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Full text of "Études sur l'aménagement des forêts"

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ÉTUDES 


SUR 


L'AMÉNAGEMENT 


| DES FORÈÊTS 


L. TASSY 


CONSERVATEUR DES FORÊTS, 
ANCIEN PROFESSEUR A L'INSTITUT AGRONOMIQUE DE VERSAILLES 


2 
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; 
7 


DEUXIÈME ÉDITION, REVUE ET AUGMENTÉE 


J. ROTHSCHILD, ÉDITEUR . 


LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ BOTANIQUE DE FRANCE 
13, RE DES SAINTS-PÈRES, 13 


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M. ADOLPHE LORENTZ 


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_ Mox cuEer Ami, 
| J'ai dédië la première édition de ces Études à notre cher 
: ‘lous nos camarades, je n'en vois aucun qui soit plus que toi 


Fobservateur fidèle et dévoué des préceptes qu'il nous a 


Louis TASSY. 


| W:rapeRi maire, M. Parade. Je te dédie celle-ci; car parmi. 


À ie colors d'ailleurs aux améliorations Re je crois 
_ avoir apportées à mon premier travail, el je suis heureux-de 


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| | PRÉFACE. 


£ Des calamités sans exemple ont frappé notre 
Fe pays; il ne m ‘appartient pas d’en rechercher ici 
les causes; je dirai seulement qu'on fronverait 
peut-être la principale de ces causes, celle.qn 
a engendré toutes les autres, dans ce CEE Co 
dage des appétits matériels, que je déplorais 
déjà dans la préface de la première édition de 
_ces Études comme étant incompatible avec la 
conservation des forêts, et qu'on remarque non- 
seulement chez les hommes illettrés, mais aussi, 
il faut bien l'avouer, chez ceux qui, par leurs 
richesses, leur éducation et leurs lumières, sont 
appelés à diriger les autres. « Plus d'États ont 
péri parce qu'on a violé les mœurs que parce 
qu'on a violé les lois‘ », et il ne faut pas beau- 


1. Montesquieu, Décadence des Romains. 


11 PRÉFACE. 


coup connaître l’histoire pour savoir que de tout 
temps la décadence des nations a été détermi- 
née par la corruption des hautes classes. On 
reproche au prolétariat ses convoitises maté- 
rielles! Et celles des gens qui possèdent, sont- 
elles plus excusables et moins dangereuses? 
Hélas! le matérialisme règne dans les palais 
comme dans les chaumières ; il est chez l’igno- 
rant, il est chez le savant; le pauvre s’y livre 
sans le savoir, le riche en a fait un dogme; il 
est partout, résultat chez les uns d’un extrême 
sensualisme, résultat chez les autres de l’orgueil 
et de la puissance exagérée qu’ils attribuent à 
leur intelligence. : 

Quoi qu'il en soit, quand un grand peuple 
comme le nôtre, si grand encore malgré ses 
revers, a été profondément atteint dans sa for- 
tune, il n'a qu'un moyen de se relever : suppri- 
mer toutes les dépenses de luxe et augmenter 
les dépenses utiles. Si, en même temps qu'il 
supprimerait les premières, il réduisait aussi 
les dernières, il consommerait infailliblement 
sa ruine. 

Mais de toutes les dépenses, les plus utiles 
sont certainement celles qui ont pour objet: 
l'amélioration du sol. II y a donc lieu d'espérer 


APT. * 


Fr 


ER ONEER RENTE REMEUS AT EE re 


PRÉFACE. li - 


que la dotation accordée à l'administration des 
forêts, pour les travaux dont elle est chargée, 
au lieu d’avoir à souffrir des cruels événements 


que nous venons de traverser, va, au contraire, 


sortir des limites trop étroites, dans lesquelles 


on l’a enfermée jusqu'à présent, et que les 


louables efforts faits par cette administration, 


-pour donner plus d'intensité à la production du 


sol forestier,seront encouragés davantage. Parmi 
ces efforts, les plus remarquables, quoique les 
moins remarqués, sont ceux qui se rapportent 
à la conversion des taillis en futaies pleines. 1Is 
honoreront éternellement les forestiers de notre 
époque et, avant tous, l'illustre fondateur de 
Fécole forestiêre, M. Lorentz, car c’est à lui 
sans contredit que revient l'initiative de cette 


grande opération. Mais il ne suffit pas de l'avoir 


entreprise; il faut maintenant se résigner fran- 


“ehement à des privations temporaires si on veut 


qu'elle soit efficace, et j'ai peur que, sous ce 
rapport, l'administration supérieure ne soit pas 
disposée à faire preuve de tout le désintéresse- 
ment nécessaire. Il y a là un danger grave que 
reconnaîtront, je l'espère, ceux qui se donneront 
la peine de lire et de méditer la troisième étude 
de mon livre : si, de tous les travaux d’aména- 


fiv PRÉFACE. 


gement, celui qui consiste dans la conversion 
d'un taillis en futaie est le plus avantageux pour 
l'avenir, quand il est fait dans de certaines con- 


ditions, il peut devenir, par contre, un des: 


plus fâcheux par ses conséquences, lorsqu'on 
lui marchande les sacrifices sur lesquels repose 
son succès. LH 
. L'aménagement, quand il a pour objet de 
convertir un taillis en futaie, ne saurait s’accom- 
plir sans entraîner une diminution temporaire, 
presque immédiate, dans la production de Ja 
forêt ; et plus cette diminution est forte, plus 
rapide est la transformation. Tout cela se com- 
prend si l'on considère qu’au fond et en défi- 
nitive, la conversion d’un taillis en futaie con- 


siste à transformer un massif composé d’un | 


petit nombre de coupes (30 à 40) en un massif 
composé d’un grand nombre de coupes (100 et 
au delà). Cependant l'administration supérieure, 
tout en reconnaissant l'utilité de ces sortgs 
d'aménagements, hésite à les faire sanctionner! 
dès qu'ils accusent une diminution de revenu, 
et ilest facile de deviner que si cette préoceu-- 
pation de la réduction temporaire des produits 
empêche les agents forestiers de réaliser dans la 
gestion (les forêts domaniales toutes les amélio- 


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PRÉ FACE. ” *: 3 


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rations désirables, elle arrive à paralyser leur 


. action et leur bonne volonté, relativement aux 


forêts qui appartiennent aux communes; car 
les communes sont naturellement bien moins 
disposées que l'État à sacrifier le présent à 
l'avenir. À HI) 

On constate donc encore, au sujet des conver- 
sions, la même diversité de vues et de tendances 
que l'on a signalée tant de fois déjà; et notam- 
ment à propos de l’aliénation des forêts, entre 
l'administration forestière et le ministre dont 
élle relève, diversité de vues et de tendances 
qui est d'ailleurs facile à comprendre : la mis- 
sion dont le ministre des finances est chargé, et 
qui vise surtout à maintenir entre les dépenses 
et les recettes de l'État un équilibre sans lequel 
la marche des services publics serait infaillible- 
ment compromise , est certes très-respectable; 
malheureusement, elle est en contradiction avec 
les travaux dont l’effet utile n’est pas suscep- 
tible de se produire immédiatement, et elle 
donne à l'esprit une circonspection et des habi- 
tudes de parcimonie qui sont tout à fait l'opposé 


de la hardiesse et de la libéralité dont il faudrait 


être pourvu, pour aborder et résoudre d’une 
manière satisfaisante les questions relatives au 


La 


7 © PRÉFACE. 


développement indéfini des richesses morales 
et matérielles de la nation. : 

Les hommes qui, comme les forestiers, sont 
habitués à préparer des fruits dont ils ne joui- 
ront pas; les hommes qui aiment à planter pour 
leurs petits neveux, sont naturellement enclins 
à grever le présent au profit de l'avenir. Que l’on 
modère ce penchant, je le comprends ; mais il ne 
faut pas l’annihiler, car après tout il est l’hon- 
neur des individus et le devoir des peuples. Le 
ministre des finances le supprimerait pourtant 
complétement si cela ne dépendait que de lui, 
et pour résumer la situation en deux mots : je 
dirai que le ministre des finances songe aux 
générations futures pour leur demander de 
l’argent, tandis que les forestiers au contraire 
cherchent les moyens de leur en procurer. 
Comment le ministère des finances et l’admi- 
nistration forestière pourraient-ils donc s'ac- 
corder? ils ne s'accorderont jamais et on leur 
rendrait grand service à tous les deux en pro- 
nonçant leur séparation. Tous les hommes com- 
pétents insistent sur l'utilité, sur l'urgence de 
cette mesure. Pourquoi leur voix n'est-elle pas 
écoutée? Peut-être regarde-t-on le service fores- 
tier comme un détail de peu d'importance, au 


Vos: à ie (NME EEE 


PRÉFACE. vit 


milieu des questions politiques et administra- 
tives qui agitent aujourd'hui les esprits. On se 
trompe si l’on a cette pensée : une aüminis- 
tration qui gère un domaine auquel, suivant 
l'expression d’un grand ministre, « les sociétés 
demandent des éléments de proteêtion, de sûreté 


et de gloire », ne saurait être un détail de peu 


d'importance, et la réforme que l'on sollicite 
pour l'administration forestière, n’est point une 


‘ de ces améliorations secondaires qui peuvent 


être ajournées sans inconvénient. Elle se lie 
évidemment à des intérêts d'un ordre très- 
élevé, et il serait d'autant plus opportun de la 
réaliser que nos forêts, dont l’étendue a été 
diminuée d'au moins trois cent cinquante mille 
hectares par la dernière guerre, sont menacées 
maintenant par les projets de décentralisation 
administrative qui font tant de bruit depuis 
quelque temps, qui ont reçu un commencement 
d'exécution, et qui ne peuvent que favoriser la 
tendance de l'individu à s'approprier la chose 
publique. ; 

Cette tendance est d'ailleurs le signe dis- 
tinctif de toutes les civilisations avancées. A 
l'origine des sociétés, l'homme ne possède d’au- 
tres moyens d'action que ceux qu'il tient de ses 


VA : | PRÉFACE. 


facultés natives. Ces facultés natives font toute 
sa force, tout son pouvoir, tout son capital; il 
vit au jour le jour, n'économise pas et ne jouit 
exclusivement que du fruit de son travail. En 
dehors de lui et des objets qui servent à sa con- 
sommation, rien ne lui appartient en propre; 
tout est commun et reste commun à la peuplade 
ou à la tribu, tant que les choses restent elles- 
mêmes telles que la nature les a faites. Mais, 
dès que l'homme à mis son empreinte sur un 
objet; dès qu'il y a ajouté une valeur productive 
si minime qu'elle soit, l’indivision, la commu- 
nauté des biens commence à lui peser, et il 
cherche dans l'appropriation un moyen d’aug- 
menter sa puissance personnelle, en s’assimi- 
lant, en s’incorporant en quelque sorte des 
forces permanentes étrangères à son essence. 
Alors les sociétés progressent rapidement. Ce- 
pendant elles finiräient tôt ou tard'par se 
désagréger si, à côté de cette tendance de plus 
en plus forte de l'individu à s’accroître aux : 
dépens. de la communauté, il ne s’établissait 
pas un pouvoir central, un pouvoir collectif 
dominant tous les autres, et assez puissant pour 
soustraire au morcellement les biens qui, étant 
utiles, nécessaires à tous, ne sauraient être 


PRÉFACE... Ix 


abandonnés aux hasards de la. destinée indivi- 
duelle. C’est là ee qui justifie, ce qui légitime 
ce qu’on appelle la centralisation. Je n'ai point 
à expliquer ici comment peut se constituer ce 
pouvoir central et supérieur au milieu des per- 
sonnalités qui sembleraient en être la négation. 
Je constate seulement qu’il est indispensable 
et qu'il ne saurait être anéanti, sans que la 
société fût transformée aussitôt en une agglo- 
mération d'individus qui, dépourvus de toute 
solidarité, de tout lien, seraient exposés à se 
disperser à tout instant: Or, parmi les biens 
communs qui forment comme le ciment du 
corps social, il n'en est pas de plus précieux 
que les forêts; on ne doit rien négliger de ce 
qui peut contribuer à les sauvegarder, et voilà 
pourquoi il serait nécessaire, d’abord, de les 
affranchir de l'autorité fiscale, attendu qu'au 
lieu de les défendre contre les convoitises de 
l'individu, elle est plutôt disposée à les leur 
livrer. 

Je pense que pour les forêts domaniales, la 
suppression de cette autorité fiscale qui les a 
exclusivement gouvernées jusqu'à présent, suf- 
firait à garantir leur conservation. Quant aux 
forêts communales, il leur faudrait une autre 


x PRÉFACE. 


sauvegarde et je ne la vois que dans les mesures 
qui donneraient plus d'efficacité à la tutelle 
exercée par l’État sur ces forêts. Si, comme tant 
de gens le désirent, les forêts communales 
étaient remises à la libre disposition des con- 
seils municipaux, c'en serait fait d'elles : 
comment voudrait-on en effet que les conseils 
municipaux pussent les protéger longtemps 
contre l'individualisme, puisque le gouverne- 
ment central, avec toute l'autorité dont il est 
investi, n’y réussit pas toujours? 

J'émets là des idées qui sont contraires à ce 
mouvement vers la décentralisation dont je par- 
lais tantôt; mais ce mouvement s’est déjà 
traduit par une loi; il constitue un très-sérieux 
danger pour la conservation du peu de forêts 
qui nous restent; je ne saurais me dispenser 
de m'y arrêter un moment. 

Quel est le but que poursuivent ceux qui. 
ont mis en avant ce mot de décentralisation? ils 
veulent, disent-ils, reconstituer l'autonomie des 
communes et celle des départements. Sur ce 
point les hommes des partis les plus opposés se 
donnent la main. L'autonomie est la panacée qui 
remédiera à tous les maux de l'humanité. Exa- 
minons ce que vaut ce grand mot-là : 


FE 


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PRÉFACE. xI 


On entend par autonomie le droit de se gou- 
verner par ses propres lois. Être autonome, 
c'est se faire sa règle à soi-même; c’est être 
indépendant, vivre de sa propre intelligence, 
de sa propre force, sans secours étranger. Mais, 
s'il en est ainsi, il est évident que l'autonomie 
de l'individu, celle de la commune, celle du 
département et celle de l’État ne sauraient coexis- 
ter. Formez-en une et les autres disparaissent ; 
d'où il suît qu'aucun des éléments qui compo- 
sent la société, ne saurait prétendre à une 
indépendance absolue, pour peu qu'il recon- 
naisse: l’utilité de conserver les autres : toute 
la question est de savoir dans quelle propor- 
tion il convient que l'autorité se partage entre 
eux. ; É 

Remarquons d'ailleurs que ces différents 
pouvoirs superposés se sont tous constitués aux 
dépens de la liberté individuelle; qu'ils n’ont 
pas de vertu propre; qu'ils n'existent que pour 
le bien de chacun, et qu'ils deviennent usurpa- 
teurs, dès qu'ils retiennent dans leur ensemble 
plus d'autorité qu'il ne leur en faudrait pour 
suppléer à l'insuffisance de l'individu aban- 
donné à son initiative, ou dès que l'un d’eux en 


_garde une portion qui pourrait être plus utile- 


XII PRÉFACE. 


ment exercée par celui qui est immédiatement 
au-dessous. “HE @ | 
Cette usurpation existe-t-elle ? La somme 
d'autorité dont jouissent ensemble la commune, 
le département et l'État, est-elle excessive, ou 
bien un de ces éléments est-il trop puissant par 
rapport à l’autre ? Voilà les questions que soulè- 
vent ces réclamations qui se produisent de tous 
les côtés, au nom de l'autonomie et de la décen- 
tralisation. Il ne s’agit pas d'organiser les 
choses de sorte que chaque commune, chaque 
département soit, dans toute l'acception du 
mot, autonome, car cela serait impossible ; äk 
s’agit de régler leurs attributions respectives, | 
d'une manière conforme à leur intelligence et 
aux moyens d'action que comporterait leur ini- 
tiative. 
+ Ainsi posé, le problème est facile à résoudre 
en ce qui concerne le pouvoir qu'on peut laisser 
aux communes, relativement à la gestion des 
forêts qu’elles possèdent. En effet, sous ce rap- 
port, l'intelligence et les moyens d'action des 
particuliers et des communes sont connus. On 
n’a qu'à voir ce que les particuliers ont fait de 
leurs bois et la rapidité avec laquelle ils en opè- 
rernit le défrichement. — Dans les 50 dernières 


“ 


PRÉFACE.  - XIII 


années, ils en ont détruit plus de 400,000 hec- 


tares. — On n’a qu'à considérer les oppositions 
passionnées dont l'administration publique doit 
triompher, afin de sauver de la ruine les forêts 
des communes, pour reconnaître combien ces 
deuxcatégories de propriétaires sont inhabiles à 
gérer convenablement leurs terrains boisés; et | 
puisqu'on ne peut plus songer à imposer une 
tutelle aux particuliers au sujet de ces terrains, 
qu’on évite au moins de porter atteinte à celle 
que l'État exerce, et que seul il peut exercer 
utilement, sur les terrains similaires des com- 
munes. 

Au surplus, ce n’est point, quoi qu'on pré- 
tende, la centralisation, c'est-à-dire la concen- 
tration entre les mains de l'administration | 
générale du pays, d'un nombre exagéré d’at- 

tibutions, qui par elle-même a été un embarras 
pour nos affaires ; c’est la délégation d’une trop 
grande partie de ces attributions aux préfets. 
et c'est surtout l'usage que le pouvoir exécutif 
a fait de son autorité dans un but politique. 
… Les préfets étaient devenus des espèces de 
proconsuls : la tutelle des communes est encore 
presque entièrement entre leurs mains; leur 


_ action s'étend sur tous les services publics sans : 


XIV PRÉFACE. 


exception; elle embrasse, on peut le dire, tout : 
le domaine de l'administration, en sorte que les 
garanties qu'on avait cherché à se procurer 
contre les abus de l'autorité supérieure par la 
division de cette autorité entre plusieurs minis- 
tres indépendants et responsables, on les a 
compromises en reconstituant dans la personne 
du préfet l’unité de pouvoir qu'avait brisée l’or- 
ganisation des ministères. Il y a à une anomalie 
d'autant plus choquante que l’allégement des 
attributions ministérielles, dans l'intérêt d’une 
plus prompte expédition des affaires, pouvait 
être facilement obtenu sans que l’on réunît sur la 
tête du préfet celles de ces attributions dont les 
ministres demandaient à être déchargés. Chaque 
. ministre n’a-t-il pas en effet pour le représenter 
dans les départements, les chefs de service des 
administrations qui dépendent de lui‘? 

Quant à l'usage que le pouvoir exécutif a. 
fait de son autorité dans un but politique, je 


4. Au lieu d’obvier à l’omnipotence des préfets, en restituant à 
chacune des branches du pouvoir exécutif les attributions qui 
devraient lui appartenir, on a cru devoir transporter une partie de 
ces attributions aux conseils généraux, dont on a fait ainsi des 
corps administratifs. Je crains bien que le remède ne soit pire que 
le mal et qu’il n’ait affaibli l’État, sans profit pour la liberté indi- 
viduelle et au grand détriment de l'intérêt public. 


PRÉFACE. xY 


me borne à rappeler que le gouvernement impé- 
rial avait considéré cet usage comme légitime, 
ét que ce fait seul était de nature à soulever les 
plus vives protestations. La politique, la politique 
intérieure, telle a été la cause principale des 
plaintes dont le pouvoir central a été l'objet. 
Elle à fait autant de mal à nos forêts que la fis- 
calité, et il me semble que c'est à elle que nous 
devons ces ardents désirs de décentralisation 
qui se manifestent de tous les côtés; mais la 
politique ; si l'administration devait en avoir 
une à elle, ne se prêterait pas à la décentralisa- 
tion ; ce serait même, de toutes les branches de 
l'action gouvernementale, la moins susceptible 
d'être fractionnée. Qu'on ne cherche pas, en 
conséquence, dans la décentralisation un moyen 
de s'y soustraire; il y a mieux à faire que cela : 
il y a à l’exclure complétement du domaine de 
Padministration. Aussi bien, dans un pays libre, 
le ‘gouvernement :ne saurait suivre une autre 
politique que celle qui lui est indiquée par 
l'opinion générale sincèrement consultée. 
Oui, il faut soustraire complétement à l’in- 
fluence de la politique les services administra- 
 tifs: Peut-être leur rendra-t-on de cette manière 


la considération qu'ils méritent, ce qui serait 
| b 


XVI PRÉFACE. 


un inestimable bienfait et pour eux et pour le 
pays tout entier. En effet, le respect du fonction- 
naire est une des conditions les plus essentielles 
de l’ordre social, et ce n’est pas la moindre de 
nos plaies, que ce respect n'existe plus. Les 
agents forestiers notamment ont à en souffrir; 
car c’est principalement par la persuasion, par 
la force morale, qu’ils peuvent accomplir leur 
mission. Je demanderai donc la permission de 
présenter à ce sujet encore, quelques obser- 
vations. Elles ne seront pas hors de propos dans 
la préface d’un livre qui est destiné surtout à 
des fonctionnaires. ami 

Il est de mode aujourd'hui, il est de bon 
goût de chercher à discréditer les fonction- 
naires publics, et de présenter leur carrière 
comme une des moins honorables que puisse 
embrasser un homme de quelque valeur.-On 
les met au dernier degré de l'échelle sociale. 
On les accable de dédains. On les regarde 
comme un vil troupeau qui a fait litière de 
toute indépendance, de toute personnalité, de 
toute initiative. On tient pour beaucoup plus 
dignes d'estime qu'eux, les individus qui con- 
servent leur liberté d'action et ne comptent 
‘que sur eux-mêmes pour se procurer les 


DA CARS ER TN CERTES CT ERREUR PRE PAS En 


PRÉFACE. XVII 


movéns d'existence, la fortune et la célébrité. 
Ces préjugés, qui tendent à se répandre de 
plus en plus, ne sont pas les moins remarqua- 
bles parmi ceux qu'ont engendrés la décadence 
des mœurs et la perversion des idées. Ils s’at- 
taquent à la principale base de toute société, et 
s'ils pouvaient jamais prévaloir et éloigner des 
fonctions publiques les hommes intelligents, 
instruîts, honnêtes et soucieux de leur dignité 
personnelle, l’état social serait atteint dans sa 
vitalité. 
+ Qu'il y ait en France trop de fonctionnaires ; 
qu'il y en ait beaucoup qui ne remplissent pas 
leur tâche d’une manière convenable ; qu’on ait 
fait trop souvent de l'administration le refuge 
des gens incapables de subvenir par leurs pro- 
pres forces à leurs besoins; qu’on ait usé du 
budget de l'État, pour avoir des créatures, tout 
cela n’est que trop vrai; mais on nedoit pas con- 
damner une institution par les abus auxquels 
elle fournit des prétextes, et la fonction publique 
quand elle est bien remplie, n'en est pas moins 
la prémière de toutes les fonctions sociales, la 
plus ‘enviable pour tous ceux qui tiennent à 
faire ici-bas un bon emploi de leurs facultés. La 
raison en est claire :-c’est la première et la plus 


XVIII PRÉFACE. 


- \ 
enviable de toutes les fonctions sociales, parce 


qu'il n’y en a aucune autre, je ne dis pas qui 
soit, je dis qui puisse être, aussi dégagée que 
celle-là de tout égoisme. Il n’est pas indispen- 
sable pour devenir un grand industriel, un 
grand commerçant, un célèbre avocat, un 
fameux médecin, un financier cent fois millio- 
naire, d'aimer ses semblables et son pays et 
de songer à leur être utile, tandis que, si 
petit, si humble que soit un fontionnaire 
public, c’est dans les services qu’il rend à ses 
concitoyens qu'il puisé sa raison d’être, et il ne 
fait rien qui ne se rapporte aux autres. Tous les 
sophismes du monde n'empêcheront pas cette 
préoccupation nécessaire de l'intérêt collectif, 
d'être le caractère évident des attributions du 
fonctionnaire, et cela suffit pour imprimer à ces 
attributions un cachet particulier de distinction. 
Sans doute, il n'est pas défendu aux fonction- 
naires publics d’avoir de l'ambition personnelle, 
de désirer un poste plus élevé, mieux rétribué; 
mais cette ambition ne peut être satisfaite que 
si le bien public l’est en même temps ou plutôt 
au préalable, tandis qu’en dehors de l’adminis- 
tration, les services que l’on rend à la société 
ne sont que la conséquence le plus souvent 


2 
ut 


PRÉFACE. xié : 


inconsciente et involontaire de ceux que l'on 
se rend à soi-même. é 
Mais le fonctionnaire aliène dit-on son 
libre arbitre. Ah! il y aurait beaucoup à dire 
l-dessus, et il serait facile de prouver qu’il 
n'y à pas de carrière qui ne comporte pour celui 
qui y est entré, un assujetissement plus ou 
moins grand. Je me borne à faire observer que 
dans celle de l'administration publique on est 
subordonné à la loi, au règlement écrit, tandis 
que dans presque toutes les autres, on est 
soumis à quelqu'un, ce qui rend l’obéissance 
bien plus pénible pour les âmes fières. Quand 
on n’est l’esclave que de la loi, on a le droit de 
porter haut la tête; or, le fonctionnaire public 
peut se donner d’autres maîtres, mais sa mis- 
sion ne lui impose que celui-là, et c’est le seul 
même qu'il doive reconnaître, s’il veut la rem- 
plir dignement. Le fonctionnaire il est vrai 
n’est pas riche en général, et n’a aucun moyen 
de le devenir; raison de plus pour l’honorer. Je 
n'ai certamement aucun mépris pour l'homr:e 
qui dépense brillamment une immense fortune 
acquise par d’heureuses spéculations ; pourtant, 
je le mets bien au-dessous d’un simple garde 
forestier qui, après s'être occupé toute la 


. XX PRÉFACE. 


journée de la parcelle du domaine public dont 
on lui à confié la gestion, n'a pour réparer ses 
forces, qu'une soupe aux pommes de terre. 
Jusqu'au dernier: jour de sa carrière, il fera le 
même. métier et suivra le même régime; il 
le sait et son zèle cependant ne se. démentira 
pas un instant. Est-il rien de plus touchant et 
de plus estimable? Haussez les épaules, heureux 
de la terre; toujours est-il qu'auprès de ce pau- 
vre fontionnaire, vous ne tirez pas. à .consé- 
quence. Quand vous partirez de ce monde, vous 
n'y laisserez que des traces éphémères, rien de 
vous ne vous survivra. Le garde forestier. dont 
je parlais tout à l'heure, en prenant soin de 
la chose publique, attache au contraire sa per- 
sonnalité à des travaux qui perpétueront. sa 
mémoire. Ainsi, l’homme qui est chargé d’une 
fonction publique n’est pas seulement. plus 
recommandable que les autres, parce qu'il 
représente de son vivant l'intérêt général, parce 
que la satisfaction de cet intérêt est le mobile 
de toutes ses actions; mais aussi, parce que sa 
prévoyance va au delà de sa vie temporaire, et 
prend autant de soins des générations futures 
que des générations présentes. IL est en un 
mot l'indispensable et le principal soutien de 


ét 


ne SCA à ÉD Mode de 2 


PRÉFACE. XXI 


l'état social. Au surplus, je le demande à tous 


les esprits sincères et impartiaux : Que serait 
devenue la société française, au milieu des ré- 
volutions politiques qui l'ont agitée, si elle 
n'avait pas eu cette administration intelligente, 
honnête et dévouée que l’on attaque avec tam 
de légèreté ? s 

Si la France a ‘supporté les plus terribles 
épréuves sans y sombrer, il n’est que juste de 
reconnaître qu'elle le doit en grande partie à 
ses fonctionnaires publics. Au lendemain de la 
dernière révolution, lorsque le pays envahi 
était en quelque sorte décapité, lorsque le com 
merce.et l'industrie étaient arrêtés, le crédit 


ébranlé, tous les intérêts privés épouvantés, 


quelle a été la conduite des fonctionnaires? Les 
jeunes ont pris les armes pour concourir à une 


défense .désespérée, et les. forestiers, sous ce : 


rapport, se sont signalés entre tous ‘. Les au- 
tres:ont continué leurs fonctions avec un re- 
doublement de zèle; privés du jour au lende- 
main, pour ainsi dire, de toute direction, ils 
y ont suppléé par les inspirations qu'ils ont 

1. Sept jeunes agents ont trouvé dbe mort glorieuse dans cette 


cruelle guerré. Ce sont MM. Robert, Bramand-Boucheron , Josse- 
rand, Pison, Guérin, Moisant et Marier de Boïs d'hyver. 


Da 


XXII PRÉFACE. 


puisées dans leur patriotisme et dans le senti- 
ment de leurs devoirs professionnels. Aussi, 
tous les grands besoins de la vie sociale n’ont- 
ils pas cessé de jouir de la protection accoutu- 
mée. Il est vrai que de leur côté les populations 
ont ‘montré une résignation et une sagesse 
qu'on ne saurait trop admirer ; mais l’anarchie 
n’en eût pas moins été inévitable, si cette mul- 
titude d'intérêts qui lient les citoyens à l’admi- 
nistration publique n'avaient pas reçu satisfac- 
tion. | 
Qu'on ne jette donc plus la pierre aux 
fonctionnaires publics. Essayer de les déconsi- 
dérer, c’est une injustice, c’est l’acté d’un mau- 
vais citoyen. Au lieu de les amoindrir, qu'on 


cherche à les élever dans l'opinion des masses 


ignorantes et qui, parce qu'elles sont igno- 
rantes, sont méfiantes. Qu'on cherche à les 
utiliser mieux qu’on ne l'a fait jusqu'à ce 
jour. Qu'on les épure, qu’on leur donne surtout, 
en améliôrant leur position, la force de résister 
aux défaillances. II y a dans cette voie beaucoup 
à faire pour tous les services, mais surtout pour 
celui des forêts; car il laisse grandement à 
désirer sous le rapport des traitements, des 
attributions, de la hiérarchie et du contrôle. 


PRÉFACE. XXII 


: Quoique ces longues réflexions ne soient 
point indifférentes pour la conservation des fo- 
rèts, elles me sont pas ici tout à fait à leur 
place. Je le sais ; mais quand un homme ren- 
contre l'occasion de plaider pro domo sud, quoi 
de plus naturel qu'il en profite. 

Un mot maintenant sur la différence qu il y 
a entre cette édition et la précédente : J'ai révu 
d'abord mon travail avec soin et je l'ai ensuite 
beaucoup augmenté, puisque j'y ai ajouté une 
étude sur les conversions dés ‘taillis en futaie. 


Il n’entest pas moins encore très-imparfait, et si * 


je me suis décidé à le livrer tel quel à mes 
camarades. c’est parce que j'ai pensé qu'ils en 
verraient aussi bien, mieux que moi, les 
lacunes et les erreurs, et qu'ils en retireraient 
peut-être autant d'utilité par là, que par les 
bonnes choses qui peuvent s’y trouver. Certai- 
nement, j'espère avoir le sentiment de ce que 
devrait être un livre sur l'aménagement des 
forêts pour satisfaire à tous les desiderata que 
comporte la matière; mais je suis trop vieux 
et je n'ai pas assez de loisirs pour essayer de 
donner un corps à ce sentiment-là. A mon 
àge on ne fait guère que se paraphraser; et, 
d'un autre côté, mes occupations ordinaires 


XXIV PRÉFACE. 


ne me permettraient pas,.en supposant que 
mon esprit s’y prêtât, de m'absorber dans mon 
œuvre comme il le faudrait pour la mener à 
bonne fin. On ne fait rien de sérieux, de durable 
dans ce monde, sans contention d'esprit ; or, 
cette contention d'esprit à laquelle ne résistent 
pas les problèmes à priori les plus difficiles, 
n’ést guère possible quand on a des affaires cou- 
rantes obligatoires et qui demandent à être trai- 
tées rapidement. Je laisse donc à des camarades 
plus jeunes et moins -préoccupés le soin de 
reprendre mes idées et de les développer. II 
n'en manque pas qui ont pour cela tous les 
moyens intellectuels et toute l’instruction néces- 
saires. Ce qui pourrait leur faire défaut comme 
à moi, ce serait le temps; mais pourquoi l’admi- 
nistration forestière ne détacherait-elle pas de 
leur service ordinaire, pour leur permettre de se 
consacrer à l'étude d'une question intéressant le 
progrès du service, les agents qui auraient mon- 
tré pour cette étude une aptitude particulière? 
Pourquoi ne suivrait-elle pas en cela l'exemple 
que lui donnent les autres administrations 
savantes ? Voilà encore une mesure que je prends 
la liberté de recommander à son attention et je 
le fais sans crainte, car je sais, par expérience, 


4 
PRÉFACE, As cxxv 


que l'homme éminent qui la dirige, accueille 
avec bienveillance toutes les propositions, 
pourvu qu'elles lui paraissent sincères et dic- 
tées par l'amour du bien public. 


L. TASSY. vd 


’ PRÉFACE 


DE LA PREMIÈRE ÉDITION. 


A l'époque où la civilisation romaine fut apportée 
dans les Gaules par Jules César, ce pays était presque 
entièrement couvert de bois‘. 

Parmi les forêts qui couvraient alors notre terri- 
toire, la plus remarquable par son étendue était celle 
des Ardennes (la forêt profonde) ; elle avait plus de cent 
lieues de long. Ces vastes déserts qu’on appelle la Solo- 
gne, la Dombes, la Brenne, les Landes, les Dunes, étaiént 
boisés. La ville de Paris, l'ancienne Lutèce, était en- 
tourée de forêts, dont celles de Boulogne, de Montmo- 
rency, de Vincennes, de Fontainebleau, ne sont que les 
vestiges. 

.. De ces richesses, il nous reste à peine huit millions 
d'hectares, dont la plus grande partie en taillis simples, 
clairiérés, n’offrant quelque intérêt que pour le chauf- 
fage. 


1. Le mot Gaule paraît être d’invention romaine ; les gens du pays 
l’appelaïent Celtique, Toutefois, quoique le mot Gallia soit latin, il vient 
évidemment da mot celtique gaë!, forêt (OzaxEAux). 


XXVIII PRÉFACE 


Toute la région comprise entre le Rhône, la Médi- 
terranée et les Cévennes, est presque entièrement 
dénudée. Il en est de même des côtes de l'Océan et 
de tout le plateau central. 

Quelles sont les causes de cet appauvrissement? 

Quand on songe à la violence et à la durée des 
guerres dont notre pays a été le théâtre, et qu’on se 
reporte à cette lutte effroyable de dix années qu’eut 
à soutenir Jules César pour en achever la conquête; 
quand on se rappelle que si, depuis cette conquête 
(60 ans avant J. C.) jusqu’à l'invasion franque (406), la 
Gaule jouit d'une tranquillité relative, vingt peuples 
divers, sortis des profondeurs de la Germanie, se préci- 
pitèrent alors sur elle, et qu’il y eut un désastre im- 
mense, universel; que quarante ans plus tard (451), 
de nouvelles hordes vinrent fondre encore sur cette 
malheureuse contrée à la suite d’Attila ; qu’en. 711, les 
Arabes, à leur tour, franchissant le détroit, y portèrent 
le fer et la flamme; quand on réfléchit à la puissance 
dévastatrice de ces multitudes en mouvement, on se 
dit que c’est là qu’il faut chercher la cause princi- 
pale du déboisement actuel de notre sol. On ne l'y 
trouverait cependant pas. | | 

Il paraît en effet certain que peu de temps après ces 
affreuses guerres qui ont rempli les premiers siècles 
de notre histoire, la végétation forestière avait repris 
une grande partie du terrain qui lui avait été enlevé. 
Et cela s'explique : la guerre, avec. les fléaux qu elle 
traînait à sa suite, la peste et la famine, occasionnait 
d’épouvantables mortalités parmi les hommes et dépéu- 
plait les campagnes. Les terres, abandonnées par, la 
culture, étaient de nouveau envahies par les forêts. 

Des ruines qui ont été découvertes dans les forêts du 


$ 


DE LA PREMIÈRE ÉDITION. Sx1X 


Haut-Rhin, dans celles de Grand (Vosges), de Damville 
(Meurthe), et qui remontent à l’époque romaine, indi- 
quent que le sol de ces forêts était autrefois cultivé. 
Des ruines également romaines existent à la Petite- 
Houssaye dans la forêt de Brotonne, en Normandie, 
‘dans la forêt de Beaumont-le-Roger (Eure). Le plateau 
de Linenberg, près Abrescheviller, en Lorraine, jadis en 
culture, est aujourd’hui entièrement boisé‘. Au quin- 
ième siècle, c'était un dicton populaire en France que 
es guerres des Anglais y avaient fait pousser le bois?. 

- Ce n’est donc pas la guerre qui a été la cause prin- 
-cipale de l'appauvrissement dont le sol forestier souffre 
aujourd'hui; c’est la civilisation avec les besoins qu'elle 
a crééset les appétits qu’elle a développés. 

“Je n'apprendrai rien assurément à mes lecteurs en 
leur disant que les hommes ont puisé dans les forêts les 
premiers éléments de leur bien-être et de leur émanei- 
pation : à l'origine, ils vivaient surtout des fruits sau- 
vages et du produit de la chasse. Les bois leur fournis- 
saient aussi et les abris grossiers dont ils sé conten- 
taient-et les armes dont ils se servaient. Plus tard, quand 
ils connurent l’art de domestiquer les animaux, ils 
dévinrent pasteurs : ils franchirent le premier degré de 
échelle de la civilisation et ce progrès eut pour consé- 
quence forcée et immédiate, le défrichement d’une 
certaine étendue de forêts : on dut créer des pâturages. 
Enfin, l’agriculture fut inventée, et à partir de ce mo- 


ment, la variété et la quantité toujours croissantes des 


matières alimentaires favorisèrent l'augmentation de 


L la population, provoquèrent de nouveaux besoins. Le 


+ 1. Mavry, Histoire des foréts. 
2. Histoire de France, Henrt MARTIN. 


XXX PRÉFACE 


sol était conquis ; il fallait conquérir les eaux; les forêts 
en fournirent encore les moyens. Elles suffirent à toutes 
les exigences ; on les attaqua de tous les côtés et par 
tous les motifs : tantôt, parce qu’elles étaient un obstacle 
à la culture des céréales, tantôt parce qu’elles renfer- 
maient des instruments de travail, de défense ou de 
transport. 

Il serait bien difficile de déterminer l'effet de cha- 
cune de ces influences, et d’ailleurs cela n’est pas 
nécessaire : je veux établir seulement que les besoins 
de la civilisation ont puissamment contribué à la des- 
truction des forêts ; je tiens à prouver ensuite que ces 
besoins ont rencontré malheureusement d’énergiques 
auxiliaires dans les vices que la civilisation engendre, 
quand elle se laisse emporter par l’orgueil et qu’elle 
tombe dans le matérialisme. Parmi ces vices, je signa- 


lerai l'oubli de la solidarité humaine et l'imprévoyance 


qui en est la conséquence, le goût des plaisirs physi- 
ques, l’ardeur pour les richesses immédiatement réali- 
sables, l'indifférence pour celles qu'il faut attendre. 

L'homme de nos jours ne se soucie ni du passé nide 
l'avenir ; il se soucie du présent, et dans le présent il ne 
voit que lui. 1l a perdu le culte des aïeux ; le sort deses 
descendants ne le touche pas et depuis longtemps il ne 
connaît plus les joies sublimes du sacrifice et du dévoue- 
ment. Il ne vit que pour la satisfaction dewses appétits 
égoïistes. Toutes ses aspirations étant concentrées. dans 
l'amour de soi-même, on comprend son dédain pour les 


biens dont il ne saurait jouir incontinent et qui 2. 


raient dès lors lui échapper. 

La conservation des forêts est installe avec de 
telles dispositions morales : sans le respect des tradi- 
tions, sans l'esprit de prévoyance, sans l'intelligence des 


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DE LA PREMIÈRE ÉDITION. xx 


devoirs réciproques que les générations ont à accomplir, 
sans l'amour de ses semblables, il n’y a pas de garantie 
sérieuse pour cette conservation. Le profit immédiat 
que le défrichement d’une forêt procurerait, prévaudra 
un jour ou l’autre sur les avantages qu’on assurerait 
à l'avenir, en la laissant sur pied. 

Cependant, l'ignorance trop sdbéréteurns ER AE AR 
dans laquelle on est, en France surtout, relativement à 


- ces avantages, donne, — j'aime à le supposer, — aux 


causes de destructionque je viens d’'énümérer, une force 


particulière, et je ne désespère pas assez de mon pays, 


pour croire que s'il était bien pénétré des dangers 
auxquels il s'expose par l’'anéantissement de ses forêts, 


il continuerait à les braver avec tant d'insouciance. 


La vie des hommes est attachée à celle des arbres, 
on l’oublie trop. Parmi les nations civilisées et rivales, 
la France est déjà une de celles qui possèdent le moins 
de bois, motif d’infériorité plus grave qu’on re le pense. 
La Provence se dépeuple, parce que les forêts disparais- 
sent’. Nous payons un tribut annuel de plus de 
soixante-dix millions de francs à l'étranger pour com- 
bler le déficit de notre production’. Nous possédons 
une magnifique flotte, mais une bataille navale mal- 
heureuse peut nous l'enlever, et nous la remplacerions 
difficilement. La situation mérite qu’on y prenne garde et 
qu'on s'occupe d'y remédier *. 

Quand on lit l’histoire des anciens ; quand on étudie 


= 


1. La Provence au point de vue des bois, des torrents, CHARLES DE 
x 


2. Ce tribut est aujourd’hui de 150 millions. (Note de la 2° édition. 


3. Je sais bien que l’administration forestière fait dans ce but les 
plus louables efforts ; malheureusement, son action est très-limitée, 
; c 


XXXII PRÉFACE . 


leur caractère, on les voit tout pleins d’un respect reli- 
gieux pour les bois. Cette histoire est remplie de traits 
qui montrent qu'une superstition tutélaire s’attachait 
autrefois à l'existence des arbres; ils étaient placés sous 
la protection spéciale de la Divinité. Nos mœurs sont 
bien éloignées de celles de nos pères; notre raison im- 
pitoyable a voulu sonder tous les mystères ; elle a fait 
tomber tous les prestiges, et pour ce qui concerne les 
bois, leur conservation serait tout à fait compromise si 
elle ne reposait que sur la vénération dont ils sont 
l’objet. On peut dire même que, de toutes les propriétés, 
c’est la moins respectée. Puisqu” il en est ainsi; puisque 
le positivisme de notre époque a renversé les barrières 
que le sentiment religieux opposait jadis à lesprit de 
destruction, on doit chercher dans l'intérêt des popula- 
tions une sauvegarde qui remplace celle qui n’existe 
plus. Il faut faire comprendre les avantages écono- 
miques inhérents à la propriété boisée; il faut surtout 
enseigner les moyens d'en tirer tous les fruits dési- - 
rables. 

Pour les personnes étrangères à la sylviculture, la 

forêt vierge représente le type du beau en matière de 

richesse forestière : elle est l'expression la plus haute 
des ressources que peut fournir une masse d'arbres. 

Il y a dans cette opinion une erreur grossière : 

Les forêts, comme les autres biens que la Providence 
a répandus sur notre globe, ont besoin des soins de 
l’homme pour développer toute leur puissance produc- 
tive : là comme ailleurs, la terre n’est féconde que pour 
celui qui la cultive. Le tout est de la bien cultiver, et il 
est en conséquence désirable qu’on en vulgarise l’art 
autant que possible: 


DE LA PREMIÈRE ÉDITION. © XXXIIT 


C'est, pour mon compte, ce que je viens essayer le 
faire. J'ai eu à remplir des attributions qui m'ont forcé 
d'étudier avec une attention particulière une partie de 
la science forestière sur laquelle il n’existe en France 
qu'un très-petit nombre d’écrits. Je veux parler de 
l'aménagement. J'ai pensé que mon devoir était de pu- 
blier le résultat de mes travaux. On n’y trouvera pas 
beaucoup de nouveautés : la plupart des idées exposées 
dans ce volume sont connues, mais il en est peu qui 
aient été imprimées. Je les ai recueillies ; je les ai 
groupées aussi méthodiquement que j'ai pu : voilà 
mon seul mérite. Parmi les agents, et ils sont nom- 
 breux, qui auraient le droit de revendiquer comme 
leur appartenant plusieurs des principes et des consi- 
dérations que je vais développer, je dois en citer pour- 
tant deux : 

M. Parade, directeur de l'École intpdtinié _fores- 

tière; g +” 
M. de Buffévent, ancien conservateur des forêts. 

Ces deux hommes éminents qui voulaient bien m’ho- 
norer de leur amitié, m'ont fourni beaucoup de notions, 
beaucoup de matériaux, soit par leurs ouvrages, soit par 
leurs entretiens. 

Une dernière observation : Je prie que lon fasse 
attention au titre de ce volume : Études sur l'aménage- 
ment. Je ne prétends pas publier un traité. Il y a à l'École 
de Nancy un professeur fort distingué, M. Nanquette, à 
qui je laisse ce soin, soin dont il s'occupe, mais qui 
demande beaucoup de temps, et dont il s'acquittera 

_mieux que je n'aurais pu le faire ‘. Je publie de simples 


1. Ce traité a paru avec l'entière approbation de M. Parade. Il ne 
pouvait avoir une meilleure recommandation. 


xxxiv PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION. 


études, un essai, un programme, par conséquent quel- 
que chose d’incomplet et de discutable. Qu’on veuille 
bien seulement me discuter, et je n'aurai pas perdu 
mon temps. 


Pr 


Paris, 1858. 


INTRODUCTION - 


F LA 


L'aménagement est un travail qui consiste à 
régler l'exploitation d’une forêt, de façon qu’elle 
fournisse un rapport annuel aussi soutenu et aussi 
avantageux que possible *. 

* L'homme a des besoins incessants, dont les 
principaux, ceux qui intéressent son existence maté- 
rielle, réclament impérieusement une satisfaction 
immédiate. Pour y subvenir, il lui faut des objets de 
consommation constamment disponibles ; de là sa 
tendance à obtenir des agents de production qui 
sont à sa portée, une continuité de rendement. 

Cette tendance est surtout manifeste dans les 


1. J'ai cru devoir maintenir cette définition, quoiqu’elle dif- 
fère de celle que donne le cours de culture. D’après ce cours, 
Faménagement consiste à régler l'exploitation d’une forêt dans le 
plus grand intérêt du propriétaire et de la consommation. Or, la 
condition du rapport annuel n’est pas comprise dans cette défi- 
nition, et elle est pourtant, selon moi, caractéristique de l’amé- 
nagement.. 

1 


2 INTRODUCTION. 


sociétés primitives : on y vit, au jour le jour, du 
produit de la pêche, de la chasse, elc., etc. Au 
milieu des ressources qui l’environnent, l’homme n’y 
apprécie guère que celles-là, parce que ce sont 
presque les seules dont l'exploitation puisse se con- 
cilier avec le renouvellement journalier de ses 
besoins. Le sol, défriché et ensemencé, lui fournirait 
sans doute, au bout de l’an, dix fois plus de matière 
alimentaire que ne lui en procurent: la chasse et la 
pêche. Peu lui importe ; il ne saurait rester un: an 
sans manger. Mais quand, à force de persévérance, 
il est parvenu à réaliser quelques économies sur les 
menus profits de son travail, et qu'il s’est mis de 
cette façon à même de soutenir son existence pen- 
dant le temps nécessaire à la culture du sol, alors 
il a fait un grand pas dans la voie du progrès. A 
partir de ce moment, il lui est permis d'utiliser. 
d’autres ressources, et de concilier avec des besoins 
qui se renouvellent, pour ainsi dire, à chaque in- 
stant, des cultures dont les produits ne sont réali- 
sables que périodiquement, à des intervalles plus ou 
moins longs. LENS S 

L’épargne, c’est-à-dire la mise en réserve d’une 
certaine quantité de produits, qui permettent d’at- 
tendre, voilà donc le moyen nécessaire auquel les 
hommes ont dû recourir pour approprier à la satis- 
faction de leurs besoins, les productions intermit- 
tentes; voilà le progrès qui explique la valeur 


- INTRODUCTION. S 3 


. que l’on attribue, dans les sociétés civilisées, à des 
agents, à des capitaux dont les produits ne seront 
disponibles que dans un avenir plus ou moins éloi- 
gné. Toutefois, ce progrès n’est pas susceptible de 
déplacer le pivot autour duquel gravite la produc- 
tion, ni de modifier la condition qui sert de régula- 
teur à cette dernière, qui la dirige après l'avoir pro- 
voquée. Les besoins de l’homme n'en restent pas 
moins incessants, et, par une conséquence forcée, 
les productions réglées de la manière la plus avan- 

: tageuse à ses intérêts, sont celles qui présentent le 

| plus de continuité. | 

+ L'épargne, lorsqu'elle est sous la forme d'objets 

de consommation, a, d’ailleurs, deux inconvénients 

graves : 

D'abord, elle ne se conserve pas longtemps. 

Le froment, par exemple, ne tarde pas à se 
détériorer dans un grenier. Le bois subit le même 
sort, quand il est exploité depuis un certain nombre 
d'années. Une récolte de blé ou de bois qui n'aurait 
lieu que tous les vingt ans, ne vaudrait done pas, en 
supposant qu’elle fût vingt fois plus considérable, 
celle qu’on pourrait faire chaque année. 

L'autre inconvénient des produits accumulés par 
épargne, c’est de solliciter l’imprévoyance, le gas- 
pillage, et d'entraîner, pour le moins, une consom- 
mation excessive. 

Les raisons précédentes sont suffisantes pour 


> # . 
PA LT TERRIER 


h INTRODUCTION. : 


Z 


_ 


justifier la transformation des capitaux dont les . 
produits se succèdent à de longs intervalles, en capi- 
taux dont les produits sont annuels, et si le consom- 
mateur est grandement intéressé à cette transforma- 
tion, le propriétaire du capital n’est pas appelé àen 
retirer de moindres avantages. 

C'est un fait bien connu que les branches d’in- 
dustrie le plus favorablement placées, au point de 
vue des bénéfices qu’elles offrent à ceux qui les 
exploitent, sont celles qui peuvent le plus facilement 
se plier aux fluctuations de la demande; or, entre 
deux forêts dont l’une, aménagée, serait susceptible 
d’un rapport annuel et soutenu, tandis que l’autre, 
non aménagée, ne serait exploitable qu’à des inter- 
valles relativement fort longs, il est évident que c’est 
la première dont la production se subordonnera le 
plus aisément à ces convenances dont je viens de 
parler, à ces mouvements de hausse ou de baisse 
dans la demande du consommateur. Ce qu’il faut, 
en effet, pour cela, c’est üne disponibilité constante 
de produits exploitables ou sur le point de l'être. 
L'aménagement peut seul la fournir. 

Au reste, ce budget annuel des dépenses et des 
recettes, qui est entré dans les habitudes de tous 
les hommes, prouve surabondamment les avantages 
de l’annualité, quel que soit le revenu.que l’on con- 
sidère. À l'expiration de l’année, chacun, l'indi- 
vidu comme la commune, comme l’État, chacun 


INTRODUCTION. 5 


arrête ses dépenses, opère ses rentrées, et il en résulte 
que de toutes les rentrées, celles-là sont naturellement 
le- plus désirables, qui correspondent à l'époque de 
ce bilan, sans lequel les règles de l’économie privée 
ou collective seraient fort difficiles à appliquer. 

Le consommateur et le producteur sont donc 
tous les deux d'accord pour que les forêts soient 
exploitées sous la condition d’un rapport annuel et 
soutenu ; cependant ils sont bien loin de comprendre 
‘la réalisation de ce rapport de la même manière, et 
la divergence de leurs sentiments, sur ce point, est 
importante à noter. ; 

Le consommateur ne demande qu'une chose : 
c'est que l’exploitation de toutes les forêts qui four- 
nissent à ses besoins soit combinée de telle sorte 
que, chaque année; elle lui-offre les mêmes res- 
sources. Il ne se soucie pas du règlement, auquel 
chacune de ces forêts, considérée séparément, pour- 
rait être assujettie. Si l’on suppose qu’elles soient au 
nombre de 30, qu’elles appartiennent à des proprié- 
taires différents, et qu'elles soient exploitables à 
30 ans, le consommateur admettra volontiers qu’au- 
; cune d'elles ne. soit aménagée, si d’ailleurs il y a, 
- = dans leurs âges, une gradation qui empêche que 
l'exploitation de l’une ne coïncide avec celle de 
-F’autre. Le rapport soutenu n’en existera pas moins, 
pour l’ensemble de ces forêts, et c’est là tout ce que 
le consommateur réclame. 


7 ge de EU LAS à 


6 INTRODUCTION. 


Le producteur n’envisage pas ainsi les choses ; ce 
qu'il veut, c’est que le rapport soutenu soit établi 
dans la forêt dont il est propriétaire ; ce que font ses 
voisins ne le touche que très-indirectement. 

Le consommateur désire des produits soutenus, 
non-seulement en matière, mais en marchandises de 
telle ou telle espèce. 

Le producteur ne recherche, en général, que le 
rendement en argent, quand ce producteur est dans 
la catégorie des particuliers. S'il s’agissait d’un État, 
d’une communauté quelconque, il en serait autre- 
ment, parce que leurs intérêts s’identifient plus com- 
plétement que ceux des particuliers avec les intérèts 
du consommateur. | 

- Ces différences sont essentielles et soulèvent des 
questions'sur lesquelles il y aurait certainement encore 
beaucoup à dire; mais les développements dans les 
quels je pourrais entrer à ce sujet seraient sans utilité 
aujourd'hui. Je me bornerai à ajouter aux principes 
qui découlent des considérations précédentes, que si 
l'établissement du rapport soutenu est une condition 
que les propriétaires de bois doivent, ordinairement, 
chercher à réaliser, il-y a cependant, pour les particu- 
liers, des cas où il ne leur convient pas de le faire. La 
petite étendue d’un bois peut être une raison pour 
qu’on ne l’exploite pas en plusieurs coupes succes- 
sives, parce que ces coupes occasionneraient des 
frais généraux plus considérables que ceux qu'en- 


+ 


INTRODUCTION. 7 


traînerait l'exploitation en une seule fois, et ne 
seraient pas suffisamment compensés par les avan- 


tages de l’annualité, 

… En outre, les propriétaires sont quelquefois con- 
duits, par des motifs d'économie domestique, à con- 
sidérer un bois comme une caisse d'épargne, dans 
laquelle ils désirent accumuler, pour une certaine 
époque, pour le mariage d’une fille, pour l'établisse- 
ment d'un garçon, etc., etc., des valeurs plus ou moins 
importantes. C'estencore une raison pour que ce e bois 
ne soit pas aménagé. 

Un propriétaire peut enfin être sollicité par 
une hausse extraordinaire du prix des bois, ou par 


_la nécessité de faire, face à des engagements, à réa- 


liser la superficie entière ou presque entière de la 


‘forêt qui lui appartient. 


Ce sont là des exceptions; elles ne sont jaune, 
sauf la première, admissibles pour l’État, pour une 
commune ou un établissement public, pour les corps 


impérissables enfin, dont le devoir est de distri- 


buer, aussi également que possible, aux générations 
successives dans lesquelles ils sont destinés à se 
perpétuer, les fruits et les richesses dont ils dis- 
posent. | 

Mais la régularisation du rendement annuel est 
surtout obligatoire pour les forêts de l’État; car 
leurs produits forment le pain quotidien d’une multi- 
tude d'industries et ne peuvent varier, sans qu'il en 


8 INTRODUCTION. 


» 3 


résulte de bras” perturbations et d'incaleulables 
souffrances. , is | 

En présence des fluctuations auxquelles ce ren- 
dement est resté soumis jusqu’à ce jour, il n’y à pas 
d'usine employant le bois comme principal combus- 
tible, dont il soit possible d'apprécier d'une manière 
exacte les conditions de roulement, et une des causes 
principales de la situation précaire dans laquelle se 
trouve la métallurgie au bois et des plaintes ardentes 


dont elle ne cesse d’assiéger l'administration, réside 


dans la: variabilité des produits que celle-ci met en 
vente chaque année. 
Les particuliers propriétaires de bois ne sont pas 


moins intéressés que les consommateurs à ce qu'il . 


soit mis un terme à cet état de choses. Aujourd'hui, 
l’administration peut à son gré faire la baisse ou la 
hausse par la quantité de bois plus ou moins consi- 
dérable qu’elle jette sur le marché. Tant que cette 
_ quantité ne sera pas réglée, et elle ne le sera que 
par l'aménagement, les particuliers seront exposés 
au danger permanent d’une concurrence susceptible 
d’avilir, à un moment inattendu, le prix de leurs 
coupes. Ce danger entrave leurs opérations et dé- 
précie leurs immeubles. 

L'aménagement répond, on le voit, à l’une des 
exigences les plus légitimes des sociétés civilisées, 
quand il a pour but d’annualiser et de régulariser 
la production du sol forestier. 


» 


INTRODUCTION. 9 


is ce résultat n’est pas le Stqu il soit pe 


Le proeurer. ds ; 


Depuis l'époque où une forêt est- énétaille de 
se. régénérer naturellement, soit par les semences, 
soit par les souches, elle peut donner autant de rap- 
ports soutenus différents qu’il y a d'années à courir 
jusqu’au moment de son dépérissement. Il suffit, en 
effet, pour assurer la perennité de sa production, de 
n’en-extraire chaque année qu’une quantité de bois 


égale à son accroissement moyen; or, parmi ces 


rapports soutenus, il y en a nécessairement un qui 
est préférable à tous les autres : c’est celui dont l’ex- 
pression, soit par contenance, soit par volume, 
forme ce qu’on appelle la possibilité d’une forêt. 
L'aménagement a pour résultat de le déterminer, et 
cetrésultat n’est pas moins recommandable que le 
précédent. 

.. Je viens de justifier le but de l’aménagement, je 
vais indiquer succinctement quelles sont les opéra- 
tions à faire pour l’atteindre : 

+ Quand on veut retirer d’une masse de bois un 
produit annuel constant et non interrompu, il faut 
la partager en un certain nombre de coupes annuel- 
lement et successivement exploitables, de manière 


que le repeuplement de l’une quelconque -de ces 
. coupes puisse devenir exploitable à son tour, dans 


le temps nécessaire pour régénérer les autres. 
Ce partage d’une forêt en coupes; la fixation de 


10 INTRODUCTION. 


l’ordre dans lequel lesdites coupes devront être 
exploitées, forment ce qu’on appelle le plan d’eæploi- 
tation. Le temps à courir afin qu’une coupe revienne 
une deuxième fois en tour d'exploitation, est ce qu'on 
nomme la révolution. ? 

L'établissement du plan d'exploitation est l'opé- 
ration essentielle de l'aménagement. 

Cet établissement est subordonné à la nature des 

produits que l’on recherche, et à l’âge auquel il 
convient d’abattre les arbres pour qu’ils soient réa- 
lisés. Si l’on destine une forêt à la production des 
cercles, on devra certainement l’exploiter à un âge 
beaucoup moins avancé, dans une révolution beau- 
coup plus courte, que si on la destine à la produc- 
tion de bois propre aux constructions. 

L'âge qui correspond au rapport le plus avanta- 
geux, et le plus avantageux est celui qui convient le 
mieux au propriétaire, est ce qu'on appelle l’âge 
d’exploitabilité. 

La détermination de cet dge d'ésploitabilité pré- 
cède donc nécessairement la formation du plan d’ex- 
ploitation. 

Mais l’âge d’exploitabilité d’une forêt est très- 
variable, suivant la position du propriétaire, ses 
besoins, les conditions tant naturelles qu'économi- 
. ques dans lesquelles est placée la forêt, et ces :con- . 
ditions, il est indispensable de lés connaître. 

La reconnaissance de la forêt, sa description, 


Li 


INTRODUCTION. 11 


l'inventaire de toutes les circonstances qui pourraient 
exercer une influence sur sa conservation et son ren- 
dement, sont donc les objets dont on doit s’occuper 
avant tout autre, lorsqu'on entreprend un aménage- 
ment. { 
La réunion des divers renseignements que ces 
objets comportent, constitue l’opération connue sous 
le nom de statistique. 

La statistique, 

La recherche de l'âge d'exploitabilité, 

. La formation du plan d'exploitation, 
- Telles sont, en définitive, les opérations princi- 
pales qu’exige un travail d'aménagement. 

Il convient en outre d'y ajouter l’élude et la pro- 
‘position de tous les travaux d'amélioration qui 
seraient propres à augmenter le rendement. 

_ L'aménagement est un travail très-simple, en 
général, pour les bois de particuliers, difficile, quel- 
quefois, pour ceux des communes, toujours très- 
compliqué pour les forêts de l’État. 

Dans toute société arrivée à un certain degré de 
civilisation, il s’est établi un mouvement commercial 
et industriel contre lequel un particulier ne saurait 
réagir; il est forcé de s’y soumettre quand il amé- 
nage ses bois. Qu'il s'agisse, par exemple, de l’écou- 
lement à donner à leurs produits, cet écoulement est 
déterminé par des débouchés, par des voies qui 
existent déjà en vertu d’une foule de causes plus ou 


12 INTRODUCTION. 


moins fondées, plus ou moins légitimes, mais dont il 
faut bien qu'il accepte les conséquences. Il y a là une 
première raison, raison capitale, pour que l’aména- 
gement des bois de particuliers soit en général un 
travail facile à faire; il l'est en outre, parce que ces 
bois sont tous assujettis à de courtes’ révolutions et à 
une méthode de culture d’une application commode. 

L'aménagement des bois des communes est plus 
embarrassant : une commune n’est pas dépourvue 
de toute influence sur les conditions générales dans 
lesquelles se meut la société dont elle fait partie; 
elle peut, dans une certaine mesure, réagir sur elles. 
D'ailleurs, ce n’est pas seulement par le produit net 
qu’elle se laisse guider, comme le font en général les 
particuliers, lorsqu'elle règle l'exploitation de ses 
bois; elle consulte aussi l’avantage d’un produit 
brut plus élevé ; elle embrasse enfin plusieurs géné- 
rations et doit songer à l'intérêt de l’avenir comme 
à celui du présent. 

Ce sont tout autant de cosi dé rot calé qui augmen- 
tent l'importance et les difficultés de l'aménagement 
des bois communaux. Ajoutons que le domaine fores- 
tier d’une commune occupant ordinairement plus 
d'étendue que celui d'un particulier, est par cela 
même moins aisé à mettre en ordre dans un but 
déterminé; que les révolutions auxquelles le premier’ 
est soumis, sont plus longues; que le mode d’exploi- 
tation auquel il est assujetti, est plus exigeant. : 


INTRODUCTION. 13 


- Quant aux forêts domaniales, ce qui en compli- 
que l’aménagement, ce n’est pas seulement le nom- 
bre et la variété des intérêts qu’il doit conèilier ; 
c’est encore et principalement la possibilité de modi- 
fier les conditions économiques générales dans les- 
quelles il est appelé à fonctionner. 

Les routes par lesquelles se sont exportés jus- 
qu’à ce jour, les produits de la forêt F, ne condui- 
sent qu’à des centres de populations agricoles. S'il 
n'y avait pas moyen de créer d’autres débouchés à 
cette forêt, il serait sans objet d'y favoriser la 
- production de bois de fortes dimensions ; mais on 
pourrait facilement la rattacher par un canal à un 
chantier de constructions navales; cette possibilité 
méritera d'entrer dans les considérations qui servi- 
ront à régler son aménagement. 

Je m'en tiens à cet exemple; il n’est pas néces- 
_ saire-d’en donner d’autres pour prouver que lorsque 
l'État aménage ses forêts, il est tenu de se préoc- 
cuper des modifications qu'il conviendrait d’appor- 
ter, dans l'intérêt de leur exploitation, au milieu 
qui les entoure, et que ce devoir comporte des 
appréciations d’un ordre élevé, très-complexes , 
_très-délicates. | 
_ D’après les définitions que j'ai données de l’amé- 
nagement, du but qu'il poursuit et des opérations 
qu'il nécessite, il est facile de voir qu’il y a entre 
cette science et la culture proprement dite, des dif- 


14 INTRODUCTION. 


férences bien tranchées; que la culture puise tous 
les principes qui la constituent dans les faits natu- 
_ rels qu’elle se borne à classer d'une manière ration- 
nelle ; tandis que l’aménagement traite des moyens 
d’approprier ces faits aux usages de la société; que 
la première est une science d’observations, tandis 
que la seconde est une science de combinaisons. 

La théorie occupe donc une place plus grande 
dans l’aménagement que dans la culture, et je crains 
que ce ne soit pour beaucoup de gens un titre de 
défaveur. Qu’on me permette à ce sujet quelques 
courtes réflexions. ds 

On affecte aujourd’hui de poursuivre comme 
inutiles, stériles sinon dangereuses, les théories 
scientifiques. C’est encore un effet de la tendance 
matérialiste de notre époque. À en croire certaines 
personnes, il n’y aurait de sérieux, de réel, d’utile, 
que la pratique. A les entendre, le dernier des gà- 
cheurs de plâtre, des tailleurs de pierre, des can- 
tonniers ou des bûcherons, en saurait plus pour 
Ja construction des maisons, l’entretien des routes, 
l’amélioration et l'exploitation des bois, que les 
hommes qui, avant de se livrer à la pratique des 
arts, en ont étudié la théorie, | 

Ce sont là des énormités qui ne supportent pas 
l'examen. 

S'il est vrai que la théorie soit la raison des 
choses, l'explication des phénomènes de la nature et 


INTRODUCTION. 15 


l'énoncé des règles, des méthodes à suivre paur 
faire servir ces phénomènes à la satisfaction des 
besoins de l’humanité ; s’il est vrai que la pratique 
ne soit au contraire que l'application de ces règles, 
de ces méthodes, n’y a-t-il pas, je le demande, 
entre la théorie et la pratique une union nécessaire, 
qu'il serait tout aussi difficile de rompre que de 
séparer la main qui agit de l'esprit qui la dirige? 
Maintenant, je le reconnais, il ne suffit pas de 
savoir comment une opération doit se faire, pour 
être capable de l’exécuter. Les travaux matériels 
demandent une aptitude, un tact, une adresse, un 
tour de main dont on ne saurait contester l'utilité, 
et qui ne s’acquièrent que par l'expérience; mais 
toujours est-il que cette expérience se formerait plus 
difficilement, plus lentement, si elle n'était guidée 
que par l'instinct au lieu de l'être par le raisonne- 
.. Îlest vrai que la théorie ne pose guère que des 
principes généraux; qu’elle n’a pas de règles de 
conduite pour toute les exceptions, toutes les anoma- 
lies; qu’elle ne dispense personne de faire usage de 
son esprit d'initiative, de sa raison, de ses observa- 
tions personnelles; mais toujours est-il qu’en ensei- 
gnant les lois générales qui régissent les divers 
* ordres de faits, elle rend plus sûre la résolution des 
cas particuliers qu’elle ne saurait prévoir; car il n°y - 
a pas de cas, quelque particulier qu’on le suppose, 


16 INTRODUCTION. 


qui soit sans aucun rapport, sans aucun lien, sans 
aucune analogie avec une circonstance typique. 

Abandonnez la sylviculture aux simples ressources 
de la pratique, et vous la réduisez, comme l'ont dit 
MM. Lorentz et Parade dans l'introduction de leur 
Cours de culture, à une routine incertaine et obscure. 
Il ne saurait en être autrement dans un ordre de 
choses, où les faits mettent plus de temps à se pro- 
duire que l’homme n’en met à accomplir sa destinée. 

Concluons donc que si la pratique doit être con- 
sidérée, en économie forestière surtout, comme un 
élément indispensable de succès, elle ne -saurait 
cependant aboutir qu’à de médiocres résultats si 
elle n’était éclairée par la théorie. 

Concluons qu’en sylviculture comme en toute 
autre matière, sans le secours de la théorie, le ni- 
veau des connaissances humaines ne pourrait jamais 
s'élever; puisque c’est à elle qu’il appartient d’étu= 
dier les phénomènes, de les grouper, d’en constater 
les lois, et de faire profiter ainsi une génération de 
l'expérience de celles qui l’ont précédée. 


— cn 


LEE 5 IA Sur 


L 


_ L'AMÉNAGEMENT 


DES AIRE 


PREMIÈRE ÉTUDE. 


DE LA STATISTIQUE. 


CHAPITRE PREMIER. 


DE LA STATISTIQUE EN GÉNÉRAL, ET DES ÉTUDES 


QU: ELLE COMPORTE 
"AU POINT DE VUE DE L ’AMÉNAGEMENT. 


La statistique est, à un point de vue général, 
l'inventaire, dans un ordre méthodique, de tous les 
faits qui concernent les besoins de la société et le 

_ développement de ses richesses. 

Elle n'est pas seulement utile ; elle est indispen- 

sable au progrès de la civilisation. 


Vous êtes à la tête du gouvernement ; vous vou- 
2 


18 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


lez doter votre pays d’un réseau de voies de commu. 
nication ; pour tracer ce réseau de la manière la plus 
convenable, il faut connaître les exigences de la con- 
sommation. Ces exigences, la statistique vous per- 
mettra d’en apprécier l’étendue. 

Tous les travaux de l’homme, petits ou grands, 
toutes ses spéculations, quelle qu'en soit l’impor- 
_ tance, s’appuient nécessairement sur la statistique. 

L'industrie forestière n’est point affranchie de 
cette obligation. Elle y est même astreinte plus 
étroitement que toute autre, sous peine de manquer 
le but qu’elle doit se proposer d'atteindre. Je vais 
en citer quelques preuves : | 

L'administration dispose d’une certaine somme 
pour des améliorations, pour des travaux de route, 
par exemple. En réunissant les demandes de crédit, 
faites à ce sujet par les chefs de service, on arrive à 
un chiffre de dépense qui dépasse considérablement 
les ressources disponibles. Il est danc nécessaire de 
rejeter quelques-unes de ces demandes, de n’en 
accueillir d’autres qu’en partie, d’aller enfin au plus 
pressé. L'administration serait dans l'impossibilité 
de procéder avec discernement à cette délicate 
besogne, si elle n'était éclairée sur les localités où 
la construction des’ voies de vidange est la plus 
urgente ; mais en jetant les yeux sur les données de 
la statistique, elle voit que dans telle localité, le 
coût du transport s'élève à la moitié du prix vénal 
des bois; que dans telle autre, au contraire, il ne 
s'élève qu’au tiers. C’est par conséquent dans la 


DE LA STATISTIQUE. 19 


première qu'il est pressant d'améliorer ou de créer 
des chemins, et c'est là qu'elle porte ses moyens 
d'action. Le manque de renseignements statistiques 
l'exposerait évidemment à dépenser ses ressources 
Fe dans les régions is en auraient le sn 
grand besoin. 
: Depuis longtemps déjà, on donne chaque année à 
nadesisioiretion 7 à 800,000 francs pour être affectés 
à des repeuplements artificiels. C’est une forte somme 
qui ; bien employée, doit amener de beaux résultats; 
mais il ne faut pas croire que pour l'utiliser il suffise 
d'acheter des graines quelconques, et de les jeter au 
hâsard dans les premiers vides qui se présenteront. 
Suivant. la position qu'elles occupent, les forêts 
réclament des essences particulières. Si elles sont 
situées, par exemple, non loin des fleuves qui abou- 
tissent dans le voisinage de nos arsenaux maritimes, 
il est désirable qu'on y propage les espèces propres 
aux constructions navales; si elles sont situées près 
des routes qui conduisent à de grands centres .de 
population, il convient d'y élever des arbres propres 
à la menuiserie, à l’ébénisterie, aux constructions 
civiles, etc., etc.; enfin, il est nécessaire, avant tout, 
que les essences soient appropriées au climat et au 
sol. Dans ces cas-ci comme dans le précédent, la 
statistique est un guide indispensable pour ne pas se 
fourvoyer. 

… Ilrésulte deces considérations préliminaires qu’une 
statistique générale, embrassant tous les éléments 
qui se rattachent au développement et à l'emploi des 


20 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


richésses forestières de la société, est un répertoire 
essentiel à défaut duquel la gestion de ces richesses 
ne saurait être réglée d’une manière rationnelle. 

Il est à remarquer d’ailleurs qu’une forêtne forme 
pas un objet qu’il soit permis de considérer isolément; 
qu’elle est solidaire de foutes celles qui se trouvent 
dans le même pays,-ou qui sont destinées à alimenter 
les mêmes centres de consommation ; que lorsqu’on 
aménage une forêt des Vosges, il y a lieu de se préoc- 
cuper des conséquences de cet aménagement pour les 
forêts de la Lorraine, et vice versd. 

En résumé, l'exploitation des forêts est subor- 
donnée à des conditions générales d'économie agri- 
cole, industrielle et commerciale, que les aménagistes 
doivent connaître, et ces conditions , il 3 ae à 
la statistique de les définir. 

Mais quand on a réuni, et je suppose qu’on l'ait 
fait en France, les notions générales et fondamen- 
tales dont je viens de parler, il reste à mettre l’exploi- 
tation de chaque forêt, prise à part , envisagée séparé- 
ment, en harmonie avec les circonstances spéciales , 
naturelles ou économiques, au milieu desquelles elle 
se trouve placée, qui la touchent directement, et c’est 
par rapport à ces circonstances spéciales que j’en- 
tends le mot placé en tête de ce chapitre et que je 
vais essayer d'indiquer toutes les études qu’il com- 
porte. 

Les auteurs qui ont traité de l'aménagement des 
forêts ont signalé les différents points sur lesquels il 
convient de porter son attention, pour que l’on puisse 


DE LA STATISTIQUEF. 21 


> apprécier, en connaissance de cause, les améliora- 
tions et les réformes dont le traitement d'une forêt 
est susceptible. Ces points sont au nombre de trente et 
* un dans l'ouvrage de M. Salomon, ancien directeur 
de l’école forestière de Nancy. Les voici dans EP 
que cet auteur a suivi : | 
- 4° Nom du bois ou de la forêt; 2° origine; 3° posi- 
tion géographique ; 4° orientement; 5° situation et 
exposition ; 6° climat; 7° vents; 8° étendue; 9° na- 
ture du sol; 40° essences et nature du bois; 14° places 
vides et clairières; 42° consistance actuelle de la forêt ; 
13° maladies, insectes; 14° surveillance et délits; 
15° minéraux et carrières ; 46° chasse et bêtes fauves ; 
17° routes et chemins; 18° limites ; 19° fossés; 20° bor- 
nes; 21° rivières, canaux, ruisseaux; 22° pêche; 
23° maisons ; 24° enclaves ; 25° pâturage ; 26° droits 
d'usage; 27° établissements et lieux de consom- 
mation; 28° distanc®s approximatives; 29° pro- 
duits moyens des dix dernières années; 30° débit des 
bois et marchandises usitées ; 34° prix courant de ces 
marchandises. 
+ Gette nomenclature comprend à peu près tout ce 
qu'il est essentiel de connaître quand on veut amé- 
nager une forêt. Son principal défaut, selon moi, 
c'est que les matières n’y sont pas classées d’une 
façon méthodique qui soit propre à les fixer dans la 
mémoire. 
Les divers objets qui sont de nature à exercer une 
influence sur l aménagement d’une forêt peuvent se 
partager en cinq groupes bien caractérisés, et rela- 


29 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


tifs : le premier, à la forêt considérée dans les élé- 
ments qui la constituent ou qu’elle contient; le 
deuxième, à sa conservation et à son entretien; le 
troisième, aux dépenses qu’elle occasionne; le qua- 
trième, à son exploitation et à ses produits; le cin- 
quième, aux débouchés dont elle jouit. 

Si nous adoptons cette classification, nous range- 
rons : Est 

Dans le premier groupe, le nom, l’origine, la posi- 
tion géographique et administrative, les limites, les 
tenants, la contenance générale, la contenance du sol 
boisé ou susceptible de le devenir, les enclaves, les 
vides et clairières, les lacs, étangs ou marais, les 
cours d’eau naturels ou artificiels, navigables ou flot- 
tables , les rigoles et les fossés d'assainissement, les 
routes et chemins, et autres moyens de vidange, les 
maisons forestières, les scieries, les constructions 
diverses, la configuration et*la nature du sol, les 
mines et carrières, le climat, le peuplement, les 
pépinières, le règne animal‘; 

Dans le deuxième, les dommages auxquels la forêt 
est exposée de la part des animaux et insectes, du 
feu, des météores, des délits ; la surveillance, l’entre- 
tien des voies de transport; 

Dans le troisième, le prix des travaux dans la loca- 

ité, les dépenses afférentes à l’exploitation, à la sur- 


1. On remarquera sans doute que ce groupe contient un très- 
grand nombre d'objets et que sa subdivision serait fort désirable. 
J'ai cherché une base pour cette subdivision, sans réussir à en 
trouver une claire, logique, rationnelle. (Note de la 2° édition.) 


DE LA STATISTIQUE. 23 


veillance, à la réparation des voies de transport, à 
l'entretien des maisons, scieries, etc., etc., des pépi- 
nières , des plantations, des fossés d'assainissement, 
des limites, etc., etc.; 

Dans le quatrième, l'exposé de l'aménagement en 
vigueur, le débit et le prix des bois, les produits en 
nature, les produits en argent, les produits accessoires, 
les produits immatériels ou indirects; 

Dans le cinquième, enfin, les droits d'usage, les 
servitudes d'intérêt public, les lieux de consomma- 
tion, le prix des bois aux lieux de consommation, la 
différence entre ce prix et celui des bois en forêt. 

Il est nécessaire d'étudier tous ces points avec 
le plus grand soin, de les bien définir. Ce travail est 
certainement un de ceux qui, dans l'aménagement 
d’une forêt, exigent le plus d’esprit d'observation, de 
netteté dans le coup d'œil, de tact, de jugement et 
de sagacité. Il est destiné à former la base de l’édi- 
fice qu’on se propose de construire, ou plutôt l’arse- 
nal dans lequel on devra puiser tous les matériaux 
nécessaires. A l’aide d’une bonne statistique, on 
peut, sans aller sur le terrain, régler la marche des 
exploitations. 

Parmi les articles compris dans la statistique, il 
y en a beaucoup qu’il suffit de traiter d’une manière 
générale ; il y en a quelques-uns, au contraire, qui 
doivent être l’objet d’un examen très-détaillé. Pour 
éviter la confusion que cet examen occasionnerait, si 
on en consignait les résultats au milieu des généra- 
lités, il est d'usage d’en faire la matière d’un docu- 


24 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


ment spécial. La statistique comprend donc deux 
sortes de renseignements : les renseignements géné- 
raux, les renseignements spéciaux. 

.Occupons-nous d’abord des renseignements géné- 
raux. Je vais passer en revue tous les points énumé- 
rés ci-dessus; j'en trouverai un grand nombre qu'il 
aura suffi d’énoncer pour faire comprendre les 
recherches qu'ils réclament ; mais il y en a sur les- 
quels j'aurai à donner des explications. 


CHAPITRE DEUXIÈME. 


RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX. 


ARTICLE PREMIER. 


| PLAN DE LA FORÊT. 

Ll : Or 

,OrS l'on entreprend la statistique d’une 
forêt, le premier document qu'il y a lieu de se pro- 
Gurer est un plan exact de cette forêt. S'il n'existe 
pas, il faut le dresser; y figurer, au moyen. de 
courbes, de hachures ou de teintes, les-principaux 
mouvements du terrain; y rapporter les enclaves, 
. jardins, élangs et tous les emplacements quelconques 
qui seraient affectés à une autre destination qu'à la 
production du bois; y tracer les routes, chemins, 
cours d'eaû, et généralement toutes les lignes sépa- 
ratives, naturelles ou artificielles, entre les parties de 
la forêt qui seraient placées dans des conditions 
toutes particulières, au double point de vue: de la 
situation et de l'exposition; donner à ces parties de: 
la forêt que l’on désigne communément par le nom 
générique, de canton des noms spéciaux, si elles 
n’en ont déjà. ‘Tel 


26 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


Ce plan est nécessaire pour l'intelligence du 
cahier descriptif, dans lequel on consigne les ren- 
seignements dont je vais refaire l’énumération rai- 
sonnée. 


ARTICLE IT. 


ÉTAT DE LA FORÊT CONSIDÉRÉE DANS LES ÉLÉMENTS 
QUI LA CONSTITUENT OU QU'ELLE RENFERME. 


1° Nom et origine. 

2% Position géographique et administrative. 

Ces renseignements, destinés à constater l’iden- 
tité de la forêt, ne réclament pas d'observation. 


3 Limites. — Faire connaître la nature et l’état 
des limites, fossés, bornes, etc. 
L° Tenants. — Indiquer la nature des rébridhls 


qui confinent à.la forêt. 

5° Contenance générale et par canton. — I n’est 
pas indispensable, lorsqu'on aménage une forêt, d’en 
connaître la contenance d'une manière parfaitement. 
exacte. Quelques hectares de plus ou de moins sont 
de peu d'importance, surtout dans les futaies dont la 
possibilité est en partie basée sur le volume. La 
triangulation préalable de la forêt n’est donc point 
d’une rigoureuse nécessité; mais il faut absolument 
que les limites en soient assurées, et par conséquent 
que la délimitation et le bornage en aient été effectués. 
S'ils ne l'avaient pas été, il y aurait lieu d’y procéder 
avant de s'occuper de l’aménagement proprement dit, 


DE LA STATISTIQUE. 97 


6° Contenance du sol boisé ou susceptible de le 
devenir. — Donner ce renseignement, pour la tota- 
lité de da forêt d’abord, et ensuite pour chaque 
canton. 

7 Enclaves. — Faire connaître leur étendue, 
leur culture, la catégorie de propriétaires à laquelle 
elles appartiennent, les inconvénients qu’elles pour- 
raient présenter pour la conservation du sol fores- 
tier. 

8° Vides et clairières. — En indiquer la conte- 
nance pour chaque canton, et spécifier les parties 
qui seraient susceptibles de reboisement et celles 
qui ne le seraient pas. 

9° Lacs, élangs ou marais. — En indiquer éga- : 
- lement la contenance par canton, et s'expliquer sur 
la possibilité et l'utilité de leur desséchement. 

40° Cours d'eau. — Faire connaître leur nom, 
leur direction, leur développement, leur utilité pour 
la vidange et le débit des bois, en considérant sépa- 
rément les cours d’eau flottables et navigables , les 
cours d’eau seulement flottables, les cours d’eau non 
flottables, mais susceptibles de le devenir, les cours 
d’eau non floltables et devant rester tels. 

. AA Rigoles et fossés d'assainissement. — Quel 
est leur développement, leur état, leur effica- 
cité? 

12° Routes et chemins, et moyens de vidange éla- 
blis sur le sol forestier. — Faire connaître leur nom, 
leur nature, leur développement en longueur et en 
largeur, leur état d'entretien, et généralement tout 


8 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


ce qui est nécessaire pour que l’on puisse apprécier 
ultérieurement les améliorations dont ils devraient 


être l’objet. En 
13° Routes et chemins établis sur le domaine 
public. — Faire connaître leur nom, leur étendue, 


leur développement, leur utilité pour la vidange.des 
produits de la forêt, en considérant séparément les 
routes impériales, les routes départementales, les 
chemins de grande communication, les chemins vici- 
naux, les chemins imposés par une servitude. 

14° Maisons forestières. — Quel est leur nombre, 
leur situation, leur état de conservation, la place 
qu'elles occupent avec les jardins qui ‘en Fr 
pendent. 

15° Scieries. — Donner les mêmes renseigne- 
ments, en distinguant les scieries qui-appartiennent 
à l’État de celles qui appartiennent à des parlicu- 
liers. Donner, en.outre, tous les renseignements 
désirables sur le mécanisme de ces usines, ét la 
quantité de planches qu’elles sont nine de 
débiter. 

46° Construchions diverses. — Les spécidoh, indi- | 
quer la place qu'elles occupent et s'expliquer sur 
leurs avantages ou leurs inconvénients. 

17° Configuration du sol. — Cet article est très- 
important au double point de vue de la végétation 
et de la vidange. On le traitera donc de manière à 
donner une idée aussi exacte .que possible des prin- 
cipaux mouvements du terrain et des pentes qu'il 
présente. On fera connaître la hauteur au-dessus du 


DE LA STATISTIQUE. 29 


niveau de la mer des ap culminants, et Iés aspects 
| aeetnt ‘de la forêt. 

+ #8° Nature du sil: — Je ne pourrais, sans entre 
: dans le domaine de la culture, exposer ici une- 
théorie complète sur la classification des sols fores- 
tiers. Je me bornerai à faire saisir les difficultés de 
cette classification, et à indiquer la méthode d’in- 
vestigation qui me paraît la plus propre à atteindre 
le but que l’on poursuit, lorsque l'on s'occupe de 
recueillir ces renseignements si importants de la sta- 
tistique. 

- Montrons d'abord qu’une classification des sols 
suivant la qualité, c'est-à-dire la fertilité, classifica- 
tion très-difficile dans l’agriculture proprement dite, 
est'impossible en sylviculture, et que la prétention 
de distinguer, dans les terrains de diverses natures : 
qui peuvent exister dans une forêt, ce qui est excel- 
lent de ce qui est bon, ce qui est bon de ce qui est 
médiocre, ce qui est médiocre de ce qui est mauvais, 
ne saurait aboutir à aucune donnée précise. 
Pour qu'ilen fût autrement, il faudrait qu’il y eût 
* dans la composition chimique ‘ou dans les propriétés 
physiques des sols, des éléments, des caractères qui 
pussent être considérés comme des signes incontes- 
tables d’un certain degré de fertilité. Il faudrait 
qu'on pût dire : suivant qu'un terrain contiendra . 
plus ou moins de substances de telle ou telle nature, 
il sera susceptible de produire plus ou moins de bois 
de telle ou telle qualité; or, c’est là ce qu’on ne sau- 
rait apprécier : chacun connaît le rôle important que 


30 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


les sels et les alcalis jouent dans la culture arable 
comme substances nutritives. Dans la culture fores- 
tière, ce rôle est très-limité; il ne paraît pas du 
moins, d’après les expériences faites jusqu’à ce jour, 
qu'il y ait lieu de s’en préoccuper sérieusement. Per- 
sonne n'ignore l'excellent effet des substances ani- 
males sur la végétation des plantes agricoles. En 
sylviculture, cet effet est nul, s’il n’est nuisible. Enfin, 
c'est un fait parfaitement établi que les céréales, sui- 
vant que le terrain est argileux, calcaire ou siliceux, 
donnent des récoltes bien différentes. En sylviculture, 
si le chêne prospère surtout dans les terrains argi- 
leux, on le voit aussi en fort bon état de croissance 
dans des sables presque purs; si le hêtre préfère les 
terrains calcaires, il acquiert souvent dans les ter- 
rains siliceux de fort belles dimensions. 

Il est certain que les propriétés physiques des 
terres, la cohésion, l’aptitude au desséchement, 
l’hygroscopicité, ont cependant une grande influence 
sur la végétation des bois ; mais ces propriétés sont 
susceptibles d’être modifiées par une foule de circon- 
stances : par la situation, l'exposition, le climat, et un 
sol trop compacte pour que le bois y prospère dans un 
pays plat, deviendra fertile dans un pays en pente. 
Un sol qui serait trop léger, trop perméable à une 
certaine altitude, perdrait cet inconvénient à une 
altitude plus grande, etc., etc. 

A quelque point de vue qu’on se place, au point 
de vue chimique comme au point de vue physique, 
les qualités des sols semblent donc se soustraire à 


DE LA STATISTIQUE. 31 


* 


toute classification rigoureuse, et nous ne conserve- 
rons pas le moindre doute à cet égard, si nous consi- 
dérons l'influence qu’exerce sur la fertilité des ter- 
rains forestiers un élément dont je n’ai pas encore 
parlé, mais que tout le monde devine : l’humus. 

L'humus, résultat direct de la végétation, restitue 
au terrain les substances minérales que celle-ci lui à 
empruntées , l’enrichit de matières carboniques, et, 
par ses propriétés physiques, le rend propre à s’assi-, 
miler-dans les proportions les plus convenables l'air, 
l’eau, la chaleur, ces trois agents qui sont la source 
de la vie végétale. 

… L'action de l’humus est donc prépondérante dans 
la fonction des sols forestiers; mais alors on ne sau- 
rait songer à établir des degrés de fertilité pour ces 
sols, d’après les éléments qui les constitueraient au 
moment de l’observation, puisqu'ils sont destinés à 
être constamment et puissamment modifiés par l'effet 
même de la végétation. 

L'enseignement à tirer de ce qui précède, c’est 
qüe ce que l’on a de mieux à faire, quand on 
arrive à la partie de la statistique relative au sol, est 
d'indiquer la nature de la base minéralogique, la 
profondeur de la terre végétale, les éléments qui y 
. dominent, celle des catégories de terrains décrites 

dans le Cours de culture de MM. Lorentz et Parade, 
à laquelle il appartient. 

Ces renseignements, rapprochés de ceux donnés 
à l’article Climat, mettront à même de juger autant 
que cela se peut, quand on n’a pas vu les lieux, de 


32 ._. AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


la puissance productive du sol et des conditions à 
réaliser pour qu’elle soit portée à son maximum ‘. 
19 Mines et carrières. — Faire connaître leur 


. Hundeshagen a fait une Æhesifieation des sols au point de. 


vue pars 
Il range : su 
= Dans la Are classe (les sols très-riches), toutes les formations 
calcaires en général. — Parmi elles, le tuf calcaire, par sa facile 
décomposition, forme d'ordinaire les plus fertiles; — les diffé- 


rentes couches secondaires de gypse et de marne de diverses 


natures; les formations volcaniques (laves), celles de basalte, de 
trapp et des brèches trappéennés ; l'euphotide, le chlorite ou grès 
flexible, la serpentine, le schiste magnésien et le schiste argileux, 
lorsqu'il contient également de la magnésie ; la marne oolithique, 
lorsqu’elle a plus de 10 pour 100 de chaux ; les gisements quartzo- 
calcaires de quelques couches de grès, lorsgs' ils forment un sol 
calcaire ferrugineux ; les porphyres. 

Les sols de cette classe peuvent faire croître, même sans 
mélange d’humus et d'engrais, les essences les plus exigeantes, ou 
du moins les empêcher de dépérir, On n'y trouve jamais de fou- 
gères, de bruyères ni de genèêts. : 

Dans la 2° classe (de fécondité moyenne), les schistes argi- 
leux, abondants en quartz et pauvres en Chaux, en magnésie et 
en oxyde de fer; les granites et gneiss; les schistes siliceux; le 
tuf quartzeux et ordinaire; le schiste micacé ; le grès primitif; les 
variétés les plus riches en argile du grès bigarré et du grès ooli- 
thique. 

Pour que les essences qui exigent un bon sol viennent biôu 
dans ces terrains, il faut qu’ils contiennent de l’humus en suff- 
sante quantité, On y trouve le genêt, la bruyère, la myrtile. 

. Dans la 3° classe (sols pauvres), les grès bigarrés en général; 
les grès de nouvelle formation reposant sur la chaux coquillière, 
les grès du Keuper et du Lias; les brèches; les molasses et, en 
général, les grès de la plus nouvelle formation. Il faut à ces ter- 
rains beaucoup d'humus; le hêtre, le charme, le tilleul, le sapin, 
le pin du Nord ne s’y conservent que par des soins et un traite- 
ment convenables. Le frêne, l’aune, l'érable, ete., n’y viennent 


L 


re dd ne En 


DE LA STATISTIQUE. , 35 


nature, leur importance, les difficultés de leur exploi- 


+, 20° Chmat, — Le mot climat, dans son accep- 

tion générale embrasse toutes les modifications dont 
l'atmosphère est susceptible, eu égard à la tem- 
pérature , à l'humidité et aux courants qui: sy 
agitent !:. 


. Ces modifications, qui otbnt : en purs arret) 
ie et qui s’engendrent les unes. les autres,. 
dérivent d’une cause première et unique, la chaleur, 


et se traduisent par des effets divers, dont le plus 


manifeste, le plus influent et le plus facile à con- 
Stater, est l'abaissement ou l'élévation de la tempé- 


rature. Aussi est-ce d’après l’état de cette dernière 
sur certains points de notre planète, qu'ont été déter- 
minés les différents climats. 


‘ka terre a une chaleur- propre et proies mais 
l'influence que cette chaleur exerce sur la tempéra- 


ture de la surface est insignifiante, et l’on peut en 
conséquence regarder le soleil comme la source 


exclusive de la chaleur. | 
Æaction du soleil est modifiée, on le sait, par un 


grand nombre de circonstances dont les principales 
sont : 
‘La latitude. La différence de température moyenne 


de originairement. On y trouve en quantité les fonsères, les 
genèts, les bruyères. 
Dans la 4° classe (sols très-maïgres), les terrains Rinés de 
cailloux roulés, de galets et de sable mouvant. 
: 4. Cours de culture des bois, page 3. 


34 [AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


” i 


est, d’après M. de Humboldt, de 0,62 par degré de 
latitude. | 

L'alritude. Sous l'équateur, à une: éiééatiof de 
3,000 mètres, on jouit de la même température 
moyenne qu’à Montpellier ou à Madrid. 

_ L'état de la surface. Dans le désert du Sahara; 
les sables s’échauffent au point de faire monter le 
thermomètre à 50 ou 60°. Dans les forêts de l’Oré- 
nôque il y a des vides couverts de rochers qui, la 
nuit, ont une température plus élevée de 44° que 
l'air ‘ambiant. On sait enfin que les grandes masses 
d’eau s’échauffent ou se refroïdissent lentement, et 
que le climat des terres voisines s’en ressent. 

Telles sont les causes principales qui influent sur 
la répartition de la chaleur à la surface du globe, et 
qui déterminent le climat moyen général d’une con 
trée; mais l’état de l’atmosphère est en outre modifié 
secondairement et localement par d’autres éléments, 
le vent et l’eau, dont l’action est variable à l'infini, 
suivant la configuration du sol. 

Froids ou chauds, secs ou humides, suivant les 
régions qu'ils ont traversées, les vents peuvent, d’après 
les expériences de M. de Gasparin, abaisser de 6° la 
température produite par la chaleur directe, et de 
beaucoup plus, celle produite par la chaleur réfléchie 
du soleil. 

Les brouillards obscurcissent l musée et 
empêchent l’action bienfaisante de la lumière. 

Les nuages abaissent la température en été parce 
qu'ils interceptent les rayons lumineux, et l’élèvent 


DE LA STATISTIQUE. 35 


Le audi atinetene ds =. 
sl AA LOT DONS ERA 


en hiver parce qu'ils s'opposent au rayonnement 
:! La pluie, au moment où elle se forme, a pour 
effet d'élever la température de l'air ambiant. La 
neige empêche les corps qu'elle recouvre, de se 
refroidir par le rayonnement. 
Le climat se soustrait donc, comme le sol, à toute 
classification rigoureuse, parce qu'il est susceptible 


ne A in Vo tee de ee 


terrain; et si l’on se bornait dans la statistique à 
définir le climat d’une forêt, d’après la température 
moyenne de la contrée dans laquelle elle serait située, 
on ne-donnerait pas les indications ain pour 
le faire apprécier *. 


an à 6 

pr x. Charles Martins a partagé la France en ee, climats; il 
range : à 

Dans le premier (climat excessif), sous le nom de din vos- 
gien, toute la contrée comprise entre le Rhin, la Côte-d'Or, les 
sources de la Saône, la chaîne de montagnes qui va de Mézières à 
Auxerre, La température moyenne de ce climat est, pour l’hiver, 
de 0°,6; pour l'été, de 48°,6; pour l’année, de 9°,6. r 
-… Dans le deuxième (elimat maritime), sous le nom:de climat 
* séquanien, toute la contrée comprise entre la frontière du nord, 
depuis Mézières jusquà la mer, le contre-fort du plateau qui 
règne de Mézières à Auxerre et le cours de la Loire et du Cher. 
La température moyenne de ce climat est, pour l'hiver, de 3°,95 ; 
pour l'été, de 47°,6; pour l’année, de 10°,9. 

Dans le troisième (climat tempéré), sous le nom de climat 
girondin, la contrée comprise entre la Loire et le Cher jusqu'aux 


pérature moyenne de ce climat est, pour l'hiver, de 5°; celle de 
l'été, de 20°,6 ; celle de l’année, de 42°,7. 
Dans le quatrième (climat également tempéré), sous le nom de 


de. se modifier, pour ainsi dire, à chaque accident de 


Pyrénées, puis à travers le plateau central de l'Auvergne. La tem- . 


36 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Je pense dès lors que, dans l'étude du climat 
d’une forêt, il convient de prendre pour guide et. 
d'adopter comme circonstance caractéristique, la 
nature et l’état de végétation des plantes qui crois- 
sent spontanément dans la région où est située cette 


forêt 1. 


climat rhodanien, la contrée comprise entre la vallée de la Saône 
et du Rhône, depuis Dijon et Besançon jusqu’à Viviers, le massif 
des hautes Alpes, une partie des basses Alpes. La température 
moyerine de ce climat est, pour l'hiver, de 2°,5; pour et, de 
21°,3; pour l’année, de 14°. 

Se le cinquième, enfin (climat chaud), sous le nom de cli- 
mat méditerranéen, le sutplus de la France, La température 
moyenne de ce climat est, pour lhiver, de 6°,5; pour l'été, 
de 22°,6; pour l’année, de 148 

Une pareille classification, bonne pour donner une idée géné- 
rale des conditions climatériques dans lesquelles se trouve la 
France, ne saurait être d'aucune utilité pratique sous le rapport 
agricole et surtout sylvicole. Dans chacune des régions qui y sont 
comprises, il y a des points plus ou moins élevés au-dessus du 
niveau de la mer, des expositions différentes et, par conséquent, 
des variations de température qui, si elles étaient considérées iso- 
lèment, devraient faire ranger les localités où elles se présentent 
dans un autre climat que celui auquel on les a rattachées. L'état 
de la température n’indique pas d’ailleurs quelles sont les espèces 
susceptibles de croître et de prospérer dans un lieu donné. 

1. On désigne ordinairement sous le nom de : ic 

Climat chaud, celui des contrées où croissent spontanément 
l'olivier, le figuier, le chêne-liége, le chène veuse. À 

Climat doux, celui des contrées où croissent en plein vent la 
vigne, l’amandier, le pêcher, toute espèce d'arbres fruitiers et de 
plantes potagères. 

Climat tempéré, celui des contrées où les arbres fruitiers réus- 


‘ sissent bien, et dont les forêts contiennent toutes les essences 


indigènes, sauf celles du climat chaud. 
Climat rude, celui des contrées où la culture des: arbres Sui 


DE LA STATISTIQUE. 37 


+ Mais ces renseignements seraient encore insuffi- 
sants si l’on n’y ajoutait tous ceux que l’on pourra 
se procurer, sur les variations de la température et 
les accidents météoriques qui pourraient adisoier un 
lieu donné. 
-_ Indépendamment de l'indication des plantes qui 
seront cultivées avec succès dans la contrée dont on 
voudra faire connaître le climat, on fournira donc 
tous. les renseignements possibles sur les écarts de 
température, la fréquence, l'intensité et la persis- 
tance des vents, de la pluie; des brouillards, de la 
gelée, de la neige, de la grêle, du verglas, du 
- givre. 

21° Nature et élat du peuplement. — Décrire à 
grands traits le peuplement, et par conséquent faire 
connaître les essences dont il se compose, son état 
_ de consistance et de végétation suivant les sols et les 
climats, l'étendue occupée par le taillis, par les futaies. 
Donner pour les principales essences, tous les 
renseignements qu'on pourra se procurer sur leur 
croissance, leur longévité, la facilité plus ou moins 
grande avec laquelle elles sont susceptibles de se régé- 
nérer, soit par les semences, soit par les souches, 
Fâge auquel elles sont présumées devoir atteindre 


tiers et des plantes potagères délicates est difficile, et dont les 
forêts sont peuplées principalement d’essences résineuses. 

Climat très-rude, celui des contrées où la culture du sarrasin, 
de l’orge et des pommes dé terre est la seule possible, et dont les 
forêts contiennent comme essences dominantes, l’épicéa, le mélèze, 
le hêtre, celui-ci mal venant. 


LL] 


38 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


l’époque de leur plus grand accroissement moyen. 

29 Pépinières. — Indiquer leur emplacement, 
leur étendue, les essences qu'on y cultive, leur état 
d'entretien, les ressources qu’elles offrent pour le 
repeuplement. 

23° Règne animal. — Dire quelles sont les espèces 
d'animaux qui peuplent la forêt et les cours d’eau; si 
elles y sont abondantes et utiles. 


ARTICLE III, 


CONSERVATION ET ENTRETIEN. 


2° Insectes et animaux nuisibles. — Quels sont 
les insectes et les animaux qui attaquent les bois, les 
désordres qu’ils causent, les mesures à prendre ÊPE 
les détruire ? 
Le gibier, le lapin principalement, cause de très- 
grands dommages dans certaines forêts; il importe 
donc de ne pas oublier cet article quand on s'occupe 
des circonstances qui sont susceptibles d’entraver la 
végétation. 

25° Incendies. — Faire connaître si les incendies 
sont fréquents, quelles en sont les causes, comment 
on pourrait en empêcher le retour. 

26° Délits. — Dire le nombre, la nature, les 
causes, les conséquences, l’importance des délits, le 
nombre et la profession des some solvables ou 
insolvables. 


DE LA STATISTIQUE. 39 


s2T. Surveillance. —. Quel est le nombre des 
brigadiers et gardes, lepn:-celaires quels sont le 
nombre et l'étendue des triages; quels sont les cir- 
constances qui favorisent ou entravent la surveil- 
lance? Servitudes, constructions à distance: pro- 
: hide etc., etc. 
28° Entretien des routes el ps — Quel est 
ete des cantonniers, leur salaire, le nombre 
%. kilomètres que-chacun d'eux est chargé d'entre- 
tenir ; quelles sont les circonstances qui exercent une 
‘influence sur l’accomplissement de leur tâche ? 


usé ous -SARTICLE:IV 


tx LA = 
LT M) Eee . f 


DÉPENSES. 


29° Prix des travaux dans la localité. — Faire” 
connaître le prix de la main-d'œuvre, suivant la 
nature du travail, le prix de location d’ane bête de 

. Charge, d’une voiture attelée. 

30° Dépenses occasionnées par la surveillance. 
«84° Dépenses occasionnées par l'entretien des che- 
mins forestiers. 

32° Subventions pour la réparation des chemins 
vicinaux. 

83° Dépenses occasionnées par l'entretien filaé mai- 
sons forestières, des scieries et autres constructions. 

8h" Crédit affecté moyennement chaque année à 
l'entretien des pépinières, aux repeuplements artificiels, 


- 


40 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


aux assainissements, aux exploitations par économie. 
- 85° Idem, pour le curage des fossés de limite, la 
réparation des bornes, etc., etc. 
36° Impositions, dépenses diverses. — Les rensei- 
gnements que coiportent les articles précédents se 
devinent, sans qu’on ait besoin de les signaler. Au 70 


ARTICLE V. “intel AN 


EXPLOITATION ET PRODUITS, 


37° Exposé de l'aménagement en vigueur. 

38° Débit des bois. — Faire connaître à quel 
usage on emploie les principales essences, et surtout 
les ressources qu'elles pourraient présenter pour les 
constructions navales. 

Établir autant que possible, pour chacune de ces 
essences, étant donnée sa grosseur à un mètre du sol, 
le rapport existant : £ 

Entre le volume conique et le volume réel de la 
tige, 

Entre le volume conique de la tige et le volume 
réel total, 

Entre le volume réel de la tige et le volume de la 
tige propre à l’œuvre, | 

Entre le volume réel total et le volume biépre à 
l’œuvre, 

Entre le volume réel total et le volume propre au 
chauffage ; 


DE LA STATISTIQUE. : M1 


Entre le volume réel total et le volume propre au 
; dhabon. | # 

4 «Entre le volume réel total: et le nombre des 
ra Entre. le mètre cube ds bois brut et l’unité des 

fabriquées en forêt. On saura de cette 
ien il faut de bois pour fabriquer une 

ts, un cent de merraip, un stère de 


«dela dpontité de marchandises qu’on # en tirer. 
+ 39° Prix détaillé des bois. — Faire connaître le 
prix sur pied du mètre cube de bois, suivant la des- 
tination à laquelle il est propre, œuvre, chauffage ou 
* charbon; les variations que ce prix a subies depuis 
-un-certain nombre d'années, la plus-value donnée au 
bois par la facon dont il est l'objet en forêt, ou, en 
d’autres termes, la différence entre le prix du mètre 
cube en grume et sur pied, et le prix de la quantité 
de marchandises qu’il est susceptible de fournir. 
_ 2. k@ Produits en nature des bois. — Faire con- 
. naître le volume exploité chaque année, dans les 
futaies, dans les taillis, en coupes principales, en 
- coupes intermédiaires par contenance et par volume. 
* Établir la part de ce volume propre à l'œuvre, 
au chauffage et au charbon. 
hA° Produits en argent des bois. — Faire con- 
naître la valeur en argent des produits en bois ci-des- 


sus spécifiés. 


h2° Produits en argent, accessoires. — Faire 


42 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


connaître ce qu'on retire des mines et carrières, de 
la chasse, de la pêche, de la glandée, dela faînée, des 
pépinières, des amendes, des indemnités pour bris de. 
réserve et tous autres menus produits. 

h3° Produits immatériels ou indirects. — Les 
produits immatériels d’une forêt sont sans intérêt 
pour le propriétaire, quand ce propriétaire est un par- : 
_-ticulier; mais quand ce propriétaire est l’État, ils ont, 
au contraire, la plus haute importance. Les 30 à. 
h0 millions que les forêts nationales rapportent cha - 
que année au Trésor sont assurément fort peu de chose 
à côté des ressources incalculables qu’elles offrent à 
l’industrie, et des avantages qu'elles présentent pour 
la défense du territoire, la conservation du climat et 
du sol, le régime des eaux. Il convient donc de faire 
connaître, dans la statistique d’une forêt, l'influence 
que cette forêt pourrait exercer sur la conservation du 
. climat et du sol, le régime des eaux, l’existence ou le 

bien-être des populations environnantes. l 

Le nombre, la profession et le salaire des ouvriers 
employés à l’exploitation, au débit, à la vidange, aux 
améliorations diverses, donneront une idée de l’im- 
portance de la forêt sous ce dernier rapport. : 


ARTICLE VI. 


DÉBOUCHÉS. 


hh° Droits d'usage. — Exposer la nature et 
l'étendue des droits d'usage, l'influence qu'ils ont sur 


_ DE LA STATISTIQUE. 43 


l'exploitation de la forêt. Si cette influence était 
 fâcheuse et qu'il fût utile de procéder à l’extinction 
: - des droits, il faudrait provoquer immédiatement cette 
—_ opération et surseoir à l'aménagement proprement 
Ë 5° Servitudes d’intérét public. — Ces servitudes 
à doivent être nécessairement prises en considération 
_ dans l'étude du plan d'exploitation de la forêt à amé- 
4 nager. Il convient donc de les faire connaître. 
.  h6° Lieux de consommation. — Indiquer les prin- 
cipaux lieux de consommation, et notamment les 
usines, la distance qui les sépare de la forêt, la nature 
L et la quantité des bois qui s’y consomment. 
| K7° Prix des bois aux lieux de consommation. — 
; Ce ‘renseignement est essentiel, éar, en le rappro- 
chant du prix des bois en forêt, on pourra se faire 

- une idée exacte de la facilité ou de la difficulté des 


| transports. 


CHAPITRE TROISIÈME 


RENSEIGNEMENTS SPÉCIAUX. 


ARTICLE PREMIER. 


POINTS A EXAMINER. 


Après avoir étudié une forêt dans son ensemble, 
eu égard seulement aux grandes divisions ou cantons 
_ dont elle se compose, il est nécessaire de l’étudier 
dans ses détails, et de décrire pour chacune. de ces 
divisions ou cantons, toutes les parties caractérisées 
par l’une des particularités qui sont de nature à 
influer sur le traitement applicable à un massif. 

Ces particularités sont : 

1° L'âge des bois. — Il est évident que c’est 
presque toujours la circonstance déterminante, dans 
la fixation de l’époque à laquelle un massif doit être 
régénéré. ve. 

2 La nature des essences. — Des bouleaux ne 
sauraient être exploités au même âge que des chênes 
ou des hêtres. Des résineux ne peuvent pas être 
soumis aux mêmes {raitements que des bois feuillus. 

3° L'état de la végétation. — Cet état permet de 


: DE LA STATISTIQUE. 45 


reculer plas ou moins le mément de la régénération. 
+ 4° La qualité du sol. — Selon que le sol sera 
substantiel ou maigre, profond ou non, perméable 
ou imperméable, un massif pourra être conduit jus- 
_ qu’à un âge plus ou moins avancé, et sera plus ou 
_ moins shsteptible de se rue et de se ARE M 
les souches. 
MR < L'eæposition et la pénhient: — A Pémpbéition 
! & nord; la végétation et les dangers qui la menacent 
sont bien différents qu'à celle du midi: L'exposition 
doit done être prise en considération dans le choix 
du traitement; la situation et surtout l'altitude doivent 
l'être également, car elles n’exercent pas moins d'in- 
-fluence sur la croissance des bois. 
_ .1#Ibest certain que chacune des circonstances que 
_ je viens d'énumérer doit être soigneusement examinée, 
lorsqu'on veut régler d'une manière ‘rationnelle le 
Dre d'une forêt. s. 
: Pour assurer cet ‘examen, voici comme on pro- 


sèb DE ARTICLE II. 


DU PARCELLAIRE. 


On commence par diviser chaque canton en autant 
de-parties qu'il y existe de peuplements différents 
par l’âge; cela fait, si ces parties renferment des par- 
ties dissemblables sous le rapport des essences, de 
l'état de la végétation, de la nature du sol, de l’expo- 


ü 


46 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


sition ou de la situation, on les subdivise en autant 
de parcelles qu’il y a d’essences, d'états de végéta- 
tion, de qualités de sol, d'expositions et de situations 
particulières. 

Telle est l’opération connue sous le nom de par- 
cellaire. C’est une des plus importantes de l’aména- 
gement, comme nous le verrons plus tard, et comme 
il est facile d’ailleurs de le comprendre dès à présent. 

Le parcellaire est en effet indispensable pour-qu’on 
puisse circonscrire les coupes, dresser le plan d’exploi- 
tation ; parce que seul il permet de rapprocher, de 
grouper les peuplements qu’il convient de régénérer 
à la même époque et par le même mode. 

Le parcellaire ne saurait donc être fait avec trop 

d'attention, et son élément, la parcelle, peut se définir, 
_ d’après les explications que je viens de donner : une 
portion de forét homogène, quant à l’âge, à l'essence 
et aux conditions de végétation, et par.conséquent, 
dont toutes les parhes constituantes sont susceptibles 
d’être soumises au méme traitement. 

Cette définition, que je n’invente pas, que j’em- 
prunte à la tradition, est fort, claire et me dispense- 
rait d'entrer dans de nouvelles explications, si les 
diversités d'état que présente une forêt, étaient jamais 
bien tranchées, bien évidentes; si l'homogénéité par- 
faite dans un peuplement ne se renfermait pas, pres- 
que toujours, dans des limites extrêmement étroites. 
Malheureusement nos forêts sont, en général, fort 
irrégulières ; et si on voulait y séparer les unes des 
autres, en prenant et en appliquant à la lettre la défi- 


DE LA STATISTIQUE. u7 


nition de la parcelle, toutes les parties dissemblables 
par un des caractères que j'ai signalés, on arriverait 
à y former presque autant de parcelles qu’il y aurait 
d'arbres, ce qui enlèverait évidemment au pasoalisire 
toute utilité. 

Il faut ici chercher une règle qui empêche que 
le parcellaire ne dégénère en une opération trop 
minutieuse; or, celte règle est indiquée par le but 
que l'on veut atteindre. Quel est ce but ? — Nous le 
savons déjà, c’est la connaissance et la réunion de 
tous les peuplements susceptibles d’être régénérés à 
. la même époque et par le même mode; mais la cul- 

_ ture nous enseigne qu'il y a, pour l'exploitation des 
bois, deux méthodes principales : la méthode du 
jardinage, qui consiste à prendre chaque année çà et 
là; sans s'astreindre à aucune limite de contenance, 
les arbres les plus âgés; la méthode des coupes régu- 
lières et de proche en proche, dont une des exigences 
est, au contraire, la concentration de la coupe annuelle 
dans une circonscription aussi étroite que possible. 
Nous n'avons pas à nous occuper de la première de 
ces méthodes, car elle est inconciliable avec l'amé- 
nagement pris dans son acception scientifique; et Si 
nous interrogeons la portée de la seconde, nous recon- 
naïtrons que puisqu'elle exige que chaque année 
l'exploitation soit concentrée dans une certaine cir- 
conscription, la contenance la plus petite que l’on 
puisse donner à une parcelle, est celle au-dessous de 
laquelle l'étendue d’une coupe annuelle ne saurait 
descendre: sans inconvénients palpables, étendue 


48 | AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. - - 


variable, du reste, suivant les localités, selon le 
propriétaire. | | | 

Quelle que soit, par conséquent, lirrégularité 
d’un peuplement, on doit considérer comme l'élément 
irréductible du parcellaire une portion de ce peu- 
plement, égale au moins en étendue à une coupe 
annuelle; y ajouter le peuplement environnant, pour 
le confondre dans la même parcelle, s’il participe de 
la même irrégularité; le séparer dans le cas con- 
traire, pour en faire une parcelle distincte; si son 
éterfdue est d’ailleurs assez grande *. | 

Nous tirerons une autre conséquence du même 
principe : c'est que dans le tracé des lignes sépara- 
tives des parcelles, il n’est pas nécessaire de s’as- 
- treindre à suivre tous les contours, toutes les sinuosités 

indiquées par les changements d'état du peuplement, 

et qu'il faut, au contraire, redresser ces lignes toutes 
les fois qu’il s’agit de ne transporter, d’une parcelle 
dans la parcelle voisine , 8 des portions peu 
étendues. 

Quant à la limite supérieure pour la contenance 
des parcelles, il n’y en a rigoureusement pas; en 


1. On m'a fait remarquer qu’au moment où on procède au 
parcellaire, on ne connaît pas encore l'étendue de la coupe 
annuelle. Cela est vrai puisqu'on ne connaît pas la possibilité, 
mais on sait déjà quelle est l’importance qu’il convient de donner 
à une coupe pour qu'elle puisse se vendre avantageusement et 
‘dans des conditions qui en favorisent la régénération. Au reste, je 
conviens que dans les futaies surtout il est impossible de prévoir 
exactement quelle sera l'étendue de la coupe annuelle, “mais il 
s’agit ici d’une approximation. (Note de la 2° édition.) : 


A EE 


4 
È 
ë 
+ 


DE LA STATISTIQUE. 19 


sorte que, si une forêt était, par exemple, située én 

plaine; composée de bois de même âge ou régulière- 

ment entremêlés, tout à fait homogène, enfin, quant 

aux conditions de- peuplement, de sol, de climat, de 

situation, son parcellaire deviendrait inutile, la 

marche des coupes pouvant indifféremment avoir lieu 
dans un sens ou dans l’autre. 

_ Ainsi, voilà qui est bien convenu : Quelles que 
soient les diversités d’état qui existent dans une 
forêt, il n’y a pas à en tenir compte, lorsque leur 
expression superficielle, s'il est permis d’employer 
ces termes, descend au-dessous d’une certaine limite. 
Voyons maintenant s’il ne convient pas de laisser, en 
outre, quelque latitude aux aménagistes, en ce qui 
concerne l'appréciation des dissemblances elles- 
mêmes, suivant qu’elles sont relatives à l’âge ou 
aux essences, à la végétation ou au sol, à la situation 
ou à l'exposition. * e 

… Dissemblances relatives à l’âge. — Puisque l’âge 
est la circonstance qui sert de base, dans la plupart 
des cas, pour fixer l’époque de la régénération d’un 
massif, la différence d'âge doit être prise, avant tout, 
en considération dans la formation des. parcelles. 


Ë Ë _ C'est d’ailleurs celle qui attire la première les regards. 


et qui est la plus évidente; mais s’arrêtera-t-on 
devant une différence d’un an? — Le simple bon 
sens répond que non : d’abord, parce que cette dif- 
férence serait fort difficile à reconnaître ; ensuite, 
parce que ce n’est point un aussi petit écart entre 
les âges qui pourrait en motiver un entre les époques 
n 


50 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


d'exploitation ; enfin, parce que dans les futaies, la 
régénération ne pouvant, en général, avoir lieu sur 
une place donnée qu’en plusieurs fois, il en résulte 
- nécessairement que sur cette même place il y aura 
entremêlés des bois qui ne sauraient être aussi exacte- 
ment âgés les uns que les autres. Il faut s'arrêter, 
dans le parcellaire, aux différences qui frappent 
l'œil, et non à celles qui ne pourraient être consta- 
tées que par le comptage des couches concentriques. 
Voilà la règle, et par conséquent, dans les futaies 
on considère comme étant de même âge des bois 
entre les âges desquels il n’y à pas un écart de plus 
de 42 à 15 ans. On adopte, dans les taillis, des - 
limites moins larges, attendu que les différences 
d'âge y sont ordinairement plus apparentes; non- 
seulement parce que la croissance des rejets de 
souches est, quand ils sont jeunes, plus rapide que 
celle des brins de semis, mais parce qu’il y a néces- 
sairement plus d’homogénéité dans les peuplements 
dont la régénération remonte à la même époque, 
leur exploitation ayant lieu, comme on sait à blanc 
“6106! 1 

Dissemblances relatives aux essences. — Après 
l’âge, vient l'essence dans l’examen des particularités 
qui peuvent motiver la formation d’une parcelle, Ici, 
il ne saurait s'élever des doutes, et toutes les fois 
qu'un massif renfermera, sur une étendue plus 
grande que celle qu’il conviendrait de donner à une 
coupe annuelle, un peuplement dont l’essence domi- 
nante différera, au point de vue de l’exploitabilité ” 


DE LA STATISTIQUE. | LE 


.. 


surtout, de celle des bois environnants, on fera de 
ce peuplement une parcelle distincte. 
Dissemblances relatives à l'état de la végétation. 


; _ — On agira de même qu'il est dit ci-dessus, pour 


l’état de la végétation, toutes les fois qu’à âge égal, 
les essences étant les mêmes, cet état sera manifes- 
tement assez mauvais, sur une étendue au moins 
égale à celle d’une coupe, pour que l’on soit obligé 
d'avancer l'époque de la régénération, d'un nombre 
d'années plus grand que celui que l’on peut admettre 
entre les âges des sujets appartenant à la même par- 
celle. © 

Dissemblances relatives à la situation et à FR 
sition. — Si le partage de la forêt en cantons a été 
fait conformément aux principes que j'ai émis, le 
climat, dans son acception générale, n’exercera 
aucune influence sur la formation des parcelles ; 
l'exposition ne saurait non plus en avoir beaucoup 
— quoiqu’elle soit au nombre des principales causes 
des aceidents météoriques qui affectent une contrée 
— attendu qu'il en aura été tenu compte indirecte- . 
ment dans la subdivision des parcelles, eu égard 
aux différences de la végétation; mais la situation, 
en rendant plus ou moins facile l’exploitation et la 
vidange, a, sous ce double rapport, une action par- 
- ticulière qui motiverait la subdivision d’une par- 
- celle, si elle devait placer des parties de cette par- 
celle dans des conditions sensiblement différentes. 

Dissemblances relatives au sol. — Le sol ne vient 
qu'en dernier lieu dans la série des circonstances 


| 52 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


que l’on doit apprécier, quand on effectue le par- 
cellaire d’une forêt; cela s’explique par la difficulté 
d'en constater la qualité absolue, et par le signe 
d’après lequel on juge le plus communément de sa 
qualité relative. Ce signe est l’état de la végétation. 
Presque toujours, le parcellaire, modifié d’abord 
d’après la nature des essences, puis d’après l’état 
de la végétation, n'aura pas besoin de l'être par 
suite des différences de qualité que pourrait présen- 


ter le terrain. Toutefois, puisque la mauvaise qualité. 


du sol n’est pas la seule circonstance qui soit sus- 
ceptible d’entraver la croissanee des végétaux, il 
pourrait arriver que des parties de terrain, pro- 
fondes et substantielles, eussent été comprises dans 
la même parcelle que des parties maigres et sans 
profondeur, parce que les premières seraient cou- 
vertes d’un peuplement mal venant. Dans ces cas, 
certainement très-rares, et dont on constalerait l’exis- 
tence au moyen de quelques sondages, il faudrait 
évidemment faire des parcelles distinctes des bons 
_et des mauvais terrains. 

Le parcellaire est en définitive, comme on peut 
en juger par ce qui précède, une opération moins 
compliquée qu'elle ne paraît au premier abord. 
Lorsqu'il est terminé, on exécute le levé des par- 
celles qu’on rapporte ensuite sur le plan de la forêt, 
et on procède, à l’aide de ce plan, à l'examen et à 
la description détaillés du peuplement et des condi- 
tions dans lesquelles il se trouve. 


ans AR it dt net dan rt de RS de ie 


» 


DE LA STATISTIQUE. 5 53 


ARTICLE III. 


DESCRIPTION SPÉCIALE. 


Tout n’est pas fini lorsque les parcelles ont été 
délimitées, levées et rapportées ; il reste à les dé- 
crire; à en donner une idée aussi complète que pos- 
sible; car c’est cette description qui décidera de la 
place qu ’elles occuperont dans le plan d’exploita- 
tion, de l’époque à laquelle elles devront être régé- 
nérées, et, en un mot, de la destination qu'on leur 
donnera. to 

Après avoir indiqué la contenance d’une parcelle, 
on fera donc connaître les essences qu'elle renferme, 
leur âge, leur état de végétation et de consistance, 
la durée probable du temps pendant lequel elles 
pourraient rester sur pied sans dépérir. On dira 
quelle est la nature de la base minéralogique, quelle 
est la composition de la terre végétale, son élément 
dominant, sa profondeur, l’état de sa superficie. On 

- dira aussi à quelle altitude approximative la parcelle 
est située, quelle est son exposition, quels sont les 
accidents météoriques qu’elle pourrait avoir à redou- 
ter, quelle est la voie de vidange par laquelle 
s'exportent ses produits. Un examen attentif, minu- 
tieux, réfléchi, est nécessaire pour que cette descrip- 
tion soit de nature à reproduire dans l'esprit du lec- 
teur l’image fidèle des lieux. J’essayerais vainement 
de donner des règles pour assurer un pareil résultat. 


54 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


La manière dont il faut s’y prendre pour apprécier 
un peuplement, l'aptitude à dégager l’état moyen de 
ce peuplement de l’espèce de confusion que pro-- 
duisent au premier aspect les variétés d'âge, d’es- 
sences, de forme et de consistance qui frappent les 
yeux, sont des choses que l’on n’enseigne guère. Ce 
sont presque des dons naturels. Il y a des gens qui 
ne savent pas voir un peuplement; qui sont par 
conséquent incapables de le décrire ; soit que la der- 
nière impression efface chez eux toutes les autres, en 
sorte que, s’ils aperçoivent, en achevant la reconnais- 
sance, un bouquet de chênes ou de bouleaux, par 
exemple, ils croient n’avoir vu que des chênes ou 
des bouleaux ; soit que les nuances qui passent sous 
leurs yeux ne se fondent pas dans leur esprit, qui fait 
alors de vains efforts pour les retenir ; soit qu’ils ne 
puissent résumer leurs diverses observations. Ces 
gens-là ne seront jamais de bons aménagistes. Il y 
a entre le coup d'œil du forestier et celui du paÿsa- 
giste une analogie frappante qui me permettra de 
compléter ma pensée. Tous ceux qui se sont occupés 
de dessiner d’après nature ont dû, à leur début, 
éprouver quelque.embarras à grouper tous les détails. 
qui se présentaient à leur regard ; à distinguer ce 
qui était du premier, du deuxième ou du troisième 
plan ; à masser, pour nous servir de l'expression 
technique, le feuillage d’un arbre; mais, au bout de 
quelque temps, les uns y sont parvenus ; les autres, 
au contraire, n’ont jamais pu saisir, dégager les 
rapports existants entre les parties d'un groupe, et 


| DE LA STATISTIQUE 55 


en représenter la physionomie générale. Il en est de, 
_ même des forestiers ; il y en a parfois qui ne 
savent pas lier leurs impressions-et leurs idées, les | 
classer, voir les choses dans leur ensemble, dans 
leur caractères principaux. Ceux-là sont inhabiles à 
faire une bonne description ; ils se donneront beau- 
coup de peine pour fixer dans leur mémoire chaque 
détail, chaque particularité, au fur et à mesure qu’elle 
* se présentera devant eux, et ne pourront tirer aucun 
_ profit de leur examen, quand il s’agira de dresser le 


“plan d'exploitation. 


ARTICLE 1V. 


RÉSUMÉ. 


bn: reconnaissance spéciale de la forêt exige qu'on 
<n dns d’abord le parcellaire. 

Cette opération consiste à subdiviser chacun des 
: félnivns qu'elle comprend, en autant de portions 
- distinctes et séparées qu’il y a de différences bien 

tranchées dans la composition et les conditions de 
- végétation du peuplement. 

- Cette subdivision, subordonnée Put à l’äg 
des bois, à la nature des essences et à l’état a 5 
végétation, est modifiée ensuite, s’il y a lieu, confor- 
mément aux dissemblances relatives au sol, à la 


_ situation, à l'exposition. 


Il est impossible de fixer d’une manière précise 


56 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


la limite minima au-dessous de laquelle la conte- 
nance d’une parcelle ne doit pas descendre ; seule- 
ment il faut éviter, si la parcelle est couverte de bois, 
de lui donner une contenance plus petite que celle 
que devrait avoir une coupe annuelle. 

Quand le parcellaire est terminé, on a soin de 
faire arpenter, lever et rapporter sur un plan toutes 
les parcelles qu’il a eu pour résultat d'établir. On 
donne à ces parcelles des signes distinctifs; on les 
désigne, par exemple, par des lettrés afin de les 
reconnaître facilement, mais, comme on le verra plus 
tard, cette désignation n’est que provisoire. 

Enfin, on procède à la reconnaissance détaillée 
de chaque parcelle, reconnaissance qu'on ne saurait 


faire en même temps que le parcellaire, attendu” 


qu’on à besoin, pour ne pas se tromper dans l’appré- 


ciation d’un peuplement, d'en connaître avant tout: 


la contenance, et que ce renseignement n'existe pas 
encore au moment où le parcellaire s’effectue. 

Un cahier spécial, dans lequel sont transcrits les 
résultats de cette reconnaissance, forme ce qu’on 
est convenu d’appeler le cahier de la description 
spéciale. è | 


ARTICLE WY. 


OBSERVATIONS SUR LES PRINCIPES CI-DESSUS DÉVELOPPÉS,. 


Les idées exposées dans les articles précédents, 
relativement au parcellaire, ne seront probablement 


DE LA STATISTIQUE. 57 


pas du goût de tout le monde : on les attaquera peut- 
- être dans le fond et dans la forme. 
: Si on consulte les traditions, on y trouvera, en 
effet, des principes qui diffèrent essentiellement des 
miens, quoique cependant ils tendent au même but. 
_… Au lieu de prendre, comme je le fais, pour élément 
fondamental du parcellaire, une portion de forêt 
homogène quant à l’âge, aux essences, aux conditions 
de végétation; au lieu de subordonner la formation 
des parcelles aux différences d’état des peuplements 
* qui constituent la forêt, on prend pour élément fon- - 
_damental du parcellaire une portion de forêt circon- 
_scrite par des limites naturelles, et on subordonne 
en conséquence la formation des parcelles à des cir- 
constances indépendantes de l’état du peuplement. 
Il est vrai qu'on trie ensuite, dans chacune des 
grandes divisions circonscrites par des limites 
naturelles, les peuplements homogènes pour en faire 
des subdivisions ; mais ces subdivisions, condamnées 
d'avance à se fondre dans les divisions dont elles font 
partie, ne sont appelées à éxercer individuellement 
… aucune influence sur la formation du plan d’exploita- 
Tel est le point sur lequel ma manière de voir 
est surtout en désaccord avec certains errements. 1l 
‘est capital, et je ne peux me __— de m'y 
arrêter. 
Si on ne formait les subdivisions dont je viens de 
parler que pour faciliter l’opération du parcellaire, 
je ne protesterais pas. On suivrait en réalité la 


58 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


marche que j'ai conseillée; mais quand on forme 
une division avec l’idée préconçue et arrêtée de faire 
subir la même destinée à la totalité des peuplements 
qu’elle contient, on met, pour me servir d’une com- 
paraison triviale, la charrue avant les bœufs; et on 
s'expose évidemment à violer tous les principes de la 
culture et de l’exploitabilité, en rangeant sous la 
même loi, en assujettissant au même traitement, en 
régénérant à la même époque, des parties de forêt 
-qui pourront avoir des exigences bien opposées. 
Quel est l’objet principal de l'aménagement? — 
C’est de fixer l’époque et l’ordre des coupes annuelles ; 
or cet ordre et cette époque ne dépendent pas. 
uniquement de la position respective des divers peu- 
plements dont une forêt se compose ; ils dépendent 
en outre, et quelquefois principalement, de l’âge 
des bois, de la longévité probable des essences, et, 
par conséquent, je ne saurais admettre qu'on ne 
tienne compte que de la première de ces circon- 
Stances. 5 
Il y a là, au moins en théorie, une erreur; je dis 
en théorie, parce que dans la pratique on se préoc- 
cupe, tout en faisant le parcellaire, de la marche 


des coupes, et qu’il y a dés cas où il est possible 


de prévoir que les exigences des règles d’assiette 
feront exploiter à la même époque, à cause de 
leur situation respective, des peuplements très-dis- 
semblables d’ailleurs par l’âge ou d’autres carac- 
tères. | 
Ce sont précisément ces exigences des règles 


DE LA STATISTIQUE. + 


d’assielte et la certitude où l'on est souvent, et en 
montagne particulièrement, qu’elles prévaudront, 
lors du règlement des coupes, sur les autres molifs, 
qui ont conduit certains agents à regarder comme 
devant être soumise à la même loi, et devant former 
l'élément fondamental du parcellaire, une portion 
de forêts” circonscrite par des limites naturelles ; 
mais il est clair d’abord que de tels principes, 
en admettant qu'ils fussent toujours justifiés dans 
les pays de montagnes, ne sauraient l’être dans 
les plaines, et il est non moins clair ensuite que, 
si dans la pratique il est permis à des agents très- 
exercés de tenir compte, dans leur manière de 
procéder au parcellaire, des exigences des règles 
d’assiette, il n’en est pas de même en théorie, où 
l'on doit classer les idées et les opérations par rang 
d'importance, les développer et les exposer successi- 
vement et sans confusion, dans un ordre tel qu’on 
puisse bien en suivre la filiation. 


- 


ARTICLE VI. 


DU NOMBRE ET DE LA FORME DES PIÈCES RELATIVES 
AU PARCELLAIRE 
ET A LA DESCRIPTION SPÉCIALE. 


- 


Dans mon opinion, il serait fâcheux que l’on impo- 
sät pour ces documents des modèles uniformes, sans 
avoir égard aux circonstances locales. Dans telle 


60 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


forêt, susceptible d’être divisée en un petit nombre 
de parcelles bien homogènes, le rapport sur un seul 
plan de toutes ces parcelles sera suffisant; dans telle 
autre forêt, au contraire, où il aura été nécessaire 
de former un nombre considérable de parcelles, à 
cause de l’irrégularité du peuplement ou des condi- 


tions de-la végétation, il conviendra qu’indépendam- 


_ment d’un plan d'ensemble on fournisse des plans 
de détail. 

Pour la forêt de Cerisy (Manche) et pour celle de 
Perseigne (Sarthe), on avait reconnu la nécessité de 
ces plans de détail : et comme l’irrégularité du peu- 
plement était très-grande, même dans chaque par- 
celle envisagée isolément, et que le cahier descriptif 
n'aurait pas suffi pour montrer cette irrégularité 
_ autant qu’il était désirable, on prit le soin de figurer 
sur les plans partiels eux-mêmes, au moyen de poin- 


tillés et de quelques annotations sommaires, les 


principales nuances du peuplement. 


Il serait, je le pense, très-utile que cet exemple | 


fût imité. 

Voilà pour ce qui concerne la représentation gra- 
phique du parcellaire. 

Quant au cahier descriptif, il convient de n’y pas 
ménager les détails, tout en laissant en relief l’état 
moyen qui sert en définitive à fixer la destination 
d’une parcelle. On ne saurait d’ailleurs prescrire pour 
cette description une formule plutôt qu’une autre, la 
manière de décrire une parcelle devant être inspirée 
par l’état des lieux. È 


conpbirils site obt)e::::"e<us r, à 


CORP el CO NO EME à let SU EE 


DE LA STATISTIQUE. 61 


… Je donne, à titre d'exemple, un plan partiel et une 
description de parcelle que j’emprunte à l’aménage- 
ment de la forêt domaniale de Cerisy. 


: PLAN. 

ET DESCRIPTION D’UNE PARCELLE 
Mist RES à æ 

Canton du Grand-Wez, parcelle A. 


5 «4 2 


FUTAIE CLATRPLANTÉE D DE 80 ANS 


CHÈNE - nn HÊTRE 
Mgune 2 Line 


CHën MINANT. 

PERCHES,  : gens É 

BONNE * MAUVAISE Ë 
VÉGÉTATION. * VÉGETATION. À se et 


: Bonne 
*. VÉGÉTATION 


BON 2x 
BLANCS 


Ÿ Contenance. 9 hectares 94 ares 70 centiares. 

_ Situation. Plateau légèrement incliné, à 300 mètres à 
peu près au-dessus du niveau de la mer. 

 Eæposition. Nord-ouest. Les vents sont à craindre. 

Sol. A la surface : Genêts, ronces, myrtilles, bruyères. 
— A l’intérieur : Grès et schiste argileux, recou- 
veris d’une couche végétale peu profonde, dont 


Ji 
D 


62 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


L 


l’argile forme l'élément très-dominant, peu d’hu- 

mus. 

Essences. Chêne, hêtre, quelques bois blancs. * 

Age. 80 ans en moyenne. 

État de la végétation et de la consistance. Futaie clair 
plantée peu régulière, d’une végétation mauvaise 
dans les parties où le chêne est dominant ; on ne 
pense pas que ce peuplement puisse rester plus 
d’une vingtaine d’années sur pied sans dépérir. 

Vides. Néant. 3 " ne: 

Vidange. Les bois s’exportent par le chemin de... 


Pet ce 2 RES RE ES 


DEUXIÈME ÉTUDE. 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 


= 


BUT ET DIVISION DE CETTE ÉTUDE. 


- On définit l’exploitabilité d’un arbre, d’un bois, 
. d’une forêt, l’état dans lequel se trouve cet arbre, 
ce bois, cette forêt, au moment où l’on peut retirer - 
de son exploitation les plus grands avantages. 

r 1 Il est évident que la détermination de l’exploita- 
—.  bhilité et.de l’âge qui y correspond, est de nature à 
exercer une influence prépondérante sur les résultats 
de la culture forestière, et qu’elle serait, à ce titre 
seul, digne de toute l’attention de mes lecteurs. Cette 
attention, elle la mérite encore à cause des recher- 
ches nombreuses et difficiles qu’elle exige. 

4 Dans l’agriculture proprement dite, l’exploitabilité 
. des fruits est indiquée d’une manière précise par leur 
maturité. Aucun doute ne peut s’élever, en consé- 
quence, sur l’époque à laquelle il convient au proprié- 

_ taire d'effectuer la récolte, et un champ de blé, par 
“… exemple, est exploitable dans un temps prévu, fixé 


- 


64 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


par la nature elle-même, et qui ne saurait varier, 
toutes conditions climatériques égales d’ailleurs, sui- 
vant la volonté de l’homme. Lorsque le soleil à doré 
les épis, on sait qu’il faut les faucher, sous peine de 
perdre les grains qu'ils contiennent. Le cultivateur 
est impuissant à hâter ou à retarder le moment de la 
moisson. 

Pour un bois, les choses se passent bien autre- 
ment : outre que la maturité d’un-bois n’est pas carac- 
térisée par des signes extérieurs, sur lesquels aucune 
contestation ne puisse s'élever, je ferai remarquer 
qu'il n’est pas nécessaire d’attendre cette maturité 
pour que l'exploitation de ce bois soit avantageuse; 
et que, suivant les convenances du propriétaire et la 
nature de la production qu’il recherche, l’exploitabi- 
lité peut être ou très-avancée ou très-retardée. 

Les bois jouissent donc, sous le rapport que j’envi- 
sage, d’une sorte de privilége. On verra que dans cer- 
taines circonstances ce privilége se manifeste par des 


bénéfices considérables; mais il est facile de com- 


. prendre dès à présent qu'il doit avoir, dans tous les cas, 
pour effet de compliquer singulièrement les difficultés 
inhérentes à la fixation de l’exploitabilité forestière. 

Si l’on examine la manière dont les particuliers, 
les communes et l’État traitent les forêts qu'ils pos- 

sèdent, on reconnaîtra ce qui suit : 

Les particuliers exploitent généralement en taillis, 
aussitôt que possible, presque toujours avant l’âge 
de 20 ans, les bois qui se prêtent à ce mode d’exploi- 
tation. Quant aux résineux qui s’y refusent complé- 


ses tm | nine 5. 


sn E 
bs 


DE L'EXPLOITABIEITÉ. 65 


tement, ils les coupent à un âge dd ne dépasse guère 
60 ans. 

Les communes exploitent aussi en taillid sait de 
| nil les bois feuillus qui leur appartien- 
nent; mais elles leur appliquent une plus longue ré- 
volution qui est le plus souvent de 25 ans, et elles y 
conservent de nombreuses réserves; leurs futaies 
résineuses sont exploitées de 80 à 90 ans... 

:, L'État enfin exploite ses taillis, sous fai: et à 
30 ans en moyenne; ses forêts, en futaie-pleine, res- 
tent sur pied jusqu’à 120 ans au moins. Las 

- Tels sont en général et à grands traits, les prin- 
cipes d'après a. est régi le sol forestier de notre 


8 


: Les intérêts des trois catégories de propriétaires - 


RD ent ce sol, ne sont donc pas identiques, et 
si l’un s'accorde avec l'intérêt public, les autres doi- 
_vent nécessairement s’en écarter. 

Montrer en quoi et pourquoi ces intérêts diffèrent ; 
indiquer les moyens de les concilier, si cela se peut; 
ce sont là des points importants que nous aurons à 
étudier, quand nous aurons traité de l’exploitabilité à 
un point de vue théorique. 

Comme: toutes les opérations qui entrent dans 
l'économie forestière, la détermination de l’exploita- 
bilité est subordonnée à deux ordres de circonstances 
bien distincts et qui tiennent: l’un, à la végétation, à 
ses lois naturelles; l’autre à des faits économiques, 
c'est-à-dire agricoles, industriels. et commerciaux, 


aux convenances de la Société ou de l’individu, à l’es- 
5 


66 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


pèce des produits qu’on veut obtenir, à la destination 
qu'il est possible de leur donner. 
Je sais que dans la pratique, parmi les considé- 
rations qui servent à déterminer l’exploitabilité, celles 
qui se fondent sur les exigences de la végétation pas- 
sent avant toutes les autres. S'il en était autrement, 
on s’exposerait à des travaux inutiles, en ce sens | 
- qu'ils pourraient reposer sur des hypothèses contra- | 
… dictoires avec les exigences mêmes de l'existence des 
bois. | 
Mais la logique de la pratique n’est pas toujours 
celle de la théorie. - 
= La culture forestière n’emprunte sa raison d’être 
qu’au profit qu’elle est susceptible de fournir. L’appré- 
 ciation de ce profit et de toutes les circonstances qui 
peuvent l'influencer, est donc celle qui se présente 
naturellement la première à l'esprit, quand on entre- 
prend de classer les principes applicables à cette 4 
culture... | 
Cela posé, voici quelle sera la table des matières 
de cette étude : 4° De l’exploitabilité, abstraction faite + 
des exigences de la végétation et de la culture ; 2° De À 
l’exploitabilité dans ses rapports avec ces exigences ; 
3° De l’exploitabilité dans ses rapports avec l’intérêt 4 
des diverses catégories de propriétaires qui possèdent 
des bois en France; 4° De l’exploitabilité dans ses 
rapports avec l'intérêt public 


“CHAPITRE PREMIER. 


DE L'EXPLOITABILITÉ, LES Le DES EXIGENCES 
DE LA VÉGÉTATION ET DE LA CULTURE, 


La quantité des produits matériels, leur utilité, 
leur valeur vénale, et le rapport de cette valeur au 
_ capital dont elle émane, sont les divers objets que l'on 
a en vue, ensemble ou séparément, quand on cherche 
à retirer des bois les plus grands avantages. , 
À ces divers objets correspondent quatre sortes 
d exploitations distinctes et relatives : 
La première, aux produits en matière les men 
considérables ; 
La deuxième, aux produits les plus utiles ; ; 
_ La troisième, au plus grand produit en argent ; 
La quatrième, au revenu le plus élevé par rapport 
au capital. 


ARTICLE PREMIER. 


DE L’EXPLOITABILITÉ RELATIVE AUX PRODUITS MATÉRIELS 
| LES PLUS CONSIDÉRABLES, 
F ; € OU DE L’EXPLOITABILITÉ ABSOLUE. 


Quelles sont les lois générales sur lesquelles repose 
la recherche de l'exploitation absolue ? 


68 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Par quels moyens détermine-t-on l’âge qui cor- 
respond à cette exploitabilité ? 

Quelle est son utilité pratique ? 

Examinons successivement ces trois questions : 


S 4er, 


Lois générales sur lesquelles repose la recherche 
de l’exploitabilité absolue. 


Quel est l’âge auquel il convient d’abattre des 


arbres, soit isolés, soit en massif, pour qu’en admet-' 


tant une régénération immédiate et une succession 
non interrompue d'arbres de la même espèce et sou- 
mis à des conditions semblables, on obtienne, dans 
un temps donné, les produits matériels les plus con- 
sidérables ? | ( 

Évidemment, c’est comme si l’on demandait quel 
est l’âge auquel il convient d'exploiter des arbres, 
pour que le produit de cette exploitation, joint à tous 
ceux qu'auraient pu procurer, précédemment, les 
coupes d'amélioration, et divisé par le nombre des 
années comprises dans cet âge, présente le quotient 
le plus élevé. 

L'exploitabilité absolue est donc indiquée par 
l’âge où se réalise le plus grand accroissement moyen, 
el par conséquent : 

Elle se présente dans la phase descendante : des 
accroissements annuels. 


Pr TR 


sache tits de fée 0 ds de di 


PRE EE 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 69 


> Ælle correspond à l’âge où l'accroissement annuel 


devient égal à l'accroissement moyen. 


- Ces trois propositions demandent ERA exp 


eléioné : - : 


- Sinous coupons un arbre par le pied, et si nous 
examinons les couches concentriques de la section 
transversale, nous reconnaîtrons que leur épaisseur, 


-très-mince dans le principe, va en augmentant jus- : 


qu'à une certaine distance du centre; puis reste à 
peu près constante pendant quelques années; et 
diminue enfin de plus en plus, au point de devenir à 


-peine perceptible, à mesure que l’on se rapproche de 
-la circonférence. : 


Les conséquences qu'il y a lieu de tirer de ces 


Caractères, pour la détermination de l’exploitabilité 
correspondante à la production matérielle la plus con- 


sidérable, sont évidentes pour un forestier; il n’en 
est pas de même pour les personnes étrangères à la 
sylviculture, et je crois que si on les interrogeait à 
ce sujet, elles ne répondraient pas, du premier coup, 


d’une manière satisfaisante. 


Ces personnes seraient probablement disposées à 
établir d’abord une relation directe entre les phases 
de l’accroissement en volume de notre arbre d’expé- 
rience, et les variations de l'épaisseur des couches 


-concentriques; elles supposeraient volontiers, qu'à 


partir du moment où cette épaisseur est devenue 


—._ constante, l'accroissement annuel est resté station- 


naire. — Ce serait là une grave erreur : Varennes 


- de Fenille a eu soin de la prévoir, en faisant remar- 


4 : AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


quer qu’il faut se garder de confondre le grossisse- 


ment avec l'accroissement annuel ; attendu que celui- 
ci peut ne pas cesser de grandir, tandis que l’autre 
diminue. 

Mais, ce que les personnes en question auraient 
de la peine à comprendre : c’est qu’il y ait perte 
dans le rendement, quand on retarde l'exploitation 
jusqu’au terme de la végétation; c’est que, quelque 
petite qu’elle doive être, il y ait avantage à sacrifier 
l’augmentation de volume que la végétation des der- 
nières années serait encore susceptible de procurer 
au propriétaire. Habituées à: n’envisager les arbres 
que dans leur individualité, au lieu de les ‘envisager 
dans une succession non interrompue et indéterminée 
de générations, il leur faudrait un certain effort de 
réflexion pour apprécier les conséquences de la soli- 
darité qui existe entre ces générations, solidarité dont 
l'absence rendrait inintelligible la théorie du plus 
grand accroissement moyen. 

- Enfin, cette solidarité consentie, et avec elle 
l'opportunité de renoncer aux dernières années de la 
végétation d’un arbre, parce qu’on est assuré de trou- 


ver plus qu’une compensation dans la production de 


celui qui le remplacera, il reste encore à démontrer 
que l’exploitabilité absolue tombe dans la phase  des- 
cendante des accroissements annuels. Cette démonstra- 
tion est facile : pour que l'accroissement moyen ne 
cesse d'augmenter, il suffit en effet que l’accroisse- 
ment annuel soit plus grand que la moyenne des 


accroissements annuels antérieurs ; or cette moyenne 


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est nécessairement toujours plus petite que le plus 
grand de ces accroissements, puisqu'elle est fonction 
* non-seulement de celui-ci, mais, au même titre, des - 
plus faibles, et entre autres, de ceux des premières 
années de la végétation. 

Les deux premiers Bt que j'ai posés ne 
sont donc pas susceptibles d’être controversés; le 
troisième en découle logiquement, en forme le corol- 
laire, et s’y arrêter serait faire trop peu de cas du 
temps de ses lecteurs. 

Quelque simples que soient ces aphorismes, ils 
ne s’acceptent pas cependant, on vient de le voir, 
sans explications, et Varennes de Fenille, qui les a 
formulés le premier, a fait faire un progrès réel à la 
science de la sylviculture. 

Toutefois, pour que ce progrès ne soit pas dépourvu 
d'utilité pratique, il est nécessaire d'admettre qu’en : 
conformité des lois qui régissent le monde organique, 
les arbres n'arrivent au terme de leur existence 
qu'après avoir traversé une phase de décadence; que 
leur force vitale et leur accroissement annuel, qui en 
est l'expression, ne vont pas en augmentant jusqu’au 
- moment où ils sont surpris par la mort; et que si 
leur végétation ne présente pas toujours les trois 
phases, ascendante, stationnaire, descendante, qu’on 
s'accorde généralement à lui reconnaître, elle présente 
au moins les deux extrêmes. Cette hypothèse est 
indispensable, et je ne sache pas, au surplus, qu'il 
ait été fait contre elle aucune protestation plausible. 

Les principes qu’on vient de développer s’ap- 


* 
se pa 
“ 

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* 4 
8 


22 _: AMÉNAGEMENT DES FORÊTS.. 


pliquent aussi exactement aux arbres isolés qu'aux 
arbres en massifs aux bois aménagés qu'à ceux qui 
ne le sont pas. 

On a prouvé par exemple que, pour les arbres 


isolés, le plus grand accroissement moyen sé produit - 


dans la phase descendante de l'accroissement annuel. 
On le prouverait de la même manière pour les mas- 
sifs ; seulement, lorsque dans ces derniers, les 
éclaircies enlèvent périodiquement une portion des 
arbres sur pied, il convient de supposer qu'elles ont 
lieu par annuités ; ét l’on doit, surtout, tenir compte 
de leurs produits, dans la comparaison des accrois- 
sements de deux années consécutives ; car si on les 
négligeait, on arriverait infailliblement à un résultat 
tout à fait contraire à celui qu’indique le raisonnement. 

. Quant à l'application aux bois aménagés des lois 
dont on n’a, jusqu’à présent, démontré la justesse 
que pour les bois qui ne le sont pas, elle est égale- 
ment incontestable : de sorte qu’étant données deux 
forêts de même étendue et dans des conditions sem- 
blables de végétation, partagées l’une en 60 coupes 
et l’autre en 420, la production de cette dernière, 


quoique l’étendue de la coupe annuelle soit moindre : 


de moitié, sera plus considérable que celle de la pre- 
mière, si le plus grand accroissement moyen ne se 
réalise qu’à l’âge de 120 ans. En termes plus précis, 
si ces deux forêts ont chacune 120 hectares, l’hec- 
tare qu’on coupera chaque année dans la deuxième, 
fournira plus de produits que les deux: hectares 
qu’on coupera chaque année dans la première. 


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a Moici ut raisonnement algébrique très-élémentaire 
qu à cet égard, ne laissera pas Dpee au moindre 


> On veut prouver ais l xnéniedent qui corres- 
“hs au maximum de l'accroissement moyen est 
celui qui procure le maximum de produits matériels. 


* Soitn l'âge de la révolution , 
ve volume d’un hectare parvenu à cet àge. 
- “Le plus grand accroissement moyen sera = 
de c la contenance de la forêt ; la cotes de la coupe 


sera © C et le volume ? X v ou € x = - 


: Mais 2 est le plus grand accroissement moyen; donc toute 


ut à 


réroluuon n' n''.… plus grande ou pins petite donnerait un 


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accroissement — TS moindre que = 2 et en conséquence, 


. 


an 5 ét 8 
une quantité C0 Tnt plus faible que c = 


= $ 2. 


De moyens par lesquels on détermine l’âge qui ot 
à l’exploitabilité absolue. 


… Voici des arbres isolés de la même espèce, 
placés dans des conditions identiques de végétation, 
“ mais ayant des âges différents. Prenons le plus âgé, 


7h AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


concentriques, il nous sera facile de déterminer la 
grosseur qu'il avait aux diverses époques pour les- 
quelles nous voulons établir son volume. Ayant la 
grosseur, il nous faudra encore la longueur à ces 
mêmes époques. Si l’arbre est verticillé, cette lon- 
gueur sera facile à trouver, puisque la distance entre 
deux verticilles successifs représente la pousse d’une 
année, et que pour avoir, par exemple, la longueur 


de l'arbre il y a 10 ans, il suffira de retrancher de 
la longueur totale actuelle, celle des 10 derniers ver- 


ticilles. S'il s’agit de bois feuillus, ce n’est que par 
des tâälonnements que nous pourrons arriver au but 
de nos recherches : ainsi, l'accroissement d’un arbre 
se constituant avec des couches annuelles: super- 
posées, il est aisé de comprendre qu’en rognant suc- 
_cessivement la tige, on augmentera successivement 
aussi le nombre des couches concentriques de. la 
section; et qu’à l’apparition de chaque couche nou- 
velle correspondra la hauteur à un âge qu’on déter- 
minera sans peine, puisqu'on connaîtra l’âge actuel. 
Nous pourrons donc nous procurer les deux élé- 
ments, longueur et épaisseur, relatifs à un âge quel- 
conque, et, avec ces deux éléments, calculer le 
volume de la tige de notre arbre à cet âge, en le 
considérant soit comme cône, soit comme cylindre. 
Des facteurs de conversion que nous établirons par 
les procédés qu’enseigne la stéréométrie, nous four- 
niront le volume réel, et il ne nous restera plus 
qu’à diviser le volume trouvé à différents âges par 
ces âges mêmes, pour distinguer en comparant les 


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DE L'EXPLOITABILITÉ. 75 


quotients, l’âge du plus grand accroissement moyen. 
* Pour plus de sûreté, l'opération que je viens 
appliquer à un arbre, on l’applique à plusieurs, 
“ on prend ensuite la moyenne des accroissements 
moyens maxime. | 
Voici maintenant des arbres en massif: € rest + un 
taillis dans lequel il n’y a pas lieu de faire des coupes 
intermédiaires, c'est-à-dire des nettoiements ou des 
éclaircies. On pourrait déterminer l’âge de l’exploi- 
_fabilité absolue par le même procédé. Mais comme 
pour diminuer les chances inévitables d’erreur que 
Von court toujours, lorsqu'on applique à un très- 
grand nombre d'arbres les lois d’accroissement 
constatées sur une partie seulement d’entre eux, il 
faut que cette partie soit par rapport au tout la 
plus grande - possible ; et comme, dans un massif, 
cette considération entraînerait l’abatage d’un très- 
grand nombre de sujets, on emploie le procédé sui- 
vant qui est moins compliqué, plus expéditif, et sou- 
. vent plus sûr. 
Au lieu d’expérimenter sur des arbres isolés, on 
“expérimente sur des portions du massif. On choisit 
donc, dans des conditions régulières de végétation, 
_ des places d'essai, différentes par l’âge, mais sem- 
-blables quant aux autres éléments de la production. 
- On cube les volumes qu’elles contiennent, et l’on 
divise ces volumes par les âges correspondants. 
Cette méthode est celle qu’on ne peut se dispenser 
d'employer dans les massifs, soit en taillis, soit en 
futaie, qui sont assujettis à des nettoiements et 


76 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


éclaircies périodiques ; seulement, on a soin d'ajouter 
au volume de chaque place d'essai, celui des coupes 
intermédiaires effectuées précédemment; de sorte 
que si des éclaircies avaient eu lieu tous les 10 ans, 
à partir de 20 ans, il faudrait ajouter au volume des 
bois de 30 ans, le produit d’une éclaircie (à 20 ans), 
au volume des bois de 40 ans, les produits de deux 
éclaircies (à 20 et à 30 ans), etc. Les quotients de 
ces sommes par les âges actuels exprimeraient les 


accroissements moyens, et au plus grand de ces quo- 


tients correspondrait l’âge le plus FOIS de celui 
de l’exploitabilité absolue. 

Les opérations que je viens de décrire tHÉDAREE 
dement sont simples en théorie. Dans la pratique, 
elles rencontrent de grandes difficultés causées prin- 
cipalement par l'embarras de trouver des portions 


de massifs qui soient dans un état de régularité 


convenable, et dans des conditions de végéta- 
tion semblables à celles des peuplements, auxquels 
devraient être appliqués les résultats des expériences 
dont elles auraient été l’objet. 


L’exploitabilité relative aux plus grands produits 


matériels varie pour une même essence, suivant les 
sols, les climats, la situation, etc., toutes choses très- 
variables souvent de leur côté, dans la même forêt. Il 
n’est pas aisé de discerner l’état moyen au milieu de 
ces variations, et c’est cependant de la découverte 
de cet état moyen que dépend le succès des essais. 
Toutefois, il n’y à pas de difficulté insurmontable 
pour la sagacité d’un forestiér qui a du coup d'œil 


rod ES 


li DE L'EXPLOITABILITÉ. : 


_ etqui est expérimenté, lorsque les peuplements pré- 
sentent les éléments indispensables sous le triple 
+ rapport de la régularité, de la consistance des mas- 
 sifset de la gradation des âges. C’est là malheu- 
_ reusement ce qui manque en France à presque 
toutes nos futaies. Aussi est-il bien peu de futaies 
dans lesquelles l’âge d'exploitabilité puisse être fixé 
« d’après des bases certaines. Pour nos taillis, la 
« recherche des lois d’accroissement est plus facile. 
“ Pourtant elle n’a été faite que très-exceptionnellement. 
* Nous verrons au surplus qu’elle est bien loin d’avoir 
_ une aussi grande importance que dans les futaies. 
_ … Des tables de production résultant d'expériences 
_ effectives et qui indiqueraient, pour des conditions 
déterminées de végétation, la marche que suit l’ac- 
_ croïssement des principales essences de notre sol 
| forestier, constitueraient un précieux document, et il 
_ serait très-désirable que l’on s'en occupät. L'admi- 
_ nistration seule pourrait entreprendre un travail de 
cette nature. Ce ne serait, il est vrai, pas trop d’un 
siècle pour le terminer; mais les résultats immé- 
diats auxquels l’état actuel de nos forêts permettrait 
d'arriver, auraient déjà un grand intérêt et une 
. grande utilité pour la détermination de l’exploitabilité 
“ dont nous nous occupons en ce moment. Ces études 
… que je conseille, l'administration forestière badoise 
« les a commencées depuis longtemps dans les forêts 
“. dont la gestion lui est confiée. Elles ne sont donc 
- pas impossibles. 
“ Mes lecteurs s’effrayeront peut-être de la mul- 


78 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


titude de comptages et de calculs que semble com- 
porter la recherche de l’exploitabilité absolue, et se 
_défieront de la possibilité d'arriver dans ces évalua- 
tions à un degré suffisant d’exactitude. De telles 
appréhensions ne seraient pas fondées : dans la pra- 
tique, la phase de la végétation sur laquelle portent 
les expériences est singulièrement réduite, soit par 
le choix du mode d'exploitation, soit par les exi- 
gences de la culture ; et pour ce qui est de la préci- 
sion des cubages, ceux-là seuls pourraient en dou- 
ter qui ignorent les procédés de Ja dendrométrie. 
L'emploi de ces procédés peut être expéditif et cer- 
tain, comme le prouvent les exploitations faites dans 
diverses forêts, conformément à la possibilité résul- 
tant des cubages de l'aménagement. Ainsi, dans la 
forêt de Haguenau, le produit des coupes de la pre- 
mière. décennie a cadré parfaitement avec la possi- 
bilité déterminée par l'aménagement. Il en a été de 
même dans la forêt de Cerisy (Manche), et il en 
sera de même toutes les fois que les comptages et 
cubages seront faits par des agents attentifs. 

Au reste, on aurait grand tort de contredire l’uti- 
lité d’un principe, en alléguant les difficultés de son 
application. En sylviculture, comme dans toutes les 
sciences et dans tous les arts spéciaux, la pratique: 
parvient rarement à réaliser, à appliquer exactement, 
complétement, les enseignements de la théorie. Ce 
n’est pas une raison pour qu'elle les repousse, et 
celui qui s’inscrirait en faux contre les principes de 
l'aménagement des forêts, par cette seule raison 


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22 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 79 


qu'ils ne trouvent pas toujours leur application, ne 
serait pas plus sage que-le mécanicien qui nierait 
l'utilité de la mécanique rationnelle, parce que les 


données qu’on y puise sur la résistance des maté- 


riaux, ne sont pas toujours d’accord avec le résul- 
tat des épreuves que l’on fait subir à ces derniers. 


. S 3. 
ST Utilité pratique de l’exploitabilité absolue. 


: J'ai fait remarquer, au début de mon travail, que 
le profit qu’on pouvait retirer de l’exploitation fores- 
tière, servait de fondement aux règles qui régissent 
cette exploitation. Mais il n’y a profit que là où il y 
a utilité produite, et comme je n’ai pas tenu compte 
jusqu'ici de cette utilité, on pourrait douter de l’op- 


. portunité des longues considérations dans lesquelles 


je suis entré, au sujet d’une exploitabilité dont les 
avantages, pour la satisfaction de nos us) n’ont 
pas encore été développés. 

La quantité plus ou moins grande des produits 


* matériels qu’un bois est susceptible de fournir 
annuellement, serait dépourvue de tout intérêt, si 


elle était indépendante de l'utilité et de la valeur de 
ces produits ; elle ne mérite d’être prise en considé- 


“ration que parce qu'elle a des rapports plus ou moins 


directs avec cette utilité et cette valeur ; on s’éton- 
nera donc peut-être que je n’aie pas pris ces rapports 
pour point de départ de mes études. 


80 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Je ne l’ai pas fait, parce que j'ai présumé que la 
clarté de mes déductions en souffrirait. 

Je reconnais, sans doute, que réduite à elle- 
même, envisagée isolément, la théorie de lexploita- 
bilité absolue serait une pure abstraction compa- 
rable à un chiffre qu'on aurait séparé de l’objet 
auquel il empruntait sa signification ; mais nous ver- 
rons plus tard que l'utilité et la valeur des produits 
ligneux sont, dans beaucoup de cas, proportionnelles 
à leur quantité, et qu’en conséquence, la théorie de 
l’exploitabilité absolue est souvent admissible. Elle 
exige d’ailleurs qu’on précise la marche de la végé- 
tation, qu’on en fasse connaître les lois et les résul- 
tats matériels, et ce sont là des données dont on ne 
saurait se priver, quels que soient le but que l’on se 
propose et les moyens que l’on préfère pour y arri- 
ver. Il n’était point, enfin, sans importance d’avoir 
un terme de comparaison aussi fixe que possible pour 
les exploitabilités de différentes natures que j'avais à 
étudier, et il n’en existait pas, ce semble, de meil- 
leur que l’exploitabilité absolue. 


ARTICLE II. 


DE L'EXPLOITABILITÉ RELATIVE AUX PRODUITS LES PLUS UTILES. 


 L’exploitabilité relative à la production la plus 
utile, est celle qu'il est le plus difficile de détermi- 
ner. Il ne suffit pas, comme on pourrait le croire au 


L2 


4 


DE L'EXPLOITABILITÉ. st 


premier abord, de -transformer en marchandises, les 
produits des arbres d'expérience ou des places d’es- 
sai, pour juger ensuite, d’après le prix de ces mar- 
chandises, de leur utilité respective. Ce prix est, 
sans doute, un élément d'appréciation ; mais on ne 
doit en user qu'avec réserve, sous peine de s’exposer 
à de grossières erreurs. | 
L’utilité des choses est, en effet, loin d'être ve 

_jours proportionnelle à leur valeur. Le bois de houx 
qui, tous les forestiers le savent ‘bien, est une 
essence digne de fort peu d'intérêt, se paye sur 
place, dans telle forêt que je pourrais citer, jusqu’à 
250 francs le mètre cube. Personne assurément ne 
s’avisera de prétendre qu’à un point de vue géné- 
ral, ce bois soit aussi utile que le chêne qu’on vend 
en moyenne 40 à 50 francs le mètre cube. Un même 
objet, qui vaut beaucoup aujourd’hui, vaudra peut- 
être très-peu demain, sans que son utilité ait cepen- 
dant diminué. Enfin, il y a des utilités entièrement 
gratuites : l'air, l'eau, les bois aussi quelquefois. 

-L On peut n’attendre de ces derniers que de l’agré- 
ment ; s'ils en procurent, ils seront utiles; on peut 
en attendre une protection contre les vents, les ava- 
lanches, etc., etc. : ces bouquets de bois qui, sur 
les rampes escarpées de nos Alpes, ont pour destina- 
tion de barrer les torrents et de les éloigner des 
“habitations qu'ils menacent d’emporter, rendent, 
sans contredit, de grands services, produisent des 
utilités; ces utilités n’ont pas de valeur vénale, et 
_ cependant, elles sont incontestables. 
6 


82 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Il est donc nécessaire de chercher une autre base 
que le prix, pour l’appréciation du maximum d’uti- 
lité des produits forestiers ; mais où la trouver ? Entre 
l'utilité du taillis qui sert de remise au gibier, et 
celle des forêts séculaires de nos hautes montagnes, 
dont la fonction est de garantir les contrées infé- 
rieures contre la fureur des éléments, combien n’y 
a-t-il pas d’autres services immatériels et souvent 
gratuits rendus ‘par les bois, services s'appliquant 
au caprice, à l'agrément, à des besoins plus -ou 
moins impérieux ? Entre l’échalas qui sert de tuteur 
à la vigne et le mât de hune qui résiste à l’effort de 
la tempête, et sous lequel s’abritent les intérêts de 
notre commerce et quelquefois de. notre gloire, com- 
bien ne pourrait-on pas compter de destinations dif- 
férentes ayant chacune des avantages spéciaux ? Où 
trouver un criterium, une mesure qui permette de 
classer tous ces services par rang d'importance ?: 

Pour le vigneron, l’échalas est le plus utile de tous 
les produits. Pour celui qui manque de combustible, 
le fagot est bien plus utile que le plus beau bois des 
îles, si celui-ci n’est bon qu’à la fabrication des meu- 
bles. Pour le propriétaire qui veut faire argent de ses 
produits, le bois le plus cher est le plus avantageux. 

On voit toutes les raisons qui s’opposent à ce qu’on 
fixe des règles pour juger de l’exploitabilité relative 
aux produits les plus utiles. Cependant, on peut 
admettre en principe, qu’à un point de vue général 
et sauf de rares exceptions, les arbres les plus utiles 
sont ceux qui ont les dimensions les plus grandes 


DE L’'EXPLOITABILITÉ. 83 


et les propriétés mécaniques ou physiques les plus 
développées. 
Les dimensions ont sur l’utilité d’un morceau de 
bois une influence bien évidente, puisque c’est d'elles 
que dépend le nombre des usages auxquels il est pos- 
sible de l’affecter : et il est clair, par exemple, qu’à 
volume égal, plusieurs rondins de chêne propres au 
chauffage seulement, seront moins utiles qu’une seule 
‘pièce de bois de la même essence, dont on tirera du bois 
dechauffage, du bois de travail, du bois de charpente. 
Le développement des propriétés mécaniques et 
physiques n’a pas une moins grande influence; or, 
Pexpérience tend à prouver que la puissance calori- 
fique, la densité, la cohésion et l'élasticité, suivent 
une marche ascendante jusqu'à un âge avancé, qui 
ne s'écarte pas beaucoup de celui qui correspond au 
plus grand accroissement moyen : d’où il résulte qu’à 
dimensions égales, du bois de 20 ans est moins pré- 
cieux que du bois de 400 ans. 

_ Henri Cotta raconte, quelque part, que dans la 
Suisse saxonne, des habitations ont duré 20 ans à 
peine, parce qu'on y avait employé de jeunes bois, 
tandis que desédifices construits il y a plus de400 ans, 
avec des bois âgés, sont encore dans un parfait état 
de conservation. Ce fait est frappant; il montre à 
quelle perte énorme d'effet utile on s’expose par des 
exploitations prématurées. Î 

Je faisais observer, dans l’article précédent, qu’il 


1, Le laricio est le moins durable de tous les bois, quand il est 


M. AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


serait très-désirable que l’on s’occupât activement de 
la formation de tables de production indiquant, pour 
des conditions déterminées de végétation, la marche 
de l'accroissement des principales essences de notre 
pays. Il ne le serait pas moins que l’on établit, par 
des expériences consciencieuses, l'influence que l’âge, 
le sol, le climat et le mode d'exploitation, exercent 
sur les qualités :de ces essences. Le chêne de la 
Meurthe est moins estimé pour le chauffage que celui 
de la Bourgogne, en sait-on la raison? Le chêne 
du Nord dure, dit-on, beaucoup moins que. celui 
du Midi; on assure que les vaisseaux construits avec 
le premier, sont hors de service au bout de 7 ou 8 ans, 
en moyenne, tandis que ceux qui sont construits avec 
du bois de Provence, se conservent plus de 15 ans. 
Certes, ce sont là des assertions qui réclameraient 
une sérieuse vérification. Quels services l’administfa- 
tion ne rendrait-elle pas au commerce et à l’indus- 
trie, si elle pouvait dire : Dans cette région, le bois 
est propre à tel usage; il se distingue dans celle-ci 
par telle qualité? etc. 

Il existe bien quelques principes relativement aux 
influences que je voudrais que l’on étudiât, mais ils 
ne reposent que sur des observations fort incomplètes 
et rarement comparables entre elles. 

Les bois de grandes dimensions ne sont pas seule- 
ment recommandables par la variété et l’importance 


employé comme poteau télégraphique, parce qu’alors il est trop 
jeune, tandis que lorsqu'on ne l'exploite qu'à l’âge de 200 ans, 
il est presque incorruptible. (Note de la 2° édition.) 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 85 


des usages auxquels ils peuvent servir ; ils le sont éga- 
lement -par les éléments de bien-être que procurent 
à la classe ouvrière les nombreuses manipulations 
auxquelles ils donnent lieu. 

L’exploitabilité relative aux produits les plus utiles 
est, en définitive, susceptible de varier suivant une. 
foule de’ circonstances que je ne me flatte même pas 
d’avoir énumérées, et de se présenter tantôt avant, 
tantôt après l’exploitabilité absolue ; il faut 10 ans 
pour faire un cercle; il en faut 250 pour que le ss 
de Riga puisse faire un mât de vaisseau. 

- Néanmoins, cette exploitabilité correspond à un 
âge qui ne saurait, dans la plupart des cas, s’éloi- 
gner beaucoup de celui du plus grand accroissement 

+ Lorsqu'on recherche les dimensions que doivent: 
avoir les bois pour atteindre leur maximum d'utilité, 
il importe de ne pas perdre de vue que l'utilité serait 
un vain mot, si elle ne pouvait être mise à la portée 
du consommateur. 

L'état des voies de vidange est donc appelé à in- 
_‘fluer singulièrement sur le résultat de cêtte recherche. 

* Que si l’on ne considérait l’ exploitabilité relative 
aux produits les plus utiles, que dans ses rapports 
avec l'intérêt du propriétaire qui ne consomme pas 
son boïs et qui le vend, on pourrait regarder le prix 

_- de ces produits comme l’expression exacte de leur uti- 
lité; et, par suite, l’exploitabilité dont nous venons de 
nous occuper, se confondrait avec celle du plus grand 
produit pécuniaire, dont je vais parler. 


86 AMÉNAGEMENT DES FORETS. 


ARTICLE IIL 


DE L'EXPLOITABILITÉ RELATIVE AU PLUS GRAND PRODUIT 
EN ARGENT. 


La marche à suivre pour déterniner l’âge auquel il 
faut abattre des bois, quand on veut en retirer le plus 
grand produit en argent n’est pas embarrassante, du 
moment que l’on est fixé sur les rendements, en 
matière et en marchandises, des arbres d'expérience 
ou des places d’essai. Les prix du commerce appli- 
qués à ces marchandises, défalcation faite des frais 
d'exploitation, de façon et de transport‘, établiront 
exactement leurs valeurs; les quotients de ces valeurs 
par les âges correspondants, donneront les revenus 
moyens, et le plus grand de ces quotients indiquera 
l’époque de l’exploitabilité cherchée. 

La chose essentielle, dans cette opération, afin 
d'éviter les erreurs, est d’apprécier sainement le prix 
vénal d'une marchandise dans les éléments qui le 
constituent; or, cela n’est pas facile, car le prix du 
bois est exposé à de très-grandes fluctuations, el il 
s’agit, au cas particulier, d'adopter non le prix du 
jour, le prix accidentel; mais le prix moyen, le prix 
normal. Quelques exemples feront mieux comprendre 
ma pensée : él 

1. Dans l'évaluation des frais de transport, on tiendra compte 
de l’influence que l'amélioration des voies de vidange pourrait 
avoir sur ces frais. 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 87 


-1 J'ai cité, tout à l'heure, le prix du houx comme 
un exemple de la valeur excessive que pouvaient 
atteindre des objets d’une utilité plus que contestable 


d’ailleurs. Eh bien ! si le bois dont on voudrait régler 
l'exploitation renfermait des sujets de cette essence, : 


en conclurait-on qu’il convient de les multiplier? — 
Une réponse aflirmative serait une erreur grave; car 
ce prix élevé tient précisément à la rareté de l’es- 
sence en question, aux soins que, dans l'intérêt de 


la sylviculture, on apporte à l’extirper, et il est com-* 


préhénsible que, pour peu qu’on en favorisät la mul- 
tiplication, sa cherté disparaîtrait. On fabrique, dans 
certaines localités, des allumettes avec du bois de 
tremble, et on en tire, de cette manière, un excellent 
parti. Serait-ce une raison pour convertir nos forêts 
en trembles ? — Évidemment non, car il en serait du 
tremble comme du houx; son prix ne tarderait pas 
à être avili. 

Ce qu’il faut donc examiner avec attention, pére 
cier avec sagesse et prendre pour base de son évalua- 
tion, c’est l'importance des débouchés qui seule peut 
garantir le maintien du prix vénal; et on doit rejeter 
* dans les considérations tout à fait secondaires, les 
circonstances accidentelles et exceptionnelles dont 
l'influence, sur la valeur des produits, ne'saurait être 
. durable. 

Si l’on suppose le prix du bois constant, c'est-à- 
dire indépendant de l’âge, l’exploitabilité relative au 
produit pécuniaire le plus élevé, suivra les mêmes 
lois que l'exploitabilité absolue. Elle se réaliserait, 


=. 


88 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


au contraire, plus ou moins longtemps après, dans 
l'hypothèse où le prix du bois s’élèverait avec l’âge; 
et plus ou moins lontemps avant, dans le cas où ce 
prix subirait une diminution, malgré le inon pesant 
ascendant de la végétation. r uosholgs 


ARTICLE IV. 


DE L'EXPLOITABILITÉ RELATIVE AU REVENU LE REY guevé 
PAR RAPPORT AU CAPITAL, - 


" è CE } 

$ 4er te 
. LE MT) a 
Pt 's sh # 


Considérations générales sur la valeur et le profit des capitaux, | 
it et spécialement des fonds de bois. 


Nous n’avons examiné, jusqu’à présent, l’exploi- 
tabilité forestière qu’au point de vue de la, quantité, 
de l’utilité, et de la valeur absolue des produits. La 
quantité et l'utilité des choses intéressent presque 
exclusivement le consommateur ; leur valeur touche 
surtout le producteur; mais ce qui lui importe prin- 
cipalement, c’est le rapport qui existe entre cette 
valeur et le capital dont elle émane ; aussi, les spé- 
culateurs qui ont à faire emploi d’un capital pécu- 
_niaire, cherchent-ils à l’affecter à l’entreprise qui 
leur promet le bénéfice le plus grand, c’est-à-dire 
un profit qui soit, par rapport au capital, le plus élevé 
possible. Cette préoccupation légitime se rencontre 
chez le propriétaire de bois, et l’on conçoit qu’on ne 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 89 


puisse y satisfaire qu’en recourant à une exploitabilité 

bien différente de celles que nous avons étudiées 

| RER 

+. On a souvent défini exploitabilté dont ils agit: : 
lexploitabilité relative à la rente la plus élevée. : 

J'adopterai aussi cette définition, quoiqu Folle ne 
soit peut-être pas irréprochable. 

. Ce qui caractérise l'exploitabilité qui va faire 
l'objet de. notre examen, c'est donc l'intervention de 
ce apitale parmi: les éléments à prendre en 
ral ion, quand on veut déterminer l’âge auquel 
t‘d'abattre des bois. Nous ne nous sommes 
scupé que du produit, sans songer à l’agent 
délgirodnetion et au prix qu'on y attache dans les 
transactions commerciales; or, cet agent a, comme 
les autres capitaux, une valeur commerciale, et il ne 
saurait dès lors être négligé par le spéculafeur qui se 
propose de fixer, pour l'exploitation d’un bois, l'épo- 
que: la plus favorable à ses intérêts. 
-1de dis que les capitaux ont une valeur commer- 
ciale. Pour l'intelligence de ce que j'aurai à exposer 
relativement aux fonds-de bois, il est nécessaire de 
rappeler comment se constitue et fonctionne : cette 
vélos. 

+ On désigne sous le nom de capitaux toutes es 
dhese, tous les objets qui servent ou qui contribuent 
à la production; ce sont donc en général des instru- 
ments de travail; leur valeur repose sur les services 
productifs qu'ils sont susceptibles ‘de rendre; elle 
s'établit, dans le commerce, en multipliant le prix 


\ 


90 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


net de ces services par un facteur convenu. Ce fac 
teur varie suivant des circonstances nombreuses dont 
les principales sont la sécurité du placement et l'abon- 
dance des capitaux disponibles; mais il ne monte 
guère au-dessus de 40, tandis qu’il peut descendre 
beaucoup plus bas. 

Les fonds de terre participent de la nature des 
capitaux, et dans le langage ordinaire, on s'accorde, 
à les ranger dans la même catégorie. | 

Qu'est-ce que le profit net? — C’est l’excédant 
du produit pécuniaire sur les frais de production *, 
d'où il résulte que les capitaux dont les services pro- 
ductifs seraient juste suffisants pour couvrir les frais 
de production, n'auraient aucune valeur commerciale, 
ce qui, soit dit en passant, ne les empêcherait pas 
d’être souvent fort utiles. Ainsi, qn’on suppose un 
fonds de terre dont le produit suffirait à peine à l’en- 
tretien du cultivateur et de ses instruments de tra- 
vail, il est clair que, commercialement, ce fonds sera 
sans valeur; mais dès qu’il y a un profit nét quel- 
conque; la valeur capitale surgit, et pour l’apprécier, 
pour la déterminer, il n’y a qu’à multiplier ce profit 
par le facteur exprimant la relation convenue dont 
je viens de parler, la relation consentie entre le 
profit net et le prix de l’agent qui sert à le produire. 
Pour une terre arable, le profit net sera multiplié 
par 40; pour un bois, par 33; pour un capital 


4. Il est bien entendu que dans ces frais est compris le béné- 
fice de l'entrepreneur, quand il y a un entrepreneur. 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 91 
employé à l'armement d'un navire, par 15, elc. 
Ce profit net qui sert à l'évaluation des capitaux, 
indique en même temps ce qu'ils-coûtent à l’indus- 
triel qui ne demande que la faculté d’en user, et il 
porte alors le nom générique d'intérêt (comprenant 
le loyer, le fermage, etc.). On suppose en effet que 
ce profit net est la conséquence nécessaire de l’inter- 
vention, du capital, qu'il lui est, en quelque sorte, 
inhérent, et qu'il est dû, dès lors, au propriétaire, 
soit que celui-ci emploie lui-même son capital, soit 
qu’il le fasse fructifier par d’autres mains. Il se pour- 
rait certainement que Femprunfeur ne trouvât point 
dans les services du capital qu'on lui aurait prêté, 
cet excédant qui constitue le revenu du propriétaire. 
Cela ne prouverait rien contre ce que j'ai avancé à 
propos des rapports qui existent entre les profits 
nets et les capitaux. Cela prouverait seulement que 
le capital dont il s’agit aurait été surévalué ou mal 
exploité. | 

D'après ces considérations, la valeur d’un capital 
ne tiendrait pas à celle de ses parties intégrantes; 
elle serait intangible, extrinsèque, elle se lierait au 
. revenu; elle diminuerait et progresserait avec lui. 

Il est cependant connu de tout le monde que la 
valeur commerciale d’une forêt, n’est pas toujours 
avec le revenu net qu'on en retire, dans le rapport 
adopté pour les placements de lespèce, et qu’elle 
dépasse quelquefois le chiffre que l’on obtient par la 
capitalisation de son revenu au taux desdits place- 
ments. 


92: AMÉNAGEMENT DES FORETS. 


D'où cela provient-il? Comment concilier ce fait 
incontestable avec la proposition précédente ? 

Essayons de répondre à ces questions : 

Parce que le revenu net sert de fondement au 
prix que l’on attache à un capital, ce n’est pas néces- 
sairement une raison pour que le revenu étant nul, 
les objets qui constituent le capital soient frappés de 
non-valeur ; ils ne le seraient que dans l'hypothèse 

où ils ne pourraient être soustraits à la destination 
qu’on leur avait donnée, pour être affectés à un autre 
emploi. Voici des pierres, du fer, du bois avec les- 
quels on a construit une maison : si cette maison ne 
se louait à aucun prix, elle perdrait toute valeur 
comme cCapital-maison, capital immobilier; mais les 
matériaux dont elle se compose, séparés les uns des 
autres, rentreraient dans la catégorie des produits, 
reprendraient ainsi une partie de leur valeur primi- 
tive, et pourraient, sous une autre forme, naersererss 
comme capital. 

Veut-on encore un exemple ? — I] nous est fbrbi 
par un bateau que l’on aurait transporté dans l'inté- 
rieur des terres. Sur le bord de la mer, ce bateau 
constituait un capital précieux; dans les conditions: 
où ‘on l’a placé, il a perdu comme D CRoM 
toute valeur, et, cependant, il est probable qu’on en 
tirera quelque profit en le dépeçant. 

Les choses qui fonctionnent comme av peu- 
vent donc avoir et ont en effet, presque toujours, 
une valeur propre, indépendante de celle qu’elles 
empruntent à leur fonction ; mais la première ‘est; 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 93 


ordinairement beaucoup plus petite que la seconde, 
ét, par conséquent, elle ne saurait exercer aucune 
influence sur le prix qu’on attache à ces choses dans 
les transactions commerciales. 
Les bois seuls peut-être font exception à cette 
règle. ai-eb Bb: b 3 
.. Si le fonds de bois était fixe, immutable, il est 
certain que son prix vénal se réglerait invariable- 
. merit comme celui des autres capitaux et particuliè- 
rement des fonds de terre, d’après son revenu net ; 
mais le fonds de bois peut, dans une très-grande me- 
sure, être transformé : de fixe, il peut devenir circu- 
lant; d'immeuble il peut devenir meuble, et ces pro-. 
priétés qu'il possède à un degré exceptionnel, lui 
donnent une valeur intrinsèque, pour ainsi dire, indé- 
pendante du revenu qu’on en retire, et qui est sus- . 
ceptible de s'élever, au point-de dépasser le chiffre 
que l'on obtiendrait, en capitalisant ce revenu au 
taux des placements en bois. Comment. s'établit 
cette valeur? — C'est bien simple : d'après l'usage 
que. l’on ferait de la portion du capital que l’on 
. aurait mobilisée. On sait, par exemple, que l'intérêt 
des capitaux qui se prêtent dans le commerce aux 
mêmes conditions de solidité que celles des place- 
ments en bois, est de 3 pour 100. Eh bien! si le 
revenu net d'une forêt descendait au-dessous du 
profit qu'on retirerait de cette forêt, en transfor- 
mant sa superficie en argent, il y aurait, à faire 
cette transformation, un nan aisément appré- 
ciable. 


9h AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Le point que j'essaye d'éclairer est véritablement 
la clef de la théorie de l’exploitabilité relative à la 
rente la plus élevée. Qu'on me permette donc d’in- 
sister, et de montrer en quoi la formation du capi- 
tal-forêt diffère de celle des autres capitaux et 
notamment des fonds de terre. 

Le propriétaire d’une terre arable Bépènsie ordi- 
. nairement, soit pour ses besoins, soit pour ses plaisirs, 
le revenu net qu'il en retire. Supposons, cependant, . 
que sa position de fortune et ses goûts lui donnent 
la possibilité et lui inspirent le désir de le faire 
valoir; supposons aussi qu’à raison de la solidité du 
. placement, il soit disposé à se contenter de l'intérêt 
_ qui correspond au taux des placements en fonds de 
terre. Pour parvenir à ses fins, il peut faire l’une des 
deux opérations suivantes : ou bien augmenter par 
une nouvelle acquisition l'étendue de ses propriétés, 
ou bien améliorer celles qu'il possède déjà. Il choi- 
sira probablement ce dernier moyen, parce qu’il est 
plus commode que l’autre, si en employant son 
revenu à des améliorations, il prévoit qu’il augmen-— 
tera son fermage d’une quantité égale à l'intérêt de . 
ce revenu ; et il continuera, chaque année, le même 
emploi, jusqu'au moment où l’augmentation du pro- 
fit net cessera de compenser la perte d'intérêt du 
revenu. 

À partir de ce moment, il cherchera pour ses - 
épargnes une autre destination; il s’en servira, par 
exemple, pour augmenter Kétandiie de ses biens- 
fonds. 


DE L’'EXPLOITABILITÉ. 95 


Le propriétaire d’une forêt ne doit pas agir diffé- 
remment; pour lui, l'accroissement d’une année, 
c’est le revenu ; il ne consentira à l'immobiliser, à 
lincorporer au capital, que dans le cas où l’accrois- 
sement de l’année suivante lui offrira un dédomma- 
gement. 

Jusque-là, les deux capitaux, fonds de terre et 
fonds de bois, donnent lieu à des spéculations iden-" 
tiques; mais ce qui distingue le fonds de bois de la 
terre arable, c’est que, dans celle-ci, le revenu incor- 
poré au capital ne se retrouverait plus, si une aug- 
mentation proportionnelle du revenu net ne se pro- 
duisait pas ‘ ; tandis que, pour le fonds de bois, il 
se conserve et se retrouve, lors même que son immo- 
bilisation ne procure pas les avantages qu’on en 
attendait. Le propriétaire d’une forêt ne perd dans 
ce cas que l'intérêt de son- revenu; seulement, il 
arrive que le rapport du revenu au capital engagé 
dans cette forêt, descend au-dessous du-taux des pla- 
cements qui sont dans les conditions de solidité que 
ledit propriétaire recherche ; et dès lors il convient à 
ce dernier de distraire de son capital engagé toute 
la portion qu'il considère comme inerte, comme dor- 
mante, en ce sens qu'elle ne produit pas un revenu 
équivalant à l'intérêt qu’elle comporte. : 


1. Jose affirmer qu'il n'est pas un champ en France qui 
vaille ce qu’il a coûté, qui puisse s’échanger contre autant de 
travail qu’il en a exigé pour être mis à l’état de productivité où il 
se trouve. 
(BASTIAT, Harmonies économiques.) 


96 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Ces considérations générales prouvent que la 
valeur effective, réalisable, d’un fonds boisé peut : 
dépasser la somme qu’on obtiendrait, en capitalisant 
le revenu net de ce fonds boisé au taux des place- 
ments; elles prouvent que le rapport entre ce 
revenu et cette valeur peut être moins grand que 
celui admis entre les profits et les capitaux de l’es- 
pèce. Il existe, par conséquent, des fonds boisés dont 
il est permis de dire qu'ils ne rapportent que 2, que 
A pour 400. En existe-t-il qui rapportent plus de 
3 pour 400, en supposant que 3 pour 400 soit le 
taux ordinaire des placements en fonds boisés ? — 
Non, car si en s'appuyant sur le bénéfice qu'il y 
aurait à soustraire une partie d’un fonds boisé à sa 
destination naturelle, on parvient, dans certaines 
circonstances, à faire accepter ce fonds boisé pour 
une valeur plus grande que celle qui résulterait de 
la capitalisation de son revenu net, on rirait évidem- 
ment au nez de l'acquéreur qui se-fonderait sur l'in- 
convénient pécuniaire qu’entrainerait ce changement 
de destination, pour payer un fonds boisé au-dessous 
_ desa valeur capitale. 

En résumé, la valeur commerciale d’un fonds 
boisé peut se régler d’après un taux inférieur au taux 
de placement des capitaux de cette nature; elle ne 
peut pas se régler à un taux supérieur; et ce que je 
veux, en exposant la théorie de l’exploitabilité relative 
à la rente la plus élevée, c’est indiquer les moyens 
de faire fonctionner la propriété forestière, d’après le 
taux de placement qu'on accorde aux capitaux qui 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 97 


présentent les mêmes conditions de solidité et les 
mêmes avantages qu'elle. 

Entrons maintenant en matière : 

J'examinerai successivement l’exploitabilité .rela- 
tive à la rente la plus élevée, dans son application 
à un arbre isolé, à un massif non aménagé, et à un 
massif aménagé. 


un 
19 
. 


De l'exploïtabilité relative à la rente la plus élevée, 
dans son application à un arbre isolé. 


… Il y a deux suppositions à faire, savoir : 4° celle 
où cet arbre occuperait un terrain vague, inculte, 
qui lui offrirait gratuitement l’espace que réclame- 
rait son développement; 2° -celle où il serait, au 
contraire, situé dans un champ sur lequel il ne pour- 
rait pas s’étaler, sans diminuer proportionnellement 
l'étendue des cultures environnantes. 

Première hypothèse. — L'arbre a atteint l’âge où 
il commence à avoir une valeur échangeable ; — il a 
quinze ans ;. doit-on le couper ou le laisser sur pied? 
— Dès que l’on pose cetle question, l’on admet, — 
chose essentielle, — que les conditions d’aisance du 
propriétaire lui permettent d'épargner au moins une 
partie de son revenu annuel, et que, s’il exploitait son 
bois aujourd’hui, ce ne serait pas pour en dépenser le 
prix. Ce qu'il cherche donc, c’est le placement le 
plus, avantageux, et il le cherchera jusqu’à ce que 

7 


93 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


les exigences de la vie l'empêchent de continuer ou 
le forcent de diminuer ses épargnes. | 

Si son arbre reste sur pied pendant encore un an, 
par exemple, il acquerra une plus-value. Cette plus- 
value sera-t-elle au moins équivalente au profit que 
lai procurerait une exploitation immédiate ? — C’est 
là ce qu’il veut savoir; il y parviendra en compa- 
rant la valeur nette que. son arbre serait susceptible 
d'acquérir dans un an à la somme représentant : 
4° la valeur nette actuelle ; 2° l’intérêt de cette va- 
leur pendant un an ; 8° la valeur, à un an, du jeune 
plant qui remplacerait l'arbre existant. 

Si le premier terme de la comparaison était plus 
petit que le second, il faudrait en conclure que tout 
délai dans l’exploitation serait PIRE au pro- 
priétaire. 

-Si les deux termes étaient égaux! le propriétaire 
ne trouverait aucun bénéfice à maintenir son arbre 
sur pied, mais il n’y perdrait pas. | 

Enfin, si le second terme était plus grand que le 
premier, l'avantage du retard dans l’abatage de 
l'arbre serait évident. 

Deuxième hypothèse. — Pour un arbre situé dans 
un champ cultivé, le raisonnement qui sert à la dé- 
termination de l’exploitabilité ne diffère du précé- 
dent que parce qu'ici la situation se complique d’une 
circonstance nouvelle : le préjudice causé aux cul- 
tures arables, préjudice qui s'agrandit chaque année. 
et qui peut se calculer d’après le loyer ou le fer= 
mage, le profit net enfin, du fonds dé terre que le 


DE L’EXPLOITABILITÉ. ee 


développement des branches ou des racines de l’arbre 
enlève. successivement à la culture. Ce profit net 
doit donc être compris dans les déductions à faire su- 
bir au prix de l'arbre afin d'en avoir la valeur nette; 
et par conséquent, pour qu'il ne soit pas désavan- 
lageux de retarder l'exploitation, il faut que la plus- 
value résultant de ce retard soit équivalente, au 
moins, à l'intérêt de la valeur nette actuelle, aug- 
menté de la valeur d’un jeune plant d’un an et de la 
somme exprimant le surcroît de préjudice causé aux 
cultures. 

On obtiendraït plus rapidement la solution du 
problème en assimilant les valeurs nettes d’un arbre 
isolé, aux époques successives de sa croissance, à 
des rentes périodiques dont on chercherait. ensuite, 
par les formules connues, les capitaux. Au capital 
le plus grand correspondrait l'exploitabilité la plus 
avantageuse. | | 197 


par , 


De l'exploitabilité relative à la rente la plus élevée, 
dans son application à un massif non aménagé. 


Le massif peut être soumis à une longue ou à 
une courte révolution ; être destiné à subir des éclair- 
cies, avant d'arriver au dernier terme de sa crois- 
sance ; ou, si la révolution est très-courte, être 
affranchi de ces exploitations intermédiaires. 

Ce dernier cas étant le plus simple, c’est celui 


100 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


dont nous nous occuperons d’abord ; mais l’analogie 
est complète entre un massif que l’on n’éclaircit 
pas et un arbre isolé, et l’on devine, par suite, que 
les éléments à apprécier pour fixer l’âge de leur 
exploitabilité respective, doivent être absolument les 
mêmes. L'exploitabilité du massif sera donc indi- 
quée, comme celle de l'arbre isolé, par l’âge au 
delà duquel la plus-value résultant du maintien du 
bois sur pied ne serait plus égale à l'intérêt de la 
valeur mette actuelle, augmenté de la valeur de la 
première feuille ou des feuilles * qui se seraient 
accumulées, depuis l'exploitation, dans le repeuple- 
ment. 

Si la révolution dépasse un certain âge, il con- 
viendra d'effectuer des éclaircies périodiques dans le 
peuplement, et j'ai dit que les produits matériels 
de ces opérations avaient pour effet de rapprocher le 
terme de l’exploitabilité absolue, c’est-à-dire du plus 
grand accroissement moyen. Ils auront donc aussi sur 
l’époque de l’exploitabilité commerciale une influence, 
influence qu’on appréciera en ajoutant à la valeur 
nette présumée de la coupe principale le prix sur 
pied de chacune des éclaircies précédemment effec- 
tuées, augmenté de ses intérêts pendant le temps qui 
se sera écoulé depuis le moment où il aura été réa- 
. lisé jusqu’à celui où l’on cherche s’il serait utile de 
procéder à la coupe principale. 

Qu'on se soit, par exemple, posé la question de 


4. On appelle feuille le recru, la pousse d’une année. 


_ DE L'EXPLOITABILITÉ. 101 


savoir s'il serait avantageux. de retarder d’une 
année la coupe d’un taillis de 30 ans qui aurait 
subi une éclaircie 10 ans auparavant : on ajoutera à 
la valeur nette S de ce taillis de 30 ans la somme 
représentative du prix sur pied de l’éclaircie à 20 ans, 
augmenté de ses intérêts pendant 40 ans; puis, on 
se demandera si la plus-value que le taillis serait 
susceptible d'acquérir, en restant un an de plus sur 
pied, équivaudrait au moins à l'intérêt de la valeur S, 
augmenté de la valeur de la première feuille. 

I n’y a d’embarrassant dans les calculs concer- 
nant l’exploitabilité relative à la rente la plus élevée, 
quand on est fixé d’ailleurs sur le taux du place- 
ment, que la valeur du jeune plant ou du jeune 
repeuplement destiné à remplacer l’arbre ou le mas- 
sif dont l’exploitabilité est mise en question : mais 
en y réfléchissant avec soin, on comprendra qu'elle 
ne peut être exprimée exactement que par la somme 
qui, s’ajoutant à elle-même, d'année en année, et 
croissant à intérêts, serait susceptible de reproduire 
la valeur nette de cet arbre ou de ce massif, à l’expi- 
ration d’une période égale à son âge actuel. 

Varenne de Fenille estime que la perte résultant 
de la non-reproduction est égale au quotient de la 
valeur du peuplement exploitable par le nombre 
d’années de son âge. Cette manière de voir ne serait 
logique que si l’on faisait abstraction de l’intérêt des 
capitaux ; or, c’est précisément cet intérêt qui est le 
point d'appui de l’exploitabilité relative à la rente la 
plus élevée ; c'est sur cet intérêt que repose la valeur 


102 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


capitale à laquelle on compare le revenu ; il ne sau- 
rait être passé sous silence. 

Qu'est-ce que la reproduction de la première 
année? C’est la première feuille, c’est le premier 
revenu annuel du fonds de bois. Que l’on assimile ce 
fonds de bois à une somme d'argent placée ou à un 
fonds de terre, une accumulation déterminée de ses 
revenus se constituera de la même manière qu’une 
égale accumulation des intérêts de la somme d'argent 
ou des rentes du fonds de terre. Choisissons celles-ci 
pour exemple : si le propriétaire les fait fructifier 
pendant 14 ans, quelle somme obtiendra-t-il par ces 
épargnes successives ? — Pour le savoir, il faut 
ajouter à la rente de la 1'° année augmentée de ses 
intérêts pendant 14 ans, celle de la 2° année aug- 
mentée de ses intérêts pendant 13 ans, celle de la 
8° année augmentée de ses intérêts pendant 12 ans, 
ainsi que les 12 autres rentes bonifiées de leurs 
intérêts pendant le nombre d’années compris entre 
leur échéance et le terme de leur placement. 

Ce qu’on fait pour le fonds de terre, on doit le 
faire. pour le fonds de bois. La perte résultant de la 
non-reproduction, perte égale à la valeur de la 
première feuille, ne peut donc rigoureusement être 
représentée que par l’annuité qui, s’ajoutant succes- 
sivement à elle-même et croissant à intérêts, repro- 
duirait, dans le laps de temps indiqué par l’âge du 
peuplement exploitable, la valeur nette de ce peuple- 
ment. 

Quant à cette valeur nette, elle s’établira en 


DE L’EXPLOITABILITÉ. 103 


retranchant du prix de l'arbre sur pied : 4° les frais 


accumulés des impôts de toute nature; 2° les frais 
accumulés de garde, d'entretien et d'assurance, s’il 
y à lieu;-3° les frais de repeuplement dans le cas où 
ils ne seraient pas mis en charge sur la vente. Il n'y 
a pas à se préoccuper du capital plus ou moins grand 
que le propriétaire aurait engagé dans l'acquisition 
du terrain; car il ne s’agit pas ici de rechercher si 
un propriétaire à fait une spéculation bonne ou mau- 
vaise en boisant une partie de sa propriété; il s’agit 
seulement de lui indiquer les moyens de tirer le plus 
grand profit des bois qu’il possède, en lui montrant 
à quel âge il doit les exploiter pour que leur rende- 


ment soit, par rapport à leur valeur commerciale, 


élevé au maximum. Je dirai, en passant, que si l’on 
comprenait dans le calcul les intérêts du capital 
engagé, on aurait pour la-valeur nette à l’époque 
d’exploitabilité une expression souvent nulle et quel- 
quefois négative, et cela s'explique, puisque cette 
valeur représente précisément ces intérêts. 

Les déductions que j'ai énumérées sont celles 
qui constituent les avances obligatoires faites par le 
propriétaire, les avances auxquelles l'acquéreur ne 
pourrait pas non plus se soustraire, et sans lesquelles 
la valeur commerciale de l'immeuble ne saurait être 
déterminée. 

Il va sans dire que ces déductions ne sont point 
applicables aux produits des éclaircies. 

Je me suis à dessein servi de ces termes prix sur 
pied pour exprimer le rendement des éclaircies, au 


104 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


lieu d'employer les mots valeur nette, afin qu’on évite 
de retrancher de ce prix les frais d'impôt et de 
garde, d'entretien et d’assurance, qui ne doivent 
être déduits que de la valeur brute des coupes prin- 
cipales, sous peine de donner lieu à un double 
emploi. 

Il va sans dire aussi que pour les arbres épars 
dans les champs cultivés, il n’y a pas à tenir compte 
de l'impôt foncier, puisqu'il est compris dans les 
déductions opérées afin de fixer le revenu net de la 
portion, de plus en plus grande, du terrain que le 
développement de ces arbres enlève successivement 
à la culture. 

On s'attend peut-être maintenant à ce que je 
fasse connaître mon avis sur le taux de placement 
que l’on doit adopter dans les calculs qu’entraine la 
fixation de l’exploitabilité commerciale. Le moment 
pour cela n’est point venu, et je prie mes lecteurs 
de suspendre leur impatience, s’ils sont assez bons 
pour en avoir. Nous sommes aujourd’hui en pleine 
théorie; n’y mêlons pas des questions de fait varia- 
bles et indépendantes des principes. Le taux des 
placements est plus élevé en France qu'en Angleterre; 
il l’est moins en France qu’en Russie. La théorie que 

je développe s’applique à tous les pays. Je me bor- 
__ nerai à faire observer dès à présent, parce que c’est 
encore là un principe, que le taux de placement 
adopté pour les valeurs qu'on engage dans la pro- 
duction forestière, doit l’être également pour celles 
qu'on en dégage afin de leur donner une autre des- 


PRÈS RUE FN TO RER 
eg Ds 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 4105 


tination. Avances faites, produits réalisés, le taux de 
placement appliqué à l'accumulation de toutes ces 
valeurs ne peut être modifié, si l'on ne ‘veut pas 
s'écarter du but qu’on se propose d'atteindre. Le 
taux des placements en bois étant de 3 pour 100, si 
on allait choisir un Laux plus élevé pour l'accumula- 
tion d'intérêts à laquelle on aurait à comparer la 
plus-value des bois laissés sur pied, on sortirait des 
conditions du problème; l’exploitabilité relative à la 
rente la plus élevée serait livrée à toutes les chances 
aléatoires de la spéculation et deviendrait indéter- 
minable. 


$ 4. 


De l’exploitabilité relative à la rente la plus élevée, 
dans son application à un massif aménagé. 


J'ai déjà prouvé que les calculs de l’exploitabilité 
correspondante au plus grand accroissement moyen, 
soit en matière soit en argent, sont aussi bien appli- 
cables aux forêts aménagées qu’à celles qui ne le 
sont pas; de sorte que l’exploitabilité absolue, dans ce 
dernier cas, ayant été fixée, par exemple, à 120 ans, 
on devrait en conclure qu’une forêt aménagée, qui 
serait d’ailleurs placée dans des conditions semblables 
de végétation, fournirait chaque année le produit le 
plus avantageux, si elle était partagée en 120 coupes 
de 4 à 120 ans. Ce principe est indépendant de la 
nature de l'exploitabilité que l’on envisage, et je 
pourrais en conséquence me dispenser de rien ajouter 


106 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


à ce que j'ai dit sur la manière de procéder pour 
déterminer l’époque de l’exploitabilité relative à la 
rente la plus élevée; mais les forêts aménagées se 
présentent avec des caractères spéciaux qui per- 
mettent, lorsqu'il s’agit d'en obtenir le rapport le 
plus élevé entre le revenu net et le capital, de 
recourir à des moyens moins compliqués que ceux 
dont on se sert pour les bois non aménagés : 

Soit une forêt de 100 hectares, peuplée d’une 
essence susceptible de rester sur pied, sans dépérir, 
jusqu’à 100 ans; on demande à quelle révolution il 
est nécessaire de l’assujettir, c’est-à-dire en combien 
de coupes il faut la pariager: pour en retirer la plus 
grande rente ? 

Si les bois n'avaient une valeur commerciale qu’à 
partir de l’âge de 15, cette forêt pourrait être sou- 
mise à 86 révolutions différentes. Choisissons parmi 
ces révolutions celles de 100 ans, de 75 ans, de 
50 ans et de 15 ans, et cherchons quelle serait la 
plus avantageuse. | 

Avec la révolution de 100 ans, le revenu annuel 
se composera du produit de la coupe âgée de 100 ans 
et de celui des éclaircies et nettoiements dans les 
99 autres coupes. 

_ Avec la révolution de 75 ans, le revenu annuel 
se composera du produit de la coupe âgée de 75 ans 
et de celui des éclaircies et nettoiements dans les 
74 autres coupes, 

Avec la révolution de 50 ans, le revenu annuel 
se composera du produit de la coupe âgée de 50 ans 


PRIRENT RME MASSE 
à Et D 


DE L'EXPLOITABILITE. 107 


et de celui des éclaircies dans les 49 autres coupes. 
Avec la révolution de 45 ans, le revenu annuel 
se composera du produit de la coupe âgée de 45 ans 


et de celui des éclaircies et nettoiements dans les 


Ah autres coupes. 

Ces produits mis de côté, il restera dans chacun 
des aménagements prévus un matériel sur pied plus 
ou moins considérable suivant l’âge de la révolution, 
mais indispensable pour assurer la continuité du reve- 
nu annuel, la succession non interrompue des coupes. 
Chaque aménagement comporte un certain rapport 
entre le revenu net annuel et la valeur dudit matériel 
sur pied. C’est ce rapport qu'il faut établir d'abord, 
et, cela fait, l’époque de l’exploitabilité la plus 
avantageuse se manifestera d’une manière évi- 
dente. 

Un premier point à noter, c'est que, dans l’amé- 
nagement à 45 ans, la valeur réalisable du matériel 
sur pied, nécessaire pour assurer la perpétuité de la 
production, est nulle, puisque ce matériel comprend 
les 44 coupes de 4 à 414 ans, inclusivement, dont le 


peuplement n’a aucun prix vénal. La coupe à exploi- 


ter, la coupe âgée de 15 ans, a seule de la valeur, 


_ les éclaircies n’en ont pas. Avec cet aménagement, 


le rapport entre le revenu net et la valeur du matériel 
sur pied, permanent, est aussi grand que possible, 


puisqu'il est infini ; l’âge de 45 ans est donc une limite 


inférieure au-dessous de laquelle on ne saurait des- 


cendre dans la fixation de la révolution, sous peine 


de renoncer à tout profit. La valeur commerciale de 


108 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


la forêt aménagée à 15 ans repose exclusivement sur 
le revenu; elle est égale à-la capitalisation de ce 
revenu au taux des placements ; le revenu dispa- 
raîtrait, si l’on diminuait la révolution d’une quantité 
quelconque, et avec lui s’anéantirait la valeur capi- 
tale. 

Une seconde remarque à faire, c'est que si, à 
partir de la révolution de 15 ans, on suit la marche 
progressive, d’un côté, du capital obtenu en multi- 
pliant le revenu net par le denier des placements, et, 
d'un autre côté, de la valeur du matériel sur pied 
que j'appellerai le capital superficiel ou réel, celui-ci, 
qui est nul dans l’aménagement à 15 ans, s’augmente 
ensuite dans une proportion plus grande que l’autre, 
de sorte que, après lui être resté inférieur pendant 
quelque temps, il devient son égal et le dépasse enfin 
de plus en plus. Cela se conçoit : le premier capital, 
que je distinguerai désormais par le mot nominal, 
est dans un rapport constant avec le revenu; or, le 
revenu ne s'accroît point, au fur et à mesure qu'on 
élève l’âge de la révolution, dans une aussi grande 
proportion que le capital superficiel, que le capital 
réel. | 

Nous ne nous éloignerons pas beaucoup de la 
possibilité des choses en supposant que, pour l’amé- 
nagement à 100 ans, le rapport du revenu au capital 
superficiel, au capital réel, sera de 1 1/2 pour 400; 
pour celui à 75 ans, de 2 pour 400; pour celui 
à 50, de 3 pour 100... ; mais alors, et si l’on admet 
que à pour 100 soit le taux des placements en biens- 


EE des ed ne 
L 


DE L’'EXPLOITABILITÉ. _ 4109 


fonds boisés, il est clair que l’âge de 50 ans est une 
limite supérieure que l’on ne pourrait dépasser dans 
le choix de la révolution, sans se condamner à une 
perte d’autant plus forte que la révolution serait plus 
longue. 

45 et 50 ans, voilà donc les âges entre les- 
quels doit se renfermer la révolution pour satisfaire 
au but que- l’on poursuit ! Si l’on veut maintenant 
préciser le terme intermédiaire auquel il convient de 
la fixer, on poussera à leur dernière conséquence les 
considérations sur lesquelles on s’est appuyé pour 
réduire la révolution de 400 à 75 ans d’abord; puis 
de 75 à 50 ans. Ces réductions successives pouvaient 
avoir il est vrai pour résultat de diminuer le revenu 
net de la forêt; mais elles étaient justifiées surabon- 
damment par l'intérêt seul de la portion de la super- 
ficie dont elles permettaient la réalisation. On se disait : 
Puisque l'intérêt de cette portion, réalisée et placée 
dans les conditions désirables de solidité, sera plus 
grand que le revenu qu’elle me fournit sous la forme 
où elle est, il n’y a pas à hésiter, changeons cette 
forme. C'était là un raisonnement très-rationnel, 
d’une justesse incontestable, et qui peut se traduire 
ainsi : Il y a avantage à diminuer la révolution, lors- 
que l’amoindrissement du capital superficiel, réel, qui 
enestle résultat, doit êtreaccompagné d’un amoindris- 
sement proportionnellement moins fort du revenu net, 
ou, ce qui revient au même, du capital nominal, du 
capital obtenu par la capitalisation de ce revenu au. 
taux des placements. Il ne pouvait y avoir doute 


110 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


à ce sujet pour les révolutions supérieures à celle 
de 50 ans. Pour celles qui lui seraient inférieures, 
l'évidence n’existe plus au même degré; mais il sera 
facile de la dégager si nous supposons qu’on soit fixé 
sur le capital superficiel, le capital réel, et le revenu 
net correspondant que comporte l'aménagement à 
un âge quelconque. En effet, pour reconnaître s’il y a 
ou non opportunité à adopter une révolution plus 
petite que celle de 50 ans, il suffira d’ajouter à l’in- 
térêt de la somme que l’on réaliserait en raccourcis- 
sant la révolution, le revenu net que la forêt fourni- 
rait encore après ce racc ourcissement, et de comparer 
‘le total au revenu net actuel dé la forêt. 

Si l’âge de 50 ans était, par impossible, supé- 
rieur à celui correspondant au plus grand revenu 
forestier moyen, la diminution de la révolution, tout 
eu amoindrissant le capital superficiel, aurait pour 
effet d'augmenter le revenu forestier ; et, dans ce cas, 
cette diminution serait très-avantageuse, puisque à 
l'accroissement du revenu forestier s’ajoutérait l’inté- 
rêt du prix de la portion du capital supérficiel, du 
capital réel, que l’on aurait réalisée. 

Sile même âge de 50 ans était inférieur à celui 
correspondant au plus grand revenu forestier moyen, 
la diminution de l’âge de la révolution entraînerait 
celle du revenu forestier ; mais il se pourrait que la 
différence, entre le revenu qu’on aurait retiré jus- 
qu’alors et celui qu’on retirerait désormais, fût plus 
que couverte par l'intérêt de la portion réalisée du 
capital superficiel; l'avantage d’une révolution plus 


DE ir 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 14 


courte, pour être moins grand que dans le step 
cas, n’en serait pas moins certain. 

Enfin, si cette différence précitée n'était pas com- 
pensée par l'intérêt de la portion réalisée du capital 
superficiel, ce serait une preuve que l’on ne pourrait 
pas baisser, sans préjudice, l’âge de l'aménagement. 

En résumé, il y a, dans le raccourcissement de la 
révolution et dans l'amoindrissement du capital super- 
ficiel, du capital réel qui en résulte, un point auquel 
on doit s'arrêter, quand on recherche l'exploitabilité 
relative à la rente la plus élevée, et ce point est indi- 
qué par le moment où tout amoindrissement nouveau 
entratnerait une diminution proportionnellement. plus 
forte du revenu net, et par conséquent du capital no- 
minal. 

L’exploitabilité relative au rapport le plus grand 
entre le revenu et le capital, est soumise à certaines 
lois dont plusieurs méritent d’être partunhment 


D EE 
r 
$ LS 
Lois auxquelles est soumise l’exploitabilité relative à la rente 
x la plus élevée. 


1° L'exploitabilité relative à la rente la plus 
élevée se réalise presque toujours avant celle qui cor- 
respond au plus grand accroissement moyen; elle est 
plus rapprochée pour les arbres épars dans les champs 
cultivés, que pour ceux qui sont situés dans les terres 


L 4 


112 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


inculles, el moins rapprochée pour les massifs qui ne 
sont pas assujettis à des éclaircies périodiques, que 
pour ceux qui le sont. 

2° Elle se fait d'autant moins attendre que les 
essences sont de moins bonne qualité, et moins suscep- 
tibles d'acquérir de l'utilité et de la valeur en vieillissant. 

3° Enfin, et c’est le point le plus remarquable, 
elle est d'autant plus près de coincider avec celle du 
plus grand revenu moyen, que l'intérét de l'argent est 
moindre; de sorte que cet intérét étant nul, les deux 
exæploitabilités se présenteraient à la méme époque. 

Consacrons quelques instants au développement 
de ces propositions ; car nous aurons à en tirer des 
conséquences pratiques intéressantes. 

1° L’exploitabilité relative à la rente la plus 
élevée se réalise presque toujours avant celle qui 
correspond au plus grand accroissement moyen. 

Cela provient de ce que la plus-value d’un bois, 
résultant de l'augmentation annuelle de la matière 
ligneuse, dans un temps donné, est ordinairement 
moindre que la somme que procureraient, dans le 
même temps, les intérêts d’un capital équivalent à la 
valeur nette de ce bois. C’est dans la phase descen- 
dante des accroissements annuels que se rencontre 
- l'époque du plus grand accroissement moyen; or, 
quand on assimile un bois à une somme d'argent 
placée, et qu’on veut en obtenir le plus grand profit, 
on ne peut, sauf de très-rares exceptions, sous peine 
de manquer son but, prolonger la révolution au delà 
du terme qui marque l'apogée de la végétation. En 


4 
J 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 113 


effet, lorsque les bois ont dépassé cet apogée, le prix 
du-mètre cube ne s'élève plus; la valeur de leur 
accroissement annuel diminue donc constamment, à 
partir de cette époque, avec l'accroissement lui-même, 
et ne saurait suppléer à l'intérêt toujours croissant du 
produit-enargentqu'onaurait réalisé par l'exploitation. 
- On se convaincra également, sans peine, que l’ex- 
ploitabilité relative à la rente la plus élevée, est plus 
rapprochée pour les arbres épars dans les champs cul- 
tivés, que pour ceux qui sont situés dans des terrains 
vagues, si onse rappelle que pour qu'il y ait avan- 
tage: à retarder la coupe dans ce dernier cas, il suffit 
que la plus-value présumée de l'accroissement soit 
plus.grande que l'intérêt de la valeur de l'arbre, pen- 
dant un. an, augmenté du prix de la feuille ; tandis 
que dans le premier cas, à ces éléments il faut en 
ajouter un autre qui augmente chaque année, et qui 
consiste dans le préjudice causé à la culture arable 
par.-le développement, soit des branches, soit des 
racines de l'arbre. L’accroissement de cet arbre étant 
supposé le même dans les deux cas, il est-évident 
qu'il atteindra plus tôt dans le premier que dans le 
second, la limite au delà de quelle il cesserait d’être 
fémunérateur. 
- C’est sans doute à cette raison que tient la défa- 
veur dont les plantations, dans les champs cultivés, 
sont l’objet de la part de nos agronomes les plus 
renommés, MM. Dombasle, Gasparin, etc. :. 


4. On applique souvent aux forêts jardinées dont ou veut régler 
8 
’ 


114 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Enfin, l’eæploitabihté relative à la rente la plus 
élevée, est plus tardive pour les massifs éclaircis pério- 
diquement, que pour ceux qui ne le sont pas. Cela 
s'explique par les produits intermédiaires que four- 
nissent les premiers; produits qui, en augmentant 
tout à la fois le revenu net et le capital obtenu par la 
capitalisation de ce revenu au taux des placements, 
tendent à reculer l’époque où ce capital devient 
moindre que le capital superficiel. 

2 L'exploiabitité relative à la rente la pie élevée 
est d'autant plus rapprochée, que les essences sont de 
moins bonne qualité et moins susceptibles d'acquérir 
de l’utilité et de la valeur en vieillissant. 

Ainsi, pour des bois blancs qui ne seraient 
propres qu'au chauffage , l'époque de la coupe 
devrait être plus avancée que pour des bois durs qui, 
propres au chauffage seulement, dans les pre- 
mières années de leur existence, ne tardent pas: à 
acquérir des qualités précieuses qu’on recherche 
pour une foule d'ouvrages, et qu’on paye en consé- 
quence. 

Si l’on veut saisir la vérité de cette proposition, 


l’exploitabilité, le procédé des expériences individuelles, c'est-à- 
dire qu’on fait entrer les arbres dont elles se composent dans la 
catégorie des arbres isolés. Ce procédé n’est pas, à beaucoup près, 
aussi exact que celui qui consisterait à évaluer le revenu moyen 
annuel et à le comparer au capital superficiel. Dans tous les cas, 
si on y a recours, il ne faut pas oublier de tenir compte du dom- 
mage causé aux sujets environnants par l'arbre d'expérience; ce 
faisant, on reconnaîtra, comme la culture l'enseigne d’ailleurs, 
que la méthode jardinatoire est de toutes la moins productive, 


ie ne emo 


FR D 1 


=. 


DE L'EXPLOITABILITÉ. u5 


il est encore nécessaire de se rappeler qu'il est 
avantageux seulement de retarder l'exploitation, 
quand l’on est autorisé à espérer que l'intérêt du 
produit réalisable, joint à la valeur de la première 


feuille, trouvera une compensation ‘suffisante dans la 


plus-value résultant de l’accroissement. 

Négligeons, pour simplifier la question, la valeur 
de la première feuille, qui ne saurait exercer une 
influence importante sur la solution du problème, et 
dont labsence est même de nature à corroborer 
notre démonstration. Ne mettons dans la balance que 


l'intérêt du produit réalisable, d’une part, et; de 


l’autre, la plus-value résultant de l'accroissement. 
Supposons enfin que le prix du bois reste s rs 
quel que soit l’âge. 

-N'est-il pas vrai qu'en suivant un arbre ou un 
massif dans ses développements annuels successifs, 
on observe que le sacrifice de l'intérêt auquel on se 
soumet, en retardant l'exploitation, est proportionnel 
à la somme des accroissements antérieurs ; tandis 
que la plus-value résultant de l'accroissement, au 
contraire, n'est jamais fonction que d’une année? 


” Progressive d’abord, elle devient ensuite station- 


naire, puis de plus en plus petite. En présence d’un 
préjudice, d’une perte, qui s’augmente en quelque 
sorte dans une progression géométrique, se trouve 
donc un avantage variable dans'des limites nécessai- 
rement étroites. Admettons, au reste, un instant, 
que l'accroissement annuel soit constant et repré- 
senté par 4, hypothèse d’autant plus acceptable que 


116 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


l'erreur qu’elle renferme affecte également les deux 
termes de notre comparaison. L'arbre ou le massif 
qui vaudra À à À an, 2 à 2 ans, vaudra 400 à 
100 ans; la plus-value annuelle sera toujours égale 
à l'unité, tandis que l'intérêt du produit réalisable, 
sera pour le massif de 400 ans, cent fois plus fort 
que pour celui de 4 an. 

Mais si nous supposons actuellement que le: prix 
du mètre cube grandit avec l’âge, il est incontestable 
que l’écart éntre les deux facteurs de la comparaison 
en sera atténué. Pour que cet écart disparût complé- 
tement, il faudrait que le prix du mètre cube grandit 
dans une progression semblable à celle que suivrait 
l'intérêt des valeurs successivement accumulées, ‘ou, 
en d’autres termes, que le prix du mètre cube à 
100 ans fût cent fois plus élevé que celui du mètre 
cube à 4 an. 

En fait, la progression que suit le prix dé bois 
selon leur âge et leurs dimensions, est fort éloi- 
gnée de celle qui aboutirait au résultat jee procure 
l'accumulation des intérêts. | 

Ce que je viens de dire peut encore, et en deux 
mots, se démontrer de la manière suivante : s 

Au lieu de considérer l'accroissement annuel, 
abstraction faite des accroissements précédents repré- 
sentés par le bois sur pied, considérons-le dans son 
rapport avec ces accroissements. 


Soit V le volume de l'arbre, a son accroissement-annuel, 
nson âge. Pour connaître le rapport à tant pour 100, on posera 


| croissante : à 100 ans l'intérêt de V serait per : 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 117 


SpA j 
y > Mais a (nous supposons l'ac- 
100 M5 100 
Vn in. 
de sorte que lorsque n sera > 100, le rapport sera < 1; or, 
le prix du bois ne changeant pas avec l’âge, l'intérêt qu’on 
obtiendrait de la réalisation du prix de l'arbre suivrait une 
progression semblable, mais en sens inverse, c’est-à-dire 


\g a: 100 Lit= 


V 
croissement annuel constant) =-; 7; onadonc Tr 


1 


Donc, l'équilibre entre la plus-value de l'arbre 
laissé sur pied et les intérêts qu'on retirerait de sa 
valeur, ne pourrait être établi, que si l'augmentation 
du prix de cet arbre était suffisante, pour racheter la 
diminution du rapport de l'accroissement annuel à la 
somme des accroissements antérieurs : 

L'échelle des prix, telle qu’elle est aujourd’ hui 
fixée par les transactions commerciales, ne saurait 
réaliser la compensation désirable ; mais comme elle 
exerce néanmoins une très-grande influence sur la 
fixation de l’exploitabilité commerciale, on commet- 
trait de graves erreurs, si on ne la consultait pas 


“ avec soin. La plus-value résultant des qualités plus 


précieuses qu’acquiert le bois en vieillissant, n’est pas 
uniforme dans sa progression ; elle éprouve dés temps 
d'arrêt plus ou moins prolongés suivant les essences 
et les convenances industrielles ou commerciales ; 
puis, elle augmente brusquement. C’est une circon- 
stance à laquelle il importe de faire beaucoup d'at- 
tention, Si les calculs relatifs à la recherche de l’âge 


118 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


d’exploitabilité s’appliquaient par exemple à un de 
ces temps d’arrêt, ils pourraient conduire souvent à 
bâter l'exploitation; tandis qu'en prenant en considé- 
ration l’époque plus ou moins prochaine où le bois 
serait devenu propre à une destination supérieure, 
on aurait peut-être trouvé dans les avantages de 
cette destination, une compensation plus que suff- 
sante pour la perte résultant du retard de l’exploi- 
tation. 

Citons un exemple : Les sapins qui ont moins de 
0*",16 de diamètre au gros bout, ne sont guère 
propres qu'au chauffage, et s'ils ne devaient pas, 
en grossissant, acquérir, toutes proportions gardées, 
un plus grand prix, il est présumable qu’on ne les 
laisserait pas dépasser cette dimension; mais au- 
dessus de 0,16 et jusqu'à 0",22 de diamètre, ils 
prennent la qualité de chevrons, trouvent ainsi leur 
emploi dans les constructions, et empruntent à cette 
destination une valeur relativement plus élevée; plus 
"tard, quand ils dépassent 0",22, ils deviennent 
propres à faire des pannes simples, c’est-à-dire, des 
pièces plus recherchées, plus utiles que les premières 
et par conséquent, à volume égal, plus chères; ils ” 
demeurent dans cétté catégorie jusqu’à ce que leur 
diamètre atteigne 0",32. De 0",32 jasqu'à 0",36, 
ils sont comptés comme pannes doubles, c’est-à-dire, 
comme bois de grosse charpente, maïs ils n'ont pas 
encore atteint l'apogée de leur prix. Au-dessus de 
0",36, ils servent au sciage, et c'est alors seulement 
que leur maximum de valeur et d'utilité est obtenu. 


PER RRIE RETIRE 


fi 
DE L’EXPLOITABILITÉ. 119 


Or, pour les conduire jusque-là, il est nécessaire de 


lés laisser sur pied jusqu'à 80 ans environ. C'est ce 
que font les propriétaires des Vosges ; ils trouvent 


dans l'augmentation du prix du bois, suivant les 
dimensions, un dédommagement, sinon une compen- 
sation, à la diminution du rapport entre le revenu 
annuel et le capital engagé. i 

Je répéterai encore que tout ce que j'ai à dire 
sur l’exploitabilité forestière, est applicable aussi bien 
aux bois aménagés qu’à ceux qui ne le sont pas, et, 


lorsque je néglige de choisir mes preuves dans les: | 
deux catégories, c’est que la démonstration ne me 


paraît pas en avoir besoin. Mes observations rela- 
tives à l'échelle des prix me paraissent, cependant, 


tellement importantes, qu’au risque d'être accusé de 


rebattre toujours la même question et d'entrer dans 
des développements superflus; jen vérifierai ‘la j s jus- 
tesse dans une forêt aménagée 

Soit une forêt régulière exploitable dans une révo- 


ution ‘de 25 ans: la. coupe: de 25 ans formera le 


revenu; le peuplement des 2h autres coupes consti- 
tuéra le capital superficiel. Si nous supposons que le 


bois ne soit, jusqu’à 25 ans,.bon que pour le chauf- 
fage, mais qu'à 26 ans, il devienne propre à une. 


destination supérieure, qu’en devra-t-on conclure? 
— On en devra conclure que, selon toute probabilité, 
il-serait avantageux d'augmenter d’un an l’âge de la 
révolution et de partager la forêt en 26 coupes au 


heu de 25. Je dis, selon toute probabilité, car cette 
destination supérieure, qui ferait attribuer au bois 


»; 


+ 


120 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


un prix plus élevé, n’affecterait nullement le capital 
superficiel, lequel resterait toujours propre au chauf- 
fage seulement, et elle porterait tout entière sur le 
revenu net annuel; d'où il résulterait que le rap- 
port de ce revenu au capital superficiel serait aug- 
menté. 

3 L'exploitabilité relative à la rente la plis éle- 
vée, est d'autant plus près de coïincider avec l’époque 
.du plus grand revenu moyen, que l’intérét des place- 
ments en argent est moindre. | 

. C'est une proposition que les emilie précé: 
dentes ont rendue évidente ; cependant, si quelques- 
uns de mes lecteurs n'étaient pas de cet avis, je les 
prierais de me prêter un moment d'attention. 

On se souvient que l’exploitabilité qui procure 
le plus grand revenu moyen, est indiquée par l’année 
où l'accroissement annuel devient égal, en valeur, à 
l'accroissement moyen. On n’a pas ‘oublié non plus 
que, pour fixer l’âge qui correspond à l’exploitabi- 
lité commerciale, il faut rechercher l’année à l’expi-" 
ration de laquelle la plus-value, résultant de l’ac- 
croissement, serait équivalente à d’intérét : des 
accroissements antérieurs, augmenté.de la valeur de 
la première feuille, c’est-à-dire de la somme qui, 
s'ajoutant à elle-même d'année en année, et:crois- 
sant à intéréts, serait susceptible de reproduire, dans 
le même temps, la valeur nette de ces accroissements. 
Il y a là une équation dont le premier membre ne 


présente qu’un terme : la plus-value résultant de 


l'accroissement ; dont le second membre se compose 


SRE 
ÿ : RES 


ol DE L'EXPLOITABILITÉ. 121 


de deux termes : l'intérét des accroissements anté- 
rieurs et la première feuille. Si l'intérêt de l'argent 
était nul, le premier membre ne changerait pas; 
dans le second, le premier terme (intérêt des accrois- 
sements) disparaîtrait, et il ne resterait que la pre- 
mière feuille; mais, cette première feuille qui ne 
pourrait plus s’accroître à intérét, deviendrait tout 
simplement égale à la somme qui, s’ajoutant à elle- 
même, d'année en année, pendant la révolution, - 
représenterait à la fin de cette révolution la valeur 
nette du bois exploitable. ; RE" 
La révolution étant exprimée par n, et | la valeur | 
nette, 8 Rois exploitable par P, la feuille serait 


égale Ces , c’est-à-dire ‘au revenu moyen. L'exploi- 


tabilité FERA serait, en conséquence ; indi+ 
quée par l’âge où la plus-value résultant de l’accrois- 
sement, plus-value qui n est autre.chose que la 

… valeur de l'accroissement annuel, deviendrait égale * 

* au revenu moyen. .. , . 

On voit clairement, par Jà, que l'intérêt de l’ar- 
gent étant réduit à 0, l’exploitabilité commerciale se 
confond avec eelle qui correspond au plus grand 
revenu moyen absolu. 

La démonstration algébrique de ce théorème est 
d’ailleurs bien simple, et je vais la donner, quoique 
ces sortes de preuves soient loin de jouir aujourd’hui 
d’une grande faveur. 

Appelons : 


# 


129 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


n, l’âge du bois dont on se demande s’il est bon de retarder 
l'exploitation : 7 
_ a, la valeur de l'accroissement à # n + 1° année; 

À, la valeur des accroissements antérieurs ; 

+, la première feuille; 

r, l'intérêt de la somme qu’on réaliserait en exploitant 
actuellement. . af 


Pour qu’il ne soit pas avantageux de retarder 
l'exploitation, il faut que l’on ait : 


(jr=Aa+ 9. 


Cherchons la valeur de ®. 

Cette valeur est celle qui, s’ajoutant à elle-même 
d'année en année, et croissant à intérêts, reprodui- 
rait,. à l’expiration de ces n années, Ja valeur À : 
nous avons donc (avec les intérêts composés): 


R— | 2 $ 4 KE 14 n— 
tt =e(1+r) ; #4 se TA +.r) 
+ (1 + n (1 +r) 41] u 
* ; 7 » 7 sir # 
d'où 9 = a - 2 


LS 1 Aie À 
Mn +UFN HUF +4 
Rémpläçant ® par sa valeur dans l'équation (4), 


nous aVONS : 


EP dr sà 


En ++) CHU ENEL 


Sans pousser plus loin la réduction, on voit que si r=0, 
_ Ar disparaît, et le dénominateur du 2° terme du second 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 123 


membre de l'équation devient égal à n, c’est-à-dire à autant 
sn l'unité qu'il y a d'années dans l’âge du bois, 


ne de. pi 


= C'est, par conséquent, lorsque la valeur de l’ac- 
croissement annuel est égale au revenu moyen des 
années antérieures, que l’exploitabilité commerciale 
se réalise, l'intérêt étant nul; mais le revenu moyen 
est maximum, quand il est égal au revenu annuel: 
donc, etc., ete. 


ÿ - + calenis se faisaient aux. intérêts simples, on arri- 
FE au même résultat; car + deviendrait alors égal à 
À 
, HN 1) r HA HE) Es V+r+! 


{Et l'on a : 


À 


#0 Lim DE PR mr Tr 


‘équation qui se transforme encore, quand r = 0, en celle-ci : 


a=—. 4 


Les forêts aménagées offrent mieux que les autres, 
les moyens de vérifier l'influence de l’abaissement de 
l'intérêt sur la fixation du terme de l’'exploitabilité 
relative à la rente la plus élevée. La seule circon- 
stance qui soit de nature à engager les propriétaires 
à raccourcir la durée de la révolution, consiste, en 
effet; dans la possibilité de placer avantageusement, 


. à intérêt, la somme qu'ils réaliseraient en diminuant 


12 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


le capital superficiel; mais si cette possibilité leur 
était enlevée, ils ne se laisseraient évidemment guider 
dans la recherche de l’exploitabilité, que par le désir 
de retirer de leurs propriétés le revenu moyen absolu 
le plus considérable. J'ai montré, d’un autre côté, que 
c’est surtout à la supériorité que le capital superficiel, 
le capital réel, présente souvent sur le capital'obtenu 
en multipliant le revenu par le denier du placement, 
que l’on juge de l’opportunité et des avantages du 
raccourcissement de la révolution; or cette supério- 
rité ne se présenterait jamais si l’intérêt de l'argent 
était infiniment petit, puisque alors les valeurs capi- 
tales deviendraient infiniment grandes, 

La première partie de mon travail est terminée. 
Nous allons quitter le domaine de l'absolu, de la 
théorie pure, de l’abstraction, pour entrer dans celui 
de la vérité relative, de la pratique, de la possibilité 
des choses. On doit prévoir que, dans cette nouvelle 
voie, nous serons obligés de nous écarter plus ou 
moins de la ligne de conduite que nous aurions à 
suivre pour obéir rigoureusement aux principes qui 
ont été développés. L'essentiel est que nous ne les 
perdions jamais de vue : ces principes, je l'espère, 
n’en resteront pas moins recommandables. : Que 
dirait-on d’un voyageur qui, surpris par l’obscurité, 
s’aviserait de mépriser la lumière lointaine qui lui 
indique le.but à atteindre, parce que les accidents du 
terrain l’'empêcheraient de prendre, pour y arriver, 
la route la plus directe ? — On douterait de son bon 
sens. Semblables à ce voyageur seraient ceux quime 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 125 


reprocheraient le temps que j'ai consacré à la dé- 
monstration de certaines lois, dont les prescriptions 
ne pourraient être intégralement et rigoureusement 
appliquées. : 
4 Parmi les circonstances qui nous forceront de 
modifier dans l’application les règles que nous avons 
__ posées, les plus importantes, peut-être, sont celles qui 
résident dans les conditions d'existence de l'homme, 
et particulièrement dans la courte durée de cette 
existence. Il en résulte que l'application d’un prin- 
cipe, d’une loi, d’une règle de conduite, bonne pour 
un temps donné, ne l’est plus quand on le dépasse. 
__ Les:mœurs, la législation, la constitution de la pro- 
_ , priété, exercent à cet égard une grande influence : 
elles peuvent plus ou moins reculer l’époque au delà 
de laquelle les appréciations humaines cessent de 
présenter un caractère suffisant. de probabilité, et 
tombent dans le domaine des futurs contingents. 

Je me borne aujourd’hui à indiquer cette idée, à 
laquelle j'aurai souvent occasion de revenir. 


% 


. CHAPITRE DEUXIEME. 


DE L'EXPLOITABILITÉ DANS SES RAPPORTS 
AVEC LES EXIGENCES 
DE LA VÉGÉTATION ET DE LA CULTURE. F 


# 


Nous avons raisonné, jusqu'ici, sur l’exploitabi- 
lité, comme si rien ne s’opposait à ce qu'elle pût 
être fixée à l’une quelconque des années comprises 
dans la durée de la vie végétale. 

Cette hypothèse n'était pas vraie. . 

Il y à dans la nature, des choses, des exigences, 
qui sont indépendantes de la volonté de l’homme, et 
qui renferment le choix de l’âge d’exploitabilité dans 
des limites plus étroites. 

L'un des principaux buts que l’on poursuit en 
sylviculture est, personne ne l’ignore, la régénéra- 
tion naturelle. 

Toute méthode d'exploitation des forêts, disent 
les auteur du Cours de Culiure des Bois, doit satis- 
faire aux deux conditions fondamentales suivantes : 

1° Régler la quotité des Coupes annuelles de 
manière à procurer un rapport soutenu. 

2 Assurer, par ces coupes mêmes, la régénération 
naturelle. ‘ 

Or, les bois ne se régénèrent naturellement que 


| 
à 
à 
: 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 127 


par les semences ou par les souches * ; ils ne portent 
de semences fertiles qu'à un certain âge, qui varie 
selon les espèces, mais qui est au moins de cinquante 
à soixante ans; ils cessent de repousser par les 
souches à un âge également variable, mais qui ne 
dépasse guère quarante ans; enfin, il y en a qui se 
refusent absolument à ce dernier mode de reproduc- 
tion. 

De là on est amené à conclure, qu'avant de fixer 
l’âge d’exploitabilité d’un massif, la première chose à 
faire est de choisir le mode d'exploitation applicable 
à ce massif. 


ARTICLE PREMIER. 


CHOIX DU MODE D'EXPLOITATION. 


Ce choix ne saurait être douteux pour les essences 
qui sont privées de la propriété de repousser par la 
souche. Il est évident que le mode de la futaie est le 
seul qui leur soit applicable; mais les bois feuillus 
jouissent tous, à un degré plus ou moins grand, de 
la faculté de produire des rejets quand on les a 
çcoupés-par le pied; ils peuvent par conséquent: être 
exploités soit en taillis, soit en futaie; et suivant 
qu'ils seront exploités d’après l’un ou l’autre mode, 
leur exploitabilité devra être ou très-avancée ou très- 


_ reculée. 


4. Je ne tiendrai pas compte des drageons et des marcottes 
qui ne sont que des exceptions. 


128 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Les considérations d’après lesquelles on se guide, 
dans le choix du mode d’exploitation, sont comme 
toujours, en économie forestière, de deux sortes : 
culturales et économiques. : 

Je vais comparer, à ces deux élite à de vue, le 
taillis simple à la futaie, et je m° ovuuperai ensuite du 
taillis composé. j | 


N Acer, 
Du taillis simple et de la futaie au point de vue cultural. 


M. Parade a parfaitement démontré, dans son 
examen comparé des trois principales méthodes d’ex- 
ploitation, les inconvénients du taillis et les avantages 
de la futaie. Je ne veux pas refaire cet examen. Je 
me bornerai à mettre en relief les principales consé- 
quences qui en découlent, et à les accompagner de 
quelques réflexions. 

Ces conséquences se résument dans les quatre 
propositions suivantes : 

1° La méthode de la futaie a pour résultat d’ aitéz 
liorer le sol; celle du taillis tend à le détériorer. 

2° La méthode de la futaie permet de garantir la 
végétation contre les intempéries du climat: celle du 
laillis la livre sans défense à ces intempéries. 

3° La méthode de la futaie est beaucoup plus Faye 
rable à la régénération que celle du taillis. ; 

h° La méthode de la futaie favorise la croissance 
des sujets qui composent un massif; celle du taillis 
l’entrave. rt A 


SE ut SAS OPEN 


# FRE 


- 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 129 


4° Influence du mode d'exploitation sur le sol. « 

Le sol, pour la culture des bois, emprunte sur- 
tout ses éléments de fertilité à l’humus. 1] peut à la ri- 
gueur se passer d’humus, quand il est constitué physi- 
quement d’une facon particulièrement avantageuse. 
Il n’en a jamais trop et il devient stérile quand, à la 
mauvaise qualité de ses composants minéralogiques, 


il joint l'absence complète de substances organiques. 


Mais l'humus ne se forme, on le sait, que sous 
l'influence de l'humidité, de la chaleur et d'un air 
calme. Cette influence est grande et prolongée dans 
les futaies ; elle est faible et courte, au contraire, 
dans les taillis dont le sol est, à des périodes rappro- 


chées, exposé à l'action desséchante du soleil et des 


vents. | 

Avec le temps, le sol s'enrichit donc de plus en 
plus dans le premier cas; avec le temps, il s’appau- 
vrit donc de plus en plus dans le second. 

Je crois que cet appauvrissement n "est plus con- 
testé aujourd'hui par personne; 1l devient plus ou 
moins grave suivant le climat, la situation, et la nature 
de la base minéralogique. 

Si le climat est humide, les inconvénients du 
taillis seront moindres quant à la fertilité du sol, que . 
s’il est sec; si le terrain est en plaine, moindres que 
s’il est en pente; s’il est en pente septentrionale, 
moindres que s’il est en pente méridionale; s’il est 
imperméable, moindres que s’il ne l’est pas ‘. 


4. On pourrait fournir de nombreuses preuves à l'appui de 
9 


130 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS.. 


ù 


+ 2° Influence du mode d'exploitation sur l'action 
des intempéries. 

La possibilité de défendre les bois contre les 
intempéries dépend, jusqu'à un certain point, de la 
durée de la révolution, en ce sens que plus cette der- 
nière est longue, plus puissante est la barrière opposée 
par l’application des règles d’assiette, soit aux vents, 


ces propositions, si cela était nécessaire. C’est le mode d’exploi- 
tation en taillis qui a amené en France la dégradation d’une 
grande partie du sol forestier, dégradation à laquelle on ne peut 
obvier aujourd'hui qu’en cultivant des pins sylvestres dans des. 
terrains où le chêne prospérait autrefois. C’est ce mode qui a 
dépeuplé la forêt d'Orléans, celle de Fontainebleau, celle de 
Saint-Germain, celle de Compiègne ; forêts dont le sol sablonneux 
aurait eu besoin d’un couvert épais et constant. Je cite ces forêts. 
parce que tout le monde les connaît au moins de nom, qu'elles 
sont à la porte de la capitale, et qu'il est facile d’aller y vérifier 
l'exactitude de mes assertions. J'ai d’ailleurs mes cartons remplis 
de notes qui ont été recueillies dans d’autres forêts, et qui con- 
statent les mêmes faits; mais je ne crois pas que la ruineuse 
influence du taillis sur le sol soit nulle part aussi évidente, aussi 
- palpable, que dans une forêt des environs de Clermont (Oise), la 
forêt de Hez. Cette forêt appartient, par portions à peu près: 
égales, à l'État et à la famille d'Orléans. La portion de l'État se 
compose d’une très-belle futaie de hêtres et de chênes; la portion 
de la famille d'Orléans se compose, au contraire, d’un taillis dont 

la consistance et la végétation sont souvent plus que médiocres. 

Les deux portions sont pourtant enchevêtrées l’une dans l’autre, 
et leur sol, identique quant aux éléments minéralogiques, est 

formé d’une mince couche de sable reposant sur un banc impé- 

nétrable aux racines; partout, à côté de la croissance rapide dela 

futaie qui annonce un sol fertile, on est frappé de la croissance 
languissante du taillis qui accuse un sol appauvri, et tandis que 

- la futaie ne renferme que des bois durs, le taillis est déjà rempli 

de bois blancs et de morts-bois. 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 131 


soit aux autres météores. Les futaies, par la hauteur 
et la consistance des massifs qu’elles renferment, 
“offrent pour les parties d’une forêt qui ont besoin 
d’être abritées, une pre en autrement efficace 
que les taillis. 

Les procédés d'éxploitation que comportent les 
futaies permettent, en outre, de ne livrer le jeune 
repeuplement aux influences de l'atmosphère, que 
lorsqu'il est assez robuste pour les supporter; tandis 
que, dans les taillis, rien ne garantit le recru contre 
les effets de la sécheresse ou de la gelée. 

Depuis leur naissance jusqu'au terme fixé pour 
leur abatage, les massifs traités en futaie sont main- 
tenus dans un état serré et peuvent, par l’appui 
mutuel que se prêtent les brins dont ils se composent, 
supporter le poids du verglas et des neiges. Il n’en 
est pas ainsi pour les taillis qui sont formés de 
cépées irrégulièrement espacées. Aussi, le verglas et 
les neiges y-causent-ils de grands et fréquents dom- 
nes as 

8° Influence du mode d'exploitation sur la régéné 
_ ration. 

n’y a de nobnritién se et véritable que 
celle qui s'opère par les semences ‘ 

Dans ce cas, le plan nouveau, . est le ce 
de la régénération, réunit toutes les conditions néces- 
saires à un développement normal; il est doté d’une 
virtualité propre, distincte, indépendante de celle 


4. Voir la note page 4127. 


132: . AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


qui lui a donné naissance. L'arbre qu’on coupe par 
le pied, et qui repousse, ne produit pas des êtres 
nouveaux, il continue de vivre. Après un certain 
nombre d’exploitations, sa vie s’éteignant, il ne don- 
nera plus de rejets. Celui qui se régénère par la 
semence peut, au contraire, se régénérer ainsi éter- 
nellement. La futaie a donc sur le taillis un avantage 
considérable au point de vue de la perpétuation de 
l'espèce. | 

D'un autre côté, quelque favorables que soient les 
conditions de régénération dans lesquelles un massif 
se trouve placé, cette régénération n'en est pas moins 
une crise très-chanceuse dont il importe de retarder 
autant que possible le retour. Une futaie, dans 
laquelle elle ne se présentera qu’une fois par siècle, 
sera bien préférable, à ce nouveau point de vue, à un 
taillis. 

Enfin, c'est dans leur jeunesse qué les bois sont 

le plus exposés à être envahis par les essences secon- 
daires et les morts-bois. Dans les taillis, les dangers 
de cet envahissement sont beaucoup plus redoutables 
que dans les futaies ; non-seulement par le motif que 
je viens d'indiquer, c’est-à-dire à cause de la fré- 
quence plus grande des époques de régénération; 
mais aussi parce que, quelque complet que soit un 
taillis à l’époque de son exploitabilité, il présente de 
nombreux vides aussitôt après son exploitation. 

h° Influence du mode d'exploitation sur la crois- 
sance. 

Pour qu'un massif végète dans les conditions les 


TE PONT 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 133 


plus favorables, il faut que les sujets dont il se com- 
pose soient espacés régulièrement et de manière à 
participer également aux influences de l'atmosphère. 
Il est possible de réaliser ces conditions dans un 
massif de futaie formé de brins de semence. Cela 
n’est pas possible dans un taillis où les rejets sont 
disposés nécessairement par groupes, et en consti- 
tuent autant qu’il y a de souches dans le peuplement; 
ces groupes plus ou moins distants les uns des autres, 
suivant que la durée de la révolution est plus ou 
moins longue, s’étalent inévitablement, au début de 
leur croissance, pour remplir les vides qui les 
séparent : trop serrés sur certains points, trop espacés 
sur d'autres, tels sont les inconvénients inévitables 
que présentent les massifs crus sur souches. — Leur 


‘ croissance en souffre et la qualité du bois s'en 


ressent. 

Sous le rapport cultural, le mode d’exploitation 
en taillis est donc un mauvais mode, et s’il n’y avait 
que les convenances culturales à consulter en sylvi- 
culture, il faudrait le rejeter sans hésitation; mais ce 
mode, quelque vicieux qu’il soit, est encore, à force 


_desoins coûteux, conciliable avec les strictes exigences 


de la conservation des massifs, et s’il se recomman- 
dait par des motifs économiques, il pourrait être 
permis de l’adopter. 


U 


134 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS 


$ 2 


Du taillis simple et de la futaie au point de vue économique. 


Les considérations économiques applicables à 
l'exploitation des bois sont tirées, nous l’avons vu, 
soit de la quantité des produits, soit de leur utilité, 
soit de leur valeur absolue, soit de leur valeur rela- 
tive. | 

Comme quantité, c’est une vérité traditionnelle 
que les taillis ne donnent pas ce que donnent les 
futaies. Toutefois, des expériences très-concluantes 
manquent à cet égard. La reproduction par rejets 
modifie profondément les phases de la végétation : 
elle rend celle-ci beaucoup plus active dans la jeu- 
nesse, à ce point qu'un rejet de vingt ans, par 
exemple, toutes conditions égales d’ailleurs, est de 
moitié au moins plus volumineux qu’un brin du 
même âge. Une conséquence de ces modifications, 
c’est que l’époque du plus grandaccroissement moyen 
sé présente beaucoup plus tôt dans les taillis que dans 
les futaies. Un taillis est-il susceptible d’un accrois- 
sement moyen plus considérable qu’une futaie placée 
dans les.mêmes conditions de végétation ? — Telle 
est la question que l’on n’a pas résolue rigoureuse- 
ment, qu'il faudrait résoudre, et sur laquelle pour- 
tant il ne s’est jamais élevé le moindre doute : c’est 
que jusqu'à présent le maximum de la production, 


par hectare, que l’on a constaté dans les taillis, ne 


+ 
£ 
ne 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 135 


dépasse pas six stères, tandis que dans les futaies il 
s’est élevé jusqu’à douze et quinze stères. 
Comme utilité, la supériorité de la futaie ne se 


_ discute pas; nous avons vu en effet que sauf de rares 


exceptions, l'utilité des bois est généralement propor- 
tionnelle aux dimensions. qu’ils présentent, attendu 
que plus ces dimensions sont fortes, plus grand est 
le nombre des usages divers auxquels ils peuvent 
servir. Ajoutons que dans les futaies, les: produits 
accessoires, tels par exemple que ceux qu'on retire 


du panage, de la glandée, du pâturage, sont plus 
nombreux et plus importants que dans les taillis. 


Comme valeur absolue, le produit du taillis étant 
probablement moins considérable et certainement 
moins utile, doit nécessairement être beaucoup 
moins Dréchéuts que celui de la futaie. 

Comme valeur relative, au contraire, le rapport 
entre le revenu et le capital superficiel étant d’au- 


tant moins grand que la révolution est plus longue, il 


est évident que le taillis peut fournir un produit plus 
avantageux que la futaie, puisqu'il comporte une 


révolution beaucoup plus courte. 


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Conclusion des deux paragraphes précédents. 


Ainsi, parmi les considérations culturales et éco- 
nomiques que l’on doit interroger, quand il s’agit 


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$ : ES SU 


136 - AMÉNAGEMENT DES FORÊTS, . 


+ 


d'arrêter le mode d'exploitation applicable à une 
forêt, il n’y.en a qu’une, celle de la rente, qui puisse 
faire préférer le taillis à la futaie. 

Je vais examiner maintenant jusqu’à quel point 
la réserve, dans les taillis, d’un nombre plus ou 
moins grand de baliveaux, est de nature à modifier 
cette conclusion; je vais examiner quelle est l'influence 
de ces baliveaux, tant sous le rapport cultural que 
sous le rapport économique. 


S 4. 


Des réserves dans les taillis. 


Pour tous ceux qui ne jugent des choses qu'au 
cabinet, le taillis sous futaie est un mode d'exploita- 
tion fort ingénieux et très-avantageux, parce qu'il 
paraît susceptible de se plier à toutes les convenances 
de l’exploitabilité. Si on recherche, par exemple, la 
rente la plus élevée, on la réalisera au moyen du 
sous-bois ; tandis qu’on pourra, au moyen des futaies 
exploitables à des âges différents, rechercher et réa- 
liser tantôt les produits les. plus utiles, tantôt les 
plus considérables, élever ici des essences d’une 
grande longévité et à côté des espèces de courte 
durée. Voilà ce que disent les gens superficiels ; 
mais ceux qui ont étudié les choses de près ne sont 


pas du même avis, et voici ce qu’ils pensent des : 


baliveaux sur taillis : 


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© DE L'EXPLOITABILITÉ. 137. 


La première condition, la condition essentielle 
afin que les arbres forestiers se portent bien, c’est 
qu’ils soient en massif, surtout dans leur jeunesse. Dès 
qu'on isole ces arbres, on les place dans un état 
anormal dont ils souffrent beaucoup, à moins qu'on 
ne leur donne des soins particuliers et très-coûteux. 
Mais si l'isolement est défavorable aux arbres, en 
principe général, et lorsqu'il est permanent, il leur 
devient bien plus dommageable encore lorsqu'il est 
intermittent. Isoler un arbre, c’est comme si on le 
transportait d’un climat dans un autre. En tout état 
de cause, ce changement ne peut que lui être nui- 
sible ; il le sera d'autant plus qu'il s’effectuera à un 
âge moins avancé. 

En fait, les baliveaux qu’on réserve dans les 
taillis, privés subitement de l’appui de leurs sem- 
blables; sont souvent inhabiles à se supporter. Ils 
tombent au moindre vent ; c’est le premier danger 
qui les menace. Ensuite, quand ces baliveaux sont, 
du pied à la tête, exposés à l’influence de la lumière, 
ils se couvrent de bourgeons, lesquels absorbent une 
partie de la séve au préjudice de la cime qui se 
dessèche en tout ou en partie. Enfin, cette écorce, 
qui jusqu'alors avait pris son développement à 
Vombre, à une consistance lâche ; mise brusque- 
ment à découvert, elle est facilement endommagée, 
soit par la gelée, soit par le soleil, ce qui occasionne 
ainsi des vices intérieurs qui rendent les arbres plus 
ou moins impropres à une destination industrielle. 

Voilà pour ce qui regarde les baliveaux eux- 


138 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


mêmes; pour ce qui est de leur influence sur le 
taillis, le raisonnement et l'expérience prouvent qu’ils 
sont loin de compenser les inconvénients qu’on vient 
de leur reconnaître. 

. Buffon a observé que la gelée faisait beaucoup 
de tort aux taillis surmontés de nombreuses réserves. 
Il a constaté que, toutes circonstances égales d’ail- 
leurs, un taillis privé de réserves en avait distancé 
un autre qui ne l'était pas, de cinq ans sur douze, 
par suite de la gelée qui avait endommagé ce der- 
nier. ; 

Un fait plus facile à expliquer, c’est qu’en entfa- 
vant l'effet de la lumière, les baliveaux, quand ils 
sont trop nombreux ou trop gros, nuisent nécessai- 
rement au développement du taillis ; le vide se fait 
donc peu à peu autour de leur tronc, et quand on 
les abat, ils occasionnent de grands vides qu'il faut 
repeupler artificiellement. 

On pourrait croire que par les semences qu'ils 


fournissent, les baliveaux contribuent au moins à la 


régénération du taillis. Il n’en est rien, et cela se 
comprend : les. jeunes plants produits par leurs 
semences, exposés à toutes les intempéries, s'ils 
naissent au moment de l'exploitation, perdus dans 
l'obscurité dans le cas contraire, sont exposés à mourir 
soit par l’excès, soit par l'insuffisance de la lumière. 
C’est à cette dernière cause qu’il faut attribuer la 
disparition des chênes dans nos taillis sous futaie; 
disparition constatée dans tous les pays sans excep- 
tion. : 


3 


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| 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 139 


D'après ce que nous venons de voir de l'influence 
des réserves sous le rapport cultural, -il -est permis 
d'affirmer qu'il ne peut pas y avoir une grande dif- 
férence entre le rendement des taillis composés et 
celui des taillis simples, lorsqu'on ne considère que 
la quantité de matière produite annuellement ; mais 
les taillis composés fournissent sans contredit des 
produits plus utiles et par conséquent plus précieux, 
que les taillis simples, et, sous ce rapport, ils offrent 
un avantage, ils ont un mérite qui n’est point à dé- 
daigner. On estime que dans un taillis soumis au 
balivage normal, la futaie entre environ pour un 
tiers ou un quart dans le produit total de l’exploita- 
- tion, et que la moitié de cette futaie est propre à 
l'industrie. Ces chiffres, que je crois plutôt au-dessus 
qu'au-desous de la vérité, montrent en même temps- 
que l'introduction des réserves dans les taillis est 
bien loin de racheter le désavantage que j'ai essayé 
de mettre en évidence, lorsque j'ai comparé ce mode 
d'exploitation à celui de la futaie : car, dans une 
futaie bien conduite, la part du produit, afférente au 
bois d'œuvre, peut s ‘élever aux trois quarts et quel- 
quefois aux Ë re cinquièmes. 


ARTICLE IL. 


DE L'EXPLOITABILITÉ DANS LES TAILLIS SIMPLES. 


La recherche de l’exploitabilité dans les taillis 
simples ne présente pas d’insurmontables difficul- 


140 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


tés, bien qu’il n’existe point de tables d’accroisse- 
ment pour la faciliter. Il est presque toujours pos- 
sible de trouver, à proximité de la forêt que l’on 
aménage et dans des conditions semblables de végé- 
tation, des massifs suffisamment complets de bois 
d'âges divers, et de se procurer, par des places 
d'essai, les éléments d'appréciation nécessaires, pour 
déterminer l’âge d’exploitabilité, suivant la sine 
des produits que l’on veut se procurer. 

En remplissant le tableau ci-contre, on aura 
sous les yeux les diverses solutions dont le problème 
est susceptible. 


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* ” * 


142 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Les recherches, les expériences que comporte ce 
tableau, ne sont d’ailleurs utiles, en général, que 
lorsqu'on veut déterminer l’âge d’exploitabilité cor- 
respondant, soit aux produits les plus utiles, soit à la 
rente la plus élevée. Quant on a pour but de retirer 
d'un taillis les produits les plus considérables, il 
faut pousser sa révolution aussi loin que possible, 
c'est-à-dire jusqu'à l’âge où les bois cessent de 
repousser par la souche. En effet, l'expérience dé- 
montre, que l'époque du plus grand accroissement 
moyen pour des rejets, ne $e présente que longtemps 


après qu'ils ont perdu leur faculté reproductive. Le 


terme de l’exploitabilité dans ce cas, est donc fixé 
par une circonstance physiologique. 


ARTICLE IF. 


DE L'EXPLOITABILITÉ DANS LES FUTAIES. : 


Nous avons déjà vu que les exigences de la régé- 
nération renfermaient le choix de l’exploitabilité, 
quelle qu’elle fût d’ailleurs, dans de certaines limites. 
En decà de l’âge auquel les arbres portent des 

semences fertiles, il n’y a pas d’exploitabilité pos- 
sible, à moins qu'on ne soit disposé à recourir, pour 
la régénération, aux repeuplements artificiels. Mais 
depuis l’âge où ils portent des semences jusqu’au 
terme de leur existence, il y a un long temps à cou- 
rir ; et pour trouver dans ce laps de temps, le point 


Éple L n 


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DE L'EXPL OITABILITÉ. 143 


précis qui correspond à une exploitabilité donnée, 
il faudrait des expériences qui malheureusement ne 
sont guère possibles dans l’état actuel des choses. 

L’exploitabilité se détermine. donc, dans les fu- 
taies, par des considérations plus ou moins vagues 
basées principalement sur la tradition et sur la Jon- 
gévité des essences. 

En thèse générale, toutes les fois que l’on veut 
appliquer l’exploitabilité absolue, ou l’exploitabilité 


_ relative aux produits les plus utiles et au revenu le 
_plus grand, on pousse les révolutions aussi loin que 


possible eu égard à la longévité des espèces. Lorsque, 
au contraire, on veut se procurer la rente la plus 
élevée, on avance le terme de ces révolutions autant 
que le comportent les exigences de la régénération. 
Les raisons qui justifient cote manière d'opérer 
sont les suivantes : $ 
4° Toutes les Mie faites sur des arbres 
isolés, et elles sont nombreuses, prouvent que le plus 
grand accroissement moyen de la plupart de ces 
arbres ne se réalise qu’à un âge très-avancé, lorsque 
déjà ils commencent à être altérés dans le cœur, et 
qu'ils ont perdu une partie de leurs qualités indus- 
trielles. Pour ce qui concerne ces arbres envisagés 
individuellement, on peut donc regarder comme cer- 
tain, qu’en les coupant au moment où ils entrent en 
retour, on gagne plus pour la qualité et la valeur 
qu'on ne perd pour le volume. 
‘Il est vrai que, ainsi que je l’ai déjà fait remar- 
quer, ce n’est pas par des expériences individuelles 


LA 


144 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


SRE 


que l’on doit essayer de déterminer les phases de 
l’accroissement d’un massif, mais par des expériences 
qui embrassent des massifs tout entiers. En, opérant 
ainsi, ce qui, nous l’avons vu, est difficile, on trouve 
que l’époque du plus grand accroissement se pré- 
sente avant celle du dépérissement. Ce fait, qui 
pourrait paraître au premier abord anormal, et qui 
est dû à la quantité, souvent considérable ; de bois 
que les nettoiements et les éclaircies enlèvent: à l’ac- 
croissement, ne saurait être admis sans explication. 

Les nettoiements et les éclaircies ont pour but 
principal de favoriser l’accroissement ; on peut dès 
lors supposer que si, au moment où on les pratique, 
ces opérations enlèvent des éléments à l’accroisse- 
ment futur, elles rendent d'autant plus puissants 
ceux qu'elles respectent; et que, en conséquence, si 
on les opérait chaque année, chaque mois, chaque 
jour, le volume de bois qu’elles emporteraient, serait 
moindre que celui dont elles provoqueraient l’accrois- 
sement. Comment se fait-il donc que ces opérations 
aient cependant pour effet, non-seulement de modifier 
le rapport entre l'accroissement futur et l’accroisse- 
ment passé, mais encore d'avancer l’époqne du plus 
grand accroissement moyen ? — C’est parce que 
lorsque les massifs sont arrivés à un âge avancé, 
on ne se borne pas à en extraire tous les sujets nui- 
_sibles à léur développement ; on enlève aussi ceux 
qui pourraient entraver l'amélioration de la qualité 
du bois ; en sorte qu'il arrive un moment où la quan- 
tité de bois tombant dans l’éclaircie est plus grande 


dés! Dé hot et 


Léa à 


| 5e 145 


que celle qu’on peut espérer de l'accroissement ulté- 


rieur. On comprend fort bien alors que les éclaircies 


aïent pour résultat de hâter le terme de l’exploitabi- 
lité absolue. Dans tous les cas, cette influence sur le 
rapprochement de l’époque du plus grand accroisse- 
ment moyen, ne saurait modifier sensiblement la loi 
naturelle qui veut que l'apogée de l'accroissement ne 
soit atteint généralement, que lorsque les bois ont 
déjà éprouvé un commencement de dépérissement. 
C'estdonc, en définitive, l’état de santé des’ arbres 
qu’il faut surtout consulter, et d'après lequel on doit 
se guider, quand ‘il ‘s’agit de fixer! l’exploitabilité 
d'une forêt dont on veut retirer les produits les plus 
considérables ; et il en est de même, presque tou- 
jours, lorsqu'on, recherche les produits les plus 
utiles ; car, sauf des exceptions peu nombreuses, 
l'utilité, on se le rappelle, est proportionnelle aux 
dimensions. 

La détermination de l'exploitabilité relative soit 
aux produits les plus considérables, soit aux produits 
les plus utiles, dans les futaies comme dans les 
taillis, repose, on le voit, sur la constatation d’un fait 
matériel, constatation toujours possible, quoique 
cependant elle ne soit pas susceptible d’une précision 
parfaite. 

: Quant à l’exploitabilité relative à la rente la plus 
élevée, le raisonnement a montré que l’accroissement 
des capitaux pécuniaires suit une marche progres- 
sive telle, qu’il y a presque toujours avantage à rac- ‘ 
courcir autant que possible la révolution des massifs 

10 


146 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


dont on veut retirer la plus forte rente, Dans la plu- 
part des cas, l’époque de cette exploitabilité corres- 
pondra donc à l’âge auquel les bois sont susceptibles 
de se régénérer naturellement par les semences. 
Néanmoins, il sera utile, toutes les fois qu’un doute 
pourra s’éléver à ce sujet par suite de la valeur 
extraordinaire des bois de-certaines dimensions, de 
faire des expériences afin de s’assurer que cette valeur 
ne demande pas qu'on fixe l'exploitabilité à un âge 
plus avancé ; et ces expériences sont suffisamment 
indiquées par le tableau ci-contre qui, bien exacte- 


ment rempli, renfermera tous les éléments néces- 


saires-pour se fixer sur l’âge correspondant à ‘une 
quelconque des exploitabilités applicables à un massif. 


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LI 


148 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


ARTICLE IV. 


DE L’EXPLOITABILITÉ DANS LES TAILLIS COMPOSÉS, 


L’exploitabilité dans les taillis composés n’est 
susceptible d’une détermination exacte que pour le 
sous-bois; et elle se règle d’après les considérations 
et les procédés applicables au taillis simple, sauf les 
modifications imposées par le$ conditions culturales 
dans lesquelles ce sous-bois se trouve placé. 

Aux inconvénients qu’entraînent dans les taillis 
simples les courtes révolutions, viennent s’ajouter 
dans les taillis composés les difficultés qui en résul- 
tent pour un balivage satisfaisant. Comme le fait 
observer M. Parade dans son Cours de Culture, il 
n’est guère possible. d'obtenir des futaies de bonne 
_ qualité et d’un fût élevé dans des taillis composés 

soumis à de trop courtes révolutions. 

D'un autre côté, il est prouvé par l’expérience 
que les sujets qui croissent sous le couvert perdent 
plus tôt que les autres la faculté de rejeter par la 

souche. | 

Ainsi, il y a dans les taillis composés deux cir- 
constances particulières qui tendent: l’une, à faire 
prolonger la révolution du sous-bois; l’autre, à la 
faire raccourcir. La nature des essences, l’état du 
climat, la qualité du sol peuvent seuls indiquer quelle 
est celle à laquelle il convient de donner la prépon- 


dérance. 


RENTE 


Ne VEN MES PENSER A 


RE 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 149 


_ Quant aux réserves, on en multipliera naturelle- 
ment plus ou moins le nombre et les classes, selon 
l'espèce de produits qu’on voudra. en retirer; mais 
de quelque manière qu'on s'y prenne, on ne par- 
viendra jamais à leur appliquer un règlement d’ex-, 
ploitation rationnel, au point de vue économique; 
puisque leur destination, en tout état de cause, est 
* d'être exploitées à des âges différents qui ne sau- 
raient être avantageux au même degré ‘: 

- Le taillis composé, peu recommandable sous le: 
| Fe cultural, l’est peut-être moins encore sous le 
rapport économique. 

… Je términerai ce que j'ai à dire sur l'exploitabi- 
lité par la récapitulation des desiderala que com- 
porte cette grande question. 


‘ 


ds ARTICLE. V.. 


DES MESCRES A PRENDRE POUR ASSURER LA APE RET I ENTeE « 
DE L'EXPLOITABILITÉ. 


- Nous avons reconnu que l'absence de tables 
. d'expériences sur l'accroissement et les propriétés 
physiques des bois rendait presque impossible la : 
détermination ‘rigoureuse de l’exploitabilité. 

* En effet, dans l’état actuel des choses, on est 


1. Consulter, sur l’exploitabilité des taillis composés, le Cours 
d'aménagement de M. Nanquette, p. 65 et suivantes. On y trou- 
vera d'excellents conseils. (Note de la deuxième édition.) 


150 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


obligé de recourir, pour se faire une opinion sur le 
rendement futur dans un temps donné : soit à des 
expériences individuelles qui sont sans signification 
pour l’exploitabilité absolue, qui ne peuvent servir 
tout au plus que pour l’exploitabilité relative aux 
produits les plus utiles ; soit à des cubages de massifs 
choisis dans la forêt même que l’on aménage, et 
s’éloignant plus ou moins de l’état régulier ou normal, 
végétant en tout cas dans des conditions différentes. 
Toutes ces expériences ne peuvent fournir que des 
résultats très-douteux. Il faudrait donc commencer | 
en France, et les commissions d’aménagement se= 
raient pour cela d’un grand secours, des expériences 
sur l’accroissement et l'utilité des bois, d’après une 
méthode bien définie. On ne saurait assurément avoir: 
la prétention de constater les phases de l’accroisse- 
ment et les qualités de chaque essence, suivant les 
mille conditions particulières, exceptionnelles, dans 
lesquelles elle pourrait se trouver. Parmi ces condi- 
tions, on devrait ne choisir que les plus tranchées, 
les plus caractérisées, eu égard au climat, à l’expo- 
sition, au sol. Je place le sol en dernière ligne, parce 
qu’il est établi que les soins ultérieurs et l’amende- 
ment qui.en résulte, tendent à effacer les différences. 
de qualité et de fertilité que semblerait impliquer la 
diversité de ses éléments constituants et primordiaux. 
Quels que soient au contraire ces soins, on n’arri- 
vera jamais à obtenir dans un climat sec et froid une 
production aussi rapide que dans un climat chaud et. 
humide. On ne fera jamais que, sous le même climat, 


F-# 


pe ae CU CSST NS EU 


AROBEÉ 


=. 
“ps DE L'EXPLOITABILITÉ. 151 
D. 20 


la croissance ne soit pas plus rapide à l'exposition 
du nord parce que l'humidité y abonde, qu’à celle 
‘du midi parce que la chaleur y.est trop intense par 


* rapport à l'humidité. 


_ Si l’on avait en France, suivant la latitude, l’alti- 
 tude, l'exposition, la nature géologique du sol, pour 
chaque essence principale, des résultats d'expé- 
riences, indiquant, par périodes de 20 et même de 
10 ans, l'accroissement possible de cette essence en 
quantité et en qualité, on pourrait fonder les plans 
d'exploitation sur des bases à peu près certaines et 
rationnelles. Jusque-là on ne fera guère que de 


re cri 


xt 
“ 


CHAPITRE TROISIÈME. | 


DE L'EXPLOITABILITÉ DANS SES RAPPORTS 
AVEC L’INTÉRÊT DU PROPRIÉTAIRE. s 


Il résulte de la discussion à laquelle je mesuis 
livré dans le chapitre I‘ de cette étude: 1.2. 

-4° Que le produit annuel en argent d'une forêt, 
considéré en lui-même et abstraction faite du capital 
engagé, s'accroît avec la durée de la révolution ; 

2 Que le rapport entre ce produit et la valeur 
commerciale de l’immeuble diminue au contraire 
avec cette durée ; 

3° Que le taux des placements pécuniaires est la 
cause principale de cette contradiction qui disparai- 
trait si l'intérêt de l’argent devenait nul. 

Ces lois remarquables expliquent et justifient les 
différences que nous avons déjà constatées dans les 
principes d'après lesquels l'État, les communes et 


les particuliers exploitent les bois qui leur appar— 


tiennent. 
Nous allons, du reste, en examiner de plus près 
l'influence. 


PPT mc i 


, Le; 
VS DE L'EXPLOITABILITÉ. - 153 
NÉ. ca : 
Fu, 


27 "0. ARTICLE PREMIER. 


» 6 US ES 
A DE L'EXPLOITABILITÉ DANS SES RAPPORTS 
Ce AVEC L'INTÉRÊT DE L'ÉTAT. 
$ 382 
: L'État est éternel ; l'intérêt de l'avenir doit donc 


_ être mis sur la même ligne que celui du présent, 
__ lorsqu'il s’agit de régler l'exploitation des forêts qui 
lui appartiennent ; et, pour satisfaire à ce principe 
dont la justesse me paraît incontestable, il est néces- 
saire d’abord. d'adopter un mode d'exploitation qui 
ne puisse pas compromettre la conservation du do- 
maine forestier; or ce mode est, sauf de rares excep- 
tions, celui de la futaie. 
.. Tous les membres de la société ont un droit égal 
* aux produits des forêts de l'État. Ces produits: ne 
sauraient dès lors être regardés comme un objet de 
spéculation. Lorsque l'État les vend, il ne poursuit 
pas le-même but que les autres propriétaires de bois. 
Il se sert de la vente comme du moyen le plus conve- 
nable; pour distribuer aux citoyens qu'il représente, 
un revenu qui n'appartient pas plus à l’un qu'à 
l'autre; il ne prétend.pas d’ailleurs xetirer de cette 
opération ün profit commercial. L'État et la société 
ne faisant qu’un, l'État propriétaire de bois, quelle 
qué soit. la manière dont il en fait jouir le public, 
les consacre en réalité dans tous les cas à son 
usage, à sa consommation; et, partant, ce qu'il doit 
= chercher à retirer de ses forêts, c’est sur un point 


154 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


donné la plus grande quantité des produits annuels 
les plus utiles. Les longues révolutions sont donc 
celles qu’il lui convient d'adopter en général, puis- 
qu’elles tendent : à sa la Re et l'utilité 
de la production *. 

Les profits du sol forestier ne consistent pas seu- 
lement dans la valeur de la coupe annuelle ; ils con- 
sistent aussi dans les ressources que le bois offre au 
travail national, dans le courant commercial et indus- 
triel auquel il donne lieu; ils consistent en outre dans 
l'influence heureuse que les forêts exercent par leur 
existence même sur les conditions ni AR 
d’un pays. 

Aucun de ces profits n’est perdu pour le proprié- 
taire, quand ce propriétaire est l’État; et comme 
leur importance est en raison directe de l'utilité 
et de la quantité des produits et de la grosseur des 
arbres, il'y a là encore de nouvelles raisons pour que 
l'État préfère les longues révolutions : aux Courtes 

L'avantage d'une prompte jouissance: ne saurait 
compenser, pour l'État, la diminution de produits 
qu'entraîne nécessairement le raccourcissement 7 
révolutions. RU 

Il est certain que deux coupes de bois à 

4. Ce n’est que très-exceptiônnellement qu'il peut y avoir pour 
V'État ‘intérêt à en adopter de courtes; cependant, si une indus- 
trie indispensable à la société réclamait impérieusement, des bois 
de petites dimensions et qu'on ne pût se les procurer que dans 


les forêts domaniales, il faudrait tenir compte de ces psp dans 
le choix du traitement desdites forêts. 319790 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 155 


Fâge de 50 ans donneront moins qu’une seule coupe 
- à l’âge de 100 ans; mais on objectera que, sion em- 

_ ploie le prix de la première coupe à 50 ans, d’une 
_ manière reproductive, jusqu’à l’époque de la seconde 
coupe au même âge, le profit qu'on en retirera pourra 
égaliser, s’il ne le dépasse, Fexcédant du produit de la 
coupe à 400 ans sur celui des deux coupes à 50 ans. 

Cela est vrai, mais je ferai remarquer que cet excé- 
dant aura été donné en quelque sorte gratuitement 
par la nature, tandis que le profit qu'on lui compare, 

- résultat des efforts de l’homme, aura exigé, consommé 

_ une-main-d’œuvre qui aurait pu être utilisée autre- 
ment. : 

Pour que l'avantage d'ènté jouissance anticipée: 
fût réel pour l’État, il faudrait deux choses : 4° qu'il 
y'eût dans notre pays surabondance de bois; 2° qu’il 
ne fût pas possible de se procurer-autre part que dans 
nos forêts des instruments de travail. Or, il y a au 
contraire pénurie de bois ; et il n’est pas nécessaire de 
couper les forêts avant leur maturité, pour se procu- 
rer: des instruments de production. Une opération qui 
aurait pour résultat d’amoindrir la puissance produc- 
tive d’un capital, dont la nature à fait tous les frais, 
ne saurait donc trouver une justification suffisante : 
dans l’importance du capital artificiel qu’on pourrait 
créer au moyen de cette diminution. 

Il n’en est pas moins vrai cependant qu’au delà 
d'un certain âge l'accroissement d’un massif boisé 
ne représente plus, en valeur pécuniaire, l’intérêt de 
la somme qu’on réaliserait en le coupant; et on peut 


156 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


se demander si cet intérêt doit être exclu des consi- 
dérations qui doivent présider à la gestion des forêts 
de l'Etat. | 

Il y aune raison péremptoire pour que cette — 
tion soit résolue par l’affirmative : 

Cette raison, c’est que l'intérêt de l’argent n’im- 
plique pas une augmentation de revenu; c’est qu'en 
supposant un moment qu’il pût être supprimé, sans 
que la circulation des capitaux en souffrît, la quantité 
d’utilités créées, de valeurs ‘produites au bout de 
l’année, n’en serait pas altérée. Il résulte de là que 
l'intérêt constitue un bénéfice pour les individus ou 
pour une fraction de la société considérée par rap- 
port à la masse des citoyens, parce qu'il modifie, en 
faveur de ces individus ou de cette fraction de la 
société, la répartition du revenu social ; mais qu'il 
ne saurait, dans aucun cas, constituer un bénéfice 
pour l’État. Ho 

Cette vérité a longtemps été méconnue; aussi 
voyons-nous encore une grande partie des forêts de 
l’État exploitées en taillis; mais les saines doctrines 
paraissent avoir enfin définitivement prévalu. L'admi- 
nistration est entrée dans la voie des conversions ‘en 
futaies ; on ne saurait trop l’en féliciter. 


DE L’EXPLOITABILITÉ. 157 


RAPIRÉ TPM PEER 


DE L'EXPLOITABILITÉ DANS SES RAPPORTS AVEC L'INTÉRÊT 
DES PARTICULIERS. 


Les besoins impérieux de la. vie, l'imprévoyance, 
Pr partages amenés par nos lois sur les successions, 
sont. autant de motifs qui s’opposent à ce que les bois 
appartenantaux particuliers soient exploités à un ee 
reculé. 

L'État a ut les moyens de moalits. par 
d autres ressources, à celles que lui fournirait la coupe 
de ses bois. Les particuliers lesontrarement, ilspeuvent 
êtreet ils sont souvent forcés de sacrifier toutes. les 
«espérances de l'avenir aux nécessités du présent. 

D'un autre côté, quel que soit, l'esprit de pré- 
. Yoyance dont on suppose les hommes doués, il. est 
concevable qu'il s’altère et s’aflaiblisse, . lorsqu'il 
embrasse un laps de temps qui dépasse la durée de 
- deur existence. 
Enfin, cet esprit, il faut le reconnaître, trouve 
encore une cause de découragement dans la certitude 
‘que: la propriété qu'il sera parvenu à constituer, au 
prix des plus: grandes privations, sera tôt ou tard 
‘démembrée, par suite des lois qui régissent, en Feel 
Vhérédité. 
+ On s'explique donc que les particuliers ne soient 
guère tentés de conserver longtemps leurs bois sur 
pied; mais la raison qui les en éloigne surtout, est le 


158 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


désir bien naturel d'augmenter, autant que possible, 
le rapport entre le revenu net et la valeur vénale de 
_cette nature de biens-fonds. 

Si le taux de placement adopté pour les bois est 
de 3 pour 100, les particuliers propriétaires de bois 
tendront à les exploiter à l’âge au delà duquel 
l'augmentation de valeur qui résulterait de l’accrois- 
sement annuel cesserait d’être égale à l'intérêt, à 
3 pour 100, que fournirait le produit pécuniaire de 
l'exploitation joint à la valeur de la première feuille. 
D’après les prix qu'ont actuellement les bois suivant 
leur grosseur et leur âgé, il ne faut pas laisser long- 
temps sur pied une forêt pour qu’elle cesse de rap- 
porter, à 3 pour 400, l'intérêt de sa valeur. Voilà 
pourquoi nous voyons les particuliers exploiter en 
général celles qu’ils possèdent, en taillis simples et 
à l’âge de 20 ans au plus, toutes les es ss à 
essences le permettent. RL 

Cette manière d’agir est rationnelle : elle ‘eèt 
théoriquement justifiée par les principes que nous 
avons développés dans le premier chapitre de la 
présente étude. Toutefois elle ne saurait être recom- 
mandée sans réserve, et elle ne convient même véri- 
_tablement qu'aux propriétaires qui ont besoin de 
vendre leurs bois pour satisfaire aux exigences de 
leur consommation. Quant à ceux qui cherchent :à 
spéculer sur le produit de leurs coupes, ils seront 
amenés par l'intelligence pratique de leurs intérêts, 
à maintenir souvent leurs bois sur pied au delà du 
terme fixé par la théorie. : | 


+ 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 159 


… «En effet, ne perdons pas de vue que dans nos 
calculs sur l’exploitabilité relative au taux de place- 
ment; nous avons tenu compte des intérêts des inté- 
rêts; et qu'en conséquence, pour qu'un propriétaire 
trouvât son profit à appliquer rigoureusement les 
principes que nous avons posés, il faudrait qu’il eût 
toujours la possibilité de faire croître, à intérêts com- 
posés; le produit pécuniaire que lui PR l'ex- 
Fa non de son bois. 

L'accumulation des capitaux pécuniaires à inté- 
seppenie est-elle facilement réalisable? — Je 
ne le crois pas, et il me semble même que les em- 
prunteurs seraient tout à fait impuissants à satisfaire 
les capitalistes, si ceux-ci prétendaient tous faire 
leurs placements à intérêts composés. En supposant 
que les:premiers se résignassent à se priver de tout 
profit net, et à ne prélever sur le produit des capitaux 
empruntés que ce qui serait strictement nécessaire à 
leur existence, l’excédant ne sufrait certainement 
pas au service des intérêts composés. Pour s’en con- 
vaincre, l'on n’a qu'à consulter les statistiques les 
plus estimées sur l'augmentation de la richesse 


publique, dans les sociétés qui disposent des moyens 
de production, même les plus puissants. On y verra 
que la proportion dans laquelle cette augmentation 


a eu lieu, est fort éloignée de celle que comporterait 
la puissance de l’accumulation des capitaux à intérêts 
__ composés. Je ne sache pas, au reste, qu'il y ait 
- . beaucoup dé banquiers disposés à servir l'intérêt des 
intérêts des sommes déposées chez eux, et que les 


é. 


Es 


160 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


établissements qui en avaient pris l'engagement 
_ aient jamais pu le tenir. 

Doit-on conclure de là que des placements à 
intérêts composés ne sont, dans aucun cas, réali- 
sables? — Assurément non; seulement, on doit les 
considérer comme tout à fait exceptionnels ec sortant 
des conditions normales de la production; on doit 
les considérer comme d’autant plus difficiles que leur 
durée devra être plus longue. 

Un propriétaire qui n’aura pas besoin de couper 
son bois, pour subvenir à des dépenses urgentes, 
agira donc sagement en le laissant sur pied au delà 
du terme où l'accroissement ne représentera plus le 
profit qu'il pourrait exceptionnellement retirer de la 
coupe, s’il en plaçait le prix. Son bois continuera de 
s’accroître à intérêts composés, à un taux moins 
élevé, sans doute, que celui qu’on recherche-et qu’on 
peut obtenir dans les placements de cette mature; 
mais dans des conditions de sécurité que ne pré- 
sentent pas les placements pécuniaires. p'e 

Au surplus, quand on veut retirer des bois une 
rente plus élevée que celle qu'on retire des terres 
arables, on a, selon moi, une prétention qui n’est pas 
raisonnable. 

Les bois, il est vrai, ne sont pas uote ptral 
d'être affermés; ils sont difficiles à estimer ; le prix 
de leurs produits est sujet à de grandes fluctuations ; 
ils ne jouissent pas d'autant de crédit que les autres 
capitaux ou fonds de terre, par suite de la facilité 
avec laquelle on peut enlever, par l'exploitation de 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 161 


a superficie, la garantie que le prêteur est en droit 

de réclamer. Toutes ces circonstances tendent à les 
déprécier et à augmenter, par conséquent , la rente 
qu'on cherche à en retirer; mais les bois rachètent 
les inconvénients que je viens d'énumérer par un 
précieux privilége ; et ce privilége consiste précisé- 
ment en ce que leur exploitation peut être retardée, 
lorsque les circonstances ne sont pas favorables à 
l'écoulement de leurs produits. 

Si vous avez de l’argent chez un banquier ou 
vhez tout autre, et qu'à l’époque où vous avez à en 
toucher l'intérêt, vous ne sachiez que faire de cet 
“intérêt, il faudra le garder improductif dans votre 
secrétaire. Si vous possédez un champ de blé, et 
qu’à l’époque de la récolte, l’état du marché ne vous 
permetté pas de vendre cette récolte à un prix 
rémunérateur , vous essayerez de la conserver dans 
des greniers, ou dans des silos construits à grands 
ps 

Pour le bois, c'est la nature elle-même qui se 
| séniée de la conservation des produits, et qui, pour 
cela, ne vous demande qu’une légère diminution sur 
- l'intérêt qu’elle vous avait bonifié jusqu'alors. Les 
Girconstances sont-elles contraires à la vente de la 
récolte, on laisse cette récolte sur pied. Non-seule- 
ment elle s’y conserve, mais elle s’y améliore; et 
tandis qu’on s'expose pour le blé, par exemple, à en 
trouver, au bout d’un certain temps, une grande par- 
tie avariée, mangée par les rats, rongée par l’alu- 
cite, on est certain, au contraire, de retrouver le 

11 


162 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


bois dont on aura retardé la coupe, amélioré par les 
années qui se seront accumulées sur lui. 

Les bois sont donc de toutes les caisses d'épargne, 
la plus commode, la plus sûre, la plus fidèle, et c’est 
vraiment trop exiger d’eux, que de leur demander 
une rente plus élevée que celle qu’on retire des 
autres biens-fonds. (AP. 


ARTICLE III. tits 
sc 
DE L'EXPLOITABILITÉ DANS SES RAPPORTS AVEC L’ INTÉRÊT 
DES COMMUNES. 


L'existence des communes ne peut pas plus être 
limitée que celle de l'État. Dans la gestion de leurs 
biens patrimoniaux, les communes doivent donc, 
avant toute chose, se préoccuper des moyens d'assu- 
rer la conservation du fonds ; et dans ce but, c’est 
le mode d'exploitation en futaie qu'il leur convient en 
général d'adopter pour les forêts qu'elles possèdent. 

Mais les communes diffèrent de l’État et se rap- 
prochent des particuliers par la modicité de. leurs 
ressources d’abord, ét ensuite par la distinction qui 
existe entre les intérêts de chacune d’elles et les inté- 
rêts généraux du pays. Lorsque, par le placement 
de leurs capitaux, elles peuvent faire modifier en 
leur faveur la répartition du revenu social, n’ont- 
elles pas raison de recourir à ce moyen pour amélio- 
rer leur sort? 


_: DE L'EXPLOITABILITÉ.. 163 


\ ‘RES 
_ side répondrais négativement à cette question, si 
 toütes les communes étaient dans l’aisance, si leur 
 æevenu-était-suflisant pour couvrir. leurs dépenses ; 
| parce que, comme je. l'ai fait:observer dans une 
_ étude-surles quarts en réserve des bois communaux", 
- la, conservation d’un capital _sous:la forme: d’une 
-… forêt,-présente à côté de l'inconvénient de faire pro- 
_ duire à.ce capital une rente inférieure à celle qu'on 
 en-retirerait en lui donnant une autre destination, en 
: le transformant par exemple en argent, l'avantage 
14 d'une sécurité beaucoup plus grande. Cet avantage est 
: L : inappréciable pour les propriétaires qui ne meurent 
… pas. Cependant, de même quelle particulier qui, n’ayant 
. pas de quoi suflire aux strictes nécessités de la vie 
avec le revenu d’une terre, fait bien de la vendre 
et d’en placer la valeur chez un banquier, malgré 
les chances de ruine auxquelles il s'expose; de 
même une commune qui a des besoins impérieux 
._ et des recettes trop restreintes, est excusable de 
—_._ chercher à remédier à cette situation, en renon- 
cant à conserver des propriétés productives d’un 
trop faible revenu relativement à leur valeur com- 
merciale. 
= Toutefois, il ne faut pas qu’elles oublient que 
ce genre de spéculation, qui a pour résultat de rac- 
_ courcir la durée de la révolution de leurs bois, est 
_ contraire à l'intérêt de leurs descendants dont il . 
_ ébranle le patrimoine, et à l'intérêt de la société 


À. Annales forestières, 1856. 


164 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


dont il amoindrit le revenu. Si les particuliers 
eux-mêmes ne doivent jamais faire complétement 
abstraction de ces intérêts, leurs obligations à elles 
sont, sous ce rapport, beaucoup plus étendues. 

L'importance de ces obligations est suffisamment 
indiquée par la non-limitation de l'existence des 
communes, par l’étroite solidarité qui existe entre 
elles et la société dont elles font partie, par la pro- 
tection spéciale dont l’État les couvre, par l'appui 
qu’il leur prête. | 


CHAPITRE QUATRIÈME 


DE L'EXPLOITABILITÉ BANS SES RAPPORTS 
AVEC L’'INTÉRÈT PUBLIC 


: Je voudrais maintenant calculer la perte que fait 
éprouver à la France l'exploitation en taillis d’une 
- partie des bois qui sont situés sur son territoire. 
Cette perte est énorme. A défaut d'expériences assez 
concluantes, je ne saurais la préciser; mais je crois 
qu'il me sera facile je donner une idée très- 
approximative. 

On lit dans le Cours de slisréi page 399, que 
Hartig, ayant comparé entre eux (toutes circon- 
stances égales d’ailleurs) un taillis simple exploité à 
30 ans et une futaie soumise à une révolution de 
120, a trouvé que les produits en matière de ces 
deux forêts étaient dans le rapport de 4 à 7. 

… J'appliquerai ce rapport aux taillis simples et aux 
futaies en général. 

- Je supposerai en outre que, par suite de la pré- 
sence des réserves dans les taillis, les produits du 
. taïillis composé soient à ceux de la futaie comme 
5 est 7. 

J'admettrai enfin qu'une futaie, dans des condi- 


166 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


tions moyennes de végétation, et bien traitée, puisse 
donner par hectare 6 mètres cubes, chiffre très-mo- 
déré. 

Le taillis simple en fournira Fe lors à, u5 

Et le taillis composé.  . 1,1 2.1. 4,30 

Or, en France; le sol restier comprend en 
chifires ronds, 8,500,000 hectares',, 

S'il était couvert de futaies convenablement cul- 
tivées, il pourrait donc fournir annuellement 51 mil- 
lions de mètres cubes. 

Voyons ce qu’il serait possible d’en retirer, en 
conservant les divers modes pe dc me 
régissent actuellement. 

Les 8,500,000 hectares de forêts qui ‘existent en 
France comprennent à peu; près, 2,300,000  hec- 
tares de futaies. À raison de 6 m.c. p. h.; on pourrait 
en retirer chaque année . . . . 13,800,000:m.1. 

1: On ne sait pas quelle est la © 44h 01 EU 
part afférente au taïllis composé 102 4976 na 
ou au taillis simple; dans les: 2918; 2 


À reporter. So: 13,800,000 m. c. 


- 1. Ces chiffres ne sont plus tout à fait exacts, puisque la 
Prusse nous a pris environ 350,000 hectares de forêts domaniales 


et communales; mais quand j’ai publié ces études, nous, n’ayions’ 


pas la Savoie et le comté de Nice, qui nous ont apporté à, peu 
près 460,000 hectares de forêts de même nature, et l'étendue que 


j'attribuais aux bois des particuliers était un peu faible; de sorte 


que la différence entre l'étendue totale du sel forestier. qui exis- 
tait lors de la 4re édition de ce livre et celle qui existe aujour- 
d'hui, ne saurait modifier sensiblement les conséquences que de 
tire de mes calculs. (Note de la 2 édition. 


DE L’EXPLOITABILITÉ. 167 


6, 200, 000 hect. qui ne sont pas 
cultivés en futaie. En attribuant 
une part égale à chaque nature 
de- peuplement, on exagérera 


. plutôt qu'on ne diminuera la pro- 


duction; car la plus grande par- 
tie des bois en question appar- 
tient à des particuliers qui, on 


lé saït, ont un goût prononcé 


pour lé taillis simple. | 
3,100,000 hect. de taillis 


composés fourniraient, chaque 
année, à raison de ! m. €. 


*8,100,000 hectares de taillis 
simples fourniraient, chaque an- 
née, à raison de à m. c. H5p.h. 


43,330,000 


10,695,000 


_ 37,825,000 m. c. 


Faux , le sol forestier, couvert de futaies, 
pourrait rapporter chaque année, 54 millions de m.c.; 
tandis que le maximum de la production possible, 


avec les diverses méthodes d'exploitation auxquelles. 


ilest actuellement soumis, ne saurait dépasser 38 mil- 
lions de.m. c. La différence -entre ces deux chiffres, 
soit 13 millions de m. c.; exprime la perte maté- 
rielle qui résulte pour la société de la PER 


donnée au taillis sur la futaie, 


Cette perle deviendra bien plus remarquable, si 


LA 


168 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


nous recherchons la qualité des produits qu’elle 
représente. 

On sait que dans certaines futaies le bois d'œuvre 
absorbe jusqu’à 80 pour 400 du produit total; nous 
en porterons la quantité à 50 pour 400 seulement. 

Dans un taillis composé normal, la futaie n'entre 
pas pour plus de un tiers dans le produit de Ja 
coupe annuelle; et en admettant que sur cette futaie 
la moitié donne du bois d'œuvre, nous resterons au- 
dessus de la vérité. Si donc je fixe à un sixième du 
produit la part afférente au bois d'œuvre dans les 
taillis composés, je ne serai pas accusé de vouloir 
l’atténuer. Dans les taillis simples, la part du bois 
d'œuvre est presque insignifiante. J'en tiendrai pour- 
tant compte en la portant à un dixième. 

D’après ces suppositions, le produit du sol fores- 
tier se composerait: 

. 4° Dans l'hypothèse du traitement en futaie, 

De 51 millions de mètres cubes dont : 

En bois d'œuvre. En bois de feu, 
25,500,000 m. c. 25,500,000 m. c. 

2% Dans l'hypothèse du maintien des modes 

actuels d’exploitation, 


De 13,800,000 mètres cubes fournis par les fu. 


taies et donnant: 


En bois d'œuvre. En bois de feu, 


6,900,000 m. c. 6,900,000 m. c. 
e 13,330,000 
mètres cubes 


A reporter. . 6,900,000 m. c. 6,900,000 m. c. 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 169 


… Reports . . . 6,900,000 m. c. 6,900,000 m. c. 
+ fournispar les 
_ faillis compo- 
_sés el don- 
tant ci 12 205,000 14,405,000 
De 10,695,000 
mètres cubes 
_ fournis par les 
… taillis simples 
et donnant . 4,069,500 9,625,500 


0 Totaux. . . 10,194,500 ”-<+ 97,630,500%:°«. 


Si nous retranchons la quantité de bois d'œuvre 
produite dans la seconde hypothèse, de celle pro-, 
duite dans la première, nous trouvons une différence 
de 45 millions 400 mille mètres cubes en chiffres 
ronds. | 

Si nous retranchions la quantité de bois de feu 
produite dans le premier cas, de celle produite dans 
__ le second, nous trouvons une différence de 2 mil- 

lions 130 mille mètres cubes en chiffres ronds. 

- Et si nous évaluons ces” différences en argent, à 
raison, pour le bois d'œuvre, de 20 francs sur pied, 
prix très-modéré, et, pour le bois de feu, de 7 fr., 


… prix assez élevé, nous constaterons, en définitive, 


que l'exploitation en taillis fait perdre à la société 
un revenu de : 


4 Je n’ai pas besoin de rappeler que ces produits dépassent 


- beaucoup les produits réels, et sont ceux que les forêts pourraient 
: donner, si elles étaient entretenues coñvenablement. 


170 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


15,400,000 »- «x 90 fr. — 308,000,000 fr. 
— 9,130,000%c x 7fr.— 44,910,000 fr. 


Différence. . . 293,090,000 fr. 


1 À 


293 millions de francs! C’est plus de la moitié 
de nos contributions directes, c’est plus quel intérêt 
de notre contribution de guerre. L 

Mais il faut, pour embrasser dans toute son étendue 
le préjudice qu'est susceptible de causer au corps 
social le mode d'exploitation en taillis, réfléchir à 
la quantité énorme de travail, queiles 15 millions de 
mètres cubes de bois d'œuvre dont on pourrait aug- 
menter la production forestière, en adoptant le mode 
de la futaie, créeraient dans toutes les branches. de 
l'industrie. - 1} 253 fs 

J'ai montré dans une note sur le: défrichéinent 
que les bois formaient en France le tiers à peu pr 
en poids, des matières transportées: 

: D'un autre côté, on lit dans le procès-verbal de 
l'enquête qui a été faiteren 4847 sur l’industrie pa- 
risienne, que la valeur des produits: fabriqués, pour 
les industries n’employant, comme matière première 
que le bois, s'élevait à 104,516,026 francs ; que 
classées par rang d'importance ‘dans cet immense 
atelier de læ capitale, la charpenterie occupait le 
20° rang, la carrosserie le 46°, l’industrie du bâti- 
ment le 9°, l’ébénisterie le 8*; que le nombre des 
patrons et ouvriers occupés à la manipulation du bois 
dépassait enfin 35,000. | 

_ Ces renseignements me paraissent Aicurénient 


te dé ÉHen: 


DE L'EXPLOITABILITÉ. 171 


propres à dissiper toute incertitude sur l'immense 
intérêt qu'a la société, à ce que l'on adopte pour les 
forêts dont elle jouit, des exploitabilités reculées. 

H n'est pas permis d'espérer que les particuliers 
trouyeront jamais leur intérêt à exploiter leurs bois 
en futaie ; car, pour cela, il faudrait non-seulement que 
le loyer. de l'argent baissât considérablement ; mais, 
ce qui est plus difficile àréaliser, que l’imprévoyance, 
le besoin du moment, l'incertitude du lendemain, 
cessassent d'intervenir dans les actions humaines. 

C’est donc à l'amélioration des forêts de l’État et 
des communes que l’on doit songer, et le lecteur sait 
maintenant dans quel sens il importe de la diriger. 

+ Onn'apprécie pas assez dans notre pays, la place 
que les forêts oceupent dans le domaine où la société 
puise incessamment les matériaux , les éléments qui 
peuvent servir à son existence, ‘à son bien-être, au 
développement de sa prospérité. Chose remarquable! 
le bois est indispensable à la plupart des industries : 
presque {ous les meubles dont l’homme se sert, sont 
en bois, depuis le berceau qui l’a reçu à sa naissance, 
jusqu’au cercueil qui le contiendra après sa mort. 
C’est avec le bois qu'il prépare ses aliments, réchauffe 
ses. membres engourdis par le froid, construit son 
habitation, laboure son champ, transporte ses denrées ; 
c’est le bois qui lui a permis d'étendre son empire sur 
l'Océan, et de créer ces voies de fer qui ne feront 
bientôt du monde entier qu’une seule famille. Sup- 


.  primez le bois, toutes les fonctions sociales sont inter- 


rompues; tout s'arrête en même temps, les travaux 


172 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS 


de la paix comme ceux de la guerre, les travaux qui 
donnent le nécessaire comme ceux qui donnent le luxe. 
Enfin, de quelque côté qu’on jette les regards, le bois 
se présente à nous comme l’auxiliaire le plus puissant 
que la Providence ait mis à notre disposition pour 
améliorer notre sort; et pourtant, de toutes les res- 
sources qui nous environnent, c’est celle dont nous 
nous préoccupons le moins. Aussi les forêts s’en vont- 
elles avec une évidente et alarmante rapidité; la spé- 
culation les poursuit à outrance, et si on n’y prend 
garde, elle en aura bientôt fait table rase *. 


1. Quelques années à peine se sont écoulées depuis le rejet 
par le Corps-législatif du projet d’aliénation présenté sous l'empire 
par le ministre des Finances, et déjà l’on voit se reproduire des 
propositions dans le même sens, propositions toujours appuyées 
sur les mêmes considérations, les mêmes sophismes : l's besoins 
de l’agriculture, les ressources des bois de particuliers, la faible 
rente des forêts de l’État, l'existence dans certaines - contrées ” 
forêts indéfinies et inépuisables, etc.; etc: 

On oublie que nous avons encore en France plusieurs miss 
d'hectares qui ne sont couverts que de bruyères; et que par con- 
séquent le terrain ne manque pas à l’agriculture; 

On oublie que les particuliers défrichent de plus en plus et 
qu'ils y sont poussés, d’un côté, par l'impossibilité pour eux d’éle- 
ver des futaies, de l’autre, par la dépréciation du bois de chauffage; 

On oublié que la faible rente des forêts de l’État est précisé- 
ment la preuve de l'intensité de leur culture et de la supériorité 
de leurs produits; 

On ignore enfin qu'il n’y a de forêts indéfinies et inépuisables 
nulle part; qu’on défriche aujourd’hui avec une sorte de fureur 
dans toutes l:s parties du monde, et que les Américains eux- 
mêmes n'ont plus assez de bois pour leur propre consommation. 
(Lire à ce sujet un intéressant article de M. G. Fabre dans la 
Revue des eaux et foréts, fév. 1872.) 


dt lé niet de 


RE, ET ET NN 


plan: 76 


Dane nd me 
NO ARE DEN 
PE Te data ee a 

4 (2 pu PER 
FU 4 l # tt 


= TROISIÈME ÉTUDE. 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 


CHAPITRE PREMIER. 


PRINCIPES FONDAMENTAUX. 


- Quand on a complété la statistique de la forèt à 
aménager ; quand on a terminé la description spé- 
ciale des parcelles dont elle se compose ;. quand on 
a choisi le mode d'exploitation et fixé l’âge d’exploi- 
tabilité qu’on estime être applicables à ces parcelles, 
on possède les éléments nécessaires pour arrèter la 
durée de la révolution, la quotité et la marche des 

ours annuelles. 

… Les documents relatifs à ces divers objets forment 
ce qu'on appelle le plan d'exploitation. 
… J'ai dit que le mot Révolution s’appliquait au 
temps nécessaire pour qu'une série de coupes de : 
régénération pût revenir au point de départ et se 
_ renouveler dans les mêmes conditions. C'est là le 
La vrai sens du mot et par conséquent, si on voulait 


174 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


s'exprimer correctement, on devrait n'employer ce 
mot que pour l'exploitation des forêts normales, car 
c'est dans les forêts normales seulement que les 
coupes de régénération peuvent se renouveler pério- 
diquement dans les mêmes conditions. Mais cepen- 
dant, par suile de la pauvreté de notre langue, on a 
abusé du mot Révolution comme de beaucoup d'au- 
tres, et on l’a employé indifféremment pour les forêts 
qui sont susceptibles d’un aménagement définitif et 
pour celles qui ne le sont point, de sorte qu'il ne se 
lie pas toujours à l’idée d'une rotation régulière de 
coupes d’une nature déterminée. 

Il en est ainsi, par exemple, lorsqu'on se sert du 
mot Révolution pour exprimer le temps pendant 
lequel une forêt devra être parcourue par des coupes 
préparatoirés à la futaie. Il est évident que ces cou- 
pes préparatoires ne sont pas destinées à se renou- 
veler indéfiniment; que souvent même, on n’attend 
pas qu’elles aient parcouru toute l'étendue de la 
forêt, pour entreprendre les coupes de régénération. 
Le mot Révolution ne leur convient donc pas gram- 
maticalement. L'usage l’a pourtant admis et consacré 
et je ne prétends pas le proscrire. Seulement, pour 
prévenir toute confusion, je prendrai les asser 
suivantes : | 

 J'appellerai Révolution principale normale a 
temps nécessaire pour l'exploitation, pour la régéné- 
ration totale d’une forêt, lorsque ce temps correspon- 
dra à l’exploitabilité des essences; Révolution prin- 
cipale transitoire celle qui bien que s'appliquant aux 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 4175 


| coupes de régénération, ne différera de la précé- 
dente que parce qu'elle devra exceptionnellement 
être plus courte ou plus longue qpe ne le sr cc 
ar l'exploitabilité des essences. 
Mais puisqu'il est fort embarrassant de déonoi- 
ner l’âge d’exploitabilité d’une forêt, même lorsque 


cette forêt est dans un état que l’on peut croire 


stable au point de vue de la consistance et de da 
végétation des peuplements qui la composent, le pro- 
_ blème devient bien plus difficile à résoudre quand elle 
“est évidemment destinée, sous ce double rapport, à 
‘éprouver des changements; de sorte qu’à l’incerti- 
tude des circonstances économiques s’ajoute celle des 
circonstances physiques. Telle exploitabilité excel- 
lente aujourd’hui, susceptible par conséquent d’être 


considérée comme normale, pourra ne plus l’être 


dans un siècle. Aussi sera-t-il raisonnable d'adopter 
comme normale ou définitive toute révolution princi- 
pale qui n’imposera pas des sacrifices probablement 
trop grands d’accroissement et d'utilité. 

J'appellerai Révolution préparatoire, bien que ce 
soient les coupes et non la révolution qui préparent, 


_ le temps pendant lequel une forêt devra être par- 


courue par .des coupes qui auront pour but d'y 


« rendre possible le début des coupes de régénération. 


On s’est quelquefois servi, dans ces dernières années, 
pour exprimer ce temps, des mots période d'atteñte. 
. Or la période avait toujours été prise jusqu’alors dans 

une acception restreinte. C'étaitet c'est encore une 
partie de la révolution qui ne saurait se dérouler en 


"y: AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


dehors d'elle; il y aurait des inconvénients à lui 
donner une autre signification. 

La révolution préparatoire, telle que je la com- 
prends, remplacera dans certains cas, la révolution 
transitoire telle qu’elle est définie par MM. Lorentz | 
et Parade. | 

L'établissement du plan d’ erphidaiies repose sur 
plusieurs principes essentiels et qui consistent : 

4° À faire arriver autant que possible chaque 
parcelle en tour de régénération, à l'époque corres- 
pondante à son âge d’exploitabilité et, en tour 
d'exploitation intermédiaire, à l’époque mer: par 
l'état du peuplement; 

2 A prescrire pour les exploitations successives 
des parcelles, un ordre qui soit conforme aux règles 
sur l’assiette des coupes ; 

3°: À former pour la répartition des produits, 
dans le cours de la révolution, un règlement qui, 
tout en se conciliant avec les exigences de la culture, 
soit de nature à assurer le rapport annuel sou- 
tenu. 

L'application de chacun ri ces principes est 
soumise à des conditions particulières plus ou moins 
importantes, plus ou moins impérieuses, et souvent 
opposées, 

Cette opposition est une des plus grandes diffi- 


cultés que l’on rencontre dans l'établissement du plan 


d'exploitation. 
Cet établissement varie suivant les modes d’ex- 
ploitation; nous l’étudierons d’abord, dans le cas le 


DU PLAN D'EXPLOITATION. hr 


_ moins compliqué, c’est-à-dire en admettant que la 
_ forêt à aménager doive être exploitée en taillis 
simple; nous verrons ensuite quelles modifications il 
faut y apporter, quand il s’agit de former une forêt 
> régulière, exploitée d’après la méthode du réense- 
 mencement naturel et des éclaircies périodiques. 
Quant aux taillis composés, comme ils ne dif- 
fèrent des taillis simples que par l'importance de la 
réserve, et comme d’ailleurs cette importance est 
 . subordonnée à des circonstances culturales très-va- 
_ riables, je ne crois pas nécessaire de faire de leur 
aménagement l'objet d’une étude particulière . 


-— 4. Le lecteur qui aurait besoin d’être mieux fixé sur la ques- 
tion de l'aménagement des taillis composés, consultera avec fruit 
_le livre de M. Nanquette, pages 297 et suivantes. (Note de la 
2° édition.) | 


12 


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“ARTICLE PREMIER. 


: FA HAGRT di ns: 


++ DU TABLEAU DES inpibihigens ET DES DIFFICULTÉS : 
Fr dibce! QUE RENCONTRE SARA 

Héirmob alt 
none affaire x un ntnillis dont. la néon 
-est de 200 hectares, dont les parcelles sont toutes 
exploitables à 20 ans,.et par conséquent dans une 
révolution principale de 20 ans‘. Nous avons sous 
-les yeux le cahier de la description spéciale et le plan 
topographique sur lequel les parcelles ont été figu- 
- réestavec: l'indication de leur étendue et de leur âge 
respectifs. Nous remplirons le tableau ci-contre : 
Pour savoir quelle est celle des 20 dernières 
Colonnes à laquelle appartient une parcelle quel- 
_<onque, il suffira de prendre la différence entre l’âge 
_md’exploitabilité et l’âge actuel de cette parcelle; si la 
: différence était de 5 nonÿte, ce serait dans la cin- 


Le LE Dette” sibdé! que. ce cite » 20: ans est mittruire. 
On n’en a pas pris un plus élevé, afin de 808 la démonstra- 
tion. (Note de la 2° édition.) 


180 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


quième colonne qu'il faudrait placer la parcelle en 
question ; si elle était nulle ou négative, ce qui indi- 
querait que la parcelle est exploitable depuis plus ou 
moins longtemps, on la colloquerait dans la première 
colonne. 

Au lieu du classement rigoureux que je suppose 
ici et qui implique que dans la reconnaissance de la 
forêt on est parvenu à distinguer les peuplements 
dont les âges ne diffèrent que d’un an‘, on pourrait 
adopter un classement de 5 en 5 ans, et remplacer 
les 20 dernières colonnes du tableau par 4 colonnes 
seulement, dont la première comprendrait les bois 
exploitables dans la première période de 1 à 5 ans; 
la deuxième, les bois exploitables dans la deuxième 
période de 6 à 10 ans, etc., etc. Je conserverai 
néanmoins le classement que mes lecteurs ont sous 
les yeux, parce qu’il est propre à rendre plus intel- 
ligibles les observations auxquelles la formation 
d’un plan d’exploitation est susceptible de donner 
lieu. 

La contenance de la forêt étant de 200 hectares, 
l’âge d’exploitabilité de 20 ans, il est clair que, si 
toutes les parcelles étaient placées dans les mêmes 
conditions de végétation et présentaient la gradation 
d’âge convenable, on devrait trouver au total de 
chacune des 20 dernières colonnes du tableau un 


4. Contrairement aux règles que j'ai exposées au sujet du 
parcellaire, pages 48 et suivantes, règles qui n’admettent pas non 
plus qu’il faille plusieurs parcelles pour former une coupe. (Note 
de la 2° édition.) 


PP ANUS EU PO ER ET Pr 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 181 


chiffre égal au quotient de l’étendue de la forêt par 
l’âge d’exploitabilité, et, par conséquent, 40 hectares. 

Si, d’un autre côté, en rapprochant l'assiette des 
coupes résultant de ce classement de celle que 
_ prescrivent les règles de la culture, on constatait 
qu'elle n’y déroge pas, on en conclurait que ledit 
classement ne laisse rien à désirer, et il n’y aurait 
plus qu'à l'appliquer sur le terrain, au moyen de 
laies sommières et séparatives, de fossés, de bornes 
et de numéros indicateurs. 

Le plan d'exploitation se trouverait parfaitement 
en harmonie avec les principes que nous avons posés 
dans le premier chapitre de cette étude : la produc- 
‘tion maxima serait assurée, puisque chaque parcelle 
arriverait en tour d'exploitation à l’époque corres- 
pondante à son âge d'exploitabilité; les règles sur 
l'assiette des coupes seraient observées d’après la 
 supposition que nous avons faite ; et le rapport sou- 
tenu serait réalisé, puisque les conditions de végéta- 
tion étant les mêmes pour toutes les parcelles, chaque 
coupe donnerait à surface égale un produit égal ; 
enfin, la méthode d'exploitation du taillis simple 
consistant à couper, à blanc étoc, les peuplements 
destinés à être régénérés, il en résulte que l'on peut, 
sans contrarier l'application de cette méthode, pré- 
ciser l’année et l'emplacement où chaque coupe devra 
être’effectuée, et que les prescriptions du plan d’ex- 
ploitation, à ce sujet, se concilient avec les exigences 

de la culture. 
| Ce plan ne serait copiidhi pas complet, si l’on 


182 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


n’y ajoutait, comme annexe, les indications néces- 
saires, relativement aux coupes d'amélioration (net- 
toiements) et à la réserve en baliveaux de l’âge, 
que l’état. du peuplement ou l'intérêt du propriétaire 
pourrait réclamer. !, 

Les nettoiements danses taillis n’ont, en général, 
aucune importance, au point de vue de leur rende- 


ment. immédiat en matière ou en argent; ils en ont. 


une plus ou moins grande, quelquefois nulle, au point 
de vue cultural; il n’était donc. pas nécessaire de:les 
faire figurer dans le tableau d'exploitation qu’ils 
auraient compliqué sans utilité. Quant aux baliveaux 
à réserver, on ne saurait d'avance en préciser ni le 
nombre ni la grosseur. 

L'aménagement d’une forêt placée dans. les con- 
ditions favorables que nous avons admises serait, 
comme on le voit, bien facile à faire; mais ces con- 
ditions sont, on peut le dire, imaginaires. Nos forêts 
offrent, presque toutes, une grande irrégularité de 
peuplement, qui tient en partie à la nature même des 
choses et. qui les éloigne plus ou moins de la forêt- 
type que nous avons prise pour exemple : tantôt c’est 
l’âge d’exploitabilité qui n’est pas le même pour tous 
les massifs qu’on voudrait comprendre dans le même 
aménagement; tantôt c’est la gradation des âges qui. 
est insuffisante ou qui ne s'accorde pas avec les règles 
d’assiette. des coupes; ou bien c'est la. puissance 
productive du sol qui est inégale... et ces circon-. 
stances fâcheuses font du règlement d'exploitation. 
une opération quelquefois très-délicate et très-ardue. 


RÉ, ct 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 183 


+ ÆExaminons successivement les principaux em- 
Le qui peuvent se produire, et cherchons les 
vie de les surmonter. : 

- Ces embarras sont presque toujours Lens et 
bein en ce sens qu'il est rarement possible 
de remédier à un inconvénient sans en faire naître 
un autres: 

La drbtion est déue #e savoir, entre Fan maux, 
choisir k le moindre. 


ÉMCLEÉNEE 


penid 0! 2: ARTICLE 1. 


25 Han 
| 20.142 CLASSEMENT DES PARCELLES SUIVANT L'AGE, 
D'EXPLOITABILITÉ. 


: . Cette considération de l’âge. d’exploitabilité est 
celle qui se présente la première à l'esprit, quand on 
veut procéder au classement des parcelles dans le 
à es SRE 
= -enaRiel de plus facile que de s'y conformer, ps 
À. âge d’exploitabilité est le même pour toutes les 
nbtelle de la forêt, et qu'aucune raison ne s'oppose 
… àce que les peuplements que renferment ces parcelles 
_ puissent rester sur pied jusqu’à l’époque Farrempon: 
à dante à cet âge. 

. Mais, l'âge d’exploitabilité étant le même pour 
“ii Fi des parcelles, il arrive souvent que, par suite, 
- soit d’une exploitation vicieuse, soit d’un abroutisse- 
| ment; d’une gelée ou de toute-autre cause acciden- 


184 ANÉLRGENENT DES FORÊTS. 


telle, le peuplement d'une ou oi d'entre elles 
exige une exploitation anticipée. Les faits de ce genre 
sont consignés dans le cahier de la description spé- 
ciale; on doit y avoir égard, et pour cela on classe 
les parcelles dans les colonnes du tableau qui corres- 
pondent, non à l’âge normal d’exploitabilité, mais à 
l’âge où elles devront être réellement exploitées, à 
raison de l’état accidentellement mauvais de la végé- 
tation. 

Lorsque l’âge d’exploitabilité n’est pas le même 
pour toutes les parcelles, on adopte pour base du 
règlement d'exploitation l’âge d’exploitabilité le plus 
reculé, et l’on partage en conséquence le tableau de 
classement en autant de colonnes qu’il y a d’années 
dans cet âge. On colloque ensuite les différentes par- 
celles dans ces colonnes, de manière que chacune 
d’elles arrive périodiquement en tour d'exploitation à 
l’âge qui lui convient; mais, pour cela, il faut que 
l’âge d’exploitabilité le plus reculé soit un multiple 
des autres, et, alors, on fait figurer chaque parcelle 
dans le tableau, autant de fois qu’il y.a d’unités dans 
le quotient de cet âge d’exploitabilité par le sien. 
Une parcelle en châtaigniers qui serait, par exemple, 
exploitable à 10 ans, figurerait deux fois dans le 
tableau d'exploitation d’une forêt dont la révolution 
serait fixée à 20 ans. hi 

Lorsque certaines parcelles ont un âge d séloi 
tabilité qui n’est pas renfermé un nombre exact de 
fois dans la révolution adoptée, elles ne peuvent être 
comprises dans le même aménagement, à moins qu'on 


ne se résigne à les couper avant ou après leur âge 
d’exploitabilité, ou qu'on ne les destine à une trans- 
formation qui les ferait rentrer dans les conditions 
désirables. Si un peuplement, exploitable à 45 ans, 
appartenait, par exemple, à une forêt dont le surplus 
serait exploitable à 20, on pourrait classer ce peu- 
plement dans le tableau d’exploitation de manière à 
le faire arriver en tour d'exploitation, dans la pre- 
mière révolution, à l'époque correspondante à son 
âge d’'exploitabilité de 45 ans; seulement, pour le 
… maintenir dans l’aménagement sans être forcé de 
modifier à chaque révolution le plan d'exploitation, il 
… faudrait, à partir au moins de la deuxième, ou porter 
à 20 ans son âge d'exploitation, ou le réduire à 10, 
ou substituer à l'essence dont il se compose, une 
_ essence dont l’âge d’exploitabilité serait conciliable 
avec celui des autres parcelles. 
: La divisibilité de l’âge d’exploitabilité le plus 
4 reculé par les autres, est donc la seule condition 
_ rigoureusement indispensable pour que l’on puisse 
_ comprendre dans le même aménagement, des par- 
: celles dont l’exploitabilité différerait; mais on verra 
._ que cette différence est souvent un obstacle à l’appli- 
cation des règles d'assiette et rend, dans tous les cas, 
l'établissement du rapport soutenu d’autant plus 
. difficile, que les parcelles exploitables à l’âge le plus 
reculé sont moins nombreuses par rapport aux 
: autres.-Aussi, dans la pratique, adopte-t-on pour 
… base du classement l’âge d’exploitabilité qui convient 
A à la majorité des parcelles, et laisse-t-on en dehors 


4 
? 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 185. 


A7. 


186 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


de l'aménagement tous les peuplements exploitables 
à un âge plus avancé, lorqu’on croit devoir se con- 
former à leur âge d’exploitabilité. GrheLE 
Quant aux parcelles exploitables à une époque 
plus rapprochée, leur classement se fait _. l'ai 
indiqué. 6 | SANT EL 
Une fois le ‘elassemént. dés lairesliés établi 
d après les considérations précédentes, il faut voir 
s’il est en harmonie avec les règles sur l'assiette des 
coupes. 


ARTICLE JL. 


CLASSEMENT DES PARCELLES CONFORMÉMENT AUX RÈGLES 
D'ASSIETTE DES COUPES, v# 


Les parcelles de la forêt que nous avons à amé-. 


nager se trouvent dans des conditions de végétation 


tout à fait identiques; les essences dontelles secom- - 


posent, la consistance qu’elles présentent, le sol sur 
lequel elles reposent, les circonstances climatériques 
auxquelles elles sont soumises, sont les mêmes. Elles 


ne diffèrent que par la contenance et par l’âge; mais 


on remarque qu'en additionnant les contenances des 


parcelles de même âge, on obtient, pour chacun des. 


âges que présente la suite des nombres de 1 à 20, si 
même total. | 


Cet état de choses, que je suppose chnstaiél par - 


le tableau d'exploitation dont j'ai donné plus haut 
le modèle, est-il suffisant. pour constituer un état 
normal ? 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 187 


Non, car s’il remplit deux des ‘conditions aux- 
quelles j'ai dit que le plan d’exploitation devait satis- 
faire, il n’est pas prouvé qu’il remplisse la troisième ; 
s’il s'accorde parfaitement avec le principe qui veut 
que les peuplements arrivent en tour d'exploitation à : 
l'époque correspondante à l’âge d’exploitabilité; s’il 
s'accorde aussi bien avec celui qui demande que les 
exploitations soient distribuées dans le cours de la 
révolution, de manière à procurer chaque année un 
produit soutenu; rien ne démontre qu’il se concilie 
avec les règles sur l'assiette des es règles que 
voici 4 "L ‘1 : 

“+ 4° Dans une même série d'exploitation, les coupes 
doivent être assises de manière à se succéder de 
: proche en proche, et recevoir la forme la plus ge 
lière possible. 

2° Elles doivent être disposées de manière que 
les bois d’une coupe en exploitation ne soient pas 
däns le cas d'être transportés à travers d'autres 
coupes précédemment exploitées. 

3 Dans toute forêt ou série d'exploitation, les 
| coupes ‘ doivent être assises de manière que celles 
_ quisont à exploiter au commencement de la révolu- 
tion-se trouvent placées du côté du nord ou de l'est, 
etles dernières du côté du sud oude l'ouest. 

+ l° En montagne, il faut couper d’abord les parties 
inférieures, et conserver les supérieures pour les der- 
nières exploitations. | 

F4. étu en a AY au Cours de culture de MM. Lorentz 
et Parade. | ei 


* 


188 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


5° Dans tous les cas, les coupes en montagne, 
autant que les localités le permettront, devront être 
longues et étroites et présenter leur moindre largeur 
aux vents dangereux. 

Il faut donc que notre plan d'exploitation ne con- 
trarie pas l'application de ces règles; or, en l’exa- 
minant de près, on reconnaît qu'il s’y oppose sur 
plusieurs points : ainsi, une parcelle qui n’a que 5 ans 
est contiguë à une autre âgée de 15 ans et qui, si 
l’on ne modifiait pas le classement, devrait être 
exploitée 10 ans plus tard. Une troisième parcelle se 
trouve en pente immédiatement au-dessus d’une qua- 
trième qui est moins âgée. Les parcelles les plus 
âgées sont situées précisément du côté du sud d'où 
viennent les vents les plus violents. Enfin, aucune 
des coupes n'offre, sous le rapport de la forme, la 
régularité convenable... 

Que faire en présence d’une pareille situation ? 

Si on maintient l'ordre des coupes fondé sur 
l’âge d’exploitabilité, il en résultera des inconvé- 
nients; si on le modifie pour le conformer aux pres- 
criptions des règles d’assiette, ces inconvénients dis- 
paraîtront, mais ils seront remplacés par d’autres. 
Quel que soit le parti que l’on prenne, il faut d’avance 
se résigner à des sacrifices. Seulement, ces sacrifices 
peuvent être plus ou moins considérables, et c’est à 
les diminuer que l’on doit tendre naturellement. Je 
ne saurais indiquer le moyen infaillible d'arriver, 
sous ce rapport, au but le plus désirable. La nature 
des choses ne le comporte pas. Je ne peux qu’ex- 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 189 


poser les principes éintoie qui me paraissent propres 
à éclairer le jugement de l'opérateur et à mes. 2 À 
de faire fausse route 

Les principales circonstances qui influent sur 

importance de l’application des règles d’assiette 
sont : la configuration du sol et le mode d’exploita- 
tion. or 

: C'est en montagne que l'assiette des coupes 
réclame une attention toute particulière, parce que 
les accidents météoriques y sont plus nombreux et 
plus violents que dans la plaine, et que, d’ailleurs, 
la déclivité et l'escarpement du sol augmentent natu- 
rellement les difficultés de la surveillance, de l’exploi- 
tation, et de la vidange. 

Mais c’est dans les futaies que la dérogation aux 
règles d’assiette est surtout dommageable. Dans les 
taillis, et dans les taillis simples notamment, les 
deux premières règles sont, en général, les seules 
qu'il soit véritablement utile d'observer; en effet, les 
vents, dont les trois autres ont pour objet d’atténuer 
la violence, ne sont guère à redouter pour le sous- 
bois qui croît à l’état serré jusqu'au moment de son 
abatage ; qui ne s'élève jamais beaucoup, et qui est 
toujours assez flexible pour plier, sans se rompre ou 
se déraciner, sous l'effort de la tempête. 

» Quant aux réserves, comme elles sont clair-plan- 
tées et qu’elles dominent le massif, la disposition des 
coupes ne saurait avoir, sur leur conservation, une 
influence appréciable. 

Quels que soient, au reste, les motifs qui rendent 


de 


190 AMÉNAGEMENT DES FORÊÉTS. 


l’application de telle ou telle règle utile et même 
nécessaire, il n’est pas indispensable, pour que cette 
application atteigne le but désirable, qu’elle assujet- 
tisse à la même loi toutes les coupes à faire durant 
la révolution. Il y a, dans le nombre des coupes 
dont on ‘veut déterminer l'assiette, une limite au 
delà de laquelle les avantages de certaines règles 
disparaissent complétement. Ainsi, lorsqu'il s’ agira 
d'appliquer la première règle, qui demande que les 
coupes soient assises de manière à se succéder de 
proche en proche, on pourra souvent, sans renoncer 
à aucun des avantages d’une semblable disposition, 
partager la révolution en périodes, et ne réaliser 
l’ordre régulier que pour les coupes de chacune de 
ces périodes, envisagée séparément. : lt 

Les règles d’assiette ne s'accordent pas toujours 
entre elles. Il arrive même fréquemment que l'appli- 
cation de l’une met obstacle à l'application de l’autre. 
Cette opposition est la difficulté à laquelle il faut 
remédier d'abord, en choisissant entre les deux règles 
qui se contrarient celle qui emprunte à la configu- 
ration du so}, à la nature du climat, à l’état du peu- 
plement la plus grande importance. : 00 

IL y à une règle, la deuxième, qui est indépen:- 
dante de l’ordre des exploitations, en ce sens que, 
quel-que soit cet ordre, elle peut être observée au 
moyen de travaux d'art plus ou moins coûteux. Il 
faudrait que ces travaux fussent bien considérables 
pour qu'on s’abstint de les faire, en présence des 
inconvénients qui résulteraient de l’inobservation 


PT CPI PEOUS PPS EEE PONS TR PE 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 191 


LE .. même partielle des règles d’assiette. L'intérêt du 
‘capital que lesdits travaux nécessiteraient, comparé 
+ à la perte que subirait la production annuelle, si on 
Maissait les, choses dans le statu quo, servira de guide 
“pus! les appréciations de cette nature. 

« L'est à l’aide de ces principes que l'on se fixera 
sir d'ordre. dans lequel il serait à souhaiter ‘que les 
parcelles de la forêt à aménager se. succédassent, 
“et sur les changements qu'il y aurait lieu d’intro- 
-duire en D AE dans le classement de, ces 
parcelles +1 
| ENT + it naisinéni, es néeichis qui 
+  -résulteraient de la non-observation des règles d’as- 
wsiette.à ceux que leur application entraînerait, 
“s£e plan d'exploitalion ayant été établi d’après 
“âge d’exploitabilité des différentes parties qui con- 
stituent la forêt, on ne saurait le modifier, d’une 
manière quelconque, sans reculer.ou avancer, pour 
un ou plusieurs massifs, l’époque de l'exploitation, 
vet;-par conséquent, sans porter atteinte au produit le 
«plus avantageux, sans amoindrir le revenu -que la - 
forêt eût éreneile de procurer dans un temps 
-*donné. 

: «nQ1È Tel: est le . inconvénient qu ’entrainerait la. 
_  vmodification du classement fondé sur l’âge d’exploi- 
pts. 

… Quelle est sa gravité? Est-elle plus grande. düand 
con és PV l'âge ne nus que Est 5l on, le 
Fi g devance? | 
On. Naf qué- ces y ne Se 


{ 


192 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


pas une solution rigoureusement exacte. Il serait : 
téméraire d'y répondre d’une manière So soit 
dans un sens, soit dans l’autre. 

On peut, cependant, poser en principe qu'il est 
presque toujours moins désavantageux de laisser 
les bois trop longtemps sur pied, que de les couper 
trop tôt; car, dans le premier cas, on ne perd guère 
que sur la quantité, tandis que, dans le second, on est 
exposé à perdre, à la fois, et sur la quantité et sur la 
qualité. On a vu, d’ailleurs, dans la théorie de l'exploi- 
tabilité, que le retard apporté à l'exploitation d’un bois 
se traduit par une accumulation de produits; sicette 
accumulation est fâcheuse, parce qu’elle ne rend pas 
l'intérêt qu’on aurait pu retirer de ces produits en 
les réalisant et en en plaçant le prix, elle l’est moins 
toutefois que ne le serait une exploitation prématurée 
par laquelle on compromettrait, en même temps, 
son capital et son revenu. aol té 

Voilà un premier principe; en voici un second: 

La perte causée par une exploitation ‘prématurée 
ou tardive est en raison de la différence qui existe 
entre l’âge d’exploitabilité et l’âge correspondant à 
l’époque de cette exploitation ; d’où il suit que c'est 
_ dans les bois qui sont soumis à de longues révo- 
lutions, que les difficultés de l’espèce ont le plus de 
gravité. cast 
Mais, quelle que soit la perte que puissent occa- 
sionner les modifications dont je viens de prévoir 
l'opportunité, il faut considérer qu’elle est subordon- 
née à des circonstances transitoires, destinées à dis- 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 193 


_ paraître ordinairement après la première. révolu- 
tion, c'est-à-dire après le temps nécessaire «pour 
l'établissement de l’état normal. . 

ré Les pertes qui résulteraient de la Bart ns 
tion des règles d'assiette tiendraient, au contraire. 
à: des circonstances permanentes, et se reprodui- 
raient à chaque révolution. Pour qu'il en fût autre- 

ment, il devrait s’opérer dans la configuration du 

| Fa le climat et dans les autres. conditions 
4 de Ja. végétation » des Rencren évidemment 

i&i Si par. FE ‘on n Asties pas . des coupes 
de, proche en proche, en ayant soin de leur donner 
la. forme, la plus convenable, on se condamnerait, 
pour toujours, à aggraver les difficultés de la surveil- 
_ lance,.et les dommages inévitables causés par le 
couvert des arbres voisins, par Feanioions et la 
vidange des produits. 
Sion ne les disposait pas de smsièes à ne point 
. être obligé de transporter les bois d’une coupe en 
. exploitation, à travers d’autres coupes récemment 
exploitées, chaque année verrait se renouveler et 
s'’augmenter les dégâts ruineux occasionnés par le’ 
 charroi des produits, etc. 
1 C'est là un caractère, la permanence des causes 
de perte, qui est de nature à peser d’un grand poids 
dans la balance des inconvénients qu'entraînent, 
d'une part, la dérogation aux règles d’assiette, et, 
dé l’autre, l'exploitation soit avant, soit après l’âge 
| Pope 


194 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Ayant à choisir entre une perte de produits, acci- 
dentelle et temporaire, et un dommage susceptible 
de se renouveler indéfiniment, le choix ne saurait 
être douteux, et le simple bon sens veut qu’on 
prenne les dispositions nécessaires pour faire dispa- 
raître la cause du dommage, sauf à ménager la 
transition de l’état actuel à l’état désirable, de façon 
à répartir sur un plus grand nombre d’années, la 
perte de produits inhérente à une ‘'exploitation tar- 
dive ou prématurée. 

- On y arrivera, en ne modifiant qu'en partie la 
marche des coupes pour les premières révolutions. 

Exemple. 1 s'agit d’un bois partagé en vingt 
coupes, situé en pente rapide, dont les exploitations 
ont toujours été faites, jusqu’à présent, de bas en 
haut, mais dans lequel, l'impossibilité de construire 
des chemins de vidange, impose à l’adjudicataire la 
nécessité de transporter les boïs de la’ coupe en 
exploitation, à travers d’autres coupes précédemment 
exploitées. 

Le maintien d’un pareil état de choses est inad- 
missible. Il faut renverser l’ordre des coupes; mais 
on ne peut songer à effectuer ce changement sans 
transition, puisque de la coupe exploitable on tom- 
berait dans les bois d’un an. On prendra donc les 
dispositions suivantes : 

Pendant la première révolution, les cinq ère 
coupes seront assises dans les bois âgés actuellement 
de 16 à 20 ans ; les cinq autres, dans les bois de 44 
à 45 ans; les cinq suivantes, dans les bois de 6 à 


dés 
D TE NB EN OET S CPPTENN Eee 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 195 


40 ans, et les dernières, dans les bois de 4 
pie 5 ans. 

« Un an après la première révolution, les cinq 
\estiis situées à la partie supérieure de la pente, 
aufont, en commençant par la plus élevée, de 5 ans 
à À an; les cinq autres coupes auront de 10 à 6 ans; 
les cinq suivantes, de 15 à 11 ans, et les cinq plus 
ses; de 20 à 16 ans. 
Pendant la deuxième révolution, on commencera 
le Ébloitations par la coupe âgée de 15 ans, et on 
les continuera en descendant successivement jusqu’à 
la coupe inférieure, qui, alors, aura 25 ans; puis, on 
se portera à la partie supérieure où l’on trouvera des 
bois de 15 ans, et on descendra successivement jus- 
qu’au milieu de la pente où l’on terminera. l’exploi- 
tation par des bois de 25 ans. _ 
.:_ A partir de la troisième révolution, l’ordre défi- 
nitif sera suivi, et, à partir de la-quatrième, chaque 
coupe sera exploitée à l'époque correspondant préci- 
_ _sément à son âge d’exploitabilité. Le maximum de 
. Ja différence entre cet âge et celui où aura lieu l’ex- 
… ploitation, sera de 5 ans, tantôt en plus, tantôt 
. en moins, pendant trois révolutions. Cela n’a rien 

prtitant. 
 Fai supposé un cas extrême et par conséquent 
En. La formation du plan d'exploitation des 
- laillis n’exige pas ordinairement ces ménagements et 
_ ces précautions, dont je viens de donner des exem- 
- ples. Toutes les fois que cette formation n’impose 
. que des transpositions de parcelles d’une faible éten- 


196 AMÉNAGEMENT DES FOBÊTS. 


due ou le redressement des contours des coupes, les 
avantages qu'on réaliserait, en appliquant à lopéra- 
tion les mesures transitoires indiquées précédemment, 

ne vaudraient pas ceux que procurerait ARE « 
ment immédiat de l’état définitif. | 

Voilà pourquoi on se borne le plus souvent, din 
les aménagements de taillis, à partager la forêt en 
coupes parfaitement régulières qu’on exploite ensuite, 
de proche en proche, conformément aux règles d’as- 
siette, en s’efforçant, il est vrai, autant que possible, 
de ne pas trop s'éloigner de l’âge d’exploitabilité, 
mais en considérant toutefois comme secondaires, les 
difficultés que rencontrerait l° pe ag de Dee 
dernière condition. ei 

Dans tous les cas, et quand bien nord on croi- 
rait devoir adopter un plan d’exploitation provisoire, 
il n’en faudrait pas moins arrêter le plan définitif, le 
plan normal, et c’est même la première opération à 
laquelle il conviendrait de procéder. Ce plan n’en 
serait pas moins appliqué sur le terrain, et.le plan 
provisoire ne figurerait que sur le papier, sous la 
forme d’un état d’assiette motivé. 

On connaît maintenant là plupart des obstacles 
qui peuvent s'opposer à l'observation des règles 
d’assiette, et l’on voit qu’il n’y en à pas d’insurmon- 
tables. Cependant il en est un dont je n'ai pas parlé 
et qui le serait : c’est celui qui consisterait dans 
l'existence, au milieu d’un bois exploitable à un cer- 
{ain âge, d’une parcelle dont l’exploitabilité serait 
différente et qui devrait, en conséquence, arriver en 


.DU PLAN D'EXPLOITATION, 197 


tour d'exploitation, deux ou plusieurs fois dans le 
cours de la même révolution. Il est certain que cette 
_ parcelle ne pourrait être placée dans les conditions 
désirables. de végétation, de vidange, et de surveil- 
lance. Aussi, est-ce là un motif de plus pour que l’on 
ne mêle pas, dans le même aménagement, des bois 
exploitables à des âges différents. 
4 Je l'ai déjà dit et je le dis encore en finissant, car 
D j je croïs que cela est de la plus grande importance : 
E piston des deux premières règles d’assiette est 
de rigueur, J'insiste sur ce griannei parce qu'on 
4 serable le méconnaître généralement. : . 
‘ Les dommages causés par le couvert des bois 
F Minh: ceux qui résultent de l'inefficacité de la 
_ surveillance rendue plus difficile; les frais qu’occa- 


. lignes séparatives sinueuses; les dégâts mêmes occa- 
sionnés par la vidange ; tous ces inconvénients ne 

paraissent pas bien graves quand on les considère 

séparément; ils passent inaperçus, et, cependant, ils 

 setraduisent finalement par une diminution, beaucoup 

_ plus forte qu'on ne croit, du produit net. "at 

_ … C'est surtout-en matière d'exploitation forestière 
4 ” + pes de petiles économies. 


_ sionne le réarpentage des coupes ou la recherche des 


198 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS, | 


ARTICLE JV. 


CLASSEMENT DES PARCELLES CONFORMÉMENT AUX EXIGENCES 
DU RAPPORT ANNUEL SOUTENU. 


SECA 


Conditions nécessaires pour que le rapport annuel soutenu 
puisse être réalisé. 


Pour que l’on puisse retirer d’une forêt un 
rapport annuel et soutenu, il faut, de toute nécessité, 
deux choses : 

1° Que les âges des différentes parcelles dont 
cette forêt se compose, soient gradués de manière 
qu'il y ait possibilité de livrer chaque année à 
l'exploitation, une portion du peuplement, sans 
s'imposer de trop grands sacrifices sur l'accroisse- 
ment ; 

2° Que chacune de ces portions soit sisi 
de fournir, à l’époque fixée pour son exploitation, le 
même produit et occupe, en conséquence, une étendue 
inversement proportionnelle à sa puissance PORTER 
comparée à-un terme commun. 

Établissons d’abord dans quels cas et à quelles 
conditions le rapport annuel est possible : nous 
chercherons ensuite les moyens de dr à soutenu ce 
rapport annuel. 

Pour l'intelligence des ivehes AR soit à 
l’âge d’exploitabilité, soit à l’assiette des coupes, il 


Mr ds à 


ME 


.DU PLAN D'EXPLOITATION. 199 


n'était pas indispensable de supposer, comme nous 
l'avons fait dans les chapitres précédents, que la 
gradation des âges était parfaitement régulière et ne 
présentait pas de lacune. Ces principes trouvent en 
effet leur raison d’être, dès que l’on admet qu’il existe 
dans une forêt des massifs dont les âges diffèrent el 
qui. demandent, par conséquent, à ne pel être 
exploités à la même époque. 

La réalisation du. rapport annuel exige, au 
contraire, qu'il y ait dans les âges une gradation, 
sinon parfaitement régulière et complète, telle, du 
moins, que ses défectuosités s'arrêtent à de certaines 
limites. 

b b 2Quelles sont ces limites ? 

… Nous-continuerons à nous maintenir dans l'hypo- 
thèse que l’âge d’exploitabilité de la majorité. des 
pores est de 20 ans. : 

Nous. classons ces parcelles. dans. les diverses 
colonnes du plan d'exploitation, et nous ne trouvons 
rien à porter dans les dix premières colonnes, ce qui 
montre que la forêt ne renferme pas de bois âgés de 
plus de 10 ans. 

Si l’on voulait, dans cet état de choses, réaliser 
D ann le rapport annuel, il faudrait se 
i à exploiter des bois de 10 ans, et à perdre, 
en. conséquence, le bénéfice de l'accroissement des 
10 dernières années. Ce sacrifice serait considérable, 
. etil est d'autant moins admissible que l’on consente 
à le faire, que des bois de 40.ans n’ont, d'ordinaire, 
qu’une très-faible valeur vénale. On attendra, pour 


200 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS, 


commencer les exploitations, que l’on ait des peuple- 
ments plus âgés. | 

Donc, une première condition pour qu’une forêt 
soit immédiatement productive d’un rappôrt annuel, 
c'est qu’elle renferme des bois exploitables ou assez 
près de l'être, pour qüe lon puisse en effectuer 
l'exploitation, sans subir une trop grande perte 
d’accroissement. 

Au lieu de ne renfermer que des bois au-dessous 
de 40 ans, la forêt n’en renferme que de 15 à 20 ans. 

Il est clair que si l’on ne voulait consentir à 
aucune perte sur l’accroissement, l'aménagement ne 
serait pas plus possible dans ce cas que dans le 
précédent, puisque après 5 ans, il n’y aurait plus de . 
bois à exploiter; la forêt se trouverait transformée 
en un jeune taillis de 4 à 5 ans; les coupes sd tit 
être forcément interrompues. | 

Admettons que l’on tienne beaucoup à établir 
immédiatement le rapport annuel. Pour cela, il sera 
nécessaire de n’exploiter qu’en 20 ans le peuplement 
existant, et, dès lors, de laisser sur pied pendant 
encore 20 ans, des bois qui en ont déjà 45. Ces bois 
auraient, à l’époque de leur abatage, 35 ans, soit 
15 ans de trop. Il est probable qu’un âge aussi 
reculé ne saurait convenir ni à l'intérêt bien entendu 
du propriétaire, ni aux exigences de la reproduc- 
tion: 

Donc, une deuxième condition pour qu’une forêt 
soit productive d’un rapport annuel, c'est qu'outre 
des bois exploitables ou sur le point de l'être, elle en 


LT dent de ho md LE Mr an ee EE PER EE 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 201 


_contienne d'assez jeunes pour que l'on puisse, sans 
de trop grands inconvénients, les laisser sur ge 


jusqu'à la fin de la révolution. 

La forêt renferme des bois de 2 ans, de 20 ans, 
et de quelques autres âges intermédiaires; mais les 
bois de 3 à 42 ans manquent complétement. Pour 
assurer la continuité des produits, il faudrait 
remplir ces lacunes et remplacer les bois de 3 à 12 
ans, absents, par une partie de ceux de 2 ans et une 


‘partie de ceux de 43, et exploiter les uns 5 ans 


avant l’âge d’exploitabilité, les autres 5 ans après. 
Lorsque les vides. à remplir sont trop grands, ils 
s'opposent à l'obtention immédiate du rapport annuel. 

Donc, une troisième condition pour qu'une forêt 
soit productive d’un rapport annuel non interrompu, 
c'est que la différence d’âge entre les peuplements 
dont les exploitations doivent se suivre, soit telle 
qu'en la partageant en deux, on ait un nombre 
d'années qui ne dépasse pas le maximum de l'écart 
que l'on est disposé à tolérer, entre l’âge d’exploita- 
bilité et l’âge correspondant à l’époque de l’exploi- 
tation. 

Telles sont les conditions auxquelles le rapport 
annuel est subordonné, lorsque la révolution défini- 
tive est immédiatement applicable. - 

Si l’on était forcé d'adopter une révolution princi- 
pale transitoire, il faudrait, en outre, que cette révo- 
lution fût assez longue pour que les parties de la 
forêt qui auraient été régénérées à son début, pussent 


être de nouveau exploitées à son expiration. 
? 


202 : AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


En résumé, le défaut de gradation dans les âges 
d'une forêt, peut être tel qu’il empêche absolument 
lannualité du rapport; il peut être tel que cette 
annualité ne soit possible qu’au moyen d'une révo- 
lution transitoire. 11 peut enfin ne pas être assez 
grand pour s'opposer à ce qu’elle se concilie avec la 
révolution définitive. | 

Nous avons vu que: l’application des règles 
d’assiette avaitsouvent pour résultat de faire modifier 
le tableau d'exploitation, ce qui entraînait la nécessité 
d'avancer ou de retarder l’abatage des peuplements 
-dont le classement était changé. La réalisation du 
rapport annuel expose aux mêmes inconvénients. 

Nous avons vu que, dans le classement suivant 
les règles d’assiette, pour diminuer, autant que 
possible, la perte d’accroissement occasionnée par la 
non-exploitation à l’âge d’exploitabilité, on pouvait 
être réduit à adopter un état d’assiette, c’est-à-dire 
un plan provisoire d'exploitation. C’est un expédient 
auquel ôn a recours quelquefois pour réaliser le 
rapport annuel, quand la révolution est définitive, et 
qu'il faut nécessairement employer, quand elle est 
transitoire. 

Il résulte de ce qui précède : 

Que lorsque le tableau d'exploitation, dressé 
tout d’abord d’après l’âge d’exploitabilité, a été 
ensuite successivement modifié : une première fois, 
pour qu’il se concilie avec les règles d’assiette; et, 
une seconde fois, pour qu’il présente une succession, 
non interrompue, de coupes annuelles, on peut avoir 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 203 


à assurer le rapport soutenu dans les circonstances 
suivantes : : 

+4° Révolution principale définitio: marche des 
dupes: normale. 

2° Révolution principale défaites: marche des 
coupes, provisoire. 

8° Révolution principale pates marche des 


cale provisoire. ; 


_… 


$ 2. 


_ Du rapport soutenu dans l'hypothèse d’une révolution principale 
définitive et d’une marche Vert coupes, normale. 


1e classement des parcelles dans le tableau d’ex- 
| ploitation est terminé. Chacune des colonnes de ce 
tableau présente au total, une égale contenance; le 
rapport annuel est assuré; lé rapport soutenu ne le 
serait que si les conditions de végétation étaient les 
mêmes pour toutes les coupes : ES elles sont, au 
poar y remédier? 

On a imaginé, à cet effet, plusieurs moyens que 
je. vais passer en revue; je dirai ensuite dans quelle 
mesure leur emploi me paraît admissible. 


xt à Des moyens de remédier à BE inégalité des condi- 
tions de la néséiasion 


? “4 On Pis Pars le Dit par hectare, que don- 


204 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


nera chaque parcelle au moment où elle arrivera en 
tour d'exploitation, et on le compare au produit 
moyen par hectare de la forêt. On obtient, ainsi, 
pour chaque parcelle, un rapport qui exprime de 
combien sa: puissance productive est supérieure ou 
inférieure à la puissance productive moyenne, et qui 
indique, en même temps, ce qu’il serait nécessaire 
d'enlever ou d'ajouter à un hectare de cette parcelle, 
pour en obtenir un produit égal à celui de l’hectare 
pris pour terme de comparaison. à 

Le chiffre qui exprime le rapport par hectare 
entre le produit d’une parcelle quelconque et le pro- 
duit moyen, est donc un coeflicient par lequel il suffit 
de multiplier la contenance réelle de cette parcelle, 
pour. connaître à quel nombre d'hectares d’une 
puissance productive moyenne équivaut cette conte- : 
nance réelle. | 

Ce nombre est substitué dans le tableau de clas- 
sement à la contenance réelle. On modifie en consé- 
quence les totaux des colonnes, et s’ils sont inégaux, 
on y remédie en transportant, de proche en proche, 
et conformément aux principes exposés précédem- 
ment, l’excédant des colonnes trop riches dans celles 
qui ne le sont point assez. Ces transferts en entrai- 
nent nécessairement d’autres lorsqu'on veut opérer 
rigoureusement ; car ils ont pour résultat d'avancer 
ou de retarder l’époque de l'exploitation des par- 
celles déclassées. On tient compte de cette circon- 
stance, et, par des tâtonnements, par des remanie- 
ments successifs, on parvient à rendre les contenances 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 205 


. coupes, inversement sas st: à leur puis- 
sance productive. 
+ Eæemple : Le produit moyen par: Dole æ est 
_ représenté par l'unité. On trouve que, calculé pour 
l’époque de son exploitation, le produit de la parcelle 
A sera.de 50 pour 400 plus fort que le précédent. 
Il est donc représenté par le ‘chiffre 4,50. On 
multiplie la contenance de la parcelle, qui est de 
8 hectares, par 4,50; on obtient 42 hectares. On 
substitue ces 12 hectares aux 8 hectares portés dans 
le tableau de classement. Après avoir opéré de cette 
manière pour les autres parcelles, on constate que 
la,colonne, dans laquelle figure la parcelle A, est 
trop riche et qu'il faut transporter une -portion de 
cette parcelle dans la colonne voisine. C’est ce que 
l'on-fait; mais ce transfert modifie nécessairement la 
puissance produetive, par hectare, de la portion 
déclassée, puisque cette dernière ne sera pas exploi- 
tée à l’époque que l’on avait fixée primitivement. On 
tient compte de cette circonstance, en réduisant ou 
en. augmentant proportionnellement la contenance 
fictive de ladite portion, etc., etc. 
+ La principale difficulté dans l’application de ce 
procédé, porte sur l'évaluation du volume que les 
_ parcelles présenteront, quand arrivera le moment de 
_ lesexploiter. Pour faire cette évaluation, il n’y a que 
deux moyens : calculer, d’après l'accroissement 
passé, l'accroissement futur, et ajouter l’un à l’autre; 
ou bien, adopter comme devant être le volume qu'ac- 
querra cette parcelle, celui d'un peuplement qui serait 


LA 


Ce 


206 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


placé dans de semblables conditions de végétation, et 
qui aurait l’âge fixé pour son exploitation. 

Le calcul de l'accroissement, d’après la marche 
antérieure de la végétation, est impossible dans les 
taillis, par beaucoup de motifs qu’il est inutile de 
développer ici, et, entre autres, parce que leur 
accroissement annuel suit ordinairement, jusqu’à 
l’époque de leur abatage, une progression qui ne 
permet pas de préjuger, avec quelque chance de 
succès, le volume qu'ils acquerront pas celui qu’ils 
ont acquis. 

C’est donc par la comparaison avec des massifs 
situés dans les mêmes conditions de végétation, que 
l’on peut espérer de parvenir au but de ses recher- 
ches. Cette opération est plus ou moins difficile, sui- 
vant l'état des lieux et les caractères plus ou moins 
variés des parcelles que l’on envisage. Les exploita- 
tions effectuées dans la forêt même dont on règle l’amé- 
nagement, suppléent quelquefois aux termes de com- 
paraison que la localité n’offre pas. S'il existait des 
données expérimentales sur l’accroissement annuel 
des différentes essences, suivant les sols, les climats 
et les modes d'exploitation, il suffirait de recourir à 
ces données pour obtenir les renseignements dési- 
rables. Malheureusement elles n’existent pas. 

2° Le second moyen qui a été conseillé pour 
rendre le rapport soutenu, consiste dans l’apprécia- 
tion directe des éléments mêmes de la végétation, 
c'est-à-dire, des circonstances qui sont de nature à 
exercer une influence sur la production. On fait, pour 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 907 


ces éléments, les mêmes calculs que pour les pro- 
duits présumés des parcelles, et on obtient de cette 
manière les coefficients qui servent à fixer les conte- 
nances qu'il faut donner à chaque coupe, pour en reti- 
rer le même produit. 

On prend par exemple, pour rte de compa- 
raison, un massif situé dans des conditions moyennes 
de végétation. On exprime par l'unité l’état du peu- 
plement et la fertilité du lieu d'habitation. On com- 
pare à cette fertilité et à cet état de peuplement, la 
fertilité et l'état du peuplement de chaque parcelle. 
On obtient ainsi, pour chaque parcelle, deux facteurs. 
On multiplie ces deux facteurs l’un par l'autre; le 
produit exprime précisément dans quel rapport se 
trouve la puissance productive de la parcelle que l'on 
considère, avec la puissance productive du massif 
choisi pour terme de comparaison. 

Exemple : La parcelle A renferme un susbdhent 
dont l'état est de un quart moins satisfaisant que 
celui du peuplement moyen pris pour type. Son ter- 
rain, son climat, son exposition dénotent une fertilité 
qui, comparée à celle du peuplement moyen précité, 
est moins bonne de un cinquième. Il en résulte que 
son coeflicient de puissances productive est, pour 
l'état de peuplement, de 0,75, et pour la fertilité du 
lieu d'habitation de 0,80. En multipliant ces deux 
rapports l’un par l’autre, on trouve au produit 0,60. 
Cela signifie que six dixièmes d’hectare ou soixante 
ares d’un peuplement, placés dans des conditions 
ordinaires de végétation, équivalent, en puissance 


“it 
+ 


AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


productive, à un hectare de la parcelle A, et que 
pour rendre, par conséquent, la contenance de cette 
parcelle inversement proportionnelle à sa puissance 
productive, il faut la porter sur le tableau de classe- 
ment pour une contenance fictive ou réduite, égale 
à son étendue réelle multipliée par le coefficient 0,6. 

Des deux procédés que je viens d'exposer, quel 
est le meilleur? 

C'est ce que j'ai maintenant à apprécier. 

Pour peu qu’on y refléchisse, il est facile de 
reconnaître que celui dont on a parlé en dernier lieu 
ne constitue pas une méthode particulière; qu'envi- 
visagé d’une manière absolue et en soi, il serait 
même dépourvu de toute valeur pratique, et qu'il ne 
peut servir qu'à compléter et à contrôler les rensei- 
gnements sur lesquels, par le premier procédé; on 
base ses appréciations. À 

Tous les deux reposent d’ailleurs, éhidèmient, 
sur le même principe. Le second implique comme 
l’autre, que l’on connaît la‘ production possible d’un 
peuplement, à un âge et dans des conditions de végé- 
tation donnés; et lorsqu'on compare entre eux les 
éléments de cette végétation, un terrain à un autre 
terrain, un état de peuplement à un autre état de 
peuplement, on a nécessairement, pour éclairer cette 
comparaison, une idée plus ou moins nette des résul- 
tats que ces éléments seraient susceptibles de fournir à 
des époques déterminées. Sans cette idée indispen- 
sable, la comparaison n’aurait pas de conclusion pos- 
sible. Un terrain n’est préféré à un autre, que parce 


red 


E 
# 


#1 


DU PLAN D'EXPLOITATION. . 209 


que l’on présume qu’il rapportera davantage. Un état 
de peuplement est plus ou moins satisfaisant par des 
raisons analogues. Dans cette matière, comme dans 
toutes celles où il s’agit d'apprécier la valeur relative 
des agents physiques, on ne peut juger des causes 
que par leurs effets. 

Le second procédé n'échappe donc pas à la dif- 
ficulté que présente l'estimation du volume futur. 1] 
rend, au contraire, cette difliculté plus grande en la 
compliquant, et il a, sous ce rapport, des exigences 
auxquelles il est impossible de satisfaire. Ainsi, il 
demande que l’on détermine l'influence particulière 
de chacun des éléments de la végétation sur le ré- 
sultat futur plus ou moins éloigné de cette végétation; 
il demande que l’on fasse, dans ce résultat, la part 
qui revient, soit à la fertilité du lieu d’habitation, 
soit à l’état du peuplement. 4] implique, dès lors, que 
l'on trouvera autant de massifs placés dans des con- 
ditions spéciales qu'il y à d'éléments divers spécifiés. 
Cela n’est pas admissible; et cependant il faut remar- 
quer que, dans l'exposé du procédé en question, on 
a partagé les éléments de la végétation en deux caté- 
gories seulement : l’une comprenant les circonstances 
relatives au peuplement, l’autre celles qui concernent 
la fertilité du lieu d'habitation. Les difficultés ou 
plutôt les impossibilités pratiques de ce procédé, 
dans l'état actuel de nos forêts, seraient bien plus 
manifestes, si l’on voulait former les coefficients de 


_ production en fonction de chacune de ces circon- 


stances. , 


D 7 
FA 
& 


20 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Le second procédé n’a’pas, en définitive, de 
valeur propre, puisqu'il ne supplée pas au premier. 
Il est impraticable, puisqu'il exige des appréciations 
que la nature des choses ne comporte pas. Son mérite 
est d'éclairer et d’assurer la marche de l’opérateur 
qui se propose de déterminer les rapports entre les 
puissances productives de divers peuplements. Ainsi, 
il l’oblige à apporter dans ses reconnaissances de la 
méthode et de la précision; il lui apprend à con- 
trôler, par des rapprochements nombreux; les résul- 
tats d’un premier examen, en vérifiant si les diffé- 
rences dans les productions qui seraient indiquées, 
soit par des exploitations antérieures, soit par des 
tables d'expérience, s'accordent avec celles que pré- 
senteraient les éléments de la végétation. 

A tous ces points de vue, l'examen attentif des 
circonstances qui sont de nature à exercer une in- 
fluence sur la production, est d’un grand secours dans 
les opérations très-délicates auxquelles l’établisse- 
ment du rapport soutenu donne lieu. 

3° Indépendamment des deux moyens sur les- 
quels je me suis appesanti, un peu longuement peut- 
être, au gré de mes lecteurs, on a appliqué à l’éta- 
blissement du rapport soutenu, un expédient qüe je 
dois faire connaître, ne fût-ce que pour fournir une 
- nouvelle preuve de l'importance que certains auteurs 
attachent à l’égalisation des produits annuels. 

On calcule, comme on le fait dans les autres mé- 
thodes, le volume de chaque coupe pour le moment 
de son exploitation; puis on partage la révolution en 


LS 


nl NO 


LL 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 241 


un cerlain nombre de périodes égales qui correspon- 
dent, chacune, à un même nombre de coupes; et, 


enfin, au lieu de fixer sur le terrain les limites des 


coupes annuelles, on subordonne leur étendue, pendant 
chaque période, au volume qu'elles présenteront en 
bloc quand elles arriveront en tour d'exploitation, ce 
qui veut dire que, chaque année, on exploite la quan- 
tité de bois qu'indique le quotient du volume total 
présumé d’une période par la durée de cette dernière. 

Ce moyen n’est pas affranchi des incertitudes 
d'appréciation qu'offrent les précédents ; il y ajoute 
au contraire des chances d’erreur ; il complique l’ex- 
ploitation, il en compromet la régularité, et ce, sans 
compensation, car de deux choses l’une : ou bien les 
exploitations annuelles se renfermeront précisément 
dans les limites qu’auraient eues les coupes, si on 
leur avait donné des contenances proportionnelles à 
leur puissance productive, ou bien elles s’en éloigne- 
ront. Dans le premier cas, les précautions qui carac- 
térisent le procédé en question auront été inutiles ; 
dans le second cas, qui est infiniment plus probable, 
une inévitable confusion se mettra dans l’assiette des 
coupes, et, pour réaliser le rapport soutenu pendant 
quelques années, on se condamnera à des anticipa- 
tions ou à des déficits successifs qui ne tarderont pas 
à l’altérer profondément. 


219 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


9. Des limites dans lesquelles il paraît conve- 


nable de renfermer l'emploi des coefjicients de produc-. 
lion. 


\ 


Il ne faut pas se dissimuler que dans l’état d’ir- 
régularité où sont généralement les forêts de notre 
pays, et en présence du très-petit nombre de ren- 
seignements positifs que l’on a recueillis sur l’ac- 
croissement et la longévité des massifs, la réalisation 
du rapport soutenu, par la méthode des contenances 
réduites, est fort chanceuse. Il est donc prudent de 
ne l’essayer que dans des circonstances bien accusées 
et avec une grande circonspection. 

Entrons, à ce sujet, dans quelques développe- 
ments, cherchons quelques principes : nous les trou- 
verons en nous rendant un compte exact de tous les 
éléments qui sont compris, comme données plus ou 
moins essentielles, dans le problème à résoudre, 
problème qui consiste à déterminer la puissance pro- 
ductive d'une parcelle de bois. 

A quoi tient cette puissance productive ? à quelles 
circonstances est-elle subordonnée ? 

Elle est subordonnée : 

1° Au temps, c'est-à-dire à l’âge qu’aura le 
massif quand il arrivera en tour d’exploitation; 

2° A l’état du peuplement, c’est-à-dire à la 
nature des essences, à leur consistance, à leur végé- 
tation; 

3° A la qualité du sol; 


EAP tour Ce 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 213 


s 


* 4° Au climat, et, principalement, à la situation 
et à l'exposition. 

- Ainsi, le produit d'une parceile, parvenue à l'âge 
fixé pour son exploitation, est la résultante des actions 
combinées de ces diverses causes. 

C’est là ce qui complique la recherche des coefi- 
cients de production. C’est là ce qui rend difficile et 
souvent impossible le choix des peuplements indis- 
pensables pour la détermination de ces coefficients ; 
et le problème serait en conséquence simplifié d’au- 
tant plus, qu'il y aurait à tenir compte d'un moins 
grand nombre des circonstances précitées. 

Or, parmi ces circonstances, les unes sont acci- 
dentelles et temporaires, tandis que les autres sont 
permanentes. Les unes sont susceptibles d'un effet 
dont le caractère favorable ou défavorable peut être 
prévu avec une approximation suflisante, tandis que 
les autres sont susceptibles de se modifier et de ne 
produire aucun des résultats qu'on en attendait. 

L'époque de l'exploitation, lorsqu'elle ne corres- 
pond pas à l’âge d’exploitabilité, est une circonstance 
temporaire; elle disparaîtra presque toujours à la 
deuxième révolution; mais son effet peut être prévu 
avec assez de certitude. 

. Le mauvais état de la consistance ou de la végé- 
tation, s'il résultait des vices de la culture ou d’un 
événement fortuit, serait encore une circonstance 
temporaire, dont, en outre, dans la plupart des cas, 
l'influence ne saurait être préjugée; car il arrive sou- 
vent qu'un massif dont la consistance et la végétation 


_ 


21% AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


ne sont pas ce qu’elles devraient être, se complète et 
répare le temps perdu, avant d'arriver en tour d’ex- 
ploitation. 

Quant aux circonstances qui consistent dun la 
nature des essences, dans l’âge d’exploitabilité, dans 
la qualité du sol, dans le climat, elles sont à la fois 
permanentes et susceptibles d'un effet qu'il est diffi- 
cile sans doute de préciser, mais dont il est possible 
de prévoir avec certitude le caractère. 

On déduit, de ces observations, les principes sui- 
vants : 

Les contenances inversement proportionnalles à 
la puissance productive des parcelles, ne sont presque 
jamais admissibles, lorsqu'elles n’ont d'autre motif 
que la nécessité d'exploiter, pendant une révolution, 
certaines parcelles, soit avant, soit après l’âge d’ex- 
ploitabilité. Elles ne le sont pas davantage, quand la 
différence, dans les productions présumées, tient à 
un état de consistance ou de végélation dont les 
causes sont fortuites, indépendantes des conditions 
naturelles dans lesquelles est placée la forêt. 

Il y a deux raisons pour que l’on ne tienne pas 
compte de ces circonstances : 

La première, c’est qu'il est, en général, comme 
on vient de le faire observer, difficile de déterminer 
leur influence sur la production; la seconde, c’est 
qu'en admettant qu'on y parvint, on se condamnerait 
à modifier de nouveau les contenances des coupes 
après la première révolution, chose que l’on doit éviter 
autant que possible. 


# 


DU, PLAN D'EXPLOITATION. 5 


Les caractères essentiels et permanents, qui dé- 
rivent de l’exploitabilité, de la nature des essences, 
de la qualité du terrain et du climat, sont les seuls 
qu'il convienne ordinairement de prendre en consi- 
dération, et encore faut-il Lg soient bien pro- 
noncés. 

. Si dans nos 200 hectares de taillis d'éspiolae, 
presque tous, à 20 ans, nous avions des” parcelles 
dont l’âge d’exploitabilité serait de 40 ans, il y aurait 
tout lieu de croire que ces parcelles ne fourniraient 
pas, par hectare, le même produit que le surplus de 
la forêt; il serait donc nécessaire, pour réaliser le 
* rapport soutenu, d’augmentér proportionnellement 
l'étendue des coupes dont elles feraient partie. 

La diversité des essences, toutes les autres cir- 


7 $ 
F1 


constances étant égales d’ailleurs, pourrait justifier 


une mesure analogue : ainsi, un taillis de châtaignier 
exploité à 20 ans, fournirait probablement, par hec- 
tare, un plus grand produit qu’un taillis de chêne que 
l’on couperait au même âge. 

Voici des parcelles dont le sol est très-mauvais. 
L'expérience a prouvé que, dans un temps donné, la 
production par hectare de ce taillis est à peine égale 
aux troits quarts de celle du surplus de la forêt. Ce 
n'est certainement pas ayec le maintien du.mode 
d'exploitation en taillis, que le sol pourra jamais 
s'améliorer ; et, dès lors, un coefficient de fertilité est 
applicable à ces parcelles. 

En ce qui concerne le climat, c’est surtout l’in- 
fluence de l'exposition qu'il importe de ne pas négliger, 


916 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


= 


lorsqu'on veut rendre les contenarices des coupes 
inversement proportionnelles à leur puissance pro- 
ductive. Un taillis, situé sur une pente méridionale, 
sera évidemment beaucoup moins productif qu'un 
taillis exposé au nord. 

. Mais, je ne me lasserai pas de le dire, l'émbloi 
des coefficients de production dans la fixation des 


« ‘contenances des coupes annuelles, ne doit avoir lieu 


". que dans des cas-exceptionnels. Il n’y faut recourir 
que lorsque les différences dans les conditions de la 
végétation sont bien tranchées, et portent sur des 
étendues assez considérables, pour que la compen- 
sation entre le bon et le mauvais soit impossible dans * 
la même coupe. Il n’y faut recourir encore que lorsque 
l'établissement du rapport soutenu n’est pas réali- 
sable par le moyen plus rationnel et plus sûr de la 
division préalable de la forêt en séries * 


$ 3. 


Du rapport soutenu dans l’hypothèse d’une révolution principale 
définitive et d’une marche des coupes, provisoire. 


Dans l’article ‘sur la formation du tableau des 
exploitations, conformément aux règles d'assiette, 
j'ai montré qu’il était convenable, pour les taillis, 
quelles que dussent être d’ailleurs les coupes anor- 
males qu’exigerait, pendant plus ou moins longtemps, 


4. Voir pour les séries la quatrième étude. 


. , 
l'état du peuplement, d'arrêter ordre ‘définitif des 
! _*coupes et de l’établir sur le terrain. 

|‘ Dans ce que nous venons de faire FAR ra 
tivement aux exigences du rapport soutenu, iln'y a 
rién qui soit de nature à détruire cette convenance. 
Nous avons reconnu, en effet, qu ny avait pas lieu 
de se préoccuper de l'influence des ci 
accidentelles et temporaires 
-coupes ; or les circonstances qui 


tivent l’adoption 


contenances respectives des coupes doivent être fixées 
comme elles le seraient, si la rotation normale pouvait 
être immédiatement appliquée. 


$ 4 


Du rapport soutenu dans fa d’une révolution principale 
transitoire et d’une marche des coupes, provisoire. 


Les circonstances pe réclament une révolution 
transitoire, sont accidentelles comme celles qui récla- 
ment un plan provisoire, et ne sauraient dès lors 
justifier une division de coupes qu’il faudrait néces- 
sairement modifier à l'expiration de cette révolution 
transitoire. 

Le nombre, la contenance et l’ordre des coupes 
seront donc, comme dans le cas précédent, fixés 
3 sur le terrain conformément aux exigences de l’état 
a normal. 


sur rendement des 


d'un plan provisoire sont nécessairement toujours 
accidentelles et temporaires, et, par conséquent, les 


DU PLAN ho ta ; 7 


Fu, 


_ 2418 AMÉNAGEMENYŸ DES :FORÊTS. 


On pourra toutefois, dans le plan ou plutôt l’état 
d’assiette provisoire qu’on dressera pour la première 
révolution, ajouter arbitrairement à la coupe régle- 
mentaire une contenance plus ou moins grande, selon 
la consistance du peuplement. 

Il faut remarquer que la révolution transitoiré ne 
permettant pas de renfermer les coupes à faire 
durant cette révolution, dans les limites normales, il 
n’y à pas de raison d’ordre qui demande qu'on fasse 
taire absolument devant elle les convenances du rap- 
port soutenu, l'intérêt de l’égalisation des produits 
annuels. 


ARTICLE V. 


RÉSUMÉ ET CONCLUSION. 


Résumons-nous : | 
L'abatage à l’âge d’exploitabilité, 
L'application des règles sur l'assiette des coupes, 
La réalisation d’un rapport annuel et soutenu, 
Tels sont les résultats que l’on doit se préoccuper 
d'assurer dans la formation du plan HAE NEE du 
taillis simple. 
Plusieurs causes peuvent s’y opposer : 
1° La situation relative des parcelles d’âges diffé- 
rents; 
-2° La différence des âges d’exploitabilité des peu- 
plements de ces parcelles; 
3° Le défaut de gradation dans les âges ; 


DU PLAN D'EXPLOITATION. POSE 


hs L'inégalité dans. les puissances ve. 
un parcelles. 

. Les deux premières causes contrarient l'obtention 
‘à deux premiers résultats ; le fâcheux effet de. Y une 
d'elles, la seconde, est irrémédiable : lorsque J'ex- 
ploitabilité n'est pas la même pour toutes les par- 
celles, il n’est pas possible de les faire arriver en 
tour d'exploitation à l’époque correspondant à cet 
âge, sans s’écarter des prescriptions des règles d’as- 
siette, et vice versd; aussi, doit-on s'abstenir de 
comprendre dans le même aménagement des peuple- 
ments exploitables à des âges différents. Quant aux 
obstacles qui proviendraient de la situation relative 
des parcelles, on les surmonie en se condamnant à 
une, perte temporaire d’accroissement; et comme, 
dans les taillis, la révolution n’est pas assez longue 
pour que cette perte soit jamais bien considérable, on 
néglige ordinairement de la répartir sur plusieurs 
révolutions, à moins que l'intérêt de la reproduction 
ne le réclame. 
.: «Les autres causes qui intéressent particulièrement 
le rapport soutenu, exigent aussi des sacrifices d’ac- 
_croissement : ainsi, pour rétablir dans les âges la 
gradation convenable, il est nécessaire d’exploiter, 
une ou plusieurs fois, un nombre plus ou moins 
grand de parcelles, soit avant, soit après l’âge d'ex- 
ploitabilité ; mais, par la raison que je viens de 
donner, il est rare que l’on ne puisse pas, à cause 
des pertes qui en résulteraient, procéder immédiate 
ment à l'établissement de l’ordre définitif. 


220 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Pour ce qui est de l'inégalité dans les puissances 
productives des parcelles, elle tient à plusieurs cir- 
constances plus ou moins dignes d'attention, et qui 
se partagent en deux catégories bien distinctes : 

Les unes sont accidentelles et temporaires, les 
autres sont permanentes. 

Si l’on tenait compte des premières, on nuirait 
infailliblement à la régularité des exploitations, 
laquelle est très-importante à obtenir; on retarderait 
la réalisation de l’état normal, résultat non moins 
désirable. On ne doit donc, en principe, attacher de 
l'importance qu’aux différences qui porteraient sur la 
nature des essences, sur leur exploitabilité, sur la 
qualité du sol, sur la nature du climat, et qui seraient 
susceptibles d'entraîner des variations sensibles dans 
les produits annuels. Pour les taillis, ces variations 
sensibles se présentent rarement, et quand elles se 
présentent, la division de la forêt en séries ‘ permet 
presque toujours d'y obvier et de se dispenser des 
calculs très-incertains que nécessiterait la détermina- 
tion de contenances inversement proportionnelles à la 
puissance productive. — De sorte que, en définitive : 

Lorsqu'on veut régulariser l'exploitation d’une 
forêt traitée en taillis simple, on se borne ordinaire- 
ment à la partager en coupes régulières, d’égales 
contenances, exploitables de proche en proche, dans 
le sens prescrit par les règles d’assiette. 

C'est en cela que consiste l’opération essentielle 


4. Voir la quatrième étude. 


PP 
RU en de EN LI 


pe 
# 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 294 


AE SRE PEER TONER AE En 


de l'aménagement, et mes lecteurs, qui ne l’ignorent 


. pas, auront été peut-être surpris des longs dévelop- 
_ pements et des hypothèses plus ou moins vraisem- 


blables, dont j'ai fait précéder cette conclusion ; ils 

se seront dit plus d’une fois : Est-ce que l’on se 

donne tant de peines pour former le plan d'exploita- 

tion d’un taillis ? est-ce qu'on y met tant de façons ? 
Je dois répondre à ces objections : 

Les diverses combinaisons que j'ai exposées ne 
sont point restées à l’état de pures spéculations; on 
les a pratiquées, on les pratique encore, même dans 
les taillis. Toutefois, leur utilité, pour les peuplements 
de ce genre, est souvent contestable, et si, malgré 
cela, je les ai étudiées avec une attention qui peut, 
au premier abord, paraître superflue, c’est parce que 
je me préoccupais de leur application dans les forêts 
soumises aux autres modes de culture. En traitant de 
l'aménagement des futaies, nous retrouverons les 
exigences que nous avons rencontrées dans celui des 
taillis. Nous les retrouverons agrandies, et nous 
reconnaîtrons que pour y satisfaire, dans la forma- 


- tion du plan d'exploitation, il est souvent nécessaire 
. de recourir aux combinaisons dont il s’agit. 


Parmi les suppositions qui auront probablement 
le plus étonné ceux de mes lecteurs qui ne considèrent 
que le côté pratique des choses, il en est deux sur- 
tout qui ont dû les frapper : 

: J'ai, par exemple, admis la possibilité de distin- 
guer dans la description spéciale et dans le parcellaire 
qui l’accompagne, les peuplements dont les âges ne 


299 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


diffèrent que d’un an. J'ai admis, en outre, que le 
parcellaire pouvait être assez détaillé pour que _— 
coupe contint plusieurs parcelles. 

Ces suppositions, évidemment forcées ‘, avaient 
pour but de faciliter mes démonstrations, de rendre 
plus intelligible, en le complétant, le mécanisme de 
la formation du plan d'exploitation. Pour faire com- 
prendre ce mécanisme, il ne fallait pas seulement le 
réduire à la plus simple expression, en l'étudiant 
dans les taillis ; il fallait supposer toutes les conditions 
propres à mettre en évidence jusqu'aux plus pére 
de ses rouages. 

En théorie, on est absolu, on ne recule dééinl 
aucune hypothèse, lorsqu’elle est utile à une démons- 
tration, et qu’elle n’est pas d’ailleurs manifestement 
contredite par la nature des choses. 

En pratique, on fait ce que l’on peut, dans 
l’ordre des choses réellement utiles; mais pour ne 
point se tromper dans le choix des choses possibles 
et utiles, il est indispensable d’être pénétré de tout 
ce que comporterait l'application rigoureuse de la 
thiorie. 

En réalité, on ne s’attache pas, je l'ai déjà dit, 
dans la division d'une forêt en parcelles, à ces 
nuances à peine perceptibles qui résulteraient de 
l'accroissement d’une année en plus ou en moins. En 
réalité, on fait ordinairement ces parcelles assez 
grandes pour que l’on puisse en former plusieurs 


4. Voir la note page 180. 


DU PEAN D'EXPLOITATION. 993 


coupes; on néglige, enfin, beaucoup de détails aux- 
quels je me suis cependant arrêté. Ai-je eu tort d'agir 
. ainsi? — Je ne le pense pas. 

Il serait peu rationnel de voir la preuve d’un 
esprit minutieux dans les soins apportés à l’étude 
d'une question. Tous les préceptes petits ou grands 
que l’on déduit de cette étude, apprennent, en sup- 
posant qu'ils ne trouvent pas leur application sur le 
terrain, à observer avec méthode et avec fruit, ét à 
ne négliger dans ses investigations aucun point 
essentiel. — C'est un précieux avantage. 

Ce n’est pas dans la théorie que lon doit 
craindre les détails; ils ne sont jamais inutiles quand 
_ils sont mis à la place convenable, et ils sont même 
nécessaires pour l’enchaînement logique des idées, la 
* force du raisonnement. C’est dans la pratique seule- 
ment que les détails peuvent être regrettables; mais 
je crois que c’est précisément quand on s’est appliqué 
à ne pas les négliger dans le premier cas, que l’on 


sen affranchit avec le plus d’à-propos dans le 


second. 


CHAPITRE TROISIÈME. 


DU PLAN D'EXPLOITATION DANS LES FUTAIES 
TRAITÉES 
PAR LA MÉTHODE DU RÉENSEMENCEMENT NATUREL 
ET DES ÉCLAIRCIES PÉRIODIQUES, 


En continuant mon étude sur la formation du plan 
d'exploitation dans les aménagements de forêts, je 
crois devoir prévenir que l’on tirerait peu de profit 
de ce que j'ai.à dire sur les futaies, si l’on n’avait 
pas présents à la mémoire les principes et les consi- 
dérations que j'ai développés, en traitant la même 
question pour les taillis. Je serai en effet obligé, 
d’abord, pour éviter des redites fastidieuses, et en- 
suite pour mettre en relief les points essentiels et 
* fondamentaux de l’opération qui va faire l’objet de ce 
chapitre, de sous-entendre beaucoup de points secon- 
daires et beaucoup de détails qui ont été discutés 
dans le précédent. 

Qu'on ne s’étonnne pas de cet avertissement; si 

je me donne la peine d'écrire, ce n’est pas précisé- 

_ ment pour les gens instruits, c’est pour ceux qui 
seraient embarrassés de donner une définition exacte 
et complète des mots série, affectation, classe d'âge, 
parcelles, etc., et qui procèdent à un martelage sans 


/ DU PLAN D'EXPLOITATION. 295 - 


se soucier d'autre chose que de ce qui se trouve dans 
l'enceinte de la coupe; sans songer qu'entre cette 
coupe et le surplus de la forêt, il existe’ une solidarité 
dont ils devraient tenir compte; sans se préoccuper 
enfin le moins du monde de subordonner leurs opéra- 
tions à un plan d'ensemble, seul moyen pourtant de 
_les faire concourir :à un même but. : 
. Ces erreurs, profondément regrettables, seraient 
évidemment moins communes, si la notion du plan 
d'exploitation était plus répandue. 


ARTICLE PREMIER. 


DES RAISONS CULTURALES QUI ,S OPPOSENT 
A CE QUE L’ON ADOPTE, 
pour LE TABLEAU DES EXPLOITATIONS DES FUTAIES, 
ÿ LE MÊME CADRE QUE POUR CELUI DES TAILLIS. 


pa 


Nous avons à régler la marche et là quotité des 


exploitations d’une futaie, dont la contenance est de 
200 hectares, dont les parcelles sont toutes exploi- 
tables à 400 ans ‘; nous avons sous les yeux le cahier 
de la description spéciale, et le plan topographique 
sur lequel chaque parcelle figure avec l'indication de 
son étendue et de son âge ; éssayerons-nous, et suffi- 


4. Ce chiffre de 100 ans n’a aucune signification pratique. Il 
est évidemment trop faible pour la plupart des futaies, et on 
verra plus tard qu’il convient d’ailleurs d'adopter autant que 
possible pour la révolution un chiffre divisible par un grand 
nombre de facteurs. (Note de la 2° édition.) 


_ 45 


+296 .: AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


rait-il, pour atteindre le but que nous nous propo- 
sons, de remplir un tableau semblable: à celui que 
nous avons dressé pour le:taillis simple et qui com- 
prendrait, en conséquence, autant de colonnes qu’il 
y à d'années dans l’âge d’exploitabilité;: sas ce n-* 
revient au même, dans la révolution >: 2 tt 
Un semblable travail rencontrerait des difficultés 
mécaniques presque insurmontables, dans le grand 
nombre des colonnes entre lesquelles devrait se faire 
la répartition des parcelles ; mais il y atpour ne pas 
l’entreprendre une raison culturale péremptoire, rai- 
son qui consiste en ce que l’application de la mé- 
thode du réensemencement naturel et des éclaircies 
périodiques ne pourrait se concilier avec un plan 
dans lequel la contenance, l'emplacement et l’époque 
des coupes annuelles, seraient :PTCHADIERERE et inva- 
riablement fixés. LL 

Admettoôns en effet que surmontant les difiqule 
tés mécaniques de la:répartition des parcelles, on 
soit parvenu à classer ces dernières dans les cent 
colonnes du tableau d'exploitation ; supposons que, la 
gradation des âges étant parfaitement régulière et les 
conditions de végétation uniformes, on ait trouvé une 
égale contenance pour. le total de chaque! colonne ; 
faisons abstraction des règles d’assiette. 

Nous serait-il permis d'affirmer, en présence de cet 
état de choses, que le plan d’exploitation ne laisse rien 
à désirer, et qu ‘il ne reste plus tits l'appliquer sur le 
terrain? 

sue n'y serions nullement autorisés, et c'est ce 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 997 


dont on s’assurera facilement, si on se rappelle, 
- d'une part, le troisième des principes que nous 
avons posés comme l’une des bases essentielles d’un 
bon plan d'exploitation, et, de l’autre; les règles de 
culture relatives au traitement des futaies destinées à 
être régénérées par les semis naturels. 

: Que dit ce principe? — Que l’on doit établir pour 
la répartition des produits à réaliser, dans le cours 
de la révolation, un règlement qui, tout en.se cônci- 
liant avec les exigences de la culture, soit de nature 
à assurer le rapport annuel soutenu. 

Que disent ces règles ? — Que l’exploitation des 
ibénèifs à régénérer doit être faite en plusieurs fois, 
si l’on veut procurer d’abord l’ensemencement com- 
plet du terrain, placer les graines dans les conditions 
les plus favorables: à leur germination, et ne livrer 
ensuite les jeunes repeuplements aux influences de 
l'atmosphère, qu'avec les ménagements que réclame 
leur tempérament. 

On ne saurait donc prévoir le nombfe d’arbres 
que l’on abattra dans la coupe d’ensemencement ; on 
ne saurail. préciser ni l’époque, ni l'importance, ni 
l'emplacement de la coupe secondaire et de la coupe 
définitive; on ne saurait enfin fixer le rang de cha- 
eune des coupes de régénération, lui donner un nu- 
méro d'ordre et l’exploiter dans l’année correspon- 
dante; et, par conséquent, un plan: dans lequel ces 
différents points seraient arrêtés, violerait les règles 
_ élémentaires de la culture. Nous verrons plus tard 
que tous les efforts faits pour! concilier. ces: règles 


298 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


avec le rapport soutenu et les avantages inhérents à 
la détermination, par contenance, des coupes an- 
nuelles, n’ont abouti et ne pouvaient aboutir à aucun 
résultat pratique. Pour le moment, je me borne à 
constater qu'il n’est pas possible de régler d'avance 
dans une futaie, comme on a proposé de le faire 
dans les taillis, l’ordre dans lequel se succéderont les 
coupes principales annuelles, | 

Ainsi, pas de doute à cet égard : le cadre adopté 
pour la formation du tableau d’exploitation des taillis, 
est inadmissible pour la formation du même ta- 
bleau, dans les futaies traitées par la méthode du 
réensemencement naturel et des éclaircies pério- 
diques. Il est inconciliable avec les principes de la 
culture; surtout quand on les considère : dans ein 
application aux coupes principales. kg #8 


ARTICLE II. 


DE LA DIVISION DE LA RÉVOLUTION PRINCIPALE EN PÉRIODES 
ET DU PARTAGE DE LA FORÊT 
EN AFFECTATIONS CORRESPONDANTES. 


Le cadre: dont nous nous sommes servi pour 
dresser le tableau des exploitations du taillis simple 
offre cependant de grands avantages, auttriple point 
de vue de la simplicité, de la facilité et de la sûreté 
qui en résultent pour la marche de ces exploitations. 
Il est désirable, en conséquence, que l’on s’en écarte 
le moins possible dans la formation du ‘tableau 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 229 


d'exploitation de la futaie, et que l’on y apporte 
seulement les modifications impérieusement comman- 
dées par l'intérêt de la conservation et de la régéné- 
ration des massifs. 

: Si lon ne peut prévoir l’année dans laquelle 
devra se faire l’une quelconque des coupes de 
régénération, sur un point déterminé, on peut, sans 
se tromper, assurer que cette coupe aura lieu dans 
une certaine période de temps. 

: Étant donné un massif exploitable en vingt an- 
nées, si on ne peut, sous peine de compromettre sa 
régénération, régler la contenance des coupes an- 
nuelles et fixer, en outre, l’ordre dans lequel ces 
coupes devront se succéder, on comprend qu’en lais- 
sant à un forestier expérimenté la faculté d’exploi- 
ter ledit massif de la manière qu'il jugera la plus 
convenable, il se charge de le sprl compléte- 
ment dans le délai voulu. 

1 Ceci admis, il s'ensuit que s’il n’est pas pos- 
sible d'arrêter, dans le plan d'exploitation d’une 
forêt divisée en cent parties, exploitables en cent ans. 
l'ordre dans lequel ces cent parties devront être 
successivement exploitées et régénérées, il est per- 
mis de demander et de prescrire que l’on coupe et 
que l’on régénère, dans un certain nombre d’années, 
préalablement fixé et obligatoire, un même nombre 
de parties prises dans leur ensemble. : 

Quel sera ce nombre d'années, quelle sera la 
durée de la période pendant laquelle l'assiette des 
coupes devra rester indéterminée ? 


230 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Ïl est aisé de le deviner: 

Cette durée sera au moins égale au double de 
l'intervalle probable de temps qui séparera, pour 
un même point, la coupe d’ensemencement de la 
coupe définitive. Si cet intervalle est de 40 ans, la 
durée de la période devra être au moins de 20 ans; 
s’il est de 5 ans, la période pourra être réduite à 
10 ans; s’il était égal à zéro, ce qui signifierait que, 
par une seule et même coupe, on pourrait enlever 
tous les arbres exploitables et assurer le repeuple- 
ment, la période deviendrait nulle, et la fixation par 
contenance des coupes annuelles, possible. 

Plaçcons-nous dans la première. hypothèse d’un 
intervalle de 40 ans, entre la coupe d’ensemence- 
ment et la coupe définitive. Supposons aussi, pour : 
ne pas compliquer inutilement.la démonstration, que 
les coupes claires ou secondaires ne soient pas né- 
cessaires, et que les arbres exploitables dans une 
contenance déterminée se distribuent par portions 
égales, entre la coupe d’ensemencement et la coupe 
définitive. Mettons-nous, enfin, en présence de la 
forêt que nous avons déjà prise pour exemple, 
laquelle serait une futaie partagée en cent parties, 
exploitables en cent ans. Cette année, nous nous 
transporterons dans la partie la plus âgée, et nous 
y procéderons à une coupe d’ensemencement ; mais 
cette coupe ne devant nous donner que la moitié des 
arbres que nous aurions à prendre, si nous n'avions 
à nous préoccuper de la régénération, nous comble- 
rons Je déficit en pratiquant une autre coupe d’ense- 


DU PLAN D'EXPLOITATION. | 


17 


mencement sur toute la partie contiguë. L'année 
prochaine, nous ferons, par. des raisons analogues, 
lespremières coupes de régénération sur là troisième 
et la quatrième partie, et dans dix ans; c’est-à-dire 
à l’époque où nous pourrons revenir au point de départ 
pour commencer les coupes définitives, nous aurons 
les vingts parties les plus âgées de la forêt, à l’état de 
coupes: d’ensemencement. Or, il est clair que celles de 
ces vingt parties qui auront été mises les dernières 
en cêt état, ne pourront être exploitées définitivement 
que 40 ans plus tard, c’est-à-dire dans 20 ans. © 
… La durée de Wg période pendant laquelle l’as- 
siette et la contenance des coupés resteront incer- 
taines, dépend donc de la promptitude plus ou moins 
grande avec laquelle les peuplements sont suscep- 
tibles de se régénérer par les semences. Toutes les 
essences ne présentent pas, sous ce rapport, les 
mêmes propriétés. La nature: du climat et la qualité 
du sol:influent d’ailleurs beaucoup sur les repeuple- 
ments naturels. Toutefois, on peut porter en général 
à une douzaine d'années, en moyenne, le délai néces- 
saire pour la régénération suffisamment complète d’un 
peuplement quelconque, si l’on à soin, d’ailleurs, de 
venir en aide à la nature par des travaux intelligents. 
Les forestiers qui ne parviennent pas à obtenir des 
-_ repeuplements naturels, qui sont disposés à les croire 
impossibles, et qui en accusent la force des choses, 
devraient en accuser surtout leur incurie. Il est 
probable qu'ils changeraient d'avis s’ils prenaient 
quelques soins pour faciliter ces repeuplements par 


239 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


des préparations de terrain faites ‘en temps oppor- 
tun, etc. Au surplus, si, malgré toutes les précautions 
prises, il devait s’écouler plus de 10 à 12 ans entre 
la coupe d’ensemencement et la coupe définitive, je 
conseillerais de recourir alors aux repeuplements arti- 
ficiels, afin de ne pas être amené à prolonger la durée 
de la période d'exploitation. En effet, il ne faut pas 
perdre de vue que tout retard dans la régénération 
d’un peuplement exploitable se traduit par une dimi- 
nution dans le revenu, et qu'on méconnaîtrait les règles 
‘ d’une saine économie, si on permettait que le chiffre 
de cette diminution pût s'élever au-dessus des frais 
qu'occasionnerait le semis ou la plantation du ane 
à régénérer ‘. 

Une autre considération pour ne pas on 
au delà de 20 à 24 ans la durée de la période dont 
nous nous occupons, c’est qu'il convient de res- 
treindre, autant que possible, la faculté de com- 
prendre dans les exploitations, des bois qui ne sont 
pas encore parvenus à l’âge d’exploitabilité, 

À ces principes ajoutons-en un autre : il importe 
beaucoup que la période en question contienne un 
nombre d'années qui soit une partie aliquote de la 
révolution. S'il n’en était pas ainsi, on se verrait 
obligé d'adopter pour les périodes successives de 
cette révolution une durée inégale, et on s’exposerait 
dès lors; soit à rester en decà, soit à aller au delà du 


1. Sur la durée de la période, voir la note au bas de la 
page 280. 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 233 


terme reconnu le plus convenable, éu égard aux 


exigences de la culture *. 
Ces préliminaires posés, mes lecteurs doivent 


_ maintenant prévoir quelles sont les modifications que 


nous ferons subir au tableau d'exploitation du taillis, 
pour l’approprier à la futaie. Au lieu de dresser un 
cadre comprenant autant de colonnes qu'il y a d'an- 
nées dans la révolution, et précisant la partie de la 


forêt, la parcelle ou portion de parcelle à régénérer 


chaque année, nous nous bornerons à ouvrir autant 
de colonnes qu’il y a de périodes dans la révolution, 
et à préciser la partie de forêt, les parcelles et por- 
tions de parcelles, à régénérer dans le cours de 
chaque période. Le plan d'exploitation ne fixera 
plus l’assiette et la contenance de chaque coupe 
principale annuelle; il fixera seulement l'assiette et 
la contenance des coupes principales, considérées en 
bloc, à faire dans chacune des-périodes de la révo- 
lution. La révolution principale étant, par exemple, 
de 400 ans, et le temps reconnu nécessaire pour 
régénérer naturellement le peuplement étant de 
40 ans, il ne s’agit plus de former un plan qui 
fournisse, chaque année, une coupe dont le produit 


- soit constant ; il s’agit d'en former un qui partage 


la forêt en cinq parties, exploitables chacune dans 
une période de 20 ans, et qui soient telles qu'on 


4. Quand nous aurons à traiter des conversions, on verra qu'il 
est utile en outre que la durée de la période soit divisible par le 
nombre des périodes, et en général par le plus grand sapin de 
facteurs possible. (Note de la 2° édition.) « 


234 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


en obtienne autant que possible des produits égaux. 

Ces parties de forêt à régénérer successivement 
dans les périodes d’une révolution principale ont reçu 
le nom d’affectations. On les distingue l’une, de 
l’autre par un numéro d'ordre différent, selon qu’elles 
correspondent à la première, à la deuxième, etc., ou 
à la dernière période, et on donne aux parcelles une 
désignation définitive qui permet, au moyen d’un 
indice numérique, de reconnaître à quelle affectation 
elles appartiennent ‘. 


1. Quand les idées que je viens d'exposer sur la formation 
des affectations ont été publiées pour la première fois dans les 
Annales forestières, elles ont soulevé des objections. Voici ces 
objections et la réponse que j'y ai faite. On verra que je suis 
d'accord avec mon contradicteur sur l'influence que peuvent 
avoir les coupes secondaires en ce qui concerne la durée de la 
période; mais je ne peux rien concéder sur les autres points. | 


OBJECTIONS. 


« Monsieur le rédacteur, 


« Dans votre article sur la fofmation du plan d'exploitation, 
vous dites que la durée de la période doit être au moins égale au 
double de l'intervalle qui séparera la coupe d’ensemencement de 
la définitive; si cet intervalle est de dix ans, la durée de la 
période devra être au moins de vingt ans. — Pour le démontrer, 
vous vous placez dans cette hypothèse que les coupes claires 
- n'étant pas nécessaires, les arbres exploitables dans une conte- 
nance déterminée se distribueront par portions égales entre la 
coupe d’ensemencement et la coupe définitive. Partant de là, vous 
arrivez très-logiquement aux conséquences annoncées. 

« Mais si vous vous étiez mis dans une hypothèse plus Con- 
forme à la généralité des circonstances, en admettant, par exemple, 
que la coupe claire doit être faite cinq ans après la coupe sombre, 
la coupe définitive cinq ans après la coupe claire, et que les bois 


DU PLAN RURALE NUE 935 


…Je-viens de déinirer la nécessité de'ne pas se 
Jimiter dans l’année, pour l'assiette des coupes prin- 


exploitables se distribuent par portions pa et par tiers entre 
les trois coupes de régénération, la conclusion eût été bien diffé- 
rente; car on peut dire, en suivant votre méthode de démonstra- 
tion et en se mettant en présence d’une futaie Let en cent 
parties exploitables en cent ans, savoir : 

« La première année, nous nous HÉAERR dbs à partie 
la plus âgée, et nous y ferons coupe sombre; mais cette coupe ne 
devant nous donner. que le tiers du matériel sur pied, nous com- 
blerons le déficit en pratiquant deux autres coupes d’ensemence- 
. ment sur toute l'étendue des deux autres parties successivement 
contiguës. L'année suivante, nous ferons, par des raisons ana- 
logues, les premières coupes de régénération sur les quatrième. 
cinquième et sixième parties, et dans cinq ans, c’est-à-dire à 


: : l'époque où nous pourrons revenir au point de départ, pour com- 


mencer les coupes secondaires, nous aurons les quinze parties les 
plus âgées de la forêt à l’état de coupes d’ensemencement; cinq 
ans plus tard, c'est-à-dire dix ans après l’ouverture de la période, 
ces mêmes quinze parties seront à l’état de coupes secondäires. 
Or, il est clair que celles de ces quinze parties qui auront été 
mises les dernières dans cet état ne pourront être exploitées 
Jap remet que cinq ans plus tard, c’est-à-dire dans quinze 
…« Au résumé, dans la plupart des cas, pour les futaies de 
sapin et de hêtre, ne serait-on pas fondé à dire que la durée de 
la période doit être au moins égale au triple de l'intervalle sup- 
posé constant qui sépare, soit la coupe d’ensemencement de la 
_ coupe secondaire, soit la coupe secondaire de la coupe définitive, 
ou, en d’autres termes, égale à l'intervalle qui s'écoule entre la 
coupe sombre et la coupe définitive, augmenté de sa moitié?. 

« La durée des périodes, e{ par conséquent celle des révo- | 
 lutions, $erait donc ainsi un multiple de trois, dans tous les cas 
où il serait nécessaire de passer par trois coupes, pour consom- 
mer la régénération des massifs. Mais d’autres considérations 
plus importantes devant présider au choix du terme d’exploita- 
bilite, ne sera-t-on pas très-souvent forcé de négliger cette con- 


‘ 


236 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


cipales, dont le plan d’exploitation est destiné à 
régler la marche. La même nécessité existe souvent 


dition, à laquelle vous voulez subordonner la durée des périodes? 

« Voilà ma première objection; je vous demande aussi une 
explication à propos du deuxième paragraphe de la page 285. 
« Une autre considération, dites-vous, pour ne pas prolonger au 
delà de vingt ans la durée de la période, c’est qu’il convient de 
restreindre, autant que possible, la faculté de comprendre dans 
les exploitations des bois qui ne sont pas encore parvenus à 
l’âge d’exploitabililé, » 

« Si je comprends bien, vous entendez par là prendre des 
garanties contre la négligence ou la légèreté des agents chargés 
d'exécuter un aménagement, et suspects d'entamer d’abord les 
massifs les moins âgés. de l'affectation. Mais n’a-t-on pas, pour les 
maintenir dans la bonne voie, un plan d'exploitation spécial, indi- 
quant l’ordre dans lequel les parcelles qui composent cette affec- 
tation devront venir successivement en tour d’exploitation ? Quant 
à ceux qui prendraient à tâche d’enfreindre les dispositions de 
aménagement, les courtes périodes ne les arrêteront pas. Il 
semble, au contraire, que plus la période sera courte, plus sou- 
vent on se trouvera dans la nécessité d’entamer, avant son expi- 
ration, les massifs de l’affectation contiguë, par suite de l’insuccès 
des coupes d’ensemencement ou des coupes secondaires prati- 
quées dans l'affectation de la première période, et, s’il faut ainsi 
anticiper, voilà nos agents pleinement investis de la faculté dont 
vous vouliez les priver. s ‘ 

« Jusqu'à preuve contraire, je ne reconnais donc à la courte 
durée des périodes qu'un seul avantage, celui de faciliter la 
recherche de la possibilité, en diminuant les chances d'erreur 
inhérentes aux calculs d’accroissement. Vous posez ensuite en 
principe que la durée de la période doit être une partie aliquote 
du chiffre de la révolution, sous peine de s’exposer soit à rester 
en decà, soit à aller au delà du terme reconnu le plus couve- 
nable, eu égard aux exigences de la régénération. 

« Cette conséquence me paraît très-contestable, et je n’attri- 
bue à l'égalité des périodes qu'un mérite de symétrie; je vais 
plus loin : il serait plus commode, à mon gré, d'admettre en 


&S ÀR & A 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 237 


* 


pour les coupes intermédiaires, car elles sont plus 
ou moins impérieusement subordonnées aux autres. 


principe l'inégalité des périodes, parce qu'il est rare que les 
parcelles, telles qu’on les,a tout d'abord établies sur le terrain, 
puissent être exactement colloquées dans des périodes égales. : 

« De là résulte que, pour égaliser les affectations périodiques, 
il faut après coup venir scinder les parcelles au moyen de lignes 
de contenance qui compliquent inutilement le parcellaire et sur- 
chargent les plans. Ne serait-il pas plus simple de proportionner 
la durée des périple à la contenance des parcelles ou des groupes 
de parcelles? ' 

« Par. exemple, étant donnée une forêt de: 100. hectares, 
aménagée à cent ans, et partagée sur le terrain d’après les consi- 
dérations de situation, de consistance et de fertilité, en cinq par- 
celles dont les contenances seraient de 40, 42, 45, 48-et 15 hec- 

lares;_ quel inconvénient, je le demande, y aurait-il à affecter 
+ de ces parcelles à une période dont la durée serait égale 
au nombre d'hectares qui y seraient colloqués, la révolution se 
trouvant ainsi partagée en cinq périodes de quarante, douze, 
quinze, etc., années ? Cela serait assurément plus simple. La régé- 
nération de. chaque affectation périodique ne pourrait poni-être 
pas s'effectuer exactement durant la période correspondante, j'en 
conviens, et l'on serait obligé, avant l'expiration d’une quel- 
_ conque des périodes, d'entamer les coupes daas l'affectation immé- 
diatement contiguë; mais c'est ce qui arrive.et. ce qui arrivera 
toujours plus ou moins, quelle que soit la durée des périodes,.et 
ces emprunts peuvent s’opérer, je crois, sans porler aucune 
atteinte à os adoptée. » 


RÉPONSE. 


. nous reproche, d’abord, d’avoir négligé de faire entrer les 
coupes claires dans l'hypothèse que nous avons admise, afin de 
moñtrer comment on pouvait arriver à apprécier la durée de la 
période et l'étendue de l'affectation correspondante. 

On nous prouve en même temps qu’en tenant compte de la 
coupe claire, et en supposant qu’elle ait lieu précisément au 
milieu de l'intervalle de temps qui sépare la coupe d’ensemence- 


238 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


On ne pourrait, par exemple , affirmer que, telle 
année, telle parcelle aura besoin d’être éclaircie , 


ment de la coupe définitive, la durée de la période nécessaire 
pour compléter la régénération de l'affectation correspondante, 
devient égale à cet intervalle multiplié par 4,5. 

Cette dernière proposition est patiteilièné exacte, lorsque la 
coupe claire égale en importance la coupe d’ensemencement ou la 
coupe définitive, et qu'elle intervient en outre précisément au 
milieu de l’intervalle de temps qui les sépare. 

Mais si la coupe claire est plus rapprochée de la coupe défini- 
tivetque de la coupe d’ensemencement, si elle est moins produc- 
tive, si elle se fait en plusieurs fois, dans chacun de ces cas elle 
peut et doit même avoir pour effet de retarder le délai indispen- 
sable pour compléter la régénération He coupés formant l’éten- 
due de l'affectation. 

En conséquence, si l’on ne considère que le nombre des 
exploitations à faire sur un point donné, pour en effectuer le 
repeuplemént naturel, on a raison de regarder notre démonstra- 
tion comme incomplète; mais si l’on nous accorde que la coupe 
d’ensemencement et la coupe définitive sont celles ‘dont l’impor- 
tance et l'écart sont le plus faciles à apprécier, et exercent, en 
outre, le plus d'influence sur le témps que réclame là régénéra- 
tion complète d'un certain nombre de coupes envisagées dans 
leur ensemble, on s’expliquera que, pour ne pas compliquer notre 
démonstration, nous l’ayons dégagée des éléments secondaires et 
variables qui préoccupent notre “pda Sat | 

-‘Répondons aux autres critiques : 

Lorsque nous avons dit qu’il fallait restreindre autant tré pos- 
sible la durée de la période, afin de ne pas être exposé à exploiter 
des bois trop éloignés d’avoir atteint l'âge d” exploitabilité, nous 
sommes partis de celte supposition que les agents chargés de 
l'exécution de l'aménagement auraient le droit et pourraient 
même être forcés de se mouvoir, pour l’assietté des coupes 

annuelles, dans toute l'étendue de l'affectation périodique. 

© Si l'on admettait, au contraire, comme semble le vouloir notre 
correspondant, que l'on pût assujéttir cette assiette à une marche 
précise, au moyen d’un plan spécial d'exploitition, les périodes 


k ._ DU PLAN D'EXPLOITATION. 239 


puisqu'on ne sait pas à quelle époque elle sera régé- 
nr mais on pour ram qu'elle aura rimes de 


Lf 


ca aus plus de raison d’être; car, onnpetiiiins 
sont motivées que par l'impossibilité de concilier l'assiette fixe des 
coupes annuelles avec les exigences de la régénération. 
” “On voit donc que le seul avantage des périodes ne consiste 
pas à faciliter la recherche de la possibilité. en diminuant les 
chances d'erreur inhérentes aux calculs d'accroissement. Si c'était 
à leur seul avantage, comme il serait d’autant plus grand quel 
les périodes seraient plus courtes, on devrait logiquement ne leur 
donnér qu’un an de durée. 

-Mais, cela posé, il est évident que si. l'où veut sorte la lati- 
tude Jaissée, aux agents d'exécution, pour l'assiette des coupes, 
‘dans les limites strictement convenables, il faut que les périodes 
dé la révolution soient égales entre elles, car, sans cela, il v 
*Péiomnit qui seraient nécessairement ou trap longues ou trop 

Supposons, avec notre contradicteur, qu’une forêt ait été par- 
tagée en cinq parties, savoir : la première de 40 hectares, la 
deuxième de 42, la troisième de 15, la quatrième de 18, la cin- 
quième. de,,45; et que chacune d'elles ait été affectée à une 

d’une durée égale au nombre d'hectares qu’elle contient : 

ny aurait-il pas de grands inconvénients à laisser pendant qua- 
rante ans, et pour une affectation qui comprendrait presque moi- 
tié de la forêt, l'assiette des coupes annuelles subordonnée à l’ap- 
préciation, au bon plaisir, à l'arbitraire des agents d'exécution; 
et; s’il n’est pas possible de fixer l'imp ortance, l'emplacement et” 
Vordre des quarante coupes à faire dans cette affectation, ne 
pourrait-on déterminer ces différents points pour un nombre de 
coupes, prises en bloc, inférieur à quarante? L'affirmative n’est 
pas contestable, et comme il conviënt que tout ce qui peut être 
fixé le soit, et qu'on ne s’écärte” de la possibilité par contenance 
que dans la mesure que comportent les exigences de la culture, 
il est certain que l’on ferait une grande faute si F on ne diminuait 
pas la durée de la première ‘période. 

Mais si cette période doit être considérée comme trop longue, 
celle de douze ans séra probablement trop courte, en ce sens 


240 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


l’être dans la période qui suivra celle de’sa régéné- 
ration; en sorte que, lorsque les affectations sont 
constituées, lorsqu'on est fixé sur la période dans 
laquelle une parcelle devra être obligatoirement régé- 
nérée, il devient aisé de se fixef également sur les 
périodes dans lesquelles elle devra être ultérieure- 
ment éclaircie. 

On voit combien la division de la révolution en 
périodes et le partage de la forêt en affectations 
correspondantes, sont de nature à faciliter les opéra- 
tions culturales à faire dans la forêt que l’on se pro- 
pose d'aménager. Ce règlement n’est, toutefois, qu’un 
acheminement au but de l’aménagement; 4} ne sau- 
rait, quelque bien établi qu'il fût d’ailleurs, consti- 
tuer à lui seul le plan d’exploitation; il n’en est que 
la charpente, le. canevas ; il remplit dans l’aménage- 
ment un rôle analogue à celui de la triangulation 
dans la géodésie, et de même que la triangulation 
est faite pour faciliter les levés de détail, de même 


qu’elle ne permettra pas, quelle que soit d’ailleurs l’habileté qu’on 
y apporte, de régénérer dans un aussi court délai les 42 hectares 
composant l’affectation, et que, bien avant d'arriver à l'expiration 
de la période, on se verra dans la nécessité d'anticiper sur l’affec- 
tation voisine. : 

On nous dit, il est vrai, que quelle que soit la durée de la 
période, il est impossible d'éviter que l’on entame avant son expi- 
ration l'affectation contiguë. Nous n’admettons pas d’une manière 
absolue cette impossibilité. Sans doute, les anticipations dont il 
est question sont difficiles à éviter; mais c’est une raison de plus 
pour ne négliger aucune des précautions nécessaires afin d'en 
diminuer au moins les inconvénients. 

Si l’on abandonne ce principe, on tombe dans l’empirisme. 


TR ES ne UE VV st 


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2 

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DU PLAN D'EXPLOITATION. Ut 


le règlement des exploitations par période est fait 
pour faciliter celui des exploitations annuelles ; mais 
iln'y supplée pas. La division de là révolution en 
périodes, et le partage de la forêt en affectations cor 
respondantes, permettent, comme je le montrerai 
plus clairement par la suite, de réaliser lé rapport 
soutenu par période; c'est beaucoup, Sans -doute, 
mais ce qu’on attend surtout de l'aménagement, c’est 
la réalisation du rapport soutenu par année, et, pour 
cela, il faut trouver les moyens dé répartir d’une 
manière égale le produit d’une affectation, entre les 
années de la période correspondante. Ces moyens 
comportent un règlement qui, joint au premier, com- 
plète le plan d'exploitation. 

- Ainsi, dans la présente étude sur le plan d’ex- 
ploïitation des futaies, j'aurai à traiter successive- 
ment : — 

4° De la formation des affectations ; 

2° Du règlement général des exploitations par 
période ; 

_3° Du règlement des exploitations annuelles. 

Mais dans les futaies, plus souvent encore que 


- dans les taillis, l’irrégularité des peuplements con- 


duit à adopter, tantôt une marche provisoire pour les 
coupes, tantôt une révolution principale transitoire 
ou une révolution préparatoire ; et ces nécessités 
donnent lieu à des complications dont je sortirais 
difficilement, si je ne faisais de chacun des cas où 
ellés se présentent, l’objet d’un chapitre spécial. 
J'appliquerai donc mon étude à trois hypothèses : 
416 


212 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


1° Celle d’une révolution principale définitive, et 
d’une marche des coupes, normale ; 

2 Celle d’une révolution principale définitive, et 
d’une marche des coupes, provisoire ; 

3° Celle d’une révolution principale transitoire 
où d’une révolution préparatoire, et d’une marche des 
coupes, provisoire. 


L- CHAPITRE QUATRIÈME. : 


Ë 

| 

| DU PLAN D'EXPLOITATION DANS LES EUTAIES, 

LA RÉVOLUTION PRINCIPALE POUVANT ÊTRE DÉFINTIVE 
| ET LA MARCHE DES COUPES NORMALE. 


MAC ETS 


Li 
ARTICLE PREMIER. #* 


{ 

; ‘ 

d FORMATION DES AFFECTATIONS. 
4 


4e, 


D OI OROUR TR ATETCTERERS 
. 


Tableau des affectations. 


Nous avons affaire à une forêt de 200 hectares, 
exploitable dans une révolution de cent ans. Cette 
révolution a été divisée en cinq périodes égales. Il 
s’agit de partager la forêt en un même nombre d’af- . 
fectations correspondantes. Nous remplironsle tableau 
ci-contre. ae | 
ë J'ai maintenu la première partie du tableau d’ex- 
: ploitation des taillis, partie destinée à recevoir le 
résumé de la description spéciale. On en comprend 
l'utilité. Il est important que le tableau des affectations 


AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


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DU PLAN D'EXPLOITATION. A5 


renferme les indications sommaires, qui sont de nature 
à justifier l’ordre adopté pour la succession des 
coupes; car ce tableau est, comme je l'ai déjà dit, le 
document essentiel et fondamental de l'aménagement, 
et il doit être établi de telle sorte, qu'on puisse à la 
rigueur juger de son mérite, sans recourir à d’autres 
éléments d’ agree que ceux qui y sont con- 
tenus. 

J'ai substitué à la seconde partie du tableau, des- 
tinée à présenter l'ordre des exploitations, cinq 
colonnes dont l’objet est clairement indiqué par leur 
en-tête... On peut regarder chacune d'elles comme un 
compte ouvert à l'affectation dont ‘elle porte le 
numéro. Toutes les parcelles qui devront être régé- 
nérées dans la première période seront:inscrites dans 
la première colonne, et composeront la première affec- 
tation. Toutes celles qui devront être régénérées 
dans la deuxième période seront inscrites dans la 
deuxième colonne, et PRRRRRESS la deuxième affec- 
pererass etc., etc. 

* Mais sur quelles snidiritinle se idnaredt 


+18 décider que telle parcelle doit être régénérée 
__. dans telle ou telle période ? 


On se fondera sur les considérations que nous 
avons fait intervenir dans la dAasian du plan d’ex- 
ploitation des taillis. « 

+ On fera donc le classement des parcelles dans les 
affectations, de manière à rendre possibles des exploi- 
tations qui satisfassent tout.à la-fois, dans la mesure 


que comporte la nature des choses, aux exigences de 


246 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


l’exploitabilité, aux règles sur l'assiette des ps 
et au rapport annuel soutenu. 

Appliquons rapidement à chacun de ces s côtés de 
la question, les préceptes que. j'ai donnés, en traitant 
de l’aménagement des taillis. 


a. 


Formation des affectations suivant l’age d’exploitabilité. 


Si toutes les parcelles renfermaiént dés peuple- 
ments susceptibles de rester sur pied jusqu'au terme 
fixé par la révolution, leur classement dans les affec- 
tations ne rencontrerait aucune difficulté. 

- La parcelle À renferme un peuplement âgé 
moyennement de 35/ans ; elle ne sera exploitable que 
dans 65 ans; on la classera dans l'affectation de la 
quatrième période. | : ob sl deb 

La parcelle B renferme un massif de vieux arbres 
clair-plantés, surmontant un jeune repeuplement ; 
exploitation de ces vieux arbres sous forme de 
coupe secondaire ou définitive est urgente; on les 
classera dans l'affectation de la première ss 

Rien de plus simple. 1&. 0: 

Mais il y a souvent des parcelles dont le peuple 
ment n’est pas susceptible de végéter jusqu’au terme 
fixé par la révolution, et qu’il faut, en Te 
exploiter avant ce terme. 19 

Cette nécessité peut tenir à une circonstance acci- 
dentelle : il s’agit d’un peuplement qui, quoique 


a nt ce mo rot ln 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 947 . 


jeune encore, ne jouit déjà plus d’une vigoureuse 


végétation, soit qu'il ait été abrouti dans sa jeu- 
nesse, soit qu’il provienne de vieilles souches, soit 
.que des éclaircies maladroites aient ébranlé sa con- 
stitution. 

Dans ces divers cas, l'affectation à laquelle une 


parcelle appartient, n’est pas indiquée par la diffé- 


rence existant entre l’âge normal d’exploitabilité et 
l’âge de cette parcelle, mais par le temps, difficile à | 
apprécier d’ailleurs, pendant lequel le peuplement de 
la parcelle en. question pourra rester sur pied sans 
dépérir: 

La nécessité d'exploiter une parcelle avant le 
terme fixé par la révolution peut dépendre d’une cir- 
constance permanente : 

Cette parcelle se compose d’une essence dont la 
longévité est moins grande que celle d’après laquelle 


_a-été fixée la durée de la révolution. Ici, de deux 
choses l’une : ou l’âge d’exploitabilité de cette essence 


est une partie aliquote de là révolution, ou il ne l’est 
pas. Dans le premier cas, on fait figurer la parcelle 
dans autant d’affectations différentes que son âge est 
renfermé de fois dans la révolution; dans le second 
cas, on la laisse en dehors de l'aménagement, à 


_moïns qu’on ne juge convenable d'y pratiquer. une 


substitution d’essences, qui permette de concilier 
son exploitation avec celle du surplus de la forêt, et 
alors-son classement rentre dans les conditions déjà 


prévues. 


Nous avons à nous occuper d une parcelle de pins 


248- AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


ou de bouleaux exploitables à cinquante ans et âgés 
aujourd’hui de vingt-cinq ans; nous la classerons 
dans l'affectation de la deuxièrhe période et dans celle 
de la quatrième. : bnagln San 

On pourrait prévoir des circonstances. où une 
parcelle devrait figurer dans toutes les affectations. 
C'est ce qui aurait lieu s’il s'agissait de comprendre 
dans l'aménagement de notre forêt, exploitable: à 
cent ans, une parcelle exploitable en taie à l’âge de 
vingt ans. 

Mais ce sont là des huilé qui ont ssl 
d'utilité pratique, et que je fais seulement pour me 
pas laisser ma démonstration incomplète. + 

Dans la pratique, on.évite généralement de com- 
prendre dans le même aménagement; -des peuple- 
ments exploitables .à des âges différents; car en com- 
pliquant le plan d'exploitation, ‘ils deviennent en 
même temps une cause de confusion et de difficultés, 
et aucun motif sérieux ne commande de se Legs 
à de tels inconvénients. : 

: [ls deviennent une cause.de confusion et dé diffi- 
cultés; parce qu'ils s'opposent à l'application des 
règles d’assiette; parce qu'ils contrarient la réalisa- 
tion du rapport soutenu; parce qu’ils obligent de 
ramener les ‘exploitations sur un point donné, plus 
souvent que sur les points environnants. | 

Aucun motif sérieux ne commande «de se rési- 
gner à de tels inconvénients: Le plus important de 
tous les intérêts, celui de la consommation, ne saurait 
par exemple y rien gagner : en effet, lorsque le con- 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 29 


sommateur sollicite un produit d’une nature parti- 
culière, ce n’est pas d’une manière intermittente, 
c'est d’une manière ‘permanente; ce n’est pas tous 
les cinquante ans, tous les vingt ans, c’est chaque 
année. Si donc les parcelles de pins, de bouleaux ou 
de taillis, dont je parlais tout à l'heure, étaient assez 
grandes pour fournir chaque année une coupe, il 
faudrait en former une série particulière; dans le 
cas contraire, il conviendrait de les régénérer en 
essences susceptibles de parcourir la révolution appli- 
cable à la masse, et, si cette régénération était im- 
possible, je serais d'avis de les laisser en dehors de 
: péémili 


Hs 
; Formation des affectations conformément aux règles d’assiette. 


Que fnatios doit être examinée à deux suit 
de vue : 

-4* Au point de vue de la marche des 7 
die chaque affectation ; 

2 Au point de vue de la péeitiôn respective que 
les affectations doivent occuper sur le terrain. 

Pour que la marche des coupes, dans chaque 
affectation, puisse se conformer aux règles d’as- 
siette, il est bon que les affectations aient une forme 
régulière; qu’elles présentent leur moindre largeur 
aux vents les plus violents; qu’elles soient traver- 
sées et limitées par des chemins, mais, par-dessus 


250 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


_ tout, qu’elles constituent des masses distinctes et 
séparées, 

Telles sont les dispositions que l’on doit chercher 
à réaliser pour assurer la marche des coupes dans 
chaque affectation. Je, recommande surtout de. ne 
jamais scinder une affectation, quand on n’a pas 
pour le faire des motifs majeurs. | 

La contiguïté des parcelles qui forment une affec- 
tation, n’est pas utile seulement pour l’application des 
règles d’assiette; elle l’est aussi pour l’économie des 
exploitations, lesquelles entraînent nécessairement: à 
leur suite des intérêts nombreux et un matériel consi- 
dérable. Il est très-désirable que l’on n'occasionne pas 
à ces intérêts et à ce matériel des déplacements fré- 
quents et coûteux. Or ces déplacements seraient inévi- 
tables si l’on formait, par exemple, une affectation 
avec des parcelles éloignées les unes des autres, et 
séparées par des massifs appartenant à d’autres affec- 
tations : après avoir fait des coupes d’ensemence- 
ment dans une partie de l’affectation, on pourrait 
être: obligé de les entreprendre dans une autre, 
puis de revenir dans la première pour.les coupes se- 
condaires, sauf à retourner l année suivante dans » 
seconde: si | RTE 

Ce seraient là des bain) très-fâcheut, et 
la:subdivision d’une affectation en deux ou plusieurs 
parties non contiguës, n’en présenterait pas d’autres, 
qu'ils suffiraient pour que l’on dût :s'efforcer de 
d'éviter; ainsi, il est clair qu'il n'importerait nulle- 
ment, au point de vue de la régularité désirable dans 


DU PLAN D'EXPLOITATION. a. | 
se grnéatian des sus. que l'affectation de la première 
période ou celle de la dernière fût partagée en deux 
parties, situées l’une au commencement et l’autre à la 


& . fin de la -série :‘ une pareille disposition: ne serait 


défectueuse que parce qu’elle contrarierait le principe 
d'économie ci-dessus énoncé; ce serait une raison 
suffisante pour ne pas l’admettre. 

Les affectations sont enfin d'autant plus propres à 
faciliter à assurer l'exécution de. l'aménagement, 
qu'elles sont plus ramassées; car la tendance natu- 
relle des agents est, dans l'assiette des coupes, de 
procéder de proche en proche, et il y aurait à craindre 
qu'ils ne négligeassent souvent, des . opérations 
urgentes, s'ils étaient forcés pour cela de se trans- 
porter sur des points trop éloignés de ceux où auraient 
eu-lieu leurs opérations précédentes. 

- On pourrait croire que l’application des. règles 
d'assiette, au point de vue de la position respective 
que les affectations doivent occuper, trouvera presque 
toujours assez de garanties dans les’ dispositions 
arrêtées pour assurer la marche et l'assiette des 
coupes annuelles. I1 ne suffit pas cependant que les 
règles soient observées dans l'assiette des coupes de 
chaque affectation, pour qu’il n’y ait rien à redouter 
de la non-observatiog de ces règles, dans l’assiette. 
des affectations; n'oublions pas, en effet, que nos. 
futaies sont en grande partie situées dans les mon- 
tagnes, où les accidents météoriques sont plus fré- 
quents et beaucoup plus redoutables que dans les 
plaines; qu'elles offrent, par la hauteur des arbres 


259 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


qu’on y rencontre , beaucoup plus de prise que les 
taillis aux vents, à la neige, au givre; que la néces- 
sité d’éclaircir les massifs que l’on veut: régénérer, 
rend plus périlleuse encore leur situation, ‘et que, 
dans de semblables conditions, la prudence exige quel- 
quefois que les règles suivies pour l'assiette des coupes 
dans chaque affectation, le soient! également pour le 
rang, l’ordre dans lequel ces ‘affectations arriveront 
en tour de régénération. Il pourrait être dangereux, 
par exemple, de disposer les affectations de manière 
que les coupes se succèdent en allant du haut en bas 
d’une montagne ou dans tout autre sens qui les expo- 
serait à l’action des vents. L'expérience prouve, en 
effet, que l’on'ne saurait prendre trop de précautions 
pour mettre à l’abri d’un coup de vent, les massifs à 
l’état de coupes secondaires ou de coupes d’ensemen- 
cement, et que la protection qu'offrent pour cela les 
bois de l’affectation dont elles font ah n 'est 4 
toujours suffisante. à F 

Cette considération des obstacles à opposer aux 
vents, est celle dont on doit le plus se préoccuper 
dans l’exploitation des futaies en montagne *. 


1, Quant aux forêts en plaine, c’est en outre aux gelées que l’on 
doit songer quand on règle la marche des coupes, car elles sont 
souvent la principale cause de l’insuccès des repeuplements natu- 
rels ou artificiels, et cette cause motiverait une règle d’assiette 
non moins importante que celles indiquées par le cours de culture. 
Il n’y a. pas un praticien qui n'ait remarqué que les coupes abri- 
tées du côté du nord et de l'est se repeuplent plus vite que celles 
qui sont ouvertes de ces côtés-là, et que les semis y'ont une vége” 
tation re active. (Note de la 2° édition. ) 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 953 


.-Sai exposé et discuté les raisons qui pouvaient 
contrarier l'application. des règles., d’assiette dans. 
l'aménagement des taillis, et j'ai essayé de démontrer 
qu’elles. n’étaient pas de. nature. à : Jnstifer: la non- 
observation de:ces règles. : 
 Quoïque les pertes d’accroissement area er on 

se condamne, quand’ on modifie le classement établi 

d’après l’âge d'exploitabilité, soient beaucoup plus 
considérables dans les futaies que dans les taillis, 
elles ne sauraient cependant prévaloir sur les incon- 
vénients permanents qu'entraînerait une assiette 
vicieuse des coupes ; car ces inconvénients sont de 
leur côté beaucoup plus graves dans les forêts de la 
première catégorie que dans les autres. : 
ñ _ En fait, l'application des règles d’assiette, dans 
Ja: formation du plan d'exploitation des futaies, n’est 

pas aussi embarrassante qu'on serait tenté de le 

croire. . 

: Nos forêts. Pa | été initio, soit par la métlindé D - 
tite et aire, soit par la méthode jardinatoire : dans le 
premier cas; elles ont été exploitées de proche en 
proche ; la gradation des âges y est donc assez régu- 

_ lière; dans le second cas, elles présentent sur tous 
les points des arbres de tous les âges, formant des 
peuplements uniformes dans leur irrégularité, et il 
est par conséquent indifférent, au point de vue des 
convenances de l’exploitabilité, de . commencer les 

-exploitations par un bout ou par un aütre. Enfin, en 
montagne, les coupes ont prèsque toujours été faites 
comme le veut la quatrième règle, c’est-à-dire en 


954 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


commençant par les parties inférieures, et la raison 
en est que cette manière de procéder était la Le 
commode *. 

Quoi qu'il en soit, toutes les fois qu’on spl 
la question de savoir si une parcelle doit être ratta- 
chée à une affectation autre que celle dans laquelle 
son àge l'avait fait classer, on la résoudra en exami- 
nant si cette parcelle est assez étendue, pour qu’il 
ne soit pas nécessaire de combiner l'assiette des 
coupes à y faire, avec l'assiette des coupes dés par- 
celles contiguës. Dans l’affirmative, on devra la 
maintenir-dans la colonne où on l’avait d’abord pla- 
cée; dans la négative, on n’hésitera pas à la collo- 
quer dans la colonne qui comprend les massifs limi- 
trophes. ù 4 

On conçoit done que les exigences dés règles 
d’assiette puissent faire colloquer dans une affectation 
des bois plus jeunes ou plus âgés qu'il ne faudrait, 
si la formation de cette affectation devait être exclu- 
sivement subordonnée à l’âge d’exploitabilité; la 
régularisation de la forêt et les grands avantages qu'on 
a le droit d’en attendre pour l’avenir, le veulent ainsi. 


… 


4. Je crois devoir prémunir les agents contre une erreur trop 
commune dans l'application des règles d’assiette à la formation 
des affectations, erreur qui consiste à croire que lorsque ces règles 
veulent que les affectations se succèdent du nord au sud par 
exemple, il est nécessaire de donner le n° 4 à l'affectation située 
à l'extrémité nord de la forêt, et le dernier rang à l'affectation 
située à l'extrémité sud. Or, on peut donner le n° 4 à telle affec- 
tation qu’on voudra, pourvu que les exploitations marchent _. 
le sens voulu, (Note de la 2° édition.) 


PNEU TS 7 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 955 


Il semble que ce sont là des principes auxquels 
il n'y a rien à objecter, et pourtant que d'étonne- 


. ment ne provoquent-ils pas tous les jours ! Il n’est 


pas rare de voir des forestiers, très-estimables d’ail- 
leurs, se récrier très-sincèrement, lorsqu'on les invite 
à pratiquer une coupe d’'ensemencement dans une 
futaie qui est plus ou moins éloignée d’avoir atteint 
son plus grand'accroissement moyen. C’est qu’ils ne 
comprennent pas qu’au-dessus des besoins du peu- 
plement dans lequel la coupé a été assise, il y a ceux 
de la forêt envisagée dans son ensemble, et ils vou- 
draïent exploiter, ils exploitent trop souvent ce peu- 
plement de la manière qu'ils jugent la-plus conve- 
nable, en égard aux circonstances présentes, sans 
examiner s'ils obéissent ainsi aux PRES de 
l'aménagement. 

Ces erreurs sont fréquentes; elles proviennent 
soit d’un défaut de portée dans les vues, soit d’une 
étude incomplète de l'aménagement que l’on est chargé 
d'exécuter ; il y a, dans tous les cas, d’autant plus à 
les redouter qu’elles ont souvent leur point de départ 
dans un fait sainement apprécié. Les praticiens prin- 
cipalement sont enclins à les commettre, parce qu'ils 
ont l'habitude de considérer les faits en eux-mêmes 
ou dans leurs conséquences immédiates et locales : 
ils n’apprécient que ce qui est sous leurs veux; les : 
circonstances extérieures et médiates leur échappent. 

_ Mais il est évident que si l’on ne consultait, 
pour se diriger dans le martelage d’une coupe, que 
l'état actuel du peuplement, on ne pourrait que per- 


* 


956 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


pétuer le désordre dans une forêt, ou l’y mettre s’il 
n’y était déjà. Aussi ne connais-je pas, dans le con- 
trôle que l'administration supérieure est. appelée à 
exercer sur la gestion de ses agents, d'objet plus 
important que celui qui concerne l’applicätion des 
plans d'exploitation adoptés par elle. 

Les agents n’ont pas toujours l'intelligence ds 
sacrifices qu’il convient de faire à la régularisation 
de la marche des exploitations. Quand:ils ont une 
coupe à effectuer, ils se dispensent volontiers de por- 
ter leurs regards au delà de l’enceinte de cette coupe. 
Is ne sont pas, d’ailleurs, plus que les autres 
hommes, inaccessibles aux tentations de la critique, 
et ils ont bientôt dit : On veut que nous fassions une 
coupe d’ensemencement ici; mais c’est absurde : les 
bois sont encore trop éloignés d’avoir alteint l’âge 
d’exploitabilité; ou bien : On nous condamne à sacri- 
fier ce beau repeuplement, en nous empêchant de le 
dégager du massif qui le domine ; mais cela n’a pas 
le sens commun, ce massif est exploitable, il faut se 
dépêcher de l’abattre. Et c’est par des considérations 
de ce genre qu'on bouleverse les aménagements, 
qu’on compromet l'avenir, et qu'en croyant bien 
faire, on ne fait pourtant qu'empirer les choses. 

Revenons à notre classement. 

Lorsqu'on a arrêté son opinion sur les és 
d’assiette dont l’application à la forêt que l’on amé- 
nage est nécessaire; lorsqu'on s’est fixé sur les dis- 
positions qu’elles réclament, on_s’y soumet rigou-. 
reusement dans la formation des affectations, ce qui 


# 


S'S ant ANR agree 


| DU PLAN D'EXPLOITATION. ‘257 


veut dire'que l’on ne s'arrête ni au désaccord existant 
eùtre l'âge d’une  parcelle:et le rang: de:lä*période à 
laquelle il y a lieu de l’affecter, ni aux sacrifices 


_ accroissement qu TE en être la consé- 


{ 


quence. : RC # cel 8, #h F: OC} 
Mais ce n’est pas: dre ai ‘une Met, pour 


que l’on soit ensuite forcé de régénérer tous les boïs, 
dans là période correspondante à l'affectation dont ils 
font partie. Je montreräi comment, dans la prémière 
révolution,-on est amené exceptionnellement à régé- 
nérer, en même témps que l’affectafion de la -période 
dans laquelle on'se trouve, des parcelles 7e sppars 
tiennent à d'autres affectations! 1 

J'admettrai, jusqu’à nouvel ordre, qe çetté ReA 
gation..ne doive pas résulter des! modifications appor- 
tées au! tableau ‘des affectations, pour le‘ rendre 
conforme aux règles d’assiette,et jervais voir quelles 
sont:celles que le rapport soutenu: 'epoufrait dé son 


côté motiver. i Dre 2 LU q À) 19 l5qé i | 
out 49 51 EPL F3 ; 2 f He x hr # 
mise. dr iv 55e 

Ferration des affectations conformément aux exigences 


2JENOIQS 29! En Fan Eten 281 ne 
>. . n + Tr: 4h 


| outes les sesitée MERS Der té dé, étain 
exploitables dans la: même période, forment ce que . 
_ l’on ‘appelle une classé d'âge. Une! forêt :normale 
exploitable dans une révolution partagée en cinq 
* périodes, doit donc: comprendre cinq classes d'âge; 


distinctes. Cette dénomination de classe d'âge, 
17 


1 


s 


258 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


appliquée aux bois compris dans la même affectation, 
mérite d’être conservée, parce qu'elle est caracté- 
ristique. 

L'aménagement à pour objet de rendre l'état res- 
pectif des classes d'âge aussi satisfaisant que pos- 
sible. Pour qu’une forêt se trouve sous ce rapport 
dans toutes les conditions désirables, il faut : 4° que 
les classes d'âge y soient en nombre égal à celui des 
périodes de la révolution; 2° que la disposition de 
ces classes sur le terrain ne contrarie pas l’applica- 
tion des règles d’assiette ; 3° qu’elles aient la même 
puissance productive, en ce sens qu’elles soient sus- 
ceptibles de fournir, à l’époque où elles arriveront en 
tour d'exploitation, le même volume. 

Lorsque ces conditions n’existent pas, il s’agit de 
les établir, et c’est précisément là le résultat que 
doit avoir le plan d'exploitation. 

Je ne laisserai jamais échapper l’occasion de 
rappeler ces principes, parce qu’ils doivent former 
la préoccupation constante de l’aménagiste, et que 
lorsqu'on ne les perd pas de vue, on est certain 
d'arriver au but. 

Quand on a classé les parcelles dans les colonnes 
des périodes, en se conformant aux exigences de 
l’exploitabilité et des règles. d’assiette, il suffit de 
jeter un coup d'œil sur les totaux de ces colonnes 
pour juger si la forêt que l’on veut aménager, est 
ou n’est pas susceptible d’un rapport périodique; et 
il n’y a.pas non plus de longues réflexions à faire 
pour reconnaître si, ce rapport périodique étant 


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DU PLAN D'EXPLOITATION. 959 


+ 


“péalieabie, il est possible de le Bros soutenu, c'est- 
à-dire constant. se 


Que mes lecteurs veuillent bien ne pas oublier 
que dans ce moment je ne m'occupe que des affec- 
tations ; que je les assimile à des coupes de taillis; 
que la période remplace l’année, et que, d'après 
l’hypothèse dans laquelle je me suis placé, le classe- 
“ment des parcelles, conformément aux règles d’as- 


‘sielle, n’a pas eu pour effet d'augmenter l'écart qui 


doit normalement exister entre l’âge qu'ont les bois 
actuellement, et celui qu’ils auront lorsque l’affecta- 
tion à laquelle on les a rattachés, arrivera en tour 
d'exploitation. 

+ Cela étant bien compris, si aucune classe d'âge 
ne fait défaut, on en conélura qu’il existe les élé- 
ments indispensables à une suite non interrompue 
d'exploitations périodiques. Dans le cas “contraire, 
on avisera aux moyens de suppléer les classes d'âge 
absentes par des emprunts faits aux classes exis- 


“ante<, et c'est alors qu'il sera utile de se rappeler 
les règles que j'ai énoncées dans le chapitre relatif 
‘aux taillis. 


D’après ces règles, des exploitations annuelles ne 
peuvent être entreprises et continuées sans interrup- 
tion que lorsqu'il y a des parcelles exploitables, des 
parcelles assez jeunes pour atteindre, sans dépérir, 
le terme de la révolution, et des parcelles intermé- 
‘diaires telles que la différente d'âge la plus grande 
entre deux peuplements à exploiter successivement, 
ne dépasse pas le double de l'écart tolérable entre 


260 AMÉNAGEMENT, DES FORÊTS. 


l’âge d’exploitabilité et l’âge de l’exploitation, écart 
qui, dans aucun cas, ne doit être assez grand |lui- 


même, pour compromettre la régénération naturelle: 


des massifs. | b ap 

À l’aide de ces règles fôrt simples, on parviendra 
sans beaucoup. de peine à remplir, autant que pos- 
sible, les lacunes qui s’opposeraient à la. périodicité 
des exploitations. Si c’est l’affectalion de la première 
période, ou, en d’autres termes, la première classe 
d'âge qui manque à l'appel, on pourra la remplacer par 
une partie de la deuxième classe d'âge et une partie 
de la dernière; si c’est la troisième classe d'âge, on 
pourra la remplacer par une partie de la deuxième 
et une, partie de la quatrième; mais :ces transposi- 
tions devront se faire desproche en proche, avec des 
peuplements contigus, de manière à ne pas déranger 
les dispositions prises conformément aux règles d’as- 
siette, et à reculer, plutôt qu'à avancer, l'épaane de 
E © exploitation effective des peuplements. ( 

Ce qui manque ordinaïrement dans nos: forêts, ce 
ne sont_ni les bois exploitables, ni les bois des. der 
nières périodes, ce sont les bois d'âge moyen..La 
- substitution de: la méthode du réensemencement 
naturel et des éclaircies périodiques au régime à.tire 
el aire, substitution qui. remonte à une cinquantaine 
d’années, est en partie la cause.de cet état de choses. 
Dans les coupes de régénération, auxquelles. ils ont 
procédé, les, agents. n'ont; pas toujours pris: les 
mesures, nécessaires pour. assurer ile repeuplement 
naturel, etils ont laissé s *accumuler les coupes d'en- 


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— 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 961 


semencement, dans l’attente d'un repeuplement que 


Chaque nouvelle année de retard rendait plus impro- 


bable. Dans les coupes d'éclaircie, ils ont trop 
généralement cédé au désir de procurer des produits 
au Trésor, en faisant disparaître les vieux arbres de 
préférence aux jeunes. On ne saurait leur en vouloir, 
puisque l'absence de tout plan d'exploitation ne 
leur permettait pas de se guider dans ces opéra- 
tions ; d’après la composition et la distribution des 
classes d'âge, et qu’en outre, parmi les sujets qui 
rompent la régularité d’an peuplement, les plus 
gros sont naturellement ceux qui attirent le plus 
l'attention, et dont l'enlèvement paraît à priori le plus 
— Le rapport soutenu serait assuré par période, si 
lé$ parcellés à exploiter dans chacune d’elles, c’est- 
à-dire les affectations de ces périodes, occupant 
d’égales contenances, renfermaient des massifs, simi- 
laires quant aux phases probables de leur dévelop- 
pement, et gradués quant à l’âge, de manière à 
être ni plus ni moins âgés les uns que les autres, 
lorsqu'ils arriveraient en tour d’exploitation. 

‘Mais ces conditions favorables ne se rencontrent 
jamais, et on doit dès lors se demander s’il ne con- 
vient pas de donner aux affectations des contenances 
inégäles, afin de corriger l'inégalité de puissance pro- 
ductive des parcelles qui les composent. 

Les facteurs dont on se sért pour faire ces sortes 
de corrections :ne sauraient, comme je crois l’avoir 
prouvé, se déduire de l'appréciation directe des élé- 


Tee 


262 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


ments qui concourent à la production, tels que le sol, 

l'exposition, le climat, l’essence, l’état plus ou moins 

serré, etc. Ils se déduisent des renseignements que. 
l’on possède, sur la production effective de peuple- 

ments, placés dans les mêmes conditions de VAESHHIORE, 

que ceux de la forêt qu'on aménage. 

Or j'ai fait observer, en traitant. du plan d’ Hs 
tation dans les taillis, qu’en allant à la recherche de 
ces peuplements comparables, on se lançait dans des 
difficultés d'appréciation très-nombreuses, très-déli- 
cates, presque insurmontables ; et ce, pour n’obtenir 
souvent qu’un très-mince avantage, et perpétuer dans 
les classes d'âge une fâcheuse inégalité. 

J'ai donc émis l'opinion que les procédés indiqués 
pour rendre les contenances des affectations inverse- 
ment proportionnelles à leurs facultés productives, 
avaient une valeur pratique: fort contestable, 

Je maintiens cette opinion. 

Mais la question est grave: on me nérdonaërs 
d'insister. Il s’agit de détruire des préjugésenracinés, 
des illusions généralement répandues. 

Je veux prouver qu'à raison de l’ incertitude des 
moyens d'appréciation dont on dispose, il convient 
d'adopter comme règle générale, pour les affectations, 
des contenances égales. 

Je dirai ensuite dans quelles circonstances parti- 

culières et dans quelle mesure, les SKSAR AR à cette 
règle peuvent être admises. 
_… À: Des motifs qui doivent faire adopter en général, 
pour les affectations, des contenances égales. — Mon- 


_ DU PLAN D'EXPLOITATION. 263 


trons de nouveau d’abord que les méthodes préten- 
dues différentes, par lesquelles on a cherché à déter- 
miner les contenances inversement proportionnelles 
à la productivité du lieu d'habitation, reviennent 
toutes à fixer par hectare le produit de chaque par- 
celle pour le moment de son exploitation; à com- 
parer ce produit à un terme commun, et à faire 
figurer les parcelles dans le plan d'exploitation pour 
des contenances qui soient, avec les contenances 
réelles, dans un rapport inverse de celui trouvé 
entre la production présumée de chaque parcelle, et 
la production adoptée pour terme commun de com- 
Pen 

: En effet, voici en quelques mots ce qu ‘indiquéot 
les auteurs qui se sont occupés de résoudre le pro- 
blème dont il s’agit. 

Ceux-ci veulent : 4° que l’on détermine le volume 
actuel de chaque parcelle ; 2° qu'on y ajoute celui 
dont elle sera susceptible de s’accroître, en supposant 
qu'élle reste encore sur pied jusqu’au milieu de la 


période à laquelle elle est provisoirement affectée; 


8° que l’on porte ces volumes dans la colonne ouverte 
à ladite période; 4° que l’on procède enfin à l'égali- . 
sation des totaux des périodes par des transferts de 
volümes de la colonne la plus riche dans celle ‘qui 
l'est le moins, en ayant soin de tenir compte des. 
diminutions ou des augmentations que l'accroissement 
pourrait subir par suite de ces transferts. 

- Ceux-là comparent la production présumée par 
hectare de chaque parcelle, au moment fixé pour son 


26/ AMÉNAGEMENT DES FORÊTS.. 


exploitation, à une production arbitraire. quelconque 
prise pour type et terme commun de comparaison; 
ils multiplient la contenance réelle de chaque parcelle 
par le rapport numérique qui résulte de cette compa- 
raison; ils substituent ces contenances fictives aux 
contenances réelles dans les colonnes des périodes, et 
ils procèdent enfin à l’égalisation des totaux de ces 
colonnes par des transpositions qui, au lieu de porter 
sur des volumes, comme srene ee> RENE sur 
des contenances. FE PISE 
Enfin, d'après d’autres auteurs, Jess étémotts de 
la production d’une parcelle étant pris pour unité; on 
établit les rapports qui existent entre cette unité.et la 
puissance des éléments de production des autres par- 
celles, et on fait de ces rapports le même ae on 
des rapports précédents. | | 
Ces trois manières de procéder s'appuient évider- 
ment sur la même base, et la première ne se distingue 
des deux autres que parce que la production à laquelle 
on compare toutes les autres, est la production elfec- 
tive moyenne au ion d'être une ae arbi- 
traire. | 
Dans tous les cas, ” c'est le seul point Spa. 
il s’agit de prévoir plus ou moins longtemps à 
l'avance le produit que donnera un peuplement lors 
de son'exploitation. C’est là qu'est la pierre d’achop= 
pement, qu'est la difficulté, difficulté qu’on peut dissi- 
muler, mais qu’on ne saurait éluder, et qui reste tou- 
jours aussi grande, quel que soit le moyen dont on se 
serve pour la surmonter. | 


ns dut, d'OS à Ep LEE 


- DU PLAN D'EXPLOITATION. 265 


Ainsi, par Jestonhéyi quand, pour déterminer la 
production ultérieure de-chaque parcelle, on calcule : 
4° le volume actuel: qu'elle contient ; 2° le volume 
dont elle s’accroîtra; on a recours à des movens 
qui peuvent dissimaler, mais qui, en réalité, ne 
diminuent pas les difficultés inhérentes à cette déter- 
mination.. Sans doute, le volume actuel est appré- 
ciable d’une manière suffisamment exacte, lorsqu'il 
s’agit d'un peuplement dont tous les sujets sont assez 
forts pour être cubés. individuellement. Si ce peuple- 
ment.est âgé, on peut également, sans s’exposer à 
de;:grandes erreurs, se baser sur son accroissement 
moyen antérieur, pour apprécier son- accroissement 
futur; mais ce n’est pas pour les parcelles qui sont 
destinées. à être exploitées prochainement, que la 
recherche du produit qu'elles donneront est embar- 
rassante;, c'est pour celles qui ont encore à rester 
longtemps sur pied; et, plus les bois sont jeunes, 
plus on risque de se tromper, soit dans l'estimation 
du volume actuel, soit surtout dans l’appréciation de 
laccroissement futur : dans l'estimation du volume 
actuel, par suite de l'impossibilité de procéder à un 
cubage individuel de tous les sujets qui composent 


. le peuplement; dans l'appréciation de l'accroissement 


futur, parce que l'accroissement moyen acquis dif- 
fère d'autant plus de l'accroissement moyen à acqué- : 
rir, que les bois sont plus éloignés de la phase de 
leur plus grand, développement, et que d’ailleurs, 
les: chances d'erreur qui accompagnent les calculs 
sur l'accroissement, augmentent nécessairement avec 


266 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


le nombre d'années sur lequel portent ces calculs. 

Aussi, pour les jeunes bois, est-on forcé de recou- 
rir à des tables de production ou à des peuplements 
exploitables et placés dans les mêmes conditions de 
végétation que ceux dont on s'occupe. 

On n'échappe pas non plus à cette sécontité] 
lorsqu'au lieu de comparer les productions, on pré- 
tend arriver au même résultat en comparant les cir- 
constances sous l'influence desquelles elles sont appe- 
lées à se réaliser. Si le lecteur veut bien se reporter 
aux observations que contient à ce sujet le chapitre 
sur les taillis, il y verra que cette prétention ne sau- 
rait être prise au sérieux que par les gens qui se 
payent de mots ; que substituer la cause à l’effet dans 
l'énoncé du problème à résoudre pour déterminer la 
puissance productive des parcelles, ce n’est pas sim- 
plifier la question, c’est, au contraire, la compliquer 
sans faire disparaître aucune de ses difficultés; car, 
dans l'étude des phénomènes de la végétation, les 
causes ne s’apprécient que par les effets. 

Voici un sol quelconque, mettez-le entre les mains 
d'un chimiste ; il n’y découvrira pas, quelle que soit 
son habileté, la quantité de matière végétale qui 
pourra s’y développer dans un temps donné. 

Une circonstance dont on fait grand cas dans 
l'examen de celles qui sont de nature à exercer une 
influence sur la production, c’est l’état de consistance 
du peuplement. Eh bien! je le demande à tout 
homme de bonne foi, quelle conclusion peut-on tirer 
de l’état de consistance d’un gaulis de quinze ans, 


da td oui sd One. à DES, 


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PE A RE A AE Re à 


F 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 267 


soon au volume qu’il présentera quand il en 
aura cent? 

LE! faut donc en revenir tomontes à la comparaison 

des productions, par conséquent, aux tables d'ac- 
croissement ou, à défaut, au cubage de parties de bois 
placées dans les mêmes conditions que celle qu'on 
envisage, et l'examen des éléments de la production 
n'a d'autre avantage que d’assurer le bon choix des 
peuplements choisis pour termes de comparaison. : 
.:, Quels que soient, en définitive, les moyens que 
l'on adopte pour la recherche du produit que donnera 
une parcelle à l’époque fixée pour son exploitation, 
le succès de cette recherche est fatalement subor- 
donné à la découverte d’un peuplement exploitable, 
soumis aux mêmes influences que celui dont on veut 
ainsi prévoir la possibilité. 

Or, cette découverte est extrêmement difficile, et, 


‘avouons-le, presque impossible dans l’état actuel du 


peuplement de nos forêts. On chercherait peut-être 
vainement en France un seul massif exploitable, qui 
pût être présenté comme l'expression exacte de la 
puissance productive normale d’un terrain. Cela n’a 
rien d'étonnant, quand on songe pe c'est à peine 
depuis une quarantaine d'années qu’on y pps le 
procédés d'une culture rationnelle. 

‘On sait maintenant à quoi s’en tenir sur le nsie 
des, coeflicients de production, sur l'utilité -qu’on 
en. peut retirer pour l'établissement. dù rapport 
soutenu. Le rôle qu'on a voulu faire jouer à ces 
coefficients est, disons-le, une véritable illusion, qui 


268 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


prouve une fois de plus la funeste influence que peut 
avoir sur le bon sens et le jugement” l'habitude des 
solutions mathématiques. — ?’ + 

On est trop disposé de notre temps à transformer 
les questions en problèmes d’algèbre ou de géomé- 
trie; il y en a qui ne sont pas susceptibles d’une 
solution exacte, c’est un malheur auquel il faut se 
résigner. La question que nous re en ce moment 
est de ce nombre. eu 

Ilne faut pas que la formel’ éréons sur le fond ; 
que l'apparence soit prise pour la réalité. Ce fatras 
de calculs minutieux et compliqués dont on surcharge 
le tableau des affectations, quand on veut tenir 
compte de toutes les influences qui réagissent sur la 
végétation, ne peut avoir de mérite qu'aux yeux de 
gens superficiels ; il n’accuse en réalité que des pré- 
tentions à l'exactitude, et comme il se fonde sur des 
appréciations presque toujours arbitraires, on: peut 
véritablement le comparer à un monument ne serait 
bâti sur le sable. : 

Au reste, si le "Apport star est une bonne 
chose; s’il est à désirer qu'on puisse l'obtenir pour 
chaque forêt, chaque série, il ne faut pas cependant 
s’en exagérer l'importance et oublier que, comme il 
intéresse surtout .la consommation, e’est surtout 
par bassin de consommation qu’il y a lieu de l’établir. 
Envisagées de cette manière, les atteintes qu'il 
pourrait éprouver sur un point, perdront beaucoup 
de leur gravité, si, comme il est probable, elles 
doivent trouver des compensations sur d’autres. 


Lz2 


DU PLAN D'EX PLOITATION. , 269 


2 On: jrsioit donc : la réalisation du rapport soutenu 
pes 4.08 une pe Spas Ne demändé 
lotrabiditéne et ve sûreté ds opérations et. je conclus 
en conseillant, comme l'ont fait avant moi les auteurs 


de la Culture des bois, de donner autant que pire 


aux afféctations des contenances égales. : 


#1 2 Des motifs: qui peuvent: fairé adopter: jour les 
affectations; des. contenances réduites. — 11 n'y a:pas 


_ de règle sans ‘exception, et, daus les pays de mon- 


tignès. surtout, il existe quelquefois, entre les cir- 
constances! qui influent sur là végétation, des diffé- 
rences :tellement tranchées, qu'on ne saurait les 
négliger- 

sie quel ve est=il permis d'en ‘enir 
comp ; 

Ces ait viéuvent divuitouiffatsiests Elles le 
sat lorsqu'elles portent sur l’âge; la Consistance, 
l'essence même, s’il entre dans les prévisions qu’elle 
devra être rémplacée: Dans aucun de ces cas, je ne 
les crois de nature à justifier une inégalité dé conte- 
narices dans les affectations. Je l'ai dit pour les tailis, 
je le répète pour les futaies. Voici pourquoi : S"s 
-rSupposons:que! l'on soit parvenu à se fixer sur le 
rendement futur. de: chaqné parcelle, à raison de 
toutes les circonstances, quelles qu'elles soient, dont 
ce rendement dépend. Supposons: que, par suite des 
différences de puissance productive qui existént entre 
ces parcelles; on ait jugé convenable, dans l'intérêt 
du rapport soutenu, de transférer la parcelle B, dont 


ä 


270 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


le coefficient est de 0,8, de la troisième période dans 
la deuxième. Voilà une parcelle qui, par le fait de 
cette transposition dans une période qui avancera 
l’époque de son exploitation, mérite qu’on lui donne 
un autre coeflicient de production; car celui qui lui 
a été appliqué étant fonction de toutes les circon- 
stances dont le rendement dépend, l'est dès, lors, de 
l’âge d’exploitabilité, ou mieux, du temps pendant 
lequel ladite parcelle avait été destinée à rester sur 
pied. En conséquence, si on l’a fait figurer pour 
X hectares, dans la troisième période, on devra la 
faire figurer pour X’, en la colloquant dans da 
deuxième, et la soumettre dès lors à un nouveau 
remaniement. 

D'un autre côté, la régularisation de la forêt 
implique la fixation de l'étendue respective des affec- 
tations, c’est-à-dire des classes d'âge; et l’on conçoit 
que cette fixation ne saurait être définitive, si on la 
subordonnait à des influences essentiellement tempo- 

raires. Ces influences n’existant plus, il deviendrait 
nécessaire de modifier les affectations et de retarder, 
par suite, l’époque à laquelle leurs limites cesseraient 
d’être provisoires. 

La production subirait enfin des atteintes inévi- 
tables, si, pour la rendre soutenue, on augmentait 
“par de nouvelles transpositions, l'écart occasionné 
déjà par l'application des règles d'assiette, entre l’âge 
de l’exploitabilité et celui de l'exploitation. 

Donc, en admettant que l’on parvint, chose 
presque impossible, à recueillir des données exactes 


M NET OR Te I TE PINS 


Re ns cet intl 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 271 


sur le rendement probable de chaque parcelle, lors de 
son exploitation, on ne pourrait les utiliser pour la 
réalisation du rapport soutenu immédiat, sans se 
condamner à des tâätonnements, à des remaniements 
sans fin, et dans tous les cas, à une diminution de 
production, c’est-à-dire à des résultats contradictoires 
avec le but que l’on se propose sata l’on haie Bhoil 


‘une forêt: 


Cependant, its ; s'il se trouvait des affec- 
tations qui continssent la moitié de leur étendue en 
vides, et qui fussent productives, par suite, d’un 
rapport moitié moindre, n’y aurait-il pas lieu de leur 
donner une étendue un peu plus grande ? — Non, 
parce qu'après que ces vides auraient été repeuplés, 
il faudrait de nouveau changer la contenance des 
affectations, sous peine de retomber dans les incon- 
vénients qu’on avait voulu éviter. Tout ce que l’on 


pourrait faire, serait de décider qu’exceptionnellement 


à la règle générale, pendant la première révolution, 
certaines parcelles ne seront pas régénérées dans les 
périodes correspondantes ; mais cet expédient 
implique l'adoption d'un plan provisoire, et j'ai 
annoncé que l'étude de ce plan serait l’objet d’un 
chapitre spécial. 

J'insiste donc sur ce principe : les affectations ne 
doivent jamais être modifiées, par suite des différences : 
accidentelles, et par conséquent temporaires, qui 
porteraient sur l'âge, la. consistance et même parfois 
l'essence des peuplements. : : 

Mais, dans les conditions dela végétation, il yen a 


279 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


qui peuvent être considérées, comme immuables ; ce 
sont, par exemple, celles qui tiennentau climat, à l’ex- 
position, à la nature des essences, à la qualité du sol; 
et ces-conditions sont quelquefois tellement différentes 
d'une parcelle à une autre, que l’on nesaurait vraiment 
être autorisé à passer outre, Ilest.cértain qu’une affec- 
tation située sur une rampe exposée au midi, ne rap- 
portera pas, toutes les autres conditions étant égales 
d'ailleurs, autant que celle qui occupera un versant 
septentrional; et qu'un massif reposant sur un sol 
substantiel, frais et: profond, rappôrtera plus que 
celui qui croîtra sur un: terrain uisisri sec et'sans 
profondeur. 94 
‘Onsait qu'il est de priricipe de composer) gutsnt 
que possible, les affectations, de: manière que les 
bonnes: parties compensent les mauvaises. OÜn sait 
aussi-qu'au moyen de la division d'uneforêt en séries, 
on parvient souvent à éviter les :embarras  qu'occa- 
sionnént, dans la formation des affectations; les diffé 
rences de fertilité des parcelles. Néanmoins, on. doit 
prévoir des cas où ces moyens seraient insuffisants 
pour corriger les-grands écarts. que présenteraient 
* les rendements probables des affectations: 8 
Dans ces cas-là, mais dans ces cäs-là seulement, 
on pourrait donner aux affectations, des contenances 
inversement proportionnelles :à leur puissance pro- 
ductive,;.en s’aidant, pour établir ce rapport entre 
les puissances productives, de toüs: les: éléments 


d'appréciation que fourniraient les tables d'expéz. 


rience, les observations direétés, la tradition surtout. 


a. 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 273 


S © Pour ne point se tromper trop grossièrement dans 
une opération de ce genre, il faut être Hs Brccri 
menté et très-circonspect. 

C’est surtout lorsque les différences &nl les con- 
ditions de végétation, portent sur |la qualité des 
terrains, que les erreurs sont à craindre: Il_n'en 
est pas des sols foresliers, ne l'oublions pas, 
comme des sols agricoles. Ceux-ci sont bien connus ; 
les relations qui existent entre leur nature et le 
produit qu'ils peuvent donner, sont bien établies ;- 
on peut assurer que telle terre ne produira que du 

| seigle, et qu’elle en produira en moyenne tant 

 d'hectolitres. Pour les forêts il n'y à guère de 
mauvais sols, en ce sens que dans presque tous, les 

1 bois peuvent prospérer ; tel terrain qui, dénudé et” 

desséché, ne paraît propre à rien, est cependant: 
absolument semblable, sauf l’humus et la fraîcheur, 

- à celui qui porte une magnifique futaie. 

On ne saurait donc être trop prudent lorsqu'on 
recherche l'influence que peut avoir la qualité du sol 
sur la production forestière Quant à l'influence de-- 
l'essence, du climat, de l'exposition, elle est moins 
douteuse. : 

Ces réflexions faites, je n’ai qu’un mot à ajouter 
sur l'emploi des coefficients de production. Lorsque 
ces coefficients sont fixés, on multiplie la contenance 
réelle de chaque parcelle par le coefficient y relatif, 
% et on porte le résultat de cette multiplication sur le 
. tableau des affectations, qui est modifié en consé- 
quence conformément au modèle suivant. 


18 


AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


274 


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DU PLAN D'EXPLOITATION. 275 


_:. On procède à l’égalisation des totaux des conte- 
nances fictives, par des transferts, en se conformant 
aux préceptes que j'ai donnés, et on obtient ainsi, 
pour les affectations, des contenances réelles inver- 
sement proportionnelles à leur puissance productive. 


ARTICLE IT. 
4 FER D À À £ 
:; RÈGLEMENT GÉNÉRAL, DES EXPLOITATIONS PAR PÉRIODE. . 


+ Quand la révolution principale peut être défini- 
tive, et le plan d'exploitation normal, le règlement 
des exploitations par période est peu compliqué. On 
ne change rien à la première partie du tableau des 
affectations, et l’on substitue dans la seconde partie, 
les mots parcelles à régénérer dans la première, la 
” deuxième; la troisième période, etc:, aux mots clas-- 
sement des parcelles dans l'affectation de la première, 
la deuxième, la troisième période, etc.; tous les bois 
compris dans la colonne affectée à la première période . 
devront être régénérés, la révolution étant de.100 ans, 
et la période de 20, dans les 20 premières années 
tous ceux. compris dans la colonne affectée à la. 
deuxième période, dans les 20 années suivantes, etc. 
:: Mais les coupes de régénération, autrement dites 
coupes principales, ne sont pas les seules qu'il y ait 
à faire dans une futaie, et si, dans les’‘taillis, les net- 
toiements et les éclaircies sont des opérations excep- 
tionnelles et, dans tous les cas, peu productives, “il 


Me AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


n'en est pas de même dans les futaies. Ici, les exploi- 
tations de l’espèce-ont une grande utilité, sous le 
rapport cultural, et sont en outre très-recomman- 
dables par les avantagès matériels qu’elles procurent 
immédiatement. C'est: une première raison pour qu'on 
les fasse figurer sur le tableau des exploitations. En 
outre, une éclaircie, pour être bien faite, ne demande 
pas seulement que les agents d'exécution se confor- 
ment aux exigences actuelles, et à ce qu’on appelle 
les circonstances intérieures du peuplement ; elle 
demande surtout qu'ils aient connaissance et qu'ils 
se préoccupent du rang que ce peuplement est ap- 
pelé à prendre dans l'échelle des âges, Comme il 
est très-rare de rencontrer des massifs homogènes ; 
comme les sujets de différents âges s’y trouvent or- 
dinairement entremêlés , il importe beaucoup, pour 


qu'une éclaircie atteigne le but qu'on doit se pro= 


poser, que les agents d'exécution sachent quel ‘est 
l’âge qu'il convient de faire prédominer dans un peu- 
plement, et qu'ils connaissent en conséquence pen- 
dant combien de temps ce peuplement aura à rester 
sur pied, avant d'arriver en tour de régénération. 
Mais pour cela, il est nécessaire de faire figurer lés 
nettoiements et les éclaircies sur le tableau des ex- 
ploitations; il'est nécessaire que ce tableau indique, 
sinon l’année précise, du moins la période de la 
révolution dans laquelle une parcelle devra être net- 
toyée ou éclaircie. 

-Cette indication n’est d’ailleurs duleniént embar- 


rassante : 


RÉ e ER AE ge di Le Si tai cils oo su 


DU er D'EXPLOITATION. 277 


PE ES EE 2. 


Les périodes embrassent presque toujours un laps 
de temps.plus considérable que celui qui, d’après les 
règles de la culture, doit s’écouler entre deux éclair- 
cies successives ; et il en résulte qu’il y a lieu de 
porter chaque parcelle dans toutes les périodes, soît 
pour être nettoyée, soit pour être éclaircie, à l'ex- 
ception pourtant de la période dans laquelle elle aura 
été portée, pour être exploitée en coupe de régéné- 
ration ‘. ; s | € 

Ainsi, la parcelle R, qui figure sur le tableau 
comme devant être régénérée dans la première pé- 
riode, devra y figurer en outre comme devant être 
nettoyée ou éclaircie dans les autres périodes. Seule- 
ment, pour éviter qu’on ne confonde, sur le tableau 
des exploitations, les coupes d'amélioration avec les 
coupes principales, on a soin d’affecter a:1x unes-et 
aux autres, pour chaque période, une colonne spé- 
ciale ;: et le tableau des exploitations, par période, 
devient alors conforme au modèle ci-contre. 


1. Cette exception ne s'applique pas toujours aux coupes de 
nettoiement qui peuvent être nécessaires pour une parcelle dans 
la période mème où elle a été régénérée. (Note de la 2° édition.) 


AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


278 


“poog | ‘ou | “og. | “1004 | “1004 | 1904 | 3004 ‘1904 
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ail. nt 


PER RTE 


- DU PLAN D'EXPLOITATION. 279 


(Comme nous avons supposé que l’état de la forêt 
permettait de fixer dès à présent et d'une manière 
définitive l’ordre des exploitations, en totalisant les 
contenances portées dans les colonnes du tableau, on 
devra trouver pour chaque période une étendue au 
moins égale à la contenance totale de la forêt. 


L) 
ARTICLE TILL 
… | ét 
. RÈGLEMENT SPÉCIAL DES EXPLOITATIONS ANNUELLES 
PENDANT LA PREMIÈRE PÉRIODE. 


L 


Coupes principales. tre Si la forêt à aménager 
pouvait être exploitée à blanc étoc; s’il était permis 
de compter sur la régénération naturelle, malgré 


J'abatage, en une fois, de tous les arbres existants 


sur-une contenance donnée ; ou bien, si l’on trouvait 
économique de remplacer le repeuplement naturel 
par un repeuplement artificiel, et que celui-ci n'eût 
besoin, pour réussir, d'aucun abri, le règlement des 
exploitations annuelles s’effectuerait en partageant 
chaque affectation en vingt parties, ayant des conte- 
nances égales ou inversement proportionnelles à leur 
fertilité. On suivrait, pour la division de chaque 
affectation en coupes annuelles, les mêmes règles que 
pour l'aménagement d’un taillis. 
- - Mais, je l’ai dit, la nécessité de n’exploiter qu’en 
plusieurs fois les arbres existants sur un point donné, 
afin d'en assurer la régénération naturelle, s’oppose à 


280 AMÉNAGEMENT. DES FORÊTS. 


l'adoption de cette manière toute simple de procéder ; 
et c’est ici que l'aménagement des futaies exige des 
opérations qui n’ont aucune analogie avec celles que 
comporte l’aménagement des taillis. 

Jusqu’à présent, tous nos efforts ont tendu, dans 
notre étude sur l'aménagement, à baser les.exploita- 
tions sur la contenance, à cause de la simplicité, de 
la rapidité et de la sûreté que cette méthode est de 
nature à imprimer à l'assiette des coupes. Nous 
sommes forcé maintenant de recourir à une autre 
base, car nous essayerions vainement de concilier la 
possibilité par contenance avec les exigences du rap- 
port soutenu et de la régénération naturelle. On l’a 
tenté cependant, et il paraît qu'on y a presque 
réussi ‘ ; mais, sans nul doute, cette expérience a eu 
lieu dans des conditions tout à fait exceptionnelles, 
et l’on ne saurait s’en prévaloir quand il s’agit de 
poser des règles d'une application générale. On con- 
çoit, par exemple, que dans une futaie de hêtres, 
reposant sur un sol substantiel, dans un climat tem- 
péré, croissant enfin dans des conditions favorables 
à la fertilité des arbres de cette essence et à la ger- 
mination des semences, on précise, sans s’exposer à 
de trop grands mécomptes, les époques auxquelles 
devront avoir lieu, sur un point donné, les coupes de 
régénération *. Le jeune plant de hêtre résiste long- 


1. Voir les Annales de 1848, p. 158. 
2. Dans certaines régions, à raison, d’une part, _de la lenteur 
avec laquelle s'opère le réensemencement naturel, et de la faculté, 


DU PLAN D'EXPLOITATION. . 281 


temps sous le couvert. Les dernières éclaircies, pour 


peu qu’elles soient fortes, seront suivies, dans la forêt 


supposée, d’un repeuplement naturel qu'on trouvera 


en bon état, qu'on pourra utiliser, lorsque arrivera 
le moment -de procéder aux-coupes principales ; et 
que ces dernières soient faites un peu plus tôt ou un 
peu plus, tard, en une ou plusieurs fois, cela est 


d'autre part, qu'ont les essences de supporter le couvert, on a cru 
devoir régler les coupes d’ensemencement par contenance et fixer 
la durée de la période à 40 ans, c’est-à-dire à un chiffre qui 
dépasse beaucoup celui que j'ai indiqué comme un maximum. 
Chaque affectation a d’ailleurs été partagée en deux parties cor- 
respondant à deux sous-périodes de 20 ans chacune, et tandis 
que l’on fait par volume des coupes secondaires et définitives 
dans l’une des moitiés de l'affectation à régénérer, on fait par 


‘vingtième de surface des coupes d’ensemencement dans l’autre. 


M. Lorentz a publié à ce sujet, dans la dernière édition du cours 
de culture, un article auquel je renvoie mes lecteurs, en me bor- 
nant à l'observation suivante ‘: 

Il est certain que lorsqu'il n'y a pas Rs à fixer un 
délai constant entre les coupes d’ensemencement et les coupes 
secondaires, il convient de régler les coupes de la première caté- 
gorie par contenance ; car on ne doit, comme je l'ai déja dit, 
recourir à la possibilité par volume qu’en cas d’absolue nécessité; 


mais la durée de la période n’est alors subordonnée qu'au temps 


indispensable pour effectuer sur le même point les coupes secon- 
daires et définitives, et c'est une raison pour qu’elle soit. plutôt 
diminuée qu’augmentée. Au surplus, dans la combinaison préci- 
tée, elle n’est augmentée qu'en apparence, attendu que ce qu'on 
appelle une sous-période est une période. Seulement, d’après 
cette combinaison, à la place des dernières éclaircies on doit faire : 
des coupes sombres. Est-il bon, est-il prudent d’y astreindre les 
agents d'exécution ? Oui, je le répète, si on est sûr de pouvoir 
maintenir longtem:s les jeunes repeuplements sous le couvert; 
non dans le cas contraire, et je crois que ce cas contraire se pré- 
sente souvent. (Note de la 2° édition.) 


282 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


indifférent pour la régénération, qui sera déjà un 
fait accompli. Mais supposons une autre essence, le 
chêne pàr exemple, un climat plus rude, un sol moins 
fertile, et le repeuplement sera exposé à des éven- 
tualités qui ne permettront pas aux exploitations 
annuelles de suivre une marche régulière. 

Il y a deux choses qui ne sauraient, en général, 
être prévues longtemps à l’avance et d’une manière 
précise, dans l'application de la méthode du réen- 
semencement naturel : c'est d’abord l'assiette des 
coupes principales; c’est ensuite le nombre d’arbres 
à enlever dans chacune de ces coupes. | 

Un écrivain fort distingué, auquel le recueil des 
‘Annales forestières doit des commuuications très- 
intéressantes, a essayé de prouver que la possibilité 
par contenance pouvait se concilier avec l’incertitude 
de l’assiette des coupes ‘. Mais, pour cela, il a été 
obligé d'admettre qu'il était possible de se fixer sur 
le nombre des arbres à enlever dans chacune des 
trois coupes de régénération. Ce nombre étant, par 
exemple, d’un tiers des arbres sur pied pour chacune 
d'elles, et la période étant de 20 ans, au lieu 
d’exploiter chaque année, en coupe rase, «un ving- 
tième de l’affectation des bois exploitables, on exploi- 
tcrait les trois vingtièmes, partie ici, partie là, 
en coupe d’ensemencement, en coupe claire ou en 
coupe définitive, selon l’état des peuplements. S'il 
était admis que chacune des deux premières coupes 


1. Voir les Annales forestières du mois de Septembre 18#7. 


a ph eh y Ed réin 50h EL ad GS dé 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 283 


“dt prendre un quart des arbres sur p'ed, et la coupe 


définitive, le surplus, chaque hectare exploité , soit 


én coùpe d’ensemencement, soit en coupe claire, 
serait considéré comme représentant un quart de la 
possibilité, et chaque hectare exploité en coupe défi- 
nitive comme en représentant la moitié. Pour com- 


pléter la possibilité, on aurait done, chaque année, à 
parcourir une étendue telle que, multipliée, selon la 
nature de la coupe, d’ensemencement, secondaire 


où définitive, par le facteur 0,5 ou 0,25, elle pro- 


duisit-un nombre d'hectares égal au vingtième de 


l'affectation. 


L Tel est le moyen imaginé pour échapper aux pré- 
tendus inconvénients de la méthode d’exploitation 
basée sur la possibilité par volume. Ce moyen a été 
repoussé par des raisons très-calégoriques dans un 
article qui n’est pas signé, mais-dont il est facile de 


deviner l’auteur ; car il est fait eæ professo. Je renvoie 


à ce remarquable travail ceux de mes lecteurs qui 
auraient le désir de se rendre compte de tous les mo- 
tifs qui rendent inapplicable au traitement des futaies, 
la possibilité par contenance ‘. Je me bornerai à faire 
observer ici que l’expédient inventé pour démontrer 
le contraire, serait de nature, lors même qu'il ne 
s'appuierait pas sur’ une hypothèse inadmissible, à 
enlever à cette possibilité son principal mérite. 

On ne saurait fixer pour un peuplement quel- 


tonque, le nombre d'arbres qu’il sera nécessaire ou 


- 


4. Voir les Annales forestières du mois de décembre 1847, 


281 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


utile de faire tomber dans chacune des coupes de 
régénération; et, pour s’en convaincre, il n’est pas 
nécessaire de recourir à des preuves tirées de la varia- 
bilité des conditions dans lesquelles peut se trouver 
un massif, et des accidents imprévus auxquels la 
végétation est exposée. Il suffit de considérer qu’en 
réalité, si l’on en excepte Ja coupe définitive, les 
coupes de régénération, quelque faible que soit leur 
étendue, ont bien rarement un caractère tranché qui 
permette de les classer, soit dans la catégorie des 
coupes d’ensemencement, soit dans la catégorie des 
coupes claires. Elles participent presque toujours:des 
deux : les unes ne sont que la continuation des 
autres, et on poursuit une chimère, quand on, veut 
délimiter chacune de ces coupes, en préciser l'assiette 
et par conséquent la contenance. 

Mais admettons l'hypothèse. 

Je dis qu’en adoptant, pour les futaies, la possi- 


bilité par contenance, on ne réaliserait aucun des 


avantages qui la rendent recommandable pour les 
taillis. 

Ces avantages consistent, on le sait, dans la régu- 
larité, la simplicité, la promptitude, la sûreté des 
opérations. 

La régularité : il faudrait y renoncer, puisque 


l’assiette des coupes ne suivrait plus aucune marche : 


certaine. 


La simplicité : on ne pourrait point l’obtenir, 


puisque l’étendue à donner aux coupes annuelles 
devrait changer suivant la nature même de ces 


Ne 


e 


recu dt 


ASTRA 


2 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 285 


coupes, et qu'il serait nécessaire, sans parler de la 
difficulté de fixer la ligne précise de démarcation 
entre deux coupes différentes, de - a à vas 
arpentages multipliés. 

La promptitude et la sûreté : il est: dis de pré- 
voir ce qu’elles deviendraient en présence des incer- 
titudes, des tâtonnements, des difficultés d'apprécia- 
tion et des travaux géodésiques que je viens de 
signaler. As s | 
+11 faut donc absolument trouver une autre base 
que la contenance pour régler les exploitations 
annuelles ; dans une futaie exploitée par la méthode 
du réensemencement naturel. Cherchons-la. 

+ Si‘la forêt dans laquelle nous avons à faire cette 
découverte, forêt exploitable dans une révolution de 
100 ans, se composait de 400 peuplements ne diffé- 


-rant que par l’âge, occupant d’ailleurs d’égales con- 


tenances , composés des mêmes essences, "végétant 
dans les mêmes conditions; si l'on pouvait ajouter 
au matériel existant, celui que chaque peuplement 
serait susceptible d'acquérir ; n'est-il pas vrai qu’en 
divisant par 400 le volume total fourni par cette 
addition, on aurait pour quotient la quantité de bois 
dont la forêt s’accroîtrait annuellement, et, par con- 
séquent, celle qu’on pourrait prendre chaque année 
et-perpétuellement, sans altérer sa puissance pro- 
ductive, en ayant soin toutefois de ne jamais abattre 
que les arbres les plus vieux? 

. L'affirmative est évidente. 

Le volume peut, en conséquence, servir de 


256 AMÉNAGEMENT DES FORÉÊTS. 


mesure aux exploitations annuelles, et, au lieu d’ex- 


primer la possibilité en hectares, on peut l’'exprimer 
en mètres cubes. 

C'est exclusivement sur cette: base. du solgee 
qu'ont été fondés les premiers. aménagements de 


futaies, lorsque l’ancienne et vicieuse méthode à tire 


et aire a été abandonnée. 

Après avoir formé les alfectalionsie en «classant les 
parcelles dans les différentes périodes, d’après les 
convenances de leur âge d'abord, et très-secondaire- 


ment des règles d’assiette, on procédait à la recher- 


che du matériel exploitable dans tout le cours de la 
révolution, et à cet effet, après avoir déterminé par 
des comptages individuels ou des places, d'essai, le 


volume actuel de chaque parcelle, on calculait par 


les moyens plus ou moins sûrs qu’indique la dendro- 
métrie, le volume dont elle était susceptible de 
s’accroître avant d'arriver en tour d'exploitation ; 
mais comme on ne pouvait fixer d'avance, d'une 
manière certaine, l’année. même de l'exploitation, on 
établissait les calculs, comme si toutes les parcelles 


comprises dans une affectation, étaient destinées, à. 


être Pres au milieu de la période correpe 
dante ‘ 


1. Supposons un produit qui aurait pour accroissement annue} 
l'unité, qui serait dès lors 4 la première année d’une période et 
20 la dernière, le produit par année moyenne serait alors 10, 
parce que tuus les termes d'une progression arithmétique dont 
le premier terme est 1 et la raison 4 donnent pour la somme des 
20 premiers termes 210, dont le vingtième, pour produit annuel, 


FPT, US 


nt Cul NE de doc done SE NS TNT. 


DU PLAN D'EXPLOITATION. _ 287 


Le volume total exploitable dans le cours de la 
révolution étant ainsi établi, il fallait voir s'il se 
partageait par porlions égales entre les diverses 
périodes : dans l’affirmative, il n’y avait aucun chan- 
gement à y apporter, et en le divisant par le nom- 
bre d'années de la révolution, on obtenait le chiffre 
de la possibilité annuelle. Dans la négative, on pro- 
cédait à l’égalisation des produits périodiques par des 
transpositionsfaites conformément aux'règles connues, 
et en tenant compte surtout de l'accroissement ou de 
la diminution des produits transportés d’une période 
dans une autre, attendu qu'ils devaient nécessaire- 
ment augmenter de tout l’accroissement que prennent 
les bois dont l'exploitation est retardée, ou diminuer 
de celui qu'ils ne peuvent prendre, lorsque leur 
exploitation est avancée. 

Quand on avait effectué de cette manière l’éga- 
lisation des produits périodiques, et arrêté en con- 
séquence le volume exploitable dans le cours de la 


.révolution , on obtenait le chiffre de la possibilité 


annuelle, en divisant ce volume comme on vient de 
le dire ci-dessus, par le nombre des années comprises 
dans la révolution. F 

Tel est en quelques mots, mais dans son objet 
principal et caractéristique, le système qui a été mis 
en vigueur, lorsque la possibilité par contenance 


‘ayant été reconnue vicieuse et inapplicable aux fu- 


est 40 4/2 ou, en nombres ronds, 10, moyenne arithmétique des 
20 nombres inégaux qui représentent les produits successifs sup- 


-_ posés de la série des 20 produits annuels de la période. 


288 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


taies, on a cherché à y substituer celle par volume. 

Mes lecteurs n’ont cerlainement pas besoin que 
je leur signale les vices de ce système, car les obser- 
vations que j'aurais à faire à cet égard, seraient la 
reproduction textuelle de celles que j'ai développées 
à l’occasion des divers procédés mis en usage pour 
assurer le rapport soutenu. J'ai surabondamment dé- 
montré que celui de ces procédés qui est basé sur la 
production effective des parcelles, et qui a; par con- 
séquent, pour résultat de déterminer la possibilité, 
n’avait aucune valeur pratique, à cause des incerti- 
_ tudes inhérentes au calcul de l’aceroissement futur 
pour les massifs éloignés de l’époque de leur exploi- 
tation, et des erreurs monstrueuses dans lesquelles 
on est exposé à tomber en entreprenant un ans 
travail. 

L'engouement pour la possibilité par vobbiné! 
calculée pour toute la durée de la révolution, a pour- 
tant été général à un cerlain moment, ettous lesagents 
forestiers n’en sont peut-être pas encore. dégagés. 
C’est un grand malheur ; car, quelle que soit l'habi- 
leté de l'opérateur, quelques soins qu’il prenne pour 
assurer le succès de ces travaux, il ne peut aboutir 
qu'à des déceptions. L'aménagement de la forêt de 
Ribeauvillé, exécuté en 1835 par les élèves dé l'École 
forestière, sous la direction du regrettable M. de Sa- 
lomon, un de nos praticiens les plus exercés, l’a 
bien prouvé : les comptages et calculs effectués dans 
cette circonstance donnèrent des résultats Hoi ne 
furent pas justifiés par l'expérience. 


DU PLAN D'EXPLOITATION, 289 


. .bhMais: si la supputation de. la possibilité par 
_ volume, pour toute la durée de la-révolution, est 
bien chanceuse, lors même qu’on y procède d’après 
toutes les règles et avec. toutes : les précautions 
qu’enseigne la science, il est aisé de comprendre 
qu’elle -devient ‘la plus inutile et, disons le mot, 
la plus absurde des opérations, lorsqu'on né- 
glige, comme on l’a fait trop souvent, ces règles et 
ces précautions. Il n’y a pas de méthode d’aména- 
-gement qui dispense, par exemple, de l’établissement 
d’un plan d'exploitation, c’est-à-dire de l'obligation 
de déterminer, aussi étroitement que. possible, 
l'assiette.et l’époque des coupes. Pour calculer dans 
la méthode, exclusivement basée sur le volume, 
l'accroissement futur, il faut évidemment être fixé 
préalablement sur l’âge auquel une parcelle quelcon- 
que arrivera en tour d'exploitation; il faut un règle- 
ment de coupes, un tableau des affectations. C’est là 
cependant ce dont beaucoup de personnes ne parais- 
sent pas se douter. IL fut un temps, et il n’est pas 
éloigné de nous, où presque de toutes parts, les 
agents forestiers se livraient à des dénombrements, 
à des cubages et à des appréciations de volumes 
futurs, sans réfléchir que ces travaux ne pouvaient 
aboutir à aucun résultat utile, dès qu'ils n'étaient pas 
fondés sur un parcellaire et sur un plan. pee 
tation’. live y | 


1. Ces fautes sont rares aujourd'hui; j s m’ pape de le recon- 
png {Note de la 2° édition: À 


19 


a“ 


290 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


— 


: Pour mettre un terme à ces déplorables errements, 
il serait à désirer qu’en attendant qu’elle pût publier 
une instruction sur les aménagements, l’administra- 
tion défendit expressément de procéder à aucun 
inventaire sans son autorisation. 

Reprenons la question du règlement des exploi- 
tations annuelles. 

Les combinaisons difficiles, longues et compli- 
quées, auxquelles on à eu recours dans l’aménage- 
ment des futaies, lorsqu'on a renoncé aux exploita- 
tions faites exclusivement par contenance, n'étaient 
pas, comme je l'ai montré, propres à remédier aux 
inconvénients de l’ancienne méthode; car si elles en 
supprimaient ‘quelques-uns, elles en provoquaient 
d’autres non moins graves ; et. l’on peut dire que si, 
en théorie pure, elles apportaient un progrès réel à 
la science, en pratique, elles n’en réalisaient aucun. 
C'était un progrès réel que de substituer la possibi- 
lité par volume à celle par contenance ; mais on le 
compromettait en prétendant pousser l'application du 
principe qui le caractérise, au delà des bornes posées 
par la nature aux prévisions humaines. 

Qu’'y avait-il donc à faire pour retirer de l’adop- 
tion de la possibilité par volume les avantages qu’elle 
offre, sans s’exposer aux inconvénients qu ‘elle pour- 
rait entraîner ? 

Il y avait à ne l’appliquer que Pers les limites 
d’une absolue nécessité. 

Ainsi,-il n’est pas absolument nécessaire, les 
affectations étant formées, d'établir une règle pour 


*.. 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 201 


“es-esploitations principales annuelles à faire dans 
-les quatre dernières périodes, mais il est absolument 
nécessaire de l’établir pour les ere è - val 
dans la première. 

: Ramené à ces termés, le phetrushtif ad: coupes 
| annuelles ne souffre plus aucune difficulté, aucune 
| complication, aucune incertitude. 

On évalue le matériel exploitable ; 

On! ajoute à ce matériel le volume ‘dont il serait 
jontonbtiblo de s’accroître dans un me we à la 
- moitié de la période; 

: - On divise le animé cette 
“période, pour avoir la quotité des exploitations an- 
- nuelles. 

“Le-seul point qui, dans ces rc, puisse 
exposer à des erreurs, est l’accroissement futur ; 
mais comme il s’agit de: bois parvenus à la phase 
stationnaire de la végétation ; que leur accroissement 

_ne:s’évalue, d’un autre côté, que pour un petit nom- 
-bre d'années, on peut affirmer qu’on ne saurait com- 
“mettre une erreur sensible, en prenant pour mesurer 
“cet:accroissement, soit l'accroissement moyen des 
dix dernières années, soit l'accroissement moyen de 
toutes les années qui forment l’âge des massifs ‘. Je 
-n’insisterai pas sur ce point qu’il appartient à la den- 
nn L général, on né:lige tout à fait l'accroissement dans le 
’caléul de Ha possibilité, et je crois que l’on a raison quand les 
périodes sont courtes, mais quand elles sont longues, quand leur 
durée est de 40 ans, par exemple, il est inadmissible que l’on ne 


tienne pas compte de l'accroissement futur. {Note de la 2° édi- 
à tion.) i # PA 4 


299 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


drométrie de développer; je ne m’arrêterai pas non 
plus aux procédés de cubage à employer pour déter- 
miner le volume des bois sur pied. Je me bornerai à 
recommander de déterminer ce volume en mètres 
cubes en grume, non-seulement pour la tige, mais 
pour les branches, sauf à le décomposer ensuite en 
marchandises, d’après les habitudes du commerce. 
Toutes les possibilités devraient être exprimées de 
la même façon, par la même mesure, le mètre 
cube en grume, qui est la seule précise ; et c’est une 
chose bien fâcheuse, qui occasionne beaucoup'd’er- 
reurs et, dans tous les cas, met du désordre dans la 
comptabilité forestière, que ce défaut d'unité: qui 
existe encore dans la manière dénoncer ces possi- 
bilités. Tel agent, en se servant mètre cube, en- 
tend parler du mètre cube équarri au cinquième, tel 
autre du mètre cube équarri au quart; tel autre 
encore du mètre cube en grume. Les uns calculent 
la possibilité en mètres cubes, en stères et en fagots, 
les autres en stères seulement et en bourrées, etc. etc. 
Il ne. serait pas moins raisonnable de la calculer 
en planches, en échalas, en merrains. Je le répète, 
il n'y a qu’une bonne mesure à employer : c'est le 
mètre cube en grume. ol soi: 
Coupes d'amélioration. — Les nettoiements-et es 
éclaircies sont des opérations dont le produit immé- 
diat est tout à fait secondaire, et dont le résultat pour 
l'amélioration des massifs est l’objet essentiel. Les 
principes rigoureux voudraient qu’elle fussent exclu- 
sivement subordonnées aux exigences de la végéta- 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 293 


tation, et qu'en conséquence on ne les soumiît à . 
aucune. préfixion de temps, de contenance ou de 
volume; mais cet affranchissement complet de toute 
sujétion ne pourrait guère se concilier avec l'ordre 
et la régularité qu’il importe d'introduire dans de 
vastes exploitations dont les gérants se rénouvellent- 
fréquemment. 

Qu'un petit propriétaire ne s'impose d'avance au- 
cune règle pour le nettoiement et les éclaircies à faire 
dans sa forêt, on le comprend et on l’approuve, parce 
que son œil est ouvert ou peut l'être sur tous les points 
où de pareilles améliorations seraient appelées par 
l’état du peuplement ; mais dans les forêts domaniales, 
si les éclaircies n'étaient l’objet d'aucune prescrip- 
tion, il en résulterait inévitablement qu’on négligerait 
souvent de les entreprendre, parce que les chefs de 
cantonnement en ignoreraient l'urgence. 

ILest donc utile. que les coupes de l'espèce soient 
prévues et prescrites, et par suite soumises à un rè- 
glement, et il ne reste plus qu’à chercher celui qui 
s'accorde le mieux avec les conditions .auxquelles 
elles doivent satisfaire. 

Ce règlement. ne saurait être basé sur le volume; 
en effet, pour fixer ce volume, toute base d’apprécia- 
tion manque absolument. Étant donné un massif à 
nettoyer ou à éclaircir dans une certaine période de - 
. temps, il n'existe aucun moyen de savoir ce que pro- 
duiront ces opérations , et il serait d’un autre côté 
très-dangereux d'imposer à ce sujet un chiffre quel- 
conque aux agents locaux; car ce serait détourner 


294 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


kur esprit du but essentiel de leurs opérations et 
les exposer à sacrifier dans l'intérêt d'un produit 
immédiat, dont ils ne doivent pas du tout se préoc- 
cuper, l'intérêt de la conservation et de l’améliora- 
tion des massifs. ti, 63 

: Un règlement basé sur l’étendue n'offre pas les 
mêmes dangers : sans doute, il arrivera que la con- 
tenance de là coupe sera tantôt moins grande, tantôt 
plus grande qu’il ne faudrait rigoureusement, parce 
qu'il n’est pas admissible, quelle que soit la régularité 
d’un peuplement, qu’il ait besoin, chaque année, d’être 
éclairei ou nettoyé par portions égales; mais, pour 
les éclaircies notamment, ce n’est pas uné ou même 
plusieurs années de retard qui peuvent compromettre 
sérieusement l’avenir d’un massif. L'essentiel est que, 
dans la contenance désignée pour être éclaircie, les 
agents. aient la faculté de ne prendre que ce qu "ils 
jugeront convenable. 

Ces principes n’ont pas toujours été pandas: 
dans l'application de la méthode d’après laquelle on 
calculait la possibilité, par Volume et pour toute la 
durée de la révolution, le produit des éclaircies pé- 
riédiques entrait dans cette possibilité, ce qui ne 
constituait pas la moindre cause des complications et 
des incertitudes de l'opération; car s’il est difficile de 
calculer l'accroissement futur des bois, lorsqu'ils 
sont éloignés de l’âge d’exploitabilité, il ne l’est pas 
moins d'apprécier ce qu’ils pourront donner dans les 
éclaircies successives qu'ils auront à subir. , 

Toutefois, on comprend, au moins en théorie, 


So Ed dt En eh 


EP PSS CPE 
Meg a 


. DU PLAN D'EXPLOITATION. 295 


que les forestiers qui n'avaient pas reculé devant les 
calculs d’accroissement pour les jeunes bois, aient.osé 
aborder aussi l'évaluation du produit probable des 
éclaircies; mais ce que l’on ne comprend pas, et ce 
qui est pourtant, c'est que des agents qui avaient 
repoussé la possibilité par volume pour les coupes 
principales à faire dans le cours de la révolution, 
aient cru devoir adopter pour les. éclaircies cette” 
même possibilité. On a vu des projets dans lesquels 
toutes les éclaircies, quel que fût l’âge des bois, 
reposaient sur la possibilité par volume. On en a vu 
surtout beaucoup où les éclaircies de l'affectation cor- 
respondante à la deuxième période, étaient réglées 
d’après cette base. On se décide évidemment avec 
peine à laisser dans l'incertitude, dans l'obscurité, le 
produit matériel, souvent considérable, des opérations 
de l'espèce, et pourtant c'est un sacrifice nécessaire, : 
si l’on veut mettre chaque chose à sa place et subor- 
donner l'accessoire au principal. 

En conséquence, il convient. de réein, 41 par con- 
tenance, les coupes d'amélioration dans les futaies. 
Si donc les périodes sont de 20 ans, et s'il y a lieu 
de ne nettoyer ou de n’éclaircir le peuplement qu’une 
fois dans ce laps de temps, chaque affectation sera 
partagée en 20 parties égales, pour être nettoyées ou 
éclaircies successivement dans chaque période, hormis - 
celle dans laquelle elles devront être régénérées.'S'il 
était utile de répéter les coupes plus souvent, tous 
les 40 ans, par exemple, chaque affectation serait 
partagée en 40 parties pour être nettoyées ou éclair- 


296 AMÉNAGEMENT DÉS FORÊTS. . 


cies successivement, deux fois dans chaque période, 
hormis celle dans laquelle elles devraient être régé- 
nérées, et une fois dans cette dérnière. 

On pourrait adopter un autre ordre et ne faire, 
par exemple, qu’une série de coupes d’améliora- 
tion, de sorte qu’au lieu d’être partagée en 40 ou 
20 coupes, chaque affectation ne le serait qu’en 2,5 ou 
en 5, ce qui simplifierait le service; mais avec cette 
combinaison, les produits intermédiaires ne sont pas 
soutenus, attendu que les ‘éclaircies rendent plus 
dans les massifs de 80 ans que dans ceux de 20, et, 
d’un autre côté, la surveillance générale de la forêt 
est moins garantie, les exploitations étant concen- 
trées sur un plus petit nombre de points. 

D’après les indications qui précèdent, pour former 
le tableau des exploitations annuelles dans le cours 
de la 1" période, nous n’aurons qu’à supprimer, 
dans le plan d'exploitation par période, les colonnes: 
relatives aux 2°, 3°, 4° et 5° périodes, et à substituer 
dans celle de la A"°, aux contenances des parcelles à 
exploiter en coupes principales, les volumes desdites 
parcelles ; puis, en totalisant les colonnes et en divi- 
sant chaque total par 20, nous aurons la ‘possibilité, 
tant par volume, pour les coupes principales, que par - 
contenance, pour les coupes d'amélioration, à ex- 
ploiter dans le cours de la 1°° période. 

“Voir le tableau ci-contre‘ : 

1. Je pourrais supposer d’autres cas. Le lecteur, j'en suis sûr, 
n’en a pas besoin. Je dirai seulement encore qu’il n'est pas indis- 
pensable d'appliquer à toutes les affectations la même périodicité 


297 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 


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298 AMÉNAGEMENT DES FORÊT. 


La possibilité par volume ne figure qu’en bloc 
_sur ce tableau; or il est utile d'en faire connaître le 
détail, tant en nature qu’en argent, au moyen d’un 
tableau particulier qu’on pourrait dresser conformé- 
ment au modèle ci-contre ‘ : 


pour les coupes d'amélioration, que l'on peut faire varier cette 
périodicité suivant l'âge des massifs (pourvu toute‘ois qu’elle puisse 
se concilier avec la durée de la période); et que les prescriptions 
du plan d'exploitation ne dispensent dans aucun cas les age de 
proposer des nettoiements toutes les fois que le besoin s’en fait 
sentir. (Note de la 2° édition.) — 


1. La possibilité, en admettant qu'elle ait été calculée avec 
toute l'exactitude désirable, peut être modifiée par des accidents 
imprévus : un incendie, un coup de vent, des insectes, etc. D'un 
autre côté, il faut considérer que les propriélaires, sont exposés à à 
des besoins extraordinaires. 

Piusieurs auteurs «ont en conséquence d’avis qu’il est d’une 
bonne économie de mettre en réserve une partie de la possibilité, 
afin d'obvier à ces accidents et à ces besoins. - 

Les divers systèmes proposés à cet effet, reviennent, en défi- 
nitive, à n’exploiter chaque année qu’une portion, le 4/10 par 
exemple, du volume qu’on pourrait prendre rigoureusement. 

Je.ne suis pas tout à fait partisan de cette mesure, qui ne peut 
que compliquer le plan d'exploitation, et qui me paraît en outre. 
de nature à compromettre la régularité des exploitations et le 
rapport soutenu : la régularité des exploitations puisqu'elle expose 
à ne pas épuiser une affectation dans la période correspondante; 
le rapport soutenu, car si l’occasion d'employer la réserve ne se 
présentait pas, il faudrait bien pourtant l’exploiter, sous, peine de 
prolonger la révolution au delà du terme reconnu le plus conve- 
nable. | 

Je. crois qu’il serait peut-être plus raisonnable d'attendre qu’un 
déficit se produisit dans le matériel exploitable, pour y remédier 
par une réduction proportionnelle de la possibilité annuelle. 

Cependant je ne voudrais pas qu’on inférât de ces paroles que 


299 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 


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300 AMÉNAGEMENT DES FORÉÊTS. 


Quand on a rempli le tableau spécial d’exploi- 
tation de la première période, on a complété la 
série des documents nécessaires, pour assurer Ja 
marche des coupes d’une manière conforme au but 
de l'aménagement, et je ne crois pas, contrairement 
peut-être à l'opinion de bon nombre de forestiers, 
qu’il soit convenable de soumettre les agents d'exécu- 
tion à aucune autre prescription particulière à propos 


de cette marche. Tout ce qu'il est permis de faire, 


c’est, à titre de conseil, de leur désigner les parcelles 


qui, par suite de leur âge plus ou moins avancé, ou 
de leur état plus ou moins prononcé de dépérissement, - 
devraient être exploitées avant les autres ; c’est aussi. 


de leur indiquer quelles sont les circonstances clima- 
tériques ou autres qui demandent que l’on commence 
les exploitations par tel ou tel côté de l'affectation. 
Mais, je le répète, toute prescription rigoureuse à 
ce sujet serait inopportune et dangereuse. 


Pour ce qui concerne surtout les coupes de régé- 


nération, il est de principe que les agents d'exécution 
doivent avoir la faculté de porter la hache dans les 
parcelles où ils le jugeront le plus urgent, de prendre 


la possibilité sous forme de coupes d’ensemencement, 


secondaire cu définitive, dans les proportions qu'ils 


je considère le rapport soutenu comme un dogme auquel on doit 
tout sacrifier. Je pense au contraire qu’il ya bien des circonstances 
où il ne faut pas hésiter à y porter atteinte. Il serait désirable par 
exemple que l’on püût, dans les forêts de chêne, augmenter les 
coupes après une abondante glandée, sauf à les suspendre plus 
tard, et, à ce point de vue, une réserve serait motivée. 


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CP pe à à né 


É 


DU PLAN D'EXPLOITATION. - 801 


-æroiront les plus convenables; et l’on ne pourrait 


démontrer la convenance de leur imposer des obliga- 
-tions à cet égard, qu’en prouvant en même temps 
que la durée de la période n'a pas été fixée d’après 
les règles que j'ai exposées ; qu’elle est plus longue, 
par exemple, qu'il ne faudrait, pour compléter la 
m5. naturelle de laffectation, correspon- 
dnnigei 
Bien de gens se figurent que lorsque faniéos- 
gris est fait, l'exploitation d'une forêt n’exige 
-plus des agents locaux ni ésprit d’observation, ni 
_sagacité, ni intelligence. C’est là une grande erreur : 
-pour se mouvoir dans le cadre très-large que leur 
fixe l'aménagement, pour se mouvoir avec le succès 
désirablé, ces agents ont, au contraire, à accomplir 
-une tâche difficile qui demande beaucoup d'activité, 
d'attention, et une expérience consommée. 

Les coupes d'amélioration ne réclament pas 
autant de liberté d’action que les coupes principales. 
- Ces coupes peuvent, la plupart du temps, être avan- 
-cées ou reculées de quelques années, sans inconvé- 
nients graves; il y a donc des cas où il serait sans 
- doute avantageux d’en fixer l’assiette sur le terrain, 
-soit en se servant pour cela des limites des parcelles 
existantes, soit en partageant par japues égales et 
régulières chaque affectation. 


202 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Avant de m'occuper du plan d'exploitation dans 
-les futaies qui ne comportent pas un aménagement 
normal, qu’il me soit permis de réndre hommage aux 
- forestiers qui ont les premiers posé les bases de la 
méthode simplifiée dont je viens de développer le 
mécanisme et les précieux avantages : l’aménage- 
ment par case, c’est-à-dire fondé sur la possibilité 
par volume, calculée pour toute la révolution, ‘était 
seul. pratiqué et désespérait l’administration et les 
agents par des complications et des déceptions de 
toute sorte, lorsque MM. Lorentz et Parade ont exposé, 
dans leurs cours de culture, les principes qui devaient 
ramener la simplicité et l’ordre dans la gestion très- 
compromise de notre sol forestier. | 

: L'aménagement avait suivi, du reste, la marche 
habituelle de toutes les conceptions humaines : infor- 
mes au début, elles passent presque toujours par une 
phase de-complication; puis arrivent des esprits fer- 
mes et rigoureux, simplificateurs, qui les dégagent 
de’toutes les supérfétations, de tous les rouages 
inutiles et leur donnent la valeur pratique. C’est ce 
qu'ont fait, pour l'aménagement, MM. ‘Lorentz ‘et 
Parade, et la science leur est redevable, sous cerap- 
port, comme sous beaucoup d’autres, d’un progrès 
qui est destiné à exercer l'influence la plus’ heureuse 
sur l'avenir de nos forêts. 


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pan ter ame tenter — ms men 


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À CHAPITRE CINQUIÈME. 

| pv PLAN D'EXPLOITATION DANS LES FUTAIES, 
17 LA RÉVOLUTION POUVANT ÊTRE DÉFINITIVE 

1 + ET LA MARCHE DES COUPES DEVANT ÊTRE PROVISOIRE. 
4 

1 : a 

| 

[  dunlbs asile AÂTIOLE PREMIER. 


_ FORMATION DES AFFECTATIONS. 


$ 4e, 


dat ‘de la formation: immédiate des affectations normales: 


» 


ii 


a la Line Dersreres ést définitive, de 
plan peut être provisoire, en ce sens que, pendant la 
première révolution, les parcelles appartenant à une 
. affectation quelconque; ne devront pas toutes être 
. res durant la période correspondante. | 
Ces exceptions à la règle, qui ne s'étendent ordi- 
nairement qu'à des portions peu importantes de l’af- 
fectation, ne doivent exercer ‘aucune inflaence sur la 
formation du tableau des affectations. 
_ Ce tableau établi d’abord d’après l’âge rospele- 


304 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


tif des parcelles, remanié ensuite conformément aux 
exigences des règles d’assiette, est arrêté enfin 
comme si chaque classe d'âge était complète, ou, si 
l’on aime mieux, comme s’il y avait harmonie parfaite 
entre l’état du peuplement de chaque affectation et le 
rang de la période correspondante. 

En effet, lorsqu'on aménage une forêt, il est fort 
utile que la situation que l’on en. à. vue de réaliser, 
au moyen de cette opération, soit exactement déter- 
minée; or elle ne saurait l’être que par le tableau des 
affectations. : 

Ce tableau est un cadre dans lequel il faut faire 
rentrer le plus promptement possible, et par les pro- 
cédés que la culture enseigne, les parcelles d’une 
forêt; c’est un casier dont chaque compartiment est 
destiné à contenir des bois d’un âge déterminé, 
une classe d’âge particulière ; il est donc nécessaire 
que la place et la contenance de chacun de ces com- 
partiments soient connues d’avance, afin que les 
agents forestiers puissent façonner le peuplement de 
manière qu’il s’y adapte. 

J'ai eu souvent occasion de vérifier des procès- 
verbaux d'aménagement, dans lesquels on avait cru 
devoir insérer des prescriptions longuement. dévelop- 
pées sur le traitement à appliquer aux différentes 
parcelles, suivant qu’elles se trouvaient dans telle ou 
telle condition. | 

“Le tableau normal des affectations rend ces 
prescriptions à. peu près inutiles. Le fait seul..du 
classement d’une parcélle dans une affectation indique 


bas, 


nd Se) ni GDS din dE ES TS 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 305 


suffisamment les fonctions qu’elle à à remplir, et par 
suite le traitement qui lui convient. 

+ La formation immédiate du tableau normal des 
affectations a un autre avantage : elle évite pour l’ave- 
nir des remaniements et des travaux de refonte 
pénibles, embarrassants et coûteux. 

Cette formation, dans l’hypothèse où nous nous 
sommes placés, sera donc faite d’après des considéra- 
tions analogues à celles que j'ai développées dans le 
chapitre précédent et les parcelles recevront cg dési- 
gnation définitive. 

C’est pour le règlement provisoire des coupes que 
nous aurons l’occasion d'indiquer des prescriptions 
toutes particulières et exceptionnelles. 

… Au reste, ce règlement provisoire est de nature 
à faciliter singulièrement, comme je vais le montrer, 
la formation des affectations. 


’ $ 2. 


Des facilités que donne, pour la formation des affectations, l'adoption 
d’une marche provisoire, pour les coupes. 


On ne doit se résigner à adopter un règlement 
provisoire pour les exploitations — cela se comprend 
— qu'en cas d’absolue nécessité, et, par conséquent, 
toutes les fois que les règles d’assiette ou les exi- 
gences impérieuses du rapport soutenu nes’y opposent 
pas, on évite de classer dans une affectation, des par- 


celles qu'on ne pourrait pas régénérer dans la période 
20 


306 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


correspondante. Mais il est très-rare que dans des 
forêts dont le traitement n’a jamais été subordonné à 
des vues d'ensemble, à un plan quelconque, on ne 
trouve pas des bouquets ou parcelles de vieux bois 
disséminés au milieu de jeunes perchis, et vive versd, 
et qu’on ne soit pas dès lors amené à comprendre 
dans la même affectation, des peuplements qui ne 
sauraient être régénérés dans la même période. 

Il arrive donc presque toujours qu’on est obligé 
de mettre dans la dernière affectation, avec des vides 
ou de jeunes fourrés, des parcelles de bois exploi- 
tables, ou bien dans la première, avec des bois mûrs, 
des vides et de jeunes repeuplements. Je ne saurais 
indiquer toutes les anomalies auxquelles on pourrait 
avoir affaire. J'en donnerai seulement quelques 
exemples. | PÉLES 

Il est évident que lorsqu'on veut faire suivre à 
des parcelles la même destinée, il faut chercher 
celles dont les âges se rapprochent le plus; mais 
toutes les fois qu'on est obligé de renoncer à soumet- 
tre, pendant la première révolution, au même trai- 
tement, des parcelles comprises ou à comprendre 
dans la même affectation, il faut au contraire réunir 
celles dont les âges présentent l'écart le plus consi- 
dérable; parce que c’est le moyen d’avancer le plus 
possible l’époque de l'établissement de l’état normal. 

Ainsi, les jeunes fourrés qui appartiennent natu- 
rellement à la dernière affectation, peuvent être com- 
pris dans la première; il en est de même dés vides, 
car, si on les repeuple immédiatement, ‘ils s’harmo- 


OPEN 2 SR 7 soi ai 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 307 


niseront avec les peuplements environnants, créés ou - 
à créer, et ne nécessiteront plus d'exception pour leur 
régénération ultérieure. 

Les bois mûrs, c'est-à-dire les bois exploitables, 
qui appartiennent à priori à la première affectation, 
seront bien placés dans la dernière, au milieu des 
fourrés et des vides; parce qu'en les exploitant dans 
la première période, ils seront remplacés par de 
jeunes semis qui ne feront pas disparate au milieu 
des massifs qui les entoureront. 

. On voit combien le tableau provisoire des exploi- 
tations est propre à faciliter la formation des affecta- 
tions de la manière la plus convenable, pour la con- 
stitution ultérieure aussi parfaite que possible des 
classes d'âge. Est-on embarrassé pour asseoir la pre- 
mière affectation, attendu que les massifs: exploi- 
tables se trouvent divisés en deux parties, l’une 
située au commencement de la série, l'autre à la fin? 
Il n'y a pas d'inconvénient à classer l’une de ces 
parties dans la première affectation, l’autre dans la 
dernière; seulement, celle-ci devra être régénérée 
eæceptionnellement, anormalement, dans le cours de 
là première période. Les parcelles qu’elle contient, 
après avoir été ainsi régénérées, le seront encore à 
la fin de la première révolution. Mais de même qu’une 
parcelle est susceptible d’être exploitée deux fois, de: 
même il y en a qui peuvent ne pas l’être du tout, et, 
par exemple, celles composées de tout jeunes bois, 
qu'on aurait dù comprendre dans la première et 
même dans la deuxième affectation. 


308 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


En définitive, on doit toujours avoir en vue l’état 
des affectations après la première révolution, et 
adopter les combinaisons les plus propres à le rappro- 
cher de la régularité désirable. : 

Mais ce ne sont pas là les seules facilités que pré- 
sente le tableau provisoire des coupes, pour former 
les affectations dans une forêt irrégulière; en voici 
une autre que je signale, parce que l’occasion d’en 
profiter est fréquente : il s’agit d’une parcelle de 
jeunes bois qui appartiendrait, non-seulement par 
son âge, mais aussi par sa position, à la quatrième 
affectation ; malheureusement l’état abrouti du peu- 
plement ou son origine (des rejets de souches) ne 
permettent pas de conduire ce peuplement jusqu’à 
l’époque où l'affectation arrivera en tour de régéné- 
ration. Eh bien ! on surmonte la difficulté, en déci- 
dant que cette parcelle sera coupée en taillis une ou 
plusieurs fois, jusqu'au moment où les rejets seront 
susceptibles d'atteindre la quatrième période. Il 
pourrait en être ainsi de toute une affectation *. 

Enfin, lorsqu'il y a impossibilité de placer des 
vides dans l’une des affectations extrêmes, il est bon 
de stipuler que leur repeuplement, s’il peut être fait 
immédiatement, ce qui est désirable, le soit avec des 
essences qui, ayant moins de longévité que la masse 


4. Voir à ce sujet le remarquable article que contient le tome III 
des Annales forestières, sur un nouveau mode de conversion des 
taillis en futaies, mode qui a été appliqué, pour la première fois, 
dans la forêt de Cerisy (Manche). 


NT 


ERA UT Es, PRE VE ANT à ee 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 309 


de la forêt, puissent être exploitables à l'époque où 
l'affectation dont elles font partie, arrivera en tour 
de régénération. 

Telles sont les règles que l’on doit observer pour 
concilier la formation des affectations normales avec 
les exigences des peuplements. Elles ne sont pas 
toujours d’une application facile, et la nécessité d’ex- 
ploiter une parcelle dans une autre période que celle 
à laquelle elle devrait être régénérée normalement, 
ne saurait être prévue avec certitude longtemps à 
l'avance. Aussi, ne doit-on regarder comme obliga- 
toires que les propositions de coupes anormales qui 
se rapportent à la première période, et doit-on se 
réserver pour les autres, de modifier suivant les cir- 
constancés, au début de chaque période, les prévi- 
sions du règlement général. 

Il me reste maintenant à indiquer, pour le tableau 
des exploitations, le cadre qui paraît le mieux se 
prêter à la consignation des prescriptions que ce ta- 
bleau comporte. 


ARTICLE II. 
RÈGLEMENT GÉNÉRAL DES EXPLOITATIONS PAR PÉRIODE. 
S 1. 
Coupes principales ou de régénération. 


Dans une forêt régulière, il n’y a que deux natures 
de coupes à prévoir : les coupes principales de 


310 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


futaie, les coupes d'amélioration, et les parcelles sont 
toujours régénérées dans la période correspondante 
à l'affectation dont elles font partie. Rien de plus 
aisé dès lors que de donner unt ableau qui permette, 
comme celui de la page 278, de reconnaître la période 
dans laquelle un peuplement devra être régénéré ou 
amélioré, et l’affectation à laquelle ce peuplement 
appartient. 

Dans une forêt irrégulière, il y à trois natures de 
coupes à prévoir au lieu de deux : les coupes prin- 
cipales de futaie, les coupes d'amélioration et les 
coupes de taillis; c’est déjà une complication. En 
outre, nous venons de voir (p. 306 et 307) que l’épo- 
que de la régénération d’une parcelle de futaie, qui 
dans une forêt régulière est indiquée par le numéro 
de l'affectation dont cette parcelle fait partie, peut 
avoir besoin, quand il s’agit d’une forêt irrégulière, 
d’une autre indication. Une parcelle affectée à la 
cinquième période, par exemple, devra souvent être 
exploitée sous forme de coupe principale, dans la 
première; une autre classée dans la quatrième devra, 
au lieu d’être éclaircie, être exploitée en taillis avant 
d’être régénérée ; de sorte que si, se contentant, pour 
les coupes principales, du nombre de colonnes qui 
figurent dans le tableau normal p. 278, on classait 
ces parcelles dans les colonnes correspondantes à 
l’époque de leur régénération , il s’établirait inévita- 
blement une confusion sur le point capital de savoir 
dans quelle affectation elles sont comprises. 

Pour prévenir cette confusion et pour que les 


1 
3 
e 
à 
: 


Sr mn 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 311 


coupes de taillis- puissent aussi se distinguer des 
autres, nous ajouterons donc deux colonnes à chaque 
période du tableau p.278 : l’une pour les coupes 
anormales de futaie, l’autre pour les coupes de 
laillis.. Nous placerons dans la première toutes les 
parcelles qui devront être l’objet de coupes anor- 
males, par ce seul fait qu'elles seront à régénérer 
dans une autre période que celle qui correspond à 
l'affectation à laquelle elles appartiennent; nous pla- 
cerons dans la deuxième toutes les parcelles qui, 
au lieu d'être éclaircies, devront être exploitées en 
taillis. 

J'ai exposé dans l’article précédent les règles à 
suivre pour préparer les bases de.ce double classe- 
ment. Cependant, parmi les difficultés que rencontre 
un tel travail, il y en a une, relativement aux coupes 
de futaie, que je n’ai pas examinée, et qui se pré- 
sente trop souvent pour que je n’en fasse pas l’objet 
d’une observation : 

Nos forêts, quels que soient les soins et l’intelli- 
gence avec lesquels on les a traitées dans ces der- 
niers temps, comprennent rarement des peuplements 
parfaitement homogènes; on y trouve presque tou- 
jours et presque partout de vieux arbres qu’il con- 
vient d'enlever dans un délai plus ou moins rapproché. 
Suflira-t-il qu'une parcelle renferme de ces vieux - 
arbres pour qu’on la classe dans la colonne des 
coupes anormales principales, c’est-à-dire des coupes 
anormales de régénération en futaie? — Non, et 
voiei sur le parti à prendre, sur le moyen de lever 


312 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


les doutes qui pourraient s'élever à cet égard, la 
règle que je crois bonne à suivre. 

_ Si les vieux arbres en question ne sont pas néces- 
saires au maintien du massif; s’ils sont dans un état 
qui constitue une coupe de régénération, une coupe 
secondaire ou une coupe définitive; s’il est manifeste 
qu’il faudra les enlever tous dans un certain délai, 
ne dépassant pas la durée d’une période, on les 
classera parmi les coupes anormales de régénération 
en futaie, parce qu’ils pourront être compris dans la 
possibilité par volume, laquelle, nous l’avons vu, ne 
peut s'appliquer qu'à ces coupes; mais s'ils sont 
épars, de différents âges ; s’ils ne constituent pas un 
peuplement parfaitement distinct et indépendant des 
massifs qui l’environnent; si l’on ne peut, en un 
mot, préciser le délai dans lequel il est utile de les 
faire disparaître, on laissera aux coupes d’améliora- 
tion dont je vais parler tout à l'heure, le soin de les 
enlever en temps opportun. 

Je ferai observer de même, en ce qui concerne 
les coupes de taillis, qu’il serait sans utilité réelle de 
leur ouvrir une colonne spéciale, si elles ne devaient 
former que de rares et insignifiantes exceptions. 
Dans ce cas, on les comprendrait parmi les coupes 
d'amélioration, sauf à rappeler par une simple 
remarque, l’attention sur la manière de les exploiter, 
pour les conduire jusqu’à la période de régénération. 

Il faut enfin se mettre à la place des agents qui 
auront à appliquer l’aménagement, de ceux qui 
auront à le contrôler, et ne multiplier les colonnes 


ni Est 2 dat ia 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 913 


"2 


qu'autant que cela est nécessaire pour l'intelligence 
du plan d'exploitation. 


$ 2. 


Des modifications que le rapport soutenu pourrait faire apporter 
au règlement des coupes principales. 


Dans quels cas et dans quelle mesure les exi- 
gences du rapport soutenu doivent-elles faire modi- 
fier le règlement des exploitations par période ? 

On comprend bien que les affectations ayant été 
formées dans l’irypothèse de l’état normal, le rapport 
soutenu est compromis dès qu’on est amené à régé- 
nérer des parcelles, soit avant, soit après l’époque à 
laquelle l’affectation dont elles font partie arrivera 
en tour d’exploitation ; de sorte que, en additionnant 
dans le tableau provisoire, les contenances affectées 
à chaque période, on ne trouvera probablement pas 
toujours le même total. 

Doit-on essayer de remédier à celte inégalité par 
des remaniements, par de nouveaux transferts plus 
ou moins considérables, et qui ne seraient motivés 
que par des circonstances temporaires ? 

Telle est la question qu’on peut se poser, et sur 
laquelle je vais donner mon avis. 

En général, sauf de rares exceptions, le rapport 
soutenu, dans la formation du tableau provisoire 
d'exploitation, est une chose dont il ne faut pas se 
préoccuper; car on ne le pourrait qu’en s’écartant 


344 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


des principes que nous avons adoptés relativement à 
l'influence des circonstances accidentelles sur ledit 
rapport, et qu’en compromettant ensuile deux résul- 
tats également recommandables et qui consistent : le 
premier, dans l'établissement le plus prompt possible 
de l’état normal ; le deuxième, dans l'exploitation 
des massifs à l’âge de leur exploitabilité, résultats 
que toutes nos combinaisons, jusqu'à ce moment, 
ont eu pour but d'atteindre. 

Voyons, d’ailleurs, quelles sont les ts pour 
lesquelles il y aurait peut-être quelque utilité à modi- 
fier de nouveau, en vue du rapport soutenu, le plan 
d'exploitation. 

Est-ce pour la dernière ? 

Non; car si l’on a observé les règles que nous 
avons posées, on y aura classé les vides, les jeunes 
fourrés et gaulis et les vieux bois, sous condition 
d'exploiter ces derniers dans la première période; 
or, quelque grands que soient les vides ou l'étendue 
occupée par les vieux massifs, si la régénération a 
lieu immédiatement, la classe d'âge pourra être con- 
sidérée comme normale, et lorsque l'affectation arri- 
vera, à la fin de la révolution, en tour d'exploitation 
principale, son rendement le sera également; c'est 
là tout ce qu’on peut lui demander; lui demander 
davantage, adopter des combinaisons qui permet- 
traient d'en obtenir plus que la possibilité normale, 
serait évidemment contraire à tous les principes 
d’exploitabilité et de bonne économie. 

La dernière période est donc désintéressée dans 


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RE CET R TIME Le 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 315 


la question, et en vérité, ce ne sont guère que les 


trois premières, qui pourraient avoir besoin qu’on 
modifiât leur contingent par un remaniement des 


coupes anormales. Raisonnons donc sur ces trois 


périodes. 
On peut supposer, soit un déficit, soit un excé- 


dant dans la première période par rapport aux deux 


autres. 
. Le déficit est peu probabié; attendu qu’une des 


nées à suivre dans la formation du plan provisoire, 


est de rejeter dans la première période tous les bois 
exploitables de la dernière et même de l’avant-der- 
nière affectation, et que d’un autre côté, ce qui manque 
dans nos forêts, ce sont les bois de deuxième et de 
troisième période, plutôt que ceux de première. Dans 
tous les cas, pour qu'il pût y avoir lieu de reverser 
une partie des produits de la deuxième et de la troi- 
sième période dans la première, il faudrait que ces 


produits dépassassent le chiffre du matériel normal de 


ces périodes; car autrement, on n’établirait l'égalité 
des produits entre les premières périodes, que pour 
la rompre entre les dernières. 

Dans l'hypothèse de l’excédant, il arrivera de 
deux choses l’une : ou bien le contingent de la deuxième 
et de la troisième période sera inférieur à leur maté- 
riel normal, ou bien il ne le sera pas. Dans le second 
cas, l’excédant de la première période constituera 
une surabondance, une accumulation de matière qu’on 
aurait dû éviter, et qu’en bonne économie, on doit 
réaliser le plus tôt possible. Dans le premier cas, 


316 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


il pourrait certainement être utile de combler une 
partie du déficit de la deuxième et de la troisième 
période, avec l’excédant de la première. Il est cer- 
tain, par exemple, que si la deuxième et la troisième 
affectation renfermaient de grands vides, il serait 
permis de désigner certaines parcelles ou portions 
de parcelles, les plus jeunes dans tous les cas de 
la première période, pour être exploitées dans la 
deuxième et la troisième ; mais ce sont là des expé- 
dients auxquels on ne doit recourir que dans des 
circonstances graves; Car, en définitive, le résultat 
inévitable de ces transferts est une perte de produits 
matériels, puisqu'ils prolongent le maintien sur pied, 
des massifs qui en sont l’objet, au delà du terme de 
leur exploitabilité. 


S-3. 
Coupes d'amélioration. 


L'époque à laquelle doit être faite une coupe d’a- 
mélioration, dépend ordinairement de celle à laquelle 
doit avoir lieu la coupe principale. La place occupée 
par un massif dans les colonnes du tableau d’exploi- 
tation, affectées aux coupes principales normales ou 
anormales de futaie, fera donc connaître dans quelles 
périodes il convient que le même massif soit amélioré. 
La parcelle A fait partie de la dernière affectation, 
mais sur le tableau provisoire, elle figure dans la 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 317 


colonne des coupes principales anormales de futaie 


+ de la première période, parce qu'elle se compose de 


massifs exploitables ; on la désignera pour être amé- 


_ liorée dans chacune des autres périodes, sauf la 
__ dernière. 


Telle est la règle générale, mais il serait possible 


qu'une parcelle figurant dans la colonne des coupes 


principales anormales de futaie de la première période, 
eût besoin cependant d’être éclaircie dans la même 
période, si elle était composée par exemple de jeunes 
perchis surmontés de vieux arbres à extraire le plus tôt 
possible. Dans ce cas, ladite parcelle figurerait dans 
chacune des colonnes affectées aux coupes d'amélio- 
ration, sauf toutefois celle de la période dans laquelle 
elle devrait être régénérée. 

Des parcelles de la première affectation, qui se 
composeraient de jeunes bois destinés à n'être régé- 
nérés qu’à la deuxième révolution, seraient, par des 
motifs analogues, inscrites pour être éclaircies dans 
chaque période. 

Enfin, il se pourrait que des parcelles ne figu- 


-rassent que dans les colonnes affectées aux coupes de 


taillis. C’est ce qui aurait lieu si ces parcelles ne de- 
vaient pas être éclaircies avant leur maturité. C'est 
une affaire d'appréciation. 

Voici le modèle du tableau des exploitations par 
période, tant principales qu’intermédiaires 


- RÈGLEMENT GÉNÉRAL DE 


LA RÉVOLUTION PRINCIPALE, ÉTANT DÉFINITL 


“} VER RINUE SP PTE } * 


NUMÉROS 


PARCELLES 


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du peuplement 


SITUATION CONSISTANCE mm: 


et 


des 
affectations 
NOMS 
des cantons 


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CONTENANCE 
ESSENCES 


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320 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


ARTICLE IF. 


RÈGLEMENT. SPÉCIAL DES EXPLOITATIONS ANNUELLES 
PENDANT LA PREMIÈRE PÉRIODE. 


Ce règlement n’exigerait aucune explication, si 
toutes les coupes, principales ou autres; à faire dans 
le cours de la première période, pouvaient être 
exploitées par vingtiène, soit de leur volume, soit de 
leur étendue. : 

On calculerait le matériel actuel de toutes les 
parcelles à exploiter par volume, soit normalement, soit 
anormalement, et l’on y ajouterait leur accroissement 
pour 10 ans, s’il y avait lieu ; on prendrait le vingtième 
du total et l’on aurait ainsi la possibilité par volume de 
la période. On totaliserait ensuite les coupes de taillis, 
et le vingtième formerait la possibilité par conte- 
nance des coupes de taillis. Enfin, on fixerait celle 
des coupes d'amélioration de la même façon. 

Mais les peuplements à couper en taillis ou à 
améliorer, ne sont pas toujours susceptibles de l'être 
par vingtième de surface. La rotation des coupes de 
taillis ne peut guère, d’un autre côté, se concilier 
avec celle des coupes d’amélioration. Enfin, à raison 
des exploitations vicieuses eflectuées précédem- 
ment, on peut être conduit à ne pas imprimer dans 
la première période une marche régulière soit aux 
coupes de taillis, soit à celles d'amélioration. Il 
est donc nécessaire ou au moins utile, afin d'éviter 


pu PLAN D'EXPLOITATION. | 32 


la conf g dre un ablian mc doit les 
coupes Lcctéiants; quelles qu’elles iQ 

Les tableaux spéciaux des exploitations, pendant 
la première période, pourraient être forn M 
les pe Sie s ci-contre : c 


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AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


322 


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323 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 


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CHAPITRE SIXIÈME. 


DU?PLAN D'EXPLOITATION DANS LES FUTAIES, 
LA RÉVOLUTION DEVANT ÊTRE PRINCIPALE ET TRANSITOIRE, 
__ OU SIMPLEMENT PRÉPARATOIRE, 
ET LA MARCHE DES COUPES, PROVISOIRE, 


ARTICLE PREMIER. 


UTILITÉ DE LA FORMATION PRÉALABLE DU TABLEAU 
DES AFFECTATIONS NORMALES, 


Quelle que soit la première révolution adoptée, 
qu’elle soit définitive, transitoire ou préparatoires 
quelles que soient également la nature et la variété 
des exploitations à faire dans cette première révolu- 
tion ; enfin, quelque grande que puisse être la diffé- 
rence entre la marche des coupes dans ladite révo- 
lution et la marche des coupes dans les révolutions 
ultérieures, je suis convaincu que de toutes les bases 
que l’on pourrait imaginer afin d’assurer la régula- 
risation de la forêt, la meilleure, la plus efficace, 
la plus certaine, consiste dans le tableau des affec- 
tations qu’il serait utile de former, si cette forêt 
était à l'état normal. Je ne crois pas qu'aucune 
lacune, dans l’état actuel du peuplement, puisse dis- 


LA 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 325 


penser de cette formation qui est destinée à mettre 
constamment sous les yeux des agents d'exécution, 
le but auquel ils doivent tendre, et qui exempte par 
conséquent de remplir les procès-verbaux d'aména- 
gement des nombreuses recommandations qu'on s’est 
cru jusqu’à présent obligé d'y consigner, au sujet 
du traitement des parcelles. Toutes ces recomman- 
dations, qu’on y réfléchisse, et on reconnaîtra que 
j'ai raison, toutes ces recommandations peuvent être, 
_ en général, avantageusement remplacées par la collo- 
cation des différentes parcelles dans les affectations 
normales des périodes. Cette collocation indiquant 
d’une manière précise la classe d'âge dont une par- 
celle est appelée à faire partie, la fonction qu’elle 
aura à remplir dans l’aménagement définitif, indique 
en même temps quels sont les soins qu'il faut lui 
donner pour la transformer de la façon la plus conve- 
nable; et si l’on admet, ce qui doit être, que les 
agents d'exécution connaissent les principes de la cul- 
ture, il n’est pas nécessaire de leur dire, dans le cahier 
d'aménagement, la manfère dont ils auront à faire 
les balivages, les semis, les plantations, etc., Fee 
atteindre le but que l’on se propose. 

Une dernière observation achèvera, je le pense; de 
lever toute incertitude sur l’utilité et la possibilité de 
cette formation préalable des affectations normales: 
C’est qu'après tout, lorsqu'elle n’existe pas sur le 
terrain et sur le papier, il faut bien cependant l’avoir 
dans la tête, quand on procède. à la régularisation 
d’une forêt, n’aurait-on à y faire que des éclaircies ; 


326 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


car enfin, en réalité, quel que soit l’état d’un massif 
que l’on veut aménager, l’aménagement consiste 
dans un travail de transformation qui peut. sans doute 
être plus ou moins difficile, plus ou moins compliqué, 
plus ou moins long ; mais qui ne cesse pas d’avoir 
le même objectif, de tendre exactement au même 
but et qui comporte en conséquence la même méthode 
et la même base. Cette base, c’est le tableau des 
affectations normales ; cette méthode, c’est la subor- 
dination du caractère des exploitations, à la place 
qu’occupent les parcelles dans ledit tableau. Ce sont 
à des idées qui sembleront peut-être trop absolues, 
je le crains. Trop absolues, soit : nous faisons dela 
{héorie, et par conséquent nous visons à l’absolu. 
Sont-elles justes ? sont-elles vraies? sont-elles propres 
à apporter la lumière et l’unité dans les:travaux d’a- 
ménagement ? Telle est la question. 

A mes yeux, les aménagements, proprement pr 
les transformations, les conversions, rentrent dans le 
même genre d'opérations. Toutes ces opérations 
peuvent différer par quelques expédients; jamais par 
les moyens fondamentaux, et il me paraît nécessaire 
qu'on puisse reconnaître, retrouver dans les plans qui 
les résument, les principes essentiels que nous avons 
essayé d'analyser. 8 

Eh quoi! dira-t-on peut-être, vous voulez assu- 
jettir la transformation d’un massif composé d'arbres 
de 20 à 40 ans, entremêlés, aux mêmes règlements, 
au même plan que l'aménagement d’une forêt qui con- 
tiendrait toutes les classes d'âge nécessaires, pour 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 227 


qu'on pôt y.entreprendre. et y FoRLiRUEr, des.coupes 

de régénération ? 
| FÉES Oui c'est là ce que je demande, et; je pense même 
| que cela est indispensable pour que l’on ne soit pas 
_ privé du seul güide propre à assurer la marche de la 
transformation du massif que l’on vient de prendre 
pour exemple. En effet, ‘celte transformation doit 
| tendre, sous peine de manquer un des buts princi- 
D” … paux de la culture des bois, à créer dans le massif 


les en question, une gradation d'âge qui permette d’ en. 
sa “relirer un jour le rapport soutenu le plus avanta- 
4 ES _geux. Mais il s’agit alors de faire un aménagement 


l. ou d'en préparer au moins. les éléments ;,or, pour 
cela, il faut évidemment se fixer sur l’âge d exploita- 
: bilité, sur la durée de la révolution définitive, sur le 
sens dans lequel il importe que les classes d'âge se 

suivent ; car, autrement, on ne saurait quels sont les 

sujets qu'il convient de censerver, ceux qu'il y a 

lieu d’abattre, etc. Bien que les opérations possibles 
actuellement ne soient que des éclaircies, on s’expo- 

4 serait à compromettre par la manière de les eflecipers 
la formation des classes d’âge. 5 
Admettez, au contraire, que la révolution défi- 

nitive devant être de 100 ans et les périodes de 20, 

on ait partagé le massif en cinq parties d’égale pro- 
ductivité, et indiqué la période dans laquelle il 
serait désirable que chacune d’elles pût être régéné- 
rée ; alors, les agents d'exécution sauront, en pro- 
cédant aux éclaircies : qu'ici il faut ménager les bois 
de 40 ans; que là on doit les sacrifier ; et, quand 


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» 


398 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


arrivera l’époque à laquelle pourront commencer les 
coupes de régénération, la forêt sera art He d'un 
rapport annuel. 5 

Le tableau des affectations normales étant arrêté, 


examinons comment on règle les exploitations dans 


les forêts auxquelles on est obligé d'appliquer une 
révolution principale transitoire ou une révolution 
préparatoire. * 


. On peut être conduit à adopter une révolution. : 


jusqu’à la fin de la révolution normale ; et une |. "0 


volution préparatoire, lorsque l’âge trop peu avancé ue” 


des massifs les plus vieux ne permet pas de les 
exploiter immédiatement. 


ARTICLE II. 


DES RÈGLEMENTS D'EXPLOITATION, 
DANS LE CAS OU L'AGE TROP AVANCÉ DES MASSIFS 
LES PLUS JEUNES, NE PERMET PAS DE LES LAISSER SUR PIED 
JUSQU'A LA FIN DE LA RÉVOLUTION NORMALE. 


Quand on a partagé la révolution normale en un 
certain nombre de périodes, ouvert à chacune d'elles 


4. Nous avons vu que l’âge d’exploitabilité n’était pas suscep- 
tible d'une détermination bien rigoureuse. Pour qu’une révo- 
lution puisse être qualifiée de transitoire, il faut donc qu’elle 
diffère beaucoup de celle que comporterait la longévité des 
essences. 


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‘Wansitoire, lorsque l’âge trop avancé des massifs lés 2. 


plus jeunes ne permet pas de les laisser sur pied 


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DÜ PLAN D'EXPLOITATION. 329 


une colonne spéciale et classé, d’après les exigences 
de l'exploitabilité et des règles d’assiette, les diffé- 
rentes parcelles dont se compose la forêt, il est aisé 
de reconnaître dans quelle mesure les jeunes bois 
font défaut, et de déterminer par conséquent le 
temps dont il est nécessaire de raccourcir la durée de 
la révolution principale définitive, pour assurer la 
continuité des exploitations annuelles. Ce temps dé- 
des sacrifices que l’on est disposé à s'imposer. 
ur l'accroissement, et surtout de la longévité des. 
sences. La perte qui résulte du maintien des bois 
delà de l’âge d’exploitabilité, est bien rarement 
… “  æssez manifeste pour motiver le raccourcissement 
| d'une révolution. La longévité des essences est d'autre 
| part assez grande, en général, pour que l’on puisse 
sans inconvénients, les laisser sur pied jusqu’au delà 
du terme fixé par leur exploitabilité; et ce n'est en 
conséquence que dans des circonstances exception- 
nelles que se présentera l'impossibilité de rem- 
plir, avec l'excédant des classes d'âge les plus 
âgées, les lacunes que pourraient présenter les classes 
| les plus jeunes. Admettons cependant que les deux 
_ dernières classes fassent défaut, et qu'il soit nécessaire 
d'y suppléer, au moins en partie, afin que les bois. 
qui devront être immédiatement régénérés, aient le 
temps de redevenir exploitables sans trop de préju- 
dice, pour le commencementde la révolution suivante; 
admettons d’un aulre côté, qu’à raison de la maturité 
des bois les moins âgés, il y ait danger à prolonger 
de plus d’une période le temps pendant lequel ils de- 


É 
Fa 

3 
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7 CR 


330 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


vraient, d’après leur âge, rester sur pied. Dans cette 
hypothèse, la durée de la révolution principale tran- 
sitoire sera plus courte que celle de la révolution dé- 
finitive d’un temps égal à la durée d'une période, 
et si la révolution normale est de 400 ans, la période 
de 20, la révolution transitoire. devra être fixée à 
80 ans. 


Cette fixation de la révolution transitoire est la 
seule opération embarrassante et délicate, dans l étude 
du plan d'exploitation des forêts non susceptibles 
d’être soumises à une révolution définitive. Quand la 
révolution est arrêtée, on procède au règlement des 
exploitätions, tant par période que. par année, qui 

est destiné à compléter le. plan d'exploitation, en 
suivant absolument les mêmes règles, que s’il s’agis- 
sait d’une forêt où toutes les classes d'âge seraient 
représentées *. 


A. La période de la révolution transitoire étant de 20 ans, 
comme celle de la révolution définitive, et je ne vois pas de 
raison pour qu'il en füt autrement, on régénérerait : 
= Dans la ir° période de la révolution transitoire, la 4° affecta- 

tation et le 4/4 de la 2°; 

Dans la 2° période de la révolution transitoire, és de la 2+, 
et 14/2 de la 3°; 

Dans la 3° période de la révolution transitoire, 4/2.de la,3° et 
3/4 de la 4'; 

Dans la 4° période de la mime révolution, 4/4 de la 4° affecta- 
tion et toute la 5°. (Note de la 2° édition.) 


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D Le 


Le 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 331 


ARTICLE HI. 


DES RÈGLEMENTS D'EXPLOITATION, 
DANS LE CAS OU L'AGE TROP PEU AVANCGÉ DES MASSIFS 
LES PLUS VIEUX, NE PERMET PAS DE LES RÉGÉNÉRER 
IMMÉDIATEMENT. 


"il y a rarement de grands FILS L FRS à lais- 
£ es bois dépasser l’âge normal de leur exploitabi- 
si la limite d'âge supérieure jusqu'à laquelle on 


£ LE les pousser est difficile à préciser, on perd au 


contraire beaucoup à les exploiter avant leur.matu- 
rité,.et l'âge minimum qu’on peut adopter pour leur 
régénération, est celui auquel ils produisent des se- 
mences fertiles. 
Il est évident par exemple que si, dans une forêt 
de bois feuillus, les peuplements les plus âgés. n’a- 
vaient que 40 ans, il faudrait avant de les exploiter 
en coupes de régénération, attendre au moins 40 ans, 


_et se borner pendant ces 40 ans, à les éclaircir. 


Ce laps de temps est ce que j'appelle une révolu- 
lution préparatoire, parce que ce mot préparatoire 
indique bien la nature et le but des coupes à faire,. 
avant que l’on puisse entamer là régénération. -Le 
réglement de ces coupes sera d’ailleurs facile à pré- 
senter : on divisera la révolution préparatoire : en 
autant de parties qu’il faudra renouveler de fois la 
coupe préparatoire, c’est-à-dire l’éclaircie, sur un 
même point : en deux par exemple, si la rotation des 


3392 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


coupes -de l’espèce est fixée à 20 ans, et toutes les 
parcelles à éc'aircir pendant chaque rotation, seront 
groupées en une série ou partagées en deux, suivant 
les circonstances. Je dis les parcelles à éclaircir, car 
il se pourrait qu'il y en eût à exploiter en taillis. 

A l'expiration de la révolution préparatoire, la 
forêt sera dans des conditions analogues à celles que 
nous avons supposées dans l’article précédent. 

Le modèle que j'ai donné, page 323, pour les 
coupes par contenance à faire pendant la première 
période dans une forêt qui aurait toutes ses classes 
d'âge, servira à dresser le tableau général des 
exploitations pendant la révolution préparatoire. 
Quant au tableau spécial, il n’est pas nécessaire, à 
moins que la révolution préparatoire ne comprenne 
plus de deux périodes, et dans ce cas on prendra le 
même cadre, modifié conformément à la note inscrite 
au bas du modèle précité. 


Si on a bien compris les exemples qui précèdent, 
on ne devra éprouver aucun embarras pour la for- 
mation du plan d'exploitation des forêts irrégulières, 
quels que soient les caractères particuliers qu'elles 
présentent. Les cadres que j'ai proposés, se prêtent, 
je crois, et nous allons d’ailleurs en faire l'essai, à 
toutes les combinaisons auxquelles la conversion ou 
la transformation en futaies régulières peut donner 
lieu. 


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DU PLAN D'EXPLOITATION. 353 


Ces cadres me paraissent surtout recommandables, 
parce qu'il dispensent dénoncer les règles de culture 


propres à assurer le succès de. l'aménagement. 


Maintenant, qu'on y ajoute, si l’on veut, à propos de 
ces règles, quelques notes complémentaires explica- 
tives,— je ne m'y oppose pas; abondance de bien ne 
saurait nuire; mais on peut s’en passer, si l’on a 
affaire à des agents intelligents, instruits et observa- 
teurs. Dans le cas contraire, soyez sûrs que vos amé- 
nagements, de quelque façon que vous les exposiez, 
ne seront jamais exécutés. : 


L 


CHAPITRE SEPTIÈME. 


GONVERSION DES TAILLIS COMPOSÉS EN FUTAIES PLEINES, 


ARTICLE PREMIER. . pue 


OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES. 

La conversion des taillis composés en futaies a 
engendré plusieurs théories très-différentes, au moins 
en apparence. Elle n'implique pas cependant, comme 
je l’ai déjà fait observer, d'autres connaissances, 
d’autres appréciations, d’autres procédés, que ceux que 
réclame l'aménagement des forêts qui ont toujours 
été traitées en futaie. Lorsqu'on sait aménager 
celles-ci, on est capable d'aménager celles-là, et la 
méthode à suivre est la même pour les unes comme 
pour les autres. 

Un taillis composé peut être assimilé à une forêt 
jardinée, en ce sens que des arbres de tous les âges 
y sont entremêlés; mais il offre cette particularité 
que les plus jeunes bois y sont représentés, dans 
chaque coupe, par des sujets du même âge en massif 
plus ou moins compacte. À cause de cette particula- 
rité, le taillis composé semblerait devoir être moins 


D nd ob Te un RSS 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 335 
irrégulier que la forêt jardinée, et cependant, en réa- 
lité, il l’est souvent beaucoup plus, par suite ge la 
différence d'âge qui existe entre les réserves. En effet, 
dans la forêt jardinée, les arbres de tous les âges ne 
sont pas toujours ensemble, et il est rare que l'on ne 
rencontre pas sur d'assez grands espaces des masses 
à peu près homogènes ; tandis que, dans le taillis 
composé qui a été convenablement traité, les vieilles 
réserves, les anciens, les modernes et les baliveaux, 
sont véritablement pêle-mêle. 

Toutefois, ce n’est point pour cela que les écri- 
vains forestiers ont traité séparément de l’aménage- 
ment des futaies irrégulières et de la conversion des 
taillis composés : c’est parce que, dans les forêts de 
la première catégorie, les jeunes bois sont des brins 
de semence ; tandis que, dans celles de la seconde, ce 
sont en général des rejets. Sans les rejets, le taillis 
composé rentrerait dans les conditions d'une futaie 
irrégulière, plus ou moins claire, et nous n’aurions pas 
à nous en occuper d’une manière spéciale; mais ces 
rejets constituent, pour la régénération naturelle, un 
instrument d'un genre tout particulier, puisqu'ils 
peuvent se reproduire autrement que par les 
semences. 

La difficulté de la conversion des taillis composés 
en futaies, réside précisément dans l'appréciation deces 
deux éléments, le taillis et la futaie, au point de vue du 
concours qu'ils sont susceptibles d'apporter à la régé- 
nération naturelle. Le concours du taillis peut être 
nul : c’est ce qui arrive lorsque ce taillis ne se com- 


336 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


pose que de bois blanes ou de morts bois; même 
lorsqu'il ne comprend que des bois durs, son concours 
peut n'être que secondaire : il en est ainsi lorsque les 
souches sont trop usées pour que les rejets en prove- 
nant, donnent jamais des semences fertiles. Le concours 
du taillis sera au contraire dominant, lorsque les rejets 
seront d'essence dure, vivaces, nombreux, et les 
réserves rares. Enfin, ce concours sera de nature 
à enlever tout embarras aux combinaisons nécessaires 
pour amener l’état normal, lorsque le taillis sera tel 
que l’on puisse, sans en amoindrir sensiblement la 
qualité et la longévité, c’est-à-dire sans le rendre 
moins propre à l’'ensemencement du sol, le couper 
encore plusieurs fois avant de s’en servir pour cette 
dernière destination. 

Ces diverses considérations doivent DA être 
présentes à l’esprit de l’'aménagiste, lorsqu'il étudie 
un plan de conversion de taillis composé en futaie, 
ét surtout quand il procéde au parcellaire ; il n’oubliera 
pas non plus : 

1° Que le premier principe de la culture fores- 
tière veut que l’on tire le plus de parti possible, pour 
la régénération d’une forêt, des ressources. naturelles 
qu’elle renferme ; 

2° Que le mode du taillis ayant pour effet de dé- 
grader le sol, plus tôt on y renonce et mieux cela vaut; 

3° Que l'intérêt de la culture, de la conservation 
et de l'amélioration des massifs, doit toujours primer 
celui qui se rattache à la production actuelle et au 
maintien du rapport soutenu ; 


nne hs ble dé jte ds di 


| 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 337 


-+ 4° Que si le but que l’on a en vue quand on con- 
vertit une forêt, est d'y établir une gradation d'âge 
qui permette de retirer un jour de celte forêt des 
produits annuels plus avantageux que ceux qu’elle 
a donnés jusqu’à présent, il ne faut pas que le désir 
d'atteindre ce but un peu plus vite, fasse compro- 
mettre la régénération naturelle des massifs. 

Le parcellaire des-taillis composés est plus aisé, 
moins long à faire, en général, que celui des autres 
forêts; parce que les limites des coupes peuvent être 
conservées comme limites des parcelles, puisqu’elles 
séparent les peuplements dont les âges diffèrent, ce 
qui est ordinairement, comme on le sait, le caractère . 
distinctif le plus influent; mais la description spéciale 
en est beaucoup plus délicate, plus embarrassante, 
parce qu’elle sert de base à des appréciations fort 
incertaines et cependant nécessaires,” comme par 
exemple celles qui se rapportent à la! vitalité des sou 
ches, à la longévité probable des rejets qui en pro- 
viennent, à l’âge auquel ceux-ci commenceront à don- 
ner des semences fertiles. Il est indispensable que 


. Faménagiste exprime sur ces divers points une opinion 


formelle, attendu que les combinaisons de l’aména- 
gement en dépendent. Il'est non moins essentiel qu'il 
s'explique sur la qualité des réserves de toute caté- 
gorie, sur le temps durant lequelelles pourraient res- 
ter sur pied, et sur le contingent qu’elles apporte- 
raient au repeuplement naturel. Outre ces questions 
principales, la reconnaissance du: taillis en soulève 
encore d’autres qui sont faites pour exercer toute la 
22 


338 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


sagacité des meilleurs forestiers. Les bois d'élite, 
quoiqu’en minorité aujourd’hui, sont-ils assez nom- 
breux pour former plus tard la majorité? Les jeunes 
brins de semence sont-ils en assez grande quantité et 
dans d’assez bonnes conditions, pour autoriser l’espé- 
rance qu’en les dégageant par des nettoiementsplusou 
moins fréquents, on créera pour l'avenir des ressources 
sérieuses? La continuation des coupes de taillis serait- 
elle possible sans qu’on eût à en redouter de mauvaise 
. conséquence, sinon pour le peuplement, du moins 
pour le sol? Ce sol se prêterait-il à des-répeuple- 
ments artificiels? Il est désirable que la solution:.de 
. toutes ces questions résulte de la description même 
des parcelles. Cette description exige donc du temps, 
de l'attention, de l'expérience, et même une sorte 
de prescience, un don de seconde vue, de divination, 
qui est d’ailleurs vraiment ce qu'on PAS at 
le sentiment, le flair forestier. 20 « Ù 

Ces préliminaires posés, choisie re Mdièmte 
de la conversion. Je n’aurai guère à me servir dans 
la discussion de ce problème que de termes précé- 
demment définis. Néanmoins, pour éviter toute:équi- 
voque, il n’est pas inutile que je précise encore 
mieux le sens que j'attache à RES de ces 
termes : 

Quand je parlerai de coupes dé taillis sous éutièes 
à continuer temporairement, il s’agira de véritables 
coupes de taillis, telles qu’on doit les faire quand on 
veut obtenir une régénération par les souches, sauf 
la réserve qui pourra être sans doute plus serrée 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 339 


_ qu'elle ne le serait d’après le premier.paragraphe de 

l'article 70 de l'ordonnance du 4“ août 4827, mais 

jaïnais assez pour entraver la production et le déve- 

loppement des rejets. Cette observation, sur laquelle 

j'aurai occasion de revenir, n’est par: superflue; 

car, tout en conservant la qualification de coupes 
| de:taillis, à certaines exploitations, on a souvent 
prescrit. d'y procéder d'une-; façon qui, devait en 
changer le caractère. C’est -ce qui a;eu-lieu, par 
exemple, pour les coupes de taillis dites modifiées 
dans lesquelles il était-recommandé de réserver plu- 
sieurs centaines de. baliveaux ; ou encore, pour les 
coupes de taillis.dites dé régénération: dans lesquelles 
on espérait, par des dégagements, sauver assez de 

brins! de semence pour en-former plus tard une: 
futaie. Cette manière d'appliquer un mode d’exploi-: 
tation dont la pratique a été cependant consacrée 

par les règlements, par l’enseignement de l’école, et 

par la tradition, n'a pas peu contribué à. égarer la 

discussion sur les conversions ‘. 

Je rangerai sous la même rubrique : coupes 
d'amélioration, non-seulement les coupes prépara- 
toires, les éclaircies: les nettoiements, les élagages, 
mais aussi les coupes à blanc étoc; les recepages plus 
ou moins complets, quand ces dernières opérations 
seront subordonnées à des circonstances éventuelles 
et appeéeRson des agents d'exécution. 


Le aire des baliveaux à réserver, doit être réglé de ma- 
nière que le couvert qui en résulte, ne puisse compromettre la 
croissance et la reproduction du taillis {Cours de culture, p. 376). 


340 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


+ 


Je repousse comme impropres les mots sous- 
période, sous-révolution, si souvent employés; car on 
ne saurait concevoir, en présence du sens que j'ai 
donné à la révolution et à la PS qu __— du + 
se dédoubler. 

Enfin, je ne considérerai la conversion p d'un laillis 
comme arrêtée, comme faite, que du jour où il aura 
été décidé que ce taillis ne sera plus recepé et devra 
se régénérer par les semences ; jusque-là la conver- 
sion reste suspendue; de sorte qu'à mes yeux, le 
début de la révolution principale, normale ou: tran- 
sitoire, qui est marqué par le moment où on effectue 
la première coupe de régénération en futaie, peut 
avoir lieu sans que toute la forêt soit convertie ou, 
en d’autres termes, sans que toute la forêt soit desti- 
née à ne plus être régénérée que par les semences. 


ARTICLE IT. 


LA 
UTILITÉ DE LA FORMATION PRÉALABLE DES AFFECTATIONS 
NORMALES. 


La formation préalable des affectations normales 
est aussi utile pour la conversion des taillis composés, 
que. pour l'aménagement des autres forêts irrégu- 
lières ; et cette formation est plus facile en: général: 
pour la conversion, attendu qu'elle n'y est-guère 
soumise qu'à une considération, celle des règles 
d’assiette. En effet, les exigences de l’exploitabilité 
perdent beaucoup de leur force dans les taillis com- 


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DU PLAN D'EXPLOITATION. sut 


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posés, puisque les vieux arbres y sont uniformément 
répartis et que le taillis n’y présente pas des écarts 
d'âge assez grands pour que l’on ne puisse, sans des 
sacrifices sensibles d'accroissement, ranger dans une 
même affectation les plus âgés et les plus jeunes peu- 
plements. Quant au rapport soutenu, de quelque 
façon qu'on s’y prenne, il est condamné à éprouver 
une forte perturbation, ainsi qu'on le reconnaîtra 
plus tard, et ce ne serait point par un changement 
dans l'assiette des affectations, qu’on y obvierait. 

Ainsi donc, étant donné un taillis composé qui, 
après sa transformation en futaie, devrait être 
exploité dans une révolution de 444 ans, par exemple, 
et dont une portion quelconque pourrait être régé- 
nérée complétement en 24 ans, nous diviserons cette 
révolution en 6 périodes. Pour chaque période, nous 
déterminerons une affectation en nous conformant 
avant tout aux règles d’assiette, et nous remplirons le : 
tableau indiqué page 244, après avoir donné à chaque 
parcelle la désignation définitive que comportera 
l'affectation à laquelle elle appartiendra; mais on 
comprend tout de suite que, si on peut rarement 
imprimer immédiatement aux coupes une marche 
normale, même dans les forêts qui ont toujours été 
trailées en futaie, on le peut encore plus rarement 
dans les forêts dont on veut changer le mode d’ex- 
ploitation; et nous avons à étudier quelles sont les 
mesures à adopter pour mettre ces forêts, le plus tôt 
possible et au mieux de tous les intérêts, dans les 
conditions désirables de régularité. Ces mesures 


342 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


doivent être résumées dans le pesto général des 
exploitations. LC! be: mnerés 


“ARTICLE IL anse pb joe 


RÈGLEMENT GÉNÉRAL DES EXPLOITATIONS, 

Nous supposerons d’abord que nous ayons affaire 
à un taillis composé régulier et complet, triche-en 
essences d'élite et en réserves de franc-pied. Ce taillis 
est soumis à une révolution de 24 ans; nous voulons le 
transformer en une futaie pleine exploitable dans une 
révolution de 4144 ans, partagée en six périodes. Le 
tableau. des affectations à été dressé conformément 
aux prescriptions des règles d’assiette; il s’agit de 
régler les exploitations par période. Je vais exposer 
les différents systèmes que l’on a suivis-pour celaiet 
je dirai ensuite quel est à mon sens"le meilleur. Ces 
systèmes n’empruntent pas séulement leur originalité 
aux circonstances de la végétation; ils l'empruntent 
aussi à la rapidité plus ou moins grande que l’on 
est disposé à imprimer à la conversion : On peut 
se proposer, de convertir immédiatement toute la 
forêts. on peut estimer au contraire qu'il est pré- 
férable de ne la convertir que graduellement. Dans 
ces deux cas, il y a bien des degrés de promptitude. 
possibles; nous aurons à apprécier quels sont les 
plus avantageux. Enfin, que l’on veuille convertir 
immédiatement ou graduellement, la transformation 
peut.se faire avec ou sans révolution préparatoire, et 


LA 


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Cd 


DU PLAN D'EXPLOITATION: 343 


nous-la idiscuterons dans l'une et l’autre hypothèse. 
Mais la supposition que nous fesons maintenant d'un 
taillis composé régulier et complet, se réalise excep- 
tionnellement. Nos taillis sont en général irréguliers 
et incomplets et leur conversion est alors assujettie à 
des règles très-variables. Nous en ferons: PEr* ss 


PAU ed | Hhoë 


RIT AS | 


S Aer. = ’ 


Règlement sa: 60 des exploitations d'un talllis es Aie et 
“Complet à convertir, lorsque la révolution est préparatoire et la con- 
version immédiate, Hoi 


_. Puisqu’ on veut que la conversion soit mbérigie et 
générale, il faut arrêter les coupes de: taillis sur toute 
l'étendue de la forêt et, par ce fait seul, on peut dire 
que la forêt est convertie; mais il s’agit d’y.créer ce 
qu'on appelle des classes d'âge et c'est là le difi- 
cile : d’abord, parce que les taillis de la première 
affectation, en supposant même que ce. soient les plus 


| âgés, ne, sont pas en général susceptibles de porter 


des semences fertiles; ensuite, parce que les laikis 
de la dernière, en supposant que ce soient les plus 
jeunes, ne sauraient fournir une aussi longue carrière 
que des brins de semence. Deux questions..se..pré- 
sentent donc : la première, étant-de savoir pendant 
combien de temps on devra laisser sur pied les taillis 
de, la première affectation, pour les amener à un état 
tel qu’ils soient à même de se régénérer naturelle: 


34h AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


- 


ment par les semences; la seconde, étant de savoir 
pendant combien de temps on pourra laisser sur pied 
les taillis de la dernière affectation, sans me on au à 
craindre leur dépérissement. | Hi GrtI 

De la solution donnée à la première de ces ques- 
tions, dépend la durée de la révolution préparatoire. 
De la solution donnée à la seconde, dépend la durée 
de la révolution principale. Cette dernière révolution 
sera d'autant plus longue; elle se rapprochera d’au- 
tant plus de la révolution normale, que la révolution 
préparatoire sera plus courte; et la répartition des 
peuplements, la plus favorable au raccourcissement 
de la révolution préparatoire et à l'allongement de la 
révolution principale, serait naturellement celle qui 
aurait classé les taillis les plus âgés dans la première 
affectation, tandis que les pre jeunes appartiendraient 
à la dernière. 

L'état des rejets, l'état des souches, le nombre et 
l’état des réserves, la nature des essences, l’âge 
auquel elles portent semences, telles sont les circon- 
stances à apprécier, afin de résoudre l’une ou l’autre 
des questions que je viens d’énoncer ; seulement, les 
rejets auront moins d'influence sur la solution de la 
première question que sar celle de la seconde, et cela 
se conçoit aisément, puisque dans la première affec- 
tation on a besoin de vieux bois, tandis que dans la 
dernière on ne saurait en avoir de trop jeunes. 

Si on se croyait dans l’obligation de laisser croître 
les taillis jusqu’à l’âge de cinquante ans, afin que 
leur action, s’ajoutant à celle des réserves, pût assurer 


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DU PLAN D'EXPLOITATION. si 


le réensemencement naturel, il en résulterait cette 
conséquence forcée que, pendant un laps de temps 


” égal à la différence entre l’âge de 50 ans et l’âge 


actuel des taillis, la forêt ne serait parcourue que par 
des coupes d’éclaircie, de régularisation si l’on veut, 
ou, pour me servir du terme consacré, par des coupes 
préparatoires dans lesquelles on s’appliquerait à 
ménager, tout en évitant d'interrompre le massif : 
dans la première affectation, les vieux arbres; dans 
la dernière, les jeunes; dans les affectations pars 
diaires, les sujets d’âge moyen. 

La différence entre l’âge de 50 ans et l’âge actuel 
des massifs étant, par exemple, de 30 ans, la durée 
de la révolution préparatoire serait donc de 30 ans. 
On‘diviserait cette révolution en autant de parties 
aliquotes qu'il y auraït d'unités dans le quotient 


du chiffre de ladite révolution par celui de la pério- 


dicité des: coupes préparatoires, el chacune des 
affectations normales serait partagée en autant de 
coupés qu’il y aurait d'années dans une des subdi- 
visions de la révolution; ou bien, si l’on jugeait 
avantageux de ne pas multiplier ainsi les coupes à 
fairé chaque année, on grouperait les affectations 
deux par deux ou trois par trois. Chaque groupe ne - 
formerait qu'une série qui comprendrait naturelle- 
ment autänt de coupes qu’il y aurait d'années dans 


une des subdivisions précitées, à moins qu’on ne 


rendit ces coupes biennales, ce qui pourrait encore 
se faire pour des raisons d'économie ou de simplifi- 
cation de service. Au reste, l'établissement du règle- 


346 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


ment général des exploitations, pendant la révolution 
préparaioire, rentrerait exactement dans ke cas prévu 
à la page 331. |: 8) | 

Après. la révolution D nénnedtairees Pan dont 
le sous-bois le plus âgé aura 50 ans et sera sur- 
monté, de nombreuses réserves, et dont le sous-bois 
le plus jeune, âgé de 80-ans, contiendra sans doute 
beaucoup de brins de semence, la forêt ne se distin- 
guera . pas! des autres futaies irrégulières. On en 
réglera. l'exploitation comme on le fait pour ces der- 
nières, en lui appliquant. une révolution. principale 
d'autant plus longue que les jeunes massifs; ou plutôt 
que les massifs de la dernière affectation, pourront 
durer plus longtemps. Si cette révolution ne s’écarte 
pas trop de celle que l’on aurait adoptée comme 
normale, on la regardera comme définitive. Si elle 
s’én écarte trop, on prendra les dispositions néces- 
saires pour que les affectations normales ne on 
jamais être perdues de vue. hi 


ai S 2. 


Règlement général des exploitations d'un taillis composé complet et 
régulier à convertir, lorsqu'il n’y a pas de révolution préparatoire, et 
que la conversion eSt immédiate. 


sé La méthode de transformation exposée dans l’ar- 
ticle précédent, est celle que l’on a longtemps suivie 
à l'exclusion de toute autre. C'est la plus simple; et 


_ 
- 


DU: PLAN. D'EXPLOITATION. 347 


je..le dirai dès à présent, la plus rationnelle, la 

plus recommandable au point de vue cullural ; puisque 
c’est celle qui permet le mieux d'utiliser les ressources 
du peuplement pour la régénération naturelle; mais 
elle se signale, au point de vue économique, par 
deux inconvénients majeurs : d’abord, elle a pour 
effet d’altérer profondément le rapport soutenu: Par 
le fait de la conversion immédiate, les coupes de 
taillis étant remplacées par de simples nettoiements 
ou éclaircies et des extractions prudentes de vieux 
arbres, il est clair que les produits annuels sont très- 
fortement diminués. Ensuite, elle retarde le début 
de la première révolution, principale, et elle rend 
presque. impossible l'adoption, pour cette première 
révolution, d’une durée égale à celle de la rHyolLÉSe 

normale. 

Le premier de ces nat l'altération pro- 
fonde. du rapport soutenu, à été longtemps le prin- 
cipal motif qui s’est opposé à la transformation de 
nos taillis sous futaie en futaies pleines, et aujourd’hui 
encore celte altération est l’objet d’une préoccupation 
très-vive. Aussi a-t-on cherché et cherche-t-on à 
l'atténuer, voudrait-on même empêcher qu’elle ne se 
produisit, chose pratiquement irréalisable et même . 
théoriquement inadmissible. Quels que soient les expé - 
dients auxquels on ait recours, quelle que soit lalenteur 
-que l’on apporte dans l'opération, on ne saurait passer 
d'une certaine révolution à une révolution plus longue, 
sans se condamner à une diminution temporaire de 
revenu ; cette diminution pourra être très-faible et de 


348 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


courte durée; elle n’en surviendra pas moins. Dans 
l'hypothèse la plus favorable, celle où la contenance 
de la coupe annuelle'serait réduite d’une quantité assez 
petite, pour que Fon perdit moins sur l'étendue que 
l’on ne gagnerait sur l’accroissement, la diminution du 
revenu, r'enfermée dans les plus étroites limites imagi- 
_nablés, porterait encore sur un an, et latransformation, 
pour être complète, exigerait plusieurs siècles, en 
supposant qu'elle ne fût pas contrariée par les exi : 
gences de la végétation. On poursuit donc vraiment 
une chimère, quand on prétend transformer les taillis 
en futaie, sans abaisser la production temporairement. 
Cette diminution sera d’autant moins sensible que le 
temps consacré à la transformation sera plus long ; 
mais comme ce temps ne peut pas être infini, la 
diminution ne saurait jamais être réduite à zéro. 
Quoi qu’il en soit, les seuls moyens d’atténuer le 
sacrifice qu’entraîne la substitution du mode d'exploi- 
tation en futaie à celui du taillis, consistent dans la 
suppression plus où moins complète des coupes pré- 
paratoires, et dans la continuation plus ou moins 
longue des coupes de taillis sur certaines parties de 
la forêt. Nous n'avons pas à discuter en ce moment 
l'emploi de ce dernier moyen, puisque nous avons 
supposé que l’on voulait convertir immédiatement la 
forêt sur toute son étendue; et quant au premier 
moyen, la suppression des coupes préparatoires, il- 
est évident qu'il ne saurait être appliqué qu’à la pre- 
mière ‘aflectation; car si la conversion de toute la 
forêt peut avoir lieu immédiatement, la régéné- 


LS So ST Né ce Qu: 


._ DU PLAN D'EXPLOITATION. | 349 


+ ration ne peut assurément en être. que graduelle. 
- 0'La suppression des coupes préparatoires, dans le 


cas d'une conversion immédiate générale, équivaut 
donc à la suppression de la révolution préparatoire. 
On entreprendsans délai les coupes de régénération. 
On soumet la forêt sans transition à une révolution 
principale, et, comme on allonge la distance possible 
entre l'époque de la régénération de la première 
affectation et l'époque de la régénération de la der- 
nière, d’un temps égal à la durée de la révolution 
préparatoire, on est moins gêné pour adopter une 
révolution principale qui soit en harmonie avec 
lexploitabilité des essences. En outre, et c’est le 
but principal que l’on a en vue, en coupant à blanc 
étoc les peuplements de la première affectation, au 
lieu de se borner à les éclaircir, on se procure une 
augmentation de produits; mais tous ces avantages 
sont quelquefois achetés chèrement par les difficultés 
que la suppression de la révolution préparatoire 
entraîne pour la régénération naturelle, difficultés 
d'autant plus grandes que les taillis de la première 
affectation sont plus jeunes. Si, même avec une ré- 
volution préparatoire, il est désirable que les taillis 
les plus vieux soient colloqués dans la première affec- 
tation, à plus forte raison est-ce’ à souhaiter quand 


__ on renonce aux coupes préparatoires. Autrement, on 


rend non-seulement, comme je viens de le dire, la 
régénération beaucoup plus pénible et par consé- 
quent plus coûteuse, mais on se*condamne encore 
à des perteS d’accroissement. Je n’insiste pas en ce 


P- 


350 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


PA 


moment sur ces deux points, parce que j'aurai: à 
les traiter in extenso plus tard. Je me borne à ajou- 
ter que la suppression de la révolution préparatoire 
ne me paraît tolérable, à la rigueur, que lorsque les 
{aillis de la première affectation sont assez âgés pour 
contribuer à la eut sinon re leurs SARARGNE, 
au moins par leur abri. 

Cette suppression étant ababe d'ailleurs; le 
règlement général des exploitations ne soulève aucune 
question qui n'ait déjà été prévue et résolue. 11 


RD AERI 290 RIRES 


Règlement général des exploitations d’un taillis composé complet: et 
régulier à convertir, lorsqu'il n’y a pas de révolution préparatoire, et 
que lat conversion est graduelle. 

QUE 


J. — Exposé, des méthodes applicables. — La 


suppression de la révolution préparatoire atténue 


donc la diminution de produits inhérente à la conver- 


sion, et permet d'adopter, pour la révolution princi- 


pale, une durée qui se rapproche davantage:.de la 
durée normale. Toutefois son effet, surtout sous de 
premier rapport, n’a point. paru -assez sensible, et 
l’on s'est demandé si l’on ne pourrait point recourir à 
des moyens plus énergiques, soit pour augmenter 
les produits pendant la transformation, soit :pour 
rendre possible l'adoption immédiate d’une révolu- 
tion principale normale? La réponse étaif facile : On 


Lo 


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: Be PLAN D'EXPLOITATION. 351 


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“svait sine lès coupes préparatoires pour la pre- 
mière affectation, il n’y avait ns les supprimer 
aussi pour les autres. 

Sion les supprime effectivement, He il y a né- 
cessité de continuer les coupes de taillis dans toutes 
les affectations, sauf la première. La conversion n’est 
plus immédiate sur toute l’étendue de la forêt; elle 
est graduelle, et rien ne s'oppose à ce que l’on adopte 
la révolution principale normale. Pendant qu’on ré- 
génère la première affectation dans le cours de la 
période normale correspondante, on continue le taillis 
dans les autres affectations jusqu'à ce que leur tour 
de régénération en futaie soit arrivé. Quant aux 
produits, si on ne les considère que dans leur ’en- 
semble, non pas pour une affectation plutôt que pour 


_ l’autre, non pas par année, mais par période, ‘ils 


seront nécessairement un peu plus forts dans la 
première période qu'ils ne l’auront été auparavant 
dans le même espace de temps; car, sur toute l’éten- 
due de la première affectation, au lieu de se borner 
à receper les taillis sous la réserve d'un nombre 
d'arbres plus ou moins grand, on aura tout à cou- 
per. La diminution de la production périodique ne 
se manifestera qu'à partir de la deuxième période, 
parce qu'alors, dans la première affectation, à la 
place des anciennes coupes de taillis, il n’y aura à 
faire que des éclaircies; et cette diminution ira en 
augmentant, de période en période, pendant la pre- 
mière révolution, jusqu’à ce que les bois précédem- 
ment régénérés soient assez âgés pour que l’on en 


t 


352 AMÉNAGEMENT DES: FORÈTS. 


obtienne, par de simples éclaircies liént de pro- 
duits qu'on en obtenait des coupes de taillis. 

Ces résultats se comprennent facilement. Je vais 
cependant les mettre mieux en évidence, et.montrer 
comment on peut les assurer par le roulement géné- 
ral des exploitations, quand on se résigne d’ailleurs 
à sacrifier les règles d’assiette, et, qu'on ne tient pas 
à avoir pendant la période une suite non interrompue, 


tout à la fois, et pour les coupes de “égénération ei - 


pour celles de taillis. 

En effet, quelle que soit la composition des: lions 
tations normales ; dès que le nombre des coupes du 
taillis à convertir est divisible par le nombre de ces 
affectations, — et il n’y a pas d'empêchement à ce 
qu'il le soit, — toutes les hypothèses de distribution 
des coupes de différents âges entre les affectations, 
peuvent se ramenér à trois types auxquels je: donne- 
rai des chiffres pour qu'ils soient plus saisissants.et, 
pour cela, je supposerai que le nombre des coupes 
de taillis est de 36 ainsi que le nombre des années 
de la période, et celui des affectations de 4. Chaque 
affectation contiendra dès lors 9 coupes et: il se 
pourra : ché 
4° Que les 9 coupes les plus âgées soient dans la 
première affectation, les coupes de 19 à. 27 ans dans 
la deuxième, et les coupes les moins âgées dans le 
dernière ; 

2° Que cet ordre étant renversé, les 9 coupes 
les moins âgées soient dans la première affectation, 
et les 9 coupes les plus âgées dans la dernières 


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© DU PLAN D'EXPLOITATION. 353 


18° Que dans chaque affectation, il y ait des coupes 
dont les âges ne se suivent pas régulièrement, 

Dans le premier cas, l'augmentation des pro- 
duits aura lieu au commencement de la première 
période dans la première affectation, dont les neuf 
coupes seront exploitées à blanc étoc et régénérées. 
Après ces neuf coupes, les produits annuels, qui 
seront fournis par les autres affectations, reviendront 
au chiffre où ils étaient auparavant, pour se mainte- 
nir ainsi pendant 27 ans, c'est-à-dire jusqu’à la 
deuxième période. A cette époque, il n'y aura que 
des éclaircies à faire, pendant 9 ans, dans les coupes 

 régénérées de la première affectation dont les bois 
les plus vieux n'auront que 36 ans et, par consé- 
quent, la production baissera plus qu’elle n’aura 
haussé au début de la première période; puis, on 
entreprendra la régénération des coupes âgées de 
28 à 36 ans de la deuxième affectation et, pendant 
9 ans, les produits se relèveront de nouveau. A 
partir de la dix-huitième année de la deuxième 
période, et jusqu’à la première année de la troi- 
sième, les produits fournis par les coupes de taillis 
dans la troisième et la quatrième affectation seront 
ce qu'ils étaient avant le commencement de la con- 
version; mais désormais il n’y aura que des éclaircies - 
à pratiquer dans les deux premières affectations et il 
s’ensuivra une forte baisse dans les produits, baisse 
qui, en moyenne, sera plus prononcée que la précé- 
dente, à moins que les éclaircies à faire dans la pre- 
mière affectation ne soient aussi-productives que 
23 


354 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


l'étaient les coupes de taillis, chose improbable. 
Cette baisse ne cessera que lorsqu'on pourra entre- 
prendre la régénération des coupes de la troisième 
affectation, c’est-à-dire à la dix-huitième année de 
la période correspondante. Après avoir régénéré ces 
coupes, et pendant les dernières années de la pé- 


riode, on coupera les taillis devenus exploitables de 


la quatrième affectation ; après quoi, il n’y aura plus 
de coupes de taillis à faire, mais simplement des 
éclaircies, jusqu’à la vingt-huitième année de la 
dernière période, et il est possible que parmi ces 
éclaircies il y en ait, celles de la première affecta- 
tion par exemple, qui fourniront autant de produits 
qu’en fournissaient les coupes de taillis ; de sorte que, 
pendant la dernière. période, les produits pourront 
ne pas être moins élevés qu'ils l’auront été pen- 
dant la période précédente. A la fin de la quatrième 
période, les coupes de la quatrième affectation seront 
régénérées, la transformation sera complète et la 
hausse croissante des: pee se manifestera de ee 
en plus. | 
Dans le douxièine cas; la première affectation 
n'étant régénérée qu’à la fin de la période correspon- 
dante, c’est à la fin de cette période qua lieu l'aug- 
mentation des produits, et la baisse ne survient qu’à 
la fin de la deuxième période, au lieu de se faire 
sentir au commencement. | 
Dans le troisième cas, les variations dans les 
produits ne suivent plus aucune marche régulière : 
selon la disposition des peuplements; d’après leur 


# 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 555 


âge; la hausse peut avoir lieu, soit au commence- 
- ment, soit à la fin, soit au milieu d'une période ; 
mais la baisse n’en est pas moins inévitable; et, 
comme dans les deux autres cas, elle l'emporte de 
plus en plus sur la hausse, jusqu'à ce que les éclair- 
cies soient devenues aussi productives que l’étaient 
les coupes de taillis. Voilà la loi qui douiine toutes 

les autres. 
Lorsque la bonne formation É des séféctitions nor- 
males sé concilie avec là collocation ‘des taillis les 
| plus vieux dans la première affectation, des plus 
| jeunes dans la dernière, de ceux d'âge moyen dans 
4 les intermédiaires, on ne doit pas hésiter à adopter; 
| pour là marche des coupes, le règlement général que 
j'ai exposé premièrement. Outre l'avantage de retar- 
der l’époque de la baisse des produits, il a celui, 
beaucoup plus sérieux, de permettre que la durée 
de la période ne soit pas égale à la révolution des 
taillis, sans qu’il en résulte une perte d’accroïssement. 
Ainsi, les taillis devant être coupés à 36 ans, rien ne 
sopposerait, pourvu toutefois que le nombre des 
coupes de taillis fût toujours divisiblé par celui des : 
affectations où ces coupes devraient être assises, rien * 
ne s’opposerait à ce que la période, dans le règlement 
général provisoire, fût fixée, comme dans le règle- 
ment définitif, à 24 ans ou à tout autre’ chiffre qui 
s’accorderait mieux avec les exigences de la régé- 
nération en futaie. C’est là ce qui est impossible 
quand les coupes sont distribuées entre les affectations 
comme on l’a indiqué dans les deux derniers cas. Il . 


Pi 


356 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


est-obligatoire alors, si l’on veut tout à la fois ne 
couper les taillis qu’à l’âge d’exploitabilité, et régé- 
nérer chaque affectation en futaie dans la période 
correspondante, que la durée de cette période soit au 
moins aussi longue que l’ancienne révolution du 
taillis. Il est visible, par exemple, que si cette durée 
était de 24 ans seulément, tandis que la révolution 
du taillis serait de 36 ans, la première affectation 
ne pourrait, tout entière, être régénérée dans la pre- 
mière période, que si elle contenait au début de la 
conversion des taillis âgés de plus de 42 ans. 

Un autre défaut des modèles de règlements qui 
précèdent, et ce défaut existe pour le premier modèle 
comme pour les autres, c’est la brusquerie dans les 
mouvements de hausse et de baisse, brusquerie qui 
devient très-accentuée quand on considère à part 
les produits de chaque affectation, et que l’on 
sépare ceux des coupes de régénération de ceux des 
coupes de taillis. On a eu recours à diverses combi- 
naisons pour y obvier. La meilleure est sans contredit 
celle qui consiste à disposer les peuplements dans les 
affectations, de manière que chacune forme une 
série complète de coupes de taillis se suivant de 
proche en proche et d'âges gradués, depuis l’âge 
d'un an jusqu'à l’âge d’exploitabilité du taillis. Mais 

cela ne se peut guère que lorsqu'on a autant de séries 
de taillis à convertir que d’affectations de futaie à 
constituer. Toutefois, quand la chose est faisable, la 
marche des coupes, soit de régénération, soit de 
. taillis, est parfaitement régulière : Pendant qu'on 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 357 


régénère par coupes successives, non interrompues et 
égalementproductives, la première affectation; on con- 
tinue les coupes de taillis dans les autres; et, durant 
toute la première période, on a une augmentation de 
produits équivalente, chaque année, à la différence 
entre le rendement d'une coupe de taillis et celui 
d'une coupe à blanc étoc. 

L'amoindrissement des produits commence au 
début de la deuxième période et se traduit, chaque 
année, par la différence entre le rendement d’une 
coupe de taillis et celui d’une coupe d’éclaircie ; mais 
l'augmentation, pendant la première période, et 


 l’amoindrissement, pendant la dernière, se répartis- 


sant également entre toutes les années de chaque 
période, on évite ces alternatives brusques de hausse 
et de baisse qu'entraînent les autres modes de trans- 
formation, et c’est un grand avantage. Malheureuse- 
ment, on ne peut non plus se le procurer qu’à là 
condition d'adopter pour la période une durée égale 
à celle de la révolution du taillis, ce qui est regret- 
table, attendu que la durée des périodes ne doit, en 
bonne règle, être subordonnée qu'aux exigences de 
la régénération en futaie. D'ailleurs, je le répète, la 
possibilité de composer les affectations de telle sorte, 
que chacune d'elles forme une série de coupes de 
taillis, se présente très-rarement. Dans la plupart des 
cas, la gradation régulière. dans les mouvements de 
la production ne peut être obtenue que lorsqu’on se 
résigne à des sacrifices d’accroissement, c’est-à-dire 
à ne pas couper le taillis à l’âge auquel on l'avait. 


358 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS 


coupé jusqu'alors ; et ce qu'on gagne au point de vue 
du rapport soutenu, on le perd et au delà au point 
de vue de la quantité des produits. f: 
Ainsi, quoi que l’on fasse, la conversion, même 
graduelle, d’un taillis sous futaie en futaie pleine, 
amène une diminution de produits, à partir de la 
deuxième période de la révolution principale. Cette 
diminution peut être régularisée ou retardée, rejetée 
du commencement de la période, au milieu ou à la 
fin. On ne saurait dans aucun cas l’éviter, à moins 
qu'en même temps que l’on convertit la première 
affectation en futaie, on ne transforme les autres en 
taillis simples en y exploitant les vieilles réserves. 
On comprend que par ce moyen, dont je montrerai 
plus tard tout le danger, on arrive à combler dans 
une large mesure, le déficit causé dans les produits 
par la substitution des coupes de nettoiement et 
d’éclaircie aux coupes de taillis. On comprend que 
l’on puisse même, par l’abatage de ces vieilles 
réserves, rendre encore plus forte l'augmentation de 
produits qui est la suite, dans la première période de 
la révolution principale, de la substitution des coupes 
de régénération à celles de taillis composé ; et là est 
tout le secret de ces merveilleux projets de transfor- 
mation sur lesquels on s’est appuyé, pour soutenir 
que la conversion des taillis composés en futaie peut 
avoir lieu, sans occasionner temporairement une baisse 
dans la production de la forêt. Cependant, qu’on ne 
s’y trompe pas : même quand on a recours à l’exploi- 
tation des vieux arbres, la baisse des produits n'est 


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DU PLAN D'EXPLOITATION. 359 


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que retardée, et l’on ne se procure plas de rendement 


dans les premières périodes que sous peine d'en 
avoir moins dans les dernières. : re 

. En tout cas, et-qu'on pas l un ou l'autre des 
ne de transformation ci-dessus décrits, le règle- 
ment général des exploitations par période se dresse 
toujours conformément au cadre donné p. 318 et 319 
pour la marche provisoire des coupes, la révolution 
principale étant définitive ; il. y.a place dans ce cadre 
pour toutes les coupes à-.faire. de quelque nature 
qu'elles soient. 

I, — Obserr ations sur les méthodes de conversion 
exposées dans l'article précédent. — Les dispositions 
qui ont été imaginées, pour. éviter les inconvénients de 
l’ancienne méthode de transformation des taillis com- 
posés en futaies pleines, se caractérisent toutes par ces 
trois circonstances : suppression des coupes prépara-. 
toires; continuation des coupes de taillis dans les 
différentes affectations jusqu'à l’époque où elles arri- 
veront en tour de régénération en futaie; extraction 
des vieilles réserves. Nous en connaissons la. valeur 
économique, no1s allons en appréeier le mérite cul- 
tural : 

Suppression des coupes préparatoires. La sup- 
pression. des coupes. préparatoires a pour effet 


- d'amoindrir, jusqu'à des annihiler quelquefois, les 


chances du repeuplement naturel. Elle est donc con- 
traire à l’un des principes fondamentaux de la culture 
forestière. Il est extrêmement important d’ailleurs, 
surtout lorsque cette culture.se pratique sur de vastes 


_360 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


étendues et réclame une nombreuse administration, 
que l’homme ne se charge pas à la légère des opé- 
rations que la nature peut faire elle-même. Les soins 
minutieux, les travaux de tout genre, que comporte" 
la gestion des forêts, seront toujours assez multipliés 
pour qu’on ne les augmente pas sans nécessité abso- 
lue. Or, pour transformer un laillis composé en 
futaie pleine, il n’est pas nécessaire de recourir aux 
repeuplements artificiels. Étant donné un taillis sim- 
ple de chêne et de hêtre, âgé de 25 à 30 ans, il 
est certain qu’en le laissant croître jusqu’à l’âge où il 
pourra donner des semences fertiles, jusqu’à 70 ans 
par exemple, on le mettra dans de bonnes conditions 
pour le repeuplement naturel ; tandis que si on le 
coupe aujourd’hui, on ne pourra se dispenser de 
repeupler le sol artificiellement. Cette obligation 
du repeuplement artificiel s’appliquera sans doute, 
toutes proportions gardées, à une moins grande 
étendue, si au lieu d’avoir affaire à un taillis simple, 
on a affaire à un taillis composé; mais il est facile - 
de se rendre compte de l’économie que les réserves, 
par leurs semences, permettront de réaliser dans les 
repeuplements à faire de main d'homme : nous 
n'avons pour cela qu'à ouvfir le cours de culture de 
MM. Lorentz et Parade à l’article concernant le bali- 
vage normal : nous y verrons que le couvert des 
réserves, au moment de la coupe du taillis, peut com- 
prendre 4/3 de l’aire de la coupe. Dans les circon- 
stances les plus favorables, les travaux de repeuple - 
ment qu’entrainerait la suppression des coupes 


én | 
DU PLAN D'EXPLOITATION. 361 


préparatoires, s’étendraient donc encore aux 2/3 de 

la surface d’une coupe. Quand on peut éviter des 

travaux aussi considérables, on doit le faire; d'autant 

qu'il n'y aurait rien d'étonnant à ce qu’un brin de 

semence provenant d’un semis artificiel, fût moins 

vivace qu'un brin provenant d’un semis naturel. N'y 

a-t-il pas dans le travail de la nature, une force 
mystérieuse que la science de l’homme n'a point 

pénétrée et ne saurait mettre dans ses œuvres ? Quant 

à moi, je penche, je l’avoue, pour l’affirmative, et, de 

même que toutes ces précocités artificielles si mer- 

veilleuses obtenues pour la viande, pour les fruits, 

ne fournissent pas des aliments aussi substantiels que 

ceux qu'on retire des productions qui ne sont pas 

forcées et dont la marche reste conforme aux lois de 
la nature; de même, j'incline-à lé penser, un plant, 

élevé en pépinière, ne vaut pas celui qui est venu 

spontanément en plein bois , et des graines, semées 

dans une autre localité que celle où elles ont été 

récoltées , ne sauraient produire des sujets aussi 

robustes que ceux qui proviennent de graines récol- 

tées et semées dans la même région. En outre, 

quelle que soit la préparation que l'homme donne au 

terrain, quelle que soit l'abondance avec laquelle il 
y jette les semences, cette préparation ne vaut pas 
lhumus, et cette abondance n’est que de la parci- 
monie à côté de la prodigalité de la providence. 

= La suppression des coupes préparatoires tendant 
en un mot à substituer l’homme à la nature, dans 
un travail qu’elle fait mieux que lui, n’est donc pas 


362 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


une bonne chose; ces coupes d’ailleurs sont très- 
utiles : | as 
4° Afin que le sol, souvent appauvri par un mode 
d'exploitation qui empêche l’humus de s’y accumuler, 
ait le temps de se refaire; | 

2° Parce qu'il est de la plus grande importance 
pour les repeuplements, soit naturels, soit artificiels, 
de n’exploiter les taillis qu’ils sont destinés à rem- 
placer, qu'à Fâge où l’on n’a plus à craindre leur 
reproduction par la souche ; cette reproduction est en 
effet, aucun forestier praticien ne l’ignore, une des 
entraves qui nuisent le plus aux jeunes plants et dont 
il est le plus difficile de les débarrasser ; 

3° Parce que, dans le cas même où on se décide 
par des motifs quelconques à renoncer au repeuple- 
ment naturel, il est économique, pour le repeuplement 
artificiel, de se procurer un abri, abri qui ne peut 
être assuré suffisamment que par des sujets dont la 
tête est bien formée. 

Ces observations ne soulèvent aucune objection 
pour l'affectation qui ne doit plus être coupée en taillis, 
qui contient ordinairement les bois les plus vieux, 
et dans laquelle il n’est plus temps, il n’est plus pos- 
sible de songer à améliorer le peuplement en brins 
de franc-pied par de fréquents nettoiements et des 
plantations faites après la coupe ; mais pour les autres 
affectations elles paraîtront, je le prévois, moins fon- 
dées. On fera sans doute remarquer que; si l’on prend 
soin de dégager tous les brins de semence qui se révé- 
leront'après la coupe du taillis, et de faire quelques 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 363 


plantations, on se procurera les moyens, à la coupe 
süivante, de constituer la jeune réserve avec des sujets 
de franc-pied et par conséquent d'avenir; et que, si 
l’on porte en outre cette réserve à 150 baliveaux et 
même au delà, il ne faudra pas plus de deux révolu- 
tions de taillis pour réunir les éléments d’une régé- 
nération naturelle complète. A cela je répondrai que 
les coupes dites de taillis, dans lesquelles on conserve 
autant de baliveaux, ne sont en réalité que des coupes 
préparatoires, sous une forme particulière, et qu’on a 
tort de leur donner une qualification qui n’est plus 
justifiée, qui est même tout à fait démentie par le. 
balivage serré dont elles sont l’objet, puisque ce bali- 
vage à pour conséquence inévitable de nuire de plus 
en plus au développement des rejets de souche. Je 
suis d’ailleurs persuadé qu’on se fait illusion, si l’on 
croit qu’il est facile, par des nettoiements répétés, 
de dégager les brins de semence qui apparais- 
. sent souvent en abondance, j'en conviens, immé- 
diatement après l’abatage des taillis. Ce dégagement 
n’est point aussi commode qu’on le pense, car il faut 
y revenir fréquemment et quelquefois tous les ans. 
Enfin, si les taillis composés présentent l’incon- 
vénient de ne pouvoir former que des futaies irrégu- 
lières dans lesquelles, au milieu de jeunes massifs 
sur souche, homogènes par places, sont disséminés 
des arbres d’âges et de grosseurs très-différentes, 
je ne m'explique pas que l’on veuille gratuitement 
aggraver cet inconvénient, en mettant dans les 
jeunes bois les inégalités qui sont dans les vieux, 


364 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


et en ajoutant ainsi d’autres étages à ceux qui exis- 
tent déjà. 11 me semble que de tels procédés s’écar- 
tent des principes de la culture, soit en ce qui con- 
cerne le taillis, soit en ce qui concerne la futaie, etque, 
fâcheux pour la production du taillis, ils le sont égale- 
ment pour la formation de la futaie. 

Continuation des coupes de taillis. — S'il est 
vrai, comme tous les auteurs s'accordent à le dire, 
que le mode d'exploitation en taillis soit compromet- 
tant pour la conservation de la qualité du sol et pour 
celle des essences les plus précieuses, surtout pour 
le chêne, toute combinaison tendant à ajour- 
ner la suppression des coupes faites d’après ce mode, 
doit être considérée comme fort regrettable ; mais si 
l'on renonce à cet ajournement, ilest clair qu’on rend 
d'abora la transformation très-longue, puisqu'on 
n’arrivera à la compléter qu'après plusieurs révolu- 
tions transitoires de futaie; et qu’on se condamne 
ensuite à une diminution immédiate et très-sensible 
dans la production annuelle. La continuation des 
coupes de taillis, en maintenant jeunes certaines 
affectations, tandis qu’on régénère ou qu’on prépare 
les autres, avance évidemment l’époque de la consti- 
tution définitive des classes d'âge, et pare en même 
temps à une diminution trop brusque des produits. 

On peut donc admettre cet expédient, pourvu 
que d’ailleurs le sol.soit bon et le taillis vivace ; 
mais , même alors, il convient d’en user avec modé- 
ration, et d’y renoncer dès que le peuplement, qu'il 
aura servi à rajeunir, paraîtra susceptible de rester 


L] 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 365 


sur pied jusqu'au moment où viendra son tour de 
régénération en futaie. En outre, bien que cette 
continuation des coupes de taillis ait surtout pour 
but d'éviter une trop forte baisse dans la production, 
ce n'est point une raison pour que le taillis soit 
exploité avant l'âge où il fournit tout à la fois et les 
meilleurs produits et le plus de ressources pour un 
balivage satisfaisant ; de sorte que si les plus vieux 
peuplements avaient été classés dans les afféctations 
qu’il ne serait point nécessaire de rajeunir, il vau- 
drait mieux interrompre les coupes de taillis au 
début de la transformation, que d’abattre des bois 
trop jeunes. Enfin, ce que j'ai dit plus haut, à pro- 
pos des coupes de taillis dans lesquelles on a pro- 
posé de forcer le balivage au delà des limites indi- 
quées par les exigences de la reproduction des 
souches, est encore applicable ici. Les coupes ainsi 
faites ne sont plus des coupes de taillis : ce sont des 
coupes d'amélioration ou des coupes préparatoires ; | 
tandis que les méthodes de transformation que nous 
étudions en ce moment, sont basées sur la continua- 
tion des coupes de taillis traditionnelles et dans les- 
quelles, par conséquent, le taillis ne doit pas être 
sacrifié complétement à la futaie. : 

Extraction des vieilles réserves. — Assurément, 
c’est une règle très-raisonnable en théorie que celle 
qui autorise à enlever les vieux arbres dans les 
affectations, conservées temporairement en taillis, 
toutes les fois qu'ils paraîtraient hors d’état de 
rester sur pied, sans dépérir, jusqu’à l’époque où 


366 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


ces affectations arriveront en tour de régénération 
en futaie; mais cette règle .est pleine de dangers : 
D'abord, il ne faut point se dissimuler que tant 
qu’un peuplement continue à être traité en taillis, sa 
conversion reste douteuse, et que ce n’est point parce 
qu’elle figure sur le papier qu'on doit la regarder 
comme assurée. Les flots et les destins sont chan- 
geants ; les plans d'exploitation le sont aussi, et il 
est prudent de prévoir le cas où la conversion, bien 
qu’ordonnée par un décret, ne serait point exécutée; 
or, dans ce cas, si l’on avait dépouillé cette affectation 
de toutes les vieilles réserves ; au lieu d'un taillis 
composé susceptible de fournir des produits à l’in- 
dustrie, on n'aurait plus qu’un taillis simple. Ensuite, 
on doit se rappeler que c’est surtout en utilisant les 
semences qui tombent en abondance des vieux 
arbres, qu’on peut maintenir les taillis dans un bon 
état de consistance et de vitalité. Je pense donc qu'il 
convient de ménager beaucoup ces vieux arbres, tout 
en reconnaissant qu’on peut en extraire d'autant plus 
que l’affectation, dont ils font partie, est moins près 
d’être régénérée en futaie. 


ET RE 


nor SA) ét nt 2 85 À dat RS OR SCC CR ds 


. 


. DU PLAN D'EXPLOITATION. 367 


Su; 


Règlement général des exploitations d’un taillis composé régulier et 
complet à conver.ir, lorsqu'on adopte une révolution gone et 
que la conversion est graduelle. 


Si les observations contenues dans le paragraphe 
précédent sont justes, il en découle qu’on doit poser 


_ comme principes fondamentaux de la transformation 


d’un:taillis sous futaie complet et régulier, en futaie 
pleine : n' + 

. 4°. La préparation des peuplements pendant assez 
longtemps, pour que le taïllis puisse concourir au 


_réensemencement naturel, et soit hors d'état de reje- 


ter abondamment par la souche ; 

2 La limitation de l’ancien mode d'exploitation 
en taillis, aux peuplements qui ne seraient pas sus- 
ceptibles de rester sur pied, sans dépérir, jusqu'à 
l'époque fixée pour leur régénération en futaie dans 
la révolution principale, et qu’on ne pourrait avant 
cette époque remplacer par des brins de semence, 
sans occasionner de trop fortes pertes d’accroisse- 
ment ; | 

3° L'exploitation du taillis à un âge qui ne soit 
pas. inférieur à celui qui avait été adopté jus- 
qu’alors, et qui permette dans tous les cas de trou- 
ver dans cetaillis les éléments d’un balivage satis- . 
faisant ; 

h° Le maintien de la futaie sur taillis dans un 


Tu 


* 


3ç8 * AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


état normal, c’est-à-dire dans un état de richesse 
aussi grend que le comportent les exigences de la 
reproduction et de la végétation du sous-bois. 

Le premier de ces principes implique l’adoption 
d’une révolution préparatoire dont la durée sera 
. d’autant plus longue, que l’âge des bois dans les 
affectations à régénérer les premières, sera moins 
avancé : il n’est pas indispensable, mais il peut-être 
utile, comme mesure d'ordre, que cette révolution 
soit un multiple de la période de la révolution prin- 
cipale. s 

En ce qui concèrne le deuxième principe, il sem- 
blerait au premier abord que s'il y a une affecta- 
tion que l’on puisse à coup sûr, sans s’écarter 
de ce principe, continuer d'exploiter en taillis, 
c'est bien la dernière; cependant, en y réfléchis- 
sant, on voit qu'il y a un moyen de la rajeunir 
qui est préférable : c’est de la régénérer en futaie en 
même temps que la première affectation’, et après 
l'avoir préparée comme elle pendant la révolution 
préparatoire. À l’époque où la dernière affectation 
arrivera de nouveau en tour de régénération, c’est-à- 
dire à la fin de la première révolution principale, elle 
n'aura pas encore atteint, il est vrai, l’âge correspon- 
dant à la durée de cette révolution ; mais il est présu- 
mable que, malgré la perte qui s’ensuivra, les pro- 
duits seront encore plus considérables que ceux qu'on 
obtiendrait des coupes de taillis. Ainsi je suis d'avis 
que ces coupes de taillis doivent être arrêtées dans la 
première et dans la dernière affectation d’abord: 


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DU PLAN D'EXPLOITATION: * 369 


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site dans la deuxième, et j'irai: mndirie à Pau 


. proposer d'y renoncer aussi dans la troisième, attendu 


qu'il est sage de ne pas oeobanE “db sacrifices en 
vue d’un très-grand bien. : ; 
: Pour se conformer au troisième principe, sans se 


‘mettre dans la nécessité d'interrompre les coupes de : 


taillis dès le début de la transformation, il faut que 
la troisième affectation en contienne d'exploitables, et 
je n’y vois pas d'inconvénient , lorsque cela peut se 
faire sans ‘contrarier les règles d’assiette. 

Quant au quatrième principe, il est toujours 
applicable, quelles que soient les combinaisons adop- 
tées, et je me borne à dire que la conservation des 
vieilles réserves est d'autant plus utile dans une 
affectation, que celle-ci est plus près de son tour de 


régénération. 


L'application de ces quatre principes étant ainsi 
précisée, la formation du règlement général d’exploi- 
tation, soit pendant la révolution préparatoire, soit 
pendant la première révolution principale, n'exige 
plus'aucun éclaircissement et je prie encore le lecteur 
dese reporter pour le cadre à prendre aux pages 


_ 318 et 323. 


La méthode que je recommande ‘ est donc une : 
transaction entre l’ancien système qui arrêtait immé- 


‘ diatement les coupes de taillis sur toute l’étendue de 


| 4: Ce’‘système est exposé avec béaucoup de clarté dans un 
article des Annales forestières (tome If}, article qui est le point 
de départ de toutes les conceptions qui ont'été basées depuis sur 


la continuation des coupes de taillis. 


2h 


370 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


la forêt et le nouveau système également radical, en 
sens contraire, qui ne les arrête que successivement, 
lorsque les peuplements arrivent en tour de régéné- 
ration dans la révolution principale ; mais-elle se 
rapproche beaucoup plus du premier que du second, 
puisqu'elle tend, comme le premier, à utiliser autant 
que possible les peuplements existants, pour la régé- 
nération naturelle, tandis que le second système fai 

peu de cas des ressources qu'on en pourrait tirer 
sous ce rapport ‘. 

Il est incontestable qu’au point de vue éultral, 
la substitution des,-repeuplements artificiels, aux 
repeuplements naturels est regrettable. Les exigences 
du rapport soutenu et l’avantage d’une création plus 
rapide des classes d'âge qui constituent une forêt 
normale, ne la justifieraient pas suffisamment à mes 
veux; et d’ailleurs, puisque la méthode mixte de 
transformation que nous avons examinée en dernier, 
tient compte dans la mesure du possible, et de ces 
exigences, et de cet avantage, il ne saurait y avoir 

d'hésitation à l’adopter. Comme celles qui ont été 
_ décrites auparavant, cette dernière méthode repose 
sur la supposition que le taillis composé à convertir, 
contient non-seulement de nombreuses réserves, mais- 
encore un sous-bois vivace, riche en essences de 
bonne qualité, complet, susceptible de coopérer tôt 


4. M. Puton, professeur à l’École forestière de Nancy, a fort 
bien expliqué et justifié cette méthode, qu’il appelle la méthode 
mixte dans son livre sur l’aménagement des forêts. (Rothschild, 
éditeur ) 


se 4 


"1j 24 Or te | 
< 4 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 371 
ou tard, dans une forte proportion, à la régénération 
de la forêt par les semences. C’est cette dernière 
circonstance qui motive surtout les coupes prépara- 
toires et la cessation la plus prompte possible des 
coupes de taillis. Lorsqu'elle fait défaut, les coupes 
préparatoires n’ont plus autant de raison d'être, et ce 
n'est plus dans le même but que l’on supprime les 
coupes de taillis. Or, tous nos taillis sous futaie ne 

se trouvent pas dans des conditions satisfaisantes au 
double point de vue de la consistance de la réserve 
et de celle du sous-bois. L'application des combinai- 
sons dont j'ai décrit le mécanisme rencontre donc 
souvent des exceptions. Je vais en examiner quel- 


ques-unes : 


$ 5. 


Rè lement général des exploitations lorsque les taillis à convertir 
sont. irréguliers et incomplets. 


-J'appelle irréguliers les taillis composés qui s’éloi- 
gnent de l’état normal, soit parce que les réserves 
en chêne et en hêtres de toute catégorie, n’y sont 
point également réparties, soit parce que le sous-bois 
y est principalement formé d’essences secondaires. 
Ces taillis peuvent être complets ou incomplets + com- 
plets, quand ils ne présentent ni vides, ni clairières, ni 
peuplements ruinés ; RTE sv ils en pré- 
sentent. | ë 

Supposons que l’on ait à convertir un taillis com- 


— 


372 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


posé complet, mais dans lequel il y a les anomalies 
suivantes : : 

Les réserves en essences d'élite, assez RATER 
dans quelques parcelles, sont rares dans les autres. 
Le taillis dont le charme et les bois blancs forment les 
essences presque exclusives, .surtout dans les coupes 
les plus âgées, sont. garnies dans les jeunes, et en 
assez grande quantité, de brins de hêtre et de chène 
qu'on pourrait encore sauver, en les dégageant des 
rejets qui les dominent. Le sol est d’ailleurs ns 
de bonne qualité. 

En présence de cette situation, c'est surtout d'a- 
près l’âge et le nombre des réserves que contiennent 
les parcelles que l'on se sera guidé, toute satisfaction 
ayant été d’ailleurs donnée aux règles d’assiette, 
pour composer les affectations, et, par conséquent, on 
aura mis dans la première affectation les parties les 
plus riches en vieux arbres. Les jeunes coupes où il y a 
beaucoup de brins de hêtre et de chêne auront été 
placées autant que possible dans la dernière, et les 
autres coupes formeront les affectations intermé- 
diaires. 

Les affectations étant ainsi constituées, on adop- 
tera une révolution préparatoire juste assez longue 
pour qu'à son expiration l’on puisse, avec les taillis 
de charme et de bois blancs de la première affecta- 
tion, faire de bonnes coupes d’abri; et tandis qu’on se 
bornera jusque-là à exécuter dans cette affectation 
des coupes préparatoires, on s'efforcera de. déga- 
ger, au moyen de nettoiements fréquents, les brins de 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 373 


chêne et de hêtre de la dernière, et on continuera 
de couper en taillis les autres affectations en commen- 
çant par la deuxième. Il n’y aurait en effet aucun 
avantage pour la régénération naturelle à soumettre 
immédiatement les affectations intermédiaires à des 
coupes-préparatoires, puisque l’on n’attend rien pour 
le repeuplement, des semences que pourraient donner 
les taillis qui les composent ; on aura le temps de 
préparer la deuxième affectation pendant qu’on ré- 

générera la première. 

Si les réserves étaient partout sites: à mais 
agées, les autres conditions restant les mêmes, on ne 
mettrait encore en préparation que la première affec- 
tation; mais il faudrait repéter les nettoiements dans 
_ lesautres et surtout dans les dernières très-fréquem- 
ment, ety conserver tous les brins d'essences d'élite, 
dût-on entraver la reproduction des rejets, compro- 
mettre par conséquent la conservation du taillis, et 
se condamner à raccourcir la durée de la première 
révolution principale; l'essentiel serait, d'utiliser les 
réserves avant leur complet dépérissement : ces réser- 
ves ne seraient abattues que lorsquelles menaceraient. 
de tomber de vétusté, ou lorsqu'elles surmonteraient 
de jeunes semis. 

Si, au lieu d'un. taillis exclusivement composé 
d’'essences secondaires, on avait un taillis dans lequel 
ces essences seraient entremêlées de. bois précieux 
dominants par place ; alors il conviendrait, pendant 
qu'on préparerait la première affectation et qu’on déga- 
gerait les jeunes brins dans la.dernière, de préparer 


«“ 


37à AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


aussi la deuxième, et peut-être même la troisième, 
ce qui n'empêcherait pas quand on y rencontrerait 
des taches de bois blancs à l’état pur, de receper à 
blanc étoc ces bois blancs, toutes les fois qu’il ne 
pourraient restér sur pied jusqu'à l’époque où 
l'affectation dont ils feraient parlie arriverait en tour 
de régénération. Ce recepage, qui ne serait qu'un pis 
aller, n’autoriserait pas à dire qu'il faut continuer 
le taillis dans ces affectations-là. 

Supposons maintenant que l’on ait à convertir un 
taillis sous futaie irrégulier et incomplet en ce sens, 
qu’indépendamment de la mauvaise qualité des essen- 
ces sur beaucoup de points, il présente des lacunes, 
des vides, des peuplements sans avenir. Ici, de nom- 
breuses mais vieilles réserves recouvrent des cépées 
de bois blancs clair-plantées ; là, le taillis est assez 
serré et riche en bois durs, mais les souches sont 
usées, et les réserves font défaut; enfin, sur la plus 
grande étendue il n’y a que des vides, des clairières 
et des broussailles sur un sol appauvri. 

Où voit tout de suite que la transformation d’une 
telle forêt n’exige pas de révolution préparatoire : il 
faut se servir sans délai des vieux arbres pour la 
régénération naturelle, se préoccuper d'utiliser les 
taillis de bois durs dans le même but, et donner le 
_plus tôt possible au sol des parties ruinées, un couvert 
qui lui rende la fertilité qu’il a perdue. On assignera 
en conséquence le n° 4 à l’affectation la plus riche 
en réserves, et on y prescrira immédiatement des 
coupes de régéneration avec enlèvement des bois 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 375 


blancs par extraction de souches. Les taillis de bois 
durs placés dans la deuxième et, s’il y à lieu, la troi- 
sième affectation, seront améliorés pendant la pre- 
mière . période, par les moyens qu'on jugera les plus 
convenables; les vides, les clairières, les broussaiiles, 
rejetés dans les dernières affectations, seront les uns 
repeuplés, les autres complétées ou régénérées avec 
des essences peu exigeantes et choisies en vue plutôt 
d'améliorer le terrain que de se procurer des pro- 
duits. Les coupes de taillis arrêtées partout, seront 
remplacées par des recepages qui marcheront d’au- 
tant plus vite, que les moyens d'action dont on dis- 
posera pour les repeuplements artificiels, seront plus 
énergiques ; car les rapailles elles-mêmes ne devront 
être coupées, que lorsqu'on sera en mesure de les 
remplacer par un couvert plus utile. dé, 
Je pourrais faire beaucoup d’autres hypothèses 
qui motiveraient aussi des exceptions aux règles 
que j'ai posées, mais je ne le crois pas nécessaire. 
J'en ai dit assez pour montrer que dans la transfor- 
mation d'un taillis irrégulier et incomplet en futaie 
pleine, les dispositions à prendre dépendent surtout 
du nombre, de l’âge, de l'état et de la répartition 
des réserves; que le sous-bois a généralement peu 
d'influence à ce sujet, et que son exploitation doit 
être subordonnée complétement aux exigences de 
amélioration du sol et à celle de la propagation des 
essences d'élite. On voit donc que le succès de l'opé- 
ration repose beaucoup moins sur l’habileté des agents 
aménagistes, que sur celle dessus d'exécution. 


376 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


En résumé, dans les conversions des taillis compo- 
sés, comme dans les aménagements des futaies irré- 
 gulières en futaies pleines, le but que l’on se propose 
étant de créer les classe d'âge indispensables, pour 
que l’on puisse retirer d’une forêt le rapport annuel 
le plus avantageux, il importe tout d'abord, dans 
un cas comme dans l’autre, d’assigner à ces classes 
d'âge la place qu’elles occuperont plus tard; puis, 
les affectations étant déterminées, on doit chercher 
à régler leur exploitation de manière à accélérer 
autant que faire se pourra la régénération de la pre- 
mière affectation, et à accumuler dans les autres 
affectations, pour l’époque à laquelle elles arriveront 
en tour d’exploitation principale, le plus d'éléments 
possible de régénération naturelle. D 

Qu'on s’occupe en outre à retirer d'ici là le ns 
grand produit de ces affectations, -rien de plus légi- 
time, pourvu que le résultat essentiel à poursuivre ne 
soit pas compromis, et c’est dans cette condition que 
réside la difficulté de la transformation. 

Les procédés de culture à appliquer aux’affecta- 
tions, en attendant que leur tour de régénération en 
futaie soit arrivé, sont uniformes dans les forêts régu- 
lières : il n'y a que des nettoiements ou des éclaircies. 
à faire. Dans les taillis composés en conversion, 
surtout lorsque ces taillis sont irréguliers, ces procé- 
dés sont variables et multiples : suivant les circon= 
stances, on peut avoir à faire une coupe de taillis, 
un recepage, une substitution d'essence, un  net- 
toiement, une éclaircie, une coupe préparatoire, une 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 377 


simple extraction de vieux arbres. Mais cette diffé- 
_ renceentre le traitement d’une forêt régulière et celui 
d’un taillis sous futaie en conversion, quelles que 


soient la consistance et la composition de ce dernier, 


ne change rien aux dispositions essentielles du plan 
d'exploitation et à la forme des tableaux qui le résu- 
ment. Ces tableaux, dont on a vu lesmodèles pages 318 
et 323, peuvent servir à tous les cas. Toutes les fois 
qu'une aflectation devra être exploitée systématique- 
ment en taillis pendant une ou plusieurs périodes, on 
la fera figurer, sur le tableau général, dans la colonne 
des coupes de taillis. Toutes les fois au contraire qu’elle 
ne devra être exploitée en taillis qu’exceptionnelle- 
ment. et. incomplétement; que ce mode ne sera: 
qu'un pis aller, un expédient auquel il serait possible 
et désirable qu'on ne füt point obligé de recourir, 
on ne fera pas de distinction entre elle et les parcelles 
qui devront’ être améliorées, et on l’inscrira dans la 
colonne des coupes d'amélioration, afin d'éviter de lui 
* donner une destination qui pourrait être démentie 
par les circonstances. On se bornera à indiquer dans 
la colonne d'observations le traitement: dont il y a 
probabilité qu'elle devra être l’objet. Rien de plus 
simple, n'est-ce pas? mais cependant pour qu’il ny 
eût aucune confusion dans le tableau des exploita- 
tions ét que le roulement des coupes de diverses 
natures s'y reconnût, s’y distinguât clairement, il 
faudrait que la durée de la rotation pour, chaque 
catégorie de coupes, fût une partie aliquote de la 
période. Or il est difficile que cette condition puisse 


378 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


être réalisée pour toutes les coupes, et qu’une rotation 
ne soit pas à cheval sur deux périodes. L'important 
est que cette irrégularité n'existe pas pour les coupes 
“les plus essentielles et surtout pour celles de taillis. 
Nous ‘avons déjà reconnu qe lorsque, cas très- 
rare d’ailleurs, il était possible et il convenait de 
former une série de coupes de taillis par affectation, 
on ne pouvait guère se dispenser de donner à la 
période une durée au moins égale à la révolution du 
taillis. Lorsqu'on ne cherche point à former une série 
de coupes de taillis par affectation, l'utilité d’avoir une 
correspondance complète entre la durée de la période 
et la périodicité des coupes de taillis est moindre; 
mais il convient alors, sous peine de n’éviter une 
confusion que pour tomber dans une autre, d’exploi- 
ter les coupes de taillis à un âge qui soit divisible 
par le nombre des affectations dans lesquelles ces 
coupes seront assises. Dans tous les cas, on se rap- 
pellera que la durée de la période normale ne doit être 
subordonnée qu'aux exigences de la régénération en 
futaie qui en sont la raison d’être, et qu'il y aurait . 
de grands inconvénients à ce qu’on s’écartät de cette 
règle sans modération; de sorte que si le taillis devait 
êlre coupé à 36 ans, tandis que la période, eu égard 
aux exigences de la régénération, ne devrait embras- 
ser. que 80 ans, il serait tout à fait irrationnel, pour 
satisfaire à. de pures et temporaires convenances de 
forme, de porter la période à 36-ans. 

Ces principes trouvent leur application quand on 
dresse le tableau des exploitations à faire pendant la 


DU PLAN D'EXPLOITATION. 379 


révolution principale. En ce qui concerne le tableau 
des exploitations pendant la révolution préparatoire, 
les mêmes difficultés ne se rencontrent pas, puisqu'il 
n'y à à faire que des coupes par contenance et que la 
périodicité de ces coupes est la seule circonstanée - 
qu'il y ait à considérer, quand il y a lieu de 

partager la révolution en un certain sièhes de sub- 
divisions. 


ARTICLE IV. 
RÈGEEMENT SPÉCIAL DES EXPLOITATIONS PENDANT LA PREMIÈRE 
PÉRIODF, QUELLE QUE SOIT 
Li péusee ADOPTÉE POUR LA TRANSFORMATION. 


… Si le règlement général des exploitations par 
période est plus ou moins compliqué et exige -des 
explications particulières, suivant l’état des peuple- 
. meniset la rapidité que l’on veut imprimer-à la con- 
version,.il n'en est pas de même du règlement spécial 
qu'il est nécessaire de dresser pour les coupes à faire 
dans le cours de la première période, soit de la 
révolution préparatoire, soit de la révolution princi-. 
pale quand il n’y a pas de révolution préparatoire, 

Le règlement pour les coupes de régénération 
doit être basé sur le volume, toutes les fois que le 
matériel existant dans l'affectation à régénérer, es 
susceptible d'être cubé avecune exactitude suffisante; 
parce qu'alors il n'y a aucune différence à établir: 


+ 
Ë 


380 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


entre la forêt à transformer et une futaie irrégulière 
quelconque à aménager. Il est au contraire basé sur 
la contenance, lorsque ledit matériel se compose de 
rejets ou de brins de très-faibles dimensions dont on 
ne pourrait faire le cubage avec une suffisante exac- 
titude, sans y consacrer beaucoup de temps et des 
soins minutieux. Dans ce dernier cas, d’ailleurs, la 
régénération devant avoir lieu en grande partie arti- 
ficiellement, il est possible d'imprimer à cette régé- 
nération, sans la compromettre, une marche régulière 
de proche en proche; mais dans aucune circonstance, 
on ne doit combiner la possibilité par volume avec 
celle par contenance, car elles sont véritablement 
inconciliables. Si donc on adopte la possibilité par 
volume, alors il n’y a pas de distinction à faire entre 
les coupes de régénération : elles prennent chacune, 
chaque année, une part plus ou meins forte de la 
possibilité, suivant l'état des peuplements. Si au 
contraire on adopte la possibilité par contenance; 
comme elle n’est évidemment applicable qu'aux 
coupes d’ensemencement, les bois qui restent après 
ces coupes doivent être considérés comme étant en 
dehors de la possibilité, et c’est aux agents locaux 
qu’il appartient d’en proposer l'extraction, sans s’as- 
treindre à aucune règle prévue d'avance, là où le 
besoin s’en fait sentir. On comprend bien, en effet, 
que l’on ne pourrait prescrire de revenir à des 
époques fixes, par forme de coupes secondaires ou 
de coupes définitives, sur les coupes d'ensemence- 
ment précédemment faites, sans s’exposer à entraver 


En de 277 
4 ge 


.DU PLAN D'EXPLOITATION. 381 


la régénération ou le développement des ‘jeunes 
plants; car on ne saurait prévoir à quelle époque et 
sur quelle étendue le repeuplement s’eflectuera dans 
une coupe donnée. Tout ce qu'on peut faire utile- 
ment, c'est d'ordonner aux agenis d'exécution de 
proposer le repeuplement artificiel de tout ou partie 
d’une parcelle si, un certain nombre d'années après 
la coupe d'ensemencement, elle n'était pas repeu- 


Je connais des aménagements dans lesquels la 
possibilité, pour l’ensemble des coupes de régénéra- 
tion, ayant été fixée. par volume, on a cru pouvoir 
néanmoins régler les coupes d'ensemencement par 

. contenance. Ce système reposait sur l'hypothèse que 
le volume de la coupe d’ensemencement, ainsi déli- - 
mitée, ne s’élèverait jamais au-dessus du chiffre de 
la possibilité. Or cette hypothèse gratuite ne s’est pas 
toujours vérifiée et les agents d'exécution se sont 
trouvés dès lors dans l’alternative :ou de dépasser le 
chiffre de la possibilité, ou de donner à la coupe d’en- 
semencement une étendue moins grande. que celle 
qui avait été fixée. En outre, il s’est présenté souvent 

* des cas où il était plus urgent de faire une coupe 
secondaire ou définitive qu’une nouvelle coupe d'ense- 
mencement, et cependant il y avait obligation de pro- 
céder à celle-ci pour obéir aux prescriptions de 
l'aménagement. Il faut donc, on le voit, adopter l’une 
ou l’autre deS deux possibilités; mais ne pas cher- 
cher à les faire marcher ensemble, car on n’y réussi- 
rait pas. 


382 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Quant aux coupes soit de taillis, soit d’éclaircie 
de nettoiement ou de recépage, soit préparatoires, à 
faire dans les autres affectations que celle qu’on 
régénère, elles sont toujours basées sur la conte- 
nance; cela ne fait pas question. 

Nous avons reconnu, quand nous nous sommes 
occupés du règlement spécial des exploitations à faire 
dans la première période de la révolution applicable 
aux forêts à régulariser, qu'il pouvait être utile de 
dresser deux tableaux : l'un pour les coupes par 
volume, l’autre pour les coupes par contenance. S'il 
s’agit des conversions, ces deux tableaux sont encore 
plus utiles, parce que les procédés de culture qu'im- 
pliquent les conversions, sont plus variés. Ces tableaux 
- ne présentent du reste que le développement des in- 
dications du tableau général qui se rapportent à 
la première rotation de la révolution préparatoire ou 
à la première période de la révolution principale 
quand il n’y a pas de révolution préparatoire , et on 
en retrouvera les modèles aux pages 322 et 323 de 
ce volume. 


QUATRIÈME ÉTUDE. 


DE LA DIVISION D' UNE FORÊT EN MASSES, 
EN SECTIONS, EN SÉRIES, 
DES AMÉLIORATIONS, DE LA RÉDACTION 
DU PROJET D'AMÉNAGEMENT, DE L'APFLICATION 
ET DU CONTROLE. 


LA 


CHAPITRE PREMIER. 


DES MASSES, DES SECTIONS, DES SÉRIES. 


ARTICLE PREMIER. % 


OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES. 


La science de l'aménagement serait une science 
difficile à comprendre, si l’on voulait approfondir 
dans tous leurs détails, au fur et à mesure qu’elles se . 
présentent, les différentes questions dont elle riche 
l'examen. 

Je me suis appliqué, dans ces études, à dégager 
les principes fondamentaux, des objets secondaires 
qui auraient pu en compliquer la démonstration, ‘et 
en rendre l'intelligence laborieuse. J'ai réduit ces 


384 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


principes à leur plus simple expression, dans la pen- 
sée que c'était le meilleur moyen pour faire saisir au 
lecteur les rapports qui les lient. Mon but était sur- 
tout de mettre en relief l’enchaînement logique des 
opérations que j'avais à exposer; de montrer comment 
elles se commandent successivement l’une l’autre; et 
je crois que si j'avais atteint ce but, j'aurais répondu 
à tout ce que l’on peut exiger d’un travail qui est 
plutôt un programme qu'un traité sur la matière. 

Ces observations préliminaires expliquent pour- 
quoi j'ai fait imprimer l'étude sur le partage de la 
forêt en masses, en seclions, et en Séries, après les 
autres. 

C'est que ce partage, malgré son importance 

dans la pratique, est, au point de vue de la théorie, 
un de ces objets secondaires, qu’il n’est pas indispen- 
sable de connaître pour comprendre le mécanisme de 
l'aménagement. 
” J'entends par masse une partie de forêt qui, à 
priori, sans qu'il soit besoin d’une reconnaissance 
préalable, à raison de sa grande étendue, de sa 
situation topographique, de ses débouchés, peut 
être considérée comme indépendante du surplus. 
Quand une vaste forêt, comme celle d'Orléans par 
exemple, présente plusieurs parties dans ces condi- 
tions-là, il convient tout d’abord de la diviser en 
autant de masses distinctes que l’on envisage comme 
des forêts à part; mais cette division dont les bases 
sont évidentes par elles-mêmes, ne réclame aucun 
développement et je n’en parlerai pas davantage. 


DES SÉRIES. 385 


= On entend par section une partie de forêt ou 
_ de masse qui se distingue du surplus par le mode 
d'exploitation (taillis, futaie régulière, futaie jardi- 
née etc.), auquel elle doit être soumise. Pour savoir 
combien il y a lieu de former de sections dans une 
forêt, il faut en avoir fait une reconnaissance générale. 
Cependant, ici encore, les principes d’après lesquels 
on se règle dans le partage d’une forêt ou d’une masse 
en sections, sont trop simples pour qu'il soit néces- 

. saire de nous y arrêter. 

Enfin, on entend par série, une partie de forèt, 
de masse ou de section, destinée à être soumise à un 
plan spécial d'exploitation et à fournir par conséquent 
une suite de coupes annuelles. 

La division d’une forêt en séries est une opéra- 
tion souvent désirable, quelquefois nécessaire, mais 
qui, dans certains cas, pourrait avoir des inconvé- 


nients. 
D 


ARTICLE Il. “i 


CIRCONSTANCES QUI SONT CONTRAIRES A LA DIVISION 
D'UNE FORÊT EN SÉRIES. 


+ 0 


S CEA 


Impossibilité de former des séries compactes, indépendantes 
l’une de Fautre. 


… La division d’une forêt en séries présenterait des 


inconvénients, si les diverses classes d’âge de cette 
25 


386 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


forêt étaient distribuées de façon qu'on ne pût, sans 
déroger aux règles, aux principes qui doivent prési- 
der à la formation des affectations, constituer des 
séries compactes, faciles à distinguer les unes des 
autres. ras | 

Supposons, par exemple, une forêt composée de 
la manière suivante : 

La classe des bois exploitables comprend cinq 
parcelles a, b, ce, d, e, dontles trois premières a,b,c, 
contiguës et situées à l’extrémité nord de la forêt, 
sont séparées des deux dernières d, e, également 
contiguës, et situées à l’extrémité sud, par des par- 
celles appartenant à d’autres classes d'âge. 

Si l’on voulait établir deux séries dans cette forêt, 
il faudrait, dans le cas où les deux parcelles d'ete ne 
seraient pas assez grandes pour compléter la pre- 
mière affectation de l’une de ces séries, y ajouter une 
partie des parcelles a, b, c. Chaque série ne forme- 

“rait pas une masse compacte. On serait exposé à 
confondre les exploitations de l’une avec celles de 
l’autre; la régularité des opérations et l'efficacité de 
la surveillance seraient compromises; et ce, sans 
aucune compensation. 


$ 2 


Étendue trop petite de la forêt. 


La division d’une forêt en séries présenterait des 
inconvénients, si l'étendue de cette forêt n'était pas 


LS 


DES SÉRIES. VE 387 


assez grande, pour que celle de chaque série com- 
portât une coupe annuelle qui pût se concilier avec 
l'intérêt de la reproduetion, celui de la surveillance 
et l’économie des exploitations. 

Ainsi, pour ce qui concerne la reproduction, il est 
clair qu'une coupe d’une contenance donnée, soit 
dans les taillis, soit dans les futaies, aurait moins à 
souffrir du couvert des arbres voisins, que deux ou 
plusieurs coupes séparées, contenant ensemble le 
même nombre d'hectares, puisque ce couvert s'éten- 
drait sur une surface relativement moins grande dans 
la première que dans les autres. 

Quant à la surveillance, la multiplicité des exploi- 
tations en augmente naturellement les difficultés. 

Enfin, au point de vue économique, si la mise en 
vente de coupes trop considérables a l'inconvénient 
de restreindre le nombre des adjudicataires qui peu- 
vent y prétendre, il est, d'un autre côté, à remarquer 
que l'exploitation d’une coupe donne lieu à des frais 
généraux, indépendants de la quantité de bois à 
abattre, et qu'il importe beaucoup, tant dans l'intérêt 
du trésor que dans celui des adjudicataires, de ne pas 
multiplier ces frais sans nécessité. 


$ 3. 


Exigences de l'assiette et de la vidange des coupes. 


La division d’une forêt en séries présente des 
inconvénients, lorsqu'elle est inconciliable avec l'ap- 


388 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


plication des règles sur l'assiette et la vidange des 
coupes. | 

Si on ne pouvait, par exemple, d'après la posi- 
tion respective des classes d'âge, composer deux 
séries qu’en les superposant sur une rampe escarpée, 
qui ne permettrait pas d'établir des moyens spéciaux 
de vidange pour la série supérieure, on manquerait 
évidemment de l’une des conditions nécessaires pour 


une utile distribution en séries. 


ARTICLE III. 


CIRCONSTANCES QUI RENDENT AVANTAGEUSE OU NÉCESSAIRE 
LA DIVISION D’UNE FORÊT EN SÉRIES. 


S Aer, 


Diversité des modes d'exploitation. 


Le mode d'exploitation adopté pour certaines 
parcelles de la forêt à aménager, peut ne pas être 
applicable à d’autres; or, de même qu’il n’est pas 
absolument défendu de comprendre dans une seule 
série d’exploitation, des parcelles exploitables à des 
âges différents ; de même il est permis, à la rigueur, 
d'y comprendre des parcelles dont les modes de 
traitement ne seraient pas semblables, lorsque ces 
modes sont d’ailleurs réguliers ; mais il est évident 
qu'on ne doit s’y résoudre qu’en cas de nécessité 
bien démontrée, car la diversité des modes d’exploi- 


DES SÉRIES. "389 


tation est difficilement conciliable avec les règles sur 
l'assiette des nee et l'établissement du pe je 
soutenu. - 

Lorsque des différences dans les modes de trai- 
tement des parcelles qui composent une forêt sont 
inévitables, il est donc désirable qu’on puisse obvier 
aux inconvénients de tous genres qu'elles seraient 
susceptibles d'entraîner, au moyen de la constitution 
d'autant de séries qu’il y a de modes particuliers. 

La division d’une forêt en séries devient absolu- 
ment nécessaire quand cette forêt renferme des bois 
exploitables, les uns en futaie régulière, les autres 
en futaie jardinée. On ne conçoit, en effet, aucun 
moyen de concilier les exigences de l'aménagement 
avec celles qui sont inhérentes à la dernière e ces 
méthodes. : 


$ 2. + 
__ Diversité des âges d’exploitabilité. 


: Des considérations analogues à celles que je viens 
d'exposer, à propos du mode d’exploitation, sont . 
applicables à une forêt composée de parcelles dont . 
l’exploitabilité ne serait pas la même. 


$ 3. 


Morcellement des classes d'ège. 


Lorsqu'une forêt est très-vaste d’une part, et que 


390 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


de l’autre, les parcelles comprises dans une même 
classe d’âge n’y sont pas toutes attenantes les unes 
aux autres, on pourrait se trouver dans l’obligation 
de scinder une ou plusieurs affectations, afin d'éviter 
de couper des bois à un âge trop éloigné de celui de. 
leur exploitabilité, si l’on n'avait pas recours à la 
division de la forêt en séries. | 

Dans la forêt F, la classe des bois de 4 à 20 ans 
comprend des massifs situés, les uns à l'extrémité 
nord-est de la forêt, les autres à l’extrémité sud-ouest. 
Si l’on ne voulait établir qu’une série d'exploitation 
dans cette forêt, la dernière affectation se compose- 
rait de deux parties fort éloignées l’une de l’autre. 
Or, quoiqu'un morcellement de ce genre soit quel- 
quefois admissible, il ne l’est cependant jamais sans 
inconvénients, et il est bon de l’éviter autant que 
possible. Au cas particulier, le partage de la forêt 
en deux séries distinctes l’èverait l'embarras. 

Les séries donnent donc les moyens de masser 
les affectations et rendent, par conséquent, plus 
facile l'application des règles sur l’assiette des coupes. 


$ 4. 


Exigences du rapport soutenu. 


Une autre difficulté, et des plus graves, que les 
séries permettent de surmonter, dans la formation du 
plan d’exploitation, c’est celle qui résulte, pour 


. DES SÉRIES,. | 391 


l'établissement du rapport soutenu, des différences 
qu’on rencontre dans les conditions de la végétation. 

Nous savons que pour assurer le rapport sou- 
tenu lorsque ces différences tendent à le compro- 
mettre, on à imaginé de rendre les contenances des 
affectations inversement proportionnelles à leur puis- 
sance productive; mais nous savons aussi que cette 
opération est fort embarrassante et fort incertaine, à 
cause de l'insuffisance des données nécessaires pour 
la fixation des coefficients de production. , 

Il est donc très-désirable que l’on puisse se dis- 
penser de recourir à ces coeflicients et à ces conte- 
pances proportionnelles. Or les séries sont de nature à 
leur enlever tout objet et par conséquent toute utilité. 
Que l’on admette la possibilité de former autant de 
séries qu’il y aurait de différences dans les conditions 
de végétation relatives au sol, à l'exposition, aux 
essences, etc., etc., et le produit de chaque affecta- 
tion devenant directement proportionnel à la conte- 
nance, le rapport soutenu sera assuré par l'égalité 
des contenances. 

C'est surtout à ce point de vue que la division 
d’une forêt en $ries est recommandable. 

En effet, où sont les chances d’erreur dans la : 
fixation des coefficients de production ? 

Elles ne sont pas dans la constatation de ce fait 
qu'il y a des différences dans les conditions de la végé- 
tation; elles sont dans l’appréciation, dans la détermi- 
nation des effets que ces différences sont suscepti- 
bles de produire ; or, pour le partage de la forêt en 


# 


392 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


séries, cette appréciation, cette détermination exacte 
est sans utilité ; on forme par exemple une série avec 
les peuplements exposés au sud, une autre série avec 
les peuplements exposés au nord, parce qu'il est 
incontestable que l'exposition exerce une grande 
influence sur la végétation et en conséquence sur la 
production, et cela suffit. Il n’est pas nécessaire 
d’ailleurs de préciser cette influence, d'en calculer 
le résultat matériel. 


$ 5. 


Application, contrèle et rectification de l’aménagement. 


Les erreurs d’assiette sont plus à craindre et plus 
graves dans une grande affectation que dans une 
petite. Les outre-passes de possibilité sont plus fa- 
ciles à constater pour la seconde que pour la première. 
On pourrait marcher plusieurs années dans une affec- 
tation de 1000 hectares par exemple, sans soup- 
çonner qu'on y prend plus de bois que n’en comporte 
la possibilité réelle, tandis que si l'affectation n’a 
qu’une soixantaine d'hectares et qu les coupes y 
soient exagérées, un œil tant soit peu exercé ne tar- 
dera pas à le reconnaitre. 

La rectification de l'aménagement est ef in plus 
prompte dans une forêt, lorsqu'elle contient plusieurs 
séries que lorsqu'elle n’en contient qu'une; car il se 
peut, dans le premier cas, que cette rectification 
n’affecte qu’une série, et n’entraîne par conséquent 


DES SÉRIES. 393 


Je remaniement de l'aménagement que pour une por- 
tion de la forêt ; tandis que, dans le second, c’est 
pour la forêt tout entière que l'aménagement est à 
remanier. Il en est des séries comme des arches d'un 
pont: un vice de construction, lorsqu'il y a plusieurs 
arches, peut n’occasionner la reconstruction que 
d'une partie du pont, tandis que lorsqu'il n’y a qu'une 
arche, on est souvent forcé de refaire le pont en 
entier. ü 

On voit par ces exemples que la division d’une 
forêt en séries est propre à assurer l'application, le 
contrôle de l'aménagement, et à en simplifier la rec- 
tification. 

Nous n'avons envisagé jusqu'ici que les circon- 
stances qui concernent ou les conditions de la végéta- 
tion, ou l’ordre intérieur de la forêt ; mais il peuts’en 
présenter d’autres parmi lesquelles il y en a quel- 
ques-unes qui méritent d’être signalées. 


S 6. 


Diminution des frais de transport des bois. 


L 


Le transport des produits pourrait être singuliè- 
réement contrarié par la constitution de la forêt en 
une seule série. Ainsi supposons que l’on ait à amé- 
nager une forêt comme celle de Fontainebleau, dont 
la contenance est de 16 à 17,000 hectares, ce qui 
implique que, pour la traverser, il faut parcourir, en 


394 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


moyenne, 12,000 mètres, il ne sera certainement 
pas indifférent d’avoir une seule série d'exploitation, 
ou d’en avoir plusieurs; car, dans un cas, les pro- 
duits principaux ne seront offerts à la consommation 
que sur un seul point, tandis que dans l’autre, ils le 
seront sur plusieurs. - 

J'admets que ces produits se partagent par por- 
tions égales entre les populations environnantes, la 
distance moyenne à parcourir pour qu'ils arrivent au 
consommateur devra se compter, si l’on n’a qu'une 
série, à partir du point central de la forêt, et s’il y 
en a plusieurs, à partir du point central de chaque 
série, c’est-à-dire d’un point plus rapproché du con- 
sommateur, de toute la distance existant entre le 
centre de la forêt et le centre de chaque série. 

La division d’une forêt en plusieurs séries permet 
donc de réaliser une économie sur les frais de trans- 
port des produits. 


$ 7. 


Égalisation du prix de revient des bois aux lieux 
de consommation. 


La division d’une forêt en séries a en outre pour 
effet, avantage non moins appréciable que le précé- 
dent, de rendre, en multipliant les centres de 
production et en les rapprochant des lieux de con- 
sommation, le prix du bois moins väriable. 


en nie à: 1 ados clettiebutent, sis ete pe Ars dé dé 


but -medén) nent ét ee dd, a ed 7 dé tué à) dé 


DES SÉRIES. :95 


É 
4 
; 
3 
S 
É 


$ 8. 


Besoins de la consommation en bois de diverses espèces. 
LA 


La formation des séries permet encore d'éviter 
des intermittences dans la production des bois de 
diverses espèces. 

Lorsque l’industrie réclame des bois d’une nature 
particulière, il vaut infiniment mieux les lui donner 
chaque année, par petites portions, que périodique- 
ment, à de longs intervalles, par grandes quantités. 
Qu’elle ait besoin par exemple de bois propres à la 
fabrication des sabots, si l’on n’avait pas soin de for- 
mer une série d'exploitation avec les essences pro- 
pres à cet usage, il pourrait s’écouler plusieurs années 
sans qu’on eût occasion d’en exploiter, et le volume 
considérable qu'on en couperait, de temps en temps, 
ne réparerait pas le préjudice causé par les années 
de privation, tant aux ouvriers qu'aux consomma- 
teurs. 


$ 9. 


Droits d’usage. 


La division d’une forêt en séries devient enfin 
une nécessité, lorsque des droits d’usage portent sur 
une portion déterminée de cette forêt ou réclament 
des produits spéciaux, et cette nécessité est assez 


396 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


évidente par elle-même pour que je puisse me dis- 
penser de la justifier. 


ARTICLE IV. 


TABLEAU DES SÉRIES. 


La série intervient en définitive comme agent sim- 
plificateur dans les travaux d'aménagement, et le par- 
tage d’une forêt en séries est une opération fonda- 
mentale dont dépend en grande partie le succès de 
ces travaux; aussi ne saurait-on y procéder avec 
trop de maturité. 

Lorsque les séries sont arrêtées, on en fixe les 
limites sur le terrain et sur le plan, et on en dresse 
le tableau conformément au modèle ci-joint. 


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CHAPITRE DEUXIÈME. 


DES AMÉLIORATIONS. 


ARTICLE PREMIER. 


OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES. 


Toutes les réformes que comporte l'aménagement 
d’une forêt ont pour but l’amélioration de cette forêt, 
et, en conséquence, la formation du plan d’exploita- 
tion lui-même devrait rigoureusement et logique- 
ment être rangée parmi les améliorations et être 
traitée dans la même étude. L'aménagement ne com- 
prendrait alors que deux parties principales : l’une 
pour la statistique, l’autre pour les améliorations. 
J'ai cru devoir cependant consacrer une étude spé- 
ciale au plan d’exploitation, parce que cet objet était 
susceptible de longs développements et qu’en outre 
il se distingue des autres améliorations, en ce sens 
qu’il tend surtout à modifier, non pas les choses 
elles-mêmes, mais la manière de les utiliser ; tandis 
que les améliorations proprement dites portent prin- 


cipalement, et souvent exclusivement, sur les choses | 


Jus 


DES AMÉLIORATIONS. 399 


et sur les modifications qu'il serait utile d'y appor- 
ter. 

Eñ parcourant successivement tous les articles de 
la statistique, on reconnaîtra facilement quels sont 
les points sur lesquels des améliorations seraient 
opportunes. 

S'il résultait par exemple du cahier descriptif de 
la statistique, que les limites sont en mauvais état, 
on proposerait de les réparer, et on ferait connaître 
la dépense que ce travail nécessiterait. 

S'il était constaté que le gibier fait beaucoup de 
tort à la forêt ou aux cultures environnantes, on indi- 
querait les mesures à prendre pour y remédier. 

Si le débit des bois exigeait l’etablissement de 
nouvelles scieries, la réparation des anciennes, on 
dresserait le devis de ces travaux. 

Je ne saurais prévoir ici toutes les imperfections, 
toutes les lacunes qui pourraient exister dans une fo- 
rêt, et qui devraient faire l’objet de propositions spé- 
ciales tendant à les réparer. Je me borneraï à donner 
quelques courtes explications sur les travaux dont 


- l'utilité est la plus grande et l’opportunité la plus fré- 


quente. Ces travaux sont relatifs au sol, au peuple- 
ment, aux moyens de vidange, à la conservation et. 
à l’entretien de la forêt. 


400 AMÉNAGEMENT :DES FORÊTS. 


ARTICLE II. 


AMÉLIORATIONS RELATIVES AU SOL. 


Dans l’agriculture proprement dite, on améliore 
le sol par divers moyens et principalement par les 
amendements et les engrais artificiels. En sylvicul- 
ture, les amendements et les engrais doivent être le 
résultat de la culture elle-même; c’est l’humus qui 
les constitue. Les expériences, très-peu nombreuses 
d’ailleurs, qui ont été exécutées pour démontrer les 
avantages de l’introduction dans les forêts de sub- 
stances minérales particulières, ne paraissent con- 
cluantes ni au point de vue cultural ni au point de 
vue économique. On a essayé aussi de constater le 
bon effet des irrigations sur les bois, et on a obtenu 
de magnifiques résultats comme rapidité d’accrois- 
sement; mais on ne connaît pas l'influence de ces 
irrigations sur la qualité des arbres, et on n'a pas 
non plus établi la balance entre le profit et les frais 
de ce moyen artificiel d'amélioration qui, dans tous 
les cas, ne saurait être praticable que très-exception- 
nellement ‘. 

Je pense donc qu’en ce qui concerne le sol, l’amé- 
lioration la plus recommandable est en définitive 


4. Il faudrait les multiplier. M. Chevandier a publié à ce 
sujet, sur l'effet des irrigations et d’autres points importants 
d'économie forestière, des mémoires intéressants, ‘que mes lec- 
teurs connaissent sans doute. 


DER PDT CT PS NT 


DES AMÉLIORATIOXS. 401 


l'assainissement. Tout le monde sait que dans les 


_terrains trop humides, les arbres sont d'une qualité 


très-inférieure ; que les graines pourrissent et qu’en 
conséquence le repeuplement naturel ne se fait 
Pair. : ’ sg 

Dans les propositions qu'ils auront à présenter à 
ce sujet, les agents aménagistes indiqueront les can- 
tons et les parcelles où des fossés d'assainissement. 
seraient nécessaires, les dimensions et la direction 
qu'il conviendrait de donner à ces fossés, et enfin 
les dépenses approximatives qu'entrainerait leur exé- 
cution. 


ARTICLE II 


| 


AMÉLIORATIOXS RELATIVES AU PEUPLEMENT. 


Les agents chargés de l'aménagement sortent de 
leurs attributions lorsqu'ils s’avisent de donner des 


. instructions, sur la manière de procéder aux semis el 
aux plantations. Leur tâche se borne à indiquer les 
parcelles et les époques où les repeuplements artifi- 


ciels doivent être. effectués, et les frais auxquels ils. 
donneront lieu. F4 

Il semblerait naturel, au premier abord, de pres- 
crire le repeuplement immédiat de tout vide existant 
dans la forêt. Toutefois, une semblable prescription 
pourrait entraîner de graves inconvénients, d’abord 
à cause des dépenses qu'elle occasionnerait, et 


ensuite à cause des conditions défavorables dans l2s- 
_ 96 


402 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


quelles serait fait le repeuplement des vides a 
dans les affectations intermédiaires. 

C'est donc seulement dans les affectations des 
périodes extrêmes, qu’il est toujours opportun d’ef- 
fectuer immédiatement le reboisement des vides. 
Pour la première affectation, cetle opportunité est 
évidente. Pour la dernière, elle n’est pas moins sen- 
sible, puisque cette affectation ne contient que de 
jeunes peuplements avec lesquels ceux qu’on aura 
créés ne tarderont pas à s’harmoniser. 

Quant aux affectations des périodes intermé- 
diaires, le reboisement des vides qu’elles renferment 
est loin d’être aussi urgent, et souvent même il peut 
être impraticable immédiatement à cause du couvert 
des arbres voisins. Cependant, s’il y existait de 
grands espaces dénudés, il conviendrait de chercher 


à les utiliser en y. implantant des essences sus- : 


ceptibles d’être exploitées, à l’époque où l'affectation 
dont elles feraient partie arriverait en tour d’exploi- 
tation. 

Les aménagistes pèseront ces considérations et 
feront connaître en conséquence, par rang d'urgence, 
la situation, l'étendue, et les frais probables des 
repeuplements artificiels à faire dans le cours de la 
première période. 

Mais s’il est nécessaire de créer des peuplements 
arüficiels dans une forêt, il est également nécessaire 
d'y créer des pépinières, à moins que les années de 
semence n’y soient fréquentes et les semis faciles, ce 
qui est exceptionnel pour les bois durs. 


CPAS TS à OP PERSONNE TE a à 


+ 


DES AMÉLIORATIONS. 405 


Les aménagistes auront donc à désigner les 
“endroits où ces pépinières devront être établies , la 


contenance qu’on leur donnera et les frais: qu ‘elles 


occasionneront. 


ARTICLE IV. 


AMÉLIORATIONS RELATIVES AUX VOIES DE VIDANGE. 


* 


La tendance de l'homme sur cette terre est d’a- 
grandir incessamment son empire sur la matière. Un 
économiste a dit avec raison que l’industrie, c'était le 
développement de l’homme, l'émission de sa pensée. 
En effet, un produit industriel quelconque n’est pas 
autre chose que l’expression-matérielle, la matériali- 
sation, qu'on nous pardonne ce néologisme, de cette 
pensée. 

Mais pour approprier ainsi les choses à ses 
besoins, il faut ou aller à elles, ou les faire venir à soi. 
Le premier cas se présente dans l'enfance des socié- 
tés. L'homme va planter sa tente sur les points qui 
lui offrent le plus de ressources. Ces ressources épui- 
sées, il va se fixer sur un autre point. Tant qu'il est 
condamné à cette vie errante, il progresse peu. Les 
Arabes nomades en fournissent la preuve; mais dès 
qu’au moyen des voies de transport, il est parvenu à 
déplacer les choses, son développement marche rapi- 
dement, et le beau idéal serait réalisé si, par des 
procédés quelconques, il pouvait grouper autour de 
son habitation tous les matériaux propres à satisfaire 


L04 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


ses besoins, ses goûts, ses désirs. Malheureusement, 
il est bien éloigné de ce beau idéal, surtout pour ce 
qui concerne les bois. Non-seulement nous avons 
encore en France des forêts que l’on ne peut pas 
exploiter, mais dans celles que l’on exploite, 
l'absence ou l’imperfection des voies de vidange 
oblige de carboniser ou de façonner sur place une 
grande partie des produits, afin de réduire autant 
que possible leur volume et leur poids ‘. Or, la car- 
bonisation est une manière encore barbare d'utiliser 
le combustible ligneux, et le façonnage en forêt fait 
courir au fabricant le risque de ne pas donner au bois 
la forme qui conviendrait le mieux au consomma- 
teur. Rae 

Sur les chemins vicinaux ou d'exploitation, les 
frais de traction par voiture peuvent être évalués, en 
moyenne, à 7 fr. 50 c. par mètre cube de bois. pour 
une distance de 20 kilomètres. 11 en résulte que si 
le mètre cube est estimé dans la coupe 40 fr. pour 
le bois de service et 40 fr. pour le bois de chauffage 
(à raison de 2 stères de 5 fr. chacun par mètre cube), 
le montant des frais dont il s’agit est à la valeur du 
mètre cube de bois de service dans la proportion de 
18 pour 100, et à celle du mètre cube de bois de 
chauffage dans la proportion de 75 pour 400, de 


4. La plus grande partie des bois de construction que nous 
recevons de l'étranger, et nous en recevons chaque année pour 
près de 200 millions de francs, se consomment dans le Doubs, le 
Jura, le Haut et le Bas-Rhin, c’est-à-dire dans les départements 
les plus boisés. (Note de la 2° édition.) 


_d métlne alt nt hdéoi de Médiudius sde sftial. Hart en Ce, AN LS 


el à d'u 


DES AMÉLIORATIONS. | "405 


+ 


sorte que quand le lieu de consommation est à 
30 kilomètres de la forêt, il n’y a plus aucun nur à 
y transporter le bois de chauffage. 

On estime que les frais de transport entrent en 
moyenne pour moitié dans le prix du bois rendu au 
centre de consommation, et comme on a calculé, 
d'autre part, que ce prix, s'élevait par année, à la 
somme de 500 millions, il en résulte que le trans- 
port des bois, dans notre pays, occasionne une 
dépense annuelle de 250 millions. On voit par là 
combien la société est intéressée à l'amélioration des 
moyens d'exportation des produits forestiers. Quand 
on a élevé une statue à Jean Rouvet, l'inventeur du 
flottage sur la Cure (Yonne, 1549), on a reconnu et 
récompensé un des plus grands services qu’un citoyen 
pût rendre à son pays. 

En définitive, les voies de transport font évidem- 
ment défaut aux bois, et pourtant ils en ont un plus 
grand besoin que les autres produits ; d’abord, parce 
qu'ils sont plus éloignés des populations; ensuite, 
parce que les forêts ne sont pas susceptibles de se 
grouper cômme les cultures arables autour des habi- 
tations. Et s’il est vrai qu’à raison du morcellement 
des héritages, une grande partie des productions de 
la terre est consommée par les cultivateurs eux- 
mêmes, il n’en est pas de même pour les bois, dont la 
moindre part au contraire resle au propriétaire ou 
au régisseur. 

De toutes les voies qui peuvent servir au trans- 
port des bois, celle qu’il conviendrait surtout d’amé- 


4°6 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Jiorer, c’est le cours d’eau. Un cheval traîne 

péniblement 4,000 kilogrammes sur une bonne route. 
D’après M. Michel Chevalier, un homme en tire 
aisément 150,000 sur un canal. Cet exemple suffit 
pour prouver l'immense utilité qu’aurait l’appropria- 
tion de nos cours d’eau au transport des bois et pour 
justifier les regrets que doit inspirer notre ss 
gence à cet égard. 

La France ne possède que 11,000 kilomètres de 
cours d’eau navigables, et sur les canaux, le transport 
des bois est entravé par l’étroitesse des biefs, d’une 
part, et l’énormité des tarifs, de l’autre. Quant aux 
cours d’eau flottables, qui pour la vidange sont d'une 
si grande ressource, c’est à peine si on en compte 
3,000 kilomètres. Cette situation est assurément bien 
misérable, et, avouons-le, inexcusable, dans un pays 
qui, sous le rapport hydrographique, a été si admi- 
rablement doté. 

Le perfectionnement des moyens de vidange est 
donc une des améliorations auxquelles les agents 
chargés de faire l'aménagement d'une forêt, doivent 
accorder le plus d'attention. 

Après avoir exposé l'insuffisance de ces moyens, 
ils indiqueront toutes les mesures qu'il y aurait à 
prendre pour y remédier. Q 

Ces mesures consisteront pour les routes et che- 
mins : 4° dans la rectification ou la réparation des 
voies existantes ; 2° dans la création de voies nou- 
velles, s’il y a lieu. 

Dans l’un comme dans l’autre cas, il faudra ré- 


RE id rte States) pass ai ed ot ai bé Bet ES DU à 


di 


DES AMÉLIORATIONS. 407 


..diger un avani-projet des Lin à faire; fixer la 


k. 2 rte et les principaux. points de passage des 
voies nouvelles ; indiquer la largeur et Ja pente qu'il 


conviendra de leur donner ; justifier leur utilité et 
pour cela montrer qu'elles seront susceptibles. de 
satisfaire à toutes les exigences de la vidange; éta- 
blir leur degré d'urgence, d'après la marche des 
exploitations; dresser en‘in un devis approximatifde 


la dépense que les travaux nécessiteront. 


En ajoutant l'intérêt du capital employé à l’exé- 
cution de ces travaux, aux frais annuels que leur 
entretien réclamera, et en retranchant cette somme 


de celle représentant l’économie que les travaux 


permettront de réaliser sur le coût du transport, on 
aura la mesure exacte des avantages que l’État en 
retirera. 

Je dis l’État, car s’il s'agissait d'un autre pro- 
priétaire, le bénéfice que les chemins seraient suscep- 
üibles de lui rapporter, ne se calculerait pas de la 
même façon. Ce qu’un particulier poursuit en effet 
exclusivement quand il ouvre un chemin pour la 
v:dange de ses coupes, c’est l’augmentation du prix 
de ses bois sur place. Il spécule donc sur cette con- 
sidération qu’à raison de la diminution des frais : 
d'extraction, les adjudicataires lui donneront un-prix 
plus élevé de sa chose; mais la. diminution des frais 
de transport, qui est le résultat nécessaire de la 
création d'un chemin, ne tourne pas toujours seule- 
ment au bénéfice du propriétaire; il y en a une part 
plus ou moins grande dont profite. le consommateur, 


468 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


1 


quand elle à pour effet de rendre le bois moins chers. 


or, cette part, qui ne constitue pas un avantage pour. * 


le particulier, en constitue au contraire un pour 
l'État; car son intérêt ne se sépare pas de celui 
du consommateur. 

Si l'on a le choix entre plusients voies et qu’on 
veuille comparer leurs avantages respectifs, on se 
rappellera que le prix de l’usage d’une voie dépend 
de trois éléments : 4° les frais de construction de la 
voie ; 2° les frais d'entretien ; 3° les frais de traction 
ou le prix de la force motrice. . 

L’effort pour tirer 4000 kilos est de 18 kilos 50 
sur une bonne route, tandis que sur un chemin de 
fer ilest de 5 kilos 34 seulement; mais la construc- 
tion d’une bonne route coûte à peine 20,000 fr. par 
kilomètre, tandis qu’un chemin de fer coûte h à 
500,000 fr. pour la même distance. 


ARTICLE V. 


AMÉLIORATIONS RELATIVES A LA SURVEILLANCE 
ET A L’ENTRETIEN. 


Surveillance. — Le service des forêts relatif à la 
surveillance laisse en général beaucoup à désirer, 
moins peut-être à cause de l'insuffisance du per- 
sonnel, que par suite de la mauvaise organisation 
des triages. Dans certaines localités ils sont trop 
étendus ; dans d’autres ils ne le sont pasassez. Dans 


+ 


DES AMÉLIORATIONS. A 


» + -lés forêts domaniales, la contenance de chaque triage 
"est en moyenne de 500 hectares. C’est une règle qui 


% 


RS on os nt ét éd den nd AS Sd oO RS CG NDS RS. is. ‘duetà 


*_ paraît adoptée par l'administration et qu'on applique 
_ sans tenir assez de compte, peut-être, des difficultés 
plus ou moins grandes de la surveillance, I} est 
cependant évident que les bois situés sur la rive 
d'üne forêt sont plus exposés aux délits et plus dif- 
ficiles à garder, que ceux situés au centre et dont on 
ne peut par conséquent sortir. qu'en traversant les 
autres, : 

L'étude de l'organisation des triages rentre en 
conséquence dans les attributions des aménagisles. 
Hs-proposeront aussi, s’il y a lieu, une augmen- 
tation du” personnel; ils désigneront l'emplacement 
le plus convenable pour les_. maisons forestières 
qu'il pourrait être nécessaire de construire ;, et ils 
feront connaître le chiffre approximatif de la dé- 
pense. 

Entretien. — Il ne suffit pas de construire des 
routes, il faut les entretenir, sous peine de perdre 
tous les fruits d’une dépense considérable. II résulte 
des expériences faites par M. Morin, directeur du 
Conservatoire des arts et métiers, que si on repré- 
sente par À la résistance présentée à une charrette 
par une bonne route empierrée, cette résistance de- 
vient égale à 4,35 pour une route empierrée, mais 
très-dégradée. M. Séguret a prouvé d’un autre côté 
dans les Annales forestières, que sur un bon chemin, 
le bois de chauffage peut parcourir en moyenne 
32 lieues, sans que sa valeur soit absorbée par les 


410 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


‘ frais de transport, tandis que sur un mauvais chemin, 
il ne peut pas en parcourir plus de 5. 

Le meilleur moyen, le plus efficace et le moins 
coûteux, de tenir les chemins en bon état, c’est de 
réparer immédiatement les moindres dégradations 
qui s’y produisent. Pour cela, il faut des cantonniers. 
On en indiquera le nombre et on fera connaître aussi 
les frais qu’ils occasionneront. 

Les routes et chemins ne sont pas les seules 
choses qui demandent à être entretenues avec soin. Les : 
fossés, les pépinières et les plantations réclament de 
leur côté des travaux, pour ainsi dire incessants, et 
il serait certainement fort utile d’avoir pour y pro- 
céder, des employés spéciaux. Dans tous les cas, 
ces travaux sont susceptibles d'entraîner chaque 
année des frais dont les aménagistes apprécieront 
le montant. | 


ARTICLE VI. 


ÉTAT COLLECTIF DES AMÉLIORATIONS. 


Après avoir fait de chaque amélioration l'objet 
d’une étude particulière, il convient de former, de 
toutes les améliorations, un état collectif qui permet- 
tent de les embrasser dans leur ensemble et de voir 
d’un coup d'œil le chiffre total des dépenses qu'elles 
occasionneront, soit dans la première période, soit 
_dans les autres; outre cet état collectif, on-en dres- 


DES AMÉLIORATIONS. Al 


| sera un autre tout spécial pour les repeuplements 
_ artificiels à faire dans chaque parcelle, car de 
tous les travaux ce sont sans contredit les plus 
_ importants. . 


L 


-. 


RÉ 5 


CHAPITRE TROISIÈME. 


RÉDACTION DU PROJET D'AMÉNAGEMENT, 
APPLICATION ET CONTRÔLE. 


ARTICLE PREMIER. 


RÉDACTION DU PROJET D'AMÉNAGEMENT. 


Je crois qu’à l’aide des notions générales que j'ai 
exposées, les agents qui auront été chargés de l’amé- 
nagement d’une forêt, ne seront pas sérieusement 
embarrassés par la manière de s'y prendre pour 
accomplir leur mission. Toutefois, j'ai pensé qu'il 
pouvait être utile de terminer cette étude par l’indica- 
tion des divers documents que comporte un projet 
d'aménagement. 

Ces documents sont de trois sortes : 

Le procès-verbal d'aménagement ; 

Les plans et devis ; 

Les pièces justificatives. 

Procès-verbal d'aménagement. — Il se divise en 
sept parties : 

Dans la première, on s'occupe de la statistique 
pour l’ensemble de la forêt ou de la masse; 


7 
Ts 


; à 


+ , .  RÉDACTION DU PROJET D'AMÉNAGEMENT. 413 


… : Dans la deuxième, de la critique du mode actuel 
d'exploitation, du choix du mode d’exploitation à 
adopter et de la division de la forêt en sections et 
en séries ; 
: Dans la troisième, du parcellaire et de la des- 
” criplion spéciale, pour chaque série ; 

Dans la quatrième, de l'âge d’exploitabilité, du 
_chdïix de la révolution, de la formation des affecta- . 
tions normales, du règlement général et du règle- 
ment spécial des exploitations, et des améliorations 

spéciales, pour chaque série ; 
Dans la cinquième, des améliorations, pour l’en- 
srl de la forêt ; 

+ Dans la sixième, de l'assiette de l'aménagement 
sur le terrain (ouverture des lignes séparatives des 
sections, séries, affectations, parcelles, etc.) ; 

: Dans la septième , de l’état futur de la forêt et 
de examen comparé des produits tant principaux 
qu'accessoires, en matière et en argent, que l’on retire 
actuellement de la forêt et qu’on en retirera après son 
aménagement. On n’omettra pas de tenir compte 
dans cet examen, de la plus-value probable qui résul- 
tera pour les produits, de l'amélioration des voies de 
vidange ‘. | È | 


NE 


4. Je donne l’ordre des travaux d'après id erre: nents suivis 
jusqu’à présent, mais ces errements laissent à désirer parce qu'ils 
ne séparent pas dans l’uménagement ce qui appartient à son appli- 
cation, de ce qui concerne sa préparation. Quand le règlement 
général des exploitations a été dressé, le projet d'aménagement 
est terminé en ce qui concerne la marche et la quotité des coupss | 
et le décret d'aménagement pourrait être proroqu‘. Une fois ce 


hih AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Il est bien certain, d’ail'eurs, que le résultat de 
cette comparaison ne saurait donner qu’une idée in- 
complète de la supériorité du régime qu’il s'agira 
d'adopter, puisque, comme on le sait, tous les pro- 
duits du sol forestier ne sont pas susceptibles d’être 
évalués en argent. Il est probable aussi que le 
revenu, faible au début de l'application de l’aména- 
gement, s’accroitra par la suite. Ce sont là des 
considérations sur lesquelles les rédacteurs du projet 
d'aménagement auront à appeler l’attention. 

Plans et devis. — I faut : 

Un plan général de la forêt indiquant les princi- 


décret rendu, il s'agirait d'appliquer l’aménagemert. Ce serait 
alors seulenent que l’on devrait arrêter le règlement spécial d'ex- 
ploitation pour la première période, règlement qui, devant repo- 
ser sur le volume pour les coupes principales, exigerait le calcul 
du matériel que ces coupes auraient à enlever chaque année. 
Aujourd'hui ce matériel est fixé par le décret d'aménagement. 
C'est à tort, selon moi; il serait plus rationnel que le décret se: 
bornât à indiquer le rapport constant à maintenir entre le volume 
total exploitable dans la durée de la période et celui de la coupe 
annuclle. En effet, ce rapport est la seule chose à reconnaitre et 
à observer pour que la possibilité ne soit pas outrepassée, et c’est à 
l'administration qu’il incombe de prendre les mesures nécessaires 
pour que l’on ne s’en écarle pas. Mais quand au lieu d'exprimer 
par unchiffre abstrait, la proportion qui doit exister entre le volume 
de la coupe annuelle et le volume total exploitable dans le cours 
de la période, on-exprime le volume de la coupe annuelle par un 
chiffre concret, par un certain nombre de mètres cubes, on s’ex- 
pose à ce que la possibilité soit outrepassée, parce qu'en suppo- 
sant qu’au moment où il est déterminé, ce nombre de mètres cubes 
soit dans le rapport voulu avec le matériel total exploitable, une- 
foule d'accidents imprévus peurent ensuite le rendre trop fort. 
(Note de la 2° édition.) 


7 . 
ee 
ii 


Eee = 


RÉDACTIOY DU PROJET D'AMÉNAGEMENT. M5 


paux mouvements du terrain, les cours d’eau, routes 
24 A pie les limites des cantons, elc. ‘; 

* Un-plan général et, s’il y a lieu, des pe de 
détail des parcelles ; 

Un plan figuratif des limites des séries; 

Un plan indiquant, pour chaque série, les limites 
des affectations ; 

Un plan indiquant le tracé des routes et chemins 
projetés, l'emplacement des maisons forestières, scie- 
ries, etc., à construire; 

Les devis sommaires à l’appui de ces divers tra- 
vaux. 

Il est bien entendu que, To , il ne doit pas en 
résulter de confusion, deux ou plusieurs des plans 
que je viens de désigner peuvent être réuni s en un 
seul, 

Pièces justificatives. — Elles se composent : 

- Des calculs relatifs au léver périmétral de la 
forêt ; d’un tableau des coordonnées des points de 
la triangulation et d’un tableau des hauteurs de 
chaque station de nivellement par rapport à un point 
unique. 

Des expériences exigées par la recherche des : 
renseignements sur la croissance des bois, leur débit, 


. S'il n’est pas nécessdire œUE n plan topogra hique par- 
A a exact pour préparer le A ent d’ ‘exploitation d’une 
forêt, il est cependant désirable à rats points de: vue, et 
notamment pour les travaux de la carte de France et pour ceux 
du cadastre, que ce plan ne laisse. rien à désirer. Une grande 
administration ne saurait en pareill matière viser à l'économie. 
(Note de la 2° édition.) &, 


$ 


416 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


les facteurs nécessaires pour apprécier leur rende- 
ment, tant en volume brut qu'en marchandises ; 
Des expériences faites pour déterminer Lie” 
d’exploitabilité ; alias 
Des dénombrements et cubages effectués pour 
établir la possibilité .et des tarifs adoptés à cette occa- 
sion. 


ARTICLE IL 


APPLICATION ET CONTRÔLE DE L'AMÉNAGEMENT. 


C’est un fait malheureusement avéré que la plus 
part des aménagements exécutés à grand frais, depuis 
une trentaine d'années, par des commissions spé- 
ciales, n’ont pas procuré tous les aväntages qu'il était 
permis d'en attendre. Mal compris par certains 
agents qui n’ont pas voulu se donner la peine de les 
étudier, systématiquement repoussés par d’autres, 
ces aménagements n’ont pas toujours été bien appli- 
qués. 

Ainsi : 

On ne s’est pas conformé assez exactement, pour 
l'assiette des coupes, aux prescriptions des plans 
d'exploitation, Comme j'ai eu déjà occasion de le 
faire remarquer, les agents locaux se laissant influen- 
cer par l'état du peuplement considéré en lui-même, 
et non dans $ ses rapports avec les circonstances exté- 
rieures, ont quelquefois porté les coupes principales 
dans des pa" elles qui auraient dû seule nent être 


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APPLICATION ET CONTROLE. 7 


écinincies et en ont éclairci d’autres qui auraient dû 
être régénérées. 

On ne s’est pas renfermé partout dans les limites de 
la possibilité ; soit parce qu’on a omis de tenircompte, 
dans les exploitations annuelles, des arbres abattus 
par le vent, la neige, le givre, et vendus sous forme 
de menus marchés; soit parce qu'on a employé, pour 
l'estimation des coupes; d’autres tarifs et d’autres 
unités de mesure que ceux adoptés par les commis- 
sions ; soit enfin parce que l’on n’a pas pris le soin 
d'établir chaque année une balance des exploitations, 
qui permit de fixer la quotité des coupes de l’année 
suivante, conformément aux : résultats de cette ba- 
lance. 

On a négligé, soit par incurie, soit par manque 
de fonds, d'exécuter les travaux d’amélioration, 
reboisements, assainissements, routes, etc., etc., 
préxus par l'aménagement; après avoir fait une coupe 
d’ensemencement, on ne s’est pas toujours assez préoc- 
cupé. de ce qu'elle devenait. 

On n’a pas enfin provoqué les révisions quand 
cependant la nécessité en était démontrée. 

Pour prévenir le retour d'aussi graves irrégula- 
rités, l’administration a souvent prescrit à à ses agents 
d'indiquer sur les états d 5 cm les parcelles dans 
lesquelles ils se proposent coupes prin- 
cipales et de justifier la quotité de > ces  COUpES, d’après 
le chiffre de la possibilité réglement Lg aire € et celui des 
coupes de toute nature de l’année 

Elle a d'un autre côté invité es ag 


M8 . AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


pour l'estimation des coupes, des tarifs et des unités 
de mesure, adoptés par les commissions ; sauf à faire 
une autre estimation spéciale pour la vente; 

Mais tout cela ne suffit pas ; il importe maintenant 
qu’elle les oblige à tenir pour chaque forêt äménagée 
un sommier de contrôle ; il est même à désirer 
qu’il en soit tenu un également à la Direction géné- 
rale. ol 

Le modèle de ce sommier a été récéiiient arrêté 
par l’administration, Divisé en trois parties distinctes : 
la première pour les exploitations, la deuxième pour 
les travaux, la troisième pour les recettes et les dé- 
penses, il permettra de juger d’un coup d'œil, non- 

seulement des soins apportés dans l'application des 
aménagements, mais encore des résultats pécuniaires 
de cette application, et sous ce dernier rapport, il ne 
sera pas moins utile que sous le premier, car il four- 
nira les moyens de rectifier les appréciations erro- 
nées auxquelles la gestion des forêts soumises au 
régime forestier a souvent donné lieu, au point de 
vue financier. Rien de plus commun, par exemple, 
que d'entendre dire que les forêts coûtent trop rela- 
ment à ce qu’on en retire; et en effet, si l’on consi- 
dère en bloc, sans s'occuper de leur nature, les dé- 
penses qu’elles occasionnent, il est certain qué ces 
_ dépenses dépassent de beaucoup la proportion qu'il 
est raisonnable de maintenir entre le revenu et les 


frais d'administration d’un immeuble; mais il con- 
vient de faire remarquer que, parmi les travaux dont 


La - 


l'aménagement d'une forêt met la nécessité en évi- 


# 


Pen UE TON ET I NE 


APPLICATION ET CONTROLE. - 119 


dénce, il y en a, et ce sont les plus considérables, 
qui sont des travaux de premier établissement, c’est- 
à-dire des travaux qui, ayant pour objet la répara- 
tion, la reconstitution, la mise en état du domaine, 
ne sauraient entrer en ligne de compte dans la com- 
paraïson du revenu avec les dépenses annuelles d’en- 
Il s'est rencontré des sociétés industrielles qui, 
pour enfler leurs dividendes, portaient au compte 
de premier établissement des sommes qui appar- 
tenaient à l'entretien et aux frais d'exploitation. 
C'était un tort très-grave. Pour les forêts, on est 
dans l'usage, au contraire, de porter au compte de 
lentretien ce qui appartient au capital de premier 
établissement, et de cette mañière, on diminue le 
revenu net. C’est un tort dans le sens opposé et qui 
n'a pas peu contribué à répandre de très-fausses 
notions sur l’économie avec laquelle les forêts sont 
gérées. Il sera facile, désormais, de rétablir la vérité 
sur'ce point, au moyen des états que les agents 
auront remplis. Néanmoins, ces états ne répondront 
pas à tous les desiderata qui se rapportent à la justi-. 
fication du service forestier: Ils sont destinés seule- . 
ment à la constatation des faits qui peuvent se tra- 
duire par des chiffres. C'est beaucoup, mais ce n’est . 
point assez, et il est à désirer que l'administration 
s'occupe maintenant de faire recueillir toutes les 
observations qui, en dehors des renseignements de 
pure comptabilité, seraient d’une réelle utilité pour 
la culture forestière et pouE les intérêts st s'y rat- 


420 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


tachent. On consignerait ces observations dans des 
cahiers spéciaux qui formeraient autant d’annexes du 
sommier de contrôle. J’en indiquerai onze qui me 
paraîtraient particulièrement ‘utiles et qui séraet 
relatifs : | 

Le premier, à la floraison et à la fructification 
des arbres. On indiquerait les essences pour lesquelles 
elles ont été le plus abondantes, et les conditions où 
se trouvaient ces essences sous le rapport du sol, du 
climat et de la consistance du peuplement, 

Le deuxième, aux expériences sur l'accroissement, 
dont j'ai parlé à la page 150 de ces études. Je crois 
qu'il y a eu quelques travaux entrepris à ce sujet. 
Que sont-ils devenus? Je l’ignore. En tout cas, ces 
travaux exceptionnels dus à l'initiative d’un petit 
nombre d'agents, eussent été tout à fait insuffisants. 
Il conviendrait d’en exécuter d’après des règles uni- 
formes dans les différentes régions de la France, au 
moins pour les essences principales. Ce serait le seul 
moyen de se procurer des bases certaines pour la 
détermination de l’âge d’exploitabilité et de la durée 
des révolutions applicables suivant les sols, les cli- 
mats et la nature du peuplement. 


Le troisième , aux exploitations de tout genre : 


coupes de régénération, coupes d'amélioration, éla- 


gages, extractions de souches. On ferait connaître 


les méthodes suivies, les procédés employés, les 
précautions prises el les résultats obtenus, notam- 
ment pour les coupes d'ensemencement et les éla- 


gages. 


APR RSS CS dc 


dt ct bétemmatbnninss. RSS NÉS PES 


APPLICATION ET CONTROLE. nt 


Le quatrième, aux assainissements et aux repeu- 
plements artificiels. 

Que deviennent les nombreux fossés FPE 
dat que. l'administration fait ouvrir chaque année 
dans les parties humides de son domaine. Quel 
effet ont-ils produit ? Ce sont des questions auxquelles 
la plupart des agents, eux-mêmes, seraient embar- 


 rassés de répondre. Il en sera autrement quand, 


chaque année, ils seront tenus de constater dans un 
cahier spécial les résultats de ces travaux d’amélio- 


* ration. 


Quant aux repeuplements artificiels, je pourrais 
citer des forêts dans lesquelles ils absorbent depuis 
Jongtemps et tous les ans de fortes sommes, quoi- 


qu'ils n'aient jamais été suivis d'aucun succès. A 


quoi. cela tient-il? Les agents n'en savent rien et 
ils n’en continuent pas moins les mêmes erre- 
ments. , 

‘Que la municipalité de Paris ne se lasse pas de 
faire replanter à grands frais sous les épais ombrages 
des Tuileries, de jeunes arbres qui ne réussissent 
jamais et meurent infailliblement au deuxième prin- 
temps. Le mal n'est pas grand, car si les arbres 
meurent, il y à des gens qui vivent de leur mort et 
ne pourraient peut-être pas vivre sans cela. La ville 
de Paris est d’ailleurs assez riche pour se payer le 


luxe de ces plantations perpétuellement renouvelées. 


Mais les repeuplements artificiels dans les. forêts 


-soumises au régime forestier ont une bien autre im- 


portance que des plantations d'agrément : La sécu- 
: @ 


"De 


422" AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


rité de toute une contrée peut en dépendre, lorsqu'ils 
ont pour but, par exemple, de consolider les terrains 
en montagne. Ailleurs, il est nécessaire qu'ils réussis- 
sent pour que l’application des aménagements ne soit 
pas compromise. Partout, ils intéressent l’avenir de 
nos richesses forestières déjà si appauvries. C'est 
dans leur jeunesse, d’ailleurs, que l’on doit soigner 
les arbres comme les hommes pour leur préparer 
une longue et utile existence, et l’administration le. 
comprend bien puisqu'elle consacre chaque année 
aux repeuplements artificiels et à leur entretien, ri 
somme considérable. 

Il y a donc, en définitive, beaucoup de raisons 
pour que cette partie du service soit soumise désor-— 
mais à un contrôle sévère et efficace. Le cahier que je 
propose de faire tenir aux agents le rendrait possible. 

On y constaterait pour chaque reparer s 
d’une certaine étendue : 

L'exposition et la situation du terrain, son état à 
l'intérieur, à la surface, le genre de préparation qui 
lui aura été donnée, l’époque de cette préparation ; 

L'époque de la plantation ou du semis ; 

L’essence, le nombre, la provenance, l’âge et la 
qualité des plans mis en terre, les précautions ir tÉ 
pour assurer leur réussite ; 4€ 

L'espèce, la quantité et la provenance des grai- 
nes ensemencées, les Pro employés AIRE len- 
semencement ; 

Le coût de l’opération dans son ensemble et dns 
ses détails ; 


a séi Lie à Née din nd, SD émis à de MES > a < F" 


APPLICATION ET CONTROLE. 423 


Les soins et les dépenses d'entretien, binage et 
remplissage : 

: L'état du repeuplement chaîne année, Pe au- 
aibient où il pourra être regardé comme complet. 

Le cinquième, à l’estimation et à la vente des 
coupes : 

Ce cahier ferait connaître les circonstances com- 
merciales et industrielles qui étaient de nature à 
réagir sur le prix du bois ; 

Les procédés employés pour assurer l'exactitude 
de l'estimation ; 

Les résultats comparés de la vente sur pied et de 
là vente des produits façonnés ; 

Les résultats de la décomposition du mètre cube 


. en marchandises diverses, de sorte que l’administra- 


tion pût se rendre compte des progrès accomplis 


- dans Putilisation de la matière ligneuse. 


Le sixième, aux routes, chemins et autres moyens 
de vidange. 4e À 
On y consignerait tous les renseignements néces- 
saires pour éclairer l'administration sur leur état et 
la facilité qui en résulte pour la vidange; 
_ On y examinerait les avantages et les inconvé- 


__nients. dés différents modes (adjudication, régie où 
économie) employés pour l’exécution des travaux; 


_ On y signalerait toutes les améliorations dont le 
transport des produits à travers bois, le débardage 
en un mot, aurait été ou pourrait être l’objet. à 

Le huitième , au débit, au façonnage et à la car- 
bonisation des bois en forêt : & 


594  ‘ AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


L'administration ignore presque complétement 
quelle est la plus-value que ces opérations ajoutent 
au bois dans la coupe même, et si on lui demandait 
combien un mètre cube de bois d'industrie dans telle 
forêt représente de journées de travail, elle ne saurait 
répondre. Ces journées de travail constituent cepen- 


dant pour l'État un produit aussi précieux que la 


somme d'argent qu’il a-retirée de la vente du mètre 
cube en question. 

Dans ce cahier, la carbonisation, l'écorçage et 
les scieries mériteraient de faire l'objet d’une atten- 
tion particulière. 

La carbonisation en forêt #se fait aujourd’hui 
comme elle se faisait il y a mille ans. Elle est restée 
stationnaire depuis un temps immémorial, et cela 
vient peut-être de ce que les agents forestiers ont 
trop négligé de rechercher les améliorations dont 
elle pourrait être susceptible. 

_ L’écorcage non plus n’est pas encore sorti de 
l’ornière de la routine. Dans ces dernières années, on 
a fait grand bruit d’une méthode -qui. consiste à 
écorcer le bois vert ou sec, au moyen de la vapeur, et 
qui a par conséquent le grand avantage d'éviter 
l’écorçage sur pied dont les inconvénients sont bien 
connus. Un homme distingué, ancien inspecteur des 
forêts, M. de Wavrechin, a dépensé beaucoup de 
temps, d'argent et d'intelligence, pour propager cette 
nouvelleinvention, sans parvenir à y intéresser l’admi- 


nistration des forêts. Cependant si l’écorçage à la 


vapeur n’enlevait rien à la qualité de l'écorce, comme 


= 


APPLICATION ET CONTROLE. 495 


semblent le prouver de nombreuses expériences , 
l'administration des forêts manquerait à tous ses 
devoirs en maintenant dans ses cahiers des charges 
relatifs aux coupes, la faculté pour les adjudicataires 
de n’abattre que lorsqu'ils sont en pleine séve, les 
taillis à écorcer. 

Les scieries sont encore, la plupart, eñtre des mains 
de l'administration qui, chaque année, en fait même 
établir de nouvelles. Elle a des scieries à elle, afin 
de soustraire ses adjudicataires aux prétentions des 
particuliers propriétaires eux-mêmes de scieries, 
prétentions qui deviendraient exorbitantes si l'État 
ne leur fesait pas concurrence. C’est une raison qui 
a sa valeur sans doute dans la situation- actuelle des 
choses. Cependant il est fâcheux, en principe, que 
l'État se charge de travaux que les particuliers peuvent 
faire; d’abord, parce qu’en général il les fait moins 
bien et moins économiquement; ensuite, parce que 
son intervention dans l’industrie, n'étant pas subor- 
donnée à la poursuite du plus grand profit net, crée 
aux particuliers une rivalité qui est de nature à les 
effrayer et à paralyser leurs efforts. 


Aujourd’hui la construction d’une scierie exige 


encore des capitaux relativement considérables, sans 


_ compter les difficultés auxquelles donne lieu l'usage 


des eaux courantes, et si l'administration des forêts 
n’avait pas de scieries à elle, il se formerait infailli- 
blement pour le sciage du bois, des monopoles qui 
mettraient les adjudicataires des coupes à la merci 
de quelques spéculateurs ; mais un jour viendra pro- 


L 


LA 


126 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


bablement où la scierie locomobile à vapeur perfec- 
tionnée pourra circuler facilement à travers les forêts 
et s'installer sur le sommet des plus hautes montagnes ; 
on louera alors une scierie comme on loue actuelle- 
ment une charrue ou une machine à battre le blé. 
Quand il en sera ainsi, l’administration des forêts 
n'aura plus à se mêler de la question, et je crois 
qu’elle devrait faire quelques efforts, chercher des 
moyens, donner des encouragements, pour se débar- 
rasser le plus tôt possible des soins que cette question 
lui impose. 

Le neuvième, aux incendies, aux animaux et aux 
insectes nuisibles : 5 

On y exposerait toutes les mesures prises pour 
prévenir ou arrêter les ravages qu’entraînent ces 
diverses causes de destruction, ravages dont l’admi- 
nistration ne connaît même pas toujours l’exis- 
tence. | | 

Le dixième, aux observations météorologiques 
(gelées, verglas, ouragans, coups de vent, orages, 
pluie, neige, température , pression barométrique.) 

L'administration des forêts indépendamment du 
profit qu’elle retirerait pour elle-même de ces obser- 
vations, pourrait rendre de grands services à la 
science de la météorologie ; elle comprend un nom- 
breux personnel qui réside dans les régions les plus 
accidentées et qui est par conséquent placé dans les 
meilleures conditions pour se livrer à des expériences 
intéressantes; mais il faudrait que ce personnel füt 
muni des instruments et des instructions nécessaires 


\ 


APPLICATION ET CONTROLE. | 497 


pour faire des observations exactes et compara- 
bles *. > $ 
Le onzième enfin, à l'influence des exploitations 


. forestières sur le bien-être matériel et la moralité des 


populations environnantes. 

Ce cahier ne serait pas le moins important ; on y 
donnerait le nombre des bras employés par chaque 
nature de travail, le chiffre des salaires, l'exposé des 
avantages que l’agriculture retire des produits divers 


LZ 


que la forêt luï fournit. w 


1. L'école de Nancy fait depuis quelques années, sous l’habile 
direction du savant professeur M. Matthieu, des observations 
météorologiques dout l'utilité est déjà fort appréciée. 


dés. nn à 


ds mdr dd Es de din 


#4 CINQUIÈME ÉTUDE. 


| ÉTAT NORMAL DES FORÊTS 

E - ENVISAGÉES DANS LEUR ENSEMBLE. 

| TRAVAUX À FAIRE POUR LE RÉTABLIR EN FRANCE. 
LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 

É ATTRIBUTIONS DE L'ADMINISTRATION 

| FORESTIÈRE. 


CHAPITRE PREMIER. 


. 
| ÉTAT NORMAL DES FORÊTS. TRAVAUX A FAIRE 
3 ? k , 

| É POUR LE RÉTABLIR. 


| Il a été souvent question dans ce livre de l’état 
normal des forêts. Qu'est-ce que l’état normal des’ 
; forêts ? — C’est l'état de ces forêts quand elles sont, 
avec les autres éléments qui constituent notre pla- 
nète, dans les conditions de dépendance réciproque, 
dans les conditions d'équilibre sur lesquelles repose 
lharmonie générale de l'univers. Mais le définir 
ainsi, c'est dire combien nous sommes impuissants 
à nous en faire une notion précise : nous comprenons 
que de certains rapports doiventexister entre les prin- 


430 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


cipaux règnes de la nature et les composants de ces 
règnes; nous avons le pressentiment que rien de ce 
qui a été créé ne peut être impunément détruit, que 
chaque objet a sa raison d’être, et que les forêts ne 
sont pas moins indispensables à la durée et à l'amé- 
lioration de notre globe que l’air, l’eau, le feu, etc.;- 
nous ne sautrions d’ailleurs circonscrire exactement 
leur mission; notre intelligence ne va pas jusque-là. 
Ces forêts, ces fleuves, ces mers, ces lacs, ces 
innombrables quantités d'animaux, de plantes et de 
minéraux, qui ont été mis à notre disposition, rem- 
plissent dans la vie universelle des fonctions provi- 
dentielles; nous n’en doutons pas; nous le sentons 
fermement, et pourtant nous sommes incapables 
d’expliquer les lois qui régissent ces fonctions. 

Mais si nous ne pouvons remonter, aux causes 
premières et pénétrer les desseins de la création, 
nous pouvons apprécier les diverses influences du 
milieu qui nous entoure, sur notre bien-être, et cela 
suffit pour que nous évitions de troubler une orga- 
nisation dont Dieu seul a le secret. 

L'état normal, tel qu’il nous est permis de le 
concevoir, est donc un état secondaire et relatif: 
c'est l’état qui se concilie le mieux avec les besoins 
de notre vie. Toutefois, pour que cet état secondaire 
et relatif ne soit pas lui-même au-dessus de notre 
intelligence ; pour. que nous soyons à même de juger 
sainement des altérations qu'il aurait éprouvées, il 
faut que nos facultés soient parvenues à un certain 
degré de culture. 


L 


et 


ÉTAT NORMAL DES FORÊTS. 431 


+ Au début des sociétés, obéissant à l'instinct. 
plutôt qu'à la raison, l’homme attaque la nature 
étourdiment, sans se soucier d'en respecter l’har- 
monie générale ; seulement, comme il ne peut guère - 
se servir que de ses. mains, là nature est plus forte 
que lui et les blessures cjételle en reçoit sont promp- 
tement guéries. Les conditions de la lutte sont tout 
autres dès que l’homme se civilise : il acquiert alors, 
par la science, des instruments très-énergiques pour 
chänger l’ordre naturel des choses, et il court le 
risque de le bouleverser lorsqu'il néglige de demander 
au développement intellectuel et moral, qui est lui- 
même la cause de ce danger, le moyen d'y échapper. 


. Or l'histoire prouve, hélas! qu’il s'est plus inquiété 


jusqu'à présent de faire acte de son pouvoir que d’en 
prévenir les abus, et qu'il n’a pas compris la néces- 
sité de modérer et de régler ses entreprises sur la 


- nature, s’il ne voulait les voir se retourner contre 


lui ; aveuglement fatal, déplorable, dont l'origine 
est dans ce défaut que j'ai eu l’occasion de signaler 
si souvent, l'oubli de la solidarité, 

Quelles sont les facultés qui grandissent chez 
l'homme avec la civilisation? C’est d’abord l’ob- 
servation; par elle, il se rend compte de l'effet 
immédiat de ses actes. C’est ensuite la mémoire ; 
par elle, il forme ce capital précieux, l’expérience, 
sans lequel tous ses efforts ne donneraient que des 
résultats éphémères. C’est enfin la prévoyance; 
par elle, il juge de ce qu'il doit faire ou ne pas 
faire dans l'intérêt de l’avenir, et c’est cette der- 


LI 


439 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


nière faculté qui lui permet d’user des autres avec 
la circonspection désirable. Malheureusement Ja 
prévoyance est précisément la faculté qui a toujours 
le plus manqué aux hommes. Et. pourquoi: leur 
a-t-elle manqué? — Parce qu'ils ne l’ont appliquée 
qu’à leurs intérêts individuels, au lieu de l'appliquer à 
leurs intérêts collectifs ; parce qu'ils ne l'ont pas éten- 
due, complétée par le sentiment de la solidarité. Il 
est incontestable cependant que ce sentiment -est 
nécessaire pour que la prévoyance ait toute son effi- 
cacité, surtout quand il s’agit des forêts ; car les 
suites fâcheuses d'un déboisement, qui seraient peu 
sensibles sion ne les appréciait que par rapport à soi et 
pour un tempslimité, pourraient l’être beaucoup si on 
les appréciait par rapport à la généralité des hommes 
et pour un temps plus long. Les éléments n’ont 
pas été créés pour l'homme isolé, et il est rare qu'on 
en jouisse sans excès, quand on les attaque dans un 
but égoïste. Aussi, peut-on assurer qu’il n’y aura de 
garanties pour la conservation de notre globe dans 
un état normal, que le jour où la paix universelle y 
régnera, le jour où les mille sociétés qui l’habitent 
ne formeront plus qu’une seule famille; attendu que 
ce jour-là seulement, il sera possible d’en régler 
l'exploitation d’une manière adéquate aux intérêts, 
aux besoins réels de l'humanité envisagée dans ses 

générations successives. Aujourd'hui, cette exploita- 
tion rationnelle est impraticable. En supposanten effet 
que l’on-parvint à remplacer la prévoyance indivi- 
duelle qui préside trop souvent aux actes des hommes 


+ 
A 
” 


ÉTAT NORMAL DES FORÊTS. 133 


dans une nation, par la prévoyance collective dans 
cette nation même, on n'aurait qu’une prévoyance 
insuffisante, à cause du manque d'entente que la 
_ rivalité des peuples a amené entre eux. S’il plaisait 
demain aux Suisses de déboiser les montagnes où le 
Rhône prend sa source, ce qui pourrait ne pas leur 
_ nuire à eux, toute notre prévoyance ne saurait aboutir 
qu’à régulariser le régime des affluents que ce fleuve 
reçoit de notre pays; elle serait donc insuffisante. 
Si, pendant que nous prohibons la destruction des 
oiseaux, parce que ces oiseaux sont utiles à l’agri- 
culture, on continue de s’acharner à les tuer quand 
ils passent sur un territoire voisin, notre prévoyance 
non plus ne sert pas à grand’chose. Ainsi, je le répète: 
tant que les hommes se feront la guerre, ils seront 
exposés à abuser des biens que la Providence a mis 
à leur portée, puisqu'ils s’interdiront de prévoir les 
effets de leur jouissance pour l'humanité tout en- 
tière. 

Cette vérité-là n’est pas une vérité de sentiment, 
c'est une vérité de raisonnement. Les temps sont 
encore loin, malheureusement, où les hommes auront 
la sagesse de la pratiquer, et ce serait beaucoup 
déjà que dans un seul et même pays les habitants 
fussent amenés à comprendre qu’il y a des objets, 
comme les forêts par exemple, dont l'exploitation ne 
saurait être l’affaire de quelques ndividus seulement, 
mais celle de tous. 

Où en sommes-nous, en France, à l'égard des 


aies Quelles sont les atteintes évidentes que leur 
98 


434 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


état normal y a souffertes, et comment pourrait-on 
les réparer ? 

Il y a en France plusieurs millions d'hectares de 
landes et de friches dont l’agriculture proprement 
dite ne saurait tirer aucun parti, et qui, autrefois. 
boisés, ne produisent aujourd’hui que des fièvres. 

Il y a sur les bords de l'Océan d'énormes quan- 
tités de sables que les courants marins y accumulent 
sans cesse et qui, n’y rencontrant plus la barrière 
que les massifs boisés leur opposaient jadis, s’avancent 
peu à peu dans l’intérieur des terres, laissant le désert 
derrière eux. 

Il y a de vastes plaines où le cultivateur vit dans 
la crainte perpétuelle d’être privé d’un moment à 
l’autre des fruits de son travail, par les intempéries 
climatériques dont l’abri des forêts ne modère plus 
la rigueur. | 

Il y a des montagnes qui, ravagées par les tor- 
rents depuis qu’elles ont été déboisées, s’en vont par 
lambeaux dans les vallées qu’elles obstruent de leurs 
débris. 

Il y a des fleuves dont les inondations, de bien- 
faisantes qu’elles étaient, lorsqu'il y avait encore des 
arbres pour diminuer la vitesse d'écoulement des 
eaux, sont devenues dévastatrices à cause de leur 
violence et des déjections qu’elles vomissent sur les 
propriétés. 

Notre pays est tributaire de l'étranger pour des 
produits ligneux dont la privation compromettrait sa 
sécurité, son influence au moins. Notre marine ne 


ÉTAT NORMAL DES FORÊTS. 435 


trouve plus dans les forêts de la France la quantité 
de bois dont elle a besoin. On ne voit que des 
rapailles là où il y avait anciennement les plus belles 
forêts de chêne du monde, que la Providence sem- 
blait avoir tout exprès plantées auprès de nos grands 
ports maritimes, pour l’approvisionnement de leurs 
Chantiers. 

* Enfin, sur les huit à neuf millions d’hectares de 
bois qui nous restent, il y en a trois qui, bien que 
soumis au régime forestier, sont loin de donner les 
produits que l’on devrait, que l’on pourrait en 
retirer. - 

_ Tous ces faits constituent certainement des at- 
teintes à l’état normal de notre pays, puisque nous 
en souffrons et que nos descendants en souffriront 
encore plus que nous-mêmes, si nous n’y remédions. 

Dans mon livre, je ne me suis occupé que de 
l'amélioration des forêts existantes, et encore l’ai-je 
fait d’une façon étroite, en ne considérant les forêts 
que dans leurs rapports avec les circonstances en 
quelque sorte environnantes, et quand j'ai parlé de 
leur état normal, j'ai voulu parler de leur état relati- 
vement à ces circonstances. : 

On voit donc que l’aménagement ainsi com- 
pris est un petit détail à côté des travaux qui con- 
sisteraient à restaurer le domaine forestier de la 
France entière; mais, par ce petit détail, on peut se 
rendre compte de la marche à suivre pour arrêter 
les bases desdits travaux. | 

La première chose à faire serait la statistique. 


4136 AMÉNAGEMENT DES FORÊÉTS. 


Elle comprendrait non-seulement les forêts et les 
päturages existants, mais encore tous les espaces 
dénudés dont l'intérêt général réclamerait le boise- 
ment ou le gazonnement. 

Elle pourrait être établie par bassins géogra- 
phiques et autant que possible par catégories de 
propriétaires. : 

Les renseignements y seraient classés dans l’ordre 
que j'ai indiqué page 22. Je n’en referai pas la no- 
menclature et je me bornerai à signaler ceux qu'il 
conviendrait de mettre en relief ou d'ajouter. 

Ce seraient : 

L'état des forêts situées en montagne, et celui 
des forêt situées en plaine; 

La distribution des essences forestières suivant 
les formations géologiques, suivant la latitude et 
suivant l'altitude ; 

La situation, l'étendue et l’état de conservation 
des terrains affectés au pâturage ; 

Les mêmes renseignements pour les terrains im- 
productifs, avec l'indication de l’origine et des causes 
de leur stérilité ; 

Les influences météorologiques dominantes dans 
chaque bassin ; leurs effets sur la santé des hommes 
et sur la production agricole ; 

Les principales voies : routes de terre, chemins 
de fer, canaux et rivières servant au transport du 
bois et le coût de ce transport par mètre cube et par 
kilomètre, pour chaque nature de voie ; 

Les circonstances naturelles ou économiques fa- 


dant» à <a in de mé éémtin tips di DE dE te 


ÉTAT NORMAL DES FORÊTS. 437 


vorables ou contraires à la- conservation des forêts ; 

Les produits généraux en bois de marine, de 
service, d'industrie, en bois de feu, et les prix maæima 
et minima de ces produits sur place ; 

Le nombre, l'espèce et le rendement des ani- 
maux entretenus dans les pâturages. On distingue- 
rait, dans cet article, les animaux appartenant aux 
populations locales, de ceux qui viennent du dehors. 
Dans le rendement, on indiquerait la part afférente à 
la laine, au lait, à la viande, le bénéfice du proprié- 
taire du pâturage, celui du propriétaire des ani- 
maux ; 

Les principaux lieux de consommation des pro- 
duits ligneux, et les prix de revient de ces produits; 

La consommation des services publics, de la ma- 
rine militaire et de la marchande, celle des usines et 
des principales industries ; 

La nature et la valeur des produits PA im 
portés et des mêmes produits exportés; l’origine des 
premiers, la destination des seconds; 

La nature et la valeur des produits forestiers 
délivrés aux populations rurales ; 

Le nombre et le salaire moyen des ouvriers 


employés à l'exploitation et au débit des bois dans 


l'intérieur des forêls; ceux des ouvriers dans les 
industries en dehors des forêts, employant le bois 
comme matière première. 

Après la statistique, on procéderait au parcel- 
laire. 


Mais le parcellaire ne s “arrêlerait pas aux pétites 


438 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


différences de sol, de climat ou de végétation, qui 
ont une grande importance pour une forêt prise en 
particulier, mais qui n’en ont aucune pour toutes les 
forêts embrassées dans leur ensemble. Les parcelles 
comprendraient souvent des forêts entières. Elles 
seraient limitées et déterminées par les lignes de 
partage des eaux et des climats, par les formations 
géologiques, par les caractères de la végétation 
spontanée, par les conditions climatologiques qui 
caractériseraient de grands espaces. La description 
de ces parcelles aurait pour but, non pas de les 
classer dans une affectation, mais seulement de déter- 
miner le genre de culture à leur appliquer, la nature 
des travaux à faire pour leur mise en valeur. 

Après le parcellaire, on dresserait le plan d’exploi- 
tation. Il ne s'agirait point, on le devine, de régler 
la quotité de la coupe annuelle; il s'agirait d’un 
objet bien plus considérable : on aurait d’abord à 
déterminer le périmètre des terrains dont le boise- 
ment ou le gazonnement serait nécessaire pour la 
conservation des sources ou comme barrière à oppo- 
ser aux torrents, aux avalanches, à la divagation 
des cours d’eau, aux ouragans, à l’envahissement 
des sables, à l'invasion du territoire par des armées 
ennemies, et on en formerait l’état par catégorie de 
propriétaires. rs 

On ferait ensuite connaître à grands traits celles 
des forêts comprises dans ce périmètre, qui pour- 
raient sans de trop grands inconvénients être traitées 
en taillis, celles auxquelles on devrait appliquer la 


+ ÉTAT NORMAL DES FORÊTS. 439 


méthode du réensemencement naturel et des éclair- 
cies, et celles qui seraient jardinées. 

On distinguerait, parmi les terrains dénudés, ceux 
qui devraient être boisés, de ceux qui devraient être 
simplement gazonnés. Sans entrer dans les détails 
de la culture, on indiquerait les essences à propager, 
soit par le semis, soit par la plantation. 

Lorsque ce périmètre, dans lequel la conservation 
des forêts et des pâturages serait regardée comme 
étant de rigoureuse nécessité, aurait été tracé, on 
rechercherait, en dehors, les forêts qui, quoique ne 
présentant pas d'utilité manifeste comme sauvegarde 
du territoire et des intérêts généraux du pays, en 
présenteraient assez cependant pour qu'il fût utile 
d'en prévenir la destruction. Ce seraient en pre- 
mier lieu toutes les forêts domaniales; car il n’en 
reste . certainement plus une seule dont l’aliénation 
ne fût pas déplorable. Ce seraient aussi, sauf un 
petit nombre d’exceptions, les forêts communales ; car 
toutes celles dont la transformation en terres agri- 
coles était avantageuse ont été aliénées depuis long- 
temps. Ce seraient, ensuite parmi les bois des par- 
ticuliers, ceux dont le défrichement aurait pour 
conséquence de rendre le sol tout à fait infertile ou 
de compromettre l’existence de sources qui, quoique 
n’étendant pas au loin leur action, sont cependant 
précieuses pour les populations locales. 

A ces diverses forêts on ajouterait, pour compléter 
le second périmètre, les terrains vides, les pâturages, 
les paquis appartenant à l’État ou aux communes, 


440 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


dont on ne pourrait tirer parti que par le boisement 
ou le gazonnement, et que l'initiative individuelle 
serait inhabile à mettre en valeur. 

Puis viendrait l’état des travaux à faire : 

1° Dans le périmètre dont le boisement ou le 
gazonnement serait de première nécessité ; 

2 Dans celui où ces travaux n'auraient qu’une 
utilité secondaire. 

On indiquerait pour le premier périmètre, et tou- 
jours par catégorie de propriétaires, l'étendue des ter- 
rains à reboiser, celle des terrains à gazonner, le prix 
approximatif des terrains, et le coût des travaux, 
en séparant les travaux d'art, tels que les barrages, 
des travaux de gazonnement ou de reboisement. 

On donnerait les mêmes renseignements pour le 
second périmètre, mais en ce qui concernerait seule- 
ment les propriétés domaniales et communales. 

On ferait connaître pour ces dernières forêts les 
dépenses approximatives qu'entraineraient leur déli- 
mitation, leur aménagement et leur vidange. 

On exposerait d’une manière générale les réformes 
qu'il serait convenable d'apporter au régime écono- 
mique et légal des routes nationales, départemen- 
tales, vicinales, des canaux, des rivières navigables 
et flottables, pour faciliter le transport des produits 
forestiers. 

On examinerait les entraves mises au commerce 
des bois par les droits de navigation, de douane et 
d'octroi, ainsi que les conditions faites à la propriété 
forestière par l'impôt foncier, et on signalerait les 


de a les hi > cie mie mn CA diéa th Etthel on dé da dt Nés Ge) dé LE dd 


ÉTAT NORMAL DES FORÊTS. hat 


mesures à prendre pour supprimer les unes et amé- 
liorer les autres. 


Voilà un aperçu des travaux qu'il y aurait à exécu- 
ter, afin de remettre le territoire de la France, au 
point de vue des forêts et des pâturages, dans un 
état normal. On ne saurait en concevoir qui pussent 
contribuer plus que ceux-là au bien et à la prospé- 
rité de notre pays. On les a, du reste, déjà commencés, 
et sur un point ils sont même très-avancés : dans … 
quelques années, les dunes seront reboisées, mais, 
après cette opération, que d’autres resteront encore à 
faire! L'administration des forêts, qui est la mieux 
outillée pour mener à bonne fin cette grande entre- 
prise, l’est-elle suffisamment? Je ne le crois pas. Je 
veux dire par là qu’elle ne trouverait ni dans les lois, 
ni dans le personnel dont elle dispose, ni dans les 
fonds qu’on lui alloue, toutes les ressources dont elle 
aurait besoin. Je ne saurais, sans sortir tout à fait 
du cadre de ces études, examiner les réformes dont 
l'organisation de l'administration forestière serait 
susceptible. Je ne dirai rien non plus du budget, 
chose variable qui n’a rien à faire avec la science; : 
mais je jetterai un coup d’æil sur les lois, afin de 
montrer leur insuffisance et les points principaux sur 
lesquels il conviendrait de les modifier. 


CHAPITRE DEUXIÈME. 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. ATTRIBUTIONS 
DE L'ADMINISTRATION FORESTIÈRE. 


Les lois et les règlements dont l’exécution est con- 
fiée à l'administration forestière, si l’on en excepte 
les lois récentes sur le reboisement et le gazonne- 
ment des montagnes qui ne concernent d’ailleurs 
qu’une faible partie du sol forestier, présentent une 
lacune que je dois relever tout d’abord. Cette lacune 
se rapporte au pâturage. Le code forestier et l’ordon- 
nance réglementaire du 1° août 1827 ne traitent du 
pàturage que lorsqu'il s'exerce dans l’intérieur des 
forêts où il est regardé comme secondaire, et rentrant 
dans la catégorie des produits accessoires. Mais 
puisqu'il est reconnu aujourd’hui que le pâturage 
constitue dans certains cas le principal et même le 
seul mode de jouissance des terrains qui se refusent 
à la culture agricole; que c’est à l’abus du pâturage 


surtout que l’on doit attribuer les ravages des torrents 


et la ruine de plusieurs de nos départements, il con- 
viendrait d'ajouter aux lois forestières des dispositions 
spéciales pour régler le régime des pâturages, et 
le régime qu'on appelle forestier devrait s'appeler 
aussi pastoral. Depuis la promulgation de la loi sur 


in De nn à in 


ai as) ae té Ltd hitiode de OL 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 3 


le gazonnement, ces dispositions spéciales et l’exten- 
sion qui s’ensuivrait pour les attributions de l’admi- 
nistration forestière, sont devenues indispensables. Il 
y a du reste longtemps que le besoin s’en fait sentir : 
N’a-t-on pas dû soumettre au régime forestier des 
terrains déboisés et livrés au parcours, parce qu'il 
n’était pas possible de les soustraire autrement à une 
dégradation complète ? On a violé ainsi l’article 90 
du code qui n’exige la soumission au régime forestier 
que des forêts susceptibles d’une exploitation régu- 
lière, et il en est résulté toutes sortes de difficultés 
entre les communes et l’administration. Il ne faut pas 
que ces choses se renouvellent, et la création légale d’un 
régime pastoral les empêchera de se renouveler. Je 
voudrais plus encore : je voudrais que le régime fores- 
tier lui-même n’impliquät pas la culture permanente 
et exclusive des bois; qu’il pût se concilier avec la 
culture agricole temporaire. S'il en était ainsi, les 
communes seraient encouragées à placer, d’elles- 
mêmes, sous la main de l’administration- forestière, 
tous leurs biens communs dont la jouissance donne 
lieu à des désordres qu’elles sont impuissantes à 
réprimer; mais j'aurai à revenir plus tard sur cette 
question, et je vais examiner de plus près, quoique : 
sommairement, les attributions de l’administration 
forestière dans leurs rapports avec les biens de l’État, . 
avec ceux des particuliers et avec ceux des com- 
munes. 


hi AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


ARTICLE PREMIER. 


ATTRIBUTIONS DE L'ADMINISTRATION FORESTIÈRE 
DANS LEURS RAPPORTS AVEC LES BIENS DE L'ÉTAT. 


Pour les biens de l’État, j'ai peu d'observations 

à faire : si on attribuait à l'administration forestière 
la gestion des pâturages et la mise en valeur des 
terres, peu nombreuses d’ailleurs, qui sont com- 
prises dans ces biens ; si on lui permettait en même 
temps d'appliquer la loi d’expropriation pour cause 
d'utilité publique aux acquisitions que réclamerait 
l'amélioration de la propriété, il n’y aurait rien à 
ajouter à l'autorité dont elle est déjà investie. N’est-il 
pas bizarre que la loi d’expropriation pour cause 
d'utilité publique soit applicable à l'achat d’un ter- 
rain nécessaire à la construction d’un chemin vicinal, 
et ne le soit point à celui d’un terrain nécessaire à la 
construction d’une route forestière ? Est-ce que cette 
route n’a pas un caractère d'intérêt général plus pro- 
noncé, que le chemin vicinal? Les anomalies de ce 
genre pouvaient se comprendre lorsqu'on considérait 
l'État propriétaire d'immeubles comme un simple 
particulier, ayant des intérêts distincts de l'intérêt 
public. Mais cette notion de l’État s’est modifiée : 
l'État, c’est tout le monde, et rien de ce qui lui 
appartient ne peut être assimilé à unepropriété privée. 
Quand il fait une route pour faciliter la vidange d’une 
de ses forêts, il poursuit un but d'intérêt général, et 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. hA5. 


la plus-value que cette route donne au prix des coupes, 
entre dans la caisse du trésor et profite à tout 
le monde. Il est à remarquer, au surplus, qu’à part 
ce point relatif à l’expropriation pour cause d'utilité 
publique, les priviléges accordés par la loi à l’admi- 
nistration forestière pour les forêts domaniales sont 
plutôt excessifs qu’insuffisants. Ils sont excessifs par 
exemple en ce qui concerne d’abord la délimitation. 
attendu qu’en déclarant que la délimitation est défini- 
tive, si au bout d’un an, à partir du dépôt du procès- 
verbal, aucune opposition n’a été faite de la part du 
propriétaire, l’article 42 du code forestier a privé 
celui-ci du bénéfice de la loi civile sur les péremp- 
tions et les prescriptions. Ils le sont également 
ensuite ep ce qui concerne l'extinction des droits 
d’usage en bois: on peut dire que la loi forestière, à ce 
sujet est presque spoliatrice, puisqu'elle a pour con- 
séquence, en définitive, et quel que soit l'esprit de 
libéralité par lequel l'administration a essayé d’en 
corriger la rigueur, elle a pour conséquence de 
diminuer dans une forte proportion la jouissance de 
l'usager. L’équité voudrait certainement qu'on lui 
abandonnât en cantonnement une partie de forêt 
susceptible de fournir un produit égal au chiffre de la : 
délivrance usagère. Elle le voudrait d'autant plus qu’il 
est de principe que cette délivrance ne doit jamais 
dépasser les besoins réels de la partie prenante ; et 
l'équité est méconnue, par conséquent, lorsque le 
revenu que l’usager peut retirer de la propriété qu’on 
lui a concédée en échange de ses droits, descend au- 


446 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


dessous de ces besoins. Puisque, comme je le disais 
plus haut, l'État c’est tout le monde, il ne saurait 
séparer, en matière d’usages, son intérêt de celui dès 
usagers. Nuire à l’un, c’est nuire à l’autre. L’extinc- 
tion des droits d'usage est, assure-t-on, nécessaire, 
parce que ces droits s’opposent à l'amélioration des 
forêts. Je ne vois pas trop en quoi, car toutes les fois 
que des usagers ont voulu empêcher l'administration 
de faire dans les forêts grevées, les travaux d’aména- 
gement ou autres qu’elle jugeait utiles, ils ont été 
déboutés de leurs prétentions. L’extinction des droits 
d'usage ne serait légitime que dans le cas où il n’y 
aurait pas d'autre moyen d'arrêter les usages à feux 
croissants, et d'empêcher qu’ils ne dévorent tous les 
produits des forêts ; mais, dans ce cas, on pourrait au 
moins laisser à l’usager le choix entre l'extinction 
des droits ou leur limitation. Que l’on allègue que le 
service des droits d’usage est gênant pour l’admi- 
nistration; soit, c’est incontestable, mais l’adminis- 
tralion n’a point été instituée pour ne faire que les 
choses qui ne troublent pas sa quiétude, et la gêne 
ne devrait pas l’effrayer. Le respect des usages, sauf 
à en concilier l’exercice avec les droits du proprié- 
taire et avec les exigences d’une bonne exploitation, 
aurait cet avantage de maintenir les liens qui ratta- 
chent à la conservation du sol forestier de nom- 
breuses populations; tandis que, par l'effet du can- 
tonnement, on désintéresse ces populations pour 
toute la partie de forêts dont elles ne jouissent plus, 
et, ce qui est plus grave encore, on compromet 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 447 


l’avenir de la partie qu’on leur abandonne, en la sou- 
mettant à tous les dangers qui consistent dans les 
besoins incessants, l’inintelligence et l’imprévoyance 
des municipalités. Convenons qu’il y a, dansla ma- 
nière dont l’État remplit ses devoirs vis-à-vis des 
communes, d'étranges contradictions : d’un côté, il 
a recours à toutes sortes de précautions pour les em- 
pêcher de dissiper leur capital, et, s’il se plaint de 
quelque chose, c’est de n’avoir pas assez d’autorité 
pour cela. D'un autre côté, quand il tient la source 
de leur revenu dans ses mains; quand rien ne le 
contrarie, ne l’entrave pour en régler la jouissance, 
et ilen-est ainsi relativement aux droits d'usage, il 
se dépouille de son autorité souveraine pour livrer le 
capital représentatif de ces droits à tous les hasards, 
à toutes les éventualités auxquels sont exposées les 
propriétés communales ordinaires dont la tutelle ad- 
ministrative est la seule protection. 


ARTICLE 11. 


ATTRIBUTIONS DE L'ADMINISTRATION FORESTIÈRE 
DANS LEURS RAPPORTS AVEC LES BIENS DES PARTICULIERS. 


Sauf les pâturages d’une grande étendue, qui 
sont régis par l'administration des domaines, l’admi- 
nistration forestière est donc investie d’une autorité 
légale à peu près suffisant e, pour améliorer le domaine. 
forestier et pastoral qui appartient à l'État. Quelle 


TT AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


est son autorité sur les propriétés de même nature 
que possèdent les particuliers? Elle est pour ainsi 
dire nulle. Sous l’empire de la fameuse ordonnance 
de 1669, les bois des particuliers étaient soumis à des 
règles d'exploitation qui avaient pour but d’en assu- 
rer la conservation et d'y favoriser la production 
d’une certaine quantité de pièces de fortes dimen- 
sions. Aujourd'hui, à part le défrichement que le 
gouvernement s’est réservé le droit d'interdire dans 
quelques circonstances exceptionnelles, les particu- 
liers peuvent faire de leurs bois et de leurs pâturages 
ce que bon leur semble, et il serait probablement 
impossible de leur reprendre la liberté qu’on leur a 
rendue sous ce rapport. Cependant, l'expérience a 
prouvé que la simple prohibition du défrichement ne 
suffit pas à conjurer la destruction des bois, lorsque ces 
bois ont plus de valeur, plus de prix par le pâturage 
qu'ils fournissent aux bestiaux, que par les produits 
ligneux, et c’est ce qui explique cette vaste étendue 
de rapailles, de friches et de terrains vagues que les 
particuliers possèdent dans les montagnes du midi 
de la France :. L'expérience a prouvé aussi que les 
pâturages, à leur tour, s’anéantissent si on en fait 
abus, surtout lorsqu'ils sont situés en pente rapide ; 


1. Les personnes qui douteraient de l’inefficacité des lois à ce 
sujet n’ont qu’à lire le très-remarquable livre de M. de Ribbe sur 
la Provence au point de vue des bois et des torrents. Le parle- 
ment de Provence a multiplié les défenses et les peines. Les défri- 
chements et les écobuages n’en ont pas moins marché avec une 
rapidité désespérante. 


Ml e à 
LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 449 


PA 


mais, pour réprimer cet abus, l'administration est 
tout à fait impuissante. 

= On commettrait donc la plus. ee des impru- 
dences, si on laissait entre les mains des particuliers 
les bois et les pâturages qu'ils possèdent, dans l’inté- 
rieur du périmètre où il aurait été reconnu que l'in- 
térêt général exige la conservation de ces bois et de 
ces pâturages. Il n’y a qu’une manière d'assurer 
cette:conservation : c'est que FÉtat s'en charge, et, 
à cet effet, exproprie les particuliers pour. cause 
d'utilité publique. Mais puisque ces derniers sont 
incapables de garder leurs terrains en nature de*bois 
et de pâturage, lorsque leur intérêt du moment est 
de les livrer sans modération aux bestiaux, encore 
plus le sont-ils de mettre des bois ou des prés là où 
n’y en a pas, et j'en conclus que le gouvernement 
devrait encore acquérir tous les terrains des par-. 
ticuliers dont la dégradation serait préjudiciable 
à l'intérêt général du pays, et dont la mise en va- 
leur serait au-dessus des forces de l'initiative indi- 
viduelle. 

Les lois sur le reboisement et le gazonnement des 
. montagnes ont prévu que l’exécution des travaux 
par l'État, était en-effet le meilleur moyen d'arriver à 
la consolidation et à la mise en valeur des terrains . 
appartenant aux particuliers; malheureusement, cles 
ontadmis que ces terrains, après avoir été consolidés 
et mis en valeur, pourraient être réclamés par leurs 
anciens propriétaires, moyennant l’abandon d’un quart 
ou la moitié de leur étendue, et c’est là une chose 

3 29 


450 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


fort regrettable, car elle expose l’État à perdre un 
quart ou la moitié de la dépense qu’il aura faite. 
Ces lois ont aussi autorisé des subventions et des 
primes pour les reboisements à faire en dehors du 
périmètre d’utilité publique. C’est là une faute aussi 


grande selon moi que la précédente, comme j’essaye- 
rai de le prouver plus tard, quand j'aurai à traiter la 


même question pour les bois des communes. : : 
Quant aux bois des particuliers qu’il n’y aurait pas 
lieu de soumettre au régime forestier et pastoral dans 
toute sa rigueur!, ils seraient remis à la libre disposi- 
tion des propriétaires, à moins que leur. existence ne 
se liât à des intérêts locaux d’une certaine impor- 
tance, auquel cas ïls seraient maintenus, après 


enquête, sous l'empire de la prohibition du défri- 
chement, et on en formerait un cadastre spécial‘. Mais 
pour dédommager les propriétaires de cette servi 
tude, l'État devrait leur accorder une indemnité’et il 
en trouverait aisément les moyens, soit en suppri- 


mant les droits d'octroi qui grèvent si lourdement les 


A. Toutes les lois sur le défrichement seront illusoires tant que 
ce cadastre ne sera pas établi. Je crois lavoir prouvé dans la note 
sur le défrichement que j'ai présentée à la Société forestière en 
1859. Mais, m’objectera-t-on peut-être, à quoi servira ce cadastre 
_ spécial s’il est vrai, comme vous l’avez dit, qu'il n’y a pas de loi, 
pas de contrainte qui puisse conjurer la ruine d’un bois, quand 

bois a plus de valeur par le pâturage que par les produits 
ligneux ? — J'ai dit cela et jy persiste, mais il y a heureusement 
encore beaucoup de bois qui ont plus de valeur par les produits 
ligneux que par le pâturage, et pour ceux-là la défense de défri- 
cher sera très-efficace, à moins que l'on n “ait affaire à des proprié- 


taires déPORrTus de raison, 
d 


! 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS.  451- 


produits ligneux dans certaines villes, soit en dimi- 
nuant l'impôt foncier qui est généralement plus élevé 
pour les bois que pour les autres immeubles, soit en 
concourant plus énergiquement à la poursuite et à la 
répression des délits commis dans ces bois, soit enfin 
en favorisant par des subventions la création de che- 
mins forestiers. Le gouvernement a du reste fait un 
premier pas dans le sens que j'indique ici par la loi 
du 27 juillet 4870, sur la région des. Maures et de 
TEstérel, en Provence, loi dont le pays est rede- 
vable à l'initiative du directeur général actuel des 
forêts, M. Faré. Par cette loi, les gardes forestiers 
de l'État ont été associés à la poursuite des-délits 
et contraventions commis dans les bois des par- 
ticuliers ; l'État s’est chargé de la moitié des .dé- 
penses qu'entraînera la construction d’un réseau de 
routes destiné à améliorer la situation -de ces bois; 
et, chose digne de remarque encoreplus que les pré- 
cédentes, ces routes sont appelées à jouir de tous les 
priviléges dont jouissent les chemins vicinaux d’inté- 
térêt commun. Ainsi voilà enfin _le principe de la pro- 
teclion spéciale que l’État doit aux propriétés boiséés 
des particuliers, consacré et sanctionné par une doi. 
“II ne s’agit plus que d’en faire d’autres dans le même 
but. L 2198408 


+ ; 


152 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


ARTICLE ITE 


ATTRIBUTIONS DE L'ADMINISTRATION FORESTIÈRE 
DANS LEURS RAPPORTS AVEC LES BIENS DES COMMUNES. 


Si on devait juger du mérite des lois et des règle- 
ments forestiers par l’état dans lequel sont les bois 
communaux, on en aurait une bien faible idée, car 
il n’y a pas une branche du service qui, pour ces 
bois, ne soit en souffrance. 

Délimilation et Bornage. — Sur plus de 1,900, 000 
hectares de forêts que possèdent les communes, y 
en a-t-il seulement la moitié qui aient été délimitées 
et abornées régulièrement ? — Je ne le crois pas. 

Surveillance. — Sauf quelques forêts de l’est et 
du centre, la surveillance de ces forêts n’est assurée 
nulle part, et pour s’en convaincre, il n°y a qu'à voir 
à combien s’élève en moyenne le traitement d’un 
garde forestier communal. Dans les 22 conservations 
où il est le plus fort, il ne dépasse pas 400 francs. 
Dans le Midi et en Corse, il descend à des chiffres 
dérisoires : 150 fr., 100 fr. et au-dessous, et encore 
n'est-il pas toujours payé. On sait que ce sont les 
conseils municipaux qui fixent ce traitement, sauf 
l'approbation du préfet. Quand ils ne veulent pas 
des gardes nommés par les préfets sur la proposition 
des conservateurs, ils ont un moyen bien simple de 
se débarrasser de ces gardes, c’est de supprimer 
leur traitement. 


nb ue: rte rh fé ue bel CR de LS sh — 


LA 
LA 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 452 


- Quarts en réserve. — Malgré les efforts de l'ad- 

ministration forestière, les quarts en réserve des 
forêts communales sur lesquels on comptait pour 
élever des arbres de fortes dimensions, des futaies, 
ont été généralement convertis en taillis que l'on 
exploite au même âge que les coupes ordinaires {. 
Les épargnes accumulées par les siècles, ont été 
ainsi dissipées au grand détriment des générations 
futures. Puis sont venues les délivrances par antici- 
pation; il y a des départements, celui de la Haute- 
Saône entre autres où, par l'effet de cetteanticipation, 


‘ les taillis ne présentent plus les éléments d’un bali- 


vage convenable. 

Aménagement. — Toutes les tentatives faites pour 
soumettre les forêts communales à des aménage- 
ments réparateurs n'ont abouti, la plupart du temps, 
qu’à de fâchenx résultats, parce que les municipa- 
lités ont refusé les ressources nécessaires pour les 
rendre efficaces. Expliquons cela : rien ne semble 
plus utile assurément que de remplacer par exemple 
la méthode jardinatoire, quand d’ailleurs le climat, 
l'altitude, la configuration du sol, le permettent, par 
la méthode du réensemencement naturel et des éclair- 
cies périodiques. La conséquence immédiate d’une 
transformation de ce genre est une augmentation 
sensible de revenu, puisque après avoir partagé la 
forêt en un certain nombre d’affectations correspon- 


4. Voir pour plus de détails la note sur les quarts en réserve 


que j'ai publiée dans les Annales forestières en 1859. 


* 


n5ÿ AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


— 


dantes à un même nombre de périodes de la révolu- 
tion, au lieu de se borner comme on le faisait aupa- 
_ravant à jardiner sur toute la surface, où enlève 
pendant la première période tout le matériel de la 
première affectation, tandis qu'on continue le jardi- 
nage dans les autres. Les communes acceptent dès 
lors avec. empressement les projets de conversion 
dans ce sens; mais leur demande-t-on quelques 
fonds pour préparer, favoriser et compléter le repeu- 
plement naturel dans l'affectation en cours de régé- 
nération, elles s’y refusent. Le sol se durcit, le 


repeuplement devient impossible, les arbres espacés ” 


par la coupe d’ensemencement sèchent en cime, ou 
sont renversés par le vent. L'aménagement au lieu 
d'améliorer la forêt en compromet l'existence; au lieu 
d’être bienfaisant il est désastreux. 

S'agit-il d’un taillis composé à transformer en 
futaie pleine? il y a également tout d’abord augmen- 
tation de revenu, lorsque la transformation n’est pas 
précédée d’une révolution préparatoire et lorsqu'elle 
est graduelle, et les communes l’accueillent encore 
avec grand plaisir; mais elles ne veulent pas 
entendre parler des repeuplements artificiels que ces 
sortes de conversions rendent pourtant indispensables 
sous peine de manquer leur but; et, au lieu d’être 
transformée en futaie pleine, la forêt est transformée 
en taillis simple. 

Coupes, produits principaux et accessoires. — II 
y a dans les forêts des exploitations qui, souvent oné- 
reuses pour le moment, sont très-avantageuses pour 


A sn rc oi on as nan SE ES 


L 


» - 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. * 455 


Favenir; ce sont les nettoïements par exemple : onles 
néglige complétement dans les forêts communales. 
Quant aux coupes principales, la distribution des 


produits en nature entre les habitants, ce qu'on 
appelle l’affouage, leur ôte une grande partie de leur 
valeur et l'administration forestière n’y pe absolu- 
ment rien. 
C'est un fait que paribut les communes abusent 


-des menus produits : le pâturage, le panage, l’enlè- 


vement des feuilles, et que l’appauvrissement complet 
de certaines forêts en a été la suite. 
Moyens de vidange. — C'est un fait aussi que les 


moyens de vidange sont encore dans les forêts com- 


mupales à l’état primitif, et d’ailleurs, il faut le recon- 
naître, il y a peu de communes qui puissent y consa- 
crer les ressources pécuniaires que leur amélioration 
réclamerait. Tandis que l’on compte plus de 12,000 
kilomètres de routes pour les forêts domaniales qui 
ne -contiennent pas un million d'hectares, on n’en 
compte que 7,000 à peine pour plus de 4,500,000 
hectares de forêts communales situées dans les dé- 


. partements les plus riches, et encore peut-on assurer 


que ces 7,000 kilomètres de routes sont à peine car- 
rossables! or il en faudrait au moins 25 à 30 milles 
kilomètres. Dans les Pyrénées, dans les Alpes, en 
Corse, il y a un grand nombre de forêts communales 
qui ne rapportent rien et qui rapporteraient beau- 
coup si on y dépensait quelques milliers de franes 
pour.des chemins. 

Voilà donc à quel point les forêts des communes 


856  : AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


sont abandonnées, sauf un petit nombre d’exceptions. 
Que dirai-je maintenant de celles de leurs propriétés 
qui sont exclusivement affectées au pâturage, et que 
l'administration forestière n’a point à surveiller ? C’est 
en y accumulant outre mesure les bestiaux qu’on y a 
favorisé, autant au moins que par le déboisement, 
les ravages des torrents. Une partie de la Provence 
a été amenée à un tel degré de pauvreté que les 
chèvres même ne trouvent plus à y vivre *. Rien de 
plus triste à voir que ces collines calcinées par un 
soleil ardent, où ne poussent plus que de rares cépées 
rabougries qu’assiégent constamment une multitude 
de chèvres affamées. Ces terrains ne sont pas cepen- 
dant tout à fait improductifs : de temps en temps, 
on en retourne la couche superficielle, on la brûle et 
on sème ensuite des céréales; mais cette ressource, 
elle aussi, tend à disparaître, parce qu'elle aurait 
besoin comme les autres d’être ménagée et qu'elle ne 
l’est pas. On devrait, quand une ou deux récoltes ont 
été obtenues, laisser le sol en repos pendant douze à 
quinze ans avant de lui en demander une troisième. 
On devrait surtout n’écobuer que les parties plates 
ou en pente peu rapide. Or les habitants, si rien ne 
les en empêche, poursuivent la culture jusqu’à ce 
qu’elle ne leur rapporte plus de quoi payer leur peine, 
et alors, ce n’est pas seulement quinze ans qu'il faut 


1. Lire à ce sujet l’instructif et saisissant ouvrage déjà cité de 
M. de Ribbe: La Provence au point de vue des bois, des tor- 
rents et des inondations, 1857, (Guillaumin et Ci: libraires.) 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 457 


äce sol pour produire encore quelque chose; c’est 
un temps indéterminé, la durée souvent de plusieurs 
générations. En outre, on écobue les parties en pente 
rapide comme les autres, et, alors, l'épuisement du- 
sol peut devenir irrémédiable. Les municipalités le 
savent bien ; aussi leur est-il arrivé quelquefois, dans 
l'impuissance où elles sont de mettre un frein à l’avi- 
dité et à l’imprévoyance de leurs administrés, de 
demander la soumission au régime forestier des ter- 
rains en question, et voilà comment l'administration 
forestière a été chargée contrairement aux dispositions 
de la loi, de gérer des biens qui ne sont nullement sus- 
ceptibles d'exploitation forestière régulière. La mesure 
n’en eût pas moins été bonne cependant si, en même 
temps qu'on confiait à cette administration des ter- 
rains auxquels le régime forestier n’était pas immé- 
diatement applicable, on lui avait laissé toute latitude 
pour en appliquer un autre. Malheureusement cela 
n’a pas eu lieu, et les communes propriétaires ont pro- 
testé, alléguant qu'en soumettant leurs biens au 
régime forestier, elles n'avaient pas entendu se pri- 
ver à tout jamais d’en retirer aucun produit. 

On voit en définitive que les communes sont en 
général tout à fait inhabiles à administrer avec sa- 
gesse, les biens sur lesquels on leur a laissé toute 
autorité ; et si elles n’ont pas non plus beaucoup à'se 
féliciter de la situation dans laquelle sont ceux, dont 
la gestion a été confiée à l'administration forestière, 
ce n’est pas la faute de cette administration, c’est la 

: faute de la loi et des règlements qui ne lui ont pas 


158 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


donné la faculté, soit de satisfaire aux désirs légi- 
timés des municipalités, soit de lutter contre : a 
exigences et leur mauvais vouloir. | 
Quand: les agents forestiers s ré pédste: à ce que 
les habitants d’une commune cultivent, même tem- 
porairement, des terrains soumis au régime fores- 
tier, bien que ces terrains ne soient pas boisés; ils 
sont certainement dans leur droit et dans leur devoir; 
ce n’est pas eux qui ont tort, c’est la loi. I faudrait 
que la loi fût modifiée et que l'administration fores- 
tière eût toute liberté pour régler la culture des 
propriétés qui auraient été placées sous sa direction, 
de la manière la plus avantageuse pour la commune 
propriétaire, eu égard à ses besoins et à ses res- 
sources ‘. Il faudrait aussi ranger dans les attribu- 
tions de cette- administration, comme je l’ai fait 
observer déjà à propos des biens domaniaux, l’exploi- 
tation des pâturages communaux ?. Maïs cela ne 
suffirait pas si lPaction de l'administration sur ces 


1. Les cultures temporaires sont en général détestables. On 
peut les ranger au nombre des plus grands fléaux de la Provence. 
Cependant on rencontre, dans les terrains soumis au régime fores- 
tier, des vides assez étendus qui ne sont point én pente el que les 
communes ne peuvent reboiser artificiellement, parce qu’elles 
n’ont pas les ressources pécuniaires qu’exigerait cette opération. 
En attendant que l’on soit en mesure de rendre ces vides à la 
culture forestière, pourquoi ne permettrait-on pas aux habitants 
de leur demander de temps en temps une ou deux récoltes de 
céréales? Quel mal y verrait-on? Ici comme ailleurs, il ne saurait 
y avoir de règle sans exception, ou plutôt il faut des exceptions 
pour confirmer la règle. 

2. Il en était ainsi sous l’empire de l'ordonnance de 4669. 


né di ds = > 


- 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS.. 459 


biens, n’était pas mieux assurée que. celle qu'elle à 
exercée jusqu'à présent sur les bois susceptibles 
d'exploitation régulière; et nous avons à chercher 
maintenant comment on pourrait rendre sa tutelle 
plus efficace. 

Pourquoi cette tutelle n’a-t-elle pas produit de 
meilleurs résultats ? Est-ce à cause de l’imperfection 
de la loi ? — Oui et non. — Oui, parce que la loi exige 
que toute les mesures que comporte la gestion des forêts 
communales, soient soumises aux délibérations des 
municipalités; parce qu'elle donne trop d'influence 
aux préfets sur la suite dont ces délibérations pour- 
raient être susceptibles ; parce qu’elle leur confère le 
pouvoir de nommer les gardes et de fixer leurs trai- 
tements ; parce qu’elle ne permet-pas à l’administra- 
tion forestière de vaincre la résistance des communes, 
lorsque cette résistance s'appuie . sur la pauvreté 
vraie où prétendue des caisses municipales. Non; 
parce qu’en somme, en définitive, l’autorité-supé- 
rieure a le droit de décider en dernier ressort sur 
presque toutes les questions forestières communales, 
et de porter d'office aux budgets communaux les 
dépenses nécessaires. L'autorité supérieure n’use 
pas de ce droit; elle n'écoute pas assez les avis de 
ladministration forestière. Telle est la raison domi- 
nante de la dégradation dans laquelle est tombée la 
propriété forestière communale. 

Jusqu'à présent, aucun gouvernement n’a été assez 
fort pour mettre un frein à l’avidité des communes 


relativement aux coupes extraordinaires et aux 


460 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


feuilles mortes; pour renfermer le parcours des bes- 
tiaux dans les limites raisonnables; pour imposer 
d'office les dépenses indispensables à l'exécution des 
aménagements et des travaux les plus urgents. Au- 
cun gouvernement n'a été assez fort, même pour 
assurer aux gardes un traitement suffisant, 11 aurait 
fallu braver le mécontentement des électeurs ; aucun 
gouvernement ne l’a osé. Que de fois n’a-t-on pas 
vu des conservateurs désavoués, presque disgraciés, . 
parce que, indignés du mal qui se développait sous 
leurs yeux, ils avaient fait quelques tentatives pour 
y porter remède. Blâmés par l'inspection des finances, 
à cause de leur indulgence, ïls l’étaient également 
par le ministère, à cause de leur sévérité. 

Que de fois aussi n’a-t-on pas vu les mêmes 
hommes qui, comme membres des conseils départe- 
mentaux, avaient, par leurs vœux, engagé l’admi- 
nistration à plus de rigueur dans l’application des 
règlements forestiers, être les premiers, comme 
maires ou députés, à se plaindre des mesures qu’ils 
avaient provoquées. 

Ces contradictions n’ont rien de surprenant. Elles 
sont presque inévitables devant deux intérêts : l’in- 
térêt de ce qui meurt et l'intérêt de ce qui ne meurt 
pas, l'intérêt du présent et celui de l’avenir, dont la 
conciliation est, quoi qu’on dise, très-difficile. En 
théorie, c'est à l'intérêt de l'avenir que l’on donne 
ordinairement raison. Dans la pratique, c’est celui 
du moment qui l'emporte. Les préfets, les conseils 
généraux, lorsqu'ils sont appelés à envisager la si-. 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 161 


tuation dans son ensemble et dans ses conséquences 
désastreuses pour les générations futures, se récrient 
dans des rapports, dans des délibérations très-éner- 
giques, contre les prétentions exagérées des popula- 
tions forestières. Le lendemain, quand ils se retrou- 
vent aux prises avec les détails, avec les exigences 
locales, les nécessités parfois bien pressantes du 
moment, et avec le désir de conserver leur influence, 
* leur popularité, ils oublient vite leurs belles protes- 
tations de la veille, et ils accusent eux-mêmes l’ad- 
ministration forestière de tracasserie et même de 
tyrannie, tandis qu’elle ne veut cependant qu’empé- 
cher la jouissance des communes de devenir trop 
abusive. | 
L'administration forestière, on ne le sait que trop, 

est peu populaire dans une partie de la France, et 
rien ne prouve mieux combien le régime qu’exige la 
conservation des forêts est odieux aux communes. En 
effet, si une administration est placée vis-à-vis de 
ceux qui lui sont soumis, dans des conditions d’im- 
partialité, c’est bien celle-là. La gestion qu'elle 
exerce dans les forêts communales est entièrement 
désintéressée, non-seulement en ce qui concerne 
l'État, puisqu'il ne prélève pas ce qu’il faudrait pour 
lé dédommager des frais qu’elle lui impose, mais 
aussi en ce qui concerne les agents, puisqu'elle ne 
leur procure aucune indemnité, aucun bénéfice. Il 
est donc nécessaire que ces agents soient fortement 
pénétrés de leurs devoirs et désireux de faire le bien, 
_ pour qu'ils puissent résister aux obsessions de tout 


462 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


genre qui les assiégent, par suite de l’égoisme de 
ceux dont ils administrent les propriétés. Il leur serait 
facile de se faire aimer autant qu'on les déteste : il 
leur suffirait pour cela d'ouvrir une libre: carrière à 
tous les appétits des conseils municipaux; mais leur 
conscience en souflrirait. Tel est le sentiment qui les 
retient. Il n’y en a pas d'autre. 

Il n’en est pas moins vrai que les forêts com 
nales disparaissent insensiblement, poussées à leur 
- perte par des forces qu'on croirait fatales. Elles s’en 
vont notamment par trois débouchés qui s’élargissent 
chaque jour'de plus en plus : le pâturage, d’enlève- 
ment des feuilles et les coupes extraordinaires. Aux 
yeux des conseils municipaux, trop souvent soutenus 
par les préfets, il y a toujours place pour les mou- 
tons dans les forêts, il y a toujours trop d'humus; et 
tant qu'il y reste un arbre, il y à matière à une 
coupe extraordinaire ?. 

A -une telle situation, je ne vois qu' un remétile 


RETe 

1, Ces coupes, le bon sens l'indique, ne Seront être prises 
que sur l'épargne, sur la réserve, sur l’excédant du matériel 
superficiel nécessaire pour assurer un produit égal au plus grand 
accroissement moyen; mais il n’en est point ainsi : les communes 
ne font pas de différence entre le plus grand accroissement 
moyen et un accroissement moyen quelconque, et voici comment 
elles raisonnent : la forêt peut rapporter X mètres cubes, pour que 
la coupe annuelle ne dépasse pas le chiffre de l’accroissement 
moyen quel qu’il soit. Sur ces X mètres cubes, prélevons les 3/4 
pour les coupes ordinaires; le reste est disponible pour les coupes 
extraordinaires. À ce compte-là, quel que soit le matériel sur pied, 
une coupe extraordinaire est toujours possible, mu SE Fan 
vrissement de la forèt, 


i 


bu" die de di hé di des ditlet à er ste éd) tt de nu LtE 
! 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 163 
infaillible : l'acquisition par l'État de toutes les 
forêts des communes et des établissements publics. 
- Une pareille proposition excitera l’étonnement ; 
cependant on va voir que l'acquisition proposée, faite 
d'une certaine manière, constituerait une Fr 
facile et peu onéreuse. 

Si l'État venait aujourd'hui proposer aux com- 


-munes de leur acheter leurs forêts à condition de 


leur-conserver le droit au pâturage et de leur assurer, 
en oùtre : 4° une renté’sur le grand livre égale au 
produit en argent, largement évalué, qu'elles retirent 
des coupes de ces forêts; 2° une délivrance en 
nature égale au volume des. coupes destinées à. 
Faflouage ; une telle offre n’aurait-elle pas de 
grandes chances d’être acceptée? Pour moi, je n’en 
douté point. Comment les communes n’accueilleraient- 
elles pas avec eémpressement une transaction qui, 
tout en leur permettant de jouir du même revenu, 
les afffanchirait des charges considérables, impôts, 
frais’de garde et de gestion, qui grèvent leur pro- 
priété et qui souvent la rendent onéreuse *. Pour les 
biens: de mainmorte, pour les biens inaliénables, le 
prix qui s'attache au titre de propriétaire est une 
pure fiction, et le revenu, le produit de ces biens, est : 
la seule chose qui mérite. d’être prise en considéra- 
tion. Puisque sous ce rapport les communes ver- 


4; M. Hun, ancien conservateur des forêts à Grenoble, a établi 
dans une brochure très-instructive sur les inondations (1856) que 
le revenu moyen des bois communaux dans les Alpes est à peine 
de 4 franc par hectare. 


164 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


raient, par suite de la cession. de Jeurs forêts à l’État, 
leur situation s'améliorer, on ne s’expliquerait pas 
vraiment qu’elles hésitassent à consentir cette ces- 
sion. Mais l’État, de son côté, n'aurait pas fait une 
mauvaise affaire en acquérant, au prix que j'ai 
indiqué, les forêts communales; car, en admettant 
que cette acquisition lui imposât pour le mo- 
ment quelques sacrifices, il est certain qu’elle le 
dédommagerait amplement plus tard de ces sacri- 
fices par la plus-value, qu’au moyen d’une intelli- 
gente administration, il ne pourrait manquer de 
donner aux forêts qu’il aurait ajoutées à son do- 
maine. 

Voilà donc par quelle opération simple et ration- 
nelle on remédierait d’un seul coup à tous les vices 
que présente la gestion des forêts communales, vices 
qui se traduisent par des pertes incalculables; non- 
seulement pour les communes propriétaires, mais 
pour la société tout entière ; et cette opération ne 
coûterait pas beaucoup à à l'État, puisque la vente 
des coupes dans les forêts qu'il aurait acquises, lui 
procurerait les ressources nécessaires pour payer 
les rentes dont il aurait augmenté sa dette. Le sur- 
croit de dépense qui lui incomberait consisterait 
dans les frais de gestion, qui seraient désormais 
entièrement à son compte : quelques millions ‘au 
plus! mais qu'est-ce que cela auprès de la richesse 
immobilière qu'il créerait en appliquant aux deux 
millions d'hectares, dont se compose le domaine 
forestier communal, les améliorations et les méthodes 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 465 


d'exploitation qu'il applique à ses propres forêts ‘ ! 
Malheureusement, un parti aussi radical rencon- 


trerait, j'en ai peur, malgré tous ses avantages, un  - 


obstacle invincible dans les préjugés de nos hommes 
d’État et dans leur manière de comprendre l’éco- 
nomie des dépenses. Aussi, me bornerai-je à en 
demander l’adoption pour les forêts situées dans le 
périmètre dont la conservation aurait été déclarée 
d'utilité publique*. Ici, l’expropriation par l’État est 
indispensable; car on aura beau chercher d’autres 
expédients, inscrire dans la loi des prérogatives plus 
grandes pour l'administration forestière ; ces préro- 
gatives ne constitueront jamais des garanties tout à 
fait suffisantes pour la conservation des forêts, tant 
que les communes auront une action sur la gestion de 
cette partie de leurs biens; et cette action, comment 
pourrait-on la leur enlever absolument, puisqu'elle 
est inhérente au droit de propriété? 

Cependant, n’y aurait-il rien à faire de mieux 
que ce qui existe, dans l'intérêt des forêts que l’État 


1. Les produits en argent des forêts communales ne dépassent . 
guère 20 millions par an. Il y aurait donc 20 millions de plus à 
inscrire au grand-livre. Il ne s’agit pas, on le voit, d’une grosse 
affaire. 

2. Un écrivain distingué, bien connu par ses travaux en éco- 
nomie forestière et en économie politique, M. J. Clavé, a publié 
dans la livraison du 4* février 4869 de la Revue des Deux 
Mondes, un article sur le reboisement des montagnes, qui mérite 
d’être lu comme tout ce qu’il fait, et qui conclut aussi à l’expro- 
-_ priation pour cause d’utilité publique de toutes les forêts dont la 
conservation serait d'intérêt général. 


30 


466 . AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


n'aurait point acquises, et faudrait-il les abandonner 
à toutes les influences qui les ont déjà si sensible- 
ment appauvries ? 

Je vais indiquer à ce sujet quelques mesures, 
sans me dissimuler qu’elles ne seraient que pallia- 
tives : | 

La première, la principale de ces mesures, serait 
de diminuer sinon de supprimer l'autorité des préfets 
dans la gestion des forêts communales, et de leur 
interdire toute ingérence dans les discussions d’éco- 
nomie forestière ‘. On devrait ensuite ne soumettre 
aux délibérations des communes propriétaires que 
les questions qui pourraient être résolues dans un 
sens ou dans un autre, sans que la conservation de 
la propriété en fût compromise; et inscrire à leurs 
budgets, comme obligatoires, toutes les dépenses 
nécessaires pour l’entretien des travaux faits et pour 
l'exécution des travaux à faire, en vertu de décisions 
régulièrement prises. N’est-il pas déplorable qu’un 
conseil municipal qui a voté une dépense puisse, 
l’année suivante, revenir sur sa délibération et annu- 
ler ce qu’il a fait; qu'après avoir donné son appro- 
bation à un projet d'aménagement, il puisse la retirer 
ou mettre l’administration des forêts dans l’impossi- 
bilité d'appliquer le projet, en lui refusant les fonds 


1. La loi départementale du 10 août 1871 n’a rien changé aux 
attributions des préfets en matière forestière; mais elle a appelé 
les conseils généraux à délibérer sur les questions d’aménage- 
ment, et il est à craindre qu’elle n’ait ainsi ajouté une grave difi- 
culté à celles que rencontre déjà la solution de ces questions. 


A 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 467 


indispensables ? C’est pour lant ce qui arrive tous les 
jours. 

On devrait, en outre, faire nommer les ae <0 
communaux par l'administration forestière, qui fixe- 
rait également leur salaire ; car, sans cela, ces 
gardes continueront d’être les très-humbles et obéis- 
sants serviteurs de MM. les maires, et de faire toutes 
sortes de métiers, excepté celui pour lequel ils ont 
été institués. 

Mais il est évident que pour que la réforme que 
j'indique ne fût pas plus apparente que réelle, il fau-. 
drait ne pas se borner à décider que l’administration 
forestière aura désormais toute latitude pour gérer 
les forêts communales de la manière qu’elle jugera le 
plus convenable ; il faudrait, en même temps, lui 
fournir les ressources pécuniaires dont elle aurait 
besoin à cet effet. 

Comment les lui fournira-t-on ? C’est le problème 
capital à résoudre. 

Pour moi, je voudrais que l’État fit toutes les 
avances de fonds que réclameraient la gestion, la 
conservation et l’amélioration des forêts communales, . 
sauf à se rembourser sur le produit de la vente des 
coupes, à défaut d’autres moyens !. 


4. Avouons que lorsque les communes se plaignent de la 
tutelle de l'État, ce n’est pas toujours sans raison; car c’est un 
singulier tuteur, convenons-en, que celui qui laisse son pupille 
dans la misère, quand il lui suffirait pour l'en tirer de lui tendre 
- une main secourable, sans d’ailleurs courir aucun risque. Parmi 
beaucoup d'exemples que je pourrais citer de l’insouciance de 


468 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Parmi ces avances, il y en aurait d’obligatoires, 
il y en aurait de facultatives. 


l'État, en ce qui concerne les forèts communales, j’en choisis un 
qui est caractéristique. 

Il s’agit d’une commune, la commune de Serragio, qui pos- 
sède en Corse une forêt de 1,600 hectares environ. 

Il a été constaté par l'aménagement qui vient d’être fait de 
cette forêt : 

1° Qu'elle contient un matériel considérable en bois exploi- 
tables; 

2° Que faute de route, le mètre cube n’y a presque pas de 
_ valeur; 

3° Qu'il faudrait dépenser 40,000 francs pour construire une 
route de 6 à 7 kilomètres; 

4° Que cette route construite, le prix du mètre cube sur pied 
s’éièvera au -moins à 10 francs, et qu’indépendamment d’une 
somme immédiatement réalisable de 450,000 francs, la forêt pourra 
rapporter éternellement un revenu annuel de 7,000 francs. 

Malheureusement, la commune de Serragio n’a pas 40,000 francs 
et elle ne sait où les prendre. Que propose-t-on alors? — On 
propose de vendre, dans les conditions présentes, une quantité 
d’arbres assez grande pour procurer à la commune cette somme 
de 40,000 francs. Au prix actuel, ce serait un volume énorme 
qu’il faudrait jeter bas, de sorte que si la proposition était adop- 
tée, la forêt n’aurait de longtemps plus rien à fournir. 

On dira peut-être que puisqu'il suflirait d’une dépense de 
40,000 francs pour élever le prix du mètre cube de bois à 40 fr., 
il y aura des spéculateurs qui seront disposés à faire cette dépense 
et à tenir compte dans leurs offres de la plus-value qu’elle donnera 
au bois. Cette objection ne serait pas indifférente en France où il 
y a de grands capitaux, et où le commerce des bois est très- 
connu. Mais en Corse elle est sans valeur, parce que tout y 
manque, le capital et l'expérience du commerce; et si on procé- 
dait à la vente que désire la commune de Serragio, les résultats 
en seraient faciles à prévoir : on ne payerait pas le bois plus cher 
qu’on ne l’a payé jusqu’à présent; la forêt serait ruinée, et le pro- 
duit de l’adjudication, au lieu de servir à la construction d'une 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 469 


Il y en aurait de remboursables intégralement, 
tandis que les autres pourraient ne l'être qu’en 
partie. G 

Seraient obligatoires les avances relatives : 4° À la 


gestion ordinaire, gestion qui comprendrait non-seu- 


lement les opérations prévues par l’article 1407 du 
Code forestier, mais encore la surveillance, la consta- 
tation des délits, et l’étude des aménagements ‘ ; 2° à 


route, devenue d’ailleurs pour longtemps inutile, serait employé 
à la construction d’une église, 

Pourquoi l’État ne fait-il donc pas la route à ses frais, sauf à 
se rembourser sur le procuit de la première coupe? Il ne lui fau- 
drait pas un an pour rentrer dans son argent, intérêt compris, 
s’il le voulait. Quand on le voit si généreux pour l’agriculture et 
pour l'industrie, n’2-t-on pas le droit de s'étonner et de se plaindre 
du peu de souci qu'il semble prendre des in'érèêts de la sylvicul- 
ture. Avec le quart lout au plus des sacrifices qu’il s’est imposés 
pour encourager le Crainage, il pourrait tripler la production des 
forêts communales. 

1. Je ne m'explique pas, je l’avoue, pourquoi les études d’amé- 
nagement ne sont pas comprises parmi les opérations de conser- 
vation et de régie. L'aménagement est la base indispensable de la 
gestion. Il n’y a pas d'opération importante qui soit possible sans 
lui. Faut-il instruire une demande de coupe extraordinaire, ou 
procéder au simple martelage d’une coupe ordinaire, il est néces- 
saire de se livrer à des reconnaissances, à Ces calculs, à des tra- 
vaux qui constituent ce qu’on appelle l'aménagement. N’est-il pas 
au moins bizarre que lorsque les coupes d’un taillis ne sont pas 
assises sur le terrain, on ne fasse rien payer à la commune pro- 
priétaire pour en exécuter chaque année l’arpentage, et que lorsque 
cetie commune consent à ce que loutes les coupes soient arpen- 
tées en une fois définitivement, ce qui revient à asseoir l’'aména- 
gement sur le terrain, on lui réclame les frais de l'opération. Ce 
que doivent supporter les communes, ce sont évidemment les 
frais extraordinaires de l'aménagement, tels que ceux qu’entrai- 


470: AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. = 


l'entretien, aux assainissements, aux délimitations, à 
l’achèvement des travaux commencés, et en général, 
à l'exécution de tous les travaux nécessités par des 
décisions de l'autorité supérieure. 

Seraient facultatives, les avances qui concerne- 
raient les travaux extraordinaires de premier établis- 
sement, tels que les routes, les repeuplements d’une 
grande étendue. 

Seraient remboursables intégralement les avances 
pour travaux de toute nature, neufs ou d'entretien, à 
moins que l’État n’y fût directement intéressé. 

Pourraient n'être remboursées qu’en partie, les 
avances faites pour la gestion ordinaire, définie 
comme elle l’est ci-dessus, et voici la règle que je 
proposerais de suivre pour fixer la proportion dans 
laquelle le remboursement serait effectué : 

Cette proportion serait plus ou moins forte, sui- 
vant que les produits principaux d’une forêt seraient . 
plus ou moins élevés, par rapport aux frais de gestion : 
Ainsi, l’État prendrait par exemple à sa charge l’excé- 
dant desdits frais sur le quinzième du prix des produits 
principaux vendus ou délivrés, ou, ce qui reviendrait 
au même, il devrait faire face aux frais de gestion, 
sans que les communes fussent lenues à un remboür- 
sement qui dépasserait le quinzième de la valeur des 
produits principaux de leurs forêts. » 

Je ne pose, je ne défends ici qu'un principe, et 
nent les expéditions des projets et des plans, les travaux de route, 


d’assainissement, de repeuplements artificiels, mais l'étude de 
l'aménagement devrait être à la charge de l'État. 


. 
# 
a Ë 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 471 


LS 


ce quinziè me des produits principaux en argent, qui 
me paraîtrait suffisant pour indemniser l’État de ses 
avances, pourrait ne pas l'être ou être excessif. C’est 
une question à examiner et que l'on résoudrait 
équitablement selon moi, si on limitait la répétition 
de l’État au rapport existant entre les frais de ges- 
tion et les produits principaux des forêts domaniales 
ou communales qui sont dans les meilleures condi- 
tions au point de vue de la production. Il est certain 
que ce rapport étant appliqué à toutes les forêts 
communales, l’État aurait à faire, pour l’ensemble 
de ces forêts, des frais qui ne lui seraient pas tota- 
lement remboursés ; mais n'oublions pas qu’en impo- 


sant aux communes de garder leur fortune sous la 


forme de bois exploitables à un certain âge, la so- 
ciété leur occasionne un préjudice notable. Il est 
possible de se faire une. idée de ce préjudice par 
Faugmentation de revenu que se procureraient les 
communes, s'il leur était permis d’aliéner leurs 
forêts pour en placer le prix en rentes sur l'État. 
Cette opération aurait souvent pour résultat de dou- 
bler au moins leur revenu; de sorte que si elles pou- 
vaient-être assimilées à de simples particuliers, l État, 

pour les dédommager des restrictions qu'il apporte à. 
la jouissance de leurs propriétés, leur devrait une 
indemnité annuelle égale au revenu actuel de ces 
propriétés. Je n'entends pas qu'on aille jusque-là, 
cr dans J'intérêt même des communes, il convient 


“que leur fortune soit placée de la manière la plus 


solide, dût-elle rapporter moins, Toujours est-il que 


172 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS 


ce n’est pas seulement pour leur bien, que c’est aussi 
pour le bien public, qu'on les oblige de conserver 
leurs forêts et de les soumettre à une certaine révo- 
lution. Toujours est-il que moins le revenu que 
donnent ces forêts est élevé, plus évidente et plus 
grande est la part de l’intérêt général dans leur con- 
servation. Il est donc rigoureusement juste que la 
société tout entière contribue d'autant plus aux dé- 
penses qu’entraîne la gestion des forêts communales, 
que celles-ci sont pécuniairement moins productives, 
et qu'il y aurait plus d'avantages pour les communes 
propriétaires à les aliéner. Et qu’on ne se récrie pas 
devant une telle proposition, car elle ne tend qu’à 
confirmer le principe qui a été adopté par le Code 
forestier en matière de gestion des forêts commu- 
nales. Aujourd’hui déjà, pour cette gestion, les com- 
munes ne sont tenues qu’au versement, jusqu'à 
concurrence de 4 fr. par hectare, du vingtième-des 
produits des coupesprincipales. vendues ou déli- 
vrées, de sorte que.cette gestion mal définie d’ailleurs 
et trop restreinte, «st gratuite pour les communes 
dont les forêts ne donnent pas de produits princi- 
paux. Il s'agirait d'étendre et d'améliorer ce principe, 
en comprenant dans les actes de gestion la surveil- 
lance, les aménagements même, quand ils n’entraîne- 
raient pas de dépenses extraordinaires; et en sup- 
primant la limite de 1 fr. par hectare, qui favorise 
les communes dont les forêts sont très-productives*… 


1. Les forêts communales rapportent aujourd’hui en produits 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 173 


E 3 


ARTICLE La oe 


CONCLUSIONS APPUYÉES SUR LES LOIS 
RELATIVES AU REBOISEMENT ET AU GAZONNEMENT 
DES MONTAGNES. 


Les diverses propositions que je viens de déve- 
lopper. les principes que je voudrais voir adopter, 
sont du reste en germe dans les lois sur le reboise- 
ment et le gazonnement des montagnes, lois que nous 
allons maintenant passer en revue : 

Les lois sur le reboisement et le gazonnement 
visent deux catégories de travaux: 3 les travaux obli- 
gainires, el Lies faculiatifs. % 
es travaux sont obligatoires lorsqu'ils ont été 
déclarés d'u ilité p ublique par un décret rendu en 

d'Eta après enquête de commodo et incom- 


“’ St hentai quand leur utilité 
n l'esl.que secondaire et.qu'il suffit, pour la constater, 
d'une décision du directeur général des forêts. 
oisements et les gazonnements “obliga- 
Loiragsalhstque toutes les consolidations de terre 
qu'ils nécessitent au préalable, sont exécutés par l'État 


principaux plus de 40 millions de francs, elles contiennent 2 mil- 
ares, et cependant le chiffre de leurs contributions 

: les frais de régie n’est que de 1,300,000 francs. Il faut donc 
qu'il ait des forêts où la limite de 4 franc par hectare empêche 
la contribution de s'élever jusqu’au 4/20 des produits. 


+ 


3e 


74 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


lorsque les propriétaires ne peuvent ou ne veulent 
s’en charger. L'administration forestière s'empare 
des terrains, en appliquant à ceux des particuliers la 
loi d’exproprialion pour cause d'utilité publique, et en 
soumettant au régime forestier ceux des communes. 
Quand les travaux sont terminés, les particuliers ont 
le droit d’obtenir leur réintégration dans leurs pro- 
priétés, à la charge de restituer l'indemnité d’expro- 
priation et le prix des travaux; mais ils peuvent 
s’exonérer du remboursement du prix des travaux en 
abandonnant la moitié ou le quart de leurs propriétés: 
la moitié quand il s’agit de terrains reboisés, le quart 
quand il s’agit de terrains gazonnés. Quant aux com- 
munes, elles peuvent également se soustraire à toute 
répétition de la part de l’État, en lui abandonnant la 
moitié ou le quart de leurs biens; mais elles conser- 
vent dans tous les cas le droit de pâturage dans les 
parties boisées devenues domaniales, et les pâturages 
dont elles retiennent la propriété restent soumis au 
régime forestier, chose dont je prie qu'on se sou- 
vienne. 

Les lois en question prévoient en outre que des 
indemnités pour interruption de jouissance, pourront 
être allouées aux communes dont les propriétés 
auraient été mises en défens par suite des travaux 
à exécuter. Si 

Les reboisements ou gazonnements facultatifs ne 
- donnent lieu de la part de l'État qu’à des -exemptions 
d'impôts, à des primes et à des subventions en nature 
ou en argent, non remboursables sauf malversations. 


“ÈS 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 475 


re 
"+. 


Telle est l’économie ‘de ces lois. Je leur 
reproche : - 
4° De faire intervenir l’État par des moyens con- 


“traires aux principes de l’économie politique, dans 


des travaux qui n’intéressent pas la société tout entière ; 
qui devraient par conséquent être abandonnés com- 
plétement à l'initiative individuelle; et qui du reste 


- seront éphémères si cette initiative, à elle seule, n’est 


pas capable de les entreprendre et de les mener à 
bonne fin. 

2° De compromettre le résultat des sacrifices . 
qu'elles imposent au trésor public, pour les travaux 
d'utilité générale, en autorisant la remise des terrains 
gazonnés ou reboisés entre les mains de leurs anciens. 
propriétaires, et en les replaçant ainsi dans les con- 
ditions qui en ont amené la dégradation. 

3° De ne pas contenir des dispositions suffisantes. 
pour éviter que pendant qu’on réparera les dom- 
mages d'un côté, il ne s’en produise de nouveaux 
d'un autre côté, par l’effet même de cette répara- 
tion. 

J'avoue d’abord que je ne m'explique pas, en ce 
qui concerne le premier grief, pourquoi, lorsque 
l’État s'associe aux travaux par des subventions, il 
renonce à toute répétition; tandis que lorsqu'il avance 
tous les frais, il ne le fait qu’à la condition de rentrer 
dans une partie au moins de ses déboursés. Puisque 
le système des subventions est appliqué, dit-on, aux 
travaux qui ne sont pas entièrement d'utilité publique, 


il semblerait que l’État devrait supporter moins 


476 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS.. 


de sacrifices pour ces travaux que pour les autres. 

En outre, quand il s’agit de travaux d’urgente 
nécessité, ces travaux sont précédés d’une enquête, 
tandis que pour les reboisements ou gazonnements 
facultalifs, ils ne le sont point; de sorte que les garan- 
ties exigées pour assurer le bon emploi des deniers de 
l’État, lorsque le bien public est engagé dans la ques- 
tion , on les juge superflues quand ces deniers sont 
consacrés à des dépenses d’une utilité locale, dou- 
teuse, et dans tous les cas, secondaire. Enfin, il m'est 
impossible de comprendre pourquoi l'administration, 
qui à des ressources insuffisantes pour les travaux 
nécessaires, en consacre une partie à des travaux 
dont on pourrait se passer. A cela on objecte que 
l'utilité des travaux facultatifs doit être en vérité con- 
sidérée comme secondaire, si l’on envisage les ter- 
rains à consolider dâns leur ensemble; mais qu’elle 
est tout aussi grande que celle des travaux dits obli- 
gatoires, pour la part du travail facultatif que repré- 
sente la subvention; car la loi dit expressément que 
la subvention sera proportionnée à la part d'intérêt 
général que présente le travail à entreprendre. L’'in- 
térêt général entre-t-il pour un quart par exemple 
dans tel reboisement, la subvention sera d’un quart 
de la dépense. Tout cela peut être ingénieux, est-ce 
bien sérieux? 

Au surplus, je repousse les primes et les subven- 
tions au nom de l’économie politique : 

En thèse générale, lorsqu'une industrie n’est 
point engendrée par le libre jeu des intérêts indivi- 


dns ed 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 477 


duels, par la spontanéité et l'initiative privées, il est 
imprudent, hasardeux pour le moins, de l’encou- 
rager au moyen d'un appât extraordinaire, anormal, 
factice, et qui peut dès lors être trompeur. C’est 
lui donner un mobile, un fondement fort incer- 
tain, et par conséquent exposer à des mécomptes 
les gens qui y consacreraient leurs soins et leurs 
capitaux. On pourrait assurément, en y affectant les 
encouragements nécessaires, introduire en France la 
culture de l'Ananas. Serait-ce une conquête utile, 
désirable? non évidemment, puisqu'elle ne saurait 
se maintenir qu'à la condition de jouir éternellement 
de la subvention qui lui aurait été primitivement 
accordée. On ne doit recourir aux primes, aux sub- 
ventions, qu'avec beaucoup de réserve et dans des cas 
exceptionnels. On comprend ces moyens de provoquer, 
de développer l’industrie au début d’une civilisation, 
lorsque l'intérêt privé n’a pas encore l'œil ouvert sur les 
ressources qu'il pourrait avantageusement exploiter; 
lorsqu'il manque des épargnes, des capitaux indispen- 
sables pour fonder une entreprise; lorsqu'il n’y a pas 


d'institutions de crédit. Au temps où nous vivons, ils 


ne sont plus admissibles. 


S'il n’y avait jamais eu de bois dans les contrées 


où il s’agit d’en établir; si l’on était dans l'ignorance 
ou dans le doute sur les avantages des biens-fonds 
de cette nature pour ceux qui les possèdent; si l’on 
pouvait enfin espérer qu’une fois les frais de premier 
établissement faits, une fois la propriété constituée, 
elle durerait par sa propre force à cause du profit 


# 


178 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


qu'en retirerait le détenteur, j’admettrais les subven- 
tions et les primes; mais il y a eu et il y a même 
encore des bois dans les montagnes ; on sait parfai- 
tement que ceux-là ont disparu et que ceux-ci sont 
en train d’en faire autant, parce que leur conserva- 
tion ne s'accorde pas avec l'intérêt actuel des proprié- 
taires, et que dans l’échelle des cultures lucratives, 
la culture forestière occupe souvent le dernier rang; 
alors, à quoi bon imposer à l’État de grands sacri- 
fices pour reconstruire un édifice qui serait destiné 
à s’écrouler infailliblement de nouveau, dès que la 
main du gouvernement ne serait plus là pour le sou- 
tenir? | 

Je ne dis rien d’exagéré : ce qui se passe aujour- 
d’hui, l'impuissance des efforts que fait l’administra- 
tion pour sauver le peu de forêts qui existent encore 
dans les Alpes, dans la Lozère, dans l'Ardèche, dans 
les Cévennes, montrent jusqu’à l'évidence que ce 
genre de propriété ne se concilie pas toujours avec les 
exigences de l'intérêt privé et qu'il n’y a ni loi, ni 
contrainte qui puisse en empêcher la ruine, lorsque 
cette ruine n’est pas susceptible d’appauvrir le pro- 
priétaire actuel. Malgré la prohibition du défriche- 
ment, malgré la tutelle que le gouvernement exerce 
sur les communes, les bois des particuliers et ceux 
des communes elles-mêmes disparaissent rapidement; 
c’est un fait constaté. 

Les bois des communes disparaîtront un peu moins 
vite peut-être, si on adopte les mesures que j’ai pro- 
posées pour renforcer la tutelle que l'État exerce sur 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 479 


eux. Cependant on aurait tort, je l’ai dit, de compter 
* entièrement sur ces mesures. die 

* Mais puisque toute la force d’une grande admi- 
nistration ne parvient pas à sauvegarder les bois des 
particuliers et ceux des communes existants encore, 
est-il sage, est-il raisonnable de songer à en créer . 
de nôuveaux, pour les placer dans les mêmes mains 
et les soumettre en conséquence aux mêmes causes 
- de destruction ? Oui, sans doute, les particuliers et 
les communes consentiront à reboiser leurs terrains 
vagues si on leur donne, sous forme de primes, 
_ d’exemptions d'impôts, de subventions, des subsides 
qui les indemnisent à la fois et des frais du reboise- 
ment et de la perte qu'on leur occasionnera par la 
suppression des pâturages; mais quand les bois 
auront été formés, comment fera-t-on pour en assurer 
la conservation ? L'État prendra-t-il à sa charge les 
frais de gestion et continuera-t-il les mêmes sub- 
sides ? ce serait le seul moyen. Mieux vaudrait cent 
fois recourir immédiatement à l’expropriation pour 
cause d'utilité publique. 

Ainsi, on est forcé de reconnaître que les fonds 
employés en subventions et en primes, non-seule- : 
ment pour les particuliers, mais encore pour les 
communes, sont des fonds fort mal employés et que 
l'on peut considérer d’avance comme perdus. On 
comprend d’ailleurs que les travaux de consolidation 
des terres, de reboisement et de gazonnement, exé- 
cutés d’après ce système, n'étant assujettis à aucun 
plan d'ensemble, à aucune direction, n’ayant entre 


Le. 
: 


e 


480 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


eux aucune solidarité re sauraient produire que des 
résultats insignifiants. ARR. 
Le premier reproche que j'ai fait aux lois du 
reboisement et du gazonnement est donc fondé. Le 
deuxième ne l’est pas moins : 
L'administration, elle-même, a montré qu ’elle 
n'avait pas grande confiance dans les résultats des 
trayaux facultatifs exécutés à l’aide de ses encourage- 
ments, puisqu'elle s’est réservé d'exécuter à ses frais - 
et de diriger, dans tous les cas, les travaux obliga- 
toires. Mais s’il y a lieu de craindre que les forêts 
créées en grande partie avec les fonds des communes 
et des particuliers ne soient pas entretenues en bon 
état, à plus forte raison doit-on s'inquiéter de l’avenir 
de celles à la création desquelles les communes ét 
les particuliers n’auront pas voulu participer; et c'est 
un vice fondamental de la loi d’avoir admis que 
les terrains pourraient être remis, après le complet 
achèvement des travaux, entre les mains des anciens 
propriétaires. Rien ne justifie une semblable généro- 
sité de la part de l'État. Il est évident que les ter- 
rains que l’on consolide n’auront de valeur que par 
les travaux qu’on y fait; que leur prix réel actuel est 
dans tous les cas peu de chose à côté de la dépense 
qu'occasionnent lesdits travaux; pourquoi donc l’État 
ne les acquerrait-il pas définitivement dès à présent, 
et s’engage-t-il à en rétrocéder la moitié ou les trois 
quarts? Eh quoi! le gouvernement s'empare de 
ces terrains; il y dépense des sommes énormes en 
barrages, en semis, en plantations, sans compter 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. .h81 


_les indemnités pour interruption de jouissance; et 
k quand pe parvenu à les restaurer au prix ‘de si 
sacrifices , il en abandonne de nouveau une 
_ partie à des mains qui-la laisseront encore se dé- 
grader ! Vraiment, ce n'est pas raisonnable. C'est 
d'autant moins raisonnable que la M oh auront” - 
> acquise ces. terrains, est surtout, une valeur 14 
- - - rielle, une valeur d’utilité publique’, qui 
4 ‘apprécier en argent, et dont l'individu ne tient aucun 
compte; de sorte qu’en la cédant à des particuliers, 
J'État s'appauvrit sans profit pour eux. ‘On pourrait” 
objecter que, pour les particuliers, cette rétrocession 
n'est point à craindre , attendu qu'en présence de la 
tendance des jurys d'expropriation à exagérer la + 
valeur des propriétés auxquelles l’État applique la 
loi d’expropriation pour cause d’utilité-publique, il y 
a grande probabilité que les particuliers-auront recu 
pour le prix de leurs terrains, une somme plus élevée 
que celle qui représentera la valeur de ces terrains, 
: après l'exécution des travaux. Cette probabilité pour- 
Ê _rait bien cependant ne pas se réaliser, quand on 
considère que les terrains à restaurer sont souvént 
complétement improductifs et sous le coup d’une 
: destruction complète, imminente. Quelle que: soit la 
Jibéralité des jurys d’expropriation, il n°y aurait rien 
d'étonnant à ce qu'ils attribuassent à ces terrains un! 
prix moins élevé que celuj qu’ils acquerront, quand * 
ils auront été consolidés et mis en valeur. Au sur- 
plus : ou le danger que je signale est réel et alors - 


mon objection reste; ou il est Chimérique et alors il 
He 


LL 


8e 


182. AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


“ 


n’y avait aucun motif pour que l’on rendit one 
priation conditionnelle. 

: Je laisse’ de côté, comme on voit, l'hypothèse du 
remboursement des frais de restauration, par les 
propriétaires des terrains. Cette hypothèse’est irréa- 
lisable en effet, puisque les frais de restauration 
seront certainement hors de toute proportion avéc le 
revenu nét que pourront rapporter les terrains, après 
qu'ils auront été remis en valeur. D'ailleurs, qui ne 
voit combien serait difficile une ventilation équitable 
entre les propriétaires , quand il s’agirait de faire à 
chacun sa part dans les dépenses de certains de ces 
travaux, tels que les barrages qui, utiles également 
à toutes les propriétés, n'auraient été. cependant 
établis que sur quelques-unes. | 

Justifions maintenant le troisième reproche : 

J'ai dit que c'était une lacune bien regrettable dans 
la loi qu’elle ne contint pas les dispositions suffisantes 
pour éviter que, pendant qu’on réparerait les dégâts 
d’un côté, il ne S'en produisit de nouveaux d’un autre 
côté, par l'effet de cette réparation. 

Les bois restent donc soumis tout simplement au 
régime forestier, tel que l’ont organisé le code fores- 
tier et l'ordonnance royale dù 1* août 4827, régime 
insuffisant ; et les pâturages, non englobés dans 


les périmètres de conservation obligatoire, restent 


livrés à l’insouciance et à l’avidité de ceux qui les 
possèdent. Or qu’arrive-t-il? C’est que, tandis qu’on 
s’efforce de reboiser les terrains dégradés, les trou- 
peaux auxquels on enlève ainsi une partie de leur 


; 
” 


- 


2 


- 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 483 


domaine, s'accumulent sur l’autre partie déja sur- 
chargée et en précipitentla ruine. On ne saurait être 
plus imprévoyant. : 

Voilà ce que je vois de mauvais dans les lois sur 
le reboisement et sur le gâzonnement des mon- 
tagnes *, et voici maintenant ce que j'y vois d'excel- 
lent: é 2 

D'abord elles proclament le droit d'intervention 
de l’État dans la gestion, non pas seulement des bois, 
mais encore des pâturages et. des terrains incultes 
appartenant aux communes; * 

Ensuite elles reconnaissent que c'est un deÿüir 


pour le gouvernement de venir au secours des com- 


munes, quand celles-ci n’ont pas les ressources qu’exi- 
gerait l'amélioration de leurs biens. 
Enfin, elles ädmettent l’expropriation pour cause 
d'utilité publique des propriétés de même nature que 
les particuliers seraient inhabiles à régénérer ou à 
conserver; et on peut dire qu'elles admettent aussi 
cette expropriation pour les terrains communaux ; 
car la faculté qu’elles donnent à l’État de retenir la 


moitié ou le quart de ces terrains, après l'exécution 
des travaux, aboutit à une expropriation partielle et : 


déguisée. 
LS : 
1. Je n'ai pas parlé dans ma critique de l’article 44 de la loi 


sur le reboisement, relatif à l’aliénation d’une certaine étendue de . 


forêts, dans le but de faire face aux frais du reboisement. Cette 
conception singulière, qui attachait la même importance aux forêts 
en projet et d’une création fort incertaine, qu'aux forêts séculaires 


en plein rapport, a été abandonné lors de la discussion de la loi 


du gazonnément. Voilà pourquoi je n’en ai rien dit, 


484 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


Ces dispositions sont très-remarquables; et comme 
l'appréciation des conditions nécessaires pour que la 
conservation d’un terrain soit déclarée d'utilité pu- 
blique, est abandonnée, sans restriction formelle, à 
l'autorité supérieure, celle-ci pourrait, avec un peu 
de hardiesse, rattacher au domaine de-l’État la moi- 
tié ou le quart des propriétés communales et toutes 
les propriétés privées situées en montagne. 

Cependant, il faut bien l’avouer, ces lois ont été 
faites pour arréter les ravages des eaux et conju- 
rer les effets des grands désordres de la nature. 
Elles ne devaient pas s'appliquer, dans l'esprit du 
législateur, aux terrains qui, bien que situés en 
pente et impropres à l’agriculture, ne courent -pas 
le risque d’être emportés dans les plaines et d'y 
causer des dommages. Ces terrains-là auraient pour- 
tant besoin aussi d’être mis entre les mains de l’État; 
au moins, d’être surveillés par lui, quand ils appar- 
tiennent aux communes, et en cela encore mes idées 
vont plus loin que les lois sur le reboisement et le 
gazonnement. 

J'avais néanmoins raison de dire que ces lois 
renfermaient des dispositions qui étaient d'accord 
avec mon opinion sur l'autorité dont le gouverne- 
ment devrait être investi relativement aux forêts et 
pâturages créés ou à créer dans notre pays, opinion 
que je résume ainsi : 

4° Instituer pour les forêts, les bois et les pâtu- 


1. Rapport à l'Empereur, page 8. 


RO Lt dE did cn dt 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 485 


rages un régime spécial qui serait intitulé : régime 
forestier et pastoral et dont l'application serait con- 
fiée à l'administration des forêts qui deviendrait 
l’administration des forêts et des pâturages; 

2 Mettre entièrement entre les mains de l État, 
pour être gérés conformément à ce régime, les ter- . 
rains dont la conservation serait d'intérêt général et 
ne pourrait être assurée que par le boisement ou le 
gazonnement. 

L'administration des forêts serait investie, pour. 
constituer et gérer ce domaine, de toutes les préro- 
gatives qu’accorde à l’État la loi sur l’expropriation 
pour cause d'utilité publique ; mais son autorité 
serait modifiée, en ce qui concerne la délimitation, 
d’une manière conforme au droit-commun; et les dis- 
positions du code forestier relatives au cantonnement 
des droits d’usage seraient abrogées, pour être rem- 
placées par d’autres disposilions qui ne tendraient 
qu’à régulariser la jouissance de ces droits et à l’em- 
pêcher d’empiéter sur celle du propriétaire ; 

3° Maintenir les bois des particuliers qui n’au- 
raieñt pas été acquis par l’État en exécution de l’ar- 
ticle précédent, sous l'empire de la prohibition, : 
toutes les fois que leur conservation, sans être d’inté- 
rêt général, se rattacherait à des intérêts locaux 
d’une réelle importance, et faire de ces bois l'objet 
d’un cadastre spécial; mais pour dédommager les 
propriétaires de la restriction apportée à leur jouis- 
sance, leur accorder une indemnité sous la forme 
que j'ai indiquée page 451 (suppression des droits 


’ 


186 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS.. 


d'octroi, diminution de l’impôt foncier, association 
de l’administration publique à la poursuite et à la 
répression des délits, subventions pour, la tar 
tion de chemins de vidange) ; b 
h° Soumettre les forêts et les pâturages et tou 
les terrains à boiser ‘ou à gazonner des communes et 
des établissements publics qui ne seraient pas com- 
pris dans le domaine prévu par l’article 2, ou qui 
n'y auraient pas encore été rattachés, à la tutelle 
administrative modifiée en ce sens : 

Qu'elle donnerait à l'administration sur les bois 
non susceptibles d'exploitation régulière, et sur les pà- 
turages, tous les droits qu’elle à déjà sur les bois 
susceptibles d'exploitation régulière; qu’elle lui lais- 
serait en outré la plus grande lätitude pour règlér la 
jouissance de ces biens de là manière la plus favo- 
rable aux intérêts des propriétaires, et qu’elle lui 
permettrait en conséquence d’y äutoriser même des 
cultures temporaires. - 

Qu'elle lui conférerait toute l'autorité voue pour 
assurer : 1° la gestion ordinaire dans laquelle seraient 
comprises, indépéndamment des opérations prévues 
par l’article 107 du code forestier, la surveillance, la 
constatation des délits et l'étude dés aménagements; 
9 l'entretien, les assainissements, les délimitations, 
l’éxécution dé tous lés travaüx autorisés par des dé- 
cisions régulières. L'administration forestièré nom- 
meräit donc les gardes; elle fixerait leur salaire; 
les fonds nécéssaires pour ässurér ce Sdlairé seräiént, 
ainsi que les autres dépeñses rélativés à la régie, à 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS, 487 


_ l'entretien et aux travaux indispensables, inscrits au 
budget des dépenses obligatoires des municipalités; 
Le Que- l'État ferait l'avance . desdites dépenses, 
sauf à se rembourser sur le prix des coupes à défaut 
d’autres moyens ; 

Que l'État, sauf à se rembourser de la cb ma- 
hière, pourrait en outre prêter de l'argent aux com- 
munes, quand elles en auraient besoin pour les 
grands travaux neufs d'amélioration tels que les 
routes, les reboisements d’une certaine étendue ; k 

Que la répétition de l'État se bornerait toutefois 
pour les frais de la régie, définie comme elle l’est 
plus haut, au chiffre à établir, exprimant le rapport 
- entre les frais de régie et les produits principaux des 

forêts les plus productives. | 


. … Énergique intervention de l'État : telle est -en 
définitive la nécessité qui s'impose, quand on étudie 
les moyens d'améliorer les parties de notre territoire 
qui ne peuvent être cultivées qu’en prés ou en bois. 
Cette nécessité sera contredite par ceux de mes 
concitoyens, et ils sont nombreux, qui, malgré la 
divergence de leurs opinions sur presque toutes les 
questions politiques, se trouvent d'accord lorsqu'il 
s’agit de porter atteinte aux prérogatives de l'État. 
Mais que ces messieurs me permettent de le leur 
dire : parmi tous les dangers qui menacent encore - 
notre malheureuse patrie déjà si éprouvée, je n’en 
- vois pas de plus grand que celui auquel l’exposent 
leurs théories gouvernementales. Si la France entrait 


188 AMÉNAGEMENT DES FORÉTS. 


dans la voie où ils veulent l’engager avec les meil- 
leures intentions du monde, je n’en doute pas, son 
heure aurait sonné : il ne resterait bientôt d’elle que 
quelques individualités plus ou moins remarquables; 
comme corps de nation, elle descendrait au dernier 
rang, elle n'aurait plus de mission à remplir. J'espère 
donc qu’elle finira par voir le néantdes chimériques 
espérances que les décentralisateurs font briller à 
ses yeux, et qu'après avoir été la première à pro- 
clamer dans le monde, non plus seulement au nom 
de la charité chrétienne, mais au nom de la-raison et 
de la science, le. principe de la solidarité, elle ne 
voudra pas se démentir. Il y va de sa gloire, de sa 
sécurité, et de l’avenir même de la civilisation. 

Les hommes sont unis par certains intérêts qui 
leur sont communs, et qui ne sauraient être sauve- 
gardés que par une autorité assez puissante pour 
- vaincre toutes les résistances. Cette autorité, l’État 
seul peut l’avoir, et, puisque la conservation des bois 
et dés pâturages est au nombre de ces intérêts ; 
puisque d’ailleurs elle entraîne des exigences aux- 
quelles l'initiative individuelle ne saurait satisfaire, 
il n'y a que l’État qui soit capable de l’assurer. 

Je sais bien que dans ces derniers temps, il s’est 
élevé des protestations au sujet de l’utilité que l’on 
avait jusqu'alors, d’une voix unanime, attribuée aux 
forêts. Ces protestations viennent d’un malentendu : 
ainsi, nous avons vu des savants s’efforcer d'établir 
que les forêts n’ont pas d'influence appréciable sur 
les grands phénomènes cosmologiques, et nous en 


LOIS ET RÈGLEMENTS FORESTIERS. 489 


avons vu d’autres conclure de là que l'État n’avait 


‘pas plus à s’en préoccuper qu’il ne se préoccupe des 


autres cultures. ° Or, est-il nécessaire de le faire 
remarquer, en posant le problème de cette ny 
on l'a fort mal posé. 

Que les forêts n'aient aucune influence sur la 
masse d’eau que le soleil pompe chaque année dans 
les mers, pour Ja reverser sur les continents; 
qu’elles n’en aient pas davantage sur la distribution 
générale dé la chaleur à la surface du globe et sur 
les courants qui traversent l’atmosphère, c'est pos- 


.sible ; mais qu'est-ce que cela prouve? Est-il vrai 
, que les forêts peuvent modifier les circonstances par- 


ticulières par lesquelles ces grands phénomènes se 


manifestent aux hommes? Voilà la question, et per- 


sonne ne conteste qu'elle ne doive être résolue par 
l'affirmative. 

IL importe peu, au point de vue des conditions 
de la vie humaine, que. la température moyenne 
annuelle d’une région ne change pas, si les varia- 


tions de cette température sur un point donné. 


deviennent telles, que ce point soit rendu inhabi- 


table. De même, il est indifférent que la quantité : 
d'eau qui tombe chaque année sur une partie du 


globe reste la même, si la distribution et l’écoule- 


ment de cette eau éprouvent des perturbations. Ce. 
‘ ne sont pas les moyennes, ce sont les chiffres sur les- 


quels reposent ces -moyennes , qui touchent les 
hommes ; ce ne sont pas les phénomènes généraux, 


ce sont les phénomènes locaux ; ce n’est pas l’en- 


* 


490 AMÉNAGEMENT DES FORÊTS. 


semble des choses, ce sont les détails, car l’humanité 


elle-même n’est qu’un détail dans'la vie universelle, 


C'est un détail aussi que quatre de nos départe- 
ments se dépeuplent, et que leurs habitants aillent 
en Amérique continuer dans les montagnes Rocheuses, 
ces défrichements insensés qui ont stérilisé leur sol 
natal ; mais pour la France et: même pour l’huma- 


nité tout entière, ce détail est un événement lamen- 


table. : sè 


FIN: 


Sd 


t = 
ic LS. . 
à , 
TABLE DES MATIÈRES. 
ë | Pages. 
PRÉFACE creuse visa is; bpins eo gate £ CRETE Ne TER, % + LI 
PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION. . , . CR 4 . KEVI 
| la. + «Abe À 1 
PREMIÈRE ÉTUDE. 
DE LA STATISTIQUE. 
CHAPITRE PREMIER. — De la statistique en général, et 
des études qu'elle cdiporté au point de vue de l'âmé: 
à tj RARE nn ur ir se em ce #6 
CHAP. II. — Renséignements généraux. . . . . . : . . 25 
ARTICLE PREMIER. Plan de la forêt. , . . . . . . . . 25 
ArT. 11 État de la forêt considérée dans les éléments 
qui la constituent ou qu’elle renferme. . . . . . . 26 
Arr. ur. Conservation et entretien, . . . . . . . . . M: 
RES ET. DODORDOT N S ec. - à» - PR 
Arr. v. Exploitation et produits . . . . . . . ... ne 
ART. vi. Débouchés . . . . . DR n : +. so 0 
CHAP. If: — Renseignements spéciaux . . . . . . ; . 4 
ARTICLE PREMIER. Points à examiner, ; . : . . . . . 4% 
2er Du porcéllaire. - 4 em -. : . . . 45 
Art. nr. Description spéciales 5. Di. . . . . 53 
AnT IN RAM LV CORRE. , … . 55 


492 TABLE 


ART. v. Observations sur les principes ci-dessus déve- 
IUDÉS +. à en 0-0 FREE es 
ArT. vi. Du nombre et de la forme des pièces relatives 
au parcellaire et à la description spéciale. . . . . . 
Plan et description d’une parcelle, ete. , . .:. . . 


à ._ DEUXIÈME ÉTUDE. 


DE L’EXPL OITABILITÉ: 


But et division de cette étude: . . . . . DE SET 


CHAPITRE PREMIER. — De l'exploitabilité, äbstraction 
faite des exigences de la végétation et de la culture . . 
ARTICLE PREMIER. De l’exploitabilité relative aux pro- 

duits matériels les plus considérables, ou de l’exploi- 
tabHIlS bien; 2. 45 5 CS ASE 
$ 1er. Lois générales sur lesquelles repose la recher- 

che de l’exploitabilité absolue . . . . . . Nora 
S 2. Des moyens par lesquels on détermine l’âge qui 

correspond à l’exploitabilité absolue . . . ... . 
$ 3. Utilité pratique de l’exploitabilité absolue. .. . 


Pages. 
56 


59 
61 


63 


67. 


67 
68 


73 
79 


Arr. 11. De l’exploitabilité relative aux produits les plus 


UHIOS. 5 + à es » + à + à à Ne CR 
Arr. 1. De l’exploitabilité relative au plus grand pro- 
duit emargent. 7. Sert rues 
Arr. 1v. De l’exploitabilité relative au revenu Fe plus 
élevé par rapport au capital . . . . . . . . . . . 

$ 4er, Considérations générales sur la valeur et le pro- 

fit des capitaux et spécialement des fonds de 
DO 0. . de SR 

$& 2. De l’exploitabilité relative à la rente la plus éle- 
vée, dans son application à un arbre isolé. . . . 

$ 3. De l’exploitabilité relative à la rente la plu éle- 
vée, dans son appliçafion à un massif non amé- 
OR us RE TA 

$ 4. De l’exploitabilité relative à la rente la plus éle- 
vée, dans son application à un massif aménagé. . 


80 
86 


88 


88 


97 


99 


105 


DES MATIÈRES. 


$ 5. Lois auxquelles est soumise l’exploitabilité rela- 
tive à la rente la plus élevée . . . . . « . .. 


CHAP. II. — De l’exploitabilité dans ses rapports avec les 
exigences de la végétation et de la culture. . . . . . 


ARTICLE PREMIER. Choix du mode d'exploitation . . . . 


$ 4e". Du taillis simple et de la futaie au point de 


vue cultural . . . . . . ST LS 
$ 2. Du taillis simple et de la futé au point de vue 
économique. . . - . + - A IR SG 4 


$ 3. Conclusion des deux paragraphes précédents. 

- $ 4 Des réserves dans les taillis . + . . . . . . . 
Anr. 1. De l’exploitabilité dans les taillis simples . . . 
Arr. m1. De l’exploitabilité dans les futaies. . . . . . 
Arr. 1v. De l’exploitabilité dans les taillis composés . 
Art. v. Des mesures à prendre pour assurer la déter- 

mivation de Fexploitabilité. . . . . . . . . Lu 


CHAP. III. — De l’exploitabilité dans ses rapports avec 


l'intérêt du propriétaire, . : . + = + + +. » - {+ . 
Anricce PREMIER. De l’exploitabilité dans ses rapports 


avec l'intérêt de l'État . . . . . . . . FRE 
Arr. 11. De l’exploitabilité dans ses rapports avec Dutée 
.  rèt des particuliers. . . . . . . . + . . . . ... 
Arr. ur. De l’exploitabilité dans ses rapports avec l’inté- 
rêt des communes. . . . . 4° 5 SN ER 8 E » 
CHAP. IV. — De l’exploitabilité dans ses rappors avec l’in- 
_ térèt public. . . . . PE SE Rae 


- TROISIÈME ÉTUDE. - 
DU Hé D'EXPLOITATION. 


CHAPITRE PREMIER. — Principes fondamentaux . . . . 


CHAP. II. — Du plan d'exploitation dans les taillis sim- 
Éd .. s + : «> F de © : 

ARTICLE PREMIER. Du tableau de exploitations et di 

difficultés que rencontre sa formalion . . . . . . . 


Pages, 


an 


162 


165 


173 


180 


180 


H9h TABLE 


Arr. 11. Classement des parcelles suivant l’âge d’exploi- 
; tabDiité 5 5 405 6 7 PA SE POP RE 
ART, 11. Class:ment des parcelles conformément aux 
règles d’assiette des coupes. . « . . + « ... 
Arr. 1v. Classement des parcelles conformément aux 
exigences du rapport annuel soutenu . . .:. ... 
$ Aer. Conditions nécessaires pour que le rapport an- 
nuel soutenu puisse être réalisé. ., ..4 +. . 
$ 2. Du rapport soutenu dans l'hypothèse d’une ré- 
volution principale définitive et d’une marche des 
"coupes normale ni, ui prntronmetht el ei 


1. Des moyens de remédier à l'inégalité des con- ; 


ditions de la végétation . . . . . 1. ..... 


2. Des limites dans lesquelles il paraît conve- 


nable de renfermer l'emploi des coefficients de 
production , . . . . dune dpi Gr di Fartre 

$ 3. — Du rapport soutenu dans l'hypothèse d’une 
révolution principale définitive et d'une marche 


des coupes provisoire . . . . . . « + + « : ja 


$ 4. Du rapport soutenu dans l'hypothèse d’une ré- 
volution principale transitoire et d’une marche 


des Coupes provisoire . "1". "CIRE 


Anr.v: Résgurmé'et contlusion, : "SR, 


CHAP. IT. — Du plan d’exploitation dans les futaies trai- 


tées par la méthode du rébnsem meñtethént naturel et des 


éclaircies périodiques. . |. . . . . , + + + + + + p 
ARTICLE PREMIER. Des raisons culturales qui S’opposent 
à ce que l’on adopte, pour le tableau des exploita- 


Pages. 


183 
186 
198 


198 


203 


203 


242 


224 


tions des futaies, le même cadre que pour celui des . 


taillis. + L . LI L L . L D . . LL L2 L LA LA L LA L La 
ART. 11, De la division de la révolution en périodes et 


du partage de la forèt en affectations correspondantes, - 


CHAP. IV. — Du plan d'exploitation dans les futaies, la ré- 
volution pouvant être définitive et la marche des cou- 
pes normale... . . . . à HA NRA à AS 
ARTICLE PREMIER. Formation des affectations. . . . . 

$ 4°. Tableau des affectations . . . . . . + . 


225 
228 
243 | 


243 
243 


_ DES MATIÈRES. 


495 
Pages. 
$2. Formation des affectations suivant l’âge d’exploi- 
co ‘tabilité. etes à Te VOIE CONNUNET M6 
: “188 Fôrmiation: des affectations eouforméhent aux 
mogios: Œassielle :.- à see tegt: 269 
$ 4. Formation des affectations conformément aux 
exigences du rapport soutenu... . . . . . « « 257: 
4. Des motifs qui doivent faire adopter en général, 
pour les affectations, des contenances égales . 262 
2. Des motifs qui peuvent faire adopter, pour les 
S _affectations, des contenances réduites . . . . 269 
Anr. 11. Règlement des exploitations par période . . . 275 
ArT. 11. Règlement spécial des sxploititions annuelles. 279 
CHAR. V.— Du plan d'exploitation dans les futaies, la révolu- 
. tion pouvant être définitive et la marche des coupes de- 
_ vant être provisoire , . . . . . ei 303 
- ARTICLE PREMIER. Formation des affectations. . . . . 303 
$ 1°. Utilité de la formation mmmédiate des affecta- 
DONS nOPMAISS,.. :..... : :.e des 303 
. $ 2. Des facilités que donne, pour la.formation dre 
. affectations, l’adoption d'une marche provisoire 
D ON CDR 4.14 0e Hal +: "305 
Arr. 1. Règlement des exploitations par période . . . 309 
$ 4+*. Coupes principales ou de régénération . . . . 309 
$ 2. Des modifications que le rapport soutenu pour- 
rait faire apporter au tableau des coupes princi- 
RAR ue oc + Ÿ 343 
$ 3. Coupes d'amélioration . : . . . + . . . . . 316 
, ART. 11. Règlement spécial des exploitations annuelles. 329 
CHA. VI. — Du plan d'exploitation dans les futaies, la ré- 
volution devant être principale et transitoire ou simple- 
ment préparatoire, et {a marche des coupes provisoire . 324 
ARTICLE PREMIER. Utilité de la formation préalable du 
tableau des affectations normales . . . . . . L'URSS 


ART. 11. Des règlements d'exploitation, dans le cas où 


l’âge trop avancé des massifs les plus jeunes ne per- 


? 


4196 TABLE 


: " 4 
. Ne Pages. 
dure met pas de les laisser sur pied jusqu'à la fin de la 
révolution normale. . . . . ee. CHEN 4e RS 
Arr. 111. Des règlements d'exploitation, dans le cas où 
l’âge trop peu avancé des massifs les plus vieux ne 
permet pas de les régénérer immédiatement ... . . 331 


CHAP. VII. — Conversions des taillis composés en futaies 
plotnes , ". 4 + ele + pe + DUR CU 
ARTICLE PREMIER. Obéetvations préliminaires. . . . 33% 
Arr. 11. Utilité de la formation préalable des aÉéchions 

DOrDAISS de + + sn. se ee 
ART. im. Règlement général des exploitations. . . . . 3%2 
$ 1°". Règlement général des exploitations d’un tail- 
lis composé, régulier et complet à convertir, 
lorsque la révolution est préparatoire et la con-- 
version immédiate. . . . . . . : .’. ++ «0 
$ 2. Règlement général des exploitations d’un taillis 
composé complet et régulier à convertir, lorsqu'il 
n’y a pas de révolution préparatoire et que la con- 
version est immédiate -. . -.°. 100 C0, . … 356 
$ 3. Règlement général des exploitations d’un taillis 
complet et régulier à convertir, lorsqu'il n’y a pas 
de révolution préparatoire et que la conversion est 
; : graduelle. . . . . ..:....... 4... 350 
I. Exposé-des méthodes applicables .:. . . . . 350 
II. Observations sur les méthodes de conversion 
exposées dans l’article précédent . . , . . . 359 
$ 4. Règlement général des exploitations d’un taillis 
composé régulier et complet à convertir, lors- 
qu’on adopte-une révolution préparatoire et que 
la conversion est graduelle. . .,. . . . . . . 367 
$ 5. Règlement général des exploitations lorsque les 
taillis à convertir sont irréguliers et-incomplets.. 371 
de Arr. 1v. Règlement spécial des exploitations pendant la 
première période, quelle que soit la méthode adoptée 
pour la transformation. . . . « . . . . + + .« . . "379 


DES MATIÈRES. 497 


QUATRIÈME ÉTUDE. 


DE LA DIVISION D'UNE FORÊT EN MASSES, EN SECTIONS, EN 
SÉRIES, DES AMÉLIORATIONS, DE LA RÉDACTION DU PROJET 
D'AMÉNAGEMENT, DE L'APPLICATION ET DU CONTROLE. 

Pages. 

CHAPITRE PREMIER. — Des masses, des __ des 
D rs niniien LR Sue «t- Cie à NS 
ARTICLE PREMIER. Observations Lrdlnthäires. es JU 
Arr. 11. Circonstances qui sont contraires à la division 

d’une forêt en séries. . « , . . 385 
$ 4+. Impossibilité de former des sériés compebies 
ou indépendantes l’une de l’autre . . . . . . . 385 
$ 2. Étendue trop petite de la forêt. . . . . . . . 386 
- $ 3. Exigence de l'assiette et de la vidange des 
; COUPES.. » . + . + - A PT PE D D ee | 
#2 ART. 1. Circonstances qui rendent avantageuse ou né-° . 
cessaire la division d’une forêt en séries. . . . . . 388 
$ 1°". Diversité des modes d’exploitation . . . . . 388 


$ 2. Diversité des âges d’exploitabilité . . . . . ., 389 
$ 3. Morcellement des classes d'âge . .. . . . . . 389 
$ 4. Exigences du rapport soutenu. . . . . . « 390 
$ 5. Application, contrèle et rectification de Pie 
nagement. . . . . . . 6 9 ci NTRO RAT € 05 


$ 6. Diminution des frais de transport des bois . .._ 393 
$ 7. Égalisation du prix de revient des bois aux 


lieux de consommation. . . .« . . . . . . . : 394 

$ 8. Besoins de la consommation en bois de diverses 
PR 4 - ui. . « dou 395 
UE Se 2... JR is 87° SU 
Arr. 1v. Tableau des séries. . . . . . . MR 396 
CHAP. II. — Des eméborsio SN. -« CHMDr 398 
ARTICLE PREMIER. Observations préliminaires. . . . . … 398 
ART. u. Améliorations relatives au sol. . . . . . . . 400 
Arr: mi. Améliorations relatives au peuplement. . . . 401 
ART. 1v. Amélioratioss relatives aux voies de vidange. . 403 

de ArT. v. Améliorations relatives. à la surveillance et à 


“ES lontroei=  :: : : | Ls34 DR: 1 vdi 408 


LA 


198. TABLE DES MATIÈRES. 


” Pages. 
ART. vi. État collectif des améliorations . . . . . . . 410 


CHAP. II. — Rédaction du projet d'aménagement, appli- 


cation.et.coninôle ; isa desserte tes PRE 17 
ARTICLE PREMIER. De la rédaction du projet d’aménage- 
MON SES el: aber 8 0 Re STATE QUE RS à 


ART. 11. Application et contrôle de l'aménagement. . . : “16 


CINQUIÈME ÉTUDE. 


ÉTAT NORMAL DES FORÊTS ENVISAGÉES DANS LEUR ENSEMBLE. 


TRAVAUX A FAIRE POUR LE RÉTABLIR EN FRANCE. LOIS ET 


RÈGLEMENTS FORESTIERS. ATTRIBUTIONS DE L’'ADMINISTRA- 
TION FORESTIÈRE. 

CHAPITRE PREMIER. — État normal des forêts silos 
dans leur ensemble. Travaux à faire pour le retablir . . 430 


CHAP. 11. — Lois et règlements forestiers. Attributions de 
l'administration forestière. . . . . « « . . . : . . + 443 
ARTICLE PREMIER. Attributions de l'administration .fo- 

restière dans leurs rapports avec les biens de l'État. 444 
Arr. 11. Attributions de l'administration forestière dans : 
leurs rapports avec les biens des particuliers. . . . 447 
ART. ui. Attributions de l'administration forestière dans 
leurs rapports avec les biens des communes. . . . 452 
Arr. 1v. Conclusions appuyées sur les lois relatives au 
reboisement et au gazonnement des montagnes. . . 473 


FIN DE LA TABLE, 


ERRATA. 


Page, li, note, ligne 2, au lieu de : le cours de culture, lisez : le 
cours de l’École. 
— 7, lignes 4 et 2, au lieu de : et ne seraient pas, lisez : et 
que ces frais ne seraient pas. 


PARIS — J, CLAYE, IMPRIMEUR, 7, RUE SAINT-BENOUT. — {414} 


PEUR LEE 


È 
1 


Tassay, Louis 
Études sur l'emene gement 
des forets 2. ed. , rev. et 


au gm. 


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