, "556; 1, 558. 
398. 604. 643, 617. 

GRAVELLE, 14, 68, 70, 80, 85, 
428, 136, 158. 176, 209, 220, 
292,223, 349, 347, 400, 417, 
420, 436, 448, 449, 438. 504, 
506, 511, 557, 574; voy. cal 
culs urinaires, néphrite cal- 
culeuse. 

GRIPPE, 504. 


H. 


HaALLUCINATION, 440, 441. 

HÉMATHEMÈSE, 341, 464, 521, 
919. 

HÉMATURIE, 104, 162, 188, 206, 
331, 430, 448, 464, 521. 

HÉMICRANIE, 564; voy. 
graine. 

HEMIPLÉGIE, 55, 525, 
paralysie. 

HÉMOPTYSIE, 38, 99, 104, 4145, 
235, 250, 260. 331, 337, 341, 
342, 448, 452, 464, 488. 496, 
521 ; voy. ‘crachement de sang. 

HÉMORRHAGIES, 56, 60, G5, 66, 
88, 145, 162, 198, 206, 228, 
235, 259, 262, 290, 313, 323, 
331, 341, 344, 345, 378, 402, 
407, 408, 409, 417, 425, 429, 
447, 448, 456, 475, 489, 505, 
520, 521, 528, observation ; 
332, 353,970,017,0bservation; 
519, 581, 587, 590, 601, 616, 
625. 

— du ventre, 

— externe, 425, 576, 577, ob- 
servation ; GOI. 

— nasale, 298, 341, 344 
observation. 

— utérine, 88, observ.; 262, 
528, 342, observ.; 520, EYTR 
622; voy. ménort hagie, mé- 
trorrhagie, perte. 

HÉMORRHOÏDES, 44, 47, 57, 65, 
observation ; 133, 228, 258, 
observation ; 239, 250, 265, 
294, 389, 437, 446, 513. 527, 
537, 538. 


mi- 


264, voy. 


, 928, 


———"" #© 


HÉPATITE, 95, 426. 

HERNIE étranglée, 45, 52, 89, 
210,467, 544, GIO. 

HERPES, 425; voy. dartres. 

HOQUET, 280, 282, 564. 

HYDARTHROSE, 64, observation; 
232, 406. 

HYDROCÈLE, 89, 97, 401, 
176, 178, 332, 536, 588. 

HYDROCÉPHALE, 607. 

HYDROPÉRICARDE, 14, 509. 

HYDROPHOBIE, 430, 589; voy. 
rage. 

HyDaoOPISIE, 9, 44, 43, 44, 29, 
31, 33, 62, 77, 81, 85, 96, 116, 
427, 430, 135, 436, 441, 442, 
145, 148, 149, 153, 158, 179, 
185, 193, 194, 195, 207, 213, 
214, 213, 219, 222, 294, 226. 
230. 240. 264. 267, 274, 283, 
299. 347. 348. 350. 354. 332 
355, 401, 404, 410, 415, 418, 
419, 448, 453, 455, 457, 458, 
494. 495, 506, 508, 509, 328. 
536, 337, 544, D48, 7856 :  VOY. 
anasarque, hy ‘drothorax, hy- 
dropéricarde, lencophlegmatie. 

— des articulations, 619; voy. 
hydarthrose. 

HyprorHorAx, 4146, 494, 350, 
426, 431, 508, 510 ; voy. hy- 
dropisies. 

HYPERSTHÉNIE, 249, 598. 

HYPERTROPHIE du cœur, 445, 
351. 

HYProCONDRIE, 141, 191, 194, 
235, 244, 249, 279. 280, 282. 
299, 310, 7350, °466, 7478, 485, 
533, 382, 364, 581, 612, 626, 
627. 

HYSTÉRALGIE, 153, 274, observ. 

HYSTÉRIE, 28, 71, 73, 204, 223, 
244, 249, 271, 274, 279, 280, 
282, 350, 440, 446, 449, 469, 
477, 478, 485, 490, 494, 524, 
543, 543, 548, 532 559. 364, 
BS4, 610, 626, 627. 


L 


102, 


Icrère, 13,16, 33, 44, 80,85, C0, 
127, 429, 430, 135, 436, 148, 


649 


s 185, 220, 231, 271, 328, 
2 354, 404, AAT, 496, 483, 
192 537, 589, 602, 608. 

ICTHYOSE, 7340, 7324. 

ILEUS, 260, 544, 590. 

INAPPÉTENCE, 224, 
219 ; vOy. anorexie. 

INCONTINENCE nocturne d urine, 
48, 49, 88, 343. 

INDIGESTION, 279, 552. 

INERTIE des intestins. 419, 495. 

— de la matrice, 515, 516, ob- 
servalion ; 519. observation ; 
518, 519, observation : 520, 
524, 599. 

— dela vessie, 524, 607. 

INFILTRATION séreuse du pou- 
mon, 271, 528. 

INFLAMMATIONS aigües, 235. 

— chronique du foie, 243. 

— chronique dela matrice, 522. 

— chronique de la gorge, 312, 
616. 

— chronique de la muqueuse de 
la bouche, 616. 

— de la peau, 276. 

— de la poitrine, 276; voy. ca- 
tarrhe pulmonaire, pleurésie, 
pneumonie. 

— de l'utérus, 
trite. 

— des intestins, 
entérite. 

— desviscères abdominaux, 277, 
358, voy. entérite, gastrite, 
péritonite, etc. 

— des voies gastriques, 276. 

— des voies urinaires, 276 ; voy. 
cystite, néphrite. 

— des yeux, 276; voy. ophtal- 
mie. 


223, 244, 


277; voy. mé- 
243, 467 ; VOY. 


— du péritoine, 243 voy. périto- | 


nite. 
— externes, 358, do2, 604. 
— gastro-intestinales, 37 y 276. 
— graves de l'oreille, 606. 
— latente du poumon, 
469, 203. 
— sourde des intestins, 467. 
— superficielles, 227, 244. 
— traumatiques, 298 
INSOMNIE, 236, observation ; 
238, 374, 


129, 


INTERTRIGO, 486. 

Irrris, 44, 238, observation ; 
492, 531, 600, 

IRRITATIONS des bronches, 260; 
voy, bronchite. 

— des voies urinaires, 
84, 628, 

— intestinales, 


58, 82, 


gastriques et 


gastro- -intestinales, 08, 244, 
366, 597, 628. 
ISCHURIE, 259, 545 ; voy.réten- 
tion d'urine, strangurie. 
ÎVRESSE, 89, GO5. 
J. 
JAUNISSE, 164, 175, 269, 514, 


404, 529, 608 ; voy. ictère. 
L. 


LAIT, pour en augmenter la sé- 
crétion, 456, 522; comme an- 
ti-laiteux, 473 ; pour en arré- 
ter l'écoulement, 609. 

LÈPRE, 442, 145, 158, 170, 540, 
354, 423, 505. 

LÉTHARGIE, 141, 344, 543. 

LuMB84GO, 421, 551 ; voy. rhu- 
matisme, névralgie, etc. 

LowBrics ou lombricoïdes (vers) 
312, 323, 329, 330, 338, 482, 
490; voy. vers. 

LEUCOPHLEGMATIE, 14,62, 466, 
181,458, 510, voy. anasarque, 
hydropisie. 

LEUCORRHÉE, 5, 23, 35, obser- 
valion ; 54, 68, 86,88, 97, 99, 
262, 274. 273, 274, 290. 291. 
292, 545. 404, 408. 419, 220, 
424, 458. 456, 466. 469, 475, 
188. 489, 492, 501, 522. 548. 
558, 570, 584, 588, 616 ; voy. 
catarrhe utérin, leurs blan- 

ches. 


M. 


MALADIES aigües, 558, 584. 
— atoniques, °272, 334; voy. dé- 
bilité générale. 
— bilieuses, 545, 439 ; voy. fiè- 
vre bilieuse. 
A1" 


650 


MALADIES convulsives, 204,516, 
469, 626; voy. convulsions. 
— chroniques de la peau, 404, 

496, 207, 215, 252,.284, 340, 
350, 554, 409, 426, 457, 473, 
545, 581 ; voy. affections dar- 
treuses, affect. herpétiques, 

dartres, lèpre. 

— de bright, 447; voy. albumi- 
nurie, néphrite albamineuse. 

— da cœur, 445, 250 ; voy. hy- 
pertrophie du cœur , palpita- 
tions. 

— inflammatoires, 259, 337, 
345, voy. inflammation. 

— nerveuses, 242, 626 ; voy. af- 
fections nerveuses, névroses. 
— pédiculaire, 34, d46; voy. 

phthyriasis. 

— stuéniques, 250. 

— vénériennes, 96, 1481; voy. 
affections syphylitiques , sy- 
philis. 

MANiE, 401, 464, 494, 196, 255, 
279, 296, 348, ‘440, "442, 545: 
voy. aliénation mentale, folie. 

Maux de gorge, 437, 472, 526; 
vOY: angine. 

MÉLANCOLIE, 249, 279, 444, 
485; voy. aliénation mentale. 

MELŒNA, 56, 579. 

MÉMORRHAGIE, 331, 455, 579, 
580, 589, 590; voy. hémor- 
rhagie utérine,  métrorrhagie, 
per te utérine. 

MÉTRITE chronique, 292. 

MÉTRORRHAGIE, 54, 60, 88, 99, 
404, 445, 551. obser valion : 
344. 481, 589; voy. hémor- 
rhagie utérine, ménorrhagie, 
perte utérine. 

MIGRAINE, 53, 275, 279, 552. 

MÔLE hydatique, 522. observa- 
tion. 

MoxA, 580, 614. 

MUGuUET, 228 ; voy. stomatite. 


N. 


NARCOTIQUES, 635. 

Névurire, 95, 1428, 458, 206, 
271, 337, 348, 597, 408, 537, 
628. 


_— 


— albumineuse, 418, 422, 458; 
VOy. albuminurie. 

— calculeuse, 179, 188, 223, 
291, 397, 408, 418, 509, 574; 
VOY. calculs urinaires gravelle. 

NÉVRALGIE, 9, 44, 92 , 94, 442, 
235, 252, 292, 306, 339, 530, 
371: 389, 420, 423, 436, 440, 
441, 444, 504, 524, 551, 543, 
559, 604, 598, 599, 610. 

— faciale, 235, 252. 

— intermittente, 504. 

— interne, 524. 

NÉVROSES, 44, 73%, 4149, 255, 
282, 371, 485, 553, 560, 564, 
68. G17. 

— abdominales ou viscérales, 
282, 485. 

NYCTALOPIE, 610. 


0. 


OBSTRUCTIONS des viscères ab- 
domivaux, 464, 295, 346, 354, 
416, 492, 541, 562; voy. en- 
gorgement des viscères abdo- 
minaux. 

ODONTALGIE, 184, 224, 226, 
238, 256, 389. 401, 250, 531, 
543: vOY. douleur de dent. 

OCCLUSI0N spasmodique des 
paupières, 238. 

OEDÈME, 44, 24, 72, 97, 
449, 177, 485, 198, 205, 212 
A6, 935, 280, 457, 472, 474, 
478. 495, 496, 497, 528, 240. 

Oraciré de la cornée, 534. 

OPHTALMIE, 44, 80, observation: 
95, 110, 438, 140, 457, 241, 
262, 389, 446 248, 437, WT, 
.268, 030, 623. 

— catarrhale, 617. 

— herpétique, 555. 

— photophobique, 258, 610. 

— scrofuleuse, 484, 258, D95;, 
534, 625. 

ORCHITE, 258, 589, 591. 

OTALGIE, 531, 543, 600. 

OTiTE, 589, 600. 

OTORRHÉE, "428, d31. 

OZÈNE, 479. 


651 


P: 


PALES-COULEURS, voy. chlorose. 

PALPÉBRITE glanduleuse , 158, 
440. 

— muqueuse, 158, 140. 

PALPITATIONS du cœur, 47,445, 
255, 249, 250, 279, 425, 564, 
620, 627 ; voy. hypertrophie 
du cœur, maladies du cœur. 

PANARIS, 266, 294, 552, 389, 
594, 554, 610. 

ParAcCousIs, 551, 600. 

PARALYSIE, 9, 21, 24, 26, 97, 
444,190, 191, 204, 255, 244, 
245, 279, 282, 299, 510, 306, 
359, 544, 418, 421, 455, 469, 
494, 497, 525, 527, 528, 551, 
333, 543, 064, 382, 599. 

— de la langue, 224, 508, 450. 

— de la vessie, 420. 

— des membres inférieurs, 525; 
voy. paraplégie. 

— du rectum, 523. 

PARAPLÉGIE, d23. 

PARAPHYMOSIS, 240, 610. 

PÉRIPNEUMONIE,4 07; VOy. pneu- 
monie. 

PÉRITONITE, 206, 243, 259, 442, 
467, 628. À 

PERTE utérine, 542, observation; 
voy. ménorrhagie, métrorrha- 
gie. 

— séminales, 524. 

PESTE du Levant, 602. 

PETITE VÉROLE, 579 ; VOy. va- 
riole. 

PHLEGMASIES, 203, 487, 550, 
561, 628 ; voy. inflammations. 

— chroniques : de la matrice, 
522; de la poitrine, 487; des 
viscères, 581 ; du tube digestif, 
563. 

— cutanées, 376,379; voy.rou- 
geole, scarlatine, variole, etc. 

— des organes dela respiration, 
260, 582; voy.catarrhe pul- 
monaire, pneumonie, pleuré- 
sie. 

— des voies gastriques, 276. 

— des voies urinaires, 203, 276, 

— des yeux, 276. 

— externes, 457. 


— muqueuses, 38. 

— pulmonaires, 437; voy.bron-- 
chite, catarrhe pulmonaire, 
pneumonie, pleurésie. 

— rénales, 437; voy.néphrite. 

— vésicales, 437; voy. catarrhe 
de la vessie, cystite. 

PALEGMON, 157, 266, 29%, 527. 

PHOTOPHOBIE, 258, G10. 

PHTHIRIASIS, 531, 546 ; vOoy .ma- 
ladie pédicnlaire. 

PaTHiste pulmonaire, 9, 29.57, 
73, 16, 94, 94, 407, 4119, 429, 
430, 164, 179, 249, 250, 251, 
257, 273, 291, 557, 346, 378, 
410, 414, 412, 413, 414, 419, 
420, 422, 425, 424, 425, 431, 
435, 451, 459, 475, 479, 487, 
535, 590, 561, 570, 581, 617. 

PIERRE, 164, 552, 485; voy.gra- 
velle. 

Piqures des abeilles et des guë- 
pes, 598. 

— desangsues (enflammées), 394. 

PLACENTA (pour en favoriser l'ex- 
pulsion, )520, observation; 559. 

PLAIES, 558,586, 513; atoni- 
ques, 588; avec lacération, 
394 ; douloureuses, 259, 296, 
992; enflammées, 266, 552 ; 
gangréneuses,227; indolentes, 
425; récentes par lacération, 
contusion ou érosion,389; si- 
nueuses, 588; stationnaires, 
423, 

PLEURÉSIE, 105, 449, 250, 259, 
260, 271, 291, 506, 347, 558, 
D16, 605. 

— avec épanchement, 415, 416, 
245. | 

PLEURODYNIE, 168, 506, 589, 
495, 516. 

PNEUMONIE, 29, 58, 62, 63, 64, 
416, 158, 249, 250, 259, 271, 
508, 538, 501, 5386, 6054 

PozypE du nez, 192, 589. 

— du conduit auditif, 389; 

— du vagin, 389. 

POLLUTIONS nocturnes, 590. 

PoRR1IGO, 145; vuy, teigne. 

POuURRITURE d'hôpital, 89, 538, 
423, 501, 512, 513, 621. 

PRURIGO,145,425,424,546,558, 


Psoriasis, 423, 425. 

PTÉRIGION, 158. 

PrYALISME mercuriel, 2 

PupiLLe ‘pour la dilater), 45, 
258, 294, 447. 

PURGATIFS, 637. 

PurpüurA hémorrhagica, 205, 
546, 587, 590. 

PUSTULES muqueuses syphiliti- 
ques, 589. 


R. 
RaAculris ou rachitisme, 460, 
475, 485, 2415, 3927; voy, 


scrofules. 

RAGE, 178, 249, 296, 430 ; voy. 
hydrophobie. 

RAMOLLISSEMENT des gencives, 
584. 

— gélatiniforme de la membra- 
ne muqueuse des voies diges- 
tives, 592. 

RÉCOLTE des plantes, 629. 

RELACHEMENT des gencives et 

de la luette, 198, S81, 590. 

de l utérus, 541, 

musculaire, 283. 

du rectum, 198. 

— du vagin, 400, 498. 

RÉTENTION de calculs dans les 
canaux biliaires, 467. 

— du placenta, 520, 
lion. 

-— d'urine, 84, 552, 565, observ, 
430, 545, 607; voy, ischurie, 
strangurie. 

RÉTINITE, 44, 389. 

RÉPERCUSSIONS exanthémateu- 
ses, 344. 

RÉTRACTIONS musculaires, 338, 
582. ; 

RÉTROCESSIONS goutteuses, rhu- 
matismales ou exanthémateu- 
ses, 423. 

RAUMATISME, 9, 24, 50, 40. 44, 
67, 83,97, 131,144, 468, 477, 
180, 194, 219, 245, 249, 285, 
284. 306, 339, 342, 344, 350, 

554, 384. 399, 108. 409, 43 
329. 424, 425 456, 444, 445; 
451, 458, 461, 482, 492, 394. 
496, 594, 027, 091, 035, 098, 


observa- 


d46, 549, 556, 557, 558, 559, 
360, 598, 601, 608, 613. 
RHUME, 333, 435, 439: VOy Ca- 
tarrhe pulmonaire. 
ROUGEOLE, 46,58, 64 PRES, 
D39, 586. 
RUBÉFIANTS, 638. 


S, 


SALIVATION mercurielle, 274. 
SANGSUES (pour les conserver), 
SATYRIASIS, 92. 

SCARLATINE, 16, 44, 58, 158, 
203, 586. 

ScrATIQU E, 44, 45, 401, 454, 
306, 350, 320, 45, 457, 462, 
463, 361, 562, 582, 

ScLéroriTe, 44, 538. 

SCORBUT, 4114, 16, 43, 15,175, 81, 
98, 150, 448, 163, 479, 191, 
203, 215, 250, 253, 271, 284, 
299, 340. 338, 340, 346; 390, 
354, 358. 210, 419, 423, 424, 
426, 456, 437, 487, 458, 472, 
298, 496, 532, 875, TR 584: 
voy. 620, affections scorbuti- 
ques. 

SCROFULES , 55, Observation; 
93, 96, 97, 407,449, 129, 450, 
455, 155, 165, 166, 185, 245, 
250, 233, 271, 284. 285,523, 
526, observation ; 327 obser- 
vation, 538, 340, 530, 5a9, 
598, 410, 419, 469, 502, 513, 
527, 529, 009, 576, 584, 614, 
615, 617 ; voy.affectionssero- 
fuleuses, 

SÉDATIFS, 655. 

SPASMES, 92, 


548, 457, 485, 
627. 


| — de la vessie, 438. 


— de l'urètre, 47, 48, 545. 

— du col utérin, 47. 

SQUIRRE, 255, 569, 570, 574. 

STOMACACE, 908, 545,573; 590, 

STOMATITE, 158, 7589, 472, 552. 

STRANGURIE, 48, observation ; : 
257,299; 294, 336, 548, 604. 

SUDORIFIQUES, 656. 

SuEurs des phthisiques, 40, 475, 
495. | 


6 


SUPPRESSION des hémorrhoïdes, 
142, 434. 

— des lochies, 467. 

— règles, 142, 269, 288, 291, 

— 321, 481, 485, 550, 386; 
voy. aménorrhée. 

SURDITÉ, 355, 479, 531. 

SYNCOPE, 282. 

SYPHILIDES, 419, 617. 

SYPAILIS, 9, 40, observation ; 
67, 95, 796! 464, 497, 450.155, 
158, 181, 196, 497, 216, 249, 
259, 558, 554, 584, 406, 424, 
453, 473, 492, 557, 570, 598, 


599, 618 ; voy. affections sy- 
philitiques, maladies  véné- 
riennes, 


FT, 


Taies de la cornée, 158, 589, 
455, 461, 479, 610, 625. 

TEIGNE, 17, 41, 108, 410, 445, 
182, 252, 255, 253, 554, 398, 
425, 485, 503. 546. 

TEMPÉRANTS, 655. 

TENESME, 44, 552. 

TÉTaNos, 46, 516, 371, 387,421, 
446, 545. 

Tic douloureux de la face, 45, 
937, 424. 

TæxrA, 104, 153, 460,172,194, 
198, 199, 204, observation; 
274, 512, 421, 467, 482, 490, 
559, 592, 622. 

TOXIQUES amers, 634. 

— astringents, 634. 

TorTICOLIS, 559. 

Toux , 44, 92, 109, 419, 206, 
223; 950, 266, 274, AA, 518, 
334. 557, 578, 414, 427, 433. 
456, 457, 452, 465, 504, 562, 
697, 606. 

TRancHées desenfants,20, 404. 

— des femmes en couche, 225. 

— utérines, 605. 

TREMBLEMENT des membres, 
282, 494, 564. 

TRismus, 45, observation, 421. 

TugErcCULES, des poumons,341; 
voy. phthisie pulmonaire. 

TumEuR blanche, 42, 44, 459, 
477, 246, 252. 


[e) 


3 


cancéreuse, 645. 
inflammation, 158, 446. 
lymphatique, 543, 591, 253. 
scrofuleuse, 206, 346, 415, 
472, 530, 569. 
— squirrheuses, 573. 
TYMPANITE nerveuse, 282, 479. 
Typaus, 380, 564,583, 595,620. 


U. 


ULCÉRATIONS cancéreuses de la 
bouche, 251, 569. 

— carcinomateuses, 592. 

— des gencives, 480, 552. 

— du pharinx et des fosses na- 
sales , 401. 

— scorbutiques de la bouche, 
252. 

— vénériennes de la peau, 599: 

ULcÈRES , 71, 93, 96, 129, 257, 
2898, observat.; 544, 554, 535, 
415, 455, 485, 545, 390, 614, 

— atoniques, 15, 51, 42,85,155, 
159, 172. 482, 187, 198, 255, 
257, 255, 273, 283, 285, 525, 
326, 527, 250, 554, 401, 402, 
425, 475, 479, 497, 501, 512, 
513, 547, 549, 551, 544, 374, 

— calleux, 401, observation : : 
530. 

— cancéreux, 75, 
446, 645. 649. 

— des paupières, 438. 

— douloureux, 259 , 294, 296, 
506. 

— fistuleux (pour les dilater ), 
487, 206. 

— fongueux, 255, 255, 04. 

— gangréneux, 45 , 172, 233, 
485, 515, 549. 

— internes, 501. 

— mercuriels, 618. 

— œdémateux, 1472. 

— phagédéniques des pieds,592, 

— putrides, 59, 75,16, 544. 
483, 547, 621. 

— sanieux, 255, 547. 

— scorbutiques , 45, 51, 98, 
407, 459, 172, 487, 255, 285, 
320, 525, 597, 330. 

— scrofuleux , 45, 31, 141, 
424, 155, 182, 187, 275, 2835, 


æ) my 
76,251, 540, 


654 


325, 526, 527, 550, 401, 402, 
424, 497, 614. 

— sinueux, 459, observation. 

— sordides, 24, 172, 227, 233, 
273,344, 401 , observation ; 
425, 479, 512, 550, 519, 78. 

— syphilitiques, 618. 

— variqueux des jambes, 42. 

— vénériens, 618. 

— vermineux, 249. 

UrèrrE des femmes (pour le 
dilater} , 187. 


V. 


VARIOLE, 16, 58, 64, 158, 558, 
586. 

VER solitaire,95, 460,172, 19%, 
498 , 199 , 201 , observation ; 
274, 312, 469, 482, 490, 559, 
622, voy. ténia. ; 

VERMIFUGES, 657, VOY. vers. 

VERMINE, 416, 479, 551. 

Vers, 5,6,7,141,12,57, 39, 
59, 62, 89, 95, 101 , 409 , 138, 
440, 441,445, 149,460, 170, 


172, 184, 190, 194, 196, 199, | 


215, 221, 230, 260, 261, 267, 
271, 274, 280, 283, 291, 302, 
312, 319, 320, 322, 525, 529, 
333, 555, 336, 538, 543, 596, 
398, 401, 416, 421, 449, 467, 
474, 476, 478, 482, 490, 495, 
501, 512, 515, 526, 527, 534, 
944, 348, 549, 550. 559, 568, 
871, 587, 604, 606, 608, 615. 
620, 627. 

VERRUES, 155, 159, 158, 530. 

VERTIGES, 2719, 409, 494. 

VÉSANIES, 441, voy. aliénations 
mentales. 

VÉSICANTS, 638. 

V'ÉSICATOIRES (pour les panser), 
004. 

— ulcérés, 485. 

VoLvuLus, 604. 

VOMISSEMENTS nerveux Ou SPas- : 
modiques , 18,92, 280 , 282, 
557, 571, 469, 474, 530, 564, 
586, 620. 

VoMITIFs, 657. 

VUE (affaiblissement amantique 
dela), 569 ; voyez amanrose, 
ambliopie. 


TABLE 


DES 


PLANTES MÉDICGINALES INDIGÈNES 


INDIQUANT 


Les familles naturelles auxquelles elles appartiennent. 


À. 


ABSYNTHE, à, syuanthérées. 
— marine, 7. 

ACHE, 8, ombelliféres. 

ACONIT, 8, 597, renonculacées, 

ACORUS vrai, Voy. 475, aroi- 
dées. 

ÀGARIC blanc, 10, champignons. 
— de chêne, 601. 

AIGREMOINE, 40, rosacées. 

AIL, 40, 601, liliacées. 

AIRELLE, 602, vacciniées. 

ALCHIMILLE pied-de-lion, 43, 
Trosuicees. 

ALKÉKENGE, 15, Solanées. 

ALLELUIA, 14, geraniacées. 

ALLIAIRE, 45, cruciféres. 

AMBROISIE , thé du Mexique, 
349, chenopodées. 

AMANDIER, 605, rosacées. 

ÂANAGYRE fétide, 606, légumi- 
neuses. 

ANCOLIEs 16, renonculacées. 

ANÉMONE des bais, 47, renoncu- 
lacées. 

— pulsatille, 452. 

ÀNETH, 47, ombelliféres. 

ANGÉLIQUE, 18, ombelliféres. 

ANIS, 19, ombelliféres. 

: ARGENTINE, 447. rosacées. 

ARISTOLOCHE clématite, 20, 
aristolochiées. 

ARMOISE, 22, synanthérées. 


ARNIQUE Où arnica , 24, 607 
Synanthérées. 

ARRÈTE-BŒUF, 27, 

ARROCHE, 27, chénopodées. 

— fétide ou vulvaire, Z8. 


7 


. ARTICHAUT, 607, synanthérées. 


ARUM, 25, aroidées. 
ÂASARET Ou Cabaret, 51, aristo- 
lochiées. 
ASCLÉPIADE blanche , (voyez 
Dompte vénin. } : 
ASPERGE, 33, asparaginées. 
ASPÉRULE Ou pelit muguet, 510, 
rubiacées. 
AUXNE, 36, 609, bétulacées. 
AUNÉE, 54, Synanthérées. 
—  dyssenterique, 609. 
AURONE, 37, Synanthérées. 
AVOINE, 55, graminées. 


B. 


BAGUENAUDIER, séné bâtard, 
925, légumineuses. 

BALSAMITE ou baume coq , 59, 
synanthérées. 

BARDANE, ibid. id. 

BECCABUNGA, 42, scrofulariées. 

BELLADONE, 43, 609, solanées. 

— atropine, 641. 

BENOITE, 54, rosacées. 

BERBÉRIS ou épine-vinette, 147, 
berbéridées. 

BERCE, 614, ombelliféres. 


656 : 


BETOINE, 54, labiées. 

BerTe, bette-rave, 55, chénopo- 
dées. 

BISTORTE, 56, polygonées. 

BoLer odorant , 612, champi- 
gnons. 

BotTrys, 550, chénopodées. 

BOUILLON-BLANC, 37, Scrofu- 
lariées. 

BouLEAU, 615, bétulacées. 

BOURRACHE, d8, borraginées. 

BoURGÈNE, 59, rhamnées. 

BOURSE A PASTEUR , 60, cruci- 
féres. 

BRUNELLE, 65, labiées. 

BRYONE, 61, cucurbitacées. 

BUGLE, 66, labiées. 

BnGLosE, ibid. borraginées. 

Buts, ibid. euphorbiacées. 

BuSSEROLE, 68, éricinées. 

Byssus des caves, 614, cham- 
pignons. 


C. 


CABARET, (VOYEZ ASARET. ) 

CAILLE-LAIT jaune, 70, 614, 
rabiacées. 

— grateron, 70. 

CALAMENT, ibid. labiées. 

CAMOMILLE romaine, 71, synan- 
thérée. 

— commune, 275. 

— puante, 72. 

CANxE de Provence, 475, gra- 
minées. 

CAPUCINE, 73, géraniacées. 

CARDAMINE, 74, cruciféres. 

CAROTTE, 75, 615, ombelli- 
féres. 

Cagvi, 76, ombelliféres. 

Cassis, 77, ribésiées. 

CATAIRE, 78, labiées. 

CENTAURÉE (petite), ibid., gen- 
lianées. 

CENTINODE ou renonée, 464, 
polygonées. 

CERFEUIL commun , 79, ombel- 
liféres. 

CERISIER, 81, rosacées. 

— sauvage ou putiet, 454. 

CÉTÉRACH, 128, fougéres. 

CHANVRE, 82, urlicées. 


CuarDoON bénit, 84, synanthe- 
rées. 

— rolland, 85. 4 

— étoilé ou chausse-trappe, 86. 

— à carder ou foulon, 87. 

CHELIDOINE ou éclaire, 435, 
papavéracées. 

CHÈNE, 87, 615, cupuliférées. 

CHÈVRE-FEUILLE, 90, caprifo- 
liacées. 

CHICORÉE sauvage, ibib, synan- 
therées, 

Chiendent, 91, graminées 

Chou ROUGE, ibid. , cruciféres. 

— vert, ibid. 

CicuE, 92, 617, ombellifères. 

— petite, 406. 

CITRONIER, 619, aurantiacées. 

CITROUILLE, 95, cucurbitacées. 

CLÉMATITE des haies, 96,623, 
rencnculacées. 

CocHLÉARIA, 97, crucifères. 

CoIGNASSIER, 99, rosacces. 

COLCHIQUE ou tue-chien, 555, 
colchicées. 

CoLoQuiNTE, 100, 624, cucurbi- 
tacées. 

CoxcouBre sauvage, 105, id, 

CoxsoupeE (grande) , ibid. bor- 
raginées. 

CoQuELICOT , 104 , 624 , papa- 
veracées, 

CORIANDRE, 405, ombelliféres. 

CoroONILLE, 106, légumineuses. 

Cressoy de fontaine, ibid,, 
crucifères. 

— alenoiïs ou nasitor, 552. 

CYCLAMEN, 408. 

CYNOGLOSSE, 409, borraginées. 


D. 


DAUPHINELLE des blés, 445, 
renonculucées, 

DictTAME blanc ou fraxinelle, 
464, labiées. 

DEXNTELAIRE,110,plombaginées. 

DiGiTALE pourprée , 141 , scro- 
fulariées. 

DoMPTE-VENIN, 426, apocynées. 

DOoRADILLE ou cétérach , 128, 
fougères. 

Douce-AMÈRE, 429, solanées. 


637 


E€LAIRE (voy. chélidoine.) 

EGLANTIER Ou rosier sauvage , 
440, 476, rosacées. 

ELLEBORE blanc, 444 , renoncu- 
lacées. 

— fétide ou pied de griffon,146. 

— noir, 141. 

EPINE-VINETTE Ou berbéris,447. 

ERGoT de seigle, 514. 

EUPATOIRE d'Avicenne, 4148, 
synanthérées. 

EUPHORBE Cyparisse , 450, eu- 
phorbiacées. 

— épurge ou catapuce, 452. 

— réveil matin, 454, 

— des marais, 152. 

— nummulaire, 152. 

— des vignes, 152. 

EUPHRAISE, 4155,scorphulariées. 


F: 


Fenoui, 155, ombelliféres. 
FENU-GREC, 457, légumineuses. 
FÈève des marais, 457, id. 
FIGUIER, 198, urticées. 
FILIPENDULE, 159, rosacées. 
FouGÈRE mâle, 159, fougères. 
FRAISIER, 161, rosacées. 
FRAXINELLE où dictame blanc, 
164, labiées. 
FRÈNE commun, 165,jasminées. 
FROMENT, 166, graminées. 
FUMETERRE, 169, fumariacées. 
FusaiN ou bonnet de prêtre, 
471, rhamnées. 


G. 


GARANCE, 175, rubiacées. 

Garou saintbois, 4173, thymèlées, 

— lauréole ou lauréole mâle, 
174. 

— Mézéréon , ou lauréole fe- 
melle, bois gentil, 474. 

GENÈT à balai, 176, légumi- 
neuses. 

— d'Espagne, 177. 

— des teintariers, 478. 

GENEVRIEK, 478, coniférées. 

GEXNTIANE, 185, jentianées. 


GÉRANION, bec de grue, herbe 
à Robert, 487, géraniacées. 
GERMANDRÉE, petit Chêne; 488, 
labiées. 

— aquatique ou scordium; 490. 

— Maritime ou marum, 494. 

GLAUCIER ou pavot cornu, 393, 
papaveracées. 

GLAYEUL puant ou iris fétide, 
492, iridées. 

GLOBULAIRE turbith, 193, globu- 
lariées. 

— vulgaire, 494. 

GRATIOLE, 494. scrophularices.. 

GRENADIER, 497, myrtinées. 

GNAPHALIE pied-de-chat, 416, 
Synanthérées. 

GROSEILLER rouge, 203, ribe- 
siées. 

Gut, 204, caprifuliacées. 

GUIMAUVE, 205, malvacées. 


58 


HÉPATIQUE des fontaines, 207, 
hépatiques. 

HERBE à Paris, parisette, 348, 
asparaginées. 

— à pauvre homme, gratiole, 
404, scrophulariées. 

HÊTRE, 210, cupuliférées. 

HIÈBLE, petit sureau, 212, ea- 
prifoliacées. 

HouBLON, 214, urticées. 

Houx, 218, aguifoliacées. 

— fragon, petit houx, 420, aspu- 
raginées. 

HyssopE, 220, lubiées. 


I. 


IF, 221, coniférées. 
IMPÉRATOIRE, 225, ombell. 
Iris des jardins, 224, iridées. 
— fétide, glayeul puant, 192. 
— jaune ou des marais, 226. 


4: 


JAGINTHE des bois, scille pen- 
chée, 510, liliacées. 

JOUBARDE (grande), 227, crassu- 
lacées. | 


658 1 


JouBARBE (petite), vermiculaire, 
229. 

JULIENNE, aragone, 233, cruci- 
féres. 

JUSQUIAME noire, 235, solanées. 

— blanche, 240. 


L. 


LaicnEe des sables, salsepareille 
d'Allemagne, 438, cypéracees. 

LaiTus cultivée, 240, synunthé- 
rées. 

— vireuse, 241. 

LAURÉOLE, 474, thyméiées. 

LAURIER franc, 244, laurinées. 

— cerise, 246, rosacées. 

— rose, 202, apocynées. 

LAVANDE, 253, labiées. 

— stæchas, 254. 

LICHEN pulmonaire, 451, liché- 
nées. 

LIERRE grimpant, 254, hédéra- 
cées. 

— terrestre, 256, labiées. 

LiLAS, 258, jasminées. 

Lan cultivé, 259, linacées. 

— cathartique ou purgatif, 265. 

LINAIRE, 264, scrophulariées. 

Lis, 265, liliacées. 

LisERON des haies, 266, convol- 
vulacées. 

— à feuilles de guimauve, 268. 

— (les champs, 267. 

LivÈcE, 268, ombelliféres. 

Lys des vallées, 510, asparagi- 
nées. 


M. 


Marronxier d'Inde, 269, 624, 
hippocastanées. 

MaARRUBE blanc, 270, labiées, 

— nair, 273. 

MASSETTE d'eau, typha, 562, 
typhacées. 

MATRICAIRE, 273, synanthérées. 

— odorante, 275. 

Mauve, 276, mulvacées. 

MÉLILOT, ib., légumineuses. 

MÉLISSE, 278, labiées. 

MENTHE, 279, idem. 

— sauvage, 279. 


MENTHE aquatique, 279. 

— pouliot, ibid. 

— poivrée, 281. 

MENYANTHE, trèfle d'eau, 284, 
625, gentianées. 

MERrCURIALE annuelle, 286, eu- 
phorbiacées. 

— vivace, 287. 

MÉZÉREON, 174, thymélées. 

Mi£Le-FEUILLE, 289, 625, sy- 
nanthérées. 

MILLE-PERTULS, 290, hypérici- 
nées. 

MORELLE, 292, solanées. 

MOSCATELLINE, 294, sorifra- 
yées. 

MouroN ROUGE, 295, primula- 
cées. 

Mousse commune, 297, 625, 
nousses. 

MouTARDE blanche, 309, cruci- 
féres. 

— noire, 298. 

MuGuET des bois, 310, arpara- 
qjinées. 

— (petit) aspérule, ibid., rubia- 
cees. | 

MunIER, 511, urticées. 

MYrTE commun, 3142, myrtinées. 

— bâtard, 51%. 


Ne 


NaRCIssE des prés, aïaut, 344, 
amaryllidées. 

— des poëtes, 347. 

NAVET, 348, cruciféres. 

NAVETTE, Colza, ibid., idem. 

NENUPHAR, 319, nymphéacées. 

NERPRUN, 320, rhamnées. 

NIELLE cultivée, 521, renoncu- 
lacées. 

— deschamps, 322. 

NoYEr, 325, juglandées. 

— cendré, 330. 

NUMMULAIRE, 551, primulacées. 


O. 


O1GNow, 332, liliacées. 
Orivisr, 554, jarminées. 
OriuM indigène, 359 
ORANGER, 626, aurantiacées. 


659 


Lérd 4 


ORGE, 337, gräminées. 

ORIGAN, 339, labiées 

ORME pyramidal, 549, urticees. 

ORTIE (grande), dioïque, 544, 
urticées. 

— (petite) brûlante, 541. 

— blanche, 544, labiées. 

OSEILLE commune, polygonées, 

— sauvage, 345. 


F, 


PALMA-CHRISTI, VOy. ricin. 

PAQUERETTE, 546,synunthérées. 

PARIÉTAIRE, 547, urticées. 

PARISETTE, herbe à Paris, 348, 
asparaginées. 

PAS-D'ANE, voy. tussilage. 

PASSERAGE (grande), 350, cru- 
cifères. 

— cresson alénois, 352. 

— ibéride (petite), 354. 

— Sauvage, cardamine, 74. 

PATIENCE aquatique, 533, poly- 
gonées. 

— Sauvage, ibid. 

Pavor blanc, 556, papavéracées. 

— Cornu, glaucier, 395. 

— opium indigène, 359, 564. 

PÈCHER, 395, rosacées. 

PENSÉE sauvage, 398, violariées. 

PERCE-NEIGE, 599, amaryllidées. 

PERSICAIRE brülante, 400, poly- 
gonées. 

— amphibie, 405. 

PERSIL, 404, ombelliféres. 

PERVENCHE, 407, apocynées. 

PEUPLIER baumier, 408, salici- 
nées. 

— blanc, 409. 

— noir, ibid, 

PHELLANDRIE,410, ombeilifères. 


PIED D'ALOUETTE des champs, 


AS. 
PIED-DE-CHAT, voy. gnaphalie, 
446. 
PIED-DE-VEAU, VOY. arum. 
PIGAMON, 416, renonculacées. 
PiLOseLLE, 417, synanthérécs. 
Pimenr des jardins, 417, sola- 
nées. 
— aquatique, 545. 
PIN ET SAPIN, 418, coniférées. 


PISSENLIT, 426, Synanthérées. 

PIVOINE, ibid., renonculacées. 

PLANTAIN, 429, plantaginées. 

— d’eau, 430, alismacées. 

Poi.YGALA vulgaire, 434 poly- 

‘ galées. 

PoLyPopbE de chêne, 433, fou- 
géres. 

PozyrTRic, ibid., idem. 

POMME DETERRE, 435, solanées. 

POMMIER, 437, rosacées. 

— phloridzine, 458. 

POMME  épineuse, 
439, solanées. 

POTENTILLE argentine, 447, ro- 
sacees, 

— rampante,quinte-feuille,456. 

PRÊLE, queue de cheval, 448, 
équisétacées. 

PRIMEVÈRE, coucou, 449, pri- 
mulacées 

PRUNELLIER, ibid., rosacées. 

PTARMIQUE, 450, synanthérées. 

PULMONAIRE, 451, borraginées. 

— de chêne, voy. lichen pulmo- 
naire. 

PULSATILLE commune, 432, re- 
nonculacées. 

PUTIET, cerisier sauvage , 454, 
rosacées. 

PYROLE, 455, éricinées, 

— en ombelle, ibid. 


Q. 


QUEUE DE CHEVAL, VOy. prêle. 
QUINTE-FEUILLE, 456, rosacées . 


R. 


stramoine, 


RAIFORT, 457, cruciféres. 

RÉGLISSE, 439, légumineuses. 

RENONCULE âcre, 460, renoncu- 
lacées. 

— aquatique, 463. 

bulbeuse, 460. 

des champs, 463. 


— flammule, ibid. 
— graminée, ibid. 
— rampante, ibid. 


-— scélérate, 460. 
RENOUÉE centinode, 464, poly. 
gonées. 


RHAPONTIC, 468, pelygonees. 

PICIN, palma-christi, 466, eu- 
phorbiacées, 

ROMARIN, 469, labiées. 

RoxcE, 472, rosarcées. 

ROQUEITE sauvage, ibid., cru- 
ciféres. 

RosEAU à balai, 473, graminées. 

— à quenouille, canne de Pro- 
vence, 475. 

— aromatique, calamus aroma- 
tique, 475, aroïdées. 

Rosier de Provins, 474 ,rosacées. 

— à fleurs blanches, 476. 

— à fleurs pâles, ibid. 

— musqué, 475. 

— Sauvage ou églantier, 440, 
476. 

RuE des jardins, 477. rutacées. 

— de muraille (capillaire), 480. 
fougères. 


S. 


SABINE, 480, conifères. 

SAFRAN, 483, iridées. 

— bâtard ou carthame, 486, sy- 
nanthérées. 

SALEP français, orchis, ibid., or- 
chidées. 

SALICAIRE, 488. 

SALSEPAREILLE d'Allemagne , 
voy. laiche des sables. 

SANICLE, 489, ombelliféres. 


SANTOLINE blanche, 490, sy- 
narnthérées. 

— des jardins, 451. 

SAPONAIRE,  1bid., cariyophil- 
lées. 


SARRIETTE, 495, labiées. 

SAUGE, 494, labiées. 

SAULE, 497, sulicinées. 

— salicine, 505 

SAXIFRAGE, 304, saxifragées. 

— de Sibérie, ib. 

SCABIEUSE, ibid, dipsacées. 

SCEAU de Salomon, 505, aspara- 
ginées. 

— de Notre-Dame, tam, 306, id. 

SCILLE, 307, liliacées. 

— penchée, jacinthe des bois, 
510, liliacées. 

SCOLOPENDRE, 544, fougères. 


660 


SEORDIUM, ibid,, labiées. 

SCROPHULAIRE, 542, sgophula- 
riées, à 

SEIGLE, graminées. 

— ergoté, 514. 

SÉNÉ bâtard, baguenaudier, 525, 
légumineuses. 

SÉNECON, 526, synanthérées. 

SERPOLET, 527, labiées. 

SOLDANELLE, 528, convolvula- 
cees. 

SOUCI, 529, synanthérées. 

STAPHISAIGRE, 550, renoncula- 
cees. 

STŒCHAS, 254, labices. 

SUMAC des corroyeurs, 552, té- 
rébenthacées. 

— vénéneux, 32. 

SUREAU, 535, caprifoliacées. 


F. 


TABA€, 540, solanées. 

Tam, voy. sceau deNotre-Dame. 

TANAISIE, 547, synanthérées. 

THÉ du Mexique, 549. 

TaLaAspi bourse à pasteur, 60, 
crucifères. 

Tax, 559. labiées. 

TILLEUL, 551, tiliacées. 

TORMENTILLE, d55, roSacées. 

TRÈFLE d’eau, voy. ményanthe. 

TUE-CHIEN, colchique, 555. 

TussiLAGE, pas d'âne, 560, sy- 
nanthérées. 

TyrPHA, 562, typhacces. 


F: 


VALÉRIAXE, 563, valeriances. 

VarEc helminthocorton, 570, 
alques. 

— vésiculeux, 569. 

VARIOLAIRE amère, 572, liche- 
nées. 

VELAR, erysimum, 272, cruci- 
féres. 

VERGE D'OR, 574, Synanthérées. 

VÉRONIQUE, ibid., scrophula- 

riées. 


661 


VERVEINE, 375, verbénacees. VioLertE odorante, 594, viola- 
Vesse-LouP, 576, champi nons. riées. 

VIGNE, 579, viniférées. VioettrE de chien, 595. 

— vin, 582. — violine, 596. 

— vinaigre, 289. VuLvaiRE, aroche fétide, 28, 
— alcool, 592. chenopodees. 


FIX DE EA TABLE. 


————— “SE 


BOULOGNE-SUR-MER. 


IMPRIMERIE DE BERGER FRÈRES, 
51, Grande Rue. 


1850. 


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Pages lignes au lieu de : lisez : 

204 33 hémorrhoïdaires, hémorrhoïdaux. 
239 26 (Effacez ou, et ajoutez-le avant 27 de la ligne 27.) 
257 39 cataclysme, cataplasme. 

292 2 ont, a. 

337 3 cette, la, 

341 15 Lusutanus, Lusitanus. 

365 37 prescrivis, prescris. 

330 13 apoplexie, apyrexle. 

443 _ 14 dypsie, dyspnée. 

459 6 albuminairie, albuminurie. 

476 34 (après employé, ajoutez en 1849.) 

494 2 3 atanique, atonique. 

900 21 anpélique, angélique. 

905 22 topique, tonique. 

o11L 4 sens; 2?" sive. 

928 16 roton difolius, roltondifolius. 
585 29 même, néanmoins. 


590 15 médications, indications. 


SOUS 


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New York Botanical Garden Library 


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